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P i e r r e B A R D , cultivateur , habitant
de la commune
d’A g n a t , demandeur et défendeur en tierce opposition y
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J E A N S A B Y , fils à P ierre, défendeur-,
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E t C a t h e r i n e S A B Y , et J e a n M A G A U D ?
tous c u ltiv a te u r s , habitans du lieu de B alistroux? com
mune de C hampagnat demandeurs en tierce -opposition';
A
pr ès qu'une affaire, volum ineusem ent in stru ite, a eu reçu sa décision :
par un jugem ent souverain et en dernier resso rt; après que l ’on a eu
é p u is é , dans le cours de l ’in stru ctio n , tous les m oyens q u ’un esprit
ingénieux p eu t im aginer pour se m aintenir dans un bien qui ne lu i
appartient p a s , et au m om ent où une preuve était sur le p oin t d ’être
ordonnée, ou une expérience par expert d even ait in d isp en sab le, où Bard •
qui réclam ait l ’un et l ’autre depuis p lu s de trois a n s , p ressait, so llicitait
une audience pour les faire o rd o n n e r, de nouveaux athlètes se sont
présentés sur la scène : ils viennent proposer à la justice de prononcer
une seconde fois sur les questions que le prem ier adversaire de Bard
avait mis au jo u r , et de changer à leur égard un m ode de partage qui a
été ordonné contre leurs frère e t beau-frère; ils font m êm e p lu s , i ls
poussent leurs prétentions jusqu’à soutenir que Bard n ’a aucun droit
contre eux. S e r o n t-ils plus heureux que celu i qui a déjà succombé
dans tous les incidens qu ’il a élevés ? c ’est ce q u ’on ne croit pas."
Jean S a b y , fils de P ie r r e , qui en suivant le genre de défense em ployé
par c e lu i- c i, a toujours soutenu que Pierre Saby et A n to in ette L ach au d
n ’avaient laissés aucuns biens m e u b le s, et qu’à l ’égard des im m e u b le s.
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il n’cn 'connaissait que quatre , mem e que d eu x qui leu r eussent appar
tenus et qui fussent sujets au partage ordonné par le jugem ent rendu
contre son p è r e , qui a toujours persisté dans ce systèm e m algré la
justification qui lu i a etc faite de plus de quarante titres d ’a cq u isitio n ,
toiis translatifs de propriété en faveur de Pierre S a b y , de la succession
duquel il s’agit, persistéra-t-il toujours dans sa prétention ? Ë t aujourd’hui
que des tém oins ont été entendus , que l ’application de tous les titres
produis par Bard a été fa ite, ne reconnaîtra-t-il pas que c ’est injustem ent
q u ’il a toujours prétendu qu ’il n ’y avait que quatre , même que d eu x
héritages sujets au partage? O n croit bien q u ’il ne s’avouera pas vaincu,
m a iso n a la certitude que la justice lu i en fera un d e v o ir, et qu’e lle le
forcera à reconnaître <jue celu i qu i retient injustem ent le. bien d ’autrui
e s t, tôt ou ta r d , oblige de cesser d ’en jouir.
F A I T S
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P R O C É D U R E .
D u mariage d ’A n d ré Saby avec Jeanne V i d a l, issürent quatre enfans,'
C a th e rin e , A n to in e tte , M arguerite et Pierre Saby.
A n to in ette et M arguerite furent lé g itim é e s; n i e lle s , ni leurs descôndans , ne sont pour rien dans la contestation.
C atherine Saby fu t m ariée deux fo is ; en prem ier lie u , avec A n to in e
S a b y , et en second lieu , avec A n to in e B r u h a t,e t lors de ses deux contrats
de m ariage, des 8 novem bre 1674 et 2o août 1 6 8 7 , elle fut instituée
héritière , par son père , de tous les biens dont il m ourrait saisi et vêtu ,
à la charge de payer à ses frère et sœurs des légitim es qui furent fixées.
M arguerite B ru h at, fille et héritière d ’A n to in e et de C atherine S a b y ,
fce maria aVdc Jean M agâùd , et de ce mariage issurent deux enfans,
A n to in e et G a b riellé M agaud.
L e prem ier se maria avec C atherin e Saby , fille de N o ë l , et G abrielle
épo u sa P ierre S a b y, fils de ce dernier : c ’est ce qui est prouvé par un seul
contrat de mariage du 25 janvier 1744.
A n to in e M agaud a laissé deux enfans, A n n e et M arie ; la prem ière a
épousé Jean D e g e o rg e , la seconde François M estre ; et lui-m êm e étant
décédé , C ath erin e Saby, sa veuve, a c o n v o l é en secondes noces avec
Je:m M agaud; ces deux derniers sont les tiers opposans.
Pierre Suby, fils d ’A n d ré, e t frère de C atherine S a b y , se maria avec
A n to in e tte L a c h a u d , et lors de son contrat de m ariage, qui est du iG
février 1(^94, il s’associa avec A n to in e B ru h a t, son beau-frère , en tou3
et un chacun leurs biens , m eubles et .im m eubles présens et h. ve n ir,
avec convention qu’en cas de dissolution de leur s o c ié té , tous leurs biens
seraient partagés entre eu x par égalité.
C e t A n to in e Bruhat survequit plusieurs années à cette so ciété, et
p en dan t tout ce tem ps les associés firent des profits assez considérables ;
tmiis étant décédé , C atherin e S ab y, sa v e u v e , héritière instituée d ’A n d ré
�Safry., crut^ne .pgs pouvoir inipux.faire q u e ■
de .s’associer elle-m êm e avec
P ierre Saby son frè re , et par acte public du 3 janvier 170 G , ils mirent
en communaulé universelle tous leurs biens m çu bhs et immeubles présens
çt 11 v e n ir , avec .ço,nvention expresse qu'en cas de p a rta g e , tous leurs
biens acquêts et covquets seraient, partagés par m oitié et égala portion. ,
Suivons la généalogie . dp .P ierre S iib y e t ' d ’A n to in e tte L a c lia u d ; il»
donnèrent le. jour à trois enfans nommés N o ë l , A n d ré et C atherin e Saby.
L o rs du contrat de mariage de ce jle -ci avec È tie n n e P io u x ,d u 8 janvier
1 7 1 9 , e lle fut constituée par son p o r e , à une somme de trois cents
francs , et JNoël Saby qui n'était point partie con tra ctan te, f u t institué
héritier général ctt universel de tous les biens dont son p ère m ourrait
saisi.
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Q u e lq u e temps a p rè s, et le., j«“ février 1 7 2 5 , N o ë l Saby passa son
contrat de mariage avec M a fie C u ra b et, et Pierre S a b y , son père , y
paraissant, approuva et ratifia l'institution d ’héritier qu’il a vait fa it e en
sa fa v e u r , dans le contrat de mariage de Catherine S a b y et de P ierre
Rou.v , et consentit qu'elle sortit son p lein et entier effet.
A n d ré Saby se maria avec M arie H éritier:, et lors de le u r contrat
de m ariage, du a i février 1 7 3 7 , il se constitua lui-m êm e une somme
de trois-cent cinquante francs qu’il avait par devers lu i, et N o ë l Saby%
son frère s’obligea de lu i payer ce lle de
cents francs p ou r ses d ro its
légitimâmes dans les biens de ses père et m ère.
D e ce mariage issut A n to in ette Sab y, m ère du dem andeur, laq u elle se
m aria avec A n d ré liard.
O n voit dans leu r contrat de m ariage, du 2t septem bre T74 9 , que
M arie H é r itie r , y prit en présence de toute sa fam ille et notam m ent de
N o ë l Saby, son beau-frère, la qualité de veuve d ’A n dré S a b y , ce qui
¿lait un p ieu ve (jue c e lu i- c i, qui s’était absenté depuis plusieurs an n ées,
¿tait alors décédé ou qu’au m oins toute la fam ille le croyait ainsi.
N o ë l Saby eut de son m ariage, avec M arie C u ra b e t, deux e n fa n s,
C atherine et Pierre , qui comme 011 l ’a déjà dit en pajl;uit de la descen
dance du Catherine S ab y, épousèrent A n to in e et G 4 ftU t^ fe M agaud.
L e u r contrat de mariage du ï.\ janvier 1 7 4 4 , prouve que le s quatrç
parties contractantes furent instituées héritières générales et un iverselles
de tous les biens dont leurs p ère et m ère m ourraient saisis et vêtus.
r.n fin , l ierre S ab y, second du nom , a laissé plusieurs en fan s, mai»
Jean S ab y, son iîls aîné et son héritier institué, est en possession de tous
ses^ b ien s, et lu i seul est défendeur dans la cause.
.Le 2o mars 1 7 8 S , Pierre Bord , forma contre Pierre Saby fils de
N o ë l , la dem ande en partage de tous lc3 biens m eubles et im m eubles
provenus de Pierre Saby et d’A n to in ette L acliaud , demande qui fut ad
jugée .par sentence rendue en la ci-devant justice de la M otte , le i o
ju ille t suivant.
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�C e tte sentence fut attaquée par la vo ie de l ’op p osition presque aussi
tôt qu’elle fut signifiée ; l ’affaire fut ensuite appointée en droit ; mais
par une autre sentence du 6 avril 1787 , P ierre Saby fut débouté de son
opposition , et il fut ordonné que la prem ière sentence serait exécutée
suivant sa form e et tençur.
C e dernier se pourvut bientôt après par appel contre ces deux sen
tences. L a sénéchaussée d ’A u verg n e connut de cet a p p e l, et le 11 dé«
cem bre de la même année , e lle confirma ces deux sentences.
Il restait encore une autre dégré de juridiction à suivre : P ierre
Saby ne m anqua pas d ’y avoir recours , et par exploit du -28 du même
m ois de décembre 1787 , l ’affaire fu t portée au ci-devant Parlem ent de
Paris.
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I/é ta t de détresse de ‘Bard n e lu i perm it pas de poursuivre l ’arrêt
q u i devait m ettre fin à toutes le s chicanes de Saby ; il était dans l ’im
puissance absolue de pouvoir fournir aux dépenses que nécessitait ce
procès , mais heureusem ent pour lu i le s choses ayant changées de face ,
de nouveau^ tribunaux ayant été substitués aux anciens j la justice ayant
été rapprochée des justiciables , l ’affaire fut p o rté e , du consentem ent ex
près des parties , au ci-devant tribunal du district de Brioude.
L à , des volum es d ’écritures furent faits de part et d ’autre ; l à , P ierre
S ab y eut recours à tous les m oyens q u ’un esprit ingénieux p eu t ima
gin er pour combattre des réclam ations justes , et parmi toutes les d if
ficultés qu ’il éleva , 011 remarque q u ’il donna lie u à traiter trois ques
tions principales qui étaient de savoir , i.° si l'institution d ’héritier
faite dans le contrat de mariage de Catherine S a b y , en faveur de N o ë l
Saby son frère non contractant , du 8 janvier 1 7 1 9 , était valable , qu au
m oins «i e lle n ’avait pas été validée par la ratification portée dans son
propre contrat de mariage de 1725 ; 2.° si un absent n ’est pas réputé
vivre cent ans respectivem ent à ses héritiers ; 3 .° si en A u verg n e les
enfans des cultivateurs , travaillant hors la m aison paternelle , p eu
vent faire des profits qui leurs soient propres , et si la somme de trois
cent cinquante francs q u ’A n d ré Saby s’était constituée en dot dans son
contrat de mariage de 1787 , n ’était pas sujette à rapport !
C e s trois questions furent jugées contre la {prétention de Pierre S a b y ,
par jugem ent souverain et en dernier ressort du 3o août 1732 , qui en
confirmant toutes les sentences sus-datées , ordonna que tous les biens
provenus de Pierre Saby et d ’A n to in ette Laçhaud seraient partagés par
¿ "a lité eçitre Pierre Saby et Pierre Bard.
C e lu i-c i provoqua alors une nom ination d’experts; Saby déclara q u ’il vou
lait se pourvoir en cassation contre ce jugem ent , qu’au surplus i l ne
connaissait que quatre parties de terrein sujettes au partage , et qu’il
co n se n ta it, sans préjudice , de ses droits , que le partage en fut luit.
C ’est ce que l ’pn voit dans un procès-verbal du 2o octobre 17£/3.
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D e s experts furent nommés , mais gagnés sans doute par Saby , il*
furent sourds à toutes le s assignations qui leur furent données p our
opérer. U n prem ier jugem ent du 3o septem bre 173 3 , révoqua l ’expert
de Saby et en nomma un autre pour lu i.
C e lu i-c i fut égalem ent sourd à toutes les diligen ces que put faire
Bard , et un nouveau jugem ënt du 2 i m essidor an II , porte que tous
les prem iers experts ont été valablem ent récusés par B ard, et que les
nouveaux qui seront nommés par les parties , seront tenus d ’opérer
dans le m ois.
C es nouveaux experts nommés co n trad ictoirem en t, tardèrent assez
long-tem ps à s’occuper des opérations qui leur étaient con fiées, car ce n e
fu t que le 6 M essidor an I I I , q u ’ils se transportèrent au lie u de
Balistroux.
L à , ils trouvèrent P ierre S a b y , qui ne se rappelant plus de ce que la
mauvaise fo i lu i avait dicté lors du procès-verbal du 2o octobre 17 9 2 ,
déclara qu’ il 11’y avait que d eux héritages sujets au partage ; il eut m êm e
la bonté de les leur design er, et com m e de cette désignation il résulte
q u ’il n’y a qii'un de cès deux héritages qui puisse s’identifier avec un
des quatre qu’il avait indiqué lors du procès-verbal de 1 7 9 2 , il en.
résulte qü’il y aurait au m oins cinq héritages sujets au partage.
C e s experts dressèrent procès-verbal des dires respesetifs des parties ;
ils eurent .même la com plaisance d ’y insérer des dires qui furent faits
par Jean M a g a u d , mari de C atherin e Saby , et ils term inèrent par
renvoyer les parties devant qui de droit pour faire fixer les biens
sujets au partage.
O b lig é de plaider encore avec S ab y, Bard le fit assigner au tribunal
civ il du P u y , et après que l ’affaire eut été reprise contre Jean Sab y, son
fils , i l intervint en ce tribunal un ju g e m e n t, le 6 fructidor an V , par
le q u e l il fut jugé en thèse que celu i qui réclam e un partage, doit
désigner nommément les biens m eubles et im m eubles qui peu vent y être
su jets, et que celu i contre qui la dem ande est form ée n ’était obligé à rie n ,
quoiqu’il eut toujours demeuré dans la m aison des auteurs co m m u n s,
qu oiqu’il fut présumé nanti de tous les titres constitutifs des propriétés
des auteurs com m uns, quoiqu’il dut avoir par devers lu i ou qu’au moin»
il lu i fut facile de se procurer les titres des acquisitions q u ’il pouvait
avoir faites
Q u e lq u e rigoureux que fut ce jugem ent „ contre C a r d , il ne lu i
restait aucun m oyen pour revenir c o n tre ; il était en dernier resso rt,
qnoiqu il ne dut pas l ’ùLre, et son état de détresse 11e lu i perm ettait
pas d’avoir recours à la cassation.
Par un prem ier e x p lo it, du 2 i brumaire an V I , Bard m otiva et
circonstancia la preuve qu’il voulait faire de la consistance des biens
m eubles et im m eubles provenus dew P ierre Suby et d 'A n to in ette JLachaud,
�( , G
*)
..............
et le iO fructidor suivant, sou défenseur après avoir différé ju?ques l \ ,
de présenter sa cause , obtint contre Saby un ju gem en t par défaut, q u i,
au lieu d ’ordonner la preuve qui était réclamée , et à la q u elle Bard s’était
soumis , lu i perm it de com pulser les m inutes de quelques notaires.
D o cile aux ordrçs qu e lu i donna son. d é fe n se u r, Tard cu it entrevoir
dans ce jugem ent un m oyen pour parvenir plus facilem en t à im jugem ent
définitif ; il ne fit pas attention que sa preuve vocale d é p é iL s a it, et qu’à
chaque jo u r il perdait q u elq u ’un de scs tém o in s; il se livra à la recherche
de plusieurs actes; il parvint à en découvrir quarante, qui tous constatent:
différentes acquisitions faites p a r 'A u d r é Saby , ou par pierre S a b y ,
«on fils, ou par A n to in e Bruliat et C ath erin e S a b y , associés de ce dernier.
T o u s ces actes furent signifiés à Jean Saby , avec n o u velle assigna
tion , pour voir ordonner la preuve à laqu elle Bard sYtail soumis , dire
que de nouveaux experts feraient l ’application de tous ces titres , et
Cire condam né à pa^yer une provision de six m ille francs.
C om m e si son dtfen seur eut été fâché de le voir admettre à cette
preuve , il se borna à réclam er une p ro v is io n , et par jugem ent du 4
l'ructidor an V II , rendu encore par défaut contre Jean S a b y , il fut ac
corde à Bard une m odique somme de trois cents francs : on dit m odi
que , parce q u ’elle n e lu i a
pas suffit , ni à beaucoup près , pou?
faire face aux dépenses que lu i a occasionné la rech eiclie des actes
q u ’il s’est procuré.
C e tte provision parut cependant
trop considérable à Jean Saby,
il forma opposition à ce jugem ent ; et par un autre du 6 germ inal an V I 11 ,
il parvint à faire réduire cette provision à la somme de deux cents francs.
C ’est dans ce jugem ent que l ’on voit ju squ’à quel poin t le défen
seur de Bard a com prom is ses intérêts ; non seulem ent il ne fi£
pas ordonner la preuve à laq u elle
Bard
s’etait soumis depuis le 2 1
brum aire an V [ ; non seulem ent il ne dit pas un mot pour l ’ob ten ir;
non seulem ent il n ’argum enta pas des quarante titres de propricté que
Bard lu i avait remis pour soutenir que la provision accordee n ’appro
chait meme pas de ce lle qui aurait dû l ’être , mais meme il n égli
gea de faire prononcer sur des conclusions qui avaient etc prises par
e x p lo it du 9 brumaire au V III , et qui avaient pour objet de faire décla
rer Jean M agau d, C atherin e Saby sa fem m e , François M eclre et M arie
M agaud sa fem m e,n o n recevablcs dans l ’opposition qu ’ils avaient formée au
jugem ent rendu contre Jean Saby , attendu que ce jugem ent n’était point
rendu contre e u x ; qu'ils n ’avaient jamais été eu instance avec B a r d ; et que
dès lors leur opposition était insoutenable, (1)
Q u o iq u ’il en s o it; l'affaire a été portée au tribunal de Brioude ; Bard
( 0
C e ilct.iil p j u r r . i p a r litre
l u i t les ¡ n u l e m
ics droits
uut
qui
fastidieux, u n i s
l'adversaire
eu- c o m p r o m i s
pir
ile
Hard
lui
la l o n l u n c e
il
a
a
j m u
fait
essentiel
i:r r u i i ” c r , et
«ju'il ,t e u c a s o n
pour
démontrer,
île l ' a u t r e
ilcîeiiscur.
jusqu'l
tl'imc
part,
«luci, p o i n t
�a insisté pour être admis à la preuve de la consistance <îu m obilier *
p rovenu de Pierre Saby et d ’A n to in ette L acliau d , des titres de créance
qu i existaient et qu i faisaien t partie de leu r s u c c e s s io n , et à ce qu e
les conclusions qu’il avait prises depuis l ’an V I , lu i fussent adjugées.
D ’un autre côté et par
exploit du i . er nivôse an I X , Bard après
avoir épuisé les voies de la co n ciliation , avait fait assigner Catherine
Saby et Jean M agaud son mari , A n n e M agaud e t Jean D egeorge
son mari , M arie M agaud et françois M estre son m a r i, pour voir
déclarer exécutoire contre eux les sentences et jugem ens rendus contre
P ierre S ab y, tout ainsi et de même qu’ils l ’étaient contre ce dernier.
C e n ’a été qu’alors et
par exploit du
11 du m êm e m o is , qu e
C atherine Saby et Jean M agaud son mari, seulem en t, ont attaqué par la vo ie
de la tierce opposition ces mêm es sentences et ju g e m e n t, pour d’une part
em pêcher l ’adm ission à la preuve à laq u elle Bard s’était soumis contre
Jean Saby , et de l ’autre pour reprdduire et faire ju ger de nouveau,
toutes le s questions que P ierre Saby avait m is au jour dans le cours d e
la constestation.
Jean Saby $ fils de ce dernier , invoquant cette tierce op position , s’estii
opposé de toutes ses forces à la preuve offerte et réclam ée par Bard ,
mais tous ses efforts ont été vains ; son espoir à été déçu et il^ a vu
adjuger contre l u i , par un jugem ent très - contradictoire du 2 r n ivôse
an I X , toutes les conclusions qui avaient été prises.
D es tém oins ont été produits de part et d’autre , ils ont été enten
dus ; des experts ont été n o m m és, ils ont opéré ; des expédition*
authentiques prouvent l ’un et l ’autre.
T e l est l ’état actuel de l ’affaire. A p rè s en avoir présenté les faits ;
après avoir rem is sous les yeu x de la justice une partie des incidens
que Bard a éprouvé depuis l ’époque de sa d e m a n d e , il est fa cile de voir
qu ’il doit aujourd’hui repousser la tierce opposition form ée par C ath e
rine Saby et Jean M agaud ; dém ontrer en même tem ps que ses pré
tentions , sont justes et lé g itim e s; et prouver que des dépositions des
tém oins, du rapport des experts et des titres p ro d u its , il en resuite la
preuve la p lus convaincante en sa faveur.
V É R I T É S
I N C O N T E S T A B L E S .
L e s biens qui doiven t com poser la succession de Pierre Saby sont
la m oitié de ceux qu ’ il avait lui-m êm e acquis , de ceux acquis par
A n to in e Bruhut et par C atherin e Saby , et enfin la m oitié de tous
les biens provenus d ’A n d ré Saby et de Jeanne V id a l, ses père et m ère.
C e la A-sulte p o sitiv e m en t des actes de sociétés générales faites en
tre l u i , A n to in e
B ru h a t et C atherin e S a b y , les iG février 1(194 et
3 janvier îy o 6 , par le s q u e lle s ils mirent a i commun tous leurs biens
�\
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(
.8
)
prcsens et à venir avec convention expresse qu’en cas de dissolution
de s o c ié té , ils seraient tous partagés par égale portion.
D ans tous ces biens , P ierre
Bard amende un quart aveG restitu
tion de jouissance et intérêts de la valeur du m obilier depuis 17 8 8 ,
époque du décès de Pierre Saby prem ier du nom.
C ’est ce qui résulte du jugem ent souverain et en dernier ressort du
So août 1792.
Il est vrai que ce jugem ent est attaqué par la voie de la tierce
opposition de la part de C atherin e Saby et de Jean M a g a u d , m ais
les droits de Bard sont irrévocablem ent acquis
contre Jean Saby
par le jugem ent dont, on vient de parler. L a tierce opposition de
C atherine Saby et Jean M agaud ne p eu t rien changer à son égard ,
q u elq u ’en soit le résultat ; parce que dans tous les c a s , le jugem ent
rendu doit toujours être exécuté contre lui..
C ’est ce qui résulte des p rincipes les plus certains -, les plus- in c o n
testables sur la m atière des tierces oppositions ; p rincipes consacrés
d ’une m anière bien solen n elle par deux jugem ens rendus au tribunal
de cassation les 26 germ inal an V I et 1 5 pluviôse an IX , rapportés
dans le bulletin des jugem ens de ce tribunal N °. 2.
Passons actuellem ent à la discussion des questions reproduite» p a t le s
tiers opposans.
P R E M I È R E
De
quel jour un
absent
Q U E S T I O N .
est-il réputé mort respectivem ent à
héritiers ?
ses
11 n ’y a rien de p ro b lé m a tiq u e , rien qui m érite une discussion sé
rieu se dans cette question. Presque tous les jurisconsultes anciens et m o
dernes assurent qu’un absent est réputé m ort respectivem ent à ses
héritiers , du jour de son départ ou de celu i des dernières n o u vel
le s qu'on a eues de lu i. Il n ’y a qu’une envie de plaider , une inten
tion de se m aintenir injustem ent dans un b ie n , qui puissent aujourd’hui
faire soutenir le contraire.
C e lte doctrine est consacrée d ’un m anière bien précise dans le s arrê
tés de M . le président de L a m o ig n o n , où l ’on lit : L ’absent est répu
té mort du jour qu'd n’a pas paru■ou de la dernière n ouvelle qu’on
a reçue de lui.
C ette décision , dit un auteur plus moderno ( B retonnier page i 5 du
prem ier volum e ) , est dans les règles , parce quo l ’absent dont on n ’a
p oin t de n ouvelles , est réputé mort par fiction, et que les fictions ont
tou jours un e lfe t rétroactif.
E n vain objecterait-on qu'un absent est présumé vivre 100 an s, et que res
pectivem ent à ses créanciers il n ’est réputé mort q u ’après cet espace de
tem ps, q u ’ainsi il doit en ê tic de m êm e relativem ent à ses h éritiers.
La
%
�¿g;
• C . 9 *. )
T..a prem ière partie de cette objection est fausse et a b su rd e , la
seconde ne repose que sur une erreur.
T o u te présom ption doit être fondée sur quelque vraisemblance et
sur ce qui arrive le plus souvent. Prcrsumptio e x eo quod plerumque
fit . Il faudrait pour q u ’un absent put être présumé vivre cent a n s,
que ce fut le temps ordinaire de la vie des hommes ; et certes , l ’exjpérieiicc prouve bien le contraire.
L e s lois 5 6 , au digeste , D e usuf. et quemad. , et 8 D e usuf. leg, ,
•invoquées par Sabÿ et M agaud ne disent pas q u ’un hom m e est présumé
vivre cent ans , mais seulem ent qu’il est présumé ne pas vivre au delà
de cent a n s , ce qui est bien d iffé re n t, P la cu it centum annostuendos esse
municipes , quia is fin is vitœ longtœ vi hominis est. Jusqu’à ce- que le temps
de cent ans se soit écoulé depuis la naissance d ’un a b sen t, il n ’est n i
présum é vivre , ni présumé mort , et c ’est à ceux qui ont intérêt q u ’il
soit viva n t, à prouver sa vie. P o th ier , sur le chap. 17 de la coutume
d'O rléans.
i C e t auteur , n i B réto n n ier, dont nous avons déjà rapporté les propres
expressions , ne disent pas ce que M agaud et sa fem m e leu r fon t dire ,
ou plutôt ils disent tout le contraire^
V o ic i les propres expressions de Pothier , 'traité des su cce ssio n s,
chap. 3 . sect. i . er0 §. 1 ." : « c ’est une question difficile à d écid er, de
» quand doit être présum ée ouverte la succession d ’une personne dont
» on ne sait ni la vie , ni la mort. L ’opinion la plus probable est de
» réputer sa succession ouverte du jour des dernières nouvelles qu'on a
s> eues de lui ; ce n’est pas qu’il y ait lie u de le présum er m ort dès
» ce tem ps plutôt que dans un autre , mais c ’est que 11’y ayant aucune
s> raison d ’assigner sa mort à un temps plutôt qu ’à un autre, et étant
» néanm oins nécessaire de fixer le temps de l ’ouverture de sa succes» sion , on ne peut m ieux le fixer qu’au temps où on a cessé d ’avoir
» des nouvelles de lu i ; parce que s’il n ’est pas effectivem ent mort
» dès ce te m p s , il l ’est au m oins équip ollem ent par rapport à la
» société des hommes ; car par rapport à la société , c ’est à peu prè*
» la m êm e chose qu’un hom m e n ’existe pas
ou qu’on n ’ait aucune
5> connaissance de son existence. »
Q u e M agaud et sa fem m e qui ont cru en im poser en citant l'o p i
nion de ce jurisconsulte , pèsent actuellem ent ses expressions qu’ils n ’a
vaient sans doute ças lu es ; qu ’ita conviennent que c’est sans réflexion
qu ils 1 ont invoque , et qu ’il en est de même à l'égard de Brétonnier
et Rousseau - de - Lacom be.
C elui qui s’est perdu , dit ce dernier , est réputé mort du jou r qu’il
a cusparu ; c ’est la règle en succession. M êm e dans tous les cas si ceux
qui ont intoret ne justifient que l ’absent est vivant.
S ’il est vrai que quelques arrêts puissent être invoqués h l ’appui de
�(
10
)
la seconde partie de l ’objection , il est aussi certain qu'il y en a de
contraires , et que l ’arrât de T ie lle m e n t qui a été tant invoqué par Saby,
p erd de son autorité quand on le rapproche de celu i 1688 , rapporté
par H e n r i, tom. 2. page 8 9 0 ; de celu i du 11 août 1 7 1 9 , rapporté au
journal des audiences ; et que cet arrêt de T ie lle m e n t q u i , comme le
d it P o th ie r , n’est fo n d é apparemment que sur cette v ie ille erreur , qu’un
hom me est présum é vivre cent ans , ne doit pas être suivi.
T o u s les anciens tribunaux paraissaient avoir embrassé cette opinion.
Ils l ’avaient consacrée par différents airèts. O n en trouve la preuve dans
le s questions de droit de Brétonnier , où il est d i t , qu’on ne doit pas
[douter que cette jurisprudence ne soit la m eilleure.
M on vallon dans son traité des successions , après avoir embrassé cette
m êm e o p in io n , en rapporte à l ’appui un arrêt rendu à son rapport, le
:£ i mai 1751 , par lequel, il fut jugé q u e .l’hoirie, de l ’absent avait dû
appartenir au parent Le plus proche lors de l'absence ou dz la dernière
n o u v elle , et a va it passe a u x héritiers de ce parent. A in s i il ne p eu t pas
y avoir de doute sur la vérité d u systèm e que l ’on soutient.
M ais pourquoi invoquer des autorités à l ’appui d ’une opinion qui paraît
in co n testable ? N e suffirait-il p a s , si elle pouvait être com battue avec
succès , de s’appuyer sur un fait particulier qui se rencontre dans l ’affaire ,
p our démontrer que qu elqu es efforts que fassent les adversaires de B ard,
p o u r soutenir un systèm e contraire , ils- n e pourront jam ais parvenir à
le faire adopter ? ]Se suffirait-il pas de dire que M arie H éritier ayant
p ris dans le contrat de m ariage de C atherin e S a b y , sa f ille , du 2 r
septem bre 1 7 4 9 , Za qualité de veuve d'A ndré S a b y , en présence de
toute sa fam ille , et notam m ent de N oël S a b y , père et beau-p're des tiers
opposaas; q u ’ayant repris cette même qualité de veuve d ’A ndré S a b y ,
dans une quittance donnée au m im e N o ël S a b y , le 11 novembre de là
m êm e a n n é e , les nouveaux adversaires de Bard qui représentent ce
I\ro ël S a b y , à titre d ’héritiers u iiiven vls , ne peuvent pas désavouer,
co n tester ce qui a été reconnu par lui en 1749 •
seul l a i t , cette seule
circo n sta n ce, ne seraient-ils. pas suffisons pour persuader q u ’au m oins
.en 1 7 4 9 , A n d ré Saby était décédé; que toute la fam ille en était convain
cu e , ef par conséquent pour faire r e je te r , proscrira tous les e ffo rts, tous
les raisonnemen6 que pourraient faire M agaud et sa fem m e.
T erm in on s cettè discussion , et disons que dès qu ’il est établi en poin t
dû droit q u ’un absent est réputé mort du jour de son départ ou des
dernières, n ouvelles q u ’on a eues du lu i; dès. que le fait particulier qui so
rencontre dans la cause , et qui résulte du contrat de m ariaçe et de la
quittance- de 1749 > ddns lesquels M arie H éritier prit la (juaUle de veuve
d'A ndré S a b y ,. vient d’ailleurs à l ’appui de celte vérité; dès, qii’iL est
prouvé dans le procès que l ’action d e Bard était entière en 17U G , par
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h
) r
le m oyen des m inorités, qui se sont perpétuées dcrs-sa fam ille *v 0 ; il en.
résulté que c’est sans fondem ent' que ses adversaires ont donne lie u acette discussion.
8 E C O
N D Ê
Q U E S T I O N .
Une institution, .d'héritier 'fuite dans un contrat de m ariage,. en fa v e u r
d'un non-contractant, est-elle, valable /
C ette question est décidée par le texte précis de la lo i m u n icip a le
qui régit les parties. L a coutum e de la ci-devant A uvergne, n e p erm et
los-ifistUtm ons d’h ép ü e r quten la v e u r des* mariés« ou dé leurs d e s c e n d a is
çeulom en t; e lle s n e.-p eu ven t jamais être faites en faveur de ceux out
n e contractent p a s,m anage ; a in si, un p ère qui marie un de «es e n fa n t
ç t l ’ijisLitue sou héritier avec un autre qui ne wî marie p a s, fait un acte
in u tile e.t nul à l ’égard de ce lu i - ci , s’il ne charge le premier d e
Vassocier à L’e ÿ e t de l ’institution ; parce que disent les ju riscon su ltes, le.
prem ier cavactere d ’une institution d ’héritier, est qu'elle soit fa it e en
fa u eu r des mariés ou de leurs descendans : c ’est d ’ailleurs oe qui résulte
des dispositions d« l ’art. 26 du tit. 14 de celte coutume.C e tte n u llité dont était infectée l ’institution d’héritier faite par P ierre
Saby r en ¡faveur de N o ë l S a b y , son fils , dans le contrat de mariage de Ca-therine Saby avec É tie n n c T lo u x , du 8 janvier 1 7 1 g , -était une n u llité abso
lu e qui ne pouvait jam ais être m ise1à couvert que p ar une nouvelle d isp o
sition qui eut tous les caractères distincts et nécessaires pour transmettre
la propriété d’un bien ; c lic n ’attribuait par elle-m êm e aucuns droits à
N o ë l S ab y; il n ’était saisi de rien par cette disposition ; elle était abso
l u m e n t nu lle à son égard ; e lle n o pouvait jamais ê tre -v a lid é e , q u o i
nullum est nullo modo contial&scere potest.
M ais disent les adversaires dé B a r d , en supposant que cette institu
tion d ’héritier fut n u lle , cette n u llité a été Couverte par la ratification
faite par P içrre S ab y, en faveur de N o ë l Saby , lors de son contrat dem ariage, du i.*r février 1720 : cette objection nous porte à examiner laquestion suivante.
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i
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Lne ratification pure et simple d'une disposition nulle dans son p rin cip ey
d'.une nullité a b so lu e, peut-elle produira quelque e ffe t ?
« L a nature de la ratification n ’est pas d’introduire un droit nouveau,"
’ est <1,cci1' lc : I 0£t,,brc *7 .ÏS ; Cil calculant depuis cette époque jusqu’au
„1 septtiiiure 17^9, date du contrat île m i r i a j e d’Antoinnette ^>aby avec André Bard, on n e t ro tiv e q u e
onze ans moins un m o u ; au moins jt cette époque, le cours île la prescription » été suspendue jusqu’au
•5 janvier 1781 , car Antoinette SaKv , née le î ; Février 17 3 g , était encore mineure A l’époque île io n ,fèces, arrive le 9.octohre , 7 t o , et Picrre B aril, kun f i l s , nl |e
janvier , r , « , n'a été majeur que le
janvier 1, Si 1 ainsi à 1 epf.que <le 11 demande du s o m a « 17 S 6 , i'attion était entière: ainsi l e m o v e n
de prescription disparaît, sans retour.
‘»vncm oyea-
B 2
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là
)
.
.
dit un auteur m odem c ; de donner un nouveau titre ; de faire une
nouvelle disposition ; mais au contraire d ’approuver un droit a n c ie n , de
fortifier un titre p ré c é d e n t, d ’afferm ir le s prem ières dispositions et
d ’en assurer l ’exécution. »
T o u te ratification suppose un droit e x ista n t, un droit acquis; elle a
u n rapport et une liaison im m édiate avec le titre prim ordial. R atificatio
a d hoc tantum Jingitur ut quasi continuatione duorum actuuni contractus
validetur. E lle ne p eu t dans les règles ordinaires ni l ’étendre , n i
l ’augmenter.
L ’esprit de ce lu i qui con firm e, n ’est pas de faire une no u velle dispo
sition, mais d ’approuver ce lle qu’il avait déjà fa ite , qui confirmât, n ih il
dat. T o u te ratification, toute confirm ation s im p le , renferm e toujours
cette condition tacite , que le titre originaire soit valable , ou q u ’au moin9
il attribue quelque droit : aussi M . Charles D um oulin après avoir dit que
la ratification qui est faite d ’un acte nul , avec connaissance de la n u llité
q u ’il renferm e et l ’intention de la ré p a re r, valide cet acte, s’exprim e-t-il
ainsi : secus in confirmationibus quee fiè r e n t sine causœ cognitione , sivè
in fo rm a com m uni; ratio, quia kujus modi confirmatio n ih il d a t , n ihil
novi juris confert , nec invalidum validat. N on enitn f i t ad fin e m dispon e n d i, sed solum ad fin e m approbandi confirm abde, talc, quale est , et
in quantum est verum , validum et cffica x si taie est et non aliter ;
ainsi si le titre est nul dans le p r in c ip e , d ’une n u llité absolue ; s’il
n ’attribue aucun d r o it; si celu i qui a disposé, n ’est point lié à l ’égard
de celu i en faveur de qui la disposition est fa ite ; si celu i-ci enfin, ne peut
invoquer cette prem ière d isp o sitio n , ni en tirer aucun avantage, la
ratification la plus précise , la plus form elle , ne peut opérer l ’effet de
la valid er, si elle n ’énonce sa nullité elle-m êm e, avec l ’intention de la
réparer. Q uod nullum est ipso jure , perperùm et inutditer confirtnatur.
T e ls sont les vrais principes qui s’élèvent contre la prétention des
nouveaux adversaires de Bard ; principes qui ont été reconnus etconfirinés
par le jugem ent rendu en dernier ressort, le 3o août 1792.
M ais dira-t-on encore , comme Saby l ’a répété plusieurs f o i s , la rati
fication équivaut à une nouvelle disposition ; e lle est elle - môme une
nouvelle d isp o sitio n , et d ’ailleur3 la prem ière disposition n'était nullo
que d'une n u llité relative.
C e sera toujours en vain qu'on voudra donner le change sur la ratificafion faite en 172 ^ , de l ’institution d'héritier portée dans le contrat de
mariage de C atherine S ab y, du 8 janvier i 7 iy , en faveur de N o é l S ab y,.
son frère, non contractant ; 011 rappèlera toujours les adversaires de Bard
aux term es que ru n ien iifiit ces deux a d es.
Par celui de 171.9, Pierre Saby institue N o ë l S ab y, son fils , noncontractant , son lifriiie r général et universel ; cette disposition était
nu lle et illé g a le , e lle ne pouvait produire aucun e ffe t ; e lle n ’attribuait à
»
»
»
»
�ïo \
Ce d e r n i e r a u c u n s droits n i présens ni futurs ? dans le s biens du
p re m ie r ; parce que le premier caractère de Vinstitution d ’héritier , e st,
on le r e p è t e , qu’e lle soit fa ite en faveur des mariés ou de leurs
descendons.
L a n u llité dont était infectée cette d isp o sitio n , était une
n u llité
absolue qui n ’a jamais pu être
couverte par une ratification q u elq u ’expresse , quelque précise q u ’elle ait été , parce que quod nutlum
est ipso ju r e , perperùm et inutiliter confirmatur.
L ’acte de 1725 ne contient p o in t une n ouvelle d isp o sitio n , la rati
fication est pure et sim ple , elle n ’énonce point la nullité dont était
infectée la première disp osition, ni l ’intention de la réparer. Il y est d it
seulem ent que Pierre Saby approuve et ratifie l ’institution d ’héritier
faite en faveur de N o ë l Saby son fils , dans le contrat de mariage d e
C ath erin e Saby , du 8 janvier 1719 , et consent q u ’elle sorte son p le in
et entier effet.
C ette ratification ne contient donc poin t une n ouvelle disposition."
L a prem ière disposition est ratifiée et confirmée , elle doit sortir son
p le in et entier effet. M ais si par elle-m ê m e elle ne pouvait avoir au
cun effet ; si elle ne liait poin t celu i qui l ’avait faite ; si celu i en fa
veur de qui elle avait été faite ne pouvait pas l ’invoquer , il faut
dire affirmativement , que la ratification , la confirm ation ne peut pas
l ’avoir validée ; parce que l ’esprit de ce lu i qui confirm e n’est pas de
faire une nouvelle disposition , d ’attribuer un droit nouveau , mais com
m e l’a clairem ent exprim é Pierre Saby lui-m êm e , d ’approuver seulem ent
la prem ière disposition q u ’il avait faite : qui confirm ât, n ih il dut.
E n vain dirait-on que le vice de la prem ière institution a été cou
vert par la ratification ; cela serait vrai ai la prem ière institution 11’avait été infectée que d ’une nullité relative ; mais étant frappée d’une nul
lité absolue , l ’objection ne p eu t avoir aucune force.
O n distingue en droit deux sortes de n u llité s , les unes absolues qui
sont de droit public , et que plusieurs auteurs ont appelé n ullités poulaires , parce q u 'elles appartiennent au p u blic et aux membres de
Etat qui ont intérêts de les proposer ; les autres relatives , parce
qu’elles 11e concernent que ceux au profit de qui elles sont établies ;
qu’elles dépendent absolum ent de leur volonté particulière , et qu’ils
peuvent y rénoncer soit expressém ent , soit tacitement.
^ A in s i une vente faite par un m ineur qui 11’est nulle que relativem ent
a lui-m em e , peut être ratifiée par lu i , lorsqu’il a atteint sa m ajo rité,
ou par le laps de dix ans , s’il n ’a pas reclam é pendant ce tem ps,
après sa m ajorité.
A in s i une vente des biens d ’une femme faite pendant son mariage
n ’est nulle que d ’une n u llité relative , et la fem m e devenue veuve p eu t
par une ratification expresse la confirmer.
F
�(
14
5
• L e m in eu r devenu majeur et la fem m e yenve «ont alors libres .^maî
tres de leurs d ro its; ils p euvent valider .ce q u ’ils ont fait .en minorité,
ou en puiiiyirçce dç jnari , et qui ne se trouve nul q u ’à cause de ces
circonstances , et la seule différence q u ’il' y ait entre le u r .ratification
c$t que colie faite par -le minicur.a .toujours un. « ffet rétroactif au p re
m ier acte , tandis qye .celle faite par la femmo jj.e I’a pfis , et q u e
celu i qui a traité a.v,ec re llç 'en puissance de m a r i, ii'u .de titre .valable'
que du jour de la ratification.
C e s' actes fuil3 par Je m ineur ou p a r la femme en puissance du m a ri,
ne sont nuls que .d’une ,n ullité relative. ; nul autre qu’eux-m êm es ne
p eu t s’en plaindre-; cuk seuls peuvent les attaquer, xovenir cQntre , ou.
les app rouvor, les-confirm er.
M ais il n ’tn est pas de même d ’un acte qui est nul d’une n u llité
absolue qui intéresse dos liçrs , et que (les tiers peuvent faire valoir.
A i n s i , par e x e m p le , un testament fait en pays de droit é crit, qu i
pécherait par le -défaut d ’jnîti-tution .on faveur d e.ceu x qui ont droit de
lé g itim e ; une donation qui pécherait par le défaut d ’acceptation de la.
part du donataire ; une donation qui pécherait par le défaut de tradition
de la part dn donateur., eu xlajis laquellp celui-ci se serait reservé la-lib erté
cl’hypothéqucr les biens donnés.; u n e donation q u i n,ç -serait pas faite
eu contrat de m a ria g e , ek qui aurait poux qbjej:.. les biens présens et à
venir d u d o n ateu r; une .don ation , ejifin , qui aurait été révoquée par
survenance d ’en fan s; de p areilles d ispo sition s, disons-nous , seraient en
yain ratifiées, et quelques p récises, quelques fo r m e lle s , quelques ,éclatanteç que fussent les ratifications , elles ne p o u rr a ie n t pas produire
l ’e ffet de les va lid er, parce que ces actes étant nuls d ’u n e n u l l i t é absolue,
ne pourraient jamais, être confirmés valablem ent. Q uod millutn est ipso,
ju r e , perperîtin et in ulilitcr conp.rmatur.
Dans tous ces cas , il faudrait un nouvel acte revêtu de toutes les*
form alités légales pour la validité d ’un testam ent, d ’une donation, parce
q u 'il e tt de l’essence des tcslam ens faits en pays de droit é c r it , qu’ilscontienn en t institution d'héritier en faveur de ceux qui ont droit de
légitim e ; parce qu’il est de l'essence des donations , qu 'il y ait u n e
a cce p ta tio n , q u ’il y a it une tradition; parce qu’il est de l ’essence des
donations qiu ne sont pas failes en contrat de m ariage, qu’elles ne -comprer.urnt que les biens présens du donateur ; et parce qu’e n fin , «Y
l ’égard du lU inier exem ple p ro p o sé, une donation révoquée par surve
n an te .'f-ufans, ne peut jamais revivre , et que dans tous ces cas des
ralifiç:.i--Jv> J'C pourraient produire ancun effet.
(^uctiid un acte est nul par lu i-m em e, il est toujours ratifié inutilem ent
ne conU nant poin t d ’engagem ent valable de la part de ceux qui l ’ont
conscrit, ne pouvant jamais être validé par le te m p s , ]a ratification qui
en e.'-t faite pai les p arties, ne les oblige pas à plus que ne les ob ligeait
l'acte mOmc.
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V5t
. ,.
L ’Institution d ’héritier portée dans le contrat de mariage de 1 7 1 9 ,
était nulle par e lle-m ê m e ; elle n ’attribuait aucun droit à N o ë l Saby; e llo
e lle 11e lia it en aucune m anière Pierre S ab y, son p ère ; et la ratification
que celui-ci en fit en 1 7 2 5 , était absolum ent insignifiante, et ne le lia it
pas à plus envers N o ë l S a b y , qu’il 11e l ’était par l ’acte de 1719 .
lo u t e la difficulté se réduit, e n fin , en peu de mots. O u la prem ière
disposition était n u lle par elle-m êm e, ou e lle était seulem ent susceptible
d ’ètru am iullée ; dans ce dernier cas, c ’est-à-dire si la disposition n ’était
pas m ille par e lle-m êm e, sed venit tantum annulandus, la ratification
l ’aurait fortifié, corroboré, va lid é; mais dès que la prem ière disposition
était n u lle par elle-m êm e, la ratification, la confirm ation qui en' furent
faites 11e p u r e n t pas la valid er; parce que , comme le dit q u elqu e part
Boërius-, coiifirmatio n ih il novi d a t , se d prius habita et possessa
confirmât.
C e s principes , ces d istin c tio n s, sont enseignés par tous les juriscon
sultes , et ils furent consacrés d ’une m aniéré bien précise par un arrêt
du 26 février 1 7 2 6 , rapporté par L ép in e-d e-G rain vile page 4 0 8 , dans
un e espèce qui était tout aussi favorable pour les donataires , que veulen t
l ’être le s nouveaux adversaires de Bard ; ils ont été renouvelles dans le
p ro je t du code civil qui peut être regardé comme raison écrite , quoiqu’il
n ’ait pas encore force de l o i ; voici ce qu’on y li t , art. 22g du 2.me liv . :
« l'acte confirm atif suppose un contrat antérieur et un contrat valable. »
« S i l ’acte confirme est radicalem ent n u l , il 11’est point validé par la
9- sim ple confirm ation , à moins qu’il n’énonce la connaissance de la
» nullité du p rem ier, ave L’intention d& la réparer, qu’il n ’en rapporte la
y substance et ne contienne la déclaration de la volonté de vouloir lu i
» donner l ’exécution. »
C e s principes ont encore été consacrés par le prem ier jugem ent que
Bard a obtenu contre P ierre S ab y; jugem ent qui a été attaqué par la
vo ie de la tierce op p osition , mais qui doit nécessairem ent être confirm é,
quelques efforts que fassent M agaud et sa fem m e pour le faire réformer.
C e s derniers insistent et invoquent encore en leu r fa v e u r , l ’autorité de
l ’immortel D u m o u lin ; et nous aussi nous la v o n s invoqué ! nous avoni
rapporté les expressions de ce célèbre ju riscon su lte, et certes nous sommes
-éloignés de les croire en leur faveur.
11 est vrai que D u m ou lin après avoir d it, ainsi que le s adversaires de
Bard en conviennent ( ‘ car ce sont leurs propres expressions que nous
ti.inscrivons ) , qiie la confirmation d'un acte antérieur ju q u e l celui qui lu
Conjirnie, se réfère sans en rapporter la ten eu r, ni en relater les v ice s
pour les rep arer, n'a d ’autre but que de maintenir l'acte dans sa valeur
primitive", qu'elle ne couvre ;ut.1 la n u llité , ni les vices de l'acts , ignorés
par L'auteur de la con frm ation , et qu'elle n'<mvr.che ni lui ni les siens de
fa ir e va lo ir ces vices , pour ¿e dispensât d 'e x ic u lc r l'amie , ajoute que si
�,G
)
la confirmation d ’une 'disposition n u lle est faite avcc la connaissance de
cette n u llité , et inten tion form elle de la réparer, la ratification valide
alors ce qui était nul. In tantum quod ctiam si conjïrmatum esset nullum
v e l invahdum , validaretur per coifirm ationem potestatem h a hentis, scientis
nullitatcm et vitiuni confirmait.... Tune proprie non discitur corfirm atio,
s e d nova et p r in cip a le dispositio.
L e s célèbres ju risco n su ltes, rédacteurs du projet du code civil qui est
attendu avec tant d ’im patience par toute la I rance , p our faire cesser la
bigarrure de nos lois , n ’ont-ils pas puisé dans l ’immortel D u m o u lin ,
l ’article que l ’on a déjà r a p p e lé , et cet article et les suivans ne sont-ils
pas la traduction presque litté ra le 'd e ce que d it ce grand maître.
E n un m o t, l ’acte de 1725 n ’énonce pas la connaissance de la n u llité
dont était in fectée la disposition contenue dans celu i de 1 7 1 9 ; il n’y en
est pas dit un m o t; on n ’y voit pas l ’intention form elle de P ierre S ab y, de
vouloir réparer ce vice qu’il devait connaître, que la lo i ne lu i perm ettait
pas d ’ignorer , et dès-lors il faut dire avec D u m o u lin , avcc les auteurs
du projet du code c iv il, que la confirmation d ’une disposition radicale
ment. n u lle , n ’est point v a lid ée par une sim ple ratification qui n’énonce
point la connaissance de la n u llité, avec l ’intention de la réparer ; que
la disposition contenue dans l ’acte de 171c) , n ’a poin t dès-lors été
validée par la ratification contenue dans celu i de 1725.
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N.
E n Auvergne , les enfans ' des cultivateurs , travaillant hors la maison
p atern elle, peuvent-ils fa ir e des profits qui leur soient propres /
O n ne rappèlera poin t ici les distinctions faites par les lois sur les
d ifférentes espèces de biens. O n se contentera de dire qu ’en A u verg n e
et dans le F o rêt, l'usage constant a toujours été que les sommes gagnées
par les enfans des cu ltiv a te u rs, soit en s’exp atrian t, soit dans l ’etat de
dom esticité ont toujours restées en leu r libre disposition; qu ’ils ont eu
le droit d ’en disposer à leur gré; et que leurs pères n ’ont jamais consi
dérés ces sommes comme faisant partie de leur patrim oine.
E lle s ont toujours été c la ss é e s, ces sommes , dans l ’ordre des biens
désignés par la lo i sous le nom de quasi-castrence, dont les pères n ’ont
ni l ’u su fru it, ni la p ro p rié té , et qui 11e sont jamais sujets à rapport à leur
succession. ISrec castrense, nec quasi castrense peculium fratribus confertur.
T o u s les ans et à des époques périodiques on voit des nuées de cul
tivateurs quitter nos^ montagnes pour aller à la scie ou à la marre ; on
les voit à d ’autres epoques reven ir, portant dans leur maison les fruits
de leurs sueurs et de leurs travaux ; les prêter le plus souvent à leu r
frère aîné , et s’en faire souscrire des obligations , des reconnaissances.
T o u s les jours on voit les enfans des cultivateurs se constituer euxm êm es
�Tnêifies., dans’ leu r contrat de mariage» des s o m ^ s provenues de-le.ur»;
épargnes et de leurs travaux ; on voit même des filles en faire autant^
dans leur contrat de m ariage , en présence de leurs parents , sans que
dans aucun cas , dans aucun temps il soit encore entre dans l ’idee des .
héritiers in stitu é s, des légitim âm es, de dem ander le rapport de ces scitv
mes pour en grossir la masse des biens paternels. O u i , il est sans exem
p le que des héritiers aient exigés q u ’un légitim aire m écontent de 'l a
part qui lu i était fixée, pour lu i tenir lieu de ses droits, rapportât à la masse
de3 biens à partager , ce qu’il s’était lui-m êm e constitué dans son con
tint d e 'm a ria g e , comme provenant de ses épargnes , parce qu ’encoré
v u e fois 011 a considéré ces profits comme devant participer de la na
ture des biens q u a s i- c a s tr e n c e , et que sous ce point de vue- ils n ’étaient
pas sujets à rapport.
S i c ’était une erreur , comme ■
l ’a dit Pierre S a b y , qui contrarie le i
principes puisés dans la lo i sur la puissance p a te rn e lle , il faudrait la
confirm er , parce qu’étant" devenue générale , elle a acquis force de lo ii
Jrro r cornmvr.ix fa c i t legem. JElllc devrait être consacrée, parce' qu ’e lle
sert d ’un aiguillon puissant aux enfans des cultivateurs pour le s déter
m iner à abandonner nos contrées , et à aHer chercher ch ez le s habitanà
d ’autres contrées , qui ont des richesses, mais non de l ’industrie , le n u
m éraire qu’aucun autre canal nty pourrait- faire parvenir dans nos
m ontagnes.
M ais pourquoi se tant appesantir sur l'u sage", sur la force qu’il doit
a v o ir , sur l ’avantage qui en' résulte* pour nos contrées ? N e suffit-il
pas à Bard d’invoquer en sa faveur , pour faire rejeter , proscrire la
prétention de ses a d versaires, les - dispositions - du contrat de m ariagè
de son ayeul l
O n y voit dans ce'co n tra t de’ mariage qui est du 2 i-' janvier' i yZy
q u ’A n d ré Saby a été constitué par N o ë l Saby son fr è r e , à une somme
de deux cents francs , pour ce qui lu i revenait dans les b ièn 3 de ses
p ère et mère , et qu’il s’est constitué lui-m ême une somme de trois
cent cinquante francs qu’il avait par devers lu i , comme provenant de
scs épargnes.
D e la distinction de ses deux sommes ’ n ’en résulte-t-il pas é v id e n t
m ent qu’il n ’y a que la somme de deux cents francs qui puisse être
sujette à ra p p o rt, si elle a été payée ? N ’en-résulte-t-il pa3 sur-tout que
N o ë l Saby père et beau-père des adversaires de Bard ,■était convaincü
que la somme de trois cent cinquante franc9 qu’A n d ré Saby son frère
se constitua lui-m êm e , comme provenant de ses épargnes , lu i était p ro
pre , et que dans aucun cas , dans aucun temps il ne p o u r r a i t y avoir
d r o i t ? N ’en résulte-t-il pas qu ’il y a fin de n o n - r e c e v o i r contre la
prétention de Magarnl et de sa femme , qui a pour o b j t t le rapport
dé cotte sojunic de trois cent cinquante francs à la succession dont
C
�<
î8
y
le partage est ordonne. C on clu on s d o n c, et
,
_
disons q u ’il n’y a dans
cette prétention q u ’in ju stice , absurdité- ( i ) .
C I N Q U I È M E
Q U E S T I O N .
L ’action en partage dirigée contre un des détenteurs des biens, possédant
par in divis avec ses cohéritiers, interrompt-elle la prescription vis-à.vis ces derniers ! (2).
. C e n ’est pas seulem ent par le s mêm es m oyens que Pierre Saby a fait
valoir contre B a r d , que la prétention .de ce dernier est combattue ; ses
n o u ve a u x adyersaires , les tiers opposans, en les rep rod u isan t, en ajoutent
.un qui leu r est p ro p re ; ils prétendent que l ’action en partage n ’ayant été
d irigée q u e,con tre Pierre S a b y , n ’a pas pu leu r n u ire , leur p rcju d icier
interrom pre-la. prescription à leu r égard.
L a discussion de la question qu'ils m ettent au jo u r, ne sera ni lo n g u e ,
n i d ifficu ltu eu se, et il sera facile de leur dém ontrer qu’il n ’y a encore
q u ’erreur dans leur n ouvelle prétention.
U n p oin t essentiel à rappeler , pour parvenir à la solution de cett«
q u e s tio n , est que les nouveaux adversaires de Bard et leurs auteurs ont
toujours jouis avec Pierre S ab y, second du n o m , contre qui la dem ande
en partage fut dirigée en 17 8 6 , de la totalité des biens sujets au partage;
,q u e cette jouissance com m une qui avait pris naissance, qui était fondéeîsur les
actes de sociétés générales et un iverselles contractées entre Pierre Saby ;
prem ier du n o m , d ’une part , et A n to in e Bruhat e t C atherin e S ab y,
d ’au tre, par les actes publics qui sont rapportés . et qui sont des 16
■février 1694 et 3 janvier 1 7 0 6 , s’est perpétuée jusqijes à p résen t, de sorte
que quoiqu’il soit de princip e en droit que toute société est rom pue,
d isso u te par la niort d ’un des a sso ciés, morte solpitur so cieta s, il est
cependant certain que par une volonté tacite et bien exprim ée par le
fa it, les sociétés générales contractées entre les auteurs co m m u n s,.se sont
perpétuées enlre leurs descendans ; et que par Je la it de la jo u issan ce,
d e la cohabitation commune ; par la circonstance qu’ils ont toujours mis
en commun les profits q u ’ils ont faits , et que dans plusieurs actes
.publics qu ’ils ont passés , .ils se sont dits communs et associés efi
b ien s; il en résulte qu’il faut considérer ces sociétés générales établies
en 1694 et en 1706 j comme ayant ete renouvellécs expressém ent il
,chaque génération.
( 1 ) Quoique dans let!r,t moyens en tierce opposition , Magaud et sa Femme n’aien t pat r e n o u v e l é
celui que l ’on vient de discu te r, on a cru devoir le p ré v o ir, parce que Pierre S aby l'avait employé
avec f o r c e , et qu’eux-memes peuven t toujours y avoir recours.
( î ) Maraud et sa femme après avoir opposé ta pre*cripti» n, op t dit qu'elle ct.iit acquise lors île la
dem ande formée çontre Pierre S^by, et o n t î jouté p a r é c i i t , t/u'illt était hten plut ir.contntnile tn fa v eu r
ir Catherin - .Soi\y f il ont dit publiquement que la demsn.le n'ayant pas été forinie dans le même temps
r a n t r e cette d e r n i ir e , la prescriptiwn avait continué de c o u i ïr e n ^ a faveu r. La ligne qu'ils o a tt s a s c e *
L’ j p r u p o i qu’ils «nt.tenuî ont JtJicruiias à t r a it e r !» question proposée.
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,
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,
l e fait d e là j'ouissâncG com m une qui a toujours eu -licit entre tou»les adversaires de B ard , qui existait à l ’tp c q y e de la demande en p artage
form ée en 17 8 6 , et qui n ’a cessé pour le s batim ens seulem ent que depu is
le 5 janvier 1 7 9 2 , époque d ’un acte public reçu Vissac n o ta ire, suffit seul^pour faire décider la question.
■
« l i e n est des héritiers du d é b ite u r,. comme- d e s ' coobligés m êm es,
» tant que ces co h é ritie rs-n ’ont pas fait de partage^ entr’eux. De3 coy héritiers qui sont encore dans l ’in d ivisio n , sont réputés associés pour
y- tout ce qui est re la tif aux biens de la succession ; ils sont censés man» dataires les uns des autres à cet é g ard ; ainsi l ’interruption qui est/
5» faite contre l ’un d ’- eux, est-rép utée faite contre la succession e lle - (
» m ôm e; » c ’est ainsi que s’exprim e sur cette question le d e rn ie r-c o m
m entateur de la coutume de la ci-devant A u vergn e.
É co u ton s ce que disent plusieurs coutum es de F ran ce, qui ont prévus
la difficulté :
(
« Interruption de prescription faite contre l ’un des frères ou- communs^on^onnaî».
y poscédans par in d iv is ; aucune chose sert et profite comme si e lle
art- 3*>
y était faite contre/les antres communs personniers-en ladite choàe.
« L ’interruption civile par ajournem ent lib e llé , ou convention ju d i-( Rcrry.
y c ia ir e , ou autrem ent, faite pour le regard de l ’un dès possesseurs ou.11*-12
y détenteurs par indivis ,• de la m aison ou héritage c^ie l ’on veut p rescrire’
y a effet contre tous les autres possesseurs et ' détenteurs pat indivis ,
y dudit h é rita g e , et leur nu it et préjudicie. »
« Interruption de prescription faite contre l ’un des frères ou communs Niv«™«;*.
»•possédans par indivis^ aucune chose , nuit aux autres frères ou .tit- 36art. f.
y communs. »
*
Four em pêcher prescription dé" trente ani*7 où ice lle interrom pre
Anjou
y e n tr e frarescheur , suffit à celu i frarescheuT contre le q u e l on objicerai^ art. 43^
y p re scrip tio n , m ontrer et enseigner quant aux choses com m unes et
y indivisees entre lesdits fraresch eu rs, que l ’un d ’eux a été inquiété , ou
y sa possession interrom pue , car en ce cas où les choses sont encore*
y in d iv is e e s , l ’interruption faite à l ’un préjudicie aux autres. »
T e l est le langage unanim e de ces coutum es sur la question à la q u elle
donne lieu la prétention de Jean M agaud et de sa fem m e. L e u r décision •
un iform è-prouve qu e cette question ne devrait pas m êm e en faire une. Il
suffit qu’une action soit dirigée dans un tem ps u tile , contre un des
détenteurs d ’un bien possédé par indivis avec d ’autres, pour que l ’action
n u is e , prejudicie à to u s , qu ’e lle interrom pe la prescription à l ’égard
c e tous.
« Q u an d ' on s’adresse contre l ’un des possesseurs , par indivis , dit
y énergiquem ent C o q u ille , l ’adresse est faite potius in rem , quam
y in personnam , et nuit à tous ceux qui y ont part. » A in si il est
cettain que- Bard en form ant en 178O la demande en partage dfio
C •2 —
�.X
(
30
i
fciens de ses auteurs , contre Pierre S a b y , avait moin8 en vue d e
s'adresser directem ent à c e lu i- c i, q u ’aux biens auxquels il préten dait
d roit ; que les biens seuls m éritaient , attiraient toute son attention ;
q u ’eux seuls étaient le m obile de son action ; q u ’ainsi et quoiqu’il ne
s ’adressa alors qu ’à Pierre S a b y , un des détenteurs des biens , son action
îta. pas m oins eu l ’effet d ’interrom pre la prescrip tion contre tous les
autres détenteurs , parce q u ’elle était dirigée p o tiu s in rem quam in
pcrsonnam .
Q u ’on ne dise pas que le,s autorités de ces coutumes ne peuvent
ôtre d ’aucun p o id s , d ’aucun^ autorité en A u v e r g n e , leurs dispositions
ont de tout temps été reconnues si s a g e s , et tellem ent fondées sur la
justice et la raison qu’elles ont toujours été approuvées par les juriscon
sultes , et regardées comme devant form er le droit commun ; c ’est ce
qui a fait dire à Chabrol , qu'il en est des h éritiers d ’un débiteur
com m e des coobligés m {m e , e t que ta n t qu’ils n ’ont p a s fa it de p a rta g e
e n ir’e u x le principe ¿ s t le m êm e.
O n convient qu’il en est autrem ent à l'égard des cohéritiers qui
ont cessé d ’être dans l ’in d iv is io n , et que dans ce cas l ’action dirigée
^contre un ne p eu t pas nuire aux autres. O n convient qu’il en est encore
autrement dans le cas où un dem andeur restreindrait sa demande contre
un cohéritier jouissant par indivis avec d ’au tres, à la portion pour
laq u elle il serait personnellem ent tenu de l ’objet de -l'action , et que
dans ce cas encore l’açtion dirigée contre un ne nuirait poin t aux autres,mais hors ces cas, et tant q u ’il y a indivision entre des cohéritiers , tant
q u ’ils jouissent en com m un d'un bien , il est certain , il est incon
testable que l ’action dirigée contre yn , n u it , préjudiçie à tous.
Pour dem eurer convaincu que ce qu'on vient de dire ne peut pas
être combattu avec succès , il suffirait de rappeler les expressions de"
M . C harles D u m ou lin sur l ’art. i 5 du titre i2 d e l à coutum e du Ecrry ,
et sur ce mot préjudiçie.
' în te llig e , dit ce savant et profond j u r i s c o n s u lt e , quand') reus super
teto co n vçn iiu r e t super toto proCedit e t H o c e s t v a î .d è j v s t v m , quam -
i is sit contra ju s scriptum in d iv id u is : secus si actor c o n v e r ia t unum .
f x p o ssesso rilu s prn p a rte sud ta n tu m , quia tune rem anet régula juris
com m uais quoad alio-s. Il suffit donc que celu i qui réclam e ries droits
contre un des détenteurs d ’un bien possédé par indivis , réclam e la lolalité de ce «pii lui revient , pour que son actiou nuise , préjudiçie à
tous les autres détenteurs. H o c e s t vA i.ni: j u s t v m ( i ) .
( l ) P c h noie
de la première question , Il résit-lte qti'i T é p o '; u e ile.la demande f j r m i »
coinre'.Pierlc Sab v en
. ¡1 nr l ’ttait ceonlc que i'>
un im-;% i t ? j'iiirs <lc temps utile pour I»
r>r<:*rHrf'on . rt rn c a k u 'a n t lU-pnii cette épr^iic juwni’aii premier mcs«idor an VI ( ly juin I7')i ) ,
liste de h rititin n en 'c m ic iln tion portée à
et A fa F c n m c , it,ii'Y a que l î arn î mem : ?
ce 'mi f.iitnn tdtal Je »S ans.» mois 4 jours., ainsi point Je prescription e n 's u i’ p«s*ut n um ç
que U-» 1 rïnclpcs
i i m i n t pas e n f j v . ’u r d c Baril.
�S I X I È M E
Q U E S T I O N .
V a-t-il quelques biens m eubles sujets a u partage ordonne pa r Lz ju g em e n t
,en dernier, ressort de 1-732 / Y a -t-il p lu s de deux im m eubles , m è m t
. p lu s de quatre sujets à ce p a rta g e !
N o u s avons terminé la discussion de toutes les questions de droit
ûuxqu’elles a donné lie u la tierce opposition form ée de la partde Catherine
Saby et de Jean M agaud. N o u s sommes arrivés au m om ent d ’établir deux
p oints de faits qui sont ce rtain s, incontestables , c ’est-à-dire qu’il y a
des m eubles sujets au partage dont il s’agit ; q u 'il y a plus de d e u x ,
même plus de quatre im m eubles qui doivent y être com pris , et cette
tâche n ’est pas aujourd’hui p én ible à rem plir.
D ans tout le cours de la procédure qui a eu lie u depuis 1786 jusques à présent , Jean Saby et avant lu i son p ère se sont toujours obs
tinés à soutenir qu’il 11’y avait aucuns biens m e u b le s, aucuns biens im
m eubles sujets à partage. U n jugem ent contradictoire l ’a cependant or
donné , et ce jugem ent est celu i du 3 o août 179.2.
A lo r s l ’obstination de P ie ire Saby à soutenir son systèm e parut s’ac
croître de plus en plus , et cependant rentrant un p eu en lui-m êm e, il
convint dans un procès-verbal du 2o octobre de la m êm e année , qu ’il
y avait seulem ent quatre héritages sujets à ce partage , e t il eut la
bonté de les désigner d’une m anière assez précise.
Fâché sans doute d’avoir fait un p areil aveu , après avoir cherché par
tous les m oyens possiblos à éviter le transport des experts qui furent
nom m és successivem ent ; après avoir donné lie u à plusieurs in c id e n s ,
Ct voyant arriver les derniers experts nommés pour procéder au parta
g e , il soutint à ces mêm es expeits ( ce fait est consigné dans un rap
p ort du 16 m essidor an III ) q u ’il n ’y avait que d e u x héritages sujet»
à ce partage , et il -eut encore la bonhom m ie de les désigner.
E n fin , après plusieurs contestations il a été décidé par un jugem ent du G
fructidor an V que Pierre Bard indiquerait les biens sujeta au partage, et
par un autre du 2 i nivôSe an IX , il a été chargé de faire la preuve de
la consistance des biens m eubles , des titre 3 de créance et des im m eu
bles provenus de P ierre Saby et d’A n to in ette Lachaud.
Par ce même jugem ent , il a été ordonné que des experts pris par
le s parties ou nommés d’o/Tice feraient l ’application des litres produits
par Bard , et com prendraient dans leurs rapports tous les im m eubles
tjui a v a ie n t ¿lé donnes p o u r confins a u x h 'r ita ç e s acquis , et qui e ta ien t
d its dans les a ‘ tes , apportentr à ou a u x acquéreurs , c ’est à-dire, à Pierre
S>*by, à A n d ré S ab y, à A n to in e B m h at, -ou à C atherin e «Sa!>y, qui tous sont
designes comme acquéreurs dans tous les actes produits par Bard.
D es témoins ont été produit.» de part c l d ’au lie , ils ont été en ten
dus. D es experts ont été n w a m w , ils ont opCré. Il ne e’agii duuç
�T fo
U t
*> •#
»
(.
23.
y
plus que de je te r un c o u p -d ’ceil rapide-sur ce qui réduite d c 3 déposi
tions des tém o in s, et du rapport des experts , pour juger du p eu de
ion<Jcment de la prétention de Jean Saby.
D ’abord, relativem ent aux dépositions des témoins q u i ont trait à la consistance des biens m eubles , nous trouvons, quatre dépositions pres
que uniform es dans l ’en qu ête-faite à la d ilig en ce de Bard.
L e troisièm e tém oin déclare q u ’il y avait constam ment dans.la mai-v
aon de P ierre Saby d e u x p a ire s de b a u f s d i x va ch es , d e u x ju m e n s
p o u lln ia ires , d ix chèvres , entour d e u x cents m outvns , m ais qu’en h iv e r,
le troupeau d im in u a it quelquefois.
L e quatrièm e dit q u 'il y a v a it quatre p a ires de b œ u fs , d o u ze v a c h e s ,
d e u x ju m en s e t un troupeau de m outons qui s ’é le v a it q u e lq u e fo is. jus~
qu’à quatre cents , m a is qid é ta it quelquefois de d e u x cent cinquante.
. L e sixièm e assure qu e la m aison des Seby f à is a i t le com m erce dey
" m outons , qu’habituellcjxicnt il y a y a it un troupeau de d e u x cents bêtes
à la in e , h u it ou d i x v a ch es et d e u x ju m e n s pouliniaires.
L e septièm e ne parle que de d e u x p a ire s de bœufs ; mais le hui<
tièm e p arle encore de d b u x p a ire s de bœ ufs , d 'u n troupeau d e m outons
de d e u x ccnts à d e u x cent quarante - , de sept à h u it v a c h e s , de sept^
à h u it chèvres e t d ’une ju m e n t.
E n fin , tous ces tém oins staccordent.parfaitem ent sur un p pint essen»,
tie l : ils disent que la m a ison des S a b y p a ssa it po u r être pécuuieuse e t'
q u’elte jo u issa it cl'une aisance notoire.
S i nous jetons actuellem ent les yeu x sur le s dépositions des témoins*
q u i ont été produits par Jean Saby ; si nous rapprochons ces d é p o sé
tiona do celles des tém oins qui o n t été produits par B a r d , nous ver-,
rons que ce qu’on d it ces derniers , et que. l ’on vient de rappeler , ac
quiert un nouveau dégré de force et de vérité , et qu’on ne p eu t faire»
autrem ent , d'après la réunion de toutes ces dépositions , que de dem eu
rer convaincu que P ierre Saby et A n to in e Bruhat son beau-frère et son
associé , C atherin e Saby sa sœ ur.et aussi son a s s o c i é e , après le décès de ce
d e rn ie r, jouissaient d ’une fortune opulen te ; q u ’ ils avaient constam m ent
au m oili3 d e u x ou trois p a ires de bœufs , d ix. va c h es , un troupeau de.
m outons d'entour d e u x cents , sept à h u it chèvres et d e u x ju m en s.
U n pareil nombre de bétail suppose nécessairem ent l ’exiatence de
tous les inslrum ens a ra to ire s, des chars , des ch arru es, jougs , clefs d e
parc etc. et tout cela suppose encore l ’existence d ’un m obilier quel-,
conque dan* la m aison de Pierre Saby , proportionné à l ’opulence dont
il jouissait.
N o u s avouerons cependant , que d ’apjès les dépositions des tém oins
produits par Saby , il résulte que sa maison s’est considérablement»
accrue depuis le décès de P ierre S a b y , d e cujus ; mais q u ’il sache
^uc Bard n ’a jam ais poussé ses prétentions- ju squ’à «outeiur que la
i
�tu
{
23
)
totalité des t ie n s dont i l jo u it actuellem ent
est sujette au partage
o rd o n n é ; -mais qu!il a soutenu qu’il y .avait p lus de d eu x , m êm e
p lu s de quatre immeubles sujets à ce partage ; qu’il y avait des m eu
bles , et que convaincu ;par les dépositions des témoins qui ont éta
e n ten d u s; qu’accablé même par la réunion de *ces d é p o sitio n s, Saby
rentre une fois en lui-m êm e et qu’il convienne au moins aujourd’hui que son
obstination e t ce lle de
son père , à soutenir q u ’il n ’y avait aucuns
biens sujets au p a r t a g e .n’ont été propres qu ’à faire faire des frais
•dont il d o it nécessairem ent être v ic tim e , comme Bard avoue franche
m ent de son côté que lu i Saby a droit à des distractions incontesta'«
bles et q u ’il n ’a qu’à le s faire connaître pour les obtenir.
L e jugem ent du 2 1 nivôse an I X , ordonnait que Saby rem ettrait
e n t r e ‘les mains de« experts, les titres qui devaient servir à établir ce®
d istraction s, mais il s’y e*t constam m ent refusé. L e s experts q u i ont
opéré l ’attestent dans leu r rapport , et si ces experts n ’o n t p o in t fa it
e n sa faveur les distractions qu’ils auraient pu faire ; s’ils ont com pris
dans leu r p lan une quantité plus considérable de terrein que ce lle qui doit
■en dernière analise être com prise dans le partage , il ne p eu t l ’im p u
ter q u ’à l u i - m ê m e , a u r e f u s constant de rem ettre ses titres.
D ’après le rapport de ces experts , tous les -titres produits par Bard
•ont reçu une application parfaite sur le s héritages jouis encore par
in d ivis par Jean Saby., C atherin e Saby et Jean M agaud. C e s experts
•ont -constaté l ’identité
des héritages énoncés dans
ces m êm es
„titres , avec ceux possédés par ces derniers , et enfin il résulte de leurs
•opérations , de l ’éch elle jointe au p la n , du calcu l que l ’on a fait d ’a>près cette é c h e lle , que p lu s de soixante septerées de terre sont sujet
tes au partage ordonné ; ainsi , que Saby cesse donc de dire qu ’il n ’y a que
d e u x héritages même que quatre qui doivent être com pris dans .ce
•partage.
Si
cependant il lu i restait à Saby quelque espoir de p ou voir répondre
à ce que nous venons de dire ; de pouvoir combattre soit les déposi
tions des témoins , soit le rapport des e x p e rts, q u ’il écoute avant de
l ’entreprendre ; q u ’il lise avec attention une preuve littérale , une preu ve
authentique et légale qui v i e n t co rro b o rer, fortifier soit la preuve vocale,
soit le rapport des experts , et qu’il nous dise ensuite si l ’-un ou l ’au
tre p eu t être critiqué avec succès.
V o ic i mot à mot ce qu ’on trouve dans le rôle de la commune de
C ham pagnat-lc-vieux , quartier de L a c jia u d , p ou r l ’année 1 7 3 7 » yôle
rendu executoire le i 3 novem bre 1 7 3 6 , et enregictré à Issoire le même
jo u r.
• P ierre et N o c l
Saby , pure et fils , et
Jean M agaud
neveu dudit
�(
^
y
P ierre , communs en biens , labourant à d e u x : p aires de ■bœufs e t u n «
p a ire de va c h es , cent qu in ze francs , c i...................... 1 1 5 fr.
•» sols.
C apitation , quarante-sept francs trois sols , ci. . 4 7
3
- C i u e , vingt - deux irancs un s o l, ci. . . . »
22.
1
T o t a l , cent quatre vingt-quatre francs quatre sols , ci.
134 fr.
4 sols
P eu t-il d ’après cela rester encore quelque doute sur la vérité des faits
al testés par les témoins à l ’égard des m eubles et des bestiaux , sur la quan
t i t é ces im m eubles sujets au partage ordonné , tel qu ’il résulte du
rapport des expeits ? L ’énonciation qui se trouve dans ce rôle ne les
dissipe - t - elle pas tous d ’une m anière irrésistible , et Saby ne
seia-t-il pas forcé d ’avouer que les tém oins n ’ont rien dit que de co n
form e à la. vérité ; que le rapport des experts 11’embrasse pas même p eu têtre lout ce qui devrait y être compris ? Entrons m aintenant dans un cal
cul sim ple mais palpable.
L e rôle de C h um p agn at, quartier de L achaud , com prend n e u f v illa g e s ,
L a c lia u d , T o ira s , Iveyrolîes , L e g l iu l, G en esto u x, le B o u clia re l, B alistre,
Balistroux et O lpign at. C es n e u f villages payaient en principal ou acces
soire d ’im positions 2673 francs i 3 sols. L a seule maison des Saby payait
184 francs 4 sols , c'est à-dire à peu près le treizièm e des im positions ,
ce qui suppose que cette m aison possédait à p eu près le treizièm e des
biens [des n e u f villages. Faisons un autre calcul.
Il est de notoriété publique , et il ne faut pas avoir d es connaissances
bien étendues p our savoir que les im positions ont considérablem ent ac
crues depuis 1787 jusques à nos joürs-; que tel bien qui à cette époque
payait 2oo francs d ’im positions doit aujourd’hui en payer 3 oo mêm e 400
irancs : mais supposons que cette augm entation d ’im position n ’est pas ar
r iv é e ; supposons que le m êm e bien qui,existait à cette époque n ’est grevé
aujourd’hui , com m e il était alors , que de 184 francs 4 sols d ’im position ,
et calculons d ’après nas lois.
L e s im positions sont le cinquièm e du revenu n et d e s.b ie n s. Pour
connaître le capital il faut donc qu in tupler le
montant des im posi
tions et par celte opération nous trouvons que le bien qui existait
en 1787 , grevé de 184 francs 4 sols
d ’im p o sitio n , doit au m oins
être en valeur de 18400- francs : ce calcul 11e p eu t pa» être combattu avec
succès.
C e rôle de l ’année 173.7 , a donc non seulem ent corroboré , fortifié
la preuve qui résulte des dépositions de tous les témoins qui ont été
entendus , mais encore il a conduit a la découverte d e là valeur au m oins
approxim ative, des im m eubles sujets au partage ; ainsi il ne peut plus res
ter aucun doute sur la consistance des biens im m eubles ; ainsi le rapport
*dcs experts ne doit pas paraître embrasser un*: plus grande quantité
4 e biçns que ce lle qui est sujette au parlage.
�-
.
..
(
5, „
:
L e s titres translatifs de propriétés rapportés par Bard , qu’il n ’a re cu e il
lis qu’à grands frais et qui ont été souscrits par différents particuliers
en faveur des auteurs communs , depuis i 6g 3 , jusqu’en 1 7 8 7 , cons
tatent qu e' ces derAiers ont acquis dans cet espace de temps pour p lu s
de- trois m ille livres d ’im m eubles.
- Il est dé fait. insContestable que depuis la* fin de l ’avant - dernier siè
cle jusqiies à p re se n t, lès propriétés foncières ont fa it plus qüe quin-:
tupler de valeur ; et cola conduit à la certitude que le3 biens énoncé»
dans les ventes rapportées par Bard doivent être aujourd’h ui en valeur
au moins de qu in ze m ille francs; et si nous- observons que les auteurs
d e s parties jouissaienl'iavant ces acquisitions d’une fortune honnête y
qu ’ils étaient au m oins présumés en jo u ir ( car les- acquisitions qu ?ils fai
saient le prouvent ) , on dem eurera convaincu que le prem ier calcul qu e
l'o n a fait n ’a rien d ’exagéré ou plutôt q u ’il est au-dessous de la valeur
r é e lle des biens sujets au partage.
N e pouvons - n o u s pas dire m aintenant arvec certitude T qu’il y a des
biens - m eubles sujet* au partage o rd o n n é ; qu e tous les immeublesénoncés dans les titres rapportés par Bard doivent y être compris ; q u e
la prétention de 8aby est injuste et absurde , et que soutenir qu’il n e
<JeVaity être com pris que d&hix m êm e q u e - quatre im m eu b les, c ’etait
« o u t e n ir une erreur qui n ’était propre qu ’a faire faire des frais dont nul
autre q u e Saby ne p eu t etre tenu?
L e s tribunaux saisis de la connaissance des contestations des p a rtie s,
en t à prononcer sur des intérêts majeurs ; ils ont à mettre fin à un procès
qui dure depuis lougues années, et à statuer si une fam ille p lon gée dans la
m isère , privée depuis 60 ans et p lu s de la portion qu’elle am ende dans uit
bien co n séq u en t,p eu t enfin espérer de voir la fin des incidens que ses adver
saires , qui sont dans l ’op u len ce , 11e cessent d ’élever m algré un jugem ent
en dernier ressort, rendu depu is plus de 10 ans. L a
tierce op p osition
form ée par M agaud et sa fem m e contre ce ju gem en t, donne lie u à statuer
de nouveau sur les mêmes questions qui ont été décidées par ce jugem ent.
C e s tiers opposants seront - ils plus heureux que celu i qui les a précédé
dans l ’arène ! Parvieiuliont - ils à prouver d ’après les circonstances
particulières qui se rencontrent dans la c a u s e , et qui résultent des
actes p ublics passés en présence de toute la fam ille , les 2 i septem bre
1749 et 11 iu>vembre suivant , q u ’un absent est réputé vivre 100 a n s ,
et que
pendant cet
espace de te m p s , toute
action
est
inter
dite à ses héritiers de droits l Ltabliront-ils , en convenant qu ’une ins
titution d'héritier faite dans un contrat de mariage , en faveur d ’un noncontractant , est n u lle d'une n u llité absolue ; que cette n u llité a été couterte par une ratification pure et sim ple faite postérieurem ent dans son
contrat de mariage ? Seront-ils assez, heureux pour faire oublier les p rin ci
p e s , jusqu'au poin t de persuader qu’en A u verg n e les enfans des cultiva^
�teurs travaillan t hors la m aison paternelle ne p euvent pas faire des pro
fits qui leurs soient propres ; et qu’enfin , l ’action en partage dirigée con
tre un cohéritier possédant par indivis avec d ’a u tre s , les biens sujets au
partage, n ’interrom pt pas la prescription contre tous ? ils p eu ven t se flatter
d e réussir , mais qu’ils n ’invoquent pas au m oins P o th ie r , B rétonnier f
R ousseau-de-Lacom be, D u m ou lin , qui tous prononcent leu r propre condam
n a tio n , et disent tout le contraire de ce qu ’ils leu r ont fait dire : et Jean
Saby qui en suivant le genre de défense embrassée par son p è r e , a toujours,
soutenu qu ’il n ’y avait aucuns biens m eubles sujets au partage , co n vien
d ra -t-il au m oins aujourd’hui qu ’il doit y en avoir quelques-uns ? et aban-,
donnant les assertions de son p ère à l'égard des im m eubles, avouera - t-il,
q u ’il y en a p lus de d eu x , même plus de quatre sujets au partage ? S i
le s uns et le s autres continuent d ’esperer que la m isere dans la q u e lle
Bard est p lon gé ne lu i perm ettra pas de poursuivre jusqu’à jugem ent défini
t i f la réclam ation de ses droits , qu’ils se désabusent ; cet espoir fon d é;
sur l ’indélicatesse , sur la mauvaise f o i , sera déçu , et ils apprendront
qu e la détresse la plus absolue p eu t qu elquefois lutter contre l ’op u
lence.
A L L E Z A R
D ,
hom m e d E lo i à B r ioude
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P U Y , de l'imprimerie de C r e s p y et G u ilh a u m e , Imprime u r s
Libraires, rue du Collège.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bard, Pierre. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allezard
Croizier
Subject
The topic of the resource
communautés familiales
partage
absence
testaments
coutume d'Auvergne
droit romain
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Bard, cultivateur, habitant de la commune d'Agnat, demandeur et défendeur en tierce opposition, contre Jean Saby, fils à Pierre, défendeur, et Catherine Saby, et Jean Magaud, tous cultivateurs, habitans du lieu de Balistroux, commune de Champagnat, demandeurs en tierce opposition.
Annotation manuscrite: texte intégral du jugement du 10 floréal an 11, 2éme section.
Table Godemel : Absent : 1. de quel jour un absent est-il réputé mort respectivement à ses héritiers ? Institution d'héritier : 8. une institution d’héritier faite dans un contrat de mariage, en faveur d’un non-contractant est-elle valable ? la ratification pure et simple qui en est faite ensuite dans son contrat de mariage, pour énoncer la nullité dont était infectée la première disposition, ni l’intention de la réparer, peut-elle être considérée comme une disposition nouvelle et avoir quelque effet ? Prescription : 13. l’action en partage dirigée contre un des détenteurs des biens, possédant par indivis avec ses cohéritiers, interrompt-elle la prescription vis-à-vis ces derniers ? Profits : en Auvergne, les enfants de cultivateurs, travaillant hors la maison paternelle, peuvent-ils faire des profits qui leur soient propres ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l''Imprimerie de Crespy et Guilhaume (Puy)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1674-An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1529
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0247
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53269/BCU_Factums_G1529.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agnat (43001)
Champagnac-le-Vieux (43052)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
absence
communautés familiales
coutume d'Auvergne
droit Romain
partage
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53746/BCU_Factums_M0247.pdf
47adc67ff277359d0e73dce0f09f1482
PDF Text
Text
M
É
M
O
P
O
I
U
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R
P i e r r e B A R D , cultivateur , habitant
d ’A g n a t j
E
de l a com m une.
dem andeur et défendeur en tierce opposition } t
C
O
N
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S A B Y , fils a Pierre y défendeur,
Et C a t h e r i n e S A B Y y et J e a n M A G A U D
J
e a n
,
■ tous cultivateurs, habitans du lieu de B a listr o u x , com
mune de C h am pagnat , demandeurs en tierce opposition ,
.A .P R È S qu’une affaire, volumîneusement instruite, a eu reçu sa décision!
par un ju g e m e n t souverain et en dernier ressort ; après que l ’on a eu
é p u isé , dans le cours de l ’instruction, tous les moyens qu'un esprit
in g é n ie u x peut imaginer pour se maintenir dans un bien qui né lu i
appartient p a s, et au moment où une preuve était sur le point d’être
o r d o n n é e , où une expérience par expert devenait indispensable, où Bard
q u i r éclamait l'un et l ’autre depuis plus de trois an s, pressait, sollicitait
une audience pour les faire ordonner, de nouveaux athlètes se sont
présentés sur la scène t ils viennent proposer à la justice de prononcer
une seconde fois sur les questions que le premier adversaire de Bard
avait mis au jo u r, et de changer à leur égard un mode de partage qui a
é té ordonné contre leurs frère et beau-frère; ils font même p lu s, il a
poussent leurs prétentions jusqu’à soutenir que Bard n ’a aucun droit
contre eux. Seront-ils plus heureux que celui qui a déjà succombé
dans tous les in c id c n s qu’il a élevés ? c’est ce qu’on ne croit pas.
Jean S a b y , fils de Pierre , qui en suivant le genre de défense em ployé
par c e lu i-c i, a toujours soutenu que Pierre Saby et A ntoinette Lachaud
n ’avaient laisses aucuns biens m eubles, et qu’à l’égard des immeuble»
A
'
�il n ’en connaissait que quatre , même que deux qui leur eussent appar
tenus et qui fussent sujet?, au partage ordonné par le jugement rendu
contre son p è re , qui a toujours persisté dans ce système malgré la
justification qui lui a été faite de plus de quarante titres d'acquisition,
toup translatifs de propriété en faveuif de P ie rre . S a b y , ' de la succession
duquel il s’agit, persisterart-il toujours dans sa prétention ï E t aujourd’hui
que des témoins ont été entendus , que l ’application de tous les titres
produis par Bard a été faite, ne rçconnaîtra-t-il pas que c’est injustement
qu’il a toujours prétendu qu’il n ’y avait que ' quatre , même que deux
héritages sujets au partage ! O ji croit bien qu’il ne s’avouera pas vaincu,
mais oii a laicertitude que la justice lui en fera un devoir , et qu’elle le
forcera à reconnaître cjue celui qui retient injustement le bien d ’autrui
est) tôt ou tard, oblige de cesser d’en jouir.
■
F A I T S
E T
P R O C É D U R E
.
D u mariage d’André Saby avec Jeanne V id a l, issurent qua^e enfans ^
Catherine, A ntoinette, Marguerite et Pierre Saby.
Antoinette et Marguerite furent légitimées ; ni elles., ni leurs descen
dons , ne sont pour rien dans la contestation.
. . . . . .
Catherine Saby fut mariée deux fois ; en premier lie u , avec. Antoine
Saby., et en second lieu , avec Antoine Bruliat, et lors de ses deux contrats
de mariage, des 8 novembre i G74 et 2o aoiit 16 8 7 , ellg fut instituée
héritière , par son père , de tous les biens dont il mourrait saisi et vêtu ,
à la charge de payer à ses frère et sœurs des légitimes qui furent fixées.
Marguerite Bruliat, fille et héritière d’A ntoine et de Catherine Saby;,
se maria avec Jean Ma,gau,d , çt de ce mariage issurent deux enfans,
Antoine, et Gabrielle Magaud.
•
; L e premier se maria avec Catherine S a b y , fille de N o ë l, et Gabrielle
¿ppusli Pierre Saby, fils de ce dernier : c’est ce qui est prouvé par un seul
Contrat de mariage du 25 janvier 1744.
Antoine Magaud a laissé deux enfans, A nne et Marie ; la première a
¿pousé Jean D ègeorge, la seçonde François Mestrc ; et lui-même étant
décédé , Catherine Saby, sa vçuve, a cçmvolé en secondes noces avec.
Jean Magaud; ces deux derniers sont les tiers opposans.
Pierre Saby, fils d’André, et frère de Calheriiïc Saby , se maria avec'
Antoinetti; Lachaud , et lors de son contrat de mariage, qui est du 16
février 1G94, il s’associa avec Antoinç Bruliat, son beau-frère, en tous
et un chacun leurs biens , meubles et immeubles pn'scns et à venir,
avec convention qu’en cas de dissolution de leur société. , tous leurs lien s
seraient partagés entre eux par égalité.
Cet Antoine Bruliat survçquit plusieurs années à celle société, et
pendant tout ce temps les associés firent des profits assez considérables;
nuis étant décédé , Catherine Saby, sa veuve, héritière instituée dTYndré,
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.
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■Sâby , 'ttùT né 'p as pouvoir ïnfêiïx faire quê de s'aresôcië? éllë-Jrhêmfe' avec
l'ie ïre Soby y feon frère, et pdir acte public ctu 3 jà’n viër 1706-; ils 'ihirêrlt
ën communaut é ünivérseile tous- leurs biens meublés et immeubles 'préSëns
gt à ven ir, uveb éó'nvèfitìóti expieés'e 'Çà’éri cas de partage, ’tous làùi^s '
biens acquêts et conquets seraient partagés par moitié et égale, portion. \
- Suivons' l â ’géiVéaldgië de "Pierre7 Saby et d’Antôiiiette L àch'àud;' ils
üohAère’n t le jour à trois erifans nótìiift'és Nô'ël , André è't Catherine Sâbÿ.
L ors dû contrat dò mariage de celle-ci avec Etienne RôuX', du; 8 jànviéV
^7 19» elle fut constituée par son p è re , à’ ùnë s'onimè de trois cénts
fran cs, ét N o ci Saby qui n’éiait point partie contractante, fu t institué
héritier général ut universel- die fottà’ les biens doni sôxl pèrè mbürrâït
saisi
• Q uelque 'temps après , et'l'é 1 " . février 172 5 , N o ë l Saby pïssà son
tontrat de màriaigè' avec Marie Curabet, et Pierre Saby , son père ,, y
paraissant, a}>pràüva ét ratifia l’institution d’héritier qu’il avait f^'ae Cji
sa fa v e u r , dans le contrat dé mariage dé Catherine Sabir ¿t de Pierre
■Houft, et consentit qu’elle sortit son p lein et entier effet. . ■
- André Saby së iriaria avec Marie Héritier ^
lors de , leur contrat
de mariage, du a'i février 17 3ÿ , _i l . ^ _CQ’TisfUûa lui-même ïrne' somme
ûe trois-cerit cinquante francs qu’il àVait par devers lui," et N o ël' § a b y .
son frère s’obligea de lui payer celle de deux cents francs pour ses droits
légitimaires dans lés biens'de ses pèrè ét mère.
1
• D e ce mariage issut Antoinette Saby, mère" du demandeur » laquelle sé
'maria avec André Bard.
.
.
, . .
- O n voit dans leur contrat de m ariage,, du^ 2 i. septembre 1749 ,. que
Marié H éritier, y prit e n ’ présence de toute sa fam ille, et notamment de
N o ë l Saby, son bèaü-frère, la' qualité de veuve d’André S a b y ç é .q u l
était un preuve cjiie celu i-ci, qui s’était absente depuis plusieurs années,
¿tait alors décédé ou qu’au moins toute la famille le croyait ainsi.
, .\'r
■ N oël Saby eut de son mariage, avec Marie C urabet, deux ,e n fa n s>
Catherine et P ierre, qui comme 011 l ’a déjà dit en parlant d e là <;lpscenr
darice de Catherine Saby, épousèrent Antoine et Guillaume Magaud. , , '
L eur contrat’de mariage du 2 4 janvier' 17 4 4 , prouve, que les quatre
parties contractantes furënt instituées héritières générales et .universelles
de tous les biéns dont leurs père et mère mourraient saisis et, vêtus.
E nfin, Piérre Saby, second du nom, a laissé _plusieurs enfans, mais
Jean Saby , son fils aîné et son héritier institué, est en possession de tous
ses biens, et lui seul est défendeûr dans la c a u s e ..............
.
1
‘ L e 20 rniars 178 6, Pierre Bard , forma contre Pierre Saby fils de
N o ël , la demande en partage dé tous les biens meubles, et immeubles
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , demande qui fut ad
jugée par sentence rendue en la ci-devant justice de la Motte , le 10'
juillet ‘ suivant;
'
A 2
�Cette sentence Rit attaquée par la voie de l'opposition presque aussi-«'
tôt qu’elle fut signifiée ; l ’affaire fut ensuite appointée en droit ; mais
par une autre sentence du 6 avril 1787 , Pierre Saby fut débouté de son
opposition, et il fut ordonné que la première sentence serait exécutée'
suivant sa forme et teneur.
C e dernier se pourvut bientôt après par appel contre ces deux sen
tences. L a sénéchaussée d’Auvergne connut de cet appel , et le 11 dé»
cembre de Ja même année , elle confirma ces deux sentences.
Il restait encore une autre dégré de juridiction à suivre : Pierre
Saby ne manqua pas d’y avoir recours , et par exploit du 28 du même
mois de décembre 1787 , l ’affaire fut portée au ci-devant Parlement de
Paris.
L ’état de détresse de Bard ne lui permit pas de poursuivre l ’arrêt
qui devait mettre fin à toutes les chicanes de Saby ; il était dans l'im
puissance absolue de • pouvoir fournir aux dépenses que nécessitait ce
procès , niais heureusement pour lui les choses ayant changées de face ,
de nouveaux tribunaux ayant été substitués aux anciens ; la justice ayant
été rapprochée des justiciables , l ’affaire fut portée, du consentement ex
près des parties , au ci-devant tribunal du district de Brioude.
,
L à , des volumes d’écritures furent faits de part et d’autre ; l à , Pierre
Saby eut recours à tous les moyens qu’un esprit ingénieux peut ima
giner pour combattre des réclamations justes , et parmi toutes les dif
ficultés qu’il éleva , on remarque qu’il donna lieu .à traiter trois ques
tions principales qui étaient de savoir , i.° si l ’institution d'héritier
faite dans le contrat de mariage de Catherine Saby., en faveur de N oël
Saby son frère non contractant , du 8 janvier 17J9, était valable , ou au
moins si elle n'avait pas été validée par la ratification portée dans son
propre contrat de mariage de 1725 ; 2.° si un absent n ’est pas réputé
vivre cent ans respectivement à ses héritiers ; 3 .° si en Auvergne lesr
enfans des cultivateurs , travaillant hors la maison paternelle , peu
vent faire des profits qui leurs soient propres , ek si la somme de trois
cent cinquante francs qu'André Saby s’était constituée en dot dans son
contrat de mariage de 1787 , n’était pas sujette à rapport !
Ces trois questions furent jugées contre la (prétention de Pierre S a b y ,
par jugement souverain et en dernier ressort du 3o août 1792 , qui en
confirmant toutes les sentences sus-datées , ordonna que tous les biens
provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud seraient partagés par
égalité entre Pierre Saby et Pierre liard.
Celui-ci provoqua alors une nominaUon d’experts; Saby déclara qu’il youlait se pourvoir en cassation contre ce jugement , qu'au surplus il n»
■connaissait que quatre parties de terrein sujettes au partage , et q u ’il
consentait , sans préjudice de scs droits , que le partage en fut lait.
C ’est ce q u e l’on voit dans un procès-verbal du 2o octobre
�D es experts furent nômmcs , mais gagnés sans cloute par Saby , i l s
furent sourds à toutes les assignations qui leur furent données pour
opérer. U n premier jugement du 3o septembre 1793 , révoqua l ’expert
de Saby et en nomma un autre pour lui.
■
; Celui-ci fut également sourd à toutes; les diligences que put faire
Bard , et un nouveau jugement du 2 i messidor an I I , porte que tous
les premiers experts ont été valablement récusés par Bard, et que les
nouveaux qui seront nommés par les parties , seront tenus d’opérer
dans le mois.
_ Ces nouveaux experts nommés contradictoirem ent, tardèrent assez
long-temps à s’occuper des opérations qui leur étaient confiées, car ce ne
fu t que le 6 Messidor an I I I , qu’ils se transportèrent au lieu de.
Balistrour,
.
t
. ^ à , ils trouvèrent Pierre Saby, qui ne se rappelant plus de ce que la
mauvaise foi lui avait dicté lors du procès-verbal du 2o octobre 179 2 ,’
déclara qu’il n’y avait cjue deux héritages sujets au partage ; il eut même
la bonté de les leur designer, et comme de cette désignation il résulte
q u ’il n ’y a qu’un de ces deux héritages qui puisse s’identifier avec un
des quatre qu’il avait indiqué lors du procès-yerbal de 17 9 2 , il en.
résulte, qu’il y aurait au moins, cinq héritages sujets au partage.
C e s experts dressèrent procès-verbal des dires respesctifs des parties;
ils eurent même la complaisance d’y insérer des dires qui furent fait*'
par Jean M agaud, mari de Catherine Saby , et ils terminèrent par
renvoyer les parties -devant qui de droit pour faire fixer les bien*
sujets au partage.
Obligé de plaider encore avec Saby, >Bard le fit assigner au tribunal
civil du Puy,_et après que l ’affaire eut été reprise contre Jean Saby, son
fils., il intervint en ce tribunal un jugem ent, le G fructidor an V , par
lequel il fut juge en these que celui qui reclame un partage, doit
designer nommement les biens meubles et immeubles qui peuvent y être
sujets, et que celui contre qui la demande est formée n’était obligé à rien ,
quoiqu il eut toujours . demeure dans la maison des auteurs communs ,
quoiqu il fut présume nanti de tous les titres constitutifs des propriétés
des auteurs communs, quoiqu’il dut avoir par devers lui ou qu’au moins
il lui fut facile de se procurer les titre» des acquisitions qu'il pouvait
avoir faites
' ,
Quelque rigoureux que fut ce jugement contre Bard , il ne lui
restait aucun moyen pour revenir contre ; il ¿lait en dernier ressort
quoiqu’il ne dut pas l'&t;re, et son état de détresse ne lu i permettait
pas d’avoir recours à la cassation.
.Par un premier exploit, du 21 brumaire an V I , Bard motiva et
circonssUmcia la preuye . qu’il voulait faire de la consistance des bien*
meubles et irmneublcs provenus de__ Pierre Saby et d'Antoine lie Lachaud
�X
v
j
e î le i 3 fructidor suivant, son défenseur apréë aVoir diffé ;é fVTS'qifeslà,
de présenter sa cause , obtint contre Saby un jugement par défaut, q u i,
au iteu d’ordonner la-preuve qui était réclarhée, et à laquelle Bard s’Ctâit
soumis , lui permit de compulser les minutes de quelques notaires. • J
D o cile aux ordres que lu i donnai son ■
défenseur, Bard éru-t Entrevoir
dans ce jugement un .m oyénpour parvenir ty'lus facilem ent à un jugemCiit
définitif ; il ne fit pas attention que sa preuve vocale dépérissait, et qü’à
chaque jour il perdait quelqu’un de ses tém oins; il se livra à la recherché
de plusieurs actes; il parvint à en découvrir quarante, qui tous'Constatent
différentes acquisitions faites par André 8aby , ou par pierre i?aby,
*011 fils, ou par A ntoine Bruhat et Catherine Saby, associés de ce dernier.
Tous ces actes furent; signifiés à' Jeàil Saby , avec nouvelle assigna
tion , pour voir ordonner la preuve à laquelle Bard s’était soumis ^dirô
que de nouveaux experts feraient l ’application de tous ces titres , et
être condamné à payer une -provision de six mille francs.
Comm e si 8on defenseur eut été fêché de le voir admettre à cette
preuve , il se borna, à. réclamer une provision , et par jugement du 4
fructidor an VII , rendu encore par défaut contre Jean Saby , il fut ac
corde à Bard une modique somme de trois centfe francs : on dit medi*
que , parce, quîelle n e lui’ a pas suffit , n i à ‘ beaucoup jbrès , poufc
faire face aux dépenses que lui a occasionné la recherche des actes
q u ’il s’est procuré.
:
. ■
Cette provision parut cependant trop considérable à Jean 8abyV
il forma opposition.à.ce jugement ; et par un autre du 6 germinal an V I I I ,
il parvint à faire réduire cette provision à la somme de deux cents- francs*
C ’est dans ce jugement que l’on v o it jusqu’à quel point le défen
seur de Bard a compromis ses intérêts ; non seulement il ne fit
pas; ordonner la preuve à laquelle Bard
s’etaib soumis depuis le 2 i
brumaire an V f ; non seulement il ne dit pas: un mot) pour l ’obtenir;
non seulement il n’argumenta pas des quarante titres de propriété que
Bard lui avait remis pour soutenir que la provision accordée n'appro
chait môme pas do celle qui aurait dû; l ’étro , mais même il negli*
gea de faire prononcer sur des conclusions qui avaient été prises par
exploit du y brumaire an VIII , et qui avaient pour objet de faire déclaJ
rer Jean M agaud, Catherine Saby sa. femme , Krançois Mcstre e t ’ Marid
Magaud sa fem m e,non recevables dans l’opposition qu’ils avaient formée ait
jugement rendu contre Jean Saby , attendu q u e c e jugement n ’était point
rendu contre eu*; q u ’ils n’avaient jamais été en instance avec B ard; et que
dès lors leur opposition était insoutenable, ( i)
Q uoiqu'il en soit; l'affaire a été portée au tribtinal de Brioude ; Bard
( 0 Ce détail po u r ra p a r a î t r e f a s t i d i e u x , m n i i il a p a r u e s se n tie l p o u r i l c i n û n t r i r , d ' u n e p a r t j
t o u s les inciilcn^ (juc l 'a d v e r s a i re de Bard lui a fa it é p r o u v e r , e t «le l 'a u t r e j u s q u ’à qu el p o i n t
« et d r o its o n t etc c o m p r o m i t p r r lo-son fian cc
a en en so n 'd cfc iiscu r.
�• / ,
- 7r 1 a insisté pour, être admis à la preuve de la consistance du mobilier *
,
provenu dè Pierre Saby et d’Antoinette Lachaud , des titres de créance
qui existaient et qui faisaient partie de leur su ccessio n , et à ce que
lés conclusions qu’il avait prises depuis l ’an V I , lui fassent adjugées.
^D ’üÀ àutre côté et par
exploit du i . er nivôse an I X , Bard après
avoir épuisé les voies de la conciliation , avait fait assigner Catherine
Saby et Jean MâgaudJ son m a r i A n n e Magaud et Jean D egeorge
son m a ri, Marie Magaud et français Mestre son m ari, pour voir
déclarer exécutoire" contre eux les sentences et jugemens rendus contre
Pierre Saby, tout ainsi et de même qu’ils l’étaient contre ce dernier.
C e ' n’a 'été qu’alors et .par exploit du 11 du même m o is, que
CatherineSabÿ/et Jean,Magaud son mari, seulement, ont attaqué p arla voie
d£ la tierce opposition ces mêmes sentences et jugem ent, pour d’une part
empêcher’ ' l'admission à la preuve à laquelle Bard s’était soumis contre
Jean Saby n et de l ’autre pour reproduire et faire juger de nouveau
toutes les questions que-Pierre Saby avait mis au jour dans le cours de
la constestation,
' Jean Saby, fils de ce d ern ier, invoquant cette tierce opposition , s’est
opposé1 -de toutes ses forces à la preuve offerte et réclamée par Bard r
mais tous ses efforts ont été vains ; son espoir à été déçu et il a vu
adjuger contre lui , par un jugement très - contradictoire du 2 i nivôse ,
an I X , toutes les conclusions qui avaient été prises.
'
Des témoins, ont été produits de part et d’au tre, ils ont été enten
des,,; des experts ont été . nommas, ils ont opéré; des- expéditions
authentiques prouvent l ’un et l ’autre.
T e l est l ’état actuel de l ’affaire. Après en avoir présenté les fa its;
après avoir remis sous lt s yeux d e - la justice une partie des incidens
que Bard a éprouvé depuis l ’époque de sa demande , il est facile de v o ir:
qu’il doit aujourd’hui repousser la tierce opposition formée par Cathe
rine Saby et- Jean Magaud ; démontrer en même temps que ses pré
tentions , sont justes et légitimes ; et prouver que des dépositions des
témoins, du rapport, des experts et des titres produits, il en résulté te
preuve la plus convaincante , en sa faveur.r
V É R I T É S
I N<C 0 N T E S T A B L E S.
L e s biens qui doivent composer la succession de Pierre Saby sont
la moitié de ceux qu’il avait lui-mêine acquis , de ceux acquis par
A.ntoine Bruhat et par Catherine S a b y, et enfin la moitié de tous
les biens provenus d’André Saby et de'Jeanne V id a l, ses père et mère.
C e la résulte positivement des actçs de sociétés générales faites en-'
lie l u i , 'Antoine Bruhat et Catherine Saby, les iG février if,q/. et
3 janvier 1706 , par lesquelles ils mirent en commun tous Leurs biens
�§-
•
•
' - (
5
ptésens et à venir avec convention expresse qu'en cas de dissolution
'> ç de so ciété, ils seraient tous partagés par égale portion.
Dans tous ceà biens , Pierre Bard amende un quart avec restitu' £ tion de jouissance ei intérêts dp la valeur du mobilier depuis 1788,.
"i? > époque, du décès de Pierre Saby premier du nom.
v.
C'est ce qui résulte du jugement souverain et en dernier ressort du
a °Û t
17 i)2 *
1
■
'
;
II est vrai que ce jugement est attaqué par la voie de la tierce
^ opposition de la part de Catherine Saby et de. Jean M agaud, mai»
^ les droits de Bard sont irrévocablement acquis contre Jean Saby
ÎC Î"G.finent dont on vient de parler. L a tierce opposition de
Catherine Saby et Jean Magaud ne peut rien changer à son égard ,
^ •quoiqu’on soit le résultat; parce que dans taua les cas , le jugement
^ Jv^rçndu doit toujours, être exécuté contre luî. ^
C ’est ce qui résulte des principes les plus certains, les plus i'nscon-.
~ ïstestables sur la matière des tierces oppositions; principes consacrés
T^l^d’une manière bien solennelle par deux jugemens rendüs au tribunal
V* fc de cassation les 26 germinal an V I et i 5 pluviôse an I X 'r a p p o r t é s—
d&ns le bu'Ilêtin des'jâ^omens de ce tribunal Is10. 2.~
, R s P a s s o n s ~ 'â c tu e lie m e n t à la discussion des questions Teproduites p a rle s
tiers opposans.
.
*'J
^ £
^
-
P R E M I È R E
De
quel jour un
.
Q U E S T I O N .
absent est-il réputé mort respectivement à ses
.
héritiers ?
I ».
Il n’y a rien de problématique , rien qui mérite une discussion séY ^ rieuse dans cette question. Presque tous les jurisconsultes anciens et mo
dernes assurent qu’un absent est réputé mort respectivement à ses
.> héritiers , du jour de son départ ou de celui des dernières nouvel„^
les qu’on a eues de lui. Il n ’y a qu’une envie de plaider , une intenJs ^ tion de se maintenir injustement dans un bien, qui. puissent aujourd'hui
faire soutenir le contraire.
.^ 5 Cette doctrine est consacrée d’un manière bien précise dans les arrê^ *h lés de M. le président de Lam oignon, où l’on lit : L ’absent est répu
té mort du jour qu'il n’a pas paru ou de la dernière nouvelle qu'on
~
a reçue de lui.
/v
Cette décision, dit un auteur plus moderne ( Bretonnîer page i 5 du
$ ' premier volume ) , est dans les règles , parce que l ’absent dont on n’a
point de nouvelles , est réputé mort par fiction, et que les fictions ont
$ tou jou rs un elfct rétroactif.
^
E n vain objecterait-on qu'un absentes! présumé vivre 100 ans, et que rc&ç pectivement à scs créanciers il n ’est réputé moi t qu’après cet espace de
temps, qu’ainsi il doit eu étie de même relativement à scs héritiers.
h*
�'
■ C- 9 . )
L a première partie de cette objection, est fausse et absurde, la
f seconde ne rcyjose que sur U n e erréur.
Toute présomption doit être fondée sur quelque vraisemblance èt
sur ce qui arrive le plus souvent, l ’ rœsumptio ex co quod plerumque
:f:t. 11 faudrait pour qu’un absent put être présumé vivre cent ans,
que ce fut le temps ordinaire de la vie des hommes ; et certes , l'ex
périence prouve bien le contraire.
•
L es lois 5 G, au d igeste, D e usuf. et qvemad. , et 8 D e usuf. leg; ,
invoquées par Saby et Magaud ne disent pas qu’un homme est présumé
vivre cent ans , mais seulement qu’il est présumé ne pas vivre au delà
de cent a n s, ce qui est bien d ifféren t, Placuit centinn annos tuendos esse
municipes , quia is finis vit.ee longuœvi hominis est. Jusqu’à ce que le temps
, de cent ans se soit écoulé depuis la naissance d’un absen t, il n’est ni
présumé vivre , ni présumé m oi.t, et c’est à ceux qui ont intérêt qu’il
soit vivant, à prouver sa vie. Pothier > sur le ckap. ly de la coutume
d ’Orléans.
.
, C et auteur , ni Brétonnier , dont nous avons déjà rapporté les propres
expressions , ne disent pas ce que Magaud et sa femme leur font d ir e ,
ou plutôt ils disent tout le contraire.
Voici les propres expressions de Polluer , traité des successions,
cliap. 3 . sect. i . ere §. i .er i « c’est une question difficile à décider, de
» quand doit être présumée ouverte la succession d’une personne dont
» on ne sait ni la vie , ni la mort. L ’opinion la plus probable est de
» réputer sa succession ouverte du jour des dernières nouvelles qu'on a
» eues de lui ; ce n ’est pas qu’il y ait lieu de le présumer mort dès
» ce temps plutôt que dans un autre , mais c’est que n’y ayant aucune
» raison d’assigner sa mort à un temps plutôt qu’à un autre, et étant
» néanmoins nécessaire de fixer le temps de l’ouverture de sa succes» sion , on n e peut mieux le fixer qu’au temps où on a cessé d’avoir
» des nouvelles de lu i; parce que s’il n ’est pas effectivement mort
^ dès ce temps , il 1 est au moins cquipollem ent par rapport à la
société des hommes ; car par rapport à la société , c’est à peu prè.»
» la même chose qu’un homme n ’existe pas , ou qu’on n ’ait aucune
» connaissance de son existence. »
, Q ue Magaud et sa femme qui ont cru en imposer en citant l'o p i
nion de ce jurisconsulte , pèsent actuellement ses expressions qu’ils n ’a
vaient sans doute pas lues ; qu’ils conviennent que c’est sans réflexion
qu’ils l’ont invoqué , et qu’il en est de même à l ’égard de Brétonnier
et Rousseau - de - Lacombe.
Celui qui s’est perdu , dit ce dernier , est réputé mort du jour qu’il
a disparu ; c’est la règle en succession. Même dans tous les cas si ceux
qui ont intérêt ne justifient que l ’absent est vivant.
S ’il est vrai que quelques arrêts puissent être invoqués à l ’appui de
B
�(
10
)'
'
la seconde partie de l ’objection , il est aussi certain qu’il y en a de
contraires , et que l ’arrêt de T iellem ent qui a été tant invoqué par Saby,
perd de son autorité quand on le rapproche de celui i 683 , rapporté
par H e n ri, tom. 2. page 890; de celui du 11 août 1 7 1 9 , rapporté au
journal des audiences ; et que cet arrêt de Tiellem ent q u i, comme le
dit P o th ier, n'est fon d é apparemment que sur cette vieille erreur , qu’un
homme est présumé vivre cent ans , ne doit pas être suivi.
T ous les anciens tribunaux paraissaient avoir embrassé cette opinion.
Ils l ’avaient consacrée par différents airèts. O n en trouve la preuve dans
les questions de droit de Brétonnier , où il est d it , qu’on ne doit pas
douter que cette jurisprudence n& soit la meilleure.
Monvallon dans son traité des successions , après avoir embrassé cette
même opinion, en rapporte à l ’appui un arrêt rendu à son rapport, le
: 21 mai 1 7 5 1 , par lequel il fut jugé que l ’hoirie de l!absent avait du
appartenir au parent le plus proche lors de l ’absence ou de la dernière
nouvelle , et avait passé aux héritiers de ce parent. A in si il ne peut pas
y avoir de doute sur la vérité du système que l’on soutient.
Mai3 pourquoi invoquer des autorités à l ’appui d’une opinion qui paraît
incontestable ? l\e suffirait-il pas , si elle pouvait être combattue avec
su ccès, de s’appuyer sur un fait particulier qui se rencontre dans l’a ffa ire ,
pour démontrer que quelques efforts que fassent les adversaires de Bard,
pour soutenir un système contraire, ils ne pourront jamais parvenir à
le faire adopter ] N e suffirait-il pas de dire que Marie Héritier ayant
pris "dans le contrat de mariage de Catherine S a b y , sa fille , du 2t
septembre 1749 , la qualité de veuve d'André Saby , en présence de
toute sa fam ille , et notamment de N oël Sa b y, père et beau-père des tiers
opposans ; qu’ayant repris cette même qualité de veuve d ’André Saby,
dans une quittance donnée au même Noël Saby', le 11 novembre de la
même année, les nouveaux adversaires de Bard qui représentent ce
N oël S a b y, a titre d ’héritiers universels, ne peuvent pas désavouer,
contester ce qui a été reconnu par lui en 1749? C e seul fa it, celte seule
circonstance, ne seraient-ils pas sulfisans pour persuader qu’au moin*
en 1 74 i).i André Saby était décédé; que toute la famille en était convain
cue , et par conséquent pour faire rejeter, proscrire tous les efforts, tous
les raisonnemens que pourraient faire Magarnl et sa femme.
Term inons celte discussion, et disons que dès qu’il est établi en point
de droit qu’un absent est réputé mort du jour de son départ ou des
dernières nouvelles qu’on a eues de lui ; dès que le fait particulier qui se
rencontre dans la ca u se, et qui résulte du runtrat.de mariage et do la
■quittance de 1741) , dans lesquels Marie 1lérilier p rit la qualité de veuve
d ’Andrc. Saby, vient d’ailleurs à l ’appui de celle vérité; dès qu’il (;5t
-ptouv«-' dan? lc procès que l ’action de Bard était'en tière en 17 8 6 , paf
�lc jn o y e n des minorités qui se sont perpétuées clar*s sa famille, ( i ) ; il en
risriiiLe' que c’est sans fondement qne ses adversaires ont donné lieu à
celte discussion.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
Une institution d'hcr Hier fa ite dans un contrat de mariage, en faveur ,
d’un non-coîitractant, est-elle valable /
Cette question est décidée par le texte précis de la loi- m unicipale
ne permet
les institutions d ’héritier qu’en faveur des mariés ou de leurs descendans
seulement; elles ne peuvent jamais ê tre,fa ites en faveur de ceux qui
ne contractent pas mariage ; ain si, un père qui marie un de ses c n fa n S '
et l ’institue son héritier avec un autre qui ne se marie p a s, fait un acte-'
inutile et nul à l ’égard de celui - ci , s’il ne charge le premier de
l'associer à l’effet de l’institution] parce que disent les jurisconsultes, l&
premier ca r a c tè r e d’une institution d'héritier, est qu’elle soit fa ite en.
faveur des mariés ou de leurs descendans : c’est d’ailleurs ce qui résulte
des dispositions de l’art. 26 du tit. 14 de cette coutume.
Cette nullité dont était infectée l ’institution d’héritier faite par Pierre
Saby , en faveur de N o el Saby , son fils , dans le contrat de mariage de Ca
therine Saby avec Étienne Ilo u x, du 8 janvier 1719 , était une nullité abso
lue qui ne pouvait jamais être mise à couvert que par une nouvelle dispo
sition qui eut tous les caractères distincts et nécessaires pour transmettre
la propriété d’un bien ; elle n ’attribuait par elle-même aucuns droits à
N o e l Saby; il n’était saisi de rien par cette disposition; elle était abso
lument nulle à son égard; elle ne pouvait jamais être validée, quod
nullum est nullo modo convalescere potest.
Mais disent les adversaires de B a rd , en supposant que cette institu
tion d’héritier fut n u lle , cette nullité a été couverte par la ratification
faite par Pierre Saby, en faveur de N o ël Saby , lors de son contrat de
mariage, du 1." février 172&: cette objection nous porte à examiner la
question suivante.
qui ré "it les parties. L a coutume de la ci-devant Auvergne
T R O I S I È M E
Q U E S T I O N
Une ratification pure et simple d'une disposition nulle dans son principe y
d ’une nullité absolue, peut-elle produira quelque effet ! A
« L a nature de la ratification n ’est pas d’introduire un droit nouveau ‘
C O P i e r r e S a b y , de e/y a», es t décédé le î i o c to b r e 173S» cil c a l c u l a n t d e p u i s c e tte é p o q u e u u o u ' u .
c i s e p t e m b re 17^9 , d ate du c o n t r a t de m a r i a g e d’A n t o i n n c t t e S a b y av ec A n d r é B a rd , 011 n e t r o u v e nnio n z e a n s m o in s un m o is ; a u m o i n s a e s tte é p o q u e , 1e co u rs de la p r e s c r i p t i o n a été s u s p e n d u e h w i n
«S j a n v i e r 1781 i car A n t o i n e t t e i a b v , n w le s S f é v r i e r i 7 m , « t a i t e n c o r e m i n e u r e à l 'é p o q u e de “ o a
•lé c è s, a r riv é le 9 octflhre 1760 , et P ie r re B a rd s o n f i l s , ne le « j a n v i e r 17^ , n 'a été n r l i u r a u c le
i ç ja n v i e r 1781 ; a insi à 1 é p o q u e de la d e m a n d e d u 20 m a r i 1 7 *6 , 1 a c t i o n é t a i t e n t i è r e - a in s i le m o v e a
de p r e s c r i p t i o n d i s p a r a î t sa n s i c t o u ï . .
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/ / / _ * / *
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A
ju y /o-
ohut'
H' 1
^
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12
)
'dit un auteur moderne ; de donner un nouveau titre , de faire une
nouvelle disposition ; mais au contraire d’approuver un droit an cien , de
fortifier un titre précédent, d’affermir les premières dispositions et
d’en assurer l ’exécution. »
Toute ratification suppose un droit existant, un droit acquis; elle a
un rapport et une liaison immédiate avec le titre primordial. Ratificatio
ad hoc tantum Jîngitur ut quasi continuations duorum actuum contractus
validetur. E lle ne peut dans les règles ordinaires ni l ’étendre , ni
l ’.augmenter.
L ’esprit de celui qui confirm e, n ’est pas de faire une nouvelle dispo
sition, mais d’approuver celle qu’il avait déjà faite, qui confirmât, nihil
dat. T oute ratification, toute confirmation simple , renferme toujours
cette condition tacite , que le titre originaire soit valable , ou qu’au moins
il attribue quelque droit : aussi M. Charles Dumoulin après avoir dit que
la ratification qui est faite d’un acte nul , avec connaissance de la nullité
qu’il renferme et l ’intention île la réparer, valide cet acte, s’exprime-t-il
ainsi : seats in confirmationibus quœ jieren t sine causez cogn'dione , sivb
in forma communi ; ratio, quia hujus modi confirmatio nihil d a t, nihil
novi juris confert , nec invalidum validat. Non enim f i t ad finem dispon en d i, sed solum ad finem approbandi confirmabile, tale quale est , et
in quantum est verum , validum et efficax si taie est et non aliter ;
ainsi si le. titre est nul dans le principe , d’une nullité absolue ; s’il
n’attribue aucun droit ; si celui qui a disposé, n’est point lié à l’égard
de celui en faveur de qui la disposition est faite; si celui-ci enfin, ne peut
invoquer cette première disposition, ni en tirer aucun avantage, la
ratification la plus précise , la plus formelle , ne peut opérer l ’effet de
la valider, si elle n'énonce sa nullité elle-m êm e, avec l ’intention de la
réparer. Quod nullum est ipso ju r e , perperàm et inutiliter confirmatur.
T els sont les vrais principes qui s’élèvent contre la prétention des
nouveaux adversaires de Bard; principes qui ont été reconnus et confirmés
par le jugement rendu en dernier ressort, le 3o août 1792.
Mais dira-t-on encore , comme Saby l ’a répété plusieurs fo is , la rati
fication équivaut ù une nouvelle disposition ; elle est elle - mémo une
nouvelle disposition, et d’ailleurs la première disposition n’était nulle
que d ’une nullité relative.
C e sera toujours en vain qu’on voudra donner le change sur la ratifi
cation faite en 1t 2 S, de l’institution d’héritier portée dans le contrat de
mariage de Calheiiue Saby, du 3 janvier 1719 , en faveur de N oël Saby,
son frère, non contractant ; on rappèlera toujours les adversaires de Bard
au* termes que ni.ferm ent ces deux acies.
Par <clu i de
i îurre Saby niotituç Notil Saby, son fils, nonconl.ractant , «un ! ' u îu t gén.'îul et universel; celle disposition était:
ïiulle et illejv l e ,
pouvait produire aucun eilet ; elle n ’attribuait a
»
»
»
y
�,V 3
)'
,
.
ce d ern ierJ
, aucuns droits ni presens ni futurs , dans les biens du
premier ; parce que le premier caractère de l’institution d'héritier , est,
on le re p è te , qu’elle soit fa ite en faveur des mariés ou de leurs
descendons.
L a nullité dont était infectée cette disposition, était une nullité
absolue qui n’a jamais pu être couverte par une ratification quelqu’expresse , quelque précise qu’elle ait été , parce que quod nullum,
est ipso jure , perperùm et inutiliter confirmatur.
'
L ’acte de 1725 ne contient point une nouvelle disposition, la rati
fication est pvire et simple , elle n’énonce point la nullité dont était
infectée la première disposition, ni l ’intention de la réparer. Il y est dit
seulement que Pierre Saby approuve et ratifie l ’institution d’héritier
faite en faveur de N o ël Saby son fils , dans le contrat de mariage de
Catherine Saby , du 8 janvier 1719 , et consent qu’elle sorte son plein
et entier effet.
Cette ratification ne contient donc point une nouvelle disposition;
L a première disposition est ratifiée et confirmée , elle doit sortir son
plein et entier effet. Mais si par elle-m êm e elle ne pouvait avoir au
cun effet ; si elle ne liait point celui qui l ’avait faite ; si celui en fa
veur de qui elle avait été faite ne pouvait pas l’invoquer , il faut
dire affirmativement , que la ratification , la confirmation ne peut pas
l ’avoir validée ; parce que l ’esprit de celui qui confirme n ’est pas de
faire une nouvelle disposition , d’attribuer un droit nouveau , mais com
me l’a clairement exprimé Pierre Saby lui-même , d’approuver seulement
la première disposition qu’il avait faite : qui confirmât, nildl dat.
E n vain dirait-on que le vice de la première institution a été cou
vert par la ratification ; cela serait vrai si la première institution n’ a
vait cté infectée que d’une nullité relative ; mais étant frappée d'une nul
lité absolue , l’objection ne peut avoir aucune force.
O n distingue en- droit deux sortes de nullités , les unes absolues qui
sont de droit public , et que plusieurs auteurs ont appelé nullités p o
pulaires , parce qu’elles appartiennent au public et aux membres de
l ’Élat qui ont intérêts -de les proposer ; les autres relatives , parce
qu’elles ne concernent que ceux au profit de qui elles sont établies ;
qu’elles dépendent absolument de leur volonté particulière , et qu’ils
peuvent y renoncer soit expressément , soit tacitement.
A insi 11ue vente faite par un mineur qui n’est nulle que relativement
à lui-même , peut être ratifiée par lui , lorsqu’il a atteint sa majorité ,
ou par le laps de dix ans , s’il n’a pas réclamé pendant ce tem ps,
après sa majorité.
_
A in si une vente des biens d’une femme faite prndant son mariage
n'.est mille que d’une nullité relative , et la femme devenue veuve v e u t
par une ratification expresse la confirmer.
.
�.
.
<■ ^
y
.
.
I,c mineur -devenu majeur et la lemn\e veuve sont alors, libre? , vnaî-,
1res de leurs dioits ; iis peuvent valider ce qu’ils ont fuit en m inunlé.
ou eu puissance de mari , et qui ne se trouve nul qu’à cause de ces
circonstances , et la seuie différence qu’il y ait entre leur ratification,
est que ceilç faite par ie mineur, a toujours un effet rétroactif au pre
mier acte , tandis que celle faite par la femme ne l ’a pas , et que
celui qui a traité avec elle en puissance d,e m ari, n’a de titre valabiej
que du jour de la ratification.
'
. Ces actes faits par le mineur ou par la femme en puissance du mari,,
ne sont nuls que d’une nullité relative ; nul autre, qu’eux-mêmes ne
peut s’en plaindre; eu*c seuls peuvent les attaquer, revenir contre , ou
les approuver, les confirmer.
. Mais il n ’en est pas de même d’un acte qui est nul d ’une nullité
absolue qui intéresse des tiers , et que des tiers peuvent faire valoir.
A in s i, par exem p le, un testament fait en pays de droit écrit, qui
pécherait par le défaut d’institution en faveur de ceux qui ont droit de
légitim e; une donation qui pécherait par le défaut d ’acceptation de la*part du donataire ; une donation qui pécherait par le défaut de tradition
de la part du donateur , ou dans laquelle celui-ci se serait réservé la liberté
¿ ’hypothéquer les biens donnés ; une donation qui ne serait pas faite,
en contrat de m ariage, et qui aurait pour objet les biens présens et à
venir du donateur; une donation, enfin, qui aurait été révoquée par
survenance d’enfans; de pareilles dispositions, disons-nous, seraient en
vain ratifiées, et quelques précises, quelques fo rm elles, quelques écla
tantes que fussent les ratifications, elles ne peuirrraient pas produirere fle t de les valider, parce que ces actes étant nuls d’une nullité absolue,
ne pourraient jamais être confirmés valablement. Quod nullum est ip so ,
ju r e , perpcrùm et inutiliter confinnatur.
'
Dans tous ces cas , il faudrait un nouvel acte revêtu de toutes les
formalités légales pour la validité cl’un testament, d’une donation, parce
qu’il est de l ’essence des testamens faits en pays de droit é c rit, qu’ils
contiennent institution d’héritier en faveur de ceux qui ont droit de
légitime ; parce qu’il est de l ’essence des donations , qu’il y ait une
acceptation , qu’il y ait une tradition; parce qu’il est de l ’essence des
donations qui ne sont pas faites en contrat de mariage, qu’elles ne com
prennent que les liiens présens du donateur ; et parce qu’en fin , à
l ’égard du dernier exemple proposé, une donation révoquée par surve
nance d ’enfans, ne peut jamais revivre , et que dans tous ces cas des
ratifications ne pourraient produire aucun effet.
Quand un acte est nul par lui-m êm e, il est loujours ratifié inutilem ent;
r.e contenant point d’engagement valable de la part de ceux qui l ’ont
souscrit, ne pouvant jamais être validé par le tem ps, la ratification qu*
tu est faite par les parties, ne les oblige pas à P^lis (i uc ne ^es obligeait
l ’acte même.
�.
,
?
V5
)
L'institution d'héritier portée dans le contrat de mariage de 1719,'
était nulle par elle-même ; elle n ’attribuait aucun droit à N o ël Saby; elle
e lle ne liait en aucune manière Pierre Saby, son père ; et la ratification
q ue celui-ci.en fit en 17 2 5 , était absolument insignifiante, et ne le liait
pas à plus envers N o ël Saby, qu’il ne l ’était par l ’acte de 1719.
Toute la difficulté se réduit, enfin, en peu de mots. O u la première
disposition était nulle par elle-m êm e, ou elle était seulement susceptible
d ’ètre annullée ; dans ce dernier cas, c’est-à-dire si la disposition n'était
pas nulle par elle-m êm e, sed venit tantum annulandus, la ratification
l ’aurait fortifié, corroboré, validé; mais dès que la première disposition
était nulle par elle-même, la ratification, la confirmation qui en furent
faites ne purent pas la valider; parce que , comme le dit quelque part
B o ëriu s, coufrmatio vihil novi d a t , sed prius habita et possessa
confirmât.
C es principes , ces distinctions , sont enseignés par tous les juriscon
sultes , et ils furent consacrés d’une maniéré bien précise par un arrêt
du 26 février 1 7 2 6 , rapporté par Lépine-de-Grainvile page 408, dans
une espèce qui était tout aussi favorable pour les donataires , que veulent
l ’être lés nouveaux adversaires de Bard ; ils ont été renouvellés dans le
p ro je t du code civil qui peut être regardé comme raison écrite , quoiqu’il
n ’ait pas encore force de lo i; voici ce qu’on y lit, art. 22g du 2.me liv. ;
« l ’acte confirmatif suppose un contrat antérieur et un contrat valable. »
« Si l ’acte confirme est radicalement n u l, il n’est point validé par la
*» simple confirmation , à moins qu’il n’énonce, la connaissance de la
» nullité du premier, ave: l'intention de la réparer, qu’il n’en rapporte la
# substance et ne Contienne la déclaration de la volonté de vouloir lu i
» donner l ’exécution. »
Ces principes ont encore été consacrés par le premier jugement que
Bard a obtenu contre Pierre Saby; jugement qui a été attaqué par la
voie de la tierce opposition, mais qui doit nécessairement être confirmé,
quelques efforts que fassent Magaud et sa femme pour le faire réformer.
Ces derniers insistent et invoquent encore en leur faveu r, l ’autorité de
l ’immortel Dum oulin; et nous aussi nous l ’avons invoqué ! nous avons
rapporté les expressions de ce célèbre jurisconsulte, et certes nous sommes
éloignés de l«s croire en leur faveur.
11 est vrai que Dum oulin après avoir d it, ainsi que les adversaires de
’Bard en conviennent ( car ce sont leurs propres expressions que nous
trani'.crivons ) , que la confirmation d’un acte antérieur auquel celui qui Le,
confirme, se référé sans en rapporter la teneur, ni en relater les vices
pour les réparer, n’a d'autre but que de maintenir l'acte- dans sa valeur
primitive-, qu'elfe ne couvre pas la n u llité, ni les 7/ices de l’acte , ignorés
par L'auteur de la confirmation, et qu'ells n'empêche ni lui ni les siens de
fa ire valoir cas vices , pour se 'dispenser d’exécuter l’acte , ajoute que si
�.
.
.
je
>
.
.
îa confirmation d’une cüspositionr nulle est faite avec la connaissance de
cette n u llité, et intention formelle de la réparer, la ratification valide
.alors ce qui.était nul. Tn tantum quod etiamsi corjirmaium esset nv.h.um
x e l nw aiidnni, vahdarctur per coirfimiationem potestatem halerilis, scicnlis
nuilitatem et vilium confirmati.... Tune propnè non discilur corfirmatio,
sed nova et principaiis dispositio.
L es célèbres jurisconsultes , rédacteurs du projet du code civil qui est
.attendu avec tant d’impatience par toute la H a n c e , pour faire cesser la
bigarrure de nos lois , n ’ont-ils pas puisé dans' l'immortel D u m o u lin ,
. l ’article que l ’on a déjà rappelé, et cet article et les suivans ne sont-ils
pas la traduction presque littérale de ce que dit ce grand maître.
E n un m ot, l ’acte de 1725 11’enonce pas la connaissance de la nullité
dont était infectée la disposition contenue dans celui de 1719 ; ii n’y en
est pas dit un m ot; on n’y voit pas l ’intention formelle de Pierre S ab y,d e
.vouloir réparer ce-vice qu'il devait connaître, que la l o i ne lu i p erm etta it
pas d’ign orer, et dès-lors il faut dire avec D um oulin, avec les auteurs
du projet du code civil, que la confirmation d ’une disposition radicale
ment n u lle , n’est point validée par une simple ratification qui n'énonce
point la connaissance de la nullité, avec l ’intention de la réparer ; que
la disposition contenue dans l ’acte de 1719 , n ’a point dès-lors été
.validée par la-ratification contenue dans celui de 1725.
Q U A T R I È M E
Q U E S T I O N *
E n Auvergne , les en/ans des cultivateurs , travaillant hors la maison
paternelle, peuvent-ils fa ire des profits qui leur soient propres J
O n ne rappèlera point ici les distinctions faites par les lois sur les
différentes espèces de biens. O n se contentera de dire qu’en A u v e r g n e
et dans le Forêt, l ’usage constant a toujours été que les sommes gagn ées
par les enfans des cultivateurs, soit en s'expatriant, soit dans l ’etat de
domesticité ont toujours restées en leur libre disposition; qu’ils ont cu
le droit d’en disposer à leur gré; et que leurs pères n’ont jamais consi
dérés ces sommes comme faisant partie de leur patrimoine.
E lles ont toujours été classées, ces som m es, dans l’ordre des biens
désignés par la loi sous le nom de quasi-castrence, dont les pères n ’on t
ni l ’usufruit, ni la propriété , et qui ne sont jamais sujets à rapport à leur
succession. Nec castrense, nec quasi castrense peculium fratribus co n fcr lu r .
Tous les ans et à des époques périodiques on voit , des nuées de cul
tivateurs quitter "nos montagnes pour aller à la scie ou <\ la marre ; on
les voit à d’autres époques revenir, portant dan s leur m a iso n les fruits
de leurs sueurs et de leurs travaux ; les prêter le plus souvent <\ leur
frère ainé , et s’en fairo souscrire de8 obligations , d es re co n n a issa n ce s.
Tous les jours 011 voit les enfans des cultivateurs se constituer euxmèmea
�,
,
< ' > 7 "5
xnêrtics , dans leur contrat de mariage, des sommes provenues d e leura
épargnes et de leurs travaux ; on voit même des filles en faire autant
dans leur contrat de mariage , en présence de leurs parents , san* que
dans aucun-cas , dans aucun temps il soit encore entré dans l ’idée des
héritiers institués , des légitimâmes, de demander le rapport de ces- som
mes pour en grossir la masse des biens paternels. O ui , il est sans exem
ple que des héritiers aient exigés qu’un légitimaire mécontent de la
part qui lui était fixée, pour lui tenir lieu de ses droits, rapportai à la masse
des biens à partager , ce qu’il s’était liii-mème constitué dans son con
trat de mariage , comme provenant de ses épargnes , parce qu’encorô
une fois on a considéré ces profits comme devant participer de la na
ture des biens quasi-castrence , et que sous ce point- de vue ils’ n ’étaient
pas sujets a rapport.
Si c’était une erreu r, comme l ’â dit Pierre S a b y , qui contrarie le i
principes puises dan* la loi sur la puissance paternelle, il faudrait la
confirm er, parce- qu’étant devenue générale , elle a acquis force de loi;
F.rror fommunis fa ç it legem. E lle devrait être consacrée, parce qu’elle
sert d’un aiguillon puissant aux enfans-des cultivateurs pour les déter
miner à abandonner nos contrées , et à aller chercher chez les habitans
d'autres contrées , qui ont des richesses, mais non de l ’industrie
le n u
méraire qu'aucun autre canal ne pourrait- faire parvenir dans nos
montagnes.
.
Mais pourquoi se tant appéèantir sur l ’usage , sur la force qu’ik d o it
a v o ir, sur l ’avantage qui en résulte pour nos contrées ? N e suffit-il
pas à Bard d'invoquer en sa faveur ,. pour faire rejeter , proscrire la
prétention de ses adversaires , les dispositions • du contrat de maria«fe
de son ayeul ?
°
O n y voit dans >ce contrat’ dé manager qui est du 2 i janvier 1737V
qu’Andre Saby a ete constitue par N o ël Saby son frère , à une somme
de deux cents francs
pour ce qui lui revenait dans les biens de ses
père et mere , et qu il s est constitue lui-même une somme de trois
cent cinquante francs qu’il avait par devers lui , comme provenant de
ses épargnés.
D e la distinction de ses deux sommes n’en résulte-t-il pas évidem
ment q u d n y a que la somme de deux cents francs qui puisse êtrfc
sujette a rapport, si e lle 'a étépayée ? N ’en résulte-t-il pas sur-tout que
N o ël Saby père et beau-père des adversaires de B ard, était convaincu
que la somme de trois cent cinquante francs qu’André Saby son frère
se constitua lui-même , comme provenant de ses épargnes , lui était pro
pre , et que dans aucun cas , dans aucun temps il 11e pourrait y avoir
droit ? N ’en résulte-t-il' pas qu’il y a fin de non-recevoir contre là
prétention de Magaud et de sa femme , qui a pour objet le rapport
a t cette somme’ de trois c u it embuante francs à la succession dont
C
�'(
ï
ïe partage est ordonné. Concluons donc,' et
cette prétention qu’injustice, absurdité ( i) .
C I N Q U I È M E
..
..
disons qu’il n*y a dans
Q U E S T I O N .
U aclion en partage dirigée contre un des détenteurs des biens, possédant
' par indivis avec ses cohéritiers, interrompt-elle la prescription v is - à vis ces derniers ! (2).
C e n’est pas seulement par les mêmes moyens que Pierre Saby a fait
valoir contre B a rd , que la prétention de ce dernier est combattue ; ses
nouveaux adversaires , les tiers opposans, en les reproduisant, en a jou ten t
un qui leur est propre ; ils prétendent que l ’action en partage n ’ayant été
dirigée que contre Pierre S ab y, n ’a pas pu leur nuire, leur préjudicier ,
interrompre la prescription à ieur égard.
L a discussion de la question qu’ils mettent au jour, ne sera ni longue,
n i difficultueuse, et il sera facile de leur démontrer qu’il n ’y a encore
qu'erreur dans leur nouvelle prétention.
U n point essentiel à rappeler , pour ^parvenir à la solution de cette
q u estio n , est que les nouveaux adversaires de Bard et leurs auteurs ont
toujours jouis avec Pierre Saby, second du nom, contre qui la demande
en partage fut dirigée en 1736, de la totalité des biens sujets au p a rta g e ;
que cette jouissance commune qui avait pris naissance, qui était fondée'sur les
actes de sociétés générales et universelles contractées entre Pierre Saby,
premier du nom , d’une p a r t, et Antoine Bruhat et Catherine Saby,
.d’autre, par les actes publics qui sont rapportés et qui sont des 16
février 1694 et 3 janvier 170 6 , s’est perpétuée jusques à présent, de sorte
que quoiqu’il soit de principe en droit que toute société est r o m p u e ,
.dissoute par la mort d’un des associés , morte solvitur societas, il est
cependant certain que par une volonté tacite et bien exprimée par Ie
fait, les sociétés générales contractées entre les auteurs communs, se sont
perpétuées entre leurs descendans ; et que par le fait de la jo u issa n ce ,
de la cohabitation commune ; par la circonstance qu’ils ont toujours mis
en commun les profits qu’ils ont faits , et que dans plusieurs actes
.publics qu’ils ont passés , ils se sont dits communs et associes cfl
biens; il en résulte qu’il faut considérer ces sociétés générales établies
en 1694 et en 1706 , comme ayant été renouvellées e x p ressém en t *
.chaque génération.
Ci^ Q u o i q u e d a n s le urs m o y e n « en ti erce o p p o s iti o n , M a r a u d et sa f e m m e n ' a i e n t pas r e n o u v e l é
c e l u i q u e l ' u n v i e n t île d i s c u t e r , o n a c r u i l e v o i r l e p r é v o i r , p a r c e q u e P i e r r e S a b y l ’i v a i t e m p i
aveu f o r c e , et qu'cnx-niéines p e u v e n t to ujours y avoir recours.
, .
•
i . le I*
( î ) M a^ a tu l et sa f e m m e a p r i s a v o i r o p p u s é la p r e s c r i p t i o n , o n t dit q u ' e l l e était ac q u is e lor 1
d e m a n d e j n r t i u e c o n t r e P i e r r e S i l i y , e t o n t a j o u t e p a r é c r i t , i/u’iUr ttm t h i v plus im -ou tn tiélc enJ *
]lS
A ' C.tlhivs'it Snhy ; il on t d i t p u b l i q u e m e n t q u e l.t i l er . i ni i . l e n ' a y a n t p J s e t i f o r m e e dans l e m e m
¡v
c o n t r e cctt'-* d e r n i è r e , U p r e s c r i p t i o n a v a i t c o n t i n u é d e c o u r i r e n s a l a v e u r . L j l i mi t e ' j u ü s o n t t .
les p r o p o i qu 'i ls p u t te n u s o n t d é t e r m i n é à t r a i t e r l a q u e s t i o n p r o po s ée .
�^
y
. 1 e fait de la j'ouissance commune qui a toujours eu lieu entre tou»
les adversaires de Bard, qui existait- à l ’époque de la demande en partage
formée en 178G, et qui n’a cessé pour les biitimens seulement que d.epma
•
le 5 janvier 1792, époque d’un acte public reçu Vissae notaire, suffit seul'*
pour faire décider la question.
•*
t « l i e n est des héritiers du débiteur, comme des coobligés m êm es,1
» tant que ces .cohéritiers n ’ont pas (fait départage entr’eux. D es co -'
*> héritiers qui sont encore dans l ’indivision, sont réputés associés pour
y tout ce qui est relatif aux biens de la succession; ils sont çenscs jnaji- •
V dataires les uns des autres à cet égard; ainsi l ’interruption qui est
» faite contre l ’un d'eux, est réputée faite contre la succession elle
» même; » c’est ainsi que s’exprime sur cette question le dernier com
mentateur de la coutume de la ci-devant Auvergne.
• Écoutons ce que disent plusieurs coutumes de France, qui ont prévu$i
la difficulté :
,
« Interruption de prescription faite contre l ’un des frères ou communs Bourfconnaîs.
» p o s s é d o n s par indivis ; aucune chose sert et profite comme si elle
art-35» était, faite contre les autres communs personniers en ladite chose. »
« L ’interruption civile par ajournement lib e llé , ou convention judiBerry.
» claire, ou autrement, faite pour le regard de l ’un des possesseurs ou tlt- 1S',rt-l6» détenteurs par indivis , de la maison ou héritage que l ’on veut prescrire
» a effet contre tous les autres possesseurs et détenteurs par indivis ,
>> dudit héritage , et leur nuit et préjudicie. »
« Interruption de prescription faite contre l ’ùn des. frères ou communs. Nivcrneis.
ü> possédans par in d iv is , aucune chose ,. nuit aux autres frères o u t!t 36 art- ?•
>> communs. »
. .
,
.
.
.
« Pour empêcher prescription- de trente ans, ou icelle interrompre
Anjou
» entre frarescheur , suffit à celui frarescheur contre lequel on objicerait art. 435..
» p r e s c r ip t io n , montrer et enseigner quant aux choses communes et
» iiidivisees entre lesdits fraresclieurs , que l ’un d’eux a été inquiété , ou
2 sa possession interrom pue, car en ce cas où les choses sont encore
y indivisées , l ’interruption faite à l ’un préjudicie aux autres. »
T el est le langage unanime de ces coutumes sur la question à laquelle
donne lieu la prétention de, Jean Magaud et de sa femme. L eur décision
imiiormè prouve que cette question ne devrait pas même en faire une. Il
suffit qu’une action soit dirigée dans un temps utile , contre un des
détenteurs d’un bien possédé par indivis avec d’autres, pour que l ’action
n u i s e , préjudicie à tous, qu’elle interrompe la prescription à l ’égard
de tous.
« Quand on s’adresse contre l ’un des possesseurs , par indivis , dit
énergiquement Coquille , 1 adresse est faite poiius in rem , (¡uam
» in personnarn , et nuit à tous ceux qui y ont part. » A in si il est
certain que liard en Xormaut en 1786 la demande en partage deo
.
.
.
'
C 2
�biens <5e scs auteurs , contre Pierre S a b y , avait moins en vue d e
s'adresser directement à c e lu i- c i, qu’aux biens auxquels il prétendait
dxoit ; que les biens seuls m en ta ien t, attiraient toute son attention;
qu’eux seuls étaient le mobile de son action ; qu’ainsi et quoiqu’il ne
s’adressa alors qu’à Pierre S a b y , un des détenteurs des biens , son action
n'a pas moins eu l ’effet d’interrompre la prescription contre tous les
autres détenteurs , parce qu’elle était dirigée potius in rem quam in
personnam.
Q u ’on ne ’ dise pas que les autorités de ces coutumes ne peuvent
être d’aucun p o id s, d’aucune autorité en A u v e rg n e , leurs dispositions
ont de tout temps été reconnues si sages , et tellement fondées sur la
justice et la raison qu’elles ont toujours été approuvées par les juriscon
sultes , et regardées comme devant formeF le droit commun ; c’est ce
qui a fait dire à Chabrol , qu'il en est des héritiers d ’un débiteur
,
comme des coobligés même et que tant qu'ils n’ont pas f a i t de partage
entr'eux le principe est le même.
O n convient qu’il en ;est autrement à l ’égard des cohéritiers qui
ont cesse d etre dans l ’indivision, et que dans ce cas l ’action dirigée
contre un ne peut pas nuire aux autres. O n convient qu’il en est encore
autrement dans le cas ou un demandeur restreindrait sa demande contre
un cohéritier jouiesant par indivis avec d’autres, à la portion pour
laquelle il serait personnellement tenu de l’objet de l ’action , et que
dans ce cas encore l’açtion dirigée contre un ne nuirait point aux autres,
mais hors ces cas, et tant qu’il y a indivision entre des cohéritiers , tant
qu’ils jouissent en commun d'un bien , il est certain , il est incon
testable que l ’action dirigée contre
, n u it, préjudicie à tous.
;
Pour demeurer convaincu que ce qu’on vient de dire ne peut pas
être combattu avec succès , il suffirait de rappeler les expressions de
M . Charles Dumoulin sur l ’art. i 5 du titre i2 d e là coutume du Berry t
et sur ce mot prejudicie.
Fntellige , dit ce savant et profond jurisconsulte quando reus supeT
toto convcnitur et super toto procedit et H oc e s t v a l v e j v s t v m , quam -
,
t Îs
sit contra, ju s scriptum individuis : secits si aclor conveniat unnmE x possessoril us pro parte sud t ant um, quia tune re.mcmct. régula ju vis
commuais quoad ahos. Il suffit donc que celui qui réclame des droits
contre un des détenteurs d’un bien possédé par indivis , réclame la lo
calité de ce qui lui revient , pour que son action nuise , préjudicie à
tous les autres détenteurs. H oc e s t v a l v e j u s t u m (i).
_____ t
(0 Dv la nole mise nu Iws île h premii'rc question, il réjulte qu'ü l'époque île l:i ile*iamle forme;
cor.>'r;pj,.rrC Sahy tn t7HJ>, il ne l’etnit écoulc une ans un mois et >jours île temps utile pour
jee* motion . et en calculant tlepuis cette époque jiuqu’nu premier mmsiilnr a n V I ( 19 juin t; i'<
date Oc ln *•!t-nti-,n en 'rnncilintitm portée à Mi'.;:uii| et à si femme, il ii't a Tne H »lis : 11101^
■jour', ceji'ii r.ijr nn total Je 2« .111s4 mois 4. jour«, aütsi point île preterijuion en supposant
que Iïs l'rinv.fccilpUiuitnc l'ussmt pas en favïisr dî Bard.
.
�-
S I X I È M E
Q U E S T I O N .
-
IV a-t-il quelques biens meubles sujets au partage ordonné par ls jugement
en dernier ressort de 1792 / Y a-t-ïl plus de deux immeubles , mèm®
. ¿lus de quatre sujets à ce partage î
Nous avons terminé la discussion de toutes les questions de droit
âiix qu’elles a donné lieu la tierce opposition formée de la part de Catherine
Saby et de Jean Magaud. N ous sommes arrivés au moment d’établir deux
points dé faits qui sont certains, incontestables , c’est-à-dire qu’il y a
des meubles sujets au partage dont il s’agit ; qu’il y a plus de deux ,
même plus de quatre immeubles qui doivent y être compris , et cette
tâche 11’est pas aujourd’hui pénible à remplir.
• Dans tout le cours de la procédure qui a eu lieu depuis 1786 jusques à présent , Jean Saby et avant lui son père se sont toujours obs
tinés à soutenir qu’il n’y avait aucuns biens m eubles, aucuns biens im
meubles sujets à partage. U n jugement contradictoire l’a cependant or
donné , et ce jxigement est celui du 3o aoiit 1792.
• A lors l ’obstination de Pierre Saby à soutenir son système parut s’ac
croître de plus en plus , et cependant rentrant un peu en lui-mème, il
convint dans un procès-verbal du 2o octobre de la même année , qu’il
y avait' seulement quatre héritages sujets à ce partage , et il eut la
bonté de les désigner d’une manière assez précise.
Fâché sans doute d’avoir fait un pareil aveu , après avoir cherché par
tous les moyens possibles à éviter le transport des experts qui furent
nommés successivement ; après avoir donné lieu à plusieurs incidens ,
et voyant arriver les derniers experts nommés pour procéder au parta
ge , il soutint à ces mêmes experts ( ce fait est consigné clans un rap
port du t 6 messidor an. III ) qu’il n’y avait que deux héritages sujets*
à ce partage , et il eut encore la bonhommie de les désigner.
. E nfin, après plusieurs contestations il a été décidé par un jugement du 6
fructidor an V que Pierre Bard indiquerait 1ns biens sujets au partage, et
par un autre du 2i nivôse an IX , il a été chargé de faire la preuve de
la consistance des biens meubles , des titres de créance e t des immeu
bles provenus de Pierre Saby et d’Antoinette Ladiaud.
.
Par ce même jugement , il -a été ordonné que des experts pris par
les parties ou nommés d’office feraient l ’application des titres produiu
par Bard , et comprendraient, dans leurs rapports tous les immeubles
qui avaient etc donnés pour confins aux .héritages acquis , et qui étaient
dits dans les a t.es, appartenir à ou aux acquéreurs , c’est à-dire, à Pierro
Saby, à André Saby, à Antoine Bruliat, ou à Cathcrino Saby, qui tous sont
désignés comme acquéreurs dans tous les actes produits par Bard.
Des témoins ont été produits de part et u’autre , ils ont élé enton•dus. Des experts on t. été nom m és, ils ont .opéré. 11 ne Va^it dvue
�C
255
)
.
.
,
,
.
plus que de jeter tiB côitp illceil rapide 'sur cc qui résulte des déposi
tions des tém oins, et du rapport des experts , pour juger du peu de
fondement de la prétention de Jean Saby.
D ’abord, relativement'aux dépositions des témoins qui ont trait à la
consistance des biens meubles , nous trouvons quatre dépositions pres
que 'uniformise dans l'enquête’ faite à la diligence -de Bard.
L e troisième témoin déclare qu’il y avait constamment dans la mai-*
son de Pierre Saby deux paires de bœufs, dix v a ch es, deux jumens
pBuiiniairjs , d ix chèvres , entour deux cents moutons , mais qu'en hiver
le troupeau diminuait quelquefois.
L e quatrième dit qu’il y avait quatre paires de bœufs, douze vaches,
deux jumens et un troupeau de moulons qui s’élevait quelquefois jus*
qu'à quatre cents , mais qui était quelquefois de deux cent cinquante.
■ L e sixième assure que la maison des Saby fa isa it le commerce d&
moutons , nu’habduellement i l y ayait un troupeau de deux cents bêtes
« laine , huit ou dix vaches et deux jumens, pouhniaires.
L e septième ne . parle que de deux paires de bœufA ; mais le hui-.
tième parie encore de deux paires de bivufs , d’un troupeau de moutons
de deux cents à deux' - cent quarante , de sept à huit vaches 3 de sept
à huit clùvres et d’une jument.
.
.
Jinfm T. tous ces témoins s’accordent parfaitement sur un point essen
tiel : ils disent que la maison des Saby passait pour être pécitnieuse eh
qu'elle jouissait d ’une aisance notoire.
Si nous jetons actuellement les yeux sur les dépositions des témoin*
qui ont été produits par Jean Saby ; si imus rapprochons ces déposilio n s'd e celles des témoins qui ont été produits par B ard, nous veri
iori6 que ce qu’on dit ces derniers , et que l ’on vient de rappeler , ac
quiert un nouveau degré de force et de vérité , et qu’on ne peut faire
autrement , d’aprèa la réunion de toutes ces dépositions , que de demeu
rer convaincu que Pierre Saby et Antoine Bruhat son beau-frère et son
associé , Catherine Saby sa iccur et aussi son associée, après le décès de ce
dernier , jouissaient d’une fortune opulente ; qu’ils avaient constamment
au moins deux ou trois paires de bœufs , d.ix vaches , un troupeau
moutons a entour deux cents , sept à huit chèvres et deux jumens.
U n pareil nombre cle bétail suppose nécessairement l ’existence de
tous les inslrumi. ns aratoires , des chars , des charrues, jougs , clefs de
parc elc. et tout cela suppose encore l'existence d'un mobilier quel
conque dans la maison de Tierre Saby , proportionné à l ’opulence dont
il jouissait.
,
.
Nous avouerons cependant , que d'après les dépositions des témoins
produits par Saby , il résulte que sa maison s’est cou.Vukrablement
accrue depuis le déct-s de Pierre S ab y, de cujus ; mais qu'il sache
*piu Bard n’a jamais poussé ses prétention.1* jusqu’il soutenir que 9
�J
M
)
...
.
totalité des biens dont il jouit actuellement 'e s t sujette au partage
'ordonné; mais qu’il a soutenu qu’il y avait plus de deux , même
plus de quatre immeubles sujets à ce partage ; qu’il y avait des meu
bles , et que convaincu par les dépositions des témoins qui ont été
entendus ; qu’accablé même par la réunion de ces dépositions , Saby
jentre une fois en kii-mêmeet qu’il convienne au moins aujourd’hui que son.
obstination et celle de son père , à soutenir qu’il ri’y avait aucuns
.biens sujets au partage n’ont été propres qu’à faire faire des frais
■dont il doit nécessairement être victim e, comme Bard avoue franche
m ent de son côté que lui Saby a droit à des distractions incontesta
bles et qu’il n ’a qu’à les faire connaître pour les obtenir.
L e jugement du 2 i nivôse an I X , ordonnait que Saby remettrait
entre les mains des experts, le9 titres qui devaient servir à établir ces
•distractions, mais il s’y est constamment refusé. L e s experts qui ont
opéré l’attestent dans leur rapport , et si ces experts n’ont point fait
jen sa faveur les distractions qu’ils auraient pu faire ; s’ils ont compris
dans leur plan une quantité plus considérable de terrein que celle qui doit
•en dernière analise être comprise dans le partage , il ne peut l ’impu
ter qu’à lui-m êm e, au refus constant de remettre ses titres.
D ’après le rapport de ces experts , tous les titres produits par Bard
.ont reçu une application parfaite sur les héritages jouis encore par
indivis par Jean S a b y , Catherine Saby et Jean Magaud. Ces experts
'ont
constaté l’identité
des héritages énoncés dans ces mêmes
’titres , avec ceux possédés par ces derniers , et enfin il résulte de leurs
opérations, de l’échelle jointe au p la n , du calcul que l ’on a fait d’a
près cette é ch e lle , que plus de soixante septerées de terre sont sujet
tes au partage ordonne ; ainsi , que Saby cesse donc de dire qu’il n’y a que
deux héritages même que quatre qui doivent être compris dans ce
partage.
Si cependant il lui restait a Saby quelque espoir de pouvoir répondre
à c? que nous venons de dire ; de pouvoir combatiré soit les déposi
tions des témoins , soit le rapport des experts, qu'il écoute avant de
l ’entreprendre ; qu’il lise avec attention une preuve littérale , une preuve
authentique et légale qui vient corroborer , fortifier soit la preuve vocalo,
soit le rapport des experts , et qu’il nous dise ensuite si l ’un ou l ’au
tre peut être critiqué avec succès.
V oici mot à mot en qu’on trouve dans le rôle de la commune (le
•Chainpagiiat-le-vieux , quartier de L ach au d , pour l’aunée 1 7 8 7 , rôle
rendu exécutoire le i 3 novembre 1 7 3 6 , et enregistré à Issoire le même
jour.
-
Ticrrc et N o ël
Suby , p ire et fils , et Jean Magaud
neveu dudit
�.
.
<
24
5
.
,
Pierre , communs en biens , labourant à deux- paires de - bœufs et une
paire dz vaches , cent quinze francs , ci. . . . . i i 5 fr.
» sois.
Capitation , quarante-sept francs trois sols , ci. . 4 7
3
.
1
Crue , vingt - deux Lancs un s o l, ci.............................22
T o t a l, ccnt quatre vingt-quatre francs quatre sols , ci.
184 fr.
4 sols
re u t-il d’après cela rester encore quelque doute sur la vérité des fait*
. nites-lés p a rle s témoins à l ’égard des meubl.es et des bestiaux , sur la quan
tité des immeubles sujets au partage ordon n é, tel qu’il résulte da
rapport des experts ? L'énonciation qui se trouve dans ce rôle ne les
dissipe - t - elle pas tous d’une manière irrésistible , et' Saby ne
scra-t-il pas forcé d’avouer que les témoins n’ont rien dit que de con-*
forme à la vérité ; que le rapport des experts n’embrasse pas même peut*
être tout cc qui devrait y être compris? Entrons maintenant dans un cal
cul simple mais palpable.
L e rôle de Champagnat., quartier de Lacliaud , comprend neuf villages,
Lachaud , Toiras , I\eyrolles , Leglial , Gcnestoux, le Boucharel ,.Balistre,
Balistroux et Olpignat, Ces neuf vdlages payaient en.principal ou acces
soire d’impositions 2673 francs i 3 sols. L a seule maison des Saby payait
184 francs 4 sois , c’est-à-dire à peu près le treizième des impositions ,
ce qui suppose que cette maison possédait à peu près- le treizième des'
biens ’des neuf villages. Faisons un autre calcul.
"
Il est de notoriété; publique', et il 11e faut pas avoir des connaissances
bien étendues pour savoir que les impositions ont considérablement ac
crues depuis 1787 jusques à nos jours; que tel bien qui à cette époque
payait 2oo francs d'impositions-doit aujourd'hui en payer 3 oo même 400
francs : mais supposons que cette augmentation d’imposition n’est pas ar
rivée ; supposons que le même bien qui.existait à cette époque n’est grevé
aujourd’hui , comme il était alors , que de 184 irancs 4 sols d’imposition,
et calculoii.3 d’après nos lois. •
L es impositions sont le cinquième du revenu net des biens. Pour
connaître le capital il faut donc quintupler le. montant des imposi
tions et par cette opération nous trouvons que le bien qui existait
en 1787 , grevé de 184 francs 4 sols d’im position, doit au moins
fitre en valeur de 18400 irancs : ce calcul ne peut pa* être com b a ttu avec
succès.
t
Ce rôle de l ’année 1787 , a donc non seulement corroboré , fortifie
la preuve qui résulte des dépositions de tous les témoins qui ont etc
cnU-iidus , mais encore, il a conduit à la découverte d e là valour au moins
Approximative, des immeubles sujets au partage ; ainsi il ne peut plus res
ter aucun «luutc sur la consistance des biens immeubles; ainsi le ra p p ort
des exports mj
pas paraître embrasser une plus grande quantité
de biens que Cyllc q u i est sujelty au par'.agc.
.LCS
�. f
ft5t
)
Le* titres translatifs de p r o p r e s rapportés par Bard , qu’il n ’a recueil
lis qu’à grands frais et qui ont été souscrits par différents particuliers
en favçur des auteurs communs , depuis 3 , jusqu’en 1 7 0 7 , constatënt 'q'iiëices dem iérs' ont acquis dans x e t espace de temps pour plus
de trois m ille 'liv re s d’immeubles.
:
■
11
est »de fa it in'scontestable que depuis la fin de 'l ’avant - dernier siè
cle jusqües à* présent, les propriétés foncières ont fait plus que quin-’
tiipler de valeur ; et cela conduit à la-certitude que les biens énoncés
dans le*s ventes rapportées par Bard doivent être aujourd’hui en valeur
aii m o in s de quin ie m ille francs; et si nous observons que les auteurs,
des parties jouissaient avant' ces acquisitions d’une fortune honnête ;
qu’iis étaient au morns présumés en jouir ( car les acquisitions qu’ils fai
saient le prouvent -), on demeurera convaincu que le premier calcul que
l ’on a fait n’a rien d’exagéré ou plutôt qu’il est au-dessous de la valeur
té e lle des biens sujets au partage.
N e pouvons - nous pas dire maintenant avec certitude, qu’il y a des
biens meubles sujets -au partage .ordonné ; que tous les immeuble*
énoncés dans les titres rapportes par Bard doivent y être compris • quç
la prétention de Sal>y est injuste et absurde , et que soutenir qu’il ne
devait: être compris que deux même qwe quatre immeuhles , c’etait
soutenir une'erreur qui n’était'propre qu’à faire faire des frais dont nul
autre que Saby ne peut être tenu? ■
L e s tribunaux saisis de la connaissance des contestations des parties,
ont à prononcer sur des intérêts majeurs ; ils ont à mettre fin à un procès
qui dure depuis lougues années, et à statuer si une famille plongée dans la
misère , privée depuis 60 ans et plus de la portion qu’elle amende dans un
bien conséquent,peut enfin espérer de voir la fin des incidens que ses adver
saires , qui sont dans l’opulence , ne cessent d’élever malgré un jugement
en dernier ressort, rendu depuis plus de 10 anç. L a tierce opposition
formée par Magaud et sa femme contre ce jugement, donne lieu à statuer
de nouveau sur les mêmes questions qui ont été décidées par ce jugement.
Ces tiers opposants seront - ils plus heureux que celui qui les a précédé
dans l'arêne ? Parviendiont - ils à prouver d’après les circonstances
particulières qui se rencontrent dans la ca u se , et qui résultent des
actes publics passés en présence de toute la famille , les 2i septembre
*749 et 11 novembre suivant , qu’un absent est répute vivre 100 a n s ,
que
pendant cet
espace de tem ps, toute action
est
inter
dite à ses héritiers de droits l i.tabliront-ils , en convenant qu’une ins
titu tio n d’héritier faite dans un contrat de mariage , en faveur d’un noncontractant, est nulle d’une nullité absolue ; que cette nullité a été co u
Verte par Une ratification pure " et simple faite postérieurement dans son
«ontrat de mariage ? Seront-ils assez heureux pour faire oublier les princi
pes, jusqu’au point de persuader qu’en Auvergne les enfaris des cultiva«
’
'
D
�partage, n’interrompt pas la prescription contre tous ! ils peuvent se flatter
de réussir , mais qu’ils n ’invoquent pas au moins P o th ier, Brétonnier ,
Rousseau-de-Lacombe, Dum oulin, qui tous prononcent leur propre condam
nation, et disent tout le contraire de ce qu’ils leur ont fait dire : et Jean
Saby qui en suivant le genre de défense embrassée par son p è re ,a toujours
soutenu qu’il n’y avait aucuns biens meubles sujets au partage , convien
dra-t-il au moins aujourd’hui q u ’il doit y en avoir quelques-uns ? et aban
donnant les assertions de son père à l’egard des immeubles, avouera - t-il
q u ’il y en a plus de deux , même plus de quatre sujets au partage ! Si
les uns et les autres continuent d ’esperer que fo .misère dans laquelle
Bard est plongé ne lui permettra pas de poursuivre jusqu’à jugement défini
t i f la réclamation de ses droits , qu’ils se désabusent ; cet espoir fonde
sur l ’indélicatesse , sur la mauvaise f o i , sera déçu , et ils a p p re n d ro n t
que la détresse la plus absolue peut quelquefois lutter contre l ’opu
le n ce.
'
"
‘
'
A L L E Z A R D ,
AU
homme de loi à Brioude
P U Y , de l’imprimerie de C r e s p y et G u i l h a u m e , Im p rim eu r
Libraires, rue du Collège.
A u X»
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bard, Pierre. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Allezard
Croizier
Subject
The topic of the resource
communautés familiales
partage
absence
testaments
coutume d'Auvergne
droit romain
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Bard, cultivateur, habitant de la commune d'Agnat, demandeur et défendeur en tierce opposition, contre Jean Saby, fils à Pierre, défendeur, et Catherine Saby, et Jean Magaud, tous cultivateurs, habitans du lieu de Balistroux, commune de Champagnat, demandeurs en tierce opposition.
Annotations manuscrites
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l''Imprimerie de Crespy et Guilhaume (Puy-en-Velay)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1674-Circa An 10
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0247
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Agnat (43001)
Champagnac-le-Vieux (43052)
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Information about rights held in and over the resource
Domaine public
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communautés familiales
coutume d'Auvergne
droit Romain
partage
testaments
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631394dd4a6108e9cfb0c90d3a5ec0f5
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Text
SM 0N B tm iEEC e9S 22G
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A C a u s e s et M
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d'appel, et a M
imprimé
o yens
,
é m o ir e
P O U R M a r i e L A C O U R S , et P i e r r e
B L A N Z A T , son mari; A n n e L A C O U R S ,
et F r .. B E R T E T , son mari; A n t o i n e t t e
L A C O U R S , et S i m o n B A R R A U D , son
mari habitans de la ville de Clermont, défen
deurs en opposition, intimés;
,
,
,
CONTRE G a s p a r d LACO U RS propriétaire
habitant de la même commune demandeur en
opposition appelant ;
,
En présence de J e a n - B a p t i s t e RODDIER
et d ’A N N E T H E R I D I E R E S , consorts,
habitans de la même ville.
Q
u
elesépreuves de douleur et de retenue pour
la piété filiale !
Les filles Lacours , mères de famille, encore jeunes,
réclament, moins pour elles que pour leurs enfans, la con
firmation d’un jugement, qui ne leur a accordé que ce
A
�Sk0
v
( 2 )
qui leur étoit assuré par la nature , attribué par les lois,
établi par des actes authentiques, par des actes dont la
clarté dans les expressions ne présente pas plus de doute
dans le fait que dans le droit.
Dans cette lutte affligeante, comment se peut-il que
leur père imagine des invraisemblances , pour éluder la
justice qu'il doit à ses enfans ? A quel embarras ne réduit-il
pas ses filles, de se faire entendre sur certains points, par
le silence, d’éclairer et mouvoir la vertu magistrale par
des réticences révérencielles ?
F A I T S .
Marie-Jeanne et Amable G uyot, filles de Gaspard Guyot
et de Gabrielle Teytard, furent mariées, l’une avec Gaspard
Lacours, appelant, l’autre avec Bonnet Gauttier.
Par le contrat de mariage de l’aînée avec Lacours, du
3 février i y 55 , ses père et mère lui constituèrent une
dot, et l’instituèrent leur héritière, conjointement avec
Amable Guyot, sa sœur, cependant avec un avantage de
5 oo francs. Les instituans se réservèrent une somme de
1,000 f r . , pour en disposer en préciput, et la faculté de
disposer de cette réserve fut laissée h Gabrielle Teytard,
dans le cas où elle survivroit h Gaspard Guyot, son mari.
Il fut fait un avancement d’hoirie h la femme Lacours
en immeubles, et en 2,000 fr. pour trousseau, meubles
et argent.
Par le contrat de mariage d’Amable G uyot, sœur puînée
de M arie-Jcanne, avec Bonnet Gauttier, du 9 novembre
�*f
( 3 )
.
1-759 , Gappard Guyot et Gabrielle Teytard, ses père et
nière, firent en sa faveur constitution de dot, institution
sous la même réserve , et un avancement d’hoirie en
immeubles, trousseau, meubles et argent.
1
De l’union conjugale de Marie - Jeanne Guyot avec
Gaspard Lacours, sont issus seize enfans; il n’en est resté
que quatre qui ont succédé à leur m ère, les trois filles
intimées, et leur frère Jacques Lacours.
Amable G uyot, femme Gauttier, n’a eu qu’une fille,
nommée Gabrielle.
L a femme Gauttier est décédée en juin T765, quelques
jours avant Gaspard G uyot, son père.
Gabrielle Gauttier, sa fille , est morte en basrirge , et
avant Gabrielle Teytard, son aïeule.
L e décès de Gabrielle Teytard est du 17 janvier 1773.
Amable Guyot et Gabrielle Teytard avoient leur domi
cile dans le faubourg de Saint-Alyre près de Clermont, conséquemment sous l’empire de la coutume d’Auvergne;
les autres immeubles étoient situés dans la ville de Cler
mont et aux environs, par conséquent en droit écrit.
Marie-Jeanne G u yo t, mère des intimés, recueillit l’en
tière succession de Gabrielle Teytard, sa mère , qui a sur
vécu à Amable G uyot, sa fille, et à Gabrielle Gauttier, sa
petite-fille; elle succéda à Gaspard Guyot, son père, pour
la totalité des biens situés en pays de coutume, sauf l’usu
fruit de la moitié acquis à Bonnet Gauttier, comme ayant
survécu à Gabrielle Gauttier, sa fille, qui avoit succédé
pour la moitié à Gaspard Guyot, son aïeul, sauf encore le
prélèvement de i , 5oo fr. pour le préciput de 5oo fr.
stipulé par le contrat de mariage de Marie-Jeanne Guyot,
A 2
v
�(4 )
et pour la réserve de 1,000 f r ., dont Gabrielle Teytard
disposa en faveur de la femme Lacours, par son testament
du 10 mai 1766, d’après la faculté stipulée dans le contrat
de mariage du 3 février i y 55.
Marie-Jeanne Guyot succéda à son père pour moitié
dans les biens situés en droit écrit; Bonnet Gauttier, hé
ritier de Gabrielle Gauttier, sa fille, qui avoit recueilli,
du chef de sa m ère, l’effet de l’institution qui lui avoit
été faite par Amable Guyot, son aïeul, est devenu pro
priétaire de l’autre moitié.
E n fin , la mère des intimées a recueilli des biens pro
venus de Philippine Teytard, tante de Gabrielle Teytard,
-su u
f décédée à la fin de 1776 ou dans les premiers
jours de 1777.
Marie-Jeanne Guyot, femme Lacours, est décédée le
25 nivôse an 3.
Les intimées étoient toutes établies à cette époque; elles
avoient été constituées en dot par leurs contrats de ma
riage des 20 février 1786, 22 février 1789 , et 24 janvier
1 793 Aucun de ces contrats de mariage ne renferme, de la
part du père Lacours, la réserve d’usufruit.
lia loi du 28 août 17 9 2 , portant « que les majeurs ne
« seront plus soumis à la puissance paternelle », a ouvert
en faveur des intimées, le droit de demander, dès l’ou
verture de la succession de leur m ère, tous les biens do
taux et aventifs, meubles, mobilier et immeubles qu’elle
avoit portés ù Gaspard Lacours; mais elles eussent aban
donné ce droit, si leur père ne les y eût forcées.
On passe sous silence tous les procédés doiucbtiques :
�('5 )
mais plusieurs ventes réalisées de la part du père Lacours,
non seulement de ses immeubles, mais encore d’une partie
de ceux provenus de la dot de sa femme, des affiches
posées pour la vente du surplus, jetèrent l’alarme dans
les familles des trois filles Lacours; pressées par des besoins
, lors actuels , effrayées sur l’avenir par la réclamation
muette de leurs enfans, lassées par une triste condescen
dance de leur époux, elles ne purent encore se résoudre
à former aucune demande à leur père.
Résistant encore à des rigueurs, à des excès même non
mérités, elles ne purent se refuser à leurs propres reproches
sur les dangers de voir à la fois leur m ari, leurs enfans,
leur propre père et elles-mêmes, exposés h la plus affreuse
misère ; elles ne purent prévoir, sans effroi, l'impossibilité
inévitable où elles seroient de satisfaire au vœu de la na
ture et de leur cœ ur, de venir au secours de tous, si elles
ne prenoiçnt au moins des mesures conservatrices. Deve
nues instruites que leur père dénaturoit son actif, en
substituant, par des quittances, aux privilèges et à des
obligations hypothécaires , des papiers négociables , la
femme Barraud tenta infructueusement auprès de son père,
la conciliation, en pluviôse an 4.. ......................................
Cependant toutes les filles Lacours s’abstinrent encore
d’aucune .action directe; elles se contentèrent, les 1 3 . et
17 prairial an 6, de former opposition au bureau des hypo
thèques , et de fiiire des saisie-arrêts entre les mains des
citoyens B.oddior et Iléridivres.
Ceux-ci parurent n’être pas indifférons.sur ces actes de
précaution, puisqu’ils exigèrent de Lacours une promesse
�( 6 )
de garantie de sa part des effets de ces oppositions; Lacours
pi'omit de leur en rapporter m ain-levée, et néanmoins
reçut 3,000 francs, par acte du 25 ventôse an 7.
Lacours pressentantbien la difficulté d’obtenir cette main
levée, resla dans l’inaction; mais Roddier et Héridières,
après l’avoir fait inutilement citer en conciliation, ainsi
que les intimées, firent assigner le père et les filles au
ci-devant tribunal civil du département, pour voir déclarer
les oppositions nulles, et qu'au surplus Lacours fût tenu de
les en garantir et indemniser.
Un jugement du 6 messidor an 7 , contradictoire avec
les intimés, déboutèrent Roddier et Héridières à l’égard
des filles Lacours, et donnant défaut contre leur père,
le condamna à garantir.
Celui-ci y forma opposition, et fit citer en conciliation,
tant ces tiers détenteurs que ses filles et leur mari.
Cette voie ayant été infructueuse, Lacours, par exploit
du 28 thermidor an 7 , fit assigner les intimés Roddier
et Héridières au tribunal civil, pour voir dire qu’il seroit
reçu opposant au jugement du 6 messidor, en ce qu’il
avoit été débouté de sa demande en main - levée; au
fond , « se voir lesdits compris condamnés à justi
ce fier des titres en vertu desquels ils ont fait faire ladite
« saisie, celle faite entre les mains des citoyens et citoyennes
« Boutarel, frère et sœurs, et une inscription sur lui au
« bureau des hypothèques, et faute de justification de
« litres valables , voir dire que lesdites saisie - arrêts,
<r opposition et inscription et toutes autres faites ou à
« faire , seront déclarées nulles et de nul effet, avec
« main-levée, radiation cl dQiniiiagos-iutérûts; et en cas
�M s
( 7 )
« de justification de titres valables, voir dire et ordonner
« que lesdits compris seront tenus de déduire et tenir
« en compte sur ce qui pourroit leur être légitimement
« dû; savoir, Lacours et Blanzat, la somme de 3,461 fr.
« pour les trousseau, meubles , argent et contrat de
« rente, suivant leur contrat de mariage ; Lacours et
« Bertet, la somme de 3,300 francs pour même cause;
« et lesdits Lacours et Barraud, la valeur à dire d’ex« perts d’une vigne de sept œuvres; d’une terre ci-devant
« vigne d’entour huit œuvres, et 5oo francs pour la valeur
« du trousseau, si mieux n’aiment ces derniers, se désister
« purement et simplement desdits héritages et lui en aban« donner la propi’iété.......... E t attendu qu’il résultera
« d’après lesdites déductions, que les filles JLacours seront
« payées de leurs créances , voir prononcer les main« levée et radiation. V oir néanmoins donner acte audit
« Lacours des offres qu’ il fa it, dans le cas où il seroit
« débiteur de quelque chose, de parfournir-ce qui pourra
« se m anquer pour compléter ce q u i doit légitimement
« revenir auxditesjilles Lacours, dans le cas seulement où
« il seroit déchu de l’usufruit des biens de sa femme......
« qu’il se réserve. »
Par exploit du 4 fructidor an 7 , les intimées accep
tèrent les ofFies et consentement de leur père, de leur
payer ce qu’il leur doit.
Cest le 14 de ce merne mois, que toutes les parties
en vinrent h l'audience du tribunal civil.
L a question sur la privation d’usufruit éprouva de
longs dél'ats.
Il fut soutenu de la part de Lacou rs, que l’on ne pou-
�(8)
voit étendre l'effet de la loi du 28 aoiit 1 7 9 2 , qui abo
lissent la puissance paternelle, à celui de faire cesser l’usu
fruit absolument étranger et indépendant de cette puis
sance, qu’il falloit juger par la loi et non par induction ;
que la disposition de la ci-devant coutume d’A u v e r g n e ,
cjui accorde au père l’usufruit des biens de sa fe m m e ,
reste dans toute sa vigueur ; qu’ on invoqueroit en vain
l ’article 48 du chapitre 1 4 de cette coutume, parce que
cet article suppose des biens acquis à la fille au moment
de son m a riag e, tandis que les filles Lacours n’avoient
rien d’acquis, puisqu’elles ont été mariées père et mère
v iv a n s ; que la forclusion qui en résultoit, équivaudrait
à une réserve d’usufruit, puisque cette forclusion ne laissoit
aucun espoir aux filles Lacours ni en propriété ni en usu
fru it, du chef de leurs père et m è r e ; qu ’au surplus les
filles scroient remplies, et au delà, des sommes qui leur
reviennent du chef de leur m è r e ; que tout ce cju’il A
t o u c h é s’élève à une somme de 21,292 francs ; que cer
taines déductions faites, cette somme demeure réduite pour
les trois quarts l’evenant aux trois filles L a c o u rs , à 1 5 ,6 3 1
francs 10 sous, et que ce qu’elles ont touché par leur con
trat de m ariage, se porte à plus de 22,000 francs, d’après le
compte qu’il en fait; que quand elles ne scroient pas rem
plies, leurs intérêts sembleroient résister aux persécutions
qu’elles font éprouver à leur p è r e , étant appelées p arles
nouvelles lois à sa succession , sa fortune s’élevant i\ TLUS
reste, la compensation qu’il
dem ande, résulte de l’axiom e nemo libéra Lis , nisi libé
ra tus , que dès que la volonté de l’homme fait place à
DECENT MILLE
f r a n c s : cju’au
la volonté de la lo i; dès q u e , par la cessation de la for
clusion
�(93
cl usi on les filles sont appelées par égalité avec leur frère
au partage des successions de leurs père et mère ; il en
résulte qu'il n’existe plus de contrat entre les parties; et
la forclusion cessant, la dot qui en étoit le prix doit
également disparoître ; que ce sacrifice étoit conditionnel
de la forclusion ; qu’il cesse avec l’existence de la forclu
sion ; que tout ce qu’il a donné de son chef, doit être
•imputé sur sa dette, et que dès-lors sa dette est couverte,
-et au-delà.
. •
♦
.i
Les intimés opposèrent que la privation d’usufruit s’opéroit par la lo i, pour les biens en pays de droit écrit, et par
le défaut de réserve pour ceux situés en paj's de coutume ;
que pour les premiers, d’après la loi cùm oportet, au code
de bonis quœ lib eris, l’usufruit n’étant qu’une émanation
et un effet inséparable de la puissance paternelle, cet effet
ne pouvoit pas plus durer que la cause, d’autant que les
•biens qui étoient l’objet de cet usufruit, ne leur sont éclius
qu’après qu’elles ont été sorties de la puissance paternelle,
pour passer sous la puissance maritale....
Que quant aux biens situés en coutume, le statut local
s’explique d’une manière impérieuse.
« Quand le père fiance ou marie sa fille » , porte l’article
X L V III de cette loi municipale, «il est privé de l'usufruit
cc i\ lui appartenant ès biens maternels ou aventifs de sadite
.« fille, SÎ EXPRESSÉMENT IL NE LE RÉSERVE.
A ux autorités des commentateurs on a joint celle de la
jurisprudence , soit dans le cas de la forclusion, soit dans
celui de la renonciation conventionelle, tant pour les biens
échus, lor6 du contrat, que pour ceux à v e n ir, parce que
B
�5 M>
\
( 10 )
l’article généralisant le principe , ne souffre pas d’excep
tion ; parce q u e, si le père avoit un droit, en mariant sa
fille, il a dû se le réserver ; parce que, s’il n’en avoit pas,
il n’a pu l’acquérir ; paxxe qu’enfin on ne peut juger par
équipollence, quand la loi est im pérative, lorsque la forclusion qui ne peut être opposée à la femme Barraud ,
mariée en 1793? a été détruite jusques dans ses racines, à
l’égard des deux autres filles, par la loi du 8 avril 17 9 1.
Pour ce qui concerne la libération prétendue par le père,
il étoit répondu de la part des filles Lacours, que le père
étant dans le devoir de doter ses filles , toutes les consti
tutions qu’il fait, sont réputées l’avoir été de sa propre
substance; que néanmoins elles veulent bien tenir à compte
à leur père les biens à lui appartenans pour former la légi
time maternelle , si en effet il leur en a donné avec cette
destination. Passant ensuite à l’analise des contrats de ma
riage contenant dot paternelle et dot maternelle, il fut
observé que la femme Blanzat n’a rien reçu du chef mater
nel ; que la femme Bertet a eu une vigne, estimée 600
francs, mais que cette vigne provenant de la mère , elle ne
peut pas être l’objet d’une imputation sur ce que Lacours
père doit h ses enfans, parce qu’il ne peut éteindre sa dette
qu’avec des objets qui lui sont personnels ; que la femme
Barraud ne doit pas non plus souffrir aucune compensa
tion , puisque d’un côté elle n’a rien reçu des 2,000 francs
argent, qui lui ont été constitués pour dot maternelle,
payable seulement après le décès des père et mère ; que
de l’autre, les deux héritages dont elle jouit, proviennent
à la vérité , du père , mais qu’il ne peut pas en employer la
valeur à acquitter la dette de sa femme. Enfin il fut fait une
�C 11 )
remarque décisive, que le père Lacours annonçant luimême une fortune de plus de c e n t m i l l e f r a n c s , et
n’ayant que quatre enfans, n’avoit pas disposé du douzième
en faveur des trois filles réunies, puisqu’on retranchant
les immeubles provenus de la m ère, elles n’ont touché
entre elles qu’un capital de 6,961 francs. Il en fut conclu ,
avec raison, qu’un tel prétexte de prétendus sacrifices ne
pouvoit autoriser le père à retenir le bien de ses enfans,
chargés de nombreuses familles , et les laisser dans les hor
reurs des besoins, quand il a dix fois plus de revenus
qu’il lui en faut de son bien personnel.
C’est sur cette discussion, rapportée sommairement,
que fut rendu le jugement dont est appel. En voici la
teneur :
«Attendu , respectivement aux biens régis par le droit
a écrit, que l’usufruit, attribué aux pères par les lois ro« maines, est une émanation de la puissance paternelle ;
• « Attendu que l’émancipation faisoit cesser l’usufruit
* pour m oitié, et conservoit l’usufruit de l’autre moitié
« au pèi’e, même sans réserve, suivant la disposition de
« la loi cùm oportet, au cod. de bonis quæ liberis ;
« Attendu que l’effet de la puissance paternelle a été
« aboli par la loi du 28 août 17 9 2 3 Ç[ue l’usufruit n’étoit
« attribué au père en pays de droit écrit, qu’en vertu
« de cette même puissance ;
« Attendu, en ce qui touche les biens situés en coutume,
« 1 art. X L V III du tit. 14 de la coutume qui porte, que
« quand le père fia n c e ou m arie ses f d le s , il est privé
« de f usufruit de plein d ro it, si expressément il ne se
c< le réserve.
B 2
�t
( 12 )
« Attendu , quant aux jouissances, qu’elles sont dues ;
« Attendu qu’il est justifié queLacours père a reçu , i°.
« suivant son contrat de mariage, i , 55o francs, distraccc tion faite de ses gains; 2°. 3,600 francs, suivant sa quit
te tance du 30 décembre i j 65 ; 3 0. celle de 3,000 fr. en
« un contrat de rente par lui constitué en faveur de Ga* brielle Teytard, sa belle-mère, le 1 1 avril 17 6 9 ; 40.
«• celle de 2,000 fr. en un autre contrat, du 16 septembre
« 17 7 0 ; 5 °. celle de 9,892 fr. suivant la reconnoissance
«f du 5 décembre 1780.
« En ce qui touche la valeur des marchandises et du
« mobilier provenus de Gaspard G u yot, attendu que
« Gabrielle Teytard étoit usufruitière de ces objets qui
cc ont demeuré confondus dans sa succession ;
« Attendu que la reconnoissance de 1780 comprend
ce évidemment tout ce qui, dépendoit en meubles, argent,
c< elfets de la succession de Gabrielle Teytard, qui avoit
« réuni dans sa main tout ce qui provpnoit en mobilier
ce de Gaspard Guyot;
ce En ce qui touche la demande tendante à ce qu’en
ce. cas de privation d’usufruit, Içs filles Ldcours soient tenues
ce d’acquitter, sur leurs, droits;maternels, tout ce qu'elles
ce ont reçu de leur père et de sa propre substance, aux
ce termes de leurs contrats de mariage;
« Attendu, i°. les principes que le devoir du père est
ce de doter ses filles, et que, dans le fait, il leur a fait,
« de son chef, des constitu tions particulières ; 20. que ces
« constitutions distinguent ce .qui devoit être pris sur les
ce biens maternels, d’avec cc qui éloit donnépqrLacourSj
« de sa jM-oprc substance;
�///
( >3 T)
« Attendu néanmoins que Lacours a compiTs, dans leset constitutions faites par lui: personnellement, des;biens« maternels, et qu’ il seroit injuste de lui en faire remplacer'
« la valeur en biens h lui appartenans;
a En ce qui touche la demande en restitution de la
« somme de io,ooo livres, prétendue provenue de la suc« cession de Philippine Teytax’d, et touchée par Lacours;
« Attendu, i ° . que la reconnoissance de 1780 a été sans
« préjudice de la valeur des objets provenus de la suc
ée, cession de Philippine Teytard, et qu’il a été énoncé dans
«. cette reconnoissance, par Lacours lui-même, qu’il avoit
« fourni une quittance séparée de ces objets, par-devant
«:. notaire ;
« 2?. Que cette quittance donnée par le mari à sa femme
« qui l’a prédécédé, a dû nécessairement être trouvée
« par lui dans sa succession, et que Lacours, qui en est
«„présumé rétentionnaire, doit la représenter; 3 0. que
« son refus d’en faire l’exhibition, fait naître contre lui
« une violente présomption de mauvaise.foi;
«Le tribunal déclare Gaspard Lacours privé de l’usufruit
« des biens maternels de M arie, Anne et Antoinette La« cours, filles; en conséquence, condamne ledit Gaspard
« Lacours à se désister en faveur de ses filles , des trois
« quarts des immeubles dont il est encore on possession ,
« provenant de Marie-Jeanne Guyot, leur mère, à leur en
« laisser la libre possession et jouissance; fait défenses audit
« Lacours de les y troubler; le condamne à restituer A ses
« filles les jouissances desdits immeubles, depuis le décès
« de ladite Marie-Jeaiine G uyot, suivant l'estimation qui
« en sera faite par experts dont les parties conviendront,
�C *4 )
» ou q u i, à leur refus, seront pris et nommés d’office,
« en la manière ordinaire; aux intérêts du montant des« dites jouissances, savoir, de celles antérieures à la de« mande, à compter d’icelle, et de celles qui lui seront
« postérieures , à compter de chaque perception. Con« damne pareillement Gaspard Lacours à restituer auxdites
« filles Lacours la somme de quatorze mille huit cent
« quatre-vingt-une livres dix sous formant les trois quarts
« de toutes les sommes énoncées dans les motifs du présent
« jugement, et portées par les actes des 3 février i y 55 ,
a 30 septemb. 17 6 5 , 25 février 17 6 9 , 26 septemb. 1770 ,
« et 5 décembre 17 8 0 , avec les intérêts à compter aussi
« de l’époque du décès de Marie-Jeanne Guyot ; condamne
« aussi ledit Gaspard Lacours, à représenter, dans le mois,
cc à compter de la signification du présent jugement, la
« quittance ou reconnoissance authentique énoncée en
« l’acte du 5 décembre 17 8 0 , et relative aux sommes et
« autres objets touchés par ledit Gaspard Lacours, procc venant de la succession de Philippine T e y ta rd , tante
«c de la mère desdites filles Lacours ; sinon et faute de ce
ce faire, dans ledit temps, et icelui passé, sans qu’il soit
« besoin d’autre jugement, condamne ledit Gaspard L a
ce cours à payer à ses filles les trois quarts de la somme
ce de 10,000 francs q u i, suivant la déclaration des filles
ce Lacours, forme l’objet de la quittance énoncée en la
ce reconnoissance dudit jour 5 décembre 1780 , avec les
ce intérêts de ladite somme, depuis le décès de Mariece Jeanne Guyot.
ce Sans s’arrêter à la demande en main-levée de saisie
ce et eu radiation d’inscription formée par ledit Gaspard
�3$$
C15 )
« Lacours, de laquelle il est débouté , confirme les saisie« arrêts faites à la requête des filles Lacours, entre les
« mains desdits Jean - Baptiste Roddier et Annet H éri« dières, comme des biens de Gaspard Lacours; en con« séquence, faisant droit sur les conclusions judiciaires
c< des filles Lacours, condamne lesdits Roddier et H éri« dières à vider leurs mains en celles des filles Lacours,
« des sommes dont ils se trouveront débiteurs envers
« Gaspard Lacours, jusqu'à concurrence de ce qui est dû
« à ses filles, à imputer, i°. sur les intérêts et frais, etc. •
« Faisant droit sur les conclusions de Roddier et Héri« dières, contre Gaspard Lacours, déboute ledit Lacours
« de son opposition au jugement par défaut, du 6 messi« dor dernier j ordonnons que ledit jugement sera exécuté
« suivant sa forme et teneur ; condamne ledit Gaspard
« Lacours aux dépens envers toutes les parties, et ordonne
« que le présent jugement sera exécuté, nonobstant et
« sans préjudice de l’appel. »
L ’appelant n’attendit pas la signification de ce juge
ment , pour notifier, le 26 du même m ois, par extrait,
i° . un traité passé entre lu i, comme mari de Marie-Jeanne
G u yo t, et autres prétendant à la succession de Philippine
Teytard, du 30 janvier 17 7 7 ; 2°. une q u it ta n c e dont il
n énonce pas la date, en marge de ce traité , de la somme
de 1 3 1 francs 20 centimes, ensemble des intérêts encourus
et des frais. Il prétendit par là , satisfaire à la disposition
relative h cet objet, pour faire tomber la condamnation
des 10,000 francs.
Le 12 ventôse an o 3 les causes et moyens d’appel ont été
signifiés.
�( 1 6 }
Le 22 du même mois, un jugement par défaut, a pro
noncé le bien jug'é. Il y a eu opposition , le 6 germ inal,
et il circule un mémoire imprimé sous le nom de l’ap
pelant, qui n'a point été signifié, et qui n’est signé de
personne.
Les intimées avoient d’abord résolu de ne point écrire;
mais les efforts qu’a faits leur père de les rendre défavo^
rables , même odieuses à la justice et à l’opinion publique,
les forcent d’éclairer l’une et l'autre par une publicité au
thentique de leur défense.
A une analise exacte des deux écrits de l’appelant ; suc-»
cédera la réfutation dans le même ordre.
D I S C U S S I O N .
Lacours a d’abord semblé par les conclusions, qui sont
le prélude de ses causes et moyens, limiter son appel au
dispositif du jugement, qui a pour objet la liquidation
qu’il contient des répétitions dues aux filles Lacours, du
chef de leur m ère; cependant, soit dans le cours de cette
production , soit dans son mémoire imprimé , et notam- ^
ment par sa requête en opposition, il réclame contre
l’entier jugement.
Les intimés vont donc répondre à tous les chefs de
discussion opposés par l’appelant.
I a i dot, dit-il, donnée aux fille s , et leur renoncia
tion d la succession de la mère , pourraient aisément
rem placer
�///
( *7 )
remplacer la réserve que le père étoit en droit d é fa ir e
par le contrat de m a ria g e, m ais qu 'il était inutile ,
puisque les fille s r i y devoient succéder.... Q uen te q u i
concerne ( pages 10 et n du mémoire ) les bie 7is situés
en droit écrit, la loi q u i a supprimé la puissance pater
nelle r i a pas ordojiné cette privation contre les pères ;
quelle ne s’est pas expliquée à ce sujet ; q u il riest pas
perm is d'ajouter c l ses dispositions ,*qu en ce q u i touche
les biens de coutum e, la réserve d’ usufruit étoit inu
tile , puisque sesfille s avoient été dotées ; quelles devoient
être forcloses ; quelles avoient même renoncé expres
sément aux successions paternelle et maternelle ; . . . .
que cet abandon absolu de leur part emportoit avec soi
la déchéance de f usufruit j et que s i on veut induire de
Tabolition de la puissance paternelle celle de ïu s ifr u it
que les lois anciennes accordoient au père , il ri est pas
possible, p a r une suite conséquente, de ne pas convenir
que la privation de tous les droits sans exception , sti
pulée contre les f il le s , contenoit aussi la privation de
Tusufruit à leur égard.
>
L ’appelant invoque , à l’appui de celte assertion, les
principes immuables de la saine raison, qui est la pre
mière des lois.
Ce sont précisément ces principesrde la saine raison,
que les filles Lacours opposent avec succès à leur père.
N est-il pas de la saine raison, que les descendons suc
cèdent aux ascendans ? N ’est-il pas de la saine raison, que
la servitude personnelle, qui faisoit autrefois de la puisC
�C 18 )
sance paternelle une tyrannie qui flétrissoit les tendres
sentimens que la nature fait naître , fût de plus en plus
restreinte à ces doux rapports, premiers rudimens de la
vertu, qui prescrivent aux enfans le devoir de la piété
et de la reconnoissance envers leurs ascendans , sur-tout
envers leurs pères indigens , qui imposent à ces mêmes
enfans, devenus eux-mêmes chefs de fam ille, un triple
devoir également sacré, de venir à la fois au secours de
ceux qui leur ont donné le jour, de leur propre progé
niture, de rentier corps social? N ’étoit-il pas temps que ces
anciens flambeaux des siècles de ténèbres pfdissent devant
l’éclat de la vérité, et que la France, subjuguée depuis
si long-temps par l’autorité des lois romaines, soumît
enfin les préjugés à l’autorité de la raison , et qu’après
avoir été l’esclave de ces préjugés, elle en devînt le juge?
L ’usufruit des pères étoit un reste de cette barbarie
prim itive adoptée par R om ulus, de la loi des douze tables,
qui donnoit aux pères droit de vente et de mort sur leurs
enfans. L ’adoucissement des m œ u rs, peut-être le besoin
des législateurs, en m êm e temps qu’ils réduisirent insen >
siblement l’effet de cette puissance , d’abord à la propriété
indéterminée des objets de succession et du pécu le, en
suite à une portion v ir ile , enfin à l’usufruit, bien plus
encore à une moitié d’usufruit, en récompense de l’éman
cipation , suivant les lois au cod. de bon. mat. et de bonis
quœ liberis , et par la novelle 2 2 , chap. 3 4 , ils introdui
sirent et étendirent divers modes de cessation , soit <1e la
puissance paternelle, soit de l’usufruit qui en étoit l’émânatiun.
�( 19 )
L ’inégalité, suite nécessaire du régime féodal, avoit
introduit la forclusion et les renonciations des filles en
faveur des mâles.
Nos premiers législateurs commencèrent par abolir, le 8 avril 179 1» « toute inégalité ci-devant résultant entrç
« héritiers ab intestat , des qualités d’aînés ou puînés ,
« de la distinction des sexes ou des exclusions coutu« mières soit en ligne directe , soit en ligne collatérale.......
« En conséquence les dispositions des coutumes ou statuts
« qui excluoient les filles ou leurs descendans du droit de
« succéder avec les mâles, ou les descendans des mâles,
« furent abrogées. »
L ’article 4 de cette loi, ordonne que ses dispositions
.« auront leur effet dans toutes les successions qui s’ ouvrir ront après la publication. »
Les renonciations conventionnelles ne recevoient point
d’atteinte par cette loi ; elles pouvoient encore en entraver
les résultats. Mais la loi du 28 août 17 9 2 , en abolissant
la puissance paternelle , en affranchissant à la fois, et sans
indemnité, les enfans sortis de cette puissance, et de l’usu
fruit qui en étoit l’effet’, et de toute renonciation qui
pouvoit émaner de la crainte révérencielle , ou ce qui est
la raeme chose, de cette même puissance , assura un
prompt eifct de la loi précédente, et dégagea de tous
les obstacles que les lois ai’bitraires avoient introduits et
entretenus, malgré les réclamations de la loi naturelle, cet
axiome le mort saisit le v i f , qui est une suite nécessaire
de la saine raison. Cette saine raison l’a donc enfin emporté
sur le prestige^ des préjugés qui y étoient contraires , et
qui avoient été cependant le type des lois positives.
C2
J
�M
w
C 20 )
C’est donc par les règles de la nature et de l’équité,
que D ieu , comme l’observe Domat, liv. p rél., tit. I e r ,
sect. i ere , som. 2. et 3 , a lui-m ôm e établies, et qu’il
enseigne aux hommes par les lumières de la raison ; c’est
donc par les propres armes de l’appelant, que sou système
est renversé. Or , si l’usufruit, cet effet de la puissance
paternelle qui en étoit l’unique cause , la forclusion déri
vant d’un statut coutumier , et les renonciations conven
tionnelles stipulées et voulues impérieusement par le père
par un autre effet de sa puissance, ont été anéanties par
les deux lois qui coïncident naturellement en faveur des
majeurs héritiers a 7j intestat, il est bien évident que les
lois arbitraires qui. avoient créé cette dérogation au droit
naturel ; disparoissent ; que celui-ci a recouvré toute sa
force ; que tous les raisonnemens qui ont pour objet de
rappeler les conséquences des principes éteints, viennent
se briser auprès de cette saine raison qui les proscrivoit;
enfin que c’est cette saine raison qui , seule dans cette
partie, doit être la base du jugement d’appel, comme elle a
été le motif du jugement dont l’appelant demande la réformotion: Quodvero naturalis ratio inter ornnes hornines
constituit, id apud omnes peraquè custoditur. D. L. G.
Ainsi s’écroule l’objection reproduite, sans nouvelles
p reu v es, par l’appelant, sur les effets de la d o t, de la
forclusion , des renonciations, de leur prétendue équipol
lence A une réserve qui n’auroit pas un meilleur sort. Ainsi
doit ê t r e confirmé le jugement qui a foudroyé des para
doxes aussi opposés à deux lois d'autant plus impératives
qu’elles émanent du plan d’égalité civile , principale base
du régime républicain.
�( 21 )
Mais il y a plus; si, abstraction faite de ces deux lois,
le frère des intimées fût décédé avant la mère; et que les
filles préférant, après le décès de Marie-Jeanne Guyot, la
réalité de cette succession à l’espoir éventuel de la succes
sion paternelle, eussent demandé contre le père la priva
tion d’usufruit, en vertu de l’art. X L V III du lit. 14 de
la coutume d’Auvergne, elles eussent également réussi,
parce que c’eut été la faute du père de n’avoir pas prévu
l’événement, par une réserve expresse ; parce que la loi
n’établit aucune équipollence, et qu’il ne peut pas être
suppléé à l’expression exigée rigoureusement par le statut.
.C’est l’avis du dernier commentateur, deuxième et sixième
question ; il cite une sentence de la sénéchaussée d’A u
vergne, de 1779- C’est aussi la doctrine de D uperrier, de
Catelan, pour les pays de droit écrit, d'après les lois de
bo?iis quœ liberis et de emancipat.
Au surplus, les lois des 8 avril 17 9 1 et 28 août 179 2, ne
laissent rien à désirer, et on doit juger combien peu l’ap
pelant a compté sur ce moyen principal, par les efforts
qu’il fait de rendre caduques les dispositions secondaires
de ce jugement, en attaquant et la liquidation, et le mode
de payement qu’elles renferment
Avant d’entamer cette discussion, il convient d’établir
les situations chronologiques des fortunes de . Gaspard
Lacours et de Marie-Jeatine G u yo t, sa femme.
Le m ari, par son contrat de mariage de 1766, fut cons
titué par ses père et mère , en une somme de 1,400 francs,
payable seulement après leur décès. Il fut de plus institué
héritier par Julien Lacours, son oncle.
Lu femme Lacours, indépendamment des institutions
�( 22 )
dont elle ne devoit recueillir l’eiTet qu’après l’ouverture
des successions de ses père et m ère, reçut eu avancement,
un ameublement estimé 200 francs, i , 5oo fr. en numé
raire , une septerée de terre et une vigne de quatre œuvres
et demie , pour jouir dès l’instant du mariage.
Jean Lacours, père de Gaspard, est décédé environ en
176.5; sa veuve n e ju i survéquit qu’environ trois ans.
C’est à cette dernière époque que leur fils Gaspard L a
cours eut quelques parcelles de biens, dont la valeur étoit
absorbée par les dettes; car laTourdias, sa femme, avoit
été obligée de se faire séparer quant aux biens , et il étoit
reconnu dans la famille que Jean Lacours étoit mort in
solvable.
Julien Lacours, oncle de Gaspard, mourut le même
jour que Jean Lacours, son frère ; mais Antoinette Triozon, sa femme, lui ayant survécu environ douze ans,
Gaspard Lacours n’a recueilli cette succession, qu’environ
en 1777. Elle consistoit dans une mauvaise maison, rue
du P o r t, qui étoit louée 60 francs par an , et dans trois
œuvres et demie de vigne. Lacours a été encore obligé
de payer beaucoup de dettes sur cette hoirie.
Marie Tourdias laissa une succession tellement obérée,
que Lacours, son fils, y répudia.
Si on doit réduire h presque zéro les successions des père,
mère et oncle de Gaspard Lacours, on va remarquer com
bien étoit féconde la fortune de Marie-Jeanne Guyot.
Gaspard Guyot et Gabrielle Teytard, ses père et m ère,
gens simples, ennemis de tout lu xe, n’ayant que deux
filles, outre une forlune au-dessus du médiocre, en im
meubles, étoient parvenus par leurs épargnes, ù avoir un
�c
)
numéraire considérable, pour l’activité de leur commerce.
Indépendamment des fabriques de toiles, pour lesquelles
ils employoient journellement douze ouvriers, ils ache
taient de très-grandes quantités de pièces de toile et
d'étoffe, et ils en vendoient à chaque foire de Clermont,
aux Languedociens, pour 8 à 10,000 francs. Ils n’ont jamais
eu recours à des emprunts pour entretenir ce commerce,
et on va se convaincre combien précieuse étoit à Gaspard
Lacours, cette mine d’industrie.
C’étoit dans ce trésor que Lacours alloit puiser, avec
cette assurance que lui présentoit la prédilection marquée
qu’avoient ses beau-père et belle-mère pour sa femme, leur
fille.
Lorsque cette épouse épanchoit ses chagrins et ses
regrets dans le sein de ses filles, elle calculoit par détail,
jusqu’à 60,000 f r . , ce que son mari avoit reçu pour elle.
Mais si Gabrielle Teytard, femme de Gaspard G u yo t,
surpassoit en intelligence et en activité son m ari, Philip
pine Teytard sa tante ne lui cédoit en rien.
Cette fille , que Gaspard Lacours présente comme une
misérable domestique, avoit fait un commerce considé
rable de vin ; elle l’achetoit ordinairement dans le temps
des vendanges, au comptant, de certains vendeurs habi
tués et de confiance ; elle leur laissoit un bénéfice pour
la revente, et chaque année elle faisoit des profits d’au
tant plus surs, quelle ne dépensoit presque rien.
Ce lut cette tante qui chérissoit tendrement MarieJeanne G u yot, femme Lacours , sa petite-nièce , qui crut
acheter, en faveur de sa bien-aimée, de bons procédés de
la part de son m ari, en venant à leur secours par une
�Ch )
somme de 3 , 5oo fr ., dont Gaspard Lacoilrs fît reconnoissance par acte notarié, du 30 septembre 17 6 5 , au profit
de sa femme , comme lui ayant été « donnée manuelle« ment, est-il dit, par demoiselle Philippe Teytard , sa
« tante , habitante de la ville de Riom ; et laquelle somme
« ledit sieur Lacours a employée dans son commerce. Les
« présentes déclarations et reconnoissance faites par ledit
« sieur Lacours pour la sûreté de sa conscience , et à la
a restitution de laquelle , le cas arrivant, il a obligé tous
« ses biens présens et à venir par les mêmes forces et
« compulsions que de ladite somme portée par ledit contrat
« de mariage , A V E C L A LIBERTÉ A L A DEMOISELLE
« G
uyot
d ’e n
d isposer
comme
DE BIENS AVENTIFS-
« ET PARAPHE RNA UX . »
GabrielleTeytard, devënueveuve Guyoten I765,etusufruitière des biens de son mari, continua avec le même succès
son commerce; et ce fut sans l’afFoiblir qu’elle se dépouilla
d’une somme de 5 ,000 f r . , qu’elle donna en rente à son
gendre L a c o u r s , par deux actes notariés , des 25 février
1769 et 30 septembre 1770.
Il est important de remarquer que, par ces actes,
Lacours consentit expressément, et par condition du bail
de l’argent, que ces rentes sortiraient à sa femme, nature
de bien aventif et paraphernal, malgré qu’elle fût héri
tière instituée de Gabrielle Teytard.
Il y a entour trente ans, que Gaspard Lacours fit l’ac
quisition de la métairie de Fontlïède, de valeur aujour
d’hui de 30,000 fr. Il ayoit alors touché', oiitre la dot de
sa femme , soit de Philippine, soit de Gabrielle T eytard,
scs tante et belle-mère, 8, 5oo fr. Il acheta aussi à peu près
à
�J(>2>
( 2 5 )
à la même époque, de la veuve Tourdias, des portions
qui revenoient h ses deux enfans dans les deux maisons j
rues des Gras et de Saint - Barthélémy. Lacours les fit
abattre et reconstruire ; il a ensuite éprouvé un procès,
sur la demande en désistement formée contre lui par les
enfans Tourdias , des objets vendus par leur m ère, et il
en a coûté à L acou rs, pour assoupir cette affaire , plus
de 5.000 fr.
L ’usufruit des biens d’Amable Guyot ayant pris fin
par le décès de sa veuve , Gabrielle Teytard, en janvier
1 7 7 3 , le 30 avril suivant, il y eut traité entre Lacours
et Bonnet Gauttier, beaux-frères. Celui-ci, héritier de
Gabrielle Gauttier, sa fille , réclamoit par représentation
d’Amable Guyot, sa m ère, en propriété, la moitié des
biens délaissés par Amable Guyot en pays de droit écrit, et
l’usufruit de la moitié de ceux situés en pays de coutume.
Ce réclamant fut désintéressé, au moyen de la libération
de ce qu’il avoit reçu par son contrat de mariage , et de
ce qu’il devoit personnellement, au moyen de la propriété
:de quelques immeubles, au moyen enfin d’une somme de
800 fr. une fois payée, pour, est-il dit, lui tenir lieu de
Tentier usufruit.
On remarque, dans ce traité, une contradiction bien
révoltante; il fut reconnu une vérité constante, que la
maison et le domicile de Gaspard Guyot étoient situés dans
le faubourg de Saint-Alyre, près de Clermont, régis par la
coutume, et que c’est sur la moitié de ces biens, consi'quemment sur la moitié du mobilier dont la disposition
est réglée par le domicile, que Gauttier, comme héritier
de sa fille, avoit l'usufruit; et cependant Bonnet Gaultier
D
�( 2 6 )
comprend dans la cession qu’il a consentie, sa portion en
propriété dans le mobilier de la succession de Gaspard
Guyot, son b eau -p ère; et cet objet, dont la propriété
entière appartenoit à la femme Lacours, mère des intimées,
fut néanmoins acheté moyennant trois sommes réunies,
formant la somme totale de 2,700 fr ., peut-être encore
moyennant la cession qui lui fut faite de la partie de rente
de i , 5oo francs : les intimées font, contre cet acte, toutes
réserves et protestations.
Ce fut encore, environ dans ce temps, que Lacours,
p è re , échangea avec le citoyen Boutarel le domaine de
Fontfrède pour celui de Ternia, dans le Marais, moyen
nant le retour pour plus-value de ce dernier, d’environ
16,000 francs que Lacours compta à Boutarel. C’est depuis
1792 ou 17 9 3 , que Lacours est rentré dans la propriété
du domaine de Fontfrède, et que la famille Boutarel a
recouvré le domaine de T ern ia; mais Lacours a eu pour
retour environ 30,000 francs, qui forment l’objet des saisiearrêts entre les mains de Roddier, dTIéridières et des
Boutarel.
On a dit que Philippine Teytax*d étoit décédée en i ’"77,
et que Lacours a fait donner copie, par extrait,d’un acte
qu’il passa au sujet de cette succession , le 30 janvier 1777,
ensemble d’une quittance dont il ne fit point mention de
Ja date, ni dans l’exploit du 28 thermidor an 7 , ni dans
les causes et moyens d’appel, mais qu'il apprend, dans son
mémoire imprimé, être du 6 décembre 1789.
Par la connoissance que les intimées ont prise de ces
actes, il paroît, i ° . que Philippine Teylard avoit des im
meubles, puisqu’elle en a légué un demi-quart à chacun
1
�( 27 )
de deux de ses cohabiles à lui succéder, par son testament
du 8 avril 17 7 6 ; 2°. qu’il fut fait des réserves des sous
tractions faites dans sa succession ; 3 0. que l’on doit néces
sairement inférer de la déclaration qui termine cet acte,
de la part des Vidal et Régnai, de garantir Teytard et
Lacours de toutes poursuites h raison d’autres titres de
créance, que tout n’a pas été terminé par cet acte, ou
qu’il y a eu des omissions ou des réticences qui supposent
un actif beaucoup plus considérable dans cette succes
sion.
De même qu’en 17 7 3? les deniers reçus de Gabrielle
Teytard servirent à Lacours pour faire des acquisitions,
de même les deniers provenus de PhilippineTeytard furent
employés par lui en augmentation du domaine de T ern ia,
soit par des acquisitions de prés et terres, soit par des
constructions entières de biitimens, par des plantations,
par des jardins.
Lorsque Lacours a été évincé du domaine de T ernia,
il a vendu séparément tous les objets qu’il y avoit réunis
par acquisitions.
A ce tableau mêlé de certitude et de désirs d’entière
démonstration, il faut ajouter l’observation que fait luimême Lacours, page 2 de son m ém oire, « qu’il a eu
« de ce mariage seize enfans.......que ces enfans ont été
« élevés d une manière convenable : 011 pourroit même
a- dire qu ils ont reçu une éducation au-dessus des facultés
« du pore. Les filles ont été placées l o n g - temps dans les
« couvens; le fils a eu des maîtres de latin, de danse,
« et rien n’a été négligé à cet égard. »
On 11e surchargera pas ce tableau de l’historique qui a
D 2
�(
2
8
}
réduit le nombre de ces seize enfans à celui de quatre.
On a fait mention de la femme Chollet ; on instruira bien tôt
de la constitution de dot qui lui fut faite. Il existoit encore
une fille décédée après avoir été religieuse dans la com
munauté dite de N otre-D am e, à R io m , pour laquelle
Lacours avoit dépensé environ 4,000 francs. Enfin il y
avoit encore un garçon qui étudioit la langue latine.
Maiscequeles intimées ne peuvent se dispenser d’ajouter
pour la défense de leur cause, c’estl’énormité de dépenses
que Lacours , sans autre ressource industrielle que celle de
l’état de chapelier, a faites pour élever une nombreuse
fam ille, donner à plusieurs de ses enfans une brillante édu
cation , faire des acquisitions aussi considérables , des cons
tructions ruineuses , et de soutenir des procès dispen
dieux, dont un dernier lui a coûté plus de 26,000 fr.
Il lui restoit, en 1780 , sept enfans; il se proposa d’établir
l’un d’eux, Gabrielle Lacours, avec Chollet.
La femme Lacours profita de cette circonstance , pour
exiger de son mari ce qui avoit été refusé à de longues
réclamations., à des reproches, à des larmes multipliées,
la reconnoissance de ce que son mari avoit recouvré de
ses biens dotaux et aventifs.
Lacours se détermina aussi difficilement qu’imparfai
tement à cet acte de justice; et abusant à la fois de son
autorité et de sa répugnance à faire cette reconnoissauce,
il crut mettre à profit la timidité , la crainte de JYIaricJeanne (îuyot.
Par acte du 5 décembre 1780 , « il reconnut avoir reçu
�s6t
( 29 \
« depuis environ sept ans 9,892 f r ., tant en deniers comp« tans qu’en meubles meublans , argenterie, effets et mara chandises en toile; tout quoi lui est échu et advenu par
« le décès de demoiselle GabrielleTeytard,sa m ère,veuve
« de sieur Gaspard Guyot, son père, m archand de toile
« en cette v ille , et à laquelle demoiselle Teytard, ladite
« dame Lacours , a seule succédé d’abord après son décès ,
« arrivé depuis environ s^pt ans ; dans laquelle susdite
« somme ne sont point compris les contrats de constitu« tion de rente qui appartenoient à ladite demoiselle
« T eytard , et qui font partie de sa succession , dont ledit
« sieur Lacours jouit c o m m e e n a y a n t l ’ u s u f r u i t ;
« laquelle somme ledit Lacours a assignée sur tous les biens
« présens et à ven ir, pour, par ladite demoiselle Guyot
« son épouse, y avoir recours A r n È s l e d é c è s d e s o n
u M A R I , sans préjudice des constitutions exprimées par
« leur contrat de mariage, et des gains et avantages ma
te trimoniauxy énoncés; tout quoiladitedeinoiselleGuyot,
« se réserve de même que tous biens aventifs à elle échus
« par le décès de demoiselle Philippine Teytard , sa tante
et maternelle , LESQUELS LEDIT SIEUR L A C O U R S A
« REÇUS SÉPARÉMENT , ET DÉCLARE EN A V O I R FOURNI
« QUITTANCE D E VA N T NOTAIRE. »
Cet acte, du 5 décembre 17 8 0 , fut passé dans l’étude
du notaire Chevalier , à Clerm ont, et c’est trois jours
après, le 8 , que Gaspard Lacours et sa femme stipulè
rent en personne dans la maison de la demoiselle Brizard,
veuve Ciiollet, à Aigueperse, dans le contrat de mariage
de G a b r i e l l e Lacours , leur fille , avec Claude Chollet.
Ils lui constituèrent un trousseau en meubles ou argent,
�( 3° )
évalué à 1,200 f r . , et une dot de 10,000 f r . , y compris
1,000 fr. pour la réserve contenue dans le contrat de
mariage du 3 février
, à elle légué par Gabrielle
Teytard dans son testament, du 10 mai 1766. Il fut au
surplus d it, qu’ily avoit dans cette constitution,la somme
de 1,000 fr. seulem ent, du chef de la mère de la future.
Par le contrat de mariage de Marie Lacours, l’une des
intimées, avec Blanzat, du 20 février 17 8 6 , ses père et
mère lui constituèrent pour trousseau, en nippes, meu
bles et argent, 1,700 fr. ; un capital de rente, de 2,461 fr. ;
une terre et deux vignes ; et enfin 3,000 fr. payables après
le décès des Lacours et Guyot. La terre et les vignes dé
livrées, et la somme de 1,000 fr. dans les 3,000 fr. à
recevoir après le décès, furent déclarés être du chef de
la Guyot, femme Lacours.
Par celui d’Anne Lacours avec Bertet, ses père et mère
lui constituèrent un trousseau de 5oo f r ., 1,200 fr. en
argent, un contrat de rente au principal de 1,600 fr .,
une vigne estimée 600 fr ., et 3,000 fr. payables deux ans
après le décès desdits père et mère ; la vigne de 600 fr.
et 1,000 fr. à prendre dans les 3,000 fr., furent stipulés
du chef maternel.
Enfin par celui d’Antoinette Lacours, autre intimée,
avec Barraud, du 24 février 17 9 3 , il lui fut constitué par
ses p è r e et m ère, un trousseau de 5oo fr. une vigne, et
une terre jadis vigne, pour 1,800 fr. et une somme de
3,000 fr. payables après les décès desdits père et m ère,
dont deux mille lurent déclarés être du chef maternel.
Ce détail étoit indispensable pour préparer à l’appré
cia fion des moyens inventés p a r l’appelant. Son but a été
�( 3 1 ■;
d’équivoquer sur la clarté des stipulations employées dans
les actes , d’obscurcir la vérité, sur-tout d’éluder les con
séquences qui résultent naturellement de la vacillation
continuelle dans ses procédés, et d’une tendance soutenue
dans son imagination cl amoindrir l’effet des reconnoissances, qu’il ne se détermina sans doute à consentir,
que pour éviter l’éclat dont il étoit menacé de la part de
Marie-Jeanne Guyot.
C’est le moment de présenter ce clief-d’œuvre de combi
naison de Lacours, sinon afin d’annuller la liquidation
prononcée par le jugement dont est appel, au moins pour
faire tomber indirectement la disposition qu’a confirmée la
privation d’usufruit, déjà ordonnée parles lois et par la
coutume. Tous ses efforts ont pour objet de changer, le
vrai sens des actes, pour attribuer ïi libéralité ce qui
émane d’une obligation indispensable et certaine, pour
faire renvoyer après son décès, un payement qu’il a été
condamné de faire présentement.
Commençons par ce' qui est provenu de Philippine
Teytard; 3,5oo fr. d’un côté, pour la reconnoissance du
30 septembre 17 6 5 , et 10,000 fr. portés par le jugement
dont est appel.
L appelant a combattu ces deux chefs l’un par l’autre.
La reconnoissance, d it-il, ne renferme qu’une libéra
lité déguisée. Il est invraisemblable qu’une domestique pût
exercer aussi gratuitement une telle générosité.
a J e n’ai jamais vu Philippine Teytard , et je n’ai jamais
« r ie n reçu ; j’eusse fait une reconnoissance: cette fille,
« par intérêt pour Jeanne G u yo t, n’eût pas manqué de
« l’exiger. Tout au moins s’en fut-elle réservé la jouis-
�(3 2 )
« sance. Quant aux 10,000 francs, il est inconcevable que
« le tribunal ait pu adjuger cette somme sans aucune es« pc*ce de renscigncmens, de connoissance de cause. Le
<r traité que j’ai passé avec les cohéritiers, du 30 avril 1777,
« et que j’ai produit lors du jugement du 14 fructidor
« an 7 , prouve que Philippine Teytard ne laissa qu’un
« mobilier fort modique, dont elle avoit disposé plusieurs
« années avant sa mort, et seulement une somme de 900 f.
« dont je 11e touchai que 13 1 fr. 5 sous , à la vérité pos«• térieurement à la x-econnoissance du 5 décembre 178 0 ;
« mais il est évident que la rcconnoissance se réfère à cet
« acte................. Du reste, les x-econnoissances des 30 sep« tembre et 5 décembre 1780 , ne sont que des libéralités
« déguisées. Lors de cette dernière, j'étois malade au
« point que l’on désespéroit; et ces reconnoissances par« venues à la connoissance de mes enfans, excitèrent leur
« réclamation ; tils ne se bornèrent pas à des plaintes, ils
<* passèrent bientôt aux reproches, aux menaces envers
« la mère : c’est ce qui me détermina à lui léguer par mon
« testament clos, en 1790, l’usufruit de tous mes biens,
a et je confirmai les reconnoissances que je lui avois faites;
« mais je ne fis tout cela qu’afin de maintenir Je respect et
« la soumission de mes enfans envers leur mère. »
Ces moyens sont épars, soit dans les causes et moyens
d’appel, soit dans le mémoire imprimé, avec ces deux
différences, i ° . que là, la maladie supposée à toute ex
trém ité, dégénère ici en simple fièvre ; 20. que là, le tes
tament de 1790 annonce une confirmation des reconnois
sances faites à la femme, et qu’ici il n’en est fait aucune
mention.
Qu’imporle
�J7 I
( 33 )
Qu’importe à la vérité, à la clarté des expressions de
l’acte du 30 septembre 176 5, que Lacours ait vu Philip
pine Teytard, et qu’il ait reçu d’elle directement ou par
l'intermédiaire de M arie-Jean n e Guyot, la somme de
3 ,5oo francs? Les termes de la reconnoissance ne cons
tatent-ils pas ce dernier fait? La sûreté de sa conscience,
qui en a été le m otif, n’exclut-elle pas toute idée de li
béralité? Si Lacours n’eût entendu que stipuler une li
béralité, auroit-il souffert que Maric-Jeanne Guyot, sa
femme, exigeât, dans cet acte, cette clause : « Avec la
«■ liberté, à la demoiselle Guyot, d’en disposer comme de
« biens aventifs et paraphernaux ? »
De ce que Philippine Teytard n’a pas paru dans cet
acte, et de ce qu’elle ne s’en est pas réservé la jouissance, il
résulte deux conséquences naturelles, et elles se rétorquent
contre l’appelant; la prem ière, qu’elle ne vouloit point
passer aux yeux de ses autres parens, ni de personne,
pour avoir de l'argent; la seconde, que ce n’étoit qu’un
léger superflu des sommes considérables qui formoient son
commerce secret : ces deux inductions s’accordent parfai
tement, et avec la déclaration faite par Lacours, dans l’acte
du 5 décembre 17 8 0 , qu’il avoit reçu d’autres sommes
provenant de Philippine Teytard avant cette époque, et
avec les résultats que présentent l’acte du 30 janvier 17 7 7 ,
et la quittance en m arge, du 6 décembre 1789.
Ce n’est pas inutilement que Lacours, pressé autant que
fâché de faire la reconnoissance du 5 décembre 17 8 0 ,
a déclaré qu’ il avoit fait une quittance séparément et pardevant notaire , des biens aventifs échus i\ sa fem m e,
p a r le décès de Philippine Teytard. Il ne pouvoit pas
E
�( 34)
être question de l'objet de la quittance postérieure de
neuf ans, à 1780. Cette quittance d e ^ S c ) , eu marge
de l’acte de 17 7 7 , expédiée sur papier du timbre anté
rieur à lu révolution , étoit produite, selon l’aveu de
I<acours, lors du jugement du 14 fructidor an 7 ; et il
11’en a pas fait la même application que sur l’appel.
Cette déclaration ne forme-t-elle pas une preuve par
écrit contre Lacours? ne présente-t-elle pas une vrai
semblance que, soit à titre de dépôt, soit par don manuel,
au lit de mort, il ait reçu cette somme de 10,000 francs,
qu’il en a fait réellement une reconnoissance notariée,
peut-être par un notaire étranger aux deux villes, ou qu'il
a seulement dit à sa femme, le 5 décembre 178 0 , que
cette reconnoissance existoit, afin de prévenir la demande
que Marie-Jeanne Guyot pouvoit former contre lui, et
les preuves qu’il étoit possible à sa femme d’articuler et de
faire pour établir sa réclamation ? Ce qui donne un degré
de certitude à cette vraisemblance, c’est la réunion des
circonstances, i°. que le don secret de 3,5oo f r ., et sans
réserve de jouissance de la part de Philippine T e y t a r d ,
annonce une dissimulation et des richesses pécuniaires chez
cette fille; 2 0. qu’elle avoit disposé de ce qui étoit appa
rent, par des donations particulières entre-vifs et testa
mentaires, des années 1772 et 17 7 6 ; 30. que les réserves
de Lacours, par l’acte de 17 7 7 , de se pourvoir pour sous
tractions, font présumer ou qu’il accusoit pour prévenir
qu’on l'accusat, ou qu’il a traité particulièrement de l’objet
de ces soustractions; 40. que la décharge qui termine cet
acte de 17 7 7 , enveloppe 1111 mystère ténébreux qui fait au
moins présumer qu’il existoit d’autres sujets de réclama-
�» 3
( 3 5 )
tions, de libérations ou de compensations. Si, lors de l’acte ;
du 5 décembre 17 8 0 , Lacours n'eut détourné l’attention
de Maric-Jeanne Guyot, par l’assurance qu’il lui-donna
d’une quittance antérieure, il se fût, sans doute, élevé
une discussion entre le mari et la femme. Lacours voulut
l'empêcher ou la prévenir, sinon par la vérité, au moins
par le stratagème, en lui disant qu’il existoit une recounoissance particulière, notariée. Lorsque les filles Lacours
ont articulé 10,000 francs pour tenir lieu du rapport de
cette quittance, c’est d’après la certitude que leur a donnée
leur mè re : et dans l’état où s’est présentée la cause devant
les premiers juges, pouvoient-ils décider différemment,
ou d’accorder les 10,000 francs, ou d’ordonner le rapport
de la quittance dont Lacours avoit annoncé authentique
ment l’existence? Ces juges pouvoient-ils annuller la dé-.,
claration faite librement par Lacours, en présence de sa
femme, dans l’acte du 5 décembre 17 8 0 , de l’existence
de cette quittance? Aujourd’ hui même que la quittance
de 1789 ne peut suppléer celle annoncée exister avant
l’acte du 5 décembre 17 8 0 , que reste-t-il à la justice ? nulle
autre ressource que celle de déférer le serment in litem
aux femmes intimées , et qu’elles offrent, qu’en tant qu’il
est de leur connoissance, d’après la déclaration de leur
m ère, Lacours, père, a reçu 1 0 ,0 0 0 francs de la succes
sion de Philippine Teytnrd, au par-dessus des 3,5oo fr.
contenus dans la reconnoissance du 30 septembre i y 65 .
C’est le seul parti à prendre; il est commandé par les
principes et par les circonstances.
Ou Lacours a dit v ra i, en assurant sa femme que cette
E 2
�I
(Z6 )
reeonnoissilnce particulière existoit, et, clans ce cas, c’est
uue mauvaise foi d’en refuser le rapport ; ou il eu a im
posé, et,alors c’est un dol. Dans les deux cas, la mauvaise
foi et le dol ne peuvent profiter à celui qui les commet,
pour retenir injustement ce qui ne lui appartient pas ; il
est constant qu’en vertu de la déclaration laite par le père,
dans l’acte du 5 décembre 1780 , il doit être condamné à
payer uue somme quelconque : il n’est question que d’en
déterminer la quotité , et dès-lors cette quotité ne peut
être réglée que par le serment ùi /item. Tout ce que l'on
pourroit ajouter, ce scroit d’y joindre une preuve de com
mune renommée; mais cette preuve d’une industrie prou
vée clandestine, remonte à plus de trente ans, et c’est par
le dol personnel de Lacours , d’avoir fait mention d’ une
quittance qu’il ne rapporte pas, que Marie-Jeanne Guyot
ne fit pas les preuves qu’il lui auroit été au moins possible
alors de proposer; et certes, d’ un côté , une somme de
10,000 francs n’est pas exhorbitante pour une fille indus
trieuse , q u i, onze ans auparavant, avoit fait un présent do
3 , 5 oo fr. ; d’un autre côté, Lacours mérite-t-il quelque
confiance, quelques égards ? lui qui annonce à sa femme
une reconnoissance qu’il ne rapporte pas ; lu i, qui s’est
emparé de tous les papiers qu’avoit sa femme à son décès;
lu i, qui n'a pas craint de produire dans son dossier les
expéditions des actes délivrés ¿\ sa femme; lu i, qui défioit,
dans le principe du procès, sesenlansderapporterdes titres ;
lui q u i, si 011 en croit au bruit public , a fait brûler après
la mort de sa femme beaucoup de papiers qui établissoient
les répétitions qu’elle avoit prétendre; lui enfin, qui,
�S ïJ
(37 )
dans tous les actes qu’il a passés au sujet des recouvremens
des biens dotaux et aventifs , n’a cherché qu’à y mettre
de la diffusion, de l’insuffisance , de l’incertitude.
Enfin , il y auroit encore un parti qui ne doit être re
gardé que comme très-subsidiaire, et qui paroît ne pas
devoir être pris d’après le titre du 5 décembre 17 8 0 ; ce
seroit de surseoir à faire droit sur ce chef, jusqu’à l’ou
verture du testament queLacours a appris lui-meme avoir
fait devant Chevalier, notaire à Clermont, en 17 9 0 , et
cju’il dit contenir des reconnoissances, ou ratifications de
rcconnoissances, en faveur de Marie-Jeanne G uyot, sa
femme. Il n’a pas répété cet aveu dans son mémoire im
prime ; mais il suffit qu’il existe dans ses causes et moyens
d’appel ; en tant que de besoin les intimés acceptent cet
aveu, et ils invitent Lacours à consentir que cet acte de
vienne public. S’il ne défère pas à cette invitation, ce n’est
certainement que parce qu’il en redoute l’événement.
La prétendue maladie qui faisoit désespérer du rétablis
sement de la santé de Lacours, et le langage comme le
sentiment supposés aux filles Lacours, décèlent la per
suasion intime de l’appelant de l’indébilité de l’acte du
5 décembre 1780.
Quant à l’allégation de la maladie, elle est littéralement
démentie par l’acte même du 5 décembre 178 0 , et par le
contrat de mariage passé à Aigueperse trois jours après,
le 8 décembre 1780.
Le premier de ces actes constate que Lacours sc trans
porta, avec sa femme, chez le notaire, et la contexture
de la rédaction prouve les débats et les souvenirs des objets
�i i i
( 38 )
en détail, dont résulta le total des fractions qui fut porté
à 9,892 francs.
Il est’prouvé par le second, i°. queLacours se transporta
à Aigueperse; qu’il médita sur la dot qu’il constitua à sa
fille, sur la réversion qu’il stipula.
Il est rai'e, quand on s'écarte de la vérité, qu’on ne
tombe en contradiction.... Selon les causes et moyens d'ap
pel, Laconrs êtoit alors très-m alade; on dcsespétoit
que sa santé pût se rétablir. Selon le mémoire im prim é,
page 6 , il avoit gardé les fièvres depuis long-temps.
Quant h la sensation supposée aux filles Lacours sur les
causes, sur les effets de ces reconnoissances , l’invraisem
blance se joint à la fausseté.
Le sexe et l’âge des intimées peuvent-ils d’abord faire
présumer des calculs, des reproches , des menaces si op
posés à leur inexpérience, à la confiance et à la douce
affection envers une mère qui en étoit autant digne , aux
emportemens et aux mauvais tvaitemens qu’elles éprouvoient fréquemment de la part de leur père , et qu’on cite
encore dans le voisinage de l'habitation Lacours, comme
des traits inconcevables?.........................................................
Il est aisé de juger sous combien de rapports l'intérêt
des filles Lacours étoit que leur père rendît pleine justice
à leur m ère, si l’on considère la conduite qu’il a tenue
pour l’administration de sa fortune, depuis le décès de
IVlarie-Jeanne Guyot; les intimés voudroient bien que le
public fût aussi circonspect sur les véritables causes de ce
procès .........................................................................................
�Srr
C 39 )
« Au fond, continue Gaspard Lacours ; la reconnoissance du 5 décembre 178 0 , n’est qu'une libéralité dé
guisée. Dans le fait, il est impossible que Gabrielle
Teytard eût 9,892 fr. puisque l’inventaire du mobilier
de Gaspard G u yo t, d’autant moins suspect, qu’il avoit
pour contradicteur Bonnet Gauttier,qui avoit fait appo
ser les scellés , ne présentoit qu’une valeur de 1,206 fr.
dans le droit; il faut plus juger des conventions par le
fait que par les expressions, poliùs idquod actum quàm
id quod diction sit sequendion est. Dès que cette reconnoissance ne sera réputée que comme libéralité,
Lacours a pu y apposer la condition qu’il lui a plu, de
ru payer le montant qu’après son décès. Les dispositions
faites par des personnes malades, ont été souvent regar
dées comme suspectes. C’est par ces motifs que les donationsentre-vifsdégénéroienten donations àcausedemort.
O r, si c’est une libéralité, on ne peut pas se refuser au
délai du payement. C’est ainsi que le tribunal civil l’a
jugé dans la cause d’entre un nommé M argot, de Combronde, et la fille naturelle de sa défunte femme,
Margueritte Pouzolz. Quant aux contrats de rentes, ils
ne confèrent que le droit de percevoir les revenus an
nuels, parce que les filles Lacours n’ont pas plus de droit
que Gabrielle Teytard, leur m ère; parce que les filles
Lacours n avoient pas formé l’action principale en rem
boursement des capitaux , ce qui eût exigé de passer au
bureau de conciliation ; parce qu'enfin , n’y ayant pas
eu d’oppositions de leur part sur les ventes des deux
maisons, elles étoient censées avoir renoncé à la de
mande en remboursement.»
�(4 0 )
Ce n’est que sur l’appel que Lacours a hasardé des con
ceptions aussi futiles. Mais est-il recevable à attribuer, au
jourd’hui, à donation, à donation à cause de mort, à des
calculs conjecturaux des rcconnoissances, dont lui-même
a articulé avoir t o u c h é le montant? N ’a-t-il pas dit for
mellement, lors du jugement du 14 fructidor an 7 , « que
« tout ce qu’il a t o u c h é , s’élève à une somme de 21,292
« fran cs.. . . ? » N ’a-t-il pas compris dans cette somme les
9,892 francs? Ne s’est-il donc pas accordé avec la lettre de
l’acte du ‘5 décembre 17 8 0 , pour rappeler qu’il a réelle
ment TOUCHÉ les sommes détaillées, qui sont l’objet de
cette reconnoissance? L ’evit-il fait s’il eût imaginé alors,
que pour le besoin d’un appel, il substituerait le mot de
libéralité à celui d’obligation ?.
Au surplus, les 9,892 francs, montant de la reconnois
sance, n’ont pas été seulement composés des objets inven
toriés après le décès de Gaspard Guyot ; ils l’ont été aussi
de l’argent monnoyé et des effets de Gabrielle Teytard, non
compris dans l’inventaire, ou qu’elle avoit accrus par son
commerce depuis 7 à 8 ans. Le dessaisissement de sa part
de 5,ooo fr. donnés en rente à son gendre, prouve qu’elle
avoit pardevers elle assez de fonds pour l’entretien de cette
industrie. Du reste, d’un côté, l’évaluation des objets inven
toriés à 1,206 francs, n’avoit d’autre objet que de fixer la
pexxeption du fisc. D ’après le relevé fait des articles, les
valeurs s’élèvent à plus de 4,000 francs, et le dépouillement
des inventaires qui ne comprend que 36 francs en argent,
suffit pour établir l’étendue du commerce des mariés Guyot
et Teytard : d’un autre côté, Gautlier n’avoit rien pré
tendre ni contre Gabrielle Teytard ni sur sa succession.
N ’oublions
�^
( 4* )
! N ’oublions pas que d’une part, il y avoit à prélever d’abord
la dot de Gabrielle Teytard, puis i , 5oo fr. de la part de
Marie-Jeanne G u yot, en vertu de son contrat de mariage
et du testament du 10 mai 1766 ; d’un autre côté, Bonnet
Gauttier n’avoit que la moitié en usufruit du mobilier pro
venant seulement de Gaspard Guyot, dont le domicile étoit
en pays de coutume.
On n’avoit sans doute pas besoin de cette explication ,
pour appuyer la reconnoissance du 5 ^jH^bre 17 8 0 , dont
la clarté dans les expressions comme dans les causes, ne
laisse aucune équivoque.
Lacours eût été , sans doute, le maître de donner tout
son bien à sa femme. Aucune loi ne le lui défendoit. Il n’auroit donc pas eu besoin de feindre d’avoir touché les objets
articulés. Le faitest donc constant qu’il a touché réellement.
-L ’intention de manifester ce fait, n'a pas pu être plus claire
ment expliquée. Ainsi, les maximes invoquées par l’adver
saire, qui ne s’appliquent qu’aux contrats de vente , sont
étrangères à l’espèce; et s’il y avoit de l’ambiguité ou de
l’obscurité, elles s’interpréteroient contre lui. In ambiguis
pro dotibus respondendum. L . in am biguis, ff. de ju re dot.
Am bigua p etitio , vel exceptio aut oratio interpretatur
secundùrn intentionem proferentis.lL.Siquis intentionenij
67, dejudiciis. Am biguitas in stipulatione contra stipulatorem est interpretenda.En voilà assez pour l’ambiguité.
Quant au doute, les principes sont aussi certains en faveur
de la lettre de l’acte. In dubio enim standum est instru
mento not. in L. ult. cod. dg fuie instrument.
Bien plus, 011 doit conjecturer combien il en a coûté à
Lacours de faire cette reconnoissance, puisqu’il a voulu,
F
�( 42 )
par abus de son autorité, aggraver le sort de sa femme et
sans le consentement de celle-ci, en s’arrogeant l’ajouté d’un
attermoiement. Mais cet ajoutéabsolument nul,n’a été obli
gatoire ni pourMarie-Jeanne Guyot, nipourses héritiers.
Du reste, y auroit-il à cet égard quelque difficulté, et
bien que les principes sur les remboursemens des princi
paux de rente soient vrais, la fin de non recevoir écarte ces
deux assertions. Lacours, soit par son acte signifié le 28
thermidor an ^-y'soit par l’acceptation qui a été faite de
la part des intimés, par exploit du 7 fructidor suivant, soit
enfin par le jugement dont est appel, ily a eu contrat judi
ciaire sur les offres faites par Lacours de se libérer de tous
les objets, si la privation d’usufruit étoit prononcée. Il ne lui
est donc plus possible de revenir sur ses consentemens. Ce
contrat dispense de réfuter tous les sophismes employés par
l’appelant sous le prétexte de libéralité, de donation, du
jugement dans l’affaire M argot, du défaut de demande
principale de la part des intimées, et de l’abstentiond’opposition de leur part sur la vente des maisons. Nous oppose
rons cependant sur ce dernier objet à Laco u rs, que de son
aveu, ses filles ont eu pour lui cette déférence,et que si elles
n’eussent pas pris celte précaution sur les ventes ulté
rieures , elles eussent été réellement victimes des fins de
non recevoir.
A u surplus, d’après les oppositions sagement avisées et
exécutées A propos, Lacours n’a pu se refuser h ces rem
boursemens. Les acquéreurs contraints de les faire euxmêmes, ont exigé comme il a été dit , que Lacours rap
portât main-levée de ces oppositions. Lacours s’cM expres
sément soumis à faire le rapport de ces main-levées, et c’est
�S$\
( 43)
en conséquence de cette soumission qu’ il a offert lui-même
le payement, et il a , par cet expédient j dispensé scs filles
de changer leurs conclusions, de former une demande
principale inutile, et de tenter préalablement la concilia
tion sur cet objet. E n un m o t , tout a été consommé à cet
ég ard , par l’acceptation et par le jugement dont est appel,
qui a consommé le contrat judiciaire.
L ’adversaire se retranche encore sur sa libération ; il
veut qu’on impute sur ce qu’il doit, ce que ses filles ont
reçu par leur contrat de mariage, ensemble 3,5oo francs,
d’une part, qu’elles ont reçus de Roddier etH éridières,
et 2Ôo fr. qu’il dit avoir payés à Bonnet Gauttier, pour la
moitié delà vigne restée en commun dans le traité de 1773.
Quant au premier article, l’appelant n’a pas attaqué le
principe, qu’il est du devoir du père de doter ses filles.
Cette obligation est consacrée par la loi 19 , ff. de ritu
nupt. , par celle cognovitnus 19 , cod. de hœred. , et par la
novelle n 5 , chap. 3 , §. s i alicui. C’est la doctrine de
Despeisses, de Domat, de Bretonnier, d’A lbert, de Cam
bólas, du président Fabre, au cod. liv. 2 , tit. 1 2 , déf. 8 ,
n°. 4 : N on enim su jjic it quod pa ier maritum quœ rat
Jiîic c , nisiet eam dotet competenterpro modofacultatum.
Mais de combien a dû être cette dot ? Le père a luimême distingué ce qui étoit de sa substance dans la dot
qu’il a constituée à chacune de ses filles : il ne peut donc
pas aujourd’ hui changer la destination qu’il a lui-même
imposée, et reprendre , pour la libération de ce qu’il doit
du chef maternel, ce qu’il a pu être contraint de donner,
et ce qu’il a réellement donné du sien.
F 2
�( 44)
L ’observation que fait Lacours ( mémoire, page n ) ,
que son fils n’a point formé d’action contre lu i, ne peut
point atténuer le jugement dont est appel ; l’un des motifs
de ce jugement porte , qu’il seroit injuste de faire rem
placer par le père , en biens à lui appartenons, ceux ma
ternels qu’il a compris dans la constitution faite par lui
personnellement, et il n’a été condamné à se désister que
des trois quarts des immeubles, dont il est encore en pos
session , provenans de la mère. C’est donc une inexacti
tude de la part de Lacours de dii'e, qu’il a été condamné
au désistement de tous les immeubles , tandis qu’il n’a été
condamné qu’au désistement des trois quarts. Mais lors
du partage, l’égalité se réalisera entre les quatre enfans;
il sera fait des lots, et s’il est dû aux filles une récompense
ou indemnité de la part du père, Lacours fils sera étranger,
dans ce moment, à cette discussion : la disposition du juge
ment, dans cette partie, doit donc être maintenue.
A l’égard des 3,5oo fr. reçus de Roddier et Héridières,
et des 25 o fr. réclamés par Lacours pour prétendu paye
ment fait à Gauttier , les intimés n’en contestent pas la
déduction, à la charge, quant à ce dernier article, de jus
tifier le payement ou le compte mentionné dans la quit
tance du 12 juin 1782. Les déductions qui seront faites
seront à imputer d’abord sur les intérêts des principaux
et sur les frais , et ensuite sur le montant des arrérages et
intérêts d’ iceux , des deux rentes de 1769 et 17 7 0 , dûs
d’ul ord jusqu’au décès de Gabriel 1e Teytard, arrivé le 17
jam er 1773? si ce n’est que Lacours n’en rapporte quit
tance ; autrement ces arrérages forment un capital dans les
mains de Gaspard Lacours, dont il doit les intérêts depuis
�( 45 )
le déiès de Marie-Jeanne Guyot. Ces déductions seront
ensuite imputées sur les arrérages de ces rentes, à partir
du décès de Gabrielle T eytard , jusqu’au décès de MarieJeanne Guyot, puisque Lacours reconnut que ces capi
taux faisoient partie des biens aventifs et parapliernaux de
sa femme, par condition expresse contenue dans chacun
de ces contrats.
Les intimés sont encore fondés de réclamer les intérêts
courus depuis que Lacours a touché les autres biens aven
tifs de sa fem m e, soit en principal, soit en intérêts. Per
sonne n'ignore les distinctions qui ont été faites par les
auteurs sur la disposition de la loi dernière, cod. depactis
couvent. , tels que Bretonnier et Menocliius, qui exigent
le consentement de l’épouse, et l’emploi des fruits à l'usage
commun. Mais ces distinctions disparoissent, lorsqu’il est
prouvé qu e, par ces fruits ou ces intérêts, le mari est de
venu plus riche. Dans ce cas , le mari doit rendre les fruits
i\ sa femme \ c’est conforme à la loi 1 7 , cod. de donat.
inter vir. et uxor. non n isi in quantum locupletiorfuit
habere te actionem. C’est l’opinion de Bartole sur la loi
s i stipulata 33 , §. siu x o r.Jf.d e donat. inter vir. et uxor.
O r, c’est un lait constant que lorsque Lacours a recueilli
la succession de Philippine Teytard, les fonds qu'il en a
retirés, l’ont placé au périgée de sa fortune.
il
«
«
«
Ce n’étoit pas assez pour Lacours de dépouiller ses filles,
a fallu encore les calomnier, et se faire piteux. « Elles
ont, dit-il, juré ma ruine ; et on peut dire, qu’elles ont
déjà trop bien réussi dans leur funeste projet..............
Outre les dots promises, je n’a vois cessé de les combler
�m < 46)
« de bienfaits ; le prix de la vente de la cave fut donné
« à la femme Bertet qui étoit alors à Gannat.
« J ’ai été obligé de vendre deux m aisons.. . . Il ne me
« reste pas 300 fr. de revenu net ; chacune de mes filles est
tf plus riche que m o i.. . . Lorsqu’il a été dit, au moment
«. du jugement, que ma fortune s’élevoit à 100,000 fr.
« c’étoit une assertion irréfléchie, absurde, et qui nepro« vient pas de moi......... » Il termine par leur reprocher
de vouloir arracher des mains de leur p ère, la modique
portion de la fortune qui lui reste.........Qu’on n’ose pas
dire qu’elles semblent prévenir son décès par leurs vœux ,
mais que leur ambition le feroit présumer.
Est-ce bien le citoyen Lacours qui ose tenir un pareil
langage ?
Est -ce avoir juré sa ruine, d’avoir tardé trop long-temps
a la prévenir, d’avoir attendu depuis le
nivôse an 3 ,
jusqu’en l’an 6 , pour réclamer l’exécution des lois ?
Est-ce avoir juré sa ruine, de ne s’être déterminé qu’à
des actes conservatoires, au moment où des ventes rap
prochées et sans besoin , les menaçoieut de perdre le bien
de leur mère? Lies modiques dots promises par leur p ère,
les ventes et les quittances factices ne préparoient-elles pas
l’amertume de se voir privées, par leur négligence, de
l’espoir consolant de partager avec leur père, des alimens
laissés c\ ses petits-enfans par leur aïeule, et arrosés des
sueurs et des larmes de leur mère ?
Est-ce avoir juré sa ruine , d’avoir prévenu les effets de
la garantie qu’ il devoit i\ Roddier et Iléridièrcs ?
Enfin est-ce avoir juré sa ruine, de l’avoir arrêté dans sa
course précipitée vers l'abîme, que des causes malheureu-
�( 47 )
sement trop notoires lui creusèrent depuis'long-temps ?
Si les filles Lacours ont à se féliciter d’avoir réussi dans
un projet, c’est d’avoir élevé par leurs oppositions et leurs
saisie-arrêts, une digue assez forte contre le projet de
leur p ère, manifesté par des aliénations, par des affiches
indicatives de vente de tout le surplus, par des quittances
simulées, de priver ses enfans, et de leur légitime dans ses
biens, et de la succession de leur m ère; c’est sur-tout d’a
voir sauvé, malgré lu i, leur père j de la risée, du mépris,
de la misère où l’eût nécessairement entraîné la réalisa
tion de ses projets.
N ’est-ce pas une dérision de rappeler, de la part d’un
père, des dots promises, des bienfaits envers ses enfans.
Quant aux dots : les avoir seulement promises, ensuite
éluder cette promesse, en vendant les immeubles qui en
sont la sauve-garde, et gourmander ses enfans de pour
voir à cette sûreté que réclament des petits-enfans ; si ce
sont là des bienfaits, de quelles expressions se servira-ton désormais pour peindre au sentiment, les sollicitudes
paternelles d’exécuter les engagemens que la tendresse et
le devoir leur ont fait contracter pour la félicité de leur
descendance !
IVlais peut-on faire sonner si haut ces mois dots promises,
si on les compare à la légitime dont la fortune de Lacours
présentoit la perspective ?
Lorsque Lacours établit la première de ses filles avec
Chollet, il lui constitua de son chef plus de 8,000 francs.
Il avoit. alors sept enfans, ce qui supposoit une fortune de
cent douze mille francs.
�.
.
.
4
8
}
Ce n’étoit donc ni irréfléchi ni absurde d’avoir dit en sa
présence, sans contredit ni désaveu de sa p art, que sa for
tune s’élevoit à plus de cent mille francs. On eut donc
raison de lui ripostez-, dans le même instant, qu’un père qui,
d’après lui-même, a une fortune de plus de cent mille fr.
et qui n’a que quatre enfans, n’excède pas ses facultés; qu’il
ne remplit pas même ses devoirs, en donnant à trois de
ses enfans réunis, moins que le douzième de sa fortune.
Cette contrariété d’assertions de la part de Lacours
mène à un dilemme d’où il lui sera bien difficile de se tirer.
Ou votre fortune est approximative de cent mille francs,
ou, pourmeservir de vos expressions, il vous reste àpeine
de quoi subsister.
Au premier cas, il seroit injuste et ridicule de votre part,
de retenir à vos enfans et petits-enfans ce que la loi leur
défère du chef de leurmère, et de leur refuser la sûreté d’une
dot que vous leur avez promise infiniment au-dessous de
leur légitime de rigueur, puisqu'il ne vous reste d’enfant
l é g i t i m e qu’un seul fils.
~~
Dans le second cas, vous pouvez d’autant moins trouver
mauvais nos mesures conservatrices , que vous nous
apprenez vous-même, moins par votre langage que par
vos projets déjà trop réalisés des ventes d’immeubles, qu’il
résulterait pour nous, pour nos enfans, pour vous-même,
un danger évident de privation d’alimens.
A l’égard des prétendus bienfaits postérieurs aux dots
promises, le respect filial doit triompher de la véracité.
Les filles Lacours se contentent de rappeler à leur père,
qu’elles n’ont jamais démérité auprès de lu i.........................
Le
�H r
( 49 )
Les pertes, vraies ou supposées, arrivées parla révo
lution, ne présentent qu’un décroissement dans le mobi
lier; la diminution delà fortune a eu des causes d’autant
plus douloureuses pour les filles Lacours, qu’elles ont
acquis trop de publicité ; mais elles ne font pas plus de tort
dans l’opinion publique aux intimés, que l’esclandre que
fit Lacours , au sujet de quelques chapeaux , et qui occa
sionna une telle indignation populaire, qu’il fut peut-être
redevable de la vie h celle qui lui devoit le jour.
La femme Bertet n’a cessé, et ne cesse depuis 1792, d’a
voir des chagrinsbien cuisans. Bien loin de recevoir de son
père des soulagemens, tout au moins quelque consolation,
il ne fait qu’y ajouter en la forçant d’acheter chèrement
des tribunaux , la justice qu’elle auroit cru obtenir du
cœur paternel.
A h ! Lacours ose dire que chacune de ses filles est plus
riche que lui ! Il est donc riche de son propre aveu? Mais
chacune de ses filles, chargée de famille, est pauvre, non
pas à mendier, parce qu’un travail pénible les met ¿1 l’abri
de cc fâcheux expédient. L ’étalage que fait l’appelant, de
la situation de ses filles, ne mérite pas plus de confiance
que ses autres assertions; selon sa coutume, il les dément
lui-même, en ajoutant que Bertet est à l’hospice d’hu
manité, et qu’il ne coûte rien «\ sa femme. Insultera-t-il
toujours à la vérité, à la nature, au malheur? lia femme
Bertet riche! et elle souffm'roit son mari à l’hospice d’hu
manité! O u i, la femme Bertet a son mari à l’hospice; il
lui reste deux enfans, de sept: non seulement elle est privée
do l'industrie de cet époux infortuné, mais encore elle ne
G
�C 5o )
peut retirer cc qu’elle lui a porte en dot. Hélas! la femme
Bertet est en butte à la misère, au désespoir! et elle est/
d’après son père, plus riche que l u i ! ...............................
Les filles Lacours sont bien éloignées de vouloir rien
arrach er de la fortune de leur père; elles ne font que
réclamer ce que le devoir d’épouse, le devoir de mère,
leur ordonnent impérieusement : elles ont démontré, par
leurs procédés, dans toute la conduite de cette affaire,
combien il en a coûté à leur cœur d’engager cette lutte.
La consolation d’arracJier leur père à l’état affligeant de
détresse qu’il redoute, et dont il n’est menacé que par luim êm e, les résout, les encourage à supporter le déchire
ment que cause à leur ame l’insulte par laquelle il finit
son libelle.
Qu’il daigne descendre dans sa conscience ! qu’il veuille
bien y rappeler et les accens douloui’eux et'les vertus de
son épouse! que dans ce doux et tendre épanchement, il
accepte les propositions avantageuses que l’on n’a cessé de
lui offrir pour son agrément et pour la conservation de
ses propriétés? Refusera-t-il toujours d’honorer, dans ses
fi lies, l'exemple de gratitude et de moralité qu’elles donnent
h leurs enf’a ns? H é! ces enfans ne sont-ils pas les siens?
Qu’il se laisse enfin toucher! qu’il s’établisse le magistrat
de sa famille! qu’il sacrifie à la nature, à la justice, les
impulsions ennemies de son repos , et qui le maintiennent
dans l’éloignement de ses fillos ! il lui seroit si aisé de
remplir, à sa satisfaction, le vœu de tous ses enfans !
Tout se réunit, jusqu’à la propre défense de l’appelant,
�SVCy
( 51 } .
pour confirmer un jugement qui a rendu à la fois hom
mage aux lois propices à la nature, à la raison, à la né
cessité de sanctionner des obligations authentiques, et de
les délier de tous les obstacles que l’abus d’autorité a pu
y introduire.
A quoi serviroit aux intimées d’étre réintégrées dans
leur propriété? à quoi mèneroient leurs actes conserva
teurs? Comment maintenir le contrat judiciaire consommé
par le jugement, du 14 fructidor an 7 , si la sagesse et les
lumières du tribunal ne faisoient triompher la candeur,
la vérité, la misère, la tendresse filiale, de l’a rt, du men
songe , de l’opulence, et d’une rigueur sans exemple?
Un p ère, sans doute , mérite les plus grands égards : mais
un pève qui ne doit son aisance qu’à sa femme; un père
q u i, dans peu d’années, sans nécessité, vend, et donne
quittance pour plus de 40,000 francs; un père qui ma
nifeste l’intention la plus marquée de priver ses filles des
biens qui leur sont également acquis par la nature et par
les lois, pour les réduire, ainsi que leurs enfans, à la
mendicité; un père qui renouvelle tous ses efforts pour
soustraire à ses filles la connoissance de leur m atrim oine,
qui va même jusqu’à nommer libéralité une obligation
aussi-bien motivée : ce père, qui ne se contente pas de
consommer la ruine de ses enfans, en les faisant plaider,
veut encore les déshonorer, et ajouter l’opprobre à l’indi
gence : ce père ne devient-il pas un sujet particulier de
rcconnoissance publique aux lé g is la t e u r s qui ont si bien
calculé et restreint l’effet ou plutôt l’abus de la puissance
paternelle, en secondant le vœu de la nature, qui exclut
les renonciations à successions a échoir, et qui consolide
�( 52)
à la propriété un usufruit si utile à l'’âge où l’on peut
être à la fois père de famille et citoyen.
Par conseil, C O U H E R T - D U V E R N E T ,
ancien jurisconsulte.
C R O I Z I E R , avoué.
A R io m d e l'im p r im e r ie
de L
an d rio t
d ’appel. —
,
A n 9.
im p rim eur du tribunal
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Lacours, Marie. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croizier
Subject
The topic of the resource
successions
contrats de mariage
dot
usufruit
vin
famille nombreuse
éducation
renonciation à succession
forclusion
avancement d'hoirie
coutume d'Auvergne
droit écrit
pays de droit coutumier
experts
commerce de toiles
foires
chapeliers
créances
textile
Description
An account of the resource
Titre complet : Réponse à causes et moyens d'appel, et à Mémoire imprimé, pour Marie Lacours, et Pierre Blanzat, son mari ; Antoinette Lacours, et Simon Barraud, son mari ; habitans de la ville de Clermont, défendeurs en opposition, intimés ; Contre Gaspard Lacours, propriétaire, habitant de la même commune, demandeur en opposition, appelant ; En présence de Jean-Baptiste Roddier et d'Annet Heridieres, consorts, habitans de la même ville.
Table Godemel : Usufruit : en pays de droit écrit, l’usufruit attribué aux pères par les lois romaines était une émanation de la puissance paternelle dont l’effet a été aboli par la loi du 28 août 1792. sous l’empire de la coutume d’auvergne, le père qui fiance ou marie ses filles est privé de plein droit de l’usufruit des biens maternels, s’il ne le réserve expressément.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1755-An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
52 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1122
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1121
BCU_Factums_M0131
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53150/BCU_Factums_G1122.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Riom (63300)
Saint-Genès-Champanelle (63345)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
chapeliers
commerce de toiles
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
Créances
dot
droit écrit
éducation
experts
famille nombreuse
foires
forclusion
pays de droit coutumier
renonciation à succession
Successions
textile
usufruit
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53678/BCU_Factums_M0137.pdf
a0a394e7ea0f269dc0c42868667c8e0f
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Text
MEMOIRE
TR I BU N A L
d’appel ,
séant à Riom.
P 0 U R
L e citoyen A n t o i n e M O U R G U E S, neveu, pro
priétaire , habitant de la ville de Saint-Etienne,
departement de la L o ire, appelant et antici
pant
.
C O N T R E
P i e r r e P R E N A T , ancien marchand de rubans,
habitant de la ville de Saint-D idier , département
de la H aute-Loir e , intimé e t anticipé.
Q U E S T I O N .
Un banqueroutier fr a u d u le u x , un voleur convaincu
et condam né irrévocablem ent , peut-il éluder, par le bé
néfice d e la cession de b ie n s , la contrainte par corps
prononcée contre l u i ?
F A I T S .
•
U N
jugement du tribunal correctionnel de SaintEtienne, du 3 germinal an 6 appliquant l’article X X X V
de la loi du 19 juillet 1 7 9 1 , confirmée par celle du 7 fri-
A
�.
( o
.
maire an 2 , a condamné par corps, P ren at, à rendre et
restituer au citoyen M o u rg u e s, en bon état, les mar
chandises et harnois détaillés dans les citation et factures,
avec six mille francs de dommages-inlérêts, valeur numé
riq u e , si m ieux Prenat n’aitnoit payer, pour la valeur
des marchandises et objets, douze mille francs, outre les
six mille pour dommages-intérèts, avec cinquante francs
d’amende , un mois d’emprisonnement, des dépens liqui
dés, l’impression et l’affiche du jugement, au nombre de
cinquante exemplaires.
Ce jugement a été confirmé par deux autres rendus
contradictoirement au tribunal criminel de M ontbrison,
des 19 frimaire et 19 pluviôse an 7 , et le pourvoi en
cassation a été rejeté par le tribunal suprême.
Prenat a satisfait à la ^vindicte publique; m ais, pour
maintenir son escroquerie et braver fimpunîté envers le
citoyen M o u rg u es, il a fait déposer son bilan chez un
notaire à Saint- D i d i e r , le z 5 floréal an 8 ; il a ensuite
fait citer ses proches parens, tous ses prétendus créanciers
h ypothécaires, et le citoyen M ou rgues, en conciliation,
pour être admis à la cession de biens, et à la décharge
de la contrainte par corps. Cette voie n’ayant pas réussi,
et sur l’assignation qu’il fît donner à ses parens et au ci
toyen M o u rgues, il a été rendu, à l’audience du tribunal
d’arrondissement d’Issingeaux , un jugement par défaut
contre les parens, et contradictoirement avec le citoyen
M ourgues qui a accueilli la demande de P r e n a t .
C ’est l’appelant qui a fait expédier et s i g n i f ie r ce juge»
ïnent, avec déclaration d’appel et anticipation..
�( 3 )
M O Y E N S .
Sept motifs ont été la base de cette décision.
O q traitera séparément chacun des deux premiers ; les
cinq autres seront l’objet d’une même discussion.
P
r e m i e r
m o t i f
.
Considérant q u 'il résulte de Tacte du dépôt de bilan
rem is p a r P r e n a t , que ce dernier a eu des pertes co/isidérables q u i Vempêchent d e ja ir e honneur à ses a f
fa ir e s .
'
Ce b ila n , irrégulier dans la fo rm e , bien loin de m é
riter au fond aucune confiance, et d’appitoyer sur le sort
de ce débiteur, met à découvert une âme profondément
corrompue j il ne doit qu’exciter l’indignation de la justice,
et la déterminer à rejeter ce bilan comme émanant d’un,
banqueroutier frauduleux.
Ce bilan est irrégulier , parce qu’il n’est appuyé ni
d’aucuns titres, ni d’aucun registre ou livre journal; il
est impossible de distinguer les effets actifs, b o n s, dou
teux et mauvais.
L ordonnance de 16*73 (1) prescrit aux marchands dè
représenter leurs livres, registres ou journaux en bonne
form e, cest-a-dire, signés et paraphés, pour être remis
dans un dejiot public ou ès mains des créanciers, au choix
de ceux-ci.
(1) Titre X I , art, III<
�•
A
.
(
4
)
,
,
Cette môme loi ( i) ordonne qu’à défaut de cette repré
sentation, ils pourront être réputés banqueroutiers frau
duleux.
l>a déclaration du 13 juin 1 7 1 6 , en confirmant ces dis
positions, ordonne à tous ceux qui sont en faillite, de
donner un état exact et détaillé de tous leurs effets'mo
biliers , et que faute de ce , ils ne puissent être reçus à
passer avec leurs créanciers aucun contrat, ni se prévaloir
d’aucun sa u f-co n d u it, et qu’ ils puissent être poursuivis
comme banqueroutiers frauduleux, même par un seul
créancier, sans le consentement des autres.
Ces lois s’appliquent <\ Pren at, parce qu*il n’a ni rap
porté , ni déposé aucun livre, registre ou journal en forme j
parce qu’il s’est borné à donner vaguement un état de
débiteurs, sans énoncer, rap p o rter, et déposer aucuns
titres, sans même apprendre le domicile de la plupart,
avec désignation de lieu , de canton et de département.
C ’est dans de semblables espèces que deux sentences
du Châtelefc (2) jugèrent indispensable le dépôt au greffe,
des registres et titres; par la seconde, un marchand de
toiles, du M ans, fut débouté de sa demande en entéri
nement de lettre de cession, par la seule raison qu’il ne
représentait pas de registres.
A u f o n d , la seule lecture de ce bilan décèle le dol r
la fraude, la perfidie : loin d’y trouver, comme les pre^
?niers juges * des preuves que Prenat a éprouvé des pertes
(1) Art. XI du mctne tilre. ,
(2) Des 16 octobre 1756 et 9 février
Dcaisan.
•
rapportées pas?
•
�-considérables, on n ’y remarque aucuns faits qui présentent
des pertes; il n y est articulé ni banqueroute, I1ti insolva
bilité, ni vols, ni avaries quelconques; on voit évidem
ment la double .affectation d e P re n a t, d’avoir désintéressé
tous ses créanciers qui avoient des contraintes par corps
contre lui,et de n’avoir appelé que des créanciers hypothé
caires, des parens trompés ou séduits ; enfin tout concourt
à convaincre que ce bilan n’a été qu’un stratagème de
Prenat pour consommer son larcin, se jouer de la justice et
braver 1 autorité. Ainsi ce premier m otif, ù raison du bilan
de P re n at,est ridicule.
'
D
e u x i è m e
m o t i f
.
.
” i ?
Considérant que la m ajorité de ses créanciers se
ré u n it, et p our reconnaître la sin cérité du f a i t , et
p o u r accepter la cession.
Erreur dans le d ro it, erreur dans le fait.
« Les voix des créanciers prévaudront non par le
« nombre des personnes , mais eu égard à ce qui leur sera
« d û , s’il monte aux trois quarts du total des dettes. »
C ’est la disposition de l’ordonnance de 1673 (1) ; mais
cette quotité des trois quarts a été réduite à la moitié
par la déclaration du 30 juillet i y i 5 .
M . Dom at (2) atteste, d’après la loi d ern ière, au code
qui bon. cedere p0M. que chez les Romains un' se u l ,
dont la créance étoit p lus‘ forte que ceUe j e tJuatl.c autres
ensemble, étoit le maître du répit.
(1) Titre X I , art. V L
(2) Liv. I V , tit, V , sect. I re»
-
�,.
f 6 )
■
M . le président Lam oignon ( i ) a pensé que s’il se
-trouve dû à un ou deux créanciers plus qu’à tous les
autres ensemble, leur proposition sera suivie.
Cette distinction, dit M. Jousse, est très-ju dicieuse,
parce que plus il est dû à un créancier, et plus il a in
térêt de veiller à la conservation des biens du failli et au
recouvrement de ses effets.
D ’après le b ila n , toutes les dettes passives s’élèvent à
30,090 fr. La créance du citoyen M ourgues est de 18,000 fr.
conséquemment elle excède de plus de moitié toutes les
autres réunies, qui ne présentent q u ’un total de 12,090 fr.:
donc le suffrage du citoyen Mourgues a dû prévaloir sur
celui des autre's réunis.
, Mais on a supposé que les autres créanciers étoient
admissibles à se ré u n ir, et il s’en faut bien qu’ils eussent
cette capacité.
i ° . Ils sont tous parens du failli,au degré prohibé; ils
l i a n t pu émettre leur suffrage : c’est ce qu’enseigne encore
M, le président Lam oignon (2).
.
3°. Tous les parens n’ont point de contrainte pàr corps;
leurs créances sont purement civiles et hypothécaires.
C o m m e , d’après l’ordonnance de *673 (3), les créanciers
hypothécaires ne peuvent être tenus d’entrer dans aucune
com position, remise ou attermoiement, il est bien évi
dent qu’ils n’ont paru au bureau de conciliation, qu’afin
de consommer leur collusion préméditée avec Prenat, 1(?
— (1) 8e. arrêté,
(2) 9°. arrêté.
(3) Tit. X I , art. VIII,
�. .
( 7 )
failli, leur parent. Cette collusion est d’autant plus odieuse,
que presque tous sont acquittés, au moins de très-grande
partie de leurs créances; mais P re n at, toujours infidèle,
s’est bien gardé d’instruire de sa libération.
Il est donc bien constant que Prenat n’avolt en v u e ,
par son bilan , que le citoyen M ourgues; que celui-ci étoit
seul qui eut 1 intérêt et le droit de s’opposer au bénéfice
de la cession, et que le second motif disparoît devant les
principes et la vérité.
A u surplus, ce n’est que très-subsidiairement et sura
bondamment, qu’on vient de réfuter ces deux motifs, afin
de ne laisser le moindre spécieux sur les bases de ce juge**
m entj parce q u e , dans l’espèce, il ne s’agit pas de ma
tière (pivile ni commerciale : c’est l’exécution de jugement
criminel ; c’est à la fois le maintien de l’ordre et du pou
voir de juridiction, des m œ u r s et de la sûreté sociale.
I I I e , I V e , V e , V I e et V I I e
m o t i f s
.
Considérant que le CITOYEN P r e n a t a exécuté les
jugem ens rendus contre l u i , quant à la-peine; que dèslors le citoyen M ourgues reste avec une action simple
ment cnn/e.
•
que les autorités invoquées ne sont ap
plicables que dans le cas où le débiteur riaurait p a s
exécuté les condam nations correctionnelles.
Considérant que dans Tancienne législation le béné
fic e de cession étoit un remède accordé au débiteur
m a l h e u r e u x , pouv se m ettre à t abri de la contrainte
n u corps.
'
Considérant
�,
( 8 )
......................................
Considérant que dans le nouvel état de législation,
OÙ LA L I B E R T É I N D I V I D U E L L E EST PLUS S O L E N N E L
, on ne sa u ro it retenir un citoyen
dans les f e r s , p a r le défaut de payem ent d’une som m e
p éc u n ia ir e, dès que le débiteur f a i t tout ce q u 'il peut
f a i r e , en cédant tout ce q u 'il a à ses créanciers ; que
1 exécution du systèm e du citoyen M ourgues raviroit
pour toujours la liberté à P r e n a t , p u isq u 'il serait tou
jo u r s dans l'im possibilité de le satisfaire ; q u i l n existe
aucune lo i ,m étne pour les délits les plus caractérisés,
q u i infligent une pareille peine.
Considérant q u e , d'après toutes k s lois , le bénéfice
de cession a jnis le débiteur à l’a b ri de la contrainte
par c o r p s, et notam m ent celle du i 5 germ inal an 6.
LEMENT c o n s a c r é e
Ce raisonnement, négligé dans sa symétrie, ne p r é
senle que méprise autant dans le droit public que dans
le droit privé , contradictions , et les conséquences les plus
dangereuses.
D ’abord un citoyen malheureux n’en est pas moins
citoyen ; mais un escroc , un frip o n , convaincu et ju g é ,
est aussi indigne de la pitié accordée au m alheureux, que
de l ’éminente qualification de citoyen.
.
Cette méprise de la part des premiers juges, a été la
source de toutes leurs erreurs.
A van t d’arriver aux conséquences qui f o r m e n t les 30 et
4e motifs, rappelons les principes sur l’origi110 etla p iogxession de la contrainte par corps, et d e ses effets.
.A u x. atrocités du b a n n i s s e m e n t , .de 1esclavage, des
touvmens, de la mort m êm e , introduites par la législation
grecque
�(9 )
grecque contre les débiteurs ; atrocités transmises aux
Romains par la loi des douze tables, les empereurs subs
tituèrent le bénéfice de la cession des b ie n s, mais avec
cette restriction , que les débiteurs établiroient que leur
ruine avoit pour cause un événement malheureux.
P ro h ib e tu r ne quis om nino , val f is c i debiior vel
A l i e n æ rei , in auro citque in argento divcrsisque n iobilibus retentator ac d e b iio r, ad cessionis bénéficiant adm itta tu r, n i s i d o c e a t s e a l i q u o f a t a l i c a s t j a d
IN OPI AM
R ED U C T U M ,
ALIOQUIN
AD
S OLUTIONEM
COMPE LLI TUR A C E R B I T A T E SUPPLICIORTJM ( i ) .
.
C ’est la disposition de la novelle 135 de Justinien, Q u i
in im içersum e x a c c i d e n t i n o n s u p i n a n e g l i g e n t i a
rcs suas am isisse. .....
L e droit français a fait prévaloir ces diverses dispositions
sur la clémence delà loi J u lia ,e n établissant les exceptions
dont le bénéfice de cession seroit jugé susceptible.
Les bases de ces exceptions ont été la faveur des choses,
l’indignité des personnes.
Dans les affaires qui dérivent des contrats civils ordi
naires, dit M. de M ontesquieu, la loi ne doit point donner
la contrainte par corps, parce qu’elle fait plus de cas de la
libei te d un citoyen que de 1aisance d un a u tre } mais dans
les conventions qui dérivent du commerce, ( et il aurait pu
ajouter, dans les cas qui intéressent les mœurs ), la loi doit
faire plus de cas de 1aisance publique que de la liberté d’un
citoyen,
_
C ’est donc en faveur du commerce et des mœurs, que
(1) L. I, au cod. Théod. qui bon. ced.jposs,
•
B
. .
�.
. .
( 10 )
les lois , la jurisprudence et les jurisconsultes de F n n c e
se sont accordés pour limiter la faveur des cessions de b.eus,
afin de maintenir la durenécessiléde la contrainle par corps.
L ’ordonnance de Philippe V I , en août 1349, prohiba
toutes grâces ou lettres de répit contre les marchands et
fréquentans les foires de Brie et de'Champagne. Celle du
10 octobi’e 1536 porte la môme exception pour les foires
de Lyon.
I*e même avantage a été introduit en faveur des effets
de la confiance, dérivant des dépôts et d’administration.
Mais bornons-nous à l’espèce particulière à l’indignité du
débiteur.
T outes les autorités dont le citoyen Mourgues va faire
le détail, l’analise et l’application à la'cause, émanent de
ce principe si cher à l’esprit et à la raison, si précieux au
cœur et à la sûreté de tous les citoyens, D eceptis non
decipientibus ju r a subveniunt.
Nos législateurs ont toujours présumé que le cessionnaire
de biens encouroit par là même une espèce d’infamie dont
l’empereur Justinien avoit voulu les affranchir. Les ordon
nances des années 1490, i 5 io et 1673, ont voulu que ces
cessions de biens fussent faites par le cessionnaire en per
sonne, et non par procureur, et qu’ily eût une désignation
publique de leurs personnes par quelque marque exté
rieure.
Mais ces législateurs ont spécifié les cas d ’ i n d i g n i t é ou
les cessionnaires ne seroient pas reçus par ce remède, k
se mettre à l’abri de la contrainte p a r c o r p s .
L ’o r d o n n a n c e de i 560 (1) p o r t e q u e to u s banquerou-»
(1) A n . G X L i n .
*
�( IT )
•
tîerï, et qui feront faillite en fraude, seront punis extraor.dinairement et capitalement.
Celle de 1679 (1) veut que les ordonnances faites contre
•les banqueroutiers et ceux qui doleusement et frauduleu
sement font faillite ou cession de biens soient g ard ées,
et que les tromperies publiques soient extraordinairement
et exem plairem ent punies.
Celle du 25 juin i58 2 donna une commission p o u r faire
le procès à ceux qui-depuis vingt ans avoient fait banque
route et faillite. • '
Celle de mai 1609 ordonne qu ’il soit extraordinairement
procédé contre les débiteurs faisant faillite et cession de
l iens en fraude de leurs créanciers.'
Celle de Louis X I I I , en janvier 1629 ( 2 ) , reçoit une
application spéciale à la cause.
« Décla rons que c e u x ‘lesquels non p a rle u rs fautes ou
Et débauches , ains par m a l h e u r ou inconvénient, seront
« tombés en p a u v r e té , et auront été contraints à cette
« cause de faire cession de biens, n ’encourent p o u r cela
« infamie ni aucune m a r q u e , sinon la publication et
« affiche de leurs noms. »
'
. O n voit par cette-loi-, que l'intérêt public l ’ em porte
jsur la justice individuelle.
' .
Ce q u i.se pratiquait p o u r 1 obtention
des lettres'de
r é p i t , etoit com m un a ce qui éioit exigé p our être reçu
au bénéfice de cession. O r , la déclaration en form e de
(1) A rt. C C V .
(2) A r t . C X L 1V .
V' ;
- , 7 .
B 2
' J
�C
^
règlement, du 23 décembre 1699 (1 ), exclu oit ces lettres
pour restitution de dépôts volontaires, stellionat, répara
tions, dommages et intérêts adjugés en matière criminelle.
Cette disposition a été renouvelée par une autre dé
claration ou règlement, du 13 décembre 1702 (2), et elle
distingue parfaitement les matières criminelles d’avec les
alla ires qui intéressent le go u vern em en t, pour lesquelles
le même règlement (3) s’explique de même.
Les nouvelles lo is , même celles faites par les législateurs
de 1793 , qui croyoient mieux asseoir la liberté par la plus
affreuse licence , n'ont pas dérogé aux anciennes.
A la vérité la convention nationale, par son décret du
9 mars 1793 , ordonna l’élargissement des prisonniers qui
étoient détenus pour dettes: elle prononça l'abolition de
la contrainte par corps; mais elle chargea son comité de
,
législation de lui faire incessamment un rapport sur les
exceptions; en sorte que cette loi circonstancielle, dans
un moment où le législateur vouloit attacher le plus grand
nombre possible d’individus à la révolution , n’a eu dans
le vrai en v u e , en décrétant cette abolition , que les dettes
civiles, et elle annonça que le principe étoit susceptible
de beaucoup d’exceptions.
,
C ’est ainsi que l’envisagea la législature subséquente par
sa loi du 23 ventôse an 5 ; non seulement elle a b r o g e a la
loi du 9 mars 1 7 9 3 , mais encore elle r e c o n n u t q u e l l e
n'a voit eu pour objet que la contrainte par c o r p s en ma(1) A rt. X .
(a) A n . V .
(3) A rt. I V ,
�C T3 )
tière civile ; c'est - à - dire , l’effet des obligations entre
citoyens, et elle ordonna que désormais les obligations>
pour le défaut d’acquittement desquelles les lois anté
rieures prononcoient la contrainte par c o r p s , y seroient
assujetties comme par le passé.
On pourroit dire que la loi du i 5 germinal an 6 est
absolument étrangère à l'espèce, puisqu’elle n’a eu pour
objet que les matières civiles et de com m erce, et que par là
m ô m e , elle a entendu maintenir toutes les lo;s faites pour
punir le dol et la fra u d e , et assurer l’exécution des jugemens rendus pour réparations des délits ; néanmoins on
y voit resplendir les anciens principes pour la faveur do.
commerce et de la confiance , et à raison de l’indignité des
personnes, puisque, sous le premier rapport ( i ) , la con
trainte par corps est autorisée entr’auties choses pour stellionat, dépôt nécessaire, cheptel de bestiaux, et objets
d’agriculture confiés ù un ferm ier; sous le second rap
port (a ), elle autorise cette contrainte contre les septua
génaires, les mineurs, les femmes et les filles pour stellionat procédant de leur fait, quoique le même texte en
dispense ces individus en matière civile.
Il
est vrai que (3J toute personne légalement incarcérée
pourra obtenir son élargissement par le bénéfice de ces
sion ; mais encore une fois, et d’après la même loi (4), il
ne s’agit que de 1 exercice de la contrainte par corps en
(1) Titre Ier. art. I I I , i y et V .
( 2 ) A r t . V du même titre.
(3) Titre III, art. X V III.
(4) Art. X IX du même titre.
�^14)
inatière civile et de com m erce, et nullement de la con
trainte par co rp s, résultant d’un jugement criminel con
tradictoire et en dernier ressort, pour restitution d’objets
volés , et pour réparations civiles.
C ’est sur les dispositions de cette lo i, qu’a été basé le
projet du code civil.
' Ce projet a eu si peu en vue d’arrêter l’effet de la con
trainte par corp s, pour les cas où elle a lieu par le pri
vilège de la chose et par l’indignité du débiteur, que (1)
relativement à la cession des biens , en distinguant la v o
lontaire d’avec la judiciaire, celle-ci, dit-iJ ( 2 ) , est un
bénéfice que la loi accorde au débiteur M A L H E U R E U X
E T d e b o n n e f o i . Il y. a m ê m e , ajoute-t-il ( 3 ) , cer
taines créances à l’égard desquelles la loi n’accorde point
Je bénéfice de la décharge de la contrainte par corps ;
toutes les dettes auxquelles la loi attache celte contrainte,
matière c iv ile , étant susceptible de cette exception , la
cession^ judiciaire n’est d’ usage que pour les dettes commer
En
ciales.
,
Bien loin donc qu’il ait été porté aucune atteinte aux
principes et aux usages adoptés dans nos mœurs, qui ren
d e n t inadmissibles les cessions de biens par l’indignité des
débiteurs j les nouvelles lois consacrent d’une manière spéciale.-et irrévocable -, et les principes-, et les usages qui ont
toujours été opposés avec succès à la turpitude et à l'ef
fronterie.
(1) Liv. I l l , tit. I l l , sect. V I I I .
(2) A r t . C X C .
g ) A r t . C X C IL
•
•
�C 15 )
Faisons donc ressortir ces usages parles autorités delàjurisprudence, et par la réunion des jurisconsultes.
L ’arrêtiste Albert rapporte (i) deux arrêts du parle-.,
ment de T o u lo u se, l’un du 9 juillet 16 2 6 , qui déclara,
un maquignon non recevable à faire cession de biens,
envers un nommé L a r o q u e , parce que c’est' une espèce
de stellionat d acheter un cheval c\ c ré d it, et en le reven
dant com ptant, de vouloir ainsi profiter de l’argent.
L ’a u tre , du 26 mars 16 4 8 , contre un p a rticu lier, qu i
ayant sur une procuration reçu de l’argent p ou r u n a u t r e ,
ne lui rend pas com pte de ce qu’il a reçu : JJolo enim
non réstïtuit quod restituere debeat. L . 8 , § . 9 , ff.
m anda ti.
A r g o u (2) rejette la cession de biens généralement dans
tous les cas ou la dette procède du dol et de la perfidie
du débiteur, notamment de celui qui est condamné eu,
l ’amende et intérêt civil p o u r crime et délit.
.
Boérius (s) établit l’exception : U bicum que q u is con -
çenitur ratione rnaleficii vel doli.
Catelan (4) assure que la seule fraude , toujours punis
sable , peut fournir une exception , et que l’esprit des lois
a toujours été de ne donner ce triste secours qu’à la bonne
foi malheureuse. V e d e l , annotateur de cet arrêtiste ( 5 ; ,
s’explique d’une manière précise pour tout ce qui d é r i v e ,
de matière criminelle , et étend même l’exception au civil,
(x) Page5 78 et 79.
(2) Tome II, pag. 390, 39t.
'
(3) Déc* 349 >n°‘ 8*
(4) Tome II, ch. XV", XXXII,
(5) Ch. X V , XXXI.
.......
�.
(16)
.
s’il y avoit de la fraude qui donnât lieu de refuser ce bé
néfice que la loi n’accorde qu’à l’in fo rtu n e, et qu’elle
dénie toujours à la fraude d’après la m axime, nemo enirn
e x s u o delicto conditionem suam n ieliorem ja cere poîest,
d’après la disposition de la loi non fr a u d a titu r (i).
' L es compilateurs Denisart, G u y o t , et Rousseau de la
G om b e, sont du même avis.
Ce dernier exclut la cession pour dommages-intérêts,
e x delicto.
L e premier déclare inadmissibles les stellionataires, et
ceux auxquels les créanciers peuvent opposer nn dol
f o r m e l; et il cite une sentence du C h âtelet, du 5 août
i j Sj , par laquelle un prisonnier détenu pour une dette
à l’occasion de laquelle il avoit été condamné au blâme
par sentence confirmée par arrêt, a été déclaré non recevable dans sa demande en entérinement des lettres de
cession.
•
• L 'a u tre , G u y o t , atteste le même principe contre ceux
qui ont été condamnés en matière criminelle à des dom-,
niages-rintérêts, et rapporte un grand nombre d’arrêts
de divers parlem ens, notamment de celui de Tou lou se,
et un dernier de celui de Paris , du 18 octobre 1 7 7 6 :
l ’objet de cette cause a une parfaite identité avec la nôtre;
car la demoiselle Peloux étoit la seule opposante au con
sentement unanime de tous les autres créanciers.
C o q u ille, su r la coutume de Nivernois (2) , e n se ig n e •
que le dépositaire employant à ses affaires la ch o se de(1) ff. de reg. jur.
(?) Tome I I , pige 324.
�_
( r7 )
•posée , comme larcin , ne peut nier le dépAt sans d o l , et
que tout ce qui est dû pour crimes n’est sujet à r<5pit ni
à cession.
'
.'<<
[
Despeisses excepte de même celui qui est condamné
aux intérêts procédant de délit.
.
M. Dolive ( i ) condamne d’une manière trop tran
chante Ja.méprise.'des premiers juges!, pour se dispenser
de transcrire sa doctrine: « Les lois; quelque douces et
« indulgentes qu’elles soient, ne prêtent jamais leurs mains
•« ci la rnalice des hom m es, et si bien quelquefois elles
-« n exceptent rien par l’étendue de leurs termes géné• r raux ; elles contiennent toujours en soi , par l’intention
« du législateur, l’exception du dol et de la fraude j autre-
«
•«
ce
«
«
«
«
«
«
«
ment il adviendrait que l’injustice trouveroit son appui
dans la justice m ê m e , et que les remèdes introduits
contre le mal en feroient naître de seconds m a u x .. . .
C ’est pourquoi il faut avouer que la loi %J.uUa , qui
donn? cet avantage, aux débiteurs, de p o u v o ir■
abandonner leurs b ien s, quoiqu’elle ne soufFre poi nt, dans
le corps du d roit, aucune restreinte particulière qu’en
un seul cas , reçoit néanmoins cette exception générale
que nous venons de dire comme une clause intimement
attachée à toute sorte de lois: In legxi nihil ex'cipitur,
« disoit Scneque en ses controverses, std multa quam vis
« 11011 excipiantur uitdliguntr/r,; et scriptum legis anc< gustian est , m tcrpretatio vero diff usa ,quœ dam auteni
« tant m anifesta sunt ut nulla.ni cciutionem desiderent.
« Ce fondement établi y nous sommes obligés d’avouer
( t) Ch ap. XXXI.
�.
.
( 1 8 . )
.
.
« qùe la loi J u lïa n’entendit.jamais faire part de son b£.« néfîce aux débiteurs, m a l i c i e u x e t c o u p a b l e s , mais
« bien A u x m i s é r a b l e s , a u x i n f o r t u n é s . En effet,
la .cession de biens est app elée, dans le d ro it, m isera
is. bile a u xiliu m , flebile adjutoriurn , via om nium m
« Jelicissim à . P o u r nous montrer sans doute qu’elle a
« pour son sujet la. misère et l'infélicité , qui. rend - les
>r hommes dignes dé compassion et de'larmes ,■et non pas
» le dol et le crim e, qui les’ rend dignes d’opprobres et
« de supplices. Aussi tous nos docteurs soutiennent cons« tamment que cette l o i , bien que fort générale, ne com
« prend point les criminels poür les condamnations pé« cuniaires; et qu’en ce cas la ¡cession .n’ayant point de
« lien , le privilège cède au droit commun , parce qu’user
« de cette indulgence envers les coupables, ce seroit ouver« tement introduire l’impunité sous l’aveu des lois, qui la
« doivent chasser elles-mêmes de la rép ub liq ue, comme
« la peste des bonnes mœurs et l’amorce du vice. »
D ’après des expressions aussi énergiques, nous devrions
sans doute croire avoir tout d it, et n’avoir plus rien î\
prouver : mais telle a été la nullité des citations exposées
' aux premiers juges; telle est la défaveur que donne en
général la qualité d’appelantj tel est enfin l’intérêt majeur
de M ourgues, commun à tout citoyen envers qui des
malfaiteurs se flatteront d’être quittes, en imitant Prenat,
de ne pas rester victime de l’impunité de cet escroc. II
va donc continuer d’établir, par funanimité des sufïragcs,
lia faveur de la cause*'qu'il soutient.
M. Dom at ( i) attribue à plusieurs causes 1 empêchement
( j) Làv. I V , tit. V , scct. I,
�A
( 19 3
de L’efi'et des grâces des cessions:de biens et des répits,
par l’ indignité du débiteur, ou par le privilège de la
créance, « A insi on n e (recoit pas, dit-il,.à la cession de
« biens, celui qui doit un.intérqt civiladjugé pour crime. »
M. le président Fabi:e .ne .pouvoit-que confirmer une
règle aussi précieuse aux mœurs (i). Comler^natus e x
delicto /ion pote.st cedere bonis nec,in p reju d iciu m J isci,
neç in prejudicium .PARTIS c u i adjudicaiunj. a li q u i d est
PROPOSA.
, t
f
,
.Çettp autorité
.d’ i^e.^iujière.plus particulière,
la distinction des premiers juges, et .prouve ^eqr erreur
d’avoir protendu q.u,e ;|?renqt étqit déchargé de la con
trainte pijr .corps, ,çnye.rs..Mour^ues, pour ,1a ,réparation
q u i'k ù a ‘ été infligée po.u’r ,ves,titpii0n , parqe qu’il ayoit
subi sa peine pour la vindicte publique. . ( ;
Ferrières (2) exjge qu’.il -y ^ait .bonne fpi pour que le
débiteur puissei jouir d e,ceitris,te secour^, et qu’il ,]jui est
refusé* pour dettes procédant de,crimes ou de fraude>telles
que condamnations prononcées pour réparation civile et
pour dommages et interêts èn'easlie délit.
■
^
.
.1
•,
r
Ce meme jurisconsulte ajoute ailleurs» ( 3 ) ’Et non
« à ceux qui ont contracté des,dettes dans le dessein de
« luire cession. N em u ii sua f m u s -débet ;patro c in a ri. I/.
« in fe u . ff. q u œ in fr a u d , dhjrfr.I^quité ne souffre, pojnt
« qu’on trouve de l’intérêt dans sa .fraude:, .ceu?frJ.à étqnt
cc indignes de commisération, q u i sua turÿitudiric eau« sârunt sïb i inopiam. L . T. CO(j. T h é o d ..d .t.
. ■
(1) Déf. 4 , ^ V Ï I , tit. XXXI~
J T ”
t ,(2> Dio*. (le droit. , < • . <
>,
()/ .;.
,
(3) Art. C X 1 de la coutume de Paris, '
C 2
/>
.
�•
■
(
> ,
Guypape, magistrat de Grenoble !, la refuse.......« 3ff. in
« delictis et q u a si delictis; 4 0. li ceux qui ne peuvent
« rien imputer à la mauvaise fortune, q u i suo n on jfo r« tu n œ v itio e x accidünti,• 5°. s’ il y a de la mauvaise fo i, cc deceptis non dècipiêutibàsjura: sùbvehiùnt. »
C ’est l’avis de M. :H énris! (1) , d’Inibert (2) qui cite
cinq arrêts conformes, du parlement de P aris, des an
nées 1ÎS77, i 58 i y i 586 ; de Jousse, sur l’article X I I du
titre X X X I V de l’ordonnance de 1667 (3); du président
Latnoignon (4) : ce magistrat proposoit, clans ses arrêtés,
d’abroger l’usage des èessions de biens', les ordonnances,
lois et coutumes qui en font mentions
.
Si le projet étoit de les abroger p ou r dettes purem ent
civiles1, ibJ'oTtiori ne devoient-^eltes pas être admises dans
les cas de dol et de déliti '
!
‘ L a ro ch e , at’rêtiste de Toulouse (5); Leprêtre (6), qui
fait, sur cette question, une dissertation très-lumineuse;
M a yn a rd , magist. de Toulouse (7); Mazuer (8), Papon (9),,
*
1:
tI
j
.
- (1) T o ra . I V , liv. I , eloap. X X X I . ;
(2) Pratique, liv. I V , pag. 835..
. (3) Toin. I I , pag.
65i.
:
.
,
‘
! (4)iPart. Irc. pig. ^07; part. I I , pagJ 520.
( 5 ) Liv. V I » lit. X X . '
•
‘ (6) i re* cent.1 chap. C.
1
(7) L iv . I V , chap. X V I I .
'
(8) Pag. 666..
*
(g) Arrêts, liv .X , 8e. arrêt, 3e. not. liv. V III, tit. des repif»,
pag. 557.
'
"
’ ' ..................
�( 21 )
P ig ea tf, auteur moderne de la procédure civile du Châ' telet ( i ) ; Pocquet de Levonière (2).
R avio t, jurisconsulte de Dijon (3), cite un arrêt du
25 juin 16 7 2 ; après une longue controverse sur la di
versité d’opinions au sujet des intérêts civils, il décide
f o r m e l l e m e n t que la cession de biens ne doit pas être
admise dans le cas du larcin. La restitution de la chose
volée n’est pas un intérêt civil, c’est une obligation plus
réelle et plus inhérente qaœ e x delicto nascitur.
■L e professeur Serres se réunit à la majorité pour les
dommages - intérêts. « C e u x , dit-il (4), qui se trouvent
« condamnés pour crimes ou délits, en des amendes ou
« à des domrnages-intérêts tenant lieu de peine. »
Enfin Soëfve, arrêtiste du parlement de Paris ( 5), s’ex
plique de la même manière que M. D o l iv e , sur le sens
de la loi J u lia .
D e cette masse d’autorités uniformes , et dont une
partie avoit été invoquée par le citoyen G aillard, défen
seur de M ou rgues, il résulte la certitude et l’étonnement
que les premiers juges, à qui on ne peut pas refuser in
tégrité et lumières, se sont écartés des principes é lé m e n t
ta ires.
* Ils ne pouvoient considérer les effets de la cession de
(1) Tom. Ier. pag. 847, 85 i , 853.
(2) Pag* 642 et suiy.
(3) Tom. Ier. quest. 3.
(4) Liv. I V , tit. V I , pag. 576 et 577.
(5) Cent. 2 , chap. L X X V I , pag, 184*
�.
^ 22 )
.
biens, que sous le rapport civil, sous celûi du commerce,
et sous l’aspect criminel.
Dans aucun cas, ils n’auroient pas dû étendre le mot
de malheureux à celui de criminel; ils n’auroient pas dû
faire sympatiser l’infortune, un accident imprévu , avec,
un v o l, avec un vol réfléchi et prémédité; ils auroient
dû commencer par le considérant qu’ils ont placé le cin
quièm e, en rendant hommage à cette distinction.
Ensuite, pénétrés de,l’esprit de la loi du ii> germinal^
a n '6', ils se seroient convaincus que plaçant hypothétique
ment-cette question sous l’aspect civil, Mourgues avoit,
bien autant de privilège qu’un propriétaire envers son fer
mier , envers un dépositaire contre lesquels la contrainte
par corps a *été 'conservée.
¡L’exceptianportee par cette loi.contre les stellionataires,,
indiquoit et la ressemblance avec le voleur, et la môme
application de -l’exception.
-iParcQurant ensuite les différentes positions du débiteur,
sous le rapport du commerce, il se fût, présenté sans doute,
eti\ la'fois , à leurjesprit et.à leur .cœur,,avec ,1a distinction,
du biènlct dumial ,-de la liberté.etde la »licence ,jl’incon
séquence , le danger d’allier la fraude avec la bonne fqi,
le crirne avec le.rnailheur, et .de leur >répartir légalement,
au mépris des règles sociales, la compassion due au débi
teur malheureux.
Dans la même hypothèse, s’ilsïusséntjmtrés dans quel
ques détails il ce sujet, en reconnoissant P r e n a t. indigne
par la nature de la dette, ils l ’a u r o i e u t convaincu;daus^i
mauvaise foi pour sa banqueroute qufipomï l^escrqquerie.
A u lieu de faire r^si^te.r.^e.sQn bi^^ une certitude de
�C 23 ) ^
^
pertes considérables •, bien loin d'accueillir'une allégation
dénuée de la plus légère p reu ve, de la plus petite pré
somption*, au contraire, à raison du défaut de rapport
des registres et journ au x, et des pièces justificatives de
l’actif; à raison de l’affectation de Prenat, d’employer le
suffra ge de ses parens et de ses créanciers purement h yp o
thécaires; en un m ot, à raison des jugemens criminels,
ils auroient dû conclure que la conduite de P ren at, qui
avoit été déjà condamné pour v o l , ne pouvoit pas plus
exciter de confiance par son bilan que de commisération
par son escroquerie.
Mais les jugemens criminels en dernier ressort, con
firmés au surplus parle tribunal de cassation, ne devoientils pas faire abstraction des lois en matière civile et de
com m erce? Outre que la voie de la contrainte par corps
ne pouvoit recevoir d’atteinte par le fait de Prenat, n’étoitellc pas aussi intacte par la démarcation des pouvoirs ?
Comment les juges du tribunal d’arrondissement d’Issingeaux n’ont-ils pas aperçu qu’étant seulement juges de pre
mier ressort, ils se mettoient au-dessus non seulement des
tribunaux correctionnel et crim in e l, mais encore de celui
de cassation, en s opposant i\ l’exécution des jugemens
souverains et absolument inattaquables? N ’o n t-ils pas
trouble cette hiérarchie de pouvoirs dans l’ordre des juri
dictions ? Ne se sont-ils pas exposés à la prise î\ partie,
à la F o r f a i t u r e .
E h ! qu’ importe encore que Prenat ait payé l’amendç
au fisc, et qu’il ait subi le temps de prison qui lui a été
infligé? c’est une preuve de plus qui justifie la légitimité
de la contrainte par corps prononcée contre lu i, comme
�.
S 24 )
peine envers la partie civile; peine d’autant plus indis
pensable , que Prenat n’a eu en vue par toutes ses dé
marches, qui ont préparé, amené et consommé sa ban
queroute, que de se perpétuer dans l’injustice de •con
server son vol.
L e troisième considérant renferme donc une erreur
dans le fait et dans le droit.
Dans le fait, en méconnoissant les jugemens correc
tionnel et criminel qui ont prononcé la contrainte par
co rps,com m e peine envers la partie civile.
Dans le droit, en n’envisageant que comme action sim
plement civile l'effet de jugemens en dernier ressort, qui
ont infligé la contrainte par corps pour réparation d’un
délit.
P ar une conséquence nécessaire,le quatrième motif est
une erreur; puisque l’intérêt c iv il, quoique distinct de
celui de la partie publique , n’a reçu aucune atténuation
par l’exécution de la peine, et par le défaut de renon
ciation do la part de Mourgues à la contrainte par corps
qui lui a été adjugée par suite de la peine due au crime
d’escroquerie , pour lui en procurer la réparation.
L ’on a déjà fait remarquer le vide du cinquième motif,
A l’égard des sixième et septième motifs , c’est une
monstruosité intolérable dans les idées sur la liberté indi
viduelle , et dans les conséquences de toutes les lois a n
ciennes et nouvelles, notamment de celle du i 5 germinal
'an 6 , qui ont établi et maintenu la c o n t r a i n t e par corps.
‘ Ce n’est point de la liberté r é p u b l i c a i n e , dans la Grèce
ni à R o m e , que dériva l ’a d o u c i s s e m e n t de la contrainte
par co rp s, pur le bénéfice de cession : la sûreté indivi•
duel/e
�C 25 )
duelle étoit indéfiniment soumise ù la sûreté générale. On
ne pouvoit guère non plus espérer cet adoucissement
sous un régime despotique, o ù , comme l’observe M o n
tesquieu, personne n’a de fortune assurée, et où on prête
plus à la personne qu’aux biens.
Lu cession de biens entre naturellement dans les gouverneinens modérés.
,
L e peuple gagne ordinairement dans les révolutions,
et n’importe sous quel régime.
Ce fut après la bataille de Pharsale que César, devenu
dictateur, favorisa le débiteur par la loi J id ia ,* mais il
sut allier la modération avec la ferm eté, en n’affoiblissant
pas les moyens de punir les crimes; et depuis, nul gou
vernement n’a dérogé à ces principes de douceur et de
sévérité.
En France les autorités, du temps des rois , comme
sous la république , n’ont point méconnu cette distinc
tion. Les lois des 9 mars 1793 , 2.5 ventôse an 5 , et
i 5 germinal an 6 , n’ont eu pour objet què les dettes
civiles et de commerce.
A in si, les premiers juges ont été indifférens et sur la
faveur de la chose, et sur l’indignité de la personne, en
induisant d’un bilan nul et infidèle, une preuve d’inforlu n e , au lieu d’y reconnoître le comble de la perfidie;
en accolant à un créancier prépondérant sous tous les
rapports, quelques autres rejetés par la lo i, soit comme
parens, soit comme purement civils et hypothécaires,
au lieu d accueillir le seul qui avoit le droit de s’opposer
î\ la cession de biens, en séparant 1 effet de la peine envers
le fisc, de celui identique de la partie civile; en confondant
la faveur due ù finfortune avec la juste sévérité due ai»
�.
.
.
.
.
.
crim e; en établissant le germe d’une anarchie ju d icia ire,
puisqu’en se constituant sauve-garde ou sauf-conduit d’un
Condamné pour crim e, contre l’exécution de divers jugemens souverains, ils ont absous ou délié de la peine celui
contre qui la justice avoit appliqué la lo i, et ils lui ont
fourni le moyen évasif d’une peine justement et irrévo
cablement infligée ; en un m o t , ils ont travesti la faveur
des lo is , en rempart contre l’exécution des lois ; e n fin ,
sous le prétexte de liberté, ils ont enhardi la licence, en
établissant un voleur le maître de la chose d’autrui ; en
lui laissant la faculté de se jouer, le reste de sa vie, de
la correction prononcée-contre lui.
! protecteurs de la lib erté, mais manutenteurs des lois qui ont combiné les égards dûs à l ’infor
tune , avec le frein d’une police qui préfère les m œ urs,
l’aisance, la sûreté pu b liqu e, à la licence d’un coupable,
M agistrats
vous n’hésiterez pas de rendre aux jugemens en dernier
ressort, la force dans laquelle le tribunal suprême les a
maintenus. V o u s apprendrez aux premiers juges à mieux
peser, en pareil cas, l’ennui d’un citoyen d’être forcé à
ajouter encore au perdu , par des frais d’emprisonnement
et de g é o le , avec cet ennui de la p riso n , qui seul peut
déterminer Prenat à restituer au moins une partie de ce
qu’il a v o l é , comme dit Balde sur la l o i , Ob œs a lien um ,
u t iœ dio carceris ajjcctus tandem solvat.
P a r conseil, C O U H E R T - D U V E R N E T , anc. ju r isc.
C R O I Z I E R , avoué.
À Riom de l’imprimerie de
imprimeur du tribunal
d’appel. -— An 9.
L a n d r io t ,
-
�
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Factums Marie
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[Factum. Mourgues, Antoine. An 9?]
Creator
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Couhert-Duvernet
Croizier
Subject
The topic of the resource
créances
banqueroute
Description
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Mémoire pour le citoyen Antoine Mourgues, neveu, propriétaire, habitant de la ville de Saint-Etienne, département de la Loire, appelant et anticipant ; contre Pierre Prenat, ancien marchand de rubans, habitant de la ville de Saint-Didier, département de la Haute-Loire, intimé et anticipé. Question. Un banqueroutier frauduleux, un voleur convaincu et condamné irrévocablement, peut-il éluder, par le bénéfice de la cession de biens, la contrainte par corps prononcée contre lui ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1798-Circa An 9
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0137
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Saint-Etienne (42218)
Saint-Didier-en-Velay (43177)
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M
É
M
O
I
R
E
P O U R
M
ar g u er ite
C O U G U E T - F L O R A T , v e u v e du sieur
de
R
eyrolles,
i nt i mé e;
COUR
C O N T R E
D ’A P P E L
D E RIOM .
C a th erin e
M A I G N E , se disant aussi veuve dudit
____
sieur d e R e y r o l l e s , appelante.__________ 1er s e c t i o n
i-M
L a demoiselle Maigne n’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas crain t, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
U ne première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sur des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudroit pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sacré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
L a dame de R eyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d abord adopté par la demoiselle M a ig n e, et son premier
A
�( 2 3
mouvement avoit été d’user d'une représaille Lien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des iaits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourmentoit depuis tant d’années, et il lui paroissoit consolant de la
poursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que cette jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour ; en consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d ’écarter de son récit
touj*#- les épisodes étrangères à ses moyens. L a réclamation d’un
état civil présente d ’ailleurs trop d ’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d ’ordre public ; c’est-à-dire , une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , après un divorce
nu l, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver dif- .
ficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l'ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis sa dignité primitive;
et tout ce qui tend h la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
F A I T S .
L a dam e C o u g u e t - F lo r a t contracta mariage avec le sieur de
R e y r o lle s , médecin , le 7 novem bre 177/1, et se constitua en dot
scs biens échus et ù é ch o ir, c ’est-à-dire, q u ’elle donna plein pou-
�X»
( 3 )
.......................................
voir à son époux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d ’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
Les premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m ère, et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroit détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrem ent, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. D ans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la daine
de F lo r a t, sa grand’mère.
C et éclat, imprudent peut-être , tourna tout entier au profil de
sa rivale; la dame de Reyrolles lut privée de tout secours , de ses
bijoux; et poussée d’infortunes en infortunes, pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu’elle les reçût de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l'humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise , la dame de Reyrolles se trouvoit
encore heureuse des égards de son époux; mais l’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se fa ire , céda !i l’évidence : l’ indignation
étouffa tous les calculs d’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Caklaguès, parens de la dame de Reyrolles ,
aüoient s’établir à Limoges. Affliges de sa position, ils lui propo
sèrent un asile ; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d’une surveillaute incom m ode,
pressa de consentir à cette séparation.
Combien étoit déjà changé le sort de la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux ; une étrangère lui faisoit oublier ses sermons et
scs t evoirs : elle avoit eu un enfant; la m ort, moins cruelle, le lui
A 2
�........................................................ ( 4 )
aYoit ravi à l ’âge ôù il étoît incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu’épouse sans époux, mère de famille sans enfans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de R e yro lles, par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement de la révolution
elle ne reçut plus r i e n , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d ’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints. Il est certain qu’il eut fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l'affection de
son épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes "
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
-voyoit, et il n ’osoit voir; il v o u l o i t , et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l'homme le plus impérieux n’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. L e premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, est l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes;
il reste désormais sans défense, et se dévoue à l’esclavage.
L a demoiselle Maigne triompha , et le premier usage de sa
victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors existoit une loi récente , que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours d ’intervalle, et avant d ’attaquer la
religion dans ses solennités, il n ’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire à prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
i n v i o l a b i l i t é , fut dissoluble indistinctement par le divorce.
Cette innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s’empressât pas de la saisir. En conséquence , le
a/| mai 1797,
¡1 fut signifié ù la dame de Reyrolles, de la part de sou
�313
5
(
)
m a r i, un acle par lequel il déclaroit qu’il entendoit divorcer pour
cause d’absence, et pour incompatibilité d ’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nomrnoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa .part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit faire une épouse? plaider?
les tribunaux n ’étoient pas compétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, et le divorce n ’en alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en s o i t , le 27 mai il fut d é claré , à la requête de
la dame de Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 34
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de R eyrolles, en
provoquant son divorce , n’avoit fait que prévenir ses intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de famille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : Sur quoi ladite Couguet-biorat leur a répondu
q u elle étoit disposée à suivre en tout point la volonté de son
mari ; mais que si son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-meme insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de rincompatibilité s’accordoient mal avec l’im
patience de la demoiselle Maigne. On crut donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il 11’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1785, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger un acte de divorce , dans lequel
on suppose qu'il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fut porté à la dame de Reyrolles par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise , après la date qui
U1 u cl'; donnée : elle signa , il 11’y avoit pas à hésiter ; d ’aillçurs
son r e lu s, en l’exposant, 11’eùt fait que rendre cette pièce inu
�(6)
tile , et forccr à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité, et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
5e fut joué de ses plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoit tant hâtée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que le sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à scs pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n ’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse. T r o p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d ’un homme que le premier mouve
ment fa ¡soi t agir, et q u i, dans ce qui concernoit ses passions , ne
savoit jamais penser par lui-même. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa perte : Inquirebant mala sib i, et dolos
totd die meditabantur.
L a grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
à leur malignité; l’époux lui-mènie fut entraîné à douter contre sa
conviction intime; cl ce que la dame de Reyrolles avoit cru être le
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
T o u t d ’un coup la scène change : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an a , douze jours avant que la dame de Reyrolles, sur son lit
de douleur, donnât le jour à une malheureuse créature sous d’aussi
sinistres auspices.
�7
(
)
N o n , le ciel ne l ’a point béni, ce fatal mariage ! 11 a entendu l ’anathème prononcé par une épouse dans sa désolation ; et elle n a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
chassée du lit conjugal. En portant un nom usurpé , la demoi
selle Maigne né trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle a voit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculé cet effet habituel du mariage ;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitué de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an . Quelque temps après, une séparation
5
volontaire les a éloignés jusqu’à la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que demandoit le premier ûge de sa fille , elle
attendoit avec résignation que le sieur de Reyrolles, rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’ il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d’un retour à la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’éloit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance, et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 > un acte d ’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, d it-il, d e c e q u ’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours éludé de
déclarer ce qui pouvoit lui être dû ; qu’ elle ne cherchoit qu’ il re
tarder la libération dudit Iieyrolles , qu’il étoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame de Reyrolles répondit qu’elle ctoit surprise et lassée
�(,‘ ï
C8 )
des procèdes iniques de son m ari, et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor su iv a n t, devant le tribunal d u P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
Ces diligences avoient lieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an ; et, dans ce pre
mier instant où l’opinion en augmentoit la valeur, le sieur d e R e y-,
5
rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
6000 francs pour tout terminer ; ajoutant, pour l’intimider, que
si elle 11e l’acceploit p a s , les offres de l'an 4 seroient jugées vala
bles , parce qu'elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la dame de Revrolles
demanda-t-elle à être éclairée sur
%/
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n ’avoir que les mandats offerts
au lieu du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans
un tribunal presque inconnu , à douze lieues de son domicile.
L a dame de Ileyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an
5,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
m ari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un partage de 1785, il lui revenoit 126 liv. 10 sous ; à quoi
ajoutant d ’aulres articles touchés par son m a r i, quoique non com
5
pris dans l’inventaire, en valeur de S jô liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des Gooo fr. qu’il vouloit
p a ye r, et dont Pacte porte quittance.
A compter de cette époque les époux furent séparés , et la dame
de Reyrolles n ’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
6on sort avec courage : elle se consuloit avec sa fille, et celle con
solation même lui lut enviée. Après le 18 fructidor , ou lui donna
l'alarme sur le sort de celte enlant , qui 11’avoit pas encore d’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroimt l’alti ind i e , et elle se décida à faire une déclaration à l'officier public, fin
n ’eut garde de transcrire la qualité qu’elle vouloit se donner, par
la raison q u ’il eut été incivique de mépriser un divorce, et que
le sieur de Ile}fo lles, redevenu puissant, n ’auruit pas trouvé bon
q u ’il
�V/
9
;
(
)
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Com m e ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 m es
sidor an . Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de R eyro lles, nommé receveur du
département de la Ila u te -L o ire , alla s’établir au P u y. L à , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui liabitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui l’a conduit
au tombeau.
5
A cette époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’attester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa fem m e, et de lui en donner, par un testament
honorable, la seule preuve qui fût désormais en son pouvoir.
Én e f f e t , il est de notoriété au P u y que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par le q u e l, cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles , ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Granchier le m ercred i, et arriva ellemême le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
sieur de Reyrolles , q u i, à ce q u ’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tête avec un mouvement con'vtilsit. Quoi qu’il en soit, il expira le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que!
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
Sft.ur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui 11e dévoient être
poses que le lendemain , au lieu do verser des lurmes stériles qu’ilt
li
�valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. U n certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n ’a
plus paru ; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. E t qu’on ne dise pas que c ’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m o tif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa d o t, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une opulence chèrement
achetée, et dont la source équivoque n ’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Après la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
besoin, en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guere avec un domicile
constamment séparé, et à douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Iirioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle fut entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n ’avoit pas le même domicile de fait que celui q u ’elle disoit
son époux; elle ignoroit que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maisou au I’ u y , s’en dcclaroit habitant dans les actes publics, et
�~
C n )
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Brioude. En conséquence,
et par ces motifs , elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
25
3
ment du
frimaire an i .
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n ’avoit été formée
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes , no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un an
après le divorce; qu’à l’égard d’elle-même Catherine M aigne, elle
n ’avoit point à craindre le sort de ce d ivo rce, parce qu’elle étoit
mariée légitimement, héritière universelle , et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort on avoit trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les plus précieux.
Il est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense de la demoiselle M a ig n e , les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n'ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n’ avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an i , le tribunal du P u y, sans s’arrêter aux fins de
3
non-recevoir proposées par Catherine M aigne, déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du
5 frimaire
an
5;
remit la dame de Reyrolles au
nieme état où elle étoit avant lesdits actes ; condamna Catherine
g u ig n e , en qualité d ’héritière du sieur de Reyrolles, à lui payer,
1 • oo ir. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 1774 ; 20. 1200 fr. pour scs bagues et
joyaux; 3 . /(00
pOUr sa pCns*lon viduelle; 4*. à lui fournir un
3
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans le
B 2
r
�dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrollea
de constater l ’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être renduà qui et dans le temps de droit; °. à payer à ladite dame d e R e y -
5
5
rolles i oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la dot, le tribunal ordonna que les parties contesteroient plus amplement, et’ à cet effet fourniroient leurs états res
pectifs, sa u f débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit exécuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Celte dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d ’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrêtoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressoit pour les rendre. L a c o u r , par son arrêt provisoire du
3
24 floréal an i , a fait défense d ’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
L e s parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être que conforme à la morale et à la
justice.
M O Y E N S.
T o u te la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention privée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la l o i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de d ire, au contraire,
que le mariage est un lien destiné à l’union de deux fam illes,
intéressant la société entière, et ne pouvant êlrc dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
�( 13 )
. . . .
cœur de tous ceux qui n’auront pas oublié ces principes immuables
qui résistent au fracas des révolutions et à l’éblouissement des
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. 11 s’agit donc d’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la dame de R e y rolles oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prétentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a dame
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m a ri, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2’ . A u fond , le divorce opposé est-il valable ? *. Si ce
divorce n’ a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la' convention particulière de la dame de Reyrolles?
3
P
r e m i è r e
Q
u e s t i o n
.
L a dame de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorce après la mort de son m ari, et malgré la loi
du 26 germinal an w ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine ? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
defunctorum post quinquennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’est pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la demoiselle
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice duquel a
» «té contracté un second mariage, peut en demander la nullité,
» du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de l’époux,
qu a titre de grâce; et il semble, par scs expressions, que c'cst à
regret qu elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de ce consentement ; et ce mot m<fme, qui semble pour ainsi
�*4
(
)
dire échappe à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u ’est-ce en eifet qu’une demande de ce genre, formée par l'é
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n ’est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est-ce une foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l ’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire : Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidele i Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Ilypparette a reconquis par un appel en justice,
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n ’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n ’est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige. Malheur donc à l’épouse inconsidérée qui tenleroit de
proclamer son abandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d’une rivale I
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
conjugal peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
mariage est comme l ’amour de la patrie. Cunctos ducit, et im-
rnemores non sinit esse sut.
,
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissimuloient plus , annoncoient une rupture prochaine; cl sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroiL vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoit retenu que par cette considéra
tion. Quoi qu’il en soit, la dame de Reyrolles a fait ce qu’elle
�%Z2>
5
( i
)
clevoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé scs droits.
L a demoiselle Maigne n ’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d’un divorce ne pouvoil pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
14 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de non-recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : Tous divorces
prononces, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n’étoit plus possible d’attaquer les précédons divorces.
C ’est-à-dire que si la veille de la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n ’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c ’cst ainsi qu'on fait l'injure au légis
lateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
Mais la d e m o i s e ll e Maigne n’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 2G germinal qu’en tronquant entièrement l’article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état civil, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
» lois qui existoient avant cette publication. »
Ainsi le législateur n’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, nisi totd
legeperspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l ’objection de la demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
.
L e divorce du 28 ju ille t 1793 est-il valable ?
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�6
( i
)
de procédures. L e sieur de Reyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, a m a l g a m a t o u t , et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductive. L e sieur de Reyrolles, par son exploit ori
ginaire du 24 niai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis neuf ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoit être dem andé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2". loi du 20 septembre 1792,
1 , art. 4. )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen
dant cinq ans sans nouvelles, il lui falloit pour première pièce
un acte de notoriété constatant celte longue absence ( §. 2 , art. 17 ) :
mais sa femme étoit près de lui le 24 niai i j g S .
S’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il'
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon comportoit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dbme de Reyrolles n ’étoit allée à
Limoges qu’avec l’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n ’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : Pexploit n ’en dit rien.
Pour incompatibilité d’h um eur, le sieur de Reyrolles avoit sa
marche tracée d’une manière positive.
« Il convoquera une première assemblée de parons, ou d ’amis à
» défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
« la convocation. ( § . 2 , art. 8. )
» L a convocation sera faite par l’un des officiers municipaux...,
« L ’acte en s e r a signifié à, l’époux défendeur. ( A r t . 9, )
» Si la conciliation n’a pas lieu , l ’assemblée se prorogera à deux
« mois , et les époux y seront ajournés. A l’expiration des deux
« m ois..... si les. représentations ue peuvent encore concilier les
époux,
�(
17
)
» époux , l ’assemblcc sé prorogera 5 trois mois. ( A rt. 10 et n . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acle en sera
» dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
» l’époux défendeur. » ( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acle
de convocation d ’un officier municipal.
Il 11e nomma point de parens; il indiqua seulement des am is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793
en fut dressé
acte; mais aucune signification n ’ a été faite à la dame de R cy ro lle s, parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
.11
Il 11’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d’humeur,
pas plus que pour absence.
C e seroit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
Mais l’acte primitif y est un obstacle perpétuel; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient corrigé cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente. •
« L e mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorce, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des plus proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §. 2 ,
art. 1". )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
» les parens ou a m is .. . . L ’acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( A rt. 2. )
» Les deux époux se présenteront en personne à l’assemblée; ils
>> y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. « )
L e but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L ’incompatibilité pouvoit n’avoir lieu que de la part d’un époux:
la procédure devoit donc avoir des formes hostiles ; c ’est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un officier m unicipal, et un
C
4
�V ( 18 )
huissier devoit sommer l’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d’y comparoître.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de -vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable ;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A i n s i , bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parons , et par actes séparés , ce qui marquerait une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensemble les
parens, en les choisissant par moitié; ellea voulu qu’ils demandassent
le divorce conjointement : ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et q u e l’a u trey a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquee.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l ’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n ’éloit pas dans son cœur; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
Non omnium quœ a majoribus constituta sunt ratio reddi potest.
II est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses
c ’est que toutes les formalités doivent être suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du /, germinal an 2 a étendu cette peine
à l'inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 178g.
�227
( !9 5
Ce seroit donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a p ré c éd é e divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seul le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne comportoit ni opposition, ni débats, ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne paroit encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas le divorce, elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, .y/son mari y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veut le divorce,
c’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
Voilà cependant ce que l’officier public , dans l’oubli de scs
devoirs , a reçu comme les épreuves suffisantes d ’un divorce.
U n divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenté
d ’un seul acte et de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa forme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun de ses parens à
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux procédures une dif
férence notable. Pour l’incompatibilité d ’h u m eu r, il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m u tu e l, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
S i , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eût clé égal
d ’avoir des amis, c ’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeanto
C 2
0J
�pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffit de remarquer que la loi
ne vouloit des amis qu 'à défaut de parens.
Oseroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l'exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause sem blable, a annullé un divorce
entre dep habitans d eR iom , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n ’exprimoicnt pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité, qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Ilêra u d ,
notaires, le 7 novembre 1774* Mais jamais on n ’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. Avant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement; le mariage rie tenoit son essence que de la
célébration. O r , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 n o v e m b r e
qui a,été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d’enregistrement et de publi» cation que l'étoient les jugemens de séparation » ( §. , art. 11. )
O r , le divorce opposé ne parolt pas même avoir été enregistré.
On avoit objecté à la dame de R e y r o l l e s qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; mais, quand on sup
poserait le contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer à son tour un divorce par con
sentement mutuel ?
Un exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’humeur , et cet exploit même
seroit une nullité de plus.
5
�C 21 )
T
b o i s i è m i
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n’a pas été 'valable, a-t-il pu néanmoins être validé
par une convention particulière de la dame de Iiejrrolles ?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut snns doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt qu’elles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Cette différence est sensible, et tient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrai privé n’est qu’une héresip
insoutenable; elle e$t condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admettoient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu ils avoient
sur l’importance du mariage.
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Juslinien , rien
)> n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’cst par lui que
» se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
« les régions et que les cités fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus morlalibus périndè venerandum est alque matrimoniurn : quippeex quo liberi, omnisque deinceps sobolis sériés
ex istâ t, quod regiones atque civitates frequenter reddat, undè
dénique reipuhlicœ coaugmentatiofiat. ( Novell . 140. )
T o u t ce qui lenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d’intérêt public : Reipublicœ interest dotes mulierum salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur ; il en
détcrrrnnoit les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage, (ffi- D ç
divortiits et répudias. )
�v
>/
s
(
22
)
Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullum divortiutn ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n’auroit pas été textuelle, elle eût cté pro
noncée par la loi qui por toit que toutes les conventions faites contre
le droit civil, contra juris civilis regulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action, (/ ,. 28, f f . D e pactis.)
O r, il iv étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fut réglée par le droit civil : Jure civili dissolvere solet matrimonium. ( L . 1 1 , f f . D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hominis v e l conditio personarum mutari non potest. ( L . liberos, c. D e lib. c .)
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n’est pas susceptible d’être validé par des conventions particulières;
et il résisteroit d’ailleurs au bon sens que la loi eût exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avolt aussi prévu que des é p o u x trop p e u attachés
à son observation pourraient se permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
Pactiones sane s i quœ adversus preesentia scita nostree majes-
tatis fuerint attentatee, tanquam legibus contrarias nullam habere volumus firmitatem. ( L . 8 , code D e repudus.)
Ainsi la question est diserlement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n’a pas été légalement f a i t , les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi française. On demande,
dit Vinnius, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
oui,* répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : Ut sponsa maneal sponsa, placet transactionern valere ; mais la transaction est
�2
z>\
( 23 )
absolument n u lle , s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( Vinn.
D e trcins. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle, la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fût l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilite spontanée du
» mariage , disoit le rapporteur de cette loi , la liberté d’en con» tracter un second , après un premier qui ne seroit pas légalement
»> rom pu, seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
« L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément aux lots. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois, dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de di’oit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
Il en résulte donc que la demoiselle Maigne n’a jamais pu être
l ’épouse du sieur de Reyrolles
fait conformément aux lois.
7
dès que son divorce n’a pas été
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n’est plus cla ir, et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs, suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d’une
convention, i°. la capacité de contracter, 2U. une cause licite dans
l ’obligation. ( A r t . 1108. ) O r, suivant l’art. 1124, la femme mariée
est incapable de contracter clle-mêine ; e t , d ’après l’art. n 5 3 , la
cause est illicite quand elle est prohibée par la l o i , ou contraire à
l’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une femme mariée puisse faire; et cependant elle n’a
pas la capacité de iaire des dispositions 'bien moindres. Comment
at
�( h
)
traileroit-clle librement avec son mari , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider? ( A rt. i et 214. )
L e mari lui-même , chef de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i
. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d ’une transac
tion , quand la puissance maritale n’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Reyrolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce ; et , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n’en existe d’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an
et de quelques
25
388
5
exploits.
L a dame de Reyrolles, objecte la demoiselle Maigne, s’est donnée
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a validé son acte de divorce.
Ce qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage. ■
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un eul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l ’être en
s e disant majeur? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d’être
engagé dans les liens du mariage ?
6
L ’exécution d’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37'. plai
doyer , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer, si chaque acte d’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n ’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu’il ne laut considérer que
l ’acle n u l , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrolles ayant coopéré par sa signature
premier acte n u l, c’est-à-dire , à son divorce, tout ce qu’cllo
a fait ensuite n’en a été que l’exécution.
à
u n
J1 falluit qu’elle réclamât ou exécutât. Mais,' étant en puissance
maritale ,
�( 25)
maritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamera compter du
décès de son mari : jusque-là elle éloit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclam er, de peur que
son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a vu comment elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoitd’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand celle partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n ’a point traité sur son divorce : elle n ’a
fait que Pexécuter par c o n t r a i n t e . P o u r exister, elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité dès
exploits, ne pouvant sc dire autorisée du sieur de R eyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle demandoit.
Mais toutes les fois que cette qualité n'étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre ; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée ;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i, qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de Florat-Rejrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d’un acte n u l, on le répète , n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur cette matière. « L a ratification d ’une
» obligation contre laquelle la loi admet Faction en nullité ou en
» rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
>> cette obligation , la mention du m otif de l’action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée. »
( Art. 1
.)
Une donation nulle île peut même être ratifiée : il faut la refaire
eu forme légale. ( A rt. i c). ) U n divorce auroil-il moins intéresse
D
558
53
L
�*
( a 6 )
le législateur? et pensera-t-on qu’il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
L a jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le a messidor an 4> parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d’une vente de
3
bien dotal en coutume d’Auvergne, « attendu que les formalités
» n’ ont pas été remplies, et que Vexécution pendant plusieurs
» annees du traite du ...... n’ a pu 'valider un acte nul dans son
» principe. »
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renversés par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d ’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l ’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n ’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d’un
tel paradoxe. Il n’étoit question devant elle que d’un divorce 'va
lable, d ès-lors la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une a r m e trop puissante
pour qu’ il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec cette seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d ’un arrêt de
circonstance.
« L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d’ailleurs et pé»
j> remptoirement que son ci-d eva n t mari étoit; non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la validité du divorce.
» A rrêt de la cour d’appel séante à T rêv es, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de nullité étoient sans
» fo n d e m e n t ; et encore, attendu que le mari a pu et voulu renoncer
�( 27 )
h au droit qu’il avoit de contester les effets civils du divorce de son
» épouse.
» Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article 6 du Code
» civil.
» Le demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l, seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon>i noissance ou consentement par le m ari, la cour d’appel n’auroit
)) pu conclure, en point de d r o it, que par la force de cette con» vention le divorce fut devenu inattaquable.
» A r r ê t . — Attendu qu’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
» lui attaqués, celle de l’approbation par lui donnée à la régularité
». de ces actes, et même celle de la reconnoissance par lui faite dans
» d ’autres actes publics de sa qualité de femme divorcee, à celle
»•qui a fiiit prononcer le divorce d ’avec lui, la cour d’appel n ’a
» pas violé l ’art. 6 du Code civil, q u i , défendant de déroger par
» des conventions particulières à l ’ordre public et aux bonnes
» mœurs, et bornant sa défense à ce qui concerne ces objets d ’in» térôt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur l’ intérêt civil et privé; ce qu’il a formelle» ment exprimé dans l'art. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i . — Section des requêtes. »
( S irey , an
pag. 2a3. )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Après un divorce demandé et obtenu par une fe m m e , c’est le
mari qui, n’étant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n ’est pas incapable.
il traite sur les intérêts civils du divorce.
II ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il reconnoit par plusieurs actes la validité du divorce.
D 2
5
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( ?8 }
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait été
nul d ’aucune nullité.
L a cour d’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n ’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l, et il se borne à une dissertation polémique
sur l’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n ’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décidé la cour de cassation • et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n ’en résulte qu’une
plus grande conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
à l’ ordre public et à l’ intérêt civil et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
11
L e m otif pris de l’art. 2046 du Code le prouve.
porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d’un délit. On n ’est donc
pas libre de traiter aussi pour l'intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, et divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ intérêt; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc bien loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d ’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle Maigne , en citant cet a rrê t, a prétendu, avec
le rédacteur, que l’article 6 du litre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure et incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
Il est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�C 2g )
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicce pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression fus publicum éloit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l’ ordre public;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
n’étoit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction, à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires ( i ) . . .
Cependant une telle nullité n’intéressoit aucunement l état de la
république.
Si en donnant la dot au mari on avoit stipulé qu’il ne contribueroit pas aux frais d’inhumation que la loi meltoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation, parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore Vétat de la république étoit
fort étranger à cette convention.
_______________ ____________IL__________________ _
( 1 ) F rater cum heeredem sororem scriberet, et alinm ab e n , cui dona tum v o le b a t , stipulari en ravie ne fa lc id iâ uteretur , et ut certam pecuniarn , si contrà fe c isse t , prœstare , privntornm cautione legibus non esse
fefragandum constitit : et ideo sororem j u r e l ' U h l i c o retentionem habituram , et actionem ex stipidatu denegandam. ( L. i 5 ,ff. A d leg. fa le. )
(2)
N eratiu s queerit s i is q u i dotem d ed era t pro m uliere , stipulants
est.... ]ye yni el m aritus in fu n u s co n ferrâ t, an fu n eraria m ari tus teneatur?
e t a it...
Si aliu s fu n e ra v it, posse
eum m aritum convenire, quia p a c lo hoc
j u s p u b l i c u m in frin gi non possit. ( L . 20 , J f. D e relig. et sum pt.)
�( 30 )
Ces dispositions n ’étoient donc que d’ordre public, et la loi ne
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public ? et au lieu de se jeter dans l ’application vague de la loi 6 ,
cod . D e pa ctis, et de l’art. 6 du C o d e , comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : ISullam ratum est divorlium, n isi, etc.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : Pachones nullam habere volumus
firmitcitem, tanquam legibus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ne p eu tè Ire contracté
qu’après un divorce légal ?
Ouand les lois sont si claires, comment seroit-il possible de
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité île femme mariée, ait pu s’en priver elle-mêm e en se disant
divorcée, et en ne transigeant pas même sur la validité du divorce
q u ’on, lui oppose?
Que reste-t-il donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
diversion à la cause par la naissance d’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
une épouse et sa rivale , déterminé à fixer son irrésolution par un
retour à ses devoirs , en est tout à coup détourné par une séduc
tion toujours active ; habilare fa cit sterilem in donio , et la mère
fie ses en fans, repoussée comme une vile esclave, est obligée de céder
ù une étrangère les honneurs du lit conjugal.
Eh ! qu’importe à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle à scruter la conduite d’une épouse? Si cette conduite
éloil blâm able, cet adultère qu'elle proclame ue seroit-il pas
�(3 0
son propre ouvrage? n ’en porterait - elle pas le poids éternel?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d ’un enfant ; il suffit
à la dame de Reyrolles de déclarer qu’elle n’ a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n ’est ici employé
que comme moyen de la cause, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroit-il
pas bizarre que, dans la commune où un divorce a été prononcé,
l ’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objection est donc absolument nulle , et rentre d ’ailleurs dans la
discussion précédente, où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle Maigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui e6t ô t é , mais il lui
en reste la fortune. L a dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lqi appartient, d’après son contrat de mariage. ]N est-ce pas
assez qu’elle soit réduite à le demander à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
e n vier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd'hui si
différent?
U ne règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e ,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé : M elius estfavere repetitioni quant
adventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans cette loi
seule , s’il n ’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion, l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
co u r, puisque les lois ne réputent pas son mariage dissous. L a
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. A in si, les principes demeurent dans toute leur lorce , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-recevoir. Mais que signifient de misérables
�( 33 )
s u b t e r f u g e s dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront q u ’ u n mariage ou un divorce, c ’e s t - à - d i r e , un objet
m a j e u r et d ’ordre public. Alors disparoitront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S ,
Me
'
D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licencié avoué.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel. — F rim aire an 1 4
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
assignats
substitution de testaments
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire Pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée; Contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles , appelante.
Table Godemel : Divorce : la loi transitoire du 26 germinal an onze rend-elle inattaquables les divorces faits en éxécution de la loi du 20 septembre 1792, fussent-ils irréguliers et contraires aux formes voulues par cette loi ? La nullité du divorce a-t-elle été couverte par la qualité de femme divorcée prise par la femme dans différens actes, par cette possession d’état, et par le décès du mari divorcé ? en cas de nullité du divorce le traité fait entre les époux divorcés, relativement à leurs intérêts privés, seraient-ils infecté du même vice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1774-An 14
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1510
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0707
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_G1509
BCU_Factums_G1511
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
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Domaine public
assignats
divorces
substitution de testaments
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2b0d78b520529aeae18dea072df8c85a
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POUR
G a s p a r d - R o c h M O M E T , propriétaire à P a ris,
intimé
CONTRE
^
J e a n - J o s e p h C R O Z E , sous-préfet de Brioude,
appelant ;
EN
d
’I g n a c e
P R É S E N C E
B E A U F O R T -M O N T B O IS S IE R
D E C A N I L L A C , appelant.
1
A c h e t e r un bien et le payer, s’obliger et remplir
ses engagemens, sont des opérations tellement vulgaires
qu’il n’y a nul mérite à les concevoir ; mais garder en
ses mains pendant dix ans la moitié du p rix de son ac
quisition , susciter à son vendeur procès sur procès, le
forcer à payer 65 ooo francs le domaine qu’on a acheté
de lui 36000 francs, et cependant lui soutenir qu’il a
vendu un second domaine sans l’avoir su , et sans en avoir
jamais été propriétaire; enfin répondre à u n e somma
tion de payement par dix chefs de demandes incidentes
�voilà une conception grande et instructive, un coup de
maître qui décèle le génie et les grandes inspirations.
Il en coûte singulièrement au sieur Momet de désigner
le sieur Croze comme coupable d’une telle conduite ;
mais réduit lui-même par le sieur Croze à se justifier de
n’avoir pas vendu le bien d’autrui, le sieur M omet est
dans"la dure nécessité de dire la vérité à la cou r, pour
sa propre défense.
F A I T S .
Par acte passé devant D eloch e, notaire à Paris, le 30
vendémiaire an 4 , le sieur de Canillac vendit au sieur
M omet le domaine dit de Chassaigne,
« C o n s is ta n t e n maison de ch ef, c o u r, jardin et dépen« dances, ensemble le s b â tim e n s nécessaires à l’exploitact tio n , le tout contenant c in q se p te ré e s deux quarte—
« ro n n é e ;
« Plus soixante septerées trois quarteronnées de terres
« labourables ;
« Plus vingt-une septerées de prés ;
« Plus cent vingt septerées de bois;
« Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
« Plus cinq septerées une coupée de terres incultes;
ce C e qui forme au total deux cent dix septerées une
« quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
« et c o m p o r t e , sans r é s e r v e , môme le mobilier v if et
« mort qui se trouvera d a n s ledit domaine appartenant
« a u d it vendeur, qui entend vendre audit acquéreur tout
« ce qu’il possède, et les droits (ju’il a et peut avoir dans
�(
3)
« ledit domaine et dépendances, à dix arpens près, en
« dehors ou en dedans. »
L a vente est faite moyennant 600000 francs de prix
apparent} dont l’acte porte quittance.
11 est dit que le domaine vendu appartient audit sieur
de Canillac, comme lui étant échu par le partage des
biens du sieur Pierre de Canillac, son oncle, et que le
vendeur s’oblige de remettre à l’acquéreur un extrait
dudit partage, de l’inventaire fait après son décès, du
contrat de mariage de lui Canillac, et du contrat de vente
de la terre de Beaumont.
Il est dit enfin que l’acquéreur se réserve les fermages et
produits de l’année 1794, et que l’acquéreur sera tenu
d’entretenir le bail ou traité fait avec le fermier dudit
dom aine, pour l ’année courante seulement (1 7 9 6 ).
L e sieur Croze, domicilié à B rioude, habitant a lo r s Paris
comme membre du conseil des cinq cents, ayant eu connoissance de cette a c q u is it io n , proposa au sieur M omet
de lu i v e n d i’c c e même dom aine, dit de Chassaigne,
a v a n t que ce dernier sût même en quoi il consistoit. L ’ac
cord eut lieu moyennant 36000 francs. Mais le sieur Croze
n’ayant pas la moitié du prix qu’il étoit convenu de payer
comptant lors de la signature de l’acte de vente, demanda
six semaines pour se le procurer, ainsi qu’une vente sous
signature p riv é e , laquelle lui fut consentie pour le se«/
domaine de Chassaigne. L e sieur Croze ne désavouera
cextainement pas ce fait.
L e sieur Croze alla à Brioude chercher ses fonds, et bien
probablement visiter l’objet qu’il avoit a c q u i s ; dès-lors il
A s
�(4 )
conçut le projet Refaire englober dans sa vente devant
notaire le petit domaine de la V éd rin e, qui étoit voisin de
celui de Chassaigne. D e retour, il convint de passer la
vente devant notaire, le 27 prairial an 4; mais il pria le
sieur Momet de lui donner en même temps une procura
tion générale pour gérer, administrer, même vendre ce
domaine de Chassaigne, sous prétexte qu’il ne vouloit pas
encore faire connoître sur les lieux son acquisition; ce que
le sieur Momet ne crut pas devoir lui refuser.
En conséquence le sieur M omet remit à M e. D eloche,
notaire du sieur C roze, le double du sous-seing privé, et
une expédition du contratàlui passé parle sieur de Ganillac,
pour qu’il rédigeât la vente et la procurationconformément
aux actes qu’il remettait. Ils le furent en effet; et le 27 prai
rial, jo u r p r is avec le sieur Croze, M e. Deloche vint chez
le sieur M om et, m u n i d e ces deux actes rédigés, et littéra
lement conformes au contrat d e v e n te que lui avoit passé
M . de Canillac. L e sieur Croze fit dire q u ’ i l n e p o u v o i t
venir ce jo u r-là , mais qu’il viendroit le 29. Néanmoins
comme il n’étoit nullement nécessaire de la présence du
sieur Croze pour signer la procuration convenue, le sieur
M om et en signa ce môme jour, 27 prairial, la m inute,
qui ne faisoit mention queduseul domaine de Chassaigne,
ne contenoit aucun ren voi, et l’approbation ne constatoit
que trois mots rayés.
L e 29 , M<\ Deloche et le sieur Croze se ren d iren t en
semble chez le sieur M omet pour la signature du con
trat de vente. Du 27 nu 29 , la minute n’avoit éprouvé
aucun changement , 11e contenoit aucun ren v o i, et ne
faisoit toujours mention que du seul domaine de Chas-
�( 5 )
5
saigne. Ce fut à la lecture de cet acte, que le sieur
Croze parvint à faire mutiler la première l'édaction , et
à faire ajouter quatorze renvois, tous plus insidieux les
uns que les autres. Bientôt la cour en reconnoîtra par
elle-même toute l’astuce et la perfidie.
D ’abord ce ne furent que de simples corrections de
quelques m ots, puis quelques changement de sens ;
enfin , des phrases entières vl rectifier. Il étoit d it,. par
exemple, que les fruits lui appartiendraient depuis les
dernières échéances : il prétendit que cela étoit vagu e,
quoique c o r r e s p o n d a n t à la première vente , et s’expli
quant par elle ; il voulut faire substituer 179^ et 1796.
IL n’avoit par sa vente qu’une quittance sans numération,,
et il voulut faire ajouter la, numération d’espèces. L e no»
taire eut la complaisance d’ajouter cette numération ; et il
est constant aujourd’hui qu’il ne paya alors effectivement
que moitié de soo prix.
Il prétendit n’être pas assez sûr de la propriété de
M . de Canillac ; il v o u lu t une rem ise de titres : que ne
vouloit-il pas ? E nfin , le sieur Croze aborda une clause
plus épineuse. Il prétendit que le domaine de Chassaigne,
quoique ne portant que ce nom , comprenoit un petit
domaine ou locaterie, appelé de la V é d rin e , qui en
étoit une dépendance; qu’autrefois ces domaines étoient
distincts et séparés; mais que depuis long-temps ils n’en
faisoient plus qu’u n , parce que dans l’un des deux do
maines les Mtimens d’exploitation étoient écroulés. (L e
domaine de la V éd rin e, dit-on, contient seul cent trente
septerées de. terre. )
C^e lait pouvoit être exact. L e sieur Momct n’en avoit
&
�(6 >.
aucune connoissance, et disoit seulement : « Je ne puis
« vous vendre que ce que j’ai acheté : puisqu’il n’est
« pas question de ce domaine dans mon contrat, je ne
cc puis en parler dans le mien ; s’il fait partie de mon
« acquisition, il fera partie de la vôtre. » Alors le sieur
Croze se retrancha à demander que , pour éviter
toute difficulté, et ne pas compromettre le sieur M om et,
il fut fait mention du domaine de la V édrine , comme
désigné seulement dans le contrat fait par le sieur de
Canillac au sieur M om et, sous le seul nom du domaine
de C/iassaigne. L e notaire fut d’avis de cette rédaction de
clause; parcë que, disoit-il, vous référant en tout à votre
contrat, si l’assertion du sieur Croze est vraie, vous ne
vous engagez à rien ; si elle est fausse, vous ne vous
engagez pas davantage. Vaincu par ce raisonnement
v r a i, le sieur M omet voulant en finir et toucher l’àcompte que le sieur Croze lui don n oit, consentit à cette
rédaction.
Il en fut de même de la clause par laquelle, après
celle de la garantie formelle qui est la même que celle
portée au contrat du 30 vendém iaire, le sieur Croze
exigea que le sieur Momet renonçât à tout excédant de
mesure, à quelque quantité qu'il puisse monter. L e sieur
Croze et son notaire dirent au sieur Momet : N ’entendezvous pas vendre tout ce que vous avez acquis ? Il en
convint : don c, dirent-ils, cette clause ne vous engage
ù x'ien.
Ainsi successivement furent vaincues les répugnances
du sieur M om et, q u i, habitant de Paris , ne connoissoit
pas ce qu’il ven doit, traitoit a^ec le sieur C ro ze, do-
�(7 )
J jfy
micilié de Brioude, qui connoissoit parfaitement ce qu’il
achetait, et toute l’étendue du cpntrat de veutè faite au
sieur M om et, dont il avoit sous lesyeux une expédition,
et depuis long-temps une copiée, 1 ^
La prévoyance du sieur Croze fut telle , qu’en deman
dant successivement les corrections ci-dessus , il étonnoit
d’autant moins le sieur ¡ M om et ,'q u e, s’il lui eût pré
senté à la fois, quatorze renvois à ajouter ; ce qui lui
' ôtoit toute idée d’exiger1,■comme alors il l’auroit fa itjhic>
sans doute, une refonte entière de l’acte , pour dévelop
per les additions faites , et expliquer des clauses- équivo
ques qui n’étoient ainsi écrites que pour s’identifier ù la
première rédaction.
Il fut inséré dans ce contrat quittance des 36000 fr.
et le sieur M om et, qui n’a rien dissimulé dans cette cause,
s’est empresse de convenir qu’il n’avoitreçu q u ’ une partie
de ce p r ix ; et qu’après le con trat, il fut fait un billet
de dépôt de 19650 f r . , souscrit par le sieur Croze au profit
du sieur M o m e t, dattî du i 5 praii'ial an 4* ( G etoit alors
le seul mode valable pour stipuler en numéraire. )
Quoi qu’il en s o it, pour que la cour ait sous les
yeux le résultat de ce qui vient de lui être d it , et voie
par quel art on peut surprendre un citoyen sans défiance,
voici l’image de la minute de la vente du 29 prairial
an 4 , d’après le vidimé oi’donné :
N o ta . T o u t ce qui se trouve entre deux crochets dans l’acte ciaprès, ainsi que dans la procuration, a été rayé dans les minutes.
orx
�N 1
(8)
t j Prairial 4.
PAh-D EvAN T i,es n o t Atres publics au déparlem ent
'Ct à la résidence de P aris, soussignés,
F ut présent Gaspard-Roch M om et, citoyen fran
çais, demeurant à P aris, place des Y ictoires-N ationa]es, section de la H alle au b lé , n . 5 ,
Lequel a par ces présentes, vend u, cédé, quitté
et délaissé, dès maintenant et à toujours, et a promis
de garantir de tous troubles, dons, douaires, dettes,
x et autres
f domaines de C h a s s a i
gne et de la V éd rin e, dé
signés seulem ent, dans le
contrat q u i sera ci-a p rès
hypothèques, évictions, substitutions, aliénations, x
empêchemens généralement quelconques,
A u citoyen Jean-Joseph C ro ze, homme de lo i,
demeurant à P a ris, rue des Saussayes, rr*. 1245,
section d e j [R ou] Cham ps-Elysées , à ce présent et
acceptant, acquéreur pour lu i, ses héritiers et ayans
ca u se,
L es -{■ domaine dit de Chassaigne, district de
B rio u d e , d é p a r te m e n t de H au te-L o ire, consistant
en une m aiso n de c h e f , b â tie à la m oderne, co u r,
jardin et dépendances, e n sem b le les b iitim ens néces
saires à l’exploitation, le tout contenant cinq septerées
énoncé, sous le seu l nom
du
trois quarteronnées [de terre labourable] ;
Plus soixante septerées trois quarteronnées de terre
labourable ;
Plus vingt-une septerées de prés;
Plus cent vingt septerées de b o is, tant taillis que
haute futaie, situées dans la commune de Chassaigne
et dans celle de Sansac ;
Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
et enfin cinq septerées une coupe de terrain inculte:
ce qui forme au total deux cent dix septerées une
quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
et comporte, sans aucune exception ni réserve, même
le mobilier v if et m c r l, de quelque nature qu’il so it,
qui se trouvera dans ledit domaine et'dépendances :
g« lu 11 lissa lit
�'» 3
k
garantissant en outre audit acquéreur les deux cent
+[ parleditvendeurrépeter ^*x septerées une quarteronnée, à dix arpons près,
contre Vacquéreur V é x cé- t cn dehors ou en dedans,] sans pouvoir +1 [répéter
dant desdites terres, h quel- 1 excédant.]
que quantité qu’ il puisse
Pour Par ledit C roze, ses héritiers et ayans cause,
monter.
jo u ir, faire et disposer dudit domaine en pleine pro
jet«
à®»
x notaires h P a ris
*^7$*
p rié té , et comme de chose leur appartenante , à
compter de ce jour, et en commencer la jouissance-4[ à compter des dernières échéances, de manière que
la totalité de la récolte des fermages et autres produits
dudit domaine appartiendra audit acquéreur;] ledit
-4- par les revenus et fe r - vendeur se réservant seulement les fermages de l ’année
mages des années m il sept mil sept cent quatre-vingt-quatorze ( vieux style ).
cent quatre-vingt-quinze e t
L e domaine présentement vendu appartient audit
m il sept cent quatre-vingt- cit. M o m et, comme Vayant acquis du cit. Ignace
se iz e , v ie u x s ty le ;
Beaufort-Canillac, par contrat passé devant D eloche,
iIu‘ en a ^a m inute, et son confrère, x le trente ven
démiaire dernier, enregistré à Paris le même jour.
A à la charge
L a présente vente est faite A par ledit acquéreur,
(IU* s’oblige, i°. de payer et acquitter les droits d’enMr'
registrement et frais de contrat auxquels la présente
y en te p ourra donner lieu; 2°. la contribution foncière
l’ an trois et l’ an quatre, à laquelle ledit domaine peut être imposé pour / [la
gs®’?
présente année] et les années suivantes; 3°. d’entre
tenir le bail ou traité fait [pour la présente année seu
lem ent] avec le citoyen ferm ier dudit dom aine, si
aucun il y a.
£$§3
E t en outre cette vente est faite m oyennant la somme
de tre n te -six m ille livres de prix principal, francs
deniers audit vendeur; laquelle somme ledit acquéreur
T nombrées et réellem ent a Prés™ lcm ent PaJ<* audit citoyen M o m e t, qui le
délivrées à la v u e des no- reconn oit> cn esPëces sonnantes 0 et monno.e ayant
taires soussignés,
cours ' comPtées + * dont
csl content, en quitte et
fi d’ or e t d’ argent,
�(
)
décharge ledit citoyen Croze , et de toutes choses re
latives au prix de ladite vente.
A u moyen de quoi ledit citoyen M om et a présente
m ent cédé et transporté, sous la garantie ci-d evant
exprim ée, tous droits de propriété qu’il a et peut avoir
sur ledit dom aine, de quelque nature qu’ils soient,
m ême tous droits rescindans et rescisoires, mais sans
aucune garantie à l’égard de ces derniers, voulant qu’il
en soit saisi et mis en possession par qui et ainsi qu’il
appartiendra, constituant à cet e ffe t, pour son pro-+- d ’opposition à Ventrée cureur, le porteur donnant pouvoir.
en possession dudit doIl sera loisible audit acquéreur d obtenir à ses frais,
m aine, +|
sur
P o sen t contrat, dans le délai de quatre m ois,
eSF-a
toutes lettres de ratification nécessaires; et si, au
sceau desdites lettres, il y a ou se trouve des oppo+1 ou de trouble fondé dans sitîons procédant du lait dudit vendeur ou de ses
la possession et jouissance auteurs, ledit citoyen M om et s’oblige de les faire
dudit domaine présente- lcvcr et cesser, et d’en rapporter audit acquéreur
m ent vendu, le cit. Mo??iet^QS ™ainie^ cs e<- radiations nécessaires, quinzaine
prom et et s ’ oblig e d’ en in- aPriiS la denonciatlon qui lui en aura été faite h son
demniser ledit cit. Croze, dom icile’ le lout auX ÎraiS dudit vcndei,r>de m a" ière
a i lu i fo u rn issa n t, dans <lue ledit »«juéreur ne soit tenu que du coût des
/’arrondissement des dé- simPles lettres de ratlf]cat|0n'
partemens de la H auteEn ca3 d’éviction, h - [dudit domaine présentement
L oire et du P uy-de-D ôm e, ventlu > lc cit* M om et promet de rendre audit cit.
des terresform ant corps de C roze, dans les départemens circonvoisins, des terres
fe r m e , et c e , à dire d’ e x - Pour la ™£-mc valeur, et ce, à dire d’experts, et non
perts, sans pouvoir par led it 'vendeur o ffrir, pour
l’ indem nité, le remboursem e n t du p r ix de lad. vente,
e t contraindre le cit. Croze
Ia somme (Iu’iI ™ nt dc recevoir.]
Reconnolt ledit cit. Croze que ledit e t . M om et lui
a présentement remis une expédition en papier du
contrat de vente susdaté et énoncé, fait audit cit.
M om cl i Plus l’expédition en papier de la transac-
ü Vaccepter.
11 “
^
tl0n Cn forn,e de PartaSe > faite entre ledit citoyen
Canillac et [la dame] sa sœur, passée devant M ony,
®
qui en a gardé m inute, et son confrère, notaires ù
•HH*
�fï(
( IT )
x incessamment
tfSfca
-ïüV4| et Varrêt d’ enregistrenient, qui ont été obtenus
sur la transaction dudit
jo u r sept juin m il sept cent
quatre-vingt-quatre.
Paris, le sept juin mil sept cent quatre-vingt-quatre,
dont décharge.
A l'égard d’un extrait de l’inventaire fait après le
décès du père du cit. Pierre B eau fo rt-C an illac, de
celui du contrat de mariage dudit vendeur Canillac
avec la citoyenne son épouse, en ce qui concerne le
douaire; de celui du contrat de vente de la terre de
Beaum ont, en ce qui concerne ce même d ouaire,
je cjtf ]\jom et s’oblige de les remettre x audit cit.
C roze, avec toutes autres pièces au soutien de ladite
propriété, que pourroit lui remettre ledit cit. C an illac,
aussitôt que ce dernier les lui aura rem ises, et notamment les lettres patentes +| [les lettres.]
Enfin le citoyen M om et s’oblige, au beso in , d’aider
l’acquéreur, 5 sa première réquisition , des diverses
quittances des payemens par lui faits pour le citoyen
- i- e t de lu i justifier des su- Canillac à différons de ses créanciers privilégiés ou
brogationsportées ès-dites hypothécaires sur les biens présentement vendus, -+quittances , jusq u’ à due le tout à peine de tous dépens, dommages-intérêts. A
concurrence de la somme
Pour l’exécution des présentes , les parties élisent
de quatre cent m ille livres domicile en leurs demeures à P aris, ci-devant déa ssi"n a ts;
signées, auxquels lie u x , nonobstant, prom ettant,
A E n f i 11 le citoyen M om et obligeant, renonçant.
s’ oblige de remettre aussi
Fait et passé à P a ris, en la demeure du vendeur,
incessam m entaud.acqué- l>an quatre de la republique française, une et indireur toutes les p ièces qui "visible, le vingt-neuf prairial , après m id i, et ont
lu i seront nécessaires pour signé ces présentes, où quatre-vingt-quatre mots sont
se faire mettre en p osses- rayés comme nuls, ( i) Ainsi signé M om et, Croze,
sion réelle dudit domaine, F leury et D eloche, ces deux derniers notaires, avec
d’ ici au p r e m i e r fructidor paraphes. Au-dessous est écrit : Enregistré à P a r is ,
prochain, et obtenir celles bureau du Contrat-Social, le 6 messidor an 4 »F0* TI 7>
qui pourroient lu i man- v°l. io ; R . quatorze cent quarante livres, valeur fixe
quer.
en m andats, sur 5 6 ooo liv. Signé G ro u .
’MN'
G
uulaum e.
^
(i) Ce sont les mots rayés à la plume dans le cours de l’acte.
D » o o n ,#
�V, %
( 12 )
A près cet a cte, il restoit encore à retoucher à la pro
curation à laquelle on n’avoit pas pensé ; mais pour cela
on n’eut pas besoin du sieur Momet : et au lieu de porter
le renvoi ( et de la Védrine ) , en marge , on en fut
quitte pour le placer au has de la première page, en le
faisant aboutir au paraphe du sieur M omet ; ce qui est
prohibé par la loi du n ventôse sur le notariat, et par
les lois précédentes ( i ) . Il paroît nécessaire de mettre
aussi cette procuration sous les yeux de la cour.
27 Prairial 4.
P a u - d e v a n t l e s n o t a i r e s p u b l i c s au département de la Seine
et à la résidence de P a ris, soussignés,
F ut présent G aspard-R ocli M o m et, citoyen français, demeu
rant à l ’ a n s, p la ce des Victoires-Nationales, n°. 3 , section de la
H alle au blé ;
Lequel a fait et constitue p o u r son p r o cu r e u r général et spécial
le citoyen Jean-Josepli C roze, homme de lo i, d e m e u r a n t à P a r i s ,
rue des Saussayes, n*. 1243, section des Cham ps-Elysées, auque l
il donne pouvoir d e , pour lui et en son n o m , régir, gouverner et
(j) Le notaire a dit, au procès verbal du vidimé, que le renvoi avoit ¿té
approuvé dans cette procuration par Jes paraphes du sieur M om et, du notaire
en second, et de l’enregistreur. Le sieur Momet désavoue ce fait, et il vient
de se pourvoir extraordinairement à Paris, contre le sieur Deloche.
Mais ce qui prouve que le renvoi n’a été mis qu’après l’enregistrement,
et liors la présence du sieur M om et, c’est que la copie 1/gale de l’enregistre
ment de cette procuration, levée par le sieur M om et, ne porte mention que .
de la gestion du seu l dom aine d e Chassaignp. , et ne constate aucun renvoi,
quoique la formule des registres l’exige, s’il y en a; et au contraire on vo it,
dans l’extrait de l’enregistrement de la vente, que la minute y est dite avoir
quatorze renvois-, enfin la cour verra par des j ajoutés, par les ratures non
approuvées des mots cl<i Chassaigne, qu il n ¿toit question que d’un domain©
seulement.
�( 13 )
administrer les domaines de Chassaigne -4 - , situés dans le ci-devant
district de Brioude, département d e là H au te-L oire, consistant en
terres, m aison, bâtim ens et vignes; recevoir de tous locataires,
fermiers et autres personnes qu’il appartiendra, soit en nature ou
autrem ent, les loyers échus et à échoir; compter avec tous débi
teurs , débattre, clore et arrêter lesdits comptes, en fixer et recevoir
le reliquat; de tous reçus donner bonnes et valables quittances et
décharges ; accepter tous transports et délégations pour le payem ent
de toutes sommes dues par quelques débiteurs; louer ou vendre, soit
en totalité ou en partie, le domaine dont il s’a g it, à quelques per
sonnes que procureur constitué jugera à propos; faire lesdits baux
ou ventes aux p rix , charges, clauses et conditions qui lui paroltront le plus convenables; faire faire même toutes dém olitions,
[reconstructions] et augmentations qu’il jugera nécessaires ; nom
mer et convenir de tous architectes, entrepreneurs el autres gens
de bâtim ens; com pter avec tous fournisseurs, les payer, s’en faire
rem ettre quittances; toucher m êm e, en totalité ou autrem ent, le
prix des ventes qu il pourroit faire dans ledit domaine ; de tous
reçus donner bonnes et valables quittances et décharges; faire régir
m ême lc jd itr domaines [de Chassaigne] par qui bon lui sem blera;
lui d o n n e r p o u r c e l a , à celui q ui acceptera ladite charge, tous
p o u v o irs nécessaires. Dans le cas où quelques débiteurs se refuseroient à payer au constituant les sommes qu’ils lui doivent, et qu’il
surviendroit quelques difficultés avec qui que ce so it, faire contre
qui il appartiendra toutes poursuites, contraintes [et diligences] et
diligences nécessaires; comparoitre devant tous juges de paix , soit
en demandant ou défendant, s’y concilier, si faire se peut; à défaut
d ’arrangem ens, comparoitre devant tous tribunaux com pétens, y
plaider, ou bien nommer et convenir de tou6 défenseurs officieux
en causes; les révoquer, en substituer d’autres; obtenir tous jugem ens, les faire mettre à exécution ou bien en appeler; faire toutes
-+- et de la Védrine
�C
*4 )
exclusions de tribunaux, form er toutes oppositions, donner toutes
m ainlevées, consentir radiation , tra ittr, transiger, com poser,
substituer ès-dits pouvoirs, et généralement faire tout ce qui sera
nécessaire, promettant l’avoir pour agréable.
F ait et passé à P aris, en la demeure dudil citoyen M om et, Pan
quatre de la république française, une et indivisible, le vingtrsept
prairial; et a signé.
R a yé trois mots nuls.
Signé M o m et, avec Fleury et D eloclie, ces deux d e rn ie rs no
taires, avec paraphes. A u bas est écrit : Enregistré à P aris, bu
reau C on trat-Social, le 5 messidor an 4 ; R* vingt sous assignats,
Signé Grou.
G
ui l l aume .
D
i loci i e.
^
Cependant le sieur M omet se croyoit tranquille, et
assure s u r to u t d e t o u c h e r au temps convenu les 19660 fr.
qui lui étoient dûs ; m a is il en étoit encore bien loin.
Quand il fut question de p a y e r, le s ie u r Croze parla
des créanciers du sieur de Canillac, et voulut des lettres
de ratification. Quoiqu’il eût été convenu que ce seroit
son contrat qu’il feroit pu rger, et non celui du sieur
M o m et, il pria ce dernier de souffrir que ce fût la pre
mière ven te, par la raison qu’elle présentoit un prix
inférieur, et qu’il lui en coûteroit moins, s’en chargeant
pour son propre compte , et promettant d’indemniser
de tout le sieur M omet qui , cette fois e n c o r e , s’en
rapporta an sieur Croze, dont le caractère de député étoit
fait pour m é r ite r sa c o n fia n c e ,
L e contrat du 30 vendémiaire an 4 fut donc mis ,
par lés soins du sieur Croze , au bureau des hypothè
ques du Puy. P ar les soins encore du sieur C ro ze, il y
�(15)
eut des enchères qui portèrent ce domaine de Chassaigne
à 65ooo francs numéraire.
Il n’y ayoit pas à balancer; le sieur M omet s’étoit obligé à
faire jo u ir, il fut obligé de retenir le domaine en parfournissant les enchères; et la mère du sieur Croze fu t,
à l’insçu du sieur M om et, caution du parfournissement.
Les lettres de ratification furent scellées, à la diligence
du sieur Croze , pour 65oôo francs au profit du sieur
M omet , le 14 brumaire an 7.
A insi , voilà déjà le sieur Momet obligé de payer un
domaine 65ooo francs en num éraire, outre les frais mon
tant à 3600 francs, après l’avoir vendu 36000 francs, et
n’en avoir touché que 18000 francs.
Par l’inspection de ces lettres de ratification , si sa
correspondance ne le prouvoit pas , 011 reconnoîtroit
que tout est l’ouvrage du sieur Croze ; on veri'oit q u ’il
s’est torturé pour arriver à y fa ir e c o m p r e n d r e indirec
tement , il est vrai, t o u t c e q u i se t r o u v o i t à Chassaigne,
en y fa isa n t q u a lifie r ce d o m a in e de terre—domaine quoi
q u ’il se f ît expédier des lettres sur le contrat du 30 ven
démiaire, qui ne porte que le nom de domaine.
Ces lettres furent frappées des oppositions de quatre
créanciers de M . de C anillac, quoique le sieur M omet
n’eût cessé de prier le sieur Croze de les désintéresser avant
les lettres ; mais cela eût évité les sur-enchères , et le
sieur Croze n’auroit pas eu un prétexte pour ne pas payer.
Enfin , quatre ans se passèrent : le sieur M omet réclama
de nouveau son payement.
A lors il lui fut signifié, le 11 floréal an 1 1 , une de
mande en ouverture d’ordre, à la requête du sieur Labas-
S
�^
( 16 )
tide , de Brioude , l’un des créanciers Canillac. L e sieur
Croze signifia cette demande au sieur Momet.
Pour lever cet obstacle, le sieur Momet chargea le
sieur Fabre de payer au sieur Labastide .2700 francs,
montant de sa réclam ation, ce qu’il lit ; et le sieur
Labastide donna quittance le 12 messidor an 11. Cepen
dant le sieur C roze, débiteur déplus de 18000 francs,
avoit mis le sieur Momet dans le cas de payer le triple de
son acquisition , et laissé faire pour plus de 3600 francs de
frais, nonobstant toutes les remontrances des créanciers,
notamment du sieur Labastide, l’un d’eu x , poursuivant,
q u i, indigné, en écrivit au sieur Momet.
Il ne devoit donc plus y avoir de prétexte pour le
sieur Croze -, mais bientôt 1111 autre incident le mit plus
à son aise.
Par exploit du 13 fructidor an 1 1 , il paroît que le
sieur de Canillac ht assigner le sieur C roze en désistement
du domaine de la V éd rin e, comme ayant été p ar lu i
usurpé.
Aussitôt le' sieur Croze saisit et arrêta en ses propres
mains, sans aucune permission de justice, ce qu’il devoit
au sieur M om et, et lui dénonça cette saisie arbitraire.
L e sieur Momet fut forcé alors de prendre les voies ju
diciaires, et il fit citer, le 13 nivôse an 12 , le sieur Croze,
en payement en deniers ou quittances du billet de i g 65o f.
et en mainlevée des inscriptions qu’avoit faites ledit sieur
Croze pour sa garantie; il le somma de faire transcrire sa
vente.
A u bureau de paix on rem arque, de la part du sieur
M om çt, une longue explication de tous ses moyens. Quant
�C 17 )
au sieur C roze, il reconnut son écriture du b illet, offrit
de payer sans intérêts, à la charge des demandes ci-après.
Sur le surplus, il refusa toute explication, et dit que sans
se nuire ni se préjudicier sur ce qu’il peut avoir d ît , il
pense qu’au m o in s, quant à présent, il n’j a heu a con
ciliation.
Assigné le 30 pluviôse en payement, il forma à son
tour dix chefs de demande contre le sieur M ornet, par
exploit du 8 floréal an 12.
io. A ce que le sieur Momet fût tenu de faire cesser la
demande du sieur Labastidc.
20. A ce qu’il fût tenu de faire cesser aussi la demande
formée p a rle sieur de Canillac, en désistement.
30. A ce que la saisie-arrêt faite par lui-même en ses
mains fût confirmée.
40. A ce que le sieur M om ct fût condamné à lui payer
les fermages de la terre de la Chassaigne, échus depuis 1795
jusqu’au jour de la d e m a n d e .
5o. A c e q u e le s ie u r M om et fût condamné à rapporter
m ainlevée de toutes oppositions et inscriptions existantes
sur les biens vendus.
60. A ce qu’il fût tenu de lui remettre tous les titres de
propriété des biens vendus.
70. A ce qu’il fût tenu de pi’ouver avoir payé pour
400000 francs de dettes à la décharge du sieur de Canillac,
suivant les contrats de vente, et justifier des quittances.
8°. A ce que le sieur Momet fût condamné à payeraudit
sieur Croze 2873 francs pour voyages et dépenses qu’il a
faits pour ledit sieur M om et, en vertu de sa procura
tion du 27 prairial an 4.
G
�9°. A ce qu’il fut tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il dit avoir contre ledit sieur Groze.
io °. A ce q u e, faute de justifier de quittance avec su
brogation pour 45oooo francs, le sieur Momet fût con
damné à lui fournir, à dire d’experts, des terres de même
nature et valeur que celle de la Chassaigne, et à lui rem
bourser ce qu’il a touché du prix.
L e sieur Croze n’oublia pas ensuite de demander la
jonction de ses conclusions à celles du sieur M om et, et la
jonction fut ordonnée par jugement du 23 prairial an 13.
En réponse aux demandes du sieur C ro ze , le sieur
Momet ne dissimula pas que le billet de 19660 francs par
lui réclamé comprenoit i 65o francs d’intérêts; aussi se
borna-t-il à r é c la m e r seulement les intérêtsde 18000 francs;
il offrit de remettre, a u d ie n c e tenante, tous les titres de
propriété du sieur de Ganillac, c o m m e il s’y étoit obligé par
la dixième clause de la vente ; il justifia d ’u n c e rtific a t de
non-inscription sur lui et son vendeur; et d’abondant, offrit
encore de rapporter la mainlevée de toutes inscriptions,
aussitôt que le sieur Croze auroit fait transcrire et les lui
auroit notifiées ; et il soutint que le surplus des demandes
du sieur Ci'oze n’étoient pas fondées, et que notamment,
à l’égard de sa garantie, il étoit évident que le sieur Momet
n’avoit pas vendu ni entendu vendre plus qu’il n ’a v o it
acquis lui-même.
L e sieur Groze répondit à la demande du sieur de
Canillac, en le sommant de justifier s’il étoit réintégré dans
son état c iv il, attendu qu’il avoit été émigré ; puis il lui
opposa qu’il étoit insolvable, et demanda caution judicatuni sofyi. A l’égard du sieur M om et, il lui objecta que
�C \9 )
si le sieur de Canillac faisoit juger que la Védrine étoit un
domaine séparé de la Chassaigne, le sieur M omet devoit
lui remplacer cette éviction en un autre corps de dom aine,
d’après leur convention, parce que le sieur M om etlui avoit
vendu et garanti distinctement les domaines de la Chas
saigne et de la Védrine.
Sur ces moyens respectifs, le tribunal deBrioude rendit,
le 21 messidor an 13 , entre toutes les parties, un juge
ment dont il importe de faire connoître littéralement les
motifs et les dispositions.
Jugement dont est appel.
Entre le sieur de C a n illa c ................le sieur M o m e t...................
et le sieur C r o z e ..............
E n ce qui touche la demande récursoire dirigée contre le sieur
M om et par le sieur Croze , au sujet de la d e m a n d e du sieur L a bastide ;
A ttend u qu’il est prouvé par acte reçu Grenier , notaire, le i 5
messidor an 11 , cjuece dernier a ete desinteresse; qu il avoit cte
justifié de cet acte audit sieur Croze , lors du procès verbal de nonconciliation , du 29 nivôse an 12; que ce ch ef de demande devenoit
dès - lors in u tile, et que d’ailleurs il a été justifié de cet acte à
l ’avoué dudit sieur C roze, par acte du 22 prairial dernier; qu’ainsi
ce chef de demande ne présente plus de difficulté.
E n ce qu i touche la demande principale formée de la part du
sieur Canillac, au désistement du domaine de la V éd rin e;
Attendu que les terres de Chassaigne, Cusse et Lacougeat sont
échues au sieur Canillac par le partage, et qu’il n ’y est nullement
fait mention du domaine de la V éd rin e, dont il a cependant tou
jours jo u i, ou par lu i, ou par ses représentans, comme étant an
n exé, et form ant une dépendance du domaine de Chassaigne ,
dont 1 exploitation étoit au lieu de la V éd rin e, et non à Chassaigne;
*
C 2
�■. V
C 20 )
Attendu que lors de la -vente du 3o vendémiaire an 4 , les do
maines de Cliassaigne et de la Védrine étoient affermés à un seul
ferm ier, et sans distinction du prix; que par ladite ven te, ledit
sieur Canillac autorisa son acquéreur à toucher en totalité le prix
du ferm age, ce qu’il n’auroit pas fa it, s’il avoit entendu ne vendre
que le domaine de Cliassaigne seulement;
A ttendu que lors de la procuration du sieur C a n illa c, dudit
jour îg germinal an 6 , il n’est nullement fait mention de faire
aucune réclamation au sujet du domaine de la V é d rin e , et s’il
n ’eût pas été dans son intention de vendre la V éd rin e, comme
une dépendance de Cliassaigne, il n ’auroit pas négligé de s’en occu
per lors de cette procuration.
E n ce qu i touche la demande récursoire formée contre le sieur
M o m et, au sujet de cette même demande en désistement;
A t t e n d u que, dès que d’après les motifs précédens la demande du
sieur C a n illa c doit être rejetée, il devient dès-lors inutile d ’exa
miner si cette d e m a n d e récu soirc est bien ou mal fondée.
E n ce qu i touche la saisie-arrêt faite par le sieur Croze entre
ses m ains, c o m m e des biens du sieur M om et;
Attendu que le sieur Croze est lui-même débiteur du sieur
M om et; qu’il n’a pas pu faire saisir en ses mains sans un titre
contre celui-ci ; que le prétendu péril d ’éviction résultant de la
demande en désistement formée contre lui n ’étoit pas un m o tif
suffisant pour autoriser cette saisie; que d ’ailleurs le sieur M om et
a offert de donner caution pour sûreté du payement qu’il réclam e,
conformément aux dispositions de l’article 1623 du Code c iv il, et
que dès-lors cette saisie ne sauroit être confirmée.
E n ce qui Louche la demande en payement des fermages de 1795,
formée par ledit sieur Croze contre ledit sieur MonieL ;
Attendu que ce dernier, en autorisant le sieur C ro ze , par la sus
dite vente, à percevoir lesdits ferrn âgés, ne s'est pas lui-même chargé
de faire des poursuites pour le recouvrement d’iceux; qu'il n’a fait
que mettre à cet égard le sieur Croze à son lieu, droit et place,
et que c ’est au sieur Croze à les réclamer contre ceux qui les doivent
�J« l
( 21 )
ou qui les ont perçus ; qu’il est de fait que le sieur M om et n’a rien
touché , et qu’il ne sauroit être garant de ce que lesdits fermages
sont retenus par le fait d’une force majeure; que d’ailleurs le sieur
Croze ne fait apparoir d ’aucunes diligences faites de sa part pour
la répétition de ces mêmes fermages.
E n ce qui concerne la demande en mainlevée des inscriptions
subsistantes sur les b i e n s vendus au sieur Crozepar le sieur M om et ;
Attendu que celui-ci a obtenu des lettres de ratification sur
son contrat de vente, le 14 brumaire an 7 , scellées, à la charge
des oppositions ;
Attendu c/u’il a établi par le rapport des actes énoncés au procès
■verbal de n on -con ciliation , du 29 nivôse an 1 1 , que le sieur
M om et a désintéressé la dame Censat, le sieur Labastide, et les
autres créanciers opposans au sceau desdites lettres; qu’il a justifié
à l’audience qu’il n’existoitque deux inscriptions contre lu i, à l’épo
que du 27 pluviôse an ia ; qu’il n’en est point survenu d’autre jus
qu’au 27 du présent, et que ces inscriptions ont été radiées par
le conservateur des hypothèques de cejourd’hui ; ce qui est prouvé
par trois certificats de ce dernier, des dates sus-énoncées ;
Attendu d ’ailleurs que le sieur C r o z e n ’a p oint lui-meme obtenu
des lettres de r a t ific a tio n , ni fait transcrire son contrat, et qu’aux
term es de la vente sus-énoncée, il ne peut forcer le sieur M om et
à lui justifier d ’aucune mainlevée, avant d ’avoir fait transcrire
son titre et d ’avoir dénoncé les inscriptions qui peuvent subsister
contre lui ; qu’ainsi ce chef de demande doit être rejeté.
E n ce qui touche la remise des titres réclamés par le sieur
C ro ze, en vertu de la neuvième clause dudit contrat de vente;
Attendu qu’il n’a pas désavoué avoir reçu les lettres patentes et
l’arrêt du 7 juin 1784, et que le sieur Momet lui a o ffe rt, audience
tenante, la remise des autres actes énoncés en ladite clause;
qu’ainsi ce chef de demande devient dès-lors sans objet.
E n ce qui touche la demande en remise de titres et quittances,
avec subrogation constatant que le sieur Momet a payé en dé
charge du sieur de C anillac, pour 400000 francs de créances hy
pothécaires ;
�(
2
2
)
Attendu que cette clause du contrat n ’est point impérative ;
que le sieur Momet ne s’est obligé que d’aider au besoin ledit
sieur Croze des titres et quittances; que ce besoin n'est point
constaté; qu’il ne pourroit l’être qu’autant que le sieur Croze feroit
transcrire son titre , et qu’il existeroit des inscriptions procédantes
du fait dudit Momet ou de ses auteurs; et que dès que le sieur
M om et se soumet de rapporter la mainlevée de toutes les ins
criptions qui pourroient exister, le sieur Croze n ’est point fondé
sur ce chef de demande , puisqu’il y est dès-lors sans intérêt.
E n ce qu i touche le payement de la somme de 2893 francs
réclamé par le sieur C ro ze, pour voyages, dépenses par lui faits
en vertu de la procuration du 27 prairial an 4 ;
Attendu qu’il a été soutenu par le sieur M om et que cette procu
ration n ’avoit été donnée que le jour même de la vente, quoique
datée de deux jours a van t, et pour servir de titre apparent au
sieur C ro z e ;
Attendu que cette p r o c u r a t io n , relative à la gestion et à l’admi
nistration , au louage et à la vente d u bien y énoncé, a d’ailleurs
été révoquée par la vente qui est s urvenue d eu x jours a p rè s ; que le
sieur C roze, à l’époque de cette vente, ne pouvoit avoir rien fait
en vertu de cette procuration, et que s’il a agi postérieurement,
ce n’a pu être que pour son compte et son intérêt personnel; qu’il
n ’établit pas d’ailleurs ce qu’il a fait pour le compte du sieur M om et,
en vertu de cette procuration, et que dès-lors ce chef de demande
doit être rejeté.
E n ce qui touche la demande en rapport du prix de ladite vente,
touché par le sieur M om et, et le remplacement en i m m e u b l e s ,
faute de justification desdits titres de créances et quittances ;
Attendu que le sieur Croze est en possession el jouit paisible
m ent desjjiens à lui vendus; qu’il n'a point éprouvé d’obstacles à
son entrée en possession ; <[u’il n’est point troublé dans sa jouissance,
et que ce n ’auroit été que dans ces cas qu’il auroit pu réclamer
l ’exécution de la clause du contrat de vente; qu’ainsi il est encore
mal fondé dans ce ch ef de demande,
�^ 5 0
( 23' )
E n ce qui touche la demande en payement de la somm ede ig 65o f.
montant du billet daté du i 5 prairial an 4> quoique fait réellement
le 39 dudit mois, etdes intérêts du montant delà sommede 18000 f . ,
depuis ledit jour 29 prairial an 4> sous la déduction de tous payem ens, et sous la déduction sur les intérêts, depuis ladite époque,
de la somme de 1620 fra n cs, compris pour intérêts dans ledit
billet ;
Attendu que quoique lors du procès verbal de non-concilia
tion le sieur Croze n ’eût pas voulu s’expliquer sur la vraie cause
dudit b ille t, il est cependant convenu, lors du jugement contra
dictoire du 23 prairial dernier, qu’il avoit eu pour cause réelle
le restant du prix de la vente dudit jour 29 prairial an 4 ;
Attendu que quoique fait sous la forme d ’un dépôt, ce billet
11e dérive pas moins du restant du prix d’une vente d’im m eubles,
pour la som m ede 18000 fran cs, et que sous ce rapport les inté
rêts de cette somme sont dûs de droit, depuis la date de la ve n te ,
d’après les dispositions de l ’article i 652 du Code c iv il, qui ne
sont que confirmatives du droit ancien, fondé sur les dispositions
de la loi au code D e aclione empti e t v en d iti;
A ttendu que quoiqu’il ait été soute nu par le sieur M om et que
dans ledit billet de i q 65o fra n c s il avoit été compris les intérêts
de ladite somme de 18000 fra n c s, jusqu’à une époque fixée entre
les parties, ce fait n’a point été formellement désavoué par le sieur
Croze ;
Attendu qu'il est prouvé par une lettre du sieur C ro ze, du 7
fructidor an 6 , en réponse à une autre que le sieur M om et lui
avoit écrite peu de jours avan t, dans laquelle celui-ci se plaignoit
du retard que le sieur Croze mettoit à se lib érer, que celui-ci
convint qu’il n’est en arrière de payer que depuis d eu x m ois huit
jo u r s , et qu’ il ne souffrira pas que ledit sieur M om et soit en
perte ; d ’où il suit la preuve non équivoque qu’il y avoit réelle
m ent un terme convenu entre les parties pour le payement dudit
billet, et que le sieur Croze a promis de ne pas s o u ffrir que le
sieur M om et fût en perle j qu’ainsi, sous tous lès ra p p o r ts , les in-
�( 24)
térêts de la somme de 18000 francs sont dûs depuis l'époque de
leur vente.
E n ce qu i touche la demande en ratification d’inscriptions faites
par le sieur Croze contre le sieur M om et;
A ttendu que le sieur Croze a la faculté, par son titre d’acqui
sition , de purger les privilèges et hypothèques dont les biens à lui
vendus peuvent être grevés ; que le mode de purger lesdites hypo
thèques et privilèges, est établi par l'article 2181 et suivant du Code
civ il, et q u ’il ne dépend que du sieur Croze d’en user ;
Attendu qu’aux termes de son contrat d’acquisition les frais de
la transcription d’icelui sont à sa charge, et que s’il ne veut pas
faire transcrire son titre , il ne peut pas le dispenser d ’accorder
la mainlevée des inscriptions subsistantes de sa part contre ledit
sieur M om et ;
Attendu qu’aux termes de l’article 2160 du C o d e , la radia
tion d’inscription doit être ordonnée, lorsque les droits de privi
lèges et hypothéqués sont effacés par les voies légales, et que si le
sieur Croze ne veut pas profiter du bénéfice de la loi dans un délai
fixe, le sieur M om et doit obtenir la radiation des inscriptions
que ce dernier a faite? contre lu i, ne pouvant pas être, p arle fait
du sieur C roze, privé du droit d’exercer ses actions contre les ac
quéreurs de ses biens.
Par tous ces m o tifs, le tribunal, jugeant en premier ressort,
Déclare le sieur de Canillac non recevable dans sa demande en
désistement de la partie de domaine dit de la V éd rin e, garde et
maintient ledit sieur Croze dans la possession et jouissance de ladite
partie de dom aine, comme annexée et form ant dépendance du do
maine dit de la Chassaigne ; et faisant droit sur tous les autres
chefs de demande formés réciproquement de la part desdits sieurs
M om et et C r o z e , le trib u n a l donne acte a ud it sieur Momet de
ce que ce d ernier rcconnoit a voir reçu l ’arrêt d’enregistrement
et les lettres patentes sus - énon cés , et de ce que ledit sieur
M om et lui a o ffe r t, audience tenante, et a mis sur le bureau de
l’audience les autres titres réclames par ledit sieur Croze, en vertu
de
�( *5 )
de la dixième clause dudit contrat de vente; lui donne pareillement
acte de ce qu’il offre de rapporter la mainlevée de toutes les
inscriptions procédantes de son fait ou de celui de ses auteurs, sur
les biens ven d u s, dès que ledit sieur Croze aura fait transcrire
6on titre de propriété, et dénoncé audit sieur Momet lesdites inscrip
tions ; et ayant égard auxdites o ffre s , faisant droit sur les con
clusions prises par ledit sieur M o m et, condamne le sieur Croze à
payer audit sieur M om et, en deniers ou quittances valables, la
somme de i q 65 o francs, montant dudit b ille t, avec les interets
de la somme de 18000 francs , depuis la date de ladite vente
jusqu’au payem ent, sous la déduction néanmoins de la somme
de i 65o francs comprise dans ledit b ille t, pour intérêt de ladite
so m m e, lesquels payemens qui ont pu être faits seront imputés
d ’abord sur les intérêts, et subsidiairement sur le principal ; et
ordonne que ledit sieur Croze sera tenu, dans le délai de deux
m ois, à compter de ce jo u r, de faire transcrire son litre d’acquisi
tion ; faute de ce faire, et icelui passé, sans qu’il soit besoin d’autre
jugem ent, le tribunal fait pleine et entière m ain le vé e en faveur
dudit sieur M o m e t, des inscriptions faites contre lui de la part dudit
sieur C ro ze, et n o ta m m e n t de celles faites au bureau de P aris,
vol. 18, n". 6 7 4 ; en celu i de Corbeil, vol. 3 , n°. 3o3 ; en celui
de D i e p p e , vol. 1 1 , n°. 583 j ordonne que sur la remise qui sera
faite par ledit sieur M om et, à chacun des conservateurs desdits bu
reaux des hypothèques, de l’expédition par extrait du présent juge
ment , ils seront tenus de radier lesdites inscriptions ; quoi faisant
ils en demeureront bien et valablement déchargés; fa it pareille
ment mainlevée audit sieur M om et de toutes autres inscriptions
faites contre lui de la part dudit sieur C ro z e , et ordonne qu’elles
seront radiées par tous conservateurs qui pourroient les avoir faites,
ainsi qu’il est dit ci-dessus; et enfin fait mainlevée de toutes
saisies et oppositions faites par ledit sieur C roze, contre ledit sieur
M o m e t, et ordonne qu’à la remise ou payement de tous les ob
jets ou sommes saisis, tous gardiens seront c o n tra in ts, sur la re
présentation du présent jugem ent, par les voies de droit ; quoi
D
�( 26 )
faisant ils demeureront bien et valablement déchargés envers ledit
sieur Crose ; sur le surplus des autres fins et conclusions prises
respectivement par les parties, le tribunal les met hors de cour et
de procès ; condamne ledit sieur Croze en tous les dépens faits par
ledit sieur M om et sur ladite demande en payement du susdit billet,
lesquels ont été taxés et liquidés, d’apres l’avis du commissaire
taxateur d e là chambre des avoués, à la somme de 56 a fr. 5 5 cent.;
le condamne pareillement en tous les autres dépens faits par ledit
sieur M o m e t, tant en défendant que dem andant, sur les autres de
m andes, lesquels ont été taxes et liquidés comme dessus, à la
somme de 299 francs 11 centimes, et condamne ledit sieur Canillac
aux deux tiers des dépens faits par ledit sieur Croze, suivantla taxe qui
en sera faite, et même aux deux tiers des derniers dépens adjugés
ci-dessus audit sieur M o m e t, le tout non compris l’expédition et
signification du présent jugem ent, qui seront supportées par ledit
sieur C r o z e , s a u f à lui à en répéter les deux tiers contre ledit sieur
de C anillac, auxquels d e u x tiers celui-ci est pareillement condamné ;
et quant à la condamnation prononcée co n tre ledit sieur Croze en
payement dudit b ille t, le tribunal ordonne q u e cette p artie du pré
sent jugement sera exécutee nonobstant tout appel, et audit cas
à la charge de donner caution, attendu que ledit sieur M om et est
fondé en titre à cet égard.
F ait et ju g é , le 21 messidor an i 3 *
L e sieur Croze ayant interjeté appel de ce jugem ent,
le sieur Momet voulut , d’après ses dernières dispositions■
,
le faire payer, en donnant caution ; mais le s ie u r Croze
demanda des défenses à la cour, et insista pour en obtenir,
malgré l’article 5652, du Code civil. Cependant, par arrêt
¿u
il fut débouté de sa demande, mais à l'a
charge par le sieur Momet de donner caution jusqu’à
concurrence de 3 6 °°° francs»
�( *7 )
C’est en cet état qu’il s’agit de répondre aux moyens que
le sieur Croze propose sur l’appel.
M O Y E N S .
L ’objet principal de la cause est de savoir si le sieur
Croze peut être fondé à retenir ce qui reste à payer du
prix de la vente du 29 prairial an 4 , soit à cause du trou
ble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit
sur le fondement de ses propres inscriptions, soit enfin
sous prétexte que le sieur Momet n’a pas achevé de rem
pli r les conditions auxquelles il s’étoit soumis.
Pour abréger beaucoup la discussion de tous les chefs
de conclusions respectives, le sieur M omet passera rapi
dement sur ceux qui présentent peu d’intérêt, afin de ne
demander l’attention de la cour que sur les points les plus
importans de la contestation.
L e I e r . chef des c o n c l u s i o n s du sieur Croze formoit
double e m p l o i et n’a plus aujourd’hui d’intérêt ; il demandoit que le sieur Momet fît cesser les-poursuites du sieur
de Labastide; mais personne ne savoit mieux que le
sieur Croze que ces poursuites étoient éteintes par un
acte antérieur au procès. L e sieur Momet avoit payé la
créance du sieur Labastide.
L e 3e. chef des mêmes conclusions est décidé par les
premiers juges, conformément aux principes. L e sieur
Croze n’ayant pas de titre , ne pouvoit faire une saisiearrêt sans autorité de justice. A u reste le p a y e m e n t du
billet du sieur Croze est l’objet d’ une demande, et ses
moyens sur ce point seront examines ci-après.
D 3
�(28)
L e 4e. chef a pour objet les fermages de 179^ et années
suivantes. A cet égard c’est la clause du contrat qu’il faut
consulter. « P o u r r a , le sieur Croze, disposer du domaine
« comme de sa chose propre, à compter de ce jou r, à
« commencer la jouissance et fermages parles années 179$
« et 1796, le vendeur se réservant seulement les fer« mages de 1794? qu’il n’a pas môme touchés. »
A in si, faculté pour le sieur Croze, réserve pour le sieur
Momet.
Il faudroit donc que le sieur Croze offrît de prouver
que le sieur Momet a reçu au delà de sa réserve ; et il
ne l’articule pas même. C’est donc à lui à se pourvoir
p o u r ce t objet; car le sieur M omet lui a seulement dit à
cet é g a r d q u ’ i l se départoit des fermages passés, et renoncoit à les r e c e v o ir .
L e 6e. chef est sans objet. L e sieur M^omet auroit
pu objecter au sieur Croze qu’il devoit seulement lui
fournir les titres de p ro p riété, aussitôt que le sieur de
Canillac les lui auroit remis ; néanmoins il a déjà donné
les titres les plus importans au sieur C roze, qui les a
dans son dossier ; il a offert le surplus à Brioude , en
jugement.
Les 5e. et 7e. chefs n’ont de même plus d’intérêt. L e
sieur Momet s’étoit obligé à justifier des quittances des
créanciers de Canillac pour 400000 francs ( assignats ) ;
mais il potirroit dire encore que cette clause étoit liée à
la faculté qu’avoit le sieur Croze de purger son contrat, et
de demander mainlevée des oppositions du fait du sieur
Momet ou de ses auteurs. Mais le sieur Momet rapporte
des quittances excédant de beaucoup la somme promise;
�( 29 ) '
il rapporte aussi la mainlevée de toutes les inscriptions.
L e 9e. chef des conclusions du sieur Croze est encore sans
objet; c’est même une demande extraordinaire. Il veut que
le sieur Momet soit tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il peut avoir contre lui. Mais
ces titres de créances sont le billet de dépôt. L e sieur
Croze n’en désavoue pas l’existence ; il en a même saisi le
montant en ses mains. Ainsi le titre de créance du sieur
M omet lui sera remis sans difficulté aussitôt qu’il l’aura
payé.
Maintenant il est aisé de réduire le surplus delà cause.
L e sieur Momet a formé deux chefs de demande, qui sont
le payement du billet de ig 65 o francs avec intérêts, et la
mainlevée des inscriptions du sieur Croze. L e sieur Croze
répond à cette demande : Je vous payerai quand vous
aurez fait cesser la demande du sieur C anillac, ou que
vous m’aurez fourni des immeubles d’égale valeur au do
maine de la Védrine (2°. et 10°. chefs de demandes. ) ;
quand vous m ’aurez payé 2873 francs pour le temps que
j’ai employé au sujet de votre procuration (8 e. chef. );
enfin je ne puis vous donner mainlevée de mes propres
inscriptions , parce que vous me devez une garantie.
Ainsi ce qui reste à discuter présente les questions sui
vantes : i°. Que doit le sieur Croze au sieur M om et?
2°. L e sieur Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit,
comme prétendant à une garantie de la demande formée
par le sieur de Canillac? 30. Est-il dû au sieur Croze 2873 f.
pour dépenses faites comme fondé de pouvoir? 40. A -t-il
droit de maintenir les inscriptions par lui faites sur le
sieur Momet ?
�( 30 )
§• Ier.
Que doit le sieur Croze au sieur M om et?
Il lui doit le montant du billet de 19650 francs, causé
pour dépôt, sous la date du i 5 prairial an 4 ; il le doit
en deniers ou quittances. A in si, au cas qu’il représente,
comme il le d it , des preuves de payemens faits pour près
de moitié de la somme, il n’y aura pas de difficulté à cet
égard, sauf que les imputations se feront d’abord sur les
intérêts.
Mais , dit le sieur Croze, je ne dois pas d’intérêt, parce
qu’un dépôt n’en produit pas ; le billet d’ailleurs n’est que
de 18000 francs en principal et i 65 o francs pour intérêts
de deux ans. Si vous vo u lez que ce soit un simple billet,
alors, comme c étoit un temps d’assignats ou mandats,
votre capital sera réduit à l’échelle de dépréciation, et je
vous payerai des intérêts.
A l’éclielle de dépréciation ! L e sieur Croze a-t-il osé
sérieusement le proposer, quand les lois de l’an 6 sont
form elles, et quand déjà il a acheté à si vil prix ?
Il prétend que 600000 francs, de vendémiaire an 4 , ne
valoient que 8000 francs numéraire. Que vaudroient donc
19650 francs en prairial suivant ?
Il veut persuader que le sieur Momet a gagné beaucoup
sur lu i, tandis que le domaine acquis en apparence en assi
gnats , a coûté au sieur Momet 68600 francs, malgré lu i,
quoiqu’il ne l’eût vendu au sieur Croze que 36000 francs.
L e sieur Croze confond ses propres idées, quand il dit
que le billet du 1 5 prairial est un dépôt, pour en refuser
�C 31 )
l’intérêt; car précisément il en a fait une saisie-arrêt,
comme d’un prix de vente. A u reste le fait est aujourd’hui
reconnu.
L e billet cependant n’a en capital que 18000 francs;
le sieur M omet se fait un devoir d’en convenir : mais
l’intérêt de cette somme sera dû après le terme fixé entre
les parties; et les principes à cet égard sont assez certains
pour ne pas exiger de discussion.
On sait que tout prix de vente porte intérêt de sa
nature, s’il n’y a stipulation contraire; car le capital
représente un fonds qui produit des fruits annuels. L ’ar
ticle i 6Ô2 du Gode civil n’a rien changé sur ce point aux
lois précédentes.
§. I I .
Z/e sieur
Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit, comme
'prétendant à une garantie de la demande form ée
par le sieur de Canîllac? e s t - ü Jbndê a demander un
r e m p la c e m e n t 7 en immeubles , du domaine de la
T^édrine ?
Sur cette question , le sieur M omet ne disputera pas
contre les principes ; car , si réellement il est garant du
désistement, il n’auroit pas d’action jusqu’à ce qu’il l’eût
fait cesser, ou fourni une caution.
Ce n’est pas que le sieur Croze ne lui ait contesté,
même en ce cas, le droit de réclamer son p a y e m e n t ,
moyennant caution. Cependant l’article 1653 du Code
civil en a la disposition expresse , et les lois romaines y
étoient conformes. DominUquœstione inotâ ernptorpre-
/
�iv .ï\
( 32 )
tiurn soïçere non cogitur, nisijîdejussores idonei prœstentur.
Mais le sieur Croze a-t-il prouvé que le sieur Momet fût son garant ?
Souvenons-nous que le sieur de Canillac demande le
désistement d’un domaine appelé de la Védrine, qu’il pré
tend distinct et séparé de celui de la Chassaigne , d’après
des baux et d’autres actes. L e sieur de Canillac a arti
culé que le domaine seul de la Chassaigne contient en
terres, prés et bois , les mêmes surfaces qu’il a vendues
pour deux cent dix septerées.
Si le sieur de Canillac le prouve , et s’il obtient le dé
sistement qu’il demande, comment le sieur Croze pourr o it - il assurer avec pudeur que le sieur Momet lui a
Vendu un second domaine?
A van t de repetei cette coupable prétention, que le sieur
Croze jette donc lesyeux sur la forme de l ’ acte q u ’ il a si fort
dépecé et dénaturé, mais dont la vérité sort malgré lui.
S’il a eu le projet d’enlacer un citoyen sans défiance,
en méditant de si loin les moyens qu’il emploie aujour
d’hui , il n’en est pas encore à Veçentus fraudis ; car il
est singulièrement resserré dans les clauses qui restent,
et qu’il ne peut effacer.
Dans une v e n te , il ne faut pas chercher l’intention
dans des équivoques, surtout pour ce qui regarde la
chose vendue ; car c’est là la substance principale de l’acte;
et dès-lors les mots ne sont plus rien pour désigner l’objet
vendu , quand il est matériellement exprimé.
En effet, que je vende un terrain d’une surface donnée
ou avec des confins constaus, sans difficulté l’erreur sur
la
�( 33 )
la dénomination ne prévaudra pas > parce que la cliose
vendue sera constante.
O r , ici est-il possible de se méprendre ? et par quelles
équivoques le sieur Croze voudroit-il persuader que le
sieur Momet lui a vendu deux domaines, quand môme
il n’en auroit acheté qu’un?
L e sieur de Canillac vend à Momet des bâtimens et
jardins ayant cinq septerées cinq quarteronnées ; et le sieur
M omet vend à son tour au sieur Croze des bâtimens et
jardins de la môme surface , avec les mêmes expressions
copiées mot pour mot.
En terres, en p rés, en bois , en vignes, en terrains in
cultes , on voit encore dans les deux ventes les mêmes
détails de contenue, sans la plus légère différence.
L e sieur de Canillac termine par énoncer que le tout
se porte à deux cent dix septerées une quarterounée ; et
le sieur M omet ne manque pas de recopier aussi la même
redondance, comme s’il eût voulu mieux avertir qu’il
avoit le projet marqué de s’asservir à transcrire en toutes
lettres tout ce qui concernoit l’étendue et les surfaces de la
chose vendue.
Enfin , le sieur de Canillac garantit les deux cent dix
septerées une quarteronnée, à dix arpens près; le sieur
M omet encore garantit la même étendue, et ne garantit
pas un pouce au delà.
Il avoit le droit de limiter sa garantie : il en a
sagement usé. O r , tant que le sieur Croze ne sera pas
fondé à dire au sieur Momet : Je n’ai pas les deux
cents septerées que vous m’avez garanties , il n’a à cet
égard aucune demande à former contre lui ; car ce ne
E
�C 34 )
peut etre qu’après avoir prouvé ce déficit, et si dans le.
seul domaine de Cliassaigne il ne trouve pas les deux cents
septerées, mesure du lie u , qu’il pourra former une de
mande en supplément contre le sieur Momet. Mais le
sieur Croze qui a fait arpenter Cliassaigne, sait bien que
les deux cent dix septerées s’y trouvent.
Quel seroit donc l’interprète astucieux q u i, trouvant
ainsi la chose vendue désignée avec tant de détails ,
s’obstineroit à la chercher plutôt dans des mots et dans
des circonlocutions ?
En elfet, sortons de cette partie claire et précise du
con trat, nous ne trouvons plus que de l’obscurité ou des
pièges.
Ces ra tu re s nombreuses , ces quatorze renvois , ces
laborieuses cow eeu ons fo n t naître tant d’idées pénibles,
qti il vaut mieux ne pas se je te r d an s le détail des obser
vations qu’il y auroit lieu de faire ¿\ c h a q u e ligne.
Une seule réflexion juge cette vente. Si le sieur Croze
n’a pas prévu et préparé sa défense du procès actu el,
alors le deuxième renvoi n’est de sa part qu’une précau
tion contre le sieur de Canillac , et il n’a pas d’action
contre le sieur Momet.
Si au contraire il veut trouver dans le deuxième renvoi
une action et une précaution contre le sieur M o m e t ,
alors il sera clair pour tout le monde que le troisième
renvoi est une précaution en faveur du sieur Croze; et
nul homme de bonne foi ne se défendra d’y voir le
consilium fr a u d is le plus é v id e n t , et le motif radical
de toutes les autres corrections.
Que cependant le sieur Croze ne suppose pas que cette
�( 35)
option lui soit laissée ; car il ne s’agit pas d’interpréter
ce qu’il a voulu fa ire, mais ce qui a été fait. Les règles
d’interprétation des actes, sont, d’après les lo is, toutes
favorables à la bonne f o i, sans jamais se prêter à pré
férer même le sens littéral à l’intention connue. Conirohentium voluntatem potiùs quàm verba spectari
plocuit : principe rappelé par l’article 1 1 56 du Code civil.
Que le sieur Croze cesse donc de placer sa confiance
dans son troisième ren vo i, où il a cru insérer un do
maine ; car des paroles vagues ne créent pas une vente;
et il verra encore dans l’article 1163 du Code que les
termes généraux doivent toujours sc restreindre à l’objet
positif de la convention.
Si ces principes ne jugent pas toute la question , si
déjà l’intention de la vente n’est pas assez claire par le
détail minutieux de la cliose ven d u e, on peut suivre
encore le sieur M omet dans la tradition qu’il effectue.
Q u’abandonn e-t-i 1 au sicui' C roze ? tout droit de pro
priété qu 'il ci et peut avoir sur ledit domaine. Comment
déclare-t-il en être propriétaire ? comme îa y a n t acquis
du sieur C anillac, par acte du 30 vendémiaire an 4.
Quels actes lui demande le sieur .Croze pour ses titres
de propriété ? les titres de la fam ille de Canillac.
A in s i, le sieur M omet ne vend évidemment que ce
qu’il a acheté par Vacte du 30 vendémiaire an 4; il en
fournit une expédition notariée au sieur Croze : conséquemment il n’emploie le mot vente au lieu de subro
gation , que pour ajouter sa garantie à celle du sieur de
Canillac.
Enfin , les articles 1617 et 1618 du Code civil fourE 2
�( 36 )
nissent au sieur M o met un moyen de droit qui le fait
s’applaudir d’avoir été assez soigneux pour détailler toutes
les mesures de la chose vendue.
Car le m axim um de l’excédant seroit d’un vingtième
en sus ( ce qui se rapporte aux dix arpens en plus ou en
moins ). Mais cent trente septerées à englober de plus,
ne sont pas le vingtième de deux cent dix (i).
(i) Pendant l’impression de ce mémoire, deux actes ont été déposés au greffe
«le la cour, à la diligence du sieur de Canillac, et leur existence est très-im*
portante pour la cause.
Il paroit que le sieur Croze avoit des craintes sur sa propriété, à cause de
l’émigration du sieur de Canillac; et sous prétexte de lui être utile dans les
diligences à faire pour les séquestres, ou même peut-être de lui demander une
ratification de la vente du 3o vendémiaire an 4 , il conçut le projet d’arranger
les choses de manière à é v it e r le s difficultés. En conséquence, au lieu de de
mander directement une ratification a u s ie u r de Canillac, le sieur Croze ne
voulut qu’une procuration : le plus a d r o it étoit d e ao l a faire adresser par le
Sieur M omet, pour pouvoir dire, à tout événement, que c ’ «Stoit son ouvrage;
et il en vint à bout, soit par ses instigations, soit par le canal d’un des commis
du sieur M omet, avec lesquels il étoit en rapport, ainsi qu’il ri'sulte des lettres
du sieur Croze, des 8 brumaire an 5 , 27 prairial et 11 messidor an 6, fort
curieuses, et qui montrent avec quel art le sieur Croze enlaçoit le sieur
M om et, tantôt par des prières, tantôt par des menaces.
P a r - d e v a n t ...........a é té présen t le c it. Ig n a ce B e a u fo r t - C a n illa e , le q u el donne p o u v o ir
à ......... de ré c la m e r le m o b ilie r saisi sur lu i p a r ............e t le p r ix de ce lu i ven d u par l ’adm i
nistration ......... de lé c la m e r les ferm ag es éch u s depuis 178 9 , e t q u ’il n ’a pas céd és au sieu r
M o m e t, dont en tant que de besoin il ratifie la vente -f-; d onner q u itta n c e , e tc. F a it lo 19 g e r
m inal an 6.
+ portée en c e lle de C h a s s a ig n e , q u ’il donne p o u v o ir de r a tifie r , si besoin est.
Le sieur Croze, muni de cette procuration qui n’expliquoit rien , voulut
la faire expliquer plus clairement; en conséquence, après l’avoir remplit» du
nom du sieur Cailhe, il se fit donner par lui l’acte suivant :
P a r - d e v a n t ......... a é té p résen t le c it. J e a n - R e n é C a i l h e ........... fondé de p o u v o ir du sieur
de C a n illa c , par acte du 19 germ in al an 6 ......... le q u e l, en lad ite q u a lit é , ra tifie , confirm e
et approuve, et m êm e renouvelle, si besoin e s t , la vente fai\e par le c it. d e C a n illa c .........
�)3
(
37
)
§. I I L
E s t-il dû au sieur Croze 2873 fra n cs pour dépenses
¿faites en vertu de la procuration du sieur M om et ?
Il est étrange que le sieur Croze ait osé former une
demande de cette nature, sous prétexte qu’il y a eu un
intervalle du 27 prairial au 29 , et qu’il a été fondé de
pouvoir avant d’être acquéreur.
Mais s’il est clair que le sieur Croze n’a jamais pu
des domaines de Chassaigne et dépendances, SOUS l e XOM d e
dénomination........par contrat reçu D e lo ch e , du
cation acceptée
pou r
3o vendémiaire
1*4 V iiD R iX F ,
ou toute autre
an 4 ......... L a présente ratifi
le cit. Momet P^tR le cit. Jean Croze , hom m e de l o i , demeurant à
B riou d o, présent ot accep tan t, tant pour ledit cit. M om et, et comm e fondé de procuration
gé n érale , que personnellement pour lui-même, comm e acquéreur des m êm es b ien s, suivant
le contrat du 29 prairial an 4 . etc. F a it le 16 prairial an 6.
Ainsi peut-on être surpris que le sieur Croze ait abusé de la confiance du
jieur Momet avec qui il traitoit, lorsqu’il abuse de la bonté d’un honnête
homme qui n’a aucune raison d’être en ¿¿fiance contre lu i, au point de lui
faire exprimer des clauses q u i sont Iiors de sa procuration ?
C e r t a in e m e n t le fondé de pouvoir n’a pas deviné si le domaine de la Védrine
étoit compris dans la vente du 3o vendémiaire an 4; il falloit que l’auteur de
cette divination y eût plus d’intérêt que le fondé de pouvoir : I s f e c i t , cu i
p rodes t.
Le sieur Croze a encore très-justement calculé qu’il falloit faire trouver la
vente de la V édrin e dans la vente du 3o vendémiaire an 4 , pour la faire
résulter de la vente du 29 prairial ; et voilà pourquoi la ratification ou vente
renouvelée de la Chassaigne et la V éd rin e est acceptée par lui pour le sieur
Momet; voilà pourquoi encore, dans les lettres de ratification prises l’année
suivante sur la vente du 3o vendémiaire, qui comprenoit le dom aine de la
Chassaigne, le sieur Croze ne put s’empêcher de faire mettre la terre-domainc. C e nim ia precautio juge tout à la fois ses intentions ou ses c a lc u ls ;
et personne ne se défendra de dire qu’en achetant loyalement et f r a n c h e m e n t
une propriété qu’on connoît, o n la f û t désigner sans équivoque, au lieu d em
ployer autant de détours.
i
�( 33 )
user de cette procuration avant la ven te, il en résultera
qu’alors la ¡procuration donnée par le propriétaire du
domaine de la Chassaigne, pour le régir , gouverner ,
administrer et vendre, sera annullée de plein droit par
la vente. Car alors le sieur Croze n’a pUis eu à régir,
administrer ni vendre pour le compte du sieur M om et,
ce qui lui appartenoit à lui-même.
O r , la procuration n’a été enregistrée à Paris que le 5
messidor an 4 , par conséquent après la vente du 29 prai
rial. Il n’a donc pas été au pouvoir du sieur Croze de faire
usage de cette procuration avant d’être acquéreur.
Dira-t-il que la procuration portoit aussi autorisation
d e r é g le r les loyers échus et à échoir, débattre et arrêter
les c o m p te s ? M a is par sa vente du 29 prairial, il a eu soin
de faite d é la isse r au sie u r Momet son droit aux fermages
antérieurs : consequemment, si le s ie u r Croze a fait des
poursuites, c’est pour lui ; s’il a r é g lé des c o m p t e s , c’est
pour lui. Il seroit donc bien commode qu’il eût une ré
pétition de 2873 francs contre un autre, pour avoir fait
sps propres affaires.
§. IV .
L e sieur Croze a -t-il droit de maintenir les inscriptions
qiCil a fa ites sur le sieur M om et ?
X'C sieur Croze avec des inscriptions aura des procès;
avec une transcription il n’en aura pas. Cependant depuis
dix ans il ne veut pas transcrire.
Mais si le sieur Croze aime mieux des procès que sa
tranquillité, le sieur Momet aime mieux sa tranquillité que
�( 39 )
des procès ; et il ne doit pas etre victime de ce goût par
ticulier au sieur Croze. On ne vend pas pour être gêné
perpétuellement dans ses affaires, et pour être toute sa
vie esclave de son acquéreur. Cette gêne a été, et est te lle ,
qu’elle a opéré successivement la ruine du sieur M o m et,
qui ayant fait, depuis l’an 7, nombre de ventes, n’en peut
toucher la totalité du prix; et d’après des reventes faites
par plusieurs de ses acquéreurs, il a été exposé aux pour
suites les plus ruineuses pour le rapport de la seule main
levée du sieur Croze, ou des sommes qui lui avoient été
payées. Les plus honnêtes se sont contentés, ne pouvant
toucher eux-mêmes leur prix déposé, de toucher du sieur
M omet les intérêts de ces sommes ; intérêts qui depuis
long-temps montent à 7496 francs par au. L e sieur Momet
peut donc avec raison dire qu’il eût été bien heureux
pour lui de n’avoir jamais connu le sieur Croze.
A la vérité un acquéreur a une hypothèque sur les
Liens de son vendeur p o u r la sû re té d e sa garantie ; mais
il a en m ê m e te m p s une voie ouverte pour éviter les re
c h e r c h e s des créanciers qui ont aussi hypothèque sur l’im
meuble ; c’est de faire transcrire.
Aussi les lois sur les hypothèques parlent des oppositions
ou inscriptions faites en vertu de créances, et ne disent
rien de celles qui n’ont pour but qu’une garantie; ce qui
prouve que le législateur a entendu que la voie de la trans
cription y suppléeroit; car l’acquéreur n’est pas un créan
cier. La loi a voulu une inscription d’office pour le ven
deur , s’il lui restoit dû quelque chose; mais elle n’a pas eu
la même précaution pour l’acquéreur, quoique la garantie
soit une clause tellement d’usage, que la loi la supplée
�C 4° )
si elle n’est pas exprimée, et s’il n’y a clause contraire.
Les acquéreurs qui s’obstinent à vouloir faire des ins
criptions disent ordinairement que s’ils ne craignent pas
les créances, au moins ils peuvent craindre les demandes
en éviction, qui souvent peuvent survenir au bout d’un
très-long-temps, à cause des minorités qui se succèdent.
Mais , sous ce prétexte, on seroit forcé de maintenir des
inscriptions pendant des siècles; et avec cette terreur pa
nique , celui qui vendroit une seule propriété auroit le
reste de ses biens en séquestre, sans pouvoir en disposer.
Aussi la jurisprudence a-t-elle restreint sur ce point les
prétentions des acquéreurs, en les obligeant à purger leur
vente , pour forcer leur vendeur à faire radier les inscrip
tions , sans qu’ils pussent eux - mêmes en conserver une
apiès la m a in le v é e d e toutes les autres.
C est ce qu enseigne M . Grenier, tribun, en son Com
mentaire de l’édit de 1 7 7 1 , page
de la seconde édi
tion. Il cite à cet égard un arrêt conforme, rendu au parle
ment de Paris, entre le sieur de Mâcon et la dame Gironde,
le 3 mai 1785. Le parlement de Rouen avoit jugé de même
le 18 mars 1779 , et le parlement de Toulouse le 31 août
1784.
‘ C ’est encore ce qu’ a jugé la seconde section de la
cour , le 25 prairial an 11 , -entre les sieurs Choussy et
Gardelle. Ce dernier vouloit maintenir une opposition
laite par lui pour sa garantie , et prétendoit que le sieur
Choussy n’ayant plus d’hnmeubles, il avoit intérêt de con
server ses droits sur celui qu’il avoit vendu le dernier.
Mais le sieur Choussy vint à l’audience avec la mainlevée
des oppositions qui a voient frappé les lettres obtenues sur
�éo\
( 4 0
•sa vente, et la cour lui accorda la mainlevée de l’oppo
sition de gai-antie formée par le sieur Gardelle.
Ainsi le sieur Momet répète au sieur Crose : Faites
transcrire à vos frais votre contrat, comme vous en avez
la faculté ; notifiez-moi les inscriptions, s’il en existe : tant
que je seraien demeure d’en avoir mainlevée, vous aurez
droit de maintenir vos inscriptions ; sinon vous n’êtes
pas le maître de la faire durer éternellement, en ne faisant
jamais transcrire.
C’est là ce qu’a jugé le tribunal de Brioude, et il est
clair dès-lors qu’il s’est parfaitement conformé à la juris' »^prtidençè : ce -'n'est pas ^seulement eir point de iîroit -qu’il,
""a- bién-jugé
-parle fait, ie-sieui’ Momet-« -établiqu’il,
—■
¿-’existort plus d’inscriptionà sut1 le. bien de GhaSsaigne ;.
!À.insi le sieur1Crofce n’ïivdl; motifs d©précaution qu o dans
son désir de'lie pas payer , et fraris son' prbjet bien con- '
duit de consommer fo* rüine dn siemr-'Momet.
'
v-* \ ^
*v •
j
/*• ''*»%
«,
*-
> ■ t.
Si la justice ci atteint le ;s?bur Crozedaus.^qprcVprQviJle,
^ srtes<?on«toyen^lïi6me» ont été indignés des horribles,
.chicanés. Cy.ril1i'ènouvelle■
s<nas,çe&se depui<; tant ^’apnéps *
pour ^a^pVô^rîer ; îitrphîs vil- -pris.,-.une belle propriété
qu^il voudrôit* accroître encore:, à* Combien plu§ fqrt^
raison doit-il s'attendre k ne pas.se jouer de l’intégiyté <,1q»
la cour. Le sieur Momet pourroit mériter quclqu’inttti^t,
par li\ dure position à laquelle le sieuv Croze, en gênant
toutes ses affaires, est parvenu h le réduire; mais il sê
contente de gémir en lui-même du malheur de l’avoir
connu, et.il n’osera solliciter de la cour que la plus rigou
reuse justice. Il ne plaide ici que de damno ritando ,*
F
�( 42 )
et loin de rien dissimuler, il se présente avec des pièces
originales qui doivent seules éclairer et convaincre -, car
ses intérêts ne seront jamais mieux défendus que lors
que la cour sera à portée de tout v o ir, et de prononcer
en plus grande connoissance de cause.
Signé M O M E T .
M e. D E L A P C H I E R , avocat
C
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R O I Z I E R , avoué.
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de l ’im prim erie d e L a n d r i o t , seul im prim eur de la
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C o u r d'appel. — M a i 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Momet, Gaspard-Roch. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
fraudes
notaires
abus de confiance
députés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Gaspard-Roch Momet, propriétaire à Paris, intimé ; contre Jean-Joseph Croze, sous-préfet de Brioude, appelant ; en présence d'Ignace Beaufort-Monboissier de Canillac, appelant.
Extrait de minutes du contrat de vente. Extrait de jugements.
Table Godemel : Paiement : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payé au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve, par une demande en désistement, soit sur l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ? Acquéreur : 5. un acquéreur est-il fondé à retenir la partie du prix non payée au vendeur, soit à cause du trouble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit par l’existence de ses propres inscriptions ? le vendeur est-il garant de la demande en désistement, si cette garantie résulte d’une surprise faite par l’acquéreur ? l’acquéreur peut-il se prévaloir de ses propres inscriptions conservatoires, lorsqu’il refuse de transcrire et de purger ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1791-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1619
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0411
BCU_Factums_G1620
BCU_Factums_M0523
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M
É
M
O
I
R
E
P O U R
M a rg u erite
CO U G U ET-FLO R AT,
d e R e y r o l l e s , in tim é e ;
v e u v e d u sieur
COUR
C O N T
D ’a p p e l
DERIOM.
R E
.
MA IG N E , se disant aussi veuve
dudit ____
sieur R
, appelante.
Ca t h e r i n e
de
eyrolles
l re. SECTION.
L A demoiselle Maigne n’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l ’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas craint, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
Une première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sûr des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudroit pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sucré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
La dame de Reyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d’abord adopté par la demoiselle M a ig n e , et son premier
A
�( 2)
mouvement avoil été d’user d’une représaille bien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des faits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourrnentoit depuis tant d’années , et il lui paroissoit consolant de la
jtoursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que cette jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour ; en consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d’écarter de son récit
toutes les épisodes étrangères à ses moyens. L a réclamation d ’un
état civil présente d’ailleurs trop d’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d ’ordre public; c’est-à-dire, une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , après un divorce
nul, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé ?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver difficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
' en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l’ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis sa dignité primitive;
et tout ce qui tend à la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
f a i t s
.
L a dame C o u g u e t - F I o r a t contracta mariage avec l e sieur de
Reyrolles, médecin, le 7 novembre 1774, et se constitua en d o t
ses biens échus et à échoir, c’est-à-dire, qu’elle donna plein pou-
�(3 )
voir à son cpoux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
Les premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m ère, et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroil détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrement, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. Dans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la dame
de F lo r a t, sa grand’mère.
Cet éclat, imprudent peut-être, tourna tout entier au profit de
sa rivale; la dame de Fxeyrolles fut privée de tout secours, de ses
bijoux ; et poussée d'infortunes en infortunes , pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu’elle les reçût de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l’humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise , la dame de Reyrolles se trouvoit
encore heureuse des égards de son époux; mais l ’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se faire, céda à l’évidence : l’indignation
étouffa tous les calculs d ’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Caldaguès, parons de la dame de R eyrolles,
alloient s’établir à Limoges. Affligés de sa position, ils lui propo
sèrent un asile; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d’une surveillante incommode,
la pressa de consentir à cette séparation.
Combien étoit déjà changé le sort de la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux; une étrangère lui faisoit oublier ses sermens et
ses devoirs : elle avoit eu un enfant; la m ort, moins cruelle, le lui
A 2
�....................................................................... / ( 4 )
avoit ravi à l’âge où il étoit incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu'épouse sans é po ux, mère de famille sans enf’ans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de Reyrolles , par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement dè la révolution
elle ne reçut plus rien , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints.
est certain qu’il eût fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l'affection de
son'épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes
11
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
voyoit, et il n’osoil voir; il vouloit, et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l ’homme le plus impérieux n ’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. L e premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, es t l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes ;
il reste désormais sans défense, et se dévoue à l’esclavage.
L a demoiselle Maigne triompha , et le premier usage de sa
victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors existoit une loi récente, que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours d’intervalle, et avant d ’atlaquer la
religion dans ses solennités, il n ’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire «» prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
inviolabilité, fut dissoluble indistinctement par le divorce.
Cette innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s ’e m p r e s s â t pas de la saisir. En conséquence , le
3/, mai 1797, il fut signifié à la dame de Reyrolles, de la part de son
�( 5 ;)
m a r i , un acte par lequel, il déclarait qu’il entenrloit divorcer pour
cause d ’absence, et pour incompatibilité d ’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nominoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit faire une épouse? plaider?
les tribunaux n’éloient pascompétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, et le divorce n ’eu alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en soit , le 27 mai il fut d éclaré, à la requête de
la dame die Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 24
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de R eyrolles, en
provoquant son divorce , n ’avoit fait que prévenir scs intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de fam ille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : S u r quoi ladite Conguet-F lorat leur,a répondu
q u e lle étoit disposée à suivre en tout point la 'volonté de son
mari ; mais que s i son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-même insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de l’incompatibilité s’accordoient mal avec l’im
patience de la demoiselle Maigne. On crut, donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il n ’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1785, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger u n acte de divorce , dans lequel
on suppose qu’il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fut porté à la dame de Reyrolles par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise, après la date qui
lui a été donnée : elle signa, il n ’y avoit pas à hésiter; d ’ailleurs
son re fu s, en l'exposant, n ’eùt fait que rendre cette pièce inu-
�( 6 )
lile , et forcer à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité , et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
se fut joué de ses plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoil tant hâtée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que le sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à ses pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse, T ro p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d ’un homme que le premier mouve
ment faisoit agir, et q u i , dans ce qui concernoit ses passions , ne
savoil j a m a i s p e n s e r par lui-méme. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa porto : Inquivebant niala sib i, et doloy
totd die meditabantnr.
- L a grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
à leur malignité; l’époux lui-même fut entraîné à douter contre sa
conviction intime ; et ce que la dame de Reyrolles avoit cru être lo
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
- T o u t d’un coup la scène chango : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an 2 , douze jours avant que la dame de Reyrolles , sur son lit
do douleur , donnât le jour à une malheureuse créature sous d’aussi
sinistres apspiccs.
�( (7)
N o n , le ciel ne l’a point béni, ce fatal mariage ! Il a entendu Panathème prononcé par une épouse dans sa désolation; et elle n’a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
ch asscc du lit conjugal. En portant un nom usurpe , la demoi^
selle Maigne ne trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle a voit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculécet effet habituel du mariage;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitué de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an
5.
Quelque temps après, une séparation
volontaire les a éloignés jusqu’à la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que demandoit le premier âge de sa fille, elle
attendoit avec résignation que le sieur de Reyrolles, rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d ’un retour à-la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’éloit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance, et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 , un acte d ’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, dit-il, de ce qu’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours élu d é de
déclarer ce qui pouvoit lu i être du ; qu’ elle ne cherchoit qu’à re
tarder la libération dudit Reyrolles , q u 'il étoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame Ue Reyrolles répondit qu’elle ctoit surprise et lassée
�(S)
des procédés iniques de son m a ri, et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor su ivan t, devant le tribunal du P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
Ces diligences avoient lieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an ; et, dans ce pre
mier instant où l ’opinion en augmentoit la valeur, le sieur de R e y
5
rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
Gooo francs pour tout terminer ; ajoutant, pour l’intimider, que
si elle ne l’acceptoit pas , les offres de Fan /j seroient jugées vala
bles , parce qu’elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la daine de Reyrolles demanda-t-elle à être éclairée sur
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n’avoir que les mandats offerts
au lien du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans*
un tribunal presque inconnu , à douze lieues de son domicile.
L a dame dé Reyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an
5,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
mari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un p a r t a g e de 1785, il lui revenoit 6126 liv. 10 sous; ¿1 quoi
ajoutant d/autres articles touchés par son m ari, quoique non com
pris dans l’inventaire, en valeur de 873 liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des Gooo fr. qu’il vouloit
payer , et dont l’acte porte quittance.
A ccnnpter de cette époque les époux furent séparés, et la dame
de Reyrolles 11’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
son sort avec courage : elle se consoloit avec sa lille, et celte con
solation même lui lut enviée. Après le 18 fructidor , 011 lui donna
l ’alarme sur le sort de cette e n la n t , qui n’avoit pas encore d ’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroient l’attein
dre, et elle se décida à laire une déclaration à l’officier public. On
n ’eut garde de transcrire la qualité qu’elle vouloit se donner, par
la raison qu’il eût été incivique de mépriser un divorce, et quo
le sieur de Reyrolles, redevenu puissant, n’auroit pas trouvé bon
q u ’ il
�9
.. . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . C )
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Comme ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 mes
sidor an . Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d ’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de Reyrolles, nommé receveur du
département de la H aute-Loire, alla s’établir au Puy. Là , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui habitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui Ta conduit
au tombeau.
5
A celte époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’attester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa femme, et de lui en donner, par un testament
honorable, la seule preuve qui fût désormais en son pouvoir.
En e f f e t , il est de notoriété au Puy que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par lequel , cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles, ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Grancliier le mercredi, et arriva ellemême le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
sieur de Reyrolles , q u i, à ce qu’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tête avec un mouvement con
vulsif. Quoi qu’il en soit, il expira le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
sieur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui ne dévoient être
posés que le lendemain, au lieu de verser des larmes stériles qu’il
li
�•
( 10 )
valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. Un certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n'a
plus paru; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. Et qu’on ne dise pas que c’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m otif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa dot, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une opulence chèrement
achetée, et dont la source équivoque n’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Après la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
b esoin, en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d ’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guère avec un domicile
constamment séparé, et à douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Brioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle iiU entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n’avoit pas le même domicile de fait que celui qu’elle disoit
son époux; elle ignoroit que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maison au P u y , s’en déclaroit habitant dans les actes publics, et
�( * 0
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Rrioude. En conséquence,
et par ces m o tifs, elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
frimaire an i .
ment du
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n’avoit été formée
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
23
3
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes , no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un an
après le divorce; qu’à l’égard d ’elle-même Catherine Maigne, elle
11’avoit point à craindre le sort de ce divorce, parce qu’elle étoit
mariée légitimement, héritière universelle, et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort on avoit trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les p lus p récieux.
Il est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense de la demoiselle M a ig n e , les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n ’ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n ’avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an 1 , le tribunal du P u y, sans s’arrêter aux fins de
non-recevoir proposées par Catherine M aign e, déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du
frimaire an ; remit la dame de Reyrolles au
même état où elle étoit avant lesdits actes; condamna Catherine
Maigne, en qualité d ’héritière du sieur de Reyrolles, à lui payer,
i". oo ir. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 1774 ; 20. 1200 fr. pour ses bagues et
joyaux; °. /¡oo fr. pour sa pension vîtluelle; *- à lui fournir un
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans le
3
3
5
3
5
4
B 2
�dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrolles
de constater l’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être rendu
à qui et dans le temps de droit; °. à payer à ladite dame de R eyrolles i oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la dot, le tribunal ordonna que les parties conlesteroient plus amplement, et à cet effet fourniraient leurs états res
5
5
pectifs, sauf débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit exécuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Cette dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrétoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressoit pour les rendre. L a co u r, par son arrêt provisoire du
3
24 floréal an i , a fait défénse d’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
Les parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être qufe conforme à la morale et à la
justice.
m
o
y
e
'n
s
.
^Toute la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention privée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la lo i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de dire, au contraire,
que le mariage est un lien destiné à union de deux fam illes,
intéressant la société entière, et ne pouvant être dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
1
�( *3 )
cœur Je tous ceux qui n ’auront pas oublié ces principes immuables
qui résislent au fracas des révolutions et à l’éblouissement de^
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. 11 s’agit donc d’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la dame de R e y
rolles oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prélentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a d a m e ’
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m ari, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2°. A u f o n d , le divorce opposé est-il valable ?
3°.
Si ce
divorce n’a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la convention particulière de la dame de*Reyrolles?
P
ï i e m i è r e
Q
u e s t i o n
.
I m dame de R eyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorcé après la mort de son m ari, et malgré la lo i
du 26 germ inal an 1 1 ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine ? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
defunctorum post quinqiiennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’est pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la demoiselle
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice duquel a
») été contracté un second mariage, peut en demander la nullité,
w du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de l’époux,
q u ’à titre de grâce; et il semble, par ses expressions, que c’est à
regret qu’elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de ce consentement ; et ce mot m êm e, qui semble pour ainsi
�*4
(
)
dire échappé à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u ’est-ce en effet qu’une demande de ce genre, formée par l'é
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n’est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est-ce une foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire ; Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidèle? Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Hypparelte a reconquis par un appel en juslice,
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n'est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige. Malheür donc à epouse inconsidérée qui tenleroit de
proclamer son abandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d’une rivale !
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
c o n j u g a l peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
1
mariage est comme l ’amour de la patrie, Cunctos d u cit, et irnt
memores non sin it esse sut.
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissimuloient plus, annoncoient une rupture prochaine ; et sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroil vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoil retenu que par cette considéra-,
lion. Quoi qu’il en soit, la darne de Reyrolles a fait ce qu’elle ;
�( i5 )
devoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé ses droits.
L a demoiselle Maigne n’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d ’un divorce ne pouvoit pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
i4 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de n o n -recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : T ous divorces
prononcés, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n’étoit plus possible d’attaquer les précédons divorces.
C ’est-à-dire que si la veille dé la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c’est ainsi qu^on fait l’injure au légis
lateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
Mais la demoiselle Maigne n ’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 26 germinal qu’en tronquant entièrement l’article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état civil, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément a u x
» lois qui existaient avant cette publication. »
Ainsi le législateur n ’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, n isi totd
logeperspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l ’objection de la-demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
L.e divorce du 28 ju ille t 1 yg
5 e st-il
.
valable ?
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�( 1 6 )
de procédures. L e sieur de R eyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, amalgama to u t, et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductive. Le sieur de Reyrolles, par son exploit ori
ginaire du 24 mai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis n e u f ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoit être demandé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2'. loi du 20 septembre 1792, § . 1 , art. 4. )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen*
dant cinq ans sans nouvelles , 'ù lui falloit pour première pièce
1 un acte de notoriété constatant cette longue absence ( § . 2 , art. 17):
mais sa femme étoit près de lui le 24 mai 1793.
S ’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon comportoit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dame de Reyrolles n’étoit allée à
Limoges qu’avec l ’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n ’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : l'exploit n’en dit rien.
Pour in co m p a tib ilité d ’i n i m e u r , le sieur de R e y r o lle s avoit sa
m a r c h e tracée d ’une m an ière positive,
« Il convoquera une première assemblée de parens, ou d’amis à
« défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
» la convocation. ( §. 2 , art. 8. )
» La convocation sera laite par un des officiers municipaux....
» L ’acte en sera signifié ù l’époux défendeur. ( A rt. 9. )
» Si la conciliation n ’a pas lieu , assemblée se prorogera à deux
» mois , et les époux y seront ajournés. A l’expiration des deux
» m o i s , . , si les représentations,11e peuvent encore concilier les
1
1
époux,
�( l7 ) * #
» époux , l'assemblée sc prorogera à trois mois. ( A rt. 10 et n . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acte en sera
» dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
« l’époux défendeur. » ( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acte
de convocation d ’un officier municipal.
Il ne nomma point de parens ; il indiqua seulement des a m is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793. Il en fut dressé
acte; mais aucune signification n’ a été faite à la dame de Rey
rolles , parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
Il n’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d ’humeur,
pas plus que pour absence.
C e seroit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
Mais l’acte primitif y est un obstacle perpétuel; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient corrigé cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente.
■
*»
« L e mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorcc, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des p lu s proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §. 2 ,
art. 1". )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
» les parens ou amis. . . . L ’acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( Art. 2. )
» Les deux époux se présenteront en personne à l’assemblée; ils
» y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. 4. )
L e but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L ’incompatibilité pouvoit n’avoir lieu que de la part d’un époux:
la procédure devoit donc avoir des formes hosliles ; c’est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un officier m unicipal, et un
• G
�}
huissier devoit sommer l ’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d’y comparoître.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable ;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A in s i, bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parens , et par actes séparés , ce qui marqueroit une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensem ble les
parens, en les choisissant par moitié; ellea vouluqu’ilsdemandassent
le divorce conjointement .- ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
(
1
8
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et que l’autre y a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquée.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l ’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n ’éloit pas dans son cœur ; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n ’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
N on omnium quee à majoribus constituta sunt ratio reddipotest.
Il est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses,
c ’est que toutes les formalités doivent etre suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du l\ germinal an 2 a étendu celte peine
à ^inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 178g.
�r9
(
)
Ce seroit donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a précédé le divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d ’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seu l le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n ’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne coinportoit ni opposition, ni débats , ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne paroît encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas le divorce , elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, s i son mari y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veu t le divorce ,
c’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
Voilà cependant ce que l’officier public , dans l’oubli de ses
devoirs , a reçu comme les épreuves suffisantes d’un divorce.
Un divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenlé
d ’un seul acte cl de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa forme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun de ses parens à
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux proce'dures une dif
férence notable. Pour l’incompatibilité d ’hum eur, il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m utuel, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
Si , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eût été égal
d’avoir des amis , c’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeante
C 2
�C 20 )
pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffît de remarquer que la loi
ne vouloit des amis qu'« défaut de parens.
Oseroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n ’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l’exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause semblable, a annullé un divorce
entre des habitans de Riom , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n’exprimoient pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité , qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Iïéra ud ,
notaires, le 7 novembre 1774• Mais jamais on n’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. Avant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement ; le mariage ne tenoit son essence que de la
célébration. Or , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 novembre
qui a été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d ’enregistrement et de publi» cation que l'éloient les jugemens de séparation » ( §. , art. 11. )
3
Or , le divorce opposé ne parolt pas même avoir été enregistré.
On avoitobjectéà ladame de Reyrolles qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; mais, quand on supposeroit le contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer à son tour un divorce par con
sentem ent m utuel ?
Un exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’huriieur , et cet exploiltinême
seroit une nullité de plus.
�T
r o i s i è m e
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n'a pas été v a la b le, a -t-il pu néanmoins être v a lid é
par une convention particulière de la dame de R ey rolles?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut sans doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt qu’elles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Celte différence est sensible, et lient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrat privé n ’est qu’une hérésie
insoutenable; elle est condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admetloient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu’ils avoient
sur l’importance du mariage.
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Justinien , rien
» n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’est par lui que
t) se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
» les régions et que les citpa fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus mortalibus perinde venerandum est atque matrimoniurn : qu ip p eex quo liberi, omnisque deinceps sobolis sériés
e x is tâ t, quod regiones atque civitaies frequenter reddat, undè
déni que reipublicce coaugnientatio fia t. ( N ovell. i
T o u t ce qui lenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d ’intérêt public : lïeip u b licœ interest dotes mulierum salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur ; il en
déterminoit les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage. ( ff. D e
divortïus et repudius. )
4°0
�Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullum divorlium ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n ’auroit pas été textuelle, elle eût été pro
noncée par la loi qui portoit que toutes les conventions faites contre
le droit civil, contra ju r is civilis régulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action. ( L . 28, f f . D e p a ctis.)
O r, il n’étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fût réglée par le droit civil : Jure c iv ili dissolvere solet matrimonium. ( h . 11 , f f . D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l ’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hom inis v e l conditio personarum mutari non potest. ( L . Ilhéros, c. D e lib. c. )
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n’est pas susceptible d’êlre validé par des conventions particulières •
et il résisteroit d'ailleurs au bon sens que la loi eût exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avoit aussi prévu que des époux trop peu attachés
à son observation pourroientse permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
P actiones sanè s i quœ adversus prœsenlia scita nostrœ majestatis fu erin t attentatee, tanquam legibus contrarias nullam habere volurnus firmitatem. ( L . 8 , code D e repudiis. )
Ainsi la question est disertement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n ’a pas été légalement f a i t , les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi irançaise. On demande,
dit Vinnius, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
o u i , répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : U t sponsa ma~
fieat sponsa, placet transactionem v a lcre; mais la transaction est
�23
(
)
absolument n u lle, s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( V inn.
D e trans. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fût l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilité spontanée du
» mariage, disoit le rapporteur de cette lo i, la liberté d ’en con» tracter un second , après un premier qui ne seroit pas légalement
» rompu , seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
a L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément auoc lois. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois , dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de droit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
Il en résulte donc que la demoiselle Maigne n ’a jamais pu être
l ’épouse du sieur de R e yro lles, dès que son divorce n ’a pas été
fait conformément aux lois.
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n ’est plus c la ir , et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs , suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d ’une
convention ,
la capacité de contracter, 2". une cause licite dans
l ’obligation. ( Art. 1108. ) O r, suivant l’art. 1124, la iemmemariée
est incapable de contracter elle-même; e t , d’après l'art. i i 5 3 , la
cause est illicite quand elle est prohibée par la .lo i , ou contraire à
l ’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une iemrnc mariée puisse f.iire; et cependant elle n ’a
pas la capacité de faire des dispositions bien moindres. Comment
�24
(
) .......................................
• trailcroit-elle librement avec son m a r i , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider? ( A r t . 2 i3 et i * )
L e mari lui-même , chef de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i
. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d’une transac
tion , quand la puissance maritale n ’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Reyrolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce ; et , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n ’en existe d ’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an
et de quelques
exploits.
L a dame de Reyrolles, objecte la demoiselle Maigne, s’est donnée
24
588
5
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a v a lid é son acte de divorce.
Ce qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage.
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un seul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l’être en
se disant majeur ? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d ’être
engagé dans les liens du mariage ?
L ’exécution d’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37e. plai
d o y e r , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer , si chaque acte d’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu il 11e iaut considérer que
l ’acte nul , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrolles ayant coopéré par sa signature
à un premier acte n u l , c ’est-à-dire , à son divorce , tout ce qu’elle
a fait ensuite n’en a été que 1 exécution.
Il fulloit qu’elle réclamât ou exécutât, M ais, étant en puissance
m aritale ,
�25
(
)
m aritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamer à compter du
décès de son mari : jusque-là elle étoit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclamer , de peur que son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a vu comment'elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoit d’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand cette partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n ’a point traité sur son divorce : elle n’a
fait que l'exécuter par contrainte. Pour exister , elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité des
exploits, ne pouvant sc dire autorisée du sieur de Reyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle demandoit.
Mais toutes les fois que celte qualité n’étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée ;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i , qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de F lorat-R ejrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d’un acte nul, on le répète, n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur celle matière. « L a ratification d ’une
» obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en
« rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
» cette obligation, la mention du m otif de l'action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action esl iondée. »
( Art. i
.)
358
Une donation nulle ne peut même être ratifiée : il faut la refaire
en form e légale. ( A r t . i q. ) Un divorce auroil-il moins intéressé
D
53
�(* 6 )
le législateur? et pensera-t-on qu’il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
La jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le
messidor an 4» parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d’une vente de
bien dotal en coutume d’Auvergne, « attendu que les form alités
» n’ ont pas é té rem plies, et que l’ exécution pendant plusieurs
» années du traité du...... n’ a pii 'valider un acte nul dans son
» principe. »
23
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renversés par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d ’un
tel paradoxe. Il n ’étoit question devant elle que d’un divorce 'va
la b le, dès-lors la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une arme trop puissante
pour qu’il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec cette seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d’un arrêt de
circonstance.
« Le sieur Bocliler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la v a lid ité du divorce obtenu par sa icm m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d’ailleurs et pé*
» rcrnptoircrnent que son ci-d evant mari étoit non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la v a lid ité du divorce.
» Arrêt de la cour d’appel séante à Trêves, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de n u llité étaient sans
)) fondem ent ; et encore, attendu que le inari a pu et voulu renoncer
�.7
( 2 )
)) au droit qu’il avoit de contester les effets civils du divorco de son
» épouse.
n Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article 6 du Code
» civil.
» L e demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l, seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon>i n o is s a n c e ou consentement par le m ari, la cour d’appel n ’auroit
» pu conclure, en point de d ro it, que par la force de celte con» vention le divorce fût devenu inattaquable.
» A r r ê t . — Attendu qu’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
»
»
h
»
»
»
»
»
lui attaqués, celle de l’approbation par lui donnée à la régularité
de ces actes, et même celle de la reconnoissance par lui faite dans
d’aulres actes publics de sa qualité de fem m e divorcée, à celle
qui a fait prononcer le divorce d ’avec lui, la cour d’appel n’a
pas violé l’art. 6 du Code civil, q u i , défendant de déroger par
des conventions particulières à l ’ordre public et a u x bonnes
m œ urs, et bornant sa défense à ce qui concerne ces objets d’intérêt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur l’ intérêt civil et privé; ce qu’il a formelle» ment exprimé dans Fart. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i . — Section des requêtes. »
( S ir e y , an i 5 , pag.
3
225. )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Après un divorce demandé et obtenu par une fe m m e , c ’est le
mari qui, n’étant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n’est pas incapable.
11 traite sur les intérêts civils du divorce.
11
ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il reconnoit par plusieurs actes la v alidité du divorce.
D 2
�( *8 )
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait etc
nul d’aucune nullité.
L a cour d ’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l, et il se borne à une dissertation polémique
sur l ’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décide la cour de cassation ; et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n’en résulte qu’une
plus grande conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
à l’ ordre public et à l’ intérêt civ il et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
L e m otif pris de l ’art. 2046 du Code le prouve. Il porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d ’un délit. On 11’est donc
pas libre de traiter aussi pour l’intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, el divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ intérêt; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc bien loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle M a ig n e , en citant cet arrêt, a prétendu, avec
le rédacteur, que l'article 6 du titre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure el incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
J1 est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�*9
(
)
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicœ pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression ju s publicum étoit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l ’ ordre p u b lic;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
n’éloit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction, à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires ( i ) . . .
Cependant une telle nullité n’inléressoit aucunement l’ état de la
république.
Si en donnant la dot au mari on avoit stipulé qu’il ne contribueroit pas aux frais d ’inhumation que la loi meltoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation, parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore l ’état de la république étoit
fort étranger à cette convention.
(1)
F ra ler cum hceredem sororem scriberet, e t aliu m ab e A , c u i dona-
tum v o le b a t , stipulavi cnravit ne f a lc id it i uteretur
niam
,
si contrd f e c i s s e t , prcestare
,
Tej'ragandum co n stitit ; e t ideo sororem
luram
(a)
,
,
et ut certain p e cu -
privatoruni cautione legibus non esse
ju r e
p u h lico
et action em e x stipulata denegandarn.
(
L.
1
retentionem Jiabi-
S , f f . A d leg. f a l c . )
N eratius quterit s i is q u i dotem dederat pro muliere
,
stip u la tili
est.... N e q u id m aritus in fu n u s co n jerret , ari funeraria m aritus teneatur?
e t a it... S i alius fu n eravit, posse eum m aritum convenire , q u ia p a c to hoc
J u s 1‘ u b l i c u m
infringi non possit.
(
L.
20
, f f D e rclig. et sum pt.
)
�3
( ° )
Ces dispositions n ’étoient donc que d'ordre public, et la loi ne
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public? et au lieu de se jeter dans l'application vague de la loi 6 ,
cod. D e p a c tis, et de l’art. 6 du C o d e, comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : N ullum ratum est divortium, m s i, ete.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : P actiones nullam habere voluinus
Jirm itatem , tanquam legîbus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ?ie p e u tè Ire contracté
qu’après un divorce lé g a l?
Quand les lois sont si claires, comment seroit-il possible do
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité de femme mariée, ait pu s’en priver elle-même en se disant
divorcée, et en ne transigeant pas même sur la validité du divorce
qu’on lui oppose?
Que r e s t e - t - i l donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
d iv e r s i o n à la cause par la naissance d ’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d ’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
u n e épouse et sa rivale, déterminé it fixer son irrésolution par un
retour à scs devoirs , en est tout à coup détourné par une séduc
tion toujours active; habitare fa c it sterilern in dom o, et la mère
doses enfans, r e p o u s s é e comme une vile esclave, est obligée de céder
ii une étrangère les honneurs du ht conjugal.
E h ! qu’importe à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle à scruter la conduite d’une épouse? Si cette conduite
étoit blâm able, cet adultère qu’elle proclame ne seroit-il pas
�(3 0
son propre ouvrage?-n'en porteroit- elle pas le poids éternel?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d’un enfant; il suffit
à la dame de Reyrolles de déclarer qu’elle n’a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n’est ici employé
que comme moyen de la cause, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroit-il
pas bizarre que, dans la commune où un divorce a été prononcé,
l’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objection est dorlc absolument nulle , et rentre d’ailleurs dans la
discussion précédente, où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle Maigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui est ôté , mais il lui
en reste la fortune. La dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lui appartient , d ’après son contrat de mariage. N ’est-ce pas
assez qu’elle soit réduite à le demander à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
envier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd’hui si
différent ?
Une règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé: M e liu s estfavererepetitioniqucim
cidventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans cette loi
seule , s’il n’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion , l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
co u r, puisque les lois ne réputent pas son mariage dissous. L a
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. Ainsi, les principes demeurent dans toute leur force , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-rccevoir. Mais que signifient de misérables
�( 33 )
subterfuges dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront qu’un mariage ou un divorce, c’e s t - à - d i r e , un objet
majeur et d ’ordre public. Alors disparoîtront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S .
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licen cié avoué,
À R IO M , de l ’ im p rim e rie de L a n d r i o t , seul im p r im e u r de la
Cour d ’appel. — F r im a ir e an 1 4
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
assignats
substitution de testaments
jugement moral du divorce
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée; Contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles , appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1774-Circa An 4
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0309
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0707
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
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Domaine public
assignats
divorces
jugement moral du divorce
substitution de testaments
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PDF Text
Text
M
É
M
O
I
R
E
PO U R
G asp ard -R och
M OM ET,
propriétaire à P a r is ,
in tim é ;
CONTRE
J ean -J oseph C R O Z E , sous-préfet de Brioude,
appelant ;
E N
P R É S E N C E
D'IGNACE B EA UFOR T- M O N T B O IS SIER
D E CANILLAC, appelant.
un b ien et le p a y e r , s’o b l i g e r et r e m p lir
ses engagemens , sont des opérations tellement vulgaires
qu’il n’y a nul mérite à les concevoir ; mais garder en
ses mains pendant dix ans la moitié du prix de son ac
quisition , susciter à son vendeur procès sur procès, le
forcer à payer
ooo francs le domaine qu’on a acheté
de lui 36000 francs, et cependant lui soutenir qu’il a
vendu un second domaine s a n s l’avoir su , et sans en avoir
jamais été propriétaire; enfin répondre à une somma
tion de payement par dix chefs de demandes incidentes P
A
C
HE T E R
65
�C2 )
voilà une conception grande et instructive, un coup de
maître qui décèle le génie et les grandes inspirations.
Il en coûte singulièrement au sieur Momet de désigner
le sieur Groze comme coupable d’une .telle conduite •,
mais réduit lui-même par le sieur Groze à se justifier de
n’avoir pas vendu le bien d’autrui, le sieur Momet est
dans la dure nécessité de dire la vérité à la cour, pour
sa propre défense.
F A I T S .
Par acte passé devant Deloche, notaire k Paris, le 30
vendémiaire an 4, le sieur de Canillac vendit au sieur
Momet le domaine dit de Chassaigne,
« Consistant en maison de chef, cou r, jardin et dépence dances, ensemble les bâtimens nécessaires à l’exploitac< tion , le tout contenant cinq septerées deux quarte« ronnée;
« Plus soixante septerées trois quarteronnées de terres
« labourables ;
« Plus vingt-une septerées de prés ;
« Plus cent vingt septerées de bois ;
« Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne \
« Plus cinq septerées une coupée de terres incultes;
« Ge qui forme au total deux cent dix septerées une
c< quarteronnée de terrain, ainsi que le tout se poursuit
« et comporte , sans réserve, même le mobilier vif et
« mort qui se trouvera dans ledit domaine appartenant
« audit vendeur, qui entend vendre audit acquéreur tout
« ce qu’il possède ; et les droits qu’il a et peut avoir dans
�(3)
« ledit domaine et dépendances, à dix arpens près, en
« dehors ou en dedans. »
La vente est faite moyennant 600000 francs de prix
apparent, dont l’acte porte quittance.
11 est dit que le domaine vendu appartient audit sieur
de Canillac, comme lui étant échu par le partage des
biens du sieur Pierre de Canillac, son oncle, et que le
vendeur s’oblige de remettre à l’acquéreur un extrait
dudit partage, de l’inventaire fait après son décès, du
contrat de mai’iage de lui Canillac, et du contrat de vente
de la terre de Beaumont.
Il est dit enfin que l’acquéreur se réserve les fermages et
produits de l’année 1794? et que l’acquéreur sera tenu
d’entretenir le bail ou traité fait avec le fermier dudit
domaine, pour Tannée courante seulement ( i j g ô ) .
Le sieur Croze, domicilié à Brioude, habitant alors Paris
comme membre du conseil des cinq cents, ayant eu connoissance de cette acquisition, pi^oposa au sieur Momet
de lui vendre ce même domaine, dit de Chassaigne,
avant que ce dernier sût même en quoi il consistoit. L ’ac
cord eut lieu moyennant 36000 francs. Mais le sieur Croze
n’ayant pas la moitié du prix qu’il étoit convenu de payer
comptant lors de la signature de l’acte de vente, demanda
six semaines pour se le procurer, ainsi qu’une vente sous
signature privée, laquelle lui fut consentie pour le seul
domaine de Chassaigne. Le sieur Croze ne désavouera
certainement pas ce fait.
Le sieur Croze alla à Brioude chercher ses fonds, et bien
probablement visiter l’objet qu’il avoit acquis; dès-lors il
A
2
�(45
conçut le projet de faire englober dans sa vente devant
notaire le petit domaine de la Védrine, qui était voisin de
celui de Chassaigne. De retour, il convint de passer la
vente devait notaire, le 27 prairial an 4; mais il pria le
sieur Momet de lui donner en môme temps une procura
tion générale pour gérer, administrer, même vendre ce
domaine de Gliassaigne, sous prétexte qu’il ne vouloitpas
encore faire connoître sur les lieux son acquisition; ce que
le sieur Momet ne crut pas devoir lui refuser.
En conséquence le sieur Momet remit à M e. Deloche,
notaire du sieur Croze, le double du sous-seing privé, et
une expédition du contrat à lui passé parlesieurdeCanillac,
pour qu’il rédigeât la vente et la procuration conformément
aux actes qu’il remettoit. Ils le furent en effet*, et le 27 prai
rial, jour pris avec le sieur Croze, M e. Deloche vint chez
le sieur Momet, muni de ces deux actes rédigés, et littéra
lement conformes au contrat de vente que lui avoit passé
M. de Canillac. Le sieur Croze fit dire qu’il ne pouvoit
venir ce jour-là , mais qu’il viendroit le 29. N é a n m o in s
comme il n’était nullement n é cessa ire de la présence du „
sieur Croze pour signer la procuration convenue, le sieur
Momet en signa ce même jour, 27 prairial, la minute,
qui ne faisoit mention que du seul domaine de Chassaigne,
ne contenoit aucun renvoi, et l’approbation ne constatait
que trois mots rayés.
Le 29 , M e. Deloche et le sieur Croze se rendirent en
semble chez le sieur Momet pour la signature du con
trat de vente. Du 27 au 29 , la minute n’avoit éprouvé
aucun changement, ne contenoit aucun renvoi, et ne
faisoit toujours mention que du seul domaine de Chas-
�(5)
saigne. Ce fut' h la lecture de cet, a c t e q u e l l e sieur
Croze;parvint à taire mutiler la première rédaction r et
à faire ajouter quatorze renvois, tous plus insidieux les
uns que les autres. Bientôt la .cour en reconnoîlra paj;
elle-même toute l’astuce et la perfidie, •
v; ,,
D ’abord ce ne furent que de'simples corrections clq
quelques m ots, puis quelques changemens de sens ;
enfin , des phrases entières à rectifier. Il étoit dit , par
exemple , que les fruits lui appartiendroient depuis les
dernières échéances : il prétendit que cela étoit vague,
quoique correspondant à la première vente , et s’expli
quant par elle; il voulut faire substituer 1796 et 1796.
Iln ’avoitparsa vente qu’une quittance sans numération,
et il voulut faire ajouter la numération d’espèces. Le no
taire eut la complaisance d’ajouter cette numération ; et il
est constant aujourd’hui qu’il ne paya alors effectivement
que moitié de son prix.
Il prétendit n’être pas assez sûr de la propriété de
M. de Canillac ; il voulut une remise de titres : que ne
vouloit-il pas ? Enfin , le sieur Groze aborda une clause
plus épineuse. Il prétendit que le domaine de Chassaigne,
quoique ne portant que ce nom , comprenoit un petit
domaine ou locaterie, appelé de la V éd rin e, qui en
étoit une dépendance; qu’autrefois ces domaines étoient
distincts, et séparés; mais que depuis long-temps ils n’en
faisoient plus qu’un, parce que dans l’un des deux do
maines les bâtimens d’exploitation étoient écroulés.r(L e
domaine de la Védrine, dit-on, contient seul cent trente
septerées de terre. )
. Ce lait pouvoit être exact. Le sieur Momet n’en a^oit
�(6)
auciine cônnoissance, et disoit seulement : « Je ne puis
a vous vèndre que ce que j’ai acheté : puisqu’il n’est
« pas question de ce domaine dans mon contrat , je ne
« puis en parler dans le mien; s’il fait partie de mon
« acquisition, il fera partie de la vôtre. » Alors le sieur
Croze se retrancha à demander que , pour éviter
toute difficulté, et ne pas compromettre le sieur Momet,
il fût fait mention du domaine de la Védrine , comme
désigné seulement dans le contrat fait par le sieur de
Canillac au sieur M omet, sous le seul nom du domaine
de Chassaigne. Le notaire fut d’avis de cette rédaction de
clause; parce que, disoit-il, vous réféi’ant en tout à votre
contrat, si Passertion du sieur Croze est vraie, vous ne
vous engagez à rien ; si elle est fausse, vous ne vous
engagez pas davantage. Vaincu par ce raisonnement
v ra i, le sieur Momet voulant en finir et toucher l’a
compte que le sieur Croze lui donnoit, consentit à cette
rédaction.
Il en fut de même de la clause p a r l a q u e l l e , après
celle de la garantie formelle qui est la même que celle
portée au contrat du 30 vendémiaire, le sieur Croze
exigea que le sieur Momet renonçât à tout excédant de
mesure, à quelque quantité qiCil puisse monter. Le sieur
Croze et son notaire dirent au sieur Momet : N’entendezvous pas vendre tout ce que vous avez acquis ? Il en
convint : donc, dirent-ils, cette clause ne vous engage
à rien.
Ainsi successivement furent vaincues les répugnances
du sieur Momet, q u i, habitant de Paris , ne connoissoit
pas ce qu’il vendoit, traitoit avec le sieur Croze ; do-
�7
(
)
#
’
micilîé de Brioude, qui connoissoit parfaitement ce qu’il
achetoit, et toute l’étendue du contrat de vente faite au
sieur Momet, dont il avoit sous les yeux une expédition,
et depuis long-temps une copie.
La prévoyance du sieur Croze fut telle , qu’en deman
dant successivement les corrections ci-dessus , il étonnoit
d’autant moins le sieur M om et, que s’il lui eût pré
senté à la fois quatorze renvois à ajouter ; ce qui lui
ôtoit toute idée d’exiger, comme alors il l’auroit fait,
sans doute, une refonte entière de l’acte, pour dévelop
per les additions faites , et expliquer des clauses équivo
ques qui n’étoient ainsi écrites que pour s’identifier à la
première rédaction.
Il fut inséré dans ce contrat quittance des 36000 fr.
et le sieur Momet, qui n’a rien dissimulé dans cette cause,
s’est empressé de convenir qu’il n’avoitreçu qu’une partie
de ce prix ; et qu’après le contrat, il fut fait un billet
de dépôt de 19650 fr. 7souscrit par le sieur Croze au profit
du sieur Momet, daté du i prairial an 4. ( C’étoit alors
le seul mode valable pour stipuler en numéraire, )
Quoi qu’il en soit , pour que la cour ait sous les
yeux le résultat de ce qui vient de lui être d it, et voie
par quel arç on peut surprendre un citoyen sans défiance ?
voici l’image de la minute de la vente du 29 prairial
an 4 , d’après le vidimé oi’donné ;
5
Nota. T o u t ce qui se trouve entre deux crochets dans l'acte ciaprès, ainsi que dans la procuration, a été rayé dans les minutes.
�2.) Prairial 4-
(8)
P
ar - d e v a n t les notair es
r u s t i c s au département
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-Roch M om et, citoyen fran
çais, demeurant à Paris, place des Victoires-Nationales, section de la H alle au L ié, n°. 5 ,
Lequel a par ces présentes, vendu, cédé, quitté
et délaissé, dès maintenant et à toujours, et a promis
de garantir de tous troubles, dons, douaires, dettes,
hypothèques, évictions, substitutions, aliénations, x
empéchemens généralement quelconques,
A u citoyen Jean-Joseph C roze, homme de lo i,
demeurant à P a ris, rue des Saussayes, n°. 124^,
section de^- [Rou] Champs-Elysées , à ce présent et
acceptant, acquéreur pour lu i, ses héritiers et ayans
cause,
* et autres
f domaines de Chassai-
L es -J- domaine dit de Chassaigne, district de
gne et de la Védrine, dé
signés seulement, dans le
contrat qui sera ci-après
énonce, sous le seul nom
du
Brioude , département de H aute-L oire, consistant
en une maison de’ ch ef, bâtie à la.m oderne, co u r,
jardin et dépendances, ensemble les bâtimens néces
'% •
S
saires à l’e x p lo ila tio n , le tout c o n te n a n t cin q septerées
trois q u artero n n ées [de terre la b o u ra b le ] ;
Plus soixante septerées trois quarteronnées de terre
labourable ;
Plus vingt-une septerées de j^rés ;
Plus cent vingt septerées de bo is, tant taillis que
haute futaie, situées dans la commune de Chassaigne
et dans celle de Sansac ;
Plus deux septerées deux quarteronnées de vigne ;
et enfin cinq septerées une coupe de terrain inculte:
ce qui forme au total deux ce n t, dix septerées une
qyarteronnée de terrain, ¡ainsi que le tout se poursuit
et comporte, sans aucune exception ni rcser\e, même
le mobilier v if et m ort, de quelque nature qu’il soit,
qui se trouvera dans ledit domaine et dépendances :
garantissant
�(
9
)'
garantissant en outre audit acquéreur les deux cent
+| par ledit vendeur repéter c^x sopterées une quarteronnée, à dix arpens près,
contre Vacquéreur l’ excé- [en dehors ou en dedans,] sans pouvoir +1 [répéter
dantdesdites terres, à quelcéd an t. ]
que quantité qu’ il puisse
P ° ur Par ledit Croze, ses héritiers et ayans cause,
monter.
jo u ir, faire et disposer dudit domaine en pleine propriété , et comme de chose leur appartenante , à
compter de ce jour, et en commencer la jouissance -+X notaires à P aris,
[& compter des dernières échéances, de manière que
de réc°lte des fermages et autres produits
dudit domaine appartiendra audit acquéreur;] ledit
*+• par les revenus et fer- vendeur se réservant seulement les fermages de l ’année
mages des années mil sept mil sept cent quatre-vingt-quatorze ( vieux style ).
cent quatre-vingt-quinze et
L e domaine présentement vendu appartient audit
nul sept cent quatre-vingt- cit. M om et, comme l'ayant acquis du cit. Ignace
seize, vieu x style ;
Beaufort-Canillac, par contrat passé devant D eloche,
Gn a ^
ct son c o n f rè re , x le tren te ve n
d ém iaire d e rn ie r, en registré à P a ris le m êm e jo u r.
A à lu charge
L a présente vente est faite A par ledit acquéreur,
@
(JUi S,° WiSe > l °mde W er et acquitter les droits d’en
registrement et frais de contrat auxquels la présente
vente pourra donner lieu ; 2°. la contribution foncière
/. I an trois et l an quatre, à laquelle ledit domaine peut être imposé pour /t [la
présente année] et les années suivantes; 5°. d’entre
tenir le bail ou traité fait [pour la présente année seu
lem ent] avec le citoyen fermier dudit dom aine, si
aucun il y a.
Etenoutre cette venteestfaitem oyennant lasomme
de tren te-six mille livres de prix principal, francs
deniers audit vendeur; laquellesom m eledit acquéreur
T nombrées et réellement a P ^ en lcm en t payée audit citoyen M o m et, qui ]e
délivrées à la vue des no- rcconnoit- cn esPeces, sonnantes 0 et monnaie ayant
tairessoussignés,
C0UtS’ comPtées + - dont 11 ost “ n ien t, eu quitte et
¿¿y.
f* d’ or et d’ argent,
�( IO )
décharge ledit citoyen C ro ze, et de toutes choses re
latives au prix de ladite vente.
A u m oyen de quoi ledit citoyen M om et a présente
ment cédé et transporté, sous la garantie ci-devant
exprimée, tous droits de propriété qu’il a et peut avoir
sur ledit dom aine, de quelque nature qu’ils soient,
même tous droits rescindans et rescisoires, mais sans
aucune garantie à l ’égard de ces derniers, voulant qu’il
en soit saisi et mis en possession par qui et ainsi qu’il
appartiendra, constituant à cet e ffet, pour son pro-t- d’opposition à l’ entrée cur.eur ’ le Porteur donnant pouvoir.
en possession dudit doH sera loisible audit acquéreur d’obtenir à ses frais, •
main e, +|
sur le présent contrat, dans le délai de quatre m ois,
¿Wï
toutes lettres de ratification nécessaires; et si, au
sceau desdites lettres, il y a ou se trouve des oppoou de troublefo n d é dans s^ioris procédant du lait dudit vendeur ou de ses •
la possession et jouissance
ledit cit0J en Mornet s’oblige de les faire
dudit domaine présente- Iever et cesser’ ct d ’en rapporter audit acquéreur
ment vendu, le cit. M o m e t les mainlevées et radiations nécessaires, quinzaine
promet et s’ oblige d’en in- aPrès Ia dénonciation qui lui en aura été faite à son
demniser ledit cit. Croze dom icile, le tout aux frais dudit vendeur; de manière
en lui fournissant, cîans '["<•
acquéreur ne soit tenu que du coût des
V
. j „ // simples lettres de ratification.
Varrondissement des der
.
r i i- i
partemens de la HauteEn cas d CVICt,on’ ^ Cdudlt dom a,neprésentement
LoireetduPuy-de-Dôm e, ven d u > le cit- M om et Promet de rendre ai,dit cit.
des terresformant corps de C roze,dans les departemens etreonvoisins, des terres
ferm e, et c e , à dire d’ e x - Pour la méme ïa le u r' ,ct ce> à dlre d’cxperts, et non
perts, sans pouvoir par le- la somme (ïu’11 ,Tient de « cevo ^ .]
dit vendeur offrir, pour
^ o n n o l t ledit cit. Croze que ledit cit. M om et lui
l’ indemnité, le rembourse- a P a i e m e n t remis une expédition en papier du
ment du prix de lad. vente,
et contraindre le cit. Croze
h Vaccepter
.
contrat de ïcn te susdat<; ct <5n0nce’ fa,t audlt c,t*
M om ct ; P,us ^ d U i o n en papier de la transac^on en f ° rme ^e partage, taite entre ledit citoyen
Canillac et [la dame] sa sœur, passée devant M ony,
qui en a gardé m inute, çt son confrère, notaires i\
�Paris, le
( 11 )
sept juin m il sept
cent quatre-vingt-qualre,
d o n t d éch arge.
x incessamment
A l’égard d’un extrait de l'inventaire fait après le
décès du père du cit. Pierre B eaufort-C anillac, de
celui du contrat de mariage dudit vendeur Canillac
avec la citoyenne son épouse, en ce qui concerne le
douaire ; de celui du contrat de vente de la terre de
Beaum ont, en ce qui concerne ce moine douaire,
]e
]V[omet s’oblige de les remettre x audit cit.
+| et Varrêt d’ enregistrenientf qui ont été obtenus
sur la transaction dudit
jour sept juin mil sept cent
quatre-vingt-quatre.
vau,
Croze, avec toutes autres pièces au soutien de ladite
propriété, que pourroit lui remettre ledit cit. C anillac,
aussitôt que ce dernier les lui aura remises, et jiotamment les lettres patentes -H [les lettres.]
Enfin le citoyen M om et s’oblige, au besoin, d’aider
l’acquéreur, à sa première réquisition , des diverses
quittances des payemens par lui laits pour le citoyen
-4- et de luijustifier des su- Canillac
différons de ses créanciers privilégies o u '
bromations portées ès-dites hypothécaires sur les biens présentement ven d u s,-4quittances , jusqu’ à due le tout à peine de tous dépens, dommages-intérêts. A
concurrence de la somme
Pour l’exécution des présentes, les parties élisent
de quatre cent mille livres domicile en leurs demeures à P a ris, ci-devant déassignats;
signées, auxquels lie u x , nonobstant, prom ettant,
A Enfin le citoyen Momet obligeant, renonçant.
s’ oblige de remettre aussi
Fait et passé à P aris, en la demeure du vendeur,
incessammentaud.acqué- l'an quatre de la république française, une et indireur toutes les pièces qui visible, le vingt-neul prairial, après m id i, et ont
lui seront nécessaires pour signé ces présentes, où quatre-vingt-quatre mots sont
se faire mettre enposses- rayés comme nuls, (i) Ainsi signé M om et, Croze,
sionréelle dudit domaine, Fleury etD elo ch e, ces deux derniers notaires, avec
d?ici au p r e m i e r fructidor paraphes. Au-dessous est écrit : Enregistré à Paris,
prochain, et obtenir celles bureau du Contrat-Social, le 6 messidor an 4 , F . 117,
qui pourraient lui man- ^ol- 10 ; R . quatorze cent quarante livres, valeur fixe
querm
en mandats, sur
ooo liv. Signé Grou.
56
G
u il l a u m e .
^
(1) Ce sont les mots rayés à la plume dans le cours de l’acte.
D
e l o c iie .^
^
�( is )
Après cet acte , il restoit encore à retoucher à la pro
cu ra tio n à laquelle on n’avoit pas pensé ; mais pour cela
on n’eut pas besoin du sieur Momet : et au lieu de porter
le renvoi ( et de la V'édrine ) , en marge , on en fut
quitte pour le placer au bas de la première page, en le
faisant aboutir au paraphe du sieur Momet ; ce qui est
prohibé par la loi du n ventôse sur le notariat, et par
les lois précédentes ( i) . Il paroît nécessaire de mettre
aussi cette procuration sous les yeux de la cour.
2T] Prairial 4.
P a r - d e v a n t l e s n o t a i r e s p u b l i c s au département de la Seine
et à la résidence de P aris, soussignés,
Fut présent Gaspard-R ocli M om et, citoyen français, demeu
rant à Paris, place des Victoires-Nationales, n°.
H alle au blé ;
3,
section de la
Lequel a fait et constitué pour son procureur général et spécial
le citoyen Jean-Joseph Croze, homme de lo i, demeurant à Paris,
rue des Saussayes, n°. 1243, section des Cham ps-Elysées, auquel
il donne pouvoir d e , pour lui et en son n o m , régir, gouverner et
(1) Le notaire a dit, au procès verbal du vidimé, que le renvoi avoit été
approuvé dans cette procuration par les paraphes du sieur M omet, du notaire
en second, et de l’enregistreur. Le sieur Momet désavoue ce fait, et il vient
de se pourvoir extraordinairement à Paris, contre le sieur Deloche.
Mais ce qui prouve que le renvoi n’a été mis qu’après l’enregistrement,
et hors la présence du sieur M omet, c’est que la copie légale de l’enregistre
ment de cette procuration, levée par le sieur M omet, ne porte mention que
de la gestion du srul domaine de Chassaigne , et ne constate aucun renvoi,
quoique la formule des registres l’exige, s’il y en a; et au contraire on voit,
dans l’extrait de l’enregistrement de la vente, que la minute y est dite avoir
quatorze renvois ; enfin la cour verra par des s a jo u t é s , par les ratures non
approuvées des mots de Chassaigne, qu’il n’étoit question que d’ un domaine
seulement,
�( 13 )
administrer les domaines de C hassaigne-t-, situés dans le ci-devant
district de Brioude, département d e là H aute-L oire, consistant en
terres, m aison, bâtimens et vignes; recevoir de tous locataires,
fermiers et autres personnes qu’il appartiendra, soit en nature ou
autrem ent, les loyers échus et à échoir ; compter avec tous débi
teurs , débattre, clore et arrêter lesdits comptes, en fixer et recevoir
le reliquat ; de tous reçus donner bonnes et valables quittances et
décharges ; accepter tous transports et délégations pour le payement
de toutes sommes dues par quelques débiteurs ; louer ou vendre, soit
en totalité ou en partie, le domaine dont il s’a g it, à quelques per
sonnes que procureur constitué jugera £i propos; laire lesdits baux
ou ventes aux p rix , charges, clauses et conditions qui lui paroltront le plus convenables; faire faire môme toutes dém olitions,
[reconstructions] et augmentations qu’il jugera nécessaires ; nom
mer et convenir de tous architectes, entrepreneurs et autres gens
de b â tim e n s ; c o m p te r avec tous fo u rn isse u rs, les payer, s’en faire
rem ettre q u itta n c e s ; to u ch e r m ô m e , en to ta lité ou autrement, le
prix des ventes qu’il pourroit fa ire dans ledit dom aine; de tous
reçus donner bonnes et valables quittances et décharges; faire régir
môme le jd iti domaines [de Chassaigne] par qui bon lui semblera;
lui donner pour cela, à celui qui acceptera ladite charge, tous
pouvoirs nécessaires. Dans le cas où quelques débiteurs se refuseroient à payer au constituant les sommes qu’ils lui doivent, et qu’il
surviendroit quelques difficultés avec qui que ce soit, faire contre
qui il appartiendra toutes poursuites, c o n tra in te s [et d ilig en ces] et
diligences nécessaires; comparoitre devant tous juges de paix , soit
en demandant ou défendant, s’y concilier, si faire se peut; à défaut
d’arrangem ens, comparoitre devant tous tribunaux com pélens, y
plaider, ou bien nommer et convenir de tous défenseurs officieux
en causes; les révoquer, en substituer d’autres; obtenir tous jugemens, les faire mettre à exécution ou bien en appeler; faire toutes
H- et de la Védrine
�\
( 14 )
exclusions de tribunaux, former toutes oppositions, donner tou tes
m a in le v é e s , consentir radiation, traiter, transiger, composer ^
substituer ès-dils pouvoirs, et généralement faire tout ce qui sera
nécessaire, promettant l’avoir pour agréable.
Fait et passé à P aris, en la demeure dudit citoyen M om et, Fan
quatre de la république française, une et indivisible, le vingt-sept
prairial; et a signé.
Hayé trois mots nuls.
Signé M om et, avec Fleury et D eloclie, ces deux derniers no
taires, avec paraphes. A u bas est écrit : Enregistré à P aris, bu
reau C ontrat-Social, le messidor an ; R* vingt sous assignats.
Signé Grou.
5
G
u i l l a u m e
4
.
A»
D
e l o c
Cependant le sieur Momet se croyoit tranquille, et
assuré surtout de toucher au temps convenu les 19650 fr.
qui lui étoient dûs ; mais il en étoit encore bien loin.
Quand il fut question de payer, le sieur Croze parla
des créanciers du sieur de Canillac, et voulut des lettres
de ratification. Q u o iq u ’il eût été convenu q u e ce seroit
son contrat qu’il feroit purger, et non celui du sieur
M om et, il pria ce dernier de souffrir que ce fût la pre
mière vente, par la raison qu’elle présentoit un prix
inférieur, et qu’il lui en coûteroit moins, s’en chargeant
pour son propre compte , et promettant d’indemniser
de tout le sieur Momet qui , cette fois encore , s’en
rapporta au sieur Croze, dont le caractère de député étoit
fait pour mériter sa confiance.
Le contrat du 30 vendémiaire an 4 fut donc mis ,
par les soins du sieur Croze , au bureau des hypothè
ques du Puy. Par les soins encore du sieur Croze, il y
�5
( i )
eut des enchères qui portèrent ce domaine de Ghassaigne
à
ooo francs numéraire.
Il n’y avoit pas à balancer; le sieur Momet s’étoit obligé à
faire jouir, il fut obligé de retenir le domaine en parfou unissant les enchères; et la mère du sieur Croze fut,
à l’insçu du sieur M om et, caution du parfournissement.
Les lettres de ratification furent scellées, à la diligence
du sieur Croze , pour
ooo francs au profit du sieur
Momet , le 14 brumaire an 7.
A in s i, voilà déjà le sieur Momet obligé de payer un
domaine ooo francs en numéraire, outre les frais mon
tant à 3600 francs, après l’avoir vendu 36000 francs, et
n’en avoir touché que 18000 francs.
Par l’inspection de ces lettres de ratification , si sa
correspondance ne le prouvoit pas , on reconnoîtroit
que tout est L’ouvrage du sieur Croze ; on verroit qu’il
s’est torturé pour arriver à y faire comprendre indirec
tement, il est vrai, tout ce qui se trouvoit à Ghassaigne,
en y faisant qualifier ce domaine de terre-domaine, quoi
qu’il se fît expédier des lettres sur le contrat du 30 ven
démiaire, qui ne porte que le nom de domaine.
Ces lettres furent frappées des oppositions de q u a tr e
créanciers de M. de Canillac , quoique le sieur Momet
n’eût cessé de prier le sieur Croze de les désintéresser avant
les lettres ; mais cela eût évité les sur-enchères , et le
sieur Croze n’auroit pas eu un prétexte pour ne pas payer.
Enfin , quatre ans se passèrent : le sieur Momet réclama
de nouveau son payement.
Alors il lui fut signifié, le 11 floréal an 1 1 , une de
mande en ouverture d’ordre ? à la requête du sieur Labas-
65
65
65
1
�( ,i6 )
tide , de B r io u d e , l’un des créanciers Canillac. Le sieur
Croze sign ifia cette demande au sieur Momet.
P o u r lever cet obstacle, le sieur Momet chargea le
sieur Fabre de payer au sieur Labastide 2700 francs ,
montant de sa réclamation, ce qu’il fit ; et le sieur
Labastide donna quittance le 12 messidor an n . Cepen
dant le sieur Croze, débiteur déplus de 18000 francs,
avoit mis le sieur Momet dans le cas de payer le triple de
son acquisition , et laissé faire pour plus de 3600 francs de
frais, nonobstant toutes les remontrances des créanciers,
notamment du sieur Labastide, l’un d’eux, poursuivant,
qui, indigné, en écrivit au sieur Momet.
Il ne devoit donc plus y avoir de prétexte pour le
sieur Croze ; mais bientôt un autre incident le mit plus
à son aise.
Par exploit du 13 fructidor an 1 1 , il paroît que le
sieur de Canillac fit assigner le sieur Croze en désistement
du domaine de la V édrine, comme ayant été par lui
u su rp é .
Aussitôt le sieur Croze saisit et arrêta en ses propres
mains, sans aucune permission de justice, ce qu’il
au sieur M om et, et lui dénonça cette saisie arbitraire.
Le sieur Momet fut forcé alors de prendre les voies ju
diciaires, et il fit citer, le 13 nivôse an 12, le sieur Croze,
en payement en deniers ou quittances du billet de 19660 f.
et en mainlevée des inscriptions qu’avoit faites ledit sieur
Croze pour sa garantie; il le somma de faire ti’anscrire sa
vente.
Au bureau de paix on remarque, de la part du sieur
Momet, une longue explication de tous ses moyens. Quant
au
devoit
�(17 )
au sieur Croze , il reconnut son écriture du billet, offrit
de payer sans intérêts, à la charge des demandes ci-après.
Sur le surplus, il refusa toute explication, et dit que sans
se nuire ni se préjudicier sur ce qu'il peut avoir d it, il
pense qiùau m oins, quant à présent, il n'y a lieu ci con
ciliation.
Assigné le 30 pluviôse en payement, il forma à son
tour dix chefs de demande contre le sieur M om et, par
exploit du 8 floréal an 12.
i°. A ce que le sieur Momet fût tenu de faire cesser la
demande du sieur Labastide.
20. A ce qu’il fût tenu de faire cesser aussi la demande
formée par le sieur de Canillac, en désistement.
°. A ce que la saisie-arrêt faite par lui-même en ses
mairis fût confirmée.
40. A ce que le sieur Momet fût condamné à lui payer
les fermages de la terre de la Chassaigne, échus depuis 1795
jusqu’au jour de la demande.
°. A ce que le sieur Momet fût condamné à rapporter
mainlevée de toutes oppositions et inscriptions existantes
sur les biens vendus.
6°. A ce qu’il fût tenu de lui remettre tous les titres de
pi'opriété des biens vendus.
70. A ce qu’il fût tenu de prouver avoir payé pour
400000 francs de dettes à la décharge du sieur de Canillac,
suivant les contrats de vente, et justifier des quittances.
8°. A ce que le sieur Momet fût condamné à payer
sieur Croze 2873 francs pour voyages et dépenses qu’il a
faits pour ledit sieur M omet, en vertu de sa procura
tion du 27 prairial an 4*
3
5
audit
C
�(i8).
9°. A ce qu’il fût tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il dit avoir contre ledit sieur Croze.
- io °. A ce que, faute de justifier de quittance avec su
brogation pour 450000 francs, le sieur Momet fût con
damné à lui fournir, à dire d’experts, des terres de même
nature et valeur que celle de la Chassaigne, et à lui rem
bourser ce qu’il a touché du prix.
Le sieur Croze n’oublia pas ensuite de demander la
jonction de ses conclusions à celles du sieur Momet, et la
jonction fut ordonnée par jugement du 23 prairial an 13.
Eu réponse aux demandes du sieur Croze , le sieur
Momet ne dissimula pas que le billet de 19660 francs par
lui réclamé comprenoit i o francs d’intérêts*, aussi se
borna-t-ilréclam er seulement lesintérêtsde 18000 francs;
il offrit de remettre, audience tenante, tous les titres de
propriété du sieur de Canillac, comme il s’y étoit obligé par
la dixième clause de la vente ; il justifia d’un certificat de
65
n o n -in s c r ip t io n sur lu i et son v e n d e u r ; et d ’ a b o n d a n t, offrit
encore de r a p p o r te r la mainlevée de toutes inscriptions,
aussitôt que le sieur Croze auroit fait transcrire et les lui
auroit notifiées ; et il soutint que le surplus des demandes
du sieur Croze n’étoient pas fondées, et que notamment,
à l’égard de sa garantie, il étoit évident que le sieur Momet
n’avoit pas vendu ni entendu vendre plus qu’il n’avoit
acquis lui-même.
Le sieur Croze répondit à la demande du sieur de
Canillac, en le sommant de justifier s’il étoit réintégré dans
son état civil, attendu qu’il avoit été émigré; puis il lui
opposa qu’il étoit insolvable, et demanda caution judicatum
A l’égard du sieur Momet ; il lui objecta que
�19
(
)
si le sieur de Canillac faisoit juger que la Védrine étoit un.
domaine séparé de la Chassaigne, le sieur Momet devoit
lui remplacer cette éviction en un autre corps de domaine,
d’après leur convention, parce que le sieur Momet lui avoit
vendu et garanti distinctement les domaines de la Chas
saigne et de la Védrine.
Sur ces moyens respectifs, le tribunal de Brioude rendit,
le 21 messidor an 13, entre toutes les parties, un juge
ment dont il importe de faire connoître littéralement les
motifs et les dispositions.
Jugement dont est appel.
Entre le sieur de C a n illa c ................le sieur M o m e t...................
et le sieur C ro z e ...............
E n ce qui Couche la demande récursoire dirigée contre le sieur
Momet par le sieur C ro z e , au sujet de la demande du sieur L a
bastide ;
Attendu qu’il est prouvé par acte reçu Grenier , notaire, le i3
messidor an 11 , que ce dernier a été désintéressé; qu’il avoit été
justifié de cet acte audit sieur Croze , lors du procès verbal de nonconciliation , du 29 nivôse an 12; que ce chef de demande devenoit
dès - lors inutile , et que d’ailleurs il a été justifié de cet acte à
l ’avoué dudit sieur C roze, par acte du 22 prairial dernier; qu’ainsi
ce chef de demande ne présente plus de difficulté.
E n ce qui touche la demande principale formée de la part du
sieur Canillac, au désistement du domaine de la V édrin e;
. A ttendu que les terres de Chassaigne, Cusse et Lacougeat sont
échues au sieur Canillac par le partage, et qu’il n’y est nullement
fait mention du domaine d e là V édrine, dont il a cependant tou
jours joui, ou par lu i, ou par ses représentons, comme étant an
n exé, et form ant une dépendance du domaine de Chassaigne,
dont l’exploitation étoil au lieu de la V é d rin e, et non à Chassaigne ;
C 2
�3
4
A ttendu que lors de la vente du o vendémiaire an > les do**
maines de Chassaigne et de la Védrine étoient affermés à un seul
ferm ier, et sans distinction du prix; que par ladite ven te, ledit
sieur Canillac autorisa son acquéreur à toucher en totalité le prix
du ferm age, ce qu'il n'auroit pas fa it, s’il avoit entendu ne vendre
que le domaine de Chassaigne seulement ;
Attendu que lors de la procuration du sieur C a n illa c, dudit
jour ig germinal an 6 , il n'est nullement fait mention de faire
aucune réclamation au sujet du domaine de la V é d rin e, et s’il
n'eût pas été dans son intention de vendre la V éd rin e, comme
une dépendance de Chassaigne, il n'auroit pas négligé>de s’en occu
per lors de cette procuration.
E n ce qui touche la demande récursoire formée contre le sieur
M o m et, au sujet de cette même demande en désistement;
Attendu que, dès que d’après les motifs précéderas la d em an d e du
sieur Canillac doit être rejetée, il devient dès-lors inutile d'exa
miner si cette demande récusoire est bien ou mal fondée.
E n ce qui touche la saisie-arrêt faite par le sieur Croze entre
ses m ains, comme des biens du sieur M o m et;
Attendu que le sieur Croze est lui-même débiteur du sieur
M o m e t; q u ’il n ’ a pas pu fa ire saisir en ses m a in s sans u n titre
contre celui-ci ; que le prétendu péril d’éviction résultant de la
demande en désistement formée contre lui n’étoit pas un m o tif
suffisant pour autoriser cette saisie; que d'ailleurs le sieur Momet
a offert de donner caution pour sûreté du payement qu'il réclam e,
conformément aux dispositions de l'article 1623 du Code c iv il, et
que dès-lors cette saisie ne sauroit être confirmée.
E n ce qui touche la demande en payement des fermages de 1795,
formée par ledit sieur Croze contre ledit sieur M o m e t ;
Attendu que ce dernier, en autorisant le sieur C ro z e , par la sus
dite vente, à percevoir lesdits fermages,nes^estpaslui-memechargé
de faire des poursuites pour le recouvrement d'iceux; qu'il n'a fait
que.m ettre à cet égard le sieur Croze à son lieu, droit et place,
çt que c’est au sieur Croze à les réclamer contre ceux qui les doivent
�( 21 )
ou qui les ont perçus ; qu’il est de fait que le sieur Momet n’a rien
to u ch é, et qu’il ne sauroit être garant de ce que lesdits fermages
sont retenus par le fait d’une force m ajeure; que d’ailleurs le sieur
Croze ne fait apparoir d ’aucunes diligences faites de sa part pour
la répétition de ces mêmes fermages.
•En ce qui concerne la demande en mainlevée des inscriptions
subsistantes sur les biens vendus au sieur Croze par le sieur M om et ;
Attendu que celui-ci a obtenu des lettres de ratification sur
son contrat de vente, le 14 brumaire an 7 , scellées, à la charge
des oppositions ;
Attendu qu’il a établi par le rapport des actes énoncés au procès
verbal de non - conciliation , du 29 nivôse an 1 1 , que le sieur
M om et a désintéressé la dame C ensat, le sieur L abastide, et les
autres créanciers opposans au sceau desdites lettres ; qu’il a justifié
à l’audience qu’il n’existoitque deux inscriptions contre lu i, à Fépoque du 27 p lu viôse an 12 ; q u ’il n ’en est p oin t survenu d'autre jus
qu’au 27 du présent , et que ces inscriptions ont été radiées par
le conservateur des hypothèques de cejourd’hui ; ce qui est prouvé
par trois certificats de ce dernier, des dates sus-énoncées ;
Attendu d ’ailleurs que le sieur Croze n ’a point lui-même obtenu
des lettres de ratification , ni fait transcrire son contrat, et qu’aux
termes de la vente sus-énoncée, il ne peut forcer le sieur M om et
à lui justifier d ’aucune mainlevée, avant d’avoir fait transcrire
son titre et d’avoir dénoncé les inscriptions qui peuvent subsister
contre lui ; qu’ainsi ce chef de demande doit être rejeté.
E n ce qui touche la remise des titres réclamés par le sieur
C ro z e , en vertu de la neuvième clause dudit contrat de vente ;
Attendu qu’il n’a pas désavoué avoir reçu les lettres patentes et
l’arrêt du 7 juin 1784, et que le sieur Momet lui a o ffe rt, audience
tenante, la remise des autres actes énoncés en ladite clause ;
qu’ainsi ce chef de demande devient dès-lors sans objet.
En ce qui touche la demande en remise de titres et quittances,
avec subrogation constatant que le sieur M om et a payé en dé
charge du sieur de Canillac, pour 00000 francs de créances hy
pothécaires ;
4
�C 22 )
Attendu que cette clause du contrat n’est point impéralive ;
que le sieur Momet ne s’est obligé que d’aider au besoin ledit
sieur Croze des titres et quittances; que ce besoin n'est point
constaté; qu’il nepourroit l’être qu’autant que le sieur Croze leroit
transcrire son titre, et qu’il existeroit des inscriptions procédantes
du fait dudit Momet ou de ses auteurs; et que dès que le sieur
Momet se soumet de rapporter la mainlevée de toutes les ins
criptions qui pourroient exister, le sieur Croze n’est point fondé
sur ce chef de demande , puisqu’il y est dès-lors sans intérêt.
E n ce qui touche le payement de la somme de 2893 francs
réclamé par le sieur C ro z e , pour voyages, dépenses par lui faits
en vertu de la procuration du 27 prairial an 4 ;
Attendu qu’il a été soutenu par le sieur Momet que cette procu
ration n avoit été donnée que le jour même de la vente, quoique
datée de deux jours avant, et pour servir de titre apparent au
sieur Croze ;
Attendu que cette procuration ^ relative à la gestion et à l ’admi
nistration, au louage et à la vente du bien y énoncé , a d’ailleurs
été révoquée par la vente qui est survenue deux jours après; que le
sieur C roze, à l’époque de cette vente, ne pouvoit avoir rien fait
en vertu de cette procuration, et que s’il a agi postérieurement,
ce n’a pu être que pour son compte et son intérêt personnel; qu’il
n ’établit pas d’ailleurs ce qu’il a fait pour le compte du sieur M om et,
en vertu de cette procuration, et que dès-lors ce chef de
demande
doit être rejeté.
E n c e qui touche la demande en rapport du prix de ladite vente,,
touché par le sieur M om et, et le remplacement en im m eubles,
faute de justification desdits titres de créances et quittances ;
Attendu que le sieur Croze est en possession et jouit paisible
ment des biens à lui vendus; qu’il n ’a point éprouvé d’obstacles à
son entrée en possession ; qu’il n’est point troublé dans sa jouissance,
et que ce n’auroit été que dans ces cas qu’il auroit pu réclamer
l’exécution de la clause du contrat de vente; qu’ainsi il est encore
mal fondé dans ce ch ef de demande.
�(< 2 3 )
E n ce qui touche la demande en payement de la somme de 19660 f.
montant du billet daté du i5 prairial an 4, quoique fait réellement
le 29 dudit mois, etdes intérêts du montant de la sommede 18000 f .,
depuis ledit jour 29 prairial an 4> sous la déduction de tous payemens , et sous la déduction sur les intérêts, depuis ladite époque,
de la somme de 1620 fra n cs, compris pour intérêts dans ledit
billet ;
Attendu que quoique lors du procès verbal de non-concilia
tion le sieur Croze n’eût pas voulu s’expliquer sur la vraie cause
dudit b ille t, il est cependant convenu, lors du jugement contra
dictoire du 23 prairial d ern ier, qu’il avoit eu pour cause réelle
le restant du prix de la vente dudit jour 29 prairial an 4 ;
Attendu que quoique fait sous la forme d ’un dépôt, ce billet
ne dérive pas moins du restant du prix d’une vente d’im m eubles,
pour la som m ede 18000 francs , et que sous ce rapport les inté
rêts de cette som m e so n t dûs de d r o it , depuis la d ate de la vente ,
d’après les disposition s de l ’article i
du Code c iv il , . qui ne
sont que confirmatives du droit ancien, fondé sur les dispositions
de la loi au code D e actione empti et venditi ;
Attendu que quoiqu’il ait été soutenu par le sieur M om et que
dans ledit billet de 19660 francs il avoit été compris les intérêts
de ladite somme de 18000 francs , jusqu’à une époque fixée entre
les parties, ce fait n’a point été formellement désavoué par le sieur
652
C ro z e ;
A tte n d u qu^il est p ro u vé par une lettre du sieur C roze, d u 7
fructidor an 6 , en réponse à une autre que le sieur M om et lui
avoit écrite peu de jours avant, dans laquelle celui-ci se p la ign o it
du retard que le sieur Croze mettoit à se libérer, que celui-ci
convint qu’il n’est en arrière de payer que depuis deux mois huit
jo u r s , et qu’ il ne souffrira pas que ledit sieur Momet soit en
perte ; d’où il suit la preuve non équivoque qu’il y avoit réelle
ment un terme convenu entre les parties pour le payement dudit
billet, et que le sieur Croze a promis de ne pas souffrir que le
sieur Momet fû t en perte; qu’ainsi, sous tous les rapports, les in-
�(
24)
térêls de la somme de 18000 francs sont dûs depuis l’époque de
le u r ven te.
E n ce qui touche la demande en ratification d ’inscriptions faites
par le sieur Croze contre le sieur M om et;
Attendu que le sieur Croze a la faculté, par son titre d’acqui
sition , de purger les privilèges et hypothèques dont les biens à lui
vendus peuvent être grevés ; que le mode de. purger lesdites hypo
thèques et privilèges, est établi par l’article 2181 et suivant du Code
civil, et qu’il ne dépend que du sieur Croze d ’en user ;
Attendu qu’aux termes de son contrat d’acquisition les frais de
la transcription d ’icelui sont à sa charge, et que s’il ne veut pas
faire transcrire son titr e , il ne peut pas le dispenser d’accorder
la mainlevée des inscriptions subsistantes de sa part contre ledit
sieur M om et ;
/
. Attendu qu’aux termes de l’article 2160 du C o d e , la radia
tion d ’inscription doit être ordonnée, lorsque les droits de privi
lèges et hypothèques sont effacés par les voies légales, et que si le
sjeur Croze ne veut pas profiter du hénéfice de la loi dans un délai
fixe, le sieur M om et doit obtenir Ja radiation des inscriptions
que ce dernier a faites contre lu i, ne pouvant pas être, par le fait
du sieur Croze, privé du droi£ d ’ exercer ses actions contre les ac
quéreurs de ses biens.
Par tous ces m o tifs, le tribunal, jugeant en premier ressort,
D éclare le sieur de Canillac non recevable dans sa demande en
désistement de la partie de domaine dit de la V éd rin e, garde et
maintient ledit sieur Croze dans la possession et jouissance de ladite
partie de dom aine, comme annexée et form ant dépendance du do
maine dit de la Chassaigne ; et faisant droit sur tous les autres
chefs de demande formés réciproquement de la part desdits sieurs,
M om et et C r o z e , le tribunal donne acte audit sieur Momet de
ce que ce dernier reconnoit avoir reçu l’arrêt d’enregistrement
e.t les lettres patentes sus - énoncés , et de pe que ledit sieur
M om et lui a o ffe r t, audience tenante, et a jnis sur le bureau de
l’audience les autres titres réclamés par ledit sieur Croze, en vertu
de
�(
25
)
de la dixième clause dudit contrat de vente; lui donne pareillement
acte dé ce qu’il offre de rapporter la mainlevée de toutes les
inscriptions prociédantes1de son fait ou de celui d esès auteurs, sur
les biens vendus, des q u e ‘ledit: sieur' Croze aura fait transcrire
son titre de propriété, et dénoncé audit sieur M om et lesdites inscrip
tions ; et ayant égard âuxçlites o ffre s, faisant droit sur les con
clusions prises par ledit siéur M om et, condamne le sieur Croze à
payer audit' sieur M om et, en deniers‘’ou quittances valables , la
somme de 19650 francs, montant dudit b ille t, avec les intérêts
de la somme de 18000 fra n c s, depuis la date de ladite vente
jusqu’au payem ent, sous là déduction néanmoins de la sommé
de i o francs comprise dans ledit b ille t, pour intérêt de ladite
som m e, lesquels payemens qui ont pu être faits seront imputés
d'abord sur les intérêts^ et ^stibsidiairement sur le principal ; et
ordonne que ledit sieur Crozè sera tenu, dans le délai de deux
m ois , à compter de cc jo u r , de faire tra n scrire son titre d'acquisi
tion ; faute de ce f a ir e , et icelui passé, sans qu’il soit besoin d'autro
jugem ent, le tribunal fait pleine et entière mainlevée en faveur
dudit sieur M o m e t, des inscriptions faites contre lui de la part dudiÇ
65
sieur C rozd, et notamment de celleà faites au bureau de Paris %
vol. 18, n \ 674,* en celui de Corbeil, vol.
583
3 \ n\
5o3 ; en celui
de D ieppe, vol. 11 , n°.
; ordonne que sur la remise qui*sera
faite par ledit sieur M om et, \ chacun des conservateurs desdits bu
reaux des hypothèques, de l'expédition par extrait du présent juge
ment , ils seront tenus de radier lesdites inscriptions ; quoi faisant
ils en demeureront bien et valablement déchargés; fait pareille
ment mainlevée audit sieur M om et de toutes autres inscriptions
faites contre lui de la part dudit sieur C ro ze, et ordonne qu'elles
seront radiées par tous conservateurs qui pourroient les avoir faites,
ainsi qu’il est dit ci-dessus; et enfin fait mainlevée de toutes
saisies et oppositions faites par ledit sieur Croze, contre ledit sieur
M o m e t, et ordonne qu’à la remise ou payement de tous les ob
jets ou sommes saisis, tous gardiens seront contraints, sur la re
présentation du présent jugem ent, par les voies de d ro it; quoi
D
�(
26)
faisant ils demeureront bien et valablement décharges- envers ledit
sieur C ro s e ; sur le surplus des autres fins *et conclusions, prises
respectivement par les parties, le tribunal les met hors de cour et
de procès; condamne ledit sieur Croze en tous les dépens faits par
ledit sieur Momet sur ladite demande en payement du susdit billet >
lesquels ont été taxés, et liquidés, d'après Favis du commissaire
taxateur de la chambre des avoués, à la somme de 562 fr.
cent, j
le condamne pareillement en tous les autres dépens faits par ledit
sieur M o m et, tant en défendant que dem andant, sur les.autres de
mandes , lesquels ont été taxés et liquidés comme dessus, à la
somme de 29g,francs 11 centimes, et condamne ledit sieur Canillac
aux deux tiers des dépens faits par ledit sieur Croze,. suivant la taxe qui
en sera faite,, et même aux deux tiers des derniers.dépens adjugés
ci-dessus, audit sieur M o m et, le tout non compris, l’expédition et
signification du présent jugement,, qui. se ro n t su p p ortées par ledit
55
sieur C ro ze, sauf à lui à en répéter les deux tiers contre ledit sieur
de Canillac , auxquels deux tiers celui-ci est pareillement condamné y
et quant: à la condamnation prononcée contre ledit sieur Croze en
payem ent dudit b illet, le tribunal ordonne que cette partie du pré
sent jugement sera exécutée nonobstant tout appel, et audit cas
à la ch a rg e de do n n er c a u tio n , atte n d u que ledit. sieur M om et esl:
fondé en titre à cet. égard*.
3
Fait et ju g é , le 21 messidor an i '..
Le sieur Croze ayant interjeté appel de ce jugement,,
Te sieur Momet voulut,. d’après ses dernières dispositions ,
le faire payer, en donnant caution ; mais le sieur Croze
demanda des défenses à la cour, et insista pour en obtenir;
malgré l’article 5652 du Code civil. Cependant, par arrêt
du
il fut débouté de sa demande, mais à là
charge par le sieur Momet de donner caution jusqu’à,
concurrence de 3 6 0 0 a francs.
�( 2? )
C’est en cet état qu’il s’agit de répondre aux moyens que
lé!1sieur Croze propose sur l’appel.
i
m o y e n s
.
L ’objet principal de la cause est de savoir si le sieur
Croze peut être fondé à retenir ce qui reste à payer duprix de la vente du 29 prairial an 4 ,'soit à cause du trou
ble qu’il éprouve par une demande en désistement, soit
sur le fondement de ses propres inscriptions, soit enfin
sous prétexte que le sieur Momet n’a p'as achevé de rem
plir les conditions auxquelles il s’étoit soumis.
Pour abréger beaucoup la discussion de tous les chefs
de co n clu sion s re sp e c tiv e s , le sieu r M o m e t passera ra p i
d em en t sur ce u x q u i p résen ten t p eu d ’i n t é r ê t , afin de ne
demander l’attention de la cour que sur les points les plus
importans de la contestation.
!
Le i er. chef des conclusions- du siéur Croze formoit
double emploi et n’a plus aujourd’hui d’intérêt ; il demandoit que le sieur Momet fît cesser les poursuites du sieur
de Labastide ; mais personne ne savoit mieux que le
sieur C ro ze que ces poursuites étoient éteintes par un
acte antérieur au procès. Le sieur Momet avoit payé la
créance du sieur Labastidè.
Le 3e. chef des mêmes conclusions est décidé par les
premiers juges, conformément aux principes. Le sieur
Croze n’ayant pas de titre, ne pouvoit faire une saisiearrêt'sans autorité de justice. A u reste le payement du
billet dui sieur Croze est l’objet d’une demande, et ses
moyens sur ce point seront examinés ci-après. ' p '
D 2
�( 28 )
L e 4e. chef a pour objet les fermages de 1795 et années
suivantes. A cet égard c’est la clause du contrat qu’il faut'
consulter. « P ou rra, le sieur Croze, disposer du domaine
« comme de sa chose propre, à compter de ce jour, à
« commencer la jouissance et fermages parles années 179$
« et 1796, le vendeur se réservant seulement les fer« mages de 1794, qu’il n’a pas même touchés. »
A in si, faculté ppur le sieur Croze, réserve pour le sieur
Momet.
Il faudroit donc que le sieur Croze offrît de prouver
que le sieur Momet a reçu au delà de sa réserve ; et il
ne l’articule pas même. C’est donc à lui à se poui’voir
pour cet objet; car le sieur Momet lui a seulement dit à
cet égard qu’il se départoit des fermages passés, et renoncoit
à les recevoir.
o
Le 6e. chef est sans objet. Le sieur Momet auroit
pu objecter au sieur Croze qu’il devoit seulement lui
fo u r n ir les titres d e p r o p r i é t é , aussitôt que le sieur de
Canillac les lui auroit remis ; néanmoins il a déjà donné
les titres les plus importans au sieur Croze, qui les a
dans son dossier ; il a offert le surplus à Brioude , en
jugement.
Les e. et 7e. chefs n’ont de même plus d’intérêt. Le
sieur Momet s’étoit obligé à justifier des quittances des
créanciers de Canillac pour 400000 francs ( assignats ) ;
mais il pourroit dire encore que cette clause étoit liée à
la faculté qu’avoit le sieur Croze de purger son contrat, et
de demander mainlevée des oppositions du fait du sieur
Momet ou de ses auteurs. Mais le sieur Momët rapporte
des quittances excédant de beaucoup la somme promise ;
5
�9
( 2 :;)
il rapporte aussi la mainlevée de toutes les inscriptions.
Le 9e. chef des conclusions du sieur Croze est encore sans
objet; c’est même une demande extraordinaire. Il veut que
le sieur Momet soit tenu de lui représenter et remettre
les titres de créance qu’il peut avoir contra luù Mais
ces titres de créances sont le billet de dépôt. L e sieur
Croze n’en désavoue pas l’existence ; il en a même saisi le
montant en ses mains. Ainsi le titre de créance du sieur
Momet lui sera remis sans difficulté aussitôt qu’il l’aura
payé.
Maintenant il est aisé de réduire le surplus delà cause.
Le sieur Momet a formé deux chefs de demande, qui sont
le payement du billet de ig o francs avec intérêts, et la
mainlevée des inscriptions du sieur Croze. Le sieur Croze
répond à cette demande : Je vous payerai quand vous
aurez fait cesser la demande du sieur Canillac, ou que
vous m’aurez fourni des immeubles d’égale valeur au do
maine de la Védrine ( 2 e. et 10e. chefs de demandes.) ;
quand vous m’aurez payé 2873 francs pour le temps que
j’ai employé au sujet de votre procuration ( 8e. chef. ) ;
enfin je ne puis vous donner mainlevée de mes propres
inscriptions , parce que vous me devez une garantie.
Ainsi ce qui reste à discuter présente les questions sui
vantes : i°. Que doit le sieur Croze au sieur Momet?
20. Le sieur Croze est-il fondé à retenir ce qu’il doit,
comme prétendant à une garantie de la demande formée
par le sieur de Canillac? 30. Est-il dû au sieur Croze 2873 f.
pour dépenses faites comme fondé de pouvoir? 40. A-t-il
droit de maintenir les inscriptions par lui faites sur le
sieur Momet ?
•
•
65
�Que doit le sieur Croze au sieur Momet ?
Il lui doit le montant du billet de 19660 francs, causé
poiir dépôt, sous la date du i prairial an 4 ; il le doit
en deniers ou quittances. Ainsi, au cas qu’il représente,
comme il le d it, des preuves de payemens faits pour près
de moitié de la somme, il n’y aura pas de difficulté à cet
égard, sauf que les imputations se feront d’abord sur les
intérêts.
Mais , dit le sieur Croze, je ne dois pas d’intérêt, parce
qu’un dépôt n’en produit pas ; le billet d ’ailleu rs n’est q u e
de 18000 francs en principal et i o francs pour intérêts
de deux ans. Si vous voulez que ce soit un simple billet,
alors, comme c’étoit un temps d’assignats ou mandats,
votre capital sera réduit à l’échelle de dépréciation, et je
vous p a ye ra i des in térêts.
A l’échelle de dépréciation ! Le sieur Croze a-t-il osé
sérieusement le proposer, quand les lois de l’an 6 sont
formelles, et quand déjà il a acheté à si vil prix ?
Il prétend que 600000 francs, de vendémiaire an 4, ne
valoient que 8000 francs numéraire. Que yaudroient donc
19650 francs en'prairial suivant?
Il veut persuader que le sieur Momet a gagné beaucoup
sur lui, tandis que le domaine acquis en apparence en assi
gnats, a coûté au sieur Momet 68600 francs, malgré lu i,
quoiqu’il ne l’eût vendu au sieur Croze que 36000 francs.
Le sieur Croze confond ses propres idées, quand il dit
que le billet du 1 prairial est un dépôt, pour en refuser
5
65
5
�(30
Pintérêt; car précisément il en a fait line saisie-arrêt,
comme d’un prix de venter A u reste le fait est aujourd’hui
reconnu» *
Le billet cependant n’a en capital que 18000 francs;
le sieur Momet se fait un devoir d’en convenir : mais
l’intérêt de cette somme sera dû après le terme fixé entre
les parties ; et les principes à cet égard sont assez certains
pour ne pas exiger de discussion.
On sait que tout prix de vente porte intérêt de sa
nature, s’il n’y a stipulation contraire *, car le capital
représente un fonds qui produit des fruits annuels. L ’ar
ticle i
du Code civil n’a rien changé sur ce point aux
lois précédentes..
652
f. I L
L e sieur Croze est-il fondé à retenir ce qi? il doit, comme
prétendant à une garantie de la demande ' formée
\par le sieur de Ganïllac ? est-il fon d é à demander un
remplacement, en immeubles T du domaine de la
Védrinel.
Sur cette question , le sieur Momet ne disputera pascontre les principes ; ca r, si réellement il est garant du
désistement ,, il n’auroit pas d’action jusq.ù’à ce qu’il l’eût
fait cesser, ou fourni une caution..
Ce n’est pas que le sieur Croze ne lui ait contesté,
même en ce cas , le droit de réclamer son payement,
moyennant caution. Cependant l’article 1653 du Code
civil en a la disposition expresse , et les lois romaines y
étoient conformes. Dom inu quœstione rnotâ emptorpre—
�32
(
)
tium solvere non cogitur, nisijidejussores idonei prcestentar.
’
•
Mais le sieur Croze a-t-il prouvé que le sieur Momet
fût son garant ?
Souvenons-nous que le sieur de Canillac demande le
désistement d’un domaine appelé de la Védrine, qu’il pré
tend distinct et séparé de celui de la Chassaigne , d’après
des baux et d’autres actes. Le sieur de Canillac a arti
culé que le domaine seul de la Chassaigne contient en
terres, prés et bois , les mêmes surfaces qu’il a vendues
l pour deux cent dix septerées.
Si le sieur de Canillac le prouve , et s’il obtient le dé
sistement qu’il demande, comment le sieu r C ro ze pourro it-il assurer avec pudeur que le sieur Momet lui a
vendu un second domaine?
Avant de répéter cette coupable prétention, que le sieur
Croze jette donc lesyeux sur la forme de l’acte qu’il a si fort
dépecé et dénaturé , mais dont la vérité sort malgré lui.
S ’il a eu le p ro je t d ’en lacer u n cito yen sans d é fia n c e ,
en méditant de si loin les moyens qu’il emploie aujour
d’hui , il n’en est pas encore à Yeçentus fraudis ; car il
est singulièrement resserré dans les clauses qui restent,
et qu’il ne peut effacer.
Dans une vente, il ne faut pas chercher l’intention
dans des équivoques, surtout pour ce qui regarde la
chose vendue ; car c’est là la substance principale de l’acte;
et dès-lors les mots ne sont plus rien pour désigner l’objet
vendu , quand il est matériellement exprimé.
En effet, que je vende un terrain d’une surface donnée
ou avec des confins constans, sans difficulté l’erreur sur
la
�( 33 )
la dénomination ne prévaudra pas, parce que la cliose
vendue sera constante.
O r , ici est-il possible de se méprendre ? et par quelles
équivoques le sieur Croze voudroit-il persuader que le
sieur Momet lui a vendu deux domaines, quand même
il n’en auroit acheté qu’un?
Le sieur de Canillac vend à Momet des bâtimens et
jardins ayant cinq septerées cinq quarteronnées ; et le sieur
Momet vend à son tour au sieur Croze des bâtimens et
jardins de la même surface , avec les mêmes expressions
copiées mot pour mot.
. En terres, en prés, en b o is, en vignes, en terrains in
cultes , on voit encore dans les deux ventes les mêmes
détails de contenue, sans la plus légère différence.
Le sieur de Canillac termine par énoncer que le tout
se porte à deux cent dix septerées une quarteronnée ; et
le sie.ur Momet ne manque pas de recopier aussi la même
redondance,-comme s’il eût voulu mieux avertir qu’il
avoit le projet marqué de s’asservir à transcrire en toutes
lettres tout ce qui concernoit l’étendue et les surfaces de la1
chose vendue.
Enfin ? le sieur de Canillac garantit les deux cent dix
septerées une quarteronnée, à dix arpens près; le sieur
Momet encore garantit la même étendue, et ne garantit
pas un pouce au delà.
Il avoit le droit de limiter sa garantie : il en a
sagement usé. O r , tant que le sieur Croze ne sera pas
fondé à dire au sieur Momet : Je n’ai pas les deux
cents septerées que vous m’avez garanties, il n’a à cet
égard^ aucune demande à former contre lui ; car ce ne
E
�( 34
\
peut être-qu’après avoir prouvé ce déficit, et si dans le
seul domaine de Chassaigne il ne trouve pas les deux cents
septerées, mesure du lieu , qu’il pourra former une de
mande en supplément contre le sieur Momet. Mais le
sieur Croze qui a fait arpenter Chassaigne, sait bien que
les deux cent dix septerées s’y trouvent.
Quel seroit donc l’interprète astucieux q u i, trouvant
ainsi la chose vendue désignée avec tant de détails ,
s’obstineroit à la chercher plutôt dans des mots et dans
des circonlocutions ?
En effet, sortons de cette partie claire et précise du
contrat , nous ne trouvons plus que de l’obscurité ou des
pièges.
Ces ratures nombreuses , ces quatorze renvois, ces
laborieuses corrections font naître tant d’idées pénibles,
qu’il vaut mieux ne pas se jeter dans le détail des obser
vations qu’il y auroit lieu de faire à chaque ligne.
U n e seule r é fle x io n ju g e cette vente. Si le sieur Croze
n ’a pas prévu et p r é p a r é sa d éfen se du p ro cès actuel ,
alors le deuxième renvoi n’est de sa part qu’une précau
tion contre le sieur de Canillac, et il n’a pas d’action
contre le sieur Momet.
Si au contraire il veut trouver dans le deuxième renvoi
une action et une précaution contre le sieur M om et,
alors il sera clair pour tout le monde que le troisième
renvoi est une précaution en faveur du sieur Croze ; et
nul homme de bonne foi ne se défendra d’y voir le
consilium fraudis le plus évident, et le motif radical
de toutes les autres corrections.
Que cependant le sieur Croze ne suppose pas que cette
�35
(
)
option lui soit laissée ; car il ne s’agit pas d’interpréter
ce qu’il a voulu faire, mais ce qui a été fait. Les règles
d’interpi-étation des actes, sont, d’après les lois, toutes
favorables à la bonne fo i, sans jamais se prêter à pré
férer même le sens littéral
l’intention connue. Co/ztrahentium voluntatem potiùs qucim verba spectari
plaçait : principe rappelé par l’article 1 1 du Code civil.
Que le sieur Croze cesse donc de placer sa confiance
dans son troisième renvoi, où il a cru insérer un do
maine ; car des paroles vagues ne créent pas une vente;
et il verra encore dans l’article 1163 du Code que les
termes généraux doivent toujours se restreindre à l’objet
positif de la convention.
Si ces principes ne jugent pas toute la question , si
déjà l’intention de la vente n’est pas assez claire par le
détail minutieux de la chose vendue , on peut suivre
encore le sieur Momet dans la tradition qu’il effectue.
Qu’abandonne-t-il au sieur Croze ? tout droit de pro
priété qu il a et peut avoir sur ledit domaine. Comment
déclare-t-il en être propriétaire ? comme îayant acquis
du sieur Canillac ^par acte du 30 vendémiaire an 4.
Quels actes lui demande le sieur Croze pour ses titres
de propriété ? les titres de la fam ille de Canillac.
A in si, le sieur Momet ne vend évidemment que ce
qu’il a acheté par Vacte du 30 vendémiaire an 4; il en
fournit une expédition notariée au sieur Croze : conséquemment il n’emploie le mot vente au lieu de subro
gation , que pour ajouter sa garantie à celle du sieur de
Cnn illac.
1617
161
four-
à
56
Enfin , les articles
et
8 du Gode civil
E z
�o s y
nissent au sieur Momet un moyen de droit qui le fait
s’applaudir d’avoir été assez soigneux pour détailler toutes
les mesures de la chose vendue.
Car le maximum de l’excédant seroit d’un vingtième
en sus ( ce qui se rapporte aux dix arpens en plus ou en
moins Mais cent ti’ente septerées à englober de plus,
ne sont pas le vingtième de deux cent dix (i).
(i) Pendant l’impression de ce mémoire, deux actes ont été déposés au greffe
de la co u r, à la diligence du sieur de Canillac, et leur existence est très-im*
portante pour la cause.
Il paroit que le sieur Croze avoit des craintes sur sa propriété, à cause de
l’émigration du sieur de Canillac ; et sous prétexte de lui être utile dans les
diligences à faire pour les séquestres, ou môme p eu t-être de lui dem ander une
ratification de la vente du 3o vendémiaire an 4 , il conçut le projet d’arranger
les choses de manière à éviter les difficultés. En conséquence, au lieu de de
m ander directement une ratification au sieur de Canillac, le sieur Croze ne
voulut qu’une procuration : le plus adroit étoit de se la faire adresser par le
sieur M om et, pour pouvoir dire, à tout événement, que c’étoit son ouvrage ;
et il en vint à bout, soit par ses instigations, soit par le canal d’un des commis
du sieur M omet, avec lesquels il étoit e n r a p p o r t , ainsi qu’il résulte des lettres
du sieur C roze, des 8 brumaire an , 27 prairial et 11 messidor an 6 , fort
curieuses, et qui montrent avec quel art le sieur Croze enlaçoit le sieur
M om et, tantôt par des prières, tantôt par des menaces.
5
P a r-d e v a n t.......... a été présent le cit. Ignace B ea u fo rt-C a n illac, lequel donne pouvoir
à ........ de réclam er le m obilier saisi sur lu i p a r........... et le prix de celui vendu par l ’admi
nistration.........de réclam er les fermages échus depuis 1789, et qu’il n ’a pas cédés au sieur
M om et, dont en tant que de besoin il ratifie la vente f ; donner quittan ce, etc. F ait le 19 ger
minal an
6.
■f portée en celle de C hassaigne, qu’il donne pouvoir de ratifier, si besoin est.
Le sieur Croze, muni de cette procuration qui n'expliquoit rien, voulut
la faire expliquer plus clairement; en conséquence, après l’avoir remplie du
nom du sieur Cailhe., il se fit donner par lui l’acte suivant :
P a r-d e v a n t........ a été présent le cit. J e a n -R e n c C a ilh e .......... fondé de pouvoir du sieur
de C an illac, par acte du 19 germinal an 6 .........le q u el, en ladite qu alité, ratifie, confirme
4
et approuve, et même renouvelle, si besoin e s t , la vente faite par e-cit. de C a n illa c... . . .
�E st-il dû au sieur Croze 2873 fra n cs pour dépenses
fa ites en vertu de la procuration du sieur Momet ?
Il
est étrange que le sieur Croze ait osé former une
demande de cette nature, sous prétexte qu’il y a eu un
intervalle du 27 prairial au 29 , et qu’il a été fondé de
pouvoir avant d’être acquéreur.
Mais s’il est clair que le sieur Croze n’a jamais pu
des domaines de Chassaigne et dépendances, S O U S ZE N O M DE L A V É D R I N E , ou toute autre
3
4
dénomination........par contrat reçu D e lo c h e , du o vendémiaire an ......... L a présente ratifi
cation acceptée P O U R le cit. Momet P A R le cit. Jean Croze , homm e de l o i , demeurant à
B rio u d e , présent et a ccep tan t, tant pour ledit cit. M om et, et comme fondé de procuration
gén érale, que personnellement pour lui-méme, comme acquéreur des mêmes b ie n s, suivant
le contrat du 29 prairial an > etc. F a it le 16 prairial an 6.
4
Ainsi peut-on être surpris que le sieur Croze ait abusé de la confiance du
lieur Momet avec qui il traitoit, lorsqu’il abuse de la bonté d’un honnête
homme qui n’a aucune raison d’être en défiance contre lu i, au point de lui
faire exprimer des clauses qui sont hors de sa procuration?
Certainement le fondé de pouvoir n’a pas deviné si le domaine de la Védrine
étoit compris dans la vente du 3o vendémiaire an 4; il falloit que l’auteur dé
cette divination y eût plus d’intérêt que le fondé de pouvoir ; Is f e c i t , oui
prodest .
Le sieur Croze a encore très-justement calculé qu’il falloit faire trouver la
veilte det la Védrine dans la vente du 3o vendémiaire an 4 , pour îa faire
résulter de la vente du ¿9 prairial; et voilà pourquoi la ratification ou vente
renouvelée de la Chassaigne et la Védrine est acceptée par lui pour le sieur
Momet; voilà pourquoi encore, dans les lettres de ratification prises l’année
suivante sur la vente du o vendémiaire, qui comprenoit le domaine de la
Chassaigne, le sieur Croze ne put s’empêchpr de faire mettre la terre-do
maine. Ce nimia precauùio juge tout à la fois ses intentions ou ses calculs;
et personne ne se défendra de dire qu’en achetant loyalement et franchement
une propriété qu’on connoît, on la fait désigner sans équivoque, au lieu ¿’em
ployer autant de détour».
3
�( 3 8 )
7 user de cette procuration avant la vente, il en résultera
q u ’alors la procuration donnée par le propriétaire du
domaine de la Chassaigne, pour le régir , gouverner ,
administrer et vendre, sera annullée de plein droit par
la vente. Car alors le sieur Croze n’a plus eu à i égir,
administrer ni vendre pour le compte du sieur Momet,
ce qui lui appartenoit à lui-même.
O r, la procuration n’a été enregistrée à Paris que le
messidor an 4, par conséquent après la vente du 29 prai
rial. Il n’a donc pas été au pouvoir du sieur Croze de faire
usage de cette procuration avant d’être acquéreur.
Dira-t-il que lu procuration portoit aussi autorisation
de régler les loyers échus et à échoir, débattre et arrêter
les comptes? Mais par sa vente du 29 prairial, il a eu soin
de faire délaisser au sieur Momet son droit aux fermages
antérieurs : conséquemment, si le sieur Croze a fait des
poursuites, c’est pour lui ; s’il a réglé des comptes, c’est
pour lui. Il seroit donc bien commode qu’il eût une ré
pétition de 2873 francs contre un autre, pour avoir fait
ses propres affaires.
5
§. IV ,
L e sieur Croze a-t-il droit de maintenir les inscriptions
qiCil a fa ites sur le sieur Momet ?
Le sieur Croze avec des inscriptions aura des procès ;
avec une transcription il n’en aura pas. Cependant depuis
dix ans il ne veut pas transcrire.
Mais si le sieur Croze aime mieux des procès que sa
tranquillité, le sieur Momel aiine mieux sa tranquillité que
�( 39 )
des procès ; et il ne doit pas être victime de ce goût par
ticulier au sieur Croze. On ne vend pas pour être gêné
perpétuellement dans ses affaires, et pour être toute sa
vie esclave de son acquéreur. Cette gênea été, etest telle,
qu’elle a opéré successivement la ruine du sieur M om et,
qui ayant fait, depuis l’an 7, nombre de ventes, 11’en peut
toucher la totalité du prix; et d’après des reventes faites
par plusieurs de ses acquéreurs, il a été exposé aux pour
suites les plus x-uineuses pour le rapport de la seule main
levée du sieur Croze, ou des sommes qui lui avoient été
payées. Les plus honnêtes se sont contentés , ne pouvant
toucher eux-mêmes leur prix déposé, de toucher du sieur
Momet les intérêts de ces sommes ; intérêts qui depuis
long-temps montent à 7496 francs par an. Le sieur Momet
peut donc avec raison dire qu’il eût été bien heureux
pour lui de n’avoir jamais connu le sieur Croze.
A la vérité un acquéreur a une hypothèque sur les
biens de son vendeur pour la sûreté de sa garantie ; mais
il a en même temps une voie ouverte pour éviter les re
cherches des créanciers qui ont aussi hypothèque sur l’im
meuble ; c’est de faire transcrire.
Aussi les lois sur les hypothèques parlent des oppositions
ou inscriptions faites en vertu de créances, et ne disent
rien de celles qui n’ont pour but qu’une garantie; ce qui
prouve que le législateur a entendu que la voie de la trans
cription y suppléeroit; car l’acquéreur n’est pas un créan
cier. La loi a voulu une inscription d’office pour le ven
deur, s’il lui restoit dû quelque chose; mais elle n’a pas eu
la même précaution pour l’acquéreur, quoique la garantie
soit une clause tellement d’usage, que la loi la supplée
�C 4° )
si elle n’est pas exprimée, et s’il n’y a clause contraire.
Les acquéreurs qui s’obstinent à vouloir faire des ins
criptions disent ordinairement que s’ils ne craignent pas
les créances, au moins ils peuvent craindre les demandes
en éviction, qui souvent peuvent survenir au bout d’un
très-long-temps, à cause des minorités qui se succèdent.
Mais , sous ce prétexte, on seroit forcé de maintenir des
inscriptions pendant des siècles; et avec cette terreur pa
nique , celui qui vendroit une seule propriété auroit le
reste de ses biens en séquestre, sans pouvoir en disposer.
Aussi la jurisprudence a-t-elle restreint sur ce point les
prétentions des acquéreurs, en les obligeant à purger leur
vente , pour forcer leur vendeur à faire radier les inscrip
tions , sans qu’ils pussent eux - mêmes en conserver une
après la mainlevée de toutes les autres.
C’est ce qu’enseigne M. Grenier, tribun, en son Com
mentaire de l’édit de 17 7 1, page 2Ô2 de la seconde édi
tion. Il cite à cet égard un arrêt conforme, rendu au parle
ment de Paris, entre le sieur deM âconetla dame Gironde,
le 3 mai 1785. Le parlement de Rouen avoit jugé de
le 18 mars 1779, et le
de
31
1784.
C’est encore ce qu’ a jugé la seconde section de la
c o u r, le
prairial an 11 , entre les sieurs Choussy et
Gardelle. Ce dernier vouloit maintenir une opposition
faite par lui pour sa garantie, et prétendoit que le sieur
Choussy n’ayant plus d’immeubles, il avoit intérêt de conserver ses droits sur celui qu’il avoit vendu le dernier.
Mais le sieur Choussy vint à l’audience avec la mainlevée
des oppositions qui avoient frappé les lettres obtenues sur
sa
parlement
25
même
Toulouse le août
�C 41 )
sa vente, et la cour lui accorda la mainlevée de l’oppo
sition de garantie formée par le sieur Gardelle.
Ainsi le sieur Momet répète au sieur Crose-: Faites
transcrire à vos frais votre contrat, comme vous en avez
la faculté ; notifiez-moi les inscriptions, s’il en existe : tant
que je seraien demeure d’en avoir mainlevée, vous aurez
droit de maintenir vos inscriptions ; sinon vous n’êtes
pas le maître delà faire durer éternellement, en ne faisant
jamais transcrire.
C’est là ce qu’a jugé le tribunal de Brioude, et il est
clair dès-lors qu’il s’est parfaitement conformé à la juris
prudence : ce n’e$t pas seulement en point de droit qu’il
a bien jugé, car, par le fait, le sieur Momet a établi qu’il
n’existoit plus d’inscriptions sur le bien de Cliassaigne ;
Ainsi le sieur Croze n’a de motifs de précaution que dans
son désir de ne pas payer, et dans son projet bien con
duit de consommer la ruine du sieur Momet.
Si la justice a atteint le sieur Croze dans sa propre ville,
et si ses concitoyens même ont été indignés des horribles
chicanes qu’il renouvelle sans cesse depuis tant d’années ,
pour s’approprier, au plus vil p rix, une belle propriété
qu’il voudroit accroître encore , à combien plus forte
raison doit-il s’attendre à ne pas se jouer de l’intégrité de
la cour. I^e sieur Momet pourroit mériter quelqu’intérêt,
par la dure position à laquelle le sieur Croze, en gênant
toutes ses affaires, est parvenu à le réduire ; mais il se
contente de gémir en lui-même du malheur de l’avoir
connu, et il n’osera solliciter de la cour que la plus rigou
reuse justice. 11 ne plaide ici que-cfe dûmno vitando $
F
�(40
et loin de rien dissimuler ; il se présente avec des pièces
o rig in a le s qui doivent seules éclairer et convaincre ; car
ses intérêts ne seront jamais mieux défendus que lors
que la cour sera à portée de tout voir, et de prononcer
en plus grande connoissance de cause.
Signé M O M E T ,
Me, D E L A P C H I E R , avocat.
Me C R O IZ IE R , avoué.
A R IO M , de l'imprimerie de L à n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d'appel.'— M ai 1806.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Momet, Gaspard-Roch. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
fraudes
ventes
abus de confiance
notaires
Description
An account of the resource
Mémoire pour Gaspard-Roch Momet, propriétaire à Paris, intimé ; contre Jean-Joseph Croze, sous-préfet de Brioude, appelant ; en présence d'Ignace Beaufort-Monboissier de Canillac, appelant.
Extrait de minutes du contrat de vente. Extrait de jugements.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1795-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
42 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0411
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Paris (75056)
Chassaigne (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
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Abus de confiance
fraudes
notaires
ventes
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■V K T C Z T v 12 M 7 " a t B t f *
M
E
M
O
I
R
E
P O U R
M a r g u e r i t e C O U G U E T - F L O R A T , veuve du sieur
de
R e y r o l l e s , intimée;
COUR
C O N T R E
D ’A P P E L
M A IG N E , se disant aussi veuve, dudit
sieur d e R e y r o l l e s , appelante.
C a th erin e
L a demoiselle Maigne n ’est pas satisfaite d'avoir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une formule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa haine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas craint, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
Une première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sûr des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le mieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudrait pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel des lois de l’empire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sacré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
La dame de Reyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d’abord adopté par la demoiselle M aigne, et son premier
A
_
D E RI OM.
s e c tio n
.
�mouvement avoit été d ’user d’une représaille Lien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position , de rendre compte
des faits et gestes de sa rivale, elle n ’avoit rien tu de ce qui la tourînentoit depuis tant d’années , et il lui paroissoit consolant de la
poursuivre encore, comme un remords vengeur, de la forcer à
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une haine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que celte jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour; on consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d ’écarter de son récit
tou^Wles épisodes é tra n g è r^ à ses moyens. L a réclamation d ’un
état civil présente d ’ailleurs trop d’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
L e mariage est-il un contrat d’ordre public; c’est-à-dire, une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , a près un divorce
nul, traiter irrévocablement avec son mari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé?
T elle est la principale question de cette cause; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver difficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
en jour ces antiques maximes, dont nous n ’avons éprouvé l’ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
Aujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la magistrature, a reconquis "Sa dignité primitive;
et tout ce qui tend à la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
F A I T
S.
L a dame C o u g u e t-F lo ra t contracta mariage avec le sieur de
Reyrolles, médecin, le 7 novembre 1774, et se constitua en dot
ses biens échus et à échoir, c ’est-à-dire, qu elle donna plein pou-
�( 3 }
-voir à son cpoux de rechercher et régir une fortune inconnue à
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation d ’un douaire, et
autres avantages matrimoniaux.
L es premières années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m è re , et possédant toute l’affection de son époux , la dame de
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroil détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullement à craindre, et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur.
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrement, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne se règlent
pas toujours par leur estime. Dans sa fierté , elle abandonna un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, et se retira chez la dame
de F lo ra t, sa grand’mère.
Cet éclat, imprudent peut-être, tourna tout entier au profit de
sa rivale; la dame de Reyrolles fut privée de tout secours, de ses
bijoux; et poussce d'infortunes en infortunes, pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu'elle les reçàt de la demoiselle
Maigne. T e l étoit, après dix ans de mariage, l’humiliation à laquelle
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer.
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise., la dame de Reyrolles se trou voit
encore heureuse des égards de son époux; mais l’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se fa ire , céda à l’évidence : l’indignation
étouffa tous les calculs d’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Les sieur et dame Cald.iguès, parens de la dame de R eyrolles,
alloient s’établir à Limoges. Affligés de sa position, ils lui propo
sèrent un asile ; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d ’être délivrée d ’une surveillante incommode,
l£ pressa de consentir ù cette séparation.
Combien étoit déjà cliangé le sort tic la dame de Reyrolles! elle
avoit un époux; une étrangère lui faisoit oublier ses serrnens et
ses devoirs : elle avoit eu un enfant; la mort, moins cruelle, le lui
A 2
�...................................... ( 4 )
avoit ravi à l’âge où il étoit incapable de tendresse. C ’est ainsi
qu’épouse sans époux, mère de famille sans enfans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
consolations de l’amitié et aux fantômes de l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de Reyrolles , par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement de la révolution
elle ne reçut plus rien , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints. 11 est certain qu’il eût fait
son bonheur de rompre ses chaînes, et de mériter l’affection de
son épouse, si la prévoyance allarmée de la demoiselle Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d ’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
voyoit, e t i l n ’osoitvoir; il vouloit, et ne pouvoit s’enhardir à vouloir:
l'homme le plus impérieux n ’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. Le premier acte de foiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, est l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes;
il reste désormais sans d é len se, et se dévoue ù l’esclavage.
L a demoiselle M aigne triompha , et le premier usage de sa
■victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors exisloit une loi récente , que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la monarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours «l’intervalle, et avant d’atlaquer la
religion dans ses solennités, il n’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire à prononcer; et le lien du mariage, malgré son antique
inviolabilité, lut dissolublc indistinctement par le divorce.
Celte innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s’ernpress.Yt pas de la saisir. En conséquence , le
3/j mai 1797, il fut signifié à la dame de Heyrolles, de la part de sou
f
�C 5 )
mari , un acte par lequel il déclaroit qu’il entendoit divorcer pour
cause d’absence, et pour incompatibilité d’humeur et de caractère;
en conséquence de quoi il nommoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa part trois parens ou amis.
Dans cette conjoncture que pouvoit l'aire une épouse? plaider?
les tribunaux n’étoient pas compétens ; résister? la loi ne le lui permettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, e t j e divorce n ’en alloit pas moins à sa fin.
Quoi qu’il en so it, le 27 mai il fut déclaré, à la requête de
la dame de Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 24
elle nommoit trois parens, ajoutant que le sieur de Reyrolles, en
provoquant son divorce, n ’avoit fait que prévenir ses intentions.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de fam ille, tou
jours motivée pour absence et incompatibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : Sur quoi ladite Couguet- 1' lorat leur a répondu
qu'elle étoit disposée h suivre en tout point la 'volonté de son
mari ; mais que si son dit mari persiste à requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
Cette réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-mêine insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de l’incompatibilité s’accordoient mal avec l'im
patience de la demoiselle Maigne. On crut donc découvrir dans
les dires de la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m utuel, pour lequel il n ’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1780, un mois après la seule
assemblée de famille, on fit rédiger un acte de divorce , dans lequel
on suppose qu’il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fu i porté à la dame de R e y r o l l e s par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en dise , après la date qui
lui a été donnée : elle signa, il n ’y avoit pas à hésiter; d ’ailleurs
son re fu s, en l’exposant, n ’eût fait que rendre cette pièce inu-
�( 6 )
l i l e , et forcer à reprendre la suite du premier mode de divorce.
Ainsi s’accomplit cette œuvre d ’iniquité , et la demoiselle Maigne
eut enfin levé le plus grand des obstacles : mais comme si le ciel
se fut joué de ses. plus chères espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoit tant liatée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que lë sieur de Reyrolles,
pénétré de la perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à ses pre
miers engagemens.
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d’un esclave. Enfin , une
grossesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
Mais les assiduités du sieur de Reyrolles n ’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse. T r o p adroits pour faire un éclat, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébranler l’imagination foible d’un homme que le premier mouve
ment faisoit agir, et q u i, dans ce qui concernoit scs passions, ne
sa voit jamais penser par lui-même. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la dame de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa perte : Inquirebant niala s ib i, et dolos
totd die meditabantiir.
La grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
ii leur malignité; l’époux lui-même fut entraîné à douter contre sa
conviction intime ; et ce que la darne de Reyrolles avoit cru être le
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
T o u t d’un coup la scène change : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son ma
riage avec la demoiselle Maigne est consommé le 11 messidor
an a , douze jours avant que la dame de Reyrolles , sur son lit
do douleur , donnât le jour à une malheureuse créature sous d ’aussi
Ministres auspices.
�(7 )
N o n , le ciel ne l’a point béni, ce fatal mariage ! Il a entendu Panathème prononcé par une épouse dans sa désolation ; et plie n'a
pas eu la douleur de savoir plus heureuse qu’elle celle qui l’avoit
chassée du lit conjugal. En portant un nom usurpé , la demoi
selle Maigne ne trouva plus dans le sieur de Reyrolles cet être
soumis sur lequel elle avoit exercé tant de fois une capricieuse
puissance.
L a demoiselle Maigne avoit calculé cet effet habituel du mariage ;
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’une époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitue de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an 5 . Quelque temps après, une séparation
volontaire les a éloignés jusqu’il la mort.
Cependant la dame de Reyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupée
des soins maternels que deniandoit le premier âge de sa fille , elle
attendoit a v e c r é s i g n a t i o n q u e le sie u r de R e y r o l l e s , rendu de nou
veau à ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d ’un retour à la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l ’abus de son administration.
Il avoit recueilli la succession considérable de l’aïeule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’étoit emparé des effets mobiliers, sans compte
ni mesure.
Néanmoins, demeurant libre d ’en fixer la consistance , et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 > un acte d’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le m o n ta n t, d it-il, de ce qu’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours éludé de
déclarer ce qui pouvoit lui être dû ; qu’ elle ne c h e r c h a i t qu’ a re
tarder la libération dudit Iieyrolles , qu’il etoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame de Reyrolles répondit qu’elle étoit surprise et lassée
�( 8 )
des procédés iniques de son m ari , et refusa les offres. Il y eut
procès verbal de non conciliation , après lequel elle fut assignée
le 21 messidor suivan t, devanT le tribunal du P u y , en réalisation
et validité desdites offres.
^
C e s diligences avoientlieu à la dernière heure du papier-monnoie;
le numéraire reparut au commencement de l’an 5 ; et, dans ce pre
mier instant où l ’opinion en augmentoit la valeur, le sieur de R e y rolles se hâta de faire proposer à sa femme une modique somme de
6ooo francs pour tout term iner; ajoutant, pour l ’intimider, que
si elle ne l’acceptoit pas , les offres de Fan 4 seroient jugées vala
bles , parce qu’elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la dame de Reyrolles demanda-t-elle à être éclairée sur
la valeur réelle de sa propre fortune ; il fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n’avoir que les mandats offerts
au lieu du numéraire promis, si elle s’exposoit à aller plaider dans
un tribunal presque inconnu , à douze iieues de son domicile.
L a dame de Reyrolles signa donc un traité le 16 frimaire an 5 ,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avec son
mari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un partage de 1785, il lui revenoit 5i2G liv. 10 sous ; à quoi
ajoutant d ’autres articles touchés par son m a r i, quoique non com
pris dans l’inventaire, en valeur de 873 liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des 6000 fr. qu’il vouloit
payer, et dont l’acte porte quittance.
A compter de celte époque les époux furent séparés, et la dame
de Reyrolles n ’eut plus qu’à s’étourdir sur le passé et à supporter
son sort avec courage : elle se consoloil avec sa fille, et cette con
solation même lui fut enviée. Après le 18 fructidor, on lui donna
l ’alarme sur le sort de cette enfant , qui n ’avoit pas encore d’état
civil. On lui persuada que les peines de la loi pourroient l’attein
d r e , cl elle se décida a iaire une déclaration à l’olficier public. On
n ’eut garde de transcrire la qualité qu'elle vouloit se donner, pnr
la raison qu’il eût été incivique de mépriser un divorce, cl que
Je sieur de Reyrolles, redevenu puissant, n ’auroit pas trouvé bon
qu ’ il
..
�( 9 )
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Comme ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 m es
sidor an 5. Cette erreur a été reconnue par la demoiselle Maigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d ’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de Reyrolles, nommé receveur du
département de la H a u te-L o ire, alla s’établir au Puy. Là , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle Maigne,
qui babitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui l’a conduit
au tombeau.
A celte époque terrible, où l’homme, ne trouvant plus d’asile
dans les illusions du monde, voudroit réparer dans un instant les
fautes de sa vie toute entière, l’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d ’altester qu’il n’avoit rien plus à cœur que de
se réconcilier avec sa fem m e, et de lui en donner, par un testament
honorable, la s e u le p r e u v e qui fût désormais en son pouvoir.
En e f f e t , il est de notoriété au P u y que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par lequel , cassant celui qu’il regardoit
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 40000 f.
à la dame de Reyrolles personnellement, et faisoit en faveur du
sieur Vauzelles , ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de ne pas se hâter assez,
elle envoya au Puy le sieur Granchier le m ercredi, et arriva ellememe le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
aieur de Reyrolles, q u i, à ce qu ’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tète avec un mouvement con
vulsif. Quoi qu’il en soit, il expira" le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle Maigne que
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
sieur de Reyrolles, et en attendant les scellés qui ne dévoient être
poses que le lendemain , au lieu de verser des larmes stériles qu’il
B
�( 10 )
valoit mieux réserver pour la pantomime des audiences, la de
moiselle Maigne étoit libre de tout parcourir. Un certain porte
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n ’a
plus paru ; et le public qui se trompe rarement en conjectures dé
sintéressées, paroit avoir été imbu de l’idée que dans ce porte-feuille
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier tes
tament. Et qu’on ne dise pas que c’est là une fable de pure ima
gination ; ce bruit avoit pris une telle consistance, que le sieur
Vauzelles, légataire, a rendu sur ce m otif une plainte en suppres
sion de ce testament.
L a dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’un fait
qu’elle n ’a appris que par la notoriété publique. C e n’est point la
fortune du sieur de Reyrolles qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut son état civil, sa d ot, et ne
dispute point à la demoiselle Maigne une o p u le n c e chèrement
achetée, et dont la source équivoque n ’est de nature à donner du
crédit que vis-à-vis quelques collatéraux.
Apres la mort du sieur de Reyrolles, ce n ’étoit plus que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence,
le 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses dot, trousseau et gains matrimoniaux, e t, en tant que de
besoin , en nullité du divorce et actes postérieurs.
L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cette tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d ’enrichir sa fidèle moitié, ne s’allioit guère avec un domicile
c o n s t a m m e n t séparé, et
douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle Maigne, qui avoit toujours habité Brioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de Reyrolles, proposa un déclinatoire, soit qu’elle crût qu’il n’avoit pas transféré au Puy son do
micile de droit, soit qu’elle fut entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n ’avoit pas le même domicile de lait que celui qu’elle disoit
son époux; elle ignoroil que le sieur de Reyrolles avoit acquis une
maison au P u y , s’en Uéclaroit habitant dans les actes publics, et
�( rO
avoit même fait rayer sa cote mobilière à Brioude. En conséquence, '
et par ces m o tifs, elle fut déboutée de son déclinatoire par juge
ment du 23 frimaire an i 3.
A u fond la demoiselle Maigne répondit que la dame de Reyrolles
n ’étoit pas recevable dans sa demande, soit à cause de la loi du
26 germinal an 1 1 , soit parce que la demande n ’avoit été formée1
%
qu’après la mort du sieur de Reyrolles, soit parce que la dame de
Reyrolles étoit divorcée par un acte requis et signé par elle-même;
qu’elle avoit traité avec son mari en qualité de femme divorcée,
et avoit pris la même qualité dans plusieurs autres actes-, no
tamment dans la déclaration de naissance d’un enfant né un àn
après le divorce; qu’à l’égard d’elle-même Catherine M aigne, elle
n ’avoit point à craindre le sort de ce divorce, parce qu’elle étoitl
mariée légitimement, héritière universelle, et que le sieur de
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette volonté pendant sept
ans, qu’à sa mort o n a v o i t trouvé le testament de la demoiselle
Maigne parmi ses papiers les plus précieux.
11 est inutile de rappeler les moyens opposés par la dame de
Reyrolles à cette défense'de la demoiselle M a ig n e, les faits cidevant narrés les indiquent; et il suffit de dire qu’en déclarant le
divorce nul, les premiers juges ne virent plus dans la dame de
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance maritale, n ’ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , ni prendre
une qualité qu’elle n’avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an i 3 , le tribunal du P u y, sans s’arrêler aux fins de
non-recevoir proposées par Catherine M a ig n e , déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 1793, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du 3 frimaire an 5 ; remit la dame de Reyrolles au
même état où elle étoit avant lesdits actes ; condamna Catherine
Maigne, en qualité d ’héritière du sieur de R e y r o l l e s , à lui payer,
x • 3oo fr. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 177 4 ; a*« 1200 fr. pour scs bagues et1
joyaux; 3 . 400 fr. pour sa pension viduelle;
• à lui fournir un
logement garni et meublé, suivant son état et sa fortune, dans'Ic
li 2
�(
)
dernier domicile du défunt, à la charge par ladite dame de Reyrolles
de constater l ’état dudit mobilier qui lui sera remis, pour être rendu
à qui et dans le temps de droit; 5°. à payer à ladite dame de Rey
rolles i5oo fr. pour son deuil et celui de sa domestique; et à l’égard
du payement de la d o t, le tribunal ordonna que led parties contesteroient plus amplement, et à cet effet fourniroient leurs états res
pectifs, Sauf débats. Les inscriptions de la dame de Reyrolles furent
maintenues jusqu’à parfait payement, et il fut ordonné que ledit
jugement seroit CfxéCuté en la forme de l’ordonnance nonobstant
l’appel.
Cette dernière disposition donna lieu à la demoiselle Maigne de
hâter singulièrement son appel et ses poursuites. Impatiente de
jouir sans entraves, elle remontra à la cour que la douairière d’un
receveur général ne pouvoit vivre avec des saisies qui arrêtoient des
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressait pour les rendre. L a co u r, par son arrêt provisoire du
24 floréal an i 3 , a fait défense d ’exécuter le jugement jusqu’à son
arrêt définitif.
L es parties sont aujourd’hui sur le point de faire juger le fond
de! la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude
une décision qui ne peut être que conforme à la morale et à la
justice.
M O Y E N S .
T o u te la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce
paradoxe : L e mariage est une simple convention prhée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui supplée les formes
de la l o i , ou qui en dispense.
L a défense de la dame de Reyrolles est de dire, au contraire,
que le mariage est 1111 lien destiné à l’union de deux familles,
intéressant la société entière, et ne pouvant être dissous que dans
la rigueur des formes légales.
Sans doute la solution de ces deux systèmes est écrite dans le
�( '3 )
coeur de tous ceux qui n ’auront pas oublié ces principes immuables
qui résistent au fracas des révolutions et à l’éblouissement des
systèmes.
Ici il est constant qu’en 1774 la dame de Reyrolles a été mariée
avec toutes les solennités civiles et religieuses, et que son époux
n'est mort qu’en l'an 12. II s’agit donc d ’examiner si le mariage
a été légalement dissous par un divorce. Mais la 4 iiiiiiJLi,lhr,R li.jr
waïUiii» oppose des fins de non-recevoir, qu’il faut examiner; et ses
prétentions donnent lieu aux questions suivantes : i°. L a dame
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son divorce
après la mort de son m ari, et malgré la loi du 26 germinal an
onze ? 2*. A u f o n d , le divorce opposé est-il valable ? 5*. Si ce
divorce n’ a pas été valable , a-t-il pu néanmoins être validé par
la convention particulière de la dame de Reyrolles?
P n E M i È n E
Q
u e s t i o n
.
L a dame de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité
de son divorce après la mort de son m ari, et malgré la loi
du 26 germinal an 11 ?
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?
sur une loi romaine? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
drfunctorum post quinquennium queratur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’e6t pas même écoulé six mois de son
décès à la demande.
C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la d e m o i s e ll e
Maigne. L ’article 188 porte que « l’époux au préjudice d u q u e l a
» été contracté un second mariage, peut en demander la nullité ,
» du vivant même de l’époux qui étoit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir avant la mort de 1époux,
qu’à titre de g r ic e ; et il semble, par ses expressions, que c’est a
regret qu’elle y a consenti : elle laisse entrevoir le conseil de ne pas
user de cc consentement ; et ce mot mdme, q u i‘semble pour ainsi
�(
dire échappé à la plume du législateur, est cependant de la plus
grande moralité.
Q u’est-ce en effet qu’une demande de ce genre, formée par l’é*
poux abandonné contre l’époux coupable, si ce n'est une espèce de
dénonciation ouvrant le champ le plus vaste à la discorde, et ren
dant désormais toute réconciliation impossible?
Est^ejum^foible épouse qui, du vivant de son mari, osera l’ap
peler devant les tribunaux pour lui dire : Je veux qu’on vous oblige
à me rester fidèle? Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti
quité, la sensible Hypparette a reconquis par un appel en justice,
1
4
)
la tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigneroient d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient
leur amour propre par un abandon plus éternel! Car les hommes,
qui font les institutions, n’ont créé que la puissance maritale; et
quels que soient les dons que le sexe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foiblesse, ce pouvoir d’équilibre n'est plus
qu’une divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige, Malheur donc à l’épouse inconsidérée qui tenteroit do
proclamer son qbandon et de chercher son époux jusque dans les
bras d ’une rivale!
Il est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
conjugal peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
mariage est comme l ’amour de la patrie. Cunctos ducit, et im-
memores non sinit esse sui.
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyrolles que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur ha
bitation séparée , une haine qu’ils ne dissirnuloient plus, annoncoient une rupture prochaine; et sans les difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroit vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit à personne qu’il n ’étoit retenu que par cette considéra
tion. (^uoi rju’il en soit, la dame de Reyrolles a fajt ce qu’elle
�( i5 )
devoit faire; tant qu’elle a eu de l’espoir, elle a gardé le silence;
et quand la mort ne lui a plus présenté qu’une étrangère à pour
suivre, elle a réclamé ses droits.
r
L a demoiselle Maigne n’est pas le premier héritier qui ait op
posé que la nullité d’un divorce ne pouvoit pas être demandée contre
lui. Mais la cour de cassation a décidé le contraire par arrêt du
14 vendémiaire an 10.
L a deuxième fin de non-recevoir n ’a pas même le mérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : Tous divorces
prononcés, etc., auront leurs effets, on en a conclu qu’à compter
de cette loi il n ’étoit plus possible d ’attaquer les précédens divorces.
C ’est-à-dire que si la veille de la loi nouvelle un divorce avoit
été prononcé sans aucunes épreuves, les époux n ’en seroient pas
moins séparés à jamais; et c ’est ainsi qu'on fait l'injure au légis-'
Iateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses.
M ais la demoiselle M aigne n ’a réussi à se faire un moyen de la
loi du 26 germinal q u ’en tronquant entièrem ent l’ article invoqué.
« T o u s divorces prononcés par des officiers de l’état c iv il, ou
» autorisés par jugement, avant la publication du titre du Code
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
» lois qui existoient avant cette publication . »
Ainsi le législateur n’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, nisi tota
lege perspectd, judicare. Maintenant que l’article entier est rétabli,
l’objection de la demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
.
L e divorce du 28 ju illet 1793 e s t - i l valable l
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�( i 6 )
de procédures. L e sieur de R eyrolles, plus pressé qu’il ne devoit
l ’être, amalgama t o u t , et interrompit au milieu de son cours une
première procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductivo. Le sieur de Reyrolles K par son exploit ori
ginaire du 24 niai 1793, avoit formé demande en divorce, soit
pour absence depuis neuf ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoil être demandé, comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2'. loi du 20 septembre 1793, § . 1 , art. 4* )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen«
dant cinq ans sans nouvelles, il lui falloit pour première pièce
un acte de notoriété constatant cette longue absence ( § . 2, art. 17):
mais sa femme étoit près de lui le 24 mai 1793.
S ’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon com por toit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dame de Reyrolles n ’étoit allée à
Limoges qu’avec l’agrément de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : l'exploit n’en dit rien.
. Pour incompatibilité d’hum eur, le sieur de Reyrolles avoit aa
marche tracée d’une manière positive.
« 11 çonvoquera une première assemblée de parens, ou d’amis à
» défaut de parens , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
» la convocation. ( § » 2 , art. 8. )
» La convocation sera faite par l’un des officiers municipaux....
« L ’acte en sera signifié à l’époux défendeur. ( A rt. 9. )
» Si la conciliation n ’a pas lieu ,
1assemblée se prorogera à deux
» mois , et les époux, y seront ajournés. A l’expiration des deux
» m o is.-., si les représentations 11c peuvent encore concilier les
époux,
�( 17 )
» époux ,* l'assemblée sc prorogera à trois mois. ( A rt. 10 et i i . )
» Si à la troisième séance le provoquant persiste, acte en sera
». dressé. 11 lui en sera délivré expédition , qu’il fera signifier à
» l’époux défendeur. ».( A rt. 12. )
L e sieur de Reyrolles provoqua un divorce le 24 m ai, sans acte
de convocation d ’un officier municipal.
11 ne nomma point de parens; il indiqua seulement des a m is,
sans même exprimer que ce fût à défaut de parens.
L a première assemblée eut lieu le 27 juin 1793* H en fut dressé
acte; mais aucune signification n ’a été faite à la dame de R e y ro lles, parce que les moteurs craignoient que dans l’intervalle les
choses fussent pacifiées.
' '
Il n ’y a ainsi pas eu de divorce pour incompatibilité d’humeur,
pas plus que pour absence.
* C e serôit donc un divorce par consentement mutuel qu’il faudroit valider.
M ais l’actc p rim itif y est un obstacle perpétuel ; on veut cepen
dant que les actes qui suivent aient c o r r e e cette première procédure.
L a loi en exigeoit une absolument différente.
« Le mari et la femme qui demanderont conjointement le di» vorce, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins
» des plus proches parens, ou d’amis à défaut de parens. ( §• 2 ,
art. I er. )
» L ’assemblée sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec
h
les parens ou a m is .. . • L acte de convocation sera signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( A r t . 2 .)
» Les deux époux sc présenteront en personne à l’assemblée; ils
» y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( Art. 4. )
Le but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires.
L incompatibilité pouvoit n ’avoir lieu que de la part d un époux;»
la procédure devoit donc avoir des formes liosliles ¡ c est pourquoi
la convocation devoit être réglée par un olficicr municipal , et un
C
�}
huissier clevoit sommer l’époux défendeur de concourir à la forma
tion de l’assemblée , et d ’y comparoitre.
Mais le divorce par consentement mutuel supposoit de la part
des époux un accord préalable né d’une égale satiété de vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation insupportable;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches.
A in si, bien loin de se signifier par huissier une nomination de
parens , et par actes séparés , ce qui marqueroit une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensemble les
(
1
8
parens, en les choisissant par moitié; ellea voulu qu’ilsdemandassent
le divorce conjointement : ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et que l’autre y a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquée.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l’un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i , provoqué par une demande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n’étoit pas dans son cœur ; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord même, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n ’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
Non omnium quœ à majoribus constituía sunt ratio reddi potes t.
Il est encore un principe bien constant en fait de lois rigoureuses,
c ’est que toutes les formalités doivent être suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du l\ germinal an 2 a étendu cette peine
à l'inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 1789.
�( 19 )
,
• C e serolt donc s’abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a précédé le divorce prononcé le 28 juillet 1793, les actes
préliminaires d ’un divorce par consentement mutuel.
Non-seulement cette procédure n ’est pas conforme à la lo i,
mais le sieur de Reyrolles a donné un autre nom au divorce par
lui demandé. Il a requis seul le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une demande, tellement
indélébile qu’elle ne comportoit ni opposition , ni d ébats, ni ju
gement.
Lors de l’assemblée, la dame de Reyrolles ne parolt encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas lo divorce, elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, ¿¿son m a r i y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veut le divorce ,
c ’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
V o ilà cependant ce que l’officier, public , dans l’oubli de ses
devoirs , a reçu com m e les épreuves suffisantes d ’ün divorce.
Un divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeoit
une foule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenté
d ’un seul acte et de trente-trois jours de délai.
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice, pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa iorme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa famille, car il n ’a appelé aucun'de ses parens ù
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les deux procédures 'une dif
férence notable, l'our l’incompatibilité d ’humeur , il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m utuel, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
S i , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eut été égal
d avoir des amis , c’étoit inutilement que la loi étoit plus exigeante
C a
�pour le consentement mutuel. Mais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffit de remarquer que la loi
ne vouloit des amis q u ’à défaut de parens.
Oscroit-on supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n ’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai, il falloit au moins l’exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que cette formalité a été remplie. Déjà
la cour d’appel, dans une cause sem blable, a annullé un divorce
entre des liabitans deRiorn , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n ’exprimoient pas que des amis n ’eussent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité, qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguet et Hêraud ,
notaires , le 7 novembre 1774* Mais jamais on n ’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. A vant 1792, l’église donnoit tout à la fois l’état
civil et le sacrement ; le mariage ne tenoit son essence que de la
célébration. Or , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 novembre
qui a été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d ’intérêt, et totalement incapable d ’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d’enregistrement et de publi» cation que Pétoient les jugemens de séparation » ( §. 5 , art. 1 1 . )
Or , le divorce opposé ne paroit pas même avoir été enregistré.
On a voit objecté à la dame de Reyrolles qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n’en a jamais donné l’ordre ; niais, quand on supposeroitlc contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer a son tour un divorce par con
sentement mutuel ?
U n exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’humeur , et cet exploit même
seroit une nullité de plus.
�( 21 )
T
r o i s i è m e
Q
u e s t i o n
.
S i le divorce n’a pas été valable, a-t-il pu néanmoins être validé
par une convention particulière de la dame de Reyrolles ?
Un contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut sans doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôt quelles
en ont exprimé la volonté.
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les formes
rigoureusement exigées. Cette différence est sensible, et tient à la
nature du contrat de mariage.
Oser dire qu’il est un simple contrat privé n ’est qu’une hérésie
insoutenable; èlle est condamnée par toutes nos lois; et les R o
mains eux-mêmes, qui cependant admetloient la répudiation et le
divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu’ils avoient
sur l ’ i m p o r t a n c e du m a r i a g e .
« Parmi toutes les institutions humaines, a dit Justinien , rien
» n ’est si sacré et si important que le mariage, car c’est par lui que
w se forme la suite des générations; c’est par lui que se peuplent
» les régions et que les cités fleurissent : il est le conservateur de
» la république et la source de sa prospérité. »
N ih il in rebus mortalibus perindè venerandum est atque matrimonium : quippeex quo liberi, omnisquedeinceps sobolis sériés
ex istâ t, quod regiones atque chutâtes frequenter reddat, undè
denique reipublicœ coaugmentatio fia t. ( N ovell . i/fo. )
T o u t ce qui tenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoient aussi considérées comme objet
d ’intérêt public : Reipublicœ interest dotes mulierurn salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’attention du législateur; il en
déterminent les formes, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nombre, leur influence et leurs re
présentations fussent un frein à la rupture du mariage. (Jf. D e
tüvorli'us et répudias. )
�(
2
2
)
Et si les formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nullurn divortium ratum est. ( L . g. eod. )
Quand cette nullité n ’auroit pas été textuelle, elle eût été pro
noncée par la loi qui portoit que toutes les conventions faites contre
le droit civ il, contra juris civilis régulas, étoient nulles de plein
droit, et ne produisoient aucune action. (/ ,. 28, f f . D e pactis.)
O r, il n ’étoit pas douteux que la forme de dissolution du mariage
ne fut réglée par le droit civil : Jure civili dissolvere solet rnatrimonium. ( L . n , ff. D e divort. et rep. )
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l’état
des hommes n ’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hominis v el conditio personarum mutari non potes t. ( L . libéras , c. D e lib. c , )
Sans doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n ’est pas susceptible d’être validé par des conventions particulières;
et il résisteroit d’ailleurs au bon sens que la loi eut exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
' dispenser indirectement.
Mais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
pour le divorce, avolt aussi prévu que des époux trop peu attachés
à son observation pourrolentse permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
Pactiones sanè si quee adversus prœsentia scita nostree majestatis fierin t attentatœ , tanquam legibus contrarias nullani habere 'volumus Jirmitatem. ( L . 8 , code D e repudiis. )
Ainsi la question est diserlement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n ’a pas été légalement fa it, les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi française. On demande,
«lit Vinnlus, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
oui, répond-il, s’il s’agit de valider le mariage : Ut sponsa rnaneal sponsa, placeù tratisciclionem valcre; mais la transaction est
�C 23 )
absolument nulle, s’il s’agit de relâcher le lien du mariage. ( Vînn,
D e trons. )
L a demoiselle Maigne opposera-t-elle la loi du 20 septembre
1792. Mais quelle que fut l’opinion du temps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilité spontanée du
» mariage, disoit le rapporteur de celte l o i , la liberté d’en con» tracter un second , après 1111 premier qui ne seroit pas légalement
» rompu , seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d ’une manière trèsconforme aux principes enseignés par les lois romaines.
« L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
» Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’après
» que le premier aura été dissous conformément aux lois. »
Que la demoiselle Maigne ne se dissimule pas toute la force de
l’expression ne peuvent. Toutes les fois, dit Dumoulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de droit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
11 en résulte donc que la demoiselle Maigne n ’a jamais pu être
l’épouse du sieur de R e y ro lle s, dès que son divorce n ’a pas été
fait conformément aux lois.
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n’est plus cla ir, et il est difficile d ’y voir que si le divorce
n ’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le mariage par
des conventions particulières.
D ’ailleurs, suivant le Code c iv il, il faut pour la validité d ’une
convention , .i*. la capacité de contracter, 2“. une cause licite dans
l ’obligation. ( Art. 1108. ) O r , suivant l’art. 1124, la femme mariée
est incapable de contracter elle-même ; e t , d ’après l'art. 1 153, la
cause est illicite quand elle est prohibée par la l o i , ou contraire u
l’ordre public.
Se départir de son état civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une iemine mariée puisse faire; et cependant elle n’a
pas la capacité de faire des dispositions bien moindres. Comment
�( H )
\
traiteroit-elle librement avec son m a r i , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré
sider ? ( A rt. 2 i 5 et 214* )
L e mari lui-même , clief de la puissance maritale , ne peut y
déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i 388. ) Com
ment donc concevoir que le mariage soit dépendant d ’une transac
tion , quand la puissance maritale n ’en seroit pas susceptible, elle
qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du mariage?
Jusqu’ici la dame de Rej'rolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce; e t , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
traité seroit nul : mais il n ’en existe d ’aucune espèce ; et ce que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an 5 et de quelques^,
exploits.
L a dame de Reyrollcs, objecte la demoiselle M a ign e, s’est donnée
plusieurs fois la qualité de femme divorcée: donc elle a approuvé,
elle a ratifié, elle a validé son acte de divorce.
C e qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince intérêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de mariage.
Mais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s , et perdre
par un seul mot son état civil ? U n mineur cesse-t-il de l’être en
se disant majeur? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d ’être
engagé dans les liens du mariage?
L ’exécution d ’un acte n u l , dit M . Cochin dans son 37*. plai
doyer , n ’en a jamais opéré la ratification ; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclamer , si chaque acte d ’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu’il ne faut considérer que
l ’acte n u l , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrollcs ayant coopéré par sa signature
à un premier acte n u l, c ’est-à-dire , à son divorce, tout ce qu’elle
a fait ensuite n’en a été que 1 exécution.
11 falloit qu’elle réclamât ou exécutât. M ais, étant en puissance
maritale ,
�( *5 )
m aritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamer à compter du
dccès de son mari : jusque-là elle étoit donc forcée d’exécuter un
divorce nul , car son intérêt n’étoit pas de réclamer, de peur que
son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première exécution
du divorce ; et on a \u comment elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e compte d’ins
truction qu’il lui devoit comme mandataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoit d’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand cette partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance maritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
L a dame de Reyrolles n’a point traité sur son divorce : elle n ’a
fait que l'exécuter par contrainte. Pour exister , elle fut obligée de
former quelques demandes ; et sans doute pour la régularité des
exploits , ne pouvant se dire autorisée du sieur de Reyrolles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle deinandoit.
Mais toutes les fois que cette qualité n’étoit pas de forme néces
saire, la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée;
elle a même prouvé, par les registres de son m a r i , qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de Florat-Reyrolles après le
prétendu divorce.
L ’exécution d ’un acte n u l, on le répète , n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dumoulin sur cette matière. « L a ratification d ’une
« obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en
» rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
» cette obligation , la mention du m otif de l’action en rescision,
» et l’intention de réparer le vice sur lequel celte action est fondée. »
( Art. i 558. )
Une donation nulle ne peut même être ratifiée : il faut la refaire
çn forme légale, ( A r t . 1559. ) Un divorce auroil-il moins intéressé
D
�( 26 )
le législateur? et pensera-t-on qu'il fut plutôt susceptible d’une
simple ratification ?
La jurisprudence ne s’est jamais écartée de ces principes. Un
jugement a été cassé le 25 messidor an 4> parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d ’une vente de
bien dotal en coutume d ’Auvergne, « attendu que les formalités
» n’ ont pas été remplies, et que Vexécution pendant plusieurs
» années du traité du ...... n’a pu valider un acte nul dans son
» principe. »
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renverses par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en thèse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d ’ordre public,
et qu’on est non recevable à demander la nullité d’un divorce quand
on l’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n ’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d ’un
tel paradoxe. Il n’étoit question devant tille que d ’un divorce va
lable, d è s-lo rs la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une arme trop puissante
pour qu’il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec celte seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aisé de voir que la demoiselle Maigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d'un arrêt de
circonstance.
« L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» Celle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d ’ailleurs et pé» rcmptoireinent que son ci-devant mari étoit non recevable,
» attendu qu’il avoit reconnu la validité du divorce.
» Arrêt de la cour d ’appel séante ù I rêves, qui admet la fin de
» non-recevoir ; attendu que les moyens de nullité étoient sans
» fondement ; et encore, attendü que le mari a pu et voulu renoncer
�C 2 7 )*
» au droit q u ’il avoit de contester les effets civils du divorce de son
» épouse.
:» Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article G du Code
» civil.
» L e demandeur soutenoit qu’une convention tendante à faire
» valoir un acte de divorce n u l , seroit contraire à l’ordre public
» et aux bonnes mœurs ; qu’ainsi, en supposant le fait de recon» noissance ou consentement par le m ari, la cour d’appel n’auroit
» pu conclure, en point de d ro it, que par la force de celte con» vention le divorce fût devenu inattaquable.
» A h k ê t . — A ttendu q u ’en ajoutant à la considération de la non
» application des lois invoquées par le demandeur aux actes par
» lui attaqués, celle de l’ approbation par lui donnée à la régularité
» de ces actes, et mêm e celle de la reconnoissance par lui faite dans
» d ’autres actes publics de sa qualité Ac fem m e divorcée, à celle
»
»
»
»
qui a fait prononcer le divorce
pas viole l ’art. G du C ode civil,
des conventions particulières à
m œ urs, et bornant sa défense à
d ’avec l u i , la cour d ’appel n ’a
q u i , défendant de déroger par
Vordre public et auoc bonnçs
ce qui concerne ces objets d ’in-
» térêt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissances et celui
» des transactions sur F intérêt civ il et privé; ce qu’ il a formelle» ment exprimé dans Fart. 2046, et ce que la loi transitoire de
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i 3. — Section des requêtes. >/
( S ir e r , an i 3 , pag. 2 2 3 . )
Combien de différences notables entre cet arrêt et la cause!
Apres un divorce demandé et oblenu par une fem m e, c’est le
mari qui, n’élant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
11 traite librement; il n’est pas incapable.
11 traite sur les intérêts civils du divorce.
11 ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il recou*
nott par plusieurs actes la v a lid ité du divorce.
D 2
�( 28 >
En plaidant, il ne peut pas même prouver que le divorce ait été
nul d ’aucune nullité.
L a cour d ’appel en effet ne se décide que par ce motif.
En cassation, l’époux n’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l , et il se borne à une dissertation polémique
sur l’effet de la ratification qu’il a donnée.
Ainsi la position de la question n’étoit pas de savoir s’il avoit
pu transiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décidé la cour de cassation ; et
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n’en résulte qu’une
plus grantîe conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tenoit
â l’ ordre public et à Uintérdt civil et privé, et qu’elle ne s’est dé
cidée à juger aussi le sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
L e m o tif pris de l’art. 2046 du Code le prouve. 11 porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d ’un délit. On n ’est donc
pas libre de traiter aussi pour l'intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, et divorcée pour sa famille et pour elle-même,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ irite'rét; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc birn loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle M a ig n e , en citant cet a rrê t, a prétendu, avec
le rédacteur, que l’article G du titre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure et incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces ne sont pas d’ordre
public.
11 est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�( 29 )
comme un doute; mais il termine de manière à prouver qu’il ne
s’est pas décidé comme la demoiselle Maigne l’entend.
Cependant sa première application semble fautive; car en rédui
sant la définition d’ordre public à ce qui concerne l’état de la
république, quodadstatum reipublicœ pertinet, il n’a pas remar
qué que l’expression jus publicum étoit alternativement employée
par les lois romaines pour le droit public et pour l’ ordre public;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, comme
on peut le prouver par des exemples.
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire la falcidie
' n ’étoit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction , à peine par son héritier de payer une somme aux léga
taires, celte disposition étoit déclarée nulle, comme contraire au
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires (i)***
Cependant une telle nullité n’intéressoit aucunement l’ état de la
république.
S i en d o n n a n t la d o t au mari o n a v o i t s t i p u lé q u ’il ne c o n t r i bueroit pas aux frais d’inhumalion que la loi mettoit à la charge
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins une
action en répétition contre le mari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation , parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire au
droit public (2)... Cependant encore l'état de la république ctoit
fort étranger à cette convention.
( 1 ) Fratercum haredem sororem scriberet, et alinm ab e à , cu i dona lum v o le b a t , stipulari curavit ne fa lc id ia uteretur , et ut certain pecun ia m , si con tri J e c is s e l , p restare , privatorum cautione h'gibus non esse
refragandimi con stilit : et ideo sororem j u r e l ' U i u . i c o retenlione/n habi turam , et actionem e x stipulatit denegandam. ( L . i 5 ,/ f. A d leg. fa te . )
(2) N rra tiu s quecrit s i is fju i dole/n d ed era t prò m uliere , stip u la tu s
est.... iVe q u id m aritus in fttnus c o n ferr et, an Ju neriim i m aritus teneaiur?
e t a it... S i a lia s fu n era v it, posse e uni m aritum convenire, quia p a cto h oc
/us i*u b licu m in ftin g i non p o ssit. ( L . 20 ,/ / . D o relig. et sum pt. )
�( 30 )
Ces dispositions n ’étoient donc que d ’ordre public, et la loi no
vouloit pas qu’elles pussent être éludées par des conventions par
ticulières. Comment donc seroit-il proposable de supposer à -la
prohibition de dissoudre le mariage, un moindre intérêt d ’ordre
public? et au lieu de se jeter dans l'application vague de la loi 6 ,
cod. D e pa rtis, et de l’art. 6 du C o d e, comment ne pas trouver
une nullité radicale aux divorces faits sans toutes les formalités,
quand la loi a dit : Nullum ratum est divortium, nisi , etc.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : Pactiones nullam habere 'volumus
Jirmitatem, lanquani legibus contrarias? enfin, comment ne pas
voir une disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tembre, quand elle dit qu’un second mariage ne peut être contracté
qu’après un divorce légal ?
Quand les lois sont si claires, comment seroit-il possible de
penser qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité de femme mariée, ait pu s’en priver elle-mêm e en se disant
divorcee, et en 11e transigeant pas même sur la validité du divorce
qu’on lui oppose?
Que reste-t-il donc à la demoiselle M aigne, si ce n ’est de faire
diversion h la cause par la naissance d’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre
une épouse et sa rivale, déterminé h fixer son irrésolution par un
retour à scs devoirs , en est tout h coup détourné par une séduc
tion toujours active ; habitare fa cit sterilem in domo , et la mère
d e s e s e n fans, repoussée comme une vile esclave, est obligée de céder
à une étrangère led honneurs du lit conjugal.
E li! qu’imporle à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle â scruter la conduite d ’une épouse ? Si cette conduite
étoit blimiable , cet adultère qu’elle proclame ne seroit-il pas
/
�( 3* )
son propre ouvrage? n’en porteroit - elle pas le poids éternel ?
Mais il ne s’agit point ici de la naissance d’un enfant ; il suffit
à la dame de Pieyrolles de déclarer qu’elle n’a point à en rougir,
et qu’elle est à même de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n’est ici employé
que comme moyen de la cau se, et parce que la qualité de femme
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. Mais ne seroil-il
pas bizarre q u e , dans la commune où un divorce a été prononcé,
l ’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objeclion est donc absolument nulle , et rentre d ’ailleurs dans la
discussion précédente , où elle trouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle M aigne,
et se justifie la décision des premiers juges.
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui est ô t é , mais il lui
en reste la fortune. L a dame de Reyrolles se borne à vouloir ce
qui lui appartient , d’après son contrat de mariage. N ’est-ce pas
assez q u ’elle s o i t r é d u i t e h le d e m a n d e r à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
e n vier, et que le sort de l’une et de l’autre soit aujourd’hui si
différent ?
Une règle de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e ,et le vœu
du législateur n ’a pas balancé: M elius est favere repetitioni quam
adventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans celte loi
seule , s’il n’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion, l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de Reyrolles; elle le sera de même aux yeux de la
c o u r , puisque les lois ne répulent pas son mariage dissous. La
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. Ainsi, les principes demeurent dans toute leur lorce , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-recevoir. Mais que signifient de misérables
�( 3 2)
subterfuges dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront qu’un mariage ou un divorce, c ’e s t - à - d i r e , un objet
majeur et d ’ordre public. Alors disparoitront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T , veuve D E R E Y R O L L E S .
M°. D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licencié avoué.
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Frimaire an 1 4
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Factums Marie
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 14?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
Description
An account of the resource
Mémoire pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles, appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 14
1774-Circa An 14
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0615
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0706
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Le Puy-en-Velay (43157)
Limoges (87085)
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divorces
nullité du mariage
remariage hâtif
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Text
LJXünâZZ
v twMMBTWw*1
¿J5S
M É M O I R E
P O U R
M argu erite
C O U G U E T - F L O R A . T , v e u v e d u sieur
d e R e y r o l l e s , intimée;
COUR
C O N T R E
r-
d ’a p p e l
i
V
C a t h e r i n e M A I G N E , se d is a n t a u s s i veuve d u d it
d e
sieu r d e R e y r o lles , appelante.
ri o m
.
section.
L A demoiselle M aigne n ’est pas satisfaite d'a voir usurpé une
grande fortune, et empoisonné la vie d'une malheureuse épouse;
elle ose lui disputer encore un titre respectable reçu aux pieds des
autels, et opposer une form ule révolutionnaire et illégale au plus
sacré des engagemens. L e désir de tout contester à son adversaire
l’a aveuglée et jetée dans cette inconséquence. Pour exposer sa h aine
devant les tribunaux, il lui a semblé doux d ’y être en scène ellemême; et elle n ’a pas cra in t, dans son propre pays, de livrer sa
vie toute entière à de pénibles souvenirs.
Une première tentative devoit la convaincre que la passion n ’est
pas le plus sur des guides. Condamnée par les juges qui la connoissoient le m ieux, elle avoit lieu de croire qu’un système de calomnie
ne prévaudroit pas contre les principes, et qu’une cour supérieure,
gardien naturel dès lois de l'em pire, ne porteroit pas légèrement une
atteinte dangereuse au lien sacré du mariage, le premier fondement
des sociétés civiles.
L a dame de Reyrolles avoit été justement indignée du genre de
défense d’abord adopté par la demoiselle M a ig n e, et son premier
A
�c 2 y ,
mouvement avoîl été d’user d’une représüille bien légitime. Plus en
état que personne , dans sa triste position de rendre compte
des faits el gestes de sa rivale, elle n ’avoit'rifch tu dé te qui la tourrnentoit depuis tant d’années, et il lui^paroissoit consolant de la
poursuivre encore, comme urir’remords Vengeur, de la forcerrà
sentir le poids de son opulence, et de mériter enfin une liaine
qu’elle ne provoquoit pas.
Cependant la dame de Reyrolles a réfléchi que cette jouissance
décevante n ’étoit pas digne de la majesté de la cour ; en consé
quence elle s’est fait un devoir scrupuleux d ’écarter de son récit
touj«* les épisodes étrangèr^»à ses moyens. L a réclamation d’un
état crvil présente d’ailleurs trop d’intérêt par elle-même, pour que
cet intérêt soit sacrifié à des personnalités et à une stérile vengeance.
3 L e mariage est-il un contrat d’ordre public; c ’est-à-dire, une
femme sous la puissance maritale a-t-elle p u , après un divorce
n u l, traiter irrévocablement avec son m ari? et si le mariage n ’étoit
pas légalement dissous, a-t-elle pu consommer cette dissolution
par un acte privé?
T elle est la principale question de cette cause ; et il faut avouer
que sans cette espèce de vandalisme philosophique, qui a brouillé
long-temps toutes les idées morales, on rougiroit de la trouver difficultueuse. Mais avec la gloire du nom français renaissent de jour
en jour ces antiques maximes, dont nous n’avons éprouvé l’ébran
lement que pour sentir les funestes conséquences de nos vicissitudes.
A ujourd’hui le mariage, placé sous l’égide de la religion et sous la
sauve-garde de la m agistrature, a reconquis sa dignité prim itive;
et tout ce qui tend à la maintenir retrouve dans les tribunaux une
protection salutaire, indépendante des personnes et des circons
tances.
F A I T S .
L a dame C o u g u et-F lo ra l contracta mariage avec le sieur de
R eyrolles, médecin , le 7 novembre 177/»» et se constitua en dot
ses biens échus et à échoir, c’est-à-dire, qu’elle donna plein pou-
�voir à son époux, ¡de rechercher et régir une fortune -inc^nnuc^a
elle-même. L e contrat mentionne la stipulation i(d un^douaire,, et
autres avantages m atrim oniaux.^
,{Les premières! années de ce mariage furent heureuses. Devenue
m ère, et possédant*toute l’affection de son époux , la damende
Reyrolles étoit loin de prévoir que cette félicité seroit détruite par
une femme qui alors ne lui sembloit nullemenl: à c r a i n d r e , et que
le sieur de Reyrolles paroissoit juger avec rigueur. j n6fono<
L a destinée de la dame de Reyrolles en disposa autrem ent, et
bientôt elle se convainquit que les goûts des hommes ne^se règlent
pas toujours par leur estime. D ans sa fierté , elle abandonna^un
époux parjure, à sa nouvelle conquête, e^ se retira c h e z la^dame
de F lo ra t, sa grand’mère. if;
il. C et éclat, imprudent peut-être , tourna tout entier au profit de
sa xivale; la dame de Reyrolles fut privée de tout secours , denses
bijo u x; et poussée d ’infortunes en infortunes, pour obtenir six
louis de son époux , il exigea qu’elle les reçût de la demoiselle
M aigne. T e l étoit, après dix ans de m ariage, l’humiliation à laquellb
étoit condamnée une épouse : tels étoient les premiers chagrins
qu’elle fut obligée de dévorer. •
Une réconciliation apparente succéda à ce premier orage. Dupe
de son cœur et de sa franchise , la dame de Reyrolles se trouvoit
encoi’e heureuse des égards de son époux; mais l’illusion qu’elle
s’efforça long-temps de se fa ir e , céda à l’évidence : l’indignation
étouffa tous les calculs d’intérêt personnel, et l’épouse outragée ne
connut plus les ménagemens de la dépendance.
Los sieur et dame Caklaguès, parens de la dame de Reyrolles ,
alloient s’établir à Lim oges. Affligés de sa position , ils lui propo
sèrent un asile ; et celle qui dominoit le sieur de Reyrolles ne sen
tant que le plaisir d’être délivrée d’une surveillante incom m ode,
l^pressa de consentir à cette séparation.
Combien étoit déjà changé le sort de la dame de R eyrolles! elle
avoit un époux; une étrangère lui faisoit oublier ses scrmens et
ses devoirs : elle avoit eu un enfant; la m ort, moins cruelle, le lui
A 2
�< 4 )
avoit ravi à l ’âge où il «toit incapable'de tendresse. C ’est ainsi
qu’épouse sans époux , mère de famille sans enfans , la dame de
Reyrolles a vécu plusieurs années à Limoges , abandonnée aux
c o n s o l a t i o n s de l’amitié et aux fantômes d e ,l’espérance.
Elle avoit touché assez régulièrement à Limoges une pension de
bienséance que lui faisoit le sieur de R eyro lles, par égard pour la
maison de Caldaguès; mais au commencement de la révolution
elle ne reçut plus rien , et revint à Brioude.
Cette espèce de résurrection d ’une femme oubliée parut lui re
donner le charme de la nouveauté, et réveiller dans le cœur du
sieur de Reyrolles des feux mal éteints. Il est certain qu’il eût fait
son bonheur de rompre, ses chaînes, et de mériter l’affection de
son épousp, si la prévoyance allarmée de la demoisellt/ Maigne
n ’eût cherché à la hâte à détruire ce premier mouvement par toutes
sortes de moyens.
Mais tel est le sort d’un homme subjugué; le sieur de Reyrolles
vo yo il, et il n’osoil voir; il vouloit, etnepouvoit s’enhardir à vouloir:
l'homme le plus impérieux n’est donc qu’un foible enfant devant
la passion qui le domine. L e premier acte de loiblesse qu’il s’est
laissé surprendre, est l’abandon qu’un vaincu fait de ses armes ;
il reste désormais sans d éfense, et se dévoue a l’esclavage.
L a demoiselle Maigne triompha , et le premier usage de sa
victoire fut de dicter les conditions et de profiter de la faveur des
circonstances.
Alors existoit une loi récente, que quelques femmes regardèrent
comme un présent du ciel et une faveur de la Providence. Après
la dissolution de la m onarchie, de la féodalité et de la puissance
paternelle, en quelques jours d’intervalle, et avant d ’attaquer la
religion dans ses solennités, il n’y avoit plus qu’une destruction in
termédiaire à prononcer ; et le lien du mariage, malgré son antique
inviolabilité, fut dissoluble indistinctement par le divorce.
Celte innovation étoit trop précieuse à la demoiselle Maigne
pour qu’elle ne s'empressât pas de la saisir. En conséquence , le
34 mai 1797»
>1 lut signifia à la dame de R eyrolles, de la part de sou
�( 5 )
m a ri, un acle par lequel il déclaroit qu’ il entendoit divorcer pour
cause d’absence, et pour incompatibilité d’humeur et de caractère,
en conséquence dé quoi il nominoit trois amis , et lui faisoit som
mation de nommer de sa part trois parens ou amis.
11
Dans cette conjoncture que pouvoit faire une épouse? plaider?
les tribunaux n ’éloient pas compétens ; résister? la loi ne le lui per-’1*
mettoit pas : souvent le demandeur se faisoit lui-même signifier
une réponse, et le divorce n ’en alloit pas moins à sa fin.
^
Quoi qu’il en s o it, le 27 mai il fut déclaré , à la requête de
la dame de -Reyrolles, que pour satisfaire à la sommation du 24
ellé nommoit trois parens , ajoutant que le sieur de R eyro lles, en
\
provoquant son divorce , n ’avoit fait que prévenir ses intentions'.
L e 27 juin il fut tenu une première assemblée de fa m ille, tou-’
jours motivée pour absence et incom patibilité; et après les dires du
demandeur et la tentative de conciliation des parens, on lit la ré
ponse suivante : Sur quoi ladite Couguet-Florat leur a répondu
qu’elle était disposée à suivre en tout point la 'volonté de son
mari ; mais que si son dit mari persiste ¿1 requérir le divorce ,
elle y donne les mains.
Celte réponse si naïve , où l’obéissance seule se laisse apercevoir,
étoit en elle-même insignifiante : mais on voulut lui donner un sens.
Les longs délais de l’incompatibilité s’accordoient mal avec l’im
patience de la demoiselle M aigne. On crut donc découvrir dans
les diresde la dame de Reyrolles des matériaux suffisans pour para
chever un divorce par consentement m u tu el, pour lequel il n’y
avoit plus qu’un mois à attendre.
En conséquence, à la date du 28 juillet 1783, un mois après la seule
assemblée de fam ille, on fit rédiger un acte de divorce , dans lequel
on suppose qu’il a été requis par les deux époux, d’après la procé
dure voulue pour le consentement mutuel.
Cet acte fut porté à la dame de Reyrolles par un valet du comité
révolutionnaire, long-temps, quoiqu’on en d is e , après la date qui
lui a été donnée : elle sign a, il n’y avoit pas à hésiter ; d’ailleurs
son refus , en l’exposant, n’eût fait que rendre celle pièce inu-
�■'itfi1! ubnsiilO fi il î f -ci.-i'ii l
' s;>^ijf:n^ f ‘ !nni
a .ni,tile içt forcer à reprendre la suite du premier mode de divorce.
A^nsi s’acconiplit cette œuvre d’iniquité, et la demoiselle M aignc
eut enfin levé lç plus grand des^obstacles Ornais comme si le d e l
se fu t joué de ses plus clières espérances , l’époque de son ma
riage qu’elle avoit tant hâtée s’éloignoit de jour en jour ; et pendant
quelque temps il y eut lieu de croire que le sieur de R eyrolles,
p é n é t r é dejla perte volontaire qu’il avoit sollicitée, oublioit la pro
cédure monstrueuse qu’il avoit ébauchée, et revenoit à ses pre
miers" engagemens.
11
L a dame de Reyrolles se livra de bonne foi à une si douce rési
piscence ; elle feignit même ne pas remarquer qu’il ne venoit chez
elle qu’à la dérobée et avec la timidité d ’un esclave. Enfin , une
grpssesse lui parut le comble du bonheur, et le gage assuré d’une
réconciliation après laquelle elle soupiroit depuis si long-temps.
.j'M ais .les assiduités du sieur de Reyrolles n ’avoient pas échappé
aux ennemis de son épouse. T ro p adroits pour faire un é cla t, ils
frappèrent des coups plus certains, et le poison de la calomnie vint
ébrauler l’imagination foible d’un homme que le premier mouve
ment faisoit agir, et q u i, dans ce qui concernoit ses passions , ne
savoit jamais penser par lui-méme. C ’est ainsi que, dans sa confiance
aveugle, la darne de Reyrolles se croyoit encore épouse quand ses
ennemis ourdissoient sa perte : Inquirebant niala s ib i , et dolos
totd die medilabantiir.
L a grossesse de la dame de Reyrolles fournit une vaste champ
à leur malignité; l’époux lui-même fut entraîné ii douter contre sa
conviction intim e; et ce que la dame de R ejrolles avoit cru être le
sceau de la paix devint en un instant le signal de la discorde et de
la haine.
T o u t d’un coup la scène change : on profite diligemment de la
disposition d’esprit où on a mis le sieur de Reyrolles , et son m a
riage avec la demoiselle Muigne est consommé le n messidor
an 2 , douze jours avant que la dame de Reyrolles , sur son lit
de douleur, donnât le jour à une malheureuse créature sous d ’aussi
sinistres auspices.
�Non , le ciel nç l’a point béni, ce fatal mariage î II a entendu ^aua"
thème ,pronjpjnç^ par 4une épouse dans sa désolation ; fet elle n a
pas eu la douleur de savoir plus* heureuse qu’elle celle qui 1 avoit
*J; !-, *î ’ .. •, i ./ ‘
1M'
/ I J
#’
chassée du lit conjugal. En portant un nom usurpé , la demoi
selle M aigue ne trouva plus dans le sieur de R eyrolles cet être
soumis sur lequel elle avoit exercé tant de fois une capricieuse
1
-.;or>
puissance.,
L a demoiselle Maigne avoit calculé cet effet habituel du mariage j
et pour se prémunir contre son résultat , elle profita d’ürie époque
où le sieur de Reyrolles venoit d’être destitué de sa place de rece
veur du district, pour proposer un testament mutuel qui fut respec
tivement signé en l’an
5 . Quelque temps après, une séparation
volontaire les a éloignés jusqu’à la m ort.
^
Cependant la dame de R eyrolles, abandonnée à sa situation péni
ble , dévoroit ses chagrins et se devouoit à sa destinée. Occupee
des soins maternels que demandoit le premier âge de sa fille ^elle
attendoit avec résignation que le sieur de R eyrolles, rendu de nou
veau ù ses premiers liens , s’occupât de deux êtres qu’il avoit si
cruellement traités. M a is, au lieu d’un retour à la nature, il ne fit
plus apercevoir son autorité maritale que par des hostilités et par
l ’abus de son administration.
I
.11 avoit recueilli la succession considérable de l’aieule de son
épouse, avoit traité de gré à gré avec un cohéritier pour le partage
des immeubles, et s’étoit emparé des effets m obiliers, sans compte
ni mesure.
Néanm oins, demeurant libre d ’en fixer la consistance , et pour
consommer la ruine de son épouse , le sieur de Reyrolles lui fit
faire , le 7 messidor an 4 > un acte d’offres de 7000 francs en man
dats territoriaux, pour le montant , d it-il, d e ce q u ’il avoit touché
sur sa dot , attendu que ladite Couguet avoit toujours éludé de
déclarer ce qui pouvoit lui être dû ; qu’ elle ne cherchoit qu’à re
tarder la libération dudit Reyrolles , qu’il étoit de son intérêt
d’ opérer le plutôt possible.
L a dame de Reyrolles répondit qu’elle ctoit surprise et lassce
�.,
( 8 )
des procédés ¡niques de son m ari, et refusa les offres. 11 y eut
procès' verbal 'de non''conciliation , après leq u el’eÏÏê' fu t assignée
le oi
su iv a n t dcvaRt le tribunal du Puf*; en réalisation
et v a l i d i t é desdites offres.
^
Ces diligences avoient lieu à la dernièVe heure du papier-monnoie;
numéraire reparut au commencemçnt de l’an 5 ; et, dans ce pre
mier iustant où l’opinion en augmèntoit la valeur, le sieur de R e y
rolles se hâta de faire proposer S sa femme une modique sómme de
6ooo francs pour tout terminer ; ajo u tan t, pour l’intim ider, que
si elle ne l’acceptoit pas , les offres de l'an 4 seroient jugées vala
bles , parce qu’elles avoient eu lieu avant la suppression du papier.
En vain la dame de Reyrolles demanda-t-elle à être éclairée sur
la valeur réelle de sa propre fortune; il Fallut obéir à la puissance
maritale , et céder à la crainte de n ’avoir que les mandats offerts
au lieu du numéraire prom is, Si cile s’exposoit à aller plaider dans
un tribunal presque incon nu, à tlôuze lieues de son domicile.
L a dame de Reyrolles signa donc un traité le 16 frim aire an 5 ,
par lequel on lui fit dire qu’elle étoit venue à compte avcca son
ïjiari, et qu’après communication prise de l’inventaire de son aïeule
et d ’un partage de 1786, il lui revenoit 6126 liv. 10 sous; ù quoi
ajoutant d’autres articles touchés par son m a ri, quoique non com
pris dans l’inventaire, en valeur de 873 liv. 10 sous, le sieur de
Reyrolles se trouva tout juste débiteur des 6000 fr. qu’il voiiloit
p a ye r, et dont l’acte porle quittance.
A compter de cette époque les époux furent séparés , et la dam e
de Reyrolles n ’eut plus qu'à s’étourdir sur le passé et à supporter
m e s s i d o r
,
l e
son sort avec courage : elle se consoloil avec sa fille, et cette con
solation même lui lut enviée. Ajirès le 18 fructidor , on lui donna
l’ularine sur le sort de cette enfant , qui n’aVoit pas encore d’état
civil. O11 lui persuada que les peines de la loi pourroient l’attein
d re, et elle se décida à faire u n e déclaration ù Pofiicier public. On
n ’eut garde de transcrire la qualité qu’elle vouloil se donner, par
la raison qu’il eût Oté incivique de mépriser un divorce, et que
le .sieur de R eyrolles, redevenu puissant, n ’auroit pas trouvé bon
q u ’ il
�Y... . r -ijj.vï
( 9 )
vïw v w
r W '
qu’il fût fait mention de lui sans sa participation. L a dame de
Reyrolles déclara donc seulement qu’il lui^étoit né une fille le 21
messidor qui suivit son divorce. Com m e ce divorce étoit daté de
l’an 2 de la liberté, on supposa la naissance de l’enfant au 21 m es
sidor an 5 . Cette erreur a été reconnue par la demoiselle M aigne,
et seroit aisée à rétablir à l’égard d ’un fait aussi notoire.
Dans ces entrefaites le sieur de R eyro lles, nommé receveur du
département de la H au te-L o ire, alla s’établir au P u y. L à , ayant
vécu près de six années séparé absolument de la demoiselle M aigne,
qui liabitoit Brioude, il fut atteint de la maladie qui l’a conduit
au tombeau.
A cette époque terrible, où l’hom m e, ne trouvant plus d asile
dans les illusions du m onde, voudroit réparer dans un instànt les
fautes de sa vie toute entière, l ’opinion générale a rendu au sieur de
Reyrolles la justice d’attester qu’il n’avoit rien plus à coeur que de
se réconcilier avec sa fem m e, et de lui en donner, par un testament
honorable, la seule preuve qui fû t désormais en son pouvoir.
j En e ffe t , il est de notoriété au P u y que le sieur de Reyrolles
avoit fait un testament par lequel , cassant celui qu’il regardolt
comme un monument de foiblesse et de honte, il léguoit 4 o °00
à la dame de Reyrolles personnellem ent, et faisoit en faveur du
sieur Y auzelles , ex-législateur, une disposition considérable.
Aussitôt que la demoiselle Maigne apprit la maladie du sieur
de Reyrolles, elle voulut se mettre à portée de déranger des projets
dont elle ne pouvoit douter. Craignant de 11e pas se hâter assez ,
elle envoya au Puy le sieur Granchier le mercredi , et arriva ellemême le vendredi suivant. Sa vue fit une révolution singulière au
sieur de R eyro lles, q u i, à ce qu’on assure, se tourna brusquement
du côté opposé, et se couvrit la tête avec un mouvement con
vulsif. Quoi qu’il en so it, il expira le même jour 18 floréal an 12.
Cette mort soudaine servoit mieux la demoiselle M aigne que
tous les plans qu’elle avoit pu concevoir. Seule dans la maison du
sieur de R eyrolles, et en attendant les scellés qui 11e dévoient être
posés que le lendemain , au lieu de verser des larmes stériles qu’il
13
�Valoit mieux, r é s e r v e r . -pour la pantomime.de& audiences , la~de~
moiselle M a i g n e étoit libre de tout parcourir,[[Un ¿çertainc,pqrte-;
feuille vert avoit paru donner de l’inquiétude au défunt : il n ’an
plus paru; et le public qui se trompe rarement en ¡conjectures dé
sintéressées, parolt avoir été imbu de l’idée que dans çe porte-feuillen
gissoient les papiers les plus précieux, et surtout le dernier!tes-c
tament. E t qu’on ne dise pas que c’e s t jà une fable de pure im a-p
gination ; ce bruit ayoit pris une telle consistance, que le sieur
Y auzelles, légataire, a rendu sur ce m otif une plainte en suppres-ip
sion de ce testament. .u; ju
jo
,JLa dame de Reyrolles ne donnera pas d’autres détails d’qn fait
qu’elle n ’a appris que par.Ja notoriété,publique. C e n’est point las
fortune du sieur de Reyrollfes qu’elle ambitionne; elle ne demande
rien qui ne soit à elle-même; elle veut,son état civil, sa dot , et ner
dispute point à la demoiselle Maigne une opulence chèrement,*
achetée, et dont la source équivoque n ’est de nature à donner du
crédit que-vis-à-vis quelques collatéraux.
•/[
■ Après la ;mort du sieur de Rqyrolles, ce n ’étoit plu§ que des
tribunaux que son épouse pouvoit attendre justice; en conséquence, ;
le, 19 thermidor an 12, elle fit citer Catherine Maigne en payement
de ses d ot, trousseau et gains m atrim oniaux, e t, en tant que de
besoin, en nullité du divorce et actes postérieurs.
; L a demoiselle Maigne ne savoit pas encore à fond le rôle con
venable à la circonstance. Cotte tendresse soi-disant conjugale qu’il
falloit supposer à un homme dont les dernières volontés avoient
été d’enrichir sa fidèle m oitié, ne s’allioit guère avec un domicile
constamment séparé, et à douze lieues de distance. Cependant la
demoiselle M aigne, qui avoit toujours habité Brioude, et qui ignoroit les moindres affaires du sieur de R eyrollcs, proposa un déclinatoire, soit qu’elle criU qu’il n ’avoit pas transféré au Puy son do
micile de d roit, soit qu’elle fût entraînée par la vérité à convenir
qu’elle n ’avoit pas le même domicile de fait que celui qu’elle disoit
son époux; elle ignoroil que le sieur de Reyrollcs avoit acquis une
maison au l Ju y , s’en déçlaroit habitant dans les actes publics, et
�( ( i l ' 1)
. . . . .......
a^oil mêmë fait’l*â‘ÿ ê r sà' cotë’ttidbilière à Bri6üdéï,T!h consequetibé/
et par çes' tntotifs P'^lle ftit’ déboütéè dè son déclmatÔÎTé 'par J1* ^
ment du 23 f l a i r e
,jb T m n ob
JioT* 5iav .9»Uu»‘
A u fond la dCm'oiselle Maignë'Tépondit que la dame dë Reyrolles*}
n ’étoit^pasirecëvable’dàns s a ’ dem ande, soif à causé de la loi <ïtiia
26 germinal ran'l i n é d i t parce que la defilande n’ avoit êt<^ form ëèâ
qu'après la mort du sieur d e;ReyrolIes, soit parcé que la darfie dë'*
Reyrolles étoit divorcée par uri' acte requis èt'signé pat ellé>niâtne;’§
qu'elle avoit traité avec son >màri en qualité dc'xfemniê' divorcée,
el avoit pris la même qualité dans plusieurs autres8actes^^110" *
tamment dans la déclaration dé naissance-druri 'ertfant ilé ^ n - a n
après le divorce; qu’à l’égard d’elle-même1Catherine M aigne 9^elltí^,,
n ’avoit ipoint à craindreJle sort de'ce'dW orce* parce qu’tillé étôit*
mariée légitim em ent, héritière unîversélle'J1'e t que le ''sieur d e 1
Reyrolles avoit tellement persisté dans cette Volonté pendënt
ans, qu’à sa:imort on avoit trouvé le testament dd la démôiselfel5
M aigne parmi ses papiers les plus préùieuoc.'
1 5' -'
¿11 est inutile de rappeler les moyens opposés par la datïielBe
Reyrolles à cette défetièe de la demoiselle M a ig n e , les fa itsT*61- ';
devant narrés les indiquent; et il suffit de dire qü’en déclarant lé ’^
divorce n u l, les premiers juges ne virent plus dans la dame d e ’
Reyrolles qu’une épouse restée sous la puissance m aritale, n ’ayant
pu dès - lors traiter valablement avec son époux , n i:rprendre
une qualité qu’elle n’ avoit pas. En conséquence, par jugement du
24 floréal an i 5 , le tribunal du P u y , sans s’arrêter aux fins de
non-récevoir proposées par Catherine M aigrie, déclara nul l’acte
de divorce du 28 juillet 175)3, et tout ce qui l’a précédé, de même
que le traité du 3 frimaire an 5 ; remit la dame de Reyrolles au'
même état où elle étoit avant lesdits actes ; condâmna Catherine*
M aigne, en qualité d’héritière du sieur de R eyrolles, à lui payer,
i #.
3oo fr. pour le montant de son trousseau stipulé en son contrat
de mariage du 7 novembre 1774 ; 2°* 1200 fr. pour ses bagues et
joyaux; 3“. 400 fr. pour sa pension viducllfc; 4*. à lui fournir un
logement garni et m eublé, suivant son état et Sa fortune, dans le
B 2
�( I;2 >
à qui et dans le temps de droit; j . à payer à ladite dame de.Reypi
rplles ¿l5 o° fr - P our S0D Jeuil.flt pe^uj de.s^ dwqestique; et à,l'égard
(jj^p^yemept
d o tale tribunal o r d o n n a . p a r t i e s conteste--.
rfiiei^plup amplement, et à, cet e ff& fournirpienLjeurp^tats w s«
pe^tifs, çauf débats. Les inscriptions de,la dame de Reyrolle^ furent,
HiaintepyejS jfjsqy a parfait; .payement,, et, il fu t ordonné que ledit
jùg^riiepM eroit exécuté en la fpyme de l'ordonnance nonobstant;
l’?PPçl*b nos: ■bujili .Yi ei nobpr,.
*’ ‘
C çt.te^ p n ièrç d$posit/pn^dçnx*a lieu »à lat demoiselle,Maigne de;
h ^ e r singulièrep.entjiSQn appel et $es poursuites. Impatiente de;
jQuip Sjap^eptr^vp^clle r^mfliïtra à la çour que la douairière d ’un
receveur génér^l ne pouvoi^vi^re^ayec des saisies qui arrêtaient des l
comptes extrêmement pressans, et que la trésorerie nationale la
pressait pour les rendre. L a c o jir, par son arrêt provisoire du
24 floréal an i 3 , a fait défense d’exécuter le jugement jusqu’à son
nYàtw '
ï»Vta ■'*'
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*
^pg.r^i5îs s°u,t aujourd’hui sur le point.de faire juger le fond
de la contestation, et la dame de Reyrolles attend sans inquiétude,
une décision qui ne peut être que conforme à la morale et à la
juS.^ÇC^vyi,
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T o u te la défense de la demoiselle Maigne est fondée sur ce(
paradoxe : L e mariage est une siqiple convention privée; il peut
être détruit de gré à gré par un simple acte, qui,supplée les form es'
de ta loi , ou qui en dispense.
• •
L a défense de la dame de Reyrolles est de d ire , au contraire,'-,
q u elle mariage est un lien destiné à l’union de deux fam illes,
intéressant la société entière, et ne pouvant être dissous que danaj.
la rigueur des formes légales.
Sans.jdoutc la solution de ces deux systèmes cpt écrite dans le
�{ *3 )
. . .
cœur de tous «eu*>qm:tt^äüront 'pas oublié ¿iéè'^A’incipcS1îïnrôÂ'abléi^
qui résistent au. fi'acasr*des‘ rövölutionä et à l’ébloiiiss?enienÎ des
8ystèmes.''intjb oJibel h i ^ e q é .‘ Ö ^iioib *b «r moJ » ^ b Jo ^-iuv «
b Ic i il est constant' qu ’en
77/v1^ datafté!‘d e R eyrolleV a été m artel
i n . . I_LA lès-'solennité*
A.
h l ! /■! n ( lO f >
ilO^ que^ 'CftYl
avec toutes
fcivilès" é t '‘ Mfcfeligieuseé^et
son ep'oux
n'est m ort qu’en' 'l'an^ i'ai 111 s’dgitMotìc^cl’exàm irier^i l^ 'iilanage ^
a été légalem eril dissoüs par uufTd h ô rco . M a is lar>'(liw*ii ^"ill 'îW j^
l« r oppose des fins dc'non-riécevoii*, qu’il faut bxâiîiitttir?3et‘^èsT
prétentions donnent1 lieu aux questions suivantes ^1
S ’’darri e j
de Reyrolles est-elle recevable à demander la nullité de son di'voVïc
après lai. mort de son m a ri^ e t malgré la' lo i i du 26'‘gÇi^in'dl^an
onze ?' 2*.t À u fond , le rdivorce opposé éàt-il -valable?1^ 3S P i e „
divôtee n ’a pas été:Valable , a-t-il* p ü n éaft& o in s7être validé
^
la convention particulière de là damende Reyrolles ?
kI r ' " - t'vt6' vd
wip l ì
.»Vil 1 eolqmoo
,
l«o~7
'
iv.Yiq 1‘ P(R E M I È R e T Q ’u e's t i o n .
” >ri
}n*;mf)^u[ al-îjJuoèzs D aôrrewL
,t ‘ t 6 i ftc loinoft fcc
L a dame de Reyrolles est-elle recevable à demander là 'n u llité *1
hde son divorce aprè¿¡la mort de son inari, et m a lg ré Ici toi
a'du 26 germinal an 11 ?
;,jlno!> fil 0
ftl . -* r -,
i
iloieiDr-b bnil
Sur quoi donc seroit fondée la première fin de non-recevoir?-I
sur une loi rom aine? mais elle ne s’applique pas : ne de statu
defunctorum post quinquennìtmì qùeràtur. Ici le sieur de Reyrolles
est mort en l’an 12, et il ne s’c6t pas même écoulé six mois de son
décès à' la demande.
■ C ’est encore moins le Code civil qui favoriseroit la demoiselle
Maìgne. L ’artldfc'ì 88!'porte que \i l ’époux au préjudice duquel a
» été contracté un second m ariage, peut en demander la nullité ,
» du vivant même de l’épôux'qui étôit engagé avec lui. »
L a loi ne permet donc de se pourvoir aVaht la mort de l’époux,
qu’à titre de grâce ; et il semble', par ses expressions, que c’est à
regret qu’elle y a consenti : elle laisse entrevoir le Conseil de ne pas'
user de ce consentement- ; et ce mot
qui terrible potir ainsi
aAAÂ jüul
^ 7 ®
�( i4 )
dire,échappéaà:1a, plume du logislatçur, ¿^ ¡cepen d an t de lajplus,,
gr^n^c m oralitc.jâ arr '>/■
eulq b iul on ttora s i Imfii;’Q u’est-ce en effet qu’une d e m a n d e ^ ce,genre i form ée par Té-y
poux abandonné contre l’époux coupable, si, ¡cc^ n’,êst une espèce de
dénonçiation..ouvrant le champ le plus .vasjte à,la discorde, et ren
d a n t désormais, toutp, réconciliation impossible?
Est-ce une foible épouse qui, du vivant de son m ari, osera Tapp e l e r , .devant ,les tribunaux pour lui dire : Je veux qu’on vous o^ igç
à me rester fidèle? Mais si une seule fois peut-être, dans l’anti-v
quUéj.Ja^sensible Hypparette a reconquis par un appel en justice,
la,tendresse du plus infidèle des époux, combien d’autres s'indigne-»**
roiçnt d ’être ainsi troublés dans leurs affections, et vengeroient'j
leuç amour propre par un,abandon plus éternel! C ar les homm es,
qui font les institutions, n’on.t^créé, que .la .puissance, maritale,; et
quels que soient les dons que le sçxe ait reçus de la nature en dé
dommagement de sa foible^se „ ,çe pouvoir d ’éqpilibre n'est plus
qu’un^ divinité imaginaire, quand les premières affections ont perdu
leur prestige. Malheur donc à l’épouse inconsidérée qui tenteroit dq
proclamer son abandon et de çhercljer son,époux jusque dans les
bra§ d ’une riyale !
11 est bien plus dans l’ordre qu’une femme prudente ferme les
yeux sur les torts de son époux, et qu’elle tolère son infidélité pour
espérer son inconstance : le même caprice qui l’a éloigné du lit
conjugal, peut l’y ramener repentant et fidèle. L e lien sacré du
mariage est comme l ’amour de la patrie. Cunctqs ducit, eÇ inir*
memores non sintt esse sut,
T o u t devoit faire penser à la dame de Reyroljps que son goût
pour la demoiselle Maigne ne devoit être qu’éphémère : leur lia-*
bilalion séparée , urje haine qu’ils ne dissimuloient plu s, annon-,
çoient une rupture prochaine; et sar,S lcs difficultés que le Code
civil a ajoutées au divorce, il est notoire que le sieur de Reyrolles
auroit vaincu la répugnance de divorcer une seconde fois, car il
ne cachoit ù personne qu’il n ’étoil retenu que par celte çonsideratiçu. Quoi qu’il en. soit, la daine de Reyrolles a lait ce qu’elle
�devoit^fatèe j
((!& * )'
,
„
'fjlTèlIé'a eti de l ’esp o ir, elle a g a rd é ie Silcnce'V
et quand la m ort ne lui a plus présenté qu ’une étrangère à pour
suivré^'éllé-Sï réclâïrië’Be's'dfoit^inüri10^ 3nu UP 3j
n39° B"
L a demoiselle Maigne ri’è'st pas le'prem ier héritier qüv'àit opposé que là nullité d’un divorce ne pouvoit pas être demandée contre
lui. M ais la cour de cassation a décidé le contraire Jpar arrêt du
14 "vendémiaire anf,io .
i f>Y
li:
■■o.-aïo. ->nu
L a deuxième fin7de non -recevoir‘ n ’ a pas même le hlérite de
fonder un raisonnement sur le bon sens.
' *
'»rut;
Parce que la loi transitoire du 26 germinal a dit : Tous divorces :
■prononcés, etc., auront leurs effets / o n en a conclu qu’à com pler'
dé fcétte loi il n’étoit plus possible^d’attaquei* les précédons divorces?*
«C’est-à-dire que si la veillé de la loi nouvelle un divorce‘avdit1
été prononcé sans aucunes épreuves ,fIles époux n ’en seroient pasP
moins séparés à jam ais; et c ’est ainsi qu'on fait Finjure ali légtà-P
lateur de lui prêter des pensées irréfléchies et monstrueuses. ainu^
l M àis la demoiselle M aigne n’a réussi à se faire un moyen dè là'P
loi du-a6 germinal qu’en1 tronquant entièrement l’article invoqulél3^
« T o u s divorces‘prononcés par des officiers de l ’état civ il,"6 tr('
» autorisés par jugem ent, avant la publication du titre'd ù Codef1^
» civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
» lois qui existoient avant cette publication. »
Ainsi le législateur n ’a pas commis la faute de valider ce qui étoit
nul, il a au contraire déclaré ne valider que ce que la loi existante 3
lors du divorce approuvoit expressément. Incivile erat, nisi lotâ
legeperspeeld, judicare. M aintenant que l’article entier est rétabli,
l ’objection de la demoiselle Maigne se rétorque contre elle.
D
e u x i è m e
Q
u e s t i o n
.
L e divorce du 28 ju illet iy g 3 est-il valable ?
Comment le seroit-il? il y en a trois dans un seul.
Ces trois espèces de divorces exigeoient trois sortes d’épreuves et
�(
16
)
de procédures. L e sieur de R e yro llcs, plus pressé qu’il ne dcvoit
l ’è lre , a m a l g a m a to u t , et interrompit au milieu de son cours une
p r e m i è r e procédure, pour lui en substituer une seconde qui ne s’ y
allioit pas.
L a nature de toute procédure se fixe irrévocablement par la
demande introductive. L e sieur de R eyrolles, par son exploit ori
ginaire du 24 mai 179 3, avoit form é demande en divorce, soit
pour absence depuis neuf ans, soit pour incompatibilité d’ humeur
et de caractère. Cependant le divorce est prononcé sous prétexte
de consentement mutuel.
L e divorce pouvoit être dem andé , comme cause déterminée pour
absence pendant cinq ans sans nouvelles , ou pour abandon pen
dant deux ans. ( 2\ loi du 20 septembre 179 2, § . 1 , art. 4. )
Si le sieur de Reyrolles eût voulu un divorce pour absence pen
dant cinq ans sans nouvelles, il lui falloit pour première pièce
un acte de notoriété constatant celte longue absence ( § . 2 , art. 17) :
mais sa femme étoit près de lui le 24 mai 1793.
S ’il eût voulu un divorce pour abandon pendant deux ans , il
falloit assigner sa femme devant un tribunal de famille ( art. 18 ) ,
parce que le fait d’abandon comportoit une défense justificative.
O r , il étoit constant que la dame de Reyrolles n’étoit allée à
Lim oges qu’avec l’agréncient de son mari , qu’elle y recevoit ses
lettres et une pension annuelle. Mais ce n ’est pas pour abandon que
le sieur de Reyrolles demanda le divorce : l'exploit n’en dit rien.
Pour incompatibilité d ’hum eur, le sieur de Reyrollcs avoit sa
marche tracée d ’une manière positive.
« Il convoquera une première assemblée de parcns, ou d ’amis à
» défaut de pareils , laquelle ne pourra avoir lieu qu’un mois après
») la convocation. ( § . 3 , art. 8. )
» La convocation sera faite psr l’un des officiers m unicipaux....
» L ’acte en sera signifié à l’époux défendeur. ( A rt. 9» )
» Si la conciliation n ’a pas lieu , l’assemblée se prorogera à deux
» mois , et les époux y seront ajournés. A l’expiration des deux
» m o is. . . si les représentations ne peuvent encore concilier les
époux,
�« époux.,
§e,prorogera à^trbis mois* (t Ar.U-. 10 e t - n . )
(i>) Si,^.lja, tr,bisicmGl?éançe-le(provoquant persiste , acte en sera
>tpressé. l l 9JuL>en- scip -délivré expédition >qqu’il fera signifier à
» l’époux "défendeur. » ( A rt. 12. )
;" ! *®BCÏ
„ L e sieur^de Reyrolles provoqua un divorce le 24 mai ,.sans acte
de^convocation d’un officier, municipal, j J ^iviJDiihoaiQi .obnfitnob
Il ne nomma, point 4 <r parens ; iljindiqua.seulem ent' des amis ,
sans même exprimer, cjue ce fû t à-défaut de parens.
aiioq
^ L a première assemblée eut lieu le 27, juin 1793 .11 en fut dressé
acte; mais aucune signification n’a été faite à?la dam e-de Rey-;
rp lles, parce que les moteurs craignoient que» dans l ’intervalle les
choses fussent pacifiées.
8ns p n h .intîbnéf? oaroads
Il n’y a ainsi pas eu, de divorce pour^incompatibilité d’humeur p
pas plus que pour absence. nu ,jluo-r
g o lk ^ f-»- ^b'r.j-r.a 0! i£ . nC e seroit donc lun divorce pan consentem ent m utuel qu’il faui*
droit valider.
: r»n ohatoo ou
M ais l’acte prim itif,y,est un obstacle perpétuel; oniveütcepen-:
ejant que les actes qui suiv/entaient corrigé cette première procédure.
^ La loi en exigeoit une absolument différente. : ? T^iigie^c jiollfit
s«. L e ’ mari et.la, fqmme qui demanderont conjointement le d i-j
»i^vorce, seront tenus de convoquer une assemblée de six au moins'
» des plus proches parens , ou d’amis à défaut de parens. ( §• 2 ,i
art, t " . )
» f;
•
■<{iu io '.oniiai
(>> L ’assemblée,sera convoquée à jour fixe et lieu convenu avec^
» les parens ou amis. . . . L ’acte de convocation sera <signifié par
» un huissier aux parens ou amis convoqués. ( A rt. 2. ) '*
' ' •
» Les deux époux se présenteront en personne à l’assemblée ; ils
» ,y exposeront qu’ils demandent le divorce. » ( A r t . 4. )
. L e but de la loi se remarque assez par la différence des actes
préliminaires. „ ,
. fr i f
-,vf ; c i:
o.
L ’incompatibilité pouvoit n ’avoir lieu que d e là part d’un époux:
la procédure devoit donc avoir des formes hostiles ; c’est pourquoi
U convocation devoit être réglée par un officier m u n icip al, et un
•I G
*—
�( 18 )
huissier devoit sommer répouxr défendeur do concourir à la form a
tion de l'assem blée, et d 'y com paroître.><ib al il, ooirf c iup 'nub
M ais le divorce par consentement m utuelisupposoit.dedaipart
des époux un accord préalable né d’une égale satiété’ de vivre
ensemble. L a loi vouloit donc la preuve évidente qu’ils avoient
un désir unanime de mettre fin à une cohabitation ¡insupportable ;
et de là vient que, pour éprouver l’uniformité de cette vocation,
la loi exigeoit une simultanéité dans les démarches;
i A in s i, bien loin de'se signifier par huissier une nomination de
parens , et par actes séparés , ce qui marqueroit une provocation ,
la loi a voulu que le mari et la femme indiquassent ensemble les
parens,'en les choisissant par moitié; elle a voulu qu’ils demandassent
le divorce conjointement .* ce qui exprime avec clarté que la loi ne
veut ni demandeur ni défendeur.
«i):L a demoiselle Maigne objectera-t-elle que le but est également
rempli quand l’un des époux a requis le divorce et que l’autre y a
consenti ? Mais voilà une provocation , voilà un défendeur en
divorce : ce n ’est plus une demande conjointe , et l’intention de la
loi est manquée.
Souvent l’incompatibilité d’humeur pouvoit être égale; mais la
moralité de l’Un des époux peut répugner à un remède désiré
par l’autre. T e l époux ne se résoudroit jamais à vouloir le di
vorce , q u i, provoqué par une dem ande, trouve dans sa fierté une
adhésion qui n ’étoit pas dans son cœur ; sa répugnance est vaincue
par l’idée que la loi ne lui a offert aucun moyen de résister à l’at
taque, et, dans son accord m êm e, son opinion est soulagée en se
disant qu’il n ’a point été le provocateur.
Mais pourquoi chercher l’intention de la loi quand elle est claire?
Non omnium quai à majoribus constitutn surit ratio reddi potest.
11 est encore un principe bien constant en tait de lois rigoureuses,
c’est que toutes les formalités doivent être suivies à la lettre sous
peine de nullité ; et la loi du l\ germinal an 2 a étendu cette peine
à l'inobservation des formes prescrites par toutes les lois rendues
depuis 1789.
�( * 9 )
C e serolt donc s'abuser étrangement que de voir dans la procé
dure qui a précédé le divorceiprononcé le 28 juillet 1793 ¿lies actes
préliminaires d ’un, divorce*par consentement mutuel.
.icl-fl
Non - seulement r. cette* procédure n ’est pas conforme à la l o i ,
mais le sieur de R cyrollesja donné un autre nom au divorce par
lui demandé.i II a requis seul le divorce ; et si sa femme a répondu
par un second acte qu’i l n ’avoit fait que prévenir ses intentions,
elle n ’a pas pour cela changé la nature d’une dem ande, tellement
indélébile qu’elleine comportoit ni opposition ,r<ni débats , ,ni ju
gement.
eimpr
Lors de l’assemblée , la dame de Reyrolles ne parolt .encore que
pour répondre ; elle ne requiert pas le divorce , elle veut seulement
suivre la volonté de son mari. A u lieu de demander conjointement
le divorce, elle donne les mains à la demande, ¿/son m a r i y persiste.
Alors le mari persiste ; donc c’est lui seul qui veut le divorce ,
c’est lui seul qui le provoque et qui le consomme.
¡min
Voilà cependant ce que l ’officier public , dans l’oubli dejses
devoirs , a reçu comme les épreuves suffisantes d’un divorce.-.. >y-ib
U n divorce commencé pour incompatibilité d ’humeur exigeait
une toule d’actes et de longs délais ; cet officier public s’est contenté
d ’un seul acte et de trente-trois jours de délai.
... ext’
C ’est donc ainsi que la sainteté du mariage auroit été mise à la
merci de l’arbitraire ou du caprice , pour ne rien dire de plus.
Mais il seroit insensé de justifier cette procédure dans ses délais
etdanssa forme; elle a péché encore par une irrégularité non moins
grande. L e sieur de Reyrolles semble avoir voulu esquiver les repré
sentations de sa fam ille, car il n’a appelé aucun de ses parons à
son divorce.
Ici encore la loi a marqué entre les doux procédures une dif
férence notable. Pour l’incompatibilité d ’h u m eu r, il suffisoit de
parens ou amis ; mais pour le consentement m u tu el, la loi a voulu
la convocation des plus proches parens.
S i , comme veut le dire la demoiselle Maigne , il eut été égal
d’avoir des am is, c ’étoit inutilement que lu loi étoit plus exigeante
C 2
�!
i
( 20 )
pour le consentement mutuel. M ais , sans raisonner plus long-temps
sur un point déjà trop évident , il suffit de remarquer que la loi
ne vouloit des àtttis q u 'à défaut de parens.? S & sa .
w i c r ’' !
Oseroit-on. supposer qu’à Brioude le sieur de Reyrolles n ’avoit
pas de parens? cela est aisé à démentir : mais si cela eût été
vrai , il falloit au moins l'exprimer. T o u t acte de formalité doit por
ter avec lui-même la preuve que celte formalité a été'rcm plie. Déjà
la cour d’ap p el, dans une cause sem blable, a annullé un divorce
entre des habitans deR iom , par arrêt du 26 pluviôse an 10 , sur le
m o tif que les actes n’exprimoient pas que des amis n ’eusSent été
appelés qu’à défaut de parens.
Que signifie même cet acte si précipité, qu’on dénomme si impro
prement un acte de divorce? L ’officier public, de sa pleine puissance,
y dissout un contrat de mariage passé devant Couguetet Héraud ,
notaivés , le 7 novembre 1774* Mais jamais on n ’a ouï dire que ce
fût le contrat notarié qui donnât l’état civil aux époux, et consti
tuât le mariage. A vant 1792, l’église donnoit tout à la fois l ’état
civil et le sacrement ; le mariage ne tenoit son essence que de la
célébration. Or , ce n’est pas l’acte de célébration du 8 novembre
qui a été dissous, mais un simple contrat privé, réglant des affaires
d’intérêt, et totalement incapable d’opérer un mariage.
Enfin , la loi du 20 septembre a exigé que « tous actes de divorce
» fussent sujets aux mêmes formalités d’enregistrement et de publi» cation que l'étoient les jugemens de séparation » ( §. 5 , art. 1 1 . )
O r , le divorce opposé ne paroit pas même avoir été enregistré.
On avoitobjectéà Iadame de Reyrolles qu’elle-même avoit assigné
pour la prononciation du divorce. Elle ignore si aucun exploit
existe, car elle n ’en a jamais donné l’ordre ; m ais, quand on supposcroit le contraire, prétendroit-on sérieusement qu’une défende
resse en divorce a pu provoquer à son tour un divorce par con
sentement mutuel ?
U n exploit après le changement de formalités auroit rétabli la
procédure pour incompatibilité d ’humeur , et cet exploit même
seroit une nullité de plus.
�C 2 1 .0
s ,,; “ '" t W ' Î s ' ! ï m e
<[j; oupicm -t sb Jiliiia ;i
U E S T I
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Tî.
S i le divorce n'a pas été valable, a-t-il pu néanmoins elre valide
,l par une convention particulière de la dame de Reyrolles? '
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.ru ■ii n
_
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t;'
U n contrat qui n ’intéresse que les deux parties peut sans doute
ne dépendre que d ’elles seules, et alors il est rompu aussitôjL qu’elles
.en. ont exprimé ^ „vo lo n té..
:Ji.
rJi
Mais un contrat qui intéresse la société entière ne peut se dis- .
soudre que par des actes publics et authentiques, et dans les fornies^
rigoureusement exigées. Cette différence est sensible, et tient à la
nature du contrat de mariage.
n
Oser dire,qu’il est un simple contrat privé n ’est qu’une hérésie^
insoutenable; elle est condamnée par toutes nos lois ; et les ^°"-^
mains eux-mêm es, qui cependant admettaient la répudiation et
.divorce, nous ont transmis les idées grandes et nobles qu’ils avoient ^
sur l’importance çlu mariage.
, n.
,
,
« Parmi toutes les institutions hum aines, a dit Justinien, rien^
» n’est si sacré et si important que le mariage, car c’est par lui que
» sc forme la suite des génératioiis; c’est par lui que se peuplent
» les régions et que les cités fleurissent : il est le conservateur de^
» la république et la source de sa prospérité. »
N ihil in rebus mortalibus perindé 'venerandum est atque matrimonium : quippeecc quo liberi , omnisque deinceps sobolis sériés
existâ t} qnod regiones atque civitates fréquenter reddat, undè
denique reipublicœ coaugmentatio fia t. ( N ovell. i/jo. )
T o u t ce qui lenoit au mariage participoit chez les Romains de
cette considération. Les dots étoieut aussi considérées comme objet
d’intérêt public : Ileipublicœ interest dotes mtdieram salvas esse.
L e divorce avoit aussi mérité l’atlention du législateur; il en
déterm inoitlcs form es, et exigeoit l’avis de la famille et la présence
de sept témoins, afin que leur nom bre, leur influence et leurs représentalipns fussent un frein ù la rupture du mariage, ( jf . D e
divortius et repudiiis. )
�iSV.El si
formes n ’étoient pas exactement suivies, le divorce étoit
radicalement nul : Nidlum divortium ralwn est. ( L . 9 . eod. ) *
3»
■cetlemullité n ’aüroit pas été textuelle, elle eût été pro
noncée' par la loi qui portoit que toutes[lés conventions faites contre
le'droit civil, contra juris civilis régulas t étoient nulles de plein
droit, etUic produisoient aucune action. ( L . 28, f f . D e pactis.)
\s' O r, il n?étoit pas douteux que la form e de dissolution du mariage
ne fû t réglée par le droit civil : Jure civili dissolvere solet matri-ntoninmM^ L . 1 1 , f f . D e divort. et rep. )
l e s
Q
u
a
n
d
D ’autres lois disent expressément que tout ce qui tient à l’état
des hommes n’est pas en leur pouvoir, parce qu’on ne peut changer
la condition des personnes : Status hominis ■vel conditio personarum mutari non potest. ( L . liheros, c. D e lib. c .)
ob Sans- doute ces principes suffiroient pour établir qu’un divorce
n ’est pas susceptible d’être validé par des conventions particulières;
et ilirésisteroit d’ailleurs au bon sens que la loi eût exigé des formes
rigoureuses, et que cependant elle eût permis aux époux de s’en
dispenser indirectement.
tr
'ii M ais la loi, après avoir exprimé scrupuleusement les formes à suivre
?pour le divorce, avoit aussi prévu que des époux trop peu attachés
à son observation pourroient se permettre des traités pour valider ce
qu’elle ne valide pas; et, par une prévoyance très-conséquente, elle
repousse ces conventions illégales, et les déclare radicalement nulles.
Pactiones sanè si quæ adversus prœsentia scita nostrœ majestatis fuerint attenlatœ, tanquam legibus contrarias nullam liabere ■vohtrnus fimiitatem. ( L . 8 , code D e repudiis. )
Ainsi la question est disertement jugée par la loi elle-même.
Si un divorce n’a pas été légalement fa it, les époux ne peuvent
ensuite le valider par aucune convention.
'
Sans doute la demoiselle Maigne ne prétendra pas que ces prin
cipes soient combattus par aucune loi française. On dem ande,
dit Vinnius, s’il est permis de transiger sur la validité des mariages:
oui, répond-il, s’il s’ngil de valider le mariage : Ut sponsa manval sponsa, placcl Iransaclionem valcrc; mais la transaction est
�(
23 )
absolument n u lle , s’il s?agit de relâcher le lien’ du mariage. ( P in n .
D e trans. ) ,v\ )
«\v\Y&rc u\ui'
■
'
1tj 11 ■*'' fP
L a demoiselle M aigne t opposera-t-elle la loi du 20 septembre
1792. M ais quelle, que fù tll’opinion du tem ps, elle n ’y trouvera
rien de favorable à son système. « L a dissolubilité spontanée du
» m ariage, disoit lis rapporteur de celte l o i , la liberté d en con» tracter un second , après un premier qui ne seroil pas légalem ent
» rom pu, seroit une liberté immorale et impolitique. »
Aussi la loi du 20 septembre s’exprime-t-elle d’une manière 1resconforme aux principes enseignés par les lois romaines. :iui
« L e mariage est dissous par le divorce légalement prononcé.
)> Les époux ne peuvent contracter un second mariage qu’apres
)) que le premier aura été dissous conformément aux lois. » mv
j: Que la demoiselle M aigne ne se dissimule pas toutejla force de
l’expression ne peuvent. T outes les fo is, dit Dum oulin , qu’elle se
trouve dans les lois de rigueur, elle marque la plus forte des prohi
bitions ; elle ôte la puissance de droit et de fait , et a le même
résultat que l’impossibilité absolue.
n (nii
Il en résulte donc que la demoiselle M aigne n ’a jamais pu être
l’épouse du sieur de Reyrolles , dès que son divorce n ’a pas été
fait conformément aux lois.
L e Code civil répète ces dispositions de la loi du 20 septembre.
Rien n’est plus c la ir , et il est difficile d’y voir que si le divorce
n’est pas légalement prononcé, on pourra dissoudre le m a r i a g e par
des conventions particulières.
D ’ailleurs , suivant le Code civil , il faut pour la validité d une
convention, 1“. la capacité de contracter, 2°. une cause licite dans
l’obligation. ( A rt. 1108. ) O r, suivant l’art. 11 2/,, la femme mariée
est incapable de contracter elle-même ; e t , d’après l’art. 1 i5 3 , la
cause est illicite quand elle est prohibée par la l o i , ou contraire à
l’ordre public.
Se départir de son étal civil est sans doute la plus grande dis
position qu’une femme mariée puisse faire; et cependant <Ile n’a
Tas la capacité de faire des dispositions bien moindres. Com m ent
�(, 24 )
t r a i t e r o i t - e l l e librem ent avec son m a r i , à qui elle doit obéissance,
et qu’elle est obligée de suivre partout où il juge à propos de ré- sider? ( A r t . a i 5 et 2 i 4 * ) q ne 'n .. \ii
Ui
L e mari lui-même , chef de la puissance maritale , ne peut y
x déroger et s’en départir par une convention. ( A rt. i 388 . ) C om , m ent donc concevoir que le mariage soit dépendant d’une transac
tion , quand la puissance maritale n ’en seroit pas susceptible, elle
g qui n ’est cependant qu’un effet ou une émanation du m ariage?
t. Jusqu’ici la dame de Reyrolles a supposé un traité sur la vali
dité de son divorce; e t , dans ce cas m êm e, il est évident qu’un
: traité seroit nul : mais il n ’en existe d ’aucune espèce ; et ce que la
»demoiselle Maigne appelle à son secours , est seulement une appro
bation du divorce , résultante du traité de l’an 5 et de quelques
Ê'exploits; io
ar <usb L a dame de Reyrollea, objecte la demoiselle M aigne, s’est donnée
¿plusieurs fois la qualité de fem m e divorcée: donc elle a approuvé,
s (elle a ratifié, elle a validé son acte de divorce.
•Ji<> Ge qu’on n ’oseroit pas dire pour l’acte du plus mince in térêt, la
demoiselle Maigne le propose avec assurance pour une dissolution
de< mariage.
• M ais peut-on s’imprimer une qualité qu’on n’a p a s, et perdre
■par un seul mot son état civil ? Un mineur cesse-t-il de l’êtreen
se disant majeur? et un époux, en se disant veuf, cesseroit-il d’être
engagé dans les liens du mariage?
L ’exécution d’un acte n u l, dit M . Cochin dans son 37*. plai
d o y e r, n ’en a jamais opéré la ratification; c a r , dans les cas où
la loi donne dix ans pour réclam er, si chaque acte d ’exécution
opère une ratification , il faudroit dire que la loi n ’a accordé aucun
délai ; et au contraire tout le monde sait qu’il ne faut considérer que
l’acte nul , et compter pour rien son exécution.
D e même , la dame de Reyrolles ayant coopéré par sa signature
à un premier acte n u l, c ’est-à-dire , à son d iv o rce, tout ce qu’elle
a fait ensuite n’en a été que l’exécution.
11 falloit qu’elle réclamât ou exécutât. M ais, étant en puissance
maritale ,
�( * 5 )
m aritale, elle avoit au moins dix ans pour réclamér à compter du
décès de. son mari : jusque-là ellç éto ird o n c forcée d’exécuter un
divorce n u l, car son intérêt n’étoit pas de réclamer , de peur que
son mari ne divorçât une seconde fois plus régulièrement.
Sans doute la restitution de sa dot étoit la première execution
du divorce ; et on a vu comment elle fut forcée par des offres à
traiter pour ce que voulut le sieur de Reyrolles. L e c o m p t e d'ins
truction qu’il lui devoit comme m andataire, pour avoir touché des
droits successifs inconnus, exigeoit d ’après les lois un détail qu’il n’a
pas donné; et quand cette partie de la cause , pendante encore de
vant les premiers juges , sera remise en discussion , la dame de
Reyrolles prouvera l’abus évident de la puissance m aritale, et le
tort considérable qui lui a été fait.
!
L a dame de Reyrolles n’a point traité sur son divorce : elle n’ a
fait que l'exécuter par contrainte. Pour exister , elle fut obligée de
form er quelques demandes ; et sans doute pour la régularité des
exploits, ne pouvant se dire’ autorisée du sieur de R eyro lles, elle
étoit forcée de se dire divorcée pour recevoir ce qu’elle demandoit.
n Mais toutes les fois que cette qualité n’étoit pas de form e néces
saire , la dame de Reyrolles s’abstenoit de la prendre ; elle peut
représenter plus de soixante actes où elle ne se l’est pas donnée ;
elle a meme prouvé, par les registres de son m a ri, qu’il n ’a pas
cessé de lui donner par écrit le nom de Floral-Reyrolles après le
prétendu divorce.
L exécution d’un acte n u l, on le répète, n ’a jamais produit une
ratification ; et le Code civil a fait aujourd’hui une loi du célèbre
passage de Dum oulin sur cette matière. « L a ratification d ’une
» obligation contre laquelle la loi admet l’action en nullité ou en
» rescision , n ’est valable que lorsqu’on y trouve la substance de
» cette obligation, la mention du m otif de l’action en rescision
» et l’intention de réparer le vice sur lequel cette action est fondée. »
( A rt. i 338 . )
Une donation nulle ne peut même être ratifiée : il faut la refaire
en forme légale . (A r t. jojçj. ) U n divorce auroit-il moins intéressé
D
�( 26?
le législateur? et pensera-t-on qu’il fût plutôt susceptible d’une
simple ratification?
jurisprudence ne s'est jamais écartée de ces principes. Un
L
a
’
jugement a été cassé le
messidor an 4 , parce que des quittances
données en viduité avoient été réputées ratification d’une vente de
bien dotal en coutume d’A uvergne, « attendu que les formalités
» n’ ont pas été remplies, et que l’ exécution pendant plusieurs
» années du traité du ...... n’ a pu valider un acte nul dans son
» principe. »
Cependant la demoiselle Maigne insiste, et il lui semble que tous
les principes qu’on vient de lui rappeler ont été renversés par un
arrêt récent de la cour de cassation, qui a jugé en tlièse, dit-elle,
que le mariage et le divorce ne sont plus des contrats d’ordre publie,
et qu’on est non recevable à 'demander la nullité d’un divorce quand
on l ’a approuvé par des actes subséquens.
Mais ce n ’est là qu’une calomnie de la demoiselle Maigne contre
la cour de cassation , qui ne peut être sérieusement accusée d’un
tel paradoxe. II n’étoit question devant elle que d’un divorce va
lable, d ès-lo rs la cause n’est plus la même.
Cependant un arrêt de cassation est une arme trop puissante
pour qu’il suffise de ne se défendre contr’elle qu’avec cette seule in
dication. L a dame de Reyrolles va en rappeler l’espèce précise, et
il sera aise de voir que la demoiselle M aigne a voulu seulement
abuser de quelques expressions fugitives et ambiguës d’un arrêt de
circonstance.
« L e sieur B ocliler, après avoir reconnu dans plusieurs contrats
» la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cependant
» tenté de le faire annuller par justice.
» C elle-ci, en repoussant les nullités, opposoit d ’ailleurs et pé» rcinptoircmenl que son ci-d eva n t mari étoit non recevable >
» attendu qu’il avoit reconnu la validité du divorce.
» A rrêt de la cour d ’appel séante à T rê v e s, qui admet la fin de
n non-recevoir ; attendu que les moyens de nullité étoient sans
» fondement ; et encore, attendu que le mari a pu et voulu renoncer
�( 27 )
» au droit qu’ il avoit de pontes ter les effets civils du divorce de aon
» épouse.
Boni1 ■
’
“
i> Pourvoi en cassation, pour contravention à l’article 6 du Code
« c iv il.
'pooiiK, , ...
.«■
3'
>5 '» L e demandeur soutenoit qu’une convention „tendante à lairc,
» valoir un acte de divorce n u l, seroit contraire à l’ordre public,
» et aux bonnes mœurs ; qu’ain si, en supposant le tait de recon« noissance ou consentement par le m ari, la cour d’appel n auro.it,
» pu conclure, en point de d ro it, que par la force de cette çon» vention le divorce fû t devenu inattaquable.
,ncbn "
» A r r ê t . — Attendu qu’en ajoutant à la considération de là non
» application des lois invoquées par le demandeur a u x , .actes pars
» lui attaqués, celle de l’approbation par lui donnée h la régulant^
»- de ces actes, et même celle de la reconnoissance par lui faitç.d_an$9
» d’autres actes publics de sa qualité de fem m e divorcée, à cell^j
n qui a fait prononcer le divorce d ’avec lu i, la cour d’appel n a
» pas violé l’art. 6 du Code civil, q u i, défendant de déroger,par.
» des conventions particulières a Vordre public et aux bopyqfy
» mœurs, et bornant sa défense à ce qui concerne ces objets d ’in»' térêt public, a voulu permettre l’effet des reconnoissancçs,ct cc^ui
» des transactions sur Vintérêt civil et privé ; ce qu’il a formelle-;.
» ment exprimé dans Fart. 2046, et ce que la loi transitoire do.
» floréal an 11 a spécialement appliqué au divorce.
» La cour rejette.
» D u 24 pluviôse an i 3 . — Section des requêtes. »
( Sircj', an 1 5 , pag. 2 25. )
Combien de différences notables entre cet r.rrêt et la cause!
Après un divorce demandé et obtenu par une femme , c’est le
mari qui, n’étant sous la puissance de personne, fait des conven
tions sur ce divorce.
Il traite librem ent; il n’est pas incapable.
11 traite sur les inlérdts civils du divorce.
11 ne traite pas seulement sur la suite du divorce, mais il reconnoit par plusieurs actes la 'validité du divorce.
D a
�( »8?) )
En
p la id a n t
jfil ne peut pas m êm e prouver que le divorce ait été-
nul d’aucune n u llité. ! »Myin /I olfoeiomob c l 9rnmo 3 àbioàb seq îaa '8
L a c o u r d’appel en effet ne se décide que par ce m otifif: q
En cassation, l'époux n ’essaye pas même encore de prétendre que
son divorce est n u l, et il se borne à une dissertation polémique
s u r l’effet de la ratification qu’il a donnée. >
noi
p
A insi la position de la question n’étoit pas de savoir s’il avoitr.
pustransiger sur un divorce n u l, mais s’il pouvoit faire rescinder
un traité relatif aux intérêts civils, par cela seul qu’il avoit aussi
transigé sur la validité du divorce.
C ’est donc encore le fait qui a décidé la cour de cassation ; et/n
si ses motifs donnent à méditer sur leur sens, il n’en résulte qu’une >
plus grande conviction qu’elle a clairement distingué ce qui tcnoit
à l’ ordre public et à Vintérêt civil et privé, et qu’elle ne s’est dé- \\>
cidée à juger aussi Je sieur Boehler non recevable, qu’en ce que, le
divorce étant valable, ses traités étoient étrangers à l’ordre public.
L e m otif pris de l’art. 2046 du Code le prouve. 11 porte qu’on
peut traiter sur l’intérêt privé résultant d’un délit. O n n ’est doncrd
pas libre de traiter aussi pour l’intérêt de la société.
E t comme une femme ne peut pas être épouse respectivement
au corps social, et divorcée pour sa fam ille et pour elle-m êm e,
il en résulte qu’elle peut bien traiter pour son intérêt privé, mais
seulement après que l’ ordre social n’ a plus d’ intérêt; c’est-à-dire,
quand son divorce a été consommé conformément aux lois.
L ’arrêt de cassation est donc b h n loin d’être favorable à la de
moiselle M aigne, qui ne peut pas exciper d’un divorce légal, après
lequel sans doute la dame de Reyrolles eût pu traiter sur les intérêts
civils résultans de son mariage.
L a demoiselle M aigne , en citant cet a rrê t, a prétendu , avec
le rédacteur, que l’article G du titre préliminaire du Code ne porte
qu’une prohibition obscure et incertaine, qui ne peut s’appliquer
à la cause, parce que les traités sur les divorces 11e sont pas d ’ordre
public.
Il est vrai que ce rédacteur propose cette obscurité, seulement
�commoiun-doute;»mais il termine de maniéré à prouver qu i! ne
s’est pas décidé comme la demoiselle M aigne l’entend, onuaur, !• \v\s\
Cependant sa.première application semble fautive j car en (rédui
sant la définition? d'ordre public ù ce qui concerne l’état de la
république-, quodadstatum reipublicce pertinet, il n’ appas remar-joe
qué que l’expression jus publicum étoit alternativement employee uô
parties lois romaines pour le droit public et pour l’ ordre public;
ce qui comporte encore une nuance nécessaire à distinguer, com m eaq
on peut le prouverJpar des exemples.
¡JbI-.
:-'ü
nu
Lorsqu’avant les novelles , la défense de distraire lai_falcidie it
n’éloit pas permise, si un testateur avoit voulu en prescrire la dis
traction , à peine par son héritier de payer une somme aux léga-, 12
taires, cette disposition étoit déclarée nulle, comme contraire^au lq
droit public , et toute action étoit déniée aux légataires
&
Cependant une telle nullité n’intéressoit aucunement Vétat\de la.hd
république.
..
o io y ib
Si en donnant la dot au mari on avoit stipulé qu’il ne contribueroit pas aux frais d’inhumation que la loi mettoit à la chargeaq
de la dot, celui qui avoit payé ces frais n ’en avoit pas moins unesq
action en répétition contre le m ari, et il ne pouvoit pas opposer sa
stipulation , parce que la loi la déclaroit nulle et attentatoire auüt
droit public (2)... Cependant encore l’état de la république étoit
fort étranger à cette convention.
.110
____________________ __________________________________ l:
(1) Frater curn hceredem sororem scriberet, et alinm ab eà, oui donattim %>olebat, j tipulnri curavit ne falcidià uCeretur , et ut certain pecurtiam , si contrd fecisset , preestare , privatorum cautions legibus non esse
refragandum conslitit et ideo sororem
rétention habi
ta ram , et actionem ex stipulant denegandam. ( L. i 5 ,ff. A d leg.falc. )
:
j u
r e
v u h l i c o
<■ m
(a) Neralitis queerit si is (/ni dotent dederat pro muliere , stipulatus
est.... Ne qtiid maritus in fanus conferret, an fitneraiia maritus leneatur>
et ait... Si alius funeravit, posse eum maritum convenire, quia pacto hoo
*us ruiiu cu ii infringi non possit. (L . 20 ,ff. De relig. et sumpt.)
�( 30 )
• Ccs dJspófcitioTiá n ’étoient donc que d'ordre public? et la loi ne
v o u lo il' >á¿ qti’elles pussent êtie é lu d a s1 par des conventions partic id U 'r e s ^
Cotnm ent donc seroit-il proposable de'supposer à la
Volubition' de dissoudre le mariage!, un moindre intérêt d ’ordre
piibÚc? et au lieu de se jeter dans ^application vague de la loi 6 ,
cod . D e petetis ; ' cl de l’art. 6 du C o d e, comment ne pas trouver
une' nullité radicale aux divorces faits' sans toutes les formalités ,1
quand la loi a dit : Nnllum ratum est divortium, n isi, etc.? com
ment ne pas trouver une nullité radicale dans les conventions sur
les divorces, quand la loi a dit : Pactiones mdlam habere vohnnus
Jirmitatem, tanquam legibus contrarias? enfin, comment ne pas
voir'urie disposition prohibitive et irritante dans la loi du 20 sep
tem bre, quand elle dit qu’un second mariage ne peut être contracté
qu'après un divorce IdgaH
■
' ' ~
Quand les lois sont si claires, comment sero it-il possible de
penser' qu’une femme, à qui un divorce illégal n ’a pas ôté la qua
lité de femme mariée, ait pu s’en priver elle-m êm e en se disant
divorcée, et en ne transigeant pas même sur la validité du divorce
qii’on lui oppose?
•
-îo
Que reste-t-il donc à la demoiselle M aign e, si ce n’est de faire
diversion à la cause par la naissance d’un enfant, survenue, dit-elle,
long-temps après le divorce? Mais d’abord elle est convenue que la
date donnée à cette naissance étoit une erreur. Que n’avouoit-elle
avec la même franchise les circonstances explicatives dont elle étoit
mieux informée encore. On verroit qu’un époux chancelant entre'
une épouse et sa rivale, déterminé à fixer son irrésolution par un
retour à ses devoirs , en est tout à coup détourné par une séduc
tion toujours active ; habitare fa cit sterilem in domo , et la mcie
de ses onfans, repoussée comme une vile e sc la ^ , est obligée de cédcr
ù une étrangère lea honneurs du lit conjugal.
Eh ! qu'importe à la demoiselle Maigne cette naissance; est-ce
bien à elle à scruter la conduite d’une épouse ? Si cette conduite
étoit blâm able, cet adultère qu’elle proclame ne seroit-il pas
�son propre ouvrage? n ’eil porteroit - elle pas le poids éternel?
Mais il1ne s’agit point ici de la naissance d’un entant; il suffit
à la darne de Reyrolles de déclarer qu’elle n’a point à en rougir,
et qu’elle est à même|de présenter des témoignages non équivoques
pour sa justification. L e fait de celte naissance n’est ici employé
que comme moyen de la cau se, et parce que la qualité de ienune
divorcée y est donnée à la dame de Reyrolles. M ais ne seroit—il
pas bizarre q u e , dans la commune où un divorce a été prononcé,
l’officier public eût lui-même rendu à la femme la qualité d’épouse?
L ’objection est donc absolument nulle , et rentre d’ailleurs dans la
discussion précédente, où elle Irouve sa réponse.
Ainsi s’évanouissent tous les moyens de la demoiselle M aigne,^
et se justifie la décision des premiers juges. (|[~.
^
L e nom de veuve du sieur de Reyrolles lui est ôté , mais_(jl lui^.
en reste la fortune. L a dame de Reyrolles se borne à vouloir, çe
qui lui appartient , d ’après son contrat de mariage. N ’est-ce pas
assez qu’elle soit réduite à le demander à la demoiselle Maigne ;
qu’après vingt-neuf ans de mariage elle ait quelque chose à lui
envier , et que le sort de l’une et de l’ autre soit aujourd’hui si
différent?
T T
‘
'
Une réglé de droit a prévu ces caprices de la fo rtu n e ,e l le yœuj
du législateur n ’a pas balancé : M elius estfavere repetitioni quam
cidventitio lucro. L e sort des parties seroit écrit dans cette loi
seule , s’il n’étoit déjà réglé par des principes d’une plus haute
importance.
A u x yeux de la morale et de l’opinion, l’intimée ne cessera pas
d ’être la veuve de R eyrolles; elle le sera de même aux yeu x de la
co u r, puisque les lois ne réputent pas son mariage dissous. L a
demoiselle Maigne ne laissant pas de postérité, il ne s’agit point
ici du danger d’ôter un état civil à des enfans nés dans la bonne
foi. A in si, les principes demeurent dans toute leur force , et ne
sont vaincus par aucune considération. L a demoiselle Maigne est
réduite à des fins de non-rccevoir. Mais que signifient de misérables
�( 3 2 )
subterfuges dans une cause de cette nature ? Les magistrats n’y
verront qu’un mariage ou un d ivorce, c’e s t - à - d ir e , un objet
majeur et d ’ordre public. Alors disparoitront les personnes, l’in
térêt seul de la société sera mis en balance, et l’arrêt de la cour
sera tout à la fois une leçon de morale et un monument de juris
prudence.
Signé F L O R A T ,
veuve D E R E Y R O L L E S .
M e D E L A P C H I E R , avocat.
M e C R O I Z I E R , licencie avoué
A R IO M , de l’imprimerie de L a n d r io t, seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Frim aire an 1 4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Croizier
Subject
The topic of the resource
divorces
assignats
substitution de testaments
Description
An account of the resource
Mémoire Pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée; Contre Catherine Maigne, se disant aussi veuve dudit sieur de Reyrolles , appelante.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1774-Circa An 4
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0706
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0309
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53901/BCU_Factums_M0706.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Brioude (43040)
Rights
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assignats
divorces
substitution de testaments
-
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80142ad5415dd8a62905afc679226b11
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Text
iß» «
MÉMOIRE EN RÉPONSE
TRIBUNAL
d’appel,
séant à Riom.
P O U R
Sect. II.
Ch
a r l e s
- L
o u i s
JOUV E - L A D E V EZE,
négociant, habitant de la ville du P u y , appelant
et demandeur en opposition
C O N T R E
,
-
Jean -F ra n ço is-X a v ier,P ierre
J e a n n e - M a r i e et J o s é p h in e J O U V E
L A D E V È Z E frères et sœurs et J e a n
B a p t i s t e B L A N C , mari de J o s é p h in e ,
de lui autorisée, habitans de la même ville, in
limés et défendeurs en opposition.
,
,
L ' A p p e l su r le q u e l il s’a g ît de p r o n o n c e r , em brasse
q u atre o b je ts , d o n t trois sero n t discutés en p eu de m o ts;
le q u a triè m e p résen te d e u x q u estion s q u i consistent à
sa v o ir :
A
|
�i°. S i une donation contractuelle fa it e en faveur
d’un neveu , ou à un ou plusieurs des enfans qui seront
procréés du m ariage, toutefois au choix du donateur,
renferme une substitution Jîdéi-commissaire- en ¿faveur
des e/ifans.
2°. S i la particule disjonctiçe ou a pu être convertie
en la conjonctive e t , afin de créer par ce m oyen,
une substitution dans le contrat de mariage.
Avant de se livrer à l’examen de ces questions, il
est important de donner une connoissance exacte de
quelques faits qui se sont passes dans la famille des par
tie s , et des contestations qui se sont élevées entre elles.
■i v •
F A I T S .
D u mariage d’Hugues d’Avignon avec Marguerite
Planchette, issurent Marguerite et Magdeleine d’Avignon.
L a première fille ne fut point mariée, et la seconde
épousa Jacques Sabatier : de ce mariage issut MarieMagdeleine Sabatier * qui étoit. propriétaire du jardin,
dont partie fait l’un des principaux objets de la cause.
~ En 1688 , Marguerite d’Avignon fit une donation de
tous ses biens, en faveur de Marie-Magdeleine Sabatier,
sa nièce: Marguerite d’Avignon élant décédée en 1691 ,
sa donataire se mit en possession du jardin. Ce fait ne
sera pas contredit : la preuve en est d’ailleurs consi
gnée dans dillerens actes, dont l’appelant ofiïe la com
munication.
Marie-Magdeleinc Sabatier avoit épousé André-Vilal
Jouve-Lat)evèze} ils eureut trois enfans, André , Charles
�£ 5/
( 3
)
et Vital Jouve-Ladevèse : Charles embrassa l’état ecclé
siastique.
L e 20 octobre 1704, Vital Jouve -Ladevèze ayant
épousé Marie Bordet de B rives, M arie- Magdeleine
Sabatier, sa m ère, qui étoit alors veuve, lui fit dona
tion de la moitié de tous ses biens meubles et immeu
bles, noms, droits et actions, présens et à venir; eu cas
d’incompatibilité, elle s’obligea à lui délaisser la jouis
sance d’une maison, et à lui délivrer annuellement trois
setiers de b lé , et six charges de f r u i t de son verger.
C ’est le jardin-verger dont il s'agit, puisque la donatrice
n’en avoit point d’autre.
A u moyen de cette donation, il est évident que Vital
Jouve-Ladevèze devînt propriétaire de la moitié de ce
jardin.
.
•
Il n’y eut qu’un enfant du mariage de Vital JouveLadevèze avec Marie Bordet de Brives: Jean -G abriel
Jouve-Ladevèze.
En 1731 , il s’éleva entre les consuls de la ville du
P u y et Jean-Gabriel Jouve-Ladevèze, unique héritier
de ses père et m ère, la question de savoir si ce jardin
étoit allodial : cette question donna lieu à un procès
tres-considérable en la ci-devant cour des aides de Mont
pellier j et après différentes vérifications et deux arrêts,
il en fut rendu un troisième, le 4 décembre i 7 3 4 >
déclara définitivement ce jardin noble, ordonna qu’il
seroit rayé du nouveau com poix de la ville du P u y ,
et fit défense aux consuls de l y comprendre ù l’avenir.
Jean-Gabriel Jouve-Ladevèze fut seul partie dans ce
procès ; ce qui doit faire croire qu’il étoit seul propriéA z
�X *
-
C4 )
.
,
taire du jardin. On ne plaide pas en son nom pour le
fait d’autrui. Un bienfait de la part de Charles- Jouve*
Ladevèze, prêtre, a néanmoins fait taaîtte un doute sur
le point de" savoir si Jean -G abriel J o iive- Ladevèze
avoit la propriété entière de ce jardin, comme elle lui
paroissoit assurée parles trois arrêts de la cour des aides
de M ontpellier, ou s’il n’en avoit qu’une, moitié d’après
la donation insérée dans le contrat de mariage de Vital
J o u v e , son père. Ce doute prend sa source daus le pre-;
mier contrat de mariage de Jean - Gabriel Joûve La»'
devèze.
*
L e 23 février 1737? Jean -G ab riel Jo u ve-L a d evèze
épousa en premières noces, Marie-Gabrielle Laurerison,
qui eut pour dot une somme de 7,000 liv. C’est dans.
ce contrat que les intimés ont cru trouver la preuveque la totalité de ce jardin appartenoit au prêtre L ad e
vèze, et apercevoir une ¡substitution lidéi-commissaire,
en faveur de leur p è re , qui étoit l’un deâ erifans Is'ôüs
de ce mariage ; la clause est aiinsi conçue i ' l c ■’
En fa v e u r dudit màriàge, ledit sieur Charles Jouve
de Ladevèze y ( prêtre ) , a donné et cédé dès à présent,
par donation fa ite entre-vifs, pure , parfaite et irré
vocable, audit sieur Jea n -G a briel Jouve de Ladevèze j
son n eveu, f u t u r ép o u x, àcceptant, et hum bitniéni
rem erciant, tous les droits et prétôhiiéns qu iÙpbuÿoit
avoir sur les biens desdits défunts sieur V ità l Jouve
de Làdevèze et M arie Bordet de B riv es, père ut tnèra'
dudit sieur f u t u r époux , ç n q u ç i que Je tout co n siste
et'puisse consister y..déclarant le}dits sièùrs de L a d evtfzè \ oncle t at neveu, que ïesdils droits et prétehtions
�c i - d e s s u s 'ééSés et donàés, sont d é Valeur de la sojn/ne
de hoo l i ç . . . . . ................
D e m êm e, en fa v e u r que
dessus, ledit sieur Charles d eL a d ev èze, a aussi donné
par même donation que dessus , audit sieur JeanG abriel Jouve de :L a d evèze•, son neveu ; acceptant et
remerciant comme dessus , ou à un ou plusieurs des
enfans q u i seront procréés du présent mariage , tou
tefois au choix dudit sieur Charles‘de L ad evèze, prê
tre, la m oitié du ja rd in planté en verger, q u i l a situé
près Tenclos des' R R . P. jacobins de cette ville; ladite
Thoitié dudit entier jardin à prendre du côté où bon
semblera audit sieur de L a d eçèzé', préire, sous la ré
serve dés fruits pendant sa ‘ vie ; lâ ’q uelie ' moitié du
jardin ci-dessus donnée , ledit sieur Chàrlés de Ladevèze
prêtre", a déclaré être de valeur de là somme de 3,000 liv.
E n considération desquelles susdites cessions et dona
tions , ledit sieur Jean - Gabriel Jouve de L a d e v è ze ,
r {
•
fu tu r épû'ux, a donné audit sieur de L a d e v è ze , son ’
o n cle, la jouissance pendant sa v ie , de la seconde
chambre de la maison que ledit sieur Jean - Gabriel
Jouve de Ladevèze a située dans cette ville, rue St.
G ille s, etc.
,
D e ce mariage furent procréés trois enfans, savoir:
GhaHes, filleu ld u prêtre LadéVèzfe, né le 8 décembre
* 7 3 7 > Picrre-François', père des intimés, et N . . . JouveLadoveze , qui naquit le i 5 juillèt 1739, et décéda aussi
tôt après sa naissance.
E ti‘ 1741 V Jeah-G abriel Jouve-Ladevèze épousa, en
secondes noces, Mürië Pichot: il en eut trois enfans, du
nom bi^ desquels est rappelant, qui a acquis les droits de
scs cohéritiers.
�c 6 )
Le 1 5 septembre 1768 ,Pierre-François J ouve-Ladevèze
ayant contracté mariage avec Élisabeth R om e, JeanGabriel Ladevèze, son père , lui fît un abandon des biens
de Gabrielle Laurenson, qui consistaient, comme on vient
de l’observer, en une somme de 7,000 francs. Pour s’ac
quitter de cette somme envers son fils, le père lui délaissa
la propriété d’une vigne estimée 1,000 irancs , et il lui fit
des délégations pour le surplus, à l’exception d’une(somme
de 1,990 irancs i p sous, que le, père p ro m it payer à des
tçrmes assez rapprochés, avec l’in térêt. à défaut de paye
ment à l’échéance des termes. Cette somme a été surpayée,
soit par le père, soit par l'appelant, son héiùtier institué.
Il a même été payé sur la légitime qui avoit été faite au,
père des intimés, une somme d’environ 4,000 fr. mais cene sont point de ces payemens qu’on doit s'occuper dans
la cause,
•
•
Par son testament du 20 avril 1773? Jean-G abriel
Jouve-Ladevèze donna, à titre d’institution, à PierreFrançois Jouve-Ladevèze, son fils du premier l i t , et père
des intimés, la somme de 3,5oo liv. Il fit plusieurs autres
dispositions, qu’il est inutile de rappeler, et institua l’ap
pelant son héritier universel.
Après le décès de Jean-Gabriel Jouve-Ladevèze, et le
Si8 juin i 7 7 4 > père des intimés forma contre l’appelant,
en la ci-devant sénéchaussée du P u y , quatre chefs det
demandes, ce qui donna lieu à unappointement en droit.
L ’instance reprise à la place des parties décédées, et la
cause portée aj.i tribunal de la IJaute-Loire, intervint, le
27 pluviôse an 7 , Jç jugement dont est appel.
J£u rap p elan t les q u a tre o b je ts ,d e la co n te sta tio n , on
�n \
• ■a'
^ 7 ^
rappelera en même temps les dispositions du jugement
dont se plaint l’appelant, mais on ne fera que quelques
très-rapides observations sur les trois premiers objets.
9•
•
*1
»
i
PR E M IER
OBJET.
1
lie père des intimés prétendant que la vigne qui lui
avoit été délaissée4pour la somme de i,o o o liv . en paye
ment de la restitution de partie de la dot de Gabrielle Laurenson, ne valoit pas 5oo liv. demanda que l’appelant fût
condamné à la reprendre et à lui payer la somme de
i,oo o liv. L ’appelant y consentit: à l’audience du 27 plu
viôse an 7 , le» intimés ayant déclaré qu’ils consentoient de
garder la v ig n e pour 1,000 fr. le trib u n al, au lieu de les
débouter dç leur demande à cet égard, et les condamner
aux dépens, se contenta de leur donner acte de leur dépar
tement , et de ce qu’ils consentoient à garder la vigne.
'* L ’appelant a observé qu’il au roi t été plus régulier de
débouter les intimés de leur demande, et les condamner
aux dépens faits sur icelle , puisqu’ils avoient persisté dans
leur demande jusqu’au jugement de l’instance, ce qui avoit
occasionné des frais assez considérables. Cette observation
étoit certainement dans le cas d’etréfaite, puisqu'elle con
court, avec bien dautres, à prouver l’irrégularité et l’in
justice du jugement dont fest appel.
S E C O N D
O BJET.
Par le second ch ef, le père des intimés avoit demandé
le payement de la somme de 1,990 liv, 10 sous, restée
»
'
�( ï* \
( 8 )
due sur-la restitution de la dot de Gabrielle Laurenson.
Les premiers juges ont ordonné un compte à ce sujet,
et en cas d’appel de Leur-jugement, ils ont condamné
l'appelant à payer par provision cette somme de 1,990
liv. 10 sous.
/
;>j. l Tt ü
}J'A 1 ir 'y i /I
Ce dispositif, qui adjuge une provision, paroît évidem
ment injuste, et pour, le dém ontrer, on se contente d’ob*
'
•
* 1■ t »• .*).
Ȏj i.
' ;
.kl.
/erver d’une p art,,qu’il est prouvé, que cette somme a
été surpayée ; et que d’une autre, en supposant que l'appe
lant en fût ^ncore débiteur, }1 ne pouvoit être obligé à
s’en libérer qu’ à la charge
par les intim és, de rapporter 1#
1 •*
main-levée des saisies-arrêts qui ont été faites entre se,s
mains.
.
r
T R 0 IriS/: .I. È M E
0 B J E T.
L e troislèmeclief est relatif au partage des biens de JeanGabriel Jouve-Ladevèze, aïeul et père des parties; L e
père des intimés avoit formé la demande eu partage, et les
premiers juges l’ont ordonné du consentement de l’appe
lant: aussineseplaint->il pas de ce dispositif; mais il se plaint
de ce qu’on n’a pas ordonné que les intimés lui rembourReroient les sommes qui leur ont été payées ù compte de
la légitime conventionnelle qui avoit été faite à leur père
par le testament du 20 avril 1 7 7 3 > avec les intérêts, à
com pter depuis chaque payement. Comme ce rembourse
ment rst de justice, et qu’il ne sauroit par conséquent être
contredit , l’appelant ne se permettra point d’autres obser
vations,
QUATRIÈME
t
�3 ^ /
( 9 )
Q U A T R I È M E
O B J E T .
Ce quatrième objet de la contestation est relatif au
désistement de la moitié du verger ; désistement qui a été
ordonné par le jugement dont est appel; il donne lieu,
comme on vient de l’annoncer, à deux questions.
P
r e m i è r e
Q
u e s t i o n
.
E x iste -t-il dans le-premier contrat de mariage de Jean * G abriel Jouve-L a devèze, une substitution Jidéi-commissaire en fa v e u r des enfans q u i seront procréés' de
ce mariage ?
Si l’on se réfère, ainsi q u ’il est de justice, aux termes
de ce contrat et aux principes reçus dans cette matière, il
est impossible, que sans prévention, on puisse y découvrir
une substitution fidéi-commissaire.
Personne n’ignore que la substitution est une institution
d’héritier faite au second degré ou autre plus éloigné. Elle
se fait ou par une disposition entre-vifs, ou par unç dispo
sition de dernière volonté. L a substitution contractuelle
n’étoit pas admise en France ; elle n’y,a été reçue, que par
un usage particulier et contre la disposition du droit romain.
On connoit aussi 1a différence qu’il y a entre une substi
tution vulgaire et une substitution fidéi-commissaire. La
première n’a pour objet, que d’assurer un héritier au testa
teur. Celui qui recueille la succession, n’est pas tenu de
la remettre à un autre ; elle lui appartient incommutablenient et sans retour. L u c iu s-T itiu s hœrçs esto 3 s i m ih î
B
�( 10 )
L u ciu s-T itiu s non e r it, tune Seius hœrcs meus esto ( i )>
II en est autrement de la substitution fidéi-commissaire.
Par le moyen de cette substitution, on fait passer une
succession ou un leg s, d’un héritier ou légataire à un
autre ; on le prioit autrefois et on le chargea ensuite de
restituer l’hérédité ou le legs: dans ce cas, la disposition
parcourt plusieurs degrés. J ’institue T itiu s, et le charge de
remettre ma succession à Seius. (2).
Dans les substitutions, deux choses doivent principale
ment concourir ; savoir, l’intention du testateur et' les
paroles propres et comme consacrées à l’effet des substi
tutions.
En ligne collatérale, 011 ne présume jamais la substitu
tion ; et comme elle n’est point favorable, il faut en ce cas,
qu’elle soit expresse. C’est la différence qu’il y a sur ce sujet,
entre la ligne directe et la collatérale. En ligne directe,
la conjecture de la piété paternelle fait qu’on se contente de
présom ption pour empêcher que la disposition ne soit
caduque. Mais en collatérale, il faut que quiconque veut
substituer s’explique en term esform els, en sorte qu’on ne
puisse douter de sa volonté(3).
Dans de semblables questions il ne doit pas y avoir cCin
terprétations arbitraires, dit le législateur ( 4 ) ; il faut
donc chercher les substitutions fidéi-commissaires dans la
disposition littérale de Facte qui les contient, et non dans
les conjectures que les lois n’autorisent pas, et qui ne sont
: (1) L. 1. %. 1. ff* de vulg. et pup.
(2) DeJidcic. hccred. §. 2.
(3) Aut. du jour, du pal. p. 1 2 5 .
(4) Frcamb. de l’ordou. de 1747.
substit.
�( « )
que des imaginations des auteurs, qui d’une matière aisée
et facile, en s’attachant exactement aux règles du droit
rom ain, avoient fait une hydre et un monstre presque '
in c o m p réh en sible , et oi\ la droite raison avoit fait un triste
naufrage......................Pour former une substitution fidéicommissaire, soit par testament ou par contrat, (car à cet
égard il n’y a aujourd’hui aucune différence ) il faut une
volonté expresse j c’est-à-dire, qui soit exprimée par les
paroles, ou qui résulte du sens et de la signification des
paroles ( i ). .
Ricard ( 2 ) s’explique A peu près de la même manière : il
faut, dit-il, se souvenir de la maxime que nous avons
établie ailleurs, qui doit servir de principe général à cette
matière : que qu o iqu e les fidéi-com m is ne soient pas odieux,
ils sont pourtant de rigueur j parce qu’ils vont à charger
l’héritier ou un premier fidéi-comraissaire, pour qui le
testateur a témoigné quelque prédilection en les com
prenant les premiers dans sa disposition : si bien, que
quand une personne ne se trouve pas expressément com
prise en la substitution, elle ne doit pas être étendue en
s a ja v e u r , à moins qu’il ne s’y rencontre uneiespèce de
nécessité, et que les circonstances qui se trouvent dans la
disposition, ne fournissent des conjectures violentes pour
faire connoitre clairement, que la volonté du testateur a été
de mettre la personne dont il s’agit au rang des substitués.
S il’oncompare ces autorités aveclestermes du contrat de
mariage de 1737, on demeurera convaincu qu’il n’est pas pos(1)Furgole, sur le préainb. delà même ordon,
(2) Torn. 2. part, 1. chap. 8, n°, 393.
�/«
\
12
( ^
sible d'y trouver une substitution fi d ci-commissaire en' fa
veur du père des intimés.Il n’yaen effet, ni termesformels,
ni disposition littérale, ni nécessité de substituer, ni volonté
expresse manifestée par le sens et la signification des paroles
du donateur ; il n’y a enfin ni circonstancesni conjectures
violentes qui fassent connoître clairement sa volonté: on
ne peut donc pas dire que la donation de 1737 , renferme
une substitution fo rm elle en faveur du père des intimés.
Mais s’il n’existe pas de substitution littéraleyon ne.satr;
roit la faire naître de l’intention du donateur : toutVoppose
à une pareille idée. i° . La donation est faite en faveur d’un
neveu, que le donateur devoit certainement plus affectioi*nër , que des enfaris qu’il ne poüvoit connoître : 1^ . le
neveu est le premier gratifié; il accepte la libéralité, et
les enfans, qui peuvent naître de son m a r ia g e r ie sont
point appelés concurremment avec lui. E n m êm efaçeïtr
que dessus, ledit sieur Charles'-de Ladevèze a aussi
donné par même donation que dessus r audit sieur JeanG abriel Jouve de Ladeyèze , son neveu, acceptant et
remerciant comme dessus, ou à un ou plusieurs des
enfans qu i seront procréés du présent mariage, toutefois
au choix dudit sieur de L a d e çcze, prêtre, etc. On voit
•par ces termes que c’est uniquement après la donation
faite, acceptée et par conséquent parfaite, que le donateur
s’étant rappelé que le donataire pouvant mourir avant lui,
ne re'cueilleroit paà l’effet de la donation, a jeté ses vues
sur les enfans qui pourroient naître de ce mariage ; mais
fonim e il ne vouloit pas que ces enfans profitassent de sa
libéralité concurremment avee leur p è re , ni même ordine
su ccessiço, si le père lui siirtivoit, qu’il ne vouloit avoir
�$e* s
C *3 )
.......................
qu'uri' donataire , ou son n eveu , ou en cas de prédécès,
l’un des enfans qui pourvoient naître du mariage', il a
manifesté sa volonté en se servant de la particule disjonctive ou.
, ‘
‘ r
D espeisses ( i ) a o b se rv é à ce sujet que si entre les héritiers
institués sous la diction disjonctive o u , il y a ordre d’af
fe c tio n , ils'sont appelés par ordre successif; c’est-à-dire,
que si lé testateur a institué son a m i, ou les enfans de
Vami ÿ lesquels- à peiné il connoissoit, on estime qu’il a
Voulu suitre l’ordre de son àffeCtion , et n'appeler les enfa n s q u a u défaut de V am i, et qu’à cette cause il a fait
l'institution avec la diction disjonctive. lien est autrement,
Continue ÏDespeissessi ledit ordre ne se rencontre point ;
car alors tous^sont appelés co n jo in te m e n t, la particule disjônetivé étant prise pour côpulative, ut primam perso nam inducat et secundam non repellat, comme dit la l o i,
citm q u id a m , invoquée par les intimés.
2
• LacôYnbe ( ) répète exactement les mêmes paroles de
tDeâpeisses. - *v
11L e même auteur (3) dit que si‘entre les institués, il y
a ordre de nécessité, lé testateur est cenàd avoir voulu
sui\re cet ordre , nonobstant la diction conjonctive et ,*
'exemp. f institue m on f i s et ses e n f a n s que fceux-ci ne
sont institues qu au défaut du fils én premier degré, et
ne sont appelés que ’v ulgairement au défaut du père.
M æ n o c h iu s (4 ) ra p p o rte d ifféro n s ca s, où la p ré so m p -
(1) Tarn. 2 , p. 34.
(2) V e r h . testam. p. 748.
(3) Jbid.n°
(4) Lib.
4
5
j ,
.t
.
, et vçrb, substit. n°. 20,.p. 671.
>P' ^8.
�( i 4 ')
tion est qu’il y a fidéi-commis, et à ce sujet Lacombe (i)
observe que ces cas et tous les autres, qu’on pourrait à
jam ais im a g in e r e z réduisent au point de savoir si par
les termes, l’héritier ou le légataire est chargé expressé
ment ou tacitement de rendre l’hérédité ou le' legs à un
tiers. Car où il n’y a point de charges de restituer expresse
ou tacite, il ne saurait y avoir de Jidéi-commis.
Saint-Léger, au rapport de D upérier(2), traite trèsbien celte question. Il décide, dans le cas d’une substitution
faite par un oncle, en faveur des enfans de son frère, m aies
ou fe m e lle s , que le mot o u , formoit une disjonctiçe,
et que les filles n’étoient censées appelées qu’en défaut
des mâles; il dit que tel fut aussi l’avis de plusieurs ju
risconsultes, Il rapporte les raisons pour et contre, .et
ajoute que la diction alternative indique un ordre suc
cessif. Natura dictionis alternativœ hœc e s t, ut ostendat ordinem inter vocatos, ut unus non censeatur
%'ocatus , nisi in subsidiurn, et in defectutn alterius.
à
*
Il dit encore qu’en cette matière simultaneœ vocationis,
il faut considérer i°. Xordre de Vécriture ; 2°. celui de
la succession, réglé par la forme en laquelle on succéderoit ab intestat; 30. l’ordre de la nécessité, par
exem ple, lorsque pour Ja validité d’un testament ou
doit nécessairement instituer quelqu’un héritier; 40. l’ordre
d’aiTeçtion. Il observe ensuite qu’ordinairement, on s’ar
rête à ces deux dernières , ut ex illis paritas , vel disparitas colligatur,
——— ■
1 1"
( 0 Vcrb. subslit. part. 2, scct. i r6. n°. 10.'
(2) Tom. 3, p. 437.
................
•' J
'
�. 2 >O j7
C
p
En faisant à l'espèce l'application de ces principes, toutes
les circonstances concourant et se réunissent pour démon
trer qu’il ne subsistoit pas de substitution fidéi- commissaire
en faveur du père des intimés. i° . L e neveu , donataire, se
trouve le premier dans l’ordre de férn ture. 2°. S?il n'y
avoit pas eu de donation, et que Jean-Gabriel Ladevèze
eût survécu à son oncle, il lui auroit succédé exclusive
ment à ses enfans. 30. On ne peut douter que l'affection
du prêtre Ladevèze, ne se soit portée plutôt sur son
n eveu , auquel il avoit fait don par le même acte de certains
droits successifs, que sur des enfans qui n’existoient pas
encore. 40. E n fin , pour ne point laisser d’incertitude sur
son intention, le prêtre Ladevèze se sert de la diction
disjonctive, lorsqu'il considère les enfans qui pourroient
naître du m ariage, et le cas où son neveu viendroit à
décéder avant d’avoir recueilli l’effet de la donation. Le
prêtre Ladevèze vouloit que les biens par lui donnés,
restassent dans la famille de son neveu ; mais il n’entendoit
appeler les enfans qu’au défaut du donataire et par la voie
d’une substitution vulgaire.
O
b j e c t i o n
.
Mais on ne p eu t, dit-on, supposer une substitution
vulgaire dans une donation faite dans un contrat de
mariage, où le donalaii-e accepte dans le même instant la
libéralité qui lui est faite. Tout est consom m é par son
acceptation, etc.
R
é p o n s e
.
Les contrats de mariage sont susceptibles de toute espèce
�pourvu
c 1 6 }
de conventions,
qu’elles ne soient contraires ni à
l’honnêteté publique, ni aux bonnes mœurs. On peut
donner et retenir; on peut donner sous condition, sans
réserve, et à ,1a charge d’une .'substitution au profit d’un
autre ; m a is . comme cette substitution est faite par une
donation entre^vifs, elle est irrévocable. Il est donc
permis de supposer une isubstitution vulgaire dans le
contrat de mariage de Jean-Gabriel J o u v e -L a d e v è z e y
puisqu’il n’y existe pas de substitution fidéi-comraissaire*
O b j e c t i o n .
,
Les enfans, ajoute-t-on , étoient éligibles ; ils ëtoient;
donc nécessairement compris dans la disposition, et si
le donateur n’eût point fait de fidéi-commis, il n’eût pu
se réserver l’élection.
^
R
é p o n s e
. ^ '
Ces enfans ne pouvoient être compris d an s -la dis
position , à l’efiet de recueillir concurremment avec leur
p è re , ni même ordine successivo, puisque le donateur
les en avoit exclus par la diction disjonctive ; ils devenoient éligibles, si le donataire étoit décédé avant Je do
nateur ; mais cette élection facultative ne fut jamais dans
l’intention du donateur.
Supposeroit-on, au surplus, qu’il eût été dans son in
tention de faire ce choix du vivant du donataire, il
suffit qu’il ne l’ait pas fait .pour que les biens donnés se
soient irrévocablement consolidés dans la seule personne
i °.
dq cjonatairc.
-
. v- w
-
• ...
<i
�^ î>
'(■•I?,)
20. Il doit en ctre.de ce cas comme dp celui où un dona
teur, avant l’ordonnance de 1747) s’étoit réservé la faculté
de substituer aux biens donnés; s’il ne faisoit point de subs
titution , le donataire demeurpit propriétaire incommu
table ües objets compris en la donation, comme l’attcsie
Furgole (1). Il est libre, d it - il,,au donateur d’user ou de
ne pas user de la faculté qu’il s’est réservée de substituer
aux biens donnés; que s’il ne fait pas comprendre d’une
manière sensible, et sans équivoque, qu’il en a usé, c’est
une preuve certaine qu’il n’a pas voulu en profiter, et qu’il
a voulu laisser les choses dans leur entier ; car autrement
il n’y a aucune apparence qu’il ne se fut pas différemment
expliqué.
Ce n’étoit pas, au surplus, une donation purement gra
tuite qu’avoit faite le prêtre Ladevèze, puisque le donataire
lui abandonnoit la jouissance d’une partie de sa maison;
ce qui formoit entre les parties une espèce d’acte synallagmatique. Il n’est pas à croire que le donataire eût voulu
fairp des sacrifices réels pour une espérance incertaine.
30. On peut, en faisant une institution ou une donation
contractuelle, se réserver la faculté de donner i\ l’un ou à
plusieurs des en fans de l’héritier institué ou du donataire,
sans qu on puisse en inférer que cette réserve contient un
^iidei-commis en faveur de ces enfans : c’est u n e , conven
tio n permise dans les contrats de mariage. Un père qui
.marie son fils, et qui l’institue son h é r i t i e r universel, se
réserve très-souvent le droit de choisir un autre héritier
parmi ses petits-enfans, dans le cas où l’institué décéderoit
G
�4»«
......
'
ces
(i8') .
, assez.
" avant l’instituant :
sortés de réserves sont
ordi
naires. Il n’existe pas néanmoins de fidéi-commis ; ainsi on
~peut, sans cela, se réserver la faculté d’élire parmi lès
enfan.s d’un héritier et ceux d’uri*donataire.
'5:i
A près avoir prouvé que dans le contrat de mariage de
1737, il n’existe point de fldéi-corrimis en favéur du père
des intimés, il s’agit d’examiner si on peut y en supposer
u n , en dénaturant les termes de la langue française. r,>
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P eu t'o n créer une substitution fidéi-com m issaire dans
une donation contractuelle, en y substituant la diction
conjonctive et à la diction disjonctiçe o u ?' ■11 J
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: . ./;ip ' ’il )
Pour prouver que dans'lé'cas d’une disposition faite
au futur époux vu à ses enfans, la disjonctive doit être
prise pour copulative: les intimés ont in v o q u é la loi cùm
quidam 4 , au code de vèrb. et rcr. signif. et l’avis de
Catellan, cehii de Furgole, et d'autres.
; <1 n( - .°f;
'
• 1 *î. ••
Ces autorités sont, à la' vérité^ très-respectables; mais
elles ne peuvent recevoir d’application à l’espèce; pour
le démontrer, il suffît de faire quelques observations.
i° . Ou ne contestera'piis^sahs doute,' que les donations,
' les in stitu tion s ¡et Ws ^ u bstitulion sfcon lractu elles, n ’ ôrit pas
et£ en usage p arm i les R o m a in s , q u i n’ad m etto ieh t d ’itutre
fo rm e de disposer que celle des testam ens : la fa v e u r des
contrats de iriariagé les a fait admettre en France, même
dans les pays de droit écrit^et quoiqu’elles soient contraires
aux disp9sitious ‘de là'loi rOrtiai ne ,'clldssont aussi iàVorables
�C 19 )
parmi nous que les testainens l’étoient chez les Romains.
O r , la loi càm quidam , qu’on oppose, ne peut être
relative qu’à des dispositions .testamentaires, et non à des
contrats entre-vifs. Il est .permis d’interpréter , même avec
la plus grande latitude', la volonté d’un testateur, parce
qu’il arrive très-souvent, ou qu’il ne peut ou qu’ on 11e
lui laisse pas la liberté d’expliquer ses dernières intentions,
ou qu’elles sont rédigées bien différemment qu’il les a
dictées. Mais il n’en est pas de même dans les contrats entrevifs, sur-tout dans les contrats de mariage; les conventions
qu'on y fait, les clauses qu’on y insère, sont toujours l’effet
d’une volonté réfléchie : ce sont des arrêtés pris par les
époux dans le sein de leurs familles , et par leur conseil.
Il faut donc s’en tenir aux propres termes des contrats de
mariage qui sont de droit étroit, et s’abstenir d’interpréter
un acte, lorsqu’il ne présente aucun doute ; cüm in verbis
nulla est am biguitas, non debet admitti voluntatis quœstio (1 ), disent leé lois. Si cette décision a lieu dans le cas
d’un testament, on doit à plus forte raison la i-especter
pour un contrat de mariage.
20. La même loi, cùm quidam, parle de deux persojmcs
indifférentes, et entre lesquelles il n’y a point de sujet et
de raison de préférence. Ille àiit ille. liœres m ilii çsto j v e l,
ilh aùt illi d o} lego, vel dari volo j yel ilium aut ilium
liber uni x,aut( tutorern esse volàj vel jubéo. Mais il doit
en être bien autrement, quand la.diction disjonctive se
trouve entre ^es personnes m ter quas cadit ordo charitalis et ajfeçtioriis j dans ce cas, il ne peut y avoir lieu
•Ij •- ' 0 j 'r t . i>Y
-I
!,.• ■ . 1
,
�( 20 )
à la conversion , comme l’observe D upérier ( i ) , lorsqu’il
s’agit des maies et des femelles, et surtout en matière des
fidéi - commis , qui visent, à conserveries biens dans la
fam ille, ainsi qu’il paroît par la loi, cùm pater, § .à te peto
de légat. 2 , et la loi, hœredes m e i, §. ult. ad sénat, trebell.
C’est aussi l’opinion , ajoute D upérier, dePaulus de Castro,
sur cette lo i, où il dit qu’elle n’a pas lieu, quand il y a
quelque ordre : ce qui est si certain qu e, quand il a quelque
raison de 'préférence, en ce cas , bien loin de changer la
disjonctive en conjonctive pour les égaler, il faut change?
la copulativeen disjonctive, pour préférer celui que vrai
semblablement le testateur a voulu préférer; comme,
quand un fief est inféodé aux mâles et aux filles, lés maleé
sont préférés, nonobstant cette conjonction qui les changé
en disjonction ; F usarius de Jideicom. quest. 279; après
Alexandre et autres, n°. 78.
On croit inutile de répéter que dans l'espèce on ne sauroit
douter que le donateur n’ait voulu.préférer son neVeu aux
enfans qui pouvoient naître de son mariage.
30. Dans la loi qu’on oppose , il n’y a qu’ une seule dic
tion disjonctive, et dans le contrat de mariage de 17 3 7 ,
il s y en trouve deux: a donné, comme dessus, audit
Jean-G abriel Jouçe-L adeyèze, son neveù\, acceptant
et rem erciant, ou à lin bu plusieurs des enfans q u i seront
procréés du présent m ariage, etc__ Dans le système
même des intim és, il faut ou que les deûx disjonctives
subsistent, ou que l’une et l’autre soientconverties en
copulatives: au premier cas , il ne peut y avoir de substi-
�C 21 )
tution fidéi-commissaire eii faveur du père des intimés,
puisqu’il s’en trouvoit privé par deux disjonctives ; au
second casj la clause présenteroit une espèce d’absurdité,
puisque le fidéi-commis devroit appartenir tout à la fois et
à un seul enfant, et h-plusieurs. Il en seroit, à peu près, de
cette hypothèse, comme de celle dont parle la loi 12 4 , au
ff. de vôjb. signif. D isjunctivum , dit-elle, est veluti ciim
dicim us , aut dies aut nox est, quorum posito altero ,
necesse est tolli alterum : item sublato altero , poni
alterum.
4 0. Il est des cas, l’appelant en convient, où il est permis
de convertir la disjonctive en copulative, et vice versâ i
s’il-s’a g it, par exem ple, d’empêcher la caducité d’un tes
tament à défaut d ’ un héritier, d ’appeler à un fidéi-commis
un parent du testateur à la place d’un étranger, de faire
succéder un mâle plutôt qu’une fille, et autres semblables.
Cela peut avoir également lie u , si les termes d’un testa
ment étoient si observés et si douteux, q u e , sans la con
version, ils ne présentassent qu’une absurdité : mais ce
seroit aller directement contre le vœu de la l o i , contre
l'intention des parties, ,que de donner à une convention
claire et précise un autre sens que celui qui lui est propre:
N on aliter à signijicatione verborum recedi oportet,
quàm cum mànifestum e s t, aliud scnsisse testatoretn (1). Faber (2), après avo ir observé qu’il est des cas
0x1 la conversion peut avoir lieu , ajoute : JSon adeo geheralitcret absurdè accipiendurn est ut ob eam causa/n
(1) L. 69, de légat. 3. •
(2) D e cunject. lib, 17, cap: iQ.
�( 2 2 )
in citjusque arbitrio et potestate esse debeat conjuncta,
prò disjunctis accipere, yel disjuncta prò conjunctis j
s’il en étoit ainsi, confundentur omnia , quoties accìdet
ut cóntrohentes vel testotores usi sint oratione aliquA
conjunctivâ , vel disjunctwà.
,
L ’auteur prétend que lorsqu’il n’y a pas.des motifs puissans' qui autorisent cette conversion , elle ne doit pas êtret
faite : H oc contendo , quoties conjunctio vel disjunctio à
testatore, a u tà contrahentibusf o c ta est, nec quidquarn
pj'ohibet quominus conjunctio pro conjunctione, disjunctio pro disjunctione accipiatur, n ih il esse causce
cu rlicea t aut oporteat recedere à proprietateverborum ;
neque citm in verbis ambiguitas nulla e s t, admittendam
esse quœstionem voluntatis : quorsùm emrn verba, msù,
ut dernonstrent voluntatem dicentis ? aut cur credatur
quisquam id dixisse quod non priùs animo y menteque
ogitaverit, inquit cleganter N isus.ex Tuberone\{i).
~ Quorsùm enim , dit la même l o i, nom ina, n isi ut
demonstrarent voluntatem dicentis ? Equidejn jion
arbitror quemquam dicere , quod non sentirei.
Sur cette loi cùm quidam , Dupérier (2) dit que dans
toutes les questions qui concernent cette constitution de
•Tustinien, il faut observer ce qui a été remarqué par
Faber ; que cette lo i, laquelle ili blâme très-justem ent,
vient de Diurneur que Tribonicn avoit de prendre trop
facilement une conjonctive pour une disjonctive, et pa
reillement une disjonctive pour une conjonctive ; qu’il
(1) L . lubco 7 , §. alt. de supcllect. légat, ,\ v,, f ,
(2) Loc. Citât,
* - V
>
-v
ly
•:)
�w
C
* 3 ')
montrb' q u e , nonobstant cette constitution , il ne le faut
jamais faire que qand on ne -peut pas îéviter , ou qu’il
survient une absurdité, comme parle Justinien , en la
loi generaliter (i) , Mayuard (2) , Rocheflavin (3), ou
une apparente contravention au sens et à l’intention des
contractans pu du testateur, par la raison de la loi non
a liter, ou de la loi ille aut ille (4). Le sens com m un,
ajoute-t-il, nous enseigne qu’il ne faut pas abandonner la
•propre et> naturelle signification des mots pour en suivre
une im propre, tant que la propre peut avoir un sens
oet un effet raisonnable : Nemo en im existim a n d u s est
dixisse quod non mente agitaverit (5).
Les expressions de Faber (6) sur cette loi cimi quidam ,
sont, en effet , remarquables. F ab er, ainsi que là majeure
-partie des auteurs , reprochent à Tribonien d’avoir trompé
,Iav confiancei.de •-l’empereur , en substituant ses propres
décisions à celles du législateur : F u it enim Triboniano
fa m ilia r e disjuncta pro conjunctis accipere, ut et in
cœteris'iferc omnibus pervertere juris veteris rationeni
ut videre est in L. ( cùm quidam ) ubi hercîè suavis
e s t, cuniMit novœ constitutioni colorem quœrat ex jure
o'etere non erubescit ajjirmare , in ilia edicti parte quœ
èst de eo quod vi aut clam fa c tu m e r it, dixisse prœtorein aut pro , ci quo fa ls iu s n ih il dicere potuit.
'
’ »
•*
■
| j i\. -- - -
'" -
(
,
.. . (*)
dc msht. subst. et rcsti'tut,
‘ ( 2 ) Liv. 5 , cliap. 34, 38;
! (3) ÎJv. 3 , lit. 5 , art. 4.
(4)
§. 1 , ff.
de légat.
i,r (5 ) L. labeo jam cit.
n
t l ‘(6) (Loc.oit,'in fin ,
I.
uij
3.
(
�*
nV
^
«
( * 4 ')
II faut donc écarter la loi cùm quidam , soit parce
qu’elle n’est relative qu’aux testamens, soit parce que le
contrat de 1737 ne contenant aucune clause obscure, ne
sauroit être sujet à interprétation.
^
Il est vrai qu’à la fin cette loi parle des contrats, d'où
l’on p’ourroit inférer-qu’elle ne s’âpplique pas seulement
aux testamens, mais à toute sorte d’actes.
\
Cette objection ne seróit pas fondée, attendu que dans
cette partie de la loi il y est uniquement question de l'op
tion parmi deux choses léguées : S i aute?n una persona
e s t, res autem ita derelictce sib it; illam aut iïïam re?n
illid o , lego, vetustatis jura manent incorrupta , milla
imiovatione eis ex hac constitutione introducenda, quod
etiam in contractibùs locuni ïiabere censemus. L ’héri
tier doit avoir le choix'; il peut délivrer celle des deux
choses qu’il jugera'à propos: cette option lui est déférée,
ainsi qu’elle l’est à tout àutre débiteur qui auróit consenti
une obligation alternative.
5°. Les intimés ne peuvent invoquer avec plus de succès
les suffrages de F urgole, de Serres , de Catéllan et autres.,
puisque leur avis n’est basé que sur la disposition de la
loi cùm q u id a m , qui ne peut avoir d’application dans
l ’espèce, et que d’ailleurs ces auteurs ne traitent point la
question qui divise les parties.
~~ Ces auteurs disent que la donation faite en contrat de
mariage, au futur époux ét à’ ses enfans, bu bien au futur
époux ou à scs enians, contient en faveur de ces der
niers, une substitution fidéi-commissaire. Mais cette dé
cision ne peut avoir lieu que dans le c a s d’une donation
faite/w rim ascendant, comme l ’observe très-bien VçdcI>
sur
�»
( 25 )
sur Catellan (i). Pour ce qui concernera donation faite
au futur ép o u x, dit V ed el, ou à ses enfans, la disjonctive
ou n’est iconvertie en copulative et, ,que par. ordre de
succession’^ quand la donation part dôila,maùi. d'un as-*
Cendant. Par j un argument contraire,' cetteiconversion;>
ne doit pas avoir liëu quand.il s’agit d’une-donation» fai te *
en collatéral: Copulam positam inter patre/n et filium *
propter ordinerm charitatis intelligi ' or dîne successif o ,
item et disjunctivam positam inter .personas inter quaà A
cadit affectio ord in a ta ‘ non resolvi in conjunctiçam ,
dit.iM ornac, sur la loi cùm quidam.\
L e .même auteur, après avoir observé que la con
jonctive £st substituée à la disjonctive , d’après le sen
timent des: interprètes, ajoute que icela n’a lieu que dans
les testamens), suivant l ’avis de,’ D um oulin, sur le conseil
9 6 d e T)ecius‘. quodintellige in testamentis ex M oiin ,etc.
Dumoulin dit!en effet, que non est differentia inter
copulam et ”altern atifam , inter persônas in testamen
tis , L . cùm:quidam. On ne doit donc pas admettre l’alter
native dans îles contrats entre-vifs, lorsque la donation
a été faite ven ligne collatérale. On ne peut'donc sup
poser une substitution fidéi-commissaire dans la donation
de. 1 7 3 7 , soit, parce qu’elle n’a pas été faite par un as
cendant, et par testament, soitoparce que l’alternative •
n’est point admise dans les dispositions entre-vifs, faites •
en-ligne collatérale, soit enfin parce qu’au lieu d’une
disjonctive, il en existe d eu x, et,qu’en les convertissant
\
1.
.
»■ '' ï
(1) Iâv. 2, cliap, 14. t■*
,
D
<
�C. *6 )
l’une et l’autre en conjonctives, les termes de la donation preseriteroient une espèce. d’absurdité.
.. .1
Tous les auteurs, au surplus, ne sont pas du tneraeo
avis de F urgole, (n i de celui de Serres , quir n’a fait?
que le copier); il en convient lui-même. Selon certains^
auteurs, dit-il, entre autres M. M aynard, liv. 5 . chap. 37, :
lorsque les enfans sont appelés avec leur père par lai dis- 3
jonctive ou ,v e ly se u , ils üe sont censés appelés que. par. \
la vulgaire j parce qu’elle est propre à caractériser la vul~.
gaire ; car si le testateur appelle Titiuss ou ses enfans,
il s’exprime de manière à faire entendre qu’il ne veut appeler que Titius ou bien ses enfans par l’alternative,
et non les uns* et les autres ,p ar concours, ni par'ordre r
successif, en vertu de la fidéi-commissàire ; 'mais dès!que î
Titius a recueilli, ses enfans nerpeuvdnt plus<ètre(admis; il
parce que la volonté du testateur, qui résulte-des térmes.p
dont il s'est s e rv i, jy résiste , et les exclut, io x r; ;;n,v!
M a y n a r d , dont l’opinion est com battue :par \Furgirlev •'»
rapporte un arrêt du parlement de T o u lo u s e y du 2 .sèp-'A
tembre i584', par lequel il a été/jugé qu’une substitution n
faite en ces termes : ou à1sesrenfans; seu ad liberos èjùs1', r,
étoit une
îu
ru ï ‘ ::u v^ rq
arrêts que rapporte ihêniè auteur, liy. ô^chap, 9« ,*. !>
sont rendus dans l’espèce ¡d’une .donation;faïte[aü>fjJS'c/ à 'ses enfans.
r.
y-}
n!.'r. jriioq W i;
•Les
substitution vulgaire.;
Je
\
•Dans l’espèceV de trois arrêts rendus au parlement de
Paris, le dernier juillet 1594,, 11 janvier rfiooret'ri^ a, il *
a même été jugé qu’il n’y avoit i)ointde substitution lorsque
la donation étoit faite au futur époux cl à ses.enfans1, ou
aux siens, ou pour lui et ses enfans. I l ÿ à tuciiiécetfôcirCt
�' (
)
constance remarquable que dansi’espèce de l'arrêt de 1600,
le père avoit donné, par contrat de m ariage, à sojijils. et
a u x ehjans>q u i naîtroient du'mariage. Les aliénations
faites iparplés ! héritiers!’instituésy ou par Ies'donataircs,
étoient attaquées de (nullité par ¡les: enfans qui'ise prétendoient substitués ; mais elles furent confirmées : 'Nec enim
< liberi gradatifoicensçhtur invitati, nec persona ahqua
- in substitutiorie aut, fidei-commissd\ subauditur, disent
■Choppin (1) et CarondaS (n)r,1qui«rapportent ces arrêts. »
Dans l’espèce des deux arrêts rapportés par Catellan,il
s’agissoitidè dispositions faites par des ascendans ; la dona
tion étoit faite au futur époux et k ses enfans, dans l’espèce
du premier; et dans celle du second , où se trouvoit la
diction ou , les enfans avoient A combattre des créanciers ,
- qui avoient fait saisir généralement tous les biens de l’ins
tituant. Cette circonstance étoit trop favorable, et peutêtre trop juste en même temps, pour ne pas donner lieu
à la conversion.
■
: s-"
. .
F urgole, quoique grand ^partisan du droit romain , ne
donne pas comme un principe constant que l’alternative
doit toujours avoir lieu dans les contrats et les testamens ;
il restraint son opinion aux casiseulement où sans l’alter• native, on ne pôurroit en expliquér'Ies'terniesid’une'ma* niere conforme à la saine raison et au sens commun. Cela
résulte de ce qu’il dit dàns son. traité deè testamens (3).
Après avoir observé que l’esprit des contractons doit pré(1) Dc morib. pans. lib. 2, tir/% , w°. 10.
(2) En ses r£pons. liv. 13, chap; 26. '
f ~ r* t
(3) Chap..7, sect. 6,*nV37:y 38,l!e t4 o to m . 2.
■r-)
D 2
�( ( 28 )
. valoir ^nr/Ja^igueiir des; termes 'dont ils: se sont servi, et
que l'alternative ne sejfaitque par une espèce de nécessité,
à cause de ràhsurditéetvde'J’inipossibilité qui résulterait
en prenant les paroles ;i\;la lettre, il conclut qu’on ne doit
rien changer dans la valeur et la signification des expres
sions , soit dans les contrats, soit dans les testamens, à
moins qu’il n y jait une nécessité pour éviter l’absurdité ,
ou qu’on ne voie, bien clairem ent, que telle a été l’inten
tion des contractans, ou du'testateur, suivant cette règle
de la l o i, non aliter à significatione, etc.
L a réflexion que nous venons de faire, ajoute-t-il, se
confirme clairement par les exemples,des conversions qui
sont rapportées dans la loi sœpè ( i ) . . . . Il faut que le sens
du discours, l’intention ou la volonté des contractans con
duisent nécessairement à faire la conversion de la copulative en disjonctive, et vice versa.
L e savant Ricard (2) s’explique d’une manière aussi po
sitive : il est bien v r a i, dit cet auteur, que les conjonctives
«e changent quelquefois en disjonctives dans la matière
des testamens, et que l’on y supplée même des paroles,
pour donner un sens raisonnable aux dispositions que'le
défunt y a faites, en présumant que-le scribe oui les térmoins, à la relation desquels le testament a-été rédigé par
, [écrit, ont omis quelques syllabes ou quelques mots de ce
¡qui leur a été ditipar le testateur; mais il n’y a aucun
exemple en tout'le droit, dans lequel une disposition qui
sç trouve parfaite dans je s termes avec lesquels elle est
•
( 1 ) 5 3 ,ff. de verb. signif.
t
.
(2) T om . 2 , traité 3 , cbap. d , psut* 1 > n. S37.
�4 **
C 29 )
conçue y et conforme aux principes, soit convertie en une
autre disposition différente, pour donner auxmns et pour
ôter aux autres, contre les termes dont le testateur s’est
ser.vi; e t, en un m ot, il est inoui de subroger une dis
position présumée à une disposition expresse valable,
et d’étouffer la vérité par une fiction.
'
Dans le doute, la présomption est plutôt pour l’institué
que p o u lie substitué (1); il en est de mônie du donataire.
: D ans'le doute, dit Furgôle (2), etsi la donation ne parle
pas clairement, elle est censée faite au premier donataire,
‘ et ne comprend pas les enfans par fidéi-commis tacite. On
doit principalement considérer la personne de celui cujùs
■
prœcipuè causa vertitur, dit Cambolas (3).
Dans l'cispèce, il ne peut y avoir de doute ; les termes
de la donation sont clairs et précis ; le donataire a été prin
cipalement considéré; c’est en sa faveur que la donation
a été faite, et les enfans ne pouvoient être appelés que
dans le cas où il fût décédé avant le donateur. On ne saur oit
donc avoir recours à l’alternative pour renverser une dis
position valable, et établir une substitution fidéi-commissaire en faveur du père des intimés.
L ’appelant pourroit terminer ici sa défense; mais comme
il a été condamné à se désister de la m oitié du jardin dont
il s a g it, ce qui ne pourroit jamais avoir lieu dans aucun
cas, et qu’on s’est fortement étayé des motifs qui ont servi
(1) Montvalon, tom. t , chap. 5 , art. 40.
(2) Sur les donat. tom. 1 , art. 11 , p. g i.
(3) Quest, du droit, liv. 5 , chap. 48.
�(So)
de base au jugement dont est appel, cela nécessite quelques
succinctes observations.
,
i
M O T I F S
D U
J U; G E M E N :T .' ;
••• va,’ > ■ v
P R. E M I E R M O T I F .
t
Î.i t
L e premier motif qui a déterminé les premiers juges
à ordonner le désistement de la moitié du ja r d in , est que
dans le contrat de 17 3 7 , il y a deux donations, et qu’en
comparant les termes de la première avec ceux de la se
conde, on trouvoit une grande différence dans la volonté
du donateur, puisque, dans la première, il ne donne qu’à
son neveu j, et que, dans la seconde, il donne à son neveu
ou à un ou plusieurs des enfans qui seront procréés du
mariage; d’où ils ont tiré la conséquence que si le donateur
n’avoit eu en vue que son n eveu , il n’auroit pas fait deux
donations dans le même acte.
R
é p o n s e
,
Quand on supposeroit, ce qui n’est pas, qu’il y a deux
donations dans le même acte, on n y trouvera jamais qu’un
seul donataire ; ainsi il étoit très-inutile d’examiner si cette
donation étoit divisée en plusieurs parties, puisque ces
parties ne font qu’un tout. L e prêtre Ladevèze donne,
et son neveu accepte t voilà tout ce qu’on voit dans cet
acte.
Mais il étoit nécessaire, quoique dans le même acte,
de distinguer la première partie de la sccoudc, et la raison
�en est très-sensible; le prêtre Ladevèzese dessaisit, dès le
moment même des droits qu’il avoit sur les successions
des père et mère de son neveu, et sans aucune réserve
d’usufruit, au lieu qu’il se fit une réserve expressè de
l’usufruit de la moitié de son jardin : cette démission pure
et simple d’un objet, et la réserve de l’usufruit de l’autre ,
nécessitoit cette distinction, sans qu’on ait pu en con
clure que le même acte renfermoit deux donations.
•Il e^st-vrai que relativement au jardin, le prêtre Ladevèze
parle des enfans’ qui peuvent être procréés du mariage;
mais iln*y a pas de substitution, au moins fidéi-commissaire, en leur faveur. S’il avoit voulu faire un iidéi-comïnissaire, il s’en seroit expliqué, il en auroit chargé sou
n eveu, puisqu’on ne peut admettre les substitutions ta
cites, sur-tout en ligne collatérale.
:
:Ofll j;I '•!’> :
b >
’
jur , S' E C 0 N D M O T I F .
irÔV'jhi’. J - ' i . il
■1 >\ .■
!
.!
. I
?Le second»motif est puisé dans les dispositions de la loi
cùm quidam. Les juges \ dont est appel , ont prétendu
quei d'après cette lo i, on devoit envisager la donation,
comme si elle avoit été'faite et à un et à plusieurs erifatzs.
•vi'h'l hue
-J,-.
'
, ■
R
é p o n s e
.
b tl o 'i ; Lr
i°. On a observe, d après la loi e lle -m ê m e , lavis do
M ornac, de Dl'cius et de D unioulin, qu’elle ne parloit
que*dekjûj$positibnâ 'testamentaires jïquod inlellîge in testattihifisy'>Momac.r | 3 , ) •
J ’ ’ .!•.
¡w'SpilaJdbüble .'alternative pôüvoit être ici admise,
I U l’1
�ce seroitlé cas de dire’j qu’on doit interpréter les volontés
des donateurs, avec la même latitude que celles des tes-.
tateurs ; car, il esti difficile à concevoir, comment celui)
q u ia donné à une seule personne, peut en mêmet temps,)
donner le même objet à plusieurs : posito altero, nccesse i
est tolli .alterum.
>
C ’est par erreu r, sans doute., que les^premiers juges :
ont d it, dans l’un de, leurs motifs,;:que Jean - Gabriel ,
Jouve-Ladevèze, n’avoit, eu iqu’un enfant de son pre
mier m ariage, puisqu’il -est, prouvé qu’il en eut trois*.:
et que l’un d’eux m ourut aussitôt après sa naissance. Mais .1
le fait est aussi peu important que le. motif.
. .
T R O I S 'I È M El; M 0:;T I F . ' , ,
. •
' *- " 1' ' - 1 *
Pour accorder aux intimés la propriété de la moitié
du jardin en question, les juges, dan t e s t appel, ont fondé
leur a v is , i ° . sur ce que Jean*Gabriel J o u v e - L a d e v è z e
en avoit accepté la donation; a°. surjce qu’iliest;dit dans
cette donation, que Ladevèze, p rêtre, avoit- donné la j
moitié de Yentier jardin; 30, suriceique l’appelant ne ^
rapportoit pas le partage fait entre Charles Ladevèze.,
p rêtre, et Vital Jouve-Ladevèze, son frère.
o *!■
R é p o n s e .
.* ’ .
■i' ; .°i
Ces motifs ne présentent! rien de spécieux.
,
i° . Il est constant d’une part, que Marie-Magdeleine
Sabatier avoit eu trois enfans, et d’une;iautre, qu’envi
1704, .elle, donna la moitié do ce jardiné .à
l'un
�-
( 33 )
l’un de ses trois fils : de là , il résulte que Vital Ladevèze
étoit seul propriétaire de la moitié du jardin ; l’autre
moitié étoit divisible entre André et Charles Ladevèze,
prctre ; ce qui faisoit un quart pour chacun d’eux. Charles
Ladevèze, p rêtre, donnant la moitié de son entier jardin,
ne donnoit donc qu’un huitièm e, et non une moitié de
la totalité.
2°.-Comment pourroit-ori'présumer que le prêtre Lade
vèze étoit propriétaire de là totalité de ce jardin, puisqu’il
est prouvé par trois arrêts, ^rendus en la cour des aides de
Montpellier, que depuis 1731 jusqu’en 1734, Jean-Gabriel
Ladevèze avoit seul soutenu contre les consuls du P u y ,
un procès considérable pour faire ^déclarer ce jardin al
lodial ?
30. C o m m e n t d’ailleurs p o u v o ir supposer que la p r o
priété entière de ce jardin résidoit sur la tête de Charles
L adevèze, attendu qu’avant et depuis 17 3 7 , les auteurs de
l’appelant n’ont pas cessé d’en jouir et d’en payer les impo
sitions ? Ladevèze prêtre, en doijflîint la moitié de l’entier
jardin , n’a donc réellement donné , ni pu donner que la
moitié de Ventier jardin qui lui appartenoit.
Par un partage, dit-on, Ladevèze, prêtre, auroit pu de
venir propriétaire de la totalité du jardin. Cela est vrai;
mais le fait n est pas prouvé, et l’appelant ne connoît point
de partage passé dans la famille. Il doit donc demeurer pour
constant que le prêtre Ladevèze n’a pas entendu donner la
moitié de l’entier jardin , mais uniquem ent la moitié de
la portion qui lui appartenoit. Il doit également demeurer
pour constant, i° . qu’il n’existe,¡pointée(.substitution ex
presse , ni même tacite y dans le çontrat de 1737; a°. que
E
\
•* * -
�3 4
l'intention! du prêtre Ladevèze n'étoit que d' avoir un ,seul
donata i r e .q u i é to it s o n neveu 3
que l’alternative ne
.peut- être admise qu e l e s t e s t a m e n s e t l o r s qu’il s’y
trou ve des clauses ambiguës e t obscures
qu’en substituant dans l’espèce la diction conjonctiv e à la disjonctive r
ce seroit donner à une clause claire et précise un sens aussi
opposé à la raison, que contraire à l’intention des parties
-contractantes 5 °. enfin que l’alternative ne peut être
admise que dans les dispositions,faites par les ascendans,
;A in s i tout concourt, tout setréunit pour faire .infirmer
le jugement dont est appel,
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P a r conseil,, G A S C H O N , ancien jurisconsulte.
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an d r i o t ,
d'appel. ~
'
■
i • .
im p rim eu r d u trib u n al
A n 9.
�G É N É A L O G I E .
Hugues d}Avignon*
Marguerite Planchette.
Marguerite d 1Avignonx
D écédée le i 3 octobre 1691.
Magdeleine d’Avignon,
Jacques Sabatier.
t
Marie-Magdeleine ,
Décédée le 3o jan vier 1723.
André-Vital Jouve-Ladevbze,
André,
N é le 23 mars 1683.
Charles, prêtre%
N é le 3 mars 1690; décédé le
Vitalx
N é le tg ju illet 1681 ; marié le là octo-.
22 janvier 1768»
bre 1704; décédé le 4 févr. 1726.
Marie Bordet de Brives*
\
Jean-- Gabriel,
N é le 23 aoât tjuà ; décédé le 20 avril »773.
Premières noces.
ß/arie- Gabrielle Laurenson A
Secondes noces.
Marie Pichot ,
M ariée le 23 février 1737.
M ariée en 1741»
\
I
Charles ,
Pierre-François ,
N é le 8 octobre
M arié avec Isabelle Rome v
>737■
N . «.. Ladevèze*
y
C*.
'»'
appelant.
y»»“
Jean-Gabriel, Pierre, Joséphine, Jeanne-Marie,
Intimé«.
Charles-Louis ,
Toussaint, Marguerite-Antoinette Guigon.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jouve-Ladevèze. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gas
Croizier
Subject
The topic of the resource
donations
fideicommis
franc-alleu
jardins
partage
doctrine
généalogie
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse pour Charles-Louis Jouve-Ladevèze, négociant, habitant de la ville du Puy, appelant et demandeur en opposition ; Contre Jean-François-Xavier, Pierre, Jeanne-Marie et Joséphine Jouve-Ladevèze, frères et sœurs, et Jean-Baptiste Blanc, mari de Joséphine, de lui autorisée, habitans de la même ville, intimés et défendeurs en opposition.
Arbre généalogique.
Table Godemel : Donation : donation faite, antérieurement à l’ordonnance de 1743, en faveur du mariage, au profit du contractant, ou, à un ou plusieurs enfans qui seront procréés dudit mariage, est une substitution fidéicommissaire, qui saisit exclusivement les enfans provenant de ce mariage.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1737-An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1115
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1116
BCU_Factums_G1117
BCU_Factums_G1118
BCU_Factums_G1119
BCU_Factums_G1120
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53143/BCU_Factums_G1115.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
donations
fideicommis
franc-alleu
généalogie
jardins
partage
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53669/BCU_Factums_M0128.pdf
10b4808a8fc5e473b3a875c2689a2331
PDF Text
Text
‘[uKCy UnitiV‘0 [te
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'■ t *
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*y y
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MÉMOIRE EN RÉPONSE
p
o
u
Tribunal
D'appel
r
S e c t . II.
C h a r le s - L o u i s J O U V E -L A D E V E Z E
négociant habitant de la ;v ill e; du P u y , appelant
et demandeur en opposition;
C O N T R E
J e a n - F r a n ç o i s ~ X a v i e r ,
J e a n n e -M a r i e
et J o s é p h i n e
L A D E V È Z E , fr è r e s . et
.B a p t i s t e
BLANC ,
P i e r r e ,
JO U V E -
Sœurs , et J e a n -
mari de
J o s é p h in e ,
d e l u i a utorisée, habitans. de la même v i l l e . i n t i m é s et défendeurs en opposition.
L'A P P E L
sur lequel il s’agit de p ro n o n cer, embrasse
quatre objets, dont trois seront discutés en peu de mots;
l e quatrième présente, deux questions qui consistent à
�.
( 2
i° . S i une donation contrae'tûellç f a i t e 'en fa v e u r
d un neveu , ou à un ou plusieurs des enfans q u i seront
procréés du m a riag e, toutefois au choix du donateur,
renferm e une substitution fidéi-com m issa ire en fa v e u r
des enfans.
2°. S i la particule disjpnçtive^on a pu être convertie
en la conjonctive e t , afu{ \de ' créer, p a r ce moyen >
une substitution dans le contrat de mariage.
A van t de se livrer à l’éxamen de ces questions , il
est im portant de donner une connoissance exacte de
quelques faits qui se sont passés dans la famille 'des par
ties , et des contestations qui se Sorit élevées' entre elles.
f
" f a i t s . "
ii ' 1 ».• (
»’ *■ ■
.........J *
D u mariage d’Hugues d’A vign on avec M arguerite
Planchette, issurent M arguerite et M'agdélei'ne d’A .vigrroh.
L a première fille ne fut point m ariée, et la seconde
.épousa Jacques Sabatier : de ce mariage issut M arieM agdeleine Sabatier, qui étoit propriétaire du jard in ,
dont partie fait l’un des pVinçipaux ^objets de la cause.
E n 1688, M arguerite d’A v ig n o n fit une donation de
tous ses biens ,• en faveur de Marie-Magdeleine Sabatier,
sa nièce: M arguerite d’A vign on étant décédée en 1 6 9 1 ,
sa donataire se" m it'è ii‘ possession du jardin. Ce fait ne
sera pas contredit : la preuve en est d’ailleurs consi
gnée dans différent actes, dont l’appelant oiïre la com
munication.
'‘
Marie-M agdeleine Sabàtier avoit épousé' A n d ré-V ilal
Jouve-Lajlevèze ; ils eurent trois enfans, André } Charles
�'
C3 )
et V ital Jouve-Ladevèse : Charles embrassa l’état ecclé
siastique.
; ' '
. L e 2.5 octobre 17 0 4 , V ital J o u v e-L a d ev èze ayant
épousé Marie Bordet de Brives;, M arie - Mugdeleine
Sabatier, sa m ère, qui étoit alors veu ve, lui lit dona
tion de larmo}tié de to u sses biens meubles çt immeu
bles, noms, •droits .çt actions, .présens et à ven ir; en cas
d ’incompatibilité , , elle, ;s’obligea,à lui -délaisser la jouis
sance d’une m aison, et-à lui délivrer annuellement trois
setiers de b l é , et s ix charges de f r u i t de son verger.
C ’est le jardin-verger dont il s’agit, puisque la donatrice
n’en avoit_point d’autre. • .
A u moyen de cette donation, il est évident que V ital
Jou ve-Ladevèze devînt propriétaire de la moitié de ce
jardin.
Il n y eut qu’un enfant du mariage de V ital Jou veLadevèze avec M arie Bordet de B rives: J ea n -G a b riel
J ouve-Ladevèze.
E n 1731 , il s’éleva entre les consuls de la ville du
P u y et Jean-Gabriel J o u v e -L ad evèze, unique héritier
de ses père et m ère, la question de savoir si ce jardin
étoit allodial : cette question donna lieu à un procès
très-considérable en ’la ci-devant cour des aides de M ont
pellier ; et après différentes vérifications et deux arrêts,
il en fut rendu un troisièm e, le 4 décembre 17 3 4 , qui
déclara définitivement ce jaj’din noÎDle, ordonna qu’il
seroit rayé du nouveau* com poix -de la ville.d u P u y ,
e t fit défense aux consuls de l y comprendre à l’avenir.
Jean-Gabriel Jo.uve-Ladevèze fut seul partie dans ce
propès ; qe qui doit faire croire qu’il étoit seul proprié‘
' ‘ '
A %
�<
( 4 )
,
r _f
taire du jardin. O n ne plaide pas en son n om -pour le
fait d’autrui. U n bienfait de la part de C h arles'Jou veLadevèze, prêtre \ a néanm oins'fait, Aaît’re un°dbüte-sur
le point de savoir si Jean - Gabriel 'J o u v e - Ladevèze
avoit la propriété entière de ce jardin , comme elle lui
pàroissoit assurée parles trois arrêts de la c o u r ;des ni'des1
de Montpellier*j
s’il n’en avoit qu’une moitié'^d^près'
là donation ins^'eG datis’îe.côntrat'^è Tcíaria:g e:■cïéi<V ita l,
J o u v e , son père. Ce doute pténd^sh«so'urcë:dâhs: Îè p'rè-3m ier contrat de mariage de ‘ Jean - Gàbrièl J o ü v ë La-*
devèze.
...... *- K i '' L • ; j :.
'I
L e 23 février 1 7 3 7 , Jean - G abriel JoüveI-Xià'dèv'èze;
épousa en premieres nûces, ftÆarie-GàbriélIe! 31iaurèrisbnj
qui eut pour dot une somme de 7,000 liv. C ’est dans
ce contrat que les intimés ont cru trouver la preuvei
que la-totalité de ce jardin appartenoit a ii’prêtre La'dev è ze , et apercevoir une“ substitution fidéi-commissaire ,
en faveur de leur p è re , qui étoit l’un des enfans issus
de ce mariage ; la clause ‘est ainsi conçue : : . •
’ E rifa v eu r dudit m ariage, ledit sieu r Charles Jouve
de L a d e v è ze , ( 'prêtre ') \a 'd 6 h iié et cëdc dès à présent,'
par donation f a i t e 1ëÀ trè-vjfs\'pàré , parfaite \etirré~*
vocable, a u d it’¿ îè 'à ? ^ è a n -G a b r ib lJ b ïlv ë Ad ë Ê a d é v è ze,
son neveu , f u t u r ' jêpôùïè‘), ' à ècèp ia h t, et hum blem ent
rem ercia n t, tous les droits 'et prétèntions qu il pouvait
à'çotr su r les biè 9is desditsu)défiints sieür V it d l Jouve'
de L a d ey eze et M a rie ■ÎBiordeï‘ d'ê ‘B oives , rpère''ët mère*
dudit 's ïe û ïf u t ü ÿ t y o u x 'ï 'eiPgudv ¿f'àe'ïê' tôiif'ccïnsbtlP
et'p uisse 'consister, sdéclarant lesdits sieurs dé L a d e
vèze 3 oncle et ncvcu^yqüe lesdits droits et-prétentions.
�. . c . s )}
ci-dessus cèdês^et- d o n n e s sont, de valeur de ' la somme
de 5oo lu’ Jw
jnême , en f a v e u r que
dessus , ledit sieur■
Ghdrles de L a d e v e z e , à aussi[donné
p a r même ■
donation que dessus , audit sieur J e a n
G abriel Jouve de L a d ev èze , son neveu , acceptant et
rem erciant com me dessus , ou à un ou plusieurs des
enfans q u i seront procréés du présent m a ria g e, tou
tefois au choix dudit sieur Charles de L a d e v è ze , p rê
tre, la m oitié du ja rd in planté en verger, q u 'il a situé
près Venclos des R R . P. ja cobin s de cette ville ; ladite
m oitié dudit entier ja rd in à prendre du coté où bon
semblera audit sieu r de L a d e v è z e , prêtre, sous la ré
servé- des fruits- pendant sa vie
laquelle m oitié du
ja rdin ci-dessus donnée, ledit sieur. Charles de L a devèze,
p rêtre, a .déclaré être de valeur d é jà somme de 3,000 hv.
E n considération desquelles susdites cessions et dona
tions , ledit sieur. Jea n - G a briel Jouve de L a d ev èze ,
f u t u r é p o u x , a donné audit sieur de L a d e v è z e , son
o n c le , la jou issan ce pendant sa v ie , de la seconde
cham bre de la m aison que ledit sieur Jean - G abriel
Jouve de L a devèze a située dans cette ville, rue St.
G ille s , etc.
.
.
■ D e ce mariage furent procréés trois enfans, savoir:
Charles, filleul du- prêtre;Ladevèze-, né le 8 décembre
173 y , Pierre-François, père des-intimés, et N . . . JouveLadcvèze qui naquit le i 5 juillet 173 9 , et décéda aussi
tôt après sa naissance-xf * t) 0
*
‘ Eiii.T74'i ^iJ.eari*vGabriel J o u v e-L ad evèze épousa, en
secondes noces¿oMarie P ich o t: il en eut trois enfans, du
nom bre desquels est l’appelant, qui a acquis les droits de
scs cohéritiers.
�(■6)
L e 1 5 septembre 1768 ,Pierre-François Jouve-Ladevèze
ayant contracté mariage avec Élisabeth R o m e , Jean
Gabriel L a d evèze, son p è re , lui fit un abandon des biens
de Gabrielle Laurenson, qui consistaient, comme on vient
de l’observer, en une somme de 7,000 francs. P ou r s’ac
quitter de cette somme envers son fils, le père lui délaissa
la propriété d’une vigne estimée 1,000 francs, et il lui fit
des délégations pour le surplus, à l’exception d’une somme
de 1,9 9 0 francs 1 o sous, que le père prom it payer à des
termes assez rapprochés, avec l’intérêt : à défaut de paye
m ent ti l’échéance des termes. Cette somme a été surpayée,
soit par le p è re , soit par l'appelant, son héritier institué.
Il a même été payé sur la légitime qui avoit été faite au
père des intim és, une somme d’environ 4,000 fr. mais ce
ne sont point de ces payemens q u’ou dpit s’occuper dans
Ja cause.
Par son testament du 20 avril 1773? J e a n ’-G abriel
Jo u ve-L ad evèze donna, à titre d’institution, à PierrePrançois Jouve-L ad evèze, son fils du prem ier l i t , et père
des intim és, la somme de 3,5oo liv. Il fit plusieurs autres
dispositions, qu'il est inutile de rappeler , et institua l’ap-*
pelant son héritier universel.
A près le décès de Jean-Gabriel Jouve-rLadevèze, et le
28 juin 17 7 4 , le père des intimés forma contre l’appelant,
en la ci-devant sénéchaussée du P u y , quatre chefs de
dem andes, ce qui donna lieu à un appointeraient en droit.
L ’instance reprise à la place des parties décédées , et la
cause portée au tribunal de la H aute-Loire, intervint, le
27 pluviôse an 7 , le jugement dont est appel.
JEn rappelant les quatre objets dé la contestation, on
�• À ■‘
^7 ^ .
•Tappelera en tncme temps les dispositions du jugement
‘ dont se plaint 1 appelant, mais on ne fera que quelques
très-rapides observations sur lës trois premiers objets.
P R E M I E R
OBJET.
’
L e père des intimés prétendant que la vigne qui lui
avoit été délaissée pour la somme de i ,000 liv» en paye
ment de la restitution de partie de la dot de' Gabrielle L aurërison, ne valoit pas 5 oo liv. demanda que l’appelant fût
condamné' à la reprendre et. à lui payer la somme de
% :oob liv. L ’appelant y consentit: à 1 audience du 27 plu
viôse an 7 , les intimés ayant déclaré qu’ils consentoient de
garder la vigne pour 1,000 fr. le tribunal, au lieu de les
débouter de leur demande à cet égard, et lés condamner
aux dépens, se contenta de leur donner acte de leur dépar
tem ent , et de ce qu’ils consentoient à garder la vigne.
L ’appelant a observé qu’il auroit été plus régulier de
débouter les intimés de leur dem ande, et les condamner
aux dépens faits;sur icelle , puisqu’ils avoient persisté dans
leur demande jusqu’au jugement de Tiristance, ce qui avoit
occasionné des frais assez considérables. Cette observation
étoit certainement dans le cas d ’être faite, puisqu’elle con
court, avec bien d’autres, à prouver l’irrégularité et l’in
justice du jugement dontiest appel. !
1 ■ .
1
.
SE C O N D
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O B J E T .
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!
^
\ ' •' P a r le second c h e f, le père des intimés avoit demandé
le payement de la somme de 1,000 liv. 10 sous, restée
' ' •r •
1 n» i
.
�.
( * ' )
.
’ due sur la restitution de, la dot.de Gabrielle Laurensojp.
Les premiers juges ont ordonné un compte à ce sujet,
et en cas d’appel de leur jugem ent, ils ont condamné
l'appelant à payer par provision cette somme de 1.990
liv. 10 sous.
• /' . i
;■
Ce dispositif, qui adjuge une p rovisio n , paroît évidem
ment injuste, jçft' pour le dém ontrer, on se contente, d?ob- s e r v e r d?une pari y.;qu’il est prouvé que cette somme .a
-été surpayée ;<et que d’une autre, en supposant que l’appeJan t en fût/encore débiteur, il ne pouvoit être obligé k
■
sen libérer qu’ à.la charge par les intimés , de rapporter ,1a
-m ain-levée des saisies-arrêts qui ont été faites entre0ses
mains.
,
* »-,
-i » • .
....... " ' ' ' ' ‘J *r' - " ••
- T R O I S I E M E
O B J E T .
'
......
:•»«>" . a
L e troisième chef est relatif au partage des biens de Jean
Gabriel J o u v e -L a d e v èze , aïeul et père des parties. L e
père des intimés avoit form é la demande en partage, et les
•premiers juges l’ont ordonné du consentement de rappe
lant: aussi ne se plaint-il pas de ce dispositif; mais ilseplaint
-de ce qu’on n’a pas ordonné que les intimés lui rem bourr
seroient les sommes qui leur ont été payées ù compte de
la légitim e conventionnelle qui avoit été faite à leur père
par le testament du 20 avril 1 7 7 3 , avec les intérêts, à
com pter depuis chaque payement. Comm e ce rembourse^
ment est de justice, et qu’il ne sauroit par conséquent être
contredit , l’appelant ne se permettra point d’autres obser^
Rations,1
' • : .
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.
Ce quatrième objet- de la contestation est relatif au
désistement de la moitié du.verger; désistement qui a été
ordonné par le jugement, dont.est appel; il donne lieu,
comme on vient de l’annoncer,, à deux questions.
P r e m i è r e -
Q u e s t i o n .
-
E x is te - t- il dans le prem ier contrat de mariage de J e a n - <
■
G a b riel J'ou v e-L a d ev ëze, une substitution fid é i-c o m -1
m issaire en fa v e u r des enfans q u i seront -procréés de
ce mariage ?
, Si l’on se ré fè re , ainsi qu’il est de justice, aux termes,
de ce contrat'et aux principes reçus dans cette m atière, il
est im possible, que sans prévention, on puisse y découvrir
une substitution fiddi-commissaire.
j Personne n’ignore que la-substitution est une institution
d’héritier faite au second degré ou autre plus éloigné. Elle
se fait ou par une disposition entre-vifs, ou par une dispo
sition de-dernière volonté. L a substitution.contractuelle
n’étoit pas admise en France ; elle n y a été reçue, que par
un usage particulier et contre la disposition du droit romai n. ,
O n connoit aussi la différence qu’il y a entre une substi
tution vulgaire et une substitution fidéi-commissaire. L a
prem ière n*a pour o b je t, que d’assurer un héritier au testa
teur. Celui qui recueille la succession, n’est pas tenu de
la remettre à un autre; elle lui appartient incommutablement et sans retour. L u c iu s -T itiu s hœres esto , s i m ih i
B
�.
..
(
( 10 )
L u c iu s - Titius non e r it , tune S c i us hceres meus esto { i )
Il en est autrement de la substitution fidéi-cominissaire.
P ar Je moyen de cette substitution, on fait passer une
succession ou un legs, d’un héritier ou légataire à un
autre; on le prioit autrefois et on le chargea ensuite de
restituer l’hérédité ou le legs: dans ce cas, la disposition
parcourt plusieurs degrés. J ’institue T itiu s^ et le charge de
remettre ma succession à Seius. (2).
r
f
Dans les substitutions, deux choses doivent principale
ment concourir ; savo ir, l’intention du testateur e f les *
paroles propres et comme consacrées à l’effet des substi
tutions.
•
E a ligne collatérale, 011 ne présume jamais la substitu
tion ; et comme elle n’est point favorable, il faut en ce cas,
qu'elle soit expresse. C ’est la différence qu’il y a sur ce sujet,
entre la ligne directe et la collatérale. En ligne directe,
la conjecture de la piété paternelle fait qu’on se contente de
présom ption pour em pêcher que la disposition ne soit
caduque. Mais en collatérale, il faut que quiconque veut
substituer s’explique en term esfo rm els, en sorte qu’on ne
puisse douter de sa v olon té(3 ).
Dans de semblables questions il ne doit pas y avoir dûin
terprétations a rb itr a ires, dit le législateur ( 4 ) ; il faut
donc chercher les substitutions iîdéi-commissaires dans la
disposition littérale de Vacte qui les contient, et non dans
les conjectures que les lois n’aulorisent p as, et qui ne sont
( 1) L . 1. § • 1. iî* de vulg. et pup. substit.
(2) D ejideic. hœred. §. 2.
(3) A u t. du jo u r, du pal. p. J25 .
(4) P rcam b. de l’ordon . de 174 7.
�.
.
( 11 >
.
que des imaginations des auteurs, qui d’une matière aisée
et fa cile, en s attachant exactement a u x règles du droit
r o m a in , avoient fait une hydre et un monstre presque
incom préhensible, et où la droite raison avoit fait un triste
naufrage.........................Pour former une substitution fidéicom m issaire, soit par testament ou par contrat, (car à cet
égard il n’y a aujourd’hui aucune différence ) il faut une
volonté expresse ; c’est-à-dire, qui soit exprim ée par les
paroles, ou qui résulte du sens et de la signification des
paroles ( i ).
Ricard (2 ) s’explique à peu près de la même manière : il
fa u t, d it-il, se souvenir de la maxime que nous avons
établie ailleurs, qui doit servir de principe général à cette
matière : que quoique les fidéi-commis ne soient pas odieux,
ils sont pourtant de rigueur ; parce qu’ils vont à charger
l’héritier ou un premier fxdéi-comrnissaire, pour qui le
testateur a tém oigné quelque prédilection en les com •prenant les premiers dans sa disposition : si b ien , que
quand une personne ne se trouve pas expressém ent com
prise en la substitution, elle ne doit pas être étendue en
sa fa v e u r , à moins qu’il ne s y rencontre une espèce de
nécessité, et que les circonstances qui se trouvent dans la
disposition, ne fournissent des conjectures violentes pour
faire connoître clairem ent, que la volonté du testateur a été
de mettre la personne dont il s’agit au rang des substitués.
Si l ’ o n compare ces autorités avec les termes du contrat de
mariage de 1737 >on demeurera convaincu qu’il n’est pas pos(i)Furgole, sur le préamb. de la même ordou.
•, (a) T.om.
paît* i. cbap.' 8, a0, 393,
‘
B 2
�^
( 12 )
sible d y trouver une substitution fidéi-commissaire en fa
veur du père desintimds.il n’y a en effet, ni termes formels,
ni disposition littérale, ni nécessité de substituer, ni volonté
expresse manifestée par le sens et la signification des paroles
du donateur ; il n’y a enfin ni circonstances, ni conjectures
violentes qui fassent connoître clairement sa volonté : on
ne peut donc pas dire que la donation de 1737 , renferme
une substitutionfo rm elle en faveur du père des intimés.
Mais s’il n’existe pas de substitution littérale, on ne sauro it la faire naître de l’intention du donateur : tout s’oppose
à une pareille idée. i Q. La.donation est faite'en faveur d’un
n eyeu , que le donateur devoit certainement plus affection
ner , que des enfans qu il n e ^ o u v o it connoître : 2°. le
neveu est le prem ier gratifié; il accepte la lib éralité, et
les enfans, qui peuvent naître de son mariage,- ne sont
point appelés concurrem m ent avec lui. E n même fa v e u r
que dessus , ledit sieur Charles de L a d ev èze •a a u ssi
donné par même donation que dessus, audit sieur J e a n
G a b riel Jouve de L a d ev èze , son n eveu, acceptant et
rem erciant comm e dessus-y ou à nm ou plusieurs des
enfans q u i seront procréés du présent m ariage, toutefois
au ch o ix dudit sieu r de L a d e v è ze , prêtre, etc. O n voit
■par ces termes que c’est uniquement après la donation
•faite, acceptée et par conséquent parfaite, que le donateur
s étant rappelé que le donataire ¡pouvant m o urir avant lui,
•ne recueilleroit pas l’effet de la donation, a jeté ses vues
.sur les enfans qui,,pourroient naître de ce mariage 5 mais
comme il ne vouloit pas que ces enfans profitassent de sa
libéralité concuri’emment'avec leur p è r e , u itWiûme ordine
su ccessiv o , si le père lui siuvyiypit, qu'il-ne vouloit avoir
�' ( 1 3 ')
.
quuri donataire , ou son n e v e u , où en cas de prédécès,
l’un des enfans qui pourroient naître du m ariage, il a
manifesté sa volonté en se servant de la particule disjonc■tive ou.
< Despeisses ( i) a observé à ce sujet que si entre les héritiers
institués sous la diction disjonctive o u , il y a ordre d’a f
fe c tio n ', ils sont appelés par ordre successif ; c’est-à-dire,
que si le testateur a institué son a m i, ou les enfans de
l'a m i, lesquels à peine il connoissoit , on estime qu’il a
.voulu suivre Tordre de son affection, et ri appeler les en
fa n s q ü à u défaut de l’a m i, et qu’à cette cause il a fait
l'institution avec la diction disjonctive. lie n estautrem ent,
•continue Despeisses , si ledit ordre ne se rencontre point7;
:car alors toussont appelés conjointem ent, la particule dis-jonctive étant prise pour copulative, ut prim am perso■nafn inducat et secundam non repeïïat, comme ditla l o i ,
cùm q u id a m , invoquée par les intimés.
Xacom be (2) répète exactement lès mêmes paroles de
.Despeisses.
’
*
L e marne ‘auteur (3) dit que si entre les institués, il y
-a ordre de necessite, le testateur est censé avoir voulu
sui\ re cet o rd re , Nonobstant la diction conjonctive et j
exemp .7 institue mon f i l s et ses enfans • que ceux-ci ne
■
sont institués qu au-défaut .du fils en prem ier d e g ré , et
-ne «ont appelés que vulgairement au défaut du père.
‘
M æ nochius(4) îapporte différens cas, où la présomp(1) Tora. 2 , p. 34.
(2) Vcrb. testam. p. 748.
(3) lbid. na%5, et verb, substit. «”.20, jt?. 671.
(4) Lib. 4, p. C8.
.
�.
^ 14 )
.
tion est qu’il y à fidéi-com m is, et à ce sujet Lacom be (1)
observe que ces cas et tous les autres, q u ’on pourrcit à
ja m a is im a g in er, se réduisent au point desavoir si par
les term es, l’héritier ou le légataire est chargé expressé
ment ou tacitement de rendre l’hérédité ou le legs à un
tiers. Car où il n’y a point de charges de restituer expresse
ou tacite, il ne sauroit y avoir de fid éi-com m is.
Sain t-L éger, au rapport de D u p érier(2 ), traite trèsbien cette question. Il décide, dans le cas d’une substitution
faite par un on cle, en faveur des enfans de sou frère, mâles
ou fe m e lle s , que le mot o u , for m'oit une disjon ctiçe,
et que les filles n’étoient censées appelées qu’en défaut
des mâles ; il dit que tel fut aussi l’avis de plusieurs ju
risconsultes. Il rapporte les raisons pour et contre, et
ajoute que la diction alternative indique un ordre suc
cessif. N a tura dictionis altem atw œ hœ c e s t, ut ostendat ordinem inter v oca to s, ut unus non censeatur
v o c a tu s, n i si iji su b sid iu m , et in defectum alterius.
Il dit encore qu’en cette matière sim ultaneœ vocationis,
il faut considérer i°. l’ordre de V écriture; 20. celui de
la succession, réglé par la form e en laquelle on suc*«
céderoit ab in testa t,• 30. l’ordre de la nécessité, par
exem ple, lorsque pour la validité d’un testament on
doit nécessairement instituer quelqu’un héritier; 40. l’ordre
d’aifection. Il observe ensuite qu’ordinairem ent, on s’ar
rête à ces deux dernières , u t e x illis paritas , vcl disparitas colhgatur.
(1) Verb. substit. p art.
(2) T o fii. 3 , p .
437*
scc t. i T0. n°. 10,'
'
�( C Ï5 )
E n faisant à l’èspèce l’application de ces principes, tontes
les circonstances concourant et se réunissent pour dém on
trer qu’il ne subsistait pas de substitution-iidéi- commissaire
en faveur du père des intimés. I o. L e neveu , donataire, se
trouve le prem ier dans l’or'dre de l’écriture. 2°. S’il n y
avoit pas eu de donation, et que Jean-Gabriel Ladevèze
eût survécu à son on cle, il lui auroit succédé exclusive
ment à ses enfans. 30. O n ne peut douter que TaiFection
dut prêtre Ladevèze ,1 ne se soit jportée plutôt sur son
n e v e u , auquel il avoit fait don par le mêmeacte de certains
droits successifs, que sur'dés ënfans'qui n’existoient pas
encore. 4 0. E n fin , pour ne point laisser d’incertitude sur
son ‘intention, le prêtre Ladevèze se sert de la diction
disjohfctive, lorsqu’il considère'les enfans qui pourroient
'ñ'aítre1 ’du m ariage, et le cas où son neveu viendroit à
décéder avant d’avoir recueilli l’effet de la donation. L e
prêtre Ladevèze vouloit que les biens par lui donnés ,
restassent dans la famille de son neveu 5 mais il n’entendoit
appeler les enfans qu’au défaut du donataire et par la voie
d’une substitution vulgaire.
'
•
O b j e c t i o n .
*
" Mais on ne p e u t, dit-on, supposer une-substitution
vulgaire dans une donation faite dans un contrat de
m ariage, où le donataire accepte d ans le même instant la
libéralité qui lui est faite. T o u t est consommé par son
acceptation, etc.
R é p o n s e .
Les contrats de mariage sont susceptibles de toute espèce
�.
(i6)
.
.
de conventions, pou rvu qu’elles ne soient contraires ni à
l’honnêteté pu b liq u e, ni aux bonnes mœurs. O n peut
donner et retenir; on peut donner, sous con d ition , sans
réserve, et à -la charge d’une substitution au p rofitd îu n
a u tre ; m ais-comm e cette substitution est faite par. une
donation entre-vifs? elle est irrévocable. Il est doncpermis de supposer une substitution vulgaire dans le*
contrat de mariage de Jean-G abriel Jo u v e - Ladevèze ,r
puisqu’il n’y existe pas de substitution.fidéi-commissaire.
O B J ’ E C T I 0 N.
'
.
L es enfans, ajoute-t-on , étoient éligibles ; ils étoient,
donc nécessairement compris dans la- disposition, et si
le donateur n’eût point fait de fidéi-commis, il n'eut pu.
se réserver l’élection*
•
R
«
é p o n s e
.
Ces enfans n e p o u v o ie n t être compris dans la dis
position , à l’effet de recueillir concurrem m ent avec leu r
p è r e , ni m êm e ordine su ccessiv o , puisque le donateur
les en avoit exclus par la diction disjonctive ; ils devenoient éligibles, si le donataire étoit décédé avant le do
nateur ; mais cette élection facultative ne fut jamais dans
l’intention du donateur.
Supposeroit^on, au surplus, qu’il eut été dans son in
tention de faire ce choix du vivant du donataire, il
suffit qu’il ne l’ait pas fait pour, que les biens donnés se
soient irrévocablem ent consolidés dans la seule personne
i
°.
du- donataire,
■
3 °.
�X * 7 j)
2°. Il doit en être de ce cas com m e de celui où un dona
teur, avant 1 ordonnance de 1747 ’ s e toit réservé la faculté
de substituer aux biens donnés; s’il ne faisoit point de subs
titution , le donataire demèuroit propriétaire, incommivtable des objets compris en la donation,, com m e ll’attesle
Furgole (0* Il est lib re , dit-il au donateur d’user ou de
ne pas user de la faculté qu’il s’est réservée de substituer
aux biens donnés; que’ s’il ne fait pas comprendre d!une
manière sensible, et sans éq u ivoq u e, qu’il en a u s é , c’est
une preuve certaine qu’il n’a pas voulu en profite? , et qu’il
a voulu laisser les choses dans leur entier ; car autrement
il n’y a aucune apparence qu’il ne se fût pas différemment
expliqué!
Ce n’étoit pas, au surplus, une donation purement gra
tuite qu’avoit faite le prêtre L ad evèze, puisque le donataire
lui abandonnoit la jouissance d’une partie de sa maison;
ce qui formoit entre les parties une espèce d’acte synallagmatique. Il n’est pas à croire que le donataire eut voulu
faire des sacrifice/ réels pour une espérance incertaine.
3°. O n peut, en faisant une institution au une donation
contractuelle, se réserver là faculté de donner;à l’un ou à
plusieurs des enfans de l’héritier institué ou du donataire,
sans, qu’on puisse en inférer que cette réserve contient *un
fidéi-commis en faveur de ces enfans : c’est une conven
tion. permise dans les contrats de mariage. Un père qui
marie son filsi, et qui l’institue son héritier universel, se
réserve trèsrsouvent le; droit de choisir un autre héritier
parm i ses petits-enfans, dans le cas où l’institué décéderoit
------ ------—
----------------¿H----—^ -----i 11T;|I |‘ ,---- - " !I ^ — ! •••’ • '
• (t)iDQS.'dbjaûtiJl2Qllu ¿^ quest,ia8 > :n°. 31.,
iirt
:j;,‘ , t n ;
C
�'
...
.
.'0 8 ')
avant l’instituant : ces sortes de résérves' sont'assez ordi
naires. Il n’existe pas néanmoins de fidéi-commis ; ainsi on
•peut, sans cela, se réserver la faculté d’élire parmi les
enfans d’un héritier et ceux d’un donataire.
A p rès avoir prouvé que dans le contrat de mariage de
1737) ü n’existe point de fidéi-commis en faveur du père
des intim és, il s’agit d’examiner si on peut y en supposer
u n , en dénaturant les termes de la langue française.
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P eu t-o n créer une substitution jîd éi-com m issa ire dans
une donation contractuelle, e n j substituant la diction
'conjonctive et a la diction disjonctive o u ? ' ■
‘ P o u r prouver que dans le cas d’une disposition faite
au futur époux ou à ses enfans, la disjonctive doit être
prise pour copulative: les intimés ont invoqué la loi cùm
quidam 4 , au code de- verb. et rer. s ig n ifiâ t l’avis de
Catellan, celui de Furgole j et d’àutrës. ■
, !>■ x t ( > '
' ;ües autorités sont, à la v é rité , très-respectables; mais
elles ne peuvent recevoir d’application à l’espèce; pour
le dém ontrer, il suffit de faire quelques observations.
** i ° . On ne contestera pas, sans doute, que les donations,
lés-institutions et les substitutions contractuelles, n^ontpas
été-en usage parmiiles Rom ains, qui n’admettoient d’autre
forme de disposer que 1celle des testamens : la faveur des
contrats de mariage les a fait admettre en France, même>
dans-les pays de droit écrit; et quoiqu’elles soient contraires
aux dispositions de la-loi rom aine, ellesisout aussi favorables
�( 19 )
parmi nous que les testamens 1 etoicnt chcz Igs Romains»
O r , la loi càm q u id a m , qu’on oppose, ne peut être
relative qu’à des dispositions testamentaires, et non à des
contrats entre-vifs. Il est permis d’interpréter-, môme avec
la plus grande latitude, la volonté d’un testateur , parce
qu’il arrive très-souvent, ou qu’il ne peut ou qu’on ne
lui laisse pas ^ lib e rté d’expliquer ses dernièresintentions,,
ou qu’elles sont rédigées bien différemment qu’il les a
dictées. Mais il n’en est pas de môme dans les contrats entre-,
v ifs, sur-tout dans les contrats de mariage; les conventions
qu’on y fait, les clauses qu’on y insère, sont toujours l’effet
d’une volonté réfléchie : ce sont des arrêtés pris par les
époux dans le sein de leurs fam illes, et par leur conseil.
Il faut donc s’en tenir aux propres termes dès-contrats de_
mariage qui sont de droit étroit, et s’abstenir d’interpréter,
un acte, lorsqu’il ne présente aucun doute ; cùni in verbis
m dla est am biguitas, non debet admitti voluntahs qitœstio ( i ) , disent. les lois. Si cette décision a lieu dans le cas
d’un testament, on doit à plus forte raison la respecter
pour un contrat de mariage.
•
'
. ...
t -2°. L a même loi, cùm quidam , parle de deux personnes
indifférentes ,-et entre lesquelles il n’y a point de sujet et
de raison de préférence. Ille aut ille hœres m ih i esta ,• v e l,
illi aut illi d o , lego, vel d a ri volo : vel ilium aut ilium
liberiun , aut tutorem esse volo j veljubeo. Mais il doit
en être bien autrem ent, quand la diction disjonctive se
trojuye entre des personnes inter quas ca dit ordo charitatis et affectionis dans, ce (cas, il ne peut y cavoir lieu
�( SO j
^
à la conversion, comme l’observe D u p e rie r'(iJ , lorsqu’il
s’agit des mâles et des femelles, et surtout en matière des
fidéi-com m is , qui visent à conserver'les biens dans la
fam ille, ainsi qu’il paroît par la lo i, cùm p ater, § .à te peto
de légat. 2,, et la lo i, hceredes m e i, §. ult. ad sénat, trebell.
C ’est aussi l’o p in io n , ajoute D u p érier, de Paulus de C astro,
sur cette l o i o ù il dit qu’elle n’a pas lie u , quand il y a
quelque ordre : ce qui est si certain q u e , quarid il a quelque
raison de p référen ce, en ce cas , bien loin de changer la
disjonctive en conjonctive pour les ég aler, il faut changer
la copulative en disjonctive, pour préférer celui que vrai
semblablement le testateur a voulu préférer 5 comme j
quand un fief est inféodé aux mâles et aux filles, les niAles
sont p référés , nonobstant cette conjonction qtii les cliange'
.
en disjonction ; F u sa riu s de Jideicom . quest. 2 79 ; après
Alexandre et autres, n °. 78.
‘ O n croit inutile de répéter que dans l’espèce on ne sauroit
douter que le donateur n’ait voulu préférer son neveu aux
en fans, qui pouvoiént naître désbn mdriage.
••
30. Dans la loi qu’on oppose , il n y à qu’ Uné' seülê dic
tion disjonctive, et ¿ans’ le ''contrat dé marüfgë dé 1 7 3 7 ?
il s'y en trouve deux : û, d on n é, cornme dessus audit
Jea n -G a b riel Jouve-L adevèze , son neveu , accfëptàiït
et rem erciant, ou â un ou plusieurs deéenfahs qui seront'
pYOCi'éés du présent m a ria g e, e t c .... Dans le système méirlC des intim és, il faut ou que les deux; disjorictiVdS
subsistent, ou que l?une' et Tauti-é soient converties etï
côpufatiVesY. nu premier cas *■
’'il he pèut y avoir de subâtï\
( 1) Tom. 3 ^liv. 4 ; quest. 2 1 . " • ' . '
“'’l
*»
■ 1 t > .■
’
�_
C ai )
tution fidéi-commissaire eii faveur du père des intim és,
puisqu il s en tio u vo it p u v é par deux disjonctives ; ail
second cas, la clause préseriteroit une espèce d’absurdité,
puisque le fidéi-commis devroit appartenir tout à ]a fois et
à un seu l enfant, et à plusieurs. Il en seroit, à peu près, de
cette hypothèse, comme de celle dont parle la loi 1 2 4 , au
if. de verb. sig n if D isju n c tiv u m , dit-elle, est veluti cùm
dicim us , aut die s aut n o x est, quorum posito altero ,
necesse est toïli alterum : item, siiblato altero , p o n i
alterum.
- ■4 0. Il est dès cas, l’appelant en convient, où il est perm is
de convertir la disjoncti've en copulative, et vice versa,'
s’iL s’agit', par exem ple, d’em pècher la caducité d’un tes
tam enta défaut d’un h éritier, d’appeler à un fidéi-commis
un parent du testateur à la place d’un étran ger, de faire
succéder un mâle plutôt qu’une fille, et autres semblables.
Cela peut avoir également lie u , si les termes d’un testa
ment étoient si observés et si douteux , q u e , sans la con
version , ils ne présentassent qu’une absurdité : mais ce
seroit aller directement contre le vœu de la l o i , contre
l’intention des parties, que de donner à une convention
claire et précise un autre sens que celui qui lui est propre:
N o n aliter a signifîcàtione verborum recèdi op ortet,
qiitïm ‘ciim -mcinifestum e s t, ahud sefisisse testato
rem (1). FabeL (2 ), après avoir observé qu’il est des cas
ou la conversion peut avoir lie u , ajoute : JNon adeo ge?kraliter et absurde'accipienduni est ut ob eam causant
(1) L . 6 9 , de IcgatY'-314 •
; .
(2) D e cunject. lib, 17, cap. 18,
�.
. ,
( 22 )
in cujusque arbitrio et pote state esse debeat con ju ncta ,
prò dìsjunctis a ccip ere, vel disjuncta prò conjunctis ;
s’il en étoit ainsi, confundentur om nia , quoties accidet
ut contrahentes vel testatores usi sint oratione aliquâ
co n ju n ctiv â , vel disjunctwâ.
L ’auteur prétend que lorsqu’il n’y a pas des motifs puissans qui autorisent cette conversion , elle ne doit pas être
faite : H oc contendo , quoties conjim ctio v eldisjun ctio à
testatore, a u tà contrahentibus f a c t a est, nec quidquam
prohibet quorninùs conjunctio pro co n ju n ctio n e, dis-,
ju n ctio pro disjunctione a ccip ia tu r, n ih il esse causœ
cu r lice a t aut oporteat recedere à proprietate verborum ;
neque cim i in verbi s ambiguitas nulla e s t , admittendarn \
esse quœ stionem voluntatis : quursùrn enim verb a , n isi
ut demonstrent voluntatem dicentis ? aut cur credatur
quisquam id dixisse quod non priùs a n im o , menteque
agitaverit, in q u it eleganter N isu s e x Tuberone (i).
Quorsùm e n im , dit la même l o i , nom ina j i i s i ut
demonstrarent voluntatem dicentis ? E q u id em non
arbitror quem quam dicere , quod non sentirei.
Sur cette loi cùm quid am , D upérier (2) dit que dans
toutes les questions qui concernent cette constitution de
Justinien, il faut observer ce qui a été.rem arq u é par
Faber ; que cette lo i, laquelle il blâme très-ju stem ent,
vient de l’humeur que T ribon ien avoit de prendre trop
facilement une conjonctive pour une disjonctive, et pa^
reillement une disjonctive pour une conjonctive j qu’il
(1) L . labeo 7 , §• ult. de supellcct. Içgqt,
(2) Loc. citât,
.
.
^
�.
C 23 )
m ontre' que , nonobstant cette constitution , il ne le faut
jamais-faire que qand on ne peut pas Téviter , ou q u’il
survient une absurdité, comme parle Justinien , en la
loi generaliter ( i ) , M aynard (2 ), Roclieflavin (3 ), ou
une apparente contravention au sens et à l'intention des
contractans ou du testateur, par la raison de la loi noiz
a lite r , ou de la loi ille aut ille (4). L e sens co m m u n ,
ajoute-t^il, nous enseigne qu’il ne faut pas abandonner la
propre et naturelle signification des mots pour en suivre
une im propre, tant, quç la propre peut avoir un sens
et un effet raisonnable : N em o enim existim andus est
dixisse quod non mente a g ita ie n t (5).
.
Les expressions de Faber (6; sur cette loi cùm quidam ,
sont,\en effet, remarquables. F a b e r, ainsi que la majeure
partie des auteurs , reprochent à Tribonien d’avoir trompé
la confiance de l’em pereur , en substituant ses propres
décisions à celles du législateur : F u it e?iim Triboniano
fa m ilia r e disjuncta pro conjunctis accip ere, ut et in
cœteris fe r è omnibus perçertere ju ris veteris rationem
ut videre est in L . •( cùm quidam ) ubi herclè suavis
est ycurn ut Jiovce constitutioni color cm qucerat e x ju r e
vetere non erubescit affirm are , in ilia edicti parte quœ
est de eo quod vi aut clam fa c tu m e n t , dixisse preetorem aut pro , et quo f a ls iu s m fu l dicere potuit.
(1) C . de instit. subst. et restïtut.
(2) Liv. 5 , cbap. 34, 38.
(3) Liv. 3 , lit. 5 , art. 4.
(4) §. 1 , ff. de légat. 3.
(5 ) L . labco jam cit.
(6) L oc. cit. in jin .
.
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*.
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�( 2f \
.
.
11 faut donc écarter la lo i cùm quidam , soit parce
qu’elle n’est relative qu’aux testam ens, soit parce que le
contrat de 1737 ne contenant aucune clause obscure, ne
sauroit être sujet à interprétation.
Il est vrai qu’à la fin cette loi parle des co n tra ts, d'où
l’on pourroit inféi’er qu’elje ne s’applique pas seulement
aux testamens, mais à toute sorte d’actes.
Cette objection ne seroit pas fon dée, attendu que dans
cette partie de la loi il y est uniquement question de r°P?
tion parmi deux choses, léguées : S i autem una persona
e s t, res autem ita derelictœ s u n tj illam aut illam rem
illi do ) lego, vetustatis ju ra marient incorrupta , nuüa
innoçatione eis e x hac constitutione introducenda, quod
etiam in contractibus locum habere censemus. L ’héri
tier doit avoir le ch oix il peut délivrer celle des deux
choses qu’il jugera à propos: cette option lui est déférée,
ainsi q u elle l’est à tout autre débiteur qui auroit consenti
une obligation alternative.
5°. Les intimés ne peuvent invoquer avec plus de succès
les suffrages de F u rg o le , de.Serres, de Catellan et autres,
puisque leur avis n’est basé que sur la disposition dç la
loi cùm quidam , qui ne peut avoir d’application dans
l’espèce, et que d’ailleurs ces auteurs ne traitent point la
question qui divise les parties.
Ces auteurs disent que la donation faite en contrat de
mariage, au futur époux et à ses e u f a n s o u bien au futur
époux ou à ses eufans, contient en faveur de ces der
niers , une substitution fidéi-commissaire. Mais cette dé
cision ne peut avoir lieu que dans le, cgs d’une dppation
faite par un ascendant, comme l’observe -trés-ibiea V e d ç l,
sur
�( 25)
sur Catellan (i). P o u r ce qui concerne la donation faite
au futur é p o u x , dit V e d e l, ou à ses enfans, la disjonctive
ou n’est convertie en copulative e t, que par ordre de
succession, quand la donation p a r t ie la m ain d'an as
cendant. Par un argument co n traire,'cette conversion
ne doit pas' avoir lieu quand il s’agit d’une donation faite
en collatéral: Copulam positam interpatrem et filiu m
propter ordinem charitatis intelligi ordine su ccessiv o ,
item et disjunctw am positam inter personas inter quas
cadit aff'ectio ordm ata non resolçi in con ju nctw am ,
dit M orriac, sur la loi cùfn ’q uidam .
, L e m ême a u te u r, après avoir observé que la con
jonctive est .substituée à la disjon ctive, d’après le sen
tim ent des interprètes, ajoute que cela n’a lieu que dans
les testamens, suivant l’avis de D u m o u lin , sur le conseil
95 de Decius qiiodintellige in testamentis e x M o lin , etc.
D um oulin dit en effe t, que non est differentia inter
Copulam et a lte rn a tifa m , inter personas in testamen
tis , L . cùm quidam . O n ne doit donc pas admettre l’alter
native dans les contrats entre-vifs, lorsque la donation
a été faite en ligne collatérale.' O n ne peut donc sup
poser une substitution fidéi-commissaire dans la donation
de 1 7 3 7 , soit parce qu’elle n’a pas été faite par un as
cendant, et par testament, soit parce que l’alternative
n est point admise dans les dispositions entre-vifs, faites
en ligne collatérale, soit enfin ’ parce qu’au lieu d’une
disjonctive, il en existe d e u x , et qu’en les convertissant
�;caf.)
l’une et l’autre" en * conjonctives/' les termes de la d o
nation présenteroient une espèce cVabsurdité.
■ Tous les auteurs, au surplus, ne sont pas du même
avis de F u rg o le , ( n i de celui de Serres, qui n’a fait
que le cop ier); il en convient lui-m êm e. Selon certains
auteurs, dit-il, entre autres M. M ayn ard, liv. 5.'chap. 37,
lorsque les enfans sont appelés avec le u rvpère par la dis—
jorictive ou } vel y s e u , ils ne sont censés appelés que par
la vulgaire; parce qu’elle est propre à caractériser la vul
gaire ; car si le testateur appelle T itiu s o u .ses enfans,
il s’exprim e de manièi*e u faire entendre qu’il ne veut
appeler que T itiu s ou bien ses enfans par l’alternative,
et non les uns et les autres par concours, ni par ordi’è
successif, en vertu de la fidéi-commissaire ; mais dès que
T itiu s a recueillisses enfans1ne peuvent plus être admis,
parce que la volonté du testateur, qui résulte des termes
dont il s'est s e r v i, y résiste, et les exclut.
•
- M aynard, dont l’opinion est combattue par F u rgo le,
rapporte un arrêt du parlement de T o u lo u se, du 2 sep
tembre 1Ô84', par lequel il a été jugé qu’une substitution
faite en ces termes : ou à.ses-enfans; seu a d libero s ejus j
étoit une substitution vulgaire.
Les arrêts que rapporte le même auteur, liv. 5 , chap. 91,
sont rendus dans l’espèce d’une donation faite au-fils et à
ses enfans. - :
; Dans 1espèce,, de trois arrêts rendus au parlement de
Paris, le.dernier juillet 1694, 11 janvier i6 o o e t 16 72 , il
a même été jugé qu’iln y avoit point de substitution lorsque
la donation étoit faite au futur époux et à ses enfans , ou
aux siens, ou pour lui et ses enfans. Il y a même "cette cir-
�( 27 )
constance remarquable que dans l’espèce de l’arrêt de 160 a,
le père'avoit d onné, par contrat de mariage , à so n jils et
a u x 'enfans q u in a itr o ie n t du mariage. Les aliénations
faites par* les h éritiers' institués', ou par les donataires,
étoient attaquées de nullité par les enfans qui se prétendoient substitués ; mais elles furent confirmées: N e c e n im
lib e r i gra da tiw ùensen tur in v ita ti, necpersona aliqua
in sübstitutione aut jidei-com m isso suba uditu r, disent
C hôppin ( i) et Oarondas (2), qui rapportent ces arrêts.
Dans l’espèce des deux arrêtsrapportés par C atellan ,il
s’agissoit d e ‘dispositions faites par des ascendans •, la dona
tion étoit faite au futur époux et à ses enfans, dans l’espèce
du ^premier; et Idans. celle du, sécond , où se trouvoit la
diction o u , les enfans avôient àcom battre des créanciers ,
q u i avoieht fait saisir généralem ent tous les biens de 1 ins
tituant. Cette circonstance étoit trop favorable, et peutêtre trop juste en même tem ps, pour ne pas donner lieu
à la conversion.
.
- F u rg o le , quoique grand partisan du droit romain , ne
donne pas comme un principe constant que l’alternative
doit toujours avoir lieu dans les contrats et les testamens ;
•il restraint son opinion aux cas seulement où sans l’alter
native, on ne pourroit en expliquer les termes d’une ma
nière conforme à la saine raison et au sens commun. Cela
résulte de ce qu il dit dans son traité des testamens (3).
A P rès avoir observé que l’esprit des contractans doit pré-
' (1) D c morib. paris. lib. 2 , tit. 3 , n°. 10.
(2) En ses repons. liv. 13, chap. 26.
• - - •
(3) Chap. 7-, sect. 6; u°. 3 7, 38, et 40 , tom. 2. •
D 2
�.
.
( 2S)
.
.
valoir sur la rigueur des termes dont ils se sont se rvi, et
que l’alternative ne se fait que par une espèce de nécessité £
a cause de l’absurdité et de l’impossibilité qui résulteroit
en prenant les paroles à la lettre, il conclut qu’on ne doit
rien changer clans la valeur et la signification des expres
sions , soit dans les contrats, soit dans les testamens, à
moins qu’il n’y ait une nécessité pour éviter l’absurdité
ou qu’on ne voie bien cla irem en t, que telle a été l’inten
tion des contractans, ou du testateur ÿ suivant cette règle
de la l o i , non aliter à significatione, etc.
>i ...
- L a réflexion que nous venons'de fa ire , ajou te-t-il, se
confirme clairement par les exemples des-conversions: qui
sont rapportées dans la lo i sœpè ( i ) . . . . Il fa u t que'le sens
du discours, l’intention ou la volonté des contractans con
duisent nécessairement à faire la conversion de la copu.lative en disjonctive, et vice versâ.
* lie savant R ic a rd (2) s’explique d'une manière atrêsi po
sitive : il est bien v ra i, dit cet auteur, que les conjonctives
se changent quelquefois en disjonctives dans là matière
des testam ens, et que l’on y supplée même des paroles,
pour donner un sens raisonnable aux dispositions que le
défunt y a faites, en présumant que le scribe ou 'les té
m oin s, à la relation desquels le testament a été rédigé par
é crit, ont omis quelques syllabes ou quelques mots de ce
qui leur a été dit par le testateur; mais il n’y a aucun
exem ple en tout le droit, dans lequel une disposition qui
se trouve parfaite dans les termes avec lesquels elle est
(x) 53, ff. de verb. signif.
(a) T om . 2 , traité 3 ,.clia p . 8 , part, j , u, $37.
�C 29 )
co n çu e, et conforme aux principes, soit convertie en une
autre disposition différente, pour donner aux uns et pour
ôter aux autres, contre les termes dont le testateur s’est
servi ; e t , en un m o t, il est inoui de subroger une dis
position -présumée à une disposition expresse v a la b le,
et d’étouffer la vérité par une fiction.
Dans le doute, la présomption est plutôt pour l’institué
que pour le substitué ( i) ; il en est de même du donataire.
Dans le- d oute, dit Furgole (2), et si la donation ne parle
pas clairement, elle est censée faite au premier donataire,
et ne com prend pas les enfans par fidéi-commis tacite. O n
doit prinéipalement considérer la personne de celui eu ju s
prcëcipüè causa v ertitu r, dit Cambolas (3).
Dans l'espèce, il ne peut y avoir de doute ; les termes
de la donation sont clairs et précis ; le donataire a été prin
cipalement considéi’é ; c’est en sa faveur que la donation
a été faite, et les enfans ne pouvoient être appelés que
dans le cas où il fût décédé avant le donateur. O n ne sauroit
donc avoir recours à l’alternative pour renverser une dis
position valable, et établir une substitution fidéi-commis
saire en faveur du père des intimés.
Xi appelant pourroit terminer ici sa défense; mais comme
il a été condamné a se desister de la m oitié du jardin dont
il s’a g it, ce qui ne pourroit jamais avoir lieu dans aucun
cas, et qu’on s’est fortem ent étayé des motifs qui ont servi
(1) M o n tv a lo n , to m . 1 , ch a p .
5,
a rt. 40.
(2) S u r les d o n at. tom . 1 , art. r i , p. <71.
(3) Quest, du droit, liv. 5 , chap. 48.
�( 3° )
#
de base au jugement dont est appel, cela nécessite quelques
succinctes observations.
M O T I F S
P
D U
r e m i e r
J Ü - G E M Æ N
T.
,
:
m o t i f
.
.
‘ü
r■
'
. L e prem ier m otif qui a déterminé les premiers juges
à ordonner le désistement de la moitié du jard in , est que
dans le contrat de 1737 » ü 7 a deux donations, et qu’en
comparant les termes de la première avec ceux de la se
con de, on trouvoit une grande différence dans la volonté
du donateur, puisque, dans la prem ière, il ne donne qu’à
son n eveu s et q u e, dans la seconde, il donne à son. neveu
ou à un ou plusieurs des enfans qui seront procréés du
m ariage; d’où ils ont tiré la conséquence que si le donateur
n’avoit eu en vue que son n e v e u , il n’auroit pas fait deux
donations dans le m ême acte,
R
é
p
o
n
s
e
.
Quand on supposeroit, ce qui n’est pas, qu’il y a deux
donations dans le m ême acte, on n’y trouvera jamais qu’un
seul donataire ; ainsi il étoit très-inutile d’exam iner si cette
donation étoit divisée en plusieurs p arties, puisque ces
parties ne font qu’ un tout. L e prêtre Ladevèze donne,
et son neveu accepte : voilà tout ce qu’on voit dans cet
acte.
#
.
Mais il étoit nécessaire, quoique dans le même acte,
de distinguer la prem ière partie de la secondò, et la raison
�C 3; )
en est très-sensible; le prêtre Ladevèze se dessaisit, dès le
moment même des droits q u il avoit sur les successions
des père et mere de son neveu, et sans aucune réserve
d’usufruit, au lieu qu’il se fit une réserve expresse de
l’usufruit de la moitié de son jardin : cette démission pure
et simple d’un objet, et la réserve de l’usufruit de l’autre ,
nécessitait cette distinction, sans qu’on ait pu en con
clure que le même acte renfermoit deux donations.
' 1 II est vrai que relativement au jardin, le prêtre Ladevèfce
parle des enfans qui peuvent être procréés du m ariage;
mais il n’y a pas de substitution, au moins fidéi-commissaire, en leur faveur.
S’il avoit voulu faire» un fidéi-comj
missaire, il s’en seroit expliqué, il en auroit chargé son
neveu, puisqu’on ne peut admettre les substitutions ta
cites, sur-tout en ligne collatérale.
S e c ond
m o t i f
.
I æ second motif est puisé dans les dispositions de la loi
cùrn quidam. Les ju ges, dont est ap p el, ont prétendu
que d’après cette lo i, on devoit envisager la donation,
comme si elle avoit été iaite et ci un et cl plusieurs eifans*
R
é p o n s e
.
1 °.
On a observé, d’après la loi elle-m ême, l’avis de
M ornac, de Decius et de D um oulin, qu’elle ne parloit
que des dispositions testamentaires, quod inlelltge in tes
ta mentis , Mornac.
2°. Si la double alternative pouvoit être ici adm ise,
�.
i 32 \ .
ce seroit le cas de dire qu’on doit interpréter les volontés
des donateurs, avec la m êm e latitude que celles des tes
tateurs ; ca r, il est difficile à concevoir, com m ent celui
qui a donné à une seule personne, peut en même temps
donner le m ême objet à plusieurs : posito altero, necesse
est tolli alterum .
C ’est par e r r e u r , sans d o u te , que les prem iers juges
ont d i t , dans l’un de leurs m otifs, que Jean -G ab riel
Jo u v e-L ad evèze, n’avoit eu qu’ un enfant de son pre
mier m ariage, puisqu’il est prouvé qu’il en eut trois}
et que l’un d’eux m ourut aussitôt après sa naissance. Mais
le fait est aussi peu important que le motif.
'
T
r
o
i
s
i
è
m
e
m
o
t
i
f
.
P o u r accorder aux intim és la propriété de la m oitié
du jardin en question, les juges, dont est a p p el, ont fondé
leur a vis, i° . sur ce que Jean-Gabriel Jou ve-L ad evèze
en avoit accepté la donation; 20. sur ce qu’il est dit dans
cette don ation , que L a d e v è z e , prêtre , avoit donné la
moitié de Xentier jard in ; 30. sur ce que l’appelant ne
rapportoit pas le partage fait entre Charles L ad evèze,
p rê tre , et V ital J o u ve-L ad evèze, son frère.
R
É v o
N s E.
Ces motifs ne présentent rien de spécieux.
i° . Il est constant d’une part, que M arie-M agdeleine
Sabatier avoit eu trois enfans, et d7une a u tre, qu’en
Ï70 4 , elle donna la m oitiv de ce jardin à V ital'L ad evèze,
l’un
�C 33 )
l’un de ses trois fils : de là , il résulte que V ital Ladevèze
étoit seul propriétaire de la moitié du jardin ; l’autre
moitié étoit divisible entre A n d ré et Charles Ladevèze,
prêtre ; ce qui faisoit un quart pour chacun d’eux. Charles
L a d e v è z e , p rê tre , donnant la moitié de son entier jardin,
ne donnoit donc qu’un huitièm e, et non une moitié de
la tolalité.
•
>
. 2°. Comment pourroit‘- on présum er que le prêtre Lade■
vbze étoit propriétaire de la totalité de'ce jardin-; puisqu’il
est p ro u vép a r trois arrêts ,:,rendus en la ;cour des aides'de
M ontpellier, que depuis 1731 jusqu’en 1734 , Jean-Gabriél
Ladevèze avoit seu l soutenu contre les consuls d u P u y ,
un procès considérable pour faire déclarer ce jardin al
lodial ?
#
3°. Com m ent d’ailleurs pouvoir supposer que la pro
priété entière de ce jardin résidoit sur la tête de Charles
L a d ev è ze, attendu qu’avant et depuis 1 7 3 7 , les auteurs de
l’appelant n’ont pas cessé d’en jouir et d’en payer les im po
sitions ? Ladevèze p rêtre, en donnant la m oitié de l’entier
jardin , n’a donc réellem ent d o n n é, ni pu donner que la
m oitié de Ventier jardin qui lui appartenoit.
Par un partage, d it-o n , L ad evèze, p rêtre, auroit pu de
venir propriétaire de la totalité du jardin. Cela est vrai;
mais le fait n’est pas prouvé, et l’appelant ne connoît point
de partage passé dans la famille. Il doit donc demeurer pour
constant que le prêtre Ladevèze n’a pas entendu donner la
moitié de 1 entier ja rd in , mais uniquement la m oitié de
la portion qui lui appartenoit. Il doit également demeurer
pour constant, j 0. qu’il n’existe point de substitution ex
presse , ni même'tacite y daos lç.poritrat dé 1737^ a°. que
‘
J ‘
E
�( 34 )
l'intention du p rê tre Ladevèze n’étoit que d'avoir un seu l
donataire, q ù i étoit son n e v e u ; 3° que l’alternative ne
peut -être admise q u e , dans les testamens, et lorsqu’ il s’y
trouve .des clauses ambiguës et obscures 4°. qu’en substi
tu an t dans l’espèce la diction conjonctive à la disjonctive ,
ce seroit donner à une c lausè claire et précise un sens aussi
opposé à la raison, que contraire à l’intention des parties
contractantes ; 5 °. enfin que l’alternative ne peut être
'admise •q u e<dans les dispositions faites par les ascendans.
A in si tout co n co u rt, tout se réunit pour faire infirm er
l e jugement d o n t est appel. P a r conseil-, G A S C H O N , ancien jurisconsulte-,
rr
C R O I Z I E R , avoué.
A R io n d e l'im p r im e r ie de L andriot , imprimeur du tribunal
d'appel. — A n 9
�G É N É A L O G I E .
Hugues d}Avignon.
Marguerite Planchette.
I
Marguerite d1Avignon ,
Décédée le i 3 octobre 1691.
Magdeleine d’Avignon.
Jacques Sabatier.
Marie-Magdeleine,
D écédée le 3 o janvier 1723.
A ndré-V ital Jouve-Ladevèze.
A n d ré,
N é le 23 mars i 683 .
Vital,
Charles, p rê tr e ,
N é le 3 mars 1650; décédé le
22 janvier 1768.
N é le jg juillet 1681 ; marié le î â octobre 1704; décédé le 4 févr. 1726.
Marie Bordet de Brives.
Jean- Gabriel,
N é le 23 août 1705 ; décédé le 20 a vril 1773.
Charles,
N é le 8 octobre
1737.
Prem ières noces.
Marie- Gabrielle Laurenson ,
Secondes noces.
Mariée le 23 fév rier 1737.
M ariée en 1741-
P ie n e -François }
N . . . . Ladevèze.
M arié avec Isabelle Rom e.
.J e a n -Gabriel, Pierre, Joséphine, Jeanne-Marie,
Marie P ich ot,
Charles- Louis,
appelant.
Toussaint, Marguerite-Antoinette Guigon.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Jouve-Ladevèze, Charles-Louis. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gaschon
Croizier
Subject
The topic of the resource
donations
contrats de mariage
généalogie
dot
doctrine
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse pour Charles-Louis Jouve-Ladevèze, négociant, habitant de la ville du Puy, appelant et demandeur en opposition ; contre Jean-François-Xavier, Pierre, Jeanne-Marie et Joséphine Jouve-Ladevèze, frères et sœurs, et Jean-Baptiste Blanc, mari de Joséphine, de lui autorisée, habitans de la même ville, intimés et défendeurs en opposition.
Annotations manuscrites.
arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1688-An 9
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
34 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0128
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0130
BCU_Factums_M0129
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53669/BCU_Factums_M0128.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
doctrine
donations
dot
généalogie
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53265/BCU_Factums_G1525.pdf
737828e292a07440196a88416b1c53c2
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Text
¿>11
M E MO I R E
D ’A P P E L
P o u r M e. J e a n - F r a n c o i s G U E F F I E R - T A L E Y R A T ,
avocat, juge suppléant du tribunal d’arrondissement de
la ville, de B rioud e, appelant, d’un jugem ent re n du au
m ê m e tribunal,, ,Ie; 2 1 m essidor an12
Cont re G u i l l a u m e C H A Z E L E T e t J e a n n e V E R N I E R E S , sa fe m m e , de lu i a u to r is é e P i e r r e
G R E N I E R et M a r g u e r i t e V E R N I E R E S ; sa
f e m m e de lui autorisée ; F r a n ç o is L A M O T H E et
A n n e V E R N I E R E S s a f e mme d e l u i autorisée ;
les trois fem m es V E R N I E R E S héritières de
J e a n l e u r père ,
E t encore contre J e a n V E R N I E R E S négociant *
J a c q u e s V E R N I E R E S et M a r i e - A n n e V E R N I E R E S , autorisée en justice -• J e a n - B a p t i s t e J u l i e n B O R E L , son m ari ; A n n e V E R N I E
R E S , autorisée en justice ,F é r é o l R O U G I E R ,
so n m a ri tous héritiers de J a c q u e s. V E R N I E R E S
leur père et beau-père aussi intim és.E n présente de M e. J a cque s G U E F F IE R -L E S P I ' ,JiN A S S E a n c ie n a v o c a t , D é f e n d e u r et d e m a n deur
en 'recours et garantie.
L A plus, grande difficu lté d e ce tte cause est d'y trouver
une question à r é so u d re .e lle est si sim ple dans ses détails ,
si facile dans sa décision , le droit d e M ° Taleyrat est
A
séant
a r io m .
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113
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si certain et si é y id e n t, qu’on a tout lieu de s’étonner de
le vo ir figurér comme appelant.
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M e. G ueffier-L èspinasse , lors dé son "mariage avec la
demoiselle B oye t d u 2 6 s e p t e m b r e 1 7 8 1 f u t institué
,héritier universel 'par d é f u n t l \ G ueffier-Lo n g p r é ,s o n
p è re. ; e n c a s d 'in c o m patibilité >. le ' p ère .délaisse à. son
.fils la jo u issa n ce d'un domaine appelé de Saint-L aure n t,
situé da n s les appartenances de, Brioude.
L e c a s d'incom patibilité. prév u étant ar r i v é , M l e s
p in a sse ,s e m it en
possession d es\ objets, q u i .lui, avoient
été délaissés ; et le 17 avril 1 7 9 1 , i l v e n d i t l 'entier
ta n t d e la m ê m e v ille d e B rio ude
,,
C ette vente fut; consentie } indépendamment des con
ditions dont il est inutile de s 'occupér , moyennant la
somme principale de 16000 fr J, stipulée payable à diffe-
rens termes e t q u e l e s acquéreurs.'s’obligent de-payer
en l’açquit et ,décharge du vendeur, au sieur .L am othe,
négociant à Clermont , ou à. tous autres porteurs des
billels de change originairement^ consentis par le vendeur
au profit du sieur M aigne , marchand à Brioude.
L e s a c q u e r e u r s e n p a y a n t a i n s i so n su b ro g é s de
plein 'd r oit à l'h yp o th èq u e acquise au sieu r L a m o the ou1
à c e u x q u i le r e p r e s e n te r o n t
*
�( 3 )
M '. Queffier-l^onggré pèrp", instrUjit^cle,
5CQ,tjH.'Pai .fpp
iVA-ijS,‘»fîS
•1jveote.,cony' ji Ci J t J
il?
sapcie, (m a g in ^ .je u ^ e jo,u«. a p rfc , ^ l , l ç , a o m ê j n f t
mois d’avril ,.,sans autre réflçxion , de vendre le même
domaine ..de SaintrLauyent,à, J ean, Yj^ftièjffSfy pptre, que
J aqques[? m o^nnant jpar^e^çpnty^eyge i^opçi jfy^,, et
sauf la jouissance de son fils jusqu’au d é cèsjjj^ g èi^ ^ le
prix de cette ¡ventent ^dit-çp ^tipuly* ;pgygijjlç.^vqfppté.
L e 20 mai 1791 y Jaçques Vemiè.|',es( cpaçqu.é^eur
de la dame. ¡Tale^rat, sej peymetj
poster, un j:pité
avec M e. Gueflier-Le^pinàs.se, cjç jM*rj ^oyer ^spj^yqaijpère. Gomme cet; acte ^ a it . naît£e-,k c o n te s ta tio n ç g t|
important de l’analise^ ji;)
j; (_i.)- ,f(; f}(î0.,
. Ar
Jacques Vernières y expose d’abord q.u’jî.a.acqu isle
dorriaine de^S^int-Laurent,, conjointement ajvee la dame
T a leyrat, mais" que cçtt^ d ern i^ e’, ' f a f f j p f â & & Î W i
luu M e.; L.espinpsse déclarejÇnsuifpJqii’i| a.jplu .à ison.pèxp.
de
-vendre
ce ..m
êm e. domaine
à. J é tf^ y e rn>!iè
re s-,
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Grçsjarne , mais sous des conditioqs ¿qui. np lui sont. paSj
encore0connues.r)On y^dit.jCnsuite,iq^’op.^.jCon^uijt^ des
hommes de,, loi .sur,,1a $la;V f^ d u .cçi^trat^(j e . mariage ,
portant délaissement, dp, la jo^ipsftpeç(.d£,<;e ^omiiipe , q,t.
qu’^l a été décidé, ;qujç.( s.iç.^r1(^ ^ ^ .pè^ê^av.y^^pu
vendre .valablement la . propriété, de .ce ^pmain^. ^mais.
que cette vente pe pouvoit pas prévaloir à çelle f^ite par.
lçj.fils, aji moins quant à, la j^ui^saqcç, pendant la ‘vie du
pèCQ. ,,r
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. .ue sieur .Les^inasse l’econnoît qu’il p ’a. conspntijcette
vente en laveur du sieur Vernières , que pour se libérer
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envers le' 'sièur'Lamothe , banquier à C lerm ont, 'd’une
éoinm e' d é r o b é 1fr.” q u ’il lu i d o it eri v e r tu d ’u n e sentence
côrisiuiairejfÀ’nÜëé & it lé ttreà -d e qHàÏÏ^e'/Le sied* V c m iè r é s ’
ph'idît 1 crnifïâré^dlé 1 se lilie r e r 'dû "j^riic de ' la M érité, 'prïrCe'
q u ’il ne 'p o u v a it à la- r ig u e tir esp'éréï- d e r é u n ir la p r o
p r ié té à lfi jdtlissancé^, et i l v ' ô i t lti 'd roit 1d ’e x ig e r d u sieu r
L e s p i r i a s s é 'l i l l d u ;l ’ex'ecutîion rdu fco iitra t, o u des d om -’
r n a g ^ t ë r ^ " :j' ; n;'],i! r,î «,a
J
' i :j‘)l
A f)[ rl
' P q tir'd v fteï^ ’ ^ é t discussions”; Jles parties* tràn sig eh t.
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P a r ù n p i'e m ié f tfrticle il est c o n v e n u q u e V e r riiè re s
fe^a üsag'e Jde Sbn 'con trht d ’a cq u isitio n p o u r la jouissance
d u ’d ôn ^ ijae tfe- S a in i-L h ù r è n t ,llq u i a p p a rtie n t-a u ' siéui*
ïj^ s^ rt^ fô é' i i r h ^ ^ q û ’a u ^ d é c y 'd u p è r e .
rr
P a r le secon d a rticle il est d it tjtïe^ lo rsq iië V ein i^ re^
sera priVé’'dy Îa jouissaÜce de cé’domaine, le sieur Glifci^ ¿ r: iilJj;l s’6Îjlfgiéi:dti,lm,<dbrtr1ier’des’fonds jiisqu’ù concur-
rb'ncè dè fla'^aleütf’* d ^
'èh 'prés / tcrres'et
V'i^ne^” dcins^e^
de la 'ville de ‘Dri'oude,
¿ môifis c(iie Guèffidi^ j/èrè'rid' lèi>' eVit'Viüs aliè’nés. Dans
ée cas, V ernie rek’ h'd,r p e u t!'exigcr de Gueffier fils que
Te" prix prîncipdT ¿t loyaux coiits du contrat de vente
payriMb, le 'dlts^àiT.'iVc'jntj'daris' ilds Théines 'terrhds stipulés
rfii Goritrit /e ’t*Îepbndant lés intérêts^ J à'cqueè VeWiitrcs
s^obllg^ de^rèîidrd^C^ Tonds à dire d’experts, qili sei’dn't
t'enlik 'de faire leur estimation en proportion et sur le
îôme pied quô l'es héritages du domain’^ Saint-Laurent:
ièn V/nfdndu'¿jué> si’cèüx1 qui'^sbrtttti! délaissés’en' reinplacement du domaine sont de meilleure ou plus mau4
vüise’cjiiûliic* ,'le sf,cicifôÿts' ,iicttrôi’it i'go¿d', '&] ¡¿d referont
tôujoiiis au; m6mcnt i ctiïcl.‘
�.( • 5 )
Par l’article trois les rparties’'prévoiént qu’il est pos
sible que Guelïier fils vienne à décéder avant son père,
qu’alors ses enfans ne voulüssènt 'point accepter sa suc
cession. Dans ce cas, le sieur Vernières', q u i'a payé la
créance du sieur Lamotlie,''montant à i 5 ooo francs, et
qui payera au sieur Gueilier le surplus du- prix de la
vente1, se trouveroit en danger de perdre le prix (du
contrat; L e sieiir Boyer iütetvien tpou r le tranquilliser,
et corisënt c/ue^le sieurVernières 'pitisse, après son dé
cès et celui de'là dame son ^épouse, contraindre ses hé
ritiers à lui rembourser le prix entier du contrat, en
semble les loyaux' coûts et intérêts qui auroient lieir, à
compter de s o n désistement',Msauf à Boyër, ou A ses re
présen tans j:son recours sur la succession 'de Gueffier 'fils.
'E n fiii, par un dernier article, il est stipulé que dans
le cas où Jean V ernières, Gro.sjam e, se départirait de la
vente a lui. consentie par le sieur de Longpré p è re , ou
que même il ■voulût se contenter, de la moitié du domaine,
1
l
T
Jacques Vernières accueillera cette dernière proposition ;
et qu’alors , conservant la propriété de l’autrtí m oitié,
de l’aveu et consentement de V ern ières, G r o s j a m e les
trois articles précédens demeureront nuls et sans effet
vis-à-vis toutes les parties. !
,
1
T e l est le singulier traité souscrit par Jacques V er-1
nières, qui s’est permis de déclarer que la daine Taleyrat
4
n’avoit stipulé que pour lu i, lors de la vente du 17 avril
1791. Assertion mensongère, puisque la dame Taleyrat
n a jamais eu-aucune connoissance de ce traité, et qu’elle
avoit réellement acquis pour sou compte la moitié du
domaine de Suim-Laurent.
�( 6 )
- Indépendamment de ce que le contrat du 17 avril en
fait foi , il y a bien moins de doute, d’après les actes qui
ont eu lieu-successivemcnt entre Jacques Vei'nicres et
Ja dame. Taleyrat.
/ -m. ,
...
r
>
En effet, le i 5 janvier 1792, il a été passé un acte sous
seing privé entre la dame Taleyrat et Jacques Vernières,
« par lequel les rparties reconnoissent être .venues, à
« compte des sommes par elles respectivement payées,
« pour lç, prix de l’acquisition qu’elles ont faite en
a so ciété , par in d ivis, sauf à procéder ultérieurement
« au partage de l’entier domaine de S ain t- L au ren t,
« situé au territoire et appartenances delà ville deBrioude,
a età elle vendu par Antoine Guefïier-Lespinasse, par con« trat reçu Biffe et son confrère, notaires; ù Brioude, le 17
« avril 1791.» Ce sont les expiassions de l’acte. Il est ajouté
que les parties se sont réciproquement fait raison de ce que
l’une d’elles se trouvoit avoir avancé plus que l’autre,
dans les circonstances des différons payemens. IL demeure
pour"avoué qu’elles ont, de part et d’autre, fait égale et
môme dépense, soit pour la passation de l’enregistrement,
soit pour le payement des épingles, soit enfin relati
vement à l’acte reçu D em ay, notaire à Clerm ont,-le
2.mai 179 1, portant subrogation, au profit de Vernières,
du montant, de la créance acquittée au sieur Lam othe,
négociant à Clerm ont, en vertu de la délégation portée
par le contrat de vente, et du consentement exprès du
sieur LespiuasscYainsi que tous autres frais et faux frais,
tels que voyages, ports de lettres, etc. etc.
M ais, comme il résultait de l’acte du 2 mai 17 9 1, reçu
D em ay, notaire, (autre que celui du môme jo u r, sous
�(
?
)
seing p r iv é , et dont il n’est fait nulle-mention ) , que
Jacques Vernières iavoit payé seul, au;sieur Lamothe,
la somme de iôooo francs montant.de sa créance, suiyant
la liquidation faite entre les sieurs LespinasseetLamothe,
Vernières; déclare qu’il, est dans l’exacte vérité qu’il
-reçù ide>la'damé, Taleyratçune somme de. 6009 fi;ancs|,
•pour j satisfaire aux ; en^agemens particuliers, d’entvp
:Lamothé ,ét lu i; que -la t subrogation consentie ,comme
dessus;, doit profiter également à la dame T aleyrat, con
curremment avec lui. Vernières reconnoît de plus que,, la
dame T aleyrat, pour se. libérer, à'son égard des gommes
qii?ili a,)pâÿées oujpromis-ide payer au sieur Lam othe,
ien déduction-du [prix devl’flcqujsitipn commune, jusqu?à
concurrence’ de la somme totale de i 5ooo francs , la dame
Taleyrat ne devra plus qu’une somme de iôoo francs,
q u i, jointe à celle de 6000 francs par lui déjà reçue,
.forme laî juste Jnoitié du montant de la créance du sieur
Lam othe.r
<•,; .
'
^.
Vernières déclare encore qu’il a terme jusqu’à la Noël
lors prochaine, sans intérêts, pour solder au sieur Lainothe
les obligations personnelles qu’il lui a consenties. Il est
convenu, que la dame Taleyrat ne comptera la somme
de i 5oo ;francs qu’au i 5 décembre lors prochain, et la
dame Taleyrat s’y oblige expressément.
Jacyw eiVernièresprom et faire jouir la dame Taleyrat,
en tout c e (qui pourra le concerner , de l’effet de la su
brogation , de passer à la première réquisition toutes dé
clarations y relatives, et à-frais communs, pour,attester
en telle forme que de d roit, la vjérité et l’objet des payemens u lui faits par la dame T aleyrat, eu vertu des pré-
�r:
yf
'
(
8
)
'tfédentes conventions , pour-» le désintéresser desjobliga-tions fqu?il avoit 'contractées ’personnellement envers le
sieur Lamothe en l’absence de la dame Taleyrat.x.oEnfin , les parties déclarent réciproquement qti’elles
n’entendent déroger, ni innover en aucune manière h
•la teneui* du cônti'at de vente, et!aux actionsfquiien-résul
tent*; elles sé’ promettent respectivement dè<sùffirer<pnr
portion égale, soit au surplus du prix de l’acqùisitibn , qui
est la somme d e1 iooo f r . , soit à tous autres frais et faux
frais q u ’il conviendra faire, et dont elles demeureront
d’accord pour suivre l’effet de la vente; •
‘
>
*
L e i 5 juillet suivant, et p aru n autre acte fait double ,
Jacques Vernières reconnoît que la dame' Taleyrat lui
a compté et payé ce môme jo u r , pari anticipation, la
somme de i 5oo fr. pour parfaire la moitié de celle de
i 5ooo fr. qu’il s’étoit obligé de payer au sieur Lam othe,
ainsi qu’il est expliqué au traité’'qui-précède ; et , en con
séquence de ce payement anticipé, la dame Taleyrat
demeure définitivement quitte et libérée envers lui. V er
nières reconnoît qu’il est seul tenu de payer au sieur
Lrtmothe’ les 3000 fr. 'au terme du 24 décembre pror
cha’in , et que la dame Taleyrat a contribué, par portion
égale'avec lui,, à l’acquittement de l’entière créance du
sieur Lam othe, qui se portoit à 1Ô000 francs, ainsi qu’il
est énoncé au truité.
v .
" 'O n vô it, d’après-ces acteà successifs qui ont été enre
gistrés et déposés, quelle confiance mérite l’énorieiption
contenue au traité du 2 mai 17 9 1, que la dame Taleyrat
n’avoit stipulé que pour Vernières lors du contrat d’ac
quisition du 7 avril précédent.
Les
�Les clioses ont resté en cet état jusqu’au décès du sieur
Gueflier-Longpré pèi’e. A cette ép o q u e, et par exploit
du 14 nivôse an 1 2 , Jean V ernières, Gi'osjame , après
avoir épuisé les voies de la conciliation , fit assigner
Me. G uefïier-Taleyrat, fils et héritier de la dame Gueffier-Taleyrat, ainsi que les héritiers de Jacques V e r
nières , pour être condamnés au désistement du domaine
de Saint-Laurent , dont ils étaient en possession en vertu
de la vente consentie par Gueilier iils, le 17 avril 1791.
Mais Jean V ern ières, Grosjarne , étant décédé, il fut
passé un traité le 26 nivôse an 12 , entre Jean Vernières,
fils et héritier institué de Jemi , et le sieur GueffierLespinasse. Par ce traité , qu’il est important de conn o ître, les parties rendent compte des deux ventes qui
ont été consenties du domaine de Saint-Laurent, l’une
par le fils G uefïier, et l’autre par le père. On y expose
que Jean Vernières avoit fait assigner M \ GuefïierTaleyrat et les héritiers de Jacques Vernières en désis
tement; que M\ T aleyrat, et les héritiers de Jacques
V ern ières, avoient annoncé au bureau de conciliation
qu’ils jouissoient du domaine de Saint-Laurent en vertu
de la vente du 7 avril 1791 ; qu’ils se proposoient de
dénoncer la demande eu désistement au sieur GueflierLcspinasse, et que Jean Vernières se proposoit à son
tour de dénoncer ces exceptions au sieur Lespinasse ,
de demander qu’il fut tenu de garantir, fournir et faire
valoir la vente consentie par le sieur Gueilier père , et
a se desister ou faire désister les héritiers de Jacques
Vernières de ce même domaine.
L e sieur Gucllier-Lespinasse vouloit opposer que son
B
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7
i
t
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^( i o )
père lui avoit donné, dans son contrat de m ariage, la
jouissance de ce domaine de Saint - Lauren t ; qu’ayant
institué son fils héritier universel, cette institution lui
assuroit la propriété de ce domaine après la mort de son
père. Ce dernier, suivant le sieur Lespinasse, n’avoit pas
pu l’aliéner : cette vente étoit faite sans m otif, sans né
cessité; le père n’avoit eu nul besoin de vendre, et n’avoit
pas même reçu le prix de la vente. Néanmoins les parties
trans'gent : il est arrêté que la vente consentie par le
sieur Gueflier père, au profit de défunt Jean Vernières,
ne sortira effet que pour moitié seulement, et qu’en con
séquence le domaine de S ain t-L au ren t, tel qu’il étoit
énoncé dans le contrat de vente, sera partagé par moitié
entre les parties, en l’état où il se trouve actuellement,
et avec les améliorations ou détériorations qu’il peut
avoir subies.
■Jean Vex*nières est dispensé de rien payer du prix de
la vente; le sieur Gueflier-Lespinasse le tient quitte et
promet l’en faire tenir quitte envers la succession de son
père : la moitié du domaine doit rester à Jean Vernières,
franche et quitte, et sans autre charge de sa part que de
ne pouvoir répéter les frais de vente et les droits de lods
qu’il peut avoir acquittés à raison de la vente du 20
avril 1791.
L e sieur G ueffier-Lespinasse s’oblige de faire désister
de la m oitié de ce dom aine M°. Taleyrat et les héritiers
de Jacques V ernières.
Jean Vernières consent que le sieur Gueffier-Lespinasse jouisse par lui ou ses acquéreurs de l’autre moitié
du domaine ; il s’en départ expressément, soit au profit
�6 z \
de Lespinasse, soit au profit de ses acquéreurs, ainsi que
le sieur Gueffier-Lespinasse avisera et jugera lui être le
plus avantageux.
. Il paroît qu’après ce traité J ean V ern ières, fils d’autre
Jea n , a transigé avec ses cohéritiers légitimaires, et leiir
a délaissé, pour leur tenir lieu de leur portion hérédi
taire, la moitié du domaine de Saint-Laurent, qu’il devoit
conserver d’après le traité du 26 nivôse, dont on vient
de rendre compte. C’est alors que ces enfans légitimaires
de défunt Jean Vernières, par exploit du 21 ventôse
an 12 , ont repris l’instance pendante, sur la demande
formée le 14 nivôse précédent, contre M V Taleyrat et
les héritiers de Jacques V ernières, et ont conclu à ce
que les uns et les autres fussent condamnés à se désister
de la moitié du domaine dont il s’agit, d’après la con
vention faite entre Jean Vernières, leur frère, et le sieur
Gueffier-Lespinasse; qu’en conséquence les parties fussent
tenues à venir à division et partage du domaine, pour
leur en être délaissé la moitié.
Les sœurs de Jean Vernières ont également assigné
le sieur Lespinasse pour faire effectuer le désistement de
cette moitié.
M e. T aleyrat, à son tour, ainsi que les héritiers de
Jacques Vernières, ont formé une demande en recours
et garantie contre le sieur Gueffier - Lespinasse ; et ce
dernier de son côté, qui ne peut contester la garantie de
M c. Taleyrat, a form é, contre les héritiers de Jacques
V ernières, une demande en contre-recours qu’il entend
iaire résulter du traité du 2 mai 1791 , dont il dit avoir
executé littéralement les dispositions.
B 2
�( 12 )
• Toutes ces demandes ont été jointes. Les héritiers de
Jacques Vernières ont déclaré que leur intention n’étoit
pas de contester formellement la demande formée par
les héritiers de Jean Vernières; mais ils ont dit que dans
le cas où cette demande seroit adjugée, et qu’on se décideroit à prononcer l’éviction partielle du domaine de
Saint-Laurent, cetfe éviction devoit être ordonnée tant
contre eux que contre M e. Taleyrat, et qu’alors M?. Guefiier-Lespinasse ne pouvoit leur refuser des dommagesintérêts. Les héritiers de Jacques Vernières ont cherché
à critiquer le tx’aité du 2 mai 1791 ; suivant eux cet acte
ctoit nul de nullité viscérale et absolue, il respiroit le
dol et la fraude, et le sieur Lespinasse ne pouvoit le leur
opposer.
Ce traité, d iso ien t-ils, a été fait le même jour où
Jacques Vernières avoit payé iôooo francs au sieur L amothe, en décharge du prix de son acquisition; s’il eût été
sincère, il pouvoit être exécuté le lendemain, Jacques
Vernières pouvoit être dépossédé de la moitié du domaine
qu’il avoit acquis, perdre la totalité des sommes qu’il
avoit payées : or, on ne peut supposer que Jacques V ernièx*es ait pu abandonner tout à la fois un domaine con
sidérable qu’il venoit d’acheter, et sacrifier gratuitement
i 56oo francs qu’il avoit déjà payés. D e tels sacrifices,
disent-ils, ne sont pas naturels, ils sont extraoxxlinaires,
et ne s’expliquent que par le dol dont on a usé envers
leur père.
Ils représentent leur père comme un cultivateur illitéré , qui savoit à peine mettre son nom en lettres majus
cules , sans liaisons, et d’une manière très-facile pour lc*9
contrefaçons.
j
�( *3 )
Suivant eux, et sur les quatre articles du traité, les
trois premiers sont extrêmement favorables à Jacques
Verni ères ; le quatrième lui est seul contraire, et annulle
tous les autres. Il est probable qu’en mettant sa signa
ture, il n’a entendu approuver que les trois premiers
articles; que le dernier ne lui a jamais été lu , et qu’il
a signé absolument de confiance.
Les héritiers de Jacques Vernières font à M e. Taleyrat
père l’injure de prétendre qu’il étoit présent à cet acte,
et qu’il a demeuré dépositaire du double qui revenoit
à Jacques V ernières, jusqu’en 1804.
trouvent éton
nant que dans le préambule de ce traité on ait fait
dire à Jacques Vernières qu’il traite pour lui seul, et
que bientôt 011 lui fait dire que la dame Taleyrat n’a
acquis que pour lui. Jacques Vernières, qui n’avoit
acquis que depuis onze jours, p o u vo it-il avoir oublié
que son contrat d’acquisition ne le désignoit que comme
acquéreur d’une m oitié, et la dame Taleyrat pour l’autre
moitié. S’il l’avoit o u b lié, le sieur Lespinasse ne devoitil pas s’en rappeler. Cet acte contient donc des faits faux,
dont la relation ne peut être attribuée à Jacques V e r
nières, pas plus que le surplus de l’acte.
Les héritiers de Jacques Vernières proposent ensuite
trois moyens de nullité contre cet acte ; i°. c’est un acte
sous seing privé qui détruit l’effet d’un acte notarié , une
véritable contre-lettre, nulle d’après les dispositions de
la loi du 22 frimaire an 7 ; 20. cet acte est n u l, d’après
les déclarations des 30 juillet 1730 et 22 juillet 1733?
qui exigent une approbation entière et écrite eu toutes
lettres de la main de celui qui a souscrit le billet ou la
L
�C *4 )
promesse; 30. cet acte ne-peut être considéré que comme
une vente ou département de v e n te ,'q u i n’a ni p r ix ,
ni consentement : enfin M e. T aleyrat, dans tous les cas,
ne pourroit pas se plaindre de cet acte, puisque par le
traité fait double, du i 5 janvier 1792 , il y est dit que
la dame Taleyrat étoit associée par indivis avec le sieur
Vernières pour cette acquisition ; et dès-lors l’associé
oblige sou associé pour tout ce qui est relatif à la société.
L a réponse de M \ Taleyrat a été simple; il a dit que
par l’acte du 17 avril 1791 le sieur Lespinasse avoit
vendu le domaine de Saint-Laurent à Jacques V ern ières,
et à la dame Taleyrat, avec promesse de garantir et faire
jou ir; que dès-lors chacun des acquéreurs devoit avoir
la propriété de la moitié du domaine. M e. Taleyrat a
ajouté que sa m ère, ni l u i , n’avoient dérogé par aucun
acte postérieur au droit qui leur étoit acquis ; qu’à la
vérité Jacques Vernières, par le traité du 2 mai 1791,
sembloit y avoir d éro gé, mais qu’il n’avoit stipulé que
pour lui ; que cet cet acte étoit étranger à M e. Taleyrat;
qu’il ne pouvoit lui nuire , ni lui être opposé ; et si
Jacques Vernières s’éloit permis d’énoncer dans cet acte
que la dame Taleyrat n’avoit stipulé que pour lui lors
de l’acquisition , cette é n o n c i a t i o n étoit fausse et sans
conséquence pour la dame Taleyrat, Il étoit d’autant plus
évident que Jacques Vernières n’avoit jamais entendu
rendre cet acte du 2 mai 1791 commun k la dame T a loyrat , que les parties en réglant définitivement leur
compte au sujet de cette acquisition, par acte du i5 jan
vier 1792 , Jacques Vernières n’avoit parlé en aucune
manière du traité du 2 mai précédent ; bien au cou*
�( 15 ) -
traire, l’acte du i 5 janvier 1792 porte une réserve ex
presse et réciproque de tous les droits qui étoient acquis
aux parties par le contrat d’acquisition, du 7 avril 1791 ;
elles y déclarent expressément qu’elles n’entendent dé
roger ni innover en aucune manière à ce contrat : dèslors le traité du 2 mai ne pouvoit être opposé à M '.
Taleyrat iils.
L ’assertion des héritiers d e 'J acques V ernières, de la
présence de M*. Taleyrat père à cet acte du 2 m ai, étoit
une calom nie, une injure gratuite, et M*. Taleyrat fils
le désavouoit expressément.
Il étoit au surplus ridicule de soutenir .que la dame
Taleyrat étoit engagée par le traité du 2 m a i, parce que
dans l’acte du i 5 janvier 1792 il y étoit dit que la dame
Taleyrat avoit acquis ce domaine en société par indivis.
On sait qu’entre deux acquéreurs qui achètent concur
remment et sans distinction de portion , ils sont censés
acquérir chacun pour moitié ; il n’y a d’autre société que
dans l’indivision , et jusqu’au partage ; et cette société 11e
peut engager les parties que pour ce qui concerne le
payement et les conditions de l ’acquisition : mais il seroit
absurde de prétendre que l’un d’eux pût se départir ou
déroger à l’acquisition au préjudice de l’autre.
Enfin, M e. T aleyrat, sans vouloir contester aux héri
tiers de Jea n Vernières la moitié du dom aine, soutenoit qu’au moins il devoit seul garder l’autre m oitié, et
que le désistement en faveur des héritiers de J can ne pou
voit porter que sur la portion des héritiers de Jacques.
I æ sieur Gueflier-Lespinasse a répondu, que d’après le
traite du 2 mai 1 7 9 1 , la demande en garantie formée
�( 16 )
pai’ les héritiers de Jacques Vernières ne pouvoitse sou
tenir ; que ce traitécontenoitdes conventions qui n’avoient
rien de contraire aux lois ni aux bonnes mœurs; que nonseulement il devoit avoir son exécution, mais qu’il entraînoit môme la garantie de la demande en recours formée
par M e. Taleyrat contre le sieur Guellier.
L e sieur Gueflier-Lespinasse, au surplus, n’a point con
testé , ou du moins n’a proposé aucun moyen contre la
demande en recours qui avoit été formée contre lui par
M e. Taleyrat.
C’est en cet état que la cause a été portée, entre toutes les
parties, au tribunal de Brioude, le 21 messidor an 12 , et il
y est intervenu un jugement contradictoire, qui condamne
les héritiers de Jacques Vernières et M e. Taleyrat à venir à
division et partagea vecles héritiers de Jean Vernières, du
domaine de Saint-Laurent, pour en être délaissé la moitié
ces derniers , avec restitution de jouissances, à compter
de la demande, jusqu’au réel désistement, à dire d'experts,
en la manière ordinaire, avec les intérêts de ces mêmes
jouissances , à compter de l’époque de leur perception
jusqu’au payement.
Il est ordonné que l’autre moitié du domaine restera
aux héritiers de Jacques Vernièresetde la dame Taleyrat,
pour être, ladite m oitié, partagée entre eux par égalité.
_L e sieur G uciIier-Lespiuasse est condamné à rembourser
aux héritiers de Jacques Vernières, et à M \ Talevrat,
la moitié du prix de la vente du 17 avril 1791 , ensemble
les intérêts de la som m e, à compter de la demande jus
qu’au payement.
Sur les demandes eu recours et contre-recours, les
parties
�'
fïV
( *7 )
. x
parties sont mises hors d’instance ; et comme le sieur
Lespinasse est en demeure de payer la moitié duprix.de
la vente, il est condamné aux dépens envers toutes les
parties.
. .
Les motifs de ce jugement sont, i °. que le sieur Gueffier
père n’avoit donné à son fils que la jouissance du domaine
de Saint-Laurent ; qu’ainsi la propriété a toujours résidé
sur la tête du père. Lespinasse fils , par le contrat de
vente du 17 avril 17 9 1, n ’a donc pu vendre que la jouis
sance de ce domaine.
l,e sieur Gueffier p è r e , qui étoit toujours demeuré
propriétaire, a transmis, par la vente du 20 avril, a Jean
Vernières, la propriété de ce môme domaine.
20. Par le traité qui a été passé entre Gueffier-Lespinasse et Jean Vernières , 1e 26 nivôse an 1 2 , la vente
faite à Jean Vernières père ne devoit sortir effet que
pour la moitié ; et Lespinasse s’obligeant à faire désister
de cette moitié les héritiers de Jacques Vernières , n’a
fait qu’user du droit qui lui étoit acquis par l’article. 4
du traité du 2 mai 179230. Par ce traité passé entre Vernières et Lespinasse,
ce dernier n’a disposé que de la moitié du domaine, et
l’autre moitié demeure aux parties qui ont acquis de lui.
4°. Dans le traité sous seing p r iv é , passé entre la dame
Taleyrat et Jacques Vernières le i 5 janvier 1792, Ja c
ques Vernières et la dame Taleyrat sont venus à compte
des sommes par eux respectivement payées pour solde de
l’acquisition qu’ils avoient faite en société et par indivis.
Il
résulte de cette énonciation , que Jacques Vernières
étoit associé de la dame Taleyrat. Cette qualité n’a point
C
�c ,i 8 )
été contestée, et par conséquent Jacques Vernières n’a
pu stipuler qu’en cette même qualité dans le traité du
2 mai 1791.
M*. Taleyrat a interjeté appel de ce jugement. Les
héritiers de Jacques Vernières s’en sont également rendus
appelans, et toutes les parties sont en présence.
Les héritiers de Jacques Vernières ont amèrement
critiqué le traité du 2 mai 1791 ; mais ils ne peuvent
adresser cette censure qu’à ceux qui sont partie en cet
acte, et notamment à M*. Gueflier - Lespinasse : il est
étranger à M ’. Taleyrat. C’est contre M*. Lespinasse qu’ils
feront ju g er, s’ils le peuvent, que la loi du 22 frimaire
an 7 peut annuller un acte du 2 mai 1791 , qui lui est
antérieur de huit ans ; qu’ilsferont juger aussi q u e, d’après
la déclaration de 1733 , un marchand qui sait à peine
signer doit mettre une approbation en toutes lettres au
bas d’un acte, malgré les exceptions nombreuses de cette
déclaration , qui s’appliquent particulièrement aux gens
illitérés. Mais comme le sort de cet acte est indifférent
pour M*. T aleyrat, il ne doit pas s’en occuper, si ce n’est
pour repousser par une dénégation formelle l’assertion
calomnieuse de la présence de son père à cet acte.
Comment seroit-il croyable que M°. Taleyrat père eût
autorisé par sa présence les conventions insérées dans cet
acte , lorsqu’elles blessoient aussi évidemment la vérité
et les intérêts de la dame son épouse ; lorsque surtout
on voit Jacques Vernières déclarer que la dame Taleyrat
■riavoit stipule quepour ha dans la vente du 8 avril 179 1,
tandis qu’il est prouve qu’à cette même époque la dame
Taleyrat avoit compté a Jacques Vernières la somme de
�( 19 ) '
6ùoo fr. faisantsa portion de la créance du sieur Lamotlie,
qu’elle avoit été déléguée à payer par le contrat de vente?
Gomment auroit-elle donné cette somme , si elle n’àvoit
stipulé que pour Jacques Vernières? Comment M e. T a
leyrat lui-même , qui devoit naturellement veiller aux
intérêts de son épouse , et à la sûreté de ses deniers,
auroit-il consenti à ce qu’elle versât une somme aussi
considérable sans avoir la certitude de la recou vrer, ou
de conserver l’immeuble qui en étôit le p rix ? T out est
absurde dans cette supposition ; et dès-lors les héritiers
de Jacques Vernières ne peuvent opposer à M e. Taleyrat
fils un acte auquel sa mère , ni lui , n’ont participé en
aucune manière.
Ce seroit d’ailleurs revenir contre le propre fait de
Jacques Vernières, qui, dans le traité du i 5 janvier 1792,
n’a pas dit un seul mot de cet acte sous seing privé , du
2 mai 1791 : au contraire, il a déclaré qu’il n’entendoit ni
déroger, ni innover à la vente du 17 avril; il a reconnu,
par cet acte, le droit de la dame Taleyrat sur les im
meubles vendus ; il déclare avoir reçu la portion de la
dame T aleyrat, moins une somme de i 5oo francs. Bientôt
après , et le i5 juillet suivant, il reconnoît avoir reçu
cette dernière somme par anticipation, quoique la dame
Taleyrat ne dût la payer qu’au mois de décembre sui
vant. V oilà donc un engagement bien précis de la part
de Jacques Vernières; il ne peut revenir contre son
propre f a it , et ses héritiers sont obligés de respecter ses
eugagernens. Il est donc maladroit de la part des héri
tiers de Jacques Vernières d’argumenter contre M \ T a
leyrat du traité du 2 mai 1791. Cet acte est pour lu i,
C a
�( 20 )
res inter alios acta ,* il ne peut lui nuire, ni lui pré
judiciel*, quand bien môme il n’üuroit pas en sa faveur
un titre subséquent qui détermine avec tant de précision
ses droits et sa portion dans le domaine dont il s’agit.
Comment donc concevoir le jugement dont est appel,
qui prive M e. Taleyrat de la moitié du domaine qui lui
. étoit acquise. A van t d’en examiner les motifs, il est essen
tiel de résumer en peu de mots la défense des parties.
O n remarque d’abord une singulière contradiction
dans les moyens des héritiers de Sacques Vernières ; ils
ne contestent pas la demande des h é r i t i e r s de J ea n , ten
dante à obtenir la moitié du domaine dont il s’ a g i t : c'est
approuver par là l’article 4 du traité du2m ai 1791 ; car ce
n’est qu’en vertu de l’article 4 de ce traité , que Jacques
Veruières devoit se contenter de la moitié du domaine,
si le sieur Lespinasse pou voit parvenir à faire désister
Jean Vernières de l’autre moitié. L e sieur Lespinasse y
est parvenu par le traité de nivôse an 12: l’héritier de
Jean Vernières a abandonné la moitié du domaine; donc
les héritiersde Jacques,en donnant les mainsà la demande
des héritiers de Jean, approuvent et exécutent l’acte du
2 mai 1791 , même dans la partie qu’ils ont le plus amè
rement critiquée. 11 faudroît être conséquent avec soimême; car, si l’acte du 2 mai 1791 est subrepiiee, s’il est
reflet de la fraude, du dol ou de la séduction, i l ne doit
pas en rester de traces, et dès-lors les héritiers de Jacques
ont une action certaine contre le sieur Lespinasse iils,
pour lui faire executer la vente du 17 avril 1791 , dans
sou intégralité, ou pour obtenir des doinmages-intérêts
en cas d’inexécution.
�0
C « )
Mais les héritiers de Jacques Vernières , toujours con
tradictoires dans leur système, reconnoissent encore que
la dame Taleyrat n’a pas stipulé pour Jacques dans cette
vente, et qu’elle a acquis pour elle et par moitié. En effet,
en même temps qu’ils donnent les mains à ce que les hé
ritiers de Jean Vernières prennent la moitié du domaine,
ils consentent aussi à ce que la dame Taleyrat partage
l’autre moitié avec eux. Cependant, si la dame Taleyrat
n’avoit stipulé que pour Jacques , elle n’y amenderoit
aucune portion ; la moitié délaissée par Jean Vernières
devroit appartenir toute entière aux héritiers de Jacques.
Combien d’inconséquences échappées à ces derniers! et
peuvent-ils être écoutés favorablement, lorsqu’ils viennent
ensuite attaquer le traité du 2 mai 1791, traité qu’ils exé
cutent de prime abord , sans s’apercevoir de leur erreur?
M e. Taleyrat, au contraire, s’est contenté de dire qu’il
n’entendoit élever aucune contestation contre les héritiers
de Jean , qu’il ne connoissoit pas, pourvu qu’il eût à lui
seul la moitié du dom aine, parce que cette portion devoit
lui appartenir exclusivement, d’après la vente du 17 avril
1 7 9 1 , dont il demandoit l’exécution. Il n’étoit lié par
aucun acte qui eût dérogé à cette yente ; au contraire,
les actes successifs et géminés que la mère avoit passés
avec Jacques Vernières ne tendoient qu’à la maintenir
et à la confirmer. Rien de plus simple que cette défense :
il ne pouvoit s’élever l’ombre d’un doute sur les droits
de M e. Taleyrat.
Maintenant quels motifs peuvent a v o ir déterm iné les
premiers juges à réduire la portion de M°. Taleyrat à un
quart de ce d o m a in e , lorsqu’il étoit si é v id e m m e n t'p ro -
�priétaire d’une moitié? Ils disent que Gueflier père n’avoit
donné à son fils que la jouissance de ce domaine ; que
son fils n’a pu vendre que cette jouissance, au lieu que
le père a transmis la propriété à Jean Vernières par la
vente postérieure qu’il a consentie.
O n ne voit pas trop quelle conséquence on peut tirer
de ce premier motif. En admettant que Gueffier fils n’eût
que la jouissance du domaine, il en avoit cependant aliéné
la pi’opriété, avec promesse de garantir et faire valoir:
il étoit donc bien au moins garant de l’éviction, et il étoit
tenu de faire jouir ses acquéreurs , ou au moins des doinmages-intérêts qu’auroit pu entraîner une éviction , si ses
acquéreurs avoient été dépossédés.
Cette garantie pleine et entière que devoit M e. Lespi
nasse fils , a été modifiée par le traité du 2 mai 1791 ;
mais vis-à-vis de qui ? vis-à-vis de Jacques .Vernières
seulement, l’un de ses acquéreurs, et non à l’égard de
la dame T aleyrat, avec laquelle il n’a pas traité.
Si dans la suite, et par l’acte du 26 nivôse an 12 , il
a été convenu que la vente du 20 avril 1 7 9 1 , consentie
par le p ère, ne sortiroit effet que pour m oitié, d’autre
m oitié,qui rentroit dans les mains de Lespinasse, devoit
nécessairement appartenir à M°. Taleyrat.
Mais le grand moyen, le m otif unique qui paroît avoir
déterminé les premiers juges, résulte, suivant eux , du
traité du i 5 janvier 1792. Par ce tra ité , disent-ils,
Jacques Vernières et la dame Taleyrat sont venus à
compte des sommes par eux respectivement payées pour
les frais de l’acquisition qu’ils avoient faite en société et
par indivis. Cette énonciation , est-il ajouté, prouve que
�( 23 )
Jacques Vernières étoit associé de la dame Taleyrat :
cette qualité n’a point été contestée ; il n’a donc pu
stipuler .qu'en cette même q u a lité , dans le traité du
2 mai 1791.
Ici les erreurs s’accumulent , les principes sont mé
connu?: on abuse évidemment des mots.
On distingue en droit plusieurs espèces de sociétés. La
société légale ou conventionnelle, la société générale ou
particulière. La société en effet peut se contracter d’une
seule chose, ou d’un certain trafic , ou de tous les biens;
des cohéritiers sont réputés associés entre eux pour les
choses qui composent l’hérédité com m une, tant qu’il y
a indivision; des coacquéreurs sont réputés associés pour
le fait de leur acquisition compiune , jusqu’à ce qu’il ait
été procédé au partage de la chose acquise : tels sont les
principes généraux qui ne seront sans doute pas con
testés.
C ’est dans la dernière classe , c’est-à-dire, dans celle de
deux acquéreurs en commun, qu’il faut placer M«. Talevrat
et les héritiers de Jacques Vernières : il ne peut y avoir
de doute sur ce point.
O r , quelle est la règle à cet égard ? quels sont les
principes en cette matière ? on les trouve dans la loi
M u ltu m , au Cod. 2 de commun, rerum alienatione. On
y voit que le coacquéreur peut vendre sa part indivise
a l’associé , même à un tiers ; mais aussi 011 y trouve que
celui qui vend une chose commune ne préjudicie pas à
son copropriétaire , et n’empêche pas qu’il ne puisse
revendiquer sa portion tamen portioni tu œ , dit la lo i,
ea venditio non yotest obsistere. Despeisses , toin. 1 ,
�)
tit. i , pag. 13 , édition in-40. , n°. 3 , dit que la venté
de la chose commune par indivis est valable pour la part
qui appartient au vendeur, bien qu’elle soit faite non en
faveur de Vassocié, mais d’un tiers; mais non pas pour
lit part de l’autre associé, bitu^jue la part de Y associé
ne soit qu’ une fort petite portion de la chose commune ,
et moindre que ne vaut la part du vendeur , comme il
a été jugé au parlement de Toulouse en l’an i y , arrêt
rapporté par Laroche-Flavin, liv. 6 , tit. 1. Despeisses
cite Ranchin en scs Décisions , partie 3 , et plusieurs
autres auteurs. En effet, il en est d’un coacquéreur comme
d’un cohéritier ; et a-t-on jamais entrepris de soutenir
qu’un cohéritier pouvoit vendre toute la succession, et
préjudiciel’ à ses autres cohéritiers? Si on a établi que le
cohéritier pouvoit , avant la demande en partage ante
motam controversiam , aliéner valablement jusqu’à concuri'ence de sa p a rt, ce n’a été que pour éviter le circuit
des actions. On fait dans ce cas échoir au lot du vendeur,
lors du partage, la portion par lui aliénée, mais ce n’est
jamais qu’autant qu’il n’a pas excédé cette part ; car s’il
a vendu au delà de ce qui lui x*evenoit, tous les jours
les acquéreurs se voient obligés de se désister de cet
excédent : telle est la jurisprudence constante qui est
fondée en raison.
(
2
4
5
8
M ais vouloi r prétendre q u ’ un coacquéreur qui a acheté
en com m un avec un ou plusieurs, parce q u ’il est associé
pendant l’ indivision , puisse aliéner au préju dice de ses
associés , et même vendre leur p o r t io n , ce seroit le com ble
de l’ a b s u r d i t é : c’est au moins le prem ier exem ple d ’ une
aussi singulière décision.
J acqitcs
�fo ;
( 25) Jacques V ernières, en achetant concurremment avec
la dame Taleyrat, et sans distinction de part, est devenu
propriétaire de la moitié des immeubles acquis jusqu’au
partage. Il a été associé avec la dame Taleyrat pour jouir
en commun, pour payer le montant d’une acquisition com
mune ; mais il n’a pu sans contredit vendre au delà de
sa portion ; il n’a pu retrancher ni préjudiciel* à son
associé. 11 n’a traité que pour lui ; il n’a pu stipuler comme
associé , engager son copropriétaire dans aucun cas , à
moins qu’il n’eût de sa part une procuration spéciale ,
un consentement exprès d’aliéner tout ou partie de la
portion revenant à son coacquéreur.
O n ne sauroit donc témoigner trop de surprise de
l’erreur grossière dans laquelle sont tombés les premiers
juges. Quelles conséquences funestes ne résulteroient pas
de leur système ! L e droit de propriété v io lé , les con
ventions incertaines, la méfiance et la crainte, en seroient
les moindres suites. O n le répète, il n’y avoit pas de
question dans la cause.
. Il peut se faire que Jacques Vernières se soit témérai
rement ou indiscrètement engagé par le traité qu’il a
passé avec le sieur I.espinasse et son beau -p ère; qu’il
n’ait pas senti la force de ces mêmes conventions; que ses
intérêts aient été compromis : cette discussion n’intéresse
pas M \ Taleyrat; elle reg'arde M e. Lespinasse. Jacques
Vernières n’a traité que pour lu i; la dame Taleyrat n’y
est pour rien, n’a rien autorisé , n’a rien connu. L e s actes
subséquens manifestent une constante volonté de sa part
de ne pas déroger à sa vente, d’en courir t o u s les évéuemens. Jacques Vernières y a souscrit lu i-m êm e; il a
D
•t è^
V
�(2 6 )
reçu les sommes nécessaires pour parvenir au payement
d es délégations. Que reste-t-il donc dans la cause ? Une
vente parfaite d’un domaine dans lequel M e. Taleyrat
amende moitié : cette moitié est libre ; le vendeur a au
jourd’hui titre suffisant pour cette moitié ; il est inutile de
remonter à l’origine pour savoir si, lorsque M Lespinasse
a vendu , il n’avoit que la jouissance, ou s’il avoit la pro
priété ; il l’a aujourd’hui ; elle est dans ses mains : M a.
Taleyrat qui l’a valablement acquise doit donc la conser
ver exclusivement.
D o it-o n , en cet état, s’occuper des demandes subsi
diaires en garantie, formées par M e. Taleyrat, tant contre
les héritiers de Jacques Vernières , que contre M .
Lespinasse ?
S’il est jugé q u e M e. Taleyrat doit avoir la moitié du
dom aine, les garanties n’ont plus d’objet ; on observera
seulement que M 0. Lespinasse n’a pas entrepris de con
tester celle qui a été formée contre lui par M . Taleyrat.
Cependant, sans autres motifs, les premiers juges ont mis
les parties hors d’instance , même sur cette garantie.
Quelle en est la raison? Il seroit difficile de l’expliquer:
tout est incompréhensible dans ce jugement; cependant
il n’y eut jamais de cause plus claire ni plus facile à
décider,
M , P A G E S (d e R iom ) , ancien avocat.
M°. C R O I Z I E R , avoué.
A R IO M , de l' im prim erie de L a n d r i o t , seul im prim eur de la
Cour d ’appel.
,
,
^ £|wu\tM4l (im
Q - ftdr-^ Ag/tsu.t~
"ài*. y cuuiJL
(Moi
�
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[Factum. Gueffier-Taleyrat. An 13?]
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Pagès
Croizier
Subject
The topic of the resource
sociétés
indivision
successions
créances
immeubles
ventes
nullité
conciliations
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Titre complet : Mémoire pour maître Jean-François Gueffier-Taleyrat, avocat, juge suppléant du tribunal d'arrondissement de la ville de Brioude, appelant d'un jugement rendu au même tribunal, le 21 messidor an 12 ; Contre Guillaume Chazelet et Jeanne Vernières, sa femme, de lui autorisée ; Pierre Grenier et Marguerite Vernières, sa femme, de lui autorisée ; François Lamothe et Anne Vernières, sa femme, de lui autorisée ; les trois femmes Vernières, héritières de Jean, leur père, intimés ; Et encore contre Jean Vernières négociant ; Jeanne Vernières et Marie-Anne Vernières, autorisée en justice Jean-Baptiste-Julien Borel, son mari ; Anne Vernières, autorisée en justice ; Féréol Rougier, son mari ; tous héritiers de Jacques Vernières leur père et beau-père aussi intimés. En présence de maître Jacques Gueffier-Lespinasse, ancien avocat, défendeur et demandeur en recours et garantie.
Annotation manuscrite: « 2 germinal an 13, 2éme section, arrêt qui dit mal jugé, en ce que l'acquisition du 7 avril 1791 a été considérée comme établissant société et en ce que un quart du domaine, seulement, a été attribué à Taleyrat ; infirme quant à ceux, et confirme les autres dispositions. »
Table Godemel : Acquisition : 1. une acquisition, faites par deux individus, d’immeubles non divisés par l’acte, attribue à chacun des acquéreurs moitié des immeubles acquis, lorsque l’acte ne contient aucune stipulation à cet égard, et lorsque chacun des acquéreurs a payé moitié du prix de la vente. la réunion des deux individus pour faire cette acquisition constitue-t-elle entre eux une société qui donne à l’un d’eux le droit de vendre tout ou partie de l’objet acquis sans la participation de l’autre, et à son préjudice ?
Publisher
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De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
1781-Circa An 13
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1525
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1526
BCU_Factums_G1527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53265/BCU_Factums_G1525.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conciliations
Créances
immeubles
indivision
nullité
sociétés
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53277/BCU_Factums_G1603.pdf
dbc8525fe9fbb08694164f53f67f527a
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Text
PRECIS
COUR
D ’A P P E L
P O U R
SÉANTE
Sieur V i t a l D E D I E N N E , et dame J e a n n e - M a r i e
D E D O U H E T son épouse, appelans
C O N T R E
F
C
,
V E S C HA M B E S
veuve de Jacques
V a l a r c h e r , J e a n n e V A L A R C H E R , et A n
t o i n e F A U C O N son mari, intimés et incidemment
appelons.
rançoise
ette
contestation est la suite d ’une précédente, jugée par arrêt
de cette c o u r , du 2 thermidor an 8. Elle est tellem ent hérissée
d ’actes, q u ’on a cru ne pouvoir se dispenser d ’en présenter, avant
l ’audience, un aperçu.
François V esch a m b e s , bisaïeul des p a r t ie s , étoit propriétaire
d un domaine appelé de la B u tg e , de valeur aujourd’hui de plus
de 60000 francs.
A
A RIOM.
�'iV
f i )
II s’est m arié en prem ières noces avec M arie Jarrigo.
D e ce mariage sont issus quatre e n fa n s, Jacques, représenté
par les appelans, Jean, M arguerite i " . , et M arguerite 2'. du nom.
D e ces quatre enfans il en est décédé un avant le père, qui n ’en
rappelle en effet que trois dans le testament.
11 a contracté un second mariage avec Catherine C om bard.
D a n s ce contrat de mariage il com m ence par reconnoître à sa fu
ture épouse la som m e de 2700 francs; il réglé ensuite la légitimé
des enfans <ju premier lit. Il destine à Jacques Vescham bes une
som m e de 1000 f r . , à M arguerite 1” . du n o m , pareille somme
de 1000 f r a n c s , à M arguerite 2'. une somme de 700 fr a n c s , et
à Jean celle de 600 francs. 11 prévoit le cas où il décéderoit avant
son épouse; audit cas il lui assure et donne la jouissance d ’une
cham bre dans la m a i s o n , garnie de meubles nécessaires, et la
jouissance de la moitié de ses biens , tant qu ’elle demeurera en
•viduité. P ar une autre c la u s e , il donne par preciput et avantage
a u x enfa ns, est-il d i t , q u i proviendront du présent mariage, au
premier, soit f i l l e ou garçon, de son c h e f la somme deSooofrancs,
et a u x autres la somme de 1000 fra n cs. Il est enfin stipulé un gain
de survie réciproque de 100 francs.
D e ce mariage sont issus cinq enfans^ C ath erin e mariée au
sieur N a u f a r i, A n t o in e , P ierre , tf.onc*ww e , et M arguerite 5 '. du
nom mariée au sieur Roche.
L e 4 m ars 169G , testam ent par lequel il rappelle et confirm e
les destinations déjà faites aux enfans du prem ier lit dans son
second co n trat de m ariage.
Il lègue à A n to in e et C atherin e
•Veschambes , deux, des enfans du second lit , une som m e
de 1000 fr a n c s , et aux autres Irois 700 irancs seulem ent. V en an t
ensuite à l ’institution d ’h éritier, il déclare q u ’il nom m e pour son
héritière générale et universelle Catherine C om bard son épouse;
«V eut et entend que son héritière générale et uni verselle, C atherine
aC o m b a rd
son épouse, n o m m é e , soit privée de l’hérédité en cas
; m ais bien
sem b lera , sans
» q u ’elle vienne à convoler à de secondes noces
rendre
» l ’héréditc à tel de scs enfans que bon lui
qu ’elle
�YS
(3)
n soit tenue à aucune reddition de com pte; et quand la demoiselle
» Com bard viendroit à décéder sans avoir nom m é tel de leurs en» fans pour h éritier, veut et entend que ledit A n to in e Vescliam bes
» soit son vrai héritier qu ’il nom m e pour héritier des à présent
» audit cas et non autrement ; mais au choix et option de ladite
» C om b a rd d ’en nom m er un autre tel que bon lui s e m b le r a , ainsi
» que dit est. »
O n voit q u ’A n toin e n ’étoit no m m é qu’ à défaut d ’d c c tio n ; et la
veuve elle - mêm e n ’étoit tenue de remettre 1 hérédité, et d é lir e
entre les e n f a n s , q u ’en cas de convoi.
L e cas prévu n ’est point arrivé; Catherine C o m b a rd a demeuré
en viduité.
L ’institution faite en faveur de la veuve étoit susceptible d ’une
double réduction,
i°. L e s biens étant situés en pays de co u tu m e , elle ne pouvoit
avoir effet que pour le q u a r t, d ’après la disposition de la C o u tu m e ;
elle étoit de plus réductible à la portion d u moins prenant des
e n f a n s , d ’après l’édit des secondes noces.
F r ançois
cscham bes. est m o r j ^ I ç ^ f é v r i e g 1700.
Jacques V escfîam bes, enfant du premier li t , s’est marié en 1707
avec Geneviève la Vaissière.
En 1710 Catherine V esclia m b e s, une des filles du second l i t ,
a contracté mariage avec Jean N au fari, P ar leur contrat de mariage,
ladite C atherine C om b a rd l’a instituée son héritière générale et.
universelle, à la charge de payer aux autres enfans du second l i t ,
savoir, à A n to in e et Pierre V escliam bes, la somme de 200 fr a n c s ,
et aux autres la somme de 5 oo francs.
En 1738 Jacques V escliam bes, fils du premier li t , m arié avec
Geneviève la V a is s iè r e , fut prévenu d ’un homicide. Il fut obligé
de se réfugier en Espagne. 11 paroît qu ’il y eut une procédure cri
minelle instruite par contum ace, qui n ’existe plus. Il n ’en reste de
traces que dans un acte du 10 janvier 1757 , produit par les ad
versaires, par lequel le sieur de M o n t - Boissier, seigneur hautjusticier de la terre de C h e y la d e , fait remise et abandon à F ran A 2
�«
(4)
çoise Vescham bes et à Jacques V alarclier, du droit qu'il avoit aux
biens de Jacques V e s c h a m b e s , en conséquence du jugement de
m ort rendu par contum ace en la justice de C h e y la d e ; jugement
dont la date est en blanc.
1
Jacques Vescliam bes m ourut peu de temps après, dans les cinq
années de la contumace.
Il avoit eu de son mariage avec Geneviève la Vaissière six enf a n s , cinq filles, et un m â le , François 2*. du nom , qui n’ a pas
survécu long-temps à ses père et mère.
D e s cinq fille s, d e u x , Michelle et C a th e rin e, ont été mariées
du vivant du père avant le fatal.événem ent dont on vient de parler ;
par conséquent forcloses.
D e s autres trois fille s, l ’a în é e , Françoise V e s c lia m b e s , s’est
mariée avec Jacques V alarcher. C e sont les auteurs des intimés*
L a seconde, M arguerite , s’est m ariée en 1744 avec D a u sa t,
après la m o rt du père.
L a troisième, A n n e V e s c h a m b e s , s’est mariée avec D o uh et.
L e contrat de m ariage d ’A n n e V escham bes est du 16 juillet 1 7 4 4 :
elle étoit majeure.:.P.ar..ce contrat, de m j n a g n e l l e çlgnnajiouvoir
au mari de traiter, transiger, de ses biens d o ta u x , les partager,
mais non de vendre.
L e 20 du m êm e môis de juillet 1 7 4 4 > -^nnc V esch a m b es, sous
l ’autorisation de D o u h e t, son m a r i, et celui-ci en vertu dù pou
v o ir , est-il d i t , à lui donné par son contrat de m a riag e, cédèrent
et transportèrent à Françoise V e s ch a m b e s, et V alarcher son m a ri,
tous les droits que ladite Anfte V escham bes pouvoit avoir tant en
son nom que com m e héritière en partie de François 2”. du nom ,
son frère, dans les successions desdils Jacques V escliam bes et G e
neviève V aissières, et encore dans celle de François Vescham bes
1 " . du n o m , m oyenn an t la som m e de i 5 oo francs.
Peu après ce traité mourut A n to in e V escham bes, fils du second
lit de François.
A v a n t son décès il avoit fait deux dispositions en faveur de la
m êm e Françoise V esch a m bes, fem m e V alarch e r, qui s’etoit mise
à la tête de la maison.
�*
*î
( 5)
r P a r un premier acte du 14 ma* 1 7 4 4 > ^ lui fit donation de'tous
les droits, est-il d i t , à lui acquis tant par le testament de défunt
F ran çois VeScham bes, son père, qui l ’y n o m m a pour son héritier,
que par le décès de Catherine C o m b a r d , sa m è r e , et par s,es dis
positions portées dans le contrat de mariage de Catherine V e s •chambes, sœur du do nateur, avec d é fu n t N a u fa r i, nom s, raisons
«t actions rescindantes et rescisoires, sous la réserve d ’une somme
de io o o fr. à disposer.
P a r un second acte du 50 octobre 1 7
il disposa de cette
com m e d e 1000 fr . eneore en sa faveur.
A n n e V es clia m b e s, et D o u h e t son m a r i, qui avaient cédé leurs
droits par l’acte du s 5 juillet 1744> o n t eu f^e
mariage une
fille, Jeanne-M arie D o u h et , qui s’est m ariée avec V it a l de D ienne.
C e sont les appelans.
!
C e tte cession du 23 juillet 1744 ¿toit évidem m ent nulle. D o u h e t ,
par le contrat de m a riag e, avoit pouvoir de transiger, p artager,
m ais non de vendre.
En l’an 6 , ladite D o u h et et ledit V it a l de D ienne ont fait citer
au tribunal civil du C a n ta l ladite Françoise V esclia m b e s, et V a larcher son m a r i , en nullité de ladite cession, en partage de la
succession de Jacques V escliam bes et Geneviève la Vüi&sière, et
encore en partage de la succession d ’A n to in e V escliam bes 1 " . du
n o m , pour leur en être délaissé la portion qu ’A n n e V e s clia m b e s,
leur mère et b e lle -m è re , am endoit dans lesdites successions, soit
de son c h e t , soit du ch e f de François 2*. du n o m , son f r è r e ,
décédé ab intestat .
C o n tre la demande en partage des successions de Jacques V e s cham bes et Geneviève V aissiè re, les adversaires ont opposé la ces
sion. Ils ont soutenu que ce lle cession ne p o m o it être raisonnable
m ent attaquée, s o it d ’dprès le pouvoir donné par A n n e Vescliam bes,
alors m ajeure, à D ouhet son m a r i , dans son contrat de m ariage,
de traiter et transiger, soit d ’après le laps de temps qui s ’éloit
écoulé depuis la cession. Ils ont ajouté q u ’ils ne tenoient point
d ailleurs les biens co m m e héritiers de Jacques Vescliambes ; qu’ils
�H
C 6 )
r e jouissoient point à tilre d ’héritiers, q u ’ils jouissoient en vertu
île l’abandon fait en leur faveur, par le seigneur haut-justicier, de
l ’effet de la confiscation résultante du jugement rendu par contu~mace.
'•
Ces moyens ont été facilem ent écartés.
1
C on tre la demande en partage de la succession d ’A n to in e V e s ch am bes, ils ont rappelé le testament de François. Ils ont dit que
François par son testament avoit institué Catherine C o m b a rd
pour son héritière, et destiné à A n to in e une somme de 1000 francs;
q u ’A n to in e avoit ensuite disposé en leur fa v e u r , par les deux
donations ci-dessus, du m ontant de ladite destin ation, ensemble
de tous les droits à lui échus par le décès de Catherine C o m b a r d ,
desquels droits faisoit partie l’institution testamentaire faite en.
faveur de ladite C o m b a rd par François ; qu’A ntoine n ’avoit pas
d ’autres biens.
L e s sieur et dam e de D ien n e ont répondu que l’institution faite
en faveur de Catherine C o m b a rd étoit doublement réductible; que
la donation des droits échus par le décès de Catherine C o m b a rd
ne pouvoit dès-lors porter sur tous les biens de François.
A
quoi il a été répliqué par V escham bes et V alarch e r q u ’A n
toine leur ayant fait donation du m ontant de la destination à lui
faite par le testament du pcre , il étoit non-recevable, et les sieur
et dame de Dienne de son c h e f , à s’aider de la réduction, soit de
la C o u lu m e au quart, soit du retranchement de 1 edit des secondes
noces ; que si on prétcndoit q u ’ Antoine eût d ’autres biens on devoit
l ’établir. C e sont les propres termes de leur défense consignée dans
le jugement.
En cet état, jugement est intervenu au tribunal civil du Cantal
le iG ventôse an 8 , q u i , en ce qui concerne la demande en partage
de la succession de Jacques V escham bes et Geneviève la Vaissière,
a déclaré la cession du 35 juillet 1744 'm ile; a ordonné le partage
des biens dépendans de la succession de Jacques V escham bes et
Geneviève la V aissière, avec restitution des jouissances depuis lo
d é c è i , à l'exception des années pendant lesquelles avoit duré lo
�C i)
mariage dudit D oülict arec ladite A n n e V escliam bes, à la charge
de rapporter la som m e de i 5oo fr a n c s, prix du traité, perçue par
ledit Douliet.
- E t en ce qui concerne la succession d ’A n t o in e ;
»
A tten d u qu’ A n to in e ayant approuvé le testament de François
Vescfïam bes i*r. du n o m , en disposant de la destination à lu i
faite en faveur des défendeurs , les sieur et dame de D ten n e
ne pouvant s ’aider de son c h e f, n i de la réduction au quart>
d’ après la Coutum e, n i de la réduction a la part du\moins
prenant des en fa n s , d’ après l ’ édit des secondes noces ; que^ les
demandeurs n ’ont p oin t établi que ledit A n to in e eût d’ autres
b ie n s, que le montant de la destination à lu i fa ite par son p ère ,
e t les droits à lu i échus du c h e f de sa m ère , de tout quoi il a
d isp osé en faveur des défendeurs ; a débouté les sieur et dam e
de D ie n n e de leur demande.
: ,
Françoise V escham bes et V alarch er ont appelé de la première
partie du ju g e m e n t, qui ordonnoit le partage des successions des
dits Y esch am bes et la Vaissière.
y.
L e s sieur et dam e de D i e n n e , de leur c ô t é , se sont rendus in
cidem m ent a p p e la n s, en ce q u ’ils avoient été condamnés à rap
porter et faire compte de l ’entier prix du traité de 1744» prix
perçu par ledit D o u h e t , à la succession duquel ils avoient renoncé.
Ils auroient pu aussi interjeter a p p e l, en ce q u ’ils avoient été in
définiment déboutés de la demande en partage de la succession
d ’A n to in e à défaut d ’indication de biens , tandis qu ’ils auroient
d u etre déboutés seulement quant à présent. Ils crurent cet appel
sans objet. Ils étoient loin de prévoir la contestation qui leur a
été suscitée depuis.
Sur les appels re sp e ctifs, arrêt est intervenu le 2 thermidor
an 8 en cette c o u r , par l e q u e l,
E n ce qui louche l ’appel incident des sieur et dame de D ie n n e ,
attendu l’articulation fai le par 1rs adversaires , que lcsdits de
D ienne avoient fait acte d ’ héritier dudit D ouh et en s’emparant
du m o b ilie r , a o r d o n n é , avant faire d r o i t , la preuve de l'im
mixtion.
�X s )
Faisant droit sur l’appel principal de Françoise Vescham bes et
V a la r c h e r , a dit avoir été bien jugé.
Vescham bes et V alarch er se sont pourvus en la cour de cassa
tion contre la disposition de Jarret qui les blessoit, mais inuti
lem ent. *
N ’ayant pu réussir de ce c ô t é , ils ont cherché à venir à leur
bu t d ’une autre manière.
»
« Ils ont p r o d u it ,
i°. U n e r e n o n c ia tio n , ou actes énonciatifs d ’une renonciation
faite après la m ort de François Vescham bes par Catherine C o m b a r d , tant pour ses enfans que pour ceux du premier lit , à la
succession dudit V e s c h a m b e s , par acte reçu au greffe de la jus
tice de C h e y la d e , le 2 mars 1700;
20. U n bail à fe rm e consenti par Jacques V esch a m b e s, n onob
stant ladite renonciation du dom aine de la B u t g e , dépendant de
ladite succession, le i 5 avril 1700;
5% U n e ordonnance sur requête du juge de C h eylad e , du 10
avril 170 0 , qui autorise Jacques V escham bes à jouir des b i e n s ,
sans qu'on puisse en induire aucune qualité préjudiciable ;
4“. U n e vente d u 19 avril -1708, faite par ledit Jacques V e s
c h a m b e s, de trois septerées de terre dépendantes de la succession,
m o yenn an t la som m e de 560 fr. ;
5 °. U n acte du 22 décem bre 17 12 , reçu au g reffe de la m êm e
justice de C h e y la d e , par lequel Jacques V escham bes déclare ap
prouver la renonciation faite par Cath erin e C o m b a rd le 2 mars
170 0, pour, et en son nom ;
6°. U n e sentence du 14 m ars 1721 , rendue contre un créan
cier q u i , en conséquence desdites renonciations , congédie V e s
chambes des poursuites faites contre lui , s a u f au créancier scs
actions contre le curateur nom m é à la succession va ca n te , nomination qui est rappelée dans le vu de la sentence;
7 9. U n acte de ch eptel, du i ,r. octobre 1758, par lequel, après
la disparition de Jacques V escham bes , ses e n fa n s , et A n to in e
et Pierre V e s c h a m b e s , scs f r è r e s , fils du second U t, déclarent
avoir
�r 9 )
nvoir pris à li Ire de cheptel vingt-quatre va ch e s, et autres lêtes
de bestiaux pour garnir le d o m a in e;
8°. D es reçus de re n ie s , et extraits des rôles d'impositions
jusqu'en 1 7 ^ 7 ;
'
1
9°. U n e requête présentée par A n lo iiic Vcscîiàm bes a 1 éjection
de S a in t-F lo u r , le i 5 février 1 7 4 3 , ’daris laquelle il a exposé que
les percepteurs des années 1758 , 1759 et 174° »voient lait saisir
sur Jacques Y escham bes , faute de’ payement des impositions-,- les1
ir.uils pendans par r a c in e , desquels fruits ils s étoîent' rendus ad
judicataires co m m e des biens dudit Jacqües V e s c h a m b e s , ignôrant’
le testament de François Vescham bes , par lequel il avoit été ins-i
titué héritier ; q u ’il venoit de découvrir ce testament ; qu’étànt
héritier il ne pouvoit être adjudicataire de sa propre chose ; qu ’e n 1
¿onséquence il demandoit à être déchargé du prix de l ’ adjudica»-;
lion ; requête suivie de sentence adjudicative des coirclliSiohs, dû
22 du m êm e m o i s , rendue par d é f a u t , tant contre les consuls
que contre Jacques V escham bes.
De
tous ces actes
ils ont
.
conclu que Jacques
V esch a m
bes n^avoit absolument aucun droit sur les biens d e . Françoi'Sj
i ' \ du nom ; que , par s i renonciation et par lèi tèstament
de François , testament qui
avoit été- confirmé
par la sen
tence de l’élection de S a i n t - F l o u r , tous les biens etoient sur
la tête d 'A n to in e , dans la succession duquel A n to in e les sieur
et daine
de D ienne n ’avoienl rien
à réclamer , puisque , par
le m êm e jugement dont ils poursuivoient l’ex é cu tio n , ils avòient
été déboutés de leur deniimde en partage à cet égard ; que dèslors il ne d e v o i t e n t r e r dans le partage ordonné de la succes
sion de Jacques^STilnn>l w
que ses biens personnels , c ’est - à -
d ir e , les biens par lui a c q u is , consistant en un petit domaine
appelé de la C o s t e , et aucun de ceux ayant appartenu à F ran
çois. A insi
les biens
qui d ’abord ,
pouvoir s ’aider de la cession du
et
tant q u ’on
22 juillet
avoit
cru
1 7 4 4 , éloient sur
la tête de Jacques V e s c h a m b e s , se sont trouves (oui à coup
snr la tête d ’Antoine.
B
�i l
( 10 )
D e ces mêmes actes ils ont inféré de plus, i°. que Jacques V e s chambes ayant constam m ent joui, et n ’ayant joui que com m e créan
cier , sa succession étoit comptable de toutes les jouissances par
lui perçues jusqu’en 1738 , s a u f à lui faire raison de ses créances;
2°. Que la succession étoit pareillement comptable de la valeur
des fonds q u ’il avoit aliénés;
5 °* Q u ’elle étoit également com ptable du m o b ilie r , et notam
m ent du cheptel qu ’il avoit dissipé ; que le cheptel avoit été
tellement dissipé, qu ’après sa fuite ses enfans et ses frères avoient
été obligés de prendre d ’autres bestiaux à cheptel pour garnir
le dom aine.
L e s sieur et dam e de D ien n e
ont rép o n d u que la renon
ciation avoit été sans e f fe t , puisqu’il résultoit des pièces m êm es
produites ' par les adversaires q u e , nonobstant la renon ciation,
il avoit v e p d u , a f f e r m é , et constam ment joui.
Ils ont dit que quand on donneroit à la renonciation tout
son e f f e t , il auroit acquis un nouveau droit par les cessions ou
par
le décès ab intestat de presque tous les enfans
tant du
premier que du second lit.
Ils ont produit un acte du 21 octobre 1714» par lequel
M arguerite ,y e s c h a m b e s , autre fille du second l i t , en approu
vant , est-il d i t , tous actes c i - d e v a n t fa its.e t règlemens de ses
d r o its , cède et transporte audit Jacques V escham bes tous sesdits droits , parts et portions èsdites successions de ses défunts
père et mère et autres q u elco n q u e s, m o ye n n an t la somme de
750 fr. et une bourète de ¡vache; a u ( m oyen de quoi elle quitte
et renonce auxdites
successions > et ià toutes
autres
directes
et collatérales échues et à échoir g é y ^ ’alerrrrrtt quelconques.
E n cet é t a t , Jacques Y a la r ch e r est décédé. Françoise Vescham bes , sa femme , a repris l’instance. Jeanne V alarchcr et
A n to in e F a u c o n , ses gendre et fille , sont interven us, et ont
adhéré aux conclusions prises par leur beau-père et belle-mère.
Ils ont répondu à
l’acte du 21
octobre
1714 , produit par
les sieur et dam e de D i e n n e , que cet acte étoit nul
com m e
�<*>£■
( «
/
)
contenant une renonciation à des successions échues et à é c h o ir ,
uniquo pretio.
L a cause portée à l ’audience , jugement est intervenu le 8
prairial an 1 1 , contradictoire entre les p a rtie s, doht voici les1
principaux motifs et le dispositif.
‘
« A tten d u , est-il dit , enlr’autrés motifs , que Jacques Y e s » cliambes ayant renoncé à la succession de son père, ses en'ans
» ne peuvent pas prendre sa place et succéder à leur aïeul.
» ï°. Jacques V esch a m bes n ’étoit pas marie a 1 époque de la
» m o rt de son père ; il ne s’est m arié q u ’en 1 7 0 7 , et son père
» étoit m o rt avant le 2 mars 17 0 0 ; ses enfans n ’étoient à cette
» époque ni nés ni c o n ç u s , et la renonciation de Jacques V e s » chambes ayant un effet rétroactif au m om ent de la m ort de son
» père , ses enfans ne pouvoient pas venir à la succession de
» leur aieuli 20. L e s enfans de Jacques ne pourroient venir à
» la succession de leur aïeul que par représentation de leur
» père : il est de principe consacré par une jurisprudence irrévo» cable , qu ’on ne représente pas une personne vivante.
» A tten d u que par l ’acte du 21
octobre 1 7 1 4 » passé entre
» Jacques Vescham bes et Marguerite sa sœur , du second l i t ,
» par lequel ladite Marguerite a renoncé aux successions de ses
» père et mère , et autres collatérales échues et à échoir , au
» profit
de
Jacques ,
m o yenn an t 760 fr . et
une
bo u rète,
>> ladite M arguerite a déclaré q u ’elle avoit fait des actes , par
» lesquels elle avoit réglé ses droits successifs dans lesdites suc» cessions; que la
som m e de y 5 o fr,
» légitime portion dans
les biens de
étoit sa
juste part
sesdits père
et
et
mère ;
» pour avoir une parfaite connoissance de leur co n sista n ce , et
» qu ’en subrogant par le m êm e
acte sondit frère à tous ses
» droits , pour par lui en avoir son recours sur lesdites succcs» sions , ainsi qu’il aviseroit, elle ne lui a point cédé scs droits
» rescindans et rescisoires, d ’où il résulte q u ’il n ’a e u , en vertu
* de cet acte de 1 7 1 4 » d ’autres droits que celui de demander
B 2
�(' «
)) à la succession de son
père la
)
somme
de 7 5o
fr. , et la
» bourète.
» A tten d u
q u ’ayant renoncé à la succession de son père ,
v Jacquçs Vescham bes s.eroit aujourd’hui non-recevable à criti—
» quer le testament dè son p ère ; et que cette fin de non-rece» voir ne peut être valablement opposée à un héritier repré;> sentant ledit Jacques.
» L e tribunal déboute les sieur et dame de D ien n e de leur de» m ande tendante à .ce que la.succession de Jacques V escham bes
» soit composée d ’une portion des biens de François Y escham bes :
» ordonne que la succession de Jacques Y escham bes sera com posée,
» 1°. du quart des biens de M arie la Jarrige sa m è r e , et des inté-
» rets à compter de 1 7 5 8 , époque à laquelle Jacques V escham bes
« s’est absenté, et a cessé de jouir en com m un des biens de F ra n » cois son, père; 20. des biens par lui acquis,, des jouissances telles
» q u ’elles sont fixées par le jugement du C a n tal , du iG ventôse
» an 8 ; 5°. de la somme de 7^0 fr. et de la valeur d ’une bou» r è t e , pour le prix de la subrogation à lui faite par M arguerite
» V e s c h a m b e s , sa sœur du second l i t , par l’acte du 21 octobre
» 171/f, avec intérêts à. compter de 17 3 8 ; 4 “. des créances que
» les parties de D u bois établiront avoir été payées par Jacques
» en l’acquit de la succession de François V escham bes , avec les
» intérêts à compter de 1 7 5 8 , si mieux n ’aiment les parties de
» D u bois rendre compte des jouissances du domaine de la B u lg e ,
» à compter de 1701 , jour du bail fait par Jacques Vescham bes
a des bienç.fje spn( p è r e , à la. déduction des nourriture et entre» tien des frères et sœur dudit Jacques; auquel c a s , le tribunal
)i ordonne que les intérêts des créances ci-dessus entreront dans
» 1.) tuasse de la succession de Jacques V es ch a m b e s, à com pter
» de l’époque où elles ont été pavées par ceux de la créance de
» 760 fr. et dç la valeur de la bom ète , et entreront dans la
» n ia s s e , de ladite successiot) à çpmptv«’ du 21 octobre 1714 , et
» ceux de la portion de la dot do Marie la Jarrige revenant à
» Jacquts V e s c h a m b e s , à compter de la m ort de François V e s -
�» c h a m b c s , sa u f aux demandeurs à lenir compte aux défendeurs
» des créances que ceux-ci prétendent et justifieront avoir payées
» en l’acquit de Jacques V e s c h a m b e s, suivant la liquidation qui
» en sera faite par les experts qui seront nom m és , et c e , sur les
» pièces que les défendeurs leur remettront : sur le surplus des
» d e m a n d e s, m et les parties hors de c o u r , dépens compensés. »
L e s sieur et dam e de D ienne ont interjeté appel de ce juge
m ent par acte du 6 germinal. L a veuve V alarcher s ’est rendue
aussi appelante par acte du 14 du m êm e mois , en ce que toutes
les conclusions par elle prises ne lui avoient pas été adjugées.
P endant que les parties étoient ainsi en instance au tribunal
de M u r â t , pour fixer la consistance de la succession de Jacques
V e s c h a m b e s , dont le partage a été ordonné par l’arrêt de celle
c o u r , du 2 thermidor an 8 , confirm atif à cet égard du jugement
de S a in t-F lo u r,
elles exécutoient l’autre disposition du même
a rrê t, q u i , avant faire droit sur l'appel incident interjeté p a r le s
sieur et dam e de D ien n e du jugement de S a in t-F lo u r, en ce que
par ce jugement ils avoient été condamnés à rembourser la somme
de i 5 oo f r . , prix du tra ité , nonobstant la renonciation faite à
la succession de D o u h e t , avoit ordonné une enquête sur le fait
d ’imm ixtion. 11 a été procédé de part et d ’autre devant le tri
bunal de M u r â t , com m is à cet e f f e t , à l’enquête et contreenquête.
L a cour a ainsi à statuer sur trois appels:
i°. Sur cet appel in cid e n t;
2°. Sur le nouvel appel interjeté par les sieur et dame de D ienne
du jugement de M u r â t , dont on vient de rendre co m p te;
E l sur l’appel incident de ce m êm e ju g e m e n t, interjeté par la
veuve V alarcher.
L e lout a été joint par arrêt du oo germinal dernier.
On ne s’occupera point ici du premier de ces trois appels; il
suffira de discuter à l’audience le mérite des enquêtes.
O n ne s’occupera que de l’appel respectivement interjeté par les
pnrlies du jugement de M urut , cl on ne proposera m êm e que
quelques réflexions.
�■ l*
( H
)
Depuis leur appel, les sieur et dame de D ie n n e , par la com
munication q u ’ils ont prise des pièces des adversaires, et par la
recherche des actes énoncés dans ces pièces , ont eu connoissance,
i°. D ’un acte passé entre Jacques V escham bes et Catherine
C o m b a rd le 3 mars 1710. Par cet acte , Catherine C o m b a r d ,
tant en son nom propre et privé que com m e m ère pieuse de ses
e n fa n s, et dudit François V e s c h a m b e s , a subrogé ledit Jacques
Vescham bes aux droits et hypothèques, part et portion que sesdits
enfans pouvoient prétendre sur la succession de leurdit défunt
p ère, soit par la destination portée au contrat de mariage de leur
feu père avec ladite C o m b a r d , qu’ autrem ent ; sa vo ir, pour C a th e
rine V e s c h a m b e s , fille a în é e, la som m e de 800 f r a n c s , et en.
p ayem ent d ’ic e lle , la maison , jardin et hérial , quatre brebis
et quelques m eub les; pour M arguerite et Françoise V e s ch a m b e s,
la somme de 600 fr. ch a cu n e ; et pour A n to in e et P ie r re , celle
de 55 o fr. chacun. L ad ite C o m b a rd , traitant ensuite de ses
droits personnels, cède et transporte audit Vescham bes tous ses
d ro its, est-il d i t , actions e t prétentions qu*elle a par préférence
sur les biens de Vescham bes son m ari, en quoi qu'ils consis
tent ou puissent co n sister, e t , par e x p r è s , le m ontan t de ses
conventions matrimoniales rappelées dans l’ acte , m o yen n an t la
som m e de 2700 fr. , dont partie est payée co m p ta n t, et le surplus
stipulé payable à terme. C e t acte a été découvert depuis l’appel'.
20. D u contrat de C atherine V esch a m bes l’alnée des enfans
du second l i t , du 14 mars 1 7 1 0 , par lequel elle se constitue par
exprès la maison , jardin et hérial à elle délaissés par le précédent
acte ; ce qui est de sa part une approbation dudit acte.
5°. D ’ un acte du 4 juin 1744* P ar lequel ladite Catherine V e s
chambes , fem m e N a u fa r y , alors v e u v e , cède et transporte à
Jacques V a la r c h e r , mari de Françoise Veschambes , c e qui pouvoit
lui rester du com m e héritière contractuelle de ladite Catherine
C o m b a r d , des causes du traité dudit jour 5 mars 1 7 1 0 , en ca-?
pilai ou intérêts , m oyenn an t la somme de 2000 fr,
�t)
( i5 )
4°. D ’un acte du i 5 février 1745 en Ire M arguerite Y e sclia m b e s,
qui avoit cédé ses droits à Jacques V e s ch a m b e s, par l ’acte du 21
octobre 1 714 rappelé ci-dessus, d ’une p a r t , et Valarclier d ’autre
p a r t , par lequel les parties , est-il d i t , étant venues à compte des
causes dudit tra ité , il s’est trouvé resté dû à ladite Y e s c lia m b e s ,
en capital ou intérêts, la somme de 749 fr* sur laquelle M arguerite
Vescham bes fait remise de celle de 124 f r . , et Y alarclier paye ou
s ’oblige de payer le surplus.
T e l est l’état de la cause.
Si le jugem ent de Saint - F l o u r , qui n ’ a point été attaqué
en cette p a r tie , avoit déclaré les sieur et dame de D i e n n e , à
défaut
d ’indication d ’autres b i e n s , no n -re ce va b le s
seulement
quant à présent dans leur demande en partage de la succes
sion d 'A n to in e , la question desavoir si les biens é to ien tsu rla tête de
Jacques ou d ’A n to in e seroit oiseuse ; ce qu ’ils n ’auroient pris dans
la succession de Jacques, ils l’auroient pris dans celle d ’A n t o in e ,
sa u f le prélèvement en faveur de V escham bes et V alarcher des
deux donations, de la destination paternelle, et des droits échus
de la m è r e , consistant pareillement dans la destination faite par
celle-ci.
Mais] le jugement les a déclarés indéfiniment non-recevables ,
et les adversaires se prévalent de cette disposition.
A v a n t , tout étoit à Ja cq u e s, et rien à A n t o i n e ; aujourd’hui
tout est à A n t o in e , et rien à Jacques.
L e s sieur et dame de D ien n e ont été exclus du partage de
la succession d ’Antoine. Il a été jugé e ffe c tiv e m e n t, et cette
disposition qui n ’a point été attaquée a acquis l ’autorité de la
chose jugée , q u ’ils n ’avoient rien à y réclamer.
M ais il a été jugé aussi que la succession consistoit unique
m ent dans la som m e de 1000 fr. destinée par le p è r e , et dans
les droits échus par le décès de la m è r e , droits qui se réduisoient pareillement à la destination faite
par lu mère dans le
�V!
( iS
co n lra l de mariage de
)
Callierine V cscham bes avec N a u f a r y ,
par lequel co n lra l de mariage la mère avoil institué ladite C a
therine Vcscham bes pour son héritière.
Les
adversaires ne peuvent pas scinder les dispositions du
jugement.
S ’ils ve u le n t,’ en vertu
du
ju g e m e n t , exclure
les
siéur et dame de D ien n e de la succession , il fa u t q u ’ils reconnoisscnt en même temps que cette succession se réduisoil aux
deux objets ci-dessus , à la destination à lui faite par le p ère ,
et à celle faite par la mère.
S ’il en étoit au tre m e n t, ils profiteroient de leur dol contre
la m a x im e , Nernini sua Jraus 'patrocinan debet.
L orsque pour parer au partage de la succession d ’A n t o i n e ,
ils ont borné la succession au m ontant de la destination pater
nelle
et
maternelle , lorsqu’ils ont
déclaré qu’ il n’ avait pas
drautres biens , ils ont volontairement renoncé à l’ effet de la
sentence de l ’élection de S a i n t - F lo u r , à l ’effet de la renoncia
tion de J a c q u e s , et de tous les autres actes q u ’ils opposent au
jourd'hui.
C e lle observation seule dispenseroit d ’entrer dans une plus
grande discussion ; mais allons plus loin.
P o n r r o i t - o n scinder le ju g e m e n t ; v o u d r o i t - o n
décision du
m o t if ,
faire abstraction
de
la
séparer
déclaration
la
des
adversaires ; il seroit facile d ’établir q u ’A n toin e n ’ avoit effec-*
tivement pas d ’autres biens.
C ’est une erreur d ’avancer qu'il étoit héritier institué du pèrer
il n ’avo it, par le testament du père , qu'une som m e de io o o fr,
A la vérité il est dit q u ’à défaut d ’élection de la part de la
mère , le père le no m m e dès à présent pour son héritier. Maid
ce n ’est q u ’à défaut d ’élection ; et la mère
elle-même n ’ étoit!
tenue d ’élire, e i d e remettre l’hérédité, q u ’en cas de convoi, L a
v o c a t i o n d ’ Antoine à l'hérédité, dependoit d ’une double condi
tion , du défaut d ’élection , et encore du cas de convoi ; et de
ces deux 'conditions subordonnées elle-mémcs l’une à l’autre , la
p rincipale, le cas du co n v o i, n ’est point arrivée. L a sentence de
l ’élecliou
�( *7 )
l'élection de Saint-FIour n ’a pu lui donner un droit qu’il n ’avoit
pas. Cette sentence porte sur un fait inexact. A u surplus , elle
a été rendue par défaut , et elle est susceptible, et d ’opposition,
et d ’appel ; les sieur et dame de D ienne sont encore en temps
utile pour l’attaquer. En e f f e t , par l ’arrêt du 2 thermidor an 8 ,
confirm atif à cet égard du jugement de Saint-FIour , la cession
faite par A n n e V escham bes et son mari de leurs droits dans la suc
cession de Jacques V escham bes , a été an n u llée, et les parties
remises au m êm e et semblable état q u ’elles étoient avant ladite
cession. L a cession est du a 3 juillet 1744*
sentence de l ’élec
tion de S a in t-F Io u r est de 1743. Il ne s’étoit écoulé entre la
sentence et la cession qu ’un an. À
l ’époque de la cession , les
sieur et dame de D ienne étoient donc en temps utile pour atta
quer la sentence, soit par la voie de l ’op p osition , soit par la
voie de l’appel ; et par l’arrêt de la cour ils ont été remis au
m êm e état q u ’ils étoient alors. O11 ne pense pas que les adver
saires insistent sur une sentence évidem m ent surprise à la reli
gion du tribunal qui l ’a rendue. D a n s tous les c a s , les sieur
e t dam e de D ie n n e déclarent subsidiairement s’en rendre inci
d e m m e n t appelans.
A n to in e n ’avoit donc , par le testament du
père , que la
som m e de 1000 fr.
P a r le décès de Catherine C om b a rd , il n ’a eu
également
q u ’une destination en argent. O n a vu que Catherine C o m b a rd
a institué pour son héritière Catherine V escham bes sa fdle aîn ée,
fem m e N a u fa r y .
Q u e les adversaires ne disent pas qu’ils sont également aux
droits de Catherine Vescham bes , au m oyen de la cession et subro
gation que celle-ci leur a consentie par acte du 4 juin 1744; car il
fa u t bien remarquer que cette cession n ’est que particulière. Par
cette cession , Catherine Vescham bes n ’a pas cédé la généralité
de ses droits ; elle n ’a pas cédé l’effet de l’institution contrac
tuelle faite en sa faveur par ladite Catherine Com bard : elle n ’a
cédé que le restant des sommes ù elle dues des causes du traité
C
�( i8
)
ilu S mars 1 7 1 0 , passé entre Jacques Vescham bes et Catherine
C om b a rd .
(¿u'on ne dise pas encore q u ’alors les biens aurolent appartenu
à ladite Catlierine V esch a m b e s, en vertu de l’institution faite en
sa f a v e u r , et que les sieur et dame de D ienne seroient également
sans dro it; c a r , indépendamment de l ’acte du 3 mars 1710 , par
lequel la mère, avant de marier sa fille, avoit déjà cédé et transporté
à Jacques Vescham bes tous les droits, actions et prétentions qu’elle
avoit sur les biens de son m a r i, lesquels n e pouvoient , par con
sé q u en t, faire partie de l’institution, on opposeroit la prescription
.de près d ’un siècle ; prescription que Catherine Vescham bes ne
pourroit écarter sous prétexte de co h a b itatio n , ayant été m a riée ,
et hors de la m a iso n , dès 1710.
E t cette prescription n ’a point p ro fité , m êm e en partie , à
A n to in e . Ici on com battra les adversaires par leurs propres armes.
-Leur défense contre la demande form ée par les sieur et dame de
D i e n n e , du c h e f d ’A n to in e , en réduction de l’institution faite par
François en faveur de Catherine C om b a rd , soit au quart d ’après
la C o u tu m e , soit à la portion de moins prenant d ’après l ’édit des
secondes n o c e s , défense consignée dans l ’attendu du jugement de
S a in t-F lo u r , a été q u ’A n to in e ayant approuvé la destination de lé
gitime à lui faite par le p è r e , il ne p ou v oit, ni les sieur et dame de
D ie n n e de son ch ef, demander laréduction. On va tourner contr’eux
le mêm e m oyen. L e légitimaire qui approuve la destination devient
étranger aux événemens de la succession ; il y est aussi étranger
que la fille forclose : il n ’a pas m êm e droit aux réserves coiiîuniières. C ’e s t , en effet , un principe constant , que le légitimaire
ne peut cumuler la destination et les réserves coutumières. A n
toine ayant approuvé la légitime n ’a donc pu p ro fiter, mêm e en
p a r t i e , de la proscription qui s’est acquise contre Catlierine V e s charnbes.
C V s t donc sans fondement , et contre la teneur des a ctes, que
les adversaires, changeant de langage, ont soutenu an tribunal de
M urât que la propriété résidoit sur la tête d ’A n toin e V escham bes.
�y
c 19 )
L e seul titre apparent à l ’appui de celte prétention in ju s te , est
la sentence obtenue en l ’éleclion de Saint-Flour. M ais cette sen
ten ce , contraire aux termes du te s ta m e n t, susceptible d ’être atta
q u é e , et attaquée en effet par l’appel incident qu ’on a déclaré in
terjeter , ne sauroit être d ’aucune considération.
V oudroit-on donner à cette sentence tout son effet ? elle a con
firmé le testam ent; elle a jugé que l'institution testamentaire devoit profiler à A n to in e : mais elle n ’a , ni p u , ni entendu donner au
testament plus d ’effet q u ’il 11c pouvoit en avoir. O r le testament,
s’il ne pouvoit êlre s u j e t , à l’égard d ’ A .n lo in e , au retranchement
de l ’édit des secondes noces , éloit toujours sujet à la réduction
au quart de la Coutum e. C ette sentence n ’auroil jamais opéré
contre Jacques Vescham bes une forclusion tolale.
E t qu ’on ne dise pas que Yattendu du jugement de Saint-Flour
a jugé que les sieur et d a m e de D ien n e ne pouvoient s’aider de
la réduction j car c ’est du ch e f d 'A n to in e , com m e A n toin e a ya n t
approuvé le testa m e n t, et non du ch e f de Ja cqu es, qui n ’a jamais
rien approuvé , et de la consistance de la succession duquel on ne
s’est m êm e pas occu p é, parce q u ’il falloit avant tout savoir si on
seroit admis au partage de sa succession, si le traité seroit annullé.
Sur qui résidoit la propriété du domaine ? non , encore une. fo is ,
sur la tête d ’A n t o in e , q u i, au contraire , étoit réduit à une légitime
en deniers , tant du c h e f du père que du ch e f de la mère , mais sur
la tête de Jacques , qui à sa portion directe réunissoit, ou à litre
successif par le décès ab intestat * ou par cession et tra n sp o rt, la
portion de presque tous les autres frères et sœurs.
N ous disons à titre successif: les deux enfans du prem ier l i t ,
Jean et Marguerite 1” . du n o m , sont décédés ab intestat cl sans
enfans.
P ar cession : Catherine C o m b a r d , par l ’acte m êm e du 5 mars
1710 , a cédé et les droits q u ’elle am endoit, et les droits et portions
héréditaires de chacun des enfans du second l i t , à la charge par
Jacques V esch a m bes de payer tant à chacun.
�( 20 )
Catherine Vescham bes a ratifié cet acte le le n d e m a in , en se
constituant dans son contrat de mariage ce qui lui avoit été assuré
par ce traité. Elle l ’a ratifié plus expressément encore , en cédant
depuis à V alarch er ce qui lui restoit du des causes dudit traité;
et V alarch er l’a approuvé lui-m êm e en prenant celte cession.
C o m m e aux droits de cette Catherine V escham bes Jacques V e s
cham bes a eu d r o it , non-seulement à la portion héréditaire qu ’elle
a m e n d o it, mais encore à la somme de 5 ooo fr. donnée par préciput au premier des e n f a n s , filles ou m â le s, à naître du mariage.
M arguerite 3*. du nom , veuve R o ch e , l ’a approuvé, el expres
sément par l’acte du 21 octobre 1 7 1 4 > e t ta citem en t, en ne reve
nant point dans les dix ans ni dans les trente.
V en on s au m o t i f qui paroit seul avoir déterminé les juges de
M u r â t à la renonciation de Jacques.
Quelle que soit cette renonciation , le jugement contient d ’abord
une erreur : A tte n d u , porte un des motifs , qu’ ayant renoncé à
la succession de son pcre , Jacques Vescham bes seroit aujour
d’ h u i non-recevable à critiquer le testament de son père. C ’est
en quoi les juges ont erré. Sans d o u te , pour demander la réduc
tion au quart portée par la C o u t u m e , il faut être héritier: mais
il n ’en est pas de mêm e pour le retranchement de l’édit des se
condes noces ; il n ’est pas nécessaire d ’être héritier pour demander
la réduction portée par l ’édit. Q u ’on lise P o t h ie r , L e b r u n , traité
des Successions; R i c a r d , nom bre
i
3 o i ; R e n u s s o n , t ra ité jie la
C o m m u n au té . L a raison e st, qu ’ils tiennent ce bénéfice d e l à lo i,
non com m e héritiers, mais co m m e enfans. L'institution faite par
le testament de François en faveur de Catherine C o m b a r d , n ’étoit
pas seulement réductible au quart d ’après la C ou tu m e ; elle étoit
encore réductible à la portion du
moins prenant par l ’édit des
secondes noces ; et quelque effet qu ’on veuille donner à la renon
ciation de Jacques V e s c h a m b e s , il auroit toujours eu droit au
retranchement. Pour l ’en exclure, il faudroit q u e lle comprit expres
sément le retranchement.
�- M ais quelle est c e lle renonciation ? D e quel poids peut être
une renonciation , qui n ’a été opposée q u ’aux créanciers pour sus
pendre leurs poursuites!, qui a demeuré sans effet dansila fa m ille ;
nonobstant laquelle il a j o u i , et non-seulement jo u i , mais -vendu,
et fait tous les actes de propriétaire.
' E t qui oppose cette renonciation ? une fille du r e n o n ç a n t , F ra n
çoise Vescham bes , qui seroit elle-même exclu e, si la cour s’y
arrètoit.
C e lt e renon ciation, dans aucun cas , ne pourroit com prendre
que la portion directe ; elle ne pourroil comprendre les portions
q u ’il a acquises des frères et sœurs , ou par cession et transport,
ou par leur décès ab intestat , com m e on vient de l’expliquer.
E t dans ces portions des frères et sœurs il auroit r e p r is , en
p a r tie , m êm e la portion directe qui par la renonciation se trou
verait avoir accru à tous les frères.
L e bu t q u ’on se propose dans ce m om ent n ’étant que de don
n er une idée de la c a u s e , on ne s’étendra pas davantage. O n se
réserve de développer à l ’audience les m o yens qui se présentent
pour écarter cette renonciation.
O n ne dira également q u ’un m ot sur le m o t i f que les juges ont
inséré dans le ju g e m e n t, relativement à la cession faite par M a r
guerite V escham bes 3*. du nom , par l ’acte du 21 octobre 1 7 1 4 .
Ils ont décidé que cet acte n ’assuroit à Jacques V escham bes qu ’une
reprise de 750 i r . , et non le droit de réclam er la portion héré
ditaire de ladite M arguerite V es c h a m b e s; parce q u e , d ise n t-ils
elle a annoncé dans cet acte que ses droits avoient été précédem
m e n t réglés , et qu ’elle n ’a pas cédé les actions rescindantes et
rescisoires.
E t quel besoin avoit-elle de céder les actions rescindantes et
rescisoires, puisque c ’est avec Jacques V escham bes lu i-m êm e que
les droits avoient été précédemment réglés par l ’acte du 3 mars
1790?
Q u importe q u ’elle n ’ ait point cédé le« actions rescindantes et
�rescisoires , puisqu’elle n 'a point réclam é ; et que non-seulem ent
elle n ’a point r é c la m é , m ais que soit e lle , soit Jacques V a la r c h e r , on t tout a p p ro u v é , tout ratifié par l ’acte portant arrêté d e;
co m p te , du 15 février
M ' . P A G E S - M E I M A C , jurisconsulte»
M*. C R O I Z I E R , avoué.
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la C o u r d ’appel. '
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Dublin Core
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Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Dienne, Vital. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès-Meimac
Croizier
Subject
The topic of the resource
renonciation à succession
successions
gain de survie
secondes noces
contumace
généalogie
biens dotaux
droit coutumier
homicides
testaments
confiscations
élevage bovins
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Sieur Vital de Dienne, et dame Jeanne-Marie de Douhet son épouse, appelans ; contre Françoise Veschambes, veuve de Jacques Valarcher, Jeanne Valarcher, et Antoine Faucon son mari, intimés et incidemment appelans.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1685-Circa An 13
1661-1715: Règne de Louis XIV
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1604
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53277/BCU_Factums_G1603.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Cheylade (15049)
Le Buge (domaine de)
Espagne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
confiscations
contumace
Droit coutumier
élevage bovins
gain de survie
généalogie
homicides
renonciation à succession
secondes noces
Successions
testaments