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30 centimes
LE ROMAN COMfLET
,
MARIE THIÉRY
. -=--+-oE'-.
LA PETITE "DEUI SOUS"
LES MAITRES
DU
ARTHtME
ROMAN POPULAIRE
FAYARD et Cie
18-~O,
Editeul'll
Rue du Saint-Gothard, PARIS
18·
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�MARIE THIÉRY
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,LES MAITRES
ARTH~ME
DU
ROMAN POPULAIRE
fAYARD d C.
18-20. Rue du SlUnt-Gothard. PARIS
�P 1 CESSE E FLLE DU PEUPLE
par Maxime LA TO II R
Le rc):man complet: 30 centimes
co.O&
II palJ'"&Ura désoJt"mais, et
'5 do cbtJi4que mols
v@lume le
UIB
....
GRINGALEtTE
jfilSfgaK'à nDUVfFdl Ol"'diliflO,
LE COQ DU VILtAGE
MALlCEï
PAR LÉON
RIVALITÉ D·' À'MOUR .
PAR PIERRE
UNE
DE NOCES
~JUIT
PAR CHARLES
MARIÉE A SON PATRON .
MORPHY
MICHEL
A. MATTH EY
RENË
ROCH!~
AMANT ET JUGE
PAR CHARLES
ILS DE JACQUES
PAR
LADOUCETTE
PAR FERNA N D-L.AFARGU E
GASTYNE
LE CORPS D'ÉLISA
L.E
PAR EDMOND
FLORAISON D'AMOURS
LA NUIT ROUGE
PAR
L'AMOUR ET J}ARGENT
PAR ,JEAN
MALDAGU E
PAR JULES DE
i.
CALVAIRE D'AMANTE
CHAlfi"E MOR.TELLE
PAR GEORGES
LA TOUR
PAR MAXIME
MÉROUVEL
LA DAME AUX VIOLETTES
PAR
GERMAlfiJ
PAR HENRI
SALES
DE PON -JEST
ESQU 1ER
MOINS FORT QUE L'AMOUR!
PAR PIERRE
SALES
-~
POUR L'HONNEUR d'une lVJÈ E
-'
Chaque Volu~e:
PAR JULES
DE GASTYNE
3 0 canti:n:n.es
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PREMJÈRE PARTJE
LA NUIT DU aWUltTRB
- Il Y a là une femme qui demande si monsi-e41r
le barOJ.J. peut ra recevoir.
- Comment est-eJle, Ur.bain?
Le valet de cllal11bl'c cul. uno grimace équivoque..
- Ça n'a pus l'ail' très ... trè: ... ço. me fait l'efl~t
d'un~
;quémnndeu.se, quoi ...
ILe baron tRaoul de F , oJ.b~]'l
ho.ussu. les éjJau,l es
avec impaLi.enoe.
- Demandez-lui son nom..
- Je l'ai .fait. Elle m'a 1'6pondu que c'était
jnulilo, que monsieur devinerait.
- ,le ne d.evlne rien du tout.. Dites à celt~
personne que soi ehle refuse de se nommer, je refuse,
moi, de 10. recevoir .
Raoul avait quest.iomLé Sull dome.~Liql
d'une
voix par(ait.ement CBlme ; il conlinuai t de oouper
Bans l.J::d.o les pages d'une revue'. Mai.s lorsque Urbain fut· sorti ct que kJ buron se retrouva seul,
son masque tomba.
Son vis8Jge aux traits réguliers pAUt d'inquiétude ; ses yeux très grands, très beaux, d'un vert
glauque, s'emplirent d'épouvante.
- Non murmura-t-il, {)'cst iJnposb~e
. EUe ne
conn aH p'as mon adr.es-se ... Je suis fou de m'unagiller .. .
Il promena autour de lui un re~ac
qui sc russurnit. Il fl:l'isa.it hon dan,s loC fn11l01,r bl,en clos. Une
lampe voilée de jaune pâle éclnirait fnibl.emenL les
P~eaux
de cuir ·r epoussé, leos meubl~
de noye.r
ClSeùé" comme des jOy8lux. Un feu clUlI' fhunbAlt
délllS l'atre ~ l'odeur très rlouoe du tabuc d'Ol~
nl
fiptto.it. Uno pendule Louis XVI en cuivre {ouillé
sonna sept heu.res.
Juste il ce moment Urbain l'evint, sa figwre glabre toute l?li.ssée de dégOilt.
. - I\.I0l1s1eur le buron, c'est bien s'llr une mendlanLc... ou une Î.QlI~
€olUe prétend reslier là jusqu'à ce qu'elle ait vu 'monsieur.
~oul
mi~
sa main devant son visage ; la lua:Ilèr~,
.sub
lte~n,
pa1'llissait l'incommoder.
PUilS il r€pnt sans qU<l su voix trembl<l.t :
- Vous avez raison Urhain ce doit ~t.re
une
rO'lIe. Débarrasooz-m'f>n' ('nrnm'" Vn11R nnnrrp,
- FoJJe... folle T Ef.es-.v()us s'Ill' que je sois folle'
UrbUtn s'6cul'w', pfJ.~
de peur.
Brusquement relevé, très 1)àle, le baron regardait la femme qui venait d'entrer.
. EUe se t.enait sur le 'seuil, adoooée à la porte
qu'elle avait ouverte gllid-ée par le bruit de.s voix.
Bien qu'el'I e fût dans la pénombre, me.rrte si sa voix
ne l'avait trahie. Raoul n'aurait pas héSité à la
reconnaître.
Il y Elut lin instant très court d'immobilité ct
de silence. Le premier, Urbain, retrouvant sOn
sang-froid, s'avullçn menaçant vers l'intruse.
- V{Jus aLlez dégneTpir, vous.
La voix de son maUre parut étrange à Urbai.n.
, cette
Elle ne frémissait {JEts seulement de ~olère
vo~x,
mais aUssi ù'épouvante.
La femme, lentement, s'avança. A mesUNI
qu'elle entrait daM la lumière, la misère de ses
vêtemen'Ls a.pparaissait plus évidente. Un chàl8
usé, rejeté en arrière, découvrait un corsag,e éJ.imé, mal entré dans la jupe sans celnlure ; res
mains nues, d'une pA.lellr de cire, se crtS'p/lient
sur sa 1)0.ifJrin,e. U.ne forme sans garnitures couvrait ma.I ses chev1cux cn déoordre.
Il pl,euvait. Au dehor,s, l a bise (le déccmbre soufflait dur. La malheureuse, en ses loaues mouiU6es,
tremblait. Mais une audace désespérée se ljsait
d.ans ses yeux creusés, sur son masque de souffrance. Une respiration haletante écartait see lèvres décolorées.
- Ln ilS'Sez, Urbain, répéta le baron.
D ajouta, ju,g,e ant nécessaire d'exp11iquer oe que
sa. conc1uil€ avai.l d'étrange pour le larbin.
- C'est une mfllll1eurouse que j'ai déjà secourue.
Une pauvre créaLure un peu dél.r.a.quoo.. . Ne La.
bI'lüalisez pas.
La f,emme ente:OIdit. Elle eut un rire qui, v'l'alÏment, ressemblait à un rire de <1tm en te.
Sur la pOl'le quo refermait derrière lui sou domesti.que, RAOul fit retomber la IouT'de portière qui
devlliit amortir l(!ls voix. Cette précaution p11se
le buron revint à sa visiteuse.
'
'
- Et mainlooant, iu vas m'expliquèT corn.rn..ent
tu es ici 1
Elin ne ré'pondit pas, regardant avec llue avide
surprise 1.0 décor de lu:xJe où elle se tl'ou>vait. RI/loui
la prit ']XlI' le bras et la secoua rudement. Alor~
elle toumu vero luti son visruge c,"ang·uE> sur lequcl
se peignaient la révolte et l'horreur.
- Comment · j.e snis toi? C'est sLmple. Je connaissni.s I.e nom <lont lu L'arru.blc.s ... n m'a été fàaiJle de ne pas te perdre de yue.
- Ainsi, tu me fois esiplionn.er?
Sans hésiter, la femme avoua :
- Oui, je t'espionne.
- Pns loi... Tu ne pnu v 8Jis le hire S{lns que je
m'en R{)is ap{'rçu ... QuoIqu'un t'uiJ û .
- C'-ost possible. Est.-iJ. vrai qlle dema1n tu te
maric3 ?
n ricann..
- Ma pauvre YVO'I1ne, si l'cspion à. tes ga~
�La 'Petite "Veuz Sous,"
faisait mieux son métier, tu seMis fixée sans avoir
besoin de me fadre œtte question. Oui, je me maTie demain. J'épouse Mlle M~rgeit
~arte,.
la
fille unique de Jean Martet, le nchisslIDe mdll'slnel.
Le père m'a.ooopte pour mon titre; sa fille pour
mOli-même, et ma belle-mère parce que sa t:Ule me
veut. Voilà 1 Y...a-t-il encore quelques détails que
tu désires connaltre 7
Sans relever la raillerie, elle dit: froidement ré601ue :
- Tu ne te marieras pas.
Il eut un geste résigné.
_ Naturellemen L. Je ru 'y attendais... La. classaque scène de jaklUsie.
. .
La femme eut un recud. Ehle prote s t8:, mclignée :
- De la. jalousie 1 Est-ce que ru ne sais pas que
depuis lcmgte~
- .si lon.gte~ps
-: je n'a~
plus
pour toi que du mépTLs 7 De la JalousIe! 0001 pour
toi, miséra.ble 1
.
- Ah 1 non, je t'en prie, pas d'injures 1... Je
~uis
patien t, tu le Vo1..'3 ••• Je te conseille, pourtant!
00 n'en pas abuser. Si t~ n'as vraiment .pour ,mOl
que les sentiments ... obligeants que tu dis, qu estce que cela peut te faire que je me llDarie ?
- Ecoute... Te souviens-tu de tes mensonges
pour me séduilre lorsque j'étais une honnête fi,lle,
laborieuse et crédule 7... Tu t'es donné comme un
incompris poursuivi par la maldl:1arrlce. T~
me promettais de m'épouser plus tard. Je tal cr~.
Je
t'aimais trop pour raisonner... Ah.! le rév~il
es~
venu vite. Mains d'un an après, J ap'ren~s
qUl
·tu étais ce qu'était ta vie ... et je te chassals:
_ Oui inber.rompit Lf'Oi:dernoe'nt le baron, ]e me
BOuviens: Tu m'as rendu, ce jour-là, un fier ser-wce : tu m'encombrais ...
- Je t'encombrais d'autant plus que j'allais être
mère ... Tu ne t'es jamais demandé ce qu'est devenu notre enfant?
- Ah! j'ai..
- Une fille.
- Charmé de l'np'prendre 1 Elde se nomme 7
- Yvette.
- Comme sa maman. C'est très gentiJ.
- Ne raille pas.
- Je n'en ai guère envie... En as-tu long enoore à me raconter?
- Jamais, poursuj-vit U!. femme, j~ais
Yvette
ne saura qui est SOD! père. ENe me oroü veuve.
- C'est tout comme ... Quel Age a-t-elle donc?
- Calcule.
- Huit... Neuf ans.. déjà 1
- Déjà.
- Bon. Ta Me a neuf ans, eIl1e te croit veuve,
~
me méprises ... Ce doit être à peu 'près tout ce
~e
tu as à m'apprendre?
- J'ai à te dire que tu n'épouseras pa~
~e
Martel. Ni elIle, ni une autxre. Assez d'une Victime.
- Très bien. Comment co1lld>tes-tu t'y prendre
pour m'empêcher de me marier?
- J'arracherai ton masque.
Raou] vit en elle une résolution implacable, et
80n a ssurance faiblit.
_ Qu'y gagnerais-tu, ma. ~auvre
fille T
- D'avoir faH mon devOill'.
_ Ln belle avaMa 1... D'abord, te croirait-<>n '1
EUe ne répondit pas. Mais ses yeux brillèrent ~
ce regard inquiéta un instant le baron. Est-<ce que,
par hasard, eale aurait des preuves '1
A cet instant, une sonnerie du téléphone VÜll'ù
dans un angle du fumoir. Raoul y courut.
_ AllO J... Oui, c'est moi... Comment, déjà ~ui
heures 1... Excusez-mai... C'est mon homme d alfaires... arrivé sans crïeJ:, gare.... Non, non, ne
m'attendez pas... dtnez, ) a.rnveral a~rès
... , MaTi
«uerite n'est pas fAchée ?.. Au reVOIr, OU1... ~
tout à l'heure.
n raccrocha le récepteur et revint à Yyonne.
_ Fin.issons-en, dit-irl durement. Cmnl>len you.Iez-volll! ,
-
-ll.!>
Vous m'avez bien oubliée.. .
Enfin, que ~rétcndez-vous?
~
Je vous l'ai dit : je veux sauver la malheureuse que vous allez perdre. Si, de bon gré, vous
ne rompez pas ce soir même ... la famUle MarLet
sera avertie dem ain.
Tu es folle. Puisque tu étatis si bien décidée
à m'empêcher de me marier, il falLLait t'y prendre
plus tOt.
- Je viens d'être très mal8Jde ... si m8!liade qu'on
n'a pas voulu me bouleverser par la nouvelle de
votre mariage. On a cru bien faire en se taisant.
- Mais qui cc on H, sapristi 1
Elle serra ies lèvres, comme 'POur retenir un
nom prêt à jaillir.
- Ecoute, Yvonne, j'en ai assez de cette pctite
fête de famille. Fais-mOÏ le plaisir de t'en aller.
- Non. Pas avant que tu m'aies promis ...
- Oh 1 Tu m'embêtes 1...
- Promets ... et fais attention que je veillerai. Si
tu me trompes, je parle.
A tout hasard, repris par son soupçon, il rép6la :
- Tu n'as pas de preuves.
- Si 1
Etait-ce un défi ? RaOUl le pensa'. Cependant,
une terrible colère gronda cn lu.:i. Mais il se domina.
- C'est bwn, dit-j,]. Tu me mets le marché en
main. .. Laisse-moi au moins le 'temps de la réflexion ... LalÎsse-moi. .. ne ro l~ce
qu'une heure. netourne chez toi. Je t'y suivrai de près, et lu s~u
ras alors ce que j'auroi déci-d6.
Elle hésita 1.m in~ta.
- Sail! dil-Qllc enfin, je t'allendraL. mais à
une condilion, c'est que tu n e te feras pas connattre d'Yvette ... D'Ili.lleurs, je ferai en sorte qu'eJ,le
dorme. Voici moq adresse ... C'est tout en haut, la
porte juste en face de l'eSICali er.
- A Grenelle! fit dédaigneusement le baron en
lisant le feuillet de papier que la femme lui tendaH. Heu:reusœnent que j'ai mon auto. Allons, file ...
Il a.ppuya Je do,igt SUT un timbr-c. Aussitût, le
vlli-ct de ohambre pa.ru 1.
- Alors, c'est convenu, disait]e baron, comme
poursuivant une tranquille conversation, vous allez
être bien cQurageuse. Je promets d'intéresser il
vous Mlle Martet. Allons, au revoir 1
llille ne protesta point. Le front bas, tout à coup
lasse à tomber, elle suivit Urbain.
Un long moment, le baron Raoul de Folbert se
plongea dans doo réflexions qui ne devaient être
ni douces, ni rasunte~,
à en juge.rpar l'expression violente de ses traIts.
Urbain, encore, vint l'arracher à lui-même.
- L'automobilr. est devant la porte depuis sept
heures et demie ...
- C'est bon, elle attendra.
LI est patient, le chauffeur 1 monologua Urbain... Ça a de la vertu ces Italiens 1 11
Cependant, malgré la vertu que lui reconnaissait Urbain, De-ppo s'impatientait.
Ardvé après rentrée d'Yvonne, il ne compr nait pas ce qui pouvait bien r etarder le d6par1.
Erugoncé d6ns sa fourru.re, la casquette J1abnLtue
sur ses yeux, il fai sait les cent pas sur le trottoir devant l'auto étincelnnte.
Tout il coup, Heppo arrêta sa marche : une femme sortait du porche. C'était Yvonne.
Beppo regarda curieusement la mis6rable ; comme elle allait passer devant le challffeur, elle relEWa la tête. Beptpo, dislinclemen t, put remarquer
les yeux trop brillants, l'expression lJ. ln foLs réBolue et désespérée ùu visage.
te Esb-oe que te ça 11 cn vient 7 11 murmura-t-il
en .suivant dies yeux la pauvresse qua. s'éloignait
mnmtenant touLe courbée.
Un long tern;p.s s'écoula encore. Beppo songeait
- :Vous êtes prêt, J3eppo?
-=--
1(
�~
r;ié-
La 'Petite
-
U
'Deux Sous ..
Oui, monsieur le baron.
============================== . 5
.
Le chauffeur, respectueu sement, ouvralt la po:-
Hère. Le baron , un insLunt, s'arrêta devant IUl.
il V01X basse quelques mot!} auxquels r~P9n
<1it une exolamation étouffée de .B eppo, pliS la
portière claqua.
.
Vingt minutes pilus tard, l'automobile stoppa.1t
il. l'entrée d'une des rues les plus ét~oies
, les
plus pauvres les !plus affreuses du Vleux GreMJ.e. Beppo' avait arrêté assez loÏin de. toute l ~ lr
mière et la voiture sombre, dans la nud, se distinguài.t à peine.
Le chauffeur ISe 'Pelotonna dans son mamtean,
tandis que, d'un bon P&S, Raoul s'éloignait. Toul
en marchant il cherchait à li.re les J].uméros. Enfin i.l trouva.
.
L'entrée était si étroite, si obscure qu'uIl:e secoode· il hésita. Enfin hl pénétrE!: dans le o~ulI'.
Au
fcmd, une petite flamme trouru.t l'obscurlté. Raoul
se dirigea vers eUe. .
Elle provenait d'un lampion au pétrole ;. UDe
fumée noire d'une âcre puanteur prolongeait la .
courte fta.rnm~
C'tétait plutOt une lueur qu'une
clarté mais elle suffisait pour rendre presque dlSt~n c~
les premières marches d'un escaLier raboteux, Raoul s'y e1ngag,ea, grayit ll·O.is étages.
C'était une de ces baiSOOS et vI,eilles ffiMSOillS ap1J€'le.és à disIJaradtre.
<1 Toul en haut ... )) C'est ici.
La porte, entre-b;âillée, lai:s~t
écha'])per un filet, de lumière. Etalfr.ce un oUllh ?.. Yvonne vouh6si toJtion chez son visij{lit-elle empêcher ~oute
teur ? Sans frapper, RaouJ pouss a le ballant.
Il y avait dans cette cl1ambr'e, .extrêmement pet.ite, un lit de fer ~ un burfet de bOlS blanc, un fourneau l'ouilllé el deux chaises. SUT le buffet, une
as.siette contenait encore queiJqu€:S pommes de
!.erre bouillies ; tout auprès, Un litre à demi plcin
d'eau un bol ébréché, un tro nçon de pain ct, posés a:u bord d~ l'assiette, deux fourchettes d'étru1n.
et un couteau.
C'était un couteau c1e poche dont Yvonne avait
dI1 se servir ce soi.r, un couteau assez grand, à
lame très aiguisée,
Le regard du baron gliRsa sur oes choses pour
s'arrêtel' sur Yvonne elle-même, assise près du
buffet, Elle dormait, renversée sur le dossier de sa
chaise, Une bougie posée à l'angle dU meuble
éclairait en plein son visage émacié.
Ce visage était si pè.Je, si douloureux qu'un,e vagu'e pitié lllmolJiil ·u n peu le cœur de Raoul.
Yvonne dorma.iL-ell e vl'aiment ?
. N'était-ce point plutOt un évanouisseanerlit qui
l'avait jetée là ?
Le baJron s'approoha, prêt à l'appeler. MailS, sos
yeux s'abaissant, il vit SUl' lœ genoux de la malheureuse un carton desl,iné à servir d'a pupitre et
une petite fiole d'encre quc, cl'une main, eUe retenait encore. De sa main droite le porte-plume
avait gUssé, tacha.nt la page commD!lcée,
Cette ,page, écrite su r une g r.a nde feuilLe de papier 'l,œdrhllé, le baron &e pencha pour la lire.
li lisalt, courbé, aLLenLiI maintenant à ne pas frO1er la dormeuse.
L'éonture était mWladroite, un peu !.reIIlbJlée.
~( Madam.e, quoi. qu'il doive m'a,rriver, je ne puis
lru.sser un miséruhLe vous vol,e r votJ.e ooIanl... ))
Le visage du ba,roiD, <J'u.bnncL empourpré de colJè·
l'e,. ptLlissait de plus en plus, il merure qu'.iJ. avan·
gall dans Sl/l Iedure.
,
Tout de suiLe, Yvon ne jctait ses accusations. EJlJe
<lisait qui était (;6 baron de Folbert aux man ières
si distinguées ; et les fails pr6r:is s'ajoutojent aux
faits . . De~
détai'ls probant!4, (h1S noms, des dates
constituaient, en cette leLtre encore inachevée, Uu
terrible et f?Udroyant rél'Juisitoire.
Raoul lut JUsqu'au bou L . puis il resta un moment immobile, cloué par la stupeur.
n dit
~
Il Ainsi, songeait-iJ, elle sait toute ma vie 1 B
faut qu'elle se taise. L'y forc er.; . ÇOmen~
? ))
Il prit la lettre, doucement 1 attira à lUl.
La d·ormeuse ne bougea point.
Raoul approoha le papier de la bougie. La t1am~
me monta. Raoul, qui tenait toujours la lettre
dans ses doigts, la lalssa se CODSUJmer.
Sentant la chaJ.eur atteindre ses doigt.s, il posa
SUI" le buffet ce qui r:estait du ' papier où ne de~
meurait plus auoune Wace d'écriture.. Et, comme
il retirait sa main, elle frOla le mancbe du couteau
ouvert. Il tr-em.bla plus encore.
Instinctivement, ses yeux firent le tour de la
pièce. Il ne dist.ingua point, inerte dans J'enfoncement du lit, une toute petite chose informe, un
corps d'enfant frileusement pelotonné sous la trop
mince couverture.
Yvette dormait. Elle obéissait à sa maml/ln qill,
en la couchant de si bonne heure, lui avait dit en
l'embrassant avec plus de tendresse, peut-être, que
d'habi tude :
- Dors vite, ma' ohérie, pour me faire plaisir.. .
Yv'ette dormait, Yvonne, évanouie ou tenassée
par la fatigue, lI1e faisait aucUill mouvement.
Le baron Raouil de Folbert, les yeux un peu hagards, promena ses doigts sur le couteau, puis son
geste hésitant s'affirma: sa main se referuna sur le
manche.
Une sueur froide mouillait ses tempes .
Yvonne dOI'mait ' toujours, la tête renversée. Sur
son cou amaigri les veines se tend<aient en saillie.
Le br8JS de RaouJ. se leva' et s'abattit avec la soudaineté d'un éclair.
.
Un fiat de sang jaiUit 00 la gorge trouée. D'un
bOllld, Raoul en évita la soui1Iwg, il y eut un'e ohute lourde, des soubI'eStauts, u.n rAl'e ...
Alol's SUI" le lit quelque chose bougea... Raoul
se re~ouna.
Yvette s"éteit réveillée. Rledress'ée, livide, les
yeux fous, elle regardait cette cl10se épouvantable :
sa mère assassinée, se tordant encore ...
L'enfant ne criait pas. De sa bouche convulsée,
nul son ne pouvrut sortir...
Raoul bondit vers elle, le bras de nouveau levé .. ,
MaLs soudain il crut entendre Yvonne lui dire :
Il Ta fille ... Yvette ... elle a neuf ans .. , ))
Le bras de l'assaiSsin retomba, il j.eLa son 8lI'IDB
et s'enfuit. Et De ful, doos la chambt'e d·u meurtre, un tragique silenœ,
Les yeux de l'enfant restaient hagards,
Son cerveau se refusait à compr'endre ...
Sans doute eUe se débattait contre un rêve monstrueux ...
Yvonne ne bougeait · plus.
La source snngla nte s'épanchait toujours. Le
flot pourpre s'étalait lentement suivant les épau.
les, glissant le long du corps...
Yvette voulait s'évellIer, . oublier son cauohemar.
Elle ten La un cffort, sa. bouche se tordit ; elle
8Jp'pela d'une voix d'angoisse :
- Maman 1
•
El voilà que l ' asÏil1~e,
de nouveau, tressaille.. . Ses lèvres remuent... mais c'est un flot rouge
qrn s'en: échappe...
.
Le corps se raidit.. . les yéux se voi.lent...
Alors Yvette comprit qu'elle ne rêvait pas.
D'une voix stridente, elle se mit à crier sa douleur et son effroi.
Des pas coururent dans l' esca.li€lr. La porte,
referm ée par RaouJ., fut enfoncée ... Alors d'autres
aI'is répondirent aux cris d'Yvette.
Et tandi,s qu'on s'~tpreai
auprès d'Yvonne en
soins, hélas r inutiles, des femmes en lourèrent
l'enJant. On l'emporta.
.
YvetLe oriait toujours, se d&batlanb, fUl'leuse,
n'ayant ooDseienoe que d'une épouvante qu'elJe
ne pouvait pas même s'expliquer. Sa raison se
brisait au choc trop rude, Elle n'était plus qu'Ull
pauvre petit être affolé
�La 'Petite "'Deux S ous " -w
G"il-6
II
VI TAL, LE MANCHOT
...:.- Eh bien 1 TortiLlon, que dis.tu de la rnaJ'chandise, ce soir ? C'est chic, hein, cet étalage ?
On ne trouverait rien de pareil rue de III Paix, ni
même sur les grand s boulevards. Allons .. . donne
ton avis.
Tortillon pencila la tête, rejeta ses oreilles e~
arr-ière et retroussa ses lèvres barbues, ce CJUl
éta..it 98. m8.!nÏère à lui de sourire et cl 'ap-prollve.r.
Tortillon - qui devait son nom à sa façon de
se tordre comme un ver et de se trémoll sser TortiUon était un caniche croisé de barbet, d'un
blanc douteux et d'une laideur certaine. Mai.s il
ra.chetai,t œ physique dé~lorbe
par tOl1teS 100
qualités de cœur et d'espnt que peut possédCif UiQ
pauvr e chien.
- Alors, t' es content, hien, vieux ':"'ortillon 't
EUes ont ben travai:Ué, les pauv'femmes... Faudra
tâcher de leur apporter des gros oous.
.
C'était à Grenelle encore, dans une rue aU9Sl
misérable, aussi lai<le, que celle où demeu.rruent
Yvonne et Yvette.
La maison éLait plus haute, et Vitali, le man?bot
lonsqu 'm rentrait chez lui après ses I~sf-ln.c
J01!1'nées, devait gravir les cinq étages c1'un €scal1er
ressemblant à une échelle.
D'ordinaire à I!a tombée du jour, les loca tai!l'e5
entendaient d~ns
l'escalIer le trottinrmen l du cltieJl,
le OM sound du ma1t.re et un certain fT'Otssrment
soyeux, un froufrou de pa'{>ier léger que tous connaissaient.
A ce f-roufrou, plus ou moin.s forl, on dev.inait
si ae manchot avait fait une plus ou moins bonne
recette ; et l€ls braves gens, lorsqu'ils (''''tendaient
fll'Ol€lr l.eUTS portes p8!I' ce que Vital 8JweIait sa
boutique, souplrai-ent, compatissants :
- Le pauvre homme n'a pas dÛ vendre grand'chose, aujourd'hui 1. ..
Ce soir, ~rsone
n 'avait entendu rentrer Je
manchot. C es.t qu'il avait ra'P'fJorté de la belle
marchandise Loute neuve, bien tassée dans un carton, et entièremen t dépouillée, la [lerche de bois
le long' de laquelle, à cet i:nstant même, il fixal!t
son am.usant étrulage.
Avec une extraordinaiIre a.èresse, Vitali, de son
uniqu-e main, nouait les ficelles mllilticolores; ~u
bout de chaque fiœlle, se bn:lançait ùne petite
poupée de bois, vêtue d'une robe en pa'{>ier ft'oissé de teinte éclalan le.
n y 5.'V8'1.t des darns€'Uses aux jl1~
oOnvoltées, d-es
poys1mnes en jllpon rouge et bonnet bl!mc, des
poupons 61U maillot. des ~ITots
et des P.ierrettes,
même de mmuseules polichinelles.
On voyaH que de 50uple-.::! doigts fémimns avaient
créé ces fragil s joujoux. Et ce drvait être une
arli.ste à sa f!lron, l'ouvrière capable de donner,
avec \Hl chiffon de papier de saie tant de physionomies di ffé ren tes à œs rai<les ret.iles pOllpf-CS.
Vital tOllt en disposant. ses pain tins, songeait
, il. celte'ouvrière, ces ollvlièrcs, plnt6t.
Il les revoyait dans leur cmamhre sans feu, la
rnèJ'(' et la. fillclLe, l'une triste toUjn.l1rs, l'autre 'déjà
trop grave, choisissant clans le fouitlis rles p8lpiC"I1S
éclatan ts, les mé langes de teintes œpahles d 'attirer le regard, <le fasciner les t.ollt-peLi.ts, les 00ranLs heureux que bonnes et mamans MIlèn.ent aux
heures claires s'amu el' d.ans les jnrrlins.
Il rallait que 00 tut tlrès joli, lrQ"! tf'ntanl, pour
que les menottes se tcrudissent sur>l~a.nte,
que
les voix caressantes au volonl.rure.<; eX1geaSSc.n L la
poupée de papier.
Vilal les vendait d€'UX sous. Il s-ch,..tait h la grosse les poupées de bot~
et les nr~l.tJi
~
~Iles
qu'il nommait ses asSOCIées et à qill II dc·vall 1 J.d.ée
de ces fan toches.
,
A l'enfant maJade, Vit.nJ, qui déjà J'a.imait dune
tendresse de père, avait un jour appocté u ne pou pée de bois d'un sou .. . Pour amuser la petite, sa
mère. avec des bout.s de papier, avait oostUloé la
marionnetle. VitruJ la regu,·duit... et l'idée s'Mait
implantée daM son cerveau de faire des petites
poupées drÔles, ainsi purées, qu'il irai t vendre.
Dfrpuis trois ans, le commerce né en une heure
avuit pro.'péré. Les fragiles joujoux ne duraient
guère; aussi l-cs ,client,s Id'€' 110. veille devenaienl les
chents du lendemain.
A ilrésent, la liIlette aussi chiffonnait des robe ..
en parpier. Depuis dell' mois, pt'ès du li t de sa
mère mala.de, olile seu,le fi lravarillé.
Enfin elle est rC'l1isc, ('elle à qui son Ame dr
délai ssé, son cœm mellrL,'i se donnèrent j8Jd.i5
sans retou!" l Stl.11S m~ lIe
he dire ....
Que d'Hnnées onl p:..ssé 1
Un soir, comme lui-meme sortait de 1110pit.& 0Ùor
après sa chute d'uli r.chafaudage on avait dCl Lill
ampllter l'épaul e droite. Vllnl rencontra .,ous le
porche une f.emme portant dans &œ bras un 1l0Ut<
veau-né. JI avrut, l,e pauvre IIlnooent, re~m
11' jour
en ceL asile de misèr'f's, enfant. de père inconnu.
La mère s'était ,'efuséc à l'abandonner.
C'était une petite fille.
Dans le bien-être de 80n lit d'hôpitnJ, entourée
de soins, la rnèTe en uerçant son poupon avait fait
des rC:ves .. . E11·e se voyail, à. force de wavail, éle-vant près d'elLe J'enfant qui Il'avait au monde
d'sulr<€! nppui que I·e s'Len, comme e'Hte n'avait plu'9
d'au tre affection.
l\'lain tenant, sur le point de franchir la port.e de
l'bôpilal, devant la foule indifférent.e des passants,
la femme avait peur 1
Il lui pa/'&Îssait tout à (:oup impossible de garder, d'élever seule son Mfnnt. EUe ne croyait l)].US
il. lJa possibilité d'un trava.i.l secourable ; eJU{J f.rmsonnait dans l'air glacé, autanl de détJ'esse que da
froid .
Vital passa près d'elle, et la regarda. Lui aussi,
au seuil de l'hOpitrul s'attardait le cœur éLreint
d'angoisse.
Ln r-cJnme vit la manche droite fJottlmte, le visage pâle. Leur's yeux se rencontrèrent, s'avouant
leur comm1lne pitié.
BlIe murmura: « Pllllvre homme! »
Et lui, qui redoutait comme une souffrance nouvelle la rompH.,sion qu'il devait désO,il'lni" ins . .
pi rel', n'éprouva qu'une émotion bienfaisante il
cette pitié spontané{'.
11 se l'l1pprocha, qllt's tionna.
Elle se nommait Yvonne, était seule aU Tl)onde.
aVe<: son enfant.
Vital était sans famille...
Causant ensemble, parlant d'eux, ils quittèrent
l'abri. du porche, marchant l'un près de l'autre.
Ils n'I!vaient pins aussi peur de la vie méchante.
Elle sans réfléchir CJ,ue lui-même était d€sarmé
pour la lutte, ql' sentait déjà. plus forte par oette
nmitié l'fui S'( l'frait.
Et lui, devon t crLt.c femme et 001 anlfant <fIl'aucun hOllhl'llc n'flvaH la charge de défendre, olbi~UX
de lui-même, songca. : « Il ne faut pas qu'elles
Boient seules. Il
Et, ne cc jOUl'-<lil, Yvonne fi vaU pu s'ap.puyer SUl'
I.e plua adèle, le phm dévoué des amis. C'est v~t.sl
qui, (USAnt 10ujouJ's : cr Vous me le rendrez Il, avait
aidé Yvonne IOl'\'iqn€ le IravAil chOmn.it.
Vita;l avn.it amH~
Cfll().\qUes épargnes. L'm(}eIJlnlÎt6 liù)T"(
~ ment
pll,y<-,C f al' san plltron, J'a.i<lait
aUlssi, mais celn. s'ép"j·sa vit.ë, et la misère al!181i\
en gl'n~i
~SIL
I t.
L,.s années paSgfl i{~nt,
de plU8 en plus dUf\r.iJi<'s.. ..
EPlllsée, min~
par Ir chagrin di! sa vie perdue,
Yvnnne, souv nt, éllHÎt S01lffrante. Pilla ce tilt
Yw.t,Le qui dut s'aliICJ.'. Vit.nl, alol'.', cnL l'idée des
pelilrs poup6es ... et l'on vivait. \'ilal ronnaLssaJJ
�~
La Petite
U
Deux Sous"
le passé d'Yvonne. Tout de S'U:ite, elle lui avaH
conté sa lamentabJe histoire.
Et comme une pensée dominait cheh la jeune
femme tous 5e'S tourments - la pensée que d'f\,utres, comme elle, serruenL trom.pées, po.r le misérable père d'Yvet~
- pour lui enlever au moin s
cette inq
u~t
de,
VitaJ s'était acharné à découvrir
et à suivre l'amant de son 8Jmie.
Et si, dès le premier instant, il n'avait poo aven;
Yvonne des projets de maria ge de Raonl, c'est
qu'elle venait d'être cruellement malade, ainsi qUI3
la pauvre femme l'avrut dit au baron, el que Vital
vou lait lui €'pargner cette nouvelle M'lotion .
Mais quel bouleversement, quell,e exaltation chez
elle quaud enfin elle apprit!
Pour la premièl'e fois Yvonne s 'était refusée ft
l11i confler ses pre jets, et le Manchot redoutait quelque folie..
•
Que pouvait la pauvr-e femme puisque - pour'
éviter qu'il ne trahit une po.tcrnité (ftl'elle voul it
à tout pr'ix qu'Yvette ~ora.t
- l'o.bandonnée se
refusait à dénoncer le coupable à. la just'ce '1 Que
tenterail-elle ?
Ce soir, ViLal en venant chercher ses pou,'P-écs
n'avait ren con tré qu'YveUe au logis. Il attcl1fllt
}<mgMmps son am~e.
Combien 11 trouva déJaite et
bouleversée la malheureuse, lor squ'elle rentra!
Elle sut, cept'f!<lant, par un immense 0ffort, mentir à ViLal, lui sourire. Elle cralfTnuit qu'avec re
désir de la protéger, il s'attardât chez elle. Elle n,e
le voulait pas.
Elle joua si bj,cn son rôle que ViLal la quiltll
rassuré par sa promesse de lui tont dire le lendemain, des démarx:hes tenlées e l de sCs projets.
Pourtant, revenu chez lui, seul en fuce de Tortillon et de ses poupées, Vital le Manchot se sentit
repris pur ses inquiétudes . De sombres pressentimen.ts lui SOITaient I.e cœur. Il I,ermin~1.
ses prépar<:üH~,
pos~
dans I1n angle de la p<ièce \il longne
percheauoow de !.aqueJle frou·froutaient ses petits
panlins eL revint près d·e la ta.!J]'Ü.
- Avec tout ça, Tortiùlon, nous avons dlné pn.r
cœur, cc soir ... Si nous cassions une croûte, . vieux
chien, qu'est-ce que tu di.rais ?
Lu queue de Tortillon fr é tilla plus fort.
C'éLuit un chien dIscret, n'insistant jamais pour
recevoir sa pitance, habitué d'ailleurs à ln misùre
et trouvant l'ordinaire de Vilal, Lout irrégulier
qu'il fùt, infiniment sl~prieu
au si,en lorsque le
l'vIanchot l'avait recu.etllL, pauvre toulou erra.nt,
destiné à la fourrière.
Sur la Lahle, un gros morooau de po.i.n ,ct un
demi-saucisso n posés sur un journAl. composaient
le. menu du souper. Le MatIlClhoL miL la main dans
la. po{!h c c1e son ve s~Qln
.
- Ben quoi, murmura-t-il, j'ai perdu mon couLeau?
11 ou vriL UII1 tiroi,l', .chercha. ·cncore. Tout à coup,
son vis.age ,s'é.cJaira. II se souvenaiL (j'a.voir, uv'Cc
oe même cou Lell'u, aic1é oe soi.t· Yvetl.c à. couper lJe,s
fi.cclles I1es poupées... Ensuï·te, il avait. posé son
couteau sur le buffe t et l'y avait, oublié. Demafin il
passerait par là p-!lJr !Je rep.rend.l'e, voi,là tout.
Philo.'301 hiqu<Jmen t 1e l'vt[~ncho
mordit do.ns fion
pain. TürWlon, il. peu ?rès rnssasi.é s'ét.iI1èl.it en
bt\illanL. 8()n mnttr<l, sUlvanL sa .COt;tumc, col1l.inuait à hli pa.r·ler.
- Tortillon, tu D'as, pn.s honte de bô.û1er 1 DOTS,
bon à rien .... Moi, il faut que je calcule... Tu ne
sais p08, TOl'~
. lo
? J' i vO'lé, cc ~ni r ... Ça t'étonne,
hein? Ben OUl, c'esl comme ça. J'ai chipé ça dl1D8
le tiroir d'Yvonne ... Tiens, vieux chiNl, tu v oici ce
papier-là? C'est une « recO'!lllllÎlsslJ.ncc lI. Si lu peLi I.e n'avaLt pas ja&\ .raurais jamaiJ su que sil.
mère avait por'lé aU lVlont-de-Piél.é oc LIu'eUe uppclait CI sa re11que )l ••• Pauv' femme 1 Avoir lravers6
. . --7-i~
tant de mauvais jours sans vOllloir le sucrifler,
el puis mai.ntenant.... C'est. pour Iln compt& de phaf.macicn, que m'.a. dit l·a pelite ... Si cHe n"aurait pas
dù m'en parler! On s'arrange toujo\ll' . Mais clle
prétend que j'oi déjà trop fait pour clle et son
enfant : "i c'est po." ridicule, hein, Tortillon, des
i<l ées comme ça 1
Il prit ln CI reconnaissance », la lut.
- Vois-tu ça, Torlillon ? .l.i":.ll bien! ça re'présenle
la seule c;.b.ose vaùanl quatre sous qu'ail jamais ocu·~
Yvonne. C'est les alion!;~s
de son père et de C,l
mère ... On va t'l.ch~r
de Jœ reLirer. On fera dt!s
éoono.rnies, quoi! Pas vrai, Torli lion?
Précieu s-e.tlll?] lt, il l,laça Je l'Clill des uljnc:.~
da n3 I.e alepin qui lui tenait lieu de portelfelljlle. Lt
l'Ame heureuse li 10. pensée de lu bonne action proje~é,
Vilal s'endormit et 1'6vn d'Yvonne.
Il faisait il peine jo\U', lorsque des COl1pS Ira ppés à so. porte l'éveillère-n L.
Qui pOL1v.oit vcuoÏr ~hcz
lui Ù. elle l1€IUre '?
Tortillon, le poil 'héli~s,
grondail sourdement.
Son ma!!J'·e le nt t.nire et courut ouvrir.
Sur l'éll'oit palier deux ombres se mouvaioot. VilaI recula interdit.
Devant liai se tenuient deux sergenls de vilte.
Cerles, le pauvre mru:chang de poupées n'avait SUl'
la conscience aucun d,étt.
Pourtant il la vue dc.'S agŒUs, le Mnndlnt fut
saisi d'une terreur irréfiérhie.
Il n'avait encore le pl' "cnt iment ù'anClln malheur défini, et cependant son cœur ~'ungois.
Tnstincti.vement, il recula ... et ce (nL d'une voix trem·
blante qu'il répondit à la question cl'un ,cs ugents
- Vilal, dit lc l\lan.cho l, (!'C'fl t mol.
All.ors les hommes pénétl'è.rent dons la chambre.
- Vital, vous allez nous sujvre. Au nom de la
loi, je vous arr6te.
...:.. Moi... ~\Ioi
1...
.
Ce cri de Sl1l'Prise épel'due ne pouvait 6mouvoÏJ'
les policiers. Pre.g.q ue ton jOli l'S, nu moment de Jeur
arrestation, les coupablQs ont Wl élan bien JOUé
d'indignation et de révolte.
- Moi!... rGpéla Vi.tal. Arr été 1.. Pourquoi? De
quoi m'accuse-L-on?
- Vous ne tarderez pas à le savoir. Allons, habillez-VO\IS .. . el pIns vite que ça ...
Machinalement, le Manchot olléit.
Pur la porte mal referméo ul1 s01lffle d'air passait et, duru; l'a.ngle où le grand lni tétait dresst\
les robes légèJ'les des poupées, agitée' pn.r ce so"Ifle, se mb-ent à frissonner ave.c un bruissement.
Tortillon tapi sous la tuble ne grondait. pl.u~!
obéis.sant à. contr~œu
è. J'ordre que v~nult
de lut
donner son mtlltr.€). Le COJ'lpS fl'émis.sûnt et Jc.s
ol'eilles en anière, i.1 fix·ait SUt' .les éLflange.ns un
regard p.Jein d'angoisse.
- Etes-vous pl'èl ?
- Je suis prêt.
- Allons, cn rouLe.
Tortillon kst.e ment, quitta sa cachette et, se
[aufùnnt, s'or lU le premier.
_ Pauvre 'COl'Lillon, murmum,,- son mnitl'e, tl.l
veux me suivre ... Hélas 1 où nous mùne-t-on ?
- Vous le v·erTez .. .
La porle claqua, envoyant un vent plus vi! ùa.ns
la fou,le des poupées. Et, LanllÎls ' qu,a le ~\IOJlc
hot,
d'un. pas ~(UI'd,
s'~lotgnai
entre 1 nge~s,
le silcnce se flt dans ,lu chambre ttbo,ndo:nnôc.
Un l'ayon <lo &ü'1Ml se gJjss" dans la ffitf\l1s·arl1e.
La journée s'annonçait belle.
Pans l-es squnres les béMs cll relieront en vain
leur ami le }"Ianl:hoL Ils reviendront chez e1lx, ra,pinut~e,
po<rlnn f. boudeusemeonl le (:jros 80\1 de~nu
JXUlIdant que, inuLi!IJc.s aUSSl en leur vame et. frllgJae
pafure, les panl.ins de Vil.o.l, de lems yeux l.'[fa.rés.
regarderon L couJcr les heme.,
�La 'Petite
III
ACCUSÉ
Dans la maison d'Yvonne, l'agi La Lion était extrême. Tous les localair.c.s s urexcités commentaient
le drame de lu. nuit
Le médecin, à son arrivée, n'avait su que con stater le décès de la victime, ct, su r l' ordre du
commissaire de ppli.ce, le corps devait reslf'r tel
quel jusqu'à l'arrivée des magis trats.
Le procureur de la République accompagné du
juae d'instruction se présenta au petit jour.
Déjà, d'après los re.nseignements recu ciJ.li s, le
cummissaire lSoup<:,nn,nait nrt ami de la marle, que
plu ";:l'IIJ"3 Il::.b:11I1 1:; f, l! Iii maison n.rn l·ltln:cnL avoir
vu venil' dan' lu soirée el que personne n'avait vu
reparLll'.
Yvette, déliranw, ne pouvait fournir aucun éclaircissement. PoulI.ln t, un nom san" cesse revenait
sur ses tèvres, cl pel'sonne ne démêlait qu'elle jetait ce nom comme uu cri d'appel; on ne remarquai! bien que l'angoisse de sa voix; Yvette, l'innocenle, elle-rn 'rne accusait son prolecteul'.
Ce Vilal qu'clic appelail élo.il l'homme venu le
soir chez l'assa<;!'>inée. On le fit nrrNer.
En nl'l'ivanl dr'vant la maison d'Yvonne, à la
vue de cette foule et des agents, le Manchot s'épouvanta.
- Qu'y a-t-il, mon Dieu .. . Qu'y a-t-U ?
La foule, le voyant descendre de voilure entre
deux sergents de ville, hurla, Iilenaçantc :
- C'esl j'ass':lssi n 1 A mort l'as!3Hssin 1
Vital, sans rrmcLrquer que ces Clis l'accusaient,
devina quc la vi('lime était Yvonne.
Tête basse, dan' un élan, avec un cri sauvage,
il se rua dons la maison.
- C'est Viln: ... L!' Manchot. .. Voilà l'assassin .. .
n montait., pOllrsuivi pOl' les voix cie colère, .et
la véTité s'affirmait à lui Lout en li ère.
Yvonne est aS';il:;sinée, et c'est lui, Vilal, qu'on
accuse ... Dans la f:hnmbl'e sanglantc, Il-evant le
corps égorgé, le malheureux s'erfondre à genoux;
il sanglote, sans \'o k autre cho~e
q'ue coite fenlme
qu'l.l adorait cl qui esl mOl'Le d'une mort all'oce.
Les ma&istrnL se regardèrent, émus. Mais tant
de coupables joucnl la comédie ...
Le procureu l' dit il mi-voix :
- Cel homme es t très fort.
El l'émotion s'ellvola.
- Vital, relevez-vous et répondez... Devant le
corps de votre victime, avouez ...
- Le COl'pS de mu victime 1 bégaya le !'vlanchot.
On m'acl~e,
moi, d'Rvoir Lué Yvonne.. moi !.. .
aUI1B,ü; don.né cenl fois ma vie pour elle 1...
110i ~i
- Si vous êle.'; 111 t1o<;cn l, nou vC11.IS aIderons il
le prouver. Répondez aux quesLions qui vonl VOLIS
êLm faiLes. Jj y a longtemps, n'cst-<:e pas, que
vous connaissipz cetle pauvre femme?
- Oui mon sieu r.
- Vous étiez parfaitement au courant de Soe8
habitudes ?
- Oui, mo nFiellr.
- Recevait-elle bcunr.oup de monne ?
-- A ma connaL'sance elle ne l'ccevrut personne.
- Que vous?
- Que moi, oui, mon ienr .
- Vous êLcs "C IIU ici hier soir 'f
- Oui, monsiel1r.
- A quelle heure ?
Mjll tl'ès n11it. Yvonne n'y otnit pas,
- Ii fai~ot
li n'y avait que la petite . .l'ai ntLcndu.
- Ah 1 Et Yvonne est rcntr'ée, n'est-ce pns.
llvllnt votr'e MpHrl?
- Oui, monSieur,
- D'où vrJ1nil-elle ?
- .le n'en SOiR rien.
- Vous ne le lui avez pas demandé?
- Si. Mais elle a r e fusé de me répondre,
U
Veux Sous .,
~
- Vou s vous êtes querellés à ce su jet ?
- NOIl1, mon sieur. Je n'avais pas à la qu el'eller .
Yvonne était libre de me confier ce qu'eJde voulait
ou de se tai re.
- Ah!... ah !... Et vous ne soupçonnez pas ce
qu'ellll'e avait été fa ire, où elle était allée?
Vital hésita.
I! soupçonnait bien vers qui avait été Yvonne,
Brusquemen t , .id eut La pensée qu'il OOIIDaissait
l' assassin ... Il ouvrit la bouche, prêt à accuser I.e
ba ron Ha oul de F olbe rt.. . Mais il lui sembla que
la victime elle-même lui ordon nai t le s ilen ce.
Ce t homme n'était-il pas le père d'Yvette, ?
Le rail'e arrêter, ne serait-ce poinl dévo Uer tout
un passé de misère qu'Yvonne vou lait taire ... risquer de faire proclamer par ce misé rab le sa paternité? D'ailleu·r s, il avu.i t j uré, lui Vita'l., à son
.a.mLe, alors que se croyant mo uramtc d Ie J'ui confiai t son -enfant, de to uj OUl'S empêcher l'orpheline
d.8 connaitre l'iniilme dont -elle éLait la. fille.
Le Manchot se tut. Son h ésil..a.tion n 'avait poin t
échappé au magisotrat.
- VOllS ne voulez pas r épondre, Vital 7
- Je ne sais rien .
- Faites attention q u'U peut être ~ our
vous de
la dernière importance de dévoiler 1emp10i de la
jou,rnée de 1a. victime. Si l'on r etrouve les personnes qu'.elle a vues, un e nouvell!e pisLe sera relovée, "\"otre innoocnce peut-être reconnue,
Le Manchot regarda le visage exan~u,
les lèvres doses de la morte, ses yeux r évulsés.
Il étorrffa un sanglot et répéta, très ferme :
- Je ne sRis rien .
- C'c!'> t bien. Donc, nous d1son s que vous êtes
venu ici hier à la nuit tombée et que, n'ayant pas
rencontré Yvonne, vous l'avez attendue. Elle est
ren trée. Vous avez causé,et p uis vo us êtes r eparti ?
- Oui, monsieur.
- Que faisaient Yvonne et sa fille T
- YvetLe allait se coucher. Sa mère le lui ordonnait. bien qu'il fût tôt encore.
- Quelle heu re à peu près ?
fi devait êtro h ui t heures et de mie .. . Neu !
heures au plus.
- Et Yvonne?
-: Yvonne n'avait pas dtné. Elle me dit qu'elle
allatt prendre quelque chose ct se coucher aussi.
- A.lors vous l'avez quiLtée. EUe para is'su.i t
calme '1
- Ou~
monsieur.
- Vous n 'avez ren~
o nLré
p'er sorLIle, en vous retirant, dans l'escalier ?
- Non, monsieur, per sonne.
- N~ en bas, à l'entDée non plus?
- Non plus,
- Vou n'avez rien remarqué aux abOI'Ù::I de III
maison? Person.ne ne rOdai t pal' là ?
- Il passait du monde. Je n 'avais a ucuuc rlll.iOn
de me méfier des passants.
- Vous êle renLl'é dir.ccteme nl chez vous ?
- Oni, monsieu!'.
- Qu Iqu'l ln VOliS a-t-i l Vu r entre r?
- Je ne suis pa!'!. Moi, je n 'ai vu pcrsonne.
- 1\fonc;ieur.. . 1\lonsicur le j1Jge, est-ce que je
puis purler?
ViLal soC z'elourna el reconnut la figure chafouine
d'un de ses colocataires.
C'étail. Un petit vieux ~orc1ide,
un juif é.;houé en
ce .q.llorl.lcr p!~uvr'e,
.,"H.pl d:ms UJ1J éLroit log/ement
VOl~1
de c~luI
de VItal. Il vivai t en pl'èta.nt à la
peLlle scmalOe. On le rooou tai t., on le haïssait et on
le fl~tai
, ayoot beso.in souven t de ses dangereux
servIces.
- Mes bons .rn.essieurs, je buis un honnê!.c
homme .. ql~nd
J. ru su de quel crime on accusait
mon. vmsIn,. Je ~ULS
venu, ~l'Oyant
!Xluvoil' peut-Oln)
6claU'cr la Justice en disant ce que je savais.
Il ta:llait bien que l'affreux usurier 'CIL certain
�Çlf'-
La 'Petite " 'Deux Sous"
=====================
de n'offrir aucune prise à. III jus liœ pour s'en approcher ami bénévolement.
En le voyant, Vital eu t un mouvement de recul.
Il éprouvait plus que du mépris : un réel dégoûL
pour cet être ri qui profitait de la misère de ses
semblables.
Plusieurs fois, VitaJ! avait trahi ses sentiments
à l'endroit du juif, et, grâce il. lui de pauvres gens
avaient pu évite-r de r ecourir il. l'usurier.
Celui-ci le sBIVait e t venait s'en venger.
- Comment vous appelez-vous?
- I.saac Siméon.
- Votre pmfoosion?
- CoU ecLioone ur, mon.sieur... collectionneur.
- C'es t-il.-dLre brooonteur ?
- Je n'ai pas de magasin. J'ai réuni dans ma
chambre quelques objets précieux...
- Que vou s revendez?
- Seulement lorsque la né.cessité m'y force,
mOI1Sieur... Seulement alors. Mes bi.belots sont une
partie de mon cœur '!
- Que savez-vous?
- Mon bon monsieur, je connais bien cet
homme, c'est mon voisin. Je sllis qu 'il.. .
- Vous serez appe lé comme témoin en temps
et lieu. Maintenant, répondez seulement il. une
question : Avez-vous vu rentrer Vital ?
- Non, non, monsieur... ni entendu... Lui qui
fait d'ordinaire tant de bruit dans l'escalier et qui
s'arrange toujours pour cog,n er ma porte en passant avec sa perche, la perChe de ses poupées,
monsieur, il est j}aJSsé comme une ombre. Mais
très tard - oh ! très tard dans la soirée ... Tl était
bien onze heures, j'ai ouvert ma porte, croyant
entendre du bruit, et j'ai vu de la lumière sous
celle du voisin. Oui, il. étai t bien onze heures.
- Que faisiez-vou s il. oette heure-là, Vital?
- Je préparais ma marchandise pour aujourd'hui.
- Vous vende?; des poupées, m'a-t-on dit?
- Oui, mon~ieu
, r.
- Alors, jusqu'à. onze heures vous a'Vez veillé
pour arranger vos poupées, après être rentré d'assez bonne heure?
- J'ai quitté Yvonne, je le répète, ve1'S huit heures et demie.
Le magistrat se tut un moment. Puis, sur un
ges.ti' de lui, on p.résenta au Manchot le cout~a
pl~m
de sang qui avait servi à égorger Yvonne.
VItal eut un geste d'horreur.
- Regardez... Regardez bien... Reconnai.ssezvous ce cou teau ?
Le visage de l'a.ccusé s'empourpra ... puis devint
blême. Il voyait SIe lever CO',n(.r.e lui des charges accab1a,ntes. Il chanœla, hébété.
- Répondez. Reconnaissezcvous ce couleau?
- C'est... le mi-en 1 bégaya Vital.
- VOIlS l'avouez. C'est votre couleau qui a servi
à tuer la victime?
- Oui, fit Vital, c'est mon couteau. Je l'ai laissé
ici hi er soi r. Je m'en étais servi.
- Pour quoi raire?
- Pour couper les ficeHes des pantins.
- Et... oos pantins, qu'en avez-vous fait?
- Je '!.es ai emportéoS c.bJez moi, dans lIne boIte.
- Il est fllcheux pour vous que ce soi t votre
couteau qui ait précisé:ment servi à frapper Yvonne.
Menta:lement, Vital suw!iait la morte.
;AIla~-e
permetLre cetLe chose monstrueuse que
lm, Vl!al, lm, son viei.l ami, soH accusé de l'avoi.r
~saSln.ée
?'" Vital sentn.lt se resserrer aul.our de
lUI, oomme ' l~s
mailles d,'u,n fi,let, l.cs P],U,5 accablantes présomptiOns d,ml on fera it auLomt de preuv~.
To,udt à C.oUlp hl se souvint de la reconnaissance du
M on.- . e-Piété empor Lée la veilLe 811 soir, celte reool!nalssance CI volée" à YVOO1ne, afin de pouvoir
rellrer se~
pa\]vres bijoux.
~ l e était là" d~n.s
sa poche.
SIon le fouillait, ce serait une preuve de plus ...
et qui parattrait décisive. Involontairement, il
porta la main à la poche de sa veste.
Des regards aigus ne le quittaient pas.
On surprit le mouvement. Sur un signe du magistrat, un agent fouilla l'ac.cusé.
Vital n'essaya pas de se défendre,
I! secoua 1& tête et laissa. couler ses larmes.
1
IV
CONDAM~
Après le réquisitoire accablant de l'avocat général, on se demanda ce que pourrait dire le défenseur de l'accusé . C'était un tout leune homme,
nommé d'oJ'fice à ha défense.
Vit.8JI. le Manchot, ac.cusé de meurtre SUr la personne de la femme Yvonne Larue que l'on soupçonnait être sa maltresse, pOUl' lui voler une reconnai.ssance du Mont-de-Piété, n'inspirait de compassion à personne. Bien que le misére.ble s'obstin tH dans ses dénégations, sa culpabùité ne faisan
aucun doute. Il s'agissait simplement de prouver
qu'il n'y avait pas eu de pr-é m édita Lion.
Tout ce que pouvait espérer le Manchot, c'étaiL .
de sauver sa tête. Ré. igné, morne, depuis son
arrestation, il avait laissé collier les jours sans
une plainte. Son avocat lui-même n'obtenait de lui
qu.e ces mots: « .le oSl.hlS innocent. Il
.
Affirmation inutile, puisque Vital ne .pouvait, ou
plutôt, ne voulail rien dire de plus. Cer·tcs, la tentation lui venait parfois de lancer la justice sur la
bonne piste. Toujours, au moment d~ dénoncer l'ancien amant d'Yvonne, un scrupul e l'ar.êtait : le
souvenir du serment fait à la morte.
Non, ja,mais, par sa faute, Yvette ne risquerait
de connattre son père 1
E't ~uel
ohose doublement horrible ce serait
pour 1en.fan.t de le reconnaHre non seulement indigne par le pu..c,sé, mais, de plus, souillé du sang de
sa mère , à elle 1
.
Non, mieux vaut que Vital. soit condamné.
Qu'imporle sa pauvre vie 1
La salle' d'audience est pleine de monde,
Ce n'est point là le public élégant des crimes 'PMsionncls. Ceux qui sont venus assister à l'aerair,,
de Vital sont, en grande partie, des gens de son
quarlit.;r qui l'ont connu et ne peuvent s'~xpliquer
son cnme.
L'avocat de l'a'Ccll5é se lève, très ému.
Son émotion ne vient pas seulement du désir de
plaidel' bri!1amment une cause qui. justement
est désespérée, pourrait le mettre en
parce qu'~le
vedelle SI, par chance, il obtenait un verdict de
oléJmencc. Le joeu,ne maltre René Barrance est sur·
tout ému de compassion.
Bien que son client n'ait rien voulu dire qui pOt
éclairer la justice, la conviction de l'avocat s'est
rai te. Son instinc t professionnel se refuse à voi.r
dans cet homme aux yeux fmncs un voleur et un
assas sin.
En mots vibrants, il dit la rencon tre de Vital el
d'Yvonne sous le porche de l'hOpital, le d.6vou&men L de cet homme infirme, sa.n res.c;ources, il de
plus faibles que lui : une femme encore malade el
un nouveau-né. Il rruprpell,e lu tend.resse vraiment
p.&teI'nelle de VitaJ pO'Uü Yvette, les so.ins d{)lnt il
aid e la mère il enlouJ'e'f la petite oréalure.
Quel motif, aut.re qu'une subite folie, aurait pu,
en un instant, [aire de , l'ami fidèle un meurtrier?
Et cependant tout accuse Vital.
Pour expliquer la pré~enC'
sur lui de la reconnaissance du Mont-de-Piété, pour expliquer comment son propre couteau a pu servir &u crime, il
ne trouve à dÎl~
que des choses très simples trop simples - qu'un jury se croyant bien a.visé ne
saurait se résigner à admettre,
�~
10================================== La
Eh bien ! matf:re Barranoe ne craint pas oe l'affirmer : elles sont vraies, les raisons que don~
Vi.tal. Un.e voix d'enfant accuse aussi I.e malheure ux ; mais c',es t la voix d'lLOO enfant détmenle qu'il
a même été impossibJ.e de f.aire paraltre Il la barre
des témoins. Et ce ori éperdu jeté sans relâche par
YveLte déliraJ),te : « Vital... Vital! » N'était-{!e poin t
plutôt un appel 8JU secours?
.
Le front caché dans sa main, prostr é sur le banc
d ' in~e,
le Manchot n'e.nteni1ait que vaguement
l,e s paroles de son défe.n:s.eur. li n 'e~l?éra
jL
plus
rie.n de la pi tié des hommes ... Il songeall à Yvette.
De tout ce qu'il pouvait redouter pour l'orpheline le pire s'est accompli.
L1e.nfant, revenue à la santé, n'a pas retrouvé
la raison. La voi05ine qui, charitabLem ent, a recueilli la pauvre petite 8i]J(rès le crime 8Jllaü - ne
pouvant conserver la charge de l'lnnocente - la
remettre aux mains de J'Afisistance publique, lorsqu'un fait étrange s'est présenté.
Un fait qui, plus que tout ce qui déjà l'aoccable,
effraie Vilal : le juif Siméon a dema:ndé et obt.enu
lu charge d'Yv.ette.
Oui, dans cet anLre immonde, où le juif et sa
femme - une vieille plus sordide encore que l'usu. riel' et pr~te,
affirme-t-on, aux J)Lres hesognes tralnaient leur existence abjecte, la pure e L douce
petite victime allait êtt'c condamnée il. vivre.
Devant le désespoir de son client en apprenant
cette lamentable décision., Me Barrance avait promis de s'employer il. [aire reprendre l'enfant; mais
il échoua dans ses démarches.
Rien de précis n'était [ol"ITIuié contre Isaac. Siméon ni cont.re sa femme Rébecca. Us pouvruent
justifier de moyens d'existence, Leur véritable [açon de vivre nul autre que Vital, pann.i les pauvres gens frustrés, bernés par eux et encore en
leur pouvoir, n'aurait osé la dévoiler de crainte
de terribles représailles.
Quant aux accusations, si formelles fussentelles, d'un malheureux accusé lui-même de meurtre, contre le premier d.e ses témoins à charge, il
était bien évident qu'on n'ert tiendrait, qu'on n'en
devait tenir aucun compte.
Dans l'impossibilité d-c tenter dovantag{3 pour
tnmquilliser son client, Mo René Barran('>8 s 'était
engagé il. ne point perdre de vue l'orpheline. Mais,
Vital
si bienveillant que dût être oe ~r . oteclur,
cam prenRit qu'il ne poun'ait protéoge.r l'enran l que
de fort loin et serai t excusable, aprè tout, de se
laisser di s traire d'une pareille tâche.
Un autre tourment reslait au Manchot.
Il savait Yvonne en possession de preuves accablantes contre le pseudo-bruron de Folbert. Qu'élaient devenues ces pl'euves ?
In terroger à ce snjet son avoc!~
c'eût été lui
apprendre J'existence de l'O!mant d'Yvonne c t rendre inutile le sacrifice fait au suprême désir de la
morte. Si la poerquli.sition op6roo au <lom icile d,e la
victime avait amené Jn découverte de oos preuves,
ln juslice eùt orienté Jes recherches d"lm a,utre eOté, et VLt.o.l l'oaurait appris. En q~('.ue
cache!,te
YVODnr serrailrel1e œ qu'eUe appelruL (( Le dossler
du criminCil » ?
PourvlJ que le hasard noe mctlr. jamais so us les
yeux d'Yvette la révélation du ileCI'Ct odien.x: de sa
noJssUlloo 1 Cal' Vilol n-e peuL I.JI;CClpler la pCt11.b'ée
que l' nIant SoQit à jomais I)J'ivé e de ;JI. .raisOtn.
L'avocat !d'est tu.
La Cour s'est reLirée. Le jmy d6liMr·e.
ViLil,1 semble cl6shnLér.cs.sé de SClIo1 sort. Emmené
par les gan·dIn.l'mes, il est SOI'lj 0. son tour. T1!'ès
pôle, très amu, ·MG Harrance ]'oCn(:CJ\lrD{§e.
.
- Oui oni, merci, répond l,e M,'..nchoL ; ça ne Jru t
..
rien... ç~ n e fai t rien.
L'avocat s'inquiète. Est-ce que son client va JUSqu'à l'incon;;cicnce ?
Vital 0. rcpr1s sa place. De nouveau, les robes
..
/
'Petite
U
'Deux Sous "
~
rouges, l'hermine blanche du magistrat, les robes
noires des avocats, papillotent de vun t ses yeux qui
regoardent S8JOJS voir.
Et voici que le président du jury se lève.
C'es t oui sur toutes les ques tions, sauf la prémé- .
oitation qui est écartée. Vitèi.l est eondamI1é aux
travaux forcés à ~pét
Li té .
v
CfŒZ LES S I M~ON
Vine odeur Acre, nausoobo'nde, méli/lnge de crasse,
de moisissure et de graillon, emplit le logis des
éjpoux Siméon .
Le,s " objets d'art ll , les « antiquités II qui sont
« une pa.rtie du cœur » d'Isaac sont là entassés,
pressés, ne laissant entre eux que hien juste la
place de se mouvoir et se rvent, au hasard de leru"
emplacement, il. des usages uu" 'quels ils semblent
peu d,es ti,n és.
Une consoJe Louis XIV aux lions dorés était devenue table à manger.
Dans un bonh~ur
du jour, Réibelcca serrait sa
v aisselle, et une' crédence Henri II tenait lieu de
garde-manger. Ce fut encore ceUe crédence qui
servit de lit à Yvette. Des harde s pos ées SUl' la
tablette inférieure rempla cèrent matelas et couverture. L'enlrult, pelüe, frêle pour son âge, y tenait
aisément.
_
Elle s'était laissé emmener par Rébecca sans résistance. SDS yeux très grands, très lumineux,
p erxliB.nt · leur expression épouvantée, se posaien,t
sans tl'ietesse ni joie S'llr les gens et les ~)bjeLs.
ELle r&pond d'un signe aux questions qu'on lui
fait, et seUil.emelIll lOl'sque ces questions touchoot
aux choses matérielles :
- As-t.u faim ?... ' froid ? .. Veux-tu dor mir ?
Elle hoche la téte. parfois pron.once un CI oui »
ou un « non II disLrait.
Mais si 1'00 veut la questionner sur ses pensées,
&ur ses souvenirs, son rega.rd devient fixe, -eilae
s 'immobilise muette et comme absente.
,L'adoption de l'or'Pheline par le couple Simoon
causa cLans le quartier' une surpri se extrême.
Quelques naïfs admirèrent sans reslriction ce
beau geste de iénérosHé. Les plus malins cherchèTent quel profit ~ac
et Rébecca espéraient pouvoir
lirer de cet acte.
Vital subissait sa peine.
On oublia vite sa pOolo et trisLe viemme, et
qui donc s'inquiéterai t longtemps d'une petite
fille il 'peu près idiote, l'ecueiLbe par un ménage
d'usuriers 1
Cependant, Mo Barmnœ vint visiter l'enfant.
Son cœur se serra devant l'aspect repou,s sant des
deux juLes et de leur demeure. Mais Y.lrette, proprement vôtue, pailisible, presque , ouriante, ne semtrisle, non inqui.et
blaiL point sou (frir. li se re~ia
sur le sort de sa petite protégée et, sur la demanda
même d'Isaac, il promit de revenir .
Lorsqu':[a Lint sa pl'@rne.sse,. t;lD mois plus ta.rd , les
Siméon, emportant lell!s vl€llUenes et e~mnat
]eur flUe adÛ'l),Live, avalen t qUItté le qU8.l'Lier S8Jt1S
laisser d'fl<lrosse.
L'avocat sc dib :
Je les .fera.i rechercher Il.
Mai s les jours pas5èl'ont, amenant leurs préoccud'Yvette.
paWons, leurs joies e~ le disL~.aY8nt
PerSOJJ.ne ne se mIt Con pelOe de retrouver les
usuriers. Au de'l à du Panlhéon, clans u.ne étl'oite
rue de Paris d'wtan, une bon tique sombre servit
de nouvel a..,He aux vieux meubles ct 8;UX bibeJots
d'I&aac. La oJ'édence ab,rit.aJt toujours l'amas de
chLl'foThS sur lequel dorml'lit YvelLe. La oonsole,
Voendu>c, était remplfùcée dans son oftJ.oe de table
par un guél'iiClon ner.ouvcrL doP, Loile ai rée.
Dans ra["l'jè~-boutiqe,
les époux avaient leur
lit à peu près conJor,Lable, sinon plI'OIpra.
\
(1
�~
La 'Petite
U
'Deux Sous
Il
Là, Yvette n 'entrait jamais. Elùe avait le dewoir ça 1 Imagine cette gosse en deuil, toute pâlucllOtte,
d'essuyer de temps en temps les v,ieux meubles
Un p-eu sdmple ...
panni lesquels eUe vivai.t ; de ba.1ayer les éLl'oits
- Un peu si.mple 1 interrompit narquoisement
espaces restés libres, @l1e fai.sai t cela docilement,
le vieux; tu peux dire tout li (aiL idiote.
le mieux poSsible, retrouvant instinctivement les
- Non. Ellie m'oMit W'ès Dien, Je saurai la fmlre
gestes précis et ad.roits, le goû,t de la pIl'opreté marcher, je t'en réponds 1 D'ailleurs, les premiens
qu'elle tenait de sa mère,
j,owrs je reste.r.&i près d'elle... c'est-à-dire pas Lout
Elle véout aiIlJSi qudque temps, inactive duraJIlt
près, Faut pus que nOus ayons l'air d'êl;re ensemune grandte partie du jour, assise su'!' un vieux
ble. Mais ' je la surve'ililerai, Donc, je te à:Ls, imaJgine un peu cette gosse.line, jolie - car elle est
tabouret, les mai.ns in€lI'tes et les yeux V18gues.
jolie la coquine - offrant ses pantins p,)Ul' deux
Isaac ne la rudoyait jamais .
.
_ Il la regardai t avec Utl étrange sourire de mé- sous, avec ce regard supplian.L.
- C'est vrai que ses yeux ont toujours l'air de
chanceté sournoLse, d'avide cupidi té. Si elle avait
demander quelque chose, reconout Isaac; s.i seupu saIsir l'expression de ce reg()rd, l'enfant se rct
lement elle savait quoi. ..
épouvantée. Elle s,e serait effrayée à tort. La me- Ça f.ait rien qu'el!le le sache pas ... Les· gens
na,ce d'lsal/:lc ne la vi.sait pas. Elle a'llait plus loin,
pen.seront qu'elle veut ses dellx SOI19. On. pourreit
plus haut que la chéLive p.eti te créature.
la mener jnsqu'au Luxembour'g". toi qu'es enragé
Mars gonflait les bourgeons.
.
Le prin t.emlP'S tout proche rendait plus sombre et pour la flure pl'QlDener !... ça. lu,i en f-era de l'exer,plus triste la sordide boutique d'Isaac, où jamais cice. BeLl, quoi... Tu réponds rien. T'es là, planté
sur tes jambes, avec Ulfl air d·h~!>iteT.
n'entrait un rayon de soleil Yvette s'étiolait.
- C'est que je voudrais pas qu'll lui arrive rlee
On lui permettait bien de s'asseoir à la porte
avant...
cc pour p1'en.d:re l'ail' ". Mais L'air d.e cette ru el·Le.
- Avant, aV6Jnl... Veux-tu que je te dise?.. Tu
domeuraü . LoUTdI, empesté presque autant que l'ates ~aboul!
O'a.1l1eu:rs, pour Lon prOjet, t'as pas
mosphère de La boutLque.
Isaac s'inquiéta. Il ne lui plaisait pas de voir besom d'attendre...
- Si, c'est pas encore temp's. Plus j'attendrai,.
dépérir yv,eLte. Il vOlJlut exigew de Rébooca q,u'eTIe
plus le sœnd8l1e sera gros... el plus Qn me paiera.
fit [aire à l'entant cbaque jour une courte prome- Savoir 1... En tout cas, mOl, ça comme-JloCe il
nade. Il s'attira une de ces rebuffades pimentées
m'ennuyer de nourri.r c'te rJetJte pour rien, FmIt
de !Fos mols dont Mm e Sim-éon avait I.e secret.
qu'elle gngne sà vie ..
C'était une ' courte, grosse, molle créature, au
- Faia à ton ldée, concérta Isaac, Seulemenl,
visage bLafa1'd, aux éheveux déjà gris. Mais ume
1 J'iii.! besoi1Il,. d'!f:)~.
telle couchoe de c.ras~e
graisseuse recouvrait ses gare, qu'iJo lui anrive ~"1el
bandeaux qu'il devenarL presque impossible d'en
distinguer la teinte r-éelle.
vr
Isaac au conLraDwe était maigre, desséché, noir
comme une VT8.ie marme . Son crAne chauve et huiUN JEUNE M ÉNA
GJ~
leux s'abntait constamment sous- une calotte de
velours ro.'Pé
Mme la baronne Raoul. de FnU>ert s'éveilla tns
Siméon ne se souvenait pas d'avoir fait obéi.r
tard, ce matin.Jà.
Rébecca. il renonça donc à obtenir qu'eLle nt proVoulant r~te
son retour de voyage, elle avait
mener Yvette Alll.&i rearoquevi1llée SM la mareh.e
donné la veille UDe fête tnerveilltlLl Se err son hOtel
du seml, La petite somnolai,t, fiévreuse, de longues
de la rue de Lisbonne - un adorable nid meublé
heul'€:S dUTan't,
.
tou t exprès pO~I'
elle paT un mari troop épris, obéisUn jour, un peu. dJe vent s'engouffl'aDt dalIls
sant à S€-S momdres caprices.
la :'loe fit volîïger SUIl"' le trottoir une feuil1e de
Et dans sa chambre d'un mauve doux au plapapler mince d'un rose vii, qui tournoya.. glissa le
fond sexué d'ru, dont les flèuJ'S se retrouvme.M
long du rw.s.se.au et V'imt s'aplatir auprès d'Yvette.
sur Je tapis, la jeu.ne femme, les yeux grandIS ouL'enfant machinalement la prit.
verts, . se de.man.doe sri. elJJe ne prolonge pas un rêve·
. C'é.bait dl\] poalpier de soie plissé, un. débris d'a:bt~
heureux,
jour jeté par une m~nagère
.
Un COl1p léger fImp.pé à la porte a.roaclla r-.rargoo.
Au froissement du papie:r entre ses doigts,
bien timbrée, cares,.
Yvette parut s'animer. Ses yeux brillèrent; elle rite à. ses songeries. Une voi~
sante, demanda :
mania un instant le chiffon brllissant., sans ~es!J,
- Je puis entrer '1
pr,écis , Puis Les mouvements de ses doigts s arferEL LouL aussitOt., soulevant la portière, le baron
ITUrent; elle enLT'ouvrait les lèvres, respirait plM
Raoul parut. Un geste ,tendre l'appela..
fort! un peu de rose aux jpues.
Penché sur le grand lit Lout IIlOU9SeUX de den~l1ent6,
entre ses mains fluettes, le prupier mince
telles, il répondit. aux mots cnressMts et mièvres
prit une forme de corolle dont elle évasa les bords.
dont 00 l'accueillait. Puis, s'llsseyo..n.L au bord d\l
Un peu de papier encore, massé au. sommet du
lit et gru'dant prisonnière un e pctd.c main que tout
cornet, figuTll vaguement un corps.
il co~vrt
de bal.sers l'U,p1dr;.s et Légers,
- Qu'est-ce que tu fabri.ques ? dit 14 rude voix ~n ~aI'l<nt,
de Rébeœa.
JJ s hn.fo1'l11>a : N était..e.J.l-o ~)1l
lasse de 80a nuit de
. Yvette sO'\lIl,eva lia peitibe chose infonne et, un fêLe? Qu'elle avait donc éLé charmante 1
- Vraiment, vraiment, diL Mafgu'Jrite vous m"
éclair à'intBlligenoe dans les yeux, e.lle répondit :
trouvez. jolie?
'
- Poupée ...
- Tiens! fit Rébecca.
Elle s'étonna, ,sincère en su sm'ppise,
Elle reprit., d'un aocent dubitatif
Non, ~argueJtc
I?e peut, sa trouver jolie,
- Tiens, tiens ... Au faH 1
Elle na pas ce temt dont la mer'veilleuse transIsaac dormBU au fond du magasin, Hi1le l'appela,
parence supplée à la réello bE'a lltiJ, Ses clleveu'X', à
- Viens voir ça .. . La. petite se souvient de son
la vérité O<pulenls oL soyeulil, soM de cette nuanoo
métier 1... Ellie sau.rait peut-être encore habiller des
cijê.Lain sans renets qui court les rues, Elle a III
poupées".
bouche grande, très rouge et bien meublée mais
- Et puis &près ,
d'un cLessin un peu lourd . Le nez, légèJ'emènt re--. Après? lues hommes sont stupides 1 Après,
troussé, donne UM expression de gnict6 jeune if.
en~
Ira les ve.ndre, ses pnupMs ..Je lui arrangerai
tout le visage.
un j?1i petit. éventaire; une perChe comme oelle
Les yeux mêmes de Margumite sont sans édl'at.
de VltaJ. sel'aLt trap lourde pour elle, Regarde-moi Du même brun que l(ls chevetUi, ils n'ont du.
1
�La 'Petite
charme que lorsqu'Hs son t emplis, comme à cc
moment, de tendresse rayonnante.
Mais l'amour n'embellit-il pas tout ce qu'il tou'che ? Il n 'y a c!OJll: flen de surprenant il cc que
le baron Raoui de Folbert, follement épris de sa
femme , la d.éclare la plus b'elle de toutes. Lui est
de Lous points séduisant ; élégant et distingué
d'·n.!lure wmme de vi<;age, avec celle grAce un peu
efféminée so us laquelle on sent la v~ u eur
nerveuse et qui rend s i comp-lètement irrésistible cel't&ins hommes .
Sous la fine moustache blonde, la bouche riait
sinueuse, les ye ux caressaient.
Marguerite extasiée conlemplait son mari.
L' intensité du bonheui' I?résent alarma soudain
la jeune femme. EI,le :\JIPI)i,IU, l, cœur gonflé.
- Vous m'aimerez toujours, Raoul?
- Toujou!\S 1
Il la regardait de ses yeux tendres, et ses lèv;res
ponotuèrent le mot sur la petite main frémissante .
Et cependant, un je ne sais quoi de distrait perçait dans son a('cent, el Marguerite se sen~it
tout
'
à coup moins heurense .
Involontairement., elle demanda :
- Qu'avez-vous?
li parut surpris de la question, fronça un peu les
sourcils.
- Qu'aurais-je? commença-t-iJ.
Puis brusque men l. pl'€nan t son parti, il avoua :
- Eh ! bien. oui, j'ai quel,que chose ... Oh 1 ne
vous alarmez pas, DH:l chéric; c'est à peme une
contrariété. Je vous l'au1'8.is cerlaulement oachée
si votre cher l?etil CŒur de sensit.ive n'avait si vite
pressenl.i celte Ol11bl'e à won ciel.
Il se mit à T'ire.
- Vous allez voir comme il y a dû quoi se Lourmenter. Il s'agil du chaulIeur. En visitant l'auto
tout à l'hecure j'ai rprnillrqué deg négligcllces. J'ai
~rondé
- c'était Il lo n' druiL - on a riposté ... bref,
-Je me suis sottelô' ent emporté et j'ai mis Gréne let
à ]:a porte.
- Grénelet. .. Vous avez renvoyé GreneJel que
papa apprécie tellf'lTIent 1 Il était resté dix ans
chez nous, et mun pèr'e a fait, je crois, un gros
sacrifice en nous 1(' ('édan L.
- Ma chère, que vouJez-vouls 1... Mon beau,père
reprendra son précieux GréneJ~t
et Lout Je mon<le
sera content. Cel hOlnrne. préci ément parce qu'hl
était plac6 ici pûr votre famille, se croyait tout
permis, et je ne puis, moi , sUl>porter les impertinents. I\lais nou~
vnici sl"lns chauffeur.
- 11 ous tel\1 des excuscs.
- Ah 1 non, ma l'hère. Je ne reprends jamais
un domestique congRlié. !\lais raSSllr'ez-vous : nous
l'aurons vite remplacé. J'ai déjà téléphoné à une
agence... I\,lon Dieu, que vous êtes donc exquise
dans l'envolemrnt de vos cheveux 1.. . Ma chérie,
je vons aime bien.
Et Mme la b:lI'nnne Raoul de Folbert ne pensa
plus au pauvre Gré-nf'let. serviteur dévoué sacrifié
en un moment d'imr..rtlience.
Le soir même, un <'hullrreur se p,résenLa rue de
Lisbonne, envoyé &:1115 cl()u~
par l'agence à laqupQ.1e le buron s'pl fl il adressé. Il apportait les
meilleures réfprr'nrN' et ce qui déciJa immédil1tement M. de Fol bPI'! Il l'arrêter, C'<lst qu'hl retrouvait en cet hOITlIn<' ,me ancienne conn.aissan.ce. Il
l'apprit à l'vfarguc'rilp avec une pointe d'émolion.
- Vous souven,'7.-vnn,'l, chère amic, du lemps
où, fiancé, je W'nois vnus faire ma cour? J'étai s
amené par une ouln IOllée nu mois que condui,~at
toujours !~ mêmf' IlfITl1me. Ull certrun Boppo. C'est
un Italien. U chel'I'hnit jus tement une place dans
UM maison particu liè r·e.
content,
- Je suis sll/.i.q fllilr que vou,s ~nyez
Raoul; et, ClOmmof' li \' 'ilS. il me 1~
que ce 13 l'lX>
qui vous nmennit près cie moi wH dorénavant à
notre service ... QUIlIlI li. GréneleL, m.aman m'.(\ téléphoné pour me demander des exp li ca tiOllS ••T'au-
Il
'Deux S ous "
~
rais aimé qu 'il rentrât à la ma ison; mais du moment qu'il s 'est montr é insolent avec vou·s, mon
père pense ne 11I1S devo,ir le r eprendre.
- C'est inOlliment déLicnt de ln. purt de lI1. Martet, répond"it le b:lllWl; je l'en rernc.rc1erai
VIT
DEUX
sous 1
On était à la fi n de jui.n. u"ne chaleur écrasante
pesait SU!' l'a gr&nd,e villie.
Dans les squares, dans les iardills. où de fré·
quents arrosages maintenaient 'une fralch eur rolative, des enfants jouaient mO'llemenl sous 1:\ surveilLance de bonnes somnolentes. Dan s J'u ne des
plus vertes allées du Luxembourg, des petiles filles et de tout jeunes garçons s'empressaient au toul'
d'une miette aux: joues pales, aux y"eux de rcve
qui soutenait il. deux mains l'évrn ta ire rel en u à
son cou pU!' un ruban et qui répétait, d'une voix
cl,lire, étmnge, comme lointaine :
- Deux sous ... deux sous ...
Ce qli 'oCl{~
venuaJl, c'élatt de très pel.iLes p<Jupées
de bols, vêLues de pa.piers m ulticoJores.
~lLes
semblaient lJ'Hre pus aussi pirnpiùlles, les
petlles poupées, que celles dont jadis VUn.! si
fièrement pronlenall l' étalage.
Tels queols, los pllfiLins LrOUVlaoient des amaLeuŒ'S
aux juvcniles admilutions ct, depuis quatre années
que chaque jour de beau temps ln petite li DeuxSous Il, aiusi que la nommaieut les enIu.llts, venait
au !--uxembourg \'rndre ses poupées, les mêi'en les
avalent été rures.
Toujours de noir vêtue, toujours pAie, enclose
dans son demi-mutis me, la frêle mu {'phunde ne paraissait ressentir aucune joie du succès de sa mal"chu.ndise. 1\ 1orne, e,lle ré;lléto.it le refrain dont sa.
clj.entè~
.a,vuiL fait un sUl'Oom
- Deux sous ... Deux sous ...
On ne iui aVI'.it jamais entendll prononcer d'autres mots. Aux ques/.lons dont parfoi.s on la pressait, elle ne répondait rien, ne sembLant même pus
leg en lendre.
Perso~n
n'aurait vowu profiLer de cet apparent
engourdissement d'cs[lrit pour nuire à l'innoc en te.
Les enfants avisaient à ne point froisser les fragUes bibelots t'n choisissant la poupée lll'éférée;
pas un n'oubliait cie lui en remettre le pr!x qu'elle
n'elH pas songé à .réclamer autrement que pu.r son
refl'l1Ïn :
- Deux sous. .. Deux sous ...
Au reste. la petite Deux-Sous pOSSédait un farouche protecteul'.
Un tllTreux caniche ~ I é maigre souffreteux
l'attendait chnque jour à: l'èntrée d~
je.l'CIin l'ac:
compagnait et ne la quittait pas de Lout le Lemps
qu.e d.lLl'ait La ~nte
. .?u:is lorsqu'elle reparta.it, iJ la
sUlvatL le nez druns sa jllpe.
Les plus tLgés des en(a.n.ts habiluéa du Luxembourg se souvûnuien.L de l'entrée en scène de ce
[>ersonn.age. Il y avn.it aklrs peu doe Lem~s
que
Deux-Soli S venait vondra ses [}OU [)Ocs.
Un jour, un chien que pourchassait le gardien
était vonu se j~Ler
oans \,<'-'l jll.mbes di} \0(1. Ollelte
et, tout aussitôt, cessant de fuir, li s'était mis n
japper joyeusrn~t,
toumant autour de la petiLe
cn remuunt IrénélIquement ce que la barbarie des
hommes avait bien voulu lui laisser de quen .
L' nfant l'avait regnrcl6 d'abord sans rien dire
puis s'était mise à pleul"ûr.
'
- A toi, ce sale oohot? demanda le gardien.
D'un signe ete lête, la pelile dit oui.
- Et. tu pleuf'es pal'Ce que je le chasse, reprit
le gaT'<lien ~nhome.
Pleure pas, gcsselinc, mEUS
garde ton chllCn près de toi ; aLLache-Ie, ça vaud ra.
m~eux
.
Decux-Sous n'attacha point l'ami retrouvé.
;
�~
n
t3
La 'Petite" 'Deux S ous ..
De lui-même il s'assit à coté d'elle, prêt à délendre l'étnlage et La marchande.
Pauvre Torti!.loo 1 Chassé, hoooi, a.près L'arrestation <1e .son malLre, des moi s du.nant il e rra.
Sa longue expérience d e vieux vagabond lui avait
fait éviter le terriJ:)!e lasso et la Providen.ce des
hraves cbiens Le r emettait sur la 'l'oule d'Yvette,
Yvette devenue la pctite Deux-Sous 1
Ce soir-là il partit Lrüompha leme nt avec là filleLte ; ma,i.s, à l'entrée du Lu xembourg, une grêle
de coups de pied l'accueil.1it.
Rébecca, qui venait là chaque soir attendre
Yvettf', reconnaissant le caniche, deV\Ïn~
furieuse.
N'était-ce donc point assez de garder la HIle de lIS.
v,ict.imc et faudra-t·il encore s'encombrer du cillen
d e 'l'assassin?
Tortillon ne cria point. Il étuit fait aux mauv.rus
trait emen ts.
Il tou.ma vers Yvette son heau regard tendre
qui sembiLait dire : Il N'aie pus peur, ne te chag;rine pas. On aura beau faire; mainLenant que
je t'ai tl'O<UVOO, on n'arrivera poi,nt à nQus> sépar er. Il
De loin il suivit sa nQuvelle maUres se jusqu'à
son logis; puis il reparLit, ncr et pim.pant, se
glissa de nouveau dans le jrurdin, se cacha dans
un bu.isson. Le lendemain Yve Lle le retrouva qui
paraissait l'attendre.
Et ce fut de même chaque jour. EUe lui apqlQrtait
du pain, dérobé sur sa maigre part.
J.cs g:Jrd,i ŒS . à présent, connois' ient la peti~
D.cux-Sous . Pnr pillé pour e11e, on sUPP<lrta Le caDJ,C11e, qu.i n'était plus oonsidéré comme errant.
On disait : 10 chien do Deux-Sous, et ce~a
f·aisait Il
Tortillon un nouve l état civil quI lui vaLait la pro.
tecLion des grandes personn€S et le respoot des
peLit.s enfants.
Toujours se'lTée dans SQn tabUer noir d'é.c olière,
la petite v·endeuso n'accllsuH pas ses quatorze fillS.
Ellle a peu grandi depuis qu'Isaac e L Rébecca
l'ont T'eCueiIJio. Copendnnt, - 'es lo.ngures séoo.nces en
plei.n air l'emp~.(hcnt
de s'6Liol r lout il faH.
Ce jour-là Yvette semhlait plus vivan le que de
coutum e. La gmnde chaleur amen<lil Ù ses joues
u!l peu ~e
cal'min. Le IlomJlre de.s. pelit-cs poupées
d:1mmu all. 'La f.ùtette répéLait son a.ppol :
- Deux sous .. . deux sous.
Une nourrice s'approcha; une élégan te nQunou
enruba.nnée, pOTtant dans ses hras un garçonnet
d'un an. ILe bébé ten.dit cs mui·ns vers' les p8lnti:Ills
aux cou,j,eurs vives don t loes t<lU1.S crriardl.) L'amusaj,enl. Yvetl-c sourit Il l'enfant.
EUe qui jamoO.is ne faisait d'avan.ces Il sa turbulen te clientèle r.;hoisil la plus éolatan te dos poupées
et la lui tendit.
- Prend s, dit la nOllIlOU. Je vais l'acheter ça,
ça te changera de tes joujoux en bijou terie.
Elle payn le panlin et s'éloig!w, tandis que lebébé se trémoussait dans ses bras en criant de
joie. Yvette suivi t la nourrice et renrant.
A l'entrée du jardin, une au to allenclait.
!->ebou t près de &Il maohin e, le chauffeur guettait la nourrice.
- Vous voilà enfin, nounou 1 Ce n'est pas trop
lOt. Madame la baronne va s 'i mpatienLer.
- Que Don 1 EUe nous a dit de la rcpr ndl'e chez
son unlie Il six heures... c'est encore nous quI
attendrons.
- Qn'est-ce que vous regardez donc, monsieur
Boppo?
- Voyez donc cette gosso, fit le chauffeur.
La n~JUou
se retourna' :
suls... T'as
--: TICns, te 'Voilà, toi... Tu nou~
envie de nous vendre une autre poupée ?
Yvette, san s p8rllHre l'on lClld re, riait au petit
garçon. ~epo.
commonça :
- ~n
)uJ'era1l1es yeux de ...
Il s arrêta, sc mOI'<lant les lèvres.
~
La nourrice s'installait dans la voiture. L'auto
s'éloigna.
Yvette reslJa un moment sur le trottoir. Quand
elle ne vit plus la voituil'e, la flllette soupiN!.. Il lui
restait encore que.lques poupées; cependant eLle
ne rentra pas dans le jardin.
Sans prendre garoe à Tortillon qui la suivait
tête Dasse, comme trisLe de la voir s'intéresser il
un élra.lI.gt''J', )vclle reprit I.e cllcllIÏln du logis.
Yvette passa la matinée du londemain à confeclionner, ù préparer sa marchandise. L'après-midi,
elle prit 'Je chemin du Luxer: bourg. La petite
Deu'x -Sous s'[\JSsit dans u n coin d'ombre et posa
son éventaire près d'ell.c, soc Je banc.
l! était elLcore trop lOt poUl' espérer des chalands; ~ ependant, <.toè.s qU'lI pas-s,ait queJqu'ruJI1,
Yvelte dÎlSnit de sa voix chantante :
- Deux S011S ... deux sous 1...
TorLillon avait l'ejoint sa maltresse et dévo,rait
10 pain apporté par elle.
Un pal; cria sur 1e sable. Yvette lendH la main
vers sa corbo.iJLe, l'agita; les petites robes de papier froufroutèrent.
- Deux sous ...
- Bonjour, petite. Tu viens donc ici tous les
jours?
Yvelte ne répondit rien.
Elle entendait cepend(lnl, et son regard s'attacba
curieusement ou r'egûl'd de l'inconnu
- C'est toi qui as vendll hier un pan Lin au poumes malll'es. Tu ne m'as pas vu près de
pon (~e
la v<Jlture qu{).n<l tu as suivi 1'8 nQurrice ?
Yvette seCû'ul8 ses pou pées.
- Deux sous. .. deux sous 1...
- Ah ça ! 0s>t-ce qn.e oett.e jOlie mioche est
idiot.e ? murmura l'.h omme.
Yv~te
~e
songeait PQin ~ à s'oHenser. Elle s'ocCUPalt mamtenant de 10rtil1lon, le caressait.
- - Laisso donc cet affreux cabot... Tu te 'Payes
ma t~Le
... On nia pas des yeux comme les Liens
quand on eSil. maboune. Réponds-moi. .. Je Le YeUX
d~
bien, je rn.'in lér-€'f'..se ~ toi parce que ... enfin, lu
n ns pas besom de saVOIr la raison de cet intérêt.
Profiles>-cn simplement. Voyons, réponds. Où est
ta maman?
CI Deux-Sol1S )) se recu~a.
Elle redil C<lmme en
rêve:
- Maman .. . 11a... man, ..
Puis e1I1e seCQua la tête.
- Morte? questionna de nouveau Beppo.
Mais YvetLe s'était remise ù caresser son chien.
- Avec qui vis-tu , alol's 7... Où demeures-tu?
A, ceci J;>eux-Sous avait appris 0. y répondre.
D un air appliq ué, elle nomma Les Siméon,
donna leur adresse . Isaac n'avait auumi.g.é lf'lSo sor·
ties de la peUte qu'n,près av il' ocquis la cel'tiluoo
qu ' elle saUlI"ait, au b-esoin, s>c faire ramen'er. Il te-nait à elle férooement.
~
Bon, merci. Tu n'oO.s d~ci<lément
pas toute la
ranson, pau.vre gosse, mn,:,,> ç'a n'en vaud!ra p8'l1têk,e que m,i{>llX.
BcpP<l s'éloigna sans qu'YvetLe parut s'en aperoevoir.
VITI
DE BRAVES GENS
- M. le baron de FolOOrt demande Bi mca.dame
peut le r ecevoir ?
1 intrQùui sez-Le 1
- Mon ~ondre
Et, tandas que le vaJet d.e chambre tallait chercher le baron, Mme MarLe t, d'une main coquette,
rectifiai t sa coiffure, faisai t bourIer lcs den teIles d.e
son corsage.
C'était une f{lmme d'une cinquanwine d'années
qui n'avait jamais été" jolie, mais que son air de
grande bonté rcndait sympathique.
Elcvée " Il. la dure )), ayant aidé son mari è. ac-
�~
ti==================================
qrué.ni.r la fortune qui, quatre ans ipl'l1S tOL, lui avait
permis de s'offüjr un gendre titré, eLle gardJ8.it des
Lemps de lutLe et de médiocrilé une façon d'êLre
active, décidée, des habltudes d'ordre et d'OOooom1e. D'ailleurs cdLe feLll/ 1Lt! Slffi!}Le ne nourrissait
qu'une ambil.ion ; faire faire à S8 bien-aimée MwrgueriLe un beau mariage.
InsigniflanLe mUl~
douoe, aimable, bien élevée,
la jeune fille, au.x yt!u.:x de sa mère, étaU digne
des plus hautes destinées.
Même 101·S{j1l.e l~ LJ/ •.n.l.1 Raoul de Folhert, rencontré à Biarritz du rl!l.D.t une vilJégiature, fit sa
demande. Mme Martet fut !.entee de te refuser
sans examen, le simpJe Lort..il de bar<ln lui paraissant peu <le chose.
MalS Le beau Raoul avait déjà fait le s.i.ège de la
pl;ace, avant de ri.squer uue attaque décisive. Et il
sayait qt'e MaJ-guel'itt. ne le Laisserai t pas évin-cer.
En effet, lorsque Mme Martel, par acquit de
conscience, 11t part à ''1 fi.1le de La. demande de
M. de Fo.lliert ;
Un garçon oerbaiTlem.en.t très
bien, ma.i.c3 qui ne .p arait pas cependant devoir
te convenir li, elll:l Pllt ln s'Irprise d·ent..endre la
douce petite Marguerite affirmer que Raoul, a!l
contraire, lui convenait abs<ll'Ument et qu'e11e étaü
résolue à n'en point épouser un autre.
- Mais, <lit Mme Martet Lout émue, c'est que
bien décidés, ton 1,f.>Jr· .·1 mai, à l'eIuoor ce jellne
bomme, nous n'avons prÎssur lui aucun renseignement..
- Prenez-en, répondit Marguerite.
M. MarLet se rendit dans une Iamille amie où
fréquentait le baron de FolJbert.
De même que Mme Martel, la mallroose de maison avait fait aux eaux la connrusSl8nce de Raoul.
Elle le savait orphelin - jJ le disait - et ne
crai~t
pas d'aftrm~
que c'élJait un homme tout
à llUt séduisant et supérieur.
Séduisant, Mme Martel partageait cet avis. Supérieur... elle n 'en <1emandi~
pa~
tant, pow-vu
qu'iJl fO.t bon, fklèle et t.endre .
- 11 est trè.s bon, dOOlaro. l'amie, électrisée
à la ~ensé
d'un mariage à faire. Çhaque [ois que
je ['ru quêlé pour mes œUVTes il s est m<lntré
d'une génbrosiLé princière...
, et ~es
Tout 'cela ne prouvait pas grand'<:hos~
renseignements de fralche date lru,ss8lent bien
dans l'ombre le passé du préten.dlUlt de
Mlle Marlel
00 s'en contenta cepen<lant. Comment empêcher
'l\[argot de prendre le bonheur où elle aIfimluiL
d!.'voir le trouver? El il suIfit au baron Raolù,
admis enfin à faire sa cour, d'un très léger effort
pour oonqtléI'ir et aveugl'er le pèTe et la mère,
comme il avait &11 oonqllPrir ct aveugller leur mIe.
Depuis qu,alre ans que Marguerite était baronne,
Mme Marlel n'avait que des raisons de se féliciter
du ch<lÎX de Margot.
Celle-ci rayonnait de bonheur. La naiss.ance d'un
fils mettait le com ble à ceLL!.' félicité eL. chaque fois
qu'il 50 p.ré..<;('ntillit chez sCo!; beaux-parents, Raoul
élfiil accueilli d'en thollsiasme.
Toujours du même élan tendrement glori'eux,
Mme Martel aLlait au-<levant de son gendre. les
main. wnùll,es.
.- Eh 1 bien, mon cher Raoul, qU<li de n eu! 'r
Votre femme et mon pr l.it P,icrre von toits bien?
- Parfait .ment bif>n, i'f, je S1.\.is qne V(HltS verrez
MargueriLe t<lul à l'hellrl') . .Te suis VŒ\1 avant ('lie
pOUII" vous en tretenir d'un sujet CfUi 'Vons est 10u·
jours très cher. Il s'agit d'une bonne action il. ncoomplir.
- Qu e je VOll.'1 remerGir de p oser ainsi 1 En
eff et, je trouve quI' le plu.s grand bn~e.u
que
'(luisse procurer ln forlune est la posslbl,l.lté de
taire des beu r ux.
NoLre chèr'e Marguerite pense de même. Elle
est, en cela comme P.1l tout, la dig~
fi.lde d'une
mèJe afl llli ('lJ.ble.
(1
1
La 'Petite "Veux Sous "
~
- Je VOllS remercie, R.aoul. Vra.iment, je sUis touohée... coul use... Ivlnis vDyons, CeLle !.>on,ne WUV1>e?
- Eh 1 bien, précisément, cette boon.e œuvre
Marguerite s'en serait certainemeIlt chargée avec
joie j mais je arois que mieux qu'eHe VOl1S serez
à même de l'en t:rep re.ndre, de l'amener à boIlJOe
fin ... Voici Loute l'hisLoire. DerruèJ.ement. ébant par
hasard enlrée au jard.in du Llllembourg, La noUlfrice de Pierre acheta un jouet pour le bébé il. une
petite m8J'l::hande d'oopect misérable. Nounou est
une bonne créatu.re Slans gran<le finesse j elle ne
remarqua point l'aspect sourfJ'cteux de l'enIant.
Mais la filletLe s'étanl wpprochée de l'nuto, Beppo,
mon chauffeur,remarqua ce visage d'enfant maladive. Cetle fIltette, paralt-il, t!l dans les yeux une
expression L<>uchanLe ... poignante j Beppo me ruSait en être tout remué. Le lendemain du j<lL1!' où il
l'a vue pour la prem1ère fois, il a de nOllv.eap rencontré la ven<.leuse de poupées. Tl l'a qu ostionnée
et a reC<lnnu qu'elle est, non pas idiote, mais
comme engourdie, avec toujours <lans ses yeux
celte expression de trislesse épe<rdue. Beppo a
demandé l'adresse de la petite et s'y est rendu.
C'est affreux 1 Un anLre immonde, où vit un vieux
cOtLple juü sordide. L'enfant n'est pas leur mIe.
Ils !l'ont recll!6.iJlie, préLendcnt·i ls, par pitié. Beppo
est persuadé, d'après ce qu'il a vu que ces affreuses gens n'(m! pris cette petite que pour s'en
servir.
.
- Oh ! s'en servir... pôu.rquoi?
- Mais ... dès maintenant, l'enfant leur est un~
SOUTee de profiLs avoo la vente de ses pantim
qu'elle fabrique elle-unême très adroitement; sa fi
gure de sou ffrance attendri t les gens, et les gros
sous doivent pleuvoir. Voilà pour le pré-sc.nl. Quant
à l'avenir... Dame, je le répète, cetté filUette est
ravissante... et l'engourdissement de son esprit
ne rend!loit que plus facile à ses S<li-disant protecteurs l'accomplissement d' ig\flobLes projets.
- Quelle horreur! se récria Mme Martet. Je ne
puis croire .. . pauvre innocenle 1
- Pauvre innocente, ên effet...
, - l'vlais d'où vien L-clJe, cette petite ?
- Eh 1 voilà jusLement ce qui semble louche.
SOi-disoot, ils l'ont trouvée touLe pClLite, errnnl u
et, comme elle ne pouvait dire son nom, ni indiquer Ron adresse ...
- Mon Dif'u, soupiTa Mme r.,'Jnrtet, qu'il y a
donc des misèl'8S de par le monde 1
- Des m isèrL-'s et <les crimes, .répondit le baron. On ne peuL espérer les guérir toutes, les
empêcher tous ; mais lorsque la Providence met
sur noLre chemi1l un.e oouVore do oont6 et de
justico à accomplir...
- On doit lui en être reconnaissant, inlerrompit avec feu Mme 'JarieL. Que je vous remercie,
mon cher Raou'l, de m'avoil' signa.lé la g.iLuation
l'tnvronte de celte ma.lheureuse 'Orpheline l, .. confaire ?
seillez-moi : que p.ouvns-~,
- l1etirer l(t petlLe à ces )uiJ.s.
- La laisseronl-ils partir ?
- Si on les paie, cer'laincment. Et 'Pour ce, cOl6
de 1'1-1 question, vous me pe r meltrez bien de cOlltribuer il. votre' bonne œuvl
' ~.
- Qu('tl excellent garçon V~l
R ~.s
!... Qu~md
jo
pense que j'ai hésité... <lui, j'ai hésité un moment li. vous conllf"r le hnnhellr de Mnrgot...
- /est. mal 1 dit le baron, d'lln a.ocent péù~r.
Puis, se r prenant, les yeux humides, la voix
a~nuiJ'd
. ie
d'émotion, il reprit ;
- Mais non, VOUS aviez raison d'hésiter j vous
aviez raiS<!f1 de me trOtl ver indigne de votre tUl .
Il est vrlll que ]'>el'sonne, je crois ne serait ab
solnm ent dign d'une créature aus~
déliciense. .Te
ne puis reconnoHre la fnv ur immense cl imm6!rit6e que VallS m'a\ez faite qu'-en, l'aimant de
toul " mon 1\,n1 r , .. ('n l'/Hlm'n nt ...
Mme Marlet s'-eoouya. ~es
yr.\l:J:. Son cœl1l' débordlliL de tend.œs se. Ah 1 qu'olle a donc bien faU
Q
�•
~
La 'Petite
U
'Deux Sous "
• 1,
======================
- On V{)US contraindra tout dé même. Nous
de céder à l'enlratnerrnent de Margot VeTS 00 beau ,
devons tous marc.her, suivant les ordres. Si l'un
ce {le!', ce bDn RuouJ ! Elle Ste leva, l'ésolue.
ae nOlls flancbe.. . Vous save7, ce qu'li arrive à
- J.e vai s ch.ezCes g€'IlS, immédiatement. Je
ceux qui flanchent ? Qn est genW, convep ez-en 1
prends l'enfant, je lla fais élever Je ...
On vous a laissé le Lemps de savourer votre lune
En SOUTi;lIlt, le bHJ'OII a.pli,~n
De h-ellu zèle.
de miel. .. sans com.pter qu'elle peut durer encore ...
- !lia mère, je yOUS l'econnai.s bien là: Mais
a.près, voLre lun,e de miel! On ne lu.i veut poo
il fauL, même dans J'ex€l'Cice d€ la bonté, cons erVOlls entrez vous- . de mal, à la petite baronne, mais ce qui est jUlré
Vélo une ceJ'lJaipc prudence, ~
est juré, et vojjà déjà trop longtemps que vous
même en pourparler's avec ces gens, ils vont esêtes seul à profiter d'une affaire qui devait être
sayer de vous faire c'hanter.
partagée ...
- Alors?
Raoul serra les poings.
- Laissez agir Bepcpo, voul.ez-vous ? C'est de
lui que vient l'idée que n ous pou,r,rions .retirr·e.r
- Oh! g,ronJd'a -t-il, être son ma.1tre 1
celt~
mail'heureuse de l'enfer où eJle est tombée" ;
- Bah 1 qui dOI1Q est tout à fa il son maltre...
c'est 111i qui, déjà, s'est présenté ohez oes brocan- Croyez-vous que ça m'amu se, moi, de fajre le
teurn, il. y relDUrneJ'18.. Il déba.ttra avec eux les
cbauffeur?.. Eh 1 j'a.i.merais e ne0re mieux votre
conditions, sUJi.vant vos instructions, naturellIer0108 que le rrüen, d'autant plus que la baronne ...
;m,ent, et sans vous nommer. Beppo €LS't adro.i.t,
Un geste menaçant de Raou.! l'interrompit.
donne7.-1ui carte lJl'anche.
• - Là... On ~Iaue
un peu... Pas 10. peine de
- Oh 1 de grand CŒur! Et je suis sÛl'e que
s émporter... DlT8..It-on pas. ..
mon mari m'a'p·p·ronv€ra : il C'Slt tOUjOllU'S sii hooBeppo se recu}a. Son visage pli.le dans le jour
:l'eux de fai;re le bien 1 Oui, je donne carte blanohe
faux du ga.r8Jge paraissait }JIlus pfl.le encore. Ses
à oe Drave Beplp0 ... Je ne l'ai mais pas, figurez'- yeux noirs lu<i.sai/ent. Ce n'étai t plus Le serviteur
vous, vo tre chaurfeur .. . Mais non, je ne lui trou- d éférant. Il r egardait Raoul a.vec une expr ession
vais pas un bon vi<S8.ge. Il a je .ne sais quoi dan s de défi, de menace provocante.
les yeux...
Raoul détourna les yeux. Beppo demanda
- Oh! mu mère !.. . Ne s'avon s-nous pas bien,
- Qu'y a-t-il de convenu?
tous, qu'il est dangereux de juger les gens SUlr
- Tu dois aller chez Siméon, L'entendre avec
les apparences ?
lui. Mme Martet donne carte blan che.
- Rouge 1 répliqua Beppo entre ses dents.
Le baron ne parut point entendre. Il demanda
IX
- QUaM iras-tu là bas ?
- A l'instant.
f
BEPPO
- Gare à toi s-i tout ça tourne mu.!... tu en
M .. le baron Raoul de F olb€rt ne fais-a.it point réponc1s ...
- Mais oui, mais oui, mais oui ...
partie de ces maltres in soudants qui dédaignent
Raoul sortit du garage, refermant avec bruit
de S'</lppesanlir su·r le détail des choses.
la porte dont les vitres vibrèrent.
~ erson
,n e fut donc sU I'[)r i,s de le voir, ce
- QueLLe poule mouillée 1 gron da Bep po. Si on
SOlr-Ut, dès que l'auto fut rent.rée ra.menant me.ne le Lenait pas ...
dame, traverS€r la cou-r de l'hôtel et. pénétrer
La nuit se faisait tout à fait lorsque Beppo pardil.Il.S le garage où Beppo s'affairait déjà au ne tLoyage de sa machine.
vint chez Isaac Siméon.
La bou tique était 6bscure. Isaac épargn ait un
Haou,1 re~Tna.
d,el"rière Iuri. la porte vibrée du
éclairage inutil e. Les chalands. rares <léjà pen'ga;ra·ge e t s'approcha de l'auto. De 1a cour on l.es
dant le jour, de~nailt
probléma tiqu es 'dès la
voyait, ma.1s personne n e pouvait les entendre.
tombée du soir.
Tandis que le bar.on se bai~ sa
it
près de Beppo,
Les maisons closes- de bonne heur-e semblaient
comme pour examm er une plèce, le chauffeur decraindre on ne sait quel de. ng,er, queHes attaqu es
manda, loa voix changée :
nocturn es. D'aiLleurs, les façades sont là très ra- Eh 1 bien, ça niche '1
res, la rue dans presque tout.e sa longue ur étant
- En plein. On prend la goS'S€.
bOI'dée de hautes muraiiLI,e s! Le fait <l'avoir choisi
- Chez soi?
cette arrl'e<Use rue afin d'v ouvrir u n magasin monPAS enoore décidé, mais on y viendra.
tratt bi,err1 que la vem.te des bibelots n'était pour
- Hueno, bueno, dit Beppo.
Isaac SirnéOll1, qu'une ra.LooIl soc.ial,e avol1able pour
- Mais es-tu stlr, très s ûr, que c'est elJe ?
couvl'ir d'.aubres méti<ens ~
r otajent moins.
J 'yOUS crois que j'en suis s Or. VOllS m'avez
neppo ~rouva
Rébacc.a occu.pée à mettre les
l'onvoyé à J'an(li en ce, et j'ai vu le défilé des té.
rno~s.
ISlM.{) Siméon en ét.ait ; jJ a cJ1a.rgé tlmt vole ts. Il la salua, plem de ôéférenœ, et s'in ·
form a d'Isaa c. La vieille le regarda avec défi ance.
qU'U a pu ce pauvre bou gre ... j'ai reconnu son
reconn u t l'h omme
Malgré la cLemi-obscurité, e~l
s :~ le
musenu.
- .l e voudrnis comprendre se/u,lement pouil'qlloi qui, la veilLe, était venu marohander une console
et qui, Lo ~ lt en discutant les prix, avl8..it pal'lé
ces juifards-Ià se sont encombrés d'Yvette.
de la petIte Deux-So us rencontrée par lui au
- Ab 1 P01ll'quoi... pourquoi. .. On tAchera de le
Luxembourg.
déco uvris. Mais ça ne m'éLonnerait guère s''hls
Que le ur vouLa.H oet indiviodu aux maniène's dou·
n'a\'qlient pas d 'autxcs rai SDns qu,e ceLle que nous
ceI1cu,s-cs? EU appela d'un ton rogue:
aYOn,., imaginée ... le tre.fic d'une jolie fUIe.. . Vous
- Isaac... On te demande.
a.v.ez 1''8 il' tout cbose ?
•
De J'antre obscur l'homme <SlurgU.
- Je ml' demande b'i c'est IIne .si b()lnne idée que
- Je vondrais m'entr tenir un instant avec
ça do ro.pp roùhor cIe nous la gamine?
b'- Non 1... Mais je vo us Lr ouve épaLo.nt 1... Eh 1 vous, dit Beppo souIevRnt ~o n clH1peo.U.
- Entro'l. A1blez doucement., je vous prie, VOllJiS
Icn, et nos projeLs 1... où trouverons-nous mieux
q\.l.() ce Lle gosse pour nou s aider T... Est-ce que pourriez beuder queJ.q ue chose ... J.e VIais fa.i.re de
la lumière.
vous avez l'intention de lab!j!Ù'l' 10ngLem[)s Lm!ner la ohose '1 ... Si vou,g aimez cetLe vJe-là...
Beppo s'était arrêté, mal ra ssuré dans ce tte om -- Je no suis pus n1<8Jlheurellx .
bre qu'il SllvaiL encombrée d'objets et snrLout qu'il
BE'J>po eut un mauvais r egard.
sentait peuplée. Cal' c'éLatt moLnoS la <:rD.in te cl'un
helJrt qu.i l'opprC's.sait que la scmsalion nctto de
VUIlS n'Nps pus ~<'\l
en cfl.nso, baron 1
,() visage de naoul se conLracta.
frOler un Clif\e. Il 6~ait
cerLoin qu'il se LrouvaiL là
Quelqu'un d'autre cru 'Isaac.
nc veux pas être contraint.
- J~
i
�La 'Petite " 'Deux Sous "
Rébeoca avait mis la dernière feuifile du volet.
La o:uirt étaU absoJue ; Be<ppo entendiL le fToltement
d'une allumette. La main crochue, velue, déformée
d'Isaac, éclairée par la petite flamme grésillante,
prenait un aspect démoruaque de patte griffue.
Le vieu x alluma une lampe il esserwe posée sur
un guéridon. Il était ainsi éclairé de bas en haut,(
et son V1isage\ comme tout a l'heure sa main, se
défonnait, hiaeux et effrayant.
Beppo, souvent, avait donné la preUNe d'un
sang-froid pouvant alllell' ju.squ'A la cruauté. 11 se
croyait des ner1is .solides, et cependant il éprouvait
ce soir dan s cette boutique de bric-A-brac, devant
00 vieu'x à. [aoe sournoise, un malaise ressemblant
il de la peur.
Un souffle rloUI'd le fit retourner : Rébecca renbrait. Elle referma La porte derrière eLle et Beppo
senti,t son malaise augmenter. Instinctivement, il
porta la main là la poche intérieure de son veston
que gonflu,i t lu. crosSIe d'u.n revolver.
Mais personne ne songeait il l'attaquer. Rébecca débarrassant un vieux fauteuil encomhré d'objets hétéroclites le poussa vers le visiteur,
- Si monsieur ve ut S'asseoir ...
Ii! accepLa. Alors, moins aveuglé par la lampe
qui se trouvait maintenant placée plus haut que
son visage, Bep.po distingua mieux les choses autour de lui.
Sur un canapé dont le crin s'échappait à travers l'étoffe déchirée, une form e noire était étendue - le frêle oorps de la petite Deux-Sous.
Yvette ne bougooi-t pas, SOn visage, appuy'é sur
son bras replié. meLtait d·ans la pénombre une
Lache pê.lLe. Elilie avait les ye~lx.
grands . ouv,erts e~
roogardaiL n ep ~.
Alors Ce.lUJ-Cl COlTljJrlt ct où lu1
était venue tollit ·à l'heure l'impression d~
n'êwe
pas seul ar\rec Isaac.
- Voilà votre jeune protégée, dit le chauffeur.
Qu'a-t-elle donc? Est-elle maJa<le ?
Rébccca Tépondit :
- Elle n'a rien du tout. Elle dort comme ça
tous les soirs, en attendant la lumJère. Elle me
peuL faire ses poupées à ttl.tons et elle n'est bonne
qu'à ça. Oh ! c'est une rude charge que ;nous avons
là, vrai 1
la Lête . . Sans le .saBcppo approuvait, hocan~
voir, ia grosse Rébecca lUI préparmt lcs VOles,
Isaac, ia voix m.ieiJleuse, protes ta.
Non non, il ne r egrettait rJen. Sans doute on
ne vi~aL
pâ.s toujours bien il l'aise ... Mais tant
yue sa femme et lui auraient un morceau de pain
11 sc mettre sous la dent, on ferait la parL de ceLLe
pauvre enfant.
- Commcnt donc l'appelIez-vous ? demanda.
Beppo ? Vous ne m'avez pas dit son nom hier,
- Yvette, dit Rébecoa,
Son mari lui jeta un regard noir, eL elle se troubla, grogna, mécontente, avec i-w conscience
d'avoir purlé trop vile. Isaac r-cp riL :
- Oui, cille se nomme Yvette, ou plutoL c'est ma
femme qui lui a donné ce nom-là, car son vrai
nom, personne ne le saura jamais puisque ellemême l'a oublié,
- Bien entendu, répondit BC'ppo. .
S'il avait oonservé quelque doule, l'Imprudence
de Rébocon le dis s~pai
t. Il se ca.rra çans son fau; su VOIX parut emteuil, prit un air ~ncLux
preinte d'une émotIon contenue,
- Vous avez éLé, vous êtes encore vraiment admirnboles. Il est consolant de rencontrer sur son
chemin des cœurs aussi gén6reux,
Isaac ni Rébcœa ne parurent s'émouvoir à cet
éloge. Ils n'éliaienL pas de ~ux
qui se I~isent
pnmdrc au miel de ID. flutterJe. ~epo
le comprit
.
.
et, très sou.ple, changeant de tncl.iqu?:
_ Si gén6reux que vous soy~z,
dIt-il, ~l d.ésm..
~rcsé
s il serait juste que voLre bonne actIOn trou,
1
.
~
vê.t enfin sa .récompense, CeLte récompense, je
viens vous l'ofCJ'.i.r.
Les époux Siméon échangèrent un regard que
Beppo surprit au passage et qui clairement signifiait : (( Attention 1 On veut nous rouler. »
- Je connais, reprit Beppo, une femme de bien,
toujours prête à secourir tau les les infortunes,
Cette personne 0. entendu par1er de vous.
- De nous ? grogna Isaac avec inqujétude.
- De vous et de votre protégée.
Si c'est ime' brave dame qui veut faire la
charité à la mOme, interrompit Rébecca. C'est pas
de refus 1 la v1e est dure. .
- La dame au nom de qui je suis ici veut faire
micux qu'une aumOne : elle vous offre d'assumer
la charge de l'enfa.nt.
- ElLe nous pai{!]'aLL umoe pension ?
-Non... E1le prendrait la fillette chez elle.
Rébecca tout à l'heure gémissail sur Jo. cherté
de la vie. Son marj a fu.iL choru:s avec eHe. Cependant, t()US deux répondent par Ja même proteste.tion :
- Jamais de la vie 1
- Nous séparer de cette chérie 1 larmoie Rébecca.
- Une enfant que nous aimons comme si nous
l'avions mise au monde! renchérit Siméon.
Beppo laisse ùi.l'e. Il a prévu ces protoe.st.ations.
- Eh 1 bien, n'en parlons plus. Je le regrette
pour vous, d',-lutant plus que cette dame cotillJ1l'enunt qu'il vous en coûterait de vous séparer de
la pelile étnit décidée il offrir unc compensation.
- LaqueLle ? deman<la Rébecca, cessant de larmoyer.
- Mais .. . une certaine somme et., je crois, assez importante.
Isaac eut un beau g-esLe.
- EsL-ce que de J'u.rgcn-ll s'écria-L-il, peut con201er une s-éfpamLion... Croit-on que nous voulons
vendre notre chère pel.itlC cnfanl ?
- Oh 1 ne vous indignez pas, répondit Bcppo
et meltons qu,c je n'ai rien dit. C'est fùch eux pour
elle. Son av>CIlir ctU été élJSsuré.
Rébecca tU un signe à Isaac, CeJui-ci prit l'air
dubilatif.
- Oui, oui, monsieur, il y 0. l'int6rêt de l'enfant. Nous n.e devons pas l'oubli er... Mais, d'un
autre coté, laisser allcr celle petile...
- Vou ne 1a perdriez pas de vue.
- VMi? s'écrùa R6becca, on nous per'mettrait
<Le la voir de tem.ps en temps ?
- J'vloi-mC!me je m'engag.e à vous l:amener, répondit neppa, aussi souvent. que poss.lhl-e; Je ~Ol1
S
le répète la personne chartLable qUI m enVOle a
été très 'touchée très émue de votre conduite si
désintéressée. Elne sc fe'l'aiL un s~l'upe
si, par
bonheur la petite J'cLronve sa J'mson - d l'éloigner 'de vous, d~
lui nrprendre l'ingl'aLilude.
_ Ah 1 s<Hlpira. Sirnron. le le vois, c'(,8L une
dJgne personne, avec de ~ien
beaux sentiments ...
_ Mais, dit Rébeoca, vous ne nous flvez pas
dit sOn nom .. .
Beppo avait d'abord caress6 J'espoir d'ohtenir du
couple la remise pure ct simple de la peine DeuxSous contre espèces sonnantes. Mais il comprit,
en Yoynnt les Sim éon sur le dMensive, qu'il n'obtiencllrnil jamnis ce1a et qu'alors mC!mr qu'ils parels'rurrangeraicnt pour le filer et
lrnicnt cMer. i~s
pauli" d.écotlvnr chez qui se trouvait Yveu,c,
Mieux vnlait brQlea- ses va.isseaux, quitte à trouver un moyen de se d&bnrrnsser de ces sordides
pCl'sonna{jles s'ils dev n.aicn t gC!nants,
n eppo en un instanL son C1ea. il ces choses et,
son parti pris, il répondit :
me
Mme
- La personne qui m'cnvoie ~n()m
Martet .. . eUe est fort l'ich , Ln. fill e de Mme Mnrtet
a épousé, il y a quo.l.re ans, t\L le baron Raoul de
Fol.bcrl, chez qui je suis en qu.aliLé de cha.uf1e~
�or- La Petite "'D.euz Sous"
e
e
}-
a.
s
r
t
======================
C'é tni t une très vieille bê.Usse, rue Monsieu.r-l eSur le bres de Rébecca, la main d'Isaac, sourPrince. Des commerçants, des petits employés,
noisement, s'abattit. Les doigts crochus de l'homme s'incr'ustèrent dans lu chair flasque, et la juive des ouvriers Il'habilaient.
Sonia, étudia nte, avait horreur des étudiants.
retint l'exclamation prête ù. lui échuppcr.
Elle demeura impassib le, tandis qu'Isaac, d'une ELIe vivait sans o.'l.lIlal"Bderie, farouchement réfrJl CLaire aux avances, a ux s)-mpal,hies qui pouvaieIlt
voix pleurarde, répon<.lait :
- Je ne cOIilluis pas cette dame ... de pUIlVrr)S
s'ollrir il. elle. Mais clle n 'avuit pas toujours été
gens comme nous n'cnten.dcnt point po..rler des per- ainsi.
sonnes du grand mond{). rVluis vous nous di:.cs
D'abord, travaillant gaiement, allègrement, son
<J,u'elIc est bonne .. . qn'elIc aimere h;en riotre pe- ambition était paLiente. tcna.ce et joyeuse.
tlte... qu'elle nOllS permettra de la voir .. .
Elle poursuivait alors son labeur sans fa iblesse,
- V6us n'avez pas expl!<.jué, interrompit R émais SUIlS fièvre . Elle voulait arriver, savait qu'elle
b ecca, comment ccLLe daille a entend u parler de . [\[Ti v rai t.
nous ...
En ces temps..Jà, elle habitait près de l'Ecole
- Diiln simplemflnt, répondit Be.ppo. Elle a "u
de IVlédecine et frc:\quentait ses camarades, réserYvcltc au Lux()mbourg, a vuulu 1-0. faire pal'lel' et
vée sans pruderie, chaste par goût autant que
s'est aperçue de son élat. Elle a cu pitié de l'enpor raison.
fant et m'a chargé de m'informer d'elle. C'est
Pilis. un bcnu jrmr, (ln la vit pù1ir, S'cs yeux se
pourquoi je me SUIS déjà présenté chez vous et je trou·h lèrent. Elle quitta son logis et se !réfugia dans
vous ai InterrQgc... AtllOIlS, ûle.s-vous cLécidés ... rE-iuceLlc maison où ne logeait aucune de ses camarades .
seZ-VOllS ?
- J'accepte, dit Siméon.
Et quand elle reparut à l'Ecole de Médecine,
c'était une Sonio différ'ente, rllde à tous, toujours
Rébecca grogna. .
- Faudrait toul de même savoir quelle somme sur la défensive el si violcmmcnt acharnée au
on aura...
laoenr, que Ics moins W'I'sjlicoces démêJè1'ent
qu'elle obéis"nil n011 à unc subite fièvre d'am- Cinq mille francs. C'est déjà joli Pour le mobition, mois à \ln bcsoin d'oubli dé es_péré.
ment on ne donnerait pas davantage. Plus lard,
Sonin Orbihoff conCfuit ses diplômC's , e.J\e ne
on ,"erra.
trouva poinl l'oubli. Et. dans ~a manE'inrdc où toute
Un sourire éruel retroussait ln lèvre rouge dc
l'éloclri cité de l'Mn::!e semblait s '~tre
amoncelée
la. " pel'!e des ciwu.H,·llrs Il.
p&r cC'l.l.c .soirée d'él~
Oppl'OO ..nle, If\ doclcrf>sse,
- Vènez la chercher demain, dit Is&'ac.
Les yeux lui,.ants, les pnll'ffi(,s brOla.nirs, song".
II ne murchand"it pas. Un intérGL IJlOI IlS imm ésonge ardemment e t fTémit dc douleur comme aux
diat , mais pllls pli.:;~,un
q1lC c{'lui de la somme ù
jours passés.
toucher mailltcnunl I·('hlouissail.
E1le s'était rapproch6e de la fenêLre ct rcgar- J'ru l' argenl, dit I3cppo. Vous a1lez me faire
un reçlJ ... el j'emmènc lu pelil,e. Inutile de rasscmdait au dellOfl'l, s.ans voir. \.JR rumeur de ln rue
bler ses vêLemcnts, on lUi en fournira.
montait ju srTll'à la j{'lJ1le r mme ; elle n'cntendit
- Ob 1 je pen e bi !:'n , gélllÎt Hébecca ; les pau- point qu'on fmppnif chez elle, ne se retourna que
vres frnsques crue nou-s pouvions lui donner ce
lorsque la pnrl.e, femnée seulement au loque t s'ouvriL touLe grande.
'
lui serviraient pas là où elle va ... Viens, ma co- Sonin 1. ..
iombe... Vien _, ma petite mign on.ne .. .
Elle eut Ull cri étouffé, presque un gémissc. Elle s'est npproëhée du eilllupé où Yvette, touJours inUl10bile, de ses gNlnds yrux purs contem- ment.
plait, sans la comprendre, l'étrange scène où sc
- Sonia 1 r6péIJA la mOrne voix caressant.e.
clrcidnit sa vie. Rn voyant nppr6lt;lwr la gro!'lse
Elle av{\it crispé ses mains il l'appui de la fenêfemm.e, l'enfant craintivement, se TecroqutNillu.
tre et, raidie, ne se retournait ras, ne voulo.iL pos
- Lève-toi, dit moins dûucement lu juive.
se relourner.
La pctiLc Deux Sous o.béÏJt.
- Sonia! N'dit la voix. Sonja, ne voulez-vous
Elle se laissa condulre vers Beppo et ne retira pM me l'rgal'(l{)r ... m'a.v{,z-VO\lfl donc oubli(·.
Ciltte fois, cl,le fit volte-face: J3.eppo, le cha1If.~ur
pas sa main lorsque eelul-ci la saisit pour entrnlner l'enfant comme une proie,
.
du baron de Folbert, se tenaH au seuil de la
chambl'e.
- Hegardez-moi, dit Sonia, ct voyez si j'oublie.
x
Beppo con templa les trai ts émnciés, les yeux
caves, la bouche crispée de la doctoresse.
LA DOCTORESSE onSlHOFF
Un peu de pitié lm vint de toute la souffrnnœ
La cho.leur, qui tout le jour avait élé acca.blunt,e, J16vélée poa.r ce v iwge que, }odi,s, il a aimé.
- MA panvr Son.ia ... et il tendaiL les bras.
se lu isait pll1S suffocunt.e encore il l'approcho du
- Laissez-moi 1 fll-elle rndement.
soir. L'oruge venait. Dps édnirs zébr'licnt l'Iwrizon
ENI' vint s'o.<;grOiT à l'abri de sa petite table
.assombri, de larges gouttes de plui{) crépitaient
encombrée de livres.
SUr les lrol,toirs surcliflilfféfl.
n{'ppo la regardait pensif, le cœnr v8~e.mnt
Duns sa petite manSArde où r'égnait une tèméll'rinl. Il s'en voulrnif de l'&rnolion rprouvee.
Pérnlure de four, Sonia Orbilioff haletait.
Crrtl's, il The vl'nnit pas ici pour r DIluer l'idylle
Soni s'était à demi dévêlllc. A ses pieds tmtnuient des savates. Un jupon de toile grise serrait nncienne, mais bi n pour jOIl('r à celte molheuses maigres hunc.hes. 1';Ue n'avait ni cOl'saflc ni :rf'll !;r qn'il A jnrl i'l I,rnn{' f'n son r ou voir, la cocami sole, et sa chemise glissait sur scs bres, clé- m('die s{'nl.imrnlnll'. nnn (Ir ln 1'< conquérir au;ct1r(]' Ile.
COUvrant les épflulrs 1.T'op minces, mais de lignes <l'l1ui qll'il avail hc ~o il
- Son in., dit-il dOllcem"nl, VOUs me haIssez ...
puros, ct la [loi td ne \ln PPll li '1 s ... c ct comme r n- Je l'C'spèrp..
lr6c pflr l'hubilul'I l'o.ppl'C1ch ment el l'inclinnison
Déjà ello decouvrait sn fnibl'~
.·r , n'osait IIlffirconstanle des épaules.
mer la hain e qni l'Ilurail défc,m(]lle.
~oni
rbihofr pos"uit dl' longups heur>~
- p sIl prit lin nit" conlr'nint.
SUit toute Sil viC' - flC'n('h('c :-Illr ln pe!I/" tob.1e
- Vous avez 10 dl'flit de me hllïl·...
cnconlorép de livres 1 ce r.ah:cl's qui, 0\"10': ulle
- Plus ([Ile vou. III' croyez! in!cl'l'ompit la jeu(',h/\be boitell se pl \ln li! (!(> r "', COIll]1o:,n it tout
1flIncuhlernent nf' ln mansarde, avec un Lub et lie feTll .ne . ./1' Il'('/:lÏs pos COllll11e nne autre, moi. ..
ies UlItl'.:!S qui font de l'anlour un jeu eL ne se lilm broc <Je fer-olnne_
2. -
LA
PETLTB c DEUX S'JUS •
�~
18
vrent que pour se reprendre. C'est toute ma vie
que je cl'oyais vous donner quand je me suis donliée .. . C'est toute ma vie que vow, avez prise, en
dfet 1 MaLs pour la [<J,ire désespérée, pour la dé\ aster à jamais... Pourquoi ne m'avolf pas laissée telle que j'étais, teHe que je voulais rester,
ignorante de la souffrance comme de la joie ...
Pourquoi m'avez-vous fai.t vous aimer 1
Dcppo s'aLtetlldait à des reproches. Mrus. il n'avait
pu,> prévu l'lJ(!oont tragique, le v.i.&age désespéré.
Vraiment, <cette Soma exagérait les choses 1 Il dissimula son impatience.
- Vou.; pouvez m'a.ocabler. Ce que vous me
dites, ie me le suis cent fois répét'é. Je vous demande pardon. .. Aocordez-moi cependant des ·circonstances atténuantes. Quand nous nous sommes aimés, Sonia...
Elle rectifia, violente :
- Quand je vous ai aimé, moi ... Vous ne m'ajmiez pas.
- Je vous jure...
- Non 1 Du moment qu'un amour peut fln.ir,
c'est qu'il n'e jamais existé.
- Qui vous dit que mem amour est mort... que
je ne vous aime plus ?
- Vous? cria-t-elle.
Il y avait dans sa voix, .en même tem,ps que
du doute, un invoJontaire espoir et aussi du défi
et de la passion. Ellie n'était point jolie, Sonj,u OrhlhotI, mais une telle int"'l1siLé de passion la soulel.·s,it, 5-eS y<;!ux brillaient d'll.O I.e! éclat, qu'ci le en de,v enait be-lie. Beppo se troublait.
- Sonia, Sonia ...
Elle vit qu'il allait se raipI?-rocher. Son geste le
repollssil. Il oMit. Debout, lom d'elle, il parla.
- Laissez-moi vous diire, vous expliquer... Je
n'ai p-as oublié quelle condition vous aviez mise
li. votre amour. Notre liaison devait être une unJon
durable et sacrée ... Plus tard, après avoir tous
deux pa!:lsé notre thèse, ayant le droit d'exercer
nous aurions mis en commun notre ln.bcur ; notre
union légalisée vous eû.t donné le .respect du monde. Vous disiez n'y pas tcnk, j'y tenais pour
vous. Je comptais devemr un. méd-ecin célènre et
qu'à nO'l1S deux nous aurions gloire et fortune ...
Milis je u'lliÎ pas ou de cha.nce 1
Elle eut nn rire sÏJ'went.
- Vous appelez cela n'avoir pas (Je chance?
Beppo pa1'ut dOuJoU1'81100ment oflen5é.
- Sonia 1 VallS ne m'avez pas OI'U ••• Vous n'avez pu me croire ooUjpable 1
chose ignoble,
- Ne mentez pas 1 Le vol, ~te
a été prouvé. Vous avez vœé votre camarade, votre ami, votre oor.ntpoa.gnon 00 misèl'e et de tNIvail. Vous avez fouil1é son tiroir que 00.0,5 méfianœ il lai&slliL ouvert, puisque vous seul pouviez
entrer dans ceUe chambre.., la vôtre à tous deux ;
vou s vous êtes apro~é
les quelq1J.es. billets de
cent ITa.IWS (PH~
le pauvre garçon venait de recevoiI' c:1e ses parents pour son entretien <le toute
une année. Un de ces billets, mtlrqué, a ôté changé
par vous .. _ oui, oui., la pl'euve e. été laite ct il est
M,c'hc à. V01l5 de nier. On lWJfait pn vous fl8.ire prendre, on a eu pitié de vous. Mais V{)US n't~viez
p'.lus
qu'une chose li. faire; aband-onncr votre oarnère,
vous cacher.. .
- Vous V yer" bien SoniA 1 VOus-TI?ê.me conv~
D'·z que ma clis.pariLion était nécessl}lre ... Fant-lI
cette djspnrition, que je no vous
conclure, d'tli~rès
aimais pa.."1 Y
_ Ce n'est point parce.que vous VOUIS êtes enfui sans me .revo.i.r que je vous dis ; iC VOUA ne
m'n'Vez jmnllis aimée. II C'est pf\.rce que VOIlS (Lvez
rendu (;ct~
fuiLe néoessnire en commettant une
t\ction rl{' gl adttnte. QUlInd on aimQ, on li horreur
de déchoir.
- Commo.nt expliquez-voU6 alors tant de crimes
commis par c.mour... et que t&nt de Olalhwreux se
La 'Petite " Deux S0U.s .,
~
laiss€'l1lt conduire à l'indélicate:sS<:l. .. afin de pouvoir
dOI1ILer à leur maHrOOb'e Ull 'Peu de luXJ0? .
- Vous n'allez pas dire qu.e vous avez volé ...
pour moi?
NO!l1, il ne peut rejeter -SUT Sooia la re·Stpollsrubilité de sa faute. Toujours fière dans SIa pauvreté,
elle n 'a jamais rien aoce.pté de lui, moins pauvre
qu'elle. Il "8 01.1p ira.
- J-c ne sais pas ... .Te ne sais .plus ...
Il éprouvait à cet instant un peu de vraie débrosse. Son a.ocent y gagna en sincél-jté et Sonia
se sentit moins inexorable.
- J'ai été cruellqment puni, l'cptT'it Beppo. Ma vie
était brisée ... J'ai connu des jOIll'S affreux ! J'ru essayé de t.ous les méLie-f'i 1 Ce qui renod·ai.t pour moi
tout diffic.ile, c'est que le ne vouJais rien dire de
mon passé. On se serait renseigné, .Te racontais
que j'arrivais de provinoe ... Ce n'était pas assez:
'o n me demand:ait des J"éf'é.r€lIlCOO , l'adresse de m~s
anciens (( poe.trons Il. Car je di.sa.ioa a'ussi, suivant ce
que je voulai! entreprendre, que j'avais fa it ceci
ou cela.... Mors j'imaginai dJe me dire lia:lien. Je
pa:rle bien œt.te Langue... M.a.in te:oon t, SoInia, je
me nomme lleppo.
.'
.
- J3.e!ppo 1
- Oui 1. .. Ne prononcez JamalS mon vrru nom,
m~e
dans cette chambre, même entre nous seuls;
hl est dispa.ru... oublié.
- Beppo ?.,
- Beppo tout COUin\.. Afin <l'évil-er les que. tians
sur ' ma famille, je me snis donné comme_ e.nf·anL
n8tur~
. Et Beppo a fuü par obtenir un.e place
chez un loueur d'a.utomobi'les. Bep;po a pass6 des
ex-a,meoo de chauffeur ... Bo lrp O m.o.i·nLenant est aU!
service d'un certain baI'On de Falbert.
- Vous, vous.. . en. service 1
- 11 n'y (l. pas de 801,5 métier.s, diL Beppo.
Elle répéta, désespérée :
- Vous, vous, VOllG 1...
- Je ne me plains pas. Le métier était plus pé1Di.ble q1.111n<l j'étais au g('lrage. Enfi~,
ma pauvI:e
Sonia., vous devez comprrndre que ]e ne pOUVUlS
VOlllS revenir en de paremo().'j conditions, vous donL
je suivais de loin ICH 'uccès, qui lJoursniviez la
»(.'11110 et noble ca'ITière ...
- Qu'y a-t-il donc de changé a.njourd'hui pour
q,ne vous sayez rev~mu
? cl manda Sonia.
- Tout simplement ccci. Lorsque j'appris votre
réussite, je me dis, me 6(lUVenant de a'habileté
professionnelle que vous possMiez avant même
d'tl.voir le droit de l'e:orercer, que vous feriez vit.e
votre place au soleil. li)t j'ni cessé de m'informer.
La pensée que j'étais banni de celte belle vie in- .
telligente <pl'ensemble nous devions mener me désespérait. J'ai voulu vous ~ublief
' Et puis, brusquement, par hasal'd, la vérlté m est !i-p~e
! Un
jour je vous ai rencontrée.. . Je v~u.s
al sUJV1e, vous
ne vous en !tes point aperGlle. J.ru vu où vous demeuriez et je me suis Ul.fo~·é
près de votJre concierge. Cette femme m'a dit que vons n'e 'ercj('z
pas - snn! par chol'itfl - e' qne vous pan rsnivi('z
vos étuc1'cs, né~ligeat
le. p1'nOt d'une immédiuLc
application de votre savoir. V0US 6LlJr1ie~,
les maladies nerveuses et mentales, st..cc vrni?
~
C'.'sL vrai. Pn.rcc Cfl'LO j'ai cru devenir folIo
moi-~e
de chagrin, il m'a plu d'6tudier la folie
des au tres.
- Ma chère Sonia...
- Je vous défends de dire; le Mu chère Sonia Il.
,Tc ne veux plus vous être chèrr ... Que v.oulez vous
ode moi?
Un coup .dc tonnCl'l'C éC'.Jata. LA. pluie rnainlenant tomblllt il Onl.s. Soflia, longuclJJCtlL, uspirn l'nit'
moins 10l.lrd M répé.f." .
- Qne voulez-vou {Je m0i ?
-- Je veux 8f'llJ.PTn{>nt vous offrir 1'<lCOflSion d'utiliser votre expérience nulrroncnL qne gratis. T.a
belle-mère du ba.ron de Folbert a près d'cllo 'tlne
Si
tmfant à peu près idiote, à gui e11e s'intére~,
�La 'Petite
~
Il
'Deux
Sou~
on vous en sera:it somppouviez la gu~rÏI',
tueusement reconnaissant, et je ne vois pas poru'-
YOllfl
quoi vous continueriez à. vivre dans l,a misère ...
J.e vous apporte le moyen de vous e.n affranchir.
- Eh men 1 expùiqutyl-VOUS, qùe faut-Ïà faire?
- Me permettez-vous de m'asseoir ? .. Non, ne
vous .dérangez pas... le lit me servira de siège.
VGici J'histoire; M. et Mme 1vLartet, le-s beaux-JNlrents du bar'on, possèdent une grosse, très grosse
fortune. Ils sont fort charitables. C'eat aiusi
qu'ayant appris qu'u.n.e pauvre créature, simple
d'esprit, joli.e, c'est-à-dire doublement une proie,
étaih à la ward d'un affreux couple de soidisant antiquair:es - en ré:iliLé des gens cBlpnbl es
de lous les métiers - Mme Ma.rLet n'a pas bésité.
Elle a donné à. ces vi:lains personnages 11Ile somme
assez l'onde et a obtenu qu'ils lui cèdent J'eniant,
[1 y I/l. un mois de cela.. La pcme Deux Sous
comme on j'appelait 'lorsqu'elle allait vendre de's
pantins de pa.pier à deux sous pièce, est devenue le
chou-chou, la. favorite de la maison. D'abord on
l'avait confiée à la femme de chambre. mIe pre.I.ait
ses repas à l'office et Mme Mœ'tet cherchait une
pension, un asile pJutot, où Cille pourrait la faire
soigner ct élever. Puis, tout a changé. Le baron a
prélendu que leur prot.égée devait ètre une enfant
volée, de n aiS\Sl3.nce aristocratique.. Il lui t.rouve
g!'und air. Mme M:u'oot a été ùe suite persuadée que
~a 'petite .Deux Sous est une prin<:ess€, ,et e1le s'est
]lu'é alors de retrouver sa ram ille . Yvette (on la
nomme Yvetl.e) est ùonc pas:séc ide ' l'o[fioe au snion .
Le baron, s'intéressant toujours à e.lle, conseille il.
sa beJ.1e-mère de garder sous son toit sa protégée
et de la faire truSter par: un spécfa.Hste. On adopte
oetr·e 1dée. Yvette ne qUltt.cra pomt sa protectrice.
plus à Paris. Je dis nous,
Mais nous ne s.om~
parce. <Iue M. le ba.ron et Mme la baronne sonL à.
Saint-Germain, dans la beNe vi1la à tournure de
chaten.u que les MJLrlet poS\l.èdent à. l'entrée de lu forêt. Dans qu·eJ..quas j011.n! mes maUres el moL .. Vous
sursautez à. ce mot de maUres ... Ma pauvre Sonia.,
qu'est-ce qu'un mot! Donc, dans quelques jours,
mes maUres et moi nous irons au bord ùo la mer.
.n nous reste encore un m<tis à pass·er o. La villa
Ma.r~ueit,
ainsi désignt'.16 du nom de la jeune bo.ronne. Le baron a confiance en moi, et nous causons souvent de bonne amit.ié. Il m'a été facile de
~.arle
de vous. J'a), d'aiUeurs, quelques droits
~
~-nres.
à la petl~
Deux Sous., ~
c'es1 moi
qUI llU découverte et rugOO!lée au charitable in térêt
de Mme Mutet.
[ Sonia O.rllihof!, peu à peu, perdait de son air
~IJChe.
Ses a.dnliorn.ble.s yeux ray<mnant de pasSIOn et d'inbellig<lDOO 00 posèPen.t s·a.r Bcppa.
- Vous n'êtes pas devenu méchant, c'est bien 1
dit-ell e .
-: Merci de cette paroile... Ah 1 Sonia, Sonia 1. ••
~L'3
ne nous Ilttendriast>ns .Pas. Je vous disais que
J '61 parlé de vous. Ne piluvant racon.ter q11and et
COJllJnent je vous ai connue, j'ai lnvon té uno fuble.
-- Encore, murmura Sonia, tonjoun{ menLir !
-: Dame, ma chère. j'y suis ~ien
!ol'cé. J'ni dit
avolJ' connu une personne guéne par vous qui
m'aVait 'P'o.rlé de votre science a.vee un éloge effervescent. J'ai fait ressortir l'avanlage qu'il y aU\'ait
à POuvoir garder, au moins quelque temps, n G<':meure près (j'Yvette, le docteur qui devait l'étllcr et la LT"Il.it.er. J'ai démon{,J'Ié a.uooi combien il
serait simplifil.l.nt que ce docteur fOt une docto~OSs?
On pourrait llti ôonfler nuit. c,t jour la ~urde
e .1 cnIa.nt. Un médecin - homme ou fem.~
arrIVé Û. la notoriété ne conflrnLiruit évidemment
pas il. abandonner SoB. clientèle pour u n{ sp.nJ e made .. Vous qni n'exal'coz encore que d'une rnr.on inernntt.on lc, vous n'aurioo pas crs raison;; ft oppos€r.. qn a. trouv6 quo jo parlni:'! d'or. C'est pourgUtol J.o allia vonu aujoul'd'hui 'ous prévenir dos
à~
entIOns dl) la fa.millo- Martot. Ce n.c.st point une
marche orncielle, On n'enverrait pas un humble
lUi
l
19
u
~
dhauffeur en mission a1l!près cIe vous... D'auLant
moins que j'ai dit - ne l'{HlbUez pas - ne vous
connat1.re qBe par des 010. dit. Je ne V0U6 ai ja 1'10$
vue, Sonia ... VOu.s éviterez avec soin de n~us
tra.h.i.r...
-:- Soyez tranqu ilJ.e, bien que j'aie horreur de
femdre.
- Vous alitez receVOIr la VÏJSi.te du ba;rolli Vous
ne pouv-ez le rooevoil: ainsi.
SonjJlll'ougit.
1
- Il faudrait VousaI'['angel' un peu, Soni,a, et
arranger aussi ·I.e décor... Vous ' êtes jeune;
adroite ...
- Mais non pas fée. Je ne puis rien avee rien.
- Ma chère amie, vouIez-vous me p.rouver que
vous m'avez pardonnè le passé '1
Les yeux de Sonia .ret.rouvèrent leur étincelle. ment farouche.
- Je n'ai rien pardonné, fit-elle d.urement.
Beppo fut dé{)ontenancé.
- Alors, dit-il, je ne sais comment vous dire ...
vous proposer... Il est bien certain, n'est-ce pas,
qu'on vous ol1riI'8 de superbes émoluments.
- Oh! sUlj}el'bes ...
- Si, si ! Je connais les Martot. Si vous guérissez la petiLe vous en avez flni nv.ec la misère.
- Où voulez-vous en venir?
- A ol:rn!nir que vous me permettiez de 'vous
faire une légère avance... de quoi vous ...
Elle acheva amèrement :
- Me vMir, n'est-cc pas? Ma garde-robe laisse
à désirer. Cependant, rassurez-vous. Je ne passe
pas ma vie telle que vous m'avez surprise aujourd'bui. Si votre baron s'effare de ma mise modeste
ce sera tant pis pour lui.
_.- Et pour vous 1 VOlUS He.s absurde.,. pardon,
absurdcment fière,
- Je n"aoc0I>terai rien de vous ... Bep?o. Mais je
vous . :reme!"C:i.e d'avoir pa.rlé de moi. J il ai VO]vl)tiers auprès de cette pauvre enfant, non par désir
de g8.0<1Tler beaucoup O'argent, ma.is parce qu'eU!'
sera pour moi un intéressant slljet d'étu de, du
moins je veux le croi.re. Si, après examen, je constate que nous nous trouvons en face d'un cas d'i.·
dioti-e banal et inguérissahle, j'en préviendrai loyalemen.t Mme Martel.
- Moi l j'ai idée que vous trouvera?; le. petite
tout à fmt digne de vous se.rvir de suje t.
- Je J'espère.
V011S V{)US occupiez d'hY'Pnotisme autrefois?
- Je n'ai pas cessé.
- Cel&: vous servira iSBIT.l..s douLe pour' Yvette ...
- VOllS aussi, vous vous en occupie2?
- Si peu ... Je p'e.n.dormais bien que des sujets
déjà. prép8.1:és par de p~us.
forts hypnotiseurs ... Allons, au revok, SonJ.~
...
- Au revoir,
Xl
Vl1.U MA.RGUERITE
Dans une jolie chambre aux tentures bleues fleuries de ptt(j'ue.rettes - J'nnc..'Ïennc chsp bre de !\lar·
gnl'rit ivlu·te
onaj~t:lIé
'\'dtc. EUeporte'1.lDC
robe de m{JU!ss lino blan,'he qU'll,llègent enco.re ses
entro-deux le V~lencius.
Un ruban blanc serre
sa taille déjà. dessinpc (lt s~
ohev{'ux b10nds bouffant autan r de son visnpte moins pt'tle sont atcb(-~
SUi!' la nnquepar un nœud de velours nQir.
Vraiment Yvntte, ainsi vêLlle, JlnmH donner rai~
'. on aux snellOsitions du bar-on de Folbrrt. Elme 8/
bi(>n l'nir d~lnc
l'eLit,o p~im
SSD m6·h ncolique.
Dep11is tfuinz€ jnurs Sonia Orbil ',ff est II. de·
meure à ln illa. t>.1:u'gllorile; Ane oh!;;erve, étudie',
essaio de pé'I1l~"r
10 myHl.ère de cet te int .eli~nc
engo\J,ti<1ic. Une lllèce ,contiguë à ,la r-)Hl111bre de ~
ma,l>!l.do a ét,.6 aménu.goo pour la dœw.resse,
,.
tI'llJ.lSformée.
Elle aussi ap81~t
�(;Il-
La 'Petite " Veux Sous
20
Lorsque le baron de Folberl s'est prés-enté chez
la jeWle femme 1,1 n 'u Il tluJes~é
ni s>wprise, ni dédain de la pau,\ (·e t.è du 1(lgl.S et de l'aspect misérable de l'hablluube, Il rW,11 !Irévenu.
Mais il importait que Sonia pnrtlt devant Mme
Martet en tt!lJue COl1velllLble, sInon luxueuse. Elle
l'a compris. EL l'awlIJœ que fort discrètement lui
offrait le baron, Sunia ruccepta.
Elle porte mruni cil/lili UD€ Jupe de laine grise,
une blouse de bata,LI:' mauve, et eUe est presque
jolie, malgré ~l:dH'w'uX cuurts.
Durant ces deux ,;erllainoes, Sonia n'a pas l'BVU
Beppo. Le chauffeur appelé pour venir aux ordres,
n 's aucune ralsoll de péllétrer dans la villa.
Et Sonia qUi, (j·abord.. s'est effrayée à la pensée
de vivre aussi prè:! dl] coupa.ble jadis si ardemment cimé, Sonia se rassure.
Si pour l,a jeulle !Prllme le passé d'amour n'est
point effacé, si c1Je ~ounre
encore et se début contre l'obsesi>'1on du souvenir, nul ne pourra le deviner sous le masque impénétrabJe de son visage.
Non, persnnlle ne saurl/:l q~ie
de se~lÏ'
BepP? si
près d'e.lle oppr'essl,> el angoisse S~ma,
e~
qu elle
n'est plus bIen sÛre que son angoisse SOlt de la
haine.
D'ailleurs, l'épl'euvl' t.ouche à sn fin,
Demain, le baroll 'et la baronne de Polliert parlent pour Biarritz. en aulo. Voyage d'amoure'lx
que racilite 1\lwc Martet en gardant près d'elle le
petit Pierre.
Devant les fenêlres ouvertes, les stores sont
baissés, L'ombre est tiède, parfumée de l'odeur
des héliotropes
Assi se sur une churise basse, les coudes aux genoux, le menton SlII' sns mains jointes, YvetLe contemple de son élf'Unge regard de rêve cette
sonne il J'énergique visage, à la vO,ix douce quolg,le
autoritaire qui, dùpuJS deux sem8.l.IleS, ne la qllltte
pas Wl in5tan.t.
- Yvette, dit la docloresM.
Un léger mouvement prouve seul que la fillelle
II. entendu son nom. StUlS repondre, elle continue
à regarder Sonia..
Celle-ci. héH-lte U1l peu, inl.erroge les prunelles
presque fixes. Certes, elle 0. <Sarle bLanche pOUl' leI
traitement qu'il lui plaira d"essayer.
Oui, elle pent cl dOit Lenter tout ce que sa
science, son aud>uce uïême lui conseillent. Cependant, si. eLle échoue? Si elle ne parvient qu'à Memdre tout à [ait la peli,Le parœl1e de raison qui parait brl1ler encore dans le cerveo.ll d'Yvette?
Brusqem~t
Soniu prend son parti. Elle s'approche de la jeune mie, la contraint à relever la
tête. Le regard de la dOc[ol'csse, 9,ue durcit l'efIort
de volonté, appuie su r les yeux ,d Yvette ... Et ces
pauvres yellx semblenl grandir, s'emplir d'épouV'ante... Les paupièrcs I>nllent oerveusement, puis
s'immobilisent. Sonia saisit le bras d'Yv'lto, le
soulève ... Le brus garde, rigide, ta position qu'elle
lui donne.
Sonia ne parl e pas. Menlnlement, elle donne li.
m'enfant, en proie an sommei] d'hypnose, un ordre
que oolle-ci exécuL IllJssilOl. C'est Lrbs simple : un
geste d la mUln , \J11 sOIIJ'irc, C'en t IlSsez pour
convaincrp Snniu de HIl rlli!':SI1nre sllr Yvette.
D'une pression de dnigt s u l' les paupières, la. doctoresse a r6v Illé l'illClln sri nte.
A l'hClire frllkhe, ROUS les grnn ds arbres du jardin, le goûlcr' e~t
Rervi : ln voix a micale de Mme
Marlet nppf'lIi' ln om'lol'f'gsc L Yvr-l.Ie,
Autour de ln lahll' en ,jnnc Chfll'/lée dl' fril:lndlses,
Marguerite d(' Fnlllf'ri 8';1('1 h'e, gracieuse, épano~
dans son bon hplJ r [).(1r'si~lfnt
Ln bonni' I\lmf' l Inrll'l t'HI (>cl1011ér dons un fauteuil il ltlll:wulf' l'Il fac' ril son n '1ri, 6rhoué, lui
aussi, rflll1rlr," ' 1Iln~
s.a dl/ur un p<:n flasque de
lI"OIiI hommr vipi llift"Clllt
Le baron de l' oib( l'L aRt li Paria dopula ce malJn
ver-
Il
-,lt!)
en auto. Il doit terminer (( des affaires )), explique
Marguerite, avant son dapart.
Le d1ner fut relal'dé par la raute au 'o-aron qui
arriva une demi-heure en retard. L'auto ayant eu
une panne, Raoul s'était vu forcé de revenir ~ar
le
train, laisso.Jlt Beppo ,J:éparer la ma.chine qu il ramènerait le plus vi~
possibl-e.
- Pourvu, d!.ll Marguerite, qu'il n'y ait demain
matin aucune anicroche...
Son mari la rassura. L'auw marcherait il. merveille Beppo [erait le nécessajre.
- Ce chauffeur es t vraiment un trésOr, dit
Mme Mu..rtet. J'en viens il vous féliciter d'avoir
renvoyé notre pauvre Grénelet, puisque vous l'avez si bien remplaoé,
Son.ia, muette, l'air absent, éc.outait les éloges
décernés à Beppo, commë cfiauffeur, et elle pensait
à ce qu'avait élé ce Beppo, aux am.bilion.s si
grandes, si nobles de ja,dis, el! auxfl llelles, de tout
son amour, eUe s'étail associée", Quelle chule 1
Remontée chez elle'" enfin, tandis que, dans la
chambre con ligu~,
YvettE' s'endormai t paisible, la
doctoresse éteignit sa lumière et s\accouda à la fenêtre.
Il faisait une a.àorable nuit. La h;ne, au-dessus
des arbres du parc, s'élevait plus pà.1e il mesure
flu'elle se rapprochait du zénith, En bas, l'odeuT des
héüotropes <lans la n,u it s'exaspérait et bruignait
Sonia de douceur aLlendrie. Elle' songeait.
Soudain elle se m.il il rire anlèrement. Elle se
raillait. Allail-elle, Sonia Ol'bihul'f ln savl~e,
la
docwresse aux cheveux courts, devenir sentimentale com me u ne griset~
?
Il Je suis folle, se ddt la pauvre fille,
c'est moimême que je devrais soigner, non les autres 1 Il
Un roulement sou:r'O fuit IJresooil1ir Sonia. L'auto
revient, La doclorf'sse se penche... regarde ]a
clarté blanche des phares qui surgit là-bas, a.u
delà de l'entrée du parc... Mninlenant, l'auto 8
tourné à la grille, elk longe l'allée... La vaici dans
la cour, devant le garage.
Sonia perçoit un bruit de voix, L'aide de Beppo
est là, prêt il seconder son chef, Sonia entend ouvrir la porLe du garage.
Beppo loge dans une ohambl e annexée il l'orangerie, qui servait autrefois il ün jardinier.
Sonia le snit. Elle sait o.us<si flue pour rentrer
chez lui Beppo doit passer devant la maison, devant la fenAtre où elle est a(,~olrJ.ée
Et elle guette,
le cœur battant d'une émotion qu'elle croyait
m'o rte, le passage de cet homme avili qu'eJ.l.e ne
veut plus ~\Ie
mépriser,
Comme 1 héliotrope S<"nt fort 1.. .
Au-dessous de la fené tre, dans l'allée blanche de
lune une ombre se dresse. Le pMe visage aux
yeux sombres de Beppo se lè~e
ve~
la fenêtre,
Dislingue-L-il la jeune femme lmmohile,
Toul dort druls la villa.. D'ailleurs, les chambres
des Martet et des Polbert don,nent sur l'autre fnçade; seuJes. de ce cOté, celle d'Yvptte ct de la
doctoresse sont habitées. Bep:po ne l'ignore pas. Il
s'est approc hé dll mil r.
Sonia se penche daV'ftlltage.
L'ombre projetée PW: la maison n'est point assez
profonde pour que la Jcune r mme ne puisse voir
le chauffeur entbrns!\er le <Xlnduit de zinc d'une
gouttière. Ses mains, ses pieds s'accrochent aux
supporls de fer ... il monte ...
La chambl' de Sonin etau premier étage' au
rez-{j~ha\1sé
se !d'olive le billard. Pet'sonnè ne
pOlll surpT'~ldN
,Reppo, prrsonne nf' virnoro <,lAfendre Sonilll Orblhnff. [t~\l e votHJruit erier, npprl6r
au SCCf'llIrR." Elle sc t.ait" regarde a.vec oel' yeux
fOll8 nppJ'Orhrr cet hnrmnr ... apprnchrr son doslin,
EL lorsqu'il surgit près cl'eIJe, lorsque, sans un
mol, sanfl In~
[11'11'1'1', il l'povploppe clp ges bl'EL.'l,
avec un ~<"mISl'rnt,
dRn!! l'horr'rllr d'elle-même
et Cf'prnrlilot 1\~i
IlV('(! llfl(' RnOlbre joie, U. semble
1 Sonia que
,l'WsOO
l'abnru loo no"
�~
La Petite
U
f)eux Sous
n
====================
, i.or~q'el·
se' r~tu
secle' d~n;
' s~ ~ha:mbre
Sonia OrbihoIT selllit une révolte d.éseospérée.
Elle pIeu ra en sl;Lg~t
qui la seouai~
t toute.
Puis soudain eMe s apulSa. Un de ces ll'elV'LI'ements
dQnt parfois sont coutumières les natures de violence, se faisait en eJJe. Oui, l'ami de jadis, d~
venu Beppo le ohauffeur, est indigne d'elle. OUl,
cet homme a dan.s son passé une infamie ... Eh 1
bien qu'importe 1 Qu'importe ce qu'il a fait, ce
qu'B' a été, qu'impor!-e ~'il
soit dé~hu
1.
.
C'-est lui encore, lU! toujours qu'aune Soma. Lill
à qu.i dans la ferveur ardente de son amour, eUe
fi. cru' naguère se donner pour jamais ... Elle l'aime
comme aux jours enfuis, plus aI'demment peut-être
à cnuse des doule uf'S souffertes.
Elle l'aime, enfin, d'une passion irraisonnée,
violen te, inguérissabl'e.
XII
SOi\IA R1!:VE
Le lendemain de bonne heure, avant que la doctoresse n'eûl quitté s'a ch amtbl'e, l'aulo ronfla .dans
la cour Sonia SUIVit le cœwr gonflé à la fOlS de
jOie et de peine, le bruit de la 1 1achillle c1élnarrl):it.
- Il est parti.. .. parti. .. parti 1... .
..
EHe s.e C\enti t prè" des larmes, mrus se re&3o.lSlrt
d'un effort, humUiée de sra f aibJe~·
.
Il Il revi endra, se di t.-elJe, ct alors ... ))
Sonia se prenait il. rê~e
le rach~t
de Bel?Po. Ell.e
le relèverait à force d amour, lul. rendrall la dignité de sa vie.
Pour la première fOhs, 108. doctor css.e SOullllite
posséder de l'or. 11 lUI en faut, et beaucoup, afin
d'établir sa vie, celle de Bp.ppo. Comme en réponse
à celte pelôSée YvetLe évelllée appelle:
- MadR.me j
Un mot q'u'elle ne pron~lCe
que .depuis quelqu.es
jours et qUl, pour elle, déSigne uDlquemcnt SonIa.
IC Je la guérirai, se chit la doctoress·e courant
li.
Yvptte, ct, pour cel l ~, mOl, hier ewore si bien détachée de tout, j'e1:1germ une somme énorme, le
Prix de mon bonheur.
Ce jour même la doctoresse endoTlTlit la petite
Deux Sous et de t.ollte La forr€ doe sa volonté, lui
ordonna rie s~ souv~nir.
Lorsque s'évei'lla l'enfont,
son regard était plus lucide, plus inquiet a.ussi;
san front se plissait, comme SOUs l'efforl d'une
pensée.
1( L'éveil... réveil viendra, se dit Sonia. Je vaincrai pour l'amour de lui. ))
Un jour que Sonia et Yvet.te se promenant, s'étaient avancées sur la route il quelque distance de
1a villa, la doctoresse vil lout à COUIP l'enfant secouée de frissons et fixant des yt'ux d'effroi sur un
Pf'fSOnnage d'a.Hure cependant très pacifique.
. C'était un pelit homme vol1té. maigre et d'âge
lndéfini. Il venait vers les promeneuses sans pa1'alll'r lE's voir.
A qlleJ,ques pas d'elles seu.lement il s'arrêta, leva
les hl'as en un geste de stupéfaction éperdue et les
laissa retomber, comme dHai,11ant d'une émotion
sans doute joyeuse, il en ju ger {)<fU' la grimace qui
t.ordait la bouche· Iip'pue SOl lS le nez crochu et qui
V9U Jait figurer un sOllrire. Yvetl.e se jeta contre SonJ.a, r{-]>étan t d'un.e voix déses pérée :
- Madame ... Madame ... Mradame 1
, - C'est elle 1 :,, 'ériia le Vif' ll X, c'est hien elle...
c est notre ohère petil.e enfant 1...
- Qui êtes.-vous? dît T'lItdement. Sonia.
L'homm.e Balua, joign.i t ' Ies mnins.
- QuJ je suis l... La mig-non.n.e ne me reconnatt
Pas... paUVI'e retite crélliure innocent.e 1 Je suis
~on
père adoptIf... cel utl qnli, pour assurer I.e bon,eur de l'en fant aimée, a fail tnir!:' sa lcndrpsse,
8 est séparé d'elle... Je ~uis
Isaac Siméon... Mais
vous ne me connaissez pas, madJl.me, je n'ai pas
l\insigne honneur d'être connu je vous.
- Je sais du moÎlk· vuLl'e lllPlll, el t!u'YveLte était
chez vous ... Ne trem·blez pas, mignonne .. . ne craignez rien. Je suis là.
EUe entourait la jeune ftIle de s on bms, la ca·
ressait Leudrefllen.L Yv·elLe lr-cfllhlai l toujours.
- Que c'est tris.te, IOl'tlI nya 15 !I. ac, qu,e cet
amour m'aiL oublié., moi qtli l'tWl lI' I,ant 1
. mplJt
je ne crois pas
- Non, dit Sonia, pr6clf;~
qu'elle vous ait oubHé ... ui l.cs l;e que vous désirez.
- Etes-vous Mill e MtLt'I..el '! quesllOnna Sim éon.
- Non, mais l'enfant m'es t confiée, et vous pouvez me dire ...
- Bien, bien. Oh! je ne veux pas grand'chose ...
La voir... m'assurer qu'ell., st en bonne san lé ...
Grands di·eux, elle est fratcl1e ,'UlJlme une Deur,
belle comme une pflnt.;'$s1
~ .. 1(' ' '-'LI nnus de n e pas
la voir. On m'avojt prolll b de Ille l'a:mener, el. jamaLs on n'a tenu celLe p.!'lJr>R~I
..
.
- On vous l'amènera certainement, si on vous
l'a promis.
- Vraiment oui, vrainlC'nt ol1i, on s'y est engagé. Oui! sans quoi, mf'llle pUllr son bonheur, je
n'a'tlJ'ais peul-être pas eu le courage de latsse.r
parl'i r cette chérie.
- Eh! bien, maintenant que vous l'av'Cz vue,
adieu 1 Venez, Yvelle.
Mme Ivlartet é.prouvn tjll<,lqn E' ennui en apprenant la démarche d·)sallc. EH., igllurait l'engagement pri s' par Beppo en son num de ne pas séparer
tout à falt Yvette des S~méon.
Le SalT mêm·c elle en'Ivii !\ :-"(1n crelldre .
.Le baron répondit que ROn ehn uITeur, pou!!' décider 1satnc, avait eu la falhlessE' ùe consentir à de
vagues promesses de revoir.
'1 Mais, ajoutait·il, je serl.lis fllché, ma mère, que
vous ou mon beau-pèri) prissiez la peine de conduire votre prutegée d,{1/
nlrrr'uses gens et,
d'un Gutre côté, on ne pent el1lployer pour ceila
qu'une per::;onne lrès sûrc.. JI.' dois précisément
envoyer mon chauffeu!' à Paris pour eXlilrniner,
chez Ile Ifubricflnt inventeur, un nouveau moteur.
Confiez·lui Yv.clte. Il Ill. 'olldll il'a chez les Siméon
eb ·1CUI' fera comprendrp ([l l'i.l senlit dan.getreux
pour eux de cOOrchcT' à abu,qe r de votl'e bo.nlé. ))
Mme MarLet communiqua sans retard à 10. doctor,e sse la lcltl'€ eLe naoul el ::)ollla Ur'billoff senLU
son cœur se gonO.er ; ses j nl~'s
rI'ordinaire lr~
pCl.les, s'empourprèrent, son regard eut un éc·l al
merv·cilleux. l'vtmr M.<lI·let, o.yon t levé les yeux sur
elle, s'éoria joyeUiSement :
- L'air di) Sainl-Ge.rlDaila vous [ait benucoup de
bien, madame Sonia. 1 VOliS embellissez de jour en
jour.
El la savante, la ~Il.rouche,
la sauvage Sonia fut
heureuse d'êlre bruIe, oulnnl qlle J'flût été la plu~
futile, !.ra plus coquette des mondaines .
Be ppo RI'riva Ill) so.ir, 1'1 dl 'tOlI~
1 1l l'autorisation
de reprendre pOUl' une nuit son ancienne chambre
de l'orangerie. Le len{] emn iJ.l , hl pal'fiJ'ait pour
Paris, emmenant Yvette.
Ce fut pendant le dlner que Soni.a a,pprH l'arrivée de Beppo. D éJaill an le rI'('n1Di., elle fut sur le
point de se tJ.rahir. A!fir>manL d~eo
. lvri
chez sa
malade des slgnes éVIdents de fnllgue, la jeune
femme entratna de bonne heure Yvette dans s8
coornbre.
Yvette n'avait pas sommeil. Elle s'était laissé
des habiller c~mplèe-:n
; ITlfli s, pnvnIoppée d.e sa.
,Iongu.e cherols,e de mut, pli*, !1t'rnP ilrn.it assise aU!
b "rd de son lit, refu sant dp " ' ' I~ndre,
répondant
un Il non)) entNé aux (\\jllr-g>nlinnR de ln doctoresse. L'enfant pal'ai ss nil c!':~r"e,
en dénanee et
JYl'omenaiL au tOllr d'oUe IID "pglll'rI inqui et. Sonia
éteignit la lumière. Seule, Illll' vrillf'use, dl8.ns son
globe rose, éolaira vaglll'ml'nt la chambre d'Yvette. Celle-ci, pour la première Coi.s, s'irrita el fit
'»"
/
�================================== La 'Petite
~2
de se lever umt à taU. La idoctorœse posa sa
sur ~ l rOJlJt .QJIi 1:en f.ant.
- -Dors ! ordon:na 5<'1. pensée.
Yvette se r aicli t, g4mil
- Dors 1 ropéta Sonia de toute sa ;volonté.
In ine
) 11 am
Encore ,u n frénaissement, une CO;ltrai~on
,de tout
le frêle petit corp.."l_ .. et la têt-e bilo!1de .retomba.
Sonia étendit reniant, le. oouynt.
Un remord:s .Iui vaaa.i.l. d'user amsUlie ,le terriMe
et mystérieuse force. "Mais ne faut-il 'pas que
'BcP'PO puisse ven.i:r?
Les mains de Sonia sont b1iUantes.
Debout près <.le sa. .fenêtr,e largement 0urv.erte, .la
doctoresse s'efforce de clistinguer dan.s l'obsaunté
lu, siJ.houeLte des choses. Mails la nuit cette !oi!s est
profonde : aucun rayonnement de lune.
Un pas très léger, à peine per.cepLible...
.
Bap-po 1 Un frCAlement sur Je zinc de J6 ,gouttlère,
un souffle qm'aocélère l!eJf0rt... BePi>Q, lest~n,
S<lute cLans la chu,fllbre,.. Daru; la plèoo V0WSlD,e,
YvetLe d{)rma.i.t toujours de \Son IOUird oommeil.
La doctoresse oubliait la présence de renIant,
plUis rien n.'exislait l6Jue Beppo. Ge fut lui qui, au
moment d.e quitLer Sonia, s:inlormad'YlVcLLe.
la docto- Peut-élIre Ila guériTai-lje, l1épondi~
.resse, ma VOIOIlLé agit s~r
elle coocrue. Jo~r.
davantage. Ce !-loir, eHe tfefusa.t.t de dQfIDlir, Je I.al· endormIe de force.
- Puis-je la voirtl
- Si tu veux.
I1r; se penchèl'o n. t s ur le ipct:il isag,e.
- J'ai houLe ... dit 'Sonia.
Et elle s'écarta de Beppo.
- EiLle d~rt
bien, wa petite iDeux SOlliS... Pas de
dang-er qu'.e.ll.e s éve ille '/ ...
- Non sans quoi je 'De 1,'aurais pas amené près
d'-elle ... · Tu l'as ."ue; œaintenoot alons~.u·€
- AttendIS.
- Quoi?
- Je voud.l'rus". Je voudrais, r~I1it-l,
,gu.ettun t
.sournoilsemcnt : ur 100 ~rajts
de SonLa l'effet que
produirait sa requête, que 1U<DI donnes à Yvette de
m'obéir .demain .. .
- Elle t'obéira ... .ELle est douce, pa.sls.ive mMle.
- Qui sait?.. En se retrouva.ut chez ces Simoon
dont el1e a sans doute gardé ·une oonI,uso terreur...
- Oui, clit Soni'R, elle ,a. ooJilServ6 le souv,enir du
brocatl leur ct cet ,h(l)rnme l'épouvante.
- T.u vois J ra se ,pourr,ait r!OIl'(' fort ,bien qu'en le
.rOv.oyAnt, en s'apoJ1cev<lut crue je la mène chez ces
affreuses gens, la pauvre petit-e s'affole et tente de
m'échapper. Imagine quel escJandre ,1
- C'est vrai, dit Sonia. Si je demand.ms il. vous
accompagner
- Non. 1 dit vivement Beppa. Ce scr;uiL impl'ude.nJ., ma chérie, si l'un v.ena.it à soupço.nner ,q uelque chose en.tre nou~
...
- Alors, que rems-tu si la petite n'obé'i<b pas?
- Je .serai en ce cas, fort embanILs.sé. C'est
pourrql1QÎ joe Ùl ùc.mancLe de lui ordouner de m'QMlr. Tu le peux?
- Sans doute.. Mais allJ.ref6is tu t'occupais
B.US.sd .c!·'llypnotis-m.e. Ordonn Aui tGi-m6mc, mais ...
son sommeil n'cBt plu A le Rommeil d'hypnofle ... La.
'ourmcnter encore ... Non., je ne le veux pas ... je
e dois pas ... Ce serait m~,l.
.,.
- Tu aimes mieux que J Ille domam l ()I\D.W <le
)Voi'I' muter par la fo!'cr. une j.ctiote révo1l6e ?
- Elle n'est pdS idiofe.
_ Non? Çu y ressemble. FoHe, a!<Jl'S '1
- ·Comme ta voix est rude, Bcppo (
m lui sourit. Et SRns hypno~c,
rien que pal: la
persuasive CUTe.C;SO do cc SOUTIre, ,par III prI~e
./terulre deR y l~1J " i,] rendit Sonia ~loc)e
à son d sU'.
lEt elle sentit que ce que VOl1)~
, ra)t
cet homme, tOt;Lt
' (Je qu'il voudrflit elle le fertUt. Détourné de Soma.
~ et ionant la muin sur le front d'YvetLe, Boppo pc-sail de lC'llte su voio.n-té Sllr cc cel"V,'uQ floulIf'.Qnt ....
~.
'Deux .sous .,
~
Yvette un moment se convulsa, puis demeura
immob.i!le.
- Prends gll.l"de, ·suPIDlia Sonia.
- EHe ID 'obéira, je crois ...
Et de nOll've8.u, d<aalS la ch.al'nbre ~[.ble
que
r{)S&Ïlt la v.eillel.1..'Se, la. pe.1Jilte De.ux Sous cLemeura
IseUI1-e, incemsci-ente de ce pou'V0ir qu.', dès Cjat instamt, .pesait .sur ell<l.
XIU
L'HOM1ilJ;: AU Mam:EAU VERT
'Il avait un~
longne barbp g'l'is 'e et des ohevel'lx d'u)') 'blanc de neige qni encnClraient ses
joues, frôl-aient ses épa.ules. Eela lui faisait un
type d~ patriarche, une tète vénémbLe . Muts Je regard manqu.a.i.t de sérénité ; il demeurait empreint
d.'une tristesse anxieuse et les lèvres. pil.le.s ne sourIBlent jrunam.
Un soir de l'hiver passé on l'avait vu errei' dana
une v1ellle rue de Grenelle. Il mendiait, sans pr.wr,
,du. geste à pein.e esquissé de sa main Lendu.c. A
VOlX basse il disait merci et.se d~tolM'1ai
Ce qui ,ajLlutait à l',aspe.ct étl1ange c'è c.llL· homme,
c'était son manteau, une longue C8.p€ de drap vert
d{mt il rejetait un pan sur une é}Juule; Je bras
d·roit dem.~rait
cache d.a~
les pliilet, pour mendlel" le Vl€lllùar..(! se SeTVrut de la main gauŒ)e.
Plusieurs jOU1'S il erra par les mêmes rues. Les
gens du quurbier l'appelaient : tI ,L'homme nu
,manLeau vort n. LI devait être fGrt misé.ra.tJ.e et nc;
pae; ma nger à ~.a
f.üm, à en jUIZE'r por S0" tpl'lpeS
creuses et Le tremhlement qui agitait ses doigts dé-
.cba.rn6s.
tl ut;dqu'un, liIpilqyé, lui conseilla. de cher.cber des
séances de pose. Son type pouvai.t ~el-vir.
11 s'en alla frapper à la porte d'un a.lelier de
peintres.
II y avait 1à cinq jeunes gens ayant réuni leurs
minces ressources, pal'tageunt cet at.eJier, profiLant
des mêmes modèles. L'homme au manteua vert fut
accueblli par eux avec un joy01.èX en Lhousiasme. 11
ne pouvait mieux Lamber, cc vieux à barbe de
fleuve 1 quj n'exirre.ait rien ... pourvu qu'on lui don.
nât de quoi ne pas mourir de Iaim. Il ne devait,
du D'este, prét.encJ.re à. beaucoup. On le comprit,
JOTsqlJ'il eut, à III plièr.e des a rtitS te s, 'aissé t.omber
son manteau : l'homme ne pouvait poser que ln
tôle, son bras d;roi L avait été déboîté à l'épanlc.
011 l'employn pourtant. Et désormais ce fut le
soir seulement quc les habitant'S des plus vieilles
l'ues de Grenelt1e vi:rent rMcr 111œnme au mantedu
vert.
Bientôt mOrne il ces~a.
de parntt.re chaque jour.
SlJS recherches mystérieuses demeurant vaines le
vieillard les poursuivait plus loin, au hasard 'hé.
l'&s 1 errant de qUfl.rL~e
en qlwrtier, plus tristJe,
plus sombre chnqu8 JOur. n revenait partais ce.p endant., alLir6 pur une sorte d'aima.nt (Ians' une
éLroi1.e, obscure et p6.1.IIVTO rue. Et
matin à
l'aube à peine lcvoée, com.me la TU.è Pu.JVtissait dé.serte et qne s{:llle lUl() fl)m~
se montrait au -~IlÜ
d'un vieille mElison, l'homme au mnntenu ' 'vert
s'apprucha d'elle ct l'abord·a. Elle crut qU'il allait
lui dcmand'e!, l'aumône 0t, sans aigreur, s'ex.:wm
- Faut rIen gu6Ler aujourd'hui, mon pauvre
homme ... Je SUI', comme on dit clans la dèrlH'
- Je n'ai .besoin de rien, merci'.. Jc vOlllols sell '
lement SaVOIr... Est-ce que 00 n'est pas ici que dr·
meure un certrun Vita3 ?
- VitalI Vitrul le Mamooot? s'écria. la feI,1111e.
Vous le connaissez?
- .Te le l" nconlraîs rl~ns
les Lemps mais jn 1'{J.i
»Crdt! (\ vue df'pUis des années.
'
- Ah 1. sl1r que vous avez d\\ 1 P I,clre de vue,
pour v:.cmr le chercher pur ici 1 Y a beau lernps
quc VILa] Je M,ouchot n étéconc1amné à pCl'pétuité .. .
un
�;~
La Petite " Veux Sous
-
Il
========= ======== = ===
Lui l. .. Et ])OuTq:.uol ?
Po ur pas grand'choSle, miù1ca la fem m e. Sim·
plement pom' avoir saigné sa bonne amie . .Tc dis
ça... Au fond, moi, je n'ai }amais pu me figurer
que cc pauvre homme, qll 'avait l'air si doux, soit
tapab e d'une atrociLé p<1.rcille ...
- Es l-ce que Ia bonne amie de Vital 'demeurait
ici ?
- Non. Quand j~ dis (( sa bonne amie )), c'était
ip8ut-être que son amie tomt cOlIJrt. Est-ce qu'on salt
Jamais? Une ma.hl1eureuS€, toujours malade,. . On
la connaissait bien dans le qoortier... EilIe a -:a1t
une gosselin-e, jolie comme un cœu.r et que VltaJ.
a imait comme sa propre fill1e.
- EL... qu'esL-el ie devenne, la gosseline ?
- !\ h ben! voJù. fo'LgUI"€Z-VOUIS que dans celt.o
Jl1<nison-ci. .. tenez, y a "il 1111 ménM!t~
... Oh! nn
"Hain couple. .. Isaac et R6becca Siméon, qu'il$
s'appellent, i,J,s faisaient de la brocante, pour dire .. .
et prlHai~nt
à lia journée et à deux cents pour cent,
s'ils pouvruen1.. i't avares, HV~C
ça 1." El v11inli-t_y
pas g-u'y demandent à se charger d{} la fille de l' 1lSsnsSlIlOO ?... Et c·était pas nn petit embarras: la
pauvre goss.e av.o.it eu si peur e.n voy.an~
sa mère
le cou Lrou<é qu'elle en av,rut perdu la boule !
~ - AloJ'S... elle, IR. peti te ... e lIe eSL id ?
- Ici 1... Ah ! c'est vrai, je ne vous ai pas dit...
Jil,s on1 filé un beau matin .. . emmenant la petite et,
d.ecpUlÎs, personne ne les a revus.
- Où son,t-i ls allés?
.
- Si vous croyO'/' (;j'u'ils ()'l;\t laissé leur ad r esse !.. .
D'aiJleurs, personne ne s'en est inqu~t6.
Je vous
di s, le tem.j}!l ;1 p'llssé .. . Quatre ans, cinq ans binnUJt. .. Tout de ml!!me, H y a un mois, on s'cst raI>peM cet.te hi.s.t.oire ici, à r:wse du chien cre Vital...
L'homme l'l'prima tm mOl1v.em<ent.
- Oui, reprit la oommèTt', figurez-valls que le
pal1vre cabot, après le départ de son maltT'e pnur
la p r ison, avait, disparu, mais p..1.S tout à frut. ne
tempo en t.e.mps, OIl le voy·ai t reven.ir. li y a un
mois, il est. reveoo et il est r sté pleUJroJ1t, gémis.sant. Probable qu{il avB.Îit ét.é recuciJ.li par q,ne.lqu'u n ct qu.'il a dû. perMe soo nouveau ma.1tJ'e ...
Moi, y me faisait de la veine, mais que voulezvous... on n'<'5t pas assez coosu IX>ur fonder un
hOpita,1 <le chiens, et dame, les enTan.l6 .. . J'ai vu le
pa uvre tou.tou atLr.a,ppé par nn &ergot et empOlié à
la fourrière.
- Pau vre vieux Tfrrü1lon 1 murmura l'homMe.
- Tiens ... Vous savez 10 nom du ohien ? fit 10.
commère, in terloquée.
- Vital m'en avait J)'al'lé. Merci, madame, die
VQs r.ense ign-omenl.s.
Et, se rrant pIns étrni~mocontre lui les plis de
sa cnpe, le vieillard s'éloigna.
Des heures et des heures, il 8JlLa, pensif. Pu.iJs
.J'homme au manLeu.u vprl s ' a ' p~rc:ut
souù{).ll1 qll'il
s'l'tait ég.'lré.
Dct>nis combien de l.cmps mar chait-i[ 'l Il ne
~conis.l
pas ooUe ru étroit.e avec ses mu·
raill es hautes nt nues ct I.e r8Ç,{l~
austères de
ra res rn n.iJSon.s. Il y Ilw1.Ît poo de rnagD,ffills et
ils él ai,e ul niliér'.v.blœ : de pauvres échoppes: unc
m .er cc r ie poussiérpuSll', . un chnr~ie
ct, p lus
lO~
\ une m.i.s6ra.ble boulique de bl'lC.à-bra.c, qUl ve D lUt de s'ouvri.r.
Une fem me à cbulÎl" n:I'lqUG en sort.n.it péniblemen t des m eubl~
verlOJu~
cpl'el1p rangeait sur
le trolt.oir. A la vue de cetAe femme, le vleillard
s 'immooj;l isa. Une exclaJ'na.tion de sUl111ise s'échap:pa de ses lèvres
- E lle.. . J e ia reconOJlls, murmur<1-t..il, je n&
me tr om pe pas.
Il rt'brollssa chf?min. Il vO\lla.it réfléchir, combin f\ ~ un plan aVll.n d'abordf CéLie R~heœa
Siméon
qu après cinq fWS il l'ell'O\lvairL si pnreille.
~h
1 songeait le vieillard, il y a vraiment une
1(
ProV1dence 1 Le hasard seul ne m'aurait pM ainsi
atllené droit a u but. •
-
:ses
Com ment péné trer chez Sim60n ? Ne va- t-o n pas
en ce vieillard (;han celan t, à barbe toute blanr:i le,
Teconnaltre oe ViLaJ. accus-é... condamné '1 Ce Vllal
assassin en ruputure de bagne '1
Durant plus d'un an Vila 1 n'a J?as osé revenir à
Paris ; il a erré, mendiant, furtIf, sans cesse en
dange r d'être alTêté pour vagabondage fauLe de
p'apiers d'identité. Puis un soir, au bord du chemin,
11 s'est heurté au cadavre d'nn misérable erl'nnt
comme lui .. . un homme doot le signalement va·
gue pouvait s·appli.quer il Vita:!.
L'6vadé s'étant 8lSsuré que nul ne l'éphQ, a
fouil.1é la bes6.ce dll pauv.re mort. rI 's'est (!JIl'~:ré
ù'un carnet cré1Sseux contenant des feu illl> g timhrées et il a su que le nommé Lancrot ~n-i"1
(i;5 ans - est autorisé par !{' m-aire ete Sil commune,
etc. .. SoixaJ.'1 te-c.inq aIlS.. . Taille moyenne. liMbe
et cheveux bd.a.nœ ...
Il manque le (( sign.e particulier Il - le bras Gmputé ; mais la place l'st r os lée blanche avant. lu
signature du maire. Vital l'ajoutera .. Il a ap:Jris
à tenir une J!lurnc de sa fi in gauche, et l\;cl'Itm-e
de l'acte est faciJernent imilJable.
Vital n'a aucun remords do faux qu'il médite, de
'S'emparer de la pemonnlillité d'un mort. Que fait ù
cet Eusèbe, entré dans l e grand repo, qU'lm UIl"
tre poursuive sous son nom sa vi.e nomade ?
Des mois on t passé depuis lors. Vital, devenu
L ancrot, a osé T'Cntre!' à Paris, osé reparaltre, mt:me dans· son anden quartier de Grenelle où l'on He
,souvient san-s doute de lui.
Brusquement, il Ge décide et Réheccn, occupée
à écllafaudoc un guéridon sur un fauteuil, s'en lent!
in terpl~.
- Pllroon.. . madame...
Elle se retourne, sans grâce.
Les olie.nts sont trop raoroo, elle n'y croit gllèr.e,
e t, n'était rent~.m
d'Isaac, Rébecca s'épaxgneIl'tic~e
com6die de l'étalage...
Ici comme à Grenelle le cOlliple Siméon a su lever une clientèle spéci-a.le. Ici camIlle là-bas d~
pauvres gens ont recours à leur obligeance. Vilal
sait ce q u.e celte I( obligeance)) coûte ::J!lX obligés et
se croit certain qu'une !'lQurce de reven o!'\ 1l115Si
lucrative n'a point été abandonnée par 100 Siméon.
Cela va lui s.ervbr.
Rébecca. ne 'y trompe point. C'est donc d'ur e
voix rn~I1C
qu' ~ le
s'infonne.
- Qu est-ce qU'i! vous faut?
- Je voudrais pa.1ier à monsieur Siméon.
- Pour?
- J o lui e;cplilTuerai.
- Vous pouvez aussi bien vous expliquer aV(1(l
m oi. Mon mari n'est pas là.
- Je l'a ~ Lcndrai
.. .
- Allons, en Irez .
Furtivoment, il fouilln. d'.! reIl oMit, empl'~sé.
gard les recOInS de la bout.ique en,combré . Ah 1
s'il avait V'U l'éclair hlond des c.heveux Ù'Yvet,Le ...
ses grands yeux lumineux 1 Mais non 1
Per.<lonne dans ln. boutique, ni lion qui décelàt
l'habi lue.lIe présence de la jeune fllle.
- Voyons, dil€s un pe-u vite ce qui vous amènr.
- VoiJà, Mad.m~
Voillà ce qu'il en est : je me
trouve >en ce all-oment un peu gêné 0 ~ , &i.1ctlllnt qu r>
M. Siméon, que-ll1uefoi!'l .. .
Rébecca l'intR.>rmmpit.
- Gomment 1 Parce que nous avons 6t.~
bons
jusqu '·à la bêtise, on se le dJ,t ... cl on on flbll,c;e ...
Ah [ nou.s en ..:l.VOM pel'dLl de l'~rg
e nt
il oblig'er des
ing-rals 1... On Il peul pas enntinlHtr c·omm Qtl. .. .
Nou,,; s."'l;ons sur la paill!" snn.'3 tn.rd(~
hc.c ur'oll'p .. .
Et puis, faudrait poUY Lr... t encore, ql"~c
on
potinait en sa privan t, faudrait aussi savoir fi qui
l'on à nJ'fn.ire.
- Je donnerai des r éfflfrences.
- Oh 1 là 1 là 1 ùes références... C'est d~
garanties que nous vouJone.
�La Petite .. 'Deux Sous "
- La. s omme don t j'aurai,s bes oin n 'est pas
forte.
- F orte ou non, si noUlS devons La perc1re... Enfin , dite::; combien il vou::; faut.
- Vingl francs.
- Vingt balles, Ifien q u e Q6.' 1 Et pÜUl' comb ien
de temps?
- 1I 11ll jours.
- On garde les intérêLs d'avance_ Vous savez
l'usage ?
- Oui.
- C'est-à-c1ire que je vous remettr..ai vingt ['rancs
sur lesquels j'en gruxlerai dix .. . C'est il prendlre ou
il luis>,er.
- Oh !
- VoUà.
- Mais j'ai besoin de yjngt francs .. _
- Alors, <C.llI'p!\unl.cz-en q uarallte, si VQUS voulez .. . Seul ment, avar1l de vOus don·ner ça , il faut
q\1e nous soyons fixés ... Où demeurez-vous?
Il se mordit les lèv.res. 11 ne lui plaisait nullement d e <Ionner aux. Siméon le moyen de le rejoindre.
- Je vai.s voUs dire, ma bonne dilme, je Loge
en gnrni ...
- Rien pour répondre, alors?
- Que ma bonne foi.
- Porl&-Ia voir au l\lont-de-Piété. Vous verrez
cc (Iu'on prête lb-dess us.
- Alors, vous refusez?
- J't{) crois, que je r{lfuse!
L'homme au manteau vert poussa un long soupir. Ce n '>était pus le ~·efu.s
de l'usul'ière qui le lui
al'l'a.ch.ait. i\la is déboulé de ,U demande, il ne lui
rœlait [J]I1S qll'à s'éloiglle r' : il quoi Lui atrait servi
de pénét rer chez les Siméon. s'il c1<müt l'epartLr
sans avoir rien appris sur Yvette?
li! cherchait com~{!nt
prolo.lIger l'entretien, comlHent l'amene-l' vers son but véritable.
- Eh ben ! si c'est !,oul oc qu'il vous fullait.. .
- Oui, oui, je m'en vais.. . Pardonnez-moi de
VOII-S avoir dél'illlgée .
_.. I.e fnit ('~l ... 'I"e t;'il I)'('n valail pns ln pe;n~.
- Bien sûr. Allons .. . adieu, au pLai6ir, madame
Siméon .. . je pa rs. Ah 1 c'est pas gai d'ûtl'e seul à
mon Age... SI seulement j'avais avec moi une gosseline comme la vôtre 1
- Comme lu nOtre? El qui vous a dU que nn11S
avions une nUe 'f En vOlJà, des r~ontas
!
- J e croyais .. .
- Ah 1 Vous voulez parler de la peliLe Deux
Sous_
- La petite Deux Sous?
- On J'app·e lait cOTllme ça parce qu'elle aLl&it
vendr'c des poupées à dix centimes. C'él.ait pus à
nOliS, cette enfnlll-Ià. Une idée à fsanc de s'en être
enrom.bré ... dcs Vlluvres gens comme nous 1
Rébecca, lout il coup, jugea imprudent, même (leva n t cet étrangt>r, <!{) quiLler le l'Ole do len.:lre
mère adoptive. POUl' J'édification du vieux, ello
changea de lon.
- Ah 1 on l'a imait bien, allez, l'innocente 1 Et
c'est pour ça qu'on s'en est séparé. Pense? ùonc :
-l1ne dome très ridl l'a prise et la fnil (.-lever (' ,)nJ.
me sn propre ù('moiselle ... Tiens ... lin voilure qui
t;'nrréle ... [<,i('h z-moi le cam.p, snns VOUf! offefl.<:HJ1'\ ..
C' es l peul-Clre des clients pOlir de vrai.
L'homme ail rnan,te<LU vert S0 rLit avec la vjeille eL
ilq' n fnllut oc r,cu qu'il ne défnillit.
Du fiacre ar~lé
un homme é1.nit c!es{:end u ot aLtü :ril une jeune aile lrès blnnde, él(!go.l11ment I,ien
que si.mpllirnenl nlÏse. En cdtl' jolie rénluJ'e, VitrtJ Croylll t !'C('nn nu!Ll'f' ICL':l yeux cl' Yv.;&Ilf', si j'Ni,reils
nux yeux d'\'vnnnc ; m.ais des yeux d-r. r 'vc, o.vce
fpl.elfjllr c"nsl' d' i.IIM.('is d-an s Le rc'IHtrd. Roébecca,
les hn c: tf'yf>s. f. i trlÏl I1n" grnn<le émol.ion.
- Mn chérie 1... .1\10. petile fille 1 On t'amùne enfin 1... :\IUIH ('!lIrez donc, monsieur.
IlHnd~.
~
Bep-po, ayant payé le oocher, le congédia. Ii rep rit la main d'Yvette el dit, dans un souffle ;
- Allons !
Ji,lle pénétra la première duns la boutique.
Beppo l'y suivit. RéUeul'tl ellt.l'O l,n dernIère et vaferma la porte. L'homrne élU rnullteau vert s'élHi~
écarté ; mais il demeurait là, atlendant.
Yvette! C' était blcn \'v.'tle, il clbillée comme
une grande dame ... Il tremblait d·émoi.
A quelqllC disLance de la bnut iqne des Siméon se
trouva'it, dans un mm' dOtul'un·l un jardin, un porche condamné. Cela for'Inait un J'enfoncement dans
lequ el deux bornes de pier re "f' dl' 's'3nienl encori).
L'hnmme élll n1nnt:'tlll vcrt s'n,;sil ~ lr
l'une d'elles. Ail1-i l,hl"'':, et !-lan' .. e monlre!', il lui éloil hci te de · l'veiller l'enlrée de la boulique du broenn teur.
HélJ CIJU , snns interrompre ~('s
protestations de
lendresse, avait oiTerl des sièges ù ses visil.eurs.
peu d'entl!outllll me accepta un I;<\IUcppo U\'o(~c
leuil pOl,:.;i(~ru·
e t ilrunlill lL. Canduile pal' nfoecca q!li sïn. ,tiJ.:La r\'li ~ d'"Ue, un bras pass6 autour de lu taille de IF! je ul1e nUe, Yvette, docilement,
prit l'tace Sl:r Il! t'PIW ! '.
- Est-cc qlle mOl~jeur
Si méon n'est pas là, demonda Beppo ?
~
- Ilétas ! gét(Jit Rébl:o,eC8, hélas! non.. . Ah'
comme il va regrettel· ... ~I uis
SI vous aviez la bonlé
d'attendre quelques in~t:U1"
.. Certainement l' ne
tardera pas beaucollp, q1Joique ...
- QIIllif/lIl) '1 r('l'll ta tl"PI'"
- Eh! bien, voilà. ~l)n
mari a été appelé à
j'oulre bout dc PUlis .. . un rcn11c7,-VOUS (l'affaires ...
ml'Ille qlle j t! sli ~ jolinlf'nl illlI'{.(uée, 'llafCe 'lue ni
IlIi, ni moi ne connai ssons la personne qui l'a <le-
- Sans doute <les bib<>lots à acheter?
- Pns il. acheter, nOIi. :'1 l ' li mer On disait !lflnS
10: lettre que, aycU1t (,OIluis~ce
du s:lVQir de Siméon. Oll lui d~1IilJ:
,1 ,,' tlllll:èr·('... 'loi, ça ne
m'atlail gllère ... j'aime <l'l t{'!-l choses qui sont l()ut
il f:lit clai\'(\<;, mai!-! l'on Cl'it de lrop pauvres gens
pour loi s&or échuPIH~r
l·oc.oo.sion de gagner qurlques sous .. .
- Bien s\1r. Et .. . esl-il parti depuis longtemj> ,
mon sieur I~n!l
c?
- Le rende7.-VOllS étuit pOil!' dix heures.
- Oh 1 alo rs , il ne rl'viendra point avant midI
et nous ne pourron : l'IlI/J>lIdr.,.
lIpJ'po s'était levé. Les mains dans les poches, il
tournait auloul' des rnollb l·e.g entoRsSfIls, s'an'Mant
devant nn bibrlol, nc1m i1'all t" rl·ilin·uan.t.
Quelqncs pas ramenèrent l3ep.po près de la brocnnleuse. A cc momenl, une de sOS mains o;e \t'ndi t brusque menl, eWell'ran l la tl~\Jre
de Rébec.::a,
La ~ro
se femme ge r'erlllll, oégayant :
- Quoi ... q\JoL ... QII'est-cc ?
.E.IJe n'en l'ut dire davanu\ge. Sem corps fiasque
s'6crou'la sur la chaise longue. ELle ne fit plu,~
un
11IOUV ment. [J"f.rPO, sans se pl'eS&er, alla donner
u Il Lou r de clef il 1,1 por'l.e de la rue.
Du dehors, on ne pO ll v ait voir le canapé sur leqœl s'-était erfnnrlloé lo/l juive. Un meuble ptus haut
le masqllflit, Le rIHlIllrreU[' l'evint près d'Yvette La
je-unc fille il'uvnit p'u; boug6.
.
- Yvette! dit Deppo.
Elle leva ver!:! lui sc-s grnnds 'yeux qui s'effnraient.
_.- 1\1I(J11B
1
Alors elle se ievu et, d'~ln
PliS saccadé, passar
devant Deppo, ellc gagna l ul·flùre-lJoulique.
4
"
XIV
LE TIR 01 11
hlanc Siméon revint rhr,z lui de fort méchante
hu.meur. A J.'adrœs.o indiquée pal' l'amateur d'snli-
c'
é
d
q
c
b
�~
La 'Petite •• 'Deux Sous
Il
====================
quiiés ct réclamant ses lumières )),. Le dit amatcur
était absolument inoonnu.
Siméon arut à lIDe e.r"Jleur de n,uméro et s'infonna da[}s les mtrisons voisines. Rien.
Au bout d'une heure de vaines recllercha-s,
Et il s'avisa
Iooac se résigna à revenir b~dou,jUe.
qu'on pOllvait g'êlre jou é de lUI .
.
' .
.
- 'ça se dit tOllit à CQllp Isaac Siméon i1'Iuml)lé,
c'est u~e
sale farce 1 Si je Le tenais, ceLui qui m'a
écrit...
1
Il rentra donc exaspéré, maLs sana crainte. 1
tl'ouva Hébecca touLe gbmi:ssante.
- Ah ! mon pauvre vieux, pourquoi justement
es-tu sorti ce ma.tin !
- Pourquoi? cria I.saflc, parce qu'on s'e.st flr;h~
de moi... P.ersonne là-bas... pas plus d'amatc:lr
qlle dans mon œil! Le plaisir de me déranger ...
- Oh ! fit Rébecca, c'est-y possible!
Sim60n pr~cise
raconte ·ses vaines recherchf'.s.
n6becca J' éco nte sans éclater en imprécatiJJ1s
Contre la méchan.ceté des hommes en général, I,t la
btllise 'd'I sasc en particulier.
CeLa p<1.Ta1l extruorxl,inaire à Siméon.
- Qu'cst-ce qu'y a donc, nébecca? T'as ' l'air
toute chose...
.
_ - Je suis ma,Lnde. Pendant que tu donl~s
COmQJe 1In e bNe dans le pnnnenli et que tu pcrd1lls
ton temps, moi j'ai failli trépasser.
- Oh!
- Comme je te dis. Re,g.a:rde voir si j'ai bOJlne
mine?
Elle se tralna près d·e la porLe, et là se ras~it
en
gl'ommelnnl des plaintes.
- lirais qu'est-ce que lu IH'l ••. qu'est-ce que tu
peux bien avoir? répétait Siméon, inquiet de la
pÙ!eur marbrée de Sil feJ11 Tl 1P..
- FJSt-ce que je sllis, moi ce qui m'arrive, co
qui m'est arrhllé tant d'Lm coup? Faut le dire
qUe tu venuis il peine de partir quand la petite
Deux Sous est eFl~'éc
id, amenée par le monsieur...
- Yvette !... Et je n'y étais Ras 1
.
- Fnis pns des giri es : y a personne qtle n10l,
Enc a changé, la pe Ute Deux Sous 1 Des ·f rusques
(]e·. duchesse ... et des airs 1... D'abor~,
clle ::;e ré\'1'1110, reLle gamine. Elle n'a plus des yeux qui pen!'C'nt à rien, ..
- Et M. Bcppo? Il était aimable ?
- Ah! oui, c'est Uù1 m()nsieur bien OOal"ffi,ant (
Il était désolé de pas te voir. Y t'a atLendu .. atLendu .. , Mais. pour en revenir à ma maladie, nc.us
é~lons
là, bien tranquillement, il c.1.user, moi asSlse il cOt-é d'Yv,c'!.t.e et M. Deppo atJolant et venant
1.)Our voir les bibelots. Tout d'un coup, pamlt que
Jt! suis devenue v-erle ... cl j-e. me suis lr-ouvée mru,
de vrüi. Quand j'ai rouvert le s ,yeux, ]:a petite Deux
Sous était l0ujollrs il cOté de moi el Joe monsieur
me faisait respirer un ftacon, .. Parait qu.e j'avais
été longue il T'e ven ir. Le monsieur m'a dit
qU'il avail eu peur... Il a oou:ru c.hez le phartnnc.ien ch·crcher des sels el encoré, en revenant 'il croyélH me voir
debout,
parce
q~l'fynt
trouvé ouvert,e la P?r~
qu'il .était s qr
d avoir fe rmée en sortant, il s étrut ImaglOé quû Je
pas de danger! Je ,b~
!n'é.tais levée ... Y av~it
g~ls
)}aos pl,u s qu'un caillou ..: Mê me que (dC?Jpuls J y
~l
'penoo) j'ai peur qll'nn Salt cn~:ré.
pend.nnt cpU3
Je. Voyais rien,., Pourvu qu'on n'aIt rIen emporté 1
C-est pos ('idiote qu'au rait ,rien emptlch6 . .
- Olli, mais comme on ne peut pas savOlr qu'elle
est comme elle es t ça aurait arrêté tout de mtlme
rie la trou ver là. '
- C'est vrai. Enfin, quand il m'u vue remise,
M. 0?J)po est parti avec 1':1 petite ~eiJ.lx
S,a us. , ~l a
promis de la rll.mof'ner ; m.fl.J.s celle rOIs 11 t aV!)l tlTa,
pOUr qUe tll 1'lltLendes. Moi, depllis leur départ, je
me s(' n ~ Lout,e chnf>e.,. des nausélC;S que j'ai ...
- Si 111 te COll chais ?
--:- J'en avais bien envie. Mais j'attendais que tu
reVienn&.!, pour ne pas lai ssetr le magasin sans
p€l'\Sonne_ Aide-moi à m~rche
... la tête me tourn~.
- Si ça ne va. pas mIeux t:e sOIr ... ou demUll1,
j'irai chez le médecin.
- Je te I.e défends 1 S'Ac na la femme, reLrou.
vant son énergie. Tu C1'oÎ:l qu'on n'a pas asse;!
de dépenses comme ça ?
Siméon se garda dïnsistr:l'.
.
Le vieil avare ai,da sa k'i1 11111? à se met1lre au lit.
Dien étendlle sur $les COU"''';lfL'', /-1 Pbecoa poussa un
long soupiJ' de bien -être. 13l1h 1 ç.a ne serait rien,:.
un maJaise causé par ta Ohr!teu r. Eale S€ sen,Lalt
déjà loute " res,;uscitée l).
Cependant une nausée ptns rm'ûC la secoua: violemment. Siméon s'empreo'!'a, $ec:oura'ble autant.
qu'il pouvait J'êlre.
..
.
Le m{lmeu.t pénible pu.ssé. cnn .me !l s'él.Olgtnaü
du lit Isaac vit sur le sol un lOlll petit feUIllet de
pupièr. II le ramassa, et tJ.USSI tOI s'es sourciJ,s se
rapprochèrenl, son fronl SIE' l't lo.:"s.,<J .
- Tu as ollvert le ~iro,
grnnr flot-il
- Moi! gémit Rébecoa. Et comment l'ouvri-rais-je, puisque lu n'a s m~nH'
pa:'! assez de confia nce eIl moi pour le fet'ffi.l"'f tl vec une clef comme
tout le monde! Une serr11.rt' ,:t' il' t's t ~
6lSSe2: sfu'.
"IIIn; t'I~
mi--! llll-des::;()\J s du bllf'eu u d·es pitons et
un caden as à secrel qu'on l\P vu~l
pas, quand! on
ne saiL pas qu'iJ y oot e l q III ~e
[eJ'me avec des
leUres ... Est-c~
que j.e fXl.LS k IIll)l '7
Isuac ne para'issait pas t'entend·re, Il tenait toujours le feuJ ltel où s'uJignl:lh '1i' <l'l'OS ch.i1Ires.
- J 'ai faH t1j,( ~ r saior dos CH 11'11.1..0. :ltU.T ce papier-là,
cnsuile je l'ai mis dans le llrOlr, j'en suis certain,
Ilb~oimen
certain J ConUnf'fl 1 se trouve-t-il par
Lerre?
U se buissa, regarda SOIiS le bllreau.
Le cadenns à socl'et était lil tll' Ijllurs, enfilé dans
Jes deux pit.ons, ùont t'un plall enfoncé dans le
corps de III taille. ['nutre <1"n~
le bOf'd du tiroir.
Il déplaça les petits rOIlI""IIX de cuivl'e soutena nt les 1ett r-as , Amena La ('f)iTlh lnaison voulue et le
CHd{!nas suns difficulté s'ouvrit..
Isaac souj1ir'n. Il se rH,&"-lf rflll. 8vi ldemment, en
fennant brusqu·ement le Lif~lr,
hi~r,
hl a dtl faire
voJer ce ['euiHel. Ah! COnJ,mt' il 8 cu peur, l'mm·
ner !
Soulevée sur son a rr.ilJ.er', rV'hp ccu le regarde ou.
vrir le tiroir. Tout y est en nnlre.
Les registres sont il Irllr riHee, ces registres
écrits en lang~e
el chirr!'..... l'I1I\Vo{'nns.
Voici une peLiLe boUe en b \jl~
blanc, d'âspeç~
très innocen.t. Le couver'cle n"'Il fCr1'llC pas à clef.
Isaac l'ollvre. Il y a là q\letqllf's feuilles de paJlier à It.'tll'es, B semble qlle tu bolte en soit .rem·
plie. Lsaac les e.n l èw~,
un dOllbl*, ,ful1.d ap:parelt. Rébecca se l'Cdr~
e.noore pOlir ItlleliX vOlT.
Ln ptanche tte du double [Ol1Ù a sauté ...
Issac pousse un cri '''rrible :
- La balte est vid ~!
Le fruit de deux vies d'av'L1'ire ~ nrdie,
d'usure,
110 trafics , le trésor tout I~ trésor des Siméon
u disparu 1
Oubliant sa raibl
e~s
, R&be<:('H avait santé d,a- son
lit. mIe venait tomber S llr ses gl"noux à cOté
flévreux, fou illd'Isa8JC; Lou.s d,eux, avec d,es gl'~tofS
laient,mêd'élnt leurs mains, If' mAthenreux "tiroir Il.
Ils se la sRèrent vile de ('CS rl)('hHI'ches ùonL l'inu.
lUi té n 'n ppal'aisslli t quo/) trnp
L'u
~ uri
er
a éLé andnr.ieuR+'rnpn1 dévalisé 1
Tout à coup sa fur enr se t()II l'ne sur la pauvre
Hébecca. A poing" fermé
~ , il lrimbe liur elle. J9tle
tente de se défcndre ... .
D'ord,inl1ire quancl il arrive A r ~AHC
de se monLI'er
brutal, elle a vite fnit cie mC'ltrp ft la raison son
seigneur et mtlnl'e. Ce soir , Il rhibtie, ne pouvant
même parer te~
COl1p~,
rllp ~p
mit à hurler.
Alons il g'arrêta rIe frnpppr .
le silence : id
Avpc force i.njlll'f'!l, il 11Ii f>nH~.it
ne manquerait plus à leur mfllhl'ur fille d'attirer des
cœT1:p,[icatioJùS en r.aisant accourir les indiscrets 1
�G'IC-
26
La Petite
~e<U!NI;ni,
gémissant, 101100 rne\l.l'll;rie, eLle negagne avec peille son lit, sans que Siméon pense
ù lui offrir son aide. Un,e inquiéLude nouvelle vi-ent
de le faire courir à l'angle de l'arrière-boutique.
Là, i1 s'étend our le sol, glisse son bras SOllS une
commode. Ses ongles s·agrippen.t à. l'un des carreaux qui pavent le sol, le soulèvent, l'attirent, et
dans la cavité obscure, Isaac plonge ln. muin ...
Qu.ell-c cbœe prédeus.e - pluo" précieuse m~'C
que son argent - a élé cachée là? .
Les traits de l'11surier se détendent un peu, ses
lèvres laissent échapper un soupir dG soulagement. Les volcUI'l:i ne l'ont ~s
entièrement dépouillé, puisque" le c~hier
l) est là ! Le cahier mystérieux, capable de faire éclaLer un scandalc cIfl'oytl.ble.
Ce cahier, entre 100 mains de Siméon, de"iendra, comme YvelLe, IIne arme terrible, nlieu: encore : ·une sou,rce inépuisabJe de profits. (Hlblian t
J'émoi du ma.lheur commun, Hesos grieSs d~ns
l.J.eoca, de son lit, demaude en geigna.nt
-- Est-ce qu'on va porler plainte '1
- Imbécile 1 répond.Isaac.
Ce mot en di.t long. La femme en com.prend
toute l'éloquence. Oui, san.s doute, il peut être impfUd-e.nt de vouloit· attirer la police chex eUX ; cependant, laisser impuni leur vcHeur, c'esl dur J
Elle insiste.
- T'as pas eu peur, quand la mère d'Yvette a
éL} slIilJnée, de parler au magistrat.
- Pas la même chose 1 Et puis, ç'aurait pu mal
tourner, je ne dis pas. Mais j'en voulais à. celte sacrée rosse de i\lanchol qU1 me félisait manquer des
affaires à chaque instant... J·étais content de lui
reld~'
ça d 'Wl coup, en J'envoyant à la p.erpète.
Et ça s'est rudement bien t.rouv~
que j'y soye allé,
chez la défunte, ju.,te à temps pOUl' cueillir... oe que
J'ai cueilli.
- T'lU; toujouns eu du flair, constata Mme Siméon qui oubliait d-écidérnent sa ro.ncnne.
Isaac avait attiré un cahier formé de f.euillcs manuscrites, que c(J tlvTQ.i~
une éc,rHure IlS,;CZ maladroite; des lettres élélient gliswes entra les feuillets du cahier.
. U vérifia. : Lou L y él.nit, feuilles et lettr-es.
Il les remit dans la c(léÎlelte et se releva.
- Si je savais qui qtl'a fait le coup, je no donnerais pas dleJ' de sa peau ... Mais y en t1 qui paieron l pour lui en m~zn.e
Lemps que pour eux-mêmes.
Seulement, va folloir s'dépêcher maintenant. On est
il sec... Oh f mnlhrllI:., rIe malheur, de malheur 1
Et, malgré ilon espoir de revll.nche prochaine conlre le sort, bunc SirnèlrJri s-e mit à pleurer de vra.i.ôs
lurihes sur le ~H'Oir
dévuli:sé.
xv
~VET
OB~lT
Sonln Ol'bihoff Iltîl'Tlrlnit avec une fl6vreuse impu-
Ilenoe le retour <le [lrppo ct d'Yv(!tlc.
Si .elle a renrlu à l'illrlignè ami de jadiS tout !olo n
amour, ou pl1llt.l Inllle So't ~)a
Rion encore exaoerbée par des a.nn('ps de RO'llftrnnce, ell-e ne peut oublier J'acte désllOnOl'ant nntrefnis commis JWr lui.
Et c'est le cJ,atiml'nl de Hon amont", l'amertume de
son lvres!'e, de DP. p()\lvoir estim~r
celui qu'eUe'
odore. Df' 1110i !'IprAit-il eo('ore capable, cet hnmme
qui a trohi 8 l'on flo n.,.,1' d'un ami et qui, en If ri' elle,
'se montr-n si crll!'l, si I1lmf'ernt"nt cruel! Parfois un
doute serre ].e cO'ur de ln jeune ffflTIrrie.
Et voici quP nlln!-l cpUe oisivpté que lui crée l'absence rie 50 nlolnr!(', la dnctoJ't""i"(-' SI' tourmente de
QOllVea Il. Cefle r(Ji~
01' n'#,' t point pOllf el~,
pOli r
Bon Qlllour (JIll' ~n'li
:'ln!] l!irl.r. ,on:"; pOIiVOll' préci.se.:r oe qu'e..1J.e N)doute pour Yvc~te,
clJ.e songe avec
unxiétô il l'cnr \Ilt.
U
'Detlz Sous "
~
Sonia sent combien eUe est attachée à celte douee
malade qu'elle s'est jm'é de guérir, et elle a le reà Beppo de prendre sur
nlOl tl:; ü'üvQir p~rnis
YvetL'.) une influenoe.. .
l:iOlll;J. !;l'U::;S, JlIe cu s'aperce.vant que, sans le vouloir, elle en revient il soupçonner Bewo.
- Ah ! gémit-elle., je suie indigne,.. je s11Î3 injusle .. . et Je l'altlle, ponrwnt, je 1 !Ume!
H 1).. été convenu qu.e Ek.t>P() l}I"(}longcrait j1J3qU'au
le'lldemain son séjour à &llükiermall1.
!::iouw y songe, elle escompte les joies de ce revOiJ·, til.c;he de lo.ut aublitll' dans la pell!!éo Ilu
l>olJhcw·. Mais elle resie anxieuse jUS<1u'au moment
où Jll voitUl'e qui doit aller à la gli.re chercher
Yvett e ct lbe·ppe l'J'avance devant lu maisoll.
Sunia ira p.'endr-e Yvett.e ù l'arrivée du ll'ain. c t,
110 111' Beppo qui s~ra
là, Soaia se pare.
Elle devient coquette, plus femme depuis qlle
l'WIlOU!' il repul'U Ùtt.llS ~
yie.
~OJ
ia C!st en ulfan.ce à la gare et piétine, impatience. AIl! enfin, voici Yvette!
Ucppo la ti~n
pa.r le bra.:; doucement, avec un
uir de l'rol.cctien vigilante qui émeut la doctoresse .
- Je vous ramène madclTlQiseUe Yvette, mademe.
La voix de DêPP() 'eSt calme, son expression res,
pectue use. Devant cette foule qui les entoure il faut
tiou er la coméd·i'e. La jeune femmQ répond:
(1 lvlerci 1 )) tuntlkl que son rega.rd ÎJJI<:'.fToge.
- l'out s'es t fort bien pu,;"é, pOUl'S\Ht J3eppo.
D'ailleurs, je rendr'aj com'pl.e à Mme Mart.e,l.
Ils ont quitté la. ~are.
~:>Uli
et \'\·ette IJl'ennent
pince dans la victoria qui les attend; B~JlPo
s'assied prè:l du co,cher.
Yv{')lt~
sourit à la alocloresse et se serre contre
elle. E.sL-ce un geste caressant, un besoin de proleclion 1... Les deux, peut-èlT'e.
!\1)(~
I\lr l'leI gllell{) le retou!' de
p-elitc proLé,
~
et tout de S'Jite Bcip'po rac-onte lew' vis.il.e a,u x
Siméon.
- L'homme n'y était pl1~,
et la. femme ~ profiLé
de not"c pré.!leJ'l.cc POUl',. s é\:anoUlr, ce qui a été
fort ennuyeux. Blcn <'l1l il men coiltè.t d.e quitler
Yvetle, ne ftH--oe qU'un inst-'int, j'ai dû couJ'ir ehez
le phaJ'llulciell, heureusement tout p.I·C1Iche. En fin,
?ett.e fem~
est r~veOl
à. eUe, g!'~ce
aux sels qne
je rUj>portms ... et]e 1'.'.I.l lll.issée. J'ai dû lui promettre de r:une~
la peIlLe, mlUs sans rien pn\ciser il
eeL égllrd : Il faul évlLer que ces gens ul1usent de
lu cOlldesœndan0C qu'on leur Lérnoigne.
Mme Martet affirma qu~
tel était son désir' e~ celui dû M. l\fu.rt.et. Pnis elle conlt'édia Ilt'fpIto
Soniu se &ontit rougir Ile honte à. la pelJsée qu'il
allait !lrelllll'e sun repli!:! il ]'oC(lee.
Ah . la MGhéance._. comm-e eJle s'fl.ffirmoll.U durvm~nt
à C'~aqLle
.heure 1 Trai\.é comme nn vnlet,
VLU, Jusqu 411 SOlI' eUe ga.:rda cette ~pine
au cœu:r
ju-squ·G.u. rlu~ent
où I3epp-o vint La ,r-eLrou,v€r.
'
f\lnis 11 étUlt prc1occupé, di s trait.
- QU 'as-Lu,. demanda Sonin, je I.e !lens loinl(\in ?
- Je ne ~l!'
pa.::; préoc(·l1lpr., je sO llrfre ...
- Tu souffres ... moralement?
- Non. ~O\lt
prosaïquement je subie une souffran ce ph ySIque.
..
- EL Lu ne m'en disais rien!
- T1l. ~OIS
ai.en que. je L' II plllI'le, au contraire ...
-:- Lalsse-mnl te soJgner. Ne considère plus en
mOl qlle le méùocin .
:rel l Tu es bonne ... Ce qu.e j'ai n'oot rien...
il m t1'l rj~e.
<Le me lra lt.er seul pOUl!' de vraiJ'l mtlJai~s,
~e
n'al pOInt ouhllié mr.s él,ud~.
Seulement, le
dIffiCIle, c'es t d.e [aire e.XOClltf'r SM! pmpres cU'donnances.: . Au ,f:lJt, Lu es doct.eur, loi. C'est tout simple : CUl s-men une ordonnance
- Dis-moi c q.ue Lu éprou'ves.
Il sc mil à rire.
- 1':Goute, c'est /lJbsurde t Je ne vOl
~i9
pas
t'avouer .oe:l I.out botnnement, tant ce ma.I pll.I'RIt
hMe el ndlcule ... Je prenais des airs de malad.e
. -, l\!
�l;If-
e
La 'Petite
If
Veux Sous
U
==================================27
6êI'ieu'X, mais je ne suis pas ma1&de... J'ai une
rage de dents, là 1. ..
Sonia, rassurée, SB mit à rire aussi.
- Al.ors, va chez le dentiste.
- Il n'y peut rien. Cest une névralgie. Cela me
prend souvent, et j'8JÏ toujours un flacon de cWarof{Hme sur moi : une goutte me ca.Jme.
- Eh 1 bien, applique ton rem~d.
- Je n'en ai pas a p'p0 rté, et ici je ne puis m'en
procurer sruns ordonnance.
- Si tu en veux une, tu pouvais le dire tout de
suite : CfUe de circonlocutions 1
- Je te l'ai dit, je me trouve ridicule.
- C'est en te gênant avec moi que ln le deviens.
Voyons .. . que je t'écrive cela. MalS g'ici à demain
tu auras le temps de souffriT.
- J'i rai chez le pharmacien à la première heure,
t1vanl de parti!l"'. Car je m'en vais, Sonia., p6J' un
dos premiers trains.
- Oh !... Tou,jour.s se quitter 1
- J'espère, cette fois. que nous il'eviendrons
;vite ... Ma chère, me ts une bonne quantité, afin que
je ne sois pas obligé de retourner de sitôt chez le
pharmacien. L'ordonnance qui m'a servi jusqu'ici
est viel~.
.et l'on m 'a fait, à cause de cela, des difficultés. ur, là-bus, où je ne suis pas connu, ce
serait pire.
- Soit. Je ne ri flUe rien ayec toi, tu es du
méwer. Tu connais donc le danger de cette drogue.
- Bien SaI' 1 SOL lTanquille.
Ils parlaient à voix basse. La porte faisant comm miqucr la cfu·).mbre de la doctol'esse avec crllè
de sa malade restait entr'ouve rte et ul le re1let
de la veilleuse les éclairaH. Ce fut à cette f~ible
'lueur que Sonia griffonne. son ol'd?nnance.
Aussit.6t qu'il l'eut en sa posseSSIOn , Beppo parut
oublier sa sou ffrance.
Le voisina.ge de la pètite Deux Sousn.e troublait
'Pas la doctoresse. Une fois encore. fu.1sa.nt Laire
ses scrupules,
nia lui Ilvait ordonné le sommeil.
- Ma domin.a.tio.n sur celle petitel dil,..elle à BepJour, et je m'en
po, devient plus complète ch~que
réjouis comme d'un garant certain de 68. guérison.
CètLe guérison, rl'ai.lJ.euns. je I.e pres8ens a..c;sez procb.(line : divers syuJi}tomes me le font e. pérer.
- Laisse-moi la voir, demanda Beppo. Laissemoi l'egarder si vr-aiment elle dort.
Et, saDI:! aUenoIre d'y être mieux auLorLsé, Beppo
Se g lissa dans la clw.mbre de l'enlant.
Quelques insiunts s·~coulè.rent,
il ne revenrut
pas ... Sonia s'impatientait.
illJe s'approcha de .la porle et appela:
- Vi.ens donc ... lu VOŒ qu'elle dort.
Le chauffeur était incliné "el' ln. dormeuse, sa
ffin.i.n louchait le [l'out de l'enfnnL.
Il ne répondit l'Hm d'aborel 0. l'appel de Sonia,
Puis il la X' ;oignit.
- EUe a la tête 1»'l\Iante, cette petite ; fais attention, ne ra.pproche pas trop les e>:pérlenœs. L'hypnotisme, souvent, dcV'ient un remède pire que le
Inal.
Le ch l1ffe11r ne s'étaH poe trompé : la petite
Deux So:us s'éveilla le LeI du:nain fiévreuse et dolente. S<mÎa la. fll l'ooJ.er couchée et s·inst.a.1la près
d'elle, heureuse (l'avoir <:etle fai on de demeurer
aeUle uvec es pens6e6.
Elle se complall il des projets pom' plus tard.
e t hivor, lorsque les M rtet seront à Paris et
(JU'YveLLe, gl1~JI;
peut~,.
ne réclamera plus la
'j:)résenr.e journalière de la dort.nr .(', avec l'argent
gagné en l'oignant la pelil,l' Dellx OIIS, Sonia rbihoU s'lnsLnllera dH.rts un logis ritlnt où tout le jour
~l\e
travuiller,
revra d
01111a.<les et où l'ami
POurra la re trollver.
Elle r~v()
de r mIre légal lellr union, de Je lier
à pU '"
Tlom d'emprllnt l'l'ra un obstacle: vou·
1;~n-ti
reprendre l'nutro ? Sonia, nssiRe an chev<lt
un
solution, éohaIaude des
u l'veLt 1 cher he
p1/lns I~L les heures passent.
~
Vers le sOir, Yvette, jusqu'alors immobile et absorbée, s'assit sur son lit. ELLe passa. les mai.ns sur
son front, SOlIrit, s'étira et ten{\it les bras à Soni~
- Eh 1 bien, cbérie, VOUB voilà remise ? .. OuL ..
Vou'S avez un joli visage reposé ... la tête frnlehe ...
Vous voulez VOUIS lever? Je vais vous aider. lVIadame Maroot est asaise sous les arbres, nous irons
l'y retrouver.
c:eJ.a faisait partie du syetème de la. doctoresse :
parler à Yvette comme Si J'enfant pouvait la com·
prendre Lout à. fait.
Cette fois, on aurait dit que la jelme fiUe avait,
en effet, pleinement saisi le sens des paroles, car,
au jarA peine bahlllée, elle s'en alla d , ' el-m~
din re joi.ndre sa biaûa.i tri ce.
M. et Mme Ma.rt.et devisaient paisililemenl se
bal4oça.nt dans des rocking-chair.
'
On salua. a~
un a.ffoctueux empressement l'opparition d'Yv U.e, que rejoignit bien tèt la doctoresse. Mais la. pet.i.te re.f.usc <he s'a!'SCOir.
- Elle v~ut
se prom&1el', supposa I.e baIl M.
Ma.rtet. Restez auprès Ge ma femme, madame Soni~.
Je. vais faire faire quelques pas à Yvette dUlliI
le Jardin ...
Yvette déjà s'éloignait, pTimant le chemin de 1'0l'a.n.gerie; M. Mo.rtet la SuiVLL.
Mais un jardinier l'arrêta au tourn<lDt de J'allée
ponl" lui IDOCl 'er un pl6Ilt de rosier en souffrance.
M. Martel adorait ses roses. TI oublia un insta.nt
Yv~te
el dut pres ser le pas pour la rejoÎlld.re.
Il la retrouva près de l'Ora.n€lCrüt. De loin Il
aVllit cru la voir rMllasser un objet 90US un oranger en caï.sse ; mais il devait se tromper, c.a.l' en
&pyn-oohant il viJl Cf\le la jeune flUe avait les mailla
videa. Du m~e
pas décidé, La. petite Deux Sous rebroussait chemin. M. Martel la ffUivil.
CetLe rois, la jeune fille consentit il prendre place
à cOt.é de S8 rpmLectrioe ; mnis plus que jamais clie
:paraissait absellte et sans pensée.
Lu sei.rée parut longue à Semia - il lui tardait
de se retrouver seule d8.ns sa cha.m.bre afin de ré~r
librement. - fi'J!Je s'endormit en m.urrmurant
des mot.s de tenCLresse.
Le bruit d'un s8JI1g1ot l'éve.illa. Qui 1 donc pieujI"ait ? La docloresse courut dons lu C'l1ambre
d·Yvette. L'('fJItI.nt en sa longue robe d" nuit était il.
Igenoux devlln t son lit et angloba.Ï l,1ft tete dans ses
d>ra.s. Une seconde porte donna.nt <le la chaJll11re
d'Yvette sur un couloir et fermée au loqUl.'t la
veille au soir par ln doctoresse étaiL entr'ouvt>rl.e.
- Yvette 1
L'enfant ne sembla pas entendre.
Sonia, dOllcern.ent, la força il. se relever.
Elle s'a,p erçut ulors <flle la. fil1t'tle tremblait con·
vulsivemenL et les
nbl1ol!l augmentant, eUe crnignit une cri5e oerve use.
Elle coucha J'enfant, lu.i fit respirer de l'éther,
rien n·apai:-...... it YvetLe ; ses bras, Il présent, se rnidl.~ent
Alors Sonia n'hésita plU.9.
A tout prix elle voulait éviter à la rrêle petite
~üu
l re
la secousse d'une crise redoutable.
Elle prit ta main d'Yvette, la regarda dans :es
yeu.x. ç.e fut plus loog que de coutume. L'enfant
['ésbstalt de tolll€ 1~
rOO'ce d'lIn volonté :::oudélin
.réveilJ
en eUe. Mais la dodore,,:le fut la pins
\forte : Yvet~
cessa. de .sc raidir, cessa de se
j}laindre.
Le visage crispé, \.oule sa volonté tendue, durement, aiguisant soo regard, la doctores e ordonne:
- Parle. Ot) es-tn ?
. - I!:n chemin de. r r .. BI.'.ppo. m~
l)j~nt
la plnin,
il me .regnrd{' ... OUI, OUI. .. J b{·lra1. .. Je ferm c{'Ja.
BeptpO ne pari pas, m i.s j'en tends ce qU'il vellt...
Ah 1 nous monton en \·nit(l.re ... des rues... ùe
rues...
Lu voiLurû s'Ilrr't..e...
Non,
je ne
veux pa.s des oendre ... .J·ni peur... j'ai p nr ... Une
femme. Je sais ... Atlenc\c-z, je sai' son nom .. . Rébecon .. . Je la connais... EUe me fait peur.. . Oh 1 On
�~
28
La 'Petite
me force à entrer... Aa femme m'embra'S'Se.. , m'as·
sied près d'elle ... De-ppo s'est levé .. .
u Ah 1 la femme tombe ... Elle n'est pas marte .. .
Mais j'ai peur... si peur 1... Beppo me fait lever .. .
Non, non.. POIS œla ... Si 1. .. Je le ferai. il C./t.uL.
je sais, il faut... J'ollvre une parte ... Je VOJS un
lit... un bureau... ·un fauteuil. Beppo me regarde .. .
Il veut. .. U v-eut. Oui, je vois ... Le Liroir est fermé .. .
Mais je vois... Dans une caisse, d-es papi-ers, de
l'or, des billets.. . LI faut ouvrir... Beppo le veut.
Je vois comment on doit faire ... Sous la table, un
cadenas ferm e le tiroir... Pas de cleC au cadenas .. .
Des lettres... Je les touche... Beppo me presse .. .
Vite, vite... Voilà.. . Le oode.nas est ouvert et le
tiroir. Beppo a pris les
piers, l'argent, les bil·
lets .. . La. boIte e t vide... 1 falJot refermN... Voilà ...
Et Seppo me remène près de la femme... On l.a
dirait morte ... Oh 1 que j'ai peur 1... Beppo lui fmt
r espIrer un Oacon... IWe OUVY'e les yeux et parle ...
Il dit qu'il a été chez un pharmacien... Ce n'est pas
vrai. Heppo a menti. Ah !... en~
.. . nous partons ..
Encore le wagon ... per onne avec moi... que Bep·
po... [1 veut encore... Non, non ...
Yvette s'afTête, haJeLante, blême, les yeux di·
latés d'har~u.
Lorsque Yvette 6. dit u Nous partons n, la doc·
toresse li faill! clier : " Assez ! aS2ez ! Il
Elle ne veut plus rICn entendre.
]Y8.1Lleul's, qu pounal t--elle upprendrr, de pire ?
Elle sait la nouvelle U1ftuui.e du mon::;tre qui, llar
deux fois, s'est Joué d'elle.
i\tais voici que la petite a dit: « n veut encore 1 »
Quoi 1... Qu'a-t-il pu vou,loir encore, le misera·
bl e 1 Et Sonia ordonne :
- PllY'le ... Que v0uH)n ? Parle 1
Yvette repr-e.nd d'une voix déchirante :
- 11 veuL... mOl j~ ne veU]( pas ... U veut... Ah 1
quelqu'un vient, il ne peul plus vouloir ... Mais il
est revenu !.e soir ... J'ai senti qu'U était là, .. Je
n'ai pas {>u me défendre el je j'ai Cail. .. J'u i obéi...
El ce soi r .. . j'ai l'lé à. l'orangerie ... J'ai trouvé le
flacon comme il m'aw.lit dit sous une caisse d'omngel', el je l'ai pris ... El puis ... tout à l'heure je me
suis levée.. . J'ai été dans la chambre de Mille Murtel et j'ai mis un mouohoir comlne il n ùit. .. J'al
vidé le flacon ... Lout le Oaeon ...
Sonia étouffe un cri. C'est trop é1JCuvalltable 1
elle ne veu t plus, ne !Ieut plus rIen
Cett.c foi~
entendre. Elle recule. Son pied hew'.e un objet qui
1I'0ule. EUe le ramn5se.
C'est un Ooaoon ayanl contenu du chloroforme.
E..lle regame le nom du phllwmaci n : cela vient
de SaLnt,.{Jermill.in ... Et Sonia comprend 1
C'est elle, eUe qni n aidé l'assassin à se procurer
la drogue morLelle ...
El l'&jsns in, c'est Beppo 1 Beppo qui, pousllnn&
ju squ'uu bout l'infnmle, n'a pas crnint ù'armer la
main d'une in con. ciente 1
Mais pourquoi ce crime" Dans 'luel but?
Et ù'nbord, en l'nrrolement où ln jette la mOlls,
trcuoo découv~l'
e, Sonia ne pense pus que quelque
chose pmllï'Qll Olr ll'nté.
Brusquement, ln doctoresse a un éclnir de raison.
P ul·Olre encore sauveri~on
la malheureuse vic.
time 1
Laissant Yvette, à présent prostrée, elle court
l la ohambre de Mme MarLet...
Une petite lampe éclairait le corridor. Elle trouva
aisément la porte, mais l'ny/ml ouverte, l'obscurité
de la pièce lui parut effrayante.
Elle recula el se Li('nt un instant Immobile, pré·
tan 1. avldemrnt l'oreille.
De la chamhre voi. ine où dormnit M. fartel,
venait le sou rOi' éga.l du dormeur. Mois du hl de
Mmr fll.r!,('L, fJl! SoniA !l8.il êtrc là, tout proche,
1\l1('"l1n bruit., /111('lln snuff!(' .
.
couler snr son corps llne sueur frOld~.
Snnin ~nt
Lh, conlr lc monlnnt de la pnl'te. gr trouve un
<!ommuta leu'l'. La doctoresse ]e fait jouer.
ra
U
Veux Sous "
~:;
SUIT la. cheminoo, deux bougies électriques ft'cdllument. Mmp. Martet n'a pa;s bougé. Les mnins albongées sur ln. cou vertUl'e sont ouvertes, 1a pUl'--ne
.en dehors.
La l.êle sur l'oreilJ.er est invisible : un moue! Dir
la recouvre encore.
Sonia, devant la réalité du danger, retrouve un
peu de sang-froid . Elle s'npprO<'he, enlève le n )Uchoir... Mm~
MarLel reste 1IIl1T1obile. Ses yec ~":.J
fermés, ses lèvres gonflées et bleuies.
Sonia comprend. ELle a d.efJui~
longteffiiPs recon.
nu chez Mme Martet 100 symptOmes d'lille maladie
de cœur.
Ces symptômes, Beprpo ,!.es a vus aus-si, et c'est
pour cela t/u'iJ a ahoi.sl. pour commettre son crime,
le chloJ'~fme,
l'erret de l'anesthésique appliqué il
un cardiaque devant êLl'e mortel.
M~is
pourquoi... pourquoi... pourquoi '1 ...
.Et soudain. ce nom qui traverse l'esprit de Sonia
lui est un tr'ttit de lumière. ~
baron RaouJ de Fol.
bert, le patron de Beppo.
Elle a répri-rn<é, la première fois qu'elle s'esi
trouvée devant lui, un mouvement répulsif qu'elle
n'a pu s'expliquer.
Cette répnlsion n'était que pres~mtin.
Pour
q.ui Beppo lluC"alt-il commL'l ce meurtTe, si ce n'es.t
pour Je baron qui p'rofit.(>rI'l de IR mort des parents
de sa femme. EL sans doute, après la mère, le père
sera sacrifié ...
De la ehltm!we de M. Msrtet arrive toujours le
même souffie égal. ..
Et voici qu"une nouveUe angoisse étreint le cœur
de lu doctoresse. Qui donc ac('usera·t,..on shnon elle.
même, Sonia. qui tI si.gné ,l'ol'drYrlnance mortelle?
Pour se défendre elle devra accuser Beppo et...
avouer qu'elle aime Œn ItSHoB.'s sin 1
Assassin... La pensée de Ja malheureuse r épète
ce mot snns ce. se, et sarus cesse a1J~m.enL
l'horreur qu'elle éprouve.
EDle pounait SUipporLcr d'être 8JCCUsOO de meur.
tre, condamnée ... Mais que l'on découvre qu'cllo a.
aimé Beppo. plutôt mourir que d'en subir la honte.
El si l'enquêle fnit cLécouV'J'i r qui a été chez le
pharmacien cherrher le clllorofoYïlle ? Beppo a (l0
prévoir cette enCJl1êle ct sa réponse est prête : jl
affirmera n'y avnir {>ff> que ~ l1r l'ordre de la lloc1oresoo. Sonla Orbihnfr peut avoir demandé ce ser_
vice au chauffeur du buron de Folbert.
Ah 1 le misérable. le mi-sérAble 1
Ainsi, pns tn(!YrIe un PPll de pitié pour la femme
qui l'a SI follement aimé 1
Ah 1 comme elle le hait, aujourd'hui ... Quelle
soif de vengeance la soulève. dominant même l'hor.
reur indicible de l'heure pl'é.senLe 1
CelLe haine ce furieux cLé2ir de représailles l'en.
dent il Sonia la volonté de se sauver. Le mouchoir
encore sa lnré de J'orlPllr nu chloroforme, clIc s'en
empare. C'est un mouchoir du trollsneau d'YveLle
que Mme Marlel a eu tant de plaisir il com.poser
pour sa protégée...
Sonia éLemt l'électricité... referme ln chambre sI.
nistre... La voici de no~vel
près d'Yvette. Sans
même un r gard ponr 1enrrunt qui dort il présent
comme éCY"6s
- ~e,
Sonia chcrch le pctit flacon mar.
Rué de J'étique~
rou~e
et qu'elle a rejeté tont il
l heure... Le VOICI. La Jeune remme l'emporte dans
su ehambre.
Elle lo:,e, dlans sa cuvette, le mouchoir et le OUr
con : l'étlqu tte e décolle.
Et tout en agissant, l,le pense il la pauwe fomme do~t
la bonté, la g6n6rO'lité onl roumi il I:lon
m urtn r . des n.rmee inco.l(~
e nf Cl.
N'ost.oe pus
Beppo qUI a découv /'Il Ln pNite Deux Sous qull'a
fuit a!lmcLtre CllCZ le s Mm'l t ?
'
N:eske plts D :ppo encol' quI ft parlé de S()n]n
Orbl~
cornm d'un I:lpécialiste éminent caipable
de guérir Yvette?
'
Son}a s.c nt sa tet se )1el·dl'c. En quelle sinistre
moohinal1on s 'est-eUe laiss6 englober ?
�q.
La Petite " Deux J'ous
U
===================== 29
-
Encore une fois la doctoresse p'ense au buron de
Folbed, Est-ce lui l'instigat.eur 1
.
Lui, le cerveau qui arme le bras '1
La petite fl"le est nette à. ' pré;;ent ; l'étiquette réduite en bouillie esl méconn!1issable, mêlée à des
eaux savonneuses dans le seuu de toilelt.e,
Le moucboir d'Yvette n'a plus l'odeur aootlsatrice, La doctoretise pousse uu long soupir, Au
DIOins pourru-l-<llle échl:t.pper il. l'infamie,
Et de nouveau elLe areuge l'effrayant problème ;
- eUe cherche la raison du meurtre, préparé - elle
U'en peut doutel' - de longue mUID,
Beppo III su démêl er en La. petite Deux Sous un
8Ujet pGssible. Ue ses études, de ses expériences
l'
Passées, il a cons ervé la " Oreté du coup d·œil.
li
Mais si la mort de Mme Ma rtet a été préméditée, M. Martet, lui aussi, doit être condamné.
CUI' Sonia ne peut découvl'lr qu 'un but aux assassins : mettre Marguent.e de Folbert, c'es1rà-&re
_ le b.a.r oTI, en pOSGesslon de l'l1éritage.
Ellc s e dellJande SI 80n devull' ne l:Ierait pas, supprimant. toute consldérll.\Jon p e l' s on
e le~
de dire
<le qu'clle sail, tout 00 qu eUe s uppol:le, unn que i\1.
MarLet se défende e l qu'iJ pui ~e
arrac her sa fl Ue
des mains crmune1les de ce Rao ul de F olbert q ui,
le jour venu, la saCl1.1iera peul-être, e lle aussL Muis
On ne la cr0ira pas 1 N'importe ce qu'elle di ra pu.rait ra. invraisemblable.
Convaincue du cnme, Sonia n'e n peut fournir
~
de. preuve absOil uc... Elle est désarmée , et - elle
qUl voudrail défendre les au tr es menllcée aunsi...
La doctoresse s'est la issé tomber assise cLev.u.nl sa
fenêlre - cetto fenê Lfe pa.r laquelle Beppo a pén{)ll'é chez el1e.
Le souvenir de cette entrevue brOie maintennnt
Ie cœur de la pauvre f..emme.
Elle se tord les ffilUIJI1S et ple ure des larmes. louTùes et d'une amertume indiCible.
XVI
LA TACHE DE SONIA
Sept 'heures sonnant à sa pendUle, Sonia Orbib ort se redressa.
. ~'in
s tal
était venu (Le jouer le rôle nuquel, dMlIII1Ivemclll, elle s'éLait rés olue,
Sonia, fébri.lement, s'activa à sa toilelte.
Elle achevait de s 'habiller lorsque la femme de
ch.a.m.bre wpparut, le VlISage bou.leve rs é.
'- Madame... venez 1. .. Je ne sais ce qu'a Mnd (une, eUe ne bouge plus 1
Sans prononcer un mot, Soni a suivit la domesti.qlUl. M. M'Ilrtet ét.rut déjà près du lit de sa. femme_
II tourna. vers lu doclorcs);e son pauvre VÎlllLgO
Convuls é de douleur.
- f\[adame Sonia... Mon Dieu, c'est aflreux ...
Je croi.s ... j'ni peur ... voyez ... vite ...
f\IueUe toujours et pâ.l~
d'horreur, Sonia reJ11.Illit
80n ornce de médecin.
, Elle dut relaire, 60U8 les yeux angoig,g6s du veuf,
l exam en qu e, toUJt il. rheure, elle a fi évre usem ent
{l(:compli seule.
1. },[a rLet. 1ill\e esL
- J' ai pcur peur ... balbuti
(raide, glacée:.. AJ1 1 mon Di u 1 ~t\
maladIe de
cœur .. . El le le d isait bien ... On nl 'Iw all pr éven u .. ,
Soni a sans r egarder M. f\.lurle t, r épond:
- QII'L.. le cœu r ... tout ~dt
fini 1...
M. Mnrtct s'e ffonrlre il gC'noux ('t sanglote.
I\l ol's d61 ivrée de ce P!.!lIT'd Ilnxi('ux, rlése8péré,
qtl' cllo 'sentnil p~e
r
nr elle, ln onctnrl'!'l<;e sC rodr.ns.."-e, a~ l {>gée.
Tout n ' l'fit pns fini c(\pelrun~
et,
d'e:llc-même, Sonia va 8u-npvllnt dll dHngr-r ..
. - ])ô,;irez,volI.l;l qu'on ILPI)('\lo votrc m€rlec'lD 01'dmonir e '1
- P011rquoi. pmlrl'fll01 '1 r"'rond le v~lIr
il. trnvers
(\~
ln l'mes. Elle l'til mor'v- .. Mil bon ne, C'.hi're,
~t.e
~
eat worLe, .. PeI't;OIlll6 ne pourr&t
~
me la rendre... Oh 1 mon Dieu, corrument vivre
se.Il8 elle 1 Vous ne savez pas ce 9ue nous ét.ions
l'un pour l'autre ... Durunt !.Il nt d a nn ées, jamais
une querelle, jamais l1D n:uage. .. EUe m'a consolé
aux mauva.Î.S JOurs, soutenu aux heures de lutte...
C'est poU!!' eUe que j'ai été s i fier, si beureux de
m'élever, pa'rœ que je l'élevais av ec moi. Et ol1e ...
vous la connaissi ez.. . Vo us avez vu .. . Elle ne jouisS8!Îlt de $.8; fortune qM si el le en fai.oooil profiter les
autres. L'adoption d'Yvette aura ét.é sa de.rnière
grande joie... P.auvre peti te en fan t 1 Pour l'amo ur
de œlJe qui l'6imait, je l'uimerai, je la gardel'lti ...
je la ferai he ur euse... Ah 1 vous p.leurez, madame
Sonia ... Vous êtes bonne ...
Sonia s angloLait., en effe t, l' à.me broyée.
Le médecin des mo rts v int constater le déci)s.
11 n'eut pl:l.S un in:; laŒlt la pensée de meUre en doute
la C8.lIS e de la m ort.
Ah 1 Be ppo a bien les m eilleure atouts dans son
jeu. Sans d011 te il avai t ordonn6 à Yvette de détruire les preuves, de cacher le flacon.
Et peut-être que, sans l'intervention de Sonia,
substiluant sa volo nté il celle du mmui.rie.r, l'cnfant aUMit aœom pli jusq u'an bOlll sa si ni!ltre mission. Mais quo i qu 'elle fasse pour E'e oonvruncre du
contr6ire, Somu se dit : " Il Il admis la po~sibl
l é
de la déco uve rte d u cr ime et fi tout prépa.ré pour
que, en ce cas, ce fOt moi l'acCU3ée, moi qm lui
ai donn é mon a m our 1 li
Le mot la flag<:llf.' dans s(}n cœur, dans Sil chaix,
dans son orgll('il. Ah 1 f[U ' il ferait bon mou rir [
r-,'l ais elle n'a pas le droi t de disparaltre...
Sachant ce qu'el le wit, elle dOIt se te[lir pr'ète à
défendr e, s'il se peu t, les victimes qu'elle croit désignées.
La. oonsd en oe de pDuvoir se rendre utile , d'avoir
une mission dangere use peut-être, à coup sù r difficile à remplir, redonne à la jeune Lemme le courage de vivre.
C'est elle qui offre à M. Martet, accablé par la
doule ur, de se chll.rge r de tou tes Les démarches à
faIre. C'es t elle qu i r-édhge à l'ndresse de cc baron
de F'olbe l'l, dont e lle pressent l'ignominic, la dépêche qui va le faire a ccouri r .
El c'es t e lle en-core qui, le lend emain, se trouve
là pour recevoir la pauovre Marg ueïite el la con duire auprès du lit où Sil mère r epo'ic .
Le baron Raoul de Folbert a v ruiment l'air bouleversé.
11 ne pleure pas, mais ses lèvres ont un frémi ssement nerveu x. &t Sonia qui ne le quitto pas des
yenx remarqu e son Msitlltion au seUlI de la chambre mortu ai re.
Pou.r lons oeU.e hésitation , c l r o u.l>I i'>~ ceLLe pâ leur sont les sign es évid en ts d' une douleur q ui
bo.nore ce ge ndre modèle. Pour la. doctoresse t'e
son.t autant de cha rge s, au tant de preuv.es contre
10 mari de Marguerite.
Donnant pour l'aisGn que la vue de la m or te
POUJ'l'aÏt ca.u..'ler à YvetLe une trop vlve secousse,
[a doctora, se s'es t refn sée il. la isse r l'enfant. pén étrer près de sa protectrice.
Mats elle veut une preuve encore de la culp a hilité du baron. Avn.nt que celui-c i ai t quitté la
cha mbre mor t uai.re , l~ Jeu ne femme Vil cherch er
Yve tte. illlle la rc ti ent s ll r 1 passage de Raoul, I ~
force il. la. rega r der, à lu i pJ\rlc.t"
monsiel,lr,
- Voici v tre pC'lite prot{>!~i'C,
- Ah 1 et il recule, pê,lissan L.
- Trnrlez ln m,lin n monsieur le ba.ron, YVPlt .
Yvelle obéit, mais Raon l ne semble pas voir le
geste. QllClqllP l'hose d'un peu hn.gll/'d pl ,C dan'.!
ses y UX. 11 murmure :
- Pas l'lie..1t' n'Illlmi!'! ra" vonlll ... pR.S voulu ..
Puis LI remarque Ilvœ CJlwl1e nltrntion la dortore!'!8C l'étll(lip., pl 'nn ['pl'lOnl r1ur'cit, snn vis.nge
pl'en J unc telle e:prl'. ,ion r1l' fé['o{'jt ~ qlJe 50nll1,
mirux ([II elle n l'Il rllil rnl'OI'p. cnmp['Ponrl 11 quel
point peut êLre dangel '0Wle ltl. IlLcu.e ~
ellQ a;>3U-
�<;'~
30
0::..=================
mée. Quel que soit l'obstacle qui leur barrwa 1&
route, R60uI, cOIDlllle Reppo, sans pitié le brisera.
Tant mieux 1
La. pensée des risques à. courir, du péril à. braver
ranime Sonia. Elle se rachètera ainsi il. ses propret'l
yeux, de la honte d'avoir aimé un être inlll.me.
SoIlia, dou.cement, a emmené Yv;ette au fond dU!
parc. Elle tient la. mAin de li8. .petite Deux 80115 et
s'inquiète de la sentir brûlante.
Pauvre innOcetlt bourreau qui serait sûrement
victime si la sécurité des criminels venait à l'exiger, que taire pour La. protéger T
Un bruit de voix a:rxn.cba la doctoresse à. son angoissan te song.e.r:i.e.
A q~u.œ
PM, M . M.arlet et son goodl'e cau.seDit,
ussis dans ce rond-point de verdure qu'affection.nait ltl. morte.
Ni l'un ni l'autre n'a entendu approcher Sonia,
disaimulée aûx yeu.x des deux hommes par un massif de rhododendrons.
- Nous ne repartizmts pas, dit le ba.'ron, Marguerite tLeot à 1'00001' près 00 vous rlaruJ cette terrible épreuTe ... Nous logerons ici, mon père, n'est.ce pM, juaqu'à. votre retour à Paris?
- Û1:Ii!, OUIÏ., I18.~
Merci. .. Oh 1 je ne
suis pas pressé de rentrer à Paris ... J'aime mieux
rester ici, où elle a plm~
~
derniers jours ... si
heureuse d'avoir près d'eQll.e son p~ti-f1s
1 IJ est
bellU, votre Pierre, vous l'a.vez vu ?
- Je l'ai vu, dit le baron.
Et, à son tour, sa voiX ~t
sans timbre, étrange ...
Sonia s'étonne que le misél'tLhle conserve encore- la
facult.6 de s'émouvoir au nom de son tlLs.
PrevQit-il de quels poids ~rant,
~J.
jou:r pOua'
l'enfant, les crimes du père?
Sonia tient toujOl1!'s la main d'Yvette.
Oelle-ci, OOIT1!.:1e la. d,octoreMe, s'œt immobilisée.
Il scmb!") que la petite Deux &lus écoute ainsi le
dialog:.;e et le comprenne.
- Au reçu de la fatale dépbChe, continue le bè;ron, n'Jus avons pris le rapide, ma femme et moi.,
a.fin d'arriver plus promptement. Beppe a.mènero
l'auto. Je l'ai chargé, en partant, de toul régler làbas. C'est un homme de canfiance.
La doctoresse sel"ré plus fort la main d'Yvette
et l'entraln.a oomme en fuite. Elle l'~mtrane
jusq;ue
dans sa cl1ambre où elle se barricade.
- Bappo arrive... Bappo... bégaye Sonia, étranglée de dégoOt.
- Bep-po ! répond en oobo Yvette.
- TaiS-toi. .. tais-loi '. Je œ défends de le nomner, cel homme ... Je te le détends 1
L'enfn.nt se met à 'bremblM'.
A-t-clle compris 10. défenso ou n'œt~e
quJEl 15
vibration dans la voix, l'Ilœent passionné de Sonia
.q ui l'émeuvent '1
-- n va venir... déjà ... déjà!
Elle savait bien qU'lm jour il lui rau~t
se retrouver en fMe du misérable; mnis elle ne pensailll
pa s que l'C dût êt,e si toto
Que lui rlil'8·t-polle '1 El lui, qu'osera-t-il , ...
Arrl veru-t-il paifdhl/>, aurlaci(''Ux, sQ, do vaincre ?
Qui sait ... comptR.nt pouvoir lt son gr6 l'emp)o~r
encore pour d'nutrefl besognes de Bung ,
- Misét·o.hle .. , mi.sérable 1. .. Ah 1 j'ai peur ...
EUe s'uffole. pnl'le presque à voix haute. Et Yvette
son tOlJr t tremble ...
Il'Ilffole
Elle nn :S1 porle les mlÙDs à son front. Mais ce
n'est point l'(>ffort d"lJ11e pensée qui la torlure. C'est
u e sOllrtrance phy'gique, une douleur ~anc1t.e,
Toul à r.oup 1~ ~cClrd
de Ill. doctoresSù l'en~
l'nut le r gard do Ir.nrnnt., Sonin. CI' se de gérmr_
Flic court à la petiLe, la prend clnns ses b;ns ...
Yvette S~
cramponno
clle. Se,l yeux SC révulscnt. .. sa tCLc l'Oille convnl<:ivnment ;1\1r l'épnule de
SOllitl. Une fois l''.lH'..or(' Yvel
rsl f,)uclroyée pM
Lmp d't'motion. POllrra·t-el),t' supi1 f )rtcr ceLLe nLlUVClLlQ 0I'j8o(1 ... Sn raison, déjà alt.ein1. ", n'a.cbèJverat-elle pas de som.brer ,
La 'Petite
U
Veux Sous
n
-l~
Hélas 1 ne vaudrait..il pas mieux qu'elle ·s 'en.
dorme à jamais, 16 petite Deux Sous 1
XVII
il MON BONHEUR ))
" . Pour .Va.mour de ma paUIV.ne f€ffime qllÎ l'aiJ.
a c:1it M. Martet, je pI1eI1drai som d'Yvette
m~t,
tou10\hl'S.
l)
Sa. résoilutiOŒl n'a point V18Ilié, et cependant Yvette
en ~roie
à la fièvre, a été plaœe dans
v01ture ~ ambulance et oun~ée
loin. de la:
villa Marguen te.
Certes, le cœur de M. Mtal11et a saigné en pe.rrnettant que œla soit.
Maïa son gen<hre a parlé au nom de la séeu:ribé
même de M~guerit,
du petit Pierre.
Mme Onb.i.hoff ne perut préci.ser' 00 qu'a l'end'ant
et tant dB lll8II.a.dies oontagieuses débutent com~
celle d'Yvette 1
- Si vo~
n'a~1?tez
pas d'élœgner la co.nt.agion,
mon père, Je <romu de mo.n devoir d'emmener ma
ferrune et mon fiLs. TI m'en coCtterait beauco\l[)
CToyez--1e, de vous abandoJllIl-er à votre douleur '
et ce .serait un \el. chagrin pour Marguerite 1
.,.
- Que dit madame Sonia? a demandé M. MaD.'tet, essaJlUlt de se défendre.
- Ellie npprCJUVe. Et puisque vous po sédez aux
Loges cette petite viIlJ,a .meulJolée qui n'est palS occupée ~
ce moment, on y pourrait bransporter Yvetttl. ~!l.turc)emn,
l\1.I;.:e OrblhofI l'a.cco.mpagnerait.
- Ah 1 oui, s~upinl.
~.
M ii.l"'te t, Ct Mon BonheUll".! !', la pr~Il1èe
peb-te maioon de c&:rl:pagne
que J aI pu offrIT à ma pauv:re chère femme... mUe
no~
pa:rul, dans la su:i:Le, trop modœte. Mais jamalS .vom-e belle-mère ne permit qu'on. la w'Illdtt.
A pem.e a-t-eILe consenti il ra mettre en. location,
parce que, n'éba.nt point l1ahitée, la villa. se seraiL
détério.rée. Chère pettte maison... Oui, si Mme Sonia ne croit pas que œI.a. puisse G-tre mauvais pour
sa, ma.lB:de .e t si, wo.iment., cela lui pa ~ ra1t
prudoot
gu 00 1 aloigne... MalS assurez-VQI\1S, je vous en
prie, que rien ne ~eu.r
ma.nq uera.
- Soy-œ Lr.am.quille, man père, j'y veil1erai. D'ailleurs, rien D'es! plus simple que de dOlhlleT œü~
blanche à Mme Ort>ihoff.
- Oh 1 certememel?-t. Qu'elle agisse au mieurx:,
sans oalau1e'r... ~ q1ll les serviTa, là-baa ?
- Sopbie, la ~
de cha.rnbre de ma pauwe
belle-mé.re, p<JlI'a~
ailler aux Loges. Maits elle est
~ée
... ~q.ue
lm lPCu, je CI'OÎIS. M.a.Pguerite, qui
s est déjà l.Oq}llétée
cela, offre 00 se prive.r pend.ani quek[ueê joOOs <Le sa précieu se HM.lBe. Sophie
la remplacera pendant oc t<l-mps. H61C!lIse ne de.roonde pas mi.e-ux que d'adler là-bas ... Entre nous cette
fille a un caractère difficJj.je >et s'oo.t.e.n.d m:à.l. .uvee
Beppo qu'elle ne peut souIkir, on n SD.it PQurquoi
M~rgueit.
ni moi ne sommes fâchés d'avoir u:n~
ra1.l3on pour les. sé:pClll'er un peu. On trO'UVel'a Iocilement aux enVlTons une perSOtD.'llc qui vieIl.dI'a faire
la. cuisine, HélŒ;se n'étarrü point cordon bleu
Ainsi rut Cait.
.
Le lende1l?ui!t m~
de l'enl,err.c.ment de Mme
iMar~t,
Sonill. InsbsJlalt. YV1eLte ft 1( Mon Bonheur
qUi, la. Joc!.aress Il: approuvé 1~ départ de ~:).
petlte m6Iad-c. Cel~
élOlgne un peu l'irull..anL rednuLé
où elle devl'a revOIr 13eppo.
Alors m~e
qu'exÎlS~rait
l'i'ClrlQyaMe tmm:& SOUpçonnée par &xI1Ja, .tneullçant M. Martot o'Près avoir
frappé sa., femme, la docLoresso ne pC'tit croire que
le da.n~geI
pour le benu-p. l'l'l nu V:t1'OTl fIOiL immé.
d,lU: blle a~lrn
le kmps, Ul1e !i!i.s YVl'lt" gUérie _
'Î1 l' USl:llt à la sauve-f - die r~'P!cIla
son post/.)
SI ".f>
près dn veu!.
Pour l'.in.s tn nt, ln. plus exposée lui parait .êtr.e
YveLte. Beppo ne crairu1rart-il po.s gue l'enfa,nL n.e
u~e
déliran.~,
.el
�c;il
La 'Petite
Il
31
'Deux Sous"
r évèle, dans la sŒI'exciba.tion de la ma:badie ou en
ébat d'hypnose, les crimes commis ?
-
~
Meil'ci, madame. Oui, je suis t rès dévouée à
ma maltres.sc ... je l'aime bIen.
- J.I ne f>3.udraà.t poo vous élo-igncr d'-elle, Hé,..
Si Heppo peut craindre une trahison, son outil
même si l'on chwchait à vous détaoher d·e
sera brisé par lui sans hésitation. C'est sur YvetLe lùY~r.,
vot.re pla<:c.
malade qu'avant tout Souk!. doit veiller .
- Je n 'ai nuUe envie de d-cmander mon coogé,
{( Mon Donheur II est une 6troite maisonnette au
et si on ne me ronvoie pa.s ... Id n 'y l:J. qu'une chose ...
centre d'un minuscule jardin .
La bonne Mme NULrtet s'y est,trouvée tout aussd Mais ça serait p.ur pl'lls trurd.
- Quoi donc?
plus heu,reuSie peuH:Lre - qu'en la
heUl'l'ILI.&C - Je peux biem. dire ça ... Madame p r omet de ne
Somptuouse villa Marguerite.
pas rél'éter? illh 1 bien, quand Gr'énelel est parti
HélOïse pince les lèvres dédaigneusement.
'
Pour accepbe;r, ei\1e - femme de chambre de la nous étions comme qui di)'ait fiancés.
- Le renvoi de Gl'ooeJet a-t-il rompu vos OallDaC'onœ doc Folbert - de venir en ce taudis faire le
çailles ?
S~rvice
d'une malade et dsqueC' peut-être la conta- Oh ! non. Gr-6nelet et moi finirons certaineglon, j.l Lui a faJJu d>e.s raisons puissantes.
Rille les confie, sans se faire pie!', il la docto- ment par entt'er cm ména..ge; mais pas de sitôt enGJ'énelet a Laujours eu l'idée d'.aclleter une
resse. Héloïse, ainsi que l'a re.connu le l>aron, ne con~.
petite au})er~
... une auberge bien lenu~.
bien propeut souffrir le ohauffeur.
pC'e
·
où
l'(}n
P"Ul'll'ait
gagner
de
l'argent.
QU/iiIld H
- Moi, que vou:lez-vûllIS, dit-c.Ue à Sonia, cette
tête-là ne me reviem t pas. Je l'ai avoué à Mme la a été renvoyé de oohez m.a<nsieur le baron, LI avait
qui le
~D.I'one
qui m'a gr(J[ldée. C'est le suint chrème, cet envie d'ab-andanner <:6 'métier d.e ch~ufer
lndividu ... MonsieuT .en a lP~ein
1'<1 bouche, de son faligue et de cllereher l'auberge ... Mais moi je lui
ai dit : Il At!.~ndez
un peu, roplurez-vous pour aU"B.eppo . IJ fail tout bien. Il sait toul, mie.u x que p.er~olJne.
Un orgueilleux, par sseux comme une cou- menter vos écOIOOuu.es. Moi, pendant œ te.mps-Jh,
feuvro ... fier avec l'oUlce, f/Lul voir 1 On dirait que j'en f-erai aU5.9i et, dans quelques années, nous
c'!Jst pal' gnkc qu'vI mène monsieur le b~.J·on
... un p,0ur:rons achder ooe jolie petite maison avec un
~ardtn
et une !,eC'ra.s·s e au bord de la Seine. Moi,.
aIr, quoi .. . comme s'il prêtait son 3Juto à mes mal. ~ cOmpr
( =I~ez,
je ne suis J~a.S
Ll'OP r· e~sé
de me
Lrc -'. Et QJUis, je l'ai trouvé souvent en ~rail
de cau- "m
; mu!.."! Lambert (Gn5nclcl s' 'Ppelle LumSt· e.r avec mo.nsieur, tout bas ... Qu'est-cP qu,'il ru COll- maner
bc.rL) IIC l'ève que de . ça et d'ouvl'i.r son aUbc.rge .
.'llL '! ... D"s ['[l!}ports coutre nous ?... Ou bien, c'pst- ;\1me de l"ol!J.ert connalt ces projets?
qulC mOI1si~ur
JI" fr'iron lui fait ses co~:ildèn<s
et
- Non... moi je n'au,C'ais pas fait de cachottL'.ries
emploie à. des besG'8ines que... enfin Je me comî!,ends. P.auwe mad.ame 1 .Monsie,?r est toujours avec olle; c'est Lamltert qui m'a demandé de n'en
à lui. J'ni obéi, n'est~c
pas?
l'i~n
gentil avec clIe... ça, Je ne cLis Pa5,.. et il a rien dire - un iG.~e
.a~
amoureux pour de bon. Mais les hoonmes [ , D'aoo1'd Lamhert, c:-a me fait l'elTet ù'un fiancé,
bien .s\)r, ct j'ai p9UIr lui bealj~p
d' ~ rti~,
autreSalt-on jamais? On dit que les femmes sont trattres. Ah 1 ilen, je lcur conseill-e de parler, à ceux ment je ne pense.nüs pas il. l'épnuseT; mais hl t'st
- douze an~
Ull moins &lors:
qUi se plaignent 1 Un bon g.u'ÇO'IJ, voyez-vous ma- plus ClIg-é que m~
le trai!.cr comm(! un
dame, c'ét,ait Gl'onel.et. illn voilà un dévoué' aux je n'ose pas lui déso~ir,
blaŒ1,c-beoc d'umOUrêtl'X de rien üu tout...
nl"lt.res ! Il pleurait comme un enia.n,t le jour où
- J',ospère que V{)1lS seI'CZ heureuse, dit Soni.a,
~n
ltli a dOnth~
soon congé. El, tout ço, pourquOI '1
Et lai ·['·an! Héloïse à ses pl'oje~."
d ·/.Ivenil, elle
OU.r ril'lfl. Monsieur le baron .a. bLe.n l'uoonté que
Gréll"!et Ini av>8.Ït mltull/ué do respect. I\lai.-l je !'tll,- revint ver" l'onfan L m~\J.adc
Depuis p,rès d'une sema1ne, la docto esse di.sp
u ~e
yre homnJe s'cn cMf IOdait, oL moi qui le GOlm'.LÎfl,
Yvetbe à la mor t C'~t
une lutte de fr.!:;ij Les insJe n , peux pas croire ~u'Ïl
a.urait jama.i.s cu ~n lang,uc: trop longue. Moi, tout de suilc, j'ai pc,n sé crue tants qui ne laü3se guère à. Sonia j. loisir de .son~er
c bLall un prétexte 00 mOlbSiem' le baron. Et je l'ai a.ux habitants de la. vtllfl. !\l'Ol.rguerile. Elle en vient
~le1.i;é
oncore ~us
QUlln<l j'ai vu arriver cet Iwllcn ninsi il oublier S'C's inc!uiét;u'(lt:s sm la sécurité de
M. Marte t, l'~ .' eule l'i.mage oUiot.use de Beppo 5o'in,,0 :1~,hcur
.0 m~IN
q li lril11b,1l.dit MODsic.ur
terpose, quoi que puis::Je faire la jeune femme enqUfi!lU il étaU garçon... autant eliro un cO!1!pli.ce.,
q UOi 1
tre elle el chncull'e de ses u.clions, ;,lI' "ses 'Pe.n~s
ELle le voit CiD. rega.rdant Yvette. ElLe l'entend. en
a écou.Lé saDIS l'illte:i'fOmpre lc long
t La ~oc.tJ·es
éCOllwnt 100 phrases i:ncollérentœ qlre pŒ'ononce la
.plu.lt1tif monologue d'HéJoYse. Le dernier mollo.
n1wlode lm son délire.
ait frissÛlnner .. . CI Com lice ! li
E't elle a des révoa.te.s, des nausôps de dégo\1t, il
1 EUe Ile r6pèw, rungoiooée sans s ' [Lpe.rc~oi
qu'elle
la pensée qu'e~
ri. p u aimer C'Ct homme.
fl'o(;xcnS8.
e pl nonce à hiau!.e voix. H~oÏSe
Ce ~oir,
il sembLe ,",u'YvetLe !:>oit. mieux, sa respi- .le dis ce mot-là ... Madame C01l1pl'cnd bien ce
ration est m~ins
hatletamte.
qUe je veux d.i:['•• J'espère que Ma.clame m'excusera
r,te répétera péltS à mea maUres Ge que je lui COllSonia inLC'oduisit entre les lèvrm (1(, l'tmfant quelo 1 VOycz-VC1US, c'est ra.ttac.hement à madame la ~t1es
~ou
t te3
d. poU
; pnis ayflllt l'ep&Sé sur
lJt~'one
qui CM f it paJ'\ler. Je no j}enx 1",l.::I e.'pU- lOl'eille!' la pauv.rc Lèla ~nd(}10ri
· f',
ln doct.messe
uer.PQurquoi - c'est IJete, c'est fcu de m~
purts'approche de III l~nt.(-e
Elle J'Il Llis,\(~e
lar~e
oudCPULS que ce clw.ufIeuI' esi entré chez. nous j'al V,CI'Le {LOn de permettne à rail' de ('C renouv.elcr.
PeUr pOllr madame.
Aus~tO,
/lU tond. cLn ju.rdin~,
une silhouette se
TOllt rn fJel'vllnL ID èoctrp,-~e
t'l 'ès ln:" a.fin dl! meut. lIn ho,J17"':c f" , t !'."":' ' S lla., 'cr:> lu m.!l.ison,
puis s'am' Le , héSitant.
~IC
Pu..c; GlieiHe!' ln petite Denx SOIlS, Héloïse ha-
i!
i
fit
q
,"urde. Le b varda,!:;c est son
1>C~()jn
<It: "e llllltie.l',
rrJe. r:r.pr'nrl nI, l'.rxp
Out il ('011 fi 1'IIIlIUÜ1!.C.
Peu l,-dl n! a-l..f'lle cu
.,~COrJITIlC je di-'d
J.,'1·[lnd
tLMilUt.. Elle
;'1.
de pari [' ....Rn qll'on l'cn
.rc"
.,~on
V\I visugo de SOllia.
III
].lTlgllf:
trop longue '7
, r,",prend-ellc d'un ni)' nnxleu., [,mdl'ltlt l'a:) J'~pr.tel
. - Snyc;~
Lranquille. Non, non, je ne rélpétl:lr i
flCn .. 1\toi aussi, bien que la conmtÎi1snrlt dClj)uis
fell, Je! ·Ir. int6rl'l ,\ :\lm de FoJh('rl .ut jl] SlllB
~O\I'()lS
<ln pCllHCl' t1'I' Ile a. plès d'clle un' poranne qui lui est toute d6vauôe.
SOllia, <.;ul'iou: ment, l'cx:trnine.
Une longu.e b l'be blfillche !.(fl!l'bc sur SIl. poütrüne ;
dos ch~veux
blFn~
débordclIt du grand chapeau
l' _letr 1"11 alTière el, III' 19l'é l r~ chaleur de Cl'
jour de sepLembl'8, un grand manLe'an - nne ca,po
IbOU
dl' dr'!;Ip Vf>l't - l'envelolppe complèfement.
De la pièc.e du rcz-de-ehall,"ôe où elle se lien f,
II6Ioï6,P, cUe aussi., a vu l'homme,
et cru qu'il
Inendi'l1.it. l.n voici qui traw"rse lE' jD.1'clinet, pOO'tant
une aumône. L'hœnm." l't'ruse.
Sonia 1 voil souJcver dl' la main gauche son
grand clnpeu'U, et ~lui
seJ.ll!>le que l~s
yeux ùe l'in-
�~
32 =================================
La 'Petite " VeUle Sous"
~
connu cllerohent ses yeux avec une expression de cheveux que les émotions terribles de ces dernières
prière et de ccrunle.
semaines ont striés ete fils d'argent.
Ohoquée de Vùlf repousser son ofLran<1e. Hé- Que désirez-vous? reprel/d Sonia. Qui êtcsv ous 1...
10Ise, rudement, interl"Oge :
- Si VOlb:l ue VlI'
L'homme é.carle son manbeau, cherc:he le ooJ.e...
~ .1 //t::n, pourquoi êtes-vous là ?
_. Je VOUU,I'81" "I,vOlr ... vous demanr~
.. C'est ]lin <?ù son enfermés. les pai~rs
du mort danL i1
bien ici qu 'U y a LIoIlt:: 11111.1a<1e?
Il pns le nom. Soma, distmilemf'nt, y jetLe les
yeux: ne lit qu'un nom : Il Eusèbe Lvntrot n.
- Qu'est-ce que tf8 vou s fait '1
Elle repousse les papiers :
- Pourriez-vous au UlOlllS me dire comment cUe
- Je n'ai que faire de cela. Répondez-moi seu·
va 'l
lement. Dites-moi ce que vous voulez ?
- Mal.
-- Ah 1 mon Dieu 1
- Je suis un ancien ami d'Yvette. J'aime cette
- Ben quO! 1 Cesl une de vos parentes?
enfunt... eL je sais qu'elle va: mourir.
- MoL. . à moi. .. (JlJ 1 non, non.
Vital a parlé simplement sans détoul'lW.I' son
- Eh 1 ben, rulurs ?
10Y'8Jl regard. Et dans ce regÈtrd, COIT'.me dan.s l'ac- Je l'ai renc on trée ... autrefois .. ,
cel~
du vieil homme, i.l y III une telle sincérité que
Soma se sent émue.
- Quand elle élatt chez ses vieux juifs?
-- Précisément.
Qu'importe . ce «:I.~'es
réeNement cet inconnu .. .
- FnJlait le dire.
Il. est certam qu II aIme La petite Deux SOl1S, e\
- Et alors je .. . je m'intéresse à cette enf.ant, SODla ne se rec0!1na1t pas le droit d'éea!·ter de l'en1 '('st-ce pé;L.8 ... c'e t pel'mis .
fant cette affectlOn, SI étrange qu'eUe paraisse,
- J'espère qu'Yvette ne mourra pas, dit la doc·
- C'est même nn 1111"t::1 de s'y intéresser à celte
gamine, .. el, pOllrs ulvlt Héloise, parlant pour ellc- toresse.
ll ême, si ce n'éLal l {Xls ce Beppo qui ra umenée...
Les yeux de l'homme au manteau vert s'emplirent de larmes.
Mais l'homme a scJ.lsi ce nom.
- Beppo 1... CUITI/ll enl est-iJ?
- Ah 1 si on pouvait la sauver... la sauver tou~
Quelque chose de VIbrant dans l'accent du vieux à fait, lui rendre l'intelligence 1
- Peut-être.
fruppe la femme de chambre. Entratnée, sans réllé·
cllir à l'étrange té de ln qu estion, elle répond :
- Mon Dieu 1 Ce seroit possible ?
- Grand, milIce. b/"llfi, des ye ux qui plaisent à
- Je n'en désespère pus ... Venez, puisque vous
lo ut le m onde et que, moi, je peux pas souffrir.
<lés irez la voir. Mais vou s ne lui parlerez pas. D'ailleurs, elle ne pourrait vous eomprc-nd re. Vous ne
- Grand, I>mu ... c'est lui, murmura l'homme.
reslerez qu'un instant.
- Lui qui?
- Oui, oui, je vous. promets, madame. Oh 1
- Lui qUi' j'ru vu avec la ... La. je1lne fille.
merci, merci 1
•
- POSSIble. C'est tout ce qui vous tou..rmente
.
- Suivez~mo
.- Na.ture lle men t, Je ne ~eu.x
pas .. . on ne voudra
L'homme se découvrit et, te front incliné, re tepns que je la voi t, '/
nant ses Larmes, il suivit la docLoreslle. A l'oenlrée
Il Y a tant dllumlliLé suppliante dans l'accent
de la che.rrù:lre, il hésita ... il n'osait plus.
du vieil181'd qu ' HéIOlS>e s'émeut.
- Voule z-vous que je demande à Mme Ol'bihoff?
- Approchez, dit Sonia,
Puis, se tournant vers HéloIse, assise au chevet
- Madame?..
de l'enfant) d'un geste elle la congédia.
- Le médecin qui soigne La. petite... la doetoLe lit eSL daJns la pénombl'e.
rE'sse. ,.
Sonia soulève UJIl rideau, afin que l'jnconnu puisse
- Oui, oh 1 oui.
Il négli€e toute prudence, le pauvre Vita.l.. Il ou- voir le visage de 1a malade.
- Oh 1 ma petite l... ma ohérie 1 murmure Je
.blie sa crainte de se f.a.Il 'e remarquer, d'être re·
Manchot.
connu. Il oublie wul dans son désir de revoir 1.0
Et il tombe il ~enolX
.
fi11e d'Yvonne... son YveLLe encore un~
fois mGDes Inrme-s qu 11 ne chetrehe plus à retenir cou/lacée pa:r La. mm't.
lent, pres>sées, sur ses jO'llCS hCl.ves.
'
- Venez, commande H61oYse.
En regardant cet homme, en voyant cette 6moSonia fut mécontente, ma.is intriguée.
tion, éviacm.mt;nt sincère, la doctre
s~ e songea it.
Que peut-être ce vieux dont le visage pa:ralt honElle se disrut !PIe M. Mar.tet, oor.f1ant en son
note, a10rs que sa mise si extraordi.oaire rappelle
,gendre, ne saurait pas déIendre l'oq h€1ine
un I>rigand d'opéra comique ?
La petite O~x
Sous est enLoUJrée do() ong
-c ~'S
enElle se pen('he il su fenêtre au moment où Iléloise va pénét.rer d8JlB la maison et, dans un soul- tourée d'ennemIs ou de gens qlli le dcviendront's'ils
pelW«K la sUil>Pose.r en étut d-e leur nuire, Pourra.l1e, demande :
t-{lille, &euJle, protéger Yvette ?
- Que veut cet homme?
Ce pauvre homme en !.aImes serait certainement
- Voir la ronlra.ne.
un allié. En la détr6llse où la jette l'angoissante
Cn mmn lA doctore sse fail un s1gne de dénégation.
ceJ'Litu.de d'êLrc eni<lurée de mclveiUance Sonin. se
llélolse insÏ6te.
sent ~réte
!l.aooe.pter tOUJLe aide qui s'oèfrira fût- Il dit qu'U l'a coDnalL
eLLe bLen ffiJ.ntme.
'
- Ahl
L'homme se souvient de ln recommandation de la
Snnia hésite. P ent.-êt,re c t homme tienfril dn
qu'un in s lant. n
quelque fa çon au p 8s~
é d'Yv~te,
ce pas~
mysté- doctoresse : 1/ Vous ne r~stez
il se relève; ~ur
,!n p,e tlt.e mnin nmn igl'i pend!tnt
l'lellX que la bon ne Mme Ma rtet a si v:i.v.c.ment déau . bord du I1t Il s mcltne. J'effleurant il peine d'un
s iré connattre ?
bai ser trembll\nt.
_ Ve nez id , n é. l o'l~
. Vous r esterez près dû la
• onia a la mêm e p<'n ée qu'IMloYsc tout à l'heure.
petite pend un t que Je . recl'vrni cet homme. .
1( Son
père, p ut.-Nre ? ))
Disc l·i'tem('Ill. !l' \'!{'llIlIl'd nllrnd t'lU I' le sc ~1
110
('~p
c ~d a
n\.,
c He dOllle. Yve tte n'fi aucun cles traits
3d mruson le bon plaisir de la doC'tores.sr . ~l1I
s~et
YC:lIX, SlIl' lout, Mllt très dHféil llU udr.ir le en U.J' de celte fcmm , obteni r d Ue de cc t In oon!l !? S;.~
r enls. El VOICI qn 11 Tl,P m lp r C~ l ()1I
cI..- dr1id Vtt s'jmla l.ri"lc joir ,, 'upprnd1Cr l.'c llfllJ1t 1I~lronte
1
_ T'jll bien 1 mon ami, vous t'J.Lcs connIllLre pose à la doetor s,se, 1I1I r-a{)I' I'OChClllj'IIt... n song ean t all x yeux d '1 vell, c lIH en ('C mOO1e nt.
Yvelle ?
Les yell x d ·Yv.e
t ~ .. 1Tl1lis il ~ Aon l parf'I!!.! il {'l'Il X
Ab 'orl f, c1nn "C!l pf'n
~ p.,s
Ir Manc hot n'n p()int
cuL< nllu a.pprodlcr " min. Il bnlhllLio, trnulil é pnr du baron Raoul dl' 1"olhert. .. COl1l mrnt n' pn 1l- 1 . ~lIe
pliS clf'ltJ. fU ll la r enl~
r lJ\e
ë Sonln rI 'Jlnu~
cette
l'u,spccl de /. VI 1Ig< ('fll'T'giqlll' 1'1 évèT'c, élr-anIdée. Plll.9 elle lutte, plus l'idée s'u11pooe à elle e ~
gem{)n-L cnClldré de cu 'v ·u.x coupés cow1.s, des
�La 'Petite .. 'Deux Sous"
~
plus aussi augmente son effroi d'être seule en face
il':! mystérieux dange.I1S.
- Je vous ;remel'cie, m&1ame. Que Dieu vous
rende ce que vous faiLoo pour elle et ce que vous
.'VICnez de faire poUT moi.
I.'homme au .mnntcau vert est prêt à ~uilte;r
ln
charrnbre, Sonia, obéis'srunt à un obscur instmct, dit :
-.::- Hl'venez demain.
1
::;ans écouter les remerciements du vieillard, elle
refeJ"me sur lui la porte et, senle avec ses pensées
devant Yvette endormie, elle cherche avidement le
mot de l'én igme.
La nuit était ~nue
tout à fait lorsqu"une auto
~ronda
sur la ;route et stoppa devant l'entrée du
Jurdinet. La doctoresse se redressa, secouée par un
fris son d'ho.rreur.
Si c'élait lui qui ose venir 1
Presque aussilôt Héloïse parut qui, d'un signe,
app pla. la doctoresse.
- Le chauJfeur est là, madame, et demande à
vou s parler.
- f\,envoyez-Ie! dit rudement Sonia.
La fc-mme dJe chambre }Xlrut surp
i ~e.
- l\Iuis c'est qu'il vient de la part des maHres.
Allons! Il faJ.l:ait se résign'cr, tenir [.êle Il l'omge.
-- FuiLes-le monter. Je le recevrni dans la seconde ché1!1lbre.
- Je peux rester près d'Yvette, si Madame veut.
~
C'est inutl~.
Comme pt:ndant mes repas, je
Lalssera.i la Do.rte ouverte. Alliiez 1
I.orsqu'elle entendit approchel' I3eppo, une dé·
tresse ph~ r .! i que
envahit Sonia.
Elle a peur, horriblement peur de cet homme qUI
Va parallre et qui a les mains souillées de vol...
rouges de sang.
(( Assassirn, aooassin, assassin 1 " répète inlassa.bllement l'esprit c1e la doctor·esse, et bien que ses
. èvres r estent closes, elle a la sensabion de prononcer cc mot à hauLe voix.
.
I3appo est calme, presque souriant. Parce qu'HélOïse l'accompagne, il s'approche avec déférence
de Sonia. Puis, ln femme de hnmbre sort ie il
r C[ll'cnd son sourire d 'enLcnLc anJ0u l'CU 8:>, rait' un
gcstc ...
Aiol's, dnns la répuJsion qu'Ile éprouve, lOllle
prudence abandonne Sonia.
El ce mot qu'elle n 'n. pas pronnnc6 tOI1 t ù l'heu!'e,
elle le jeUe ù la t..êLc du misémlJle :
- Assassin 1
. lI pâlil, recule, puis, avec un geste inooucioQJlt, il
d Il:
- J 'aime autan t ça.
El il sc lai L. IDllc répète
- Assa ssin 1
PUis clIc ajc..uLe :
- Volel1r!
- Ah çà 1 Jait Beppo.
davan[.nge, dirait-on, de cette sen s'inql.j~Lo
COnde ~(,A'usnl.io
- Expliquez cet accUlCil. ELes-volls devenue folle?
- Pns encore ... ct ce n'est pns volre fuute,
, - Voyons, pas de mélodro.me 1 De quoi, au
Jllste, m'accusez-vous?
D'uvoir dévaùisé les brooonl-eurs.
eppo poussa un juron.
ça 7
- Commenl S~i-tl
- D nvoir, reprend Sonin hors d'elle, as.susHin6
M roe Murte!.
u - Tu as déclaré Loi-m~e
a succombé à
ne malu<lie de cœur ...
- PUI' l'effe t du chloroform .
ch; P.crsonne .n'n parlé de chloroforme, que je sn-
il
So ~
Personne n'a su comment cela s'es t fait, dit
nia.
- PCl'sonn '" que vous 7
- Quo moi, om.
- Pourquoi l1'avoir pa dit cc que vous savie-z ?
3. -
LA rETIT\:: « DEUX SOuS ••
33
~
Qu'attendiez-vous 7.. . De pouvoir me le dire ell
tOle à tête 7
Sonia se tllt, atterrée de s'Ollre livrée, d'avoir livré
Yvette. Avouer qu'elle savait, n'était-ce pas se
perdre inuliJoernenl LouLes deux ?... Elle s'était si
bien juré de 00 taire ! Et voilà qu'en face du misérable une mal"ée de dégoû.t l'a soulev~,
déLruisant
tau le prudence,
- Pourquoi t'être tue, voyons 7 reprend I3eppo.
I! ne scmble point effrayé, seulement furieux,
- Il ne m'a pas convenu de vous livrer, répond
Sonia avec effort.
I3eppo hausse les épaules.
- Me livrer ! Qui donc écouternit vos fables"
Sur quoi reposen.t...elLes 7 Avez-v.aus des prel.j.V't:s 7
- Non, dit la doctoresse.
TI lui plait qu'i.l la croie désa'rmée. C'est le s(jILTL
pour elle, et sans ~Ie
que deviendrait Yvette?
Seppo, de plus en pJus, a J'air t1+6gagé.
- Au fond, vous-même ne croyez pn.s un mot ùe
ce3 histoires de brig.ands. Qnel in lérCl aurais-je cu
Il lu mort de cette pauvre femme?
Sournoisement, le regard de Oeppo cherche Ir!!
yeux de la doctoresse. Elle se sent 6piée.
Elle en a déjà trop dit. II ne raut pas qu'elle lai s,;/)
cel homme deviner qu'elle accuse le baron. Elle ré·
pond, détournée :
- Que sais-je ... J'ai trouvé le flacon du chloroforme ... le mouchoir.
- J'étais bien loin, dit I3eppo, je pourrais 10
pl'ouve!', el aus i l'impossibilité de pénéw'el' lu nuil
à la vilIa lVlal'gllel'ile, dont les pal tes son t soignensrmen t vCl'fouillées ...
- Taisez-vous! gémit la malheureuse. Ah! taisez-vous 1
- Donc, reprend I3eppo impitoyable, en admettant, qu'avec l'aide du flacon on puisse ét.nblir I]ui
a été acheter Jou d.r<?gue, reste il. 5avoir fJ~i,
en pleine TIllll, dan:; lu vllIa cIo e, ryun.nd J'étalS loin ... u
pu J'ad.min ÎlSlrer. Eh 1 Il me semble que Ja juslice
ayant sous la main, dans la. maison mOrne du
crime - pnÏoS(]l1e vous voulez qu'iJ y nit eu cl'ime
- ayant, clis-je, une docLoresse, celle.Jlà pl'éciséInent qui, la veil~
mCme, a signé l'o!'donnunce, il
me s mble que la justice ne cÏ1erchor..1Jit pas plus
loin. Qu' n penscz-vous? Que di~-vous
de 11100
dOductions ? i\lais je suus sû r q1LC vous u.viez pesé
tout cela à vous seule. cal' vous l'tes :me femme
remarquablement inLcl~et,
m:ld.rune Ol'bihoff.
Sonia réprime un frémissement de colère.
- Quant à l'histoire du vol chez les brocanteurs,
vous m'intéresseriez en m'indiquant la provenance
de ce conte à dormir clebout.
- On u volé les Siméon, .. ct vous y avez été .. .
- Alors, naturellement, ce ne peut être que
moi ... MerCI.
Il ricanait. Mais les paroles de la doctores'3e lui
cousaient un vérilable soulog.emenl.
- Dois-je conclure que le sil nce prudent ob~p.r
vé par vous jusqu'ici seru mainLcnu '1
- Oui.
- Je crois que cela vaudra mieux .. , pour t(lut
le monde. Comment va votre ma.lade 7 J'6t.ui s ,,"nu
nl'en infOl'mer.
- Je ne puis me prononcer encore.
7
- Vous n'avez besoin de rien pOUl' ~e
- Non, merci.
- M. t\lar:Let m'a chargé de vous rc-metl.l'e une
somme - je ne sais laquelle, la lelLre est cac(wlée
- ce qui vous est dO, je pense,
- C'est bien, Remerciez-en pour moi M. Mortet.
Elle n.vait pl'Îs l'enveloppe que lui tendait Beppo,
mais ne l'o\lJvmit point.
- Vous ne vous assurez pas que tout y est?
ruiIJa I3eppo; passant pur mes lUn~\
cependant.._
- Assez 1 ordonna SonioU.
Ello ébait à bout de rorce.
ct s'éloigna...
J3eppo ricana, haussa les épaul~s
•
�La Petite .. Veux Sous"
XVIII
LU1t1IÈnE
. Chaque nuit, HéloIse prenait, durant quelques
beures, auprès d'Yvetle, la plaœ de la doctoresse,
~
que celle-ci pat se reposer. Mais ce soir-là, Sonia refuse de sc laisser remplacer: elle sait que le
repos lui serait impossible.
.AlssiJse au chevet de la petilc Deux Sous, tenant
>dans sa main la main de l'enfant, Sonia s'efforœ ,
llurant ses lon-gues heures de veiJle, d'arrêter un
plan, de préparer l'avenir.
Que falre, que dCNcnir '1
Seme, elle pourrai.t peuL-êtr e se soustraire aux
représailles de Bappo ; mais elle ne veut point se
séparer d'Yvelle, l'abaJldonn er au baron. La laisser chez f\I. Mar1.et, c'est la livrer aux meurtriers
de sa bienfaitrice. Le ve.uf, ignorant le danger, ne
saurait l'en défendre.
Sonia OrbihoIf a conscience d'être seule, absolu·
ment seule au monde.
.
Elle a peur, e'lJle, la vaiJlanle 1 Et voici que, du
fond de sa détresse, elle évoque l'image de l'inconnu de la veille.
Ce vieil!laNl, don t e1iIe ne sait rien que sa pauIVreté et sa faiblesse, bien apparentes, aime tendrement Yvelte. Si précaire que dOL êLre son secours,
el.1e l'acCClptera. D'ailleurs, par lui, alle pourra sa·
v.oir peul-être ce qu'est Yvette.
Quand donc a-l-id connu l'enfant '1 Le dira-t·il?
Cet homme est étraJlgj!. Cc nom de Lanc1ot, ces
papiers s<lnt-ils bien à lui. Qui peut-iI être ...
Sonia tient toujours la main d'Yvette. Sans y
prendre garde, ~
la serre davanl.a.ge, laJldis que
sa pensée se condense sut la nouvelle énigme sur·
gie en s<lU chemin : « Qui est ce vieiUard '1 Il
Soudain, la voix d'Yvelt.e s'élève, prononçant un
nom que la doctoresse n 'a pas encore en Lendu.
- Vilall
Sonia reLient s<ln souffle. Que va dire l'enfant 'l...
Est-ce le d élir~
encore '1
Mais non. La voix d'Yvette n'est ni enfiévrée,
Ini douloureuse comme lorsqu'eIlle divague. Ccln
ressemble plut.OL au timbre spécial, à l'accent un
Ipeu saocn.dé qu'eJ1e a 'Iol':;qu'elle parle sous J'influence mégnéLique.
- VHal... repnd-l~,
VilaJ. le Manchot
Son ia I.N)ssai1le. Hier, un pli du gr&l)d manteau
,verL tombant trop neLlement, trop droit, de
'l'épaule, lui 0 fiait presscnlil' l'infirmité du vieil·
la.rrl.
Mais il dit se nommer Lnnclol '1
- Mon o.mi VilaJ., dit Yvette. Il vient chercher
les pou,pées ... Maman a bie n lravaillé ... Moi aussi..
Il y a beaucoup de peUles poupées ... Vil..aJ apporte
de l'argent. Maman n'est pas là... gUe esL sortie .. ,
Mon ami ViLaJ., ne V{)US fàchez pas 1. .. Si 1 Il a de
la peine que mamo.n soit sor lie, parce qu'elle esl
malade ... Ah 1 voici mutnUJl. Elle esl 11Jute pâle,
pAlc.. .. Elle v~ut
quo je me couche ... Je vais dormir
Oh 1 Oh 1
Et Lout à coup c'est une dlnmeur de détresse qUIl
pousse YveLlc, un cri dé!> !'lp~r6
.,
.
Sonia la prend duns ~cs
bras, 1l1palse, cherche
là l'al'l'Hcher 1\ ccl étal di' dcrni-solnmeiJ lu cide où,
si HrulIgomcnt, eITe
t tomhée.
Yvel.le pnfin A'us50upil. El la nuit S'Ucll va, lenLe,
mais moin s tOl'lur'an[c pOlir Sonia Orbihoff.
Le SOllllneil d'YveUe dllra d(~ jongurs heures ..
J\u jour !cv6, lu vie repril, discrèlc dUlJS la pellte
viJIu, j)[uynn le aux a len lou l'S.
Yvette re.posait toujour:i, lorsque 1I6hllsc so mon·
Ira. Il la porle de sa chu rnlJ1'c. l<jùle aIHlflllçail quo
" le vieux b nhomme c1'hi ,1" " Mail l'()venu.
La doclol' !i ·c, loul l'II vl!iJolllllt SUI' le sommeil de
10. jeune Hile, li (lIT(lt6 ,on plal1.
Elle veut provoquer les confidences de l'étrange
~
vieillard et, pour cela, elle parallra certaine de ce
qui, chez elle, n'est encore qu'une supposition .
Elle donna l'ordre d'introduire J'inconnu et, d'abord, elle garda le silence, laissant le vieillard contempler sa petite Deux Sous endormie.
Lu doctoresse gueltait J'ém{)Uon sur le visag~
cr-eusé, meurtri, du vieil homme. Il y avait dans
son re.gaNl Hxé sur Yvel le la'nl de bonlé, de ten·
dresse, de douleur, que Sonia sen Lit S'évanouir ses
dernières hésitations .
Elle s'approcha du vieux et, sans élever la volx
mais nettement, elle dit:
- Vital ... le l\lan chot.
Lorsqu'un homme cache sa pers<lnnalité sous un
faux nom, le fail d'êl re brusquement démasqué
cause uI)e secousse nerveuse qu e les plus habiles
n e parvlennen 1 pas toujours è. dissimuJer.
Mais l'homme au manteau vert ne cherche point
à feindr~,
ne ~'erfai
.pas !l0n plus. Au contrair-e,
son maigre vIsage s'IUuffime, et c'est en frémiilsant de joie qu'il s'écrie :
- Elle m'a -donc teconnu, hier... e.1!e se ~Ol\'
.v ient 1
- Elle ne vous a pas reconnu. Eveillée, eLle ne
se souviendra probab lement de rien .
Et comme il s'effare, ne comprend pas, Sonia
l'emmène dans la pIèce conliguê.
- Asseyez-vous, Vital, el si vous aimez Yvette ...
- Ah 1 Dieu, si je. l'aim-e 1
- Si vous l'aimez, r ép-ondez-moi en loul.e frun
chise. Je suis une amie pOU l' elle, moi aussi. Je
cherche à la déf-end re.
- La défendre! QueUe dangers la menacent '/
.- Ah 1 Pour vous le dire, il faudrait que je (usse
bl~n
s.Ore tIe pouvoir cOll1!pter sur vous ... El je n.)
saIs rren, sinon que vous vous êLes introdUIt ici
sous un faux nom ...
- C'es t vl'ai, j'ai menLi. Mais que l'on sache que
Vital se cache sous un nom d'emprunt .. e'esL pour
moi ... pir.:! que la mort,
- J e nr vous trahirai pas, dit Sonia. Pour l'amour d'Yveltr, ne c.herchlz pus à me 11'0111J)el'. J'ul
besoin de l.out savoir.
- Ecoulez donc mon hi:;loil'e, 'diL Vital et à lu
gl·tlce de Dieu 1
'
Hrièvement, iJ dit sa rencontre avec Yvonne au
seuil de J'hOpital, d'où ils sor Laien t tous deux ot
IcuI' amitié, et le drame ...
CondllJlllné ~ perpétuité, il a cru devenir fOll de
désespoir, à la pensée que jamais plus il ne reverrait son enfant d'adoption.
La volonté de l,a relrouver a décuplé son audace.
Il a rés~lu
de s évade~.
D autres voulaient tenl.er
une évasIOn. Il les a ll.Idés et les El suivis
Ah 1 la fuite areus~,
trop t.Ol décou~erL,
les
coups, de feu 1... ,lis étalen t parlls Lroie, L'un a été
tué, 1 auLre reprJs.
.
V!lal, seul, a miraculeusement échappé.
Vllal r~conl.e
sans empha.se, simpJcment. li ne
parait pomt ,~e doul:er combIen fut sublime son silence, lorsqu Il sacrrfla au vœu de la morl.e sa li.
berLé, sa vIe peut-être.
Sonia écolJ~
en silence, ne songeant point il dou.
r : les 'yeux de ViLal ne sont pas trompeurs. Il en
vlOL ail Jour .TieuT"eux où un husard l'a conduit ~LlI
nouveau logIS des Siméon à l'heure nlame oÙ
Y~eL
y fut amenée par Ull monsieur Ir granrl,
mrnce, très brun n.
-. Beppo, mu.ra Sonin.
~l
. rep~nd
r6ci~.
II diL s'O Lre tenu à quel,
q1l0 dI5Ul~(
de
boutlq\lc des Siméon, guellanl
la SOI' ~ J(~ d Yvetl.e. La docLor sse l'irtcnol11p.
le mOllsieur qui avaiL al/lené
- L hOIl~1e.
Yve.lle, n·t-)], une première fois quitl.é seul le ma'
gas ll1 '1
- Non, non, j'en sllis sOr. Ils on L rlmocllr6 lonG'
LC'rnps, tl'OS lon~temp!
chez I::snlne cl sont re-purI111
cns.(\fllbIC fi pICO, le mOl1l:>ieur l.emm l YVi'lto pDr 10
mmll, Au bout de la rue, ils ont nrr0l6 une voi'
u:
�(;'iF-
'ture, y lSoot 'filonbés ; le monsieur a dit : Il Gare
Sa in t-Lazare ll, AIOI'R ('omplant la peU I.e somme
'que JI' poS'Sédais je pris, moi aussi, l1n taX!i, l~ ciel
lallc protégeai l, j'arm,ai avant eux &. la gar:e,
l' Je les entendis demand er drs !~lJptS
à cle, Linatian de SainL-Gel"ma.in, ~l fl place l uyéc, en lroiIsièll1C', il me r esJ,ail quall'e sous .. , 1\ Saint-Germain,
,j e vvus vis, madamc .. , Oh ! je vous l'll:(,nnais bien ,
iJe l'L'ga rdais Yv tLe, ma petit,(' -v'tt" uull'efoJs si
lJ1i;(~!be,
prendre !Jlu('C' duns un IJl~ , l 6quipage, Je
IJe sui\'is, ce b 1 équ'llilge, l'l! cournuL, sans S()uci
d'allirCI' l'attention, ~Ï7I1S
vos cllt'viluX ull!-licnt plus
vile, et, biellL6L, je vous perdis cie vue, Je continuai,
<A!pvu(l U1I" suiv,o.nL lu lf'il(',e eln l'ou.es. C'est H1I1:;i
que j'IITivai à la villa Yl;11'gu er ile. Le ('onciel'ge
élail ù rentrée de l'aven Ile, o,'<liqu.unl les cuivres dl!
la gdlle. Je lui domnnrl<li l'nl1l1l6no - cc qui étail
\10(' manière de lier ennvenmtioll - et en - ui le m'infOl'll lU.i qui était la j olie pc>liic Ilemoi~J
qui venait
d'niT \ el' CUl voiture. Il Il oC r,'p(/neli l : Il <,:u ne VOUg
1Tcgarde 'Pas ll, ct me fel'nH\ 1;1 grille S11 r le nez.
C'étn it donc bIen là que demCllr,'lil YvelLe. Si je
m·6!:l i .. t.rompé ('!11 ' 1Ii''''nl 1 1l'a!'" . <I.f' lu voilul't',
c.el homme aurait répondu que personne ne venait
de rentrel'. J'UJurail$ œpcndHlll biell voulu a.ppl'endrl~
le nom des protCG1.e\II'S Lie mn pUllvre petile
CI1{'l'i{'. 1ais je S<'lvni ni, 1'1 1'CtlOI\~r.
c'é Hit l'i m pOI'tant. Je ne pouvais revel1le à Paris, n'ayant que
'lllnll'(' SOIIS n poche, ,Il' l,',; l'll1l'Înyai il ' ,'heler lin
J.C1l de pajn, p üs rn
mi , li ln 1'''I'hpI',III' d'un-lit
iCI' .; , pl':nllIl'C' ou cl" "II' IIII'C'. I C' vi\'ni Ù Pl1l'is
en pfJdnnt ln Lèll' ... Jf' IIIl l" par Iro, lv('!' Ù m'€1l1plnyer ,1"\!'l ' , ",ù",
Il' l,p'" IC'ntp
~
cl ne pHS
tout il fait mOlll'ir e faim. Cellfl mE' suffisait. Chaqlle jOli!', je l'ô(l.'li,, :11110111' d,(' la vmu i\1:ll',querile.
Un soir, le concierg.e m'ay.anl aperçlJ ln'app l a.
1( Tenez,
voilà lino pièC'oI', Irl dit ccl homme q\li
pieu!' il. La patlvl'e l adnmc 0. été enlel'rée ce mutIn et J'on m'a dOIlDé de l'nrgl'nt à di!'tribll l' en son
nom au: pauvres qui vicnrl 'ni,ml nlljollJ'(I'l1uÎ. Il Cela me SCITa le cù'ur. Q\li élnit la morte? Sa mort
lai ~ tit-0IJL' (\(' n<I'IV(',111 1'. II!' nn rH'olertion"
filaI:; Î<' Ile pllis riC'!1l dClIIan '1'. ,() 1 ni rn 'll1e fnill',
l, ('oll('ierge éliflit rentré t., c('\lr fois l'nn1l'l" je viH
fl~
fe!l'lllCI' lu ~l'je
devant 11ln!. Le lrndemuin. j<.'
' l'cv ! .. pour voir !';or1.ir dn porc 11ll" \ oi 1111'(' d'amhulll llCC! Le ronCJC't'g , CC'lf ' :"'IS, nl'opo'll'{)pha 1'11clenll'n l r.L m' \"'~:.<1
rie l'fl.clcr lOlljOlll'!' pHI' 1'1, peulêll'(' m'c(' l'int"lIlinn dC' filll'C' un mouvois CClllp.
" "l'd 'lIlent, me dit cd homm" VOU" porter mnlhC'111 ;ICI, hahiLanl:; dC' c llr \ il1t1. i\Jl't~
la lJlort de
Mu Inllle, void lu pauvre petitc a.dopl{'C mal/lde. 1)
J 'ui l'II g l'tllld'pcillt! à ('ltl('lrf'I' Illon rh Igl'ill, ln voix
s'éll'llll."1ftit pour cl 'Tnonc)f'l' : le Il l'prnmi~o
il
l'ltôPIl"'i'? Il - " Non ... il III pl tilC' villfl rJ 11 maltres,
al!' r.O~HI
... Une nw.iRo!l gl'IlIHle ('()J11In u.n mOIl('hoir. Il rvlnis 1 conci l'~r,
~'ftr-evnl1
fln'il me
il'épon<lnil uu lieu de lI!>!' J'u elny r, r commença à.
CI'I('l', me üéfendJlnl d 1 ~'pr":JIL,
,If' n'ui plus 1'0Pl\ru Ih-I> <i, en l'r~t
; qu'onl": -k ri', y [nil' ?.I1'
/ SUif> "CIlU ici. .l'ai que
s ti oln"~
dûs gens... Qllelq~l'IJt
a,)unt 1 marqup 1ft vo,llll't d'/lTllhlllnnc m'inÙI!J1I1l (' lI.e mflison, ,J'ai pas. (, qllPlqll ,~ jonrs sans
hi er, jf' nH' gui, f1C'nli Il'np inoser cnl,I'pI'. Et pli~,
quiet, trop l11tllh ureux... Voila toule mon llisLoi.r'e,
tllo.cluJllc.
1 -- .le vo
cl'Ois, dit ' nin. Voua lIvez bi!l'.Il fai~
I ~e vcnir, bien fait de VOUIS con/ler à moi. VomI Otes
Ilnlllbellreux, je sl1is plu s Imnll1 Ul'ouse ncore. VOIlS
uv(':( rlù, vous dC'vez VOIl'! (;wher : moi (t'usai je
;rglliruis Cair pl'I'dr'(' 11l<l troN'. mr. flllver loin (1<>
ll, r,eux Rue j'ai con,nllil. i'\JH~
COll
qu je Cuis
PUI'ce (Tllf> j ~n
ni Pl'Ill', i' n vrllX pn lr-R prl'dl'e
~e Vlle. Srul{', je saiR quel p('ril III n.lIrA' un ltnnnMe
ln.lrlln
uno )i'unp femme t'unfl n Ie. Seille, je pour,l'UI lOi! pr~:-Icve
, - Et Yvette 1... Vou.'! ~l'!V
1, P ,1'16 d'un dangor
I
dl/ln
!
l
I
l'POt1r
-
35
La Petite .. 'Deux Sous"
'1le.
Oui, si l'on pOlit crnindl'c au'clle lie souvienne
~
et tr.ahiJSse. On a fait d'elle un instrument que l'Otll
bri:sera sans pitié s'il parait devenir daDglereux.
- ll éla.s ! dIt Vilal, gu ru'a-l-e-Lle seulement?
- Je l'espère. Cette nuit, une dètenLe s'e~
proclllil.e, suivie d'un bon et reposant sommeil. Elle
dort eIlJcore. Noms paruons à voix basse. Cependalllt,
ln porte de sa chambre ~Lanl
ouverte, le murmure
Sllrnl'ait ù la n'éveiller d'un assoupissement moins
pl'ofond. Ses forces se reno\1vellen t, son cel'veau
s'apaise, ï(m ai la conviction. Oui, je la guéri1'l1i,
la pauvre pctil.e. I\lais une foi!'- guérie, il ne fnuL
pas qu'elle rèt.c:l\Jrne chez les Martet.
L'~lOme
au mantJeau se leva. av,ec un cri.
- Grand.s dieux !
Qu'avez-vous ? demande Sonia, épouvantée
de la subito altéralion de ses trails .
- M,artel... Oh 1 non, c'est im'Possible ...
Il Ce serail trop .affreux! Non !.. . n y a pilusi.eurs
I\i(.a'r tot, sans doule. Cependant, voyons ... Est-ce que
ces personnes avaient une fille?
- Oui. Elle a épousé, hl y a environ cinq ~ns,
Le
ooron Ra olll ùe Fol.b€rt
Vi lai retomba sur sa chai-se.
11 tremblAil de la lête aux pied .
L'air hagard, il répétait comme en songe : Il Folbert. .. le hé! ron Raolll de Folh:.rt.. Il
Tout il. coup, saisissnnt le poigrÏet de la doctoresse, il prononça . sl'uncll8.nt les mots :
- Il n e f.q~,t
pas qll'Yvelle soit reprise par eux.
Qu'eUe meure plu lot 1. .. Oui, qu.'()lle meure 1
XIX
HANTISE
A la viUa MaT'gueriLe, la vie se lralnait lourdement. Le pauvre M . Martet pass&.it des joul'l1ée",
entières enfermé dans la oham.bre de sa fenllnc. JI
défendait que l'on y dérangeM rien. Il voula it cru
l es rho!'ip." demeurassent telles que la morte les
avait laissées.
(Ju ' lqll l! \lf el ,sincère que fût le chagrin de l't[1I!'gllcl'ill' de F()!Ll"i~,
<>a i.cudl'es:e pOlir SOI1 fils, SOIl
amouI' pOUl' Raoul, l' J1 c1élourn:tienl un peu. Sa
vie 11 clIc, était assombrie, ntkj!;t("" non 'Point brisée COnlll1/C l'él.ail celle de IV!. ~l LrlCf.
Le baloll sc 11IonLI'u.it plein de lact.
Il cS!3>Uyait (;Cr nclant, en jJl'éscll e ùe l'tJnrguerite,
de (léLoul'll 'l' son beau-père <le sc" longues s6unccs
clnns la chumbre de la morte. Il le demnnduit arfeelueu ement, mOl1le Lendroment, mais avec une
cerl-aine fel'n\1~
anxieuse que r-lsrguel'iLc ne [UI.
pas longtemps sans J' >fOOIl'qu r.
e tonrm nlci: d ,nc point mon père, dit-ell
un jouer. Cc..'! séjours ohez ma pauvre mruman lui
fonL du bien.
- Us lui ront du mal, riposla le buron, beaucoup
de mnl. V01l::l ne J' mlll'quez rien?
- lkllHu·quew ... quoi donc? Il est trisLo ... o.borM en son chagrin.
- Jc ne vous le fujs pas dire : il Gst absorbé,
- C'eRt bien nnturel 1 Moi qui vous ai, qui ni
mon pelit enhlllt, cr'oyez-vous que je ne l'egr Ho
pas Ù 10llt inRlnnl qUl' m'J.man nl' soi t pLu!l~.ù
1
Haou.! ut un gcst impali nL cl triat,c.
- VOIH nû me n1l1ipI'eJ1cz pas ... Du 1 esLo, achev -t-il ù demi-voix, il Vfll.tl Illieu: (lue je sois 5"ul
il. P ~voil'
C(' nouvetiu lnnllwul' ...
l\1~I'g
' lr
avait entendu.
Elle suisit le brus de S Il mnri.
- Qur voulez vou!> dire, l oout 1.., Vous ne pensez pns que mon père soiL molli lo?
- Mnlud, .... non.
- Vous avez uno préoc{;u HLl.inn (jUd vous \'oulez
roo cnchrl'.
- Oui, je ,'oudrnis \'01~
lu di simuler. tllnis jc
me demande si j'Cil ai 10 dl :, .l'assume, en lUltlunt
�~
36
La Petite
61
'Deux S ous "
~
les symplOmes swpris par moi, u ne responsabilité
Blle s'approc:haft, s'efforçant de soUTire, tendant.
bien grande.
petit P ierre aux lèvres de M. MarLet.
- Quels symptOmes... Q:uoi ?...
Mais cette chambre à d'C'lTIi obseuore effraya sans.
- Calmez-vous ... Ce ne sera r ien peulrêLre. En
doute ren~at
; il se rejela en arrière en poussant.
tou t cas, cela peut n'être qu'u n tr o1iliJ.e passager.
des crts 8.lgus.
DUes-moi , chère amie, y eut-il jamais, dans votre
- Emmène-le, emmèoo-le, dit le grwnd-père.
(amilIle, des cas de ... de folie?
Et, plus im;patiea:nment enC<lre, il demanda :
MargueriLe jeLa un cri.
- Que veux-tu ? .. Laisse--moi ici avec elle ... avec'
- Vous ne voulez 'pas dire que mon père .. .
cl'le .. : Vous n 'avez pas besoin de moi, vous.
Raoul hocha pensivement la ~Le.
Pms se reprenant, avec un remords, il atlira sa.
fille et l'embrassa.
- On a vu de grands esprits troublés par le ohagrin.
.
- Toll. pauvre vieux papa, vois-lu, ne peut pas- Oh 1 Raoul l... Mais non, je n'ai jamais ense C<lnsoler e~ ne veut pas qu'on le console.
tendu dire que personne, dans notre famille, ail été
Et Mar.guel~,
sans oser insisLer, s'éloigna toule
fou .. . D'ailleurs, je ne vois pas, non, je ne vois pas
e!l ~anmes
. OUl, son mari a raison : 1\'1. l\larteL
ce qui peut vous faire r edouter cela. Mon père
s €!Xalte, sa douleur s'exaSlPère.
n'est pOlnt un exalté.
Le soir du même jour, M. de Folberl s'étant
- Oui, oui, répondit Raoul d'un air profondérendu da~
le garage eut avec Beppo une longue
ment préoccupé; il se peut que je m'exagère le danct mystérieuse conférence. l!l en revint souriant
ger, mais il exisLe, ma abérie. 11 y a des symptôd'~n.
narquois sourire que prudemment il effaça en
mes auxquels, .pour peu que l'on se soit occupé rejoignant sa fearune e.t son beau-père dans la saille
doe médecine, il est diJficile de se tromper.
à manger où Le dtnar venait d'être servi.
M. Martet, au Tegl'et d'avoir affligé sa chère Mar- Eh bien 1 envoyons à « Mon Bonheur »
guerite, s'efforça, dtLrant le repas de se montrer
chercher la doctoresse OI'bi'hofI. Elle a la spécialité
moins absorbé. III se mêlait à la èonversation lD.des maJo.dies menlales. Nous serons fixés ,
chait mérne de s<lurire : mais Mme de Folbel"t ne
- A vous parler franohement, je l'ai fait prier
pouvait oublier la terreur ressentie en trouvant son
l'autre jour, par Beppo, de venir. Ellie a refusé de
père prostré, les yeux hagards, en le voyant requilLer sa moJade, ne fût-ce que pour quelques heupousse.r 'Son petit-fils.
res. Lorsqu e vous la reverrez, ne lui en faiLes pas
1'\'1. Marlett ne dit rien que de fort rais<lnnablc. Il
de reproches. D'abord paree qu'olle a cru n agisa.cce:pla de prol~nge.u
peu la veillée en fUlllille,
sant ainsi J empli r son deVOir, et puis parce que
au lI~u
.de se r~Li
er
Sitôt la fin du repas, ainsi qU'hl
Boppo, d'après mes ordres, a dû lui dire que je la
le frusalt depUIS la mort dc sa femme.
demandais à votre insu, ce qUI est la vérité.
MargucriLe finit par se rassurer. Le baron lui- Comme vous avez confiance en Beppo 1
même se félicita de ce que ses craintes probableTe le mérile-t-i1. pas ?
ment seraient vaines.. Il s'excusa auprès de sa
- Je ne peux le nier. Mais il me déplatL que vous
femme de l'avoir troublée par de triS/les chimères.
disiez à un domestique que vous agissez à mon
Le lendemain réservait ù Mme de Folbert une
insu.
surprise douJoureuse.
- En un cos semblable, afin de vous éviter une
Lorsqu'elle entra chez son père pour lui faire
inquiétude, personne ne peut rien y voir d'offenainsi que chaque matin, sa première visite elle
sant pour vous. Mais j'ai eu tort, puisque cela vous
trouva flévreux, inquieL et si plUe qu 'elle s'c'n époufAche, Voulez-vous acceptel' mes excuses?
vanta.
- Ah 1 lai ssons cela, répondil Mme de Folbe.rL
- Père, tu es rn.a1a<le ?
en pleurant. J'ai d'au tres soucis plus graves, à pré- Non, non, au contraire ... Je suis, oui, je sui!>
sent. Je crains pour mon père .. . Il fauL appeler un
heureux, très heureux.
médecin.
CetLe fois, vrnime~t,
les yeux du pauvre homme
- l\lonsieur MarteL s'effraiera, s'inquiétera. ALavaient une CXlpresslOn de folie,
Lendons quelques jours encore, voulez-vous? PeuL1\I. ~ate.
considérait &a. f11.Ic, d'un air hésil.{ml. ..
êlre arriverons-nous, à force d'affection, à arra- SI.J é,tlllS sÛl"... commença-L-il... Non ri 'n. Tu
cher votre pauvre père à son idée fixe. TOchez de le
me
CIXJlI'UIS
fou.
'
faire s'inléresSier davonlage il. son peLit-Ols : la
père 1 gémit la pauvre Margu erite.
- <?h 1 ~on
gentillesse de l'enfant serait le meilleur remède .. .
s'enflé\ l'ùnt
- SI, SI 1 repfll M. Mut'lel, en~lé,
- ,Ir vais touL de suite con.duire Béb6 à son
da.~lI,t:gc
Tu ne pour:nis pas ~melr
.. . nlai~
gril nd-père.
mGI, j al, Lant vécu av-cc son SOUVOl1II' depuis qu'cUe
El ln jeune femane courut au jardin où, sous la
st pal'Lie 1 A force de penser il. elle, je J'ai reLcJ
garde de sa nourrice, le petit Pierre jouait, assis
dans l'herbe.
.
près de nous 1. .. ~lIo.ns,
voici que lu as l'ni!' l~1
ffrayée .. . Je savais bIen 1... N'en parlons plu :; n'on
- Viens, mon amour; viens, mon petit ange 1
Tendrement, Marguerite endève son ms dans sea
panions plus, eL, descendons ensembLe c..ll j ~rd
in
bras,
A~ons
1 Bé!be dOlIL y C!Lrc. Pauvre chéd 1 Ili er j'ai
- J vous le rapporlerai tout 0. l'heure, nounou .
reo1u.OO d:e 1~rasc
. Ji:) f i 'en \"eux.
Et e!Ue parLiL, caressant le pelit, qui riait.
Il ayult dit : CI D~scendo
au jur<lin n, el cCQJenDans la chambre de la morte, où régnait une
danl Il ne bougea}t pus, sem.blan,t désirer que sa
demÎ..obscuriLé, où floLlait J'odeur des roses renouftIl~
s~,nt1.la
premlèr:e. Enfin, vOyllnL qu'clIe l'attenvelées chaque jour, 1\1. MarLet, la UlLe en ses mains,
d/ut, III Pl'lt, son ~l
eL s'ap.roch~
d'une table-hurCi~u
aont .Il ouvl'.lJL cL ferma rapil(]emenL le liroir
songeait à la ohèro diSlparl.1c.
Marguerite en pénétrant dons la. ohambre close pUl,~
en relira I~ ~af
qu'hl miL dons sa poche.
•
fut impl'e sionnée p.ar cetLe obscurité 00 tombeau.
SI, proJ!1pl qu aIt éLé s.on, mouvemenL, Murgu el'iLo
le ,,:,Il gl~Sc.:
d~9
le Lir<llr un feuillet de papier
- Père, es-tu là?
qu 11 ,avaLt jlllSqll alOI tenu cach6 dans sa main.
- Oui, oui.
Qu es.!'-'ce que ccJa pouvni L Mn.. ?
Elle ouvrit pluil gronde la pOI1Le, et la chambre
s'éclaira. ELle 1 vil alors dans SIO. pose 00l'a$6c. Ses
M. MarLet jela un rO"oUrd de ';'cgrel au LiroiJ'
ferm~,
poussa un Soupir
dil :
y ux qu e dopuis longt mps il nüiL f.cl'més eurent
- Allons ... aUons voir Bébé.
M113 lu lumière un rega.rd !faré.
J.'esprit pl'évent! oc Ma.I'gu J'!tc vi,t Ill. un de ces
il quilta résolument sa chambr{', ct Sil
Cette f~iB.'
r-cdout.ables sympLômes donL lUI avait parlé Raoul.
ftll 0.le sU,lvll, plus in.quiète qu jf1mai!l.
SOli cœur sc gonfla.
HlCn .dn.normal no S() produisit dans le cours oc
Grand-père, voici Bébé qui voudraU t'ea:n.bro.sa.a maLmée. Ap.rès le déjeuner Margu.crit.c in LaLla.
6C'r.
son père dans le billard, p.ièco hgréo.blemenl Irulc.he
1;
cL
�'Qè
La 'Petite
H
'Deux
SOIIS
37
U
.que M. M,artet choisis's ait volontiers pour y faire sa
.sieste. Ensuite, répondant au désir de son mari,
.- -eIl:le alla le rejoindre au salon.
- ' Causons, ma chérie, pro'posa Raoul. Mais, de
,grê.ce, écartons les sujets pénibles. Je voudrais retrouver un peu La gai,elJé de ma chère petite Mar~ot.
Oh ! je ne demande pas que vous vous conSOLie z
tout de suite de la mort de l'excellente femme que
'Vous pleurez, que nous pleurons tous 1
.Ici, Je ba.ron de Fo1bert eut lU!Il long SOUJ)Îlr.
- Comme vous êtes- bon 1... Elle vous aimait
bien, pauvre rnarman 1
Une ombre passa sur le visage de Raoul; ses
trait.s eurent une crispation légère, et ses yeux, ses admirables yeux - se d6Lournèrent. Ce ne fut
qu'un moment. Ay.ant très vite repri.s G<JIlr saJlgfroid, souria.nt, il pcmrsuLvit :
je voudrais
- Sans oublier celle. qu,i n'est p~UlS,
que, pendant quelques unstants, vous soyez à moi,
laissant de cOté Lo.U!le pil'éoocuip'ation étrangère.
- Toute préoccupation étrangère ? répéta Marguerite. Je tiendrais œpendant à VOUIS parJ€!I' de
mon père, à vous dire ce que j'rui. surpris ce matin.
Et elte r épéta les propos conius de M. Mart.et et
dit l'avoir vu cacher un pu.pier.
Haoul avait aHumé une cigarette. Il suivit d'un
œil rOveur l'enroulement de la fumée légère et
soupira.
.
- Oui, ouL .. éviâel'nm'ént, c'est étran~
... et in.(JUii.étant. J'espérais tant m'êLre trompé! Hélas!
hélas 1 Mais ne vous désolez pas. En mettant tes
choses au, pi>l'e, nouoS n'awoIlJS certainement à lutler que contre une exaltation pa.ssagère, causée
par le grand chagrin bnl.squement abattu sur va~re
pèr>6. En tout cas, dès demain, j'irai à Paris
Je venai un spécialiste. Je le mettr-ai aU cowdn t
de ce qul 00 p6.S8e e-t le pri-er.ai de ~ir
ici au
plulS l:Ot, s , a~8
~
faire conn.a1tre comme- mécLècin,
~
r~1
effralerrut M. Martel. Ce.s messieurs ont
lllabltude de ces choses et savent les p['écautions
à pl'~mdre
pour ne point blesser leurs ma:lades Et
maLntenwnt, ma chère amie, ln.issez-moi vous' r épét~l'
ma requNe. Soyez pou~'
une h<mre toute li
mOI, plongeons-nous >\111 peu dans ce délici eux
~goïsme
à deux qu'est l'amour... et faisons des proJets ... de beaux projet,g. Pui,sque votre MW,] nous
Sépal~
du mOfllne pour de longs mois, que diriez,vous d'nne croisière LoinLail1Je ?... Si nous w.ùl.ions
~a."5ser
au bord du Nil, uno partie de l'hiver?
- Et mon père '1 dit MaTgueril.€.
"' Le haron fronça légèrement lles souroiJs. Mais
u'll.l'Ul voix reslée douce, il répondit:
- Noua J'emmènerons, s'il y consent ct que sa
s'a nté ae Ipel"meLte.
- Alors, oui, je vellX bien. Ce sera oharunant 1
Nous ,laisserons il. Mme Orbi,hoff la petite proLégée
de maman.
- C'est cela.
--. A prOiPos d'elle, savez-vous ce que prétend
1I61oïse ?
. -- VoLI'e femme de chambre? Quelle imaginatIOn so.tlgrenue a-l-eH,e à ce s'uj,e t ?
Ln baronne 00 mJt à tt-ire.
, -- VOIl,S ne croyez pns si bien dire. Une imagination sarurgrenue, en effet. Héloïse, doo qu'elle Il. vu
YveLLc. u. pré-bend'u qu'elle a vos yeux, qu'erlle VOllS
l'essc.mblre 1
-- C'rsL clhalTIlOllt ! De là il conolllre que j'ai fait
TCCIJ riJi il' par ana lJelle-mère un... pooh6 d<l jeull{!Sse ...
- Oh 1 RaOl!'1 1
- ,Te plaisante.
- 1';Hpérons-lc 1
- l~n.,
vous ne vOIJJLcz pas 'De parlerr que de
lIous ?
,- ~i,
si, j,a veux bien. Je VOUlS aillme.
vous
.fI.llll(', hll VOllS le l'élpéloer c'est bien parler e DOue,
J('.I" 'l1se ?
l!'lIcUS que le baroD e1 la baroJ1Ile de Folbe.rt
J'e
~
s'efC'o rçaient d'oublier en de te.rudres p,r opos les tristesses du mOlII1efllt, une scène bizarre &c déroulait
dJaIlS> 'la swlle de bLllard .
Alors que, hanté par le souvenir de la chère
1ll1Orbe, il passait Ides nuits en tièrers id 'inrsO!lIlI1Îe,
M. M.a.rtet céidait de 'suite à la sieste dont iJ avait
l'babitude et qui lui était devenue ind,ispensable.
Etendu sur un divan de cuir, il dormait proJondément dans Ilra pièce ouscure. Les i.enêLres ,restaient ouv,erLes, mais les vdlets étaient clos .
M. Martat fut soudain arraché au s'Olmmeil par
un brusque rai de lumière loe frappant au visag~.,
Il ouvrit les y€IUiX, juste pour voi.r disparra1tre le
rayon qui -l'avait étblouL. Mai.s l.'obscu,rité d\ll billarrd
n'était poin t assez profonde P011I' que M. l\frutet
ne pût distingu.er ia Lolmle des Moses.
"'
Devant la fenêlre dont le volet un in.stant écarté
venait d'êh1e ,a.vec soin refermé il vit un homrn.e.
Il fut aJ'Ors nÜ'n effrayé, seulement sur:pris, eru
:rOOOJlJlaiss,ant celUJi qui g'introrluisait ainsl par la
fenêtre.
- C'est vous, I3eppo? Avez-vous b-esoin de _par1er il mon gendre ?... li n'est point ici. Mais quelle
singulière idée de ne pas entrer tout bonnem()nt
'Par la porte ?
Le chauffeur, d'un geste, dc.manda le siJ.ecnce,
Il P'I'otait l'oreille, J'air anxi8ILX.
- Ah ! ça, fil M, MaTLet, pourquoi ce mystère'
- Mon.sieur, <lit Be,p'po en s'a.pprochant du divan
sur La p'OinLc d€s pi{)dlS, j'ai à vous parler... de
choses très graves.
- A moi?
- Oui, monrsieur. E~
je 'VOIlliS demandClI'I1Ï la
'Promesse de ne pas,me trahir, ni Bu'p rès de monsieur le baron, n i. auprès de madam.e la baronne.
M. MarJ..et se redressa avec ennui.
- Que diable avez-vous de si secret il m€ oonfier?
- Puis-je om~Ler
sur ln. discrétion ...
'
- Oui, oui, c est promis.
Bappo se pencha vers l'v1. flloJ'tet. De très près,
de tout près, iL lui nlUJ'lTlura quelques mots.
M. fllnrLet changea de visage. SM r egard se fit
anxieux. Il bégaya :
- Je S'oi.s.. . On m'a dit ... Je n'y croyais pas.
1\'1018 -d'~jlin
... je ... je ne sais,
B ~o
dit quelques mots encore. M. MarLet, les
yeux en larmes, joignit les mains.
- Elle ... e.me y croyait, Isoup'ira-t-il. Que de fois
je l'en ru !laillée ! Erlle Il vai,t acheté en cachetLe des
lilvres tNlibant de cel:a; je les ai ll'O'\lvés ...
Beppo reprit à voix moins basse :
- Si vous le voulez ... quand mon ieur le l\amI!
ira à l'aris ...
EL sans .attendre de l'éponse, comme il é tai l venu
id s'en alla.
Il' savait t(lS domestiques re lenus à Il'o1f1ce nuimCmo IC'UI' ttyl.1Dt fourni l'agréable occupaLion de
d6guster il sa sanlé une bouteille de 'Champagne.
TI leur &:vaiL expUqu>é ce lte larges&e par nn heureux
'CIjl:t.lJp :de ç,ar'1ls, au o~é,
la veLlle au soir.
, i\1(us 111; vOllle au ~;() r Heppo, en réalité, n'a qllitté
1orangene que pOUl' pénéfJrer après tou.tes lumières
éteintes par le ohemin connu de lui, dans la ohambre de Sonia, dont une main cDmplice avait eThtr'ouvert ha fcnNre.
De là, lrave rsan.t la chambre d'Yve-tte, le cha.wffeur erst entré dans <:{)olle de Mme MarteL.
Il n'y est r esl6 qu'une scond~
ct s'est reWré par
10 même chemin.
xx
I.E MI~
SAGER
DE L'AU-DELA
Lorsque J.() len<l-emain le baron mmonça devant
5œ'1 intention de se J"cn dJ'e à Paris (Hlnd
la ,jou:-née, sûn beam-père. qni" depu:i.s la veHlc, pa.
I"aJ/;/Stut plus absorbé que Jam~lS
dans un.p. id,,1 fixe
M. MaI'Let
�~
38
La 'Petite
If
'Deux Sous "
~
r.emb~a
sortir d'un rêv~
pour s'informer si R6CJUÙ
à. ces cllOses . .Iill,le me <:li ait : (1 Si je meurs l n preprendrait l'auto.
mière, j e vous prou ve r.ai que c'est vrai ... n
- Certainement, est-oe que vous songeriez, mon
On ani \'>ni l II U go l'age.
père, à. m'accam.pa.gner?
Attendez-moi iCI, monsiell r, je remise ln voiLe baron avait un accent ·de surprise joy~use,
t,
et je reviens. Vo~s
a vez dl'viné, je pense" qu'il
comme s'U ne pouvait croire à. cette ,b onne rolw~e
.
n y Il aucune réparatwn il fUll e et gue c'étaIt un
'Mal'gueriLe se récria :
p,réLexte pour me libérer de devoir ~n<luire
mon- Pa,pa déteste l'auto.
sIeur le baron partant où hl lui aurait plu d'aJJ.er.
- Mais non, mu.i.s non, protesta vivement
Me voilà I,ibl'e de vous mener où vous 5'&.'\'IE'z.
M. Marte t, je ne la déteste pas du Lout, et oola me
C'6Lait dnna une mAison ne,lIve, en l'une des codistraira. J'inai av.ec vous, Ra:oul, si ma présence
queLLes ru s nouveUement percées qui onl si comne vous cause aucun dérangement.
plè-em~n
LI'ansformé le quarti-cr des Ternes.
- Par exemple! Je s'U.Ïs très ,heureux, vraiment,
:\u pIed d'~n
large escalier ae stuc et de marbre
[l'ès h eureux ... Tan-ùis que j'irai un rendez-vous
gns, s'ou\'l'nlt la. porte ct'un ascensc,ul' avec bonquette cie ,clams rou,ge.
'<l'affaircs qui m'ap.jlelle, B l po vous mènera où
vous voudnez.
Bl'rpo y nt n~scoir
~I.
l\larlet, monta près rlr lui
et JJllt ln I1lflCIJlne en mouvement.
-- Si je vous accompn.gnaLs? p'r oposa Margue- C'est nu der:ni~
éto~e.
rite.
1\1. illal'tet gard~
II le silence. Sa bonne m'Il rI'
- Et Bébé? fit Haoul. 11 resLeruit iCI tout seul
ordino.ire!TIcnt très colorée, avait péli,
0
'
avec les domestiques ... Je n'aime pas cela.
avec U'lle ~ecolis,
s'nrréla,
E Inn 1 :J~cnser,
- Non, non, appuya M . Martel, il ne foot pas.
SUI le pu.lier.une .seule porl p , à cet instant ~rnde
Ponr une fois, je pn.'Jlds ln rInce, l\largot.
ouvc1'lc, laso~
VOlr un hadj ;>omptueux éclairé par
(( iVlurgot n, cc petit nom donné allx joU1's hell<le h a,\~l(;'s
vel'rlèrc'l en grisaIlles. De~
mellbl's s6l'eux! Lu jeu ne fr.lllJne sc sentit rcna,Ure il. l'esà pled~
Lors, fau teuiI~
rigivêres : l)A.hu.Is, ~aT)les
poir. Non, 1\1. l\lnr!el n'étn it point dangereusenlcnt
des. le gurmss8lent. J)es potiches japonaiRl'l', "nmenacé ... on l'arracherait à la hantise. Et pr-esque
!;wrt'ée:s rie dragons allX aile ùorl'-es, conl naient des
joyeuse, teniln t sail Iils aIlS ses brn,s, el.le assistu
plnn tes verte,s. Face à la po l'le, dominant une
I8IU doépall't de &ln père et de SIAn Il:01'1.
haute /'heIIl:ll:ée, une 11orlof(oP nOI·mand.p-.
13 epl'tl • tnut à son rOlo tle rhnuf(ellr, ,\tAit impnssible. Vain,emf'nt l\J. l\1.arl et cherchli à re'TH'ontrer
Sn!, l~
l'cuil .u,n domestique d'impeccable tenue
alLendfllt les vlSlllenrs.
ses yeux pour lui nire : " Je snis là, soyez fidèle à
Monsieur pe.lIl-il nous recevoir? demnnda
vos prome.s.s-es. Il neppo ne scmblu.it se 50uV'enLr
n eppo.
'
de rien.
- Je vois m'ûn assurel'. Si ces messieul's veuPlace de l'Etoile, l'auto stoppa.
lent prenclire la peine d'entrer flU Alon? ..
- Qu'arrive-l-il ? demanda le baron,
LP sll.lon, de tous points, élait en harmonie avec
- Je ne sais ~ro , p, dit Oeppo.
l e ho,I,1 d'cnlr'éc.
II descendil, s.e livra il un examen rapidoe, mais
Pas une fausse note da.ns l'amcublement.
sufn"'anl pour Eùl cner un gr01lpe dl' badauds 8111J)cs,soi<>s d'un gris très dOl!x tendairnt les IllU".'!,
tour de la voitlll e.
- Il faut llllrr nu garage, dit br'ièvcment le àroplJJcnt les fenêtrcR, couvl'ni nt les faul euils et
retombaienl en pli- larges. autour d'nne tnblc londe,
th I11lffl'u'r, el j /lUI ni du mal à y arriver.
Le tapis aussi élait de IlUIII1l'e gl'ise.
I I. Ma.rtel., ne connaissanl rien nu mOlClUr, ne
. :- Remn.l'f/u z:VOl1!l, rnnl1sirur, qu'il n':t~
1 pas
TDuvai(' songer il r1emnnder d(',; explications qu'il
101 un
Renlr (., Ill! en dehors dll gris? r ( cou7]' ùl eert.ain llcnl pas comprisf's.
leUl's sont p'I'ohibf>es.
-l~
baron, 5'0'15 uvoi'I' l'e m~f'
rAi,sons de' sc déNon; f. .M~rlct
.n'nv.rlil pns remnrqllé .
rplus
• inl,ére!iS T de ln fl IlC'>s l,i on, n'inlJ>rrr,;eu 'P~,
II n ndlwffilt ~o()ln
celte horm<mie li ail Cf' fi son
que S'On beau-pbre. Il s'irril.a seulenwn l du conü'egotll, un peu de I?oul'Pr~,
d jaune RPrlrn't, '1'1 eltemps et dé<:lal'a qu'il alLail pl' ncll'e un taxi.
qllœ dorures alll'olCn!, mlNIX convenu. Mai s il lui
j 1. , laJ'Lct jeta un r.cgard amueux ù l1eppo ; l'plie
plnlt qUo 1 cc.drc SOit élrn,ngr>.
foi,;, le chwuffeur y répondit par 'lln impel'l'ciplible
M. ;\J.arlet B'A~it.
Ros.pf'dle&rm~nt
r. n.f'ppO
signl'.
se ten.nJt dehout Cl qll! Iqllc dl.,tnnc
'
- El vous, mon pèl"e, demanda. le bnron, que
I.\près un ins!'nnt, ,1. "u rtel ' demanda il mi'l'ui LC'S-vous ?
VOlX:
- J' ... je va.is .1.lIer jlliSCTlJ'au garage av'Ûc l'auLo,
-~
Pensez-vous qu'on nous reçoive?
L je l' viendrai l'y pr'enclrc à l'hellre que V(lIlS
- ,Je l'I'spère,
ml' donnCl' .1.. P ll61r la r6paJ'\8.tion s.enn- t..cltl
PI'\l!-é1I'c cOt-i'l mio1.lx valu demandar lJn
longur ...
<Iez.-volls ?
ren- En toul cas j' i afraire! moi, ponr d ux bonnes
.
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pensnit
il
la
viSIta
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ppo
hl'ul' s. ned~-,c)lIs
ensulla ut! gurago, si cola
['Olt pOl lUI ICI, I>ll. v<.>!I,Ic:' <lU soir C'élail 'm'
vous va, mon pène.
qu'un 1'!.I\~ez-vous
(l"'il ét il
jH'E;~d.
leu.x
..erlainellDcnl, certnin mcnt.
j 1011 ';lelll' de
(.fu1nevrellse répondit le hau l
1\T. Mal'Lot n'Cl plus l'air pai~hle
qui rafl~m.it
sn .fellr
d'IIO Inn pénNr(> l'Hl iIlAn"lmonl
c.bl
.'
".
,~
eCO\1rn
e ct 1
fille. ))"'5 qll'Û l'ulllo f; l' Iml cn 1l0'(~,:I.
'Inrl 'l
1 ! qu ' on \lel!t
~ac1n
ft
,1111
av!'/'
le
Ml'1ir
d'~tl!
con-,
se [lI iL il iTIIC"['r,lg '1' Il ppo avec VOlllblhll'.
sol~,
II no rr·fust' J[lJfII\.l!\ r]'fll'f'u/"I,I,I,il' personne
!msicur <üt le challffeur, c.<llmeZ-V01Js . .l'ai
_
d' Un hOI~.la
~nrut
souclnin cinna l'I'n adrf'~lnt
dt>jh cie. RCJ1l1lll!LeS de ce <flIC j'ni rail , ne !(J...'l {lg~
un ,P0r 1 re . onl ~n
rn'l.in (ln , longll-e et pAle
mrntl'z [ln.'). ,'1 vou. Nf'. clèfl nlt"~8I1
al~81
l'e~81
Ics plts. SOI~
rnnigr'c visngr, Lrès pl\lè
tr01 JI M, qu !icmlrce apl'As ?... El mflllSll'Ul' le ba~USI,
oux gl'n(~R
!t'nlls r(> 'Illiers, plt'in d'une ma1'011 ItUnl tot rail do devin .1' qU'JI sC passe quelque
Je!l~
noucr, éllllt s(>vôrl'mcn l rns(>' 1
1
<l'un blan<, c1r
"
, , C r8 c I('veux
chos!'.
M cl Che nClgr, ;1.~Sf'Z
Ion ~ , l'(>nrnclr;!ir'nl
'on, n I)PO, je vou~
I~
p'r~lIct.s,
je ne laisse. e
n(!VI'ClIse, f r~s
~rancl
90 ourbnit 'II n
rai rien devin 'l'. :\101 OU~F:l
Jill r!f'. i'crnpul cs et,
P, u. Sa délTlfl,rche, œp nclnllt, étnJt jeune lorsqu'il
f;nllR II' fnlf ... extr(lf)J'(linnirc dc l'nutre nuit...
s avança (~IJ-!VO:l
clp. St's visiteurs.
Qu 1 fnH" demnnda l3eppo.
qlll l'Il-Je 1 honnl'lIr
1\1. Inrlct sc !lIordit (':; Ir v 1'1>:;. Suns pnrntlre enPui s sou.clnin Il rf'connllt' l1eppo.
trmc] 1(' tn 1/1Icc;lion (ltl ChAllff Il.1', il pOlll'!wivil. :
- Ah ! ~h('r
monsjf'ur je vou s r mels ... je vo lB
- Ce sont cl'oynnces de r mIlles. J'ai sOllvent mels~
~l Je me SOuvif'ns l... Quel,lc amère (J'ésolahlflm6 ln t.enrl/ln
dc Mme Molu l l à s'intércsser
han était la vOtre, lorsque VOUl'l vlnLc9 il. moi!
V.MU
�~
La 'Petite
Il
Veux Sous "
- Oui, murmum Béppo, dont le .regard devenait
-extntiqu-e, j'étais près du suicide, alors, et, sans
vos conooils .. .
- Qu,e dites-vrJus ? s'écria le beau vieilJard avec
lliI1 aacent de r(~pT'och-e.
.
VOUIS von1ez dire : sans
eUe. .. sans les conseills de cel1e que vous ploor iez
ct qui vint v-ous consoJer, vous gUldc.r...
- Et comment serait-elle venue, répondit Beppo avec foo, si vo tre voix ne l'avait appelée 1
- Vûul1ez-vous me demander de l'élvOCfUe.r encore ? .. Avez-vous oublié qu'clle vous pria... vous
ordonn'a de laisser son esprit en repos, désormais ?
- Je n'ai rien oublié. Je suis ici - non pour
moi - mais pour vou's amener moooieu'I'.
e n laissant peseiI"
- Ah l llt 1vl. de CMncvr u~e
son regard sur IVI. !Vl,ar[,eL Très bien .
- IVlonsieur, commença le peuvre homme, je
viens d'ér.rouve r un'e grande douleuT ... ~t
si S()u~
dain.e qu elle en est peut-être plus cuisante. J'ai
perdu ma chèr,e femrne.
- PaJ'don , murmura discrètemenl nappa , il 1:1e
scmbJ,e co,nvenabLe que j me reti:rre.
M. de ChênevI'e'llse arw rouva .
- J'al tend,r ai daJ1S le hu.lŒ, dit neppo.
M. Marlet reprit :
- Ma chère Eugénie est morte s'ubilement ces
jours.-ci . Je la savais aL~eint,
ou plu,tôt menacée
{l'une malBidie de cœur; cependant rien ne pouvait
me faire craindre un dénouement aussi orusque ...
1\lonsieu.r, je dois vous . l'avouer : personne n'a
plu.s que moi o,ié énerglquemenL les phénomènes
srltrites. J'étais parraitement l 6bsolume.nt inçrédule.
Oh 1 je ne s'uis pas matérialiste ! J'eS/pérais - j'esPère encore - en u'ne survie qui n'aul1a point de
fin et réunira dan s l'au-delà ceux qui se seront
aimés ici-bas. l'l'lais je n'ndmetl.n.is pas que les
âmes parvenues à cet nu-delà puissent MVerlll'
parmi nous -et manHesle.r I.e UT présence. Ma
femme, e],]e, croyait &.u spirit.i,s me. Moi, je la plaisantais. Elle me di t un jOlH' ; (j Si je rrreur.'3 181
pr'emière, je TeviemLrai. »
1\1. Marlet s'arrêLli, v,jolemment ému.
ReoueilJ.i, l'imposant M. de Chênevre'Use éCOllt.ait
ces co,nflcl'enccs. Le veuf POUll'sllÎvit ;
- Depuis la mOl't de ma remme, je passe la pluS
grande parJj,!! de mes jOl1l'J1ées dans sa cbambre.
It me emble qu'olle y €'St enco.re.
- Blie y est sans dOlJ~e,
répondit M. de ChêneYreuse.
- Olli ... oui monsieur, elle y est... du moins à
c~rlains
momen ts. ,l'en ai cu hier mutin La pnmve.
- Voyons cett'e prcuve.
- De grand m ~ lI.1,
je pén6Lrai clons la chnmbre
de ma femme. Personne n'avnit bougé dans Jia
Villa. Les rideaux étaient baissés, il faisait lrès
nuil. Je tenais il la main une bougie que j'allai
POSClI' sur le bill'onu ... El là., je vis ... Je is une
Ieui],]c de papier il loltms (du papier dont cHc se
S'erv'o il, il y en a enCOl'e Sur le }mrra11 don.'3 un
~uvar,
une feuiJJ.c posée hien fin évidence l't Cfui,
J'en SUIS sûr, n 'y était pas la voillo au so ir 1 h!
~onsi.cU1·,
com~nl
vous dire mon 6motion Cf uiln d
le lus ~ur
10 f uil leL qurlqups ml'llfl tracés au
cl'ayon, quo je reconnus être do l'ccrlture de ma
fe.miffi e l .
- Son écritllre, viI'aime.nt?
'- 01li, monsieur, il n'y il. point 11 cm douLer. I.;es
~h'08
peul-être sonL nn peu moins formes, mais
tout li. l'f1il reconnoi sso,bl es cependant.
- Et quels ébnienL 1 8 mots Ll'acés?
- (( Je ne VOlilS oublie pas. )1
- Signés?
- Oui, monsieur... do son prénom : Engén.ie.
La signabuTe surlnul csl ubsolumi'ul pareille aux
SIgnature de ses 1 Ll.res de viva.nLc.
O,,[)por'Lé ce précienx mesag~
'l
- A ve~ous
- Cerl,/;dnem n .
- Voulez-vous me le confier?
- Ùl voici.
s'abso.rba un moment dans
de cetLe éorj,lure d'outre-tombe.
- 1'1'10nsieu'I', dit-il après une courte méditation ,
vous êtes privilégié. Alors que, très souvent, 18&
esprits s-e font prier et su'p plier 10ngLemps avant
de répondre à notre appel, votre appel même esL
deVl8illcé ... On vient au-devant de vaus 1.. . Je cro1a
que o'ous obtiendrons sans peine de très probantes
manifestations. Mais dites-moi, monsieur, qu~
q u'un a-t-il cannai s,s ance de cette surn's turel1e
missive?
- Non. Je ne l'ai montrée, je n 'en ai parlé il
personne ...
- Comment avez-vous eu la. pensée d,e vous
adrcsser à moi?
' - 8eppo, le chauffeur du ba:ron de Folbert, mon
gendre, a vu, parait-i!l, des f<lits krM extraordinaires. C'est un adepte d'U spirilisme.
- C'est un [idèle, comg,ea non sans sév.:rÏJt~
M. d.e ChênelVreutSe. Vous J'avez entendu, t'Out
l'.heure, 'rerudre boma
, g~
à la chal'ité OO<XYUI'a.bO.e
d'un eS{Jlr'it quJ lui e'st cher .. ,
- Oui. Hier, Beppo ost ve.ruu me trouver. Il m'al
parlé de ·vous. Ayant été consolé, il a 8'U l,a dlé!ldcatl6
pensée de vouloir que j,e le so iR a'lLSsi ... A.h ! s'écria
soudain M. Martet en prenant sa (kle dans ses
maLns , je ne pui CToire encore qu.e ce so-]t moi ...
moi, qui suis icL .. moi qui ohe.l'che le swrnaturel !... Ah! sans c.etLe lett.re.. . Je sui,s bien
foroé de croire II l'in'Vraisembla.bl-e. J'ai d'a.ilJe:ul'S
élé prépé\.f'é il a.œmeltl'e le miracle par mes J.ec.\Ul'eS <le IceS jour
s~i.
J,e V'ous ai <lit que ma femiTne.
s'intéressait OJU Slpiriti,gme. iVI>a,is, sachant que ceLa
po,uv,a it me cléplJélire, e1k ne m'av8iL jamais avoU'~
qu'elle lût des ollvrages, des études s'Ur 00 Sll.10et.
Après 00 mort j'a.i lrou.vé ces volum es (j'ans sa.
chn.mbro et je le.s ai lus ... Je les ai Lus en me ca('.ha.nt de ma flUe ct de mon g-e·n.dre, espriLs positifs fjlu,'a'uraiffilt e ray~
s,
'ou plu tôl r6voltés, œs
{'\hoses étl'an.ges. Monsi.c){,J', pouvez-volls, dès maintenMt, évoq,ner la ('\hère âme l'Dvolt-P ?
M. de Chênevru~('
prit un air rlllhiLaIi:i:f, héstitn
10ngtcmps puis, bTlLSquemenL, se leva.
- V.enez, mOll'sieur.
Et précédant M. Martet, il lui nt quiller 1-0 saqon\
où rien n'a,pf»lrnissait d'8Dortrav{!rg.er un b~H'Cnu
111.'111 et l'inlroduisit dans llDe très prtil.e pièc~
5tlll3
[J1l11[\('
p"l'Ic que c·elle qui leur liVlraiJ, passage et
sans feJlêlr'e flJppurcnte.
La porte nefermée, la nuit so nt complll(,e.
M. de Chênevreuse toucha un commu/.fiteur, et
un hoc 6lectl'ique s'alluma au centre du plafond.
Mo-i's M. MarteL vil que ce plaJond 6talt noir;
qtW les murs, le sol, tes boiseries, tont otaï t nQk
Noir aussi le guéridon ten.ûnt le milieu d'e la pi,èœ,
nCYÎlres les chûises Cf ID l'cnl-o.llfoien t. L'ntmol'lp!lllfe
élait Nouffante. M. do Chl'nevJ1ellso lendit à
M. M'f,lrLc.l nn _ cmvclopp.c ffi lmée.
- Voici la leltro de l'Esp,rit que VOus m'avez
confiée louL à j'!J e.ure. Je l'tU mi&c ici. L'envol p~e
est cach elée. Ne l' ouvl'C'z pas ... Posrz-Ia vous-môme
S'Ut!' ln lable ... C'est bien. Tout à l'heurc vous l'emport J'ez. D'orulJ\'es mol, S·001,S doule allront été ajou\,és à la plrm~
quP. vous ovez lue.
1\1. :\'J'fu'tC'l ne l'é-plJT1rlil .rien. II l'la it bien dans le'3
(Ji,!,;p(Hli li ons rvoUilurs pOl II' lout croirr.
L' (1.II1 uin.ncc ùu lieu, 1'<l"j11.cl rnCme ûn ~p'k
ilt8,
&iii
voix 1{tn(;lrnnLc, u.l1lol'iUtire et <luuce il la fOlis, subjuguaient le pauvre hn·mtme.
- A~:;.eycz-vmls,
dil l\L de h~n.evl's
PO!:lez
vos TTHlinlS sur le glt~ridon.
flien.
Lui-mt\mc, ns~i
l'Il rncf' de ,1111. i\ la 1'1 r t, erflmllra ,de
s s dnigl.s la taille. Ali bout (J'uln in.'3l.tlnl, dns c-r8qucm lIl .. sc firent enlendre, une sorte de fr'émisscmenl a.nirna le gllftr idnn.
- y n-L il {}Iu,c.lqu'un ? dcmonda 1\1. che Chênela
M. die
on~emplJéti
C1én~lVreus
a
VI'CU S·C .
lJn pioo ,ùu gu('ridon soulev6 retomba. Cel,n, vou].aiL dire ; u Oui! Il
•
�~O=
- Qui êtes-vous?
.
.
Le guéridon se souleva, pUIS fmppa cmq coups.
Puis vingt et un.
- E. .. U ... lradf\li sait le spirile.
Sept, G.. , Cinq en-core ... quatorze...
~1.
Martet n'aLLeIlldit pas davantage,
, - Eugénie ... c'est elle 1
.
•. LB; tlilile, vi 1:1 cm reusemen t, frappa le coup umque
Slgnl fi an t : D'Ill,
.
.
L'Esprit somblait content d'être SI Vite reconnu.
- Voulez-vous parler? demanda le médium.
'on 1 répondit i!la tanle en fraplPant deux
coups.
.
_
. - Oh ! puurq.llo! ? RémIL ~L
~Iarl.!t,
haJelanl.
- Chut 1 fit J.e spirite.
Il questioruna :
- Voulez-vous cependant vous manifester?
La 'labile acqui~.
- Alors... <:teignez vous-même.
AussitOt, l'élecwiciLé disparut.
Il ne vint pas li la pensée du bon 1...1. Martel que,
/1ans 100 plancher même, sous les pieds dn médium,
un commutateur .se pouvai.t Lrouver. D'~ileurs,
le
temps lui manqua pour faire des réflexIOns.
,. Les prodiges se précipiLaient.
1 Une main toucha la SIenne.
1 Des rosee tombèrenl effeuillées sur san visage.
Un halo lumineux se leva dans un coin, s'a,lIlongea,
puis, quil~nt
le sol, aLla s'évanouir en touchant le
PlafoIlld DOlr.
. .
.
l\1. t-.larLet aprlls aV\1ir SI vivement ~ésIr
communiquer aver 103 chère morle éprouvrut une émolion qui :Il 'étai t pas tou le de douceur.
Brusquement, le guéridon se remit à frapper. Le
e-pirite épela :
/'
Il Emporler la lettre, Ille l'ouvrir
que demain
soir )).
1 Et la.ussitÔt., l'élecbriciLé r eparu l, un peu rassurante. ~I.
Martet 6tail blô.lne.
, - La LUJTJillrc soudain roopparue, dit le médium,
' signifie gue l'r::pril ne veut plus se manif.esl{)): aujourd'hm. Rcven.cz quand vous voudrez, monSIeur,
tant quoe VO l1S voudr'{)z ... Ave7.-vous un orayon ?...
Ecrivez mon /1.dr-esse sur l'adresse mC!.me de la
'leltT'C ode l'Esprit. .. Je vrus vous la ,dicter.. Vous
flvez, il est vrai, prlls de vous quelqu. un qUl rourToit vous fa ralflPc.ler ... cependant, CCCI vaut nlleux_
Je dicte: cc f\-Ionsieur de :h~n('\
" reusc
... Vous savez
le nom de la rue .. . nO 17. )) C' st parfai t.
-.Tc &uis bi en ému, bouleversé, murmura
l\I. Marlel.
1 - Ccla sc con~i
L : une prcmibre sél~ro!
!vlais
.t'lOIlS obLiendron9 mieux. J'cspèro que 1 Espnt se
1 mon Irel'O 1)lu 9 nr[[l'lTIcnt.
.
Le sril'ite ,,'&Lait levé, rouv~It
la port~.
1. I\[ortct quiHa. In. chumbrc mystéfJeu.se, eJTJ, porlanl cG('heL('c l a 1.cL!re do l'E!'lplit.
.
hoJI. en cor:npognre du
l Borpo aLl.cII<luit (\l1~s.e
correct larlJin qui ltV~
mlrodUit los VJSIteurs.
1 De nlQ\lV('!lIu dun..'i l'asocnoou,r, BQppo 'c1omnnd·a.
l'cS'pectueu emen L :
.
- gLes-vou C:()'l1Ln~,
monSlCur?
- Je suis ... shr.péfart 1
.
1 _ J(' VOllS ai confié le secret c1e ma V1C ... , Vous
saVC7. m inl{,"l1ant qu'une grande <1ouJ~r
m a accablé et comm nt J'll!i été. consolé .... SI., pou!' une
raison ou pour' une autre, il vous plmsall de la anter il (/uolqullln v{)Lrc visite à M. de Ch~Dcvreus
...
, - l ll'y fi pna de damg~r.
, .
- Enfin, si vous changl z d aVIs! n me m61ez en
rien il votre l'oeil. V01lS pouvez ayOlr enlrutdu paJ110r
de lui par d'mll.reR quo por n~ol.
- Ne craignez rien, répondJt gnave.mcnt le pauvre hommc.
.
- El si l'<m vous inLcrrogc 9Ur l' mplOl de 'V{)Lre
Icmps ?
.
- .Je dirai que ... j'ai fait des co 1t.Ni rs.
C'rl\l lOIn. Au Bon Marché, vous pouvez aVOIr
La 'Petite .. 'Deux .sous"
~
fait une commande... Al1ez dhrect ement au g&.o..
l'age, monsieur. Jo 'Prends une voiLune et je vai,s
là-mis ... Avez-vous confiance en moi? Je p.rends
I,'!'nViOyer. Urue
n 'importe quoi, que je VO\lJS f ~ rai
peau d'El bique, 'PM exemp.1e. Vous cli.rez que vous
6vez repris goût à l'auLo .. . et atlOl'8 ...
- Je veux bien. Merci, Bappa. Moi, je n'en puis
plus 1
- Cela se voit, monsieur, vous panais:::ez bien
fa.tigué. Rejoignez M. le baron au gar./:l.ge et
l'acontez.!J.ui que vous venez du Bon Marohé... Pn:rfez de . la foorruil'e. Si je suis un peu en retard,
M. le baron m'excuscra. Surtout diLes bien que
vcyus m'avez quiLté sitôt en arrivant.
- Oui, oui ... Metei, mon ami! Vous êtes vraimont Lrès dévou06 et je ne l'oublie.rai pas ...
XXI
LE B.\RON DE FOLBERT A RAISON
De son cOLé, le baron n'avait pas perdu s.a jomnée. TillJ1dis que SDn beau. . père et Bappo se dirige&iont voers Je quartier renoumlié des Ternes,
M. de Fol·beri se faisait conc1uire à N euJlly. Là, au
centre d'un po..rc assez vaste enclos de hau:te.s muraJLl-es, se tl'Ou\'e la maiJson de sanié du docbeur
Probe.
Le docLcur Probe était I1n homme d'urne cinquantaine d ' an~es,
à l'œil vif, à la paroie brève. Ses
lèv.res minces, soigne1J.semen t rl1Sées en Lre des favori<s grisonoonts, ilgn'Ol'aien.t le sourire. Cc.penclant
le visage du médecin se fit affable, autant qu'j.J éLait
en lui, pour accueillir le baron.
Dè-s l'abord, ils éohangèrent des phrases qui paraissaient étr<l ln slliLc de conversalions pr6céden Les. Le docteur demanda. :
- Doi,:;-je con.clure de votre vcnue ici que tout
est bi rn .,
- Tout sera bien, je l'espère.
- J'en suis lrèi:i heu,reux. I\r~s
yous n'oubli{'z pas
quels sont nos prinCipes, prmclpes dont rien no
me fera démordre, parce que ma tranquillité en dépend, aulant que cellle des personnes qu.i veulent
bien se confier à. moi. Jo n'accepte comme pensionnrul-es que des m.o.la.des dûment munis <I<l cr-r'tiflcals, t je veux, Je veUX qu'a ce oertificat soit signé d'un nom hont'l1b~me
connu . .Tc sais, jr . i8
que l!'es exilgen.ces à ce ~ujet
ont éloigné de moi
C<ll'tamos personnes ... Mru.s los Qutrcs les. inLellige;nLcs" les raisonnables, m'en ont su éé; cc.ln n'a
fUlt qu augmenter 'lour confl.unc cn moi. Notez que
je .ne dcmo.ndo p.as que l'on con sul le un prince de la
EClence : ce serail exogér6 - et maladroit - car les
sommités d6tourne.raienL les fami
.~los
d'envoyer les
m8Jlades ici. 11 Y Il des cc maison de santé Il classiques (si je p,:!is dire) qui j~ui
sent
de lu protCl~n
d~
ces. messreurs. Mo. maIson, li moi, est de trop
mlDce .lmporta~ce
ct leur parait à dédaigner. Ccp ndant, JO. ne cratns pus de 1 aIfiMl or\ lie eSll parfaiJ,cmen~
blen ten~.
r..:tes pc.nsionnnires y ont la vic
aUSSJ .do~ce
cru I~ rn e&t possibd <le 1<1 leur procurer.
Je &U1S 1cnneml des mesures de violence ou d
moins, je n'y l'OOOUI'.s qu'à bon oscir,Oit.
'
,
- Eh 1 mon oher 9Gcleur, VOliS v us méprene1..
Avez-o~s
donc. besorn de me convaincre? Suis-je
l'6.fl'llctalro à ,la Juste admiration crue mérile un 6t.o.b!isen~
aussi... ulile que le vôlre ? Nons somm s
d .a:ocord,' J~ p~nse,
d~pul
s 10ngLGm,ps ? Si je viens
a~Jou:d
hUI, c ost UflIq'uemen.t pour vous prier de
m 1l1dlque,r lm m6decin réunissanl Ioules les quaIlLés requIses.
- Avez-vous SlUivi mes conseils?
- D~
point en poi'lll.
- Bl~n:
AJlors je vais vous donner une adresse.
JJJ écrJvlt quelques mols snr une carle ct la Lendit
il Raoul.
- VDici. Le docLcur méry st le plus honn te
�z'
~
La 'Petite ,. 'Deux Sous"
=====================
homrne du monde, universeJ.lement estimé comme
tel. On le sait incapable d'une compromission.
- -Et... alors?
- AIlors', c'est ce qu'il nous faut. Toujours mes
principes de sagesse ! Vous irez chez ce brave
Oméry. Vous lui direz que vous V{)US adressez à lui
parce que vous avez enhendu vanter ses J.urn.ières.
li en sera d'auLant p'1u-.: flatté que, si l'on es>t una·nirne à estimer l'!l{)mme, on l'est presque autant à
déclarer ses capacités ... moindres que ses vertus.
Il s'étonnera peut-être que vous n'ayez pas, tout
d',abc,xi, consulté votre médecin habituel ... V{)US lui
eXlpJiquerez crue votre pauvre beau-père, ne se
croyant point malade, aurait s,ans doute refusé de
le r.ooevoi,r. Vous insisterez sur la nécessi,té <le péné~I'er
près du ... suÏ'et sans le mettr.e en défianoe.
Et - voici où est la vraie trouvaille - vous lui
appreoorez q1ue le spiritisme est le da.<Ia de v{)tre
beau-père et lui sug~érez
de se présenter au besoin comme un médIUm. illuSltre. Là-d,essus, le bon
Oméry bondira, car hl tient, sans examen, pour des
charlatans ceux qui praiiquem le spiJritisune et pour
des fous - vous entelIldez - des fous, ceux qui y
,croient. J.e ne suis pas très certain qu'il se trompe;
mais peu de ses confrères se montrent aussi absolus. C'est pourquoi j'&i choisi celui-là entre wus.
- Merveille.ux ! dit le baron.
Et il pl'it congé hà.livement, afin de se rendre chez
Oméry.
Le docteur, àg>é, réffficLaire aux choses nouveNes, rétif aux idées modernes, n'~vait
plt1JS qu'une
clicnLèle resLreinLe. Il se conso'lait de ses loisirs
forcés ,en se livrant à des travaux absol'bant.s.
li fut oependant oruUlI'ffié d'en être disLI"aÎlt pUll' la
vi'site du bar{)n, plus charmé encore d'apprendre
.qu'il n'était point !,out à fait o.ublié e~ qu'il y avait,
de par le monde, des gens qUl vantmcnt il. d'au[.res
1( ses lumières )1.
. Il promit de se rendre le lende'!l1ain à l~ vifla .Marguerite et o.CC0pLa ap.rès avo,ll' bond't amSl que
le prévoyait son conlrère, de JOUier le rôl e d'un. spirile - c'est-à-<dire d'un eharlatan - afin d'amener
le ma'l ade à trahir ses pensé~.
,
"
Le baron eut l'iffilPressi{)n que d avance étall fUlt~
la convi!ction du docteur Oméry : un homme qui
s'oceu,pe de s:ririlisane est certaineme.nL bon il. enfaruner.
M. de Folbert fit il. sa femme un récit mitigé de
ses démarches.
Il passa S{)us slilence sa visite au doeteur Probe,
mais parla longuement de ce rulgIle dOcWur Oméry,
dont il avait si souvent entendu ci.ter le nom. Il
parut étonné <{ue Marguerite ignorAt son existence.
- Pour ne point effrayer votre père, ma chèTe
amie, le doc~ur
Oméry, cachan,L sa qualité de médecin, domandcsra M. Marlel NO'Ils pousserons celui-ci il. le recevoir et le laissero ns soul avec le docteur qui d{)il se donner comme SlPiriLe .. .
- QueUe id6e 1
,., - Ah 1 c'est que ... vous ilSnorez ... je ne vous ai
Pas dit, craignant de vous Imepressionner, que j'ai
Surpris M. Martet 'Plongé dans la lecLurc d'ouV'ro,ges traitant de SIPil'lLisme. C'est donc une ontrée
en matières.
1 - Mais comment e:xrpILquere-L..jn qu'il c{)nnaH
'~l{isLCtce
de mon père ?
If - Affaire il lui! Ne craignez rien, il dira ce qu'il
i\udra dire.
Le lendemain, M. Ma.rtet pro){)ngeait sa sieste SUr
~o dÎlYan du billard lorsque son gendre vin t l'éveilar. Le .baron s'en excusa fort.
s' - Mais, dit-H, quolqiU'un vient d'arriver qui inIsle pour vous voir, mon père.
- QuC'lqu'un ... un hommo, une femme?
- Un monsieul' Ô-gé.
.
-:- Un v~ ei. 1 ami, sans dQlulJC, qui croiL d,o son deVOI,r ete venir me disLrn.ire de mon oha.gri:n ...
11 en 6prouvait plu tôt de l'impatience.
- VallS avez dit que j'y éJLn.is ? .. Il no fallait pas.
- Je n'ai point osé me permettre... Je ne conn.ais, du reste, aucunement ce m{)nsioor. Il m'a prié
de vous dire qu'il vient de la part d'un M. de
Chêne ... Chênevreu&e ... un nom de oe genre.
M. Martet se redressa vivement.
- Amenez.,Je ici. .. amenez,]e ... Ah ! mon Dié'll !. ..
- Je vais le chercher.
Et i;} alla rejoindre le docteur, qui ruttendait le résultat de l'ambassade.
- ;Eh bien 1 oonsent-on à me recev<Xir ?
- Ç'a été difficiùe... Et peut-être n'aurais-je rien
obtenu, si je n'avais eu la pens.ée de di.re que vous
veniez de la pal't de M. de Chénevreuse.
- Qui est ce personnage?
. - Je n'en sais tro;p rien. Hier, en revenant de
Paris, mon beau-père a prorwncé ce nom plusieurs
fois, de but en blanc, sans que rien l'y ai.t amené,
sans le faire suivre d'aucune expJication, et je n'ai
pas osé l'interroger.
- Qu'est defVOOU votre beau-père hi.er, pendant
les deux ou tr{)is heures qu'il a passées à Paris?
- Il est aillIé faire des courses. .. il a été au Bon
Marché.
- -Vous en êtes bien s>o.r ?," Ce n'es.t point une
fable inventée par lui?
-. Non. Puisque l'objet qu'il a a.cheLé, une peoo
de bique pour l'auto, a été apporté ce maLin.
- Alors ... Mais il a eu le temps de faire plusieurs
ahoses, peut-être.
- J'en doute, car H est arrivé au gal'age où n{)us
nous êtions> donné rendez-vous bien avant le momen.t fixé. Un employé me l'a dit quand, à mon
tour, je suis arrivé. Il n'eStt resté seul .à Paris que
durant une heure et demie. Nous étions à l'ELoile
quand je l'ai q;uitLé. Le garage est vois.in. V{)US
voyez ... q'e t€lJIlJ)s d'aller rue du Bac, de faire un
achaL et de revenir.
- Oui, évidemment. Donc, je me présente de la
pant d'un M. de Ohênevreuse dont j'ignore tout :
c'est commode !
•
- Plaidez le faux llour savoir le vrai.
- tMétJ10de de polllCier cela, mon bon m{)nsieur.
Enfin, je verrai bien!
Le baron condui5i.t le médecin dans la biblio!l1èqru.e et, suivant ee qui avaH été convenu, l'y laissa
seuil' avee son beau-père.
La pensée que cet inconnu veno.it de la part du
médium impressionna.it assez M. Mantet pour que
s{)n visage trahisse son ém{)tion. Son regard, ordinairetnen t paisible, éLait inquiet, fiévreux.
M. Oméry le nota comme un fû.ahoox syrn.pt6me.
LI aborda cependant d'un ton jovirnl celui qu'on lui
indiquait comme un malade.
- Monsieur, je n'ai pas l'honneur d'être connlU
de vous; mais je viens de la Tlart d'une perS{)nne ...
- Je sais, je sais, répûndlt pré.cipi,tamment M.
MarLel. Parlez plus bas... PO'UI'<J11Oi l'avez-vous
nommé? Il n,e fallait pas dire ce nom-là ici.
- Mais vou8kmême, monsieur, ne l'avez-vous
pas prononeé ... hier, delVant M. de Folbert ?
- Moi ?... Jamais! Je m'en garderais bien!
- Hum! hum! fit le médecin.
- Vous ne mo croyez pas ? .. IL est v.rai que je
n'ai point di,t à M. de CMnevreuse que je ~iendra.lB
cachée ma visiLechez lui ...
- Racontez-la-moi, votre visite.
- Vous ... VQUS voulez ?...
- M. de Chêne'Vl'euse, mon ami , Lient à s'assurel'
que vous n'avez rien oubhé. C'os.t Lrès importanil....
Le docteur Orné]"y parlait au hasard, se di.sant :
ri Si mon inter'Iocuteur u touLe sa fllÎ'S{)n, il va me
déclarer q1ue mes paroles n'ont aueun sens et me
meLlre il la p{)r~
comme un av.entu rier. Ce sera
tant mieux pour lui. S'il est fou, il imogine.ra compr<Jndre quelque chose à mes propos incohéllCnts, al
ce sera Lam pi.s 1 " M. Martet pllJ'lllt oompl'endre.
- Eh 1 qUOI, mon sie Ul', dit-~,
VO'llS ocoupez-voul!
aussi de spiriLiso.ne ?
- Ceriainern<!nt, répondit à. regret ]e médecin.
�42 ==================================
Après s'être assuré que la porte bien fermée les
mettait à l'abri des indiscreLs, M. Martet revint
s'asseoir près de son étrange visiteur.
- Que je vous raconl..e 7... Je vais le faire. Mais
d'abor<l, si M . de Chênevreuse vous a laissé enl..endre que je ne suis pas venu seuJ ohez lui, oubliez-le.
Cela, il faull'oLililie r. J'ai promis de n 'en rien dire
et je ne veux pas trahir la confiance qu'on m'a témoignée. M. Ge 01ênevreuse n'a rien à oraindre :
je n'ai perdu la mémoire <l'aucun détail. Je pourrais
même vous décrire la maison, l'appartement. ..
- Décrivez.
Et le pauvre M. Martet parla d'abondance, dépeignit le luxe du hall, du salon gris, du bureau qu'il
fallait traverser pour pén&lrer dans la oh ambre
noire.
- Et dans cette cha.mbre noire, que files-vous?
- Vous le savez aussi bien que moi, répond it
M. Martet non sans quelque im.patience. puisque
vous le cannai sez, il a dû vous rendre témoin de
prodiges semJtlables. Vous~mée
en avez peut-être
obtenus?
- Il importe que vous les répétiez ... si vous voulez qu 'ils se renou vellent.
Et ce fut le r éci l de la séance, amplifié par cet
8S/prit crédule qui s'était si bien cru n communication avec l'au-ddà.
A mesure qu 'il évoquait les ohoses, le pauvre
11. Marlct d venait plus nerveux. Ses veux avaient
un regard fixe eL, sans y prendre gaj'de, duns la
tension de son esprit son corps aussi se Lendait.. la
nucrue paraissait se raidir - sympLOme pathologique, noté aussitOt par le médeclD.
Afin de pousser à bau t le malade, le docteur Ieigni.t tout à coup de douler.
- Monsieur, dit-il d'un ton sarcastique, je vous
ai fait raconter ces choses précisément pal'ce que
je n'y crois pas. on, je n'y crois pas 1 Je n'y cro.irais que si ï avais une preuve ... Je n'en ai jamais
obtenu de probantes.
- Vou s n'y cl'Oyez pas 1... Alors, j'ai r~vé
?
- Je ne dis pas.
- Et la leUre ... la let.lre que j'ai trouvée, moL ..
moi'1lTJ~e
t sur le bureau de ma ferrune morte, et
écrite de sa main?
- Où est calte leLlre ?
- J'e vous rai dit. 1. d Ch nwreuiSIe l'a en[,.rmée dans une enveloppe et p~ée
f'ur lu: table. L'Esprit y a ajouté des l11ots ... df phr<lS , pel-~'.
- Vous ne l'avez pas nuv rll)?
- Pas neore. Je Il dois l'Ollvril' qu'C ce soir.
- Eh 1 mon
~i("lIT
nous y sommes ù. préscnt,
faprè!rmidi comple pour le soir. Vous avez un bon
moyen de me cunvaincrp.
- Si vou êtes incr6<lule, ponrquoi vous envoie·
l-on vers moi?
- Pour q1le Valls me convertissiez.
- Cette I('M re, je l'ni sur moi. .. je ne l'ni pns
quitLée. Ln. voici.
Et. M. MarLel, d'une main Iremblan(~,
brisa l'cnvel ppe. Il en sOl'lit un r lIill,. ete pnpicl' qu'il rcconnut aussill'lt : (,'élnil II' pn.p iel' gl'is-hlcll qu'employait Mme Mn riel rt donl IIne provisiun reslait
encore sur le bUl'eau de sn cliambre.
Lentement, il la ù6plin.
Et ses yeux s'agrandirent, œvinrent hagards, sa
bouche s'en Lrou vril.
],;11 1 bien? cl manflll le médecin.
M. M ri t ne répondiL rien.
n tpnnÏltolljoul's le pupier, et !ln main de plus en
plus Lrembillil. D'un g' Le o.u Lori LaiJ'e, le médecin
enleva le ( u il let.
- ,le m'en dout.l.lis ... il n 'y a. rien, f'j.c.n ..•. pns un
mol., po.!! IIne Ir'oce.
M. Marl('1 AI' rnnima.
- On m'a trompé! ('nin-t-il. L'E:prit 0. pu ne ri n
njollwr. Ce qui d{oJh élaiL (ocrit y SéraiL encore· .. On
Il chang{lle ...
II s'un·ato.. Il wlai~
dire: Il On 0. hangé le par
La 'Petite
Il
Veux J'ous ,.
~
Du doigt, le médecin lui montrait le L.imde l'angle: (( Villa Marguerite n.
- Comment exp'iquerLez-vous que M. de Chênevreuse ait eu en sa possession du papier à J'entête de votre villa?
M. Martel serra son fronL dans ses mains .
- Je ne sais pas ... Je ne sais plus ...
Alors, M. Oméry chang{~
de manière.
- Voyo.ns, mon ami., voyons, du cai.me 1••• Raï,.
sormons. Vous ave?J la fièvre, il faut vous soigner...
Vous .avez des haJl~cinto
s ... Vous n'êtes point
allé hIer chez monSIeur de Chênevreuse. Je VOILS
ai laissé dj,re ; maLs je sais qoo vous vous êtes
rend'll lout simplement dans un mal1asin .
- Ce n'est paA vrai l
'"
- 1'I1uis si 1 c'e t vrai. Vous y avez même fait
l'emplette d'une fourrure qu'on vous a apportée oc
malin.
- Ah 1 g·émit le malheurcUJ(, la fourrure 1
Et, 1 li l à coup fmLeux , il cria:
- Que venez-vous faire ici ? De quel droit m'interogl-v~s
? Qu'est-ce CJ1.le cct interrogatoire ?
Le médeclD ne paru l pOilll surpl'is de cette fureur : cela était aussi un symlltûme ...
~'envlop
de la fI lettre de l'Bsprit » avait
glissé par tl'rre, un nom s'y lisaIt. : « 1. doe Chênevreuse. » VIvement, ONec une sonpll',sse su.rprenante chez un homme de son âge, M. Oméry la. ramassa., sans quo M. l\Jarlet l'eùt r~mal'qué
.
Celui·ci s'Nai t levé et, de son bras tendu montrunt la purte :
'
de .moi... je ne le support.era.i
- On se moqu~
pas. Sarl.. 1., ~1leUr,
Je vous prie.
Le bu.ron n é l'ull pas loin. A la voix courroucée
de son bc.au-pèl'e, il accour ut.
J?'un coup d'œil, le do~Lcur
lui fit comprendre
qu .un P.1us long examen pour l'instant éLaiL inutüe.
PUIS ItllssUI?l le gendre calmer !l'il le pOlliVo.it son
beau-père, Il quillu la biblioU1èqne.
Il ren co ntr'u r. .la'~ueitp.
qui I~ guplfu it.
- Eh bien 1 doc:1 Il r, mon pauvre pèpo?
- Hélu~
! .l11ndUlI!p., il vou.s fau.l. du courage.
- ;Y/on DIeU 1 Cc -t donc vraI. .. Il est m~n.cé
do fo.lIe ?
- Plus quc m-enacé, il esL alteint.
El ~ ra('~nl
cc qui ne res:;.cmbla.it que Lrop il
ùes dlva.go.LlOns.
'~jlCndH,
l~adm(,
nou~
cn aurons le cœur
neL SI, b.ICn ,:,l'üln:f'nt, monsielJr votre père> n'a
pas lout m~LglUé,
Je 110 lais.·j'rru pas que d'êliro
e!l(;o~'.c
111(!UoICl sur'... n IJI\nI1lIit6: l\lnis cliOn nOIlS
n aUJHJI1S pus alfau'e il. 1 hallucmation, sauf pOUJ'
l~
!dl~
C<'pcndan t. ,A ce sUJet, ln preuve est fai Le.
J .al, par b nheur, 1 admssc d() ce prétendu monSLelU' (!,e Cllêncv/'pu:,c. Voy,ez... &st-ce J'&::rilw'e
de Monsi w· tll/lI'Let?
- Oui, ccci (lsl ér'riL le la main de mon père
- Cetle. adr . ··c P;-lIl <lone ~tre
purempnl flcLive
00 cela, Je. vaIs 1." u, surer en m'y .ren<lanL mo~
mOITI.. V 1II.l1ez dl.I·C ~ . t\lon~i.('ur
de Fulbert
e
derna:n ;n~lI
- je n,~1
plus le t.cmps ce soirqu-,
Je VOI~
l,t-I).t:3 ... PUI!:lqu il fi un auto qu'] , f
cond li wc dl' son cOté. •o ilS ferons ' en~r
qut'lc. 1 cndcz-vous il. dix heUI<l; "'_ nL el
nméru 17...
.
wuvan e nu~ brag
piero
»
bl
f.B.Se
Le I<mdemnin M. de Foll 'l't am('n', ]Jar nev 0
fuL,. comme on le pens, 'xacL HU rendez-vous p
Lalllodubul'onetlc(!{)IUl)"d
éd '
.
gèl'cnt I~ lon~
ùu tl'{JL!oil'. ·
e U III ecm soc l'O.ll'- Qu a fUll notre malud après mon départ?
d~al!1c
doc teur il. Hnoul.
~ J ru eu gl'~ndpi
à.le calmer. Mais il u'cxpliOit [?6.s ponrqllol Il éllut !li furieux ('onLre v ua
1 a.valt as.~ ~
sem lfb.n.S-Il'ofd pOUlI' t.enir il. m oa~
~}lpr
~n.
1)1 ~lnduc
VISIte il. CoC pI·p.>lpndu médium.
En~,
11 s 1 upllisé, mais a g(wdé - coin se
voynlt - une préocClipation : il llf' compr nd pW3
qUI vous OLes et cp Illlc VOIll.'! avoCz voulu.
- PUtLvre mOll.SICUl' 1 Si pur ha..sa.rd il est tomb6
W
�\~
La 'Petite u1)eux Sou.s
u
entre lies mains d'un charlatan, nous le ferons
pincer, ce Monsi~ur
(le Cl1ênevreuse, je vous le
promeLs.
•
- Bah ! Je suis stlr qu'i:] n'exLste pas.
- P eut-êLre. V6Jci la maison indiquée. Laissezmoi i n.~el'rog
]e concierge.
Celui-ci j ustement sortait de sa loge.
- Mon ami, dit le docteur Oméry, je VOThS 00U!rais gré de me renseigner. Est-ce ici. qu'habite
Mons ieur de Chêne·vre'U·se ?
- ConnBlÎs pas. Il U'c.st pas chez nous, probablement pas dans cette rue, qui n'est guère lo.ngue
et où l'on se ,conn ait entre concierges ... J'ai pas eOltendu c·e nom-là.
- Qui donc habite id wu dernier étage?
- Au dernier étage ?.. Vous tombez bien: il
est à louer.
Le baron et le docteu.r échangèrent un regard.
- Cela suffit, je pense, dit le bal'on.
Mais le m6decin voulut en avoir 1e cœur net. Il
glissa, di.scrètement une pièce dans la main d'Il"
concierge et demanda :
- Un de vos locataires n'a-t-i,1 pas un saJ!on entièrorruront g.r.Ls .. . meub l·es, tentures, ridea,u x 7.: .
- EnlièrernenL gris... dit l'homme, en fals~.nt
disparaître la pièce dans la poche de son l.abller.
At~no(ijez
voir un peu . Je lL8s oonnaÎ!s tous, pour y
être entré. une fois ou l'n.u tre. Au pr.emier y en a un
rouge, l'aUll..re bLanc; au gecond, un blanc aussi et
un jaUotùe ; au troisi.ème., c'est du b,leu; au qU8r
tri èml", du cho.u.c\ron ; au cinquième.. .. BenI 1<8 cinqu ième ... il est il. louer. fi n'y u qu'un apparter
menL par étage. C'est œès vaste : 8iSceooeur, eau,
élec1JriciLé téléphone ...
- l\"ler-c'ï, mon ami, merci bien.
Le doGc [,eu r Oméry n'eut pas l'idée de s'informer
nu numéro 19, et si le baron y song,ea., il avait s'es
raisoTollS pour ne le point faire .
ChêneLà, d'aiUeurs, CQlffime au 17, le .nom d~
vreuse était in.coRn'U, mais on autrut pu dire qu'au
dern.i.er étage il y avant, en effet, un sBllon gris ..
- Mom.sü>\1r dit il. Raoul le docteur Oméry, Je ne
sai,s t,l'Op co.rrlmen.t a.pproc.hcr de noU!v.ea.u n otre
. malade saM l' exaspérer. Je crois qu'il serait bon
, de le meUre en sUI'veillOJ1cc.
- p,nnsez-vous qu'il soit prudent de I.e ~arde
,avec rW'lS 7
-- Oh ! prudent. .. JI n'cst jamais prudent de gl;lfder nn démen.t ch<..'Z soi, mêane s 'iJ ne po.r,a tL a Ltemt
([lle cl/! folie dou ce. Vons avez vu bier il. quel p.oint
Il était fllrkux ? ,l'admets qu'il eut quelque rOJson
de l'~(),
pli~'re
je lc contrariais da,n.s ses croyo..n~s.
I\lais on peul très bien, sans le vouloir, contral'J.et· un fOll. Un mot ffialaidroit e t l{) voi,l à on colère.
IOr "DUS savez que ta colère - en somme, nne
,-8?'rtc. de foJie passu.gèrc - d-evi.en.t fort dange re use
Sl etUe se grefto sur une démenœ latente. Pour Mme
de [, olbert, f·i.n on pour VOl1S, je crois que mi,eux vaudraiL isoLe,!" M. M~rtR,
all moi.ns momenLnnémen,t.
, - Je le crois llul'3si rnrnlll{)U'reuseme-nt.
- , i je puis vous être ut,ile en VO"ThS inct.iqwarùt
Iln.e maison d\") san lé ...
- Merc.i, doclc.u r .. . H6111S 1 que die tJristess'es !
1 issez point abaLLre . Bien so i·gn é,
- Ne vou~
Dal'fait.emooL surveiIJ6, mo.nlSie ur votre beau-père
gUt'-rj,ra sans doute. Vous m'a.vez dit que personne,
<1an~
sQ rllmme, n' a (olt; alLeint de oe l.ru-nilile mal.
- PIns que je sache.
-:- Eh 1 bien, lorsque la Co],ie n'est pas hérédi~a ~ re,
elle Re guérit. C'est alors un accident forllJt provoqu6 par u'ne cause extérieure. Dans le
f~
qui ~ou
s occupe il s'sgiL .d'un vio lent c h~riI1,
~
~ lbL:
ayons bon espOlr. Je retoul'neral ce
r VliJ.la Marg,oorLt.e. S i jo ne puis voiJ' M. Mar~et,
V0111S me liiendrrez a'll ccmrant d(' ce ~
Slu,ra. pu
oeL passer d'ici là, et je vous délivreral le oortiflua nécessn.ire à 1'8Iflmi s.qion de volq'c malade en
ne' maiso,n de s,Ln t 6 q t1-eJ,le qu 'elle soit ...
Mme d e F olbe'rt guettait avec ioffi.IPalience le re-
tou.r de son mari. Elle courut à. lui 'à sa descente
de l,'au-t.o. La figuxe bouleversoée de la j-eu!l1e f.enmll8
effraya le ooron.
- Grands dieux, ma chère, qu'y a-t.H, uIj
malheur 7
- Un maTheur ... je Ille sa.:Ls pas ... mais quelqM
chose de bien étran.ge 1 HéloTse est lJà.... Elle est
venue nous dire que Mme OrbihoCf et Yvette on t
di.spos,ru 1
Le baron ét{)uffa up. juron peu en harmonie avec
son élégante co;r.rectlOn.
Bep.po, l,ui, ne broncha pas. Mais on aurait pu
voir ses mains tre:rnMer e t ses lèvres blêmir.
Le baron s'81ança.
.- Où es.t Héloïse 'l
--:- Dans ma cbambre. Je l'y retiens depuis son
arrIvée, pour êtl'e s'Cre qu'e pap.& ne La rencontrera
pas. Ellle est larmes ; il la queS>tioDiIlJ8rait, et œ
serail encore pOUT liuli un sujet de boulevenseaneDt.
- Je vais l interroger. .
Héloïse, en effet, était en larmes. Aussj le baronl
ne put-LI d'abord obtenir d'elle que des exclama.tions désolées . Enfin eLle Mcon.t a :
que, c1eipuis quel- 1) faut vous <lire,. mo~sieur,
ques lOUPS Yvette al].aat mIeux. J e m'en apercevais
bIen, el même j'aurais jUlfé que La petite ,avait reLro~vé
sa t6te. à la faço n don L ·elIbe regO.!!'d:a.it.
MalIS Mme 8<>ma n'en voulait pas conven.i:r. DePUiS quelques nuits, elle refusait de m e laisseT veiller... J e r..e sais pas comment eUI:' pouvajt résister.
il l1e jamais donrru.r. Hier soÎ!r, Mime SOIJJi.a. me
dit : (e De bon matin, Héloïse, dès que VDUS serez
le'Vée, V(JCUS ire't chez le pharmacien faire faire c~Le
ordonnance. Ce ser a pel1L-êtJ"e long à préparer"
maLS vous l'attendrC'l n. MDi, à peine Levée, je
pars. La femm e qui vient pour la cuisine n'arrive
qu'à onze lùeures chaque matin. Voilà qu.e quand
je re viens de chez Le pharmacien qui m'avait fait
alLendre... fa Il ai t voir 1 - cc J.am a is, qu'il dis aiL,
il n'avait manigancé quelque chose d'aussi compliqué. n - V{) ilà donc que quand je r,evi.eI1s, je
trouve UrnuJe - c'esl la f-emme qui faisait la cui~
sin e - en trai n de prépal'er so n déjeuner, CI - Eh 1
b en, que je lui dis, a-L-on demand é après moj, làh a u t 7 » - CI. N?n, q~' e l e me répond, on n'a. pas
bougé. On dira.lt qu on dort. Mème que j'ai p&I
osé. monLe: prendre les ordres. Il - CI J'y vais,
moL. " Et l,a mon Le. Ah 1 monsieur 1 Mon sam a n'a.
fa it qu,'un tOUir qu·and je suis entroo dans La c~am
bre d·Yvette. Le lit était vide 1 El pas plus de ma.darne Orbiboff que d-e petite J;:>eux Saus. .. Je va.is
dans les a.ulr'C's chambres ... Rien! J'ouvre l'armoire où jé serrais les arfaires de La doctor esse ...
plus rien 1 Je redesoends en courant,. te - Ursule.
que je crie, elles sont parties 1 " - (( Qu·i ? n _
cc Yvette et sa. doc toresse. " Elle monte et revient
touLe tremblant '. cc - C'est pourtant vrai ! Qu'est-ce qlle. Çl1 veut dlr~
7... Elles sont peut-être retourn6e.s v.uLLa Ma.rgpe rtLe ... n - CI Ah! ben oui! Ava.n.t
qu'on tes y appelle... Il - (( Alons '{ " - (( Alors
je ne sai.s pas! )l - (l Faut deman<l,cr aux vDis~
!lICS n, que dü Ursu:le. Mais moi je pense : on va.
]n.ser, conLer d.c.s histoires qui rOnthiOrDnt Irs m6l1lr,es .. ~ cc - Non, que j.e dis, ne d0mandez rien. Ne
pal 'lez à perSOMC. Je cours à lu villa prévenir mons io ur et madam e. Ils feront ce qu'i.ls voud.ro!lJt.
VOUIS, restez ici pour garller. Il - Cc Plus sou'vent 1
qu'e lle me répond, j'aurai.s trop p eu.r... Emporfl'z
la cleC; moi, je me trolle . " Et me VDilà ...
Le ba ron s,e m ordait les làvres. Il qucslionnaJ
d'\lJloe voix dont t'altération snrpriL MargueriLe :
- Quel.q'U'uu est-il venu à cc Mon Bonhe ur n ces
lours<Ï 7
- Qu.clqu'un ... Non ... Ah 1 mais si : un pauvre.
- Gc.la ne compte pas.
- AlLcndez 1... Jo' veux dire un pauvre pae
comme les a.ntres. Un v Leux très extraordinaire
qui avait oonnu la petite Deux 80118,
- Ma.d.ame Sonia. l'a reçu 'l
�~
'4
==================================
- Oh 1 oui, monsieur. A deux re.prises, moi,
je l'ai vu entrer dans la cha.mbre de la. petite.
CotLe fois I.e juron vulgaire échappa au baron,
mais Marguerite n'y prit point garde.
RoouJ, brusquement, quitta la ch~br.e
e.t, d'un
pas rapide, reto.urna. au garage.
Beppo avait prévu ce retour et l'ordre qui sui:vrait. L'auto étalt là encore, prête au départ.
Le baron y sauta.
- A CI Mon Bonheur ". vite 1...
A voix basse, il ajouta:
- Un sale CQUP, peut-être.
- Peut-être, répondit Beppo.
XXII
PRIS AU PI~Gm
Les CI affaire<> Il d'Isaac Siméon l'entrainaient souvent fort loin de c.hez lui. Il avo&.it des CI d}.~ents
"
un peu partout, un peu daIDs tous les mondes.
L'usurier, qui prêtait un louis en rechignant à
de pauvr.es hères contre un reçu de quaran,to
(francs, pouvait avancer }.a IorLe somme à un fùs
\ 00 fa.a:niUe mis à sec par la dame de pique ou la
dame de cœur.
Le prooédé alIors variait légèrement.
Isa.a.c promettait par exemple deux cents louis,
con.t.re un reçu de quatre cents.
Sur ces deux cents louis, lors de la signature des
.bi1lets. il remetLait à l'emprunteur mille francs.
CI Pour le
reste, disait bénévolement le brave
1homme, revenez d.em8jn.
El le pigeon nalÏ revenait... pour recevoir, 0.11
flieu de l'argent attendu, des ü(res de propriété sur
Iles objets les plus invnuisamblables.
Pour l'achat, la ven!le des objeLs exLnao~dijrs
1dont il payait les go~s,
Siméon sc livrait sou ven t
à des COUI'ses lointaines.
C'cst ainsi qu'il se lrouva un soir à l'heure où
la nuit va d cendre, devant l'élablissement du
docLcur Probe à T{·u illy.
IcSaac col1l1..l11L le docteur.
Avanl que n~
90it suJûsammcnt achuland 'e sa
maison d~ santé, M. Probe a dl1, CIJ1 un lemps de
misère, recourir à cc l'obligeance Il de ru urier.
Jamais Simc'on l1C sc désin,téressait complètement de ses anrjC'ns clienls.
« Qui a emprunlé, cmprunl.cra Il, sc disait ISMe.
En ce qui concernait M. Probe, le juif se trompait.
Availril trouvé (lrèl.cur à de moin.s dures conditions, ou, s'élKlilrl,t liré d'embsd"l'ss gr~e
à son
adresse et à Lo soupiles.se de sr.. conscic:nce?
Toujours est-il que Sim60n n'l'ut pus le plaisir
de l'CJprendre Ir c10cLeur dans s<JS filets. Cepcru:1ant
ce soir, en plLc;..<lIlnt devant lu maison de san lé, il
s 'arrêta et conlemp la avec intér t la belle grille
doublée (le \,Ole ct les murs très hau,ls, sans une
ouverture, derl'ièr" It'...squels s'o,britaient le pavillon
du directeur ct 100 co/'ps de bll.liments réservés
aux pensionnoi)'('s clu docteul' Probe.
auc, a..wmt suffisammenl rognr<1é, aLlait sc décid-er à s'éloigner, lo rsqu<l la gl'iJJl·c s'éobraOllra : 100
batl.n~
1&..I'gcmr.nl s'écarlère.nt pour laisser sorlir
une nulomobile. Il sc rangea. cL s'aplll.liL mO<l.ooLement contre ]e mu!', obéissant il son humbl>c el
prudc.mLo coutume de !.cnir le moins de pln.ce possJ..blc, afin de n'(>tl'c poi,nL romarqué.
Le chanrCeur n'avllil IJas cl" mu sque. TI ne prit
point garde il. l'homme l'n.ngé conlr le mu!', mais
J'homme le vil. El, don s s ~
v{'\I·x, s 'lt.lllllnn llDe
avide curiosité. TI IJlong .n s on· r S·J.rd à l'iulérieur
de III. voiture. Un Jomme s'y ll'OuvniL seul.
C hli-Iù nw~si,
T ~lUC
le reronnu\.
n la~sn
flIer' l'I1ut().
Le concicrg(' fermait la grille, lorsque le juif
:l4!'111 deva.n.t lm.
1)
La 'Petite
Il
'Deux Sous
Il
~
- Pardon ... j'en Lre.
- Monsieur, l'heure des visites aux maJades
est passée.
- Je ne viens pas pour un malade.
- Monsieur le directeur ne reçoit plus à parLir
de cinq heures et demie.
- Il vien t cependant de recevoir ?
- Cas personnes sont arrivées à quatre heures.
D'aiLleuil's, je n'ai point à di sou ter. Je vous dis de
ne pas entrer, vous enLrez tout de même. __ AJloez
VOI1S casser le nez à l@ porte du dU'eoLeJw' si le
cœur V.Q\lJS en dit.
'
Sim60n courba l'échine. Il était accootum6 aux
rebuffades ct ses neds crussent été insensibles à
de plus vives insolenc.es. A pas menUiS, hl sc diri<1ea
vers le bul'.e.1.u.
0
Au valet de pied digne et gou,rmé qui lui avait
ouvc.rt la port.c du pavillon Isaac se fondant en.
courbettes et en grimaçan.U; sourJes, avait remjs
sa carte:
ISAAC SIMEON,
Antiquaire
Pas d'al~.
Au crayon, l'usurier grirronna :
CI Pour affaire .urgente, du plus hau·t intérêt. li
. ~e
valet d~
rled ne parut point surpris qu'un
VlSlteur de SI piètre aspecl se crot certain d'(!tre
reçu et d'intéress·er le po..tron.
Sans do.ut.e, son expél'ie.nc.e de larbin lui avait
appris à ne jam ais préjuger des décisions des
m~lres
et. d.e l'iJ?.porlancc des gens. Sail-on jamrus ? 11 tntrodUlsJt Siméon dans UJle pièce d'aLten Le et dit :
- Je ':'als m'assurer si monsieur peut l'eœvok.
Il revll1t., annonçant que « monsieur li allait
hientôl revenir. L'atLe.n!le se prolongea. L'ombre
ISe fit c?fipl~e
dans la ,petile pièce où le visi!leur
atLerudmt >Cl Il commença.Il à sc sentir mal il l'ais.e,
vaguemf'nt rrl'ayé d'il ne savait quoi, lotsque le
docteur Probe parul enfin. Son abo,pd f,ut clMl'mant.
- Eh 1 bon.jour, mon cher monsieur Siméon ...
Très enchanté 1. .. Asseyoz-.v ous donc_ Puis-je quelque chose pour vous sel'vU'.
Il fil jou.er l' ékclri.cité. Isaac cligna des yeux
comme un hibou ù la gl'llJ1de lumière.
le doct.cuI', vous deman- Je ven.ais, mOI~iour
der quelques ren seIgnements sur vos prix ... sur
le genre .de f!1alades que vous recevez, sur ...
- DbllrCl']CZ-VOUs, par hasard devenir mon
pcnsionnn.ire ? r~ila
le docl.cur Probe.
non 1 Si moi-mêm.e ou quel-:- N<1D, m~ : )O.!'uerl
quo n.n cl s mlCns IlVl0t:lS le malheu·r de pereIre 1
r~Jgon,
nous y ,e pOllrl'JOns, ie le sais, am bi lionner
KI Nre reçu . ICI. VOtl'<l maison n'esL poin.t pour les
pauvres gens.
- Eh 1. mon .l1mi, il y Il plusieurs classes pn.nnl
nos penslOnnalr
Ceux pour losqu Is la famille
s~
monll'e <lxigoonto, qui doivent, par exemple,
vivre lA?u-t 0. raIL ~ part n deos petits pavillons t
Olre SOIgnés spéCIalement, ceux-là naturellement
pa.ycm·t pl,us chC'r.
--: Pr6ei.s ément, la personne qui m'envoie voudraIt aVOIr J?!lur... . en~,.
pour I~
ma!a;do qn'on
v.Qu~
cOn.ral~,
~ ~Sl!0sOn
de l'un d VII..'i J1etitH
pavl,Il?ns. ~als
J ru bien pour d'arriver t ,p l ard
et qu I~
salent tous occupés. Vous venez SODJ~
dou~
d e~ réserver un, car Monsieur l<l buron de
Fol~r
n est pas un homme ft se conl ntel' 'du
régime commun J?our une personne de sa fnmillo('.
- b C mmcnt, dinbl. sav('?;-VOUS L. s'écl-in fil.
P 1'0 e.
- Je. on~s
parfail.cmcmt monsiew' le baron
et aussI monSieur. B~po,
son chaurreurM. 1 roh asu~eti
son bin9Cle
t son rC''' ' l'd
pcrÇM.t chercha à déchWre.r \'( ~ ni'gme
du VI ~ U : . ,
?hufoll.1D ct J'eLors grimaçanl devant lui. Ill' (;/1, 1Il ou Ju st, que prétend-il l!p'cndr~,
cet hfl l1 ll1 .
dont ..1. Probe a el.e bonnes raisons pour l'c.lrmt,,·l'
�•
La 'Petite " 'Deux Sous
~
U
La o8JllJ8.ilIerie '1 J.ga,ac vit cette héisit&iJOn. Il reprit,
av-ec \ln bel 8Jplomb :
- J'espér.a.is arriver à temps ce soir pOlUl' rencontrer ici Monsieur 1e baron. Je savais qu'il
viendrait - cela m'ellt évité d'aller demain villa
. Marguerite. Quand on est occu·p é comme je i.e
suis, ces déplacements ...
- Enfin, mon bon Siméon, qu,e désir,ez-vous au
juste '? RencOOlt.reŒ' MonsiJeur de l' olbeTt ou me dem.ander les co!llic1ition.s pour un m&J1ad'e ?
- Les deux. J'ai ma'nqué Monsieur de Folbert.
Voul·ez-vous me donner par écrit les prix ?...
- Voici u·n prospectus. Tout y est prévu. Cependant, on peut, de vive voix, discuter et s'entendre.
- Merci, Monsieur ].e docteur.
M. Probe se leva. C'était un congé.
- Sans doute, dit hUiffiblement l'usl1I'ier, l'heure
est passée de varus demander la fav eur de visiter... J'ava.i.s promis de rapporter des détails
de visu ...
-
En effet, à cette heure les pensionnaires vont
. Qu,elqUJC's-UllIS Les agités - QlIÜ leM dou~
che ...
- Ne pourrais-je me prom ener aU moins dans
le parc... voir l'extérieur des pavillons ? ... R evenir me sera difficile ... EL je voudrais lant qu e Le
malade dont }e m'ocC'l1pe soit amené ici! Je n'ai
pas oublié los frons rapports que nous avons eus
ensemble, monsieur le d,oc teu r, .ct je serais conlent
de vous r.en,dr.e service, ·en rendant service égalemenl il une fnmi.lle dans ... l'em barras.
Cette fois, Isaac lou-chait jusle.
A son accenl, au léger ul'l'êt dont il avai t fait
précéd·er le mol embarras lui don:nant ainsi une
valeur de sous-.cnLcndu, M. Probe dressa l'oreille.
Si réellement on vielü lui pl'opooer UIloe (( Blfaire II il s 'agit -d.e ne point la laisser échapper en
mécontentan t l' inlermédiliLre.
- V.eœz dit-il, mon cber monsieur Siméon,
faire voir tout ce que je pourrai, étant
je vaLS vau~
donné l'heure Lurdive. Il faitCll cor,e jou.r dans le
parc, heureusement; vou.lez-vaus me sn ivre ?
- Que je vo us remercie, monsIeur le docteur!
s'écrin, Siméon.
EL il se précipiLa sur les pas de son gnide.
Derrière le pavilJon dir.ec LOl'i n.1 donl une cou.r
J)avée le s6pruraiL, s'élevait un MlimenL carré à
deux éLa.ges sou'lemen ~ aux fenNre s gr'Ïllées.
- Ici se lrouvent les malades de secon{]e classe,
d\! b~tirne.
les lro.nquiUes, dan s. 10. partie ~nuche
A clro it.c son t les ~glés.
J' en 81 peu pour llIlsLant.
- Cepenclan t, ces cris que j'en lends? di t Isaac
qui do\)venaü livide.
- Ln cloulChe, expli.qu.a briève ment le docliCur.
A1LlOI1S plus loin. Voici devant vous, sépQ;rés les
U!I1s des au lres par des arbr :! vertR - choisis
P8.I'ce que, toute l'année ils forment un rideau do
verdure - voici les quatre p0lils po.ymons donL je
dispose. C'est peu mais peut-Olre pll1S lard pO\lJrrai-j.e m'agramldir. ~
d€rniel', là-bas, es t inhabité.
Je puis vous Le faine visUel'.
- AIJons 1 répondit Isaac, frémissanl de sa
bonne chanco.
POUl' alLcindre au fond du par'c le dernier pavillon il fu;ll.a.illongcr Ics trois auLnes· Or, qui sait
ce qu,c, en passan l, des oreilles ct des y.eux bien
ouverts pOUDTaiClIL surpreryd l'c ! Ilu pr.e mICr ~vtJ
Ion, 1lne voix s'élevait, ml11s n{ln pour une plmnte.
Dno femme chanl(üt.
Au second pavillon, un silence. profond rêgnait.
Sa.ns la lurrniè.r.e qui, déjà, br'i1l8.lt à. une fenêtre
On ul1rsit pu le croire jnha·bi ~6.
En arrivant éIIU troisième, le docteur pressa le
pas. Moais Si:m6on feignit de ne pas 1 emarqu,er
cette hê,t.o d, al1 con.L.ruire, l'olen li L:
.
On -cn LcndaiL à. l'inlérieur une VOIX ru.de qUl meqn1 cl'iaj t :
. llaçuil ol une voix S1UlP.pian~c
- Oc n'est pas vra'l 1 Au secOl1fS 1 Je ne suis
d~n
er
pas [()lU!... Qu'on me rende ma fiUe ... MargueriLe,
Marguerite! Mon g,endre est un misér&b].e. Marguerite, viens délivrer ton père 1...
Isaac poussa un long soupir.
- Pauvre Monsieur MarLet, diL-il en rejoignant
le docteur, est-il assez malheUl'e'Ux 1
M. ProDe fr()[)ça les sourcils.
Mais le. visag-e :de Siméon n'exprimait éllUcunemi:mt le tri-omphe de qu elqu'un qui Il intérêt à surpr.endre un secret. Il semblait vraiment parler d'un
fait connu de lui d'avance.
Le médec1n se rassura. Ap.rès tout, ce juif est
8:ssez canaiUe pour êbre mans ],a oooo,oo'lloe.
Cependant H ne répondit rien et entralna Siméon
à ·],intéri.eur du derni,er pavillon, enwre inoccup é
afin qu'il en pùt IdécriI"c le co-n.fort à ooux qU.i ]'a~
vaLent ch.argé de sc rensei gn el'.
Lors qu'au retour il repassa d<want le pavillon
de M. Martel, 1e paiUvre homme ne cri-ait plus.
1"1. Probe reconduisit le visiteur puis r,evenant
S~H'
se~
pas se rendit au.près de son· nouveau pensl-onnt\ll'e. Il,Ie trou va couché, .Ies bras emprisonnés
dalls la cam.L$o1e de force, 100 Jambes li ées. Prè s de
lui, un gardien se tenait. Un gaillard à LoiUrnure de
IUlteUü, au~
yeux du.rs dans UIJe figure bestiale.
- Eh bIen 1 demanda le docteur d'une voix
douce, ·est-o n calme?
- Ah 1 oui!... J'ai dû. lui melLre la camisole et
lui I.ülaclie.r les jambes ... Il aumit fini par faire du
vdalIl ... Il est dangereux, oe vi·eux-Ià 1
M. l\l.urtet tourna vers le méd-ec in son pauvre
visage convulsé.
- Calmez-vol1S, mon ruui, c.almez-vous.
- Monsi.eul', mOllsieur! Je ue suis pas fou .••
C'est une indignité 1
cc Laissez-moi vous r oconicr. - On m'a amené
chez vous sans me dire où l'OD me conduisait. Il
y a deux Jours, un homme que je ne conn.aissais
pa.s, M. Ornéry, .est venu ... qui m'a, renù-u à moitié
fou ... Non, 1l0'1l, pus ce mot-là! Je veux dire qui
HÙ\ fait l'·a conler d-es eh~s
qu e je ne .devais pas
JLIlre cUIllla1Lrc. Et de-puIs, j'ai bien vu ... aIl me
surveillait. Mu fille n'osail plus )'e.s ter seule avec
lJloi ... On éloiglluit Illon petit iii ... Mon g·enLlre ne
Il le quitlait pus, uujounl'hui il n voulu me jJromeIl er CIl aulo . J'ui accepté, ct l'un Hl'a amené ici
SUIIS lIle ri·eu dire ... EL Loul dl! :;uiLc on m'u pr'is:
on m'u enfermé ... c'est Ull guel'élllc IlS ! Je me plaindrui iL la juslice ... Vous PIl l'épuÎlIll'ez. Je ne vt'ux
pus r€st·er ici... Lochez-moi, misérable 1
11 s'-exc iLait ùe nouveuu.
Le ùut:Leu·r Pro·be, so ns élever lu vo.ix, déclora:
- Si vous ne vous Lenez pu s ll'Ullquille, si vous
cri ez, on va. V(lUS doucher.
Les yellx de 1\1. I\oltlrteL S'OllVI'i l'C llt ùémesurém ent
ses jO'Ul\S devinrent cramoisie,". 11 se mit Il trem~
blol' et il gémir COTllllle un )lelit cnfant.
me pe·l'suntlel' que vous avez votre
- Vous voul~z
b Ull sens, l'cpl'll le ùocteur, l'c!:>lez c(rlme, alors,
soyez suge. ün vous rendrn II votre nlle si vou.s
n'Cl-es pus malade.
- ç'esl.;. c'est vrai? ba.llJlILia le malheureux.
- Ce1'luulcITlenL Muis pa!:> l(~It
de suile. Quand
vous ltI'e~
.1)JI(~é
que l'on s'cst trompé en vous
umennnt ICI... Icnez, je vais VOus rnontrru' ma.
honne volont6 ... Ne m'en fnilo s I>as r-epenlir 1 Me
pl'OmeLLez-vol1s d'6lre doci.le ?... OÎt va vous dé1Ler.
- Oui, oui ...
- Déliez-le, l\holI, relirez lu cümisole.
- Il va rocommCJ'lCetr.
- Non. Je suis corlaül que non ...
- Non, non, promit 10 pauvre hommJe.
On le ùt\livr-a.
11 s'uss it su,r son lit, regun]n 1\1. Probe, HliuIf,
son g,lI'dieIl, puis l.Juisso. 1 . yeux.
II ne s/wail IClluel de ces ci eux hommes l'épOllvunLuH 10 plllS, eL il cou t enco!'e envje de crier à.
l'nille, de lenler de leur échoppe!'. Le souvenjr de
10. ruùe poigne do Hholf s'ulJallunt sur ,l ui to.ut à
�La 'Petite " 'Deux Sous "
""beure le fiL se contenir. Il essaya d'espérer, se
répétant: Il C'i!.'3t une erreur que l'on reconualtra
yit.e ... li
[\(ais il ne pouvait croire à celte erreur, ni comprenrl.re ce qui l'avait amenée... et l'horifan~
conviction le pénétl'llit que son internement aValt
été voulu, prépuré, pur ceux sur qui reposait toute
aa tendresse: son gendre ... sa fille.
Oui, il en venait ù accuser sa fille!
Comment supposer qu'elle plU se laisser si complètement aveugler 1...
.
(( Pourtant, sollgeait le malheureux, j e n'élUls
pas gênant ... Je l'uilllu.is de toute mon o.me et sans
égoïsme: je n'ai jamais prétendu assombrir son
boolleul' pur mu tristesse ... Et elle ... eHe avait un
si bon petit cœur 1 Elle paraissait me bien aimer
aussi... Non, non, c'est impossible, mon eillant ne
peut être criminelle 1... ))
XXIII
RÉDECCA llENTnE EN SCÈNE
Ce jour étant un dimanche, Isaac Siméon en profita pour ne point ou vril' son magasin.
Les .... oleLs de fe r l'estèrent donc rabattus. Seule,
la parlie basse de ln porle fut dégagée.
Cela !nisait COlllllle une grande chatière par où,
de grand matin, 1'.Jll) e Siméon, revêtue de ses plus
beaux atours, s'était glissée au dehol's.
- TAche Ge faàre de la bonne besogne et dépêcbe.
toi, Lui cria 90D mal'i du fond du magu.<;'În.
- Pas peUl' 1 rél,ondit la douce Hébecca.
Et l'éclair soudainement allumé dans ses prunelles toujours si lIIornes, la crispation de ses lèl'res .en disaient long sur ses intentions.
Depuis 16 v-e-i11e au soir, depuis qu'Isaac, de retour de Neuilly, uvait appris à sa femme l'internem ent de M. Martel, ceJ,~i
ne décolérait poo.
- Alt IliÙS encoril, gl'onrlait-elle, lambin! Perm ets il cet Individu de réussir en Luut 1... Apr s
quoi tu seras tout étonné quand tu voudrus [eJ"!JI(;r
!e pil!ge, de trouver l'oisea'u nvolé. CI'ois-tu Qu'il
s' éterni sera il Paris, même en Fronce?
- l\Jllis oui, mui s oui .. . A quoi bon pOUIf' lui grossir un magot donl i,1 ne pou,r rait jouir? Car où
peut-on jouir de fJ'"elque chose sinon ici, dans co
ben u Paris où l'on llT'rive il se cacher aussi bien
qtl "O fnr'êt viprgl' ?
- Eh ben 1 il s'y cachera, dans la forêt vierge,
BI t aimes u!i('ux c,:u t PUll!' toi, (;u r vIent au III '1IlC.
Qu an.d on nous a volés, t'us dit: (1 FUUt que jc me
dépêche 1 1) Et pui H, maintenant, on diraIt que t'oses plus ... T'es un tache 1
- Oh 1 dis pn.s ça 1
- T'cn donne l'HS l'air, alors,
- J'altends te !llomenl. .. Je surveille,
- Oui, joliment 1 Tu ne suis mOle pas cc qui
6 pMRe à Snlnl-GNrnain. Sanll l'husnrd, Lu ne tl'
dOIItel'ais seu,lempnt pas que le beau-pl!re est piqué.
- Savoir 1
- Su.voir quoi?
- S'il est loqu6.
- Oh 1
- J 'ai id qu'on lui a fuil un Sille coup, au puu:\'1" ' mon ieur, n l'enfermnnt.
- Oh 1 fil eneore l\ ébecca. ça c' st. .. c'cst. ..
T'.lle ne IroILvlllt {lns le (IUnlinculJ [ pr'i~nuL
C Helen t son admiratIOn pOUl' lino Ri undl (!icm ' 11IIbil'Lé Che'l 1 b Ollrrf'JlI. Simérm lui vi.nt n aide,
Cn, dit-j,I, c'e ,[ l!'l!:; rouhlord,
ju toment, Il/H'r'C' CI" 1(' hUl'on est hnbill' .. . lu
te méfior, Et moi, je pr(otrn.ds qu'y faul 13111'i" de plnH prl' Sttinl GC1"Olnin,
On rn'Il fai l N<Lvoir qu si je me montrai trop
Jl
• nl. ..
l' mon tre pa!! 1
.
or . jf' rlf' vf'rrn.i rien, non plu s 1. ..•Te SUlS
~
pas invisible ... Je peux pas rôder aulollir de la villa
et interroger les gens sans qu'on me voie ...
- Que les hommes sonl maladroits! grogna Mme
Sim·éon.
- Vas-y toi-même, la vieille, si ça Le chante.
- J 'irai dema.i.!Il.
- Bon voyage! fit Isaac d'un air détaché.
Mais la nuit parLe conseil. Le matin v.cnu, Siméon
ne tmite pllLS le vuyage de Rébecca comme une simple fantaisie de fell1111e curieuse. Après tout, elle
Il raison. Il serait bon de ne point perdre de vue
ces gens-là.
Or, depuis la visite d'Yvette ' chez eux, les brocapteurs n'ont plu.s enlendu parl er des hôtes de la
villa Marguerite. Siméon, d'ailleurs, a été absorbé
par les recherches auxquelles il s'ost livré sournoi.sement pour découvrir son voleur.
Un point reste, pOUl' le juif, particUilièl'effient inquiétant. Il pourrait expliquer qu'on se soi t emparé
de son trésor .en bri.sant le tiroir, mais comen~
a-t-oo découvert le secrel du cadenas?
Siméon, sellll aujourd 'hui en sa bouLiqu.e ob~l!'e,
s'acharne à creusCJ' l'obs éda nl problème. Et une
pensé.e qu'il a déjà souvenl repoussée comme par
trop invraisemblable, le hante de n uveau, s'impose il lui..
Ce Beppo aux jolies manières ne serait-il pas l'auteur ou le complice du vot ?.,
Qui l'aurait arr6té '/ Pos la présence de l'idiote,
bien sl1r. Rébecca lor que son ma.i ~ui
Il fait pOl't
de ce soupçon s'est inrJi.gn ';c.
Ça, par exemple, c'est t.rop for t! Accuser un monsicu.r· si aimable, qui l'a si bien sOI.gné.e, courant
chez le phru'mlloCÎen - el 00 n'est pas ~a porte à
cOté - lui ncheLarü des sels qu'il lui a laissés en
hommage 1... Ah 1 non !... On peut être inju Lé,
mais il ne fnut pas êLre bêle, d soupçonner le chauffeur du baron c'est être plus que bNe 1
Siméon a paru s'incliner sous l'algarade, mais
le doute reste eo lui,
Il Eh bien 1 se dit le jui[ que la bi,le étouffe à
crLte idée, si c' es t lui il rendro gorge &.vec son
111 alt l' e, je le lui pl'oTllI'Ls. Ah 1 lion, ClI
I~ ';4,
hl ne
fau t plus Lal'de.r il m ettre 1 feu aux poudl'cs ! 11
Ré) occa ne reviT}'l citez oH q\1C tU.l'lt daJf1~
1.'1 jou I'noe. Elle s'c'ngoulfl'n, com~
lm f'tüCll IlOlIJ'&lIivi,
dnn...'1 l'o1vr~Ie
busS{' eJ,e la pal te , puis s'n.l'rNa,
sufT,oquée en v n&Jll de dehors )1111' lu. nuit cl l'u,lIlU&ph'~
cmpun.nl.ir de la boutique.
- Isaac, t'i!.'3 là 7
- Oui ... je dormais, je crois ... Tu In'as fait peur.
Qu'est-cc qu'e t'as?
r-lalgré !'fl s-omnl~ce,
it avait sai~
i le trOllble de
la voix. Rébecca haletait.
- J'ai ... j'ai ... Ah! Y s' 11 passe de belles 1
- Mais quoi?
.
- Allume d'abord, L pUIS dOllDe-moi à boire ...
j'étouffe.
"
DarU m en t, le vie ux fit de la lumière. Puis il alla
dans l'al'ribre-bouliqllc cl revint avec un verre
d'eau.
- T'as pas honLc 1 rugit R{·becon. De l'au ... de
l'enu il. 'Une pauvre f mme flll'U trimballé toute lu
sainte journée avec 1111 pain
del1x sous dans l'estomac pour Lout déjeuner 7... Mulh ur 1 Donne.
moi de l'eau-de·vie.
- Mais ...
~e
l'eau-fj -vic, je to dis,
- n.lJ~oi
- SI III n a~ rien nlnn"{·, ça 1 kl" mal...
- As-liu flnl 7... Et pui" fni!'1 'C CIIIO je tr (li.H. J'!I,i
besoin cie me remonl.{' I', Et l.ni l\1I~i
t'UllJ1(IS besoin
de te r omonl r, ql1u,nd ln !'fl Il 1"HS.
'l'II me donnes ln f!nll. sc ...
- Y >Il clo quoi 1... VeJ'Sc fi boire ...
- Tien.s. rtol'onLI', ft {)J'lofe'nl.
- Ah 1 ça. foil han 1... Ouf! 1 Eh 1 ben, voilà.
Mnclunle Mtll'Iot st morLe ...
- Morte ?
Et cnLorr6e. Oh 1 t'u pas besoin cLc com-
trc
�~
La 'Petite" 'Deux Sous
47
H
me.ncer à lever te~
bras en ['air." Si tu dois crier à
chaque cowp, fauL lie préparer : c'est pas fiul. Pour
lUl homme qui {( snJ"V·eilJ e » si bien les gens, y devrait au moins savok quand c'est qu'on les porlie
lU eimeLière.
- MOI'te 1 Madame Martet morLe ! T'en es sllre ?
Qui te fa dit ?
- La boulangère à qui j'ai acheté Je pain de mon
déjel1ner. C'élail la boulangerie La plus pr.oche d'El
la v~la
. Je lui ai dit oomme ça : « C'esl-y vous,
madame, qui fouI'nissez la vlllu Marguerite ? li
- « Voui, qu'~I1e
me r~poqld,
mudame. li - « On y
est dll.Os la peLne, que Je dls )J. - (( Croyez-vouSJ si
:C'est un malheur! qu'elle me fait )). ~
« Ben sûr
{]:lLe je lui di,s. Le puu,vre monsieur ! C'es!,..y v~n
tout d'u~
coup? Il - " Hen, qU'elle me r6pond, c'est
le chagI1n Il . - « Le chagt'lll '1 Il - (( VO\.lJi madame
comme je vous le dis. Y a encore des 'maris qui
aiment leurs femmes, même quand elles ortt les
cheveux gnis. C'e~t
. consolanl il pc,nser. EL lui, le
brave monsleur, id éLalt de ceux-là. QU<lnd il a vu
sa dame morte, comme ça, lou,t d'un coup, ça l'a
sai L .. )) - Moi, je ne di s.ais pl.u!:> rien. J 'é lf.1.Î.S
sa.isi,e aussI. EL pu,is, je voulais pas ~aire
vok que
je \Savais pas que mad'ame l"lul'let était morte. La
bOl1langère reprend: " Mourir comme ça, la nuil
~n
dormant1 y en a qui d i,sen t que c'est une bel~
mm'L. Moi, J'aimerais mieux avoir le Lem.ps de me
retourner, pour sùr. Le pauvI'e mo.n,sieur se trouvait lout sellol quand c'e,st arrivé. Mo.do.m la bo.·
rOnln,e de FolbeT'L, sa fille, et monsie-ur le baron
étaient absCJIls. lis sooL vile revenus, vous pen.a€z ! Heureusement, Il y avalt lJ. la villa une dame
médecin pour soigner une pauvre gosseUne qu'on
avait ado!ptée. Car c'est du monde bon comme mOIn
pain, je peux le dire. Je les cann/l;is ! Ils se ser'Vent chez nous depuis qu'ils viennent à la villa
MargueriLe. )) Je d,e ma.nde : C( El la gos&eline
qu'esL-ce qu'on va cn faire, à pr&senl ? Il - C( Ah i
madame, voilà bi en ce qu'on flle suil pas. POlir l'instanl, pli l1 'e,~t
pus ioi. Elle avniL une mnladie contagieuse. Alors, l'flpJlorl A.ll pelil de mndnm<, la baronne ... n - « Une maladie! Depui s quanti donc? Il
,}'ûlnis bleue moi de penser qll'on avait mis
Yve tte ÈL l'M'pilaI sans nous prl'verllir. « Tout juslo
aprè lu mol'~
de madame Madet qu·c dillu boulangère. On l'a emmenée dans une villa qu'Hf-; ont
aux Loges - C( Mon Bo.nheul' Il qu'elle s'uppelle, 111
v~l1a.
- avec la dame médecin qlli la soigne . .T-e
sais ça par la cuisinière: o.n cause, n'est-cc pas ?
M~me
la femme d(l ch'ambre à mac1l1.me la hlu\onne
y él.n.iL aussi, è. C( Moo Bon he'11I' n, pour sC'rvir la.
<lame eL sa malade. Mais elle CoHt revenue ces jOllrsci, L je lUe serais pas étonn é qu'i,l y ait clu nouveau là-bas. La cuisinière, quand j lui s.i demandé
des nouvelles, m'a dit que mndernoi!';ûlle Hé].o'j,SoC c'est la fcmme de chnmhre il madame Ill. har'onne depuis qn'elle est de retaur, ne desseTTe -plus les
<lents. Qunnd on J'interroge, ell e répond: (( J'ai pas
à m'occuper des afflllr-es des malLres. Il
H6bccca oessf1. Œil Înstant cl pUI'ler, but un,e seoConde rasade d'eau-de-vie el reprit:
- Tu pcm'9e6 si j'étai.s suffoqu&e <l'onl,endOO,
Isaac se Laisait. Douche bée, les yeux fous, écrn13é par tant de nouV'elles dmprévues, il écou~ait
Rébecca.
- Nn!Ju
, relcmn~
je me dis louL de su-iLe : fi Jo
vais aller aux Loges Il, J'y ai été, j'ai vu la vj]Ja
Il Mon Bonheur )1 fermée, p l'les cL fen ll'es, comme
:.I3i, d()puis des mois, personne n'y dem lIrflit plus.
D'ubol'd, j'ai pensé que la }}oulanf!èl,{, s'éloit Ll'ornP()o de nom, ou qu'il y avait dellx (( j'vlan BOtll,heur li.
J'Ui demandé li des voisins ,'li c'él,nit lJiC'n liL qu' n
ollVnil appor.Lé une mall1.c1c. Oui. l\1-uis on ne savail
pas (j'llund elle é~lIit
partie. On me diL : Il Si vous
'vou 1er. rn appri'ndre pluf! long, demander. à. la fcmime qu'allait travailler là. Il - (( Bon 1 que je dis.
Ûù qu'elle demeurc ? » On me J'enseigne, t'l m voi-
~
là p,~tie
à la recnerche de. la femme de ménage,
Je 1 al trouvée ... Donne-mOl encore à boire 1
Siméon vers.o, il ne prof,cslait plus, Rébecca
avala sans sourciller l'alcool dévorant et reprit:
- J e l'ai lrouvée ... el sais-Lu ce qu 'elle m'a appr,is ? Un matin, pendant que la femme de chambre était allée en commission, la dame médecin
a enlevé la petit.e Dcux SOM 1
- Oh 1
- Ne reoommen,c-e pas à crier! C'e.st comme ça.
- , Non! C'est l'e baron, vociféra Lsaac ; il a voulu
se débarrasser d'elle.
- Pas du lout 1 Je l'ai d'abord cru aussi. Mais
quand il a su la chose, le baron , il est arrivé tout
cDu.rant à. (( Mon Bonheur ", I.lvec monsjeur Beppo,
et ills étOlent verts tol1S les deux, qu'a dit la femme de mé.nage. Elle les a bien vus, puisqu'ils l'ont
qu psllOll l1 ec.
Siméon s'erra son front à deux mains el de ses
1~."I
'es
. blêmes tombèrent d'effroyable.s jurons. Sans
s mqUléter de la fureur de son mari Rébecca le
huc
~L
'
- La voilâ envolée La petite Deux Sous sur laque.Jle tu comptai,s si sûrement 1 La voi.là disparue ... Ben lu' peine de nous en encombrer peiDdant
quatre ans!
- Elle Ifl'OUS a valu l'argent de M. Martet, dit
malencon lreusement Siméon.
- Oui, glapiL Hébe-cc.a, parlons"'ÛJ1 ! Envolé com me Yvel,[ , l'urg nt! Ah! lu p€Ux te vanter d'être
habile 1
~t,
1nspirée par J'alcool, Rébecca à son tour dégOIsa les trésors de son répertoire .
~Iméon
dans le besoin de s'en prendre à quelqu un riposta menaçant.
La fe';lme leva l~. poin~
; une gifle répondit à son
ges t.e. El ce fut 1 1!(1wl)le pugilat entremêlé d'insultes et de mols immondes.
'
XXIV
PREMIÈRE ALARME
Après Ire départ de son pè.re ponr la maison de
sl1nlp, M:1rgu .1·ltl' tir Fnlhrl'l (]r, 'lnrn à son mari
que le séjonr de ln villa lui étaiL d('vcnu insupportahl · :],e souv nil' de ll'Op dr \.l'is;(~e
Les choses mis-cs hlHivemen'l en ordre, on pflTt.it.
Ce fut llne douc ur pour la bnrOlll1C de se retrouvel'
dans l'hOlrlll de la rue de Lisbonnl' cadre charmanL
de S(>S '[l,I:emi 1'S mois de bonheur:
Très vIl.c, le baro!! en homm e pratique s'inquiéia : on ne peul ,la~&er
III forlul1r de M. Mnrlet
entr les mams d un fou. Il fauL conslituer un conseil de famille.
- Mon pè~e
guérira, Il dit Marguerite. C'est
aff.re'llx de fal re consl,(l.Lcr sa foEe ...
- Lorsqu'il sera guéri, ma ch re amie on lui
rendra la libre disposiLion de ses biens. Mais jusqnc-là nous devon!'; à notre !ils d-e sauvegn rel r
ses in LérêLs. Or, tant que mon molhf'1U'e1lX beaupère n c.s ra. pas interdiL on peut tout craindre.
- MaIS chez le docteur Prone il est comme en
prison, il ne peu L rien f8lire.
- S'il ne peut ri.cn en mal il ne peut ricn non
plus en bien. All I'Z-VOllS lai s,c;er dormir ses revenus? Qui louchera s s OOllp'0l1S ct. <lui surveillerA.
Je CO\1l'S de seR vnleurs? Et l'MieL" pen!->cz-vOllS
qn'il soi\. raisoJ1nahle de le COW'Cl'vrl'? Votl'r pèr(',
s'il guérit, vtiV1'l1. nvrc nous . 11 n'n l1rn.i t d'ai11eur,
pas li ':3oin d'uno si gronde infilol\.nlion pour lui
seul.
Mnrgl1rrilc se laissa convainçl'r.
.
Le s Mn rtd n'o.vnicnt que . d,ps pOlrenlts loignéfl,
ahso,rbl\3 dillns },CI\ll'S ocrl1?l1,Ilons romm rcülJ,,,s ou
auLt'es cl n'ayanL pas, comme le brlw-père dn bllr?Jl do Jï'0I1)Cl~
COll{l uÎJS, avec 10. il".ichess, IO! drolL
(le r. r(\poscr.
�~
,
48================================
- Je me feTa1~
scruJp'llle, &t RaQUa., d a'ugmoo
Ler leurs t.racas. S'id vous oonviJenlt amsi, ma dhère, IlOllIS org.a;rris.erons le oonseil S6lIlS 6.'VoiIr reCOUirS à ms aJŒiés. Je caooaJ5 des hommes d'i8lfairas lrès experts, très oobi'l es ...
- Ah 1 f.a.i.tes pOil!' le m:i.eux, COIl1Soea1Jtàt Margue.r1te. Moi je n'en.1.endlS rien à oes tristes choses, et
m'en occuper augmente mon cllaga-in.
Ra<l'Ud s'eIlliPlbya avec un.e ooLiv.uLé foéibrile à réunir les six membres nécessaires au conseil de famille. Avant .la convocation léga1e qIl!i devait leur
être faite Hs se rassemblèrent rue de LiWonne,
chez le bar.on d'e FoLbe.rt.
Margue.I'1te leIS vit. Raoul les Jn.ui préserua.
C'étaient des noms qu'eJ.!le entendait pou.!' La
première foj,g, des visages jamaÏlS aperçus. Cela
00 lll1i. parUli point ex !Jraorxiinaire. Comment e.ocailt~e
COThflU oes (( hommes <l"aITaj.res », ~e
qu~
jamais ne s'était occupée de questi<Jns d'argent 1
S'il av,a it assisté à la réunion de ceux qui devaient gérer ses biens, <lU plutôt surveüler la gestion du tuteur qu'on allait chois.ir - et qu'elle seran)t ce ,LUlteur, sinon le gendre die l'ÎIn Lc.rdilt, Lemt
nat11re!J1emeIllt désig,né - M Martel ellt été Sltro,péfait de reconnattre, S<Jus le nom bien banal de M,
Du;pant, les trailts austères de 1\1. de ChQn eVI'€ll1se.
Beppo, qui se trouvait à l'eru!.rée Q'e 1',hôLcü 101lSque ces messiel1rS y parvi'l1lrenlt, salilla 1\1. Du~t
d'œ disare/. sourire. D'aIiReu.rs i1 ies acauealÙlail
«lUS d un reg.ard de CO'l1lOalssanœ. A cet imSl!.alIll,
le chuufCeulf ouillhait un peu son roI(} ~ltbaJen.
Quelques j<Jurs plus tard, le conseil fuL dùment
oonsti [,00.
A 'lia maison d.u dooteulr Probe, La onLre-vis~t
n'avait ame'I1é que la confirmwl,joo de l'éLnIl de M.
Marr'l€lt. Ge Dut UIl1e pénible scèn e.
Le malin, le docteur Probe vint, d'un ai:r souriant, trouver son pensionnaire.
- l'lIon cher mons.i€fUll', je vous ep'pocLe une exoel1enio no>uveUe. Deux de mes cOnlr;ères VOOlt venir vous eX3m.Ïlller. S'i.!IJs 50111t Q'''wvis que vous devez ~tre
rendu il. voLre farrtille, eh .bien! vous
ayanL trouvé assez calme cee; temps-ci, je n'y ferai point d'<JbjecLion, Ces meSSIeurs sont envoyés
ici par ordre pl'éf-ccLoral, alln de s'assurer de votre état. Vous m'avez aimable.monL accusé de vous
reLenir ici pour complaire à votre ge ndre ... Vous
ne voudrez pas, je l'espère, accuser deux autres
médecins de ceLLe m~e
entenle. P>ar conséquent,
tâchez de les bien cOllvraincre, car c'osL volrç doI'nière chance. S'ils vous décJn ren t mulade, m.ru.gré mon désir de vous êLre agréable, je screl rappelé au devoir de prudence el je vous rcLiJen<lrari.
M. Mart.cL sen li t son cœur sc gon ner do joie.
l!.niin 1 il raJ.Lait pouvo1r prouver aux autr'cs qu'i,t
était S>UJin d' prit.
pas de ciLer voLre soi- Je ne vous consei1l~
disant monsieur de ChOnevreuse il. mes conCrèl'eS : ils referaient pl'ol.HlblemenL l'enquête d6jà
faite et. qui pl'ouverait que vO,:!s a,:ez r~vé
Loute
oetLe hIstoire. Cela ne VOllS aIderaIt pOint i.l. les
convaincre de voLre pal'fait élat mentall.
M. MarLot ne I,(,po.ndit pas, Absorbé d~W1S
son
espo1r de délivrance il OIYaLa snns y goùl.e.r son
déjeuner du matin el ne s'aperçut pas qu'il avait
un gollL singuHer,
Presq\U} aussitôt lin étrange énervement s'empara du pensiollnaire du docleur Probe. 1.1 eut des
fourrniJlemenLs dans les jambes, un beSOI n de remuer, de s'ogit.cr, et lui, si calme 'pur prudence,
sur une obscl'v.nLÎon de I1holf se mIt en colère.
Le gardien menaça; 1\1. 1nrLeL g'exospém davantage. Une demi-heure plus tard, lorsque ~.
Probe introduisiL ses If confrères )1 dans le paVIllon, M. f\,ln1'lel, le!! bras empr'isonnés dans III camisole de foroo écumolÏL comm un Iurieux, Ccpendont, il s'Cl.puisa ncl Tl voya.nt 1 s m('decins.
- Docteur, gémit le mnlheureux en s'lIclress'llnt
à M. Probe, cet homme est uoo brute ... Commun-
La 'Petite" 'Deux Sous ,.,
~
de z-lu.i de me détacher. Vou.s savez bien que je
ne SUl,S pas fou ... Vous me l'avez dit vous-même ...
li s exaspérai'l d<e nouveau. Ma:lgré lui ses nerfs
le dominant, il volidait crier, frapper.
L'un des médecins élrangers s'approcha.
- Calmez-vous, mon ami, calmez-vous .. .
:- Oui, oui, doctel!r, je suis calme. Mais qu'on
m enlèVIC ça .. . Je vru.s VOus raconter pourquoi on
m'a cru fou.:. C'est parce que j'ai dit avoir été
chez un. spirite, monsieur de Chêllevreuse. Je vous ;
donner8.J son adresse. Et l'on prélend qu'il n'existe pas ... Il existe. Vous le trouverez ct vous verTez la chambre Lonte noire et la lable où EUr1énie
a changé sa lellre.. . Je veux dire. ..
<>
Il s'ar~l.
A l'expression_ des figu.res, il comp.rit
à qool pomt sas paroles étaient j'ugées incohéllelJ1tes, l 'I vit soo espoi.r s'évanouir, se f<ermer davantage Les portes de sa prison.
Alors son désospoü' devint immense 1 Et toujours en lui ce frémissement .nerveux j<nmais encore éprouvé, oette exospération contre laquelle il
ne pouvait plus lutter. Il se sentit devenir furieux,
vraIment, et cMont il celte colère qui le perdail,
il se remit à crier, i.l. s'·agiter comme un forcené.
Les médecins se retirèrent, édifiés,
Le rapport confir'mant la démence de l\'f. 1\1 artel fut .sJgoé par eux en toule trunqi~lé
de COI1Scienoe. Le Lombeau de la victime était défmiLive'linent scellé.
Mlarguerite, cependant, ne pouvait se consoler.
E~1
vO,uJai~
re~oi
son Jlè,re, offirmallt que sn
VISite l aplllsePUIL. Elle obl'rnL de son mari qu'il
l'aocompagne à Nenilly ; mois là ils se heurlè rent
il. l'inilexible volon Lé de M. Probe.
TouLe visite il son !,1eIlHionnni,re, pour le moment, demeu1'llit interdlle : son éloL, loin de s'améliorer, empirait, et IIne émolion ne pouvuit
qu'être l)OUI' lui funeste.
Marguerite revint ch e1. elle désespé rée.
Son courrier l'aLlendail. ElIc le dépouilla distraitement, .gans song-er i.l. vérifier les adresses
avant de déchirer les cnvcloppclS.
Flle s'orê~a
en voyant: Il ~Ionsicur
Te Doron Il,
e:, clIIe allait mettre de côté la lellre sans en lire
dav61ltage, lorsque son J'egard rlll attiré pOl' qllelqu es mots sou lignés (~'ln
trait épuis ct qu'ell e 1111,
presque sans le voulOlr : Il Pl'enez gnrde il. VOU!!, »
ans plus de oserupules MargucrlU! lut Loule Œ.a.
lettre. EIile él.ait brève.
(( 1\1on::;ieur ]e boron, écrivait-on, aVCZ-O~IS
oublié certain faH qui se possa un soit' - une nuit
plutôt - i.l. Grenelle, il y a bienlôL s,ix ans?
" D'aulres s'en souviennent
" Prene:: aardc à V01.U: ! »
Et p.as de signa lu re.
1,0. baronne de FolberL llaussu les épaules. Une
letLre anonyme 1
.
C'est-il-dire l,a chose du monde la plus méprioSabIc, Le premier mouvement de ,l a jeune femme fut
de déchirer cette lettre, PI1ÏlS ello s'l1tlJardof.: à la
mieux examiner.
Le papier 6~t
vulgaire, l'écritu~
petite, grinçante,. volnt.aI1e~
retoyrnée. MnTgueriLe plia
le CeuiJ IC.t. le remlt SOUS enveJoppe el, se rendit au
bureau de Raoul,
Elle expliqua au baTOn son erreur et lui conpas lire celte ~nepL
missLve.
seiUa. de ~e
~1rus
lUt Lint 8>U conlraire r'.t. en prendre connOI sance. JI la lut même deux fois sous] regard
de sa Cemme, étonnée de surprendre une légère
alér~Lion
~ur
son 'Visage.
OUI, vrrument, les lraits du b au Raoul ont u
un imperceptible frémissement en lisanL oos incoagérément dé
hérenoos ... et sa voix œL pcut-~.re
d,aignouse pou'r dire :
- C'~sL
un imbécile qui pense m'intriguer.
Il f!,olssa la lettre t ln jC'ln au panier,
l'vIru.s !Ol's quCl Margu riU! l'ont quitl6 il ln. l' prit,
la d6f~'o1Sa
ot l<mguemœL réOé.chil en 111 relisl1nt.
�La 'Petite" 'Deux Sous
~
De qui p ouvait venir cette mena'Ce qui - le baron .s'en croyai.t cerla.in - ne ~evait
être qu'un premier 81veM:tSsement, le preO'uer coup de fou ouvrant la. guerre?
Un soupçon lui vint, un n om monta. à ses lèvres :
Beppo 1 Le chauffeuT seu.! savait.
Mais quel intér6t aurait-,j,l, après tant d'années,
à devenir, d'allié, ennemi ? ..
D'aitleUlfS, un danger de oette sorte, at.teignant
Raoul, aLieindrait le chauffeur. . en atie.indrai,t bien
d'au.tr,es ...
Et s'il était reconnu que Be'ppo pouvait devenir
déla Lcur, oornbien vite des mains pru de<n tes, mais
inexorables, se tendraient pour étouffer le serpen.t !
M. de Folberl sonna. deux GOups, puis un seuù,
a.u titnJbre étecLrique placé à sa portée. Quolques
instanls plus tard Happo parut.
Sans dire un mot, fixant SUl' le chauffeur l'éclair
perçan.t de s es y'8!UX, l,e baron lui tendit la letlre
anûnyme. Be.p-po la lut. Avec un sifflement bref,
.il la renDit au baron.
_ Eh ! bi'en qu'en penses-tu? demanda oelui,-ci.
B{}ppo eut èncore son brc.f si fflement, qui tena.it
du défi du déd,o..in et de la colèr'e,
pense, dIt-il, que IG: petite Deux Sous a retrouvé la mémoire.
- Oh 1
Le baron na songeait pas que le donger pllt ver
nir de là.
CcrLes il n'a point cessé d'être inqui.cL de 10. dispa.rilion d'Yvette, mais sans y aLlo.cher ccperudant
une impor!tan.r...e capitale.
Il en sait assez sur les rapports de Beppo avec
SOOlia Orbihuf[ pour s'expliquer le désir dl') la doctoresse oe ne p,lus se trouve r en faoo du ch8Jurrewr,
et il pen.sait qu'une question d'humanHé l'avait
'SeuJe empêchée de s'oof\lJir en abandonnan.t sa malade. ;Et voilà que la situation empirait 1
- VOThS aviez raison , reprit Beppo, c'éLait un
sale coup, cet enlèvement.. .
- Mais ... es-tu sO.r ?'"
- Dame 1 Voyez-vous quelqu'un d'autre 7
- Non ... Que faire?
_ Atlendre. Ce pOUlIet ne sera pas le dernitlfl'.
- Certes non 1 Si on voulait simplemen,t m e perdre on le ferait sans me meUre su~
mes gardes. Ce
q;u 'on veut je pense c'est me fau'e cho.n,ter.
- çu. on'a tou t l'ru!-, dit Bcppo. Et ,mùm,e, à vous
parler franc, ça me déroote. Ln. petIte n est point
cB.p'l1b.1'e d~
oombi.ner une a.f[ture comme ceù'~-là
.
- Non. .. mais la doctoresse .. .
- Eh 1 bi.en, non, justement. Ce n'es.t pas, ça ru!
peut pas être el~
... Du chantage, OrbJ!lOff ... Non.
Vous ne la COnn8J.SSC'l pas.
.
- J e la connais moins que toi en f,o,ut cas, railla
le bru·on.
ÙC!ppo haussa les épaules.
.
_ Vous moquez pas. C'est un clue type ... et. ..
enfin, j{) m'enLends.
- Tu f.cras bien de ne pn.s te lo..isser f,a usser le
j~emnt
et aveug1c.r par Les souv,Cln irs. amow'Ü UiX.
L'heure est grave. Il s'agit d'ouvrir l'œt1. ,
.
- Oh 1 vom, frappez pas 1 On sc Lire.ra d a fr.alI'e.
de
Ça semit Lrop beau, le métier, si on n'av~lt
~mps
en Lemps un peu la frou sse ... Gard.e'l blcn ce
billot pour compo,rCd' &.V'CC ceux <ru,i su1vrOif.Li eL
nous ~'eI1dr
compl.c s'hl y IÜ uno O'U plooHlw's
Plumes au service de nolre ennomi.
- On pOOlt changer so.n 6criLure.
.
~se
- .Jamn1s si complèLemc.nt qu'on n'y J'econa
00l"lainœ par.entés ... ct je m'y cnLends à expertIser
1~ écl'iLures.
- Tu L'entends Ilus.si à les contrefaire .
.- V<Jth<J diLes ça pour la leLtre d l'Esprit 7..• Eh 1
loul.c la besogne,
hJen, 1'1 z si ça vOus plaH : dUl1~
ce fIU i Ill'U bté le plus du.r, ç'a 6Lé de jouer au re·
_ Jo
"<mant.
Tu cs supcl'sUli,eu,x 7
PeuL·OLre ...
4, - LA PE'UTB • DEU X sous •
-
49
U
-i!:>
-:- Enfin, repr it le baron, personne ne peut saVOIr... Non, peI\Sonne., en dehors de la petite. Et
eII1oore, en y réfléchissant, j'admeLs qu'elle ait raOÇlnté ce qu'elle a vu ... qu'elle ait dé-slgnoé un monr
SHmr quekonque comme 1e. .. enfin ...
- Oui, oui, allez, sautez le mot s'il vous gêne,
interrompit sans façon Beppo. VOUIS avez raison,
l'eiI1fant, en somme, ne sait rien puisqu'elle ignore
le nom .. . à moiIlls que Sonia n'arrive à Je lui fai.ro
dire en état d'hypnose...
.
- PuJI 1 Une voyante? railla le baron.
- Une nerv'euse, aU'X mains d'uM très habile
hypnotiseuse.
. - Sapristi 1 ' 11 fallait penser alors que cela devilCnidrait un danger et ne pas ameLLer œtte doctoresse de malheur l...
- Là .... là .. . un danger! Oui, j'aurais dû y penser ... "fVfals ce qui ma.inlena.nt ncms inquiète 00115
a se,r vi d'abord. Vous n'allez pas Le nier et vous
en prendre à moi, à prés,ent ?
-- Oh 1 ne n.ous ohamaillons pas, il y a mieux à
faire. Tàchons de découvrir d'où vient cette diable
de lettre.. ,
- Ne m'avez-vous pas dit qUJe votre ancienne
prét.endait avoir des preUNes ?
- Des mots en l'air. r...e qui aw'ait fait du vilain
c'est qu'elle ait e.n;voyé la leUre qu'elle écrivaiL
quand .. . ~I1fin,
la leLtre que J'ai trouvée.
- Et SI elle en possédait, de,s preuves 7 Si., après
sa mort, quelqu'un les avait pris{}S ... et gardées '7
- Qui? Une seille persOlIU1.e - l'enquête l'a révélé - était dans ses confidences. Et s i le pauvre
bougr'e de Manchot avait pu S81l1Vcr sa überLé en
désignant une vioti.me à dnme Ju.stice, je pense
qu'il l'o.uraM ç''\Ï.t.
- C'est vrai, dit Beppo. Alors é.videmment Soni.a,
l'enragée 1 a\liI18. fait causer Yvette. Ah 1 sru:r ...
Et le beau Beppo jura sons souci du décorum.
- Il faut les r.etrouver, ces deux-là, di,t le baron.
- J'ai e1l beau enquêLer aux Log es ... pas un indice 1 A croire qu'eLles se sont en.volées. Et, quont
au vieux me!Ildiant qui est allé à (( MOIl BoOr
heur "."
- Eh! parbleu 1 Le voilà, l' autou r de la leLlpe
anonyme ... Tu me rassurais au suj<lL du per'sonnage, prétendo.n.t qu'il n'était qU'lm aide inconscient aux mains de lu doc tores .. e, ,.
- OuJ, je pensais qu'elle avall !fuit entrer un
pauvre qucloonqu.e el s'en éta.it sCl'\'ie comme d'un
commissdonnaire pour préparer ],eur fuite.
- Taru:lis que moi je m'cn inquiél.ais.
- Peut·être aviez-vous raison ct moi, tort. Il
ost cerLain que si Sonja lui a confLé de.s secrets,
10 bonhomme seraiL biCl1 bête de n 'en point pro-
mer.
- De ne poinL tdcher d'en profiler, corrjgl'.a le
bar{)n. Me crois-Lu arrivé où j'en suis sans Olre
décidé à tout pour conserver ce que j'ai ?
- Ce q?,o v~lUS
avez ... , et volrc peau, mon. cher
baron 1 N oub1Jez pas qu elle scro.it cn cas de bavardages imprudenl.s, sigUlèrcD~L
compromise,
- EL la tienne?
- IIc'U ... enfin, oUJi, je .. . Monsi Uil' 10 baron n'6
plus d'ordres il. me dOIUlJer '1
Au changement de ton du Chllllffcur, LnsLincti·
veml~t
Raoua l.ourna lu. tête vers la porte. Quelqu'un la poussaH doucement.
..- C'e s t moi, dit Mal'guûrite. Je Sllvais Bcppo
101.••. J 'ai une commission il. lui donner.
- Donnez, ma chère, je n'ai plus besoin de lui.
Et Je bal'on put lLdmircr la prolllptilUlÙe avec la.quelle le chauffeur reprenait son rOle.
Margu,erite n'avail utlnché uUIlle importance à la.
lettre érùgmatique. POUir elLe aueun doute nc [louvait exister : c'éLatl l' œ uvre d'Ull mauvais plalsanl.
Sans dou\.() n'auNÙl..eLle plus pcu sé à ceLLe menace .Q.oonymo si, le lendemain, sortant de bon
maLien pour <les cO'W-:l>es charitables don.t &lIe avail
pris l'habitud.e avec su. mère, la jeune fmnme o.e se
�Ql-
50
Clll trouvée à la porte de l'hôtel pr~cisément
comme'
le facteur remettait au portier le prenuer courner.
Ma,rguerit.e le prit des mains de cet homme a.fi:n
d'en faire elOO-même le tri, Et parmi les lettrœ
adressées a.u baron, eUe t.roo!va u.n.e en.v-e.loppe pareille à oelle de la. veille,
Il Enoor-e une leLLre anon.yme,
se dit..eUe\ cela
finit par devenir exaspérant, Il
Et ehle :reID001La. pour 16 remettre à eon. mari
et le prier, en. m~e
temps, de chercher d'où vonaient ces sottises, afin d"en tarir au plus vite la
source. El~
aJJa direc!.€:ment il La chambre de
Raoul. Mais la pièce était vide.
Une porte La fa.i.sa.i.t oommunÎtq'ueJ,' avec le bw·cau.
Cette porte, ubrHée de l'autre cOté par une draperie, était entr'ouverle.
.
.
de VOIX,
Le jeune femme perçut un brUl~
Stupéfaite, elle s'arrêta..
.
La voix qu'elle entendoot étaJt celle de Beppo, et
cela n'avait rien d'-étra.nge qu'il fllt" à oeite heure,
venu aux ordres, Mais était-œ bien le chauffeur
respectueux qui parlait sur ce Lon famiLi.er, presque arrogant?
- Il n'y a pas à se le dissimuler, disait Beppo,
c'est profondément embêl.aD L.. . Plus je réll6ctbis
plus je me <118 qu'ji y a une Cu~t.e
... Vous ave.z été
l'ud&nant mal avisè en les élOlgnant." Fo.lla.ü les
garder sOus voLTe clef.
- Ah! c'est toi qui m'embêtes avec les r proches,
répondit Le baron.
.
.
.,
'
Coinmenl ! Raoul tutoie cet homrn~
1.., Et il 1 au~orise
il lU! reprocher quelque chosol
d'H~oïs.e
Elle eut le cœur serré, Une insu~t.o
lui revinl en mémoire. Il Madame a bleu. tort, dlS8.lt
la femme de chambre de tanl vanLer ce Deppo ...
Moi, si j'étais Mada.nle, j'aiIler~s
pas que ~10n
siC'Ul' ait, OQTnIne ça., 9O\l!I la ma!U, un dOiUcsliiqu.e
ùu temps qu'il était garçOOl. Il
La voix de Deppa s'éleva de nouveau.
_ Vous verrez qu'aujourd'hui nous aurons un
autro billel doux 1
- Tant mieux. Il sera so.relnent plus expli.cile que
ccIui d'hier ...
~la.rgueH
porta lu main il son cœur:
Une 1umière cruelle Sé faisait.
Le Il billeL doux n dont on annQllçait la venue,
elle le lenni l. .. Celui d'hier, lrop peu explicite, c'était. la lettre anonyme, partanl de cerLuins raiLs qui
se sonl passés une nuit.,. six o.ns plus lOt, li. Gre.noUe ... Six ~lD.s
... Avant son rnariug-c ...
Ah 1 ll éloï'e avait rlllioolL: ce I3cppo a aidé .aux
folle, de jeune?$e du bar<ln... et peut-êl.re au Jourd'hu i /lcorc.·,
~Ini.s
ene se reproche ce soupçon. Elle est s().re
qu'à présent Raoul est tout à elle. Et a-t~le
le
droit de s'cll'1uérlr de son passé? Qut:l bomme en
së mal'in~
11 apporte p~,
à celle qU'lI éP~lse,
un
cœur alourdi d~
myslél'1.eux souvenirs qu elle no
devrn jamais connattre, quo peuL-~tr,
hélas 1 (}!Je
sera impuissao,le il effacer 1
Et dans son tendre cœur confla.nt, imédaLe~lnt
n0.11 le r mords de S'UT'pr ndrc oc d>iJuJogue, dons lequel un faiblesse MCle.nne rappelée permet au valet c!{) trui 1er suns respect son maUre.
Elle heul'te un meuble, appelle ...
_ Ici mu chère, répon Hnoul.
.
,~epo
Lol", qll ' Ju/'guerif:o ouI va la pl~I'ère,
avait dH~rau.
IWo l"!~\
la lettr SUI 1 bUI~:,
_ \ 'olllt 1 (li~Ie,
s'efforçanl de sourire. J n.:- ~
COlll Il rëcri[urc. Ge'L le Inauvais pltl'auL d Iller
q i reCOllllnellCC,
Q1I \ va r6iHJOdrè 1,"110111 'l
1.0 hllron Jf'lf nu oup c1\:i1 sur l'o.uycloPI '. Eu
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f)~ux
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sourire, le baron devine qu'elle est inquiète mtùgré-'
tout et qu'elle veut .savoir,
Tandis qu'en riant, il hausse les épauJes, Raoul !
eherche avec oogoisse à gagner du temps et le
moyen d'éloilg.ner sa. femme.
- Ma chère amw, faites-moi le gr::md piaisu' de
jeter vous-même cette jeUre a.u panier, C'est lout
oe qu'elle vaut.
- Sans la. lire ... Est-ce prudent ?
- Prudent 1 Qu'entendez-vous par Là ?
- Si absurrdes et si: vagues que soient ces menaces, elles peuvenL émaner d'un ennemi... et mieux
vaudrait faire Ince à cet ennemi. .. Ouvrez la lettre t
Raoul, et voyons ensemble cc qu'il en est.
- Ensemble, .. Vous tenez vraiment à connattre .
les inepties Ilu'elle contient?
- Oui 1
Il Y a eu dans la voix de Raoul un léger frémissement et son rc;ard n'a pas su restar impussi. ble. Margu~ite
.n IJerçu l'anxiété, et c'est avec un
accent de fermeté que soo mari ne lui eonnaissaü
point encore qu'elle a répondu : u Oui 1 Il
Raoul est beau joueur. D'aileurs~
J'a.udace peut
seule le tirer de co mnuvais pus. t epl'onanL son
sourire moqueur il déchiTe l'enveloppe.
Il Demain mardi, à quaLre heures, on attendra
monsieur Qe baron de Folberl à l'entrée <.lu passage
du Havre. rue Saint-Laza.re. Il
Le baron éclata d'uu rire peuL-être un peu trop
bruyant.
- C'est complet 1 La plaisuDer~
sO corse. Un
rendez-vous ... Lisez ... mu chère.
- Vous irez '1
- Cette question n'est pOB sérieuse ... Me cl'oyezvous d'assez faible menLalité POUl' d{)nner dans ce
paIUlenu grossier ?
Il regarda su femme. Au fond des yeux de ~.Iar
guerite une ombre demeuro.it,
Prompt à ln méfiance, Raoul songea :
Il Elle ka, eJlLe, et cherchera. à découvrir la personne qu.i fera le pied do grue... EL si on la connall, i.rrité d{' ne pas me voir, pcul.~Lre
s'aùrC'r.;S l'o.-t-on à ehle ? Il
En un illSl110t S Il parti fu t pris.
_ J'ira:i d'auLanL mOIns que je comj)Lo.is \UUs
llI'opooer ù'CS981y.cr oooore d<J V0!r volre psr .. .
- Ah 1 vous ~tA·s
bon 1 ~oCrl
.• , Eh blen 1 oui,
nous il'O~.
COlllmandez J'a.uto.
Le v.i.soge dé Raoul se rombrunit. S'il Oe va p, ~
au rendez-vous, il Y f!I1Vel'J\O. Heppo.
r;on, nous ne ~ouvns
aujourd'hui
- I\la c~èl'e,
nous se I'Vlr de 1 auto. noppo, Justement sorl. dïci
et m'o. demandé sa journée.
'
- Ah !... C'est contrariant.
- No~s
prendrons une voilure, paUl' une Ioia ...
-Ow.
- Qu'avez-vous, ma chàre '1 Vous ne m.e purlez
pas Crf:Lnchement. Je sens en vous je no sais quelle rétICences ...
et tlui parle douIl s'est levé, se rapproche d'~le
cem~t,
meltant dans sos admirables yeux toule
la pUlssanoo de Lenrlresse doot il sc sent capo.blc.
Et le cœur de MUI'gllerile se fOll<1 dons la douceur d ce regard. El1r noue lies bras nu cou de
Raoul el murmure:
.: Je VOI1S ai!l'0 tanl 1 Ne me fait s jumni. de
peUHl ... Ce ~cralt
LI op (:nI 1'1, cc seru it trop 1Il1l!.
Une émotion ~inct
l'I! pl flC Kil!' Ile ''l'illge le
.RallU!. L'umou-r r l'V nt dunt J'culoll/"e sa f 'mwe
depuis l~ prelllw!' Jour n éVI'ill6 daus l'fUll Il 1 1111sérlfblc le seul sC'ntillH'nL vrai 1'1 pur IIU'il /lIt JUInUJS éIH·IJIIV-é. El c'
bi
III
pLus qu'une: dnllC
la Inn.th
tU
llOO. UI'
euJ. nlLifl CIll11 lUi
!.ombé l' pllUVl'e
1011 rd il. 110111.
1
t p Ill'
Ill'. fA',
(' l'CH 'il
1Iii llllO IJllffr\l.'lO,
1n.I'nJ . ({ll'a V" "'1""8
de fl nll r/~
10. l 'II
1ft ( m n
('Ù 011
ro ~
1. MarI l onl fo.l..'! d'un poicls lroo
CUll. ()
Mois IJeppo le lui
0.
rappolé ct l.e lui rapjlclle
�Ç'll-
La Petite " 'Deux
SQUS
U
=~t
~
enoore au moindre signe d~ faiblesse : le baron, de
Folbert n'est pas seat 1
II n',est qu'un rouage dtans un terr1ble engt'enage.
qui le 1)roiera s'il tente d'anrête:r l'éllB.Ja auquel il.
B. promis de concourir.
la' te.ntatio:n de fuir, em~
ParioU! vient à. Ra~u1
menant sa femme loIn. de [out. ce qui, ~ . l'attachant à .}.'horribJe passé, Je condamne dans le pnésem, le condarrnnera dans l'avenir t il. jlOursUllv:x;e
la mê.me l'oule.
1
Mais ses désirs de relèvement sont die cOlUrte
durée. Le cœur du baron de E'olbert, ast trop profondément ganr~é
pour g;Uo€l le rc.mords y puisse porter des fi'uits salutaires. Au contrai,re ir:rité contre lui-même de ce qu'il Lroite de faibiess(ts
ridicules, a.près ces crises de <légoùt i1 se replonge.
plus profondément dans ln. beue, se rejetle vers
OOUx qui le traiLerl:t d'ami eL serai51lt d'i.mplacabiles ennemis pour le complice devenu renégat.
En cct instunL o.ù ,tvlarguerile" énervée pur 1:1
.souffrance d "avoir à douter de son mari, cède aux
larmes qui l'étouffent ct. 'pleu~
su.r l'épaule de
R-aouJ, celui-ci ]a rassure.
- Vous fa.ire de la peine. ma -chénie '1 Le ciel
~'en
préserve 1 Igllorez-vous q l~e
je n'ai d'o,Ylre
.Joie au mondle qu votre joie '1 ... Il :Il'y a pas de
Iemrne plus t,endl'emeut aimée qu..e VO'US, ma. pelite
Mal'g0t, et ~est
ê.tl'e i'lljust'e que, (l'€tl1 douter.
Elle sour:i.t à tl'aVleI"s oos lurmes eI., tro]l. franche pour lo11gteIIl(pS pouvoir dissunu}er, elle conres.se ses aaiubüs. Ce r~p,el
du put.:ré ... ne s'ap·
p~le-ti
11ns sur une faute oncienne ? Raoul peut
bl~
l'avouer : polScfU 'wo.rs eUe n'exist.,1.'it point
OOCOl'e l1011f lui, de quel droit lIUi ferajt~l
des
r eprocbes '1 Mois le lDaron ,s c défend.
Il n'oU. l',ieD à confesser, vraiment j eb ne comprend
pas plus qLl'clle ce qu'LI en >csL.
Alors r vèI'SaWJ,e comme elle:; sont. toutes, ia jeune fOOlmc exige qu'!,! sache; qu'il com.pl'enne, et
pOur cela il n 'y Il. qu.'un moyen : se rendre à ce
rend<lz-vouS mystérieLlX,
- Vous rksÏl'<CZ que j'aWl> là.-hl!1S ?
- Oui ... ~'lus
je ré.11éehis, pl'us je crois ~ue
ce
sée par un .sentiment de malaise ~
dès le dé"
part de Raoul\ l,'avait. s&isie.,.
Elle veut sav@'w ... eUo veu t v«}ir. l
Devant l'en.tl'OO du pu.ssagcc le fiacre! s'est aITèté.
Sur le trott04ù1 de: la l'ne. Sai:I:lt-L!l7.Jalre, CIlJŒIS ge.ns
p.aJSsoot, pressés_: NLme die Ii'0llie.zrt, N!lmcoÏJgn6e
au fond -d-c la vOlture, regarde ceUE qID eliltND t,
ceux qui 'liiu. moment statiOIment.
m.avanbage,. dans la
Souda.in, elle se renIo~
crainte d'être !'ec..Qonue. Enire ]]laT l'a~."-e
lCôLé ùu
passage, RMW s'avance... il va sortM'.
PersoI!-ne ne par
~1t
l.'a.ltendre, le goohtcl'.
. Sou.dam, \ID petit YlffililarGl." ôccu,}Dé jusque-là fi
exarn~l'
'Un ét.o.lage, se ret~Ul'n.
Et Mnrguerile vaut v'ÛÎ.l' le mouvement 6'arrét
du baron son re.cuil,
~
,petit vi·eux soulève' on chapeau - un melon
détemt, verru\lrc" usé" cemme la. houppelande qui,
malgré la S8.lSO'U, ,€IIhVle].fi)oppe les maigt1o.s épo.ulcs
et lombe presque )usrfU'auiX tuIons.,
Il salue, obséquie:uiX, dit quclques mot..s .
Hao.u] ne ,paru1t, [point eHrayé, aeUilemenl surpris et mécontent.
Et tous deux, le baron. et l'homme, Fet(i}Lll'U>lml,
s'enlonoent dans le passage.
Mme !i.e Folbert n',wall jamai' vu le brOCMllcl1r
Isaac Sun éon. Tanài.s que la voilure' la raroel1f1it,
eHe se demandait quJ. pouvait être ce peiit VÎ <'II X
d'aspect sordide.
Un quémandeur peu l-être, qui n'a rien trollvé
de mieux pour forcer l'attention du b.aron que rl~
l'intriguer par de v.agL1es menar.es. filais H:10l11
a reoonnu cet homme. Son ar.rêb bIlllsq,ue l',iudique assez.
Marguerite encore pense à 1me matl1'>Cslle u.bu.ndDI1'I100. N'osant venir elle-mèrn{' celte femme. aura.
choisi un maoollltaire, son père sans dOl1 te
Mon Dieu 1 Pcut_êlJ'e son mHr~
o-t·il r mmis la
gran.de .!inuLe de séd1 ir.a Ll!ll>e honê~
flUc .. , PeulêLr.e de l'an.c.Le.!me liaison y a-t-il un en fan t...
(( Si oeta est, se dit la jewne Jemme. il faLlt f]U.9
Raouil S?Îl gér'ifu'e!Jx et llon ... je le VCllX 1 .Je provoquorru sc.s oonfidences Min de pouvoir lui f.:\Îl'O
cOllnaHI'e mon d6 ir de conso.]er, de sOCOUI'ir la
Vous savez qu.e je n'y J' nCl!lntNI'ai pTobablelIl:ent peI'~Otl.? Tout ce qU'a je f l'ni, c'est de
,dol?neI' la joie il mon pe:rsécuLeur dlssinlUlé de me
Mlargu'€'Inte voyant _~.p1>roch{'!
l'heur.c du dliwl'
sans que son m/;lJr.i <i\'!t reparu pc.n!:la qu'il U\ ait
été voir Jo. dé1a.Ls,sée,
sel'a mieu..x.
-
.voU' faJ,re béné,v olemenl le picd dJe' gl·Ue.
- Ne Je roUes pas 1 On ou» a dj~
quatre }1>CUrl~ s : VOUS' pouvez Obl'c saI" que si l'tDn a vraIiancn.t
InLon.tion de V0US ahnr-deJI on sera exact. Ne
SOye)'! pas là .av~lL
quatre bcurca et quat"L. Tl'averwz dé1hbrm~i'lt
le passage, çomme si vOUS
Vo.us rcnœez il un buL détermiuné, et si pe:nsonl'lc
n,a 'V01l!l arrèie, c'est que S\ll1 IIlml on ne veut q;ue;
68Jl1l1lser il vos dépens. Alors, lIl:C l'evencz r01jlt
SUI' vos pas.
- Je feNIl). 00 gue vous voulez, eomIllle' V{)llil v.ou,.
dl'cz.
.
- Merci 1
, - C'est mol, ma chère nmie; qua. vous rcmt;rc.i.e
~ aVoir conlinncc en moi.
- Oh 1 Raoul 1 J'nul'ai Luujow's ctD'llfiance en
vo.us ...
L'flrpl'e5-rnidi du JOUI' où le bOll'on 5e l'enœait,
Lui comp,laire, ruu l'elidez-vou :! nDOJlJyme; l'e.
~,rOlnc
ItVlllit refnsé de s.or·li l' d juuu it avec pdit
1erro., lorsque quatr.c hOUl'08 thntère.\1t à lu. pend\1le.
La jClU'lJe fc.rmrlc, involon.Lnj1' 'rnent, '~mg;.a:
V,H OoLl.e penô'ua. ' av noe : en me dépÔdmll,l, j'alTi<:1'uiS Moore 1tl. bu.
vant lta.ou!. )1
d' Dl! ÎllsLn,nt pllw Illrù, coHf6c on ho'tc, enveloppée
( u,n long InUnl.cHlI, cne monlaiL dun LlIlC voiLul'c
Iu.ell e avai!. (:Hvoy(; cherchel·. Une loi::! cu ~'O\J
te
?~:
1'6fléch.iL il t.O qu' ~l()
pcn~aiL
l 'culllplir !-llJOn"'"léIl1c.nL, el ac rendit comple qu' Ue y éLuiL pou~'
})GIll!'
t
mullheureu c. ))
EnIin
no.ouJ
p8JI'UL.
Il étaiL plus pille enoore qu,e d"ha.bituœ, av co
do 10. pen.l' dru1S le r egard. MargllJer1tu lui sourit.
MlI1is oc ql1'iJ dit fige le sout'i~
'c sur '1:00 Jèvr.()~
dt}
jeune femme" lui serre le cœur ... l'angoisse...
Ruoo.l ment 1
- Eh bien t vous S/.l.v-e.z ? s;'6r..I.'ie-t-Î11 d'un lIOn
dégagé, oomme j e le pensais bien je n'ai trouvé
pe.rsollloe ... Et <:~J?8n.daIl't,
j'ai alLc.ndu. Oul; j'ai cu
La bonté (j'alteo,dre 1
- Porsonne ... au rendez_v Uf! '1 ... Ma.i.s .. , ~vez
vous au moins rencontré ponr VOtiS raire prendre
pat~enc
... qnelque visage connu?
'
SI le baron de Folbert' était moi.ns t r'Oublé il
~'8percvTait
de l'étT'ftngelé de oclte question, du
Lon pills éLl'o.nge cncofr d nt (l11r lu i ~st
rllite.
Mais il nr. rcTnlbrquc l'icn el l'rp,OllO ttvcc ~,st!~
f'aUC·C :
-
Ol!
.1'0
•
llÏ vu âme qui vive de conn'lissane", ami
[l'l
nnemi.
I.n jellne femme ~
tajt el fiC détolll1lù pOlir 001ohrr ln rnl)['{'11T' qlli OmpOlll'pl'C son
iwge, lc.q
lUl'meR qlli monlc'nl il. ses V' l1X.
(',{'ipCnd/lllt, on C011r8 dn' l'rp,I1f!. lont en s'effor·
Gnn! or mont.r>er bonne con[cnnnrl' olle rfof.!{oobit,
tll 11 0 nl de b'nl1\'(lr rTI ::lon 011101J1' cl ~ eXClMCS à ]a
rl r 1 vaul,i" dl' Rnnn1.
f\f'vcn·ll.g 'clnn ' le bnudoi!' de la baronne, où
.i'·\Ille rTlf'nngr. paS-l>n sCS soil'PCS de têt(' . M~,
lal'!wenl.r. 11J1'OL(1r.ment oommcnr..e :
- Je m'élru ::; llguré. ..
1
�52
~
La Petite
- Quoi donc, chère amie 'l
- Que peut-êt.re ces lettres proveooient d'une ...
trune personne envers laquelle, autrefois, V0118
auri~
eu des obligations ...
RaoUl interrompit, amèrement ironique :
- Une anci·enne amie 1. .. Vous tenez à la version de l'ancienne amie 1
ne
- Ne soyez pas irriLé. Je le pensais... e~
]l'l'cn offcnsais point. M~e,
je voulais vous dire ...
Qu.e je trou:veI1aÏs très bien, très généreux de
la &eoourir, 'Si eUe en a booo.i!n.. Je n'en serais pas
offe.IhSée du tou t.
- Vous êtes bien bonne, merci 1
- Non, pas àu tout offensée. Je vous saurai'S
gré, au contraire, d'agir avec fl'8Ilohise.
Elle attendit un irust&nt. Raoul gardait le silenoe.
Alors elle reprit :
- Ce que je ne vous pardonnerais pas, R~ouù.,
ee serait de me ca.cbelI' quelque chose... D1tesmoi... la vérité, toute Ln vérité.
- Mais je n'ai r ien à vous dire 1 Il n'y ay.ait
personne au rendez-vous. Quelqu'un s'est moqué
de moi, n'y pen sons plus. Vraime nt, ~Il:s
me
rega rdez d'un air soupçonneux... On dlr8.1t que
;VOUs doutez de ma pGTOle !
Il ache va, la caressant de son tendre regard :
- Vous fa u t.-il ma parole d'honneur ?
Elle cria épouvantée:
- Nonl
Sa parole d'honneur... pour a.ppuyer un mensonrre 1 1 l ais alor s ... alors?
n. ~ ouJ
n'es t donc pas l'homme impeccabk , bon.,
loyal au cœur d.roit qu'elle a aimé? Marguerite se
sent 'prise de v-e<r~
e . li lui semble qu'clle s'enJonœ
dans un flbtme DOU' eL gl8JCé.
Elle vou.drait crier a u secours, laisser éclater
les sanglols qui l'étouffent... Et oependant elle
reste impassible. Une volonté s'évèi1!e en elle; savoir la vérité.
~aIDemnl
xxv
Pendant plwsieurs jou.rs, Mme de Folbert guetta
00 ind'Ï'œ qui pOol la ~tLre
sur le c~
min de celLe vérité qu'eUe s'est Juré de déoouvflr
et que, cependant, eUe redou.Le de connalLre.
Ple urer la morL d'une mère très tendre, voir
s'obscurcir la raison d'un père profondément
aimé... cos épreuves si 'dILI'CS Marguem\.e cor;nprenrl qu'elles ne sont rien encore comparées il. 1 épreuve nouvolle: douter de celui qUl Il. tout son
cœur qui av.a.i.t toute sa conflanoo.
Et '00 qui rencLait plus affreux pour la malheureuse femme la conscience de s'êtro troml?oo dans
son es Lime et la certitude d'en trouver blenlOt la
preuve c'est que, mOme indigne., même déchu,
eon ~(1Ul'
pour lui étailt le grand, complet, suaveugle, p~ut
blime amour, qui, s'il. cesse d·~tre
souffrir de ce qu'il VOlt trop clrurcmen.t, non pomt
en mourir.
.
.
MarguerLt..e guettait les COUlTlOrs.
.
PrétexlllDt une sorti e, elle s'arrangeait pour descendre c t .se trouver dovant la loge a u moment de
l'arrivée du facLeur dont eUe surveillait l'approche
.
par la fenêtr e dc sa cham bre. .
Mais un nutrc a ussi gueluul. Et Sl grande htLte
qu'e.l.I.e ma li d sccn.dre dès que l'hom me nppro'c hail deux foi.<3 eJ.le arriva juste li Lemps paw'
voir 'ncppa s'cm parer des lettres. Respec lu eusemen l, il dit:
- Je porl le COurriCI li monsieu r lc baron.
Et Margue.rit<> n'osa r~ . n.dr e .: " ,Je m'cn charge »
et p l\C li~re
les letlres qu II t('nl1ll.
.
D'ailleu r, il qll 1 bon? Elle éLn..it COD VllIncuo
quI' le chauffeur n'ugissait ainsi que par: ordre et
q u com p!ire habile , il avait déjil fa i L ~I spar
t t:re
la lettre OOill,i,)rom tLe.nLc qu'elle ne devrut po..s vo.U\
U
Deux Sous
U
~
Si l'anxiété, l'en.fièvrm~
de la jeune femme
échappaient encore au barOOl, c'est que de cuisantes inquiétudes le tourmentaient. Mais le dévouement d'Hélolse veillait, et elle fut plus clairvoyante.
Deplili! son retour des Loges, la femme de chambra a souvent pensé à la recommandation de Sonia
Orbihoff: li Ne q;uiltez pas madame de Folbert,
a dit la doctoresse, ne vous laiBSez pas éloigner
d'elle n. N'avait-.eiLe poin.t ses liaisons pour parler
ainsi, l'ét.nange doctoresse?
Qu'elle ellt enlevé Yvet\.e, peut-être avec le CODr
cours du vieillard inconnu, ne rendait nullement
suspecte Sonia 8IU jrlLgement d'Hélolse.
li Elle savait ce qu'eUe fai.Sla.i.t, se disait la bonne
fille; quant à croU'e que ce soiol une méchante
femme avec les yeux qu'eLle a, non 1. .. Seulemen.t
une personne qui a aû avoir de grosses peines
dans sa. vie ... Ça Illii aura un peu dérangé l'esprit.
Enfinl maintenant que Madame Martel est morte,
que le pauvre monsi.eur est enfermé, mieux vaut
pouT 1a ,petiLe Deux Sous d'av.oir quitté 1a maison. ))
H€JOïoo, s'éLant souvent répété ces choses, ne se
tourmentait plus au suj et d'Yvett.e et conservait
un bon souvenir li la d~me-é
e cin
qui écoutait
ses conft.denœs et ses plaintes contr.e Beppa avec
una si graMe bie.nveillan.ce. Elle en savait peutr.
être long sur M. le baron et son inséparable Bep~)o,
Mme Sonia! Hélolse n'était pas loin de se crOIre
investie d'une mission: la. mission de protéger,
de défendre sa mallresse. Si Mme Orbihofr ne l'avait
pas jugoo capable de remplir ce rôle, l'aurait-elle
supp.1iée de ne point quitter Mme d.e Folberl ?
Chaque matin, elle trouvait sous l'oreiller de
Marguerite un petit m~ucboir
trempé de la:m~
Elle aurait vou.lu conseiller à sa maltresse d aVOir
un peu de courage... et DIC l'os.ru.t. Un mat.in., cependa11lt, voyant à Mme de Folbert un visage pl!u.s défcit que de coutumiC, elie n'y tint plus.
.
- 11 faut qu.c Ma dame se fasse une raison ...
Margue.l'il..e tressaillit.
_ Pourquoi me dit.es-vO'lLS cela, Hélo1,;"?
_ Je dis ça, parce que Madame ~leur
.? Loute la
nJUit... Le jour encore, de:VaIl:L Mon61c!lr, Ma.dp
. m~
se r.etien t pour ne pas lm fall'e de. l>ffi.r;e ; .m8.1s 51
M01l5ieu.r savait que tous les matioo 1 oreiller est
Lrempé de larmes .. ·
_ Je voua défends de lui dire...
_ Oh 1 Madame ... y a pas de danger! Mais vrai,
si la pauvre défunte Ma.dame voyait l'état ot! madame la baronoo se met, elle serait la première
il. lu·i dire : (1 Faut pas pleurer, ma fille l...
Pour
monsieur Martel... il guérira, bien stlr, et ça lui
r.erait joliment de la peine, quand y reviendra, de
trouver Madame si. changée.
- Est-ce que je change, ma bonne Hôlolse ?
- 011 1 de pleur.er, ça n'a jamais e.rnbelli personne... ça, faut dire la vérllé. El monsieur le baron esl stlrcme.nl triste de voir Ma dame avec les
yeux rollges.
\
Malgré oUe, d'un ton d'am crtum douloureuse,
Marguerite répand:
- Il n'y prend pas garde.
IIélDlse eul le cœur serré. Ell e joignit lea main s,
et son bon r egard devin.t humid e.
Margu erite vil 00 regard. Elle y liut \lJD. nrrectueux
dévou ement ct se sen tî t moins d6soopér 6c : clio
n' était plus seule, seuLe contre tous .
Cor lie en. vc.nuLl il. se croi l'e cnlouroo d' nncmis ; saU-elle s i d'uutrcs, parmi leurs ser viLeuJ's,
n 'ont pas comme l3eppo été nch rtbs pur l aoud,
nfin de l'a.i d r il la tromper, li lui mentir ?.. , Elle
béBita. un instant. lIé.loTsc le v it ct dit bien vite :
- Si r-Io.dom n jllmniB be di D dl' conflcr dcg
peines ... enfin des p in.('R qu'clle aW'LLit, il C}lIulqu' un .. . ct s~ des fois, l'li n\'rut bC:'oin que c qudqu'unrJà snit prot à rn lrer dnns 1 feu pow' ~1J ...
enfin mol... je n sais pas bLoo e.xpliquel·... Ce quo
)1
�~
La Petite " 'Deux Sous"
============== = = =====
• , bien
Ah 1 c'est triste
53
-i.e:;
~
triste, sou.pira l'excellenlt
je veux dire, c'est qoo je su.is toute dévou.ée à. Madocteur. Mais il ne fau t pas se désespérer, madame,
dàme, voilà.
ajou,tart..jl en s'adressant à la bar{]<noo ; il arrive
IJ y a tant de sincérité dans oette offre de déscmvent que les malades les plus agités sont le plus
vouemen.t, que la baronne en est bou.le.versée.
Ayez 'Il1l peu de pl/3ltienoe.
Ehlesent qu'elle p<l'Urr.a s'appuyer sur Héloïse, vjte ~>ér1s.
Mme de Folbe.rt quitta le docteur Probe désespécompter . sur e!JLe pour tOUlt ce que pourra fake
rée. La c8lIDÎsole de forc·e 1 Elle imaginait 1e pUIDl'humble amie.
- l'v1a.daane 00 sait pas, reprend Héloïse, il fa-q.t vre bon M. Marlet en proie à 00 supplice.
que je lui dise.. Grénelet et moi nous nous marieDwrant tout le trajet du reLoU:!' elle pleura, le
.1'000 un de ces JOurs. ..
visage enloui dans son mouchoir. Près d'e1l-e Raoul
. demeurait siùencieux, ne trouvant pas un mot pon.!'
- Gr-énelet ? ..
- Oui, madame. Oh 1 d'avoir été renvoyé comme 8ipa.Lse:r oe chagrin. Ceux q,ui 1ui montaient aux
ça par monsieur le .baron, ça ne l'empèche pas de . lèvres ét.a.ienlt àoes mots qu'Il devait étouffer, des
rester bien le servüeur de madame la baronnc-, mots qwi l'aurait perdu.
et s'il a l'occasion de lui être bon à queJ.que chose...
Oui, près de oette charmante et dOThCe MargueOn ne sait pas ... C'est comme moi, il fera tOIut son rire dOillt il voyalt chaque jour augmenter la trispossible ...
tJe.sse, Le cœur du misérable se serrait. Il n'épro\],.
- Grénelet ! reprit Marguerite.
vait pa.s en.core le remords de ses crimes, il so uf~
EUe se mppelle que le jour mème du brusque fr&i.t de voir l,a jeune femme en être victime.
renvoi. de ce pauvre garçon, Beppo est entré' au
S8.lliS même entr-er à la nursery pour embrasseI'
serv1ce du baron ... Et, pour la. première fois, erre le petit Pierre, Marguerite monta tout droit ùan.s
son.ge à s'étonner de cette ooïnciden.oo,
sa chambre, si affligée de l'état de son père qu'clle
Pa.uwe Grene.let 1 Il a été sacrHié, elle en. est en oubliait .ses autr€-S Leurments.
maintenant cerLaine. Et vœd que sa fiancée, la
Héloïse, 8JCcourue pOl1r l'aider à quitter ses vêle>brave créature, se pol1te garant que tout Blutant ment.s de sortie, les JUti. rappela.
qu'eUe-même il lui est resté dévoué.
- Mooame la baronne a vu les leUres?
- Mercd., Héloïse. J.e VOI1JS SULs reconooissante..
- Non ... où sont-elles ?
ah 1 plus que vous 00 le pensez, de m'être ainsi
- Sur le b1l.l'eau de Madame ... là, sous ce jourattachée... J'aurai peut-être un jour à mettre à n.al. Par prudence, je les avais co.~hées
... Elles son t
l'épTeuv,e votre dévouement.
Leutes po\1I' Madaffi-e, sauf une .. .
- Et celui de Grénelet, réclama Hélotse.
- Ah ! soupLïa Marguerite, cnfin!
- Celui de votre fiancé, 000.
Elle wait reconnu PécriLure con.tournée, le pa- Mad'8JIle, je ne veux ps,s dire : tan't mieux! pior vulgaire.
parce ql1e, lorqu'on est heureux, que tout marche
- Laissez-moi, Hé.Jolse. C'est bien... Mcrci ...
COOll'Ile sur des roulettes, on n'a besoin de personn.e.
Fièvrelu.sernent, Mme de Folbert courut meUre le
,ToOUJt d(} même, je suis c<ID.te.nte de penser ... enfin, verrou à sa porte. Elle voulai t être a.ssuréc de la
Madam,e oomp.rend, ..
solitude pour lire l'horrible rn.is.sivc... oui, hor- Oui, et, pour commencer, pour vous montrer rible, elle en est certaiM, elle le sen.t l... Qun.nd
tout de suite la confiance que j'ai en VOlLS, je vais elLe aura hrisé cette enveloppe, c'en sero. fait de
vous charger d'une mission ...
l'ombre d-e doute qui défendul t e ncore SO!1 boIÙleur.
1
Ahl
Le malheur sera là, clair, aveuglant.
HéloYse se rengorge, ses yeux semblent défier
Elle Dte cheroha point à ouvrir l'enveloppe tn
des eIlllteanis oachés ...
évitant de l'abtmer, afin de pouvoir - l'nyant re._ Madame verra si je m'en tire bien ... o.h 1 je OOillée - la faire remettre Il Raou.l sans avouer
n'aurai peur de personne.
qu'elle l'eût ouverte. Elle aurait cru s'cl)a.i.sser J'lI
- Bien. Mals il n'y aura point à. ba,lailler. Je agissant ainsi. BIle d6plia la lettre,
voudrais que vous descendiez à la loge et que. vous
'1 restiez, S0118 prétexte de caus cr avec le conCierge,
Il Monsieur le baron,
Ju..squ'à J'arrivée du courrier. Alors, vous prendrez
,( Je vous remercie de l'argen.t que j'ai bien reÇ11...
tout oe qu'apportera le facteur .. · Tout, vous me
Votre chauffeur vouJaH UM signature. Je l'ai refllcomprenez bI en?
sée. Vous n'avez pas besoin de CfuHLance , elle n.e
- Le courrier de Monsioor aussi ?
vous servil18.it à rien.
- Tout.
(( Si vous voUtliez em faire usuge conlre moi, j.e
- Bien, madame.
- Vous me l'apporterez ici. Et, si vous rencou,.. ferais connaHre le secret que vous me payez puur
garder ct je ne serais pas Le plus à plo.indI'e.
Irez ... qt1elqu'un, neppo, par exemple..•
(( J'ai à vous dir.e enoore oecL Je crois que j'a,i
, - Q.u'iJ y v.ienne 1 gII'onda Héloïse.
- ... Quo Beppo, reprit l,a baronne, réclame les tort de me taire et l1tLC vous ne m'en aurez pas
:kltlres de MonoSieur, vous répondrez que vous les touto la reoonnaissanoe que vous devriez. Peutêtre, si je m'adressais à madame La. baronne, semonllez vous-même .. . Allez.
rait-elle plus généreuse que VOUL9.
- J'y COUIB ...
(( Ma femme me conseille d'agir dc cette façon.
Il n'y avait rien, 00 matin-là, du cor.!lespondant
J'ai bien du mal à l'cmpôcher d'écrire il madame la
mystérieux.
ba:ronn.e et je !1() suis pas SÙl' qu'eJJe m'obéira tou- Je retournerai à t.ous les cou~'rie
s , Mad!&.Ill'e
, les (,c.rnmes, c'est très cl.1têté.
jours. VO'lliS sav~z
))eu.t êtr~
lranquille.
rendre la ml~n
- C'est vrai, fit Marguerite, plusi.eUM fois par Ce-peru:lant, je cro1S qll;'on po~rnut
.raIsonnabLe <lt lui fau'c tenir sa langoo; maIs 11
Jour il aI'Jive des- lettres ...
faudrait la conLenLelr.
mIilo a'eUll.I18Jit de n'y avoir pas songé.
(( EUe !1e se plaU pa.s où noUlS sommes: elle
L'après.midi de 00 jour, M. et Mme de Folbert
n'étaü pas née pOUl' vivre ~ome
oela dans la m6Be rendirent à Neuitlly. Ils prirent l'auLo, t MardilcriLé. Il n'y a qu'à la VOlr 1...
lUeriLe en tut aise: Beppo ne serait poin.t à l'hO.~ed
~ Alons e.Lle pense que vous pourriez nous verseI
PGw l'>mpècher BâloIse de s'emparer du courl'lor
nOl s saurions faire
d'un seul coup U[) capital, qu~
du baron.
De même qu'à leur prcmière v.i.site, M. Probe fructi,Oer. Vous êtes devenu Soi riche depuis l'affuÏl'tl
de Grenelle (mCmc que vous avez <lU de ln chnnce
t:eçlllt le baron ct lA ba.ronne avec des rcgrets ~
Iiles condol6ances.. L'état de M. MarteL - il devait que 'ça soye moi, et non la (( rouSISe )l qui aiL trouvé
les preuves) que vous ne vouùrez PCts qu'on pllÎsse
il. la vérité de le dire - bien loin de s'améliorer,
etn.pirruit. P resqu.c constammen t, il Iullult lui meHre dJre que vous refusez de l'ru'g.cnt à. de po.uvr'cs gC:lltS
comme !10iJJS, de l'n.rgcnt quü, pour nin.s.i dire le\l.ll
la camisole de force.
�La Petite" VellE Sous"
est .da, à OOJUBe du service qU'Lis vous pendent en se
16isant.
« Si ee que ..e vous propose là vous convient eL je cllOis qu'à la réJlexion, ça 'Vous ~OIl1Viendra
vous y aUll'œ du. béné.flee, 'parce que ma femme et
moi .avons du cœw' eL ne vaudrnns pas abuser
d'un bienfaiteur généreu..'C.
" Donx:, .m .cela V'Ous convient, failes-le-moi S8r
v{l'r. Si demain soir je n'oaJi pas reçu de vus noUr
. vellés, je me préGenLer.a.i apres-demron cbez Vo:t1S . .•
.Et taot pis si madrune la ba.eonne me voit ct me de-
mande pow-quoi je viens.
(( V Jil1ez croire, monsieur le 'baron., à mes senlimmts humbJement dévoués. »
Marguerite, blêmf.\ froide comme un marbre,
retenait ta lettre oans ses pau'Vres mains tr.em,blanbes.. . 'ses mains où scintLllait la. somptueuse
bague de ~ilIes
qui ra promise à. Ra0111 et
l'ar,nenu d'or, l'anneau bénit qui l'a li-ée ù lui.
EUe ne comprend plltl, Elle ne peut comprendre.
Seulement., elle sait qu'one infamie pèse sur
fhomme dont aUe porte le nom; que des misérables
t.iennen t entre leurs mains avides leur honneur, ..
La souffrance de la malheureuse deviont insout nable. Elle étouffe, son cœur ebi déchiré par des
ongles 00 r.er, un ma.nteau c1e glace l'envdoppe,
et cependan.l elle a l'impression. que ses mains
tiennent des ch.arbons ardents, que {lu feu aussi
coute (tans sa poitrine.
Et la tentation du suicide vient il. l\Iarguerile.
, Oh loua, disparaHro.,. Je plus souJfrir l... Ah!
Diou lui pardonnera: elle est tellement torturée 1
Ia.is voici que des cris s'entendent. ,. des cns
d'('nfant. B6bé, snns doute, a un cnprJoo ct plew·e.
- Ah 1 mon petit Pierre, .. mon petit e.nJoQ1lt!
gémIt la mère douloureuse.
on, elle ne peul, ne doit pas déserter la luloo,
nlhndonner le pauvre i.nnocenl. Si rude que soit
II' calvaire, il faut qu'elle le gra isso jusqu'à l'ult ne immolation !
Iargue.rit.c, froissant encoro cn , n main la lettre
l-ntale COUlI'~
à. la chnmbru (j l'entant En v<>yuni
eulLrer ~
mère, il s'o.p.aisc, lui teud le.<; bras :
-
Maman 1
Elle le serre con\.re elle, pernnment.
- Oh 1 mon ange, mon cher .nnge 1...
Et Le renda.nt h. s.a. bonne, l\ful guenl (', d(oc i d~,
nOll plue il. mounr, mais i~ luHer, il dl'fendre son
fiLs, à dérendré Haoul lui-méme, l\LarguerUe Wl.
trolV~.
son mari,
En la 'Voyant si pâle et s i 6muo mclt.nnt C iLe
émoli<>n sur j,o com.pte de ln. visite il. ruiLly, 10
b31'01l eu t un 61<111 ue piW é si11 cère,
- Pauwe peLiLo 1
-,. Pauvre petIte, réPèLc_Ldk, ln voix amère.
DUi vons pouvez me J)lailHll'r'. Je Jl crois pM
qu'i1 '.1 aJ.t au III n(!c un supplice cümpltrublo Il
celui (rue j'endure. A'Volr la pl' ,que N"rtiLooc qll,
l'homm C[u'on fil'lllO s.L iudigll d'{ lim'!
Mlarguoerlte 1
' C quI' jl' 'Vous
_ Oh 1 ALLe.nc! \1, pour me r ' ~OndI
di·. ce gue je SJlis. Et d'ltb.lrù, je vou 1.1018 un
o.v'u. J'ai été, /IIui uussi, l'\.luLre jou,r' LW r !lei '70,vou . J~ vous ai vu pal er à un vieil Ilommo d'aBpeeL ml érubJe".
- Oh 1
- J'ai cru - je vous ni diL cc qu je cmY'lÎ ' ~
l'Appel (lU a l'our's d'ulle rJI~l.1!wU'C
ac
utandonnée . .le vou luis v lU le fuil'o <\vuUC'T' cL vuull
ilirl crunhien j dt. il\lllJi vou. voir g{>nér u .. ,
..
Mal V \If! /lI'[\V<Yt 1 lU t Alors j'ai u ~ur,
peUl' de VOHl! quj vou, l1Iontl'; '7, Uélnynl. ,J'ni eu
l'.iOl[1/'e:sioll LÜ/OC tl'Nr /lI! bord d'un prf'.cl pi ce,
la t =rr III' d'y ~Ii'
(1"••• hl j" i voulu, OO[ 'ndllnt,
voir
'1\I'il y av.lI L d bouc /lU lond d Ci' 11 btmc,
savoir 1]1 Il
v/I 'IIi
Cl1chllit vo I"e front, 'l je
~ .· u i ~ ,. /·vie rio ju senl arme Ml Illon pouvo ['.
~
J? m~
suis abrussée ~ ép.iel' vos cor.resrpondances., .
Et VOllà ! acheva-t-elle dans un cri de doUÙ)m· en
jetant élevant RaouJ la lettre anonyme.
'
Il 118. prit. A mesur.e qu'jJ lisait, sa pâleur clevenrai,t qivl('le, ses yeux se creuscie:nt. Cerf.<>.s il en'brrut dans cette émotion l'abjecte texreu.r
misé-
du
qui voit son crime, déoourveM ; mais il y
ruva.l't de 10. douleur nus
lJ8. rloule1J'r de le voir
connu de la seule oréatu.re pour laquelle il éprou_
vât un sentiment d'affection .
Marguerite devinn ce dé~
poil',
. La , wuffral1Ce de celui que, malUé tou~
elle
alIDrut encore, la bouleversa. Elle s'efI<mdra il genoux près de Ici, prit dans ses mains la tête du
baron, l'ottÎJ:a vers Ue.
- Oh ! RnouJ, RnoU!! 1 Je vous aime tan,t 1.. .
quoi que vous ayez commis... fûLœ un crime,
Je ne c~s.rai
pas de, vons .a,i;me.r ... Mais ayez pit.ié
de mOl! Ne me trmlez pe:s e.:a ennemie, .. Soycz
con fiant, .. Dites-moi ln vér.ilté ... La 'Vérité Raoul
et je vous pardonne.rai 1
"
- MargueriLe.,. All ! vous me tort.urez J
Vrniment, il. ceLle minulie, 11 a horreur d" lui.
Le d{'goùt de vivre lui mont.e du cœur 'll.UX ]l'vres
en amère nausée. Il se dég.a,.ge, ouvre un tiroir de
son bureau, on retire un revolver.
Avee un C'I'i, \lar.gueriLe lui aorraahe l'arme,
- Je ne VCLt.'V: pas, Raoul!.. . Je ne veux J S 1
Oh 1 jo t'en conjure, pour l'amour de moi,., Au
nom de nolre iUs !
-:- Novre fi,ls l... Ah 1. me.lheureuse 1 Mais pour
lUI, pour lw surton l, iJ V'8.udrai~
mieux qlle je
fusoo mort J•••
Cl pl'n<mnt il a !tüs,;é la jeun fc.mmc s'emnu.rer
du revu/ver, et déjà 1 reprend la volonté d'·o ·istor, d.e luLLer, d jouir encore.
La Len ' {)'~
il ln fnb si p~s
3 ion.
et ~i Tl1Ire
de IlU1'fJlleri le a pu fdire jaillir dl' co cœur de boue
un ooluJ.l· de l'opentil" : l'éclair s'éteint vit .
11 pouna SU,pf\'JJ'LAr de vivrc, aimer vivro MIe, 'il peut l.'onti nuel' il. profiter du Mnéfice d
s~
crim ·s. JIn. l'edoll té d'avoir en sn femme un
ju stlcicl', JW , s'ofll'!! comme .a!lli6c, ne rro <Joutant
P( ~ ; quc cet It rn~
~> i follement . ld ro n'.a point
'culement un pli. SI' de ~g,
~I\lS
qu'aujou rù'hul
C'ncol'C se rrolongc :iOn iniamle,
lJurl'ièrc ('c fronl que Mar uerlle épel'cJ.lle pres_
se dl' s s Illvr ., u w'nn6 la pcn<;(>c de mort con_
d,amnant lm MnrtcI. C~s
malTlS qu'~U(
erre
dru ! les sIennes J on L falto deux fOlS orpheljne
CJl !ncnnnL son pèr
I1tl cn.blLnon,
Qu cl vien<ll'Ilit III ma1heu)"cll. e si 0Cfl fOl'rails
lui l!lIo.icnl brusqur.m nt rév(;lrés.
En un i Il WII t, le parti du bu ron est pri
:dlo véril6.({u'on lui. r6f;larnc il doit la 'I~,il
mêll)f' III vnntré (~l
JomLam pm:1';6. M.orguel'Ïtf.
su Il pço (llll' IJ Il adc dA hooo!'8n 1.. . cIl!lô po IIITUl t
il la l' <ileur le pm don nor.
. l\klis quoi qu'cl1i' rliS.(.', elle l'C<'lltorait aV' r' une
l~sur{)nLabc
,lJolTcur s~.l
prononçüit le mot
l'Ob~e
d ffl .1 :
If
Je .:i!lIS un MaassÎn l
n
l'aveu,
Il
H faut <IUJ ,c tout
lûiiWC
t
c?ncllHlr : ~ IfLs fulre ccl ap el à la
C'T'V"('
- !\In chérie, je l 'Ql1hl1('11!l.Î j:lTll(liR C[u l , IVlllle_
mml. qlll?JILc lendl'l'-.
ont lt-. vfJll S ! II f lit
g o vou ' soyez meUll'ul' (CI)I!, <flICO
plu!!
rr
lllelul enle et secotJmbl .. , qu> VOll n III' lh.ligi ' 7.
PlU!
rlp~
c1cs SOI1VprUI (11 li m sm t. ~ro .
oc~.,
O~l1,
J ru été COlJpll.bJC 1 ui o~
lHJlJlIlI1! qui
m fi éCJ·I,t .~ut
me ponr.Lre, s.i je no C'Qnwnl!l pas
am /.)1 tlOn ...
Ainsi, c'p.q vrnÎ. ., VOilA 0.'\'1'7. commlR 11ne Il. .. fJlli vous (), po c
d tl pourlio,n clnr1iI~h(',
au 1 Les jllUll:1I11l'CR '1
- - nui .
Ion fli('u 1
- Ah 1 j. VOII!; rni hOl'r III' 1
0 !fl/'ll"
- VOII m C,dl c,
600
-
�,~
La 'Petite
U
Deux
SOU$ ..
==================== 00
DEUXIÈME PARTIE
~
Si vous m'abandonnez, Marguerite, je sms
perdu .. ,
- Je ne vous abandonnerai pas,
VOUB n'exigerez pas ... de savoir ?
- Je ne l'exige pas... Je vous de'mande da tout
1
me dire.
chose.
- Soit. Je vais voua r.acan.ber l'horib~
Mais ensuil;e, je vous 1& jure, Marguerite, comme
w me serait imp<l5Bible de supporter 1a pensée que
'Vous me méprisez ...
- Je vous plains, je vous aime ...
- Vous me p1-aignez enCOiI'e... Peut-êt-re ne cesserez-VOus pas de m'aimer... vous me mépriserez
cependant malgré vous, et je n.e Vel:lX pas de votre
mépris... Si vous voulez que je psrte, je parlerai.
Mais les mots que vous exigez seront les derniers
que vous entendrez de moi. Le geste libérateur
dù:ut, tout ~ l'heUlI8, vous m'a.vez détourné, vous ne
plus.
Œ'em~chrz
Ah ! c'est horrible 1 RllIOul 1 Quel odieux mar-ché 1.. .
- Choisissez.
-
-
Ne soyez pas inexorable!
- C'est vous, ma pauvre amie, qui êtes sans
·pitié.
- AlI'ors, CfUoi. Que vou3.€'l-vous? Q.ue puis.-je '1
- Me pardonner 1
- Je VOUs pardonne.
- TYr,a ider.
- Je vous aiderai... Je vous aideNli il satisfaire
i a cupidité de ces gens immondes.
- Vous les connailSsez? <lit Raoul.
-
Non .. , J'if,lJlore leur nom.
Lsaac Siméon.
Les parents a.doptifs de 1,[,' pet.i.l.e Deux Sous?
Oui.
Raoul!
Quoi encore?
YveLte... Celle ressemblance.. . Un jour que
j~
vous en pa.rlai s, VOu.s v ~ u s , êles ind ig né, Elle...
.(ffic tient au mystère aUSSI, n esl·ce pas?
- Non, non 1 Pensez-vous qu'alors cet homme
e'en serait s6paré 7... Vous voy.cz bien que non 1.. .
- Que dit·jJ do sa dispari lion '1
- Il nous Cil ' d6clo.r
.sponsable. El cela. le
rend plus rér'occ conLre moi.
- 11 n'a.i.maiL pas cetle pet.ile, ccpendun t ?
- Non, mu.is il feint d la pleuror pour avoir le
drotL de récl'imin r ... Ah 1 que je suis la s de tou l...
1{1S à. mourir .. , Laissez·moi vous délivrer de nlo~
Mm'guerite, ..
- Tai s-toi ... Tais-Loi 1
Comme il savait bien que s'il parlo.it de mouri"
il l'aurait il sa merci 1
Elle gémit:
- VO'lI S ne m'aimez donc p .9 ?
-- C'esl pa;roo que jc VOllS uirnc ...
- Vous m'avez promis... Ecoulez, 6col1lez ...
~'.acoepl
l e pacte : je ne V011S quesfJ.orm l'ai pllls ...
J e n'e snierai pas d'apipr-endre ce que VOliS voulez
Ult) cacher... Je vou,s pnrdonne de m'uvo1r menti 1
- Je vouJais vous épargner une peinc.
- Et vous m'a.vez dOsespér 6 ' .. Mai s je T'oublie.Irai. Je ferai ce que vous voudrez. Jut z-moi seu lemont de ne pas vous ... Ah 1 c'est horrible 1 Je ne
.veux même pas prononcer ce mot 1
- Je vivrai, Marguerite ... Je vivrai pOUl' expier,
~r
me r achetor... pour V008 rendre vOLre bonent' 1...
, Et lat pauvre femme, aveuglée. plU' Bon .um<mr,
~ -cl mi oonsol60 <'0 SC voyant armée, Sc JlJgœnt
.néces5aLro, n soupçonna poInt qu'elle scellnÏL ellemême 100 cha1ncs d'un esclnvng de honLe dane
lequel bÎle'nLOt ello s'e déobaLIJ'aiL, im.puÏS6anLc.
~
,. U ri UATELOT'I'm
ji
Avet. un joyeux bru:i:t de grelots,
tou.rna. dans la
ta. caITioIe
COI1I'.
Le chev,ru! s'arrêta. de l\llÎ....ffiéme dev&lJt 10. porte
de i'a'1.1berge. Un holll!I.M auss.itôt partUt sur I.e
seuil.
il avait les cheveux grLs, un vi.s-age é-panoui de
oo.nLé .et lCles yeux joyeux et [-ralles, à cet instant
très attendris.
- . ETh ben 1 le gOSS'e ~
Sur 1a voitWTe, 00 g&>rçonoot d'une douzoine d'anniées se l~
tout drroit, jeta sa casquette en l'air
et cria :
-Ça ye.stl
Une femme condui.sailt le chevall. EDe .accrocha
les r~nes
au garde-crotte et, tout en descendant,
d ~ t
posément mais a.vec un frémissement de
Lriomphe dans la voix:
- Jean est reçu. On luj a fait des compliments,
Bravo, petit hœnme 1
Et, se reboUI"I1llnt vers l'extérilffiU' de la. maison.,
l'aubergiste annonça :
- VOUJS enLendez, vooo auLroo ? Le fis ton a son
eertificn.t d'élu~.
et av.ec dos complime.nLs 1..,
l'an bern y av8iÏt Lrois hommes att.ablés ; ~ome
gis l;e, ils crièrem,t : Ct Br'8fVo 1 l) EL le lriompb..uteur,
ta.nt entré, dut Lrin.quer avec eux.
n les con.naissait, d'ailleurs - ùes morinie.r3
qui, chaqu.e jour et souvent plu&ieurs lois pur jour,
venaient là « vider UID VeIT H.
Une terrasse <.lomi,na.it la Se.il!1-e, ombrogée d'acacias taillés. Dan.'l un rungl, une tonneLle: des
cc messieurs de Pal1Ï.8 Il ue dédaignaient pns de s'y
as sooir dllil·a.nt la be lle sai 00, pOUl' d6gusLc.r une
d e oes ma.telotes - dont J'cTh9Cil gn.e de l'aUJberge
établissait la célùbriLé - en buvant un vin a.igrelet
qui t.a.isait l'osilI' le joli visage des feTIl1me.S t fuser
plus clairs leurs éclat... de ril·(1. Depu:is huit uns
, t son succès a.llait croissant,
que l'auberg-e ~xist,aj
eL chacun s'-Iliccordail. à dJ.re qu.e c'était jus Liœ.
D~
si braves gens, coo GréncloL !
Lui, Lam.bert, ancien chanfI ur; lIe H6JOïse,
fen!lIDe d chambre ayant amass6 un pdit ma got,
étalent venUlS se. poser l.a,. payan.l deni'e'1's comp!,ants - cetl;e mlUSOn dont Ils aval ,[ fuil lll1C auberge. Ils amo{"TlaJent avec eux leur file, un gamin
de quatre 8JlJS, l.r'Os pâle.
On lIe <LcvS;il pas s'é-toruner de lû voir si Ir~1
. Sa
mère ra. n\.mt qoo, ne pouv6JIL quitler se:, rntlltroo,
elle a.val\. d? m ' lke son bébé n nourri r-o. Or, Ic>s
D?UJl'l'IOOS n ~t
poo toujours pour 1 pauvr
e.~
petIts Ml'es qlll IffiU' sont confiés tou.s 1 .·oin s n é·
œssair-e.s. Au bon a.ir." bien nourri, choy6 aimé
l 'cn far\.l ne tH.l'd{l POirlit à s c for-LiDer.
'
,
Plr1fo()i~
il pleul'u.il, r"pou,sganl sa mère cl appeInnL: cc Mruman 1 Mama.n 1 Il d'une V(li.· d(':;'CbPI\'
:rée. AllQT'S, le vis llge d'IMloÏso s'a\.Llustt.il i ,JJe ' 1"
nül L'enfant 0111110 SOIIl C ;ur, el s.i qur.lqll 'Ull ~.
sist.a.i L à la SoCOo.-o, elle lof' pre.rHlliL li lé.rnoin de l'ult (l·
c.hemcruL tenace de son p~ti
Jro'D DOUl' lu. nourri
que, duran.t quaLre /l11llées, il a considéroo comm'.!
sa mère.
Peu t.L !>Ou, cepen danf., les souv-cnirtl dl) .l em
s'aH6nuèrcnt L ce 11() ruL plus qu'll éloYso ql1'i
appela" mama.n.-II -el. ql1 'hl aana.
AussiL()l qu'il eut l'àge nt uis, JAl.Olbe.M Gl'énel
envoya SoOl1 fUs 0. l'écolo. Plus inLoll igcnt qUI doci le
était LIS si a rc! nt Ull Jeu I II à l'é lud.r
Je g.(~min
Bientôt, mililgré sa diss.ipo.won qui SOli vl"O,L lui 'v~
lait des rcrtlonl.mnce.s, il d vint Le favOY'1 du malI
que s6duisait son esprit vil et sn [rancllisc.
-
�C?l-
56
Cette franchise, plus gue toute au1Are qualité, Héloïse s'attachait à la. développer chez l'enfant. On
eût di t qu'elle reùoula.i t de voir poindre en lui une
tendanoe au mensonge.
l'vIrus Jean ne ment.a.il ja.mais. Il aurait rougi de
se sauver d'une punition par W1 mensonge.
Ses camarades l'adoraien.t. Les jourr-s de oong-é
Lambert Gréuelet a.va.it fort à faire pour défendre
Bon auberge contre l'envabissemen.t de touLe uM
marmaille, -d<Y.llt Jean dirigeai t les bruyants ébats.
A cou.ps de serviette, crian.t et riant à la fois, il
Les chassait lous comme une volée de moinea.ux
indiscrets ; et la troupe tapageuse a.llalt s'ébattre
sur la berg·e, à la grande frayeu r d'Héloïse qui eM
mieux aimé sacrifier son rcpos et la belle Lenuc de
l'auberge qu.e de voir son fils impr.udemment s'approcher de l'eau.
Elle imaginait Loujours pour lu.i les pires catastrophes, ce dont la ra1J1ait son mari.
- Ne vois-tu pas commc il est débrouillé pour
son âge ... et alerte, et adroit 7... N'aie pas peur,
va! D'ailleurs par ici l'eau est calme, pour ain-si
diTe sans courant ; aucune écluse aux environs.
Si Jean tombe à l'eau, il en sortira : il nage comme
une anguille.
Et, en efIet, Jea n tombait à l'eau ... volontairement, dans celte eau c.LaLre et tranquille, dès que
te ~omps
étaU doux.
Les baioo froid.s, les libres courses au gru.nd air
fortifièrent si bien l'enfant malin gre, qu'à douze
ans il en aurait pa.ru plutôt quin7.e, sans l'exprc&sion enfantine des yeux bruns, l.a.rge ouverLs.
- Tout 1e portrait de sa mère, répéLait Lambert
avec émotion.
- Oui t oui, disait sa femme.
Ils 6talent senl de cet avis, ct lorsqu'on entendait Grén~et
affirmer celle ressemblanoe, on metlu.;t Héloïse sur lu selle lie.
- Voyons voir, m'ame Gréllclel. .. Monlrez vos
yeux 1... EL vous trouvez qu'il VOtl!S ressemble, le
gumin 7 Jamai de ln "ie! J 'voux pas vous fnire
de Ir. peine, muis il n'a rien de vous .. , rien de rien 1
- Il ne me r'c 'semble pourLu.nL pas non p us,
disu.il aloI'S Grénclel.
Et il riait à gorge d 'ployée,
116loYse haussai t les épaules.
- Je v.a.iB vous dir-c, r prcnaiL-elle, moqueuse
un peu ; vous ne m'avœ pas n\lJue à son Age ...
J 'ai changé.
- Ben l El votre homme, y vous a CO:{loue quand
vou.s étiez gosse 7
- Il m'imo.giuc, riposLait HéloIse. El puis, quoi,
Jean ressembl à sa grand·mère.
On s'aimait !waucoup il l'auber'ge de la (( MaLeIole Il d'une affection profonde, appuyée sur l'estime ~éc.i!proque
- seule aIr ction qu,i puisse r6sisler à l'UJSure du Lornps.
- 11 n'y a pl.Ul de meilleure, de plus digne femme
que la palronnc, déclarait volontiers Lrun.bert.
- Je ne connais pas au monde un hO'IDIJl.e v&lant
Grénelet, proclrun.nit Ilélo1se.
Tandis que .Jean, après avoir bu à. su propre
2k>ire, se hClJt..ait de reprendre ses vM ments de tous
Tes jours afin do courir impatient do leur 31>prcndro
ses succès! 1 joindre ses cuma rades, 'un des
clients .altanlOs demanda;
- Qu'en ferez-vous, de oc g8JTl1n ? Un aubergis~o
qui prendra la (( l\laleloLe )) quand vous aurez enVIe
de vous l'Cpu S r ?
Lambert sc r6cria :
- Un aubergiste 1 Bi n sOr que non.
.
- Nous n'y a ons point s<mgé, intelT mplt Hé15 on a encore du t 'mps pour choisir il. Jeun
an métier qui ooit de s m goût,
pas sine l', cette préoccup<!-Hélol 0 n'~t
tion do l'av nil" de Jea.n, elle 1'0. depuis lunglemp!l.
Fot ((unnd Il l'h eu r ù\} dîner le gamin l'cntra
rs!'oufll&, ébuuriffé, tout vil.lra.nL ncorc de 10. Hullé
d t~s
jeux, Ue le priL contre elle, l'a.paisa, 1" mlL en
La 'Petite " 'Deux Sous "
~
ordre ses vêtements, lissa ses cheveux, et tendre,
très grave aussi, eUe demanda :
- Jean, que voooras-tu f~:ire
plus tard 7
- Plus tard .. , répéta l'enfant, quand je ser~
grand 7
- OuL
- J'y ai déjà pensé, maman.
- Vrai 7 El tu ne m'en as rien dit l
sava.is pas si mon idée vous plairait.
- Je ~.e
à papa et à toi.
- Dis-la Loujours.
- D'abor,d, réponds-moi, maman. Tu ne veux
pas·, que j'aie une au.berge comme vous, lu n'y
tiendrais pas.
0:1, non .
.:.... Alors, va bien 1 fit Je pelit dans un éc!at clIO
rire, Si VQUlS n'avez pas cette idée-Ià, que ça. ne
vou,s fasse pas trop gros cœur, quand vou s aurez
eDv~
de vQ.us reposer, que la (( MaLelote Il soit fermée ...
- Co.rnme tu vois loin 1
- C'es t mOTlSieur MiThande qui m'a rait réfléohir à ç'a.
- l\lonsieur Mirhanùe ... le. peintre quli a pris pen,..
sion. ici pendanl u.n mois l'c.utomne dernier 7
- OUI .. ,
- C'est lui qui l'a. demandé si nous comptlol1S
Le passer l'auberge un jour 7
- Oui
- De quoi y sc m~le
1
- Un dimanche, lu sais, il s'étais mis à pIeu'"
voir. Il était dans la salle,.. et moi aussi. Je m'nmusa.is il. faire des bon hommes sur un cahier, l\lonsieur,lirhande m'u vu. TI a pris le cahier, Cl. re.gardé mes bonhommc5, et hl a. dit : 1( - Il est
épalanL ce gOl I(). I~i n 1 P~tiJ,
tu rus des dh;posiLIOns pOllr II) dessin. Ça l'arnulSerait,.. il d'apprendre la peinLure 7 - Je famis des tabLeaux aussi
beaux que les vOtnr.'l? - Peut-èt.re plu!; be'l11x ...
Qui sait 7 Il .J'ai. pCT! 6 qu'il se moqu.ait. de moi ...
TouL de même, il m'cn 11 repad6 ct unc fois il m'a
dU : - Alors, Lu Slf' 11IlS aubt"J'giste plus tal'd ... C'CoSb
dommage 1 - Pourquoi, mon~iur
7 - Parce
quo Lu as un cou p de rayon qlll. pr~et.
Il Voilà,
maman, pourquoi je Le demnn.clULS SI, vous trniez
il. me rniro {!nrd (' ln « MaL IoLe Il ... Sl! Lu VOu lais ...
- Quoi, mon I?cLil .... Te faire ~prend
la pein,.
Lure 7... l\Inis OUI ... OUI, co &erllit très bien ... J'on
œu.serni avec Lon père.
- Oh 1 morci, m'man 1
Le soi r mêm • Tl610ïse mit son mari nlll cournnt
dos désirs de Jean . Grônelet appro.uViU : il y a des
pei.n.Lros qui gagnent trœ gI'OS.
- rel puis, dilril, c'est UM carrière qui doiL être
a,gréal>le, puisqu'elle rend gai.
- Ellc rend gai 7
-:- I?aane t As-Lu jamais vu, Rarmi las artistes
qm vLenneont il. La « Ma.!JeloLe d an-g uillas Il Ils- Lu
ja.m.a.i.s vu un visaJ,Je tr.isLe, hein ?
'
- Oui, ils ~on
. L Lou s bien en lrain. Faut dire aussi
quo ceux ~l\
vJ.Cnr~et
sont en humeur de rire ...
J\utrement, l~ ne vlJCnd~aiet
pas.. , En fi'l1 , si c'est
~ Id.OO du peL.ll.... J
valS écrire à monsi li!" Hl'hallde cL lUl dem'illllder consei1.
Il
Of' DONS AMrs
A moi l es plaisirs!
Les f olles ma/tresses /
Il //lui...
- Bonjour, mon.'liour n1nn runi. ..
Pu.u,l Mll'hand nrrêt.n. Ilet p n grn.nd nir l'L, tO\1
d'une pl!~t'r,
s r Lourna sur s n hnut Ln!>ouJ'C't de
pnillc. A !'cn!J:l:e de l'u,!,cHor une jOlll1e Hile sc tenait, souriant.e.
'
�I:l'C-
La 'Petite " Veux .sous" ===================== 57
- Salut, petite Princesse ... Eh 1 bien, arrive ioi,.
Tu es en retard .
- Gela se peut.
- EL voilà ta contrition 1
- Si vOUJS me grondez, je m'en vais.
- Va.-i'en 1
Le sourire de la j.eune fille s'épanouit en. un rire
,franc.
Au lieu de s'en a1,ler eJile refenna],a porte,
et se mi t en devoitr d'ôter son chapeau.
.
- Sais-tu" reprit 1e peinlre, ce que j'a1me en tOI 1
- Tout, j'espère.
- La mtUinc 1 Atlen.ds que je te. le disco
- Non. Vous ne le direz pUiS.
.
- J'ai envie de te ballre 1.. . ce que j'aime en tOi,
c'est que m~e
lorsque tu ris, les yeux reslent
trisle.s. '
- Vous aimez me voir triste ?
- Tu ne l'es point, puisque lu r13.
- Mœ yeux ne rient pas .. . e t les yeux, c'est le
lnirojr de l'ème.
- On dit ça. Mais d'abord, ça ne prouverait
lien: le m1r"oir d'une femme doit Loujours mentir.
- J 'aime rnj,eux que le mien me dise la vérité.
- VOye'l-VOll'S ça 1... Non, mais, parole, tu ~e
trouves jolie?
- Pas vous 1
- Je n'en sais 1'1en. Je ne me le suis jamais demandé.
- Eh 1 bien, moi non 'p~us
. Mais si V{)US m'aviez trouvée l<lido, vous ne m'auriez p6>S f'ait POOOI'
pour Ophélie... qui devaIt être joli,e, ni: pou,r cetl,e
Princesse vénitienne, qui vous a ~aLu
une méda~le.
- Et à Loi, un surnom. Prinœsse, vous avez une
Colossale vanité.
- Pas du Lout 1
En parLn~
elle avait enfilé une longue blouse.
ElLe lira un chevalet, découvrit une élude commencée, ouvrit RU bolt.e de cou'leurs, puis, toules c~s
choses prêles, elle alla s'asseoir sur un divan.
- Eh! bien, tu ne travailles pas?
- .J'Slttends le modèle.
- TiJ<IDs, parbleu, c',est wai 1 SOIphi.e n'est pas
o.rl'ivée.
- VOUiS voyez bien que joe n'étais pas·' :eLard?
~l
même, mon ami Lancrol monqu·e aussi.. . Si
J'avais pu prévoir cela, j'aUl'uis lralné ...
?
- Tu redoules Le l~Le-àtê.c
- Avec vous 1... Ah 1 gr,amds clieux, non 1
- Hum 1 CH le peintre, comm{)nL clois-je prendre
Cette confiance, pewt-êlre aprè s Lout excessive?
- Comme une preuve d'.cstimc, monsieur mon:
~,
et aussi d'if>ffecLion... Om, je V{)UIS aime
leu .. .
cc
Mon cœur est en lroi,s morccaux : l'lm pour
Sonia, Ioe seoond paulI' Lan.crot, l'aulJ'e pour vous ...·
Et, comme mon cœur est l'I'ès, très grand ...
- Tu crois ça?
- J'c n suis sû r e. Je le sens. Et alors, vous comprenez, l,es moroeuux en sont gros.
- Un gros morceau de cœur... Je possède un
gros mOl1000.u du cœur de la Princesse 1 Je pourrais m' en conlent.er. Mais je suis servi l'e dernier
diltl.S ceLLe distribution, et cela me chiffonne.
- Les derniers seront les premiers ...
- Oh 1 0.101"13 ••• Mais tu n'arrives jllJl1Ja.is au bouL
do ton jd6e : pourquoi a11fOois-tu lralné si tu avais
Su que le paLriarche ne serait pas là 1
- Parce qu'i·l n'[Ùme pas qu'o jo sois seule avec
Un monsÎleur ... mOrne avec vous.
- De quoi se mêle-t-il, ce vieux? Tu sals, cetLe
f~çon
de gouvernanLe il. barbo blanche est un peu
l'Idicule.
,,_- Oh 1 Il a bien le droit (le S'occllpcr do moi ct
"'I.l ç.e quo je fais ... pauvre bon yi'eil nm il. i vous
saviez co qu'il 0. ét6 pou r moL .. pOUl' Sonia 1
h':- ;PeliLo Princess., quand me diroz~yus
votre
~lo.'
1... Je ne sais rien de vous, mOL .. Lorsque
~
je travaillais à Grenelle dans un alelier que, je partageai,s uvec trois camarades, j'employais comme '
modèloe un vieux manch{JC très misérabLe, qui ressembl·ait dans sa cape de drap vert à un brigaI1a de
comédie. Un beau malin, le bonhomme me laisse
en plan. Des jours, des semaines s·e passent... Enfin, le modèle r eparalt, plus absorbé, plus muet
que jamai.s ; oependanL l'expression de son visage
est müins triste.
« Là-dessus, je fais un hérit.age, un petit, Lou l
petit héritage. J 'en prome pour m'i;n.staùJe.r ch'Cz
moi, dans un E.teli.er où je pui·sEYe t.rav.a.iJIer seul,
aV18C une cl1a.rribl'e
à mE.' guise. Je loue cet a~elir,
albenam te, une poti~e
cuioSine, en.fin... I\1n paJai,s 1 J Y transporte mes frusques, mon chevalet ...
et mon modèle à barbe blanche m'y suit.. . ou plutôt
m'y poursUJit.
cc Je commençais il. être fatigué de peindre des patri.a.rolles, si bi en que j'aurois Fmi par congédier
le bonhomme, s'i! TI'av'a:it e·u, u.n. jowr, 16: bel1e idée
de L'runener. Tu n'éLai.s guère encore qu'une gamine... maigre comme un olou. En ~ voy,a nl, je
dioS au vjeux :
- Pourquoi m'amenez-vous ce fauch-eux?
- Je m'en souviens, inLerrompit Princesse, et.
cela m'a fai t riJ'.e.
- Et Lon rire, reprit ,le peintre, me fi t te rnjeux
regarder ... et je compris !Iout le parti que je pouvais tirer de ce vi,sage émacié de petite vi€rge. Tu
me servis plusieurs fois. Le vieux famen.aH, s'asseYO;i,l dans un coin et a lLendai t, sans bouger, que
la séance ait pris fio. Tu engraissoo très vite,
Princesse, et &01'S tu deyj,TIJS une Ophélie exquise ...
et 00 Iut ce momcnt-Ià que tu choisis pour me dé~
clarer que Lu avais assez de la pose et que tu voulais peindre à ton Lour. ,Te be savnis seule da.ns la
vie, seu le avec cet éLI'ange et vieux défenseur qui
- œla se voy.a.irl. - se serai t fait tuer pOUT Loi d~
bon cœur ... Pour ce que ça t'aurait servi l. .. Tu
parlaîs aussi de Sonia. et quand je te demandais :
Il Qui est-ce donc ? l) tu ouvrais tout grands Les
yeux et tu d.i.sais : cc Eh 1 bien, Soma.. . c'est Son1a. Il Le vieux n'oéLa.1t guère plus exphcitJe. Il C'est
une am ie d'Yvonne, qui a pris la. obJarge de l'enfant. li Et je l!1'en ai j-rumahs s.u daV'E.'l1,t;ag,e.
- Mon ami, je ne pouITaiJS V{)US en apprendre
beaucou,p plus. 11 y 6 dans m{)n exisLence un mystère que jo ne pourrai sans douLe jamais éclaircir.
Si loin que je me .souvienne , je me vois sur un Lit,
dClJIlS uno rnaison inconnue. Une femme se p€ncbait vers moi et me parlait douooment. ElIe se
nommait Sonia. Dans ma tête, horriblement doulJoureuse, il y availL Ull chaos... ùes images confuses, des figures -grima.çantoCs, d'aulres Bouriante.s.
Je me .rappelle qu'un vieillard - Lanuot - est venu. Je ne le connaissais pas, et pourtant sa. présence me iaisai t plabsir comme ceBe d'un. ami. Je ne
parlais pas... ou je opa..l1lais très peu. Un matin,
Lancrot est arrivé. Sonia m'a empo.l11ée dans ses
bras, comme un petit oofant. J'Mais si maigre ...
je ne devru,s paS! pISer beaucoup. On m'a mise
dans une VOilUI~,
Sonia el Lancrot son,t m<>nLés
près de moL.. Je m.o suis év.anouie, paraH-il : le
mouvc men t, J'air vif au sort.ir d'une chambre de
malode m'avaient saisie. Je repris conf~isae
phlS Lard ... Nous étions loujouro cn ViOiLure. Nous
arrivions à UM tourte pctiLe gare. Sonia me prit
oocoro dans ses bra.s et m'emporLa. dans un wagon.
LanoroL ne vint pus av,c c nous; c'.cst il. Paris que
nous l'avons rdl'ouvé en arrivant. Il monta en voiture avec nous .ct nous mlfimes dans un hOl.c1. Là,
Je fus .encore mwll/lde quelqucs jours. 'J e commençojs li. parler, li. ilvLerroger. Sonia. me répondoit ~
H Plus tard, p lus to.rd 1). Enfin, quamd je pus me tenir dd)OllIL, cl10 ln'emmenn dans le petit appnrl.cment que, depuis, nons n'o.vons pas qll i1té, aux
l3alignol,bes. Lancrol hubil>c, dans ln mOme maioo:n, une cham bre /:lU sixième. Le plus Bouven t
il .refuse de prendre ses repas avec nous. EL pow
�La
~n8=
;:tant Sonia le traite mieux qu'en égal : elle a. pour
Ilmi de la, dMérence. Cbère Sonia. 1 Quand elle vit
que, bien .remise, mais épouvantée de n'avoir dans
Ima pauvre tète que du vide, ou plutbt un choc de
'oouvenirs vagues et cootr.ooi.ctoires, je m'obsti.nais à. V0u10hl' me comrprendre moj,.~e
et me
.rendro comple de ce qui m'en.tourait, elle ne chercha p()oint il lDA:I leurrer avec des fa.bl.es. E\llie m e
dit : (( Je n'en sais pas beauooup plus que toi sur
ton passé. J'ai été appelée par une personne que
je ne coIlIl18.i.ssais pas et qui I/,'avait l'ecu,eillie, pour
te soigner. Oetlie personne est morte et sa CamBle
a voulu f..'éloigner. Tu étais dangereusement ma/Lade. Jo suis partie aVl3C toi. Je t'ai gard ée un peu
de temps il. ~n campagne, puiJ8 je t,'ai amenée ici. Tu
m'appartiens, puisque ceux qui s'intéressa.i-en.t à
toi t'on t repoussée. Il ne faudra jamais chercher
à les ret.rouver... d'aiJleur.s, tu ne le poUlTaie pas. Il
1.1 e demabdai IQ illom de ma bienfaitrice. Son.ia me
dit ; Il Tu ne me connai13 pas. Mais regarde-moi,
Tegardc ffie8 j'eux. Tu volts, lu sens, n'œt-ce pas,
<pIe j e ne veux nullement te mentir, te tromper?
!Eh ! bieru, 00 .Qom, ·il vaut mieux pOUl' toi l'ignorer.
J e t'ai emportée comme te vol111nt, pour le 5000traire à un grand {langer. Sur ce dang(?f' jamais je
ne dirai rien. Tu ne dois rien iSavoir. Oublie-le,
comme je m'efIorcerai de l'oublier... )J Tout cela
ét.ait obscur, bien compliqué paru' une pauvre petikl créatul'e ébranlée par la maJ1a.die eL dont le 001'veau, 6'éwiUarü à la vie, avait peine à précisCJ' les
choses. Je devais avoir liU. mentnIJt6 d'un tout petit
enf8iD.t... Peut-ê(.r-o ne me serais-je point SOl1vanue
de ce que- m'avait diL Sonia si, plusieurs fois,
J'ayant de Q1(J\lVCt\u questionnée, je nc m'étai.s al[i,ré les Dlémes répolloos. El chaque fois je voyais
.mieux combien mon insistance lui él.aht pénible: je
118. faisais vraim ent souffd l'. Alors je tenlai d'interroger Lan:el'ot. Il me dit ne rien savoi!'. 11 devaill,
ussurait-il. une grande roconn,aissance à madame
Sonio. qui l'avait cllaritablemont u:ccueilli, et à moi
qui !liui ruwell une eillant gu'il a jadis booucoup
aimée. AlollS, jV' me résignai à. ne rÎ-on savoi!', et
,bienlOt d'u,uLrcH
préoccupations m'assaillirent.
!I)'tlbord Jl1.OUS Jl.vi-on.' vécu sans soucis. Je voyais
Sonia. puiser ,dans un porlcleuit1le qui conlenait
des billels de banque; mois üs n'ntaienl pas en
bien gnmd nOll1IJl' . Un jour elle avoua à La.ncroL
qu'elle louchait il !Lu fin de sa réserve! Alors il lui
dit qu'il avaiL repris ses séanc
de pose et que plusieurs p intr- 1'<JllIployairnl. Il sUPT1J.ia Sonia de
lui :pcrmcLbr'c de nous uider. Elle refusait, disanl
qu'eLle nlfi~
!J'l1VU.Ü!CI'. Il Ma.ls, difrelle, ce que je
faisaü; jadis, 1-c ne le ferai plus jama.i.s, jamais. J'ai
IIorreur d(') cc qui l'Ilpp.f\llc 1 prussé.» Alors je compl'Î-s ql1C 10 passé do Sunia élait mOlé par quclque
chose li. mo.n passé il. moi, du moins au plus r6ccnl.
Sonia ch l'chl\ du travail. Elle écrivait., écrivai L
pendant dos b 111'(''') cL clos heurell, puis s"en nllail
offrir aux journaux sa copie el raoovall parfois un
pèu d'aI'gen t. Il JIIÎ en coû(nitl8.f.freusemcnL de :;01'IiI', Ùt{) voir du mon.ùe ... EIl.(' ~e
déoJ.a.rai l at,INnlte
ct nClll'as thénio <01. lu~I. !l.i con,tre ses ncl'fs. ml 0.
cu hrau l1utLer ! SUH nerfs nt prü:l 10 dCHl:u~
. EIl{}
souffro pl'osqU{) consLn.mmen,l, s'irrite dt' son inaction 'l ('r[fr frl'iI.lltion la rend plus mal.nùc. Un jour
Lan~
'I()1
ln t.une nn ('hrz VOU . .Te no coois pns qu'il
eOt la prnsée de me propoS<'1' oomme modèle ; t'1
voulail seulemen t me distr'o.irc U.ll pou. C'est très
BOUV nL que jn odais avec llli. Vous slli\·rz.le res.te.
- - Pauvre rpct.Hc Princesse 1 PauvI'c prhLe Pnncesse, VQUD devriez Ciro sombl'-e comme un mélodrame, plaintlvo comme un 61égie, cl vous OL~
délitcieuS('.lI1elll gaie... tin luul
t pure comme UJn
gll(!llot d'or... t d"hol'danl.o de vie.
.
- C'est que, dit la Princesse, fai tout un a.r\léré
à rel))' ndrc... les I.\.lln6cs don L Je nc me S u VI OtS
pas. Durant CC {('!li pa-là, Je n'ai pas dÛ être heu·
reuse. ct c'est dl' lA q1le vien l la. contrd~.i
que
vous o.lm~
: ma bouche rit au prés.ent, plus encore
'P~tie
U
'Deux Sous
Il
~
0. l'avenjr, et daM mes yeux, un peu du passé d·emeure qui les attriste.
- Peti·Le Prin0e6.':>e deiégende, quel àge.a.vr.z-vOtus?
- Je n'<m s&is rien ... Je dois avoir vingt-deux
ans ... ou plus ... 0I.l ffio-Lns ... Qu'en prnooz-vous ?
- Je pense, d1t le peintre, que VlOU.S avez l'âge
des a'ooos et du printemps.
Il ,p rit ~a main de la j eune filJe, la baisa.
E.!JJ.e essn.ya de rire, mais son rire était moil1S
clair, et BUe fut tout heureuse d'entendre frapperl
à 1-0. porLe d'une façon dri.scrète qu'e1:1e reoon.nut.
- Ah 1 dit..eUe, voici Sophie... Au travail, monsieur mon ami, et Burtout jumai.s, jamais, ne trahissez mes confidences.
- Ne cro.ig.nez rien : vous· a.vez de plu.s ûnciens
amis que moi, vous n'en avez pas de plus dévoués .. .
de plus sincères.
- Je le croi.s, dit..elle, .t rès grave. Je l~ sens .
III
LA POULE AUX ŒUFS
n'on
- Monsi'e ur le baron fait demander à manam<l la
baronne de vouloir bien descendre au sallon.
- C'est bien, Irma.'
Rien n'était changé dans la chambre luxueuse où
IVIargnerile de F()ol·b erL, jeune mariée, avait connn
to.nt d'heures tJûureus.es.
Quo ce Lemps semblait 10intain, irrécl il. la pauvre
temme ! Ses jomnép8 à present s'écou1.aaent mornœ
dans cette chambre plei.ne de souvenirs des joias
défunLes, et e1le s'ét()nnait de V'OÎf les choses 81 pa/l"ejIJles il. j Ilifli s, tanois q.ue sa vi€ intime 6: subi de
teLs boŒleversrunents !...
!
Ah ! que de mine,s autouT d'.elle, en el~
QrlJclle vainc lutLLe contre les m.q.1l'ValS génies
acharn6s à saper son bonheUtr 1 Une soole. chose
esl l'Cstéle, irJ'édudwle: l'amour de Mal'gu
e l'j,~e
paul' son mar.Î!.
Mais \JoUL est mort de ce qui faisait la noblesse et
la douceur do cci amour. Mme de Folbert ne peut
pll15 estimer oo.lu·j dOJl,t clle porte le n-orn, l'lIe ne
peut p"
hélas 1 se ~!,oi.r'9
aimée... Non, ('Ile n'a.
même
; conservé lllluslOn de cette Len dre.sse.
P.o.rtiojs· HOOlll n dos ~Ian.s,
des crjs d01.1.!l)l1rCIlX,
qui font que MargutCnLe a COtlJSciooc,e de lui Ctl'e
utile encor, d 1 d6f cfLdrc par sn pr600nce d'une
plu<s compdèt.e ~éhance
j ffitüs eUe srut aussi que
? 'almer ?a f.emme s'aime lui-même
Rooul av~t
ct pr6Le.n.d JOillr de la Vle.
Raonl a trop vile compris que la pa.saion doulourcuse ,de :a rem.me ln .faismL flo n <'.oSclav à jn..
mais. II a mOl'l'lS prHl lEI: ~lIe
de feindJ1CI, s'csl monl.r6 fl'<UûCh<>Olllent au tont8JJre, cyniqllC'l'Tloent i"gOYsto.
1J1I1e a souffert d,wu,nlage <'.t ne l'a pas moins 'aim6
.
J 0.0111 Con tend être ()obéi.
C'cst p<Jurqu.tQÎ\ bien qu~
sachant qui elle va l"O1~
ver au salon ct. pourqUOl QIIl l'a[}pe.l'le Mm"'llerit.e
doc.i}e à l'oJ'{l!re reçu, quiLLe (1UJ!lSLt6t 'sa CJ~ambt'e:
DL'{ heuJ'cs soDinent. C: t le soi.r. En pnss(l.nL
d~vant
sn huulLe f;llaoo gu olair-en~
des n ~lu"S
éIcc\.l'lgues, Mù.rguerl,Le JeLLe à wu image un mélo.ncoJiq1ùe rleg~d.
Le temps n'est pl'us où l'flITJOU.r
de l-tooul 1ll.L d.onnait l'i.Ull,(3i.on d'~t.r
CJ boUe. Sa jC I1 l1esSO œt. f~née.
~
ch.cveux ont des mèches gris.es, sonl Lei.n t a pâlI.
Mais l'expns~
ùu rega.rd si fièrrmont résiun.e
gné, La mél.a!l(X)ljQ du sourire lui ~OJ1ne.t
bOllut6 nOlw~Je,
plus .k>ucbfmLo qu'wn '~cla.
t do prin ...
temps et q)ll appello lI'J'oo.i.sLible.mol1t la sympa,Lhi
,M.a.rgu.e..rlL. p~rte
'Ulloe toileLLe 6légllnLe (le mlûLro
1 eXIge), mal.9 dune OOinbe eff.a.cée, d'un gl'ig dOl1X
'U[) peu ma.uve, au corsage à peioo OUN l'l. Un haut
c0·!Jel' de porles mainLenuos par des ba.rot~
de
brLllanl.s cn erre son cou. POUl' obéir à Raoul enoore, cos perl - car cUe Q. prs l'hCM'rour des bi-
�f~
La 'Pdite ., 'Deux ~ous
u
===========:::s:::======== 59
'1mx, l'borreur de toutes les parures: le bonheur
songe à se par,er.
fseul
~ On rit très rOllt dans le salon.
\ 1\tI.argul8l'ite s'attarde un ins·tallit, J.a. main f3iur la.
~rte,
repoUBSée par ce rire vulgo.ire qu'elle connaIt
Jif-en. Cepen:dlant, ehle sa décide... entl'e.
1 Ah 1 voici notre chère petite oorOl1DJe! Bonjour, rnignoo.llle. .. Vou.s wilà. plus jolie que jamais
LoUjollrs ai jeune!
Dœ grosse femme, en robe de soie d'un viillet
'a.ro.ent ou1nagew;ement décolletée, portanJt sur sa
Lmitrïn.e moDe tout un 6ventaire de joyaux se lève
~C
les bras tendus, va vers Marguerite. Mais I.e
,mouv.em.e.nt de recul de la baronne est t.rop net:
,la grosse fermne l&Ï&se reto~
ses bras.
- Ne vous voynnt pas, ma t.outte beJle, nous nous
.inquiétions, craignant que vous ne soyoo malade.
- Je n'étais pas prête, dit brièvement Margl18'rite; veuillez m'exeuoor, ro8Jdame.
Debout devant la cheminée, Loujoums très beau,
d'une impeccable élégance, le baron Raoul de Folibe.rt regaroait MargueriLe.
Au mouvement de recul, visiblement de dégoo.t,
dont e.lle. a repoussé l'élan de la grosse femme,
'Raoul a fJXlnc6 lœ sourdis.
Cetle ombre sur le Visage du maUre donne à la
malhelU'euse le courage de micux ent.rer dans son
jt'6le: elle va d'elle-méme au-devant d'un petit
,homme aJUquel SOn habiL, pourtanL d'un bon faiseur,
,ne parvienl pas à don:ner l'au' il sa place dans ce
,saJon très élégant.
.
" - Bonsoir, mo,ftsLewr Simoon.
- l\ladame la baronn.e, je suis votre très humjble servFt.eur.
EL t'.usu.rier sa rencoig:ne da,ns l'angle dc ia ohe~ée,
à l'ombre proLeohrice de Raoul.
Vr.n.i.ment, <Le oos deux hommes, celui qui a sur
l'antre toul pol1vo.i.r - eL quel cruel pouvoir de
terreur et. de honle 1 ,- semble bien êLre cc beau,
col arroganL Raoul.
l\Iais Mme 00 Folbert sent gue ceLte arrogance,
coUe fierté recouvrent. une craUlte perpétuell . J a:mais le baron n'a CQl1sen.li il faire à sa malh€UICUSe
lf.e.mme l'aveu du crimo co.p1IDis. Maie e}le s.ait
.q u'il a éL6 OOUpii bIc, el elle chcrche, elle UDngme
Jes pires choo·cs. La pensée d'un meurt.re mOrne la.
(l(nLc. Un jour elle Il 056 dire au 'baron :
- Si vous avoz da.ne votre passé une action honteuse, le temps néce.ssaire est écoulé pour que
vous n.c soyez plus sous lo coup d'une poursuite ...
'Libére7.-vous de vo.s pers6cuLeul'::!.
. Non, non, je ne pour- Us ferai·c.nl un s~dn.lc
mi. me déJJarrasscr d eux que par ...
, TI s'Mai L Ill"rOLé, ,les .yeux brusque.rnent baissés
IJlOUT en dérober 16e10.11' à Marguerit.c. Et elle a
JOOmp.ris cruolle pe~sé
<Le m~,
n traversé le cer~u
du bll.l'On ....El~
a fl'éml d. horreur. Ah 1 plu:tôL subir la dOml.OOtlon sournOLse de ces gens 1. ..
.lU ç'a élé 1 UI' hideuse pr~lce
pl'osqU() chnqu
~or.
ILs onol a,n:tê.Oé. « ~
amlS n que, (f'ni1l urs,
pe baron sembl8.JL déjà. CO'llJlIl1tr<l t que Mnrr:,rueritc
~epto.i
sont> di cu SIan, J)1~lS
écœurée, plu,s rnnl'hEJIu'euse et aussi mieux vllmcue.il chB1]ue intJ'u!fÀ.On nouvcUe. Pe'tl à peu, les omlS de su. {amill ,
peux dos llJlnées hc.urOUSeB}, ,s'écariè~nL
fl'oi~R
s
lpar lJatWud~
ckl 1100u1, :flIL\JlLude ~u Ils pre;Dillcnt
<JlOur du dédain ,L qui atnJL, ()/l:r I!lJ, à des::!em. calFOIre M{oJI'gur~L
eUe·même aiJdalt il. lcu.r él~gIO
~nL
ces Il.émoi<o'S 00 son honheur ne frusarut
JO: 'a!l~)rci
sa prOOcnt..e misère.
r l.ongt mps., La j une femme a co.rC>!'\eé l'~poir
la gu\ri.oo d M. Martel. Alor~,
f/penant !1.Upl'~
cf<CJle son. pèl'C, s dévouant il !tll, elle se s nl1l'fllt
moin.s i.ol ,moins (jIX>lra.g
~ c.
I·~t
puis,.il l'aurait
.rodée à défe.ndr le peLit Pi !Te oont!'e les mflu
e lc~
néCnslcs dl1 n01lvel clltourage il. Ile unposé. Il l'lUt
nu pmI. cl.eur poUir LI, un guide pour .J'enf.a.'ll.
M. Marl.eL ne guérit point. Uno s.euJ.e fOts, SA
f1l:1(\ n (-1,., oiClmisc li L'npprochC'r.
;et
~
Elle s'est trouvée en {.ace d'un pauvre être revê"btr
eL qu'un ga.rdien maintenait avec peine. En voyant Ma.rguerite, il a hurlé
avec rage et. l'a. maudi.t.e... Elle n'a p.lus demandé
à le voil'.
Un jQ\ll', SUI l'ondre <le RaouJ, on 8. 81rüe.n.é Pierre
a u saJon où se tJroumt le couple Siméon. Ré.becoa
a pris l' enfant g.UI ses genoux, l'a embro.~ê
- Comme cet &mou l', a dit la groSSoe femme
.ressemble à sa. chère maman 1... Mals il aura.
l'esprit de son père. Qu'en ferons-nous, plus tard,
de ce ché.ru.bin 'l
Il Qu'en lerons-nau.s"
li
Ces mots ont pénétré
d'a.n.goiss.e le cœur de Marguerjte.
Quoi 1 CeLLe temme a.urrut quelque influence sur
le fils de Raoul - son fils il eLle - et Raoul l'o.u1.0l'isel'élJtt 'l ... Ah 1 non, non 1
Depu.i.s lors, la crainte de voir son en.tant aux
mams cie o~te
mégère a. poursuivi Marguerite.
A oeLte époque &le tomba malade ... si gra.vement
qu'cl1e crut en mourir.
Et ce fut unoO surprise pour Raout de voir que la.
femme de chambre de sa femme, la fidèle Héloïse,
choilSissai t cet instant pour s'éloigner, quiLLe r sa
matt.resse a.vec éclat, sur une simple réprimande.
Que1!l'U<OO jo.urs plu'S tard, la bonne du petit Pierro
aya'DIt emmené l'enfant nu parc Monceau y renconlrn Hélorse. Les deux femm
causèrent longtemps. HéJloIse pllJ'a1ssOJi.t con \Ji te.
- J'ai eu tort, d.i.snit-elde. Pauvre madame, je
la regrette... Parlez pour moi, voulez-vous 'l D'7
roand z-lui de me reprendre.
L'uutre prom6ttait son intercession et bavardai,t ,
questionnée par Héloïse.
Pierre s'était éloigné de quelques pas
Sou.dnin, sa bonne s'inqui éta.
- Bébé ... je ne vois plus bébé...
E1I.e I.e chereba sans trop d'anxiété d'abord, puis
en s'affolant Hélolse .J'aidait, ananL d'un roté Lan·
<lis que la bonne cow'ait d'un o.uLr{) ... C'éiai,L l'lleuro
cm le parc regorge d'enfants joyeux et de nounous
bavardes. Beaur..oup connaissaient Pierre, habitué
du ja.rdin. Personne ne l'avait vu 1
Longtemps les ct ux femmes cherchèrent... La
bonne pleurait; HéloIse, très pMe, s'affa.iralt. Il
falluL reverur à l'hôtel, rumonœr la di.sparilion du
pa.U.VM petit.
- Je ne vous accompagne pas, dit Hélolse. Je ne
veux pas voir le cbagrin de MMlam .
Ce fut Raoul qui apprit li Marguerite le malheur
qui la frappl!.H.
- Mais, dit..iJ, on le ret.rouvera, soyez Lro.nquille 1
Je ferai le nécessair.e.
ELie \'6cou lai t, sans parallre oomprendl'e, avec
un él.J'i1ngc ,"ga.rd. Soudain Il éclal:a de rire, un
riTe stridant qui s'acneva en an gl ots.
On nc ret.rcmvll. point l'enfant volé. Et ja.mai.s,
, d<>pu.Î.5 lors, sa mèr ne prononça son nom. Elle
devinL plus triste., piUS sombre, avec un perpétuel
éclat de 'film dans 1 yeux. hlle ne parlait gut'ro,
eL sea !1Clt(ls h~bitu.('ls
ne scmb laient poinL s'offenser <le cC' si1eoe·a. Rl-b ces., OPp nd8J1L, par d'incessantes question$, a' ff rçail génémllr.ment d'obte·
nir mieux que des r~pofi>Ses
évasives et trop brè·
ves. Ce soir encore, ayant entralné la baroun RUT
un cannp6 Ol\ la gros, (.,mm se lai' tomber
pri\'i rI'ell e, nébcœ s'obstina dans ses eItorls d'amabidité.
- Vous avez, chèr~
baronne, une robe meïVp.i1~u3e.
Oh 1 mu.is oni, pour sl1r 1... QueUe jvlie
étoffe 1 ; l <111 volour8 frappé 'l
- D la vanno.
1). la ... quoi, s'fI vous platt ?
de la camisole <Le ro~
tout
-
PU.!1I1" .
RébC'..<)(Al. se rellvoer , avec un écln.L de rire IInl
s.ecou.u IIoll'l i:l()ft gros corps fJVf\rhL
- De ln panne 1... Une ôlotCl' 'lui doit c ûLc.r .~
yeux do la tél<c ... Ah 1 o.h 1 ah 1 PourqUOI pas d~ Ùl
purée ... 1Ii ! h i 1 hi 1
�~60
==================================
Le baron causait à mi-voix avec Isaac. Il cessa
de parler et regarda la Jui.ve qui, s'en apercevant,
répéta son inepte plaisanLerie. Le baron eut un. riTe
indulgent, Isaac grimaça de satisfaction.
Depuis qu'mG na;geaient dans l'opu.1enœ, les deux
époux vivaient en ~aite
union.
EL Siméon est plelD' d'admiration pour le génie de
Rébecca 1 C'est à elle qu'est venue l'idée d'établir
de façon oontinue et toujours fructueuse le chantage
qui met RaoU'l à la merci du couple juil.
Yvette disparue, les pièces accusatrices r estaient
a.ux mains de Siméon. CeLui-ci, venimeux, ja:loux,
après un gros versement reçu voulait, telle une
bomlle, lancer sur la route de Raoul les terribles
accUlSations, puis disrarattre. R&becca en avait dissuadé son mari : m.LeUX volait agir doucement et
ne pa.s étrangJer la poule aux œufs d'or, avant
d'en avoir tiré tout ce qu'on en pouvait prétendre.
- Oui, répO'Ddait Siméon, et quand il n'aura
pLus rien à craindre, le temps de prescription
écoulé le baron nou.s enverra promener.
- Non. il ne nous enverra pas promener, parce
qu'il 8IIlra toujoUJrS quelque ohose à crai.ndre.
- Quoi?
- L'a.ccusation d'avoir fait enJermer son beaupère pour se rendre mallre de sa fOl·lune.
- On n'y croirait pas.
- Non, si on mettait ça sur le dos du baron de
Folbert, riche, considéré. Oui, si du même coup
on découvrait la vra.i..e personnalité de ce bea.u
monsieur... Fais-.lui comprendre quc tu ne croIs
pas il la. folie du beau-père. et tu verras sa têbe 1
Isaac avait, en tous points, suivi les conseils de
Rébecca. Et les résultats de l'habile manœvre demeuraient si sati.sfaisants que l'affreux SiméO'D
en éprouvait, pour sa géniale compagne, une admiration respectueuse et aLteoo:J'1e.
Lo couple s'aLLachaH aux Folbert ainsi que d'Sr
vides sangsues l't ces aff.reux juifs n'éLaient. point
les geugs à exiger, comme cho'e doo, une part de
cel or pa.y~
par des larmes el du sang. Le prix de
réaùisé avai·t subi un réemploi
l'hOieil de M. r-,.1~teL
acti1. En réalilé, de ],a valcur immobilière ni des
valeurs e.n portefeuiJ.Je oonsLHuan,t la fortune de ses
beaux.parents, l'ien ne re "laiL aux mains du baron.
Il avaH dû s'exéculer. C'élai t le sacrifice prévu.
La dot de Margue rite même avait été ébréchée.
Pourtant, le tmin de mai.son des FolberL en Elpparooœ demeurait le même.
Une superbe auto, dernier modèle, est toujou.r s
au garage; le chauffeur a élé remplacé. 13eppo a
Quitté le service. Il mène joyeuse vie dans un monde
interlope et, de t mps 0. aulre. fait à son ancien
ma.1lro une visite in Léress6c. Raoul l'accueille
sans plaisir, mais il salt qu'il doit J'accueillir, et
jamais Reppe ne repart les mains vides.
Pour sulflre à LOUit cela, le baron tr ouve des rcssaumos... dang rellOOS. dont les Siméon exigent
un profit; de6 r ssources qui se tariraient peutêLre. si la disLinction parfaite de Marguerite ne
donnai.t aux Il soirées 1) du baron, auxquolLes on
la contraint de paraltre, un cachet de respecLabilité qui oot une sauvegarde pour Les initiés, un
attrait, une garantie pour les nouveaux Il invités 1).
Rébecca nait encore dans un ébranlement de
touLe a. chair gélaLineuse. lorsque la porte fut ou"c.rte p.u.r un impecoahle domooLique annonçant:
- Monsieur Durand.
Et 10 vénérable vieil1a.rd, ni plu..'! ooUJ'bé ni moins
imposant que naguère, IuL introduit.
Très vile, d'aulres noms furent je tés par le valet
de piccl solennel, la plupart l'onllan ta L sO'Dores.
- Monsieur le
mto de Dollusaccio... monsieur
de Rocheville-La.lour...
El d'ootres plus humbles, comme heureux de
passer inaperçus:
- Duporyl. Grossac, Gu r.i r...
.
Margue.rt Le, debout., accueillait sans élan. mW8
doucem nt polie.
La 'Petite .• 'Df!UX Sous "
~
Le comte de BeLlusacciol grand, brun. teialt
olivàtre, diamoots aux dOIgts. s'in'Clinn. SUl' la
ma.in de la ieune femme et la baisa.
_ M. de Roch ev ine-Latou.r. petit. /trop maigl'e,
teint livide, bredouilla une ph.r.ase Bm'Poulée.
Les oaulr-es: Dupont, Grossac. etc.... personna.ges secondaires et quelconques, saluèrent plus
cavalièrement la maltresse de maison, réservant leur empressement pour Réjlkca qui les.
d'elle. Ceux-là, plus que. les autres,
gro:upa a~tour
étaient de son clan.
Le comte de Bellusaccio s'excusa, d'UJDe voix
caressante, d'avoir pris la lioberté grande d'enga·
ger Ul.1 die se~
amis, de passage dans la capitale.
à vemr ce SOtr.
Le visage de l'vlargueribe eul une contraction
douloureuse. Ce fut le baron qui répondit:
- Comment donc, lrès cher 1 Vos amis sont
nos amis.
Presque .aussilôt, rami du comte parut.
- MonSieur Borùève, a'IlIlonça le valet
C'était un très jel10e homme à l'air âssez timide; un je ne sais quoi de' gauche d'indécis
émanait de sa personne.
••
Rébecca jeta au com.te de BellThSa.œio un r.egnrd
in terrogateur. Il y répondit par un clignement
des paupières.
.La groo.se femme eut un sourire avide, landls que le baron de FoJbert, après avoir dit au
nouveau venu quelques phrases c1e bon: accueil,
proposait n égligemment:
- Mesi~ur
... un écarlé, si cela vous Lenle ?
Marguenle. encore plus pâle. alla. se placeL
dans un ~ngle
de la pièce.
\
En ~n
lDstant, une table à jeu fut dépliée. U1I
trenqullle écarté s'ébaucha entre le nouvel Mlo
et le haron, les autres faisant cercle auLour des
jou1eurs. Le jeune homme timide gagna... ga gna
enoore. Alors, M. de Bolluso.ccio récbama :
- Mon cher baron, si vous élargissiez le r r.
cle? Que -diriez-vous d'un pem bac de famille
auquel nous pounions loUIS prendre part?
- Comme il vous plaira.
On s'inslalla.
- A deux lableaux? proposa le comLe ' je
LienG la banque.
'
- J'en suis, dit Rébecca.
AssiSie .!loin du j~,
raidie, Lâchant d'oublier
00 qui se pnssc à côté d'elle, Marguerite penoo
il son petit Pierre.
IV
FHI
En plein quart1el' des Batignolles, au fond d'une
assez vaste oour oento,urée de hautes bàtises haDiten:L Yvette et Soma Orbihoff. C'est au CÎnq'UJ~me
... un logemt'nt d<l deux pièces très som.
mllJrement meublées.
S~nia"
s,,:uvent oouIfrante et obligée de garde&'
Le lit, s étali rOs rv~
la plus petite. Dans la s&oonde, où ~
deux. fQffimes pnenaient leurs repoo, .on. déplie, le :'Oir pour Yv LLo UDJ tit.cage.
Amsl. que la dLt la pe!tiLe Princesse à son nmi
Paru:! MI~h
an<Le
, la d.octorcsoo est venue 00 fixer
là a.vec 1e.nlant oonvwlescenle voici déjà plusieul'S
années. EII,cg y ont. véeu pauvrement. sévèr'cment.,
el cependant la . gru.o!.é d'Yv.cLle s'est ép6.1Ïouie e~
rayonne, embelliooant les dures réalités de l'exi&
~nce.
Gelle qui n'a pu réagir, celle dont l' ôMrgi'e,
tendue un mo~<t
- le L mps néoessairo pour
enI.ev.er la pellte DEmX Sou.s e t veni\l' .La. oacher
dans ce~t.
gr:mue cité popule use - a bru squemont 1utoll, c t la doctoresse.
Il y a ciMa sa vi trop d'arrrel\l.X souv nire...
ml ne pout en disll'll.ir sa pensée
EL l'en distraire commellt? Reprendre sa car-
�~
1
La 'Petite
U
f)eux Sous "
======= = ======= ======
•
tière, soigner les autres, elle qui a tant besom
d'être soignée 'l ... Non, Sonia ne le peut plus.
_ CalIl:e que l'.wmour 6 ren<l!ue si misérabLe ne
peut échapper il la géhenne de ses pensées, de ses
remords, de ses regrets.
Yvette ne saurait comprendre de quelJ,e.s SO'Urces
.profondes viennent les larrnes auxquelles souvent,
à bout de force, Sonia s'abandonne. La doctoresse
~pli.que
ces l&rmes par un état nerveux J'TlJ8iliadi1.
- - Je suis neurasthénique, ma pauvre petite chêne, n'y prend:s pas garde ... Surtout, que ta gaieté
ne soit point éteinte par ma maussaderie 1 car ta
glaieté, vois-tu, c'est la seufte fête de ma Vle.
S~uls,
deux êtres sont chers à Sonia: Yvette,
l'innoc·ente arrachée par elle à ses bourreaux, et
Lancrot, ce vieil ami dévoilé dont la souffrance a.
tait )}Our elle un frère de misère.
Cepcooant, elle s'est inquiétée de M. Martel. Le
ManchoL, envoyé par eUe, est allé aux renseignements. n lui a été facile d'apprendre l'internement
du beau-pèr.edu buron. Son.ia, de suite, a soupçonné
le nouveau crime des misérables.
Fou, ce tranquille, paisible, pacifique M. Martet?
Allons donc 1
Sonia sait comment il a supporté la perte subite
de sa femme; cHe a. vu à quel point sa douleur
était profonde, mais sans exaJt.alion.
,Par que.lles secol1S5es l'a-t-on fait passer pour
1amener à des actes d'8pparcn le démence?
Vita.l n'ayant point su le nom de la maison de
san~é
où l'on ayait conduit le père de Marguent.c,
Soma ne pouvlLlt soupçonner la connivence du médecin aliéniste. Elle uppo.saiL te malade confié à
-l'une des sommités dont le seul nom est une gal'antie.
Si donc le baron a tramé uoo nouvelle infamie,
Sonia sc crœt certain.e que ses projets criminels
seront déjoués. Elle se l'affIrme pour s'excuser de
quitter la lutte.
Vraiment, cette tAche qu'eUe a cru possibLe déJendre M. Mart.et, défendre Marguerit.e - elle
8e sen.!. incapable de la remplir, Yvette seule lui
devra son selut.
Un jour vin.t où, gràce à Paul ;\Iirhnnùe qui la
tnit tra.vaiLler avec l ui, Yvette sc lrouva à. mOrne
de fournir U'D peu .ct'aide pour les dépenses communes. Le gène fut moins g!'.moe.
Pour la j~e
fllle les hen-r es p~6cs
à l'atelier
'du pein.lre éLalen,t des heures lummeuses ; elle en
revenait LoUIt imprégnée d~ joie. Cependant elle n'a
tamais cherché à défini.r le~
sen lirnoote qu'elle
eprùuvo pour le jeune homme. Il Monsieur mon
am i n, diL-elle par jeu.
El cela résum~
bien 1 déférenoo de l'élève pour
son mnl lre sa cnnilancc dans le bon et affoctueux
camarade ~ue
se montre Paul Mirhande. Jamais
ils ne se vruent seuls.
Cc n'osL pas que Vital meLle cn doute J.o: loyau~
du peintl'e, l'honnêtet6 d.e ~
oh~re
Yvette; malS
d'autres peuvent venir tandIS qu clle est là - des
rapins familiers, bardis, blagu lies. - Peut-être
aussi le Manchot a-L-i1 voulu év1lcr, par sa pré-~ce,
les qUJootions de Miehn:nde auxquelles la
san.s doute l.rop fl'anch~et.
jeune fille r6~ndait
Et en cite il a suffi d'un moment de sohtude
pour qu'Yvet , dans ln joie de SC ~oner
il. celui
qu'eU aim.e sans le sa VOl!' rneore, ail raconté tout
CO qu'clle connadt de
vie. Lors.que Soph.ie, 10
tnodèle, arrivant chez le pein.tre, IIllerr0!'I'lpll ,ces
COnfidences, elle fu t ac:.cueillie uvec malUS d-enlhQusinsme par le maUl'e que par l'élève.
Sophie, Fifl poUil' ses inLim('s, 6lait \IDe peLite
brune bien model~
./l.nx yeux bri1Iant~,
entre des
cOIrfure assez
rounnqu elloo d'un noir lui sant
peu es lhéLiqwe, mais qu'elle modinoil suivant le
gotll d "1 pelntl'cs qui l'employaient.
.
A pe ine arrivée el1 se mit N t deVOIr d'opéror
~
Challgemenw 'voulu.s. llil un tournemain ce
6i
~
fut faU, et du paravent derrière lequel u n instant
eLle s'était r éfugiée, elle sortit transformée.
Cheveux épars, une draperie blanche retenue
d'un geste frHeux ,sur un corps dévêtu, Fifi monta
sur la table du modèle et pri t la )}Ose.
Yvette, ressaisit! par son t.ravail, l'air grave,
étalait ses oouleurs. Debout derrière eUe, Mirhande
examinait l'œuvre commencée.
- Bi-en, ça, peti-be, apprO'llva-L-hl ; ton dessin
s'affermit. .. Tu sais, je reste classique, moi; je
veux la ligne... Eh 1 bien, Fifi.. . quand tu aUJ'8JS
fini de f.aire des grimaces ?.. M-a pa.role, elle pleurniche 1
Yvette regarda le modèle.
- Oh 1 c'o88t vrai, Sophie, VOUs pleurez 1
Sans faQOIl, Mlle Fifi se moucha da.n.s un coin
de sa draperie.
-. C'est rien, grogn.a.-t-elle; faut pas faire attenr
tion. Ah 1 j'en suis t'y sotte de m'faire d'la bile
pour un pareil type ... vrai 1
- Mon enfant., dit Paul Mirhande, je t'invi te il
ne pas nous oonfier tes secrets.
- l'\'Ionsieur mon ami, dit Yvette, vous aurez
beau faire : Sophie vous ccmtera sa. petite histoire ...
C'cst un jour où vous êtes destiné à recevoir des
confidences.
- Cehles de celte jeune persoI1I1e ne ressembleront pas aux vOLres, Princesse, j'en ai peur.
- Pauvre mie 1 Laissez-la parler. Peut-être pourrons-nous qUlClque chos.e pour eUe, et si vigilant
que soU mon VieUX Lancrot, il n'a pu m'empêcher
d'apprendre que le mal existe.
- A propos, il ne parait pas, votre Il gouvernant n.
- C'est vrai. li a quitté la maison avant moi.. .
n aura été reten.u ... Voyon.s, Sophie, a11ez cheorcher
votre mouchoir et prenez le temps de nous raconter voLre tr is.tes se. Cel&' vou.s soulagera.
- C'est une baigneuse que nous voudrion.s peindre, appuya Mirhande, pas une fon.taine.
- Ne vous moquez pas ... Elle ne dirait rien.
:- Je t'a.ssure, ma petile amie, que oela vaudrait
rrueux.
- Non 1 Moi, eLle m'int6resse, cette pauvre
créalure.
- Ben, voilà, dit Flfi, c'est rapporl à RaLphe.
- Rolphe...
- Rodolphe y s'appelle, de son vrai nom ; mais
on dit toujours RçJphe.
- r: te fnit des traits, hein? demanda le peintre.
- Oh 1 j'vous ICN;S, qu'v m'en rail 1... M'en a
toujours fait .. . Mais c'est moi, tout de même celle
'
que.. . oeUe qui.. .
- Oui, oui, nous comprenons ... passe 1 conseilla
Mil'h an de.
- Mais v'la trois jours que j'lai pas revu. Alors,
j'ai peur qu'y' soit pris da'D!S une sale affaire. ..
Elle se rerml à pleurer.
- Pau'Vre petite! dit gravement Yvette. Si indigne que soil celUI qu'elle aime, elle l'aime vraiment... Il faut la pLaindre. Ne vous désolez pas,
Sophie, votr.e ami roviendra.
Les yeux de Sophie étincelèrent à travers f}eiS
larmes.
:- S'y revierut, c'est qu'y sern l'sté c'bemps-Ià b.
f8.1l'6 la fote ... Alors, gare à lui 1
Celle fois, Yvelte ne put s'empOcher die rire.
- VallA bicn, dit le peintre, l'inconséquence féminine ... Au juste, Fifi, qU'QSl-oc que tu voulC1rai..s,
ma chère.
- Ne l'a.voir jamais oonnu 1
Il Y nvait da.ns CG cri u.ne telle sin<!érit6 de <1éBeSj)}Oir, que Mirhando lui-mOme s'émut.
- AutrefOis, ropr-end FiO, ROdol,plle t.M.va.illait.
- Oh?
- Oui, monsieur, il trnvaiJ,lail. Jt étail obez un
médôein qui so~e
d s fous. Comme RodoliplOO est
très {orl, on lUI donnait b. garder les ~lus
méc.ha.nls. Et pis, un joW', y s'a CAché avec el pa~u.,
�~
62
.:.:= ===========-=== ====== La
a eu des mot.s.. . y 6"est dég.ol~
d'Il! métier...
Et en a I!ris un autr e, conclut ironiqueœDJeŒlit
le peintre.
- Non, répond FQfi iintgénœnent, y n'tait p118
rio~
que O'brioo'l er.
A ce moment, quel.qu'oo Û'appa. C'était La.ncrot.
- Je suis en retard, dit Le M-anohot. Je me suis
laissé arrêter par \][l rasoombl-emen.t et j'1éI.i. ftait le
-
badaud, moi aussi
- Un accident 'l demanda Yvettft.
:Ie entre
- NOD . Un€ bataille ... Une vraie bataiŒ
a\pa.ches. En plein jour, c'eet assez extrfrordiJJJa.ire.
GénérBÙement, ces messieurs at1lende:nt Le s oir...
ou la nuit. Ils étaient p lusieurs. Nat UT6Hem€lllt, les
a.gents aooourus Lrop peu noonbre ux O'Ilt dll attendre du renlort. En.fin, on a pu en aITêter ainq,
dont deux ont éLé con<lui ts à l'hOpital, leurs CBlIIla r ad es les ayant mis en fàc.heux état.. . Estroe que
la. séan ce est finie 'l
Mirhan.de et YVl{3tte surl'V.irent la direction dJu regaro du Manehot et ils vire n t So<phie, d esc endue
d,e la taible, 00 sauvant. derrière oon paravent.
Le peintre la rappeJa.
- Eh ! bien, Fifi ?
- J 'm'en vas, répondit Fifi s ans se vetollI'oor .
Vous Th'pai erœ rien p-our aujollI',J'h ui, v'là tou.t. ..,
!.e.u·t q~
j'm'en reioUl'ne ... Ah 1 m alhelU' 1
Mi rhanoo et Yvette édhang èrent un CO L ~ (j,'œiJ1.
Ils (;()U1pl'enaient. La pauvre Fifi tremblmt pour
RoJa.l.he et le vOy8J.t déj à lie ven tre ouvert d'ull
coup de cou teau, ou , ce q ui senait pire 'peut~
L re
à
ses ye u.x , a rrêlé par la t.errilile rousse.
Yvetle éLait toute pA le.
- Les vilaines ohoses ... Pouah 1
- Ou bHez-1es, ma p e tite a.rni€ ... Ou.bOiez tou.t Clé
qui n 'est poo votre arLT prin cesse... :V o~re
art... et
oof.re amitié, o.oheva-t·ij tou t bas.
v
DANS LA BOUE
SOIJlhie
a:vw t quitté
l'ateltier dG P aul MirlhaMl6
à cher cher Rodolphe.
Il te Luj iaJ.I.a.i t, mort ou viI. Et son ÏDsLi.n:ct l'ui
di saiL qu'à la bagarre à laquelle le Manohot venait d'assister, 0011 &mi élaiL mêlé. Mtais cllIo ne
put rien élIIypremd.œ.
D'8ibOIxl, da.os son aJ!<llemenl, ene n'a pas SOIllqé
à s'irrliformel' de l'endroit où la bat&ille Gill 1lrell.
A tout hasard, à une {.em.me qui poase e:hle de~
i d ée
man<l c :
.
- C'esL-y vraa qu'on s'est bllLLu tout à. l'n()'.ll'e
pa.r ici 'l
- Batlu 7... Je ne salis pas.
La femme est uno bmve ouvrière Ilue l'àSlpoct
de Fin n'encourage pomt à La. oouse.rie.
- Eh 1 va. do1lJC .. . n Ja.ronne l'amje de 1 00 ()il:phe.
BUc continua sa route., s 'a)'.WroohtIDt des gI'O~pe8
avoc l'espoir d ' co~dr.e
par']tlr d<ls arreslaLl<> r:s
o [J<6rées. Si (;I!ll>Q vOyn.lt UiCl t~ge nt elJ..e se WlLV'QI18J.t,
a.vce la peUl' d' ê Lrc (( ramassée » pour r ien, sim]'l'1c:menL 'parce q u'el le oher che Ralphe. l]me essaie
.
de se .raisonner.
Aprùs LouL, eJle n'es L J)aS s ûre !Iue RoJuillc r~ t
de la par tie... C'est. bêLe d~
s-e f6.lre du InaUV81S
8Ilng
CQfTllnc
ça, sans savOl! ...
Et une l d6e 1l0UV lIo snrglL dans son cervcau.
PeIlL-être, Jwnrll/111L qu'die Ic oherche, noù:~phe
es L·i.1 reve n\l ch-ez cne? EII" pre 'e le pas.
e'l'st rue BerLlH', un Lnlldi .. Elle grimpe en cou~
ranL "e,".{;ILlier crU~l't.>Ix
cl cher 'Ill! la clef <lll1lS la
~('Lt.e,
sous le pu.illuBtf>n.
La cie! n'y e."t j)Us. Alors le C!I'ur d<" Fifi Se met
lt. ba Ll r e il baLLrc .. Sl'lr, il ,t lev nu ... Hûr 1
El lillè n.'{). e ~l.'frupp{'r, son inl!litllenœ oh!.LllSée brusquement en tl'l'I'eUr.
'Petite· ·u 1) ~ ux
Sous " ~
.
ID DI~esL
pas doux, Ra.lphe, il oo,gne quand. il esi
sootll ... et il l'est peut-âtre.. .
,
EYe 00 d·éc.i.de pourtant, frébppe à petits coulPs'
~
s .
Un€
voi~
étou1iée r épood :
.
- ·C'est-y t'Di 'l
Une m ain ~tr'ouve,
la p<lrte p ru<lemml/ffit,
- Oh 1 te v là_. te v hà, Rolphc.
- V as-tu te taire, malh~}'eus.
...
Sur Fifi qui vivement est emt,rée, la porte se referme et -la rniséJJ&b1e pousse un. gfun.issemen l.
'
. . je l'sav,aÏls ... '
- Oh 1 1& d>e d'là. 1 je ~a.is
- Vs.s-tu p-as g u euJe.r 't... Lav-e-moi puMt
l'.bMO.
RodoJq>lle est à. d:elmi dév&u.
Sur SOBi torse de Intteur, le s8!I1g couLe o'm1re'
a&!ge ])laie ooaire fépaU:le.
- Un peu ',Pus bas .. , ça y était... Voyons, fais
pas Ja bête .. . De l'eau Jl.1'OFe .. . et pus vUe que
ça 1 Ousqya t'étais, au lieu de m 'a Ltend·r e ?
- J'p.aux IP as t'attenJdœ tout l e tarrrps.. . faut
que nl'&~aiJe
q~
j'te w ... J 'tP.ose ohez des peinI!.res... T as oUJbllé.
.
- Ah 1 vom.
~
On. L'en donnera des femII\es qui turb irlent
comme moi.
- As--tu fini l... Et Th'ipJe-urn.iclle pas.
Rolphe, aUaM SUT une clI.aise , slilUlHlait fort, .
pMe, lui aussi. R epr.i!re de ja;lousie, elle daman ..ùa. :
- Qui qu'ta. fait ça?
- C'est l'Bibi ùe Grenelle.
- Ici?
.
- On y r e.ndrû. sa visiLe.. . Soye tra n quill e t
LaiSOO-«l1.OÎ m'guérir et j'ui f... une boutonn ière
d8.D!S l'esLomac ... que l'air y passe.
- p{Jurquoi qu'y L'en veuL à Loi ?
- Pas à mm, mals an s11ent. J'cognais p OUl' 1
Ernesse ct Bibi pour un c&maro. C'est &a h i 8~
toir~s
de fem.J'IWs.
- Je l'pensai.s. .. <::ria Fifi exa.spérée,
Miflllgré sa souffrance, RQIlphe conse.rvait de ~
vigueUl'. SOOl QOlng s'Blbattit rudement sur Fift ql11
chanoeLa.
- Oh 1 g.tmùt-cJle
L 'homme jlJ116.. 11 étaU le maltre, peut.-étre ? ..
AllaiL-e:JIIe se la.ire ? ..
Domptée, elle s'em pressait a.vec oos mains Lrcmblantes. Quand il au.t assez vocifél'é, i.!l18.{;onLa.
- Uue. sale Il:fo.i,r~
.. y en a un qu'a son <lPll1p Lc.. .
C'{)st mOL fiue Je J al sonné... . que le sang y sodait
par 1<!,S esgou.r·<!es .. .. C'es~
il 00 moment--là que Bibi
m'a crevé. J'y aUl'aJS fl1JL payol', Lu peux le croi re l.. . Mais ~
ae.r:go[s arrivaient... J \a.i fait la fUiede-l'air ... J'smgna.IS ... 1l~
C01'e tr op, ça n>se voyait
pas .. . Jima. rrupporlil mOl-même ici au lieu que les
autres, C'<lst les sergots qUi les on't for~s
.. . à 'J' hO~ülI,
ou men és au post.c ... MaUtcur
- .RolJp.OO. VJ,à q~' ça reco.ul!Je, j.a.u.I. un médecin ...
- Un .. .. non , ~s
J'épè le , pour voir 1... Ça se-rait l a peme .de ID être tiré d'là pou r me r 'melll-e
dans lctll'.S ,Pll?.ces 1...
- On y ~L
que tu t't1JS rais QI.1 en ... J' sais pa.s.
-:- En ~
tJ. moz;. bw'cau, ra.illu RoLphe. F ....
T?Ol la 1P.tllX1 J V Dg rn m ettre au pieu... Mals j'vas.
e r, .l1lA p a u v' gosse 1
t enco~Dr
- N d is 'p1l8 ça ... réllondit la tris le Fifi... N 'dis
pas ça ... ~o n lJC} ~ )m o 1 C'es LpllS qu'l u soyes cares.
san t... M ~lS
.Lu s ru s ben quc j'Le gobo eL que j'Ierais
Lou L p ~u r lm ... tu l'lill.ls bon !
- C e.",t bO!!. Dœllnc-moi à boi.nc ...
Le l c~d(,lfImn
Paul Mli r hDnde cL ) VOIl!Je utLcndil'eut vamelllent l eu.r modèle.
So~
l ne
ne peut quiLLe r Rolphe. La. Oèvl'c J'u pris,
i1 déh!"O, olaq\NlJ1t des den ts 1iU têle ('.n f(}lI. SophiQ
plcure tou Lcl:! ses lUl'mp . <:lue ro.ir·c·/ DésobéI!' è
Hoclo1phe en dcmllnda.nt du sccours '{ Elle lit., J'o.:J(
pn~
: son ma
l .tr~
l'./\, dCPli.~
lon gLe.mJls pli é iL 1'0b.éi!:lS&I~
pr~we.
I.~t
Cop.on.dJant, si l e lllUl empi(·l ...
81 10. pl;w.e s .cnvonome ?
Pendunt plusieurs Jou r s, ill res La. prùs du blc.ssé
1
�~
La 'Petite
U
63
'Deux .sous"
sans le .quittJer d ' une h-ew e, vivan t -de. rien, d'b'i,llenrs Slins OIppétit, le cœur trop serré.
Cependll.l1t, les quelques frru'lcs économisés durant l'a bsence de Rodolp.he, s'épuisèrent. Fif!. les
eu t vito employés chez Je .pharmaolen à qui, à.~,tou
hasard, elle demandait « une pommade pour une
grosse coupure )l, au restaW'aIlt où ello prenait des
" portions li alléchantes capulJles dc Lenter, entre
deux accès de fièvre, J.'aP'Pétit du blessé.
Pen{kmt une de ces accalmies, RodoLphe inquiet
domand,'l :
- V'1'ô. combien de jours que je suJs là, hcin. '1 ...
EL sans qu'lu gagnes rien '!
- J'y ai pas 1'cœur à travailler, .l'opondlt FiiI.
- Si t'attends ça ... Faut pourtant vivre?
- EcouLe 1 Veux-tu g:ue j'te quitte, seulement
deux heures ?.. . J'vas Chez l'peintre qui m'e~
ploie, qu 'est ben gentil... m'SICU Mirhunde, qu'l
s'appelle. Y m'av,anoera q~ éqles
ronds, si j'y dis
qU'fuI du tourment.
- Qué tourment qu'lu vas y. dire?. . Que ton
daron ou ta claronns est malade?
- J'dirai que e'e.st moi.
- Fait est... qu't'as une sale mine. . on l'croira:
Va voir si r:a colkl... va.
FiG rétablit la correction sp.6f'\iale de SO. coiffure
enfila une mauvais'€! jaquette fol courut. il. l'Illclie/
',Ile y Lrouva non le peintre, mois Yvclte.
.Ln jeune fille venait là chaqul} JOUI', !m\·ailJ"r.
81 PUIlI , lirhandtl devait sortir iI ln I,'liss.ait, di~a.nt
: Il Vous êles chez vous, Prinoc:;pc ! )1
En, ce cas, Lfl.n~rot
demeurait au,p"es d'Y\ 1 t[ ').
Pour ri~n
<lU monùo, il n'Q\'lL t;Oui"euti à laisser
I.n jeuno flUe seule dt1ns ce l1uurticr c,'iCenLliquc.
EUe avaLt beau promett.re de n 'ouvrir à pCl··
sonne. Ln L1Cl'O t. s'anlêL.a,it à l'œ l.er. ColLe éLroj~e
v~gilance
cffl'uyo.il Yvet.!,(} lui rappelant lc mystél'1-eUX danger couru par elle j adIS . Sans doule ce
danger m( te enoore!
Ce ru t le Manchot. qui introduisit Sophie.
- Eh! hien, dit gu.ierMnL Yvotte, c'est joli de
nous plru1lel' là de cetLe façon!
- F'l.ut pl1S /l1'en vou.loil" ma.ùemoiselle. J'en
ai 1\ du linwuin, n,Uer. 1. .. El c'est pn,s fini. l\l'sicu
l\'Iil'hùmle n'est pa.s là ?
- Non. Voul z-yous raLe~d
... ou puis-je lui
fo.ire votre oomallsslOn? l'vluls vous venez peUL·
être posl,'r 't
-
p{)'!:'.er 1... Ab 1., ben, . Vl'ui .. J:ai pus cor
10
Lemps. FOlllit ~eq
J J·al?'phq~<e
..
J a.i un malad-e ...
Jo veux dire c oP.S L nJOl q u e,st mn.ll1d0.. . Des lnngUiOUU'S d!ums l'esLom~
.. : Pas moy,en d'rcsLer debou L. J'pourrais ~
t mil' ~
pose" ben s ilr.
Elle paI'la.1L Lrès ViLe, désIr use d éloudir yv , el~c
<le Lui It\Îf lIbljcr s J.~ débu L malaùroit : 1( .J 01
Un JnIfLLarle )l. YveL(,c la regil,f'd,(1 l on~
u cmenL.
EUe
yH 10::1 ye,u x roug.i.s plill' la voQiU-e e ~ tcs lu.l'mes, Les
j'ou,es Lerreu&es.
- !Pauvre Fifl .. . 9Il. ne va pas ?
L'accen t d.e bon té d'6 la joune fille Joncha la
misérable, ello se mit à ple~'r.
DtlU0CmenL,
Yv-eLto nUlu ve.rl;! elle la. fit asseOll'.
soye\'; gentillo et roisollnabJ(), au Heu
- • oph~G,
de m nnl.lr et de l?III uror. l~suy
z vilo .vos yeux
eL dites-moi ce qUl vous fl1Ît [ont do P('LllO. Poutêtl1e pourrai-je queLque chose pour VOliS '1
.
- Ah! VO li S nvc7. bon acouf, VUU .. , au hl'U
de V(lU S Jn(H11Jl , de moi C01l1111 m'Rirn ~lirh
rie.
- .Je n'ni Ilucun envie de me ll}(HjUer Cil voy/.U)t
du C;h8~Iil.
.
1,l1llero!, j U8I'JllC-Iù, n'avait ricu dlt. Il se ru,p·
!)l'ochn.
~I)rhil,
V01l8 voulez une IlVOl.IlCe ?
F:JIII' le l'e/{tu"da il tI'f\.Ve1·H f l Inmll e ' et fil, nd·
mirnLivo: .
- L'u. !.ollL de mÔl1le comp,.I" JI' vieux ... Oh!
p8.rd0n, m'sieu 1
- ne l'urg nI ... (:'I.'sf pO Ill' (rI nvoiJ' q\1O vous
plCII('f Z? dit Yvo n~,
ch l t1(~e
~
- C'est p6S pour en avoir que j'pileu.re. corrigea
Fin avec une sorte de dignité, c'est paree q~e
je
pIeure que j' en ai besoin ... Je veux dir-e po,rce que
je suis dans la peine, vollà 1
- Je ne peux voUS donner gr:an d'ohose, mo,i,
ma pauvre FitL .. Je ne. suis pas riche ... Voici toujours un~
petite pièce. Il iaU<iru revlElftlÏ.(' quand
M. Mirhan de sera là.
- Oh ! me,rci, mooemoise.Ue?
.- Altendez, ne vous en u.Jlez po..s enCQro ... Vous
dItes que vous êtes mallade.. . Vous n'avez pas
l'ail' bi en vaiIJan!e, en effet.
'ous mentir... c'~t
pus moi,
. . 1 'Oll, j'voux pus
c'cst... ll!le amie ... une umle~
comme qo., que j'ai
chez mOI, et aJor~
.. .
Yvett.o retint 11[1 30U1'1re. '
_. Fifl, je ma souviens de vos confidenoos. Celle
amie , c'oQst TIodolphe, n'est-cc pas '!
SOphLC bondit, épouvantée.
- L'nomm cz pas. .. Ah 1 maJheur 1 S'y savait
quo j'l'ai dit 1. ..
- Vous n 'avez rien dit. C'es t mol qui ai devil1é ...
Pauvre créat ure 1
Lau cro L, ùe nouveau, par'la :
. -:- Cette fille s'est s.alIVée, 'l'autre jeJu r, qlNlIld
J'fll raconl6 lu quereJle ~ la bataille plutôt - de
ccs ehenf\pNls.Son ROdol,ph.e devait cn Clll'e et iJ
aura élé blessé.
Le visag-c ']e Fifi était devenu VI.!Tt 1 Dans &es
yeux il y avait de fép ouyall lc ete la colère aussi
et IIne sorte de résœution dé~èsp6re.
En ccl instant , l){)u.r d6fcn1r~
celui qu'elle aime, t·' lfi sr. rail
capabTe de lJJcUJ'tre.
Le i\Ianchot dev.Lne ce qui R'est pn.ss6.
:- Votre ami ~st
blessé, ct plutôt que ùe se
laJ8ser prondre, Il r.réfère reilter n;n,s soins. Je
suis bien sOr qu'il n a pas vu de 111&If'Cln.
- Non, répondit Fifi d ' un a.ir Jlurouche.
- Vous aimez mieuX le VOiT mouri.r '1
-: IY veut Cl ue j'ap'Pellle personne... f\1."l1R pourqUOi qU'vOll S lll'faiLes flirl' c''1ue ](10i>5 P' ;; 'l... ;\lisère de misère! S'y f'ovait ça ...
- 1vln pauvre flllr, reprit -velte, j'Rl rnnd'pitié
de '10\1.8... Je vondrnis pouvoir l'OU,:! l1f!'UChOT Ù
cet~
Vle. En ,uLteMllnt, jo SC1' is contenLe de vous
èlre bonne à quelque chose,
n n'y pcut rien ... quc de dem'mder a m"sieu
\Iirhflndc (1e m'avancer.
- Vnus ne voulez pas qu ' on VOU!;! nvoio ...
- Non 1... C'est pourtant vrui... M'sieu. Mj~
]'llande sail olt que je demelll'f'... Qu'y n'envoie
pel'sonne, surtout, qu'y ne vienne nus, lui non
ll'l.11S !.. n'nhord, je rest.e jl1
i.~
1,\, poursuivit
Fl0, Làchan L .d~
répae~.
J 'res!e près de Rolphe ...
\'(ll.l't , Au plR.lsl.r, mon~le
ur , mndnrrio_
Et vUe, l,in reparUt.
VI
CI:IAR ln
1
Sonia, depnil'l qtIelque-..'3 jours , nlJait m.ioux. Pour
compl air il Y\'c(Le,. eUe sorbait ün pëll Ses nerfs
la fltlSUienl moins soul1rir.
On Nail (\n avrll. Le ciel pnrDif1~t
Ri d&lioo!~Jn e
nL
hl en, l'Jur si lège·r, (1) Ir3 C(f'urS lcs plus
tl'rillt!'l 'Plllnip n! lel1r peine IlLLOnll 'e.
!I est dl' r:c:, jou.rn(>.e !'l e,'quises 0\1 il semble qll'll
SOIt lIuposnhle d'CLr~
m.alh6'1r
~u.'
On n spire un
t.~pnil'
illljll 'éri' , l'impossible f;{'mblc TK>. illlc. ilJais
les snil':; dl' ces jou!1s-là sont jl(ll't1{'uIÎll menl
hllll'rls aux t'lml ~ ('on dNrr!'lse.
Apr?'fl nvoÎr' tout le jOllr h{>ni 1... (>1 J'II' s'N!"
trolvé~
moius ml ,lh(>~reJ.
e ,0111, Ol'blhoff, vcrs
t .oil', 50 !H'J1Lait ~p.rlse
~k
l'borl' 'Ul' de VIVTe.
Qunnd Yv~tlp.
!'\)virnt de }'.at.elicr d~
PHul li l'ha.n1J e
III dort
esse (!lait étendue sur .Ion lit dans là
chalilbre qui, e éjà, s fu.i.suit ob",curc
1
�~
64==================================
- Oh 1 Sonia, dit Yvette en l'embJl8.SSant, êtesvous plus souffronte ?
.
- Non, non...
- Vous n 'êtes pas sortie, je suis so.re, gronda
la jeune fille.
- M'aj,g si, ma chérie. Je l'ai fidèlemen t obéi.
J'ui marché, plus même que le temps convenu.
Peul-être me suis-je fa tiguée ...
Y\'ette s'assit au bord du lit et, prenant dans
ses mains La mai.n fi évreuse de la pauvre femme,
douoement la caressa.
- Sonia, ma chère grande anùe... Que puis-je
pour vOOS d!isl1raire ... Ah 1 voici. Je vais faire un
réci~
dramatiq:ue. Fitl... vous savez, le modè'le 1
- Oui. Elle ne revenait plus, m'as-tu dlit 1
- Elie 6. reparu aujourd'lmi, non pour poser,
J1'\lS.is pour demander seco1Jl'S. Je vous ai dit l'histoire de cette malheureusc Sophie .. . Voilà que son
horrible Ralphe cst reven u chez e]Ie, blessé ... peutt-tre gravement, et pJu~t
que de risquer d'être pris
(cet homme doit avoir (les crimes sur aa conscience) il préfère rester sans soins 1 Fifi n'ose pas
lui désobéir en ap/pelant un médecin ... C'est affreux de voir une femme aimer un tel miséra ble 1
Son.~
eut une sorte de gémissement.
- Ah 1 oui, c'est af!reu.."i: ... affreux.
- Comme vous voilà redevenue nerv(,llse, SoIlia chérie... Mm qui croyais VOWl dist.roir.e aTe4
mon hi.stoire, bien qll'oCl1c ne soit pas très gade.
- Non, non ce n'est pas ce1u ... Je p1ui!lJS Fifi.
- ~Joi
aU5s~
j'ai grand'pilié, mais peut-on appelcr de l'amour un sentiment qui a pour objet un
t,l rc abject, criminel peut-être ...
Sonia encore gémit.
? demanda Yvdt.e inquiète.
_ Mais qu~avez-olS
La main de Sonia serr a plus fort la main de la
jcooe fille, Elle supplia :
juge pas ... Tu ne
_ Pourquoi parler ainsi ? ~e
1'~uX
gavoir .. Aie seulement pIllé 1 Pauvre, pa.,u:vre
créature 1
..
_ La m eilleure façon d'exercer la plllé envers
FiJi scrait de la sépa:rer d Ralphe.
~
Elle ne se laisse.l'nil pas fai re.
EL Sonia r é péu., plulS douloureusement :
- Tu ne snhs pas ... tu ne sais pas 1...
'"
Après un moment, la doctoresse aemonêttl :
- Sais-tu l'<adrosse de ccLLe fine 1 Ecris--la.
_ Ecriro l'adl-eSse de Fitl 1.. . n ne fauL !la 1100·
ner à personne, vous savez. Ln malheureuse petite
a tant supplié qu'on n'y aille pas t
- 'e crains J'i{'o . Ah ! crue de misères dans ce
monde 1... Et elle acheva 1.out bas : Et que de misérobles 1
Le 1endemai.n YveLte SOI'lit de bon maLin. Elle
nJaait porter son trava.il il. l'un des magazines pour
lequel. enle doosinai;t. Lancrot sorlil de son cOlé. Il
('{)ntinuait è. gag;ne.r un pou d'aTgcnt en posant pour
la tête. Sonia' ee d6clruro las&c et promil de sortir
plus tard. Mais fi prino fllt-c-Ile seule que :La dodoj'csse s'apprêta en hlloo.
Elle ne portait p~us
~s
chevC'llX ooul'1s, mllÎts die
sévèrcs bo.ndcaux, tout blancs il présent. et son vi,
~nge
éma.cié, ses yeu?, t'I1 u!,lris .lJ,C l ?eva!~n
t de l a
vieilltiJ'. Pour la p1'Cml~
f OlS . depUIS bien long(.omps, Sonia. Orbiliof! marchrut il. pas pressés;
pour Ja prem ibr.c fois depu is Lan ! d'années, elle
avait un but.
..,
d'
La maison qu'habiLoJ.t 1"111 Ignomlt le luxe. un
concierge. Des caries clouées aux. por~s
lD~
quruent 10 nom d s loc.at.ail'cs. L'esc~hr
étmt éLrOll,
très raide, obsc ur Lbooou:7l.. Il faiJllall de. bons yeux
pour Lire sur \ ~ cll1"lons les noms écrll.s, le plus
.
oouvent, par une main oll.ulh ubilc.
Sonia enfln trouva ce qu'die cherchait.
Pas de son~tl
. ENe fJ'f.l})pf\. Per&Qnne ne répon.
dit. ElD.e [rappn pins fort.
AJor.'>, il pli. fnrt.ltfs on (1 JlpT'ochn de 1(1. porte, pUIS
on s'immobilisa. S on in dH à mi-voix:
- Ouvrez, Sollhio, c'est llll (Unie.
La 'Petite" 'Deuz Sous"
~
Elibe entendit tourner une clef, ne battant fut
écarté a v ~ c Pf.éooution et Ile visage c hiffonné de Fifi
apparut, m qruet, entre 600 rouflaquettes mal peignées. En voyant dcvant elle u ne personne inconnue à qui el Le trouva l'.air auslèl'e, le modèle s'efIara et, dans un instinctif mouvement de défense
chercha à r ef,ermer la porte a.u nez de l'ét.l'aIlJcrère:
Mais cellile-ci avait prévu lIe g.cs Le, et déjà elle se
f,aufilait, obligean t Fif! à s'écarter.
Én mémé temps, elle S"efforçait de la rassurer,
- N'ayez pas peur de moi, ma petite. Je ne veux
de mal ni à vous ni à votre bJ·e ssé, je viens le voir.
Je suÏJS médecin.
Fifi, se baus~nt
sur JJa. poinle des pieds, UlchaiL
de masquer le ht placé près de {],a porte. Elle dit,
les den ts ser rées :
.- Y ;n'est pas dei... j'sais pas ce que vous voulez
aire .
- Pour quoi mentez-vous? demanda douce ment
Sonia. ~e viells de 10. part de mademoisel,le Yvette,
pour quI vous posez chez monsieur Mirhande et Je
vous le répète, je suis médecin.
' ,
- En t{:cz, alors.
Et Sophie s 'écarta, <lémasquan t le lit.
?ur l'oreiJiler d'un blaI?-c douteux, Rod_o:1phe reposait, les yeux clos, le VIsage cmpO'Urpre. Sonia eIfleura délicatement le front brûlant. Le blessé entr'ouvrit à peine Jes yeux en grommelant; il avait
le soüffle court et très fort.
- ,Cet homme a la fièvre.
- J'sais ben ... et pus y va, pus il I·a ... Y ne me
!recon:rlo.1t s~u'IOlnet
pus aujourd'hui ..
EUe se mit à sanglot.er, la LêLc dans son tab1icr.
- Du calme 1 Nous aJ10ns a.c soigner, Avez-vous
confiance en moi ?... Je vous assurc que persol1!lc
ne ~aur
qui je viens voi.r et mêm e que je viens ici.
Flfi <tamponna ses yeux et, soudain conflante, dit
avec ferveur :
- Ah t c'que vous avez bien fai.t d'venir ... Vrai
de vrai, j'en devenais fo.l.le.
La plaie , ainsi que la doctoresse s 'y attendait
~ta.i
violemment enflammée. La Il pommad e 1) ach
e~
tée par Fif! avait eu les plus mauvais résuJt.ats .
P.eut-ê lre était-ce sl1rtout La fau te de l'irÛlJ'l11.ièrc
improvisée à. laquelLe touLe nolion I}on p.&.s d'anlisepLie, mais de s imple propreté, étaIt cerlainemcn l
étrangère,
Sonia aVtJ.lt- ctl soin de sc mutilr du 'Ilécess,1.ÏJ'e.
Elle Iftt chauffer l'eau, nettoya, fil un pansemcn t.
L'inf1ammaLion, l:écoO.l'tement des Uèvres de la plaie
rendaient i mpos~1c
il IJe:l?ter les points de SU~l-e
.
Rolphe demeurelt lllconsclCmt.
- EsL-ce qu'iÏl est très maàado? demanda Fifi
qu'6pouyantaft cet~
longue prost~in.
'
- OUI. Il TI aurru t pas fallu .. . M·aIS pourquoi vous
faire des Teproches ? Ce n'cst poinl votrc fauLe.
- Et il. présent 1
- A présen t il n'y a rien il. faire quo de lc ma.int.eIllr è. la diète et qu'à tAcher dc couper ceLLe fièvre
Voici dos cnh~ts.
Fail;es.lhJi en prendre un quand l~
fièvre sc~a
tombée. Je revlCThdnai demain.
- Vrru ?
Maintenant, So~he
meLLait. &ul~
t d'emprcsse~nt
il Técl.ame~
laIde de Lu blenfals-anlf'l inconnu<l,
'tlu<:lle avaIt rnlS lout à l'heurc d'entéLcnùlUl il la
refl1Scr.
- Jc reviendrai demain cL tous les janr jusqu'uu
m om~
n.t où vot.ro blessé n'o!lura plus besoin de moi.
El VOIC~
un peu de monnaie poUl' que vou s ne Boyer.
PB:s obligée de ~tou.rn
c r aujourd'hui chez monsièur
Mil'hande, Ne J!lI SseZ pas so un volre mnlad .
- Oh 1 tout d m6me... tout d'môme... C'quc je sui,s
BouJag~
l... SU~OL
C]11e VOlllS m'pl'omeLLez ...
Le v!~as.e
atkIst6 .de Sonin s 'éclaira d'un SOUl'il'C
il ce tLe mSlstance qUL o'osai t ne ttement s'affJrmer .
- .l e vous prom t.s d't:lre di sc!' Le ... Vou s l'ou rTez
rassurer ce garçon , s'il s'inq11ibllC cl c ma vcnue iCI.
- J'su is tranquill e nlor:. Icrci 1...
Sonin ne pouvait comprendre quel moiil l'nvaU
�c;i7-
La 'Petite
Il
'Deux Sous ..
poussée à venir au secours de cel homme. Depuis
l'effr<>yable secousse où avail sombré toule son
énergie, c]Je ;ne connaissait plus la pUié.
l\lais en écoulant YveLte redire le récit de Fifi, de
nouveau la doctoresse a r essenti la compassion.
ELl'e revint de sa visiLe plus apaisée. qu'elJc ne l'a
Jamais été depuis la nuiL.tragique où elle découvrait
le cadavre encore chaud de la bonne l\Ime MarLeL.
Elle a fait du bien, il lui .c<n vient quc.lque douceur. Yvclle fut rayonnante en apprenant que sa
chère Sonia a eu pitié de sa pl'ot-égée ; eLle prétendait accompagner la doctoresse le lend emain. CeLleci s'y opposa.
. .
- AVlee mes che\"eux blancs , ma mlgrlOnne, Je
puis me risquer pa.rtout. Mais loi ... Oh ! non, vraiment, ce ne serait poo la place.
YVlCLte céda. A sa second.e visite, 10. doctoresse
LrouVf> le maLade en pleine connrussanoe.
Il l'accueillit sans élan , eL Sonia vit qu'C, SQphi.e
avait les yeux roucres. BUc grunda :
- Vou s avez ma.f tnené celle petite il. cause de ma
visite 7... Eh bien! mon garçon, elLe ne m'a point
appelée. Je suis \'el1U'C de moi-Illeme. Et c'est tant
mieux pour vous que je sois yenue; je dois vous
dire que vous flJ.:ez un mauvais coton ... Pas belle
du loul, voLre blessure... Allons, ·exo.minons ça,
vou:; protesterez après.
- J'aime pas qu'on s'mêJ.e ... commença-l-il.
- " (ms aimez mioOOoX crever comme un chien 7
Alors , très bien. Bonsoir 1
'onia faisai,L mine de l'Cpartir.
Rolphe se mit ù geindre.
- Ah! ma bonne darne, dit Sophie, n'vous en
allez pas comme ça !... Faut ben pardonner... Y
sail '{>Us c'qui dit. .. Oh ! l'us beau m'faire des yeux,
j'dis c'qu'e t vrai ... Véux-tu L'laisscr soigner, malheureux 1 D'ubqrd, à présent qu'la dame m6decÎln
t'a vu, qu'é soit où que l'es, é pourrait toul aussI
ben l'faire avoir du désagrément, qu'elle te soigne
ou p a s . .
.
onia sount il. celle lnglqne, el nolphe en fut
frappé, Il sc détourna, l'air penaud.
- Voyons, demanda la doclore5&(', \'oulez-vons
m pOl'mctlrc de refaire ce prunscment? ne s~'ule
chose m'inléref7sc : guérir clio(' hle.s.sur . Tl'ouvezVOllS C)'Ue j'aie 1'air d'un mouchard 7
ll.oL.r.he se décida ù. ln rog81'de.r, h6sila un instanL,
puis Il dil, moins rogu.e :
- Non: J'croi& pas que vou s te en OLes Il.
m il se r elourna p()lUr sc fait' pans l'.
Ce jour-là, So~ia
pada pou . Ellp donna :sos instructions il. SOphlC, rebanda la plaIe el pru'lll, n'emportrunL comme paicm nt qu'un courl merci de Rodolp1lC. Sophio, conLcnle, no .songoait m':me pas il.
rOnl-ol'cier. La doclre~
l'evlnL. L'homme s'appri.voisail. Il laissail Sophio b~varde.
- C'est un bel homme, c pas,. mad~
7 Et fort 1
C'est il. cause de ça qu'on l'avrul pris pour soigner
des fou~
.
- Oui dit Ro1phe un ,r ude métIer ...
Quan?' son malade' ~ut
se lever, Sonia reparla de
5C6 anClCnnes oœupa[ions.
.
- EsL-ce qué vous ne voudl'lez pas les reprendre ? Vous n avez pas honle de lu vIe que vous menez?
- Si, des [ois.
Il ne 50 s·cnt plus en m6fio.nco. Cet~
fe~maux
yeux désolés qui l'a si dou c In nl, SI potl mment
soigné, par puro bon té, lui o.pparalL d'une e 'sence
SUJpéricurc.
. '
Il n'~l
pl116 peur qu' !Je lui fa5se o~Ol[,
des ellJnU1S ;
mais il l'll,i déplu.tt qu'olle Je mé.pl'lse absolument.
Il écoule J s conooils qu'olle lui donne : ~he]'c?r
du travail, viViJ'c mioux ot, pui quo sa pelllo. a.rrue
lui est si dévouée, la reliror de la boue nu llou de
l'y cn roncor.
.
- Oui, oui, grommelle TtolphC', mal. convOlnou,
ben sCr, oui, m rci. .. Jo compr nds blCn ... PC'IlLl!Lro. Oh 1 Caut ~
oroire ct . choses ...
6. -
LA PL."I:lXI; "DEUX
OUS ••
Il s'arrête, gêné pour mentir, sous le beOlU re.guJ'(l
clair de l,a doctoresse; et, cessant de parler de lui,
il s'écrie, cette fois sindre :
- J 'voudrais vous r'valoir c'que vous avez fait
pour moi. Si, des fois ... o.n ne salt pus ...
Il cheJ'Che comment il pourrall être ulil-e, cl
trouve en.fin il. donner un conseil.
- Tenez, ma.dame, j'peux toujours vous dire
quéqloo chose ... Ça pounait servir, Si, des fois,
vous connaissiez des pauv' bougres qu'ont J'crtLne
fOlé et qu'on soye pour eux à la recherche d'un
asile, ne 'Les enlVoyez pa.s là ousque j'travaillais.
- Où donc étiez-vous 7
- Chez l'docteur Probe, à NeuiLly. Ah 1 mes
agneaux, quelle turne !... Et c'est ça &1JSsi qui m'a
dégoûté. J'suis pus méchant... QUQ,ml j'voyais ...
Ah 1 non, tout d'même, j'peux ben être canaille,
comme vous dites; mais y a des jours où qu'la vie
VOU5 dégoûte el, vrai, j'f'rnis pas c'qu'y fait, le
docteur, non!
Sonia devenait n.l!en ive. En dcananda:
- Quels lraitemenls fait donc subir co doclour
Probo ù ses pell1sirJ11l1aircs ?
- Oh ! j'dis pnil qu'y les marlyrise ... Non, pour
ça ... ni qu'y \~s
fu sse mourir de faun, ni qu'y soye
rude avec eux.
- Alors 7
Sophie devail savoir à quoi s'en tenir.
Elle, si bavarde, s'inquiète, sc met à tousser
d'une petite toux d'u\'el'lif'semenl.
- Zul! dil l1.odo1pllC . ln ll'ouves que J"ai la 1angu.e trop longue ?.. Tu m'embêles... 'ai l'droit
d'parler. EL si ça fait ·des e-mMtcments au l'ahron,
t8lllt pis 1 l\Iais ça ne lui en rra pas, 11 esl tu é, la
canaille 1 Y sail s'y prendre. Tout an rbgle ... toUlS
les certificals... Les conlre·visites légalos s'font.
quand y faut. .. C'qu
' ~ a d'épatant, c'est que Loutle
monde, justement, n y "oit qu'du feu 1. .. Ah ! madame, comme je vous l'dis, n'envoyez pas d'vos
amis au doctoor Probe, à moins que ça soroiL que
vous \'ouderriez vous déhOl'ru8SC'J' d'0tlX.
- Que voulez-vous dire? demanda la doclore sse ,
houle\' l'sée. Si je vous compI'C'l1ds on purvient
dans cet asilo, il interner ct à. con:'3oeJ'ver COlllll è
fous des gens \'Oisonnables 7
- Tout jusl', Augusl! Moi, n m'révolle 1 i
c'élait que j'voudl'.uis lI1'd faire d'un panl~,
j'aimerais mieux J'surine·l' ... l'faire uri,11 cr, que d'le rc;nd'
malheureux des nns eL dos ans. Y en 0. qu i d'viennent fous tout d's uite, c'est le moins il. plaindre.
y en a ((ui r'tien nent un p u d'raison l, ma foi,
ça fen.d 1 cœur 1. ..
- C'cst monstrueux 1
Sonia aJl.uiL diro : (1 Votre d voir (;lait de dénoncer oct homme. Il Elle S'MI'è-Ln. l .urJer de devoir
il. l'ami d Sopl1i.e lellt été 1ui paJ 1 l' ohinois.
- y s'y en Lcnd, l'patron, il. les ll'ipalul'er 1 11 a
l'air doux, g~nl
tou l plein. Et y dit des mot '"
j'sais pas comment, juste c'qui fout pour meLt' en
furour le pauv' dio..blo qu'oo veul faire passer pour
maboul. A!urs, une fois l'bonhomme Cd1 colbre, on
L'&, flanquoC la oomisole do [oroc ... ça. l'fail rugir.
VOIUS pensez 1 Alor, \'us-y d'In 'douche 1... Eill 1
ben, la douche, j'sais pas SI ça. culmo les -vrais mabOilles, mais
aul', ça les exaspère. Et puis, sani
compLcr ~es
p htes drogues ... Oh 1 pas de poison ..
non 1 maIs des machins qui tapent su' l'système.
Et, oomme je VoQus dis, le médcCÎJ1 d'II{). prMeclanoc
'1. peul ,:'nir .: y V~!:r
un fou, y pourrait l'jureo~
1011ez, 1 d .T'mer 9U) a.l el! Ù gU I cl r, c'élait un d'ln
hautc, el II aVllll l'ail" bonllol11nle comme lont. ..
Son gondre élnil de La nobl sSC. Ah 1 ouiche 1 y
s'en puss' do pl'Op' ùans Le gratin. Fn.llnit voir ça,
quand c'esl qu'y amenait mossieu son beau -piJr '"
dans wn aulo.. . Ah! ma chc)r , I;a en fail ,m foin
ces gens..Jà 1 L'pouv' vieux, y pl ul'ail. .. appelait sa
mie ... sa Marguerite, qu 'y disnit... Et pis, y s'est
mis il ball' la camJ>U~e
pour de vrai, il. eauser à
sa défunte comme' cj vous pa.r] .. ,
Jc:s.
�~
66
Santa ét.a.it devenue livide. D'une voix qu'elLe
s'efforçait de {I~end
re
ferme, elle demanda :
_ Son nOfi ... le nom de cet 11Omm0 !
Quoi qu'elle m, son accent trahit l'émotion qui
l'agitait. Rodolphe cligne des paupières et répond :
- J'sais pas.
Sonia, d'un air égaré, passe la main sur son
front. Elle murmure:
_ lon ... Cela encore!... Ce serait trop! Et cependant ... Son gendre, titré ... Sa fllile, l\farguerite ...
Sa femme, morte ...
Sophie s'approche et se [ait consolante.
.
_ On dirail qu'ça vous chil'fonne, c'qu'y dIt,
Ropbe. Faul pas vous tou.rncr les sangs .. . Si c'est
quéqu' personne d'vos connaissances qu'on aye mis
' là~bas
sans qu'y l'mérite, faudra voir à l'faire sor'iLir... l\laintenant qu'vous l'savez.
_ pm! Vas-y voir 1 fit Rolphe.
Sonia demanda encore:
.- _ Son nom .. . le nom de cel hom.me.. . Oh 1 je
lVOUlS €iD prie L .. Vous m'avez dioL que vous vouliez
me rendre 5crvice, que vous m'êtes reconnaissant.. :
C'est moi qui vous devrai de la reconnaissance SI
vous me nommez ce malheureu:x ... el ... je vous en
saurai gré ... Je ne suis pas riche, malheureusement.
Rolphe cut un geste plein de noblesse.
_ Ah ! mn.lheu,r ! On n'veut rien pour ça ... J'vous
dis que j'sais pas l'nom ... C'esl nai. Le patron 1''\
pas dit. y J'dira jamais. J'y ai dcmo.ndé au paJu .'
Nieux ; Y m'a I·'gn.rdé (l'lravers.
_ 'oyons, mon ami, il faut..; oh ! il faut aDSf1lu:menl que je sache ... Vous padlez du gendre vC1l1U
en automobile: vous l'avez donc vu ?
- J'l'ai aperçu.
- _ Comment ét il-il ?
_ ChoueLlc. comme tout .... Oh ! ponf ça, y a pas
pu rupin.
_ C'est vaguc ... soupi ra. 10. docloresse. Et le ...
son chnuffcuf. Il d(wail o.\'oir un chauffeur?
_ "oui! Et c'ui-là, je sais son nom
- Ah ! dites-le ...
_ .J • aiti son num, j'vas vous expliquer comment.
J'étais par là quand son palron lui a dit: Il Altendez-moi ici ... » cl il 1'0. nommé .. .
_ 1;;h 1 birn ? Oh 1 mais, diles .. .
_ Hnlphe, inltCl 'om.pl Fifi, la dam" va. sc trouvor
mal.
_ C'est vrai qu'vous êtes d'la. couleur d'un ma-
La 'Petite .. 'Deux Sous et
-l?-
- Merci, ma pauvre petite 1
Sophie, devant cetLe main tendue, hésita.
Elle l'ef'lleura timidement d'abord ; puis, soudain résolue, elle la saisit et la baisa.
_ Pauvre, pauvre créature! mUI'.lIlUTa Sonia.
Et elle partit, la tête perdue, ne sa.ohant encore
à quoi se r6soudre, qu'cmtre!pren.drc.
Avant tout, il fall.ait savoir la vérité.
VII
sous
LA TONNELLE
Depuis que 00 mère avaü écrit à Paul MiI'lhande
pour le consulter au sujet c1e la vocation d e Joon,
le peliL bonbomme ne domnait plus que pour faire
des rêves de gloire , e.t il passait des hoores ea:ltières
à dessiner.
Cependant les jours s'écoulaienL, et Mirhandoe ne
Jean se d~
râpondajL pas. Héloïse s'im~aten.
5Olait.
Avril fleuri ssai t les bords (le la Seine.
La terrasse de l'auberge devena.it uccuei'llant ,
et le dimanohe on voyait arriver, de nouveau, des
jeunes femmes très gaies (l,U bras de jeunes gens
très fous .
Par un beu.u dimanche brillant de so·Leil, Paul
Mir<huMe, <lont on cllésestp-é l'ait de recevoir des nouvelles, arriva à « la l"lateJote )l.
Il.n' étaiL ~as
seul., Un couple élronge J'accompae~trêmcnl
jolie el pa.ra.isgnll.ll. Un.e Jeune ml~
sant fort Joy euse - qUOIque d'Ulle gu.ietoé difr6rentc
de cedle des aulI'c~
habitués dll dimanche - ct un
vi,cHlard à barbe bl.fcllooo, très gra.ve, lrisle mC!me.
Il est vrai que sa tristesso pouvniL s'expliquer
suIflsomment. Cc vieillard élait infirllle : annuL6
d'U bras droit. Ils s'as&Lrntl. tous Lroi sous lu 'Lonnelle, el 1\1 Lrlwncle commanda. le repas.
_ Après, dit-il, n011S oauBerons de mon ami Jean .
Le gamin ria.it d'l1!l air e,·lasié.
_ Oh ! j'ai rud ment tra:va.illé, aillez, m'sieu 1
Vous verrez ...
_ Va jouor en atbendanL. N'oûnnuie pas le monde, ol'dolln Gré.nl"lel.
Il s'empressait. ù mett.r-e 10 couvc.rt, aidé pur une
&el'vanLe. Quand il vil ses IlOtes instal[és , Gréne-.
let annonça :
_ Je v.o.is dire ù ~ hourgeOlsc que vous lites là,
;m'sicu Mil'hande. ~J
clle vous avaat ap rçl!, elle
chabé~.
serail venlue ~o
surl:c pour vous remercic.r de ne
_ ,le ne me II ouve pas mal. Le n m !
nouS aVOJl2 oubh6s.
_ All-imdez voir... l3o.n 1 y m'o. sorti de la tête ... pas
JI6Jooïsc, a.bandonnan L ses fourneaux, arriva en
un nOIl1 il. cone.her rlcho~·
...
courant.
Haletante, )e5 dents serrées, Sonia. dit:
-:- Ah, 1 monsieur,. que c'est gent.il de votl' part 1
- DcfYPO ?
~!i\Jo
s arr6t,a net . ses yeux agrandis \'i1r ln SUl'_ ,l'15le!... Ah 1 bC'D, si j'm'atlend i: ... Vous les
connais."Wz 'i ... .J'ni trop [lud.., moi ... Sùr com.me [lm;o .a.I..\aH'nL d.u iv!ttnchot li ln jeune 11 Ir.
~.c
J 11 ct fl'~IS
Vlsu~e
d'Yvetle n '6V'CiJJttil en eUe
j'suis ici, j'.nul'ul <les cmbC!lernenls l... Mo. .bonne
.9U un,e v.a~ue
bmprcs~lOn
de déjà-vu. L'Yvette d'ondam<', faut p11 manger l'morceau.
bl.c
ru peu il l'YveLte de jadis 1 ~lnis
onia n'enLctnd [11u&. IWe 0. cuché son visage dans lourd hUI re. &w~n
sos matrl!S, el elle revit le po..'!sé, J'horrible passé .. , Lancrot, luI., n a pas ch!fln~é
I3ien quo. v~tu
convenablement, il ra'P'P <3lllc netteFifl t nolphe sc regard nl, intrg\1l~s.
eTùCo~c
) homme au manteau vert. D'ailleurs,
_ tlfa.dame, demande timidornenl l''in après un men~
son Ipflmut610 re,nd plu.s so.ramcnt recorurltlis,o.blc.
long silcore, vouIez-vous prC'l1dre quéqu' chose?
Lm remarque 1 attentIOn dont il esL l'ohj<'l, mais
- Merci ...
sans la. compl'oCJ1ldro. Comment pourrait-I,I roconSonia se re<lrc&SC, respirG longuem ent.
na.tlro en cet~
opulente mntl'o1~
HUX chen'II;'; gri_ Nous l'()ptI~rons
de cela, Ro~l)1e.
Si je vous
son~.t
la plmpantc femme de chambre qUI l'indemnnde de m'uider ... de me ser'Vlr ... avec une r~
tomJlen
~e
proporti onnée nalllr011cmenl nux serv1- trodUISit un Jour il « Mon Bonheur)) 1
olle, ~;e
pl'end poin!. garde il 11\ 5t 1J (fnc. Yvc~Le,
ces rendu,8, pOllrrai-Je cornpt.cr slll' vOllS ?
tlon d l-I ~IOH{!.
J.ollle f111 plaiRir de ceLte j Olll'llG\! .nll
nl.
.
_ Voui 1 r{>,pnnc1it Rodolphe solen/~mc
grand al!', 1l~
JDUit du ciel plI l', do ln 11l'i .. ' pnlrÛl' 1 appllya Fin. \t:l, s'y n'vous tilde \lH&, rn~1
<le
ln
JCI!II"
vcrdul'e . eUe admire le cintilfumée,
je f'rai tout /;'IPUC ,"QUS voudrrz, madamc 1 lOI,
lem nl eJ·e l!~ SQLne.
'
voyez.vous, j'r.llbl iel'ai jnmni 8 ql'
~ nli
VOI~
T1l0~
fi: pein a-t~l'c
donné à l'hôlœsc un regard dishomme, à J'heure qu'il c~t,
s'rail à ln I\lorg~!C'
ou Il t\arL.
Paul Ill'hlll1'10 inLerprèlo à sa fnçon l'ébnla fosse communc ... Ah 1 vou.s pou\' 7. l'Cl'OIl'e, 80hlssemeI1t cl' HéloIs•.
phil' S' ferait tHer pour VOIl&, Vr!L~
d > vrai 1 .
- ~h
! mu !JOli 1·' maùame Gr(n<,1 l, VOliS voilà
hlle parlait, d'lin grand ~hUl
éVldm11lnenl Sincère.
très ml.I'Iguéo. Vuu s trOll vez que j'ai bion c.hoisi
Sonia, ponlnn6menl, lui lcndll la main.
�'~
La 'Petite
U
'Deux Sous"
mon vis-à-vis pour le repas en pleine lumièlre ?
!l'Iademoisel1e que voici ne red<QuLe point Le grarud
jour... Pas frclaLé, oc teint-là, madame GrénJelet.. .
YveLOO a entendu ; elle rit, un peu plus rose.
- Non! dit résolument HéùoÏse, rélpondant à ses
p en·sé es, c'esL impossib'le !
- Qu'y a-t-il d 'impossible, madame Grénel'et ?
. - que... rien. Une iCMe que j'ai. M,a is pDur
·monruour ...
D'un mouvement du menton, Hélolse désignait
NiLal. Oelui-ci demon·da souriant :
- On dirait, madame, que vous CToy-ez me I1e connaHre ?
- Ou.i ...
- Vous dave'l vous tromper, car je ne arois pa;s
vous avoir jamais r€ll1Contrée.
- C'est possiliJe. Une res·sernblanoe .. .
- JI vient tant de monde ahez vous, mad.ame
Gré.ne 1et, d.iL le pein tre ; les confusions v<Qus sont
pcnmis.es.
- Bien SÛT. Mais ce n'est pas iCi. que j 'ai idJé.e
d'avoir rencontré monsieur ; c'est.. .
EUe .a.lIait (lire : (( C'est aux Loges Il.
El'le rctint le mot impl'l/clent : 'si el!Le av·ait alOors
frôlé u.n mystère - Cf" 'elle aimerait éclaireir eJIle a été,. depu.is, mêlé à un autre mystère qu '€I1l·e
doit jalousemeI1t garder .. Ne serait-ce pas le com·
prometLre que d'18,ppll'€ndre à des étrangers le nom
des maUres qu'eLle a servis .. .
La servante, wpportant les hors-d'œuvre, amCiIla
une diversion.
H610ïse retourna surveiller ses cas·serooe.s, et l'e
peiu,We et sa peti te amie purent :repren.dre l'amica.le et Laquine. causer'ie qui dllrait depuis le matin SOlliS Je , sourire bienvoCillanL du Manchot. Ge
souri.rtl, d'ailleu rs, 6lai t sou vent d.istrait.
Un,e préocC'upaLion nQuvc,l'l,c tourmenLe ViL8Jl. Soni~
Dr> .lui a P?int oa.c~é
l'arfreuse rév,élation que
lUI fi fa.ILe l'aThCl-en gardlcn ù~s
luus.
C'est hier seulement CJlIC S011lU est revenue bouloyers{\c de so. visiOO à Rod~ph
, et dès aujourd'hui
cllc aurait voulu commen cer tenquêLc, Le!Iltcr de
déco/I\'fir le seol'et d'épouvante que cacho l' asile
du doc leur Pl'o.De.
tlIU
!~l
la ohère peLlLe Yvette sc prometa.i~
une
tcll' joie de pas&Cr lIIl1Û jOllrnée à la campagne
av·cc SQn gr'and ami Paul I\lit'hande, jouJ'n6c ()It.'go.nis6 la veilJl<l, ù l'hcUt'e môme où Sonia :recevait
les con'tldooees du fMouche omi d Sophie l...
La doctoresse n'a pas VOU111 atlrislet' la jeuniC
flllJlc en ta reLenant. Et hien qu'elle se sente plein.e
d~
ClitlitnllCC dans la loyallté du peintre dont C'me
~ pu app.réci r la C9JIstunL-c et géné.rewe bon Lé,
Son lll n vJ}ulu que Vila,] fût de la partie. Demain,
le I\luncllot tentera de p6n6tl'er dnns l'asile sous
u n pr"I,cx~
quclcon.f[lle. Sonia, eJae, ne peut en
~prudlc
: olle &G dIt qll'c le haron de FoJbc.rL doit
Ge IlCwlre padois chez s.on complice ann do s'osSU,rEll' <l'e l'étaL c.Le leur vIctime. Si c h'onJCT.ée si abime,' qu'eUe soit par los mn.ux soufferts, ' edJ.e ne
v cuL pus s'cxposer à êLre reconnue.
Vital, 00 plus cu plus, S'.a.bSOI'bc en ses pensées
'~
p;}ine faiL-i1. hunneur au déjeuner, maJ/gr6 le~
lnsLances d
Jcun-e.s gens.
. A 1)(ltIlt Lw, Banll Mil'nuncLe cn est un peu agacé
YvetLe rit à pl in gosier doC Lout et de rie.n. lia~
Ile sent (( henrcusc ... heur~sc
... heur~s
1... Il et
le dll. ingé'nuffi' nt, cc qui n.[tcndriL le rointre e t
lui [lorl'ar'lIe une cxC'lnrnnlioll intpmpesti.ve :
cn lui preno[~'l)t
les mains.
- Oh 1 mil. ch6ri·e 1d~lriI,
mie l'e:i'a de riJ'{'. Son Ilco/l regard s'aJongniL .
(Ille ::;c d6Lour'na, colÛus·e, W..ndis que 11() peintre jetÙ
\ln Cl'dulItir J'o(3'gQ.l'<l sur le MllndlOt.
~ ~lni s
, 10 nez dans son nssieLLc, VilaJ n'a pas vu
ite gC::lt des ma.ins unies. i\.Jors, Mirthanc.Le, il son
. our, so met à l'il' ,.umLl~é
~ Ali dOilserl., .J'ean ropo mlL, ~JlPortan,
d'un ail'
la. foi g1?rioux eL conJus t( Bon l.ra.vruJ. Il.
67
~
Paul Mirhan:c1e el Yvette se partagent les aahjers
et a dJn.i,rent, enco ura.geants.
HéJ.oïse arrive pour ClriLendre Les OOD1iplÙl1e.nts
q~e
l'on adresse à son fils . Mais sa joi-e est affaibili-e qu.a nd €Ille ap,prCIlJd que pour entrer à l'Ecole
does Bc:aux-Arts il fnut avoir quinze ans accomplis
et subIr un examen d'adunission.
- E:b. Men 1 IaUOO's, jusque,1oà q.ue iai!re? Et.,
po'u r être assez savant au moment de l'exam€Jn
il faudra q u'il 08jppren.ne .. . Qu.i 'lui donnera des le:
çons ? demande Hél·oYse.
- Moi, déclara uvee eniram Yvette.
~t
comm.e Héùoïse la regarde, indécs~
elLe ex:pJlque :
'
- yous pouvez élJvoir cOManee , m8ldJame : je
lravarile avec mo.nsieur Mirhande. C'est lu.i qui
m'a en~gJé
~
que j e sais. Dès qu'il ne sera plus
·tout à frut novloe,. voire petdJt garçon piC'ofltm'8. des
oonsetls de M. MiThande. N'est-ce pas monsieur
mon ami. ?
'
- Prinœs'!if, vous organisez tout, le mieux <Lu
mO'ud.e. U:ne d i~:culté
ce.pend8JIlt demeure : commen t, habJtant lCI., votre.... notre .élève viend.ra-t..jj!
!prendre ses leçons à Montmartre ?
~
Il pourrait venir une ou deux fois par 00mame ; on le garderai t ~(}uLe
18 journée et enlre
les leçons il travailLerait ici...
'
- Si c"est p.ossib.le comme œla, reprit Héloïse
m?n mari et m.oi en serons bien heureux ... I.e
m1n est débrou.il,lé . .le V<QUS l'amènerai une fois ou
doux, puis il se tirera d'affaire. Le traj et est court.
-:-:- Je prendrai le bateau, déclara fièrement Je
peut Je.a.n, et jJ'\lJis à P.ani,s j,e demand.erai man.
chemin ... Oh 1 j-e le salll'ai vite allez 1
- II est gentil, ce gamin, mo.nsieur mon ami ..•·
Mon petit éJève me plIait absolument.
- m. quant o.U prIX des leçons, re.prit Héloïse un
ipeu gèn~e,
~n.mari
et moi n 'y regarderons pas.
être payée, s'écria
- MaIS m?l Je n.e veux p~s
YveLte. Monsleur Mlrhande m a toujours donné son
temps pour rian, par bonté. Je suis contente de rcndre à. son pc.tit protégé ce qu'il a Juit pour moi.
- Cc-pendant, vœ1ur!. protJesLe<r Il61oïSC .
- ACcc.ptez,. ma bonne madame Gl'énelet, acceptez,. dLl le pean tre. En ~change,
mademoiS<elie et
mOl ..: e t mê
. ~ ce !D.onsJ.eur ql;li n'a pas l'air d'entend.le et que l ~ubhrs,
11000 vlCnclrons quelqueIois
le d/m.anohe dé'J ewl·e r chez vo us. Vous nous ferez
des priX de f&.veur, voilà tout.
- A.h 1 je serai bien heureuse de vous offrir notre
modcste menu, ulJez 1
- C'.~s,L
vous qui OLes modesLe - bea.ucou,p trop
- vos m~nus
~o . nt
suoC'Uilents, vous l e savez bien.
- Et c e~t
Sl J O~l,
œlte terrasse, di~
Yvette.
Elle continua., sadresoo.nt à Lanc.ro,L :
- Si elle V()~alt
eonsenLir il: nolliS acc.OIJ1pagner,
com.me ce seraü bon pow' Soma de resp.l.I' 'cel air
e>.Jqui:s !
- Ah 1 fi t Héloïse, Sonia?
:- Vous la connaissez? demn.nüa YveLl.c, surprasc.
Vi Lnl, {lI'rac~
à ses pensées, la rego.rclail anxicu...
sem on t. HéLoïse se sentait rougir.
- C'est ce nom que je trouve MOle, nt-€lle embarrassée.
Mais La.ncro t Il,e se laissa point tromper.
CetLe fcmme, qu'il croyait n'avoir jamais vu le
coonnU - €l·Le 10 djsait avec r~üson
to'Ut iL l'heure el clio connaU aussi Sonja. A-t-elle 616 mêlée au
draro do la villa iI1ilrhruerile? ommenl et l1nns
qucJJe me.sun'c. ? l.~'
pcintre s'e t levé.
'
- Une promenade nu bord de l'eau vous plu.il'uil.elle, Yv ILe?
C'oest lu premièrl' fois qu'cn p['ésence d'Héloï. e, il
:nom~e
la jcun~JIU
uuLremcnt que pur le surnom'
de ~ . rl1ces{)
qu /llw donne ei volon Liers .
, Vllal rc.qI1~<e
}[él
.oï~e
qui est J'Cstée bouche béo.
[Ixes Slll' ln. Jeune fille semhlent ne .pas la
Se. ycu~
vou' cL s effûrer devant un fanLOme
ga:
�c:if-
68
Il n'y a point à en douter, se dit VitaJ, elle nous
connalt.. . Mon Dieu, que sait-elle ? Est-elle avec ces
monstres auxqueLs· nous avons arraché ma pauvre
petite enfant? »
De son cOté, Héloïse se dit :
cc Un miracle s'est accompJi 1 La petite Deux Sous
iiliote est devenue cette belle créature. Je ne m'étais
pas tJ.rompée en oroyant que le Manchot, arrivé à
Il Mon Bonheu.r )l , avait aidé à enlever l'enfant ...
Depuis, il ne l'a pas quittée ... S'ils l'ont enlevée, lui
et la doctoresse, c'est qu'ils craignaient quelque
chose pour elle ... Quoi... et de lu part de qui? Madame Orbihoff ne semblait guère aimer monsieur le
baron. Peut-être que, dans ce temps-là, elle S6 mé·
fiai,t déjà de ce que Madame a SU plus lard ... Quoi? ..
Je n'ai pas compris. Mais slÎrement pas des choses
il. l',h onneur de Monsieur, puisque .. . Ah 1 ma pauvre
(';hère Madame 1 ))
Un souvenir étreignit le cœur d'Héloïse, amenant
des larmes dans ses yeux. Le Manchot s'en aperçut.
li cessa de s'effrayer.
Pau~
Mirhande et Yvette, escortés du petit Jean,
descendaient vers le fleuve, Vital restait sur la ter·
rasse avec Héloïse.
Elle paraissait ravoir oublié, se tenait près de
la table en désordre, sans penser à la desservir. De
la maison, Grénelet ruppela :
- Héloïse!
- On y va...
Et elle s'apprêtait à partir, en effet, lorsque la.
main de Vital se posa sur la sienne.
- Héloïse ... C'est votre nom, je me souviens. On
ous a nommée devant moi autrefois ... Vous aviez
raison, tout à l'heure : VOUJ me connaissez.
Elle devint IouLe pAle.
- C'est ... c'est la petite Deux Sous ? demund<&:1-elle à voix basse.
- Oui.
- Oh ! Lout de même ... Lout de même 1
Et, sarus trop sav.oir pou.rquoi, e11e reprit :
- Vous avez bien rait de la reLireI' de là-bas .. .
U y avait de ln crainte et aussi de la rancune
dans sc,: façon de prononcer: Il Là-bas )). Vital soUrpira, allégé.
Héloïse demanda, tout à cou p méfiante :
- Les avez-vous revus?
- Qui 'l
- Le baron ... et les autres.
- Je ne con~jsa1
personne.
- C'est vrai. l\lais la doctoresse les connaissait
bi en. Ils ne l'on t pas r etrouvée Lout de suite, je le
sais. Mais depuis, plus tard?
(1
-
Null.
lis se regardaicn t, n'osan t être enoore tou.t à CaH
francs, mais sentant bien que cela. devenait nécessaire. Lnncrot demanda:
- Y a-W l long Lemps que voUs avez quitté IJl.8r
dame la baronne?
- Oh 1 oui... des années 1
- Vous retournez chez el.le quelqueJois ?
- Jamais.
- VOWl ne vous êtes pas bien quillées ?
IléloIse eut un sourire ambigu.
- J 'aimais beaucoup Madame. Mais elle n'est paS
~e1l
dans la maison. La raison qui m'en a (ait
partir m'empêche d'y revenir, même pour voir Ma·
dame.
- Ah 1
- Pourquoi me demandez-vous ça ? Avez-vous
peur que je parle à ces gens-là de la petite Deux
Sous? Pas de dôJ1ger 1 Si c'est ce qui vous toux·
nente! vous pouvez dormir sur vos deux oreilles.
- J ai confiance en vous, dit gravemen t Vit,aJ.
- Comment ça. ? Sans me connaHre.
- Vons avez un visage 10yo.J ... eL très bon. Vous
e voudriez pas nuire à ... à ... quelqu'un ..
- A per onne 1 Et, s'il faut tout vous dire, ça. me
La 'Petite
If
'Deux Sous"
-le)
chiffonnerait rudement si vous connaissiez le baron
de Folbert ou quelqu'un de chez lui
- Pourqooi ?
:- Pour des raisons à moi, je veux qu'ils m'ou.
bll en t. . Ah ! VO'l1S n'allez pas croire que j'en ai peur
au motns ... ou que je SUIS partie en volant.
'
- Ah! grands dieux 1 non... Chacun a ses rai.
sons, OOffiIne vous le dites... Mais, madame, j'ai
encore autre chose à vous demander. Si vous vou.
~e
q:ue madBl!1~e
Orbihoff permette à Yvette de yenir
I ~,
II fa . u~ me Jurer... oh 1 oui, !TIe j~r er,.
sur cc que
"IiOUS ayez de l,lus cher, de ne JamalS frure allusion
devant cetle enfant, au temps où vous l'avez connUe Il ViUa IVLargu.erite )) ou à Il Mon. Bonl1eu,r ))
p;lIe fie sa.i,t rien de son pas1sé et eUe doit l'ignore,r;
il Le faut 1 Vo.u.s.ne. me trahirez pas?
- Je. ne dirat rIen de rien, Je vous le jure...
Tenez, Je vous l,e Jure sur la tête de Jean ...
- C'est bien.
. - Etl .r~it
Héloïse, voulez-vous que je vomr
dlse ? J ru 11dée que c'est un bonheur que nous nous
soyons retrouvés. On est. amis, n'est-ce pas ? ..
Peut-êr~
a~rons-u
besOln les uns des autres .. ,
- QUI srut! peut ctrc, répondit pensivement Vital.
VIII
V:-! JOLI MONDE
-
Qué sa}e temps J. .. Misère 1
remonla le col de sn veste, fourra ses
m8JJ1S daos ses poches et, sa casque tte rabattue sur
s~
ye~x,
ma sQlo~
l'averse. Il éUü t nuit noire. Une
bise al~ ' r.~ poussru t la p.luie en lIarges ondtes.
qu.e .l'hiver revient? grommelait
- Dmul-?'fl P~s
R od~
l , phe.
~ en al ChOISI un d'soir pour ma premJè~
sorLle... rvllnce 1
Il longeai~
les maisons afm de se garer un peu de
la .grande VJ.olenoe de l'averse et, plus encore, pOUl'
évtLer de p8sser dans la. zone des becs de gaz
!~od
'ph~
.n'~
,pas l'e sprit tranquille dep.uis'la. bata111e ou, SI Jolim nt, en ééhnnge 'du coup de COULeau
d'ont ~onia
l'oU guéri, il a (( sonné » un camarade.
- EL I?~rtanl,
monolo,g ue Rolpho pour sc l'OSsu.
rer, qu.ol qu'ça peut 1cur-z-y faire à oeuSISes de la
rou.sse ?
Rolphe loLLrlNl. l'~ngJ.e
d'une rue.
.Une trouée lumJT~es
apparut dans le sombre
alignement des bâtiSses.
D'une grancLc baie ruisselait la lumière
Au-dessus, un énorme glObe ct
.
6clairé à l'inLéri€'1.lr servai t d'e <: verre rouge
lettres électriques expliquaient u~s;lbea
d~s
~olphe
Il
A Li\. BOULE ROUGE ))
g
Une nmsiqu.e de bastl'i ngue ù 1
.
naient parven,ait jusqu'à R 1
e~
cU1v~e
s. domi·
P
de l' t°ée (} qUI se dLssl mula,
à queIDque disLanc~
coin d'une porle.
en r
du bal, dan s le l'CI! piétinait, impatient t
, 1
d'avoir donné à F-ifl
e. conge é. Il re~ctai
d'61VObr oonvenru
" ce sOJr-~à
, une LeUe tache et
J"
Il qu on sc l'ctrouvorod-t là »
MoUis ail~S:d
b'soin d'l.unt m'presser... · V'rai 1
de (( La Bou'l~
Roe groanrneler : une femme sortai t
vidus. Tous deU~gt)l
RCCompagné~
do deux indi·
baissée su r les
alen t COIffés dune casquetw
nuque, étaienL l~x·,eurs
cheveux, rasés sur la
œ
. ')
. en saux I.<m!pes en aCCroche~uri:s'
c~éspor,
nt cette blouse longue, f ndue
de gurder presque consLamment les 'm~ilfeJt
doigts peuvent ca
ans /:les poches. Ainsi, les
Leau il virole armT.'eSdseI· souvent .Ie mo.ncho ùu cou, . a 0 ces chevaJlers du crime.
I~ La. ~em.
éUlll en cheveux, avec des rouflaque t""s, amSJ que (( ces messieuns Il
ROlphe reconnu L Fin.
.
�C?C-
La 'Petite
U
'Deux Sous"
- Pas trop tôt... avec Eloi et La Risque, comme
j'lui avais dit .. . Bon !
Le trio venait vers lui. Il le laissa approcher.
Quand il passa devant Ralphe, celui-ci se détacha
de l'ombre. On se SM<ua.. Fin aJrl.ait en avant, trot' tant comme une levrette. En ligne, les trois hommes suivaient, se oourbant sous raver,s e.
Fitl s'arrêta bientôt devant un cabaret sordide,
c'éLa1t l'habj,tœl dooor, Au centre 'ŒIl aquari.um où
somnolaient des poissons maladif.s . Fifi entra là
comme chez eEe ; le.s trois hommes s'engouffrèrent
à sa suite avec un cc ouf 1 Il de satisfaction, et
sèébrouèrent. Leur,g. vêtements ruisselaient.
, nes voix ratiq;ues les sal'uèrent de lazzi. - ~lmce
de rigole 1...
.
- As-Lu fini d'faire l'.arrosOIr !
.
Il régnait dans la salle une chaleur lourde et empuantie. Les· relents de tabac, d'alcool, de vêtemenLs crasseux et mouillés prenaient à la gorge.
Sur un signe de RlY1p-he à la patronne - une
<1ross.e femme av·achi,e - cene-ci quitta. le oomptoi.r,
tra\'orsn. 'Ia: sa:lle ct ouvrit une petite porte dis&imuùée dans lb: hoiserie.
- Si vous vou,]cz être LranquLlles, dit-elle.
~ Le groulp e disparu t ,par l'étroite ouverture que la
grosse femme ensuite referma.
. .
Dans le réduit où la patronne les avaIt mtro"(luits FHi et 16 trois hommes s'assirent autour
d'unè pel.He table poisseuse, sur laqu elle traînaient
dos verres et un flacon d'a.J>OQol gradu.6.
- J'l'avuis prévenue en passant, dit Rolphe, pour
expliquer ces préparatifs. J'y avnis dit qu'a nous
gal'de l'salon, qu'on avait à Ca11&er.,
.
Au-dessus de la tmble, un bec de gaz 11 demI fenn6
laLssaiL échapper 'cn sifflanluue l'el.ite flamme dansan.te. Fifi se renveroo su,r sa ohaise el fixa ses
ye'llx SUI' ta p('o~le
flam~;
elle ol,ignail d,c's paupières , e,ngoul'diô et Lasse. La 1 lsql!e dl~man!i
:
_ EL puis après ?.... Lu 1I10me n a l'Icn dlt.
_ Flle n'a rien à dll'e.
_ Sûr! approOlf'v.a. Elo!. A, toi d'faire ~'bonimt.
_ Ben voilà. J al basoH), d u.n J'ude laopm ... sohd€.
_ Ga z'y est, dit La Bisque dont le poing s'abattit
, sur la table.
. ,
Eloi fit la grimace.
_ Tu sais ... moi j'maI'ch' pas, s~ c est un sale
cou!,>. P,o ur le mijoL€r, l'col1p d frLcfrac .. .. , vas~y
,
j'SU IS Lon homl)1e.; mai~
p01ll' m~rche,
l Le d18,
j'marclle p8JS ... J'al les fOIes blancs.,.. .
_ J'Li,ens à ma sorbonne... Et 1· pamar rouge .. ,
et la lunette ... Rien qu'd'y penser ...
Lu. n isque vociféra. :
- Q\lé muffle 1 nom cLc d'là l
,
_ Assez 1 commanda Ralphe. J'sais c'qu on peut
vous demander. Si c'étoit pour saigner un pante,
j'a.urai s besoin d'personne.
- Des fois 1 protesta. La. Risque.
Fif! arrachée à sa somnolence par la colère de
l'homme se fI'oLLa les yeux eL à &On Lour se fIlcha.
En voi'là une idée de croire qu'on a. besoin d'eux
pour !oire urrlm8Juvais coup ... Est-ce qu'elle s'en seraH mùLée?.. Au con Lrairc, ·il s'agit d'une bonne
action.
- Pas, Ralphe?
Celte fQis, La. Risque eL l'aulre il l'unisson s'esclaIrèren t.
_ Non 1 mais écoutez ça 1
_ MademoOiselle a bien son peLit rrix Mon Lyon?
FUL'iellse rouge C01Dffie un coq, l'in envoya. aux
deux hommes une bordée d ' ~!Iju'e
s.
_ Toi ordonna. Roliphe, to.lS lon bec!
_ Si 't'()lai.s à moi, g,r onda Eloi, ce que j't'en
collerais une ...
_ VoUi 1 cria. Sophie exaspMée, cfUand c'esL que
c'est une femme t'as du courage 1
Mais un gesLe' menaçant de Rolphe la Dt ~e résigner au silen . Elle pinça les lèvres, er001Sa les
bro.s et sc recula, boudeuse.
Rollphe parla longtemps.
69
~
Quand il se Lu tl. Eloi demanda :
- Combien?
- ça... j'peux pas cor' vous l'dire.
- Moi, ça me fait rien, déclara La Risque. La
chos·e m'va ... J'iJrais pour rien ... Pour le plaisir.
Eloi railla, sceptique :
- Pour l'plaisir ed'quoi ?... D'se faire faire marron su l'tas ?
- Pas d'danger, promit Ralphe. L'bourgeois n'se
plaindra pas .. . U aurait la frousse qu'on y barbotte
chez lui.
- Enfin, quoi, pour moi c'est dit, fit solennellement La Risque. Quand qu'Lu sauras l'jour et l'moment, un signe .. . et on marche.
Eloi baussa les épaules.
- Alors, moi z'aussi.
- C'est pas malbeureux! cria Fifi 00 son coin.
- Fais pas ta poire, conseilla Ralphe, et viens
trinquer.
IX
UN PORTRAIT
Le peLit Jean Gréne!let prenait sa première leçon.
A vrai c1ire, iL ne travailluit guère!
Il promenait sur toutes choses des regards extasiés et n'osait pas avouer à Paul Mirhande à quel
[Joint dessiner au fusain l'oreille et le nez que le
peintre avait placés devant lui comme premier modèle lui paraissait I{luéril et ennuyeux. Il aurait infiniment préféré Mre mis de sui\,c au modi!Je vivant.
AujouI'd'lmi, Fifi n~ pose pus. t...liL'ban.de J'etouche,
de chic, des ébauches, et Yvelte travaille ù des illustrations pour un lC maga7.ine n. Elle cherche iL
stimuler son élève qui, tous les quarts d'heure,
donne un COUT> de fusain.
- ~Iais,
mon peLit, vous ne ferez aucun progrès
si vous ne lravuillez pas.
- Je t,rav'a.ille, madomoiselle. Je regarde.
- Bravo 1 cria le peintre. Cet enfant vi,ent de dire
une chose profonde. Rega.rder d'une certaino façon,
pour l'arl.i.s\,c, c'est encore travailler.
- R este il. savoir, dit en rianL Yvetle, si monsi ur
Jean regarde de la façon que vous dites ou, wul
&implement, €Jl petit garçon curieux.
Jea.n devint cramoisi d, consciencieusement, dignall't de !'œ1I, ten<lant son fusuin à bout de bms,
il prit des mesures.
,
La demi'Ü de neuf heures sonna au large cadran
d'une ho['loge norma.TIde. Paul l\li.l'hande ropoussu.
vLv.ement son ehevalet et se leva.
- Je ne vous ai pas dit, Princesse, que j'ai reçu
ces jours-ci la v1si\,c d'un c.amurade de collèg,e.
- Ah!
- Quand je dis cama.r.ade .. . Nous n',é tions pas
dans la même classe. Il est plus jeune que moi,
bien plus je.un.e. Il m'a retrouvé grD.ce à vous.
- A moOi?
- A la princesso byzantin.e qL1e vous posê.\,cs ...
Ça 1'0. amusé, ce gosse, de connnllre II UlIl artiste )).
Il m.'a écrit à ce moment-là. Il hnbill1il la provin.ce 1
près d'uill oncle, tauLe sa famiUe . Le dit oncle ()tunt
mort l'an passée, Dordève - c'est le nom de mon
jeune ami - est venu oetL€ année II prendre l'ail'
00 Paris Il. Mais ja vous parw de lui pour Q.lTiver
à vous a'Pprendre ced: Bordève a fait, je ne sais
oomnICnt, la connaissance d'un e ccrlaino baronne
de Folbcrt, ulne personne cllal'ma.nLe, paralL-il, et
tris Le, tris Le , !.risle ... CetLe trislesse a séduit mon
ami Il est, je crois, un l?C'u amoureux do la. baronno(). bien qu' cUe Ile saIl ni jeune, nj jolie, et
s'enLOLo à la. clisLra.il'e du chagrl!l mystérieux qui
semble la ronger. C'est dans cc but qu'il a lour·
menlé le baron de FaIber'L, mani de la dome, jusqu'au momenL où celui-ci a obliaeJ sn femme à
poser devant moi. Oui, j vnis nvoir 0. porll'niturel' oeLte mélancolie. BOl'dèvc s'est rhlll'g6 de me
Ça m'ennuyai!. J'ni demandé
pl'esscnLiT il ce ~ujeL.
•
�La 'Petite ., 'Deux Sous "
un très gros prix pour découra:ger. Bordève m'al
pris au mot. (( Tope-là, m'a-t-il rut, j'ai cart.e blanche n. C'est au matin .. . tout à l'heure... à l'instant,
que ce provmcial obstiné va m'amener son héroïrue.
Car j,e senüs bien swprhs s'il ne remplaçait p.as le
mari pOUl' ootte corvée.. . Pa.r.dO'Il, Princesse, j'allais dire une sottise... et c'eüt été mal reconnaHre
la confiance que, depuis peu, me témoigne votre
(( gouvern,ant n. Lui qui sans cesse était sur vos
talons vous laisse venir et rester seuLe lel avec
moi depuis une semaine ... Qu,e se prus e-t-il ?
- Je n'en sai rien, répondit Yvette; mais certainement il s~ passe quelque chose. Il a l'air préoccupé et Sonia semble bouleversée.
EUe avait oublié Jean qui depuis un moment
's 'appliquait en conscience. Paul Mirhande, d'un s1gue, lui rappela la présence de l'enfant.
E ·le contin ua à voix ph1s haute :
- Padons de votre modèle, monsÏJeur mon amJ.
Si cette dame doit venir, peut-être vaut-il mieux
que je m'en aille,
- ~Ia.is
non. D'ailleurs, .elle ne sera pas seule:
Bordève va sllrement s'incrusLer.
- Oui, mais moi ... pauvre petite artiste 1ncon'nu e.·, sans compter ce gamin .. .
- Bah ! Si c'est une poupée coquette, vanite-use,
elle sera enchantée Jd'avoir une gaJerie ... de poser,
pOUl' deux personnes de plus.
- Votre ami ne dit-hl pas qu'eUe parait triste '1
Ce n'est donc point lln.e pou.péc coquette. La mélan colie n'alteint pas les ots.
- Bravo, Princesse 1 En ce cas, ma baronne est
un brave cœur meurtri par la vie et au-dessus par le fait même de ~te
sourf!l~e
qui élève des peLi Les mesqulJ1enes, suscepltbiJités, et c., etc... ,
que vous cr~jgnez
de froisser en ne lui cédant point
la place ... Ma phrase est un peu diffuse ...
- Un peu, avoua la j.eune fùle en riant, mais
elle me conv.a.:inc tout de même. Je reste, nous restons, Jeun et moi 1 Voyons celLe oreille, monsi.eul1
mon élève? Eh bien 1 mais ça vu... 0.0 va vous
metire viLe à la bosse ... et de la bos.oo au modèle
vivant...
- Une voiture s'Birl'ête 1 annonça Jenn.
Un instant [llus t.ard, guidée, ainlsi quo l'nvait
prévu le p~in['c,
p!)r M. llordève, Mme dl' Folbert
pénétrait dans l'alelier..
Emprcbsé, M. Dorclëve présentuit :
oici, maclUlnc, mon ami Pnul Mirhande dont
vou.s goùtez comme moi le beau [.(l.lent. lil'hande,
la baronne de fi'olberl qui désirc le servir de modèle.
Il s'arzoêLn ay(\nt avisé Yvette qui s'était levée,
et .s'~cIiu,
enlhousiu.ste :
.- Mai:; lu voilà l... C'cst >0'11' la princcRse by~
zn.nIL1le., .
Yvolf.c devint toute rose. Marguerite sc laurna
vers (l1J<J en SOuri.lf1ft.
ne élèvl' ... maintenant pmfcssmlr... EL vomi
SOl1 élève... Co petit bonhomm e qui baisso 10{) noz ...
Tu [Jf'll. roprcndre lon travail, Jean, tllndnme le
permottra.
~ JoIe d"mnnde. Et vous tlllflSi, madcmqi.;elle,
rcrndt('z vous il votre dessin ... Bot-il inùi scrct de
regarder ?, ..
Yv III() explirpHl. le sujet, nomma le roman (ju'cllo
ill us l mi t.
.
.
A 101', j conna.i.s.sn.is v?'S œuvres: JC rcço~s
la r evlle où oela. para.U. Je Illl1S c~urméo
de poUVOlT
vou:> en complimenter, mOldemolselle.
- Et mumle.n.an[ dilt M. Dordèvc, parlons un
peu du dLCf,d'ml1\'I'c quo devra rn.ire . , ct Sllns
grand mérile (; Lie fois - mon ami Paul Mu·handc ...
Aillsi rl1Pf lée nu su) L de sa visite, Mme de FoJ.bor! lùlJlprnchu du peintre.
- Ju vous uvoue, dit-l'II Q,Vcc nn pen d'l1m~r
LlI!TIl', que je n'ulII'nis jnrl'ltl.is SOllgé ft ml' frul"e
]}Cinl!1 (' .. , C'c:t UDr. idée de mOllsil'ur Bord!'!vc qui
l'a lloufW·1' i\ Illon T!1ari ... m j'ai dù céder.
~
Les SJéaillJoos de 'Po se vous ennuIeroIllt, madame?,
Oh 1 grands dieux, non, ce n'esl pas ,
cela. Autan~
je comprends le désir d'avoQir son
portraH chez une jeunle femme dnus ~out
l'éclat
dJe sa beauté, autant je trouve a:bsurde à mon ttge .. .
-" Mais vous êtes jeune 1 protesta Mirhandc .
Elle secoua la tête.
- Peut·être... si l'on s'en rapporte au nombr~
des années. Mais 1a jeunosse ne s.a calcuLe pas .. .
T,elles femmes de dix uns plus vieillo9 qUie moi me
font l'effet d'être de dix ans mes cadettes.
- Madame, dit sincèrement l\Iirhande, voulez·
vous me permetLre d'êLre franc?.. C'est l,e peintre qui parle : vous êtes charmante ... et je fi'aurais
pu soullaiter un modèle plu,s intéressant.
- Intéressant. ., Comment cela?
- Il ya liant de choses dans vos yeux ... EL c'est
moins votr.e vi l sa.~e
que votre ê.me qu'il faudrait
saisir ... cl ren.dre.. .
.
EUe eut l'air épouvanté un peu, comme si le re- '
gard scrutateur
peint 1'e rulait vraiment lir dans
wn ê,me douloureuse l'effrayant secret qu'ü Lous
il faut cacher.
/
- Commen.t voulez-vous pOlSer? demanda i'"lirhande.
- Oh 1 comme voUs voudrez! Décidez VOllSmême. J"ai mis celle robe, qui est n11lC robe du soir,
à tOUit hasard.
EI1e écarta le long manteau qui l'enveloppai t
toute et apparut, très mince, in.fl.niment gl acieuse
et simple d'attitUide, en celLe robe aux plis un peu
lOUJ'ds el souples oependant, d'un ~rjs
leinté de
mauv,e, au corsage à. peine ouv.ert, qlll a'Vait 1nspiré
à Rébecca Siméon son inepLc pLaitsanoorie sur « lu.
panne )).
- Enlèverai.je mon cha.peau?
,
C'était un grand chu,pewu nou', ,d u~.
de ces
form.es seyantes et toujollrs jolies, qut peüverLt braver le temps et ne sont jamt~
démodées, p~rce
qu'elles s rut empreinLes d'lin vél'lLa.ble (;fI.chet ri urt.
_ Non oorta.1nomenL ne l'elllevc>z pfls... ct ne
dép()fUil
e~ pas Lout b. fait cc gra.rud manLea.u qui
sera un fond cxcellcn t.
Animé, joyc.u..x, il atLi:raiL un chevalet, chois:i.s·
saiL une Loile.
.
_ Hordove il VOlIS est perrrll's do rester... eL de
distrai re moo modèle par u:ne oonvc"rsuLioll nus .
spiQ'iLuelle qu'il vous se.pa donné de la fournjr.
Là. 1... De voux-même,' ma~c,
vous yous ~Irs
placée mkn.lx qLle je n aurulS su le f[l.lre. En vr>us
des r>lis
asseyant, vous. avez donné à. votre ro~e
merveilleux ... Lo bras sou,ple... Oh 1 Illon... ('bo.l.'mant!..·
M. D01'dève pent n.voir de l'CSipI'lt ou se taire, à
SOli gré. La. ban'onne 1 FollOOl't n'écou~e
q\le vaguoment les propos 6chu,ngéR uutour cl'clle; son
regard V~1.
dl1 pT<?fi1 <.l6Ii~t
d'Yvette, penchée sur
son desa m , au Vlsage Irms ct rose du pelit élève
qui felnL d'être absorbé pfI.r son truvail.
l~\1S
il sc senL observe, plu.s il ho.isse le nez.
Qu'esL-ce qu.'eUe a donc, la dame, à le regarder
comme ça?
Le vLsage de Mo.rgneritc s'ussomlJl'it. Une trisLesso plus déseSipér{}e flnCoœ navre son rE'gard.
êLre fi 1'0 et
Ah 1 10 bel nrant 1 Qlle . a mbre doi~
h ul·euoo ... ffislAI ainsi le peLit PielI'ro disparu de SU:
vJc? A-t,..il ces boo.ux ch-cveux blonds bouclé . . ces
.
y-cux fira.n.cs ?...,
- Etc~-vo.us
l!l.5se, mo.rlnme ? Vou s p!\1iS{)~.
- Ç>UI. .. Je... je l'C'VLendra.i. un autre jour, plulOL
demaJln ... voulez-vous?
Elle indiqua une heure, et
l<wn, pr .. ér de
sc retrouver seule pour pleul'cr.
M6co~ten,
Puul Mil'llande repoussa le c11I'\o.l t.
- yOllà 1 tlloi qui. me féliciLai.s, jug ont c 'tif' da·
me d 1111 autre n.cnhll (T'lO l:Ies sœu!'", les in sllpporl.ubles poupées mondlunes 1... Pa.~
du Lou ! : \10.'
dame ost cap T'i ci<Hl 00, M~nme
a des VUIIOUl·S ...
Yvette &e mit b. ri~.
-
-
NQIIl.
du
�c;<>r
La 'Petite" 'Deux Sous "
7i
~
oor.a.it pO'5S.Lb1e que des efforts fussent tenLés pour
l'arracher à sa pri.son ?
Des eHorts ... Hélas! quels efforts la malheureuse
Sonia pourra-t-eille entreprendre seule, démunie di
oe levier qu'e·st l'argent, lI'ayant pour l'aider qu'Ul
vie.i.Hard infirme?
C'eSit à ce moment que VJiLaJ, à quJ alle s'est CCYJI
fiée, a cessé d'accompagner Yvett.e. Chaque jour i
est aillé à Neuilly, rOdant autour de l'asile, q.u~
LiolUlant .chez les fourlllSSeUl'S, essuyant même cl
faire parler le concierge.
La veille du jour où Yvette dovait r0ncont1'"-I>
Mme de Folbert., Sonia, ma,lgré l'lu)rreul' que lu
inspire Rolphe, s'est bI'usquernent réso'lue.
- Je retourIlcrai demain rue Bert.he, a-t-elle dé
claré à ViLal, et je défends qlle VOllS me suiviez.
.I,e n ',a,i rien à cr&.indre, je V,Ol1S l'assure.
Tandis qu'Yvette se rendait à l'ateJier de Mirl1an~
le, la doctoressc se iliri.gon.il v,ers le logement de
Sophie. Elle se hâtait, craignant que la j6'1.lne femme ne soit déjà sortie. Avant même de frapper, elle
fut rassur(or. On ~ e dL<.".p utait dans l a ch'lmIJre.
Soma heurte à la porte. Les VOiK 50 lai sent.
Sophie, raclant ses savates, vient ouvrir. ElLIe salue
Ua viGitellSC d'une exclamation .
- Oh 1 e'te coup, la v'JJà. 1
E}JUe pOUT'suiviL, toute·rouge, avec des mines:
- C'est mMèmr, RoLphe, c'esl la bonne dème...
Entrez donc, médèrne, dOOlll€Z-VOUS c,eHe de vo~
asseoir.
Rodo.Jlphe aussi change de langage. Sans Nrc du
franç:.ais très pur, ni des expressions de la suprême
élégunce, ce n'est plus l'ignn.b1(' argoi. Polimen1,
il remercie 1'8 dooLores,se dl? ses F".oins, !'a'lsurc que
son épau.le va tout il. fait bien.
- Ah 1 Lant mieux ... lont mi,ùl1x ... Je le pensais.
Aussi ne suis-je pas v0nue auj lIl'd'hui pour vous
offrir des soins, mais po'lll:' vous demander de
m'oj,der ...
RoJphe ct Sop.hie échang()'Ilt UT! coup d'œil.
- L'autre iour 'vous ,avez mnnifcsLé le désir de
m'êLrengréable.
- Voui 1 dédlara Pin, pour sûr 1 Il le veut, et
moi-7.-<8.ussi.
- y a-t-Î'l longtemps que vous avez quitté la
mai&OTL de f>flllt6 ?
- Oh 1 dame, voui ... d-es années.
- Vous iguo/rez dOTiio si... le rrHllade ou, lIu
moins, celui qu'on faisait raSSCI' pour malaJe et
que vons gnl'die7. cu demie!' tirll. <'flol ellCOrr là. ?
- J'vas vous dire. On sort qnrlcmefoi.s guéri des
au Lre.s maisons d.e san lé. De cene-là, jamais. Com~
ment qu'on guérirait puisqu'on n'est pas malade 1,
Sonia fris..'>OTLna.
- C'est 11orri])l,e! gémit-elle.
- Oh ! fJl1and rclis qu'on n'('11 r;n!'L pa: ... Si! ort
on sOIrt toujours ben, \Ion jOtLl' ou Llllk.e, IlH.Üs 100
picdL9 devant.
- Et ... monsi mr .. . le monsi'oll.r, enfin, l'st-il viv.o.nt?
- Voni.
- Vous en otes 50.1' '1
- Voui.
- Com.mŒl. t cela?
Rdhphc hésil.r" ft t le gros dos, louoha dit c6t6 c10
Sophir. Fifi encouragea :
- VI/ls-y! •
x
- Ben, s'y faut que j'vous dise ... VoWl. L'autre
jour, pas, moi j'<tibcn vu, comme <:Cl, que l'vieux
LE PRIX D'UNE VIE
vous ~enli
. .i'm'ai pensé : RM (fllC ('l'lIt! pauv'
domo vOlldr.oit lâcheIT ùe l'(j,['I'I' (1'11'1... SOr aussi
Sonj~L
n'élait plus retournée ohe7. Sophie. Le bles- qu'ça sera gl1r.rc commode ... A réll!'.R·rn pt'~
pas.
sé pouvai L il présen L se -passer de ses soins, ct Ill. rl'~Îs
ça. emhOlcrnil jolimonl l'pntnlll, si p<,u qu':ia
doctor sc, en r6flé·chiss.flnL :n~IX
,rollfl<!m1Ccs d.e
('S~aye.
Fli j'vas l'prôvcnir:. qn:oll. s'rnélle ~:tUl.
y
l'cx-gnrdien des fOllS, éUlIt ISnlSlû d hOrl'eul' contre m'deman.del n rommcut qUJe 1 SUIS ... Oh 1 J semis
pns Cn peine d'lui dnnnrl' une cXl~!r
, nlio
... .T'en
cot homme qui avait consonti il sorvir' de grOlier.à
IrOuvC\I"uü:l tllujours une... Et lu!', contPnt, y m'!el'a.H
de mnJhe\JrCtl'OOH vic limes, QllC fern cc Ralphe? Ne
trollvcTn-L-ll pas le moyon d pt'ôvenir le docteur un p'lit caclenu.
Il .l'moi llit o.n
s .~i
: l'patron c8l lm l. J,J' t ~ 1 qui
Pmbe que que1qu'un s'int6rcSflO à M. Mnrlet ct qu'il
- Ne soyez pas méchant, monsieur mon ami,
cela ne vous va pas.
- Ah! vraiment? Pourr,a is-je savoir ce qui me
va?
- D'~Hre
bon. V()IUS l'êtes.. . OeLte dame est
malhellreuse, elle avait les yeux pleins de larmes.
- Possible. Mais elle ne devrait pas choisir juste le moen~
où olle tl0se pour se livrer ù. une
recrudc ' ('ence <le chagrm.
.1QD, mais vraiment, m{msieur mon .D.mjt
croyez-vous qu'on choisisse le roomerut de !alsser
s'cxasp rer son cbagri,n, comme vous le . ditos 1..:
C'est injuste et cTuel.. . Vowez-vous savoir ce qlU
a. bouleversé oelte paurvre femme?
- Jo serais charmé de l'apprendre, a.fin d'éviter,
à la prochaine oCCélJsion, le même écu el!.
- Eh! bien, c'est Jeau.
- Jean 1
.
- Moi? Oh 1 mademoiselle ...
_ Oui, Jean. Ene le regard.ait, le regardait...
Elle a su,ns doute pC\I"du \1Il petIt garçon .. .
- Princesse, vous devriez écrire des romans!
Après tout, votre supposition est peut-être juste ...
.li\.lors, je ne fixerai pas les séan.ces aux jours
où nolre élève devra veUlr.
-Oh!
_ Gela vous déplalt, mansienr Jean?
- J'aurais voulu revoir la dame.
- Tu la verras en peinture. Je Le montrerai son
portrait. Laisse ton dessin, petit, tu dois être faligué. A qu.eile heure ta mère doi t-elle venir te
'Prendre?
- A quatre heuros. Je lui aJ dit que, hien sûr, ça
ne vous gênerait pas que je r ste lOtit le lemps ici,
pour profiter.. . Maman m'a donné mon déj.QUJDœ·
oomme du temps que raDais à l'école.
_ Tl'ès bien, mon. arrni Jeun. Mais je t'aurais
invill' volontiers il ipar~lùge
le mien qu~
du res:
ta\ll'l1.nt voisin on m'apporte ... Une pOl'hon ... qUl
refroidit... Ah J Prilncesse, Princesse 1 L'exisLe.noo
d'un vieux garçon a des heures amères.
IWo prolesta gaiement :
- Vienx garçon J .
- !\lpLtOO1s cé1ibatrure,
Ene jeta éLou.rcUlffient :
- M~riez-v<YUs
1
Pli~
elle dcYint pourpre cL no sut plus quelle
con tenanco avoir. Il dit, très grave:
.
.
_ Je snivl'ai peut-être vite V(Jt~e
consetl, Prmcese, si... si. .. j.e sujs o.SBez c l'Lnw du .s'Llccès poUJr
ne pas redou\,Cr les charg~
d'une fumJJle.
8noore Loule rose, ,eLle &e hô.~a
de rassembler ses
doooins cL de prcuù1'e congé.
_ \{ous reviendrez cet aprèSrmidi? demanda 1t3
peintré.
- CcrJ;a.inement. Ne le dois-je pM? Mon élèvo
m'uttendra.
- C'ost vrai.
E ouvrit Ja. porte et, attendri, pensif, regarda s'éloigner la jeune mie.
Ce n'était poilnt seulement lu crainte de la gêne
qui arrêta.it encore sur les lèvrGS de Paul Mirnande le dlofiruLif 8,v.eu. Si <1élicicuse qu'li jugeât sa
chère Princesse, ce p8Jssé obscur qLl'elIc-mêmo
jg.l1ore l'ép011.Vantc.
�Gl'è-
72 =================== La 'Petite
n'a jamai.s rien fail pour moi. .. La dame, au cont.raire, m'a reoousu, soigné, guéri. .. que sans elle,
Fill s'rail veuve...
A celle éVOO6.üon , Sophie hruyammc-nt reniOa.
- Alors, reprit Rolphe, c'est l)aS lui que j'vas
servi r, c'est la brume da.me. Et, pour comme ncer,
j'vas m'informer si, des fois, l'vieux n'y s'rait
pus. Faut vous dire que j'connais er.core des gardiens d'là-bas. Le docteur g.arde longtemps son
personel, s'y peu,t. Y n'·est janlais fiClr qUUlld y
en a qui s 'd6filent, comme moL.. n a peu r des
fu.ites. Enfi,n. l'nuL' dimanche, rai été par là.
J 'ili vu un a'mes anciens camarades qui sortait,
et je l'ai questionné.
Fifi sc mord'l1.it 11'5 lèvres. Cette version avait été
arrangée entro elle ct Holphe, p ur l'édillcation
de la dock>resse. Lu. vérité, c'est que RaLphe a enYo)'é Fifi guelter la sortie des gardiens en congé
s'en rapportant à elle du choix des moyens pour
obtenir des con-fidenoos. Rolphe conLinua :
- Vet' monsiew', que m'a dit mon camarade est
toujours dans SOn pavillon; mais j'crois qu'II est
fou pour de vrai, ou idiot maintenant.
- Ah ! le Inwlhcureux !... gémit Sonia.
Elle prit dans sa poche une pièce d'or - les
économies de Vit a.l 1 - et la lendit à l'homme.
- POur votre peine ... C'esl tlès peu ... Je ne suis
pas riche.
- lVllCrci ! Ça n'v,alait pas ... Oh 1 moi, vous sa... que j'en suis b()te 1 ;"Ialvez, j'suis désint~re
heureusement, y en a pas beaucoup comme moi 1
- Ah! pour sür, dit Fin, d'u.n accent pl\néU'é,
pour sûr que c'est dommage que Eloi ct La Ri5que
ne soyent pns, comme Rolphe, disposés à rend'
service pou{' le plaisir.
Son ami jugea qu'elle avait la langue trop longu . Il fronça les sourcils.
l'dais la peLite ne se troubla point:' Elle répéLa
son encouragement favori :
- Vas-y donc 1
S~nia
avait saisi la r6ti en ce. Elle interoga~
anxieuse:
- Qui sont ces gens,., Que vOl1le7.-Yous dire 7
- Oh 1 ben, on peut vous expliquer ... Voilà ce
qui en est. Quand j'ai 616 sl)r, pas? j m'ai dit :
c'rc;t pas l'tout, mon loup. ~lainte
qu'on sait
qu'y est, faut l'tir l' d'là.
l! s':lr~t.n
un inshnt.
onin, pâle ct le c(J'ur batLanl, atlendnit.
- Voui, j'm'ni cllit ça ... comme ça. 1\1 is j'm'ni
pensé aussi: à. IQi seul, mon gros ... lu peux l'fonil11 r ! Faut d'l'nide. Oh 1 avec deux bon, 7.igues
qu'ont peur de ripn, cl pis moi qui rl'nit l'lrohJ (, III l' ,
on s'L .. pns mul des mur'ILlIes, des po'"1 s cl d
gnrdiens 1 POIlI' lon~,
j'IIi Lou 'hé deux moLs d'J'fIffnir à des bru";' gens que je connnio .. . Y m'ont répondit : Il Çn biche 1 On marche. (\Iab dis .0111bit'n ? 1) Combien 1... Qué qu'y fallnit leur z'y dire "
J'leur 'l'y ai dit : Il .J 'caus rai il la personne pour
ICI celle qu'on mtLrchol'uit. - Alors, ljU'Y 'l'ont l'é~
pendu, on S'I'U Ion homme; mais rien,., dllme, ..
on fi mieux ... 1)
Ec«(,uI'6e, crpendanl frémidsnnte d' spoir, Sonia
brièn'Inent demanda :
- Que vous fauL-il 7
_ :'Ilni ... ,J'veux rien pour moL ., C'est cu ses.
- Comhien leur faul-il ? corrigea docilement la
doctoresse.
- J'ni mllrchnndé.,. commc pour moi... i\lnis y
risque:>,.. t drs gros 1
n rle~
- "oyon., ,ln hifrl'e,
- Cinq miJ.le J
Sonil se lordit leil m ins.
- Impo!lsihlc ... C'eilt Impo~!libe
1
- Y 7,'1'0 vOlllnient deux .. vnnt. .T(' lellr 7,'nl c1iL
". Non 1 moi j'aurai l'fll'g nt. .. Vous avez on~
f\(ln '1" Y 'l'ont dit : (( Voui, on l'conTInU Il. 1.ien
lI'n f. ()n In\Jchel'l\ (jlllll1rJ l'monieur s'ra (!n sù-
H
'Deux Sous"
~
reté, où qu'on nous dira de l'conduire Il , Vou~
savez, ma chère dame, c'est pour rien !
Soni-&: n.e répo nd it pas. Le fron.t pencM, les
mains crispée , elle réfléchissai t.
Cinq mille franœ ... Où les trouver 7.. ,
Et quand m ême .elle arriverait à se les procurer,
est-ce vraiment le devoir de Sonia de tant risquer,
de Lenter cet effort insensé avec des aides aussi
répugna~s,
[Jour retirer d'un cabanon un malheureux que tant d'années de suppJ.i,ce ont peut-()tre
r en<lu. fou 7 Et ~ nod olphe échQue ? Si lu i ou se:;
compiLees se laIssen t prenclPe 7 C'est Je bruit, le
scandale le procès retentissant où sera mêlé le
r;om de S()J1~a
Orbihoff. Il faudra parl~
de nappo,
l accuser ... Et tous ses efforts pour éviter la honte
seront perdus ...
El Yvdte ... la petite Deux Sous que, du même
co~p,
le baron de Folbeut pourra rejoindTe 7 Yvette
qUi se trouvera de nouveau livrée aux menées do
ces ~ens
... ~t arpprendra qu'eLle fut criminelle d.ms
son InconSCIence de malade ..
~olphe
ct Fifi. sont embarrassés par le silence
qUl se prolonge. Holphc reprend :
- C'est comme je vous dis. Vous ne J,}8.yerez
qu'après qu'lout s'ra bi€n .
- Ces hommes saven t mon nom?
- Jamais de la vie 1
Et, oubliant qu'il affirmait Lout à l'heure aŒ1r
gratuitement, Rolphe ajoute :
0
- V~yons
,! Vous pensez pu.s que j'soye ('i MI .. ,
Leur dire vot nom ? .. Pour qu'y s'adressent t't VOliS
sans moi el que l'affaire me passe sous le. nez '1
- Hum ! hum 1 lOU5!'Ola Sophie.
Rolp11e s'aperçoit dc sa bévue et lAChe de la ré·
parer.
- Non, j'voudrais pas .. , Moi, qUlInd j'arruncre
q;uéqu'dhose, J'm'y inJ,6res~
, ça m'chiffonne qu
S pQ..'jse de moJ. .. on a sa peille amour-propre.
- EL... si VQU& échouez ?
- Dame, ça sera wnt pis.
- Si l'on vous prend ?
- Oh ! ça ... pas d'dange r 1
- Si on prend les nutres ?
- Faut pus penser ça, ça porte malheur 1 Enfin
si on pince quéqu'uJ1, ça s~ra
pas moi, pl1l' . qu'
j'en sais assez pOlll' faire Laue l' patron d'l'élubllssemen l. Et puls, j'suis pas manchot 1
- Je voudrais ()lrc sQre qu'en auoun cas mon
nom ...
- Oh 1 si ç'cst ça qui vous tracassr m bonne
dame, vous pouvez ct' lrnnquilJe : pers~nl1
n'maugera l'I ~orc.
.
- OUI: .. mUls ClIlq mllie francs 1... C'esl norme
pour mol.
.- y n 'voud,ronL rien raba.ttre ... V'là Je malheur
dit Rodo lphe avec un SOu.pir hypocriLe ,
'
La doctoresse se leva,
- J ~ v,?us remci~,
prononça-t-elle avec effort '
r{:fléchlral. .. Je verral.,. el je vous donnerai bic~J
une rép<lnse.
- C'est ç~ .ma chère dame, a u plaisir 1
-: Au p.lmsl.l' ! l'ép06ta Sophie sur le pa.lier,
popu,laire parut à Sonia, en la
. Et cetl.o lo~t,!
cl.l'con.5 Iance, IroDlque jusqu'à ln rllaulé.
le lunr'hOl qui l'ntlcndnitnnxi useSonIU, Il'ûuv~
monl. ELle I,UI rapporta ce qu'avait d't R l i t
conc.lut n pl UI'<lnl '
1
0 P le e
J1~ais
nou s nd réunirons celle somme 1
<!ont elle 0. cllls le premier' jOI1l' reconnu la
1 a~
loy,anl6 et ,1 uvcugle dévou emen t il Yvetle, Sonia dc'PtUIls Ilong1temps a confessé son roman de douleur
C cc 1011 ,
,Aujom'd'hui, co n'es!. plus s ul ment pOlir la IlIle
1nl <.1 serllll prM à donnrr S<:l
d.Yvonne quo .10 vi~1
VIC. Il la sucrtf'ic l'nlt an. si suns un r.cgl' t à rello
mnlllClIreU!!? r6Itlu.~e
qui, u milieu du ]1lns 6pouvnnl.nbl drllme qUI puIs!'!, Lor~l
rune ltmc de
f em~H'"
a li Jo courage cl songer il. sauver YvéttE',
de 1 r.m acher nu x 1J011l'rC'tlu . de sn bienfaitrice.
on
A
�C'1l-
.
1
La 'Petite " 'Deux Sous"
=== = = === = === ==== =====
Vital et Sonia che!'chaient vainement une solution à ce problème torturant, lorsque Yvette revint
de l'ate·lier, animée, joyeuse, toute contente d'uvoir,
pour distraire sa cM.re grande amie mélancoliq.ue, à
fair~
le n~cit
de la visüe, chez Paul Mirhande, de la
baronne de Folbert.
- Vite 1 dit Yvette, à téllble 1 Je meurs de faim ...
En déJeunant, je vous raconterai des choses ... oh 1
des choses on ne peut plus intéressantes. Mon ami
Lancrot, vous déjeunez avec nous pour m'écouter ? .. Oui, je meLs V'Otre OOlUv,ert ... Eh bien ! vooo
n'êtes pas curieux, dit la jeune fille désappointée,
lorsque le déjeuner corrnmencé, elle vit que ni Sonia
ni le Manchot ne 'paraissaient songer à la questionner.
- Mais si! dit la docto.resse, je suis très intriguée; j'attends ton bon ,p laisir.
- Eh bien ! sachez que monsπu:r Mirhan.de f.aIt
un portooit. Cela n'a rLen d'extraordinaire. Mais la
belle madame est venue ce matin, avec un jeune
h9ffime.. . Pas intéressant, le jeune homme, queICQ.nque ... Mais elle 1 Vous l'aimeriez, Sonia, mol
j'en perds la tête 1... Une figure, pas régulièrement
jolie, mais écJ.airée par des ye.ux qui ont l'aiIr d'êLre
devenus tNins:paremt.s à foree d'avoÎlI' p1enliI'é. Mo.i,
je pense que cette dame a dÛ pc.rd're un enfant,
parce que, tout €J1 po·sant, eUe re@aJfd:ait 1:e pet~
Jean ... VOIUS savez, La.Dtcrot, mon élève, le fUs dJe.s
aubergistes de « la Matelote» '1
OLÙ, oui, j e sais.
- Elle ne quittail pa,s c1es yeux ce g·amin, pouersuit Yvette, et je voyais son regard devenir d·e plu8
en plus Lriste, et s-a flgu.re se co.ntracter. Monsieur
~li
rha.nde
l'a vu aussi et lui a pro~sé
de lever la
séance. Ah 1 e1le ne s'est pas fait prl{!r 1... Elle s'ost
sauvée p-1utOt qu'el·le n'est partie. Mais elle reviendra, je la reverrai 1 EL peut-êt.re que je sU'Ill'ai son
histoire...
- Quelle pel.àLe curieuse.
- Savez-vous I.e nom ùe oelte dame? deJ'lliaD.cLa.
ViLal, d'un ton d.is~l'a,t
- Certainement. C'est ln haronne de Folbert. ..
Sonia! qu'avez-vous 1", Oill 1 mon Dieu 1
.Devon,\]o d'uilie pù,ùcu.r de coonvre, Sonia défail~
lait. LancmL aida. la jeun.e nUe ù la soutenir. Mais
lui alllSsi, b16.rne, trem.b.1o.nt, 1 araissait p.rêt à s'6vanou:ÎIr. Ocoupéc de Iii docl.o·t· sse, Yvebtc ne vit poi:nJt
le boulcvoersmnenl du vioiU.nœcL
XI
ANGOISSANTS PROBLÈMES
Sonia se l'cmü assez promrpte ment. Son P~e:r
regard [ut pOUl' Vit.a.l, et dans les yeux du vLell
homme elle vil une é.pouvante semblllbJ.e à la
91j'6nne. To.\1s d~ux
sen<LaiolliL SO rCS5errer 81Utour
d'eux, autour d'Yve-tLe, la cha.tnc du p·assé. Paa- un
invraisembl'a ble concours de circonstances, les perso.nnruges du dI'IllIUIC sc tl'O'Uvaient de nouveau rap~
'Proch6s.
_ T.o.nt pis pour mon élève r décJ.a.ra. Yvett.e. Je
{Ile vous quHte plus aujourd'hui, SOnJa. La.ncrot
ilra pl'6vcru.r mo.n sieur Mir)1ande.
Mais la doctores-se protesta :
- Ne te fais pas de peine à cause de moi, ma p~
lite chérie. Va, va, mon YV{)tt.e 1 Puisque tu as pr!s
la charge de faire LravaiJ.ler oct onIant, tu ne dOlS
!PflB la lai'Sser à anonsiC'UJ' Mtrhlmde.
_ Promebtez-moi, du moins, que SI vous étiez
plu.s souffrantc l vous m'enverriez ch·e rcher ? ..
- CeJ.a, oui, Je te le pl'omels volontiers.
Lancrol et Sonia. demeurèrent seuls.
- Enfin; disail Sonia., madame de Folbert :vit,
eUe Jouit encore de sa for tune, Les misérables ne
l'ont donc point condamnée '1
- Et o~endat
, répondit Vital, elle est profondément triste. Quel martyre moral lui fait-o.n subir !
- Peut-être, ainsi que le suppose Yvette, a-t-elle
:pcrdu son fils. Le petit. Rierre. C'était un bel enfant, vigoureux et gai. Mons.ieur Martet adorait SOn
petit-fils.. .
. - Ce qui m'étonne, dit le vieilla.rd, c'est que madame de Folbert ne se SOiit point opipOsée à l'internem~t
de son père ... A-t-on pu la tcrompe~
elle
aUS51 '1
- Ah 1 sBlns doute. A moins qu'oo ne l'ait contrainte à laisser faire.
...:.. Oh 1 elle n'aurait pas cédé.
- Je me so.uviens de l'ernrpire absolu qu'avait le
baron sur sa fenune .. . Un empire qui s'expliquait
assez pa.!' la violente passion qu'éprouvait la pauvr.e créature pour le beau, le séduisant Raoul. Que
de fo.is j'ai entendu madame Martet et son mari
s'attendrir sur le grand amour unissant le j~uDe
ménage. Ah 1 le monstre 1 Son pouvoir de séduction agissait même sur ses beaux,parents : ils l'admiNi!ient, 1e loUJai.€-rut, l'adoraient.
- Gerbes, reprit le Manohot, j'aurais fait tout au
mon.de pour éviter cette rencontre de madame de
Fo1bert et d'Yvette, st l'on aVl8Î'l pu la prévoir. Cependant - conune pO'lltI' sa reconnais.sance par IleJo~
e l'autre jour - je suis d'avis qu'il ne fau t pas
voU' les choses BlU pire. Qui sait 1. .. Peut.-être de ce
mal sortira-t-il un bien 1
- Eh! quel bien en peut-il sortir?
- En tQut oas, nOlUi8 n'avons à rcd'Ol.J,ter rien
d'immédillit. Comment Mme de Folbert pourrait-elJe
OOOODma1lre, en oelite superbe créaeuTe dont les
yeux brillen t d'inteLIigenc.e., 10. pau·vroo hlioLe p(\le
et [rClle de jadis 1
'
- C'est vrai.. . Hélol'.se cepeooant.. .
- Héloïse a reco.nnu Yvette parce que j'Hais là.
C'est en m'identifiant avec le pauvre accu.ellli à
« Mon Bonheur» lors <le la disparition de l'enfant,
que cette femme on est arrivée à idenLifle.r également Yv'etle aVlec da peti.Le Deux So.us. J.e vous assure, madame Sonia, que vous vous exagérez le
danger. A chaque jour suffit sa peine 1 AJ10ns au
pl,us pressé, qui est de secourir monsie'u,r Martet .
- Ah ! je le voudlrais 1 s'éC!l'ia Soruia exaltée.
- Admettons un insLant, poW'suivit le Man cho.t,
que nous arrivions à arracher M. Murtet il ~ ..
bourreaux. Où 1.e mener, où le cacher '1 D'autre.·
que nous pourraient attaquer les criminels; il su:firait alol's de menrc le malade sous la protecti, I{I
de la justice. Mais VOIlS, madame, ne pouvez agir
légalement. Dénonce!' les coupables, ce serait meltre au jour un !J'op douloureux mystère. Donc, \1Martet évadé aura tout il. craindre encore. P ens'~k
vous que sion Je retro\lve on hésilel'llit à le replonSiG geôle? CclLe fois, aucune fo.rrna lil6 il
ger d~ns
rem~li
: c'~st
un fou évadé que J'on rattro.pC'. Il
auraIt beau Jeu, le docteur Probe! Et l'on emploi,'.
!,ai~
peuL-~.tr
les gral?ds moyens, CO'JX sur lesquels
II n y a pomt à rC'Vemr, pour empC!cher une évasion
nouvelle.
- Oh 1 laisez-vous J... Di eu sait que je les en
crois capables 1
- Il Lmporte, l ~rit
l e r-.ran.;Ï1ut, d'ussnrer à.
M. Martel une rctraite discrète et sÙI'e. Où la trouverons-nous ?
- Ilél.a.s 1 cela aussi. est presque impossible avec
notre manque <Ïe NlSSouroes ...
Il ne faut pas dés espérer. Nous allons cher·
j:).h€!l'." 'réOéchlr... Vouflez-v()lUs me Inn ss'cr quaranLe-hrtiit heures pOUl' réfléchiT et pOlJ't-ClLI'e tentai' 'qn€,lque ooooe? Aye-z comflance en moi 1
- Oui, mon ami, de tout mon cœur 1
Tandis qu e Vila! ct la doctoT'esse creusaient d'an· '
goissan ts problèmes, le petit Jean Grénelet, uyant
ta.nt ~ien
que m~1
dessiné u.o nez de pl'Om, se dé·
battlllt pOllr vaI'lCI' ses plaulll'S avec la difficulté
de d.€l'iSine.r un n.o7. de race. Ce qui l'assomm it.
Il demanda timidement à Yvette :
•
�(;?-c 74
===================
- Est-œ que vous aussi, mademoiselle, vou.s
avez dessiné des nez?
- Je crois bien! Et des yeux, et des bouches ...
Cela ne m'amusait pas du tout.
- Ah 1 soupire J ean, un peu réconforté par cet
aveu, ça vous ennuyait aussi?
- Mais je m'appliquais tout de mê.me.
- Et M. Mirhan<le?
- Quoi, M. Mirande?
- Il a dessiné aussi des nez, des bouches, des
yeux '1 '
- Certainement, répondit la voix joyellse du
peinltre. Pauvre petiot 1 Parce que, sur tes cahiers,
lu mets debout des bonshommes, tu Le croyais capable de faire, du premier coup, un chef-d'œuvre '1
Va ! Tous nous avons la même déception, el dans
tous les a.r~
œLa se relrouVIC. Et, tu sais, mon petit
homme, si tu sens faiblir ta vocation, il est lemps
d'avouer à ta maman que tu t'es trompé. Tu ceindras le tablier blanc des gâte-sauccs et seras tout
simplement marmiton à la (( Matelote d 'ang uilles n.
- Oh! monsieur, bien sl1r que non, je n'ai pas
changé d'idée. Je ferai ce qu'il faudra .
- Bon, mon petit.
Un peu avant l'heure convenue, Héloïse vint
chercher son ms. Il lui tardait de savoir comment
s'était passée cette (( première journée d'atelier n.
Chargé d'un imposant carlon où le peintre avait
mis des reuilles blanches et un feuillet de modllle,
le fulur membre de l'Institut quiLla J'atelier, (ler
comme un prix de Rome.
En routc seu:lell1<,nt il songea il racon ler à sa
mèr{l la visiLe de celte bcIJe madame, dont M. Mil'bande allait faire le portrait.
- C'est une baronne, muman... On a dit son
nom, mais je ne me le rappelle pas .. . j"écou tais pas
beaucoup ... Ça m'amusait bicn de voir M. Mil'hande
ln lleindl'o ; mais H ne veut plus q1J.c je ois là
quund elle revi ndra.
- Pourquoi? Est-ce que tn n'us pas été sage ?
- Oh 1 si 1... C' st parce que celle dnme est deyenue triste, LrisLe à cnt1se d moL .. si tristc qu'elle
est partie.
- Comment, triste à cause de toi?
- Oui, pal"ce qu'elle
n ail il un petit gr.rçon
(ju'elle a perdu. C'est mad moiselle Yvette qui l'a
dit. Elle n'en savait rien, pour st1r ; mais M. Mil'hnnde croit nussi flue c'cst ça.
- Pauvre darne 1 répon<lit lfélolse cOlnpntissunte.
La 'Petite
U
'Deux Sous"
~
Brusquement, depuloS 1 jour où Yvette lui a conté
sa vie, depuis qu'un '\r liment nouveau s'est glissé
entre eux, le pellltre a 'lb~r
H.1oné
le tutoiement qu'il
co~servai
t d? temp où Yvette. fiUeLte encore, poSaLt p01!-r lm. En V{)'y "llt &a petite amie alLri.s,tée,
Puul MU'hande reprit lB lu tolement ra.milLer.
- l'lIon peLit., tu U"- du chagril1 .. .
Elle s'était assise gUI" UJl divan, les coudes aux
genoux, le menton sur ses mains joinles. Il sc mit
près d'eUe, 1a. contraign it à .le regarder et répéta
très tendre :
- Tu . as du cbagrin, dis '1
- am.
ee tutoiement
ainsi r pris n.'élait plus le m~e
qu.e jadis. Elle S'CD lrf,uula et rougit, gCnée. Le
p~mtre
s'en aperçut. Lui-même sentait bien que
l'~noceDr.
camaraderie de naguère ne pouvait plus
eXJster entre eux. Il se fit Il"ès grave et fraternel,
afin qu'e1le el1t confianœ.
- Ne suis-je plus votr"l' grand ami, Yve~t
? Ne
voUJl.ez-vous pas vous cnn!lL-r il. moi '1
- ~onia
m'a. retel1ue ce matin parce qu'CIlIe se
scntrut souffranle. j'l101, je m'imagine que ce n·était
là qu'un préLexLe pour me garder.
- Quelle idée 1 P ou rquoi '1
- J 'al SJ peur qu'eU ne me laisse plus venir ici
chaq-ae jour 1
- Ah! pru' excmplc 1 En quel honneur '1
- Si je P?uvais le f'omprendre 1 11 sc passe iles
~hose.
dont]e n.e soupçonne pas la n(üurc, muis que
.ID devL1le.:. terribl<'s, ..,1 Il Ilx(juclles je dois êtrf! mêsN>
1 Lan crot, qui CI'~lvnit
lée: .. Soma e!"t l~'vpr
pOlOt paru de la JOIIl'lI {r, ('st arrivé tout il. ·1 lI( ure
avec un ail' élrange. Il Ms 'ln 'il esl entré S~nia
m'a congédiée. Elle C\ Iln,' il. m'envoyer ici' au~"mt
de volonTé qu'elle cn a (<11 C(! malin pour me "order.,
Au bas de l'escu.lier, 11' ('tan! aperçue que j'avais
oublié ma bourse, je sui, r-l'lTIonl6e. J'ai 01lvert avec
ma clef. Ni SOllia. ni f.illl(·]'ol ne m'ont enLendnc. Ils
causaient dans la chumbr-e de Sonia dont lu l,orte
élait OuvClfte, ct j' i su rpris ulle ph!'CtlSe fJui m'a
épouvunl6e. Sonia di sni l : " C'est hOnlbllQD1ent. ùangE:l"eux ... Qu'o.vez-()l1~
fuit? Vers quel nhlOle ourons-noll,s !. .. n Insl indiv 'lTl 'ni, SHIlf! J'ôrl(~chj
Ilue
j'agi 'sujs mal, j'ai pn\lé l'oreille. Lnncrot u r{ pl Ddu : " Je <;uÎS sùr- ùe ,~'I 'e frmme ... et nous n'uv ons
pns le choi.x. Mais nOliS Ill' sommes point 0:\1 boue
de nos p.cines. J.1 faul 1:Jr-!~f'n
.. . )) - (( Ah 1 jc donner,lis n'on sanf(, 0 rll!. Slrnla, pour me prorlll" r
celle somme .. . ClIlq n III' frnnc 1 P ur ln.nt d {Jcns
c'cst si peu .. . et pOll r fH!.IIS c'('!'j[. .. l'imjJ{)ljsiLJlc""
JI 1 s font, reprnd Rl'f . r. p.st llnJ"l qneslion d, vie
XII
ou d{l mo~·t
... n Je m~
!'>1I.1!'> se.n·Lie glacée de terrcur 1
Snns br'UlI, .comme J {>l'~
('nt.I·~e,
j suis l"f'ssortie.
LE nT.) "lIEUn m:CULE ..•
.Tc nc vonlals pns Clrc :Sllr-Iwise éc()ulant. Dites-moi
ce que cela peut Si.gllif1PI· I... Il me s 1 bic qlle je
- J e vons ni regrellée ce llIat.in, Princf' sc.
l!l che nu ~ord
ù 1!1I Ilblrne qui, d'un momt'nt à
Y'Vette jeta un regnlù cüsLrni,t ur J'ébuuche pIn1 m! lre, va. t:J. cngloll Lu'. A Il 1 j'étais trop haurcu;;e 1
cée en pleine lumière.
hIle se nnt à pk'ul'{!I" épCl"dum nI.
- Mal aussi, monsieur mon ami, j'ni rcgrcllfJ de
. Ne. pleurez p·llS ... Oh 1 ne pleurez pas 1 Je ne
np pus vf'nir... Valls avez travaillé... Io.dome do
pUU:I vou' vOs I.annos .. . YvetLe, Yvette ... mu peliLe
Folbert est venne ?
<UTI!I'. .. ne craIgnez l"ien, je SU is là. J Cl sorui là
_ Oui. .. et justement elle vous 0.. réclnmée.
louJours pour V01l protéger, VOIlS défcnd! e.
~foi
'1
Eh ! comment pOllrrf'7.-VOllS me déf ndre conous l
lre un ùang~'
dont jïgllor 'I n natul'e '1
_ Elle n'a pns .réclamé notre fulur prix de Rome?
. - .;. Et qUI peuL-ôlr fl' xi!!' que ùn.ns v{)lr lma.~
on...
. .
gtnalion ... Yvette, r gardez votre ami l, ..
VOliS voyez, j'olliVniS raison : il lui Cl frut l!1ll1 ~1l
sO\,lril à, W'UVPI'S Fe' larl lOS. Sa. fl'Uycur saJin"ion .
plll!!all. ~lJc
n ép.rouvai 1 plus cefl.e sen: tian irr,üJ
_ PalICe qu'elle n'en Il pns pnrlé?
sonné.e d lLba.~r1on
!l'ni J"opprcsse cnl.m Sonlo. t-t
alu r..,l 1f'!n en l, nll1rma Yvonnl'.
_ Vous cherchez toujours midi il 1111lt[or7.e heuL nClOt cl .pU IS Cju tl!OC lr:s voil ab~r6il
pax ulle
Pl"~ocuI!nt.O
qui Illi U 'I OoCUI;C étrangère.
l'CS, Yvdte r "l';n f()11 t CH ,VOU l'av 7. f!"n ppée : elle
hile n e::.t plu~
'leur Ht'ule p n86·(', 1 ur sollci doVàus a. lrouv c chaJ1nnnw.
_ Vrai? ,Je suis conLcnle. J'aul"U is bien aimé ln 1I11nant, t cela. su ml pour gluc r celle poLi I.e Clm.
(:~nlt\e.
J\uprès dl. Poul
lirhu.nd, ünc r lrouv6
r voir ...
! III pI'C8HLOn,. don 1 dl(· Il lJ ,."oin )lonl' otro h/nreuse
pUi-\ v<,nll.'! 7.... Et po~r
_ P01l1YJ,uoi Tl/ôt.c~-vons
ôLl'e lrès atfilôc,uinlôc Illlit!1 H'IO<>nt.
'
<l'loi m'urnW'7.-VOllS il 1'1\ lll'{' où rl~j:\
k' J(HU' halsné~umls,
dlL It, IH'intl' . WJLrc o.mie ("/ll1('rhe
.
S() '1 ... Qu
(lnl cc. fllçOnEl-là, morlf'moisC'lI' '1 •.• Eh 1
Clllrr mtJ.lc fl·a.nes f1L 0 sai 1 où les tro11ver. J'ai
muis ... vous uve/: plcur(:, Princes e 1
�C'?l-
La 'Petite .. 'Deux Sous"
====================== 75
connu ce genre d'amgoisse. On n'en meurt pas. Le
vieux a dÛ confier cet embarra,s à une femme que
madame Sonia r egr~t
de voir mise dans la confidJerruc .. . Il 1a.ut êtù'le ème petri.te folile comme vo'us
pour Î!.vire du d'l16lffi,e av'ec dies o11olSes a'U'ss1 simpLes.
- Mais cette frayeur de Sonia ! EUe a parlé d'un
abimû ou nous courons ...
- Cet abîme n'est que trop facIle à définir. Evidemme.nt, ces cinq rn.iill1e francs sont le chiff.re d'une
detle. Si on ne les paye pas, 1,e créan~
poursuivra, '. fer.a ven.dre ce que possède madrune Sonia.
Les meubles vendus, le propriétaire ne vous gardera sans doute 'pas très vol~mtirs
... yous ~erz
dans la rue ... Voilà. l'abîme! Ce n est pomt gal. Cependant je tl;onve exagéré d'en faire une question
de vie 0'l1 de mort...
- Oh ! vous cherchez à me rassurer... Mais ce
sero.it d.éj.à bien douJoiUù'eux d'être saisis ...
_ Parbleu! Aussi on 1'6vjtera... Vous pouvez
être sùre qu'on l'évitera, petite Princesse ... n'y aumit-il que moj pour procurer cet argent.
100 s ... 011 ! non .. .
- Comment, non? Vous ne petmeUriez pas à
votre vieiil I/:'-Ioi de vous rendre service?
_ Mais vous n'êLes pas si riche que ça...
une imperti_ Vous n',en save z ri,en. Que vo~1à
nente petite personne !
- Ne vous fê,chez pas.. .
.
- En .ru-je l'air ?
- Qu.e VOUs êtes bon 1... Ah 1 que vous êtes .bon 1
- VOU5 allez vous rasséréner, j'espère '1
- Oui, bien sûr ... Mais comment faire pour expliquer ù Sonia ... lui dire ...
_ Ma chère p()tite Yvette, il y Cl <:les g@s sans
conscience qui se croien t irès malins n inventant,
pour .expliquer les choses les plus simples, des fabJrs il. dormir debout. Pour moi, j'ai 1'l1o,r l'eur du
mensonge, .
. _
_ Et je SUilS comme vous, fit l velte.
_ Je le sais. J'ru l'borreur du mensollgr, d'abord
parce que je le trouve dégr?-d0- nt , et c~t.e"l'1Liso?
me
sn1ïlrn.H pleinement pour 1 évücr. l\10.1S J en III une
a.u tre : le mensonge c.s t une mal~dres
' e, ct. iJ\ .arrive toujours il. comphque.r c;e 'ru hl préLcndal t SIl'llpliIler. Vous aB,cr l'doumer près de madame Sonia. Vous Ilui raconterez tout bonnemcn1r que v!\US
êLc.s remontée, que vous l'avez rntendue sc d6ol~r
de n'avoir pas cetLe somm{}, que vous êtes rcp.arL16
sans oser ...
_ Mon pauvre ami, c'est jmpossible ! ~e n'aime
pas, j ne veux pas mentir, mnis je ne pUIS o.v~u('r
il. Sonia que j'lli sutI'pr.i.s une po.rtie du secret qu ello
prend tant de peino à me cacher ... Eille cst. iro)? nerVCll SC, lrop é.bl'nnlée ... J'aimerais mieux le ùlr~
il.
Lo.ncl'ot.
- Vu r.0ur Lltncrot 1
,.Il s I.l.l'rangera ensuite comme il pourra aViec
Sonia ... Ah 1 qUù vous ôLes bon ct g6néroux \...
Mais, VOUS savez, cet argent, j'Û' vous le l'cndl'ai.
- Parhlen 1
- J'y Liens nbsolument.
- MQi aussi.
- Vous ricz ... Vous me parlez comme aux peULs
enfanls qui onL un caprice. On dU comme eux pour
ne pfLS Les exeiLct·.
_ Ma-is non, mais non ... Je comprends fort bi~
que V01IS soyez .une Lrbs fi bre pctite Prinoosse, ob
je vons 1ai,ssÛ\ral me rembourser peu ù peu, comme vous l'en Le.ndr.az,
_ Eh bion 1 c'est oonvenu. J e me sa.u,w'. Il me
tarde d'apporter un peu d<l paix il. celte pnuv.l'll:l
Sonia 1
Et, ue nouveau joyeuse, les yeux élincelants,
YveLLe \S'ten nMl1 port,cr la. bonne nouvelle.
Denx honroo plus Lard, ,la nuiL V<lnllnt, ~ : ml
Mirau
hnndo s'apprfll it ù sortil' puur n.Ller, prc.n~
. l'csluUl'nnt son rrpn.q solitt1Ïrt" IOI'SCf1.1 un vunleUr
iOIC1LLendu se pl'ésc.nLo.. C'élai t l.nllcrot.
~
A sa. mioo troublée, le peint.re comprit qu'Yvette
Iltvai.t trar..smis sem offre.
Le Manchot, pressé, von.a.it-il chercher l'arg ent?
- Mons1eur, dit ~e vicilJ.ard, je v.(}u,s retal~d
...
Cependant j'aimerais avoir, dès ce soUr, un moment
d'en,lretien av'e'C VOll'S.
- Il est certain que ... c'estl'heuTe de mon dîner.
Mais, moo bon Lancrot, je le recuLerai pour vous
La.i.:re plaisir.. . Laissez-moi d<mnoer {le la lumière.
Sm' un chevalet, un tableau voilé d>c serge attira
l'atlem.tion du Manchot. Il l,e désigna du geste.
?
- C'est lie porlrait de la baronne !de F~bert
- Ou.i... Yvet,te vous a parl6 de cette dame ...
Rh quoi peut-elle vous in téresoor ?
- Oh ! en rien. Moo&ilcur, je viens vous nemercier de l'offre gén.éreuse que v us avez faite à
YveoLte. Elle me J'a lraD.Sù11ise.
- C'est lout naturel.
- Non, monsieur, cela n'c&t point naturel... ou
bien ,..-cela POU'l'l'ait l'être trop.
- Que signtifle...
- Monsieur, ne vous fAehm pas. PardonmlCz-moi
si je m',exprime un peu bruLalement. J.e ne suis
qU'lu.n :pau;v.ne homme qui ne S'5 it ,p as tourner de
belles phrases. Monrueur, cet arg-ent serait le s.Br
lut pour une personme bj10n malheurs~
. Cepe;n,.
dant, aVJant de l'n.cce.plier, je voudrais vous priJeI
de me 1e pre ter ù moi, non à Yvette.
- Je flle VO:lls pas la différence ...
- Elle n'appn.ralt pas très netlement, peutrèt.oo
au premier abo.nd; cependarllt, Îll me sem.ble que
vous devriez la sem,ir... Monsi,eur, notl'4i) petito
Yvette es,t si simple, si éll)ignoe de tOllt vilru n ca.1cul, qu'.e:lle n'a pas suppot;é uno minute qu'en 1.'0hligearut v,o us pouviez conoevoir une mauva1se
peDlSée.
Cette fois, le peintro comprit.
s'empourpra. Il marcha vers le vieilSon visa~
la:rd et, les poings &C1Tés, ordonna :
- Vous aaIILez sortir .. . sortir imm6ùi.aL me.nt.. .
Mais au lieu de reculer, ul!l.r roL lBndiL la main
OIU jeune homme; son honn6le figll,re s'é.c1G.ira,
- Ah 1 monsieur, monsieur, que je suis COlltent 1 Que je vous remercie !
La colère du peintre III place à la stupéfaction.
- Ah 1 oui, monsJeur, je suis conLc.nl.. . heureux 1 Ce qu e j'ru dH, c'ét.ail pour provoquer cc
mouvement indigné ; car je le pensais bien, vous
êtes inca,pRble d'un bas cœlcuJ, il1<capnble d'abuser
00 ln candide confiance d'une €l1fant. r..Jais je voulais en CLre sO r, cn avoir nne preu 'l'. Pensez donc 1
Mo. p etite Yvette es t tou L cc que
ime nu monde.
Je voudrais ln sauver de touL mu.l, Ini préparer un
avenir hCUl"C'UX. Peut-être cela n' st-il point pos
sible : tant c1e choses sont entre c'lle ct le bon.heur !
Mais qu' Ue vive, sinon S8ns d0111eur, du moin::;
j' i commencé à parler,
sarns remordIS 1 Et puis~
monsiour, laissez-moi être sincère ju~q'a
bout:
j'ai un grand , Lrès grnnd service ù. vous demanùCJ'.
b'abord, il me faut trahir un Recrot... dont on ne
m'a. p'o int fait confidence, mais que j'ai deviné. ]1
se pass.o une chose prévlle par moi il y a long·
te:mp~.
Je la redoubais sans pouvoir l'emrpêcoor.
DClpuis ql~
je vous ai. amené Yvdte, to u Le joJe,
tou~
ef'<poir, tout co qui a miR d 1 bontheur da.ns sa
vie lui est venu de VOliS. EU.e f]uiLtnit un int6rieur
IlristIC, sombre, misér8ble, DOUI' venir, dxmsi ~a
beHuté üe votre nf,elier, jOli ir de l'art, ùu lravail, or
La g ielé, cll} La. jeunesse. Vous .avez pour elle toujours éLé si bon, si affcdueux, sans rien qui puisse
i'effarollcJ!cr... Comment la, pauvro petite ne se
serait-elle pas aLlOJCtb6e à vous? Je crois que pour
YveUe 10. pensée de ne plus VOLIS voir s raiL un
arrêt de mort... MaiA j e vous demru.de, monsieur,
sl I)IIJO vous est chère, de l1C point 1.0. laisser se
Imlrrer cl'espérances vaines. FoiLcs-lui senlil' que
voLre aff.oction pour elle n'esl que oe l'amitié. PoiLOA-llI; comprendre que trop de dü;tnnce vous sépar e ù'une pauvre cnfnnt comme clle, pOllr que
ro
•
�G?r-
76
vous puissiez songer à lui donner votre nom.
Monsieur, je vous en prie, ne laissez pas ma chère
petite Yvette croire au bonheur 1...
Le vieilard par:1ait doucement, humblement, et
cependant d'une voix ferme, et son regard très
franc ne quittait pas les yeux du peintre. Paul Ivlirhande, à son tour, lui tendit la main.
- Lancrot, vous êtes un brave et digne cœur...
J'ignore quel lien vous attache à Yvonne .. .
- Aucun lien du sang, monsieur, mais j'ai...
j'ai connu sa mère.
-
Ah 1
-.: Elle l'ignore. BIde ne sait rien de son passé.
- Oui, elle m'a dit ocla... C'-est étrange.
- Une émotion- une terrible émotion, alors
qu'elle était Loule 'petite, avait anéanti toute mémoire chez elle, ct durant des années, de longues
années, elle a paru vivre sans pensée.
Le peintre était devenu très pAIe.
- Lancrot, c'est impos sible ! Elle, Yvette, n'a
pu être .. . folle 1·
- Non, monsieur, pas foJJe 1 pas idiote non
plus ... mais comme endorunie, comme étourdie par
une trop rude secousse ... Il ne faut pas que l'enfant le sache ... Je vous l'ai dit parce que ... parce
que j'ai cru devoir le faire.
- Merci, mon runI.
Il y eut un court silence. Le peintre, atLristé, !longeait. 11 demanda:
- Comment l'a-t-on si bien guérie ?
- Madame Sonia est médecin, elJle l'a soignée.
- Et elle croit que rien n'est à redouter pour
l'avenir?
- Oh 1 oili, morusieur, de ocla eLle est certaine.
L'eruant a retrouvé le libre usage de sa raison
après une sorte de fièvre cérébrale; et de'p uis, e,l le
n'a jamais donné aucun signe ... je ne dirai pas
de folie : oille n'en a jamais donné... mais de la
moindre étrangeté.
- Lancrot, le sen timent que j'ai pour ceLLe e<Ilfant est plus que de l'amitié.
- Je le sais, monsieur, et c'est pourquoi je vous
parl<l comme je le rajs.
- Et si ... si ce sentiment était assez fort pour
me fl{1ire pa.sser sur ... 00 que vous venez de m'l1J>prendre ...
- Il Y a Ilutre chose, monsieur.
- Quoi?
- J'ai connu la mère d'Yvette. C'était une a.dm~mble femme, une victi,me ...
- Je vous cOfl1d)re.ncJ.s. : Yvette n'a pas d'étaL
civil.
- Elle n'en a pas Elle doit ignorer même le
nom de sa mère.
- Pourquoi?
- Un drame a entouré ce n m. Cc drame qui Il
brisé ln J>auvre petite, il n<.l faut pas le lui raJllpel1er.
- Ah?
- So. mère était uno [ mme du peuple ... Vous
voyez, monsieur. Pille naturelle d'un pauvre l~wJ
heureuse, Yvette ne peuL OLre pour vous qu une
BlInio à qui vous ferez du bien, ou une iThforLun-ée
que vous perdriez ...
_ Vous vou s trom,pez LllIncrot. En,fant du peuploe dites-vous? Eh 1 que suis-je donc? D'llilleurs,
JO
dépends de personne, puisque, MIas 1 mes
vieux sont morts.
.
.
_ Mon sieur... oh 1 mo nsJcur, ce seraIt trop
beau ... trop inespéré... Voire femme,. ma pau.vre
petlLe YV'€tte 1... Ah 1 je pourrais mou,nr tr.o.nqu'1L1e,
et sa mbre l à~ha.u
t, vous bénirait... MaIS non .. .
c'est impos9.lble, mon Dieu 1. .. li y Il autre chose .. .
.'
Il y a pire 1
- Quoi ? Yvette ... étant Inconsciente ...
- Yvette est llllASi puro que la plus pure 1...
Non il ne S'agit pOint d'ell e. .. mais son pèTe ...
, Quoi? Vous m'épouvantez.
RsL un miséruble 1
- Snil-ellf' son nom ?
he
La 'Petite
U
Veux Sous ,.
~
- Elle ne re saura jamais. Ce fut le dernier vœu
de sa mère.
-!EL lui ... la conatl
~ il
?
- Il a pu., rapprocher jadis. Savait-il qu'eLle
Hait sa, fille .. . Je n'ai pu ID 'en assurer. Maintenant i~ ignore où elle se trouve et qu'elle est guérie. Peut-être, si elle était en sa présence, ne la
r econnaHrait..;i1 pas.
- ELle ne vous a pas qu esLionné sur ses parents ?
- Je ne lui ai jamais dit les avoir vus . Et je
vous demande, monsie ur, en échange de la confiance que je vous témoigne ...
- N'ay·ez aucune inquiéLude, mon ami. A YveLte,
à pel'lSOnne au m.onde, d'.aill eurs, je n e l"épèterai un
seul mot de œ que V{)US venez de m'apprendre. Je
vous remercie d,e votre démarche. Elle vous honore, Lancrot, et elle m'honore aussi, car elle me
prouve votre estime. Oui, l'ombre d'un affre'ux
passé obscurcit l'avenir d'Yvette. Je devrais ne
songer qu'à une chose: je l'aime! et je sons bi,en
qu'eUe m'aime aussi... M/a rcher ven, le bonheur
sans regarCLer en arrière ... Peut-êll'e un jour auraije oc courage, qui ne sera, sans doute , que sagoose. MaLs, je vous le confeRse, je suLs boulevrs~
par ce que VOus me révéJcz. J '![li besoin CLe voiIr bien
olair en moi-même. Je veux, avant de demander à
ma pauvre petite ami.e de mettre sa main dans La
mienne, êLre certain de ne jamais regr.eLter ce
moU'vemenL. ..
- Vous avez raison d'>/lJgir ainsi, monsieur, VOUIS
le devez.
- Kn atLenCLant, je vous donne ma parole d'honnête homme de ne rien Laire conna11oi'e 0. Yvette
des sentiments que j'ci pour elle. Je la troiLerai en
peliLe amie très chère, tl'ès respectée 'JUs si. Je
serai fmLemel av,ec ·oHe, je vous Je l)['omeLs.
- Merci, monsicur.
- El maintenant, me jugez-vous assez désintéressé pOUl' accepter que je vous prête la somme
don t VallS avez besoin ?
- Ah J monsieur, qùo vo1fs êLe.s bon! Vous me
pardonnez d'avoir VOullU m aSsurer de vos inLenLions?
.
- Vou s u.siez de voLre drOit... C'était mC!me votre
devoir. Cet argent, vo~s
pCI1S~Z
?ien que je no l'ni
pas dans mon secrélmre .. Mms Je p'llLs me le procurer. Voulez-vous reveT),1,r dcmo.in il cette mC!me
'heure? Yvelle sera parL1'Û.
- Merci 1.;. Ah 1 j'n~
une requête encore 0. vous
I/lJMeSS,er : Je voudraiS - Mme Sonia aussi
qu'Yvelte n'asSliste pas aux séa'TLces de pose do
Mme de Folbert.
- 'l'ions ... cl p01.ll'ql1oi cola?
- Nous d~siron
qu'eiIJIe ne fasse paIS de nouvelles connaissances pou r le momen t...
- TouL autre modl!le mondain vÜ'us effraierait-il
autant, ou e·s t-oe une méfiance qui vise personneA.
lemenL Mme de FolborL ?
LancroL se tro'Ublll..
j;~
bien 1 .non, ne me répondez poo. Je ne
veux r~Qn
savol!' de p,lus. J'ai confiance en vous.
Vous ilIlm.e,z ~vet,
vous la déf€'l1d'ez ... eL jusqu'au
momenL ou .J aura.l des clroiL!:I sur elle, si j'en d<Jis
prendre un ]our, ]e m'en romets à vous.
XlII
Il. Bonoi];VE SE R6;vOL'fE
..... Faites :vos jeux, m essieurs.
Un ~ourd
silen.ce règne dans le alon. Les joueurs,
o.ttenLlr!:l, sU!'Vel~cnt
le banquier.
Pr~sque
tou s les v.i.sages cepel11do..n.t demeurent
oourlllil1ls.
On dira~
que le comLe d{} Bellazuccio qui, en ce
moment, t,l ~n t,.1a
~an(rue,
se soucie aussi peu de
gagner qu tlJl s mqullète reu do pcrcl're. Ln banque,
�l
g
(;if-
La 'Petite" 'Deux Sous
U
jJ est vrai Il. ce soir une chance extrême. Le visage
du comte' ne s'en éclaire pas davantage.
Tout à l'heure, tandis qu'hl était à l''I1n des tableaux, il a perdu coup sur coup aovec la mêm;e
éga1ité d.'Ame . Auprès d.e lui M. Bordève .perdalt
avec mOUlS de philosophie. Info.rtuné M. Bordève 1.
La .chance qui aux premières .soirée~
poosées .à.
l'hôlel de Folbert avait paru lUI SO'UT.lre le boud.e
mainte~
sans discontinuer.
cont..re le
Ce soir, waimenl, le guignon s'a~ne
paulVre garçon. M. Hoehevine, le sptrlte aux nobl~
traits que chacun ici appelle M. Du,p.ont, ~rd
aussI
puisqu'il est au m~e
tabJ~u,
et il 50urü comme
le comte, indifférent, hautam.
Il y a là encore deux étrangers, deux nouveaux
venus amenés - comme n<J.g!1ère }l amena Bordève
- par le comte de Bel:lazucclO qUi les a reno~Lés
dans une mai-son où l'on .s'!l!il'l1se. A chaçrue sOlré~,
des habitués amènent am51 un ~ ,pll!-sleu.n: arrus
qui viennent quelque t,e;mps, pms dISiparalssen.t.
Les nouveaux veillus. aujoul"d.'llUl, des h6te~
dêJla..'V'
sage qui doivent qulLter Paris 1e le~dma?,
n ont
pas pour leurs débuts, la chance qUI favol"lsa ceux
de Bordève. Ils font contrc mallvais'e fortune bon
cœur avec assez de vaiHance.
Gro&S>&:c,. les
A Î'a'l1lirc tableau', Siméon, Lal~ir,
habit.ués, v01an.t iffiOi.nJS souvent ralLSSetr looT .mLse.
Bordève, ce soir, est ncr.veux. Celle persistante
déveine l'irrite et iJ se oouvien t que MIfi~
de. Folbert l'a grondé <l'être joueur. La. sympa~le
~S(pec
tueuse mêJéc de pitié que la ba~one
l~
lUs!plre ne
fai t que croHl"e. Elle-'ffiOO1O' lal5se voU' 8.J\l Jeune
homme une bienveillance qu'à nul aut..re de ses
Mles eUe ne témoigne.
- Vous ne. d0vriez pas jouer t
QueLle amertume dans sa voix quand eUe lui dit
cella... li a r6pondu, pensant la rassurer:
- Buh ! J.O' ne jouc guèl"e q·ue chez vous ...
EUe a étouffé un gémisseunent, est devenue Loule
plUe. Le soir de cc mOme jour eile a tenté de -l e retenir près d'elle quand sc soot foomés 100 Joux. La
baronille, si peu oauseuse d'orc1inai,re, a feillit d'être
entralnée daills Uille conversaLion animée.
Le jeune homme s'y P1"0 tait, mais le buron de
Folbel"t a rappeJé son Mte.
- Eh bien 1 nous ne jouons pas ce soir?
Et la groSGe Rébécc< venant s'<J.l'iseoir près de
tlfargucnte, a insisté.
d'aller jo.uer, ma
- N'empêchez pas M. BOl"dè~e
chère baronne, je vais vous Loo!l" com,pagme ..
Aujourd'hui' Bordève se souvlClrll des consCll!s de
de façon
Mme de FOlbMl. Poul"quoi l'enga-L~,
&i pressante, à s'éloi.gnel" 7... PourquOl celle émoLion lorsqu'il lui a di l ne jouel" que chez eJ.le?
Un sO'Ulpçon qui, de.pUlS peu, hante le Jcune
homme, se précise, s'im pose.
CetLe persistance do déveine... Cette incroyaéb le
chance du banquier, les physionomies détach es
des familiors du lieu, alors mOmo qu'ils perdent des
sommes énol"mes ... Que signifie [,out ceda 7...
Ces gens perde,nlrils on réaliLé, ou plutÔl ne sonlce point les compères de ces banqUlers chanceux,
et l'ar~ent
qu'ils vel'&ent d'u'l1e main ne le reprendront-Ils pas do l'aulr-o ?
Il regarde la jeune femme assise au fond du s.aIon. Les yeux de M. Bordève relliCO'ntr.mt les yeux
de Marguorite, et U st bouleversé de lour expression à lu foio aul"l"itaire et sUlppllanLo.
Quo demande, .qu'ordon ne-t~.I
?
pa~.
il
Qu'il cesse. de Jouor ... ou. qu Il ne chel"~
voir trop clair aul0!1.l" do lUI, .e.L que, deVInant lmdélicateSISC il sc taise, par pILlé pour eLlc ?
Sans quhter du rc~ad
la baronne, BOl"dève dit :
- J'abandonne le lOu.
Un concert do reproches s'élève, il ne réc.oute pas.
Le soU'rire de Marguorite l'approuve, furLlf et bref
sowire, qui. suHlt pou'!' l'encou~gr.
I:1 r6pèt.e :
- J' Ah fUldool1e le ieu ... .Te SUIS à sec.
- Qu'à cela ne tienne, monsieur 1 Voulez-vou.,
me permettre ?. .
.
Siméon est déjà près de lui, courbé, obséqUieux,
les mains pLeines. de billets de banque.
Là-bas, le regard de l',·1argu.erile 5'angoisse.
- Merci, répond sèchemenL le jeune homme, je
suis décidé.
- Vous n'êtes pas beau joueur, mon cher, chantonne le comte de BeUazuccio. J'ai perou plus gue
vous tout à l'heure ... On se refait, vous voyez.
- Peul-être n'aurais-je pas le5 moyens que vous
avez pour me reiaire, rlposle I3ordève.
-:' Que voulez-vous dire, monsieur?
- Ce que j'ai dil.
Le comte s'était levé, les deux mains appu.yées à
la tabi'e, les yeux étincelanLs.
Mais -le baron de Folbert est là qui surveille', prêt
à intervenir. Et cette intervention, le comte semble
l'attendre. Elle est sans doute prévue.
- Eh 1 vraLmoot, mon dher, 'écrie Haoul avec
un rire indllllgent, que vous avez mauvais caractèl"e 1 Il est peruni.s à un joueur, si ci?nstamment
malheureux que l'est .notre .pauv~
alIlll, ~e
perdre
patience un penJ ... eb li n'a J'en SlUlS cerlam , voulu
meUre aucune intention offensante dans ses paroles. Je sujs sûr, BeIJazUlCcio, que vous pos5édez
de la corde dc pendu .. . avouez-le! et donnez-en un
petit morceau aux joueurs malchanceux.
Mais 1\1. Bordève ne se sentait pas d'humeur ù
accueillir la plaisanterie. Les bra·s cl"oisés, il jlttendait que Le comte accenlullt I.e défi de oon a~liude
.
.Mais à cc moment, une mam &e posa sur 1 épaule
de Bordève. Il se retourna.
Mime <le Folbert s'était rapproclhée de lui.
.
Elle nt) paf1lait pas; mu.is il sentait frémir la mrun
et voyait trembler les lèvl"es de ln jeune f~me.
San" UIl1 mot de plJus, il q,uitta la lable, s'éloigna.
Il avait pris la mai.n de Marguerile, il la baisa et
elle comprit tout ce que vvulalL dire ce baiser.
- Merci 1 mu.nmura-l-elle.
Elle attendit que BOl'dève -etH quiLLé le 5al<>n.
Alors, elle aus.si s'en alla, sans souci des joueurs.
- Vos jeux, messieurs, disait la voix du comte,
redevenue parfailemen t calme.
Les nouveaux venus encore perdaient...
Bordève marcha lon~emps
au husard, afin
d'apaiser la fièvre qui faisait battre ses Lempes et
do se calnnel" assez pour pouvoir réfléchil".
Après l'esclandre que ce soir il a failli soulever,
il ne peut revenir ohez les Fo1bert. Plu.s il songe
aux à}]UI"~S
des h6tes du baron, plus il se sent convaincu d'avoir été umené par le comte de Dellazuccio - cct ami de ren()('nLre - dans un Ilripot.
Et cela explique pourqlloi, malgré la distinction
parfaite, Jo charme do ln mallresse de maison, on
ruc reçoit chez elQ·e que des hommes.
Mai.s par quel étrange concours de circonstances
la baronnc <10 FoIberl si cha l'man te, si rés~ve,
si évidemrnent en dehot· de toules vilenies, se
ll'ouvc-treJle jO'l1er le l'Ole d'une 1 nJlll1cière de tripot 7 Pa.r queUe doéohoon e oon marj, dLstingué et
cha.rmant, en est-il v·enu ù Iair.e ]e méLier de
grec ? Comment a-t-il pousé une créature r.uss.i
angélique que la baronne ? Pauvre Jemme 1 De
quCl11e é10quence a élé 5 n regard 1 Quelle reconnaissance li. ex'primé son pauvre visage doulou roux
lorsque Bordève, se lai 5ant entr<J.lner par elle,
Il quitté la lnbl-c de jeu 1
IlIa reverra. Il veul la revoir, mais ailleurs que
ohez elle. Il se souvient que le lcndcm<J.in l1e doit
poser chez Pa.ul Mkho.ndr..
Lc l.endemain il se rC'Ild;1 à J'atelier, nvanll'heure
convenue pOllr la pose, et lro.vn le p inIre occupé
à tout disposer.
plus gl a.ve quo de outume. QuaMinhando ét~i
tre joul's se &on L écoulés dopuis !<i'\. onv l'salion
avec La.n.crot. C s jours il Jes a pnssés à réfléohil",
Il a rovu YveLlc, Lendre pour lui émue de grntiLu<ln : el voulant tenir la promesse faite au vieil.
�~
78
La 'Petite
lard, il a dO. se montrer, au contraire, plus froid
eL réservé; du moius l'a-t-il e5sayé.
lais comme il joue mal son r61e ! Il suffit que le
visage de la jeune fiUe s'aUriste à une phrase un
p.!u compassée, à un (l'lot qui veut être indifférent,
l'our qu.e, bouleversé, il demande: « Qu'avez-vous,
petite Princesse ? Il, avec un regard qui suffit à
d6ll'uhre to.uL l'effet de ses bcliles attitooes.
Paul Mirhande s'en veut d'être si faible s'en
veu.l plus encore d'hésiter devant ce qu'il sent
Lien, cependant, devoir être le bonheur. Cela le
l'end triste, absorbé.
M. Bordève n'y prend point garde. Il a luimCmc une préoccupation qui l'ompêche d'être clair;voyant poUl' au;f.rw,
li a ré olu de confier à Paul Mirhande ses soupçon,s. Il espère - sans se l'a.vouer - que le peintre
raillera son imaginalion, traitera ses supposi.tions
de billevesées.
Il ne serait pas IAché qu'on lui prouvât qu'il se
trompe: ce matin il n'ace pte plus sans regret la
pensée de ne pas retourner à l'MLeJ de Folbert.
Mais aux premiers mols que prononce Dordève,
in peintre de\i ient tLll.'nli.r,
son allen lion ne sent
point la raillerie. C' st qu'il se souvent du désir de
Lancrot d'6viler les l>encontres d'YvetLe avec la
nronne, Il a. dû mentir, lui que le mensonge inilignc, et affirmer il. Yvetle que Mme de Folbel'L
V I ut êLre seule. Par le fait d'avoÏJ' vu redouLer LeUl'
contact pour sa petiLe amie, tout ce qui t{)uche
au . F{)lbert intére 'e au plus haut point le pe1l1tre.
Un trJpot, cett.A maison des Folbert tEst-ce pou.r
cela qu'on veut éloigner Yvette?
Le Manchot sernlt donc au courant ?...
1n.is, comme 1\1. Bordève, il se déclare convain.cu
qJ" le rôle de 1\Ime de Folbert n'esl que passif et
q l'elle est con trainte à le remplir.
. - Celte femme est une hon~le
femme, j'en jurerni. ! l'Ûpondil-il à Dardèvi), qui lui raconte l'intpl'vcntion do la bn.ronne. Vous devez, mon cher,
IlJi obéir et, avant (j'avou' laiss6 entre les griffes
de cos VOlOUl'S tou'e;; le.,; plumes de 'u;; ailes, rcto:trnCl' vers le r/.)!cmbicr Iamilial.
li;, n'esl-ce pU_", je ùevruls... d'(l.u\.a.nl que
j'ni violemm.enl éLr6r:11é rnt.:s cu.pitau.· ... C'est Ifi' tyUlll ce que la vic coûLc cller, même en dehors
d'I jeu.
Cela dépt\nd ùc.<; vies, réponù1t l'artis~
en
1 i nl ; vous n'u.vcz ptt!; choh:ii la phu; snge.
- Oui, oui. je vais re uI'tir. Il m't·n coûlcra.. .
pn"ce CJue je me suis pris tI 'u ne v6rllable affection .. .
I/I'oS là ... d'UllC nrrl'clion ll'è:; iendre qui epenri tnl n'est pas ùu l'amour - pour 'Une femme que
jl' devinc très mulheur Il e. Je la sen.,> menue'
dt' jl' no suis qllet dHn.gf'!r, d ~ m'illHl "in fIue je
T,OII1'1 ai, en l'CSLanl, ltLi être bon ù. qU('lqlle clK>l:YC.
- II st qu .:;Ijoll ùe la })arorme, nnlurcllcIlleDt.
ui, Ah 1 une voilure ... c'est eIJe? j'aJ anvie
li ' Ille ·auver.
'e soyC7. pa' ridicule. Accu illC't.:-Ia OOlnlnc si
ri' l'irJl u'éLail ,t luis ·('z·rnoi raire. l{'.~uùzIa
t l'l di que je po. rleJ'ELÏ. Vau' V<llTe2 !li elle m'o.p1 lllvr.
I!orrlève n' ul pliS 10 lait'· de dcmon<ler <1"5 explI sLions ,: le pei nlre .ollvru.it la porle, el la. baIfllllle de l' 01 b 1'1 rn~.al
•~ Jn vi
"C (>luit murbré. ses Il'(l.lf.<; tir6s. E1J
1(. Igl\ CIl voyallt Dordbvc, J.I s'avonç!1 VCl'$
lIe
Il:llt, !lndeI' c~
(;OITIme la reille au 80il', bUlSa la
nll n qu'clic l'IJi tendait..
.
1irhn:nde, vous arrivez
_ f\lndarnc <lit Paul
tO :11 à propos. 1 TOLIO umi sc désohlit à ln. )l nsoc
cl,' !I(' pouvoir peul.être pl' 'nore congé de vous. Il
pi'il . aujourd'hui mCme.
J':', !</UIS laisser nu jeuTle homme le Lemps de
pr\)le. ter, l' peintl' poursuivit :
- Il
arrOllï'S mgr.nles...
1/118 j'lmagmc qu'il
noU'i l l 'n<lm vit '. Tl Il jlris août b 1/1 \'Ie fi Parisien oisif. La province, le tl'avail r ffr icnl.
et
•
U
'Deux Sous
Il
~
Le visage de l\IaJ'guerite s'éclaira
- Oh 1 monsieur, qu'une existence intelligernruent occupée dans un cadJ'e p.aisible ne vou~
f!. uvantü pas ... Cest le bonheUl', croyez-moi. Je suis
contente que VOUs IJarLiez.
Et CMUlle 13ol'-ùève avait un geste attristé, elle
COlil'lgea :
- Je vous l·egl'etLcroi.. . oui, vraIment, vous me
manquere7.. Nous étions de buns amis, je crois .. .
Mai:;; précisément à cause de cela, parce gue je
veux être une vérit.able amie, je vous conselile de
relour'lwr cl1ez YOUS, là OLL out vucu les yCH'J'es ,
où votre vie doit aussi s'écouler... un peu gr'ave
peut-être au gré de vos désirs, mais plus douce,
plus süremem heureuse et ser-eine <Iu 'e.n celte
tourmenLe dont, en un moment de folie, vous
avez pu vous charmer,
Ello le vit très ému et s'émut aussi,
- NoLre amitié, repriL-eI.le avec un sOUJ'ire un
peu !lremblé, m'a été bonne; je vous en remerCle.
- Je voud!fais, ID&darne, avo.i1' l'occasion de
vous prouver mon dévouement... il est très profond, je vous le jure!
- J e le cl'Ois .. . Je le sens .. . l\lerci.
- D'aussi loin qlle je sois, je serai heureux de
répondre à vot,r..: appel,' si jnmuls vous me fo.isie7.
l'honneur très gl'and de ré<llumer ce dévouement.
EUe dit encore :
- l\lerci !
Et, fle nouveau, eUe lui tendit la. mail1.
DOJ'dève y posa longuement ses lèvres, puis il
sorlit suns une parole. Uue gêne tomba entre le
pcin 1.J'e el son n!odèl<l.
Mille de Folbcl'l comprend tl'Op bien quo lu scène
de la. veille a décidé Borxlève il t,rusquer SOn déI!o.rL glle ne J){'ut <Iouler qu'il T1'ait des SOUpçons
sur l'!lOnorab' itu de ses partenaires.
.
A-t-Il conflé ces sou.pçons à son OO11? Paul
f\1irhdlHlo, à so n lour, est-il en défiance ?
~e , qUI
EII,' st;n t ln honle poser sur elle ; l'angoÏ!~
i"ol'llis ne la quiLLe se fait plus oppressante. Ah !
n'e
st~!'le
point coupable d'accepter celte odielliie
existence?
QU'!Jbtien
~e Uc,
11610.s 1... Pou'n a-l-eHe loujours
&atJ'il'J' Raoul '1
El!. ~l si souvent rOvé ~e
l'ar~che
à !>8. vie
coupLtblc, de l'emrnCI~
10~
... bien loin, pour leIairl' ,I\t'C lui lUI t' 1'.'ISIA'IlCC n{Hlvel\e. E.I!e Je lui Il
dcm
ulr't~
... Comme il!'" d.IJrrD1 cllt rnillée 1
Le peintre, n silenc.e Lr~vaitl,
cherchant quel
sujel ;dJ~a
l' pOUl' clistrulre la lJùl'onne de SOrt
6v](l, lI,~
lJ'lSkt'lS('. Il (ut heureux d' ntendre résonll r le limbre d' nlrée.
_ Entrez .. . ln po.rle est OUV{)rte.
Insl,in"'i"C'm ,nl, ~'I.m
ct Folbt:rt e relourna en
enl nt1ll1t ouvrir. Une Iemme s'avanr.n dans l'o.tclier l'll ~ 'cxC\l~nL
•
- .Ja ,vous déralJ~c,
monsieUJ·... Je venais ..
EU, !> !lrrêfo, péf.rlfléc, seR VCU: clemourant fixés
sur le v~, age. de l\lme de FOlbel t.
Cellè-r:1 él;,wl de,,:clllW livide; Idais soo rrglll'CJ
- un J'Cgd rd 1'111 plr~u1L
- ne se Clt)lachnit 1Olllt du
regard de la Iemme.
Ilyn~
reconnu la visileuse s'éllit lout
Lr'.I" ;~1',
nus. Il,H r1~,louné
JoOdlffé.rcmJ.. Toul en 'mêlant sc'
coul lJI' , II domanda. :
- {JI!' . t-C( . donc qui vous amène mil. chèro ma .
<hlllC Urt'nala t ?
'
Le' '('11' rie lu baronno suppl iai nt toujours urd~IWlcL.:
lé~J'
c . inclina la tête. Mnrguel'iLe se
VI t compl'J, . hl,. rIgide, oli J 'lHi.t la po ·C.
. • .1l~
1:.1I1', dIt .1I()lolse, d'une voix qu'clio vou11111 .dl 1 mil e.L (]lU, mnJgr6 SPS cfforl.s, fr6missnit
éll'Olll Jl1ent, Je Y·'lUl.L vou s <Jil'C qlle le peUL ne
pOu.rI'~
p~lS
delmtin vemir prendre aa leçon.
- Jo. 1-11 TOldnd ?
. - f\lalade 1 .~r
récria vivement Hélol'so, ah 1 non,
bIen . HM, il PCIn lUI peu enrhnmé ... C'cst uno précaullOn,.. Malade! E!:It;..ce qu'il t jamais malade ~
�~
La 'Petite
U
'Deux Sous"
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79
yeux fixes, ne disant poo un mot, ill obéisSJait passi,Vooo savez quel beau garçon ça fait pour son àJ.,me "
v'ement au gal'dlen qui sllcoédaiot à HodOlJophc.
let fort, et vigoureux... et si gai! Ab 1 iJ. n'est pa,s
Cet homme n'ébait point brutal!. Moirul avisé que
malheureux, ça sc voiÏt.
son pr'éd6cesseur, 11 ne so:n.geaH pas à remarquer
Le peintre, surpris, regarde la mère de Jean.
l'étrange ull,urè ùe la maison.
Pourquoi oette tirade... Où vcut-elle en venir ?
Analnle, d'espl'lt moioo curieux que Ro1p,h e était
- Cet enfant-là ne me donne que des satisfacaussi, de corps, moiThs vigoureux. Il eû.t été ÎlIl.tions. Vous vous ra:ppelez comment il a passé son
suffisant dura nt les premiers Lemps du séjour de
examen pour le certificat d'études .. . Et voici qu'il
devi,endro, grAcc à VOY., monsieur MiThand,e, un ),,1. 1lar/;ct il ['asile. M. Probe ne pouvait l'el111ployer qu'à la garde des pea1S.ionna.ires déjà ma;artiste 1. .. C'est beau d'6lœ arLÎIS!,e !... Un métier de
t~s
. Son rôle prèS de M. Martet n 'av~Llt
donc rien
Monsieur .. ,
doC l't'rr rblc: J ,'1':-; par ceJa même il devenait très
u Ah çà! se demanJn't le peintre, devient-elle
monotone, el dlwant Joes interminabLes heures pas.
Mle ? Eet,.,oe pour lI1me de Folbert cet éial8€'e? Il
sées auprès de cc vieillard immoblJ.e et muet le
S0S yeux se posèrent sur ::;on modèle.
Marguerite avait los [aupière's baissées, une gardien pouvait ü.brerme:nt donner cours à son ilnagination.
flamme colorait ses joues, tou t à l'heure si pAJes.
Anatole n'était pas poèLe, mais amoureux 1
- Monsieur Mirhande, reprit Héloïse, voilà ma
Amoureux de toutes les remmes .
cororoÎsSlion faite. Sitôt que mon peLit homme ne
Bmn es, hlonâes, roooses se succédaient dans
:sera plas 'e nrhumé, je vous l'envoie .. . Oh 1 comme
,j e vous dis, i~ n'est pas maili.l.de .. . Mais du tout 1 les bonnes grâces du gardi-en, san.g qu'il songe/il
Seulement, moj, je s'uis pr,UI' qu'on soigne les dm- même à étaLJlir une sélection.
Pour l' in:;Lu,nt, l'inflammable Anatole est au démes aftn que ça ne devienl\e pas sérieux ... Et j'aibut d'une nuuvelle lWle de miel.
me assez noLre potiot pOUl' avoir le droit d'exagérer ... Au revoir, monsieur.
Elle est. brUlle, avec des yeux luisants, des che- Au revoir, ma bonne madame Grénelet. Dites v ellx t'üd!.., "li 1 les. \.empes ; son corps est souple
x, f!:u x cltmensions parfaites.
à Jea:n de dessiner en attendan t. Je prévieudrui .cL nerv~
Elle lUl a dll se nommer u Nllli Il. C'est vraiment
demain son professeur.
tout ce qu'il saiL d'elle.
Héloïse cependant ne s'~tojgnai
paiS et regardait
NinL. évirlemmont UI! nom de guerre choisi pour
avide.mmcm t Mme de Folb er t.
l,es amoureux ... peut nom sans prétentions d'ailMais celle-ci ne tourna plllS vers elle son visage.
leUors, et Qui plalL Il l'es pl-it UWOlent ô'Anatole.
Elle se tenait immobile, ne semblait pus entendre.
~l J'a conllue. iJ y a peu de Lemps. Un dimanche
Héloïse alors se décida il sortir.
qUi élruf S()11 JOllr (le sorlie, il l'a renC'on[.rée sc
Lorsque la port\) se iu~
rC'[ermée, Marguerite lep!,OiJlllCnant I~ nez en l'air devant l'entrée de l'ava sur le peinLre u,n reg/lnl étincelan.t de joie.
- Cc petit garr,on que j'ai vu il ma première sile. Le concierge, en olig,nanL des yeux uvec indwlgence, la lui avait fait remarquer.
visite ici est-il le fil.s de cette femme?
C'p.~l-v
vot' {'A)nn'll;SsanC'e, rn'sieur AnaLo]r
Elle parlaÜ à voix presqu e basse, avec une douceL\..e g&minc? a demandé le cerbère bonasse De~
ceur caressante, un 8Jccenl de tendresse qu'elle ne
p,uis ,ce I?alin elle. est 1à. Elle m'a demruidé si
se connaissaiL plus.
c .éf:.al Lle JOu l' de sortle du gardien chargé du der- Oui, r6pondH le peintee surpris; c'était Jean
mer pav,llIon, aU fond du parc ... E,,,L-eLle au couGrénelet.
l'~nt,
h~Jn!
(( .Anat le? '~ que je lui ai dit. Elle
- Jean? Ah 1 oui, Jean ... Le petit Joan Grénelet.
Son souri.Te s'eff,a ça. cs 'y~lX,
de nouveau, s'as- 's eS,t, O;I&e à. rwe. (( SavOlr 1 qu'elle m'a dIt, y en
j'ai dit, e s t
BOmbl'irent. L'oolaL de son vl5.lqe lentement s'atté- a pl 0.1 plU SIeurs ». - . u Anatole, ~e
pas bIen grand, pas bt·c n fort, eL il a une pelile
nua. Jusqu'à la fin de la séal1iCe, 1a baronne d-e
mous1i!-tehc blonde qu'y retrousse ... Il EllIe m'a enFolber.t tin L lu. pose en silen .
co!'!' 1'1 1111 1H'7. (>1 m'a répondn : u C'<Tlle vou,c; 6Le..;
aillCW'5.
Vi'siblement, son lune é~lÜ
un brave homme, vous 1 Il Pui'l elle a tourné les
b!llons cL s'est mise à faire les cent. pilS. La m~
tme! Regardez comme elle vous r'luque ... Mais
XIV
pas de da.ngel' qu'elle s'approche pendant qu'vous
êtes à me, jXLrler, parce qu'é pense hlen qu'nous
UNE IDYLLE
cn.us~
d elle. ~lIe.
que j'vous reLienno l'os ...
Un JOUI' p~r
qllmzlltnC c'est vraiment pas d'Irop
M. le doc[,eur Probe, chaque soir, faisait consp~u.r
une JClmesse comme vous ... Bonne chance
ln SII'IlI' AnntOlk !
ciencieus ment sa ronde.
n allait <le cellule en cellule, distribuant aux nouAno!\.Ll~
n 1'Cjo~0IL
la. pet.ite peJ'sonne.
vc;aux venus de ces encOltragemenLs dont il a,
El I lUI a souri, IUl a pris le bra" et lui a dit
quelques année.s })lus tOt, si habilement leurré M.
sans préambule :
'
MarteL.
-r:~
m? r'~onais
... Fais pas ta. bête ... Avec
D même que M. Martet, les malheureux on l'éç.n qlll.flut qUIllZfune, tu L'cs pas apC'rçu quo j'te
coutant se reprennenL à e~prc.
Pour ceux-là mO- r' luquats 1
rne (jl1i ont le C<lTVeaU détraqué ct que leurs fa- Où donc ? 0. dC'mandé Analole inlenloO(lué.
milled ont confiés au dodcur Pf'Oue sans soupçon, - Tu ne l'saLs p't'êt' pas... hci.n? TAc le de
nor cc que le d<?ct~ur
tl,ppelle cyniquement entre
t rapcl~
ousque L'ilS éLé.
wiliés la Il spéctall Lé Il ode la maison, M. PI'obc
- J'ai Hé ... <'111 u Brin cie MI~let
» où y avait bal.
J\.rou ve dos p8JI'olc.s d'espoir perSo\ll&.sives.
- Ah 1... Tu vois ben qu'c'était loi 1. ..
Mais cc genre de mallmlrs cst rûre dans 1'61.ab1is,EL, com~e
oRe n'~
dit ail concierge tout à
.semen l. Le rlocl,()ur [ll'Mère Ic.,<; pensionnaires gue ~ heure. na J UII !lC'lfSOntne s'es l éCI i(>~
:
,hli amènent de::! n.Lb~ler:s
ncWs ct inLél'ell sés. Des
- Non ... c'(jue l'cs un br.llVe type lü! 1
familles dc oc:s peIloSlOnnUlres on peut obLPnir OOl1u.
Avo·uer à celle chllrmnnt-c fille qn'il ne l'a pas
coup, ÎIIlfil1im nt plus crue les somm s fi"lJl'llnt sur .ren1lUI
· fJlI~
nu hA,] du ct nrin de Muguet Il. c'e~t
les prcHpecLus de l'a~ne.
'9 .familles onL tont à
été vraiment peu garant.
:rrdolll '1' du docteur et p.nr!lîJ les sangsues attaAnllto\e mentit crrl'ontémenL. Il affirma que les
chées li III fortune des Folbert, M. Probe n' t cer- yeux nOIl'S de su ronquête l'avaiont Cuit rêvC\r plue
tEllS point la moins avide.
BOuvent qu'à lellr Lour.
• M. Probe t("T'mina. Sll visile pfLr M. MarLcL.
Elle lUI apprit nIons qu'oMo so nomma.ït NÙlil
LeJ) re de la baronne dc l' olberl ne donnait plu.'! qu'elle ét.aiL rCpa.'lseu~
el que son bon ami l'ayanJ
gran aouc.i il. son Lourreau. MOl\1e, prosLré, Les
afllndonn6e, eLlc était llbr. '
-
�~
80
La 'Petite "Veux Sous "
- Comme ça s'trouve 1 répondit Anatole, je suis
libre aussi...
Ils passèrent une jottrnée exquise.
Et rentr é 1( en prison n, oomme disait Nini en
plaignant son nouvel amoureux, Anato~e
trouva
Jes heures démesurément longues.
11 lui semblait que jamais cette terrible quinzaine ne finirait. Ah 1 revoi:r Nini !...
Et voici que IlIl donzel1e, im.pati.enbe a:uta,nt qU'hl
est impatient, a trouvé le moyen d'abréger l'at-
tsrute.
0UI' J'affirm'ation du g&rdd.en qoo
510: correspondance lui Hait fidè1ement remise et ne COUlrériift
auoun risque, Nini a por.omis d'écrire.
.
Aujourd'hui on a remis à AnaLo,le une I€ttre qUI
J'a complètement boulever.sé.
.
.
.
Il l'a a.ppTise paT coettr - c~ qm n'était pas difficile car elle est courr-te, - et puis, par prudence,
l'a d~truiLe.
Nini éoriv.ait ;
(( A ménuH vat au fon du gardin pré du mure
à colté du çapin. Ge gaiteré une écheJ de corde.
Tu me trouvera dan le chemain qui longe le g'ardin de ce collé la.
1( Cel qui
t'ème,
1(
NIN!. »
Depuis qu'il a reçu cette épltre, évocatriCe de
joies amO'llreUSes, Anatole est enfiévré.
On le serait à moins.
Ce Roméo, m.aJ,gré tout, ne l ais~
.p.as d'être. un
peu inquiet de l'aud>aC€ de sa JU~leL;
Les sU!,tes
pourraient être fâcheuses p~u.r
lUI Sl I on vene". a
découvrir son absence. MalS les rJ.sques sont-1Js
vraiment très gran<los ?'" SO? malad.e n'es~
point
un agité. Il dort, ou du mOilla se tIent COl toute
la nûit. Et en l'enfennant à double tour ...
Quant à craindre une visite nocturne du patron ...
pas de <l.ang-cr 1 Une fois sa ronde fini>o , fi\ 1. Probe
sauf un cas exLroordinaire, ne r eparatt pIns.
Cette ronde de chaque soir, il tarde au gardien
qu'elle soit terminée.
Enfin, voici M. Probe 1 Il s'arrôLe au seuil d.o la
chambre et demande, de sa voix d0üce
- Rien de nouveau?
- Non, monsieur, répond An.alole,
- Le mal'Ild€ est calme
- Oui, monsieur.
- Il n dlno?
- Oui, monsieur.
- Il faut Je coucher.
- Dien, monsieul'.
- Bonsoir, mon ami.
- Bonsoir, monsiettr:
Ce sonL exactement les phrases échangées chaque soir. M. MarteL a paru ne rien entendre.
.
A Ris clans le fllUI.cuil qui, avec un lit, une tOilette une armoire t une petite tahle, compose le
mobllier <le Sil chMnbre, le vieillard n'a pas même
·Ievé les yeux su r le docteur. Son visage rcsLe rigidc-, comme figé.
Ah ! qu'il est changé, 10 bOn moIlJS.Ïeur Martet,
<Iepuis le tem,ps heureux où, dans Je jardin de la
vilil.o. M.arguerite, il f(L isait gaiement jouer son 'potitfils 1 Le corps a muig.ri, la (ace est d()venue jaunâtre, la: barbe tout à fmt blanche est mal soignée,
l es oheveux se sonl raréfiés.
D'après le conseil du docteur Probe, il la suiLe
de l'épouvantable crise de fureur où l~ vu~
de sa
fille a jeté le pauvre homme, Marguerite n a plus
cherché il le revoir. P.ersonJ'le n'approcha plus Je
pensionnaire de M. Probe, que M. Probe lUl-même
et] gat'dien al.taohé au ma:ladc.
Anatole écoule s'éloigner et se ,p erdre le pas du
direcLeur.
Là-bas dans le bl\.Liment princ:ipal, un fou pou.sse
des clrun'eurs déchÎl'an[es . mui.s le sLlence est profond dans les pavillons voiSIns de oelui de M. Martel. Le plus proche est inoccupé DIlJ1S l'autre, 16
~
femlliie que lors de la visite li laquelJle i1l avrut
a.mené M. Probe à consenliT, Isaac Siméon a entend·u·e chanter, ne chante pllius ...
Sa gardienne serait peut-être pour Anatole un
danger si eUe soupçonnait ses projets. I!l )0. sait
mauvaise, hypocrHe et de plus Jalouse, dans sa
vieillesse hideu.se, de la jeunesse et des plaIsirs
des autres. Mais chez celte mégère 'Un vice 110UV€&,u a I\emp'~acé
[,es vLccs d'amtan : elle boit.
Dans la chambre même de l'infirme qu'eUe doit
soigner, la g.ardienne a des cachettJes d'alcool, et.
chaque soir, après la visite du maltre, eUe s'enivre. Anatole .salt qu'à minuit, .(->lle sera in.capnblf' d·
rien disœrner et que, enLenldit-elle marcher dan:g
l es a116es, eUe ne s'en souciera guère et ne bougc.M. pas. Anatole avait à sa dispositi0:n , pour le
oas où son malade, au cours d'insomnIe, deview
drait ditficile, 'Un flacon de dl1ol'!11.
Il n'hésita point à eIl pl'éparer une forLe dose,
et quand M. Martet, obéissant passivement, se
fut couché, il lui pré-senta un verre en dis,ant d'una
voix terrible ;
- Buvez 1
M. Martet obéit. Il a cooscience d'être au pouvoir de volontés inflexibles. Anatole, tout à fait
tranquillisé, le regruXlu s'endcrmjr.
Que ~es
he11I'eS sont len!,cs a,u gl'é de l'impatie noe
amoureuse du gar<lien 1... Enfin, il prend pa.rti la demie de onze heures sonnant - de qUlUel' le
pavillon.
La nuit est ckl11ce, l'ombre, sous les arbres, est
hrouée de flèches d'arge'l1 t.
Anatole respire longu€iIJlent. Il se sent, pour la
première fois de sa vie, ulle âme poétique.
Le chemin qui lange le parc et où l'attendra
l'amante a.udaoieuse est dé&crl, même durant la
.j ournée. IL est bordé de jardins dont on ne voit que
des sommets d'flIrbres au-des,'5üs de bauoos murallies t de teTrains vagues.
.
1
Un peu plus loin, se irouve un cha.nLIer. de ConstructIOn, abandorlné depuis peu par sUIte de la
faillite Oe l'en treprene u,r.
Voici Je sapin dépasSDnl l~ mUT de clOLure et
qui, du deh01's, servira de pomt de, ropèr'e il Nini
pour lancer l'éohelle de corde.
Enf.L!1 les douze coups <le minuit s'·égrènent, 50lenn.els .. . AussitOl qudque chose fouette J'air audessus du mur et rcLombe a.vec un heUfrL assourdi.
Exacte 'autant qu'au<Ùlcieusc Nini a lanc6 l'éch lIe de cor<1e avec une habileté - une vigueur
surtout - qui plong em t Anatole dans l'admir.aLion.
- ELIe il du nel'f, la. mâtine!
Nini, en effet, a. donné, en lançant l'échelle, une
preuve de force élonmante chez une femme, on.r
à J'échelon d'U bas est attachée une IOtI.rde plCrre.
Anatole, de plus en plus, admire.
N'est-œ pas bien ilrriaginé cc poids qui mointiendra l'·écheUe lorsque, l'heure venue de réilltégrer le pavillon, AnaLole devra grimper de
l'Illutre côté
- QueHe fine ffi.OlU!he, cette gosse 1
AUè~l'em81t,
AnaLoLe g.agne le faiLe du mur. J,à
quelques précautions il prendre, . le mur étant
peut-être, SOUlS l'épaisse. couche de lierre, gllllli
de tosson.s .. . La. lun éclaIre le chemin.
Anatole peut vok, au pied do lOêchoJ~e
Ninl mli
lui envoie - précieux enco.uragement ..:. Il!tl halser du bout 00s doigts.
Un instant. encore... et Anatole serre d'aIlS ses
brft~
sa ~lon.ée
petite amie.
Vüe, vlLe, elLe en\.ro.t.në SOli amoureux vere le
.ch&!ll1Ï'Ûr. Ello aussi, }a foug-ul'usc Nini n. rlon<:
pensé il J'abri tuLélaire <lI' I.n cabane alJ.~conée
?
C'reL par ln, en erfel, que Ni'ni cntrntne A'I1>l1,Lole.
TouL à COnp - et 51 soudainement que le ma,lh{ll1reUX n'a pu jeLer un cri - Anatole A>e sent
bllillonné, terrassé, ligoté; une éloffe n01160 81.11['
ses y0tlX l'av>ougJe ... cl 8 bras pUlsMnf,'l l'enlèvent,
et réduit au si,1ence comme il l'immûobilité, l'arnou.-
�~
La Petite
1#
'Deux Sous"
=====================
.ooux inJort:uné est, à l'ébat de paquet, pol'lté d&1s
'La cabane, qui va. devenU" sa. prison - peut-être
son to.rnbea.u 1
Ah 1 que d'.amères reflexioIl5 viennent ajouter
aux lJi·stesses du pauvre garçon.
Il est tombé dans un guet-apens 1 Les sourires,
,les œilhl:ooes M Nir1i oo.t éLé l'a:p.pàt auqool, pauvr€
imbééitLe, il a mordu trop aisément.
1
HélBlS 1 hé1ru3 1 (Juclle infâ.me créatuœ se cache
sous le joli InaSlqUe de la petIte Nini 1
Jv1ais pourquoi ce guet-apens? Que lJù veut-on ?
, Anatole se dit que peut-être ~iY?
est, comme lui,
victime et non oompUœ des cmruneLs.
\ PauNre Nini ! N'est-ce pa.s un amoul'eu'x congédié
qui, l'ayant épiée. a vau1u se venger 7
. Mais il s'est adjoint, le monstre, un ... <1eux comsenti
plices peut-être ... Anatole es ' ~ certain d'av~ir
s'&lbattl'e sur lw quatre maill S... même SLX...
Alors ... Nini, elle aussi pro bableme11 t, a été je~
,pal' teu:-re, bê.illan.née... emporliée ... où cela. gJ'8lIld,s
dieux ?..
• Anatole en vient à oublier L'incertitux:le de son propre des~in
dans l'angoisse où il es't ~e celUi de son
, arrlOureuse.
Tandis que le pauvre garçon 00 débattait moral~
ment dJans une affreuse Lnqu·i étude, sans ~v.oLr
phy.s.iqwemen,t se dJebatLre le moins du monde, tant
iJ, éb&.it bÎJe[1 ficelé sl1ivant les règles de l'art,
N.ini avait repris sa place 8JU p,i ed de l'échelle
qu: eliLe mamtcn.ait.
, Un homme, déjà., l'avait gmvie qui, a;près un prudent coup d'œil dans le ja.rxJ.in du docteur Probe, y.
.éLait descendu.
Un autre prit le même chemm. Nini entendit leurs
ipas éLouff.és sur 1e sable, pU!Ïs.. . rien.. Le cœUT de
la. jeune femme battait il, grands cOUfPs. Elle n'avait
oepen.dant pas peur.
..
Dans cette romanesque avenLu.re q'U1 pouvaIt tourner en drame, la Fif! de RodoUphe, devenue Nini
pour se faire u:imcr d'Anatole, se trouvait dans son
élément. Un Cl'ime l'eût elfrayée; mais faÏJre la
oonquêLe d'oo ni.ai.s l'a.vait &.musée.
Pauvre Analore 1 Que doi l-il peuser d'elle, là-bas,
d,ans sa. ca.ban.e?.. Elle en ril, MLle Fw, et, jOUilllt
sur ses .<WllX petJts noms de gu.erre, elle mu.rmLLre,
r ail:leu.se :
- F ... i. .. fi, fi ... L .. ni, fLni 1
_ PaUVlre Anatole 1
Mais la pensée de Sophie se reporle aux choses
6&ieuses. Les pas se rapprochent dans l'alIée...
.l'échelle ge tend.
Fifi maniée sUT un échelon, pèse de toute sa
fOl'cc.'Un homme SUI1git a.1-~S
du mu,r , l'enjam!be, puis, retaurné vers le JaI'<.Li.n, se ,penche, tend
les bras... aJtLire un OOl"pts que qu~
u.n. soThlève ...
Un effort encore de rbOOlme qui, pén.i:bLement, desc.end a'Vec sa charge ...
.Fi.fl aide li. déposer dou:oement le corps sur le
chemin. Un instant ruprèe, Rolphe repal'aU il, son
tour, descend lestement.
, - Ben 1 dit Fifl, pour de la belle oUVirnge, c'est
de la belle ouvrage.
", La. Risque, penché sur le corps, grommelle
, - y n'boug·e toujaurs pas, le pante...
FUl s~ inC] u.ièto :
- Quoi qu'voua y ruvez rait, au vieux 7
'- Ls: paix 1 gronde noIphe. Ferme ton bec...
On n'y a rien fait, d'ubord, Qlle d'Ilji meL' un fo~
lard sur la. l:J.o,uch~
dans son in térét. Y do.rm~
con 1Ille un sabol... Atlention 1 l'amène l'échelle, La
RIsque.
- 1..:.11 bien. 1 et le poids .,
- Tire... J'V'B.S t'nid 'r... A tt.cnds... pose-mol
il'vieux il, l'ombt·e ... Sllt.n.née challdolle 1 A pourrait
a'souf!l{)r à c't'heure ...
Mais la lune 6lai t haute ncore et rosplend.i.ssant.e. Rolphe siffla doucemen t.
I\U& itôt un roulement se nt entendre el, au
tournanl du chea:ni.n, une oharrette paru.t, Lra.1née
6. -
LA PETITE • IlBUX BOUS »,
St
~
par une harLde!lle. C'était une sorte de haquet reoouvert d'une bâ.che. EJ..J-e s'a:rrêta devant le groupe,
et Le con'<1udeur demaillda :
- C'est-y bon ?
- Va bien, Eloi ! répondit La Risque.
On souleva le corps, toujours inanimé, on le coucha dans une chal"I1et~,
à. dessein remplie de chiIfons, que l'on ramena sur lui.
Ralphe monta près du conducteur.
La Risque avait roulé l'échelle, débarrassée du
poids. Il demanda :
-;- Je r'conduit'y Fifi ?
- Comme c'est dit, répondit Rdlphe.
Le cheval, cinglé d'un coup de fouet, fila. Fitl. et
La Risque se trouvèrent seuls sur le chemin.
- Maintenant, à l'autre 1 grogna l'homIlle.
- Quoi quTas dit ?
Sans r épondre, La Risque se dirigeait vers la
oabane. Fill se cramponna à lui.
- ne défendis 1. .. T'entends ? .. Rolphe t'a Pa.'3
dit de l'refroidir. Laisse-le 1
- Pour qu'y jaspe ?
- Quoi? Y n'peut rien dÎJ'e : y n'sait rien ... Y
d~ra
que j'm'appelle Nini... Et v'là tout c'qu'y peul
dire... et qu'je d'meure à NeuiJlly ... Si ça les y aide
à romp.rend', c'est qu'y serant malins ...
La Risque hésitait.
1 menace Sophie. Si tu fais
- Tu sais, aten~o
pas oof!1me. on a dlt, REJol.phe gardera la braise ...
C'étaIt, blen pll1S que tout sentiment de pitié le
raisonnement CB.Jpable de décider La R.i..c;que
'
fi jure sourdeme.rut et rebrou.ssa chemin:
XV
ENVOL~
-:- AllO ... aùlO .... C'est vous, baron 7 Oui... c'est
mOl, Probe... B.LeI1 ... Parf&i te men t, merci. .. S'il y
7.... Oui. ... Et assez camme ça ... J'rua du ~ouvea
merrus vous VOIr... 0111, tout de suile. Oh 1 toute
affaire cessante, s'ill vous pladt 1. .. Non., j'a1tendg...
Dépêchez-vous.
Le docteur PJ'obe raccracho. le récepteur et repou.ssant un peu le téléphone par ta tif, s'accouda à
BOIl bureau, le menton sur ses doigts joints. M. 16
docteur Probe n'a jamais le teint vermeil. Aujour.
d'hui il est jawne, avec des rnarbrUJ'es plombées.
Ses yeux ont un rega.I'd inquiétant.
. On fra.ppe à la porte. ~
gard1ens, des employés
VIennent aux ardTOO ou frure des rapports. Le docteur Probe écoute distraltement, répond rudeme<nt. Personne n'a l'aiT slJllpris de celte attiLude,
tous Iles viooges sont bouleversés presque à l'ég.a1
de oelui du pc..tron.
Une heure passe.
M. Probe n'a pas quitté sa place. ToUJtes les ciru)
mioutes il regarde sa montre.
Enfln 1 Sous 100 fenêtres du burea:u, c'est le grondement, le halètement d'une auto qu'on arrête.
Un instant plus tard, le baron de Fo.lbbrt paru'
devant le méde-oin.
- Qu'y a-t,.i1 '1 demanda Raoul, non sans anxiété.
Le docteur Probe le regaJ1dla fi x emen.t.
- Il Y a, mon cher aa:ni., que cette nuit on a enlevé votre beau-pllre.
- On & .. Non 1
- Asseyez-vous donc. Vous voiQà bl~me.
Vaue
.aVIeZ parfaitement entendu. On a -enlevé M. Mtartet,
Le buron se taisoait. L'a.irr hébété, il regarduit la
d oclem·. Celui-ci s'impatienta.
- TAchez de comprendre et de m'aider. Qui, en
dehors de vous, pouvait s'intéresser à votre beaupère ?
- Personne.
- Sa DUe, cependant. ..
- Ma femme ? IDUe n'a jan'16Ï6 eu le maindrt!
sol1pçon. Je L'aifi.rme.
- Pa.s d'autres pail'enf& '1
�~8
2=
=
=
- Très éloignés, qui se soucien t de lui comme
de leur première pantoufle.
- Alors .. . je clois pense.r. que 100 a.uteurs de cet.. .
acte se son t trompés.
- Comment, trompés ?
- On a. enlevé monsieur MarLet croyanL enlever
un au tre ma.lade ... Il m'esL difficile de m'expliquer
le but de ceLte [açon cl'n.o"Ù'. Ca:r, enfin, ,~i l'on a des
doutes sur la parfaite l~gaJté
de. Imtern~
d'une personne, il me paratt plus simple de, S<l.1?u'
qui de droit de l'affnire, en demandant qu on mforme, que de mettre les lorts de son cOI,6 ,par un
acte illicite.
- Qui sait 1... Il Y a tant de complicaLirms souvent dans les ftlmilles 1... Et puis, c'est peut-être
une manière de faire chanter?
- Vous reprenez courage, vous, à l'idée qu'~n
a
pu emporter Yow"€ beau-père
l~
VOulOU"fl
Vous avez tort de vous rasc;u.rer Sl vlte.
- Vous m'avez dit qu'il est idiot.
- Oui ... à peu près. Mais on n'est jamais sûr..
- Ah 1 vous savez, si par votre r.a.ute je dOlS
avoir des ennuis. ,
que ,:ous
- Par ma faute est assez joli 1 E~t-ce
l.loyez que je m'amuse, moi, depUiS ce m hn ?
Ppn;;ez-vous qu'il DIC convienne beaucoup de metlre la police dans m":'G aUaires ?
- Vous n'avez pas ...
- Porté plo..inle .'l Ma.Ls. immédiatement 1 ~ l'a
Li~n
fallu 1 Et le diable s.att comment cela fimra ...
, il ! 'Vous v-oici moins fier ...
- Pourquoi avoir porté pla.inLe ?
ql~
vous
- Ah çà, vous êtes m.a.gni1lque 1 ~e
croyez que chez moi 1e3 malo.des . clispar81s00nt
comme les mu~c:1.des
? J'ai un 6tablissement. très
bien tenu, mo~jcur
le. ba.r~n
J~
ne prOte pomt le
Hanc à la. criLique, mOl 1 J Y velUe. Je me garde.
- Vous vous gardez, m~l.S
vous ne ga·rdez pas
vos malades.
Le dooteur haussa les épaules.
- Enfin, comment 001.a S'oOSt-il tait ? dem.a..niIa
lerveusement le Laron.
- Si je le sa'D,is 1
- Le gard ien de mon lll'uu-père ? ,.
- Anatol-e a rlif;paru aussi.
- Alors , c'est lui.
- Je n'en f,Ul~
pas sl1r, En tou t Cfl9, il n 'était
poin t seul On a ({lit passer monsieur Martet pardessus un' mur de plus de trois mètres de haut les traces son L vi 'ibles - puis on l'a emmené en
voiLure ; il Y a. l~
m arques des r oues.
- Oh 1 oh 1 oh 1
- Oui nO UE! sommee frais, nous deux.
- Enfin si comme vous le supposez, c'est par
erreur qu'on '6 e nl (}v6 mon ben\ll-père, qu'eJ1' ferat-on ,
- Ah 1 voilà 1 Qu'en lera-km.. . Il est probable
qu'on s'e n débol'rnssera.
,
- Si c'é tait sllr l
- Vous vous colùSoleriez ... Mal9 on Ben dé barl'a.c;se ra prob/l.blernoo t en l'ab andon nant sur un
(;hemin. Et s'il "avl
de dire son nom, sur le signalemen t' que r i donné on me 1 r amènera. Cela
ne !.lerait pas encore ITop, brop !Ih;heux...
- Qua ]'l611t-il arriver de pire ?
- Eh 1 rn.e.1S, que dan., un 6cluJr d'intelligence, Il
ruconw ...
- - QuoJ , Que rll.conLerait-il qu'i] n'a.H dêj/\ dit 1
-- car vo~
êLcs V'l'uiment Un h 'm Lout a ~i
bile homme -ruiro mieux con tiller sa folie ...
- Mon rher baron, V()US pa.ss ~ hu'n vil,. de
l'effl'Oi 811
Jmc, rle l !!II'cnr il l é~oge
... • ~Ol
jo
me main ions dans 111\ nillfeu ((III, pOlir ètro Juste,
n'cn L MS mOin cl Ilgl'éahle. J'r lime q!le ml\me
si rien n\e 1 perdu nous {Lvons tont ,~nut1rc
. .J~
'VOlIS li' fa il. f ppel l' d'abord ~ rc.e qll 11 conven Lit
que vou ru 1'11. instruit /\n reu\rd d,e ~t.
événe10nt, ('n uiw [}U~
e que Jo v Hl
VOlr 1 JO p~
r.Offiipt r Sllr vous.
sans.
La 'Petite
U
'Deux S ous "
~
- .l:!:h 1 que diable p1Jl.Îs-j e faire, moi ?
- Rien maintenant, que de pa.rattre rempli d'une
pieuse inquiétude sur le sort de vol.I'e cher beau.père.
~
Et puis ?
- Et puis si les choses toutrnent m~ l, me sout.enir, affirmer... très exactement le contraire de
ce que vous savez.
- Vous n'y g.an~rez
rien, et j'y gagnerai, moi,
d'Olfe mêlé à de vilaines histoires.
- D'être mêlé .. . Ah 1 non ... Laissez-moi riro...
D'être mêlé 1... Vous êtes exquis- 1 Eh 1 mon cher,
ne save7rVOUS plu.s que nous somlDe:) tOllil solidJ.Ur~
les oos ùes autres ?
,.,.. Si 1.. . Oh 1 si j amais on m'y repince ...
- Ne dites pas d'enfantillages. Pour être :re]:Iincé, il faudrait que vous eussiez ~'abrd
recouvré
'Votre liberté .. . Et vous savez que c est Im~os.lbe
...
Bon t Vous voici de nouveau prêt à. grmcer des
dents 1 C'est absurde. Avez-vous. eu tant à vous
plaindre?.. Ulle femme char...
- Je voUs défends de parler d'elle.
- Oh ! mon ami... Quel gClU'C... Quelles façons
dé-plorablement déplacée vous pren~
1.
A ceL instant un employé se préCIpIta nans le
bureau.
- l\Ionsieur 1... On a. retrouvé Anatole.
Les deux hommes se lovèrent d'un bond,
- Mort ? questionna le docteur.
- Heu 1.. . 11 n'cn vaut guère mieux. On est venu
chercher U.I:Ie civière pour le tran.s.,portel' il. J'inilrmerle.
- l\lais où l'a-t-on retrouvé?
- Dans le chantier de constructions, sous une
oabalIle, bê.i1lonné, Ligoté.. . sans conais~.
Déjà M. Probe quittait son b~eau
en courant.
Le baron le suivit.
Débal'rassé des liens dont ses membres tuméflés,
gonflés, gal'daient l'empreinte, le vi.sage e.L les
mains violaoés, le cou enfl6, Anatole reposaIt sur
la. civière qui avait servi ll. le rapporter.
Le docLcur écarta les ngt:nts et les employé qui
entouraient le pauvre gardien.
'.
.
- Délshabi,ll('z-le... vIte.. . La resp.l.rallon artificielle...
DOTant plus d " \1 n~
heure, il demeura là" irnmà'le cœur d An.ltole
bile, regardant touJoul"f:!. ~fln
se r mit à baUre, lu. pOlLrme se gonfla.
Quelles que pussent être les l'évéh-tions qU 'l'lurait
il faire Je gardien, M. Pl'Obe désimit 1 !l re ovO'ir
le pr emier, e t san témoins. Arguant de la faiblesse du mœladc, il! éloigna tourt le monde, ne per me ttant qu'a u baron de domeurer là. Il riéclara
q ue la déposition d' Anatdle ne pourra.it lui êLre dema.ndée avant de longues heures.
de l'asile il connoHre La.
L'in téTêt du d i r~teu
vérité ne laisait doute pour personne. La police
elle-même s'inclina donc deV'ant la volonté tin rnédomn.
Lorsqn Anatole eut recouvré pl Inement l'n age
de ses facnlLés, tQ nc vit il qes cotés que I\J. Probe
et le baron. Il ne conn i r.:it pas cu dernler, maLs
la vue de son patJ'on Le rassura.
I! e· !I Il tLl en stlre~
ct J)lenra de joUl.
- Voyon. ·, voyon"l, mon ami... yous voilà:; uvél
Ne pIeUTez pas et dilc;i-.r11l11S (:~ qUJ vous e·[. (JI rivé,
Ml1.ls Anatole n'éprouvnit allcune hClte à r;ol1[œ~
ser sc::! tor!.'!. Il Im~gtnl.i
ln fllr ur du patron lrou.
Vlmt le mat.in 'on pi'n l'ion/1 tl,c seul 'lU lA. .!Jon
- ellr Il nI,) soupç IInc pns enr.ol·c lC::i slii le do
l'a vc.n tu 1'''' dont il fu!. viclim - il c: pèrc que ,;ÇIJl
piteux él.lt a.tLendl1rn le do t'ur.
- Vou, . cul, ropcn~
1 1. Proh~,
P()lIVC:t. ,d,le!' b.
retrouvrr le molli 1 (JilL vou 61n,IL cOIlf10.
Les y IIX d'AII/ltolf' s'ouvrirl'ot Il ~m
ur"m ni.
- Rfjlrollvé ... Inon mallUl ... Il '~l
donc flOU 61
- It déhrr, soupirll le ri ol.eur.
- Ou oot homme rElit l'idiot, gl'ond~
le ba,('on.
�G'l2'-
La 'Petite
fi
'Deux Sous" =====================
Anatole tOI1J'D1l, v&rs iui, nOIIl sans difficulté, sa
tète endolorie.
Il avait un regard si sÎlIlcèrement effaré qu.e la
':lupposItion de dé1i.re, autant que' l'accusation de
la feinte, devait tomber.
Evidemment Anatd1e ignore que M. Mru-tet a ét.é
enlevé. Cela embro1tiJlJe 1.lID !peu p1us l'écheveau,
déjà emmêlé, dans lequel!. se débat M. Probe. D'un
geste, il recommande au baTon la patienoe, et de
nouveau, très dO'\lJCeme-nL, interroge.
- TAchez de v<ms jSouveruir... Que s ' est~il
passé ? ... On vous a troUV€ dans une cabane, au
cbantier voisin du prurc. Vous avez dû, pour sortir du jaI'din, frnnchi r la mUTai:JJe. Vous 8-t..on emporté .. . et. comment ?
- Emporté, mlH"ffiUJre AnatOile... nbll.
Il
-
-
J'ai poris l'écheJle et suis monté.
Quelle échelle ?
L'écbcl1e de cO'I'de que m'a lanoée Nini.
Le d?cteur et le ~81'on
échangent un regard.
- Dltes-nous qlU est Nini ?
- Ma cOTInatssance, avoUA Anatole.
\
1
\
Et tout. à cO'u p retpris paT les doutes qui l'ont torburé avant qu'il ne soit évantlllÎ dans la cabane il
racon1;e . tout d'une hruleine ce qui. lui advint. '
coutpab~e,
mon~eu,
ool!lclut-hl en pleu- J ru ~t
rant ; l!1MS Je penlSalS 1'6VOOJJl' biien viLe... et voilà!. ..
J~
me demande si aUe n'avait p-as fait. "semblant...
8.l ce rend1:-v~us,
c'était ~
Ipr6pa;ré pour :tne faire
prenc.Lre ... MaLS pourqUOl? On ne m 'a pas seulemen.t fouillé.
- N'en. doute,z ~as,
dU le docl/eur, votre Nina. est
une ~e
9uJ. s oot iou~
de VOU5. Pondn.nt que
v~,
étiez mIS bor,s d'état d'a,gir, m~e
d'appeler
à ~ &lde, on a pé~tr
darus le parc, on s'cst tntrodUlb dans le pavillon, et le pauvre vie.lil:4\.rd que
VOlUl deVLeZ garder a ét.é CThlcVJ6.
AnI/lLole poussa un rUf.l!Lsseme.nt féroce qui proll-
va que sa force rovena..it.
- Ditoo-no'lls COIl11ment é!t&i.t cette mIe?
- Pas bien grande, J'nne, a.vec des' yeux luisiilnt.s, dies eh,eveux pl8.<ru(\" sru.r I~
tempa'!.
- Quand 1 aVC'l-VOUiS oonnue ?
- A ma dernière sortie.
VOlLS a-t-ellle drmné son ndresse T
- Non. ELle m ' a dit comme ça. qu'oHe demeurait
chez sa. mè.re, alors qu'y ne !a.Uait pas lui écrire ni
eller CIh ez eLle.
-
-
Oui... enfin, vous a vez éM r ouJé.
n~
peut l'dire 1 g~t
le
mQIlS.l!eua', pa.Nl.O'llIIleZ-mol ...
pauvre garçon. Ah 1
XVI
UN COUP OE FILIn
Le printemps est la saison J)ril~
te
penijo,nt la.qu,elLe les hôtes de passage, provinciaux e1 étrangers, uffluent il. Pari.s.
A u..{ COllIse , au t.hM.Lre, au cercle, - car il fiait
pa.rtie d'un cercle, et non du moindre - le comt~
de BfM~u
'caio
I,nisait S'fins cesse de nouvellJcs
conooi.SSaIlOOS qU'hl ~meoil
e:n&'Uito allez 8C8
exoolJents amis.
Ils étaiant aoclleillis !;laf le baron de l?oU>erL
ave<: une pert'aite coutrto ie, !JIl.r la baronne .avec
u'nl politealHl un pOil onll'.ainLe qn.e sa marne
Lristesoo expliqu~t
~ez
pour qÙ'e)J ne ftU paa
Jtl.«ée of, ~tI.n
nt~.
ltt le:; ({ potit.os parties üe fa.mille Il S P0111'SlÙvent, dl}vicnnenL de moins en moins f.amiliale .
Les b8.bles &Ont à peine lnsta.lléo qu'un valet
vient j),(l,I'ler bas au baron.
- Vous porrnoltez\, In
icwr.!l ?... Une oommllnioolion tlrge1ne. {oit u s'~cLpe.
Rtbocca, l.a.sae d pMI:IOr
soir6es auprès de
Marau.ariw muette, Il pl'is d ' oa.rtea ~L joue, eU.e
83
~
a.ussi. Mme de Folbert est secle. Personne ne rai~
attention à elle.
Ell.e a éprouvé une anxiété du soudain départ du
ba,ron. EUe quitte doucement ie S'alon. Dams le vcsli.buJ,e, elle trouve le v.aJet qui est venu avertir son
ma1tre. C'est un homme dont ene se méfie, comme
elle se méfie mainten.ant de tous OO'llX qui l'ento.u.rent ; car le personnel entier a été rerwuveJé :
tous les domestiques, merne sa. femme de chambre,
ont été choi,s1s, arrêté..'! par le bn.r.on lui-même.
Marguerite, en sa pu'opTe maison, &0 sent entoUtrée d'e.nnemis. A peine ose-t:el1e interrog.or le
valet de pied. Gourmé, correctement respectueux,
il répond:
- Monsieur Beppo a fait demander Monsieur,
iIls sont au fumoir.
Beppo.... le mauvais génie 1... Quel! mal encora
va-t--l,l faJ.ro ? Marguerite sait qu'il vient parlois
e.t IlJe s'en v~
jamais les fQaioo vides. Ce soiT,
peut-ét.re, est-il venu poussé par un be'soin 'd'a.r.
gent.
Cette pensée la rassUTe à demi. Mais le cou.
:v&Jge 11u.i manque pour r,epara1tre au snlkln.
- Si monsieur le baron me réclame, dites que
je suis souffran te.
Elle pas<>e vile devant le fumoir d'où s'écha,ppe
un brUlL de voix COllrUS et monte chez elle heu.
reuse d'6cbapper à l'odieu.se contMinte.
'
Dilus Je fumoir, le baron et Beppo sont debout,
l'un en faoe de l'autre. CeLui-ci d.iJt. :
.
. - J IC .v0UtS a.vais pr~v{)nu.
CetLe organisation
8lD.Sl [aIle est une. fC?J'le... C'est parce que j'9.i
oompns que L'CoLa f1rurrut mcl que je vous ai quitté.
D'un l1ocent. dé.aign~x,
le baron réplique
- .Te ne VOIS pas d ai.l.kmrs Beppo, mon anci-en
chauffeur, admis dans mon saJO't).
- Vous à'auriez admis s 'il l'eût faUu.
- PIus très sClr...
- L'heure n'est plus aux dispntas... Pas 16
~ps.
Je vous ,dis que VOUiS êtes dénon.cé, surVeIllé ... menacé d une desce!lJte de police.
- Dénoncé par qu.i ?
- Par l'un queloonque Îles pigeons que vous
p!\lIll1ez. ,vous VOllS i.maginiez que personne ne re~
gun'berru.t ? Absurde ... absurdle ... surtout je le ré.
pè~,
d avoi r organi:sé oela... chez vouS 1... Une
mru~on
d~
jeu dans un hO ben, alors que pour ce
métlCr-Ià li l'8.ut à tout moment pouvodr cbànge;r
de J.ocaJ. J...
- Il ya loo deux systèrnoo : ici le pavillon sa.uve
.
la. ma.I1Cbal!ldioo.
-
Ou.i 1 A cause de la respecLa.biliLé de Mme de
FoJ.bert, vous vous croyez 1:1. J'a.bri indéfiniment,.
Eh .bien 1 moi, je sais... vous entendez qu-e vous'
êtes ITJ6IlISioé... Ge soJ.r, peu.t-èLre VOill"l serez pinoo..
- Comment le sais-tu'
'
- Je m'en doute d~p.yis
longliemps, je vous l'eJ
dit 1 Vous veJ'.l1ez. Mal, ) ru survei.llé, D'abDa'd je ne
sUti.s paIS trn:n.quriJJe depuis 1'€'.l1U-èvement de M' Mar
tet ... C'est loucl:le 1. ..
.
: personne, en dehors de
- On a dO. faire er~u.
ma fomme, ne POUlt s .m.t&J'esS{}l' au ViÏ.eUlX.
- Ce n'ost pa prouvé. Je .suis dans mes peLi1ls
souJiel'S, moi.
- Puisque, en tout cas, le bonhomme est fou 1.. .
- C'cst Pr be qui le diL... Vous êtes mono.C'é
de t~us
cOt~.s,
je vous l'a.fflrme 1 J'ai vu, ces jours
da:ru~s
.. d éL~'I.lges
t1LJ6es et venues pIlI ici ~
SOir, ) al repris mon poste d'observat.ion et j'ai vu
d?S. gens sll.specte garder l'ooLroo de l'hôtel. Je
n al pa.s hésllé li. vous avertir moJ!ITé le dangeœ
rl.'étre pris darl.S le cotlf de m'ct.. vgu ne VOUIM
rien écou!'Ol·... Bonsoir
- 13onsoiiI' 1 répondit 10 baron ironiqlJC
Mni~
quoi qu'iJ en. Go.l, il frémissait
T;lcrppo ,quit,ta le ~oir,
I~ se h urLa, u poo:U
qUI V," rat cil' surgir dans If:' hall et. qui,
tromblanL, Mgayu.1t :
- Monsieur le bGl'on. .. 14 poliœ 1
�G"lt-
8~
======================
Comme un tau, Folbert se rua dans le saJon et
clama:
- Rangez tout 1
.
,
.
Les muins, promptes comme l'6clrur, s abattl.fent
sur les enjeux, les cartes fwrent enlevées. Dans
U!l1 tohu-DOhu Il1d(,
~-;.( Tipl.be,
les hommes coururent
aux portes... Trop tard 1
A chacune, un agent barrait le chemin.
Beppo, poussé par le baron, était entré avec 101
d-ans le salon. Tous deux, à la faveur du désordre,
par une porle d I,-;s.iafl U 100 dans la boise~,
,regagnèrent le boudoir Ge la baronne, pULs l escalier ... Ils montai f' nl, IH1\ etanls, avec la mOrne pensée : prendre l'argent \à-ha.ut, dan:s 1e coffoo-fort, et
redesceond re par rf~.sc'Ilie
de serVice ...
Ils entrèrent en trombe dans fa chambre de
Marguerite... L'heure n'était plus aux dél~cates
ni aux conVenllnces.
La baronn.e n'avRit pas commencé à se dévêtir.
Assise dans une profonde bergère, elle songeait,
lasse, brisée. A l'entrée des deux ho.mmes, e.lle se
lève d'un borul. Le baron lui jette en passant:
- La palice 1
Les deux homm ~ ont disparu dans le bureau du
baron, Ils s'acl!ul"Tlenl sur le corfre-fart dOIlJt, en
son affalement, nanu l ne trouve poinL La oleI.
Quand>, où, comment l'a-toi] égarée?
Bewo, exaspér6, l'insulte.
Et le baron, exa-spéré de même, insulte aussi
le com,plice de DfIguère.
- Tu m'as vendu! C'est toi qui m'as dénoncé 1
- Tu n'as pas 6gnr-é la clef, rugit Bep~.
Tu
refuses de parlllUN Lon or avec moi... QUI le l'a
donné, cet al' ?... 1 est à moi oomme à toi. .. voleur 1
Dans un liroir le baron a pris un revolver. Li
le brandit. Ses yeux sont injectés de sang c1a.n.s
son visage livide.
Oeppo a peur .. , Il recule, il chance.1Je devant le
can<>n d'aCier braqué sur son front.
La voix rauqu , na.oul lui jelte sc.: haine.
- C'est loi qui m'as p rdu ... qui m'as entralné .. .
Misérable 1 Oh ! misprablc 1
En bas, les poliriers ont tout envnhi.
Trois d'entre eux se détachent, montent à la
pOUl'Suite du buron rie Folbe,rt.
ParvenM au premier, ils hésitent ... Ils n'ont
point il h6siLer longtemps; un bruit de voix furieuses les guide ... Mais devant eux se dresse un
obstacle.
Une femme, les bras étend M, leur barre le cliCmin. C'ost l\1arguei~,
D' une pilleur de mort, 100
yeux lOM, ene 81ppllrolt, trngiqu ment belle dans
la clarté orue d s 1umièN'.s élcctriques.
Elle se tien.t SUl' le sellil de sa chambre, et son
geste de protection d6scspél'ée, son masque d'angoisse émouvenl un insl.n.nt les policier:>. TI leur
répugne de repous!ler bl'utaJement celle malhcureuse. Ils diselll seulement, la voix brève :
- Laissez-nous PO!; r, madame, il le fauL.
Elle aussi, sans doule, ils devl'ont lout il l'heure
l'arrOler : n'esl-l'lIc pM complice ?
Pour l'instant, 001 IIi ql1'i~s
cherch nt c'est le chef
de la bande. MBJ'gnerite se raidit ùavnnln.ge, los
dents serr6cs ... On lui p&sscra sur le corps plutOt
que de l'écart.. r,
. Tout il coup cliC' jette un cM strident, s'abat sur
les g ncmx; dan. Il' bUI'cau d son mal'i un cou'p
de feu vient (l'(t,,\uler, f;uivi d'une chute,
Sans plus s'or~lIpc
de la pnuvl'e femme, les
ngents enfonœnl ln pO l't<J , Dehout, le baron te.nait
à 1 main son rl'vnlvN fum:1nt.
d'Ilne dern!Ïèl'. convUllDevanL lui, L"I' ~aiJlnt
ion, Deppa est ('U'1I0U, If' f,'(Jn t trollé .. , T~n
vOylln t
entrer lC!i p !il'if'l"s. If' bfl.mn El lin rire de cJl>menl.
- Cela dcvnil nni·r a.insi 1 gémit l-e misérab'C'.
El, tlvllnt ql1'on n'lLit pu pr6voij" SaIl mOlJV JOen!.,
il a relevé 'on arme... appuyé le canoll sur sa
tcn JI .... Le coup part...
La Petite "1)~ux
Sous ,. ~
Sur le co~s
du complice tué par lw, le corpe
du swcidé s abat low·demen.l.
Dépuls les confidenées de ~on
~mi
Bo~dèe,
Pa~
Mirhllinde s'était pro-mis de pénétrer, un soir de
jeu, chez la baronne, II voulait s'assurer par lwmême, dOt-il y perdire quelques louis, de l'allure
de ce coU'pe-gorge dissimulé SO'US de briJlants
dehors.
li avait annoncé son intention il Mme de Folber t, sans recevoir d'elle le chaleureux encouragement qu'aurait da lui dicLer la poltles-se m<lndaiM. Il en savail assez sru.r son rôle pour cornprendl'c ù'où venait ceLte rés-erve et ne point S'eJla
formali ser.
Ce soiT-là, brusquement, il se dûcida. A.rrivé très
tôt, il atlendH un .peu a.vant d'enlrer. Arrêté SUlr le
trottoir d'en face, iJJ. admirait l'ospect élégant et
luxueux de 1'hOle.!,
A travers les persiennes rabattues, des lueurs
filtraient. On eOt dit qu'une fête somptueuse se
donnait là,
Ce soir d'autres que le peintre examinaient l'hOtel. Il rem{\J'qua des hommes vêlus de paroessus
et de chllipeaux melons. Deux par deux, ws nUaient,
revenaienl sur leur pas, san" jamais beallcoup
s'éloigner de l'enLrée où s'engouffraient soit isolés,
soit par groupes, d'autres hommes, ceux-là d'aspecL pl us élégan t.
tlfirhande ne pOUIVaiL s'y tromper: ceux qui entraienL - naïfs ou grecs - étnient les Mtes attendus; dans ceux qui faiJSaient les cent pas d'un
ai~
d'indifférence nê.ne use, le peintre dovina des
policiers,
L'bOlel de Folbert était en surveillance 1
AussiLOl le jeune homme songea il. la baronn<l.
Il pensait que Bordève présent se rot ingénié il. la
pI'éserver, il. la sauver.
Un homme enoore, d'une aJ.J.ure rapide, se glissa
dans l'hO lei,
Presque aussitOt une fenêtre au premier s'éclairu.
Une silhcyuetle de femme se dessina derrière les
rideaux de guipu l'C. Le pcin !d'e recoOill u t MargueriLe. Elle venairt de ('emoTliLer che~
~l(
et, ay-anL allumé elle-même J'élocLri ci Lé, oublllllt de fermer ses
volcts.
Elle s'éloign,a. de la renêtre et aJJa se jeLer duns
la bergère où son mari e~
neppa devaient la l'&trouve!'.
Paul MLrbande, ne. la voyant plus regarda de
!l10Uveall l'enLrée, 11 Vlt devant le porche un groupe
nombreux : tous los flâneurs d1strai\,s venaient de
s'y réuni~.
P.Los do doute: une descente de palice
61lait avoIr Lieu 1
Mirha.nde traver,sa. r-ejoignit leB policiers au moment où une .partl~
de ceux-ci entraienL viv menL
dans l'bOlel i, il les suivit.
hl pé.nétra d&ns la salle de jeu. Après
Avec ~ux
ceux qUI monlaienL il. la recherche du baron il
15'6Iança...
'
Margue~i
te, affaissée, déraillai t, oomme si ellemôme ét.a.it. CrB.ppée par le cou.p de feu enlonùu.
:
Elle gérndssrut, la voix élra~e
- Raoul... Raoul .. ,
. A l!l seconde dékloaLian, eUe cessa de gémir et
s arls~
Lont il fait, êvancYuie .
~!e
n eut ,point conscience que deux bras la soulevaient, qu on l'emportait en courant.
P~ul
~1irhan(je
cha rgé de son préCIP\IX flmlenu,
avaIt fUI, au hll,sarfl, n'urant qu'une id~c
: nrr:J('hr
MBJ'gu~r,lte
il. lu honLe dune arrc.stlflt.i fi., l'.nr'·a<:llex
il la VISion d'horl'cur qui, sans doute, l'aul'alt attendue il son réveil.
'
Il sc dil (jll le baron, affOlé devant le péril imminen t, s'C,'\t fail jnslioe.
Une portière coupe cn deux 1 cOI'l'idor. Lol'sderrière IlIi, Mil'honde rc~pie
qu'elle !'t ,'~tombé
un. peu, Un dliv-a.n ('_~t
là . 11 Y doépl>8e Le OOrp.<! inerte
et li OiLLcnd, avec III même anogoLs l' que si lui-mOme
�~
La 'Petite ., Deux S ous ..
était poursuivi. TI prête l'oreille aux cris, au tumulte d'en bas, aux ex.clamations de ceux qui ont
découvert les corps et 8ppe1J.en-t leurs camarades.
Marguerite a fait un mouvement. Elle ouvre les
yeux. -Si elle aJJait eTier 7.. .
Douceme.n t, respectueusemen t, le pein tre 1ui
pose une main sur 'les lèvres ... H supplie à mi-voix:
- Taisez-vous 1. ..
. Marguerite se cramponne à lui, se s<mlève. Le
souvenir lui revient, et son VÏJSage se convulse.
- Ne criez pas 1 Ne parlez pas 1 murmure P.aul
Mirhande . Pouvez-vous marcher 7.. . Venez .. .
Elle deman<le, haleûaDte :
- Il s',est tué ... "Il'est-ce pas 7 Ou on l'a tué ...
Et com me le jeune homme se tait, elle tente de
lui échu P'])eT.
- Laissez-moi. .. Je veux Je voir.. .
- On venait l'arrêter, dJt-iJ.
Pour la sû U\,;er, il doit se montrer sans piti é.
- Ah ! l'arrêter... Oui. ..
- VOU!'l ne pouvez rien pour lui, rien ... et vous
allez V011S perdre.
Elle eut un geste désespéré.
- Qu'importe 1
- Je vous en conjure, madame, 18Jissez-moi vaus
sauver 1 Venez ... Il doJÏt y avaiT une autre sortie.
A quoi bon souffrir une honte imrfféritée ?
A tout hasard, cherchant à la convaincre, il
ajouta :
- N'avez-vous person'l1e qui vous soit cher 7.. ,
Pel\Sonne à qui vous rattacher encore?
- P ersonne ...
Elle redit, dou'l oureu se :
- Personne 1... Ah 1 mon Dieu!... Main Len an f,
main tenant...
Un combat se Livrail en eHe. Ses la:rmes jaillirent, et, tout à courp résolue, elle dit :
- Emmenez-moi... Merci 1
E11e é tait nu-tête, en toile~.
Elle mUlI'mu!18. :
- Il faudrait un man'teau ... Comment revenir en
arrière ?...
Un cMle d'Orient aUx teintes douces était dmp6
sur le divan. Le peintre l'arraoha et le jela sur la
tête et los épaules do la jeune remme. Dans la demiobsct:rité de la rue oela passe r oJt inaperçu .
MamLonant, ~'es
el~
qui le dirige. Elle le conduit il. un esooller mtérlCur qui mène aux cuisines.
Ellles sont désertes. Commo une bande de rals
fuyant un vaisseau qui s'engloutit, les domestiques
~i
diiSlpal'U. V;ne por~
de ~ervic
dOllJne sur une
lID'p&lSSO él!rOlte <lernère l hOieI... On n 'I(\. point
songé à. ceLJ,o sorne.
- Où vais-je aller? demande la pauvre cr6ature
éperdlle.
.
- Chez moi d'abord, si vous voulez bien me
Caire cet honneur.
- Ah 1 pOUJI'quoi êtes-vous sn bon?.. Si vous
saviez ...
quo vous otes malheureuse et je vou s
- .Te sa~
sens digne de tous les respe c t,s, cela me suffit.
Hâton s-nous, madame.
XV1I
EN FUITE
- Bonjour 1
Yvelt,c entrait dans l'ate:l.i er, saluant gaiement
EUe s'8d'rêta, ia1terdite, en. v?yant Paul Mirban<le:
un doigt sur les lèvres, Jill lmpooer le silence. n
8.lla S'Ur la pointe des pieds s'assme!' que la pO'I·te
de l'a1e11er à sa c.hamJ)re étnit soigneusement fermée el revint ver3 10. jeulne mlo.
- Qu'y a-l-il 7 demnnda celle-ci à mi-voix.
- .J'ai chez moi quelqu'un ... une personne sauftrante.
- Ahl
- Oui. Je ... Je sUIiB bion ombarrMS().
85
-:1
- Embarrassé pourquoi... ponr la: soigner 7...
:Voulez-vous que je vous aide?
Il admir-e 1& jolie confiance d'Yvette.
.
Il sait bien qu'elle l'aime et, l'ai mant, ne serait~le
pas excusable d'éprouver un peu de défiance
jalouse à la lPensée de cette malade séjournant chez
son ami?
Il allait a,ccepter l'aide de la jetlne fille étant
bien sOr qu'elle ne trahirait point un secret à elle
confié. Mais il se souvient qu'il a promis à Lancrot d'éviter les rellJcontres entre Yvelte el la baronne de FOIl.be rt, et cette malade qui après une
effroY,able nUlt de larmes re.I?0se sur le lit du peintl'e, c cs t la pauvre Mn.rguenle.
- V,ous peOls'cz q:ue je seu'als nlne ;rlauv!i'Î.5e
gard-e~m!.
? repfleDtd Yv'Ùt~e
qu'éLonne Je silence
de son grand ami.
- Non. ce n'est pas cel'a. Cette dame désire que
sa pr6sence ici soit ignol 'éc de lous.
- Ah!... redit la jeune fille:
Cet~
e fois, un peu d'angoisse p'Ü!sse dans son reg.ard. PauJ Mi.rhande prend sa main e t tend.remeJlt :
- P~tie
Prin~es
se , vous me croyez, n'est-ce pas,
<;Iuand Je vo~s
diS que ].a malheureus,e femme à qui
je donne .asile mér!te tous les respects ?
Et Je [?emtre sourIt en pensant que le voilà comme
son aJ'rll Bord?ve, prêt à se faü'e le champion de
ce~t
:nélancolique baronn'e dont, en somme il ne
salt nen.
'
- Si je ne puis vous être ulile, fit doucement
Yvette, il vaut mieux que je vous lai sse. Cette personne serait fô. chée de trouver quelqu'un dans
l'a telier si elle veut s'en aller,
- Qu'allez-vous faire, PrinlCesse, si VOUs ne restez paIS ici à tr"avai1ler?
- .Te préparerai ~ la maison. des croquis. Je serai
tOlJte seule... 8?ma e'sl Qal'tle de grand malin,
comme elle le fait chaque jour, pour aller voir son
nouvellu malade.
- mUe se remet à exercelI', a.lors 7
- Oh 1 par charité ... Ce doit ê~re
quelqu'un dans
le genre de l'amoureux de J'i'ifi, j'i magine, ca:r eHe
refuse de me Inisser l'accompagner, et eUe emmène Lancrol. Allons, adieu!.. . .l 'ou bliais : avezvous lu les jOllrnaux, ce matin 7 Que s'œt-il passé
hier soir 7... Les camc,lots crient dans la rue ...
- Quoi 7... Qu'annoncent-ils ?
. - Un d~uble
.d.rnme. Un ,crimin el qui se Cait justice. Une dispantlOn ... On dIt mOrnc des noms, mais
je les ni mal en tend UiS, et je n'Qi pas eu la curiosité d'ooheter les !e,uiJIols senf'lo,tionnsls. MaitS on
a remué c1o.ns vot:re chambre.. . CelLe !Oi3, je me
sauve...
, La jeune fille venait à peine de quiLter l'alelieJ
lorsque,. /lU seuil de la oh ambre, parnl MIi.rgu e.ri te
Le pemtre eut une exclamll.Lion d pitié: les che·
veux de la malheureuse femme étaient devenus
tout bllanes 1
IWe n~
prit point ga.rde à la surpl'Ïse apitoy6e de
Paul Mirhande. Elle avait les yeux fixes les lèvres
tirées en un rictus de souffrance.
'
Elle dit, la voix saocadée :
- Il faut que je retourne, là-bas.
« C'œt mon devoir ... Il n''CiSt peut-être que bl.cssé
ct il me l'éo1am e,
'
- Il est mort, dit I~ peintre.
S~
br.ulaJe que fO.t celte aCnr!Dation qu'i] sait
vrole, SI cruel que S01t le coup qu'il porte, le peintre
no peut hésiLcr. A lout prix, il doit empêcher Mme
de Il D'Ibert de retourner il. l'hOtel.
- Votre mari n'est plus, ma(tam{), vous ne pouvez rien pour lui 1
Bile ne pleure pa.'3. Sos yC'Ux paraissent brO l6s
enlre les paupières meurtncs.
Elle dit, de la mOrne voix saccndée :
- Boppo l'a lu6. Je dois le ve'nger.
Mirhunde songe au cri des camelots que lui a
rapporté Yvette.
�~
=================================
~
-
Madame, dit le peinlxe, le meurtrier s'est fait
justice.
Dans le regard de Marguerite l'horreur augrJ'!lente.
Elle pa.g.s,e ses mains sur son front et bégale :
- Du .s8.ng... oh 1 que de samg 1 Et de la boue
,ussi. .. tant c1e boue.".
..
- Je vous en conjure, apl~z
-voUS:
..
(( N'ave'l-vouS personne qui vo.u:s sOli cher'
'Avec un cri }lJJe jette :un nom :
.-: Pierre 1
Et des flota de la~
s'éobapp.en:t de se~
yeux.
PaU1l Mlrr'hland:e, doucemen.t, la rrut ~s eOLr.
Margt.erite ple1:1ra longtemps. Et toujours ce l!0m
revenait sur ses lèvres avec une ferveur de prière
ou une douceur de caresse. .
.
- Ce Pierre, dit en.fi.n le pe.mbre, vous pla1t-il ql1e
Je l'appelle auprès de VOlliS ?
f: L·oppeJer... l'appeler?
J:j;lIe se oolma, tamponna ses yeux.
- L'8Jppeler près de moi, Pierre? Mais il ne me
oonnal t Das.
:'Ilil'hunde fut épouvanté.
Marguerite avrut perdU la raison!
Elle vit l'.effro:i. du j'eune Hbmme et, s'effocça.nt
de s~ dominer afin de le l'B.SSUTer :
4 VOllS me croyez lolle ? ...Non. J'ai ~oute
ma.
roison... Je ne puis vOUJS e:x>pUquer ... J1lIa1.ntenant.
~'.r>e
ne me connalt pa.s... ne me co.tID8J1t plus..
vrei : ie ne
Mais je le connaLs ... Ah! vous di~
d()'s point retourner là-bas. Je ne peI1Ill>etwal pas
qu'on me retrouve... Je Vlai~
me ~a.er
me
cacher J... Où puis-je, oJ!l~r,
dJt~
mOl, yenQanl
quelque temps, ill?ql18;U JOur. où ]e sal1I'aI uUe le
.nom Je mon man .. nest pomt...
EUe s'arr6ta, effrlllyée de ce qu' J]'e ~J·ail
dire.
Paul, respêdu.euscmc:nt, serra ses mrum.s tremblan,tes.
:\I~dom>e,
J'ai pour vOUs le pllus profond,. l~
absolu 1 espect. La.'iSS62-moi vous dln-e que j'at
en pul'Ue deviné ce qtÙ, autoul'f de VOliS, derelt
vous fElffe tnnt souffrlI" et je dom ute convOJJJ.Ou
que vou rùtoo La p~eèI'
victime .. Pa.rdQlThn~
moi ùe vous parI
al.fiSL 1 Je vou.dr<ns vous falfe
œmpl'C:ndre que je VOUlS suis dévoué cLe tout cœwr.
N'avez-vous pas quc:Iqu''UO à qui vous cONier '1
- Non. Si 1.., Ab 1 Blle me recevra... me gardom ... Commc.ut n/y n.i,.je pas p nsé tout de suite 1
Eh 1 mOn Dieu, o'est si simple ! TrOtp shm.pI.e pour
ma paUv.le téte... Je suis ~perdu,
mO'i, je ne Slais
p!IUI .... Ob 1 voulez-vous. ,C.aire venir une voiture
bwn VIte... Je veux po.l'W ...
E.!ù.e 3e ll()vs,it d6jÀ., impn.tiente. PlauJ. dit :
- J~ vous accompagneroi.
- Non, non! Il 00 t,o.uL pM.
- AloM, n.tlendcz. Partir insi, en pleiT) jour,
snns ch.apeau, sans manteau, en robe do 9011', C{~Jn.
est irn possi.hle. Voua VOus cn irez à. la tombée du
joLlT, afln de n'Mrc poin!. rClIlflf([ué.f'. Si :VIll,; VOll),'7,
vous en con Lonl.er, di\fll3 mcs accessOires JO POl-laèd.e un.o mante nretonne, VOIlS rabl1LLrez le capuchon.
- Oui, oui, c'est parfait.
[nis, madlliIDo, vou,s ne pourvez 1'OOt€r ~n.s
eŒ'gcnt. Pour un peu de temps, p8l'meL!Jcz-!1101 de
:VOus prêLer...
,
_ ;\[Il prêter... pour un poo de LemPS: .. nCIla;S\ 1
si ce que je redoute se prod'U.lt, Margueflte de Pol.
borL aux yeux de tous, dClvra pas.<Jer pour mOM
Je r~teai
pt.:lIvre, comnH'. ln ,r}w; !J(~tlV'I
:.m'l~
dianLe. J {.ni.s l'n ~F' moment Je n III hr~()ln
cll' lll'n .
ravûis ma bOUTS S'\llr moi,. elle con~et,
t1n.~
fort
somme, t pui::! j'ai nW6 blJOU'X que Je n avrus pas
-
P!1Ul
.
enroro l'cU rl'fl.
S'~t,lÏ
apprOChée du ch Vo8Jl t
fme do Po b~l't
~ur
l'Cqnel se trouvait son porlnait commencé. NJae
6co.rla le .ri(leau 'lui
contempla.
~cs
- JIier hi
péré, ct ~1jourd'hi
l'
cachait et Longu ment se
lnrm s P; H(>rs 1'i&~(HI
·icn
l.
11C01'('1 dIt··rlle d'un tween,L dé'Sœc''est finL tout est fini 1 Ah !
La 'Petite .. Veux J'ous .,
~
j'étai-s bien malheureil.We, mais il viy,a.i.t 1 Oh 1 mo<n
p.8.'UiV1I"e, p!6!uvre Raoua. .. mon pauv.re RalÜ'ull
Vers le sok, après de pénibles ,8IlteI'lllativ'€lS de
oa:l:me et de déSelslpoir, ayant accepté de p.roruŒl'e
un peu de nourriture pol1I' complaiJre à son hote,
la baronne de F{),l bert, enveloppée die la longue
mante sambre aux pli1s lourrls qui ne La:i.ooait rien
deviner d'eJlJle, qudtta l'atel<i.eT.
Paul Mirh8.Il!de avait fait aVl8lloeT UJn0 voiture;
y monta.
- Ahlez vers Bassy, je V{)US dirai.
Le peintre, attIristé, tourmen~é
de ce mystère,
si,
oomel1I'a l{)ngtemps pensif, se (]Jema.n~t
maJlgré SI8. prom.eslS'e, la baJr'onne ne l'6t{)l1I'l1Jal.t pas
vens ~ mocj cŒlpable... et désespérément aimé.. .
rvIiaJ~uwj,te
XVIII
COMME UNE ÉPAVE
Dans la salle oommune de la «( Matelote d'anguiJtes Il quedques buveurs melllll;iell.t Wlpa,~e.
C'étaient des IDa.ruers qui, leu,r Journée fime,
S 'UClCOI'chaioot lldl mOllllellt (1e joyeux repos.
Sm le cbelI.l;in venant de l'em.blllI'cadère où leIS
bate<8tUX .accostent, UDe lemme Lentement s'ava.n..
çaH. Elle sembRailt eX'f./rême.ment lasse, presque
défa.tlll'ante.
Parioie e1l.e s'arrêtait pour reprenol'e h8ll-eine.
P.ax-Iohs l8.ussi eLle serrubffiaJit hésiter. La vu,e de l'auberge éal a ir.-ée, le bru~t
des voix lill rendirent un
peu de f{)roo et de cou.nag . Elle pressa le pus.
Un horrume pa:rut dans l'encadrement .de .110. porte.
' t un bon vi.sa.ge épanoui et tena.lt, lNçe s.ur
Il ~:v.ai
son épaule, une ser-vieLLe. C'était le prOpl'létalI'e
de la (( MaLelote )J, J'hon~te
Gr-énelet.
d'a,borc~
dl8l1s le chamin.
n regaroa. dli.sbrat~
la v.u e de. la femme tou le drOlt€ en s·oo. grr'<lJnd
mantoou à ca.puchon Jl8Ibn.LLu sur son viooge, J'attention de l'homme s'éveil.~
Il attendit, penlS'llnt
que l'inconnue aJllLait s'approcher. EIItlIC fit que'lques
pM, en effet, mais c1e nou,vell.U s'al:rêLo..
A lors Grénelet, prenant son. partI, ana. vers eUe.
Sos wl,1u.rœ ne lui pllahScnt pomt.
- Vous désirez, mac1nme?
V1e.DJt,..e-ILe rôde.l l o.u~
de l'auberge po11I' aLtcndlre 1'00 dea roona:llers ... Impossi1ble d'a dcviner il. quello cl~e
e1le IlIpPuI'Lient, si elle e.st
jeune ou vle.iJi1:e.
.
tr~s
bloocbe, aux dolgt.s de 11l,qu.eTJ8
Une ro~in
scln tiIJen.t des 01!1l111lfl.nfJ.s, l'flIbat plUIS eOCOTC la grend
c.'1.jJ'uchon. Gréuc-lel. albo.ndonn.a. sa s'I'lIppülSiLion,mai.s
n' n d.avi.m.L C]1] C p.l ns m6/'J.nut.
Gerpend'llIIlL, de P{)mbre du oopu.dl1on vient une
v{)ix llssou.rdie, tremhl an Le.
- Je voudraLS p6iI'ler à Mme Gré.n.elet.
- A ... ma femme
- Vous OLes Lambert... Je ne vous reconnOJÏJë&uis
pas.
La voix est plus 1'11Qnohe. La Lête so relèlve. PJ'6ci pitamm en t, l'auJ:>eTgklbe se découvre.
- Oh 1 mnd ...
nommez
- Ohllt 1 pour l'oUllour de Dieru, ne
pus ... Puis-je entrer ch z vous sllfllS otrc vue?
- Ah 1 pal' exemple... pM exemple 1 Ah 1 mon
me
Dieu... m .n Dieu!
Tl s'effare, le bllfive Lamoo.rt. De l'auborge, on
crie :
- Hep 1 patron ... l'addition 1
-Onyv 1. ..
EE viLe ouvrant une peULe bal'rière qui ct !lIno
d'Un~
ilU'din.et de l'n.UbI"I'bre, Gr6nclet y pousse
'1'
la fugitive.
Rnlrcz là, mlld/lJ1U, t ll.tlendez .. , Il Y a UllO
port. lT6f.oJ. va vr.ni.r VOlIS ch l'cher ...
Vi'V'elmm1L il l:eCCT.I116 l,a. bnlT.ière, JaisS8lt1t Mnr-
gueri/ie d.a.n.s le j.o.r.uin ooocw',
�I<;"<r-
La 'Petite" 'Deux
Sous
ne oe côté, une fenlê't.r~
du premiar étalge oot
Une femme un instant y a.pparalt, aLtitré.e
sa.ns doute par le bruit de la barrière ref·ermée.
TIJ1ll,e se penohe j mais elle est à oon1lre-joUir eL
Mun€- d~ Folbe.rt ne peut voitr d'ol1~
que d€ls cheveux grlS.
- Eost-oe Vions, HéJor.se ?
1 Ma:rguarite ne répond pas. il lu~
s.eml:i:le reconlIlaître œtJte v'Ü.ix. A q.l1JetlqU'Wl d'i.nvisLb,1e au f'Ünd
{de la chambr-e, la poc.oonne à oheveux gris parle
: ma.i.nMm.'&.nt d'un ton rassurant.
- tilLais non, c1it-dIe. Ne VOUIS agirez pl8JS. .. A,L( Ions, al!l'Üns ...
1 Elle se retourne et disparaît.
r !A 00 mOlment, UTIle püfl"1ie du rez~d-cha;usS'6
est
[ ~VlerL
et HéLoïse OO\lJrt à hl). nouvei1Le venue.
- Mrudame, oh 1 .rriJa.d.a.me... C'est le wn Dieu
\ qui vous en:voie ! Je rue savais cwnme.nt vous faire
d.iJ'e .. . QiUand je l'ai y;u sd mal1ade ...
Mlanguerite jette un cri.
- P !CIITe 1
.
- Pioerre ? Oh 1 non, non !'t'ts lui ! Il va bien ...
m.ême pllJJS enrhumé. Alm'1i,' vû'us ... v'üu!s ne S1a.V€'Z
donc pas .,. Comment, si v'Üus ne save'Z pas,
êb8S-VOUS venue?
- De grâce 1 fiaite&«Iloi ent.rer... Je n 'en p'1.1is
;plus!
- Foll!e que je .suis 1 Je vous tiens là... Venez,
, iV~nez
... ,en~r.z
.. . POl.lJVez-vous m.onter ?
: Mmguerit.e sa cramponne à. la rampe. Héloïse,
d'une main, Ua soutien.t, de l'autre élève une la.mpe.
Le capuchon a glissé. Dans 10. pJeinc lumière apparulL le visage défaiL de la barorme, sn chevelure
Llenche ...
- Ah 1 vos chevéux 1 gémit Héloïse. Ma pnuVl'e
madtune, oe qu'on a. fai~
de vous 1
- Mes cbeNcux... oui, il::; sonL tout blancs, j'ai
i;vu... CeLle nuit, ills ont blanoehl ...
Eilles .{laTveIl'fl.ient au pa.lier. Héloïse iniroduisü
Mrurgn nie dlllllS une chamlJre propremeut meublée
d'acaj ou et Oe rops à Geurs. SUL' le lit, enfermé
dans ses rideaux, un édredon gunflait. Des vases
de porcelaine S'IlII' la cheminée soulenruenL des fleUl\'l
en papier.
- Not.rc rplll.9 belle cl1ambre 1 annonça, non
sans fierté, Mme Grénelet.
.011e approcha ll'Il î.aluleuiil où Ma.rguerite se laissa
torrubcr.
- Eille n'en peul .plu.s ... mon Dieu 1 Elle se trouve
mal...
En erret, brisée par trop d'émotions, ha.r~ée
de
fatigue, le. bal'Ollifie de Folbert d6faj]] ait.
ll?lloïse pose sa lampe, l.l"(lverse l'éiro~
palie.I\
rrn.ppe à une porte.
- E'nt.rez 1 l'Qpond 10. voix que tout il. l'heure MurgueriLc a cru reconIlJll.Ure.
La chambre où pénèire HélOïse est moins vaste
que 1'l1uLre, eL les meub~s
en sont moins briUanLs i
m.a..i6 olle prend jour sur le jal·dinei. C'est pourquoi eilile ~ été choisie :p<;>W' l'Mte qu'elle abrite en
ce moment. C'est UiJ). Vleillard à longue bar~
blanr
ohe, dont le regrurd, empreint d'une stupeur efSII1IlB cesse autour de lui . Il est oouché.
!.rayée, ~e
Une frmme se tient (}rès du lit; elle se retoume
}'ers lléloIse.
- Ah ! madame, dit celle-ci, venez vite... C'e-si
un.e cha!Dœ crue vOthS soyez rei:! Lée ce soir 1 Venez ...
1 il y a là quelqu'un de. malaùe.
1 - Qu ir4~I.Ul
... m~l1s.
.
.
.
. Ehle h651ta. HéJ.olse, qUl, SUlt pou rqu.OI , fnit un
L, 1o11t bas\ poUt' n être point onLendue du
-,jgn
VieiHard, elle diL un nom.
}. .l:!:t Sonia Orbihoff [l'émit. Mme de Folbert à l'au-~
~
ta. Il MI8A.eIoLe J. .. Il .ELle s~t
donlO" .
,..... Je croyldil:! qp'eUe aV8.1t appns, poursu:L lIét 101se Em désign611t du geste le malade i m8.l$ elle
1 n'a pas l'air de savru.. .
,..... Ailors, comment es1rol1e ici ?
_ Pout-ôtre... commence Bélolso.
~aitrée.
87
U
FopXlr~
~
Mais eJ.Le s'rurrête : le secret de la baronne de
ne lui appartient pas. Même à Mme Sonia
qUl salt tant de chos,es, qui po.raH connaUre tant
de ~ourex
m~Atèl'es
, ~léoïse
ne se croit pas le
droIt d apprendre pourquOI, ou plutôt pour qui elle
suppose que MargueriLe est accourue ce soir.
- La chambre en f·a ce ... allez, il y Il de lu lumière. Moi je reste l'l-v.ec lui.
Lorsque Murguerüe reprit conscience d'elle-même
elle se vit couchée dans le liL dont la doctoressè
avait relevé les ridea.ux, rejeté l'édredon .
. Elle fiL un effort1 se sou.vint et fondit en lru-mes.
A10rs Sonia se pencha vers elle, la contraignanL
à respirer de l'éther.
- Qui êtes-vous? dit Wlu t à coup Mia.rguell'iLe.
,..... Une amie.
t - Je vous connilis ...
m'o.vez-vothS re.ncontrée déjà?
- Pe~L-êir
- Mms ... vous aussi, vous me connaissez ... Vous
aVez dit mon ILom tout à l'heure ... Alors, c'est fini. ..
Je suis perdue!
- Calmez-vous. .. Je sais votre nom, en effet i
mais s>i VOUiS désirez le cacher, je ne le prononcerai l,}lus . A personne je ne révélerai voire pré~nce
Lei ..• Vous pouvez avoir confiance. Regal'dezmoi : vous verrez· dl/1lls mes yeux que je ne sais
pas menLir.
Marguerite se sO'Ulève. Son regard, ardemment,
iln tenoge le visage émacié de la docioresse et elle
se souvien t.. .
- Madame Orbihoff... Madame Sonia 1. .. Vous .. .
vous... Oh ! je me rappeEe... la peLit.(' Deux Sous .. .
Vous Clt.es partie... Pourquoi? Peut-C:lre saviezvous le mystère de la v1e d e Raou.!... Le mysll.!re
que j<l n'ai jamais conJ1U et dont il est mort.. .
- lIlort 1... lI1. de Folbert esi mort!
AnCI'ée dans son erreur, Marguel'ile poursuit
- Mari la nuit passée ... Tué ... nssaooiné 1
- Lui 1
...... Par Beppo ...
- Lui! redit la docwresse.
Muj,s de quel ton d'horreur, d'oeffrroi.
- EnsuHe, reprend Marguerite, Beppo s'est tué.
- Lui! :redit encore la doclo.resse.
lEt tous les dégoûLSI, 100 remords, les désespoirs
soufferts durent un instant revivent et la submerge~L.
Elle s'appu,ie au.lit de M&I'guer~L
pOW' no
pomt tomber. EUe revoit l'étudianL aux yeux irÜc.!Œigents el e.nsoroeJ,eurs. Puis le chnuf.li n,r aux yeux
de rnellSonge.. . E<t en eUe soudain so tait un-e
grande paix. EllIe a conscience que ~Ülut
est· firui.,
ef1\a"cé ...
Beppe est mOO"t 1
Ma.rguerite s'esL remise à parler. Secouée pur la.
fillvre, eJle ne peut pJoo b!W' l'a[[reux récit. Elle
diL la descente de police, la ruée dos agents .
sauvée. On m'a en Lral née , on m'a
- Je me sui~
gardée Lout le JOur, cachée. Ce soir, je suis poartie.
PeI'Son.ne, peI\SoI'lne ne me reLrouvera 1 Il ne rau~
pM !... Je ne rcprendrali. mon nom que si ln mé·
moire ùe Raoul éOhu,ppe au dbhonneur ... AloN,
je reprendl ai mon Dom ci je reprendrai mon fils ...
- Pierre 1...
- Vou VOIlS souvenez de lUi. 1... Vous êtes
bonne 1
- Où donc ~'WJ.
?
- Où .. . VOUS ne le savez pliS 1... Non, vous 110
.pouvez savoir. ,Je Vfl.i.s VOltS ai,re ...
- Non, n'ajouL z riC'n maintel anl. Crulmezvous ... 11 faut prell<1re quelque chose. llNoll:ie va
;VOUS apporLcI' un pC'u de buuillon... Et puis vous
dormir z... Il faut dormir .
Tandi'l que Sonia. Orbihof! proùigualt ses soins
Il Mme de FolbcrL, Yvette, d<Ulls le peUL logement
~
Bal.i~oUes,
s'inqui6t6it.
A midi elle a vu revcrùr Lancrot seul. Le ~r HI·
chot Il bdèvomenl expliqué que le malaùe dont S(IDia. s'est chargée étlllll pl
fiouffrnnL, lu ùoclort' ....
ne le quittera point de la. journée.
�~
88==================================
Vainement la jeune fii1le tente d'obtenir des explications.
- Vous savez CIe que vous a dit Mme Sonià 'l
C'est un homme très maJlheureux qui vient de fort
.
loin ... il ne veut pas être nommé.
Et le jour passe, doublement mélancolique et très
lent pour . Yvette qui ne peu t aller retrouver son
g;rand arru.
Le soir vient.. . La nl\lJÏt se fait. Lancrot a dit :
(( Si Mme Sonia n'est pas de retour à sept heures,
c'est qu'elle ne reviendra que demain.
Yvette ne dormit guère oette nuit-là.
Lorsqu'elle fut levée le lendemain, Yvette alla
frapper chez Lancrot ; elle trouva la chambre vide.
(( TI est allé cheTcher Sonia )), ,pensa la jeune fiUe.
Elle s'activa à préparer leur petit logement, pour
fêter le r etour de son amie. Ce matin-là non plus
elle ne se rendit point à l'atelier. A mddi, Lancrot
repBJI'1llt seul. Alan" tout à fait maLheU!îeoo'6, Yvette
rul~
retrouver P auil Mirhfllnde.
Elle lui dit l'absence de Soni·a.
- De tous cotés, conclut-eJle, je me heurte à d'es
mystères : c'est très pén'ible.
- Voilà une méohante petite phrase qui contient à mon adresse 00 reproche immérité. Trouvez-vous mauvais, Princesse, que, même vis-à-vis
de vous, je respecte un secret qui n'est pas le mien?
- Pardonez~i!
C'est vr-ai, je suis injuste...
C'est que j'ai du chagrin.
- Le travail va vous diJstrai:re.. . Le travail et le
modèle. J'ai intimé à M1le FHi, par un petit bleu,
l'ordre de veILiT tout à l'heure. Je prétends achever
ma baigneuse, et cette effrontée jeune peI'sonne .p robablement pour me remwcie;r de lui a voir
avancé le monLant de plusieurs séances de pose ne reparatt plus.
- Chut 1 monsieur mon ami. .. J'en tends son trè8
spécial trottinement.. . EcouLez, on sonni'l,
- Entrez! oria le peinLre.
.c'était bien Sophie.
Seulement, 0 surpr.ise 1 el1e ne 'pOiI'tait plus ses
c!heveux collés en rouflaquettes, rnuis relevés en
bouffa n Ls presque réguliers.
- Ma chère{ déclara. le peintre, tu as l'air pres·
que disbingué
Néglirrennt la réticence... de l'adverbe, Fin parut
flattée. <'E lle s'excusa poliment d'av il' Lardé à re·
parattre. j~le
allait poser mainteooUnt tant qu'on
voudrait.
- Alors, v:ite 1
Elle tenait un journal qu'évidemment elle avait
(1t) lire en rouLe. BUe le jeta sur le divan et pa.soo
deI'ri6re le pa,r avent.
Machinalement, Yvdte p'ri.t le journal.
Elle dit au modble invisi.ble :
- Mademoiselle Fin lit 10 feuilleton 1
- OUli, pour sOr, mais pas (lllljourd'hul. Aujourd'hUI, j'ai lu l'aff<atre ... à la première p1lige ... Vous
voyC7. ... en grosses leUres ... Il ost d'hier, le journal.
Pu'ul Mirhande préparait sa p.8IleLte et n'écoutait
pas. Yvette lut il haute voix : " Le drnme de l'hOtet
Folliert)l. ElLIe s'arr6t.a, SUrroqll<ée.
- Monsieur Mirhande ... le drame d-e l'hôtel Fol.
oort 1 Vous entendez ... Folbe'l't !
"- Allons, bon 1 murmul18. le peintre.
Comme il ne répondait rien, YvetLe s'étonna
- Vous n'entendez pas 1... Fdltertl
- Ll s'agit d'autres FoIDert, sans doute ...
- Ecoutez:
cc Depuis longtemps. la polioe surveillait ce qui
Be passait chez un cerlain ba:ron de Folbert dont
['bOtel sc trouve voisin du Parc MOnoeil<U. On y
jouai l groo jeu et la polioe s 'en douliait. Mais l'a.pparente respectabilité de la b8lT'0nnc, les dehol's
correcLs du baron, longtemps prolég6rent ces chevaliers d'industrie, CX' 9 c crocs de haute volée ... Il
Yvette interrompit sn lecture :
- Oh ! la bUŒ'onne." Non. noll. c'est impossibJe ,
La 'Petite .. Veux Sous ,.
~
Cette femme a un si beau, si doux visage 1 Elle ne
pouvait m-entir... C'est une calomnie!...
- En oe qui la regarde, oUti, dit le pednt-re. Ecoutez-moi, Yvette. Après tout, je ne sais pourquoi
j'ai feint d'ignorer ces tr1sLes choses. Je les ai lues
comme tout le mon.de. En deux mots, sans les
phrases ronflantes d'un reporter en quête de copie,
voici la vértité : Toute une bande de gtI'ecs se réunissû'jent chez le baron de Folbert et, de compilicité
avec lui, on dépouillait proprement au jeu les naïfs
que, bantOt J'un tantOt ralltre, des affiliés aLtiruient
dans ce coupe-boursCtS. La baronne s'en doutaitelle ... Est-ce de là que ven'ait s'a prOfOnGB tl'[steSlse 1... A'vant-hter SOiT, sur J.a plainte d"Uine victime moins patiente que les autres, une descente
a été opérée. Le baron s'est sauvé dans son bureau
avec un d-e ses complice.s et - qu~
s'eSlt-i,l 'paJs,s é ils ont dt) se quereller... On a entenGu deux coups
de feu. Le baron, après avoir tlué son adversaire
s'est logé une ba:lle dans la tête:
- Mais c'est horr.iil:Jtle ... c 'est effroyable !... Oh!
la pau,v1"e f-emme 1. .. Es,l-ce qu'on l'a arrêtée aussi?
Ce serai t par .trop injuste 1
- Non, la baronne a d..i:s:paru et la polioe n'a pas
trou.vé sa trace, peut-être ne l'a-t4ù.e pas cherolJ6e.
- Oh 1 est-ce vrai?
- On le diL et je m'en suis réjoui ... Pauvre créature 1
- L'aV>lffit-clernière nndt... fitipellsivement Yvette.
Ses yeux demeurajen t fixés sur le peintre. Elle'
lui vit l'air contraÏ'nt.
Elle réfléchit encore un instant; puis, s'u'PProchant de lui, trè8 ~rave
et (out de même un peu
triomphante, eUe dit, appuyan t su r les mots :
- L'autre nuit... L'autre nuit... Monsieur mon
ami, je comp'rends, ..
Il jeta une brosse au bout de l'a\Jelier e t g;ronda
- Au dJable, Jes femmes!
- Oh ! monsieUü mon ami ...
- Pardon, Princesse .
- Je vou s pardonne. P.a,r donnez-moi à votre
tour... El ne regrettez rien .... NOR, rwn ,1 C'est
comme si je n'avais pas compns.
Elle a pa.rlé très bas. Occu pé à prendtI'e sa pose,
l e modèle n'a pas da en Lendr·c. Mais f'ifi est pleine
de son sujet. ELLe recommeooe son bovrurdJage,
1
- Y s'en passe de drôles, ruIlez, par re mona{)~
Un baron 1 Qui a'Ul"lüt jrumfllbs cru?. . Y vaut gu6re
mieux que l'autre baTon ...
- Quel ailUre 1 d'emantIoa le peintre.
- Mam'zel1o Yvette me comprend.
- Moi '!
- Den sOr 1 Puisque la dame m6decin il. qui cfue
Rolphe a tout rn.con l-é est votre amie, a VOllS a
ben dit ... Non 'l Oh.! ben, zut, rai cor ou ln l~,ngue
trop longue... Pis, j'bava rde, ) bava./·de ... et J ~lens
pas la pose ... M'si eur MLrh~dc
Vtll., me gr~n<le.
- Certainement 1 fit le pemtl'e d une VOLX rude,
vous nou s assourdisse\'. uvec vos sornettes.
JI voyait s'Iltllumer dn.ns les yeux d'Yvette une
curiosité inquiète.
Les a,Uures de Soni'a dev~aint,
ele,puLs qu e~ que
temps, si étrn.nges que la Jeune fille devait être
prompte il. se tourmenter, à &llisir le moindre mot,
A le oreuser, il le re tourner.
Pauvre cbère peLite Princesse f Qu'il serail bon
de J'enlever il lou s ces drr.rrnes soupçonnés... de
L'emf}orter bien loin cl de IUii faire tQIU t oru.bljffi'
dans U1lle we nouv.elLJe... une vie d'aTTlO'Ur 1
(( Aussi bien, so dit le peinLl'e, je finirai par en
rurriver là, envol' et con.tre tout f... Je l'lltime ... Jo
faim<o de toute mon Ame l...
De bonne heUTe, Yvel!{) quitta l'ateMer.
Elle n'osait pas quoot.ionner le mod61e et, irritée
il 10. penséo que celle Otltc éla.IL au courant ù"une
el1~
ne
partie. de ce. mystbre qui u,b sorbait ~onia,
pOllVfl1t se dl!:lLraire de sa proOCOlllplt.LlOt,J, travatllo.lit
m~l.
EUe prlt hâtivement congé du pemtrl" ct partit.
'
�~
La Petite ., V eux .sous"
================ =====
Alo.rs, ju.geant que son amour pour Yvette l ui
donne des droiLs sur un sooreL qui peut la toucher,
il entrepren<l de foire parler son modèle. Mais Sophie s'ost bu.t ée. A toules les quest.i.ons du peintre,
elle l'épond vaguem erut :
- j'd,ois j'sais rien ... Non, vrai, c'est des histoires
comme ceHes que RO'lpbe roconLe... II en a dit
comme ça des Las d'vant la dC1me qu'est venu,e chez
!lOUiS .. . pour rien, pOUl' causer ... J 'd oi·s t'y venÎJr denain?
- Deunaln ... non . L€ peLit GI~énelt
vient pour sa
eçon et j'ai idée de me servir de lui pour une
eLu cie.
Fi-fi desoendait de sa table. EUe s'arrêt·a.
- Gréne ... quoi? Que vous avez dil?
- GréneJ/et. Tu connais qu elq u'un die ce nom?
- ' J'te cro1s.. . Pardon 1 J 'vous crois... Q'uand
j'd·is que j'connais ... C'est de nom seulement. Une.
tJ.ul;>e'~
qu'y lient, mon GI'énelet, à moi.
- to;h ! bien, c'est son fils, si ça t'in Lér-es.se.
- Son ...
Fiû faiJ.iit laisser choin' sa d,rape,rie.
- En quo,i celLe pu,renlé du patron de la (( Matelote )) et de l'élève de tllule Yvette te su'rp.rend.-elle ?
Sophie se mordit les lèvres; d'un. bond elle se
réfugia derrière son paravent. En deux minutes elle
fut revClue, et quitta l'atelier sans avoÎlr voulu prot:J.O.Thoor un mot de plUJS.
XIX
UN COIN DU VOILE
- EnfIn 1
Celle nuit encore SOIllia est restée là-bas.
Blie revient au matin, bricsée cl tourmentée de
l'inqui étude où doit êlre Yvette.
Da.ns l'exclramaLion dont la. jeune nUe accueille
la doclorœse il Y a du )'c-proche auLant que de la
joie, c-L la voici qui se mc-t à p.Jeurer.
- Oh 1 YveLLc ... ma. chérie ...
- Non, vous ne m'.aim.ez pus! Vous n'avez pas
confiance en moL. Vous. me lrarilez comme une
peUte [vIle sans raison ou comme une élrun.gère
dont on se méDe ...
Elle s'a.bat dans 1,?s br8JS que lui tend sa grande
amie, se laisse ber'!€'1', ' comme un baby ct finit par
s'apaiser, pal' sour.l1t'e à travers ses lo.l'mes.
Sonia osL 1'6sO'Iue à se confier à Yvette. Que peutelle Cl'ifllindre à pl'ésent 1
Ceux donL la jeune me a'Uro.it ou to.nt à redouter,
parce qu'Hs avaient tout à redout.c.r d'ello, ne sont
'P'lU!s. En dehors du baTon CIL de B{)J[>po, nul santS
(loute ne pourrait élabLir l' idClllLiLé d'Yv·clLe et de ]os.
petite Deux Sous. Peroonne n'est p1rus là pOl1l' di.re à
qoolne besogne de sung fUTent employées les moins
innocentes et, remonGant vers un drame plus ancien, pour rupprendire à Yvelte qu'elle vit une nuit
so, mère agoniser sous le couLoou d.'l\1n asSla.s.siIll
e t que cet assassjJ,l étrut son père 1
Alors, à quoi !lon affliger la jeune flUe en lui
taJisant enoore 00 qu'elle ne saurait touj01U1S
ignarer?
- C'est méchant, dU Yvette de se cacher de
moi... J'ai peur...
'
- Assieds-toi près de mol... DOMe tes mains...
E11œ SOilit brQJ.a.nl.es. Tu n'as pas dormi?
- Til'ès mal. Je ne suis jamais tranquille toute
seuJ>e ... E st-il guéri, cc malnde dont je dois tout
Jgnorer ?.. Reprurtez-volllS ce eOÎlr?
- Non.. Demaitn seuJement ; si l'on avait besoin de
moi, Lan crot , qui est retourné là-bas po1Jr pr.end~
ma p1ace, v·i.endra m~
chercher... EoouLe-mOl,
Yvett.o, co que j'ai à te diTe est t.rès grave. QertaillIS dét.e.il s encore <loivoent restGr caché.':!. C<lnr
l.(l[lt.e-toi do ce que je puis te dire et s<luvien.s-tol
CJIu'une indiscr6lion cOlJ'l1;IJÛ5e me pe-r<lrcll.
- Oh 1 SoniA 1
89
~
- Autrefois, il y a b j,en l.ong~emps
, poursuivit
la doctore.sse, un crime fut CUUlJuis, un crime affreux 1 Un pauvre homme act.:usé de Io1iJe, a été
interné aydn.l toute sa ra.ison. Le rn.alheu.reux
vienl d 'échapper à son mar tyre . Il s'es·!. J~iugé
ch,oo la mère de ton petit élève, HéJoYse Grénelet.
C'est là que j.e vais le voir.
- Comment. ..
- Chut! Ne m'interromps p&'3 . Il ne fa,ut pa.s
qu'on se doute de La présence de ce poovre homme
chez Les Gréndet. Il y arrwa une D'lüt. Personne
d'autre que moi et les Grenele t c 'est admis auprès
de ·lui. Comme il est i.mjJo:>sible, cependoot, de
cacher son existence, HéJol::;e r.u.C'onte à qui, veut
l'e.ntendrre qU'El c'est uu' de ses parents maila.d!e.
- Rien de tout cela n'est bi.cn Lr.ag.ique.
- Tu trouves ?
- Mais oui, puisqu'il ost mainlenant en liber~é,
ce monsieur 1
.
- On pourrait le repren-dre... Bioen que. .. maintenant.. . D'aillC'Urs, qu·esl-t.:e qni pourra jamais
ef[.a/cer les so'uJlrances qu'il fi endurées 1
- Vous me défendez de vous interroger ... Laissez-moi pourtanl vous demander une chose: RodOilphe esl-il mêlé à ceoi '1 .• •.
- Pourquoi oette question?
- Une idée ql1i me vi ent... parce que hier, Sophie a paTté de VOOJs et d'um 1>&:1'on ...
Sonia S'épo.uvanle. Qu.e-lle dangereuse auxiliaire
que cette fille étourdie 1
La doclo.resse ne cherch.e point à nJ.er.
- Rolphe a connu mon mala.de ...
- A,lol"s, c'est lui qui vous l'a. fait oonnallre et
vous a priée de le so ign er ... ~onia
chérie, (lites~
moi encore ccci : pourquoi l'avaiL-on enfermé?
- Non, non ... cela n'est point mon secret.
- La même défaite que lui 1
- Lui ... CfUÏ?
- Mon.sieur Mirhande. Par exmpl~,
son secret,
je l'ai percé à jour. Mai·s je ne vous en dtral rien,
j'ai promùs.
Et redevenue joyeus.e, Yv.ette embrMsa follemen t la doctoress'e.
CeIJe-cj avait un visage plus triste que jama.is.
Le deuil de sa v.Île Luj 6cro.saiL le CŒur.
A l'llJuberge des Gr6nclct, dans (1 la plus beJle
chambre )), Margueri,te de Folbert repose. Après
une nuit sans sommeil vers I.e matin elle s'est
assoupie; et la bonne IIétlotse, si elle 00 craigœit
d'évciUer les curiosités, fc.rmernil aujourd'hui· 1'00berge, afin d' évi ter il . ses malades 1e tapage que
mènont les ordinaires clioenLs.
Mais la doctoresse a donné il la baronne un calmant puissant, et le somrn-eitl de la pauvre f-emme
résiste 8Jll br\}ü dos voix qui montent du rez-doeoha:ussée. El1e n ' en1tend pas non plus le.s san
glots bruyants, la voix rageuse de M. Jean Gréœlot qui, en e nfant glUé, se m.che tout rouge po..rce
que s~
mère vient de décider qu'il n'ira. pas aujour,d'h ni chez M. Mirhande.
- Mai,s tu m'fuS laÎlSs6 lu:! écrire que je suL!
gUéJ1Ï et ~e
j'irai aujourd'hui.
- J.e n avais pas réfiéehi.
- Réflécbi il quoi 1... Je veux y a.ller 1
- Mon Dleu, tais-toi, elle 'la. t'eJi.tenMe.
- Qui?
- Une odBJffie, arrivée Mer soir... Tu vooals de te
coucher.
1.0. curiosité dIstrait Joan de son chagrin.
- On fiJTive toujolll'S ÎlCi la. nuit, main.tenant.
- PO\lrquoi dis-Lu ça?
- Eh 1 ben, le cousi'll aoos i est arrivé la nuit...
- Tu te couches de bonne heure.
- Oh 1 lui, c'est pas de bonne hrUI1e qu'il esti
Il.I'rivé. J'ai été révei,lIé pOl' la voiture cL j'ai en.tendu
Les pas dans l'~caier.
Il m.ar·chalt d'un lourd ...
On a.urait dit qu'on Le porl<l:H, le coœln.
- C'élAi.t -sa m.aj,J~
qu'on port.a.it.
�La Petite •. 'Deux Sous ..
~90=
- Oui, tu me 1'&3 dit. A ce momenWà l'horlog.e
de la salie a soIlI1é quatre coups.
- Tu as mal oompté, tu 'dormais à mottié.
- Et ma.iJnt.enant il y a une autre personne là-
t.al1t?
- Oui.
- Elle dnrt encore ... EUe est ma.l.a.de aussi, peutêtre? Ça va devenir un hôpital, chez nous !
- Oui, elle est un peu souffrante: .. fatiguée de
son voyage. Alors, tu comprends, je vais ~tre
obligée de m'occuper d'elle. C'est pour ça qu.·e je te
demande de rester. Tu es assez grand pour aider
,ton père ,I?endant que je sena.i. en haut.
- Si c est pour ça... murmura le ~ti
Jea,n dont
la mauvaise humewr n'est jamais bIen tenace.
Mais poodant La. semaine, il n'y a pas fou1e à
i'auberge toute la journée. Le travail tient éloignés
les clients, dont quelques-uns seulement reviennent
tl.UX heures des repas.
Après s'êLre appliqué de son mi6U!X à seconder
son père, le gamin peut aooez viLe s'éva.der. Il
monLe à pas de loup J'escaLiler eL, sur le pali€r
du premier étage, s'arrête, l'oreille au guet.
Dans la. chambre du cousin on parlait. Une voix
d'homme répondait il Héloïse. PeUl Je8JIl la recoo'rultt, cetLe voix: c'est celle du ManchoL qui, un
dimanche, est venu il la (( Matelote n, ronené par
lM. Mirhand-e el Mlle Yvette. Et ce n'a pas ét.é une
mince surllr:iJse pour Jean que de voir le Mancbot
repn.rattre le lendemain de l'ariV~C
du cousin et
.re\'enir ensuüe, chaque jour. Il pa.ratt qu'Us se
connaiss-ent depuis longtemps, le cousin et lul.
drôle d'apprendre comme ça
C esL toul de m~o
bru. l}uement qu'on a un parent dont personne jllmai. n'avait parlé.
- C'esl,-v <lu'on étail brouillé, a. dama.ndé le gamin?
•
- Qu-clqne cho!'oC comme ça... et puis, il voya.geait.
Il voyageait 1 Le mot fait rêver Jean. Comme
oe serait amusant d'entendre raconte.r au cons-in
scs uvcnLuros 1
Lorsque le CO\lsin sera guéri on lui demande ra
des histoires. D'lOi là, défenoo de pénétrer duns
sa. charnl)'(~
1
- Çe ne sefa pas gai, la. maison, songe mélancoliquement le petit.
EL il l'esLe là, sur son paJ.ier, ntre les dEm.X por-
te closes, ne s.achant trop que fnire de
hl-rn~JC.
Mrus voicj qu'il s'imngint' entendre remuer dllll.'l lu.
clwlnbr.e où loge ln voyu.g use. Cotte dame app Il
poul-NI ... f.: besoin ct socours ...
1( Si mnmlln
vCllait, sc dit Jean, je la pr6vi n-
drai . clic ntrerait. Il
klÎ' non 1 llblo!!' cm e toujours a \ c la MlllLCIIOL.•I
ne peut en!lcmtre cc qu'clle rut. li n'()::;6
l' (l.PI 1 1'. •. COllllTl nt faire ?
.1 'an
L <le caractère r6so'lu.. Il se décide à frapper r hez l'étrnq~e.
PCI' MM nl' répond.
d'avoir n(,ppendant, 10 gamin &0 croit cert(~il
tendu du bruit tout il. l'h~1T
.
hl si cIl é.Lait plu nl1~.I:(Ù)
... ou mOJ te.
1\ crotLe pensoo un grando cud ilé combattuo
par un viol nt effroi ngito le relit Gr6noel 1. La ('lltiosllé l' mporLc. [)nle~r.,
t.r~
dQu.cemont, il
enLr' ou vrQ ln porlê ct regarde.
Ce visage pAle !l1lX yeux clos l'eposant sur 1'0reiller ~m(.\uL
l'enfa.nt.
Qu' IJe a J'n.k mJ.tI:a.de, la !,r.l.uvre drune 1 AllClm
Mp[l){)(!h(>JJ1ent ne peut se fair
flans l'e 'prLt
du petit garçon P.D'Lr cette fomm dont 1 s cheVi lIX .'ont répandus en M ordr.! et ln h.olle ma.d~e
aux ch veux brunR qni, en .grand to16~J
CŒrrOO
d'lin 1. u cha
li, flut f li . son POlI\,Hl.1l il. M.
MirhI1D
(I~.
D'ailleu.r.9, il n'avait guoI"e 006 ln l'\)gare! r.
. '
Le VI'uit 00 l'lI.11bol· r, n'a ru t.r~
" ~arglOt
te
de Sil. 1 rrellr, La pré mc , GcpentJanl. ~1 1 ILCICUS1.,
de J-(',an Gr{mel t agit sur le.,. la l'Vlurne.
~
Elle ocuvr-e les ye.u:x. Soo regard est indécis d'aboro, p'l1is angoissé... EHe se redToose.
- Madame, dit renIant d'une voix tremblante,
maman va voojr tout de suite, je va.ilS la chercher.
L'.angoisse s'efface dans les yeux de Margueriie.
E11e sourit... et murmure dou.cement :
- Mon petit ... oh 1 mon beau petit ...
JC8IIl se l'8JSSoUre. Il s'r6Jpproebe du lit, sOU!I'iant
aussi, et s'inf,o.rme a'Vec po1i.Lesse :
- Vous a:I!.Iez mieux, madame? Maman a dit que
vous étiez malade ...
- Mamoo... tfl maana.n, ah 1 oui ... J'e rue te fai.s
pas peUT?
- Pourquoi me feriez-vous 1lBU!I' ? ..
Elle l'eLo:rnJ)e Sour l'or-ei.1ler, plus blême, plus défatte.
- Vous n'avez paIS l'arlT d'aùler très bien, madame; voulez-vous que j'aille cbercher maman?
SeUlement, je ne sais comment (aire, parce qu'elle
oot &ans la chambre du cousin., et l'on me défend
d'y entrel' ... Un cousin que je ne connais p<iJs et
qui est vteu.x .. . je sais, je l'ai demanJdé à maman.
11 est n.rrivé une nuit... comme vous, il y a ... pas
bien longtemps. D€!pU1is, il ne sort pa.s de sa chambre. Hier, il a éLé J)1'l1S malade; c'ost une dame
médecin qui le soigne, asve.c un vieu x qui a un bros
de moins, un ami de Mlle Yvette... Ellie me donne
des leçoIlB de dessin chez M. Mirhancle... Mais
v.ous ne connaissez pas ...
Maœguerite est sur le point de rectifier, de cUre
qu'elle a vu Mlle Yv.etteà l'atelier .
Elle se ravise. Jean ne semble pas la recon..
naUre, cel vaut mieux.
Lu baronne de FoJ:ber.t si elle doit disparo1tre di.spllJI'alLra, même pour J'enfant.
Est-ce que vraimen~
elle pourro rompre avec le
· l~e
?
p . 6, se refaire une vtie nouve
Elle évoque la scène de l'avant-vellle ... les cou.ps
'de !Jeu, le meur\.re, et jcL\.c un long cri d ·horreur.
A ce cri, HéloIse accoUTt.
Jean se sauve sarn.s demander son reste,
L'heure où Jean Gl'énelet aTl'Lvnlit d'ol1ài:naire à,
l'atelier étant depuis long Lemps sonnée et l'enfant
no po.rad.ssant palOt, non plUS qu'Yvctbe, PaUl Mil'hande ,réso1ut de mettre à, ex6cultion le projet que,
sur les vagu
propos de Sophie, il a conçu.
Com~t
Fin a-t-elle e.n~du
p<l!rlcr des Gr6n let'1 Ces gens ne sonL-iJls pas môlés 8JU mystère
dans lequel s'enferme Sonia ,
Ce mystère, le peinlJ-e est décidé à ol'oola.iJrcir du
m ins en ce qui p ut menacer ou simplemcfi't toucher sa petite amie.
Puisqne Yvette ne paraIL pas c'es1 que Soni
st
de relour chez elle. Hruison de plus pour Mirhande
de c ren.d.re à l'auberge do la (( Ma.Lelot.e li .
Si la jCUIne m.le vient à. l'atelier ~ l'ab nec du
peinbr , l nt pis 1 Elle 'S'llppO!lera qu'une arroa.ire u,r gent.e 0. obligé Paul Mîrhande à sorür sans l'avohl'
prév nue.
L'nrli Rle arriva à l'auberge des Grénelet juste il.
point pour commu.nde,1' son d6j 'uner. 1l1'aV1tl.it aLnsi
(!\Icul~
alln de donner plus ~e natu.rel à sa venue.
n ne t rouvl1 dons ln salle flot Grondel.. ni IIéJoIse.
Le pnti t J can, d '·UIl air ab!lo,rbé) s 'œt\vaiL à. dresser lOtI cou crts. Il euL un VI'al on d~ jOJ(~
cn voyant
entrer II} pcint.r~
.
- Ah 1 JTon:;.tcu~
M.trhande 1 Je pcn.sais bien,
moi, lJ11C vong RCflez éLonné de 00 pas me vou'
arri v
l' GO
Ina Lin 1
- Eh) ou}, mon petiL homme, étonn6 ei m~e
un peu rnquJcL. J me demandais ai Lu n'av.a.is pas
cu l.me reohu~
el sui'} venu prendre cl.6 to.'1 nou"
veUes.
- Oh 1 qn vous êt.es bon monsieur! Corn.ne
vous V 0'l'Cz , j n
uÏl<l J)llfI m~l.fd
'. Mo.k·· il Y NI Il
cl u. (JUI le son~,
d'in. ln maison, ~t.c'esi
pour oela
~\le
Jnllman 0. refU!3é de me lat:;,er 8I1ler... .Jo
lollide il. sel'viT.
~
Q\lJ. donc est mal-ade '1
�La 'Petite " Veux Sous .,
~
==================
- Un de no's COlliSms que joe n'ai jatrnai's vu et
une dame qui est arrivée la nuit detrnière. Je ne
la COn'I18:1s pas non plus. .. EL1e esi pMe... pllle. ..
Ça fait peux.
- D'où vieDit-elle ?
- Je n'en sats rien, d'un voyage proha.blelllent.
J'ai 'vU dans sa: chamilTe un granel, grand manteau oomme un man:te.au de religieuse, avec un
capUJOhon.
.
.
Mirhande devenait très attentiI. Il demanda,
cherchant à pruraUre i:nodifférent
- Tu as v'u ceLte dame ...
- Oui, ce matin.
- Ah 1 fit le peintre, déçu .
Un soupçon, que rien d'aiJJeul's n'autorisait, lui
a tTaw)I'oo l'es.prit, tanclis que le g8JIIlin parlait dru
manLe.au à cap.uchon. Mai·s iil y a beau coup de
' manteanx seIIhbilabJ,es, et la pensée ne vient pas au
. peÏiIli.r'e CJlUe Jeaill a pu volÏJr la baronno de Folbert,
renco'nlbrbe par 11lli dans l"atelier, sanlS ~a recon·
, !!llalJl.re. J eau repI'en.d :
- Devinez qui soigne notre cousd.n., qui le connaU ?... Le vieux av-ec un bras de moins que vous
avez ame-né un jour déjeunJer ici 1... C'est drôle
hein ? Et au lieu d'un méJdecilin, c'est une dame:
•une doctoresse ... N',est-ce p8JS q'ue c'est drÔle 1 Moi,
j'a'u rais pas confiance... Ah 1 voici papa qui revient de la cav~
... Papa, .rego'I'de qui est là 1...
- Monsieur Mirha,nde !
Très vhs.ibleme.n.t, le brave Grénelet doit faire
er~Qft
poUT ,aocueiilHir j.oy IIsrmen.L le peintre. Palù
Mrrhand'e na p8JS besmn {j(' cnn,c;tater la conLrainl e
de l'aubergiste pour s'aftil1t1('1 !fll'il a bien fait de
veni.r, qu'il touche au mol {jp ]'{'rllgme.
Jeam s'était esquivé pour allt!1' prévenir 00 mèr .
Ce,Llo-ci arriÙva, essuywlll ses muin's à son tablier. BIle !&i.sai.t me.iJ.leure contenance que SOJl
mari.
Ne sUlpposnnt ,p as que le peintre pût avoir des
soupçous, Héloise jugea qu,!, lp meill lour moyen
d'{liViLcr qu'il en eût étail de pn.ra.1Lre enrchnnlée' Je
sa présenœ. Elac le l'emercin doJ1JC éperdumen,t de
, s'être dé'Ian~
à ca:use de SOI1 gnlop·jn de fil s.
Mais en parlant de Jean, T1~lose
senlit s'évu,.
nou.ilr sa.: balle assu.rance : n'all ni t-il pas, le bavard,
I.rouver le moyen de pal'ler (Le lu venue ici de Ln
dor.eg,~
et du Ml>Jl1cllol...
L'exiSlLen.oe parut t ut à coup très compLiquée à
La pauvre Mme Gréool L.
-- Vous voUJlez bien déje'UDer, monsieUJ', n'e61.-00
pas, sur la terra'sse ?
- Va poua' la terras ' e 1 Dontlez-moi le men!U
'du joUl', madame Gréoolel, s.ailLS plus. li doH ét . r~
: d'ailloUl's exoohlen.t.
- Pa.'1 lrès redherché, m onsq eUT. En semaÏJ1e,
~ous
sa.vez, je n'ai. à. cOlnpl.er que sur des clienLs
pluLOL gros mal1,gcUI1S qu,e gourlli'ets.
- Niiunporte, je Ilie veu.x en rien augmenter vos
ocC'Upations ... Jean m'a dil quo vous aviez ici deux
malades.
- Déjà 1
- Comment, déjà'
- Jo veux (lire: iJl a déjà eu le temps de vous
reoonler ça. ?... Oui, nous avon s un cousin à nous,
pae solide, le pUlUfVJ'e 1 1:1 a été bien. sonffra.n t tous
ces dernlic'N jouns. Il va mieux ce nllll.i\l. Il aVlwl
pris froid en vOY8.g'Cant la nui'!, flUW:I CLre flSlSez
"ouvert... VoyonrS, je va.is pl'épa\['er vou'e taJ.Jle ...
A!l.kuls, bon 1
DeUe oxc.llUlla.rLion étairt. MI'achée li HélOïse pa.r'
l'.a.:wafliLinn 1nopin6e du Ma~clt(},
Ignorant ln 111"éoonoe du pei.nt.re ViLaù VeTlSJ t chrrch.er le repas c1<l
son tDGllade. En' voyan.L 1 aui iil'hrlOrde, le 'Vii cil
lard un in!!t.a.nt palI'l\\ ennbonussé. Mais il Hvai.L,
pour so raSSUI'cr guI' aes cOM6<ju~:nos
~o
sihl(>~
de
raj/30n~
qu Ignormt Uélo~
'e ;
ecU rcltcont..rc d
cola IH qll'npl'ès' s'être d'abord 0.: ~l)1nb,ri
son vJ,sa,ge
s'llclu.i..r cl 'un souil1irre.
91.
-Lie
Le pe1ntre lUIÏ tendit la main et, tout bas, !;\ifIn de
ne prus être entendu d'Héloïse, il demanda :
- Pourrais-ie vous voir un moment, Lan.rcrot?
J'al à VOUIS l?arlelI".
- Pas mamtenant, monsioeur. J.e dois retourner
au.près do ... quelqu'un, mais tout à l'heure, quand
~me
G~énelt
al}-f.a le lodsir de me remplacer, je
vrloodr8.1 vous re)Oln:dre.
- VOI1S me tJ'Ouv.eroz SUIT la te.rJ'lasse j'y vais
déjeuner.
'
- Bien, mOIl'Sieur.
Ce fut sans grand. aip:pétit que Mirha;n;de fit honneu[' au menu d'HéIloïse. T'l'op de choses le tourID<ffiltai en.t.
Ayant achevé son T€IJ>'8lS, le peinrbre restait là, fumant afin de se donner une contenance. Impatienté
de ne 'Pas v?ir a.rri!ver LBJncrot, il ehe.rehe à distingue[' ce qUJ se passe dœns une chambre dont lia
fenêtre est larg,e ouverte au premier étage. Est-oe
là que se trouve le malade soLgI1!é par la doctoresse?
Le l,i l est invisible. Pensonne n'approche de la
LeJIêtre. Le peintre en vient à Sl1pO~,
la. pioce
inha.N,tée. Mois si! Quelqu'UiD. est là... queJqu:"l.1n
vien,t s'accouder à la fenêtre.
ç'est une femme à.. chevetLX blancs qui, SUtI" eUe,
a Jeté U'Ilie mante notl1e dont elle s'e,n,veùoppe frileusement D'un élan irréfléchi, Paul Mirha.n.de
s'esllevé.
La terrasse est étroite. Mocguetite de Folbert
~u1.
netLeJ.nent d~stinguer
les tTaita du ]J'6iWt.re.
Comme il J'a reconnue, elle ru recon:na1t.
Elle a tant voulu d€jpisber sa curios:i:té tal1t voulu
lui ('orhe.!· Ra l'eL'ra ite 1 Et malgré tout' en voyant
près d'elle cel hOO1:me qui lui fut secoul'kble et bon
eUe épf'Ouve W1 s·enliment de douceur d'apiBe~
ment. Elle lui fait un signe.
'
je puis monter?
- VraLment, diL Pau~,
Il pnrle bus: elle devine sa ques.tion plutôt CJ1l'eUe
ne 1entend, répète le geste lJUIl l'mvite et qultLe la
[enélrê.
Elle a un étrange a.spect, la pauvre Marguerite.
Ses cheveux qu'elle n'a. point rcùevés tomboot sur
s~
é~ules.
~1Je
est vêt.ue, sous sa gr&ru:le ma.nte,
d un slmple ) u,pon , et si le offianleau s'éca.r(.e la
niUdl~
des bras et des. éfaules a.ppar.o.1l.
'
!VIrus elle ne son.ge porn à cela Elle va ouvrir la
po.r!.e de sa oh 8lmbre, afin d'éviter au pcinLre tou·
te hésitalion, car elle pense qu'il monLera à tout
h~ .sa;l'd,
Mns demander qu'on le guide. Et c'est
alOsl, en effet, qu'agit Paul Mi1'ho.nde. lil oonnalt
l?s Il~es.
(l..u, lieu de lrav.ersc..r l,~ s::W.Je :p'our gagné!'
l ~scahe
' r, 11 Lol~'r(
la, maison, s mlroduli po.r le ju,\'dlilleL. Ma~gl,ent
laisslUlt sa porLc oUV>QI-Le, est revenue S(~ JeLc!r dans UII1 fau,toui!. Paul Mjroorude P"'raliL. Il est é!mru .a~tIlOL
qu'el.l.p est émue.
-:- Madrne~
dit-lI,. avaml Lont laisse:u-moi VOUI
afflIlTner qne Je ne SUIS pas venu ici en espion pOUl
SUf'J)l'f:!flidJ'.e llO scr~
qrue vous vou.ticz me cacher.
Alors mêlll<C que le ha!'.ard m'ul1l'o.it appris le JiC"J
de votre rèl.ruit.e je me serai& fait un point d'han·
nour d-e' ne [li).':! vous impos.e.r ma présence pui.squ.e
'
vous vou1icz l'éviter.
- .le. vous crois ... ~ai.s
<,Juel1o que soit la rai.
son qUl vous amllne, )e S'Ulf:, heureuse que VOU f!
soyez id. J'avais trop présumé de mes rorees ... Je
no puis TC Ler sans an soutien, sans un ami dé·
voulé ... Et cet ami, je &ais qU<l vous acceptez de
l'êlr , Ah 1 Dieu vous bénira 1...
- Dite&-rrtoi en quol je puis vous slervù', madrone.
- D'abord, apprcnez-moi ce q:ne VOllS sa.vez. Que
s'est-li passé ... là ·bas ?.. Je n'al vu OiUcun journal.
- VoIre bOtel
t mis soU& !>Collés. On y a perquisi tion-oé, et !li, parmi]
papiers saisis, il s'en
Lr'()llvr do COIJl1promeit..anL.. pour certaines personn R... lel1 N'port,r!':> Il 'en onl point été avisés. Les ur.
r~lion
faiJ.e.s l'allll'o soir sont mai nt.enues.
- Vous avez les noms ... Isaac, Rébecca ?
- ArrêLoo.
�~
92
- Be1lazuœio '1
- Arrêté.
- Ce sont les pires, munnura la pauvre femme;
Ys furenl les mauvais génies de RaouJ. Et alleZ
eux, art-on perquisilionn.é '1
- Certes 1 Là-dessus, La police fut moiIliS discrète. Les jOUJrl1aux prétendent qu'on aurait trouvé
dans le coffre-10rt de SiIméon, outre le& preuves que
cel homme et sa femme pratiquaient l'usure sur
une grande écheJle, des données précieuses se rapportant à un crime commis il y a de longues
années, et pour lequel un innocent fut condar~é.
- Un Cl'lIITle 1 Un crime 1 répéta Marguente
lLffolée. Le crime de GreneJl1e ?
- De Grenelle, oui ... Comment savez-vous '1 •..
Elle se penoha ver& lui, el, san visage exprimant
une douleur, une angoisse de martyre, elle dit
dans un souflle :
- Ce crime... C'est lui qui l'a commis. .. C'est
pour acheter de silence d'Isaac qu'i.! était devenu
son esclave... Le criminel, c'est Raoul 1...
- Ah 1 m&l.beuteuse femme 1
Elle s'exaltait maintenant. Se& mains fiévreuses
crispées sur la main du peintre, elle poul'S'Uivit :
- J e sav.rus ... Je sa.vais qu'on pouvait le perdre.. . J'aj tout endThré pour le sauver... toutes les
douleurs ... toutes les honUlo ... et .rien n'a servi 1
L'heure du châliment a sonné. Un jour j'ai compris que la volonté de ces e.t.res abjocts - . Isaac,
Rébecca - comme elle pesait sur mon., ~an
pèse:
rait dans l'avenir sur mon fils. Alors J ru consenti
l'atroce sacrifice. J'ai. vouln que, pour moi, m~
enfant soit mort. J'ni voulu être morte pour lUl...
Mon peLit. .. mon Pierre 1. .. Il m'a vue, il m'a. parlé . en lui ri en n'a tressailli 1 Je reste pour lUi une
élrangère ... Et je dois me laire encore,. le laisser
dans ron ignorance. Lui apprendre qU'lI est mon
fils, ce &'erait faire peser sur sa têLe l'infamie de
son père. Ah 1 malh eu r sur moi l... Malheur 1
Et soudain une pcnsoée nouvelle vienL à Marguerite, un nouveau tourment l'assaille.
- Ah 1 mon Dieu 1 gémiL-elle, Mon pauvre père 1
- Votre pbre ?
- Oui 1. .. Vous ne savez pas. TI vit encore, h6las!... Mieux vaudrait qu'il rÛt mort 1... Il a perd u
ma mère su.bitcrnent, et dans la violence du .chag;rin sa raison a s0!TIbré. lil. eRL d~ns
un asIle ...
fou Curieux ... Qu'advlendra-t-II de IUJ 1
- 00 0. dû nommer un conseil de famille?
- Oui. .. je me souvi ns ... Ceux qui le c~mpoeaient, Lous ... tous m'étaient inconnus; mais de1. C'él~ent
puis, ils ne m'ont que irop ~proché
des amis de Raoul. ]).ellazucclO en faiSait parlle...
eL Dupont. .. et 1e& autroo, ceux qui sont arrOLés.
- Votre père avait de la fortune ?
- Oui, une grosse fortune. Pourquoi me demandl*l-vous cela .,
- Vous l'avez revu depuls son int.ernemC'Ilt ?
questionna le peintre évitant de rApooore.
.
- Rien que de m'entendre nommer, paralt-Il,
8uUit pour le mettre en crise.
- Ah 1 Où est-il 'l
..... A l'asile du docLeur Probe. Vous connaissez '1
..- Non. Qui &lIait le voir '1
- Mon mari.
- A.b 1 fit ncorc le peintre.
- Et maint nant, qui a'occupc.ra de lIUi T••. Cel
hommes... arrOLés .. .
- Ne vous tourmentez pas. On nommera. lm curaleur. Sa pension sera très ré~liè"Cment
payée
j'usqu'à ea mort. Al ors, vous hént.erez.
- Me taire connntlre...
- Vous avez nn tlls, madame; croyez-vQ'US avoh'
le droil de le dépouiller ,
- Cet or ... Cet or est maudit...
Elle s'cxa9pémil, les yeux arrdlés.
Mirhande eut peur cl'un e nouvelle crise ner-vOUBO.
Il chercha cles y ux un flacon ù'6bhor, des eL.~,
.. n
ne wt lien. Des 8ft.ngl W! oonvulc;1fs eeoou.aiM.t MM-
La 'Peti~
"f)eux Sous ,. ~
goorik Le peintre se décidta à ch-encber de a'Olide ;
il quitta la cht8iffib.re Sllins que Mme de F oJ.OOrt paTllt
s'en apea-cevoir. Au mOOlent où i.l anr.ivaJ.t SUT 16
paliea-, une porte s'ouvrit <Levant lUli. Latncrot sortait de chez l'hOte des Grénelet.
- MonsiellT .. . Vous saviez qu'elle était ici 1 Vous
veniez pour e11e... A-t-eLle donc assez confiance en
vous pour vous avoir lout dit '1 ..• Ah 1 de quel secours, alors, vous nous seriez 1
- Je ne vous comp,rends pas. .. Mais 's i je puis
rendre service à ceLte pauvre femme j'en serai
bien heureux ... Avant tout, il faudrait La soi.gner.
Elle a de véritables convulsions de douleur !...
- Je vais envoyer Héloïse.
- Mais...
.
- Madame Grénclet lui est absolument dévouoo.
-Ahl
.
- Sans cela, serait-elle ici ? Attendez-moi un
instant, monsieur.
Un moment pl'llS tard, Lancrot revenait, suivi
d'Hélolse. Mirh.a.nde Q'tJtendait au seuiJ 00 la chambre du malade. Le Manohot l'y poussa.
- EntJrez, monsieur. Aussi bien, dût-on me blâmer, je veux tout vous dire. Je sais que vous no.115
serez un appui.
A r entrée des deux hommes le malade s'était
taumé vers eUX. Le pei:ntre, sllrpTis et apitoyé, vit.
une face maigre aux lons de cire, encadrée de cheveux blancs el dans laquelle luisait un regard craintir. M. Lancrot s'81pprocha du lit.
- Monsieur, fit-il doucement, voici un nouvel
ami qui vient vous voir.
- Un ... ami? prononça le vieillard.
- Mais oui. Vous n'avez plus que des amis
maintenant 1 Les mauvais jours sont finis .
Le visage de cire se contracta.
- Il me reprendre 1 gémi t le malheureux,
- Il ne peut plus ...
- Comment?
- Pa.rce qu'iJl est mo~t.
.
- Oui, VOllS m'a.vez dlt... J,e ne SalS pas ...
Mirhande écoutait sans cœn
~rend
.
Le Manchot se tourna vers lui.
- N'esk:.e pao, monsieur, que le baron de Foloort est mort 'l
- Oui 1. ••
En répondant, le pcin!Jre inte.I1I'ogeo. Vital d'un
regard angoissé. Comen~t,
au dT<lme de l'autre
nUit, cet homme étai-~l
mOLe?
- Mort, mort, mort 1 répéta le vieillard d'une
voix qui s'afIermissait.
Il continua, anxi-eux :
- Et elle.. . elle...
- EBle sera blcn h8'l1I'euse tle VOUs retrouver.
- ELle 1... Elle était avec lui, contre moi.
- Non , monsieur, je vous l'nIfirme, et monsieur
Mirhande, qui connaU madame de Folbert, VOUs
diTa ...
- De grâce murmura le peintre, eXijlliquez-moi
ce my tère 1 j"ai la sensation d'être en proie à un
cauobern.ar ...
Mu Lanc:rot, d'un signe, l'implora .
- DiteS seulement, insista le Manohot, ce que
vous pe'Ilsez de mndnme la ba.ronne.
- Oui, dites, répéLa le m'lllade.
- C'est uoo femme très digne très malbel)
reuse ... une victime.
'
- Une victime... eUe aUssi 1 gémit le vieillard.
Ah 1... je l'ai sonvent maudit.c... Vous ne oroy<l'2
pas, vous ne peo.scz pas ... qu'elle ai'! voulu sc débarrasser de son pauvre pèr '" l' nIC'MllC1" a.vec da
fous 1.. . Ah 1 les mOMlres, les monslres 1
Mirhande compronait. En un fulgurant ~cJair
dl
pensée, il ro,pprochait les confldences de Margue
rite d s paroles du violl1flTd.
TOllt à l'heure, en 6coulant la baronne plIr1e:r dl
aan père n'~t-1!
pas eu un S<Y\lpçon de l'é'pouVMl
table vél'ilô ?
�~
Là Petite
U
Deux Sous"
AilI1si, depuis des années,. le père de Mme de
folbert vivait interné en pleme ralson 1
PO'Ur s'entparer de la fortune du malheureux, le
baron a conçu, exécuté le plua h~ible
de~
forfaits el Marguerite, aveuglée, n'a. rien doevmé 1
- ' Comment reprend la voix brisée du pauvre
M. M.ar~e:t
co'rrument, après si longtemps a-1relJ.e
pensé... d-èviné. .. Car c'est elle, n'cst-ce pas, c'~t
Marguerilte qui m'a arraché il. cet enfer 1... Puisque vous dites qu'elle es<t bonrn.e.
.
V~ta.l
hési.te, irLdécis sur ce qulil dOIt ré~de.;
mails l'e peintre ose Le pieux mensonge qun. dOit
achever la. gué'riS<ln du vieillard.
.
- Oui, dit-il, c'est votre fille. .. Voulez-vous. la
revoir 1...
. .
- Oui ... o.u,i ... Oh 1 oui 1. .. Marguerlte et mon
Xletit Pie.rre son bel enJant. ..
~. EncoI'C ~e
roilS, LlLDcrot se tr?uble:
N'a·t,..o.n point supposé que 1 émotlOTh de la bar
ranne en voyant petil Jean à l'atelier venait du
8o.uvenir de son fils mort 1
Mais P.aul Mirhande rassu'r e le grand-père.
- Il' est bien portant vo.l.re peti1t-fil.s, vous le
'Verrez.
.
- Ah 1 c'est trolp de bonhew" 1 murmure le vie.iII.land.
I! sourit, ses yeux s'humecte?'t. de '!.arme6 t;euson cerveau, aff.aIbh par tan.t d 8.Ilr
reu.ses. Ma~s
nées de souITrance sans espoir, s'embrume de nouveau s'appesa.rut.it ... Son regard devi~t
vague ...
dorm.ir mainwna.nl, dit La.ru:rot.
- h f~ut
- Oui... dormir.
Il est fail à l'obéilSsan.ce, lc p~uvre
M.. Martet.
iiI ferme les yeux et tourne son V1.sage vers. la muraille. ALors le Ma.n.chot emmèn.e Paul Mlrh.and~
à l'extrémité de la cbambre et il. voix basse !tu
raconte comment,. par les confidences d-e l'ami de
Fifl Soilla. a appJ'ls que M. l"la l'bet, So/in:"S être fOll;,
élaiL prisoniüer du dodellr Brobe. ~nèvamel,
il
dU que Sonia, jadis, a conmu lia fo,miJJ.e, N1.a.rtet. U
dit comment lill-même a Cu la. pen.s~
d amener le
vl-eilla:rd don.L Sonia à préparé La doél.i,V1'anœ, chez
œt~
Hélo\'se Grén.edet, dévouée' il. la ba/"<mne qu'elle
servit autrefois. il était néof'ssail'e que VQiU5 sachiez ... l'vlooame Soni>&: me pardorunera
- Bl1c vous paroonnera. Ltl.n.Cl'ot. ~le
ne peu1
me considérer comme un étranger, pUlsque ...
n sourht. Lanarot devine.
- Oh 1 monsieur, vraiment 1 Vous avez rMl6chi ... Et vous voudriez, sachant. ..
- J'ai réfléchi. Et mes r'éOexions m'ont amené
il. cOlw-e.n.ir avec moi-mêm e que je ne pOl1rra.is êtr.e
heureux sans ma chère peli le Princesae. C'est donc
au fiancé d'Yvl'Jtlo - car ell-e ne me repoussera
pas, je l'espère -:- que vous ave'L conllé les secrets
d.e madame Soma ...
xx
OU LOINTAIN f'Asst •• ~
Les Siméon eunml li. se défendre d'avoir é~
com.p.uCCB do l'assassinat dc la malheureuse
Yvonne.
On se l'appelle qu'ayant pénétré dans la .cham·
bre du me'Ul'lre au mom nt de \n. conJroniJ.aoon de
Vital avec sa. prélcndue victime, o.f1n de charg~
I.e Manchot dool 11 vou1!üt se venger, L~c
a.vwt
dérobé SCIJ1.S e.n prév<lir- la valeur, un p<'tlt carton.
Or, celle bolle que la victjme d RarJuJ a, sn.na
d~IJLe
il. dess/lli'O, miRe en évirlrnrt', avec I.e pro] t
imprudent d~ menacer Renll l d'en livrer le contoou
aux l\lar'1.et cetle bol I.e con I.i.rn t dPlS lett.N'.::I l'('ÇIlCS
par le baron . de FoLOelt, a.\lll'!l qu'il sc nommait
R~1DUil.
sAlJlS phil.'!, éwmt filA d.e [11>1'0 t m~I'P
inooI1.nu.!!. Plu.cé comme 8Jpp.ren1.i dans lime rU'brlque, il
n'avait pojnt t..aJrdé à ae lier aV( de rnauwu.'3 <1.1'0100
cL il. d6l.a.iB3er l'a t.eli.ar.
93
~
Dès lors, ce fut ta vie de hasard, bricoil.an.t, va--
Lant. .• la vie misé.rable... Puis H demeura quelque
temps groom chez une cabotine de bas Mage. Ce
fut là que, voyaIllt de près le monde des féta.rxù>!
li!! prit les allures d'insolente oondescenda.nœ qUl
devaient plus tard, éblouir la bonne Mme Martet.
Décidé' à tout po1.LI" parvenir à la fortune, il s'enrola dans une étrange et terrible bande qui, voulan.\
monter il. l'assaut du monde, s'arl'nait de tooo les
moyenoS. Chaque initié, sui.vant ses cBlpacltès, acœptait un rôle.
Le rOl,e du Il beau RaoUl1. )) parut à tous neW~·
ment i.nJdiqué. Il pouvait, avec son physiqu e, jouer
l'homme du monde, et accrocher 'Une hériiière,
fille uni.que, afin d'amener à la masse la fortune
des parenLs après celle de la fiancée.
Ce fut il. cette époque q.u'i.! connut Yvonne et la.
conquit. On saiIt de qu el cœur elle l'adora 1
La malheureuse, affo:lée d'amour ne songea point
à juger cet homme qui se prétendait malchanoeux,
sans travail, et consentait à vivre du labeur d'una
femme, tout en ref\lSl8JDt de l'épouser.
Lorsqu'il rompit avec elle, en l'abndo~t
brusquement, il ou bila chez elle un. portefeuille où l1'a1naient des leUres <te ses comph,ces. Par ces lettres,
Yvonne connut l'ignoble existence de celui qu'elle
6V.aJ.t ba.nt aimé; ce so.n.t eUes que l'abandanmée,
ayant a.ppris les fiûnçaiIJœ de Raoul, a projeté d,e
livrer il. M. et à Mme Martet ann de sauver leu,r
ft:1le d'un sort plus misérable encore que n'a été le
aien. Ces J!.ett;r.e,s onlété entre les mrains d'Is.a.ac une
arme dont il se promettait de ne mena<:er Raoul
~ue
lorsque celui-ci, r0pu, en poi.session de l{1ul
loI' des Martel, lui para1tl'ait une proie asosez belle.
Ne ~révoyant
pas que le baron de Folbert aurait
cette infamie - aprè.s tant d'autres 1 - de se débarrassser si vite de ses beaux-pnrents, Isaac ay~t
compris de qui était l'enfant d'Yv.oDn.e, gardalt
la petite Deux Seus cœn.me lJJIl prem.\.CT mstrumen.t
de chant~e
venant a'j)puyer les ~tres.
Les pr'oJets d~
Siméon de ce cOté, ont été déjoués; mals ils se sont si bien rattmpés autremn~
qu'üs n'ont poi:nt r egretté la disparition d'Yvette.
Le coffret, pour e'Ux, était la poule aux œufs d'or 1
A sa seule évocation par Isaac, le baron rendait
mervei11eusemMt. La bande en tière, SIe sentant
me:n.aœe dans lia. par~
de l'un ~e se:" memi?ll'es1
a ct 11 Ca.ire bon ace ue.iJ au cou'-!>le d USIlJ'.ùeI'S CJU.L elll
dooo'én&VW1t, sa ~al't
des profiLs.
Et voilà que 1il1Strument de chantage caressé
par les Siméoo se tourne contre eux 1
On a pu retrouver la trace de cette Yvonne, jadis
ma1trresse du beau Rooul. E'\lc n. été 8SSBlSsilIlée, la
veille même du mariage de celui-ci. Comment hésiterait-on il aœu3eT RaoUil 1
Or, un innocent rut oondarnné sur une déposition
aoca.b.Lante d'Isaac qui, justement, possédait de quoi
(aire accuser le baron. N'eslritl pas très évident que
r.u:sll!rier rat complice 1 Si les années éccmLées ne
leux assurarent pas l'impunité c1u crime, on ferait
peser sur les Siméon l'a.ssa.s.sinat d'Yvonne, En fait
li pèse sur eux cncore; oor ce souvenir rend les
jug&s plus s~vère,
les jurés implacables.
Les leUres tr(Y\]voos chez ISl!.{\.c n'accablaient pas
seulement le baron. EUe émanaien t de w plupart
des actelll'S actn.els de la oliminelJe comédie, éclairant ainai le ~é
des te amis )) de Raoul.
liJUes l'éclairaient si bien que le vénéra.ble monSi.~ur
de CMne<vreu - o.u Dupont - d<>nt le œhinel noir de spilite rendait plus d'no sel'Vire il. l'ru.
socilllion, se se ntanl tmr> sérieusement mena cé,
Lrou'Va le mOyQn &> se pendre da.nB sa. priso.n. Los
au tres pfi.'T'uren taux 8...'lS.i s.ea.
QUlln l il la ba ronne de F'ol1><'rt, disparue le soir
ÔiU. suicide de son m&M, elJ.e deroowm introuv8Jbla
Un seul, pal'mi ceux qui s'intércssent aux débnt.s,
pourrai t indi!'fuer le li Il où elle se trouve. C'est un
avocat, M· Darronœ, dont le beau talent s'Post affi r.
mé depuis qu·il d6!eodit désespérément Vital 11
�~9
=,-~
MancllOt, sans pouvoir faire partager sa .convict.ion d>e l'innocence du malheureux. Ainsi, il ne se
trompait pas : VHol lut injustement C:ùnda/IIlné 1
Mo Barrance sc souvü:n"t d'Yvette dont il avait
promis de s'ocC'Uper et qu'i!L n'a point cl1eTché à retrouver, Un remords lui en vient, qu,i le fait s'attacher à la. nouvelle affaire ressuscitant raucienne,
et s'y passionner. Un jour, quelqu'un qu'il rue l'lecoruuut pas se pMsenta chez Lui. C'était le MancllOt.
- Monsieur, dit Vital, 1orsqu'il eut CCJnté sa vi~
je me confie à vous. On a cru mort lIe. torça t évadé:
je préfère que s.a mémoire seule soit réhabilitée,
que Vital défunt r€\s~e
défunt. Mais je VOThS denande un service... Oh ! un !Service bien grand ...
~ha.rgez
-vous
de défendre madame de Folbcrt.
- La femme du baron? Elle n'est point accusée.
- Faites que nul soupçon de complicité ne pèse
lIll' elle... Qu'eIl!le puisse, lorsqu'il dui conviendra de
9.lr-e valoir ses droit.s, retrouvel sa fortune et ceJ.le
~ ses paren ls, '.
- Mon ami, dit Me Barrance, ~'avoct
€'St lié par
le secret profe.ssiœlnel. Dites-moi ce que vous savez, dites-mot où se trouve Mme de Fol.bert,
A partir de ce jour Marguerite Martet eut pour
champion l'un des avocals res plus écoutés dubal'rrou. Les débaLs fin,is, l\ro Da.rra·l1ce,s'ocoupa,au nom
de sa oli:emte, de Lous les arran 1 ents lDI/lJLériels.
Jusqu'au dernier moment, 1~
docteur Probe
échappa aux soupçons. Son nom 00 figurait pas
dans ~es
fameu
s~
le~Lr.s
et il n'a j amais paru à
l'hOtel de Folbe.r~
Mais lorsque Rébecca se vit ·au banc des accusés, bout le fiel de ISO. vil.aine âme lui remon~at
aux
lèvres, ellle voulut se consoler en fa.is&I1t partager
son trop juste malheur il une personne de plus.
EUe accusa Le baron d'avoilr foit enfermer son beaupère de ccmnivooce ,!-vec le docteur Probe. Celui-cl
éta.l1 dans Ua salle, diJScrètement dissimulé.
Ne trouvant pus 00113 la pem..sée qu'll fut toujours ha.bille à so.uver les 8IPpafenOOS une aJSsu.ranœ assez so.lide, iJ. quJLta vivement la saUe
et, ~e lendemain, l'établiswmeut de Neui.lly fut sans
di.reeteur· On le cueiJ.lit au Havre, oel son dépaTt
préciJ>ité ne fit que l'accabler davantage.
,T andis que }es phases de ce procès reten Lissant
se dérOU!laienL, des scènes poigno.ntes se succédaient il l'auberge de Lambert Grénelet.
DL avait fallu préparer M'll.r/SuerUe à La :révélation
du crlme ignoré d'elle, cœnmlS par son mari contre
le pauvre M. MarLèt,
Mors son amour, qui av:ait survécu à wul, 5Orobra d.an.a l,'horreur de cette révélation. Elle n'<élp.rol1va pIAlS qu'un immoOnse déwuragement, \.lIIl immense MgoQt d'avoÎ:!' appartenu à cet être ilIDmonde.
Appa.rtenu, oui. Mais, Jégu.J.ement, ene ne fut
point sa Cemme. Le mariage contracté par Ruj sous
un faux nom est nul. L'cn!a.nt né d'eux 00 portera.
pas le nom couvert d.<l se.ng et cOO boue.
Ce 'D.e tut que trois jOUI'& après les 1r6vélo.Lion.s
fattes au peintr pal' Lancret qu..o Sonia con.sentit
~ apprendre il Murg~ite
.Jo. présence s.i procl1c dG
son père. Lor que M. Mortel., la OguTa reva8ée, mé.
oonnaLssable pour c ne qui d puls La.rut d'ancé.es ne
l'a vu, lui tendü le.<! bras, Ml8XgueriLe ne put que s'y
jetar défaiUM ,sans pronOn<:el' une parole.
- Ma fille ... ma chérie... Ce qu'ils ont ta.U
d'eLle 1... Ri !#j pauvre ln.è.l la voyail Ainai 1...
YVette mrunll'lnilllt vic.nt avec Sonia auprès ide
Mn.rguerile .. Ell( ne ~tlU'n
j[j,T)l i
<111-01 nng o()ule
dans &C8 verncs, <IIJ ][e ptll'l "JI' t ut do n 1 drames .00 naguèr'e, 'lais, Sai é jUWl pOl' S()ni~
rle C6
qu'jij devaÏL lui npPl'cndrc du pn, sr" l'nul 1\lIhrunùo
vouln, pour cel! ) qu'il l'cgu ni l' d(I,' l'lIlltin tomme
e8. fla.noéc, éclair ' lin pou l'llT1goi wHo énigme.
Yvelk! n'ignoI'e plu qu les Ilurt.ct l'ont l'ecu 'illie p 1 11VI'e pet:i t4' ét.rtmgorc; CJlIQ rhez eux Sonia
rlj.'
,nue ct que :il la. dOC.t.olC13 0 l'a erillcv60 pour insi dlre volée - c'est qu'tLyan~
découve.r
La Petite
U
'Deux Sous "
~
l'indignité du baron de FO'lbertl el1e vouJait éloigner
de. tout pernideux contact l'emant à laquelle, en 181
sOIgnant, elle s'est tendrement attaooée-.
C'est sur la terra.sse de l'aaberge, devant le décor
brillant de la Seine, sous le ga'and sOIe.ill, qu:e PaUi1
Mirhande a parlé à YVJett.e du passé,
- Alors... Je auus une enfant t.rouvée, sans famille ... sans nom ...
San coeur se gon.fle. Le pcintre l'atw-.e contre lui
et, ten.dremerut., gravemen.t, réRo:ndi:t :
- Pour famille, vou:s avez ceûx qui vous aiment
Et, si vous le vowez, Pr.i:nOOS5e, mon nom devien:
dra votre nom.
Eblou~e,.
elle . oublia tout ce qui n'ébait pas la
grande Jale subItement éclose sur son chemin. Elle
nooo. ses bras au cou de son ami et bien mieux
que par des. motS, ses lèvres lui réPondirent.
Quelques ]oums ploo tard, Jean, qui a'Voait pa.ssé
de longues heures à canôt'er avec s es camaJrades
presque déserte, '
trotlNa à son retour la ma~.son
Héloïse panüssait bouleversée, à la fois heureu&e
et désolée.
- E'coute, mon petilt, dit-eUe à l'enfant en l'attirant pràs d'elle; j'ai à te dire une chose bien
ave... Tu sais combi'e.n je t'aime ... Et toi, jamais
il ne iaud.ra m'oublier... Mais tu dois l'apprendre
aujourd'bui : je ne suis pas ta vraie maman ...
~
La regadi~
tcro.t pâLe. Ses yeux se remplissallent de larmes. .biUe poursuivit :
- Ta maman était ma-lbeul'euse, !J'ès malheureuse et ne pouvait te ga.rder près d'elle. Alors elle
t'a confié à moi. Maintenant, elle veut te reprendre.
- Je ne veux p8JS 1
- Jean ...
-:- Non" j~ n~ .veux pM ... Je ne la connais poo,
mOl, et tOI Je. t alme ... Marnan, c'est toi 1
- Mon peLlt, mon bon petit! Je ne te quittel'ai
pas. Tu alliras deux m8lffi8lfls voilà t~u
...
- m... j'aurai deux papa.s aussi?
- Ton père e.s~
mort.
-Ah 1
Le vJ.sage de l'enf.oot peignru.i.t une srup6facLlion
douloureuse, Héloïse le serra. contre clle le cajolant comme lorsqu'il était Lout petit.
•
- Ecoute encore, mon chéri; tu la. connais ~
maman 1 C'est la dame si trisLe qui était ici'
- Qui éulit... EllIe n'y est plus (f
•
. - Non. El,le. est partle tooL à l'heure. N()'U.s iro.n.s
bientôt la reJoindre ... Ne p!.eUJre p8JS mon bon pe~t
J eau, ne pJeure pas l
'
- Je veux bkn l'aimer - elle fi l'air si maJr
~usa
- et aJler vivre avec clIe fiÎ. tu v1cns
UUSSl, avec pupa,
'
- Il ne fo.udra plus dire : CI Papa )).
- Ohl
- Non. TlI diras : CI Palpa Lambert, maman
Héloïse n. Maman tOl.\t court ce ne sera plus moi 1
Elle lutbaiL pour ne poiJrÙ s~oter
all!$si 1&
ban~
créatu.re.,
l
- Tu verras comme nous serons heureux tous
c~mhle
1 Tu verms 1 Et tu aura.s aussi un grand.
père. Il sera 6i bon pour toi... Il te gâtera.
- Un grand-père... Je suis content.
- Il faut que jo Le dJ.s.e encore oeci : le cousin
est parti.
- Ah 1 avoo octte da ... avec ... avoo ma nouvelle
m~re
?
temps qu'elle i ~l Vil mJcux,
- En m~o
-,Il rovtenclN ?... Je ne l'w J.o.mai,s vu, moi, le
w
COUSlll .. ,
ni... N'cn parle pas. Ne pn.l'le de rien Il
pen<l.a.nt quelque temps, Tu me le promet. ?
- Oh 1 oui, Et. fllors, mon deSLSin ...
ontmuerus Vtl 1 Mon~eur
Mirhll.nd,.lo,
T11 I.e
connuI,t blc;!- ta .me.rnlIn: ttL... hl ne sais pa 7..
Il crOlS qu il va
. m ner, monsieur MirltaIlde.
- Avec mademOlscllo Yvette, s'écria le gamin,
distrait de sa (m'Oue émoldon. Oh 1 mol, 11 1
pcl'tlOnnC
�~
La 'Petite ,. V eux J' ous u
95
t;;fLo
avait eIkol'e épargné la Dande e..vid'e - on.t éLé
r éali~s
.. On Il veJ.ldu 1'h.Otel que j-amais plus Marguerite ne voudrrul l"evOlr ; et cela assure l'oaVlem.ir.
Marguerife a acheLé la maison blanche en plein~
s,?utude, Dans une maisonnette, au bout du pare,
VlVe.nt l es Gr~n.elt
lis onL' cédé la « MlflItelotf) li,
ne vouJ.amt pomt se séparer de ce~ui
que toujours
ru chérissent comme leur enÏoot.
Lambert se décCYUVTe une passion pour le jardiXXI
nage, Héloïse met sa joie à élever toutes les bêtes à.
AU PORT
plumes ou à po.i!I, susoept.i:bles de peu'Pler u,nre b8JSsecùur, et elle trouve en'COl'e il. exercer ses talents de
Sur la cOLe basque, dominant la rive rocheu&'J cOl'clon bleu" en apprenant son métier il. la jeune
devant le meI"W)il!eux horizon de la mer dans le Basquaiee qu'a pr1se Marguerite.
iécor' des montagnes ble.ues, une vaste maiBbn
Lancrot est instal.lé chez les Grénel€t. Il se rend
blanche am boiseries sail1antes est nichée danlS 181 utile de son mieux, et la bonne Héloïse le choie
verdure et d8lIlJs les fleurs. Le jardin s'avance en de tout son br ave cœur.
teJ'l'QlS\S'e vers la mer.
'Marguerite est men déli<,.ate, bien brisée pur
Là, par une douce soir6e d'été, un groupe fami- toutes se.s épreuves. M. Martet demande encore
liDJ s'a:ttarrde. Un vieilliard SiUX yeux paisibles, au des soins, Ils ont auprès d'cux la plu:> vigilante,
bon soulli.re, est assi.s dans un y.aste fauteuil.
comme la plus éolairée des compagnes : Sonin 01'Docile et attendri, il s'efforee de ne pas bouger bihoff ne les quittera plus.
aOn de ne point contrarier un jeune <.lessinateur
Tout à l'heure eile est nJ.J.ée cherclle.r à la poste
gl'Uvement appliqué à faife son portrait eL qui, à la plus voisine les lettres que le facLeur n'aurait
lout moment, s'écrie :
remises que I.e lendemain, La. voici qui revien i,
- Je n'y arriverai jamais si vous Temuez Lou· moins pAle, une lumière aux yeux.
Piorre 00 lèv'@ et court à elle.
jOllllS, grand-père,
- Ma.dame Sonia.., venez voir.. La nuit arrive,
Marguel'He f\Iarfet, assise près de son père, uvec
sans quoi je finirais ... Di Les, ne trouvez-vous pas
un orgueil mélancolique contemple l'enfant.
POUl' Pierre comme pour YveHe, Je passé demeu- que grand-père est ressemblant?
Il Vous no rcga:rdez pas 1
rera obscur. li ne saura jamais que la baronne de
- Madame Son.i&, dit M. i\1artet, en souriant, a
Fo1bert enLrevue par lui est œtte dame arrivée une
nuit à l'auberge de la Matelote. Il ignorera que ce des lettres qui la rendent. heureuse...
- C'est vrai. J'u.i des nouvelles du jeune m6nagc.
fut pour l'arracher au milieu criminel où el-mê~
6LaiL 10roée de vivre, que sa mère a consenti 10 Yvette m'écrit. Hs prolongent enc01"O leur voyage
c1e nooes, muis noD.S ~rometLn
d-e s'.a:nrêter ici
pll1S cruel sn,crifice qui se puisse consentir ...
ct soo fiancé - l'une occupant longuement a.u retour.
Lorsque IWlo~se
- Ah 1 s'écria Pierre, maman Hélorse avait raila bonne àe Pierre, et Grenelet entralnant le bébé
- ont, sur l'ordre de MargucI'ite, volé son ms, son : comme nous allons être heureux, tous enMme de Folbert croyait que cette séparation serait semble 1
Mais nulle voix joyeuse ne fit écho lo sa joie,
éternelle, et eUe l'acceptait 1 Elle acceptait pour
Heureux, tOUiS troi.s l'Maient dans le )1'6sent aUl'enf.ant un avenir de travahl, une vic très humble,
plutOt que de le voir un ltJur suivre les exemples tant qu'ils le pouvaient Nl'e. Mais du pnssé trop
Ceae son père. Mais libre, Mal'guerite a. voulu repren- de c1éohir8lI1ts souvenirs se levaienl palU' au~.
penda~
, MaIlgluerit.e regardG,nt son ms , murmu.ra :
dre son Clis.
Par los soing de Mio Barrance, les biens de
- Du bonheur. " oui, il en est encOl'e... tant qUI)
.
M. Martet et de sa fille - ou, du moins, ce qu'en l'on peut 8limer 1
longtemps qu,e j'y pense... Al<Yrs peI'sonne ne se
qu ittera ... On sera tO'Us, tous ensemble ?
- Mais oui 1
- Embrasse-moi, l.i1'8l1Ilan. Hél .. non, maman tout
court.. . Je ne po urrai jamais dire autrement, voistu ... Faudra pas que mOlIl autre maman .s'en fAche 1
-
-
."....
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Le 15 Mai parai/ra:
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... l)alJl... tl
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La leçon d'Amour dans un Parc.
Ren6 BOYLESYE ....• ) Mndemoiselle Cloque,
Adolphe BRISSON ..... florise Bonllenr.
Véaus ou les deux Risques.
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LeS Demi·Pous.
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Paul DfROULlWB ..... Chants du Soldat.
Lucien DESCA YES .... Sous-OUs.
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Ferdinand FABRB ..... L'Abbé Tigrane.
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Vit de CbAteau.
Claude FERVAL ....... Ma Figure.
Ciel flouge.
Uon FRAPUl ......... L'lnslitutrlce de ProvlnGe.
Le Capitaine FracDiSc (lor vol.).
ThéophUc GAUTIER ... Le Côpitlline Fracasse (2. VOl.).
Itenée MaupcrlD.
E. cl J. de GONCOURT (jerminie LacertelU.
Sœur Philomène.
Gustave GUiCHES ..... Célesle Prudhomat.
le Cœur de Pierrette.
L:l Boune Galette.
Tolole.
GyP ................... La Fée.
Murnau.
Doudon.
La Meilleure Amie.
Myriam DARny ....... t, Divine Chaason.
Le~
TranslI !Il1otiques.
S(lu~enirs
du Ylcomte de Conr.
lllcl'e.
Monsieur de Courplère mari6,
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Abel HEltMANT ....... Le Sceptre.
Le Cnvaller Miserey,
Chronique du Cadet de Coutras.
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L'Heureux Ménage.
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de 1 Ac.'l.démle frn.nçaU!o. Lettres à Françoise.
I.e Domiao Jnune.
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L.l Princesse d'Erminge.
L: Scorpion.
M. et Mme Moloch.
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l'muse Bourgeoise.
Pierre ct Thérèse.
l'cmmes.
Lettres i Françoise JIUlrlée.
IDIBJOllues d'Amour.
Mlehol l'ROVINS ...... Commenl elles nOlis pronnent.
L: Professeur d'Amour.
Henri de R20NlEn,
)Le Bon l'Ialslr.
de l'Aoad6mio fra.nçaiBo./ Le Mariage de Minuit.
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1
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Les Maitres du roman populaire
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Arthème Fayard lance les Maîtres du Roman Populaire en 1914.<br /><a href="https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/exhibits/show/fondbastaire/les-maitres-du-roman-populair">En savoir plus sur les Maitres du roman populaire</a>
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La petite a deux sous
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Bouvet Marie-Louise
Publisher
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A. Fayard
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1914
Type
The nature or genre of the resource
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Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
Les maîtres du roman populaire ; 18
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Source
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BCU_Bastaire_Maitres_Roman_Populaire_C20696_1205592
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