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MÉMOIRE
EN
TRIBU N AL
ds
CASSATION.
RÉPONSE,
P O U R
J
ean
- B
apti st e
-C
èsar
CHAM PFLOUR-
D ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
P u y - d e - D ô m e , défendeur
C O N T R E
P
B O Y E R , juge au tribunal civil de
l arrondissement de la même ville, demandeur,
i e r r e
Quod genus hoc hominum
VIRG.
Pierre B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de Clerm ont, a été long-temps mon procureur et mon
A
�c o
homme d’aflaires; il me servoit avec exactitude, je le
récompensois avec générosité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
I l devoit à l’une de ses filles une dot de 20,000 francs;
il expose, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
.dot.
U n jugement solennel du tribunal d’appel, séant à
R iom , a réduit les prétentions de Boyer, i°. ¿1 une
somme de 1,800 francs 13 centimes, qui étoit due par
iéu mon frère', et que je ne contestais pas ; 20. à une
somme de 2,400 francs que je paye deux fo is, parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
Boyer m’a fait signifier le jugement, avec sommation
de l'exécuter. J ’ai p ayé; il a reçu. Aujourd’hui il se
pourvoit en cassation.
On sent que cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugement du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homme aussi peu délicat, siégeât parmi
^es magistrats du département.
Il a cru détruire cette première impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore ; je m’étois
contenté de faire valoir mes moyens h l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intérêts. Je croyois devoir cette con-
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que ¿'honneur lui survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance; il a soixantesept ans : il pourvoit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. 11 aficcte de rappeler souvent qu’il est juge :
un plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nommé parce q u il le connaissait, et que le gouverne
ment îavoit conservé parce q u il ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon ami; il m’a dénoncé comme
émigré! Boyer se dit mon a m i, et il m’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m’étoient dûs!
( i ) U n citoyen de C lerm ont réclam e contre l ’assertion de B o y e r,
et lui fait au contraire de grands reproches : c ’est le cit. Bourdier.
11 devoit à défunt B e ra u d , mon beau -p ère, une rente annuelle de
5 o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années d’ai rérages : le
citoyen B oyer étoit chargé d ’en poursuivre le recouvrem ent. Bour
dier lui donna douze louis en or à com pte ; mais il n ’eut pas la
précaution de retirer de qu ittan ce, parce que B oyer prom ettoit de
la lui faire donner par la dam e Beraud. B oyer a oublié cette cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la m ontre, a toujours dit le
délicatB oyer : etles douze louis seroient perdus pour le cit. B o u rd ier,
si je n ’avois eu connoissance du fa it. Je les alloue au citoyen B our
dier : c’est encore une somme à ajouter à toutes celles que j ’ai
données à B o y e r , qui voudra bien la regarder com m e une nou
velle marque de reconnaissance,
A 2
�( 4 )
Boyer se dit mon am i; il fut cause de ma réclusion,
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jou r, cri sa qualité de
commissaire de Couthon , il se rendit à la maison des
Ursulines, où on avoit entassé une foule de victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les femmes, et de
les conduire dans un autre cachot. Non seulement il se
permit de.les traiter avec une rigueur digne de ces temps
affreux, qui lui convenoient si bien, mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœur César.
M oi Champflour, ami de Boyer!mais l’âge, la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations, les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. 11 convient lui-mêm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des marques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B oyer, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
Enfin, cette amitié ne remonte pas bien lo in , puisque
au l’apport de B oyer, ce n’est qu’en 1.783 ou en 178 4,
que je lu i a i été présenté. Quel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors ; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérémonie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et aumois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoître. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à R iom , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
�Ma famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite*, mes ancêtres se sont illustres dans la magis
trature , et l’un d’eux fut annobli pour services rendus a
l’étut. G’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
vm citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. La propriété principale
que je possède est située près de Clerm ont, clans un
des plus beaux cantons de la Limagne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p lacé, dans un temps où il
existait des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit forcé, dans la v ie , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m’étoit ouverte de toute
part, et quoi qu’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
Boyer , qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un roman, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m’appliquer; mais personne ne m’a reconnu à ce portrait
touchant.
La charge de receveur des décimes du clergé, apparienoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exex’C’ée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par Boyer, que j’avois chargé
de mes affaires -, le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer fit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai ses soins et son zèle-, je lui iis
�. c 6 )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleu x , et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu, il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de la charge de receveur
des tailles, qui venoit également de ma famille. 11 est
connu de tout le département, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l’en ai jamais occupé.
En 1789, j’eus besoin de quelques fonds *, Boyer me
p rêta, le premier novembre de cette même année, une
(1)
Il n ’est pas inutile de détailler ici les différens cadeaux que
j ’ai faits à B o y e r ; vingt couverts d’a rg e n t, dont huit à filets; huit
cueillers à ra g o û t, douze cueillers à café , six salières d 'a r g e n t,
une écuelle d ’argen t, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d ’a rg e n t, à b a te a u , trèsbien ornés ; six flam beaux d ’argent , deux cueillers à s u c r e , à
jour ; deux tabatières d ’or pour le m ari et la fem m e'; une m ontre
d ’or à répétition, deux m outardiers et deux cafetières d ’argent ; un
c a b rio le t, un fusil à deux co u p s, deux pistolets et une se lle , cin
quante cordes de bois à b r û le r, une feuillette de B o rd ea u x , tout
Je bois nécessaire pour parqueter sa m a iso n , faire ses alcoyes et
séparations , le tout en planches de n oyer et p o irie r , et tant d ’auIres choses qui ne reviennent pas à m a m ém oire.
En a r g e n t, soixante-dix louis , q u ’on lui fit accepter com m e
bénéfice du jeu , quoiqu’ il n ’eût rien avancé.
J’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis ; je
ne parle de cette largesse , que parce que je sais (ju’ à m onsieur
çfle en rendait cjuçlijiie ch ose.
�( ? }
somme cle 5,ooo francs, avec intérêts a cinq pour ccnl,
sans retenue. L ’année suivante 1790? je renouvelai mon
billet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novembre 1790, il me prêta encore une somme
de 2, 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. Je voulus retirer mon b illet; il n’eut pas
le temps de le chercher au même moment ; je négligeai
de le redemander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792, je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois émigré ; il me dénonça comme
tel, le 27 octobre 1792 ; sa déclaration (1 )contient l’énu
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son profit les 1 et 1 x
novembre 1790, quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
(1) V o y ez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o yer , que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1 7 9 3 , il me iaîsoit
rembourser deux fois la som m e de 2,5oo francs. Q ue vous ai-je
rép o n d u , me dit-il ? — Q u 'il falloit vous payer encore une fois !
A lors m ’adressant au'juge de paix et à ses assesseurs, je m ’écriai :
Quelle opinion d evez-vou s avoir d ’un hom m e qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà re çu ? I^e juge de paix et ses asses
seurs sont très-m ém oratifs de ce f a it , et peuvent l'attester.
�( 8 )
mars 1793; Boyer ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. On sent que ce u’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit ;
je crus ne pouvoir mieux faire que de le mettre hors
d’intérêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Gouthon.
Mais Boyer s’étoit encoi’e fait un autre titre de créance;
il me.dit avoir emprunté d’une nommée Martine .Delarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pouvoit-il qu’il
eût fait cet emprunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dames, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retii'é d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune mémoire : point de recon-*
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut payer ( 1 ).
(1) À propos de M artine D e la rb re , B oyer lui avoit em prunté
cette somme de 800 fr . le i 5 avril 1790. C ’est le
23
du m êm e
m o is , huit jours après ce billet , qu'il fit le com pte des dames
Beraud et Cham pflour , et il ne fait nulle m ention de cet em
prunt pour leur com pte. Je me suis procuré ce billet des m ains
des héritiers de M artine D elarb re. J'ai rem arqué qu ’il étoit de la
somme de 840 fr. payable dans un an ; la som m e de /to fr. étoit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossemens en
m arge, de la som m e de 4 ° fr* chaque ; Tun , du 12 septembre
1792 ; l’a u tre , du 27 m ai 1793. O n y voit encore , que sur la date
du i 5 avril 1790, B oyer a effacé lç mqt d i x de la fin de la d a te ,
' ‘
Mes
�( 9 )
Mes rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme ju g e , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendémiaire ; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les, regards ; il ne fut pas même
lort en crédit jusqu’au 18 fructidor an 5 ; mais à cette
époque, il reparut avec a u d a c e il étoit cependant hu
milié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
iil parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro- '
chemcnt. Le prétexte fut un arrangement par lui fait
avec feu Champilour-Desmoulins, mon frère, en 1789.
Suivant Boyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement comptée, et c e qui a voit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le m ot onze ; ce qui donne au billet la date de
1791 au lieu de 1790. L ’encre qui a trace le trait sur le m ot d i x ,
et écrit le m ot o n z e , l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infinim ent plus noii’e que celle du corps du b illet et
de la signature qui le term ine. Ges changem ens ne paroissent
avoir été faits que lors de l’endossement de la som m e de 40 fr.
du 27 mai 17 9 3 : cet endossement est postérieur au rem bourse
m ent que je lui ai fa it, Il.voulqt alors rem bourser M artine D elarbre
en assignats, sur le prétexte que je l’avois rem boursé de m êm e.
C elte fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et q u ’elle ne lui avoil pas prêté pour m on com p te;
alors il effaça le m ot d ix pour y substituer le m ot onze. 11 avoit
deux objets ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l ’a u tre , de rendre plus probable l’em prunt qu ’ il
disoil avoir fait pour ces d a m e s, en lui donnant une date posté
rieure au com pte qu ’il avoit fait avec elles , et qui se trouvoit
trop rapprqclié de Iq dfite du billet pour qu’on ne soupçonnât pas
su délicatesse,
B
�C IO )
"aucun bénéfice sur ces payemens ; maïs comme je lui avoxs
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790? il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte qùe je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un compromis, pour nous en
rapporter définitivement ù deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i, et que Boyer ne cherchoit
qù’un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m’avoit prêtées en 1790? Il crut s’être
fait un titre polir me forcer à lui donner une indemnité;
et bientôt, révoquant le compromis, il me traduisit au
tribunal civil du Puy-de-D ôm e, où il étoit juge.
Mais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’étrange marché que Boyer
avoit fait avec mon frè re , le 28 mai 1789*
Champflour-Desmoulins, mon frère, étoit un jeune
m ilitaire, généreux, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et me devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les m ains une quittance de m on fr è r e , de la tota
lité de sa lé g itim e , en date du 1 " avril 17 8 4 ; un billet de l u i ,
du 1 " m ars 1 7 8 9 , par lequel il se reconnolt m on débiteur de
4,fioo fra n c s; et un second, du
25
août 1791 , par lequel il re-
connoît m e devoir la som m e de 15,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n ’ai cessé de venir au secours de m on frère dans
tous les Icinps ; j ’ai une foule de lettres de l u i , par lesquelles il
m ’exprim e sa reconnoissance.
�C ïi )
II lui restoit pour toute ressource une creance de
16,000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cent,
sur le prix de la charge de receveur des tailles de
l’élection de Clermont, dont le tiers appartenoit a notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V iry 5 notre
oncle, titulaire de cette charge.
Mon frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les moyens de le tranquilliser. Il proposa ù mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V ir y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se cliargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Dèsmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
Mais un actc.de ce genre seroit bien coûteux, entraîneroit des droits, d’enregistrement considérables; il faut
eviter cette dépense, et il -y a un moyen tout simple.
Donnez-moi, dit - il à Desmoulins , une procuration
notariée, pour m’autoriser*à recevoir les 16,000 francs
et les intérêts que vous doit votre oncle ; vous recounoîtrez, par celte p r o c u r a t i o n , que f ai déjà payé les
12.000 fra n cs ¿1 vos créanciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne cette somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans avoir donné un sou ; et ce n’est point
B 3
�ici une assertion aventurée ; Boyer l’a reconnu dans le
compromis du 1 5 fructidor an 7-, il a renouvelé cet aveu
'd evan t le juge de p aix , devant les premiers juges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
■pour cause ¿fausse, ou sans cause -préexistante (1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi importante $ sans bourse délier! et Boyer
veut-il que Thonneur lui survive, lorsqu’il est condamné
i\ remettre une obligation consentie pour causej^ausse !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) E n m êm e.tem ps que m on frère sousçrivoit cette ob ligation ,
¡1 avoit donné à B o yer l'état de ses dettes. C ç t état étoit ainsi
conçu :
1“. A M . L a v ille , M .B Ia u d c a u tio n ................................. i , 5oo fr .
A la N anon , cuisinière de m on f r è r e .......................
A D u fra isse -L a p icrre , dom estique de M . d eFlagbeac,
cî . ...............................................................................................
Goo
1,200
M . B o yer , ma c a u t io n .....................................................
2,800
A m adam e S a u z a d e ...................................... .................. 2,900
A C a ze , p e r r u q u ie r .........................................................
5i5
A F a b re , c o n f i s e u r .........................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r .....................................................
1,200
A B l a t i n ................................................................................
260
A B r a c h e t, t a i l l e u r ...............................» ......................
3Go
T
o
t
a
l ..........................................................................1 2 , 3 5 5
fi-
V oilà les dettes que devoit payer B oyer ; il n ’en a acquitté
d’autres que celles de C a z e , Fabre et Blatin , que je lui ai allouées.
( E x tr a it (lu livre jo u r n a l de mon fr è r e , dans leq u el il avoit in s
crit les dettes dont B o y e r é to it ch a rgé).
�( 13 )
un 8, Boyer obtient une ccdule du juge de paix de
la section de l’Ouest de Clermont - F errand, où je
suis domicilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m’a rendu des services nota
bles -, qu H a reçu d’abord de m oi des marques de re
connaissance • il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 1790 ; que l’époque des remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’échelle de
dépréciation, ‘ suivant les conventions des parties; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et Louyrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les aveux ; e t , comme les arbitres n’avoicnl autre
chose à faire qu’un calcul qui seroit pén ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
H me demande au principal, i° . la somme de 8,55ofr.
pour les causes énoncées au compromis; 2°. les intérêts
de cette somme, à compter depuis l’échéance des eiïels;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen Lescuricr, pour le compte de mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; plu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l’obligation de 12,000 fr. 4°. la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen Bugheon,
le 28 mai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 1792, avec 135 fr. pour intérêts ou frais.
Boyer demande encore une somme de 267 fr. 20. cent.
I
�C *4 )
payée à B latin , négociant, le 8 juillet 1789; celle de
315 fr. payée au nommé Gaze, coiffeur, le 10 du même
m ois; celle de 1,218 fr. donnée à Fabre, marchand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desmoulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclamoit aussi une somme de 2,400 fr.
qvi’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un eifet souscrit par mon frère, et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme, à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B oyer, par une suite de confiance; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , Boyer demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr. qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en Javeur de qui.
Telles étoient les demandes principales, et comme
Boyer se trouvoil dans le besoin , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
bref d élai, pour être condamné à lui payer, par pro
vision et à bon compte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il doue dans le délire? à qui persuadera-t-il
qu’il a emprunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
cî’une part, et 3,180 fr. d’autre, sans se faire donner
aucune reconnoissancc par celui pour lequel il faisoit
les emprunts ? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas même
déclaré aux créanciers ? P o u rq u o i, quand Bugheon a
obtenu contre lui une sentence do condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi n’a-t-il p;is fait dénoncer les poursuites de
Jiuglieon ù mon frère ou à ses héritiers ?
�C l5 )
Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l’obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’etre creanciei ?
Mais cette obligation est contenue dans une procumtion q u il’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo Francs par année ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il etoit
donc tenu de rendre compte de sa procuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescuner
■et de Bugheon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient toui'né à son profit. Reçues par mon
frère! mais cela étoit impossible, Boyer ne devoit lui
rien compter ; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu, il n’a l'ien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets minutieux de
Blatin, Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs :
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de Lescurier, Desmoulins étoit
à son régiment -, j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-moi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour ‘le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m’a fait assigner.
N on, ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789, et eut l’adresse de tirer sur
moi la lettre de change de Bugheon , et c’est avec ce
�( 16 )
môme argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus d élié, il retiroit deux fois son argent ,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai remboursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frère : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adi’oit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argumens, qui
étoient simples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m oi, et que cet écrit étoit accablant.
Mais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoîlre
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et de m’attérer par cette preuve que j’avois moi-même donnée.
Ce fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A vant d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît connoîLre le montant des sommes qu’il disoit avoir emprun
tées pour mon frère.'
Boyer me présente une feuille de papier, et me prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Boyer a emprunté
« pour mon frère ,
« 1°. A M . Buglieon 3,000 francs.
« 20. A M . l'abbé A u b ier 1,800 francs.
« 3°. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je de
mande is
�( *7 ) ‘
, '
mandais comment ccs prétendues créances etoient éta
blies. Eoycr prend de l’hum eur, et retire le papier:
c’est cette même note qu’il a eu l’indignité de produire,
et q-i’il annonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il? Il ne produisit qu’un papier
coupé, de la longueur de quatre lignes, dont il vouloit
se s e rv ir:1il avoit supprimé le reste, et l’avoit côupé
avec cles ciseaux ( x ).
Pour le coup, ce fut Boyer qui fut attéré, et publi
quement couvert de honte. Malheureusement pour lu i,
la créance de Yabbé A u b ier se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de l'abbé A ubier. S’il avoit supprimé les
autres qu’il ne demandoit plus •, il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A ubier; cependant il convenoit qu’elle
ne lui étoit pas due. O r, il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Bugheon et Lescurier , quecelle
d’Aubier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou cette préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables?
Qu’on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Bughçon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
xn avoit prêtées eu 1790 î et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'au d ien ce, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des c ise a u x , ils
firent éclater un m ouvem ent d ’indignation contre l’infidélité du
citoyen B oyer. Plusieurs citoyens de C le r m o n t, qui étoient éga
lement à l ’audience, s’en aperçu ren t, et ont publié que les rieurs
n ’ éloient pas du côté du citoyen B oyer.
G
�C iS )
Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m’ùvoit. fait
écrire sous sa dictée, et sur le môme papier, il^avoit
porté entre autres, une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen LenormandFlagheac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dii’e si mon frère avoit été son débiteur, et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
I>e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
devoit rien, et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
Je présentai cette lettre à l’audience , et fis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé différons créanciers ! Quand
on connoît B o yer, il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B oyer, procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l’audience sur l’interpellation du président!! !
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon Irère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu’il me demande, et celles qu’il ne in’a pas
(1) B oyer a ajoute de sa m ain son p ré n o m , qui avoit été laissé
en blanc dans le double du com prom is que j ’ai en mon pouvoir.
�( l9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent a
1789, et qu’il est établi que mon frère a reste à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 1 7 9 1 5 sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C’est ici le cas de parler de la lettre de change de
Laliousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
1A
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 ’francs , au profit du
citoyen Laliousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788 -, il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de parler principalement de la créance de Laliousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrois
a diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Laliousse; je n’àvois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la dette; je priai le
citoyen Iiiiliousse de vouloir bien me remettre la lettre
de change de mon frère, et j'offris de souscrire à son
profit un effet de pareille somme.
lie citoyen Laliousse s’empressa d’accéder à ces arrangemens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’cifet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
famille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ignoroit les arrangemens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dernier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le montant, et l’engage
à mettre son acquit au bas de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots .nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’ctoit-rfe.y deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien connue, malgré la malignité
de B o y e r, refusa de signer l’acq u it, en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa . bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature ; il a osé depuis former
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payement, sur le fondement
que Boyèr étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a enü’aîiié les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme juge, sans le juger comme homme', mais
cet homme est un juge!!!
Mais je demanderai à B o yer, comment et à quelle
époque il a payé cette somme à Lahousse ?
Boyer a d it, en plaidant, qu’il l’avoit acquittée î\
l’échéance : 011 se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 1789; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de cette obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
' nanti avant d’être créancier; il en convient lui-même.
�( 21 )
II ne l’a pas pavée depuis, puisque la lettre île change
étoit sortie d’entre les mains de Laliousse , lo n g -temps
avant son échéance. Tous les laits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Laliousse’:, déclaration que j’ai produite u
l’audience (i) : aussi,lorsque j’ai satisfait auxeondanmations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre cette lettre de change, afin d’en
poursuivre le recouvrement contre Laliousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à cette remise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel de Riom.
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l’impudeur de réclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C’est ainsi que j’ai payé 1,800 francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 1786, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C’est ainsi que j’en ai payé Lien d’autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en note, à l’ex
ception de celles de F a b rc, Caze et Blalin.
Je pouvois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Laliousse est im prim ée à la suite d u me«noire.
1
�C 22 )
.T’avois présenté nn autre état qui m’avoit été donné
par mon frère, et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cctte
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M on frère avoit fait la note des sommes que j’a vois pré
cédemment payées pour lui, et m’avoitremis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une demi-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa m ain , et que
mon frère n’existoit plus , cet état étoit une pièce pro
hante qu’on ne pouvoit contester : je m’en iis un grand
moyen, lors dé la plaidoirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. Boyer, qui ne connoissoit pas cette pièce, en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de *
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoient avec
intérêt la discussion de cette cause. X>a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est membre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
L e défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit a la main;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates.
L a cause est continuée à une nuire audience; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit à mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
jiqiis demandons tous deux avec confiance, soit à Boyer,
v
�( 23 )
soit à son. défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouve.
Alors Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou rature
les dates. On voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, n’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la partie, lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la pièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse- : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté ceLte créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en co n vin t, et Boyer fut
jugé par le public. Aujourd’h u i, Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son mém oire, lui Boyer, le seul eu
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blamera-t-on maintenant de m’être refusé à 'payer
une indemnité à Boyer, à raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
2°. J ’ai remboursé, dans le courant de mars 1793, dans un
temps où les papiers avoient encore une grande valeur (1).
(1) Boyer ne peut pas équivoqner sur l ’époque de ce rcm hour-
�Cm )
Il est vrai qu’en m’acquiliant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il 11e restoit plus de traccs
du remboursement.
Qu’a fait l’ingénieux Boyer, pour me donner plus de
défaveur sur ce remboursement? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
On lui observe que cela est impossible -, qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation; alors il
Tépond que c’çst au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut mériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et Louyrette,
par nous réciproquement choisis : Boyer a révoqué le
compromis.
40. E nfin, je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit récipi*oque, et que Boyer m’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payemens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé *, il n’y a donc pas de réciprocité.
6cm cnt.
J’cn aî fa it un , clans le m êm e tem p s, au cit. L o u y r e tte ,
l ’un des arb itres, que B o yer lui-m ême pressoit d ’exiger son paye
m en t c l d ’im iter son exem ple , sur-tout à raison de m a prétendue
ém igration.
Depuis le co m p ro m is, il eut la m auvaise foi de prétendre que
le rem boursem ent avoit été fa it beaucoup p l u s tard ( en messidor
ail 4. ) L ’ arbitre L o u y re tte le releva sur cette assertion. L e dé
licat B o ye r se liàta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire com m e m o i, puisque nous avons été rem boursés dans le m êm e
temps. O n conçoit actuellem ent le m o tif de la grande colère de
B oyer contre L o u y rette.
T els
�(a5).
•Tels furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
mon défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les p r o p o s de taverne
et de café , qui furent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
_ Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pns été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut couvert, dit-il, par mes vociféra
tions , et le tribunal, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un délibéré, et n’a prononcé qu’après
le plus mûr examen.
E n fin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9, qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clermont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m oi, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 1789, et de celle de 3,180 francs d’a u tr e ,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même année, intérêts et frais qui leur sont acces
soires ;
1
20. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement de la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obligagation de 2,804 francs, prétendue contractée par Chain»)ilour-Desmoulins, au profit cCune personne inconnue;
3°. En ce que les intérêts ont été adjugés à E o yer,
à compter des époques des payemens; 40. Enfin, en ce
que j’ai été condamné aux dépens; cmendunt, Eoyer est
D
�( 26 )
débouté de toutes scs demandes relatives à ces diiïerens
chefs, sauf à lai à agir en garantie, le cas échéant; (c’està-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de i,8ôo fr. 13 cen.
montant des sommes payées à Blatin, Eabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné à payer les 2,4oof.
montant de la lettre de change de Lahousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour à me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
frè re , comme faite pour cause fa u s se ou sans cause
-préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugement auquel
je suis condamné.
Ce jugement, dont Boyer a pris la peine de faire im
primer les motifs et les dispositifs , est principalement
m otivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à Boyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champlîour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de Boyer, dans le compromis
devant le juge de p aix, devant le tribunal d’appel, qu’au
moment de cette obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère ;
Le tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
�( 27 )
ficatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et dôcumens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement de
la somme de 8,55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i °. que cette somme a été par moi payée à Boyer,
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquement Bôÿer se soumettait à ne ré
péter les sommes qu’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon frè re , que suivant la môme propor
tion, et d’après l’échelle ;
4°. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. Le tribunal décide , quant à l’indemnité du caution
nement , qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet présent, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne -pas.
La condamnation des sommes; dues à B latin , Cazc et*
Fabre, est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change de Lahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
-
D a
�C rf)
À l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depui«
l’époque de ses prétendus payeinens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
convention , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
JLa demande.
B o yer, présent à la prononciation de ce jugement,
croit avoir fait un assez grand profit; il part, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content, qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement à mon avoué,
le 5 floréal an 9 , sans approbation préjudiciable, pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon domicile,
soit,y les mêmes réserves ,* mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugement, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire un acte d’ofFre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal et intérêts ; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage au procès, notamment la lettre de
(1) C es réserves et protestations de B o yer m e rappellent l ’anecdole d'un vieux p ra ticie n , qui voyageant dans les tén èb res, fu t
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à sc reconnoître dans l'obscurité. Il s’écrioit ;i chacun : J e t’ accopie en tant que lu m e s e r s , ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
C om m e l u i , B oyer ne m arche jam ais sans protestations.
�( 29 )
clinnge souscrite par feu mon frère au profit de Laliousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient inscrits les noms de Ijescurier, Vabbé A ubier
et Buglieon, comme créanciei's de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendroit, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Laliousse.
Boyer ne laisse pas échapper l’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. {cellefa ite pour cause
Jausse); mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, dit-il, la lettre de change et la, note, sous le
vain prétexte qu’il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’appel, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
Il me parut d’autant plus extraordinaire , que B o yer,
qui m’avoit fait sommation d’exécuter le jugem ent, qui
reeevoit le montant des condamnations qu’ il prononce en
sa faveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
Je pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d une rébellion à justice ; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugement, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je présentai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
inc permet de l’assigner à jour fixe sur cette demande.
L e i 5 du même mois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à ce jugement dans le
d élai, et a fait paroître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité, également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m’appi'end, par
ce lib elle, qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
Telle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-être été
minutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire -, je laisserai ensuite à
mon conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose,
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la plum e, le fait bon et
compatissant! R isum teneatis. B oyer compatissant ! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les hal)itans de la commune
de Solignac , que Bo3Ter habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des ruloirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand.
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu’il m’a rendus , Boyer a mal choisi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Qu’on examine cette vente, du 16 janvier 1786 (1); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avois pas encore été présen té au citoyen B o ye r à celte
époque.
�31 ^
l ’acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 *-r* au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi formel.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de mes filles. J ’en ai trois , toutes établies ; elles ont porté
à leurs maris une fortune au moins égale, et j’estime assez
ines gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (1) ,
(1) B oyer dénature les fa its , relativem ent au citoyen B onnet.
C e n ’est pas l u i , com m e il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointem ent et cum ulativem ent
le 9 août 1790. J’ai heureusem ent conservé le b ille t; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m o n ta n t, partie en im
m eubles , partie en num éraire. J’ai donné en im m eubles , au m ois
de juillet 17 9 2 , douze jo u rn au x'd e te rre , situés dans les appar
tenances de C le r m o n t, dans le m eilleur ca n to n , près les jardins
des Salles ; plus , une grange située à C lerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai com pté en outre , en num éraire , la somme
de 8,400 fr a n c s , intérêts co m p ris, à la demoiselle B o m p a rt, 4
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. C es payem ens
ont été faits les 21 m essid o r, 21 et
25
therm idor an 6 : j ’en rap
porte les acquits de la demoiselle B om part.
�( 32 )
et quelques autres créanciers dont il fait rémunération.
.Mais Boyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Qu’il
le dise , s’il l’ose. Mais de ce que Boyer a été ma caution,
tons ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’avcnturoit rien lorsqu’il se prétoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
§ur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre moi , comme émigré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il persécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit ù R iom , chez le citoyen
Grenier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de Riom ; et malgré sa moralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterminer ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E st-il bien étonnant, d’après ces services signales,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon émigration? Il n’en falloit pas tant en 1793; et
j’aurois eu moins d’inquiétude, si j’avois été dans cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
On sait qu’il falloit cire propriétaire pour, être- inscrit
sur la liste fatale,
Boyer,
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sut
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût iuterpellee.
Accoutumée à vivre dans la retraite , loin du tumulte de
la société, elle fit avec effoi't le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti ; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la iis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus
qu’à m o i, cette imposture m’afiecteroit plus vivement.
Lorsque vous dites que j’ai connu l’obligation consentie
par mon frè re , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai cn-
( 0 B o ycr prétendit en p la id a n t, que les som m es empruntéesde Bugheon avoient été versées dans le tablier de m a sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm o u lin s, m on frère, : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressément m on défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-m ême pour lui
donner un d ém en ti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de m a sœ u r , étoit
celle de 2,900 fr. prêtée par la dam e S au zad e, que j’a i'a c q u itté e ,
B oyer ne l ’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-m êm e de celte m an ière
au citoyen B o y e r , lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dam e Sauzade répondit à B o y e r , que la som m e
prêtée par le citoyen Bugheon son fr è r e , n ’avoit pas été comptée
à Pesm oulins : elle est toujours prête à attester ce que j’avance,
Ë
�(
3
4
} .
'
core par le mentiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur moi la lettre de change, que j’en passai l’ordre à
Bugheon ; mais je ne le fis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
neur, qu’il ne fut point question de mon frère : vous
saviez trop bien que dans ce moment je ne me serois pas
engagé pour lui.
Un des grands argumens de B oyer, pour prouver que
l’emprunt fait à Lescurier n’étoit pas pour son compte,
est de dire qu’il a pris de Baptiste, notaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être ; mais cette
quittance est pour le droit de contrôle : or, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs; et,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en x-etirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution ne devoit pas échapper
à Boyer.
M ais, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère, puisqu’elle est
comprise dans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez Chevalier, notaire, le premier complé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur cette pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avecinoi, et nous avons été di/isés, lorsque je
�( 35)
vous en ai demandé le compte. Vous prétendiez en
avoir fourni le montant, à la vérité en assignats; vous
m’offriez de me faire raison du bénéfice, à condition q u i
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez ; e t , lorsqu’après plusieurs années de discussion,
j’ai voulu éclaircir ce fa it, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usage à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent*que j’avois toujours refusé d’allouer d e,
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation:
en changeant le lieu de la scène , il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider ; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion‘; c’est le billet sans date, où j'ai projtitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus apprendre au public, lorsqu'il en fit parade ,
les motifs qui l’avoient dicté. C’est après la journée du
18 fructidor. J ’nppartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme ém igré; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoit fait des menaces; il
disoit h tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu’il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma famille, mes amis, étoient alarmés; 011 m’engage i
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
�cède. Bover étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
f'réquens de cette ville à celle de Glcrmont ; il clierchoit
surtout à épargner les voitures ; j’envoyois la mienne à
R iom , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta bien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance ; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste :
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calomnies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? Il me semble
entendre ce voleur qui erioit bien haut de peur qu’on
l’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore ridicule, lorsqu’il prétend que j’écarlois
rafiluence des honnêtes gens qui accouroient chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la fo u le, et qui n’a jamais pex-sonne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
desti tuer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernement
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il obtint, par importunité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest’tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si souvent manqué
de mémoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut pins
s'étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres , quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrette. Mais tous
•deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
feslime publique, et tous les deux commissent trop bien
B oyer, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( r , ) __
.
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
triomphe.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; j’ai le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugement, je donnai à dîn er, à Beaumont, à plusieurs
citoyens , parmi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœux pour le gouvernement, pour le premier
magistrat de la république, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion publique, à lui-même , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent son volumineux et insignifiant mémoire.
Signé, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
i i E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examiné la
procédure et le jugement rendu contradictoirement,
entre les citoyens Cliampflour et B o y e r, le 27 germinal
an 9 ; le mémoire en cassation du citoyen B o y e r, et
celui en réponse du citoyen Champflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen Boyer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du procès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les différens chefs de créances réclamées par le citoyen
Boyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaix-es, si foibles, qu’on seroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen Cliam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un mémoire contre lui.
En .effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen Boyer, une fin de non recevoir invincible. l i a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l’exé
cuter , en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
¿■afts se fa ire aucun préjudice.
Il est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête p;>s
�l’exécution d’un jugement en dernier ressort. M ais, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles etre
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
qui a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement*, alors, s’il croit avoir éprouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p ou rvo ir, il ne doit payer
que comme conti’aint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention , sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescement préjudiciable.
Mais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; dans ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l’acceptation.
O r, le citoyen Boyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Champflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Champilour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc terminé, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrement, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Champflour seroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condamné, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugement, et donneroit à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudroit syncoper le jugement, le casser dans
�( 40 )
une partie, et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugement, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chois
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i, dans l’état où
en sont les pai’ties : les choses ne sont plus entièi'es, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
Boyer, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus mûr examen ?
Il oppose, iQ. que la cause a été plaidée pendant deux
audiences ; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ, Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7 , sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui, suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , qui, dans ce cas, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
Avant de proposer un pareil moyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il attaque,
et qu’il a lui-même fait signifier. Ll y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été pi’ononcé. Boyer dçvroil surtout se rappeler, puisqu’il
étoit
�(4 0
étoit présent à l’audience; qu’il assistoit Son avoue pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut^prononee.
Ce fait, au surplus, est constaté par le •jugement qui ,
sans doute, mérite plus de confiance, que 1’assertion de
Boyer. Il porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant'dèûx précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i, après en avoir délibéré, etc ». Voilà
qui répond , sans doute , à l’objection d’une manière
péremptoire.
- D ’ailleurs, un délijbéré n’oblige point à un rapport,
Joussc, sur l’article III du titre V I de l’ordonnance de
1667 ■
>explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des pro« curcurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience; auquel cas, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur.le registre,
K sans mémoires ni écritures. L e greiïier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : 011 en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« 1 audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
« plus prochain , cl le jugement se prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sorles de délibérés sont autorisés par l’article III
du' titre V I , et par l ’article’X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rapport , écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugement, qu’il
a été ordonné un délibéré.ès mains de l’un des juges,
F
�( 42)
ce seroit la stricte’exécution de l’ordonnance,loin d’être
.une infraction a la loi»
11 est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brum aire, d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l’exécution de l’ordonnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure, et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute procédure*, l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
-abroge donc nécessairement la loi du 3 brumaire , si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’expliquer, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boyer pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
espèce de rajyport à la cause ; il p orte, « que si les parties
« comparaissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
.« de demande et le jugement définitif; si l’une d’elles ne
« comparait point, il lui sera notifié de plus le jugement
u préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« cédure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
On- ne voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’article X n’est pas plus déterminant:
« Les juges cîes tribunaux, porte cet article, pourront,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet exam en, ils rentreront à l’audience pour y déli« bérer en public, y opiner à haute voix , et prononcer
« le jugement. Ils pourront encore, si l’objet pnroît
« l’exiger, nommer un rapporteur, qui fera son rapport
�« le jour indiqué dans le jugement de nomination, lequel
c< a p p o rt devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétondra pas que le
jugement est nul , parce que les juges n ’ont pas opine
à haute voix. Ce mode, qui a entraîné tant de. dénon
ciations , n’est plus usité. L ’objet de la cause n’exigcoit
pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de çoin
les diilerens chefs de demandes', et le citoyen Boyer doit
se féliciter de cette précaution ; elle lui a valu la con
damnation du billet de Lahoussë, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
A in s i, ce premier moyen de cassation est absurde et
inadmissible, d’après la teneur du jugement, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second lie u , que le ju
gement viole la disposition de l’article I du titre 111 de
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le citoyen Champilour
est condamné \ il se fonde sur ce que le citoyen Cliampflour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il n’avoit point fait d’olïïes; d’où il tire la consé
quence que tous les dépens étoient h la charge du citoyen
Cham pilour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses a p p l i
cations : il est vrai que l’article qu’il invoque veut que
toute partie qui succom be, soit condamnée aux dépens
F 2
�( 44)
indéfiniment, sans que pour quelque cause que ce, soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Champflour a-t-il succombé? L e citoyen
Boyer a formé contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient ù une somme de 23,317 f.
10 cent. 11 n’a réussi que sur deux chefs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r, il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
gagne , surtout lorsque ces.chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des. dépens. C’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyer. V oici com
ment il s’explique, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l’assignation, et que le doman
te deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les compenser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagne, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
« sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Champflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le premier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoient
contenus dnns le même exploit, et ont bien évidemment
occasionné autant de frais les uns que les autres. L e
�( 45 )
.
.
citoyen Champflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens ; cependant ils ont été compenses ,
et le coût du jugement a été entièi’ement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en plaindre, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-môme dans
son troisième moyen. Sans doute 011 doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairement contractées.
Mais lorsque les conventions ou les obligations sont
purement conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accomplies, avant que la
convention, soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention-, l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur une vérité aussi,certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être controversé.
O r, quelles sont donc les conventions des parties? En
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Champflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qui l lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fuit
un compte entre les parties, et que Boyer l’indemniseroit
à son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’étoit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Champflour
n’étoit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-meme. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties'*, Boyer n’a fait aucun payement pour le compte
�du citoyen Chnmpflour-Desmoulins, ou, ce qui est la
‘même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il n’y a donc plus de consentement, dès
que Boyer révoque le compromis ; il n’y a donc plus de
réciprocité, dès que Boyer n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir en compensation aucune indemnité,
et cependant la compensation avoit été la cause première
et essentielle du contrat; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
condition, la convention est demeurée imparfaite. C’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce qui a été parfaitement
développé dans les motifs ; et si Boyer prétend que dans
un contrat synallagmatique et réciproque, le citoyen
Champflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-même;
qu’il pouvoit se jouer de ses engagemens, tandis que le
citoyen Champflour étoit obligé d’exécuter les siens,
cette prétention paroîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation, parce qu’il n’y a ni vio
lation de form e, ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frimaire, 5 thermidor an 4, i 5 fruc
tidor an 5, sont également mal appliquées.
Premièrement, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le disci'édit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frimaire : Boyer avoit reçu volontaire
ment, et r oient i non f i l injuria.
Les lois des 9 thermidor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nu se sont occupées que des obligations pures et simples,
�( 47)
et non des conti*ats conditionnels; il étoit donc inuLile
de grossir un mémoire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut examiner le fond du
procès.
L e quatrième moyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
grief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Bugheon et Lescurier ; il va jusqu’à
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de 12,000 f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend que cette not e, qui émane
du citoyen Cliampflour , prouve que Desmoulins, son
frère, a louché les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l’emploi
de 12,000 francs*, mais il prétend avoir prouvé , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
Cliampflour, que Desmoulins, son frère, avojl louché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rempli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugement; la confession de celui qui est muni d’un
pareil titre, ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
Tout est erreur et confusion dans ce grief, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
Il se plaint de ce que celte obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Qu’on lise son exploit inlroductif de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; o n ’verra que
�. u 8)
loin de conclure au maintien de cette obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
C h a m p ilo u r a demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l’a ordonné en motivant, sur les aveux de Boyer,
que l’obligation étoit consentie pour cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
■
A l’égard des lettres de change souscrites par Boyer,
au profit des citoyens Bugheon et Lescurier, rien n’établissoit que l’emprunt eût tourné au profit du citoyen
Çhampflour-Desmoulins ; il n’en a pas reçu le montant ;
il ne devoit pas même le toucher, d’après les conven
tions, puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Çhampflour-Desmoulins;
çt Boyer n’a payé aucune de ces dettes.
Pour l’écrit prétendu émané du citoyen Champilour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. La forme de cet écri t, la
créance de Tabbé A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de Buglieon, et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payement, dénotent assez le cas qu'on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroît dû
précédemment supprimer; mais le jugement ne pou voit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas formé la demande : le tri
bunal ne pou voit condamner le citoyen Champ.flour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen Boyer; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celle partie, ce scroit un grief d’appel, et non
un moyen de cassation.
Dans
�( 49 )
.
Dans son cinquième et dernier m oyen, le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 17 8 9 , qui perm et a l a v e n i r
de prêter de l ’argent à term es fix e s , avec stipulation
d’in té rêts, suivant le tau x déterm iné par la loi , sans
eutendre rien in n o ver au x usages du com m erce.
L e citoyen B oyer argum ente de cette l o i , p o u r p ro u ver
que le jugem ent dont il se plain t auroit dû lu i adjuger
les intérêts de la somme de 4?200 francs qu i lu i a été
allouée , à com pter du payem ent q u ’il d it en a v o ir fait.
L e jugem ent ne lu i adjuge cet in térêt qu ’à com pter de
la demande ; d o n c , suivant le citoyen B o y e r , il y a in
fraction à la lo i du 3 octobre 1 7 8 9 , p ar conséquent ou
v e r tu r e à cassation.
E t range conséquence ! S u ivan t les anciens prin cipes,
l ’argent étoit stérile de sa n a tu re , et ne p o u v o it p rod u ire
d’in té r ê t, lorsqu’il s’agissoit de p r ê t, qu’autant que le p rin
cipal étoit aliéné entre les mains du d é b ite u r , ou qu ’ il
existoit une dem ande judiciaire en payem ent.
L a lo i citée n’a pas d éro g é à ce p rin cip e ; elle a seu
lem ent laissé la faculté, p o u r l’aven ir, de stipu ler l’in térêt
au taux ordinaire , par l’obligation ou le b illet ; c’est-àdire , que lorsque cet in térêt est stipulé par l’écrit ém ané
du d éb iteu r, les tribun au x do iven t l'a d ju g e r, con form é
m ent a la convention ; mais s’ il n’existe aucune stipula
tion , l ’intérêt n’est d û , com m e a u tre fo is, que du jo u r
de la demande.
O r , il n’y a aucune convention de cette nature entre
les p arties, puisqu’au contraire les sommes réclam ées par
le citoyen B o yer étoient contestées ; que d ’ailleurs le
p réten d u p rêt étoit antérieur à la loi*, il y a p lu s , c’est que
G
�( 5° )
dans les emprunts prétendus faits par Boyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payement, et que cet intérêt
avoit été confondu avec le principal. C’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier et Bugheon, et pour les
sommes adjugées à Boyer; tel est d’ailleurs l’usage abusif
et usuraire qui s’eSt introduit dans le commerce.
Ainsi les prétentions du citoyen Boyer ne tendraient
à rien moins qu’à se faire adjuger l’intérêt des intérêts,
et à faire admettre l’anatocisme dans les tribunaux.
Il
invoque une clause du compromis, où il est dit que
les citoyens Louyrette et Costes, arbitres, feront aussi le
compte des intérêts, conformément à la loi. Mais celte
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à compter
les intérêts légitimement dûs , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créanceLahousse , auroient
au contraire rejeté le principal.
Mais le citoyen Boyer a l’évoqué le compromis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés ; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-même détruit.
L e citoyen Boyer, en terminant son mémoire, annonce
que scs moyens sont encore mieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est communi
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cliampflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R i o m , p a r l e s anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendémiaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
Le
c o n s e i l
s o u s s i g n é
est
du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrand, le 30 vendémiaire
an dix.
DARTIS-M ARCILLAC.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. Délibéré à R io m , le 3 brumaii*e
an 10.
ANDRAUD.
�P I È CE S
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C I A T I O N
DE
P IE R R E
B O Y E R ’,
A n térieu re à l’inscription du cit. Cham pflour, sur la liste des ém igrés.
E x tr a it des registres , contenant le s déclarations des créanciers
sur ém ig rés, tenus au ci-deva nt d istrict de C lerm on t, n°. 74*
A o , o . a d ’ j i u i vingt-sept octobre m il sept cent quatre-vingtd o u ze, a été déclaré par le procureur syndic du d istrict, q u ’il lu i
avoit été signifié un a c te , en sadite qualité , par le m inistère de
W e l l a y , h u issier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette co m m u n e ,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit B oyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisteCésar Cham pflour-d’A la g n a t , pour lequel il avoit fa it des affaires
im p ortan tes, et s’étoit p rê té , à son égard , à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant h o m m e ; q u ’il l ’avoit fait de la m a
nière la plus gén éreu se, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , 11e
s ’attendant à d ’autre reconnoissance qu ’à celle que se doivent des
amis ; qu’il l ’avoit principalem ent obligé , en souscrivant d iffé rens emprunts faits par ledit C h am pflour, notam m ent un billet de
la som m e de 17,000 francs au profit du sieur R o c h e fo rt, et autres
quatre de
85o francs
ch acu n , le
3
m ars 1 7 9 1 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d ’indem nité : 20. d ’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur C ham pflour par le citoyen B r u n e i, pour lequel il y
avoit égalem ent indem nité ; qu ’il avoit en outre passé l’ordre de d if
férentes leltres de change tirées sur lui par ledit sieur Charnpflour, dont il étoit dans l’im possibilité de donner
le d é t a il,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notam m ent celles
�dos sieurs Bonnet chirurgien, G u y o t de V ic-le-C om te, et- a u lie s, qu i
lui étoit dû à lui-m ême par billet 7,9^0 francs : p lu s , qu il lu i
eto it dû par le d it G ham pjlour-D esm oulins la somme de 12,000
fra n cs par acte devant notaire , lesq u els 12,000 f r . (1) lu i B o y er
avoit emprunte’s pour le s com pter audit Cham pjlour ou à ses créan
c ie r s , e t fo u r n i de se s deniers ce q u i n’ avoit pas é té emprunte ;
m ais que cette somme lu i avoit é té déléguée ci prendre sur les
sieurs de V iiy père et f i l s
par le m êm e a cte du 28 'm a i 1789 ,
lesq u els devaient audit Cham pjlour la som m e de 16,000 fr a n cs
portant quinze cents fr a n cs d’ intérêts ; q u ’i l é to it m êm e porteur\
du titre obligatoire q u i é to it com m un avec le sieu r Champjlour.
a în é e t la dam e B l o t , a u x q u e ls i l étoit dû p a reille som m e.
. Q u ’il avoit été instruit par bru it public que ledit sieur Gésar
Cliam pflour étoit ém igré; q u ’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts , e t de faire en conséquence la pré
sente d éclaratio n , avec protestation de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte éloit signé dudit sieur B o yer et de l’huissier.
Q u e M . le procureur-syndic croyoit ne devoir être tenu à autre
chose sur cette sign ification , que de la déposer au secrétariat du
d is tr ic t, pour valoir et servir audit B o yer ce que de raison ;
que les lo is, soit du 8 avril, soit du 2 septem bre d e rn ie r, ne le
rendoient en aucune m anière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d ’émigrés ; que l ’article V I de la loi du 2
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce q u ’ils avoient
h faire , pour être conservés dans leurs droits , privilèges et hypo
thèques , et être colloqués utilem ent sur les deniers provenans de la
vente des biens des émigrés ; que par conséquent l’acte du sieur
B o yer, q u i, sans être un acte inutile, ne rem plissoit pas néanm oins
(1) O n voit que B o y er ne c o m p to it pas sur m on r e t o u r , lorsqu'il v o u lo it
s'approprier les 12,000 francs énoncés en l'obligation de m o n frère ; q uoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , p o u r c a u s e f a u s s e , il ne la portoit pas moins com m e une créan ce légitim e q u ’il vo u loit s’a p p r o p rie r , saut
doute p o u r l'i n t é r ê t d e la n a tio n . Y o i l à ’cet h om m e qui veut que l'h o n n e u r
l u i survive !
�.
(
5 4
}
..
le but de la loi $ur scs intérêts ; et q u ’il ne pouvoit sans autrem ent
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
faire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
nu secrétariat ; ce qui a été l a i t , sa u f audit B o y e r , s’il le juge à
p ro p o s, à parer aux inconvéniens qui résulteraient de cette décla
ration im parfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé
procureur-syndic. N °. 406.
L e d it jour
5
B
e r n a r d
,
décem bre 1 7 9 2 , est com paru au m êm e directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r , avoué au tribunal du district
de C lerm o n t, y h a b ita n t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment* rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen Bernard , procureur-syndic de ce d istrict, le 27 octobre
d e rn ie r, a décla ré qu’ i l croyuit devoir la réitérer, e t Vétendre
notamment:sur des objets
qui
doivent
profiter
a
la
républiq ue
,
clans la supposition que J ea n -B a p tiste-C ésa r Cham pjlour-B eaum ont , d o m icilié en cette 'ville ju s q u ’au 14 ou 1 5 ju ille t d ern ier,
s o it ém ig ré, ce que le requérant ignore a bsolu m en t, le sieur
Cham pflour ne lu i ayant a n n on cé son voyage que pour la v ille
de L y o n ,
ne
se
tr o u v a n t
tas sur la
liste des
ém ig rés
,
dans la
q u elle Joseph Cham pjlour son frè re e st inscrit. E n conséqu ence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d ’ affirm er s}i l en e s t
req u is, ou s i cela p eu t être nécessaire (1) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Cham pflour , pour
lequel il a fa it des affaires im portantes et heureuses égalem ent
notoirem ent connues ; que par su ite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu ’on peut faire pour obliger un galant hom m e ; q u ’il l’a
lait de la m anière la] plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fa m ille, ne s’attendant à d ’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalem ent obligé en souscrivant
( l ) Mîi feintne nt l’ un dp mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la d ém arche <Ie B o y e r ; ils offrire n t de le rassurer, par des «ngagemens soli
daires sur leur furtune personn elle, de ;out ce q u ’il pourroit perdre : m.iis
Boyer avoit d ’autres v u e s; il com pto it se faire adjuger m on bien de Be.uw
;npnt.
�( 55 )
.
différens emprunts fa ils par ledit sieur Cliam pflour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient com m uns , notam m ent cinq billets à ordre.
L e F \ de i 7,000 francs en p rin cip al, au profit du sieur R o clieiort de R io m , et les autres quatre de
3
85 o
francs ch acun, le
mai 1 7 91 , pour lesquels ledit sieur Cliam pflour a fourni le
meme jour une indem nité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
20. Q u ’il a souscrit avec ledit C ham pilour Un autre billet de
la somme de ia,Goo francs prêtée ù ce dernier par le citoyen
B ru n e i, habitant de cette v ille , du
5
5
m ars 1791 , payable au
mars de la présente année, ignorant le requ éran t, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indem nité du même jo u r, et qu’ il
a également déposé.
6 . Q u 'il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur C h am p ilo u r, et dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des p rêteu rs, desquels ¡1 est dans l ’im pos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n ’en
ayant pas gardé des notes, com ptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur C h am pilour; m ais qu’il en connoit plusieurs, notammeuL
celle du sieur B on n et, chirurgien de cette v ille , dç 8,400 fr a n c s ,
et qui éloit auparavant de 27,300 francs.
4
• Q u ’il a souscrit et accepté deux lettres de change de 3,000 f.
chacune, en faveur du citoyen G u y o t, ’de V ic - le - C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le i " - février 179$, pour
lesquels il y a indem nité du 1 " . février 178 9 , de la part du sieur
C ham pilour , en faveur dudit in stan t, laquelle le requérant a éga
lem ent déposée.
5°. Q u ’il a passé l ’ordre
en faveur du citoyen C h arb on n ier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24 ° fr a n c s , tirée par le
sieur C h am p ilo u r, en faveur du req u éra n t, le i 5 m ars 1791 ;
G\ Q u ’il est dû au requérant, i°. la somme de
5, 25o
fr. suivant
le billet consenti par le sieur C h am p ilo u r, le 1 " . octobre 1790 ;
2 . autre somme de 2,5oo f. portée par billet du 11 novem bre 1790;
�( 5G )
5*. enfin d ’une som m e de 400 f . payée en son acquit au citoyen
D essaignes, pour le m ontant d ’un billet de pareille somme , du 22
août 1790» suivant sa q u itta n ce , au dos du 17 janvier 179 1.
T o u s lesquels billets le .requérant a déposé à l’in s ta n t, en exé
cution de l’art. V I de la loi du 2 septembre dern ier, sa u f à les
re tire r, s’il est n écessaire, lesquels ainsi que les indem nités sont
tim brés et non contrôlés.
l i a d écla ré d é p lu s , e t c e
tour
l ’in t é r ê t de
i. a
n a tio n
, sauf
à réaliser sa déclaration à la m u n icip a lité de cette v ille j con
form ém ent à la l o i , q u ’ i l a en ses m ains le s objets suivons , con
cernant le sieur Cham pjlour e t son fr è r e : i°. un dou ble de
traité p a ssé sous sein g privé entre les sieurs A r ta u d -d e-V iry ,
père et fils, et les sieurs Jean-César C bam pflour, Josepli C h am p flo u r, o fficier, et Claudine Cbam pflour et Jean G érard B l o t , son
m a r i, du 14 octobre 17 8 2 , par lequel les sieurs de V ir y se sont
obligés à leur payer la som m e de ,48,000 fr. pour leur portion ,
dans la charge que possédoit le sieur de V i r y , et l’intérêt de cette
so m m e , sans pouvoir la rem bourser de dix années , à com pter de
l’époque du tr a ité , sur le pied de
4 >5 oo
fran cs p ar a n n é e , c ’est-
à-dire, i,5 o o francs c h a cu n , en in térêts, et 16,000 en p rin cip al,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette v ille ,
du 29 janvier 1 784? portant condam nation de ladite som m e et
des in térêts, sur laquelle som m e de iG,ooo fr. revenant au sieur
C b a m p flo u r, o fficier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 m ai 1 7 8 9 , en sorte q u ’il n ’est plus dû au sieur
Cbam pflour cadet que /¡,ooo ira n c s, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ i l a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Cbam pflour et B lo t , au sujet de la com ptabilité des béné
fices de la m êm e charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V i r y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mém oires
et relevés pris sur les registres-journaux et som m iers pris par le cit.
L o u •/v rctle
�( 57 >
Lonyrette qui y a , de sa p a r t , em ployé au niôilïS trois m o is , sans
désemparer", et qu’il sem b le, d ’après le com pte de clerc à m a ître ,
que le sieur de V ir y est débiteur d ’environ 120,000 fr . envers les
sieurs Cliam pflour et B l o t , le sieur C ham pflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, com m e héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dam e E spin asse, sa fe m m e , e lle s
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliam pflour p è re , époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie r s , entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
sont co m m u n es, tan t avec ledit B lot et le déclarant q u ’avec les
irères C liam p flou r, et qu’il en est de m êm e de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offran t cependant de com m uniquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , m êm e avec déplacem ent.
3°.
E n fin , qu’ i l a en ses m ains trois contrats de 'vente sous
seing prive' -3 de d e u x parties de m aison situ ée en ce lte v ille ,
v i s - c i - v i s le s c i- d e v a n t A u g u s t in s } e t d ’ un m oulin sur le
chem in de Clerm ont ,
a lla n t à C liam alières ; les deux pre
m ie r s , du a 5 septembre 1 79° > l
consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat a în é , et l’autre en laveu r de M agdelaine
C h a rles, veuve de Claude D o n ces, sellier ; et le tro isièm e, du 1'*.
avril 1791 , en faveur d ’H crm cnt Jaco b , tra ite u r, habitant de
celte v ille , m oyennant les prix y én o n cé s, desquels il a pareille
m ent fait le dépôt présentem ent, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B eraud, épouse du sieur C liam pflour a în é ,
com m e faisant partie de la succession du sieur B era u d , son père,
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposes, sans préjudice à lui de tous ses droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
C op ie certifiée conjorm c :
L A B R Y ,
secrétaire.
II
oyer
.
�d é c l a r a t io n
J
e
du
c it o y e n
l a u o u s s e
.
soussigné recon n ois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Cham pflour - D esm oulins, la som m e de
2,400 fr a n c s , de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
p ayable au com m encem ent du m ois de janvier 1 7 8 g ; que long
tem ps avant l’éch éan ce, le citoyen Cham pflour aîné me dit que
son frère D esm oulins étoit inquiet à raison du payem ent de cette
lettre de ch a n g e , et me p ro p o sa , pour le tran q u illiser, de m e
faire lui-m êm e un effet de pareille so m m e , payable à m a volonté ;
ayan t accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frè re ,
je lui rem is ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
so m m e , q u ’il me paya ensuite.
D éclare et co n fesse, en o u tre , que lo n g -tem p s après avoir été
payé du m ontant du b illet représentant ladite lettre de ch an g e,
le citoyen B oyer me présenta la m êm e lettre de ch a n g e, en me
disant : V o ilà un effet dont vous avez été p a y é ; il faut y m ettre
votre acquit ; lequel il me dicta : et com m e il m ’avoit fa it écrire
que c ’étoit des deniers de lui B o y e r, je refusai de le sig n e r; dé
clarant en outre que le citoyen B oyer ne m ’a jam ais rien p a y é ,
ni pour les citoyens C h am pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolum ent pourquoi celte lettre de change s’est trouvée entre les
m ains de B o y e r , de laquelle je n’avois plus entendu p a rle r, que
depuis l ’année dernière que le citoyen Cham pflour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et m e dirent que le citoyen B oyer prétendoit s ’en faire payer par le citoyen Cham pflour aîné.
C e 29 n iv ô se , an g de la république.
D éclaration de ce que dessus.
LA U O U SSE .
Enregistre à R io n i, le d i x - s e p t germ inal an n e u f, fo lio 48 ,
recto e t verso. Jieçu un f r a n c , p lu s d ix centim es.
P O U G I I O N.
�Saint - A rn aud, le 7 frimaire an 8.
J'ai reçu ta lettre, m on cher C h a m p flo u r, par laquelle tu me
demandes un éclaircissem ent sur une créance de 600 francs que
le citoyen B oyer réclam e de la succession de ton f r è r e , qu’ il d it
n' a voir p a yée au nom de ton fr è r e , je ne puis te dire que ce que
j' ai répondu au citoyen B o y e r, qui est venu m e voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à m e rap
peler , et depuis j’ai encore tâché de m e ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur ce tte affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’il m ’a toujours parfaitem ent payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclam er : mais je ne m e rappelle pas que
jam ais il ne m ’ait rien été payé , au nom de D esm o u lin s, par
le citoyen B o y e r; je le lui ai déclaré com m e je te le m ande ic i,
parce que j’e n ’en ai pas la m oindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire to rt, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B o y e r, à qui j’ai fait la m êm e déclaration que
je te fais là. M ille respects à m adam e de C h am pflo u r; et re ço is,
m on cher a m i, l’assurance de m on bien sincère attachem ent.
L E N O R M A N D .
A R I O M , de l ' im prim erie de L a n d r i o t , seul im prim eu r du
T rib u n a l d ’appel. — A n 10.
�
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[Factum. Champflour-d'Alagnat, Jean-Baptiste-César. An 10?]
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Toutée
Pagès
Dartis-Marcillat
Andraud
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créances
assignats
Couthon
émigrés
inventaires
contre-révolution
Blatin
Aubier (abbé)
lettres de change
notables
opinion publique
séquestre
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Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-de-Dôme, défendeur ; contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Publisher
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De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 10
1789-Circa An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0709
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
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Domaine public
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assignats
Aubier (abbé)
Blatin
contre-révolution
Couthon
Créances
émigrés
inventaires
lettres de change
notables
opinion publique
séquestre
-
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55bd2cb0170fb20e9893ed4723d022e4
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Text
MEMOIRE
EN
RÉ P O N S E ,
POUR
J
CHAMPFLOURD ’A L A G N A T , propriétaire , habitant de la
ville de C lerm ont-F errand , département du
e a n
- B
a p t i s t e
Puy-de-D ôm e,
- Cesa r
défendeur j
CONTRE
\
P i e r r e B O Y E R , juge au tribunal civil de
l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Q u o d genus h oc hom inum !
V irg.
B O Y E R , juge au tribunal d’arrondissement
de C lerm ont, a été long-lemps mon procureur et mon
A
P IE R R E
t r ib u n a l
de
CASSATION.
�( s )
Iioinmc d’affaires ; il me scrvoit avec exactitude, je le
récompensois avec généi-osité.
Je me croyois quitte envers lu i, de toutes les manières ,
lorsque tout à coup il s’est prétendu mon créancier d’une
somme de 23,337 francs 10 centimes.
Il devoit à l’une, de scs filles une dot de 20,000 francs ;
il ex p o se, dans sa citation, que c’est à moi à payer la
dot.
U n jugement solennel du tribunal d’a p p e l, séant à
R io in , a réduit les prétentions de B o yer, i° . à une
somme de 1,800 francs 13 centim es,.qtii étoit due par
feu mon frè re , et que je ne contestois pas; 20. à une
somme de 2,400 fi’ancs que je paye deux fo is , parce que
malheureusement j’avois laissé le titre entre les mains de
Boyer.
.Boyer m’a fait signifier le jugem ent, avec som m ation
de Vexécuter. J ’ai* payé ; il a reçu. A u jo u rd ’hui il se
pourvoit en cassation.
O n sent que-cette démarche n’a été qu’un prétexte
pour répandre un libelle contre moi. L e jugcniènt du
tribunal d’appel avoit fait grande sensation ; le public
s’étonnoit qu’un homm e aussi peu délicat, Siégeai parmi
les magistrats du département.
Il a cru détruire cette prem ière impression, et ne s’est
pas aperçu qu’il augmentoit le scandale par ses écrits.
J ’avois évité toute publicité ; je ne voulois laisser au
cunes traces d’une affaire qui le déshonore; je m ’éfois
contenté de faire valoir mes moyens ù l’audience, et mon
défenseur avoit eu tous les égards qui pouvoient s’ac
corder avec mes intéi’êts. Je croyois devoir cette con
�( 3 )
descendance à un liomme qui avoit eu autrefois ma con
fiance : mais puisque Boyer me force d’entrer en lice ;
puisqu’il cherche à faire suspecter ma loyauté, je ne dois
plus garder de ménagement. Je vais faire connoître cet
homme qui veut que th o n n eu r lu i survive, et qui se
dit sans reproche, (i)
Boyer débute par son extrait de naissance ; il a soixantesept ans : il pourroit dire comme V ....., soixante-sept
ans de vertus. Il affecte de rappeler souvent qu’il est juge :
nn plaisant qui sait l’apprécier, a dit que Couthon Vavoit
nom m é parce q u i l le co n n o isso it, et que le gouverne
m ent ïa v o it conservé parce q u i l ne le connoissoit pas.
Boyer dit qu’il a été mon am i; il m ’a dénoncé comme
émigré ! Boyer se dit mon a m i, et il m ’a fait rembourser
en assignats discrédités tous les anciens capitaux qui
m ’étoient dûs!
(i) U n citoyen de Clermont réclame contre l’assertion de Boyer,
et lui fait au contraire de grands reproches : c’est le cil. Bourdier.
Il devoil à défunt Beraud , mon beau-père, une rente annuelle de
5o fr. ; il avoit laissé écouler plusieurs années' d’airérages : le
citoyen Boyer éloit chargé d’en poursuivre le recouvrement. Bour
dier lui donna douze louis en or à compte ; mais il n’eut pas la
précaution de retirer de quittance, parce que Boyer prom eüoil de
la lui faire donner par la dame Beraud. Boyer a oublié celte cir
constance : s’ il a une quittance qu’ il la montre, a toujours dit le
délicalBoyer : etles douze louis seroient perdus pour le cil. Bourdier,
si je n’avois eu connoissance du fait. Je les alloue au ciloyen Bour
dier : c’esl encore une somme ii ajouter à toutes celles que j ’ai
données ù B o y e r, qui voudra bien la regarder comme une nou
velle marque (le reconnaissance.
A 2
�Boyer se dit mon ami ; il fut causes de ma réclusion f
et a eu l’atrocité d’insulter à mes malheurs !
Je dois lui rappeler qu’un jo u r , en sa qualité de
com m issaire de Couthon , il se rendit ù la maison des
U rsulines, où on avoit entassé une foule c^e victimes. Sa
mission avoit pour objet de séparer les fàm m es, et de
les conduire dans un autre cachot. N on seulement il se
perm it de les traiter avec une rigueur digne de «es temps
affreux, qui lui convenoient si L ien , mais il eut la barbarie
d’y ajouter les sarcasmes, et n’oublia pas son a m i, qu’il
désignoit agréablement sous le nom de sœ ur César.
M o i Cham pflour, ami de Boyer! mais l’âge,'la fortune,
les goûts ne permettoient point des rapprochemens de ce
genre. Boyer faisoit mes affaires, discutoit mes intérêts;
je payois ses vacations , les momens qu’il a employés pour
moi ne furent jamais stériles. Il convient lui-m êm e, dans
sa citation, que je lui ai donné des m arques de ma recon
naissance , et on sent bien que suivant le dictionnaire de
B o y e r, des témoignages de reconnoissance ne sont que
de l’argent.
E n fin , cette amitié ne remonte pas bien loin , puisque
au rapport de B o y e r, ce n’est qu’en 1783 ou en 17 8 4 ,
que je lu i a i été -présenté. Q uel luxe d’expressions ! Boyer
n’étoit pas juge alors; pour être admis dans une étude,
il faut moins de cérém onie que pour être introduit dans
un hôtel.
Mais il se trompe encore, ce n’est qu’en 1786, et au mois
de janvier, que j’ai eu le malheur de le connoîfre. Je vais
rendre compte des faits qui ont occasionné le procès
jugé à Ilio m , et donné lieu au mémoire auquel je suis
obligé de répondre.
?
�(
5
)
J}c> \
M a famille est ancienne et fort connue dans la ville
que j’habite; mes ancetres se sont illustrés dans la magis
trature, et l ’un d’eux fut annobli pour services rendus à
l ’état. C ’étoit autrefois le plus haut degré de gloire auquel
un citoyen pût parvenir ; il est permis de le rappeler.
M on père m’a laissé une fortune considérable , que
j’ai accrue, loin de la diminuer. L a propriété principale
que je possède est située près de G lerm ont, dans un
des plus beaux cantons de la Lim agne ; elle ne fut jamais
hypothéquée. J ’ai toujours été à l’abri des besoins, et
en état de soutenir avec dignité le rang où mon nom
et ma condition m’avoient p la c é , dans un temps où il
existoit des distinctions parmi les citoyens. Il n’est pas
de propriétaire qui ne soit fo rcé, dans la v i e , de recourir
à des emprunts. Cette ressource m ’étoit ouverte de toute
p art, et q u o iq u ’en dise B oyer, je jouissois du plus grand
crédit.
B o y e r, qui ne connoît que l’almanach ou le praticien
français, a eu besoin de lire un rom an, pour y copier
un tableau d’infortune ou de détresse, qu’il a bien voulu
m ’appliquer •, mais personne ne m ’a reconnu à ce portrait
louchant.
L a charge de receveur des décimes du clergé, appartenoit à ma famille. L e commis qui l’avoit exercée avoit,
comme bien d’autres, enflé son mémoire. Je fis examiner
les pièces de comptabilité par B oyer, que j’avois chargé
de mes affaires ; le commis se trouve débiteur au lieu
d’être créancier. Boyer lit ce travail comme tout autre
l’auroit fait. Je payai scs soins et son zèle; je lui iis
�•
f
(G )
encore un présent considérable ( 1 ) : il n’y a rien là de
m erveilleux, et personne ne s’attendrira sur le sort de
B oyer, puisque de son aveu , il a été récompensé de son
travail.
J ’étois et je suis encore créancier des citoyens V ir y ,
mes cousins, pour le montant de là charge de receveur
des ta illes, qui venoit également de ma famille. Il est
connu de tout le départem ent, que j’ai acquis un bien,
provenu des citoyens V ir y , pour avoir les moyens d’être
payé ; et Boyer est absolument étranger à cette affaire ;
je ne l ’en ai jamais occupé.
•
E n 17 8 9 , j’eus besoin de quelques fonds; Boyer me
p r ê ta , le prem ier novem bre de cette même an n ée, une
(1)
Il n’est pas inutile de détailler ici les différons cadeaux que
j ’ai faits à B o yer; vingt couverts d’argent, dont huit à filets; huit
cueillers à ragoût, douze cueillers à c a fé , six salières d’argent,
une écuelle d’argent, avec son couvercle et assiette, le tout d ’un
travail recherché ; deux porte-huiliers d’argen t, à h ateau , trèsbien ornés ; six flambeaux d’argent , deux cueillers à sucre , à
jour ; deux tabatières d’or pour le mari et la fem m e; une montre
d ’or à répétition, deux moutardiers et deux cafetières d’argent ; un
cab rio let, un fusil à deux coups, deux pistolets et une selle, cin
quante cordes de bois ù b rû ler, une feuillette de B ordeaux, tout
le bois nécessaire pour parqueter sa m aison, faire ses alcôves et
séparations, le tout en planches de noyer et poirier, et tant d’au
tres choses qui ne reviennent pas ù ma mémoire.
En argent , soixante-dix louis , qu’on lui fit accepter comme
bénéfice du je u , quoiqu’il n ’eût rien avancé.
l ’ai donné en différentes fois à sa servante vingt-cinq louis; jo
ne parle de cette largesse , que parce que je sais qu’ il monsieur
çlle en rendoit quelque chose.
�QU
(7 )
somme Je 5,ooo francs, avec intérêts à cinq pour cent,
sans retenue. L ’année suivante 1790, je renouvelai mon
Juillet pour une autre année, à la même échéance, et
le 5 novem bre 179 0 , il me prêta encore une somme
de 2 , 5 o o francs. Je lui remboursai cette dernière un
mois après. J e voulus retirer m on billet ; il n’eut pas
le temps de le chercher au même m om ent; je négligeai
de le redem ander, j’en ai été quitte pour le payer une
seconde fois; mais j’ai appris à être plus exact, et je
suis étonné que Boyer ne se soit pas vanté de ce que
je lui ai cette obligation.
A u mois de juillet 1792 ', je m’absentai momentané
ment du département pour des affaires importantes.
Boyer répandit que j’étois ém igré; il me dénonça comme
tel, le 27 octobi-e 179 2; sa déclaration (x)contient rén u
mération de tous les effets actifs que je lui avois con
fiés ; il prend la précaution de faire enregistrer les deux
billets que j’avois souscrits à son proiit les 1 * et 11
novem bre 179 0 , quoique je lui eusse remboursé le
second (2).
Je revins à mon domicile dans les premiers jours de
....... ■
I
........ .
— ■!■■■■■— I
■■
. ■
(1) V oyez sa déclaration, pièces justificatives.
(2) Je dois rappeler à B o y e r, que je lui reprochai devant le juge
de paix et ses assesseurs, qu’en le payant en 1793, il me faisoit
rembourser deux fois la somme de 2,5oo francs. Que vous ai-je
répondu, me d it-il? — Q u'il1falloit vous payer encore une fois!
A lors m ’adressant au juge de paix et ù scs assesseurs, je m'écriai :
Quelle opinion devez-vous avoir d'un homme qui se fait payer
une seconde fois ce qu’il a déjà reçu ? L e juge de paix et ses asses
seurs soiït très-mémoratifs de ce f a i t , et peuvent l'attester.
�* -r
( 8 ) .....................
mars 179 3; Boycr ne m’attendoit pas; je suis instruit de
toutes ses manœuvres. O11 sent que ce 11’étoit pas le moment
de discuter, surtout avec Boyer qui étoit alors en crédit;
je crus ne pouvoir m ieux faire que de le mettre hors
d’in térêt, et dans l’impuissance de me nuire. Je payai
le montant des deux billets, quoique j’eusse remboursé
le second, un mois après sa date, et je n’oubliai pas de
le remercier de sa complaisance : il eût été dangereux
d’aigrir l’ami et le protégé de Couthon.
Mais Boyer s’étoit encore fait un autre titre de créance;
il me dit avoir emprunté d’une nommée M artine D elarbre , une somme de 800 fr. pour le compte de mon
épouse et de ma belle-mère. Comment se pou voit-il qu’il
eût fait cet em prunt? Il avoit présenté, quelque temps
auparavant, le compte de ces dam es, et n’avoit point parlé
de cette somme de 800 francs; s’il la leur avoit donnée,
sans doute il auroit retiré d’elles une reconnoissance :
ces dames n’en avoient aucune m ém oire : point de recon-»
noissance ; mais il la réclam oit, il fallut paÿer ( 1 ).
(1) A propos de Martine D elarb re, Boyer lui avoit emprunté
cette somme de 800 fr. le i 5 avril 1790. C ’est le
25
du m êm e
m o is, huit jours après ce billet , qu’il fit le compte des dames
Beraud et Chajmpflour , et il ne fait nulle mention de cet em
prunt pour leur compte. Je me suis procuré ce billet des mains
des héritiers de Martine Delarbre. J’ai remarqué qu’il étoit de la
6ormne de 840 fr. payable dans un an ; la somme de /¡o fr. éloit
pour tenir lieu des intérêts. Il contient deux endossernens en
m arge, de la somme de /(.o l’r. chaque; l'un , du ia septembre
1792 ; l’autre, du 27 mai
On y voit encore , que sur la date
çlu
avili 1790» Boyer a cflacé le ipot d ix de la fin de }a date,
Mes
r
�( 9 )
M es rapports avec Boyer furent absolument interrom
pus : destitué comme juge , il ne fut remis en place
qu’après le 13 vendém iaire; et pendant sa destitution,
il se déroboit à tous les regards ; il ne lut pas même
fort en crédit jusqu’au 18 fructidor' an 5 ; mais à celte
ép oqu e, il reparut avec audace: il étoit cependant hu
m ilié de ce que je lui avois retiré ma confiance; il me
fit parler par plusieurs personnes pour opérer un rappro
chement. L e prétexte fut un aiTangem ent par lui fait
avec feu Cliampflour-Desmoulins, mon fr è r e , en 1789.
Suivant B oyer, il s’étoit chargé de payer aux créanciers
de mon frère une somme de 12,000 francs; cette somme
n’avoit pas été entièrement com ptée, et ce qui avoit été
payé, ne l’avoit été qu’en assignats. Boyer ne vouloit faire
pour y substituer le mot onze ; ce qui donne au billet la date de
4791 au lieu de 1790. L ’encre qui a tracé le trait sur le mot d ix t
et écrit le mot on ze, l’approbation de la rature et la lettre ini
tiale B , est infiniment plus noire que celle du corps du billet et
de la signature qui le termine. Ces cliangemons ne paroissent
avoir été faits que lors de l'endossement de la somme de 40 fr.
du 27 mai 1795 : cet endossement est postérieur au rembourse
ment que je lui ai fait. Il voulut alors rembourser Martine Del arbre
en assignats, sur le prétexte que je I’avois remboursé de même.
Cette fille lui répondit qu’elle lui avoit donné de l’or provenant
de ses épargnes, et qu’elle ne lui avoit pas prêté pour mou compte;
alors il effaça le mot d ix pour y substituer le mot onse. 11 avoit
deux objels ; l ’un , de faire croire que cette fille ne lui avoit donné
que des assignats ; l’autre, de rendre plus probable l’emprunt qu’il
disoit avoir lait pour ces dam es, en lui donnant une date posté
rieure au compte qu’il avoit fait avec elles , et qui se Irouvoit
trop rapproché de la date du billet pour qu’on ne soupçonnât {»as
sa délicatesse.
B
�( ÎO )
.aucun bénéfice sur ces payemens; mais comme je lui avois
remboursé en assignats les sommes qu’il m’avoit prêtées
en 1790, il étoit juste aussi que je lui comptasse,
d’après l’échelle, de la perte que je lui faisois éprouver.
Cette proposition étoit raisonnable; je l’acceptai; mais
j’exigeai qu’il fût passé un com prom is, pour nous en
rapporter définitivement à deux amis communs. L e
compromis eut lieu : Boyer a transcrit cet acte en entier,
page i 5 de son mémoire.
Qui pourroit croire que cette proposition n’étoit qu’un
piège tendu à ma bonne f o i , et que Boyer ne clierchoit
qu7un prétexte pour m’engager à payer encore une fois
les sommes qu’il m ’avoit prêtées en 179 0 ? Il crut s’être
fait un titre pour me forcer A lui donner une indemnité ;
et bientôt, révoquant le com prom is, il me traduisit au
tribunal civil du P u y-d e-D ô m e, où il étoit juge.
M ais n’anticipons pas sur les événemens ; il est im
portant de faire connoître l’éti'ange marché que B oyer
avoit fait avec mon frè re , le 2,8 mai 1789.
Cham pilour-Desm oulins, mon frère , étoit un jeune
m ilitaire, gén éreu x, dissipateur, qui avoit dépensé au
delà de sa légitim e, et m e devoit encore une somme
assez considérable ( 1 ).
(1) J’ai dans les mains une quittance de mon frè re , de la tota
lité de sa légitim e, en date du 1 " avril 1784; un billet de lui ,
du 1" mars 17 8 9 , par lequel il se reconnolt mon débiteur de
4,600 francs; et un second, du 25 août 1791 , par lequel il reconnoit me devoir la somme de 16,920 fr. M algré ces avances
considérables, je n'ai cessé de venir au secours de mon frère dans.
tous les temps ; j’ai une foule de lettres de lu i, par lesquelles il
m ’exprime sa reconnoissancc.
?
�Il lui restoit pour toute ressource une créance de
16.000 francs, portant intérêt à 9 et demi pour cen t,
sur le p rix de la charge de receveur des tailles de
l ’élection de Clerm ont, dont le tiers appartenoit à notre
père. Cette somme étoit due par le citoyen V i r y , notre
o n cle , titulaire de cette charge.
M on frère avoit des créanciers qui lui donnoient de
l’inquiétude ; il communiqua ses craintes à Boyer qui
trouva les m ojens de le tranquilliser. Il proposa à mon
frère de lui faire une cession de 12,000 francs sur l’o
bligation des 16,000 que lui devoit notre oncle V i r y ,
et qui rapportoit i , 5oo francs de revenu : à cette con
dition , il se chargeoit de payer 12,000 fr. aux créanciers
de mon frère.
Comme Boyer est obligeant et fécond en ressources,
le léger Desmoulins accepte sans balancer ; il ne s’agit
que d’appeler un notaire pour consommer la cession.
M ais un acte .de ce genre seroit bien coûteux-, entraîneroit des droits d’enregistrement considérables ; il faut
éviter cette dépense, et il y a un moyen tout simple.
D on n ez-m oi, d i t - i l à D esm ou lins, une procuration
notariée, pour m ’autoriser î\ recevoir les 16,000 francs
et les intéi'êts que vous doit votre oncle ; vous reconn o îtrez, par cette procuration, que f a i déjà payé les
12.000 fra n cs à vos créa n ciers, et vous consentirez,
par la même procuration, que je me retienne celte somme
sur celle que je recevrai de votre oncle V iry.
Ce marché fut conclu : Boyer devint créancier de
12.000 francs, produisant neuf et demi pour cent d’inté
rêts par année, sans, avoir donné un sou; et ce n’est point
B 2
�ici une assertion aventurée ; B oj’er l ’a reconnu clans lo
compromis du i 5 fVusador an 7 ; il a renouvelé cet aveu
devant le juge de p a ix , devant les premiers ju ges, et
devant le tribunal d’appel ; il est condamné par le
jugement à me remettre cette obligation , comme fa ite
p o u r cause f a u s s e , ou sans cause préexistante ( 1 ).
V i t - o n jamais un homme délicat se nantir d’une
créance aussi im portante, sans bourse délier! et Boyer
veu t-il que l'honneur lu i survive, lorsqu’il est condamné
à remettre une obligation consentie pour cause fa u s s e !
Je reprends le récit des faits. L e 13 vendémiaire
(1) En même temps que mon frère souscrivoit cette obligation,
jl avoit donné à Boyer l’état de ses dettes. C et état étoit ainsi
conçu:
i°. A M . L aville, M . B lau d cau tio n ............................... i , 5oo fr.
A la Nanon , cuisinière de mon f r è r e ......................
Goo
A Dufraisse-Lapierre, domestique de M . de Flagheac,
1,200
c i ...................................................................... ... . :'V . . .
M . Boyer , ma c a u tio n ...................................................
2,800
A madame S a u z a d e .......................................................
2,900
A Caze , p e rru q u ie r........................................... ...
3i 5
A F a b r e , c o n fis e u r .......................................................
1,218
A l’abbé A u b i e r ..............................................................
1,200
A B l a t i n ............................................................................
A B ra cb e t, t a i l l e u r ............................. ........................
260
5Go
T o t a l . . . ............................. ...
12,353 fi .
Voilà les dettes que devoil payer Boyer ; il n ’en a acquitté
d'autres que celles de C aze, Fabre et Blalin , que je lui ai allouées.
( E xtra it du livre journal de mon frl're, dans letjuel il avoit ins
crit les dettes dont B o y e r éto it chargé).
!
�an 8, Boyer obtient une cédule du juge de paix du
la section de l’Ouest de Clerm ont - F erra n d , où je
suis dom icilié. Il y expose , entre autres choses , que
depuis nombre d’années, il m ’a rendu des services nota
bles ; q u i! a reçu d’abord de m oi des m arques de re
connaissance ,- il n’oublie pas de rappeler que je lui
ai remboursé en assignats des sommes qu’il m’avoit
prêtées en 179 0 ; que l’époque des-remboursemens de
certaines de ces sommes les assujétissent à l’éclielle de
dépréciation, suivant les conventions des parties ; qu’à
la vérité elles avoient compromis entre les mains des
citoyens Costes et L o u yrette, mais qu’il peut révoquer
la clause compromissoire, sans anéantir les conventions
ou les a veu x; e t , comme les ni-bitres n’avoient autre
chose à faire qu’ un calcul qui seroit p én ib le, il vaut
autant recourir aux voies judiciaires. En conséquence,
Boyer me cite pour me concilier sur les demandes prin
cipales et provisoires qu’il est dans l’intention de former
contre moi.
„11 ine demande au prin cipal, i° . la somme de 8, 55o fr.
pour les causes énoncées au com prom is; 20. les intérêts .
de celte som m e, à com pter depuis l’échéance des effets;
3°. la somme de 6,200 fr. par lui prétendue empruntée
du citoyen L e scu rie r, pour le compte do mon frère,
par obligation du 3 juillet 1789; p lu s, la somme de
72 fr. pour le coût de l'obligation de 12,000 fr. 4 0 . la
somme de 3,180 fr. aussi empruntée du citoyen B u gh eon ,
le 28 niai 1789 , et qu’il n’a remboursée que le 27
décembre 179 2 , avec 136 fr. pour intérêts ou frais.
. Boyer demande encore une somme de 2^7 fr. 20. cent.
�( H )
payée à B la tin , négociant, le 8 juillet 178 9; celle de
3 1 5 fr. payée au nommé Caze, coiffeur, le 10 du m ême
m o is; celle de 1,218 fr. donnée à F a b r e , m archand:
ces trois sommes payées à la décharge de feu Desm oulins,
mon frère , n’ont jamais été contestées.
Mais Boyer réclam oit aussi une somme de 2,400 fr,
qu’il disoit avoir donnée au citoyen Lahousse, cafetier,
pour un effet souscrit par mon frè re , et qui étoit échu
le 1 janvier 1789. J ’avois payé cette somme à Lahousse
depuis long-temps ; l’effet s’est trouvé entre les mains
de B o y e r, par une suite de confiance ; il a étrangement
abusé de cette circonstance, ainsi que je l’établirai dans
un moment.
E n fin , B oyer. demandoit une indemnité pour une
somme de 2,804 fr- qu’il disoit avoir cautionnée, sans
savoir en fa v e u r de qui.
Telles étoient les demandes prin cipales, et comme
Boyer se trouvoit dans le b e so in , pour faire face à la
dot par lui constituée à sa fille cadette, il me cite à
b ref d é la i, pour être condamné à lui p a y e r, par pro»
vision et à bon com pte, une somme de 18,000 fr.
Boyer étoit-il donc dans le délire ? à qui persuadera-t-il
qu’il a em prunté, pour le compte de mon frère, 6,200 fr.
d’une p a rt, .et 3,180 fr. d’au tre, sans se faire donner
aucune reconnoissance par celui pour lequel il faisoit
les emprunts? Comment se fait-il qu’il ne l’ait pas môme
déclaré aux créanciers ? Pourquoi , quand Bughcon a
obtenu contre lui une sentence de condamnation, n’a-t-il
pas déclaré qu’il n’étoit point le véritable débiteur, et
pourquoi 11’a-t-il pas fait dénoncer les poursuites de
Uuglieoa ù mon frère ou à ses héritiers ?
I
�C 15 )
•Répondra-t-il qu’il étoit nanti, au moyen de l'obli
gation qu’il s’étoit fait consentir avant d’être créancier?
M ais cette obligation est contenue dans une procura
tion qui l’autorisoit à toucher la somme de 16,000 francs,
et les intérêts à raison de i , 5oo francs par annee ; il ne
devoit se retenir que la somme de 12,000 francs: il étoit
donc tenu de rendi’e compte de sa pi’ocuration; il devoit
donc établir que les sommes empruntées de Lescurier
et de Bughcon avoient été reçues par mon frère , ou
qu’elles avoient tourné à son profit. Reçues par mon
frère ! mais cela étoit im possible, Boyer ne devoit lui
rien com pter; il ne prenoit l’obligation de 12,000 francs
que pour payer des dettes jusqu’à concurrence de cette
somme. O r , de son aveu , il n’a rien payé aux créanciers
de mon frère, si on en excepte les objets m inutieux de
B latin , Caze et F abre, qui ne se portent qu’à 1,800 francs:
mon frère n’a pu toucher ces deux sommes , puisqu’à
l’époque de l’emprunt de L escurier, Desmouliiis étoit
à son régim ent ; j’en ai la preuve écrite.
Je demandois sans doute à Boyer une chose raison
nable, et je n’ai cessé de répéter ces offres. Prouvez-m oi
que les créances que vous me présentez aujourd’hui ont
été employées pour le compte de mon frère ; qu’il a
touché les sommes ou qu’elles ont servi à payer ses
dettes, et je vous les alloue. Boyer a regardé ces propo
sitions comme une injure, et m ’a fait assigner.
N o n , ces différentes sommes n’ont point été empruntées
pour mon frère; elles l ’ont été pour le compte personnel
de Boyer ; il les prit en 1789 > ei1^ l’a(lresse de tirer sur
moi la lettre de change de B u gh eo n , et c’est avec ce
�(i6 )
même argent qu’il m’a prêté en 1789 et en 1790 la
somme de 8 , 55o francs, dont j’avois besoin ; de sorte que
par un calcul qui n’est pas encore venu dans la tête de
l’agioteur le plus délié , il reliroit deux fois son argen t,
et par le prêt qu’il m’avoit fait, que je lui ai rem boursé,
et en mettant ces deux sommes sur le compte de mon
frèi’e : si ce n’est pas une preuve de délicatesse , c’est au
moins fort adroit, et l’expression est modeste.
Boyer embarrassé de répondre à ces argum ens, qui
étaient sim ples, ( et les plus simples sont les meilleurs ) ,
affecta de répandre à l’audience, qu’il avoit dans les mains
un écrit émané de m o i, et que cet écrit étoit accablant.
M ais il le gardoit pour la réplique, afin de bien connoître
tout ce que je ferois plaider pour ma défense, et d em ’attérer par cette preuve que j’avois m oi-m ême donnée.
C e fameux écrit parut enfin : c’est une note qu’il a
transcrite au bas de la page 11 de son mémoire.
Je dois encore expliquer ce que c’est que cette note.
A v a n t d’en venir aux discussions judiciaires, j’exigeois
que Boyer m’instruisît de tous les faits et me fît con
noître le montant des sommes qu’il disoit avoir em prun
tées pour mon frère.
Boyer me présente une feuille de papier, et rne prie
d’écrire ce qu’il va me dicter. « M . Bo}rer a emprunté
« pour mon frère ,
« i°. A M . Buglicon 3,000 francs.
« 2°. A M . l'abbé A u b ie r 1,800 francs.
« 30. A M . Lescurier 5,000 francs.
J ’en écrivis bien d’autres ; mais à mesure que les
sommes grossissoient, je faisois des objections; je denuiXHÎois,
�c 17 )
^
^
J*
mnndois comment ces prétendues créances étoient étaLLies. Boyer prend de l’hum eur, et retire le p ap ier:
ce st cette inéme note qu’il a eu l’indignité de p ro d u ire,
et qu’il aimonçoit comme un moyen accablant. Mais en
quel état le produisit-il ? 11 ne produisit qu’un papier
c o u p é , de la longueur de quatre lign es, dont il vouioit
se servir; il avoit supprimé le reste, et l’avoit coupé
avec des ciseaux ( i ).
P our le co u p , ce fut B oyer qui fut altéré, et publi
quement couvert de lionte. Malheureusement pour l u i ,
la créance de Yabbé A u b ie r se trouvoit intercalée entre
Buglieonet Lescurier; et cependant il n’avoit pas demandé
la créance de Yabbé A u b ier. S’il avoit supprimé les
'autres qu’il ne demandoit plus ; il ne pouvoit pas ôter
celle de l’abbé A u b ie r; cependant il convenoit qu’elle
DC lui étoit pas due. O r , il n’y avoit pas plus de raison
pour demander celles de Buglieon et L escu rier, quecelle
d’A u bier : celle-ci étoit aussi-bien établie que les autres:
pourquoi ce choix ou celte préférence ? Etoit-ce parce
que les sommes étoient plus considérables ?
Q u'on remarque d’ailleurs combien les sommes de
Buglieon et Lescurier cadroient bien avec celles qu’il
m ’a voit prêtées en 1790! et 011 est bientôt convaincu
du double emploi,
(1) Lorsque les arbitres, qui étoient présens à l'audience, aper
çurent cette note ainsi défigurée et coupée avec des ciseaux , ils
firent éclater un mouvement d’indignation contre l'infidélité du
citoyen Boyer. Plusieurs citoyens de C lerm o n t, qui étoient éga
lement à l’audience, s’en aperçurent, et ont publié que les rieurs
n ’etoient pas du côté.du citoyen Boyer.
�Je poussai plus loin Boyer sur cette note singulière;
je me rappelai que parmi les sommes qu’il m ’avoit fait
écrire sous sa dictée , et sur le même p a p ier, il avoit
porté entre autres , une somme de 600 fr. qu’il disoit
avoir payée pour mon frère au citoyen Lenorm andFlaglieac. J ’écrivis au citoyen Flagheac, et le priai de me
dire si mon frère avoit été son d éb iteu r,. et si Boyer
lui avoit payé cette somme de 600 fr.
L e citoyen Flagheac me répond que mon frère ne lui
cîcvoit rien , et que Boyer ne lui avoit jamais rien payé.
J e présentai cette lettre à l’audience, et iis interpeller
Boyer sur ce fait. Boyer convint des faits, et répondit
au président qu’en effet il croyoit avoir payé cette somme,
mais qu’il s’étoit trompé.
Boyer croit avoir payé une somme de 600 francs, et
n’en a pas tenu note ! il n’en a pas même retiré des
quittances, lorsqu’il a payé diiïérens créanciers! Quand
on connoît B o y e r , il est impossible de croire à ces
omissions.
On ne croira pas non plus que B o y e r , procureur
pendant quarante ans, qui a gagne 300,000 francs de
fortune, ait signé un compromis de confiance ( 1 ) , sans
savoir ce qu’il contenoit : c’est cependant ce qu’il a osé
dire à l'audience sur l’interpellation du président!!!
On ne croira pas davantage que Boyer n’eût pas pris des
reconnoissances de mon frère, s’il avoit payé pour lui
les sommes qu'il me demande, et celles qu’il ne m’a pas
(1) TCoyrr a ajouté tf'» sa main son prénom , <jui avoit été laissé
rn blanc dans le double du compromis <jue j’ai en mon pouvoir.
�Jss
( *9 )
demandées, lorsque ces prétendus payemens remontent à
178 9, et qu’il est établi que mon frère a resté à Clermont
pendant toutes les années 1790 et 17 9 1, sans que Boyer
lui eût jamais dit un mot de ces emprunts.
C ’est ici le cas de parler de la lettre de change de
.Lahousse, montant à 2,400 francs, et que j’ai été con
damné à payer par le jugement dont Boyer a imaginé de
se plaindre.
En 1788 mon frère Desmoulins avoit souscrit une lettre
de change de la somme de 2,400 francs , au profit du
citoyen Lahousse ; elle étoit payable dans les premiers
jours de janvier 1789. M on frère éprouva une maladie
grave dans le courant de 1788; il avoit de grandes inquié
tudes du désordre de ses affaires, et dans son délire ne
cessoit de pai'ler principalement de la créance de Lahousse.
Il 11e revoit que poursuites et contraintes par corps, etc. Je
crus devoir lui mettre l’esprit en repos , et j’imaginai
qu’en lui présentant sa lettre de change, je parviendrais
à diminuer son m al, ou au moins à faire cesser le délire.
Je me rends chez Lahousse; je n’avois pas alors les fonds
nécessaires pour payer le montant de la detle; je priai le
citoyen Lahousse de vouloir bien inc remettre la lettre
de change de mon frère, et j’offris de souscrire à son
prolit un effet de pareille somme.
L e citoyen 1 -ahousse s’empressa d’accéder à ces arrangeinens; je pris la lettre de change et la portai à mon
frère; j’ai acquitté depuis l’effet que j’ai souscrit.
M on frère, par une suite de la confiance qu’il avoit
en Boyer , lui remit tous les papiers d’affaires ou de
fam ille; et parmi ces papiers se trouva la lettre de change
dont Boyer a su faire son profit.
�( 20 )
Boyer n’ignoroit pas que cette lettre de change avoit
été acquittée; mais il lui falloit un prétexte pour s’en
faire payer par moi. M on frère n’existoit plus : il ign o roit les arrangeinens que j’avois pris avec Lahousse; en
conséquence il va trouver ce dern ier, lui présente la
lettre de change, dont il a reçu le m ontant, et l’engage
à mettre son acquit au Las de l’effet.
Lahousse n’a pas l’habitude d’écrire ; il prie Boyer de
lui dicter les mots nécessaires, et celui-ci lui fait écrire
que c’éloit des deniers de lu i Boyer. L e cit. Lahousse,
dont la probité est bien con n u e, m algré la m alignité
de B o y e r , refusa de signer l’acquit , en se récriant
contre la surprise qu’on vouloit faire à sa bonne foi.
Boyer retira l’effet sans signature; il a osé depuis form er
la demande en payement de cette somme ; le tribunal
d’appel m’a condamné au payem ent, sur le fondement
que Boyer étoit nanti du titre. La rigueur des principes
a entraîné les opinions ; c’étoit bien assez d’avoir à le
juger comme ju g e, sans le juger comme hom m e; mais
cet homme est im juge!!!
Mais je demanderai à B o y e r, comment et à quelle
époque il a payé ccltc somme à Lahousse ?
Boyer a d it , en plaidant, qu’il l’a voit acquittée à
l’échéance : on se rappelle que l’échéance étoit au mois
de janvier 178 9; cependant ce n’est qu’au mois de mai
suivant, que Boyer se fit consentir par mon frère l’obli
gation de la somme de 12,000 francs; et ce qu’il y a de
plus certain, c’est qu’à l’époque de celle obligation Boyer
n’avoit rien payé pour le compte de mon frère; il étoit
nanti avant d’etre créancier; il eu convient lui-incm e.
�Il ne l’a pas payée depuis, puisque la lettre de-change
étoit sortie d’entre les mains de Lahousse, lo n g-tem p s
avant son échéance. Tous les faits que je viens de mettre
en avant, sont attestés par une déclaration authentique et
enregistrée, de Lahousse’; déclaration que j’ai produite à
l’audience (r) : aussi,loi’sque j’ai satisfait auxeondamnations
prononcées par le jugement en dernier ressort, j’ai sommé
Boyer de me remettre celte lettre de change, afin d'en
poursuivre le recouvrement contx-e Lahousse; mais Boyer,
qui craint une demande en recours de Lahousse, s’est
refusé à celte rem ise, quoiqu’il ait reçu l’argent; et ce
refus fait aujourd’hui la matière d’une instance qui est
encore pendante au tribunal d’appel, de Riom .
Il est d’autant plus extraordinaire que Boyer ait eu l'im
pudeur de xvclamer le montant de cette lettre de change,
que malgré les arrangemens pris avec mon frère, il a
refusé de payer ses créanciers, et me les a toujours ren
voyés. C ’est ainsi que j’ai payé i,8oo francs au citoyen
Dufraisse, que mon frère lui devoit depuis 178 6, par
lettre de change renouvelée à chaque échéance, en prin
cipal et intérêts. C ’est ainsi que j’en ai payé bien d'autres,
notamment la créance de la dame Sauzade , et toutes
celles comprises en l’état que j’ai donné en noie, à Per
ception de celles de F a b rc, Caze et Blatin.
Je pou vois sans doute me dispenser de ces payemens,
puisque mon frère me devoit des sommes considérables :
je l’ai fait pour honorer sa mémoire.
(1) L a déclaration de Lalioussc est imprimée à la suite du mé
moire.
�( 22 ^
J ’avois présenté un autre état qui m’avoit été donné
par mon frè re , et qui a disparu à l’audience, lorsque je
le communiquai à Boyer : je dois rendre compte de cette
anecdote que Boyer a encore malignement dénaturée dans
son mémoire.
M o n frère avoit fait la note des sommes que j’avois pré
cédemment payées pour lu i, et m’avoit remis cet état pour
ma sûreté ; il étoit sur une dem i-feuille de papier com
mun. Comme il étoit écrit en entier de sa main , et que
mon frère n’existoit p lu s , cet état étoit une pièce pro
bante qu’on ne pouvoit contester : je m ’en fis un grand
m oyen , lors de la p laid oirie, surtout pour la lettre de
change de Lahousse, parce que mon frère y avoit écrit
que j’avois retiré cette lettre de change, et que j’en avois
payé le montant de mes deniers. B oyer, qui ne connois^
soit pas cette p iè ce , en demanda la communication ; elle
passa dans ses mains , dans celles de son défenseur et de ‘
tous ceux qui étoient au barreau, qui écoutoienL avec
intérêt la discussion de cette cause. L a pièce subit le plus
rigoureux examen. M on défenseur plaidoit le prem ier,
parce que j’étois appelant : Boyer avoit surpris un juge
ment par défaut, au tribunal dont il est m em bre, et je
m’étois pourvu par la voie de l’appel pour abréger.
I/O défenseur de Boyer prit la parole après le mien ;
il discuta longuement sur cet état qu’il avoit à la m ain;
pas un mot sur les prétendues ratures ni sur les dates,
lia cause est continuée à une autre audience ; mon
défenseur s’aperçoit avant l’audience que cet état manquoit il mon dossier; lui et moi la cherchons vainement;
ijous demandons tous deux avec confiance, soit à B oyer,
V
�i
c 23 )
soit à son défenseur, s’ils n’auroient pas retenu cette pièce
par mégarde; réponse négative, l’état ne s’est plus retrouvé.
A lo rs Boyer imagine de faire plaider que c’est moi qui
ai retiré cette pièce, parce que j’en avois falsifié ou raturé
les dates. O n voit que Boyer ne perdoit pas la tête ; mais
le tribunal, qui avoit saisi tous les détails de cette cause,
avec son attention et sa sagacité ordinaires, u ’approuva
pas cette tournure insidieuse, et parut indigné de la mau
vaise foi de Boyer. L e président interpella son défenseur,
et lui demanda comment il étoit possible que ces pré
tendues ratures ou falsifications eussent échappé la veille
au défenseur ou à la p a rtie , lorsqu’ils avoient entre les
mains la pièce sur laquelle ils avoient si longuement dis
cuté, et qu’ils ne se rappelassent ces circonstances que lors
que la'p ièce avoit disparu. L e défenseur fut également
interpellé sur la créance de Lahousse : le tribunal lui
rappela la mention qui en étoit faite par mon frère ,
que j’avois acquitté cette créance de mes deniers : l’argu
ment étoit serré -, le défenseur en c o n v in t, et Boyer fut
jugé par le public. A u jourd ’h u i , Boyer ose reproduire
cette calomnie dans son m ém oire,/ lui Boyer,7 le seul en
état de nous apprendre ce que la pièce est devenue !
M e blAmera-t-on maintenant de m’être refusé à payer
une indemnité à Boyer, à. raison de la perte qu’éprouvoient
les assignats, lors du remboursement que je lui ai fait?
Mais d’abord, j’ai payé deux fois partie de ces sommes.
20. .T’ai rem boursé,danslecourant de mars i793,dan su n
temps où les papiers avoient encore une grande valeur ( j ).
(1) Boyer ne peut pas équivoquer sur lVporjuc de ce rembour-
�C m )
Il est vrai qu’en m ’acquittant je retirai les effets, que
je déchirai comme inutiles, et il ne restoit plus de traces
du remboursement.
Q u’a fait l ’ingénieux B o yer, pour me donner plus de
défaveur sur ce rem boursem ent? Il plaide que je ne lui
ai donné ces assignats qu’en messidor an 4.
O n lui observe que cela est impossible ; qu’à cette épo
que les assignats étoient retirés de la circulation ; alors il
répond que c’est au moins en messidor an 3 : quelle
confiance peut m ériter cette assertion ?
30. Je n’ai promis cette indemnité qu’à condition que
le compte seroit fait par les citoyens Costes et L ou yrelte,
par nous réciproquem ent choisis : Boyer a révoqué lo
compromis.
4°. E n fin , je n’ai consenti à cette indemnité qu’autant
qu’elle seroit réciproque, et que Boyer in’indemniseroit
lui-même du bénéfice qu’il auroit fait sur les payomens
qu’il disoit avoir faits en assignats pour mon frère. Boyer
n’a rien payé ; il n’y a donc pas de réciprocité.
sèment. J’en al fait un , dans le même tem ps, au cit. L o u y re lte ,
l’un des arbitres, que Boyer lui-même pressoit d’exiger son paye
ment et d ’imiter son exemple , sur-tout à raison de ma prétendue
émigration.
Depuis le com prom is, il eut la mauvaise foi de prétendre que
le remboursement avoit été fait beaucoup plus lard ( en messidor
cm 4. ) L ’arbitre Louyrettc le releva sur cette assertion. L e dé
licat Boyer se hâta de lui répondre : mais vous avez intérêt de
dire comme m o i, puisque nous avons été remboursés dans le même
temps. On conçoit actuellement le m otif de la grande colère de
Boyer contre Louyrelte.
Tels
�(25)
T els furent les moyens que je fis valoir avec sécurité;
m on défenseur y mit toute la dignité qui convenoit à ma
cause, méprisant les commérages, les propos de taverne
et de café , qui fui*ent prodigués par mon adversaire; je
me contentai d’exposer les faits.
Ce qu’il y a de plus singulier, c’est que Boyer a plaidé
pendant deux grandes audiences ; il se plaint de n’avoir
pas été défendu! et son mémoire est une copie littérale
de sa défense. Il fut co u vert, d it-il, par mes vociféra
tions , et le trib u n al, ne voulant rien précipiter dans sa
décision, ordonna un d élib éré, et n’a prononcé qu’après
le plus m ûr examen.
Enfin , il a été rendu un jugem ent, le 27 germinal
an 9 , qui a infirmé celui rendu par défaut au tribunal
d’arrondissement de Clerm ont, i°. quant aux condam
nations prononcées contre m o i, en payement de la somme
de 6,200 francs, montant de l’obligation de Lescurier ,
du 3 juillet 178 9 , et de celle de 3,180 francs d’au tre,
montant de la lettre de change de Buglieon , du 28 mai
de la même a im ée, intérêts et frais qui leur sont acces
soires;
-2°. Quant à la condamnation prononcée contre moi
en nouveau payement do la somme de 8, 55o francs que
j’avois déjà acquittée en assignats, et aussi quant à la con
damnation en indemnité de cautionnement d’une obliga
t i o n de 2,804 francs, prétendue contractée par Cham pllour-Desmoulins , au profit d'une personne inconnue ;
30. En ce que les intérêts ont é.é adjugés à B o y e r,
à compter des époques des payemens ; 40. E n fin , en ce
que j’ai été condamné aux dépens; ém endant, Boyer est
D
�'♦
.
(* o
débouté de toutes ses demandes relatives à ces différens
chefs, sauf à lui à agir en garantie, le cas échéant; (c’estù-dire, dans le cas où il seroit recherché pour ce prétendu
cautionnement envers une personne inconnue).
Je suis condamné à payer la somme de 1,800 fr. 13 cen.
montant des sommes payées à B latin, Fabre et Caze, que
j’offrois; maisjesuis égalementcondamné àpayerles 2,400f.
montant de la lettre de change de Laliousse, que certai
nement je ne devois pas, et avec les intérêts seulement
du jour de la demande.
Boyer est condamné à son tour h me remettre l’obli
gation de 12,000 francs qu’il s’étoit fait consentir par mon
f r è r e , comme faite pour cause fa u s s e ou sans cause
■préexistante, et devenue sans intérêt comme sans objet.
Tous les dépens, tant des causes principales que d’appel,
sont compensés, à l’exception du coût du jugem ent auquel
je suis condamné.
Ce jugem ent, dont Boyer a pris la peine de faire im
prim er les motifs et les dispositifs , est principalement
m o tivé, relativement aux créances Lescurier et Bugheon,
sur ce que ces deux actes n’établissent que des dettes person
nelles à B oyer, et qu’il ne justifie pas en avoir employé
les sommes à l’acquit des dettes de Champilour-Desmoulins.
Sur les aveux répétés de B oyer, dans le compromis
devant le juge de p a ix , devant le tribunal d’appel, qu’au
pioment de celle obligation de 12,000 francs il n’étoit
créancier d’aucune somme, et qu’il devoit seulement l’em
ployer à payer différentes dettes contractées par mon frère;
L e tribunal a pensé que par une suite naturelle de ce
nantissement, Boyer devoit rapporter les quittances justi-
»
�C*7)
iicatives de l’emploi de cette somme, ainsi que les actes,
titres et documens relatifs au compte à faire.
En ce qui touche la demande en nouveau payement dç
la somme de 8, 55o francs et en indemnité de ce cautionne
ment envers une personne inconnue ;
Il est dit, i que cette somme a été par moi payée à Boyer*
et de son aveu, qu’il m’a en conséquence rendu les effets ;
2°. Que la loi veut que les payemens faits et acceptés en
assignats soient irrévocables ;
3°. Que je n’ai consenti à revenir sur ce payement qu’en
considération d’un compte à faire devant des arbitres, et
parce que réciproquem ent Boyer se soumettoit à ne ré
péter les sommes q u ’il disoit avoir payées en assignats pour
le compte de mon fr è r e , que suivant la môme propor
tion , et d’après l’éclielle ;
4 0. Que la révocation du compromis de la part de Boyer
fait cesser mon consentement;
5°. Que la matière de ce contrat réciproque ne subsiste
plus, puisque Boyer n’a fait d’autres payemens que ceux
dont la répétition est jugée ne lui être pas due.
6°. L e tribunal d écid e, quant h l’indemnité du caution
n em ent, qu’il n’y a pas lieu à statuer sur une demande
qui n’a pas d’objet prescrit, sur un cautionnement qui ne
paroît point, et qui est fait au profit d’une personne qu’on
ne désigne pas.
L a condamnation des sommes ducs à B latin , Caze et
la b r e , est motivée sur mon consentement; celle de la
lettre de change deLahousse, sur la circonstance que Boyer
est saisi du titre, ce qui forme en sa faveur une présomp
tion de payement,
V 2
J
�(a 8 )
.
A l’égard des intérêts que Boyer avoit demandés depuis
l ’époque de ses prétendus payemens , comme ces créances
ne produisoient pas d’intérêt de leur nature, ni par la
con ven tion , ils ne pouvoient être adjugés que du jour de
la demande.
B o y e r, présent à la prononciation de ce jugem ent,
croit avoir fait un assez grand p ro fit; il p art, criant
à tous ceux qu’il rencontre, qu’il est fort content , qu’il
a gagné son procès.
Cependant il fait signifier ce jugement a mon avou é,
le 5 iloréal an 9 , sans approbation préjudiciable , pro
testant au contraire de se pourvoir par la voie de la
requête civile ou de la cassation.
Bientôt il réitère cette signification à mon dom icile,
sous les mêmes réserves; mais il me somme en même
temps d’exécuter ce jugem ent, quant aux condamnations
qu’il prononce (1).
Je m’empresse de lui faire urt acte d’oifre par le minis
tère de deux notaires, le 12 floréal an 9 , d’une somme
de 4,655 francs 10 centimes, montant des condamnations
en principal cl intérêts; mais je lui fais en même temps
sommation de me remettre les titres, notes et procédures
dont il a fait usage an procès, notamment la lettre de
(1) Ces réserves et protestations de Boyer me rappellent I’anecdote d’un vieux praticien, qui voyageant dans les ténèbres, fut
assailli par un orage violent ; les éclairs lui servoient quelquefois
à se reconnoîlre dans l’obscurité. II s’écrioit üt chacun : J e t’ ac
cepte en tant que tu me sers, ne voulant faire aucune approbation
préjudiciable.
Comme lu i, Boyer ne marche jamais sans protestations.
�/
(
29
A
)
change souscrite par feu mon frère au profit de Lahousse,
et la note dont il s’étoit servi à l’audience, sur laquelle
étoient insci’its les noms de L escurier, 1abhe yliibier
et B ugheon, comme créanciers de mon frère.
Je me réserve, par le même acte , de me pourvoir
ainsi et contre qui il appartiendrait, pour la répétition
du montant de la lettre de change souscrite au profit
du citoyen Lahousse.
Boyer ne laisse pas échapper l ’argent; il me restitue
même l’obligation de 12,000 fr. (c e lle fa ite pour' cause
fa u s s e ) \ mais il refuse de me rendre les autres pièces,
surtout, d it-il, la lettre de change et la n o te, sous le
vain prétexte qu’ il entend se pourvoir contre le juge
ment du tribunal d’a p p e l, et que ces pièces lui étoient
particulièrement nécessaires.
11 me parut d’autant plus extraordinaire , que B o y e r,
qui m’avoit fait, sommation d’exécuter le jugem ent, qui
rccevoit le montant des condamnations qu’il prononce en
sa laveur, voulût se retenir des pièces ou des effets dont
le montant étoit acquitté.
J e pris le parti de me plaindre de ce procédé , comme
d’une rébellion à justice; et dès qu’il s’agissoit de l’exé
cution du jugem ent, que ma demande en remise de ces
titres en étoit une suite nécessaire, je préseulai une re
quête au tribunal d’appel ; je demandai que Boyer fût
condamné à me remettre les titres, ou à restituer les sommes
que je lui avois comptées.
J ’obtins, le 7 prairial an 9 , un premier jugement qui
nie permet de l’assigner à jour fixe sur celle demande.
L e i 5 du même m ois, jour capté, il se laissa condamner
�( 3° )
par défaut ; il a formé opposition à cc jugement dans le
d é la i, et a fait paraître en même temps son m ém oire, ce
chef-d’œuvre d’iniquité , également injurieux pour m o i,
mes arbitres, mes conseils et les juges ; il m ’apprend, par
ce lib e lle , qu’il s’est pourvu en cassation contre le juge
ment du 27 germinal an 9.
T elle est l’analyse exacte de la cause : j’ai peut-etre été
m inutieux dans les détails ; mais je ne voulois rien omettre
d’important. Il me reste encore à répondre à quelques
faits consignés dans son mémoire ; je laisserai ensuite ;V
mon' conseil le soin de discuter les moyens qu’il propose
pour obtenir la cassation du jugement dont il se plaint.
Celui dont Boyer a emprunté la p lu m e, le fait bon et
com patissant ! R isu m teneatis. B o y er com patissant! et
les larmes du pauvre arrosent les champs que Boyer a
acquis ou usurpés pendant quarante années de vertus !
Il ne s’agit que de consulter les habitans de la commune
de Solignac , que Boyer habite dans ses loisirs ; et le déli
bératoire du conseil, du 9 frimaire an 9 , qui autorise le
maire à poursuivre Boyer en désistement des rutoirs et
communaux dont il s’étoit emparé pour agrandir son pré
de Pasgrand. ’ ~
Mais pour peindre ma détresse, et rappeler les ser
vices signalés qu'il in’a rendu s, Boyer a mal ch o isi, en
prenant pour exemple la vente d’une de mes maisons.
Q u’on examine celte ven te, du 16 janvier 1786 (x); elle
contient deux délégations seulement. Par l’une d’elles,
(1) Je n’avoia pas encore été présenté au citoyen Boyer £1 celte
¿poejue.
�(3 0
l'acquéreur est chargé d’acquitter une rente de 300 fr. au
principal de 6,000 francs ; et certes, un homme obéré ne
va pas choisir le remboursement d’une créance dont le
principal n’est pas exigible ; il paye les plus pressés , sur
tout s’il y en avoit eu qui eussent obtenu des contraintes
par corps.
Un menteur devroit surtout avoir de la mémoire , et
ne pas s’exposer à recevoir un démenti aussi form el.,.
Boyer veut encore que je lui aie obligation du mariage
de .mes filles. J ’en ai trois , toutes établies; elles ont porté
a leurs mai'is une fortune au moins égale, et j’estime assez
mes gendres , pour être persuadé qu’ils s’honorent de
m ’appartenir.
Boyer a été ma caution pour le citoyen Bonnet (i),,
(1) Boyer dénature les fa its, relativement au citoyen Bonnet.
C e n ’est pas lu i , comme il le prétend , qui a seul souscrit le billet
d ’honneur : nous l’avons souscrit conjointement et cumulativement
le 9 août 1790. J’ai heureusement conservé le b illet; il est de la
somme de 27,300 fr. J’en ai acquitté le m ontant, partie en im
meubles , partie en numéraire. J’ai donné en im m eubles, au mois
de juillet 1792, douze journaux de terre, situés dans les appar
tenances de C lerm o n t, dans le meilleur canton, près les jardins
des Salles ; p lu s, une grange située à Clerm ont : les douze jour
naux sont en valeur de plus de 18,000 fr. J’avois refusé de la
grange 5,000 fr. J’ai compté en o u tre , en numéraire , la somme
de 8,400 fra n c s, intérêts com pris, à la demoiselle B om part, à
qui le citoyen Bonnet avoit cédé la lettre de change. Ces payemens
«nt été faits les 21 messidor, 21 et a5 thermidor an G: j’en rap
porte les acquits de la demoiselle Bompart.
�w><.
( 32 )
et quelques autres créanciers dont il Fciit rém unération.
M ais B oyer a-t-il été dupe de ses cautionnemens ? Q u’il
le dise , s’il l’ose. M ais de ce que Boyer a été ma caution,
tous ceux qui le connoissent en tireront la conséquence
que je n’étois pas dans la détresse, et que Boyer n’aventuroit rien lorsqu’il se prêtoit à ces arrangemens : je
pourrois en dire davantage ; mais je ne veux pas revenir
sur des choses consommées, et que j’ai bien payées.
Boyer veut se justifier de la dénonciation qu’il a faite
contre m o i, comme ém igré ; il dit que sa dénonciation
a été précédée de huit autres. Je n’ai pas vérifié ce fait;
mais ce que je sais bien, c’est que tous ceux qui l’ont fait,
n’ont agi que par les conseils et par les ordres de Boyer;
jusqu’à ma femme et mes filles qu’il pcrsécutoit pour
pallier ses torts : il les conduisit à R io m , chez le citoyen
G ren ier, jurisconsulte éclairé.
Mais ce jurisconsulte étoit alors procureur-syndic du
district de R io m ; et m algré sa m oralité bien connue, il
se seroit bien gardé ( surtout devant Boyer ) d’arrêter
une démarche qu’il désapprouvoit. Boyer n’a pu cepen
dant déterm iner ma femme et mes enfans à signer la dé
claration qu’il leur avoit rédigée.
E s t-il bien étonnant, d’après ces services sign alés,
que mon retour n’ait pas fait disparoître les bruits de
mon ém igration? Il n’en falloit pas tant en 179 3 ; et
j’aurois eu moins d'inquiétude, si j’avois été daiis cet état
de détresse que Boyer peint d’une manière si touchante.
O n sait qu’il falloit être propriétaire pour être inscrit
sur la liste fatale.
B oyer,
I
�( 33 )
Boyer! en citant ma sœ ur, femme Blot ( i ) , vous parlez
d’une femme respectable; elle désavoue tous les faits sur
lesquels vous n’avez pas voulu qu’elle fût interpellée.
A ccoutum ée à vivre dans la retraite, loin du tumulte de
la société, elle fit avec effort le voyage de Riom , pour
se rendre à l’audience et vous donner un démenti'; elle
assista à une séance de trois heures : vous vous gardâtes
bien de rien dire devant elle; vous craignîtes d’être con
fondu : elle ne quitta qu’après la plaidoirie ; et vous osez
dire que je la fis sortir à dessein ! Si je pouvois être sen
sible à toutes vos calomnies, si elles pouvoient aller jus*
qu’à m o i, cette imposture m ’affeeteroit plus vivem ent.
Lorsque vous dites que j’ai connu f’obligatiôn consentie
par mon frère , avant que vous fussiez son créancier ;
que j’étois chez vous lorsque vous avez souscrit la lettre
de change au profit de Bugheon ; je vous répondrai en-
( i) Boyer prétendit en plaidant, que les sommes empruntées
de Buglieon avoient été versées dans le tablier de ma sœ u r, pour
qu’elle les fit passer à D esm oulins, mon frère : ce fait étoit de la
plus insigne fausseté. M a sœur chargea expressémeut mon défen
seur de le désavouer à l’audience ; elle y vint elle-même pour lui
donner un dém enti, et lui apprendre qu’il confondoit les épo
ques. L a somme qui avoit été versée ès mains de ma sœ ur, étoit
celle de 3,900 fr. prêtée par la dame Sauzade, que j ’ai acquittée,
Boyer ne l’ayant pas fait.
L a dame Sauzade s’en est expliquée elle-même de cette manière
au citoyen B o ye r, lorsqu’il a voulu lui arracher une déclaration
contraire. L a dame Sauzade répondit à Boyer , que la somme
prêtée par le citoyen Buglieon son frè re , n ’avoit pas été compte«
à Desmoulins : elle est toujours prête à attester ce que j ’avance.
E
�e 34 )
core par le m entiris impudentissimè du bon père V a lérien. J ’étois alors brouillé avec mon frère; nous avions
absolument cessé de nous voir. Il est vrai que vous tirâtes
sur m oi la lettre de ch ange, que j’en passai l’ordre à
Bugheon; mais je ne le iis que pour vous servir de dou
blure, suivant votre expression ; et j’atteste sur mon hon
n eu r, qu’il ne fut point question de mon frère :.vou s
saviez trop bien que ¡dans.ee moment je ne me serois pas
engagé pour lui. ¡. .
Un des grands argumens de B o y e r, pour prouver que
l’emprunt fait à Lçscuriçr n’étoit pas pour son com pte,
est de dire qu’il a pris de B aptiste, n otaire, une quit
tance du coût de cette obligation.
Il existoit, ajoute-t-il, un concordat entre les notaires
et les procureurs, d’après lequel ils ne devoient pas se
prendre d’argent entre eux. Cela peut être; mais celle
quittance est pour le droit de contrôle : o r, il n’y avoit
pas de concordat entre la régie et les procureurs ; e t ,
lorsque celui qui contracte paye le contrôle, il est d’u
sage d’en retirer un reçu, pour que le notaire ne puisse
pas le répéter. Cette précaution no devoit pas échapper
i\ Boyer.
M a is, dit-il encore, vous avez au moins connu la
cession que m’avoit faite votre frère , puisqu’elle est
comprise clans un acte de dépôt que nous avons fait
ensemble chez C h evalier, notaire, le prem ier com plé
mentaire an 4.
Sans doute je l’ai connue à celte époque , puisque c’est
précisément sur celle pièce que vous avez renouvelé vos
rapports avec m oi, et. nous avons été divisés, lorsque je
I
�( 35 )
^
en ai ' demandé le compte. V ou s prétendiez en
avoir fourni le m ontant, à la vérité en assignats; vous
m ’oifriez de me faire raison du bénéfice, à condition que
je vous indemniserois à mon tour du remboursement
que je vous avois fait : c’étoit là le piège que vous me
tendiez; e t, lorsqu’après plusieurs années de discussion j
j’ai voulu éclaircir ce fait, il s’est trouvé que vous n’a
viez rien payé, que j’avois été votre dupe; vous avez
cru avoir un titre contre m o i, et vous m ’avez fait
assigner.
L ’état dont j’ai fait usnge à l’audience, est celui que
vous aviez donné aux arbitres : j’en argumentai pour
prouver votre mauvaise foi ; et les arbitres présens
vous apprirent que j’avois toujours refuse d’allouer de
prétendues créances dont je ne voyois pas l’emploi.
Boyer adresse son mémoire au tribunal de cassation :
en changeant le lieu de la scène, il croit pouvoir répéter
impunément ce qu’il a déjà fait plaider; il a même le
courage de faire imprimer une lettre qui le couvrit de
confusion; c’est le billet sans date, où j’ai prostitué,
par foiblesse, le titre d’ami.
Je dus aj-îprendre au pu blic, lorsqu’il en fit parade,
les motifs qui l’avoient dicté. C ’est après la journée du
18 fructidor. J ’appartenois à une classe alors proscrite;
j’avois été dénoncé comme émigré ; et quoique j’eusse
obtenu ma radiation, Boyer avoil fait des menaces; il
disoit à tous ceux avec lesquels j’ai des relations, qu'il
vouloit me perdre et qu’il me perdroit.
Ma fam ille, mes amis, étoicnl alarmés; on m’engagei
à avoir des ménagemens pour un homme dangereux : je
E 2
tous
�C 36 J
code. Boyer étoit alors juge à Riom ; il faisoit des voyages
Iréquens de cette ville à celle de Clerm ont ; il cherchoit
surtout à épargner les voitures; j’envoyois la mienne à
R io m , je lui écrivis pour l’engager à en profiter, ce qu’il
accepta Lien vite : il trouva le billet flatteur; il ne s’attendoit pas à une pareille prévenance; il a gardé la lettre
pour prouver qu’il ne me demandoit rien que de juste •
voilà sans doute un singulier moyen.
Dois-je relever ces expressions grossières de v o l , de
calom nies, qu’il répète jusqu’à la satiété ? 11 me semble
entendre ce voleur qui crioit bien haut de peur qu’on
l ’accusât, et qui n’en fut pas moins découvert.
Il est encore rid icu le, lorsqu’il prétend que j’écarlois
l ’afllucnce des honnêtes gens qui accouroicnt chez lui ;
semblable à ce charlatan de la foire, qui s’enroue en criant
de laisser passer la foule , et qui n’a jamais personne.
Il me reproche d’avoir fait des démarches pour le faire
destituer de ses fonctions de juge : ai-je besoin de lui rap
peler que sa place est à v ie , à moins que le gouvernem ent
n’acceptât sa démission ?
Il a la jactance de dire qu’il n’a jamais rien sollicité ;
il a sans doute oublié les lettres qu’il o b tin t, par importu n ité, de quelques-uns de ses collègues, lorsqu’il fut dest tué après le 9 thermidor. Mais Boyer a si sou vent manqué
de m émoire dans toute cette affaire, qu’il ne faut plus
s’étonner de rien , pas même de ce qu’il insulte les arbi
tres, quoiqu’il eut choisi le citoyen Louyrclte. Mais tous
deux sont au-dessus de ses injures; tous deux jouissent de
l’estime p u b liqu e, et tous les deux connoissent trop bien
B o y er, pour être affectés de ses calomnies ou de sa colère.
�( 37
) _
Boyer se permet encore de critiquer ma conduite ; et
rêvant toujours à son affaire, il prétend que j’ai donné
une fête à ma maison de campagne pour célébrer mon
tx-iomplie.
Je suis assez heureux pour avoir des amis ; fa i le plaisir
de les réunir quelquefois, et dans la belle saison je les con
duis à ma maison de campagne, située à une demi-lieue de
Clermont. Sur la fin de prairial, plus de deux mois après
le jugem ent, je.donnai à d în er, à Beaum ont, à plusieurs
citoyens , pai’mi lesquels se trouvoient les premiers fonc
tionnaires du département. L a réunion fut joyeuse ; nous
fîmes des vœ ux pour le gouvernem ent, pour le premier
magistrat de la rép u b liq u e, et Boyer n’est pas un être
assez important pour qu’on daigne s’en occuper, surtout
dans un instant de plaisir et de joie : son nom rappelleroit
des choses que précisément on veut oublier.
Je le livre donc à l ’opinion p u b liqu e, à lui-m êm e , à
ses remords : j’en ai déjà trop parlé. C ’est à mon conseil
qu’il appartient de discuter les moyens de cassation qui
terminent sou volum ineux et insignifiant mémoire.
S ig n é, C H A M P F L O U R .
�CONSULTATION.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examine la
procédure et le jugement rendu contradictoirem ent,
entre les citoyens Champflour et B o y e r , le 27 germinal
an 9 ; le m émoire en cassation du citoyen B o y e r , et
celui en réponse du citoyen Cham pflour ;
E s t i m e que le jugement du tribunal d’appel est
régulier dans la forme , et qu’au fond il est favorable
au citoyen B o yer, qui ne devoit pas s’attendre à obtenir
la condamnation de la créance du citoyen Lahousse.
L e tribunal de cassation ne pouvant connoître du fond
du p ro cès, on se dispensera d’entrer dans aucun détail
sur les difïérens chefs de créances réclamées par le citoyen
B oyer ; on s’occupera uniquement des moyens qu’il fait
valoir pour obtenir la cassation du jugement ; et ces
moyens sont si extraordinaires, si foibles, qu’on scroit
tenté de croire, comme le dit le citoyen C liam pflour,
que le pourvoi en cassation n’a été qu’un prétexte pour
distribuer un m émoire contre lui.
En effet, il s’élève contre le pourvoi en cassation du
citoyen B o y er, une fin de non recevoir invincible. Il a
approuvé le jugem ent, en faisant sommation de l'exé
cuter, en recevant le montant des condamnations qu’il
prononce , et scs réserves doivent être rangées parmi
ces protestations banales, si souvent employées par des
praticiens renforcés, qui 11e manquent jamais d’accepter,
sans se fa ir e aucun préjudice.
1.1 est vrai que le pourvoi en cassation n’arrête prs
�(
39
)
.
l'exécution d’ un jugement en dernier ressort. M a is, dans
quel cas les protestations ou réserves peuvent-elles être
nécessaires ou utiles? Ce n’est jamais que lorsque celui
q u i a éprouvé des condamnations, est poursuivi pour le
payement; alors, s’il croit avoir ép rouvé une injustice;
s’il est dans l’intention de se p o u rv o ir, il ne doit payer
que comme contraint; il est tenu de protester, de mani
fester son intention, sans quoi il y auroit de sa part un
acquiescemen t préjudiciable.
M ais , lorsque celui qui a obtenu des condamnations,
en poursuit l’exécution , veut profiter du bénéfice du
jugement qui emporte profit , quoiqu’il ait succombé
sur plusieurs chefs ; d;ins ce cas , il n’est plus recevable
à attaquer ce même jugement : tout est consommé par
l ’acceptation.
O r , le citoyen B oyer, en faisant signifier le jugement
du 27 germinal an 9 , au domicile du citoyen Cham pflour,
lui a fait sommation de l’exécuter, et commandement de
payer les sommes dont la condamnation étoit prononcée
en sa faveur. L e citoyen Cham pflour lui en a fait des
offres à son domicile ; le citoyen Boyer a reçu et donné
quittance; tout est donc term iné, et les protestations ou
réserves deviennent insignifiantes.
S’il en étoit autrem ent, il n’y auroit aucune récipro
cité : le citoyen Cham pflour scroit obligé de payer des
sommes auxquelles il a été condam né, sans pouvoir se
soustraire ni différer l’exécution du jugem ent, et don
nerait à son adversaire des armes contre lu i, pour faire
casser un jugement dans les chefs où l’adversaire a suc
combé. Il faudrait syncoper le jugem ent, le casser dans
�une p a rtie , et le laisser subsister dans l’autre : ce seroit
une monstruosité dans l’ordre judiciaire. Si le citoyen
Boyer avoit l’intention de se pourvoir en cassation, il
étoit indispensable de suspendre absolument l’exécution
du jugem ent, de n’en tirer aucun profit, pour que dans
le cas où le jugement auroit été cassé, les parties eussent
été remises au même état qu’elles étoient avant le juge
m ent, et pussent plaider de nouveau sur tous les chefs
de demandes.
Cela devient impossible aujourd’h u i , dans l’état où
en sont les parties : les choses ne sont plus entières, par
le fait du citoyen Boyer ; il y a donc un obstacle insur
montable à sa demande en cassation.
• Mais quels sont donc les moyens que propose le cit.
B o y e r, pour faire annuller un jugement solennel qui
est le résultat du plus m ûr examen ?
Il oppose, i° , que la cause a été plaidée pendant deux
audiences; que le 23 germinal il fut ordonné un délibéré
au rapport du citoyen C a th o l, à qui les pièces furent
remises sur le champ. Il ajoute que ce délibéré ne fut
prononcé que le 2 7, sans rapport préalable ni plaidoirie
de la part des défenseurs; ce qui , suivant lu i, est une
contravention aux articles III et X de la loi du 3 bru
maire an 2 , q u i, dans ce ca s, exige un rapport à l’au
dience publiquement.
A v an t de proposer un pareil m oyen, le citoyen Boyer
auroit dû lire plus attentivement le jugement qu’il allaq u c,
et qu’ il a lui-m êm e fait signifier. Il y auroit vu que les
défenseurs ont été entendus, le jour que le jugement a
été prononcé. Boyer devroil surtout §e rappeler, puisqu’il
éLoit
�C41 )
¿toit présent à l’audience-; qu’il assistait son avoué pour
prendre ses conclusions, lorsque le jugement fut prononcé.
Ce fa it, au surplus, est constaté par le jugement q u i ,
sans d o u te, mérite plus de confiance que l’assertion de
Boyer. 11 porte expressément ces mots : « L e tribunal,
« après avoir entendu les avoués et défenseurs des parties,
« pendant deux précédentes audiences, et à Vaudience
« de cejourd’h u i , après en avoir d é lib é ré , etc ». V oilà
qui répond , sans d o u te , à l’objection d’une manière
pérem ptoii’e.
D ’ailleurs , un délibéré n’oblige point à un rapport.
Jôusse, sur l’article H t du titre V I de l’ordonnance de
1667 , explique ce que c’est qu’un délibéré. « Il a lieu ,
« d it-il, lorsqu’après la plaidoirie des avocats ou des p ro« cureurs, l’affaire paroît de trop longue discussion pour
« pouvoir être jugée à l’audience ; auquel ca s, ou pour
« autres considérations, les juges font remettre les pièces
« sur le bureau, pour en être délibéré sur le registre,
« sans mémoires ni-écritures. L e greffier les reçoit et les
« présente aux juges, et l’un d’eux s’en charge : on en
« délibère ensuite , si le temps le perm et, à l’issue de
« l ’audience , ou du moins le lendemain ou autre jour le
c< plus prochain , et le jugement sc prononce à l’audience
« par celui qui a présidé au rapport du délibéré. »
Ces sortes de délibérés sont autorisés par l’article 111
du titre V I , et par l’article X du titre X V I I , sans qu’il
soit besoin d’aucun rap port, écriture ni mémoire. A in si,
quand il seroit v r a i, contre la teneur du jugem ent, qu’il
a été ordonné un délibéré ès mains de l’un des juges,
F
�»fe
.
.
^42 )
ce seroit la stricte exécution de l ’ordonnance, loin d’être
nne infraction à la loi.
Il est extraordinaire qu’on veuille citer aujourd’hui la
loi du 3 brumaire , d’après l’arrêté des consuls , qui or
donne l ’exécution de l ’oi’donnance de 1667. Cette ordon
nance est un code de procédure , et la loi du 3 brumaire
an 2 est négative de toute pi'océdure ; l’une ne peut donc
pas exister avec l’autre : l’exécution de l’ordonnance
abroge donc nécessairement la loi du 3 b ru m aire, si
funeste dans ses effets.
Il est cependant difficile d’exp liq u er, même en sup
posant que cette loi fût toujours en vigueur , quel argu
ment le citoyen Boy.er pourroit tirer des art. III et X
qu’il invoque dans son mémoire. L e premier n’a aucune
pspèce de rapport à la cause ; il p o r te , « que si les parties
« com paroissent, il ne sera notifié au procès que l’exploit
a de demande et le jugement définitif ; si l’une d’elles ne
« comparoît poin t, il lui sera notifié de plus le jugement
« préparatoire : la notification de tout autre acte de pro« ccdure en jugement n’entrera point dans la taxe des
« frais. »
O11 11e voit pas ce que cet article peut avoir de commun
avec un délibéré. L ’arlicle X n’est pas plus déterminant:
« Les juges des tribun aux, porte cet article, p ou rron t,
« comme par le passé, se retirer dans une salle voisine
« pour l’examen des pièces; mais immédiatement après
« cet examen , ils rentreront à l’audience pour y déli
ée bérer en p u b lic, y opiner à haute v o i x , et prononcer
« Je jugement. Ils pourront en core, si l’objet paroît
« l’e x ig e r , nommer un rapporteur, qui fera son rapport
I
�( 43)
« le jour indiqué dans le jugement de nom ination, lequel
k rapport devra être fait, pour le plus tard , dans le délai
« d’un mois. »
Sans doute le citoyen Boyer ne prétendra pas que le
'jugem ent est n u l, parce que les juges n’ont pas opiné
à haute voix. Ce m ode, qui a entraîné tant de dénon
ciations, n’est plus usité. L ’objet de la caiise n’exigeoit
'pas un rapporteur; il n’y en a point eu de nommé : le
délibéré n’a eu lieu que pour examiner avec plus de soin
les différons chefs de demandes, et le citoyen Boyer doit
'se féliciter de cette précaution; elle lui a valu lu con
damnation du billet de Lahousse, qu’il n’auroit pas ob
tenue si la cause avoit été jugée de suite et sans autre
examen.
Ainsi , ce premier moyen de cassation est absurde et
inadm issible, d’après la teneur du jugem ent, la dispo
sition de l’ordonnance, et même la loi du 3 brumaire.
L e citoyen Boyer oppose, en second l i eu, que le ju
gement viole la disposition de l’article 1 du titre III do
l’ordonnance de 1667, pour avoir compensé les dépens,
hors le coût du jugement auquel le ciloyen Champflour
est condamné ; il se fonde sur ce que le citoyen Cham p
flour est condamné à payer la somme de 4,200 francs,
dont il 11’avoit point fait d é lire s; d'où il lire la consé
quence que tous les dépens éloient à la charge du citoyen
■•Champflour, réputé débiteur.
L e citoyen Boyer n’est pas heureux dans ses applicaeations : il est vrai que lïarticle qu'il invoque veut que
toute partie q u i s u c c o m b e soit condamnée aux dépens
F a
�■
•
-
(44)
indéfinim ent, sans que pour quelque cause que ce soit,
elle en puisse être déchargée.
Mais le citoyen Ghampflour a -t-il succombe? L e citoyen
B oyer a form é contre lui huit chefs de demandes princi
pales; ses prétentions se portoient à une som m ede23,3i7f.
i o cent. Il n’a réussi que sur deux ch efs, et il ne lui a été
adjugé qu’une somme de 4,200 fr. O r , il est de règle et de
principe, que si le demandeur perd plus de chefs qu’il n’en
g a g n e , surtout lorsque ces chefs n’ont pas occasionné plus
de dépens que les autres, il doit au contraire supporter une
portion des dépens. C ’est ce qu’enseigne Jousse, sur l’art,
de l’ordonnance invoqué par le citoyen Boyei'. V o ici com
ment il s’exp liq u e, nomb. 5. « Lorsqu’il y a plusieurs chefs
« de demandes portés par l ’assignation, et que le deman« deur obtient sur les uns et perd sur les autres, alors il
« faut ou les com penser, si le demandeur perd autant de
« chefs qu’il en gagn e, et que ces chefs n’aient pas occa« sionné plus de dépens que les autres , ou condamner la
« partie qui perd le plus de chefs, en une certaine portion
« de dépens; ce qui doit pareillement avoir lieu sur l’appel,
« lorsqu’il y a plusieurs chefs de condamnation portés par
« la sentence dont une des parties s’est rendue appelante,
« sur partie desquels l’appelant vient à obtenir, et à perdre
u sur les autres ».
Dans l’espèce particulière, le citoyen Cham pflour a
fait infirmer le jugement sur tous les chefs principaux,
et n’a succombé que sur deux objets, dont le prem ier
n’étoit pas contesté. Tous les chefs de demande étoieut
contenus dans le même exp loit, et ont bien évidemment
occasionne autant de frais les uns que les autres. L e
�(45)
citoyen Cham pflour auroit donc pu rigoureusement
exiger que le citoyen Boyer fût condamné en la majeure
partie des dépens; cependant ils ont été com pensés,
et le coût du jugem ent a été entièrement à la charge
du citoyen Champflour. Comment donc le citoyen Boyer
a-t-il imaginé de s’en p lain d re, et de se faire un moyen
de cassation de ce qu’il a été trop favorablement traité.
L e citoyen Boyer ne s’est pas entendu lui-même dans
son troisième moyen. Sans doute on doit exécuter lit
téralement les conventions des parties, maintenir les
obligations qu’elles ont volontairem ent contractées.
M ais lorsque les conventions ou les obligations sont
purem ent conditionnelles, la première règle est que les
conditions soient pleinement accom plies, avant que la
convention soit exécutée : la condition est la base et
le fondement de la convention ; l’une ne peut subsister
qu’avec l’autre. Il n’est sans doute pas besoin de s’appe
santir sur uue vérité aussi certaine, enseignée par tous
les auteurs; et ce principe ne sauroit être conlroverséi
O r , quelles sont donc les conventions des parties? E n
quoi consistoient les obligations contractées par le citoyen
Cham pflour? Il promet d’indemniser Boyer du payement
qu’il lui a fait en assignats, à condition qu’il seroit fait
Un compte entre les parties, et que Boyer l’indeinniseroit
h son tour des sommes par lui payées en assignats pour
le compte du citoyen Champflour-Desmoulins. Ce n’éloit
ici qu’un contrat réciproque ; le citoyen Cham pflour
n’éloit obligé qu’autant que le citoyen Boyer le seroit
lui-même. Boyer révoque le compromis passé entre les
parties; Boyer n’a fuit aucun payement pour le compte
�( 4 <5 )
du citoyen C h am pflour-D esm oulins, o u , ce qui est la
même chose, ceux qu’il prétend avoir faits ne lui sont
point alloués. Il li’y à donc plus de consentement, dès
que Boycr révoque le Compromis •, il n’y a donc plus do
récip rocité, dès que Boycr n’a fait aucun payement : il
ne peut plus offrir e n compensation aucune indem nité,
et cependant la compensation avoit été la cause prem ière
et essentielle du contrat ; elle en étoit la condition prin
cipale, et tellement liée à la convention qui avoit eu
lieu entre les parties, que sans l’accomplissement de la
co n d itio n , la convention est demeurée imparfaite. C ’est
ce qu’a décidé le tribunal ; c’est ce q u ia été parfaitement
développé dans les m otifs; et si Boyer prétend que daus
un contrat synallagmatique et récip ro q u e, le citoyen
Cham pflour a pu s’obliger sans qu’il s’obligeât lui-m êm e;
qu’il pouvoit se jouer de scs engagem ens, tandis que le
citoyen Cham pflour étoit obligé d’exécuter les siens ,
cette prétention paraîtra nouvelle ; mais au moins ne
la regardera-t-on que comme un moyen d’appel, et non
comme un moyen de cassation , parce qu’il n’y a ni v io
lation de fo rm e , ni infraction à la loi dans la décision
du tribunal.
Les lois des 12 frim aire, 5 therm idor an 4, i 5 fruc
tidor an 5 , sont également mal appliquées.
1
P rem ièrem ent, le remboursement avoit eu lieu long
temps avant le discrédit total des assignats, qui a provo
qué la loi du 12 frim aire : Boyer avoit reçu volontaire
m ent, et ralenti n o n jit injuria.
Les lois des 9 therm idor an 4 et i 5 fructidor an 5 ,
nç se sont occupées que des obligations pures et simples,
I
�et non des contrats conditionnels; il étoit donc inutile
de grossir un m ém oire d’une foule de citations qui n’ont
aucune analogie avec la cause, et ne doivent pas occuper
le tribunal de cassation, qui ne peut exam iner le fond du
pi’ocès.
L e quatrièm e m oyen du cit. Boyer n’est encore qu’un
g rief d’appel. Il se plaint de ce qu’on ne lui a pas adjugé
les lettres de change de Buglieon et Lescurier ; il va jusqu’il
dire qu’il auroit pu se faire payer l’obligation de i2 ,co o f.
quoiqu’il n’en eût pas fourni le montant ; il revient sur
la fameuse note qu’il produisit au tribunal, et qui le cou
vrit de confusion. Il prétend quç cette n o te , qui émane
du citoyen Cham pflour., prouve que D ësm oulins, son
frère, a touclié les deux emprunts. Il convient de s’être
obligé à rapporter les quittances justificatives de l ’emploi
de 12,000 francs; mais il prétend avoir p r o u v é , par ce
fameux écrit, c’est-à-dire, la note qui émane du citoyen
C ham pflour, que D esm oulins, son fr è r e , avoit touché
les deux emprunts, et que lui Boyer a rem pli le montant
de l’obligation que Desmoulins lui avoit consentie. Il se
plaint de ce que cette obligation n’a pas été maintenue
par le jugem ent; la confession de celui qui est muni d’un
pai'«il titre , ajoute-t-il, ne peut être divisée en matière
civile.
T o u t est erreur et confusion dans ce g rie f, et feroit
craindre qu’il n’y eût de l’égarement chez le citoyen Boyer.
11 se plaint de ce que cette obligation de 12,000 francs
n’a pas été maintenue, et il s’est bien gardé d’en demander
l’exécution. Q u’on lise son exploit introductif. de l’ins
tance, et tout ce qui a été écrit au procès; on verra que
�(48)
loin de conclure au maintien de celte obligation, il a
toujours déclaré qu’il n’en avoit pas fourni le montant.
C ’est d’après ses déclarations réitérées, que le citoyen
Cham pflour a.demandé la remise de cet acte, et le juge
ment l?a ordonné en m otivan t, sur les aveux de B o yer,
qu& robligatipn étoit consentie p o u r cause f a u s s e , ou
sans cause préexistante.
«
»
__
A l ’égard des lettres de change souscrites par B oyer,
au profit des citoyens Bugheon et L escu rier, rien n’établissoit que l’em prunt eût tourné au profit du citoyen
Cliam pflour-Desm oulins; il n’en a pas reçu le m ontant;
il ne devoit pas même le to u ch er, d’après les conven
tions , puisque ces sommes devoient être employées au
payement des dettes du citoyen Cham pflour-Desm oulins;
et B oyer n’a payé aucune de ces dettes.
P o u r l’écrit prétendu émané du citoyen Cham pflour,
ce dernier en a suffisamment expliqué l’origine et les
causes dans son mémoire. L a forme de cet é c r it, la
créance de îa b b é A u b ie r , intercalée entre celles de Les
curier et de B u gh eo n , et dont le citoyen Boyer n’a pas
demandé le payem ent, dénotent assez le cas qu’on doit
faire d’un pareil écrit, que le citoyen Boyer auroit dû
précédemm ent supprim er; mais le jugement ne pouvoit
ordonner le maintien de l’obligation de 12,000 francs,
puisque Boyer n’en avoit pas form é la demande : le tri
bunal ne pouvoit condamner le citoyen Cham pflour au
payement d’une dette que tout prouve être personnelle
au citoyen B o y er; et enfin, quand le tribunal auroit mal
jugé en celte p a rtie , ce scroit un grief d’ap p el, et non
un moyen de cassation.
Dans
?
�(
49)
Dans son cinquièm e et dernier m oyen , le citoyen Boyer
rappelle une loi du 3 octobre 1789, qui permet à Favenir
de prêter de l’argent à termes fixes, avec stipulation
d’in térêts, suivant le taux déterminé par la loi , sans
entendre rien innover aux usages du commerce.
L e citoyen Boyer argumente de cette lo i, pour prouver
que le jugement dont il se plaint auroit dû lui adjuger
les intérêts de la somme de 4,200 francs qui lui a été
al l ouée, à com pter du payement qu’il dit en avoir fait.
L e jugement ne lui adjuge cet intérêt qu’à com pter de
la dem ande; d on c, suivant le citoyen B o y e r, il y a in
fraction à la loi du 3 octobre 1789, par conséquent ou
verture à cassation.
Etrange conséquence ! Suivant les anciens principes,
l ’argent étoit stérile de sa nature, et ne pouvoit produire
d’in térêt, lorsqu’il s’agissoit de p rêt, qu’autant que le prin
cipal étoit aliéné entre les mains du d ébiteu r, ou qu’il
existoit une demande judiciaire en payement.
L a loi citée n’a pas dérogé à ce p rin cip e; elle a seu
lement laissé la faculté, pour l ’avenir, de stipuler l'intérêt
au taux o rd in aire , par l’obligation ou le b ille t; c’est-àdire , que lorsque cet intérêt est stipulé par l’écrit émané
du débiteur, les tribunaux doivent l'adjuger , conform é
ment à la convention ; mais s’il n’existe aucune stipula
tion , l’intérêt n’est d û , comme autrefois, que du jour
de la demande.
O r , il 11’y a aucune convention de cette nature entre
les parties, puisqu’aucontraire les sommes réclamées par
le citoyen Boyer étoient contestées ; que d’ailleurs le
prétendu prêt étoit antérieur à la lo i; il y a plus, c’est que
G
�<<•
( 5o )
dans les emprunts prétendus faits par B oyer, il est même
convenu qu’on avoit calculé l ’intérêt qui devoit courir
jusqu’au terme fixé pour le payem ent, et que cet intérêt
■avoit été confondu avec le principal. C ’est ainsi que cela
a été pratiqué pour Lescurier ei B u gh eo n , et pour les
soijimes adjugées à B oyer; tel est d ’ailleux’S l’usage abusif
et usuraire qui s’est introduit dans le commerce.
A in si les prétentions du citoyen Boyer ne tendroient
à rien moins qu’à se faire adjuger l ’intérêt des in térêts,
et à faire admettre l ’anatocisme dans les tribunaux.
XI invoque une clause du com prom is, où il est dit que
les citoyens L ouyrette et Costes, arbiti-es, feront aussi le
compte des in térêts, conform ém ent à la loi. M ais cette
clause d’usage et de style, ne se rapporte pas à la loi du 3
octobre 1 789; elle n’obligeoit les arbitres qu’à com pter
les intérêtslégitim em ent d û s , et sans contredit les arbitres,
loin d’adjuger les intérêts de la créance L ah ousse, auroient
au contraire x-ejeté le principal.
M ais le citoyen B oyer a révoqué le com promis ; mais
le citoyen Boyer n’a pas exécuté les engagemens qu’il
avoit contractés; mais le citoyen Boyer ne peut pas argu
menter d’un acte qui n’existe plus, qu’il a lui-m êm e détruit.
L e citoyen B oyer, en terminant son m ém oire, annonce
que ses moyens sont encore m ieux développés dans sa
requête en cassation; comme la requête n’est com m uni
quée qu’autant qu’elle est admise, il y a lieu de penser
que le citoyen Cbam pflour ne sera pas obligé d’y répondre.
D é l i b é r é à R io m , par les anciens jurisconsultes
soussignés, le i 5 vendém iaire an 10.
TOUTTÉE, PAGES.
�( 5i )
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis par les
mêmes motifs. A Clerm ont-Ferrarid, le 30 vendém iaire
an dix.
D A R T I S - M A R C 1L L A C .
qui a lu attentivement la
présente consultation, est parfaitement du même avis et
par les mêmes raisons. D élibéré à R io m , le 3 brum aire
an 10.
Xi
e
c o n s e i l
s o u s s i g n é
,
ANDRAUD.
�VJI,
PIECES
J U S T I F I C A T I V E S .
D É N O N C IA T IO N
DE
PIERRE
B O Y E R ,
Antérieure à l’inscription du cit. Champflour, sur la liste des émigrés.
E x tr a it des registres, contenant lés déclarations des créanciers
sur ém igrés, tenus au ci-devant district de Clerm ont, n°. 74.
A u j o u r d ’ iiu i
IS
!»
vingt-sept octobre mil sept cent quatre-vmgt«douze, a été déclaré par le procureur syndic du district, qu’il lui
avoit été signifié un a cte, en sadite qualité , par le ministère de
W e lla y , huissier, en date de cejourd’h u i, à la requête du citoyen
Pierre B o y e r , avoué au tribunal de district de cette com m une,
par laquelle il lui est déclaré qu’il étoit bien notoire que depuis
bien des années ledit Boyer avoit eu la confiance de Jean-BaptisleCésar Champflour-d’Alagnat ; pour lequel il avoit fait des affaires
im portantes, et s’étoit prêté, à son égard, à tout ce que l’on peut
faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’avoit fait de la ma
nière la plus généreuse, ainsi qu’il étoit connu de la fa m ille , ne
s’attendant â d’autre reconnoissance qu’à celle que se doivent des
ümis ; qu’il l’avoit principalement obligé , en souscrivant diffé
rons emprunts faits par ledit Cham pflour, notamment un billet de
la sommé de 17,000 francs au profit du sieur R och efo rt, et autres
quatre de 85o francs chacun, le 3 mars 1791 , pour lesquels objets
il y avoit un acte d’indemnité : 20. d’un autre de 12,000 fr. prêtés
audit sieur Champilour par le citoyen B ru n e i, pour lequel il y
avoit également indemnité ; qu’il avoit en outre passé l’ordre de dif
férentes lettres de change tirées sur lui par ledit sieur Chamjtflour, dont il étoit dans l’impossibilité de donner le d é tail,
attendu qu’il y en avoit à très-longs term es, notamment celles
�jé r
(. 5 5 )
•
• ^
tics sieurs B o n n e t chirurgien, G uyot de Vic-le-Com le, et autres ; qu’il
lui étoit du à lui-même par billet 7,95o iîancs : p lu s , q u ’il lui
étoit dû par ledit Champjlour-Desmoulins la somme de 12,000
francs par acte devant notaire , lesquels l'ifo o o fr . (1) lui B oyer
avoit empruntés pour les compter audit Champjlour ou ci ses créan
ciers, et fou rn i de ses deniers ce qu i n’avoit pas été emprunte ;
mais que cette somme lu i avoit é té déléguée à prendre sur les
sieurs de V i r j père et f i l s , p a r le même acte du 28 mai 1789 ,
lesquels devoient audit Champjlour la somme de 16,000 francs
portant quinze cents francs d’ intérêts ; qu’il étoit même porteur
du titre obligatoire qui étoit commun avep le sieur Champjlour
a îné et la dame B l o t , auxquels il éloit dû pareille somme.
Q u’il avoil été instruit par bruit public que ledit sieur César
Champilour étoit ém igré; qu’il croyoit devoir prendre les précau
tions qu’exigeoient ses intérêts, et de faire en conséquence la pré
sente déclaration , avec protesta Lion de faire toutes poursuites néces
saires : lequel acte étoit signé dudit sieur Boyer et de l'huissier.
Que M . le procureur-syndic croyoit 11e devoir être tenu ¿1 autre
chose sur cette signification, que de la déposer au secrétariat du
d istrict, pour valoir et servir audit Boyer ce que de raison ;
que les lois, soit du 8 avril, soit du 2 septembre dernier, ne le
rendoient en aucune manière dépositaire ni surveillant des inté
rêts des créanciers d’émigrés ; que l ’article V I de la loi du a
septem bre, prescrivoit au contraire aux créanciers ce qu’ils avoient
à l’a ire, pour être conservés dans leurs d roits, privilèges et hypo
thèques , et être colloques utilement sur les deniers provenais de la
vente des biens des ém igrés; que par conséquent l ’acte du sieur
B oyer, qui, sans être un acte inutile, ne remplissoit pas néanmoins
(1) On voit que Boyer ne comptoit pas sur mon retour , lorsqu’il vouloit
s’approprier les 12,000 Francs énoncés en l’obligation de mon Irèie; quoique
cette obligation fût consentie de son a v e u , pour ca u se fa u sse. , il ne la portoit pas moins comme une créance légitime qu ’il vouloit s’approprier, sans
doute pour V intérêt d e la nation. Yoilà_cet homme qui veut que l'honn eu r
lu i survive !
�( 54 ) _
le Lut de la loi sur ses intérêts ; et qu’il ne ponvoit sans autrement
se charger, ni sans porter aucun préjudice aux intérêts de la nation
(aire la déclaration ci-dessus, et requérir que ledit acte soit déposé
au secrétariat ; ce qui a été fa it, sauf audit B o y e r, s’il le juge à
propos, à parer aux inconveniens qui résulteraient de cette décla
ration imparfaite pour ses intérêts ; et au registre a signé B e r n a r d ,
procureur-syndic. N°. 406.
Ledit jour 5 décembre 179 2 , est comparu au même directoire
de district le citoyen Pierre B o y e r, avoué au tribunal du district
de C lerm ont, y h abitan t, lequel craignant de n ’avoir pas entière
ment^ rempli le vœu des décrets par l’acte qu’il a fait signifier
au citoyen B ern ard, procureur-syndic de ce district, le 27 octobre
d ern ier, a déclaré qu’ il croyait devoir la réitérer, et Vétendre
notamment sur des objets q u i d o i v e n t p r o f i t e r a l a r é p u b l i q u e ,
dans la supposition que Jean-Baptiste- César Champflour-Beaum ont, dom icilié en cette 'ville jusqu’ au 14 ou i 5 ju ille t dernier ,
so it ém igré, ce que le requérant ignore absolum ent, le sieur
Champjlour ne lu i ayant annoncé son voyage que pour la villa
de L y o n , n e s e t r o u v a n t p a s s u r l a l i s t e d e s é m i g r é s , dans la -*
quelle Joseph Champjlour son frère est inscrit. E n conséquence ,
le requérant déclare de nouveau , avec offre d*affirmer s’ il en est
requis, ou s i cela peut être nécessaire ( 1 ) , qu’il est notoire que
depuis huit années il a eu la confiance du sieur Champflour , pour
lequel il a fait des affaires importantes et heureuses également
notoirement connues; que par suite, il s’est prêté à son égard à
tout ce qu’on peut faire pour obliger un galant hom m e; qu’il l’a
fait de la manière la*plus généreuse, ainsi qu’il est connu de sa
fam ille, ne s’attendant à d’autre reconnoissance que celle que se
doivent des amis ; qu’il l’a principalement obligé en souscrivant
( i j Ma femme et l’ un de mes gendres firent de vains efforts pour arrêter
la démarche Je B o ye r; ils offrirent de le rassurer, par des engagemens soli
daires sur leur fortune personnelle, de lout ce q u ’il pourroit perdre : mais
Boyer oyoit d ’qutres vues; il comptoit se faire adjuger mon bien de Beaiw
»PQIltf
�( 55 )
différons emprunts faits par ledit sieur Cham pilour pour se liquider
envers des créanciers pressans, lesquels il a signé avec lui comme
si les emprunts étoient communs , notamment cinq billets à ordre.
L e Ier. de 17,000 francs en principal, au profil du sieur R o chefort de R io m , et les autres quatre de 85o lrancs chacun, le
3 mai 17 9 1, pour lesquels ledit sieur Champilour a fourni le
même jour une indemnité au requérant dont il a fait le dépôt
présentement.
2°. Q u’il a souscrit avec ledit Champilour un autre billet de
la somme de 12,600 francs prêtée à ce dernier par le citoyen
B ru n ei, habitant de cette v ille , du 5 mars 1 7 9 1 , payable au
5 mars de la présente année, ignorant le requérant, si ledit billet
a été acquitté, pour lequel il y a indemnité du même jour, et qu’il
a également déposé.
3°. Q u’il a passé l’ordre de différentes lettres de change tirées
en sa faveur par ledit sieur Cham pilour, el dont le requérant a
passé l’ordre en faveur des prêteurs , desquels il est dans l'impos
sibilité de donner le détail y en ayant à longs termes et n’en
ayant pas gardé des notes, comptant sur la probité et l ’exactitude
du sieur Champilour ; mais qu’il en connolt plusieurs, notamment
celle du sieur B onnet, chirurgien de celte v ille, de 8,\ 00 francs ,
et qui étoit auparavant de 27,300 francs.
4*. Q u’il a souscrit et accepté deux lettres de change de
3,000
F.
chacune, en faveur du citoyen G u yo t, [de V ic -le -C o m te , juge du
tribunal du district de B illo m , payable le x"* février 1795, pour
lesquels il y a indemnité du i or. février 1789, de la part du sieur
Cham pilour, en faveur dudit instant, laquelle le requérant a éga
lement déposée.
5*. Qu’il a passé l’ordre en faveur du citoyen Charbonnier, d ’une
autre lettre de change de la somme de 4>24° fra n cs, tirée par le
sieur Cham pilour, en faveur du requérant, le i 5 mars 1791 ;
6°. Q u’il est dû au requérant, i°. la somme de 5,260 fr. suivant
le billet consenti par le sieur Cham pilour, le 1". octobre 1790 ;
20. autre somme de 3,5oo f. portée par billet du 11 novembre 1790;
�(56)
S', enfin d’une somme de 4oo f. payée en son acquit au citoyen
Dessaignes, pour le montant d’un billet de pareille somme , du 23
août. 1790 , suivant sa q u ittan ce, au dos du 17 janvier 1791«
T o u s lesquels billets le requérant a déposé à l’in sta n t, en exé
cution de l’art. Y I de la loi du 2 septembre dernier, sauf à les
retirer, s’il est nécessaire, lesquels ainsi que les indemnités sont
timbrés et non contrôlés.
l i a déclaré d é p lu s , e t ce rouR l ’ i n t é k k t nE l a n a t i o n , sa u f
à réaliser sa déclaration a la m unicipalité de celte 'ville , con
form ém ent à la l o i , qu’ il a en ses mains les objets suivans , con
cernant le sieur Champjlour et son frère : i°. un double de
Im ité p a ssé sous seing privé entre les sieurs A rta u d -d e -V irj ,
père et fils, et les sieurs Jean-César Cbam pilour, Josepli Cham pilour, officier, et Claudine Champflour et Jean Gérard B lo t, son
m a ri, du 14 octobre 1782, par lequel les sieurs de V iry se sont
obligés à leur payer la somme de 48,000 fr. pour leur p o rtion ,
dans la charge que possedoit le sieur de V i r y , el l’intérêt de celte
som m e, sans pouvoir la rembourser de dix années , à compter de
l’époque du tra ité, sur le pied de 4>5oo francs par année, c’està-dire, i , 5oo francs chacun , en intérêts, et 16,000 en principal,
sans préjudice de leurs autres droits ; lequel traité a été suivi d ’une
sentence contradictoire de la ci-devant sénéchaussée de cette ville,
du 29 janvier 17 8 4 , portant condamnation de ladite somme et
des intérêts, sur laquelle somme de iG,ooo fr. revenant au sieur
C h a m p f l o u r , officier, il en a cédé au requérant celle de 12,000 f.
par acte du 28 mai 178 9 , en sorle qu’il n ’est plus dû au sieur
Champflour cadet que 4,000 fran cs, et les intérêts de deux années
qui écherront le 14 du présent ;
2°. Q u ’ il a une procédure contre le sieur de V ir y , père, au nom
des sieurs Champflour et B lo t, au sujet de la comptabilité des béné
fices de la même charge de receveur des tailles, alors exercée par le
sieur de V ir y , père , dans laquelle le déclarant a fait un projet de
requête qui l’a occupé plus de six m o is, quoiqu’aidé de mémoires
et relevés pris sur les registres-journaux el sommiers pris par le cit.
Louyrette
I
�5 7 }
Louyrette qui y a , de sa p a r t, employé au moins trois m ois, sans
désemparer^, et qu'il sem ble, d’après le compte de clerc à m aître,
que le sieur de V ir y est débiteur d’environ 120,000 fr. envers les
sieurs Champflour et B lo t, le sieur Champflour aîné ayant une
portion plus forte que les autres, comme héritier de son père qui
avoit l’usufruit des biens de la dame Espinasse, sa Jcmme, et les
autres n ’ayant de prétentions effectives sur cette somme que depuis
le décès du sieur Cliampilour père, époque à laquelle la succession
maternelle a été divisée par tie rs, entre les trois enfans venus de
leur mariage , lesquelles pièces le déclarant ne pouvant déposer non
plus que le traité et la sentence, attendu que les deux dites pièces
(
sont com m unes, tant avec ledit. Blot et le déclarant qu’avec les
frères Cham pflour, et qu’il en est de même de la procédure, excepté
que le requérant n ’y est que pour son travail qui lui est encore d û ,
offrant cependant de communiquer lesdites pièces à qui il appar
tiendra , même avec déplacement.
5°. E n fin , qu’ il a en ses mains trois contrats de 'vente sons
seing privé , de deux parties de maison située en cette v ille ,
v i s - à - v i s les c i-d e v a n t A ugustins, et d’ un m oulin sur le
chemin de Clermonl , allant à Chaînaii<)vas ; les deux pre
miers , du a 5 septembre 1790 , l’un consenti en faveur de Jean
L è b r e , dit M arcillat aîné , et l’autre en faveur de Magdelaine
Charles , veuve de Claude D onces, sellier ; et le troisièm e, du 1 " .
avril 1791 , en faveur d ’Herm ent Jacob, traiteur, habitant de
cette ville, moyennant les prix y énoncés, desquels il a pareille
ment fuit le dépôt présentement, observant que les objets vendus
appartiennent à ladite B craud , épouse du sieur Cliampilour aîn é,
comme faisant partie de la succession du sieur Bcraud, son père.
Desquelles déclarations et dépôt le déclarant a requis acte et
récépissé des effets déposés, sans préjudice à lui de tous scs droits
et moyens contre les prêteurs, et au registre a signé B
Copie certifiée conforme :
L À B R Y ,
secrétaire.
II
oyeu.
�DÉ C LARA T IO N DU CITOYEN LAROUSSE.
J e soussigné reconnois, déclare et confesse qu’en l’année 1788,
j ’avois prêté au citoyen Champflour - Desm oulins, la somme de
2,400 fra n c s, de laquelle il m ’avoit fait une lettre de change
payable au commencement du mois de janvier 1789; que long
temps avant l’échéance, le citoyen Champflour aîné me dit que
son frère Desmoulins étoit inquiet à raison du payement de cette
lettre de change, et me proposa, pour le tranquilliser, de me
faire lui-même un effet de pareille som m e, payable à ma volonté ;
ayant accepté sa proposition pour faire plaisir à lui et à son frère,
je lui remis ladite lettre de change, et il me fit un billet de pareille
som m e, qu’il me paya ensuite.
D éclare et confesse, en outre, que long-tem ps après avoir été
payé du montant du billet représentant ladite lettre de change,
le citoyen Boyer me présenta la même lettre de change, en me
disant : V oilà un effet dont vous avez été payé; il faut y mettre
votre acquit; lequel il me dicta : et comme il m ’avoit fait écrire
que c ’étoit des deniers de lui B oyer, je refusai de le signer; dé
clarant en outre que le citoyen Boyer ne m ’a jamais rien p a y é ,
ni pour les citoyens Cham pflour, ni pour personne, et que j ’ignore
absolument pourquoi cette lettre de change s’est trouvée entre les
mains de B o y e r, de laquelle je n’avois plus entendu p arler, que
depuis l’année dernière que le citoyen Champilour et d ’autres per
sonnes vinrent chez m o i, et me dirent que le citoyen Boyer prétendoit s’en faire payer par le citoyen Champilour aîné.
Ce 29 n ivôse, an 9 de la république.
Déclaration de ce que dessus.
L AIIO U SSE.
Enregistré à R io m , le d ix - s e p t germinal an n e u f, fo lio
recto e t verso. R eçu un fr a n c , p lus d ix centim es.
r O U G I I O N.
48
�(59 )
Saint - Amand, le 7 frimaire an 8.
J 'a i reçu ta lettre, mon cher Cham pflour, par laquelle tu me
demandes un éclaircissement sur une créance de 600 francs que
le citoyen Boyer réclame de la succession de ton frè re , qu’ il d it
m’ avoir payée au nom de ton frère je ne puis te dire que ce que
j’ai répondu au citoyen B oyer, qui est venu me voir il y a quelque
tem ps, et qui me parla de cet objet. Je cherchai bien à me rap
p eler, et depuis j’ai encore tâché de me ressouvenir si je n ’avois
pas quelque notion sur cette affaire. Je sais que ton frère m ’a dû
plusieurs fois de l’argent qu’ il m ’a toujours parfaitement payé ;
ainsi je n ’ai rien à réclamer : mais je ne me rappelle pas que
jamais il ne m’ ait rien été payé , au nom de D esm oulins, par
le citoyen B oyer; je le lui ai déclaré comme je te le mande ici,
parce que j e n ’en ai pas la moindre idée. Je serois aussi fâché
de te faire tort, que je le serois de porter préjudice à la récla
mation du citoyen B oyer, à qui j’ai fait la même déclaration que
je te fais là. M ille respects à madame de Cham pflour; et reçois,
mon cher a m i, l'assurance de mon bien sincère attachement.
LENORMAND.
À R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
T ribun al d ’appel. — An 10,
J ï'ô
�
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Factums Godemel
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[Factum. Champflour-D'Alagnat, Jean-Baptiste-César. 1802?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Champflour
Touttée
Pagès
Dartis-Marcillac
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
lettres de change
biens nationaux
assignats
magistrats municipaux
prison
opinion publique
Couthon
notables
émigrés
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Jean-Baptiste-César Champflour-d'Alagnat, propriétaire, habitant de la ville de Clermont-Ferrand, département du Puy-De-Dôme, défendeur ; Contre Pierre Boyer, juge au tribunal civil de l'arrondissement de la même ville, demandeur.
Annotations manuscrites : « 11 frimaire an 11 de la section civile de la cour de cassation qui rejette la fin de non recevoir. Sirey tome 3, page 101 »
pièces justificatives « déclaration des créanciers sur émigrés ».
Table Godemel : acquiescement : la partie qui par le jugement du tribunal d’appel avait obtenu gain de cause sur plusieurs chefs, et succombé dans d’autres, a telle pu, après en avoir poursuivi l’exécution dans les dispositions qui lui sont favorables, avec toutes les réserves en protestation de requête civile et autres voies, se pourvoir ensuite en cassation contre les dispositions de ce jugement qui lui étaient défavorables ? n’y a-t-il pas eu, au contraire, acquiescement d’après la maxime flacta potentivia sunt verbis?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1802
Circa 1786-Circa 1802
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
59 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0928
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0927
BCU_Factums_G0929
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53089/BCU_Factums_G0928.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens nationaux
Couthon
Créances
émigrés
lettres de change
magistrats municipaux
notables
opinion publique
prison