1
100
60
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53243/BCU_Factums_G1503.pdf
9aad24efaa8885eca62418e5dea806ad
PDF Text
Text
EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D } Jurisconsultes
POUR
Sieur A n to in e VIDAL, Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs , et
V ID A L , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition
C
Le sieur
,
a t h e r i n e
contre
R E D O N C H A T , propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
ean
F rançois
,
ar ie
n n e
�EXPOSÉ DE F A IT S ,
En suite desquels est la Consultation de messieurs
B E R G I E R , B E I L L E - B E R G I E R et
A N D R A U D Jurisconsultes ;
POUR
Sieur A ntoine V I D A L , Expert-Géomètre et Notaire
public , en qualité de légitime administrateur de ses
enfans mineurs, et C a t h e r i n e VIDAL , sa fille
majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, com
mune de St.-Christophe, appelans et demandeurs
en opposition;
Le sieur
,,
CONTRE
,
,
R E D O N C H A T propriétaire
J
S A L V Y Notaire public, et M
- A
R E D O N C H A T son épouse intimés et défendeurs
en opposition.
ean
F rançois
,
arie
nn e
Martin Garcellon , propriétaire de deux domaines appelés
Tougouse et Blaval , transmit sa succession à Guillaume Garcellon, dit G uillen, marié à Marguerite D ufayct.
A
�CD
L e mariage desdits Guillaume Garcellon et Marguerite Dufayel
donna le jour à huit enfans :
Antoinette, qui fut mariée à Benoît Jam y , et desquels descen
dent les appélans ;
Martin , mort en 1 7 1 7 , et dont la postérité s’est éteinte;
Sim on, mariéà Agnès Ferluc, décédé en 1 7 1 6 , laissant quatre
enfans, l’cprésentés par AntoinetteBèrc, veuve Tabarier, et par
Marie Vidal , épouse de Martin Hébrard, qui 11e sont pas en
cause sur l ’appel ;
Pierre, décédé en 1 7 1 9 , et auquel on n’a pas connu de pos
térité ;
M arguerite, morte sans postérité ;
Catherine', morte fille en 1702;
Antoine, mort en 1735;
E t Jean , curé de St.-Projet , mort en 1721 ;
Tou s, à l’exception de Jean, curé de St.-Projet, répudièrent
çiux successions de leur père et aïeul. Jean Garcellon les accepta
sous bénéfice d’inventaire.
M artin, Simon el Pierre Garcellon, z .e , .e et 4 .' enfans de
Guillaume Garcellon et de Marguerite Dufayet étaient associés
dans un commerce: leur association avait existé avec Pierre
J fincher.
3
31
L e 4 septembre 1709 Blancher leur céda son fonds de com
merce , et dissout la société avec eux. Les frères Garcellon s’obli
gèrent de lui- payer une somme de 19,000 francs, et se char
gèrent d’ncquilter les dettes de la société.
Pour sûreté et acquittement du prix de la cession, les frères
Guiccllon subrogèrent Blancher aux hypothèques par eux ac
quises sur les successions de Martin et Guillaume Garcellon,
leur aïeul et père.
A u x termes de leur association , les survivans succédaient au
promim- déc'édé. Ils laissèrent beaucoup de dettes, el point d’iminrublo*.- I.our actif consistait dans le fondsde commerce et dans
les créances q u ’ils s’étaieut faites contre les successions de leur
�3
(
)
père et aïeul, et qu’ils avalent déclaré s’ élever à i i , d j 5 liv. S s.
Les enfans de Martin et Simon répudièrent aux trois succes
sions. L e sieur Blancher , leur créancier , lit nommer Pierre
Espinasse curateur aux hoiries vacantes. .
Ces enfans de Martin et de Simon Garcellon furent pourvus
d’un tuteur: ce fut Pierre Garcellon que l’on c r o i t être leur
grand-oncle.
L a succession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, ouverte
comme on l ’a vu en 1721 , le 21 septembre, fut dévolue à Antoi
nette Garcellon , femme J a m y , aux enfans de Simon Garcellon t
venant Jure suo , par représentation de leur p ère, et à Antoine ,
7 .' enfant, désigné dans la généalogie. Alors les enfans de M ar
tin n’existaient plus.
Antoinette Garcellon demanda le partage de la succession au
tuteur des enfans de Simon Garcellon et à Antoine G a r c e l l o n ,
dit cadet. Ceux-ci contestèrent sa demande , sur le fondement
qu’elle avail été f o r c l o s e .
Par sentence du
mai 1720, rendue au bailliage de Salers,
5
elle fut admise au partage; mais il ne fut pas fait.
Parurent les créanciers des successions de Martin , Simon et
Pierre Garcellon, qui réclamèrent leurs créances sur les domaines
de Tougouse et Blaval, hypothéqués aux sommes duesauxdites
successions, par celles de Martin et G u illau m e, aïeul et père.
Jean et Catherine Blancher, se disant héritiers bénéficiaires
de Pierre Blancher leur frère et oncle, formèrent demande contre
Antoine Garcellon, dit cadet, Pierre Garcellon tuteur des enfans
de Martin et Simon Garcellon, et Antoinette Garcellon, Benoît
Jamy son mari, au paiement de la somme de 19,000 fr. à eux
due en vertu de l ’acte de cession de commerce du 4 septembre
*709Une sentence du 12 mai 172Ï) ordonna que les Blancher corninuniqueraionl leurs titres de créances , et que les Garcellon et
J a m y , héritiers ab intestat de Jean Garcellon praire, qui était
héritier bcnc/iciaire de Martin et G uillen G a r te llo n , scs père
A 2
�et a ïe u l, communiqueraient
faits à Pierre Blanclier ;
U )
les quittances et états de paiemens
Ordonna que le sieur P ra d el, le curateur à l’hoirie desdits
M a rtin , Simon et Pierre Garcellon, et autres intéressés, seraient
appelés en particulier et mis en cause.
Par autre sentence du 19 juin 1728, rendue entre les mêmes
parties et Pierre Espinasse curateur aux hoiries vacantes , et les
créanciers connus desdites successions, il fut ordonné que tous
les meubles et effets délaissés par les Garcellon frères , au jour
de leurs décès, en quoi qu’ils consistent et puissent consister, et
par exprès l’effet de la subrogation du paiement de la somme de
19,000 fr. mentionnée au contrat du 4 septembre 1709, avec les
intérêts du jour de la demande formée contre Jean Garcellon
prêtre , en qualité d'héritier de Martin et G uillen Garcellon ,
èes père et a ïe u l, seront rapportés et mis en masse ; auquel rap
port seront tous détenteurs, dépositaires ou débiteurs contraints,
et notamment Antoine Garcellon, Antoinette Garcellon, femme
Li&
Jamy, etPierre Garcellon tuteur, à celui delà somme de 19000 fr.,
à laquelle ledit Jean Garcellon prêtre, en qua lité d'héritier de
ses père et aïeul avait été condamné.
Premier juillet 1733, sentence de la sénéchaussée d’Auvergne
sur l ’appel des deux précédentes, contre Antoine Garcellon, dit
ca d et, Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs de Martin
et Simon G arcellon, appelant d ’une part ; Jean Blancher et
Louise Blancher, sa nièce, héritiers de Pierre Blancher, inti
més, d’autre part;
E t lesditsBIancher, demandeurs en assistancede cause , d’une
part; et Benoît J a m y , en qualité de légitime administrateur de
scs en fans , et d’Antoinette Garcellon, Catherine Jamy , fille
dudit Beuoîtet de ladite Antoinette Garcellon , et Fiancois Doinal
son mari , défendeurs , d’autre part ;
Confirme les sentences de 1725 et 1728; cc faisant, condamne
1rs
appelons, en qua lité d'héritiers purs et simples de Jea n
Garcellon prêtre , icelu i héritier de M artin et G uillen Gar-
�J3
(5) •
cellon , personnellement pour leurs parts et portions , et hypo
thécairement pour le tout, à payer aux intimés les sommes dues
à P ierre, Simon et Martin G a rcello n , en vertu des titres de
créances, énoncés au contrat du 4 septembre I7°9» aux(l ue^s
Pierre B la n d ie ra été subrogé.
Déclare la sentence commune à Benoît et Catherine Jamy ,
dans les qualités dans lesquelles ils sont pris ; les condamne
personnellement et hypothécairement au paiement des mêmes
sommes.
Déclare affectés et hypothéqués au, paiement d’icelles, les
biens immeubles des successions de Martin et Guillaume Gar
cellon , permet de les faire saisir et vendre en la manière or
dinaire.
On rapporte ici ces faits pour établir que Jean Garcellon,
curé de S a in t-P ro jet, n’était pas héritier de Martin , Simon et
Pierre Garcellon a^ant laissé des e n f a n s , et dont les successions
avaient d ’a i l l e u r s été répudiées ; et pour justifier l ’appel d’un
jugement qui condamne les appelans , en qualité d’héritiers de
Jean Garcellon , au paiement de la dette de Simon et Pierre
Garcellon.
Ces faits Rétablis par les pièces à l ’a p p u i, écarteront les énon
ciations vagues et furtives insérées dans des actes de procédures
postérieures , et à la faveur desquelles les intimés veulent sou
tenir que Jean Garcellon était héritier, et a été déclaré héritier
de Martin , Simon et Pierre Garcellon.
L es faits qui suivent, sont propres à la cause.
En vertu de la sentence du i . er juillet i j
, les Blancher firent
33
saisir réellement les domaines de Tougouze et B la v a l, provenus
de Martin et ensuite de Guillaume G arcellon, par procès-verbal
du 26 mai xy35.
L a saisie fut suivie jusqu’à la sentence d’attestation, cepen
dant il ne parait pas qu’il y ait eu de bail judiciaire dépouillant
les débiteurs , et mettant les biens sous la main du ballistre judi
ciaire , jouissant pour les créanciers saisissans et opposans.
A3
d
�<
C6 )
Un arrêt du 11 mars 1786, rendu au parlement de Paris, entre
les s i e u r s Bertrandy, successeurs dqs Blnncher, d’une p a r t, Gas
pard Delprat , mari d’Antoinette Garcellon , l ’une des filles de
Simon Garcellon , Pierre Hébrard , Catherine Domal son épouse,
Marie Domal, Joseph Fiiiol son mari , d’autre part , en con-.
damnant de nouveau lesdits Hébrard et Domal , au paiement de
la somme de 19,000 francs, et intérêts, ordonna qu’il serait fait
déduction sur lesdites condamnations, entre antres articles , de
la somme de 31,924 francs , valeur des jouissances perçues par.
les enfans Bertrandy et leurs auteurs, depuis et compris xy ,
35
date de la saisie réelle, jusques et compris 177ÎÎ. En sorte que
cet arrêt, rendu en ce point sur les offres de Bertrandv , décide
qu’il n’y a point eu de bail judiciaire des domaines saisis , et
q u e les Bfanchor et Bertrandy en ont successivement jo u i, dès
l ’iuslant du procès-verbal de saisie réelle jusqu’en 1776. Cette
remarque est essentielle; elle fera un moyen de la cause.
• Dans la suife , des jugemens de 1793 et 2 frimaire an 6 , ont
ordonné la radiation de la saisie réelle , ét renvoyé en possession
des biens saisis, les successeurs des héritiers de Jean Garcellon,
curé de St.-Projet.
E n cet élal de choses , le sieur Jean S a lv y , Marie Pvedonchat
son épouse, Jacques, A n n e , Jeanne-Françoise et Marie Pvedon
chat, intimés, sortirent de la poussière une sentence incompé-,
tente et injuste, rendue à la juridiction consulaire deClermont,
par défaut, en 1721 , contre Jean Garcellon , curé de St.-Projet,
peu de jours avant son décès, et dont 011 n’avait pas osé suivre
l’exécution.
Celte sentence , obtenue par Guillaume Kedonchat, aïeul des
intimés , condamne consulairenicnl cl par corps , Jean Garc'dlon , curé, en qualité d’héritier en partie de Pierre Garcellon »
ion IVère, au paiement de- la somme de ,4.% liv. s. ; elle est
3
3
au si rendue contre Antoine Garcellon cadet , et Pierre Gnrr»*!!oii, tuteur des enfans de Martin et Simon Garcellon , aus-ii
héritier* eu partie de Pierre Garcellon leur ouclc, et do Martiu
�V ?
.
)
et Simon leurs pères. Nous remarquons que chacun est con
damné personnellement pour sa part seulement, et qu’ainsi la
(7
dette fut divisée. Autre remarque, le tuteur fut aussi condamne
à aller en prison pour ses pupilles.
Guillaume Redoncliat fit signifier cette sentence suivant que
l’atleste un original d’exploit rapporté le 17 mai 1721 ; et il faut
croire que les parties condamnées 11’en eurent pas connaissance.
Après trente-trois ans de l ’obtention de cette honteuse sentence,
nulle par incompétence , absurde par les condamnations par
corps prononcées contre le curé de St.-P rojet , pour la dette
d ’autrui et contre un tuteur; injuste encore dans la condamna
t i o n personnelle, et en qualité d’ héritier de Pierre, Martin et
Simon Gnrcellon, p r o n o n c é e contre les non-successeurs. Jacques
3
'lledonchat né en 1706 , lit le o juillet 1764, une opposition
irrégulière à la saisie réelle faite à la requête de défunt Jean
B la n ch er, d e s biens i m m e u b l e s d e s s u c c e s s i o n s répudiées de
M artin, S i m o n et P i e r r e G a r c e l l o n , sis ès villages de Tougouze
et Blaval s u r le curateur , à ladite succession.
Nous disons cette opposition irrégulière, parce qu’elle ne frappe
pas sur la saisie réelle faite sur Benoît J a m y , François Domal
son gendre, Antoine et Pierre Garcellon , par procès-verbal du
26 mai 17.35 ; et que la saisie réelle non datée , des biens des
successions répudiées de Martin , Simon et Pierre Garcellon ,
snr le curateur auxdites hoiries , est étrangère aux appelans et à
celle des domaines de Tougouze et Blaval. L ’on établira dans
la discussion la nécessité d’ une opposition bien positive, datée,
et bien précisée.
Il n’y eut pas de notification de cette opposition sourde.
Antoine Raoux, Jean S alvy, Marie, Anne lledonchat et autres,
l’ont réitérée plus régulièrement au mois de décembre 1783.
En 1787 , les Salvy et lledonchat ont fait assigner M argue
rite Garcelon fille , Pierre lLcbrnrd, veu f de'Catherine Domal,
Antoine V id a l, appelant, et Marie llébrard son épouse , Joseph
J i l i o l , Marie Domal son épouse, Gaspard D e lp ra t, en qualité
�C8 )
<le père et légitime administrateur de Joseph Delprat , fils et
héritier d'Antoinette Garcellon, pour voir déclarer exécutoire
co n ti’eux les billets souscrits par Simon et Pierre Garcellon , et
la sentence consulaire de 1721 , rendue contre Jean Garcellon et
autres, et pour être, en conséquence, condamnés, même soli
dairement, à payer en deniers ou quittances la somme principale
de
3,456 liv. 3 s. avec les intérêts depuis l’opposition formée aux
scellés des effets desdits feus Garcellon.
A la dénomination des parties assignées, l’exploit n’énonce pas
la qualité dans laquelle ils sont pris,et on ne la trouve pas claire
ment dans le corps de l’exploit. Il y est dit : « Pour en qualité,
« tant de leur chef que de celui de leurs auteurs et prédécesseurs,
« même ledit sieur Hébrard d’usufruetuaire des biens de défunte
« d em oiselle........... Domal son épouse , d’héritiers et jouissant
« les biens des successions desdits défunts sieurs Garcellon ;
« v o i r , etc. »
Cette -assignation a été suivie d’une sentencr par défaut,
faute de comparaître , en date du i . er juin 1787, adjudicative
de la demande ; la sentence paraît avoir été signifiée le 3 août de
la même année.
Airectant toujours par principes héréditaires de surprendre
des condamnations, notifiées sous la cheminée, et de laisser
écouler de longs délais avant de faire connaître les jugemens, afin
d’acquérir la force delà chose ju g é e , les intimés ont demeuré dans
l’inaction jusqu’au 29 nivôse an 1 2 , époque à laquelle ils ont
fait signifier le jugement de 1787 , avec commandement de
payer. L a signification a été suivie d ’une saisie-arrêt, qui a
empêché le sieur Vidal de toucher une somme de ,000 francs,
3
de hquelle il est en souffrance.
V i d a l , en sa qualité de légitime administrateur de ses enfans
mineurs, et Catherine Vidal sa fille majeure, sont appelans de
t>c jugement , et r.'est de cet appel qu’il s’agit.
Mous ferons remarquer q u ’Anloinette fierc, veuve Tabarier,
Marie Vidal et Antoine ilélnard son m a ri, 11e sont pas appe
la is
�'»>
.
*
lans du jugement qui les frappe cependant ; qne la crcance des
intimés , supposée légitime , et exigible des héritiers des débi
teurs originaires, serait due en entier par lesdits Berc et V i d a l ,
comme descendans de Simon Garcellon qui avait souscrit les
billets qui forment les titres primitifs de créances; qui aussi ont
fait assigner les intimés pour justifier de leurs titres de créances,
et qui seraient garans des appelans , s’ils supportaient quelques
condamnations.
Qu’ainsi c’est purement par hum eur, que les intimés se sont
adressés aux appelans, et par obstination qu’ils résistent à leurs
défenses.
B
�CONSULTATION.
Ï^ E
C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a examiné avec la plus
scrupuleuse attention toutes les pièces, procédures, sentences,
arrêts et jugemens relatifs à l’aiFaire pendante à la cour d’appel
de R i o m , entre le sieur Antoine V idal , légitime administra
teur de ses enfans, héritiers de feue Marie Hébrard leur mère,
et Marie V i d a l , m ajeure, sa fille aînée, appelans d’un jugement
rendu au ci-devant bailliage de Salers , le i . er juin 1 7 8 7 , et
les héritiers R edo n chat, intimés,
E s t D’a v is , i.° que l’appel de la sentence p ar défa u t du i .e*
juin i 'j ñ j est receivable, quoiqu’il n’ait été interjeté qu?après les
dix ans, à compter de l’exploit de signification qu’on en rapporte,
principalement, parce que les condamnations qu’il prononce tom
bent sur des m ineurs, et que l’appel n été interjeté avant qu’il
y eût dix ans de majorité d’écoulés ;
2 .0
Que cet appel est fondé parce qu’il adjuge une créance
illégitime dans le principe, et d’ailleurs éteinte par une double
prescription, avant la demande.
Justifions ces deux propositions.
PREMIÈRE P R O P O S I T I O N .
L 'a p p e l e s t rcccv a b le.
Quel est le délai dans lequel était recevablc l’appel des jugejnens rendus par les tribunaux de l’ancien régime;, lorsqu’ils
étaient susceptibles d’etre attaqués parcelle voie? il fallait dis
tinguer: après trois ans écoulés depuis la signification , légale
ment faite, celui qui avait obtenu la sentence pouvait sommer
le condamné d’en interjeter ap p el, et s’il n’y avait pas d’appel.
�dans les six mois à compter de cette sommation , il n’était plus
recevable. (A rt. 1 2 , tit. 27 de l ’ordonnance de 1667).
Si le condamné venait à mourir dans les trois ans, ses héri
tiers , majeurs, avaient une année de plus de délai , et six mois
encore après la nouvelle sommation qui lui était faite d’appeler.
( A r t. i . Ibid. )
A défaut des sommations ci-dessus , les sentences n’avaient
force de chose jugée qu’après dix ans , à compter du jour de
leur signification. (A rt. 17 ).
5
Ajoutons que ces fins de non. recevoir n’avaient point lieu
contre les mineurs , pendant le tems de leur minorité, et jusqu’à
ce qu’ils eussent vingt-cinq ans accomplis, terme après lequel
les délais commençaient seulem ent à courir. ( A rt. 16 ).
Cette exception, en faveur des mineurs , eût été suppléée de
d ro it, quand elle n’aurait pas été littéralement écrite dans l ’or
donnance , car il est de règle générale , que les p r e s c r i p t i o n s de
toute espèce, sont suspendues pendant la minorité, a moins qu’il
n’y ait dans la loi une disposition contraire pour quelques cas
particuliers.
Appliquons ces règles à l'affaire présente.
L e jugement du 1 .« juin 1787 ne fut point rendu contre des
mineurs; mais Marie Hébrard , épouse du sieur V i d a l , l’une des
parties condamnées , mourut en 1789 , deux ans après le juge
ment , et laissa trois enfans en bas âge : le plus âgé des trois était
Catherine V idal qui n’avait alors que sept à huit ans; les autres
deux sont encore mineurs; la prescription a donc dormi pendant
tout cet intervalle de tems , et conséquemment elle était loin
d’ôtre accom plie, lorsque l’appel du 14 pluviôse an 12 fut in
terjeté.
Marie Domal , autre partie condamnée par le même jugemriit du 1 .cr juin 1787 , céda scs droits sur les biens de la famille
(-»nrcellon au sieur Vidal qui n’accepta la cession qu’au nom de
scs ciilaus mineurs, en qualité do tuteur légal et administrateur
légitime de leur personne et biens , par acte du dix-sept juillet
U 2
�(
12
)
i?9 7 ( 0 - A c^,te ^l)ôrPie >lesdix-ans accordés à la cédante, pouf
appeler de la sentence de 1787, n’étaient pas encore complète
ment révolus ; car ce jugement n’avait été signifié que le 3 août
17B7, conséquemment le 17 juillet 1797, il n’y avait encore que
neuf’ ans onze mois quatorze jours d’utiles pour la prescription
d’écoulés. Alors elle fut suspendue par la minorité des cédataires (2 ), d’où il suit que l ’appel est venu dans un teins utile ,
aussi bien en ce qui concerne Marie D o m a l, qu’en ce qui con
cerne Marie Hébrard , épouse du sieur V id al , représentés l’un
et l ’imtre par les enfans V idal.
Cependant il est possible que Catherine V id al ait tardé plus'
de seize jours après sa majorité à former son appel ; alors en
joignant les neuf ans onze mois quatorze jours qui avaient couru
sur la tète de Marie D o m a l , avant qu’elle cédât ses droits, au
tems intermédiaire entre le jour de la majorité de Catherine
V id a l et l’acte d’appel, on pourrait peut-être trouver dix années
utiles d’écoulées contr’e lle , et conséquemment la prescription
aurait été accomplie pour le tiers qu’elle amendait dans la ces
sion de Marie Domal ; mais , dans ce cas , la suspension de la
prescription pour tous droits corporels el incorporels, pronon
cée par la loi du 20 août 1792 , viendrait à son secours, et la
mettrait encore à l’abri de la lin de non recevoir. Cette l o i , tit. 3,
art. 2, porte en effet : que « L a prescription pour les droits cor« porels et incorporels appartenant à des particuliers, demeure
«
«
*
«
suspendue depuis le 2 novembre 17ÎÎ9 , jusqu’au 21 novembre 1794 , sans qu’elle puisse être alléguée pour aucune
partie du teins qui se sera écoulé pendant le cours desdites
cinq aimées». O r , si l’on retranche ces cinq années des dix
années, et quelques jours seulement de majorité, qui peuvent
5
(1) 28 Mcîiiilor an , voir le jugement du tribunal civil, du 2 frimaire
011 6 , au v.° du premier feuillet.
(2) Bomjon, Droit commun de la France, tom. 2, p. 573 j lien ris, Louet
el lhüdtauj Duplessis, etc.
�avoir couru , soit sur la tête de Marie Doraal cédante, soit sur
celle de Catherine V id a l cédataire, il ne restera guère que la
moitié du teins nécessaire pour la prescription du droit d’appeler.
On dira peut-être que l ’article cité de la loi du 20 août 1792 >
doit être sainement entendu ; que la suspension de la prescrip
tion qu’il prononce, n’est pas générale et indéfinie ; que le légis
lateur n’avait en vue d'affranchir de prescription que les rentes
foncières, constituées, et autres redevances quelconques, etqu’elle
est sans application aux a u t r e s actions. Sans prétendre que la loi
dont il s’agit, s’applique à toutes sortes de prescription indistinc
tement , on lest en droit de soutenir que l’on n’en abuse p a s ,
lorsqu’on l’invoque uniquement pour soutenir que l’appel d’un
jugement par défaut , inconnu de l ’appelante , serait venu à
tems, quand il aurait été .interjeté quelques jours, ou quelques
mois après les 10 ans de majorité, à la suite d’une révolution
pendant laquelle l’état de l’ordre judiciaire et des tribunaux a
subi tant de variations. S ’il est u n e m a t i è r e , en e f f e t , ou la pres
cription ait dû être suspendue pendant les troubles, l’agitation et
les bouleversemens de la révolution , c’est bien certainement la
prescription du droit d'appeler des jugem enspardéfaut, faute de
comparoir, rendus avant la révolution, soit à cause de la per
suasion où l’on était généralement que la faculté d’appeler de
cette classe de jugemens , durait o a n s , soit à raison de l’incer
titude où l’on était jeté sur la manière de procéder en cette m a
3
tière, par les variations continuelles des tribunaux et de l ’ordre
judiciaire.
N ’hésitons donc pas à conclure de tout ceci que l ’appel du sieur
V id a l au nom de ses enfans m ineurs, tant du chef de Marie
Ilébrard leur mère que du chef de Marie Domal femme Filiol ,
leur grande tante, et celui de Catherine V id a l sa fille ainée du
même chef, ont été formés à tems, e t s o n t rccevables sacs diüicuhe.
Voyons maintenant s’ils sont fondés.
�Preuves de la seconde proposition.
L ’appel du sieur V i d a l , au nom de scs enfnns mineurs et da
Catherine V idal sa fille a in é e , est bien fondé.
L a sentence rendue, le i . er juin 1787, nu bailliage de Salers,
dont l’appel est à ju g er, fu t prononcée ,
i.° Contre Pierre Hébrard, veu f de Catherine D om al, en qua
lité d’usufruitier de ses biens.
Antoine V i d a l , en qualité de mari de Marie Hébrard, et son
épouse héritière de Catherine Domal sa mère;
Joseph Filiol, en qualité de mari de Marie D om al, et contre
son épouse;
Tous représentés maintenant par les appelant.
2.0
Contre Gaspard Delprat, veuf d’Antoinette Garcellon , et
contre Marguerite Garcellon , sa belle sœur fille majeure, repré
senté par les héritiers D elprat, par Martin Hébrard , Marie V idal
son épouse, Antoinette I erc veuve de Joseph T a b a rier, qui ne
sont point appelons.
Son dispositif est ainsi conçu : « Nous avons contre les dé« faillans donné défaut, et pour le profit, faute par V idal et
3
« Filiol d ’avoir autorisé leurs femmes , avons ¡celles autorisées
«
«
«
«
«
k
«
<r
«
en justice............... D éclarons exécu to ire, contre lesdits Garcellon , Hébrard, Domal et Delprat, en qualité, tant de leur
chef que de celui de leurs ailleurs, même ledit Hébrard , d ’usufruitiers des biens de ladite défunte Catherine Domal son
épouse, d'héritier et jouissant lesbiensdesdits sieurs Garcellon,
tant lesdits billets, exploits , sentence et oppositions, en date
des 20 septembre et 16 novembre 1716, 28 et o août 1719 ,
2 mai 1720 , 11 mars et 17 mai 17 2 1, o juillet 1754, et z
décembre 17^3.
3
3
En conséquence, condamnons les défaillant, èsdits noms et
qualités, chacun personnellement pour la part c l portion dont
�5
*¿5
( i )
ils sont héritiers des défunts G a rcello n , et hypothécairement
pour le to u t, à payer aux demandeurs, en deniers ou quittances
valables , la somme principale de 3 , 4 0 6 livres, avec les intérêts
d’icelle depuis l’opposition formée aux scellés apposés sur les
efiels desdits feus sieurs Garcellon, et en tous frais et dépens; le
tout adjugéparlasentencedudit jour n mars 1 7 2 1, ainsi qu’aux
frais de mise d’exécution ; condamnons en outre les défaillans
aux dépens de la présente instance ;
Disons enfin que lesdits Y id a l et Filiol seront tenus d’indiquer
des biens de leurs fem mes, etc.
Les appelans ont à se plaindre de ce jugement sous deux
points de vue ;
E n ■premier lie u , parce qu’il fait revivre, en ce qui concerne
les appelans, une vieille créance dont l’origine était illégitime ,
et qui avait été éteinte depuis long-tems par la prescription ,
lorsque le tribunal de Salers en ordonna le paiement.
E n second lieu , parce qu’il condamne hypothécairement leurs
auteurs , au paiement de la créance entière.
Ces deux griefs exigent d ’être développés séparément pour
éviter la confusion qui est Pécueil le plus à craindre dans cette
affaire extrêmement compliquée.
P R E M I E R GR I E F .
Prescription.
L e Dernier des titres de créance, produit par les intimés lors
du jugement du i . er juin 1787 , est une sentence obtenue par
Guillaume lle d o n clm t, leur a u te u r, contre Jean G arcellon,
prêtre, curé de Si. P ro jet, Antoine Garcellon son frère, comme
héiit iers, en partie, de Pierre Garcellon leur défunt frère , et
encore contre autre Pierre Garcellon , tuteur des enfans mineurs
de Martin et de Simon Garcellon , héritiers, en partie, de Pierre
premier, leur o n cle, ainsi que de Martin et de Simon , leur
père, le 11 mars 1 7 2 1 , signifiée à domicile, le 17 mai suivant.
sè
�( ,ï 6 )
Depuis cette éqoque jusqu’à la demande en déclaration de ce
jugement exécutoire, formée par les intimés, le 2 mai 1787 ,
on trouve un intervalle de tems de 66 ans. Les intimés prétendent
(m a ïs sans le justifier), que Guillaume Redonchat mourut en
1720; qu’il laissa Jacques Redonchat son fils mineur, et que la
prescription dormit jusqu’en 17 3 1, époque à laquelle ce fils at
teignit sa majorité. Ce fait n’est pas établi ; mais en le supposant
vrai, et quand il ne faudrait partir, pour compter la prescription,
que de 1781 , il resterait toujours , de cette dernière époque à
56
l’année 1787, époque de la nouvelle demande,
ans, conséquemment un intervalle presque double du tems nécessaire pour
acquérir la libération de la créance dont il s’agit, dans une cou
tume comme celle d’A u vergn e, où tous droits et actions se pres
crivaient par le laps et espace de 00 ans continuels et accomplis,
d ’aprcs l’article II, titre 17 de la coutume. Les intimés essayent
d’écarter ce moyen tranchant; mais y réussiront-ils? On va en
juger par la discussion des objections sur lesquelles ils fondent
leur espoir.
P r e m iè r e o b je c tio n con tre ta p rescrip tio n .
L e s biens de la famille Garcellon furent mis en saisie réelle,
en l’année 1735, à la requête d’un sieur Bertrandy , créancier,
et les biens saisis furent administrés jusqu’en 1786 par le com
missaire aux saisies réelles, qui jouit au nom de tous les créan
ciers du saisi, et qui par conséquent conserva les droits de tous.
De 1721 îi 1735 il 11’y aurait que 143ns d’utiles, quand même
011 ne défalquerait pas le teins de la minorité de Jacques RedonL-hat. La prescription a dormi pendant la durée de la saisie réelle
jusqu’en 1786. D e cette dernière époque a la demande sur la
quelle es» intervenu le jugement de 1787, dont ¡1 y a appel ,011
11e trouve p is deux mis; d’où il suit que c’est une illusion de mettre
quelque confiance daus la prescription de la créance.
Réponse.
�( «7 )
Réponse.
'
&
C ’est pour la première fois qu’on a prétendu que la saisie réelle
des biens du débiteur interrompt la prescription, n o n seulement
en faveur du créancier saisissant, ce qui n’est pas douteux, mais
encore à l’égard de tons les créanciers indistinctement, du jour
de sa date, ou si l’on v e u t, de sa notification au débiteur saisi.
On a toujours pensé et avec raison,
i°. Que la prescription était interrompue en cas de saisie réelle,
A l’égard du saisissant, par la simple saisie notifiée, et du jour
de la notification ;
. A l’égard des créanciers opposans, du jour de leurs opposi
tions qui leur rendent l’effet de la saisie réelle commun.
2°. Que le cours de la prescription reste suspendu, tant a l égard
du poursuivant, qu’à l’égard des créanciers opposans , pendant
tout le tems qu’il y a des baux judiciaires, par la raison que le com
missaire aux saisies réelles jouit au nom de tous les créanciers,
de l’immeuble saisi q u i est leur gage, et dont les fruits ^doivent
se distribuer, comme le prix de la vente, par ordre d’hypothèque.
Mais la jurisprudence n’a jamais donné à la saisie réelle l’effet
d’interrompre la prescription en faveur des créanciers non oppo
sans , parce que jusqu’à leur opposition ils sont étrangers à la
poursuite; elle est à leur égard res inier alios acta\ et au lieu de
conserver leurs droits sur l’im meuble, le résultat de la vente par
décret qui laterinine, devaitêtredepurgerleurhypothèque. En un
mot la saisie réelle seule n’a jamais été unepoursuite utile, en aucun
sens, aux créanciers qui négligeaient d’y prendre part, par une
oppositiou régulière. Les intimés doivent donc renoncer à l’es
poir qu’ils paraissent avoir conçu, de faire considérer la saisie
réelle de iy35 comme un acte interruptif par lui-mCme , et du
jour de sa date , de la prescription de leur créance.
Seconde objection contre La prescription.
' l i é bien ! soit : il fallait une opposition de la part de nos auteurs
G
'
i
�-* \ »
( i8 )
à la saisie réelle, avant l’accomplissement de la prescription de
leur créance, pour que cette saisie réelle conservât leur droit;
mais cette formalité conservatrice ne fut pas négligée, puisque
nous rapportons l ’opposition qu’ils formèrent à la saisie réelle
des domaines de Tougouse et de B la v a l, le o juillet 1754. Notre
créance n’était point encore éteinte, à cette époque, par la pres
cription , parce qu’elle avait, été suspendue par le décès de
■
3
Guillaume R ed o u ch at, créancier originaire, en 1 7 2 3 , et la
minorité de Jacques, son fils, jusqu’en 1731 : l’interruption qui
s’opéra alors effaça tous les tems antérieurs. Depuis 1754 jusqu’à
la radiation de la saisie réelle, elle a resté suspendue : nouvelle
interruption en 1783, par une seconde opposition, et en 1787,
par la demande suivie du jugement de cette date. A i n s i , point
de prescription; il n’y en a pas même l’apparence.
Réponse.
L e s intimés placent la mort de Guillaume Redonchat, qui
avait obtenu la sentence de 17.21 , au 27 décembre 1723 : c’est
l i n fait à vérifier. M ais, supposons qu’il soit e x a c t , la suspension
de la p r e s c r i p t i o n jusqu’à, la majorité de son fils, en 1781, en
sera la conséquence, il est vrai, et il en résultera qu’effectivement
les trente années nécessaires pour prescrire leur créance n’étaient
pas révolues lors de l’opposition formée le o juillet 1754. Mais
3
que gagneront les intimés à celle découverte, si l’opposition du
o juillet, dans laquelle ils placent toute leur confiance , 11’a
aucun rapport à la saisie réelle de 1735, à laquelle on voudrait
l’appliquer aujourd’h u i, pour mettre leur créance à l ’abri de la
prescription? Rien. Une opposition étrangère à la saisie réelle à
laquelle 011 voudrait la rattacher, se rangera nécessairement dans
la classe des chiffons inutiles. O r , ce fait que l’opposition de 1754
ne s’appliquait point à la saisie réelle de 1735, se démontre par
3
la simple lecture de la pièce : il en fut signifié copie en tête do
l’assignation pour comparaître au bailliage de Sulcvs, le 2 mai
�*9
(
) >
Ï7S7. Et que voit-on dans cet acte d’opposition? Jacques Hedonç h a t, fils et héritier de G uillaum e, comparaître au greffe du
bailliage de Salers, et déclarer quoi? q u 'il s'oppose à la saisie
réelle des biens meubles des successions répudiées de Martin ,
Simon et Pierre Garcellon , sis ès pillages de Tougouse et
B la v a l, sur le c u r a t e u r auxdites successions, à la requête de
fe u Jean B lan cher; à ce que sur le p rix qui proviendra des
dits biens ledit R edonchat soit pa yé de la somme de
liv.
en principal, portée par sentence de la ju rid ictio n consulaire
3436
de C lerm on t, du 11 mars 1721.
i°. L a saisie réelle du 26 mars 1785-n’avait été faite, ni sur
les biens des successions répudiées de M artin, Simon et Pierre
Garcellon, ni sur le curateur auxdites successions ; elle l’avait,
été sur B en o ît J a m y , et François D o m a l, son gen d re, co
dernier administrateur légitim e de ses enfans et de défunte
¿(Lnne J a m y , iceux héritiers de ladite A nne Jamy , leur mere,
et d’Antoinette G a r c e l l o n , leur a ï e u l e , qui étaient héritières en
partie de Jean G arcellon, curé de Saint-Projet ; sur Antoine
Garcellon, autre héritier en partie de Jean Garcellon, prêtre j
et sur Pierre Garcellon, tuteur des enfans de défunts Martin et
Simon Garcellon, lesquels étaient également héritiers en partie,
de leur propre chef, du même Jean Garcellon, prêtre, décédé le
31 septembre 1 7 2 1 , conséquemment après ses trois frères ,
( Simon, décédé le 26 septembre 1716 ; Martin, mort le i jan^
vier 17 x7, et Pierre, mort le 14 septembre 17x9. )
5
2°. Les biens saisis n’étaient pas ceux des successions répu
diées de Simqn, Martin et Pierre Garcellon,mais deux domaines,
l ’un appelé Tougouse, et l’autre appelé Blaval, provenus de la
Buccession de Jean Garcellon, curé de St.-Projet, et auparavant
de celles de Guillaume, ou Guillen Garcellon, débiteur de Blanch&r, saisissant.
3 .°
Enfin elle ne fut pas faite par un créancier des successions
répudiées de Simon, Martin et Pierre Garcellon frères, associés
pourle commerce; elle fut faite au contraire en vertudes créances
�y
\
que ces trois frères avaient cédées à Blancher, parlraitd du 8 no
vembre 1709 , sur les domaines de Tougouse et de B la v a l, pro
venus des successions de Martin i . er et de Guillen Garcelion ,
auxquelles ]es cédans avaient répudié, et qui avaient été recueillis
par Jean Garcelion prêtre (1).
Il n ’y a donc r i e n decominun entre la saisie réelle des domaines
de Tougouse et de Blaval par procès-verbal du 26 mars 178^ ,
dont les appelans ont fait prononcer la radiation, et la prétendue
saisie réelle faite sur un curateur aux successions répudiées des
frères Garcelion", à laquelle Jacques Redonchat forma opposi
tion en 1764.
On ne trouve entre ces deux saisies jéelles, l’une très-certaine,
et l’autre peut-être chimérique, ni identité de personnes, ni
identité de biens saisis. L a diversité des personnes est évidente;
la diversité des biens ne l ’est guère moins; car l’opposition porte
sur la saisie re'elle de biens que l’on désigne comme des héritages
épars et détachés, qui appartenaient aux successions répudiées
des frères Garcelion , marchands-associés dans les territoires des
villages de Tougouse et de Blaval ,au lieu que la saisie réelle de
1 7 3 5 , frappait sur deux corps de dom aine, provenant de la
s u c c e s s i o n de Jean Garcelion prêtre ; et il est bon de remarquer
que l’opposition de Jacques Redonchat se réfère si peu à la saisie
des domaines de Tougouse et de B la v a l, du 26 mars 1735, qu’elle
n’y est même pas énonce'e par sa date.
Voilà donc une opposition lout-à-fait étrangère , soit aux au
teurs des appelans qui n’y sont aucunement dénommés , soit i\
la saisie réelle faite sur eux et sur les autres co-propriétaires des
domaines de Tougouse et Blaval. Or , comment une opposition
qui 11’a de rapport ni avec les auteurs des appelans, ni avec
( 1 ) T o u s c e s faits sont c o n s i g n a s d a n s l e j u g e m e n t du t r i b un a l c i vil , d u
2 f r i ma i r e a n 6 ,
cluituséc
de
r e n d u a v e n les i n t i m é s ; et d a n s la s e n t e n c e d e la s é n é -
R iom ,
du
Gma i
p o u r s u i v a n t la s ai s i e r l c l l c .
177
6, r e n d u e
avec B e it r a n d y , créancier
�(• 21 )
leurs biens., et qui ne leur fut point notifiée dans le tems, paur-^
xait-elle avoir interrompu la prescription qui courait en leur fa
veur? Tout le inonde ne sait-il pas que « /’interruption civile
« n’opère pas régulièrement d’une personne à l’autre, ni d une
« obligation ou d’une action à une autre »,com m e le dit Dunod,
traité des prescriptions, page 61 ?
Concluons que la prescription a continué de courir après l’op
position faite sur un curateur qui n’avait aucun rapport avec
les auteurs des appelans , et qui ne les représentait à aucun
titre , comme auparavant ; et par une suite-qu’elle était acquise
depuis long-tems, lorsque les intimés voulurent rectifier leur op
position de 17^4 par une seconde mieux libellée et mieux ap
pliquée , qu’ils firent en 1783, et à plus forte raison, lorsqu’ils
formèrent en 1787 la demande accueillie par le jugement dont
est appel.
U11 moyen si décisiT dispense de faire remarquer d’ailleurs,
que l’opposition de 1754, e û t elle é t é a p p l i q u é e à la saisie réelle
de 1735 , et f a i t e r é e l l e m e n t s u r les auteurs des appelans, elle
n’aurait pas été plus efficace; et pourquoi ? parce que l’opposi
tion faite au greffe sans être dénoncée au saisi, n’interrompt la
prescription que dans le seul cas où la saisie réelle étant suivie
de baux judiciaires, constamment soutenus , par l’effet desquels
tous les opposans jouissent des fruits du gage commun de leurs
créances, en attendant que la vente judiciaire en soit consom
m ée, l’action de chaque créancier est conservée entière par cette
jouissance du commissaire , au nom de tous. Or , la saisie réelle
de 1735 , au lieu d’être suivie de baux judiciaires réguliers et
soutenus, 11e servit que de prétexte au sieur Blaneher saisissant,
et
après lui au sieur Bertrandy son héritier, pour s’emparer,
d’autorité, des biens saisis, et en jouir pignorativement ; si
bien que par arrêts de la Cour de parlement, des années 1779»
Ï786 et 178 7, les héritiers Eertrandy furent condamnés à ren
dre compte des jouissances de ces biens , à dire d’experts, de
puis et compris 1735 , jusques et compris 1775 , et à faire l ’im
�putation de ces jouissances sur leur créance. Ce n’est que posté
rieurement à 1777 , qu’il y eut des baux judiciaires réguliers et
sérieux. De là il suit que Blancher et Bertrandy ne jouirent de
1735 à 1775 des biens saisis que pour eux seuls exclusivement ',
çt non pour tous les créanciers ; conséquemment qu’ils ne con
servèrent à l’abri de la prescription, que leur créance seule.
M o tif de plus de déclarer celle des intimés prescrite , dans l'in
tervalle de 1721 à 1783, époque où ils firent, mais trop tard,
une opposition régulière sur la saisie réelle de 1735, accompa
gnée alors de baux judiciaires subsistans.
L e premier grief desappelans contre le jugement dont ils se
plaignent, résultant de ce qu’il a fait revivre contr’eux une
créance éteinte par la prescription , est donc invinciblement
justifié ; et Pinfirmation du jugement est d?autant plus inévi
table sous cc point de vue, que la prescription qui est ■ordinaire
ment un moyen odieux, se trouve une exception favorable dans
l ’çspèce , aliimdu que la prescription, dont les appelans invo
quent le secours , n’a éteint qu’une créance originairement illé
gitime , que Guillaume Rcaoncbal s’était fait adjuger en i j 2 i r
par des juges incompétens, contre de p r é t e n d u s h é r i t i e r s de
Pierre , Martin et Simon Garcellon, ses débiteurs, dont les suc
cessions étaient répudiées, ainsi que le prouve l’opposition fai té
par Jacques R e d o n ch a t, sou lils, en 1754, que nous venons
d ’analyser. L a surprise avait versé sur les auteurs des appelans
une dette qui leur était étrangère. L a prescription les en a libé
rés. Ce résultat n’est que la réparation d’une injustice; et c’est
un motif bien puissant pour que la Cour d ’appel s’empresse
d’accuLillir avec autant de laveur ce moyen de libération ,
qu’elle l'accueille avec répugnance , dans les circonstances
ordinaires.
Passons au second grief.
�(tf)
S
e c o n d
g
r
i e
f
.
,
L a solidarité hypothécaire est prononcée sans fonde
ment, entre tous les condamnés par le jugement
dont, est appet.
L e moyen de prescription peut être opposé en tout état de
cause, et sur l’appel comme en cause principale; mais il ne se
supplée point. Tous les condamnés, par le jugement de 1 7 8 7 ,
ont également droit de l’opposer; mais tous 11’ont pas pris la
voie de l’appel pour se mettre à même d'en faire usage : peutêtre même n’est-il plus tems pour eux de prendre cette voie. De
là il résulte que les condamnations prononcées contr’eux per
sonnellement subsisteront, nonobstant que les appelans soient
déchargés de la partie de la dette prescrite qui les regardait per
sonnellement. E n cet état de choses, si la condamnation soli
daire, prononcée hypothécairement par le jugement dont est
appel, subsistait, il en résulterait donc que les appelans, dé
chargés du paiement de la dette pour leur contingent person
nel, pourraient être contraints de payer par l ’effet de la solidité
hypothécaire, prononcée par le jugement dont est appel , le
contingent des autres condamnés, sauf leur recours; c’est à quoi
ils ne doivent pas rester exposés, par deux raisons : sa vo ir, en
premier lieu, parce que la solidarité hypothécaire qui a été pro
noncée l’a été sans fondement ; la seconde, parce que dans tous
les cas, la prescription qui les a libérés de l’action personnelle,
les a libérés également de l’action hypothécaire.
Nous disons que la solidarité hypothécaire pour la créance
en tière, a été prononcée sans fondement, et en effet, il est cons
tant et c’est chose jugée entre les parties , par jugement rendu
ou tribunal c iv il, le 2 frimaire an 6 , que les domaines de T ou gouse et de Blaval , dont les appelans possèdent la moitié qui
leur fut attribuée par ce ju geaien t; proviennent de la succès«
�( i-t )
sion de Jean Garcelon, prêtre , ouverte en 17 2 1, et qu’ils appar
tenaient à cette succession sans partage; enfin que les appelans
possèdent et n’ofijt;jouais possédé aucun autre immeuble de
la,famille Garcellon que.la.moitié de ces deux domaines.
J est également constant que Jean Garcellon , prêtrq, n’était
pas seul débiteur de la créance adjugée aux ailleurs des intimés
1
ppr la sentence consulaire du 11 m us 1721, ni à beaucoup près ;
qu’il n’avait été condamné, par cetté sentence, qu’à payer son
cbnfingenfcohime'béritier pour 1111’ qïiart de Pierre Garcellon,
fcèn défunt frère, conjointément avec Antoine Garcellon, son
aufrè frère survivant ‘avec les en fan s dé'M artin Garcellon , et
avec c ë u i de Simon Gitrcéllon : et attendu qu’ il résulte du même
jugémènt que Pierre (rarcéllou n’était îui-mêm'e débiteur que du
tiers de’ la créance entière, il est conséquent, que ce tiers distri
bué entre les quatre branches d’héritiers, né donnait à la charge
'dé Jean Gmvt,llôn"qu’un douzième de la dette (1).
T1 n'y avait aucune solidité entre les côndnmnés', et il ne pouVnit'pasj Vu avoir, puisque les condamnations n’étaient frtnddes
que sur dès actes sous seing-privc; de 1A , il résidte que les biens
clé Jean 'Garcelon n’étaient hypothéqués qu’au douzième de la
detlç entière , et par une dernière conséquence, que les appelans
rie possèdent que dés immeubles provenus de Jeîirt Garcellon ,
ils ne seraient tenus hypothéchirement que du douzième d e là
créhnce, pour lequel il y nvaif eu condamnation contre l u i , par
I.¥ sénU'iiéé de 1721, et quô la condamnation hypothécaire pro*
noiicée pour le tout ,r serait déntlée de tout fondement, quand
]aJércanéé subsistera il 'encore.1
Mais ce n’est pas tout : ■n-ou.*; ’avons prouvé que la prescription
î)vîiit éteint la créance èhtièré, long-tems' avant lé jugement de
( 1 ) P o u r h i c » e n t e n d r e c c ' f n ^ e m e n t do n t l e d i s p o s i t if est 1111 p eu c o n f u s ,
il f.iui s;* r a p p r o c h e r d e l ’ e x p l o i t d e d e m a n d e s ur leiji/el il fui r e n d u , et a u q u e l
î l ‘-e r^fêi t v
'u ■
■
■
■
;
!
S a 1e r s ,
�*5
'(
)
Salers. de l’année 1787 , dont est a p p e l, si les codébiteurs qui
11e sont point appelons , ont jugé à propos de renoncer ù la pres
cription en ce qui les concerne , ils n’ont pas eu le droit d ’y
renoncer au préjudice des appelans ; et ceux-ci ont incontesta
blement droit d’invoquer cette exception tutélaire, que la loi
leur oiïie pour se dispenser de payer la dette cCautrui.
R É S U M É .
\
Nous croyons avoir porté, jusqu’à la démonstration, la preuve
des assertions annoncées en commençant, savoir:
1.° Que l ’a p p e l, interjeté par les enfans V id a l, ou à leur notn,
du jugement rendu au bailliage de Salers en l’année 1787 , est
recevable, quoiqu’il n’ait pas'été intérjeté daiis les dix ans de la
signification , parce qu’il a cté interjeté dans les dix ans de la
majorité des appelans, et que toute prescription dort pendant la
minorité; notamment la prescription du délai d’appeler, aux
termes de l’art. 16 , titre 27 de l’ordonnance de 1667 ;
2.° Que cet appel est fondé, parce que la créance de
liv.
3,436
eu capital, et de plus de 80 ans d’intérêts, adjugée par la sen
tence attaquée, était illégitime dans l’origine , et doublement
prescrite lorsqu’elle fut adjugée ;
Que la prescription n’avait été interrompue par aucun acte
judiciaire utile, depuis 1721 jusqu’en 1787, et 11’avait été sus
pendue , par des minorités que pendant sept ans; •
.° Enfin que si les débiteurs de la plus grande portion de
3
cette cré.mce , ont jugé à propos de renoncer au bénéfice de la
prescription et de l’appel, les appelans ne peuvent pas souffrir
de leur résignation ou de leur collusion , et supporter , sauf leur
recours, la charge de la dette enliè’re, par l’ell'et d’une solidarité
hypothécaire, qui n’a jamais existé que pour une faible partie
de la dette, et qui est éteinte, pour le tout, par la même pres
cription qui les a libérés de leur contingent personnel.
D
�(26)
E n cet état, les appelans doivent attendre avec sécurité l ’évé
nement de leur a p p e l, qui ne peut que leur être favorable.
D
élibéré
à
3
C lermont-Ferrand , le 18 nivôse an 1 .
BERGI ER,
BEILLE-BERGIER.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu la présente consulta
tion, est du même avis, et par les mêmes raisons.
D é lib é r é
à R io m , le 20 nivôse an 1 3.
ANDRAUD.
O
B S E R
V A
T I O
N
S .
L
A Cour pourra se convaincre par l’examen des titres origi
naux de la créance, qu’une vente de fromage portée par la police
du 8 avril 17 19 , a eu pour prix l es deux b i l l e t s a n t é r i e u r s dont
il n’est fait aucune réserve, et q u i, à 16 fr. de différence près ,
font la même somme que le prix de la vente; que Guillaume
Redonchat fit au moins double emploi de 1664 livres lors de sa
demande eu 1720.
M.e V A Z E I L L E , avoué.
A "
à.
^
A ,
/t a t r J .
^VaV 6
À
R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D U P A L A I S , C H E Z J . C . S A L L E S .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Vidal, Antoine. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
créances
tutelle
saisie
généalogie
prescription
droit intermédiaire
Bailliage de Salers
Description
An account of the resource
Titre complet : Exposé des faits, en suite desquels est la consultation de messieurs Bergier, Beille-Bergier et Andraud, Jurisconsultes ; pour Sieur Antoine Vidal, expert-géomètre et notaire public, en qualité de légitime administrateur de ses enfans mineurs, et Catherine Vidal, sa fille majeure, habitans du lieu de Mezenasserre, commune de Saint-Christophe, appelans et demandeurs en opposition ; Contre le sieur François Redonchat, propriétaire ; Jean Salvy, notaire public, et Marie-Anne Redonchat, son épouse, intimés et défendeur en opposition.
Annotation manuscrite: « 17 prairial an 13, 1ére section. Attendu que depuis la signification du jugement du 1er juin 1787 il ne s'est pas écoulé sur la tête des enfants Vidal dix ans utiles de majorité. Reçoit l'appel sur le fond. »
Table Godemel : Appel : 6. l’appel d’une sentence rendue en 1787 est recevable, après les dix ans de la signification, s’il ne s’est pas écoulé dix ans depuis la majorité.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
circa An 13
Circa 1709-Circa An 13
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Bonnet-de-Salers (15174)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53243/BCU_Factums_G1503.jpg
Bailliage de Salers
Créances
droit intermédiaire
généalogie
prescription
saisie
Successions
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53698/BCU_Factums_M0157.pdf
c0ab9af9b3ed046621fb2de387b2a1e8
PDF Text
Text
CONSULTATION
TRIBUN A t
d' ap p e l
POUR
P
ierre
TOUZET,
séanràRioni.
et autres Intimes ;
CONTRE
J
ean
- J
oseph
CHOUSSY
Appelant.,
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , q u i a lu un mémoire
pour le citoyen Choussy-Dupin, appelant ; contre Pierre
Touzet, Buisson Touzet, et autres intimés ; le mémoire
en réponse des citoyens Touzet et consorts ; et a revu une
précédente consultation sur la question qui divise les parties ,
E stim e t en persistant dans son premier avis , que Ie
A
�..
,
( 2 }
jugement d’A m bert, dont est appel, est conforme aux
dispositions des lois, et que le citoyen Clioussy ne peut
espérer aucun succès dans sa prétention.
^ Le citoyen Choussy a vendu son bien de Féolgoux aux
intimés, suivant l’estimation qui en seroit faite par dés
experts choisis respectivement par les parties. Ces experts,
divisés dans leur opération, s’en sont remis à un tiers,
ainsi qu’ils y étoient autorisés par la convention faite entre
le vendeur et les acquéreurs. L ’estimation de ce tiers doit
être le prix déterminé de la vente, et il faut absolument
l ’adopter, quelle que soit cette appréciation.
La loi dernière, au cod. liv. 4 , au titre de contrahenda
em ptione , exige impérieusement que la vente ait lieu sui
vant l’estimation : om ni m odo, secundùm estimationem
res tradatur , et pretium solvatur. Le glossateur de la lo i
ajoute : D ic it imperàtor qïiàd si venditio fa c t a f u i t sub
ilia conditione , nec déficit conditio; puta quia Titius
pretium d efn içit emptor ad pretium , venditor ad rem
tradendam tenebitur.
La même disposition est répétée dans les institutes de
Justinien , au tit. da venditione et emptione -, et Mysingérius, commentateur estimé, nous donne en maxime,
que cette vente est aussi bonne que si les parties contrac
tantes avoient elles-mêmes fixé le prix : perindè àc s i ipsimet cuntrahentes pretium istud ita definivissent.
Ce m êm e auteur enseigne encore que le vendeur a , du
jour du contrat, une action contre l’acquéreur pour le
prix de la cliosp, et pour les'intérêts, du jour dè la
trad itio n . N ascitur actio ex vendito et hœc co?npetit
Tfirulitori- ad ea consequenda quœ ipsi ad ajnptore
�.
^3 ) .
•prœstare opportet, in qua veniimt non modo pretium
quanti res estimata est j sed et usurœ post diem traditionis ■nam cum re emptor Jru a tu r 3 œquùsirnum
est eum usuras pretii sofrere.
<
=
■ Vinnius, autre commentateur célèbre ,. ï k > u s apprend
qu’il faut absolument en passer* par l’estimation .du tiers
auquel on s’en est remis : hâe conditione stabit empiio
s i persona nominata pretium dejinivit..
,
, Ferrières, sur le même tit. des institutes, dit que Jus-,
tinien a décidé impérieusement .cette'question,, et qu’on
l’observe ainsi dans notrè'idroit français., •'
.
<
’ L ’autorité <de Despeisses est -également précise : voici
comment il s’explique, tom. i ? sect.- 3 , nomb. 6.
*■ Après avoir dit que la vente seroit n ulle, si le tiers
auquel on s’en, est remis n’a >pas pu!'ou voulu faire Tes*
tixnation; « il en seroit autrement, ajoutç-t-ilysi le tierâ
« avoit fait lé prix’; cqr alors la vente seroit bonne,
« suivant le prix fixé par ledit tiers, bien que le prix
« établi par ledit tiers, ne sait pas le juste p rix , contre
r l’avis d’Accurse, sur cette loi dernière , qui veut que
« s’il y a lésion d’outre moitié dii juste prix, les parties
a ne soient pas tenues de se tenir à cette estimation ;
ce car, puisque la loi derniere ne veut pas qu’on prenne
te lavis du nommé pro. arbitno boni v iri, autrement,.
« toujours le prix seroit certain, bien que le nommé n’en;
« fit pas 1 estimation. Il faut conclure, qu’on s’en remet
« purement et simplement à l’avis du nommé, soit juste
« ou injuste, et cest ce que veut dix-e Justinien sur ledit:
« texte par ces termes, tune om ni m odo , etc. »
fo th ie r, dans son traité du contrat de vente, nomb. 2$
A, a.
1*
�. . . .
.
.
( 4 }
.
.
,
a 'servilement copié l’avis d’Accurse ;’jl exige , comme lui ,
la lésion M’outre moitié dans le prix de la vente : mais
cette opinion est contraire à la disposition de .la- lo i, qui
n’admet point d’exception. D’ailleurs, le citoyen Çlioussy;
n’a jamais prétendu qu’il y eût lésion d’outre moitié dans
le prix de l’estimation : la question de droit est ce quiTa
le moins occupé dans son mémoire. Une discussion vive,
animée, a du entraîner quelques personnalités entre les
parties, des déclamations contre les experts qui ont opéré;
et ce n’est pas chose nouvelle d’entendre critiquer des rap
ports, lorsque les experts ne répondent point à l’attente
de l’une dés parties. On pourroit dire que1les objections
faites à l’expert des intimés so n t bien bannales ; des fes-.
tins auxquels il a participé;, des fêtes, des soins , tous ces
moyens de séduction sont souvent r e p r o c h é s p a r la p a r t ie
mécontente. Cependant; 4’auteur ,da-¡mémoire, se, fait -lire
avec intérêt, et c’est bëa,uç0upippur,I'e citoyen,¡Choussy.
Les intimés y ont répondu,avec le'm êm e agrément • ils
ont même répandu'le ridicidum <icri sur le .prétendu
lignage du citoyen Tardif,' tiers-expert, avec, l’un des acquêt
l eurs , et il faut convenir qu'a c’est aller^cherchéf bien loin
un moyen de, récusation ; c’est ¡sur-tout le ,proposer bien
tard , alors que 1opération-du tiers-èx'pcii est terminée:
mais on doit éviter ici ces détails, et se renfermer dans
l’impartialité d’une consultation. - >: • 1
ni ! ,
Lors dé la sentence qui a été citée .dans le! mémoire des,
intimés, et qui a été rendue sur la plaidoirie de l’un des.
soussignés, le citoyen Coiilier, comme le citoyen Chôussy,
critiqnoit le rapport du tiers-expert auquel il s’en ctpit
; il employait les mêmes moyens ; repas, .contradie-
�.
.
{
,
.
tiolis, ineptie, séduction. Le tiers n’avoit pas fait son rap
port dans le terme;prescrit j il y avoit seulement cette
différence, c’est que le citoyen Coiffier étoil l'acquéreur,
et se plaignoit de ce que le tiers avoit porté son estimation
à trop haut p rix , tandis que le citoyen Choussy, qui est
le vendeur, se plaint qu’on l’a estimé trop bas. Mais malgré
tous ces motifs, la sentence du y mars 1786 jugea que la
vente étoit valable, et condamna Coillier ¿\ en payer le
prix. Cette sentence a été confirmée par un arrêt du
6 mars 1789. Les parties se-trouvent, sans contredit,
dans l’espèce, de ce .préjugé : E t ubi eadcm ratio ,
ibidem ju s. ,, , „
,
,
Il est même impossible , dans ce cas, de prononcer un
amendement de rapport; il ne peut exister de vente sans
prix ; le prix est nécessairement celui qu’ont fixé les ex
perts; auxquels on s’en étoit remis; et, si cette estimation
n’é toit pas adoptée , il n’y auroit plus de vente, la conven
tion n’existeroit plus. On peut avoir sa confiance dans le
tiers qu’on a choisi , et ne pas l’avoir dans un autre ;
v o ilà pourquoi les auteurs, ont dit qu’il n’y avoit plus de
vente, si l’estimation n’est pas fa’ite par celui auquel oq.
s’en étoit rapporté; - •
; •
On ne peut s’empeelier de remarquer une contradic
tion qui a échappé à l’auteur du mémoire du citoyen
Choussy , et qui a été relevée dans le mémoire en ré
ponse. r
;p ' n
."
!
‘
On voit que le citoyen Choussy veut tantôt faire con
sidérer les experts appréciateurs comme de véritables
arbitres , et que tantôt il les réduit au simple rôle d’experts.
Mais-de deux choses l’une5 s’ils sont des arbitres, le
�.
( 6 y
..
.
,
citoyen Choussy doit respecter leur décision ; il ne s’esfc
point réservé la faculté de rappel.: la loi du 16 août
1790 , veut que leur décision soit en dernier ressort.
S’ils ne sont que des experts, leur rapport doit faire
également la lo i, parce que la vente est consommée par
leur estimation ; quelle qu’elle soit, elle forme le prix
de la vente..
A la vérité1, le citoyen Choussy n’a voulu faire consi
dérer les experts comme arbitres, que pour se faire un
moyen de la, loi , qui veut que le tiers se ' réunisse aux
deux autres, pour ne rendre qu’une même décision. Mais,
sous ce rapport,, les experts ont fait tout ce qu’ils devoient
pour satisfaire à la loi..
Les deux premiers éloientdivisés d’opinion ; ilsavoient
fait chacun leur rapport séparé ; le tiev s-ex p ert ne p o u v o it
empêcher que ces rapports n’existassent. Mais le tiers-^
expert, pour procéder à son opération,. s’est réuni aux.
deux autres ; son ra'pport en fait mention • il est signé;
des deux premiers. C’est ce dernier rapport qui fixe le*
prix de la vente y il. n’y a donc qu’une seule et mêmedécision.
•
Si ensuite on, veut restreindre lés estimateurs au simple
rôle d’experts, alors leur rapport est fait comme il con
vient 5 et dans l’u s a g e o n n'a dû. homologuer que lerapport du tiers.
On prétend encore que lë citoyen Choussy veut se
faire un moyen de ce que les rapports des experts n'ont
pas été divisés par séances. On dit qu’il existe un juge
ment du tribunal de cassation qui a annullé un j u g e m e n t
portant homologation d?un rapport non divisé par/
�■
C 7 )
séances. L'un des soussignés a souvent remarqué qu’on
faisoit usage de ce moyen dans plusieurs jugemens du
Cantal. Mais le jugement du tribunal de cassation ne
peut s’appliquer qu’à la coutume de Paris, qui exige
impérieusement que les rapports des jurés soient divisés
par séances. Ce statut particulier ne pouvoit faire loi 5.
Am bert; -et jamais le tribunal civil du P u y-d e-D ô m e
n’a eu égard à ce moyen.
En résumant , la vente consentie par le cit. Choussy >
a tous les caractères qui constituent une véritable vente*
Le prix fixé par les experts ne peut éprouver aucune
réduction , aucun changement : om ni modo secundùm
estimatianern res tradatur. Les reproches qu’on fait
■aux experts n’ont rien de nouveau ni de saillant : de
tout te^ps la partie mécontente a critiqué les rapports
de la môme manière : le célèbre Cochin l’a dit avant le
'citoyen .Choussy ; et malgré sa critique, le rapport qu’il
attaquait fut homologué. Il doit en être de même de
celui qui fait l’objet de la contestation; et le citoyen
Choussy ne paroît pas avoir droit de se plaindre du prix;
auquel a été porté son bien de Féolgoux.
Délibéré à R io m , le g germinal an 9.
P A G E S. A N D R A U D . T -O U TTÉ E .
C A SC H O N . D E V A L .
LE SOUSSIGNÉ est du même avis, et ajoute que de tous les
moyens, le plus déterminant consiste à observer que, dans l’es
pèce, les parties, pour la fixation du prix^s’en sont rap p o rtes
aux citoyens D iip ri et Langlade, et en cas de division , au tiers
que ces deux appréciateurs pourront prepdre à l’insu des parties.
�(
8)
Il ne s'agit pas ici d’une simple fixation, à dire d’experts que
la justice peut nommer, à défaut par les parties d’en convenir
après l’acte il s’agit d’une confiance particulière , réciproque.ment convenue et exprimée. Cette confiance n’est ni vague, ni
arbitraire ; ce n’est pas seulement et en général à des hommes
qui aient. des connoissances et de la probité , que les parties ont
entendu s’en rapporter; c’est à Dupré et Langlade, c’est à. eux,
et non à d’autres , et tout au plus au tiers qu’ils pourront pren
dre pour les départager. Ce choix déterminé des experts est donc
dans l' acte du 12, messidor an 8 une clause essentielle, et qui,
comme toutes les autres du même acte, doit obtenir sa pleine
et entière exécution. E t cela est si v ra i, que dans le cas où l’un
des experts n’auroit pas voulu accepter la commission , il eut
été libre à l’une comme à l'autre des parties, de se rétracter de
la vente. Que si la personne nommée ne pouvoit ou ne vouloit
faire l ' estimation , ou venoit à mourir avant que de la f a ir e , la
convention d em eu rero it n u lle ; c a r e lle renfermoit la condition
que l 'estimation seroitfa ite par cette personne. Domat liv. I er,
lit. I er. sect. 3.nomb. 11. C’est le même paragraphe dont le citoyen
Choussy , en.en faisant l’exorde-de son mémoire, en a prudem
ment supprimé cette partie,
Or , si l’amendement étoit ordonné, la justice nommeroit d’au
tres experts, et l’acte ne seroit plus exécuté.
Cependant il ne s’agit pas de faire annuller, l’acte du 12 . mes
sidor an 8 ; il s’agit au contraire de le faire exécuter dans toutes
ses parties ; d’où résulte la conséquence forcée et évidentej quel’amendement doit être rejeté, et l’appréciation faite consacrée
sans quoi l’acte n’obtiendroit plus son exécution.
Délibéré à R io m , ce 9 germinal an -9
FAYARD.
A R io m , de l’imprimerie de L a n d r i o t , im p rim eu r du.
Tribunal d’appel. An 9..
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Touzet, Pierre. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Andraud
Touttée
Gaschon
Deval
Favard
Subject
The topic of the resource
experts
acquisitions
Description
An account of the resource
Consultation pour Pierre Touzet, et autres Intimés ; contre Jean-Joseph Choussy, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1785-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0157
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0155
BCU_Factums_M0156
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53698/BCU_Factums_M0157.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Le Puy-en-Velay (43157)
Sain-Germain-l'Herm (63353)
Féolgoux (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
acquisitions
experts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53694/BCU_Factums_M0153.pdf
7f02161cfc873f2c745e609da98bad35
PDF Text
Text
* ll /■
h
M
E
M
O
I R
E
E T
C
J
à
O
N
S
U
L
T
A
T
I
O
N
.
C Q U E S T H O M A Z E T m ourut en 1 7 2 7 , sans p o stérité ; ses
sœurs et ses neveux répudièrent sa succession : il y
Curateur judiciaire.
eut un
Benoit C o lan g e tte , étranger à la famille , avait des droits à ré
péter contre cette succession ; du c h e f de sa m ère , il avait a c
quis encore en 176 2 , tous les droits de la branche de D am iens
T h o m a z e t , oncle de Jac q u e s : cette branche était créancière d’ un
compte de tutèle et de la dot de Ia fem m e de Damiens. Ig n ace
Colangette est en possession d’une partie des biens de Jac q u e s
Thom azet ; il ne sait lui-m ém e à quel titre son p ère les lui a
transmis.
E n 1 7 9 2 , André J o u r n e t , descendant d ’ une sœur de Jac q u e s
T h om azet, a déclaré au g re ffe , qu ’il prenait la qualité d’héritier
bénéficier de Jac q u e s T h om azet , des collatéraux de sa b ra n c h e ,
et des successions de la branche de D am iens T hom azet ; ensuite ,
il a assigné Ignace Colangette en désistement.
C o la n g e tte , pour terminer plutôt la contestation, a engagé
Dauphine Barisson qui descend de Dam iens T h o m a z e t , à accep ter
purement et simplement la succession de Ja c q u e s T h o m a z e t, pour
exclure l’héritier bénéficier. U n e caution a été donnée par l ’acte
d ’a c c e p ta tio n , et ensuite , Ignace Colangette a acquis les droits
de D auphine Barisson.
A l o r s , André Journ et a déclaré au g r e f f e , qu’il acceptait luim êine la succession d ’André J o u r n e t , com m e h éritier pur çs
�( 2 )
Dans un procès qui eut l i e u , en l’an 3 , entre la Barisson et
Colangette , sur la validité de cette cession , et jugé en faveur
de C o lan ge tte, il se trouve dans le ju g e m e n t, la mention que
Colangette jouissait pignorativement ; ce t aveu n ’avait nul rap
port à la cause , il est m êm e en opposition au x moyens de dé
fense qu ’il fait valoir alors contre Journ et ; mais il est* écrit ,
et Jo u rn e t s’en prévaut.
.
On D em an de :
i° . S i J o u r n e t , né en 1 7 3 0 , a pu accep ter de son c h e f ou
de ses a u te u r s , une succession ouverte en 1 7 2 7 , lorsque ses
auteurs l’avaient répudiée , et que lui m êm e n’était ni né ni conçu
lors de 1’ouverture de cette succession.
Subsidiairement :
2°. S i la su c c e ssio n , répudiée par toute la branche de Jac q u e s
T hom azet , a pu être acceptée par la B arisson, et profiter à
Colangette.
3°. Si l’acceptation par J o u r n e t , comme héritier b é n éficie r,
a été suffisamment éloignée par la Barrisson qui a accepté com m e
héritière pure et simple r et a donne caution.
4°. Si Colangette , qui n’a pas de titre de propriétéde partie
des objets qu’on lui d em an d e, s’est' f a i t / p a r l e jugem ent de
la B a r isso n , un titre v ic ie u x , dont l’effet soit rétroactif à sa
mise cii possession.
1
'
c o n s u l t a t i o n
Le
so u ssig n é
.
qui £i" vu et examiné le Mémoire à consulter
pour Ignace Colangette.
Consulté
n’était
sur la question de savoir, si André J o u r n e t , qui
ni né ni conçu au décès de Jac q u e s T h o m a z e t, son
�(3)
arrière Grand Oncle , décédé en 17 2 7 ; est recevable à se dire
son h é ritie r , à rechercher Ignace Colangette qui est en oppossession de ses biens.
Estim e , qu’il n ’y est pas recevable.
G ’est un principe de tous les tems et de tous les pays , q u e,
pour pouvoir se dire héritier d’ un défunt , il faut être né ou
concu
au m om ent de son décès.
»
C e principe est puisé dans les Lois Romaines , il est puisé
dans nos Lois coutumières ; il consacré par la Jurispru d en ce
des Tribunaux.
S i on ouvre les instituts de Ju s t in ie n , on y lit q u e , si un
enfant est né après la mort de son a ï e u l , il n’a pas moins le
droit d’être son héritier , pourvu qu’il| fût conçu à l’époque de
son décès, ta m en avo vivo conceptus , mais , que s’ il n’était ni
né ni c o n ç u , il ne peut avoir aucun droit à sa succession. P la n e
s i et conceptus et n atu s f u e n t p o st m ortem a v i , suus lucres
avo non e x istet.
L e Législateur en donne aussitôt la raison en ces term es j
Q u ia nullo ju r e co g n a tio n is p a trem su i p a tris a tteg it.
On lit les mêmes principes dans le Digeste , L iv re 3 8 , T it r e 1 6 ;
d e suis et leg itim is hœ redibus. L o i 6.
Q u i post m ortem a v i su i co n cip etu r , porte cette loi , is ncquo
leg itïm a m h œ reditatem e/us ta n q u a m suus h ccres, n eq u e b o n o rw n
possessionem , ta n q u a m co gn atu s a c c ip e re po tcst , q u ia 1ère
du o deca n ta b u la ru m eu m v o c a t a d h œ re d ita le m q u i m o rien te
eo d e eu]us bonis q u een tu r /il reru m n a tu ra fu e r it .
L a loi suivante ajoute , v e l s i v iv o eo conceptus est. Q u ia
conceptus qu o d am m odo in reru m n a tu ra esse e x is lim a t u r .
S i , des lois ro m a in e s, on passe à notre droit français , on y
retrouve par-tout le m êm e principe répété à toutes les pages.
L a prem ière règle des succesisons ,
dans les instituts de Loiscl
�( 4 )
_
fjui a recueilli toutes les règles du droit fr a n ç a is , est celle-ci:
«. L e M o r t s a is it le V i f , son plus prochain héritier habile k
lui succéder. «
_
Il faut donc être v i f , pour être saisi d’ une succession , et ,
on ne peut être v i f , si l’on n’ est ni né , ni conçu au moment
du décès.
•
Cette règle est répétée dans presque toutes nos coutumes ,
et forme le premier article du chapitre des successions.
L ’article prem ier du chapitre 12. de la coutum e d’A uvergne ,
qui régit les parties , est conçu en ces termes :
L e m ort s a is it le v i f , son plus proche héritier habile à lu i
» succéder a b in t e s t a t , sans appréhension de fait.
k
» L e s termes de la coutum e , le m ort s a is it le v i f , dit le
>3 dernier
Commentateur , tome prem ier , page 208 , font voir
3) que , pour pouvoir su ccéd er , il faut survivre à' celui de la
32 succession duquel il s’agit , la prem ière qualité nécesssaire
33 est d’exister ; on examine ensuite si celui qui se présente , a les
» qualités nécessaires ; il arrive souvent que le fils renonce à la
33 succession de son père , et qu au défaut d’autres enfans , c e u x
33 du rénonçaut se présentent pour 1 accepter ; ils n a u ra ie n t p a s
jy ce d r o it, s ’ils n ’éta ien t n i ncs n i conçus a u tem s du décès d e
» le u r a y e u l ».
L ’article 299 de la coutume du Bourbonnais , est absolument
rédigé dans les mêmes expressions que celui de la coutume d’A u
vergne , qu’on vient de rapporter ; il forme encore l’article pre
m
i e r
d u
chapitre des successions, pour prouver que c ’est le premier
principe en matière de succession.
E t les Commentateurs de cette coutum e , ne manquent pas
de faire re m a rq u e r , comme le fait ce lu i de la coutume d’A u v e r g n e ,
que ces expressions , le m ort s a isit le v i f , supposent nécessai
rement que celui qui se présente pour recueillir une succession ,
�(5 )
était né ou conçu au moment du décès de celui de la su cce s
sion duquel il s’agit.
A t t e n d e , dit François D ecu lan t , cité par A u ro u x sur cet
article , a d hœc v c rb a s t a t u t i, l e m o r t s a i s i t l u v i f , s i q u id e m
q u i tem pore d ela tœ h œ red ita tis n ec n atu s n ec conceptus est ,
non succedit.
Il ajoute que cela fut tûnsi jugé , à Moulins , le prem ier fé
vrier 1 6 2 1 . Q uippe , dit-il , nepos n ed u m n atu s non p o te ra t ,
bonis successionis a v i s u i esse sa isïtu s , quce sta tn n p r o x im u m
hoeredem a ffe cta n t , nec e s t , n ec esse p o test h œ red ita s sin e suc
cessore , q u a si in suspenso ; ita q u e n u llu s a d m ittitu r hœ res , n is î
q u i tem pore d ela tœ h œ red ita tis n atu s vel c a p a x sit.
L ebru n , qui de tous les auteurs ont écrit sur les successions *
est celui qui a le plus approfondi laLmatière , traité cette ques
tion ; Livre p r e m ie r , chapitre 3 , qui est ainsi intitulé :
D e c e u x q u i n e sont p a s en core n é s , lors d e V ouvertu re do
la succession.
'
te C ’e s t, dit i l , un principe de l ’une et l’autre jurisprudence ,
» comme il est d’ailleurs é ta b li, que la capacité ou incapacité de
l'héritier se ju g e , eu égard au tems du décès. A u s s i , pour être
3> capable de su ccéd er , soit en ligne directe , soit en ligne co lla
>» téralle , il faut être né ou conçu lors de l’ouverture de sa
x> succession.
Après avoir cite les différens textes du droits sur lesquels ce
principe est a p p u y é , il ajoute que notre règle ; « L e M o r t
sa isit le v i f , est une preuve que cette proposition s’observe
» encore plus exactem ent dans le pays coutum ier , puisqu’elle
appèle le plus proche à 1 instant du d é c è s , et par co n sé q u e n t,
» exclut c e u x qui ne sont pas encore ni nés ni conçus ».
A u surplus , ce principe , com m e on l ’a dit au c o m m e n c e m e n t,
a de tous tems été conservé par la jurisprudence des tribunaux.
Brodeau sur L o u e t , lettre R , som m aire 3 8 , nous dit que
^’exclusion de celui qui n ’était ni né ni conçu , « à lieu , non
�•
.
'
(6 )
.
5> seulement à l'égard de l'héritier saisi par la mort du d éfu n t;
« mais encore d ’uu étranger 5>.
■
Il cite , à cette occasion , l’exem ple d’ une adjudication d’hé
ritages , d’une succession vendue sur un c u r a te u r , aux biens
vacans , « auxquels u n , qui n’était ni né ni cou ru lors d e l ’ou» verture de la succession , voudrait rentrer , sous p ré te x te , qu ’il
3> ne se présente aucun capable d’être héritier que lui.
» L ’adjudicaiaire peu t, d it-il, pour son intérêt p articu lie r,
5> le soutenir non recevable à se dire , et porter h é ritie r, soit
51 pur et simple , soit par bénéfice d’inven taire, com m e n’étant
« aucunem ent joint de parenté au défunt 55.
Il ajoute qne cela fut ainsi jugé par arrêt du 2 1 juillet i 6 i 5 ,
l u i , plaidant, q u o i q u e dans les adjudications il y eut des n u l
lités indubitables, sur le seul moyen que c e lle qui se présentait,
n ’ é t a i t pas recevable à se dire héritière , par j e q u ’ e lle était née
d eu x ans après la mort de celui dont les biens avaient été a c
quis par Deiret.
,
L a m êm e chose a été jugé par un arrêt du j i mars 1 ^ 9 2 ,
dont le fait et les moyens sont rapportés au journal des au d i
ences , tome 4 > Pag e 42 1,
On y voit que celui qui reclamait la succession dont il s’a
gissait au p r o c è s , laisait valoir les moyens les plus s p é c ie u x ,
pour donner quelque ietveu r n sa cause ; mais l ’avocat-général
D ag u esseau qui porta la parole daus cette a f f a i r e , fit sentir que
tous les principes du droit Romain et du droit Français , s’op
poseraient à sa prétention , et que la circonstance que la su c
cession était vacante , ne pouvait pas être un m otif pour l’a d
mettre à cette su cce ssio n , <.c parce qu ’a u tr e m e n t , d isait-il, des
« enfans nés plusieurs siècles après des successions o u v e r te s, si
55 elles se trouvaient vacantes , pourraient avoir de semblables
5) prétentions. Que les dispositions du droit Rom ain les en reji jettaient ; que les lois étaient reçues et admissibles en l'ran ce ;
que cela éLait confirmé par plusieurs arrê ts, e tc . 55
�( 7)
On peut encore voir D e n iz a rt, au mot e n f a n t , N os. a / ,• r
et au mot succession , N °. îg .
'
f
J ’
On ne Unirait pas , si on voulait rapporter toutes les auto
rités qui supposent ou qui confirment ce principe , qui a ¿ S
reconnu de tous le stem s, com me la base de législation en matière
de succession ; il ne reste donc qu’à eh faire l ’application à
’e xp èce qui se présente.
1
Jac q u e s Thomazet est décédé en 17 2 7 , et André Journ et n’est
né qu en 1730.
Ces deux faits sont constans au p r o c è s , et jueent la cause
_ Il est é t a b li, qu après le décès de Jac q u e s Thomazet ses héri
tiers immédiats ont renoncé à sa succession , puisque que dans
les tems on a lait créer un curateur à la succession vacante
Cette circonstance serait d’ailleurs fort indifférente , parce
ou on voit dans les auteurs ci-devant c it é s , et spécialemeni
dans L e b r u n , que celui qui n’était ni né ni concu à l'ouverture
d u n e su cce ssio n , n en est pas moins e x c lu à ‘t itre de renré
sentation que de son chef.
1 epit,
II est également établi que Jac q u e s T h o m « ^ --aiuniversel cl Année Thom azet son père et
Jieiltiei
s é Ja 't tous les bi«.,, dont André J ou r/let r ic ia m e 'le désis,eniem
contre le C,t. Colangette ce qui rend sans
“
ception (|l, 4 k u » A ndré Jo a r n e t sous bénéfice d 'i,„ e iu a ir ’e £
t o u t « les autres successions échues dans la famille T l , 0 ® ’ TT
de])uis un siècle.
‘ ‘ornazet
Au su rp lu s, quoiqu’il fut assez in d iffé re n t, comme on r
précédem m en t, que le C it. Colangette fu t u n éi i n n °
i ut em paré, m êm e sans titre, des biens dont i l' -’
¡ a . V'1
fl Ul s<'
q u ’André Journ et est absolument non recevable à r c c U c \ v C \
(iiiel titre il les possèd e: i n est m e
' ^ n c i t n c i .1
À >1 .
1 r
11
I as ‘ »utile de rem aid u er
i°
( 1 1 il teiia.j . . <1 lainille par Catherine .Lassein sa m è r e , v r „ v n
,1 A u t o, n e
h ™ . » « . , c o u s , „ germain du d é fu n t; . . „ ' i l p o S
pa, ses a u t t u i s , les bi ens dont on » e u t a u j ou rd 'hui l ' é v i nc e r
Q u e , sans c onnaî tre e x a c t e m e n t l’ origine de sa possessio , , !
vo, du moins q u e lle était o n d ée , soit par des a c e s „a i
(¡ueis on e t a i t c n v e n u d e faire des délaisse,,,eus de fonds 1
C all,er,ne Lasse,,, sa mère pour la rem plir de sa dot ; soit n„,,'
le rem plir du paiem ent de rcli,p ,„,s ,(è c o m p ta de |a
'
soit sur des cessions de droits hérédi tai res ou aut r es a c t e
mi
prouvent la justice et la honne-loi de sa possession
1
2 . Que 1 action d A n d , c l o u , net „-est , „ r „ „ e vieille reclirrelio
I minginée p e n d an t les ass ignats , «t dont l'objet serait d e pr eUt - r
�( 8 }
de l’augmentation survenue a u x biens fonds depuis 1 7 2 7 , et de
la perte des titres qui peuvent établir les droits du Cit. Colanpette , pour le dépouiller aujourd’ hui d’ un bien venu de ses
p è re s , et qui forme l’objet le plus important de sa fortune.
Disons-le avec le chancellier D aguesseait, s’il en était a in si;
D es en fa n s nés p lu sieu rs siècles a près des successions o u vertes ,
p o u rra ie n t a v o ir d e sem blables p réten tio n s , ce qui troublerait
le repos des fam ille s, et laisserait une incertitude , sur les propriétés inconciliables avec toute idée de bien public.
D élibéré à Clerm oat Ferrand , le 18 Brumaire , an 8.
B O I R O T.
S o u s s i g n é qui a lu la c o n s u l tat io n c i - c o n t r e et des a u t r e s
p a r t s , est du m ê m e av i s et p a r les m ê m e s motifs.,
L e
D élibéré à Riom , le 18 Brumaire , an 8. P A G E S .
L e C o n s e i l S o u s s i g n é qui a vu la présente consultation , e st
entièrement du m êm e avis et par les m êm es raisons ; il n ’y a
pas de question dans tout le droit, sur laquelle on puisse réuni
plus d’authenticité , décisions de lois , soit de droit écrit, soit de
c o u tu m e . a rre ts et doctrine des Jurisconsultes. L ’auteur de la
consultation en a cité un grand nombre à l ’appui de sa résolu
tion et il a dit avec raison qu’0n pourrait encore les multiplier.
C e serait une bien pauvre objection que de dire pour celui qui
n ’était ni né ni conçu à l’ouverture de la succession , qu’il peut
y venir p a r représentation de ses au te u rs, lorsque ceux-ci h é r i
tiers du prem ier dégré , avaient répudié la succession. On n e
peut succéder au droit qu ’avait le représenté, q u ’a u tant que luim êm e n ’avait pas renoncé à ce droit ; de là vient ce qu’ à ju d i
cieusem ent observé C hab rol, dernier com mentateur de la c o u
tume d’A u v e r g n e , sur l ’article prem ier, du titre 12 . V o ici les
termes dont il se s e r t : i l a r r iv e so u ven t qu e le f i l s renonce à
la succession d e son p è re , et qu ’au d efa u t d ’au tres en fa n s , c e u x
d u ren o ç a n t se p résen te p o u r l ’accepter : ils n ’a u ra ie n t p a s ce
d ro it s ’ ils n 'é ta ie n t n i nés ni conçus a u décès d e le u r a y e u l.
C ’est ici précisément le cas où se trouve André J o u r n e t , puis
que tous ce u x de sa branche qu’il voudrait représenter avaient
tous renoncé à la succession dont il s’ag it, et que lui-même n’était
ni né, ni con çu à l’ouverture de ladite succession. A u s u r p lu s ,
1’in c a p a c ité des enfans d’A ndré Journ et étant démonstrati
vement é ta b li; toutes les autres questions du mémoire y étant
entièrement subordonnées, deviennent parfaitement inutiles à
traiter.
Délibéré à Riom, le 2 Germinal, au 8.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Thomazet, Jacques. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
décès sans postérité
curateur
le mort saisi le vif
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
successions
successions répudiées
Description
An account of the resource
Mémoire et consultation [Jacques Thomazet]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n. (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1727-Circa An 8
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0153
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53694/BCU_Factums_M0153.jpg
coutume d'Auvergne
coutume du Bourbonnais
curateur
décès sans postérité
le mort saisi le vif
Successions
successions répudiées
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53873/BCU_Factums_M0613.pdf
372266759c7ce87f1f0d2a36dd4f209a
PDF Text
Text
MEMOIRE
POUR
L a d a m e E l e o n o r e R O L L A T , é p o u se d e F r a n c o i s P h i l i p p e C O U R B Y , h a b ita n t à A ig u e p e r s e .
•A U CUNE situation n’est com parable à la m ienne. Mon époux
est accusé d’un crim e horrible dont je n’ose prononcer le nom :
son honneur et le m ien, le sort de ses enfans, seront bientôt dans
la balance de la justice; et ses persécuteurs s’a g iten t, quand luim ê m e , accablé de sa situ a tio n , il fu it la calom nie sur un sol
étranger.
Lorsque pour la prem ière fois cette nouvelle épouvantable
vint jusqu'à m oi, toute m a conviction de l’innocence de m on
époux ne m ’em pécha pas de résister à ses résolutions, et de les
ébranler par mon désespoir. O u i, et je m ’en confesse co u p ab le,
je l'im portunai de mes la rm e s, je séduisis son courage , et sa
•fuite fu t un effort de sa tendresse ; m aintenant je m e dem ande
avec effroi si sa présence ne lui eût pas été plus u tile , et si son
danger, au co ntraire, n’est pas né de m a terreur.
Dans cette cruelle anxiété, que ne puis-je appaiser de m on
sang ceux qui sont altérés de celui de m on époux ! Q ue n ai-je
A
�(o
du moins le droit de me présenter pour lui en jugement, pour
confondre ses accusateurs, pour le défendre....... ? Que dis-je?
me défendre m o i-m êm e; car jusqu’au tombeau ma destinée
h’est-elle pas attachée à la sienne?
JVlais la rigueur des lois me repousse du tribunal qui va juger
ma propre cause. Ainsi la nécessité me dicte mon devoir. J ’ap
prendrai à mes juges une partie de ce que mon époux auroit pu
leur dire, ou du moins quelques-unes des circonstances que des
témoins auroient pu attester.
Je ne me suis point dissimulé combien de difficultés j’aurois
à vain cre, quand je n’aurois à opposer que mon foible langage
à des combinaisons préparées par la méchanceté même. Car
telle est la condition d’un malheureux accusé, que déjà la ca
lomnie a jeté de profondes racines, alors même qu’il peut en
treprendre de la combattre. Que peut sa voix plaintive contre
les cris précurseurs de cette astucieuse ennemie? Et lorsqu’enfin
on consent à l’entendre , combien ne faut-il pas encore qu’il
dévore l ’humiliation de la défiance qu’il excite? car la préven
tion du mal est malheureusement celle qu’on s’obstine le plus à
conserver ; et les esprits même les plus raisonnables semblent
trouver plus commode de croire le crim e que d’en méditer les
invraisemblances.
Ces réflexions pôrtoiént le découragement dans mon Ame ,
quand le souvenir de mes enfans a vaincu ma répugnance, et m’a
élevée pour ainsi dire au-dessus de moi-même. O u i, me suis-je
écriée, je l’entreprendrai cette tâche pénible. La timidité de l’é
pouse cherchera des forces dans l’amour m aternel, et ces deux
titres prêteront peut-être à môn récit un intérêt que mes foibles
accens n’auroient pas eu la prétention d'espérer.
C ’est à des ju ges, au reste, que je veux m’adresser, et ceux-là
ne r e p o u s s e r o n t pas mes paroles avec l’ennui de les entendre ; leur
terrible ministère ne leur donnera de défiance que contre la pré
vention qu’ils craindroient trouver en eux mêmes. Mes récits se
ront donc écoutés comme une explication nécessaire, par ceu *
�( 3 )
que la loi a armés de sa puissance ; car ils trem bleront, sans doute,,
de l’idée seule qu’ils pourroient condamner une famillg honnête 4
l’infamie , et un innocent à la mort.
Les relations de mon époux avec la maison de Murol nç furenjt
pas de ces liaisons soudaines et fortuites , qui ne donnent pas le
temps de s’apprécier, ou de concevoir de justes défiances. G’esjt
depuis son enfance qu’il connolt le sieur de Murol ,fîls aîné , ayant
été élevé avec lui dans le ipéme pensiçnn^t, à ^yon.
Cette habitude de se voir a continué dans un âge plus avancé j
mais l’historique de ces premières liaisons n ’a rien d’essentiel à
remarquer, et je me hâte d’en venir à des époques plus récentes.
Jusques à l’année dernière, je n’a.vois v,u à Aigueperse que les
sieurs de Murol fils , et leur père m’étoit absolument inconnu. Il
me paroissoit même que Courby le connoissoit à peine , et ne ,vi;voit avec lui que sur le ton du respect et des convenances de
société.
N ous ignorions entièrejnent ses affaires, e t n e connoissions
celles de ses fils que par c et extérieur d ’opule.nce, qui fait illusion
au vulgaire tan t qu’on a des ressources ¡pour le soutenir.
Cependant, tin jour de l’été dernier, le sieur de Murol p ère , se
trouvant seul chez son fils cadet avec C ourby, fit tomber la con
versation sur la situation de ses fils , çt syr le mécontentement
qu’il éprouvoit de leurs dépenses excessives.
Cette ouverture pouvoit n’étre que le désir secrçt d’ un père de
faire parvenir ses plaintes à ses fils, par un organe qu’il supposoÿ
plus persuasif peut-être. Mais .le sieur de Murol père ne se borna
pas là. Soit hasard, soit que la première idée lui en fit naître une
seconde, il confia bientôt à Courby qu’il irçéditoit pour son fils
ainé le projet d’une grande alliance, mais qu’il étoit retenu par
des dettes pressantes, dont l’éclat alloit rpiner toutes ses espé
rances.
A lors, comme par réflexion, il demanda à Courby s’il ne pqurroit pas lui faire trouver de l’argent.
A 2
�( 4
)
Un jeune homme ne pouvoit être qu’embarrassé h cette brusque
proposition. Courby fut forcé de lui avouer son impuissance de
lui être utile. « J’ai des dettes m oi-même, lui d it-il, sans avoir à
me reprocher un excès de dépense ; mais j’ai eu la foiblesse de
» cautionner les effets d’un homme que je oroyois incapable de
» me tromper; il a fait faillite, et m’a laissé beaucoup à payer;
» et dans ce m om ent, je cherche moi même 18,000 fr. pour finir
» de m’acquitter.
» Q u’importe ce que vous m’objectez, lui répondit M. de
» Murol; vos ressources pour avoir de l’argent ne tiennent sans
» doute qu’à une signature de plus; je vous offre la mienne pour
» les 18,000 fr. dont vous avez besoin, et à votre tour, vous me
donnerez la vôtre pour me procurer l’argent que je cherche;
m elle me sera utile, parce que vous êtes d’une famille de
« négocians , et que par moi-méme je ne trouve plus à era» prunter : de cette manière , cous nous serons rendu un service
t> mutuel. »
J’igncrai dans le temps cette conversation ; et Courby m’a avoué
depuis que quoiqu’il y eût un côté avantageux pour lui dans la
proposition du sieur de M urol, ces combinaisons d’emprunt et de
signatures brouilloient ses id é es, et confondoient son inexpé
rience ; qu’il s’étoit contenté en conséquence de bégayer un con
sentement évasif, et avoit trouvé un prétexte de se retirer sans
rien terminer.
Mais le sieur de Murol père n’abandonna pas ainsi son plan. Le
20 aoû t, je le vis à Aigueperse. Il parut fâché de ne pas y trouver
C o u tb y , que je l’engageai à attendre. Courby ne revint pas le soir,
et M. de Murol ne partit que le lendemain après dîner. Je ne cher
chai point à savoir le motif de son voyage; je me contentai de le
recevoir avec honnêteté et empressement.
C ’est dans son chemin qu’il trouva Courby ; il le pria de rétro
grader jusqu’à Clermont, et ne le quitta plus jusqu’à ce que les
billets fussent souscrits. Je fus informée de tout cela au retour
de mon époux. Jusqu'alors il m avoit dissimulé l’embarras où
�( 5 )
l ’avoit jeté sa complaisance pour un faux ami ; il me montra pour
18,000 fr. de b illets, qui suffisoient pour le libérer.
Bientôt il s’occupa de placer ces billets à Thiers; et le sieur
de Murol l’ignora d’autant moins, que Courby prit plusieurs fois
un cheval chez lui ( à la Borde ) pour y aller, et je crois même
un domestique.
Dans le courant de septembre, je vis M. de Murol père une
fois à Aigueperse : il parut y être venu pour consulter M. Lagout
sur sa santé, craignant, disoit-il, être atteint d’hydropisie. A son
retour il ne dit rien de la consultation; et cette réserve m’ayant
étonnée, j’en demandai la cause à Courby qui l’avoit accompagné.
Il me répondit q u e , sur les questions de M. L agou t, M. de
Murol avoit avoué qu’une gale traitée avec trop de précipitation
avoit depuis dix ans dérangé sa santé ; qu’il lui sembloit , de
loin en loin, sentir une nouvelle invasion de cette m aladie, et
que sa santé alloit toujours en empirant; que M. Lagout lui avoit
ordonné une certaine eau , dont la recette ou l’adresse étoit
contenue dans un petit imprimé qu’il lui remit.
M. de Murol partit, engageant Courby à aller le voir les der
niers jours de septembre, à la Borde, où ses fils devoient venir
faire une partie de chasse.
C’est au 29 ou 3o septembre qu’on place l’épouvantable ac
cusation qu’ont répandue les sieurs de Murol contre le malheu
reux Courby. Hélas ! ils l’accabloient encore de démonstrations
d’am itié, quand déjà leurs affreux soupçons le signaloient en
public comme un vil crim inel; et le poison qu’ils lui préparoient
étoit bien plus dangereux et plus subtil que celui........ Mais à
quoi tendroit une plus longue réticence; il faut bien m’avouer
à moi-même que Courby est accusé d’un empoisonnement.
C ’est, dit-on, en mangeant des pêches que le. sieur de Murol
père aperçut au fond de son verre un sédiment épais, dont le
gout lui lut désagréable , quoiqu'il eût mangé sans répugnance
les pêches qui avoient été saupoudrées de la même matière. Il
vomit beaucoup, éprouva des douleurs aiguës, eut des ulcères
�( 6 )
dans la b o u ch e, et dit à ses am is, le lendem ain, qu’il croyoit
avoir été empoisonné.
Voilà ce qu’a répandu la famille de M urol, en ajoutant même
que C ou rby, présent ^ disoit en confidence aux assistans : Il n’eu
reviendra pas.
Ici toutes les époques deviennent précieuses, car les événemens postérieurs portent avec eux des conséquences pressantes.
Le jour même de cet événem ent, et le lendemain , les fils
Muro.l, leurs amis, et Courby, firent la partie de chasse projetée.
Le ^6 o cto b re, Courby retourna à la Borde : Murol fds ainé
lui emprunta huit louis pour payer des impositions ce même jour.
Le sieur de Murol père étoit présent, et dit qu’il en faisoit son
affaire.
Le même jo u r , Murol ainé engagea Courby à aller avec lui
voir le curé de Beauregard, et le sieur Parricaud, qu’il n’avoit
pas v u , d it-il, depuis son retour de Paris.
L e 10 octobre, M. de Murol père envoya son domestique à
Aigueperse, avec une lettre d’invitation à Courby pour aller à
la Borde le dimanche suivant, manger un cochon de lait avec
le curé de Beauregard.
En effet, le dimanche suivant, 11 octobre, Courby alla dîner
à la Borde, fit le soir une partie de piquet avec M. de Murol
et le c u ré , et ne revint à Aigueperse que 'le lendemain.
Le 21 octobre, M. de Murol père vint à Aigueperse avec le
nommé Chapus , domestique de son fils. Courby étoit à Gannat,
et j’engageai M. de Murol à dîner.
Quand j’allai donner des ordres à la cuisine, mes domestiques
me recommandèrent de ne pas laisser toucher mes enfans par
M. de M u rol, parce que Chapus leur avoit dit qu’il étoit plein
de gros boutons, depuis un remède que M. Lagout lui avoit
donné.
En attendant le dîner, M. de Murol alla chez M. L agou t,
où Courby de retour alla le chercher.
T ém oin de la prem ière conversation, o n .n e lui cacha pas la
�( 7 )
seconde , et il entendit M. de Murol causer avec M. Lagout de
l’effet de son remède. M. de Murol se plaignit d’avoir eu des
coliques, des vomissemens, et une salivation incommode qui lui
avoit fait naître de petits ulcères dans la bouche. Il termina
cependant par remercier M. Lagout du rem ède, parce que sa
santé étoit, dit-il, beaucoup meilleure depuis quelque temps.
M. Lagout avoua ne pas connoître la composition de l’eau qu’il
n’avoit conseillée qu’en le déclarant ainsi, et sur l’approbation
que sembloient y donner ses confrères. Il ne s’étonna pas des
accidens dont lui avoit parlé M. de M u rol, parce qu’il soupçonn o it, d it-il, que le remède contenoit du mercure.
M. de Murol partit le soir, et recommanda beaucoup à Courby,
s’il venoit à la Borde dans la sem aine, de ne pas traverser l’Allier
qui avoit, dit-il, grossi beaucoup, et où il s’exposeroit.
Il laissa h Aîgueperse une charrette couverte d’un drap , et em
prunta de^Courby une carriole pour faire un voyage àMontluçon.
Le 2Q^3'optombre, le sieur de Murol père vint à Aigueperse
avec un de ses fils, pour rendre la carriole qu’il avoit em pruntée,
et reprendre la sienne avec un cheval de selle que son fils avoit
prêté à Courby depuis deux mois.
Ils parurent désirer reprendre les effets de 18000 francs, si
Courby ne les avoit pas négociés; et Murol fils sembloit seul y
mettre quelque humeur. Courby avoit négocié pour 16400 fr.
d’e ffe ts, pour ses propres dettes ; et il répondit à M. de Murol
p ère, que si la proposition faite par lui-m êm e ne lui conve-
noit plus, il étoit prêt à lui souscrire des effets équivalens; et
il en signa en effet pour 19362 francs , ce qui comprenoit un
intérêt sans doute assez considérable; et je souscrivis moi-méme
ces nouveaux effets dont les sieuçs de Murol sont aujourd’hui
porteurs.
Un mois se passa ensuite sans que j’euS9e rien de commun
avec cette famille. T out d’un coup , au mois de décembre ,
j appris 1 horrible nouvelle que le sieur de Murol accnsoit hau
tement Courby de l’avoir empoisonné, et qu’une procédure cri-
�( 8 )
minelle étoit provoquée par ses fils et lu i, non qu’ils eussent osé
accuser en leur nom , mais à la diligence du magistrat de sûreté
de C lerm ont, qui les faisoit tous entendre comme témoins.
Ce crim e, ces combinaisons, mes idées accablantes, un retour
de comparaison sur les temps cruels des délations et des écha
fauds , tout cela m’ôta le discernement et la réflexion. Je ne
voulus entendre celles de personne. Mon époux partit, et je me
trouvai seule à la vue de ces indifférens qui soupçonnent tou
jours, et ne réfléchissent jamais.
Quoi qu’il en soit, le temps qui s’est écoulé depuis le mois de
décembre a permis à la justice de faire d’exactes recherches. L e
sieur de Murol p è r e , âgé de prés de quatre-vingts a n s , a été
atteint d’une maladie épidémique inflammatoire, à laquelle s’est
jointe une hydropisie. Il s’est mis alors dans les mains d’un ch i
rurgien ignorant, et il est mort dans les premiers jouis d’a v r il,
ayant survécu par conséquent plus de six mois à son prétendu
empoisonnement.
Je n’ai jamais désiré la mort de personne ; mais je le confesse
sans rou gir, la mort de cet homme a ôté de mon cœur un far
deau bien pesant. Ce n’est pas que j’eusse, comme de V itellius,
de la joie à considérer le cadavre d’un ennemi ; loin de moi ce
sentiment de vengeance. Mais je n’ai pu m’empêcher de dire:
C ’est là qu’étoit cachée la vérité ; c’est là que le triomphe de
l’innocent sera écrit par les mains même de la Providence.
Que mes lecteurs me pardonnent .cet aveu d’un mouvement
que je n’ai pu vaincre. Il faut avoir été dans ma position cruelle,
pour sentir qu’elle justifieroit même un sentiment moins légitime.
Me voici donc devant mes juges , incertaine maintenant de
ce qu’il me reste à leur dire; car quand toute la procédure me
ceroit co n n u e, je ne puis sans ridicule me jeter dansja carrière
polémique d’une discussion de droit criminel.
Mais la défense de mon époux sera plus dans la conviction de
íes juges que clans mes efforts. Je n a i voulu que révéler des
faits
�C 9 )
faits de ma connoissance , et sans doute ils vaudront mieux que
mes réflexions.
Un crim e ne se commet pas sans être nécessaire. C o u rb y ,
nanti d’effets signés de M. de M u ro l, n’avoit pas besoin de s©
défaire de lui pour les retenir. On est bien plutôt capable d’un
vol hardi, et sans danger , qu’on ne l’est d’un empoisonnement.
Si le sieur de Murol père est venu tant de fois aprè9 le 29 sep
tembre à A igueperse, et s’il a continué d’appeler Courby à la
Borde, qui pourroit se défendre d’étre convaincu qu’il n’a pa»
cru être empoisonné par lui ; car eût-il cherché la société de1
son assassin ?
Cependant c ’est, dit-on, le jo u r même du déjeûner des pèches,
que le sieur de Murol se crut empoisonné ; c ’est le lendemain
qu’il fit part de ses craintes à ses amis.
S ’il eût soupçonné d’autres personnes , on pourroit se rendre
raison de cette continuation de confiance ; mais le sieur de
Murol a dit encore avoir vu Courby saupoudrer les pèches de
la matière blanche, qui 11e lui répugna qu’au fond du verre, ee
qui lui causa à l’instant même des douleurs et des vomissemeus«
L’idée de l’em poisonnem ent, e t de son au teu r , se seroit d u n e
liée sans intervalle dans son imagination ; et alors com m ent con
cevoir c ette suite de fréquentation jo u rn a liè re , ces repas m ul
tipliés, qui auroient rendu aisée la consom m ation du c rim e ,
et qui n’ont cependant donné lieu au soupçon d’aucune tentative
nouvelle ?
Comment concevoir encore qu’un homme se croyant empoi
sonné le 3 o septembre , se disant tourmenté des douleurs ordi
naires de ce m al, consulte un médecin le 20 octobre , et ne lui
dise pas un mot de ses m aux, ni de se3 terreurs?
Là , au contraire , les vomissemens sont attribués, par le ma
lade lui-méme , à une autre cause. Ils ne l’inquiètent point du
to u t, puisque l’amélioration de sa santé, et le rem e x ciment au
médecin , sont le seul objet de sa visite.
Cette bonne santé se soutient pendant quatre mois consécutifs,
B
�( IO )
fit il tonibe-enfin malade. Est-il mort d’hydropisie ? est-il mort
d’une inflammation dans le ventre ? On dit l’un et l’autre. On
dit aussi qu’il a été traité de l’hydropisie, et que la ponction lui
a été faite deux fois dans le mois qui a précédé sa mort,
r Je n’entends rien en médecine : mais les effets de l’arsenic
sont connus de tout le monde; il passe pour le plus mortel et
le plus prompt des poisons.
Si son action est brûlante et corrosive, si le premier contact
produit des. ulcères dans l’instant même , com m ent concevoir
qu’un homme empoisonné devienne lentement hydropique ;
qu’une surabondance d’eau exige deux ponctions ; qu’il ne se
manifeste d’inflammation que dans le bas-ventre, sans lésion des
viscères supérieurs?
<
Le cadavre a été vu , dit-on, par des docteurs délégués par
la cour criminelle. Je n’ai garde de supposer qu’ils se soient
livrés à des conjectures ; ils n’avoient point, comme les Arusp ic e s , à consulter les entrailles d’une victim e pour présager
l’avenir. Leur tâche plus facile a été de chercher dans le corps
d’un hom m e, mort hydropique, si des traces de poison étoient
visibles , et de vérifier les corrosions qu’auroient dû recéler
l’estomac et les premières voies.
•
'
Si le poison n’a pas été visible à leurs yeux , le sera-t-il à la
conscience du juge?
On prétend que C o u rb y, au lieu de donner du secours à M. de
M u ro l, les 29 et 3o septem bre, a dit à plusieurs valets de la
maison qu’il étoit vieux et ca ssé, qu’il ne guériroit pas ; et de
commentaires en com m entaires, on va presque jusqu’à y voir
un aveu de son crime. C ’est ainsi que la malignité interprète
les expressions les plus indifférentes. Mais comment ne pas voir
qu’un coupable, dans cette position, auroit au contraire affecté
ce qu’il ne sentoit pas , et multiplié ses soins pour n’être pas
soupçonné.
Il à , dit-on encore , demandé à un pharm acien, après l'empoi
sonnement , et dans la r u e , si 1 opium étoit un poison qui fit
�( 11 )
souffrir long-temps. Autre arme de la m échanceté, pour en tirer
xine conséquence à charge. J’ignorois ce fait, et j’ai même des
raisons de suspecter ceux qui l’ont accrédité. En cherchant dans
le passé à quelles époques j’ai vu mon époux attristé de l’embarras
subit où la faillite d’un ami l’avoit je té , je n’ai pas trouvé dans ma
mémoire qu’il ait eu jamais des instans de désespoir, ou du moins
il n’en a pas manifesté en ma présence. Il savoit d’ailleurs que je
viendrois à son secours ; et je suis humiliée que pour 18000 fr. et
surtout pour une dette d’honneur, on puisse croire que mon
époux se trouvât réduit à attenter à ses jours.
<
Quant à toute autre version, je la dédaigne. Quel insensé concevroit l’idée qu’il pourroit faire avaler de l’opium à son ennem i,
c ’est-à-dire, la plus amère des potions, sans qu’il la refusât, ou
qu’il pourroit la glisser à dose suffisante parmi ses alimens?
*
Celui qui pour se défaire d’un homme veut l’empoisonner, a
pour première pensée d’ensevelir en lui même le secret de son
crime. S’adresse - t-il à un pharm acien, il est le premier qu’il
trompe; et à moins de croire l’empoisonneur sans bons sens, on
ne supposera jamais qu’il ait parlé de la inort au pharmacien à qui
il deinandoit du poison.
Mais qu’aura gagné la calomnie à tout cet amas de faits incohérens, et de petits détails exagérés par la passion, ou grossis par
les circonstances? car, s’il n’est pas constaté qu’il y ait empoison
nement , il n’y a pas de coupable à chercher.
Vaut-il mieux abandonner ce qui se présente à l’idée la plus
simple, et substituer des fictions ou des conjectures , à ce qu’ou
conçoit avoir été un effet de l’ordre naturel des choses ?
Et parce qu’un vieillard, d’un tempérament u sé, est mort à
près de quatre-vingts ans, faudra t-il s’obstiner à croire qu’il n’a
dû mourir que d’une mort violente?
S il n étoit mort que du plus subtil des poisons, auroit-il résisté
six mois? auroit-il surtout passé quatre mois dans le meilleur
état de santé qu’il ait eu depuis dix ans?
Certes, je n’ai pas cru un instant qu’aucun homme au monde
B 2
4
�( 12 )
put dire en son âme q u ’il est convaincu de la réalité du crim e,
et que Courby mérite la mort : je l’ai cru encore moins de ses
juges, pour qui le premier devoir est de ne se rendre qu’à l’évi
dence. Mais il m’importoit aussi de détruire jusqu’à l’apparence
d’un crime dont l’idée seule m’accablera jusqu’à ce que le soup
çon même en soit détruit pleinement.
Je ne sens que trop de quelle influence cet événement sera
pour ma destinée future ; car le malheur d’un aussi cruel soupçon
ne peut se réparer qu’à la longue ; et j’ose croire que les cica
trices de la calomnie ne seront point ineffaçables. La conduite
à venir de mon époux se réglera, je l’espère , sur les circons
tances dans lesquelles sa mauvaise étoile l ’a placé.
Je puis donc voir encore le bonheur renaître dans mon asile;
et si c ’est une illusion, que du moins un si flatteur horoscope
ne soit pas enlevé à une mère : mon époux, rendu à sa fam ille,
ne verra dans son infortune passée que le devoir sacré d’en effacer
jusqu’au souvenir. Il peut encore, malgré la calomnie, transmet
tre à ses en fans un nom sans ta ch e, et vivre avec honneur dans
leur mémoire.
C O U R B Y , née R O L L A T .
I
�CONSULTATION. :
L e C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu le mémoire de la dame
R o llat, femme Courby ,
»
*
, d’après les faits contenus audit mémoire , que si les
médecins délégués par la cour criminelle pour examiner le ca
davre du sieur de M urol, n’ont pas trouvé de traces de poison',
Ou s’ils n’ont pas exprimé une opinion certaine et fondée sur ce
genre de m ort, il paroit impossible qu’un jury se déclare con
vaincu que le sieur Courby est coupable.
E s t im e
O n n’a pas accusé le sieur C ourby d’une simple tentative d ’em
poisonnem ent , mais bien d ’un em poisonnem ent effectué avec de
l’arsenic jeté sur des pèches. P a r conséquent il ne faut pas se
borner à exam iner s’il y a preuve de la ten ta tiv e, mais il faut
savoir s’il y a un em poisonnem ent et un coupable.
La question préalable d’une instruction criminelle est de cons
tater le corps d’un d é lit, de même que la première chose à exa
miner par le jury est de savoir si le délit est constant.
Car il n’est pas besoin de chercher s’il y a un coupable, lors1 qu’il n’y a pas certitude qu’il y a eu un délit : D e re priusquàm
de reo inquirendum est; e t , comme le dit Dom at en son Traité
du droit public : « C ’est le premier et le plus indispensable des
« devoirs. Cette preuve est même tellement essentielle, qu’elle
« ne peut être suppléée ni par les dépositions des témoins , ni
« par des conjectures, ni même par la confession de l ’a c c u s é . »
D après c e la , peut-on bien dire que le corps du délit imputé
au sieur Courby, est constant, et qu’il est c e r t a i n qu’il y a eu.
empoisonnement? R ie n n e paroit au c o n t r a ir e moins prouvé.
�( i4 )
Aucun rapport de médecin ou chirurgien ne paroit avoir pré
cédé la mort du sieur de Murol : lui seul a eu quelques soupçons
que rien n’a vérifiés. Ainsi , jusque-là aucun corps de délit n’est
constaté.
Après la mort du sieur de M u ro l, la cour criminelle a bien
fait ce qui étoit en elle pour constater le corps du délit , puis
qu’elle a commis des hommes de l’art pour visiter le cad avre,
et en décrire l’état. Le rapport qui a dû en être fait sera soumis
au ju ry , s’il est antérieur à l’acte d’accusation ; et c ’est là où
le jury puisera principalement les idées qui appelleront sa con
viction sur le fait de savoir s’il y a un d é lit, c ’est-à-dire, s’il
est constant que le sieur de Murol père est mort empoisonné.
Sans doute la présence du poison n’est pas toujours visible ;
mais son effet n’en est pas moins marqué par des signes exté
rieurs , surtout quand le malade en a été victim e, et quand il
s’agit d'un poison aussi violent que l’arsenic.
Aucun auteur n’a mieux décrit les effets de ce poison , et les
signes auxquels on peut les connoitre , que M. Ma lion , en son
Traité de médecine légale; et c ’est le meilleur guide qu’on
puisse avoir pour raisonner sur une matière aussi grave et épi
neuse.
Les poisons corrosifs, dit cet auteur, tuent très-promptement,
et leurs effets s’annoncent avec une rapidité qui ne.permet guère
de douter de leur emploi. (T o m e 2 , p. 2.yS. )
L ’arsenic est soluble dans tous les liquides ; c ’est le plus in
domptable des poisons : il ne peut être mitigé , ni masqué en
aucune manière, ( Page 276, )
Quand il y a soupçon d'empoisonnement, tout m édecin, avant
d’inspecter le corps , doit s’informer soigneusement de IVige,
du sexe , du tempérament , des forces , du genre de vie du
, s’il étoit sain ou malade
combien de temps il a
vécu depuis, de quelles incommodités il s’est 'plaint , quelle
espèce de régime ou conduite il a observée ap rès, s’il a été
secouru par un médecin expeiimenté ou par des ignoransu
d é f u n t
( Pajje 26G. )
,
�( i5 )
Après cela, l’inspection du cadavre consiste à examiner l’état
des parties extérieures et les signes intérieurs du corps.
Q u a n d l’arsenic n’est pas conservé en nature dans quelques
viscères , ce qui arrive fréquem m ent, sa présence est au moins
manifestée par des traces de lésion et de corrosion assez remar
quables dans toute la route qu’il a parcourue (1) ; son action va
même jusqu’à se manifester au-dehors (2) ; et quelque nombreux
encore que soient ces signes , le médecin , comme le ju ge, ne
peuvent se croire convaincus que par leur ensemble.
Ici il faut d’autant plus de circonspection , qu’il s’agissoit d’un
sujet vieu x, et dont la santé paroissoit altérée depuis long-temps.
Des douleurs internes et des vomissemens sont, dit-on, le seul
indice de poison qu’il a remarqué lui-mémé (3). Mais une foule
(1)« 2°. L ’érosion inflammatoire, gangrène, taches éparses dans l’œsophnge,
l’estomac, le pylore, les intestins, le sphacèle de ces parties. — Quelquefois l’es
tomac p ercé, — le sang coagulé, — le péricarde rempli d’ un fluide jaunâtre ou
corrom pu, les autres viscères ramollis et comme dissous, parsemés d’hydatides,
de pustules, de taches; le coeur flasque et comme racorni; le sang qu’il contient,
noir et presque solide; le foie noirci, ou livide, ou engorgé. »( M alion, pag. 272.)
« On voit enfin, tant extérieurement qu’intérieurem ent, des vessies disper
sées ça et là, remplies d’ une sérosité jaune ou obscure, et presque toujours d’une
odeur désagréable. » ( Ib id , pag. 273. )
(2) « Distension.excessive de l’abdom en, au point d’en menacer la rupture •
— taches de différentes couleurs sur la surface du corps, surtout au dos aux
pieds, à l’epigastre; — la prompte dissolution, quand la personne est morte du
poison. On peut trouver dans la dissection du cadavre des indices certains d’ em
poisonnement: — la roideur des membres, la tuméfaction du ventre, ne sont
pas des signes constans ; — mais ce qu’il y a de constant dans les cadavres des
personnes qui ont péri d’ un poison âcre ou caustique, c’ est de trouver l’oesophage,
l’ estomac et les intestins grêles, atténués, enflammés, gangrenés, rongés et sou
vent percés.... Il suffit de résumer ces signes, pour être convaincu de la néccssilé^de ne jamais se décider que par leur ensemble. » ( Ibid . p. 270, 271 , 307. )
( >) « Quand on n a pas été ci temps d ’examiner la nature du vomissement, que
les sympLÔmes sont passés, que le malade est guéri , peut-on tirer des indices
suffisans de l’assertion du plaignant, et de celles des personnes qui l’ont assisté?
— Je ne le pense pas. » ( Ib id . pag. 3o 6. )
�( 16 )
d’alimens, même très-sains, peuvent fournir les mêmes résul
tats (1).
Il parolt que le sieur de Murol avoit été mal traité d’une
gale. Les empiriques ont pour ces sortes de maux des remèdes
dont la promptitude séduit le m alade, mais dont l’effet double
ment funeste consiste à faire rentrer dans la masse du sang une
humeur vicieuse, dont la nature cherchoit à débarrasser le corps:
et s’ajoute à ce mal réel, le mal plus grand peut-être du remède
lui-même. Aussi est-il constant qu’ une éruption rentrée suffît:
seule pour agir mortellement sur l’individu, et laisser des traces
presque semblables à celles du poison (2).
L ’opinion qu’a pu avoir le sieur de Murol lui-même sur son
état, ne doit pas être d’un très-grand poids; car 011 sait com
bien un m alade, et surtout u n vieillard, est sujet à se frapper
l’imagination : pour peu que ses craintes soient accréditées par
quelque soupçon, il ne trouve plus rien que d’ extraordinaire dans
son état, et il s’obstine à ne pas croire que des maux naturels, ou
la caducité , puissent être l’unique cause de son dépérissement.
Cependant la plupart des maladies vives s’annoncent par une
invasion soudaine ; et cette rapidité même semble tellement inex-
(0 a Q u’ un hom m e ait mangé des alimens difficiles à d ig ére r, ou faciles à
entrer en putréfaction, il peut arriver que quelque temps après il se trouve
très-m al, et qu’il ait tous les symptômes du poison, jusqu’à mourir.
» J’ai vu une châtaigne rô tie, avalée toute entière, donner tous les signes
de l'empoisonnement. Les têtes et pieds de ve au , les écrevisses, les huîtres,
les vins troubles et avariés, ainsi que les vins frelatés, ont très-souvent aussi
produit cet effet. « ( M alion, pag. 299. )
(a) « Certaines maladies laissent sur les cadavres des traces peu différentes
des signes ordinaires du poison. »
a U ne éruption rentrée, une affection scorbutique très-avancée, une bile
très-Acre, etc. — Mais par une contemplation réfléchie des syrtiptômes, ct la
comparaison que le médecin en fera avec les signes que porte le cadavre, il
distinguera aisément les restes d’une maladie violente > d’avec les caractères de
l’empoisonnement. » ( Ib id . pag. 3 i 3. )
p lica b le ,
�( i7 )
plicable, qu’on repasse alors dans sa mémoire jusqu'aux moindres
détails qui ont précédé; les choses quiétoient auparavant les plus
simples se grossissent, la crédulité s’en empare. P o st hoc, ergo
propler h o c , se dit - on ; et ce raisonnement de l’ignorance n’en
séduit pas moins quelquefois les personnes les moins prévenues.
Un soupçon alors, né du plus léger indice, acquiert bientôt de
la consistance, à tel point que les explications les plus naturelle»
sont dédaignées ; le préjugé l’emporte sur l’expérience ; et on ferme
les yeux sur les exemples plus frappans, qu’on a eus souvent sous
les y e u x , des bizarreries de la nature, et des accidens de la vie (1).
Car en cette matière , dit le docteur C o ch in , et quand il s’agit
de juger des poisons, les conjectures les plus vraisemblables ne
sont souvent que des illusions (a).
Le célèbre auteur Zacchias avoit été consulté sur un événe
ment presque semblable à celui du sieur de Murol. Un individu
avoit fait un ample diner avec un am i, et ne tarda pas à éprouver
de grands malaises qui furent suivis d’un prompt dépérissement.
Il devint subitement pâle et exténué, perdit la raison , et mourut.
Le diner ayant été son dernier acte de santé , les soupçons s’é
levèrent contre celui qui l’avoit partagé ; il fu t mis en prison.
L e cadavre fut ouvert, et Zacchias y trouva les intestins trèsenflés, le sang coagulé dans les ventricules du cœ ur, la substance
même du cœur d’une couleur dégénéiée, la tête et les lèvres
grosses, les poumons livides et adhérens, le foie corrompu.
T ou t cela pouvoit paroltre des signes de poison. Mais ce docte
(i) « Il est une infinité de maux sourds, qui augmentant insensiblement en
intensilé, peuvent avoir affligé un homme depuis longues années, sans qu’il
s’en soit lui-même beaucoup aperçu, et q u i, éclatant tout à coup, paraissent
inconcevables à ceux qui ne sont pas au fait des divers accidens de la v ie , et
qui ont l’imagination préoccupée. » ( Ibid. png. 317. )
(a; Qucst. du poison, t. i«r. , png. 4 ' Recherches sur les signes anatomique*
et judiciaire* des signes ¿ ’empoisonnement, par M . de lk t z .
G
*
�I i8 )
médecin no chercha que dans son art et dans son génie des con
séquences que la prévention auroit dénaturées, s’il se fût aban
donné aux fausses impressions de l’opinion publique.
Dans une consultation très-méthodique et très-savante, Zacchias suivit pas à pas tous les symptômes décrits; et il fit résulter
de leur ensemble, que l’homme étoit mort de la jaunisse.
Il ne jugea pas possible que ces sym ptôihes fussent nés du
p o iso n , puisque la natu re n ’avoit pas fait un effort continuel et
sans re lâ ch e , pour se débarrasser de cet ennem i dangereux ( 1 ).
Il y avoit eu un vomissement soudain ; mais il avoit cessé ; mais
il n’y avoit pas eu de ces douleurs opiniâtres et de ces angoisses
toujours croissantes, qui dénotent une prochaine dé génération
des solides Ta).
La corruption du foie et l’adhérence des poumons avoit paru
de quelqu’importance a Zacchias ; mais il pensa que si la cause
en lut venue du poison, l’estomac et le cœur auroient dû. être
lésés et corrodés auparavant (5).
D ’après cela Zacchias n’hésita pas à prononcer que le malade
n’étoit pas mort de poison, mais d’une maladie naturelle (4).
Les auteurs qui ont écrit sur le droit criminel ne conseillent
pas une moindre circonspection dans les jugemens qu’on peut
porter sur de semblables matières.
(1) « A c c id e n c ia , s i e x veneno adm inístralo superveniant , s o len t , cum
Ímpetu quodam , ac vehem entia apparére , non tolerante natura, vim improvistim ipsius veneni.-n ( Z a c h . Consil. 16. )
(aj « V om itas indf.sinens, m olestia in to lera b ilis, d olorespernecabiles ,
•lip olh y m ia , syncopis , et alia. » ( lb id . )
« Primo et antequám hepar leedatur , necease est Itedi stomachum
jitq u e etiam cor. » ( l b i d . )
(4 ) “ Igitlir eX P ratd ic tis p atet N... d propinato veneno n o n fu isse fixlin ctu n i, s e d potiüs á morbo yuodam n a tu ra li.» ( l b i d . )
�(- i 9 )
a Plus l’accusation de poison est grande, d itM . T>rév6t,cé« lèbre crim inaliste, plus on doit examiner avec soin si elle est
u fondée. La mort est tous les jours accompagnée de symptômes
« qui en imposent sur cet article. Ainsi il faut user de beau« coup de prudence, observer avec soin si les accidens dont
« se plaignent les personnes qu’on dit empoisonnées sont ab« solunjent les suites du poison : si la personne empoisonnée
« est m orte, l’ouverture doit apprendre et constater le poison ;
« il se manifeste clairement par les premières v o ie s, etc. »
CPrincipes sur les visites et les rapports, pag. 226. J
Il y auroit donc bien du danger à s’en tenir à de simples
soupçons, ou à des indices équivoques, dans une matière d’aussi
grande conséquence. Car il suffit que d’autres maladies pré
sentent des signes semblables à ceux du poison, pour que dans
l ’incertitude il faille juger qu’il n’y a pas de preuve d’empoi
sonnement (1).
Car qui pourroit, en matière crim inelle, juger par de simples
indices , lorsque les lois elles-mêmes exigent des renseignemens
certains , des indices indubitables , et des preuves plus claires
que le jour (2) ?
Mais que peut-on entendre par ces indices indubitables? Les
criminalistes prennent encore la peine de les signaler de ma
nière à ne pas s’y tromper. Il faut que l’esprit du juge en soit
frappé et même contraint au point de ne pouvoir pencher pour
l’opinion contraire. C ’est la situation de l’â m e , dans laquelle
(1) « N on d icitu r probatum veneni C rim ea, e x probatione continui
vom itus , v el e x livore corporis , a u t spumis e x ore J ìlu e n tib u s , quia
^htec tigna, p o ssim i eliurn e x p estiferà f e b r e , a u t a cu to mot h o , citrà
veneni causam orire. » ( F arin a c. q u a si. 2 , n°. 3 a , p m x . crìm . )
(2) « M u n ita s it ap ertissirn is d o cu m en ti* , v e l in d ic iis a d p ro b a tio *
tionem in d u b ita tis e t lu ce cla rio rib u s. » ( L . S c ia n t , co d . D e proba t. )
�( 20 )
l’esprit se repose sur le parti qu’il vient de prendre comme sur
une découverte assurée et satisfaisante, sans revenir jamais à
hésiter dans la conviction qu’il vient d'acquérir (1).
Ces maximes sont puisées dans la loi elle-m êm e, qui ne veut
pas qu’on puisse condamner un individu sur de simples soup
çons (2), parce qu’en effet l’expérience prouve que celui qui
com m ence à soupçonner, ne voit jamais comme il doit voir (3 );
ce qui a fait dire à M. Domat que le juge doit se défier de la
première impression qu’on lui donne dans une affaire , parce
qu’elle est malgré lui le mobile de sa conduite, et qu’il ramène
tout à cette opinion (4).
Si d’après l’examen de tous ces principes généraux, il faut se
former une opinion, le conseil n’hésitera pas à dire que s i , comme
on paroît le croire , les médecins délégués par la cour criminelle
n’ont pas attesté avoir trouvé dans le corps du sieur de Murol
dès traces de poison , il est impossible de penser qu’il y ait ni
conviction de culpabilité, ni même conviction d’empoisonne
m ent ; c a r, comme le dit la dame Rollat dans son m ém oire,
si le poison n’a pas été visible pour les médecins , comment le
seroit il pour un jury?
Il n’y aura pas de corps de délit , et par conséquent il sera
inutile de chercher un coupable.
Les circonstances qui ont précédé et suivi l’évén em ent, ne
semblent pas même donner lieu à des soupçons bien fondés ; et
(1) « In d iciu m in d u h ita tu m e s t q u o d co a rcta t m entem ju d i c is ila u t
om ninù c r e d a t , neo p o ssit in contrariant in clin a rr. R s t dem onstratio
rei p e r signa su fficien tia p e r <juce anim us in a li quo tanquam ex isten te
36 , n°. 35. )
(2) « Ne suspicionibus quemqnam damnari oportere divus Trajanus
scripsit. » ( Tj. Abs. ff. Pœnis. )
(3) « Q u i tn s p ic a tu r p lu s se videra p u ta t. » ( E x tr a d e testib . )
q u i esc i t , e t p lu s investigare non cu râ t. » ( l'a r in a c. qucest.
(4) T r . du droit public.
le
�( 2.1 î
le résultat achève même de détruire la première impression qu’une
semblable accusation ne manque jamais de répandre.
L e sieur Courby étant dépositaire d’effets signés du sieur de
Murol p ère, quelle qu’en fût la som m e, l’envie de se les appro
prier a bien pu faire croire que l’empoisonnement avoit été un
m oyen d’y parvenir. Mais rien n’empéchoit le sieur Courby de
garder ces effets, et de s’en dire le maître : l’ usurpation des
billets étoit même plus solide sans crime.
La conduite amicale du sieur de Murol envers le sieur Courby,
depuis le 29 septem bre, est le meilleur témoignage que ce der
nier puisse avoir; et si le sieur de Murol a dit à la justice avoir
eu des soupçons' dès le jour m ê m e , ou il a.été bien inconsé
quent , ou ses soupçons ne méritent pas une grande confiance.
On ne voit pas que le 29 septembre il ait appelé à son secours
aucun homme de l’art ; par conséquent il ne faut pas croire qu’il
ait eu d’aussi grandes souffrances , ni une aussi grande terreur
qu’il a pu le dire a p rès, lorsqu’il étoit atteint d’une maladie
chronique.
B ientôt au contraire il reprit son régim e accoutum é. L ’es
tom ac paroit avoir fait ses fonctions com m e auparavant ; et il
est bien difficile de concilier c et état de santé parfaite avec la
dégénération progressive qu’auroit dû opérer la présence de l’a r
senic , en quelque petite quantité q u ’on le suppose.
Il faudroit même admettre que le poison a été pris à grande
d ose, si les pêches en étoient saupoudrées , puisqu’elles ont été
avalées entièrement avec le vin , et que le sieur de Murol n’a
répugné au poison que pour la portion demeurée au fond du
verre. Le véhicule auroit donc été suffisant pour porter une
grande quantité d’arsenic dans les premières voies.
O r , il est impossible que les effets de ce poison eussent cessé
tout d’un coup , et n’eussent laissé aucunes traces.
( Le fait articulé , que le sieur de Murol a subi deux fois l’o
pération de la paracentèze , ou ponction , prouve qu’il a été
�(
22
)
considéré comme atteint d’hydropisie ; et ce traitement achève
de détruire toutes les incertitudes.
Il
y a donc lieu de conclure que les soupçons du sieur de
Murol n’ont eu aucun fondement réel ; qu’à soixante-quinze
an s, et avec les circonstances qui ont accompagné sa m ort,
elle n ’ a eu rien que de très-naturel.
D
é lib é r é
à R iom , le 16 juin 1807.
L. F. D E L A P C H IE R , avocat; B A R TH E LE M Y , doct. m éd.;
A N D R A U D , avocat; C H O SSIER , doct. m éd.; PAGÈSM E IM A C , avocat ; G E R Z A T , doct. méd. ; P A G E S ( de
Riom ) , avocat ; M A L B E T , doct, méd.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rollat, Eléonore. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Barthélémy
Andraud
Chossier
Pagès-Meymac
Gerzat
Pagès
Malbet
Subject
The topic of the resource
abus de confiance
prêts
empoisonnement
Murol (famille de)
homicides
Description
An account of the resource
Mémoire pour la dame Eléonore Rollat, épouse de François Philippe Courby, habitant à Aigueperse [suivi de ] Consultation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0613
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0334
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53873/BCU_Factums_M0613.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aigueperse (63001)
Thiers (63430)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
empoisonnement
homicides
Murol (famille de)
prêts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53782/BCU_Factums_M0334.pdf
f09640d78fd04e3e8cfbe8bdc45f47e9
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR.
L a dame E
P
léonore
h il ip p e
R O L L A T , épouse de F
r a n ç o is -
C O U R B Y habitant à A igueperse.
A . ucune situation n’est com parable à la mienne. Mon époux
est accusé d’un crim e horrible dont je n’ose prononcer le nom :
son honneur et le m ien , le sort de ses enfans, seront bientôt dans
la balance de la justice; et ses persécuteurs s’agitent, quand luim é m e , accablé de sa situation , il fuit la calomnie sur un sol
étranger.
Lorsque pour la prem ière fois cette nouvelle épouvantable
vint jusqu'à m oi, toute ma conviction de l’innocence de mon
époux ne m’em pécha pas de résister à ses résolutions, et de les
ébranler par mon désespoir. O u i , et je m ’en confesse co u p ab le,
je l’importunai de mes larm es, je séduisis son courage , et sa
fuite fut un effort de sa tendresse; maintenant je me demande
avec effroi si sa présence ne lui eût pas été plus u tile , et si son
danger, au contraire, n’est pas né de ma terreur.
Dans cette cruelle anxiété, que ne puis-je appaiser de mon
sang c e u x qui sont altérés de celu i de mon époux ! Que n’ai-je
A
�( a )
du moins le droit de me présenter pour lui en jrgem o n t, pour
confondre ses accu sateu rs, pour le défendre....... ? Q ue dis-je?
me défendre m o i-m ê m e ; car jusqu’au tombeau ma destinée
n ’est-elle pas attachée à la sienne?
Mais la rigueur des lois me repousse du tribunal qui va juger
ma propre cause. Ainsi la nécessité me dicte mon devoir. J'ap
prendrai à mes juges une partie de ce que mon époux auroit pu
leur d ire, ou du moins quelques-unes des circonstances que des
témoins auroient pu attester.
Je ne me suis point dissimulé com bien de difficultés j’aurois
à vain cre, quand je n’aurois à opposer que mon foible langage
à des combinaisons préparées par la m échanceté même. Car
telle est îa condition d’ un m alheureux accu sé, que déjà la ca
lom nie a jeté de profondes ra cin e s, alors m ême qu’il peut en
treprendre de la com battre. Q ue peut sa voix plaintive contre
les cris précurseurs de cette astucieuse ennemie? E t lorsqu’enlin
on consent à l’entendre , com bien ne faut-il pas encore qu’il
dévore l’humiliation de la défiance qu’il excite ? car la p réven
tion du mal est m alheureusem ent celle qu’on s’obstine le plus à
conserver; et les esprits m êm e les plus raisonnables semblent
trouver plus com m ode de croire le crim e que d’en méditer les
invraisem blances.
Ces réflexions portoient le découragem ent dans mon ame ,
quand le souvenir de mes enfans a vaincu ma répugnance, et m’a
élevée p o u r a i n s i d i r e au-dessus de m oi-m ême. O u i, m e suis-je
é c rié e , je l’entreprendrai cette tâche pénible. La timidité de l’é
pouse cherchera des forces dans l’amour m atern el, et ces deux
titres prêteront peut-être à mon récit un intérêt que mes foibles
accens n’auroient pas eu la prétention d ’espérer.
C ’est à des ju g e s , au reste, que je veux m ’adresser, et ceux-là
ne repousseront pas mes paroles avec l’ennui de les entendre; leur
terrible ministère ne leur donnera de défiance que co n tre la pré
vention qu’ils craindroient trouver en eux-m êm es. Mes récits se
ront donc écoutés com m e une explication n é c e s s a i r e , par c e u x
�( 3
)
que la loi a armés de sa puissance ; ca r ils trem bleront, sans d o u te,
de l’idée seule qu’ils pourroient condam ner une fam ille honnête à
l’in fa m ie , et un innocent à la mort.
Les relations de mon époux avec la maison de M urol ne furent
pas de ces liaisons soudaines et fortuites , qui ne donnent pas le
temps de s’a p p récier, ou de concevoir de justes défiances. C ’est
depuis son enfance qu’il connoît le sieur de M urol fils ainé , ayant
été élevé avec lui dans le m êm e pensionnat, à Lyon.
Cette habitude de se voir a continué dans un âge plus avancé;
mais l’historique de ces prem ières liaisons n’a rien d ’essentiel à
rem arquer, et je me hâte d’en venir à des époques plus récentes.
Jusques à l’année d ernière, je n’avois vu à Aigueperse que le*
sieurs de M urol fils , et leur père m’étoit absolument inconnu. Il
m e paroissoit même que C ourby le connoissoit à peine , et ne vivoit avec lui que sur le ton du respect et des convenances de
société.
N ous ignorions entièrem ent ses affaires, et ne connoissions
celles de ses fils que par ce t extérieur d’o p u le n ce , qui fait illusion
au vulgaire tant qu’on a des ressources pour le soutenir.
C ependant, un jour de l’été d ern ier, le sieur de M urol p è r e , se
trouvant seul chez son fils cadet avec C o u rb y, fit tomber la con
versation sur la situation de ses fils , et sur le m écontentem ent
qu’il éprouvoit de leurs dépenses excessives.
Cette ouverture pouvoit n’étre que le désir secret d’ un père de
faire parvenir ses plaintes à ses fils, par un organe qu’il supposoit
plus persuasif peut-être. Mais le sieur de Murol père ne se borna
pas là. Soit hasard, soit que la prem ière idée lui en fit naître une
s e c o n d e , il confia bientôt à Courby qu’il méditoit pour son fils
ainé le projet d’une grande alliance, mais qu’il étoit retenu par
des dettes pressantes, dont l'éclat alloit ruiner toutes ses espé
rances.
A lo rs, comme par réflexio n , il demanda à Courby s’il ne pour
rait pas lu i faire trouver de l’argent.
A
2
�(4)
Un jeune homme ne pouvoit être qu’embarrassé à eette brusque
proposition. Courby fu t Forcé de lui avouer son im puissance de
lui être utile. « J ’ai des dettes m oi-m ém e, lui dit i l , sans avoir à
» m e reprocher un excès de dépense ; mais j’ai eu la foiblesse de
» cautionner les effets d’un homme que je eroyois incapable de
j> m e trom per; il a fait faillite, et m ’a laissé beaucoup à payer ;
53 et dans ce m o m en t, je cherche m oi-m ém e 18,000 fr. pour finis
» de m ’acquitter.
Q u ’importe ce que vous m ’o b je c te z , lui répondit M. de
» Murol ; vos ressources pour avoir de l’argent ne tiennent sans
» doute qu’à une signature de plus; je vous offre la mienne pour
» les 18,000 fr. dont vous avez besoin, et à votre tour, vous m e
» donnerez la vôtre pour m e procurer l’argent que je ch erch e;
» elle me sera u tile , parce que vous êtes d’une fam ille d e
« n égo cian s, et que par m oi-m ém e je ne trouve plus à ern» prunter : de cette m a n iè re , nous nous serons rendu un service
■
j} mutuel. »
J’ignorai dans le temps cette conversation ;^st C ourby m ’a avo u é
depuis que quoiqu’il y eût un côté avantageux pour lui dans la
proposition du sieur de M urol, ces combinaisons d’emprunt et de
signatures brouilloient ses idées , et confondoient son inexpé
rience ; qu’il s’étoit contenté en conséquence de bégayer un co n
sentem ent évasif, et avoit trouvé un prétexte de se retirer sans
rien terminer.
Mais le sieu r de Murol père n’abandonna pas ainsi son plan. L e
20 a o û t, je le vis à Aigueperse. Il parut fâché de ne pas y trouver
C o m b y , q u e je l’engageai à attendre. Courby 11e revint pas le soir,
et M. de Murol 11e partit que le lendemain après dîner. Je ne cher
chai point à savoir le m otif de son voyage ; je m e contentai de le
recevoir avec honnêteté et empressement.
C ’est dans son chem in qu’il trouva Courby ; il le pria de rétro
grader jusqu’à Clerm ont, et ne le quitta plus jusqu’à ce q*ie ^e®
billets fussent souscrits. Je fus informée de tout cela au retour
de mon époux. Jusqu’alors il in’avoit dissimulé l’embarras où
�( 5 )
I avoit jeté sa com plaisance pour un fau x am i ; il me montra pour
18,000 fr. de b ille ts, qui suffisoient pour le libérer.
Bientôt il s’occupa de placer ces billets à T h iers; et le sieur
de Murol l’ignora d’autant m o in s, que Courby prit plusieurs fois
un cheval chez lui ( à la Borde ) pour y aller, et je crois môme
un domestique.
D ans le courant de septem bre, je vis M. de M urol père une
fois à Aigueperse : il parut y être venu pour consulter M. Lagout
sur sa santé, craignant, disoit-il, être atteint d’hydropisie. A son
retour il ne dit rien de la consultation ; et cette réserve m ’ayant
étonnée, j.’en demandai la cause à Courby qui l’avoit accom pagné.
II me répondit q u e , sur les questions de M. L a g o u t, M. de
M urol avoit avoué qu’une gale traitée avec trop de précipitation
avoit depuis dix ans dérangé sa santé ; qu’il lui se m b lo it, de
loin en lo in , sentir une nouvelle invasion de cette m aladie, et
que sa santé alloit toujours en em pirant; que M. Lagout lui avoit
ordonné une certaine eau , dont la recette ou l’adresse étoit
contenue dans un petit imprimé qu’il lu i remit.
M. de M urol partit, engageant Courby à aller le voir les der
niers jours de septem bre, à la B orde, où ses fils devoient venir
faire une partie de chasse.
C ’est au 29 ou 3o septembre qu’on place l’épouvantable a c
cusation qu’ont répandue les sieurs de Murol contre le m alheu
reux Courby. Hélas! ils l’accabloient encore de démonstrations
d’a m itié , quand déjà leurs affreu x soupçons le signaloient en
public com m e un vil crim inel; et le poison qu’ils lui préparoient
étoit bien plus dangereux et plus subtil que celu i........ Mais à
quoi tendroit une plus longue réticence ; il faut bien m ’avouer
à moi-méme que Courby est accusé d’un empoisonnement.
C ’e st, dit-on, en mangeant des pèches que le sieur de Murol
père aperçut au fond de son verre un sédiment ép ais, dont le
goût lui fut désagréable, quoiqu’il eût mangé sans répugnance
les pèches qui avoient été saupoudrées de la m ême matière. Il
vom it beaucoup , éprouva des douleurs a ig u ë s, eut des ulcères
�( 6; )
dans la b o u c h e , et dit à ses a m is, le len d e m a in , qu’il croyoit
avoir été empoisonné.
V oilà ce qu’a répandu la fam ille de M urol, en ajoutant m êm e
que C o u rb y, présent, disoit en confidence aux assistans: Il n’en
reviendra pas.
Ic i toutes les époques deviennent précieuses, car les événemens postérieurs portent avec eux des conséquences pressantes.
L e jour m êm e de cet é v é n e m en t, et le lendem ain , les fils
M urol, leurs am is, et C ourby, firent la partie de chasse projetée.
L e ^6 o c to b re , C ourby retourna à la Borde : M urol fils ainé
lui emprunta huit louis pour payer des impositions ce m êm e jour.
L e sieur de M urol père étoit p résen t, et dit qu’il en faisoit son
affaire.
L e m êm e jour , M urol ainé engagea Courby à aller avec lui
voir le curé de B eauregard, et le sieur P a rrica u d , qu’il n’avoit
pas vu , d it-il, depuis son retour de Paris.
L e 10 o cto b re, M. de M urol père envoya son domestique à
A ig u ep erse , avec une lettre d’invitation à C ourby pour aller à
la Borde le dim anche su iv a n t, manger un cochon de lait avec
le curé de Beauregard.
En e ffe t, le dim anche su iva n t, n o ctob re, Courby alla dîner
à la B orde, fit le soir une partie de piquet avoc M. de Murol
et le c u r é , et ne revint à Aigueperse que le lendemain.
L e 21 octobre, M. de M urol père vint à Aigueperse avec le
nommé C lm pus, dom estique de son fils. C ourby étoit à Gannat,
et j’engageai M. de M urol à diner.
Q uand j’allai donner des ordres à la cuisine, nies domestiques
m e recom m andèrent de ne pas laisser toucher mes enfans par
M. de M u ro l, parce que Chapus leur avoit dit qu’il étoit plein
de gros boutons, depuis un rem ède que M. Lagout lui a v o it
donné.
En attendant le d în er, M. de M urol alla chez M. L a g o u t,
où Courby de retour alla le chercher.
T ém oin de la prem ière conversation, on ne lui cach a pas la
�( 7 )
seconde , et i l entendit M. de M urol causer avec A3. Lagout de
l’effet de son remède. M. de M urol se plaignit d’avoir eu des
coliques, des vomissemens, et une salivation incom m ode q u i lui
avoit fait naître de petits ulcères dans la bouche. Il termina
cependant par rem ercier M. Lagout du rem èd e, parce que ta
santé é to it, d it-il, beaucoup meilleure, depuis quelque temps.
M. Lagout avoua ne pas connoître la composition de l’eau qu’il
n’avoit conseillée qu’en le déclarant ainsi, et sur l’approbation
que sembloient y donner ses confrères. Il ne s’étonna pas des
accidens dont lui avoit parlé M. de M u ro l, parce qu’il soupconn o it, d it-il, que le rem ède contenoit du mercure.
M. de M urol partit le soir, et recommanda beaucoup à C ourby,
s’il venoit à la Borde dans'la sem ain e, de ne pas traverser l’A llier
qui a vo it, d it-il, grossi beaucoup, et où il s’exposeroit.
Il laissa à Aigueperse une charrette couverte d’ un drap , et em
prunta de Courby une carriole pour faire un voyage àM ontluçon.
L e 29 ooptomWe, le sieur de M urol père vint à Aigueperse
avec un de ses fils, pour rendre la carriole qu’il avoit empruntée ,
et reprendre la sienne avec un cheval de selle que son fils avoit
prété à Courby depuis deux mois.
Ils parurent désirer reprendre les effets de 18000 fran cs, si
C ourby ne les avoit pas négociés; et Murol fils sem bloit seul y
m ettre quelque hum eur. Courby avoit négocié pour 16400 fr.
d’e ffe ts , pour ses propres dettes ; et il répondit à M. de Murol
p è re , que si la proposition faite par lu i-m êm e ne lui convenoit p lu s, il étoit prêt à lui souscrire des effets équivalens; et
il en signa en effet pour 19352 francs , ce qui com prenoit un
intérêt sans doute assez considérable; et je souscrivis moi-même
ce s nouveaux effets dont les sieurs de Murol sont aujourd’hui
porteurs.
U n mois se passa ensuite sans que j’eusse rien de com m un
avec cette famille. T o u t d’un coup , au mois de d é c e m b re ,
j'appris l’horrible nouvelle que le sieur de Murol accusoit hau
tem ent C ourby de la v o ir em poisonné, et qu’une procédure cri
�(
8
)
m inelle étoit provoquée par ses fils et lu i, non qu’ils eussent osé
accuser en leur nom , mais à la diligence du magistrat de sûreté
de C lerm o n t, qui les faisoit tous entendre com m e témoins.
Ce c rim e , ces com binaisons, mes idées acca b la n tes, un retour
de comparaison sur les temps cruels des délations et des éch a
fauds , tout cela m’ôta le discernem ent et la réflexion. Je ne
voulus entendre celles de personne. Mon époux partit, et je m e
trouvai seule à la vue de ces indifférens qui soupçonnent tou
jo u rs, et ne réfléchissent jamais.
Quoi qu’il en soit, le temps qui s’est écou lé depuis le mois de
décem bre a permis à la justice de faire d’exactes recherches. L e
sieur de Murol p è re , ¿îgé de près de quatre-vingts a n s / a été
atteint d’une maladie épidém ique inflam m atoire, à laquelle s’est
jointe une hydropisie. Il s’est m is alors dans les m ain s d’un c h i
rurgien ignorant, et il est m ort dans les premiers jours d’a v r il,
ayant survécu par conséquent plus de six mois à son prétendu
empoisonnement.
Je n’ai jamais désiré la mort de personne ; mais je le confesse
sans ro u g ir, la m ort de cet homme a ôté de mon cœ ur un far
deau bien pesant. C e n’est pas que j’eusse, com m e de V itelliu s,
de la joie à considérer le cadavre d’un ennem i ; loin de moi ce
sentim ent de vengeance. Mais je n’ai pu m’em pêcher de dire:
C ’est là qu’étoit cachée la vérité ; c’est là que le triomphe de
l’innocent sera écrit par les mains m êm e de la Providence.
Q ue mes lecteurs me pardonnent ce t aveu d’un m ouvem ent
que je n’ai pu vaincre. Il faut avoir été dans ma position cru elle,
pour sentir qu’elle justifieroit m êm e un sentim ent moins légitime.
M e voici donc devant mes juges , incertaine maintenant de
ce qu’il me reste à leur dire; car quand toute la procédure me
seroit co n n u e, je ne puis sans ridicule me jeter dans la carriè re
polémique d’une discussion de droit crim inel.
Ma is la défense de mon époux sera plus dans la
c o n v ic tio n
de
ses juges que dans mçs efforts. Je n ’ai voulu que révéler des
faits
�( 9 )
faits de tna connoissance , et sans doute ite vaudront m ieux que
mes réflexions.
Un crim e ne se com m et pas sans être nécessaire. C ourby ,
nanti d’effets signés de M. de M urol , n ’avoit pas besoin de s«
défaire de lui pour les retenir. O n est bien plutôt capable d’un
vol hardi, et sans danger , qu’on ne l’est d’un empoisonnement.
Si le sieur de Murol pére est venu tant de fois après le 29 sep
te m b re à Aigueperse , et s’il a continué d’appeler Courby à la
Borde, qui pourroit se défendre d’étre convaincu qu’il n’ a pas
cru être empoisonné par lu i ; ca r eût-il cherché la société de
son assassin ?
Cependant c ’e s t, dit-on, le fo u r même du déjeuner des pèche«,
que le sieur de M urol se crut empoisonné ; c ’est le lendem ain
q u ’il fît part de ses craintes à ses amis.
S ’il eût soupçonné d ’autres personnes , on pourroit se rendre
raison de cette continuation de confiance ; mais le sieur de
M urol a dit encore avoir vu C ourby saupoudrer les pèches de
la m atière b la n c h e , qui ne lui répugna qu’au fond du v e rre , et
qui lui causa à l’instant m êm e des douleurs et des vomisseinens.
L ’idée de l’em poisonnem ent, et de son a u teu r, se seroit donc
liée sans intervalle dans son im agination; et alors com m ent con
cevoir cette suite de fréquentation jo u rn alière, ces repas m ul
tipliés, qui auroient rendu aisée la consommation du c rim e ,
et qui n’ont cependant donné lieu au soupçon d’aucune tentative
nouvelle ?
Com m ent concevoir encore qu’un hom m e se croyant em poi
sonné le 3o septembre , se disant tourmenté des douleurs ordi
naires de c e m al, consulte un m édecin le ao octobre , et ne lui
dise pas un mot de ses m a u x , ni de ses terreurs?
L à , au contraire , les vomissemens sont attribués, par le ma
lade lui-m ém e , à une autre cause. Ils ne l’inquiètent point du
to u t, puisque l’am élioration de sa san té, et le rem erclm ent au
m édecin , sont le seul objet de sa visite.
' Cette bonne santé se soutient pendant quatre mois consécutif*,
B
�( 1° )
f-t il tomba enfin malade. Est-il mort d’hydrôpisie ? est-il mort
d une inflammation dans le ventre ? O n dit l’un et l’autre. O n
dit aussi qu’il a été traité de l’hyd rop isie, et que la ponction lui
a été laite deux fois dans le mois qui a précédé sa mort,
i Je n’entends rien en m édecine.: mais les effets de l ’arsenic
sont connus de tout le m onde; il passe pour le plus mortel et
le plus prompt des poisons.
Si son action' est brûlante et corrosive, si le prem ier contact
produit des ulcères dans l’instant m êm e , com m ent concevoir
qu’un hom m e,hempoisonné devienne lentem ent hydropique ;
qu’une surabondance d’eau exige deux ponctions ; qu’il ne se
m anifeste d’inflammation que dans le bas-ventre,sans lésion'des
viscères supérieurs ? '
L e c a d a v r e a été v u , d it-o n , par des docteurs délégués par
la cour crim inelle. Je n’ai garde de supposer qu’ils se soient
livrés à des con jectures; ils n’avoient p o in t, com m e les Arusp ic e s , à consulter les entrailles d’une victim e pour présager
l ’avenir. L eur tâche plus facile a été de cherch er dans le corps
d’un h o m m e , m ort h yd rop iq u e, si des traces de poison étoient
visibles , et de vérifier les corrosions qu’auroient dû receler
l’estomac et les prem ières voies.
Si le poison n’a pas été visible à leurs yeu x , le sera-t-il à la
conscience du juge?
On prétend que C o u r b y , au lieu de donner du secours à M. de
M u ro l, les 29 et 5o sep tem b re, a dit à plusieurs valets de la
maison qu’il étoit vieu x et ca ssé , qu’il ne guériroit pas ; et de
com m entaires en com m entaires, on va presque jusqu’à y voir
un aveu de son crim e. C ’est ainsi que la m alignité interprète
les expressions les plus indifférentes. Mais com m ent ne pas voir
qu’un coupable, dans cette position, auroit au contraire affecté
ce qu’il ne sentoit pas , et m ultiplié ses soins pour n’étre pas
soupçonné.
Il a , dit-on encore , demandé à un pharm acien , a p r è s 1 em poi
sonnement-, et dans la rue > si l’opium étoit un poison qui fit
�(
II
)
souffrir long temps. Autre arme de la m échanceté / pour en tirer
une conséquence à charge. J’ignorois ce fait , et j’ai m êm e des
raisons de suspecter ceu x qui l’ont accrédité. En cherchant dans
le passé à quelles époques j’ai vu mon époux attristé de l’embarras
subit où la faillite d’un ami l’avoit jeté , je n’ai pas trouvé dans ma
mémoire qu’il ait eu jamais des instans de désespoir, ou du moins
il n’en a pas manifesté en ma présence. Il savoit d’ailleurs que je
viendrois à son secours ; et je suis hum iliée que pour 18000 fr. et
surtout pour une dette d’honneur, on puisse croire que mon
époux se trouvât réduit à attenter à ses jours.
*
Q uant à toute autre version, je la dédaigne. Q uel insensé concevroit l’idée qu’il pourroit faire avaler de l’opium à son ennem i,
c ’est-à-dire, la plus am ère des potions, sans qu’il la refusât, ou
qu’il pourroit la glisser à dose suffisante parmi ses alimens?
C elui qui pour se défaire d’un homme veut l’empoisonner, a
pour prem ière pensée d'ensevelir en lui-m ém e le secret de son
crim e. S ’ad resse-t-il à un pharm acien , il est le premier qu’il
trompe; et à moins de croire l’empoisonneur sans bons se n s, on
ne supposera jamais qu’il ait parlé de la mort au pharm acien à qui
il demandoit du poison.
Mais qu’aura gagné la calomnie à tout cet amas de faits incohére n s, et de petits détails exagérés par la passion, ou grossis par
les circonstances? ca r, s’il n’est pas constaté qu’il y ait empoison
nem ent , il n’y a pas de coupable à chercher.
V aut-il m ieux abandonner ce qui se présente à l’idée la plus
sim ple, et substituer des fictions ou des conjectures , à ce qu’on
conçoit avoir été un effet de l’ordre naturel des choses ?
Et parce qu’un vieillard , d’un tempérament u s é , est mort à
près de quatre-vingts ans, faudra-t-il s’obstiner à croire qu’il n’a
dû mourir que d’une m ort violente?
S’il n’étoit mort que du plus subtil des poisons, auroit-il résisté
six mois? auroit-il surtout passé quatre mois dans le m eilleur
état de santé qu’il ait eu depuis dix ans?
Certes, je n’ai pas cru un instant qu’aucun homme au monde
B 2
�(
12
)
put dire en son âme q u ’il est convaincu de la réalité du crim e,
et que Courby m érite la mort : je l’ai cru encore moins de ses
ju g e s, pour qui le prem ier devoir est de ne se rendre qu’à l’évi
dence. Mais il m ’importoit aussi de détruire jusqu’à l’apparence
d’un crim e dont l’idée seule m ’accablera jusqu’à c e que le soup
çon m êm e en soit détruit pleinement.
Je ne sens que trop de quelle influence ce t événem ent sera
pour ma destinée future ; car le m alheur d’ un aussi cruel soupçon
ne peut se réparer qu’à la longue ; et j ’ose croire que les c ic a
trices de la calom nie ne seront point ineffaçables. L a conduite
à venir de mon époux se ré g le ra , je l’espère , sur les circo n s
tances dans lesquelles sa mauvaise étoile l’a placé.
Je puis donc voir encore le bonheur renaître dans mon asile ;
et si c ’est une illu sio n , que du moins un si flatteur horoscope
pe soit pas enlevé à une m ère : mon ép o u x, rendu à sa fa m ille ,
ne verra dans son infortune passée que le devoir sacré d’en effacer
jusqu’au souvenir. Il peut en co re, malgré la calom nie, transmet
tre à ses en fans un nom sans ta ch e, et vivre avec honneur dansi
leur mémoire.
C O U R B Y , née R O L L A T .
�CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu le m ém oire de la dame
R o lla t, fem m e C ourby ,
, d ’après les faits contenus audit m ém oire, que si les
m édecins délégués par la cour crim inelle pour exam iner le ca
davre du sieur de M u ro l, n’ont pas trouvé de traces de poison,
E s t im e
ou s’ils n ’ont pas exprim é une opinion certaine et fondée sur ce
genre de m ort, il paroit impossible qu’un ju ry se déclare con
vaincu que le sieur C ourby est coupable.
O n n’a pas accusé le sieur C ourby d'une simple tentative d’em
poisonnement , mais bien d’un empoisonnement effectué avec de
l’arsenic jeté sur des pèches. Par conséquent il ne faut pas se
borner à exam iner s’il y a preuve de la ten tative, mais il faut
savoir s’il y a un empoisonnement et un coupable.
L a question préalable d’une instruction crim inelle est de cons
tater le corps d’ un d é lit , de m êm e que la prem ière chose à exa
m iner par le jury est de savoir si le délit est constant.
Car il n’est pas besoin de chercher s’il y a un co u p a b le, lors
qu’il n’y a pas certitude qu’il y a e u un délit : D e re priusquàm
de reo inquirendum est; e t , comme le dit D om at en son T raité
du droit public : « C ’est le prem ier et le plus indispensable des
« devoirs. Cette preuve est m êm e tellem ent essentielle, qu’elle
« ne peut être suppléée ni par les dépositions des témoins , ni
« par des con jectures, ni même par la confession de l’accusé. »
D ’après c e la , peut-on bien dire que le corps du délit im puté
au sieur C ourby, est con stan t, et qu’il est certain qu’il y a eu
empoisonnement ? Rien ne paroit au contraire moins prouvé.
�. (
1 4 }
A ucun rapport de m édecin ou chirurgien ne paroit avoir pré
cédé la mort du sieur de M urol : lui seul a eu quelques soupçons
que rien n’a vérifiés. Ainsi , jusque-là aucun corps de délit n’est
constaté.
Après la mort du sieur de M u ro l, la cour crim inelle a bien
fait ce qui étoit en elle pour constater le corps du d é lit , puis
q u ’elle a com m is des hommes de l’art pour visiter le c a d a v re ,
et en décrire l’état. L e rapport qui a dû en être fait sera soumis
au ju r y , s’il est antérieur à l’acte d’accusation ; et c ’est là où
le ju ry puisera principalem ent les idées qui appelleront sa con
viction sur le fait de savoir s’il y a un d é lit , c ’est-à-dire , s’il
est constant que le sieur de Murol père est mort empoisonné.
Sans doute la présence du poison 11’est pas toujours visible ;
mais son effet n’en est pas m o i n s marqué par des signes exté
rieurs , surtout quand le malade en a été victim e, et quand il
s’agit d’ un poison aussi violent que l’arsenic.
A ucun auteur n ’a m ieux décrit les effets de ce poison , et les
signes auxquels on peut les connoitre , que M. Mahon , en son
T raité de m édecine légale ; et c ’est le m eilleur guide qu'011
puisse avoir pour raisonner sur une m atière aussi grave et épi
neuse.
'
Les poisons corrosifs, dit cet auteur, tuent très-prom ptem ent,
et leurs effets s'annoncent avec une rapidité qui 11e permet guère
de douter de leur emploi. ( T om e 2 , p. 276. )
L ’arsenic est soluble dans tous les liquides ; c ’est le plus in
domptable des poisons : il ne peut être m itig é , ni masqué en
aucune manière. ( Page 276. )
Quand il y a soupçon d em poisonnem ent, tout m édecin , avant
d’inspecter le corps , doit s informer soigneusement de l’àge*
du sexe , du tempérament , des forces , du genre de vie du
défunt , s’il étoit sain ou malade , com bien de temps il a
vécu depuis, de quelles incom modités il s’est p l a i n t , «juelle
espèce de régim e ou conduite il a observée a p r è s , s’il a été
secouru par un médecin expérimenté ou par de> ignoians,
( Page 26G. )
�( i5 )
Après c e la , l’inspection clu cadavre consiste à exam iner l'état
des parties extérieures et les signes intérieurs du corps.
Quand l’arsenic n’est pas conservé en nature dans quelques
viscères , ce qui arrive fréquem m ent , fa présence est au moins
manifestée par, des traces de lésion et de corrosion assez rem ar
quables dans toute la route qu’il a parcourue (1) ; son action va
môme jusqu’à se manifester au-dehors (2); et quelque nom breux
encore que soient ces sig n es, le m édecin , com m e le ju g e , ne
peuvent se croire convaincus que par leur ensemble.
Ici il faut d’autant plus de circonspection , qu’il s’agissoit d’ un
su jet vie u x , et dont la santé paroissoit altérée depuis long temps.
D es douleurs internes et des vomissemens sont, d it-on , le seul
indice de poison qu’il a rem arqué lui-méme (3). Mais une foule
(1)« 2°. L ’érosion inflam m atoire, gan grèn e, taches éparses dans l’ œ sophage,
I’cstoiTiac, le p y lo re , les intestins, le sphiicèle de ces parties. — Q uelquefois l'estom ac p e rc é, — le sang coagu lé, — le péricarde rem pli d ’ un fluide jaunâtre ou
c o rro m p u , les autres viscères ramollis et com m e dissous, parsemés d’ hydatides,
de pustules, de taches; le coeur flasque et com m e racorn i; le sang q u ’il co n tien t,
noir et presque solide; le foie noirci, ou livide „o u engorgé. » (M a h o n , png. 272.)
« On voit en fin , tant extérieurem ent q u ’intérieurem ent, des vessies disper
sées ça et là , remplies d’ une sérosité jaune ou ob scu re, et presque toujours d ’ une
odeur désagréable. » ( Ibid. png. 273. )
(2) « Distension excessive de l’ab d om en , au point d’ en m enacer la ru ptu re ;
_taches de différentes couleurs sur la surface du corp s, surtout au dos, au x
pieds, à l’ epigastre; — la prom pte dissolution, quand la personne est m orte du
poison. O n peut trouver dans la dissection du cadavre des indices certains d ’em
poisonnem ent: — la roideur des m em bres, la tum éfaction du v e n tre , rie sont
pas des signfcs constans ; — mais ce q u ’il y a de constant dans les cadavres des
personnes q u io n tp é ri d’ un poison âcreou cau stiq u e, c’ est de trou ver l’oesophage,
l’ estomac cl les intestins grêles, atténués, enflam m és, gangrenés, rongés et sou
ven t percés.... Il suffit de résum er ces signes, pour être convaincu de la néces
sité de ne jamais se décider que par leur ensemble. » ( Ibid. p. 270, 2 7 1 , 307. )
' (5) « Quand on n’a pas été à temps d’exam iner la nature du vom issem ent, que
les symptômes sont passés, que le malade est guéri , peut-on tirer des indices
Suffisans de l’assertion du plaignant, et de celles des personnes qui l’ônt assisté?
— Je ne le pense pas. » ( Ibid. pag.
3o 6. )
1
�(
}
d’ alim en s, m êm e très-sains, peuvent fournir les mêmes résul
tats (1).
1
6
Il paroit que le sieur de M urol avoit été m al traité d’une
gale. L es em piriques ont pour ces sortes de m aux des remèdes
dont la promptitude séduit le m alad e, mais dont l’effet double
m ent funeste consiste à faire rentrer dans la masse du sang une
hum eur vicieu se, dont la nature ch erchoit à débarrasser le corps:
et s’ajoute à c e mal r é e l, le mal plus grand peut-être du rem ède
lui-m ém e. Aussi est-il constant qu'une éruption rentrée suffît
seule pour agir m ortellem ent sur l’individu, et laisser des traces
presque sem blables à celles du poison (2).
L ’opiuion qu’a pu avoir le sieur de M urol lui-m ém e sur son
é tat, ne doit pas être d’un très-grand poids; car on sait com
bien un m alad e, et surtout un vieillard , est sujet à se frapper
l ’imagination : pour peu que ses craintes soient accréditées par
quelque soupçon, il 11e trouve plus rien que d ’extraordinaire dans
son éta t, et il s’obstine à ne pas croire que des m aux naturels, ou
la caducité , puissent être l’unique cause de son dépérissement.
Cependant la plupart des maladies vives s’annoncent par une
invasion soudaine; e t cette rapidité m êm e sem ble jellem ent inex-
( i) « Q u ’ u n hom m e ait m angé des alim ens difficiles à d ig é re r , ou faciles à
«ntrer en p u tré fa ctio n , il peu t a rriver que qu elqu e temps après il se trou ve
très-m a l, et q u ’il ait tous les sym ptôm es du poison, jusqu’à m ourir.
» J’ai vu une châtaigne r ô lie , avalée toute e n tiè re , don ner tous les signes
de l ’ em poisonnem ent. Les têtes et pieds de v e a u , les ¿crevisses, les h u ître s,
les v in j troubles et avariés, ainsi que les vins frelatés, on t très-souvent aussi
prod u it ce t effet. » ( M a lio n , Pag- 299. )
{*) « Certaines maladies laissent sur les cadavres des traces peu différente*
des signes ordinaires du poison. »
« U n e éru ption re n tré e , une affection scorbu tiqu e très-a v a n cée , une bile
très-Acre, etc, — M ais par une contem plation réfléchie des sym ptô m es, et la
com paraison qu e le m édecin en fera avec les signes que porte le c a d a v re , il
distinguera aisément les restes d’ une maladie v io le n te , d ’avec les caractère* de
l'em poisonnem ent. » ( Ibid. png. 3 i 3. )
p lic a b le ,
�C 17 )
p lica b le, qu’on repasse alors dans sa m ém oire jusqu’aux moindres
détails qui ont précédé ; les choses qui étoient auparavant les plus
simples se grossissent, la crédulité s’en empare. P o s t h oc, ergo
propler h o c , sc d it-011; et ce raisonnement de l’ignorance n’en
séduit pas moins quelquefois les personnes les moins prévenues.
U n soupçon alors, né du plus léger in d ice, acquiert bientôt de
la consistance, à tel point que les explications les plus naturelles
sont dédaignées ; le préjugé l’emporte sur l’expérience ; et on ferm e
les yeu x sur les exem ples plus frappans, qu’on a eus souvent sous
les y e u x , des bizarreries de la nature, et desaccidens d e là vie (1).
Car en cette m atière , dit le docteur C o c h in , et quand il s’agit
de juger des poisons, les conjectures les plus vraisemblables ne
sont souvent que des illusions (2).
• L e célèbre auteur Zacchias avoit été consulté sur un événe
m ent presque semblable à celu i du sieur de Murol. Un individu
avoit fait un ample diner avec un a m i, et ne tarda pas à éprouver
de grands malaises qui furent suivis d’ un prompt dépérissement.
Il devint subitement pâle et e x tén u é , perdit la raison, et mourut.
L e dîner ayant été son dernier acte de san té, les soupçons s’é
levèrent contre celu i qui l’avoit partagé ; il fu t mis en prison.
L e cadavre fut ouvert, et Zacchias y trouva les intestins trèsenflés, le sang coagulé dans les ventricules du cœ ur, la substance
m êm e du cœur d’une couleur dégénérée, la téte et les lèvres
grosses, les poumons livides et ad hérens, le foie corrompu.
T o u t cela pouvoit paroltre des signes de poison. Mais ce docte
i
____________ _____________
(1) « Il est une infinité de maux, sourds, qui augm entant insensiblement en
in ten sité, p eu ven t avoir affligé un hom m e depuis longues années, sans q u ’il
s’ en soit lui-m êm e beaucoup a p erçu , et q u i, éclatant tout à c o u p , paroissent
inconcevables à ceu x qui ne sont pas au fait des divers accidens de la v ie , et
Ibid. pag. 317. )
(2) Quest. du poison, t. Ier. , pag. 4. Recherches sur les signes anatomiques
et judiciaires des signes d’empoisonnement, par M. de Retz.
qui ont l’im agination préoccupée. » (
G
�C 18 )
m édecin ne chercha que dans son art et dans son génie des con
séquences que la prévention auroit dénaturées, s’il se fû t aban
donné aux fausses impressions de l’opinion publique.
D ans une consultation très-m éthodique et très-savante, Zacchias suivit pas à pas tous les symptômes décrits; et il fit résulter
de leur ensem ble, que l’homm e étoit mort de la jaunisse.
Il ne jugea pas possible que ces sym ptôm es fussent nés du
p oison , puisque la nature n’avoit pas fait un effort continuel et
sans re lâ ch e , pour se débarrasser de cet ennem i dangereux (1).
Il y avoit eu un vomissement soudain ; mais il avoit cessé ; mais
il n’y avoit pas eu de ces douleurs opiniâtres et de ces angoisses
toujours croissantes, qui dénotent une prochaine dégénération
des solides iz).
La corruption du foie et l’adhérence des poumons avoit paru
de quelqu’iinportance a Z a cch ia s; mais il pensa que si la cause
en fût venue du poison, l’estomac et le cœ ur auroient dû être
lésés et corrodés auparavant (5).
D ’après cela Zacchias n’hésita pas à prononcer que le m alade
n’étoit pas mort de poison, mais d ’une maladie naturelle (4). *
L es auteurs qui ont écrit sur le droit crim inel ne conseillent
pas une moindre circonspection dans les jugem ens qu’on peut
porter sur de semblables matières.
^1) « jáccidentia, si ex veneno adminístralo superveniant, solcnt, cum
Ímpetu (fuodum, ac veliementia appare re, non tolerante natura virn im
provisa m ipsius vene ni. » (Zac/i. Consil, 16. )
(aj « Vomitus indesinens, molestia intolerabilis, dolorespernecabiles,
lipothymia , syncopis , et alia, » ( Ibid, )
(3) « Primo et antequám hepar ladatur, necesse est leedi stomachum
atque etiam cor. » ( Ibid. )
(4) « lgitur ex prctdictis patet N... d propinato veneno nonfuitse
Une tum , sed potiüs á morbo e¡uodam naturali,» ( Ib id .)
�( i9 )
« Plus l’accnsation de poison est grande, dit M. P ré v ô t, cé « lèbre crim inaliste, plus on doit exam iner avec soin si elle est
u fondée. La mort est tous les jours accom pagnée de symptômes
« qui en imposent sur cet article. Ainsi il faut user de beau« coup de p ru d en ce, observer avec soin si les accidens dont
« se plaignent les personnes qu’on dit empoisonnées sont ab« soluinent les suites du poison : si la personne empoisonnée
« est m o rte, l’ouverture doit apprendre et constater le poison ;
« il se manifeste clairem ent par les premières v o ie s , etc. »
ÇPrincipes sur les visites e t les rapports, pag. 226. J
Il y auroit donc bien du danger à s’en tenir à de simples
soupçons, ou à des indices équivoques, dans une m atière d’aussi
grande conséquence. Car il suffit que d’autres maladies pré
sentent des signes semblables à ceu x du poison, pour que dans
l ’incertitude il faille juger qu’il n’y a pas de preuve d’empoi
sonnement (1).
Car qui pourroit, en m atière crim inelle, juger par de simples
indices , lorsque les lois elles-mêmes exigent des renseignemens
certains , des indices indubitables , et des preuves plus claires
que le jour (2)?
• Mais que peut-on entendre par ces indices indubitables? L es
criminalistes prennent encore la peine de les signaler de ma
nière à ne pas s’y tromper. Il faut que l’esprit du juge en soit
frappé et même contraint au point de ne pouvoir pencher pour
l’opinion contraire. C ’est la situation de 1a m e , dans laquelle
(1)
« Non d ic itu r probaium ven en i crim en t e x probatione concm m
vom itns , v e l e x livore co rp o ris, aut spum is e x ore ß lu e n t ib n s , yitia
licec signa possunt etiam e x pestij'erä f e b r e , aut acuto m orbo, citrä
veneni causam orire. » ( Iuirinac. tjuast. 2 , n°.
,
«M u n ita t i t a p e r tis s im is
,
3 a , prax. crim . )
d o c u m e n t is v e l in d i c i is a d p r o b a tio -
tio n e m in d u b ita tis e t lu c e c la r io r ib u s . »
(L . S c i a n t , c o d .
D e p r o b a t .)
�(
20
)
l’esprit se repose sur le parti qu’il vient de prendre com m e sur
une découverte assurée et satisfaisante, sans revenir jamais à
hésiter dans la conviction qu’il vient d'acquérir (1).
Ces maximes sont puisées dans la loi elle-m êm e, qui ne veut
pas qu’on puisse condam ner un individu sur de simples soup
çons (2), parce qu’en effet l’ expérience prouve que celui qui
com m ence â soup çon n er, ne voit jamais com m e il doit voir (3);
ce qui a fait dire à M. D om at que le juge doit se défier de la
prem ière impression qu’on lui donne dans une affaire , parce
qu’elle est malgré lui le m obile de sa cond uite, et qu’il ram ène
tout à cette opinion (4).
Si d’après l’exam en de tous ces principes gén érau x, il faut se
form er une opinion, le conseil n’hésitera pas à dire que s i , com m e
on paroit le croire , les m édecins délégués par la cour crim inelle
n’ont pas attesté avoir trouvé dans le corps du sieur de M urol
des traces de p o iso n , il est impossible de penser qu’il y ait ni
conviction de culpabilité, ni m êm e conviction d’empoisonne
m e n t; c a r , com m e le dit la dame Rollat dans son m ém o ire,
si le poison n’a pas été visible pour les m édecins , com m ent le
seroit-il pour un ju ry?
Il n’y aura pas de corps de délit , et par conséquent il sera
inutile de chercher un coupable.
L es circonstances qui ont précédé et suivi l’événem ent , ne
sem blent pas m êm e donner lieu à des soupçons bien fondés ; et
(x) « Indicium indubitatum est quod coarctat mentent jtidicis ita ut
omninà cr'edat, nec possit in contrarium ificlificirp, Est demonstratio
rei per signa sufficiently- per tjuas animus in aliquo tant/itam existente
quiescit, et plus investigare non curat. » ( Farinac. qucest. 36 , »°. 35. )
(2) « Ne suspicionibus quemquam damna ri oportere divus Trajanus
scripsit. » ( L. A b s. ff- Pccnis. )
(3) « Qui suspicutur plus se videre putat. » ( Extra de testib■)
(4) Tr. du droit public.
�C
)
le résultat achève même de détruire la prem ière impression qu’une
semblable accusation ne manque jamais de répandre.
L e sieur Courby. étant dépositaire d’effets signés du sieur de
M urol p è r e , quelle qu’en fût la som m e, 1envie de se les appro
prier a bien pu faire croire que l’empoisonnement avoit été un
m oyen d’y parvenir. Mais rien n’em péchoit le sieur C ou rby de
garder ces e ffe ts , et de s’en dire le maître : l’ usurpation des
billets étoit m êm e plus solide sans crim e.
L a conduite am icale du sieur de M urol envers le sieur Courby,
depuis le 29 septem bre, est le m eilleur témoignage que ce der
nier puisse avoir; et si le sieur de M urol a dit à la justice avoir
eu des soupçons dès le jour m ê m e , ou il a été bien inconsé
quent , ou ses soupçons ne m éritent pas une grande confiance.
O n ne voit pas que le 29 septembre il ait appelé à son secours
aucun hom m e de l’art ; par conséquent il ne faut pas croire qu’il
ait eu d ’aussi grandes souffrances , ni une aussi grande terreur
q u ’il a pu le dire a p rè s, lorsqu’il étoit atteint d’une maladie
chronique.
(
'
Bientôt au contraire il reprit son régim e accoutum é. L ’es
tomac paroit avoir fait ses fonctions com m e auparavant ; et il
est bien difficile de concilier cet état de santé parfaite avec la
dégénération progressive qu’auroit dû opérer la présence de l’ar
senic , en quelque petite quantité qu’on le suppose.
Il faudroit m êm e adm ettre que le poison a été pris à grande
d o se , si les pêches en étoient saupoudrées , puisqu’elles ont été
avalées entièrem ent avec le vin , et que le sieur de Murol n’a
répugné au poison que pour la portion dem eurée au fond du
verre. L e véhicule auroit donc été suffisant pour porter une
grande quantité d’arsenic dans les premières voies.
O r , il est impossible que les effets de ce poison eussent cessé
tout d’un coup , et n’eussent laissé aucunes traces.
L e fait articulé , que le sieur de Murol a subi deux fois l’o
pération de la p a ra cen tè ze , ou ponction ^ p ro u ve qu’il a été
�(2 2 )
considéré comme atteint d ’hydropisie ; et c e traitem ent achève
de détruire toutes les incertitudes.
Il
y a donc lieu de conclure que les soupçons du sieur de
Murol n ’ont eu aucun fondem ent réel ; qu’à soixante-quinze
a n s , et avec les circonstances qui ont accom pagné sa m o rt,
elle n’a eu rien que de très-naturel.
D élibéré
à R io m , le 16 juin 1807.
L . F. D E L A P C H IE R , avocat ; B A R T H E L E M Y , doct. m èd. ;
A N D R A U D , avocat; C H O S S IE R , doct. mèd. ; P A G È S M E IM A C , avocat ; G E R Z A T , doct. mèd. ; P A G E S ( de
Riom ) , avocat ; M A L B E T , doct. mèd.
A lUOJVÎ , de l’im prim erie de
L a n d r io t ,
seul
Cour d’appel. — Juin 1807.
im p r im e u r
de U
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rollat, Eléonore. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Barthélémy
Andraud
Chossier
Pagès-Meymac
Gerzat
Pagès
Malbet
Subject
The topic of the resource
abus de confiance
prêts
empoisonnement
Murol (famille de)
homicides
Description
An account of the resource
Mémoire pour la dame Eléonore Rollat, épouse de François Philippe Courby, habitant à Aigueperse [suivi de ] Consultation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0334
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0613
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53782/BCU_Factums_M0334.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aigueperse (63001)
Clermont-Ferrand (63113)
Thiers (63430)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
empoisonnement
homicides
Murol (famille de)
prêts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53324/BCU_Factums_G1721.pdf
2d9a5c6aed0c7d00a0193d87edfb37cc
PDF Text
Text
MEMOIRE
E T
CONSULTATION.
�MÉMOIRE
POUR
La dame E
P
RO LLAT, épouse de F ra n ç o is COURBY, habitant à Aigueperse.
l e o n o r e
h il ip p e
A u c u n e situation n’est comparable à l a mienne. Mon époux
est accusé d’un crime horrible dont je n’ose prononcer le nom:
son honneur et le m ien , le sort de ses enfans, seront bientôt dans
la balance de la justice; et ses persécuteurs s’agitent, quand luim êm e , accablé de sa situation, il fuit la calomnie sur un sol
étranger.
Lorsque pour la première fois cette nouvelle épouvantable
vint jusqu'à m oi, toute ma conviction de l’innocence de mon
époux ne m’empécha pas de résister à ses résolutions, et de les
ébranler par mon désespoir. O u i, et je m’en confesse coupable,
je l’importunai de mes larm es, je séduisis son courage , et sa
fuite fut un effort de sa tendresse ; maintenant je me demande
avec effroi si sa présence ne lui eût pas été plus u tile , et si son
danger, au contraire, n’est pas né de ma terreur.
Dans cette cruelle anxiété, que ne puis-je appaiser de mon
sang ceux qui sont altérés de celui de mon époux ! Q ue n ’ai-je
A
�(a )
du moins le droit de me présenter pour lui en jugement, pour
confondre ses accusateurs, pour le défendre....... ? Que dis-je?
me défendre moi - même ; car jusqu’au tombeau ma destinée
n’est-elle pas attachée à la sienne?
Mais la rigueur des lois me repousse du tribunal qui va juger
ma propre cause. Ainsi la nécessité me dicte mon devoir. J ’ap
prendrai à mes juges une partie de ce que mon époux auroit pu
leur dire, ou du moins quelques-unes des circonstances que des
témoins auroient pu attester.
Je ne me suis point dissimulé combien de difficultés j’aurois
à vaincre, quand je n’aurois à opposer que mon foible langage
à des combinaisons préparées par la m échanceté même. Car
telle est la condition d’un malheureux accusé, que déjà la ca
lomnie a jeté de profondes racin es, alors même qu’il peut en
treprendre de la combattre. Q ue peut sa voix plaintive contre
les cris précurseurs de cette astucieuse ennemie? Et lorsqu’enfin
on consent à l’entendre , combien ne faut-il pas encore qu’il
dévore l’humiliation de la défiance qu’il excite? car la préven
tion du mal est malheureusement celle qu’on s’obstine le plus à
con sfrver; et les esprits même les plus raisonnables semblent
t ro u v e r plus c o m m o d e de cro ire le c r im e q u e d ’en m éditer les
invraisemblances.
Ces réflexions portoient le découragement dans mon âme ,
quand le souvenir de mes enfans a vaincu ma répugnance, et m’a
élevée pour ainsi dire au-dessus de moi-même. O u i, me suis-je
é c r i é e , je l’entreprendrai cette tâche pénible. La timidité de l ’ é
pouse cherchera des forces dans l’amour m aternel, et ces deux
titres prêteront peut-être à mon récit un intérêt que mes foibles
accens n’auroient pas eu la prétention d ’espérer.
C ’est à des juges, au reste, que je veux m’adresser, et ceux-là
ne repousseront pas mes paroles avec l’ennui de les entendre ; leur
terrible ministère ne leur donnera de défiance que contre la pré
vention qu’ils craindroient trouver en eux mêmes. Mes récits se
ront donc écoutés comme une explication nécessaire, par ceu x
�( 3 )
que la loi a armés de sa puissance ; car ils trem bleront, sans doute,
de l’idée seule qu’ils pourroient condamner une famille honnête à
l’in fam ie, et un innocent à la mort.
Les relations de mon époux avec la maison de Murol ne furent
pas de ces liaisons soudaines et fortuites , qui ne donnent pas le
temps de s’apprécier, ou de concevoir de justes défiances. C ’est
depuis son enfance qu’il connoît le sieur de Murol iils aîné , ayant
été élevé avec lui dans le même pensionnat, à Lyon.
Cette habitude de se voir a continué dans un âge plus avancé ;
mais l’historique de ces premières liaisons n’a rien d’essentiel à
rem arquer, et je me hâte d’en venir à des époques plus récentes.
Jusques à l’année dernière, je n’avois vu à Aigueperse que les
sieurs de Murol fils , et leur père m’étoit absolument inconnu. Il
me paroissoit même que Courby le connoissoit à peine , et ne vivoit avec lui que sur le ton du respect et des convenances de
société.
Nous ignorions entièrement ses affaires, et ne connoissions
celles de ses fils que par cet extérieur d’opulence, qui fait illusion
au vulgaire tant qu’on a des ressources pour le soutenir.
Cependant, un jour de l’été dernier, le sieur de Murol p ère , se
trouvant seul chez son fils cadet avec Courby, fit tomber la con
versation sur la situation de ses fils , et sür le mécontentement
qu’il éprouvoit de leurs dépenses excessives.
Cette ouverture pouvoit n’étre que le désir secret d’ un père de
faire parvenir ses plaintes à ses fils, par un organe qu’il suppohoit
plus persuasif peut-être. Mais le sieur de Murol père ne se borna
pas là. Soit hasard, soit que la première idée lui en fit naître une
seconde, il confia bientôt à Courby qu’il méditoit pour son fils
aîné le projet d’une grande alliance, mais qu’il étoit retenu par
des dettes pressantes, dont l’éclat alloit ruiner toutes ses espé
rances.
A lo rs, comme par réflexion, il demanda à Courby s’il ne pour
rait pas lui faire trouver de l’argent.
A
2
�( 4 )
,
Un jeune homme ne pouvoitëtre qu’embarrassé à cette brusque
proposition. Courby fut forcé de lui avouer son impuissance de
lui être utile. « J ’ai des dettes moi-même, lui dit i l , sans avoir à
» me reprocher un excès de dépense ; mais j’ai eu la foiblesse de
» cautionner les effets d’un homme que je croyois incapable de
» me tromper; il a fait faillite, et m ’a laissé beaucoup à payer;
jj et dans ce m om ent, je cherche moi-méme 18,000 fr. pour finir
de m ’acquitter.
» Q u’importe ce que vous m’objectez, lui répondit M. de
» M urol; vos ressources pour avoir de l’argent ne tiennent sans
» doute qu’à une signature de plus; je vous offre la mienne pour
les 18,000 fr. dont vous avez besoin, et à votre tour, vous me
» donnerez la vôtre pour me procurer l’argent que je cherche;
elle me sera u tile, parce que vous êtes d’une famille de
te nëgocians, et que par moi-méme je ne trouve plus à emj> prunter : de cette manière , nous nous serons rendu un service
y> mutuel. »
J’ignorai dans le temps cette conversation ; et Courby m’a avoué
depuis que quoiqu’il y e û t un côté avantageux pour lui dans la
proposition du sieur de M urol, ces combinaisons d’emprunt et de
signatures bro u illo ie n t ses idées , et co n fon d oien t son in e x p é
rie n c e ; qu’il &’étoit contenté en conséquence de bégayer un con
sentement évasif, et avoit trouvé un prétexte de se retirer sans
rien terminer.
Mais le sieur de Murol père n’abandonna pas ainsi son plan. Le
20 aoû t, je le vis à Aigueperse. Il parut fâché de ne pas y trouver
C o u ib y , que je l’engageai à attendre. Courby ne revint pas le soir,
et M. de Murol ne partit que le lendemain après dîner. Je 11e cher
chai point à savoir le m otif de son voyage; je me contentai de le
recevoir avec honnêteté et empressement.
C ’est dans son chemin qu’il trouva Courby ; il le pria de rétro
grader jusqu’à Clermont, et 11e le quitta plus jusqu’à ce que les
bilh ts fussent souscrits. Je fus informée de tout cela au retour
de mon époux. Jusqu’alors il m’avoit dissimulé l’embarras où
�( 5 )
l ’avoit jeté sa complaisance pour un faux ami ; il me montra pour
18,000 ir. de billets , qui suffisoient pour le libérer.
Bientôt il s’occupa de placer ces billets à Thiers ; et le sieur
de Murol l’ignora d’autant moins, que Courby prit plusieurs fois
un cheval chez lui ( à la Borde ) pour y aller, et je crois même
un domestique.
Dans le courant de septem bre, je vis M. de Murol père une
fois à Aigueperse : il parut y être venu pour consulter M. Lagout
sur sa santé, c r a ig n a n t , d is o it-ilê tr e atteint d hydropisie. A son
retour il ne dit rien de la consultation; et cette réserve m’ayant
étonnée, j’en demandai la cause à Courby qui l’avoit accompagné.
Il me répondit q u e, sur les questions de M. Lagout, M. de
Murol avoit avoué qu’une gale traitée avec trop de précipitation
avoit depuis dix ans dérangé sa santé ; qu’il lui sem bloit, de
loin en loin, sentir une nouvelle invasion de cette m aladie, et
que sa santé alloit toujours en empirant ; que M. Lagout lui avoit
ordonné une certaine eau , dont la recette ou l’adresse étoit
contenue dans un petit imprimé qu’il lu i remit.
M. de Murol partit, engageant Courby à aller le voir les der
niers jours de septembre, à la Borde, où ses fils devoient venir
faire une partie de chasse.
C ’est au 29 ou 3o septembre qu’on place l’épouvantable ac
cusation qu’ont répandue les sieurs de Murol contre le malheu
reux Courby. Hélas! ils l’accabloient encore de démonstrations
d’amitié , quand déjà leurs affreux soupçons le signnloient en
public comme un vil criminel ; et le poison qu’ils lui préparoient
étoit bien plus dangereux et plus subtil que celui........ Mais à
quoi tendroit une plus longue réticence ; il faut bien m’avouer
à moi-méme que Courby est accusé d’un empoisonnement.
C ’est, dit-on, en mangeant des pèches que le sieur de Murol
père aperçut au fond de son verre un sédiment épais, dont le
goût lui lut désagréable, quoiqu’il eût mangé sans répugnance
les pêches qui avoient été saupoudrées de la même matière. Il
vomit beaucoup , éprouva des douleurs aiguës, eut des ulcères«
�( 6 )
dans la b ou ch e, et dit à ses am is, le lendem ain , qu’il croyoil'
avoir été empoisonné.
Voilà ce qu’a répandu la famille de M urol, en ajoutant même
que Courby, présent, disoit en confidence aux assistans : Il n’en
reviendra pas.
Ici toutes les époques deviennent précieuses, car les événemens postérieurs portent avec eux des conséquences pressantes.
Le jour même de cet événem ent, et le lendemain , les fils
M urol, leurs am is, et C o u r b y , firent la partie de chasse projetée.
Le |6 octobre, Courby retourna à la Borde : Murol fils aîné
lui emprunta huit louis pour payer des impositions ce même jour.
L e sieur de Murol père étoit présent, et dit qu’il en faisoit son
affaire.
Le même jo u r , Murol ainé engagea Courby à aller avec lui
voir le curé de Beauregard, et le sieur Parricaud, qu’il n’avoit
pas v u , dit-il, depuis son retour de Paris.
Le 10 octob re, M. de Murol père envoya son domestique h
A igueperse, avec une lettre d:invitation à Courby pour aller à
la Borde le dimanche suivant, manger un cochon de lait avec
le curé de Beauregard.
En e f f e t , le d im a n ch e su iv a n t , i3> o c t o b r e , C o u r b y alla dîner
à la B o r d e , fit le soir une partie de piquet avec M. de Murol
et le c u r é , et ne revint à Aigueperse que le lendemain.
Le 21 octobre, M. de Murol père vint à Aigueperse avec le
nommé Cbapus , domestique de son fils. Courby étoit à Gannat,
et j’engageai M. de Murol à diner.
Quand j’allai donner des ordres à la cuisine, mes domestiques
me recommandèrent de ne pas laisser toucher mes enfans par
M. de M urol, parce que Chapus leur avoit dit qu’il étoit plein
de gros boutons, depuis un remède que M. Lagout lui avoit
donné.
En attendant le dîner, M. de Murol alla chez M. L agou t,
où Couiby de retour alla le chercher.
Tém oin de la première conversation, on ne lui cacha pas la'
�( 7 )
seconde , et il entendit M. de Murol causer avec M. Lagout de
l’effet de son remède. M. de Murol se plaignit d’avoir eu des
coliques, des vomissemens, et une salivation incommode qui lui
avoit fait naître de petits ulcères dans la bouche. Il termina
cependant par rem ercier M. Lagout du rem ède, parce que sa
santé é to it, dit-il, beaucoup meilleure depuis quelque temps.
M. Lagout avoua ne pas connoltre la composition de l'eau qu’il
n’avoit conseillée qu’en le déclarant ainsi, et sur l’approbation
que sembloient y donner ses confrères. Il ne s’étonna pas des
accidens dont lui avoit parlé M. de M u rol, parce qu’il soupconn o it, d it-il, que le remède contenoit du mercure.
M. de Murol partit le soir, et recommanda beaucoup à Courby,
s’il venoit à la Borde dans la sem aine, de ne pas traverser l’Allier
qui avoit, dit-il, grossi beaucoup, et où il s’exposeroit.
Il laissa à Aigueperse une charrette couverte d’un drap , et em
prunta de
une carriole pour faire un voyage à Montluçon.
Le 29 ooptcnfljro, le sieur de Murol père vint à Aigueperse
avec un de ses fils, pour rendre la carriole qu’il avoit empruntée ,
et reprendre la sienne avec un cheval de selle que sou iils avoit
prété à Courby depuis deux mois.
Ils parurent désirer reprendre les effets de 18000 francs, si
C o u r b y ne les avoit pas négociés; e t Murol fils sembloit seul y
m ettre q u e lq u e h u m e u r. C o u r b y avo it n é g o c ié p our 16400 fr.
d’effets , p our ses propres dettes ; e t il répondit à M. d e Murol
p è re , que si la proposition faite par lu i-m êm e ne lui convenoit plus, il étoit prêt à lui souscrire des effets équivalens; et
il en signa en effet pour 19362 francs , ce qui comprenoit un
intérêt sans doute assez considérable; et je souscrivis moi-même
ces nouveaux effets dont les sieurs de Murol sont aujourd’hui
porteurs.
Un mois se passa ensuite sans que j’eusse rien de commun
avec cette famille. T out d’un coup , au mois de d écem b re,
j ’appris l’ horrible nouvelle que le sieur de Murol accusoit hau
tement Courby de l’avoir empoisonné, et qu’une procédure cri
�( 8 )
minelle étoit provoquée par ses fils et lu i, non qu’ils eussent osé
accuser en leur nom , mais à la diligence du magistrat de sûreté
de C lerm ont, qui les faisoit tous entendre comme témoins.
Ce crim e, ces com binaisons, mes idées accablantes, un retour
de comparaison sur les temps cruels des délations et des écha
fauds , tout cela m’ôta le discernement et la réflexion. Je ne
voulus entendre celles de personne. Mon époux partit, et je me
trouvai seule à la vue de ces indifférens qui soupçonnent tou
jours, et ne réfléchissent jamais.
Quoi qu’il en soit, le temps qui s’est écoulé depuis le mois de
décembre a permis à la justice de faire d’exactes recherches. L e
sieur de Murol p é r e , âgé de près de quatre-vingts a n s, a été
atteint d’une maladie épidémique inflammatoire, à laquelle s’est
jointe une hydropisie. Il s’est mis alors dans les mains d’un ch i
rurgien ignorant, et il est mort dans les premiers jours d’a v r il,
ayant survécu par conséquent plus de six mois ,à son prétendu
empoisonnement.
Je n’ai jamais désiré la mort de personne ; mais je leconfesse
sans rougir, la mort de cet homme a ôté de mon cœur un far
deau bien pesant. Ce n’est pas que j’eusse , comme de V itellius,
d e la joie à co n sid érer le c a d a v r e d ’un e n n e m i ; loin d e m o i c e
sentiment de vengeance. Mais je n’ai pu m’empécher de dire:
C ’est là qu’étoit cachée la vérité ; c ’est là que le triomphe de
l ’innocent sera écrit par les mains même de la Providence.
Que mes lecteurs me pardonnent cet aveu d’un mouvement
<jue je n’ai pu vaincre. 11 faut avoir été dans ma position cruelle,
pour sentir qu’elle juctifiecoit même un sentiment moins légitime.
Me voici donc devant mes juges , incertaine maintenant de
ce qu’il me reste à leur dire; car quand toute la procédure me
seroit con n u e, je ne puis sans ridicule me jeter dans la carrière
polémique d’une discussion de droit criminel.
Mais la défense de mon époux sera plus dans la conviction de
«es juges que dans mes efforts. Je n’ai voulu que révéler des
faits
�C9 )
faits de ma connoissance , et sans doute ils vaudront mieux, que
mes réflexions.
Un crim e ne se commet pas sans être nécessaire. C o u rb y ,
nanti d’effets signés de M. de M u ro l, n’avoit pas besoin de sa
défaire de lui pour les retenir. On est bien plutôt capable d’un
vol hardi, et sans dan ger, qu’on ne l’est d’un empoisonnement.
Si le sieur de Murol père est venu tant de fois après le 29 sep
tembre à A igueperse, et s’il a continué d’appeler Courby à la
Borde, qui pourrait se défendre d’étre convaincu qu’il n’a pas
cru être empoisonné par lui ; car eût-il cherché la société de
son assassin ?
Cependant c ’e st, dit-on, le jo u r même du déjeuner des p èch es,
que le sieur de Murol se crut empoisonné ; c ’est le lendemain
qu’il fit part de ses craintes à ses amis.
S ’il eût soupçonné d’autres personnes , on pourrait se rendre
raison de cette continuation de confiance ; mais le sieur de
Murol a dit encore avoir vu Courby saupoudrer les pêches de
la matière blanche, qui ne lui répugna qu’au fond du verre, et
qui lui causa à l’instant même des douleurs et des vomissemens.
L ’idée de l’empoisonnement, et de son auteur, se seroit donc
liée sans intervalle dans son imagination ; et alors comment con
cevoir cette suite de fréquentation journalière , ces repas mul
tipliés, qui auraient rendu aisée la consom m ation du c r i m e ,
et qui n’ont cependant donné lieu au soupçon d ’a u c u n e teutative
nouvelle ?
Comment concevoir encore qu’un homme se croyant empoi
sonné le 3o septembre , se disant tourmenté des douleurs ordi
naires de ce m al, consulte un médecin le 20 octobre , et ne lui
dise pas un mot de ses m aux, ni de ses terreurs?
Là , au contraire , les vomissemens sont attribués, par le ma
lade lui-même , à une autre cause. Ils ne l’inquiètent point du
to u t, puisque l’amélioration de sa santé, et le ieineiclm ent au
médecin , sont le seul objet de sa visite.
Cette bonne santé se soutient pendant quatre mois consécutife,
B
�( IO )
f t il tombe enfin malade. Est-il mort d’hydropisie ? est-il mort
d’une inflammation dans le ventre ? On dit l’un et l’autre. On
dit aussi qu’il a été traité de l’hydropisie, et que la ponction lui
a. été faite deux fois dans le mois qui a précédé sa mort.
Je n’entends rien en médecine : mais les effets de l’arsenic
sont connus de tout le monde ; il passe pour le plus mortel et
le plus prompt des poisons.
Si son action est brûlante et corrosive, si le premier contact
produit des ulcères dans l’instant même , com m ent concevoir
qu’un homme empoisonné devienne lentement hydropique ;
qu’une surabondance d’eau exige deux ponctions ; qu’il ne se
manifeste d’inflammation que dans le bas-ventre, sans lésion des
viscères supérieurs?
L e cadavre a été vu , dit-on, par des docteurs délégués par
la cour criminelle. Je n’ai garde de supposer qu’ils se soient
livrés à des conjectures ; ils n’avoient point, comme les Arusp ic e s , à consulter les entrailles d’une victim e pour présager
Xavenir, Leur tâche plus facile a été de chercher dans le corps
d’un hom m e, mort hydropique, si des traces de poison étoient
visibles , et de vérifier les corrosions qu’auroient dû recéler
l’estomac et les p re m iè re s voies.
Si le poison n’a pas été visible à leurs yeux , le sera-t-il à la
conscience du juge?
On prétend que C o u rb y, au lieu de donner du secours à M. de
M u ro l, les 29 et 5o septem bre, a dit à plusieurs valets de la
maison qu’il étoit vieux et ca ssé, qu’il ne guériroit pas ; et de
commentaires en com m entaires, 011 va presque jusqu’à y voir
un aveu de son crime. C ’est ainsi que la malignité interprète
les expressions les plus indifférentes. Mais comment ne pas voir
qu’un coupable, dans cette position, auroit au contraire affecté
ce qu’il ne sentoit pas , et multiplié ses soins pour n’étre pas
soupçonné.
Il a , dit-on encore , demandé à un pharmacien , après l’empoi
sonnement , et dans la r u e , si l’opium étoit un poison qui fit
�( 11 )
_
souffrir long-temps. Autre arme de la m échanceté, pour en tirer
une conséquence à charge. J’ignorois ce fa it, et j’ai même des
raisons de suspecter ceux qui l’ont accrédité. En cherchant dans
le passé à quelles époques j’ai vu mon époux attristé de l’embarras
subit où la faillite d’un ami l’avoit jeté , je n’ai pas trouvé dans ma
mémoire qu’il ait eu jamais des instans de désespoir, ou du moins
il n’en a pas manifesté en ma présence. Il savoit d’ailleurs que je
viendrois à son secours ; et je suis humiliée que pour 18000 fr. et
surtout pour une dette d’honneur, on puisse croire que mon
époux se trouvât réduit à attenter à ses jours.
Quant à toute autre version, je la dédaigne. Quel insensé con
cevrait l’idée qu’il pourroit faire avaler de l’opium à son ennem i,
c ’est-à-dire, la plus amère des potions, sans qu’il la refusât, ou
qu’il pourroit la glisser à dose suffisante parmi ses alimens?
Celui qui pour se défaire d’ un homme veut l’empoisonner, a
pour première pensée d’ensevelir enlui-m ém e le secret de son
crime. S’adresse-t-il à un pharm acien, il est le premier qu’il
trompe; et à moins de croire l’empoisonneur sans bons sen s, on
ne supposera jamais qu’il ait parlé de la mort au pharmacien à qui
il demandoit du poison.
Mais qu’aura gagné la calomnie à tout cet amas de faits incohé
rent, et de petits détails exagérés par la passion, ou grossis par
les circonstances ? c a r , s’il n’est pas constaté qu’il y ait empoison
nement, il n’y a pas de coupable à chercher.
Vaut-il mieux abandonner ce qui se présente h l’idée la plus
simple, et substituer des fictions ou des conjectures , à ce qu’on
conçoit avoir été un effet de l’ordre naturel des choses ?
Et parce qu’un vieillard, d’un tempérament u sé , est mort à
près de quatre-vingts ans, faudra-t-il s’obstiner à croire qu’il n’a
dù mourir que d’une mort violente?
S'il n’étoit mort que du plus subtil des poisons, auroit-il résisté
six mois? auroit-il surtout passé quatre mois dans le meilleur
état de santé qu’il ait eu depuis dix ans?
Certes, je n’ai pas cru un instant qu’aucun homme au m onde
B *
So5
�( 12 )
put dire en son âme qu’il est convaincu de la réalité du crim e,
et que Courby mérite la mort : je l’ai cru encore moins de ses
ju g e s, pour qui le premier devoir est de ne se rendre qu’à l ’évi
dence. Mais il m’importoit aussi de détruire jusqu’à l’apparence
d’un crime dont l’idée seule m’accablera jusqu’à ce que le soup
çon même en soit détruit pleinement.
Je ne sens que trop de quelle influence cet événement sera
pour ma destinée future ; car le malheur d’ un aussi cruel soupçon
ne peut se réparer qu’à la longue ; et j ’ose croire que les cica
trices de la calomnie ne seront point ineffaçables. La conduite
à venir de mon époux se réglera, je l’esp ère, sur les circons
tances dans lesquelles sa mauvaise étoile l ’a placé.
Je puis donc voir encore le bonheur renaître dans mon asile;
et si c ’est une illusion, que du moins un si flatteur horoscope
ne soit pas enlevé à une mère : mon époux, rendu à sa fam ille,
ne verra dans son infortune passée que le devoir sacré d’en effacer
jusqu’au souvenir. Il peut encore, malgré la calomnie, transmet
tre à ses enfans un nom sans ta ch e, et vivre avec honneur dan«
leur mémoire»
C O U R B Y , née R O L L A T .
�( *3 )
CONSULTATION.
L e C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu le mémoire de la dame
R ollat, femme Courby ,
E s t i m e , d’après les faits contenus audit m ém oire, que si les
médecins délégués par la cour criminelle pour examiner le ca
davre du sieur de M urol, n’ont pas trouvé de traces de poison,
ou s’ils n’ont pas exprimé une opinion certaine et fondée sur c e
genre de m ort, il paroit impossible qu’un jury se déclare con
vaincu que le sieur Courby est coupable.
On n'a pas accusé le sieur Courby d’une simple tentative d’em
poisonnement , mais bien d’un empoisonnement effectué avec de
l’arsenic jeté sur des pèches. Par conséquent il ne faut pas sé
borner à examiner s’il y a preuve de la tentative, mais il faut
savoir s’il y a un empoisonnement et un coupable.
L a question préalable d ’ une instru ctio n crim in e lle e st de Cons
tater le co rps d ’ un d é l i t , de m ê m e que la p re m iè r e c h o se à e x a
m in er par le ju ry est de savoir si le délit est constant.
Car il n’est pas besoin de chercher s’il y a un coupable, lors
qu’il n’y a pas certitude qu’il y a eu un délit : D e re priusquàm
de reo inquirendum est; e t , comme le dit Dom at en son Traité
du droit public : « C ’est le premier et le plus indispensable des
« devoirs. Cette preuve est même tellement essentielle, qu’elle
« ne peut être suppléée ni par les dépositions des témoins , ni
« par des conjectures, ni même par la confession de l’accusé. »
D ’après c e la , peut-on bien dire que le corps du délit imputé
au sieur C ouiby, est constant, et qu’il est certain qu’il y a eu
empoisonnement? Rien ne paroit au contraire moins p ro u vé .
�( 1 4 }
Aucun rapport de médecin ou chirurgien ne parolt avoir pré
cédé ]a mort du sieur de Murol : lui seul a eu quelques soupçons
que rien n’a vérifiés. Ainsi , jusque-là aucun corps de délit n’est
constaté.
Après la mort du sieur de Murol , la cour criminelle a bien
fait ce qui étoit en elle pour constater le corps du d é lit, puis
qu’elle a commis des hommes de l ’art pour visiter le cad avre,
et en décrire l’état. Le rapport qui a dû en être fait sera soumis
au ju ry , s’il est antérieur à l’acte d’accusation ; et c ’est là où
le jury puisera principalement les idées qui appelleront sa con
viction sur le fait de savoir s’il y a un d é lit, c ’est-à-dire, s’il
est constant que le sieur de Murol père est mort empoisonné.
Sans doute la présence du poison n’est pas toujours visible ;
mais son effet n’en est pas moins marqué par des signes exté
rieurs , surtout quand le malade en a été victim e, et quand il
s’agit d'un poison aussi violent que l’arsenic.
>'f'Au^un auteur n’a mieux décrit les effets de ce poison , et les
signès'«ïf3muels on peut les connoitre , que M. Mahon , en son
Traité de niécjecine légale; et c ’est le meilleur guide qu'on
puisse avoir poiii\,raisonner sur une matière aussi grave et épi
neuse.
Les poisons corrosifs,dit cet auteur, tuent très-promptement,
et leurs effets s'annonceut^nvec une rapidité qui ne permet guère
de douter de leur emploi.\j!Tdme 2 , p. 275. )
L ’arsenic est soluble dan^tte^Lles liquides ; c ’est le plus in
domptable des poisons : il ne^ p ^ étre m itigé, ni masqué en
aucune manière. ( Page 276.
Quand il y a soupçon d’empoisonnement, tout médecin , avant
d’inspecter le corps , doit s’informer soigneusement de lïig e,
du sexe , du tempérament , des iorces , du genre de vie du
défunt , s’il étoit sain ou malade , combien de temps il a
vécu depuis, de quelles incommodités il s’est plaint, quelle
.espèce de régime cai conduite il a observée après , s’il a été
secouru par un inedeoïn expérimenté ou par des ignorans.
( Page 2ÇG. )
�c i5 )
5° ° \
Après c e la , l’inépection du cadavre consiste à examiner l'état
des parties extérieures et les signes intérieurs du corps.
Quand l’arsenic n’est pas conservé en nature dans quelques
viscères , ce qui arrive fréquem m ent, sa présence est au moins
manifestée par des traces de lésion et de corrosion assez remar
quables dans toute la route qu’il a parcourue (1) ; son action va
même jusqu’à se manifester au-dehors (2) ; et quelque nombreux
encore que soient ces signes, le médecin , comme le ju g e , ne
peuvent se croire convaincus que par leur ensemble.
Ici il faut d’autant plus de circonspection , qu’il s’agissoit d’un
sujet vieux, et dont la santé paroissoit altérée depuis long-temps.
D es douleurs internes et des vomissemens sont, dit-on, le seul
indice de poison qu’il a remarqué lui-méme (3). Mais une foule
(1)« 2°. L ’érosion inflammatoire, gangrène, taches éparses dans l’oesophage,
l ’estomac, le pylore, les intestins, le sphacèle de ces parties. — Quelquefois l’estomac percé, — le sang coagulé, — le péricarde rempli d’ un fluide jaunâtre ou
c o r r o m p u , les autres viscères ramollis et comme dissous, parsemés d’hydatides,
de pustules, de taches; le coeur flasque et comme racorni; le sang qu’il contient,
noir et presque solide; le foie noirci, ou livide, ou engorgé. »(M ahon, pag. 272.)
« On voit enfin, tant extérieurement qu’intérieurem ent, des vessies disper
sées ça et là, remplies d’ une sérosité jaune ou obscure, et presque toujours d’une
odeur désagréable. » ( Ibid. pag. 273. )
(2) « Distension excessive de l ’abdom en, au point d ’ e n menacer la rupture ;
— taches de différentes couleurs sur la surface du corps, surtout au dos, aux
pieds, à l’ epigastre ; — la prompte dissolution, quand la personne est morte du
poison. On peut trouver dans la dissection du cadavre des indices certains d’em
poisonnement : — la roideur des membres, la tuméfaction du ventre, ne sont
pis des signes constans ; — mais ce qu’il y a de constant dans les cadavres des
personnes quiontpéri d’ un poison âcre ou caustique, c’ est de trouver l’œsophage,
l’estomac et les intestins grêles, atténués, enflammés, gangrenés, rongés et sou
vent percés.... Il suffit de résumer ces signes, pour être convaincu de la néces
sité de ne jamais sc décider que par leur ensemble. » ( Ibid. p. 270, 2 7 1 , 307. )
(5) «Quand on n’a pas été à temps d’examiner la nature du vomissement, que
les symptômes sont passés, que le malade est guéri , peut-on tirer des indices
sùffisans de l’assertion du plaignant, et de celles des personnes qui l’ont assisté?
— Je ne le pense pas. » ( Ibid. pag. 3o 6. )>
�( 1 6 }
d’alimens, même trés-sains, peuvent fournir les mômes résul
tats (1).
Il paroit que le sieur de Murol avoit été mal traité d’une
gale. Les empiriques ont pour ces sortes de maux des remèdes
dont la promptitude séduit le m alade, mais dont l’effet double
ment funeste consiste à faire rentrer dans la masse du sang une
humeur vicieuse, dont la nature cherchoit à débarrasser le corps:
et s’ajoute à c e mal r é e l, le mal plus grand peut-être du remède
lui-même. Aussi est-il constant qu’ une éruption rentrée suffît
seule pour agir mortellement sur l’individu, et laisser des traces
presque semblables à celles du poison (2).
L ’opinion qn’a pu avoir le sieur de Murol lui-même sur son
état, ne doit pas être d’un très-grand poids; car on sait com
bien un m alade, «t surtout un vieillard, est sujet à se frapper
l’imagination : pour peu que ses craintes soient accréditées par
quelque soupçon, il ne trouve plus rien que d’extraordinaire dans
son état, et il s’obstine à ne pas croire que des maux naturels, ou
la caducité , puissent être l’unique cause de son dépérissement.
Cependant 1a plupart des maladies vives s’annoncent par une
invasion soudaine; et cette rapidité même semble tellement inex-
(1) « Q u ’ un homme ait mangé des alimens difficiles à d ig érer, ou faciles à
entrer en putréfaction, il peut arriver que quelque temps après il se trouve
très-m al, et q u ’il ait tous les symptômes du poison, jusqu’à mourir.
» J’ai vu une châtaigne rô tie, avalée toute en tière, donner tous les signe*
de l’empoisonnement. Les têtes et pieds de veau , les écrevisses, les huîtres,
les vins troubles et avariés, ainsi que les vins frelatés, ont très-souvent aussi
produit cet effet. » ( M alion, pag. 29g. )
(2) « Certaines maladie» laissent sur le« cadavres des traces peu différente«
des signes ordinaires du poison. »
« Une éruption rentrée, une affection scorbutique très-avancée, une bile
très-âcre, etc. — Mais par une contemplation réfléchie des sym ptôm es, et la
comparaison que le médecin en fera avec les signes que porte le cadavre, il
distinguera aisément les restes d’une maladie violente, d’avec les caractères de
l’empoisonnement. » ( Ib id . pag. 3 i 3. )
p lica b le,
�C 17 )
plicable, qu’on repasse alors dans sa mémoire Jusqu’aux moindres
détails qui ont précédé; les choses quiétoient auparavant les plus
simples se grossissent, la crédulité s’en empare. P o st hoc, ergo
propler h o c , se d it-o n ; et ce raisonnement de l’ignorance n’en
séduit pas moins quelquefois les personnes les moins prévenues.
Un soupçon alors, né du plus léger indice, acquiert bientôt de
la consistance, à tel point que les explications les plus naturelles
sont dédaignées ; le préjugé l’emporte sur l’expérience ; et on ferme
les yeux sur les exemples plus frappans, qu’on a eus souvent sous
les yeu x, des bizarreries de la nature, et des accidens de la yie (1).
Car en cette matière , dit le docteur C o ch in , 'et quand il s’agit
de juger des poisons, les conjectures les plus vraisemblables ne
sont souvent que des illusions (2).
L e célèbre auteur Zacchias avoit été consulté sur un événe
ment presque semblable à celui du sieur de Murol. Un individu
avoit fait un ample diner avec un am i, et ne tarda pas à éprouver
de grands malaises qui furent suivis d’un prompt dépérissement.
Il devint subitement pâle et extén ué, perdit la raison, et mourut.
Le diner ayant été son dernier acte de santé, les soupçons s’é
levèrent contre celui qui l’avoit partagé ; il fut mis en prison.
L e cadavre fut ouvert, et Zacchias y trouva les intestins trèsenflés, le sang coagulé dans les ventricules du cœ ur, la substance
même du cœur d’une couleur dégénérée, la tête et les lèvres
grosses, les poumons livides et adhérens , le foie corrompu.
T ou t cela pouvoit paroitre des signes de poison. Mais ce docte
(1)
« Il est une infinité de maux sourds, qui augmentant insensiblement en
intensité, peuvent avoir affligé un homme depuis longues années, sans qu’il
s’en soit lui-mème beaucoup aperçu, et q u i, éclatant tout à coup, paroissent
inconcevables à ceux qui ne sont pas au fait des divers accidens de la v ie , et
qui ont l’imagination préoccupée. » ( Ibid. png. 317. )
(a) Quest. du poison, t. i er. , pag. 4 - Recherches sur les signes anatomique*
et judiciaires des signes d'empoisonnement, par M . de Retz.
G
�M
C 18 )
médecin ne chercha que dans son art et dans son génie des con
séquences que la prévention auroit dénaturées, s’il se fû t aban
donné aux fausses impressions de l’opinion publique.
Dans une consultation très-méthodique et très-savante, Zacchias suivit pas à pas tous les symptômes décrits; et il fit résulter
de leur ensemble, que l’homme étoit mort de la jaunisse.
Il ne jugea pas possible que ces symptômes fussent nés du
poison, puisque la nature n’avoit pas fait un effort continuel et
sans relâche, pour se débarrasser de cet ennemi dangereux (x).
Il y avoit eu un vomissement soudain ; mais il avoit cessé ; mais
il n’y avoit pas eu de ces douleurs opiniâtres et de ces angoisses
toujours croissantes, qui dénotent une prochaine dégénération
des solides (2).
La corruption du foie et l’adhérence des poumons avoit paru
de quelqu’iinportnnce à Zacchias; mais il pensa que si la cause
en fût venue du poison, l’estomac et le cœur auroient dû ^tre
lésés et corrodés auparavant (3).
D ’après cela Zacchias n’hésita pas à prononcer que le malade
n’étoit pas mort de poison, mais d’une maladie naturelle (4).
L e s auteu rs q u i on t é c r it sur le droit cr im in e l ne conseillent
pas une moindre circonspection dans les jugemens qu’on peut
porter sur de semblables matières.
(1) « A ccid en tia , si ex veneno administrate superveniant, soient, cum
impe.tu tjnodam , ac vehementia apparerò, non tolerante naturò vim im
provisant ipsiiis veneni. » ( Zach. Consil• 16. )
(2)« Vom i tus indesinens, molestia intolerabilis, dolores pernecabilet ,
lipothymia , syncopis , et alia. » ( Ibid. )
3
( / « Primo et antequàm hepar lad atu r , necesse ett Ited i stomachum
Otque etiam cor. » ( Ibid. )
4
( ) « Igitur ex pradîctis patet N... à propinato veneno non fuisse tx tinctuni, sed potiùs à morbo quodam naturali. » ( Ibid. )
�( 19 )
J t 2>
u Plus l ’accusation de poison est grande, dit M. P r é v it, céîa lèbre crim inaliste, plus on doit examiner avec soin si elle est
u fondée. La mort est tous les jours accompagnée de symptômes
« qui en imposent sur cet article. Ainsi il faut user de beautc coup de prudence, observer avec soin si les accidens dont
« se plaignent les personnes qu’on dit empoisonnées sont ab« solument les suites du poison : si la personne empoisonnée
« est m orte, l’ouverture doit apprendre et constater le poison ;
« il se manifeste clairement par les premières voies, e tc .»
C Principes sur les visites et les rapports, pag. 226. J
Il y auroit donc bien du danger à s’en tenir à de simples
soupçons, ou à des indices équivoques, dans une matière d’aussi
grande conséquence. Car il suffit que d’autres maladies pré
sentent des signes semblables à ceux du poison, pour que dans
l ’incertitude il faille juger qu’il n’y a pas de preuve d’empoi
sonnement (1).
Car qui pourroit, en matière crim inelle, juger par de simples
indices, lorsque les lois elles-mêmes exigent des renseignemens
certains , des indices indubitables , et des preuves plus claires
que le jour (2)?
* Mais que! peut-on entendre par ces indices indubitables? Les
criminalistes prennent encore la peine de les signaler de ma
nière à ne pas s’y tromper. Il faut que l’esprit du juge en soit
frappé et môme contraint au point de ne pouvoir pencher pour
l’opinion contraire. C ’est la situation de l'â m e , dans laquelle
(1) « Non dicitur probatum veneni crimen, ex probations continui
vomitus , ■pel ex livore corporis, aut spumis ex ore flluentibus , quia
hcec signa possunt etiam ex pestifera feb re , aut acuto morbo, citrà
veneni causam orire. » ( Farinac. qucest. 2, n°.
32
, prax. crim. )
(2) «. Munitfi sit apertissimis documentis , vel indiciis ad probation
tionem indubitatis et luce clarioribus. » ( L, Sciant » cod. De probat. )
�( 20 )
l’esprit se repose sur le parti qu’il vient de prendre comme sur
une découverte assurée et satisfaisante, sans revenir jamais à
hésiter dans la conviction qu’il vient d’acquérir (1).
Ces maximes sont puisées dans la loi elle-m ém e, qui ne veut
pas qu’on puisse condamner un individu sur de simples soup
çons (2), parce qu’en effet l’expérience prouve que celui qui
com m ence à soupçonner , ne voit jamais comme il doit voir (3);
ce qui a fait dire à M. Domat que le juge doit se défier de la
première impression qu’on lui donne dans une affaire , parce
qu’elle est malgré lui le mobile de sa conduite, et qu’il ramène
tout à cette opinion (4).
Si d’après l’examen de tous ces principes généraux, il faut se
former une opinion, le conseil n’hésitera pas à dire que s i , com m e
on paroît le croire , les médecins délégués par la cour criminelle
n’ont pas attesté avoir trouvé dans le corps du sieur de Murol
des traces de poison , il est impossible de penser qu’il y ait ni
conviction de culpabilité, ni même conviction d’empoisonne
m ent ; c a r , comme le dit la dame Rollat dans son mémoire ,
si le poison n’a pas été visible pour les médecins , comment le
seroit-il p ou r un ju r y ?
Il n’y aura pas de corps de délit , et par conséquent il sera
inutile de chercher un coupable.
Les circonstances qui ont.précédé et suivi l’évén em en t, ne
semblent pas même donner lieu à des soupçons bien fondés ; et
(1) « Indicium indubitatum est quod coarctat mentem judicis ita ut
omnind credat, nec possit in contrarium inclinare. E st demonstratio
rei per signa sufficientia per qum animus in aliquo tanquam existente
36
35
quiescit , et plus investigare non curat. » ( Farinac. qucest.
, n°.
.)
(2) « Ne suspicionihus qur.mquam damnari oportere divus Trajanus
icripsit. » ( L. A bs. f f . Poenis. )
3
( ) « Qui suspicatur plus se videre putat. » ( Extra de testib. )
(4) Tr. <lu droit public.
�C 21 1
le résultat achève même de détruire la première impression qu’une
semblable accusation ne manque jamais de répandre.
Le sieur Courby étant dépositaire d’effets signés du sieur de
Murol p ère, quelle qu’en fût la som m e, l’envie de se les appro
prier a bien pu faire croire que l’empoisonnement avoit été un
m oyen d’y parvenir. Mais rien n’empéchoit le sieur Courby de
garder ces e ffe ts, et de s’en dire le maître : l’usurpation des
billets étoit même plus solide sans crime.
La conduite amicale du sieur de Murol envers le sieur Courby,
depuis le 29 septem bre, est le meilleur témoignage que ce der
nier puisse avoir; et si le sieur de Murol a dit à la justice avoir
eu des soupçons dès le jour m êm e , ou il a été bien inconsé
quent , ou ses soupçons ne méritent pas une grande confiance.
On ne voit pas que le 29 septembre il ait appelé à son secours
aucun homme de l’art ; par conséquent il ne faut pas croire qu’il
ait eu d’aussi grandes souffrances , ni une aussi grande terreur
qu’il a pu le dire a p rès, lorsqu’il éloit atteint d’une maladie
chronique.
Bientôt au contraire il reprit son régime accoutumé. L ’es
tomac parolt avoir fait ses fonctions comme auparavant ; et il
est bien difficile de concilier cet état de santé parfaite avec la
dégénération progressive qu’auroit dû opérer la présence de l’ar
senic , e n q u elq u e petite quan tité q u ’on le suppose.
Il faudroit m ê m e adm ettre que le poison a été pris à grande
dose , si les pêches en étoient saupoudrées , puisqu’elles ont été
avalées entièrement avec le vin , et que le sieur de Murol n’a
répugné au poison que pour la portion demeurée au fond du
verre. Le véhicule auroit donc été suffisant pour porter une
grande quantité d’arsenic dans les premières voies.
O r , il est impossible que les effets de ce poison eussent cessé
tout d’un coup , et n’eussent laissé aucunes traces.
L e fait articulé , que le sieur de Murol a subi deux fois l’o
pération de la paracentèze , ou ponction , prouve qu’il a été
�considéré comme atteint d’hydropisie; et ce traitement achève
de détruire toutes les incertitudes.
Il y a donc lieu de conclure que les soupçons du sieur de
Murol n’ont eu aucun fondement réel ; qu’à soixante-quinze
an s, et avec les circonstances qui ont accompagné sa m ort,
elle n’a eu rien que de très-naturel.
D é l i b é r é à R iom , le 16 juin 1807.
L. F. D E L A P C H IE R , avocat; B A R T H E L E M Y , doct. méd. ;
A N D R A U D , avocat; C H O SSIE R , doct. m éd.; PAG ÈSM E IM A C , avocat ; G E R Z A T , doct. méd. ; P A G E S ( de
Riom ) , avocat ; M A L B E T , doct. méd.
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Juin 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Rollat, Eléonore. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Barthélémy
Andraud
Chossier
Pagès-Meymac
Gerzat
Pagès
Malbet
Subject
The topic of the resource
abus de confiance
prêt
empoisonnement
Murol (famille)
homicides
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour la dame Eléonore Rollat, épouse de François Philippe Courby, habitant à Aigueperse [suivi de ] Consultation.
Particularités : Notation manuscrite : « 28 octobre 1809, après cinq jours de débats, à la cour de justice criminelle, acquittement sur ma plaidoirie. »
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Juin 1807
1806-1807
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1721
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0613
BCU_Factums_M0334
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53324/BCU_Factums_G1721.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aigueperse (63001)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Abus de confiance
empoisonnement
homicides
Murol (famille)
prêt
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53690/BCU_Factums_M0149.pdf
c73cb5139b926ba4831869776756afb5
PDF Text
Text
CONSUL TATION
POUR
Jean-Baptiste
R O B E R T , Avoué , habitant de
la ville, de Riom
CONTRE
Les créanciers inscrits de J
oseph
B A R T A UD
L E CO N SE IL SO U SSIG N É, qui a vu le procès verbal d’ouverture
d"ordre distribution des deniers provenans de l’adjudication faite au
citoyen R obert, d es b iens de Joseph Bartaud, les observations faites
dans ce procès verbal par le citoyen Robert adjudicataire, et les réponses
faites à ces observations par le citoyen Grand, qui avoit poursuivi l’adrtu
a
B
djudication , par les citoyen et citoyennes Granchier, créanciers deJ
h
sep
o
r
�( O
.
............. . _
_
L e citoyen Robert se plaint d’un déficit de SüffêSürê ëï 3 e cohîenâh'cé.
O r, c’est un principe certain, écrit dans toutes les lois, que si dans une
vente la quantité de la chose vendue est déterminée, et qu'elle ne s’y
trouve pas, l’acheteur a contre le vendeur l’action qu’on appelle en
droit ex empto. C’est la disposition de la loi 2 , ff. de actione empti et
venditi. S i in emptione modus dictus est et non prœstetur , ex empto
actio est. L ’effet de cette action est d’obliger le vendeur à fournir la
quantité promise, ou à diminuer le prix à proportion. S i modus agri
minor invenietur, pro modo jugerum , auctor ohligatus est. L . 4 ,
cod. eod.
Dans les réponses faites au citoyen R o b ert, on lui a opposé, i°. que
le principe qu'on vient d’établir n’avoit lieu que dans les ventes volon
taires , et non dans les adjudications judiciaires, et pour cela on a invo
qué l’opinion de Mornac sur la loi 40, if. de contrahenda emptione,
et un arrêt de 1699, rapporté par Mornac au même endroit.
Mais d’un cô té, Mornac n’ouvre point d’opinion sur la question ; il
ne fait que citer un arrêt de 1699, sans date, ni du mois ni du jour.
D ’un autre côté, H enrys, auteur dont on connoît la profondeur,
traite et discute la question, tom. 1 , liv. 4 , quest. 8 5 , et il établit qu’il
n’y a point de différence à faire entre la vente volontaire et la vente
judiciaire. Il rappelle l’arrêt de 1699, cité par Mornac; mais il dit que
cet arrêt ne lui fait pas-changer d’avis, et qu’il doit avoir été rendu dans
l’hypothèse. Et en effet, Mornac ne rapporte pas 1 espèce et les circons
tances de l’arrêt. Mais on ne doit jamais perdre de vue ce qu’a dit si «
judicieusement un de nos anciens praticiens, que ce n'est rien que
d a v o ir h corps des arrêts, si Von a point l’âme des hypothèses.
A u contraire Henrys rapporte l’espèce d’une sentence de la sénéchaussée
d’A u vergn e, dans une affaire ou lui-même avoit été consulté, et qui
jugea qu’il n’y avoit pas de différence à faire entre une vente judi
ciaire et une vente volontaire, lorsqu’il se trouvoit un déficit dans la
mesure énoncée dans les placards et les saisies. Henrys cite encore un
arrêt de la Cour des aides, qui avoit jugé de la même manière ; et il
rapporte l’espèce de cet arrêt. Bretonnier, sur la même question de
H enrys, cite encore une sentence des requêtes du palais, qui navoit
pas non plus fait de différence, dans le principe, pour une vente par
décret ; sentence confirmée^ par un arrêt du 26 mars iy o 5 ,e t la sen
tence et l’arrêt avoient aussi jugé que même après la distribution des
deniers du prix de l’adjudication, l’adjudicataire avoit une action pouc
le déficit contre celui qui avoit poursuivi la vente.
2°. On a objecté au citoyen R obert, que le mot entour ou environ r
ajouté dans le placard à la mesure qui y a été énoncée des héritages
qui y sont com pris, doit exclure l’adjudicataire de 1 action du déficit
contre celui qui a poursuivi la vente*
�( 3 )
On peut d’abord remarquer que le mot entour ou environ n’a pas
'été ajouté à tous les articles du placard, et que même dans ceux ou
il n’a pas été ajouté, il se rencontre du déficit.
Dans cette objection on a voulu s’autoriser de l’autorité de Despeisses
et de celle de Ranchin. Mais d’abord, Despeisses ne donne pas son
avis sur la question; il ne fait que citer celui de Ranchin, sans même
rapporter les termes dans lesquels Ranchin peut s’être énoncé. Et
ensuite cette opinion solitaire est combattue par la doctrine d’auteurs
graves et qui expriment les motifs de leur décision.
Voici à cet égard, comme s’explique Pothier, auteur très-judicieux
et très-estimé, dans son traité du contrat de vente, part. 2, ch. 3 , art. 1.
« L e sens de ces termes ou environ, est que le vendeur ne sera pas
« tenu du défaut de contenance, lorsque ce défaut sera peu considé!» rable : par exemple, si sur cinq arpens de vign e, il ne manque que
c<huit ou dix perches ; car cinq arpens, à si peu de chose près, sont
ce vraiment cinq arpens ou environ. Mais si ce défaut étoit considérable,
« comme si sur cinq arpens il s’en manquoit un demi-arpent, ces termes
a ou environ n’empêcheroient pas que le vendeur ne fût tenu du défaut
te de contenance. » On trouve la même doctrine dans les auteurs du
répertoire de jurisprudence, au mot vente, tom. 17 , pag. 481. « Il
« arrive souvent, disent ces auteurs, qu’en exprimant que l’héritage
ce qu on vend, contient tant d arpens, on ajoute ces termes ou e?iviro?î •
«• il faut conclure de cette expression, que si sur dix arpens vendus '
« il ne manque, par exemple, que dix ou douze perches, le vendeur
« ne doit pas être recherché à cet égard ; mais que si le défout est
cc considérable, et qu an heu de dix arpens, il ne s’en trouve que neuf
« il doit faire raison à 1 acheteur de ce défaut, nonobstant les termes
« ou environ. »
On oppose encore au citoyen R o b ert, qu'il n’a pas ét(î promis 1
1 adjudicataire de lui donner une contenance déterminée et exacte, mais
seulement celle qui se trouve renfermée dans les confins, plus ou moins
considérable.
Cette objection est une pure absurdité, dès que dans le fait la mesure
des héritages a été déterminée. Il n’y a pas de vente où l’on n’exprime
les confins de la chose vendue. Pourquoi donc la loi auroit-elle dit que
quand la mesure déterminée dans la ven te, ne s’y trouve pas, l’ache
teur doit obtenir une diminution proportionnelle?
* "
Ou a encore reproché au citoyen R obert, de n’avoir pas lu atten
tivement la loi du i l frimaire an 7 , qui, dit-on, fait disparoître toute
idée de retour, de la part de 1 adjudicataire, si, avant le jugement,
il n’a été proposé aucun moyen.
O n n’a pas cité l’article de cette loi dont on veut se p révaloir, et
�on ne peut avoir eu en. vue que l’article 23 qui est dans le chapitre 3.
Cet article, 011 l’a lu très-attentivement ; mais il ne dit pas un m ot
q u i, après l’adjudication, exclue l’adjudicataire de l’action qu’exerce
le citoyen Robert. Bien loin de là , cet article est au contraire tout en
faveur dç l’adjudicataire. Ce sont le saisi et les créanciers q u i, après
l’adjudication, ne peuvent exciper contre l’adjudicataire d'aucun moyen
de nullité, ou omission de formalités dans les actes de la poursuite.
Mais d’un côté il 11e s’agit pas ici de moyen de nullité ni d’omission de
formalités. E t d’un autre co té, cet article qui n’est qu’en faveur de
l’adjudicataire, ne l’exclut pas de son action, pour faire remplir
la mesure et la contenance des héritages qui lui ont été adjugés. Ce sont
donc au contraire les adversaires,du citoyen R o b ert, qui n’ont pas
lu attentivement la loi du 11 brumaire, et qui en ont pris si gauche
ment la disposition de l’article 2 3 , en voulant tourner contre l’adju
dicataire cette disposition qui est toute en sa faveur.
Enfin, la dernière objection est encore parfaitement ridicule. O n
dit que le citoyen Robert a exécuté le jugem ent, puisqu’il a vendu et
fait son profit particulier de la majeure partie des biens adjugés.
Sans doute il a exécuté le jugement en se mettant en possession des
héritages adjugés; mais ce n’est qu’alors aussi, qu’il a pu acquérir la.
connoissance du déficit dans la contenance, et dès qu’il l’a connu > il a
exercé son action à laquelle n’auroient pas pu nuire les ventes qu’il
avoit pu faire d’une partie des héritages adjugés. D'ailleurs, l’adjudi
cation n’avoit été faite au citoyen R obert, que pour lui ou pour son
mieux , et il a fait la déclaration du m ieux, dans le délai prescrit par
]a loi. E n fin , il est de réglé et^de principe, que l’adjudicataire peut
encore pendant dix ans après l’adjudication, exercer son action pour
ce qui se manque^ dans les mesures et contenances des fonds qui lui
ont été adjugés; c est ce qui est bien établi par Henrys et Bretonnier,
aux endroits qui ont été cités.
Dans cet état, il ne peut pas etre douteux que l’action exercée par
le citoyen Robert est fondée en principe, et doit lui être adjugée.Tant
que les,deniers du prix de 1 adjudication ne sont pas distribués , il doit
obtenir sur le prix une diminution proportionnelle ; et s’ils avoient été
distribués, il auroit contre le citoyen G ran d , qui avoit poursuivi
l’adjudication, une action en répétition du montant de la diminution
proportionnelle. C’est encore ce qui est parfaitement établi par Henrys
et Bretonnier.
Délibéré à R io m , le 10 ventôse an 9. A N D R A U D .
A R io m , de l'im p rim cried e L a n d b i o t , imprim. du tribunal d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Robert, Jean-Baptiste, An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
adjudications
Description
An account of the resource
Consultation pour Jean-Baptiste Robert, avoué, habitant de la ville de Riom ; contre les créanciers inscrits de Joseph Bartaud
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
Circa An 9
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0149
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0148
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53690/BCU_Factums_M0149.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53689/BCU_Factums_M0148.pdf
e6b83f50d79d2c478b1b6ef09d57790c
PDF Text
Text
C O N S U L T ATION
P OUR
J ean-B aptiste
R O B E R T , Avoué , habitant de
là ville de Rium ;
C O N T R E
Les créanciers inscrits de
J
oseph
B A R TA UD.
L E CONSEIL SO U SSIG N É , qui a vu le procès verbal d'ouverture
d’ordre et distribution des deniers provenans de l'adjudication faite au
citoyen Robert , des biens de Joseph Bartaud , les observations faites
dans ce procès verbal par le citoyen Robert adjudicataire, et les réponses
faites a ces observations par le citoyen Grand, qui avoit poursuivi l’ad
judication et par les citoyen et citoyennes Granchicr, créanciers de
Joseph Bartaud ;
E s t d’a v is que les observation du citoyen Robert, tendant à obte
n ir une d im unition du prix de son adjudication proportionnelle au
deficit qui sc trouve dans les mesures et contenances des héritage adjugés, telles quelles Avaient été exprimées dans le placard d a' ffiche ;
que ces observations sont fondées dans les vrais principes de la nature ,
que
te les réponses qui y ont été faites son t contraires à ces mêmes
principes.
’’
•
|
1
*
«
|
•
«
«r
V
^
*
�.
( 2 )
.
-
L e citoyen Robert se plaint d’un déficit de mesure et de contenance.
O r, c’est un principe certain, écrit dans toutes les lois, que si dans une
vente la quantité de la chose vendue est déterm inée, et qu’elle ne s’y
trouve pas, l’acheteur a contre le vendeur l’action qu’on appelle en
droit ex emptu. C’est la disposition de la loi 2 , ff. de actione empti et
venditi. S i in emptione modits dictas est et non prœstetur , ex empto
actio est. L ’effet de cette action est d’obliger le vendeur à fournir Ja
quantité prom ise, ou à diminuer le p rix à proportion. Sim odus agri
minor inçenietur , pro modo jugerum , auctor obligatus est. L . 4 ,
cod. eod.
Dans les réponses faites au citoyen R o b e rt, on lui a opposé, 1 °. que
le principe qu’on vient d’établir n’avoit lieu que dans les ventes volon
taires , et non dans les adjudications judiciaires, et pour cela on a invo
qué l’opinion de Mornac sur la loi 40 , ff. de contrahenda emptione?
et un arrêt de 15 9 9 , rapporté par Mornac au même endroit.
Mais d’un côté, Mornac n’ ouvre point d’opinion sur la question ; il
ne fait que citer un arrêt de 15 9 9 , sans date, ni du mois ni du jour.
D ’ un autre côté, H enrys, auteur dont on connoît la profondeur,
traite et discute la question, tom. 1 , liv. 4 , quest. 85 , et il établit qu’il
n’y a point de différence à faire entre la vente volontaire et la vente
judiciaire.Il rappelle l’arrêt de 1599 , cité çar M ornac; mais il dit que
cet arrêt ne lui fait pas changer d’avis, et qu il doit avoir été rendu dans
l’ hypothèse. E t en effet, Mornac ne rapporte pas l'espèce et les circons
tances de l’arrêt. Mais on ne doit jamais perdre de vue ce qu’a dit si
judicieusement un de nos anciens praticiens que ce n 'est rien que
d'avoir le corps des arrêts , si l'on n a point l'âme des hypothèses.
A u contraire Henrys rapporte 1 espece d’une sentence de la sénéchaussée
d 'Auvergne , dans une affaire ou lui-même avoit été consulté, et qui
jugea qu’il n’y avoit pas de différence à faire entre une vente judi
ciaire et une vente volontaire, lorsqu’il se trouvoit un déficit dans la
mesure énoncée dans les placards et les saisies. Henrys cite encore un
arrêt de la Cour des aides, qui avoit jugé de la même manière ; et il
rapporte l’espèce de cet arrêt. Bretonnier , sur la même question de
H enrys, cite encore une sentence des requêtes du palais, qui n’avoit
,pas non plus fait de différence, dans le principe, pour une vente par
décret; sentence confirmée par un arrêt du 26 mars 17 0 5 , et la sen.tence et-l'arrêt avoient aussi jugé que même après la distribution des
deniers du prix de l’adjudication, l’adjudicataire avoit une action pour
l e déficit contre celui qui avoit poursuivi la vente.
2«. On a objecté au citoyen R o b ert, que le mot entour ou environ r
ajouté dans le placard à la mesure qui y a été énoncée des héritages
qui y sont com pris, doit exclure l’adjudicataire de l’action du déficit
contre celui qui a poursuivi la vente..
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Robert, Jean-Baptiste, An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
adjudications
Description
An account of the resource
Consultation pour Jean-Baptiste Robert, avoué, habitant de la ville de Riom ; contre les créanciers inscrits de Joseph Bartaud.
Le factum est relié deux fois à la suite, par erreur, celui-ci étant incomplet.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
Circa An 9
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
2 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0148
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0149
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53689/BCU_Factums_M0148.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
adjudications
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53688/BCU_Factums_M0147.pdf
edc9f8873583d41ce618d20f9283306d
PDF Text
Text
DITR1CT
PRECI S
de
Pour LÉGER. R I C A R D , c ito ye n , habitant de
la commune de L e z o u x , appelant d’un jugem ent rendu au district de Billom le 3 germinal
dernier,
Contre m a r g u e r i t e M A Z 1N , femme séparée,
quant aux b ie n s , A n t o i n e B A N N I E R ,
autorisée en ju s t ic e , intimée.
‘
'
q u e s t i o n
.
Une fe m me, q u i, en coutume d’Auvergne , a vendu
ses biens dotaux, pour racheter s o n m ari de prison,
avec toutes les form alités prescrites , p eut-elle de
mander la nullité de cette aliénation , sur le pré
texte qu’ a l'époque de cette vente, son m ari possédoit encore quelques héritages, mais hypothéqués à
une fo u le de creanciers, antérieurs à celui qu i avoit
obtenu la contrainte par corps ?
Les questions les plus simples deviennent aujourd’hui
des problèmes, et p ar-tou t on ne voit qu’ incertitude
ou erreur! Les points de jurisprudence les plus certains
A
t i i i e r s
.
�•
.....
.
( * )
.
.
sont méconnus. Les personnalités remplacent les princi
pes; de vains'motifs de considération sont substitués aux
moyens de droit ; -l’arbitraire à succédé aux lois les plus
précises ; les propriétés sont chancelantes et incertaines !
*. T d le s sont les tristes vérités dont le jugem ent du district
de Billom fournit une nouvelle preuve. , '
; Le. 14 novembre 1778, A n toin e B an n ier, habitant du
lieu de D allet, vendit à Léger R ica rd , appelant, la quan
tité de quatre cent vingt-six pots de vin rouge, moyennant la
somme de mille vingt livrçs. qu’il reconnut avoir reçues.
Il s’obligea, par; a'cte notarié, à délivrer la quantité
de vin vendu , dans le courant du mois de ju in , lors
prochain , et il n’est pas. mutile d’observer que B a n n ier
■ se soumit à la contrainte par corps, attendu qu’il s agis
sent d’ un objet de son commerce.
B a n n ie r , hors d’état de faire cette, délivrance , vint
trouver le citoyen R ic a r d , le 8 mars 177c); il le pria
d’accepter une obligation, pour tenir lieu du prix de la
vente, qu’il avoit touché; et quoique le marché lut de
venu avantageux au citoyen R ica rd , celui-ci voulut bien
le résilier; Bannier lui consentit une obligation de mille
quatre cent deux livres, causée pour la vente'et. déli
vrance de quatre cent vingt-six pots de v in , ou pour les
frais de la première vente ; il renouvela sa soumission à
la contrainte par corps, attendu qu’il s’agissoit de vente
pour le fait de son commerce.
Cette obligation fut stipulée payable en deux termes;
moitié au 24 juin suivant, le reste au 11 novem bre, lors
prochain.
•
B an n ier ne fut pas exact à l’échéance : le 18 ju in ,
/
�( 3 )
il y eut un commandement de p ayer; et le 12 juillet
suivant, un procès verbal de rébellion.
On ne peut pas reprocher i R ica rd une grande pré
cipitation dans ses poursuites , puisque du com m an de
ment, à l’exécution., il y eut plus d’un mois d'intervalle.
Mais une obligation étoit un 'vain titre, qui n’imprimoit.
qu’une hypothèque sur les biens de Bannier-, et R ica rd
etoit primé par une foule de créanciers plus anciens.
Pour parvenir au payement de sa créance, et attendu
qu’il s’agissoit d un fait de commerce; que B annier s’étoit
soumis consécutivement par deux actes, à la contrainte
par corps; 'Ricard le traduisit en la juridiction consulaire
de Billom , et obtint le 20 juillet 1779 , une sentence qui
condamne R am ner consulairemènt au payement du pre
mier terme écliu de l'obligation.
Cette sentence fut mise à exécution le lendemain • la
femme B am iier présente requête au juge des lieux 'de
mande à être autorisée à consentir une obligation au profit
de R ic a r d , poür racheter son mari- de p r i s o n ; elle obtient
une ordonnance conforme , sur l’exhibition de l’acte d’-'
crou ; et le 23 juillet, -elle consent une obligation de
la somme de sept cent; v in g t-se p t livres sept sous trois
deniêrs dont son m’ari se-rendit caution « «' '■
■
)
Dans l'in tervalle, il fallut lle nouvelles poursuites • la
femiriè Banmer n est'pas plus exacte qi,e son mari. Ce
l u i . « s inquiété peu de'‘son cautionnement. T raduit de
fio u veta à 'k juridiction'corisul&iré'de Billom“,' une sb- '
coude sentence, du i 5 février i 78 o , le oondâmne au
payement de 1 obligation Consentie par sa fem m e, et dont
il s’ëtoit rendu caution.
ii
>
A 2
�C4 )
^
Il y a eu des commandemens de payés , des procès
verbaux sans nom bre, et tout est inutile : le second terme
de l'obligation arrive, il faut recommencer ; il est assigné
en la juridiction consulaire de Rio'ui, et le 30 novembre
1780, jRicard obtient une sentence qui condamne jBanirier au payement du terme échu.
B a n n ie r , de nouveau dans les pi'isons, Marguerite
M a z in , sa fem m e, s’occupe sérieusement de l’en faire
sortir : elle présente requête au ci - devant lieutenantgénéral de la sénéchaussée, pour demander permission
de ven d re, afin, de racheter son mari de prison , et se
libérer du montant de l’obligation qu’elle avoit consentie
au profit de Ricard.
Sur la représentation de l’acte d’écro u , elle obtient
le décret du juge, et vend à R ica rd quatorze œuvres
de vigne, moyennant la s o m m e de o n z^ cent trente livres,
jusqu’à concui\rence de laquelle elle étoit autorisée à.
vendre.
Depuis cette ven te, il n ’est pas de vexations que la
femme B a n n ier n’ait fait éprouver à Ricard. C e lu i-ci,
qui a v o i t eu la facilité de venir au secours de B a n n ier,
et avoit a u g m e n t é ses créances, a toujours trouvé à son
chemin Marguerite M azin , qui s’étoit fait séparer de
biens avec son mari : il n ’y a p a s eu un procès verbal
d’exécution, que la femme B an n ier n’ait formé oppo
sition ; pas un meuble saisi qui n’ait été réclamé par
elle comme lui appartenant. Tous les tribunaux ont. re
tenti de scs querelles, soit- avec R ic a r d , soit avec les
autres créanciers : par-tout elle a succombé. Le détail des
jugemens qui ont été rendus est étranger à ce mémoire,
�.
( 6 >
et en grossiroit inutilement le volum e; mais elle a mis
le comble à la mesure , en revenant contre l'obligation
et la vente par elle consentie au profit de R icard.
Après plus de 13 années de silence, et lorsqu’elle a
Vu que les immeubles avoient augmenté de valeur
par une progression énorme , elle a imaginé, après avoir
épuisé les voies conciliatoires, de traduire au district
de Billom , le citoyen R ic a r d , par exploit du 16 prai
rial de l’an a , pour voir déclarer nulle l’obligation par
elle consentie, le 23 juillet 17 79 , et être condamné
au désistement des 14 œuvres de vigne par elle vendues,
pour rachetei son man de prison, le 30 novembre
1780; elle a demande la restitution des jouissances,
depuis la vente , et les intérêts du tout.
La femme B annier a exposé qu'il étoit établi . par
son contrat de mariage, que tous se sbiens étoient
dotaux.
Elle a argumenté de la disposition de la coutume d ’Auveig n e, qui interdit 1 aliénation des biens de cette nature ,
pendant la durée du mariage.
*
Elle a soutenu que la coutume ne permettoit l’alié
nation des biens dotaux, pour racheter le mari de pri
son , que lorsque le mari n’avoit pas d’autres biens'- et
a mis en fait qu'A ntoine B a n n ier , son époux, possédoit plusieurs immeubles, lorsque R ica rd l’avoit con
traint de vendre.
Elle a pretendu encore que les formalités exigées
par la loi municipale , n’avoient pas été remplies ; que
la vente avoit été faite sans connoissance de cause.
Elle s est ensuite livrée a des personnalités injurieuses
�( 6)
envers R ica rd , moyens ordinaires de ceux qui n ont
pas d’autre ressource.
R ica rd , méprisant les injures, a rendu compte des
faits avec exactitude \ il a rappelé la disposition de
l’article 7 du litre 14 de notre coutume , qui autorise
]a feinint* à aliéner ses biens dotaux , en cas de néces
sité, pour alimcrLs décile, de son mari et de ses enfans,
ou pour racheter son m ari de priso/2.
La venté consentie par Marguerite M a z in , avoit
ce dernier objet, puisque son mari étoit privé de sa
liberté.
Si la coutume exige connoissance de cause et décret
du ju g e , cette connoissance de cause existe lorsqu’il y
a un . acte d'écrou -, le décret du juge est rapporté :
tout étoit donc en règle.
‘
L a coutume, en disant que la femme peut aliéner ses
biens dotaux, à défaut d’autres biens, n’a entendu par
ler que des biens de la femme qui péuvent être de
différente nature , parapliernaux ou dûtaux et comme
la femme est maîtresse, dans tous lés cas, d'e ses tiens
parapliernaux , ils doivent être épuisés les premiers, s’ils
s o n t sufïisans , a v a n t d en venir aux biens dotaux ; mais
il n’est et né peut être question des biens du- mari
qui petit se trouver dans l’nnpossibilité de les aliéner,
l\ raison des privileges, ou hypothèques antérieures, et
par là seroit menacé de languir dans une dure captivité.
Cette explication si naturelle n’a pas satisfait les pre
miers j u g e s ; là cause portée à l’audience, le 3 germinal
dernier, il y est intel'venu un jugement dorit il est
essentiel de connoitre les motifs,
�.
. .
^7 \
' « A ttendu, est-il dit, que l'obligation de la M a zut
e femme B an n ier, est le résultat d’une collusion rrnmi« feste entre R ica rd et B a n n ier, celui d’une machina
it tion tramée pour acquérir les biens de la femme ;
‘ ’« Collusion, machination prouvées par la conduite
« de R ica r d , qui, ayant un titre paré, fait une somk mation , un procès verbal de rébellion, et abandonne
« des poursuites commencées, pour obtenir un jugement
« consulaire absolument inutile : illégitimité qu’il met dans
« ses poursuites, en obtenant le 20 juillet un jugement
<r qu’il ne peut obtenir que dans la soirée; et cependant
« B an n ier etoit incarcéré le lendemain à sept heures
« du matin, et le même jour une ordonnance qu’on fait
« obtenir à la femme pour sortir son mari de prison,
* qui y étoit à peine en tré, ou qui n’y étoit entré que
« volontairement, car nul huissier ne se fût exposé à
« mettre un jugement de la veille à exécution, et R ica rd
« n’eut osé s’y exposer ;
«’ Attendu qu’il est constant que B a n n ier avoit des
« meubles et des immeubles, que la raison et la justice
a disent devoir être épuisés, avant de conduire une
« femme à l’aliénation de ses immeubles ;
« Attendu que la vente est la suite d’une obligation
« nulle et illégitime ;
.
« Attendu q uelle n a pas été faite par aucun des cas
« prévus par la l o i ,
•
« Le tribunal déclaré nulle l’obligation consentie
« par la M a z u i, au profît de Ricard. , le 23 juillet
« 1779 j déclare aussi nulle la vente des 14 œuvres de
« vigne, du 30 novembre 1780 ; ordonne que l’une et
�,
•
(
8
.
,
« l’autre demeureront sans effet :' condamne
t R icard à
« sedésisler, au profit de la M a z m , des 14 œuvres de
« vigne; à lui en laisser la libre possession et jouissance;
« lui fait défenses de l’y troubler, aux peines de droit; le
« condamne à rendre compte des jouissances perçues
« depuis la vente; au payement des dégradations, suivant
« festirnation par experts ; le condamne au payement des
-« intérêts du tout et aux dépens. »
Ce jugement est aussi singulier dans ses motifs, qu’in
juste dans ses dispositions; R icard s'est empressé d’en
interjeter appel • le tribunal de Thiers a été saisi de la connoissance de cet ap p el, après les exclusions respectives.
On gém it, comme on l’a observé en commençant, de
voir motiver un jugement sur des personnalités, ou sur
des motifs de considération, tandis q u ’ o n met de côté
les principes et les moyens de droit. R icard détruira,
avec facilité, les assertions erronnées de collusion, de
machination ' il établii'a ensuite la validité de la vente,
en rappelant la disposition de la coutume, qu’on s’est
permis d’interpréter d’une manière si contraire au texte
et à l’esprit de l’article qu’il invoque.
’
Il ne peut y avoir, ni collusion, ni machination; c’est
pour la première fois, sans doute, qu’on a imaginé qu’un
débiteur eolludoit avec un créancier, lorsque ce dernier le
poursuit rigoureusement, le fait traduire dans les prisons,
après avoir épuise toutes autres ressources, fait exécu
ter et vendre ses meubles par une foule de procès
v e r b a u x , dont il n en est pas un seul qui n’ait lait un
incident toujours contradictoirement discuté et jugé.
Mais, dit-ofl> cette collusion et machination est prouvée
par
�'
. ( 9 \
~
par la conduitode R icard qui avoit un Litre p arc, en
vertu duquel il avoit commencé des poursuites qu’il
abandonne, pour obtenir un jugement consulaire abso
lument inutile.
Les premiers juges, au lieu de voir des machinations,
auroient dû voir les titres parés dont ils parlent ; ils
auroient lu , dans les deux obligations de 1778 et de
1779 ? clu(i B an n ier s’étoit soumis consécutivement à
la contrainte par corps, attendu qu’il s’agissoit d’objets
de son commerce; que, par conséquent, R icard avoit
eu le droit de le traduire devant les juges-consuls ; ils
auroient senti que les jugemens consulaires n’étoient pas
inutiles ; que c etoit, au contraire, la seule ressource qui
restât à R ic a r d , pour se procurer le payement de ses
créances , par la raison qu’une sentence consulaire lui
donnoit une action sur la personne du d ébiteur, tan
dis qu’une obligation ne lui donnoit qu’une hypothèque
sur ses biens, hypothèque postérieure à toutes les autres
créances; à M arguerite M a z i, 1 3 sa fem m e, dont l’hy
pothèque ^remontoit à son contrat de m ariage, et qui
d e p u i s sa séparation, s’est fait adjuger tous les biens de
son mari pour le montant de ses reprises.
.•
I , .Qu’importe que R ic a r d n’ait pu obtenir la sentence
que dans la soirée ? que B a n n itr ait été incarcéré Je
lendemain, etc.? où donc est l’impossibilité que la sen
tence ait été exécutée avec célérité; narrivc-t-i.1 pas tous
les jours qu un créancier, qui trouve le moment opportun,
fait saisir son débiteur, lorsqu’il sait où le prendre , et
11e se presse-t-il pas au contraire de faire exécuter le
jugement avant que le débiteur soit averti et puisse se
B
�.
( 10 ) ■ .
.
..
soustraire par la fuite; et d’ailleurs 'iln’est pokrt question
ici du hic 11 ou mal procéd é, oti jugé par les sentences
consulaires J elles ont été exécutées, approuvées, ne sont
point attaquées, ne pourroient pas l’étre, parce qu’elles
ont passé en force de -choses 'jugées. Mais c’est "trop
s’arrêter sur des motifs-aussi pitoyables : on s’empresse
d’aborder la question de droit.
r
J
L ’art. 7 du titre 14 de notre coutume autorise ’la
femme à aliéner ses biens d otau x, à défaut d’autres
biens, en cas de nécessité , poux dlimens d?elle , de son
mari, de ses enfans, ou pour Tacheter son m ari de 'prison,
Cette aliénation peut être'faite,sans aucune récompense,
:pourvu qu’il y ait connaissante de' cause et im'xlécr&t
d u ju g e .
•
On a agité ‘long-temps parmi 'les jurisconsultes , 'si,
pour qu’il y eut c o n n a i s s a n c e de cause ; il falloit un
avis de parens, indépendamment d’un décret du ju ge,
•■
et à cet égard on'a fait une distinction pbur 'les aliénations
causées pour alimens , d avec “celles qui avoient pour
objet de racheter le mari de prison.
.
Dans le premier cas, on a pensé qu’il étoit nécessaire
d’avoir un avis de pai-ens, parce que la nécessité de cette
aliénation 11e pouvoit être constatée que de cette -ma
nière ; mais 011 a décidé que l’avis 'de parens étoit inu
tile, l o r s q u ’ il sagissoit de racheter le 'm ari de prison;
ou a pensé avec rajson qu’il existoit une assez grande
- c o n n o i s s a n c e de cause du procès verbal ^ ’emprisonne
ment et de lacté d’écrou. Il Suffit de rapporter à ‘l'hôtel
du juge ces deux pièces, sur lesquelles le juge rend son
d écret,'et ce décret a toujours été suffisant pour valider
les ventes qui s Ciisuivoient.
�,
, .
( 11 )
Telle étoit la jurisprudence constante et l'usage de la
ci-devant sénéchaussée d’Auvergne. On trouve au Journal
des Audiences un arrêt du 21 juin 17 0 7 , qui a jU(r£
la question en thèse. Le dernier commentateur est égale
ment de cet avis : il rend compte d’une sentence qu’il a
omis de dater, et qui a ju g é , en très-grande connoissance de cause, qu’il n’étoitpas nécessaire dans ce cas de
prendre un avis de parens : enfin ce point de juris
prudence est devenu trivial parmi nous , on ne se per
met plus de le révoquer en doute.
Dims l’espèce, le procès verbal d’empris.ônncinent,
l’acte d’écrou., le décret du juge sont rapportés. L ’obli
gation de la femme B an n ier a donc eu une cause légi
time ; l’aliénation de ses immeubles , qui en a été la
suite, a donc été valablement faite.
.
M ais, ajoute-t-on, il est constant qu’à l’époque de lp.
vente consentie par sa femme, B a n n i e r avoit des meublcs , des immeubles , notamment vingt-trois œuvres
de vignes : laïaison et la justice veulent qu ils soient épuisés
avant de conduire une femme a l’aliénation de ses biens
dotaux. .
‘
î
Il se présente une foule de réponses ¿1 cette objection •
il est ¿vident, cl’apres le texte de l’article, que la-cou
tume , en permettant i\ la femme ^’alié;ier ses biens^jptaux,
à fa u te d autres bien s, n a en tendu--pai/Jçr
dcyf^/ien?
de la'i.io;mne , et non de ceux çlu i ^ y i d o n t iJLr ne$t
pas question dans l’article.
¡} .... ,, '
,
Cela ne veut dirç autre chose, sinon. qi)ip;.cjlaps le cas.j
où la femme auroit des biens paraphcri^aux, pu^aycijtiis;!)
sullisans pour subvenir à la détresse de son .¿nari, cjle
B 2
�.
( i2 )
^
devroit les aliéner par préférence à ses biens dotaux.
La raison en est sensible : la femme dans notre cou
tume, est maîtresse de disposer, comme bon lui semble,
de ses biens aventifs et paraphernaux : elle en est mere
de fam ille, pour se servir des termes de la lo i; au lieu
que les biens dotaux sont inaliénables de leur nature.
Les prem iers, par conséquent, doivent être épuisés,
avant d’en venir aux derniers : c’est ,ce qu’a voulu la cou
tume, et on devroit s’en tenir au texte. Si donc la femme n’a
q u e des biens dotaux, elle peut les aliéner, pour rache
ter son mari de prison, quand même le mari auroit
encore quelque bien : l’intérêt public , la faveur du
commerce, le repos des familles, exigent que les ventes
de ce genre s o i e n t valables.
L e dernier commentateur rcconnoît lui-m êm e que
son opinion est contraire au texte de la coutume , qui
n’a entendu parler que des biens de la femme, et non
de ceux du mari. S’il pense que les biens du mari doivent
être premièrement épuisés, son avis n’est fondé sur
aucun jugement ou a rr ê t, et aujourd’hui , plus que
jamais, on devroit suivre littéralement le texte- de la
lo i, sans se permettre de l’interpréter.
A la vérité B a sm a iso n , dans sa Paraphrase, a énoncé
la même opinion : on conviendra même qu’il est rai
sonnable?.^ .que lorsque le mari a des biens sulïisans
pour payèr'^èes dettes , il commence par les aliéner,
plutôt que ceux.de sa femme; mais il peut a r r i v e r que,
quoique le mari ail des biens, il soit dans l’impossibilité
d-acquitter, avec ces mêmes biens, la dette qui le retient
en captivitésM ' '
6
z n.
�,
.
' 13 )
Le créancier qui a la contrainte par corps contre son
débiteur, peut avoir des créanciers fort antérieurs à
lui en hypothèques, ce qui rend la vente impossible
aux créanciers postérieurs. Il en résulteroit qu’alors le
mari languiroit dans une captivité rigoureuse; ce qui
rendroit absolument illusoire la faculté que la coutume
accorde ¿1 la femme d’aliéner ses biens dotaux, pour
racheter son mari de prison.
.
Cette distinction s’accorde parfaitement avec l’opinion
du dernier commentateur : il ne lui paroît pas naturel
que la femme vende , quand le mari peut pourvoir à
ses besoins. Mais lorsque le mari a ses biens affectés à
des créances antérieures à celles qui le retiennent en
prison, il est dans l’impossibilité de subvenir à sa dé
tresse, et alors il faut que la femme vienne à son secours;
c’est là le cas que la coutume a voulu et dû prévoir , les
seules lumières de la raison doivent convaincre de cette
vérité.
Telle est l’espèce où se trouve le citoyen R ica rd •
la femme B annier en a imposé à la justice, lors
qu’elle a soutenu que son mari avoit encore des meu
bles. Comment a-t-elle pu mettre en avant cette asser
tion , elle q u i, à chaque procès verbal de saisie-exécu
tion , est venu demander, et a fait demander par sa
mère, la main-levée de la saisie, sur le fondement que
son mari navoit aucune espèce de meubles, et que
ceux qui avoient été saisis appartiennent à elle ou à sa
m ère? Ce n’est pas au citoyen R ica rd seul, contre
lequel elle est pourvue, sous ce prétexte, mais contre tous
les autres créanciers, et notamment contre le citoyen
Vernièrcs.
�( *4 )
Elle a ajouté, mais sans en donner aucune preuve,
que son mari possédoit v in g t-tro is œuvres de vig n e,
lorsqu’elle a aliéné ses biens dotaux : quand le fait
seroit vrai , R am iier étoit dans l’impossibilité de ven
dre ; il y avoit une foule de créanciers antérieurs au
citoyen R icard ; la femme M a zin elle-même avoit uiie
f hypothèque du jour de son contrat de mariage ; cette
iTypotlicqluTabsorboit seule, et au-delà, tous les biens du
m ari, puisque la femme, dans la suite, se les est fait ad
ju g e r, en totalité, pour le montant de ses reprises,
et a poursuivi le désistement contre les tiers acquéreurs.
E l l e ne pou voit pas se départir de son hypothèque j
dès quelle étoit en puissance de mari : c’eût été de
sa p a rt, une aliénation absolument nulle. Quand elle
auroit pu le faire, R icard n’eût p a s été.plus a v a n c é , parce
que les créanciers antérieurs se seroient mis en posses
sion des vin g t-tro is œuvres de vig n e, ou auroient été
colloqués avant lu i, sur le prix de la vente.
R a m iier n’avoit donc d’autre ressource pour se
r a c h e t e r de prison, que dans les biens de sa fem m e,
qui paroît se repentir, aujourdhui, de lui avoir tendu
une main secou rable : ainsi le moyen de nullité est odiçux
et de mauvaise foi.
'
Si on considère ensuite, que c’est apjj^s plus de treize
années de silence , que la femme R annier vient témoi
gner des regrets davoir fait son devoir ; qu’elle n’a
form é cette demande, qu’à raison de la progressionsurvenue dans la valeur des immeubles, que les préten
tions de ce genre se. multiplient tous les .jours , et
deviennent le iléau de la société ; on demeurera côn-
�(15 )
vaincu qu’il faut enfin qu’il y ait quelque chose de
certain parmi les hommes ; que la prétention de la
femme B an n ier est déplorable , et on s’empressera de
réformer un jugement q u i, à tous égards, et sous
tous les rapports, est contraire aux principes et à
l’équité.
Ainsi semble : à R io m , le 20 th erm idor, an 3 de
la république française. P A G E S .
TO U T T É E , ANDRAUD, GRANGHIER,
V E R N Y , T O U T T É E , jeune, F A V A R D , GAS
C H O N , B O R Y E , GRENIER.
$
A RIOM, DE L’ I M P R I M E R I E DE LANDRIOT.
\
1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Ricard, Léger. An 3?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Touttée père
Andraud
Granchier
Verny
Touttée jeune
Favard
Gaschon
Borye
Grenier
Subject
The topic of the resource
coutume d'Auvergne
vin
créances
biens dotaux
prison
Description
An account of the resource
Précis pour Léger Ricard, citoyen, habitant de la commune de Lezoux, appelant d'un jugement rendu au district de Billom, le 3 germinal dernier, contre Marguerite Mazin, femme séparée, quant aux biens, d'Antoine Bannier, autorisée en justice, intimée. Question. Une femme, qui, en coutume d'Auvergne, a vendu ses biens dotaux, pour racheter son mari en prison, avec toutes les formalités prescrites, peut-elle demander la nullité de cette aliénation, sur le prétexte qu'à l'époque de cette vente, son mari possédait encore quelques héritages, mais hypothéqués à une foule de créanciers, antérieurs à celui qui avait obtenu la contrainte par corps ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 3
1778-Circa An 3
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0147
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Lezoux (63195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53688/BCU_Factums_M0147.jpg
biens dotaux
coutume d'Auvergne
Créances
prison
vin
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53257/BCU_Factums_G1517.pdf
f01c67a0603ec296eebe7caae167a76c
PDF Text
Text
v
et
m -
CONSULTATION
TRIBUNAL
de l ’a rr o n d is s e m e n t
D E RIOM.
EMPLOYÉE
P O U R C A U S E S E T M O Y E N S D ’A P P E L ,
POUR
La dame D E P R A S L I N propriétaire de la terre
de Randan, appelante;
CONTRE
Le Corps commun des.habitans du bourg de Randan,
intimés.
i L
C O N SE IL SO U SSIG N E , qui a vu le jugement
E
du juge de paix du canton de Randan , du 29 brumaire
an 13 , entre la dame de Praslin , propriétaire de la terre
de R andan, et le Corps commun de la commune de
A
�Randan, procédant en la personne du sieur M artin , maire
de cette commune; les pièces sur lesquelles ce jugement
a été rendu, et l’appel qu’en a interjeté madame de Praslin
au tribunal d’arrondissement de Riom :
E s t i m e que le jugement du juge de paix du canton
de Randan a été mal rendu, et que l’appel en est bien
fondé.
Pour établir cette résolution , il est nécessaire de rap
peler la nature de l’action que madame de Praslin avoit
exercée contre le Corps commun de Randan , dans la
personne du maire, et la procédure qui a été tenue devant
ce juge.
Madame de Praslin se prétend propriétaire, et avoir
de tout temps, et par exprès d’avoir depuis plus d’an
et jour , la possession d’un terrain qu’elle dit avoir
formé anciennement un manège dépendant du château
de Randan : ce terrain est immédiatement co n tig u aux
autres dépendances du château.
Il vient à la suite d’un autre terrain qui faisoit autrefois
un jeu de paum e, et n-en est séparé que par une avenue
pour arriver du château à la chapelle qu’avoit autrefois
le seigneur dans l’église de R an d an •, et ce terrain du jeu*,
de paum e , qui n’est p a s contesté à madame de Praslin,
egt aussi immédiatement à la suite du jardin du château.
Enfin ce terrain du manège est b o rn é , au septentrion ,
par l’avenue qui conduit au château , et, ù l’occident, par
la voie publique.
Mais ce qu’ilfdut surtout rem arquer,c’est que ce même
terrain est et a toujours été environné de fossés cons
tamment et toujours faits et entretenus par les seigneurs
�( 3 .)
de Randan j.et bordé ,d u côté de l’avenue du château et
de celui de la voie publique, par des arbres qui ont tou-,
jours été taillés et émondés par les seigneurs de Randan,
qui ont toujours aussi profité du retail de ces arbres ,
enlevé les arbres morts, et remplacé ceux qui avoient péri.
Dans le temps seulement de la révolution, il s’est établi
quelques foires à Randan , qui n’y existoient pas aupa»ravant. Madame de Praslin a souffert, pendant le temps
de ces foires, que quelques marchands qui s’y rendoient
étalassent leurs marchandises sur le terrain dont il s’agit,
sans exiger d’eux aucune espèce de rétribution pour l’éta
lage : c’étoiLde sa part un acte de bienfaisance qui ne pouvoit nuire à sa propriété , ni à sa possession ; elle conservoit toujours l’une et l’autre par l’entretien des fossés
autour de ce terrain, par l’émondage qu’elle faisoit faire,
par l’enlèvement des arbres m orts, et par leur rempla
cement.
Il y a même sur cela un fait qu’il n’est pas inutile d’ob
server; c’est qu’en l’an 10 elle pria le sieur Martin de
faire faire pour elle quelques réparations aux fossés de
ce terrain , et de faire faire les creux nécessaires au rem
placement de quelques arbres qui avoient péri , et pour
établir une nouvelle allée, dont les arbres furent fournis
par elle, et plantés par ses préposés; et elle fit rembourser
au sieur Martin une somme de 12 liv. 16 s. pour la répa
ration des fossés, et une somme de 6 liv. 10 s. pour la
façon des creux d’arbres : ce remboursement lui fut fait
au mois de brumaire au 12.
T el étoit l’état des choses, lorsque, le 11 fructidor an i i ,
s’étant tenu une foire daus le bourg de Randan , et les marA 2
�( 4 )
chands ayant ¿talé leurs marchandises dans le terrain dont
il s’a g it, comme madame dePraslin l’avoit souffert depuis
que, pendant la révolution, il s’étoit établi des foires à Ran<lan,lesieurMartin,mairede Randan,s’avisa de se fa ire payer
des droits, soit sur les marchandises, soit pour l’étalage; et
il a prétendu dans la suite que ce n’étoitque pour l’étalage,
et non pour les marchandises, 'qu’il ayoit perçu ces droits^
ce qui est parfaitement indifférent, parce que , percevant
des droits pour l’étalage , c’ étoit s’arroger une possession
6ur le terrain : mais c’étoit comme maire qu’il agissoit, par
conséquent au nom de la commune.
Madame de Praslin a donc dû regarder cette entre
prise comme un trouble à sa possession, et par là se croire
fondée à exercer une action en complainte possessoire.
Madame de Praslin annonça son intention d’exercer
cette action, dans une pétition qu’elle présenta au préfet
du département, pour demander que le maire de Randan fût autorisé à y défendre ; et sur cette pétition fut
rendu un arrêté, le 6 prairial an 12, qui autorisa le con
seil municipal de Randan à s’assembler pour délibérer
s’il y ayoit lieu à défendre à la dem and e de madame de
Praslin, et qui chargea le maire de Randan de l’exécu
tion de cet arrêté ; et le 10 du même mois il fut fait une
notification et laissé copie de l’arrêté au maii*e de Randan.
D e suite, pour ne pas laisser passer le délai d’an et jour,
depuis le trouble, madame de Praslin, en vertu d’une
cédule du juge de paix, du 5 fructidor an 12, fit assi
gner le Corps commun des liabitans de Randan, dans la
personne du maire, "par-devant le juge de paix, pour la
Toir garder et maintenir dans la possession'où elle étoit
�'4Ü
( 5 )
d’an et jo u r, avant le trouble, du 'terrain dont il s’agit,
avec défenses de l’y troubler à l’avenir, aux peines de
d ro it, e t , pour l’avoir fa it, être condamné en 200 francs
de dommages-intérêts.
La cause une première fois portée à l’audience du juge
de p aix, le 19 fructidor, sur l’exposé fait par le maire,
qu’on ne pou voit pas l’assigner avant d’être autorisé à
défendre cette cause au nom de la commune , le juge de
p a ix , attendu que le maire de Randan n’étoit pas auto
risé à défendre au nom de la commune, et qu’il ignoroit
l’époque où il le seroit, ordonna que la cause demeureroit suspendue pendant deux m ois, sans que ce délai pût
nuire aux droits respectifs des parties, tous dépens, dommages-intérêts réservés.
Si l’on prend garde à l’époque de ce jugement du 19 fruc
tidor , on jugera aisément que depuis la signification qui
a voit été faite au maire de Randan de l’arrêté du préfet,
du 10 prairial, dans l’intervalle de plus de deux mois qui
s’étoient écoulés, il avoit bien eu le temps de se fah’e au
toriser à défendre à la demande de madame de Praslin ,
par une assemblée du Corps m unicipal, et d’en obtenir
l’homologation du préfet; et il est d’ailleurs certain qu’il
y a eu une homologation.
Quoi qu’il en soit, et après le délai de deux mois accordé
par le jugement du 19 fructidor, madame de Praslin, en
vertu d’une autre cédule du juge de p aix, assigna de nou
veau le maire de Randan à l’audience de ce même juge,
pour procéder sur la demande en complainte déjà fox*mée;
mais le maire de Randan n’ayant pas co m p aru à cette nou
velle assignation, il fut rendu un jugement par défaut,
A 3
�( 6 )
le 24 brumaire an 13, qui garde et maintient madame de
Pvaslin dans la possession du terrain dont il s’agit, fait dé
fenses de l’y troubler à l’aven ir, et prononce la condam
nation des dépens.
Sur la signification qui fut faite au maire de ce juge
m ent, il y forma opposition le 8 frim aire, avec assigna
tion devant le juge de paix , pour être fait droit sur l’op
position; et c’est en cet état que fut rendu le jugement
dont est appel, du 29 frim a ire , et duquel il est néces
saire de rendre un compte exact. •
O n y voit que le procureurfondédemadame dePrasliny
reproche au maire de ne s’être pas fait autoriser ¿défendre à
la demande par un arrêté du pi’éfet, et demande qu’il soit
débouté de son opposition. L e maire répond d’abord que
le terrain dont il s’agit est une place publique qui appar
tient à la commune, qui en jouit d’un temps im m ém orial,
et dont elle a disposé pour la tenue de scs foires ; il con
vient qu’il a perçu un droit pour la place qu’occupoient
les marchands, et non sur les marchandises qui y étoient
étalées ; il ajoute ensuite qu’il est autorisé à défendre à la
demande, par une délibération du Corps municipal, qu’il
a adressée à M . le Préfet pour en obtenir l’homologation,
qu’il n’a pas encore reçue; mais.qu’il est d’ailleurs de droit
naturel de se défendre; qu’enfin la demande de madame
de Praslin est vicieuse, attendu qu’elle n’est pas de la com
pétence du juge de paix , qui 11e doit connoître que des
affaires personnelles, et qu’elle attaque une commune
entière; en conséquence, il demande qu’elle soit dé
boutée de sa demande, cominc assigné devant un juge
incompétent.
�( 7 ) /.
C ’est surces dires respectifs que fut rendu le jugement
dont voici les motifs et le dispositif i teAttendu, y est-il
« d it , que la compétence des juges de paix se borne à la
« connoissance des affaires purement personnelles et mo« bilières;quela demande dont il s’agit embrassé en masse
« tous les habitans, pour avoir commis le trouble dont on
à se plaint; qu’il y a impossibilité que tous les habitans de la
« commune se soient concertés pour commettre le trouble
« énoncé eii la demande, qui n’auroit due êjre formée que
« contre les auteurs du trouble ", en conséquence, envoie la
« cause par-devant les autorités compétentes, tous moyens
« tant de fait que de droit respectivement réservés, ainsi
« que les dépens, pour être sur le tout statué ce qu’il'
« appartiendra. »
Pour justifier l’appel que madamç de Praslin a interjeté
de ce jugement, il faut en combattre les motifs et le
dispositif.
L e m otif principal qui a servi de prétexte au dispositif,
c’est l’incompétence du juge de paix ; mais rien n’est moing
vrai que cette incompétence. Quelle étoit la nature de la
demande ? G’étoit une action possessoire. L e juge de paix
a prétendu que sa compétence se bornoit aux actions pure
ment personnelles et mobilières, et qu’elle ne s’étendoit
pas aux actions possessoires : comment a-t—il pu méconnoitre la loi de 1790, sur l’organisation de l’ordre judi
ciaire, où, dans le titre 3 , la compétence des juges de
paix est si clairement déterminée, et où il a u ro it dû voir,
dans 1 article 10 , que le juge de paix est au torisé à connoitre, à la charge de l’appel, non-seulem ent des déplacemens de bornes, des usurpations de terres, arbres
�A( 8 r
haies, fossés et autres clôtures, commis dans l’année, et
de toutes autres actions- possessoires, du nombre des
quelles sont sanâ contredit les actions en complainte? Et
n’est-ce pas en effet dans les justices de paix de tous les départemens de l’empire français, que se portent chaque
jour toutes les actions en complainte possessoire? Il est
même très-vraisemblable que le juge de paix du canton
de Randan a lui-mêm e fait droit sur plusieurs actions de
cette nature ; çt c’est sans doute pour la pi’emière fois
qu’il a imaginé de se prétendre incompétent dans cette
matière.
Quant à cet autre motif de son jugement, que la demande
dont il s’agit embrasse en masse tous les habitans, pour
avoir commis le trouble ; qu’il y a impossibilité que tous
les habitans se soient concertés pour le commettre, et que
la demande n’auroit dû être formée que contre les auteurs
du trouble, ce m otif s’écarte encore facilement.
On peut commettre un trouble, n o n - s e u l e m e n t par soimême , mais encore par son mandataix-e, ou son procureur
constitué, ou tout autre représentant. O r, quel^est le repré
sentant d’une commune? C’est sans doute le maire de cette
commune , puisque c’est lui q u i est autorise à en exercer
toutes les actions, et que c’est contre lui que doivent être
dirigées toutes celles que l’on peut avoir contre la com
mune; et c’cst à ce titre de maire que le sieur Martin
convient lui-même avoir perçu des droits pour l’étalage
d e s marchandises dans le terrain dont il s’agit; ce qui a
formé le trouble à raison duquel la complainte possessoire
de madame de Praslin a été exercée : et une preuve de
plus que c’est au nom des habitans qu’il a commis le trouble,
�( 9)
c’est la délibération du conseil municipal qui l’a autorisé à
défendre à la demande en complainte.
A in s i, rien de plus frivole que les motifs qui ont servi
de prétexte au jugement par lequel le juge de paix s’est
déclaré incompétent, -et l’ont fait renvoyer les parties
devant les autorités compétentes, puisque lui seul étoit
juge compétent dans cette matière , et sa compétence
bien déterminée pour toutes actions possessoires dans
l’article 10 du titre 3 de la loi de 179 0 , sur l’organisa
tion de l’ordre judiciaire. Rien ne l’empêchoit par consé
quent de prononcer sur l’opposition formée à son precedeut jugement, et de juger si l’opposition étoit bien ou
mal fondée.
11 doit donc paroître évident que le jugement a été mal
rendu, et que l’appel en est bien fondé. Mais quedevoit
faire le juge dont est appel, dans une action en complainte
qu’il a voit déjà adjugée par un jugement par défaut, au
quel il avoit été formé opposition? La demande en com
plainte fondée sur la possession annale, cette possession
étant contestée, le juge de paix devoit, avant de faire droit
sur la demande de madame de Praslin, ordonner qu’elle
feroit preuve de la possession annale, avant le trouble ; et
c’est vraisemblablement ce qu’ordonnera le tribunal, sur
l’appel de ce jugement qui est porté devant lui.
O r , e’est cette preuve qu’il parôît que fera facilement
madame de Praslin, puisqu’elle a mis en fait que nonseulement, et de temps im m ém orial, les seigneurs de
Randan ont toujours joui paisiblement du terrain dont il
s’agit, en le faisant entourer de fossés, entretenant les fossés,
faisant émonder les arbres qui y étoient plantés, profitant
�C 10 )
eux seuls dés émôndages etdesarbresmorts, et faisant rem
placer ceux quiavoient p é r i, mais encore que madame de
Praslin en a continuellement usé de la même manière pen
dant toute l’année qui a précédé le trouble. Et comment
le sieur M artin oseroit-il contester ces faits, et exposeç la
communauté aux suites d’une enquête, tandis que luim êm e, sur l’invitation de madame de Praslin, a fait faire
les fossés, les creux des arbres, et s’est fait rembourser de
ses dépenses par la dame de Praslin, au lieu que ces frais
euesent été à la charge de la com m une, si le terrain eût
été une place publique qui lui eût appartenu.
D élibéré à R io m , le 4 messidor an 13.
A N D R A U D , VISSAC.
C O N C L U S I O N S .
A
ce q u e , attendu, i° . que le juge de paix du canton de
Randan étoit seul c o m p é te n t, aux termes de 1 article 10 du
titre 3 de la loi de 1790,. sur l’ordre judiciaire, pour connoîtrede l’action possessoire exercée par la dame dePraslin ;
attendu, 20. que le trouble qui a donné lieu à l’actiou possessoire a été commis par le sieur Martin , maire de la
commune de Randan , en exigeant des droits des mar
chands qui avoient étalé sur le terrain dont il s’agit , et
qu’il est le représentant de la commune, qui l’a autorisé par
une délibération du conseil municipal à défendre à la
�(11)
demande en complainte possessoire ; il plaise au tribunal,
par jugement en dernier ressort, dire qu’il a été mal jugé
par le jugement dont est appel, bien appelé ; émendant,
et faisant ce que le juge dont est appel auroit dû fa ire,
débouter le maire de la commune de Randan de son
opposition au jugement par défaut , du 22 brumaire
an 13 , qui sera exécuté selon sa forme et teneur, et
condamner le Corps commun des habitans de Randan en
la somme de 200 fr. de dommages-intérêts, applicables,
du consentement de la dame de Praslin , aux pauvres de
la commune de Randan, et a u x dépens; et ou le tribunal
y fe ro it, quant à présent, quelque difficulté , ordonner ,
avant faire d ro it, que la dame de Praslin fera preuve ,
tant par titres que par témoins, de sa possession du terrain
dont il s’agit, et notamment d’an et jour avant le trouble,
dans les délais de l’ordonnance, sauf la preuve contraire
dans les mêmes délais , p o u r, les enquêtes faites et rap
portées, être fait droit ainsi qu’il appartiendra , dépens
réservés.
M e. S 1 M O N N E T , avoué.
A. RIOM , de l’imprimerie de LANDRIOTt , seul imprimeur de la
Cour d'appel, — Messidor an 13.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Praslin. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vissac
Simonnet
Subject
The topic of the resource
juge de paix
foires
espace public
espace seigneurial
châteaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation employée pour cause et moyens d'appel, pour la dame de Praslin, propriétaire de la terre de Randan, appelante ; contre le Corps commun des habitants du bourg de Randan, intimés.
Table Godemel : Action possessoire : 2. un juge de paix, saisi en complainte possessoire d’un tènement déterminé, contre le corps commun des habitants, a-t-il pu se déclarer incompétent d’après les termes de l’art. 10 du titre 3 de la loi de 1790 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
Circa An 11-An 13
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
11 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1517
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Randan (63295)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53257/BCU_Factums_G1517.jpg
chateaux
espace public
espace seigneurial
foires
juge de Paix
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53686/BCU_Factums_M0145.pdf
99771e524a9427e510051e214238ad09
PDF Text
Text
P
R
E
C
I
S
\
P O U R
P L A N T A D E -RABANON,
propriétaire, habitant .de Chitain, commune
de Saint-Christophe, Appelant;
J e a n - C la u d e
C O N T R E
C H O U S S Y , géom ètre} habitant de
la commune de C u sse t, Intimé.
Jacques
D e u x ju gem ens du tribunal c iv il du départem ent de
l’A llier ont donné lieu à l’appel.
L e prem ier de ces ju g e m e n s, du
17 floréal an 7 ,
déclare le citoyen R abanon non recevable dans les de
m andes en restitution qu’il avo ît form ées contre les actes
passés entre lu i et le citoyen Choussy. C e ju gem ent fu t
rendu par défaut.
Par le second jugement, du 11 messidor an 7 , et qui
A
�( * )
.
fut con trad icto ire, le citoyen R aban on est aussi déclaré
non recevable dans l’opposition qu ’il avôit form ée au
p rem ier jugem ent.
L és m oyens d’appel se puisent dans les m otifs m êm es
exposés dans l’u n et l’autre de ces jugem ens.
L e m o tif exp rim é dàns le p r e m ie r , est qu’en chose
m ob iliaire il n’y a pas lieu à restitution p ou r lésion.
M ais aussi n’étoit-ce pas par le m oyen de lésion qu e
le citoyen R abanon dem andoit à être restitué. Q u ’on
jette les y e u x sur l’ex p lo it du 9 pluviôse an 7 , qu i ren ferm o it les demandes du citoyen R abanon ; il disoit
que les actes contre lesquels il dem andoit d’ être resti
tué , éto ien t le f r u i t de Ve r r e u r , d u d o l , m en a ces ,
violences et d én on cia tio n s ¿faites con tre lui. lia seule
lésion ne suffit p a s, sans d o u te , p o u r être restitué en
cliose m o b iliaire; mais les actes qui ont p o u r p rin cipe
l ’e r r e u r , le dol et la v io le n c e , sont sujets à rescisio n ,
quelle qu ’ait été la.m atière de ces actes. L e ju gem en t du
1 7 floréal a donc fait une fausse application du principe
q u ’il s’est donné p o u r m o tif, et il n ’a pas m êm e abordé
la question que p o u v o it présenter une dem ande en res
titu tio n , p o u r cause d’erreu r, d o l, menaces et violences.
Cette question reste donc tout entière soumise au tribunal
d ’appel.
....
L e second ju gem en t, du 11 m essidor an 7,- qu i déclare
Je citoyen R abanon non recevable dans l’opposition qu’il
avoit form ée à celui du 17 flo r é a l, énonce p o u r m o tif,
q u ’au x termes de l ’ordonnance de 16 6 7 , et d’un arrêté
du tribunal du départem ent de l’A llie r , les jugem ens
rendus à tour de rôle, ne sont pas sujets à opposition.
�(3 )
D ’ab o rd , fausse application de l'ordonnance de 1 6 6 7 ,
p o u r les oppositions aux jugem ens rendus à to u r de rôle.
Il faut distinguer ceux qu i sont rendus en dernier ressort,
de ceux qui ne sont .rendus qu’en prem ier ressort, et qu i
sont sujets à l’appel. O r, l’art. 3 du titre 30 de l ’ordünnance
de 1 6 6 7 , exp rim e nom m ém ent les ju g em en s en d ern ier
r esso r t, rendus à tour de r ô le , contre lesquels il n’est plus
perm is de se p o u rv o ir p ar opposition; d’ o ù , par la règ le
in clu sio u n ius e s te x c îu s io a lte r iu s , il résulte qu ’il y a lieu
à opposition contre les jugem ens qui ne sont pas rendus
en d ernier ressort, quoique rendus à tou r de rôle. A ussi
a-ce été de tout temps la jurisprudence de tous les tribu
n a u x , où dans toutes les affaires jugées à tour de rô le , en
t p rem ière instance, les oppositions ont toujours été cons
tam m ent admises.
E t quant à l’arrêté du tribunal civil du départem ent
de l’A llie r , il ne p o u v o it être d ’aucune con sidération ,
en ce que le tribunal n’avo it pas le droit de faire des
règ lem en s, sur-lout des règlem ens contraires à la dispo
sition de l’ordonnance de 1667.
O n peut donc rép éter avec confiance, que la question
reste tout entiere. L e tribunal d ’appel infirm era infailli
blem ent le jugem ent du n
m essidor an 7 , qui a déclaré
le citoyen
a anon non recevable dans son opposition
à celui u 17 orea 5 et sans s a rrêter à la fausse appli
cation du moti qui avoit déterm iné ce prem ier ju ge
m en t, puisque la dem ande en restitution ne p ortoit pas
simplem ent sur la le sio n , le tribunal d’appel examinera,
si ce sont en effet 1 erreu r, le d o l, les menaces et la v io
lence qui ont donné l’être aux actes contre lesquels la
restitution est demandée,
A, a
�.
( 4 )
m
T o u s les faits d’e rre u rs, de d o l, de m enaces, de vio
lences , de dénonciation , seront développés dans toute
leur éten d u e, lors de la plaidoierie. M ais quoique dans
ce précis on ne les présente que som m airem ent, on espère
qu ’ils n’en seront pas m oins portés jusqu’à la dém ons
tration.
D on n on s d’abord une idée g é n é ra le , mais exacte et
succincte de ce qui a donné lieu au x actes contre lesquels
le citoyen R abanon dem ande à être restitué.
L e 2, b ru m aire an 2 , le citoyen R abanon fit l’acqui
sition des d eu x dom aines de Chitain et de Janinain : trois
autres dom aines du m êm e p rop riétaire furent vendus à
d ’autres particuliers. D ès l’année 17 8 3 , ces cinq dom aines
avoient été affermés à P ie rre C h o u ssy, père de l’in tim é,
q u i jo u it des deux qu i fu ren t vendus au cit. R a b a n o n ,
jusqu’au mois de m essidor an 2.
A lo r s , il étoit question de faire l’exegs des bestiaux des
2 d o m ain es, et il falloit p ou r y p rocéder une estim ation
de ces m êm es b estiau x , p o u r rég ler ce qu i devoit en
rev en ir au p rop riétaire ou au ferm ier ; mais ce ne fut
point P ierre Choussy j le véritable fe r m ie r , qu i se p r é
sen ta, ce fu t Jacques Choussy l’in tim é , son fils : il fu t
d ’abord con ven u d ’e x p e r ts , p ou r faire l’estim ation des
b estiau x; ces experts ne furent pas d’accord. D ’ailleurs
les bases sur lesquelles ils o p érèren t, et q u i étoient celles
que les lois alors existantes avoient établies, étant ruineuses
p o u r les p ro p rié ta ire s, on s’attendoit chaque jo u r à de nou
velles lois qu i dévoient rendre m oins dure la condition des
p ro p riétaires, lois qu i ne tardèrent pas en e ffe tà p a ro ître ;
et dans leux attente, et dans l ’intervalle, le citoyen Rabanon
�.
S 5 )
différoit de term iner les diliicultés q u i existaient sur l’exe^s
et la rendue des bestiaux. D ’ailleurs il étoit loin encore
d ’a vo ir les connoissances nécessaires sur la qualité de tous
les bestiaux qui devoien t lui être rendus ; et il espéroit de
se p rocu rer les éclaircissemens nécessaires à cet égard.
L es m êm es prévoyances qui faisoient différer le citoyen
R a b a n o n , faisoient hâter le citoyen Choussy qui se p résentoit com m e devant traiter p o u r P ierre C h o u ssy, son
p è r e , et p o u r lu i-m ê m e , qu oique son p ère eût été le
seul ferm ier.
M ais le citoyen Choussy eut b ien tô t trouvé, le m oyen
Se faire cesser les difficultés que lui opposoit le citoyen
R abanon. O n étoit alors dans ces tem ps d’épouvante et
de terreu r, qui ont inondé de sang innocent tout le terri
toire de la France ; et p e u t-ê tre le district de Cusset fu t- il
celui qui en fut le plus abreuvé. C ’étgit le règne des
trium virs et de leurs suppôts. U n de ces suppôts les plus
m arquans fut sans doute le représentant F o restie r, q u i,
quoique né dans le district de Cusset, se fit un jeu d’être
le dévastateur de sa patrie. O n fr é m it, au nom bre des
innocentes victim es par lu i dévouées et livrées à la m o r t,
p o u r satisfaire sa r a g e , et p eu t-être sa cupidité. E h b ie n ,
ce Forestier étoit l’oncle du citoyen C h o u ssy , et ce fut
l ’arm e dont se servit le citoyen C h o u ssy, p o u r trancher le
nœ ud des difficultés.
lie 29 messidor, epoque à laquelle tous les gens honnêtes
trem bloient p ou i leu r sxirete et p o u r leur existen ce, le
citoyen R abanon reçut une lettre du citoven C h o u ssy, Celtc IeUre se™
1
,
,
*
i i
i m p r i m . à la s u i t e
dont les termes sont rem arqu ables, et dont la conséquence du présent men’étoit pas difficile à p révo ir. V o s tra ca sse r ie s, disoit-il moire*
�( 6 i
.
au citoyen R a b a n o n , m o n t m is dans le ca s tfen "parler
à notre brave représen tant F o r e s tie r , q u i n ’ a pa s été
content de votre f a ç o n d’agir, et m 'a d it de vous écrire
de sa p a r t , et de vous in viter de vous m o n trer plus
a c co m m o d a n t, qu e nous n 'étio n s plus dans le tem ps où
les tra ca sseries éto ien t à Tordre du jo u r .
•
A v a n t de recevo ir cette le t t r e , le citoyen R aban
savoit déjà que dès le mois de germ inal p ré c é d e n t, le
nom m é B o u rg e o is, cordon n ier de V i c h y , et l’un des
Voir
la déclara-
r i t i o n authentin u e du v o i t u r i e r ,
émissaires du représentant F orestier, à P a ris, y ayant renCOntré un vo itu rier p ar e a u . de V ic h y , et lui ayant dit
.
.
.
.
'
.
•n
•
T>
imprim. à la suite qu il etoit venu a P a n s , p o u r faire gu illotin er iv o u g a n e,
du présent me- ■
}
avo j|- ajQuté qu ’il en avoit encore quatre en v u e ,
jn oiro.
D um ousseau , G ra v ie r-R e y n a u d , Sauret et R a b a n o n .
D éjà m êm e quelque tems au p aravan t, les ennem is du
citoyen R abanon avoient fait placer sur la liste des biens
des ém igrés, une des deux maisons qui lui appartiennent
à P a ris , et l’autre alloit encore y être p la c é e , lorsqu’on ayant
été instruit, il vin t ¿\bout d’étouffer les calomnies, en rap por
tant les preu ves les plus authentiques, qu’il n’avoit jamais
quitté un seul m om ent le territoire de la rép u bliqu e et celui
du district de Cusset, où il avoit été em ployé successivem ent
com m e m aire de la co m m u n e, com m andant de la garde
nationale , com missaire p o u r la recherche des g ra in s,
etc. etc. C est
ces mêmes époques que la p orte d’une
m aison de Cusset lui fut refusée, parce qu ’il devoit être
arrêté p rochain em en t; que ses fidèles domestiques ont été
sollicités, pressés p ou r sortir leur m obilier de chez lu i,
p a r la crainte qu’il ne fût confondu avec le sien , com m e
national ; qu ’enfin la clam eur générale vo u lo it qu’il eût été
�.
.
, ^7 ^
conduit au tribunal révolu tionnaire du chef-lieu de sa
mission p ou r les grains.
C om m ent ainsi déjà p r é v e n u , et recevan t la lettre de
Choussy, ch* 29 m essidor, qui lu i é crivit au nom du brave
représentant F o r e s tie r , le citoyen R abanon au roit-il p u
ne pas céder à la lo i qu i lui étoit im p o sée, et ne pas en
passer par tout ce qu’exigero it de lui le neveu de ce brave
représen tan t? Q u ’on se rep orte à ces tem ps funestes; o b éir
o u la m o rt : c’est dans cette alternative que se tro u vo it
placé le citoyen R abanon.
Il fut donc obligé de souscrire à toutes les volontés du
citoyen C h o u ssy, qu i le 17 th erm id o r an 2 , lui donna
u n acte signé de l u i , par lequel il reconnut q u ’il en avoit
reçu 5,392 * 16 J ; savo ir, 2 , 5 oo tf- en argent ? et
16 J en un billet payable le p rem ier germ in al su iva n t; à
laquelle som m e de 5,392*^ 16 J se niontoit sa part et
p ortion de l’excédent des bestiaux qui garriissoient les
dom aines de Chitain et de J a n in a in , déduction faite du
m ontant des chetels qu’il devo it laisser, en conform ité de
son bail de ferm e.
Il
n’est pas inutile d’observer que le billet de 2,892 ^ 1 6 ^
énonce la cause de p r ê t , et non pas le p rix de l’excédent
des bestiaux; mais com m e il est du m êm e jo u r que la
reconnoissance,
et rappelé dans cette reconnoissance , la
véritable cause de ce b illet n’est pas douteuse. E lle est
m êm e avouée dans la p rocéd u re p ar Jacques Choussy.
, O n dira peut-etre que la reconnoissance et le billet étant
du 17 th e rm id o r, et par conséquent postérieurs à. cette
heureuse époque du 9 du m êm e m o is, q u i v it p érir les
triu m v irs , le citoyen R abanon ne devo it plus alors être
�C 8 } .........................................
affecté de cette juste crainte qu’il dit lui a v o ir fait souscrire
aux ordres du brave représentant.
*
M ais dans si peu de te m p s, après sept jours seulem ent
de cette heureuse époque , et les circonstances de l’événe-1
m ent ne p ou van t pas encore en être parfaitem ent connues*
à la distance de près de cent lieues de la ville de P a r is ,
C e t arrêté sera
imprimé à la suite
du présent m é
m oire.
où il s’étoit o p é r é , p o u v o it-o n encore être bien rassu ré?
M ais s u r - tout p o u v o it-o n l’ être dans le district de Cusset i
oh. le brave représentant , treize jours après le g th erm i
d o r , et le 22 du m êm e m ois , p rit un arrêté qu’il rendit
m êm e p u b lic p ar la vo ie de l’im pression, par lequel il
en voya au tribunal révolu tion n aire de Paris douze notables
citoyens du district de Cusset, qu ’il a vo it déjà fait tradu ire
dans la m aison de réclusion de M oulin s ou dans la m aison
d ’arrêt de C u sset, et m enace encore d’y en v o ye r p roch ai
nem ent deux magistrats de l’ancien bailliage de Cusset.
A p rè s tout c e la , après la lettre de C h o u ssy , qui tém oi
gne le m écontentem ent du brave r ep r é sen ta n t, après
l’invitation de celu i-ci, qui ne p o u vo it être regardée q u e
com m e un o r d r e , qui p o u rro it douter que c’est la plus
juste crainte q u i a forcé les engagem ent contractés p ar
R abanon envers C h o u ssy? E t quelle cra in te ? Celle de
la m ort : le brave représentant n’en inspiroit pas d’autreJ
' Si donc les engagem ens contractés p ar R abanon envers
C h o u ssy , le 17 therm idor an 2, lui ont été extorqu és par
la crainte, les menaces et la violen ce, com m e on ne sauroit
en d o u te r, ils sont p a r cela m êm e absolum ent n u ls, et ne
peuvent p rod u ire aucun effe t, parce qu ’ alors il n y avoit
pas de vrai consentem ent, rien n’ étant plus contraire au
consentem ent que la crainte et la violence. Q u o d m etûs
ca u sa
�( 9 )
'
ca u sa gestum e r i t , ratum n on habebo. L . i , ff. Q u o d
m etus causâ. N ih il en im co n sen su i tarn c o n tr a riu m
quàrn vis et m e tu s , dit la loi 1 1 6 , ff. de regulis ju r is .
Il est vrai que les lois ne se contentent pas d’une crainte
pusillanim e ; elles veulen t q u e lle soit telle q u e lle puisse
ébranler un lionim e ferm e et con stan t} m etum a u tem
n o n v a n i h o m in is , sed q u i m erito et in hom in em con sta iïtissim u m c a d a t, L . 6 , ff. q u od m etus ca u sa . M ais
ici nous sommes trop rapprochés des temps de la terreu r,
p o u r qu’on puisse douter de l’im pression que p o u vo it
faire alors sur l’hom m e le plus ferm e et le plus constant,
la crainte de déplaire à un brave rep résen ta n t, tel que
F o restie r, qui déjà avoit fait p é rir u n si grand nom bre
de ses com patriotes.
N os ordonnances, en particulier celle de François 1« ,
de l’année 16 3 6 , ont adopté les principes du droit rom ain,
e t admis la restitution p o u r cause d’erreu r de fait, de
d o l, de violence et de crainte ; et non seulem ent notre
jurisprudence s’y est con form ée, et nos livres sont pleins
d’arrêts qu i ont détruit les engagem ens que la crainte
e t la violence avoient fait contracter ; mais cette m êm e
jurisprudence avo it été plus lo in ; elle avoit con sacré.
les principes d’un titre du code tlié o d o sien , in titulé : .D e
i?rfirniandis h is qu œ sub tjr a n n id e a cta sunt. N ous
trouvons dans les réponses de Charondas un arrêt du
m ois de janvier 1 6 9 7 , p ar lequel il fut ju g é que des
ventes d’héritages faites durant les troubles des guerres
civiles et temps de calam ités, étoient sujettes à rescision ,
sans m êm e s’enquérir de la vilité du p r ix ; L . 9 , rép. 2 5 .
Nous trouvons dans Mornac un arrêt p ar lequel un
B
�.
C 10 )
débiteur qui s’étoit fait faire rem ise de sa d e tte , pendant
le temps de la lig u e , par son créan cier, lorsque les troubles
furent appaisés, fut néanm oins condam né à p ayer la dette,
a l le g . % ,J j . de ca lu m n ia to rib u s. E t c’est à l’occasion de
cetarpêt que M orn ac cite le titre du code th éo d o sie n , in ti
tulé : D e la n écessité de détruire les actes p a ssés dans
le s tem ps de ty ra n n ie. Mais quels tem ps furent plus cala
m ite u x , quels tem ps furen t plus tyranniques que ceux
du proconsi^iat de F orestier dajis le district de Cusçet?
A p rè s les faits et les principes q u i viennent d’être ét^r
b lis, il doit p aroître sans difficulté que le citoyen R abanon
est restituable contre les engagem ens q u ’il n’ a contractés
envers le citoyen C h o u ssy , que par l’effet de la violence
et de la crainte , la plus capable d’ébranler Fhom m e le
plus ferm e et le plus co n sta n t, sans m êm e exam iner s’il
a souffert quelque lésion p o u r ces arrangem ens , ce qui
' se vérifiera après la restitution pron on cée lorsqu’on en
viendra à p rocéd er de nouveau à l’e x e g s , et à la rendue
des b estia u x, suivant les règles établies par toutes les lois
sur cette matière. Cependant le citoyen Rabanon p eu t, dès
à présent, étabKr.que.da.ns ces arrangem ens, p a rles erreurs
de fait et de calcul j le dol çt la fraude qui y ont p ré s id é ,
il a souffert des pertes rée lles, qui doivent être réparées.
E n e f fe t , on vo it que dans un acte qu e R aban on fit
faire à C h o u ssy, le 2 germ inal an 3 , à l’échéance de la
prom esse q u il lui avdit fa ite } le 17 th erm idor an 2 , de
]a som m e de 2,89,2 francs 16 sous, en lui faisant par cet
acte des offres réelles,de cet^e so m m e , alors plus éclairé
sur ses in té rê ts, et plus libre.de les so u te n ir, q u ’au 17
tlien n id o r an 2 , il apposa ,h ces .offres les con d ition s, i ° .
�C II )
de justifier p ar Choussy de sa qualité de ferm ier des do
maines de Chitain et de Joninain ; 2°. que p ar une esti
mation , il seroit p rocéd é à l’exegs , et à la rendue des
bestiaux de ces domaines , con form ém en t aux arrêtés du
com ité de salut public , des 2 therm idor et 17 fru ctid o r
an 2 , et aux lois qu i seroient rendues sur cette m atière.
P a r cet acte d ’oiïres réelles , le citoyen R abanon a non
seulem ent réclam é contre la contrainte qui lui avoit été
faite p o u r souscrire les engagem ens du 17 therm idor an 2 ,
il a encore suspendu 1 effet de ces arrangem ens, en récla
m ant la justice que les lois lui a c c o rd o ie n t, en refusant
l’exécution pure et sim ple des com ptes faits antérieure
m ent , et en demandant 1 exécution des arrêtés du com ité
de salut public , des 2 th erm id o r et 17 fructidor an 2.
P a r là les parties se sont trouvées dans un état de contes
tation et de difficulté qu i n’a pu cesser que par une nou
velle transaction entr’elle s, ou p ar l’autorité de la loi.
O r , le i 5 germ inal an 3 , peu de jours après les récla
mations du citoyen R a b a n o n , une lo i a été rendue sur les
bau x à ch etel; elle déterm ine la m anière dont les ferm iers
dévoient rendre les bestiaux aux propriétaires. L ’art. X I
de cette loi est ainsi conçu : « T o u te s lés difficultés qu i ont
« pu s’élever dans le courant de l’année dernière sur les
« baux à chetel exp ires ou résiliés , et qui sont indécises ;
« toutes celles aussi qui se sont élevées relativem ent à l’exé« cution des arrêtés du com ité de salut p u b lic , des 2. ther« m id or et 17 fructidor , jusqu’à ce jo u r , et q u i n e son t
« pas non plus en tièrem en t te r m in é s , sero n t d éfin itiçe« 7nentrêglées d’aprèsles dispositions desarticles précédens.»
L es offres réelles du 2 germ inal ont élevé des difliB a
�(
12 ) .
.
.
.
•
cultes sur le bail à chetel des dom aines Chitain et Joninain ;
elles en ont élevé relativem ent à l’exécution des arrêtés
du com ité de salut p u b lic , des 2 th erm idor et 17 fruc
tid or an 2 ; elles u’étoient pas entièrem ent terminées h
l ’époque du i 5 germ inal an 3. L e citoyen R abanon se
tro u vo it donc littéralem ent dans les dispositions de l’ar
ticle 11 de la loi citée; il étoit appelé à jo u ir de leur
b é n é fice , et il p ouvoit ré p é te r, de son fe rm ie r, des bes
tiaux en m êm e n o m b r e , espèce et q u a lité que celu i-ci
les avoit reçu s, ainsi que le p orte le b ail fait par le fondé
de p o u vo ir du citoyen L a q u e u ille à P ierre Choussy.
Ce dro it lui étoit déjà acquis en vertu de l’arrêté du
17 fructidor q u i , en interprétant celui du 2 th erm idor
p ré cé d e n t, avoit assimilé les ferm iers aux m éta ye rs, et
leu r avoit im posé les m îm es obligations. O r , cette in
terprétation venant au secours des propriétaires lézés , le
citoyen R a b a n o n , qui avo it traité dans l’intervalle de ces
deux a rrê té s, p ou vo it bien dire à Jacques C h o u s sy :
« E rre u r n’est pas com p te ; vous deviez m e rendre les
« bestiaux des dom aines Chitain et J o n in a in , co n fo r« m ém ent à l’arrêté du 2 th erm id o r, et aux clauses du
« bail de vo tre p è r e , et vous ne l’avez pas fait : je n’ai
« p oin t renonce aux dispositions de cet arrêté et de ce
« b a il, en traitant avec v o u s; il a été décidé depuis qu ’il
« vous concernoit ainsi que les m étayers ; venons à n o u « veau c o m p te , suivant ce qui est tracé par la lo i, et
« certes Jacques Choussy n’a v o it rien à opposer à cette
« réclam ation ».
Ce que le citoyen R abanon p o u v o it faire en vertu de
l’arrêté du 17 fructidor an 2 , il l’a fait p ar les offres
�C 13 )
réelles du 2 germ inal an 3 ; la lo i du i 5 du m êm e m ois
a confirm é ses prétentions, e t , par co n séq u en t, ses droits
se trouvent conservés dans leur intégralité.
O n peut m êm e aller plus lo in , et dire que quand l’ar
rêté du 17 fructidor n ’auroit p oin t don n é au citoyen
R ab an o n , le droit de reven ir sur les arrangem ens du 17
therm idor an 2 , il suffiroit q u ’il eût élevé sa réclam ation
contre ces arrangem ens , p o u r qu’au x termes de l’article
i l de la lo i du i 5 g e rm in a l, il fû t admis à jo u ir des
avantages de cette l o i , dont le b u t a été de rétablir l ’é
quilibre entre les propriétaires et les fe rm ie rs, et d’em
p êch er les uns de s’en rich ir au détrim en t des autres ; elle
r i a ch erch é d'autre ca u se e t d ’autre m o t if , q u 'u n e
sim ple -prétention élevée de p a rt ou d’ autre. Il n’y a
rien de plus clair ni de plus p ositif à cet é g a r d , que
ses dispositions.
■ J .
D e cette discussion , il résulte que les difficultés qui
existaient entre le'citoyen R abanon et ,Jacques C h o u ssy,
au i 5 germ inal an 3 , sur leur com pte de c h e te l, n ’ayant
pas été vidées ni term inées- depuis cette é p o q u e , sub
sistent to u jo u rs, et q u ’il fa u d ro it, p o u r les rég ler d éfin i
tivem ent , avoir recours^ au x dispositions de cette loi
si elle étoit toujours en v ig u e u r: mais cette loi n ’ayant
plus été susceptible d’exécu tio n , .à l’instant où les assignats
et mandats ont cessé d’avoir cours f o r c é , le législateur
y a s u p p l^ par une loi nouvelle du 2 th erm id o r an 6
q u i, en conservant les droits de c h a c u n , a consacré u n
nouveau m ode de com pte et d’estim ation.
- L e cit. R abanon doit s attendre que Jacques Choussy
lu i opposera l’article 6 de la lo i du 2 th e rm id o r, q u i
�C 14 )
^
porte en substance, que les com ptes et partages entière
m ent co n so m m és, sont m ain ten u s, et sortiront leu r pleinet entier e ffe t, à quoiqu’ép o q u e et dans quelque p ro
p ortion qu ’aient été faits lesdits com ptes ou p a rtag es,
et il en conclura que l'arran gem en t du 17 th erm idor an
2 i doit avo ir son exécu tion .
M ais les articles 7 et 8 de la m êm e l o i , renferm ent
la réponse à cette objection , puisqu’ ils p o r te n t, d’une
p a r t , que les com ptes et partages é c h u s , non d éfin itif
vem ent con sorm n és, seront réglés suivant les conventions
et les lôis ou usages antérieurs à la lo i du i 5 g erm in a l,
et de l’a u tre , q u e l’estim ation sera faite en valeu r m étal
lique , au p rix m oyen de 1 7 9 0 et n on o b sta n t toute es
tim a tio n d éjà f a i t e p eh d a n t la dép réciation du papier
m onnoie.
O r , il est dém ontré que les com p tes• entre Jacques
Choussy et le citoyen R a b a n o n 1, ne sont pas d éfin itivem en t
consom m és. L es réclam ations faîfé^'par le citoyen R a
b a n o n , depuis plüs de six an s, en sont la p reu ve jo u r
nalière*, un arrangem ent n’ est con som m é qu’aütânt que
tout est reçu , tout payé*, et que“ pei-sohné ’ ne s’est refusé
à son éxecution. L a loi du i 5 germ inal an 3 , -l’a" décidé
én term es e x p rè s; celle dü 2 th erm idor an 6 V1l’entend
aussi de m e m e , et elle ne’ fait pas dépendre la cô iisom indtioit d ’ un co m p te, d u n e e s tim a tio n f a i t e en pa pier
ynonnôîe , puisqtf elle porte que V estim a tion a u ra l i e u ,
n on ob sta n t celle f u i t e pendant la d ép récia tio n du papier
m onn oie. E n fin les difficultés élevées par leprdcèfc vei-bal
d’ offres réelles’, d ü u2 germ inal an 3 , né sont pas vidées ;
Choussy s’eSfc toujours refusé ù l’exécu tion de là loi du
�( i5 )
1 5 germ in a l; et de ce qu’il a été ré c a lc itra n t, et q u ’il»
refusé une justipe é v id e n te , il seroit ridicule à lu i d’en
conclure que la loi a vo u lu sanctionner sa résistan ce, et
lui rendre son obstination profitable.
L a demande en restitution form ée par le citoyen R aba
non , sou.s le second rapp.ort com m e sous le p re m ie r, est
donc dans le? teyú es du d ro it et d e là plus saine justice.
M ais il est un troisièm e p o in t de v u e , sous lequel elle
n’est pas moins fa v o ra b le , ç’est que les arrangem ens du
17 th erp iid o r a» 3 > fou rm illen t (d’erreurs de com pte et
de calcul les plus grossières.
'
Gett.e discussion entraîne avec ellç un détail qu 'u n
précis ne com porte p a s , mais dont le développem ent qu i
en sera fait lors de la plaidoierie de la ca u se, sera p o rté
à la dém onstration. L a justice ne pourra donc pas laisser
subsister de telles erreurs qty ne .peuvent justem ent se ré
p arer q u ’en se rçpprtant aux Jo.is qu i Qnt tracé la m arche
que l’on doit suivre en (ce^e ,matière.
Mais de p lu s , cette discussion deviendroit ici assez inu
tile , dès qu’on" a d’ailleurs établi dans le fait et dans les
principes, que les engagem ens de R abanon envers.Choussy,
doivent être annullès par les m oyens de crainte et de v io
lence qui ont forcé R abanon à les contracter. L a nullité
une fois p rononcée, Içs opérations qui se. feront d’après les
lois rendues sur cçljtç m atiere, depuis que les assignats ont
cessé d’avoir un cours forcé ; ces opérations m ettront en
évidence que loin d’être d ébiteur de C h o u s s y , R abanon
sera au contraire son créa n cier, et qu ’en tout cas il aura à
ré p é te r, sinon le to u t, au m oins une grande partie des
a , 5 oo livres en num éraire qu’il a payées à Choussy.
�( *6 )
< O n se persuade qu’il est assez dém ontré que les arrangemens sur les chetels entre R aban on et C iioussy,' n’ont
jamais été term in és, et par conséquent que R abanon est
toujours en état de se p révalo ir de la loi du 2 th erm idor
an 6.
'
M ais quand m êm e tout p aroîtroit avo ir été con som m é,
ce seroit assez que les actes qu i auroient o p é ré cette con
som m ation fussent rescindés et annullés p o u r e r r e u r ,
dol , crainte et violen ce, p o u r qu’alors tout dut ctre
rem is au prem ier é ta t , et par conséquent que rien ne fût
censé consom m é. C ’est ce que veu t la lo i 8 , au titre du
code théodosien que Ton a c it é , q u i valide les actes
p rivés passés m êm e dans des tems de ty ra n n ie, mais seu
lem ent lorsqu’ils n’ont pas été produits p ar le dol ou la
c ra in te , si dolo m etuçe ca ru e rin t • c’est ce que ve u t en
core la loi 9 du m êm e titre , en disant : N i s i a u t etiam
circu m scrib tio s u b v e n ict, n ec vis a u t terror ostenditur.
.
S ig n é , P L A N T A D E - R A B A N O N .
R e le g i, A N D R A U D .
V u et a p p ro u vé par m oi jurisconsulte soussigné.
'
TO U TTÉE.
A p p ro u v é par l’ancien jurisconsulte soussigné.
PA G ES.
L e citoyen G O U R B E Y R E , A v o u é.
j
�( *7 )
PIÈCES
JU STIFIC A TIV E S.
E x t r a i t des registres de la so ciété épuratoire de V ic h y ,
du 16 bru m a ire 3e. année.
D
e v a n t
les commissaires épurateurs a com paru Claude
A r m illio n , vo itu rier par e a u , citoyen de cette c o m m u n e,
âgé d’environ trente-un a n s, leq u el, sans p réven tio n ni
personnalité, ni passion, a déclaré qu’ étant seul avec Claude
B o u rgeo is, ce dernier lu i d it, dans les prem iers jours de
germ inal d e rn ie r, chez la citoyenne L a m b e r t, à P a r is ,
. q iïilé t o it v e n u à P a r is , p o u r fa ir e g u illo tin er R o u g a n e;
que ledit A rm illio n lu i rép liqu a : J * a { p a ssé et repassé
a u p o rt "Siougane, et lu i a i to u jo u rs vu d on n er a u x p a u
vres de T argent ; j e T aurois to u jo u rs cru bon p atriote.
C om m en t diable ça va donc c h e z n o u s. T o u t le m onde
change donc. A la vérité v o ilà q u a tre m ois qu e f en su is
so rti. B ou rgeois lu i répliqua \ J e t e prie de p a sser silen ce
s u r R o u g a n e y et continua en lu i disant : J 'e n a i en core
q u a tre en vue; f a i D u m o n sse a u ; f a i G ra v ier-R ey n a u d ,
S a u ret et R a b a n o n . L e déclarant lui rép liqua : J ' a i p o u r
ta n t vu ce m a tin R a b a n o n , et bu T ea u de vie c h e z lu i
avec E t . Sorn m . C om m en t ça va donc c h e z n ous ? c a r
R a b a n o n n ous a d it q u i l étoit ic i p o u r so llic ite r des
subsistances p ou r le d istr ict de Cusset. E t B ourgeois
lu i répliqua : S i R a b a n o n est i c i , c est p o u r se cacher. A
cela le déclarant répondit : J e su is bien étonné de cela ;
C
/
�(i8 )
,
car quand on. avoit besoin on n avoit qu’à aller chez ce
brave m on d e-là . L ectu re a été faite audit A rm illio n de sa
déclaration; et après l’avo ir en ten d u e, il l’a affirm ée sincère
et véritable. Suivent les signataires des commissaires épu
ra teu rs, des m em bres de la m unicipalité de V ic h y , et de
ceux du directoire du district de G usset, en form e au
thentique*
■
.
Cussetj ce 2g messidor, deuxième année républicaine*
C I T O Y E U ,
. V o u s n’igncn'ez pas que j e su is a llé d e u x ¿fois c h e z
vo u s p o u r term in er nos affaires con cern a n t votre a c q u i
s itio n de C h ita in , q u é dans m on p rem ier vo yage nous
avons fait l’estim ation des bestiaux, qui s’esc m ontée, tant
p o u r le dom aine Chitain que p ou r J o n in ain , à la som m e
de 11,270
suivant l’estim ation q u ’en avoit faite Saulnier,.
m on exp ert ; laquelle som m e j ai bien vo u lu réd u ire à
celle de 10,000
J ’aurois cru que ce sacrifice v o u sa u ro it
engagé à m e payer lren-sus du ch etel, qui se m o n te, suivant
le calcul que j’ën ai fait, à la somme de 5,396
16
D ans m on second v o y a g e , ainsi que dans le p rem ier r
j ’ai vo u lu vous rem ettre les clefs, en présence des citoyens
C ro izier : vous n’avez jamais voulu les pren dre. T o u te s ces
tra ca sseries m o n t m is dans le ca s d ’en p a rle r à n oire
brave représentant F o r e s tie r , q u i n’ a pa s é té con ten t
de votre f a ç o n d’a g ir, et n ia d it de vous écrire de sa
p a r t, et vous invite de vous m ontrer plus a ccom m o d a n tr
�(
1
9
)
x
qu e n ous étion s plus dans ces tem ps où les tra ca sseries
étoient à l’ ordre du jo u r . A in s i, c ito y e n , je vous in v ite
à nous arranger ensem ble com m e de vrais républicains
do iven t le faire, et cela le p lu tôt possible ; car mes facultés
ne m e perm ettent pas de toujours m e prom en er à ne rien
faire. J 'a i entrepris de Vouvrage p o u r le d is t r ic t , et j e
n e p e u x pas le f a i r e ta n t q u e j e n a u r a i pas term iné
avec vous.
'
Salut et fraternité.
.
CHOUSSY.
Com pte et C a lc u l écrits de la m a in de J a c q u e s C h o u ssy .
L e chetel du dom aine Joninain que doit laisser Choussy
à-R ab an on , est de la somm e de. 800 fr. ei^ estim ation or
dinaire , et de celle de 960 fr. à p rix de foire.
L e chetel dudit dom aine se tro u ve actuellem ent se m on
ter à celle de 5,45p fr. (le s brebis c o m p rise s), suivant
l’estimation qui en a été fa ite , le 14 m e s s i d o r p a r les ci
toyens Saulnier et G a illa rd , experts nom m és ; il résulte
de cette expérience que l’en-sus du chetel est de la som m e
de 4 ,49 ° fr* ce (ï tl*
p o u r la p ortion du citoyen C h o u ssy,
celle de 2,245 fr. dont le citoyen R aban o n doit lui tenir
co m p te, c ï ............•
............................................ 2,245 fr.
- L e chetel des m étayers envers led it Choussy est de la
s o m m e de 1,290 fr. à p rix de f o i r e , de laquelle som m e
il faut soustraire celle de 960 fr. qui est le chetel que doit
laisser Choussy; il restera celle de 330 l'r. que les m étayers
•
C 2
�.
^
( 20 )
doivent com pter audit C h o u s s y , ou ledit R a b a n o n , s’il
veut av o ir le m êm e clietel en vers les m étayers que Choussy
] avoi t ; laquelle dite som m e de 330 fr. ajoutée à celle de
2,245 fr. çi-dessus, feront celle de z , 5y 5 fr. dont le citoyen
Rabanon*.est' com ptable.
L e chetel que doit laisser Choussy à R a b a n o n , p o u r le
dom aine C h ita in , est d e 7 9 4 f r . en estim ation o rd in aire,
et de 952 fr. 16 s. en p r ix de foire.
L e chetel dudit dom aine se trou ve actuellem ent se m on
ter à celle de 4,272 fr. n on com p ris les brebis , suivant
l’estimation faite par les susnom m és; il résulte de cette
estimation que l’en-sus du chetel est delà som m e de 3,319 fr.
4 sous, ce qui fait p o u r la m oitié de Choussy celle de
1,659 fr. 12 so u s, dont le citoyen R abanon doit lui tenir
com pte.
'
L e chetel des m étayers envers ledit Choussy est de
1,841 fr. à p rix de fo ire , n on com p ris les b reb is, de la- ,
quelle som m e il faut soustraire celle de 962 fr. 16 so u s,
qui est le chetel que doit laisser C houssy; il restera celle
de 888 fr. 4 so u s, que les m étayers doivent com pter audit
Choussy ou ledit R ab an o n , s il veut a v o ir le m êm e chetel
envers les m étayers qu e Choussy l’avo it ; laquelle dite
som m e de 888 fr. 4 sou s, ajoutée à celle de 1,659 fr. 12 s.
de l’autre p a r t, feront celle de 2,547 ^r *
citoyen R abanon est comptable.
sous, dont le
C om m e les m étayers doivent laisser audit Choussy le
nom bre de 4^
tête p ou r tête, lesquelles ont été esti
mées 6 fr. la p ièce , le citoyen R abanon doit com pter audit
C h o u ssy, la som m e de 270 fr. p o u r la valeur des susdites
brebis ; laquelle dite somm e de 270 fr. ajoutée à celle de
2,547 fr. 16 sous, feront celle de 2,817 fr. 16 sous.
�C 21 )
R eco n n a issa n ce de J a c q u e s
C h o u s s j tout écrite de
sa main.
J e so u ssign é,
faisant tant pour moi que pour mon
pèr& ,
reconnois avoir reçu du citoyen Plantade-R abanon
la som m e de cinq m ille trois cent q u a tr e - v in g t- d o u z e
livres seize sous ; savoir : celle de deux m ille cin q cents
livres en a r g e n t, et celle de d e u x m ille h u it cent quatre-
vin gt-d o u ze livres seize sous en un billet dudit citoyen ,
payable le prem ier germ inal p ro c h a in , à laquelle se m onte
m a part et portion de l’excédent des bestiaux qui garnis
sent les domaines de C hitain et Joninain dépendans de la
ci-devant terre de C h ita in , déduction faite du m ontant des
chetels que je dois laisser en conform ité de m on bail de
fe rm e , dont l ’appréciation desdits bestiaux a été faite par
les citoyens G a illa rd , p rop riétaire de la com m une d ’Isserp e n t, et Sau ln ier, p rop riétaire de celle de M a g n e t,
experts par nous choisis à l’am iable ; la totalité de laquelle
à la somme de neuf mille neitf
cent cinquante livres y compris le chetel des brebis
appréciation s’est m ontée
,
.
Fait à C h risto p h e , ce dix-sept th e r m id o r, l’an deux de la
république française une et indivisible.
Signé,
Châtel-Montagne, le vingt-sept brumaire
treize Jr. cinquante centimes. T A R D Y .
E n reg istré à
an
7- R e ç u
CHOUSSY.
�Séance du
co m ité de su rveilla n ce de C u sset, du 22 th er
m id o r 2e. année de la république une et in d ivisible ;
-présidée p a r la représentant du peuple F o restier.
L a discussion a été ouverte sur les individus incarcérés
dans la m aison d’arrêt de cette c o m m u n e , et sur ceux
que le com ité a envoyés dans la m aison de réclusion à
M oulins.
P o u r éclairer le représentant sur cette discussion, il a
été mis sous ses y e u x les dénonciations faites contre
chaque in d iv id u , leu r interrogatoire et les tableaux qui
les concernent.
,
A p rè s un m u r exam en , considérant le nom bre des
détenus dans la maison d’arrêt de cette c o m m u n e , la
g ra vité des faits dont ils sont p r é v e n u s , leu r ancienne
influence dans les cantons circo n vo isin s, et le danger
de laisser trop long-tem ps ceux qui sont détenus ici dans
une maison qui n’est pas assez forte p ou r contenir de tels
accusés ;
Considérant que les nom m és B o u q u e t-C h a ze u il, e x rio b le; G u ilb o n , fem m e de C h a u v ig n i, é m ig r é ; et D esgo m m ières, veu ve de G ira rd -S a in t-G é r a n d , g u illo tin é ,
détenus dans la maison de réclusion «\ M o u lin s , sont
pareillem ent accusés de d é lits, dont la p un ition ne saur oi t , sans de grands inconvénien s, être reta rd ée;
L e représentant du peuple arrête ce q u i suit:
A r t .; I f r.' L es nommés S ic a u ld - M a r io l, e x - n o b l e ;
B ard o n -D u m éa g e , ex-noble et frère d’ém ig ré; M eilh eu r a t, e x -m a ire , adm inistrateur de district rem placé; M aresquier p è r e , ex-ju ge de paix destitué; M aresquier fils,
�C 23 )
ex-officier m unicipal destitu é; B u re lle , épouseide M a resquier p è re ; B u r e lle , notaire et e x - p r o c u r e u r de la
com m une de V a r e n n e , re m p la cé ; L ah ou sso is, e x -frè re
séphontiste ; et la nom m ée L a b o issiè re, dite G an n a to ise,
tous détenus en la maison d’arrêt de Cusset ; le$ pom m és
B o u q u et-C h azeu il, G u ilb o n , épouse Çhaiivigi^i^ et D e s go m m ières, veu ve G ir a r d , détenus dans la maison de
réclusion à M oulins ;
,
P ré v e n u s , i°* d’aristocratie e ffrén ée ; 2 °. de propos
eontre-révolutionnaires; 3 ^ d’avo ir professé les principes
du royalism e ; 4 0. d’avoir cherché à a vilir la convention
et les autorités constituées , en ridiculisant les d é crets,
e n fin , par leur conduite, de s’être déclarés les ennemis
du p e u p le , etc. etc. les pièces de conviction desquels in d i
vidus ont été envoyés à l’ adm inistration du district, qui
les a transm ises, soit au com ité de sûreté gén érale, soit
à l’accusateur public du tribunal révo lu tio n n a ire; seront
traduits sous bonne et sûre garde dans une maison d 'arrêt
de la com m une de P a ris, p o u r être jugés par le tribunal
révolutionnaire.
II. L es nom m és C h au vin et C o in c h o n , e x - ju g e s d u
tribunal du district de C u sset, rem p lacés, resteront en
état d’arrestation com m e suspects, dans la m aison
de
Cusset, jusqu’à ce que le com ité de sûreté générale ait
statué sur les pétitions q u ’ils lui ont présentéesIII. H élèn e C o m b e , M arie C h a rle s, toutes deux exreligicuses, et Claude C h a rle s, n o ta ire, resteront en état
d’arrestation com m e-suspects ^ et néanm oins le représen
tant du peuple charge le com ité de surveillance de Cusset,
d’entendre incessamment les tém oins indiqués dans la
dénonciation de G authier, et. tous autres..
'
f'
'
‘
�(
24)
I V . Il sera remis une exp éd ition en form e du présent
arrêté à l ’agent national du d istrict, q u i sera tenu de
faire traduire dans un b r e f délai les ci-dessus dén om m és,
dans une m aison d’arrêt à P a ris ; il en sera rem is une
seconde copie à la gendarm erie nationale chargée de la
con d uite des détenus.
t
V . L e présent arrêté sera affiché et im p rim é jusqu’ à
concurrence de cinquante exem plaires, au x frais de l'ad
m inistration.
Le représentant du peuple, F O R E S T I E R .
A R lO M , de l’im p rim erie de L a n d r i o T , im p rim eur du
T rib u n a l d’appel.
�A ^t
h
ï:
i• :
,
�G É N É A L O G IE .
N ... Auzolles.
N .................
Marguerite-Pierre
Verdier.
Marie-André
Froquières.
I
Magdeleine-Annet
Rastinhac.
2
Antoine.
André.
3
André, mort
sans descendans.
Antoine - Marie
Lagarde, intimée.
Enfans mineurs,
dont la mère
est tutrice.
Pietre ,
mort sans ènfans.
Marguerite.
4
5
6
M arguerite,
religieuse.
M arie-François
Rames.
Jeanne-Bertrand
de G re ils,appelant.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Plantade-Rabanon, Jean-Claude. An 7?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Plantade-Rabanon
Andraud
Touttée
Pagès
Gourbeyre
Subject
The topic of the resource
ventes
domaines agricoles
cheptel
contre-révolution
émigrés
Terreur
société épuratoire de Vichy
ferme
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour Jean-Claude Plantade-Rabanon, propriétaire, habitant de Chitain, commune de Saint-Christophe, Appelant ; contre Jacques Choussy, géomètre, habitant de la commune de Cusset, Intimé.
Arbre généalogique.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 7
1799-Circa An 7
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0145
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Christophe (03223)
Cusset (03095)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53686/BCU_Factums_M0145.jpg
assignats
cheptel
contre-révolution
domaines agricoles
émigrés
ferme
Société épuratoire de Vichy
Terreur
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53684/BCU_Factums_M0143.pdf
1b0697304c4d469bf5df97cbd26e771c
PDF Text
Text
J w f y (M
M
E
A
M
O
I R
t u w v - X A filo
E
.
C O N S U L T E R ,
P O U R C h a r l e s P A N N E T I E R e t ses c o n so r ts, in tim é s ;
CONTRE
Anne
C O U C H A R D et P i e r r e C U R E Y R A S
son m a ri, appelans ;
E n présence d’O R A D O U X - V E R N I G N E S , aussi intimé
.
f a i t s
Du
.
mariage de Léonard Pannetier avec Gilberte B au n y, sont
issus quatre enfans ,
Gilberte , première du nom , Charles , M arie-Anne , et Gilberte
jeune.
Gilberte Bauny est décédée en 1749 ; il y av oit communauté de
biens entr’elle et son m ari, aux termes de leur contrat de mariage
et de la coutume locale d É b r e u il, ou ils faisoient leur habitation.
Cette communauté a été continuée jusqu’au décès de Léonard
Pannetier, arrive en 1762.
Pendant la continuation de cette communauté , et le 8 août 1753,
Léonard Pannetier avoit acquis d’Antoine Taillardat, .prêtre, et de
Pétronille Baratier, veuve de François T aillard at, un petit domaine
appelé de Chavagnat, situé sur les hauteurs d’Ébreuil, moyennant ,
la somme de 1oo; francs- de rente, au principal, de '2000 francs.
L e 1 5 avril 1755 Léonard P a n etier m aria, Gilberte Pannetier
sa fille aînée, avec .Jean-Baptiste Couchard qui étoit notaire à Ébreuil,
et procureur dans toutes les justices des environs.
Gilberte Pannetier se constitue les biens qui lui sont échus par
le décès de Gilberte B auny sa m èrè, du consentement de son père
is’en, réserve, l’usufruit.
u
q
■
�. . .
( 2 >
..
.
Son père l’institue en même temps son héritière universelle de
tous les biens meubles et immeubles , dont il mourra vétu et s a is i,
-conjointement et par égale portion avec ses autres enfans, f rères
et sœurs germains de ladite ¿future, sous la réserve de la somme
de ¿,000 francs, pour en disposer à sa volonté.
' Et cependant, est-il ajouté , en attendant sa fu tu r e succession, il
donne et délaisse en avancement d’hoirie et constitution de d o t, une
r v '
•
'
.
1
*•
v
.
maison située à Ebreuil y les draperies et autres marchandises étant
actuellement en sa boutique, pour ,1e prix e t, somme qu’elles lui
a voient coûté , dont il seroit fait état et inventaire lors de la déli
vrance d’icelles ; p lus, une partie de jardin'dont la contenue et les
confins sont en blanc.
« P lu s, le domaine de Châviignat audit lieu et paroisse d’Ebreuil,
« avec toutes ses dépendances, garni de ses bestiaux actuels, sur le
« pied du cheptel, et ainsi et de même que ledit sieur Pannetier
« T a acquis d’Antoine Tailla rd at, p rê tre , curé de Bussière, et
« autres, à la charge de io o fr. de rente annuelle auxdits vendeurs,
« au principal de z,oo'o francs, suivant le contrat du 8 avril 1763;
« à la charge par ladite future et ledit futur, d’acquitter à l’avenir
« auxdits vendeurs ladite rente de 100 francs, fct les cens auxquels
« ledit domaine peut être assujéti, etc. »
‘
D e plus, Léonard Pannetier promet payer à la future, et pour elle
au fu tu r, la somme de z 5o francs dans les termes convenus.
« Tous lesquels susdits fonds , sommes et marchandises ou la
«■valeur d’icelles, en ces présentes, seront rapportés par ladite future
« venant à partage, avec ses susdits frères et sœurs, des successions
* de sesdits père et m ère, ou retenir iceux, si ainsi est convenu,
« à dire d’experts ».
Il n’est pas indifférent d’observer que tous ces biens, meubles et
im meubles, délaissés ainsi provisoirement par Pannetier à sa fille
et à son gendre, étaient en totalité dés effets de la communauté, ou
plutôt de la continuation de la communauté d’entre Léonard Pannètier et Gilberte Bauny.
L e citoyen Couchard s’aperçut bientôt que la jouissance du domaine
4 e Ghayagnat lui étoit plus onéreuse qu’utile 3 il se proposoit d’ailr
�« * X%
3
• • ‘ v.
%
1^
^ ^
v
> ________
*■
.
•
>
1"
•■' - • - ' • w s - ; ; - * w V ^ T ‘3 ,T ’^ ' v*■O *\'
Sf 1
leurs de s’établir à Gannat, pour y exercer sur un plus grand théâtre
ses talens pour la pratique ; il chercha donc à se ‘défaire t e ce domaine.
L e nommé Chantereau se présenta pour prendre son lieu et place ;
y
mais soit que Couchard fut, encore mineur f n’étant.â l’époque de *
son mariage que majeur de coutume, soit qu’il ne présentât pas une
solvabilité suffisante aux yeux de Chantereau, soit enfin qu’on con
sidérât encore Pannetier comme étant le vrai propriétaii-e de ce
dom aine, ne l’ayant délaissé à sa fille et à son gendre qu’en jouis
*
•
î
•
»
sance^ét à la charge du rapport, Chantereau ne voulut avoir à faire
qu’à Léonard Pannetier.
,
:
:
Ce fut donc, Léonard Pannetier q u i, le 28 mars 17 5 6 , onze mois .***}>
et quelques joiïrs après le mariage, subrogea Chantereau au contra^^
d’acquisition ou bail à rente de 1763, sans autre charge que de payer
la rente de a 00 francs aux premiers vendeurs.
.>
<• _
Mais comme cette subrogation étoit faite, çon seulement du c o n - '^ ' "
seulement de Couchard, mais'à ;sa sollicitation, il a paru à Cet acte **'■
pour y donner son acquiescement en ces termes :
>-»v
, « En présence et du consentement de M e. Jean-Baptiste Coû
te cliard, notaire royal, demeurant.en cette ville d’ E breuil, qui se ^ ,
^ «.départ des droits qu’il pouvoit avoir sur ledit domaine de Clia« vagua t ci-dessus vendu, sans préjudice à la constitution de dot
« port(ie par-son contrat de mariage, et autres droits résultans d’ice-'
lu i, qui a aussi signé , etc. ».
.
,
■
Il n’ost pas besoin; de remarquer que ces réserves ne port
*■
' ’ ■<•-«*. q&e sur les autres objets du contrat de mariage, et non siàj^çe domaine
.*
de Chavagnat, sans quoi c’eût été; une subtilité perfide :de la, part
^
du praticien Couchard, mais;heureusement sans conséquence, parce
*7 iqu’il est de principe que les réserves faites dans-un.¡acte sont sans
effet, toutes les "foi^'qu’elles sont contraires à l’essence,môme de l’acte,
^>5*-. et qu’elles tendent à le détruire;¡.
:;.Vv>‘ lr>
(
>» A
“ Quoi qu’il en soit, Couchard ainsi débarrassé/de cç, domaine, alla
|: *
^ 5s’établir à Gannat, où il a continué d’y exercer les fonctipns de notaire **
et de procureur.
: Léonard Pannetier -étant tombé malade au ¡mois de juin 1762
*t
^ C o u c h a rd se rendit auprès.de ljii
^pwftliatt.t;^ r;at>s§D,çe. dg.Çhaylef
■
■
1 ■A 2
V
*
�—
U jy tg æ
' *
------ v - i * ------ '
W
^ -
-^ _ _ .
■
Pannetier, seul mâle de la famille auquel étoit destinée la réserve de2,000 francs f il parvint ;\ lui faire faire un testament par lequel il lui
f,.
fit disposer de cette réserve de 2,000 fr. au profit de sa femme et
I
‘de ses deux belles - sœurs gu ’ll ne put pas exclure pai*ce qu’elles
étoient présentes.
!
A u décès de Léonard Pnnnetier, Charles Pannetier/et ses sœurs
j
étoient 'encore m i n e u r s ; 'on les fit émanciper; on leur fit nommer
;
un curateur. Coucliard, praticien retors, abusa de ces circonstances
1
pour s’attribuer tout ce qu’il y avait de bon et de précieux/clans la
succession, et il y j o i g n i t une astuce qui a servi de germe au procès
¡qui divise aujourd’hui les parties.
Y
Son pi’emier tour d’adresse fut de faire renonce^5a femme à la
I
^4,^ Succession de son père, pour s’en tenir à ce qui lui avoil été délaissé
^ - jp a r son contrat de m ariage, quoique l’institution par égalité et le
-délaissement fussent indivisibles ; que la condition de ^institution et
^
;du délaissement fût qu’il en seroit fait rapport la succession des
père et mère communs, et que dès lors Gilberte Pannetier ne fût
pas la maîtresse de renoncer à la succession de son père, à moins
J a, qu’elle ne fit l’abandon des objets■
délaissés.
'
I .
L e second tour d’adresse fut de faire approuver par Charles Pan
netier, mineur, le- testament portant disposition de la réserve, quoi- n^c,
qu’il fût vicié de la nullité la plus absolue, par le défaut de signature
de Léonard
rd Pannetier, qui n’avoit pu tracer, et encore d’une manière Z
'
^
inform e, que trois lettres de son nom , au lieu de neuf dont il é to it* * ^ ^ ^ »
compose.
'L e : iroiÿième tour-d’adresse fut-de se faire délaisser pour son t i e r s /jrth
'dërces- 2-àoô francs, des héritages précieux qui valoient alors quatre
fois, et qui valent aujourd’hui dix fois le tiers de ces 2,000 francs/^^^*^*^.
L e quatrième tour d’adresse fut de sépavernis successions dc/^*Tj% /
___r:„que, par
«.......
i ___ ^ 7 / : 1
*r
r
.Panneticr\ct
11
.. . . dev. GilberLe
r*;ii___xj-----j.»
, ' Léonard
Bauny,• tandis
une• ,clause
expresse du conlratVde mariage, Gilberte Pannetier ne pouvoit se ,f~Ly A h
^ dispenser de faire lé rapport des objets qui lui avoient été délaissés par
y
, -^son père, au partage des successions de ses père et m ère, avec d’au
tant plus de raison' que' tous1les objets délaissés étoient les effets de
X tn
l a i coiriiiUuïàlttê^ôuJ é^iitiiïuàtioiijdo Communauté. < .. J ■
�iTVÙ*
(
5
)
,
^
r Cinquième tour d’adresse. Couchard se fait-encore délaisscr^pour
sa portion dans la succession maternelle, communauté et continua
tion de communauté, des fonds précieux, et d’u n e.valeur bien des'
fois supérieure à ses droits.
Sixième tour d’adresse. Il force encore ses beaux-frères et heïles-'V '^^
Sœurs à traiter avec lu i, pour une prétendue parcelle de jardin énoncée
dans son contrat de mariage, sans confins ni contenue, et dont l’exis-j^>u^**:
tence étoit inconnue de toutes les partiesr f h '
E t enfin, pour septième tour d’adresse, il prend occasion de
qu’on ne découvre pas la propriété de ce jardin, pour se faire des^ ^ *
réserves des droits qui peuvent résulter de son contrat de mariage;
réserves qui ne sont relatives qu’à la propriété de ce jardin^dans
le cas où il viendrait à se d éco u vrir, et qu’on a soin de présenter^T/1* ^
astucieusement dans le mémoire imprimé auquel on répond, com m e'V ^ ^
■des réserves générales, pour faire croire qiie Couchard se p r é p a r o it ^ 't<
dès lors un retour sur le domaine de'Chavagnat.
H étoit facile à Couchard, praticien consom m é, d’abuser de la
,
m inorité, de la foiblesse et de l’inexpérience des trois mineurs Panrietier. Ccux-ci auroient p u , à leur m ajorité, revenir sur le partage-/^ -:
fait en 1762, sur la nullité du testamenî^SuTle défaut de rapport,
de la part de Couchard, de tous les biens meubles et immeubles qui
a v o ie n t été délaisses î\ sa femm e, en attendant le partage des succes
sions des père et mere communs ; sur la lésion énorme de tontes
les opérations portées par cet acte : mais ils préférèrent leur repos
a u x tribulations d un procès; et les parties ont ainsi vécu, jusqu’à
la naissance de cette contestation} qui a eu lieu au mois de vendé->
jniaire an 4.
>
Pendant cet intervalle, Chanterenu, qui avoit pris la subrogation p
du bail à rente du domaine de Chavagnat, en 1756 r s’y étoit ruiné/^
soit en y faisant des constructions, soit en y faisant des améliorations
que l’ingratitude du sol avoit rendues infructueuses.
Il
fut fo rc é , en l’année 1 771 , de vendre au citoyen O radouxV ernignes, non seulement c e ! domaine et toutes les améliorations
qu’il y avoit faites, mais*tous les autres biens qu’il avoit à Ebreuil.
On voit dans le contrat, que le prix de cette vente, y compris
A 3
'
�.
.
.
( G )
ses autres biens d’Ebreuil, est de la somme de 5,ooo francs; que le
k citoyen Yernignés en retint 2,000 francs pour la rente, et que le
..’surplus fut employé à l’acquittement des dettes du vendeur.
L e citoyen Vernignes, devenu acquéreur de ce bien, y a fait des
X constructions considérables, des réunions et des améliorations de tout
; genre; il a alors excité la cupidité du citoyen Couchard, de sa fille
et de son gendre, qui ont cru trouver un prétexte dans le contrat
.de mariage de 1^55, pottr. réclamer la propriété de ce domaine.
•' Ils ont fait assigner le citoyen Vernignes en désistement, au mois
x de vendémiaire an 4.
L e citoyen Vernignes a dénoncé cette demande à Charles Pannetieiàet aux enfans de M arie-Anne et de Gilberte Pannetier, seconde
du nom.
,
. C eu x-ci ont pris le fait et cause du citoyen Vernignes.
1 I,a contestation a été portée au tribunal civil du département de
l’A llie r, 011 après, une ample discussion et des mémoires respectifs
fournis par les parties, il est intervenu jugement contradictoire, le
22 germinal an 6, qui est conçu en ces, termes : ' ,
,
« Considérant, dans le droit, que celui qui se porte héritier d’un
•
f
« défunt, est tenu d e ' " f a i t s , et doit executer ses engagemens ;
« qu’on ne peut être garant de sa.propre action, sans être noncc recevable à la former;
- :■
, « Considérant, dans le fait, que par. le contrat de mariage de
« G ilberte Pannetier avec. .Jean-Baptiste Couchard, L éonard , son
ce père, l’avoit .instituée lieritiere par égale portion avec seâ autres
« enfans ; que le délaissement qu il lui avoit fait d’une maison et un
cc jardin sis en la commune d’E breuil, d’une boutique et des mar
« Chaudises qui,la garnissôient, ensemble du domaine"de Chavagnat,
« ne l’a été qu’en avancement d’hoirie, et-en attendant sa future
cc siiccession, et à la charge, en outre, d’en-faire le rapport en ve^
« nant à partage, ou de les conserver, à dire d’experts, si ainsi
a élôit convenu entre les cohéritiers ; ce qui ne présente l’abandon
cc que d’une simple jouissance qui étoit donnée à Jean-Baptiste
cc Coucliard’, .pfjur l’aider k supporter le,s charges çlela communauté,
« et non de la propriété absolue;
,
<
t
<
�C7 ) '
’ « Considérant que cet abandon n’étoit que p roviso ire, et fait
* en attendant la succession de Léonard Pannetier ; qu’à l’époque
« de son ouverture , qui est celle seule où les droits des enfans à
cc la propriété, se sont réalisés, les objets-alors existans de l’avan« cernent d’hoirie, constitués aü profit de Gilberte Pannetier, se
* trouvoient confondus, de manière que la mère de la demandé
es resse, nonobstant sa renonciation, n’a pu les conserver qu’à titre
« d’héritière dudit Pannetier ; que sous ce rapport, elle est
non-recevable à attaquer la subrogation consentie au profit de
«C han tereau, le 28 mars 1 7 56 , du domaine de Chavagnât, avec
« d’autant plus de raison que le tiers des 2,000 francs, qui revenoit
« à ladite Gilberte Pannetier, en vertu du testament de son p è r e ,
« ayant été reçu par elle , en immeubles provenans de sa succès« sion, et étant affectés de droit à son exécution, elle est elle-meme
« garante hypothécaire de l’action qu’elle a exercée ;
« Considérant que la demanderesse ayant accepté la continuation
« de communauté, et partagé les objets en dépendans , il en résulte
a qu’elle est non-recevable à attaquer une vente qui a été faite pen
a dant la continuation de ladite communauté ;
« Considérant enfin que le domaine de Chavagnat a été cédé à
« Chantereau aux mômes charges, clauses et conditions qu’il avoit
« été acquis par Léonard Pannetier -, et étant prouvé par les cir« constances du fait, que ce domaine étoit plus à charge qu’à profit,
« et qu il n etoit entre pour rien dans l’avancement d’hoirie fait à
« ladite Gilbeite Pannetier, il en résulte que la demande formée
<
îî par sa fille, nest fondée sur aucune espèce cPintérêts.
« L e tribunal, jugeant en premier ressort, déclare la demanderesse,
« partie de Bellaigue, non-recevable dans sa demande; renvoie de
cc l’effet d’icélle le défendeur originaire; par suite, renvoie les défen« deurs sommes de celle en recours et garantie dirigée conlr’eux ,
« et condamne la partie de Bellaigue, aux dépens envers toutes les
« parties, liquidés à, etc; »
Cureyras et sa femme sont appelans de cc jugement : m<)is peu
confians dans le succès de leur appel , ils ont formé une demande
contre Charles Parme lier > et contre les représentant de Marie-A-nue
•
A 4
�.
<8 î
Pannetier, teadante k ce que dans le cas où ils ne parviendroient
pas à obtenir contre le citoyen Vernignes le désistement du domaine;
de Cha vagnat, ledit Charles Pannetier et ses neveux et nièces soient
tenus de leur en payer la valeur.
>
: T el est le résultatd’ün mémoire im prim é, répandu par Cureyras»
et sa femme, où après avoir présenté cette affaire comme donnant lieu>
à; des questions- nom breuses, incertaines et assez difficiles, et les»
avoir-discutées en sept paragraphes, ils terminent en ces termes
« A u résumé : ou nous ferons infirmer la sentence dont est appel,
ce. vis-à-vis le citoyen'Vernignes, et nous aurons le domaine de Cha^
«.vagnat : ou cette sentence sera maintenue à l’égard du citoyen3
« Vernignes; mais alors elle doit être réformée respectivement auxj
« héritiers Pannetier ; ils doivent être condamnés à faire désister le
« citoyen V ernignes, ou à'nous payer la valeur présente de ce
« domaine. Sous ces deux faces, notre demande est légitime ; elle1
k l’est nécessairement sous l’une au moins, Nous devons y avoir toute
« confiance ».
x
Charles Pannetier> et ses consorts demandent au conseil si en effet
la demande de Cureyras et de sa femme est légitime sous les deuax
f a c e s , ou si elle Test nécessairement sous tu n e au moins, de manière
à ce qu’ils doivent nécessairement obtenir ou ie domaine de Cha-» vagnat ou sa valeur.
L E S O U S S I G N É , qui a v u et examiné le mémoire à con
sulter pour Charles Pannetier et consorts, ensemble les titres, pièces'
et procédures, et lé. m ém oiie ijnprime d Anne Couchard et P ierre1
Cureyras ;
E s t i m e qu’il a été bien fugé par le jugement du tribunal civil’
du département d’A llier ; du 22 germinal an 6 , et que Cureyras et’
sa femme sont également non-recevables et mal fondés ? soit dans1
leur demande en désistement du domaine de Chavagnat contre le
citoyen Oradoux V ernignes, soit dans leur demande subsidiaire,
récemment formée contre Charles Pannetier et consorts, en paye
ment de la valeur de ce domaine, dans le cas où ils ne parviendroient'
pas A en obtenir le désistement contre le citoyen Oradoux-Vernignes,
�.
( 9 >
•
'A u lieu de ces. questions nom breuses, incertaines et très~difficultueuses, que Cureyras et sa femme croient trouver dans cette
affaire, et qu’ils discutent en sept paragraphes, elle se réduit à trois'
fins de non-recevoir, qui ne présentent que des notions simples, et
qui n’exigent qu’une brève discussion.
Premièrement, fin de non-recevoir, résultante de la qualité d’héri
tière de son père dans la personne de Gilberte Pannetier , et de la né
cessité du rapport,
,
Secondement, fin de non recevoir, résultante de ce qu’elle a recueillr
des biens immeubles dé cette succession pouf sa portion de la-réserVe,
Troisièmement, fin de non recevoir, résultante de ce qu’elle a accepté
la continuation de la communauté, pendant laquelle le domaine de
Chavagnat a été acheté et revendu par Léonard Pannetier,
'
A van t d’entrer dans la discussion de ces trois fins de non-recevoir,
îl n’est pas indifférent de rappeler le fait qui a donné lieu à cette
contestation, et de se former une idée juste de ce qu’on peut appeler
!
la moralité de cette affaire.
L a femme Cureyras se plaint de ce que Léonard >Pannetier , son
'
a ïe u l, a aliéné à Chantereau, en 1756, le domaine de Chavagnat ,1
!
qui avoit été délaissé à’ sa mère par son contrat de mariage, '
' \ "1
Mais il est démontré que Léonard Pannetier n’a fait en cela qu’un-, /
acte de complaisance/pour sa fille et son gendre,
i *
Couehard étoit chargé de la rente de 100 fré envers les premier*
vendeurs, et de payer les cens et les impôts : Léonard Pannetier;
n’avoit donc rien à perdreyen laissant les choses dans l’état où elles
étoient d’après' le contrat de mariage de i j 55
Il
n’avoit rien a gagner/én aliénant ce domaine, puisqu’il l’a cédé
h Chantereau, aux môme/conditions qu’il l’avoit acquis des héritiers
Taillardat, et qu’il l’avoit délaissé à sa fille et à son gendre.
,
j
Ce n’est donc pas pour lui qu’il a fait cette aliénation, mais-pour,
eu x; il l’a faite, en -présence et du consentement tju cit. C o u e h a r d , J
qui a signé l’acte; il s’est prêté à ;les débarrasser/de cette propriété
qui leur devenoit onéreuse, parce que les charges en absorboient le
produit, et qui leur seroit devenue plus onéreuse encore, d’aprèskm* projet de s’éloigner des lieux, et de se fixer à.Gùnnat, /
,
Y
^
.
I
�|
i
il
1
'
r-l
^
!
li
' Ainsi 7 le résultat de la prétention de la femme Cureyras tend â
punir Léonard Pannetier, dans la personne de ses descendans, de la
complaisance qu’il eut alors pour eux, et d’avoir ajouté ce bon procédé
aux bienfaits dont il avôit déjà comblé sa fille et son gendre.
Mais heureusement tous les principes s’élèvent contre cette odieuse
recherche, et se réunissent pour repousser l’appel que Cureyras et
sa femme ont interjeté du jugement qui l’a proscrite,
'
„
<
Prem ière Jin de non-recevoir, résultante de la qualité d héritière
de son père, dans la personne de Gilberte P a n n etier, et de la
, nécessité du rapport.
■
.
' Léonard Pannetier institue Gilberte Pannetier son héritière, con
•
*
•
•
jointem ent et par égale portion avec ses autres enfans ,, qui étoient‘
au nombre de quatre, sous la réserve.de 2,000 fr.
H t cependant en attendant sa future succession , il lui délaisse
en avancement d’hoirie et constitution de dot différens objets mobi
liers et im mobiliers, avec clause que tous ces objets seront rapportés
•
par ladite future venant à partage des'successions de ses père et m ère,
,
.ou. retenus, si ainsi est convenu, à dire d experts. ,
P V ^ ^ ^ Ï T e s u lt e de cette clause, premièrement, que Léonard Pannetier
a voulu assurer à sa fille un quart de sa succession^ ayant quatre enfans,
!
mais qu’il n’a rien voulu lui donner au delà. ,
.
I» - k*
S e c o n d e m e n t , que c’est à ce titre d ’h é r i t i è r e instituée pour un
v! quart, et en a v a n c e m e n t de cette in s t it u t io n , qu’il lui a fait le délais- ,
ï s e in e n t des biens é n o n c e s dans son contrat de mariage.
^*1
*
*
*i • •
•
: '
T r o i s i è m e m e n t , qu il « impose pour condition à ce délaissement,
qu?elle en feroit-le rapport en nature ou en valeur, à dire d’experts.
On ne peut pas appliquer à l’espèce l’article C C C V II de la cou
tume de Paris, qui porte que « où celui auquel on auroit donné,
■
« se voudroit tenir à son d on , faire le peut, en s’abstenant de l’héf \
« rédité, la légitime réservée aux autres. »
\
Cette loi supposç un don pur et simple, une constitution de dot,
v — t ou un avancement d’hoirie sans condition , tandis qu’ici il y a une
? '*•»> institution par égalité, un délaissement anticipe qui est subordonne
■. ii celte institution, et la condition formelle du rapport.
.
�. C« )
.
t
A u décès de son p è re , Gilberte Pannetier a pu retenir les biens
qui lui avoient été délaissés, sur le pied de leur valeur, à. dire ¿d’ex
perts , au lieu d’en faire leur rapport en nature ; m ais, d’une part,
elle n’a pu les retenir que comme héritière instituée, parce que
cette institution étoit le titre qui les lui avoit transmis ; d’autre p a rt,
elle n’a pu les retenir que jusqu’à concurrence du quart, parce que
«on titre s’opposoit à ce qu’elle recueillît une plus forte portion dans
la succession de son père.
’•
Cependant si on adoptait le système de la femme Cureyras qui la
représente, il s’ensuivroit, premièrement, qu’elle auroit retenu beau
coup plus que son quart, en gardant la m aison, les marchandises et
tous les autres objets portés par le contrat de mariage de sa m ère;
secondement, qü’elle reprendroit encore le domaine de Chavagnaü
qu’elle dit être aujourd’hui en valeur de 10,000 francs, de sorte
qu’elle réuniroit sur sa tête la très-majeure partie de la succession,
contre le texte formel de son contrat de mariage et le vœu de l’éga
lité , bien prononcé par l’auteur commun.
'
Ainsi elle est triplement non-recevable dans sa prétention.
" Non-recevable, parce qu’elle est plus que remplie du quart qui
étoit assuré ,à sa mère par son contrat de mariage.
. N on-recevable, parce qu’elle 11’a pu conserver les objets qui lui
avoient été délaissés, qu’au titre d’héritière instituée qui les lui avoit
p r o c u r é s , et q u ’à ce titre elle est tenue d’entretenir les faits de son père.
- N o n - r e c e v a b l e , enfin, parce que si elle parvenoit à ses fins, elle
ne p o u r r o i t recouvrer le domaine de Chavagnat que pour le rendre
à ses c o h é r i t i e r s , qui seroient eux-mêmes tenus de le rendre à 'l’ac
quéreur évincé.
'
A l’égard de la répudiation de Gilberte Pannetier à la succession
de son père, elle est absolument sans conséquence, puisqu’elle ne put
renoncer à cette succession sans renoncer à l’institution, et renoncer
à l’institution sans abandonner la totalité des biens qu’elle lui avoit
procurés.
•
(
î
y
.
�-
.
(
12
)
Seconde fin de non-receQoir, résultante de ce que Gilberte Pannetier
a recueilli des biens immeubles de la succession de son p ère, pour
sa portion de la réserve dont il avoit disposé à son profit par son
testaments
_
*
, :>
Cette seconde fin de non-recevoir n’a qu’un mot.
Les biens qu’a recueillis Gilberte Pannetier étoient incontestable
ment hypothéqués à la garantie promise à Chantereau, par le con
trat de 175 6 , et par suite au citoyen ;Qradoux-Vernignes , acquéreur
de Chantereau.
O r , le possesseur d’un immeuble hypothéqué à la garantie de?
l’acquéreur, ne peut être reçu à l’évincer, parce qu’il est garant hy
pothécairement de sa propre action, garantie qui a lieu pour le
to u t, et qui ne peut cesser que par l ’abandon des objets hypothé
qu és, quia hoc nomme tenetur in solidum , d it Valla , de rebus
dubiis. Chap. 9.
Il
importe peu de savoir si ces immeubles ont été délaissés , ou
n o n , avec garantie à Gilberte Pannetier, par ses frères et sœurs ; ce
n’est pas ce dont il s’agit pour le m om ent, parce que cela est indiffé
rent à l’acquéreur, qui n’a besoin pour repousser l’éviction dont il
est menacé , que du fait que celui qui le recherche a recueilli des
biens immeubles de son vendeur, qui sont, hypothéqués de droit à s»,
garantie.
L a femme Cureyras semble annoncer dans son mémoire, que ces hé
ritages sont aujourd’hui entre les mains de Charles Pannetier, l’un
des consultant.
M ais, premièrement, le fait est absolument faux-, le cit. Couchard
vendu tous ces biens au citoyen Collanges, d’E b reu il, qui en pos—
sède encore la majeure partie, et le surplus- est dans d’autres mains.Deuxièm em ent, ce fait seroit indifférent, parce que Couchard le*
ayant vendus, il importeroit peu que ce fût à Pannetier ou à tout autre.
Il
résulte au contraire deux conséquences décisives de ces ventes.
L a première, que la femme Cureyras ayant reçu le prix de ces
aliénations, elle est dans la môme position, respectivement à l’ac
quéreur, que si ccs héritages étoient dans ses mains.
�.
t.'13 )
L a seconde, qu’elle seroit aujourd’hui dans l’impossibilité de les
«déguerpir, quand ce déguerpissement pourroit l’affranchir de la
garantie qui la rend non-recevable dans sa recherche.
Troisièm e fin de non - recevoir, résultante de ce que Gilberte
Pannetier a accepté la continuation de com m unauté, pendant
laquelle le domaine de Cllavagnat a été acheté et revendu par
Léonard Pannetier.
Il
est certain dans le fait, que le domaine de Chavagnat a été
acheté par Léonard Pannetier, pendant la continuation de commu
n au té, puisque Gilberte Bauny est décédée en 1 749, et que ce
domaine a été acheté des héritiers Taillardat en 1753.
^
. Il est encore certain qu’il a été revendu pendant cette même com
munauté, puisque la revente à Cliantereau est de 1766, et que la con
tinuation de communauté n’a cessé qu’à la. mort de Léonard Pan
netier, arrivée en 1762.
Enfin, il, est prouvé par le partage d u . 20. o.çtobre 1762, que
Gilberte Pannetier a accepté cette continuation de cpmmunaulé, et
.qu’elle en a fait le partage avec ses frères et sœurs, en même temps
que de la succession maternelle..
,
O r, il.est difficile de concevoir comment.la représentante cle G il
berte Pannetier, qui a accepte cette continuation de communauté,
pourroit être admise à évincer un acquéreur, non pas seulement
d’un immeuble acquis et revendu: pendant cette continuation de
communauté, mais d’un im meuble, quel qu’il soit, vendu par le
chef de cette communauté.,
,
En acceptant cette communauté., Gilberte Pannetier s’en est rendu
personnelles toutes les actions actives et passives : il n’est pas ici
question de savoir jusqu’ou pourroit s’étendre sa garantie vis-à-vis
des tiers; si celte garantie pourroit s’étendre ultra vires , ou se borner
¿Vce qu’elle a recueilli dans cette continuation de communauté; mais
de savoir si elle est,fondée à s’élever contre .les faits du chef de la
communauté, qui l’ayant gérée à son g r é , l’a rendue avantageuse,
puisqu’elle n’a pas hésité à l’accepter.
< Cette question ne peut pas être considérée, sans doute, comme
�.
( i4 )
incertaine et assez àîfjlcultueuse, comme le sont celles discutées
dans les sept paragraphes du mémoire imprimé de la femme Cureyras;
elle est écrite dans tous les livres de jurisprudence qui ont -été écrits
sur cette matière, et particulièrement dans le commentaire d’A uroux
des Pommiers , sur la coutume de Bourbonnais , si souvent citée
par les appelans, tome I , article C C L X X , n°. 38, où il s’explique
en ces termes :
'
. « Mais ils ne peuvent pas la continuer en partie, et y renoncer
« en partie; par exemple, si le survivant avoit fait de grandes acqui« sitions dans les premières années après la mort du prédécédé, et
« qu’il eût fait de grandes pertes dans la suite, il n’est pas permis
« aux enfans d’accepter la continuation de la communauté pour le
« temps ; il faut qu’ils y renoncent tout à fa it, en arrêtant la commu*
« nauté au temps du décès du défunt prédécédé, ou s'ils acceptent
« la continuation (Ficelle} qtiils la prennent dans l'état quelle s est
« trouvée, quand elle a cessé de droit. »
'
« Il fau t, dit encore Bourgeon, D roit commun de la F rance,
« tome I , page 602 , qu’ils acceptent la continuation pour toute sa
« durée, ou qu’ils y renoncent absolument: la faculté de leur part de
k renoncer ou d’accepter, est généi*ale; et ce seroit aller au delà dé
« la lo i, que de diviser et s y n c o p e r c e tte même faculté. »
O r, ce seroit la diviser, la syncoper ; que de n’en adopter que
l’u tile, et d’en rejeter l’onéreux ; d’en recueillir les avantages, et de
se jouer impunément de tous les engagemens qu’a pu contracter,
pendant cette continuation, le chef de la société.
Cette prétention seroit trop absurde pour trouver des sectateurs;;
et quoique la femme Cureyras ait dénaturé toutes les questions, dans
son m ém oire, pour les rendre incertaines et difficullueuscs, elle
n’a pu se dissimuler que cette acceptation de la continuation de la
communauté, élevoit contre son action en éviction dirigée contre
le citoyen "Vernignes, une fin de n on -îecevoir insurmontable. On
voit dans le i'ésumé qui termine sa discussion, qu’elle est sans con
fiance dans le succès de sa prétention contre le citoyen Vernignes;
mais qu’en succombant contre l u i , elle prétend devoir du moins
obtenir contre les intimés la restitution dç lu valeur actuelle du
�(iS )
domaine de Chavagnat ; ce qui fera la matière d’une discussion par
ticulière.
E xam en de Taction subsidiaire exercée contre les intimés par la
je m m e Cureyras, en payement de la valeur actuelle du do main a
de Chavagnat.
Si les intimés n’avoient à opposer à la femme Cureyras que la .
seconde fin de non-recevoir, résultante de ce que Gilberte Pannetier
a recueilli dans la succession de son père, des biens immeubles, pour
son tiers de la réserve de 2,000 francs, elle trouveront du moins
un prétexte à cette prétention subsidiaire, dans la clause du partage,
par laquelle Charles Pannetier , Ma rie-Anne et Gilberte Pannetier
jeune ont garanti à Couchard et à sa femme les immeubles qu’ils s e .
sont fait délaisser pour cette réserve.
Si 011 cherche le motif de cette garantie^‘ on n’en trouve pas
d’autre, si ce n’est que c’étoit un majeur qui traitoit avec des mineurs,
et un praticien rusé qui se jouoit de l’ignorance et de la foiblesse
de ses beaux-frères et belles-sœurs, qui dirigeoit tout, et qui faisoit
le partage du lion.
Q u o i q u ’il en so it, cette garantie existe, et si toute la défense des
intim és se réduisoit à dire à la femme Cureyras, vous êtes non-recevable dans votre action , parce que vous en êtes garante hypothé
cairem ent à raison des biens immeubles q u i vous ont été délaissés
pour votre tiers de la réserve de 2,000 francs , elle pourroit répondre
avec qu elque apparence de fondement, que si ces immeubles écar
tent son action, elle a droit de s’en indemniser contr’e u x , par suite
de la clause de garantie qui en accompagne le délaissement.
Mais on a vu que l’action de la femme Cureyras est écartée par
bien d’autres moyens.
'
Par la qualité d’héritière instituée de Léonard Pannetier qui a
valu à sa mère la maison , les marchandises et l’argent, dont son
contrat de mariage constate la délivrance.
Par la circonstance que ses droits à cette succession, ne pouvant
jamais excéder le quart pour lequel elle étoit instituée, et étant plus
que remplie de ce quart par les biens qu’elle a retenus , toute réckÙiation lui est interdite.
�E nfin, par la circonstance décisive, qu’ayant accepté la continua
tion de communauté, elle n’a pu l’accepter qu’avec ses vices et vertus,
et que l’action en garantie du cit. Oradoux-Vernignes frappant spé
cialement sur cette continuation de communauté , puisque la vente
faite à Chantereau l’a été en 1756 , son action est repoussée par la fin
de non-recevoir la plus personnelle et la plus tranchante qu’il soit
possible de présenter à la justice.
A u surplus, les héritages délaissés à Gilberte Pannetier, pour la
remplir de sa portion dans cette continuation de communauté, n’ont
pas été garantis par ses cocommuns et cohéritiers, si ce n’est pour la
garantie de droit entre copartageans ; mais quand cette garantie seroit
stipulée, cela seroit indifférent, parce que ce n’est pas ici sur l’hypo
thèque qu’est fondée la fin de non -recevoir’, mais sur l’engagement
personnel résultant de l'acceptatïon de la continuation de la commu
nauté , qui ne permet pas d’en critiquer les opérations.
L ’action subsidiaire de la femme Cureyras, contre les intim és, en
payement de la valeur actuelle de ce domaine, ne doit donc être consi
dérée que comme l’invention d’une pratique obscure, imaginée pour
surcharger cette affaire, et faire perdre de vue le vrai point de la
contestation q u i , au lieu de présenter des questions nombreuses ,
incertaines et assez difficiles, se réduit à un petit nombre de notions
simples et certaines, tirées des principes les plus incontestables du
droit, et des r è g le s les plus sacrées de la justice.
D élibéré à Clerm ont-Ferrand, le 10 frimaire an 10.
BOIROT.
L e G ON SE IL SOUSSI GNE, qui a vu la présente consultation,
et le mémoire qui la précède, est entièrement du même avis. Il ne
seroit guère possible de rien ajouter aux moyens sur lesquels sont
établies les résolutions de cette consultation, et les fins de non-recevoir
contre les demandes de la femme Cureyras, doivent paroître irrésis
tibles. D élibéré à R io m , le. 11 frimaire an 10.
A N D R A U D,
A RIOM,
de
l’imprimerie d e L A N D R I O T ,
Tribunal d’appel. ’
GASCHON.
seul im prim eu r
du
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Pannetier, Charles. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Andraud
Gaschon
Subject
The topic of the resource
communautés de biens
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter, pour Charles Pannetier et ses consorts, intimés ; contre Anne Couchard et Pierre Cureyras son mari, appelans ; en présence d'Oradoux-Vernignes, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1755-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0143
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0142
BCU_Factums_G1124
BCU_Factums_G1123
BCU_Factums_G1125
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53684/BCU_Factums_M0143.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Plauzat (63282)
Ebreuil (03107)
Chavagnat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Communautés de biens
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53152/BCU_Factums_G1124.pdf
e4c5471b413da88efa8da3f4ef7b1e0b
PDF Text
Text
M E M O I R E
A
POUR
C harles
k litia
r *
C O N S U L T E R ,
PAN N ETIER et ses consorts, intimés;/W«’
C O N T R E A n n e C O U C H A R D et P i e r r e CU REYRAS.
son mari appelans ;
,
En présence d’ O R A D O U X -V E R N IG N E S , aussi intimé.
F A I T S .
D
U mariage de L éo n a rd Pannetier avec G ilberte B a u n y , sont
issus quatre enfans ,
G ilb erte, première du n om , C h arles, M a rie -A n n e , et G ilberte
jeune.
G ilberte Bauny est décédée en 1749 ; il y avoit communauté de
biens entr’elle et son m a r i,f aux termes de leur contrat de mariage
et de la coutume locale d’Ebreuil , où ils faisoient leur habitation.
Cette communauté a été continuée jusqu’au décès de L éon ard
Pannetier, arrivé en 1762.
Pendant la continuation de cette communauté , et le 8 août 1 7 53 ,
Léonard Pannetier avoit acquis d’A n toin e T aillard at , prêtre, et de
Pétronille B a ra tier, veuve de François Taillardat , un petit domaine
appelé de C havagn at, situé sur les hauteurs d’E b reu il, moyennant
la somme de 100 francs.de rente au principal de 2,000 francs.
L e 1 5 .avril 1 7 55 , Léonard Pannetier maria G ilberte Pannetier
sa fille aînée, avec Jean-Baptiste C ou ch ard qui é toit notaire à E b reu il,
et procureur dans toutes les justices des environs.
G ilberte Pannetier se constitue les biens qui lui sont échus par
le décès de G ilberte Banny sa m è re , du consentement de son père
qui s’eu réserve l’usufruit.
A
o
�'S o n père l ’institue en même temps son héritière universelle de
tous les biens meubles et im meubles , dont il m ourra vêtu et s a is i,
• conjointem ent et p a r égale portion avec ses autres erifans, fr è r e s
et sœurs ger/nains de ladite f u t u r e , sous la réserve de la somme
de 2,000 francs, pour en disposer îi sa volonté.
E t cependant, est-il ajou té, en attendant sa fu tu r e su ccessio n , il
donne et délaisse ren avancement d’hoirie et constitution de d o t, une
maison située à E b r e u il, les draperies et autres marchandises étant
actuellement en sa b outiq ue, pour le p rix et somme qu’elles lui
avoient coûté , dont il seroit fait état et inventaire lors de la déli
vrance d’icelles ; p lu s , une partie de jardin dont la contenue et les
confins sont en blanc.
« Plus , le domaine de Chavagnat aiidit lieu et paroisse d’E b reu il,
« avec toutes ses dépendances, garni de ses bestiaux actuels, sur le
« pied du cheptel , et ainsi et de même que ledit sieur Pannetier
et l’a acquis d’A n toin e T a illa rd a t, prêtre , curé de Bussière, et
« autres, à la charge de 100 fr. de rente annuelle auxdits vendeurs,
« au principal de 2,000 francs, suivant le contrat du 8 avi’il 175 3 ;
k à la charge par ladite future et ledit fu tu r, d’acquitter à l ’avenir
« auxdits vendeurs ladite rente de 100 francs, et les cens auxquels
« ledit domaine peut être assujéti, etc. »
D e plus, Xiéonard Pannetier promet: payer à la future, et pour elle
au fu tu r , la somme de 2Ôo francs dans les termes convenus.
« Tous lesquels susdits fonds , sommes et marchandises ou la
.« valeur d’icelles, en ces présentes, seront rapportés par ladite future
« venant h. partage, avec ses susdits frères et sœurs, des successions
« de sesdits père et m ère, ou retenir ice u x , si ainsi est convenu ?
« ;\ dire d’experts ».
Il n’est pas indifférent d’observer que tous ces b ie n s, meubles et
im m eubles, délaissés ainsi provisoirem ent par Pannetier ù sa fille
et h son gendre, étoient en totalité des effets de la com m unauté, ou
plutôt de la continuation de la communauté d’entre Léonard P a n neticr et G ilberte Bauny.
L e citoyen Couchard s’aperçut bientôt que la jouissance du domaine
de Chavagnat lui étoit plus onéreuse qu’ utile \ il se proposoit d’ail-
�( 3 )
< £ .»
•
leurs de s’établir à G an n at, pour y exercer sur un plus grand théâtre
ses talens pour la pratique; il chercha donc à se défaire de ce domaine.
L e nommé Chantereau se présenta pour prendre son lieu et place ;
mais soit que Couchard fût encore m in eu r, n’étant à l’époque de
son mariage que majeur de coutum e, soit qu’il ne présentât pas une
solvabilité suffisante aux yeux de Chantereau, soit enfin qu’on con
sidérât encore Pannetier comme étant le vrai propriétaire de ce
dom aine, ne l ’ayant délaissé à sa fille et à son gendre qu’en jouis
sance, et à la charge du rapport, Chantereau ne voulut avoir à faire
qu’à Léonard Pannetier.
Ce fut donc Léon ard Pannetier q u i, le 28 mars 176 6 , onze mois
et quelques jours après le m ariage, subrogea Chantereau au contrat
d ’acquisition ou bail à rente de 17 6 3 , sans autre charge que de payer
la rente de 100 francs aux premiers vendeurs.
M ais com m e cette subrogation étoit faite, non seulement du con
sentement de C o u c h a r d , mais à sa sollicitation, il a paru à cet acte
p o u r y donner son acquiescement en ces termes :
« E n présence et du consentement de M e. Jean -B ap tiste C ou« chard, notaire ro yal, demeurant en cette ville d’E b r e u il, qui se
« départ des droits qu’il pouvoit avoir sur ledit domaine de Cha« vagnat ci-dessus v e n d u , sans préjudice à la constitution de dot
« portée par son contrat de m ariage, et autres droits résultans d’ice« l u i , qui a aussi signé , etc. »
H n’est pas ixisoin de rem arquer que ces réserves ne portoient
que sur les autres objets du contrat de m ariage, et non sur ce domaine
de C h a va gn a t, sans quoi c’eût été une subtilité perfide de la part
du praticien C o u c h a rd , mais heureusemenL sans conséquence, parce
q u ’ il est de p rin cipe que les réserves faites dans un acte sont sans
effet, toutes les fois q u ’elles sont contraires à l ’essence m êm e de l’acte,
et qu ’elles tendent à le détruire.
Quoi qu’il en so it, Couchard ainsi débarrassé de ce domaine , alla
s’ établir à Gannat, où il a continué d’y exercer les fonctions de notaire
et de procureur.
Léonard Pannetier étant tombé malade au mois de juin 176 2,
Couchard se rendit auprès de lu i, cl profitant d e l’absence de Charles
A 2
�P an n etier, seul mâle d e là famille auquel étoit destinée la réserve de
2,000 francs, il parvint à lui faire faire un testament par lequel il lui
fit disposer de cette réserve de 2,000 fr. au prolit de sa femme et
de ses deux belles-sœurs qu’il ne put pas exclure parce qu’elles
étoient présenles.
A it décès de Léonard Pan n etier, Charles Panhetier et ses sœurs
-étoient encore m ineurs; on les fit ém anciper; on leur fit nommer
u n curateur. C ouch ard , praticien retors, abusa de ces circonstances
pour s’attribuer tout ce qu’il y -aV,oit de bon et de précieux dans la
succession, et il y joignit une astuce qui a servi de germ e au procès
'qui divise aujourd’hui les parties.
Son prem ier tour d’adresse fut de faire renoncer sa femme à la
succession de son p è re, pour s’en tenir ¿ice qui lui avoit été délaissé
par son contrat de m ariage, quoique rinstitution par égalité et le
'délaissement fussent indivisibles ; que la condition de l’institution et
du délaissement fût q u ’il en seroit fait rapport h la succession des
père et mère com m uns, et que dès lors G ilberte Pannetier ne fut
pas la maîtresse de renoncer à la succession <le son p ère, à moins
q u ’elle ne fit l’abandon des objets délaissés.
L e second lour d’adresse fut de faire approuver par Charles Panîietier, m ineur, le testament portant disposition de la réserve, quoi
qu’il fût vicié de la nullité la plus absolue, par le défaut de signature
de Léonard Pannetier, qui n’avoit pu tracer, et encore d’une manière
inform e, que trois lettres de son n om , au lieu de neuf dont il étoit
•compose.
L e troisième tour d’adresse fut de se faire délaisser pour son tiers
<le ces 2,000 francs, des héritages précieux qui valoient alors quatre
fo is , et qui valent aujourd’hui dix fois le tiers de ces 2,000 francs.
L e quatrième four d’adresse fut de séparer les successions de
Léonard Pannetier et de G ilberle Bauny, tandis que, par une clause
expresse du contrat de m ariage, G ilberte Pannetier ne pouvoit se
dispenser de faire le rapport des objets qui lui avoient été délaissés par
■son père, au partage des successions <ic se,? père et îïière, avec d’au
tant plus de-,raison que tous les objets délaissés étoient les effets de
la coiiunuijaülé ou continuation de communauté.
�( 5 )
Cinquièm e tour d’adresse. Couchard se fait encore délaisser, pour
sa portion dans la succession m aternelle, communauté et continua
tion de com m unauté, des fonds p récieu x, et d’une valeur bien des
fois supérieure à ses droils.
Sixièm e tour d’adresse. Il force encore ses beaux-frères et bellessœurs à traiter avec l u i , pour une prétendue parcelle de jardin énoncée
dans son contrat de m ariage, sans confins ni contenue, et dont l’exis
tence étoit inconnue de toutes les parties.
E t eriiin, pour septième tour d’adresse, il prend occasion de ce
q u ’on ne découvre pas la propriété de ce ja rd in , pour se faire des
réserves des droits qui peuvent résulter de son contrat de m ariage;
réserves qui 11e sont relatives qu’à la propriété de ce ja rd in , dans
le cas où il viendroit à se d é c o u v rir, et qu’on a soin de présenter
astucieusement dans le m ém oire im prim é auquel on rép on d, comme
des réserves gén érales, pour faire croire que Coucliard se préparoit
dès lors un retour sur le domaine de Chavagnat.
Il étoit facile à Coucliard , praticien consommé , d’abuser de la
m inorité, de la foiblesse et de l ’inexpérience des trois mineurs P an netier. Ceux-ci auroient p u , à leur m ajorité, revenir sur le partage
fait en 1762, sur la nullité du testament; sur le défaut de rapport,
de la part de Couchard, de tous les biens meubles et immeubles qui
avoient été délaissés à sa fem m e, en attendant le partage des succes
sions des père et m ère com m uns; sur la lésion énorme de toutes
les opérations portées par cet acte : mais ils préférèrent leur repos
aux tribulations d’un procès; et les parties ont ainsi v é c u , jusqu’à
la naissance de cette contestation, qui a eu lieu au mois de vendé
m iaire an 4 *
Pendant cet intervalle, Chantereau, qui avoit pris la subrogation
du bail à rente du domaine de C havagnat, en 17^6, s’y étoit ru in é,
soit en y faisant des constructions, soit en y faisant des améliorations
que l’ ingratitude du sol avoit rendues infructiieuses.
11 fut forcé , en l’année 1 7 7 1 , de vendre au citoyen O radouxV ern ign es, non seulement ce domaine et toutes les améliorations
qu’il y avoit faites, mais tous les autres biens qu’ il avoit à Ebreuil.
O u voit daijs le contrat, que le p rix du celLc vente, y compris
A 3
�.
.
(
6
)
scs autres biens d’E b reu il, est de la somme de 5,ooo francs; que le
citoyen Vernignes en retint 2,000 francs pour la rente, et que le
surplus fut em ployé à l’acquittement des dettes du vendeur.
L e citoyen V ern ign es, devenu acquéreur de ce b ien , y a fait des
constructions considérables, des réunions et des améliorations de tout
gen re; il a alors excité la cupidité du citoyen C ouchard, de sa fille
et de son gen d re, qui ont cru trouver un prétexte dans le contrat
de mariage de i j 55 , pour réclam er la propriété de ce domaine.
Ils ont fait assigner le citoyen Vernignes en désistement, au mois
de véndém iaire an 4.
L e citoyen Vernignes a dénoncé cette demande à Charles P an netier et aux enfans de M arie-A n n e et de G ilberte Pannetier, seconde
du nom.
C e u x -c i ont pris le fait et cause du citoyen Vernignes.
L a contestation a été portée au tribunal civil du département de
l ’A llie r , où après une ample discussion et des mémoires respectifs
fournis par les parties, il est intervenu jugement contradictoire, le
22 germinal an 6 , qui est conçu en ces termes :
et C onsidérant, dans le d ro it, que celui qui se porte héritier d’un
« d éfu n t, est tenu de ses faits, et doit exécuter ses engagemens ;
« qu’on ne peut être garant de sa propre action, sans être non« recevable à la form er;
« Considérant, dans le fait, que par le contrat de mariage de
« G ilberte Pannetier avec Jean-Baptiste Couchard, L é o n a rd , son
« p ère, l’avoit instituée héritière par égale portion avec ses autres
« enfans; que le délaissement qu’ il lui avoit fait d’une maison et un
« jardin sis en la commune d’E b re u il, d’une boutique et des m ar« chandiscs qui la garnissoient, ensemble du domaine de C havagnat,
« ne l’a été qu’en avancement d’h o irie, et en attendant sa future
« succession, et à la ch arge, en outre, d’en faire le rapport en ve~
« nant à partage, ou de les conserver, à dire d’experts, si ainsi,
a étoit convenu entre les cohéritiers; ce qui 11c présente l’abandon
« que d’une simple jouissance qui étoit donnée à Jean -B ap tiste
« Couchard, pour l’aide-r à supporter les charges de la com m unauté,
« et uou de la propriété absoluej
�et Considérant que cet abandon n’étoit que p ro v iso ire, et fait
« en attendant la succession de Léonard Pannetier ; qu’à l’époque
« de son ouverture , qui est celle seule où les droits des enfans à
c< la p ro p rié té , se sont réalisés, les objets alors existons de l’avantc cernent d’h o irie , constitués au profit de G ilberte P an n etier, se
« trouvoient confondus, de manière que la m ère de la demande« resse, nonobstant sa renonciation, n’a pu les conserver qu’à titre1
cc d’héritière dudit Pannetier ; que sous ce ra p p o rt, elle est
a n on-recevable à attaquer la subrogation consentie au profit de
« Chantereau, le 28 mars l y ô ô , du domaine de C havagnat, avec
« d’autant plus de raison que le tiers des 2,000 francs, qui revenoit
« à ladite G ilberte Pannetier, en vertu du testament de son p è r e ,
« ayant été reçu par elle , en immeubles provenans de sa succes« sion, et étant affectés de droit à son exécution, elle est elle-même
c« garante hypothécaire de l’action qu’elle a exercée ;
« Considérant que la demanderesse ayant accepté la continuation
g de com m unauté, et partagé les objets en dépendans , il en résulte
c qu’elle est non-recevable à attaquer une vente qui a été faite pen
te dant la continuation de ladite communauté ;
« Considérant enfin que le domaine de Chavagnat a été cédé à
h Chantereau aux: mêmes ch arges, clauses et conditions qu’il avoit
c< été acquis par Léonard Pannetier ; et étant prouvé par les cirt< constances du fait, que ce domaine étoit plus à charge qu’à profit,
te et qu’il n’étoit entré pour rien dans l’avancement d’hoirie fait ¿\
a ladite G ilberte P an n etier, il en i-ésulte que la demande form ée
a par sa fille, n’est fondée sur aucune espèce d’intérêts.
« L e tribunal, jugeant en prem ier ressort , déclare la demanderesse,
« partie de Bellaigue, non-recevable dans sa dem ande; renvoie de
« l’effet d’icelle le défendeur originaire; par suite, renvoie les défen
te deurs sommés de celle en recours et garantie dirigée contr’eux ,
u et condamne la partie de B ellaigue, aux dépens envers toutes les
« parties, liquidés à , etc. »
Cureyras et sa femme sont appclans de cc jugement : mais peu
confians dans le succès de leur appel , ils ont formé une demande
Cüutrc Charles J?umielkT; et contre les représentons de M arie-A n ue
A 4
�WsV
( 8 )
P an n etier, tendante à ce que dans le cas où ils ne parviendroient
pas à obtenir contre le citoyen Vernignes le désistement du domaine
de Chavagnat, ledit Ghaxies Pannetier et ses neveux çt nièces soient
tenus de leur en payer la valeur.
T e l est le résultat d’un m ém oire im prim é, répandu par Cureyras
et sa fem m e, où après avoir présenté cette affaire comme donnant lieu
à des questions nom breuses, incertaines et assez d ifficiles, et les
avoir discutéos en sept paragraphes, ils terminent en ces tei’mes ;
« A u résumé : ou nous ferons infirmer la sentence dont est ap p el,
* vis-à-vis le citoyen V ernignes, et nous aurons le domaine de Cha« vagnat : ou cette sentence sera maintenue à l’égard du citoyen
« V ern ign es; mais alors elle doit être réform ée respectivement aux
« héritiers Pannetier ; ils doivent ôtre condamnés à faire désister lo
« citoyen V ern ig n es, ou à nous payer la valeur présente de ce
« domaine. Sous ces deux faces, notre demande est légitim e ; elle
« l’est nécessairement sous l’une au moins, Nous devons y avoir toute
« confiance »,
. Charles Pannetier et ses consorts demandent au consoil si en effet
la demande de Cureyras et de sa femme est légitime sous les deux
f a c e s , ou si elle îe s t nécessairem ent sous l'une au m oin s, de m anière
à ce qu’ils doivent nécessairem ent obtenir ou lo domaine de Chi\yagnat ou sa valeur,
L E S O U S S I G N É , qui a v u et examiné le m ém oire à con
sulter pour Charles Pannetier et consorts, ensemble les titres, pièces
et procédures, et le m ém oire im prim é d’A n n e Couchard et Pierre'
Cureyras ;
E s t i m e qu’il a été bien jugé par le jugement du tribunal civil*
du département d’A llie r , du 22 germ inal an 6 , et que Cureyras et
sa femme sont également non-recevables et mal fondés, soit dans
leur demande en .désistement du domaine do Chavagnat contre-le*
citoyen Oradoux - V e rn ig n e s, soit dans leur demande subsidiaire ,
récemment form ée contre Charles Pannetior et consorts, en paye
ment de la valeur de ce dom aine, dans lo cas où ils ne parviendroient'
pas à en obtenir, le désistement contre le citoyen Oradoux-Vernignes.-'
�(9)
A u lien de ces questions n o m b reu ses, incertaines et très-drfficu ltu eu ses, que Cureyras et sa femme croient trouver dans celte
a ffaire, et qu’ils discutent en sept paragraphes, elle se réduit ù trois
fins de n o n -recevo ir, qui ne présentent que des notions sim ples, et
qui n’exigent qu’une brève discussion.
Prem ièrem ent, fin de non-recevoir, résultante de la qualité d’héri
tière de son père dans la personne de G ilberte Pannetier, et de la né
cessité du rapport.
Secondement, fin de non recevoir, résultante de ce qu’elle a recueilli
des biens immeubles de cette succession pour sa portion de la réserve.
Troisièm em ent, fin de non recevoir, résultante de ce qu’elle a accepté
la continuation de la com m unauté, pendant laquelle le domaine de
Chavagnat a été acheté et revendu par Léonai'd Pannetier.
A v a n t d’entrer dans la discussion de ces trois fins de non -recevoir,
il n’est pas indifférent de rappeler le fait qui a donné lieu h cette
contestation i et de se form er une idée juste de ce qu’on peut appeler
la m oralité de cette affaire.
L a femme Cureyras se plaint de ce que Léonard P an n etier, son
a ïe u l, a aliéné h Chantereau, en i y 56 , le domaine de C havagnat,
qui avoit été délaissé à sa m ère par son contrat de mariage.
M ais il est dém ontré que Léonard Pannetier n’a fait en cela qu’un
acte de complaisance pour sa fille et son gendre,
Couchard étoit chargé de la rente de io o f r . envers les premier*
ven d eurs, et de payer les cens et les impôts : Léonard Pannetier
n ’avoit donc rien à perdre en laissant les choses dans l’état où elles
étoient d’npvès le contrat de m ariage de i j ô S .
Il n’avoit rien à gagner en aliénant ce dom aine, puisqu’ il l ’a céd é
h Chantereau-, au x mômes conditions q u ’il l’ovoit acquis des héritiers
T a illa rd n t, e t 'q u ’ il l ’avoit délaissé à sa fille et à son gendre.
Ce n’est donc pas pour lui qu'il a fait cette aliénation, tnais poufr
e u x ; il l’a laite, en présence et du consentement du cit. C ouchard
qui a signé l’acte; il s’est prôté <\ les débarrasser de cette propriété
qui leur devenoit onéreuse, parce que les charges'on ubsorboieut lo
produit ^ ot qui leur scroit devenue plùs onéreuse encore, d’aprè*
leu r projet de s’éloigner des lie u x , et de se fixer à Gannat.
�>
h ¿ ‘/S i
( 10 )
A in si, le résultat de la prétention de la femme Cureyras tend à
punir Léonard Pannetier, dans la personne de ses descendans, de la
complaisance qu’il eut alors pour eu x , et d’avoir ajouté ce bon procédé
aux bienfaits dont il avoit déjà com blé sa fille et son gendre.
M ais heureusement tous les principes s’élèvent contre cette odieuse
rech erch e, et se réunissent pour repousser l’appel que Cureyras et
sa femme ont interjeté du jugement qui l’a proscrite.
P rem ière Ji/i de n on -receçoir, résultante de la q u a lité cohéritière
de son p èr e, dans la personne de Gilberte P a n n e tie r, et de la
nécessité du rapport.
Léon ard Pannetier institue G ilberte Pannetier son h éritière, con
jo in tem en t et p a r égale portion avec ses autres enfuns , qui étoient
au nombre de quatre, sous la réserve de 2,000 fr.
E t cependant en attendant sa future su ccessio n , il lui délaisse
en avancement d’hoirie et constitution de dot diflerens objets m obi
liers et im m obiliers, avec clause que tous ces objets seront rapportés
par ladite future venant à partage des successions de ses père et m ère,
ou retenus, si ainsi est con ven u, à dire d’experts.
Il résulte de cette clause, prem ièrem ent, que Léonard Pannetier
a voulu assurer à sa fille un quart de sa succession, ayant quatre enfans,
mais qu’il n’a rien voulu lui donner au delà.
Secondement^ que c’est à ce titre d ’héritière instituée p o u r un
q u a rt, et en avancement de cette institution, qu ’ il lui a fait le délais
sement des biens énoncés dans son contrat de mariage.
T ro isiè m e m e n t, q u ’ il a imposé p o u r condition à ce délaissement,
q u ’elle en feroit le rapport en nature ou en v a le u r , à dire d’experts.
O n ne peut pas appliquer à l’espèce l’article CCCVLL de la cou
tume de Paris, qui porte que « où celui auquel on auroit don né,
a .se voudroit tenir à son d o n , faire le p eu t, eu s’abstenant de l’héc réd ité, la légitim e réservée aux autres. »
Cette loi suppose un don pur et sim ple, une constitution de d o t,
ou un avancement d’hoirie sans condition , tandis qu'ici il y a une
institution par égalité, im délaissement anticipé qui est subordonné
7
0
j
à cette institution, et lu condition form elle du rapport,
�X
( ii )
¿>3 «
A u décès de son p è r e , G ilberte Pannetier a pu retenir les biens
qui lui avoient été délaissés, sur le pied de leur va leu r, à dire d’ex
perts, au lieu d’en faire leur rapport en nature-, m ais, d’une p a rt,’
elle n’a pu les retenir que comme héritière instituée, parce que
cette institution étoit le titre qui les lui avoit transmis ; d’autre p a r t,
elle n’a pu les retenir que jusqu’à concurrence du q u art, parce que
son titre s’opposoit à ce qu’elle recueillît une plus forte portion dans
la succession de son père.
Cependant si on adoptoit le système de la femme Cureyras qui la
représente, il s’ensuivi'oit, prem ièrem ent, qu’elle auroit retenu beau-»
coup plus que son quart, en gardant la maison , les marchandises et
tous les autres objets portés par le contrat de mariage de sa m ère;,
secondem ent, qu’elle reprendroit encore le domaine de Chavagnat
qu’elle dit être aujourd’hui en valeur de 10,000 francs, de sorte
q u’elle réuniroit sur sa tête la très-majeure partie de la succession ,
contre le texte form el de son contx*at de mariage et le vœu de l’éga-*
lité , bien prononcé par l’auteur commun.
A in si elle est triplement non-recevable dans sa prétention.
N on-recevable, parce qu’elle est plus que rem plie du quart qui
étoit assuré à sa m ère par son contrat de mariage.
N on -recevable, parce qu’elle n’a pu conserver les objets qui lui
avoient été délaissés, qu’au titre d’héritière instituée qui les lui avoit
procurés, et qu’à ce titre elle est tenue d’entretenir les faits de son père.
N on-recevable, enfin, parce que si elle parvenoit à ses fins, elle
ne pourroit recouvrer le domaine de Chavagnat que pour le rendre
h ses cohéritiers, qui seroient eux-m êm es tenus de le rendre à l’ac
quéreur évincé.
A l’égard de la répudiation de G ilberte Pannetier à la succession
de son p ère, elle est absolument sans conséquence, puisqu’elle ne put
renoncer à cette succession sans renoncer à l’institution, et renoncer
à l’institution sans abandonner la totalité des biens qu’elle lui avoit;
procurés.
I
«
�('l'bX
( * 0
Seconde j î n âe non-recevoir, résultante de ce que Gilberte P a n n etier
a recueilli des biens im m eubles de la succession de so?i p è r e , pojtr
sa portion de la réserve dont il a çoit disposé à s on profit p ar son
testament.
Cette seconde fin de non-recevoîr n’a qu’un mot.
L es Liens qu’a recueillis G ilberte Pannetier étoient incontestable
ment hypothéqués ci la garantie promise à Chantereau, par le con
trat de 17 5 6 , et par suite au citoyen O radou x-V ern ignes, acquéreur
de Chantereau.
O r , le possesseur d’un immeuble hypothéqué à la garantie de
l ’acquéreur, ne peut être reçu à l’évin cer, paxxe qü’il est garant hy
pothécairem ent de sa propre action , garantie qui a lieu pour le
t o u t , et qui ne peut cesser que par l’abandon des objets hypothé
qués , qu ia hoc nom ine tenetur in s o lid u m , dit V alla , de rebus
dubiis. Chap. 9.
Il im porte peu de savoir si ces immeubles ont été délaissés , ou
n o n , avec garantie h G ilberte Pannetier, par ses frères et sœurs; ce
n’est pas ce dont il s’agit pour le m om en t, parce que cela est indiffé
rent A l’acq u éreu r, qui n’a besoin pour repousser l’éviction dont il
est menacé , que du fait que celui qui le recherche a recueilli des
biens immeubles de son vendeur, qui sont hypothéqués de droit à sa
garantie.
L a femme Cureyras semble annoncer dans son m ém oire, que ces hé
ritages sont aujourd’hui entre les mains de Charles P an netier, l’un
des consultans.
M ais, prem ièrem ent, le fait est absolument faux; le cit. Couchard
a vendu tous ces biens au citoyen Collanges, d’E b re u il, qui en pos
sède encore la majeure partie, et le surplus est dans d’autres mains.
D euxièm em ent, ce fait seroit indifférent, parce que Couchard les
ayant vendus, il im porteroit peu que ce fût h Pannetier ou à tout autre.
II résulte au contraire deux conséquences décisives de ces ventes.
I>a p rem ière, que la femme Cureyras ayant reçu le p rix de ces
aliénations, elle est dans la même position, respectivement
l’ac
q u éreu r, que si ces héritages étoient dans ses ciains.
�( 13 )
L a seconde, cju’ellc seroit aujourd’hui dans l’impossibilité de les
-déguerpir, quand ce déguerpissement pourroit l’afTranchir de la
•garantie qui la. rend non-recevable dans sa recherche.
T roisièm e -fin de non - recev o ir, résultante de ce que Gilberte
P a n n etier cl accepté la continuation de com m unauté, pendant
laquelle le dom aine de Chavagnat a été a cheté et revendu p a r
L éo n a rd P a n netier.
•..
.
v
j
t
Il est certain dans le fa it, que le domaine de Cliavagnat a été
acheté par Léonard P an n etier, pendant la continuation de commu
n a u té , puisque G ilberte Bnuny est décédée en 1 7 4 9 , et que ce
•domaine a été acheté des héritiers Taillardat en 1753.
Il est encore certain qu’il-a été l’evendu pendant cette même com .m unaulé, puisque la revente à Chantereau est de 1 7 56 , et que la con
tinuation de communauté n’a cessé qu’à la m ort de Léon ard P an n elier, arrivée en 1762.
E n fin , il est prouvé par le partage du 20 octobre 176 2 , que
Gilberte Pannetier a accepté cette continuation de com m unauté, et
qu’elle en a fait le partage avec ses frères et sœurs, en même temps
que de la succession maternelle.
O r , il est difficile de concevoir comment la représentante de G il
berte P an n etier, qui a accepté cette continuation de com m unauté,
pourroit êLre admise à évincer un acquéreur, non pas seulement
.d’un immeuble acquis et revendu pendant cette continuation do
com m unauté, mais d’un im m euble, quel qu’il so it, vendu par le
c h e f de cette communauté.
E n acceptant cette com m unauté, G ilberte Pannetier s’en est rendu
personnelles toutes les actions actives et passives : il n’est pas ici
¡question de savoir jusqu’où pourroit s’étendre sa garantie vis-à-vis
•des tiers; si cette garantie pourroit s’étendre ul/ra v ir e s, ou se borner
à ce qu’elle a recueilli dans celle continuation de communauté-, mais
-desavoir si elle est fondée à s’élever contre les faits du chef de la
«communauté f qui l’ayant'gérée à son g r é , l’a rendue avantageuse,
^puisqu'elle n’a pas hésité à l’accepter.
Cette question ne peut pas être considérée., sans doute, ccm m e
�(3
(y b
' k
( H )
incertaine et assez d ifjicid tu eu se, comme le sont celles discutées
dans les sept paragraphes du m ém oire im prim é de la femme Cureyras;
elle est écrite dans tous les livres de jurisprudence qui ont été écrits
sur cette m atière, et particulièrement dans le commentaire d’A u ro u x
des Pom miers , sur la coutume de Bourbonnais , si souvent citée
par les appelans, tome I , article G C L X X , n°. 38, où il s’explique
en ces termes :
« M ais ils ne peuvent pas la continuer en p a rtie , et y renoncer
« en partie; par exem ple, si le survivant a voit fait de grandes acqui« sitions dans les premières années après la m ort du p réd écé d é, et
'« qu’il eût fait de grandes pertes dans la suite, il n’est pas permis
a aux enfans d’accepter la continuation de la communauté pour le
« temps ; il faut qu’ils y renoncent tout à f a it, en arrêtant la commu« nauté au temps du décès du défunt prédécédé, ou s'ils acceptent
« la continuation iVicelle, qu'ils la prennent dans Yétat q u elle s est
t< trouvée, quand elle a cessé de droit. »
« Il fa u t, dit encore B o u rgeo n , D ro it commun de la F ran ce,
« tome I , page 602 , qu’ils acceptent la continuation pour toute sa
« durée, ou qu’ils y renoncent absolum ent: la faculté de leur part de
« renoncer ou d’accepter, est générale; et ce seroit aller au delà de
« la lo i, que de diviser et syncoper cette même iuculté. »
O r , ce seroit la d iv iser, la syncoper, que dé n’en adopter que
l ’u tile , et d’en rejeter l’o n éreu x; d’en recueillir les avantages, et de
se jouer impunément de tous les engagemens qu’a pu contracter,
pendant cette continuation, le chef de la société.
Celte prétention seroit trop absurde pour trouver des sectateurs;
et quoique la femme Cureyras ait dénaturé toutes les questions, dans
son m ém o ire , pour les rendre incertaines et d ifficultu euses, elle
11’a pu se dissimuler que celte acceptation de la continuation de la
com m unauté, élevoit contre son action en éviction dirigée contre
le citoyen
Verni<rnes,
*
O
' une fin de n o n -recev o ir insurmontable. O11
voit dans le résumé qui termine sa discussion , qu’elle est sans conliancc dans le succès de sa prétention contre le citoyen V ern ign es;
mais qu’en succombant contre l u i , elle prétend devoir du moins
obtenir contre les intimés la restitution de lu valeur actuelle du
�( i5 )
domaine de Chavagnat; ce qui fera la matière d’une discussion par
ticulière.
E x a m e n de fa ctio n subsidiaire exercée contre les intim és par la
fe m m e C u rey ra s, en payem ent de la valeur actuelle du domaina
de Chavagnat.
Si les intimés n’avoient à opposer à la femme Cureyras que la
seconde fin de n o n -recevo ir, résultante de ce que G ilberte Pannetier
a recueilli dans la succession de son p è re, des Liens immeuLles, pour
son tiers de la réserve de 2,000 fran cs, elle trouveroit du moins
un prétexte à cette prétention suLsidiaire, dans la clause du partage,
par laquelle Charles P a n n etier, M arie-A n n e et G ilberte Pannetier
jeune ont garanti à Couchard et à sa femme les immeubles qu’ils se
sont fait délaisser pour cette réserve.
Si on cherche le m otif de cette g aran tie, on n’en trouve pas
d’autre, si ce n’est que c’étoit un majeur qui traitoit avec des m ineurs,
et un praticien rusé qui se jouoit de l’ignorance et de la foiblesse
de ses Leaux-frères et Lelles-sœ urs, qui dirigeoit to u t, et qui faisoit
le partage du lion.
Q uoi qu’ il en s oi t , cette garantie existe, et si toute la défense des
intimés se réduisoit à dire à la femme Cureyras, vous êtes non-recevaLle dans votre action , parce que vous en êtes garante hypothé
cairement à raison des Liens immeuLles qui vous ont été délaissés
p o u r votre tiers de la réserve de 2,000 fran cs, elle pourroit répondre
avec quelque apparence de fondement , que si ces immeuLles écar
tent son action , elle a droit de s’en indemniser contr’e u x , par suite
de la clause de garantie qui en accompagne le délaissement.
Mais on a vu que l’action de la femme Cureyras est écartée par
bien d’autres moyens.
Par la qualité d'héritière instituée de Léonard Pannetier qui a
valu à sa m ère la maison , les marchandises et l’a rg e n t, dont sou
contrat de mariage constate la délivrance.
P ar la circonstance que ses droits à cette succession, ne pouvant
jamais excéder le quart pour lequel elle étoit instituée, et étant plus
que remplie de ce quart par les biens qu’elle a retenus, toute récla
mation lui est interdite.
�W'
i O bi
6
(1 6 )
E n fin , par la circonstance d é c isiv e , q u ’ayant accepté la continua
tion de com m unauté, elle n’a pu l’accepter q u ’avec ses vices et vertus,
et que l ’action en garantie du cit. O ra d o u x -V e rn ig n e s frappant spé
cialement sur cette continuation de com m unauté , puisque la vente
faite à Chantereau l’a été en 1 7 56 , son action est repoussée par la fin
de n o n -recevoir la plus, personnelle et la plus tranchante qu ’il soit
possible de présenter à la justice.
A u su rplu s, les héritages délaissés à G ilberte P a n n e tie r, p o u r la
rem p lir de sa portion dans cette continuation de com m u n au té, n ’ont
pas été garantis par ses cocommuns et cohéritiers, si ce n ’est p o u r la
garantie de droit entre c opartageans ; mais quand cette garantie seroit
stip u lée, cela seroit indifférent, parce que ce n'est pas ici sur l’hypo
thèque q u ’est fondée la fin de n o n - r e c e v o i r , mais sur l’engagement
personnel résultant de l ’acceptation de la continuation de l a com m u
n a u té , qui n e perm et pas d’en critiquer les opérations.
L ’action subsidiaire de la femme C u rey ra s, contre les in tim és, en
payem ent de la valeur actuelle de ce dom aine, ne doit donc être consi—'
dérée que com m e l ’invention d’ une pratique obscure, im aginée p o u r
surcharger cette a ffa ire, et faire perdre de v u e le vrai point de la
contestation q u i , au lieu de présenter des questions nombreuses ,
incertaines et assez d ifficiles , se réduit à un petit n om bre de notions
simples et certaines , tirées des principes les plus incontestables du
d ro it, et des règles les plus sacrées de la justice.
D élib éré à Clerm ont-Ferrand, le 10 frim aire an 10.
B O I R O T .
L e C O N S E T L S O U S S I G N É , qui a v u la présente consultation,,
et le m ém oire qui la p r é c è d e , est entièrement du m êm e avis. Il ne
seroit guère possible de rien ajouter aux moyens sur lesquels sont
établies les résolutions de cette consultation, et les fins de n o n -recevoir
c o n t r esesl demandes de la fem m e Cureyras;, d o iv e n t paroitre irrésis
tibles. D é lib é ré à R io m , le 11 frim aire an 1o„
A N D R A U D,
I
G A S C H ON.
A R I O M , de l ’im prim erie d e L A N D R I O T , seul im p rim eur d u
T rib u n al d’appel.
L
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Pannetier, Charles. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Andraud
Gaschon
Subject
The topic of the resource
communautés de biens
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, pour Charles Pannetier et ses consorts, intimés ; contre Anne Couchard et Pierre Cureyras son mari, appelans ; en présence d'Oradoux-Vernignes, aussi intimé.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Institution d'héritier : l’institution contractuelle de la future, par son père, pour son héritière universelle de tous les biens meubles et immeubles, dont il mourra vêtu et saisi, conjointement et par égale portion avec ses autres enfans, avec délaissement de meubles et immeubles en avancement d’hoirie et constitution de dot, en attendant sa future succession, tous les quels seront rapportés pour elle venant à partage, constitue-telle l’instituée propriétaire des objets immobiliers, si elle juge à propos de répudier à la succession de l’instituant ? ou, au contraire, l’institution par égalité étant liée avec l’avancement d’hoirie, doivent-ils être, en tous cas, rapportés au partage ? Si l’immeuble a été aliéné par l’instituant, l’instituée, qui, après son décès a recueilli des biens immeubles de la succession de son père, hypothéqués à la garantie de l’aliénation, est-il recevable à évincer l’acquéreur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1755-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1124
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0143
BCU_Factums_M0142
BCU_Factums_G1123
BCU_Factums_G1125
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53152/BCU_Factums_G1124.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Plauzat (63282)
Ebreuil (03107)
Chavagnat (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Communautés de biens
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53743/BCU_Factums_M0244.pdf
8082fff6c50c646be4275952c6cb03cf
PDF Text
Text
2 '1'’
¿{m ÿ
^¿L .
}< ju i± -
A ^ l- /
fi™ * “ '/ ¿*
*\ gi « > isi
__ < »
&
—
r.----------------------- . -
C
. t -
O
P o u r
N
S
y«*- fe ^ ii^ è ^ c r J /^ .
-
U
B e r n a r d
L
/x^
m *\
^ <*-'
i&'Lù )J tf¿ £ Í
------------------ r - S T T T - - -
T
A
A n to in e
T
I
O
N
M
a g a u d
^
^
p r in c ip a l a c q u e r e u r d u b ie n d e v e r v a fs e
p r o v e n u d e J e a n -F r a n c o is M a r ie d e
V
ic h y
d é f e n d e u r e n a s s is ta n c e d e
incidem m ent
appelan t
de
ju g e m e n t
c a u se a
rendu
au
t r i b u n a l . d e p r e m iè r e in stan ce d e C lerm o n t, l e
3 M e fs id o u a n 1 1 ;
"
C o n t r e l e s h é r i t i e r s d ' AI n t o i n e R I C A R D '
e t a u tr e s c r é a n c ie r s in s c r its d e J e a n F r a n c o is M a r ie d e V ic h y , in tim é s
E n p résen ce d e T h érése L A N G L A R D ;
é p o u s e d iv o r c é e e t c r é a n c iè r e p r in c ip a le d u d it
.
d e V ic h y a p p e la n te a d e m a n e r e fs e e n
a f s is t a n c e d e c a u s e
L
es
créanciers inscrits qui n’ont point fait d’ ench ères dans le délai ,1
sur la notification de la transcription des ventes faites par leur débiteur ,
peuvent-ils, après deux ans d’inaction , se prévaloir de l ’enchère irréguliere ,et nulle > projettée mais non con s o m m é par un
autre créancier
qui l’abandonna aussitôt qu’il en eut apperçu les vices irréparables ,
et qui eu supprima tous les actes ?
‘
�..........................................................
( 2 )
^
Sont-Ils en droit de faire revivre ce germe d’enchère anéanti, de forcer
le créancier qui L’avait hasardé , à lui donner suite , ou de s’y subroger
et de poursuivre
eux-mêmes la revente du bien enchéri ,
par expro
priation forcée ?
Le
Tribunal de Clermont a jugé l’affirmative ; mais son
jugement
viole trop ouvertement la lo i et la justice , pour n’être pas réformé au
Tribunal d’appel.
L e fait s’explique en deux mots :
Antoine-Jean-M arie de V ich y , dom icilié à B ois-le-D u c en H ollande ,
vendit à Bernard-Antoine Magaud , par contrat du i.e r floréal an 9 , au
prix de soixante-huit m ille francs , un corps de biens appelé Yarvasse ,
situé dans la commune de Chanonat.
Son contrat d’acquisition fut transcrit au bureau des hypothèques à
C lerm on t , le 3 du même mois , et notifié avec le certificat de trans
cription , le
12 , aux créanciers inscrits ,
conformément à l’article
X X X de la loi du n brumaire an 7.
L e délai d’ un mois , accordé aux créanciers inscrits pour faire des sou
missions d’enchérir etrequérir la revente par expropriation forcée , expirait
le 12 prairial. On prétend que Thérèse Langlard , épouse du ven d eu r,
fit notifier le 11 , conséquemment en temps utile , une soumission d’en
chérir d’ un vingtième ; mais à qui fut faite cette notification , d’après
l’extrait de l ’enregistrement nui est produit ? à Bernard-Antoine M agaud ,
et aux autres acquéreurs habitans de Saint-Sandoux. Pas la moindre trace
d’ une notification pareille faite en même temps à M . de Vichy vendeur ,
ni à sou domicile réel en Hollande , ni à son dernier dom icile
connu
en France , qui était à Varvasse , en le considérant comme français
absent et hors de France , conformément à l ’article V I I I , titre II de
l'ordonnance de 1667 '■
> ni au domicile du Commissaire du Gouvernement
près le Tribunal d’apptl , conformément à l’article VII , même titre II
de l’urdo mance , en le considérant comme
étranger ; ni enfin au do
m icile élu qu’on lui suppose chez le citoyen B onnefoi, avoué à Cler
mont : on 11e trouve que la relation d’un acte notifié à ce prétendu do
micile élu , le 12 messidor ; et quel est cet a cte? une
sommation à
M. do V ich y de payer à sa ci-devant épouse j 3/j,f>77 l*vr° 9 > ainsi qu il
résulte d’ une dénonciation qui en lut faite à l’un des acquéreurs , dont
onjproduit quelques fragmens.
D elà résulte donc la preuve positive et irrésistible , qu’il 11’y avait eu
�(
»
)
.
de notifications d’enclièies .avant le délai fatal expiré le 12 prairial ,
qu’aux acquéreurs seuls , et qu’il n’en fut fait aucune à M. de V ich y
vendeur : cette omission rendait sans conséquence les notifications faites
aux
acquéreurs ; car l ’article X X X I de la loi du 18 brumaire an 11 ,
exige que les réquisitions de mise aux enchères soient signifiées ta n t à
l'acquéreur qu'au vendeur , à peine de nullité.
Ce n’était vraisemblablement pas la seule nullité de la soumission
d’ enchérir, dont il s’agit ; mais ce lle-là suffisait seule pour rendre l’ en
chère
imparfaite et sans effet : ne soyons donc pas étonnés que Thérèse
Langlard , qui en reconnut les vices , ait .pris le sage parti d’en retirer
les copies et de les supprimer.
D eux années entières d’oubli de cette tentative manquée ont succédé :
le citoyen Magaud s’est en conséquence établi à Varvasse ; il s’y est ar
rangé ; il y a disposé de tout en m aître ; et pour se mettre en état de
payer son acquisition
Saint-Sandoux.
E n fin , lorsque les
plus prpfonde , ils
pulser de Varvasse.
} il a vendu le patrimoine de ses pères situé à
héritiers Ricard le voient dans la sécurité la
se réveillent tou t-à-cou p , et visent à l ’ex
Cependant ils n’osent pas l ’attaquer en fr o n t ,
et ils s’adressent à la dame Lan glard-de-V ichy.
Ils
font
entendre
le langage du rep ro ch e , et poussent l ’indécence jusqu’à l ’accuser de
connivence avec les acquéreurs des biens de son mari , sous le prétexte
qu’elle abandonne
le
projet qu’elle avait annoncé en l’an 9 ,
de
poursuivre la revente de leurs acquisitions aux enchères ; ils la som
ment de reprendre ses poursuites , et faute de ce faire dans le mois,
ils demandent d’être autorisés à s’y subroger.
Les acquéreurs sont mis en cause ; on en vient à l ’audience ; la
discussion est vive , et le combat se termine par un jugement qui
a étonné ceux mêmes
dispositif :
qui l ’ont obtenu. E n
voici les motifs et le
« A ttendu , y est-il—d it , que l’acte de notification fait à la requête
» de Thérèse Langlard , à François Brochet , etc. ,
le
i 3 messidor
» an neuf , constate suffisamment l ’existence de l ’enchère par elle noti5> fiée aux acquéreurs de
son mari.
» Attendu que l ’article X X X I de la lo i
* accorde aux créanciers inscrits la
» enchères
de l’immeuble
du 11 brumaire an 7
faculté de requérir la
mise aux
vendu par son débiteur.
I 5
�(
’ » Attendu que
4
)
d’après l’article XVIII de la loi du
n
brumaire
» an 7 , sur les expropriations forcées, la soumission de porter l ’immeuble
» vendu à un vingtièm e en sus de celui stipulé en la vente volon
» taire , tient lieu de première enchère j qui nécessairement profite à
» tous les créanciers , et leu r donne la faculté de poursuivre la
>> vente par expropriation forcée.
» Attendu que des créanciers inscrits qui peuvent n’avoir négligé de
» faire des soumissions d’enchérir, que parce qu’ils avaient connaissance
» de celle faite par un autre créancier , et dans la confiance de re
» cueillir les avantages de cette soumission , ne peuvent être privés
» de cet avantage.
» L e Tribunal ordonne que Thérèse Langlard sera tenue de donner
» suite à ses soumissions , dans le mois
sinon déclare
» les créanciers Ricard subrogés à son lieu et place , et les autorise
» à poursuivre, par
expropriation forcée , la revente des objets énoncés
» et désignés dans la notification du i 3 messidor an 9 ».
L a dame de
V ich y n’a pas hésité à se rendre appelante de
étrange jugem ent, et le
réclamation sera-t-elle
citoyen Magaud a
cet
adhéré à l ’appel. Leur
sans succès ? Non : les
lumières et l ’impar-
partialité du Tribunal d’appel leur en sont garans.
Jtt
O j j r Æ
x r ê
J P tem iev
30 ) ’
J P 3É X , .
^ÏÏL ojjen.
L e Tribunal de Olermont a déclaré , en point de f a it , que l ’existence
de l’enchère faite par la dame L aaglard -d e-V ich y, sur les acquéreurs
de son mari , est suffisamment constatée ; mais il
est encore mieux
constaté par ce que nous avons dit dans le récit des faits , et par les
dates que donnent eux-mêm es les héritiers Ricard aux actes qu’ ils
prétendent avoir été notifiés à M. de V ich y ; que s’il a existé un acte
de soumission ,
dans le
il n’a point été notifié à M . de Vichy vendeur ,
ni dans le délai. Ce fait étant certain , la
même temps ,
nullité absolue d e l à soum ission, prétendue signifiée aux acquéreurs,
en est la conséquence forcée ; car l ’article X X X I de la
brumaire an 7 , la prononce expressément.
Il porte ;
loi du
11
�(
5
)
« T out créancier , dont les titres ont été inscrits , peut requérir la
» mise aux enchères et l’adjudication publique de l’immeuble ,
à la
» charge i . ° ,e tc .
» z .° D e se soumettre de p o rter, ou faire porter le prix: au moine
» à un vingtième en sus du prix stipulé dans le contrat.
» Cette réquisition est signifiée tant à l'acquéreur qu'au vendeur ;
le tout à peine de nullité ».
Or
s’il est indubitable que la soumission
L an glard -d e-V ich y, aux acquéreurs de
notifiée
son mari ,
par
dans
la dame
le
d é la i,
était nulle pour n’ avoir pas été notifiée au vendeur , dans le même
délai , n’est-il pas ridicule de vouloir
réprouvé
qu’elle donne suite à cet acte
par la lo i ? qu’elle établisse une procédure en expropriation
forcée sur une pareille base ? qu’à son défaut les
créanciers inscrits
soient autorisés à suivre à sa place une expropriation qu’elle n’a pas
le droit de provoquer ? E t n’est-il pas plus ridicule encore de vouloir
que les acquéreurs souffrent cette expropriation vexatoire ?
•
cPecotiè
^TTLoyen.
C e n’est pas tout ; quand la soumission éclipsée de la dame Langlardd e-V ich y reparaîtrait sous les yeux du T rib u n a l, et quand sa régularité
serait à l’abri de toute critique, le jugement dont est a p p el, qui autorise
les créanciers à s’en emparer , n’en présenterait pas moins une fausse
application de la loi.
L e Tribunal de Clerm ont s’est étrangement mépris , en e ffe t, lorsqu’il
a cru que la soumission d’enchérir faite , dans le d é la i, par madame de
V ich y , de sa seule vo lo n té, pour sa seule utilité , comme première et
principale créancière, et entièrement à se3 risques } appartenait à tou3
les créanciers inscrits.
Il serait contre toute raison qu’ un créancier inscrit n’eût pas le pouvoir
de renoncer seul aux actes conservatoires qu’il avait eu le pouvoir de faire
s e u l, et que le bénéfice de ces actes , non seulement profitât aux autres
créanciers qui n’encouraient pas les risques , mais qu’il leur eût attribué
dè3 le premier instant de son existence, un droit irrévocablement acquis
L a loi du 11 brumaire an 7 a conféré , par l ’article X X X I , à t >ut créan
cier inscrit la faculté de requérir la mise aux enchères, sans que lu réqui
sition de l’un empêche la réquisition des autre?.
�(
6
)
• D e ce que tous peuvent requérir , il suit que chacun n’agit que pour
lui-m êm e particulièrem ent et isolément.
,
Ç elui qui reste dans l ’inaction préfère de se contenter , en ce qui le
çoQcem e-,du prix stipulé au contrat de. v en te, plutôt que dp courir les
hasards attachés à la provocation des enchères. Il con sen t, par cela seul
qu’il se t a it , à ce que la valeur de l’immeuble demeure définitivement
fixée au pied convenu entre le vendeur et l’ach eteur, conformément à l’ar
ticle'X X 'X II de la loi.
’
1
t C ’est pour cela que l ’article XXXIII de la môme lo i n ’attribue le droit
de poursuivre la revente sur enchères , qu’au plus diligent , soit de l’ac
quéreur , soit du créancier qui /’ a requise lim itativem ent , et qu’aucun
droit n’est déféré à ce sujet aux autres créanciers. C ’est pour cela enfin
que l ’acte , par lequel la revente aux enchères est requise , ne doit être
notifié qu’au vendeur et à Vacquéreur seuls.
. Si la loi avait voulu que la soumission d’enchérir profitât à tous les
créanciers , pour être conséquente , elle en aurait prescrit la notification
à tous , comme elle l’a fait à l ’égard des affiches ordonnées pour parvenir
à l’expropriation forcée ( * ). E lle les aurait autorisés tous à en poursuivre
l ’effet. Hé bien ! elle
a
fait tout le contraire. Que faut-il en conclure ?
qu’elle a voulu que le créancier vigilant restât seul maître d’un acte de
diligence dont il avait seul voulu courir le danger , et conséquemment
qu’il eût. la faculté de s’en désister quand il le jugerait utile à ses intérêts,
sans consulter les autres créanciers , et sans recevoir des conditions de
leur part. Les créanciers qui se sont abstenus de faire des soumissions
d’en ch érir, ont formé par leur silence leur contrat extra-judiciaire avec
l ’acquéreur , comme ils l’ont voulu 5 de quel droit s’opposeraient - ils
donc à ce que le créancier qui a pris un parti différent, exécute le sien
de son côté comme il lui plaît ?
Nous nous y opposons , diront-ils , en vertu du droit que nous donne
l ’article XVIII de la loi du 11 brumaire sur
l’expropriation fo rcée, de
profiter de l ’enchère lorsqu’ il y en a une. L e créancier qui l’a faite , s’il
ne se présente pas au jour indiqué pour l ’adjudication, h l ’effet de pour
suivre son e n ch ère, n’en est pas seulement d éch u , il en est puni par
une condamnation aux frais de poursuite, et en outre , à p a y e r , comme
excédant du p r ix , la somme à laquelle il s'était obligé de porter où
fa ir e porter f immeuble en sus du prix conventionnel. Cette peiue tourne
( * ) A r t ic le V I do la loi du 11 iru m a irt: , »ur l ’e xp rop riation .
�( 7 )
t
nécessairement au profit de tous les créanciers dans l ’ordre de leurs hypo
thèques respectives ; donc l’enchère , quoique faite par un seul , est une
amélioration commune à tous , et , par su ite , il n’appartient pa 3 à celui
qui l’a faite de la rétracter.
.
A ce raisonnement qui est le principar m otif du jugement dont est ap
pel , nous répondrons que l’on confond ici les choses et les temps. C e
n’est pas aussitôt que la soumission d’enchérir est faite, que l ’enchère est
déclarée appartenir sans retour aux créanciers, c’est seulement lorsque la
mise aux enchères, provoquée par le soumissionnaire , a été effectuée par
l ’acquéreur; lorsque les affiches ont été posées , qu’ elles ont été notifiées
tous les créanciers inscrits , en exécution de l ’article V I de la loi sur
l ’expropriation forcée 3 lorsque cette notification leur a rendu l ’objet et le
bénéfice de la poursuite, communs ; enfin , lorsqu’au jo u r annoncé pour
l'adjudication, le soumissionnaire ne se présente pas pour l ’accepter.'
Alors la partie est engagée avec tous les créanciers inscrits, puisque les
affiches ont été notifiées à tous. L e provoquant qui ‘a attendu le dénoue
m ent pour se retirer du jeu , doit y laisser sa mise imprudente , sans doute ,
et c’est à tous les créanciers qu’il doit la laisser, puisqu’il jouait avec tous.
Mais qu’ a de commun le soumissionnaire q u i, comme madame de V i
c h y , se retire d’entrée de je u , et avant que la partie s’engage ; qu’a-t-il
de com m un, disons-nous, avec celui qui persévère dans sa provocation
jusqu’à la fin , et ne se retire qu’au dénouement ? L e contrat est formé
avec ce dernier par l’appel de tous les créanciers auxquels l’affiche^ pour
la revente a été notifiée, au lieu qu’ il n’en existe aucun entre le premier
et la généralité des créanciers auxquels rien n’a été notifié. Concluons
qu’il nsy a point de parité à établir entre deux cas si différons, et que la'
démarche imprudente de madame de V ic h y , ayant été rétractée avant que'
1 oreille des créanciers en eut été frappée'par aucune notification, elle ne
leur a ouvert aucune action contre elle.
Ils sont d’autant moins fondés à dicter des lois à madame de V ich y ,
dans les circonstances
particulières de cette affaire , et à lui reprocher
l ’abaudon de ses premières démarches , qu’ayant tardé à requérir la m ise'
aux enchères jusqu’aux derniers jours du d é la i, ils ne peuvent pas dire
qu’elle les a empêchés d’agir eux-mèmes , en les endormant dans une '
fausse sécurité , ni que l’abandon de ses poursuites trompe leur attente • •
car ils n’ont pu être instruits de sa soumission d’enchérir , qu’après l’ex
piration du délai 3 et par conséquent U est im possible qu’e lle ' ait influù’
�(
8
)
sur la détermination qu’ils prirent de s’ en tenir au prix stipulé par le
contrat de vente.
Des vérités si frappantes n’ont pas besoin , pour réunir tous les suf
frages , d’être appuyées sur des exemples ; mais s’il pouvait être utile
d’ en indiquer , nous renverrions les intimés au n .° n 5 d u
journal du
palais , où l’on trouve à la page 38 un préjugé qui les a consacrées dans
des circonstances bien plus délicates que celle où la question se présente
aujourd'hui.
. Il ne s’agissait pas seulem ent, en e ffe t, de savoir si un acquéreur pouvaitêtre contraint de subir la mise aux enchères de l’immeuble par lui acquis ,
sur la simple allégation qu’il avait existé une soumission d’enchérir
non rapportée , une soumission désavouée , abandonnée par le créancier
au nom duquel elle avait été faite irrégulièrement , et qui , n’ayant pas
¿té signifiée au vendeur , était repoussée par la loi comme insuffisante et
nulle : il s’agissait de savoir s i , d’après la loi de l ’an 7 , le créancier
qui a requis la mise aux
enchères , qui persiste à la
requérir , qui a
rempli toutes les form alités, qui représente tous les actes exigés par la l o i ,
peut être forcé à s’en désister , en le mettant hors d’intérêt par des olfres
réelles du montant de sa créance ; et si les autres créanciers , que l’on
ne désintéresse pas de m im e , peuvent intervenir pour se subroger à la
poursuite , dans le cas où l’enchérisseur serait condamné à recevoir son
paiement , à se désister de son enchère , et à se taire. Hé bien ! la résis
tance du créancier soumissionnaire , l ’intervention des autres créanciers ,
et leur demande en subrogation ,
L e i.e r germinal an i o ,
furent également repoussées.
le Tribunal de première instance , séant i
Meanx , où l’affaire fut d’abord portée , condamna le créancier à recevoir
les offres , à se désister de la réquisition qu’il avait faite pour la revente
de l ’imnieuble aux enchères , et
à consentir la radiation de son ins
cription.
Appel au Tribunal séant a Paris.
Intervention , en cause d’appel , de la cito yen n e Poucet créancière ,
pour requérir d’être subrogée à la poursuite.
16 thermidor an 10 , jugement contradictoire par lequel le Tribunal
rejette l’intervention, dit qu’il a été bien jugé par le jugement dont est
appel , et ordonne qu’i l , ^ ^ exécuté suivant sa forme et teneur.
Le Tribu nal d’appel de Riom a décidé la même question de la même
manière , par jugement du 11 prairial an 11 , dans l’espèce suivante :
Alexis
�C 9 )
Alexis Reynaud vendit quelques immeubles à Jean-Baptiste Trellet ;
celui-ci fit notifier son contrat d’acquisition aux créanciers inscrits. Bablantier , l’ un d’eux , déclara , tant à l ’acquéreur qu’au vendeur , qu’il
entendait enchérir d’un vingtièm e en sus du prix exprimé au contrat de
vente. Lartaud , autre créancier in s c rit, garda le silence ; mais Bablantie r , s’étant départi de son enchère , Lartaud se réveille ; il le fait as
signer j ainsi que l’acquéreur , au Tribunal de Gannat , pour voir dire
qu’il sera subrogé à l’enchère. Jugement du Z nivôse an 10 , qui déclare
Lartaud non
recevable.
Les motifs
de
ce
jugement
sont
ainsi
conçus :
« V u les articles X X X I , X X X II , XXXIII de la lo i du 11 brumaire
» an 7 , considérant que l’acquéreur est tenu de notifier son contrat d’ac» quisition aux créanciers inscrits , et que tout créancier a le droit de
» surenchérir ; qu’ainsi le créancier , qui veut profiter du bénéfice de la
» l o i , est personnellement tenu de satisfaire aux obligations qu’elle
» impose.
» Attendu qu’aucun des articles du code hypothécaire ne rend commun
» à tous les créanciers la réquisition de mise aux enchères faites par l’un
» d’eux , puisque par l’article X X X II cette réquisition ne doit Être sig » nifiée qu’à l ’acquéreur et au vendeur , et que d’après l’article XXXIII la
» revente ne peut être poursuivie que par l’acquéreur , ou le créancier
» qui l ’aura requise.
» Attendu qu’aucun article de la lo i n’accorde aux créanciers le droit
» de se faire subroger à l’acte de réquisition de mise aux enchères faite
» par l ’un d’eux , et que ses dispositions sont telles , que la supposition
» ne peut s’en faire sans lui donner un sens contraire.
» A ttendu que la partie de AJancel a pu renoncer au bénéfice de son
» acte de réquisition, qu'elle n'avait f a i t que pour la conservation de
» ses droits ; qu’il est de principe que chacun peut renoncer au droit
» qui lui appartient, lorsqu’il est facu ltatif, à moins que la loi n’y at
» tache des conséquences formellement exprimées et utiles pour des
» tiers , ce qui ne s« rencontre pas dans la loi du u brumaire an 7 ».
L e T rib u n a l, etc.
Appel de la part de Lartaud. Jugement du
11 prairial an 11 , par
lequel le Tribunal d’appel , séant à Riom , par les motifs exprimés au
Jugement du Tribunal de G a n n a t, confirme ce jugem en t, sauf à Lartaud,
a p p ela n t, et aux autres créanciers inscrits , leur action contre Bablan-
tier pour lui faire rapporter le montant de son enchère.
2
�C
i°
)
S i, dans ces deux affaires, deux Tribunaux d’appel différons ont refus*?
aux créanciers inscrits la subrogation à
l’enchère d’un autre créancier
qui ne voulait pas ou qui ne pouvait pas y donner suite , quoique tous
les actes prescrits par la loi eussent été régulièrement faits et
qu’ils
existassent, combien à plus forte raison le citoyenM agauddoit-iltriom plier
des efforts des intimés qui veulent être subrogés à une soumission d’en
chérir , dont les actes n’existent p lu s , et qui n’a jamais eu une exis -
tence légale (*).
On est prévenu qu’ils se proposent de tirer un grand parti de l’article
X C X IX de la nouvelle loi sur le
régime
hypothécaire , formant le
titre V I , livre III du Code c i v i l , adopté par le corps législatif le 28
ven tô se, qui admet leur système pour l’avenir , et autorise tous les créan
ciers inscrits à se subroger aux enchères faites par un seul. Mais ils
s’ab usen t , s’ils placent quelque confiance dans ce m oyen tiré d’une lo i
de trois ans postérieure
à l’anéantissement de la soumission d’enchérir
qu’ils essayent de faire revivre.
D ’un côté , les lois n’ont point d’effet rétro actif, et ne disposent que
pour l’avenir (**). La disposition du
Code civil qu’ ils invoquent, est
nouvelle ; elle ajoute à la loi du 11 brumaire an 7. Cette disposition
nouvelle et additionnelle fixera le sort et l ’effet des enchères qui seront
fa ites à l'avenir ; mais elle est sans influence sur le sort et les effets des
enchères fa ite s et abandonnées depuis trois ans.
E n second lieu , si l’article X C X IX de la loi nouvelle est favorable
au système des intimés , d’ un autre c ô té , l’article X C V I qui le précède
détruit leur espoir sous un autre point de vue ; car il ne donne d’effet
( * )
Q « ’on n ’ e s ia y e pas Je b a la n ce r ce s p réju g e s par le ¡ligam ent ren d u au trib u n al do
c a ssa tio n , lo
an 10 ,
dans l ’a ffa ire
G e n io u s t
a b so lu m e n t sans a p p lica tion ; c a r il n ’é ta itp a s q u estion , dans l ’a ffa ire
et
V c r s e p u y ; il est
V c r s c p u y , de sa vo ir
si des créan cier» in scrits d ovaien t etro reçu s h so su b roger à l ’cn ch èro faito p a r un
autre
c ré a n c ie r , p o u r re q u é rir la m isa d’un bion v en d u a u x e n ch è re s. Il s’ agissait se u le m e n t dfl
s a v o ir si un c ré a n c ie r in sc rit » vait la facu ltu do 6e su b roger à la p ou rsu ite d’une exp ro p ria
tion f o r c é e , su r la q u e lle lo p o u rsu ivan t sem b lait disposé à ne pa> re q u érir la m iso aux en ch è
re« , lo jo u r indiqué par les affich es d even ues com m u n es à tous les cré a n ciers par la n o ti
fic a tio n qui le u r en avu it e 'té fa ito , on exé cu tio n do l ’a rtic le V I do la lo i du 11 h m m airo an
7
su r l ’oxprop riatio n fo rc é e ; c e qui n ’a rie n de com m u n ave c la su b rogation aux en ch è re s
faito su r uno vonto v o lo n ta ire qui no sont n otiliées qu ’ à l ’a cq u éreu r et au ven d eu r. D ’a illeu rs >
1» question de sa vo ir si la su b rogation a la p ou rsu ite do l ’exp rop riation fo rcée e st a d m issi
b le i ne fu t m êm e pas jugéo dans l ’a ffa ire V o rs e p u y , puisque le p o u rsu ivan t l ’a vait écartés
•n con tin uan t la p o u rsu ite , et on requ éran t l ’ad ju d icatiu n qui fu t p ro n o n cé e .
( * * ) Article I I , titre préliminaire du Code.
�( 11 )
qu’aux soumissions ¿ ’enchérir qui seront légalem ent faites; et il e x ig e ;
comme la loi du 11 brumaire an 7 , que ces soumissions soient notifiées
tant à l’acquéreur qu’au vendeur, dans le délai , à peine de nullité . L a
soumission d’enchérir de la dame Langlard n’avait point été signifiée
à M. de V ich y , vendeur , dans le délai , encore une fois ; ce point de
fait est constant ; elle était donc radicalement nulle et déclarée te lle .
par la loi. Or , ce qui est nul ne peut jamais fonder d’action contre per
sonne ; quod nullum e s t , nullum producil effectum.
S’il fallait couronner des moyens si’ victorieux par les considérations
de la faveur , nous ferions remarquer le défaut d’intérêt de l ’attaque des
intimés , et l’intérêt majeur de la défense du citoyen Magaud.
L ’attaque des intimés est sans in térêt, et comment ? parce que si elle
obtenait quelque su ccès, la créance de la dame de V ich i qui est anté
rieure aux leurs , absorberait les enchères qu’ils p rovoq uen t, et qu’il ne
leur en reviendrait rien.
L ’intérêt de la défense du citoyen Magaud est majeur , au contraire ,
et comment ? parce qu’il a vendu j au cours de l ’an 9 , son bien de S t.Sandoux , pour acheter Varvasse ; qu’il n’avait fait d’abord que des
ventes conditionnelles, et qu’ il les a rendues pures et simples lorsqu’il
a du croire la propriété de Varvasse.immuablement fixée sur sa tête , par
l ’expiration du délai des enchères , et le désistement de la
V ich y du projet qu’elle avait annoncé d’en former.
sa position , si cette
prix des fonds
acquisition lui échappait
dame dey
Q uelle serait donc
aujourd’hui que les
ont acquis un tel accroissement de valeur , qu’il ne
la remplacerait pas avec un tiers de perte ? Égalem ent dépouillé , et de
son
ancien et de son nouveau patrim oine, par l’acharnement des Ricard à
le vexer sans p ro fit, il serait difficile de concevoir une situation plus
pénible que la sienne : mais la justice
et la
lo i qui le protègent ,
le garantiront de ce malheur.
"
T elle est l ’opinion du Jurisconsulte ,
soussigné.
Délibéré à Clermont-Ferrand , le trois gernrinal an 12.
b e r g i e r
.
Les soussignés qui ont lu le mémoire à consulter pour le citoyen Magaud
contre les créanciers de V ic h y , et la consultation du citoyen B ergier, du 3
de ce mois ,
*
Sont absolument du mJme avis que le citoyen Bergier, et par les infimes
motifs.
2 2
�( 12 )
^
•’
Il faut d’abord ne pas perdre de vue un point e s se n tie l, qui est que la fa-i
culte d’enchérir tendant à l'inexécution d’un contrat, doit toujours être jugéerigoureusem ent: il faut avoir rem pli strictem ent les formalités prescrites par
la lo i, à peine de déchéance.
\
•A près cette observation prélim inaire, et en supposant même qu’il y eut ,
dans le délai fixé par la loi, une notification d’enchère de la part de la dame de
Y ic liy au citoyen M agaud, acqu éreu r, ce qui est douteux , puisque l ’acte -de
notification n’est point rapporté', et que le tribunal de Clerm ont s’est con
tenté de la supposer , d’après une mention vague contenue dans un autre acte ,
L a dame de Y ic h y n’aurait-clle pas eu la faculté de se départir dans la suite
de la prétendue enchère, sans que les autres créanciers pussent en profiter î
A cet égard , la loi du 11 brumaire an 7 étant m u ette, on pourrait invo
quer le principe g én éral, que tout privilège est personnel. On pourrait dire
avec fondem ent, que la faculté d’enchérir concernait personnellem ent chaque
créancier , et que le seul qui ait enchéri sc désistant de son enéhère , le droit
qui en résultait n ’est point communicable aux autres.
En supposant ce point d outeux, on ne pourrait qu’être fortem ent touche
d ’une jurisprudence qui s’est déjà formée par les jugemens cites dans la con
sultation du citoyen Bergier.
I l est vrai q u e, suivant la nouvelle loi sur les hypothèques, art. X C I X , le
désistem ent du créan cier, requérant la mise aux enchères , n’empêche pas
les autres créanciers de poursuivre l ’adjudication.
M ais on sait aussi que les lois n’ont point d’effet rétroactif.
M ais un moyen q u i, en faisant abstraction de tous autres , serait seul tran
chant et décisif en faveur du citoyen Magaud , que l’on peu t même dire n ’êtro
point susceptible de répliqué, résulte de ce qu’il n’est prouvé, en aucune ma-,
n ière , qu’il y ait eu de la part de la dame de V ich y une notification de l'en
chère à son m ari, vendeur. S'il y en avait eu u n e , il serait très-aisé de le
prouver par la m ention sur les registres du percepteur de l ’enregistrem ent :
o r , il n ’existe à cet égard aucune preuve.
Cependant il est incontestable, d’après l ’art. X X X I de la loi du
11 bru
maire an 7 , que cette notification ne devait pas seulem ent être faite à l'ac
quéreur , qu'elle devait encore l'être au vendeur ; et çct article dit : le tou t, à
peine de nullité.
Il
n'y avait donc pas d’enchère , à proprem ent p arler; car ce qui est mil ,
est aux yeux de la loi comme ce qui 11’existe pas. Aussi la loi nouvelle qui ,
comme o n l ’adéjà d it , ne doit pas régler les intérêts des parties, cil allant
plu* luin que celle du 11 brumaire an 7 , ne parle, art. X Ç I X , que du simple
désistem ent, et suppose une enchère régulière : on avoue qu’on ne prévoit
aucune réponse à ce moyen.
T<e tribunal de Clermont , en motivant son jugem ent, a dit que << l ’acte do
» notification fait à la requête de Thérèse Lunglaid a François Brochet, etc.,
�(
13
)
» lo i3 messidor an g , constate suffisamment l'existence de l'enchère par elle
» notifiée aux acquéreurs de son mari ».
O n a déjà observé que cette existence n’était pas légalem ent prouvée. Mais ,
en la supposant tou jou rs, était-il suffisant que la notification fut faite aux
acquéreurs du mari ?
O u le tribunal n ’a pas songé à cette insuffisance , et une pareille inatten
tion ne déposerait pas en faveur du jugem ent ; ou il a pensé que cette notifi
cation suffisait ; et dans ce cas , il est tombé dans une erreur qui doit être
réformée.
Enfin , les circpnstances dans lesquelles se trouve le citoyen Magaud sont
tclleinent favorables, elles préviennent tellem ent contre la réclamation tar
dive des créanciers qui n ’ont évidemment songé à faire valoir un pareil m oyen,
qu’à raison de l ’augmentation survenue dans la valeur des fonds , qu’on peut
tlire que les raisons qu’on vient de déduire en recev ra ien t, si elles en avaient
b eso in , un nouveau degré de force.
Délibéré à Paris par les anciens Jurisconsultes , soussignés
an ix de la République française.
GRENIER
et F A V A R D ,
le zS germinal
. .
du Puy-de-Dôme.
L e soussigné, qui a vu et examiné la consultation ci-dessus et des autres
parts , est du même avis et par les mêmes raisons.
D ’une p a r t , la circonstance que l ’enchère n ’a pas été notifiée au précé
dent propriétaire , débiteur p rin cip a l, annullant évidemment cette enchère
aux termes de l ’ancienne comme de la nouvelle loi , les autres créanciers
n ’auraient pu en tirei avantage , q u an d , en thèse générale , ils y seraient
autorisés.
D autre part , ce n e s t pas la simple enchère faite clandestinem ent, pour
ainsi dire , entre le créancier , l’acquéreur et le débiteur , qui peut donner
ce droit aux autres créanciers ; mais la mise aux enchères effective qui a
lieu par la signification à tous les créanciers inscrits , et par les affiches.
Cette démarche publique étant une fois faite , elle ne peut pas être illu
soire , et tous les créanciers ont droit d’en profiter.
C'est ie seul sens raisonnable qu’on puisse donner à l ’article X C I X du litre
V I de la nouvelle loi sur les privilèges et hypothèques.
D ’autre part enfin , tout doit avoir son terme ; tout est prom pt et rapide
dans la marche de la loi sur les hypothèques. L a transcription , la notifica
tion , l ’cnchùrp, l ’expropriation, tout doit être lait dans les plus brefs délais
puisque le plus long ne passe pas /(o jours,
1
C ep en d an t, dans le plan des adversaires du c.cn Magaud , un créancier
pourrait , pendant 3o ans , expulser de sa propriété un acquéreur , parce
qu’il a plu à un créancier de faire uuc enchère à laquelle il a cru ne devoir
donner aucune suilc.
�(
i4
)
On dit pendant 5 o ans , parce que si on admet Une pareille action
après deux a n s, il n ’y a pas de raison pour ne pas l ’étendre à tr o is , à
q u atre, à d i x , et jusqu’à trente ans ; ce qui serait absolument contraire à
l ’esprit de cette loi , dont l ’unique but est de fixer , d’une manière prom pte
et absolue , l ’irrévocabilité de la propriété sur la tète de l ’acquéreur.
Délibéré à Clermont-Ferrani , le $ floréal an 12.
B 0 I R 0 T.
L e Conseil so u ssign é, qui a vu la présente C on sultation , est entiè
rem ent du même avis et par les mêmes raisons. Les résolutions qui y
sont prises sont appuyées sur les principes les plus certains , et d’une
application absolument indispensable à l'espèce.
D é lib é r é à
R io r n ,
le
io
flo r é a l a n
n ,
A N D R A U D.
L e Conseil soussigné est entièrement du même avis et par les mêmes rai
sons. Rien ne constate d’abord l ’existence de la déclaration d’enchère; on ne
rapporte d’autre preuve que la m ention qui en est faite dans l ’acte de notifica
tion fait à la requête de T h érèse Langlard , le 17 messidor an 9. Cette men
tion suffit-elle l non, sans doute ; ce n’est pas le cas d’appliquer la maxime ,
in antiquis enuntiativa probant. lies créanciers ne peuvent pas avoir plus de
droit que T h érèse Langlard ; et celle-ci pourrait-elle se dispenser de rappor
ter l’acte même ? Serait-elle reçue à y su p p léer par la m ention insérée dans
l ’acte du i 5 messidor ? Ensuite , cette m ention pourrait-elle être regardée
comme une preuve suffisante de l ’existence de la déclaration d’enchère î L ’ac»
quéreur serait toujours fondé à exiger la représentation de l ’original qui peut
être infecté de vices de forme. Ces raisons , jointes à celles développées dans
la consultation , ne doivent laisser aucun doute sur le mal jugé du jugem ent.
Délibéré à R io m , ce to floréal an ix.
PAGES -MEIMAC.
J
O
Æ
£
Î
D u citoyen BERNARD M A G A U D , appelant, sur le mémoire imprimé
que viennent de fa ir e paraître les héritiers R IC A R D } intimés.
L e mémoire des héritiers Ricard n’est qu’ une déclam ation insipide
qui n’apprend rien au Tribunal d’appel de ce qui doit fixer son juge
ment dans cette affaire.
�(
i5
)
Pas un m ot , dans z 5 pages d’impression , de la nullité de l’enchère
prétendue faite par la dame L au glard -d e-V ich y , faute d’avo ir été
notifiée au vendeur dans le délai fatal.
Le point de d r o it, que la soumission d’enchérir l ’immeuble , dont
la transcription de la vente a été notifiée aux créanciers inscrits ,
doit être sig n ifié , tant à l'acquéreur qu’au vendeur , dans le mois de la
notification du certificat de transcription, à peine de nullité , ne peut
pas être mis en problème puisque l’article X X X I de la lo i du 11
brumaire an 7 en a une disposition textuelle , confirmée par l ’article
M M CLXXXI du nouveau Code civil , n.os i.e r , 3 et 4.
L e point de f a i t , que la réquisition de mise aux enchères de la dame
Langlard-de-Vichy ne fut point signifiée à son m a r i, ven d eu r, dans le
mois de la notification de la transcription , qui expira le 12 prairial an
q , ne peut pas être mis en doute non plus , puisque les héritiers Ricard
ont dit eux-mêmes , page 6 de leur mémoire imprimé , que les réquisi
tions de mise aux enchères notifiées à Bernard Magaud le 1 x prairial ,
et aux autres acquéreurs le 16 , ne furent dénoncées au sieur de V ich y ,
vendeur , à son dom icile élu chez le citoyen Bonnefoi , que les 11 et
i 3 messidor suivant , c’est-à-dire, un mois , au m oin s, après l’expiration. ..^ du délai fatal ; et les extraits des registres de l’enregistrement confirment
çette vérité.
Q uelle est la conséquence irrésistible et forcée de ces deux points
l ’ un de droit , l’ autre de f a i t , également incontestables ? que la sou
mission d’enchérir de la dame de V ic h y , eût-elle existé , elle serait nulle
pour n’avoir pas été notifiée dans le délai au vendeur , et par une su ite ,
que la soumissionnaire serait tombée en déchéance.
Or , comment justifier après cela le jugement dont est appel , qui
ordonne à la dame de V ich y de poursuivre une pareille réquisition nulle et
tombée en déchéance ? q u i, à son refu s, autorise les héritiers Ricard à se
subroger à la poursuite , et qui enfin condamne Bernard Magaud ,
acquéreur , à subir cette vexation ? un acte de d ilig en ce, n u l , ne peut
produire d’effet pour personne ; quod nullum e s t , nullum producit effectum. La soumission nulle de la dame de V ich y , quand on en représen—
le ra it les actes , ne donnerait donc d r o it, ni à elle , ni à aucun autre
créancier , de déposséder Bernard Magaud de son acquisition. Il est
inconcevable qu’une vérité si frappante n’ait pas été sentie par les
premiers juges.
2 .° Les dissertations à perdre h a le in e , dans lesquelles les héritiers
Ricard se jettent sur d’autres questions , sont peine perdue. Bernard
Magaud se gardera bien de lasser l’attention de ses juges , en s’enfonçant
dans les ténèbres avec ses adversaires,pour faire appercevoir leurs écarts.
Quand une affaire peut se vuider par un m oyen tranchant qui s’explique
en deux mots , et qui est de nature à porter la conviction dans les esprits
les plus r e b e l l e s , comme celui de la nullité de l’enchère que les héritiers
Ricard voudraient ressusciter à toute force , pourquoi ne pas s’y tenir ?
Pourquoi ne pas épargner au Tribunal l’ennui des dissertations assom
mantes dans lesquelles ou voudrait nous engager sans utilité ?
*
3 .° Mais nous 11e pouvons pas également nous dispenser de dire quelques
mots de cet amas de déclamations injurieuses ^ dont le mémoire des
héritiers Ricard est un dégoûtant tissu.
* v
�(
i6
)
Ils crient , d’un bout à l ’autre , à la fraude , à la collusion. A les
entendre , le citoyen Magaud s’est ligué contr’e u x , avec la dame de
V ich y , pour leur faire perdre la créance la plus favorable et la plus
légitim e , en s’emparant du bien de leur débiteur à v il prix. Mais , de
bonne f o i , y a -t-il de la raison à prétendre que la dame de V ich y ,
n’a abandonné que par collusion et à dessein de nuire aux créanciers ,
une soumission d’enchérir nulle et insoutenable , à laquelle elle n’au
rait pu donner suite qu’en s’exposant à faire et à perdre cinq à six m ille
francs de frais ? Il n’y eu a pas davantage à crier contre le c.en Magaud ,
parce qu’il résiste à ce que la dame de V ich y exerce contre lui une action
en expropriation qu’elle n’a pas.
E û t-il fait une acquisition aussi avantageuse qu’on veut le dire , ni la
justice la plus sévère , ni la délicatesse la plus généreuse ne lui impose
raient l ’obligation d5y renoncer au profit des créanciers du vendeur après
avoir vendu les biens de ses pères , pour la payer.
Mais d’ailleurs il fit cette acquisition au plus haut prix dans le
temps , et si bien au plus haut p r ix , qu’il couvrit l’enchère de
messieurs Ducrohet , d’Albignat , de Riom , et Margeride de C lerinont , qui se retirèrent sans vouloir surenchérir.
Ce bien vaut 100 m ille francs aujourd’hui , dit-on T et n’en coûte
que 68 au citoyen Magaud : quand cela serait , on ne pourrait voir là
que l’effet de la progression des valeurs des im m eubles, depuis l’an
neuf ; et bien loin qu’il en résultât un m otif de le dépouiller , après
qu’il a vendu ses biens de Saiut-Sandoux , au même prix proportionnel
rie l’an 9 auquel il a acheté , ce serait une puissante considéra
tion pour le maintenir dans son acquisition , dont il ne pourrait C-tre
déchu sans éprouver la perte de 3o m ille francs ou davantage , qu’il
aurait à subir pour remplacer son bien de patrimoine aliéné.
Enfin , le bail général de Varvasse , lorsqu’il fut vendu au citoyen
Magaud et à cinq à six autres acquéreurs p a r tie ls , n’était que de
35 oo francs , et les fermiers ne payaient les impositions qu’en déduc
tion de ce prix.
L e produit des différentes ventes passa quatre-vingt-dix m ille francs.'
Peut-on sérieusement crier à la vilité d’ un tel prix ?
Des aboiemens si ridicules ne peuvent inspirer d’autre sentiment que
celui de la pitié.
M A G A U D .
Clcrmont-Fcrrand, de l'imprimerie de L IM E T , P ère et F ils.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Magaud, Bernard-Antoine. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Grenier
Favard
Boirot
Andraud
Pagès-Meymac
Magaud
Subject
The topic of the resource
ventes
nullité
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
châteaux
Description
An account of the resource
Consultation pour Bernard-Antoine Magaud, principal acquéreur du bien de Varvasse, provenu de Jean-François-Marie de Vichy, défendeur en assistance de cause, et incidemment appelant de jugement rendu au Tribunal de première instance de Clermont, le 3 Messidor an 11 ; contre les héritiers d'Antoine Ricard, et autres créanciers inscrits de Jean-François-Marie de Vichy, intimé ; en présence de Thérèse Langlard, épouse divorcée, et créancière principale dudit de Vichy, appelante et demanderesse en assistance de cause.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1801-Circa An 11
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0244
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0243
BCU_Factums_G1409
BCU_Factums_G1410
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53743/BCU_Factums_M0244.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
La Varvasse (château de)
Saint-Sandoux (63395)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
chateaux
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
nullité
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53223/BCU_Factums_G1409.pdf
a592d119b20f3ea3a55a501e380426e4
PDF Text
Text
i t ï
ï
«
< 0 0
88 ,* , 2g
< Ü 0> -
Jgj
4
»
"T
&
.* . 2 g <Q O >
■■rr-n-r-
|
%
CONSULTATION
P o u r
B e r n a r d - A
n to in e
M
A
G
A
U
D
,
p rin c ip a l a c q u é re u r d u b ie n d e V a rv a fs e
p r o v e n u d e J e a n -F r a n c o is -M a r ie d e
V ic h y , d é fe n s e u r e n a fs is ta n c e d e c a u s e a
in c id e m m e n t a p p e la n t d e
ju g e m e n t
rendu
au
T r ib u n a l d e p r e m iè r e in s t a n c e d e C le r m o n t, le
3
M e f s i d o r an
I I ;
C o n t r e l e s h é r i t i e r s d 'A n t o i n e R I C A R D ,
e t a u tr e s c r é a n c ie r s in s c r its d e J e a n
F r a n c o is -M a r ie d e V ic h y , in tim é s ;
E n présen ce de T h érése L A N G L A R D ,
épous e d i v o r c é e a c r é a n c i è r e p r i n c i p a l e d u d i t
d e V ic h y a p p e la n te a d e m a n d e r e fs e e n
a fs is ta n c e d e c a u s e
L e s créanciers inscrits qui n’ont point fait d’ enchères dans le délai
sur la notification de la transcription des ventes faites par leur débiteur ,
peuvent-ils, après deux ans d’inaction , se prévaloir de l 'enchere irrégu
lière et nulle , projetée mais non consommée par un autre créancier
qui l’abandonna aussitôt qu’ il en eut apperçu les vices irréparables ,
et qui en supprima tous les actes ?
�(
2
}
Sont-ils en droit de faire revivre ce germe d’enchère anéanti, de forcer
le créancier qui l’avait hasardé , à lui donner suite , ou de s’y subroger
et de poursuivre eux-mêmes la revente du bien enchéri , par expro
priation forcée ?
Le Tribunal' de Clermont a jugé l’affirmative ; mais son jugement
viole trop ouvertement la loi et la justice , pour n’être pas réformé au
Tribunal d’appel.
Le fait s’explique en deux mots :
Antoinç-Jean-Marie de V ic h y , domicilié à Bois-le-Dûc en Hollande ,
vendit à Bemard-Antoine Magaud , par* contrat du i .cr floréal an f) , au
prix dç $oixante-<buit mille francs , un corps de biens appelé Varvasse ,
situé dans la commune de Chanonat. ’
•. "
K
'Son..contrat ¿’acquisition fut transcrit au bureau des hypothèques à
C lcn n o n t, l e ”-3 du même mois , et notifié avec le certificat de transcripû'oii , 1 e ' 1 2 ', aux créanciers in scrits,
conformément à l’article
X X X de la loi du 11 brumaire an 7.
- 4, -'
*
.»
>
Le délai d’un mois , accordé aux créanciers inscrits pour faire des sou
missions^d’enchérif et requérir la revente par expropriation forcée , expirait
le 12 prairial. On prétend que Thérèse Langlard , épouse du vendeur,
fit notifier le 1 1 , conséquemment eu temps utile , une soumission d’en
chérir d’un vingtième ; mais à' qui fut faite cette notification , d’apres
l’extrait de l’enregistrement qui est produit ? à Berriard-Antoine Magaud,
et aux autres acquéreurs habitans de Saint-Sandoux. Pas la moindre trace
¿’ une notification pareille faite en même temps à AI. de Vichy vendeur ,
iii à sou domicile réel en Hollande , ni à son dernier domicile connu
en France , qui était à Varvasse , en le considérant comme français
àbscnl et liors de France , conformément à l’article V I I I , titre II de
l’ordonnance de 1667 ; ni au domicile du Commissaire du Gouvernement
près le Tribunal d’appel , conformément à l’article VII , même titre II
de l’ordo mance , en le considérant comme étranger ; ni enfin au do
micile élu qu’on lui suppose chez le citoyen Bonnefoi, avoué à Clermont : on ne trouve que la relation d’un acte notifié à ce prétendu do
micile élu , le 12 messidor ; et quel est cet acte ? une sommation à
M. de Vichy de payer à sa ci-Jevànt épouse 134,077 livres , ainsi qu’il
résulte d’une dénonciation qui en fut faite a l’un des acquéreurs , dont
o:i|produit quelques fragmens.
Delïi résulte donc la preuve positive et irrésistible , qu’il n’y avait eu
�’
(
3
i '
3
de notifications d’enchères avant le délai fatal expiré le 12 prairial
qu’aux acquéreurs seuls , et qu’il n’cn fut fait aucune à M. de Vichy
vendeur : cette omission rendait sans conséquence les notifications faites
aux acquéreurs ; car l’article XXXI de la loi du 18 brumaire an 11 ,
exige que les réquisitions de mise aux enchères soient signifiées tant à
l’acquéreur qu'au vendeur , à peine de. nullité.
Ce n’était vraisemblablement pas la seule nullité de la soumission
d’enchérir, dont il s’agit ; mais celle-là suffisait seule pour rendre l’euchère imparfaite et sans effet : ne soyons donc pas étonnés que Thérèse
Langlard , qui en reconnut les vices , ait pris le sage parti d’en retirer
les copies et de les supprimer.
Deux années entières d’oubli de cette tentative manquée ont succédé :
le citoyen Magaud s’est en conséquence établi à Variasse ; il s’y est ar
rangé ; il y a disposé de tout en maître j et pour se mettre en état de
payer son acquisition , il a vendu le patrimoine de ses pcres situé à
Saint-Sandoux.
E n fin , lorsque les héritiers Ricard le voient dans la sécurité la
plus profonde , ils se réveillent tout-à-coup, et v ise n t à l’ex
pulser de Varvasse. C epen d an t ils n ’osent pas l’attaquer en fro n t,
et ils s’adressent à la dame Langlard-de-Vichy. Ils font entendre
le langage du reproche, et poussent l’indécence jusqu’à l ’accuser de
connivence avec les acquéreurs des biens de son mari , sous le prétexte
qu’elle abandonne
le
projet qu’elle avait annoncé en l’an 9 ,
de
poursuivre la revente de leurs acquisitions aux enchères ; ils la som
ment de reprendre ses poursuites , et faute de ce faire dans le mois,
ils demandent d’être autorisés à s’y subroger.
Les acquéreurs sont mis en cause ; on en vient à l ’audience ; la
discussion est vive , et le combat se termine par un jugement qui
a étonné ceux mêmes qui l ’ont obtenu. En voici les motifs et le
dispositif :
« Attendu , y est-il-d it, que l’acte de notification fait à la requête
» de Thérèse Langlard , à François B ro ch e t, etc. , le i 3 messidor
s> an neuf , constate suffisamment l’existence de l’enchère par elle noti» fiée aux acquéreurs de son mari.
» Attendu que l’article X XX I de la loi du 11 brumaire an 7 ,
s» accorde aux créanciers inscrits la faculté de requérir la mise aux
* enchères de l’immeuble vendu par £0ü débiteur.
T 2
�(
4
)
» Attendu que d’après l’articlc XVIII de la loi du xi
brumaire
»
»
»
»
»
au 7 , sur les expropriations forcées, la soumission de porter l’immeublo
vendu à un vingtième en sus de celui stipulé en la vente volontaire , tient lieu de première enchère , qui nécessairement profite à
tous les créanciers , et leur donne la faculté de poursuivre la
vente par expropriation, forcée.
» Attendu que des créanciers inscrits qui peuvent n’avoir négligé de
j> f a i r e des soumissions d’enchérir, que parce qu’ils avaient connaissance
» de celle faite par un autre créancier , et dans la confiance de re-
» cueillir les avantages de cette soumission , ne peuvent être privés
» de cet avantage.
»
»
»
»
» Le Tribunal ordonne que Thérèse Langlard sera tenue de donner
suite à ses soumissions , dans le mois
sinon déclare
les créanciers Ricard subrogés à son lieu et place , et les autorise
à poursuivre , par expropriation forcée ,1 a revente des objets énoncés
et désignés dans la notification du i 3 messidor an 9 ».
La dame de V ichy n’a pas hésité à se rendre appelante de
étrange jugem ent, et le
citoyen Magaud a
cet
adhéré à l’appel. Leur
réclamation sera-tTelle sans succès ? Non : les lumières et l’imparpartialité du Tribunal d’appel leur ep sont garans.
M 0 3 i?0 £ xrê
JÜ>-
JP JP JÈ X..
JPiemicu ^ÏYLoycu.
Le Tribunal de Clermont a déclaré , en point de fa it, que l’existence
de l’enchère faite par la dame Langlard-dc-Vichy, sur les acquéreurs
de son mari } est suffisamment constatée ; mais il est encore mieux
constaté par ce que nous avons dit dans le récit des faits, et par les
dates que donnent eux-mêmes les héritiers Ricard aux actes qu’ils
prétendent avoir été notifiés à M. de Vichy ; que s’il a exist: un acte
de soumission , il n'a point été notifié à A l. de Vichy vendeur ,
dans le même temps , ni dans le délai. Ce fait étant certain , la
nullité absolue de la soumission , prétendue signifiée aux acquéreurs,
pu est la conséquence forcée ; car l’articlc XXXI de la loi du 1 1
brumaire an 7 , la prononce expressément,
11 porte ;
�( 5 )
« Tout créancier, dont les titres ont été inscrits , peut requérir la
» mise aux enchères et l’adjudication publique de l’immeuble , à la
» charge i . Q , etc.
» 2.° De se soumettre de porter, ou faire porter le prix au moins
y à un vingtième en sus du prix stipulé dans le contrat.
» Cette réquisition est signifiée tant à l’acquéreur qu’au vendeur ;
le tout à peine de nullité ».
O r , s’il est indubitable que la soumission notifiée par la dame
Langlard-de-Vichy, aux acquéreurs de son mari , dans le délai ,
était nulle pour n’avoir pas été notifiée au vendeur , dans le même
délai , n’est-il pas ridicule de vouloir qu’elle donne suite à cet acte
réprouvé par la loi ? qu’elle établisse une procédure en expropriation
forcée sur une pareille base ? qu’à son défaut les créanciers inscrits
soient autorisés à suivre à sa place une expropriation qu’elle n’a pas
le droit de provoquer ? E t n’est-il pas plus ridicule encore de vouloir
que les acquéreurs souffrent cette expropriation vexatoire ?
c Pecottè
'
9 7 1 o y e it.
Ce n’est pas tout ; quand la soumission éclipsée de la dame Langlardde-Vichy reparaîtrait sous les yeux du Tribunal, et quand sa régularité
serait à l’abri de toute critique, le jugement dont est appel, qui autorise
les créanciers à s’en-emparer , n’en présenterait pas moins une fausse
application de la loi.
Le Tribunal de Clermont s’est étrangement mépris , en e ffe t, lorsqu’il
a cru que la soumission d’enchérir faite, dans le délai, par madame de
Vichy , de sa seule volonté, pour sa seule utilité, comme première et
principale créancière, et entièrement à ses risques , appartenait à tous
les créanciers inscrits.
Il serait contre toute raison qu’ un créancier inscrit n’eût pas le pouvoir
de renoncer seul aux actes conservatoires qu’il avait eu le pouvoir de faire
s e u l, et que le bénéfice de ces actes , non seulem ent profitât aux autres
créanciers qui n’en couraient pas les risques , mais qu’il leur eût attribué,
dès le premier instant de son existence, un droit irrévocablement acquis.
La loi du 11 brumaire 3117 a conféré , par l’article X X X I, à t)ut créan
cier inscrit la faculté de requérir lu mise aux encheres, sans que la requi'
fcitiou de l’un empêche la réquisition des autre?.
�^f -
( 6 )
i
De ce que tous peuvent requérir , il suit que chacun n’agit que pour
lui-même particulièrement et isolement.
Celui qui reste dans l’inaction préfère de se contenter , en ce qui le
concerne , du prix stipulé au contrat de vente, plutôt que de courir les
hasards attachés à la provocation des enchères. Il consent, par cela seul
qu’il se ta it, à ce que la valeur de l’immeuble demeure définitivement
fixée au pied convenu entre le vendeur et l’acheteur, conformémentà l’ar
ticle XXXII de la loi.
C ’est pour cela que l’article XXXIII de la même loi n’attribue le droit
de poursuivre la revente sur enchères, qu’au plus d ilig e n t, soit de l’ac
quéreur y soit du créancier qui Va requise limitativement, et qu’aucun
droit n’est déféré à ce sujet aux autres créanciers. C’est pour cela enfin
que l’acte , par lequel la revente aux enchères est requise , ne doit être
notifié qu’au vendeur et à Vacquéreur seuls.
Si la loi avait voulu que la soumission d’enchérir profitât à tous les
créanciers , pour être conséquente , elle en aurait prescrit la notification
à tous , comme elle l’a fait à l’égard des affiches ordonnées pour parvenir
à l’expropriation forcée ( * ). Elle les aurait autorisés tous à en poursuivre
l’effet. Hé bien ! elle a fait tout le contraire. Que faut-il en conclure ?
qu’elle a voulu que le créancier vigilant restât seul maître d’un acte de
diligence dont il avait seul voulu courir le danger , et conséquemment
qu’il eût la faculté de s’en désister quand il le jugerait utile à ses intérêts,
sans consulter les autres créanciers , et sans recevoir des conditions de
leur part. Les créanciers qui se sont abstenus de faire des soumissions
¿ ’enchérir , ont formé par leur silence leur contrat extra-judiciaire avec
l’acquéreur , comme ils l’ont voulu ; de quel droit s’opposeraient - ils
donc à ce que le créancier qui a pris un parti différent, exécute le sien
de son côté comme il lui plaît ?
Nous nous y opposons , diront-ils , en vertu du droit que nous donne
l’article XVIII de la loi du 11 brumaire sur l’expropriation forcée, de
profiter de l’enchère lorsqu’il y en a une. Le créancier qui l’a faite , s’il
ne se présente pas au jour indiqué pour l’adjudication, à l’effet de pour
suivre son enchère, n’en est pas seulement déchu, il en est puni par
une condamnation aux frais de poursuite, et en outre , à payer, comme
excédant du p r ix , la somme à laquelle il s'était obligé de porter ou
fa ir e porter Vimmeuble en sus du prix conventionnel. Cette peiue tourne
( * ) A rticle V I de la lo i du u
brum aire , «ur l'«xpropriation.
�.* f'
C 7
)
nécessairement au profit de tous les créanciers dans l’ordre de leurs hypo
thèques respectives ; donc l’enchère, quoique faite par un seul , est une
amélioration commune à tous , et , par suite , il n’appartient pas à celui
qui l’a faite de la rétracter.
A ce raisonnement qui est le principal motif du jugement dont est ap
pel , nous répondrons que l’on confond ici les choses et les temps. Ce
n’est pas aussitôt que la soumission d’enchérir est faite, que l’enchcre est
déclarée appartenir sans retour aux créanciers, c’est seulement lorsque la
mise aux enchères, provoquée par le soumissionnaire , a été effectuée par
l’acquéreur; lorsque les affiches ont été posées , qu’elles ont été notifiées7
tous les créanciers inscrits , en exécution de l’article V I de la loi sur
l’expropriation forcée ; lorsque cette notification leur a rendu l’objet et lebénéfice de la poursuite, communs ; enfin , lorsqu'au jour annoncé pour,
l'adjudication, le soumissionnaire ne se présente pas pour l’accepter.
Alors la partie est engagée avec tous les créanciers inscrits, puisque les
affiches ont été notifiées à tous. Le provoquant qui a attendu le dénoue
ment pour se retirer du jeu , doit y laisser sa mise imprudente , sans doute ,
et c’est à tous les créanciers qu’il doit la la is s e r , puisqu’il jo u a it avec tous.
Mais qu’ a de commun le soumissionnaire qui, comme madame de V i
ch y, se retire d’entrée de je u , et avant que la partie s’engage ; qu’a-t-il
de commun , disons-nous, avec celui qui persévère dans sa provocation
jusqu’à la fin, et ne se retire qu’au dénouement ? Le contrat est formé
avec ce dernier par l’appel de tous les créanciers auxquels l’affiche pour
la revente a été notifiée, au lieu qu’il n’en existe aucun entre le premier *
et la généralité des créanciers auxquels rien n’a été notifié. Concluons
qu’il n’y a point de parité à établir entre deux cas si différens, et que la
démarche imprudente de madame de V ic h y , ayant été rétractée avant que
l ’oreille des créanciers en eût été frappée par aucune notification, elle ne
leur a ouvert aucune action contre elle.
Ils sont d’autant moins fondés à dicter des I013 à madame de Vichy f
dans les circonstance# particulières de cette affaire , et à lui reprocher
l’abandon de ses premières démarches , qu’ayant tardé à requérir la mise au* fencbèies jusqu’aux derniers jours du d é la i, ils ne peuvent pas dire
qu’elle les a empêchés d’agir eux-mêmes , en les endormant dans une
fausse sécurité , ni que l’abandon de scs poursuites trompe leur attente ;
car ils n’ont pu être instruits de sa soumission d enchérir , qu’après l'ex
piration du délai 3 et par conséquent il est impossible qu’elle ait influé
�( 8 )
sur la détermination qu’ils prirent de s’en tenir au prix stipulé par le
contrat de vente.
Des vérités si frappantes n’ ont pas besoin , pour réunir tous les suf
frages , d’être appuyées sur des exemples ; mais s’il pouvait être utile
d’en indiquer , nous renverrions les intimés au n.° n 5 du journal du
palais , où l’on trouve à la page 38 un préjugé qui les a consacrées dans
des circonstances bien plus délicates que celle où la question se présente
aujourd’hui.
Il ne s’agissait pas seulement, en effet, de savoir si un acquéreur pou
vait être contraint de subir la mise aux enchères de l’immeuble par lui acquis,
6ur la simple allégation qu’il avait existé une soumission d’enchérir
non rapportée , une soumission désavouée , abandonnée par le créancier
au nom duquel elle avait été faite irrégulièrement , et qui , n’ayant pas
été signifiée au vendeur , était repoussée par la loi comme insuffisante et
nulle : il s’agissait de savoir s i , d’après la loi de l’an 7 , le créancier
qui a requis la mise aux enchères , qui persiste à la requérir , qui a
rempli toutes les formalités, qui représente tous les actes exigés par la l o i ,
peut être forcé à s’en désister , en le mettant hors d’intérêt par des offresréelles du montant de sa créance ; et si les autres créanciers , que l ’on
ne désintéresse pas de même , peuvent intervenir pour se subroger à la
poursuite , dans le cas où l’enchérisseur serait condamné à recevoir son
paiem ent, à se désister de son enchère , et à se taire. Hé bien ! la résis
tance du créancier soumissionnaire , l’intervention des autres créanciers,
et leur dem ande en subrogation , furent égalem en t repoussées.
Le i.er germ inal an 10 , le Tribunal de première instance > séant à
Meaux , où l’affaire fut d’abord portée, condamna le créancier à recevoir
les offres , à se désister de la réquisition qu’il avait faite pour la revente
de l ’im m euble aux enchères, et
à consentir la radiation de son ins
cription.
Appel au Tribunal séant à Paris.
Intervention , en cause d’appel , de la citoyenne Poncet créancière ,
pour requérir d’être subrogée à la poursuite.
16 thermidor an 10 , jugement contradictoire par lequel le Tribunal
rejette l’intervention , dit qu’il a été bien jugé par le jugement dont est
appel , et ordonne qu’il sera exécuté suivant sa forme et teneur.
Le Tribunal d’appel de Riom a décidé la même question de la même
manière } par jugement du 11 prairial au i l , dans l’espèce suivante ;
Alexis
�C 9
)
Alexis Reynaud vendit quelques immeubles à Jean-Baptiste Trellet ;
celui-ci fit notifier son contrat d’acquisition aux créanciers inscrits. Bablantier , l’ un d’e u x , déclara , tant à l’acquéreur qu’au vendeur , qu’il
entendait enchérir d’un vingtième en sus du prix exprimé au contrat de
vente. Lartaud , autre créancier inscrit, garda le silence ; mais Bablantie r, s’étant départi de son enchère , Lartaud se réveille ; il le fait as
signer , ainsi que l’acquéreur , au Tribunal de Gannat , pour voir dire
qu’il sera subrogé à l’enchère. Jugement du 3 nivose an 10 , qui déclare
Lartaud non recevable. Les motifs de ce jugement sont ainsi
conçus :
« Vu les articles X X X I , X X X II, XXXIII de la loi du n brumaire
» an 7 , considérant que l’acquéreur est tenu de notifier son contrat d’ac» quisition aux créanciers inscrits , et que tout créancier a le droit de
» surenchérir ; qu’ainsi le créancier , qui veut profiter du bénéfice de la
» l o i , est personnellement tenu de satisfaire aux obligations qu’elle
» impose.
»
»
»
»
» Attendu qu’aucun des articles du code hypothécaire ne rend commun
à tous les créanciers la réquisition de mise aux enchères faites par l’un
d’eux , puisque par l’article XXXII cette réquisition ne doit £tre signifiée qu’à l’acquéreur et au vendeur , et que d’après l’article XXXIII la
revente ne peut être poursuivie que par l’acquéreur , ou le créancier
» qui l’aura requise.
» Attendu qu’aucun article de la loi n’accorde aux créanciers le droit
» de se faire subroger à l’acte de réquisition de mise aux enchères faite
» par l’un d’eux , et que ses dispositions sont telles , que la supposition
» ne peut s’en faire sans lui donner un sens contraire.
» Attendu que la partie de Maneel a pu renoncer au bénéfice de son
» acte de réquisition, qu'elle n'avait fa it que pour la conservation de
» ses droits ; qu’ il est de principe que chacun peut renoncer au droit
» qui lui appartient, lorsqu’il est facultatif, à moins que la loi n’y at» tache des conséquences formellement exprimées et utiles pour des
» tiers , ce qui ne se rencontre pas dans la loi du i i brumaire an 7 ».
Le T ribu nal, etc.
Appel de la part de Lartaud. Jugement du 11 prairial an 11 , par
lequel le Tribunal d’appel , séant à Riom , par les motifs exprimés au
jugement du Tribunal de G annat, confirme ce jugem ent, sauf à Lartaud,
appelant, et aux autres créanciers inscrits , leur action contre Bablantier pour lui faire rapporter le montant de son enchère.
�(
lo
)
Si, dans ces deux affaires, deux Tribunaux d’appel différons ont refusé
aux créanciers inscrits la subrogation à l’enchère d’un autre créancier
qui ne voulait pas ou qui ne pouvait pas y donner suite , quoique tous
les actes prescrits par la loi eussent été régulièrement faits et qu’ils
existassent, combien à plus forte raison le citoyenMagauddoit-iltriompher
des efforts des intimés qui veulent être subrogés à une soumission d’en
chérir , dont les actes n’existent p lu s, et qui n’a jamais eu une exis
tence légale (*).
On est prévenu qu’il3 se proposent de tirer un grand parti de l’article
X C X IX de la nouvelle loi sur le régime hypothécaire , formant le
titre V I , livre III du Code c iv il, adopté par le corps législatif le 28
ventôse, qui admet leur système pour l’avenir , et autorise tous les créan
ciers inscrits à se subroger aux enchères faites par un seul. Mais ils
s’abusent, s’ils placent quelque confiance dans ce moyen tiré d’une loi
de trois ans postérieure à l’anéantissement de la soumission d’enchérir
qu’ils essayent de faire revivre.
D ’un côté , les lois n’ont point d’effet rétroactif, et ne disposent que
pour l’avenir (**). La disposition du Code civil qu’ ils invoquent, est
nouvelle ; elle ajoute à la loi du 11 brumaire an 7. Cette disposition
nouvelle et additionnelle fixera le sort et l ’effet des enchères qui seront
faites à l’avenir ; mais elle est sans influence sur le eort et les effets des
enchères fa ites et abandonnées depuis trois ans.
En second lieu , si l’article XCXIX de la loi nouvelle est favorable
au système des intimés , d’un autre cô té , l’article X C V I qui le précède
détruit leur espoir sous un autre point de vue ; car il ne donne d’effet
( * ) Q u ’on n’essaye pas de balancer ces préjuges par lo jugement rendu an tribunal de
cassation , lo
an 1 0 ,
dans l ’offaire
G enioust et V crsep u y ; il est
absolum ent «ans application ; car il n’était pas question , dans l ’affairo V c rsep u y , de savoir
ci des créanciers inscrit« devaient ctre reçus à se subroger à l ’enchùro faite par un autre
créan cier > pour requérir la mise d'un bien rendu aux enchères. Il s’agissait m ila u icn t de
la v o ir si un créancier inscrit avait la faculté de se subroger n la poursuite d ’uno expropria
tion fo rc é e, sur laquelle le poursuivant semblait disposé à ne pas requérir la tniso aux enchè
res , lo jour indiqué par les affiches devenues commune* à tous les créanciers par la noti
fication qui leur en avait é té fa ito , en exécution do l ’article V I de la loi du u brumaire an
7
sur l ’oxp.-oprif.tion forcée ; ce qui n’a rien do commun avec la subrogation aux enchère»
faite sur une vente volontaire qui no sont notifiées qu’à l'acquereur et au vendeur. D 'ailleurs ,
la question de savoir si la subrogation à la poursuito do l ’expropriation forcée est adm issiM o, ne fut même pas jugée dan» l ’affairo V crsep u y , puisque le poursuivant l'avait écartée
•n continuant la poursuite , et en requérant l'adjudication qui fut prononcée.
(*■* ) A rticle
I I , titre préliminaire du C ode,
�H A 'r
(
i>
t> -
)
qu’ aux soumissions d’enchérir qui seront légalement faites; et il exig e,
comme la loi du 11 brumaire an 7 , que ces soumissions soient notifiées
tant à l’acquéreur qu’au vendeur, dans le d é la i, à peine de nullité, La
soumission d’enchérir de la dame Langlard n’avait point été signifiée
à M. de V ichy , vendeur , dans le délai , encore une fois ; ce point de
fait est constant ; elle était donc radicalement nulle et déclarée telle
par la loi. Or , ce qui est nul ne peut jamais fonder d’action contre per
sonne j quod nullum e s t , nullum producit effectum.
S’il fallait couronner des moyens si victorieux par les considérations
de la faveur , nous ferions remarquer le défaut d’intérêt de l’attaque des
intimés , et l’intérêt majeur de la défense du citoyen Magaud.
L ’attaque des intimés est sans intérêt, et comment ? parce que si elle
obtenait quelque succès, la créance de la dame de V ichi qui est anté
rieure aux leurs , absorberait les enchères qu’ils provoquent, et qu’il ne
leur en reviendrait rien.
L ’intérêt de la défense du citoyen Magaud est m ajeur, au contraire ,
et comment ? parce qu’il a vendu, au cours de l’an 9 , son bien de St.Sandoux , pour acheter Varvasse ; qu’il n’avait fait d’abord que des
ventes conditionnelles, et qu’il les a rendues pures et simples lorsqu’il .
a dû croire la propriété de Varvassejmmuablement fixée sur sa tête , par
l’expiration du délai des enchères , et le désistement de la dame de
Vichy du projet qu’elle avait annoncé d’en former. Quelle serait donc
sa position , si cette
acquisition lui échappait
aujourd’hui que les
prix des fonds ont acquis un tel accroissement de valeur , qu’il ne
la remplacerait pas avec un tiers de perte ? Egalement dépouillé, et de
son ancien et de son nouveau patrimoine, par l’acharnement des Ricard à
le vexer sans profit, il serait difficile de concevoir une situation plus
pénible que la sienne : niais la justice et la loi qui le protègent,
le garantiront de ce malheur.
Telle est l’opinion du Jurisconsulte ,
soussigné.
Délibéré à Clermont-Ferrand , le trois germinal an 12.
B E R G I E R.
Les soussignés qui ont lu le mémoire à consulter pour le citoyen Magaud
contre les créanciers de V i c l i y , et la consultation du citoyen B e r g ic r, du 5
de ce mois ,
Sont absolument du mime avis que le citoyen Bergicr, et par les mêmes
motifs.
2 2
^
�(
12
)
Il faut d’abord ne pas perdre de vue un point e s se n tie l, qui est que la fa
culté d’enchérir tendant à l ’inexécution d’un contrat, doit toujours être jugée
rigoureusem ent: il faut avoir rem pli strictem ent les formalités prescrites par
la l o i , à peine de déchéance.
A près cette observation prélim inaire, et en supposant même qu’il y eut ,
dans le délai fixé par la loi, une notification d’enchère de la part de la dame de
V ich y au citoyen M agaud, acqu éreu r, ce qui est douteux , puisque l ’acte de
notification n ’est point rapporté , et que le tribunal de Clerm ont s’est con
tenté de la su p p o ser, d’après une m ention vague contenue dans un autre acte ,
La dame de V ich y n’aurait-elle pas eu la faculté de se départir dans la suite
de la prétendue enchère, sans que les autres créanciers pussent on profiter ?
A cet é g a rd , la loi du n brumaire an 7 étant m u ette, on pourrait invo
quer le principe g én éra l, que tout privilège est personnel. On pourrait dire
.avec fondem ent, que la faculté d’enchérir concernait personnellem ent chaque
créancier , et que le seul qui ait enchéri se désistant de son enéhèrc , le droit
qui en résultait n’est point com municable aux autres.
En supposant ce point d ou teu x, on ne pourrait qu’être fortem ent touché
d’une jurisprudence qui s’est déjà formée par les jugerçiens cités dans la con-r
sultation du citoyen Bergicr.
Il est vrai q u e , suivant la nouvelle loi sur les hypothèques, art. X C I X , le
désistem ent du créa n cier, requérant la mise aux en ch ères, n’empêche pas
les autres créanciers de poursuivre l’adjudication.
M ais on sait aussi que les lois n’ont point d’effet rétroactif.
Mais un moyen q u i, en faisant abstraction de tous a u tre s, serait seul tran
chant et décisif en faveur du citoyen Magaud , que l ’on peu t même dire n’être
point susceptible de répliq ue, résulte de ce qu’il n’est p ro u v é,en aucune ma
nière , qu’il y ait eu de la part de la dame de V ich y une notification de l'en
chère à son m ari, vendeur. S 'il y en avait eu u n e , il serait très-aisé de le
prouver par la m ention sur les registres du percepteur de l ’enregistrem ent :
o r , il n ’existe à cet égard aucune preuve,
. Cependant il est incontestable, d ’après l ’art. X X X I de la loi du
n
bru
maire an 7 , que cette notification ne devait pas seulem ent être faite à l'ac
quéreur , qu’elle devait encore l ’être au vendeur ; et cet article dit : le to u t, à
peine de nullité.
Il n’y avait donc pas d’enchère , à proprem ent p arler; car ce qui est nul ,
est aux yeu x de la loi comme ce qui n’existe pas. Aussi la loi nouvelle qui ,
comme on l ’a déjà d it , ne doit pas régler les intérêts des parties, en allant
plus loin que celle du 11 brumaire an 7 , 11e parle, art. X Ç I X , que du sim ple
désistem ent, et suppose une enchère régulière : on avoue qu’on ne préyoit
aucune réponse à ce m oyen.
Le tribunal de Clerm ont , en motivant son jugem en t, a dit que « l'acte d«
» notification fait à la requête de T h érèse Langlard à François Crochet, etc.,
�24 3
( 13 )
» le i3 messidor an 9 , constate suffisamment l'existence de l ’enchère par elle
t notifiée aux acquéreurs de son mari ».
O n a déjà observé que cette existence n ’était pas légalem ent prouvée. Mais ,
en la supposant toujours, était-il suffisant que la notification fut faite
aux
acquéreurs du mari ?
O u le tribunal n’a pas songé à cette insuffisance , et une pareille inatten
tio n ne déposerait pas en faveur du jugem ent ; ou il a pensé que cette notifi
cation suffisait ; et dans ce cas , il est tombé dans une erreur qui doit être
réformée.
Enfin , les circonstances dans lesquelles se trouve le citoyen Magaud sont
tellem ent favorables, elles préviennent tellem ent contre la réclamation tar
dive des créanciers qui n’ont évidemment songé à faire valoir un pareil m oyen,
qu’à raison de l ’augmentation survenue dans la valeur des fonds , qu’on peut
dire que les raisons qu’on vient de déduire en recevraien t, si elles en avaient
b e s o in , u n n çu veau degré de force.
Délibéré à Paris par les anciens Jurisconsultes , soussignés, le 3.8 germinal
an 13. d e là République française.
GRENIER
et F A V A R D , du Puy-de-Dôme.
L e sou ssign é, qui a vu et examiné la consultation ci-dessus et des autres
parts , est du même avis et par les mêmes raisons.
D ’une p a r t , la circonstance que l ’encliêre n ’a pas été notifiée au précé
dent propriétaire , débiteur p rin cip a l, annullant évidemment ce.tte enchère
aux termes de l ’ancienne comme de la nouvelle loi , les autres créanciers
n ’auraient pu en tirer avantage , q u an d , en thèse générale , ils y seraient
autorisés.
D ’autre part , ce n ’est pas la sim ple enchère faite clandestinement , pour
ainsi dire , entre le créancier , l’acquéreur et le débiteur , qui peut donner
ce droit aux autres créanciers; mais la mise aux enchères effective qui a
lieu par la signification à tous les créanciers inscrits , et par les af'üclies.
Cette démarche publique étant une fois faite , elle ne peut pas être illu
soire , et tous les créanciers ont droit d’en profiter.
C ’est le seul sens raisonnable qu’on puisse d o n n e r à l ’article X C I X du titre
V I de la nouvelle loi sur les privilèges et hypothèques.
D ’autre part enfin , tout doit avoir son terme ; tout est prom pt et rapide
dans la marche de la loi sur les hypothèques. I-*« transcription , la notifica
tion , l ’en chère, l ’expropriation, tout doif être fait dans les plus brefs délais,
puisque le plus long ne passe pas /|<> jours.
C ep en d an t, dans le plan des adversaires du c.cn Magaud , un créancier
pourrait , pendant 3o ans , expulser de sa propriété un acquéreur , parce
qu’il a plu à<un créancier de faire une enchère à laquelle il a cru ue devoir
donner aucune suite.
�IW
¡.
,
(
O n dît
'4
)
pendant 3o ans , parce que si on admet une
pareille action
après deux an s, il n ’y a pas de raison pour ne pas l'étendre à tro is, à
quatre , à d ix , et jusqu’à trente ans j ce qui serait absolument contraire à
l ’esprit de cette loi , dont l ’unique but est de fixer , d’une manière prom pte
rt absolue , l ’irrévocabilité de la propriété sur la tête de l ’acquéreur.
Délibéré à Clermont-Ferrand. , le g floréal an 12.
B O I R O T.
L e Conseil so u ssig n é, qui a vu la présente C o n su ltatio n , est entiè
rem ent du même avis et par les mêmes raisons. L es résolutions tp i y
sont prises sont appuyées sur les principes les p lu s certains , et d’une
application absolument indispensable à l ’ espèce.
Délibéré à R io m , le to floréal an 22.
A N D R A U D.
L e Conseil soussigné est entièrem ent du même avis et par les mêmes rai
sons. R ien ne constate d’abord l ’existence de la déclaration d’enchère; on ne
rapporte d’autre preuve que.la m ention qui en est faite dans l ’acte de notifica
tion fait à la requête de T h érèse Langlard , le 17 messidor an 9. Cette men
tion suffit-elle ? non, sans doute ; ce n’est pas le cas d ’appliquer la maxime ,
in antujuis enuntiativa probant. L es créanciers ne peuvent pas avoir plus de
droit que T h érèse Langlard ; et celle-ci pourrait-elle se dispenser de r a p p o r
ter l’acte même ? Serait-elle reçue à y su p p léer par la m ention insérée dans
l’acte du 13 messidor ? E n suite , cette m ention pourrait-elle être regardée
comme une p r e u v e suffisante de l'existence do la déclaration d’enchère ? L ’a c
quéreur serait toujours fondé à exiger la représentation de l'original qui peut
être infecté de vices de forme. Ces raisons , jointes à celles développées dans
la co n su lta tio n , ne doivent laisser aucun doute sur le mal jugé du jugem ent.
Délibéré à Riom, ce 10 floréal an 13..
PAGES -MEIMAC.
j y
o
a?
j ê
D u citoyen B e r n a r d M A G A U D , appelant, sur le mémoire imprimé
que viennent de fa ire paraître les héritiers R IC A R D , intimés.
L e mémoire des héritier* Ricaril n’est qu’une déclamation insipide
nui n’apprend rien au Tribunal d’appel de ce qui doit fixer sou juge1 __
ment dans
cette affaire.
�Z S I
C 15
)
Pas un mot , dans 25 pages d’impression , de la nullité de l’enchère
prétendue faite par la dame L an glard-dc-V ichy, faute d’avoir été
notifiée au vendeur dans le délai fatal.
Le point de d ro it, que la soumission d’enchérir l ’immeuble , dont
la transcription de la vente a été notifiée aux créanciers inscrits ,
doit être signifié, tant à l’acquéreur qu’au vendeur, dans le mois de la
notification du certificat de transcription, à peine de nullité , ne peut
pas être mis en problème puisque l’article XXXI de la loi du 11
brumaire an 7 en a une disposition textuelle , confirmée par l’article
MMCLXXXI du nouveau Code civil , n.os i.er , 3 et 4.
Le point de f a it , que la réquisition de mise aux enchères de la dame
Langlard-de-Vichy ne fut point signifiée à son m a ri, vendeur, dans le
mois de la notification de la transcription , qui expira le 12 prairial au
f) , ne peut pas être mis en doute non plus , puisque les héritiers Ricard
ont dit eux-mêmes , page 6 de leur mémoire imprimé, que les réquisi
tions de mise aux enchères notifiées à Bernard Magaud le 11 prairial ,
et aux autres acquéreurs le 16 , ne furent dénoncées au sieur de V ic h y ,
vendeur, à son domicile élu chez le citoyen Bonnefoi , que les 11 et
i 3 messidor suivant , c’est-à-dire, un mois , au m oins, après l’expiration
du délai fatal j et les extraits de 3 registres de l’enregistrement confirment
cette vérité.
Quelle est la conséquence irrésistible et forcée de ces deux points ,
l ’un de droit , l’autre de fait , également incontestables ? que la sou
mission d’enchérir de la dame de V ich y , eût-elle existé , elle serait nulle
pour n’avoir pas été notifiée dans le délai au vendeur, et par une suite,
que la soumissionnaire serait tombée en déchéance.
Or , comment justifier après cela le jugement dont est appel , qui
ordonne à la dame de Vichy de poursuivre une -pzreMlerequisition nulle et
tombée en déchéance ? q u i, à son refus, autorise les héritiers Ricard à se
subroger à la poursuite , et qui enfin condamne Bernard Magaud ,
acquéreur , à subir cette vexation ? un acte de diligence, n u l , ne peut
produire d’effet pour personne ; quod nullum e s t , nullum producit ejfectum. La soumission nulle de la dame de Vichy , quand 011 en représen
terait les actes , ne donnerait donc d ro it, ni à elle , ni à aucun autre
créancier , de déposséder Bernard Magaud de son acquisition. Il est
inconcevable qu’ une vérité si frappante n’ait pas été sentie par les
premiers juges,
2.0 Les dissertations à perdre haleine , dans lesquelles les héritiers
Ricard se jettent sur d’autres questions, sont peine perdue. Bernard
Magaud se gardera bien de lasser l’attention de ses ju ges, en s’enfonçant
dans les ténèbres avec ses adversaires,pour faire appercevoir leurs écarts.
Quand une affaire peut se vuider par un moyen tranchant qui s’explique
en deux m o ts, et qui est de nature à porter la conviction dans les esprits
les plus rebelles, comme celui de la nullité de 1 enchère que les héritiers
Ricard voudraient ressusciter à toute force , pourquoi 11e pas s’y tenir ?
Pourquoi ne pas épargner au T ribu n al l’eunui des dissertations assomJnantc3 dans lesquelles ou voudrait uous .engager sans utilité?
3 .° Mais nous ne pouvons pas également nous dispenser de dire quelques
mots de cet ama| de déclamations injurieuses , dont le mémoire des
héritiers Ricard est un dégoûtant tissu.
�( 16 )
Ils crient , d’un bout à l’autre , à la fraude , à la collusion. A les
entendre , le citoyen Magaud s’est ligué contr’e u x , avec la dame de
V ichy , pour leur faire perdre la créance la plus favorable et la plus
légitime , eu s’emparant du bien de leur débiteur à vil prix. Mais , de
bonne f o i , y a-t-il de la raison à prétendre que la dame de Vichy ,
n’a abandonné que par collusion et à dessein de nuire aux créanciers ,
une soumission d’enchérir nulle et insoutenable , à laquelle elle n’aurait pu donner suite qu’en s’exposant à faire et à perdre cinq à six mille
francs de frais ? Il n’y en a pas davantage à crier contre le c.en Magaud ,
parce qu’il résiste à ce que la dame de Vichy exerce contre lui une action
en expropriation qu’elle n’a pas.
Eût-il fait une acquisition aussi avantageuse qu’on veut le dire , ni la
justice la plus sévère , ni la délicatesse la plus généreuse ne lui impose
raient l’obligation d’y renoncer au profit des créanciers du vendeur après
avoir vendu les biens de ses pères , pour la payer.
Mais d’ailleurs il fit' cette acquisition au plus haut prix dans le
tem ps, et si bien au plus haut p rix , qu’il couvrit l’enchère de
messieurs Ducrohet , d’Albignat , de Riom , et Margeride de Clermont , qui se retirèrent sans vouloir surenchérir.
Ce bien vaut 100 mille francs aujourd’hui , dit-on , et n’en coûte
que 68 au citoyen Magaud : quand cela se ra it, on ne pourrait voir là
que l’effet de la progression des valeurs des immeubles, depuis l’an
neuf ; et bien loin qu’il en résultât un motif de le dépouiller , après
qu’il a vendu ses biens de Saint-Sandoux , au même prix proportionnel
de l’an 9 auquel il a acheté , ce serait une puissante considéra
tion pour le maintenir dans son acquisition } dont il ne pourrait être
déchu sans éprouver la perte de 3 o mille francs ou davantage , qu’il
aurait à subir pour remplacer son bien de patrimoine aliéné.
Enfin , le bail général de Varvasse , lorsqu’il fut vendu au citoyen
Magaud et à cinq à six autres acquéreurs partiels , n’était que de
3 5oo francs , et les fermiers ne payaient les impositions qu’en déduc
tion de ce prix.
Le produit des différentes ventes passa quatre-vingt-dix mille francs.
Peut-on sérieusement crier à la vilité d’un tel prix ?
Des aboiemens si ridicules ne peuvent inspirer d’autre sentiment que
celui de la pitié.
M A G A U D .
Clermont-Ferrand, de l'Imprimerie de L IM E T , Pè re et Fils.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Magaud, Bernard-Antoine. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Grenier
Favard
Boirot
Andraud
Pagès-Meymac
Magaud
Subject
The topic of the resource
plus-value
nullité
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
châteaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour Bernard-Antoine Magaud, principal acquéreur du bien de Varvasse, provenu de Jean-François-Marie de Vichy, défendeur en assistance de cause, et incidemment appelant de jugement rendu au Tribunal de première instance de Clermont, le 3 Messidor an 11 ; contre les héritiers d'Antoine Ricard, et autres créanciers inscrits de Jean-François-Marie de Vichy, intimé ; en présence de Thérèse Langlard, épouse divorcée, et créancière principale dudit de Vichy, appelante et demanderesse en assistance de cause.
Table Godemel : Enchère : 1. la déclaration de mise aux enchères peut-elle s’établir autrement que par le rapport de l’acte contenant la soumission du créancier ? 2. l’enchère faite par certains créanciers du débiteur du vendeur, profite-t-elle aux créanciers ? si les soumissionnaires abandonnent, ces créanciers peuvent-ils obtenir subrogation, et poursuivre en même temps la revente pour expropriation forcée ? 3. la déclaration de mise aux enchères, d’après l’article 31 de la loi du 11 brumaire an 7, doit être notifiée dans le mois, à peine de nullité, aussi bien au vendeur qu’à l’acquéreur.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Limet (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
Circa 1781-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1409
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0244
BCU_Factums_M0243
BCU_Factums_G1410
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53223/BCU_Factums_G1409.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chanonat (63084)
La Varvasse (château de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
chateaux
enchères
Giscard d'Estaing (famille de)
nullité
plus-value
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53814/BCU_Factums_M0503.pdf
e0d0037f35a89e38d9dc5f3dac48f780
PDF Text
Text
MÉMOIRES
A
C O N S U L T E R ,
ET CONSULTATIONS.
PA R
.
des reconnoissances très-anciennes, et nouvelle
ment ratifiées, le s habitans d’un village avoient reconnu
des cens sur des héritages par eux possédés, en expri
mant la contenance et les confins de chacun de ces hé
ritages ; et en même temps ils avoient reconnu que tous
les autres héritages non sujets à cens, situés dans les ap
partenances du villa g e, appartenoient au seigneur, en
toute propriété , et que quand ils les cultivoient, ils
etoient obligés d’en délivrer au seigneur la percière au
quart des fruits.
E n conséquence, et dans tous les temps ? le seigneur
A
�( O
avoit perçu le quart des fruits de tous les héritages cul
tivés et non sujets à des cens.
Mais depuis la révolution, le ci-devant seigneur a été
privé de ses droits de percière, qui lui ont été x’efusés,
et il a d’ailleurs conservé les reconnoissances qui les lui
atti'ibuent, et qu’il a soustraites au brûlement ordonné
par l’article 6 de la loi du 17 juillet 1793 et il demande
si aujourd’hui il peut faire usage en justice des reconnois
sances qui lui donnent le droit de perciere, des que les
mêmes reconnoissances établissent en meme temps des
droits féodaux de censive sur d’autres héritages.
l e
c o n s e il
s o u s s ig n é
, qui a vu le pré
sent m ém oire,
E s t i m e que le ci-devant seigneur peut, sans danger,
produire en justice les titres qui établissent ses droits de
propriété sur des héritages soumis à la percière au quart
des fruits , quoique les mômes titres lui attribuent des
droits féodaux sur d’autres héritages, et qu’il n’a pas à
craindre que par le mélange de divers droits, dans les
mêmes titres , les tribunaux ordonnent le brûlement de
ces titres.
La disposition de la loi du 17 juillet 1793 , dans l’ar
ticle 6 , relatif au brûlement des titres féodaux, n’est plus
aujourd’hui susceptible d’exécution. Celte disposition pro
duite par l’effervescence du temps, au milieu des maux
incalculables de 1793 , disposition odieuse en elle-même,
et dangereuse daDS ses effets, a dû nécessairement disparoître -, elle n’a pu vivre davantage que les circonstances
�(
3
)
qui l’a voient vu naître, et les désordres qui l’avoient
produite.
L e Lrulement des titres même uniquement féodaux
étoit dangereux , pour beaucoup de propriétaires non
seigneurs , qui pouvoient s’en servir pour établir leurs
propriétés; car on suppose que les concessions, à la
charge de droits féodaux, eussent été faites à des parti
culiers qui n’en auroient pas joui pendant le temps né
cessaire pour en acquérir la prescription , dès que les
titres de concession auroient été brûlés, comment auroientils pu se défendre des demandes en éviction qui auroient
été formées contre eux? Ces titres leur étoient donc né
cessaires pour conserver leur patrimoine ; et cependant,
parce qu’il y auroit été question de droits féodaux, il
auroit fallu les brûler! Quels désastres ! Quel bouleverse
ment dans les fortunes! Quels maux n’auroient pas pro
duits l’article 6 d e la lo i d u 1 7 ju ille t 1 7 9 3 , si son exécu
tion avoit été maintenue!
E lle étoit donc odieuse cette disposition; mais elle étoit
de plus sans objet : car la suppression des droits féodaux
garantissoit suffisamment les redevables contre les auteurs
des titres; et sous ce rapport on reconnoît toute la vigueur
de la loi du 17 juillet 1793. Mais il en est autrement de
la disposition de son article 6 ; il n’a pu ni dû être exé
cuté lorsque l’effervescence révolutionnaire a c o m m e n c é
à s’appaiser.
Aussi ces vérités furent-elles senties bientôt après la
loi de 1793 : l’article 6 de cette loi avoit ordonne que
les titres féodaux seroient remis aux municipalités pour
y être brûlés; mais l’article 3 de celle du 8 pluviôse an 3 ,
A 2
�C4 )
ordonna, au contraire, « que tous les titres remis aux mu« nicipalités, en exécution de la loi du 17 juillet 1793,
« y resteroient en d épô t , jusqu'à ce qu'il en aurait été
« autrement ordonné. »
Qu’on trouve si l’on peut la levée de cette suspension?
Jusque-là il faut reconnoître que l’abrogation de l’art. 6
de la loi du 17 juillet 1793, n’est pas seulement impli
cite , mais qu’elle est expresse; car la suspension, en pareil
cas , vaut une abrogation parfaite.
M ais il y a plus ; l’article 4 de la même lo i défend
aux notaires et autres officiers publics et privés de déli
vrer des extra its ou expéditions desdits actes, sans les
avoir purgés de tout ce qu i est proscrit par la pré
senta loi.
'Donc la loi permet de délivrer des expéditions en pur
geant les actes des qualifications proscrites; donc l’inten
tion du législateur étoit de conserver ces actes.
XI y a plus encore; car, sur la représentation du comité
de législation et du ministre de la justice , qu’en certain
cas il étoit essentiel d’avoir ces actes dans leur intégralité,
la loi du 11 messidor an 4 « perm it, dans les cas prévus,
aux notaires et autres officiers publics et privés, de
« délivrer des copies ou expéditions des actes désignés
dans la loi du 18 pluviôse, sans lespurger, aux termes
« de l’article 4 de ladite loi. »
Il est donc évident que le législateur a voulu que l’on
c o n s e r v â t les titres, puisqu’il
a senti le besoin que l’on
voit avo ir, pour l’utilité publique, non-seulement
des titres en eux-memes, mais encore de toutes les qua
lifications proscrites qu’ils pouvoient contenir.
s
�(
5
)
Qu’on vienne après cela s’appuyer de ce que la loi du
17 juillet 1793, et le brûleraient, sont rappelés dans plu
sieurs lois postérieures, puisque ces lois ne rappellent le
brûleraient que pour l’abroger.
Dira-t-on encore que l’avis du conseil d’état, du 30
pluviôse an 1 1 , rappelle ce brûleraient? Mais c’est vrai
ment une dérision que de vouloir sans cesse, et dans
toute sorte de cas, appliquer cet avis. 11 a pour objet,
non pas des titres, mais les réclamations fondées sur des
titres mixtes, qu’il déclare compris dans l’abolition : mais
il ne statue rien sur le brûleraient ; il n’en parle que par
occasion , et'comme ayant dans le temps frappé sans dis
tinction les titres mixtes comme les autres , et seulement
pour en tirer la conséquence que les droits fondés sur
des titres m ixtes, sont rangés sur la même ligne que les
droits purement féodaux.
Ce seroit bien plus faussement encore q u ’on prétendroit
tirer un moyen de la jurisprudence de la cour de cassation,
qui ne fait, dit-on, aucune distinction entre les différentes
dispositions de la loi du 17 juillet 1793.
Il est vrai que la cour de cassation n’a pas dit expres
sément qu’il étoit défendu de brûler les titres, mais elle l’a
dit par sa conduite; car elle fait une distinction bien sen
sible entre les diverses dispositions de la loi du 17 juillet
I 793* O n lui a souvent présenté des titres qu’elle a 'rejetés
comme féodaux, et elle a déclaré, dans ces cas, les rede
vances abolies. Mais a-t-elle jamais retenu ces titres pour
les faire bi’ûler? Ne les a-t-elle pas , au contraire , laissés
entre les mains de ceux qui les avoient présentes ?
Ainsi tout doit rassurer le consultant sur la crainte
^3
�C*-
itA JL ^ U
H «-
¡1
' .
r 4'tr ~ ‘
,xuÀy
u ^ b rd
qu’il auroit de vo ir livrer aux flammes les reconnoissances
qu’il pourroit produire pour établir sa propriété sur les
héritages sujets à des droits de percière, et au quart des
fruits; droits qui n’ont en eux-mêmes absolument rien
de féo d a l, et que par conséquent on croit qu’il peut
réclamer justement.
85
D é l i b é r é à R iom , le 27 septembre i o .
ANDRAUD.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis, par
les mêmes considérations, sur tous les points qui sont
traités dans la consultation ci-dessus.
D é l ib é r é à Clermont-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
B E R G 1ER.
D a n s les mêmes actes, les habitans du village du M ontel ont passé reconnoissance en faveur de leur seigneur,
i<\ chacun pour ce qui le concernoit, de divers articles
de cens; 2°. de la propriété des héritages non censuels
du pays > et de la redevance dont ils étoient tenus envers
lu i, sous le nom de percière, lorsqu’ils les cultivoient.
On demande si ces actes peuvent être produits en justice,
pour établir a u jo u rd ’h u i les demandes en prestation de
la percière.
�7
(
)
V u quelques notes et une consultation,
L e C o n se il répond, comme l’auteur de la consulta
tion visée, que la percière est due par les tenanciers des
héritages qui y sont sujets, n’ayant point été atteinte par
l ’abolition des redevances féodales ; et qu’il n’y a ni obs
tacle ni inconvénient à ce que les reconnoissances rela
tives soient employées dans la poursuite dont elle sera
l’objet.
On est dispensé de toute discussion sur la nature non
féodale du droit de percière, après celle dont il a été la
matière, et devant la cour d’appel de R io in , et devant
la cour de cassation, dans l’affaire d’entre le sieur Lassalle
et quelques habitans de la commune de Blanzat.
Dans le cas présent, la demande de la percière sera
établie, comme dans celui du sieur Lassalle, sur de sim
ples reconnoissances. Il a été jugé, et il le sera encore,
que la percière est de nature purement foncière, et n’a
point été comprise dans la suppression des droits féodaux.
Aussi n’est-ce pas le fond du droit de percière qui est
la matière des difficultés dont on cherche la solution ;
mais les reconnoissances, qui en sont les titres uniques,
sont en même tem ps, relativement à d’autres héritages,
ceux de la directe du seigneur, et des cens dont elle étoit
le principe ; et l’on craint que les redevables n’objectent,
i° . que de tels titres ne peuvent être produits, parce que
la loi en avoit ordonné le brulement; 2°. que les mêmes
actes étant relatifs à des droits féodaux, en même temps
qu’au droit foncier de la percière, il y a au moins un
�(
8
)
mélange de féodalité, d’après lequel il faut résoudre que
tout a été supprimé.
Il est vrai que la loi du 17 juillet 1793, après avoir
aboli sans indemnité toutes les redevances seigneuriales
et féodales (art. i er.)> ordonna le brûlement de tous les
titres constitutifs ou récognitifs de ces redevances (art. 6
et suiv.); mais comme elle réserva expressément les rentes
et prestations purement foncièi’eset non féodales (art. 2),
011 voit bien que les titres de ces prestations durent etre
exceptés de l ’incendie.
Ce fut l’esprit révolutionnaire qui dicta cet étrange
c o m m a n d e m e n t , et qui voulut que l’infraction en fût
punie par la peine des fers ; mais l’esprit révolutionnaire
ne réflécliissoit pas.
O n ne vit pns que les titres établissant, en faveur des
s e ig n e u r s , des droits féodaux, pou voient être ceux et les
seuls de la propriété des censitaires;
Que des droits féodaux pouvoient avoir été constitués
ou reconnus accidentellement dans des actes d’ailleurs de
la plus grande im portance, et jusque dans des contrats
de mariage;
E t qu’après to u t, ce seroit souvent une question à ré
soudre, avant l’incendie, si les droits créés ou énoncés
dans les actes, étoient ou n’étoient pas féodaux.
Ces considérations et d’autres se présentèrent quand le
premier mouvement fut appaisé; et ce précepte, qui avoit
de si graves inconvéniens, fut oublié même par ses mo
teurs.
On l’a fort bien remarqué dans la consultation visée ;
�9
(
).
des actes postérieurs, et de législation, et de gouverne
ment, font comprendi’e que la mesure indiscrète du brûlement a été abandonnée : ces textes de la loi de juillet
1793 y restent pour être pris en argumentation de la vo'lo n té formelle d’abolir tous les droits féodaux, et non
pour provoquer des poursuites de nouveaux incendies, et
des peines.
Ce qui est constant, c’est que depuis quelques années
les tribunaux retentissent des débats d’entre les ci-devant
seigneui’s et leurs censitaires ; que les juges ont examiné
les titres, proscrit les droits reconnus féodaux, et rendu
toute leur consistance à ceux qui n’avoient pas ce carac
tère, ou qui n’en avoient que l’apparence, sans qu’il
soit venu à la pensée de personne, que des brulemens
dussent encore être ordonnés, et qu’il y eût des peines à
infliger à ceux qui succomboient dans leurs demandes en
payement de redevances.
Un assentiment général a donc mis hors d’usage le pré
cepte du brûlement : l’on sait bien que la d é s u é tu d e abroge
les lois, et qu’elles tombent devant la réprobation com
mune, comme devant des lois postérieures et contraires,
non solùm suffrogio legislatoris, sed etiam tacito con
sensu omnium per desuetüdinem abrogari. L . 32, ff. D e
legib. ’ et cela, on doit en convenir, s’opère bien plus
facilement, lorsqu’il s’agit d’une erreur évidente, et, pour
ainsi d ire , d’une fièvre de la législation.
Rien donc ne s’oppose à ce que, pour établir la demande
du droit de percière, on produise les reconnoissances qui
en ont été passées, bien que ces actes contiennent en
meme temps des reconnoissances de cens.
�( ID )
D e cet assemblage de reconnoissances diverses dans les
mêmes actes, conclura-t-on que celles qui ont rapport
aux cens abolis, communiquent par leur réunion le vice
qui leur est propre, à celles qui regardent la redevance
non féodale de la percière ? C’est la difficulté véritable
de l’affaire.
Comme la loi de juillet 1793 avoit excepté de la sup
pression les rentes et prestations purement foncières et
non féodales, on fut embarrassé dans le cas ou dans le
même titre et la même concession se trouvoient établis
des droits féodaux et des droits purement fonciers, et
qu’il fallo it, ce sembloit, b rû lera cause de ceux-là, et
c o n s e r v e r à cause de ceux-ci.
U n membre de la convention nationale proposa, le
2 octobre, de séparer dans les actes ce qui étoit pure
ment foncier; mais la convention passa à l’ordre du jour,
et par conséquent refusa d’ordonner la séparation.
Elle s’expliqua même en termes très-précis à ce sujet,
l o r sq u e, le 7 ventôse an 2 , interrogée sur le point de
savoir si l’administration du domaine national devoit re
cevoir le rachat qui lui étoit offert d’une rente foncière
à laquelle un cens étoit ajouté, elle répondit que les rentes
foncières, créées avec mélange de cens ou autres signes
de féodalité, avoient été supprimées.
C ’est de là que partiront les redevables de la percière,
pour soutenir que les mêmes actes contenant les recon
n o i s s a n c e s de ce droit, et des reconnoissances de cens,
l’abolition totale est la conséquence du mélange.
On 11e sauroit même le dissimuler; si, dans le temps de
la loi de juillet 1793? lorsque l’effervescence qui l’avoit
�(
1 1
)
amenée présidoit encore à son exécution, ces reconnois
sances avoient paru , brûlées sans m erci, elles n’auroient
pas laissé plus de traces de la percière que du cens; mais
il ne faut pas argumenter de l’extension dont la pensée du
législateur pou voit être alors susceptible. Puisque la me
sure du brûlement a été abandonnée, elle ne doit, comme
on l’a d it, être tirée à conséquence qu’en ce sens qu’elle
confirma la suppression de toutes prestations féodales, ou
mélangées de féodalité.
E t puisque les actes restent, ce qu’il y a à vérifier, c’est
si la percière, d’après les reconnoissances, est mélangée de
féodalité : le résultat est évidemment négatif.
Comment supposeroit-on le mélange? Il est dit que les
héritages sur lesquels cette redevance se perçoit, sont la
propriété du seigneur, et que, pour raison de cette pro
priété , il perçoit une certaine quotité des fruits qui en
proviennent. II n ’y a là a u c u n e sé p ara tio n du domaine
direct et du domaine utile, et ainsi aucun caractère de
féodalité ; et rien n’est ajouté qui soit entaché de ce vice.
Il n’importe que, dans les mêmes actes, on rencontre
des reconnoissances de cens ; aucune confusion n’en est
la conséquence. Si l’on discute l’un de ces actes, on devra
dire qu’il renferme deux titres; que l’un relatif aux cens
est supprimé, et l’autre regardant la percière est main
tenu; que la cause, la nature, les obligations et les héri
tages sont divers; qu’après avoir reconnu les cens, le re
devable a pu aliéner les héritages censuels et être quitte,
et pourtant continuer d’être obligé sous le rapport de la
percière; et que là où tout est si nettement distinct, il n’y
a réellement point de mélange.
�( Ï2 )
En un m o t, il y a mélange de féodalité, lorsque le
même héritage, d’après le même titre constitutif, sup
porte avec la rente un droit féodal quelconque envers
le même seigneur; et l’idée n’en peut être conçue, lors
qu’il faut passer d’une redevance à une autre, d’une cause
à une autre, d’un héritage à un autre, etc. L e même écrit
contient deux ou plusieurs transactions, sans les confon
dre; elles y sont accolées et non mélangées.
A in si, les reconnoissances que le précepte oublié du
brûlemeut n’empêche pas d’employer, établiront la de
mande de la percière ; et le prétexte du mélange de féo
dalité ne fournira aux redevables qu’une exception faci
lement repoussée.
D é l ib é r é a Paris, le i er. brumaire an 14.
CHABROUD.
D u même avis, par les mêmes motifs.
DÉLIBÉRÉ à Clermout-Ferrand, le 9 frimaire an 14.
BERGI ER.
L
e
CONSEIL SOUSSIGNÉ, qui a vu la reconnois-
sance consentie au seigneur de Chalusset, par les habitans
du village du M ontel, et la présente consultation,
E s t d u même AVIS, et par les mêmes raisons auxquelles
�( ï3 )
il ajoutera un moyen qui trancheroit tous les doutes, s’il
pou voit encore en subsister.
Ce moyen se puise dans les dispositions d’an décret
impérial qui se trouve rappelé dans le tome 4, an 13,
du Recueil de jurisprudence de la cour de cassation, par
S ire y , à la pag. 29 du supplément, èt qui se trouve en
core sous la date du 29 vendémiaire an 1 3 , à la suite
du n°. 213 des Instructions décadaires sur l’enregistre
m en t, tom. 1 2 , pag. 238.
Après que dans l’article 5 de ce décret, il est d i t ,
« on doit considérer comme preuve de l’abolition d’une
« redevance, le titre constitutif, par lequel le même im« meuble se trouve gi’e v é , au profit du même seigneur,
« de redevances foncières et de redevances reconnues féo« dales’, » il est ajouté dans l’article 6 : « N e sera point
« admissible comme -preuve de mélange deféodalité, un
« titre récognitif \ dans lequel les redeva?ices fon cières
«r et les redevances féodales se trouveront énoncées dis« tinctement et séparément, sans q u i l y ait de liaison
« entre Vune et l'autre énonciation. »
O r , dans la reconnoissance du ténement du M ontel,
chacun des habitans et détenteurs a reconnu individuel
lement tenir, savoir, tel particulier, tels et tels héritages,
chacun par sa contenance et ses confins, et sous tel cens
pour chaque héritage ; et ce n’est qu’après toutes ces rcconnoissances, qu’alors tous les détenteurs se réunissent
pour reconnoître que tous lesau très héritages du même téne
ment, qui ne sont point asservis à des cens, appartiennent
en toute propriété audit seigneur j et q üC lorsqu’ils les
cultivent, ils sont tenus de lui en délivrer le quart des
�*4
(
)
fruits : prestation connue en Auvergne sous le nom de
percière, et ailleurs sous ceux de champart, agrier
terrage, etc. ; mais qui est une prestation purement fon
cière, surtout dans une coutume allodiale, comme celle
d’Auvergne.
L ’application des dispositions du décret impérial se
fait donc bien sensiblement à l’espèce du titre récognitif
des habitans du Montel. La percière est une redevance
purement foncière, qui ne frappe pas sur les mêmes i?nm eubles, et qui se trouve énoncée distinctement et sé
parément , et sans aucune liaison antr’elle et les cens
établis par la même reconnoissance sur des héritages toutà-fait differens.
D é l ib é r é a R io m , le 14 mars 1807,
a n d r a u d
.
de la reconnoissance consentie au terrier
de la terre de Chalusset, par les habitans du
village du M ontel> devant Bouyon et Mornac
notaires, le 24 février 1788.
E xtrait
Par-devant les notaires royaux soussignés, et témoins
ci-après nommés, ont comparu Sébastien Faure, Amable
Audanson , Pierre Breschard ( et plusieurs autres dé
nommés ) , tous laboureurs, habitans du village du M on
tel; lesquels, de gré et bonne volonté, après avoir pris
communication d’une reconnoissance reçue de la Farge
notaire ro y a l, le £2 juin 15 7 7 , consentie au profit de'
�( i5 )
Gilbert Daubusson, seigneur de Banson , insérée dans
une expédition du terrier de la (cire de Banson , signée
Rochette, notaire, et du plan figuré du M ontel, qui leur
a été représenté par M . de Sarrazin, et qu’ils ont trouvé
sincère et véritable, de tout quoi ils ont dit être certains
et bien instruits, ont reconnu et confessé ten ir, porter et
posséder, avoir tenu et possédé de tout temps et ancien
neté, du sieur de Sarrazin , a c c e p ta n t, etc. i° . de ladite
reconnoissance, art. i 55y dudit terrier, tiennent, Louis
Beaumont, une maison , grange et étable, et un jardin ;
M ichel M om et, un jardin, etc. M ichel Chom ot, une
maison , etc. Louis G o u rd y, quatre clienevières , etc. ( et
ainsi de plusieurs autres, tous dénommés particulière
ment ) , au cens annuel et perpétuel, solidaire et uni
forme d’argent, 21 s. 2 d . , seigle, etc. avoine, etc. avec
tous droits de directe seigneurie. ( Viennent ensuite d’autres
particu liers q u i reconnoissent c h a c u n les h é ritag e s qu’ils
possèdent sous un cens solidaire en directe seigneurie. )
Tous les cens des susdites pagésies, compris en la présente
reconnoissance, en tout droit de directe seigneurie, tiers
denier de lods et ventes, usage de chevalier, taillables
aux quatre cas en toute justice, haute, moyenne et basse,
payables et portables à la fête de Saint-Julien , 28 août
de chaque année, au château de Banson, pagésie par pagésie, comme dit est.
C’est à la suite de cette clause que se trouve im m é d ia
tement celle ci-après transcrite.
- Reconnoissent de plus tous lesdits confessans , que
toutes les autres terres , héritages et propriétés non in
vestis , situés dans ladite justice dudit seigneur, sont
�( 16 )
et appartiennent en fo n d s et propriété audit sieur de
S a rra zin , dont ils ont promis et se sont obligés de lui
payer la percière de tous les f r u i ts y croissant, qu’ ils
seront tenus de porter à ses granges , et qu ils ne pour
ront partager n i déplacer , sans appeler ledit seigneur
ou ses préposés, etc. Fait et passé , etc. le 24 fevrier
1 7 8 8 en présence de et d e , etc. soussignés, . avec ledit
seigneur et les sieurs H ugon , le R o y , C lo z e l, Tailhard ie r , Sanitas, V id o u z e , G rangh on et Dezrim ard ; les
autres confessans ont déclaré ne savoir signer ; de ce enquis. L ’expédition signée par M ornac, notaire.
,
A. R IO M
de l’imprimerie de
L andriot
, seul imprimeur de
la Cour d’appel. — 1807.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Les habitants de Montel. 1807]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Bergier
Chabroud
Subject
The topic of the resource
percière
droits féodaux
contentieux post-révolutionnaires
Description
An account of the resource
Mémoire à consulter et consultations.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1807
1793-1807
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0503
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Montel-de-Gelat (63237)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53814/BCU_Factums_M0503.jpg
contentieux post-révolutionnaires
droits féodaux
Percière
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53246/BCU_Factums_G1506.pdf
92d9ff98b9f508d7808a29e4c0bc217d
PDF Text
Text
_______________________________________________________________________
•m—
—
n—
■^—
—
!—
i—
^ t —
—
■—
—
m m » w a amam p
MEMOIRE
u S
m
w
w
4 à
w
ET CONSULTATION
C0UR
P O U R
D ’A P P E t
G i l b e r t L A F O N T , propriétaire, aubergiste de
*****
___
la commune de N é ris-le s-B ain s, appelant de
jugement rendu au tribunal de Montluçon, le
14 nivôse an 1 ;
3
ET
ENCORE
POUR
J e a n B O U R N E T , M a r i e L A F O N T , son épouse;
J e a n F O R IC H O N , et M a r i e L A F O N T , sa
femme; appelans d’un jugement rendu au même
tribunal, le 19 ventôse an 1 1 ;
CONTRE
C a th e r in e
-
-
LAFONT,
veuve et commune de
Gilbert-Marie L a f o n t , habitante de la même
commune de N é r is -le s -B a in s , intimée..
Q U E S T IO N
M É D IC O -L É G A L E . '
A quels signes peut-on reconnoître qu’un enfant est né
vivant ?
L e 14 brumaire an 10, Catherine L afon t, intimée, a
épousé Gilbert Lafont. L e père de Catherine l’institua
A
�I#
( o
son héritière universelle, et lui abandonna, dès l’instant
m êm e, les biens qu’il possédoit dans la commune de
Néris.
Il fut stipulé entre les époux une communauté con
jugale. L e mari devoit habiter dans la maison de son
épouse, et confondre une somme de 300 fr. pour prendre
part à la communauté; le reste de ses biens devoit sortir
nature de propres.
Les époux se donnent réciproquement l’usufruit de
tous leurs biens, en cas de non enfans survivans, et
pendant la viduité.
Ce mariage n’a duré que jusqu’au 27 fructidor an 10,
époque du décès de Gilbert-M arie L a fo n t, âgé de vingttrois ans.
L e 21 frimaire an 1 1 , Catherine Lafont a accouché
d’un posthume-, ses couches furent laborieuses et pénibles.
L ’enfant est sorti mort du sein de la mère : c’étoit une
fille. L e même jour on a dressé deux actes civils, c’est< à-dire, l’acte de naissance et celui du décès. Ces actes
sont ainsi conçus :
« A cte de naissance d’un enfant né en ce b o u rg, à
« trois heures et demie après m id i, du légitime mariage
« du défunt G ilbert-M arie Lafont et de Catherine La« font : le sexe de l ’enfant a été déclaré être un enfant
« femme. Prem ier tém oin, François C orre, tisserand,
« voisin à l’enfant-, deuxième tém oin, Marguerite Roclie« fo rt, accoucheuse, domiciliée audit bourg. L e premier
« témoin a signé ; le second a déclaré ne le savoir. Fran« çois C o rre, âgé de quarante ans; le deuxièm e, de
« soixante-six ans.
�« Sur la réquisition à nous faite par Louis L afon t,
« propriétaire, aubergiste, grand-père de l’enfant, aussi
« domicilié audit b o u rg, qui a signé avec le premier
« témoin. Constaté par moi adjoint au maire de la com« mune de N éris, faisant les fonctions d’officier public,
« le maire absent. Signé R eynaud, adjoint. »
O n remarque deux choses importantes à la lecture de
cet acte; i ° . que l’enfant n’a pas été présenté à l’officier
public, conformément à la lo i; 2°. qu’on ne lui a donné
aucun prénom.
Suit l’acte du décès, ainsi conçu :
« A cte de décès d’un enfant fem m e, né du légitime
« mariage de défunt Gilbert-M arie Lafont et de Catlie« rine L afo n t, décédé ledit jour en ce bourg, à quatre
« heiu’es après m idi; né audit lieu le même jour, h trois
« heures et demie de l’api’ès-m idi. Sur la déclaration
« faite par le citoyer/Louis Lafont, propriétaire, auber« giste, grand-père de l’enfant, âgé de cinquante ans,
« et de François C orre, tisserand, âgé de quarante ans,
« tous les deux domiciliés audit b o u rg, qui ont signé.« Constaté par moi Pierre R eynaud, adjoint du maire
« de la commune de N éris, le maire absent, »
Ce sieur Reynaud étoit tout à la fois curé de Néris
et adjoint de la commune ; il avoit été mandé , en sa
première qualité, au moment des couches de Catherine
L afo n t; on lui avoit présenté l’enfant, auquel il avoit
trouvé un reste de chaleur , et il l’avoit baptisé sous
condition.
La sage-femme elle-m ôm e, qui avoit remarqué que
1 enfant étoit en danger lorsqu’il étoit dans le sein de sa
A 2
�4
. • .
C )
m ère, avoit pris la précaution de l’ondoyer avant que
l’enfant fût so rti, et lorsqu’il présentait les pieds.
L a notoriété publique avoit appris que cet enfant étoit
né mort : les parentes et voisines qui assistoient à l’accoucliement l’avoient ainsi déclaré ; elles n’avoient aperçu
aucun signe de vie à l’enfant. La mère elle-m êm e, au
milieu de ses douleurs, téraoignoit la plus grande inquié
tude ; elle croyoit avoir accouché d’un enfant mort : mais
l ’accoucheuse, pour rassurer son esprit dans ce moment
critique et douloureux, lui avoit dit que son enfant étoit
vivant. T e l est toujours l’usage dans ce ras. Catherine
Lafont a persisté à vouloir s’en rapporter à ces paroles
de consolation, et à en tirer parti : elle est accouchée
dans un temps où la loi du 17 nivôse étoit en vigueur,
et où dès-lors elle devoit succéder à son enfant, s’il étoit
né viable. E lle a annoncé sa prétention aux héritiers dé
son mari : mais ceux-ci, qui étoient parfaitement instruits
de la v érité , et qui savoient que l’enfant étoit né m ort,
ont cherché à faire valoir leurs droits \ ils ont d’abord
pris la précaution de faire saisir entre leurs mains et eü
celles des tiers tout ce qui pouvoit être dû à la succession
de G ilbert-M arie L a fo n t, leur frère et beau-frère.
Bientôt s’est engagée une lutte considérable entre les
parties. Catherine Lafont a fait citer au bureau de p aix,
le 12 ventôse an 1 1 , en m ain-levée de la saisie-arrêt,
avec dommages - intérêts ; elle a soutenu qu’elle étoit
seule héritière de son enfant, et que tout devoit lui ap
partenir.
Les voies conciliatoires ayant été sans succès, elle a
présenté requête au tribunal de M ontluçon, le 12 ven-
�5
(
)•
^
tôse an n , pour voir dire, par provision, qu’elle auroit
pleine et entière main-levée des saisies-arrêts, sous toute
réserve de ses autres actions. A l’appui de cette requête
elle a justifié de son contrat de mariage , de l’acte de
décès de son m ari, et des actes de naissance et de décès
de son enfant.
L e 19 ventôse an 11 elle a obtenu un jugement par
d éfaut, qui lui adjuge ses conclusions.
Mais ce premier jugement n’étoit qu’un prélim inaire;
et Catherine Lafont avoit sa principale confiance dans
les deux actes de naissance et de décès de son enfant, qui,
suivant e lle , établissoient que cet enfant avoit vécu une
demi-heure; elle les opposoit aux héritiers de son mari.,
comme un obstacle invincible à leurs prétentions, et
comme un moyen certain de s’approprier la succession
de son enfant.
Gilbert Lafont crut d evoir, dans cette circonstance,
s’inscrire en faux incident contre ces deux actes; il con
signa l’amende, conformément aux articles 8, 9 et 10 de
l’ordonnance de 1737; e t, muni de'Sa quittance, il pré
senta requête au tribunal de M on tluçon , tendante à ce,
qu’il lui fût permis de s’inscrire en faux incident contre
les deux actes dont il s’agit, avec sommation à Catherine
Lafont de déclarer si elle entendoit se servir de ces deux
pièces. La requête fut présentée et signifiée les 1 , 2 et
3 germinal an 11. L e 7 du même mois, Catherine Lafont
fit sa déclaration qu’elle entendoit se servir de ces mêmes
pièces, et le même jour elle en fit le dépôt au greiï'e; il
en fut dressé procès verbal le 10 ; et le sieur Lafont pré
senta ses faits et moyens de faux -ainsi qu’il suit.
�(6)
IL expose que plusieurs personnes étaient présentes à
l’accouchement de Catherine L a fo n t, veuve de G ilbert;
que l’une d’elles, en soutenant la mère , aperçut les
pieds de 1,’enfant sortir les premiers ; toutes les personnes,
s’écrièrent : V o ilà un enfant mort. L a sage-femme de
mande et prend de l’eau bénite, et s’empresse d’ondoyer
l’enfant dans le sein de la mère ; elle emploie cinq à six
minutes pour achever la délivrance; elle prend cet enfant,
qu’elle met dans les bras de M arie Gusse, épouse de Fran
çois Corre. Immédiatement après la sage-femme demande
de l’eau-de-vie, elle en frotte la tempe de l’enfant et autres
parties de son corps ; elle ouvre avec un de ses doigts la
bouche de l’enfant, la bouche se referme de suite : la
pâleur étoit sur son visage, ses yeux étoient fermés; en
uii m ot, l’enfant étoit vraiment mort né.
François C orre, l’un des témoins dénommés aux actes
de naissance et de m ort, sur la déclaration duquel les actes
ont été rédigés par l'adjoint, n’étoit pas présent à l’accou
chement de Catherine Lafont; il n’arriva dans l’apparte
ment de l’accouchée que dans l’instant où la sage-femme
ensevelissoitl’enfant pour le faire inhumer.
L a femme de Corre, en palpant l’enfant, dit à son époux :
V a s avec L o u is L a fo n t (aïeul maternel de l’en fan t),
Ju ire fa ir e ces actes de naissance et de décès. C’est dans
le môme instant que les actes de naissance et de décès ont
été rédigés sous la date du 21 frimaire an u ,
G ilbert Lafont expose encore que l’enfant n’a pas, aux
termes de l’article 6, titre 3 de la loi du ao septembre Ï792,
été porté à la maison commune de Néris : qu’il n’a pas
été présente a l’adjoint. Il n’a point ute fait rnême de ré-*
�>4
'( V O
tjuisition à l’adjoint de se transporter à la maison où étoit
l’enfant; il n’a par conséquent remarqué aucuns signes de
vie de sa part. Il n’a rédigé les deux actes que sur la décla
ration des deux témoins, du nombre desquels étoit l’aïeul
maternel, partie intéressée, et François Corre, qui avoit
seulement vu ensevelir l’enfant.
Il n’a été donné aucun prénom à l’enfant, ou du
moins l’acte de naissance n’én contient aucun ; ce qui
est contraire à l’art. 7 du même titre de la loi citée.
Les professions des père et mère de l’enfant ne sont
pas énoncées dans l’acte de naissance. L e mcme acte
de naissance est muet sur les professions et domiciles des
tém oins, contre le vœu du même article.
Par tous ces m otifs, Gilbert Lafont conclut ù ce que
les deux actes de naissance et de décès soient déclarés
faux, et rejetés de l’instance.
L e jugement intervenu sur cette requête, en date du
3 floréal an 1 1 , ayant égard au premier moyen de faux
énoncé par Gilbert Lafont contre les deux actes dont il
s’agit, déclare ce premier fait pertinent et admissible, en
ce qu’il tend à prouver que l’enfant femelle étoit mort
avant de naître; ordonne qu’il sera informé de ce fait,
tant par titres que par tém oins; et à l’égard des sept
autres moyens de faux présentés par le sieur L a fo n t, il
est ordonné qu’ils demeureront joints à l’incident de faux,
pour en jugement y avoir tel égard que de raison.
Il a été informé en exécution de ce jugement. L e
ptemier tém oin, qui est Pierre Reynaud, desservant de
la succursale de N éris, et adjoint de la com mune, dé
d a le que le a i frim aire, un peu açant quatre heures
¿¿4
�(8)
île t après-midi, il fut appelé par Marie Bournet, épouse
de Gilbert Lafont, dit Chamblant, pour aller administrer le baptême à un enfant né du légitime mariage de
déiunt G ilbert-M arie Lafont et Catherine Lafont. On
lui dit que cet enfant étoit en danger de mort ; il y
courut, et chercha à s’assurer de son existence : il le
toucha, et lui sentant u n 1reste de chaleur, il crut, dans
le doute, pouvoir risquer le sacrement de baptême, qu’il
lui administra à telle fin que de raison. Cette cérémonie
religieuse fin ie, il inteiTogea , comme officier public,
M arguerite R ocliefort, accoucheuse, qui lui attesta que
• l ’enfant étoit né vivant. Après être sorti de -la m aison,
François C o rre, tisserand, voisin de l’accoucliée, et Louis
L a fo n t, gran d -p ère maternel de l’enfant, vinrent lui
déclarer que Catherine L afont, veuve de G ilbert-M arie,
avoit mis au monde un enfant fem elle, à trois heures et
demie de 'l’après-midi; que l’enfant étoit mort à quatre
heures du même jour. Sur leur déclaration relative à
la vie de cet en fan t, il rédigea son acte de naissance;
et sur leur déclaration relative à son décès, ainsi que
sur ce qu’il avoit vu lui-m êm e, il rédigea son acte de
m ort,
«
L e second témoin est François C orre; il.déclare-que
le jour que Catherine Lafont est accouchée , la femme
'du nommé Pignot vint le chercher dans la vigne où il
étoit; elle lui annonça que le curé étoit venu à la maison
de Catherine Lafont pour baptiser son »enfant, et lui dit
que le curé, comme adjoint et officier public, le trou
verait bon pour signer Pacte, Sans expliquer s’il s’agissoit
' d’acte de naissance ou de décès. Il se rendit en elle t en
la
�u »
( 9 ) .
. '
la maison de Catherine Lafont. Il vit l’enfant sur les
genoux de sa fem m e, et ne se st nullement assuré par
lu i -m êm e s'il étoit mort ou vivant lorsqiüil est venu
au monde. L e même soir il alla avec Louis L a lo n t,
grand-père de l’enfant, pour faire faire les actes de
naissance et de décès, chez le sieur Reynaud, oilicier
public. Celui-ci leur dit que les actes n’étoient pas encore
rédigés, et les renvoya au lendemain pour les signer :
effectivement il s’est rendu le lendemain chez le sieur
R eynaud, et a signé les deux actes.
L e troisième témoin est Marie L a fo n t, femme à Jean
T rim ouille, dit Pignot. Elle a déclaré être cousine ger
maine de Gilbert L afon t, et par conséquent alliée au
même degré de Catherine I^afont. Quoique l’ordonnance
défende d’entendre des témoins à ce degré de parenté,
comme il y en a plusieurs autres dans le même cas, tant
dans l’information que dans l’enquête de l’intim ée, l’ap
pelant n’a pas cm devoir proposer aucuns reproches dans
les circonstances extraordinaires où se trouvent les parties.
Les parens sont des témoins nécessaires ; et si on peut
soupçonner de la prévention ou de la partialité dans la
déclaration de ces mêmes parens, la cour d’appel appré
ciera quel degré de conliance ils peuvent inspirer. L ’ap
pelant s’en rapporte à cet égard à la prudence de la cour.
Ce tém oin, au surplus, déclare que comme parente,
amie et voisine de Catherine L afon t, elle s’est rendue
chez cette dernière au moment où elle sentoit les douleurs
de l’enfantement; elle la trouva debout, et soutenue des
sous les bras par la femme de Gilbert Lafont et Marie
Bournct. A van t que l’enfant parût, elle, déclarante, a
E
�( 10 )
vu tomber de ses excrémens; aussitôt elle a dit à Marie
Bournet: V en fa n t est m ort, parce qu’elle l’avoit déjà vu
arriver ainsi. Elle a ouï dire que les enfans qui lâchoient
ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître.
L ’enfant a paru les pieds premiers : l’accoucheuse le lui
fit voir sorti jusqu’aux reins, et lui fit signe que l’enfant
étoit mort. Elle lui demanda de l’eau bénite, qui fut
apportée aussitôt : l’accoucheuse l’a ondoyé sur la partie
du corps qui étoit visible. L ’enfant a resté plus d’une
demi-heure ù venir entièrement au inonde. L ’accoucheuse,
lui dit : E n tre la main du côté du cœ ur, et tu le lui sen
tiras encore battre ; elle lui a répondu : Je ne m’y connois
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
sortoit ainsi, l’enfant lui a paru m ort, ainsi qu’après qu’il
a été venu au monde. Lorsqu’il fut entièrement sorti du
sein de sa m ère, l’accoucheuse lui demanda de l’eau-devie pour le frotter; elle lui en mit au visage, lui a mis
les doigts dans la bouche et y a souillé : l’enfant n’a donné
aucuns signes de vie. La femme Corre le prit sur ses
genoux ; m ais, émue de l’idée que cet enfant pouvoit
être mort, les genoux lui tremblèrent, et ce tremblement
se communiquoit i\ l’enfant. La femme Corre disoit que
cet enfant portoit signe de v ie , et qu’il falloit le porter
à l’église pour le faire baptiser; elle, déclarante, répondit :
Nous serons mal reçues, si nous portons à. M . le curé un
enfant mort. La m ère, qui n’étoit pas encore entièrement
délivrée, dit alors : Mon enfant est peut-être m ort; pour
la tranquilliser, on lui répondit que non. M . le curé
arriva, toucha l’enfant à divers endroits, prit de l’eau
bénite, le baptisa et se retira. L e nommé Corre, qu’ou
�fa i
oil
( n )
avolt envoyé chercher,'arriva aussi, et sa femme lui dit :
T u iras faire faire l’acte de cet enfant; ne manque pas de
dire que tu Vas du vivant, parce q u il Vétoit. Cependant
dans ce temps-là 011 se mettoit en devoir d’ensevelir l’en
fant; et le nommé Corre et Louis Lafont se rendirent
chez M . le curé. D epuis, Catherine Lafont est venue
chez elle, déclarante, et lui a dit : Vous disiez autrefois
que mon enfant étoit venu au monde vivant, et actuel
lement vous dites qu’il étoit mort ; elle lui répondit :
Nous te disions cela dans les temps pour ne pas t’inquiéter
dans l’état où tu étois : je te conseille de t’accorder avec
tes beaux-frères, parce que si je suis appelée en justice
je ne pourrai m’cmpêclier de dire la vérité ; mais elle
répliqua : Ils auront tout, ou je l’aurai. L e témoin ajoute
de plus que Louis Lafont, père de Catherine, lui avoit
fait beaucoup de menaces sur ce qu’elle étoit disposée à
dire la vérilé.
L e quatrième témoin est M arie B ournet, femme de
Gilbert Lafont ; elle est également cousine germaine des
appelans et de l’intimée. Elle dépose que pendant que
Catherine Lafont étoit au mal d’en fan t, elle la tenoit
avec une autre femme nommée Catherine Lafont ; que
l’enfant parut long-temps avant que la mère fût délivrée.
La sage-fem m e demanda de l’eau bén ile, et, en l’on
doyant, dit : J e crois le baptiser en cas dé vie. Elle dit
aussi ù la femme Pignot : T ouch ez, commë son cœur bat.
Cette femme répondit : Vous connoissez votre m étier,
pour moi je ne m’y connois pas. Après tous ces propos,
1 enfant resta près d’ une demi-heure à venir au monde.
L o isq u ’H parut, elle, déclarante, détournant les yeu x,
B 2
J
�tx6
(et
( ** )
ne l’a nullement regardé ; elle ne s’est occupée qu’à mettre
la mère au lit. Pendant qu’elle y travailloit, elle a en
tendu dire dans la maison : L ’énfant a encore de la vie.
E lle, toujours sans le regarder, a dit de le porter à l’église :
l’accoucheuse s’y est opposée. L a déclarante alors a été
bien aise de trouver un prétexte pour sortir de la maison,
et est allé chercher M . le c u ré , qui y est venu. Ce n’est
que long-temps après que M . le curé est arrivé, qu’elle
est rentrée dans la maison, et alors l’enfant étoit sans vie.
M argueviteLafont, veuve Bonnefoi, cinquième témoin,
encore cousine germaine des parties, déclare s’être trouvée
dans la maison lorsque Catherine Lafont est accouchée.
Lorsque l’enfant a commencé à paroître, la sngc-femme
a témoigné de l’inquiétude sur son compte, et a demandé
de l’eau bénite pour l’ondoyer : cependant elle a dit plu
sieurs fois qu’il avoit de la vie. Catherine Lafont a été
à peu près une demi-heure sans se délivrer : lorsqu’elle
l’a é té , la sage-femme s’est emparée de l’enfant, et a de
mandé de l’eau-de-vie. E lle, déclarante, étoit auprès de
la sage-femm e et de l ’enfant; et lorsque la sage-femme
lui a frotté le visage avec de l’eau-de-vie, elle a remarqué
que l’enfant a fait un léger soupir, ce qu’elle a regardé
comme signe do vie : mais depuis elle ne lui en a vu
donner aucun autre.
Telle est l’analise exacte de l’information faite sur une
demande en faux incident, qui étoit aussi indifférente
.qu’inutile dans la cause. On ne voit pas, en effet, quelles
inductions Catherine Lafont pouvoit tirer d’un acte de
naissance qui ne donne aucunes lumières sur le fait im
portant qu’il s’agissoit de vérifier. Cependant Catherine
�*3
U *
(
)
Lafont, effrayée de cette démarche, crut devoir demander
permission de faire une preuve contraire •, et en vertu
d’un jugement du tribunal de M ontluçon, du 7 nivôse
an 12, qui l'y autorise, elle a fait procéder à une enquête
dont on va également dépouiller les déclarations.
L e premier témoin est Marguerite R ocliéfort, veuve
de Gilbert Lafont : c’est la sage-femme qui a accouché
Catherine Lafon t; elle est âgée aujourd’hui de soixantedouze ans; elle est tante par alliance de toutes les parties.
E lle déclare que lors des couches de Catherine Lafont,
elle fut appelée pour lui porter les secours de son art.
Lorsqu’elle fut auprès d’e lle , et qu’elle voulut toucher
la malade, elle trouva que les pieds de l’enfant se présen
taient les premiers; elle sentit que ces pieds remuoient
dans sa main : à mesure que le corps de l’enfant avançoit
de sortir, elle s’apercevoit toujours de son mouvement;
lorsqu’elle fut à même de porter la main sur le cœur
de l’enfant, elle en sentit les pulsations; elle proposa
à la femme P ign ot, qui étoit auprès d’elle, d’y toucher;
ce qu’elle ne voulut faire. I/enfant fut à peu près 1111
quart d’heure à sortir du sein de la mère ; dès l’ins
tant qu’il fut sorti, elle ne lu i sentit plus de mouve
ment : elle demanda sur le champ du vin pour l’en
frotter, ainsi qu’il est d’usage. A u lieu de v in , on lui
porta de l’eau-de-vie ; elle en prit dans la main et en
passa sur le visage de l’enfant : dans ce moment l’enfant
a fait un gros soupir, qu’elle a regardé comme un signe
de vie; mais elle ne lui en a pas distingué d’autre. Aussitôt
elle a remis l’enfant à la femme C o rre, pour s’occuper
de la mère. L e curé de la commune, qu’oji avoit envoyé
�U 1
( 14 )
chercher, est ven u, et a baptisé l’enfant. L a déclarante
le prévint qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer
avant qu’il fût sorti entièrement du sein de la mère.
François D urin , second témoin, non parent des parties,
a dit avoir soupé chez le sieur Etienne Forichon , officier
de santé, le jour des couches de Catherine Lafont : le sieur
R eynaud, c u ré , étoit à ce souper. Pendant qu’on étoit
à table, le déclarant dit que la veuve Lafont étoit accou
chée : le curé répondit o u i, et dit qu’il avoit été appelé
chez elle, comme officier public. J ’ai touché, d i t - i l ,
l ’enfant sur l’estomac, je lui ai senti de la chaleur ; j’ai
cru lui remarquer de la vie, et j’ai rempli les fonctions
de curé en lui donnant le petit baptême,
L e troisième témoin est M arie B ourn et, femme de
Gilbert L afon t, cousine germaine des parties : c’est la
même qui a été entendue dans l’information faite à la
requête de l’appelant; et comme la déclaration qu’elle a
réitérée est absolument la même que celle précédemment
faite, il est inutile de s’en occuper,
Claire G ilet, femme de François Corre, quatrième té
m oin, non parente, dépose qu’elle étoit chez Catherine
Lafont lorsqu’elle est accouchée. A près que l’enfant a
été entièrement sorti du sein de sa m ère, la sage-femme
a demandé du vin; on lui a donné de l’eau-de-vie. Après
que la sage-femme a eu essuyé un peu cet enfant, elle l’a
porté sur-les genoux d’elle déclarante, et lui a dit de le
laver avec du v in , qu’elle alloit prendre soin de la mère.
E lle a pris l’en fant, l’a lavé avec du vin qu’on lui a
porté dans un plat, lui a vu remuer les bras trois ou
quatre fois, lui a^ vu égalemont battre le cçeur, et lui a
�( 15 )
distingué des mouvemens dans le visage lorsqu'on lui
passoit du vin sur cette partie : elle a remarqué qu’il soupiroit; mais l’enfant est resté mort sur ses genoux, et il
a été impossible de distinguer le moment où il a cessé
entièrement de vivre. ■
Gilbert-Jérôm e Guillem in, cinquième tém oin-, déclare
que quelque temps après les couches de Catherine Lafont,
et dons un temps où l’on disoit que les héritiers Lafont
vouloient s’inscrire en faux incident, il a.;soupe avec le
curé de N éris, qui lui dit qu’au moment où Catherine
Lafont avoit accouché il avoit été appelé chez elle comme
officier public; qu’il s’y étoit rendu, et avoit aussi exercé
les fonctions de curé en baptisant son enfant; ce qu’il
n’auroit fait s’il n’eût cru s’être assuré de son existence;
que quelque temps après la sage-femme qui avoit accou
ché Catherine Lafont lui avoit dit chez lui que l’enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’elle l’avoit ainsi dé
claré à son confesseur.
L e sixième témoin , Georges Forichon , officier de
santé, déclare que quelque temps après l’accouchement
de Catherine L afon t, et au moment où l’on disoit que
les héritiers Lafont se pourvoyoient en faux incident, il
s’éloit trouvé chez Mari en Forichon avec le sieur R ey
naud , curé de la commune. L e sieur Reynaud dit en sa
présence que le nommé' Corre étoit venu-chez, lui lui
déclarer qu’il avoit vu l’enfant de Catherine Lafont en
V iei que s’il venoit à se rétracter il le dénonceroit au
commissaire du gouvernement. Il ajouta qu’au moment
des couches de Catherine Lafont, il avoit été appelé chez
elle; qu’il avoit senti de la chaleur à son enfant, et lui avoit
�tto
< SI
( 1« )
administré le baptême en cas de vie, sans pouvoir assurer
qu’il fût vivant. Il a aussi ouï dire à plusieurs femmes
que la nommée P ig n o t, femme Trim ouille, leur avoit
déclaré que l’enfant de Catherine Lafont étoit né vivant,
qu’elle lui avoit vu porter plusieurs fois son bras à la
tête, et lui avoit remarqué plusieurs autres signes de vie.
A la suite de ces enquêtes, Catherine Lafont, qui ne
comptoit pas infiniment sur la déclaration des témoins,
s’est bornée à soutenir qu’elle n’avoit besoin d’autres
preuves de viabilité que l’extrait de naissance qui constatoit que son enfant avoit eu vie ; et quoique cet acte
de naissance constatât que l’enfant n’avoit pas été présenté
' ù l’officier public, un moyen aussi futile a fait impression
sur les premiers juges. L e 14 nivôse an 13, la cause portée
à l’audience, après plusieurs séances, est intervenu juge-^
ment contradictoire qui déboute Grilbert Lafont de sa
demande en inscription de faux incident, le condamne
à l’amende de 60 fr. par lui consignée, conformément
cjux articles 4 et
du titre 2 de l’ordonnance de 17 3 7 ,
et en tous les dépens.
A van t de rendre compte des motifs qui ont déterminé
les premiers ju ges, il est à propos de rappeler que le
procureur im périal, dans ses conclusions, observa qu’il
né suffisoit pas pour qu’un enfant puisse succéder et trans
mettre , qu’il eût donné des signes de vie dans le sein
de sa mère; qu’il falloit qu’il fût né vivant; Il remarqua
que de l’ensemble des dépositions des témoins, présentées
respectivem ent, il résultoit seulement que l’enfant de
Catherine Lafont avoit fait un soupir après être sorti tout
4 fait du sein de sa mère; que quelques-uns de ses membres
a voient
_
5
�U1
*7
(
)
avoient palpité. M ais, ajouta-t-il, les auteurs ne sont pas
d’accord sur la question de savoir si ces signes sont carac
téristiques de vitalité. Plusieurs veulent que l’enfant ait
jeté des cris ; d’autres se contentent d’un souille, d’un
soupir; mais aucun n’a régardé la palpitation des membres
comme un signe évident et certain. Il observe avec jus
tesse que le Code civil ne s’explique pas sur les caractères
qui peuvent prouver que l’enfant a eu v ie , ni sur la ma
nière de le prouver. Il conclut en conséquence à ce que
avant de faire droit il soit ordonné qu’un docteur en rnéidecine et un docieur en chirurgie, nommés par le tribunal,
donneront leur avis sur la question de savoir si les sou
p irs, restes de chaleur et de palpitation, dont ¡Varient
quelques-uns des témoins, sont des signes certains de vita
lité; ou si, malgré ces signes, l’enfant doit être réputé
mort né.
Mais le tribunal, peu touché de cette opinion marquée
au coin de la sagesse et de la prudence, en a pensé autre
ment. Il donne pour motif d’une décision précipitée, pour
ne rien dire de plus, i° . que tous les acte^ de l’état civil
font foi jusqu’à inscription'de faux ; 2°. qu’il est établi
par l’acte de naissance que l’enfant de Catherine Lafont
est né à trois heures et demie le 21 frimaire au 11 ; 30. qu’il
est établi par l’acte de décès que, le merne jour, le même
enfant est décédé à quatre heures après m idi, c’est-à-dire,
demi-heure après sa naissance ; qu’ainsi il est prouvé par
acte authentique que l’enfant est né vivant.
Les premiers juges ajoutent que Gilbert Lafont a pris
la voie de l’inscription en faux incident contre ces deux
actes; que par là il s’est imposé la luehc de prouver que
C
,
�(
1 8
5
cet enfant étoit mort avant de naître : mais il n*a pas
rempli cette tâche. L e premier témoin a senti un reste
de chaleur à l’enfant, et lui a administré le baptême à
telle fin que de raison. 11 a ensuite interrogé, comme offi
cier public, l’accoucheuse, qui lui a attesté que l’enfant
étoit né vivant. L e second témoin ne s’est pas assuré par
lui-même de l’existence de l’enfant. L e troisième a tou
jours regardé l’enfant comme mort avant de naître; il l’a
jugé ainsi aux excréjpens qu’il a vu tom ber, aux signes
que la sage-femme a faits,: cependantila même sage-femme
lui a dit. que le cœur de l’enfant battoit encore, lui a
proposé d’y porter la m ain , ce qu’elle n’a voulu faire.
Lorsque l’enfant a été sorti du sein de la mère, le témoin
ne lui a remarqué aucun signe de v ie , quoique la sagefçimne.. l’ait frotté a v e c de l’e a u - d e -v ie , lui ait mis.les
doigts dans la bouche et y ait souillé. L e quatrième témoin
ne s’est pas assuré par lui-même si l’enfant avoit vécu après
sa naissance; mais il a entendu dire dans la maison que
renfant^existoit encore. L e cinquième lui a vu faire un
léger .soupir^qu’il. a,.:rçgai;dp çon^me un signe de vie.
Mais de ces cinq témoins , ¡Je troisième est le seul qui
soutient que cet enfant étoit mort; il pensoit ainsi, d’après
la chute des excrémens et les signes de l’accoucheuse.
Cependant cette même accoucheuse a dit que le, cœur de
l’enfant battoit, a proposé au térrçoin d’y porter la main,
ce qu’il n’a voulu faire , parce qu’il ne s’y connoissoit pas.
L e tribunal, considérant que le prçmicr témoin ,a senti
de la chaleur à l’enfant; qu’il a interrogé l’accoucheuse;
qu’elle lui a attesté que l’enfant etoit né vivant; qu’elle
l’a ainsi déclaré lorsqu’elle a été appelée en témoignage ;
�!9
Ias
(
)
que le quatrième témoin avoit ouï dire dans la maison,
après la naissance de l’enfant, qu’il avoit encore de la vie;
que le cinquième témoin lui a vu faire un soupir qu’il
a pris pour un signe de vie.
Considérant qu’il résulte de l’ensemble de ces décla
rations que l’enfant a plutôt vécu après sa naissance qu’il
n’étoit mort avant de naître; que Gilbert Lafont n’a pas
détruit les deux actes de naissance et de décès, ainsi qu’il
se l’étoit proposé; qu’on en est d’autant plus convaincu,
quand on considère que le quatrième témoin ouï à la
requête de Catherine Lafont, à qui l’accoucheuse a remis
l’enfant pour donner des soins à la m ère, confirme la
déclax’ation de la sage-femme, lui a vu battre le cœ ur,
lui a distingué des njouvemens au visage, et a remarqué
qu’il soupiroit; que d’ailleurs il paroît constant que cet
enfant étoit parvenu au terme prescrit par la nature; qu’il
n'avoit apporté au monde aucuns vices de conformation,
ni aucuns vices de putréfaction.
Les premiers juges concluent que ces dernières circons
tances , jointes aux actes civils et aux déclarations des
témoins, doivent suffire pour constater la vie de l’enfant,
ou au moins le faire présumer vivant.
Ils considèrent encore que Catherine L a fo n t, qui a
été m ère, qui en a couru les dangers, qui a perdu son
enfant, doit obtenir la consolation que la loi lui accorde;
et dans leur sagesse ils en-trouvent assez pour débouter
Gilbert Lafont de sa demande , pour attribuer à une
éti'angère tous les biens d’ une fam ille, et enrichir un
second m ari, qui la consolera mieux encore.
Quel état d’incertitude et d’anxiété pour les parens du
C a
�mari ! Il semble qu’une'* question de ce genre méritoit
peut-être plus d’examen et de maturité; elle tient à l’ordre
public, elle intéresse la société toute entière. L e procureur
impérial sembloit avoir tracé la seule marche que les pre
miers juges avoient à suivre; et les héritiers Lafont, usant
des moyens que la loi leur accorde, bien convaincus de
l’impartialité de la cour d’appel, dont les arrêts sont de
grands exem ples, se sont pourvus contre ce jugement.
Mais avant que la cour prononce, ils désireroient réunir
une plus grande masse de lum ières, en s’adressant aux
jurisconsultes et aux docteurs , pour leur demander une
splution sur le point de savoir si l’enfant femelle dont
Gilherine Lafont est accouchée, a été capable de recueillir
et transmettre la succession de son père.
JLiES a n c i e n s a v o c a t s e t l e s d o c t e u r s
E N M É D E C IN E R É U N IS , qui ont pris lecture des
pièces et mémoires de la cause d’entre Catherine Lafont
et Gilbert Lafont, et notamment de l’information du 13
prairial an 1 1 , de l ’enquête du 10 messidor an 12 , du
jugement définitif dont est appel, du 14 nivôse an 13 ;
ensemble des mémoires à consulter;
que l’enfant femelle dont est accouchée.
Catherine Lafont n’a pas donné des signes de vie assez
évidens pour qu’il ait été capable de recueillir et de
transmettre une succession.
E u examinant cette question en point de d ro it, on peut
E
stim ent
�K J
( 21 )
décider, d’après la loi et les jurisconsultes-, que les signes
de vie que semble donner l’enfant, lorsqu’il est encore dans
le sein de sa m ère, sont absolument indifférons. On ne
considère l’enfant que du moment qu’il a vu le jour, qu’il
est hors du sein de la m ère, ou entre les bi*as de la sagefemme. L a loi pénultième, au code D e posth. hœredib.
inst. en a une décision précise. S i vivus perfectè natu*
est, lit e t, illico postquàm in terram cecidit, vel in manibus obstetricis decesserit, nihilom inùs testamentum
rumpit. Ces expressions, perfectè natus e s t, annoncent
assez qu’on ne doit s’attacher à l’enfant, et remarquer les
signes de vie, qu’autant qu’il est entièrement sorti ex utero
matris. Toutes les expressions de la loi présupposent né
cessairement que l’enfant a entièrement vu le jou r, qu’il
est débarrassé de toutes les entraves : jusque-là il n’est
réputé qu’une portion des entrailles de la mbvc}pars viscerum matris.
11 est certain, nous dit Henrys, tom. 4, p. 202, 5e. plaid.
n °. 2, qu’un enfant ne peut être censé vivant, ni capable
de succession, s’il n’est hors le ventre de la m ère, et s’ il
ne touche la terre, ou du moins ne se trouve entre les
bras de la sage-femme. Quelques signes de vie qu’il ait
pu donner, ils ne sont pas plus considérables que les
actions vitales qu’il a pu faire dans le ventre de la mère.
Comme ce 11’est pas assez qu’il ait eu vie dans le sein ma
ternel, s’il ne vient à naître, il ne sufïit pas aussi que,
venant h sortir, il paroisse vivant, et en donne quelques
signes, s’il ne sort entièrement et ne quitte la matrice.
Il faut qu’il s’en détache, autrement- il est plutôt censé
une portion de la mère qu’une personne vivante : il ne
«ci
�( 22 )
vit que par elle, et n’a pas d’autre subsistance; et par
conséquent ne peut établir un degré dans les successions.
M . Domat, Lois c iv ile s, tit. 2 , n°. 6 , enseigne que
les enfans qui sont encore dans le sein de leur mère n’ont
pas leur état réglé, et qu’il ne doit l’être que par la nais
sance. Jusque-là, dit-il, ils ne peuvent être comptés pour
des enfans, non pas même pour acquérir à leur père les
droits que donne le nombre des enfans. P a rtu s antequàni
edaturym uîierisportio est, velviscerum , L . ï, §. 1, ff. D e
inspect. vent. P a rtu s nondiim ed itu s, homo non rectc
f u is s e dicitur. L . 9, in jin . ff. A d leg.Jalc. Henrys s’appuie
également sur l’avis de Bartliole, d’A lc ia t, de Tiraqueau,
dans son commentaire sur la loi S i unquiim , au code D e
revocand. donat., ouvrage très-estimé; et enfin de T e rtu llien , qui s’exprime ainsi : M entior s i non statïm injfan s utvitam vagitus satura v it, hoc ipsum se testatur
sensisse ? atque intellexisse quod natus est : omnes sirnul
dedicans sensus , et luce v isu m , et sono auditum , et
lannore gustum , et aere odoratum, et terra tactum.
Il résulte de ces autorités que, pour réputer un enfant
viable, il ne suffit pas qu’il ait paru vivant au passage,
il faut qu’il ait donné des signes de vie après être entiè
rement sorti du sein de la m ère, aux termes de la loi 3
ci-dessus citée : S i vivus perfectè natus est,
Ilen rys, t. 3 , liv. 6 , cliap. , question 21 , examine
encore à quels signes on peut reconnoître si l’enfant est
vivant après qu’il est sorti du sein de la m ère, et si l’éjec
tion des excrémens notamment est un signe suffisant de
vitalité. H paroît qu’Hemys a voit cherché la solution dans
¿os pères de la médecine, dans Ilippocrate, Galion et
5
�ia
6
C 2 3 )'
Avicène \ il décide, d’après l’autorité de ces grands
hommes, quel’éjectiondes excrémens n’est pas une preuve
de vie. D ’après Hippocrate, liv. 4 , aphorisme 23, et l’ex
plication que donne Galien de cet aphorisme , cette éjec
tion arrive souvent dans un cadavre, pai’ce que les excré
mens s’épanchent et tombent d’eux-mêmes. Si la chaleur
vitale en est la cause commune, il ne s’ensuit pas qu’elle
soit absolument nécessaire ; c’est aussi souvent une preuve
de dissolution qu’une preuve de vie : dès-lors on ne peut
en tirer aucune preuve de vitalité.
• Bretonnier appuie l’opinion d’Henrys; il se fonde sur
le sentiment de Ménocliius , de Paul Zachias, dans ses
Questions médico-légales, liv. 1 , tit. 2 . quest. 6 , n°. 8,
qui décide que l'enfant ne doit être réputé viable qu’au
tant qu’il rem ue, crie , éternue, et épanche son urine :
S i voce/n e miser i t , s i spiraperit, s i membra distenderitj'velse m overit, s i sternulaverit, et urinam reddat,
Bretonnier cite encore Acaranza , médecin espagnol,
en son traité D e partit, nos. 32 et 3 4 , qui exige des
signes évidens et certains, et qui apprend qu’en Espagne
il y a une loi qui définit qu’aucun enfant n’est censé
parfait et viable, s’il ne survit pendant vingt-quatre heures
après sa naissance, et s’il n’a reçu le baptême. Jure verb
nostro regio , lege taiiri nullus est partus m aturus, et
vitalis qui viginti quatuor horas ab editione non superv ix e r it, et sitnulJ'uerit baptizatus.
Bretonnier ne peut s’empêcher de remarquer que cette
lo i est Irès-judicieuse, et qu’elle devroit être adoptée parmi
nous pour éviter toute difficulté. En eil’e t , nous sommes
encore dans un état d’incertitude sur ce point : il eût été
�(H )
à désirer que le Code civil contînt un règlement à cet
égard; niais on n’y trouve qu’une seule disposition qui
puisse s’y appliquer ; c’est celle exprimée en l’art. 725
qui porte que l’enfant qui n’est pas né viable est incapable
de succéder.
Il faut donc en revenir aux anciens principes ; et on'
ne peut trouver de meilleur guide que R icard , dans son'
Traité des dispositions conditionnelles, chap. ,sect. ,
n°. 503 etsuivans, où il soutient qu’il faut dés signes de>
vie évidens et certains,parce que la mort étant certaine,
c’est à celui qui veut tirer avantage de la vie de véx*iGer
sa prétention par des témoignages convaincans.
O n pourroit encore invoquer l’opinion de L e B ru n ,
dans son Traité des successions , et une foule d’autres
auteurs qui n’ont fait que copier les précédens. En appli
quant ces autorités à l’espèce particulière, on remarque,'
i°. que l’enfant ne doit être considéré que lorsqu’il est*
sorti du sein de la mère. Tous les mouvemens qu’on a
pu apercevoir dans l’instant de la délivrance, avant que
l’enfant ait touché la terre, ou qu’il soit sur les genoux de *
la sage-femme , sont insignifians,
•
2°. Lorsqu’il est sorti du sein de la m ère, il faut des
signes de vie évidens et certains, des mouvemens n o n ’
équivoques, et qui ne soient pas un reste de palpitation
ou de chaleur. Il 11es’agit donc que d’analiser les enquêtes,'
et d’examiner si on y trouve des présomptions assez fortes,
ou des preuves que l’enfant de Catherine Lafont est né
vivant.
'
On commencera par celle faite à la requête de Cathe
rine L afd u tj.ct ce n?est pas intervertir l’ordre, quoique
celte
5
5
�*5
(
)
cette enquête soit postérieure à l'inform ation, parce‘que
la mère devoit prouver que l’enfant avoit eu vie , tandis
que l’objet de l’appelant étoit d’établir que l’enfant étoit
mort. né.
■
L a sage-femme, premier témoin , et cousine germaine
des parties , a remarqué d’abord que les pieds de l’enfant
se présentoient les premiers ; elle sentit les pieds de cet
enfant remuer dans sa main ; à mesure que le corps de
cet enfant avançoit de sortir , elle s’apercevoit toujours
de son mouvement: elle porta la main sur le cœ ur, elle
en sentit les pulsations; elle proposa à la femme Pignot
d’y tou ch er, ce qu’elle ne voulut faire.
<
Ces premiers signes aperçus par la sage-femme ne peu
vent donner aucunes lumières. L ’enfant n’étoit pas encore
né ; il étoit toujours dans le. sein de la m ère, et ces moiir
vemens appartenoient à la mère. U n corps inanimé , sus
pendu , se meut par son propre poids ; mais ce m ouve
ment ne peut être regardé comme un signe de vitalité,
»Les pulsations du cœur remarquées toujoursr dans le
sein de la m ère, ne seroient pas plus convaincantes; mais
dès qu’il ne faut considérer l’enfant que lorsqu’il a touché
la terre, on ne doit pas s’arrêter à des signes aussi équi
voques.
La sage-femme ajoute que l’enfant fut à peu près un
quart d’heure à sortir entièrement; e t , dès l’instant qu’ il
fut sorti, elle ne lu i a plus senti de mouvement : circons
tance remarquable, qui prouve que l’enfant n’a jamais
pu être compté au nombre des êtres vivans. Lorsqu’elle
u passé de l’eau-,de-vie sur le visage de l’en fan t, il a fait
uu gros soupir qu’elle a regardé coiu.me un signe (Je vie;
^
.D
�(26)
mais elle ne lui en pas distingué d'autres. E li quoi ! un
seul soupir, qui peut n’être qu’ un mouvement expiratoire,
remarqué dans un instant de trouble, seroit-il donc suffisant
pour faire présumer la vitalité ? L a sage-femme a remis
l’enfant à la voisine pour s’occuper de la mère : le curé
est v e n u , et a baptisé l’enfant -, mais elle a prévenu le
curé qu’elle avoit pris la précaution de l’ondoyer avant
qu’il fût sorti du sein de la mère.
Cette sage-femme , qui ne s’appesantit pas davantage
sur les détails de son opération, déclare ensuite ne savoir
n i lire n i écrire. Comment une femme illitérée pourroitelle inspirer quelque confiance dans une matière aussi
importante? Peut-elle avoir assez de connoissances dansson
art, pour raisonner et tirer des conséquences sur des signes
aussi incertains que ceux dont elle rend compte ? Sa décla
ration ne pourroit être de quelque poids, qu’autant qu’elle
seroit appuyée oii corroborée par l’opinion d’un homme
de l’art. Il est assez étrange q ue, dans un moment aussi
critique, on n’ait pas appelé un médecin ou un chirur
gien : l’état de la mère et de l’enfant sembloit exiger cette
précaution ; l’intérêt de toutes les parties le commandoit
impérieusement ; et c’est à la mère , ou au grand-père
présent, qu’on doit faire le reproche de n’avoir pas cons
taté les faits d’une manière certaine , puisque , pour se
servir des termes de R icard , elle devoit tirer parti de la
vie de son enfant; et c’étoit à elle à l’établir.
L e second témoin est un marchand cafetier qui soupoit
en villeavec lecuré,le jour des couchesde Catherine Lafont,
et qui ne répète que ce qu’il a oui dire au curé , qui
étoit un des convives. Sa déclaration est donc absolument
insignifiante.
�( 27 )
Vient ensuite la femme Bournet^ cousine germains
des parties , qui n’apprend autre chose, sinon que l’enfant
a été ondoyé avant qu’il fût sorti. Elle a entendu la sagefemme proposer à la femme Pignot de le loucher , pour
sentir comme son cœur battoit ; cette femme a refusé de
le faire : pour elle , elle n’a jamais porté les yeux sur l’en
fant. D e la manière dont elle s’exprim e, il paroît qu’elle
le croyoit m o r t, et qu’elle avoit quelque répugnance à
le considérer. Cependant elle a entendu dire qu’il avoit
de la vie ; elle a recommandé , dans ce cas, de le porter
à l’église : mais on a répondu qu’il ne falloit pas aller à
l’église , et seulement envoyer chercher le curé. Elle étoit
charmée de trouver un prétexte pour sortir de la maison ,
parce qu’elle étoit elle-même fatiguée ; elle s’est empressée
d’aller chez le curé; elle n’est rentrée que lorsque celui-ci
sortait, et pour lors elle a vu que l’enfant étoit décidé
ment mort.
On ne voit pas quelles inductions on pourroit tirer de
cette déclaration. Y a -t-il, dans tout ce qu’a dit le témoin,
quelques signes de vie évidens ? Cette femme n’a pas osé
jeter les yeux sur l’enfant dans les premiers momens ;
cependant elle soutenoit la mère ; elle a été témoin des
alarmes de la sage-femme : enfin elle 11’a vu l’enfant que
lorsqu’il étoit décidément mort.
Claire Gilet étoit chez Catherine Lafont lorsqu’elle est
accouchée. Après que l’enfant a été entièrement sorti du
sein de la m ère, la sage-femme l’a essuyé un peu avec de
1 eau-de-vie ; elle l’a ensuite porté sur les genoux d’elle
G ile t, lui a recommandé de le laver avec du vin , ce
qu elle a iait ; elle lui a vu remuer les bi'as trois ou quatre
D a
�y*
n*i
( 28
fois, lui a vu battre le cœ ur, lui a distingué des mouvemens dans le visage lorsqu’on lui passoit du- vin , a re
marqué qu’il soupiroit ; mais l’enfant est resté m ort sur.
ses genoux : il' lui a été impossible de distinguer le moment
où il a entièrement cessé de vivre.
•
Cette’ Claire Gilet est la femme de François Corre.
Peut-pn compter sur ce qu’elle dit avoir aperçu ? O11
verra bientôt- qu’elle trembloit elle-m êm e de tous sesi
membres;¿et ce qu’elle a cru sentir ou apercevoir peut
être l’effet de■
l'imagination effrayée: car, dans L’état où.
il paroît qu’étoient tous les assistans ; il ne seroit pas.
étonnant que le dépôt d’un cadavre sur ses genoux lui
eût inspiré de l’effroi. M^ais s’il est vrai qu’il n’y a qu’un»
point entre la vie et la m ort, et que ce point étoit im-r
perceptible pour le témoin lui-même , puisque Penfant»
est resté mort sur ses genoux sans qu’elle ait pu distinguer
le moment où il a cessé de v iv r e , de quel poids peut être
une déclaration aussi incertaine?
X^es cinquième et sixième témoins n’étoientpoint présens
à l’accouchement ; ils ne parlent que sur la relation qui
leur a été faite par le curé et quelques femmes, plusieurs
jours après les couches de Catherine Lafont. L eu r dépo
sition n’est donc d’aucune importance pour le fait dont
il s’agit ; et c’est à quoi se réduit l’enquête de Catherinel
Lafont.
L ’information faite à la requête- de l’appelant laisse
encore moins de doutes sur la mort de l’enfant. L e curé,
qui est le premier témoin , fut appelé un peu avant quatre
heures par M arie Bournet (. troisième témoin de l’en
quête ) , pour aller administrer le baptême à l’enfant,
�9
'
( * .)
q u i, lui dit-on, étoit cd danger de mort. Il‘ y. courut f
chercha.à s’assurer de son existence, le toucha; et,'.lui,
sentant un reste de chaleur, il crut dansjle doute, pouvoir
risquer lé sacrement de baptêm e, qu’il lui administra, à,
telle lin que de raison.
• .
.
.
Ce langage, annonce assez que le curé avait des doutes;
il s’exprime-.plutôt en homme religieux, qu’en, homme
instruit. Ce-reste de chaleur, avoit été contracté dans le;
sein de la m ère, et n’étoit point un signe de'.vie y il n e
couroit aucun.danger en administrant,le baptême, et remplissoit un devoir, en ne le donnant q u à tellefin que derai
son, Si la sage-femme lui a dit que l’enfant étoit né vivant;:s’il a rédigé ensuite les actes de .naissance et -do décès>
comme officier p u b lic, il ne l’a fait que sur la déclara
tion de François Corre et de l’aïeul maternel ; mais il n?en
étoit pas mieux, éclairé -, on.ne lui a pas même représenté»
ïenfantv - ;>•
-,
Il
résulte de la déposition de François C o rre , qu’it
n’étoit pas. présent à l’accouchement; qu’on l’est vemij
chercher dans sa vigne. On lui a annoncé que le curé,
étoit allé u la maison.de Catherine Lafont pour baptiser,
son enfant; ou lui a dit q,ue le cu ré , comme adjoint .et
officier public , le trouverait bon pour signer Pacte, sans,
expliquer s’il s’agissoit d’acte de naissance ou de décès.,
Il se rendit en effet en la maison de Catherine L afon t;
il vit l’enfant sur les genoux de sa femme. Il ne s’est nul
lement assuré par lui-même s’il étoit mort ou vivant; sa.
femme lui a dit qu’ il étoit vivant lorsqu’il est venu au.
m onde, et le même !soir il-est allé le déclarer ainsi à
1 officier public,. Quelle confiance doit-on avoir en. ces
�MX
M
3
•
( ° )
actes de naissance et de décès, dès que l’un des témoins
déclare qu’il ne savoit pas lui-même si l’enfant avoit eu
v i e , et lorsque celui qui l’accompagne est l’aïeul maternel
de l’enfant ? On ne conçoit pas même comment l’appelant
a pu avoir besoin de s’inscrire en faux contre ces deux
actes. Loin de chercher à les détruire il faut les conserver,
puisque ces deux actes ne sont faits que sur la relation
d’un témoin qui n’a rien v u , et d’un autre qui est inté
ressé k la chose. L ’enfant n’a pas été représenté ; l’oifiçicr
public ne sait rien et n’atteste rien par lui-même. Les
deux actes de naissance et de décès sont faits dans le même
instant ; et loin d’être avantageux à Catherine L afo n t, ils
tendent au contraire à prouver que l’enfant n’a pas eu un
moment d’existence.
L e troisième témoin de l’information est M arie Lafont y
femme Pignot; c’est elle qui a vu tomber les excrémens
avant que l’enfant parût : elle a regardé cette circonstance
comme un signe de dissolution. E lle a dit que l’enfant étoit
m o rt, parce qu’ellél’avoit déjà vu arriver ainsi, et qu’elle
avoit ouï dire que les enfans qui lâchoient ainsi leurs excrémens étoient morts avant de naître. L ’enfant a paru les
pieds premiers ; l’accoucheuse le lui a montré sorti jus
qu’aux reins ; elle lui fit signe qu’ il étoit mort ; elle lui
demanda de l’eau bén ite, et l’ondoya sur la partie du corps
qui étoit visible. L ’enfant a resté encore plus d’une demiheure à venir entièrement au monde. L ’accouchcuse lui
a dit : Entre la main du côté du cœur , et tu le lui sentiras
encore battre ; elle a répondu qu’elle ne s’y connoissoit
pas. Mais dès l’instant qu’elle a vu la partie du corps qui
jsortoit ainsi , lenfant lui a paru moi-t , ainsi qu’après
�11*•
( 31 )
qu’il a été venu au monde. Lorsqu’il a été entièrement
sorti, l’accoucheuse l’a frotté au visage avec de l’eau-devie , lui a mis les doigts dans la bouche, y a soufflé ; l’en
fant n’a donné aucuns signes de vie : la femme Corre l’a
pris sur ses genoux. Emue de l’idée que cet enfant pouVoit être m o rt, les genoux lui trembloient ; ce tremble
ment se communiquoit à l’enfant. La femme Corre disoit.
qu’il portoit signe de vie, et qu’il falloit l’envoyer à l’église
pour le faire baptisei\ Marie Lafont répondit qu’on seroit
mal re çu , si on portoit à M . le curé un enfant mort. La
mère n’étoit pas encore entièrement délivrée; elle s’écria :
M on enfant est peu t-rôtre .mort ! Pour la tranquilliser, on,
lui dit que non. L e cu ré, qu’on étoit allé chercher , est
ven u , a touché l’enfant à divers endroits, a pris de l’eau
bénite, l’a baptisé, et s’est retiré. L e nommé C orre,
qu’on a voit envoyé chercher, Ust aussi venu. Sa femme
lui a dit : Tu iras fa ir e fa ir e Pacte de cet enfant; ne man
que pas de dire que tu Tas vu vivant, parce qiCil üétoit.
Dans ce temps-là cependant on se mettoit en devoir de
l’ensevelir. D epuis, Catherine Lafont est venue la voir,,
et lui reprochoit qu’autrefois elle disoit que son enfant
étoit venu au monde vivant, et qu’actuellement elle disoit
qu’il étoit mort. Elle lui répondit : Nous te disions cela dans
le temps pour ne pas t’inquiéter dans l’état où tu étois.
On s’est appesanti sur cette déposition , parce qu’elle
est plus détaillée et plus circonstanciée que les autres. L e
témoin a mieux observé : plus rapproché de l’accou
cheuse , il a été à portée de tout v o ir , de tout remar
quer; et scs observations, ainsi que son récit, prouvent
a n en pas douter, qxie l’enfant n’a eu aucun instant de vie.^
�WK
^ * |4
3
( *)
'
L ’autre témoin est M arie Bournet, qui a été aussi enfendùe dans l’enquête, et qui ne fait que répéter sa décla
ration.
Il
n’en reste plus qu’un , qui est Marguerite L a fo n t,
veuve Bonncfoi; elle s’est trouvée dans la maison deCatlierine Lafont au moment de ses couches ; elle est cousine
germaine ; elle a rem arqué, lorsque l’enfant a commencé
a paroître, que la sage-femme témoignoit de l’inquiétude;
qu’elle a demandé de l’eau bénite pour l’ondoyer.Cependant
cette sage-femme a dit plusieurs fois qu’il avoit .de la vie.
Catherine Lafont a été à peu près une demi-heure sans
se délivrer. Lorsqu’elle l’a été , la sage-femme a frotté
. le visage de l’enfant avec de l’eau-de-vie ; e t, pendant
cette opération , la déclarante a remarqué que l’enfant a
fait un léger soupir. Elle l’a bien regardé comme signe
de v ie ; mais depuis elle ne lui en a vu donner aucun
autre,
.
Ce sont là les seuls éclaircissemens qu’on a obtenus sur
le fait important qui gissoit^en preuves. 11 faut en con
venir'; si de légers signes aussi équivoques pouvoient être
déterminans sur une question d’un si grand intérêt, la
fortune des citoyens seroit sans cesse flottante et incer
taine! encore les témoins ne sont-ils pas d’accord sur ces
signes si légers et si douteux. A la lecture des enquêtes,
on voit que le moment des couches de Catherine Lafont
fut un moment de terreur et d’effroi pour tous les assis
tons. Des femmes parentes et officieuses , ordinairement
si touchantes dans ces tendres soins , n’éprouvent que de
la répugnance et de la crainte; l’une refuse de toucher
l’enfant; l’autre éprouve un tremblement universel lors
qu’on
�14*
33
(
)
qu’on le dépose un instant sur ses genoux , et s’aperçoit
bientôt qu’elle ne tient qu’un cadavre. On ne s’occupe
que de la mère , on cherche à la rassurer par des paroles
de consolation : mais on a la conviction de la mort de
l’enfant. Dans les heureuses couches, l’instant de la déli
vrance est un moment de joie ; on n’éprouve que le plaisir
de voir naître son semblable ; et l’heureuse délivrance
d’une jeune mère de famille comble tous les vœux : on
l’environne, on la félicite ; elle est accablée de caresses.
La naissance de l’enfant est annoncée avec sensibilité :
c’est un jour de fête. I c i , au contraire , les assistans sont
consterne^ ;la mère est inquiète, un silence funeste l’épou
vante: elle s’écrie, M on enfant est m ort! On veut la ras
surer suivant l’usage ; on craint une révolution dans l’état
critique qui précède la délivrance : mais il est impossible
de feindre ; et les témoins, en rendant compte des détails,
ne présentent qu’un tableau de deuil et de douleur.
L ’enfant est né sans vie! voilà la seule induction qui
puisse résulter des enquêtes. Les circonlocutions, les hési
tations des témoins ne permettent pas de douter. On
plaint la m ère; mais on est convaincu que son enfant
est mort avant de naître.
- La succession de cet enfant pourroit-elle consoler une
m ère? A h ! que l’intérêt approche peu de ce sentiment
que la nature a gravé dans son cœ ur! et ce n’est qu’avec
l’œil du mépris qu’on doit envisager ce m otif du juge
ment dont est a p p el, portant « que Catliçrine L a fo n t,
* qui a été m ère, qui on a couru les dangers,doit être
« -consolée par la succession. » L e cœur n’a pas dicté ce
E
�’ ( 34 )
m otif absurde ; et dans les tribunaux , lorsque l’esprit
n’est pas convaincu, là finit le ministère du juge.
Loin de nous ces motifs de considéi-ation, qui nous
' jetteroient dans un arbitraire dangereux, et qui sont mar
ques au coin de la dépravation et de l’insensibilité.
Si on les envisage même sous le rapport politique, est-il
bien intéressant que les biens d’un individu passent dans
une famille étrangère, qu’ils aillent enrichir un second
époux aux dépens des héritiers légitimes (* ) : on ne voit
pas ce qu’y gagneroit la société ; on ne trouve pas de motifs
assez puissans pour faire fléchir la sévérité des lois , in
tervertir l’ordre des successions.
Les premiers juges se sont encore déterminés par la
circonstance que l’acte de naissance devoit faire foi. Mais
cct acte de naissance, que prouve-t-il ? L ’officier public, le
seul qui puisse donner par son caractère quelque authen
ticité à sa déclaration , n’atteste i’ien par lui-mêm e; il ne
'rédige que sur la relation d’autrui, sur le rapport d’un
aïeul intéressé qui n’a rien vu , rien entendu ; sur la dé
claration d’un homme qui a avoué n’avoir pas vu l’enfant
vivant.
Les information et enquête détruisent la déclaration
de François Corre , seul témoin à l’acte de naissance. L ’officier public, qui a encore la qualité de curé , n’est pas
même en état d’attester le fait ; il est dans l’incertitude ,
lorsqu’il remplit les devoirs de la religion dont il est le
ministre.
L o rsq u e le m ém oire étoit à l ’im pression, on a été instruit que
C ath erin e L a fo n t \enoit de contracter un second m ariage.
�35
(
)
II aperçoit, il sent un reste de chaleur ; il risque, dans,
le doute, le sacrement de baptême , à telle fin que de
raison. L ’acte de naissance rédigé par lui ne fait donc
aucune preuve, et ne devoit pas influer sur la décision
des premiers juges.
Jusqu’ici les jurisconsultes ont seuls raisonné d’après
les principes du droit et les assertions des auteurs les
plus accrédités \ ils croient avoir rempli leur tâche ; ils
se flattent d’avoir démontré que l’enfant de Catherine
Lafont n’étoit pas viab le, et n’a pu transmettre une suc
cession qu’il étoit incapable de recueillir. Les docteurs à
leur to u r , après avoir mûrement examiné l’information
et l’enquête, pensent que ces deux pièces ne donnent pas
Une solution satisfaisante.
Elles ont besoin d’une explication et d’un développe
ment puise dans les principes de la physique médicale,
afin d’atteindre ce degré de probabilités médico-légales
qui doit édifier les magistrats.
Pour répondre affirmativement ou négativement sur
la vie ou la mort de Venfant Lafon t au moment de sa
naissance, il est nécessaire d’exposer que la vie est un
mouvement continuel, successif et réciproque des solides
et des fluides de tout corps animé, formant l’ensemble des
fonctions qui résistent à la mort,
I^a vie se divise en animale et en organique.
La vie organique se compose d’une succession habi
tuelle de contractions, d’oscillations,’ d’assimilations, d’ex-
�( >u
C 3 6 )
crétions , qui fait rèjeter ou retenir les molécules des
corps qui peuvent servir ou nuire à son accroissement;
elle est indépendante de la perception ; elle est commune
aux animaux et aux végétaux (*).
La vie animale consiste dans la perception des sensa
tions nuisibles ou utiles, agréables ou douloureuses ; la
faculté d’exprim er par la vo ix articulée ou inarticulée,
ses désirs et ses craintes, ses peines et ses plaisirs.
Cette vie est le partage exclusif de tous les animaux ,
et constitue essentiellement leur existence.
P our déterminer si l’enfant Lafont a joui de l’une et
de l’autre v ie , les docteurs entreront dans l’analise de
l’information et de l’enquête, en s’attachant seulement
aux déclarations des témoins de visu.
L ’un a senti des restes de chaleur ; un autre a dit avoir
vu rendre des excre'mens avant la naissance complète ;
un autre propose de toucher le cœur , q u i l dit battre
encore ,* un autre dit avoir vu rendre un seul et dernier
soupir ; un autre dit avoir senti les pieds de l’enfant
remuer entre ses mains , ainsi que le mouvement du cœ ur,
lui avoir fait des frictions sur le visage avec de l’eau-dcv ie , lui avoir mis le doigt dans la bouche , y avoir soufflé,
et vu rendre un dernier soupir ; un autre dit avoir mis
l’enfant sur ses genoux , lui avoir lavé le visage avec de
l’e a u - d e - v ie , avoir vu remuer te bras et soupirer *
un autre enfin déclare- que les genoux de la femme sur
{*) Bichat, Rrcclicrches physiolog. sur la vie et la mort.
�MO)
37
(
)
lesquels étoit placé l’enfant lui trembloient de pour, et que
ce tremblement s’eloit communiqué à l’enfant.
Ge tremblement de genoux ainsi communiqué à l’ènfant, ne peut-il pas en avoir imposé pour un mouvement
qui lui fut personnel ?
Quelles inductions tirer de ces déclarations? Les signes
de vitalité qui en résultent n’indiquent autre chose qu’un
reste de contractilité et d’irritabilité, attributs, de .la vie
organique, mais indices de la cessation encore récente de
la vie animale.
Parmi les signes les plus saillans de cette contractilité
organique , il faut compter les déjections dés matières
fécales dont il est parlé, dans les dépositions , long-temps
avant la sortie de l’enfant du sein dç sa m ère, annoncées
par l’un des témoins comme symptôme de mort.
Les signes non équivoques de la vie animale consistent,
comme on l’a d it, dans la perception des sensations nui
sibles ou utiles, etc. Si l’enfant Lafont eût épx*ouvé le
contact de l’air atmosphérique sur la surface du corps ;
si ses poumons eussent eu la force de supporter le volume
d ’air nécessaire pour la respiration , première fonction de
la vie animale, il l’auroit exprimé par les cris toujours
naturels aux nouveaux nés ; aucunes déclarations ne font
«îention de ces cris; quelques-unes seulement parlent
d un dernier soupir, d'un léger soupir : mais ce dernier
mouvement expiratoirc, atonique et passif, n’est point la
respiration.
La respiration se compose du double mouvement actif
�133
(
)
de l’inspiration, et passif de l’expiration : un dernier
soupir , un léger soupir, doivent donc être considérés
comme le dernier mouvement expiratoire passif, propre
ment dit expiration dernière, ou la m ort, et peut-être
encore comme l’effet de l’insuflation..........
Tous les signes de vitalité qu’on peut recueillir de l’in
formation et de l’enquête , ne sont que des indices de
contractilité et d’irritabilité, attributs de la vie organique,
tels qu’on les observe sur les cœurs nouvellement arrachés
du sein des animaux , sur les têtes récemment séparées
de leurs troncs , sur les chairs encore palpitantes des ani
maux pendus à la boucherie, sur les trachées-artères ou
l’arynx des oies, que les enfans insufflent dans les rues
pour en tirer un bruit semblable aux cris de l’oie ; tels
enfin qu’on les excite, par les nouveaux procédés galva
niques , sur tout ou partie des animaux morts depuis
peu.
Si la distinction que les docteurs viennent d’établir
étoit arguée de subtilité métaphysique, ils répondront
qu’elle est reconnue par tous les physiologistes modernes;
q u e, puisée dans la nature, elle doit être consacrée par
la loi ; et qu’au commencement du siècle dernier cette
grande vérité fut pressentie par Paul Zacliins, dans son
fameux Traité sur les questions médico-légales. Cet auteur
s’exprime en ces termes: P r o mortuo habetur, qui vi-r
çere non potest.
Par tous ces motifs , le conseil estime que si l’enfant
Lafont a porté en naissant quelques restes de vie orga
nique, il n’a pas joui dçs conditions qui çonsituenl la vio
�IM
39
C )
toute entière ; e t , pour s’expliquer plus nettement, qu’il
est mort avant d’être né.
D
é l i b é r é
8 5
à R io m , le 24 novembre 1 o .
P A G E S (de R io m ), B A R T H E L E M I ,
ancien avocat.
doct. en méd.
ANDRAUD,
anc. av .
D E VAL,
anc. av.
GRANCHIER,
anc. av.
C H O S S IE R ,
doct. en méd.
G E R ZA T,
doct. en méd.
M e. V E R N I È R E , avoué licencié.
A R I O M , de l’im prim erie de L
andriot,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — F rim aire an 14.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Lafont, Gilbert. An 14]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Bartelemi
Andraud
Granchier
Chossier
Deval
Gerzat
Vernière
Subject
The topic of the resource
posthume
successions
viabilité nouveau-né
médecine légale
accouchement
témoins
vices de forme
actes de naissance
faux
sage-femme
baptême
experts
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultation pour Gilbert Lafont, propriétaire, aubergiste de la commune de Néris-les-Bains, appelant de jugement rendu au tribunal de Montluçon, le 14 nivôse an 13 ; Et encore pour Jean Bournet, Marie Lafont, sa femme ; appelans d'un jugement rendu au même tribunal, le 19 ventôse an II ; Contre Catherine Lafont, veuve et commune de Gilbert-Marie Lafont, habitante de la même commune de Néris-les-Bains, intimée.
Table Godemel : Viabilité : à quels signes peut-on reconnaître qu’un enfant est né vivant ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 14
1801-An 14
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0323
BCU_Factums_G1508
BCU_Factums_G1507
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53246/BCU_Factums_G1506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Néris-les-Bains (03195)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
accouchement
actes de naissance
baptême
doctrine
experts
Faux
médecine légale
Posthume
sage-femme
Successions
témoins
viabilité nouveau-né
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53651/BCU_Factums_M0110.pdf
fffefc09a6ab2b82f22b95509bd53b48
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
E T
O
B
S
E
R
V
A
T
I O
N
S
,
E M P L O Y É E S P O U R C A U S E S E T M O Y E N S D ’A P P E L ;
PO U R
'
Les D i r e c t e u r s des C r é a n c i e r s unis de Joseph
Heyrauld, appelans d’un jugement du tribunal civil du
Département du P u y -d e -D ô m e , du 16 prairial an 8;
C O N T R E
J e a n - B a p tiste
et J o s e p h
H E Y R A U L D , intimés.
L e C O N SE IL SO U SS IG N É , qui a vu le contrat de mariage du
citoyen J osep h H eyrauld, du 1 mars 17 72 ; un acte d’exhérédation
du citoyen Jean Heyrauld , du 24 juillet 1781 ; deux autres actes des
11 février et 14 juin 17 9 1, contenant démission de biens, d e l a part
des père et mère desdits citoyens Jean et Joseph H eyrauld, frères;
arrangemens et partage entr eux ; ensemble le mémoire à consulter ;
E s t d ’ a v i s que les deux actes de démission et de partage dont il
s agit, sont inattaquables , soit dans leur form e, soit au fond ; et que,
quand ils pourroient être attaqués avec succès , le citoyen Joseph
Heyrauld n’auroit rien à redouter d’un semblable événement. Il auroit
toujours droit de recueillir une part égale à celle de Jean son frère,
dans les successions de leurs père et mère communs.
Ces deux propositions ne sont pas difficiles à établir.
Et d’abord, il est hors de doute que les deux actes des 11 février et
14 juin 17 9 1, sont valables par eux-memes, et doivent être inviolablement exécutés. Rien ne. leur manque du côté de la forme. Ils sont
faits triples , et signés de toutes les parties , même des conseils
quelles s’étoient choisis, pour opérer avec la régularité et l’équité
convenables. Quant au fond des dispositions de ces actes, si quelqu’un.
�pou voit s’en trouver blessé, ce ne seroit sûrement pas le citoyen Jean
H eyrauld, qui doit se regarder comme fort heureux d’avoir recouvré
par là des droits héréditaires dont il étoit déchu.
Quelles étoient, en effet, les circonstances antérieures aux deux
actes? Il est vrai que le citoyen Joseph H eyrauld, institué héritier
par son contrat de mariage, du i mars 1772 , de tous les biens que le
citoyen Robert Heyrauld et Hiéronime Petit, père et m ère, délaisseroient à leur décès, n’étoit institué qu’à la charge d’associer à cette
institution, Jean H eyrauld, son frère aîné, jusqu’à concurrence des
deux tiers des mêmes biens. Les père et mère communs, consultant
moins la voix de la nature, et l’intention de la lo i, que des préjugés
reçus ou une affection particulière, vouloient alors établir un droit
d’aînesse en faveur de Jean H eyrauld, et l’avantage des deux tiers de
leurs successions. Ils ne faisoient qu’user de la faculté qui leur étoit
accordée par la législation existante à cette époque.
Mais d’un côté on peut dire que la charge imposée à l’institution
du citoyen Joseph H eyrauld, n’avoit d’autre effet que d’assurer à ce
dernier un tiers des successions paternelle et maternelle. Quant aux
deux autres tiers, encore que le frère aîné dût les recueillir, suivant
l’intention formelle des père et m ère, il n’en étoit réellement point
saisi, par une simple réserve consignée dans un acte qui lui étoit
étranger. Les père et mère ne Finstituoient pas directement leur
héritier jusqu’à concurrence des deux tiers. Ils ne contractoient en
aucune manière avec lu i, et ils avoient incontestablement la faculté
de révoquer ou de modifier la charge qu’ils avoient imposée à leur
fils puîné. Ils le pouvoient d’autant plus, que l’institution étoit accom
pagnée d’une donation faite par les père et m ère, au survivant d’e u x ,
et d’autres conditions qui avoient besoin d’être acceptées, pour con
solider la réserve faite en faveur du fils aîné. En un m ot, celui-ci ne
figui’ant pas dans le contrat de mariage, comme partie contractante,
n’étant point formellement institué h éritier, n’acceptant point les
conditions imposées a 1 institution du fils cadet, n’étoit obligé en rien
envers ses père et m ere, qui à leur tour n’étoient point liés envers lui.
D ’un autre côté, quelle que fut la force de la réserve faite des deux
tiers, au profit de Jean Heyrauld, il est certain que par la suite il
s’étoit mis hors d’état d’en profiter. Il s’étoit marié à l’âge de moins
de trente ans, sans le consentement de ses père et m ère, quoique ce
consentement fût de toute nécessité, même pour la validité de son
mariage. Il avoit encouru par la la peine deFexhérédation, aux termes
des lois alors en vigueur, et notamment de l’ordonnance de i
, de
celle de B lois, art. X L I I , et de la déclaration de 1639. Scs père et
mère l’avoient frappé de cette peine par l’acte authentique du 24 juillet
556
�17915 dans lequel ils le décïaroient déshérité, privé de leurs surcessions
futures, incapable de recueillir l’avantage porté au contrat de mariage
de leur fils cadet, lequel avantage é to it, en tant que de besoin, ré
voqué. Us décïaroient aussi que la totalité de leurs biens, deineureroit
au citoyen Joseph. Heyrauld; et il est constant que si les choses fussent
restées en cet état, le fils aîné se fût trouvé déchu de toute prétention
légitim e, relativement aux successions de ses père et mère.
Il en est arrivé autrement. Les père et mère communs ont bien voulu
sacrifier leur vengeance, oublier l’injure faite à leur autorité, admettre
leur fils aîné à leurs successions, et établir entre lui et leur fils puîné,
cette sage égalité que la nature et l’équité réclament en faveur des enfans nés du même sang. Us se sont dépouillés de leurs biens sous diffé
rentes clauses et conditions , les ont fait partager également sous leurs
ÿ e u x , et ont pris tous les moyens possibles d’assurer à jamais la paix
et l’union dans leur famille. C ’est la matière et le but des deux actes
des 11 février et 14 juin 1791? signés tant des père et mère que des
deux frères, en présence de leurs parens et de leurs conseils, qui avoient
travaillé avec zèle à une si heureuse réconciliation.
Par le premier de ces actes, le citoyen Heyrauld père et son
épouse, voulant établir de leur vivant Tordre, la p aix et la tran
quillité parm i leurs eirfans, et leur donner, par une distribution
uniforme de leur fo r t u n e , une preuve de justice et d'une égale
affectioii, leur abandonnent à Vavance de leur succession, et par
jo r m e de délaissement an ticip é, tous leurs biens meubles et im
meubles , sous certaines réserves et à différentes charges détaillées.
Jean et Joseph Heyrauld acceptent cette démission; et pour éviter
toutes difficultés entre eux et leurs héritiers, ils procèdent au par
tage par portions égales des biens qui leur sont délaissés. Us dé
clarent qu’il ne restera plus à partager entre eux que les objets
particuliers que leurs père et mère délaisseront à leur décès. Pour
consolider de plus en plus leur opération , les père et mère décla
rent, et le citoyen Jean H eyrauld, fils aîné, consent, que dans le
cas où il refuser oit après leur décès , $ exécuter le présent arran
gement de J'a mille , les actes de privation q u i avoient ci-devant
eu lieu à son égard, conservent toute leurjforce et reçoivent leur
entière exécution...........
Par le second acte, qui est purement additionnel et interprétatif
du prem ier, les père et mère et leurs fils assurent de plus en plus
Je partage fait, règlent différentes difficultés, et terminent par sti
puler qu’ au moyen des conventions ci-dessus , toutes réclama
tions , contestations et divisions entre les d eu x frèra s, demeurent
pour le présent et à Tavenir anéanties j reconnoissant que leurs
A 2.
�\
,
.
.
droits ont été pesés à la balance d’ une égale justice j promettant.
ne ja m a is nous inquiéter n i rechercher directement n i indirec
tement en f a ç o n quelconque’ renonçant respectivement à toute,
espèce de droits et avantages, en considération de ceux q u i ré
su lten t du présent acte en leu rfa v eu r, et principalement en fa veu r
dudit Jean H eyrauld, fils aîné.
Rien de plus sacré et de plus inviolable, sur-tout pour le citoyen
. Jean Heyrauld, fils aîné, que de pareils arrangemens. A l’époque
où ils ont été faits, les père et inère avoient bien le droit de régler
par avance le partage de leurs biens, et même de les distribuer inéga-,
lernent entre leurs enfans, ce qu’ils n’ont pourtant pas fait. Ils ont
même donné à ce partage un nouveau degré de force et d’irrévo
cabilité, en s e dessaisissant dès lors de6 biens détaillés dans les deux
actes. Les enfans pouvoient également, sous les yeux et de la vo*
lonté de leurs père et mère communs, après avoir accepté la démis
sion , procéder au partage et liquidation des biens abandonnés; ils
l’ont fait; ils ont même terminé le dernier acte par une transaction
sur toutes contestations nées et à naître entre eux. S’il exista jamais
quelque traité légitime et irréfragable , ce sont ceux dont il s’agit.
Il y a plus, si Jean H eyrauld, fils aîné, refusoit d’exécuter les
arrangemens dont il s’agit, s’il vouloit y porter atteinte, il feroit re
vivre l’exhérédation prononcée contre lui. On a vu en effet, que ses
père et mère ne lui avoient pardonné l’injure faite à leur puissance
par son mariage , que sous la condition expresse de s’en tenir aux
conventions contenues aux deux actes, et qu'en cas de refus l’acte
d’exhérédation devoit reprendre toute sa force. Il résulte de là que
s’il vouloit rompre une paix et une union si solennellement jurées
entre les mains des père et mère communs, le frère puîné auroit
droit d’opposer Texhérédation, et de réclamer l'universalité des
biens des successions paternelle et maternelle.
C ’en est assez pour être convaincu de la force et de la validité
des deux actes de 1791- t
'
A u surplus, que pourroit gagner le citoyen Heyrauld , Faîné, à la
> rupture des arrangemens faits avec son frère? abstraction faite de
l’exhérédation , pourroit-il espérer une part plus forte que celle de
son frère puîné dans les successions paternelle et maternelle ? Non y
sans doute.
t
t
Le citoyen Heyrauld père est decéde, mais depuis la loi du 17
nivôse an II ; la mère commune existe encore. C’est donc la loi du
17 nivôse qui règleroit les droits des deux frères, si les actes de 1791
étoient annuités. O r, cette loi n’est rien moins que favorable h l’iné
galité des droits entre les héritiers, et sur-tout aux avantages qu’un
frère préten^roit avoir au détriment de l’autre.
�L ’article premier déclare nulles toutes institutions contrac
tuelles et toutes dispositions à cause de m o r t, dont Fauteur est
encore vivant, ou n e s t décédé que le 14 ju illet 1789, ou depuis,
quand même elles auraient été fa ite s antérieurement.
L ’article II confirme encore cette disposition, en déclarant que
les dispositions contractuelles antérieures au 14 juillet 1789, qui
renferment en même temps des libéralités entre-vifs et une insti
tution dans des biens à ven ir, n'auront leur ejj'et que pour le
don entre-vifs, et non pour les biens résultans de Vinstitution , si
l instituant vit encore...........
^ Quoique ces articles ne subsistent plus, quant à l’effet rétroactif,
ils trouvent ici leur application, puisque le citoyen Heyrauld, père,
n est mort que depuis la promulgation de la loi du 17 nivôse,
e* que la mère commune est vivante. Ils frappent directement de
nullité institution faite dans le contrat de mariage du cit. Joseph
xleyrauld, du i cr. mars 1772. Il en résulte que cette institution est
annullée relativement aux biens à venir qui en étoient l’objet. Ce
seroit en vain que le citoyen H eyrauld, fils aîné, voudroit s’en
prévaloir pour demander les tiers des deux successions en question. In
dépendamment de tout autre m oyen, la loi du 17 nivôse repoussel0|t invinciblement sa prétention.
'-'Ctte loi détruit ensuite toutes les distinctions introduites dans les
successions par les anciennes lois, sous le nom de droit d’aînesse,
de préciput, ou sous tout autre prétexte. Elle veut* art. V I I I , que
les en fan s, descendans et collatéraux, ne puissent prendre part
aux successions de leurs pères, m ères, ascendans ou autres pa
ïens , sans rapporter les donations qu i leur ont été fa ite s par
c e u x -c i, antérieurement au x4 juillet 1789. Par là elle ferme la
porte à une des principales causes de l’inégalité dans les portions
eréditaires; mais l’article I X proscrit encore avec plus de force
cette inégalité.
~
« Les successions, y est-il d it , des p ères, m ères, ou autres ascen«dans, et des parens collatéraux, ouvertes depuis et compris le 14
tc juillet 1789, et qui s ouvriront à Vavertir, seront partagées égaleRment entre les enfans , descendans ou héritiers en ligne collatérale,
* Nonobstant toutes lo is, coutumes , donations. testamens et partc ta^es déjà faits. »
'
'
L a i ticle X I ajoute, que le mariage d’ un des héritiers présomptifs
n \&ie directe ou collatérale, n i les dispositions contractuellesfa ite s
7,na*'iaJ li ■
> ne pourront lu i être opposées pour l'exclure du par
age égal, à la charge par lui de rapporter ce qu i lui a ¿té donné ou
P<yre lors de son mariage.
"
'
1
�La loi, comme on le voit, rétablit entre les héritiers, soit directs ,
soit collatéraux, cette égalité si conforme à la nature et à la raison, et
si violée autrefois. Tous les héritiers doivent partager également l’ héri
tage de celui qui étoit leur auteur ou leur parent commun, quelles que
soient d’ailleurs les institutions ou autres dispositions contractuelles,
faites antérieurement, au préjudice de l’égalité que la loi établit dans
les partages. Plus de différence, sur-tout entre le frère aîné et le
puîné. Leurs droits sont égaux devant la l o i , comme aux yeux de
la nature.
Reste donc à tirer une conséquence; c’est que si les actes faits en
17 9 1, entre les deux frères H eyrauld, n’existoient pas, il faudroit
liquider leurs droits héréditaires d’après la loi du 17 nivôse an 2 , qui
établit entre eux une égalité parfaite. Mais ces actes existent ; ils font
ce que la loi a ordonné depuis, puisqu’ils renferment un partage par
égale portion. Ils forment un pacte de famille qui ne peut être légale
ment détruit, et qui ne peut même être violé par le frère aîné, sans
qu’il fasse revivre l’exhérédation prononcée contre lui.
Délibéré à Paris, ce i
-
5 prairial,
an 4 delà république.
H U T IN .
GATTREZ.
Æ C O N SE IL SOUSSIGNÉ qui a vu le mémoire des directeurs
des créanciers unis de Joseph H eyrauld, et les titres et actes qui
seront rappelés dans la présente consultation j
Est
’
que les procédures et les jugemens rendus de c.oncert
entre Jean-Baptiste H eyrauld, et Joseph Heyrauld son frè re , re
lativement au partage des successions de leurs père et m ère, sont
évidemment l’effet de la fraude pratiquée entre les deux frères, au
préjudice des créanciers de^ Joseph Heyrauld, qui se trouve en
banqueroute ouverte, et qu’ainsi ces créanciers sont bien fondés à
former tierce-opposition a ces jugemens, et à s’opposer à l’homo
logation du partage fait en conséquence, et à laquelle ils ont été
appelés par Jean-Baptiste Heyrauld.
L e principe ne sauroit etre contesté ; tout ce qui est fait en fraude
des créanciers, peut etre par eux révoqué ; ils sont admis à exer
cer tous les droits de leur débiteur, et par conséquent à faire va
loir tous les moyens que lui-même pourrait opposer contre les ac
tions exercées contre l u i , et qui tendroient à diminuer le gage de
scs créanciers. L e principe est trop constant pour avoir besoin d’être
d
a v i s
�établi : on peut voir sur cela la loi 2 au code quando Jiscus vel
prwatus debitoris su i debitores conv&nire p ossit, vel debeat ; et
la loi i , § 2 , if. de re judicata. C’est d’ailleurs l’a doctrine enseignée
par tout ce que nous avons de plus célèbres jurisconsultes , C ujas,
M ornac,le B ru n , Renusson, etc.
Il est vrai cependant que quelques auteurs, et entre autres le
B ru n , dans son traité des successions , ont pensé que le créancier
hypothécaire de l’un des cohéritiers dans le lot duquel , dans un
partage déjà fait , on n’avoit fait entrer que du m obilier, les im
meubles ayant été donnés aux autres cohéritiers, que ce créancier
ne pouvoit pas attaquer le partage, et troubler des arrangemens
pris dans la famille, ayant à se reprocher de n’avoir pas agi avant
le partage, dénoncé son action hypothécaire et demandé d’être ap
pelé au partage.
Mais d’un côté, dans cette opinion, il s’agit d’un partage auquel
on ne reproche point de lésion ni d’inégalité ; d’un autre côté , il
s agit d’un partage déjà fait, d’un partage exécuté; ici au contraire
le partage n’est pas consommé ; des experts y ont procédé, mais il
ne peut recevoir d’exécution que par l’homologation ; ce que JeanBaptiste Heyrauld a si bien reconnu , qu’il en a formé la demande
en homologation ; et il ne l’a pas seulement formée contre son frère,
avec lequel il avoit été ordonné, il l’a encore formée contre la di
rection des créanciers de son frère. Ceux-ci sont donc parties capa
bles pour contester cette homologation , et Jean-Baptiste Heyrauld
l’a bien reconnu, sans quoi il ne les y auroit pas fait appeler.
En second lie u , les jugemens concertés entre les deux frères, ne
peuvent pas nuire à leurs créanciers. Ces jugemens sont à leur égard
ee qu’ils seroient par rapport à Joseph Heyrauld leur débiteur, s’ils
avoient été rendus par défaut; il pourroit y former une simple op
position , et faire valoir tous ses moyens contre les prétentions de
son frère; par conséquent, les créanciers de Joseph Heyrauld peu
vent , en y formant tierce-opposition, faire valoir les mêmes moyens,
par le principe qu’ils sont fondés à exercer les droits de leur
débiteur.
~ ~
^ C’est une suite du même principe , qu’un héritier ne peut pas, en
iraude de ses créanciers, renoncer à une succession qui lui est échue,
et que les créanciers peuvent révoquer la renonciation et exercer tous
ses droits; e t ce n’est pas seulement dans le cas d’une renonciation
absolue, mais encore lorsque par le partage même déjà fait, en 1 ab
sence des créanciers, il y a eu quelque inégalité qui leur fait préju
dice; en ce cas, ils peuvent, toujours en exerçant les droits de leur
débiteur, se pourvoir contre ce partage, pour rétablir leur débiteur
5
�( 8 )
,
. . .
•
i c tous les droits qui lui appartiennent. On n a fait ici que copier
i ' termes de le B ru n , dans son traité des successions , liv. 3 , chap. 8,
eS .. % nom bre 28. Cet auteur ajoute , que les créanciers ont la même
n r t i o n
x-6vocatoire contre un partage in égal , que contre une renon
ciation , parce que le partage où il y a de la lésion, produit le môme
e ffe t , et les frustre d’une partie de leurs hypothèques.
Les principes une fois connus , il ne s agit que de rechercher la
fraude commise envers les créanciers de Joseph Heyrauld, dans la
conduite concertée entre lui et son irè re , et pour cela il convient sur
tout d’établir par les actes passés dans leur lamille, quels de voient
être les droits de Joseph H eyrauld, dans les successions de ses père
et mère.
. , ,
.,
,
,, ,
.
J o s e p h Heyrauld avoit été marié avant son Irere , et par son contrat
de m ariage, ses père et mère l’avoient institué leur héritier universel,
à la charge d’associer à l’institution Jean-Baptiste Heyrauld, son frère
aîné , pour les deux tiers.
_
. . .
Ces dispositions du contrat de mariage ne saisissoient que Joseph
H eyrauld , seul contractant, et la charge d’associer son frère aîné, qui
lui étoit imposée, pouvoit être révoquée par les père et m ère: la
chose est sans difficulté. O r , qu’arriva-t-il dans la suite ?
’
Jean-Baptiste Heyrauld, méprisant l’autorité de son p ère, sous la
puissance duquel il étoit alors, et le respect qu’il devoit, tant à sou père
qu’à sa mère , se maria sans leur consentement, et sans leur faire les
actes de respect q u i, par les lois alors existantes, lui étoient prescrits
à peine d’exhérédation. Les père et mère usèrent du pouvoir que les
lois leur accordoient, et firent, devant notaire, un acte authentique
d’exhérédation de Jean-Baptiste Heyrauld , révoquant la charge qu’ils
avoientimposée à Joseph H eyrauld, de l’associer à son institution ;
ils s e réservèrent seulement la liberté de faire à Jean-Baptiste Heyrauld
quelques libéralités par dons ou legs, dans le cas où il se rendroit
digne de leur commisération, mais sans que les libéralités qu’ ils pourr o i e n t dans ce cas exercer à son égard , pussent être regardées comme
une révocation de l’exliérédation.
L ’acte d’exhérédation est de l’année 17 8 1, et les choses demeurèrent
en cet état pendant dix aos, jusques eu 1791 , temps auquel les père et
■mère voulant prévenir toutes les contestations qui pourroient naître
contre leur —.
.
A
,
.
Crest et à Chanonnat, dont ils le mirent meme des lors en possession ;
mais ils le chargèrent du payement de plusieurs de leurs dettes, et
particulièrement d’acquitter une somme de 76,000 francs , sur le prix
1
de
�de l’acquisition qui avoit été faite par le père Iieyrau ld , des domaines
des Domeries et du Chaufour ; et par le même acte , ils assignèrent à
Joseph Heyrauld , leur fils cad et, les domaines des Domeries et du
Chaufour, pour son partage dans leurs successions, et à la charge de
payer les dettes qui lui furent désignées. En un m o t, ils réglèrent dé
finitivement que les biens du Crestet de Chanonat, feroicnt dans leurs
successions le lot de l’aîné , et les domaines des Domeries et du Cliaufour, le lot du cadet, sous les charges qui furent imposées à chacun
d’eux ; mais en môme temps les père et mère marquèrent franchement
leur intention , que dans le cas où après leur m o rt, le fils^ aine refuseroit d’exécuter l’arrangement de famille qui venoit detre fait, les
actes de privation, (c’est-à-dire, l’exhérédation ) , qui avaient eu lieu
ci-devant à s un égard, conserveraient toute leu r f o r c e , et rece
vraient leur pleine et entière exécution.
y
T e l étoit l’état des choses, lorsque le 22 fructidor an 4> aprcs la
mort du père H eyrauld, il fut passé, par-devant notaire, une transac
tion sur procès, contenant partage entre les deux frères, de l’agrément
de leur mère, qui fut partie dans l’acte, et qui y traita aussi de ses droits
dans la succession de son mari.
_
Dans ce traité, les deux frères respectèrent les intentions de leur
père, et le frère aîné se soumit aux conditions sous lesquelles son père
s’éloit relâché de l’exhérédation qu’il avoit prononcée contre lu i; en
conséquence il fut fait un partage par lequel ses biens, situes dans la
commune du Crest, furent mis au lot de Jean-Baptiste H eyrauld, et son
lot fut chargé de payer tout ce qui pouvoit être resté dû du prix de la
vente des domaines des Domeries et du Chaufour , et à la citoyenne
H eyrauld, femme Massis , ce qui pouvoit être resté dû de sa dot. Quant
à Joseph Heyrauld, il lui fut assigné pour son lo t, les domaines des
Domeries et du Chaufour, et il fut chargé de payer dix articles de
dettes de la succession , spécifiés dans le traité. Enfin, par le dernier
article, il est dit qu’au moyen de tout ce que dessus, les parties se
tiennent réciproquement quittes de tous rapports, prélévemens et
l’c'stitulions de jouissances, et que tous procès prévus et à prévoir,
sont éteints et assoupis, sans aucuns dommages-intérôts.
^
Il n’est peut-être pas ici hors de propos de remarquer que les père
et mère , en se relâchant-de l’exhérédation, avoient pu y mettre telle
condition que bon leur sembloit, suivant la doctrine des auteurs et
la jurisprudence des arrêts, ainsi qu’on peut le voir dans le traité des
successions, de le Brun , liv. 3 , chap. 10 , sect. 4> noinb. 12: uinsL les
père et mère du fils exhérédé, en le rappelant à leur succession, ont
pu ne l’y rappeler que pour telle part et portion qu ils ont voulu, sans
que celui-ci puisse se prévaloir delà chargé de 1 association qui avoit
�( 1° )
.
. ,,
été imoosée à son frère, charge qui étoit révocable, et qui avoitété
révoquée par l’acte d’exhérédation.
#
IL semble donc que d’après un acte aussi authentique que le traite du
22 fructidor an 4, dont on a rappelé les dispositions, acte qualifié de
transaction sur procès, et qui en a tous les caractères , les intérêts des
deux frères se trouvoient définitivement réglés , que tout se trouvoit
terminé entre e u x , et qu’il ne pouvoit plus y avoir matière à con
e
f f e t
s o m m e n t se peut-il donc que le frère aîné- ait voulu en élever y
et que le cadet se soit prêté à de nouvelles prétentions, auxquelles ce
traité présenloit une barrière insurmontable? Les causes n’en sont
pas difficiles à pénétrer , et elles manifestent le concert qui a régné
e n t r e
les deux frères pour faire fraude aux créanciers de Joseph
H eyrauld .
Celui-ci, dès avant et depuis la mort de son père, s etoitlivré a un
genre de com m erce, q u i, par son défaut d’intelligence , et peut-êtrepar d’au très encore plus blâmables, a entraîné sa ruine; en sorte que
déjà et depuis long-temps il est en banqueroute ouverte; et c’est, à»
n’en pas douter , pour mettre une partie de ses biens à couvert et
frustrer ses créanciers, cju’il a concerté avec son frère,. des mesures
qui ne tendroient à rien moins qu’à faire passer à celui-ci tout son
patrimoine, et même à le rendre débiteur de son frère de sommesconsidérables, ce qui rend très-vraisemblables quelques contre-lettres
entre les deux frères, pour conserver au cadet une planche de naufrage..
Si on a voit sous les yeux la- procédure tenue entre les deux frères,,
il est à croire qu’on y trouveroit des circonstances de- plus en plus
propres à manifester l’esprit de fraude qui les a dirigés; mais on en’
trouve assez d’ailleurs dans le dispositif du jugement qui a ordonné
entre eux un nouveau partage, pour en demeurer convaincu.
On ne connoît au reste le dispositif de ce jugement, que par-ce qui
en est rappelé dans le rapport des experts qui ont procédé au nou
veau partage; car , en donnant copie de ce rapport aux directeursdes créanciers de Joseph H eyrauld, on a affecté de ne pas leur donner
copie du jugement qui ordonnoit le partage, pour ne pas leur faireconnoître les moyens respectifs qu’avoient pu employer les parties, et
les inotifsde s o n jugement que le tribunal avoit pu en recueillir; en quoi
cette omission n’a pu avoir pour objet que de cacher aux créanciers,
les circonstances de fraude qu’ils auroient pu trouver dans- les faits, et
les moyens sans doute exposés dans le jugement.
_
Ce ne peut donc être que sur de tausses suppositions ou des consentemens frauduleux donnés par Joseph Heyrauld, et concertés,
entre son. frère et lu i, que le jugement du tribunal a déclaré nuls
�lacté d’exhérédation du 4 juillet 17 8 1, le partage du 2 fructidor
an 4 , et tout ce qui s’en est ensuivi, et en conséquence a ordonné
un nouveau partage des successions des père et m ère, dans lequel
en attribue trois cinquièmes à Jean-Baptiste lie y ra u ld , et deux
cinquièmes seulement à Joseph H eyrauld, et lors duquel partage il
est encore ordonné plusieurs rapports, tant en principaux qu’en
jouissances, et divers prélévemens. M ais, le dispositif même du
jugement prouve démonstrativement le concert de fraude, puisqu’il
7 est dit nommément, qu’il est rendu du consentement de toutes
tas parties. Aloi*s ce jugement ne peut former aucun préjugé contre
des tiers créanciers d’un des héritiers , qui n’a pu donner des consentemens valables au préjudice de ces mêmes créanciers, qui, alors
aussi peuvent faire anéantir un pareil jugement, en prouvant que
les droits de leur débiteur, qu’ils sont fondés à exercer, y ont été
blessés \ o r , ici la preuve en est facile.
Ln effet, il n'y avoit pas lieu à un nouveau partage entre les
deux freres, parce qu’il y en avoit eu un premier qui étoit inatta
quable, et dans lequel les intentions des père et mère avoient été
exactement respectées et suivies.
L e frère aîné n’auroit pas même pu attaquer ce premier partage
par aucun moyen de lésion.
Il ne pou voit pas se prévaloir de la charge qui avoit été imposée
a son frère, par son contrat de mariage, de l’associer pour les deux
tiers de son institution, puisque cette charge étoit constamment
revocable, et que dans le fait ily en avoit eu One révocation expresse
dans l’acte d’exhérédation de 1781.
'
D ’un autre côté, l’acte d’exhérédation, autorisé par les lois alors
existantes, emportoit même contre le frère aîné la privation absolue
des successions de ses père et mère.
Il est vrai que l’exhérédation avoit été ensuite modifiée par les
pere et mère , mais sous une condition qu’ils y -avoient apposée, et
on il ci-devant prouvé qu’ils étoient parfaitement maîtres d’imposer
telle condition que bon leur sembloit 5 c’est même de l’accom
plissement de cette condition , qu’ils ont fait dépendre les modifi
cations qu ils ont accordées i\ leur exhérédation, en disant formelle
ment, que s i Je fils aîné refusait d’exécuter t arrangement qu i
venoit d etre f a i t , /es actes de privations q u i avoient eu lieu cievant a son égard, conserveroient toute leur fo r c e , et recevraient
leur pleine et entière exécution.
Cet arrangement de famille , concerté entre les père et mère et
les enlans, a d’ailleurs pleinement été exécuté après la morl du
p ere, et on s y est exactement conformé dans l’acte de transaction
B 2
�( 12 )
,
, ,
.t r*»v*;i<rc du 22 fructidor an 4 ; et c’est conformément à l’arra¡¿(-vient de famille, que la part du fils aîné et celle du cadet ont
¿i* fixées et déterminées dans ce dernier acte. Les biens situes dans
la ^co inmune du Crest , ont formóle lot du fils aîné, et on a spécifié
les dettes dont ce lot seroit chargé ; les domaines des Domeñes et
du G hau four ont fait le lot du cadet, et on a également spécifie
les dettes qui étoient à la charge de ce lot. ^
Il est manifeste qu’il ne peut jamais y avoir de lésion à opposer
contre ce partage; la raison en est toute simple: cest parce q u o ii
y a rempli les intentions des père et mere , et que si le frere aine
n’a voit pas voulu rem plir ces intentions, il n avoit rien a prétendre
aux successions de ses pere et m ere, et qualors lexheredation
devait conserver toute sa fo r c e , et recevoir sa pleine et entière,
QCCGCUitOJX»
i/''
a / a,
1? 1 ' ' 1 é*
Supposons môme que le irere aine eut pu attaquer lexheredation
et l'arrangement de famille fait pendant la vie du père, par lequel
¡’exhérédation avoit été modifiée ; au moins seroit-on forcé de bien
convenir que cela eût fait vraiment la matière d’une contestation et
d’ un procès sérieux: mais aussi dès qu’après la mort du père, les
deux frères ont passé l’acte du 22 fructidor an 4 , ce n’est pas
sans raison qu’ils ont qualifié cet acte de transaction; o r, en matière
de transaction il 11e peut jamais y avoir lieu à restitution pour lésion,,
suivant la disposition des lois, et particulièrement d’après l’ordonnance
de i o.
_
_
#
Il est donc d elà plus grande évidence, que la transaction du 22c
fructidor an 4 , et le partage qu’elle renferm e, ont fixé irrévoca
blement l’état et le sort des parties dans les successions de leurs
père et mère. Dès ce moment donc, chacun des deux frères est
devenu propriétaire incommutable du lot qui lui est déterminé par
le partage.
_
?
Ce n’est donc évidemment qu en fraude de créanciers du cadet T
que les deux frères ont concerté des mesures pour parvenir à dé
truire le premier partage', et pour en faire un autre qui détruisît
tous les droits déjà acquis au cadet, non seulement pour diminuer
sa fortune , non seulement pour 1 absorber, en la faisant passer tout
entière à l’aîné, mais encore pour rendre celui-ci créancier de sort
frère de près de 5o,ooo mille francs; au lieu que, laissant subsister le
premier partage, dans lequel les parties s’étoient tenues réciproquement miittes de tous rapports, prélévemens et restitutions de jouisi l en r é s u I toit que le cadet ne devoit rien à son frère, et
«arices
Trouvoit encore propriétaire de la totalité des domaines des Do~
merles et du CliaiifoiU'»
56
9
�Il doit donc paroître démontré, que la tierce-opposition des créan
ciers de Joseph Heyrauld est bien fondée, et que le jugement con
certé entre les deux fr è r e s n e doit son existence qu’au consentement
que le cadet y a donné , puisque ce consentement est précisément
exprimé dans le dispositif du jugem ent; mais, consentement qu’il
na pu donner au préjudice de ses droits acquis, et en fraude de ses
créanciers. Ce consentement devant donc être annullé, le jugement
qui n’en est qu’une suite, et qui ne peut avoir d’autre motif, ne
peut pas non plus subsister.
■ Il y auroit au reste, bien des observations à faire sur le jugement
rendu entre les deux frères. On ne voit pas, par exem ple, le m otif
qui fait donner 3 cinquièmes à l’aîn é, et deux cinquièmes au cadet.
Si ^association de l’aîné avoit pu subsister, il auroit du avoir les
deux tiers; c’est-à-dire, plus que 3 cinquièmes; et le cadet n’auroit
- dû avoir qu’un tiers; c’est-à-dire, moins de deux cinquièmes. Si au
contraire on devoit écarter l’association, les portions auroient dû être
égales.
• Il y auroit encore des observations à faire sur le rapport des ex
perts , ou non seulement on remarqueroit des omissions, mais où
Ion voit encore clairement qu’ils n’ont rien opéré par eux-mêmes;
que les actes ne leur ont point été représentés, et qu’ils ont tout
laie de confiance d’après le vœu des deux frères, qui n’avoient
d autre vue que de frustrer les créanciers légitimes de Joseph
Heyrauld.
• Mais toutes ces observations deviennent inutiles, dès qu’il est évident
que le jugement en lui-même ne peut subsister, non plus que tout ce
quia pu être fait en conséquence,et que la tierce-opposition ne peut
pas éprouver de difficulté.
•
Délibéré à Riom , le 17 pluviôse an 8.
ANDRAUD.
J - Æ C O N SE IL SO U SSIGN É , qui a revu sa précédente consul
tation , délibérée le 17 pluviôse dernier, et autres pièces dont il
sera parlé dans la présente consultation, qui lui ont été mises sous
es yeux par les directeurs des créanciers unis do Joseph H eyrauld,
et un nouveau mémoire ;
PERSIST^, dans les résolutions de sa précédente consultation, et
�*4
.r
c
)
ne pense pas que les motifs sur lesquels elles ont été établies, puis
sent être écartes par les objections qu’on présume pouvoir y être
opposées par Jean-Baptiste Heyrauld.
.
La clause du contrat de mariage de Josepli Heyrauld, par laquelle
il étoit chargé d’associer Jean-Baptiste Heyrauld son frère, à l’insti
tution universelle pour les deux tiers* cette clause n’avoit pas pu
saisir Jean-Baptiste Heyrauld , et lui attribuer irrévocablement les
deux tiers de l’institution , puisqu’il n’étoit pas co n tra cta n t.
Ainsi., sans difficulté , la charge d’associer étoit révocable. Or
par l’acte de 1781 , non seulement les père et mère avoient pro
noncé l’exhérédation contre Jean-Baptiste Heyrauld , mais ils avoient
même expressément révoqué la charge d’associer, faite en sa laveur
dans le contrat de mariage de son frère.
Quand on adopteroit même que les lois survenues depuis la ré
volution auraient annullé les exhérédations dans tous les cas où elles
étoient autorisées par les lois antérieures, la révocation de la charge
d’associer n’en subsisterait pas moins, puisque cette charge ouï
n’avoit pas saisi Jean-Baptiste H eyrauld, étoit révocable- et ’cette
révocation serait d’autant plus favorable, qu’elle n'aurait que’ l’effet de
rétablir l’égalité entre les deux frères, égalité qui a fait l’obiet nrincipal des nouvelles lois.
’
Et c’est aussi ce qui est arrivé par l’acte de 1791 , «ù les uèreet
mere ont modifie 1 exherédation , et fait eux-mêmes entre leurs
enfans concourons avec eux dans cet acte, le partage de leurs biens
en attribuant a chacun d eux çjes portions de leurs biens qui formoient a peu près des lots égaux.
.
, ,p > illeu‘'s » ,Ie P6'-? .Heyrauld dans le contra l de mariage de Joseph,
s eto.t «serve de faire lui-meme le partage de ses bfens entre ses
deux fils. Il est vrai qu il leur »voit aussi réservé le droit de faire
après sa mort la révision de ce partage ; mais c’est en effet ce qu’ont
fait les deux ,fils
nn 4/ , par 1lecmel1 ils
1
n dans. le traité
. du 22 fructidor
\ : LlU01 an
ont approuvé le partage qui avoit été lait entre eux ,,‘ar leuî- père,
et promis de l cxeculer ; et cet acte est qualifié et porte avec lui tous
les caractères dune véritable transaction sur procès* il y est dit ex
pressément qu’au moyen de toutes les conventions qui y sont arrêt t a , tous procès prévus et à prévoir seront éteints et a'ssoupis sans
aucuns depens, dommages-intérêts.
i
r
Dans cette transaction , la mère des parties n’y est entrée qnp
pour consentir qn<- sps fi|s fissent entre eux le partage des biens dont
elle avoit l’usufruit; et ensuite , par 1111 autr.e acte du même jour
elle sVsl départie de son usufruit et de tous ses droits sur la suc
cession de son piari, A la charge d’une pension qu’glle s’éloit réser
vée pendant sa vie.
-
�15
C
)
,
Il seroit ridicule de prétendre , que de ce que la mère est entree
dans le traité pour l’unique objet de son usufruit, c’est, par son im
pression que Jean-Baptiste Heyrauld a accordé toutes les clauses de
ce traité ; et ce qui prouve que la déférence pour sa mère n y a eu
aucune part, c’est que c’est même avant la mort de sa mère qu’il a
formé l’action pour réclamer contre le traité.
• Enfin Jean-Baptiste Heyrauld a lui-même approuvé et exécuté le
traité, en payant postérieurement la créance de la citoyenne le Clercd e -J u ig n é , qui avoit été mise à la charge de son lot , par le par
tage fait par le père en 1 791, et par le traité du 2,2 fructidor an 4.
Le jugement qui a ordonné un nouveau partage entre les deux
frères, en annullant, soit celui qui avoit été fait par le pere, soit
le traité du 22 fructidor an 4} ce jugement auquel les directeursdes créanciers unis de Joseph Heyrauld ont formé opposition , ne
peut pas être considéré comme un véritable jugement, par lequel
le tribunal ait entendu juger les questions ; on ne peut le regarder
que comme un acte de fraude concerté entre les deux trères, et le
jugement en contient la preuve la plus évidente.
' En effet, aucun m otif de décision sur les questions présentées, ou
qui pouvoient s’élever, n’est exprimé dans le jugem ent, qui n’a
donné d’autre m otif que celui-ci: attendu que les -parties se sont mu
tuellement accordées, et qu il riexiste plus de difficultés entre elles,
le trib u n a l, du consentement de toutes les parties, etc.
Si en général des créanciers autorisés à exercer tous les droits et
actions de leur débiteur, sont fondés à former tierce-opposition à un
Jugement rendu dans une contestation sérieuse, lorsqu’ils sont en état
d’établir que ce jugement blesse leurs intérêts, et qu’il n’est qu’une
suite de la fraude commise par leur débiteur; combien à plus forte rai
son leur tierce-opposition ne doit-elle pas être accueilllie, lorsqu’il ne
s’agit que d’un jugement rendu de concert, où leur débiteur se prive
volontairement des droits les plus légitim es, au préjudice de ses créan
ciers ? Et c’est ce que produirait l’effet de ce jugement, s’il pouvoit
être exécuté, puisqu’ilannulle un partage fait par le père entre ses enfans , exécuté par les deux frères, api’ès la mort du père, par une transac
tion sur procès, et en ordonnant un nouveau partage avec despréléVemens et des restitutions de jouissances qui n’étoient pas dûs, et ré
duisant i\ rien la fortune de Joseph H eyrauld, qui étoit le gage de
ses créanciers.
O n a suffisamment prouvé , dans la précédente consultation , que
îa tierce-opposition des créanciers étoit des plus légitimes ; et cette'
preuve se fortifie par le jugement même qu'ils aLtaquent, dont ont
nTavoit alors qu’une connaissance imparfaite, mais où l’on voit au-
�( r6 )
. . .
'ourd’ hui qu’il a été rendu sans aucun examen des questions qui se
m-csentoient, et sur le seul motif que les -parties s’étoient jnut¡telle
ment accordées, et qu’ il n existo it plus de difficultés entre elles.
On peut ajouter que la fraude faite aux créanciers, et concertée
entre les deux frères, se manifeste encore dans 1 exécution qu ils ont
voulu donner à ce jugement par le partage quils ont fait faire par
les experts nommés en conséquence de ce jugement} partage dans
lequel les experts n’ont eu autre chose à faire que de copier lesi
volontés des parties , qui tendoient toutes à la ruine des créanciers.
Parmi plusieurs exemples que l’on peut en trouver dans ce par
tage, il y en a sur-tout deux de remarquables.
I*» On y fait prélever à Jean-Jaaptiste Heyrauld, une somme de
q5 ooo 1i~, pour les intérêts de la créance delà citne. leClerc-de-Juigné,
qui avoit’ été mise à la charge de son lot par le partage de 1791 , et.
•par le traité du 22 fructidor an 4 , tandis qu’il est prouvé par
î’arrêté de compte fait entre Jean-Baptiste Heyrauld et la citoyenne
le Cierc-de-Juigné, devant les notaires à Paris, le 18 vendémiaire
an 6 que Jcan-Baptiste Heyrauld n’a payé que la somme de 3000
à laquelle la citoyenne le Clero-de-Juigné voulut bien réduire les
intérêts. Voilà donc un prélèvement de 35,000 if~ qui devoit être
réduit à 3000
seulement, quand- même il auroit pu y avoir lieu;
à un nouveau partage.
^
20. Les experts, dans ce nouveau partage , portent dans l’état
des dettes du père une somme de 3,280 , due aux citoyens Roddes
et B re t, en vertu d’un jugement du 27 pluviôse an 7. Il est vrai
que cette créance dérivoit d’un billet à ordre fait par le père; mais
le montant en avoit été touché par les deux frères, qui en avoient
fourni une indemnité à leur père, et avoient promis solidairement
de l’en garantir. L e payement de cette créance ayant été poursuivi;
contre Jean-Baptiste H eyrauld, il eut l’impudeur de la désavouer ;•
mais le créancier ayant recouvré la promesse d’indemnité , JeanB a p t i s t e Heyrauld , par le jugement du 27 pluviôse an 7 , fut condamné
* ' navement, et un des motifs du jugement exprime nommément
aU
désaveu avoit été f a i t de mauvaise f o i par Jean-Baptiste
que
-- • on porte
■ donc
J----1.....................4
— , -------1 ‘ tes du
Uerrauld' Ainsi
dans le partage
comme deltes
'pnere,
>
rmI
nVtoit
due
la
dette
des
deux
frères,
et
à
laquelle
Jer
e r e , ce
eu
ciul
q
u
i
ni'toit
H“
ï “ “ vlv “ r..
----------y
. ™ ’.
^
J
e a n’
. H
tYeyrauld
..... „1,1 rWmh'onnU'ihuer
Rnni iste
devoifoontribuer pour
pour la
la moitié.
moitié.
T
Dans a*, même nouveau partage, on porte la restitution des
• ’ 4 - An Iran-Baptiste Heyrauld à 16,223 ^ , et celles de Joseph
' ÿrauld i ¿7';7nt
c V * -d b e, “ ^>55i* "■ ‘l0 P,us
Cdlus de.
Il
frère
1IÌ11 de diminuer d’autant les droits de celui-ci ; tnndis
qu-it ne poùvoit être question de restitution de jouissances, puisque
4
�par la transaction du 22 fructidor an 4 , les deux frères s'éloient
respectivement tenus quittes' de tous rapports, prélévemens et res
titutions de jouissances»
.
^ E n fin , ce qui achève de mettre la fraude dans le plus grand
jo u r , c’est de voir que par l'effet du nouveau partage , non seu
lement il ne reste rien à Joseph H eyrauld, des successions de ses
père et m ère, mais qu’encore on le constitue débiteur de son frè re ,
d une somme de plus de 30,000 \ ce qui n’a pu se faire que
pour frustrer les créanciers , et comme on l’a dit dans la précé
dente consultation, pour conserver à Joseph H eyrauld, par quel
que contre-lettre, une dernière planche de naufrage.
-
Délibéré à R io m , le 13 prairial, an 8.
ANDRAUD.
;
.
D I S P O S I T I F
DU
JU GEM EN T
DONT
EST
APPEL,
D u 16 prairial an 8.
L e tribunal, par jugement en premier ressort, déboute les parties
de Huguet, ( les créanciers de Joseph Heyrauld ) , de leur opposition
ou jugement du Jloréal an 6 , et les condamne en ïam ende de
60 f : et néanmoins ordonne que par de nouveaux experts, il sera
procédé aux opérations ordonnées par les jugemens du prairial
ûn 6 , et 17 prairial an 7 , lors desquels la somme de 600 1f~ypayée
<t lajille V a llière, sera portée au chapitre des prélévemens de Joseph
H eyrauld, et celle de 16,876 tt') pour intérêts payés c1 ladite Jutgné,
ne sera portée en prélèvement audit Jean-Baptiste H eyrauld, que
pour 3000 ti~> et que la créance Brest sera soustraite des prélévetnens dudit Jean-Baptiste H eyrauld, s a u f ¿1 se pourvoir par les
.voies de droit, contre ledit Joseph H eyrauld, etc.
5
5
�( 18 )
.
M OTIFS du jugement, et qui y sont exprim és, en ee qui concerne
les créanciers de Joseph Heyrauld.
p r e m i e r
Attendu que le jugement-du
bonnef o i .
m o t i f
5 Jloréal an
.
6 , a été convenu de
r
Ré
ponse
au premier M otif.
Le jugement auquel les créanciers de Joseph Heyrauld, ont formé
tierce-opposition, a été rendu sans discussion ; aussi n’en a-t-on exprimé
d’autre motif, si ce n'est que les parties se sont mutuellement àccor
dées , et q u il ne reste plus de difficultés entr elles. Et c’est pour cela
qu’il est dit, qu’il a été rendu du consentement de toutes les varties
O r , comment ce jugement a-t-il pu être convenu de bonne foi lors
qu’on n’y douve aucune discussion sur les questions auxquelles les
demandes de Jean-Baptiste Heyrauld pouvoient donner lieu? Commenf
le consentement de Joseph Heyrauld pouvoit-il avoir été donné de'
bonne lo i, Iorsqu on ne peut pas s empêcher de reconnaître qu’il avoit
les moyens es plus solides a opposer à ces demandes; lorsqu’on voit
qi. ,1 s etoit lm-meme fait cela,Fer sur ces moyens , paHa consultation
qu s etoit fait,donner des e l 5 pra.rial an 4 , par deux jurisconsultes
de Pans et d après laquelle avo.t été arrêtée la transaction du
fructidor de la meme annee? lorsqu’on voit que les actes antérieurs et
postérieurs à cette consultation, passés dans la famille , étoient inatta
quables, et que cts actes avoient confirmé J Joseph H eyrauld, une
portion égale * celle de son (rère, dans 1* succession de leur pèrece ç,u. est aemonslrativement établi dans les consultations ci-dessus?'
Qu on nous dise sur quelle base est appuyée la disposition du jugement
de floréal au 6 qu, donne trois cinquièmes à Jean-Baptiste Heyrauld.
et deux cinquièmes seulement a Joseph H eyrauld, tandis qu’à partir
de I association du contrat de mariage de
H eyrauld, JeanBaptiste devoit avoir les deux tiers, et que d’après la révocation de
1 association , et les dispositions du pere dans les actes subséquens, il
ne devoit avoir que la moitié. Encore une fois, pourquoi ces trois e n -'
quièmes à un et les deux cinquièmes à autre? Mais la circonstance
que Joseph Heyrauld méditoit alors sa banqueroute, puisquelle a suivi
,1
Joseph
1
P’’1 . . .
,
■
et qui faisoieut le gage de ses créanciers.
1
�5
'
Qu’on ajoute que par l’efFet clu jugement du prairial an 6 , rendit
de son consentement, il s’est soumis à des l’apports et des restitutions
de jouissances de sa part, et à des prélévemens de la part de son frère,
tandis que par la transaction du 23 fructidor an 4 , les parties s’étoient
•respectivement tenues quittes de tous rapports, prélévemens, et resti
tutions de jouissances. Dans le concours de toutes ces circonstances,
n’est-on pas fondé à croire qu’il ne s’est prêté h donner son consente•ment, qu’en considération des conditions secrètes arrêtées avec son
frère, pour se conserver, comme il a été dit dans les consultations, une
dernière planche de naufrage! II doit donc paroître inconcevable que
les premiers juges aient pu donner pour motif du jugem entdont est
appel, que celui auquel les créanciers avoientform é tierce-opposition,,
avoit été accordé de bonnef o ù
D E U X I È M E
M O T I F ,
■Attendu q u ii étoit permis aux d e u x fr è r e s , de transiger de leurs
droits réciproques , et q u u n e transaction en jugement est plus
solennelle qu'une transaction devant notaire.
R é p o n s e *
Ce motif démontre qu’il n’y a pas eu de vrai jugem ent, et que le
premier tribunal n’a rien eu à juger. Aussi point de discussion : il n’est
rendu qu’ après que les parties se sont accordées, q u ii n’existe plus
de difficulté entr ellesyet de leur consentement; mais il n’est pas vrai
q u ii f û t permis à Joseph H eyrauld, l’un des deux frères, par une
transaction, soit en jugem ent, soit devant notaire, d’abandonner des
droits qui lui étoient acquis , en fraude de ses créanciers dont ces
droits faisoient le gage. On a établi dans les consultations, et on ne
sauroit trop le répéter, que « Dans notre droit les créanciers peuvent
«intervenir au partage, pour y soutenir les droits de leur débiteur ;
« mais que quand le partage est fait en leur absence, et qu’il y a
Cc quelqu’inégalité qui leur fait préjudice, ils peuvent, en exerçant les
* droits de leur débiteur, se pourvoir contre ce partage, pour le rétablir
« dans le droit d’aînesse, et autres droits qui lui appartenoient, lors
« principalement que leurs dettes péricliteroient autrement. Ils ont
R la meme action révocatoire contre un partage inégal que contre une
« renonciation, parce que le partage où il y a de la lésion, produit
« le même eiFet, et les frustre d’une partie de leurs dettes ; et un aîné*
«qui a des dettes, ne peut se désister de son droit d’aînesse; ni im
<*ûls admettre ses sœurs à une succession, nonobstant quelles aient
�( 20')
^
(
« été dotées dans une coutume d’exclusion ; ni un mâle entrer en
« partage avec une femelle, des fiefs qui lui sont échus en collaté« raie, sans avoir un dessein formé de frustrer ses créanciers. Cette
«remise et cet abandonnement de ses droits, est une véritable do
« nation dans laquelle il suffit qu’il y ait de la lésion et de la fraude.
« Car en ce cas, saiis exam iner s i ceux qu i en voudraient protefite r sont participons de la ¿fraude, l’action révocatoire des créan
te ciers a lieu ». Le Brun, traité des successions. L. 3. Ch» 8. Sec. 2
N°. 28.
1
.
-
T R O I S I È M E
m
.
o t i f
A ttendu enfin q u à Tépoque du jugement, la fo rtu n e de Joseph
H e y r a u ld paroissoit bien a ssise, et qu'on ne pouvait pas prévoir
la fa illite qu i ri est venue q u u n an après.
R
é p o n s e
.
5
Com m ent, à l'époque du jugement du floréal an 6, la fortune
de Joseph Heyrauld pouvoit-elle^ paroître bien assise, tandis que
peu de mois avant ce jugement, il avoit vendu pour 5i,5oo ^ de
biens, dont il avoit. employé le prix à payer à quelques-uns de ses
créanciers , le tiers ou le quart de leurs dettes, afin de les engager
à renouveler leurs effets,pour ce qui leur étoit resté dû; tandis que
même alors, il avoit consenti des obligations par-devant notaires,
preuve de la défiance des créanciers qui avoien t exigé des obliga
tions, contre 1 usage ordinaire des négoeians, qui ne traitent entre
eux que par lettres-de-change ou autres effets de commerce? Com
ment cette fortune pouvoit-elle paroître bien assise avant ce juge
m ent, tandis que quelques mois après, sa banqueroute a été déclarée,
et que dans son bilan, ou il na déclaré aucune perte, il porte ses
dettes passives à 270,000 ^ , el ne présente qu’un actif seulement
en mobilier de 30,000
mais qui n’a produit en effet, que 18,000
par la vente que ses créanciers en ont fait faire? Il n’y a donc qup
]u plus complète illusion, dans ce dernier m otif du jugement dont
est appel, en ce qui concerne Joseph Heyrauld.
o
b
s
e
r
v
a
t
i
o
n
s
.
Il
seroit inutile d’examiner les autres motifs du jugement dont est
appel, dans ses autres dispositions; mais on peut dire qu’il en résulte
�de nouvelles preuves de la fraude dont Joseph Heyrauld s’est rendu
coupable envers ses créanciers. On peut même ajouter qu’il en résulte
aussi que Jean-Baptiste Heyrauld a été participant de la fraude.
En effet, le partage fait par les experts, en vertu de ce jugement,
faisoit faire eatr autres deux prélévemens à Jean-Baptiste Heyrauld ,
qui étoient absolument sans fondement, et contre lesquels Joseph
Heyrauld, toujours de concert avec son frère, ne faisoit aucune récla
mation, puisqu’il n’en avoit rien dit lors du partage, et qu’il avoit
laissé rendre par défaut contre l u i , le jugement dont est appel, et
ce n’est que d’après les observations faites par les créanciers eux-mêmes,
sur ces deux prélévemens, que le jugement dont est appel, a ordonné
de nouvelles opéi'ations par d’autres experts, dans lesquelles le premier
prélèvement seroit réduit de quatre cinquièmes, et le second prélè
vement seroit entièrement effacé.
L e premier prélèvement que s’étoit fait accorder Jean-Baptiste
H eyrauld, sans contradiction de son frère, étoit de 16,875 francs,
pour intérêts payés à la citoyenne de Juigné, et il est prouvé par la
quittance de la citoyenne de Juigné, qu’elle s’étoit contentée de 3,000 fr.
pour ses intérêts; aussi le jugement a -t-il réduit le prélèvement à
3i°oo fr. Pourquoi donc Jean-Baptiste Heyrauld avoit-il demandé
16,876 fr. tandis qu’il ne lui étoit dû que 3,000 francs ? Pourquoi donc
Joseph Heyrauld ne réclamoit-il pas contre l’excès prodigieux de ce
prélèvement ? N ’est - ce pas là une preuve évidente du concert de
fraude entre les deux frères ?
L e second prélèvement que s’étoit fait accorder Jean-Baptiste Hey
rauld , toujours sans contradiction de son frère, étoit d’une somme
de 3,280
par lui prétendue acquittée comme dette de la succession
de son père, au citoyen Brest, tandis que ce n’étoit pas une dette
du père, mais une dette personnelle des deux fils. Le père , à la v é rité,
s’étoit bien obligé envers le citoyen Brest; mais ce n’étoit que comme
caution de ses fils, qui en avoient donné une indemnité. Aussi ce prélévement de 3,280 francs, a-t-il été rejeté par le jugement dont est
appel ; mais ce n’est pas sur la réclamation de Joseph Heyrauld, qui
a laissé rendre ce jugement par défaut contre lui, c’est encore sur
observation des créanciers. Nouvelle preuve du concert des deux
freres dans la fraude pratiquée contre les créanciers! Mais quelle im
pudeur n’y a-t-il pas eu de la part de Jean-Baptiste Heyrauld, de s'être
fait iairece prélèvement comme dette du père , tandis qu’ayant précé
demment désavoué cette dette vis-à-vis du créancier , il lut condamné
delà pnyer comme sa dette personnelle, et que l’un des motifs du juge
ment qui l’y condamna , fut, que le désaveu q u ile n a v o itfa it, étoit
de mauvaise f o i /
1
:
j
j
;
!
,
�( 22 )
On citeroit beaucoup de preuves d’illusions faites par Joseph Heyrauld à ses créanciers: une seule qu'on va rappeler, fera voir à quel
point il portoit la perfidie. En 1792, il emprunta du citoyen C halier,
une somme de 6,000 francs, pour le payement de laquelle, dans l’obli
gation qu’il en consentit, il hypothéqua spécialement un bien qu’il avoit
déjà ven d u , en 1791, au citoyen Dum as; mais voulant cacher à ses
créanciers la vente qu’il en avoit faite, il prit à ferme du citoyen
D um as, le même bien qu’il lui avoit vendu; et ce qu’il y a de
plus singulier , c’est que pendant la durée de la ferm e, il fit pour
plus de 4,000 francs de réparations, dans un bien qui ne lui ap~
partenoit plus. Qui auroit pu croire qu’il avoit vendu un bien
dont il continuoit de jouir? qui auroit pu penser que ce bien ne
lui appartenoit plus, quand il y faisoitdes réparations si considérables?
et cependant, en hypothéquant spécialement un bien qu'il avoit déjà
vendu , il commettoit un stellionat qui le soumettoit à la contrainte
par corps.
A u reste , pour ne pas user de répétitions, on se réfère aux moyens
em ployé
établis dans les consultations qui seront imprimées avec
les présentes.
Par conseil,
A N D R A U D.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Heyrauld, Joseph. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Hutin
Gattrez
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
créances
conflit de lois
exhérédation
fils déshérité
Description
An account of the resource
Consultations et observations, employées pour causes et moyens d'appel ; pour les Directeurs des Créanciers unis de Joseph Heyrauld, appelans d'un jugement du tribunal civil du Département du Puy-de-Dôme, du 16 prairial an 8 ; contre Jean-Baptiste et Joseph Heyrauld, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1772-Circa An 8
1751-1789
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0110
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1415
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53651/BCU_Factums_M0110.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Cournon-d’Auvergne (63124)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
exhérédation
fils déshérité
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53229/BCU_Factums_G1415.pdf
e325f01e14bf4c736e53832b6d3cd9a1
PDF Text
Text
B g B K I B M
c o n s u l t a t i o n s
ET O B S E R V A T I O N S
E M P L O Y É E S P O U R C A U S E S E T M O Y E N S D ’A P P E L ;
P O UR
Les D
i r e c t e u r s
des C
r é a n c i e r s
unis de Joseph
H e y ra u ld , appelans d’un jugement du tribunal civil du
D épartem ent du P u y - d e - D ô m e , du 16 prairial an 8;
CONTRE
Jean- B a p tiste
et J o s e p h
HEYRAULD,
intimes.
L e C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a vu le contrat de mariage du iiota.C\
citoyen Joseph Heyrauld, du 1 mars 1772; un acte d’exhérédationcette con
du citoyen Jean H eyrauld, du 24 juillet 1781 ; deux autres actes des
11 février et 14 juin 17 9 1, contenant démission de biens, de la part fructidor
des père et mère desdits citoyens Jean et Joseph Heyrauld, frères;*1 serï p»
arrangemens et partage entr’eux ; ensemble le mémoire à consulter ; ution^*
E s t d ’a v i s que les deux actes de démission et de partage dont il
s’agit, sont inattaquables , soit dans leur forme, soit au fond; et que,
quand ils pourro ient être attaqués avec succès , le citoyen Joseph
Heyrauld n’auroit rien à redouter d’un semblable événement. Il aurait
toujours droit de recueillir une part égale à celle de Jean son frère,
dans les successions de leurs père et mère communs.
Ces deux propositions ne sont pas difficiles à établir.
Et d’abord, il est hors de doute que les deux actes des 11 février et
14 juin 17 9 1, sont valables par eux-mêmes, et doivent être inviolablement exécutés. Rien ne leur manque du côté de la forme. Ils sont
faits triples , et signés de toutes les parties , même des conseils
qu’elles s’étoient choisis, pour opérer avec la régularité et l’équité
convenables. Quant au fond des dispositions de ces actes, si quelqu’un
A ''
,
�C a ).
pouvoitsen trouver blessé, ce ne seroit sûrement pas le citoyen Jean
Heyrauld, qui doit se regarder comme fort heureux d’avoir recouvré
par là des droits héréditaires dont il étoit déchu.
Quelles étoient, en effet, les circonstances antérieures aux deux
actes? Il est vrai que le citoyen Joseph Heyrauld, institué héritier
par son contrat de mariage, du i mars 1772 , de tous les biens que le
citoyen Robert Heyrauld et Hiéronime Petit, père et m ère, délaisseroient à leur décès, n’étoit institué qu’à la charge d'associer à cette
institution, Jean Heyrauld, son frère aîné, jusqu’à concurrence des
deux tiers des mêmes biens. Les père et mère communs, consultant
moins la voix de la nature, et l’intention de la l o i, que des préjugés
reçus ou une affection particulière, vouloient alors établir un droit
d’aînesse en faveur de Jean Heyrauld, et l’avantage des deux tiers de
leurs successions. Ils ne faisoient qu’user de la faculté qui leur étoit
accordée par la législation existante à cette époque.
Mais d’un côté on peut dire que la charge imposée à ^institution
du citoyen Joseph Heyrauld, n’avoit d’autre effet que d’assurer à ce
dernier un tiers des successions paternelle et maternelle. Quant aux
deux autres tiers, encore que le frère aîné dût les recueillir, suivant
l’intention formelle des père et m è re , il n’en étoit réellement point
saisi, par une simple réserve consignée dans un acte qui lui étoit
étranger. Les père et mère ne l’instituoient pas directement leur
héritier jusqu’à concurrence des deux tiers. Ils ne contractoient en
aucune manière avec lu i, et ils avoient incontestablement la faculté
de révoquer ou de modifier la charge qu’ils avoient imposée à leur
fils puîné. Ils le pouvoient d’autant plus, que l’institution étoit accom
pagnée d’une donation faite par les père et m ère, au survivant d’e u x ,
et d’autres conditions qui avoient besoin d’être acceptées, pour con
solider la réserve faite en faveur du fils aîné. E11 un mot, celui-ci ne
figurant pas dans le contrat de mariage, comme partie contractante
n’étant point formellement institué héritier, n’acceptant point l e î
conditions imposées à l’institution du fils cadet, n’étoit obligé en ri
rien
envers ses père et mère, qui à leur tour n’étoientpoint liés envers lui.
D ’un autre côté, quelle que fût la force de la réserve faite des deux
tiers, au profit de Jean Heyrauld, il est certain que par la suite il
s’était mis hors d’état d’en profiter. Il s’étoit marié à l’âge de moins
de trente ans, sans le consentement de ses père et mère, quoique ce
consentement fût de toute nécessité, même pour la validité de son
mariage. Il avoit encouru par là la peine de Texhérédation, aux termes
des lois alors en vigueur, et notamment de l’ordonnance de i 556 , de
celle de Blois, art. X L I I , et de la déclaration de 1639. Ses père et
mère 1 avoient frappé de cette peine par l’acte autlicntique du 24 juillet
�( 3 )
. ,
^
1 7 9 1 , dans lequel ils le déclaroient déshérité, privé de leurs surcessions
futures, incapable de recueillir l’avantage porté au contrat de mariage
de leur fils cadet, lequel avantage é to it, en tant que de besoin, ré
voqué. Ils déclaroient aussi que la totalité de leurs biens, deineureroit
au citoyen Joseph Heyrauld; et il est constant que si les choses fussent
restées en cet état, le fils aîné se fût trouvé déchu de toute prétention
légitim e, relativement aux successions de ses père et mère.
Il en est arrivé autrement. Les père et mère communs ont bien voulu
sacrifier leur vengeance, oublier l’injure faite à leur autorité, admettre
leur fils aîné à leurs successions, et établir entre lui et leur fils pu în é,
cette sage égalité que la nature et l’équité réclament en faveur des enfans nés du même sang. Ils se sont dépouillés de leurs biens sous diffé
rentes clauses et conditions , les ont fait partager également sous leurs
y e u x , et ont pris tous les moyens possibles d’assurer à jamais la paix
et l’union dans leur famille. C’est la matière et le but des deux actes
des 11 f é v r i e r et 14 juin 17 9 1 , signés tant des père et mère que des
deux frères, en présence de leurs parens et de leurs conseils, qui avoient
travaillé avec zèle à une si heureuse réconciliation.
Par le premier de ces actes, le citoyen Heyrauld père et son
épouse, voulant établir de leur vivant Tordre, la p a ix et la tran
quillité parm i leurs eiifcuis, et leur donner, par une distribution
uniforme de leur fortune , une ^preuve de justice et dun e égale
affection, leur abandonnent à l'avance de leur succession, et par
fo r m e de délaissement anticipé, tous leurs biens meubles et im
meubles , sous certaines réserves et à différentes charges détaillées.
Jean et Joseph Heyrauld acceptent cette démission ; et pour éviter
toutes difficultés entre eux et leurs héritiers, ils procèdent au par
tage par portions égales des biens qui leur sont délaissés. Ils dé
clarent qu’il ne restera plus à partager entre eux que les objets
particuliers que leurs père et mère délaisseront à leur décès. Pour
consolider de plus en plus leur opération, les père et mère décla
rent, et le citoyen Jean Heyrauld, fils aîné, consent, que dans le
cas où il refuseroit après leur décès , à'exécuter le présent arran
gement de fa m ille , les actes de privation q u i avoient ci-devant
eu lieu à son égard, conservent toute leur fo r c e et reçoivent leur
entière exécution ...........
Par le second acte, qui est purement additionnel et interprétatif
du prem ier, les père et mère et leurs^ fils assurent de plus en plus
le partage fait, règlent différentes difficultés, et terminent par sti
puler qu’ au moyen des conventions ci-dessus , toutes réclama
tions , contestations et divisions entre les deuxj'rèras, demeurent
pour le présent et à /’avenir anéanties ÿ reconnaissant que leurs
A 2
�" '
,
( 4 ),
droits ont été pesés ci la balance d'une égale justice j promettant
ne jam ais nous inquiéter n i rechercher directement n i indirec
tement en fa ç o n quelconque ; renonçant respectivement à toute
espèce de droits et avantages , en considération de ceux q u i ré
sultent du présent acte en le u rfa v eu r, et principalement en fa v e u r
dudit Jean H eyrauld , Jils ainé.
Rien de plus sacré et de plus inviolable, sur-tout pour le citoyen
Jean Heyrauld, fils aîné, que de pareils arrangemens. A l’époque
où ils ont été faits, les père et mère avoient bien le droit de régler
par avance le partage de leurs biens, et môme de les distribuer inéga
lement entre leurs enfans, ce qu’ils n’ont pourtant pas fait. Ils ont
même donné à ce partage un nouveau degré de .force et d’irrévo
cabilité , en se dessaisissant dès lors des biens détaillés dans les deux
actes, lies enfans pouvoient également, sous les yeux et de la vo'
lonté de leurs père et mère communs, après avoir accepté la démis
sion , procéder au partage et liquidation des biens abandonnés ; ils
l’ont fait; ils ont même terminé le dernier acte par une transaction
sur toutes contestations nées et à naître entre eux. S’il exista jamais
quelque traité légitime et irréfragable, ce sont ceux dont il s’agit.
Il y a plus, si Jean Heyrauld, fils aîné, refusoit d’exécuter les
arrangemens dont il s’agit, s’il vouloit y porter atteinte, il feroit re
vivre l’exhérédation prononcée contre lui. On a vu en effet, que ses
père et mère ne lui avoient pardonné l’injure faite à leur puissance
par son mariage , que sous la condition expresse de s’en tenir aux
conventions contenues aux deux actes, et qu'en cas de refus l’acte
d’exhérédation devoit reprendre toute sa force. II résulte de h\ que
s’il vouloit rompre une paix et une union si solennellement jurées
entre les mains des père et mère communs, le frère puîné auroit
droit d’opposer l’exhérédation, et de réclamer l'universalité des
biens des successions paternelle et maternelle.
C ’en est assez pour être convaincu de la force et de la validité
des deux actes de 1791.
A u surplus, que pourroit gagner le citoyen H eyrauld, l’aîné, à la
ruplure des arrangemens faits avec son frère? abstraction faite de
lexhérédation, pourroit-il espérer une part plus forte que celle de
son frère puîné dans les successions paternelle et maternelle? Non,,
sans doute.
Le citoyen Heyrauld père est décédé, mais depuis la loi du 17
nivôse an II; la mère commune existe encore. C’est donc la loi du
17 nivôse qui règleroit les droits des deux frères, si les actes de 1791
étoient annullés. O r, cette loi n’est rien moins que favorable à l’iné
galité des droits entre les héritiers, et sur-tout aux avantages qu’ua
frère prétendroit avoir au détriment de l’autre»
�L ’article premier déclare nulles toutes institutions contrac
tuelles et toutes dispositions à cause de m o r t, dont Vauteur est
encore vivant, ou n’ est décédé que le 14 ju illet 1789, ou depuis,
quand rnéme elles auroient été fa ite s antérieurement.
L ’article II confirme encore cette disposition, en déclarant que
les dispositions contractuelles antérieures au 14 juillet 1789? q u i
renferment en même temps des libéralités entre-vifs et une insti
tution dans des biens à v en ir, n a u ro n t leur effet que pour le
don entre-vifs, et non pour les biens résultans de Vinstitution > si
Yinstituant vit encore. . . . . .
Quoique ces articles ne subsistent plus, quant à l’effet rétroactif,
ils trouvent ici leur application, puisque le citoyen Heyrauld, père,
n’est mort que depuis la promulgation de la loi du 17 nivôse ,
et que la mère commune est vivante. Ils frappent directement de
nullité l’institution faite dans le contrat de mariage du cit. Joseph
Heyrauld, du I er. mars 1772. Il en résulte que cette institution est
annullée relativement aux biens à venir qui en étoient l’objet. Ce
seroit en vain que le citoyen Heyrauld, fils aîné, voudroit s’en
prévaloir pour demander les tiers des deux successions en question. In
dépendamment de tout autre moyen, la loi du 17 nivôse repousseroit invinciblement sa prétention.
Cette loi détruit ensuite toutes les distinctions introduites dans les
successions par les anciennes lois, sous le nom de droit d’aînesse,
de préciput, ou sous tout autre prétexte. Elle veut, art. V I I I , que
les enfa n s , descendans et collatéraux, ne puissent prendre part
au x successions de leurs p ères, m ères, ascendans ou autres pa
rens , sans rapporter les donations qu i leur ont été ¿faites par
c e u x - c i, antérieurement au 14 juillet 1789. Par là elle ferme la
porte ¿\ une des principales causes de l’inégalité dans les portions
héréditaires ; mais l’article I X proscrit encore avec plus de force
cette inégalité.
« Les successions, y est-il d it, des pères, mères, ou autres ascen« dans, et des parens collatéraux, ouvertes depuis et compris le 14
« juillet 1789, et qui s’ouvriront à l’avenir, seront partagées égale« ment entre les enfans , descendans ou héritiers en ligne collatérale,
« nonobstant toutes lo is, coutum es, donations, testamens et par« ta^es déjà faits, n
L article X I ajoute , que le mariage d’un des héritiers présomptifs
en ligne directe ou collatérale, n i les dispositions contractuellesjaites
en le m a rian t, ne pourront lui être opposées pour l’exclure dupartage égal, à la charge par lui de rapporter ce q u i lu i a été donné ou
payé lors do son mariage►
�( 6 )
...............
L a loi, comme on le voit, rétablit entre les héritiers, soit directs ,
soit collatéraux, cette égalité si conforme à la nature et h la raison, et
si violée autrefois. Tous les héritiers doivent partager également l’héri
tage de celui qui étoit leur auteur ou leur parent commun, quelles que
soient d’ailleurs les institutions ou autres dispositions contractuelles,
faites antérieurement, ou préjudice de l’égalité que la loi établit dans
les partages. Plus de différence, sur-tout entre le frère aîné et le
puîné. Leurs droits sont égaux devant la l o i , comme aux yeux de
la nature.
Reste donc à tirer une conséquence; c’est que si les actes faits en
1 7 9 1 , entre les deux frères Heyrauld , n’existoient pas, il faudroit
liquider leurs droits héréditaires d’après la loi du 17 nivôse an 2 , qui
établit entre eux une égalité parfaite. Mais ces actes existent ; ils font
ce que la loi a ordonné depuis, puisqu’ils renferment un partage par
égale portion. Ils forment un pacte de famille qui ne peut être légale
ment détruit, et qui ne peut même être violé par le frère aîné, sans
qu’il fasse revivre Texhérédation prononcée contre lui.
Délibéré à Paris, ce i 5 prairial, an 4 de la république.
H U T IN .
GATTREZ.
iE
C O N SE IL SOUSSIGNÉ qui a vu le mémoire des directeurs
des créanciers unis de Joseph 'Heyrauld, et les titres et actes qui
seront rappelés dans la présente consultation ;
E s t d ' a v i s que les procédures et ies jugemens rendus de concert
entre Jean-Baptiste Heyrauld, et Joseph Heyrauld son frè re, re
lativement au partage des successions de leurs père et mère, sont
évidemment TefTet de la fraude pratiquée entre les deux frères, au
réjudicc des créanciers de Joseph Heyrauld, qui se trouve en
anqueroute ouverte, et qu’ainsi ces créanciers sont bien fondés à
former tierce-opposition ù ces jugemens, et à s’opposer h l’homo
logation du partage fait en conséquence, et à laquelle ils ont été
appelés par Jcan-Baptiste Heyrauld.
L e principe ije sauroit être contesté ; tout ce qui est fait en fraude
des créanciers, peut être par eux révoqué 5 ils sont admis ;\ exer
cer tous les droits de leur débiteur, et par conséquent à faire va
loir tous les moyens que lui-même pourroit opposer contre les ac
tions exercées contre l u i , et qui tendroient à diminuer le gage de
scs créanc iers. Lu principe est trop constant pour avoir besoin d’être
E
�44$
( 7 .)
établi : on peut voir sur cela la loi 2 au code quando Jiscits vel
-privâtus debitoris sui debtiares convenire p ossit, vel debeat ; et
la loi i 5 , § 2 , ff. de re judicata. C est cl ailleurs la doctrine enseignée
par tout ce que nous as^ons de plus célèbres jurisconsultes , Cujas ,
M orn ac,le B ru n , Renusson, etc.
Il est vrai ce p e n d a n t que quelques auteurs, et entre autres le
B ru n , dans son traité des successions, ont pensé que le créancier
hypothécaire de l’un des cohéritiers dans le lot duquel , dans un
partage déjà fait , on n’avoit fait entrer que du mobilier, les im
meubles ayant été donnés aux autres cohéritiers, que ce créancier
ne pouvoit pas attaquer le partage, et troubler des arrangemens
. pris dans la famille, ayant à se reprocher de n’avoir pas agi avant
le partage, dénoncé son action hypothécaire et demandé d’être ap
pelé au partage.
Mais d’un côté, dans cette opinion, il s’agit d'un partage auquel
on ne reproche point de lésion ni d’inégalité ; d’un autre c ô té , il
s’agit d’un partage déjà fait, d’un partage exécuté; ici au contraire
le partage n’est pas consommé ; des experts y ont procédé, mais H
ne peut recevoir d’exécution que par l’homologation ; ce que JeauBaptiste Heyrauld a si bien reconnu , cju’il en a formé la demande
en homologation ; et il ne fa pas seulement formée contre son frère,
avec lequel il avoit été ordonné, il l’a encore formée contre la di
rection des créanciers de son frère. Ceux-ci sont donc parties capa
bles pour contester cette homologation, et Jean-Baptiste lleyrauld
l’a bien reconnu, sans quoi il ne les y auroit pas fait appeler.
En second lié u , les jugemens concertés entre les deux frères, ne
peuvent pas nuire à leurs créanciers. Ces jugemens sont à leur égard
ee qu’ils seroient par rapport à Joseph Heyrauld leur débiteur, s’ils
avoient été rendus par défaut; il pourroit y former une simple op
position , et faire valoir tous ses moyens contre les prétentions de
son frère; par conséquent, les créanciers de Joseph Heyrauld peu
vent , en y formant tierce-opposition, faire valoir les mêmes moyens,
par le principe qu’ils sont fondés à exercer les droits de leur
débiteur.
C’est une suite du même principe, qu’un héritier ne peut pas, en
fraude de ses créanciers, renoncer à une succession qui lui est échue ,
et que les créanciers peuvent révoquer la renonciation et exercer tous
scs droits ; et ce n’est pas seulement dans le cas d’une renonciation
absolue , mais encore lorsque par le partage même déjà fait, en l’ab
sence des créanciers, il y a eu quelque inégalité qui leur fait préju
dice ; en ce cas, ils peuvent, toujours en exerçant les droits de leur
débiteur, se pourvoir contre ce partage, pour rétablir leur débiteur
�*V
i
( 8)
dans tous les droits qui lui appartiennent. On n’a fait ici que copier
les termes de le Brun , dans son traité des successions , liv. 3 , chap. 8,
secl. a , ncïmbrc 28. Cet auteur ajoute , que les créanciers ont la même
•action révocatoit’e contre un partage inégal, que contre une renon
ciation, parce que le partage où il y a de la lésion, produit le même
effet, et les frustre d’une partie de leurs hypothèques.
Les principes une fois connus, il ne s’agit que de rechercher la
fraude commise envers les créanciers de Joseph H eyrauld, dans la
'conduite concertée entre lui et son frè re, et pour cela il convient sur
tout d’établir, par les actes passés dans leur famille, quels devoient
être les droits de Joseph H eyrauld, dans les successions de ses père
et mère.
Joseph Heyrauld avoit été marié avant son frère, et par son contrat
de mariage, ses père et mère l’avoient institué leur héritier universel,
à la charge d’associer à l’institution Jean-Baptiste H eyrauld, son frère
a în é , pour les deux tiers.
Ces dispositions du contrat de mariage ne saisissoient que Joseph
H eyrauld, seul contractant, et la charge d’associer son frère aîné, qui
'lui étoit imposée, pouvoit être révoquée par les père et mère: la
chose est sans difficulté. O r , qu’arriva-t-il dans la suite?
Jcan-Baptiste Heyrauld, méprisant l'autorité de son père, sous la
puissance duquel il étoit alors, et le respect qu’il devoit, tant à son père
qu’à sa mère , se maria sans leur consentement, et sans leur faire les
actes de respect q u i, par les lois alors existantes, lui étoient prescrits
ù peine d’exhérédation. Les père et mère usèrent du pouvoir que les
lois leur accordoient, et firent, devant notaire, un acte authentique
d’exhérédation de Jean-Baptiste H eyrauld, révoquant la charge qu’ils
avoient imposée h Joseph Heyrauld, de l’associer à son institution;
ils se réservèrent seulement la liberté de faire à Jean-Baptiste Heyrauld
quelques libéralités par dons ou legs, dans le cas où il se rendroit
digne de leur commisération, mais sans que les libéralités qu’ ils pourroient dans ce cas exercer à son égard , pussent être regardées comme
une révocation de l’exhérédation.
L ’acte d’exhérédation est de l’année 1781., et les choses demeurèrent
en cet état pendant dix ans, jusques en 1791 , temps auquel les père et
mère voulant prévenir toutes les contestations qui pourroient naître
entre leurs enians, après leur m ort, et voulant en même temps se re
lâcher en plus grande partie de fexhérédation qu’ils avoient prononcée
contre leur fils aîn é , lui abandonnèrent les biens qu'ils avoient au
Crest et à Chanotmat, dont ils le mirent même dès lors en possession ;
mais ils le chargèrent du payement de plusieurs de leurs dettes, et
particulièrement d’acquitter une somme de 75,000 francs , sur le prix
�................................................ ( 9 >
.
de l’acquisition qui avoit été faite par le père Heyrauld, des domaines
des Domeries et du Chaufour ; et par le même acte , ils assignèrent à
Joseph Heyrauld , leur fils cadet, les domaines des Domeries et du
Chaufour, pour son partage dans leurs successions, et à la charge de
payer les dettes qui lui furent désignées. En un m ot, ils réglèrent dé
finitivement que les biens du Crestet de Chanonat, feroient dans leurs
successions le lot de l’aîn é, et les domaines des Domeries et du Chaui'our, le lot du cadet, sous les charges qui furent imposées à chacun
d’eux ; mais en même temps les père et mère marquèrent franchement
leur intention, que dans le cas où après leur mort, le fils aîné refuseroit d’exécuter l’arrangement de famille qui venoit d’être fait, les
actes de privation, ( c’est-à-dire, l’exhérédation ) , qu i avoient eu lieu
ci-devant à son égard, conserver oient toute Itur ¿force y et recevroient leur pleine et entière exécution.
T el étoit l’état des choses, lorsque le 22 fructidor an 4 , après la
mort du père Heyrauld, il fut passé, par-devant notaire, une transac
tion sur procès, contenant partage entre les deux frères, de l’agrément
de leur mère, qui fut partie dans l’acte, et qui y traita aussi de ses droits
dans la succession de son mari.
Dans ce traité, les deux frères respectèrent les intentions de leur
père, et le frère aîné se soumit aux conditions sous lesquelles son père
s’étoit relâché de l’exhérédation qu’il avoit prononcée contre lui ; en
conséquence il fut fait un partage par lequel ses biens, situés dans la
commune du Crest, furent mis au lot de Jean-Baptiste Heyrauld, et son
lot fut chargé de payer tout ce qui pouvoit être resté dû du prix de la
vente des domaines des Domeries et du Chaufour , et à la citoyenne
H eyrauld, femme Massis , ce qui pouvoit être resté dû de sa dot. Quant
à Joseph Heyrauld, il lui fut assigné pour son lo t, les domaines des
Domeries et du Chaufour, et il fut chargé de payer dix articles de
dettes de la succession , spécifiés dans le traité. Enfin, par le dernier
article, il est dit qu’au moyen de tout ce que dessus, les parties se
tiennent réciproquement quittes de tous rapports , prélévemens et
restitutions de jouissances, et que to u s procès prévus et à prévoir,
sont éteints et assoupis, sans aucuns donnnages-intérêts.
Il n’est peut-être pas ici hors de propos de remarquer que les père
et mère , en se relâchant de l’exhérédalion, avoient pu y mettre telle
condition que bon leur sembloit, suivant la doctrine des auteurs et
la jurisprudence des arrêts, ainsi qu’on peut le voir dans le traité des
successions, de le Brun , liv. 3 , chap. 10 , sect. 4, noinb. 12 : ainsi les
père et mère du fils exhérédé, en le rappelant à leur succession, ont
pu 11e l’y rappeler que pour telle part et portion qu’ils ont voulu,.sans
que celui-ci puisse se prévaloir de la char^» de l’association qui avoit
�(
10)
cto imposée à son frère, charge qui étoit révocable, et qui avoit été
en efFet révoquée par l’acte d’exhérédation.
Il semble donc que d’après un acte aussi authentique que le traité du
22 fructidor au 4, dont on a rappelé les dispositions, acte qualifié de
transaction sur procès,,et qui en a tous les caractères , les intérêts des
deux frères se trouvoient définitivement réglés , que tout se trouvoit
terminé entre e u x , et qu’il ne pouvoit plus y avoir matière à con
testations.
Comment se peut-il donc que le frère aîné ait voulu en élever,
et que le cadet se soit prêté à de nouvelles prétentions, auxquelles ce
traité présentoit une barrière insurmontable ? Les causes n’en sont
pas difficiles à pénétrer, et elles manifestent le concert qui a régnéentre les deux frères pour faire fraude aux créanciers de Joseph
Heyrauld.
Celui-ci, dès avant et depuis la mort de son père, s’étoit livré à un
genre de commerce, q u i, par son défaut d’intelligence , et peut-être
par d’autres encore plus blâmables, a entraîné sa ruine ; en sorte que
(Îéjî\ et depuis long-temps il est en banqueroute ouverte; et c’est, à
n’en pas douter, pour mettre une partie de ses biens à couvert et
frustrer ses créanciers, qu’il a concerté avec son frère, des mesures
qui 11e tendroient h rien moins qu’à faire passer à celui-ci tout son
patrimoine, et même à le rendre débiteur de son frère de sommes
considérables, ce qui rend très-vraisemblables quelques contre-lettres
entre les deux frères, pour conserver au cadet une planche de naufrageSi on avoit sous les yeux la procédure tenue entre les deux frères,
il est à croire qu’on y trouveroit des circonstances de plus en plus
propres à manifester l’esprit de fraude qui les a dirigés; mais 011 en
trouve assez d’ailleurs dans le dispositif du jugement qui a ordonné
entre eux un nouveau partage, pour en demeurer convaincu.
On ne connoît au reste le dispositif de ce jugement, que par ce qui
en est rappelé dans le rapport des experts qui ont procédé au nôuveau partage; car , en donnant copie de ce rapport aux directeurs
des créanciers de .Joseph Heyrauld, on a affecté de ne pas leur donner
copie du jugement qui ordonnoit le partage, pour ne pas leur faireconnoître les moyens respectifs qu’avoient pu employer les parties, et
lbs motilsde son jugement que le tribunal avoit pu en recueillir; en quoi
celte omission n'a pu avoir pour objet que de cacher aux créanciers ,
les circonstances de fraude qu’ils auroient pu trouver dans les faits, et
les moyens sans doute exposés dans le jugement.
Ce ne peut donc être que sur de fausses suppositions ou des cou*
sentemens frauduleux donnés par Joseph Ilevrauld, et concertés
entre sou frère et lui, que le jugement du tribunal a déclaré nuls
�l’acte d’exhérédation du 4 juillet 178 1, le partage du 2 fructidor
an 4 , et tout ce qui s’en est ensuivi, et en conséquence a ordonné
un nouveau partage des su ccessio n s des père et mère , dans lequel
il en attribue trois cinquièmes à Jean-Baptiste Heyrauld , et deux
cinquièmes seulement à Joseph H eyrauld, et lors duquel partage il
est encore ordonné plusieurs rapports, tant en principaux qu’en
jouissances, et divers prélevemens. Mais, le dispositif môme du
jugement prouve démonstrativement le concert de fraude, puisqu’il
y est dit nommément, qu’il est rendu du consentement de toutes
les parties. Alors ce jugement ne peut former aucun préjugé contre
des tiers créanciers d’un des héritiers, qui n’a pu donner des consentemens valables au préjudice de ces mêmes créanciers, qui, alors
aussi peuvent faire anéantir un pareil jugement, en prouvant que
les droits de leur débiteur, qu’ils sont fondés à exercer, y ont été
blessés ; o r , ici la preuve en est facile.
En effet, il n'y avoit pas lieu à un nouveau partage entre les
deux frères, parce qu’il y en avoit eu un premier qui étoit inatta
quable, et dans lequel les intentions des père et mère avoient été
exactement respectées et suivies.
Le frère aîné n’auroit pas même pu attaquer ce premier partage
par aucun moyen de lésion.
Il ne pouvoit pas se prévaloir de la charge qui avoit été imposée
à son frère, par son contrat de mariage, de l’associer pour les deux
tiers de son institution, puisque cette charge étoit constamment
révocable, et que dans le fait il y en avoit eu une révocation expresse
dans l’acte d’exhérédation de 1781.
D ’un autre côté, l’acte d’exhérédation, autorisé par les lois alors
existantes, emportoit même contre le frère aîné la privation absolue
des successions de ses père et mère.
Il est vrai que l’exhérédation avoit été ensuite modifiée par les
père et mère , mais sous une condition qu’ils y avoient apposée, et
on a ci-devant prouvé qu’ils étoient parfaitement maîtres d’imposer
telle condition que bon leur sembloit ; c’est même de l’accom
plissement de cette condition, qu’ils ont fait dépendre les modifi
cations qu’ils ont accordées ¿\ leur exhérédation, en disant formelle
ment, que s i le fils aîné refusoit d’exccuter Tarrangement qu i
venoit d'être f a i t , les actes de privations q u i avoient eu lieu cidevant à son égard, cotiserveroient toute leur f o r c e , et recevraient
leur pleine, et entière exécution.
Cet arrangement de famille , concerté entre les père et mère et
les enfans , a d’ailleurs pleinement été exécuté après la mort du
père, et on s’y est exactement conformé dans l’acte de transaction
B 2
�et partage du 22 fructidor an 4 ; et c’esl: conformément à l’ar
rangement de famille, que la part du fils aîné et celle du cadet ont
été fixées et déterminées dans ce dernier acte. Les biens situés dans
la commune du Crest, ont formé le lot du fils aîné, et on a spécifié
les dettes dont ce lot seroit chargé ; les domaines des Doineries et
du Chaufour ont fait le lot du cadet, et on a également spécifié
les dettes qui étoient î\ la charge de ce lot.
Il est manifeste qu’il ne peut jamais y avoir de lésion à opposer
contre ce partage; la raison en est toute simple : c’est parce qu’on
y a rempli les intentions des père et m ère, et que si le frère aîné
n’avoitpas voulu remplir ces intentions, il n’avoit rien à prétendre
aux successions de ses père et mère, et qu’alors l’exhérédation
devoit conserver toute sa fo r c e , et recevoir' sa -pleine et entière
exécution.
Supposons même que le frère aîné eût pu attaquer l’exhérédation
et l'arrangement de famille fait pendant la vie du père, par lequel
l’exhérédation avoit été modifiée ; au moins seroit-on forcé de bien
convenir que cela eût fait vraiment la matière d’une contestation et
d’un procès sérieux: mais aussi dès qu’après la mort du père, les
deux frères ont passé l’acte du 22 fructidor an 4 , ce n’est pas
sans raison qu’ils ont qualifié cet acte de transaction; o r, en matière
de transaction il ne peut jamais y avoir lieu à restitution pour lésion y
suivant la disposition des lois, et particulièrement d’après l’ordonnance
de i 56o.
Il est donc de'la plus grande évidence, que la transaction du 22
fructidor an 4 , et le partage qu’elle renferme, ont fixé irrévoca
blement l’état et le sort des parties dans les successions de leurs
père et mère. Dès ce moment donc, chacun des deux frères est
devenu propriétaire incommutable du lot qui lui est déterminé p ar
le partage.
Ce n’est donc évidemment qu’en fraude des créanciers du cadet,
que les deux frères ont concerté des mesures pour parvenir à dé
truire le premier partage, et pour en faire un autre qui détruisît
tous les droits déjà acquis au cadet, non seulement pour diminuer
sa fortune, non seulement pour l’absorber, en la faisant passer tout
entière à l'aîné, mais encore pour rendre celui-ci créancier de son
frère de près de 5 o,ooo mille francs; au lieu que, laissant subsister le
premier partage, dans lequel les parties s’étoient tenues réciproque
ment quittes de tous rapports, prélévemens et restitutions de jouis
sances, il en résultoit que le cadet ne devoit rien ;\ son frère, et
se trouvoit encore propriétaire de la totalité des domaines des D o nieries et du Chaufour.
�( *3 )
Il doit donc paroître démontré, que la tierce-opposition des créan
ciers de Joseph Heyrauld est bien fondée, et que le jugement con
certé entre les deux frères, ne doit son existence qu’au consentement
que le cadet y a d on n é, puisque ce consentement est précisément
exprimé dans le dispositif du jugement; mais, consentement qu’il
n’a pu donner au préjudice de ses droits acquis, et en fraude de ses
créanciers. Ce consentement devant donc être annullé, le jugement
qui n’en est qu'une suite, et qui ne peut avoir d’autre motif, ne
peut pas non plus subsister.
Il y auroit au reste, bien des observations à faire sur le jugement
rendu entre les deux frères. On ne voit pas, par exemple, le motif
qui fait donner 3 cinquièmes i\ l’aîné, et deux cinquièmes au cadet.
Si l’association de l’aîné avoit pu subsister, il auroit du avoir les
deux tiers; c’est-à-dire, plus que 3 cinquièmes; et le cadet n’auroit
dû avoir qu’un tiers; c’est-à-dire, moins de deux cinquièmes. Si au
contraire on devoit écarter l’association, les portions auroicntdû être
égales.
Il y auroit encore des observations à faire sur le rapport des ex
perts, où non seulement on remarqueroit des omissions, mais où
l’on voit encore clairement qu'ils n’ont l’ien opéré par eux-mêmes;
que les actes ne leur ont point été représentés, et qu’ils ont tout
fait de confiance d’après le vœu des deux frères, qui n’avoient
d’autre vue que de frustrer les créanciers légitimes de Joseph
Heyrauld.
Mais toutes ces observations deviennent inutiles, dès qu’il est évident
que le jugement en lui-même ne peut subsister, non plus que tout ce
quia pu être fait en conséquence,et que la tierce-opposition ne peut
pas éprouver de difficulté.
Délibéré à Riom , le 17 pluviôse an 8.
ANDRAUD.
-L<E C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a revu sa précédente consul
tation, délibérée le 17 pluviôse dernier, et autres pièces dont il
sera parlé dans la présente consultation, qui lui ont été mises sous
les yeux par les directeurs des créanciers unis de Joseph Heyrauld,
e t un nouveau mémoire ;
P e r s is t e
dans les r é s o lu tio n s de sa p r é cé d e n te co n su lta tio n , et
�C *4 )
................
ne pense pas que les motifs sur lesquels elles ont été établies, puis-_
sent être écartés par les objections qu’on présume pouvoir y être
opposées par Jean-Baptiste Heyrauld.
La clause du contrat de mariage de Joseph Heyrauld, par laquelle
il étoit chargé d’associer Jean-Baptiste Heyrauld son frère, à l’insti
tution universelle pour les deux tiers; cette clause n'a voit pas pu
saisir Jean-Baptiste Heyrauld , et lui attribuer irrévocablement les
deux tiers de l’institution , puisqu’il n'étoit pas contractant.
Ainsi, sans difficulté , la charge d’associer étoit révocable. Or ,
par l’acte de 1781 , non seulement les père et mère avoient pro
noncé l’exbérédation contre Jean-Baptiste Heyrauld , mais ils avoient
même expressément révoqué la charge d’associer , faite en sa faveur
dans le contrat de mariage de son frère.
Quand 011 adopteroit même que les lois survenues depuis la ré
volution auroient annullé les exhérédations dans tous les cas où elles
éloient autorisées par les l o i s antérieures, la révocation de la charge
d'associer n’en subsisteroit pas m oins, puisque cette charge, qui
11’avoit pas saiii Jean-Baptiste Heyrauld, étoit révocable; et cette
révocation seroit d’autant plus favorable, qu’elle n'auroit que l’effet de
rétablir l’égalité entre les deux frères, égalité qui a fait l’objet prin
cipal des nouvelles lois.
Et c’est aussi ce qui est arrivé par l’acte, de 1791 , où les père et
mère ont modifié l’exhérédation , et fait eux-mêmes entre leurs
en fans concourans avec eux dans cet acte , le partage de leurs biens,
en attribuant à chacun d’eux des portions de leurs biens qui formoient à peu près des lots égaux.
D ’ailleurs, le père Heyrauld , dans le contrat de mariage de Joseph,
s’étoit i-eservé de faire lui-même le partage de ses biens entre ses
deux fils. Il est vrai qu’il leur avoit aussi réservé le droit de faire
après sa mort la révision de copartage; mais c’est en effet ce qu’ont
fait les deux fils dans le traité du 22 fructidor an 4 , par lequel ils
ont approuvé le partage qui avoit été fait entre eux par leur père,
et promis de l’exécuter; et cet acte est qualifié et porte avec lui tous
les caractères d’une véritable transaction sur procès:il y est dit ex
pressément qu’au moyen de toutes les conventions qui y sont arrê
tées , tous procès prévus et à prévoir seront éteints et assoupis sans
aucuns dépens, dommages-intérêts.
Dans cette transaction , la mère des parties n’y est entrée que
pour consentir que ses fils fissent entre eux le partage des biens dont
elle avoit l'usufruit; et ensuite , par un autre acte du même jou r,
elle s’est départie de son usufruit et de tous ses droits sur la suc
cession de son mari, i't la charge d’une pension qu’elle s’étoit réser
vée pendant sa vie.
�(15)
Il seroit ridicule de prétendre , que de ce que la mère est entrée
dans le traité pour l’unique objet de son usufruit, c’est par son im
pression que Jean-Baptiste Heyrauld a accordé toutes les clauses de
ce traité ; et ce qui prouve que la déférence pour sa mère n y a eu
aucune part, c’est que c’est même avant la mort de sa mère qu’il a*
formé l'action pour réclamer contre le traité.
Enfin Jean-Baptiste Heyrauld a lui-même approuvé et exécuté la
traité, en payant postérieurement la créance de la citoyenne le Cíe re
d e - J u ig n é , qui avoit été mise à la charge de son lot , par le par
tage fait par le père en 1 791, et par le traité du 22 fructidor an 4.
Le jugement qui a ordonné un nouveau partage entre les deux
frères, en annullant, soit celui qui avoit été fait par le père, soit
le traité du 22 fructidor an 4 ; ce jugement auquel les directeurs
des créanciers unis de Joseph Heyrauld ont formé opposition , ne
peut pas être considéré comme un véritable jugement, par lequel
le tribunal ait entendu juger les questions ; on ne peut le regarder
que comme un acte de fraude concerté entre les deux frères, et le
jugement en contient la preuve la plus évidente.
En effet, aucun motif de décision sur les questions présentées, oir
qui pouvoient s’élever, n’est exprimé dans le jugement, qui n’a
donné d’autre motif que celui-ci : attendu que les parties se sont mu
tuellement accordées, et q u il n existe plus de difficultés entre elles,le trib u n a l, du consentement de toutes les parties, etc.
Si en général des créanciers autorisés à exercer tous les droits et
actions de leur débiteur, sont fondés à former tierce-opposition à un
jugement rendu dans une contestation sérieuse, lorsqu’ils sont en état
d’établir que ce jugement blesse leurs intérêts, et qu’il n’est qu’une
suite delà fraude commise par leur débiteur; combien à plus forte rai
son leur tierce-opposition ne doit-elle pas être accueilllie, lorsqu’il ne
s-’agit que d’un jugement rendu de concert, où leur débiteur se prive'
volontairement des droits les plus légitimes, au préjudice de ses créan
ciers ? Et c’est ce que produiroit l’effet de ce jugement, s’il pouvoit
être exécuté, puisqu’ilannulle un partage fait par le père entre ses enfans , exécuté par les deux frères, après la mort du père, par une transac
tion sur procès, et en ordonnant un nouveau partage avec desprélévemens et des restitutions de jouissances qui n’étoient pas dûs, et ré
duisant rien la fortune de Joseph Heyrauld, qui étoit le gage de
ses créanciers.
On a suffisamment prouvé, dans la précédente consultation, que
la tierce-opposition des créanciers étoit des plus légitimes; et cette
preuve se fortifie par le jugement même quils attaquent, dont on
n avoit alors qu’une connoissancc imparfaite, mais où l’on voit au-
�(16 )
jourd’hui qu’il a été rendu sans aucun examen des questions qui se
présentoient, et sur le seul motif que les parties s'étoient mutuelle
ment accordées, et qu’ il n e x isto it plus de difficultés entre elles.
On peut ajouter que la fraude faite aux créanciers, et concertée
entre les deux frères, se manifeste encore dans l’exécution qu’ils ont
voulu donner à ce jugement par le partage qu’ils ont fait faire par
les experts nommés en conséquence de ce jugement; partage dans
lequel les experts n’ont eu autre chose à faire que de copier les
volontés des parties, qui tendoient toutes à la ruine des créanciers.
Parmi plusieurs exemples que l’on peut en trouver dans ce par
tage , il y en a sur-tout deux de remarquables.
i°. On y fait prélever à Jean-Baptiste Heyrauld, une somme de
35,000
pour les intérêts de la créance de la citne. leClerc-de-Juigné,
qui a voit été mise à la charge de son lot par le partage de 1 791 , et
par le traité du 22 fructidor an 4 , tandis qu’il est prouvé par
l’arrêté de compte fait entre Jean-Baptiste Heyrauld et la citoyenne
le Clerc-de-Juigné, devant les notaires à Paris, le 18 vendémiaire
an 6 , que Jean-Baptiste Heyrauld n’a payé que la somme de 3000 ft'3
à laquelle la citoyenne le Clerc-de-Juigné voulut bien réduire les
intérêts. Voilà donc un prélèvement de 3$,000
qui devoit être
réduit à 3000 ^ seulement, quand même il auroit pu y avoir lieu
à un nouveau partage.
2°. Les experts, dans ce nouveau partage , portent dans l’état
des dettes du père une somme de 3,280
due aux citoyens Roddes
et B r e t , en vertu d’un jugement du 27 pluviôse an 7. 11 est vrai
que cette créance dérivoit d’un billet à ordre fait par le père; mais
le montant eh avoit été touché par les deux frères, qui en avoient
fourni une indemnité à leur père, et avoient promis solidairement
de l’en garantir. L e payement de cette créance ayant été poursuivi
contre Jean-Baptiste Heyrauld, il eut l’impudeur de la désavouer;
mais le créancier ayant recouvré la promesse d’indemnité , JeanBaptiste Heyrauld , par le jugement du 27 pluviôse an 7 , fut condamné
au payement, et 1111 des motifs du jugement exprime nommément
que le désaveu avoit été f a i t de mauvaise f o i par Jean-Baptiste
Heyrauld. Ainsi on porte donc dans le partage, comme dettes du
père, ce qui n’étoit que la dette des deux frères, et à laquelle JeanBaptiste Heyrauld d e v o i t contribuer pour la moitié.
3°. Dans ce même nouveau partage, on porte la restitution des
jouissances de Jean-Baptiste Heyrauld à 16,223 ^ j et celles de Joseph
Heyrauld à 27,781 ^ ; c'est-à-dire, à 12,558
de plus que celles de
son frère, a fin de diminuer d’autant les droits de celui-ci; tandis
qu’il 11e pouvoit être question de restitution de jouissances, puisque
par
�C ‘7 >
.
^
par la transaction du 22 fructidor an 4 , les deux frères £ étoicnt
‘■Respectivement tenus quittes de tous rapports, préléveinens et res
titutions de jouissances.
Enfin , ce qui achève de mettre la fraude dans le plus grand
jo u r , c’est de voir que par l’eiïèt du nouveau partage, non seu
lement il ne reste rien à Joseph Heyrauld, des successions de ses
père et mère, mais qu’encore on le constitue débiteur de son frère,
d’une somme de plus de 30,000 ^ ; ce qui n’a pu se faire que
pour frustrer les créanciers , et comme on l’a dit dans la précé
dente consultation, pour conserver ù Joseph Heyrauld, par quel
que contre-lettre, une dernière planche de naufrage.
Délibéré à R iom , le 13 prairial, an 8.
ANDRAUD.
D I S P O S I T I F
DU
JU GEM EN T
DONT
EST
APPEL,
D u 16 prairial an 8.
f
I - i E tribunal, par jugement en premier ressort, déboute les parties
de Fluguet, ( les créanciers de Joseph Heyrauld ) , de leur opposition
au jugement du 5 Jloréal an 6 , et les condamne en Vamende de
60 th : et néanmoins ordonne que par de nouveaux experts, il sera
procédé aux opérations ordonnées par les jugemens du 5 prairial
an 6 , et 17 prairial an 7, lors desquels la somme de 600 ypayée
à lajille V a llière, sera portée au chapitre des prélévemens de Joseph
H eyrauld, et celle de 16,876 ti', pour intérêts payés <ï ladite Ju ig n éf
ne sera portée en prélèvement audit Jea/i-JBaptiste H eyrauld, que
pour 3000 tf*, et que la créance Brest sera soustraite des préléve
mens dudit Jean-Baptiste H eyrauld, s a iif ¿1 se pourvoir par les
voies de d ro it, contre ledit Joseph H eyrauld, etc.
�M O T IF S du jugement, et qui y sont exprimés, en ce qui concerne
les créanciers de Joseph Heyrauld.
PREMIER
MOTIF.
,
Attendu que le jugement du 5 floréal an 6 a été convenu de
bonneJ'ai
:
RÉ p o n s e au premier M otf.
.
Le jugement auquel les créanciers de Joseph Heyrauld , ont form <5
tierce-opposition, a été rendu sans discussion ; aussi n’en a-t-on exprimé
d’autre motif, si ce n'est que les parties se sont mutuellement accor
dées , et q u iln e reste plus de difficultés entr elles. Et c’est pour cela
qu’il est di t , qu’il a été rendu du consente?nent de toutes les parties►
O r , comment ce jugement a-t-il pu être convenu de bonne foi, lors
qu’on n'y trouve aucune discussion sur les questions auxquelles les
demandes de Jean-Baptiste Heyrauld pouvoient donner lieu? Comment
le consentement de Joseph Heyrauld pouvoit-il avoir été donné de
bonne foi, lorsqu’on ne peut pas s’empêcher de reconnoître qu’il avoit
les moyens les plus solides à opposer à ces demandes ; lorsqu’on voit
qu'il s’étoit lui-même fait éclairer sur ces moyens, par la consultation
qu’il s’éloit fait donner dès le i 5 prairial an 4, par deux jurisconsultes
de Paris, et d’après laquelle avoit été arrêtée la transaction du 22
fructidor de la même année? lorsqu’on voit que les actes antérieurs et
postérieurs à cette consultation, passés dans la famille, étoient inatta
quables, et que ces actes avoient c o n f ir m é à Joseph Heyrauld, une
portion égale à celle de son irère, dans la succession de leur père;
ce qui est démonstrativement établi dans les consultations ci-dessus?
Qu’on nous dise sur quelle base est appuyée la disposition du jugement
de floréal an 6 , qui donne trois cinquièmes h Jean-Baptiste Heyrauld,
et deux cinquièmes seulement à Joseph Heyrauld , tandis qu’à partir
de l’association du contrat de mariage de Joseph Heyrauld, JeanBaptiste devoit avoir les deux tiers, et que d’après la révocation de
l’association, et les dispositions du père dans les actes subséquens, il
ne devoit avoir que la moitié. Encore une fois, pourquoi ces trois cin
quièmes à l’un et les deux cinquièmes à l’autre? Mais la circonstance
que Joseph Heyrauld méditoit alors sa banqueroute , puisquelle a suivide très-près le jugement dont il s’agit, ne rend-elle pas de plus en plus
évidente sa mauvaise fo i, et que c’est en fraude de ses créanciers, qu’il
a prêté 1111 consentement qui détruisoil des droits qui lui étoient acquis^
t*t qui faisoieut le gage de ses créanciers.
�( i9 )
Qu’on ajoute que par l’effet du jugement du 5 prairial an 6, rendu
de son consentement, il s’est soumis à des rapports et des vesti tu lions'
de jouissances de sa part, et à des prélévemens de la part de son frère,
tandis que par la transaction du 2a fructidor an 4 , les parties s’éloient
respectivement tenues quittes de tous rapports, prélévemens, et resti
tutions de jouissances. Dans le concours de toutes ces circonstances,
n’est-on pas fondé à croire qu’il ne s’est prêté à donner son consente
m ent, qu’en considération des conditions secrètes arrêtées avec son
frère, pour se conserver, comme il a été dit dans les consultations, une
dernière planche de naufrage! Il doit donc paroître inconcevable que
les premiers juges aient pu donner pour motif du jugement dont est
appel, que celui auquel les créanciers avoientformé tierce-opposition,,
avoit été accordé de bonneJ'ai.
D E U X I È M E
MO T IF *
Y
A ttendu q iiil étoit permis aux deux f r è r e s , de transiger de leui'&
droits réciproques , et qu'une transaction en jugement est plus
solennelle qu’une transaction devant notaire.
R
é p o n s e
.
Ce motif démontre qu’il n’y a pas eu de vrai jugement, et que le'
premier tribunal n’a rien eu à juger. Aussi point de discussion : il n’est
rendu qu'après que les parties se sont accordées, qu il n'existe plus
de difficulté entr elles, et de leur consentement,• mais il n’est pas vrai
qii il f û t permis à Joseph Heyrauld, l’un des deux frères, par une
transaction, soit en jugement, soit devant notaire, d’abandonner des
droits qui lui étoient acquis , en fraude de ses créanciers dont ces
droits faisoient le gage. On a établi dans les- consultations, et on ne
sauroit trop le répéter, que « Dans notre droit les créanciers peuvent
«intervenir au partage, pour y soutenir les droits de leur débiteur ;
« mais que quand le partage est fait en leur absence, et qu’il y a
« quoiqu'inégalité qui leur fait préjudice, ils peuvent, en exerçant les
« droits de leur débiteur, se pourvoir contre ce partage, pour le rétablir
« dans le droit d’aînesse, et autres droits qui lui appartenoient, lors
« principalement que leurs dettes péricliteroient autrement. Ils ont
« la même action révocatoire contre un partage inégal que contre une
« renonciation , parce que le partage où il y a de la lésion, produit
« le même effet, et les frustre d’une partie de leurs dettes; et un aîné
«qui a des dettes, ne peut se désister de son droit d’aînesse ; ni un
a fils admettre ses sœurs à une succession, nonobstant qu’elles aiexit
�( 20)
« été dotées dans une coutume d’exclusion ; ni un mate entrer en
« partage avec une femelle, des fiefs qui lui sont échus en collaté« raie, sans avoir un dessein formé de frustrer ses ci’éanciers. Cette
«remise et cet abandonnement de ses droits, est une véritable do« nation dans laquelle il suffit qu’il y ait de la lésion et de la fraude.
« Car en ce cas , sans exam iner s i ceux q u i en voudroient pro
iefiter sont participons de la f r a u d e , l’action révocatoire des créan
te*ciers a lieu ». Le Brun, traité des successions. L. 3. Ch. 8. Sec. a.
No. 28.
T R O I S I È M E
M O T I F .
A ttendu enjln q u ii Tépoque du jugem ent, la fo r tu n e de Joseph
Heyrauld paroissoit bien a ssise, et q u o n ne pouvait pas prévoir
Jp, fa illite qu i n est venue qu'un an après.
R
é p o n s e
.
Comment, à l’époque du jugement du 5 floréal an 6, la fortune
de Joseph Heyrauld pouvoit-elle paroître bien assise, tandis que
peu de mois avant ce jugement, il avoit vendu pour 5 i , 5oo
de
biens, dont il avoit employé le prix à payer à quelques-uns de ses
créanciers , le tiers ou le quart de leurs dettes, afin de les engager
à renouveler leurs effets, pour ce qui leur étoit resté dû; tandis que
même alors, il avoit consenti des obligations par-devant notaires,
preuve de la défiance des créanciers qui avoient exigé des obliga
tions, contre l’usage ordinaire des négocians, qui ne traitent entre
eux que par leltres-de-change ou autres effets de commerce ? Com
ment cette fortune pouvoit-elle paroître bien assise avant ce juge-,
ment, tandis que quelques mois après, sa banqueroute a été déclarée,
et que dans son bilan, où il n’a déclaré aucune perte, il porte ses
dettes passives à 270,000^, et ne présente qu’un actif seulement
en mobilier de 30,000 tf~, mais qui n’a produit en effet, que 18,000
par la vente que ses créanciers en ont fait faire? Il n y a donc que
la plus complète illusion, dans ce dernier motif du jugement dont
est appel, en ce qui concei'ne Joseph Heyrauld.
O B S E R V A T I O N S .
I L seroit inutile d'examiner les autres motifs du jugement dont est
appel, dans ses autres dispositions; mais 011 peut dire qu’il en résulte
�c „ )
4 *
de nouvelles preuves de la fraude dont Joseph Heyrauld s est rendu
coupable envers ses créanciers. On peut racine ajouter qu’il en résulte
aussi que Jean-Baptiste Heyrauld. a Ç£é participant de la fraude.
En effet, le partage fait par les experts, en vertu de ce jugement,
faisoit faire entr’autres deux prélévemens à Jean-Baptiste Heyrauld ,
ui étoient absolument sans fondement, et contre lesquels Joseph
Leyrauld, toujours de concert avec son frère, ne faisoit aucune récla
mation , puisqu’il n'en avoit rien dit lors du partage, et qu’il avoit
laissé r e n d r e par défaut contre l u i , le jugement dont est appel, et
ce n’est que d’après les observations faites par les créanciers eux-mêmes,
sur ccs deux prélévemens, que le jugement dont est appel, a ordonné
de nouvelles opérations par d’autres experts, dans lesquelles le premier
prélèvement seroit réduit de quatre cinquièmes, et le second prélè
vement seroit entièrement effacé.
Le premier prélèvement que s’étoit fait accorder Jean-Baptiste
Heyrauld, sans contradiction de son frère, étoit de 16,875 francs,
pour intérêts payés à la citoyenne de Juigué, et il est prouvé par la
quittance delà citoyenne de Juigné,qu'elle s’étoit contentée de3,000 fr.
pour ses intérêts; aussi le jugement a -t-il réduit le prélèvement à
3,000 fr. Pourquoi donc Jean-Baptiste Heyrauld avoit-il demandé
16,875 fr. tandis qu’il ne lui étoit du que 3,000 francs ? Pourquoi donc
Joseph Heyrauld ne réclamoit-il pas contre l’excès prodigieux de ce
prélèvement ? N ’est - ce pas là une preuve évidente du concert de
fraude entre les deux frères ?
*' .
, „
t>
L e sfecond prélèvement que-s’&oitjfait accorder Jqan-Bpgfl^eHeyraijld, toujaur^ sajns contradiction de son frère, étoit d’une somme
de 3,280 ^ par lui prétendue acquittée comme dette de lâ sucoeçsien
de son père, aV^fcoyen Brest,, tandis que ¿ e n’étoit pas une dette
du père, nj^usjurç^ettejpersonnelle des deux fils. L e p è re , à la vérité,
s’étoit bien obligé'envers fë citoyen Bi/e3t';‘ *mais‘Tie ri’étoit que comme
caution de ses fils, qui en avoient donné une indemnité. Aussi ce pré
lèvement dek3,280 francs, a-t-il été rejeté par le jugement dont est
app^ ; mais ce ii’est pas sür la: *r6elamatîon de Joseph Heyrauld, qui
a Jaîssé ïèndfV'Ce }agemeflt ¡Jiaii*défaut.contre lu i,.c ’est ençore.sur
l ’obsdrvatî&i lle$. créanciers. Nouvelle^ preuve du concert des deux
1n
-»-V I
/i/Ml
lpC
I 1V/1O l# r n \ n 11/% 1
S
demment désavoué cette dette vis-à-vis du créancier, il fut condamitô
de la payer comme sa dette personnelle, et que l’un des motifs du juge
ment qui l’y condamna , fut, que le désaveu qu 'il en avoitf a i t , était
de mauvaise J v i !
�On citeroit beaucoup de preuves d’illusions faites par Joseph Heyrauld à ses créanciers: une seule qu'on va rappeler, fera voir à quel
point il portoit la perfidie. En 1792, il emprunta du citoyen Chalier,
une somme de 6,000 francs, pour le payement de laquelle, dans l’obli
gation qu’il en consentit, il hypothéqua spécialement un bien qu’il avoit
déjà vendu, en 1791, au citoyen Dumas; mais voulant cacher à ses
créanciers la vente qu’il en avoit faite, il prit à ferme du citoyen
Dumas, le même bien qu’il lui avoit vendu; et ce qu’il y a de
plus singulier , c’est que pendant la durée de la ferme, il fit pour
plus de 4,000 francs de réparations , dans un bien qui ne lui appartenoit plus. Qui auroit pu croire qu’il avoit vendu un bien
dont il continuoit de jouir ? qui auroit pu penser que ce bien ne
lui appartenoit plus, quand il y faisoitdes réparations si considérables?
et cependant, en hypothéquant spécialement un bien qu’il avoit déjà
vendu , il commettoit un stellionat qui le soumettoit à la contrainte
par corps.
Au reste , pour ne pas user de répétitions, on se réfère aux moyens
employés et établis dans les consultations qui seront imprimées avec
les présentes.
Par conseil,
A N D R A U D.
j
A R
i o m
F
,
de l’ imprimerie de L
v
'.J
a n d r i o t
,
imprimeur d u T r ib u n a l d’Appel.
�/ < r .
- s s i i i c«WsA*a2*$^*¿ü^
a . * tJL^Uwufcl*î r ^ ;^Æ
^'o*-.- î F ' Î » /cJÇ
^u/íuvu, <Ä» «.'«hir*iim
» ;
^
i \r
\?/ * r ,Â4>
rktf (u
/um,
&M / u iu /ii’,...,
/ •
au
V - _, •
..' J1—* .
it / /
**■
*^ c*«^w t .j /T'**“" ^
iuiuhîL
~ y~ - ¿ ~ T k - U r - ^ C u .
'.I
. *ÍX il ■
£1 u«A
- V- *,.*__ ,\ .
u'^ fefcT ^*: <«‘*a»‘' » ¿ ' í >
‘ / ok^
*
~t>,* /«*£
ia a u L
f » z ' /* « " & y /~ L
'i'L'tm ¿~yúttz¿zr /**»*' l'-f& x . «A y x ^ b
i
^ u i> u r^ <AA«JyU. /' <««i~~fÿ\
"X Ae^oj^ÁjfcTt« /<!>. i*i.ot¿fcu
taw ^ uJiT ^ t «JU1 <-l\*A*-y< i/ «lAotÁjUí,
w 4u<jr / « ^ n tv , /fc
^ 4 yuwovP
^
^*■
<
’ tu » - Îu|jCÆ"
Ur(4* /Ó|«^»4^ '))OJfcjr*cCu ft»L«tîotva>
iJt- f Y
- *-- tv
/*V<
,>y *‘“ ir
■
UoffelU* )•. At».«tu l^lfct. ¿Á
^ 't/u7 ^^y^tMÜruliuidÚ^ <a
K r “ OMn>«u«>j|— i «»^«i«yu*--- -T
¿tMAA^UlUp t/<Ûù&J' ^^^4*
C
L
A
a
a
a
««/11,
^ ac¿Íaaj^ ..1
¡ jiiir fi i¿i«xiu V
.
<
1
// flJr. O/UUI t*
„ ** . ^ -a
»
(t*
«a » » - i r
A
/ ^**a’ “*U^>
— ¿ -A r-^ -A
y
^
IX*
“■“ *
J /
(V‘
Q
tlU
xi Ç
»A
M (Il Cow^iyUx .
___I /
- / * — « •» -**- - > r <
w
/•
o*>î “—■
1 ÉlRMA^JulU *»*-
.
'
/? aw - u yU
«£/~ W«'V*- <*CA~~4.
yjf ÍAXu I^UkA
^autaú.
lA irW /i»
^ M / Y ‘“ y*il " 14
pcukufytJjr ¡t¿~ y \ ^ / <Hr ^a*»*«
^W ^UVIA^
*^*~
w>«<u~AuJii.
<v\<f</MAU«jr'
/
á-A^^yü
'«•>
-----*
—
n r ^Z
** ^
OÎluXviolr'
^ ^ AC^L 6mJ^i
CV /iAAV^MjJvIJ« 'b, iuAUUUVVUU
« ¿ c L ^ O -, «— ou^fcï^i / U
^
Cl
/<k
/
r
<»«
<M
fc^'W
*1 "^* ‘■
‘■/T1*
0 v'*t>
^ cott. /Ç ^»»JL OlX«^jjjov*WX O /.—^ A
“* ^
«A* «MVtta.
o-*T
-p
Âr ^ *
<— /“—
V é o u ^ ^ ,^ ^ “ y “ ^
/ okm* Avt^a» ¿ /'«■í^¿t‘ "VcJAvAx ;
*• î r * °*^
yr<«___ g ^ C ,C
^ps¿JZ*<~**~*T Tu /«•/* à*
.._ /< _
«v «~j£&r
ÿ '‘~f‘~ ~
*4sÿw*«
�/• (|>aaAumulL3 Qlv» /K Vi<a>J^IaaaÀC*A/V-** Cma^
( ^ v a ( M A '¿ o ^ o l w f c r
ümj. /^ /ovAvuk*.
j ,_
X ty iC l^ v
t** u
Lâjl£ 4
i i At CJOU[/umOjl>,
^ // OSK.
J i o w w i t ^ ^ o » * A ir U Ä “
*b> ■ »•'!•*•» - »A^
fo^ UnAjyyo Ok
a !JÜWAuJ|» 7A* CA*1Ä>Jjf
^
^
.V'i*ljo
H
'
U % ^ i*yK í Í T ^ Í T , /
M
:*w ^■•—J •I ■
i^ ¡O ^ y
■_
t â • v ’ *\
Cyïtk*JÀ u**.
«— >64
« ÉTλ«.
ít iw /Ly
A ^ Ÿ ^ t <*^ ti/^
V ^//tj
/ /^'^1*'— ^‘ /ü'“V ^**‘^**J’
a~li'*
a
.
^
>
>
/
•
>
u
—
««
o,
ClktaAWHUMA^wuur' C
x
Àj^
^1 ^
i V
i
—
âtüÿ^
A - y l^ S
¿hzb^r -
C w u u ü t— U i * * ^ < u í r
ÌJT
/ ’t j ó ó * y h ^ v u v % ^ y c H Û < * * A A »
/ ,fe iy
- «£>(«jp /v^ /..-^.... - ^— à. U|*<UüüU ^«A*
<*•“&» y-“ ’*^
«uüùui
*
»»^>!,>
' *V
™
m
t .
,>
'
» //
*r
4/¿~ bjyuL
t íó
“T
V ~ 7/îiitu^ ^Ayitaü»,
~T
-■
■
T *r fíj*
r vt » 7 p “ »» —r^ v.
ti>*>*itt\^«u euiu^ b i¿ /*«•
ca *j
“ * “ r*^* a
/
/ i - -^v^
*ê
a
r *
i/o^viaum A.** <yx^«AÎX~ «4rr
/¡fi**' <*•**•
“*»r-^tj,«» <!*^- ¿ 4 ÍÍU- ^
—
r^iür CûiA^yu«<|x ....
V «
■*
^r»
''■»
.-p#« „
■•• Il ..., «>
V ?,
'
T
" T'
,1
A
« H«.J>
V*
s'
.
'•
"•“ r r r •• v ;. .<
.u
i
'
*'
V
*> •
J»
•'Y
*
’
A
'
.-
>
i.
■î.
•V
't
»
,1
^
#
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Heyrauld, Joseph. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Hutin
Gattrez
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
créances
conflit de lois
exhérédation
fils déshérité
partage
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations et observations, employées pour causes et moyens d'appel ; pour les Directeurs des Créanciers unis de Joseph Heyrauld, appelans d'un jugement du tribunal civil du Département du Puy-de-Dôme, du 16 prairial an 8 ; contre Jean-Baptiste et Joseph Heyrauld, intimés.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Tierce opposition : les créanciers d’un cohéritier sont fondés à former tierce-opposition à tous jugements relatifs aux droits et partages des successions de ses père et mère, et à s’opposer à l’homologation du partage, lorsque, par le concert des cohéritiers, il en résulte préjudice à leurs droits et intérêts.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1772-Circa An 8
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
22 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1415
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0110
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53229/BCU_Factums_G1415.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Romagnat (63307)
Cournon-d’Auvergne (63124)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
conflit de lois
Créances
exhérédation
fils déshérité
partage
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53139/BCU_Factums_G1111.pdf
dc78687ef169a39a0bae55c091685345
PDF Text
Text
P
PO U R
R
É
C
M arie - M agdeleine
I
G
S
r é g o i r e
, Veuve de
Jean -L o u is Reynaud , tutrice de fes Enfans , demeu
rant au lieu de la R iv e , Com m une de Saint-Jullien-fousSaint-C ham ond, Appellante ;
C O N T R E
Camille — Claude — Antoine
R e y n a u d ,
Propriétaire , demeurant en la Commune de Trévoux , Dépar~
tement de l'A in
Intimé :
E N prêfence de Jean - B ap tifte A r d i s s o n ,
Négociant ;
demeurant en la Commune de S a in t-C h a mond , fubrogé tuteur
e uxdits Mineurs R e y n a u d ,
auf f i Appellant.
ne fais fi la queftion que le tribunal a à décider e ft
délicate & importante par fa nature : je fuis fe m m e ,
& point familiarifée avec les règles du droit.
M ais je p révois, & je puis affirmer que le fuccès de
l’oncle de mes enfans, mettrait le bouleverfement dans
leurs affaires , & ruinerait leur fortune. T u tr ic e , il eft
de mon devoir de les défendre; mère , on me pardonnera
ce que pourra com porter d’amertume une trop jufte
critique.
Il eft bien am bitieux, bien inju fte , fans d o u te , celui
q u i, au préjudice d’un tra ité , eft venu troubler le repos
' A
Je
�( * >
cle ma maifon , & voudrait m ’arracher le patrimoine de
mes enfans! M ais que dirai-je des juges qui ont favo rife,
accueilli fa prétention ?
Leur reprocherai - je l’ignorance ou la prévention ?
N o n , rien de tout cela; la voix publique d’un coté les
d éfen d , & de l’autre leur juiHfication ett dans m on
cœur. M ais ils font hommes ces juges , & ceux-là même
qui le plus honorèrent leur iie c le , ne furent pas toujours
à l’abri de l’erreur.
C ’eit donc une erreur que je leur impute : oui une
e rreu r, mais une erreur évid ente, une erreur te lle , en fin ,
qu’on aurait peine à fe la perfuader , fi elle n’était
confignce dans un jugement rendu après les plaidoiries
les plus inftru&ives.
C ’eft une cen fu re, j’en conviens , ce que je viens de
dire du jugement du tribunal civil du département de
la L o ir e , léant à M ontbrifon : mais en prenant la plum e,
je n ai pas voulu être apologiite , on peut juger fi je le
puis. La cenfure d’ailleurs eft un droit à tout le m onde ,
un devoir m ê m e , j’ofe le d ir e , quand elle eit juièe &;
fondée.
Q u’on ne s’étonne pas de la fermeté de mon langage ?
elle eft toujours la compagne cle la vérité ; & plus une
injuftice eil grande , plus on doit apporter du courage à
la dévoiler 6c à la faire réparer.
C eci d it , on me demandera : quelles font mes preuves ?
Quelles elles font ? Elles réfultent de la fauil'eté des faits,
que les premiers juges ont pris pour m o tifs, & de la
violation de tous les principes.
F n core une fo is , je ne fuis point familiarifée avec les
règles du droit : je ne veux d’ailleurs fatiguer l’attention
de perfonne. Je me contenterai de fupplier mes nouveaux
juges de lire les confultations que m ’ont rédigées les
jurifconfultes qui me guident. V oilà les armes avec lefquelles
je veux com battre m on adverfaire ; voilà les principes
�2 S i
( 3 )
que je veux oppofer aux erreurs : c’efl: dans ces décifions
que j’ai puifé ma confolation , com m e c’eil dans les
lumières & l’intégrité de mes juges d’ap p el, que je mets
toute ma confiance.
G R É G O I R E , V s. Reynaud.
A R D A I L L O N , Défenfeur
officieux à M o n tb rifo n ,
C o
n
s
e
i i.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a pris lefhire
du jugement rendu au tribunal civil de la L o ire , féant
à M o n tb rifon , le 15 T herm idor an 4e. , entre C am iileClaude - Antoine Reynaud , & M arie - M agdelaine
G régoire , veuve de Jean-Louis R eynaud, tutrice de leurs
enfans; Jean-Baptiile A rd illo n , fubrogé tuteur des enfans
mineurs , de plufieurs autres titres & pièces , ôc fur ce
qui a été e x p o fé ,
E s t i m e que ce jugement efl: une nouvelle preuve que ,
depuis plufieurs années , il 11’y a plus rien de certain
en jurifprudence ; les vérités les plus confiantes, les prin
cipes les mieux établis deviennent aujourd’hui problé
matiques; le repos des familles efl: fans celle troublé
par des prétentions extravagantes, qui malheureufement
l'ont fouvent couronnées par un fuccès inattendu.
L e jugement dont il s’a g it , admet la reilitution contre
line ceiîion de droits fucceflîfs, faite entre cohéritiers
majeurs, & fuivi de plufieurs a&es gém inés, approbatifs
de cette ceiîion.
�Il fufïirait fans doute d’expofer la queilion , pour la
réfoudre ; il n’y a que l’importance de l'o b je t, qui puiile
donner quelque intérêt à la difcuiîion. O n croit néceilàire
de rappeler les principes de cette matiere ; on en fera
enfuite l’application à la caufe , ¿c on exam ineia ù les
circonstances particulières pouvaient faire fléchir une
regie invariable, & une jurifprudence jufquici uniforme.
Une ceilion de droits fucceOifs eiï un contrat aléatoire.
L a raifon enfeigne qu’un aéïe de cette nature n’eit point
fujet à refcifion pour caufe de léfion ; le ficcefleilr cede
pour un objet certain , des droits non liquides ôc qu’il ne
garantit p o in t, & le ceiîïonnaire le fou met à des charges
6c à des dettes dont le montant n’eit pas connu. Daguetfeau , dans fon onziemé plaidoyer , a difeuté ce point de
droit avec la profondeur & la fagacitc qu’on lui connaît.
Perfonne n’ignore , d it-il, la lage dilpofition de la loi 2 ,
( au C . de refeind. vend. ) ; nos Doéteurs n’ont pas cru
quelle put avoir lieu dans la vente d’un droit univerfel,
tel qu’eil une fucceiîion. A ntoine Loifel en a fait une règle
expreiTe du droit Français. Son fentiment eilto n d é fur les
principes de la jurifprudence Rom aine , & il a m érité
d ’être fuivi par la jurifprudence confiante &c uniforme des
Arrêts. Us ont tous jugé qu’il fallait que le prix de la chofe
vendue pût être certain , afin de pouvoir eitim er fi la
léfion excede la m oitié du jufte prix , & que ce prix ne
peut jamais être aifuré dans la vente d’une fucceiîion ;
qu’une hérédité 11’eit bien iouvent qu’un nom trom peur ,
q u i , fous une fauiî'e apparence , cache la ruine & la perte
de celui qui l’accepte , & que ce n’eit pas fans fujet que
quelques-uns de nos Auteurs ont d i t , que tout hom m e
qui acheté une h érédité, periculofx plénum opus alcæ traclat
& incedit per ignés Juppofitos cineri dolofo.
U ne prom eilè , une garantie
priver un jour celui qui acquiert
efpérait recueillir de les travaux
de ce péril pendant trente an s,
des faits du d éfu n t, peut
fa lucceilion , du fruit qu’il
; &c , pui¡qu’il eit menacé
6c que juiqu’à ce terme il
�efl encore incertain fi la crainte n’eil pas bien fondée , ou
doit en conclure avec raifon , que l’on ne peut accorder
au vendeur le bénéfice de la reititution en entier , parce
que ce bénéfice eil renfermé dans l’efpace de dix annees ,
6c qu’après ce temps les créanciers de la fucceflîon , dont
les atlions ne font prefcrites que par le laps de trente ans,
peuvent encore paraître 6c diminuer par leur d em and e,
6c les forces 6c le prix de la fucceflîon.
Ainfi une fucceflîon ne peut acquérir dans dix années ,
un état fixe , certain 6c invariable ; 6c cependant ce temps
eft le terme fatal après lequel 011 n’écoute plus les plaintes
trop lentes de ceux qui n’auraientpas attendu fi long-temps
à implorer le fecours de la l o i , s’ils avaient étc vérita
blement léfés.
Enfin ce M agiftrat célèbre finit par dire : qu’il eft
inutile d’emprunter le fecours des L o ix 6c l’autorité des
D oéteu rs, pour prouver une m axim e qui eft également
confiante , 6c dans les principes de l’équité naturelle ,
6 c dans la m axim e du d r o it, ô c dans la juriiprudence
des Arrêts.
En e fte t, depuis lo n g -te m p s les Arrêts avoient jugé
d’une manière conform e. O n cite avec avantage dans
cette m a tie re , un Arrêt du 9 M ai i 6 i z ,*rapporté dans
B a rd e t, 6c connu fous le nom de Flavacourt. C e t
A rrêt a jugé qu’un cohéritier qui avait cédé fes droits
en majorité à fon frere , moyennant une lom m e de
30000 liv. franche 6c. quitte de toutes charges 6c de
dettes héréditaires , était non - recevable en lettres de
re fciiio n , contre un femblable tra ité / p a rc e que dans
une ceffion de droits fucceififs , 011 11e confiderc jamais
la leiion d outre—m oitié du juite prix , meme du quadruple
ou telle autre qu’elle puiilè être , à caufe de l’incertitude.
L ’annotateur Berroyer ajoute : qu’on 11e doit pas
regarder une ceffion 6 c vente de droits fucceflifs échus ,
faite à un co h éritier, com m e 1111 partage, ôc qui ferait
fujet à refciiion pour raifon du tiers au qu art, quoique
�ce
de
ne
de
( 6 )
fût le premier a£le paiTé entr’e u x , depuis l’ouverture
la ilicceliïon ; que cet A rrêt a jugé la queftion , &
s’eft point arrêté à la lé iio n , que l’on foutenait être
plus des trois quarts.
Un fécond A rrêt du 10 M ai 1633 , rapporté dans le
même recueil , a décidé en termes formels : qu’une vente
& ceiîion faites au mari par les héritiers de la fem m e ,
de leur part en la com m u n au té, n’était pas fujette à
refciiion pour aucune léiion. La lé iio n , telle qu’on la
puiilè articuler , n’eit jamais d’aucune confidération ,
difait-on lors de cet A r r ê t , à caufe du péril & de l’in
certitude 011 eft perpétuellement l’acquéreur de ces d ro its ,
pour lefquels il fe peut faire qu’il fera tenu de payer
quelques dettes , ou de fupporter quelques charges qui les
abforbera entièrement : quafi fpes hœreditatis em ittur , &
ipfiitn rei incertum venit ut in retibus , d it Ulpien fur la
loi 11e. de hærcd. vel act. vend. L e tout confiite au hafard
<& en l’incertitude s’il y aura du profit ou de la perte :
id aclam effc manifrjlum e f l , ut qnemadmodum emolumentum
négiciarionis , ¿ta pericnium odemptorem pertinet.
Il eft vrai que quelques Jurifconfultes , & notam m ent
Brodeau , lor£ d’un Arrêt du 19 M ars 1580, prétendait
que ces principes n’avaient lieu qu’à l’égard de ceiîions
& tranfports de droits fucceiîifs faits à des étrangers,
&c non à l’égard de ceux qui fe font entre cohéritiers
légitim es, & notam m ent, dit-il, avant le partage, parce que
tels con trats, com m e étant les premiers à l’ouverture
de la fucceiiion , font réputés partages. M ais cette diftin& iôn a été rejetée par l’Arrêt m êm e, fur lequel Brodeau
fait cette remarque , & par tous ceux qui ont été rendus
depuis. E t en e tle t, fi cette opinion était fiiivie , il eii
réiiilterait 1111 grand inconvénient , c’eit qu’un héritier
ferait réellement privé de la faculté de céder fes droits
fucceiîifs à fes coh éritiers, qui peuvent cependant lui en
donner un meilleur prix qu’un étranger, parce qu’ils font
•obliges, pour recueillir leur portion héréditaire, de fe
/
�( 7 >
donner-autant de peine que pour en recueillir deux on
la totalité.
Il ferait d’ailleurs bien étrange qu’on voulût confidcrer
com m e un partage, un a£ïe par lequel celui qui vei.d
Tes droits , déclare expreiTément qu’il ne veut pas être
héritier ; celui qui vend jus & nomen hœredis , renonce
précifément à la qualité d'héritier ; par conféquent il ne
peut être queftion de partage. Aufli L e B ru n , des fucceilîons , liv. 4 , chap. i c r , nom b. 57 , enfeigne-t-il que
la ceflîon de droits fucceilifs faite à un cohéritier , eit
inataquable pour caufe d eléfion . T e lle eft auffi l’opinion
de P o th ie r, traité des obligations, nom b. 13; de L e
G ran d , fur la coutum e de T ro ye s ; de Ferrières, Dupleiîîs ;
tel eit enfin le langage univerfel des Auteuts qui ont
traité la queftion.
Il n’eft pas hors de propos de rappeler ici ce que
difait Pavocat général Séguier , lors d’un Arrêt récent
du 12. M ai 1760, dans la caufe du S. Devilleneuve. T o u s les
Jurifconfultes, difait-il, ont comparé une vente de droits
fucceilifs à une chofe incertaine ; c’eft le marché qu’on
pourrait faire d’un coup de filet ; l’incertitude à laquelle
s’expofe un acquéreur eft une confédération puiifante ,
qui exclut toujours & abfolument le m oyen de léfio n ,
qui pourrait donner lieu à la reftitution contre lui ; s’il
fe trouve du b én éfice, il n’efl: pas jufte de lui envier ce
p r o fit, parce que s’il y a de la perte elle tom be fur
lui fans reiTource. Dans une vente de droits fucceilifs ,
le vendeur reçoit une fom m e certaine , qui ne peut lui
être enlevée fon gain eit aifuré & à couvert de tout
événement ; l’acquéreur ne trouve au contraire pour le
prix de ion a rg e n t, qu’une efpérance traveriée de périls
& d’inquiétudes ; l’on ne peut connaître les dettes d’une
fucceflion qu’après les trente an s, dans lefquels les aétions
perfonnelles peuvent fe prefcrire ; jufqu’à ce term e fatal
de prefcription , l’acquéreur flotte toujours entre la
crainte & l’efpérance, entre la perte & le gain. 11 ne
�(
8
)
faut qu’une p ro m e fie , qu’une garantie du d é fu n t, pour
renverfer la fortune la m ieux établie. E n fin , de même
que fi immédiatement après la fucceifion on eût découvert
des dettes inconnues , & capables d’abforber toute
l’hérédité ; l’acquéreur 011 le ceflïonnaire ne peut pas fe
faire reftituer , de même il eft raifonnable qu’on ne
puiile pas revenir contre l’un ou l’au tre, lorfqu’après
s’être expofé à tous les dangers poilîbles , ils réuifiiîènt
même au-delà de leurs efpérances. C/eft d’apres ces raifons
naturelles , que n o sL o ix & nos Jurifconfultes ont toujours
décidé , que dans une vente de droits fucceilifs, il n’y a
point de reftitution à caufe de l’incertitude de l’évenement , qui rend toujours le marché égal.
Enfin , ce principe eft fi certain & fi connu , qu’il n’efl:
pas ordinaire qu’on foit obligé de. s’appefantir autant fur
une difcullion de ce genre.
Si l’on fait l’application de cette m axim e au jugement
du tribunal de M ontbrifon , on fera bientôt convaincu
que ce jugement ne peut fe foutenir ; on pourrait même
préfumer qu’il a été di£té par la prévention , des qu’il
bleilè des principes auili éVidens. Il n’eit pas poiîïble de
révoquer en doute , que la ite paifé entre les deux freres
R e y n a u d elh in e véritable ceilïon de droits fucceilifs, faite
entre majeurs , enconnaiilance de caufe, & qui eft à l’abri
de toute demande en reftitution. En e ffe t, le père com
mun eft décédé le 28 Juillet 1785 , laiilànt quatre enfans ,
deux fils & deux filles. Par fon teibin en t du 15 du même
m ois de Juillet , il légua à chacune de fes filles la fom m e
de 57000 livres , indépendamment de 43000 liv. qu’elles
avaiert reçues chacune lors de leur mariage : il uiftitua fes
deux fils fes héritiers , fous un préciput qu’il fit à l’aîné de
fes bâtimens de réiidcnce , ainii que des m eublesmeublans , linges & argenterie.
A cette époque , tous les enfans étaient majeurs : les
fcellés
�/celles furent appofés fur les effets du père , après Ton dé
cès , & ne furent levés que le 4 A oû t lu ivan t, à la réquifit io n de tous les héritiers réunis.
. . .•
}
Ile 6 du même m o is , les deux frères traitèrent avec leurs
deux fœurs lcgitim aires, & au lieu de 57000 1. qui avaient
été léguées à ces dernières, elles obtinrent une fom m e de
80000 livres pour tous droits légitimâmes & fupplémentaires , indépendamment de ce qu’elles avaient reçu par
leurs contrats.
L e lendemain 7 A o û t , les deux frères , toujours réunis,
vendirent la charge de fecrétaire du R o i, dont était pourvu
leur père défiint ; le prix fut payé co m p tan t, & partage
entre les deux frères.
'
Il exiftait un procès confidérable dans la fucceilion , avec
les créanciers Carouge; les deux frères le term inent par m i
traité du 15 N ovem bre 1785.
Le
du même m ois de N o v e m b re , les deux frères
avaient traité avec un des aiïociés dans le com m erce du
père : ils ont tous deux réglé les droits de leur mère.
' C ’eft après tous ces aftes multipliés , qui donnaient au
frère cadet une ample connailTance de toutes les forces
de la fucceilion , une inilru&ion détaillée de toutes les
affaires , que le 2,3 du mois de N ovem bre , il céda à JeanLouis , fon frère aine , tous les droits qu’il avait à pré
tendre dans la fucceilion paternelle échue , m oyennant
une fom m e de 103000 liv. payable de la manière exprimée
en l’aéte ; cette ceilïon fut Faite aux périls & rifques du
ccdataire qui refta fournis à toutes les charges de l’héré
dité avec convention que la fom m e convenue ne pour
rait être diminuée par aucun événement. Il fut aufîi
exprimé, que il les légitimâmes parvenaient à faire pro
noncer la nullité du teilam ent du père c o m m u n , par
l’inobfervation de quelques loix locales ou au trem en t, la
ceiîion demeurerait nulle ; le cédant s’obligea encore de
prêter fon nom à fon frère, dans tous les aèles & procé
dures , tant en demandant que défendant, lorfqu’il ferait
ü
�, . ( 10 ^
obligé d’agir com m e héritier du père , fans que néanmoins
il pût en réfulter aucun engagement ni garantie de la parç
du cédant.
_
^
L e 18 Février 1786, le cédataire aiîocia Ton frère dans
fon com m erce relatif aux forges de Guegnon ; la raifon fo ciale devait être fous le nom de Cam ille R eyn au d , Fils &
Com pagnie ; les affociés tenaient à ce prénom que le père
avait rçorté , ÔC fous lequel ils étaient connus par leurs
Correfpondans , ce qui les diilinguait d’ailleurs d’autres
familles de com m erce du même nom .
L e i i F évrier, C a m ille -C la u d e -A n to in e Reynaud fe
défiita de tous les droits réfultans de cette fociété , au pro-;
fit de fon frère, q u i , de fon coté, prom it de le garantir de
toutes les obligations réfui tantes de cet aéle de fociété. ;
Il n’efi: pas inutile d’obferver encore, que furies 2.030001.
prix de la ceiîion de d roits, il y en avait 103000 qui de*
vaient être prifes chez les frères M a rd u e l, négocians en
foie , de la ville de L y o n , chez qui le pere com mun avait
p la c é . cette fom m e en com m andite ; ôc le frère c a d e t,
céd an t, travaillait lui-m êm e depuis plufieurs années chez*
ces négocians. L e cédant provoqua la diilolution de là
Société en com m andite, elle fut prononcée par fentence
de la Confervation de L y o n , le 17 Avril 1787 ; la portion
revenante à Reynaud c a d e t, fe trouva m onter à 1 1 8 1 0 1 1.
a s. 3 den. au lieu de 103000 1., de forte qu’il profita d’un
bénéfice de 15000 1. fur cet objet.
,;
L e 16 Septembre 179 1 > il fut paiTé un traité entre les
deux frères, par lequel Reynaud aîné s’obligea de ne pou
voir rembourfer les 1000001. qui reliaient pour parfaire le»
prix de la ceilion , que fix ans après , c’e it-à-d ire, le 2.8
Juillet 1797 ; ÔC on lent que cette'prolongation était toute
à l’avantage du ca d e t, ôc pour éviter un remboürfemenc
en papier-monnoie.
Depuis , Reynaud aîné efl décédé ; fa Veuve a éto
nom m ée tutrice de les enians. Reynaud cadet reproche .à fa
belle-famr d’ayoir voulu lui rembourfer en aiCgnats. la
�S 11 >
fom m e reftée due du prix de la ceffion : mais les parties
fo n t , à cet égard , contraires en faits. L a Veuve foutient
au contraire qu’elle n’a offert de rembourfer de cette ma
nière que les intérêts feulement.
Q uoi qu’il en foit de ce fa it, qui eft purement d e pro
cédé , & qui eft fort indifférent pour le point de d r o it , le
fils cadet a imaginé de fe pourvoir devant un tribunal de
famille , le 3 T h erm id o r an 3 ,p o u rfe faire reftituer contre
la ceiîïon de droits par lui confentie , fur le prétexte que
cet a&e renfermait fraude, d oî & léfion du tiers au quart.
C ette demande dut paraître fort extraordinaire : il paraît
m êm e que Cam ille Reynaud cadet femblait vouloir l’aban
donner , puifque poftérieurement à cette demande , &c le
2-7 O étobre 17^^ , ( vieux ftyle ) il a donné quittance
pure & fimple de deux années d’intérêts , du principal
qui lui reftait dû fur le prix de fa c e iîio n , & fans autre
réferve que le capital &: les intérêts courans.
C e t aète était fans contredit une fin de non-recevoir '
infurmontable ; c’eft une nouvelleconfirm ation de fa ceiîîon
de droits ; il était fans doute le maître de régler le m ode
& les conditions de fa quittance ; il pouvait fe faire
toutes efpèces de réferves, potuit apertius dicere : & cepen
dant il perçoit lès intérêts , fans préjudice du capital ; donc
il ne fe réferve autre chofe que ce même capital, donc il
exécute la ceiîion qu’il a confentie , donc il l’approuve
de la manière la plus form elle & la plus précife.
-Q u o i qu’il en foit , après la fuppreiîion des;tribunaux
de famille , il a repris l’inftance pardévant le tribunal civil
de M ontbrifon ; cette prétention était choquante, elle
ne pouvait foutenir les regards de la jiiftice ; la raifo n ,
l’équité , les loix , toutes les circonftances fe réuniiîaient
pou 1* la faire profcrire. L ’a&e qu’il attaque n’eft & ne
peut être qu’une ceiîîon de droits , aléatoire & incertaine ;
iU était débarraflé de toutes les dettes-, de toutes les
charges de la fucceflîon , tandis que fon frère était garant
envers tous les créanciers: il y a toujours des rifques à
�( Il )
courir clans ce cas & f u r - t o u t clans l’efpèce , ou il
s’agiflàit de lafucceffion d’un N égocian t, où de tout côté
il y avait des pertes à craindre , faillite de débiteurs ,
m ax im u m , réquisitions , terreur , pertes de tous genres ;
&: le frère cadet fe trouvait à l’abri de tous les évènemens , avec le prix certain qu’il avait obtenu.
Il n’y avait dans l’efpèce aucune tutèle ni protutèle ;
tous les deux étaient majeurs au décès du père ; les fcellés
n’ont été levés qu’en préfence du cédant : il a tout v u ,
tout f u , tout connu ; c ’eft lui qui a réglé les légitimes
de fes fœurs , d’après les forces calculées de la fuccefîîon ;
il a traité avec les aiiociés de com m erce de l'on pere ;
il a eu fous les yeux les livres de c o m p te , les journaux ,
les bordereaux , & généralement tous les titres qui établiilaient Paftif com m e le pafîïf ; c’eft lui qui , con
jointem ent avec fon frère , a terminé le procès avec les
créanciers Carouge ; fa ceflion de droits émane d’une
volonté libre , confiante & éclairée ; il n’a pas voulu
être refponfable des évènemens ultérieurs; il n’a pas voulu
être héritier de fon père , il a vendu ju s & nomen hœredis.
Par quelle étrange fatalité a-t-il donc obtenu & fait
juger que cette cefïion était fujette à reftitution ? Les m o
tifs qui fervent de bafe à ce jugement font très-nom breux,
mais tous contraires aux principes & aux maximes du droit.
O n va difcuter les principaux ; car il en eft une foule
qui ne m éritent pas d’être relevés.
O n m et d’abord en principe , que toutes les loix natu
relles &: civiles fe réunifient pour décider qu’un premier
a£te fait entre cohéritiers eft réputé partage, fous quelque
dénom ination qu’il ait été ftipulé.
M ais ce principe , qui eft vrai en point de d ro it, reçoit
une m odification en matière de ceflion de droits fucceffifs , parce que , pour qu’un aile foit réputé partage , il faut
conferver la qualité de cohéritier : com m e par exem ple,
lorfque l’un d’eux vend à l’autre des immeubles particu
liers de la fucceffion, par la ra ifo n , que dans ce cas il
�conferve toujours la qualité d’h é ritie r, & qu’il n’en eft
pas moins tenu de fa portion des charges ; c’eft alors
que s’il a été trompé dans le prix de fa vente , il peut
revenir pour caufe de léfion du tiers au q u a r t, parce
qu’il eft jufte qu’il ait une portion égale de l’u tile , dès
qu’il paye une portion égale des charges. M ais lorfqu’un
cohéritier vend Puniverfalité des droits qu’il a à prétendre
dans une fu cceiîîon , il eft im p o iîîb le, il eft abfurde de
vouloir coniidérer cette vente com m e un partage, puifque
c’eft précifément un aéte dénégatif de tout partage : &
qu’on ne vienne pas dire i c i , que l’égalité eft la loi natu
relle 3 & que deux frères fur - tout doivent fe traiter
égalem en t, lorfqu’ils traitent fur la fucceiîîon d’un père.
O n ne peut pas faire une plus mauvaife application du
principe d’égalité ; & ce m o tif eft vraiment révolutionnaire.
Il ne doit y avoir égalité de bén éfice, que lorfqu’il y
a égalité de charges : ici toutes les charges , tous les
embarras de liquidation étaient pour le cédataire , ÔC
le cédant n’avait qu’à recevoir une lom m e qui le m ettait
à l’abri de tout péril & de toute inquiétude.
, L a différence qu’on a Voulu faire entre une ceiîîon
faite à un étran g er, d’avec celle faite au profit d’un
cohéritier , a été réfutée par les autorités qu’on a déve
loppées en com m ençant.
Il eft ridicule d’entendre dire que cette cefîîon a été
confentie quatre m ois après le décès du père , & que 1
dans un auiîî court in tervalle, le fils cadet n’a pu con
naître les forces de la fucceffion , qu’il habitait depuis
longues années
hors la maifon paternelle ; tandis
que fon frère l’aîné , qui habitait avec fon p è re , avait
une connaiiîance parfaite de tout ce qui com pofait la
fortune du père.
M aispourquoi un héritier ne pourrait-il pas céder fes droits
après quatre m o is , lorfque la loi ne donne que quatre
mois oc dix jours à l’héritier pour délibérer fur les forces
de la fu cceiîîon , & accepter ou renoncer ? C om m ent
�eft-il poflible que le frere cadet n’ait pas'eu le temps
de connaître les forces de la fucceiïion , lui qui a
concouru à régler la portion légitim aire de fes fœ urs,
6c qui n’a pu la calculer que fur les forces connues de
cette fuccelfion ? C om m en t a - 1 - il pu en ignorer la
confiftance , lui qui a réglé les affaires de com m erce avec
l’aifocié de fon pere ?
O n dit vaguement , que le traité du 13 N ovem bre
1785 efl: mal à propos affimilé au coup de filet, parce
qu’il ne renferme pas les cara&eres eiFentiels du contrat'
aléatoire ; c’eft m ettre en fa it:p o fitif le contraire de ce
qui eft: prouvé par l’a&e m ê m e , & c e la , par la claufe
feule qui rend le frere aîné refponfable de toutes les
charges héréditaires. C ’eft précifément cette condition ,
qui d’après tous les Doéteurs du droit qu’on a c it é ,
renferm e le cara&ère d’incertitude & du hafard , qui
rend toujours les marchés égau x..
O n a dit avec afte& atiori, que la liquidation de cette:
fucceiïion ne préfentait aucun n ique; qu’il n’y avait-,qu’un
feul procès qui avait été terminé av.ant la ceffion : mais,
peut-on garantir, fur-tout dans une maifon de co m m erce,
les évènemens imprévus; tout le pafiif peut-il être connu ?
Il ne faut qu’une promette , qu’une garantie du d éfu n t,
pour renverier la fortune la mieux établie ; & d’ailleurs on
expofe que depuis la c e ffio n , le cédataire a été obligé de
foutenir quatre procès relatifs à la fucceflion.
O n dît encore que il Reynaud l’aîné fût devenu infol-,
vable , fon frere cadet aurait été obligé de payer la, dot
de fes fœ u rs, par fuite de l’engagement qu’il avait contracté
par le traité fait avec elles : mais ce m o tif eit abfolumenc
dénué de fens & de raifon. L e cédant ne s’ctait-il pas
contenté de la folvabilité de fon frere ? les fœurs n’avaientelles pas une hypothéqué fur tous lés immeubles dclaifles
p arleu r père ? & d’ailleurs, en cas d’infol.vabilité ou à
défaut de p ayem en t, la ceflion eût été déclarée nulle , 6 c
le cédant ferait rentré dans tous fes droits. G ’cit au fur-
�«
\ ) /
*
plus poiïi* la première fois qu’on a vu dônnèr un femblable
m o tif de réfolqtion, .parce, que dans ce cas., le vendeur- à
à fe réprôchef 'de n’avoir pas exige une caution E t fibi
im putet, qiii corripromïfiP. « r‘
O n dit encôre qüe' fi lès ’ frères M arduel éûfïent fait
faillite ; Reyn’aùd cadet eûti(pèrdii les io3oooi liv.- qui lui
étaieilt dues par cette M aifon d e 1com m erce : màis«d’une
part ^Reyri&ud ; cadet avait défi ré que ion frere lui cédât
cette créance , parce qu’il était lui-même depuis long
temps dans cette maifon , qu’au m oyen de cette fom m e
il devenait lui - même afîocié com m anditaire , que cette
fom m e lui procurait un ëtât de fdn c h o ix , & dans un
genre de com m erce qu’il avait adopté. D’ailleurs il faut
ie; rappeler1qu’il eil: expréfïëment itipülé dans la- ceffiori
de cjroits que la fom m e coriyeniiené pourra être diminuée
par aucun événement : cette claufe donnait le droit au
codant de réclamer cette fom m e entière dans tous les cas y
& fi les‘ftferes1M arduèl -avaient: fait faillite , ce qu’on ne
peut pas^réfumer :ce qui eil'^ ’ailleurs injurieux pour la
rhàifon::dônt il's’-agit^, Reÿnàud eàdet eût eu dans-cè cas
un recouis affûté contre fon -frere. O n expofe encore que
fi les f légitiinaires avaient fait, déclarer le • teftam ent
du p ère;n u ), la ceffion eût été révoquée , que le cédant
courait’ dlé^1rifque$ en prêtant'fôn noni pour la pourfuité
des protêt j ë h J)i^tant fon iiV<3m7pour la:ràifon de coin-’
m erte , dans tîn'e-Sôciété ‘ où .il n’avait ,'aucun' droit.
M ais tôtis- c1ës motifs difparaiflent, & on fent aifément
i^. q u è 'fr le tëftamciht avait été déclaré nul , le cédant
n’avait plus des droits aufii étendus fur la fiict'effion. O r ,
il était bien tenu.ïde. -garantir au m9ii\s ,:.&; fa qualité
d’héritier, & la portion qu’il am endait, puifqu’il en recevait
le pri^ /S’Ü prêtait fo n fn o m pour les procès / il étâit
dit précifémenc .qu’il n’en pouvait réfulter contre lui
aucune garantie. D ’ailleurs cette précaution n’avait d’autre
objet que d’éviter, ynCdroit de burfalité pour Penrégiftrement de la ccfiio n , précaution d’un ufage familier
�fur-tout entre frereS, mais qui ne peut changer -la nature
de l’aàe.
,
■.
|
S’il prêtait Ton nom pçmr la raifon de com m erce *
c’était indépendant de la ceffion , 6c par une convention
poilcrieure inférée dans un traité qui avait tout autre
objet que la fuccefiion ; encore n’était-ce pas fon véritable
n o m , puifqu’il porte plufieurs p rén o m s, & qu’on n’atta
chait d’importance qu’à celui de C a m i l l e parles m otifs
qu’on a déduits plus haut. ;
;
Envain reprocherait-on de n’avoir point fait inventaire;
cette form alité eit inufitée entre freres m ajeurs, 6c était
abfolument inutile , puifque tous deux affiftaient à 1&
rém otion des fcellés. D ’ailleurs, on n’a pas oie argumenter
d’aucune fpoliation , d’aucun recelé , 6 c le cédant ne fera
pas cet outrage à la mémpijre de fon frère.
Enfin les*thofes ne font plus entieres ; il efl impoffible
aujourd’hui de con n aître, fu r - t o u t , la confiftance du.
m obilier & des effets qui ;ç>nt été dénaturés vpnt dû 6 c
pu l’être, puifque le frere écait propriétaire incommut^ble ;
6 c le cédant n’a pas di t , il laiiîèra, même ignorer':lçfc
fom m es qu'il a partagées ôc reçues'lors de la rcm otioii;
des fcellés.
C ’efl: cependant avec de femblables motifs , qu’on &
admis la demande en rcftitim on , & ordonné l’eftim atioii
des B ien s, pour vérifier ’s’il ÿ ’fvait^léfiqi} dy_ tiers .au
quart. C ette décifion ei^révoltaijite,;.¡énon^ef’ \es motifs»
c’efl les com battre , 6c fous tous les; rapports ^ la,veu ve
Reynaud peut fe prom ettre de faite, anéantijç fur l’appel
ce Jugement inique.
.,
/ . . .( ,»
■>.
.
Délibéré à Riom } le i f Brumaire , an 5e.
PAGÉS,
GRANCHIER,
i
1 !; '
’
T O U T T É E Père,
TO U TTÉ E
.
'
Fik,
.
d e v a l
-
'
.
.
. »
J:
■
Le
t
J
�( i7 )
qui a vu le jugement
rendu le 15 T h erm id or d ern ier, au tribunal civil du dé
partement de la L oire , entre le citoyen Cam ille-ClaudeA ntoine Reynaud , & la citoyenne M arie - M agdelaine
G régoire , veuve de Jean-Louis Reynaud, tutrice de leurs
enfans ; & le citoyen Jean-Baptifte A rdillon , leur fubrogé
tuteur ; les pieces relatives à la con teftatio n , & fur ce qui
a été e x p o fé ,
L
e
C
o n s e i l
s o u s s i g n é
,
• E s t d’Âvis que le jugement du i? T h erm id o r dernier
eit contraire aux principes , & qu’il doit être, infirmé fur
l’appel qui en a été interjeté.
Pour le prouver & pour procéder avec o rd re , on divifera la difcuffion en trois parties.
Dans la premiere , on établira qu’en faifant abilrailion
de tous m oyens de confidération, & des fins de non-recevoirqu i s’élevent contre la demande du citoyen Reynaud,
cette demande ne peut fe foutenir par elle-m êm e, d’après
les principes.
Dans la fécondé partie , on expofera les faits & les circonitances , qui prouvent que le citoyen Reynaud a c o n tra â é en connaiiîànce de caufe ; en forte que fa demande
efl infiniment défavorable.
Dans la troifiem e , on développera des fins de n on recevoir contre la réclamation du citoyen Reynaud.
P R E M I E R E
P A R T I E .
» •
Lorfque les deux freres ont traité , ils étaient majeurs :
ils l’étaient à l’époque du décès de leur pere : ils amen
daient un droit égal dans fafuccefiion , fous un préciput
en faveur de l’aîné. Il eit de toute impoffibilité d’attribuer
au citoyen J ean -L o u is Reynaud aîné , le caraétere de
C
�c
1
8
}
tuteur ou de protuteur de fon frere puîné : 011 ne l’a même
pas articulé. C e dernier a donc eu liberté & capacité de
vendre fes droits fucceffifs à fon frere ainé.
O n prétend que la ceffion du 23 N ovem bre 1785 ren
ferme une léfion confidérable, que cet a£ï:e doit être affim ilé à un partage, parce qu’un premier aéte pailë entré
cohéritiers doit être regardé com m e t e l, & que des-lors,
pour être refcindé , il fuffirait qu’il y eût léfion du tiers
au q u a rt,
le jugement a adopté cette prétention , en
ordonnant une eftimation des biens du pere com m un , à
l’effet de vérifier fi cette léfion exifte ou non.
C ette prétention réfifte à tous les principes , & l’on ne
peut qu’être étonné que plufieurs motifs du jugement pré
sentent l’idée qu’un pareil afte eft vraiment fufceptible de
refcifion pour caufe de léfion du tiers au quart.
C ’eft un principe élémentaire en matiere de ceffion
de droits fucceffifs qu’on ne peut articuler la léfion-,
quelqu’énorm e qu’elle pût être. C ’eft un vrai contrat
aléatoire : on ne peut déterminer s’il y a léfion ou non.
L ’acquéreur eft chargé de toutes les dettes ; elles peuvent
11’être connues qu’après trente ou quarante ans, & abforber
toute la fuccefîîon ; cependant le vendeur, ne laiile pas
d e.co n ferver le prix de la ceffion ; Fincertiti.de de
l’événement fait regarder cette ceffion com m e 1111 forfait ;
c’eft un coup de f i l et , joclus retis. Il eft permis de
gagner beaucoup, là où il eft poffible de perdre beaucoup.
Perfon ne n’ignore FArrêt du 7 M ai 1586, cité par
A u to m n e , par lequel un batelier qui avait vendu pour
trois cents écus la fucceffion du Bailli du P alais, qu’on
eftim ait être de 4000 liv. de re n te , fut débouté de fes
lettres. C e principe eft établi par une foule d’autorités
refpeàables, rapportées par Dénizart au m o t droits fucceffifs ,
4 & fuivans.
C ’eft une erreur de prétendre, com m e Fa fait le cit.
Reynaud , que f ila léfion n’a pas l i e u, lorfque la vente
¿le droits fucceffifs eft faite par un héritier à un étranger,
�( r 9. )
/
elle doit au m oins être ad m ife, lorfqu’elle eft faite entre
coh éritiers, 6c ce qui doit plus étonner , c’eft que cette
erreur ait été adoptée par le Jugement.
Il eft vrai qu’A u tom n e, fur la loi 4 au cod. de hœred. vend.
a avancé cette p ro p o fitio n , 6c l’on ne peut qu’être furpris
que Pothier , dans fon traité du contrat de vente , page
360 , ait paru l’adopter , fans néanmoins difcuter la
queftion , oc en fe contentant de renvoyer à fon traité
des obligations , N ° . 3 5 , où il eft Amplement dit qu’en
partage la léfion du tiers au quart fuffit, à la différence
de la vente où il faut la léfion d’outre-m oitié.
M ais cette diftin&ion a été conftam ent rejetée en
Jurifprudence ; c’eft ce que dit Denizart /oco citato. Les
Arrêts qu’il cite ont tous jugé que la reftitution n’a pas
lieu dans le cas d’une vente de droits fuccefîïfs , même
entre cohéritiers ; c’eft encore ce que dit expreilément L e
Brun , dans fon traité des fucceiiïons, liv. 4 , chap. i e r,
n ° . 57;
M ais aucun Auteur n’a mieux établi ce point de d r o i t ,
c e ft - à - d ir e , que la refcifion pour léfion ne doit pas
plus avoir lieu en vente de droits fucceiiifs entre héritiers ,
que d’un héritier à un étranger, que l’illuftre DagueiTeau,
dans fon onziem e p laid o yer, tom e 2 , page 2.80. C e
M agiftrat réfute cette objeèlion avec force ; il dit qu’un
pareil a6te ne doit pas être confidéré com m e un partage,
a raifon de ce que c’eft le premier a 61e fait entre cohé
ritiers ; il en donne une raifon bien fimple , c ’eft qu’un
pareil aéte n’eft point fait dans Tefprit de divifer l'hérédité ,
que l’intention des contraéîans 11’a pas été de partager
ou de liciter les effets co m m u n s, mais de les vendre
6c de les acquérir. Il fe fonde fur l’opinion du célébré
D u m o u lin , qui le dit ainfi fur l’article 2.1 de l’ancienne
coutume de Paris.
*
Enfin , telle a toujours été la Jurifprudence du cidevant parlement de Paris ; la ci - devant fénéchaufîce
d’Auvergne avait adopté cette diftin&ion dans un temps j
C z
�( 2.0 )
mais fes jugement ¿raient infirmés au P arlem en t, oc il y a
environ 20 ans qu’elle s’était conform ée aux principes ,c ’eft>
à-dire , qu’elle n’admettait plus la refcifion en vente de
droits fucceflifs , dans aucun cas , m êm e quoique la
vente fût faite entre cohéritiers. T e lle a été la Jurifprudence
des ci-devant tribunaux de diftri6t du département du
P u y-d e-D ô m e ; telle eft encore celle du tribunal civil
de ce département.
M a is , dit le cit. R eynaud, la vente eft nulle, com m e
frauduleufe , par la raii'on qu’il n’a pas eu les inftruéHons
convenables avant de traiter fur la fucceiîion de fon pere,
& qu’il l’a fait fans connaiiTance de caufe.
M ais on ne connaît aucune l o i , aucun règlement qui
veuille que pour la validité d’une vente de droits fucceilifs
entre cohéritiers , il foit établi légalement que le vendeur
ait eu des renfeignemens fuffifans pour bien apprécier les
forces de la fucceiîion. L a raifon feule nous dit que celui
qui vend eil préfumé s’être procuré ces renfeignemens;
il ne faut pas de preuve authentique qu’ils lui ont été
donnés. C e ferait à lui à prouver qu’on a pratiqué à fon
égard le dol & la fraude , com m e par exemple s’il y
avait eu un inventaire dont on lui eût fouftrait la connaiiîance , fi on lui avait lai île ignorer un teftam en t, ii ,
en un m ot , il eût été indignement trompé par fon
cohéritier : mais il ne prouve rien de tout cela ; il n’en
faudrait pas davantage pour écarter cette objeition ; mais
elle devient bien encore d’un m oindre p oid s, lorfqu’on
vo it que le citoyen Reynaud a contracté en connaiiîànce
de cau fe, d’après les preuves qui en feront développées*
en difcutant la fécondé Partie.
L e citoyen Reynaud n’eit pas plus heureux , lorfqu’il
prétend que la vente en queition eit nulle , ou au moins
qu’elle n’eft pas un véritable fo rfa it, fur le fondem ent
qu’il fut ftipulé dans la ceiîion , que “ fi les légitimaires
»> parvenaient à faire prononcer la nullité du teitament
t, du pere com m un , par l’inobfervation de quelques
�>> loix locales ou autrement , la ceffion demeurerait
» nulle 6c réfoluè. « C ette claufe ne. change en aucunë
maniéré la nature de la vente ; elle n’eft pas moins un
forfait.
Pour en être convaincu , il faut rappeler qu’il y a
deux garanties en matiere de ceffion ; celle de droit 6c
celle de fait.
L a garantie de droit eft que celui qui cede eft réel
lem ent propriétaire de ce qu’il cede ; la garantie de fait
eft que le cédataire fera bien payé, de l’objet cédé.
L a premiere garantie a lieu de plein droit fans ftipulat io n , on ne peut même pas y renoncer. L a fécondé n’a
lieu qu’autant qu’elle e f t . ftipulée.
E n appliquant cette diftinétion à Fefpece, il, par exem ple,
le citoyen Reynaud , cédant , n’eut pas eu le titre
d ’héritier de fon p ère, il aurait fans doute été garant;
il a dû avoir le jus & nomen hœredis, qu’il a vendu ; mais
n’ayant rien garanti fur les forces de la fucceiïion , la
vente fubfifterait quand cette fucceiïion fe réduirait à
rien.
Ç)r > de même que celui qui vend toute une fucceflion
doit toujours garantir de d r o it , 6c fans ftipulation , fon
nom 6c droit d’héritier, parce qu’il répugnerait qu’il
eût vendu com m e r é e l, ce qui ne ferait qu’une chimere ;
de même auffi celui.qui n’en vend qu’une partie*, com m e
une m oitié , parce qu’il n’eft héritier que pour une
m oitié , eft garant de droit du délaiiïèment de la quotité
qu’il aliéné , à plus forte raifon aurait-011 pu ftipuler
qu’il ferait garant jufqu’à concurrence de cette quotité:
mais l’a&e eft toujours un fo rfa it, en ce qu’il eft indif
férent que cette m oitié ven d u e, même avec garantie ,
valût 100000 1., ou ne valût rien; dans un cas com m e
dans un a u tre, la vente doit fubfifter , il fuiïit pour
cela que celui qui vend ait le titre univerfel d héritier ,
s’il vend toute la fucceiïion , ou qu’il Fait pour la quotité
qu’il cede , s’il n’en vend qu’une quotité.
�Par la même raifon on a pu valablement itipuler que iî
le teiiam ent était nul , d’où il ferait réfulté que le cédant
n’aurait amendé qu’un q u a rt, au lieu de la m oitié qu’il
v e n d a it, la ceiîion ferait nulle. Il n’y a pas de différence
entre cette ftipulation & celle de la garantie. La vente
eft toujours un fo rfa it, quant à fon réfultat. L a claufe de
la nullité , dans un cas, ayant été prévue , a fait dépendre
la fiabilité de la vente d’un évén em en t, elle l'a rendue ,
il l’on veut , conditionnelle ; mais cet événement
n’étant point arrivé , la vente devant être exécu tée,
elle conferve fon cara&ère de forfait. C ’eil un forfait, p u if
qu’il n’im porte p as, pour fon exécution , que l’objet vendu
foit beaucoup , ou qu’il ne foit rien.
L e citoyen Reynaud n’eft pas mieux fondé à prétendre
que la vente eft nulle en ce qu’il y a incertitude dans le
prix , parce qu’elle a été faite pour 203000 liv. dont il y
avait 103000 liv. ou environ , à prendre dans le com m erce
des freres M arduel.
En premier lieu , le m ot environ n’emporte qu’une lati
tude d’un vingtième en plus ou en m oins; cela a toujours
été ainfi obfervé , &c le projet du nouveau code civil en a
une difpofition. Ainfi fi cette délégation eût produit un
vingtièm e de plus , le citoyen Reynaud cadet l’aurait gardé
fans répétition de la part de fon frere ; & s'il y avait eu
un vingtième de moins de 103000 liv ., il aurait été obligé
de s’en contenter , fans avoir aucune a£Hon contre fon
frere : il n’y avait donc pas d’incertitude abfolue fur le
prix. L a valeur du m ot environ avait une déterm ination
connue & fixe.
En fécond lieu , ce qui fait cefîer toute difficulté , cVil
la claufe précédente, où il eft dit que “ les (ommts ci-après
» convenues ne pourront être diminuées par aucun événement. »
Voilà donc une ailurance de cette fomme. Il n’était pas
poflible qu’il y eût un prix plus certain ; aufîi, dans le
f a i t , le citoyen Reynaud cadet a-t-il touché pour la dé
légation fur le com merce Marduel la fom m e de 1180001,
�¿y &
au lieu de celle de ‘103000 li v ., & le furpins du prix* de la
vente lui eftdû , en conséquence de la prorogation de dé
lai à laquelle il a confenti.
^
t
Le citoyen Reynaud cadet a tenté de faire< regarder
com m e inégal le marché dont il s’agit, à raifon d’une fo*
ciété qu’il avait contra£iée avec fon frere & les citoyens
Couchoud , Crozet ôc autres , & de laquelle il s’eft défifté
au profit de fon frere, par un aile du 21 Février 1786.
M ais c’eft vouloir embarraiïèr la conteftation d’un
incident qui lui eft abfolument étranger. L e traité relatif à
cette fociété n’a rien de com m un avec: le traité du; 2.3
.Novembre 1785 , relatif à la'fucceffion paternelle'.
M ais dans le fonds le traité relatif a la fociété n’a eu
d’autre but que de conferver à la raifon de fociété le n om
de Camille Reynaud , ainfi que cela y eft dit. L e com m erce
du pere avait été connui£c avait profpéré fous ce n om , qui
était en effet celui du pere ; ’il était intéreiîànt .de le con
tinuer. O n crut: ne pouvoir le faire qu’en prenant fiétiv.e-r
m ent pour ailocié le citoyen Reynaud ca d e t, -attëndii.que
C am ille était un de fes prénom s, _&ç que le citii Reynaud
aîné ne le portait point; .
.
ï , :<r.
D ’ailleurs par l’aftetlu xnFéyrier 17.85. r 'rnêr^ejour de
la fociété, le citoyen Reynaud ainé s’obligea; de,garantir
fon frere de toutes les! ¡obligations jréfultantes de; l’ade
jfocial. Il eft donc impoftihle , fous! tous'les rapp.octs , de
tirer la. moindre indu&ion’ de'la fociétér.cUt zc'F é^ rier
1786. Il en réfulte feulement que.lecitoyeji Reynaud cadet
a prêté fon n om , 6c il n"a;.co.uru aucun.rifqtieairp ‘-T'î?’ '‘H'
SEC
O N D E, P si 'R, r . l ' E . ' ,
,'!
O n a 'd é jà établi que la vente du 23: N ovem bre 1785
ferait valable , en la dépouillant de tou tes'circon ftânces,
que cétait au citoyen Reynaud cadet -à prouver qu’il
eut été ciroonveiiiu ; mais cette vente devient tou t a-lafois favorable & • fondée en d r o i t , : dès <}uè la veuve
Reynaud prouve • que^fon •beau ¿¿'frère avait eus avant de
.a J
<c
fil
�V '* ^ X
, "
r(> ' 4*5
.
,
.
..
de traiter , toutes les inflru&ions néceiîàires pourcontra& er
en connaiiTance de caufe ; cela réfulte en effet d’une foule
de circonftances.
i°. Le citoyen Reynaud cad et, quoiqu’abfent depuis
quelques années de la maifon de Ton p ere, ne connaiiîàit pas
m oins l’étendue & la propriété de fon com m erce , étant
à L y o n em ployé lui-même dans le co m m erce, & étant
journellem ent à la fuite des relations commerciales de
fon pere.
2°. Il apprit fa m ort avant le citoyen Reynaud aîne.
L e père m ourut à D ijon , le 28 Juillet 1785, & la nouvelle
en fut fue à L y o n avant de parvenir à Saint-Cham ond ,
où habitait l’aîné.
3°. Les fcellés furent appofés fur les meubles & effets
du pere , auilitôt qu’on apprit fon décès ; il ne put y
a v o ir eu aucunes fouftraéUons de commifes ; il n’y en
eut point dans le f a i t , & le citoyen Reynaud cadet
fie s’efi. même pas permis d’en articuler.
*. 4°.• S’il n’y eût point d’inventaire , ce 'fur-par unfe
raiion-.bieiv fimple ; c’eft que- le citoyen Reynaud cadet
étant à S a i n t - C h a m o n d , les fcellés furent levés; en 1a
préfence v &cfoit<-lui, la it .ion :frere* qui-avaient un droit
■égal à; la fucceÜion , prirent conjointem ent ¿ormaiilànce
de. tout ce qui là compofaik il fàltait qu’ils fe procu;raiîenc cette cônnaiffance pour pouvoir tr a ite r, com m e
ils'firent:, avec^ leu rs. faeurs'r& . bt.'aux1- frères , fuivant
l ’a&e du 6 A o û t 1.785':. i l - y a plus, c’eil que cet aèle
prouve que. le cit. Reynaud cadet h’eii pas de bonne f o i ,
lorfqu’il prétend qu’jl n’y eut..pas, d’inventaire, ôc qu’il
n ’a rien connu.“ O h "'lit darts cét à&è 'que les deux freres
•Reynaud, o il raient tlè com m uniquer' â Meurs' fœurs i^tnt
de l'actif & 'dit Pa[fîf de ht (uccxjjiuji. dj) pçrç commun 7 tous
[les liyres ^titr'S^ 'papiers 6f docuqiensd .dejatjfés p a r l e u r pere
;;
;
.qu’ilsjontien jefie t eumn;i inique tout ceUv, :ÔÇ;il eiè encore
a jo u té j ■
“ les, üyrçs taiit du com m erce cle leur pere, que
» d&Jes atiai^es-;PârU cul ier & doujjeitiques, ainfi que les
» diverfes
�'
¿ t l
. ( V, )
.
diverfes notes par lui tenues, les titres conilitutiis en
fa faveur de diverfes créances , enfemble les titres de
propriété de fes immeubles , & les deniers comptans. »
eit encore dit que fur le tout : “ les freres Reynaud
ont fait un état de l’a ftif & du pailïf de ladite fuc» ceiîion , lequel état a été vu & examiné , ainii que
» les pieces juilificatives , par leurfdites fœurs 6c leurs
» maris. >»
Il eil impoilible de mieux prouver qu’il y a eu un inven
taire : qu’im porte qu’il ait été fait pardevant N otaire ou
dans le fein d’une famille ?
C ette piece s’élevera toujours avec la plus grande force
contre toutes les objeilions vagues 6c deilituées de preu
ves, imaginées pour faire anéantir un a&e qui a été fait
avec bonne f o i , 6c qui eil devenu un arrangement précieux
dans une famille.
C e 11’efl pas un m oyen de prétendre qu’en fe réglant par
la proportion qu’il devrait y avoir entre ce qui a été payé
aux filles pour leurs légitim es, 6c ce qui eil revenu au cit.
Reynaud cadet , il aurait dû avoir'u n e bien plus forte
fom m e , 6c que par conféquent il a été léfé.
En premier lieu , il eil très—poiîible que les deux héri
tiers univerfels, déjà traités auili avantageufement par le
pere , aient voulu ne pas ufer de rigueur envers leurs
l’œ urs , 6c qu’ils aient entendu les gratifier pour maintenir
l’union.
En fécond lieu , on ne peut connaître au juile le prix de
la ceihon faite par le citoyen Reynaud cadet. O utre qu’il
avait auparavant reçu la fom m e de 40000 1. pour la m oitié
du prix del à vente dé la charge de ci-devant fecrétaire du
R oi , fuivant la vente conientie par lui 6c par fon frere
conjointem ent , le 7 A o û t 1785 , c’eil qu’il peut avoir
partagé avec fon frere de l’argent 6c des clfets de com
merce , 6c notam m ent les deniers comptant énoncés dans
l’aéle patte avec les fœurs, fans qu’il en ait été fait m ention
dans l’aile du 13 N ovem bre 1785, qui garde auili-le
D
*
.
»
»
»
Il
�( i6 )
filence fur la fom m e' de 40000 liv. provenante de la
vente de l’oiFice de Secrétaire du ci-devant Roi.
E n troifiem e lieu , il faut toujours com pter rengage
m en t contra&é par le cit. Reynaud atné , d’indemnifer
fon frère de toutes les dettes de la fucceiïion , connues
ou inconnues : c’eit cette incertitude q u i , fuivant les lo ix i
légitim e la ceffion. , quelque modique que le prix puiilè
en être en apparence.
5°. U ne foule d’aétes pailes par les deux freres Rey
naud , depuis la m ort du pere , prouvent que depuis cetté
époque, ils ont furveillé & géré la fu cceffio n , & qu’ils
ont eu une connaiiiànce égale de fes forces ; c’eit ce
qui réfulte notam m ent de l’aète du n N ovem bre 1785
qu’ils ont paiîe avec la fécondé femm e de leur p e re , &
de celui du même jour , paiîé avec les cit. C o u ch o u d ,
& enfin de la vente de l’office de Secrétaire du R o i ,
dont on a déjà parlé.
I
T R O I S I E M E
P A R T I E .
Si après des moyens auffi tranchans , on avait befoin
d’invoquer des fins de non - recevoir , il n’en manque
certainement pas.
i° . L e citoyen Reynaud cadet a provoqué la diAb
lution de la Société qui avait lieu avec les freres
M arduel ; cela eit prouvé par une fentence de la confervation de L yo n , du 27 Avril 1787, & l’on ne peut
qu’être étonné qu’il foit dit dans le Jugement que cette
diflblution s’eit faite fur la réquiiition des freres M arduel.
II réfulte de là que les choies ne font plus entieres , ôc
par le fait du citoyen Reynaud cadec ; il ne peut ie préfenter de fin de non - recevoir plus décifive : tout eft
confom m é fans retour ; pour qu’il re v în t, fi d’ailleurs
il y était fondé , il faudrait qu’il pût remettre les chofes
au premier état.
�z°. Il a con fen ti, le z6 Septembre 1791 , une proro
gation du délai dans lequel les 100000 liv. reliant du
prix devaient être payées : voilà une approbation de la'
vente donnée fix ans après. L e citoyen Reynaud cadet-’
n e s ’efl donc pas reconnu lé fé , & il y^ a ed un allez long
temps pour qu’il eût pu le découvrir.
3°. E t ce qui form e une fin de non-recevoir infur—
m ontable contre la réclam ation déjà odieufe du cit.
Reynaud c a d e t, c’eft la quittance qu’il a donnée le 2.7
O ètobre 1795 , ( vieux flyle ) de la fom m e de 10000 liv.
pour les intérêts de la fom m e de io o c o o liv. qui lui
étaient dus fur le prix de la ceiîion.
Il faut remarquer qu’avant cette quittance, qui répond
au 5 Brum aire, an 4 , & dès le 3 T h erm id or précédent,
le citoyen Reynaud cadet avait form é fa demande en
refcifion contre fa c e iîio n , pardevant un tribunal de
famille.
E n recevant , en cet é ta t, les intérêts du refiant du
prix de la ceiîion , il en réfulte le déiiftement de la
demande qu’il avait déjà form ée , ce qui eit bien plus
fort qu’une iimple réception du p r ix , fans qu’il y eût
une demande. L a réception du prix eft contradièloire
avec la demande ; il n’a pu recevoir fans anéantir luimême cette demande.
O n foutient que la réception emporterait l’abandon
de la demande , quand même le citoyen Reynaud cadet
aurait proteflé de fuivre fa demande ; il eit en effet de
principe que la proteilation contraire à l’aéle , ne faurait
le détruire , la proteiîation s’évan ou it, & l’aéle refle ,
ainfi que nous l’enfeigne M o r n a c , fur la loi 16 ff. ad
Jènatus Maced.
M ais ici il y a bien plus : le c ito y e n Reynaud cadet,
dans cette quittance, n’a pas fongé à protefler de fuivre
fa d em an d e, ou de s’en réferver l’ef t e t , il a fait le
contraire , car il a dit ,•fans préjudice du capital & des intérêts
cou-ans. Il le réferve donc l’exécution d u n a ¿le dont il
D ^
�•
( 1? )
avait déjà demandé la refciiion , fans fe réferver cette
demande. P eu t-on voir tout à-la-fois une approbation
plus précife de l’aéte , & un abandon plus form el de la
demande ?
Il a imaginé enfuite de reprendre la demande au
tribu n al, après .l’abolition des arbitrages , par un exploit
du i z Prairial , an 4 ; mais il n’a pu le fa ire ,
il y
eil n on -recevab!e.
i° . Parce qu’il n’a pu reprendre une demande dont
il s était défiilé , & q u i , des-lors , n’exiflait plus.
z ° . Parce que lors de la nouvelle demande portée au
trib u n al, il s’était écoulé plus de dix ans à com pter de
la ceflîon du 23 N ovem bre 1785 , &: qu’on ne peut
attaquer un aéle fur le fondement de la léfion 011 du
dol , après dix ans.
^
jy
Enfin , com m ent revenir aujourd’hui a un partage de
la fuccefïïon dont il s’agit? L e frere aîné qui a du com pter
fur la fiabilité de l’engagement de fon frere , n’a certai
nement pas confervé les notes & états exiftans après la
levée des fcellés , &: dont il eft parlé dans le traité paiïe
avec les freurs. C om m ent conilater aujourd’hui les forces
d’une fucceiïion qui confiilait principalement en effets de
com m erce ? Plufieurs dettes aaives ont été payées à l’ainé
en aifignats. C om m ent les déterminer aujourd’hui ? C ar
on ne prétendra pas fans doute qu’elles duiïènt être rap
portées en écus. Les chofes ne iont donc plus entieres fous
aucun rapport.
A infi les principes du droit au fond , les circonflances
& les fins de non-recevoir s’élevent tout à-la-fois pour
faire profcrire une demande qui n’eil enfantée que par un
cfprit de cupidité. L e jugement doit être in firm é, &t en
flamant fur le fond , le citoyen Reynaud cadet doit être
déclaré non*recevable dans la demande , avec dépens.
Délibéré à R iom , le 2.4 Brum aire, l’an 5 de la Répu
blique Françaife une & intlivifible.
A N D R A U D.
, . v
�( 2-9 )
E
n
o
n
M
« n
M
i i » a M
i
L e C o n s e i l
s o u s s i g n é , qui a vu les Confultations ci-d eilu s, eft entièrement du même avis & par les
mêmes raifons. Il y a long temps que la Jurifprudence eft
fixée à rejeter la reftitution pour léfion en vente de droits
fucceffifs , fans diftinguer fi la ceffion eft faite à un étran
ger ou à un cohéritier. C ette diftincfrion propofée par
Brodeau & Argou a été rejetée. Ils ne la fondaient cette
diftinétion que fur ce que l’on dit com m uném ent que le
premier a£te entre cohéritiers eft réputé partage ; mais
long temps avant eux , le favant Dum oulin avait établi
que jamais une vente de droits fucceffifs n’a pu être réputée
partage. S i quis habens in re communi portionem pro indivifo , &
non incipiet a divifione , Jed incipïet à donatione , venditione 3 vel
permutatione portionis Juœ , feu uni vel pluribus ex Jociis cedat ,
quia tune cum non intendunt dividere , non e/l divifio nec refpeclu
materiez , nec refpeclu formez 3 nec refpeclu intentioms} Jed alias
contraclus & alia fpecies tranflationis rei. C ’eft fur le fi. 71 ,
n°. 101 de la Coutum e de P a ris, que fe trouve cette doc
trine de Dumoulin. Enfin les motifs du jugement du tri
bunal de la L oire font difeutés &: détruits de fond en
com ble par les Confultations.
Délibéré à Riom , le 25 Brumaire an 5.
G A S C H O N.
Je fuis du même Avis p arles motifs développés dans
les Confultations ci-deilus.
C lerm on d -F erran d , le 27 Brumaire an 5.
S ig n é % D A R T I S
M A R C IL L A T ,
M A U G U E .
�V u le Jugement rendu au tribunal civil du département
de la L o ir e , du 25 T h erm id o r dernier , entre M arieM agdeleine G régoire , veuve R eyn au d , tutrice de fes
enfans , d’une part ;
L e S. A rdiiTon, fubrogé tuteur aux mêmes enfans ,
d’autre part ;
E t Cam ille - Claude - A ntoine Reynaud le jeune ,
d’autre part :
V u auffi les pieces & titres fur lefquels ledit Jugement
eiï intervenu , le Souffigné eil d’avis
Q ue le tribunal de M ontbrifon ne pouvait plus ouver
tem ent bleilèr les principes les plus familiers , tom ber
dans une contradi&ion plus frappante avec l u i - m ê m e ,
ni donner à fa décifion des m otifs plus erronés-, ô c
des faits plus évidem m ent faux.
L ’établiilèment de Panalyfe que l’on vient de fa ire , eft
fa cile , au p o i n t , que fans le concours d’aucunes réflexions
ni cita tio n s, il réfulterait du feul narré des faits.
L e 28 Juillet 1785 , décéda à Dijon Cam ille Reynaud
pere : par fon teftament du 1 5 du même m o i s , il avait
inftitué Jean - Lmiis & Cam ille - Claude - Antoine , fes
deux fils , pour fes héritiers, donnant néanmoins à l’aîné
fa maifon d’habitation & le m obilier qui la garn iilàit, en
préciput : il avait en même temps légué 57000 liv. à
chacune de fes deux filles , outre ce que déjà elles avaient
reçu.
Dans l’intervalle du 28 Juillet au 4 A oû t 1785, les
fcellés avaient été appofés dans le dom icile de Reynaud
rçere : & ce fut ce même jour 4 A o û t , que les deux
fils cohéritiers en demandèrent 6c obtinrent la main-levée.
�( 3} )
L e fin-lendemain 6 , ils réglerent la légitim e de leurs
deux fœurs : ils s’obligerent pour 800001 . pour chacune.
L e 7 , ils vendirent toujours conjointem ent l’office de
Secrétaire du R oi dont leur pere était titulaire : ils
r e ç u r e n t com ptant 80000 liv . , prix de la vente.
L e 2.9 N ovem bre fu ivan t, ils tranfigerent avec le cit.
Couchoud , ailocié de leur père , foit pour raifon des
forges de Guegnon , foit pour raifon des autres parties
de com m erce qui étaient en fociété.
L e même jour i z N ovem bre , ils traitèrent encore
avec la fécondé femme de leur p e re , fur les gains de
furvie qu’elle pouvait prétendre.
Enfin le 13 N ovem bre , quatre mois <Sc quelques jours
après la m ort du p e re , ces deux héritiers traitèrent enfemble.
Les termes de cet a£te font remarquables. C e n’eil pas
un partage qu’ils font dans l’intention de faire, ce n’eft
pas auiîi un partage qu’ils font : rien dans l’aéle ne le d i t ,
rien même ne l’annonce : tout au contraire , tout in dique,
tout prouve que c’eil une vente qu’ils ont intention d’e f
feâu er , & tout auiîi dém ontre que c eft une vente qu’ils
ont confom m ée.
O11 voit d’un côté que le cadet vend ,
que l’aîné
achete.
z°. Que la chofe vendue confifte dans la portion de cohérédité qu’avait le cadet.
30. E t enfin que le prix de la vente eft irrévocablement
fixé à une fom m e de deux cents trois mille livres ; l’a v o ir,
100000 1. payables dans iix ans,avec intérêts , & 103000 1.
qui étaient en com m andite dans le tom m erce des freres
M arduel de L yon.
Ainfi quant à p réfen t, tandis que d’un c ô t é rien n’an
nonce ni un partage , ni même le deiîèin de partager ;
de l’autre au contraire , tout c a r a ilé r ife la ferme ré fo lu tion de vendre ô t d’acheter, tout en un m ot conftate la
vente réelle.
�Il y a plus , & ce qm ne laiiîe aucun d o u te , c’eil que
les Parties ont expreilément & littéralement expliqué
qu’elles traitaient à forfait.
D e cette ftipulation réfiilte la conféquence invincible ,
que quand même les claufes de l’a&e ne renfermeraient
pas les fignes caraftériftiques, eiïentiels & fubitantiels
du véritable traité à fo rfa it, il e i t , difons-nous , de
conféquence infaillible , que la feule volonté des parties ,
ainii exprimée fur ce p o i n t , fuppléerait à tous ces fignes
cara&ériiliques , &c que l’a£te ne vaudrait pas moins
com m e traité à forfait.
M ais en réfléchiiîant à toutes les claufes & conditions
de l’ade , on y trouve, & la volonté exprimée , ô i toutes
les formes qui caratlérifent le traité à forfait.
i° . L a volonté eil con ftatée, com m e nous l’avons
dit , par ces mots : Le préfènt traité efl fa it à fo r fa it , comme
s agiffant de droits fuccejfîfs.
\ Q. Les formes & conditions requifes fe rencontrent en
ce que d’un cuté, Reynaud cadet a vendu pour une fom m e
fixe & déterminée , indépendante & affranchie de toutes
dettes & charges , quels qu’euilent été les évènemens ;
ô c enfuite , en ce que les dettes &: charges paiîives. de
la fucceilion refteront toutes pour le com pte de fon
frère aî né, & enfin en ce qu’il y a eu vraiment incer
titude pour l’aine , les dettes pouvant 11e fe découvrir
que dans d i x , vingt ans & plus , pendant que le cadet
n’avait abfolument aucun rifque à courir.
T e l eit le traité fur la validité duquel le tribunal du
département de la L oire vient tout récemment de pro
noncer.
Que le cédant ait ofé demander à être reflitué pour
caufe de lé iio n , les jurilconfultes, les (impies praticiens
même en riront ; mais qu’un tribunal , tel que celui
de M ontbrifon , recommandable par les lumieres de la
pluralité de les membres , ait confacré cette prétention ,
c’eit ce que l’on ne concevra qu’en difant qu’ils fe
�font laiiïe prévenir par les déclamations menfongeres &
hardies de C am ille-C laude-A ntoine Reynaud , contre
lefquelles , fans doute , ils n’auront pas été fuffifamment
en garde.
. Q uoi qu’il en fo it , confulté fur le mérite de ce juge
m ent , le Souifigné eftime qu’il y a lieu à infirmation.
i°. A caufe des fins de non - re c e v o ir, qui s’élevent
contre Reynaud cadet.
aQ. Parce qu’au fo n d , des a£tes de la nature de celui
dont il s’agit font inattaquables pour caufe de léfion.
39. E t enfin, parce que le tribunal a admis pour certain
des faits évidem m ent démontrés fa u x , & que c’eft de ces
faits qu’il a tiré les principaux motifs de la dccifion.
Entrons en matiere.
L e fins de non-recevoir dont nous avons parlé, font
de pluiieurs fortes ; mais nous pouvons dire qu’une feule
devait fuffire pour faire rejeter l’attion de Camille-ClaudeA ntoine Reynaud.
La premiere réfulte d’un a6te poftérieur à celui du
N ovem bre 1785.
O n fe rappelle que par la vente , le prix promis à
Reynaud ca d e t, confiftait d’abord dans les cent trois
m ille livres qui étaient en com m andite chez les freres
M arduel , &c enfuite dans autre cent mille livres qui
furent itipulées payables dans fix ans , avec intérêts.
C e font ces cent mille livres qui ont donné lieu à
l’acte fécond qui fe trouve à la date du 16 Septembre
1791,
A cette époque les papiers-ailignats étaient en circulation :
Reynaud cadet répugnait à recevoir en cette monnaie , il
propofa à fon frere de reculer fon paiem ent, dans Fefpérance que dans l’intervalle le numéraire reprendrait
cours. En conféquence , le 16 Septembre 1791 , par fous
feing—privé fait double , il fut convenu que le payement
des cent mille livres était prolongé à fix années , avec intérêt à
E
�Tordinaire , fans que Reynaud aîné put Vanticiper, ni Reynaud
cadet l’exiger. Avant l’époque du a.8 Juillet 1 79 7 *
C e t a£le que nous rapportons eft , fans contredit,
une fuite de l’aéle premier ; il eft plus , il en eft une
confirm ation, une ratification, tellement que le m o tif de
ceifecond a£te eft l’exécution du premier quant au fond
des claufes , puifqu’iln ’y eft fait aucune dérogation , aucun
changement qu’en ce qui concerne l’époque du payement :
& encore vo it-o n bien clairem ent, que fi le terme du
payement eft re cu lé , c’eft pour le plus grand avantage
du cédant.
M aintenant qui pourra fe perfuader que Reynaud
c a d e t, fix ans après le traité du 23 N ovem bre 1785, (1
ce traité l’eût réellement léfé com m e il le dit aujourd’hui ,
eût foufcrit un a&e nouveau confirm atif du premier ?
P e rfo n n e , fans d o u te , ne pourra l’imaginer : & fans
c o n tre d it, dans l’intervalle de fix années , il avait bien
eu le temps de fe convaincre fi ou non il avait été lé fé ,
& par une conféquence n éceflàire, au lieu de donner
une nouvelle fo rce , une nouvelle approbation au traité,
il fe ferait pourvu dès-lors : mais , toujours eft-il que le
fous-feing-privé du 16 Septembre 1791 , eft approbatif
de celui du 23 Novem bre 1785 , puifqu’il en ailiire
l’exécution; & ainfi 1111 a£te approuvé, ratifié, n’eft plus
fufceptible d’être attaqué.
Cette fin de non-recevoir devient plus forte e n c o re ,
fi l’on confidere que le cédant ni dans fa demande
devant le tribunal de fam ille, ni dans celle en reprife
au tribunal de M ontbrifon , n’a demandé à être reititué
contre le fécondé aéïe.
Une fécondé fin de non-recevoir fe préfente : le but
de la reftitution pour caufe de lc iio n , eft de remettre
les parties au même état quelles étaient avant l’atle ;
d e - l à naît que fi les choies ne font pas entieres , la
reftitution eft inutile &c inadmiÜible.
O r , dans l’efpece des freres Reynaud, il y avait lors
�X V
S 3* )
du traité cent trois mille livres en com m andite chefc
les frères Marduel.
C ette fociété ne fubfifte plus, Reynaud cadet l’a diiToute :
com m ent à préfent rendrait-il com pte du produit de cette
fociété ? C om m en t le juftifierait-il, ? com m en t, enfin,
p o u rra it-o n l’apurer? Il réfulterait donc en faveur de
Reynaud c a d e t, qu’il aurait profité du bénéfice pendant
toute la durée de la fo c ié té , 6c il ne remettrait les ciiofes
qu’il a perçues que dans le temps où elles auraient celle
de lui profiter autant. O n fent que cela répugne à. tous
les principes d’équité.
Enfin une troifiem e fin de non - re c e v o ir, mais plus
forte , mais irréfiftible, vient encore confolider notre
opinion.
C am ille-C laude-A n toin e Reynaud s’était pourvu en
reftitution au tribunal de fa m ille , dès le 3 T h erm id o r
de l’an 3e.
Eh bi en, le X7 O ctobre 1795, c’efl: - à - dire , trois
m ois après fa demande , ce même C am ille-C laudeA ntoine Reynaud reçut &c paila quittance d’une fom m e
de dix mille livres pour les intérêts de deux ans des
cent mille livres qui lui reftent dues en principal.
C e qu’il y a de remarquable dans cette quittance
c’efl qu’il ne fait aucune réferve de pourfuivre fa dem ande;
au co n traire, il fe réferve expreilément les cent mille
livres de capital qui lui fon dues , & les intérêts courans
ceux à échoir.
Peut-on plus form ellem ent approuver un aéte , qu’en en
exécutant les claufes, qu’en recevant une partie du prix
qui y efl p o r té , & en fe réfervant le capital reftant &
les intérêts courans ?
Exécuter un traité après avoir demandé à en être
re le v é , c’efl: fans contredit re n o n c e r à cette demande ,
c’efl: approuver le traité , c’efl le c o n fo m m e r, c’efl:,
en un m o t , anéantir l’aftion qu’on avait intentée.
Voilà précifément tout ce qu’a fait Cam ille-ClaudeE x
�Antoine R eyn au d , dans la quittance qui l a paÎTée le
27 Octobre 1795 , poftérieurement à fa demande.
En fuivant ce raifonnem ent, il réfulte que la demande
du 3 T herm idor , an 3e , a été éteinte 6c anéantie des
le 27 O élobre 1795 : il réfulte enfin que cette demande
une fois é te in te , Cam ille-Claude-Antoine Reynaud n’a
pu la faire revivre par fa demande en reprife, parce
qu’on ne peut reprendre les pourfuites d’un a£te ou cl’une
procédure qui ne fubfiile plus : m o tif plus que fuffifant
pour Je faire déclarer non - recevable dans fa demande
en reprife.
M ais le tribunal de M ontbrifon aurait-il regardé la
demande en reprife com m e demande principale , il
n’aurait pas moins groiîierement erré. En enet la demande
en reprife ne date que du 12 Prairial, an 4 , 6 c à la
form e de la loi du 9 Fruétidor , an 3 , l’a£lion en reftitution pour caufe de léfion était in te rd ite , 6 c d’autre
part quand ces fortes d’a£tions n’auraient pas été étein tes,
Cam ille-Claude-Antoine Reynaud était non - recevable ,
parce que le délai que l’ancienne loi acco rd ait, ne fe
prolongeait pas au cle-là de dix ans , 6 c que depuis le
23 N ovem bre 1785 jufqu’au 12 Prairial, an 4 , il s’était
écoulé dix ans 6c quelques mois , délai plus que fuffifant
pour acquérir la prefeription.
N ous avons dit qu’au fond , les a6les de cette nature
font inattaquables pour caufe de léfion , quelle qu’elle
foit. Il ne nous fera pas difficile de l’établir.
D ’abord nous avons démontré que l’aè'te du 23 N o
vem bre 1785» ne préfente ni l’intention d’un partage,
ni. la rédatlion d’un contrat en cette forme. Nous avons
dém ontré , au contraire , que les parties n’ont apporté
à cet a£le que l’intention d’une véritable vente de droits
fucceiîifs, d’un contrat aléatoire , d’un véritable traité à
forfait : cela p o fé , 6c co n fia n t, reile le point de droit
à examiner.
O r en droit il efl certain que la lé fio n , quelle qu’elle
�JW
( 37)
fo it, eft impuiiîànte contre un tel a£te. Parm i les auto
rités nombreufes que nous pourrions citer à ce fu je t,
nous nous contenterons d’invoquer Farrêtifte D e n iz a rt,
au m ot droits fuccelfifs , n°. 4 & fuivans ; Le B ru n , dans
fon traité des fucceiîions , livre 4 , ch. i cr. , n°. 57 ;
Dum oulin , fur Fart. 21 de l’ancienne Coutum e de Paris ;
Pothier , dans fon traité des obligations , n°. 13.
T o u s ces Auteurs décident uniformém ent la queflion.
L a Jurifprudence ancienne & m oderne n’eft pas moins
favorable à l’opinion que nous manifeftons. Denizart
rapporte diftérens A rrêts, on en trouve grand nom bre
aufli dans Bardel & dans le journal des audiences.
Parm i les anciens , les plus remarquables font ceux
du g M ai i 6 z z , 10 M ai 1633 , & 29 Décem bre 1691.
Les motifs de tous ces Arrêts ont été le péril &
l'incertitude qui réfultent toujours de ces fortes de traités
contre l’acquéreur q u i , malgré tous les évènem ens, eft
tenu d’une fom rae fixe &c invariable envers fon céd a n t,
pendant que lui - même , durant près de trente ans , il
peut être inquiété , recherché, ruiné ; il fuffit d’un feul
engagement de la part du d éfu n t, & ce font toutes ces
circonftances, toutes ces chances que court l’acquéreur, quiont fait affimiler ces efpeces de ventes au coup de f i le t ,
qui ont fait affranchir l’acquéreur de l’a£Hon en refcifion
P°.u^ téfio n , parce qu’il eft jufte , com m e le dit la l o i , que
U' / Ur lequel feul toute la perte retom berait, prenne le
benence s’il s’en rencontre , ut quemadmodum crnolumentum
negociationis , ita periculum ad emptoren perùntt.
' /r°1CIJ* v^r‘table égalité que les juges de M ontbrifon
eufient du prendre pour mo t i f , & non pas celle qu’ils
ont mis en avant dans l’un de leurs confidérans.
^Car^ à fuppofer que C am ille-C laude-A ntoine Reynaud
eut été léfé , c’efl-à-dire , qu’il n’eut pas reçu autant qu’il
lui ferait revenu par l’effet d’un partage r é e l , il fallait
compenfer cette p e rte , avec la charge qu’il avait impofée
à Faîne de payer toutes les dettes de la fucceffion , il
�W>
,
.
( 38 )
fallait la com penfer, en un m o t , avec la crainte où font
encore les héritiers d’être a&ionnés & ruinés par des
créanciers qui , fur-tout dans les années dernieres, ont
eu intérêt de ne pas fe faire co n n aître, pour ne pas
recevoir 1111 papier dont le diferédit accroiiFait tous les
jours.
Envain en caufe d’ap p el, Cam ille - Claude - Antoine
Reynaud répéterait-il ce qu’il a dit & fait adopter par les
premiers ju ges, que l’aéle pailë entre fon frere & lui
n’eft qu’un premier a£le de partage. L e juges du dernier
reflort feront ailèz avertis par l’erreur de ceux qui ont
prononcé avant eux.
O u i l’égalité doit régner là où il eft queftion de
partage ; & dans ce cas nous nous honorons de confefîèr
que la léfion eit admife.
M ais a - 1 - il été queftion de partage entre les deux
freres Reynaud ? Jamais , non jamais. C et aéïe feul peut
& d oit s’appeler partage , par lequel chacun des cohéri
tiers prend fa part dans l’a f t if , & fupporte fa portion
du pafîif.
O r dans l’a&e de 1785 rien de cel a: les parties n'ont
jamais eu l’intention du partage ; Reynaud cadet n’a que
voulu v e n d re , & cela eft tellement vrai , que c’eft une
vente à forfait qu’il a déclaré qu’il faifait. E t ç’a été
d ’autant m oins un partage, que toutes les dettes font
reftées pour le com pte de Reynaud aîné , fans que pour
aucun cas la fom m e promife au cadet pût être diminuée.
M ais pour détruire plus fortem ent encore les motifs
des premiers ju ges, nous demanderons fi la convention
du 1 6 Septembre 1791 , approbative de l’a&e de 1785,
convention qu’on a mife fous leurs yeux , était aufîi un
premier a£te entre cohéritiers ? Nous demanderons enfin ,
li la quittance du i j Oéjtobre 1795 , qui a approuvé
encore la vente ,
anéanti la demande , était de même
un premier aèle ?
'W
�.
. .
N . ... ; ( 3 9 I
........... . . ...
C e'iyftêm e ferait révoltant. T o u s ces différens à&es
font analogues les uns aux au tres, approbatifs ; corrobo
rates. Il en exiftait trois : les premiers juges ont donc eu
to rt d’énoncer qu’il ne s’agiilàit que d’un premier a£te de
partage.
. • *.
\
N ous ne faurions mieux te rm in e ra cet é g a rd , qu’en
rapportant les .expreiîîons textuelles de Dagueiîeau, lors
de l’arrêt de 1690. “ O n a fou ten u , d it- il, que le traité
» devait être confédéré com m e partage, parce que c’eil
» un premier afte entre cohéritiers. Pour détruire cet ar» gument , il fuffit de confidérer qu’afin qu’un aéte foit
» préfumé partage , il y a deux conditions qui font abfolu» m ent eiîentielles : l’une que ceux qui le paiîènt foient co»> héritiers , ou aient des droits com muns ; & l’autre que
» cet a&e foit fait dans l’efprit de divifer l’hérédité , que
» l’intention des contra&ans ait été de partager ou liciter
» les effets com muns , ôc non pas de les vendre 6c de le$
»v acquérir/ » '
................
,: :
_Sans aller plus loin , nous dirons que l’une des condi
tions requifés fe rencontre dans Pefpèce, favoir la com
munauté de l’hérédité ; mais l’autre ne fe rencontre aucu
nement , c’eft-à-dire que l’afte n’a pas été fait dans l’efr
prit- de la divifer , mais feulement dans l’intention de
Heynaud cadet de vendre
de Reynaud ainé d'arfieter.
E n appliquant ce principe à l’efpèce: lo r s ‘de la vente , il
pouvait y avoir des d ettes, il s’en eft trouvé c'a efîet, -&i
p eu t-etre s’en trouvera-t-il beaucoup’ encore ; ôc ce ne
font pas les dettes que l’on a partagé', c’eft feulement la
totalité de fes d tô its , que Cam ille-Claude-Ant* Reynaud
a vendus. A infi il fau t écarter toute idée de premier aile
de partage.
1 ‘:
A la vérité quelques Auteurs , Brodeau & Pothier entre
autres , ont voulu reitreindre l’impuiflànce dàl al éf i on au
cas où la vente ferait faire par un héritier à un étrarrger : ÔC
cela parce qu’on fuppofe que le cfcdant avaijt plus de co n ïioiilance que l'acquéreur j mais cette diiHn&ron toujours a
�Xif
y
r ' ' .
( 4 ° )
é té rejetée , notam m ent par l’A rrêt de 1690 , & p lu s ré
cem m ent encore par celui du 1 1 M ai 1760 , & enfin par
lin bien m oderne de 1781 , lors defquels il s’agiilàit de
ventes de droits fucceiîifs, faites par cohéritiers à autres
cohéritiers.
T o u tes ces efpèces de ventes font inattaquables , à
m oins qu’elles n’emportent avéc elles les trois conditions
qu’exige la loi 4 au C o d e de hcereditate vei aclione venditâ :
“ Qui nondum certus de quantitate hæreditatis , perfua« dente emptore , quafi exiguam quantitatem eam vendi» d i t , bonæ fidei judicio , conveniri ut res trad at, aut
» afViones m an det, non compellitur. »
Il faudrait d o n c , aux termes de cette l o i , que C am illeClaude-Antoine Reynaud , au temps de la vente, eût été
incertain de l ’état & des forces de la fucceifion de fon
pere ; i ° . qu’il eût été furpris par le dol & les artifices de
fon frere; 3°. E t enfin qu’il foutFrît une léfion énorme.
Si ces trois circonftances ne fe Rencontrent p a s, il ne
peut être écouté.
O r rien n’efl: moins établi que chacun de ces trois
points ; & c’eit fur cet objet que nous avons eu raifon de
dire que les premiers Juges ont admis pour conitans des
faits évidemment faux.
'
Premiere Cit confiance. C am ille-C laude-A nr. Reynand n’a
ni méconnu ni pu m éconnoître', au temps de la vente , les
forces de la fucceflîon.
Im m édiatem ent après la m ort du p e re , les fcellés furent
appofés : c’eit fur fa réquifition , fur celle de fon frere ,
& en préfence de tous les deux qu’ils furent levés le 4
A o û t 1785- D e s - l o r s tous deux enfemble & en même
temps connurent les livres, promeilès , vérifièrent le nu
méraire , & c . in ven torièren t, & c .
'/ , • '
C ’eft tous deiK & non pas l’ainé feulement qu’ils ven
dirent , le 6 , l’office de fecrétaire du Roi , pour 80000 1,
qu’ils reçurent com ptant , & fe partagèrent..
C ’eil tous deux en fem ble, & 11011 pas l’aîné feulem ent,
qu’ils
�qu’ils réglerent les droits légitimâmes de leurs foeurs. A
‘l’époque l’un & l’autre avaient le même intérêt, 6c l’on ne
fuppofera pas qu’ils aient traité avec leurs foeurs fans
connaiilànce de caufe : cet afte d’ailleurs indique que
tou t a été com pris, que comptes & calculs ont été faits.
C ’eft tous deux en fem ble, 6c non pas l’aîné feulem ent,
qu’ils foufcrivirent le traité avec Couchoud aiTocié de leur
père. A cette époque encore l’intérêt du cadet était le
m em e que celui de l’aîné, 6c certes on ne croira pas
que le cadet ait confenti un pareil a£te, fans avoir bien
connu les objets de la fucceiîion qui entraient dans ce
traité.
,
C ’eit tous deux enfemble enfin , 6c non pas l’aîné
feu lem en t, que le 22 N ovem bre ils fe réglerent avec
leur belle-mere pour fes gains de furvie : 6c fans contredit
on fait jufqu’où va ordinairement la générofité des enfans
.’envers la ieconde femme.
E n un m o t , com m e on le v o i t , tout s’efl: fait avec
C am ille-C laude-A ntoine Reynaud ; rien ne s’eiî: fait fans
lui : il a aififté à t o u t , coopéré^ à t o u t , accordé t o u t ,
figné enfin tous les aétes fucceiîïvement les plus intéreffans pour des cohéritiers : 6c il voudra faire croire qu’il
;l’a fait dans l’ignorance! E t des juges com plaifam ment
l’en ont cr u, ô c ces juges encore en ont fait un des
m otifs principaux de leur décifion : ne nous laiïons
pas de le d i r e , tout les avertifloit d''être en garde , &
pourtant ils ne le furent pas.
^
Par ce que nous venons de voir , il eft démontré que
Reynaud cadet n’a rien méconnu , que tout lui a cté
exaètement d écouvert, 6c que fon frere n’a pas eu plus
:de connaiilànce que lui. A in ii écartons toute idée d’igno
rance , de dol 6c de furprife.
Réitérait donc la troiiiem e c ir c o n f t a n c e , celle de la
léfion ; mais, les principes veulent que feule 6c ifolée ,
elle ne foit pas confidérée ; les principes veulent qu’elle
fo it compenlée avec les dangers que l’acquéreur : chargé
�( 41 )
de la totalité des dettes court : & iur c e k ^ ous ne
nous répéterons p as, en diiant qu’il peut arriver qu’un
jour encore les enflas de Reynaud iiîné foient ruinés., •
O n répétera encore peut-être ce que les premiers juges
j i ’ ont pas craint d’inferer dans un de leurs confidérans',
xjue dans le traité, tous les rifques ont été déverfrs [un le cédant,
C ’eft une impofture bien groiîiere que celle-là de la. part
de Cam ille-Claude-A ntoine Reynaud , puifque la vente
porte que le p r ix , par aucun événement , ne pourra en être
dim inué, & que toutes les dettes demeurent
F acquéreur.
à la charge de
O ù d o n c , après ?cela, font les rifques allégués par
Reynaud c a d e t, & admis par les premiers juges ?
D i r a - t - o n que les rifques dérivent de la claufe par
laquelle l’aile devait être regardé com m e non ayen u , Îi
les légitimaires parvenaient à faire cafter le teftament ?
M ais cette claufe était de d r o i t , quand elle n’aurait pas
été inférée :. car il ne faut pas confondre la garantie de
droit avec celle de fait.
Cam ille-C laude-A ntoine Reynaud ne pouvait pas en
effet tranfmettre fa qualité de coh éritier, fi réellement
elle ne lui appartenait pas ; ainfi la garantie était due
m êm e fans ilip u lation , quant au droit en lui-même : &
le traité n’a été à forfait que relativem ent à la quotité
du produit.
A vec cette d iftin élio n , les premiers juges eufïènt
éludé le fophifme de Cam ille-Claude-Antoine Reynaud.
N ous ne finirions p as, fi nous nous attachions à tous
ceux des confidérans du Jugement qui donne matiere à
critique. O n pe ut , en tel nom bre qu’ils fo n t , les réduire
à deux , parce^ que ce font toujours les deux mêmes
m otifs confignés fous des exprefîions variées.
M ais la queilion efl trop clairement décidée, & par
■les L o i x , <5c par les Auteurs , & par les A r r ê ts , pour
que , dans aucun des tribunaux,, elle puifîèfaire la matiere
�( 43 )
d’un doute : & nous ne pouvons qu’être de plus en plus
étonnés de la conduite du tribunal de M on tbrifon qui
lui-même trois fois dans la même année a jugé le con
traire de ce qu’il a jugé dans le différend des freres
Reynaud.
P o u r avis, à R oanne, le 2 3 F rim aire, an 5
A R D AILLO N , VERNE.
L e Souffigné qui a pris lecture de la préfente C o n fultation , eft parfaitement de l’avis du cit. Ardaillon
qui l’a rédigée.
A Roanne, le 24 Frim aire, an 5e.
I
B O U Q U E T .
Æ; Vuxfc)*-
^
ati . 6**' <v^ u f
■ + ■ tV-^/\fcxr V '
tAAuuîtojvsA^
10MA«
V
r
, r
/ tW l/
. Z 7 t4A X,X /W
y ^ f <** ~
•
m
rA «v>y^u t»/vi
-# • .....
» .< >..<4 .,Ur
y * * iw^
>
£^ytx~~
U
t
A
> ¥4
\
,
w
_
T*U
S
AA I N T - E T I E N N E ,
de l ' i m p r i m e r i e d e B o y e r
l'An V e. de la République Française,
!
**
I l% >
U
i
COIIMLMUL. « (
(UW) (
<
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Grégoire, Marie-Magdeleine. An 5]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Granchier
Touttée Père
Touttée fils
Deval
Andraud
Gaschon
Dartis Marcillat
Ardaillon
Verne
Bouquet
Subject
The topic of the resource
successions
tutelle
minorité
rescision
doctrine
jurisprudence
société en commandite par actions
assignats
tribunal de familles
banqueroute
Conservation de Lyon
inventaires
charge de secrétaire du Roi
traité à forfait
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Marie-Magdeleine Grégoire, veuve de Jean-Louis Reynaud, tutrice de ses enfans, demeurant au lieu de la Rive, commune de Saint-Julien-sous-Saint-Chamond, appellante ; Contre Camille-Claude-Antoine Reynaud, propriétaire, demeurant en la commune de Trévoux, département de l'Ain, intimé : En présence de Jean-Baptiste Ardisson, négociant ; demeurant en la commune de Saint-Chamond, subrogé tuteur auxdits mineurs Reynaud, aussi appellant.
Annotations manuscrites: « Il n'y a plus rien de certain en jurisprudence » déclare le conseil sousigné. Note manuscrite résumant le jugement, qui confirme le premier jugement.
Table Godemel : Cession : la restitution pour cause de lésion est-elle admise contre une cession de droits successifs, faite entre cohéritiers majeurs, suivie de plusieurs actes géminés et approbatifs ? Peut-elle être considérée comme partage susceptible de rescision s’il y a lésion du tiers au quart ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Boyer (Saint-Etienne)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 5
1785-An 5
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
43 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1111
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Chamond (42207)
Trévoux (01427)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53139/BCU_Factums_G1111.jpg
assignats
banqueroute
charge de secrétaire du Roi
Conservation de Lyon
doctrine
inventaires
jurisprudence
minorité
rescision
société en commandite par actions
Successions
traité à forfait
tribunal de familles
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53962/BCU_Factums_B0123.pdf
8ae621e63165b2db9c1d009dd11366a9
PDF Text
Text
MEMOIRE
P O U R Le fieur F E U I L L A N T , Défendeur &
Demandeur.
CONTRE
G
.
e r v a i s
S A U R E T
,
Défendeur & Demandeur
L
E fieur Feuillant convient qu’un créancier ne doit
imputer fur fa créance , d ’autres objets que ce u x que
le débiteur prouve qu’il a payés. M ais auffi penfe-t-il que
tout hom m e raifonnable trouvera qu’il e f t injufte qu’un créanc i e r q u i a c e f f é d e l ' ê t r e , e x ig e que celui qui par
paiement a ce ffé d'être fon débiteur» foit encore f orcé à
payer fes dettes , fous le p rétexte qu’il a été fon débiteur.
O r telle e ft la prétention de Sauret. D ans le même temps
où le fieur Feuillant étoit fon d é b ite u r, il a été fa caution.
Sauret à la vérité prétend que le fieur Feu illant n’a pas été
f a caution , mais qu'il a fait fon affaire perfonnelle de fa dette.
L e fieur Feuillant a rempli fes engagements envers S a u r e t ,
dans le m ême temps où celui-ci prétend que le fieur F e u il
lant s eft rendu débiteur à fa décharge. S i le fieur F eu illant
A
�V
2
prouve qu’il s’eft libéré de fes engagem ents perfonnels envers
Sauret , ne paroîc-il pas jufte que les choies rentrent dans
l’ordre naturel , 6c que Sauret paye une dette qui a tourné
à ion profit ? O r le fieur Feuillant prouve non feulement que
Sauret a été pave en entier de fa créance contre l u i , mais
e ncore que Sauret eft fon débiteur de deux v o y es de
'•'T ïïa r b o n T ^,
O T p re m iè re aflignation dans cette affaire a é té donnée
en mars 178 7 à Sauret , par le fieur S é v e , qui l ’a toujours
regardé com m e fon unique débiteur } fous le cautionnement 'du fieur Feuillant. Sauret , dans les commencements
] d c c e t te ajïaire , a fait naître une foule d'incidents , qui
[ e n ont d ifféré le jugem ent , & dans lefquels il a toujours
p é t é convaincu ou de fe tromper ou d’avoir voulu tromper.
Sur la fin de juin , le fieur Feuillant a fait un v o y a g e à
P a r i s , où il a été retenu pendant trois mois pour affaires
im po rtantes, ou pour raifon de maladie. Sauret pendant ce
temps n ’a ceifé de folliciter un jugem ent ; la préfence du
fieur Feuillant ayant été regardée com m e néceflaire, le ju
g em en t a été différé jufqu’à fon arrivée. M ais S a u r e t, crai
gnant alors la préfence du fieur Feuillant & fes défenfes , a
eu recours à un A v o c a t , qui lui a donné une confultation
en fa faveur. L e fieur Feuillant , inftruit que cet A v o c a t
s’étoit porté pour défenfeur de S a u r e t , le pria de mettre
l ’affaire en arbitrage. L e fieur Sauret , l ’on ne fait fou3
quel prétexte , mais vraifemblablement fondé dans fes efpér a n c e s , nJen a montré que plu* de chaleur dans cette af
fa ir e , & a refufé abfolument de fe rendre à la propofition
du fieur Feuillant. C elu i-ci a , de fon cô té , mis fous les
y e u x de quatre célébrés A vocats de cette V ilie , un m é
moire déraillé des faits & de fes moyens de défenfe ; & tous
ont été d'avis que la co n te ih tio n de Sauret é toit des plus
mal fondée.
T o u t alors étoit égal entre les p a rties, lorfque le défen
feur de Sauret a demandé communication du njémoire du
licur F e u illa n t , & de la confultation qui a fuivi. Il a ré
�pondu à l’un & à l’autre par un m ém oire que Sauret a fait
im prim er, dans l’efpérance fans cloute d’en impofer au public «
par l’éclat donne à cette allaire.
'
'
L e T ribunal auquel l ’affaire eft p o r t é e , peu accoutum é à
voir imprimer dans les affaires de fa com pétence , gémic
fans doute des frais qu’occafionnent les chicanes du fieur
Sauret. Mais ce dernier aura peut-être à fe repentir dJavoir
donné à cette conteftacion une publicité qui pourroit nuire
à la réputation de probité , dont il fait parade avec trop de
chaleur.
Q u o iq u ’il en f o i t , le fieur Feuillant a dû à lui-m êm e , au
public & aux Jurifconfultes qu’il a c o n f u lt é s , de fe juftifier
authentiquement du reproche de fuppofitions & d June foule
d 'in e xa & itu d e s, au m oyen defquelles il auroit furpris la re
ligion de fes Avocats. I l va tâcher de fuivre pied à pied le
défenfeur de S a u r e t , fans efpérer cependant de captiver les
le£teurs amateurs de l ’art oratoire. Us feront peut - être
curieux de favoir lequel du fieur F eu illa n t ou de S a u r e t ,
9 débité des inexactitudes.
F
A
I
T
S
.
L e fieur F e u illa n t , N é g o c ia n t de B ra fia g e t, acheta dans
les premiers mois de 1785: , de G ervais S a u r e t , dit le G r e
nadier , M a rchand ^ R io m , un cheval m oyennant dix-huit
v o y e s de charbon , qu’il s’engagea , par une lettre du 20
février , à lui faire conduire au P o n t-d u -C h â te a u , chez le
nom m é G i r a r d , A ubergifte de cette V i l l e , le déchargem ent
a la charge de Sauret. C e fut fur cette lettre que Sauret re
m it au domeftique qui en étoit porteur , le ch e v a l qu'il
avoit vendu au fieur Feuillant. C e cheval fut donc livré en
conféquence des conventions inférées dans la le t t r e , qui eft
le titre de Sauret contre Feuillant.
Sauret prétend dans fon mémoire que n ’ayant point l ’ufage de lire & d’é c r i r e , il ne fe fit donner q u ’une c o n noiffance très - fuperficielle d e l à le ttre du fieur Feuillant
A a
'
�4
dans l ’infiant où elle lui fut re m lfe , &: que ce ne fut que
lo n g - temps après qu’il apprit que les frais de décharge des
d i x - h u i t voyes feroient à fa c h a r g e , d’après cette lettre.
C eci eft une aflertion que rien ne prouve que le fieur
Feuillant d é m e n t, mais qu’il étoit utile à Sauret de mettre
en a v a n t , pour donner à la conduite du fieur Feuillant une
couleur de mauvaife foi. Les frais de ce déchargement étoient
un trop petit o b j e t , pour occuper le fieur F e u i l l a n t , de ma
nière à le porter à une furprife envers Sauret ; le comm erce
du fieur Feuillant le m et au - deiTus de pareilles petiteiTes.
I l étoit de plus eiTentiel pour Sauret de prévenir ,
par cette réflexion , les indu£tions qui fuivent de ces
expreilions de la lettre de F e u illa n t, le déchargement à votre
charge. Elles font voir que c’eft à Sauret à veiller à ce d é
chargement. L e fieur Feuillant n’a dû répondre du char
bon que jufqu’au Pont - du - Château ; c ’eft là que Sauret
eft convenu de le prendre , le déchargement à fa charge.;
TLe charbon une fois arrivé au P o n t , eft fur le lieu choifi
par Sauret ; l’arrivée de l’expédition prouvée , Sauret feul
eft chargé du charbon ; c ’eft à lui à le faire décharger ; &
fi Feuilîant a fi expreffément recommandé à Girard , dans
fa lettre du 5; août , de tenir le charbon déchargé , 6c prêt
à être enlevé par Sauret : c ’eft que c e l u i - c i étoit extrê
mement preifé de le retirer ; que Girard ayant été co m m is
par les deux parties , de la part de F e u illant à la rccep~
tion , d e"la part de Sauret au déchargement ; le meilleur“
moyen ,, pour "confiatef~i’âFnvlSe du charbon , étoit que
Sauret le. trouvât tout prêt à être enlevé. Il importoit peu
dans le fait que la recommandation fut faite par Feuillant
ou par S a u re t; mais il étoit intéreflant pour Feuillant de
fixer l ’époque où il ceifoit d’en être garant. E t quelle fejroit en effet la condition du vendeur , fi , après avoir fait
’• conduire la marchandife vendue nu lieu indiqué Ôc a c c e p té ,
-1, il en rcftoit refponfable jufqu a fon enlèvement complet ?
Q u e l feroit donc le lieu où le vendeur ceiferoit d ’en être
garant ? D ’après ces ré flexio n s, on fent toute la confé-
�f
-,
quence de ces expreiïions , le déchargement à votre charge.^
Ces autres expreiïions de la même lettre , j e vous fe r a i con- (
dnire au p lu tô t, prouvent encore que le Commiifionnaire \
Girard a été choifi par les deux parties. A u plutôt fignifie )
prom p tem en t, mais ne fixe point de jour. Il falloit donc /
que quelqu’un fût commis d’accord pour le recevoir , avec /
connoiffance réciproque de la fidélité du Commiifionnaire i /
d e l à part de F e u illa n t, pour attefter l’a r r iv é e , de la parcj
de S au ret, pour veiller au déchargement.
L e fieur Feuillant convient d’avoir été en re ta rd , quant
à l’envoi de ce charbon. D ’abord le grand nombre d ’e x p é
ditions qu’il avoit à faire dans ce m ême te m p s , le rend excufable : enfuite il furvint une fécherefle extraordinaire ,
qui fut un obilacle infurmontable.
Sauret cependant
avoit revendu au nommé G arde , le charbon
que
le fieur Feuillant lui devoit : il reçut en conféquence de
Garde une aflignation qu’il dénonça au fieur F e u i lla n t , &
obtint contre lui , le 30 juillet 1 7 8 ; , une fentence qui le
condamnoit à délivrer ce charbon dans trois jours
à
compter de la.lignification, & faute de ce faire dans ledit
'temps , aux dommages & intérêts de Sauret , ainfi
qu’aux frais fouiferts ou à foufïrir de la part de Garde.
C e fut alors que le fieur Feuillant pria V ig ie r du Pont-duChatcau , de vendre à Sauret & lui délivrer la quantité
de charbon qui lui feroit néceflaire, ajoutant quJil en répondoit. Je dis que 1s fieur Feuillant pria , follicita V i g i e r , parce
que V ig ier qui connoiffoit déjà S a u r e t , ne vouloir abfolument
faire aucune affaire avec lui ; fie il ne fallut rien moins que le
plaifir d’obliger le fieur F e u illa n t, pour déterminer Vigier.
I l fembleroit par la manière dont ce fait eft racon
té par .Sauret , que Feuillant a dit , en préfence de
V i g i e r , que le charbon qui feroit délivré à Sauret , feroit .
imputé fur la quantité qu’il devoit perfonnellement. C e fait /
eft démenti par i’afiignation des héritiers V ig ie r à S a u r e t , ôc 1
par la conduite du fieur F e u illa n t, qui dans le même temps [
6 eft libéré envers S a u r e t , en lui faifant conduire au Pont- I
�s
du-Château v in g t voyes de charbon en deux e n v o is , l'un de
fix v o y e s , du $ août 1 7 8 ^ , l’autre de quatorze voyes., du
mois de feptembre fuivant.
L es chofes étant en c e t é t a t , le fieur S év e , gendre du
iieur V i g i e r , fait aflîgner Sauret à lui payer quatre voyes
& demie de c h a r b o n , qui lui avoient été vendues par fon
beau-père. Sauret répond en défendant qu’il ne doit rien,
& par une afTercion auiïi vague , auili hafardée , force les
Juges à ordonner la comparution du fieur S é v e , gendre de
V ig ie r , qui, en fon abfence, fut repréfenté par la dame S é v e ,
fon époufe. Sauret conferve à cette fécondé audience le mê
me air d’aiTurance , fe tient f j r la négative. Sauret prétend
que la dame S év e lui fait demande d’une certaine quantité
de charbon , qu’il affure avoir payée , en fatisfaifant, à la dé
charge du fieur V i g i e r , à la demande de quelques ouvriers.
L a dame S é v e lui dit alors qu’ elle veu t bien le croire fur
fa parole , quant à cet article; & ajoute que ce n’eil point
de cet objet dorrt elle forme demande , mais de quatre voyes
& d e m ie q u e fon père lui a vendues , à la follicitation du
fieur F e u i lla n t , qui avoit promis de payer lui-même le char
bon que Sauret p re n d ro it, dans le cas où celui-ci ne payeroit point. Sauret s’é lève alors avec chaleur fur la quantité
demandée par la dame S év e > rend cette quantité problé
matique , prétend tantôt qu’il n’en a pris que trois v o y e s ,
tantôt trois & dem ie; & enfin la dame S é v e demande que
la fervante qui demeuroit ch ez fon p è r e , lors de l'en lève
m ent de ce c h a r b o n , foit entendue fur cette conteflation :
Sauret reprenant la parole , dit alors q u e , dans tous les ca s,
c ’efl au fieur Feuillant à payer ce charbon ; de-là une fentence préparatoire , qui ordonne que cette fervante fera
ouie , & le fieur Feuillant mis en caufe.
Q u ’eft-il réfulté de la dépofition de cette fervante? i° . q u e ,
d ’après le com pte des v o itu re s , fait fur la déclaration de cette
f i l l e , & contradi&oirem ent avec S a u r e t , la quantité du
charbon a été fixée à quatre voye* & demie. 2 0. L e s Ju
ges ont appris de cette fervante , qu’elle avoit vu mefurer
/
�7
le tombereau de Sauret , qu’il contenoit vingt*une r a fs s ,
& Sauret cependant prétendoit que ce tombereau n’en
contenoit que «iix-huit. Auifi cette fervante ajouta - 1 - elle
que Saurat cliargeoit au t a s , fans avertir perfonne de la
maifon ; ce qui m écontentoit fort Ton maître.
L e fieur Feuillant en caufe , a foutenu n’avoir été
que fimplement la caution de S a u r e t , & a formé con
tre lui demande de deux v o y e 3 de charbon , attendu
qu’il lui en avoit fait conduire v in g t au P o n t - du Château , & qu’il ne lui en devoit que dix-huit. Sauret
a , de fon cô té , formé demande d’une v o y e & demie
au fieur Feuillant , attendu que quatre v o y e s & demie
qu’il venoit d’être convaincu d’avoir retiré , & douze
qu’il prétend uniquement avoir reçues au P ont-du-C hâteau,
fon t feize voyes & d em ie; & pour prouver qu’il n’en avoit
reçu que douze , il demanda le rapport du livre de G ira rd ,
commis à la réception du charbon. L e rapport de ce livre ne
le fatisfaifant p a s, il demanda la déclaration de Girard & celle
de fon époufe. Girard vint dépofer ici. S on époufe fit fa dé
claration devant le Bailli du Pont-du-C hâteau , où elle
étoit retenue , pour raifon de groflefle avancée. E t c ’eit
dans le livre de Girard , fa déclaration & celle de fon épou
fe , que Sauret puife fes moyens de défenfe. O r , on fe flatte
d'établir que ces dépofitions ne peuvent être concluantes
en faveur de Sauret; qu’elles font au contraire des moyens
de défenfe effentiels dans la caufe du fieur Feuillant.
M O Y E N S .
Sauret d i t , dans fon m é m o ire , q u e le fieur Feuillant ne
peut prouver fa libération envers lui , qu’en prouvant
qu il a reçu dix - huit voyes de charbon , que cette
preuve n’étant point f a i t e , & Sauret fàifant la preuve con
traire , le fieur Feuillant eft redevable à Sauret du m on
tant de fa demande. O n obferve qu’un fait entre mar
chands 3 fe prouve ou par le s 7livres journaux 3 ou par la voie
\
�s
teftim oniale, quelquefois m ême par des circonilances q u i ,
réunies, ont force de preuve. E t il eft d’un ufage très-ordi
naire d e ’ fe déterminer dans Jes Jurifditlions C on fu laires,
d’après ces circonilances probantes ; ces fortes de Jurifdiâions
n’étant p o i n t , pour l ’avantage du commerce , aflervies aux
formalités^ rigoureufes des procédures ufitées dans les autres
C o u r s , ainfi que le porte l’Ordonnance de 1667 , art. I I du
ritre X X (a). O r
le fleur Feuillant prouve par ces divers
moyens , non feulement qu’il s’eft libéré envers S a u r e t ,
mais encore que celui-ci eft fon débiteur.
E n effet, fuivant l ’article I I du titre I I I de ¡’Ordonnan
ce de 16 7 5 , les agents de change & de banque doivent te
nir un livre jo u r n a l, dans lequel fo n t inférées toutes les Par
ties par eu x négociées, pour y avoir reçours, en cas de co/ztejlation. Girard dans l’affaire préfente , eft est agent inter
médiaire. Pour que fon livre f î t f o i , & que l’on pût y avoir
r e c o u r s , il faudrait qu’il fût d’une même fuite , par ordre
de date , fans aucun b la n c, fuivant l ’article V du titre I I I
de la même Ordonnance ; & encore dans ce c a s , n’en tireroit-on des induirions , qu’en le conciliant avec le livre
des deux conteftants, comme l ’obferve M . J o u fle , C om m en
tateur de cette Ordonnance. Mais le livre de Girard n’eft
point en règle , c Jeft plutôt un chiffon qu’un livre , il eft
en trois ou quatre feuilles volantes , mal t e n u , écrit fans
f u i t e , ayant des vuides intermédiaires ; & il faut que ce fait
foit bien vrai , pour que Sauret ne l'ait pas relevé dans__
fon m ém oire.^Aufli t r o u v e - t - i l plus fimplc , page 7 ,
d écarter les liv r e s journaux ,
fous un prétexte fri
vole , fans faire réflexion qu’il entend tirer grand parti de
celui de Girard , qui par là-même q u ’il n ’eft pas en rè g le , ne
mérite aucune foi ; ce livre eft de plus démenti par la dépo( a ) L e J u g e , dans les affaires de com m erce , ne m arche pas to u jo u rs h la lu eu r
d’un io leil éclatant : fi , d’une part , la loi I'éclaire fur les règles a u ftères d e I*
p ro b ité , d’autre part , \et circo n ila n ce s lu i fourniH ent un e lu m iire sû re , q u o i
qu e m oins v i v e , à l’aide d e laquelle il p erce l’épaifleur des tén èbres , où la
m auvaife fo i s’e n fo n ce p our cacher Ces o p ératio n s,
fitioo
�9
ficion de Girard & celle de fon époufe. Sauret n’en peut
donc rien induire contre Feuillant , de même auili que le
fieur Feuillant n’en peut rien conclure contre Sauret. A u x
termes de l’ordonnance , ce livre doit être de peu de
confidération. Il refte donc à recourir dans cette partie à
la voie teftimoniale. O r Girard Ôc fa femme , feuls tém oins,
& ouïs à la requête de Sauret
difent qu’ils ne fe rappel
lent pas la quantité de charbon qu’ils ont reçu , qu’ils cro yen t
que c ’eit douze voyes qu’ils ont délivrées à Sauret. G irard
^déclaré en outre avoir reçu deux envois diitintts , quoique
fon livre ne faiTe mention que d’un l e u l , de douze voyes.
I l répréfente en outre une lettre d’avis de lix voyes ,
parties le j août de BraiTac , & arrivées le 8 au P o n tdu-Château.
Il y a de l'incertitude , quant à la quantité , dans la
déclaration de la fe m m e , mais elle porte douze voyes , ÔC
la lettre repréfentée n’en annonce que fix ; cette déclara
tion , toute incertaine qu’elle eft , ôc qui , de l ’aveu de
Sauret , ne va pas jufqu’au doute , fait donc voir clairement
q u’il y a plus de fix voyes envoyées. C e tte déclaration ,
loin d o n c de détruire l ’énoncé du livre du fieur Feuillant ,
vient à l ’appui de ce livre qui annonce deux envois. O r l ’on
apprend par le livre du fieur F eu illa n t, que la rivière à la
fin de feptembre charrioit à fept voyes j & que Girard reçut
le même jour un envoi d’un bateau à fept v o y e s , expédié pour
un autre particulier. L a dépofttion du mari eft plus précife ,
elle attelle la vérité de deux envois , & ne laiiTe de l ’in
certitude que fur la quantité , elle force donc à avoir re
cours au livre du fieur F e u illa n t, par lequel feul cette quan
tité peut être connue. O r ce livre doit faire f o i , quoi
qu’en dife Sauret dans fon mémoire, où , pour appuyer la pré
tention étonnante que les livres journaux ne font foi qu’en
tre marchands entre lefquels il y a une correfpondance de
com m erce bien établie , il dit : cela ejl f i vrai , que les li
vres des Marchands ne fo n t point f o i contre les bourgeois ,
& il cite Lacom be. L ’autorité de L acom be eft refpe£table ,
�Io
mais elle eft au moins déplacée , dans une conteftation en
tre marchands.
i ° . L ’article I du titre I I I de l ’Ordonnance , porte : les
Négociants & M archands, tant en gros qu’ en a é ta il, auront
un livre qui contiendra tout leur négoce : autrement , dit
Joufle , les autres Marchands qui Jeroient \en contejlatioti
avec eu x , & qui auroient des livres en règle 3 pourraient être
écoutés dans leurs demandes, par cela f e u l que leurs livres f e roient en règle , ces derniers étant alors préfumés être dans
la bonne f o i. Bornier dit auiü que , f i l e Marchand n'a point
tenu de liv r e, bien que fa demande f o it fondée fu r une promeffe écrite , & fignée de la main de celui à qui les marchaitdifes ont été délivrées ; en ce cas le livre journal du débiteur
doit fa ire f o i , pour prouver qu’i l a p a y é , parce q uun M ar
chand qui tient des livre? , eft réputé de meilleure f o i .
2°. Q u a n t à ce que porte le mémoire de S au ret, que les
livres journaux ne font foi qu’entre les marchands entre lefquels il y a une correfpondance de commerce bien établie:
cette réflexion ne fe trouve nulle part que dans ce mémoire :
l ’ordonnance & l’ufage n'ont donné nulle part l ’exclufion à 1 a
foi que méritent les livres journaux, dans la premiere affaire
que fait un marchand en gros avec celui en détail. Sauret eft
marchand de charbon en d é ta il, puifqu’il avoit revendu partie
de ce charbon à un nommé Garde. Il en confomme beaucoup
pour l’entretien de fes fours à c h a u x , & peut & doit donc
è re confidéré com me commençant par cette première affaire,
u ie correfpondance avec le fieur Feuillant. Un livre en règle
doit, fuivant l ’ordonnance, faire foi môme contre le créancier
qui ne préfente point de liv r e , tant dans le gros que dans le
détail. O r Sauret ns tient point de livres, quoiqu’il fâche
écrire, com m e il en eft convenu lui-mêm e, en réclamant de la
part de Girard un livre autre que celui qu’il rep réfen to it, &
& dans lequel Sauret difoit avoir écrit une promefle en faveur
de Girard. Sauret n’eft donc point en règle , & aux termes de
l ’ordonnance , le livre de Feuillant fait foi contre lui. O r ce
livre fait foi qu'il a été expédié à Sauret vingt voyes de char-
�bon au Pont-du-Château ; c’eft-là que Sâuret a dû le recevoir.
U ne fois le charbon arrivé au Pont-du-Château , il a été à la
charge de Sauret ; il a pu en difpofer fuivant fon bon plaifir.
Sauret cependant prétend n’avoir reçu que douze v o y e s , invo
que en témoignage le livre de G i r a r d , fa déclaration & celle
de fon épo ufe, & enfin il d it, page 1 3 de fon mémoire , que
fi les expéditions ont été faites, il n’en a jamais été prévenu
par lettres d’avis, ou autrement.
i° . Q u e l fi grand parti Sauret peut-il tirer de la déclaration
du livre de Girard , qui porte au
août une feule délivrance
de douze voyes de charbon faite à Sauret, en vertu d’un envoi
du fieur Feuillant ? L ’on ne voit rien de fi convainquant contre
S a u re t, que l’énoncé de ce livre; la date f e u le , qui n’eil
conform e à aucun des envois du fieur F e u illa n t, prouve que
cet envoi a été porté fur le liv r e , abfolument fans aucun fouvenir tant des époques que d e là quantité. Girard & fa fe m m e,
jdont les dépofitions ont été requifes par S a u r e t, ont dû d épofer d’une manière moins affirmative. L a dépofition de la
femme G ira rd , porte qu’elle ne fe rappelle pas précilëment le
nombre de v o y e s , qu’elle croit que c ’eft douze qui onr ¿rA
déçhargées & remîtes à S auret. G irard ignore ainfi que fa
fe m m e îa quantité de v o y e s , mais convient de deux envois
cliftin£ts, quoique fon livre ne faiTe foi que d’un feul e n v o i,
d ’une feule délivrance. I l rapporte au procès une lettre en \
date du j août 1 7 8 ; , par laquelle le fieur Grimardias, commis '
du fieur F eu illa n t, lui donne avis qu’il lui e xp éd ie , ce même
jo u r , fix voyes de charbon en deux b a te a u x , pour le compte
de Sauret. Pourquoi n’eft-il point fait mention de cet envoi
fur le livre de G ira rd , & qu’au contraire il y eft fait note d’un
de douze voyes le 27 a o û t , tandisque le dernier envoi n’a été
fait qu'à la fin de feptembre ? C ’eft que Girard ne s’eft rappcllé que très-long-temps après leur arrivée , qu il avoit
oublié de les infcrire fur fon livre; qu’il ne s’eft pas plus rappellé la quantité que contenoient les feconas b a t e a u x ,
que la date de l’expédition. Les deux premiers bateaux
contenant fix voies, il a conclu de la contenue des premiers à
B 2
�12
celle des féconds. I l a penfé que le premier envoi ayânt été
fait précipitamment en vertu de fe n te n c e , le y a o û t, le fé
cond avoit dû fuivre de près, ôc en co n féq u en ce, il a cru
pouvoir les rapporter fous une feule d a te , celle du 2 j août.
Son incertitude fur la quantité eft fi fo r m e lle , que Girard
conclut à la fuite de fa déclaration en ju ftic e , au rembourfement d’une fomme plus confidérable que celle de fix liv r e s ,
dans le cas où il feroit prouvé au procès qu’il eût reçu une
plus grande quantité de charbon. Sauret ne peut donc rien
conclure en fa faveur du livre journal de Girard ; livre qu’il
a rejetté lui-m êm e, en prétendant qu’il y en avoit un autre
dans lequel il avoit vu qu’il n’y avoit que fix livres endoifées
pour être répétées pour le déchargement. Sauret a donc eu
connoiflance de ce que contenoit ce livre , & en a tiré parti
à fon ava n ta ge , foit parce qu’il avoit oublié lui - même la
quantité, foit parce qu’il a cru qu’elle ne pourroit être connue.
Il eft d’autre part très-probable que c ’eft Sauret lui-même qui,
abufant de l’oubli de G i r a r d , l’a induit en erreur fur la quan
t i t é , & que fort de ce tém oignage qu’il s’efl procuré en fa
f V3 ur,il a pour lors conçu ia hardieiTe d’élever cette conteftation. Auili le fieur Feuil'ant aflure-t-il , qu'ayant rencontré
S a u re t, fur le chemin de C i e r m o n t , il lui dit: Mais S a u re t,
vous me redevrez deux voyes de charbon ; à quoi celui-ci
répondit: O h ! nous arrangerons cela dans une bouteille de
vin , & puis il ajouta : Mais vous me devez les frais de cette
f ) fentence , nous ferons TTri compte. C ette converfation fut
C répétée à 1 audience par le fieur F eu illa n t, à qui Sauret ré/ pondit leftement que c ’étoit autant de menfonges. C ette ré( ponfe n’eft point verte, mais effron tée, in décen te, vis-à-vis"
/ d’un homme reconnu pour lo y al, en préfence de Juges q u i,
S p'uir découvrir de quel cô té eft la v é r ité , fe font un devoir
\ d'entendre les parties elles mêmes.
(
2°' Sauret fe plaint de n avoir été prévenu d’aucun des en
vois. Sauret d i t , page 2 de fon mémoire , qu’il n’a point
l ’ufage de lire ni d ’écrire , 6c qu il ne fe fit donner qu’une
connoiflance très-fuperfïcielle de la lettre du fieur F eu illa n t,
�1 3’
.
.
.
.
en date du 20 février. O r il eft fort inutile d’écrire une lettre
d ’avis à un homme qui n’a l’ufage ni de lire ni d’é c r ir e , vu S
fur-tout q u e , dans le premier moment d’une affaire, m om ent ?
eifentiel pour les co n ven tio n s, la lettre contenant ces co n - \
vendons, l’affeSte allez peu pour n’en prendre qu’une connoif- C
fance fuperficielle. I l étoit plus fimple d’avertir Sauret de
vive vo ix ; ce qui a été fait. L a lettre d'avis écrite Je 3 août
1 7 85 à G ira rd , porte que Sauret fera le lundi., qui étoit le
8 , au Pont-du-Château , avec des voitures pour enlever ce
charbon. Je vous ferai o b l i g é dit le fieur Grimardias dans cette
lettre , de faire toute la diligence poffible lundi matin , pour
le déchargement de ces deux bateaux , & éviter par ce moyen
à M . Feuillant des fr a is que Sauret ejl dans l'intention de
lui f a i r e , f i le charbon n étoit pas déchargé à l ’ arrivée de fe s
voitures. E t efFeâivem ent, Sauret prefToit vivem ent le fieur
F e u illa n t, puifqu au terme de la fentence qu’il avoic obtenue
contre l u i , dix-huit voyes de charbon devoient lui être dé
livrées dans trois jours. O n ne peut dire que le commis
du fieur Feuillant ait avancé fans fon d em en t, dans fa lettre
que Sauret feroit le lundi au Pont pour enlever ce premier
envoi. Il avoit certainement été convenu entre les p arties,
que ce charbon feroit délivré ce lu nd i, à moins de fuppofer
que les expreifions de la lettre du fieur G rim ardias, ne fuiTent
dès ce temps difpofées de telle f o r t e , qu’il en pût tirer
a v a n ta g e , pour une coquinerie. qu’il méditoit ; ce qu’il eft
abfurde de cro ire-q u and on confidérera , fu r-tou t, que le
fieur Grimardias ayant atteilé la vérité des expéditions, ainfi
que celle des dates, fon affirmation porte auffi nécefiairement
fur la fincérité du contenu en fa lettre d’avis à Girard. D e
plus , l’expédition a été fa ite , puifque Girard l’a v o u e ; l’e x
pédition a été enlevée dans le temps , puifque la fentence
obtenue par S a u r e t, & fixant dans un temps de fécherefle,
trois jours feulem ent, pour la délivrance de dix-huit v o y e s ,
démontre clairement que Sauret avoit repréfenté avec cha
leur aux Juges, le befoin qu’il a v o i t de ce charbon, qu il les
en avoit convaincus en leur repréfentant l ’aiTignation qu’il
�*4
avoit reçue d’un nommé G a r d e , à qui il avoit revendu ce
charbon. S a u r e t , d’après une fentence p a reille , eft-il recevable à dire qu’il n’en a pas pourfuivi l’exécution & que
prévenu de cet envoi , com m e il ne peut le nier d’après
la lettre du fieur G rim ardias, il n’a pas enlevé ce char
bon fur le champ , (a) mais qu’il l ’a laifTéfur le p o r t , ôc que
ces fix voyes font partie des douze qui y étoient fur la fin
de feptembre. Il auroit donc ainfi laiiTé écouler deux mois
entiers fans enlever du charbon qu’ila v o it v o u lu , le 30 juillet,
lui être délivré dans trois jours. C ette prétention eft de toute
abfurdité , ÔC d ém o n tre, tout à-la-fois, la pétulance de Sauret
rlnns tes folliritations auprès de fes Juges, 6c ladreffe la plus~
"mal conçprrée pour les induire aujourd'hui en erreur.
C e tte abfurdité fera au moins aulli frappante, quant à' ce
qui concerne le fécond envoi. Page 3 de fon m ém o ire, Sauret
déclare que fur la fin du mois de fep tem bre, ou e n viro n , il
demanda au fieur Girard fi le fieur Feuillant ne lui avoit pas
adreifé du charbon qui devoit lui être remis. Girard répondit
qu’il en avoit reçu en plufieurs fois douze voyes. Sauret con
v ie n t , dans la même p age, d’avoir retiré le charbon à cette
époque. Q u e lle époque le fieur Feuillant fixe-t-il pour le fé
cond envoi de quatorze voyes? L a fin de feptem bre;( le char
bon eftparti de BrafTac le 22 de ce m ois, ) & Sauret ofera dire
qu’il n’a pas eu avis de cet envoi ! Q u e l étoit donc le charbon
qui étoit fur le port? Etoit-ce celui du premier envoi? Il eft
démontré qu’il étoit impoflible qu’il n'eut pas été enlevé par
Sauret. C ’eft donc celui du deuxieme envoi 3 6c fi Girard ne
l'a porté fur fon livre que pour douze voyes , c ’eft qu’il ne Ta
infcricquetrès-long-tem ps après la délivrance ; c'eft qu’ayant
perdu la lettre d’avis de ce fécond e n v o i, il a oublié la quantité
de voyes. I l avoit confervé la lettre d’avis du premier e n v o i ,
( a ) Il e ft à o b ferve r qu e Sauret n’a jamais^ n ié le p rem ier e n v o i , quand l ’on a
repréfen té la lettre d’avis é crite à G irard } mais qu ’il s’e il to u jo u rs retranché à dire
u’il n’a v o it re ç u qu e d o u z e v o y e s , com m e il o ffro it d e le p ro u v er par le livre
e G ira rd .
a
�& a crû inutile de l ’enrégiitrer 3 la repréfentation de cette
lettre étant fon titre pour fe faire rembourfer de fes avances
pour le déchargement. Q u and Sauret lui demanda s’il n’avoit f
jjas reçu du charbon pour l u i , Girard ne pouvoit croire que \
Sauret e ntendit parTëF de cëlui du premier envoi ; il avoit ¿té }
^ Ï ^ T l ü ë T u i ^ p o n d i t donc que relativement à u n ie c o n d . j
■ ^ ïirè ra meilleure mémoire que G ir a r d , quant à la q uantité, \
puifque Girard ne dit autre c h o f e , finon q u i l croit. L orfq u e *
Girard l ’â infcrit fur fon liv r e , ayant totalement perdu cette
affaire de v u e , il a ¿'té induit en e rreu r, foit par S au ret, foit
par la contenue des premiers bateaux ; de-là auifi, fon incerti
tude dans fa dépofition,qui ne contient d’autre vérité q u e c e l - 7
le-ci, que Sauret a retiré ce que Girard a reçu , fur-tout quand (
on la rapproche des expreifions de la page 3 du m ém oire, où|
Sauret déclare avoir enlevé ce que Girard lui a dit avoir reçu.)
A la vérité , par la réponfe de Girard , il femble que
c’eft en plufieurs fo is que ce charbon eft arrivé ; mais qui ne
vo it que ces mots en plufieurs f o i s , font à defTein ajoutés
à cette réponfe? Q u ’importoit-il dans ce temps-là à S a u r e t,
que ce fût en une ou plufieurs fois ?_ Q u e lle raifon avoic G i
rard de lui dire que c’étoit en plufieurs f o i s f c e n ’eft que depuis
que la conteftation eft élevée, que ces mots font devenus de
quelqu’importance. Aufïi Girard , en écrivant fur fon livre ,
m et fimplement douze voyes : dans fa d éclaration, il dit qu’il
croit n’avoir reçu que douze voyes en un ou plufieurs bateaux :
il convient uniquement de deux envois diftin&s, & ne parle
pas d’un troifieme. O r , il faudroit qu’il y eût eu trois envois,
pour que Girard fe fut réellement fervi de cette maniéré de
p arler, en plufieurs fois.: un premier de fix voyes , le %a o û t, }
qui néceffairement a été enlevé dans le temps , & deux pour
les douze voyes que l’on convient avoir été retirées depuis la
fin de feptembre;ces mots en plufieurs fo is font donc ajoutés. E t
Sauret fe plaindra d’inexa&itudes dans le mémoire deFeuillant! j
L es deux envois ont donc été connus ôc enlevés par Sauret.
I l ne peut être recevable à dire que le charbon peut être
arrivé an Pont fans qu’il ait reçu la quantité qui lui étoit due.
�16
Il fuffit qu’il foît prouvé que le charbon eft arrivé, & qu’il en *
eti connoiflance , pour qu’il en foit feul refponfable.
L e charbon n’eft jamais contremefuréau Pont. Il eft reçu fur
la foi des lettres de voiture. Girard & tous les autres marchands
le reçoivent ainfi. L a condition de Sauret doit être la même.
L e charbon mis à tas fur le port, eft livréà la foi publique.Girard
a averti Sauret de ce quJil avoit r e ç u , il a dû lui dire : voici
votre tas; il eft de telle quantité. Si Sauret avoit voulu connoître par lui-même la q uantité, il falloit qu’il le fît mefurer
fur le champ. Il prétend s’être afluré de cette quantité par le
nombre de voitures qu’ila faites du Pont-du-Château à R io m .
D e -là fuit que Sauret ne s’en eft crû certain qu’à l ’inftant de
la ceflfation des tranfports ; & de fon aveu, ce charbon eft refté
fur le port, livré à la foi publique, pendant l’efpace de deux
mois ou environ. Mais ne feroit-ce pas plutôt ce nombre de voi
tures qui auroit induit Girard enerreur?(a) A y a n t oublié de por
ter dans le temps les envois fur fon livre, il aura demandé à Sau
ret combien il avoit enlevé de charbon. Sauret lui aura dit que
d'après le nombre de voitures qu’il avoit chargées, il n’y en
avoit eu que d ou ze; alors, Girard fe fera contenté de cette
réponfe , & aura mis douze voyes fur fon livre. Mais le tom
bereau de Sauret contenoit 21 rafes., & il lefaifoit paifer pour
n ’en contenir que 18. O r , le même nombre de voitures qui
ont conduit
12 voyes félon Sauret , en ont dans le fait
conduit
14.
L a voie eft compofée de trente rafes. 12 voyes font par
conféquent
3^0 rafes.
Et
14 voyes
420 rafes.
Il a fallu
20 voitures, chacune de
18 rafes, pour
conduire
360 rafes, ou 12 voyes.
Et
20 vo itu re s, chacune de
21 r a fe s ,
c n tc o n d u it 420 ra fe s, ou 14 voyes.
(a )U n e «Îémonitration m athém atique m o n trero it la vérité dans to u t fon jo u r ; elle
con fon d , terrafle le m en fo n ge : la probabilité fo u rn it des arm es con tre lu i ; elle
le v é fuivan t fes d ivers d e g ré s , p lu s o u m o in s du v o ile don t il s’e n velo p p e.
Qui
�17
Q u i ne voit dans cette opération de calcul la fource de l’er
reur de Girard, fur le nombre des voyes enlevées depuis la fia
de Septembre ? ce calcul eft d’une exa&itude fi frappante, qu’il
prouve tout à-la-fois, & la vérité de la dépofition de ln fervante
de V i g i e r , ôc la fincérité de l ’énoncé du livre de F e u illa n t,
qui porte ce fécond envoi pour quatorze voyes.
Il eft de plus à obferver que Girard n’eft pas ici dans la
claiïe des commilTionnaires qui reçoivent des émolumens. C euxci non-feulement veillent au déchargement des v o itu re s , &
en payent le montant. N o n feulement ils font tenus d’avertir ~
ceu x pour qui il ont reçu ; mais encore ils emmagafinent la
marchandife en lieu fain & c lo s , de manière q u e , par c et
a£te, ils deviennent refponfabTes de cette marchandife : auïïî
leur eft-il payé une ibmme qui tourne à leur p r o f i t , & ne
diminue en rien le rembourfement qui doit leur être fait pour
raifon des voitures; au lieu que les 10 fols pour le décharge
ment de chaque voye de charbon, forment uniquement le paie
ment-des déchargeurs, de même qu’il eft payé une certaine
fomme au porte-faix ou crocheteur qui aide à décharger les
balles de deflus les voitures , ou à les tranfporter de la voiture
au magafin. E t en e ffe t, la v o y e contient 30 grandes bacholées , qui font tranfportées des bateaux fur le p o r t , & mifes à
tas. I l n’eft paffé que 10 fols par voye à G i r a r d , ce qui fait 4.
deniers par rafe ou bacholée. L a modicité de ce prix prouve
qu’il eft uniquement deftiné au paiement des déchargeurs, &
que Girard n’a , dans ce d éch argem en t, d’autre intérêt que ce
lui d’o b lig e r, & jamais l’on n'a dit que ces 10 fols tour
n a ie n t à fon profit. Girard ne tient regiftre du déchar
gem ent , qu’afin de fe faire rembourfer de fes avances.
S o n inexa&itude ne peut lui être préjudiciable que pour ce
rembourfement. I l a d’ailleurs averti Sauret à la fin de feptembre , qu’il avoit reçu pour lui du charbon » & lelon Sauret
~lui-mëme, douze voyes. (Jette date elt celle de l'envoi de quatorze v o y e s , puifque la date de l ’expédition eft du 22 feptembre.
O n ne peut préfum er raifonnablem ent, d’après la lettre du
<ieur Grim ardias à G irard, en date du j ao û t, que Sauret ait
C
^ &
•
[J
�18
ign oré le premier e n v o i, encore moins qu’en étant àverti, il
ait négligé de l ’en leve r, lui qui avoit demandé & obtenu que
Feuillant fût condamné à délivrer dix huit voyes dans 3 jours.
D ’un autre cô té , il convient d’avoir enlevé douze v o y e s .
'"depuis le mois ~HêT~~feptëmbn^ ÎT a donc connu & enlevé
les deux- envois de charbon , chacun dans leur temps. Saurec
a donc reçu vin g t voyes de charbon du fieur Feuillant. L e
fieur Feuillant eft donc n o n -fe u lem e n t libéré envers lui >
mais encore Sauret lui eft redevable de deux voyes , fous
la dédu£tion des frais de la fentence qu’il avoit obtenue con
tre l u i , le 30 juillet 178^.
Sauret , pour s’étayer de to u t, prétend qu’on ne prend
pas ordinairement plus qu’on ne doit j & qu’on ne paye pas
ordinairement plus qu'il n’eft dû. V o ic i ce fe m b le , comme il
falloir raifonner : O n ne paye pas fouvent plus qu’on ne doit/
& on prend fouvent plus qu’il n’eft dû. Il eft d’ufage & d’é co
nomie de charger les bateaux à la tenue de l’e a u , fur-tout
quand l’objet eft d’une petite conféquence. L ariviere charrioit
à fept voyes , & le fieur Feuillant a profité de cet avantage ,
attendu qu’il étoit convenu avec Sauret que s’il lui envoyoic
quelques voyes d ép lu s, ils feroient bien d’accord. Il n’eft de ne
p is étonnant qu’il en ait envoyé vingt au lieu de dix-huit.
Maintenant qu’il eft prouvé que Sauret a reçu vingt voyes
du fieur F e u i lla n t , il eft facile d’établir que les quatre voyes
ôc demie qui lui ont été vendues par V ig ie r , père de la dame
S é v e , font à fa charge. L e fieur Feuillant avoit dit indéfinim en tà V ig ie r , qu’il le nrioit de vendre à Sauret la quantité de
cln rbon dont il auroit b ^ V in , & s’étoit engagé verbalement à
être fa caution ; & ce ne fut qu’en confédération du fieur
Feuillant que V ig ier confentit à cette vente. L e fieur
Feuillant ne pouvoit penfer que ce charbon fut un à
compte fur ce qu’il devoit , lui qui a toujours ignoré la
quantité qui avoit été délivrée à Sauret ; & il a fi peu re-'
gardé cette dette comme perfonnelle à lui , qu’il a expédié
a Sauret vingt voyes de charbon , o m m e il a été prouvé ,
& cela à comm encer du 3 août , dans les mûmes temps
�19
où Sauret retîroit les quatre voy es 6c demie du fieur V ig ïe r . ]
Il eft étonnant que Sauret , rempli de fa c r é a n c e , V
ait ofé foutenir que ces quatre voyes & demie fuflent à
compte d e .c e que lui dévoie le fieur Feuillant. C om ptoitil en impofer davantage à fes Juges , en feignant d'avoir
oublié cette quantité ? mais il a fait plus , il a nié cette
quantité , a foutenu qu’elle étoit moindre , & la diffé
rence n’étoit pas de demi - v o y e , comme il le prétend
dans fon mémoire , mais d'abord d’une v o y e & demie ,
& puis d’une voye. Il a fallu enfin le convaincre qu’il avoic
retiré quatre voyes & demie , comm e aujourd’hui il faut
le convaincre que c eft vingt voyes qu’il a reçues du fieur
Feuillant. •
L e fieur Feuillant a prouvé qu’il avoit fatisfait en entier
à fa dette envers Sauret. Les quatre v o y es & demie y
dues au fieur S é v e , 6c qui ont tourné au profit de S a u r e t ,
font donc à la charge de ce dernier.
1Répliqué
à
.
la prétendue réfutation des objections d u
mémoire du Jieur Feuillant
C ’eft avec raifon que le fieur Feuillant attaque les dé
clarations de Girard & de fa femme , fur le fondement
qu’elles ne font point précifes , & ne préfentent que de
l ’incertitude.
i° . L e fécond membre de la déclaration de Girard a une
liaifon intime avec le premier. S i Girard dit vrai , en décla
rant qu’il n’a reçu que douze v o y e s , Sauret eft cenfé par
le fécond membre , n’en avoir enlevé que douze. Mais il
G irard ne fait que croire que c ’eft douze voyes f qu il ne
foit pas certain de cette quantité , il eft vrai aufii de dire
que ces mots , 6» qui ont été effectivement remifes à Sau ret,
ne fignifient autre chofe , finon : Sauret a reçu ce que
j e crois avoir reçu.
2°. C e n’eft pas parce que Girard n’a donné que fix liv»
G
3
�20
pour le d é ch a rg e m e n t, qu’il ne doit y avoir eu que douze
v o y es; mais c ’eft parce qu’il a cru qu’il n’y avoit eu que
douze voyes
qu’il ne réclame que fix liv r e s , & vingt fols
pour buvette. E t il eft bon de favoir que Girard ne dit pas
dans fa déclaration., qu’il n’a payé que 6 livres, mais qu’il
croit n ’avoir payé que 6 liv.
Dans la Consultation donnée en faveur de Sauret , par
fon d éfe n fe u r, le i er. o & o b r e , il eft dit q u i l n’y a plus de
doute, même pour la quantité reçue au Potit-du-Château, dès
que Girard & fa fem m e ont fo n d é leur déclaration fu r un f a it
efje n tie l, qu’il eji marqué dans leur livre , fo u s la date du 2.5
août t y 85 y qu’ils ont payé & hv. pour le déchargement. L a
même réflexion fe retrouve dans le mémoire imprimé , mais
avec une petite différence. Pourquoi n y lit-on pas que ces
6 liv. données pour le déchargement , font portées dans ce
livre , fous la date du 25 août ? C ’eft que le défenfeur de
Sauret a bien fenti que le livre de G ir a r d , informe & c o n
tredit par fes dépofitions , ne pouvant faire foi contradi£toirement à celui du fieur Feuillant , qui eft en r è g l e , & donc
les dates font réiatives à celles fixées avant le rapport de ce
l i v r e , il étoit aifé de voir que les 6 liv. pour le décharge
m e n t , n’ont pas été données le 2Ç a o û t , puifque dans ce
mois il n’eft arrivé que fix voyes. Com m ent faire décharger
en août ce qui n’eft arrivé qu'en feptembre ? 11 faut conve
nir auifi que Girard a mis Sauret dans un furieux embarras,
en convenant de deux envois , rapportant une lettre d’avis
de fix voyes , & écrivant cependant fur fon livre douze
voyes , fous une feule date de délivrance, date qui ne fe rap-porte à aucun des envois.
Réplique relative à ta fecon.de objection,
i° . O n convient q u e , de ce que Girard & fa femme nuroient reçu vingt v o y e s , il n’en réfulteroit autre c h o fe , finon que ceux-ci doivent compte de vingt voyes au fieur
�Feuillant. M ais comme il eft prouvé que Sauret a été averti
de l’arrivée du ch arb o n , dans le temps même de cêtre~arri-~
v é e , ce n’eft plus Girard qui en eft refponfable , mais Sauret. C ’eft au Pont-du-Château que le charbon a dû lui être
conduit ; il a été inftruit de fon arrivée ; de ce moment il
eft à 'fa charge.
2°. C e n’ eft point après coup que Girard a réclamé le
prix du déchargement d’un plus grand nombre de voyes ,
s’il étoit prouvé au procès qu’il en eût reçu davantage. C ’eft
lors de la déclaration qu’il a faite en juftice , c ’eft à la fuite
de cette déclaration , avant qu’il fût en caufe ; & cela eft
aifé à juftifier par les dates. V o i c i , ce femble , com m e il
faut raifonner dans cette conteftation : Girard a reçu une
certaine quantité de charbon pour Sauret , & l’a dans le
temps prévenu de l ’arrivée de ce charbon. Girard a oublié
la quantité des v o y e s ; Sauret ne l ’a point fa itm e fu r e r , &
n’en peut énoncer la quantité, que d’après le nombre de fes
-voitures ; mais il n’a retiré ce charbon de deflus le p o r t ,
que dans l’efpace de deux m o is , il ne peut donc en fixer la
q uantité: à qui donc s’adreflfer pour la connoître? aux livres
journaux refpe£tifs. Sauret n’en tient point. L e journal du
fieur Feuillant eft en règle , p ro p re , écrit dans toute la con
tenue de chaque page , tenu par un commis qui n’a d ’autre
occupation que celle d’y porter les expéditions jour par jour ,
. qui n’a eu nul intérêt à faire un faux dans ce l i v r e , & qui en
a affirmé la fincérité. Si cette affirmation n’a pas été fuivie
d’un ju g e m e n t, c ’eft qu’il reftoit à prouver que Sauret avoit
é té prévenu du fécond envoi; le fieur Grimardias ayant affiiré
qu'il avoit été prévenu du premier, comme il eft démontré par
fa lettre du j août 1785: , à Girard. O r il n’eft pas poiïïble de
confondre le premier envoi avec le charbon qui s’eft trouvé à
la fin de feptembre au P o n t-d u -C h â tea u , & que S a u r e t , fur
l ’indication de Girard , convient d’avoir retiré , à com m en
cer de la fin de ce m o is , ou du commencement d’o£tobre.
Sauret a donc connu ce fécond e n v o i } lors de ion arrivée
�au Pont-du-Château. Sauret eft donc refponfable des deux
e n vois, c ’eft-à-dire , de vin g t voyes.
Réplique rclaùve a la trolfième objection.
L e fieur Feuillant n’a point dit dans fon mémoire , ni
prétendu q u i , dans le cas où Girard n’auroit délivré que
douze voyes à Sauret , quoiqu’il en eût reçu v i n g t , Sauret
fût refponfable de vingt voyes envers lui; il a dit que Girard
avoit été commis à la réception par F e u illa n t , & au déchar
gem ent par S a u r e t , & que dans le cas où^ Sauret n’auroit
retiré que douze v o y e s , au lieu de v in g t, l ’arrivée des vin g t
voyes prouvée , & les deux expéditions connues dans le
temps par Sauret , ce dernier feul en étoit refponfable. E t
i ° . Sauret a remis le c h e v a l, prix des dix-huit voyes , fur la
lettre du fieur Feuillant ; Feuillant ne propofe pas à Sauret
.V^-Td’aller le recevoir chez G i r a r d , mais ait qu’il le fera c o n - 7
'B uire ch ez Girard les conventions de la lettre ne font que
la” répétition des conventions verbales. I l avoit donc é t é _
convenu que Girard feroit le commiflio'nnaire des deux ;
"mais fuppofons que Girard ne fût point le commiilionnaire~
réciproque , qu’il fût uniquement celui du fieur Feuillant.
A quoi dans cette fuppofition étoit ob ligé Girard ? à avertir
S a u r e t , aufli-tôt après l’arrivée des bateaux. Girard a rem
pli fa miflion. Si Sauret ne convient pas d’avoir été averti par
G irard du premier e n v o i , il ne peut nier qu’il a connu cet
e n v o i, & qu’il en étoit même inftruit avant Girard , puifqu’il
dû être le lendemain matin de l’arrivée de ces pre
m i e r s bateaux au Pont-du-Château, pour enlever ce charbon.
I l convient qu’il a été averti à la fin de feptembre de l ’arrivée
d e douze voyes , & qu’il les a retirées. E t la fécondé expé
dition eft du 22 feptembre. Il a donc été prévenu des deux
envois. O n a prouvé que le fieur Feuillant cefToit, après ces
prélim inaires, d’en être garant. L e fieur Sauret doit donc
compte de vin g t voyes au fieur Feuillant
�23
f
.
Réplique relative à la quatrième objeâion
L e défenfeur de Sauret prétend que la vérité & la réflexion '
il ont point préfidé à la défetife du Jleur F eu illa n t, & croit le
prouver en difant qu’il étoit aifé de faire attention qu’on ne
peut payer dix fols par v o y e , fans favoir combien il y en a.
L a prétention du défenfeur de Sauret feroit v r a i e , fi celui de
Feuillant difoit que le charbon eft déchargé , fans que la
quantité foit connue des déchargeurs. Ils la connoiffent fur
le rapport qui leur eft fait de la contenue des bateaux. Ils
ne le contremefurent point. Ils fe fient à la foi des lettres de
voiture : en for:e qu’il n’eft point vrai de dire que l’on n 'ap
prend le nombre de voyes , que par le déchargement des
bateaux. L e fait eft que jamais le charbon n'eft contre-m efuré au Pon t du-Château ; & jamais on n’a mis des raifonnements en oppofition a v e c des faits.
.
Répliqué relative à la cinquième objection
Sauret a ignoré ou feint d’ignorer la quantité de charbon
qu’il avoit retiré de chez V ig ier. Il a d’abord dit qu’il n’en
avoit retiré que trois voyes , pour trois & demie ; & enfin
la dame S é v e , fille de V ig ie r , a , pour le convaincre, fait
entendre la fervante qui demeuroit pour lors chez fon p è re ,
& c'eft le tém oignage de cette fille , réuni au compte
des voitures qu’il avoit enlevées , qui a convaincu Sauret
qu’il avoit reçu quatre voyes & demie. D e - là fuit qu’il
n’eft pas exa£t de dire que Sauret s’en eft rapporté au livre
de V i g i e r ; il a fallu le convaincre. La déclaration de cette
fille eft de plus venue à l’appui de ce quJavoit dit le Procureur
du fieur Feuillant ; que le Heur Sauret s’étoit fervi dans fes
enlèvemens de charbon , d’un tombereau frauduleux. E t ef
fectivement cette fervante a dit & affirmé que le tombereau de
Sauret contenoit vingt-une rafes^ qu’elle l ’avoit vu m efu rer,
�& q u e Ton M aître avoït fait des reproches à Sauret de ce qu’il
avoit chargé à ion tas fans avertir perfonne de la maifon. O r
Sauret prétendoit q u e c e tombereau n econ ten o it que dix-huit
r a fe s ,& il n’a fait d’autre réponfe au reproche qui lui a été fait
fur cette contenue , finon que ce tombereau s’étoit élargi par
l ’u fa g e .T o u t homme raifonnable fentira le ridicule de cette
défenfe de Sauret dans une accufation d’une telle importan
ce. L£contenju^_de__çe__tombereaufera3^
ouvrir Tes yeux fur le point eifentiel de la conteftation.
C O N C L U S I O N.
,
J
-1
4" 7
'
f
V
L e livre de Girard , agent intermédiaire , ne peut faire
foi. Son tém oignage verbale , réclamé par S a u r e t , à la
requête duquel il a été o u ï , vient à l ’appui du livre du
fieur Feuillant. Celui - ci eft en r è g l e , & attefte deux en
vois. Girard rapporte une lettre d ’avis de fix voyes , du
y août 178^ , par laquelle il appert que Sauret a été
prévenu de cet e n v o i , & a dû fe trouver le lundi au
r o n t - du - Château , pour le recevoir. I l a été prouvé ,
foit par les expreilions de cette l e t t r e , foit par l ’obtention de la fentence rendue en faveur de Sauret , contre
le fieur Feuillant ; fentence qui montre le befoin le plus
preffant de charbon , de la part de Sauret ; qu’il a néceffairement enlevé ces fix voyes , dans le temps de l’arri
v é e , ( le 8 août 1785: , ) que ce charbon ne peut par c o n féquent faire partie de celui que Sauret a appris de Girard 9
être fur le port , à la fin de de feptembre , & qu’il con
vient d’avoir retiré dans le temps ; cette date eft celle de l ’expé
dition des quatorze v o y e s , parties de Brafiac le 22 feptembre.
_
S a uret a donc retiré fix voyes le 8 août , & quatorze
— ^ c o m m e n c e r de la fin (Je feptembre.
^
D e p lu s , le charbon n’eft jamais contremefuré au P o n t-C h âtea u ; Girard par là même s’en eft rapporté à la
bonne foi des lettres d’avis qui annonçoient la contenue
bateaux. L a condition de Sauret a dû être la même.
�II n’a fait efFe&ivement fon com pte j félon Iuï - m êm e
que fur le nombre de voitures qu’il a
fait conduire
du Pont - du - Château à R io m . O r la contenue de fon
tombereau a certainement induit Girard en erreur fur
le nombre fixe des voyes du fécond envoi , attendu ,
i° . que celui - ci a perdu la lettre d’avis de cet envoi.
2°. Q u e , la différence de douze voyes avouées , à qua
torze voyes expédiées , s’explique par la contenue de ce
tombereau , qui eft d’un feptième en fus de ce que Sauret
déclare qu’il contenoit ; ce qui opère précifément , a ve c
même nombre de voitures , la conduite de deux voyes
de plus.
- Sauret en outre ne tient point de livre journal ; Feuillant
feul eft en règle à cet é g a r d , & fon commis, teneur de ce livre,,
en a attefté la fincérité. C e livre feul doit donc faire foi.
Sauret eft donc refponfable de vingt voyes envers le fieur
Feuillant. L e s quatre voyes & d em ie, dues au fieur S é v e ,
on t tourné uniquement au profit de Sauret ; elles font
donc à fa charge. Sauret doit donc être débouté de fa
demande incidente contre le fieur Feuillant , condam né au
paiement de quatre voyes & demie envers le fieur S év e ,
& à celui de deux voyes envers le fieur Feuillant , fous
la dédu&ion de ce qui peut être dû à Sauret pour le
montant des frais de la fentence du 30 juillet 1 7 8 ; , & à
tous les dépens.
M onjieur B O I S S O N ,
-
Juge
F l o u r i t
en chargé.
,
Procureur.
�CONSULTATIONS.
E C onfeil foufligné , qui a vu les mémoires , les pièces
y mentionnées , &, la C o n fu lta tio n , délibérée à R io m
le 6 du préfent mois :
E S T D ’A V I S que la prétention du fieur Sauret n’eft
point fondée , & que la demande incidente de deux voyes
a e charbon , qu’a formée contre lui le fieur F e u illa n t , paroît
abfolument inconteftable.
L e livre journal qu’ a rapporté le fieur Feuillant , eft des
plus réguliers, & il prouve clairement que le fieur Feuillant
a fait deux envois de charbon pour le com pte du fieur
Sauret , l ’u n , de fix v o y e s , en deux bateaux, le f août
17$$ ; le f é c o n d , de quatorze voyes y aufli en deux ba
teaux , le 22 feptembrc fuivant.
C es deux envois ne peuvent être conteftés ; ils font
avoués par Sauret ; & G i r a r d , fa&eur commun des deux
parties, les a atteftés dans fa dépofition juridique.
I l ne refte donc plus qu’à favoir fi ces deux envois ont
été réellement reçus par S a u r e t , à leur arrivée au P o n t du - Château , & c ’eft de quoi il n’eft pas permis de dou
ter , d’après le livre journal du fieur F e u illa n t} q u i paroît
être à l'abri de tout foupçon.
Sauret ne défavoue pas ces deux envois ; il ie. retranche
à dire qu il n a pas reçu la quantité exprimée ; qu’il peut
fe faire que Girard en ait retenu une partie , & que dans
ce c a s , c’eft au fieur Feuillant à exercer fon recours contre
Girard. V o ilà quel eft le feul argument que propofe le fieur
Sauret ; argument qu’il eft facile de réfoudre.
i ° . L e fieur Sauret eft convaincu de mauvaife foi dans
la c a u fe , rélativement à la manière dont il s’eft défendu
vis - à - vis la dame Séve , au fujet des quatre voyes & de
mie de chajbon , dont elle lui a demandé le p a ie m en t,
L
�27
¿c au fujet auflî de l’abus de confiahce qu’il a commis lors
de la délivrance de ces quatre voyes & demie de charbon.
O r ) il eft de principe qu’en fait de c o m m e r c e , celui qui
eft convaincu de mauvaife foi fur un article , laiiTe fur fon
com pte de bien violents foupçons fur les autres articles
de délivrances qui lui ont été faites } quoique par d’autres
Marchands.
20. Girard a dépofé dans la caufe , & il a d'ailleurs tenu
un livre journal.
Sa dépofition conftate les deux envois faits par le fieur
F e u i l la n t , & elle laiffe de l’incertitude fur la quantité de
ces deux envois : il ne dit pas qu’il eft afluré qu’ il n’y a
eu dans ces deux envois que douze voy es de charbon ; il
dit qu’il ne s’en rappelle p o i n t , mais qu’il n’a payé que
pour douze voyes , & que s’il y en avoit davantage , le
prix de déchargement du furplus étoit dû.
C ette dépofition n’attelle donc rien de certain ; elle
laifle fur la quantité des deux envois la plus grande in
certitude , & le livre journal du fieur Feuillant n’en laiiTe
aucune.
3°. L e livre journal de Girard n’eft qu’un vrai c h iffo n ,
& d’ailleurs très - infidèle : il donne le 2^ août pour é p o
que de la délivrance faite à Sauret des deux envois du
fieur Feuillant ; tandis que le premier eft du j août s
& le fécond n’eft que du 22 feptembre.
C om m ent concevoir que Girard a pu délivrer à S a u r e t ,
au 2 ; août , le fécond envoi du fieur Feuillant , qui
étoit de quatorze voyes ; tandis que ce fécond envoi
n ’eft parti de BrafTaget que le 22 feptembre fuivant ?
V o ilà donc l’infidélité du livre journal de Girard bien
prouvée , & le livre journal du fieur Feuillant n’eft pas
môme taxé d’inexa&itude.
Q u on rapproche ces deux livres journaux , on verra
aifément que celui de Girard n’a été fait qu’après coup ,
& fur la rélation de Sauret lui - même , qui , pour
diminuer les frais du déchargement qui étoient pour fon
�Compte , lui a déclaré qu’il n’y avoit que douze v o y e s ;
ôc c ’eft fur cette déclaration que Girard , qui étoit de
bonne foi , a mentionné fur fon livre qu’il n 'a v o it été
payé que fix livres pour les frais du déchargement.
Qu*on rapproche encore le livre journal de Girard de
fa dépofirion juridique ; on voit que l’un & l ’autre font
en contradiction. L e livre journal ne parle que d’un feul
envoi fait par le fieur Feuillant ; la dépofition fait men
tion de deux expéditions. D ans le livre journal il paroît
qu’il n’a été payé que pour douze voyes de déchargement ;
dans la dépofition , Girard dit qu’il ne fe rappelle pas
qu’elle étoit la quantité de charbon , quJil n’a été payé que
pour douze voyes de déchargement , & que s’il y avoit
une plus grande quantité de ch a rb o n , les frais du déchar
gem ent lui font dûs.
L e fieur Feuillant n’a point de recours à exercer contre
le fieur Girard ; il a vraiment e n v o y é , en deux fois , les
vin g t voyes de charbon , mentionnées en fon livre journal f
& ce l i v r e , non fufpe£t, en fait foi.
'
Girard convient avoir reçu les deux envois ; il a donc
reçu les vingt voyes. Il a délivré à Sauret les deux envois.,
à mefure qu’ils lui font parvenus , & celui-ci eft forcé de
convenir que la délivrance lui a été faite en deux fois ; c ’eft
donc vingt voyes que Girard lui a délivrées au Pon t - du Château. C eft pour le compte de Sauret que le charbon a été
déchargé fur le p o r t , 6c dès ce m om ent la perte fortuite
eft retombée fur lui.
O n ne préfume point qu’il en ait é té fouftrait fur le
p o r t , & il y a tout lieu de c r o i r e , d’après les circonftances , que Sauret a réellement voituré ch ez lui la totalité
des v in g t voyes , m a is , dans le cas co n tra ire , ce feroit ü.
faute , s’il étoit furvenu du déchet fur le port.
Il faut donc tenir pour certain que Girard a délivré à
Sauret toute la quantité de charbon qui lui a été adreiTée
par le fieur Feuillant. L e livre journal du fieur Feuillant
prouve qu’il y en a voit v in g t voyes. O n a rapporté une
lettre
�' #
t
a i > .
lettre de l u i o u d e f o n co m m is , qui fait foi que le premier
envoi étoit de fix voyes ; pourquoi ne rapporte - t - o n pas
auffi la féconde lettre , pour le fécond envoi du mois de
feptembre ? C ’eft parce que cette féconde lettre prouveroit
démonftrativement que le fécond envoi é toit de quatorze
voyes. T o u t porte à croire qu’elle eft entre les mains de
Sauret , foit qu’elle lui ait été adreffée directement , foit
qu’elle lui ait été enfuite com m uniquée par Girard.
O n ne peut pas préfumer que le commis du fieur
F e u illa n t, qui avoit eu attention de donner avis du premier
envoi , quoiqu’il ne contînt que fix v o y e s , ait n égligé de
donner avis du f é c o n d , qui en contenoit quatorze.
Pourquoi ne rapporte - t - o n que la lettre du premier
envoi ? C ’eft pour faire croire que le fécond n’a pas é té
plus confidérable que le prem ier, & c ’eft en quoi la bonne
fo i de Sauret doit être fufpectée.
Enfin , fa mauvaife foi eft prouvée au p r o c è s , com m e
o n l 'a déjà obfervé , foit par la manière dont il s’eft co m
p o rté dans le principe de la conteftation , vis - à - vis la
dame S év e , foit en retirant le charbon que le fieur V ig ie r
lui avoit vendu ; foit enfin par la circonftance que ce n’eft
qu’incidemment que Sauret a imaginé de fe replier fur le
fieur Feuillant ; & il eft plus que vraifemblable qu’il n’auroit jamais formé contre lui la demande incidente d’une
v o y e & demie de charbon , fi la dame S éve ne l’eût ja
mais recherché pour la valeur de quatre voyes & d em ie,
dont Sauret eft encore fon débiteur.
D é lib é ré à R io m , le 24 O ctobre 178 7. T O U T T É E t
L A P E Y R E , A N D R A U D
& M A N D E T .
A
R I O M , de l’imprimerie de M a r t i n D É G O U T T E ,
Im prim eur-Libraire, prcs la F ontaine des Lignes. 17 8 7,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Feuillant. 1787]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boisson
Flourit
Toutté
Lapeyre
Andraud
Mandet
Subject
The topic of the resource
marchandises
troc
charbon
créances
transport fluvial
livres-journaux
mines
poids et mesures
Description
An account of the resource
Mémoire pour le sieur Feuillant, défendeur et demandeur. Contre Gervais Sauret, défendeur et demandeur. [suivi de]Consultations.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1787
1785-1787
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
29 p.
BCU_Factums_B0123
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_B0122
BCU_Factums_B0124
BCU_Factums_B0125
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53962/BCU_Factums_B0123.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pont-du-Château (63284)
Brassac-les-Mines (63050)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
charbon
Créances
livres-journaux
marchandises
Mines
poids et mesures
transport fluvial
troc
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52952/BCU_Factums_G0409.pdf
c883bd36b01fac14dd31ab1ef012bd41
PDF Text
Text
»»v
RÉFLEXIONS
SU R
LE. M ÉM O IRE IM PRIM E’
ET
SIGNIFIÉ
D U SIEUR DE COMBAREL.
PO U R P ierre FAUG ERES,M archand du Bourg
du V ernay , Défendeur en retrait féo d al, &
Demandeur en garantie.
,
,
CONTRE ledit Sieur de COMBAREL D e
mandeur & la Dame C e l i n d e l a REYNERIE , f on époufe Dêfendereff e en garan-
L
,
E s confultations imprimées & fignifiées de la part du
Sieur Faugeres au Sieur de Combarel, établirent fa
défenfe à la demande en retrait féodal , pleinement &
dans la plus grande éxactitude des principes. Il n’eft donc
befoin que d’oppofer de fimples réflexions au M ém oir
�que , de fa part, vient de faire iignifier le Sieur de Com
barel.
^
L e Sieur de Combarel dit à la page 13 que , le retrait
féodal ejl aujjî favorable que le retrait lignager Veft peu.
C ’eft-à-dire que fous l’ombre de cette faveur on croit pou
voir faire fléchir les réglés. Mais cette aifertion' eft bienfauiTe, fur-tout dans la Coutume d’Auvergne & dans.prefque toutes les Coutumes qui donnent la préférence au re
trait lignager fur le retrait féodal. Elle eft bien fauife en
Auvergne où la Coutume foumet l’exercice du retrait féodal
& du retrait lignager à toutes les mêmes; formalités dont
le Défaut- d’obfervation emporte la déchéance de l’un
comme de .l’autre.
L e Sieur de Combarel dit à la, page 18 & à la page 20
que, la foi-hommage ne met pas L'Acquéreur à couvert du
retrait féodal.
Erreur intollérable ; lé principe eft contraire. Voici les
preuves.
Art. 21 de la Coutume de Paris. » Si le Seigneur féodal
» a chevi ou baillé fouffrance, le Seigneur féodal ne peut
». plus retenir ledit fief par puiiTance de, fief , pour l’unir
» & mettre en fa table à caule d’icelle vendition «.
Qui a donnéfouffrance , c’eft-à-dire, qui a,donné terme
ou délai pour rendre la foi.
' ‘‘
^
La Coutume de Paris ne dit pas, qui a reçu lafoi.\. mais
la raifon en eft bonne ; parce qu’il efivindubitable-f que
quand le Seigneur a reçu la foi de l’Acquéreur*,x il ne peut
plus exercer le retrait féodal. C’eft Dumoulin lui-même
'qui le dit fur Je §. 12 , gî'. 1. n. 2. verb. a ï e ç u de l’an
cienne Coutume de Paris. Jecunda fpecies , dit-il , refpicit
admiffwnem inclientiam , cujus utpote indubitabilis, non
fit in textu mentio.
» Puifque la fouffrance accordée exclut le Seigneur du
» retrait, à plus forte raifon en eft-il exclu par la foi-hom» mage reçue del’Acquéreur, ce qui eft fans doute «. C ’eft
ainfi que s’explique Ferrieres fur l’art. 2 1. de la Coutume
de Paris, & tous les autres Commentateurs ont parlé de
même.
�—Non pas feulement tous les Commentateurs de la Cou
tume de Paris , mais tous ceux des autres Coutumes qui
ont eu occafion d’en parler ; mais généralement tous les
Auteurs.
Les Arrêts auili ont jugé de même. Voici la chronolo
gie de ces Arrêts.
26 Mars i6o\ , Arrêt rendu en la Grand-Chambre du
Parlement de Paris, qui juge qu’après la foi-hommage ren
due au Seigneur du fie f, il ne peut plus demander le re
trait féodal. L ’efpece de TArrêt eft rapporté, par Peleus,
en fes actions forenfes/liv. 3. act. 3p.
28 Février i ^ n •> Autre Arrêt du Parlement qui a
également jugé que le Seigneur, après avoir reçu fonVaffal en foi 6c hommage, ne peut plus retirer l’héritage par
puiffance de fief : l’efpece en eft dans Soëve , tome i er. ,
cent. 4. chap. 1 ; .
i er. Avril 17 13 , Troifieme Arrêt rendu en la Cham
bre des Comptes de Montpellier , qui juge qu’un Acqué
reur de terre ou fief relevant du R o i , ne peut, après en
avoir prêté la foi-hommage , être évincé & dépoiTédé par
un donataire du Roi du droit de retenue par prélation ou
retrait féodal. L ’efpece & les moyens font rapportés dans
le 2me. tome du Recueil d’Augeard, page y 84..
11 Mai 17 2 2 , Quatrième Arrêt du Parlement de Paris
au rapport de M r. l’Abbé Pucelle, qui a déchu du retrait
féodal le ceflionnaire du Roi , contre l’Acquéreur qui
avoit rendu la foi & hommage, & fait enfaifiner. Cet Ar
rêt eft rapporté par Dénizard au mot retrait féo d a l} & on
en trouve l’efpece & les moyens dans le Plaidoyer de Mr.
Cochin au i er. vol. de fes Ouvrages , pag. 8ç.
21 Fevrier 1737* Cinquième Arrêt de la Chambre des
Comptes de Paris, qui jugela même chofe que celui du Par
lement de 172*2, Denizard le rapporte au même endroit.
6 Septembre i738,Sixiem e Arrêt de la Chambre des
Comptes, qui juge encore la queftion de la même maniéré..
L ’efpece en eft rapportée dans la Confultation de M e. le
Gouvé,
A 2,
�r ’
4
Ainfi, trois Arrêts du Parlement , deux de la Chambre
des Comptes de Paris , & un de la Chambre des Gompde Montpellier. C ’eft donc une Jurifprudence univerfelie
& commune à tous les Tribunaux»
Contre tous ces Arrêts , contre tous les principes, on
oppofe l’Arrêt folitàire du 16 Juillet. 1 7 6 2 , rendu pour le
Comte de Langhac contre le Sieur Ribéyre. Arrêt de circonftances , & dont trouve la réponfe dans la confultative imprimée de M e. le Gouvé^ qui avoit lui-même plai
dé dans cette affaire.
On peut renvoyer pour voir la queftion traitée dans fon .
étendue 9 au plaidoyer de Mr. Cochin que l’on a déjà
cité.
Mais il n’eft pas ici queftion de la foi-hommage, on n’en
a parlé quepour répondre au Sieur de Combareî, & pour
détruire les conféquences d’une erreur que l’on vouaroit
ériger en principe.
Même erreur à l’égard de renfaifinement, qui} comme
. la reception de la foi - hommage eft un a£te qui exclut éga-~
lement le retrait féodal. Ici , il n’y a plus à citer les en
droits du Mémoire du Sieur de Combarel : c’eft le fond de*
l’Ouvrage.
Si , par fa nature 6c par fa vertu propre , renfaifinement
■eft exciufif du retrait féodal , ce feroit une abfurdité de
cïire que le délai du retrait féodal ne court que depuis l’-enraifinement : Ci c’eft une abfurdité , ce n’eft point ce qu’a
dit-ni pu dire l’Edit de 17x0 , ni ce qu’a jugé ni pu juger
l ’Arrêt de 174.9 , à fuppofer que cet Arrêt exifte.
Enfaifinement & faifine ne font qu’un même mot : c’eft
l’iinveftiture que le Seigneur d’un iïef donne à fon nouveau
.vaifal, par laquelle il loue & approuve la vente , & agrée
ce nouveau vaifal.
Anciennement la propriété d’un héritage tenu en fief
nepouvoit être vendue que par la permiihon du Seigneur
duquel il étoit mouvant.
On conçoit que dans ce premier état le cotiÎentèment
�$©•
'du Seigneur a la’vente ¿toit exclufrf du retrait féodal fui
cette même vente.
• Par cette opération , le Seigneur deifaififfoit l ’ancien
propriétaire , ion vaffal, & faififfoit l ’acquéreur qu’il accep
tait pour fon vaffal à la place de l’ancien.
Lors de la réformation des Coutumes, on a le plus gé
néralement adopté j que la propriété des immeubles pouvoit être transférée fans qu’il fût befoin d’enfaifiner pour
opérer l’expropriation: néanmoins plufieurs Coutumes ont
laiifé fubfifter la Loi de la néceifité de la faifine. Dans la
plupart même de celles qui femblent l’avoir abrogée, l’ufage en a démeuré, parceque dans ces mêmes Coutumes ,
quoiqu’on y ait établi la réglé, ne prendfaifine qui ne veut.
Cependant , par une difpofition allez inconféquente, on a
laiffé fubfifter la réglé antécédente, que le délai fixé par
les Coutumes pour le retrait lignager ne commençoit que
du jour de la faifine pour les héritages tenus en cenfive ; "
enforteque les acquéreurs de ces héritages fe font toujours
enfaifiner pour faire courir le délai du retrait lignager.
Les premiers Edits fur l’enfaifinement des biens qui font
de la mouvance du Roi étoient modélés fur l’abrogation
dê la faifine dans les diverfes Coutumes , & l’enfaifinement
n’étoit ordonné que dans celles qui avoient confervé l’an
cien ufage, & iaiffé fubfifter la faifine.
Par -des règlements poftérieurs , l’enfaifinement a été
rendu d’un ufage univerfel & a fait une Loi générale pour
tous les biens de la mouvance du R o i, dans quelque Cou
tume qu’ils fuifent fitués.
Mais cette extenfion n’a point changé la nature &L l’effét de la faifine ou enfaiiinement qui eft en lui-même l ’inveftiture du nouveau vaffal de la part du Seigneur (jui le
reconnoît & qui l’agrée , 5c qui, par conféquent , l’ayant
reconnu & agréé, ferûit contraire à lui-jncme s’il vouloit
enfuite l’évincer par un retrait féodal.
Si la réception en foi exclut le retrait féodal, 'c’eft par' Ce que, par cette réception en foi, le Seign'eur a reconnu
�<>
-ôc agréé le nouveau vaffal. L ’enfaifinement ayant le mê
me effet, doit donc produire la même conféquence.
On a pour garant de cette conféquence les Jurifconful• tes. d’un nom connu , Auteurs des Confultations qni ont
été imprimées & figniiiées. On a plus encore., dans la natu
re & l’objet de l’enfaifinement, qui eft l'acte par lequel le
Seigneur reconnoît i’acquéreur & l’agrée pour fon vaffal.
~ Il feroit donc de toute abfurdité de ne faire courir le
délai du retrait féodal que du jour de l’enfaifinement, dès
qu’il eft de toute évidence que l’enfaifinement eft lui-même
exclufif du retrait féodal.
Ainfi , quand l’Édit du mois de Mai 17 10 a dit en l’art.
IV.,que tous les acquéreurs & nouveaux poffeiTeurs desterres,
fiefs 6c héritages relevant du Domaine ne pourroient acqué
rir aucune prefcription que du jour de l’enfaifinement ; il
n’eft pas permis de fuppofer que cette Loi a voulu parler
du délai du retrait féodal, puifqu’il eft de la nature de l’enfaifinement d’exclure le retrait, il n’eft pas poiïible de fup
pofer dans une Loi une abfurdité fi palpable.
D ’ailleurs , qu’eft-ce que le retrait féodal? C ’eft une fa■culté accordée au Seigneur de retirer les chofes de fa mou- _
vance dans un délai fixé par la Loi même qui lui accorde
- cette faculté. L ’exercice de la faculté dans le délai, eft la
condition de la faculté elle-même. S’il vient après le délai,
ce n’eft point une prefcription qu’on lui oppofe , c’eft une
déchéance, faute d avoir rempli la condition inhérente à la
faculté , & de-là vient que le temps du retrait court contre
les mineurs & tous autres que les Loix affranchirent des
- prefcriptions ordinaires & proprement dittes prefcriptions.
-On ne croit pas même qu’il y ait aucune de nos Coutumes,
qui, parlant de la déchéance du retrait exercé après les dé
lais qu’elles ont fixé, ait employé le mot de prefcription.
Difons donc, comme on l’a dit dans les Confultations
imprimées, que l’Édit de 17 1 o ne peut s’entendre que des
prefcriptions de 10 , 20 & 30 ans, c’eft-à-dire des prefcrip'tions proprement dites, étant d’ailleurs impoffible de fup-
�7
.
pofer que la Loi ait fait courir l’actiôn en retra^ ^Ur j°ur
de l’enfaifinement, qui eft incompatible avec cette atlion.Nous voici arrivé à cet Arrêt de 1749 , que l’on a ^UP“
pofé, de la part du Sieur de Combarel, avoir jugé en theîe que le délai du retrait féodal ne pouvoit courir que du
jour de l’enfaifinement.
On avoit dit pour le Sieur Faugere dans une- obfervation mife à la fuite des Confultations imprimées , que cet
Arrêt qu’on n’avoit encore trouvé que dans le Dictionnaire
du Domaine, étoit fufpe£t, pour la feule fource où on l’avoitpuifé, d’autant plus fufpetl, que nous avons des recueils
d’Arrêtspoftérieurs, faits par d’autres Auteurs,& qu’aucun n’a
fait mention de celui de 1749 ; & comme le Sieur de Com
barel avoit dit que fon confeil avoit d’ailleurs parlé de cet
A rrê t, fur la connoiifance perfonnelle qu’il en avoit, pour
avoir vu dans le temps les Mémoires de cette affaire , ôc
en avoir conféré avec le DéfeniTeur du Duc de Richelieu ,
on avoit invité le Sieur de Combarel a nommer fon con
feil pour pouvoir juger du dégré de confiance que pouvoit
mériter cette aifertion.
L e Sieur de Combarel , dans fon Mémoire imprimé ,
répète l’aifertion , cependant il ne répond pas à l'invita*tion qu’on lui avoit faitte par cette obfervation qu’il ap
pelle observation anonyme ; mais pourquoi anonyme ? N ’eftelle pas fignéepar le Procureur de Faugeres? Et les Requê
tes & le Mémoire du Sieur de Combarel ont-ils d’autres
fignatures que celle de fon Procureur ?
_ *
L e Sieur de Combarel pourra voir à la fin de ces réflexions,
que le DéfeniTeur de Faugeres n’a aucun intérêt de garder
l'anonyme.
Revenons à l’Arrêt de 1749. Il eft dit dans le Diction
naire du Domaine, que cet Arrêt juge » que le défaut d’en» faifinement d’une acquifition faite par un Secretaire du
» Roi dans la mouvance de Sa Majefté , donne lieu à l’exer5) cice du retrait féodal, quoiqne l’acquéreur eut été reçu
.» eu foi & hommage «.
�’* " *
_
8.
On 11’avoit jamais connu cet Arrêt que dans le Diction
naire du Domaine, on-vient de le retrouver dans une au
tre fource qui n’eft guere.s moins fufpe£le ; c’eit c’ans une
Inftruclion fur l ’enfai finement imprimée à Paris en 1771 ,
chez Lamefie 3 Imprimeur des Fermes du Roi j ait, Bureau
général des Aides > Hôtel de Bretonvilliers.
Voici' ce qu’on lit à la fin de la page 64 , & au commen
cement de la page 6$.
■
» Arrêt de la Cour du Parlement, rendu fur les conclufions
» de Mr. le Procureur-Général «.
» Qui adjuge à M. le Maréchal Duc de Richelieu, dona» taire de Sa Majefté , du droit de prélation de la Terre
» de IVJarenne , le retrait féodal de ladite Terre acquife
» par M. Vallet de la Touche, Secretaire du Roi , quoi3) qu’il eût été admis en foi par la Chambre des Comptes,
» & qu’il eût fourni fon aveu avant la demande en retrait»
» faute par lui d’avoir, en exécution des Edits & Déclarar
» tions des mois de Mars 1673 , Avril . 1 6 , Décembre
» 1 7 0 1 , Juin I7051, Mai 17 10 & Décembre 17 2 7 , exhi» bé au Receveur-Général du Domaine fon contrat pour
» être enregiftré , ôc fa Requête tendant à être adonis en
» foi «•, .
Nous devons au Sieur de Combarel quelqu’autres inftructions fur cet Arrêt , qui nous prouvent qu’il pourroit même
nous en donner davantage en nous reprefentant les fources
fm il lesapuifées,puifqu’aulTi-bien elles ne fe trouvent point
ni dans Je D.i&ionnaire du Domaine ni dans rinftru&iojj
fur l’enfaifinement, imprimée chez Lamelle , Imprimeur
des Fermés.
- L e Sieur de Combarel nous dit page 1 j de fon M ém oir
re , que la Terre de Marenne, dont ilétoit queftion lors de
cet Arrêt, eft fituée dans la Coutume de Xaintes : il nous
■apprend que le Sieur de la Touche, acquéreur de cçttp
Terre , avoit fait infinuer fon contrat le i cr. Avril 17^5- ^
�qu'il avolf rendu la fol-hommage lé 4 Mai’fuivimt,- & four*
jai fon aveu le 21 Juin. Ilnqijs ^iTure que le don de prélation accordé à M, le Maréchal de Richelieu ¿toit du 27J
Février 17 4 6 , & qu’il avoit formé fa demande en retrait
féodal le 27 Mars. Il faut que le Défenfeur^du Sieur
dç Combarel ait confervé les Mémoires de cette affaire, ôc
en ce cas, pourquoi ne pas les communiquer pour nous
faire connoître bien exaûement l’efpece de l’Arrêt ? Ou il
a une mémoire bien mçrveilleufe pour avoir retenu tant
de dates fx exactement. Remercions4 e toujours des éclairuifements qu’il a bien voulu nous donner ; nous allons con
tinuer nos réflexions en conféquence.
Nous allons prouver d’abord que le retrait féodal avoit
été exercé par M. le Maréchal de Richelieu dans le délai
du retrait.
'
Nous trouvons dans le Coutumier général, les Coutumes
de Xamtonges, au Siege ôc relfort de Saint- Jean-d’Àngely/
La i re. note qui fe trouve fur cette Coutume, eft celle-ci. i «.
» Cette Coutume porte improprement le titre de Cou» tume de Xaintonges : ca r, elle n’eft en ufage que dans
» le reifort du Siege de Saint-Jean-d’A ngely, 6c ne s’ob» ferve point dans le refte de la Province, qui efteatre la
» Charente ôc la Garonne, que l’on dit entre-mer ôc Cha» rente , lequel canton du rejfort de Xaintès > fe régit par
» Droit écrit 6cc «,
La Terre de Marennçs eft fituée entre la Garonne 6c
la Charente , ou entre-mer ôc Charente > ce qui eft la mê
me chofe. Elle n’eft donc pas régie par la Coutume de
Xaintes, elle l’eft par le Droit écrit.
Or , en Droit écrit, on ne connoît point d’autre délai
pour le retrait, foit lignager, foit féodal, que celui de l’an
ôc jour , ôc ce délai ne court , aux ternies de l’Édit de
1 703 j qui le portetainfi expreilément, que du jour del’infinuation.
.
n
Ainfi, la chofe paroîtroit claire : le contrat d’acquifition
du Sieur de la Touche avoit été mfinùéle i er. Avril 1 7 ^ ,
�& le retrait féodal de 7vï. le Maréchal de Richelieu avoit
été exercé le 17 Mars 174 6 , par conféquent il étoit venu
dans le délai du retrait,
:
Mais ne diilimulons pas q u e, outre les Coutumes de
Xaintonges au Siege & reffort de Saint-Jean-d’A ngely, il
y a de plus Vufanee de Xaintonges entre-mer'& Charente,6c
que quoique la note qu’on a ci-devant rapellée dife que ce
canton fe régit par Droit.écrit, elle ajoute » excepté dans
» les cas compris dans ion ufanee, particulière «.
Voici ce que porte l’article 7 de l’ufance de Xaintonges,
entre mei: ôc Charente.
» L e Seigneur de fief, ayant jurifdiftiôn ou non , a droit
» ' de prendre les lods: ôe ventes des chofes vendues en fon
>1 fie fy ou icelles prendre Ôc retenir par puiffance de fie f,
» ( excepté le Roi & l’Églife qui n ont point la retenue'féo>y, date )rs 'en rembôurfant l’acquéreùr du fort principal &
» loyavix-coûts dans\ huitaine à compter du- temps que
» racqüéreur auroit exhibé 6c aíTéveré fon Contrat, &jufques
yr à Texhibitión- & affévération , le Seigneur n ejl point en deîîi irieure^ fmonxque l’acquéreur eut pofledé les chofes par
»;!lùiacqiiifes durant 30 ans
‘ S i ; cette- difpoíitíon de; lufanee de Xamtes , - entre mer
ô&ttfrafttate efl abfervée il s’eniuiyroit que l ’Arrêt de 1745^
rte^péíjb^páb exifter , puifqiiè dans. le canton du reffort de
Xaintes qui eft entre mer 6c Charente, le Roi n a point la
riàefiUâ féodale, v
,
cm 'doit encore remarquer la i rivnote qui fe trouve
átí Goutumier ^général-fur l’ufance de Xaintes. Il 'y eft dit
que cette ufanee, qui né:fut. uoirit comprife dans.ila j-édactiôn des 'Goütümesr/'» n’eft.’ atïfeirvée qu’en trois cas ; le i er.
vi lorfqiie les^patties en demeurent d’accord ; le feCond,
itíflórfqúellb a.été- confirmée par divers jugements, ;ôc;fur*
»fffdue-pîir Anrêc ^.le .trodfîéüie, après une preuve faite par
» notoriété «.
de-iy^p^exifte , il' en réfulte que l’art. 7 de
l^f&Ijcd'de'Xàiines'n’eft point dans aucun derCes trois cas^
�X\o
11
& par conféquent qu’il n’eft point obfervé. Mais alors 'le
retrait féodal dans ce canton du reifort de Xaintes n'e/l
»lus fujet à d’autres Loix que celles du D roit. écrit, & cea pofé , il refte prouvé que le retrait féodal de M. le Ma
réchal de Richelieu avoit été exercé dans le temps. ' -jp y,
Allons encore plus loin , & fuppofons même queTarî. :,?.
de l’ufance de Xaintes fut obfervé , à l’exception de l’èxclufion du retrait féodal qu’il donne au R oi ôc.à l’Églife ;
effaçons de l’article ces mots ( excepté le Roi & VÉglife qui
n'ont point la retenue féodale ) , & nous allons, voir ,q,ue
M. le Maréchal de Richelieu devoit être encore dânsde
temps du retrarit.
<\-:i:
j
yl
En effet, aux termes de cet article , le délai du retrait
fixé à huitaine ne court que du jour que l’acquéreur z exhi
bé & afféveré fon contrat, & faute de l’exhibition 6c aiTévération , le retrait -dure trente ans.
//I - '
Il faut fuppofer que la Terre de Marennes eft dans la mou
vance immédiate d u 'R o i, fans quoi il n’auroit pu donner
le droit de prélation.
.'
Alors, comment le Sieur Valet de la Touche, acquéreur
de cette T e rre, auroit-il pu faire courir ice :délai .de hui
taine pour le retrait féodal ? Ce n’auroit pû êtxe qu’eti e,xhir
bant & affévérant fon contrat au Seigneur immédiat.-' o a
Il ne pouvoit pas le faire au R oi dire£lement , lé refpecb dû a la Majefté Royale ne permet pas -aux vaiTaux de
s adreffer dire&ement à la perfonne du Prince : il ne p’ou?
voit donc avoir recours qu’à l’Offiçier qiie le Roi a îrevêtu
de fon autorité pour ces fortes d’ailes j Bc cet Officier êft te
Receveur rdu Domaine.
•:•
. '’ . i t '•
"H
Si le Sieur Valet efrtiexhibé fon- contrat à, cet Officier \
il l’auroit enregiftré ; mais dans l’efpece du Sieur .Valet de
la Touche, il n’y avoit point d’enregiftremeiit, par.conféqu^nt point d’exhibition ,t ôcapar conféquent-auifi..,\ le.’délai de huitaine, qui /aux- termes de l’article p. de l’ufance
de Xaintes,'ne commence que du jour de L1exhibition., n’avoit pas pu courir. Donc encore, en.ce ¿¡as, M .le Mard-
{
^
�' chai de Richelieu aurok exercé Ton retrait -féodal dans Iç
•délai'du retraite
'
L ’Arrêt de 1749 n’auroit donc adjugé le retrait féodal
que 'parce-qu’il auroit été exercé dans le temps-du^ retrait
& qu il n’y ’atiroir pas eu encore d’enfaifinement exclufif de
reti'ài’t1; ce ¡qui eft:bien différent de ce qu’on prétend qu’il
a'jiigé..
1
Il éft vrai qu’on pourroit fe fervir de cet Arrêt , pour
'direYqu’il a jugé que faction en retrait féodal étoit toujours'
; ouverte ^quoique l’acquérçur eût été reçu en foi-homma.-ge. -Ce n’eft pourtant pas encore ici notre efpece , puifquç
le retrait dont il s’agifi'oit avoit toujours été- ex.ercé dans le
délai de lufance de Xaintes , & qu'ici , il ne l’a été que
plus demeuf ans après le délai de la Coutume d’Auvergne.
Mais, pour l’honneur des réglés , on ne doit même pas
croire que l’Arrêt de 174*9 , toujours fuppofé exiftant , ait
jugé qu’on pouvoit exercer le retrait féodal après que l’ac
quéreur avoit été admis en foi. Les fourçes où l’on.puife
cet Arrêt nous apprenent le contraire..
L ’Inftru&ion imprimée fur l’ënfaiftnement qui rappelle cet
Arrêt , dit que le retrait fut adjugé »faute d’avoir exhibé>
» au Receveur-Général du Domaine, le contrat pour être
» enregiftré, & la Requête pour être admis en. foi «.
.
^ L ’Arrêt a ju gé, conformément à l’ufance de Xaintes ,
que le délai du retrait n’avoit pas couru faute d'avoir
e-xhibe.
Mais il n*a pas jugé que l’admiflion en fo in ’étoit paa ex
clu five du retrait ; il a jugé autre chofe.
Il a jugé , relativement à l’admiiTion en foi du Sieur Va
let de' la Touche, que cette admiilion étoit nulle: en voici
la preuvei
- L ’A rrêt, teL que l’avance l’Auteur de l’Inftru£tion, porte,
» faute-,'en.exécution de plufieurs Édits & Déclarations ,
». entr’autres nommément de VÊdit de Décembre i j o i
» à’zvowexhibé au Reçeveux. du Domaine la Requête j>Quf
» être admis en fo i «.
•
t
�V3
I/art ai de cet Edit de Décembre »701 , porte en effet:
» voulons que les Requêtes tendantes à la réception des
» foi & hommages leur foient communiquées ( aux Rece» veurs des Domaines ) avant que nos Procureurs don» nent leurs conclufions «.
L ’Arrêt de 174P n’auroit jugé autre chofe , fi ce n’eft
que pour la que réception en foi puiffe produire l’effet d’ex
clure le retrait féodal, il faut qu’elie foit faite avec la folemnité que le Roi a établi dans les pouvoirs qu’il a don
nés à fes Officiers de recevoir la foi-hommage en fon nom.
Il a jugé que pour être valable, la réception en foi devoit
être précédée de la communication au Receveur du Do
maine dé la Requête tendante à y être admis , & que fans
cela elle étoit nulle. Et ce préjugé laiife toujours fubfifter
le principe général que la réception en foi , quand elle
eft faite régulièrement, eft exclufive du retrait féodal.
Voilà bien des difcuifions que nous auroit épargné le Défenfeurdu Sieur de Combarel s’il eût communiqué les éclairciffements particuliers qu’il a certainement fur l’Arrêt de
1749 j le*JVlémoires dans lefque].s il a pris les noms , les
dates, &c. Mais ces difcuifions omettent au moins dans tout
fon jour cette vérité que 1*Arrêt de 1745) n’a certainement
pas jugé cette abfurdité, que le délai du retrait féodal ne
peut courir que du jour de l’enfaifinement, qui eft un acte,
qui, par fa vertu propre exclut le retrait féodal.
Enfin , le Sieur de Combarel prétend que la Cour a ellemême jugé la queftion dans l’affaire de la Dame Marquife
de.Langhac , contre le Sieur Marie Pelliffier.
On a maintenant fous les yeux la produ&ion du Sieur
Pelliffier dans cette affaire. On ouvre fon Mémoire
imprimé ; on y voit qu’il difoit , quil avoit pris pojfeffa n le ig Octobre 1 764 & que ce retrait n avoit été exercé que
le 10 Mars i j 6 $ ainfi , trois ans & demi trop tard.
On lui oppofe l’Édit de 1710 .
Il difoit quil y avoit folidemetit répondu dans fes falvations du 28 Août tyyo
On a recours à ces falvations , & voici tout ce qui yeft dit fur cela.
�14
La Dame, Marquife de Langhac>oppofe le défaut d’enfaifinement du contrat d’acquifition du Sieur Marie prefcrit
par l'Édit de tyo 3 & la Déclaration de i j 10 , portant qu au
cune prescription ne pourra courir avant l'enfaifinement : elle
avoue > que quoique plu/ieurs Coutumes du Royaume ne faffent courir le temps du retrait féodal que dujour que le contrat
a été enfaifitié par le Seigneur. (Cela eft faux pour le retrait
féodal. Il n’y a aucune Coutume qui en faiTe courir le dé
lai du jour de la faifine ou enfaifinement , ce qui eft une
nouvelle preuve que la faifine exclut le retrait féodal). Néan
moins notre Coutume n exige pas Venfaifinement , & fa it
courir le temps du retrait féodal du jour de la,prife de poffejjion.
Elle ne pourroit donc oppofer ce défaut d’enfaifinement ,
que dans le cas où les .chofes acquifes feroient dans la mou
vance immédiate du Roi & il ejl démontré quil 11y en a
aucune.
Voilà , encore une fois , tout ce qu’avoit 'dit- le Sieur
Marie fur cette queftion de l’enfaifinemeut. -J\. ne croyoit
pas , on le voit bien, qu’il fût néceflaire de la«traiter : il
plaçoit fa principale confiance dans les moyens expofés trèsamplement dans fon Mémoire & dans fes écritures tendants à
prouver que les chofes acquifes n’étoient pas dans la mou
vance immédiate du R oi , & ces moyens lui réuflirent
en effet pour, la plus grande partie des objets de fon acquifition. Mais il ne croyoit pas néceflaire de traiter la quef
tion de l’enfaifinement , ôc les Sentences ôc les Arrêts
ne jugent que lesqueftions qui font traitées & controvërfées
par les parties. Le Sieur Marie pouvoit traiter la queftion,
ôc s’il leût fait, c’eût été fans doute avec fuccès ; mais
s’il ne l’a pas fait par trop de confiance en fes autres moyens,
il ne faut pas dire que la Sentence de la Cour ait jugé une
queftion que le Sieur Marie n’a point traitée , 6c qu’il îi’a
point controverfée.
Une Sentence rendue fur un point non contefté , non
débattu, eft proprement une Sentence par défaut.’ -Il ferait
�fmgulier d’oppofer le préjugé d’une Sentence par défaut,
dans une queftion importante , & contre l’évidence des
principes.
Il faut prévenir une objection qu’on ne manquerait pas
de nous faire , en s’autorifant du nom même du Défenfeur
du Sieur Marie dans cette affaire, pour en tirer cette conféquence qu’il n’auroit pas manqué de voir le moyen & de
le faire valoir dans toute fa force, s’il l’eut jugé bon.
Oh ! par exemple, il eft certain que s’il eût vu le moyen,
il l’eût infailliblement fait valoir avec toute la profondeur
d’un Jurifconfulte confommé & digne de fa réputation.
Mais il n’en eft pas moins vrai qu’il n’a point vu le moyen
ou la néceiiité d’en faire ufage.
On en refte convaincu, quand on fait attention qu’il y
avoit eu dans cette affaire plufieurs écritures & très-volumineufes, parce que le nçmbre des objets le comportoit, &
deux Mémoires imprimés de la part du Sieur Marie , & il
n’a rien été dit fur la queftion que le peu de lignes qui ont
été tranfcrites ci-devant , en lettres italiques. Concluons
donc que la Cour, par fa Sentence dans cette affaire , n’a
jugé ni entendu juger une queftion fur laquelle le Sieur Ma
rie n’infiftoit pas & qu’il n’avoit pas traitée.
Après cela, que feroit-il befoin d’ajouter que même le
Sieur Marie a interjetté appel de la Sentence , quoiqu’elle
lui fut favorable fur le plus grand nombre des objets, &
que cet appel eft pendant ?
L e Sieur de Combarel oppofe encore une Sentence ren
due en la Chambre du Domaine de Paris, qui , dit-il , a
jugé de la même maniéré ; elle eft rapportée par Denizard
dans une note au rrrot Domaine.
Denizard rapporte l ’Édit de 1 7 1 0 , qui porte que les ac- '
quéreurs des fiefs qui font dans les mouvances du R o i, ne
pourront acquérir aucune prescription que du jour de l’enfaifinement. La note qui vient à la'fuite, dit feulement que
la Chambré du Domaine de Paris a ju gé en conformité de
cetEdit j, fu r lu prefcription. Mais l’Auteur ne dit pas que'
C
�dans cette Sentence il fut quçftien du retrait féodal, &
cela eft impofïible , puifque h conteftacion n’étoit qirçntrç
le Receveur du Domaine ôç des particuliers qui étoiem
peut-être acquéreurs de fonds dans la mouvance du Roi ;
encore la note ne le dit-elle pas.
On trouve la même Sentence dans le Dictionnaire du
‘Domaine , où il eft dit qu’il étoit queftion des droits de
lods; toujours fource fufpecte. Mais l’action pour les droits
de lods n’eft fujette qu’à la prefcription de 30 ans , qui eft
une prefçription ordinaire &' proprement dite v ôc par conféquent ce pouvoît être le cas d’appliquer 1 Edit de 17 1 o ,
fans qu’on puifle en argumenter contre le retrait féodal,
parce que a un côté ce retrait , comme le lignager , n’eft
qu’une faculté conditionnée de l’exercice dans le temps
fixé par la même Loi qui accorde la faculté , & qui n’eft
fujet qu’à une déchéance, faute d’avoir accompli la condi
tion fine qud non \ & que d’autre part, l’Édit de 1 71 0 ne
peut s’entendre du délai du retrait féodal, étant abiiirde
de ne faire courir ce délai que du jour de l’enfaifinement,
q ui , par fa vertu propre, exclut le retrait féodal ? & eft in
conciliable avec lui,
. Ces réflexions ne font faites que pour venir à l’appui des
confultations que le Sieur Faugeres a fait imprimer : c’eft
dans ces confultations qu’il place fa plus grande confiance.
On n’a plus qu’à parler de la demande en garantie que
le Sieur Faugeres a exercé, contre la Dame de Combarel.
Mais auparavant il faut relever une petiteffe du Mémoire
du Sieur de Combarel, à la page 17.
S 'il ¿toit permis, dit-il, de mêler , avec desfuffrages refpeâables celui du Défendeur > on rappelleroit ici qu’il a dit
lui-même au Procès j que f i on lui avoit déclaré la qualité
féodale du Pré quil achetoit ¿ il auroit fa it enfaifiner fon
contrat ; ainfi il reconnoiffoit que fans cette formalité l ’ac
tion en retrait féodal fubfifteroit toujours.
C ’eft dans l’exploit qui contient la demande en garantie ,
que le S r. Faugeres a formé contre la Dame de Combarel,
qu il
�qu’il a dit qu’il auroit fait enfaifiner fi on lui avoit déclaré
la qualité féodale. Mais j pourquoi donc diiïimuler que
par ce même exploit, il eft dit précifément que la deman
de en garantie‘ eft formée fans autrement approuver la de
mande du Sieur de Combarel fans préjudicier aux moyens
de droit q u il a à objecter contre ladite demande ?
C ’eft en conteftant le retrait féo'dal , que Faugeres
a dit que s’il pouvoit avoir lieu il devoit être garanti par
la Dame de Combarel, héritiere du vendeur de Faugeres,
& qui ne lui avoit point déclaré la qualité féodale dans la
vente, qui, non-feulement ne la lui avoit pas déclarée ; mais
qui en avoit déclaré une contraire en vendant l’héritage au
c e n s fi cens y a\ ce qui étoit dire bien clairement quel héri
tage étoit ou en cenfive ou en franc-aleu, c’eft-à-dire roturier.
Eh quoi ! toutes les fois qu’il y aura une demande princi
pale quoique mal fondée & qu’on conteftera,’ parce qu’en
même-temps on aura formé une demande en garantie , le
Demandeur principal pourra dire que la demande en garan
tie eft un aveu de la demande principale ? Voilà qui eft bien
miférable & bien fait pour donner une idée de la demande
du S r. de Combarel où l’on eft obligé d’employer de fi pe
tits moyens.
L a demande principale eft mal fondée : cela n’empêche
pas que,en la conteftant,onaitpu former fubfidiairement une
demande en garantie, c’eft fe qui ce voit tous les jours.
Or , le Sieur Faugeres l’a formée ôc il a pu la former à
tout événement.
En effet , y ayant eu de la part du Sieur Faugeres plus
de neuf ans de poifeilion depuis fon acquifition , n’eft-il
pas évident que s’il eût été néceffaire pour faire courir le
retrait féodal qui n’eft que de trois mois, que fon contrat
eût été enfaifiné, le Sieur Faugeres auroit eu tout le temps
de faire faire cet enfaifinement, de même qu’il avoit pris
l’a&e de poffeflion pour faire courir le délai du retrait lignager l
C
�i8
En . ce^casf on vendeur l’auroit manifeft.ement induit en
erreur , en ne lui déclarant pas la, qualité féodale ,~ôc <au
contraire en donnant .à l’héritage une'qualité roturiere.
r Eft-ce donc qu’on voudroit dire quele vendeur n’eil pas
autant.garàiït de la qualité que de la quantité 1rdé :la chofe
vendue? On renverôit aux éléments. duDroit-quiconqu«
oferoit le prétendre.
.
‘
Il eft bien étrange que l’on vienne dire que la garantie
ne feroit pas fondée , parce que la qualité [féodale eft plus
précieufe que.la qualité roturiere : a-t-on prétendu-diré «ne
vérité'abfolue ?"On ne le pouvoit pas : car, qui eft-ce qui
ignore qu’un roturier qui achete un fieféftiiijet au droit de
franc-fîèf, toujours plus onéreux que dés droits de lods ,
parce qu’il fe renouvelle plus fouvant ? Et outre-le droit
de franc-fief, il faut confidérer encore les frais de foi-hom
mage ‘ , aveu & dénombrement , ôc toutes lès: fuites '¡qui
fe répètent aux diverfés mutations du Seigneur ôcr4 u-vaffai.
Mais il eft fouv.erainement ridicule de dire que le Sieur
Fauger.es ne pouyoit pas ignorer là qualité féodale du* fonds
qu’il achetoit , ayant entendu liii-même publier au Prône
de fa Paroiffe pendant trois Dimanches
Vav-eu
'dé
nombrement du f i e f de la Reynerie qui comprenoit cet héri• Tl*
~
t:
r
tage.
Trois Dimanches , confécutifs fans-dôute. On eft iurpris
x^ue l’on n’ait pas encore cité les règlements eccléfiaftiques ,
qui ordonnent à tous les fideles d'aflifter à la MeiTe deParoiife où fe fait le Prône, au. moins un de trois Dimanches
confécutifs.;pour en conclure encore pliis affirmativement,que
Je S r. Faugeres, qui eft bon chrétien, n’a pis pu ne pas en
tendre une fois la- publication de l’aveu & dénombre
ment.
Il, faut l’avouer , on ne peut pas répondre férieuièment
à idçjs'pbjè&toris comme celle-là. - Cependant voici'urie' réponfe prife de la date de l’extrait de baptêmedu^Sieur Fau
geres.', A l’époque de la publication de l ’aveu ôc dénom^
�ip
brèment, le Sieur Faugeres n’avoit pas l’âge de 7 ans,
&c. &c.
Voilà les objections & les réponfes. Les moyens de la
demande en garantie font dans les Requêtes du Sieur
Faugeres.
^
....
j .
Monfieur de V IS S A G U E T * Préf ident & Rapporteur.
M e.
A N D R A U D ' Avocat.
JA L L O T Procureur.
A
R I O M.
Chez M a r t i n D É G O U T T E , Imprimeur - Libraire
Place des Taulles 1774.
.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Faugères, Pierre. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissaguet
Andraud
Jallot
Subject
The topic of the resource
retrait lignager
retrait féodal
coutume d'Auvergne
jurisprudence
foi-hommage
saisine
prescription
délai
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Réflexions sur le mémoire imprimé du sieur de Combarel. Pour Pierre Faugères, Marchand du Bourg du Vernay, Défendeur en retrait féodal, et Demandeur en garantie. Contre ledit Sieur de Combarel, Demandeur, et la Dame Celin de La Reynerie, son épouse, Défenderesse en garantie.
Table Godemel : Retrait : 4. l’exercice du retrait féodal après le délai déterminé par la coutume, est-il nul par déchéance ? de quelle époque court le délai ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1745-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0409
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Vernet-la-Varenne (63448)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52952/BCU_Factums_G0409.jpg
coutume d'Auvergne
délai
doctrine
foi-hommage
jurisprudence
prescription
retrait féodal
retrait lignager
saisine
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53844/BCU_Factums_M0533.pdf
ec6f1aa7926bcbab06fb5460a68d1030
PDF Text
Text
CONSULTATION.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu l’acte de déclaratio
n
de mariage, fait en exécution d e l’é d it du mois d e novem bre 17 8 7 ,
par A m a b le -G ilb e rt D u fra isse et F élic ité -A n to in e tte -M a g d e leine Guyot de Saint-Armand, devant le juge de paix de la section
de la Place-Royale, à Paris, le 3 mai 1 7 9 1 ; et sur ce qui lui a été
verbalement exposé;
que le cit. Dufraisse est aussi bien fondé à soutenir
la validité de l'inscription qu’il a faite sur les biens de la défunte
dame Guyot de Sain t-A mand, son é p o u s e , pour la sûreté des
gains et avantages matrimoniaux à lui acquis par son prédécès,
et à attaquer, pour cela, de nullité le divorce que ladite dame
Guyot avoit fait prononcer contre lui; que le cit. G eorges-Fran çois D u pleix, avec lequel ladite dame de Saint-Amand a convolé
à de troisièmes noces à la suite d ’un second mariage contracté
E
st im e
A
�( 2 ) .
en conséquence de ce divorce, scroit peu recevable et fonde a
attaquer de nullité le mariage dudit cit. Dufraisse avcc la demoi
selle Guyot de Saint-Amand.
E n effet, s’il est vrai que le divorce que la demoiselle Guyot
de Saint-Amand avoit fait prononcer contre le cit. Dufraisse soit
nul et irrégu lier, il en résulte, par une conséquence nécessaire,
tirée de l’art. X du tit. I V de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , quelle
n’a pu contracter de nouveaux liens, d’abord avec le cit. de Bèze,
e t, après le décès de celui-ci, avec le cit. Dupleix. Il en résulte
également qu’elle n’a pas cessé, jusqu a 1 époque de son décès,
d’être femme du cil. D uf r a is se je t , pai une dei nieie conséquence,
que les gains et avantages matrimoniaux , stipulés par le contrat
de mariage en faveur du survivant des deux époux , ont été
acquis au citoyen Dufraisse par le prédécès de ladite demoiselle
G uyot de Saint-Am and.
O r , il ne peut s’élever un doute sérieux sur la nullité du
divorce obtenu par la demoiselle Guyot de Saint-A m and contre
le cit. Dufraisse. Ce divorce étoit fondé sur l’inscription du cit.
Dufraisse sur la liste des ém igrés, qui est l’un des sept motifs
déterminés dans l’art. I V du paragraphe premier de la loi du 20
septembre 179 2. Il ne pouvoit donc, aux termes des art. X V I
et X I X du paragraphe II de la même l o i , être prononcé que
par l’officier civil du domicile du cit. Dufraisse, c’est-à-dire, par
celui de la ville de Lliom , dont le cit. Dufraisse a toujours été
habitant, et où la dame Dufraisse habitoit elle-même peu de
temps avant son divorce.
D e ce que la demoiselle Guyot de S a in t-A m a n d , au lieu de
se pourvoir devant la municipalité de R io m , pour oMeuir ce
divorce, comme le lui prescrivoient ces articles, l’a au contraire
demandé à la mun icipa lité de Sam t-A m an d, à laquelle son mari
étoit absolument étranger, il s’ensuit que ce divorce est absolu
ment nul et irrégulier, et que, pur cette raison, il n’a pu avoir
�( 3 ).
l’effet de dissoudre les liens qui unissoient la demoiselle Guyot
de Saint-Amand au cit. D ufraisse, ni de l'autoriser à en contrac
ter de nouveaux.
Cette loi n’excepte qu’ un seul cas où le d ivorce, pour cause
déterm inée, puisse être demandé ailleurs que devant l'officier
public du domicile du mari ; c’est celui de l’absence d'un des
époux depuis cinq ans, sans nouvelles : dans ce cas, elle autorise
l’époux demandeur en divorce à se p ou rvoir devant l’officier
public de son domicile. Mais la dame Dufraisse ne se trouvoit
pas dans ce cas, puisque la cause du divorce étoit, suivant elle,
l’émigration de son mari ; et q u e , dans ce cas, l’article X I X cidessus cité la renvoyoit expressément au domicile du m ari, et
devant l’officier public de ce domicile.
E u vain, pour échapper à la nullité évidente de ce divorce,
nullité qui entraîne celle du mariage que la demoiselle Guyot
a contracté depuis avec le cit. D u p le ix c e lu i-c i entreprendroit-il
de contester lui-même les qualités du cit. D ufraisse, et d’atta
quer ;\ cet effet la validité du mariage de ce dernier avec la
demoiselle G uyot de Saint-Amand : le cit. D upleix seroit tout
à la fois non recevable et mal fondé à faire usage d’un moyen
aussi odieux.
I
Non recevable, d’abord, parce qu’ il ne peut avoir plus de
droits que la demoiselle Guyot de Sa in t-A m an d , à laquelle il
a su ex to rq u er, en l’épousant, la donation de ses biens; et que
celle-ci a recon n u, de la manière la plus formelle, la validité
de son mariage avec le citoyen Dufraisse, en recourant à la voie
honteuse du d iv o rc e , comme au seul moyen de rom pre des
nœuds indissolubles.
Cette reconnoissance de la validité du mariage du citoyen
D ufraisse, quoiqu’elle fut seule suffisante pour opérer une fin
de non recevoir insurmontable contre l’objection du citoyen
D u p le ix , n’est pas au surplus la seule dont le cit. D u fra ’s e
A a
�(4),
puisse cxciper. L a demande en séparation de biens contre lui
formée par la demoiselle G uyot de Sain t-A m an d, le jugement
par lequel elle l’avoit fait p ro n o n ce r, l’acte de naissance et l’acte
mortuaire d’un enfant né de son mariage avec le cit. Dufraisse,
la qualité d’enfant légitime qui lui a été donnée, la possession
publique qu’elle a eue de l’ état de femme du cit. Dufraisse, la
qualité qu’elle en a prise dans tous ses actes, la reclusion qu’ elle
a éprouvée en cette qualité par suite de 1 inscription de son
mari sur la liste des é m ig ré s, sont autant de îeconnoissances
non équivoques, de sa p a r t , de la validité de son mariage avec
le cit. Dufraisse, et par conséquent autant de fins de non rece
voir qui s’éleveroient contr’e lle, si elle ,venoit, après c o u p ,
révo qu er en doute la validité de ce même mariage.
Si donc il est v r a i, comme on ne sauroit en douter, qu’à
supposer la demoiselle G uyot de Saint-Amand encore vivante,
elle ne pourroit être admise à attaquer un mariage qu’elle a
tant de fois reconnu valable, et plus formellement encore par
sa demande en d iv o rc e , à combien plus forte raison le citoyen
D u pleix ne peut-il y être re ç u , lui q u i, au moyen de la nul
lité du divorce, nullité qui entraîne avec elle celle de son ma
ria g e , devient aussi étranger à la famille Guyot de Saint-Amand
qu’ à celle du cit. Dufiaisse.
M a is, quelque victorieuse que soit cette fin de non recevoir
contre le cit. D u p le ix , le cit. Dufraisse pourroit sans danger lui
en faire le s a c r i f i c e , parce que les m o yen s, au fo n d , ne sont pas
moins t r a n c h a n s pour établn la régulaiîte de son mariage avec
la demoiselle Guyot de S a in t - A m a n d , et pour repousser la
critique que le cit. D upleix pourroit se permettre à cet égard.
A vant d’entrer en matière sur ce p o in t, il n’est pas inutile
de commencer par observer qu’à l’assemblée constituante , le
cit. Dufraisse avoit été l’un des principaux opposons à la loi
qui fut qualifiée de constitution civile du clergé; qu ’après même
�(5)
que cette loi eût été ad op tée, il alla jusqu’à protester contre.
D e là il est aisé de juger que le cit. D u fraisse,. dans son
opinion religieuse, ne rêgardoit pas comme catholique la nou
velle église qui fut établie en vertu de cette constitution3 qu’il
regardoit, au contraire, comme seuls et véritables pasteurs, les
ministres, q u i, faute de prestation de.serm en t, avoient.été dé
pouillés de leurs bénéfices >, et m,êin,e déportés ou reclus.
* Cependant, cette église constitutionnelle étoit la seule qui fût
réputée catholique aux yeu x de la l o i , la seule devant laquelle
des catholiques pussent contracter mariage. L e cit. Dufraisse
s’en regardant. comme sép&ré , •et* ne.voulant pas reconnoitre
ses ministres, voulant cependant donner une iorine légale au
mariage qui avoit été arrêté entre lui et la demoiselle Guyot
de S:iint-Arnaud , il eut recours au je /‘o rmes qui ayp.ient été
introduites par. l’édit du mois .de novem bre 1 7 8 7 ? alors en
pleine vigu eu r, pour assurer .l’état civil xk; ceux qui ne faisoient
pas profession de la religion alors, doniûfante en France.
Il fit en conséquence publier ses )}ùns-(Jan.s la. forme prescrite
par cet édit, tant dans la paroisse du ..domicile qu’iLa voit a lo rs,
comme représentant de la nation', que dans.çelle, où habitpit la
demoiselle Guyot de Saint-Aiuand , et même dans -celle^de sçs
tuteurs. A la suite de ces publications', et d’ une dispense par jui
obtenue dans la forme de cel édit, il se transporta le 3 mai J.791 >
avec la demoiselle Guyot de SaintrAmand, et ses tuteurs, assisté
de quatre témoins, devant le juge de pqix de la section de la
P la ce -R o y a le , pour y déclarer leur mariage , conformément à
Particle X V I de cet édit.
Ce juge reçut leur déclaration *i e t , sur le vu des publica
tions et dispenses de bans, du consentement de la mere du cit.
Dufraisse , et de celui des tuteurs de la demoiselle G uyot de
Saint-Amand , il déclara aux parties jr.aù nom de la lo i, co-n-
A3
�(6)
form ém ent à l’art. X V I I I du même é d it, quelles étoient unies
en légitime et indissoluble mariage ; inscrivit cette déclaration
jsur deux feuilles de papier destinées à servir de registre , les
signa, et les fit signer par les parties et par les témoins.
Toutes les formes, prescrites par l’édit de novembre 1 7 8 7 ,
ayant été scrupuleusement observées , voilà donc un mariage
légalement c o n t r a c t é , un mariage qui ne peut etre raisonna
blement critiqué par ceux même qui aui oient qualité sullisante pour cela.
Vainement v o u d r o i t - on se faire un m o y e n , de ce qu’aux
termes de l’ ar tic le I er- de cet é d i t , la naissance , le mariage et
la mort de c e u x des Français qui faisoient profession de la reli
gion c a t h o l i q u e , ne pouvoient être constatés que suivant les
rites et les usages de ladite religion, autorisés par les ordonnances,
p ou r en conclure que le cit. Dufraisse et sa fem m e, qui faisoient
profession de cette religion , ne pouvoient emprunter pour leur
mariage les formes de Tédit de 1 7 8 7 , et voudroit-on opposer
au cit. Dufraisse, et la déclaration de catholicité, laite par sa
femme et l u i par devant notaire , le même jour 3 mai 1 7 9 1 ,
et la bénédiction nuptiale q u ’ils se firent donner le même jo u r ,
par un pretre.
Oui le cit. Dufraisse étoit catholique. O u i , la demoiselle
G ivot d e S a i n t - A m a n d l’étoit au ssi, du moins à cette époque.
Mais il faut le dire , ils ne l’étoient pas dan» le sens que les
lois at t a c h o ie n t alors à ce mot. Ils ne regardoient pas comme
catholiques les ministres de l’église constitutionnelle; ils les
regardoient , au c o n t r a i r e , comme séparés de l’église; ils ne'
pouvoient donc être obligés de recevoir de leurs mains le sacre
ment de mariage. Ils étoient donc obligés de recourir aux formes
introduites par l’edit de 17 8 7 : et ils le pouvoient d’autant mieux,
qu’ils étoient ou croyoient etre d une religion différente de celle
�t7)
qui jouîssoît du culte public en F ra n c e ; et que cet éclit embras
sent évidemment dans ses dispositions tous ceux q u i professeroient une l’eligion autre que la religion nationale.
Peu importe donc qu’à la suite de leur mariage , le cit.
Dufraisse et sa femme aient fait, par devant notaire, une décla
ration de catholicité : cette déclaration n’avoit pour objet que
de prévenir le do u te, que la forme de leur mariage auroit pii
faire naître dans la suite sur leur orthodoxie ; mais elle ne peut
porter la plus légère atteinte à la validité de leur mariage, quant
au c iv il, dès que toutes les formes prescrites par l’édit de 17 8 7
y ont été observées ; de là surtout qu’il est manifeste que la
religion catholique, dont les époux déclaroient faire profession ,
n’étoit pas la même que celle à laquelle la loi donnoit cette
qualification en France.
L a bénédiction nuptiale, que se firent donner le cit. Dufraisse
et sa fem m e, par un p rê tre , est encore plus indifférente. E lle
ne prouve pas davantage qu ’ils fussent de la religion nationale,
elle prouve même le contraire, puisque ce p rê tre , le célèbre
abbé M aury , aujourd’hui cardinal , n’a fait ce mariage qu’en
vertu de la permission du cit. V e y t a r d , curé de St. G e r v a is ,
qui étoit alors devenu victime de son refus de prestation de
serment.
Il est vi’ai que de là même que ce mariage a été fait eri vertu
de la permission du cit. V e y t a r d , q u i, suivant l u i , avoit perdu
la qualité de curé de St. G e r v a is , le cit. D upleix pouri-oit e n
faire résulter une autre nullité du m ariage, c o m m e non fait
coram proprio parocho; mais cette nullité, à la supposer aussi
réelle qu’ elle est chimérique et même dérisoire, ne frapperoit
que sur le sacrem ent, tandis qu’il ne s'agit, dans l’espèce, de les
envisager que du côté c iv il; et qu e, sous ce point de v u e , l a
parfaite observation des formes prescrites par fé d it de 17 8 7 ,
le rend à l'abri de toute atteinte.
�C8) .
Aussi la dernière ressource du cil. D upleix-paroit être de
soutenir, qu’à supposer même que le mariage du cit. Duiraisse
eût été légitimement contracté, il auroit perdu son effet, faute
par le cit. Duiraisse de s’être conformé à Tari. I X de la sec
tion I V de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , sur le mode de cons
tater l’état civil des citoyens; article qui vouloit que si anté
rieurement à la publication de cette loi quelques personnes
s'étoient mariées devant des officiers civils, elles fussent tenues
d’en faire la déclaration , dans la huitaine , devant 1 olficier civil
de la municipalité de leur domicile, qui en dresseroit acte sur
les registres , dans les formes prescrites par celte loi.
' Mais, q u a n d cette loi pourvoit s’appliquer au cit. Dufraisse,
au moins est-il v r a i que le délai de îiuitaine, qu’elle accordoit
pour faire c e ll e déclaration, n’étoit pas fatal, et que cette loi
ne p r o n o n ç o i t pas la peine de nullité.
M a is, d’un autre côté, ce qui est plus tranchant et plus décisif,
c’est que cet article ne pouvoit avoir en vue que les mariages qui
avoient pu se faire devant des officiers civils, sans avoir préa
lablement observé les formes légales, les mariages qui n’étoient
pas déjà consignés dans les registres destinés à constater l’ élat
ci vil des citoyens.
O r , le mariage du cit. Dufraisse n’ étoit pas dans ce cas, puis
qu e, d’ une p art, il avoit été fait avec toutes les formes légales
prescrites par l’édit de novembre 1 7 8 7 , puisque, d ’un autre
c ô lé , le registre sur lequel il avoit été inscrit, avoit déjà été
ou dû être r a p p o r t é dans le dépôt public destiné à recevoir les
registres de l’état civil- A quoi bon auroit-il donc été nécessaire
de réitérer la déclaration d’un mariage déjà consigné dans ces
registres, d’un mariage d’ailleurs précédé de publications et de
toutes les formes requises par la loi ?
On ne se permettra à cet égard qu’une seule observation qui
paroît décisive; c’esl que de même que le cit. Dufraissè et sa
�(9)
femme n'auroient pas élé obligés de réitérer la déclaration de
leur m ariage, en vertu d e là loi du 20 septembre 1 7 9 2 , s'ils
l’eussent fait devant le curé ou le vicaire de la paroisse, quoi
qu’ en exécution de l’ édit de 1 7 8 7 , de même aussi n’ont^ils pu
y être obligés pour s’ être adressés au juge, parce que cette loi
leur laissoit l’option ou de s’adresser au juge ou aux curés et
vicaires, et donnoit le même effet aux déclarations de mariage
reçues par les uns et par les autres, relativement à l’état civil des
citoyens.
On croit donc avoir établi jusqu’à la démonstration les propo*
sitions qui ont été annoncées en commençant, et par cette raison
on passera sous silence les moyens de défaveur qui s élèvent en
foule contre le cit. D upleix. Ce n’ étoit pas assez pour lui d avo ir
épousé la femme du cit. Dufraisse, sans que le premier mariage
fût valablement dissout. Il lui restoit encore à dénoncer le cit.
Dufraisse pour l’empêcher de recouvrer son état c iv il; et il n’a
pas resté en arrière d’ un si beau rôle. L ’odieux d’une pareille
conduite, développé lors de la plaidoierie, doit ajouter le plus
grand poids aux moyens de droit dans lesquels 011 a cru devoir
se renfermer.
D é l i b é r é à Hiom par l’ancien jurisconsulte soussigné, le
28 ventôse an 1 1 de la république.
TO UTTÉE.
L e c o n s e i l SOUSSIGNÉ, qui a vu la consultation ci-dessus
et des autres parts, les actes sur lesquels cette consultation est
fondée, et qui s’est assuré que la contestation à laquelle donnent
lieu les questions résolues par ladite consultation, est pendante
dans les tribunaux du département de la N iè v re ;
E st
e n t iè r e m e n t de
l ’a v i s énoncé en lad. consultation,
�C10 )
et par les mêmes raisons. L ’in térêt, qui ose to ut, a pu faire
élever les questions que D upleix paroît vouloir agiter. Mais la
raison , la loi et la justice concourent pour les décider contre lui.
D é l i b é r é à Riom. le 29 ventôse an 1 1 .
REDON.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture de la consultation
ci-dessus, de tous les actes qui lui servent de base, du mémoire
à consulter, et qui s’est" procuré la certitude que la cause étoit
de la compétence des tribunaux de la N ievre et du C h er,
' A d o t t e absolument les moyens développés par cette consul
tation, en faveur du cit. Dufraisse. Ils démontrent que le divorce
q u ’a fait prononcer la dame Duiraisse, née Guyot Saint-Am and,
est n u l, et que le mariage par elle contracté précédemment est
valable; quainsi le cit. Dufraisse doit obtenir la maintenue de
son inscription au bureau dos hypothèques, et le payement de
tous les gains et avantages stipulés par son contrat de mariage.
Indépendamment des moyens de droit sur la validité du ma
riage, et sur la pleine conservation des gains assurés au citoyen
Duiraisse , les fins de non recevoir à proposer contre son adver
saire sont déterminantes, et 11e permettent pas à D u pleix d’élever
mêm e des doutes sur la validité du mariage de la dame Guyot
Saint-Amand avec le cit. Dufraisse.
D é l i b é r é à R io m , le 29 ventôse an u .
.
VE11NY.
L e C o n s e i l , (pii a vu tous les actes énoncés dans les con
sultations ci-dessus, et pris une lecture attentive de ces consul
tations,
�C 11 )
de toutes les résolutions qui y sont
prises, et en adopte tous les principes et lqs moyens. Il croit
seulement devoir ajouter une observation sur une objection qui
ne paroît pas avoir été prévue.
On opposera p e u t - ê t r e , pour écarter la nullité du divorce
fondée sur ce qu’ il n’a voit pas été prononcé par l’officier public
du domicile du ma r i , mais seulement pour ém igration, l’un
des motifs déterminés par la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , que
l’on doit juger de ce cas déterminé comme de celui où le divorce
est demandé pour cause d’absence depuis cinq ans sans nou
velles; cas auquel le divorce peut être prononcé par l’officier
public du domicile actuel de l’époux qui le demande.
Mais, i ° . il y a une exception particulière dans l’article X V I I
du paragraphe II de la loi du 20 septembre. 17 9 2 , qui, dans
le cas de l'absence, attribue la prononciation du divorce à l’of
ficier public du domicile de l’époux qui le demande; au lieu
qu e , pour toutes les autres causes déterminées du d iv o rc e , la
loi exige généralement le ministère de l’officier public du do
micile du mari ; et l’exception ne peut pas être étendue d'un
cas à l’autre.
E
st
FERM EM ENT
d ’a v i s
20. P û t - o n même étendre l’exception d’ un cas à l’autre, il
iaudroit au moins que Témigralion se trouvât dans les mêmes
circonstances où la loi admet Je divorce pour cause d’absence.
O r , en ce dernier cas, le divorce ne peut pas être demandé
simplement pour l’absence de cinq ans; il faut encore que ces
cinq ans d’absence aient duré sans qu’on ait reçu des nouvelles
de l’absent. M a is, dans le fait particulier, le cit. Dufraissc se
dit êLre en état de rapporter des lettres de sa fem m e, qu’il en
«voit reçues en réponse à celles qu’il lui avoit écrites , mais
dont les dates ne remontent pas à cinq ans avant le d iv o rc e ;
par conséquent il n’y avoit pas eu ouverture au divorce pour
cause d’absence. A in s i, de toute manière, le divorce dont il s’agit
�( 12 )
est nul , pour n’avoir pas été prononcé par l'officier public du
domicile du mari.
D ÉLIBÉRÉ par le jurisconsulte soussigné, doyen des avocats.
A R i o m , le premier germinal an 1 1 .
’
1
Le
c o n se il
A N D R A U D.
SO U SSIG N É , q u i a v u de nouveau les pièces
énoncées en la prem ière consultation ci-co n tre ,
P
er sist e
dans la r é s o l u t i o n q u ’ il avoit déj à p ris e , et adopte
entièrement l'o pinio n des jurisconsultes qui ont délibéré p ré—
cédem m ent.
N u l d o u t e que le divorce est nul et irrégulier ; il ne pou-
vo it être prononcé que devant l'officier public du domicile du
m ari. L ’ état des hommes est sacré aux y eu x de la loi; e t, dans
cette matière où tout est de rig u eu r, on ne peut raisonner d’un
cas à un autre.
2°, L e mariage du cit. Dufraisse est valable ; il s’est conformé
en tous points à l’édit de 17 8 7 . D upleix n’a pas de qualité pour
le contester , e t , s’il n’y avoit pas eu de m a riag e, il eût été
inutile de recourir au divorce.
par l’ancien jurisconsulte soussigné. A Riom ,
le 3 germinal an 1 1 .
PAGES.
D ÉL IB ÉR É
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu la consultation délibérée
le 28 ventôse dernier, en adoptant les moyens qui y sont discutés,,
E S T A BSO LUM EN T DU MEME A V IS ,
D
é l ib é r é
à R i o m , ce 4 ventôse an 1 1 ,
C A T H O L.
l
1■
------------------------------------------
-------------------------------------- ------------------------------------------------
»
A R IOM , de l'imprimerie de L a n d r io t- , seul imprimeur du tribunal d ’appel,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dufraisse, Amable-Gilbert. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Toutée
Redon
Verny
Andraud
Pagès
Cathol
Subject
The topic of the resource
divorces
nullité
nullité du mariage
constitution civile du clergé
émigrés
Description
An account of the resource
Consultation [Dufraisse, Amable-Gilbert]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1787-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0533
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Saint-Ammand
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53844/BCU_Factums_M0533.jpg
constitution civile du Clergé
divorces
émigrés
nullité
nullité du mariage
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53725/BCU_Factums_M0226.pdf
5b8f9f510e08e279dab9a89c07259c28
PDF Text
Text
CONSULTATION
�CONSULTATION.
L e C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu les pièces de
l’instance pendante au tribunal d’appel séant en la ville
et commune de Riom , sur l’appel interjeté par le citoyen
Teyssèdre , du jugement interlocutoire rendu au tribunal
d’arrondissement de M u râ t, le 24 thermidor an 8 , entre
le citoyen D u b o is, in tim é, et le citoyen Teyssèdre,
appelant ;
E s t i m e qu’ il paroîtroit d'abord que le-citoyen T eyssè
dre est, quant à présent, non recevable en son appel.
L e jugement du tribunal n’est qu’un jugement prépa
ratoire qui ordonne, avant faire droit, une seconde visite
par de nouveaux experts. O r , suivant l’article V I de la
loi du 3 brumaire an 2 , on ne peut appeler d’aucun juge
ment préparatoire pendant le cours de l’instruction ; et
les parties sont obligées d’attendre le jugement définitif ;
ce qui ne peut pas leur être nuisible, puisque le même
article ajoute, qu’on ne pourra cependant pas leur opposer
A 2
�.
.
•
.
.
(4 )
ni leur silence, ni même les actes faits en exécution de
jugement de cette nature.
• *
On ne peut pas dire que l’arrêté des consuls, du 18
fructidor an 8 , ait dérogé à la loi du 3 brumaire an 2 ;
d a b o r d , parce que cet arrêté n’exprime point de déro
gation. On ne croiroit pas même qu’un arrêté piît déroger
A une loi. Mais d’ailleurs, cet arrêté, en disant que les
avoués suivront exactement la procédure établie par l’or
donnance de 1667
règlcmens postérieurs, ne peut avoir
aucune application au cas de l’appel d’un jugement prépa
ratoire qui appartient à la discipline de l ’o rd re ju d ic ia ir e ,
et n’a aucun rapport à la procédure que doivent suivre
les avoués ; un acte d’appel n’étant pas même de leur
ministère, mais seulement de celui des huissiers.
•Mais la fin de non-recevoir ne dût-elle pas être accueillie,
l’appel ne seroit pas mieux fondé.
O n veut l’appuyer principalement sur ce que le juge
ment dont est a p p e l, ordonne une seconde visite par
experts; et on s’autorise pour cela de la disposition de
1 article C L X X X I V de la coutume de P aris, qui porte ,
qu en rapport d ’experts on ne pourra demander amen
dement.
Mais premièrement, les coutumes en général n’ont pas
d’einpire hors de leur territoire, et celle d’Auvergne ne
renferme pas de pareilles dispositions.
Pourquoi d’ailleurs nous reglerions-nous plutôt par les
dispositions de la coutume de Paris, dans cette matière,
que par celles des coutumes voisines, comme celles de
Bourbonnais, qui, dans l’article D X X I , a une disposition
absolument contraire à celle de Paris > et qui autorise
�(5)
expressément l'amendement de rapport; et celle de Ni
vernais, chap. X , art. X V I I , absolument conforme à celle
de Bourbonnais? N ’est-il pas reconnu en jurisprudence,
que quand une coutume est muetle sur une question, il
faut se régler p«r les coutumes voisines? Les deux cou
tumes de Bourbonnais et de Nivernais ne sont pas les
seules qui aient une semblable disposition ; i l y en a plu
sieurs autres, parmi lesquelles est celle de M e lu n , article
C L X X X I I I , et celle d’Etampes, article L X X I .
Il y a plus encore : ne sait-on pas que le droit romain
est le droit commun de l’Auvergne ; que la coutume n’en
est qu’une exception , et que c’est au droit romain de
préférence, qu’il faut recourir, pour les questions que la
coutume n’a pas prévues. O r , les lois romaines admettent
l’amendement de rapport, comme on peut le voir dans
la l o i , Jf. D e verborurn obligationibus. Et à eet égard,
il est d’autant plus nécessaire, dans l’affaire présente, de
se conformer au droit romain , que les parties sont dom i
ciliées dans la partie de l’A uvergne régie par le droit écrit.
Mais dans la coutume même de Paris, est-il bien vrai
qu’ il ne puisse pas y avoir d’amendement de rapport ?
L e contraire se démontre invinciblement. Ün se fait un
fantôme de l’articleC L X X X IV " de cette coutume: mais il
est aisé d’en dissiper l’illusion.
Cet article dit bien qu’en rapport d’experts on ne peut
demander amendement de rapport ; mais il est tout de
suite ajouté : P e u t néanm oins le juge ordonner autre
ou plus ample visitation être J a i t e , s'il y échet.
Il est aisé de concilier ces deux parties du même article.
La nouvelle visitation, qu’est-ce autre chose que l’amen
A
3
�( '( 6 )
_
dement de la première ? Mais cette nouvelle visitation
ne peut êlre ordonnée que s’i l j échet.
Ces mots, s il y échet, sont laissés l’arbitrage du juge ;
mais rien n’empêche aux parties de demander cette nou
velle visitation , en exposant les motifs qui la rendent
nécessaire. C ’est alors au juge à peser ces m o tifs, pour
connoître s’ il échet une nouvelle visitation.
E t quand la coutume de Paris avoit dit auparavant,
sa 7is q u o n puisse demander am endem ent, cela ne veut
dire autre chose, si ce n’est qu’on ne peut pas le demander
sans causes et sans motifs légitimes. Mais si les motifs qu’on
expose, manifestent q u i l échet une nouvelle visitation,
soit parce que la première est irrégulière ou insuffisante ;
c’est moins alors sur la demande de la p a rtie , que la
nouvelle visitation est ordonnée, que par l’office même
du juge, qui ne trouve pas dans la première une instruc
tion suffisante.
Aussi comment l’article C L X X X I V de la coutume de
Paris a-t-il été entendu et expliqué par les commentateurs
de cette coutume, et par les jurisconsultes et gens de loi
qui ont pratiqué dans cette même coutume ? L ’explication
qu ils en ont faite est exactement conforme à ce que l’on
vient de dire.
R icard, sur cet article, dit que puisqu’il laisse au juge
la liberté d’ordonner une nouvelle visitation, il estime
que quand le juge reconnoît qu’une première visite a été
mal faite, il peut ordonner d office, pour une plus grande
instruction , qu il en sera fait une seconde \ et on doit
surtout remarquer ce qui est ajouté par R icard, que cette
nouvelle visite a coutume d’être ordonnée aux dépens de
�( 7 )
.
.
.
celui qui la requiert : ce qui fait bien vo ir que la partie
elle-même peut la requérir, puisqu’elle doit être faite à ses
dépens.
A u z a n e t, sur ce même article, dit que 1 article est b o n ,
niais qu’il faut ôter ces mots : sans qu'on puisse demander
am endem ent; car cela se fait tous les jours : mais il faut,
ajoute-t-il, laisser cela à l’office du juge en connoissance
de cause, et obliger la partie qui demande un nouveau
rapport, d’en avancer les frais.
Ferrières, autre commentateur de la coutume de Paris,
sur l’article C L X X X I V , n. 1 6 , dit aussi que le juge peut
ordonner une autre ou plus ample visitation, au cas qu’il
la trouve nécessaire.
,
I/auteur des interprétations ajoutées au commentaire
de Ferrières, s’explique ainsi au n. 8 : Lorsque les juges
n’ont pas assez de connoissance et de lumière par le rapport
fait, et que quelqu’une des parties désire qu’un autre
rapport soit fait, pour lors les juges doivent ordonner un
second rapport ou une plus ample visitation ; et quoique,
ajoule le même auteur, le présent article ôte l’espérance
aux parties d’obtenir une nouvelle visitation ou amende
ment de rapport à leur requête, néanmoins plusieurs ne
laissent pas de l’obtenir, soit en blâmant le rapport pré
cédent, ou bien en offrant d’avancer les frais du second,
si en fin de cause il est dit.
Ajoutons à l’autorité des commentateurs de la coulume
de Paris, ce que dit un grand magistrat, M. le Camus,
dans ses observations sur ce même article : Je crois qu il
faut retrancher de l’article, ces mots : sans q u o n puisse
a
4
�(8)
demander am endem ent, parce que tous les jours on en.
demande et on en ordonne.
Enfin , des auteurs plus récens , élevés et pratiquans
dans la coutume de Paris, ont entendu de la même ma
nière la disposition de l’article C L X X X I V . Rousseau de.
L a c o m b e , dans son Recueil de jurisprudence, au mot
E x p e r ts , dit que quand le juge reconnoît qu’une pre
m ière visite a été mal faite, il peut ordonner d’oilice ,
pour une plus grande instruction, qu’il en sera fait une
seconde, et qu’elle a coutume d’etre ordonnée aux dépens
de celui qui la requiert ; et Denizart s au même mot
E x p e r ts , dit aussi que si le juge ne trouvoit pas sa re
ligion suffisamment instruite par un rapport d’experts,
il pourroit de son chef, et sans aucune réquisition des
parties, en ordonner un nouveau, quand même l’avis des
premiers experts seroit trouvé unanime.
V oilà donc bien évidemment quelle est la véritable in
telligence de l’article C L X X X I V de la coutume de Paris;
quand on voudra ne pas en séparer les deux parties, celle
où il est dit : sans q u o n puisse demander am endem ent,
et celle par laquelle il est ajouté : pourra néanm oins le
juge ordonner nouvelle ou plus ample v isita tio n , s 'il y
écliet.
C ’est-à-dire , en un m o t , que la partie ne peut pas, sans
cause légitim e, demander l’amendement de rapport, mais
qu’elle peut exposer les motifs qui exigent une nouvelle
visite; et si le juge se trouve frappé de ces motifs, c’est
moins sur la demande de la partie que de son propre
office, qu’il ordonne un nouveau rapport.
�C9 )
,
.
il ne s’agit cloilc plus que d'examiner si les motifs qui
ont déterminé les premiers juges à ordonner ce nouveau
rapport, sont raisonnables et justes : c’est ce que nous
verrons dans un moment , après avoir rappelé quelles
étoient les opérations prescrites aux premiers experts, par
le jugement intei'locutoire en vertu duquel ils avoient
procédé.
y
Sur la demande en restitution pour cause de lésion,
fo rmée par le citoyen D u bo is, à raison de la vente qu’il
a voit faite au citoyen Teyssèdre, du domaine delà Courdon,
il étoit intervenu, au tribunal du district de M u râ t, un
premier jugement, le 4 thermidor an 3 , par lequel il
avoit été ordonné que les biens vendus seroient estimés
par experts, eu égard à leur valeur à l’époque de la vente,
a 1 eilet de déterminer s’il y avoit ou n y avoit pas de
lésion. Les experts furent chargés d’estimer séparément
les meubles tant morts que v ifs , faisant partie de la vente,
et de déduire sur la prisée des bestiaux, les indemnités
accordées aux fermiers par les lois rendues sur les cheptels,
et avoir égard aux prix de 179 0 , et faire distraction, sur
le prix entier de la ven te, de la valeur des meubles morts
et vifs; enfin, il étoit aussi ordonné aux experts d’avoir
égard à l’entretien du prix du bail auquel le cit. Teyssèdre
avoit été obligé par le contrat de vente.
'
. L ’exécution de ce jugement interlocutoire se trouva
arrêtée par la loi qui survint au mois de thermidor de
la même année , qui abolit pour l’avenir les actions en
restitution pour cause de lésion, et qui suspendit 1 exer
cice de celles qui étoient déjà pendantes devant les tri
bunaux. Les choses restèrent au même état jusqu’à la loi
�( r <> )
^
f
du 19 floréal an 6 , qui leva la suspension, mais qui en
môme temps prescrivit un nouveau mode d estimation,
et q u i, par une disposition particulière, voulut que pour
juger s'il y avoit lésion dans les ventes, dont les prix
avoient été payés en papier-monnoie entre particuliers,
depuis le premier janvier 1791 , époque de la dépré
ciation des assignats jusqu’à la publication de la loi du 14
fructidor an 3 , les tribunaux ordonnassent l'estimation
par experts de la juste valeur, contre assignats, qu’avoit
1 immeuble vendu au temps du contrat, eu égard, 1°. à
son état et a son produit à la même époquej 2°. à la
valeur contre assignats qu’avoient dans le canton ou dans
les lieux les plus voisins les immeubles de même nature,
à l’époque de la ve n te, et aux époques les plus rappro
chées j 30. aux facilités et avantages résultans des termes
accordés pour le payement du prix de la vente.
Dès que cette nouvelle loi eut p a r u , le cit. Dubois
reprit ses poursuites au tribunal civil du département du
Cantal, où il fut rendu un second jugement le i 5 ther
midor an 6 , qui ordonna que celui du tribunal de dis
trict de M u rât, seroit exécuté selon sa forme et teneur,
et que lors de l’estimation qui seroit faite en consé
quence, les experts se conformeroient à la loi du 19 floréal;
et il fut ajouté que les experts fixeroient séparément la
valeur des immeubles, et celle des meubles et outils d’a
griculture.
C'est donc d’après les bases prescrites par le jugement
du tribunal civil du Cantal, que les experts devoient
procéder i\ l’exécution de celui du tribunal du district
de Murât.
�( II )
lies parties ayant respectivement nommé les exp erts,
le citoyen Dubois leur administra entr’autres une pièce
qui étoit bien popre à remplir le vœu de la loi du 17
floréal an 6 , et à leur faciliter le moyen de s’y confor
m er; c’ étoit l’adjudication du domaine du Marcbadial':
ce domaine étoit,situé dans le mcme canton, dans le
même vallon, et presquecontigu au domaine de la Courdon , vendu par le citoyen D ubois; les deux domaines
composés d’héritages de même nature, p r é s , champs et
pacages, et les deux ventes faites presqu’à la même épo
que ; celle du domaine de la Courdon est du 18 floréal
an 3, et celle du domaine de Marchadial est du premier
germinal de la même année; il n’y a pas cinq décades de
distance de l’une ù l’autre. O n ne pou voit trouver entre
ces deux ventes un point de co m p a r a iso n plus a p p r o p r i é
aux dispositions de la loi de floréal an 6 ; deux domaines
de même nature, situés dans le même canton, presque
contigus l’un à l’autre, vendus en assignats, et à la même
époque.
L e citoyen Dubois administra aussi aux experts le bail
du domaine de la C o u rd o n , et rien aussi n’étoit plus
propre à les rendre certains du produit de ce domaine ?
au moment *de la vente.
.
D e son côté, le citoyen Teyssèdre remit aux experts
quelques ventes de biens faites en assignats, à peu près
à la même époque, et entr’autres la vente d’un domaine
appelé le F ayet, faite par Claude Borel î\ P ie r r e Esdieu,
de Murât ; c’est surtout le prix de la vente de ce domaine
que les experts ont pris pour point de comparaison dans
leur estimation du domaine de la Courdon.
'
�(
12
)
Mais ils ont absolument écarté la vente du domaine
du M archadial, que leur avoit administrée le cit. D ubois;
on pour mieux dire , ne voulant pas voir l’ensemble de
ce domaine, ils en ont choisi deux ou trois héritages aux. quels dans l’adjudication du domaine du Marchadial, il
.avoit été donné des prix distincts, et c’est aussi sur le prix
de ces héritages particuliers qu’ils se sont appuyés dans
leurs opérations.
Quoi qu’il en soit, ils ont terminé par estimer la va
leur du domaine de la Courdon , à un prix tel que l'on
n’y trouveroit pas la lésion d’outre moitié.
^ L a discussion, du rapport des e x p e rts entraîne des dé
tails et des longueurs que ne comporte pas une consul
tation. Cette discussion se trouve d’ailleurs faite avec le
plus grand so in , avec exactitude, et la plus grande clarté,
dans la réponse qui a été faite par le cit. D u b o is, aux causes
et moyens d’appel du cit. Teyssèdre : il paroît d’ailleurs
sulïire de présenter le moyen le plus saillantet le plus effi
cace, qui se présente pour prouver l’irrégularité , la par
tialité évidente des experts, et qu’ils se sont absolument
écartés des dispositions de la loi du 18 floréal, auxquelles
ils dévoient strictement s’assujettir dans leur estimation.
Ils sont obligés de convenir que le domaine du Marcliadial est le plus voisin et le plus rapproché de celui
de la Courdon; qu’il est situé dans le même vallon; d’où
se tire naturellement la présomption qu’il doit y avoir à
peu près meme qualitc des fonds dos deux domaines
également composés de prés , de champs et de pâturages.
Les experls ont vu d ailleurs qu’il n’y avoit qu’un mois
et demi de distance des dates des deux ventes. Voilà bien,
�( 13 )
r
•
sans doute, le point de comparaison qui leur étoit marqué
par la loi du 18 floréal, et dont ils ne pouvoient s’écarter
sans contrevenir à la loi, mais cest précisément ce pointde comparaison qu'ils ont négligé \ et quelles raisons en.
donnent-ils ?
D ’abord il faut écarter leur assertion, de la différence
de qualité dans la valeur des fonds de même nature dont
sont composés les deux domaines ; leur situation dans le
même canton, dans le même vallon, et leur presque conti
guïté, élève la plus forte présomption contre leur asser
tion. Il y a sans doute, dans chacun de ces deux domaines,
certains fonds plus ou moins bons; mais c’est l’ensemble
qu’il falloit envisager , et sur cet ensemble qu’il falloit
opérer.
Mais qu’ont fait les experts ? bien loin de saisir l’enseinble, ils ont détaché deux ou trois héritages du do
maine du Marchadial , qu’ils ont choisi entre les plus
mauvais, et ils ont pris les prix distincts et séparés de ces
deux ou trois héritages, pour les assimiler à tous ceux de
toute qualité du domaine de la Courdon : c’est assurément
une opération pitoyable.
•
Ensuite quelles raisons ont-ils données, pour s'excuser
de n'avoir pas pris l’ensemble du domaine de Marchadial?
c’est, ont-ils dit, que par sa situation il devoit présenter
une plus grande concurrence d’acheteurs. Mais ces deux
domaines étant situés dans le même canton , dans le même
v a llo n , et presque contigus l’ un à l’autre, ils se trouvoient
également à la bienséance et à la p r o x i m it é de ceux qui
ont acheté le domaine du M a r c h a d i a l , et par conséquent
1 v avQit même raison de concurrence.
�.
.
( 14 )
Enfin il y avoit de plus en faveur du domaine de la
C o u rd o n , que c’étoit un bien patrimonial, au lieu que
celui du Marchadial ctoit un bien national; et qui est-ce
qui ignore qu’un préjugé, sans doute mal fondé, a cons
tamment d o n n é , dans les ventes qui se sont faites des biens
de l’une et l’autre espèce, aux biens patrimoniaux un prix
infiniment supérieur à celui des biens nationaux?
Mais ce qui est encore bien plus essentiel, et qui ne
peut qu'inspirer une juste indignation contre le rapport
des experts, c’est de leur voir prendre pour point de com
paraison la vente faite par le cit. Borel au cit. Esdieux du
domaine du F ayet, quoique plus éloigné de celui de la
Courdon que celui du Marchadial. Ce n’est pas ce qui paroîtroit plus révoltant; mais ce qui l’est outre mesure, c’est
que la vente du domaine du Fayet n’est vraiment qu’une
vente simulée , et que c’est proprement un acte d’échange.
L a preuve en est évid en te, puisque le même jour que
Borel vend à Esdieux le domaine du F a y e t, Esdieux , de
son cô té , vend à Borel un autre domaine. Pourquoi ne
pas prendre la voie de l’échange, au lieu de faire deux
ventes? La raison en est toute facile à comprendre. En
faisant un échange , les droits d’enregistrement eussent été
pris sur la valeur réelle des deux domaines ; et si l’éva
luation qui en auroit ete laite dans l’acte n’avoit pas atteint
la vraie valeur , les employés de la régie de lenregistrcmcnt n’auroient pas manqué de prendre les échangistes
en fausses déclarations, et de leur faire subir les doubles
droits, et autres peines prononcées par les lois dans le cas
de fausse déclaration : au lieu que faisant deux ventes sépa
rées, les deux parties éloient maîtresses d’en fixer le prix
�( i5 )
^
ù leur g r é , et de le rendre bien inférieur à la vraie valeur,
et par là de réduire les frais d’enregistrement, sans donner
prise à l’avidité fiscale.
Les experts n’ignoroient pas les circonstances des deux
ventes du même jour: c’est donc vraiment une astuce de
leur part de se les être dissimulées, et de prendre pour
valeur du domaine du Fayet le prix d’une vente que le
vendeur et l’acquéreur avoient un égal intérêt de porter
le plus possible au-dessous de la valeur de la chose.
Il
y a sans doute bien d’autres critiques à proposer contre
le rapport des experts, et elles l’ont été dans toute l’étendue
et la force dont elles sont susceptibles, dans les réponses
à causes et moyens d’appel du citoyen Dubois. Mais n y
eût-il que celles qu’on vient d’observer, elles sont trop
frappantes pour q u ’elles ne suffisent pas pour juger de
.¡’irrégularité du rapport des experts, de la violation de
la loi du 18 germinal, à laquelle ils devoient se conformer,
et de leur partialité évidente dans le choix qu’ils ont fait
pour point de comparaison de la vente du domaine du
F a y e t, qui n’est vraiment qu’un échange , et qui n’a eu
par conséquent qu’un prix idéal et fictif, que l’intérêt du
vendeur et de racheteur a dû leur faire rabaisser infini
ment au-dessous de la vraie valeur de la chose, dès qu’il
y avoit vente réciproque du même j o u r , et r i e n , par
conséquent, à débourser de part ni d’autre.
E n voilà assez, sans doute, pour justifier la nécessité
ou se sont trouvés les premiers juges, d ’ o r d o n n e r un second
rapport par de nouveaux experts , afin de se procurer les
instructions nécessaires qu’ils ne pouvoicnt pas trouver
dans le premier rapport, pour juger en connoissancc de
�, ( 16 )
cause. On a d’ailleurs établi au commencement de cette
consultation , qu’ils y étoient autorisés non seulement par
la disposition des lois romaines qui régissent les parties,
' et par celle des coutumes voisines, mais même encore par
celle de la coutume de Paris, suivant l'intelligence que nous
en donnent tous les commentateurs et autres auteurs qu’on
a cités, et surtout d’après les termes de l'art. CLXXXIV ,
que néanm oins le juge ordonne autre ou plus ample visi
tation , s il y échet. Le tribunal de Murât auroit pu même
aller plus loin , en déclarant nul le rapport des experts,
pour ne s’être pas conformés à la loi du 18 floréal ; ce
qui leur avoit même été prescrit par le jugement inter
locutoire : c’est une grâce qu’on a fait au citoyen Teyssèdre, d’avoir soumis le citoyen Dubois à avancer les frais
du nouveau rapport.
A in s i, quand le tribunal supérieur ne prononceroit pas
c on tre l’appel par fin de non recevoir, au moins croit-on
avoir prouvé que l’appel est mal fon dé, et que le juge-»
ment doit être confirmé.
D é l ib é r é
à R i o m , le 28 frimaire an 10.
A N D R A U D ,
A
R
i o m
,
de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du tribunal d'appel. An 9. — 1801,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dubois. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
coutume d'Auvergne
droit romain
droit écrit
doctrine
experts
coutume du Bourbonnais
coutume de Paris
Description
An account of the resource
Consultation [Citoyen Dubois, intimé ; contre citoyen Teyssèdre, appelant]
Annotations manuscrites.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1801
1800-1801
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0226
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
La Courdon (domaine de)
Marchadial (domaine de)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53725/BCU_Factums_M0226.jpg
coutume d'Auvergne
coutume de Paris
coutume du Bourbonnais
doctrine
droit écrit
droit Romain
experts
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53894/BCU_Factums_M0634.pdf
81958d531f82e19b1d3620bfe780e0d7
PDF Text
Text
DISSERTATION
SUR L A NA TU RE DES PERCIÈRES
DANS
L A
C I - D E V A N T
P R O V I N C E
E T
C O U T U M E
D’AUVERGNE.
ou p a r c i a i r e , a g r i e r , c h a m p a r t , t e r r a g e ,
e tc ., autant de termes synonymes employés dans les
divers pays, pour ne signifier qu’une même chose, c ’est-à-dire,
la portion de fruits que le propriétaire de l’héritage perçoit
pour son droit de propriété ; l’autre portion des fruits devant
appartenir au détenteur de l’héritage, pour le prix de son travail
et de la culture.
P e r c i è r e
c a r po t,
C ’est ainsi que s’en explique le glossaire du droit français ,
au mot champart : « C’e s t , d i t - i l , le droit de gerbe de blé
« et légumes que le seigneur de la terre p r e n d s u r le champ,
« avant que le laboureur enlève son blé, qui autrement s’ap
pelle terrage.
Il en est dit autant au mot perciére : cum
dominus fu n d i capit partem in fructibus cum colono.
�( 2) .
Ce d ro it, sous quelque dénomination que ce s o it, s’établit
non seulement par titre , mais aussi par une possession suffisante
à prescrire : c ’est ce que nous apprend la Thaum assiéres, dans
son commentaire de la coutume de Berri, tit. io , art.
.
Et il en doit être de même en Auvergne, o ù , par l’art. 2
du tit. 17 de la co u tu m e, tous droits et actions, cen s, rentes,
servitudes et autres droits corporels ou incorporels se pres
crivent, acquièrent ou perdent par le laps ou espace de trente
ans.
On voit aussi dans l ’art. 21 de la coutum e de Saintonge ,
au bailliage de Saint-Jean-d’A n g é ly , que les terres peuvent
être tenues à titre eïogrier,non-seulement par baillette expresse,
mais aussi par trente ans possédées ; et cet article ajoute que
si celui qui les tient ainsi les la is s e chômer pendant trois ans, le
seigneur pourra reprendre lesdites terres.
L ’article 24 de la coutume de Berri porte que les Cerragiers
ne pourront vendre ou autrement aliéner; lesdites terres terragières sans la licence et consentement du seigneur, si ce
n’est qu’il fût permis par le b a il, convention ou autre moyen
valable.
D e toutes ces autorités semble sortir la preuve que la pro
priété du fonds, réside toujours dans la personne du bailleur
à percière, champart, e t c . , et que le preneur n’est qu’un véri
table colon, partiaire ; et c ’est ainsi qu’on a vu qu’il étoit nommé
dans le glossaire du droit français , au mot p a rcia ire, où le
bailleur est appelé dominus fu n d i, et le preneur colonus. Il
n’y a en effet de différence entre le bail de métairie et le
bail à percière , si ce n’est que le bail de métairie est fait
pour un temps déterminé de trois a n s , ou de trois à s ix , ou
de six à neuf ; au lieu que le plus s o u v e n t le bail à perciére
est fait pour un temps indéfini ; mais le preneur, à l’un et à
l’autre titre , n’est jamais qu’un co lo n , q u i, comme le ferm ier,
ne jouit que pour le maître de la chose.
Quelle est d’ailleurs la nature de la percière ou du champart?
23
�(
3
)
est ce un droit féodal ou seigneurial, ou un simple droit foncier?
il faut distinguer.
;0
Ecoutons d’abord le grand maître de la m atière des droits
seigneuriaux, Me. Charles D um oulin, appelé à juste titre le
Papinien fra n ça is, et ce qu’il dit dans la préface du titre des
censives de la coutum e de Paris.
Quoique souvent, dans les coutumes de F ran ce, il soit fait
mention du champart , oe n est pas cependant un droit sei
gneurial et qui engendre des droits de lo d s, si ce n ’est dans
les coutumes qui le disent expressément 5 mais autrement le
champart est compris entre les droits privés et les servitudes
particulières, quoique quelquefois il puisse concourir avec le
cen s, comme avec quelque autre charge sur le même fonds;
c’est-à-dire , par une convention particulière, toutes les fois
qu’elle a été stipulée : noca quod quatnvts sœpè in consuetud in ib u s fia t mentio de campipartu, tamen non est ju s domi
nicale , nec laudimka trahit n isi ubi consuetudo hoc expresse
dicit. A lia s inter jura^privata et servitutes particulares computatur, quamvis quandôque possit concurrere cum censu, ut
q u o d lib e t ejusdem rei privatwn onus, •videlicet e x impositione
particulari ubi cumque ità pactum fu it.
Après cela on ne peut pas être surpris de lire dans la nouvelle
collection de Denizart, au mot champart, tom. 4,pag. 428, que
« le champart ( même droit que la percière ) est celui dû pour
« toute autre cause que la reconnoissance de la directe, soit au
« seigneur, soit à tout autre; qu’il se gouverne par les mêmes
« principes et par les mêmes règles que les rentes foncières,
cc et qu’il faut titre ou possession équivalente pour pouvoir
« le prétendre, et qu’il se perçoit comme tout autre droit, etc. »
LaThaum assîères, sur l’art.
de la coutume de Berri, avoit
dit aussi que cc les terrages ( même droit que la perciôre ou
cc le champart ) n emportoient pas, dans cette coutume, les lods
cc et ventes , quoiqu il soit le premier droit établi sur l’Iiériu tage libre et allodial, non plus que dans les autres coutume*
23
�( 4 )
et qui n’ont pasfde dispositions contraires; » sur quoi il renvoie
a u passage de D um oulin, et il ajoute que « cela ajlieu dans
« cette coutuïne, qui admet le franc-alleu, et rejette la règle,
« nulle terre sans seigneur. » '[
: ' .
Et sans doute il en doit être de même dans la coutume d’Au
vergne, qui, comme celle de Berri, admet le franc-alleu , rejette
aussi la règle , nulle teire sans seigneur | et reconnolt la règle
toute contraire, nul seigneur sans titre. !
i iQue l’Auvergne soit un pays 'de franc-alleu , c’est ce qui ne
peut être la matière d’un doute ; et c ’est ce qui est attesté
par tous les auteurs qui en ont parlé.
M azuer, que M. d’Aguesseau appelle un de nos plus excellens
praticiens, et dont l’ouvrage avoit principalement pour objet
les coutumes d’Auvergne, avant q u ’ e ll e s fussent rédigées par
écrit, y atteste la franchise et la liberté des héritages, même
à l’égard des seigneurs justiciers : non sequitur, res quam
possideo est in tua furisclictione ergo teneo à te in fenclum ,
et hoc innuitur, quod dominus debet ostendere rem pro quâ
prœtendit.
• A ym o n , le plus ancien des commentateurs de la coutume
d’Auvergne, expliquant l’art. 19 du titre 1 7 , l’entend sans dif
ficulté du franc-alleu d’origine : omnia præsumuntur libéra
et allodialia pro ut fu eru n t primœvo jure.
Bessian, qui vient après Aym on dans l’ordre des commen
tateurs, sur les articles 4 et
du titre 2, rappelle les termes
de l’art. 19 du titre 1 7 , et il en tire cette conclusion : qualibet
res prœsumitur allodialfs et libéra, nisi contrarium probetur.
Itigaltius, qui a fait un traité de prœscriptionibus Arvernorum,
assure aussi l ’allodialité de la coutume d ’A u v e r g n e ; et loin de
la f a ir e d é r i v e r d e la prescription d u c e n s , q u i y est aussi admise,
il ne regarde cette prescription que comme une suite du francalleu : aliud servatur in A rvernia, in quâ prœ dia, libéra et
optima conditione quilibet possidere potest; undè eu ni quilibet
prœsumptione furis communis, sit in quasipossessione libertatis
5
�C5 )
et immunitaUs ci censu, talem immunitabem acquiri triennio
qui s dubitet ?
Basmaison , dont la paraphrase sur la coutume d’Auvergne
est si estimée, ne s’explique pas moins clairement : « Tout
cc héritage, dit-il, de sa première nature est franc et allodial’ :
« la coutume maintient en cette liberté naturelle les héritages
cc situés dans son district, pour charger de la preuve du contraire
« ceux qui prétendroient des fiefs , des cens et autres servitudes,
cc s’ils n’en font point apparoir. »
Consul, qui a fait des notes et des sommaires sur la coutume
paraphrasée de Basmaison, a ainsi conçu le sommaire de l ’ art.
19 du titre 17 : le franc alleu a lieu en Auvergne.
Ce ne sont pas seulement les commentateurs de la coutume
d’Auvergne qui pourroient être suspects de favoriser leur pays ;
tous les autres auteurs qui ont eü"occâsIon de parler de l’Au
vergne , au s u j e t du Tfanc-allen, ont également reconnu dans
cette province le franc-alleu naturel. On peut voir sur cela
la Thaumassières, dans son traité du franc-alleu , chap. 4 ;
Salvaing, dans son traité des fiefs, partie 2, pag. 11 ; Ferrières,
dans son commentaire de la coutume de Paris, art. 68, n. 20,
et les annotateurs de Duplessis, titre 2 , chap. 2 , pag. m .
Com m ent d’ailleurs auroit-on pu méconnoitre le franc-alleu
de la coutum e d’A u v erg n e , à la vue de l’art. 19 du tit. 17?
Toute personne , soit noble ou roturier, peut tenir auclit pays ,
haut et bas, héritages fr a n c s , quittes et allodiaux de tous
cen s, charges , J if fs , et autres servitudes quelconques.
Le franc-alleu de l’Auvergne a été tellement reconnu, qu'on
ne connolt qu’un seul exemple où l’on ait tenté de le contester,
mais où il fut confirmé par un arrêt du parlement de Paris, du
août 1748, rapporté par Denizart au mot franc-alleu; arrêt
rendu contre la dame de la seigneurie d’Eybes en Auvergne ,
et par lequel il fut jugé que le seigneur devoit prouver sa directité par titres, et en justifier par la possession.
On a voulu en dernier lieu assimiler les baux à percière
3
�avec les baux à rente, pour conclure, d’après les articles i r”.
et 2 du tit. i de la coutume d’Auvergne , que le bail à perciére
emportoit la directe seigneurie , et que par conséquent il devoit
être placé dans la classe des droits féodaux supprimés. Mais on
abuse de ces deux articles, non-seulement pour les rentes, mais
plus encore pour les perciéres , qui sont d’une nature toute
différente.
Voyons d’abord à l’égard des rentes.
L ’art. xer. du tit. i porte que tout cens ou rente établi sur
fonds ou héritages certains emporte directe seigneurie, s’il n’ap
pert du contraire.
Et l’art. 2 veut que celui qui acquiert cens ou rente sur
héritage quitte et allodial, ilacquiére directe seigneurie, quoique
de la directe il ne soit fait aucune mention.
Quoiqu’au premier coup d’œil ces d e u x premiers articles sem
blent assimiler le cens à la ren te, néanmoins si on jette les yeux
sur les articles suivans, on comprendra aisément que les termes
dont se servent les deux premiers articles ne peuvent s’entendre
que d’une rente proprement qualifiée censuelle, et non de toute
rente foncière en général.
C’est ce qui paroit d’abord indiqué dans l’art. , qui porte
que celui qui est obligé à asseoir cens, ou rente censuelle , il
faut qu’il baille rente en directe seigneurie. L ’article ne dit pas
simplement ren te, il dit rente censuelle ; et le même article dis
tingue une autre espèce de rente, qri’il appelle rente rendable,
et qui peut être également une rente foncière.
Les articles
et
distinguent également la rente censuelle
de la rente rendable, et annoncent suffisamment que ce lle -ci
n’emporte pas la directe, puisqu’ils portent que quand on donne
rente rendable au lieu de cens, il faut fournir le tiers-plus, pour
l ’ i n t é r é t de l a directe ; et que l o r s q u e a u contraire on donne
rente en directe, elle est prise pour tiers-plus.
3
3
3
4
5
Mais rien n’est plus clair pour distinguer la rente en directe
de la rente rendable, que la disposition de l’art. 6 , qui porte
�(
7
)
. que celui qui est tenu asseoir rente absolument sans autre
adjection, il en est quitte pour asseoir rente rendable.
D ’où il est démontré que dans la coutume d’A uvergne, quand
on ne se sert que du mot rente seulement, cette rente ne peut
jamais être considérée comme une rente censuelle, et que pour
donner cette qualification à une rente quelconque, il faut l'a d
jection de censuelle ou de directe seigneurie, ou autre équi
valente.
C’est ainsi qu’en effet se trouvent expliquées les dispositions
de la coutume d’A uvergn e, dans un acte d e notoriété rendu
public par la voie de l’impression , du prairial an , q u i fut
donné par les jurisconsultes de R iom , qui avoient exercé en la
sénéchaussée d’Auvergne la profession d’avocat pendant vingt,
trente, quarante et cinquante an s, et qui attestoient qu’ils avoient
toujours ainsi pratiqué et r é s o l u en consultation ; et que, dans la
coutume d ’ A u v e r g n e , quoique les rentes s u r h é r i t a g e s allodiaux
f u s s e n t très-fréquentes, il n’y avoit pas d’exemple que pour de
pareilles rentes , lorsqu’on ne les avoit pas qualifiées censuelles,
ou qu’on n'y avoit pas stipulé la directe seigneurie, aucun des
tribunaux de la province eût accordé les droits de lods.
Ces principes constans en matière de rentes foncières, ac
quièrent encore plus de force pour les baux à percière, qu’il
seroit ridicule de confondre avec les baux à rentes foncières ;
car, comme on l’a déjà dit, le bail à percière ou à champart
conserve au bailleur toute la propriété de l’héritage , le bail à
percière ne différant pas essentiellement du bail à colonage,
dans l’un et dans l’autre le bailleur recevant une quotité de
fruits pour son droit de propriété, et le preneur u n e autre
quotité pour le prix de son travail et de la culture; en sort# que
l ’un et l’autre participent également au bénéfice de l’abondance,
et au péril de la disette, tandis que dans le bail à rente le
bailleur perçoit t o u j o u r s une somme fixe o u , une quantité de
grains déterminée , qui ne reçoit aucune augmentation par
l’abondance, ni diminution par la disette.
5
3
�(
3
)
Aussi, à l’égard des baux à portion de fruits, trouve-t-on le der
nier état de notre législation fixé par les avis du conseil d’état, ap
prouvés par les arrêtés du gouvernem ent, qui sont rappelés dans
l’instruction donnée par le conseiller d’état, directeur général
de l’enregistrement et des domaines, le i pluviôse an 1 1 , et par
lesquels avis du conseil d’érat et arrêté du gouvernement, il est
décidé que «les lois portant suppression des redevances seigneu« riales et féodales ne sont point applicables aux baux à com
te plant on portion de lruits dont les clauses'portent la réserve
te de la propriété, et quelles preneurs doivent être considérés
« comme des fermiers à cet égard; et il est ensuite ajouté qu’à
<c l ’égard des clauses qui portent la réserve de la propriété ,
« ce n’est pas seulement celles qui en contiennent la réserve
« e x p r e s s e , mais que cette r é s e r v e dérive encore de la faculté
cc d’expulser le détenteur dans le cas de mauvaise c u l t u r e , m
O r, cette faculté est naturellement attachée aux baux à perc iè r e , agriers ou cham part, comme on peut le voir dans la
plupart des coutum es,com m e dans celles d’Etampes, d’Orléans,
de Saint-Jean-d’A n gély, et particulièrement encore dans celle
de la Marche, voisine et contiguë de celle d’Auvergne, et où il
est d it, dans l’article 329, que si celui qui a reçu une terre à
titre d’agrier laisse cet héritage en friche, celui qui a donné
ladite terre peut la reprendre.
Ainsi le droit de reprendre la terre en cas de mauvaise cul
ture emporte nécessairement la réserve de la propriété, suivant
les avis du conseil d’état, approuvés par les arrêtés du gouver
nement.
On a encore é le v é , dans ces derniers temps, la prétention que
les percières qui se trouvoient dues à d’anciens seigneurs s u r des
héritages situés dans l’étendue de leurs j u s t i c e s , étoient, par
cela seul j réputée» r^odalun, ot «a uouvoient par conséquent
comprises dans la suppression des droits féodaux ; mais cette
prétention se repousse invinciblement de plusieurs manières.
D ’ un cûté , le bailleur à perrière restant toujours propriétaire
5
�9
( (
)
des fonds qu’il a concédés à ce titre , ces fonds 21e sont pas d’une
nature différente que ceux qu’il a .conservés, et dont il jouit;
et les lois nouvelles n’ont pas privé les anciens seigneurs de leurs
héritages, de quelque nature qu’ils- fussent, p rés, terres,
b o is, etc.
M ais, d’un autre côté, la question se trouve jugée dans les plus
forts termes, par un arrêt de la cour d’appel de Riom, dônt le
pourvoi en cassation a été rejeté par un autre arrêt de la cour
de cassation, rendu sur les mêmes motifs cjue celui de la cour
d’appel, sur les conclusions de M. le procureur général Merlin.
Il s’agissoit du droit de percière sur nn très-grand nombre
d’héritages allodiaux, situés dans la ci-devant justice de la terre
de Blanzat, coutume d’Auvergne, qui avoient été donnés à ce
titre de percière à plusieurs habitans de Blanzat.
Depuis la r é v o l u t i o n , ces habitans a v o i e n t r e f u s é la presta
tion de la percière; elle fut réclamée par le sieur de la S a l l e ,
seigneur de Blanzat, et lui fut accordée par les premiers juges,
dont le jugement fut confirmé par un arrêt de la cour d’appel
de Riom. Les habitans de Blanzat se pourvurent en cassa
tion, s u r le fondement que les percières dues à un ancien sei
gneur étoient des redevances féodales supprimées par les nou
velles lois.
Le pourvoi donna lieu à une grande discussion , où rien ne fut
oublié de part ni d’autre ; mais il fut rejeté par l’arrêt de la cour
de cassation, du 2.4 vendémiaire an i . On peut voir tous les
moyens qui furent em ployés, dans les recueils de Denevers et
de Sirey ; il suffira, quant à présent, de transcrire ici l ’a r r é t de la
cour de cassation, et les motifs qui en a p p u i e n t la décision.
« La c o u r, après un long délibéré en la chambre du conseil ;
cc A t t e n d u que la coutume d’Auvergne étoit purement allocc diale, ainsi q u e c e l a résulte de la c o m b i n a i s o n d e plusieurs
cc de ses articles, et de la j u r i s p r u d e n c e constante du p a y s ;
« que par conséquent toutes les redevances dues sur les biens
« situés dans le ressort de cette coutum e, qui étoit soumise à
« la maxime nul seigneur sans titre, étoient de leur nature
3
�I
( r° )
te réputées purement fo n ciè r e s, à moins que le contraire ne
cc fût positivement stipulé par acte valable; qu’il est d’autant
<c moins permis de supposer qu’en Auvergne les redevances
« connues sous le nom de percières étoient exceptées de cette
« conséquence générale résultante de l’allodialité, et réputées
« de leur nature seigneuriales ou censuelles, que, de l’aveu des
« demandeurs, il n’en est pas dit un seul mot dans les divers
« titres de la c o u t u m e , qui concernent les droits seigneuriaux
« et féodaux, et qui en font une longue énumération ; et qu’en
c< outre la cour d’appel met en f a i t , ce qui n’est pas contesté
« non plus, qu’il est de principe reconn u, qu’à la différence
cc du c e n s , dont la coutume ne permettoit de demander que les
c< trois d e r n i è r e s a n n é e s d ’a r r ë r a g e s , ort pou voit au contraire
cc demander vingt-neuf années d’arrérages ou f r u i t s d e l à percière;
« Que l ’article de Ja loi du
août 1792, n’oblige que les
« propriétaires des droits féo d a u x ou censuels à représenter le
« titre prim itif, et que l’article 17 dispose que les rentes pure« ment foncières ne sont point comprises dans la disposition
« de cet article ; que si ce même article 17 ajou te, et autres
cc redevances qui ne tiennent point à la fé o d a lité , et q u i sont
cc dues à des particuliers, et à des particuliers non seigneurs
cc n i possesseurs de f ie f s , on ne sauroit induire de ces dernières
cc expressions, non - seulement que le législateur ait dit, mais
« encore qu’il ait entendu dire que désormais, et par déroga« tion aux lois antérieures, toutes les rentes purement foncières,
cc lorsqu’elles se trouvent dues à des ci-devant seigneurs ou
« possesseurs cle fie fs , seront présumées féodales, et obligeront
« les propriétaires à représenter le titre prim itif;
cc Attendu enfin que par aucune des clauses des nctes pro<rc duits au procès, il n’est établi que les deux percières dont il
cc s’agit eussent un caractère féodal ou seigneurial, rejette, etc.
cc M. Malville, président; M. Rupperon, rapporteur. »
Il 11’y a de différence entre l’affaire du seigneur de Blanznt,
et celles qui pourroient s’élever avec quelques autres anciens
seigneurs de la ci-devant province d’A uvergn e, si ce n’est que
5
5
25
�C
11
)
le sieur de Lassalle rapportoit des titres qui établissoicnt ses
percières, au lieu que les titres de la même nature que pouvoient avoir la plupart des anciens seigneurs, avoient péri dans
les incendies ordonnés dans la plus grande effervescence des
premiers temps de la révolution; incendies dans lesquels on sait
assez qu’on avoit confondu les titres de toute nature, féodaux
ou non, qui s’étoient trouvés dans les archives des anciens sei
gneurs, où le plus souvent une populace effrénée s’étoit introduite.
Mais au défaut de titres, la possession vient au secours et en
tient lieu.
_ On a déjà vu dans l’article 2 du titre 17 de la coutume d'Au
vergne , qu’en général toutes sortes de droits s’acquièrent ou
se perdent par une possession de trente ans.
On a vu dans d’autres coutum es, particulièrement pour le
droit d’agrier., champart, terrage ou percière, que ces pres
tations peuvent s’établir par baillettes expresses ou autrement,
par trente ans possédées : ce sont singulièrement les termes
dont se sert l’art. 21 de la coutume de Saint-Jean-d’Angély.
C ’est aussi la doctrine des auteurs, comme on peut le voir aux
endroits ci-devant cités de la Thaumassières, et de la nouvelle
collection de Denizart.
Et le tribunal civil de Riom a récemment admis la preuve de
la possession de la percière pour madame de Praslin, dame de
la terre de Randan; ce qui détermina les détenteurs à en passer
de suite de nouvelles reconnoissances.
On ne sauroit mieux terminer cette dissertation, qu'en rap
pelant la distinction que faisoit si judicieusement M. le pro
cureur général M erlin, en portant la parole lors de l’arrét de
la cour de cassation, pour les percières de la terre de Blanzat:
voici comme il s’exprimoit.
« Un droit de percière ou de cham part, réclamé par un
« ancien seigneur, est-il présumé féodal par cela seul que le
« titre n’en est pas rapporté?
« Le champart n’est pas essentiellement féodal. A in si, pour
« savoir si un champart que possédoit un seigneur étoit un
�( 12 )
« droit féod al, il faut distinguer. Ou ce champart se percevoit
« dans un pays allodial, c ’est-à-dire, dans un pays où tout bien
« étoit de droit présumé franc-alleu, s’il n’étoit prouvé fief, ou
« il se percevoit dans un pays soumis à la règle nulle terre sans
« seigneur.
« Au premier cas , le cham part, quoique possédé par un
« seigneur, n’étoit pas réputé seigneurial, parce q u e , pour avoir
« ce caractère , il eût fallu que les héritages sur lesquels il se
« percevoit eussent été concédés par le seigneur qui en faisoit
la perception , sous la réserve du domaine direct , et qu’en
« général, dans ces contrées, cette séparation qui constituoit
« essentiellement la seigneurie, ne pouvoit être prouvée que
par titre ; et c ’est ce qu’en effet établissent tous les auteurs
d e s p a y s allodiaux, etc. »
Après une longue discussion, pour prouver la distinction ,
M. le procureur général finit par dire : « Il ne nous reste qu’à
cc examiner si la coutume étoit ou non allodiale, m O r , on con
çoit bien par tout ce qu’on a établi ci-devant, que M. Merlin
n’a pas dû hésiter sur l’allodialité de cette coutume.
Aussi-a-t-on vu que c ’est ainsi qu’elle est reconnue dans le
premier m otif de l’arrêt de la cour de cassation Attendu, y
est-il dit, que la coutume d’Auvergne étoit purement allodiale,
ainsi que cela résulte de la combinaison de plusieurs de ses
a rtic le s ,e t de la jurisprudence constante du pays. »
Com m ent, après tout ce la , pourroit on placer dans la classe
des droits féo d au x, les percières qui sont dues aux anciens
seigneurs..dans la coutume d’A uvergne?,
La présente dissertation a été faite et rédigée par le s o u s s i g n é ,
ancien jurisconsulte, sous-doyen des avocats prés la c o u r d’appel
de Riom , le 2 7 f é v r i e r 1808.
ANDRAUD.
: ! •>
•* ■
A R IO M , do l’im prim erie de
!■
>
T
h ibau d . L a n d r io t ,
im prim eur de la C our d'appel.
-
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Droit de percière. 1808]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
percière
franc-alleu
champart
coutume d'Auvergne
droits féodaux
doctrine
Description
An account of the resource
Dissertation sur la nature des percière dans la ci-devant province et coutume d'Auvergne
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Thibaud-Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1808
avant 1661
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0634
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Randan (63295)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53894/BCU_Factums_M0634.jpg
champart
coutume d'Auvergne
doctrine
droits féodaux
franc-alleu
Percière
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53103/BCU_Factums_G1005.pdf
63ad709365d119088506808fd95c18a0
PDF Text
Text
TRO ISIÈM E MÉMOIRE.
RÉPONSE
A U S E C O N D M É M O IR E D U D É F E N D E U R .
PO U R J e a n D E V È Z E , J e a n n e D E V É Z E , sa sœur, fille
majeure tant en son nom propre et privé, qu’en qualité
de cédataire de Michel et Marie D evèze, ses frère et
sœ ur, tous héritiers de Jeanne G azard, leur m ère,
; e t par représentation de Gabriel G azard, leur a ïe u l,
. et de Marguerite Bouchet, leur grand’m ère, deman
deurs.
C O N T R E G a b r i e l G A Z A R D , second du nom, leur
oncle, notaire royal, habitant de Saint-Mary-le-Plein 3
défendeur.
L a
sentence interlocutoire du 5 septembre 17 8 6 ,
paroît avoir réduit la contestation à savoir si la dot
constituée à Jeanne G azard, mère des demandeurs, a
A
�( o
excédé la portion qu’elle amendoit dans la succession
de Gabriel G azard, premier du nom , son père,, de manière
q u ’on puisse lui trouver dans l’excédant, une somme quel
conque pour le prix de sa renonciation à la succession
de Marguerite Bouchet, sa mère, ou si au contraire cette
même dot n ’est qu’égale ou même au-dessous de sa portion
dans la succession du père, ensorte qu’il soit évident que
la renonciation à la succession maternelle a été faite sans
prix.
E n cela, la sentence interlocutoire paroît avoir adoptéle principe de l’arrêt da Pont - Carré, suivant lequel la.
renonciation faite par une f i l l e , en même temps à une
succession échue et à une succession à échoir pour un
seul et même p rix , ejfuso sermone, et sans distinguer
ce qu’il y a dans ce prix pour la succession échue 4
et ce qu’il y a pour la succession à échoir, n’est valable
qu’autant que, dans le prix convenu, il se trouve pour la
succession à échoir un excédant au-delà de ce qui devoit
revenir i la renonçante pour sa portion dans la succes
sion échue , sans quoi la renonciation est absolument
n u l l e pour l’une et l’autre successions. C ’est une modifica
tion établiepar cet arrêt à la doctrine de l’auteùr'du traité
des. successions qui avoit enseigné en général que la renon
ciation faite unico pretio à une succession echue et à une
succession â échoir, étoit radicalement nulle.
Pour la décision de la contestation , il faut donc prin
cipalement s’attacher à connoître la valeur des biens de
Gabriel Gazard , premier du nonx, Qt comparer ensuite la
portion que devoit y avoir Jeanne Gazard avec la dot qui
lui fut continuée, pour juger si dans cette dot il y a eu un
�excédant au-dessus de sa portion, qui ait pu faire un prix
quelconque de sa renonciation à la succession à échoir de
Marguerite Bouchet, sa mère.
Voyons d’abord ce que nous apprend le rapport d’ex
perts, fait en exécution de la sentence interlocutoire, et
nous parlerons ensuite des omissions faites dans ce même
rapport, mais qu’il faut nécessairement y suppléer.
Les experts ont évalué les immeubles de la succession
de Gabriel Gazard, premier du nom, qui leur ont été indi
qués à la somme de 5,240'*'; mais quoique la sentence in
terlocutoire l’eût ordonné , ils ont omis de faire l’estima
tion du m obilier, et l’inventaire de ce mobilier commencé
par Gabriel Gazard lui-même avant sa m ort, et continué
par le juge des lieux après sa mort, ne porte point d’esti
mation particulière des meubles et effets qui y sont dé
taillés. Seulement il fut fait mention en marge de l’inven
taire, que les parties avoient déclaré que les meubles étoient
en valeur de 1,7 0 0 ’*', compris les obligations, chetels et
autres effets. O r, 011 sent parfaitement que cette évalua
tion ne pouvoit pas faire la lo i, n ’étant faite que par une
simple déclaration de la tutrice, partie intéressée. D ’ailleurs
on comprend qu’on n ’avoit principalement en vue dans
cette déclaration que de fixer les droits de contrôle et de
les réduire le plus possible. Quoi qu’il en soit, adoptons
pour un moment cette évaluation, sauf à la rectifier.
V oila donc 1,700'*' à ajouter à la somme de 5,240"** à.
laquelle les experts ont estimé les immeubles. Cela fait un
total de 6,940'*'.
On a vu dans les écritures et mémoires du procès, que
Gabriel G azard, second du nom , devoit prélever un quart
A 2
�, ( 4 )
(le la succession de son père par les dispositions de son tes
tament. L e quart ¿toit donc de
5 ^ , ce qui réduiroit
la masse à 5 ,2 0 5 ^ , formant les trois quarts divisibles par
égalité entre le frère et la sœur , et dont la moitié revenant
à Jeanne G azard, eût monté ^.2,602^ 10
Sous ce point de v u e, la dot constituée à Jeanne
Gazard étant de 5,0 0 0 ^ , et sa portion dans les biens pa
ternels ne montant qu’à 2,6 0 2 ^ 10 J , elle auroit reçu un
excédant de 3 9 7 ^ 10 J qu’on pourroit appliquer au prix de
la renonciation à la succession à échoir de sa mère ; et
alors dans le préjugé de l’arrêt de Pont-Carré , elle se fut
trouvée, elle ou ses enfans^ hors d ’état de réclamer contre
la renonciation.
Mais il s’en faut bien qu’on doive ainsi réduire la masse
de la succession de Gabriel G azard, premier du nom.
i ° . Les experts ont estimé infiniment au-dessous de
leur valeur les immeubles de la succession qui leur ont
été indiqués , et à cet égard on ne pourroit pas refuser aux
demandeurs l’amendement de rapport qu’ils ont demandé
subsidiairement, et qui porteroit ces immeubles à une
valeur bien supérieure.
2 ° . L e rapport des experts contient l’omission de plu
sieurs immeubles qui ne leur ont pas été indiqués , et il
est de toute justice d’ajouter à la niasse la valeur de ces
immeubles.
5 0. Nous n ’avons pas non plus l’estimation de l’office
de notaire royal dont étoit pourvu l’auteur commun,
autre objet encore qu’on n e peut se dispenser d’ajouter à
la masse.
4 ° . E n fin , il faut encore augmenter la masse de la
�(
5
)
valeur du mobilier au par-dessus la somme de 1,7 0 0 ^ , à
laquelle on l’avoit seulement évalué par la déclaration
mise en marge de l’inventaire ; et c’est encore un reproche
tr'es-grave à faire aux experts, de n’avoir point fait cette
estimation qui leur étoit expressément prescrite par la
sentence interlocutoire.
Or si l’on ajoute tous ces objets à la masse de la suc*
cession de l’auteur commun, il en résultera évidemment
,un déficit considérable dans la dot de 3,000^ constituée
à Jeanne G azard, pour la remplir de ses droits dans la
succession de son père, et il restera démontré qu’elle n’a
absolument rien pu recevoir pour la succession à échoir
de sa mère. Reprenons en détail tous les objets.
1 9. On est persuadé que les experts ont estimé à moins
de l,ooo'tt' de leur valeur les immeubles qui leur ont été
indiqués, ce qu’on pourroit vérifier par l’amendement de
rapport qu’on a demandé subsidiairement ; mais laissons
cet article dans ce moment pour mémoire seulement.
2 0. On a omis dans le rapport des experts l’estimation
de trois corps d’héritages quineleur ont pointété indiqués.
Ces héritages ont été désignés dans l’écriture signifiée de
la part des demandeurs, le 2 septembre 17 9 0 , qui est sous
la cote I du second sac de leur production. C e sont des
héritages connus dans le pays sous le nom vulgaire de
Brughas; c’est-à-dire, des terres froides qui servent le plus
ordinairement de pacages, mais que cependant on défriche
quelquefois pour leur faire produire des récoltes de temps
à autre. On veut bien ne porter ces trois héritages qu’au plus
bas prix possible , et n’en supposer la valeur qu’à 600^.
Mais les experts ont encore omis un objet immobilier
A 3
�( O
'
dont il est facile , sans leur secours , de fixer la valeur ;
c’est une boutique de maréchal qui, à l’époque de la mort
de Gabriël Gazard, premier du nom , étoit affermée par un
bail encore alors subsistant, moyennant 1 8 cartons de seigle
par a n , avec la charge du ferrage des bestiaux de la mai
son. Quand on n’évalueroit le carton de seigle qu’à 1 5 ^ ,
les 18 carrons monteroient à 1 3 ^ io ^ , dont le capital
seroit de 2 7 0 ^ ; et à l’égard du ferrage, ce seroit bien peu
l’estimer que de le fixer à 40’*" par an ; mais réduisons-le
de moitié , et ne le portons qu’à 20 ^ . L e capital seroit
de 4oo't+' à ajouter aux 270'*' pour le capital des 18 car
tons de seigle ; ce qui feroit un tout dè 6 70^ .
L e défendeur n ’a point contesté ni l’existence de la
boutique dont il s’ag it, ni qu’elle fît partie de la succes
sion de l’auteur commun. Mais il a prétendu que cette
boutique faisoit partie de la maison qui a été estimée par
les experts. A cet égard , le rapport des experts ne
confirme pas cette assertion ; il n ’y est fait nulle mention
de cette boutique. D ’un autre côté, on peut d’autant
moins présumer qu’ils aient entendu la comprendre dans
leur estimation de la maison , que cette boutique en est
absolument détachée , et à plus de 18 toises de distance.
A u reste , on trouve dans l’inventaire la preuve que
cette boutique dépendoit de la succession , puisque le
bail de ferme de cette boutique fait la cote 31 de cet
inventaire , qui fait encore foi que le prix du bail étoit
de 18 cartons seigle. Il est vrai qu’il n’est pas parlé, dans
l’inventaire , de la condition du ferrage des bestiaux de
la maison , que l’on s’est borné à évaluer à 2 0 ^ par an ;
mais les demandeurs avancent le fait comme positif j et
�il doit passer pour t e l , jusqu’au rapport du bail com
pris dans l’inventaire, le q u el, ainsi que celui de tous
les titres inventoriés , est constamment à la charge du
défendeur.
Un autre objet encore , qui doit être ajouté à la
m asse, pour une somme quelconque, est l’office de no
taire royal , d o n této it pourvu l’auteur commun. Il est
vrai que cet office étoit tombé aux parties casuelles ,
d ’où il fut relevé par le défendeur ; mais il n’en doit pas
moins rapporter la valeur de cet office à la masse, sous la
déduction de la finance qu’il a payée aux parties ca
suelles , d’après les quittances qu’il en doit représenter.
Indépendamment de l’office de n otaire, il faut encore
ajouter à la masse la valeur de la pratique. A cet égard,
l’inventaire fait foi de l’exercice de cet office , par
l ’auteur com m un, pendant les années 1 7 1 5 , i j i 6 ,
1 7 1 7 , 1 7 1 8 , 1 7 1 9 , 1720 et 1 7 2 1 ; c’est-à-dire ,
pendant sept ans , puisqu’on trouve dans cet inventaire
l ’état des minutes des actes qu’il avoit reçus pendant ces
sept années.
On ne croit donc pas excéder, en portant la valeur ,
tarit de la pratique que de l’office , et déduction faite
de la finance payée aux parties casuelles , à une somme
de 1,0 0 0 'tt'.
Au surplus , on a prouvé dans les précédentes écri
tures et mémoires , par l’autorité de deux arrêts du
conseil , de 1 636 et de 1 61 9 , rapportés par Denisart,
que pour un office levé aux parties casuelles , la préfé
rence est accordée aux plus proches parens du défunt ;
que c’est en considération de la succession 5 que
A 4
�(
8
)
cette préférence est établie. C ’est en vain que le défen
deur a prétendu que la préférence n’a lieu qu’en faveur
des plus proches parens qui auront fait les diligences
pour lever l’office , et contribué au paiement du prix ,
dans le temps de préférence. Cette objection se dissipe
facilem ent, si l ’on fait attention qu’à la mort de son
père , Jeanne Gazard avoit à peine deux ans , et
qu’elle étoit hors d’état de faire aucune diligence pour
la levée de l’office. E lle étoit encore mineure, lorsqu’elle
se maria en 174^ ; à cette époque , l’office de son père
n ’étoit pas encore levé aux parties casuelles ; son frère
n ’en étoit pas encore pourvu , puisque , dans le con
trat de mariage de sa sœur , il ne prend que la qualité
de praticien , et non pas celle de notaire. Or , par ce
contrat de m ariage, Jeanne Gazard ayant fait une renon
ciation au profit de son frère , il n ’est pas surprenant
que celui-ci ait seul fait les diligences nécessaires pour
la levée de l’office ; mais comme ce n’est qu’à la faveur
de sa renonciation , que Jeanne Gazard a été éloignée
de concourir à ces diligences , il en résulte justement
que j la renonciation se trouvant n u lle , son frère doit
lui communiquer le bénéfice obtenu , par la levée aux
parties casuelles de l’office du père commun , à la suc
cession d u q u el, elle ou ses enfans se trouvent rappelés
par la nullité de sa renonciation.
5 0. Enfin , on doit augmenter la masse de la succes
sion , de l’excédant de la valeur du mobilier , au par
dessus la somme de 1,700 ^ , à laquelle il se trouve seu
lement évalué , par la déclaration mise en marge de
l’inventaire 3 pour la fixation des droits de contrôle ;
�( 9 )
.
et cet excédant doit plus que doubler et tripler la som m e/
de 1,7 0 0 ^ . C ’est ce qu’il est facile de ju ger, seulement
par le détail de ce mobilier , compris dans l’inventaire ,
et dont on a déjà présenté un tableau estim atif, par
approximation , dans l’écriture du 2 septembre 1 7 9 0 ,
sous la cote i ere. du second sac de la production des
demandeurs , et par lequel on a porté ce mobilier à
3,079 ■*" 19 ^ ; mais réduisons-le encore , si l’on veu t,
à 2,4.00'*' ; ce sera cette somme de plus à ajouter à la
masse.
E n réunissant toutes les sommes qu’on vient de prou
ver devoir être ajoutées à la masse de la succession de
Gabriel G azard , premier du nom , sans y comprendre
l ’augmentation de valeur des immeubles indiqués aux
experts , augmentation qu’opéreroit certainement un
amendement du rapport d’experts, et qu’en attendant on
n ’a présentée que pour mémoire, toutes ces sommes monteroient à celle de#4,67o'tt\ Otons un quart à prélever
par le défendeur, qui seroit de 1,16 7 '* ' 10 6 ; les
trois quarts restans sont de 3,502 ’**" 10 J , dont il
xevenoit la moitié à Jeanne Gazard, qui est de 1 , 7 5 1 ^
5 J , qui , ajoutée aux 2,6 0 1'*' 10 J , pour sa part ,
expliquée ci-devant dans l’estimation des experts , ou
dans les 1,70 0 ^ de la déclaration du m obilier, mise en
marge de l’inventaire , détermineroit l’intégrité de son
amendement dans la succession de son père , à une
somme de 4,3 53
15 J , et par conséquent à 1 , 353^*
15 J , au-delà de la dot de 3,000 ^ , qui fut le prix dû
sa renonciation à la succession échue de son p è re ,
et à celle à échoir de sa mère j d’où il reste démontre
�( IO )’
qu’il n ’y a pas eu de prix pour la renonciation de la
succession à échoir, puisque la dot est même fort infé
rieure à ses droits dans la succession échue.
Encore n ’a-t-on pas parlé des restitutions de jouissan
ces que Jeanne Gazard auroit eues à réclamer de sa por
tion , dans les biens de son p'ere. Sur quoi il est bon
d ’observer que , quand on auroit pu déduire sur ces
jouissances sa nourriture et son entretien, toujours
auroient - elles présenté un excédant assez intéressant ,
sur-tout eu égard à la fortune des parties ; mais même on
n ’auroit pu répéter ces nourritures et entretiens que pour
les premières années de l’enfance de Jeanne Gazard ;
parce qu’une fois parvenue à l’âge de 1 1 à 1 2 ans, elle les
avoit bien gagnés par son travail ; car il ne faut pas seu
lement considérer l’état de notaire de son père et de son
frère , il faut aussi faire attention qu’ils ténoient en même
temps auberge dans leur maison, et Jeanne Gazard y
faisoit le service d ’une domestique. On ne' doit pas être
étonné qu’un notaire fut en même temps aubergiste ; le
fait est vrai, et ne peut être contesté par le défendeur.
Ensuite il y en avoit sur-tout dans ces temps-là plusieurs
exemples dans les campagnes, et on en connoît de temps
encore moins reculés.
Concluons que dès à présent il est plus que démontré
que la dot de 3,000 ^ faite à Jeanne Gazard, ne remplissoit
pas à beaucoup près ses droits dans la succession de son
père ;q in ls ’enfalloitaum oinsdeplusde i^ o o ^ e t p a r c o n
séquent qu’on ne peut pas trouver dans cette dot un prix
quelconque applicable à sa renonciation à la successsion
échoir de Marguerite Bouchet, sa mère : donc nous sommes
�y
( 11 )
dans l ’ espèce la plus favorable du principe enseigné par
l’auteur du traité des successions, qui annulle la renoncia
tion faite unico pretlo à deux successions, Tune échue et
l’autre a échoir , puisqu’il est évident que le prix de cette
renonciation n’a pas même, à beaucoup près, rempli les
droits de la succession échue, et n’a rien laissé pour le
prix de la succession à échoir, comme il le faudroit dans
l ’adoucissement apporté à la règle générale par le préjugé
de l’arrêt de Pont-Carré.
M ais, encore une fois, ce que l’on ne présume p a s, s’il
restoit encore l’ombre de difficulté, au moins n’y en auroitil pas à ordonner l’amendement de rapport, dont en tout
les demandeurs ont offert d’avancer les frais.
E n fin , si cet amendement de rapport étoit ordonné, il
seroit à propos pour ne plus y reven ir, de tracer la marche
des bouveaux experts, il faudroit leur prescrire , i Q. outre
la nouvelle estimation des immeubles indiqués aux pre
miers exp erts, d’estimer encore les trois héritages connus
vulgairement sous le nom de B ru ghas, et désignés dans
l’écriture des demandeurs, du 2 septembre 1 7 90; 2 °. d’es
timer la valeur de la boutique de m aréchal, omise par les
premiers experts 5 3 0. d’estimer aussi l’office et pratique
de notaire, sous la déduction de la finance payée par le
défendeur aux parties casuelles; 40. enfin, d’estimer éga
lement les m eubles, bestiaux et effets mobiliers compris
dans l’inventaire de la succession de Gabriel G azard ,
premier du nom.
ü n pourroit sans doute borner ici la défense des de
mandeurs, et négliger ses objections auxquelles on a déjà
suffisamment répondu dans les mémoires et écritures qui
�( 12 )
ont précédé ; aussi ne va-t-on que parcourir et rappeler
.rapidement les principes qui détruisent la seule objection
sur laquelle le défendeur paroît encore insister; c’est celle
de la prescription.
On ne parle que du moyen de prescription ; c a r ,
pour la fin de non recevoir des dix a n s , quoique le
défendeur ait encore voulu en p a rle r, il faut absolument
récarter dans l’espèce où il s’agit de la renonciation faite
sans prix à une succession , et on vient de voir qu’il n’y
a point eu de prix pour la succession maternelle à échoir.
Or 5 le dernier commentateur de notre coutume , M.
Chabrol , qui avoit été le défenseur du défendeur dans
toute cette affaire , et qui étoit l’auteur de tous ses mé
moires et écritures, enseignoit sur l’art. 25 du tit. 14 ,
tom. 2 , pag. 4 15 , que l’action pour faire prononcer la
nullité d’une renonciation faite sans p rix , avoit la même
durée que l’action en partage des biens de la succession,
et par conséquent q u ’il ne peut y avoir à cet égard d’autre
prescription que celle de 30 ans.
On ne doit pas non plus faire attention à la garantie
de la renonciation que l’on avoit fait stipuler au mari ,
parce qu’une telle garantie d’une renonciation n u lle, et
¿ ’une nullité qui ne procède pas seulement de la minorité ,
jiiais qui se tire ex visceribus rei> doit suivre le sort de la
renonciation qui est annullée.
D ’ailleurs, la sentence interlocutoire a nécessairement
préjugé qu’il ne pouvoit y avoir lieu à la lin de non rece
voir de dix ans ni à la garantie du m ari, sans quoi l'inter
locutoire eût été absolument inutile , et les demandeurs
eussent dû dès-lors être déchus de leurs prétentions.
�( >3 ) .
. Venons-en donc à la prescription. ..On( pourroit direr
encore à cet égard que la sentence interlocutoire a aussi
préjugé qu’il n ’y en avoit p a s , puisque l’interlocutoire
auroit été également inutile , s’il y avoit eu prescription.
Mais dans le fait il n’y avoit pas lieu à l’opposer.
Cela est d’abord certain à l’égard de Jean n e Devèze
et de Jean Dev'eze, deux des défendeurs. E n effet, à la
mort de Jeanne G az ard ,leu r mère , qui étoit née le 27
janvier 1744 , et qui décéda.le premier décembre 1765 ,
la prescription n ’avoit pu courir que pendant les 20 ans
et 1 5 jours de majorité qui se trouvent dans^cet intervalle.
O r, Jean n eD evèze n ’a été majeure que le 2 août 1 780 ,
et de ce jour à celui de la demande qui est du 25 juillet
1 783 , il ne se trouve pas trois années entières : donc il
n ’y avoit eu à son égard que 23 ans d’utiles pour la pres
cription , et il en auroit fallu 30. Il y a encore un an de
moins à l’égard de Jean Devèze qui ne parvint à sa majo
rité que le 24 septembre 1 781 .
Il faut avouer cependant qu’à l ’égard des trois autres
enfans , Gabriël, Michel et Marie D evèze, il auroit couru
plus de 30 ans utiles; mais dans la circonstance, Gabriël
Gazard ne peut point leur opposer la prescription ; parce
que si elle avoit l ieu, ce ne seroit pas à lui, mais aux
deux autres enfans, Jeanne etJean D evèze, qu’elle pourroit
profiter, et sans doute, ils sont bien les maîtres de ne pas
s’en prévaloir contre leurs frères et sœurs.
C ’est aussi ce que la sentence interlocutoire paroît
encore avoir préjugi , sans quoi ils auroient été dès-lors
déclarés déchus de leurs prétentions, et cet interlocutoire
n ’auroit été ordonné qu’avec les deux enfans contre les
quels il n ’avoit pas couru 30 ans utiles.
�..
. '( <I 4 )f f' •i ' Tr‘ f- j r
-s ~
Mais on a d’ailléurs parfaitement'démontré dans le
premier mémoire des demandeurs par l ’autorité des l oi s,
et la doctrine de le Brun et celle du savant R icard , que
‘les enfans seuls contre lesquels la prescription n’auroit
pas opéré , auroient profité des portions de ceux contre
lesquels elle se seroit accomplie par l’effet de l’accroisse
ment qui a lieu entre les héritiers ab-intestat, et qui ne
se fait qu’à ceux de la même branche , et non à ceux d’une
autre branche. L e cas particulier de la prescription ne
change rien à l’effet de l’accroissement qui auroit lieu par
une répudiation ou une abstention des cohéritiers de la
même branche ; idemque e r it, dit la lo i, et si tempore exçlusus sit. Ainsi il est évident c[ue si Gabriël, Michel et
Marie Devèze .avoient pu perdre par la prescription les
droits qu’ils avoient comme héritiers de leur mère dans
la succession de leur a ï e u l , et de leur grand’mère , ces
droits n ’auroient accru'qu’à Jeanne et Jean D evèze, leur
sœur et leur frère^ e.t non à Gabriel G azard, second du
n o m , leur oncle.
On se persuade donc d’avoir solidement établi les de
mandes qui ont été formées contre le défendeur. Il doit
même dès-à-pjésent paroître très-évident que Jeanne
Gazard n’a pas été repiplie, à plus de 1,2 0 0 ^ près, de sa
portion dans les biens de son père, par la dot de 3,0 0 0 ^
qui fit le prix de sa renonciation , et que par conséquent
la renonciation à la succession de la mcre se trouve sans
prix ; c,e qui opcre la nullité de la renonciation, tant pour
l ’une que pour l’autre successions. L ’insuffisance dé la
dot de 3,ooo‘t+' devroit donc des-à-présent être regardée
comme démontrée , sans ^u’ilfut besoin d’en venir à une
�(1 5 )
nouvelle estimation. C e ne peut donc être que très-subsi~
diairement qu’on a demandé un amendement de rapport
ma i s , en tout c a s , s’il pouvoit encore rester l’ombre
difficulté, cet amendement ne pourroit etre refusé, dès
. que les demandeurs offrent d’en avancer les frais.;
Monsieur D E V A L , Rapporteur
Me. A N D R A U D , Avocat
a
M A N D E T , je une , Avoué
. à
ihsuS-iAjti »4 i 4jûmMA4 ClUw.
¿MUm jL . îiJ-
«T
¿¿¡U ÿ.£u> ÿU**** £ot
'
A
R
I
O
M
D E L’ I MPR I M E R I E D E L A N D R I O T . 1792.
«/Î m^vo
/«»^V*4^ *AA^rfoa
Ci-//*
c/iL HAU. <uÏ uÛa
üiii* ^ u l 6 a ÎMO/t^AiW li^
K
V fS
^riAAtr^jL
*—&
; <ÿu>* f*
JET ^/tAxi^wio
�/ «
( u
a
A
^
<
y
t a
u
u
4
.
t u
| / ( i v i M
i c j r
o t \ ( c ¿ JU
< u u a m
« .
ft >
t U A c
Û
U
MA.OHX
t
< L ~ i* .c JS ~ ÿ £ * '
^ U JK tM to , .
î ^
^
î -
r
x
^ «L i. f a - ( « 4 « * « . tÄiAOW y ' « ^ ) < A y v > i
tJLO JkXZC,
{*
J “ **
U k ^ o w u u r <il
A
^iÜW/ (uOtlAfO UAur ^>«.
^ ^
^v/UÜUMti^l
Ctr~»/«' ‘*‘^ 1 • **< ■/(UMMi*u*- tÂï
V
¿UJ;
f/ji Oi. j d;o. r:; !^- orí/jrro¡ii.
;r..^ u
a it-
V / 7» * * « ^ »
y,, r
c u ^ M fc r
•.^ u ü
www
(k.
“ *tuuÄ/(«WL«
/‘‘ / A
l t ó
■*--~i>-_i
- •-,,- ^ >r. >
A.
r;'j Jj jr * '- .;./ L .
..••• „ , r....» «r ,„ . ^ * A i/
uuät^uy' c*~*£u/+ t ü i m w A ;
ti» » Y jfe ü
y u S ’J f ' t A J t - b f y V iJ L y A ^ y / * -
J¡ J y
Ä » y '*
^
yW
* ~ tX U
^ tX m cía^ jÍE ü *» ^
6
u^tóc;
^
A^cuvaju.
<A* JtJLxLA^
'mO.CUi^/ZC, "Î>a
Aw
"V ^ ^ >
** yow uá: “ - 6—
->6 c L uÄky y
A a J¿u ^ ¿ A ^ o j ^ ^ ^
^
v
L' rAJVM^Uy.
¿
*~*AA J5£'T^'*>
. **■
s .r x .^ r r
-
^ ml ^Cw»^. (u e/unw (*»iwrtii{u>^' ^ X y /' ***
W A ^ M u T«m
U i u ^ C
m
JZ T
€ V - U ^ C aA O Ü U A
ìu A
^ ftitvu 4ma /cU«^u <j^Y^*oxZ3ü**,
Ou
ftm T
'à. A.
) i fr
(A V
A A A V lw ^ * w - '
^
^
y
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean. 1792]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Deval
Andraud
Mandet
Subject
The topic of the resource
successions
renonciation à succession
donations universelles
dot
tutelle
office de notaires
pays de droit coutumier
prescription
doctrine
experts
fraudes
minorité
Description
An account of the resource
Titre complet : Troisième mémoire. Réponse au second mémoire du défendeur. Pour Jean Devèze, Jeanne Devèze, sa sœur, fille majeure, tant en son nom propre et privé, qu'en qualité de cédataire de Michel et Marie Devèze, ses frère et sœur, tous héritiers de Jeanne Gazard, leur mère, et par représentation de Gabriel Gazard, leur aieul, et de Marguerite Bouchet, leur grand'mère, demandeurs. Contre Gabriel Gazard, second du nom, leur oncle, notaire royal, habitant de Saint-Mary-le-Plein, défendeur.
Annotations manuscrites avec transcription de l'arrêt, les 3 héritiers majeurs ont été déclarés non recevable et la demande en partage a été acceptée pour les deux autres.
Table Godemel : Mineur : une renonciation faite par une fille mineure, dans son contrat de mariage en 1743, autorisée par sa mère qui était sa tutrice, au profit de son frère, à la succession échue du père et à la succession à échoir de la mère, moyennant un prix unique, est-elle nulle, surtout, lorsque dans le même contrat la mère commune fait au fils donation universelle de tous ses biens, sans avoir rendu compte de la tutelle ? si la prescription trentenaire est acquise contre quelques-uns des demandeurs, et que la minorité des autres ait conservé leurs droits, les mineurs ont-ils relevé les majeurs ? en tout cas ces mineurs peuvent-ils profiter des droits des majeurs par droit d’accroissement ? 2. une renonciation faite par une fille mineure, dans son contrat de mariage, en 1743, autorisée par sa mère qui était sa tutrice, au profit de son frère, à la succession échue du père et à la succession à échoir de la mère, moyennant un prix unique, est-elle nulle, surtout lorsque, dans le même contrat, la mère commune fait, au fils, donation universelle de tous ses biens, sans avoir rendu compte de la tutelle ? le délai pour se pourvoir en rescision contre cette renonciation est-il de dix ou de trente ans ? Rescicion : le délai pour se pourvoir en rescision contre une renonciation à succession échue du père et à échoir de la mère, est-il de dix ou 30 ans ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1792
1721-1792
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1005
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1002
BCU_Factums_G1003
BCU_Factums_G1004
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53103/BCU_Factums_G1005.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Mary-le-Plain (15203)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
donations universelles
dot
experts
fraudes
minorité
office de notaires
pays de droit coutumier
prescription
renonciation à succession
Successions
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53728/BCU_Factums_M0229.pdf
5c8189c34b35b48998af38d186589819
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
_
_i
__
J e a n - B a p t i s t e D E V E Z E , appelant ;
CONTRE
A
n t o in e
L A M O U R O U X , intimé ;
EN RÉPONSE
L
’a
p p el
A CELUI DE L' I N TI MÉ.
est d’une sentence de la Sénéchaussée
d'Auvergne, du 29 mars 1790. U ne simple réflexion
suffirait pour en établir le mal-jugé. Elle a refusé l'ho
mologation d’un jugement arbitral qui devait être ac
cordée , sans se permettre le moindre examen du bien
ou mal-jugé. Elle a fait, plus, elle a jugé le contraire
de ce qui l’avait été par le jugement arbitral : en un
mot , la Sénéchaussée s’était érigée en tribunal d appel
d’un jugement arbitral. Tout cela ne peut être consi
déré que comme une monstruosité dans l'ordre judi
ciaire.
A
�( s )
#
Il ne doit donc pas paraître difficile de justifier l’appel
de la sentence de la Sénéchaussée d’A uvergn e; on fera
plus., et on espère de prouver surabondamment qu ’abstraciion du jugement arbitral, si la contestation eût été
portée directement en la Sénéchaussée , la sentence
eût été aussi injuste qu’elle a été irrégulière après le
jugement arbitral.
Commençons par rappeler les faits etlescirconstances
singulières de cet te affaire.
Par un acte sous seing pri vé, du 2 avril 17 8 6 ,
Lamouroux vendit à Devèze l’élat et office de greffier
en ch ef de la maîtrise des eaux el forêts de Si.-Flour.
L e vendeur promit de remettre à l’acquéreur, quand
l<on semblerait à celuî-ci,la procuration a d resignandum. L e prix de la vente fut de 18,000 fr., pa}rab!es
aux.termes convenus, avec intérêts. Il est convenu , par
la vente, que Lamouroux partagera avec Devèze tous
les arrérages qui pouvaient lui être dus dans le greffe,
même les gages et chauffages jusqu’au jour de la vente;
de loul quoi, est-il dit, D evèze se chargera de faire le
recouvrement , et d’en faire compte à Lamouroux à
fur et mesure qu’ils rentreront. Lamouroux se réserva
seulement les revenus el profits casuels du greffe, de
l ’année i y B ô , tant dans l’élection de S l.- F lo u r, que
dans celles d ’Aurillac et de Mauriac. Lamouroux avait
affermé à Daude le greffe de la maîtrise de St.-Flour,
et il avait aussi affermé a Seriez les droits de ce greffe,
qui se percevaient dans les élections d’Aurillac el de
Mauriac.
11 fut stipulé dans la vente , que D e vè z e serait
�.
c.
3
}
.
.
obligé d’entretenir le bail de Daude jusqu’à son ins
tallation , et qu’alors, s’il voulait l’interrompre, il ga
rantirait Lamouroux des dommages-intérêts que Daude
pourrait exiger pour l’interruption ; et à l’égard du bail
de Seriez, Devèze lut obligé de l ’entretenir dans toute
sa durée.
,
Lamouroux se repentit sans doute d’avoir vendu à
D evèze l ’office de greffier ; en vain celui-ci le pressait
chaque jour de lui remettre sa procuration a d resignandu/n, ses provisions, quittances de marc d’or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires pour se
faire pou rvoir; en vain lui demandait-il toutes les
pièces, sans lesquelles il ne pouvait se faire payer des
gages et chauffages qu’il devait partager avec L a m o u
roux, et dont il était chargé de faire le recouvrement,
et les baux des fermiers Daude et Seriez , pour se faire
payer du prix de leurs fermes, qui ne devait point en
tier en partage avec Lamouroux; celui-ci trouvait tou
jours des prétextes pour ne pas remettre tous les actes
nécessaires, et cependant l’intérêt du prix de la vente
courait toujours.
Déjà huit mois s’étaient passés , lorsque Devèze se
vil obligé de faire , par un acte du 2 décembre 1786 ,
une sommation à Lamouro ux, de lui donner et déli
v r e r , dans les 24 heures, sa procuration a d resignand u n i, ses provisions , quillanc es de marc d or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires. Celle
sommation ne put pas être ignorée par L a m o u ro u x ,
puisqu’elle lui fut faite, parlant à s.a personne, par
A 2
�(4
)
Biron , huissier audiencier au bailliage
_
de Saint-
Flou r.
Il n ’est pas inutile de remarquer que danscettesommation, D evèze ne fit pas mention de l ’acte de vente
•du 2 avril 1786, pour ne pas se mettre dans la nécessité
de le faire contrôler et d’en payer les droits; ce qu’il
voulait éviter avec raison , puisque l’acte devait ensuite
être passé par-devant notaire: il se contenta d’énoncer
dans la sommation , que Lamouroux lui avait vendu
l ’office de greffier des eaux et forêts, et qu’en cas de
déni, il offrait de le pi’ouver tant par titres q u e par
témoins. Cette remarque répond d’avance à une ob
jection faite à cet égard par Lamouroux.
Après cette sommation , Lamouroux ne put pas re
culer plus lon g-tem s, et se trouva enfin obligé de
manifester son repentir. La sommation était du 2 dé
cembre; et le 7 du même mois, il fit signifier à Devèze ,
par Pertuis, premier huissier audiencier de l’élection
d’Aurillac, un acte , par lequel, «en répondant à la
« sommation qui lui avait été faite par D e v è z e , le 2
« du même mois , il lui déclara qu’il n’enlendait point
« donner la procuration acl res/^nandunide son office
* de greffier en c h e f de la maîtrise des e a u x et forêts
k
d e S t . - F l o u r ; q u ’à la v é r it é , par des c o nv en t io ns faites
* entre parties, au mois d avril dernier, il avait vendu
« son office à Devèze , mais que dès le lendemain même,
« et depuis, il s’en était repenti; qu’élan! encore jeune,
<r et ayant plusieurs enfans maies pour le remplacer,
« il ne pouvait pas raisonnablement se défaire d’un
�5
C
)
office qui lui donnait un état, et auquel il était atta
ché par le long exercice qu’il en avait f a i t , et,qu’en
outre cet office lui avait ete transmis par son p e r e ,
qui le tenait aussi de ses auteurs, et attendu encore
les privilèges et prérogatives qui y étaient attachés :
c’est p o u rqu o i, bien loin de donner la procuration
a d resignandum , il se propose de, se servir de l a
faculté que la jurisprudence accorde à tous les offi
ciers ; et en exerçant le regrès de son office, il se
croyait fondé à demander que les conventions faites
entre les pariies, fussent déclarées nulles et comme
non avenues ».
>’
Par ce même acte, où il est dit q u e . ¡D e vè z e ;;a
fait refus d’acquiescer au repjrès., quoique l’a c t e .n e
soit fait qu’e/i parlant à sa servante, il est donné
assignation à De.vèze, au bailliage de Saint-Flour,
pour voir prononcer la nullité, et déclarer, en con
séquence, queLamouro ux demeurera libre et déchargé
des conventions faites avec Devèze.
,
Celui-ci était absent au moment de ce^ acte fait
en parlant à sa .servante, et à son retour* l/^ç/e lui
ayant été remis, s’étant c o n s u l t é e ! ayantappris qu’il
ne pouvait pas résister à Taction en regrès ; voulant
d ’ailleurSj se débarrasser de toutes tracasseries avec
L a m o u r o u x , le 12 du, même mois, lui ,fit signifier
un açle par Ceuille, h u i s s i e r audiencier en l’ élection
de Saint-Hour , par lequel il déclara, en réponse à
la déclaration et à l ’assignation de L a m o u r o u x , q u ’il
consentait et acquiesçait aux conclusions prises par
�,
.
(
6
}
.
.
.
.
Lam o u roux , par l'assignation qu’il luiavaitfait donner,
et à ce que les conventions faites h raison de l ’oflice
de grdfïier, demeurassent nulleset comme non avenues,
el que Lamouroux pûl disposer de son office comme
bon lui semblerait.
T o u t alors-paraissait consommé entre les parties:
L a m o u ro u x avait fait le regîès,- et D evèze l’ avait
accepté. Devèze eut toute raison de se croire dans
la plus grande sécurité. Déjà huit mois s’étaient passés
dans un profond silence de part et d’autre. Devèze dut
e lle donc bien surpris lorsque , le i août 1787, Lamou roux lui fit faire, à son domicile et en son absence,
3
im acte insfmmenlaire, contenant sommation de se
trouver le lendemain, luiil heures du matin, en l’étude
d’uri notaire de Sainl-Flour, pour passer la vente de
l'office, ou voir déposer l’acte sous seing p rivé, du
2 avril i786,etacce[)tersii procuration a d résignandum.
L e lendemain 14 août, procès - verbal de défaut
chez le notaire, où D evèze n’avait garde de se 1rouVer, étant encore absent, et 11e pouvant avoir con
naissant^ de lh' sommation qui lui avait été faite la
veille; el ■ée'même j
14 août, assignation à D evèze
par Lain0tirori;x >en veVlu de com m illim us en la sénéchausséé d'/Urvergne, pour reconnaître les écritures el
signMlurefc"dè l’acle dé’ vente Sons seing privé, du 2
avril 1 786 ,; el ;n't principal, pour ratifier la vente, sous
olfre de délivrer la procuration ad resignanduni.
Lors de celle assignation, le grand-m'ai Ire des eaux
C-t forêts ¿e trouvail dans la ville de Sainl-Llour. Lii
�7
(
)
contesta lion élevée par Lamouroux fut connue , .et
plusieurs personnes s’entremirent pour
engager les
parties à la faire terminer par la médiation du grand
maître. Lamouroux et D e v è z e passèrent un compromis
sous seing privé, le premier septembre 1 7 8 7 , par lequel
ils convinrent de s'en rapporter, pour le procès pen
dant entr’e u x , à L'avis et médiation du grand-m aître,
promirent de lu i envoyer, incessamment, dans l’espace
de trois m ois, tous leurs titres, papiers nécessaires,
et pièces y afférentes, même chacun , le double sous seing
privé de la vente, se soumettant de s’en rapporter à
son a v is , à peine-de 4000 liv. qui demeureront encou
rues , de pLein droit, contre le contrevenant.
Les parlics envoyèrent leurs pièces et mémoires au
grand-mai:re, alors de retour à Paris; ¡1 ne les reçut
qu’au mois do décembre 17 8 7; mais il ne pouvait
prononcer son jugement qu’après avoir fait-contrôler
le compromis, ce qui fut fait à Paris le 9 décembre
1 7 8 7 , et le dépôt en fut fait cjiez un notaire de Paris,
le même jour. L e 9 février suivant, 1788, le grand
maître rendit son jugement arbitral.
.
'
I»
Dans ce jugement il est énoncé que toutes les pièces
et mémoires despariiesont été vus par le grand-maître,
et notamment la sommation faite par D e vè ze à L a
mouroux , le 2 décembre , 1786 , l’acte signifié par
L amouro ux, le 7 du même mois, contenant son regrès
et la vente de l’office ; enfin , l’acte d’acceptation
du regrès.,signifié par D evèze à La mouroux , le 12 du
même mois. On doit croire que ce furent les origi-
�C8 )
naux de tontes les pièces qui furent vus par le grand
maître, sans quoi il aurait énoncé qu’il n ’avait pro
noncé que sur les copies.
Après le vu de tou les les pièces, voici comment s’ex
prime le
« Sans
« ployés
« nullité
«
«
«
«•
grand-maître dans son jugement arbitral:
enlrer dans la discussion des moyens e m
par les parties pour soutenir la validité ou la
de l’acte du 2 avril 1 7 8 6 , j ’ai considéré
l'affaire sous son véritable point de vue; et la queslion qu’elle présente, n’est pas de savoir si l’acte
de 1786 est valable j mais s’il est détruit par la réponse
du sieur 'Lamouroux , à la sommation qui lui fut faite
« de délivrer la procuration ad resignandum , et par
« l ’acquiescement du sieur D e vè z e aux conclusions
« portées en ladite réponse.
« L e sieur Lamouroux a bien senti le faible de sa
k
demande; aussi n’est-il nullement question de ces
« actes dans son mémoire à consulter, et c ’est son
«
«•
«
«
silence’ sur l’existence'de ces pièces qui lui a procuré des avis favorables. Si l’acte du 2 avril 17867
est valable, comme contracté entre majeurs , pourquoi les actes subséqiiens ne le seraient-ils point ?
« L e sieur Lamouroux avait vendu : malgré Tacquies-
« cernent à son regrès, il entreprend de suivre Follet
« du premier a c te ; sa marche est contradictoire, et
« sa procédure est dérisoire.
"
« Eu conséquence, nous disons que le traité dudit
« jour 2 avril
1786 , sera cl demeurera comme 11011
« avenu, et que ledit Lamouroux pourra disposer,
« ainsi
�9
C
)
« ainsi que bon lui semblera, de son office de greffier
« de la maîtrise de Saint-Flour, le condamnons eu
« tous les dépens.; sur les demandes en dommages
* intérêts, mettons les parties hors de cour ■
».
C e jugement était du 9 février, et le 12 du même
mois, il fut envoyé par le grand-inaîlre (Boisneuf de
Chenevière ), au sieur M u ret, garde-marteau des eaux
et. forêts de Saint-Flour, pour en faire lecture aux
parties, et le déposer chez le notaire qu'elles v o u
draient choisir. La. lecture et prononciation du juge
ment arbitral furent faites aux parties par le sieur
Muretjet par acteinstrumentaire du premier avril 1788,
D e vè ze fit sommer Lamo uroux de déclarer entre les
mains dequel notaire il voulait que le jugement fût dé
posé, lui protestant, qu’à défaut de s’expliquer, le dépôt
serait fait entre les mains du notaire, sur ce requis.
Lamouroux feignant d’être absent de chez l u i , ne fit
que présenter sa servante, en parlant à laquelle, il
fut déclaré que le dépôt du jugement arbitral aurait
lieu entre les mains du syndic des notaires de SaintFlour, le lendemain huit heures du matin, dans le
cabinet du sieur M u ret, o ù , en conséquence, L a m o u
roux fut sommé de se trouver pour y voir faire nou
velle lecture et prononciation, et le dépôt entre les mains
du notaire.
On conçoit bien dans la conduite qu avait déjà
tenue L a m o u rou x , et par celle qu’il a tenue dans la
suite, qu’il n’avait garde de se rendre à la sommation;
en conséquence, procès-verbal par défaut contre lui,
B
�( 10 )
de la lecture, prononciation et dépôt du jugement, 1©
2 avril 1788.
L ’inaction où demeura L a m o u ro u x , après avoir eu
connaissance du jugement arbitral, dut persuader à
D e v è z e , que toute contestation entr’eu x, sur la vente
de l ’office de greffier, était terminée; il fut d’ailleurs
confirmé dans cette idée, par les renseignemens qui
lui parvinrent, que L a m o u r o u x , depuis la vente de
1786 , n’avait jamais cessé de prendre la qualité de
greffier, et d’en faire les fonctions; mais que de plus,
il avait perçu les gages, chauffages et émolumens du
greffe, qui devaient appartenir h D e v è z e , du jour de la
vente. D e v è z e s’était aussi rendu certain, que même
après l’acte de dépôt, du 2 avril 1788, du jugement
arbitral, Lamo uroux avait obtenu , contre Sériez, une
sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , l e 6 m a i 1788,
qui condamne Sériez à lui payer les fermages du bail
de l’année 1787561 dans laquelle sentence, Lamouroux
se qualifie, comme dans tous les actes précéderas, de
greffier en c h e f de la maîtrise de Saint-Flour. Et ce
pendant, si la vente du 2 avril 1786 , avait dû avoir eilet,
si Lamouroux n ’avait pas cru qu'elle était anéantie par
son actede regrès, et par l’acceptation de D e v è z e , quel
droit aurail-il eu au mois d’octobre 1 7 8 7 , après tous
ces actes, de demander et de percevoir le prix des
baux, pour les années postérieures à la vente, puis
que aux termes de celte ve n te , tous les droits et prix
de baux de fe rm e, devaient appartenir à D evè z e ?
T o u t concourait donc à affermir D e vè ze dans sa sé-
�( 11 )
eu ri té, et a lui faire croire que Lamouroux avait
persisté dans son regrès, puisque après le regrès, il
avait tout perçu , ce que sans cela il n’aurait pu
faire ; tout lui prouvait que Lamouroux approuvait
le jugement arbitral, puisque après ce jugem en t, il
avait exercé des actions, et obtenu des sentences pour
se faire payer des prix de baux, que ce jugement
seul pouvait l’autoriser à recevoir.
- A u reste, tous les faits dont on vient de rendre
comple, ne sont pas même contredits, et ils sont
établis par les pièces authentiques qui seront jointes
a la production de D e v è z e , et notamment la sen
tence de la Sénéchaussée d’Auvergne , rendue en
faveur de Lamouroux, contre Sériez, le 6 mai 1788.
La confiance de D e vè z e fut bientôt troublée par
des menaces qui lui parvinrent de Lamouro ux, de
sorte que pour plus grande précaution, il crut devoir
présenter le jugement arbitral, à l’homologation de
la Sénéchaussée d’Auvergne. La mouroux s’opposa à
,cetle homologation, et prétendit faire revivre l’action
q u ’il avait originairement formée contre D e v è z e , pour
l ’exécution de la vente du 2 avril 17 8 6 , et il s’y crut
fondé par un acte de désaveu qu ’il fit du regrès qu’il
avilit notifié à D e v è z e , le 7 décembre 1786, pré
tendant même que l’acte précédent, du 2 du merae
mo is, et celui d’acceptation du 12 , étaient des actes
faux.
Ces nouvelles prétentions de Lamouroux donnèrent
lieu à une assez longue discussion, sur laquelle interB 2
�( 12 )
vint la sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , du
24 mars 1790, dont est appel, et par laquelle ayant
égard au désaveu formé contre les héritiers de l’huissier'
P e r f u i s , d e l’acte du 7 décembre 1788, cet acle fut
déclaré nul et de nul effet ; D evèze débouté de
la demande en homologation d e i a sentence arbitrale,
la vente du 2 avril 17 86 , fut confirmée, et D evèze
condamné à payer le prix d e l à vente, el les intérêts.
E n exécution de celle sentence , et même aupa
ravant Lamo uroux avait fait faire des saisies-arrêts
entre les mains des débiteurs de D e vè ze ; et pour se
procurer une plus prompte exécution de la sentence
qui était ordonnée, nonobslant l’appel, il s’était hâté de
donner caution, mais D evèze interjela appel au Par
lement, où il obtint un arrêt de défense, et demanda, en
même-tems,la main-levée des saisies-arrêts: Lamouroux
de son côté,demanda,par une requête du i
5 mai 1790,
l ’exécution provisoire de la sentence de la Sénéchaussée.
Ces demandes firent la matièred’ unapoinlé à mettre, sur
lequel inlervinl un arrêt du i juin 1790 , qui accorda
5
à D evèze la main-levée des saisies, en ordonnant, que
sur le fond et le surplus des conclusions des parties,
elles feraient diligence pour faire juger, el en viendraient
à l’audience; les dépens furent reservés, hors le coût
de l’arrêt qu ’il fut ordonné que Lamouroux serait lenu
d’avancer, sauf à répéler s’il y avait lieu.
L ’arrêt fut signifié à Lam ouroux, le 9 juillet 1790.
I^amouroux 11c paraissant pas encore rebuté de ses
poursuites , avait fait faire à Devèze deux actes instru-
�13
(
)
mentaires; le premier ,le 7 janvier 1791 ; el le second ,
le
3o juillet suivant.
Alors la suppression des offices des
eaux et forêts, depuis long-tems annoncée, avait été
effectuée.
Par le premier de ces actes il fît
D eveze des oiires
de quelques pièces nécessaires à la liquidation de l’office
de greffier en chef, notamment de trois quittances du
centième denier, depuis et compris 1 7 7 9 , jusques et
compris 1789 ; ces quittances étaient sous les dates,
l ’une du
3o décembre
1 7 7 9 , la seconde du ‘do septem
bre 1 7 8 0 , et la troisième seulement du 11 décembre
1788.
3
P a r l e second acte, du o juillet 1 7 9 1 , Lam ouroux
somme Devèze de déclarer s’il entendait que la liqui
dation de l’oflice de greffier , que Lamouroux avait an
noncé vouloir poursuivre comme créancier du prix de
la vente , fût faite eu égard au prix de la ve n te , ou
autrement d’après les bases déterminées par les décrets.
D e vè ze répondit ¿1 ce dernier acte, qu ’il était bien
étonnant que Lamouroux demandât l’exécution de la
vente dont il s’agit , pour faire la liquidation de l ’office,
tandis que cette vente avait été déclarée non avenue
par le jugement arbitral du 9 février 17 88, depuis
confirmée par Lamouro ux, et par lui exécutée par la
continuation de l’exercice de cet office; que sa préten
tion pour faire revivre une vente anéantie , était le
comble de la mauvaise foi; qu ’il était constant q u e c e
n ’était que l o r s q u e Lamouroux avait appris, aux mois
de juillet et d’août 1 7 8 7 , qu’il était question de la sup-
�.
A .
(
14
\
.
pression des maîtrises , qui avait depuis été effectuée
par Tédit du mois de mai 1788 , qu ’il n ’avait plus voulu
garder son office au préjudice de la résolution de la
vente qui en avait élé faite : c’est pourquoi D e vè ze
déclara qu’il n’empêchait Lamouroux de faire pour la
liquidation de son office , tout ce que bon lui sem
blerait.
A partir de ce dernier acte de la part de Lamouroux,
3
du o février 1791 , on ne voit de sa part qu’un pro
fond silence pendant près de six ans, c’e s t - à - d i r e ,
jusqu’en l’an 6 de la république.
Néanmoins il méditait dans le silence les moyens de
se procurer par la violence ce qu’il ne pouvait pas espé
rer d’oblenir par la justice, et l’occasion s’en présenta
bientôt, lorsque survinrent les tems désastreux des pre
mières années de notre révolution.
Alors Lamouroux fut trouvé digne d’être procureur
de la commune de St.-Flour; il se persuada aisément
pouvoir effrayer D evèze , et sous le faux prétexte d’é
migration, par l'autorité de sa place, il le fit incarcé
rer. Sans doute si Devèze eût voulu céder à la crainte
des maux dont il était menacé, en consentant une vente
déjà annullée par un jugement arbitral, il eût bientôt
obtenu sa libel l e } mais les efforts de Lamouroux furent
vains, et D evèze trouva d’autres moyens plus légitimes
d’échapper aux malheurs que lui préparaient les effré
nés suppôts de la tyrannie décernviiale. D evèze invite
Lamouroux à se rappeler les horreurs de ces tems-là,
et l’assassinat d’un magistrat respectable, le lieutenant.
�( i5 )
-
Criminel d’Àurillac, commis sous les ye u x de tous les
membres du département, qui siégeait alors dans celle
ville, sans'qu’aucun d’e u x , loin d’arrêter les fureurs
des brigands, y donnât le moindre signe d’improbalion.
Grâces à la journée du 9 thermidor, il y eut un mo
ment de calme, qu’une autre journée de fructidor fit
bientôt disparaître , jusqu'à ce qu’enfin la Providence
suscitât le héros qui devait réparer les maux de la France
opprimée.
Ce ne fut donc qu’en l’an 8, que Lamouroux imagina
de reprendre les poursuites de l ’appel qui avait été
pendant auparlement, de la sentence de la Sénéchaussée
d’Au ve rgn e , de 1790; et on n’a pas oublié qu’au parle
ment il avait déjà échoué dans la demande qu ’il y avait
formée , tendant à l ’exécution provisoire delà sentence
de la Sénéchaussée. Ce fut par deux exploits, l’un du
8 thermidor an 8 , et l’autre du 26 brumaire an 9, que
X.amouroux assigna D evèze au tribunal d’a p p e l , pour
procéder sur l’appel qui avait été pendant au parle
ment , de la sentence de la Sénéchaussée, de 1790, et
pour voir confirmer cette sentence.
Comme la sentence avait été rendue sur apointement en droit, elle fait la matière d’un procès par écrit
au tribunal d’appel , sur lequel D evèze a déjà fourni
des griefs, qu’on a cherché à combaltre dans un m é
moire im prim é, que Lamouroux a fail signifier ; et
c ’est à ce mémoire qu ’on se propose de ré p o n d r e ,
après avoir rétabli, comme on vient de le faire, les
faits, les actes et autres circonstances de cette affaire.
�]
L
a
sentence dont est a ppel, a été irrégulièrement
et mal rendue. D ’un côté elle ne pouvait pas refuser
Tliomologalion qui était demandée, par D e v è z e , du
jugement arbitral qui avait été rendu entre lui et Lamouroux; elle devait prononcer cette homologation,
sans même prendre connaissance de ce qui avait été
décidé par le jugement arbitral. D ’un autre côté,
elle 11e pouvait prononcer sur des demandes de Lam ouro ux, qui ne tendaient qu’à détruire la décision
du jugement arbitral. On se propose, enfin, de prou
v er surabondamment,que lesdemandescîeLarnouroux,
n ’eussent elles pas déjà été jugées par une sentence ar
bitrale , et eussent-elles été portées directement en la
Sénéchaussée, loin de pouvoir être accueillies, elles au
raient dû être rejetées. Ce n'est point là l’ordre qui a
été observé dans le mémoire de La mouroux; il aurait
rendu sa défense plus difficile ; mais c ’est celui qui a
paru le plus naturel à celle de D e v è z e , et qui paraît le
mieux convenir aux véritables questions que le tribu
nal doit juger dans cette aflaire. A u reste, ce nouvel
ordre ne laissera rien échapper des réponses qui peuvent:
se faire aux objections du mémoire de Lamouroux.
P
r e m i e r
M
o y e n
.
»
L ’homologation demandée ne pouvait être refusée.
L ’article i . er de la loi du mois d’août 1790, concer
nant l'organisation judiciaire, dit : que l’arbitrage est le
mo yen
�17
(
)
m o y e n le plus raisonnable de terminer les conlestations entre les citoyens. C ’est une vérité reconnue dans
tous les tems , que cet article de la loi ne fait que pro'clamer et confirmer.
" l/article 5 veut que les sentences arbitrales dont il
n ’y aura pas d ’a p p e l , soient rendues exécutoires par
une simple ordonnance du président du tribunal, qui
sera tenu de la donner au bas, ou en marge de l’expé
dition qui lui sera présentée.
Ces termes de l’article, qui sera te n u , annoncent
assez que le juge auquel le jugement arbitral est pré
senté , pour le rendre e x é c u to ire , ne peut pas entrer
en connaissance du bien ou mal-jugé ; et ce n ’est point
encore là une loi nouvelle.
Que nous disent tous les auteurs qui ont parlé des
sentences arbitrales? voici comment ils s’en expliquent,
et particulièrement ceux du Recueil de jurisprudence,
1om. i.er pag. 549. «La partie qui poursuit llio m o lo g a * tion d’une sentence arbitrale, doit faire assigner l’au« ire partie devant le juge c o m p é t e n t, lequel doit en
« conséquence procéder sommairement, à celleliomo « logation, sans prendre aucune connaissance du fo n d
« du procès, sauf aux pallies à se pourvoir par appel,
l< contre la senlence arbitrale, si elles le jugent à proc< pos : ainsi aucune des parties ne peut empêcher l’ho
" mologation , sous prétexte que La sentence arbitrale
« est irrégutiere, ou autrement vicieuse ».
D ’après ces principes, il doit paraître évident que,
quelque moye n qu’on pût opposer contre la senlence
C
�.
( 18 }
.
arbitrale, la Sénéchaussée ne pouvait pas refuser l’ho
mologation , elle devait la prononcer sommairement,
et sans entrer en aucune manière en connaissance de
cause, ni du fond de ses dispositions, ni des irrégula
rités ou des vices qu ’on pouvait opposer à cette sen
tence. Les moyen du fond, les vic es, les nullités, les
irrégularités de la sentence arbitrale, étaient autant
de griefs contre cette sentence, qui ne pouvaient être
proposés et jugés qu’au tribunal d’ap p e l, si en effet
1 appel en était interjeté.
Un de ces moyens par lesquels on voulait empêcher
l ’homologation, était une nullité prétendue du com
promis, tirée de ce que ce compromis ne déterminait
pas à l’arbitre un délai pour juger: mais cette nullité
n ’eût mêm e été proposable que devant le tribunal
d ’appel, s’il y eût eu un appel d’inlerjeté; et même
en ce cas , elle n’aurait pu être accueillie par le tribu
nal d’appe l, q u ’autant qu ’une révocation du compro
mis aurait eu précédé la sentence arbitrale.
3
Que nous dit encore sur cela l’article
du lit. des
arbitres , dans la loi du 16 août 1790? « Les compromis
« qui 11e fixeront aucun délai dans lequel les arbitres
« devront prononcer; et ceux dont le délai sera expiré,
seront néanmoins valables , et auront leur exécution,
«■jusqu’à ce qu ’ une des parties ail fait signifier aux ar
« bilres, qu ’elle ne veul plus tenir à l’arbitrage».
Ce n’est pas là encore un règlement nouveau. Que
nous disent tous nos auteurs qui ont écrit avant la ré
volution ? l is o n s ce
qui
est écrit par llousseaud- *
�9
( i )
Lacombe au mot Compromis , n. 2. «■Après que les par
ti lies ont subi volontairement la jurisdiction des ar
« bitres , asqae ad fm em negotiù,e\. que les arbitres ont
« rendu leur sentence arbitrale, les parties ne sont plus
« recevables à dire qu’il y avait nullité au compromis,
« de ce qu’il ne contenait aucun tems limité. Ainsi
« jugé par arrêté du 27 janvier 16 26 , sur les conclu« sions de M. Bignon , avocat général, rapporté au
« Journal des audiences ». L'auteur aurait encore pu
citer un arrêt semblable, du 16 janvier 1628. rapporté
5
par Mornac, sur la loi ¿ . ff. D e recept. qui arbitr.
Il était étonnant qu ’en la Sénéchaussée d’A u ve r gn e ,
on eût osé combattre ce principe, et plus'étrange en
core qu’aujourd’hui au tribunal d ’a p p e l , dans le m é
moire de Lamouroux , un jurisconsulte ait prétendu
le réfuter par l ’autorité de M orn ac , à l’endroit m êm e
où l’on vient de le citer. 11 faut être exact dans ses cita
tions, et on ne l’est pas dans cette occasion.
1 5
M orn ac , sur la . 2
ff. de recept. qui a rb ilr., cite
deux arrêts, l’un du 16 janvier 1628 3 l’autre du 27
mars 1618. L e premier adjugea la peine d’un comproniis, quoique ce compromis ne contînt pas de délai pour
juger; le second au contraire réfusa la peine du c om
promis qui n’exprimait pas non plus de délai. Mais il
11e faut pas croire que ces deux arrêts furent contradic
toires. Dans l’espèce de l’arrêt de 1628 , M. l’avocat
général Servin observa, que la partie qui avait appelé
do la sentence arbitrale, s’était soumise à la jurisdiclion
des arbitres, en écrivant et produisant ses litres et méC 2
�( 20 >
moires; devant les arbitres. JEutn qui appellaüerat et
scripsisse et instruxisse penitus instrumentes 3%tabules-*
que obsignatis arbitraient litem. M. Servin citait à cette
occasion les termes des lois. Quis est ferendus a d appellationis veniens a u xiliu m in iis quœ ipse fa cien d a
procuraçit. En conséquence l ’arrêt de 1628, adjugea
la peine du compromis , quoiqu’on y eût omis le délai.
Senatus ergo ex kis pœtiam deberi p ron u n cia çit, tametsi tempus omissum esset compromisso.
Mais l ’arrêt de 16 28 , que cite aussi Mornac, n’élait
pas dans la meme espèce. Celui qui se refusait i'i la peine
du compromis, n ’avait rien écrit ni produit devanl les
arbitres; ainsi Mornac, après avoir rapporté l’arrêt de
16 2 8 , qui avait adjugé la peine du compromis dans le
quel il n’y avait pas de d é l a i , parce que l’appellant
avait produit aux arbitres ses titres et mémoires, Mornac
dit qu’il en serait autrement, si, lorsque le compromis
ne contenait pas de délai, celui qui appelle de la sen
tence arbitrale, n’a rien dit ni produit devant les arbi
tres , et que c’est ce qui a été jugé par l ’arrêt de t 6 i 8 .
Secus enim s i, prœler omissum in compromisso d iem ,
nihU ab eo qui postcà appellavit, prolatum , productum que fu erit ; eo enim casu judicaturn pœnam non
deberi ab appellatore ; et c ’est en ellet ce que Mornac
dit avoir été jugé par l’arrêt de 1618.
.
O r , nous ne sommes pas ici dans l’espèce de ce der
nier arrêt, mais bien dans celle de l ’arrêt de 1628. L a
mouroux avait produit devant le juge arbitre ses titres
el mémoires.
�C 2ï )
_
• L ’auteur du mémoire de Lamouroux n ’est pas plus*
exact dans la citation de l’arrêt du 22 décembre 1627 ,
rapporté‘au journal des audiences, et il faut qu’il ne
se soit pas donné la peine de lire tout le chapitre,
quoique très-court, où cet arrêt est rapporté.
D e quoi était-il question dans l ’espèce de cet arr êt?
il y avait un compromis sans fixation de délai; mais il
n ’y avait pas eu de sentence arbitrale,rendue sur le
compromis.Une des parties, qui avait produit ses titres
devant les arbitres, avait traduit l’autre partie'devant,
le juge du M a n s , pour l’obliger à produire de sa part
devant les arbitres. C elle partie s’y était refusée, 'et la
sentence du juge dù Mans l’y avait condamnée. C ’était
de cette sentence qu ’il y avait appel ; mais comme il
n ’y avait pas de délai: dans le compromis, l’arrêt in
firma la sentence du juge du Mans; et dans le fait,le
refus de produire devant les arbitres, emportait avec
lui la révocation d’ un compromis qui ne fixait pas de
délai : mais pourquoi ne s’est on pas donné la peine
de lire ce que dit encore le journaliste? «Toutefois si
K les arbitres avaient rendu la sentence arbitrale, ce
« ne serait pas nullité en icelle, de ce qu’en compro
" mis il n’y aurait point eu de jour, d’autant que lorsK qu’ils l’auraient rendue , les parties pouvaient encore
K se soumettre devant e u x , et les prendre pour arbitres1;
K et de fait, la cour l’a jugé ainsi par ses arrêts».
L e journaliste a eu raison de dire que les arrêts l ’a
vaient ainsi ju g é : outre celui de 1628, que rapporte
M o r n a c , le journaliste lui-m êm e rapporte celui du
5
�( 22 )
janvier 16 2 6 , dont a parlé Rousseaud-Lacombe,- par
lequel il fut jugé que toute audience devait être d é
nuée à un appelant., jusqu’à ce qu’il eût payé la peine,
encore que l’on remontrât qu ’il y avait nullité au com
promis, en ce que par icelui on n'était convenu d ’au
cun tems, ni jour, dans lequel les arbitres pourraient
rendre la sentence-, et le m otif f u t , dit le journaliste,
que ce n ’est point une nullité en une sentence arbitrale ,
de ce que au compromis i i n i j avait eu aucun tems n i
jo u r lim ités, parce les parties l ’ai/ant ainsi convenu,
et ensuite subi volontairement la jurisdictiori des ar
bitres, usque ad finem negotii, ils l’avaient pu fa ir e ,
et ne sont plus recevables à s'en plaindre.
'
« M ais, ajoute le journaliste,'quand il n’y a point de
« jour ni de tems limité au compromis, c ’est une nul« lité qui donne matière à s’en retirer; en sorte que
« la partie qui ne veut plus l’entretenir, n ’y peut être
« contrainte, parce que autrement la jurisdiclion des
« arbitres serait prorogée , in infinitum ».
C ’est donc un principe inébranlable que le jugement
arbitral est valable, quoiqu’il n’y ait point de délai
dans le compromis, lorsqu’il n’y a point eu de révoca
tion qui ail précédé le jugement, et que les parties se
sont soumises à la jurisdiclion par la production de leurs
litres el mémoires.
'
‘
On ne se serait pas livré à une si longue discussion à
cel égard , si l’on n’eûl pas cru nécessaire de rappeler
à plus d’exactitudo dans les citations.
’
Il doit donc paraître démonlré que le défaut d ’ex-
�(
*3
)
.................................................................
pression de délai dans le compromis, lie pouvait pas
.empccher l’homologation de la sentence arbitrale.
M a i s , a-t-on dit e n core , le compromis n’a pas été
représenté en la Sénéchaussée, quoiqu’ on n’ait cessé
d’en demander la représentation. Il est bon de rappeler
ce qui est dit à ce sujet à la page 22 du mémoire de
Lamouroux ; on va le transcrire mot pour mot.
•
« L e citoyen Lamouroux allait même ju s q u à con« venir, que si Le citoyen Deve&e rapportait un compro«■mis régulier, il n'aurait d ’autre moyen que de se
« pourvoir au parlement , pour fa ire réformer une sen
»«
«
«
«
te
tence qui sera le fr u it de la surprise et de la fraude;
il somma en conséquence le citoyen D e v è z e d’exhiber du'compromis , qui n ’est cité ni dans la sentencearbitrale , ni dans aucun acte. L ’appelant s’est tou
jours refusé à représenter ce compromis ; dès-lors la
« sentence arbitrale n ’était plus qu’un simple a v i s ,
« émané d’ un particulier sans caractère. Sous ce rapport
« la Sénéchaussée a donc pu connaître d e l à demande
« en nullité et défaut de l’exhibition du compromis:
« et quand le citoyen D evèze rapporterait aujourd’hui
« un compromis régulier, cette discussion serait sans
“■intérêt , parce que le tribunal d’appel représente le
cc ci-devanl (1) parlement, et qu’il suffirait alors d ’interjeler incidemment appel de cette prétendue senff tence arbitrale ».
C1) Que v e u l e n t d i r e c e s mo t s cL -d c v a n t? q u a n d on
PaRO d A t h è n e s , ou d u Sénat d e U o u i e , il f a u d r a d o u e
A r é o p a g e , l e c i - d e v a n t Sénat.
p a r l e r a tie
dire,
le
l’Aréo-
ci-devaut
�( H )
^
Il y avait inexactitude dans les cilations d’arrêt faites
dans le mémoire ; et dans le passage qu’on vient de
transcrire, il y a mensonge et erreur.
Mensonge , en ce qu ’on dit à la page 22 du mé
moire, qu’en la Sénéchaussée le compromis n ’avait pas
été représenté; mensonge à la page
, en ce qu’on y
36
suppose qu’il n’exisle pas de compromis, et qu ’on est
hors d’élal de représenter; et le mensonge est prouvé
par une requête donnée par D evèze en la Sénéchaus
sée, le 14 janvier 17 89, par laquelle il fit production
du compromis
et la signification de cette requête ,
faite au procureur de I^amouroux, fait aussi mention
du bail de copie du compromis.
D on c alors, et dès que le compromis avait été re
présenté en la Sénéchaussée, il riy avait d'autre moyeu,
suivant Lamouroux lui-même, que de se pourvoir au
parlement; par conséquent la Sénéchaussée ne pouvait
pas juger; par conséquent l’appel de son jugement est
bien fondé.
Inutilement ajoute-t-on qu ’il fallait un compromis
régulier ,• on vient d ’établir invinciblement que le com
promis était régulier, et <|iie, quoiqu’il n’y eût pas
de délai fixé , dès qu ’il n’y avait pas eu de révocation ,
dès que les parties avaient produit à l’arbitre titres et
mémoires, on 11e pouvait plus arguer de nullité ni le
compromis, ni la sentence arbitrale.
Mais, dil-on encore, dans le passage que l’on vient
de transcrire, la discussion est sans intérêt, parce que
le tribunal d ’appel représente le parlement , et qu’il
suffirait
�.
..
(
)
suffirait alors d ’interjeter appel incident de la sen
tence arbitrale.
Il y avait mensonge dans la première partie du pas
sage ; il y a erreur dans celle-ci. L ’appel'incident du
jugement arbitral serait aujourd’hui non recevable ,
parce que'ce jugement a passé en force de chose jugée.
L e jugement fut signifié à La m o u roüx , le 2 avril 1788 ;
et mêm e encore aujourd’hui il n’en a pas été interjeté
5
d ’appel. Voilà plus de 1 ans de la signification ; mais
suivant la disposition de l’article 17 du titre 27 de l’or
donnance de 17 67 , les sentences acquièrent force de
chose ju gée, après dix ans du jour de leur signification,
et on ne p eu t plus alors en in te rj et e r appel.
Jousse, sur ccs mots de l’article après d ix ans , dit
qu’ils sont trop précis pour vouloir en changer la dis
position , en étendant jusqu’à o ans la faculté d’ap-
3
On ne doit cependant pas dissimuler qu’au parlement
de Paris on s’était écarté de celte disposition de l’or
donnance , et que les appels y étaient reçus pendant
3o ;
niais que pouvail la jurisprudence contre la dispo-
silion de la loi? une jurisprudence, et sur-tout celle
d un seul parlement ne peut pas c h a n g e r la loi ; el l’on
«si toujours fondé à réclamer contre la transgression
de la loi. Aussi aujourd’hui Ions les tribunaux d’appel
se conforment-ils à la disposilion de l’ordonnance de
*667 , même pour les senlences pendues avant la sup
pression du parlement, et s’il y a eu quelques jugemens
contraires, ceux du tribunal de cassation les ont anéauD
�.
( 26 }
■
.
tis. On pourrait même soulenir qu’à compter de la loi
de 1 7 9 0 , il n ’y a eu qu ’un délai de
3
mois pour se
pourvoir par appel contre les jugemens antérieurs; mais
cela devient inutile^ parce que même les dix ans de
l ’ordonnance de 1667 , ont constamment donné à la
sentence arbitrale la force de la chose jugée.
C ’est donc aujourd’hui par une erreur bien reconnue
qu’on voudrait
prétendre qu ’on pourrait interjeter
appel incident d ’une sentence signiiiée il-y a plus de
10 ans, et qui a constamment acquis la force de chose
jugée.
Enfin un dernier moyen ^ par lequel on prétend jus
tifier la sentence de la Sénéchaussée d’Auvergne.dont
est appel, est le désaveu qu’avait fait Lamouroux de
l ’acte de regrès, signifié à Devèze par l'huissier Pertuis.
On examinera dans la suite le mérite de ce désaveu;
mais pour ce moment-ci il suffit de remarquer que le
désaveu eût été bien ou mal fait , ce ne pouvait pas
être en la Sénéchaussée qu ’il devait l’être, et que ce
désaveu lel quel ne l’aulorisait pas à refuser 1 homo
logation de la sentence arbitrale ; et pour s’en con
vaincre, il n’est besoin que de rappeler et de répéter
ce que l'on a dit ci-devant des principes enseignés par
les auteurs, que «le juge auquel l'homologation d ’une
« sentence arbitrale est demandée, doit procéder som« mairement à cette homologation, sa/is prendre aa« cune connaissance du fo n d du procès' sauf aux par
te tiesà se pourvoir par appel, si elles le jugent à propos.
« Ainsi aucune des parties 11e peut empêcher l'hom o-
�27
(
)
« logation, sous prétexte que la sentence arbitrale est
« irrégulière, ou autrement vicieuse ».
D ’où il doit se conclure nécessairement que le désaveu
sur lequel on voulait élablir le vice de la sentence ar
bitrale , bien ou mal fo n d é , n ’aurait pu être jugé qu’en
tribunal d’a p p e l , et que le vice du désaveu, quel q u ’il
pût être, ne pouvait pas empêcher l’homologation de
la sentence arbitrale.
Mais on aura d’ailleurs occasion de prouver dans la
suite de ce mémoire, que le désaveu n’était pas receYable, dans le ’cas même où l ’affaire n’eût pas été jugée
par une sentence arbitrale, et qu’elle eût été portée
directement en la Sénéchaussée. Ce sera la dernière
proposition de ce m é m oire , d’ailleurs par elle-même
très-surabondante, comme on l’a déjà dit, et parce que
le désaveu n’aurait pu être jugé que par un tribunal
d’appel, qu’il n ’y a jamais eu d’appel de la sentence
arbitrale , et que celui qu’on en interjetterait aujour
d ’hui , serait non recevable.
Ainsi donc mal-jugé évident de la sentence dont est
appel, en ce qu’elle a refusé l’homologation de la sen
tence arbitrale.
'
-
�(
D
*8
e u x i è m e
)
M
oyen
.
L a sentence de La Sénéchaussée ne pouvait prononcer sur
des demandes déjà ju g ées par une sentence arbitra Le,
et détruire par des dispositions contraires celles de la
sentence arbitrale.
I>a proposition du mo yen semblerait seule devoir
l ’établir, parce que la proposition elle-même n’énonce
qu’ un principe., et ce principe a déjà été suffisamment
développé dans la discussion du premier moyen.
Une sentence arbitrale ne peut être réformée, quel
que vice qu’elle renferme , que par un tribunal d’appel;
elle n ’est sujette qu’à l ’homologalion du juge inférieur,
et cette homologation ne peut être refusée p a rc e juge
inférieur. D onc il ne peut connaître, lorsqu’on lui de
mande l ’homologation, ni du fond du procès déjà jugé ,
ni des vices du jugement déjà rendu par les arbitres.
N e serait-il pas ridicule, quand une sentence arbi
trale a été rendue sur les demandes d’une partie , de
prétendre q u e l ’aclion peut être renouvelée devant des
juges autres que ceux devant lesquels doit être porté
l ’appel de la sentence arbitrale , el que les juges infé
rieurs jugeassent tout le contraire de ce qui l’aurait été
par les arbitres ? et c ’est ce ridicule, on pourrai! même
dire celle absurdité, qui se rcnconlre dans la sentence
dont est appel.
L a sentence arbitrale avait déclaré comme non avenue
�C 29 )
la vente de l’office de greffier, et celle de la Sénéchaus
sée déclare celte vente valable, et en ordonne l’exécu
tion. Voilà donc une contrariété évidente de jugement ;
niais le premier ne pouvait être réformé , ne pouvait
être détruit que par des juges d’appel, el la Sénéchaus
sée n ’avait pas ce caractère. Donc son jugement est
nul , et le mal-jugé est par cela seul démontré.
Si par la sentence de la Sénéchaussée il eût été dit
en termes formels , qu’il avait été mal jugé par l e juge
ment arbitral, oserait-on proposer qu ’une pareille sen
tence pût être confirmée? mais n’esl-ce pas la même
chose, quand la sentence de la Sénéchaussée a jugé
absolument le contraire de ce qui l ’avait été par la
sentence arbitrale? En un m o t , la Sénéchaussée s’est
elle-même érigée en tribunal d’appel. C ’est ce qu’on a
eu raison d’appeler une monstruosité dans l’ordre judi
ciaire. En voilà assez, sans doute , pour justifier l’appel
de la sentence , sans qu’il soit nécessaire de le qualifier
comme de juge incompétent.
T
r o i s i è m e
M
o y e n
.
S i ta contestation rieût pas été déjà ju g é e par une seti
. lence arbitrale, et quelle eût été portée directement
en la Sénéchaussée, la sentence de ce tribunal eût été
aussi injuste dans te jo n d , quelle a etc irrégulière,
après une sentence arbitrale.
•Ai' ivüs l’élablissemenl des deux premiers moyens, on
comprend aisément que celui-ci ne peut être que subsi-
�. .
( 30 3
diaire et surabondant; aussi ne veüt-on le présenter,
qu’afin d ’avoir occasion de justifier la conduite de'
De vè ze dans toute celte affaire , et de rendre sensibles ^
les variations et la mauvaise foi qui ont régné dans toute
celle de Lamouro ux, et qui l’ont amené à un désaveu
q u ’il a regardé com meun edernièreplanched e naufrage,
enfin pour démontrer l’infidélité de ce désaveu. Ici il
est nécessaire de rappeler quelques-uns des faits dont
•on a déjà rendu compte.
Lamouroux était propriétaire de l’office de greffier
en ch e f de la maîtrise de St.-Flour. A u mois d ’avril
1 7 8 6 , il vend cet office à D evèze , par un acte sous
seing privé, moyennant 18,eoo francs, et il l’oblige
de remettre à Devèze sa procuration a d resigna ada/n,
et tous les titres nécessaires, p o u r, par D e vè ze s’en
faire pourvoir, lels que ses provisions, quittances de
finance et de centième denier.
Lamouroux nous apprend lui-même dans son m é
moire , que la vente laite à D e vè z e , qui n’était que
sous seing privé, étant encore inconnue , il se pré
senta d’autres acheteurs, et entrJautrcs un citoyen
M alb e t, cjni lui offrit 24,000 francs au lieu de 18,000,
prix de la vente qu’il avait faite à Devèze. Un béné
fice de 6000 francs était bien fait pour le tenter. Mais
comment taire une nouvelle venie à Malbel ? il y avait
la voie du regrès. Mais un regrès si prochain de la pre
mière v e n t e , et une seconde vente faite incontinent,
lout cola aurait paru bien frauduleux. Hésitant alors
sur le parti qu'il avait ;à prendre, il prit du tems pour
�C 3i )
y réfléchir, en différant de remettre à D evèze sa proJ
curation ad resignandum , ses provisions. quitlànceS
de finance et d e . centième
denier. Mais toutes ces
pièces étaient nécessaires, et Devèze ne pouvait, sans
les avoir toutes, se faire pourvoir de l'office.
Cependant Devèze impatient de tous ces délais,
prit enfin le parti de faire faire à Lamouroux une
sommation de lui délivrer la procuration a d resignand u m , et toutes autres pièces nécessaires pour parvenir
à obtenir des provisions. Cette sommation est du 2
décembre 1786.
-
Lamouroux ne pouvait plus reculer. Il se repen
tait do la vente par l’espérance d’ un plus grand prix
que Malbet lui avait offert. Il sentait bien qu’il ne
pourrait p as , sans se perdre de réputation * profiter
de ce bénéfice par un regrès qui. serait aussitôt suivi
d ’une nouvelle v e n t e ; mais il se flattait qu’en exer
çant ce regrès et conservant l ’oiïice de greffier, il
pourrait s’en défaire plus avantageusement dans un
tems plus éloigné. Il se vit donc forcé, par la som
mation de D evèze d’exercer ce regrès contre la vente
qn’il lui avait faite, ce qu’il fit en effet par l’acte qu’il
iitsignilier à D evèze, le 7 du mêm e mois en répon
dant à lu sommation du 2; ce D evèze à son tour ins
truit qu’il ne pouvait pas résister au regrès que le ven
deur d’ un office est toujours fondé à exercer, tant
qu’il
st pas dépoudlé par les provisions de l’acheteur,
pour se débarrasser d’ailleurs de toute inquiétude
sur une affaire de cette nature, et employer à son
�,
. c 32 }
.
.
ulilité les fonds qu’il avait destinés au prix d’une
acquisition qui ne pouvait plus avoir lieu, se déter
mina à faire signifier à Lamôuroux un nouvel acte,
par lequel il accepta le regrès. Cet aclè fut signifié
le 12 décembre, cinq jours après le regrès. Après ce
dernier acte, huit mois se passèrent dans le plus
profond silence de la part de Lamouroux envers
Devèze qui crut d ’autant mieux que tout était con■sommé à l’égard de la vente, que depuis le regrès
I,amoureux n’avait cessé d’agir comme lilulaire et
propriétaire de l’office de greffier, percevant les émolumens courans qui auraient appartenu h D e v è z e ,
si’ la vente avait ,dii subsister^ se faisant payer des
arrérages des gages et chaüflàges antérieurs ¿1 la vente,
q u e , s u i y a n l les clauses de l’acle, il devait partager
avec Devèze,, et don t celui-ci devait seul faire le re
couvrement.
'
Mais les événemens survenus dans l'intervalle , firent
craindre à Lamouroux une suppression prochaine des
maîtrises,, ef par conséquent', de son office de Greffier.
O n conçoit qu’ il dnl alors se repentir de sou regrès.
Les discours prononcés; à rassemblé des-notables*, le
25
mai 1 7 8 7 , et devenus publics, lui annoncèrent
le projet de s occuper de la suppression des
maîtrises,
el le risque q u ’il courait de perdre- un office dont î;i
liquidation ne pouvait jamais se porter au prix qu’ il
l ’avait vendu. Mais comment put - il se flatter de faire
cesser l’eilèl du regn>s qu’il avait e x e r c é , surtout après
l ’acceplation de Devèze ?
Cependant
�'
(
3 3
5
.
,
Cependant dans cette confiance illusoire, il voulut
revenir sur ses pas. Il imagina de faire signifier à
D e v è z e , le i 3 août 1 7 8 7 , un acte par lequel il lui
fil sommation de se trouver chez un notaire, pour
y voir déposer la vente du 2 avril 1786. D e vè z e ne
’pouvait se rendre h l’heure de la sommation remise
chez lui en son absence ; en conséquence * le 14
a o û t , procès-verbal de défaut chez le notaire, et le
même jour assignation à la senéchaussée d’A u v e r g n e ,
pour reconnaître la signature, et pour être condamné
a l ’exécution de la vente, sous offre de délivrer la
procuration a d resignandum.
.
Il 11’est pas inutile de remarquer que dans la som
mation faite pour se trouver chez le notaire, et dans
l’assignation donnée le lendemain, on fait bien offre
de délivrer une procuration a d resignandum , maiso n
ne fait point d’offres réelles de la procuration ellemême , et on ne pouvait pas le faire, parce que cette
procuration n’existait pas encore, et 11’a même jamais
existé : cependant un tel acte pouvait se faire sans
la présence de D e v è z e ; il n ’était pas même d ’usage
<I'ie ces sortes de procuration fussent acceptées dans
le même acte par l’acheteur de l ’office. Mais il n’au
rait pas même suffi d’offrir réellement la procura l io n ,
il aurait encore fallu offrir les provisions du vendeur,
les quittances de finance et celles du centième denier,
pièces qui devaient nécessairement accompagner la
procuration, et sans lesquelle s l’acheteur n’aurait pas
pu obtenir les provisions de l’office.
E
•
�.
( 34 }
.
.
* ,
On a v u ci-devant les causes qui avaient empêché
qu ’il ne fût donné suile à la demande portée par
L am ouroux en la Sénéchaussée d’Au vergne, c’est-àdire, le compromis par lequel les parties so u m ir e n t
l a contestation à l’arbitrage du grand-maître, et le
jugement arbitral qui déclara Lamouroux non receVable dans sa demande, en déclarant la vente comme
non avenue. On a vu que la conduite que tint L a
mo u ro u x, après le jugement arbitral, après qu’il lui
en eût été fuit lecture et qu’il lui eût été signifié avec
bail de copie : on a vu que de tous les actes qu ’il
avait exercés en prenant la qualité de greffier, en se
faisant payer du prix des bau x, et percevant les émolumens, on a vu, dit-on, que de cette conduite résul
tait nécessairement de sa part l ’ap pr o ba tio n et l'exé
cution du jugement arbitral. Mais nous avons promis
que dans ce mo yen subsidiaire et surabondant que
nous examinons, nous mettrions à l’écart le compro
mis, le jugement arbitral et toute leur suile, pour
attaquer la sentence de la Sénéchaussée d’Au vergne,
dans la supposition même que les demandes de L a
mouroux n’eussent jamais été soustraites à la juris
diction da ce tribunal par un compromis, et jugées
par une sentence arbitrale.
Remarquons cependant que ces demandes, portées
en la Sénéchaussée d’Auvergne, par une assignation
du
14 août 1 7 8 7 , lie lurent reprises dans celle Sé
néchaussée, que long-tems après, et lorsque Devèze
y eût fait assigner Lamouroux pour voir ordonner
�3 5
.
.
l'homologation de la sentence arbitrale, la résistance
(
}
à l’homologation, qui ne devait pourtant pas l’ar
rêter comme on l ’a prouvé c i- d e v a n t , et sa persévé
rance à demander qu’il fût fait droit sur des deman
des éteintes par un compromis et par une sentence
arbitrale, étaient d’ailleurs repoussées par le regrès qu’il
avait e x e r c é ,e t l ’acceptation de D e v è z e ; e t ce fut alors
qu’il eut l ’audace de faire un acte de désaveu du re
grès, et d’assigner les héritiers de l’huissier, pour faire
juger avec eux le désaveu, car prudemment il avait
attendu la mort de cet huissier pour former ce dé
saveu. ,
On a vu , dansla discussion des deux premiers moyens,
que le désaveu n’aurait pu se proposer en la Séné
chaussée d’Auvergn e, et qu’après la sentence arbitrale,
ce n’eût pu être que sur un appel de cette sentence
qu’on eût pu se faire un moyen d’appel qui, par con
séquent alors, n’aurait pu être jugé qu’au parlement.
Mais nous supposons ici qu’il n’y aurait eu ni com
promis, ni sentence arbitrale; qu’en un m ot, la Séné
chaussée aurait seule été saisie de la contestation, et
alors même on va prouver que la Sénéchaussée ne
pouvait avoic égard au désaveu dans les circonstances
où on venait de le produire.
Il ne faut pas se persuader qu’on puisse désavouer
les actes d’un officier public, par la seule raison qu’ils
110 sont pas signés de la partie, ou qu’elle n’a pas
donné par écrit un pouvoir de faire ces actes, lorsque,
d ailleurs, il se rencontre des circonstances et des préE 2
�.
.
(
36 }
somptions puissantes que l’officier n ’a pas agi sans pou
voir, et que les actes ou des faits postérieurs sont
des suites naturelles de l’acte qui est désavoué, sur
tout encore lors qu ’il y a preuve que l’acte a été
connu de la partie qui le désavoue, mais qui reste
long-tems dans le silence, après qu ’on lui en a donné
connaissance, et attend, pour en iaire le désaveu,
la mort du ministre de l’acte.
Quelques praliciens, et même Denisart , avaient
voulu donner en m a x i m e , que le procureur ou l’huissier
lie pouvaient être désavoués après leur mort 5 mais
cette maxime générale eût été trop dangereuse ;aussi
les arrêts l’avaient-ils fait dépendre des circonstances,
Observez néanmoins, disent les auteurs du réper
toire de jurisprudence, que quoique le désaveu puisse
avoir lieu après le décès du procureur , on ne doit
l ’admetlre que quand les circonstances font présumer
qu’il y a eu dol et malversation de la part de cet
officier. L a raison en est qu’on doit supposer, en
g é n é ra l, qu’ un procureur n ’agit pas sans pouvoir, et
que les héritiers ne sont pas instruits suffisamment
de ce qui pouvait l'autoriser.
O r , quelle circonstance plus propre à prouver que
ce désaveu est fait de mauvaise foi, lorsqu’on établit
que l’acte a été connu par la partie qui le désavoue,
long-tems avant le désaveu, cl qu’on a attendu, pour
faire ce désaveu, la mort du minislie d e l ’acle qui est
désavoué.
Ici on ne peut pas mettre en doute la connaissance
�37
(
)
qu’a eue Lamouroux de V^cte de regrès. D e v è z e lui
fait, le 2 décembre 1786, une sommation de lui déli
vrer une procuration ûd résignaridu/n, et les autres
pièces nécessaires pour se faire pourvoir de l’office de
greffier. Lamouroux ne peut pas dire qu’il n’a pas connu
cette sommation, qui a été faite en parlant à sa per
sonne ; il ne pourrait le dire qu’aulant qu’il formerait,
contre cet acte, l’ inscriplion de faux.
•Après cetle sommation, que devait-il faire, s'il vou
lait accomplir la vente? C ’était de délivrer la procu
ration a d resignandum , et les autres pièces qui lui
étaient demandées par la sommation.
Que pouvait-il faire., s'il ne voulait pas accomplir la
vente? Il u’avait pas d’autre mo yen que d’exercer le
régi ès.
Il a exercé ce regrès cinq jours après la sommation,
le 7 décembre;" et le 12 du même mois le resrès
a été
O
accepté par D e v è z e , par un acte signifié à Lamouroux.
11 ne peut donc pas dire non plus qu ’ii n’a pas connu
l ’acte par lequel le regrès a été accepté, puisque cet
acte lui a été signifié, et il ne pourrait le prétendre
encore qu’en s’inscrivant en faux contre la signification
qui lui a été faite de l’acceptation du regrès.
D e là donc qu e , d’ un côté, il n’a point satisfait n i a
sommation du 2, en délivrant à D e vè ze la procuration
et autres titres nécessaires, on doit conclure qu ’il n ’a
plus voulu que la vente s’accom plît, puisqu’elle ne pouvau l’être qu’après la remise de tous les litres.
D e là q u e , par l ’acte du 1 2 , D evèze lui a fait si-
�#
^
( 38 )
............................
gnifier l’acceptation d’un regrès qu’il disait lui avoir été
signifié à la requêle de Lamouroux , si le regrès n’avait
pas été de son fait, s’il n ’en avait pas donné pouvoir
à l’huissier, il devait s’empresser de désavouer l’huissier.
Mais dès qu’alors il n’a rien fait pour contredire le
regrès, que le désaveu n’est venu que plus de deux ans
après, et que,, pour le faire, il a attendu la mort de
l ’huissier, tout cela ne manifeste-t-il pas la mauvaise
foi de ce désaveu tardif?
N en sera-l-on pas même encore plus convaincu , si
toutes les actions de L am ou rou x, postérieures à l’acle
de regrès, se concilient parfaitement avec la vérité de
ce regrès, si ces actions emportent avec elles la consé
quence que Lamouroux avait l ’intention de se main
tenir dans le titre et la propriété de l'office qu’il avait
vendu à D e v è z e ?
A u t re m e n t , de quel droit aurait-il perçu lui-même
les émolumens du greffe, qui devaient appartenir à
D e v è z e ? de quel droit aurait-il perc;u les arrérages an
térieurs à la vente des gages et des chauffages qu ’il
devait partager avec D e v è z e , mais dont, aux termes
de la vente, D e vè ze devait seul faire le recouvrement ?
de quel droit a-t-il poursuivi Seriez, l’a f;)ii condamner
au paiement du prix de la ferme, et s’en est (ait payer?
11 n a pu faire tout cela qu’en manifestant son inten
tion do conserver le titre et la propriété du greffe, et
par conséquent sans approuver le regrès et reconnaître
le pouvoir qu ’il avait donné à l’huissier; et ce ne pou
vait être que par l’effet du regrès qu ’il pouvait con
server le titre et la propriété de l’oflicc.
�3
( 9 )
C ’est d’ailleurs en vain que pour rendre suspeci l’acte
de regrès du 7 décembre 1 7 8 6 , et pour fortifier le
désaveu, on prétend qu’il se trouve un acte du même
jour, fait par le même huissier à plus de dix lieues de
distance de Saint-Flour; d’où l’on conclut que l’huis
sier ne pouvait pas être à Saint-Flour ce même jour.
i°. Il ne serait pas physiquement impossible qu’un
huissier fit le même jour deux actes en deux lieux différens, à la distance de dix et douze lieues l’un de
l'autre.
2.0. Devèze produit un acte signifié à Saint-Flour le
6 d é c e m b re , la veille de celui qui a été signifié le 7 à
D ev èze ; et ce même huissier pouvoit être encore à
Saint-Flour le lendemain 7, signifier le regrès de Lamouroux le même jour au matin, et parlir de suite pour
al!er plus loin faire d’autres exploits. On ne pourrait
pré'endre qu’il n’était pas à S a in t -F lo u r le 7 , qu’en
formant l'inscription de faux contre l ’acte par lui si
gnifié ce même jour à la requête de Lamouroux.
3 .°
Mai* Lamouroux a eu connaissance du regrès,
par l ’acceptation que D evèze lui en a fait signifier le
12. S’il n ’avait pas donné de pouvoir à l'huissier, il ne
pouvaû pas trop se presser de le désavouer, et ilallend
plus de deux an s, et la mort de l’huissier, pour faire
ce désaveu.
4 *°
Pour admettre le désaveu de Lam ouroux , il fau
drait qu’il y eût trois actes faux, ceux du 2, du 7 et
du ï2 du même mois, et trois actes faits par trois différens huissiers. Comment supposer qu ’011 eût pu cor
rompre trois huissiers ?
�40
(
)
A lors , de foule manière le mal-jugé de la sentence
de la Sénéchaussée d’Auvergne, en ce qu’elle avait jugé
le désaveu valable, ne doit-il pas paraître évident,
même en faisant abstraclion de la sentence arbitrale,
et en supposant toujours que le compromis et la sentence
arbitrale n’auraient jamais existé?
Mais on peut encore aller plus loin, et soutenir avec
fondement q u e , n ’y eût-il jamais eu d ’acte de regrès,
ou que jamais Lamouroux n ’eût montré l’intention de
se conserver le titre et la propriété de l’office , malgré
la vente qu il en avait faite, la sentence de la Séné
chaussée aurait encore mal jugé en ordonnant l’exéculion de la vente.
Pour cela il suffit d’observer que D e vè z e ne pouvait
devenir titulaire et propriétaire de l’office, que par reflet
des provisionsqui lui en auraient été accordées, et qu'il
ne pouvait obtenir ces provisions qu ’autant qu ’il aurait
eu en son pouvoir les provisions de Lamouroux, sesquittances de finance et de centième denier, qui ne lui
avaient jamais été délivrés par L am o u rou x , et que
jusques-la , Lamouroux restait absolument le maître et
le propriétaire de l'office, d ’où doit résulter la consé
quence que cet office ayant été supprimé , il l'a été sur
la tôle de [/¡imouroux , et que la perle n'en a pu re
tomber que sur lui , par la règle de droit , res petit
Domino.
' 11 est bon de rappeler les principes de la matière,
nous en ferons ensuite l’application.
L a vente ne peut recevoir sa perihelion que p;ir la
tradition ÿ
�41
(
)
tradition ; elle ne peut transférer la propriété qu’autant
qu’elle est suivie de la tradition ; traditionibus dominia
rerum transferuntur, non m idis pactis. 1. 20, cod. de
pactis 1 ainsi jusqu’à la tradition, la propriété de la chose
réside toujours dans la personne du vendeur; ce qui est si
vrai que dans le droit , le propriétaire qui a fait une
première v e n t e , venant à en faire une seconde d e l à
même chose à un autre ach e te u r, s’il lui en fait la tra
dition, ce dernier acquéreur est préféré.
L a tradition et la délivrance des choses qui sont
fermées sous clef, ne s’opère que par la remise des
clefs que fait le vendeur à l’acheteur : sed qui nier~
ces in horreo depositas vendiderit, simuL atque ciaves
tradident em pton, transfert proprietatem merciutn a d
cmpiorern. In st. §. 4b de ter. divis.
L a délivrance des immeubles, dit D o m a t , d’après
la dispostion des lois, se fait par le v e n d e u r, lors
qu’il en laisse la possession libre à l ’acheteur, s’en
dépouillant lui-meme, soit par la délivrance des ti
tres , s’il y en a , ou des clefs, si c ’est un lieu clos,
comme une maison.
En ne parlant que de ces principes généraux, car
on verra bientôt qu’il y en a de particuliers pour la vente des offices, la tradition de l’oflice vendu ne pour
rait se faire que par la remise des titres nécessaires
pour en faire pourvoir l'acheteur; c ’e s t - à - d i r e , de
la procuration ad resignanduni, des provisions de
Latnouronx, de ses quillances de finance el centième
denier. L a remise de loutos ces pièces était nécessaire
Y
�4
.
( 2 )
pour opérer la tradition de la chose vendue , de mémo
que la remise des clefs du grenier dont on a vendu
les grains qui y étaient renfermés, de même aussi
que la tradition d’une maison qu’on a vendue, et qui
n ’a pu aussi s’opérer que par la remise des clefs.
Ainsi, n’y ayant pas eu de délivrance des litres né
cessaires pour faire pourvoir D e v ò t e , et le faire jouir de
la chose vendue , il n’a pu y avoir de tradition, sans la
quelle la propriété de l'office ne pouvait lui être transfé
rée, tradi-twmbus dominici rem ni Irans/cmntur, non m i
dis p aclisj mais comme Liinioiu oux ne pouvait perdre la
propriété qu’au moment qu’elle passerait à D e v è x e ,
ce qui était impossible par le défaut de la remise dos
titres qui n ’a jamais été faite, dès que l’ofiicd a été sup
primé, la perte n’en
pu retomber que sui' Lamon-
roux , q u i , au moment de la suppression , en était seul
propriétaire.
Lamo uroux voudrait-il dire qu ’il Avait fait desoflies
de délivrer la procuration ad rcsignandutn , et autres
titres nécessaires? mais dans quel teins a-t-il lait ces
ollres? il devait les faire au moins aussitôt après la som
11
mation que lui en lit D c v è / e , le 2 décembre 1786.
avait annoncé qu ’il ne voulait j oint les faiie dans l’acte
du regrès du 7 du même mois, cl qui fut accepté par
Dovèze dans l'acte signifié le 11 à Lamouroux.
Et ces offres tle délivu r, il ne le-, a laites que deux
ans après , et long-tems même apn s lu sentence arbi
trale qui avait déclaré la vente comme non avenue.
.Mais supposons mémo q u ’il n ’y eût eu ni rciirès, ni
�43
(
)
_
acceptation, ni compromis, ni jugement arbitral, qu’eniin Lamouroux ne se fût pas toujours porté et .qualifié
propriétaire en recevant les éinolumens du greffe, les
gages, les droit de chauffage, qui auraient dû appar
tenir à D evèze , en percevant les droits du greiïe, en
poursuivant le paiemen t, obtenant des jugemens où
il se qualifiait toujours de greffier en chef, et touchant
le prix des fermes ; niellant tous ces faits à l’écart,
quelle est doue cette espèce d’offres tardives faites
par L am ouroux?
J1 olliait , disait-iUde délivrer une procuration ad
rcsignandum ; mais ce n’était pas là une offre réelle
qui seule pouvait le libérer de l'obligation qu ’il avait
coul raclée ; il aurait fallu qu’il eût réellement une pro
curation loule faile, et non pas une procuration à faire,
et qui 11e l’a jamais été.
jKien d'ailleurs n'aurait pu l'empêcher de faire celle
procuration el de l'offrir réellement; il n’avait besoin
pour cela ni de la présence de D e v è z e , ni de son conseulement; et jamais dans ces sortes de procurations
il n’y eut d’autre partie que le constituant.
Lors même q u ’il lit ces oflres, et quand elles auraient
été réelles, D e vè z e aurait élé fondé à les refuser, parce
qu elles auraient élé tardives et i’a i k s à couli*'-tem.s. (.ts
offres miraient dû être laites inum'diaUnm ni a^r>s H
scinmalion que Dev -zelui avait fail faiiv k* z d *cembro
; mai;; on nr- 1: > aviit laites que pu : Ij d:*ux ans
*4 * *• , et
1«:; -que lu mm i u
i-ti cî .v nuàlnses ét'ût d j;’i
�44
C
)
On croit donc avoir démontré par les principes gé
néraux de la vente et de la tradition, que Lamouroux
élait seul propriétaire de l’office lorsqu’il a péri par la
suppression des maîtrises ; et alors quelle est la règle?
res périt Domino. Mais il y a de plus des principes par
ticuliers pour les ventes d ’offices : nous ne pouvons pas
les puiser dans une source plus pure que le traité des
offices de Loyseau ; c ’est là vraiment le siège de la
matière.
« C e l u i , dit Loyseau, liv. i , ch. 2, n. 2 1 , qui après
« avoir composé de l’office, e.l payé le prix d’i c e l u i,
« a relire de son vendeur une procuration irrévocable
« pour le résigner en sa fa veur, même un acle exprès
« de résignation, n ’a point encore de droil en l’ofiiGe
« jusqu’à ce que la résignation soit admise par le col« Ialeur et la provision expédiée à son profil; de sorte
« que jusqu’alors l’office est encore in bonis du rési« gnant
et par conséquent peut être saisi pour ses
« dettes , comme a décidé la Coutume de Paris, art.
® 97, et peut par lui-même êlre résigné à un au tre,
« s’il prévient par eflet son premier résignalaire ».
(( Dont la raison est, conlinue Loyseau , que la ré
* signalion n'est pas une tradilion de l’office, attendu
« que les offices ne sont pas en la libre disposition des
«• pourvus, pour les pouvoir directement et imnié« dialement transporter à autrui ; mais il iaut qu’ils
« passent auparavant par les mains du collaleur, duquel
« leur disposition dépend principalement ».
Ainsi, d’après la doctrine de L o y s e a u , celui qui a
�(
)
vendu l’office en reste toujours propriétaire, lorsmême
qu’il a délivré sa procuration ad resignandum ,• 1ant
qu’il n’y a pas eu de provision, l’office est toujours l u
bonis du vendeur; mais si l’office vient à être supprimé
dans l'intervalle, il ne peut périr qu ’entre les mains du
vendemvpuisque celui-ci en reste toujours propriétaire.
Si cela est vrai, même à l’égard du vendeur qui
a déjà délivré la procuration a d resignandum, à com
bien plus forte raison do'.i-il en être de m ê m e , lorsque
non seulement la piocuration a d resignandum
n’a
pas été délivrée , mais lorsque encore il n’y en a ja
mais eu de faite , surfont encore lorsqu’il y a eu som
mation de la 06'iv.ei , comme on voit qu ’il en fut
Dait une le duux. décembre 1786 ; et qu ’ensuite ,
prés de deux ans après, Lamonroux a offert de déli
vrer la procuration ad. resignandum , alors les choses
n ’étaient plus entières, et d’ailleurs ce ne sont pas
des offres réélles de la procuration elle-même, mais
de simples offres de délivrer une procuration qui n’exislait pas encore, et qui n’a jamais existé , procuration
qu’on pouvait faire sans la présence de D e v è z e , où
il n’était pas besoin qu ’il concourut.
1
Il
doit donc paraître démontré que quand même
a flaire eût été portée directement en la Sénéchaus
sée d’Auvergne , la sentence qui y fut rendue était
de toute injustice.
Comment cette sentence avait - elle d ’ailleurs pu
]"ger valable le désaveu d’ un regrès qui devait paraître
constant par toute la conduite de L a m o u ro u x , surtout
�46
(
)
par une suile des actes des 2, 7 et 12 décembre 1786,
_
trois actes faits par trois huissiers différens qu’il aurait
fallu corrompre tous les trois pour leur faire faire ail
lant de faux , le premier et le dernier, en ne donnant
pas copie de ces actes à Lam o u rou x, quoique leurs
exploits énoncent le bail de copie, et l’huissier qui
avait fait le regrès de L am ou rou x, pour l’engager à
faire cet acte sans l’aveu de Lamouroux. L ’acte du
12 décembre 17 86, donna connaissance à Lamouroux
d’un regiès signifié à D e vè ze le 7 , par l’acceptation
du regrès faite par cet acte qui ne pouvait être atta
qué que par l’inscription de faux. Pourquoi donc le
désaveu n ’a - t - i l pas suivi de près, et attendre à le
faire, deux ans après la mort de l’huissier. Nulle autre
cause vraisemblable du désaveu, que la connaissance
qu’a eue Lamouroux de la suppression prochaine de
l ’office qu ’il avait , vendu à Devèze.
Et quant à ce qu’on dit que la relation du con
trôle dans le registre de l’acte de regrès, parle d ’un
acte signifié à D e v è z e , qualifié habitant du Pont du Vern e t , au lieu qu'il, est habitant de Saint-Flour, de quelle
conséquence peut être celle énonciation, contraire à
celle de la copie du regrès signifié à D e v è z e , où il est
qualifie habitant de Saint-Flour? I,e contrôleur ou le
commis qui a fait 1 enregistrement, pouvait avoir dans
l'idée quelque acte précédent, où il était question d’un
habitant du V e r n e l , et il a pu confondre. D ’ailleurs il
n ’existe pas d'individu du nom de D e v è z e , qui soit ha
bitant du Pont du Vernel. Mais ce qu ’011 veut ensuite
�47
(
)
•supposer, que c’était Devèze lui-m êm e qui avait écrit
sur ie registre la mention du controle ^ est lout-a-lait
niai adroit. Si le fait était vrai, comment D evèze luim ê m e , habitant de Saint-ïlour, se serait-il donné un
domicile au Pont du V e r n e t ?
Dans de telles circonsîances, il est impossible de con
cevoir comment la sentence dont est appel, a pu dé
clarer valable le désaveu de L am o u roux, et ordonner
l ’exécution de la vente. Cette sentence est donc évi
demment injuste, en écartant même le compromis et
le jugemen arbitral qui l’avait précédé.
Mais la sentence est encore plus insoutenable : elle
est nulle et irrégulière, en ce qu’elle a jugé le con
traire de ce qui l’avait été par un jugement arbitral
qui ne pouvait être détruit que par un appel, dont la
Sénéchaussée n’aurait pas pu connaître. C ’est ce que
l ’on se persuade avoir démontré dans les deux premiers
moyens.
On finira par observer que L am ouro ux n’avait cessé
de se répandre en injures contre D e v è z e , dans tout le
cours du procès. 11 semblait s’en être repenti, lorsqu'il
avait dit à la page1 i x de son mémoire, q u il éviterait
avec soin tes personnalités, pour ne s'occuper que de La
cause, et que sans doute Devele lu i saurait gré de sa
Modération ,• mais on a bien mal tenu parole en ter
minant le mémoire par celte phrase, que Le citojen
Devèze est parvenu ci ce p oin t, qu il. est difficile de le
calomnier. Quand on est méchant, on ne devrait pas
�promettre, par réflexion, ce qu’on ne peut pas tenir
par caractère. Mais qu ’est-ce que cela fait à la cause?
L e citoyen T
L e citoyen A
io lier ,
ndraud,
rapporteur.
avocat.
L e citoyen C r o i s i e r avoué.
A R I O M , DE L 'IM P R IM E R IE DU P A L A I S , C1IEZ J.-C. SALLES.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean-Baptiste. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Andraud
Croisier
Subject
The topic of the resource
ventes d'office
arbitrages
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jean-Baptiste Devèze, appelant ; contre Antoine Lamouroux, intimé ; en réponse à celui de l'intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1786-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0229
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1411
BCU_Factums_G1412
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53728/BCU_Factums_M0229.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Mauriac (15120)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
ventes d'office
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53225/BCU_Factums_G1411.pdf
1f641333b5eaeba98ffd3b55d2965bca
PDF Text
Text
ME MO I R E
POUR
J
e a n
- B
a p t i s t e
D E V E Z E , appelant ;
C O N T R E
A
e n
L
’a
n
t
o
i
n
e
RÉPONSE
p p el
L A M O U R O U X , intimé
A
CEL U I
DE
L ’I N T I M É .
est d’une sentence de la Sénéchaussée
d ’Au vergn e, du 29 mars 1790U n e simple réflexion
suffirait pour en établir le mal-jugé. Elle a refusé l’homologation d’un jugement arbitral qui devait être ac
cordée , sans se perm ettre le moindre examen du bien
ou, m a l - j u g é . E l l e a fait plus, elle a jugé le contraire
de ce qui l’avait été par le jugement arbitral: en un
mot , la Sénéchaussée s'était érigée en tribunal d’appel
d’un jugement arbitral. Tout cela ne peut être consi
déré que comme une monstruosité dans l' ordre judi
ciaire.
�I V^
( 2 )
Il ne doit donc pas paraître difficile de justifier l’appel
de la sentence d e ja Sénéchaussée d’Auvergn e; on fera
plus, et on espéré de «prouver surabondamment qu ’abs
traction du jugement arbitral, si la contestation eût été
portée directement en la Sénéchaussée , la sentence
eût été aussi injuste qu’elle a été irrégulière après le
jugement arbitral.
Commençons par rappeler les faits et les circonstances
singulières de celte affaire.
Par un acte sous seing p rivé, du 2 avril 17 8 6 ,
Lamouroux ^vendit h D evèze l’état et office de greffier
en ch e f de la maîtrise des eaux et forêts de St.-Flour.
L e vendeur promit de remettre h l’acquéreur, quand
bon semblerait à celui-ci, la procuration a d resignandum. L e prix de la vente fut de 18,000 fr., payables
aux termes convenus, avec intérêts. 11 esl convenu , par
la vente, que Lamo uroux partagera avec D evèze tous
les arrérages qui pouvaient lui être dus dans le grefle,
même les gages et chauffages jusqu’au jour de la ve n te }
de tout quoi, est-il dit, D e vè z e se chargera de faire le
re couvre m ent, et d’en taire comptera Lamouroux à
fur et mesure qu ’ils rentreront. Lamouroux se réserva
seulement les revenus et profits casuels du gre ffe , de
l’année 1 7 8 6 , tant dans l’élection de St.-Flour, que
dans colles d’Aurillac et de Mauriac. Lamouroux avait
affermé à Daude le greffe de la maîtrise de St.-Flour,
et il avait aussi affermé à Seriez les droits de ce greffe,
qui se percevaient dans les élections d Aurilluc et do
Mauriac. Il fut stipulé dans la vente , que Devèze.serail
�&il
( 3 ).
obligé d’entrelenir le bail de Daude jusqu’à son ins
tallation , ét qu ’alors, s’il voulait l ’interrompre, il ga
rantirait Laraouroux des dommages-intérêts que Daude
pourrait exiger pour l’inlerruption ; et à l’égard du bail
de Seriez, D e vè ze fut obligé de l ’entretenir dans toute
sa durée.
X/araouroux se repenlit sans doute d’avoir vendu à
D evèz e l’office de greffier ; en vain celui-ci le pressait
chaque jour de lui remettre sa procuration a d reslgn anduni, ses provisions, quittances de marc d’or et de
centième denier, et autres pièces nécessaires pour se
faire p o u rv o ir; en vain lui demandait-il toutes les
pièces, sans lesquelles il ne pouvait se faire p aye r des
gages et chauffages qu’il devait partager avec Lamouroux, et dont il était chargé de faire le recouvrement,
et les baux des fermiers Daude et Seriez , pour se faire
payer du prix de leurs fermes, qui ne devait point en
trer en partage a ve cL am o u roux ; celui-ci trouvait tou
jours des prétextes pour ne pas remettre tous les actes
nécessaires, et cependant l'intérêt du prix de là vente
courait toujours.
D éjà huit mois s’étaient passés, lorsque D evèze se
vit obligé de faire , par un acte du 2 décembre 1786 ,
une sommation à Lamouroux, de lui donner et déli
vrer , dans les 24 heures, sa procuration a d resigna/id u n i, ses provisions , quittances de marc d’or et de
centième denier, cl autres pièces nécessaires. Cette
sommation no put pas être ignorée par L a m o u r o n x ,
puisqu’elle lui lut laite, parlant a< sa personne, par
A 2
Ut*
�(4 )
33iron , huissier audiencier au
bailliage
de Saint-
Flour. '•
1
Il n’est pas inutile de remarquer que danscettesommation, D evèze ne fit pas menlion de l’acte de vente
du 2 avril 1786, pour ne pas se mettre dans la nécessité
de le faire contrôler et d’en payer les droits; ce qu ’il
voulait éviter avec raison, puisque l’acte devait ensuite
être passé par-devant notaire: il se contenta d’énoncer
dans la sommation , que Lamouro ux lui avait vendu
l office de greffier'des eaux et forêts, et qu’en cas de
déni, il offrait de le prouver tant par litres que par
témoins. Cette remarque répond d ’avance à une ob
jection faite à cet égard par Lamouroux.
Après cette sommation , Lamouroux ne put pas re
culer plus long-tems, et se trouva enfin obligé de
manifester son repentir. La sommation était du 2 dé
cembre; et le 7 du même mois, il fit signifiera Devèze ,
par Perluis, premier huissier audiencier de 1 élection
d’Aurillac, un acte , par lequel, «en répondant à la
« sommation qui lui avait été faite par D e vè z e , le 2
« du même m o is , il lui déclara qu’il n ’entendait point
« donner la procuration ad resignandnm de son office
* de greffier en chef de la maîtrise des eaux et forêts
« deSt.-Flour; qu’à la vérité, par des conventions faites
« entre parties, au mois d’avril dernier, il avait vendu
« son office à D e vè ze , mais que dès le lendemain même,
« et depuis, il s’en était repenti; qu étant encore jeune,
’« et ayant plusieurs enfans maies pour le remplacer,
« il 11e pouvait pas raisonnablement se défaire d’un
�M i,
( 5 )
« office qui lui donnait un état, et auquel il était atta« clié par le long exercice qu’il en avait fait , et qu’en
« outre cet office lui avait été transmis par son père,,
« qui le tenait aussi de ses auteurs, et attendu encore
•• les privilèges et prérogatives qui y étaient attachés:
« c ’est p o u rqu o i, bien loin de donner la procuration
« a d resignandutn, il se propose de se servir de la
« faculté que la jurisprudence accorde à tous les oüi« ciers ; et en exerçant le regrès de son office, il se
« croyait fondé à demander que les conventions faites
«• entre les parties, fussent déclarées nulles et comme
« non avenues ».
Par ce même acte, où il est dit que D e vè ze a
fait refus d’acquiescer au regrès, quoique l’acte ne
soit fait qu’en parlant à sa servante, il est donné
¿assignation à D e v è z e , au bailliage de Saint-Flour,
pour voir prononcer la nullité, et déclarer, en con
séquence, queLam ouro ux demeurera libre et déchargé
des conventions faites avec Devèze.
Celui-ci était absent au moment de cet acte fait
en parlant à sa servante, et à son retour, l’acte lui
ayant été remis, s’étant consulté, et ayant appris qu’il
ne pouvait pas résister à l ’action en regrès ; voulant
d’ailleurs, se débarrasser de toutes tracasseries avec
Lamouroux , le 12 du même mois, lui lil signifier'
un acte par Ceuille, huissier audiencier en l ’élection
de Saint-Flour, par lequel il déclara, en réponse à
la déclaration et à l’assignation de L a m o u r o u x , qu ’iL
consentait et acquiesçait aux conclusions prises par
�( 6 )
L a m o u r o u x , par l’assignation qu’il lui avait fait donner,
et à ce que les conventions faites à raison de l'office
de greffier, demeurassent nulles et comme non avenues,
et que Lamouroux pût disposer de son office comme
bon lui semblerait.
T o u t alors paraissait consommé entre les parties:
L am o u rou x avait fait le regrès, et D e vè ze l ’ avait
accepté. D e vè ze eut toute raison de se croire dans
la plus grande sécurité. Déjà huit mois s’étaient passés
dans un profond silence de part et d’au Ire. D e vè ze dut
être donc bien surpris lorsque , le i 3 août 1 7 8 7 , L a
mouroux lui fit faire, à son domicile et en son absence,
1111 acte in s t ru m e n t a le , contenant sommation de se
trouver le lendemain , huit heures du matin, en l’étude
d’un notaire de Saint-Flour, pour passer la vente de
l ’office, 011 voir déposer l ’acte sous seing p rivé , du
2 avril 1786,6! accepter sa procuration a d reslgnandum.
L e lendemain 14 août', procès-verbal de défaut
chez le notaire, où D e vè ze n ’avait garde de se trou
v e r , étant encore ;ibsent, et ne pouvant avoir con
naissance de la sommation qui lui avait été faite la
veille; et ce même jour 14 août, assignation à D e vè z e
par L a m o u r o u x , en vertu de coninuttunus en la séné
chaussée d’Auvdrgne, pour reconnaître les écritures et
sigmilurcs de l’acte de vente sous seing privé, du 2
avril 1786, et ail principal, pour ralilierla venir, sous
offre de délivrer la procuration ad rcsignanduni.
Lors de celle assignation, le grand-maître dos eaux
et forets se trouvait dans- lu ville d e Saint-Flour. La
�( 7 )
contestation élevée par Lamouroux fut c o n n u e , et
plusieurs personnes s’entremirent pour engager les
parlies ¿1 la faire lerminer par la médiation du grandmaître. Lamouroux e t D e v è z e passèrent un compromis
sous seing privé, le premier septembre 1 7 8 7 , par lequel
ils convinrent de s’en rapporter, pour le procès pen
dant e n tr e u x , à Cavis et médiation du grand-m aître,
promirent de lu i envoyer, incessamment, dans l'espace
de trois m ois, tous leurs titres, papiers nécessaires}
et piecesi) afférentes, même chacun, le double sous seing
privé de la vente, se soumettant de s’en rapporter à
son a v is, à peine de 4000 Uv. qui demeureront encou
ru es, de plein droit, contre le contrevenant.
Les parties envoyèrent leurs pièces el mémoires ail
grand-maître, alors de retour à Paris; il ne les reçut
qu ’au mois de décembre 17 8 7; mais il ne pouvait
prononcer son jugement qu’après avoir fait contrôler
le compromis, ce qui fut fait à Paris le 9 décembre
1 7 8 7 , el le dépôt en fut fait chez un notaire de Paris,
le même jour. L e 9 février suivant, 1 7 8 8 , 1 e grandmaître rendit son jugement arbitral.
Dans ce jugement il est énoncé que toutes les pièces
el mémoires des parties ont été vus par le grand-maître,
el notamment la sommation faite par D e vè z e à L a
mouroux , le 2 décembre 1 7 8 6 , l’acte signifié par
L a m o u roux , le 7 du même mois, contenant son regrès
el la vente de l’oilice •, enfin , l’acte d’acceptation
du regrès,signifié par D evèze n Lam ouroux, le 12.du
môme mois. Ou doit croire que ce furent les otigi-
�*s.C
' ( 8 )
naux de toutes les pièces qui furent vus par le grand' maître, sans quoi il aurait énoncé qu’il n ’avait pro
noncé que sur les copies.
Après le vu de toutes les pièces, voici comment s’ex
prime le grand-maître dans son jugement arbitral:
« Sans entrer dans la discussion des moyens e m « ployés par les parties pour soutenir la validité ou la
« nullité de l’acte du 2. avril 1 7 8 6 , j ’ai considéré
«
»
«
<r
l ’affaire sous son véritable point 'de vu e; et la question qu’elle présente, n’est pas de savoir si l ’acte
de 1786 est valable, mais s’il est détruit par la réponse
du sieur Lamouroux , à la sommation qui lui fut faite
« de délivrer la procuration a d resigriandurn, et par
« l ’acquiescement
du sieur D e vè ze aux conclusions
« portées en ladite réponse.
’
« L e sieur Lamouroux a bien senti le faible de- sa
« demande; aussi 11’est-il nullement question de ces
« actes dans son mémoire à consulter, et c est son
« silence sur l'existence de ces pièces qui lui a'pro«• curé des avis favorables. Si l’acte du 2 avril 1786,
« est valable, comme contracté entre majeurs , pour« quoi les actes subséquens ne le seraient-ils point ?
« L e sieur Lamouroux avait vendu : malgré l’ncquies« cernent à son regrès, il entreprend de suivre reflet"
« du premier acte ; sa marche est contradictoire, cl
<r sa procédure est dérisoire.
c En conséquence, nous disons que le traité dudit
r jour 2 avril 1786, sera cl demeurera comme non
« avenu, et que ledit Lamouroux pourra disposer,
« ainsi
�»
C9)
■.
« ainsi que bon lui semblera, de son office de greffier
« de la maîtrise de Saint-Flour, le condamnons en
« tous les dépens; sur les demandes en dommages«■intérêts, mettons les parties hors de cour ».
Ce jugement était du 9 février, et le 12 du même
mois, il fut envoyé par le grand-maître (Boisneuf de
Chenevière ) , au sieur M u r e t , garde-marteau des eau^
et forêts de Saint-Flour, pour en faire lecture aux
parties, et le déposer chez le notaire q u ’elles v o u
draient choisir. L a lecture et prononciation du juge
ment arbitral furent faites aux parties par le sieui
Muretjet par acte instrumentaire du premier avril 1788,
P e v è z e fit sommer Lamouro ux de déclarer entre les
mains de quel notaire il voulait que le jugement fût dé
posé, lui protestant, qu’à défaut de s’expliquer, le dépôt:
Serait fait entre les mains du notaire, sur ce requis.
L am o u roux feignant d ’être absent de chez l u i , ne fit
que présenter sa servante, en parlant k laquelle, iï
fut déclaré que le dépôt du jugement arbitral aurait
lieu entre les mains du syndic des notaires1 de SaintFlour, le lendemain huit heures du matin1, dans lo
cabinet du sieur M u ret, o ù , en conséquence, L a m o u
roux fut sommé de se trouver pour y voir faire nou
velle lecture et prononciation, et le dépôt entre les mains
du notaire.
O11 conçoit bien dans la conduite qu ’avait
déjà
tenue L a m o u ro u x , et par celle qu ’il a tenue dans la
suite, qu ’il n ’avait garde de se rendre h la sommation;
en conséquence, procès-verbal par défaut contre lui,
B
'
�%
‘ n
( i.o )
de la lecture, prononciation et dépôt du jugement, le
2 avril 1788.
•
j
L ’inaction où demeura L a m o u r o u x , après avoir,eu
connaissance du jugement arbitral, dut persuader à
D e v è z e , que toute contestalion entr’e u x , sur la vente
de l’office de grefïier, était terminée; il fut d’ailleurs
confirmé dans cette idée, par les renseignemens qui
lui parvinrent, quq L a m o u r o u x , depuis la vente de
1 7 8 6 , n ’avait jamais cessé de prendre la qualité de
grefïier, et d’en faire les fondions; mais que de plus,
il avait perçu les gages, chauffages et émolumens du
greffe, qui devaien^appartenir.à D e v è z e , du jour de la
vente. D e v è z e s’était aussi rendu certain, que même
après l’acte de dépôt, du 2 avril 1788, du jugement
arbitral, La mouro ux avait obtenu , contre Sériez, une
’
;>
!
•
sentence de la Sénéchaussée d ’A u v e r g n e , l e 6 mai 1788,
qui condamne Sériez à lui payer les fermages du bail
de l ’année 1787 ;et dans laquelle sentence, Lamo uroux
se qualifie, comme dans tous les actes pré céd en s,d e
greffier en c h e f de la maîtrise^le Saint-Flour. Et ce
pendant, si la vente du 2 avril 17 8 6 , avait dû avoir effet,
si L am ouro ux n ’avait pas cru qu ’elle était anéantie par
son acle d e regrès, et par l’acceptation de D e v è z e , quel
droit aurait-il eu au mois d’octobre 1 7 8 7 , après tous
ces acles, de demander et de percevoir le prix des
b a u x , pour les
années
postérieures n la v c n l e , puis
que aux termes de cette v e n t e , tous les droits et prix
de baux de ferme, devaient appartenir à D e v è z e ?
T o u t concourait donc à affermir D e v è z e dans sa sé-
�(
)
11
curité, et à lui faire croire que Lamonroux avait
persisté dans son !régrès y puisque après lè regrès, il
avait
tout*'perçu , ce que sans cela il n ’aurait pu
fa ir e; tout lui prouvait qtie- Lartiouroux approuvait
le jugement arbitral, puisque après ce j u g e m e n t , il
avait exercé des actions, et obtenu des sentences pour
se faire payer dès prix de baux, que ce jugement
seul pouvait l’autoriser à recevoir.
i
1:
A u reste, tous les faits d o n t ; on vient de rendre
compte, ne sont pas mêmé contredits, et ils sont
établis par les pièces authentiques 'qui seront jointe^
à la production de D e v è z e , ‘e t ‘notamment laî:sen-i
tence de la Sénéchaussée* d’A ù v e r g n e r, rendde ëri
faveur de Lanïouroux, contre'Sériez-, le 6 mai 1788.
La confiance de 'Dev èze f u t ‘ bientôt troublée par
des menaces qui lui parvinrent de La mouroü‘x:,1 de
r
• |A»
«
sorte que pour plus grande’ précàiïtiÔny i f 6rut devoiir
présenter le jugement arbitral, à’!l’homologation de
la Sénéchaussée d’Auvergne. Lamoitfoux' s’opposa à
j
•
celte homologation, etprétendil faire1f b v i v r e l ’actiôn
qti’il avait originairement fortnéè contre D e v è z e , pour
1 exéculion de la vente du 2 ‘avril 17 8 6 , et il s’y crut
fondé par un acte de désaveu q u ’il fit du regrès qu’ il
avait notifié à D ë v è z e , le 7 ‘ décembre 17 8 6 , pré
tendant mémo que l’aéte précédent, du 2 du mémo
m o is , et celui d’iicceptation du 12 , étaient dos actes
faux.
Ces nouvelles prétentions de Lamouro ux donnèrent
lieu à une aiàez longue discussion, sur laquelle interB 2
�( i* )
vint la sentence de la Sénéchaussée d’A u v e r g n e , du
24 mars 1 7 9 0 , .¡dont.est app el, et .par laquelle ayant
égard au désaveu formé contre les héritiers de Thuissier
P.ertuis,de l’acte du 7 décembre 1788, cet acte fut
déclaré nul ' e t de nul effet ; D e v è z e débouté
de
la demande en homologation de la sentence arbitrale^
la vente-du z avril 17^6, fut.confirmée, et D e v è z e
condamné à paye r.le prix d e l à Vente).et les intérêts.
exécution de cette sentence , et mêm e aupa
ravant,,, Lam ouro ux avait fait faire des saisies-arrêts
entre les mains des débiteurs.,de D e v è z e ; et' pour se
pj’ocuppr- une. tplu5rprompte exécution de la sentence
qui était ordonnée, nonobstant l ’appel, il s’était hâté dé
donner caution
mais*Devèze interjeta appel au P ar
lement, pu ilobtintunarrêt dedéfense, et d e m a n d a , en
mêmertems,
la main-levée,des
saisies-arrêts,:
Lamouroux
•
*
'i
de son çôtç, demanda,^par une requête du x 5 mai 1790,
l ’exécution provisoire de la sentence de la Sénéchaussée.
Ces demandes liront lu mutière d ’ un apointé à mettre, sur
l e q u e l , intervint un arrêt du. 1 5 »juin 1790 ,,qui accorda
à D e v è z e la main-levée des saisies, en ordonnant, que
sur le fond et le surplus des conclusion.«? des parties,
elles feraient diligence pour faire juger, et en viendraient
h l’audience; les. déppns furent réservés, hors le coût
de l’arrêt qu’il fut ordonné que Lam ouro ux serait tenu
.d ’avancer, sauf à répéter s’il y avait lieu.
..
L ’arrêt fut signifié à L a m o u rou x , le 9 juillet 1790.
L am ouroux ne paraissant pas encore rebuté de ses
poursuites, avait faù faire à D evèze deux, actes instru-
�( 13 )
mcntaîres', le premier ,1e 7 janvier 1791 ; et le second ,
le 3 o juillet suivant. Alors la suppression des offices des
eaux et forêts, depuis long-tems annoncée, avait été
effectuée.
■Par le premier de ces actes il fit à D e vè ze des offres
de quelques pièces nécessaires à la liquidation de l’office
de greffier en chef, notamment de trois quittances du
centième denier, depuis et compris 1 7 7 9 , jusques et
compris 1789 ; ces quittances étaient sous les dates,
l ’ une du 3 o décembre 1779? la seconde du 3 o septem
bre 1780 , et la troisième seulement du 11 décembre
1788.
Par le second acte, du 3 o juillet 1 7 9 1 , Lamouroux
somme D e v è z e de déclarer s’il entendait que la liqui
dation de l’office de greffier, que Lamouroux avait an
noncé vouloir poursuivre comme créancier du prix de
la v e n t e , fût faite eu égard au prix de la ve n t e , 011
autrement d’après les bases déterminées par les décrets.
D e v è z e répondit à ce dernier acte, qu’il était bien
étonnant que Lamouroux demandait l’exécution de la
vente dont il s’agit, pour faire la liquidation de l’office,
tandis que cette vente avait été déclarée non avenue
par lfj jugement arbitral du 9 février 17 88, depuis
confirmée par L am ou rou x, et par lui exécutée par la
continuation de l ’exercice de cet office; que sa préten
tion pour faire revivre une vente anéantie , était le
comble de la mauvaise foi; qu ’il était constant que ce
n ’était que lorsque Lamouroux avait appris, aux mois
de juillet et d ’août 1 7 8 7 , qu ’il était question de la sup-
�6
M
( H )
pression des maîtrises , qui avait depuis été effectuée
par l'édit du mois de mai 1788, q u ’il n’avait plus voulu
garder son office au préjudice de la résolution de la
vente qui en a'vait été faile: c ’est pourquoi D e vè ze
déclara qu ’il «’empêchait Lamouroux de faire pour la
liquidation de son office , tout ce que bon lui sem
blerait.
A partir de ce dernier acte de la part de Lamouroux,
du 3 o février 1791 , on ne voit de sa part qu’un pro
fond silence pendant près de six ans., c ’e s t - à - d i r e ,
jusqu’en l’an 6 de la république.
Néanmoins il méditait dans le silence les moyens de
se procurer par la violence ce qu ’il ne pouvait pas espé
rer d ’obtenir par la justice , et l’occasion s’en présenta
bienlôl, lorsque survinrent les tems désastreux des pre
mières années de notre révolution.
Alors La mouroux fut trouvé digne d’être procureur
de la commune de St.-Flour; il se persuada aisément
pouvoir eflrayer Devèze , et sous le faux prétexte d’é
migration , par l’autorité de sa place, il le fit incarcé
rer. Sans doute si D evèze eut voulu céder à la crainte
des maux dont il était menacé, en consentant une vente
déjà an nu liée par un jugement arbitral, il eût bientôt
obtenu sa liberté 5 mais les efforts de Lamouroux turent
vains, et D e v è z e trouva d’autres moyens plus légitimes
d’échapper aux malheurs que lui préparaient les effré
nés suppôts de la tyrannie décemvirale. D e vè ze invite
.Lamouroux h se rappeler les horreurs de ces tems-là-,
et 1.’assassinai d’un magistral respectable, le lieutenant
�^ 9 3
( i5 )
criminel d’AurilIac, commis sous les y e u x de ions les
membres du département, qui siégeait alors dans cette
ville, sans qu’aucun d ’e u x , loin d’arrêter les fureurs
des brigands, y donnât le moindre signe d’improbation.
Grâces à la journée du 9 thermidor, il y eut un mo
ment de calme, qu ’une autre journée de fructidor fit
bientôt disparaître , jusqu*à ce qu’enfin la Providence
suscitât le héros qui devait réparer les maux de la France
opprimée.
Ce ne fut donc qu’en l’an 8 , que L a m ou ro u x imagina
de reprendre les poursuites de l’appel qui avait été
pendant auparlement, de la sentence de la Sénéchaussée
d’A u v e r g n e , de 1790; et on n’a pas oublié qu’au parle
ment il avait déjà échoué dans la demande qu’il y avait
formée , tendant à l’exécution provisoire delà sentence
de la Sénéchaussée. Ce lut par deux exploits, l ’un du
8 thermidor an 8 , et l’autre du 26 brumaire an 9, que
Lamouroux assigna D e vè ze au tribunal d 'a p p e l , pour
procéder sur l’appel qui avait été pendant au parle
ment , de la sentence de la Sénéchaussée, de 1790, et
pour voir confirmer cette sentence.
C om m e la senlence avait été rendue sur apoinfement en droit, elle fait la matière d ’un procès par écrit
au tribunal d’appel , sur lequel D e vè ze a déjà fourni
des griefs, qu ’on a cherché à combattre dans un m é
moire im p rim é, que Lam ouroux a fait signifier; et
c ’est à ce mémoire qu’on se propose de répondre,
après avoir rétabli , comme 011 vient de le faire, les
fa it s, les actes et autres circonstances de celte affaire.
�(i6)
<
M O Y E N S .
L
a
sentence dont est a p p e l , a été irrégulièrement
et mal rendue. D ’un côté elle ne pouvait pas refuser
l'homologation qui élait demandée, p a r D e v è z e , d u
jugement arbitral qui avait été rendu entre lui et Laraouroux; elle devait prononcer cette homologation,
sans même prendre connaissance de ce qui avait été
décidé par le jugement arbitral. D ’un autre côté,
elle ne pouvait prononcer sur des demandes de L a
m o u ro u x, qui ne tendaient qu’à détruire la décision
du jugement arbitral. On se propose, enfin, de prou
ver surabondamment, que les demandes de La rnouroux,
n ’eussent elles pas déjà été jugées par une sentence ar
bitrale , et eussent-elles été portées directement en la
Sénéchaussée, loin de pouvoir être accueillies, elles au
raient dû être rejetées. Ce n'est point là l ’ordre qui a
été observé dans le mémoire de L a m o u rou x ; il aurait
rendu sa défense plus diificile ; mais c ’est celui qui a
paru le plus naturel à celle de D e v è z e , et qui paraît le
mieux convenir aux véritables questions que le tribu
nal doit juger dans celte affaire. A u reste, ce nouvel
ordre ne laissera rien échapper des réponses qui peuvent
se faire aux objections du mémoire de Lamouroux.
P r e m i e r
M o y e n .
L'hom ologation demandée ne pouvait être rejliscc.
I/article i . rr de la loi du mois d ’août 1790, concer
nant l ’organisation judiciaire, dit: que l’arbitrage est le
*
moyen
�( i7 )
m oyen le plus raisonnable de terminer les conteslations enlre les citoyens. C ’est une vérité reconnue dans
tous les t e m s , que cet article de la loi ne fait que pro
clamer et confirmer.
I/article 5 veut que les sentences arbitrales dont il
n ’y aura pas d’appel,, soient rendues exécutoires par
une simple ordonnance du président du tribunal, qui
sera tenu de la donner au bas, ou en marge de l’expé
dition qui lui sera présentée.
Ces termes de l’article, qu i sera te n u , annoncent
assez que le juge auquel le jugement arbitral est pré
senté , pour le rendre exécutoire, ne peut pas entrer
en connaissance du bien ou mal-jugé ; et ce n ’est point
encore là une loi nouvelle.
Que nous disent tous les auteurs qui ont parlé des
sentences arbitrales? voici comment ils s’en expliquent,
et particulièrement ceux du Recueil de jurisprudence,
loin. i , cr- pag. 549. teLa .partie qui poursuit l’homologa« tion d’une sentence arbitrale, doit faire assigner l’au« lie partie devant le juge c o m p é t e n t, lequel doit en
« conséquence procéder sommairement, à cetteliomo« logation, sans prendre aucune connaissance du fo n d
« du procès, sauf aux parties à se pourvoir par appel,
a contre la sentence arbitrale, si elles le jugent à pro
ie pos : ainsi aucune des parties ne peut empêcher l’h o
« mologation , sous prétexte que la sentence arbitrale
« est irrégulière, ou autrement vicieuse ».
D ’après ces principes, il doit paraître évident que,
quelque moyen qu ’on pût opposer contre la sentence
C
�U w
( i 8 )
arbitrale, la Sénéchaussée ne pouvait pas refuser^Phomologation , elle devait la prononcer sommairement,
et sans entrer en aucune manière en connaissance de
cause, ni du fond de ses dispositions, ni des irrégula
rités ou des vices qu’on pouvait opposera celle sen
tence. Les moyen du fond, les vic es, les nullités, les
irrégularités de la sentence arbitrale, étaient autant
de griefs contre cette sentence, qui ne pouvaient être
proposés et jugés qu’au tribunal d ’a p p e l , si en effet
l ’appel en était interjeté.
Un de ces moyens p a r lesquels on voulait empêcher
l ’homologation, était une nullité prétendue du com
promis, tirée de ce que ce compromis ne déterminait
pas à l’arbilre un délai pour juger: mais cette nullité
n ’eût même été proposable que devant le tribunal
d ’appel, s’il y eût eu un appel d’interjeté; et même
en ce cas , elle n ’aurait pu être accueillie par le tribu
nal d ’app el, qu ’aulant qu’une révocation du compro
mis aurait eu précédé la sentence arbitrale.
Que nous dit encore sur cela l’article 3 du lit. des
arbitres , dans la loi du i 6 a o û l 1790? « Les compromis
ce qui ne fixeront aucun délai dans lequel les arbitres
« devront prononcer; et ceux dont le délai sera expiré,
» seront néanmoins valables , el auront leur exécution,
« jusqu’il ce qu ’une des parliesail fait signifier aux ar« bilres, q u ’elle ne veut plus tenir à l’arbitrage».
Ce n’est pas là encore un règlement nouveau. Que
nous disent tous nos auteurs qui
la ré•* ont écrit avant U
volution ? Lisons ce qui est écrit par llousscaud-
�( i9 )
Lac om be au mot Compromis , n. 2. «• Après que les par« ties ont subi volontairement la jurisdiction des ar
ee bitres , usque a d finem n egotii,et que les arbitres ont
« rendu leur sentence arbitrale, les parties 11e sont plus
« recevables à dire qu’il y avait nullité au compromis,
« de ce qu’il ne contenait aucun tems limité. Ains^
« jugé par arrêté du 27 janvier 1626, sur les conclu« sions de M. Bignon , avocat général, rapporté au
« Journal des audiences ». L'auteur aurait encore pu
citer un arrêt semblable, du 16 janvier 1628, rapporté
par Mornac, sur la loi 2-5. ff. D e recept. qui arbitr.
Il était étonnant qu’en la Sénéchaussée d’Au ve rgn e ,
on eût osé combattre ce principe, et plus étrange en
core qu’aujourd’hui au tribunal d ’a p p e l , dans le m é
moire de Lamouroux , un jurisconsulte ait prétendu
le réfuter par l’a 11lori lé de M orn ac, à l’endroit même
où ron vient de le citer. Il faut être exact dans ses cita
tions, et on ne l’est pas dans cette occasion.
Mornac , sur la 1. 25 fT. de recept. qui'arbitr. , cite
deux arrêts, l’un du 16 janvier 1628 ^ l’autre du 27
mais 1618. L e premier adjugea la peine d’un compro
mis, quoique ce compromis ne contînt pas de délai pour
juger; le second au contraire réfusa la peine du com
promis qui n’exprimait pas non plus de délai. Mais il
11e faul pas croire que ces deux arrêts furent contradic
toires. Dans l’espèce de l ’arrêl de 1628 , M. l’avocat
général Servili observa, que la partie qui avait appelé
de la sentence arbitrale, s’élait soumise à lu jtirisdiclion
des arbitres, en écrivant et produisant ses tilres et méC 2
�(
2 0
)
moires devant les arbitres. JEutn qui appellaverctt et
scripsisse et instruxisse penitus instrumentis , tabulesque obsignatis arbitraient liteni. M. Servin citait à cette
occasion les termes des lois. Ç u is est ferendus a d appellationis venions a u xiliu m in iis quœ ipse ja cictid a
procuravit. En conséquence l’arrêt de 1628, adjugea
la peine du compromis , quoiqu’on y eût omis le délai.
Senatus ergo ex his pœtiam deberi p ron u n ciaçit, tametsi tenipus omissuni esset compromisse?..
Mais l ’arrêt de 1628, que cite aussi Mornac, n’élait
pas dans la même espèce. Celui qui se refusait à la peine
du compromis, n’avait rien écrit ni produit devant les
arbitres j ainsi Mornac, après avoir rapporté l’arrêt de
16 2 8 , qui avait adjugé la peine du compromis dans le
quel il n’y avait pas de d é l a i , parce que l ’appellant
avait produit aux arbitres ses titres et mémoires, Mornac
dit qu ’il en serait autrement, si, lorsque le compromis
ne contenait pas de délai, celui qui appelle de la sen
tence arbitrale, 11’a rien dit ni produit devant les arbi
tres, et que c ’est ce qui a été jugé par l’arrêt de 1618.
Secus enim,
sl,
præter omissuni in comproniisso dieni,
n ih il ab eo qui postcà appellavit, prolatuni, productuni que fu e n t ÿ eo enim casu ju d ica tu m pœnam non
deberi ab appellatore - et c ’est en ell'et ce quo Mornac
dit avoir été jugé par l’arrêt de 16 i 8.
O r , nous ne sommes pas ici dans l’espèce de ce der
nier arrêt, mais bien dans celle de l’arrêt de 1628. Lamouroux avait produit devant le juge arbitre ses titres
et mémoires.
�( 21 )
L ’auteur du mémoire de Lamouroux n*est pas plus
exact dans la citation de l’arrêt du 22 décembre 1627 ,
rapporté au journal des audiences, et il faut qu’il ne
se soit pas donné la peine de lire tout le chapitre,
quoique très-court, où cet arrêt est rapporté.
D e quoi était-il question dans l’espèce de cet arrêt ?
il y avait un compromis sans fixation de délai; mais il
n ’y avait pas eu de sentence arbitrale, rendue sur le
compromis. Une des parties, qui avait produit ses titres
devant les arbitres, avait traduit l’autre partie devant
le juge du M ans, pour l’obliger à produire de sa part
devant les arbitres. C elle partie s’y était refusée, et la
sentence du juge du Mans l’y avait condamnée. C ’était
de cette sentence qu ’il y avait appel ; mais comme il
n ’y avait pas de délai dans le compromis, l'arrêt in
firma la sentence du juge du Mans; et dans le lait ,le
refus de produire devant les arbitres, emportait avec
lui la révocation d ’un compromis qui ne fixait pas de
délai : mais pourquoi ne s’es! on pas donné la peine
de lire ce que dit encore le journaliste? «Toutefois si
« les arbitres avitient rendu la sentence arbitrale, ce
« ne serait pas nullité en icelle, de ce qu ’en compro« mis il n’y aurait point eu de jour, d’autant que lors« qu ’ils l’auraient rendue , les parties pouvaient encore
« se soumettre devant e u x , et les prendre pour arbitres;
« et de fait , la cour l’a jugé ainsi par ses arrêts».
L e journaliste a eu raison de dire que les arrêts l’a
vaient ainsi j u g é : outre celui de 1628, que rappoile
M o r n a c , le journaliste lui-niCme rapporte celui du 5
�( 22 )
janvier 16 26 , dont a parlé Rousseaud-Lacombe, par
lequel il fut jugé que tou le audience devait être dé
nuée à un appelant, jusqu’à ce qu’il eût piiyé la peine,
encore que l ’on remontrât qu’il y avait nullité au com
promis, en ce que par icelui on n'était convenu d’au
cun tems, ni jour, dans lequel les arbitres pourraient
rendre la sentence; et le m otif f u t , dit le journaliste,
que ce n’est point une nullité en une sentence arbitrale ,
de ce que au compromis i l n i j avait eu aucun tems n i
j o u r lim ités, parce les parties l'ayant ainsi convenu,
et ensuite subi volontairement la ju risd ictio n des ar
bitres , usque ad finem negolii, ils l'avaient pu fa ir e ,
et ne sont plus recevables à s'en plaindre.
« Mais, ajoute le journalisle, quand il n’y a point de
« jour ni de tems limité au compromis, c ’est une nul« lité qui donne matière à s’en retirer; en sorte que
« la partie qui ne veut plus l’enlrelenir, n ’y peut être
« contrainte, parce que autrement la juridiction des
« arbitres serait p r o r o g é e , i/i infï/utum ».
C ’est: donc un principe inébranlable que le jugement
arbitral est valable, quoiqu’il n’y ait poinl de délai
dans le compromis, lorsqu’il n’y a point eu de révoca
tion qui ail précédé le jugement, el que les parties se
sont soumises à la jurisdiclion par la production de leurs
titres el mémoires.
On ne se serait pas livré à une si longue discussion à
cet égard , si l’on n’eûl pas cru nécessaire de rappeler
à plus d’exactilude dans les citations.
Il doit donc paraître démontre que lé défaut d'ex-
�ïo t
(
2
3
)
pression de délai dans le compromis, ne pouvait'pas
empêcher l ’homologation de la sentence arbitrale.
M ais, a-t-on dit encore, le compromis n ’a pas été
représenté en la Sénéchaussée, quoiqu’ on n ’ait cessé
d ’en demander la représentation. Il est bon de rappeler
ce qui est dit à ce sujet à la page 22 du mémoire de
L a m o u ro u x ; on va le transcrire mot pour mot.
« L e citoyen Lamouroux allait même ju s q u ’ à cou
rt venir, que si Le citoyen D ei e&e rapportait un compro« mis régulier, ii n'aurait d ’autre moyen que de se
« pourvoir au parlem ent, pour fa ire réformer une sen
ti tence qui sera le fr u it de la surprise et de la fraude j
« il somma en conséquence le citoyen D e v è z e d’exlii« ber du compromis , qui n’est cité ni dans la sentence
« aib itrale, ni dans aucun acte. L ’appelant s’est tou
te jours refusé à représenter ce compromis; dès-lors la
« sentence arbitrale n ’était plus qu’un simple avis ,
« émané d’un particulier sans caractère. Sous ce rapport
« la Sénéchaussée a donc pu connaître d e l à demande
« en nullité et défaut de l ’exhibition du compromis:
« et quand le citoyen D e vè ze rapporterait aujourd’hui
« un compromis régulier, cette discussion serait sans
« intérêt , parce que le tribunal d’appel représente le
« ci-devant (1) p a rlem en t, et qu ’il suffirait alors d ’ina terjeler incidemment appel de celle prétendue sen«• tence arbitrale ».
(1) Que veulent dire ces mois ci-d ev a n t? quand on parlera de l\Aréo*
page d ’Athènes, ou du Sénut du llou ie, il faudra donc d ir e , le ci-devant
A réopage, lo ci-devant Sénat.
* *
�\*b
(H )
Il y avait inexactitude dans les citations d’arrêt faites
dans le mémoire ; et dans le passage qu’on vient de
transcrire, il y a mensonge et erreur.
Mensonge , en ce qu’on dit à la page 22 du m é
moire, qu ’en la Sénéchaussée le compromis n’avait pas
été représenté; mensonge à la page 3 6 , en ce qu’on y
suppose qu’il n’exisle pas de compromis, et qu ’on eàt
hors d’état de représenter; et le mensonge est prouvé
par une requête donnée par De vè ze en la Séuéchaussée, le 14 janvier 17 89 , par laquelle il fit production
du compromis ; et la signifîcalion de cette req uête,
faite au procureur de L a m o u ro u x , fait aussi mention
du bail de copie du compromis.
D o n c alors, et dès que le compromis avait été re
présenté en la Sénéchaussée, il n y avait d'autre moyen,
suivant Lamouroux lui-même, que de se pourvoir au
parlem ent; par conséquent la Sénéchaussée 11e pouvait
pas ju ger; par conséquent l’appel de son jugement est
bien fondé.
Inutilement iijoule-t-on qu ’il fallait un compromis
régulier; on vient d’élablir invinciblement que le com
promis était régulier, et q u e , quoiqu’il n’y eut pas
de délai fixé , dès qu ’il n’y avait pas eu de révocation,
dès que les parties avaient produit à l’arbitre titres et
mémoires, on 11e pouvait plus arguer de nullité ni le
compromis, ni la sentence arbitrale.
Mais, dit-on encore, dans le passage que l’on vient
de transcrire, la discussion est sans intérêt, parce que
le tribunal d ’appel représente le parlement , et qu’il
sujjirait
�. (
25
)
suffirait alors d'interjeter appel incident de la sen
tence arbitrale.
Il y avait mensonge dans la première partie du pas
sage ; il y a erreur dans celle-ci. L ’appel incident du
jugement arbitral serait aujourd’hui non recevable ,
parce que ce jugement a passé en force de chose jugée.
L e jugement fut signifié à La m o u ro u x , le 2 avril 1788;
et mêm e encore aujourd’hui il n’en a pas été interjeté
d ’appel. Voilà plus de i 5 ans de la signification ; mais
suivant la disposition de l’article 17 du titre 27 de l ’or
donnance de 17 67 , les sentences acquièrent force dô
chose jugé e , après dix ans du jour de leur signification,
et 011 ne peut plus alors en interjeter appel.
Jousse , sur ccs mots de l ’article après d ix ans , dit
qu ’ils sont trop précis pour vouloir en changer la dis
position , en étendant jusqu’à 3 o ans la faculté d ’ap
peler.
O11 ne doit Cependant pas dissimuler qu’au parlement
de Paris 011 s’était écarté de cette disposition de l’or
don nan ce, et que les appels y étaient reçus pendant
3 o ; mais que pouvait la jurisprudence contre la dispo-
silion de la loi? une jurisprudence, et sur-tout celle
d ’un seul parlement ne peut pas changer la loi ; et l’on
est toujours fondé à réclamer contre la transgression
de la loi. Aussi aujourd’hui tous les tribunaux d ’appel
se conforment-ils à la disposition de l ’ordonnance de
1667 , même pour les sentences rendues avant la sup
pression du parlement, et s’il y a eu quelques jugemens
contraires, ceux du tribunal de cassation leso ntanéa nU
�( ?
26
lis. On pourrait même soulenir qu’à compter de la loi
de 1790", il n ’y a eu qu ’un délai de 3 mois pourrse
pourvoir par appel contre les jugemens antérieurs; mais
cela devient inutile, parce que même les dix ans de
l ’ordonnance de 1667 , ont constamment donné à la
»
sentence arbiti-ale la force de la chose jugée.
C ’est donc aujourd’hui par une erreur bien reconnue
q u ’on voudrait
prétendre qu’on pourrait interjeter
appel incident d’une sentence signifiée il y a plus de
10 ans, et qui a constamment acquis la force de chose
jugée.
Enfin un dernier m o y e n , par lequel on prétend jus
tifier la sentence de la Sénéchaussée d’A uvergne dont
est appel, esl le désaveu qu ’avait fait Lamouroux de
l ’acte de regrès, signifié à Devèze par l'huissier Perluis.
On examinera dans la suite le mérite de ce désaveu;
mais pour ce moment-ci il suffit de remarquer que le
désaveu eût été bien.ou mal fait , ce 11e pouvait pas
cire en la Sénéchaussée qu ’il devait l’être, et que ce
désaveu 1el quel ne Fautorisail pas à reiuser l'homo
logation de la sentence arbitrale; et pour s’en con
vaincre, il n’est besoin que de rappeler et de répéter
ce que l’on a dit ci-devant des principes enseignés par
les auteurs, que «le juge auquel l'homologation d'une
« sentence arbitrale est demandée, doit procéder som« mairement à c e t t e homologation, sans prendre a u
ne curie connaissance du fo n d du procès ,• sauf ;iux par
ie tiesà se pourvoir par a p p e l, si elles le jugent à propos.
« Ainsi aucune des parties ne peut empêcher l’h o m o -
�( 27 )
« Iogntion, sous prétexte que la sentence arbitrale est
« irrégulière, ou autrement vicieuse ».
D ’où il doit se conclure nécessairement queledésaveu
Sur lequel on voulait établir lë vice de là sentence ar
bitrale , bien ou mal f o n d é , n’aurait pu être jugé qu’en
tribunal d ’ap p e l, et que le vice du désaveu^quel q u ’il
pût être, ne pouvait pas empêchër l'homologation de
la sentence arbitrale.
Mais on aura d’ailleurs'occasion de prouver dans la
suite de ce mémoire, que le désaveu n’était pas recevable, dans le cas même où l’afïàire n’eût pas été jugée
par une sentence arbitrale, et qu’elle eût été portée
directement en Ici Sénéchaussée. Ce sera la dernière
proposition de ce m é m o ire , d ’ailleurs par elle-même
très-surabondante, comme 011 l’a déjà dit, et parce que
le désaveu n’aurait pu être jugé que par un tribunal
d’a p p e l , qu’il n’y a jamais çu d ’appel de la sentence
arbitrale , et que celui qu ’on en interjetterait aujour
d ’hui , serait non recevable.
• •
t*'
•
^i li*
.Ainsi donc mal-jugé évident de la sentence dont est
appel, en ce q u ’elle a refusé l’homologalion de la sen
tence arbitrale.
1
i
1
; L
D a
�(
D
e
u
x
i è
* 8
m
e
)
M
o y e n
.
L a sentence de La Sénéchaussée ne pouvait prononcer sur
des demandes d éjà ju g é e s par une sentence arbitrale,
et détruire par des dispositions contraires celles de la
sentence arbitrale.
L a proposition du moyen semblerait seule devoir
l ’établir, parce que la proposition elle-même n’énonce
qu’ un principe, et ce principe a déjà été suffisamment
développé dans la discussion du premier moyen.
U n e sentence arbitrale ne peut être réfo rm ée, quel
que vice qu’elle renferme , que par un tribunal d’appel;
elle n ’est sujette qu’à l ’homologation du juge inférieur,
et cette homologation ne peut être refusée p a r c e juge
inférieur. D on c il ne peut connaître, lorsqu’on lui de
mande l ’homologation, ni du fond du procès déjà jugé ,
ni des vices du jugement déjà rendu par les arbitres.
N e serait-il pas ridicule, quand une sentence arbi
trale a été rendue sur les demandes d ’une partie, de
prétendre que Faction peut être renouvelée devant des
juges autres que ceux devant lesquels doit être porté
l ’appel de la sentence arbitrale , et que les juges infé
rieurs jugeassent tout le contraire de ce qui l’aurait été
par les arbitres? et c ’est ce ridicule, on pourrait mémo
dire cette absurdité, qui se rencontie dans laseitfenco
dont est appel.
L a sentence arbitrale avait déclaré commernon avenue
�C 29 )
la vente de l’office de greffier, et celle de la Sénéchaus
sée déclare cette vente valable, et en ordonne l’exécu
tion. Voilà donc une contrariété évidente de jugement ;
niais le premier ne pouvait être réformé , ne pouvait
être détruit que par des juges d’appel, et la Sénéchaus
sée n ’avait pas ce caractère. Donc son jugement est
n u l , et le mal-jugé est par cela seul démontré.
Si par la sentence de la Sénéchaussée il eût été dit
en termes formels , qu’il avait été mal jugé par le juge
ment arbitral, oserait-on proposer qu’une pareille sen
tence pût être confirmée? mais n’esl-ce pas la même
chose, quand la sentence de la Sénéchaussée a jugé
absolument le contraire de ce qui l ’avait été par la
sentence arbitrale? E n un m o t , la Sénéchaussée s’est
elle-même érigée en tribunal d'appel. C ’est ce qu’on a
eu raison d’appeler une monstruosité dans l ’ordre judi
ciaire. En voilà assez, sans doute , pour justifier l’appel
de la sentence , sans qu’il soit nécessaire de le qualifier
comme de juge incompétent.
T
r
o
i s
i è
m
e
M
o
y
e
n
.
S i la contestation tieu t pas été d éjà ju g é e par une sen
tence arbitrale, et quelle eut. été portée directement
en la Sénéchaussée, la sentence de ce tribunal eût été
au ssi injuste dans te fo n d , quelle a été irrégulière
après une sentence arbitrale.
A
pr è s
rétablissem ent des deux prem iers m oyens, on
com prend aisém ent que celui-ci ne peut être que subsi
�(
3
0
)
diaire et surabondant; aussi ne veut-on le présenter,
q u ’afïn d ’avoir occasion de justifier la conduite de
D e v è z e danis toute cette affaire, et dë rendre sensibles
les variations et la mauvaise foi qui ont régné dans toute
celle de L a m o u ro u x , et qui l’ont amené à un désaveu
qu’il a regardé comme une dernière planche de naufrage,
enfin pour démontrer l'infidélité de ce désaveu. Ici il
est nécessaire de rappeler quelques-uns des faits dont
011 a déjà rendu compte.
L am o u roux était propriétaire de l ’office de greffier
en ch e f de la maîtrise de St.-Flour. A u mois d’avril
1 7 8 6 , il vend cet office à D e vè ze , par un acte sous
seing privé, moyennant
i
3 ,q o o
francs, et i l j ’ôblige
de remettre à D evèze sa procuration a d resig n a n d u tn ,
et tous les litres nécessaires, p o u r , par D e v è z e s’en
faire pourvoir , tels que ses provisions, quittances de
finance et de centième denier.
Lam ouro ux nous apprend lui-même dans son m é
moire , que la vente kiite à D e v è z e , qui’ n’était que
sous seing p rivé , étant encore inconnue , il se pré
senta
d’autres acheteurs, et entr'autifes un citoyen
jVJalbet, qui lui offrit, 24,000 francs au lieu de 18,000',
prix de la vente qu il avait faite à Devèze. U11 béné
fice de 6000 francs était bien fait pour le tenter. "Mais
comment faire une nouvelle vente à Malbet ? il y avait
la voie du regrès. Mais un regrès si prochain de la,promièie v e n t e , et une seconde vente faite incontinent,
fout cela amait paru bien frauduleux. Hésitant alors
sur le parti qu il avait à prendre; il prit du teins pour
�*
C
3f
)
y réfléchir, en différant de remettre
D evèze sà pro
cura t.i.on ad £esi'gnandum,\ses provisions, quittances
de finance^ e t , de. c.enlièmeJdénier. Mais toutes ces
pièces étaient; nécessaires, et D evèze ne pouvait, sans
lps avoir toutes, se faire pourvoir de l’office.
I
; Cependant D e vè ze impatient de tous: ces délais,
prit enfin le p{irti de fai^e »faire à Lamourôux une
sonnnation de,lui délivrer.la procuration a d resignand u m , et toutes'autres pièces'nécessaires pour parvenir
à obtenir des provisions. Cette sommation est du 2
décembre 1786.
¡,
.
Lam ouroux ne pouvait plus reculer. Il se repen
tait de la vente par. l’espérance d ’un plus grand prix
que Malbel lui avait offert. 11 senUiit bien qu ’il ne
pourrait p a s , sans se perdre de réputation, profiter
de ce bénéfice par un.regrès qui serait aussitôt suivi
d ’une nouvelle v e n t e ; mais il se flattait qu ’en exer
çant ce regrès et conservant l'oifice' de greffier, il
pourrait s’eu défaire plus avantageusement dans un
teins plus éloigné. 1.1 se vit donc forcé, par la som
mation de Devèzo d ’exercer ce regrès contre la vente
qu ’il lui avait faite, ce qu ’il fil en effet par l’acte qu ’il
fit signifier à D e vè z e , le 7 du même mois en répon
dant à la sommation du 2; ce D e vè ze à son tour ins
truit qu ’il ne pouvait pas résister au regrès que le ven
deur d’ un office est toujours fondé à exercer, tant
qu’il n’est pas dépouillé pur les provisions de l’acheteur,
pour se débarrasser d ’ailleurs de toute in juiétude
sur une affaire do cette nature, et employer à son
�(
3
2
}
utilité les fonds qu’il avait destinés au prix d ’une
acquisition qui ne pouvait plus avoir lieu, se déter
mina à faire signifier à Lamouroux un nouvel acte,
par lequel il accepta le regrès. Cet acte fut signifié
le 12 décembre, cinq jours après le regrès. Après ce
dernier acte, huit mois se passèrent dans le plus
profond silence de la part de Lam ouroux envers
D e v è z e qui crut d’aulant mieux que tout était con
sommé à l’égard de la v e n l e , que depuis le regrès
Lam o urou x n'avait cessé d ’agir comme titulaire et
propriétaire de l’office de greffier, percevant les émolumens courans qui auraient appartenu à D e v è z e ,
si la vente avait dû subsister, se faisant payer des
arrérages des gages et chauffages antérieurs à la vente,
q u e , suivant les clauses de l’acte, il devait partager
avec D e v è z e , et dont celui-ci devait seul faire le re
couvrement.
Mais les événemens survenus dans l’intervalle, firent
craindre à La mouro ux une suppression prochaine des
maîtrises , et par conséquent, de son office de Greffier.
On conçoit qu ’il dut alors se repentir de son regrès.
L es discours prononcés à l’assemblé des notables, le
2 5 mai 1 7 8 7 , et devenus publics, lui annoncèrent
le projet de s’occuper de la suppression des maîtrises,
et le risque q u ’il courait de perdre un office dont la
liquidation ne pouvait jamais se porter au prix qu ’il
l’avail vendu. Mais comment put - il se flatter de faire
cesser l’effet du njgrès qu ’il avait exercé, surtout après
l’acceptation de Devèze ?
Cependant
�$
(
3 3
1
1
)
Cependant dans cette confiance illusoire, il voulut
revenir sur ses pas. Il imagina de faire signifier â
D e v è z e , le i 3 août 1 7 8 7 , un acte par lequel il lui
fit sommation de se trouver cliez un notaire, pour
y voir déposer la vente du 2 avril 1786. D e vè ze ne
pouvait se rendre à l’heure de la sommation remise
chez lui en son absence ; en conséquence s le 14
a o û t , procès-verbal de défaut chez le notaire, et le
même jour assignation à la senécliaussée d’A u v e r g n e ,
pour reconnaîire la signature, et pour être condamné
à l ’exécution de la vente, sous offre de délivrer la
procuration a d resignandum.
Il n’est pas inutile de remarquer que dans la som
mation faite pour se trouver chez le notaire, et dans
l'assignation donnée le lendemain, on fait bien offre
de délivrer une procuration a d resignandum , maiso n
ne fait point d’offres réelles de la procuration ellemêm e , et on ne pouvait pas le faire, parce que cette
procuration n’existait pas encore, et n’a même jamais
existé : cependant un tel acte pouvait se faire sans
la présence de D e vè z e ; il n ’était pas même d ’usage
que ces sortes de procuration fussent acceptées dans
le même acte par l’acheteur de l ’office. Mais il n ’au
rait pas même suffi d ’offrir réellement la procuration,
il aurait encore fallu offrir les provisions du vendeur,
les quittances de finance et celles du centième denier,
pièces qui devaient nécessairement accompagner la
procuration, et sans lesquelles l’acheteur n ’aurait pas
pu obtenir les provisions de l’office.
E
Art
�ifil
( 34 )
O n a v u ci-devant les causes qui avaient empêché
q u ’il ne fût donné suite à la demande portée par
Lam ouroux en la Sénéchaussée d’Au vergn e, c’est-àd iie , le compromis par lequel les parties soumirent
la contestation à l’arbitrage du gran d -m a ître , et le
jugement arbitral qui déclara Lam ouro ux non recevable dans sa demande, en déclarant la vente comme
non avenue. On a vu que la conduite que tint Lam o u r o u x , après le jugement arbitral, après qu’il lui
en eût été fait lecture et qu’il lui eût été signilié avec
bail de copie : on a vu que de tous les actes qu’il
avait exercés en prenant la qualité de greffier, en sc
faisant paj^er du prix des bau x, et percevant les émolumens, on a vu, dit-on, que de cette conduite résul
tait nécessairement de sa part l’approbation et l ’e xé
cution du jugement arbitral. Mais nous avons promis
que dans ce mo yen subsidiaire et surabondant que
nous examinons, nous mellrions à l’écart le compro
mis, le jugement arbitral et toute leur suite, pour
attaquer la sentence de la Sénéchaussée d’Auvergn e,
dans la supposition même que les demandes de L a
mouroux n ’eussent jamais été soustraites ¿1 la juris
diction da ce tribunal par un compromis, et jugées
par une sentence arbitrale.
Remarquons cependant que ces demandes, portées
en la Sénéchaussée d’Auvergn e, par une assignation
du 14 août 1 7 8 7 , ne furent reprises dans cette Sé
néchaussée, que long-lems après, et lorsque D evèze
y eût fait assigner L am ouro ux pour voir ordonner
�¿ a
mi
( 35)
l ’homologation de la sentence arbitrale, la résistance
à l’homologation, qui ne devait pourtant pas l ’ar
rêter comme on l’a prouvé ci-devant, et sa persévé
rance à demander qu’il fût fait droit sur des deman
des éteintes par un compromis et par une sentence
arbitrale, étaient d’ailleurs repoussées par le regrès qu’il
avait e x e r c é ,e t l ’acceptation de D e vè z e ;et ce fut alors
qu’il eut l’audace de faire un acte de désaveu du re
grès, et d’assigner les héritiers de l’huissier, pour faire
juger avec eux le désaveu, car prudemment il avait
attendu la mort de cet huissier pour former ce d é saveu.
On a v u , dans la discussion des deux premiers moyens,
que le désaveu n’aurait pu se proposer en la Séné
chaussée d’Au vergn e, et qu’après la sentence arbitrale,
ce n’eût pu être que sur un appel de cette sentence
qu ’on eût pu se faire un moyen d’appel qui, par con
séquent alors, n ’aurait pu être jugé qu ’au parlement.
INlais nous supposons ici qu’il n’y aurait eu ni com
promis, ni sentence arbitrale; qu’en un m o t, la Séné
chaussée aurait seule été saisie de la contestation, et
alors même on va prouver que la Sénéchaussée ne
pouvait avoir égard au désaveu dans les circonstances
où on venait de le produire.
Il ne faut pas se persuader q u ’on puisse désavouer
les actes d’un officier public, par la seule raison qu’ils
ne sont pas signés de la partie, ou qu’elle n’a pas
donné par écrit un pouvoir de faire ces actes, lorsque,
d’ailleurs, il se rencontre des circonstances et des préE 3
'
�( 36 )
somptions puissantes que l’officier n’a pas agi sans pou
voir , et que les actes ou des faits postérieurs sont
des suites naturelles de l’acte qui est désavoué, sur
tout encore lors qu’il y a preuve que l’acte a été
connu de la partie qui le désavoue, mais qui reste
long-tems dans le silence, après qu’on lui en a donné
connaissance, et attend, pour en faire le désaveu,
la mort du ministre de l’acte.
Quelques praticiens, et même D e n is art, avaient
Voulu donner en m a x i m e , que le procureur ou l ’huissier
ne pouvaient être désavoués après leur mort ; mais
cette maxime générale eût été trop-dangereuse ; aussi
les arrêts l’avaient-ils fait dépendre des circonstances,
Observez néanmoins, disent les auteurs du réper
toire de jurisprudence, que quoique le désaveu puisse
avoir lieu après le décès du procureur , on ne doit
l ’admettre que quand les circonstances font présumer
q u ’il y a eu dol et malversation de la part de cet
officier. L a raison en est qu’on doit supposer, en
g é n é r a l , qu’un procureur n ’agit pas sans pouvoir, et
que les héiiliers ne sont pas instruits suffisamment
de ce qui pouvait l’autoriser.
O r , quelle circonstance plus propre ¿1 prouver que
ce désaveu est fait de mauvaise foi, lorsqu’on établit
que l’acte a été connu par la partie qui le désavoue,
long-tems avant le desaveu, et qu ’on a attendu, pour
faire ce désaveu, la mort du ministre de 1 acte qui est
désavoué.
Ici on ne peut pas mettre en doute la connaissance
�( 37 )
qu’a eue Lamouroux de l’acte de regrès. D e v è z e lui
fait, le 2. décembre 17 86, une sommation de lui déli
vrer une procuration a d resignandum , et les au 1res
pièces nécessaires pour se faire pourvoir de l’office de
greffier. Lamouroux ne peut pas dire qu ’il n’a pas connu
cette sommation, qui a été faite en parlant à sa per
sonne ; il në pourrait le dire qu ’autant qu ’il formerait,
contre cet acte, l’inscripiion de faux.
Après cette sommation, que devait-il faire, s'il vou
lait accomplir la vente? C ’était de délivrer la procu
ration a d resignandum , et les autres pièces qui lui
étaient demandées par la sommation.
Que pouvait-il faire, s'il ne voulait pas accomplir la
vente? Il n’avait pus d’autre moyen que d ’exercer le
regrès.
Il a exercé ce regrès cinq jours après la sommation,
le 7 décembre; et le 12 du même mois le regrès a été
accepté par D e v è z e , par un acte signifié à Lamouroux.
Il ne peut donc pas dire non plus qu’il n’a pas connu
l ’acte par lequel le regrès a été accepté, puisque cet
acte lui a été signifié, et il ne pourrait le prétendre
encore qu ’en s’inscrivant en faux contre la signification
qui lui a été faite de l ’acceptation du regrès.
D e là donc q u e , d’un côté, il n’a point satisfait à la
soinmalion du 2 , en délivrant à D e vè ze la procuration
et autres titres nécessaires, on doit conclure qu’il n’a
plus voulu que la vente s’a c c o m p l î t , puisqu’elle ne pou
vait l ’être qu ’après la remise de tous les titres.
D e là q u e , par l’acle du 1 2 , D e v è z e lui a fait si-
�Gk.
( 38 )
gnifier l’acceptation d’un regrès qu’il disait lui avoir élé
signifié à la requête de L a m o u r o u x , si le regrès n’avait
pas été de son fait, s’il n ’en avait pas donné pouvoir
¿r l ’huissier, il devait s’empresser de désavouer l’huissier.
Mais dès qu’alors il n’a rien fait pour contredire le
regrès, que le désaveu n’est venu que plus de deux ans
après, et q u e , pour le faire, il a attendu la mort de
l ’huissier, tout cela ne manifeste-t-il pas la mauvaise
foi de ce désaveu tardif?
- N ’en sera-t-on pas mêm e encore plus convaincu , si
toutes les actions de L a m o u rou x , postérieures à l’acte
de regrès, se concilient parfaitement avec la vérité de
ce regrès, si ces actions emportent avec elles la consé
quence que Lamouroux avait l ’intention de se main
tenir dans le titre et la propriété de Tofiice qu’il avait
vendu à D e v è z e ?
A u t r e m e n t , de quel droit aurait-il perçu lui-même
les émolument du greffe, qui devaient appartenir à
D e v è z e ? de quel droit aurait-il perçu les arrérages an
térieurs à la vente des gages et des chauffages qu’il
devait partager avec D e v è z e , mais dont, aux termes
de la v e n t e , Devèze devait seul faire le recouvrement ?
de quel droit a - l- il poursuivi Seriez, l’a fait condamner
nu paiement du prix de la ferme, et s’en est fait payer? (
11 n’a pu faire tout cela qu’en manifestant son inten
tion de conserver le titre et la propriété du greffe, et
par conséquent sans approuver le regrès et reconnaître
le pouvoir qu’il avait donné à l’huissier; et ce ne pou
vait être que par l’eilet du regrès qu’il pouvait con
server le titre et la propriété do l ’oflice.
�¿
4
*
( 3? )
C ’est d’ailleurs en vain que pour rendre suspect l’acte
de regrès du .7 décembre 1 7 8 6 , et pour fortifier le
désaveu, on prétend qu’il se trouve un acte du même
jour, fait par le même huissier à plus de dix lieues de
distance de Saint-Flour; d’où l’on conclut que l ’huis
sier ne pouvait pas être à Saint-Flour ce même joui\
i°. Il ne serait pas physiquement impossible qu’un
huissier fît le même jour deux actes en deux lieux dif_
ié r e n s , à la distance de dix et douze lieues l’un de
l ’autre.
20. D e vè ze produit un acte signifié à Saint-Flour le
6 décembre, la veille de celui qui a été signifié le 7 à
D e v è z e ; et ce même huissier pouvoit être encore à
Saiut-Flour le lendemain 7, signifier le regrès de L a m o u
roux le même jour au matin, et partir de suite pour
aller plus loin faire d’autres exploits. On ne pourrait
prétendre qu’il n’était pas à S a in t-F lo u r le 7 , qu ’en
formant l’inscription de faux contre l’acte par lui si
gnifié ce même jour à la requête de Lamouroux.
3 .° Mais Lam ouroux a eu connaissance du regrès,
par l'acceptation que D e vè ze lui en a fait signifier le
12. S’il n ’avait pas donné de pouvoir à l’huissier, il ne
pouvait pas trop se presser de le désavouer, et il attend
plus de deux a n s , et la mort de l’huissier, pour faire
ce désaveu.
4.0 Pour admettre le désaveu de Lamouroux , il fau
drait qu ’il y eût trois actes faux, ceux du 2, du 7 et
du 12 du même mois, et trois actes faits par trois dif
férons huissiers. Comment supposer qu ’on eût pu cor
rompre trois huissiers ?
�( 40 )
A lors , cîe toute manière le mal-jugé de la sentence
de la Sénéchaussée d’Auvergne, en ce qu’elle avait jugé
le désaveu valable, ne doit-il pas paraître évident,
même en faisant abstraction de la sentence arbitrale,
et en supposant toujours que le compromis el la sentence
arbitrale n’auraient jamais existé?
Mais on peut encore aller plus loin, et soutenir avec
fondement q u e , n ’y eût-il jamais eu d’acte deregrès,
ou que jamais Lamouroux n ’eût montré l’intention de
se conserver le titre et la propriété de l’ofTice , malgré
la vente qu’il en avait faite, la sentence de la Séné
chaussée aurait encore mal jugé en ordonnant l’exécu
tion de la vente.
Pour cela il suffit d ’observer que D e v è z e ne pouvait
devenir titulaire et propriétaire de l’office, que par l’effet
des provisions qui lui en auraient élé accordées, et qu’il
ne pouvait obtenir ces provisions qu ’autant qu’il aurait
eu en son pouvoir les provisions de Lamouroux, ses quit
tances de finance et de centième denier, qui ne lui
avaient jamais élé délivrés par L a m o u ro u x , et que
jusques-là, Lamouroux restait absolument le maître et
le propriétaire de l’office, d ’où doit résulter la consé
quence que cet office ayant été supprimé , il l’a élé sur
la tête de L a m o u ro u x , el que la perte n’en a pu re
tomber que sur lui , par la règle de d r o it , res périt
Domino.
Il est bon de rappeler les principes de la matière,
nous eu ferons ensuite l’applicalion.
I,a vente ne peut recevoir sa perfection que par la
tradition;
�tâte}
( 4 0
tradition ; elle ne peut transférer la propriété qu ’autant
q u ’elle est suivie de la tradition ; tracLitionibus dom inia
rerurn trans/eruntur, non nudis pactis. 1. 20, cod. de
pactis ’ ainsi jusqu'il la tradition, la propriété de la chose
réside toujours dans la personne du vendeur; ce qui est si
vrai que dans le droit , le propriétaire qui a fait une
première v e n t e , venant à en faire une seconde d e l à
m êm e chose à un autre a c h e te u r, s’il lui en fait la tra
dition, ce dernier acquéreur est préféré.
L a tradition et la délivrance des choses qui sont
fermées sous clef, ne s’opère que par la remise des
clefs que fait le vendeur à l’acheteur : sed qui merces in horreo depositas vendiderit, sitnuL atque claves
tradideiLt emptori, transfert proprietatem rnercium a d
empioreni. 1 nst. §. 45 de rer. divis.
L a délivrance des immeubles, dit D o m a t , d ’après
la dispostion des lois, se fait par le v e n d e u r, lors
qu’il en laisse la possession libre à l’acheteur, s’en
dépouillant lu i-mêm e, soit par la délivrance des ti
tres , s’il y en a , ou des clefs, si c ’est un lieu clos,
comme une maison.
En ne parlant que de ces principes généraux, car
on verra bientôt qu’il y en a de particuliers pour la
vente des offices, la tradition de l’office vendu ne pour
rait se faire que par la remise des titres nécessaires
pour en faire pourvoir l’acheteur ; c ’e s t - à - d i r e , de
l'a procuration a d resignandurn , des provisions- de
La m o u roux , de ses quittances de finance et centième
denier. L a remise- de toutes ces piétés était nécessaire
E
�C 42 )
pour opérer la tradition de la chose vendue , d e mémo
que la remise des clefs du grenier dont on a vendu
les grains qui y étaient renfermés, de mêm e aussi
que la tradition d’une maison qu ’on a vendue ^ et qui
n ’a pu aussi s’opérer que par la remise des clefs.
Ainsi, n’y ayant pas eu de délivrance des titres né
cessaires pour faire pourvoir D é v è z e , et le faire jouir de
la chose vendue , il n’a pu y avoir de tradition, sans la
quelle la propriété de l’office ne pouvait lui être transféTée,t/'aditionLbus dominia rerum Irans/eruntur, non nud ispactis; mais comme Lamouroux ne pouvait perdie la
propriété qu’au moment qu’elle passerait à D e v è z e ,
ce qui était impossible par le défaut de la remise des
titres qui n’a jamais élé faite, dès que l’office a été sup
pri m é, la perte n’en a pu retomber que sur Lamouroux , qui, au moment de la suppression, en était seul
propriétaire.
Lamouroux voudrait-il dire qu’il avait fait des offres
de délivrer la procuration a d resigriandurn, et autres
titres nécessaires? mais dans quel teins a-t-il fait ces
offres? il devait les faire au moins aussitôt après la som
mation que lui en Ht D e v è z e , le 2 décembre 1786. II
avait annoncé qu ’il ne voulait point les faire dans facto
du regrès du 7 du même mois, et qui fut accepté paç
D e v è z e dans l ’acte signifié le 12 à Lamouroux.
Et ces offres de délivrer, il 11e les a faites que deux
ans après, e llo n g-te m s mêm e après lu sentence arbi
trale qui avait déclaré la vente comme non avenue.
Mais supposons même qu ’il 11’y eût eu ni regrès , ni
�(43)
acceptation, ni compromis, ni jugement arbitral, qu’en
fin La mouro ux ne se fût pas toujours porté et qualifié
propriétaire en recevant les émolumens du grefïe, les
gag’e s , les droit de chauffage , qui auraient dû appar
tenir à D e v è z e , en percevant les droits du greffe, en
poursuivant le paiement, obtenant des jugemens où
il se qualifiait toujours de greffier en c h e f , et touchant
le prix des fermes ; mettant tous ces faits à l’écart,
guelle est donc cette espèce d’offres tardives faites
par Lamouroux ?
Il offrait ¿«disait-il, de délivrer une procuration ad
resignandum ) mais ce n ’était pas là une offre réelle
qui seule pouvait le libérer de l’obligation qu’il avait
contractée; il aurait fallu qu’il eût réellement une pro
curation toute faite, et non pas une procuration à faire,
et qui ne l’a jamais été.
Bien d’ailleurs n’aurait pu l’empêcher de faire cette
procuration et de l ’offrir réellement; il n’avait besoin
pour cela ni de la présence de D e v è z e , ni de son con
sentement; et jamais dans ces sortes de procurations
il n’y eut d’autre partie que le constituant.
Lors même qu ’il fit ces offres, et quand elles auraient
été réelles, D e v è z e aurait été fondé à les refuser, parce
qu ’elles auraient été tardives et faites à contre-tems. Ces
offres auraient dû être faites immédiatement après la
sommation que D evèze lui avait fait faire le 2 décembre
1786 ; mais on ne les avait faites que près de deux ans
après , et lorsque la suppression des maîtrises était déjà
annoncée par des actes publics,
F a
�Ì7X k
*
( 44 )'
On croit donc avoir démontré par les principes gé
néraux de la vente et de la tradition, que Lamouroux
était seul propriétaire de l’office lorsqu’il a péri par la
suppression des maîtrises ; et alors quelle est la règle?
res périt Domino. Mais il y a de plus des principes par
ticuliers pour les ventes d ’offices : nous ne pouvons pas
les puiser dans une source plus pure que le traité des
offices de Loyseau ; c ’est là vraiment le siège de la
matière.
« C e l u i , dit L oyseau , liv. i , ch. 2, n. 2 1 , qui après
« avoir composé de l’office, et payé le prix d’i c e l u i,
« a retiré de son vendeur une procuration irrévocable
« pour le résigner en sa fa veu r, même un acle exprès
« de résignation, 11’a point encore de droit en l ’office
« jusqu’à ce que la résignation soit admise par le coir
« lateur et la provision expédiée à son profil; de sorte
« que jusqu’alors l’office est encore in bonis du rési« gnant , et par conséquent peut être saisi pour ses
« dettes , comme a décidé la Cou!unie de Paris, art.
« 9 7 , et peut par lui-même être résigné à un autre,
a s’il prévient par eilet son premier résignataire ».
« Don t la raison est, conîinue L oyseau, que la ré«• signation n’est pas une tradition de l ’office, atlendu
« que les offices ne sont pas en la libre disposi lion des
« pourvus, pour les pouvoir directement et iinmé« dinlement transporter à autrui; mais il iaul qu’ils
« passent auparavant parles mains du collateur, duquel
« leur disposition dépend principalement ».
Ainsi, d’après la doctrine de L o y s e a u , celui qui a
�( 45 )
vendu l’ofTice en reste toujours propriétaire, lors même
q u ’il a délivré sa procuration ad resignanduni • tant
qu’il n’y a pas eu de provision, l’office est toujours in
bonis du vendeur; mais si l’office vient à être supprimé
dans l'intervalle, il ne peut périr q u ’entre les mains du
vendeur,puisque celui-ci en reste toujours propriétaire.
Si cela est vrai, même à l’égard du vendeur qui
a déjà délivré la procuration a d resignandum, à com
bien plus forte raison doit-il en être de m ê m e ,lo rsque
non seulement la procuration a d resignanduni n’a
pas été délivrée., mais lorsque encore il n’y en a ja
mais eu de f a i l e , surtout encore lorsqu’il y a eu som
mation de la déliv rer, com me on voit qu ’il en fut
fait une le deux «décembre 1786 ; et q u ’ensuite }
près de deux ans après, Lam ouroux a offert de déli
vrer la procuration a d resignandum , alors les choses
n ’étaient plus entières, et d’ailleurs ce ne sont pas
des offres réélles de la procuration elle-même, mais
dé simples offres de délivrer une procuration qui n’exis
tait pas encore, et qui n’a jamais existé, procuration
qu ’011 pouvait faire sans la présence de D e v è z e , où
il n’était pas besoin qu’il concourût.
Il
doit donc paraître démontré que quand même
l’a (la ire eût été portée directement en la Sénéchaus
sée d’A u v e r g n e , la sentence qui y fut rendue était
de toute injustice.
Comment cette sentence avait - elle d ’ailleurs pu
juger valable le désaveu d’un regrès qui devait paraître
constant par toute la conduite de L a m o u rou x , surtout
�( 48 )
promettre, par réflexion, ce qu ’on ne peut pas tenir
par caractère. Mais qu ’est-ce que cela fait à la cause?
1
j ». •
L e citoyen T ro l i e r , rapporteur.
L e citoyen A n d r a u d , avocat.
L e citoyen C r o i s i e r ., avoué.
fÿ
(If
lAJk. M
/'^y*~/ ¿A ^ ^ Iw iô û u ^ a <ly
id t.y v + l* «¿£r
a , ; «* /A
i /*A* 4»WW«^
A * « ^ K W ft — «¿>^,«"^
tu<Jhu~~x;
—»7- «*- £
**?*">
f r* T p ' m*~
(im4K A» A*»Aœi. (¿1 A
•*tûX~ ------ *
a it .
/)ÿO.
^
m'A m i
(y*+fp*+*\
/U -rfd, • r î - i < r '
^.7,1-nV» «MA
&•
4u ^ a l ?*>
/ •— / £ * * > € Vy —
aJtk , ^
U l^ ü
**
A.yAÿ—-to*
------r ^
p *
0 \<jï£u^
^ *-*
4.
A R I O M , DE L ’ IM P R I M E R I E DU P A L A I S , C H EZ J - C . S A L L E S .
• I»;
�'Kp » u*J***~ y u . ^ . vs*(cfcv^ i_
» ,
M
A
i,^
c — ïi*
^ tV lf?
A.
> /w&i
^
r w oO ucA ^
o, ^
///03
t ^ /«> ^
/ x j'^- i,/U - n ^ ^
j
^
^
^
/a
r
^
V«~3>vyo~ c^^W
-
^
0/U ^A
^ />*«
/ ?& »
û
/ ^ »
* .
à. i'J ^ J i^ ^
-
/
^
¡^XaaaJ4 uAjüu^
. v A
.
' y4**, ^OUA U^I/Uoi— i l VU4 /<XyCAiíwúi tuiififtJo û»Jy^yK
^OÛJIry«^^^*aA t ^mIuï twJCuu«Jt OJu^»uiu*Ai-'^ y*ua**AÀ±
a»K^ütü»«M«> cru £u^(ui/ax
í/í^c^f«*^1*^4"
____ ^ x< -- ***** » « - —
^ ^UtUA
■
txi^e/^ ^ /abitui »/jfyl ^^ #•
/ViT û^M*
^Ou4¿ *ÎW/a VíaÍJT
/^^fy (ai/ c/*M AVllUMlâX V ÂAJU1</ *^*//****'
•
Uxnl^ ojjuptf /*
o cifUÎru—
¿fc'j/i>tw-«
¿y*
O, u 'tiédie <*Ltìo
y -' “* ^
^
^
^
î><
/<- V c ^ C ,
^ui aia t¿\ujlír c*juU > \ » J otOín»Ai*J ^ u Íc\*mu V«
OjJiJtkJla
Éy-Uyc> "t>i*r
U « Ww itAl ('^ ¿^ * y<uj^ Vvut ~*A^K¿¿u
g^U¿^-\x -u«v«~> c+ fy**>- /<A (y**ü\TÍ>*A. iVcAAr^A«Q ^«^/omu'ut^- />oSt»T
/ > * £ *A *~ V aJlJù('^
<AAftU f < ’¿
« M
- liif c ¿ jr ^
f u l j r ÎKjLjJ^^lr* .........-fr--lO U ^ t^ K U
A »y / o Jf
(K
«A1«À&ÀjT
A & l^ iw u
</û^voui-^
*'¿tú¿(
u
¿
/ V ow Ü
\J'*A*yo*VS ¿<^Ma9
t^ » *
¿ » ^ I t o ^ i i * ^ , ° * * «nj
^o^»m a*; /«*— ﻫv ^
/^o«Il// * /ft. M«Jt/ 'à. />fc¿" /AûW
*1)V
k
»/ / ( \ ^ * ( i l <
a-
fl/ ft* » « i) U A U v ^ »
y t1
A
OV^
^
•
C^u'il tM- Om't^A. ^i«A»M)Wj6ui (P*^
I ^ C U M b W U lw ^ «
iV
Cw JkÁ^
il
(A A
U j ia M c u ^ l ÎU u O J J
<^À
t k u
^a* <** o\+x£ftUx /«* Âu-1«-
7 **-fA ÍX^t
U |J U *^ >
«kX«n-*
/ « M A J U U A D t^ fl
^ 't í u
U y i/vV '•’’
<AA U l u u C l M i u A u t «
C M *U ’
< aM a* ^ |
IAAAJL^WiuÎwMTfelAinoiÀukj «** MjJKl^iUAAfe«Jl
t/ti U
fc lîï) ^ ^ !
(
V 4A>X* ■
tw
||\«
/1 C U I ^ u  t l U A A M A j r '
& ^C*V\
^Ul^/'il ft tfWtÀw ^CA «UJVI^tUJUlcjUuj^ CfO\A- ^u'i
" ^ O aaA
UA tM M ltA A JU
^ u ! b jU U A
wvjcJjr
A*
llift /
tl
A iia
tA A A lA * n ij
^ * j C c >
CAJVAJVI kAAJutM
CuJbùr
'.
/ * ^ ‘^~
y iA ^ D
(A
fe m i
Ce ^ u >
/
^ « A JL / /fts / ( A j k J o
C J Ü « ^ V ^ tA A A A I « J u î^
lu X c \
C u iA ^ iÜ V > M M
o m m u
IX Î^ M X )
W
w v
^«
|^UJL ^ W
m
JL>WU>^ o
<UWA|11o lvaÂ^>
^uM*^j.'il 6j» i<j*AM\é¿Jr;
*1/^ ^ ° u”
ÎAA^o^./vv
«UO*jj» tA.WTHAli/, t'«A*
<A^ '
ot*lL* ^ Cw, ^ jr y» ^ ^ yvít¿tr' ^ r f y t V«¿/«y ^
A
(
O A Í lJ tk '
Ia a Âa .
^
A
J
>
*
*
O
A
I 1 «A *4
*"
*\
*~|A^
( i f ^ ^ Î A i </| « J
�^ u 'c w u v
Cj ü u * a ) v u
,
il
¿ fio r
w > r \ i'f c *
«jy>* ^
;
i* y o * * * .OU '
i**/l».y<A<v*OU>~X~. A*JJX¿Jr~b • luiu|jttll«»» ^ WV' <
(/*~>0
cAjUÍO a /'Clmj&JÍ U
«/W
J Cu^
tk^JUX-f
MAM. (Avtu
ÙA>
XüXjf AU,V^ ' <1*^*
, ,• , r
/
V . */—•
u*«—
CV ¿ Í .
/ «y «.
o ^ K * e i\ u »«
u
V
Ij.;
^
XAJXwUULâ»
.
a# .
cW
T W ".« ' «* /~*r/o~ ^
A VtÆ ^'aJU
^ / « ^ * y « * fc = ^ , «*- ^
°"
^/itiAjà« <Ât-jf*i\* uÍ¿aÍ> </«jl.~Ì>o»/>j«a~*_^ *,w ‘*— £m» 0/%/tuy
. cvJhi/UtJ
/uu^ii /fû^»n»-»-i <a*jXx>
^ » -y *t
Cu CH«
ci*— -*“
cdt~: tÿjLA Cl.
**•y *
, ,t^
W u a íu u ^
^llÙiJâ^6(» ^ » liytlAAU CUu^Ul
Í Al
<jÆ£3r«*ui<JL "bOt Cvlo. /«^yx Ax***r &
& Í W * ^ ^ iu .- t Æ v
<y ^
•
fcij *MWV* ***!>*'
a * ¿ y< Æ , - - - - - -
j
\V
*
#
A
l
\
\
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Devèze, Jean-Baptiste. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Tiolier
Andraud
Croisier
Subject
The topic of the resource
ventes
offices
arbitrages
office de greffier
maîtrise des eaux et forêts
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jean-Baptiste Devèze, appelant ; contre Antoine Lamouroux, intimé ; en réponse à celui de l'intimé.
Annotations manuscrites : intégralité du jugement.
Table Godemel : Homologation : 1. le tribunal saisi de la demande en homologation d’une sentence arbitrale, sous l’empire de la loi d’août 1790, a-t-il pu refuser cette homologation pour le motif que le compromis ne comportait pas de délai, et a-t-il pu prononcer sur le fond même soumis à l’arbitre, en décidant, contrairement, sans qu’aucun appel de la sentence eut été interjeté ? Sentence arbitrale : - infirmée. v. homologation.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1786-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
48 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1411
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0229
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53225/BCU_Factums_G1411.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Mauriac (15120)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
arbitrages
maîtrise des eaux et forêts
office de greffier
offices
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53165/BCU_Factums_G1207.pdf
f7dba76bfa3ed43b145937137b9518b4
PDF Text
Text
C O N S U L T A T IO N
S u r le douaire stipulé en coutume d'Auvergne ,
en cas de viduité seulement
Le
, qui a vu le
contrat de mariage de Joseph Delafarge et de
Marie - A n n e Urion , du 17 janvier 1 7 7 6 , et
l ’assignation donnée à la requête de ladite MarieA n n e Urion et de Joseph D ufraisse, son second
mari, à Antoine Delafarge , son fils du premier
mariage, le
nivôse dernier, et auquel il a été
exposé que Joseph Delafarge est mort au mois
de mai 1793 ,
c o n s e il
s o u s s ig n é
23
E S T I M E que la demande en continuation
de paiement du douaire, formée par la mère
contre le fils, est parfaitement ridicule et abso
lument mal fondée,
A
c
�( 2- )
A
époque du contrat de mariage de 1 7 7 6 ,
et encore à celle du décès de Joseph D elafarge,
nous étions gouvernés par les dispositions de la
coutume d’Auvergne. O r , en Auvergne il n ’y
avoit point de douaire coutumier ; la femme ,
devenue v e u v e , ne pouvoit en prétendre contre
la succession de son mari, qu’autant qu’il lui en
avoit été constitué par son contrat de mariage.
Par la m ê m e raison qu’elle ne pouvoit pas
exiger un douaire, s’il ne lui en avoit pas été
^ constitué , aussi ne pouvoit-elle le demander que '
tel et de la manière qu’il avoit été stipulé.
D ’un autre c ô t é , l’usage le plus général de la
province étoît de ne constituer le douaire que
pour le temps de la viduité ; et p eut-être sur
cent contrats de mariage n ’en trouveroit-on pas
d e u x où la restriction du douaire , au temps de
la vid u ité, ne fût pas e x p r e s s é m e n t c o n v e n u e ?
D ans notre u sage, le douaire ne pouvoit donc
être considéré que comme un secours donné à la
fem m e devenue veuve , pour soutenir le nom et
l ’état du mari q u e lle avoit perdu. Ainsi , lors
qu’elle en perdoit le nom par un second mariage,
et qu’elle prenoit letat d u n nouveau mari,il n ’eût
pas été juste, sur-tout lorsqu’elle avoit des enfans ’
du premier mariage , d’enrichir le second mari
aux dépens des enfans du premier.
1
�fû ï
3
<.U
'
(
)
D ans le dernier état du droit romain, et par
la disposition de la novelle 2 2 , chapitres 43 e t ^
44 , la condition de ne point passer à d e ^ T * * ^
secondes noces , étoit valable
soit qu’elle
imposée par le mari dans une disposition qu’il
2t 2M *-*-'•
fa'isoit en faveur de sa fe m m e , soit qu’elle le fût/~v.»*LtM^hL..
par tout autre que le m ari, et elle emportoit
perte de la disposition par la feitime qui
trevenoit à la condition.
D ’ailleurs, on ne regardoit pas la disposition^'/'**^. * ti.
. faite par le mari en faveur de la femme pendant^
qu’elle demeureroit veuve , comme une interdic- ' * t • ¿ L . K
i
.
.
,
fa * .
tion de se remarier, mais seulement comme une
consolation et un soulagement que le mari lui
accordoit pendant sa viduité : hœc conditio , si
vid.ua erit , cum vidua e r it, non indicit viduitatem , sed solarium viduitati prœbet : c ’est ainsi
que s’en exprime élégamment j e savant Cujas ,
dans son commentaire de la novelle 22 ; de
même G o d e fro y , sur la loi dernière, au code de
indicta viduitate.
O n peut même dire que le douaire constitué
en A u v e r g e , pour avoir lieu pendant la viduité
seulem ent, ne peut pas, à proprement parler,
être considéré comme une disposition conditionnelle ; c’est seulement une disposition de la qua
lité de celles que Ricard appelle donations tem-*
A 2,
3
�(
4
)
poraires ou à tem p s, trait, des disp. cond. n. 7 ;
et les jurisconsultes font une distinction entre
la disposition d’usufruit faite par un mari à sa
fem m e, à condition de ne pas se remarier, et celle
de l’usufruit dont elle jouira, tandis qu’elle de
meurera en viduité : la première devenoit caduque
par l’effet du second mariage ; c etoit le cas de
la caution mucienne qui obligeoit la femme à la
restitution des fruits qu’elle avoit perçus pendant
sa vid uité, si elle venoit à passer à de secondes
n oces; au lieu que la disposition faite pour jouir,
tant quelle demeureroit veuve , n etoit en effet
qu’une disposition temporaire, qui se divisoit en
autant de dispositions, in singulos anno s , pour
chaque année de la vid uité, après laquelle seule
m ent la disposition cessoit, mais sans restitution
des fruits du temps antérieur.
D ’après c e la , et d’après la clause d’un contrat
* de mariage qui n ’accordoit un douaire à la femme
que pendant le temps de sa viduité seu lem en t,
certainement dans l’état de nos anciennes lois ,
une femme qui se seroit remariée, n ’auroit pas
eu l’impudeur de demander la continuation du
douaire.
Y auroit-il donc dans les lois survenues depuis
la révolution, y en auroit-il q u e l q u ’une qui auto
risât là femme remariée à exiger la continuation
�(
5
)
d un douaire stipulé en cas de vidurté seulement ?
11 paroît par la demande que la femme Dufraisse
vient de former contre son fils du premier mariage ,
qu’elle veut faire regarder la disposition de. son
contrat de mariage pour le •douaire, restreint au
temps de sa viduité , comme une clause impérative
et prohibitive, gênant la liberté de se remarier ,
et par cette raison proscrite par l’article Ier. de la
loi du
brumaire, an 2 , et l’art. 12 de celle du,*
J 7 nivôse, même année.
d " ' 11 y a deux réponses à cette objection.
i°. L a clause dont il s’agit n ’est par elle-même
ni impérative ni prohibitive. C e n ’est point une
disposition conditionnelle qui ait commandé à la
femme de ne point se remarier, qui lui ait dé
fendu de le faire ; c’est seulement une disposition
temporaire qui a été faite en sa faveur pour tout
le temps qu elle seroit veuve; et le second mariage
est si peu une condition imposée à la disposition,
q u e , venant à se remarier, la femme n ’auroit pas
été privée de son douaire pour le temps qu’elle
seroit demeurée veuve; au lieu qu e, si la disposition
lui eut été faite à condition de ne pas se remarier,
en se remariant, elle eût été, suivant nos anciennes
lois, sujette à la restitution des fruits qu’elle auroit
perçus pendant sa viduité. T elle est en effet la doc
trine des jurisconsultes, et particulièrement celle de
5
�C 6 )
Pérégrinus ,V<? Jpdeicommissis, art. t t , n°s. 122 et
, rappelée par les annotateurs de Ricard, des
dispositions conditionnelles, n°. 2 5 2 ; 'e n un m o t,
la disposition n ’emporte avec elle aucune prohibi
t io n de se remarier, aucun commandement de
garder la viduité, non indicit viduitatem, comme
.dit C ujas, ce n ’est qu’une consolation et un secours
qui lui est accordé pendant qu’elle demeurera
v e u v e , sed soLatium. viduitatiprœbct. Autre chose
est de détourner de se marier par l’imposition d’une
peine; autre chose d’inviter à la viduité par une
récom pense, dit Maynard en ses arrêts, tome
page 321 ; aliud est à nuptiis pœnâ deterreri, aliud
ad viduitatem prœmio invitari. D ès que la veuve
Delafarge., par un second mariage, est devenue
fem m e Duf'raisse, elle ne doit plus avoir c e q u in e
lui avoit été donné que comme une consolation
pendant sa viduité, consolation dont elle n ’a plus
besoin.
Il doit donc paroître évident que les nouvelles
lois de brumaire et de nivôse, seroient dans tous
.les cas sans application à la clause du premier con
trat de mariage de la femme Dufraisse, et que
cette clause n’est ni impérative ni prohibitive.
Mais il y a une seconde réponse à son objection.
Il doit paroître certain que ce ne scroit que par
lin effet rétroactif des deux lois de brumaire et de
123
�({(
(7
)
n iv ô se , que la femme Dufraisse pourroit s’en pré
valoir contre la clause expresse du contrat demariage
de 1 7 7 6 , antérieur de plus de, 1 7 ans à ces lois ,
et contre les lois qui étoient alors en vigueur, et
qui letoien t encore au décès du premier mari. E lle
ne pourroit pas dire en effet qu’avant l’existence
de ces lo is, elle auroit pu seulement hasarder la
prétention qu’elle élève aujourd’hui; elle eût été
alors sans doute rejetée avec indignation r elie sera
bien forcée d’en convenir. Donc il est évident que
c’est l’effet rétroactif de ces lois qu’elle invoque.
O n vient de prouver cependant qu’elles n ’ont pas
d’application à l’espèce. Mais quand elles auroient
pu s’y appliquer, ce n ’eût é t é .encore une fois que
par 1 effet- rétroactif qui y avoit d’abord été attaché.
O r, l’effet rétroactif étoit d’une souveraine injus
tice; et les législateurs, forcés de la reconnoitre, se
sont vus obligés de la corriger, en rapportant cçt
effet rétroactif par la, loi du 9 fructidor dernier. '
Ainsi le contrat de mariage étant de 1 7 7 6 , par
conséquent antérieur aux lois de b ru m a ire et de
n ivose, la mort même de Delafarge, premier mari,
étant aussi antérieure à ces lois, leurs dispositions,
fussent - elles applicables à l’esp èce, 11e peuvent
plus frapper sur un acte et sur un événement qui
les ont précédés, et la prétention de la'femme D u
fraisse se présente aujourd’huf avec autantr çTimpu-
Of
�ilk
.T »
8
8
Ÿ f * ' ^ deur qu’elle auroit pu le faire avant des lois qu’elle
r f f f invoqueroit d’ailleurs sans aucun fondement ,
t f ,ak ^ quand même leur effet rétroactif n ’auroit pas été
^
rapporté.
rl
?•
?■
L
Délibéré à R i o m , le 10 pluviôse, an quatrième,
^ ? r t
ANDRAUD.
*r
T O UT TE E ,
G R A N C H IE R ,
T O U T T É E , fi!s ; P A G È S .
• N ota . L e citoyen Delafarge ; en faisant imprimer cette
consultation pour sa défense , croit devoir observer q u e ,
plein d’amour pour sa m ère, il n’a garde de lui imputer
une action q u’ il est persuadé qu’elle désavoue dans son
c œ u r : il ne l'attribue qu'a la c u p id ité d 'u n s e c o n d mari
qui d’ailleurs, suivant la pensée d’un ancien jurisconsulte,
doit avoir en haine les enfans du premier mari ; c um eos
o d io e i s i t m an ifcstum . L e citoyen D elafarge est douloureu
sement affecté de ne pouvoir arracher de sa mémoire do
tristes souvenirs.
h
f
^
A
-—
—
RIOM, DE L’IMPRIMERIE DE LANDRIOT,
/
'
• y'
'
J
'
y
/>
V
�/(X t / o * A ^ O
cÿ ttoÿ
Cusa
7
Oj uJ a c ^T
^ «
^ f y f O A x '^ jO
üax^*' ^ Ù*Jal/u\tiK> <Mr CXjiAOkxX<mIu <Àamijv '. AMxiiW]t'
'
(/^
*
Ua ZÏaÂxm^ MiiCfûoujjl--ftiTu«*^ô 'tv y tMouju^V ¿lícifctT
oJt .
/P/ /•-
ÎAAACA^X
«M M 4 J
<<AW>VU
~h* A
U a a a b iu x ir
VA'1*
^
6 a
/(ivi <it*_
Mai
*
^
. 7
/ ,/
» / 'r#/.
ïj'aaa*AOaAA. tT /^ (A*M«(0 d/fe (/tuv\( (/M-Uflulïl.
y
*
/i ,
/■_
OÄ
¿ CLGyfcM^. faÿi*yO tK'lfo^X
^XOv/fA^AX^.^4
(u_¿1« ill /?ÍJ| tAc V<IWJ(
Ul>«ÂΫJ* VW\ Ulivw»« *MÍAAA
^ w * ^ u n
à .
/ (Â À « . . n . « - , - - -
u iS u u X lV u « ^ t *
u A l> i A .l i ^ /
-If—
à
e^ x
àc*ffOL^*
>
f}
C~t,
^ V *,' U a a
/fa*Jv /S î» /ÛkIT ¿ui
c *
« Ä
< A ¿ o « ie >
l t
^ « A
Ê \ J M * T s C u À jL .
J
a iM t- w A ^
ÿ\*À.
/a
CUUJU/WJI
"^, V t»»i<«M 6j)a
u ic ^ t ¿ M
.t
í —
- »
^ v ».
¿L»
tA r- / ?
0
tM W I ,' Û
U
U
y ° ^
¿ xv> O  Z ^57 w 3 ^ aaa. \ ^ v^
t~ o u io ^
■
<*\ * + fpju\X T
Y
//tôtr
w
^ fcu -
A«f«Mi**AULl t~'AJ5
à »
ojsjuCis
e¿L~Xá,„ Ä co»~^Äjj' ^-y'**'-*/- ^
JtuÂi«
/» &Á¿UaxiJ inioja Uiwwvmu, e^6U«A^oua ^u,uK>ÎU-/c^oaj^
* UtoJjfUX <J tMAVk^t)
/j1 <>A»*JVUI f})ß c*- 6 CuShO.-w»». “
- -- .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Delafarge, Joseph. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Toutée
Granchier
Toutée, fils
Pagès
Subject
The topic of the resource
douaire
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
secondes noces
conflit de lois
droit intermédiaire
droits de la femme
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation sur le douaire stipulé en coutume d'Auvergne en cas de viduité seulement.
Anotations manuscrites, énoncé du jugement. « Il n'y a pas de rétrocativité » etc.
Table Godemel : douaire : en auvergne, il n’y avait point de douaire coutumier, il fallait qu’il fut stipulé, et on ne pouvait le demander que tel et de la manière qu’il l’avait été. L’usage était de ne les instituer que pour le temps de la viduité. cette disposition purement temporaire n’était nullement prohibitive et ne restreignait pas la liberté de convoler. seulement le secours donné à titre de consolation cessait. - les lois intermédiaires ont-elles modifié ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1776-Circa An 4
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1207
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53165/BCU_Factums_G1207.jpg
conflit de lois
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
douaire
droit intermédiaire
droits de la femme
secondes noces
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53921/BCU_Factums_M0726.pdf
8ea4c7160b83c737338244b28f21c20a
PDF Text
Text
m é m o i r e
SUR
La n u l l it é e t la r é c l a m a t io n
C O N T R E D E S VOE U X E N R E L I G I O N .
A RIOM,
E
DE
LANDRIOT,
I M P R I M EUR DU T R I B U N A L
1 8 0 3
X I I
s e u l
D’APPEL.
�MEMOIRE
POUR
J e a n - J a c q u es D A N C E T T E ,
prêtre,
habitant de la commune de B e a u z a t, département de la H a u te -L o ire , défendeur en tierceopposition, et aussi demandeur en tierce-opposition;
CONTRE
F A U G I E R et J a c q u e s
M A S S A D I E R son mari, de lui autorisée,
demandeurs et défendeurs.
F r a n ç o i s e
est défendeur à une tierceoppositjon- formée par Françoise Faugier et son m ari,
àune sentence de l’officialité du diocèse de M âcon, qui a
A
Jea n - J a c q u e s D
ancette
�c o
déclaré nuls ses actes de vêture et de profession dans
l’ordre de Cluny, et l’a renvoyé au siècle, et à un arrêt du
parlement de Paris, qui a déclaré n’y avoir abus dans la
sentence de l’officialité. D ’un autre côté, Dancette a formé
opposition à un arrêt du parlement de Toulouse, où il
n’est point partie, et qui cependant attribue à Françoise
Faugier le patrimoine de Dancette.
Si Françoise Faugier et son mari doivent succomber
dans la tierce-opposition à la sentence de l’ofïicialité de
Mâcon et à l’arrêt du parlement de Paris, alors il ne peut
y avoir aucune difficulté dans la tierce-opposition de
Dancette à l’arrêt du parlement de Toulouse. C’est donc
principalement à la tierce-opposition à la sentence de
l’oiïicialité de M âcon, et à l’arrêt du parlement'de Paris,
qu’il faut s’attacher.
Cette affaire tient tout à la fois à l’ordre public et à l’in
térêt privé. G’est du développement des faits que naîtront
les questions sur lesquelles le tribunal d’appel doit pro
noncer.
F A IT S .
D u mariage d’André Dancette et de Marie Robin
étoient nés trois enfans, Claude, Marguerite et JeanJacques Dancette.
'<;Toute l’afTcction des père et mère s’étoit portée sur
Claude Dancette, leur fils aîné, à. qui ilsdestinoient toute
leur fortune, qui étoit considérable, en lui sa crifia n t son
frère et sa sœur. Dès les pi'èmières années de c e u x -c i,
ils les vouèrerit a u 'célibat daïis l’état monastique. A l’âge
de huit ans, la fille fut misé dans un couvent de religieuses
�(3)
ursulines, où, sans qu’elle en fût jamais sortie, dès quelle
eut atteint sa seizième année, on lui fit faire le sacrifice
qu’on exigeoit d’elle : les caresses et les m e n a c e s , et les
insinuations des l’eligieuses toujours portées à faire des
prosélytes, rien ne fut épargné.
On trouva plus de résistance de la part du fils cadet.
A u x caresses employées vainement succédèrent les mena
ces, qui étoient aussi sans succès. Bientôt les mauvais traitemens suivirent et s’accrurent chaque jour : on en vint
à le forcer de partager avec les domestiques les travaux
les plus pénibles de la campagne, que son âge et son état
ne pouvoient comporter ; il fut privé de la table de ses
parens.
Peut-être le cœur du père se seroit-il ouvert aux prières
et aux gémissemens de son fils ; mais que ne peut sur un
mai’i foible l’ascendant et l’empire que prend sur lui une
femme audacieuse, que sa prédilection pour un de ses
enfans veut enrichir aux dépens des autres, et q u i, pour
parvenir à son b u t, les livre à la persécution, en faisant
partager à son mari ses caprices, sa haine et ses mauvais
traitemens !
Il n’est pas surprenant après cela qu’un enfant si cruel
lement persécuté, pour échapper p eu t-cire à de plus
grands dangers, se jette en désespéré dans: la captivité
d’un cloître. Telle fut la malheureuse destinée qui entraîna
Jean-Jacques Dancettc dans la maison de Cluny.
Cependant la providence permit que son entrée dans
le monastère ne fût pas accompagnée des formes prescrite^
par les lois pour l’y retenir jamais; ëlle lui ménagea dep
Ressources assurées pour reprendre sa lib erté, lorsqu’il
A a
�U )
n’auroit plus à craindre les effets funestes de la haine et
de la violence. C’est ce qu’on établira dans la discussion
<les moyens. Continuons le récit des faits.
Jean -Jacq u es Dancette n ’a v o it cessé de protester contre
la violence q u i l ’avo it con duit dans la m aison de Cluny ;
il a v o it fait des actes de protestation p a r -d e v a n t notaires
1761, en 1766, en 1 7 7 1 , en 1776, en 1781 et en 1785.
Claude Dancette, son frère aîné, étoit mort en 1767.
Cette circonstance paroissoit devoii le rendre à. l’affection
de ses père et mère : il tenta auprès d’eux toutes les voies
pour les engager à venir à son secours j mais les sentimens
de haine conçus contre lui par sa mère avoient pris dans
son cœur de trop profondes racines, et la perte de son fils
aîné ne lui fit que reporter ses affections sur ses parens
collatéraux ; elle prît dès - lors le dessein de leur faire
passer non-seulement ses propres biens, mais ceux même
de son m a ri, au préjudice de ses enfans, ses héritiers
naturels; en sorte qu’abusant toujours de l’empire qu’elle
s’étoit donné sur un mari foible, elle le rendit insensible
aux prières et aux larmes de son fils, et se fit faire par lu i,
dans un testament, une institution d’héritière universelle,
autorisée par les lois du pays de droit écrit, qui régissoit
les parties et leurs biens. L e testament qui contenoit cette
institution étoit de 1768.
Une circonstance bien remarquable dans ce testament,
c’est qu’en instituant sa femme son héritière u n i v e r s e l l e ,
et faisant à son fils, par le même testament, le legs d’une
pension viagère j il.y est dit qu’il institue son fils son héritier
particulier dans cette pension pourquoi ce legs h titre
ü’instiiution particulière ? Gela n’étoit pas nécessaire si le
en
�(5 )
fils étoit vraiment mort au monde par une profession en
religion, libre et régulière ; mais il falloit prévoir le cas où
le fils réclameroit contre sa profession, ou la feroit déclarer
nulle : et si cela arrivoit, et qu’il n’y eût pas d’institution
particulière en sa faveur, l’institution universelle faite à la
femme eût été nulle par la prétention du fils. Cette précau
tion annonce suffisamment que le père et la mère connoissoient les vices de la profession de leur fils.
L e père, qui avoit fait son testament en 1768, mourut
en 1773. En vain encore alors Jean-JacquesDancette agitil et fit-il agir auprès de sa m ère, pour la rappeler à la
tendresse maternelle : vains efforts, la liaine étoit trop
invétérée.
Cependant, dès après la mort de son p ère, il avoit aban
donné la maison de C lu n y , et quitté l’habit monastique ,
continuant toujours de renouveler ses protestations. Les
religieux de Cluny n’eurent garde d’user des voies qui
auroient pu le contraindre à rentrer dans le cloître ; ils
savoient trop eux-mêmes que sa vocation avoit été forcée,
et'ils connoissoient sans doute la nullité des actes qui l’y
avoient introduit. Sorti de la maison de Cluny dès la mort
de son p è re , ne trouvant point d’asile auprès de sa mère, il
n’avoit cessé d’errer çà et l à , chez des parens et des amis
compatissans et sensibles à ses malheurs.
Mais sa mère étant morte en 1782, il se mit dès-lors en
possession des biens de son père, et n’a cessé depuis ce temps
d’en jouir et d’en disposer pendant un grand nombre d’an
nées, sans éprouver de contradictions de qui que ce soit.
Sa mère avoit fait un testament par lequel elle avoit ins
titué son héritier Barthelemi Robin son neveu, et par un
�(6 )
codicile elle avoit fait en faveur de Jean-Barthelemi R obin ,
autre de ses neveux, le legs d’un domaine considérable qui
venoitdesonrnari; et, dans la vue sans doute d’engager son
fils à ne pas contrarier ses volontés par les voies qu’elle
sa voit bien lui être ouvertes contre la profession en religion,
elle lui avoit donné la jouissance du domaine dont elle avoit
disposé par son codicile en faveur de Jean - Barthelemi
Robin : mais, ce qu’il y a encore à remarquer dans le testa
ment de la mère, elle qualifie son fils de prêtre sécularisé ,
et elle a aussi la précaution de lui faire un legs d’usufruit,
à titre d’institution particulière.
Il n’est pas non plus inutile d’observer que depuis 1773 >
époque de la mort du père, jusqu’en 1782 qu’arriva celle
de la m ère, les collatéraux du père n’imaginèrent pas d’at
taquer le testament d’André Dancette, et laissèrent toujours
sa femme, son héritière testamentaire, jouir de l’universa»
lité de sa succession. Ils auroient pu cependant demander la
nullité du testament, comme ils l’ont fait dans la suite ; et
s’ils ne le firent pas alors, ce ne put être que par la connois-?
snncc qu’ils avoient de la nullité de la profession de JeanJacques D ancelte, qui seul alors pouvoit avoir le droit
d’attaquer le testament de son père : mais, même après la
mort de la m ère, le fils n’éprouva aucun obstacle dans la
possession où il se mit aussitôt des biens de son père.
Cependant,peu de temps après, Claude Faugier qui vivoit
encore alors, qui étoit fils et héritier d’Anne D a n c e t t e , la
quelle étoit sœur d’André Dancette, et qui a u r o it eu droit
à la succession de son oncle, si Jean-Jacques Dancette son
cousin-germain eût pu être considéré c o m m e mort civile
ment par une profession en religion régu lière, Claude
�(7 )
Faugier imagina d’attaquer les héritiers de Marie R o b in ,
et de demander contre eux la nullité du testament d’André
Dancette.
Il doit paraître étrange que Claude Faugier ne se fût
adressé qu’aux héritiers de Marie R o b in , qui n’étoient pas
en possession des biens, ou qu’il n’eût pas en même temps
dirigé son action contre Jean-Jacques Dancette, qui s’étoit
empai’é de ces mêmes biens après la mort de sa mère.
l i ’action de Claude Faugier fut portée en la sénéchaussée
du Puy, où elle fut reprise après sa mort par A ndré Faugier,
tant en son nom que comme tuteur de l’enfant mineur de
Claude Faugier son frère, et par Françoise Faugier sa sœur,
et Massadierson mari; et, après une assez longue instruction,
le testament d’ André Dancette fut déclaré nul, et les Faugier
envoyés en possession de ses biens. Les Robin interjetèrent
appel de la sentence de la sénéchaussée du Puy au parle
ment de Toulouse, où elle fut confirmée.
Mais l’envoi en possession prononcé contre les R o b in ,
ne pouvoit pas être effectué à l’égard de Jean-Jacques Dan
cette qui s’étoit mis en pleine jouissance après la mort de
sa mère. Cependant, craignant d’etre troublé p a r le s collaté
raux, à la faveur de la sentence de la sénéchaussée du Puy ,
et de l’arrêt confirmatif, il se persuada qu’il étoit de plus
grande précaution de faire px-ononcer judiciairement la
nullité des actes de vêture et de profession qu’on pourroit
lui opposer.
Il se pourvut en conséquence en l’ofïicialité du diocèse
de Maçon, où étoit situé le monastère de Cluny, et demanda
la nullité des actes de vêture et de profession. Il appela ,
pour faire prononcer la nullité, non-seulement les religieux
�(8 >
de C luny, maïs aussi ses parens paternels et maternels, qui
h son défaut auraient été en droit de succéder à ses père et
mère. Les parens paternels étoient André Faugier, prêtre,
tant en son nom qu’en qualité de tuteur de l’enfant de
Claude Faugier son frère, tous deux héritiers d’Anne Dancette leur mère, sœur d’A ndré Dancette. Les parens mater
nels étoient Barthelemi et Jean-Barthelemi R obin, neveux
de Marie Robin sa mère.
Par une sentence contradictoire de l’officialité de M âcon,
et sur les conclusions du promoteur, les actes de vêture et
de profession de Jacques-André Dancette furent déclarés
nuls, et il fut renvoyé au siècle en état de prêtre séculiei*.
L a sentence est du . . . . juillet 1790.
Les Robin, parens maternels, interjetèrent appel comme
d’abus de cette sentence , au parlement de Paris, où ils ap
pelèrent en même temps André Faugier, tant en son nom
qu’en qualité de tuteur de l’enfant mineur de Claude Fau
gier , pour voir déclarer commun avec lui l’arrêt qui int e r v i e n d r o i t su r l’appel comme d ’a b u s ; ils appelèrent aussi
les religieux de Cluny. L ’affaire ayant été discutée au parle
ment par des écritures de part et d’autre, intervint arrêt
contradictoire le 6 octobre 1790, sur les plaidoîeries de
quatre avocats, et sur les conclusions du ministère public,
par lequel il fut dit qu’il n’y avoit abus dans la sentence
de l’oflicialité d e M âcon , et il fut ordonné qu’elle s e ro it
exécutée selon sa forme et teneur; et cet arrêt fut bientôt
après signifié aux parties.
D e ce moment Jean - Jacques Dancette continua de
jouir paisiblement de la succession de son pore, et en
disposa l i b r e m e n t ; il fit même des ventes de quelques
héritages
�(9 )
héritages détachés, sans que ses acquéreurs éprouvassent
aucun trouble de la part de ses parens.
Mais bientôt après survinrent les décrets funestes contre
les pi'êtres insermentés, et Dancette étoit du nombre : il
fut obligé de se cacher, et il fut même mis sur une liste
d’émigrés. Lesagens nationaux le considérèrent tellement
comme vrai propi'iétaire des biens de son père, qu’ils
s’empi-essèrent de faire mettre le séquestre sur ces mômes
biens, meubles et immeubles, et comme lui appartenans,
en vertu d’un arrêté du district de M onistrol, du mois
de floréal an 2 et l’administration du district adjugea la
ferme de ses propriétés, sur la réquisition du receveur
de l’enregistrement.
Cependant les temps étant devenus moins orageux, et
les prêtres commençant à reparoître, Dancette obtint du
directoire du district de Monistrol un arrêté du mois de
thermidor an 3 ■
>qui le rétablit dans ses pi’opriétés. L e
juge de paix vint avec les officiers municipaux de la com
mune de Beauzat lever le séquestre, et le remettre en
possession des meubles qui se trouvoient n’avoir pas été
vendus, et de ses domaines, à la charge toutefois de laisser
subsister l’adjudication qui en avoit été faite, pour le
temps de sa durée.
La jouissance de Dancette fut encore paisible. L e ¿5 fri
maire an 4 il afferma son domaine de Confolent au citoyen
Porchier, pour neuf ans; et le 7 nivôse suivant son do
maine de la D orlière, pour six ans , au citoyen Rey.
Jean-Jacques Dancette avoit pris en affection A ndréMarie Faugier, son neveu à la mode de Bretagne, et qui
étoit son héritier présomptif du côté paternel-, il l’avoit
B
�( 10 )
l’etiré auprès de lui : mais il eut le malheur de le perdre
le 6 complémentaire an 5. A van t de m ourir, ce jeune
homme , qui avoit été mécontent de l’administration
d’A ndré Faugier, son oncle et son tuteur, lui avoit fait
s ig n ifie r qu’ayant atteint l’âge de puberté il n’avoit plus
besoin de tuteur, et qu’il clioisissoit Jean-Jacques Dancette pour son curateur. O n conçoit aisément que cette
démarche dut déplaire à l’abbé Faugier, surtout en ce
que Dancette lui étoit préféré pour la curatelle. Cepen
dant tant que le jeune Faugier vécut on n’imagina pas
de troubler Dancette dans sa possession; ce ne fut qu’après
sa mort que l’abbé Faugier et la femme de Massadier,
sa sœur, prétendirent se prévaloir de la sentence de la
sénéchaussée du Puy et de l’arrêt confirmatif du parle
ment de Toulouse, qui les avoient envoyés en possession
de la succession d’André Dancette, et qu’ils se persua
dèrent qu’ils pourroient, par une tierce-opposition, faire
cesser l’effet de la sentence de l’officialité de Mâcon et de
l ’arrêt du parlement de Paris, qui avoient annullé la
p r o f e s s io n de Dancette et l ’a v o i e n t renvoyé au siècle.
Il scroit assez inutile de rendre compte de toutes les
procédures tenues dans les tribunaux du Puy et d’Issengeaux; il suffit de remarquer que Massadier et sa femme,
qui ont acquis les droits d’A ndré Faugier, ayant formé
tierce-opposition à l’arrêt du parlement de P aris, et
Dancette à celui du parlement de Toulouse , ces oppo
sitions ont enfin été renvoyées au tribunal d’appel, seul
compétent pour juger des tierces-oppositions à des jugernens rendus par des tribunaux souverains. M ais, comme
on l’a déjà observé en commençant, c’est seulement à la
�( 11 )
tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris qu’il
iaut s’attacher, parce que si cette tierce-opposition n’est
ni recevable ni fondée, l’arrêt du parlement de Toulouse,
absolument étranger à Jean-Jacques Dencette, n’a jamais
pu produire aucun effet contre lui.
Si la tierce-opposition à l’arrêt dù parlement de Paris
est non recevable, on pourroit se dispenser d’établir
qu’elle est mal fondée. L a fin de non recevoir est le
moyen principal; le mal fondé n’est qu’une proposition
subsidiaire. Cependant c’est par l’examen de celle-ci que
l’on va commencer : la fin de non recevoir, qui sera la
seconde proposition, n’en sera que plus favorable,
M O Y E N S .
Prem ière proposition.
Dans cette proposition il faut mettre à l’écart l’arrêt
du parlement de P a ris, qui avoit déclaré n’y avoir abus
dans la sentence de l’oflicialité, qui avoit annullé les actes
de vêture et de profession, et qui avoit ordonné l’exé
cution de cette sentence : il faut supposer que la sentence
n’eût pas été attaquée.
Elle n’auroit pu l’être que par un appel simple à l’ofiicialité métropolitaine, ou par un appel comme d’abus au
parleraient de Paris. Mais l’appel simple n’auroit pas été
recevable après que, sur l’appel comme d’abus, il auroit
été dit qu’il n’y avoit pas d’abus, et que l'exécution de
la sentence auroit été ordonnée. Mettons-nous donc dans
la position où il n’auroit pas été prononcé sur l’appel
B 2
�( 12 )
çomme d’abus , et que ce fût aujourd’hui le tribunal
d’appel qui dût y faire droit. En un m ot, y a u ro it-il
des moyens d’abus contre la sentence de l’officialité ?
Il n’y en a pas certainement, si cette sentence, en pro
n o n ç a n t la nullité des actes de vêture et de profession de
Dancette, s’est conformée à la disposition des oi'donnances,
en jugeant que ces actes n’étoient pas revêtus des forma
lités qu’elles prescrivent.
C’est sans doute une mauvaise objection que ce qu’on
a dit que l’official n’avoit pas énoncé les motifs de son juge
ment : ce n’est que dans ces derniers temps que les juges
ont été assujétis à cette énonciation ; et la sentence de
l’ofiicialité est antérieure à la loi qui a prescrit dans les
jugemens cette nouvelle forme jusqu’alors inconnue dans
les tribunaux. C ’est dans la l o i , la justice et la raison
qu’on cherchoit seulement le m otif du jugem ent, sans
qu’il fût exprimé dans le jugement même : aujourd’hui
même il n’est pas sans exemple de voir de bons jugemens
r e n d u s sur d e mauvais m otifs, et qui sont confirmés
par d’autres inptifs que ceux qui paroissoient avoir déter
miné les premiers juges.
Il ¡y a deux moyens pour attaquer les vœux monastiques :
la nullité des actes par lesquels on veut les établir, pour
n’avoir pas observé dans ces actes les formalités prescrites
par les lois pour les rendre valjd.cs; et la nullité des vœux
dans leur substance, parce qu’ils n’ont été p r o d u it s que
par la crainte ou la v io le n c e ¡e t cette seconde nullité a
tout son effet, lors même que, dans le s . actes, les forma
lités ont été gardées. Commençons par examiner la pre
mière dç ces deux nullités.
�( J3 )
Prem ière nullité.
L ’ordonnance de Moulins et celle de 1667 avoient
réglé les formalités des actes qui devoient assurer l’état
des religieux. Ces formalités ont été non-seulement con
firmées, mais exprimées et presci*ites avec plus d’étendue
dans la déclaration du 9 avril 1736, dont il est néces
saire de rappeler les dispositions.
A rticle X X V . « Dans les maisons religieuses, il y
ce aura deux registres en papier commun, pour inscrire
« les actes de vêtu re, noviciat et profession , lesquels
« registres seront cotés par premier et dernièr, et para« pliés sur chaque feuillet par le supérieur ou la supé« rieure ; à quoi faire ils seront autorisés par un acte
« capitulaire qui sera inséré au commencement du
« registre. »
A rt. X X V I . « Tous les actes de vêture, noviciat et
« profession , seront inscrits en français sur chacun desd.
« deux registres, de suite et sansjm c u n blanc; et lesd.
« actes seront signés sur lesd. deux registres par ceux
« qui les doivent signer, le-tout en même temps qu’ils
« seront faits; et en aucun cas lesdits actes ne pourront
« être inscrits sur des feuilles volantes. »
Art. X X V I I . « Dans chacun desd. actes il sera fait
« mention du nom et surnom et de l’âge de celui ou
« de celle qui prendra l’habit ou fera profession ; des
« nom s, qualités et domicile de ses père et m ère; du
« lieu de son origin e, et du jour de l’acte , lequel
« sera signé sur lesdits registres, tant par le supérieur
�( I4 )
« ou la supérieure, que par celui ou celle qui prendra
« l’habit ou fera profession ; ensemble par l’évêque ou
« autre personne ecclésiastique qui aura fait la céré« m onie, et par deux des plus proches parens ou amis
« qui y auront assisté. »
A rt. X X V I I I . « Lesdits registi’es serviront pendant
« cinq années consécutives, et l’apport au greffe s’en
« fera , savoir : pour les registres qui seront faits en
« exécution de la présente déclaration, à la fin de
« l’année 17 4 1, et ensuite de cinq ans en cinq ans, » etc,
C ’est d’après ces dispositions de la déclaration de 1736,
que la sentence de l’officialité de Mâcon a dû juger
de la validité ou de l’invalidité des actes de vêture et
de profession de Jean-Jacques Dancette. Voyons si dans
ces actes on s’est conformé aux dispositions de la lo i,
et si l’on y a observé les formes qu’elle prescrit.
Commençons par l’acte de vêture, qui est celui qui doit
constater l’introduction dans le noviciat.
Cet acte de vêture, comme celui de profession, devoit
être inscrit sur deux registres, et autorisé par un acte
capitulaire inséré au commencement du registre, suivant
l’article X X V de la déclaration de 1736. On n’a pas pu
savoir s’il y avoit eu deux registres, et il y a lieu de croii'e
qu’il n’en avoit été tenu qu’un seul, puisque dans le procès
jugé par la sentence de l’officialité, ni les religieux de
C luny, ni les parens de D ancette, qui étoient parties
dans ce procès, n’ont pu représenter le r e g is t r e q u i auroit
dû rester dans les archives du monastère, et q u e leur oppo
sant des nullités dans le registre déposé au grefle, on
n’aïu-oit pas manqué de tenter de les faii'e cesser par la
�( i5 )
représentation du registre qui devoit demeurer dans le
monastère, si dans le lait ces mêmes nullités n’eussent pas
existé dans ce second registre. Ce seroit déjà une première
contravention à la disposition de la loi.
En second lie u , dans le registre déposé au greffe du
bailliage de M âcon, il n’y a point eu d’acte capitulaire_
qui ait autorisé le supérieur à recevoir les actes de vêture
et de profession , formalité encore prescrite par le même
article. Et cette formalité n’est pas sans l'aison, puisque
la réception au noviciat et à la profession ne peut se faire
qu’après avoir recueilli les suffrages des religieux qui ont
droit de les donner, et qu’il n’y a qu’un acte capitulaire
qui puisse constater la pluralité des suffrages, sans laquelle
l’entrée au noviciat ne peut pas être accordée. Les actes
de vêture et de profession sont des contrats synallagmatiques, qui doivent engager le novice ou le profès envers
la communauté, et la communauté envers le novice ou
le profès.
En troisième lieu , l’acte de vêture n’a pas été signé
par Dancette; et cette signature est exigée par l’art. X X V II.
E t comment ne l’auroit-elle pas été ? Un pareil acte est
un acte authentique dont le supérieur du monastère est
le ministre établi par la loi ; et en général tous les actes
volontaires n’acquièrent l’authenticité qu’autant qu’ils sont
signés par les parties, et le défaut de signatureNou de la
mention que les parties ne savent pas signer, les rend par
cela seul radicalement nuls.
En quatrième lieu , l’acte de vêture, comme celui de
la profession, doit être fait, suivant le même article X X V II ,
en présence et signé par deux des plus proches parens ou
�( rf)
amis. O r , clans celui dont il s’agit, il n’y a ni présence ni
signature de parens ni d’amis : et si l’on disoit qu’il n’y
avoit sur les lieux ni parens ni amis , au moins auroit-il
fallu les remplacer par deux témoins , la présence des
témoins pouvant seule constater l’authenticité des actes,
et les ordonnances prononçant la nullité des actes publics
qui sont faits sans témoins.
En cinquième lieu , suivant l’article X X V II I , le dépôt
de l’un des deux registres doit se faire, dans les cinq ans,
au greffe de la justice royale. O r, ce n’est que huit ans
après Pacte de vêture dont il s’agit, qu’il a été dépose
un registre au greffe du bailliage de M âcon; en sorte que
pendant les trois ans qui ont suivi le délai prescrit par
la loi on a eu la facilité de faire ou refaire le registre à
volonté, pour y faire tous les changemens possibles.
En sixième lieu, suivant l’article X X V I I , il doit être
fait mention, dans les actes de vêture et de profession,
non-seulement des noms des père et mère de celui qui
est a d m is au n o v i c i a t ou à la p r o fe s s io n , mais même de
leurs qualités-, et dans Pacte de vêture dont il s’a g it,
nulle mention des qualités des père et mère de Dancette.
Ce u’est donc pas en un seul point qu’on s’est écarté
de la disposition de la loi ; elles ont toutes été violées dans
l’acte de vêture, où l’on n’a observé aucune des formalités
essentielles qu’elle prescrit. D e là doit s’ensuivre néces
sairement la nullité de l’acte de vêture.
Mais la plupart des formalités négligées dans Pacte de
vêlu re, Pont été également dans celui de la profession.
i°. Point d’acte capitulaire q ui_ajt autorisé à recevoir la
profession. 20. Point de double registre. Ni en l’ofïicialité
de
�( i7 )
de M âcon, ni au parlement de Paris, les religieux de
C lu n y , ni les parens de Dancette n’ont pas pu justifier
de celui des deux registres qui devoit demeurer déposé
dans les archives du monastère. 11 est possible que ce
registre n’ait jamais existé, ou que l’acte de profession
qui devoit s’y trouver manquât des formalités nécessaires;
sans quoi on n’auroit pas négligé de le représenter, soit
en l’ofïicialité, soit au parlement. 30. Dans le registre
déposé au greffe, l’acte de profession n’énonce pas les
qualités des père et mère ; formalité exigée par l’ar
ticle X X V I I de la déclaration de 1736. 40. Une autre
formalité essentielle dans l’acte de profession, également
exigée par l’art. X X V I , c’est que cet acte soit entièrement
écrit en français ; au lieu que le plus essentiel de l’acte de
profession , le serment qui devoit attacher le religieux
au monastère, se trouve écrit en latin.
L e défaut d’observation d’un si grand nombre de for
malités , soit dans l’acte de v ê tu re , soit dans celui de
profession, doit donc nécessairement rendre ces deux
actes invalides, et les faire considérer comme n ’a y a n t
jamais existé.
Et qu’on ne dise pas que les lois, en prescrivant ces
formalités, n’ont pas prononcé la nullité des actes où
elles n’auroient pas été gardées. Ecoutons sur cela ce
que nous dit notre célèbre Domat.
« I,es formalités ont été inventées pour rendre les
«' actes valables, c’est-à-dire, pour faire qu’ils aient leur
« effet, par la preuve qu’elles font de leur vérité. Que
« s’il est nécessaire qu’ils aient quelque forme qui en
« prouve la v é r ité , il y a autant ou plus de nécessité
c
�( 18 )
« qu’un acte sérieux et important soit accompagné des
cc preuves de la volon té, qui non - seulement excluent
« tout soupçon d’autre volonté que de la sienne, mais
« qui donnent à ses dispositions le caractère d’une vo« lonté bien concertée, et dont la fermeté et l’autorité
« doivent établir le repos des familles que ces disposi« tions peuvent regarder. »
Il est vrai que l’observation de Dom at, que l’on vient
de rapporter, est placée dans son ouvrage sous le titre
des formalités des testamens : mais le principe qu’il établit
est général ; il parle de toutes sortes d’actes, et ce n’est
que l’application du principe qu’il en fait aux testamens.
L a preuve en est dans ce qu’il dit que les form alités des
actes ri ont été inventées que pour les rendre valides,
c e s t - à - d i r e , pour f a ir e q u ils aient leur effet. D ’un
autre côté, lorsqu’il ajoute, à l’égard des testamens, qu’il
y a nécessité qu’un acte sérieux et important soit accom
pagné des preuves de la volonté, qu’il fait résulter de
l’observation des formalités, quel acte plus sérieux et
plus important que celui qui exclut un individu de la
société, et qui attribue à des tiers les droits qu’il a déjà
et qu’il pourroit avoir à l’avenir; qui enfin intervertit
l’ordre des successions dans les familles ? quel acte par
conséquent où il soit plus indispensable de garder les fo r
malités , q u i ri ont été inventées que pour rendre les actes
valides, cest-à -d ire, p o u rfa ir e q u ils aient leur effet.
Si donc l’acte de vêture et celui de profession sont in
valides , s’ils sont n uls, o u , cc qui est la même chose,
s’ils sont censés n’avoir jamais existé, comme nos lois
exigent impérieusement une profession écrite où l’on ait
�( I9 )
.
observé les formalités qu’elles prescrivent, on ne peut pas
argumenter d’une profession tacite par la résidence sous
l’habit monacal qu’eût pu faire Dancette dans le monas
tère , quelque longue qu’eût pu être cette résidence.
L ’ordonnance de M oulins, celle de 1687, et la décla
ration de 1736? n’admettent d’autre profession que celle
qui est faite dans un acte par écrit, revêtu de toutes les
formalités; en un m ot, c’est une maxime générale en
France qu’on n’y reconnoissoit point de profession tacite.
C’est ainsi que s’en expliquent tous nos canonistes : l u ...
G alliâ minime prorsùs admittitur nlla tacita prqfessio,
dit le père Cabassut; et après lui tous nos autres cano
nistes , et entr’autres d’Héricourt et Rousseau-Lacombe,
s’en expliquent de même ; et c’est ce qui a été cons
tamment jugé par les arrêts.
Ces arrêts l’ont ainsi jugé; bien que celui qui opposoit V,
la nullité ou qui réclamoit contre ses vœux eût demeuré
d ix , vin gt, trente ans et même plus dans le monastère
et sous l’habit religieux. D e là l’axiome du droit canon :
L ’habit ne fait pas le m oine, Habitas n o n fa c it rnonac/ium j ce que les canonistes expriment encore en d’autres
termes : L e capuchon ne fait pas le m oine, mais la pro
fession, Cuculla non fa cit m onachum , sed prqfessio.
On trouve les arrêts qui l’ont ainsi jugé dans presque tous
les arrêtistes : on peut citer en particulier celui du 28 mai
1603, rapporté par M . Bouquier, dans l’espèce duquel
il y avoit vingt-huit ans de résidence dans le cloître, sous
l’habit monacal ; mais surtout on doit remarquer l’arrêt
du Journal des audiences, du 16 juillet 16 5 7, rendu 011
faveur de Christine de Haro contre son frère. E lle avoit
C 2
�ÿ 'ÿ d k û n ÿ A /l J * A j L û t \ 4
—
£ lühh;6& f e A u U iu .i'jà ^ '
( 2Q )
résidé pendant trente ans dans le monastère de la'Saalle,
Û&<v3vT^( ‘AA^dépendant de l’ordre de Gluny, toujours sous l’habit de
religieuse; il y avoit de plus contr’elle cette,circonstance
a^
.
que dans plusieurs actes capitulaires où elle avoit assisté
^
y avoit pris la qualité de professe : son frère oiï’r oit
même la preuve du vœu et de la profession, et il avoit
$• Imjvj
obtenu monitoirp à cet effet. Cependant elle fut
admise au partage des successiojQS de ses père et mère.
iftfo*
L ’arrêt fut rendu en grande connoissan.ce de cause, après
(U-viu^ ¿f/lvJùuy?l’instruction qui suivit un appointement.
f
Parmi beaucoup d’autres arrêts semblables qu’on pour^ ' //
voit citer, et dont quelques-uns sont- même rappelés dans
}es Mémoires du clergé, il y en a surtout un bien remar)(,
~
quablc, en ce qu’il a été rendu pour cette province, et
*4usM'\
p OUr une profession qui avoit été faite dans le couvent
'
(u S Î c^cs c01' ^ ^ de cette ville. En voici l’espèce.
/ ' T
Pierre de Pannevert de la Rocliette avoit pris l’habit
.religieux dans le couvent des cordeliers de Riom. Son
acte de vêture étoit du 3 août 1690, et il avoit fait pro
fession le 6 août 16 9 1, après un an et quelques jours de
<noviciat. Quelques années après il avoit déserté le monas
tère ; il fut lieutenant au régiment d’Orléans; il fut ensuite
interprète dans les ordres du M ont-C arm el et de SaintLazare, écuyer du duc de la Force; et, dans tous les actes
qu’il avoit faits. il avoit toujours pris le nom de Pierre de
;Pannevert, écuyer ou chevalier,.seigneur de la R o c li e t t e .
; Il se maria en 1729 avec la demoiselle Mansion, et ne prit
d’autre qualité que celle d’écuyer, sieur de lu Hochette.
Il mourut sans enfans eu 1743 .
Un an après sa m ort, sa vCuve fit assigner au clmtelet
�"
C
)
le sieur de Panne vert, frère du'défiint’, pour voir ordonner
l’exécutioir d’ une donation [réciproque’ de tous les biens
du prédécédé en faveur du* survivant/ portée par leur
contrat de mariage.
' On lui opposa que le mariage n’avoit pu produire
aucun effet c iv il, parce que Pierre de Pannevert étoit
engagé par des vœ ux en religion dès l’année 1692.
11 y eut appel comme çl’abus du mariage, interjeté par
M . le procureur général ; et le frère du défunt adhéra
à cet appel.
- '
Sur cet appel la Veuve opposa ,k nullité des actes de
vêture et de profession de Pierre de Pannevert, son mari;
Elle dit que-Pacte de'ivêture n’avoit pas été signé par
Pierre de Pannevert; que l’acte de profession n’étoit signé
qu’imparfaitement Pierre de la Rocliette, sans exprimer
le nom de famille Pannevert; qu’il y avoit plusieurs fa=milles dans la province du nom de la Rochette, et qu’une
signature impnrfaite ne valoit pas plus:qu’un défaut absolu
de signature. Elle opposa que dans 'l’acte de vêture ni
dans l’acte de profession il n’y avoit aucune signature de
parens ni d’amis. Elle disoit que tant de vices rassem blés
dans ces actes formoient autant de moyens d’abus, pai’ce
que toutes contraventions aux lo is , commises par les
ecclésiastiques séculiei's ou réguliers dans les actes de leur
juridiction volontaire ou contentieuse, étoient des abus;
qu’il n’étoit pas nécessaire que la peine de nullité fût
prononcée p a r‘la loi pour caractériser l’abus, qu’il sufiisoit que ce qu’elles ont ordonné, de quelque manière que
ce soit, n’eût pas été suivi et exécuté de la part des ecclé
siastiques. On ajoutoit que les formalités prescrites par
�C 22 )
les ordonnances, pour la solennité des mariages, n’étoient
point ordonnées à peine de nullité, et que cependant les
mariages qui pèchent dans l’une ou dans plusieurs de ces
formalités étoient abusifs, et jugés tels journellement par
les arrêts.
Tels furent les moyens, sur lesquels fut rendu l’arrêt
du 16 mai 1746, par lequel il fut dit qu’il n’y avoit point
d’abus dans le m ariage, et qu’il y avoit abus dans la pro
fession de Pierre de Pannevert. On a recueilli cet arrêt,
l’espèce et les moyens sur lesquels il fut rendu, dans le
traité de la mort civile, de Riclier ; et il est encore rappelé
dans le Répertoire de jurisprudence.
Il y a sur cet arrêt une observation qui n’échappera pas
au tribunal, c’est quependant cinquante^-un ans qui s’étoient
écoulés depuis la profession de Pierre de Pannevert en
1692, jusqu’à sa mort en 1743, il n’y avoit jamais eu de
sa part aucune réclamation contre ses vœ ux; et par con
séquent ce ne fut que sur la nullité des actes de vêture et de
profession, que l’arret prononça qu’il y avoit abus, quoique
la nullité opposée ne fût pas prononcée par les lois, mais
parce qu’on jugea l ’invalibilité des vœux par l’inobservar
tion des formalités.
Il y a donc entre l’espèce présente et celle de l’arrêt de
1746, des rapports sensibles et même encore plus frappans.
Point de signature dans l’acte de vêture, point d’acte capitulaire qui ait autorisé ni l’entrée au noviciat, ni la profes
sion ; point de présence ni de signature de parens ou amis,
ni même d’aucun témoin, et la présence et la signatui'e des
témoins est une formalité indispensable pour donner aux
actes qui doivent être publics l’authenticité, et dont le défaut
�( 23 )
est même une nullité prononcée par les ordonnances. P oint
d’expression des qualités des père et mère. Il y a même une
autre nullité qu’on n’opposoit pas dans l’affaire de Pannevert , c’est celle qui résulte de ce que Pacte de profession
se trouve écrit en latin : il est vrai que celui-de Pannevert
étoit également en latin; mais la nécessité de l’écrire en.
français n’avoit pas été établie par l’ordonnance de 1667,
au lieu qu’elle fut prescrite par la déclaration de 1736 >
postérieure à la profession de Pannevert, mais antérieure
à celle de Dancette.
Les actes de vêture et de profession de Dancette abondent
donc de nullités par le défaut d’observation des formalités;
maison va présenter une autre nullité qui tient directement
à la substance dès vœux.
Seconde ^nullité.
L e droit canonique, comme le droit civil, déclare nuls
tous les actes qui sont l’effet de la crainte ou de la violence ;
mais surtout la profession en religion exigé la plus parfaite
liberté dans les personnes qui l’embrassent : de là la récla
mation autorisée par le concile de Trente et par l’ordon
nance de Blois, contre les vœux de religion forcés par la
crainte ou la violence.
Il est vrai cependant qu’en g én é ra l, et le concile et
l’ordonnance exigent que la réclamation soit faite dans les
cinq ans; mais, suivant tous les canonistes etla jurisprudence
constante des arrêts, et comme le disent les Mémoires du
clergé , tome 4 > pages 208 et 289, a les cinq ans donnés
« à ceux qui sont entrés par force .'dans les monastères ,
« pour réclamer contre leurs vœ u x, ne doivent point être
�( 24 )
« expliqués précisément de cinq ans après la profession ,
cc sans avoir égard aux circonstances et empêcliemens qui
« n’auront pas laissé la liberté de réclamer; mais on doit« les entendre'de cinq années utiles, qui sont comptées du
« jour que la violence a cessé, et que celui qui a été forcé
a à faire profession a pu agir pour se faire restituer. »
t D ’un autre côté, il n’est même pas nécessaire que l’action
en réclamation ait été ex'ercée dtms les cinq ans utiles après
que la violence a fcessé; il suffit qu’il y ait eu des protesta
tions de la part de celui qui veut réclamer : c’est encore le
principe enseigné par tous les auteurs. Il suffit de citer
d’H éricourt, titre de la réclamation contre les vœux ,
article XIII. « Quoique le religieux, dit cet auteur, qui
« veut réclamer contre scs vœ ux, soit obligé de proposer
« ses moyens au supérieur, et à l’ordinaire dans les cinq
cc ans de sa profession, il n’est pas nécessaire qu’il fasse des
« poursuites dans lo même temps pour être relevé, ses pro « testations conservant le droit qu’il a de demander à ren-i
« trer dans le siècle, p o u r v u qu’il n’ait pas laissé écouler
cc depuis un assez grand nombre d’années, pour qu’il soit
« censé avoir ratifié tacitembnt sa profession, »
Pour appliquer ces principes,'nous''-avons ¿ 'é ta b lir,
i° . que les vœux de Danceltc ont été'l’eiïet de la crainte et
de la violende; 2°. qu’il a pTotcstë dans un temps utile ,
pendant et après que la violence et la crainte ont cessé;
3 ° . qu’il a exercé son action en réclamation et n u l l i t é des
v œ u x , dans un temps prochain de Ses d e r n iè r e s protesta
tions. Trois articles 'qui doivent justifier pleinement la
«mtenec de l’oiïicialité, qui a déclaré nuls les actes de veture
cl de p ro fe s s io n , et qui l’a renvoyé au siècle.
A r t ic l e
�C 25 )
A
r t i c l e
p r e m i e r
.
En l’officialité, Dancette avoit mis en fait la violence et
la crainte qui avoient forcé son entrée dans le monastère
de Cluny : il en avoit offert la preuve par témoins-, mais
il en avoit de plus rapporté des preuves écrites, et ces
preuves écrites furent jugées suffisantes, sans être obligé
de recourir à la preuve par témoins ; et ce m otif joint
d’ailleurs aux nullités des actes de vêtureetd c profession,
déterminèrent la sentence de l’officialité à prononcer la
nullité et le renvoi au siècle. Ces mêmes preuves écrites
furent présentées au parlement sur l’appel comme d’abus;
et elles sont d’autant plus évidentes que les actes qui les
renferment procèdent du fait même des personnes qui sont
aujourd’hui nos seules parties dans la tierce-opposition à
l’arrêt du parlement de Paris.
11 faut ici se rappeler le procès jugé en la sénéchaussée
du Puy et au parlement de Toulouse , entre les parens
collatéraux de Dancette , paternels et maternels : procès
dans lequel les parens paternels firent déclarer nul le tes
tament d’André Dancette qui avoit donné tous ses biens
à Marie Hobin sa femme, et se iircut envoyer en posses
sion des biens d’A n d ré Dancette, père de Jean-Jacques
Dancette.
Quels étoient les parens paternels parties dans le procès?
C ’étoit André F au gier, Françoise Faugier sa sœ ur, et
Massadier son mari. Quelles sont aujourd’hui nos parties
adverses? C’est la même Françoise Faugier, et Massadier
son m a ri, qui agissent non - seulement ¿en leurs noms ,
mais encore comme ayant les droits d’Anne Faugier.
D
�( *6)
Dans le procès en la sénéchaussée du P u y , et au par
lement de Toulouse, Annet Faugier, sa sœur, et Massadier son mari, étoient entrés dans les plus grands détails
sur la conduite de Marie R obin, mère de Dancette, pour
faire passer à ses propres héritiers tous les biens de son
m a ri, au préjudice des héritiers de celui-ci ; et ils s’étoient expliqués on ne peut pas plus clairement sur les
violences exercées contre Jean-Jacques Dancette et sa
sœ ur, pour les forcer à pi’endre l’état religieu x, dans’
deux mémoires imprimés et signifiés au parlement de
Toulouse : mémoires qui ont été heureusement consei'vés.
Dans le premier de ces mémoii’es, signifié le 7 avril 1789,
api'ès avoir dit que du mariage d’André Dancette et de
Marie Robin étoient issus trois enfans, du nombre des
quels étoient Jean-Jacques et Marguerite Dancette, voici
comment ils s’expliquoient sur les moyens employés par
M arie R o b in , pour obliger ces deux derniers enfans à
prendre l’état religieux :
« Le sieur André Dancette étoit d’un caractère timide
« et foible, se laissant aisément conduii'e et subjuguer par
« ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lu i; il fut
« marié avec la demoiselle Marie R o b in , femme d’un
« caractère difficile , acariâtre , .im périeux, exigeante,
« n’aimant rien qu’elle-même.
« Il provint de cette union trois enfans, Claude Dan« cette, avocat, qui décéda en 1767, Jean-Jacques et
« Marguerite D ancette, qui furent forcés d’embrasser
« l’état monastique, ne pouvant plus supporter l’humeur
« difficile, les tracasseries et les mauvais traitemcns de
« leu r m crc.
�( 27 )
« Après avoir forcé ses enfans à faire profession, l’un
« dans l’ordre de Cluny , l’autre dans le couvent des
« ursulines, il ne manquoit à la demoiselle R obin, pour
« être au comble de ses v œ u x , que de se revêtir des
« dépouilles de ses enfans, etc. »
Dans un autre mémoire im prim é, en réponse à celui-ci,
que firent signifier les héritiers de la demoiselle R obin,
qui soutenoient la validité du testament par lequel elle
avoit été instituée héritière d’A ndré Dancette son mari,
ils se récrièrent contre les imputations qu’on faisoit à la
mère contre ses enfans, et traitèrent de fable et de calom
nie le reproche qu’on lui faisoit d’avoir par ses mauvais
traitemens forcé deux de ses enfans à embrasser l’état
religieux.
Mais comment André Faugier, sa sœur, et Massadier
Son mari répondix-ent - ils à ces dénégations , dans un
second mémoix-e signifié le 3 juin 1789. Il faut encore
rappeler les termes de ce second mémoire.
« O u n’a pas calomnié la demoiselle R o b in , quand
« on a dit qu’elle avoit forcé ses enfans à faire profes« sion dans l’état monastique. Gomment les adversaires
« peuven t-ils soutenir le contraii*e ? eux qui ont été
« témoins, ainsi que tous les habitons de la ville de
çc Beauzat et des envii’ons, des repi-oches que le religieux
« Dancette a faits à la demoiselle R obin, d’avoir contrarié
« ses goûts et son inclination décidés pour le commerce.
« Les tentatives inutiles de ce religieux, sa conduite, sa
« .fu ite, ne pi’ouvent que trop l’aversion qu’il a toujours
« eue pour un état que sa mère lui fit embrasser malgré
P lui, ?»
D 3
�( 28 )
Qui est-ce donc qui a tenu ce langage? Ce sont ceuxlà même qui aujouixl’hui attaquent les jugemens qui ont
annullé des vœux formés par la crainte, par la violence
et par les mauvais traitemens, qui, de leur propre aveu,
avoient forcé l’entrée en religion de Jean - Jacques
Dancette.
V oilà donc la preuve par écrit, et la preuve la plus
irrécusable, puisqu’elle est sortie de là bouche des adver
saires de D ancette, et qu’ils l’ont rendue d’autant plus
éclatante dans des mémoires im prim és, que les vœux
de Dancette n’ont pas été libres, qu’ils n’ont été que
l’effet de la crainte et de la violence.
Après des aveux si formels dans des mémoires imprimés
et signifiés, et qui furent produits au parlement de Paris,
sur l’appel comme d’abus, comment le parlement auroit-il
pu ne pas dire qu’il n’y avoit pas d’abus dans la sentence
de l’officialité qui avoit déclaré nuls les vœux de Dancette,
e t l’avoit l’envoyé au siècle? et comment, encore aujour
d'hui, s’il pouvoit être question de prononcer de nouveau
sur l’appel comme d ’a b u s , nos adversaires pourroient-ils
sans impudeur i-ejeter la preuve qu’eux-mêmes nous ont
fournie dans leurs mémoires imprimés et signifiés, qui
tiennent une place intéressante dans les productions de
Dancette.
A
r t i c l e
II.
On a vu ci-devant qu’il est de principe que les cinq
ans accordés pour réclamer contre des vœux qui sont
l’elfet de la crainte et de la violence, ne commencent a
courir que du jour où la crainte ou la violence ont cessé.
�( 29 )
Mais la crainte et la violence n’ont jamais cessé. .D’abord
ces motifs ont toujours subsisté jusqu’à la mort du fils
aîné Dancette : c’étoit l’envie d’enrichir ce fils aine aux
dépens des autres enfans, qui avoit excité les mauvais
traitemens de la mère et du père , qui forcèrent leurs
enfans à prendre l’état religieux.
Après la mort de ce fils aîné, la m ère, qui voulut sc
rendre maîtresse des biens de son m ari, auroit eu de justes
sujets de ..craindre de ne pas réussir dans son p ro jet, si
elle n’eut pas entretenu son mari dans les sentimens de
haine qu’elle lui avoit inspii'és et fait partager avec elle,
contre ce fils malheureux qu’on avoit entraîné dans la
captivité d’un cloître, la réclamation n’eût fait encore
que confirmer et envenimer la haine. L e fils sortant du
cloître se seroit trouvé sans ressource, et sans asile dans la
maison paternelle : ainsi la mère eut toutes les facilités
que son ascendant et son empix-e sur son rnax’i pouvoient
lui donner pour se faix*e instituer Iiéritièi’c univei’selle
dans son testament ; et aussitôt après la mort de soxi mari
elle se mit en possession de sa succession.
Cependant, long-temps avaxxt la mort du pèx’e , dès
176 1, le fils avoit fait des protestations pax’devant notaires,
qu’il avoit renouvelées en 1769 et en 1771. M ais, son
père m ort, il espéra trouver grâce auprès de sa mère. 11
n’hésita pas dès ce moment à déserter le monastère et à
quitter l’habit monacal. Tous ses efforts, toutes ses solli
citations auprès desam ère furent inutiles, et il fut obligé
d’errer cà et là chez des pareils ou des amis compatissans
et sensibles à ses malheurs, toujours pourtant renouvelant
ses protestations en 1776, en 1781 et en 1786.
�( 3° )
Mais sa m ère, depuis la mort de son fils aîné, avoit
tourné toutes ses affections du côté de ses parens et de
deux de ses neveux, l’un desquels par son testament elle
lit son héritier universel, laissant à l’autre un legs consi
dérable par un codicile. Touchée sans doute de quelque
rem ords, elle ne fit le legs d’un domaine venu du patri
moine du père, à un de ses n eveu x, qu’à la charge d’en
laisser la jouissance à son fils; e t, ce qui est surtout à
remarquer, c’est que dans ce dernier acte la mère étoit si
pénétrée de la nullité des vœux de son fils, qu’elle ne le
qualifie pas de religieux, mais bien de prêtre sécularisé.
Elle eut encore la précaution qu’elle avoit déjà fait pren
dre dans le testament du p è re , de faire faire une insti
tution particulière en fa y eu r du fils, de faire elle-m êm e
une pareille institution dans la jouissance du domaine
dont la propriété fut donnée à son neveu par son codicile;
institution particulière, qui ne put être faite que dans
la prévoyance que le fils pourroit un jour faire déclarer
la nullité de ses vœ u x, et pour, dans ce cas, ne pas vicier
scs dernières dispositions par la prétérition.
A lo rs, qui est-ce qui ne comprendra pas que jusqu’à
la mort de la mère la volonté et la liberté du fils ont tou
jours été enchaînées, que les motifs de crainte et de vio
lence n’ont cessé de subsister tant que le fils a pu craindre
que sa m ère, par des voies extraordinaires qui n’échap
pent pas à la haine, le privât de toute ressource et de touÇ
secours pour réclamer les biens de son p è re , qu’elle s’étoit
fait donner par un testament, testament que le fils ne
çonnoissoit que par la voie publique, sans q u ’il en eût
jamais eu une connoissance particulière qui pût l’instruire
�( 31 )
des moyens par lesquels il pouvoit attaquer ce testament.
M ais, même encore après la mort de sa mère, il renou
vela ses protestations en 1785. Il fit plus encore; il se
mit en possession de tous les biens de son père , sans
éprouver aucune opposition de la part de ses parens ni
paternels ni maternels, et sans même qu’il se crût obligé
de réclamer contre ses vœ ux, qu’il de voit regarder comme
absolument nuls, non pas seulement parce qu’ils étoient
l’effet de la crainte et de la violence, mais parce que
tous les actes qui auroient pu les rendre valables étoient
frappés de nullité par l’inobservation des formalités né
cessaires pour les rendre valides.
Cependant ayant dans la suite été informé des contes
tations qui s’étoient élevées en la sénéchaussée du P u y ,
et au parlement de Toulouse, entre les Robin et les
Faugier, les premiers demandant la validité du testament
d’Audré Dancette, et les Faugier demandant la nullité
de ce testament, qui avoit été en effet ordonnée par la
sentence de la sénéchaussée du P u y , et par l’arrêt confirmatif du parlement de Toulouse, Jean-Jacques Dan
cette , pour se mettre à l’abri des contestations qu’à la
faveur de ces jugemens on pourroit lui élever pour le
dépouiller des successions de ses pèi’e et m ère, il prit
le parti de se pourvoir à l’officialité du diocèse de Màcon ,
pour faire prononcer la nullité de ses vœux.
Ainsi on croit avoir établi la seconde proposition ,
que Dancette avoit protesté dans un temps utile, puis
que ses protestations avoient non - seulement précédé ,
mais même suivi immédiatement le temps où la crainte
et la violence avoient pu cesser.
�C 32 )
A
r t
. III.
E n fin, il avoit exercé l’action en réclamation et en
nullité dans un temps prochain de scs dernières pro
testations.
On a vu ci-devant, dans les Mémoires du clergé, que
les cinq ans dans lesquels doit se faire la réclamation,
ne courent que du jour où la crainte ou la violence
ont cessé.
On a vu également dans d’H éricourt, qu’il n’est pas
nécessaire d’exercer l’action en réclamation dans les cinq
ans, pourvu que dans ce temps il ait été fait des pro
testations, et que ces protestations conservent l’action,
si depuis les protestations on n’a pas laissé passer un
assez grand nombre d’années, pour qu’on ne soit pas
censé avoir ratifié tacitement la profession.
D ’après ces principes, quand même la nullité des
vœux n’eût été fondée que sur la crainte ou la violence,
abstraction faite de l’invalidité des actes de vêture et de
profession par l’inobservation des form alités, l’action
de Dancette scroit venue à tem ps, puisqu’elle lui avoit
été conservée par ses actes de protestation , dont le
dernier n’étoit pas antérieur de cinq ans à l’action
en nullité. La dernière protestation étoit du i 5 avril
178 5, et l’action en nullité fut exercée au mois de
mars 1790. D ’ailleurs, cette dernière protestation avoit
été précédée de plusieurs autres, dans l’intervalle des
quelles il ne s’étoit jamais écoulé cinq ans. Enfin, n’étoit-ce pas une protestation continuelle de la part de
Daricelte,
�C 33 )
Dancette, d’avoir, d’abord après la mort de son père,
abandonné le monastère, et quitté l’habit monacal, et
de s’être, après la mort de sa m ère, mis en possession
des successions paternelle- et maternelle ?
On se persuade donc d’avoir établi invinciblement
les trois articles annoncés pour prouver la seconde
nullité. i°. On a établi que la profession en religion de
Dancette a été reflet de la crainte et de la violence ;
et toutes les lois civiles et canoniques déclarent nuls les
actes qui ne sont pas faits dans une parfaite liberté. z°. On
a prouvé que Dancette avoit protesté dans un temps
u tile, avant et après les cinq ans où la crainte et la
violence avoient cessé. 30. O n a encore prouvé que
l’action avoit été exercée dans les cinq ans de sa der
nière protestation, précédée de plusieurs autres qui
toutes avoient continué de conserver son action.
Mais on avoit encore aupai*avant établi une première
nullité par l’inobservation des formalités dans les actes
de vêture et de profession.
; T out concourt donc à justifier la disposition de la
sentence de l’ofïicialité qui avoit déclaré nuls les actes
de vêture et de profession de Dancette, et l’avoit renvoyé
au siècle. T out démontre qu’il n’y avoit pas d’abus dans
cette sentence , et que déjà n’eût-il pas été fait droit
au parlement sur l’appel comme d’abus, et pût-il être
q u e s tio n de le juger de nouveau, les appelans ne pourroient pas attendre du tribunal d’appel un jugement dif
férent de celui qui fut prononcé par l’arrêt du parle
ment. Mais alors quel avantage 11e peut-on pas se pro
mettre de la fin de non-recevoir contre la tierce-oppo^
silion ?
17
�C 34 )
Seconde proposition.
Quels sont les tiers-opposans ? C’est Françoise Faugier,
et M a s s a d ie r son mari. A quel titre se présentent-ils
pour former la tierce opposition ? C’est d’abord au nom
d’André Faugier dont ils disent avoir les droits. Mais
A ndré Faugier étoit partie dans la sentence de l’oilicialité et dans l’arrêt du parlement.
Sous ce premier rapport-, et comme cessionnaires
d’André F augier, Françoise Faugier et son mari sont,
constamment non-recevables dans la tierce-opposition.
L ’article II du titre X X X V de l’ordonnance de 1667 ne
permet la tierce-opposition contre les arrêts et jugemens
en dernier ressort, qu’à ceux qui n’y ont pas été parties :
or, A n d ré Faugier avoit été partie non-seulement dans
la sentence de l’oilicialité, mais encore dans l’arrêt du
parlement. Ainsi la tierce-opposition q u ’ il a u r o i t formée
l u i - m ê m e sevoit é v i d e m m e n t non-recevable ; et elle l’est
également contre Françoise Faugier et son m ari, q u i, à
cet égard, n’ont pas plus de droits que leur cédant.
Eussent-ils même obtenu la cession d’André Faugier
avant l’arrêt auquel ils forment la tierce-opposition , ils
y seroient également non-reccvables, étant de principe
que les successeurs et ayant-cause de ceux qui ont été
parties dans les jugemens en dernier ressort ne peuvent
pas plus qu’eux y former tierce-opposition. C ’est ce que
tous les auteurs et les praticiens nous e n s e i g n e n t , et ce
qui a élé jugé par une infinité d’arrêts : on en trouve
jusqu’à onze dans Deuizart et dans le Répertoire de juris-
�C 35 )
prudence,'qui ont été recueillis dans les arretistes. C’est
la faute de l’acquéreur ou du-cesSionnaire de celui contre
lequel a^été'rendu le jugement contradictoire en dernier
'ressort, de n’avoir pas fait^connoître sa vente ou sa cession,
et de 11’étre pas intervenu.
S’il en est ainsi lorsque'la vente ou la cession est anté
rieure au jugement, à plus'forte raison doit-il en être de
même lorsqu’elle est postérieure.
«
■ La fin de non-recevôir du chef d’André Faugier doit
même paraître d’autant plus accablante, que l’arrêt du
parlement fut rendu de son consentement : c’est ce que
l’on voit dans le contexte même de l’arrêt.
Ce n’étoit d’abord que les R obin, parens maternels de
Dancette', qui avoient interjeté l’appel comme d’abus de
la sentence de l’oiliciâlité ^mais sur cet appel ils avoient,
en vertu d’une commission , assigné André Faugier au
parlem ent, pour se joindre à eux dons'leur appel, et à-fin
d’arrêt commun. O r, nous voyons dans l’arrêt qu’Andro
Faugier avoit donné une*requête par laquelle il avoit
conclu à ce que les R obin fussent déclarés non-receVables dans leur demande en déclaration d’ arrêt com
mun par eu x form ée contre M *. ylridré F a u g ier, ou
en tout cas et subsidiairement seulement qu'ils en fu s
sent déboutés. On ne pouvoit pas un consentement plus
formel de la part d’André Faugier à la sentence de l’ofiicialité , et un aveu plus précis qu’il n’y avoit pas
d’abus danscette sentence : aussi l’arrêt qui intervint et
qui jugea qu’il n’y avoit pas d’abus, ne condamna pas
seulement les Robin aux dépens envers Dancette, il les
y condamna également envers A ndré Faugier.
°
e
2
�C 36 )
Il seroit donc impossible de
refuse^ à l’évidencc des
fins de non-recevoir,;contre la, tiercer opposition que
Françoise Faugier et Massadier son mari ont formée du
chef d’A ndré Faugier, et comme cessionnaires de ses
droits.
Mais cette tierce-opposition a encore été formée du
chef de Françoise F augier, en son nom propre et per
sonnel , sous le prétexte qu’étant elle-m êm e héritière
d’A ndré Dancette par la profession en religion de son fils,
elle auroit dû être appelée soit en l’oflicialité , soit au
parlement sur l’appel conjme d’abus de la sentence de
l’oiFicialité.
• .
Il y a tx-ois réponses à cette objection.
i°. Il n’est pas exact de dix’e qu’il faille que celui qui
demande la nullité, ou qui réclame contre ses vœ ux, soit
obligé d’assigner sur sa demande ceux de ses parens qui
sont directement intéi’essés à ce que sa profession subsiste.
Il n’y a absolument aucune lo i, ni canonique, ni civile,
qui exige cette nécessité. On pi’oposoit néanmoins la même
objection lors d’un arrêt du mois d’avril i 665 , rapporté
par M . de Catelan ; et voici ce qu’on y répondoit : « Une
« religieuse, par sa profession et scs vœ ux, n’est engagée
« qu’à D ie u , dont les intérêts et les droits résident dans
« la communauté qui l’a reçue, et à laquelle on laisse le
« soin de les ménager et de les défendre. Ainsi on n’a
« point dû y appeler son frère, qui n’y a qu’un intérêt
« bien moins considérable en comparaison, cl à rognr« der la vraie importance des choses; un intérêt d’ailleurs
« accessoire, et qu’on nomme un intérêt per cotise« <jucni ¿as; tout comme, selon nos arrêts, les seigneurs
�( 37 )
« ne sont point appelés à l’entérinement des lettres de
« grâce, quoique intéressés aux condamnations*, et tout
**«~commeT.es' sü]Tsfîriîes^iTé*'sonf^Toîiit appelés ^dans^ des
« procès ou il s’agît de Îa validité ôîTmvâîidité des nïa« riages, et dont l’événement peut servir d’obstacle ou
« d’ouverture à la substitution. Aussi la chose fut-elle
c< décidée de même dans le cas pareil d’un frère non
« appelé à la fulmination du rescrit obtenu par la sœur
cc qui réclamoit contre ses vœ ux, par l’arrêt du 30 mars
« i 65 i , qui déclara n’y avoir point d’abus dans la sen
te tence de l’ofïicialité de M ontauban, qui avoit fulminé
« le rescrit sans appeler le frère. »
Ce que l’on vient de rappeler de Catelan est répété par
les auteurs du Répertoire de jurisprudence, au mot P r o
fe s sio n , où ils disent que n’y ayant aucune loi canonique
ni civile qui exige la nécessité d’appeler les parens, il est
ù croire.que l’inobservation de cette formalité ne scroit
pas regardée comme abusive.
2°. Si on étoit obligé d’appeler les parens, au moins
ne seroit-ce que ceux qui seroient alors directement inté
ressés à ce que la profession subsistât. Mais Françoise
Faugier , h l’époque de la demande en nullité et de la
réclamation de Dancette, n’avoit pas droit à la succession
du père de Dancette. A la vérité elle étoit sa nièce; mais
elle ne pouvoit venir à la succession que par représenta
tion d’Anne Dancette, sa m ère, sœur d’A ndré Dancettç,
et laquelle elle-même 11’étoit morte qu’après son frère.
Ainsi c’eût été la mère de Françoise Faugier qui auroit
succédé à André Dancette, si les vœ ux du fils n’eussent
})as été nuls.
�( 38 )
Mais Françoise Faugier, par son contrat de mariage
avec Massadier du 28 avril 17 18 , avoit renoncé à la
succession de son père et à celle de sa m ère, m oyennant
une dot qui lui fut constituée tant pour biens paternels
que maternels, et dans laquelle il fut distingué ce qui
lui étoit donné pour cliaque-espèce de'biens. 'Par con
séquent1sa mère auroit eu recueilli la succession d’André
Dancette son frère, si les vœux du fils eussent été vala
bles ; et cotte succession auroit fait partie de celle d’Anne
Dancette, mère de François Faugier, à. laquelle elle avoit
renoncé. Donc a lo rs, et au temps où Jean-Jacques
Dancette avoit demandé la nullité et réclamé contre ses
vœ ux, Françoise Faugier n’avoit aucun intérêt à ce que
la profession de Dancette subsistât. IL n’eût donc pas été
nécessaire, pour former la demande en nullité et en récla
mation , d’y appeler Françoise Faugier.
3°. On croit avoir prouvé que quand les choses seroient
entières, et qu’il s’agiroit de prononcer de nouveau sur
l’appel comme d’abus, étant d’ailleurs démontré qu’il
n’y a point d’abus, la nullité des actes de vêture et de
profession se trouvant évidente par l’inobservation des
formalités prescrites par les lois, et d’ailleurs n’ayant été
que l’eiTet de la crainte et de la violence, la tierce-oppor
sition seroit sans objet, puisqu’il faudroit toujours déclarer
la nullité des vœux. A quoi donc pourroit servir la tierceopposition ?
]] doit donc paroître démontré que Françoise Faugier
et Mnssadier son mari sont non-recevables dans leur tierceopposition du chef de Françoise Faugier, soit parce qu’en
général aucune loi civile ni canonique n’exige d’assigner
�( 39 )
les parens sur les demandes en nullité des vœux, soit parce
que si cela étoit nécessaire, ce ne pourroit être que pour
les parens qui au moment de la demande en nullité
auroient un intérêt présent à ce que les vœux subsistassent,
et qu’à cette époque Françoise Faugier ne pou voit pas
avoir cet intérêt, parce qu’elle avoit renoncé à la.succession
de sa m ère, et par conséquent ne pou voit pas la repré
senter dans celle d’André Dancette; soit parce qu’enfin
ou ne pourroit jamais empêcher que les vœux de Dan
cette ne fussent déclarés nuls.
Mais Françoise Faugier n’avoit renoncé qu’à la succes
sion de sa m ère, et non aux successions collatérales de
l’estoc ni paternel ni maternel. Sa renonciation aux suc
cessions directes avoit profité à Claude et André Faugier
ses frères : or, Claude ayant laissé un fils qui est ensuite
décédé sans postérité, Françoise Faugier la tante a dû lui
succéder conjointement avec André Faugier son autre
frère ; c’est une succession collatérale dans laquelle elle a
dû trouver la moitié de la portion que Claude Faugier
et son fils après lui auroient eue dans la succession d’André
Dancette; et si le fils de Claude Faugier avoit dû être
appelé dans la demande en nullité et réclamation contre
les vœux, la tierce-opposition du chef du fils de Claude
Faugier, que Françoise Faugier représente, devroit être
accueillie.
D ’abord cette objection se réfuteroit par ce qu’on a
déjà v u , qu’il n’y a aucune lo i, ni canonique, ni civile,
qui exige d’appeler les parens dans les demandes en n u l l i t é
ou en réclamation contre les vœux; mais d’ailleurs le [ils
de Claude Faugier s’est trouvé partie dans l’arrêt du par
�( 40 )
lement clc Paris, dans la personne d’André Faugier, son
oncle et son tuteur.
Il est vrai qu’on a répondu à cela qu’André Faugier,
lors de l’arrêt, ne pouvoit pas figurer pour son neveu,
jvirce que la tutelle avoit cessé au moment de la puberté
que le mineur avoit acquise à cette époque, ayant accom
pli sa quatorzième année au mois de mars 1790, c’est-àdire, quelques mois avant l’arrêt du mois d’octobre de
la même année.
Mais comment Jean-Jacques Dancette, qui avoit été
* si long-tem ps éloigné de sa fam ille, a u ro it-il pu être
informé de l’âge du fils de Claude Faugier, tandis surtout
q'u’André Faugier procédoit lui - môme en qualité de
tuteur ? et s’il n’avoit plus cette qualité, ne devoit-il pas
cesser de la prendre, et en instruire Dancette ? Si luimême aujourd’hui proposoit cette objection, pourroit-il
y être recevable, lui qui auroit induit Dancette en erreur?
est-elle donc plus proposable dans la bouche de Françoise
Faugier et de Massadier son m ari, qui se présentent
comme cessionnaires d’André Faugier ? ne pourroit-on
pas même ajouter qu’André Faugier n’avoit cessé dêtre
tuteur jusqu’au moment de l’acte par lequel son neveu
lui signifia qu’il avoit atteint sa puberté, et qu?il s’étoit
choisi un curateur?
11 faut enfin toujours en revenir à cette vérité, qu’aucune
loi canonique ou civile n’exige la nécessité d’appeler les
parons; et il ne faut pns non plus perdre de vue que la
lierce-opposilion seroit sans objet, puisqu’il faudroit tou
jours p r o n o n c e r la nullité des vœ ux, soit a cause q u ils
nV’ Loient que l’oit et de la violence , soit parce que les
actes
�C41 )
actes de vêture et de profession n’avoient pas été revetus
des formalités prescrites par les ordonnances, soit enfin
parce que les protestations avoient conservé l’action en
réclamation qui fut exercée dans les cinq ans de la ces
sation de la crainte et de la violence.
Une autre fin de non-recevoir se tire de l’approbation,
de la sentence et de l’arrêt, par l’exécution qu’en ont
soufferte tant André Faugier que Françoise Faugier et son
mari.
Déjà avant la sentence et l’arrêt, et dès l’instant de la
mort de sa m ère, Dancette s’étoit mis en possession tant
des biens de sa mère que de ceux de son père; et après
la sentence et l’arrêt il s’étoit conservé dans cette posses
sion sans obstacle de la part de ses parens, et notamment
de Françoise Faugier. Si D ancette, par la rigueur des
..décrets rendus contre les prêtres insermentés, dans les
temps désastreux de notre révolution , est mis sur une
liste d’émigrés et obligé de fuir et de se eaclier, qui est-ce
qui met la main sur les^iens de son père qu’il possédoit?
ce ne sont .pas ses parens, ce n’est point A n dré ni Fran
çoise Faugier; c’est la régie nationale qui s’empare de ces
biens, comme appartenans à un prêtre déporté ou émigré;
c’est la régie qui les met en séquesti'e et qui les afferme :
et dès l’instant que le malheureux Panpctle peut reparoître, c’est lui seul qui demande la main-levée du sé
questre, c’est à lui seul qu’elle est accordée; et ses parens
continuent et ne cessent de le laissçj* jouir.
Françoise Faugier et.sp.n mari ont prétqndu, dans leur
m ém oire, que tant que le.■¡fils de Claude Faugier avoit
yécu ç’étoit lui qui afï'ermoit les biens; mais c'est de leur
�'T 4 0
part une fausse assertion , et qui est démontrée par les
baux de ferme consentis par Dancette lui-même avant la
^ o r t du fils de Claude Fhugier. Un de ces baux, du do
m a i n e 'de la D ôrlière, est)du 4 nivôse an 4 ; un autre,
du domaine de Confolent [ est du 5 fructidor de la môme
année : et la mort du fils de Claude Faugier est posté
rieure à ces baux; elle n’est ax-rivée que le 5 complémen
taire an 5.
Quel est le moment où Françoise Faugier et son mari
imaginèrent de troubler Dancette dans une possession où
ils l’avoient laissé si paisiblement pendant p lu s i e u r s an
nées? c’èst seulement lorsqu’il a fait q u e lq u e s dispositions
“de ces mêmes biens qu’ils espéroient de x’ecueillir un jour
‘ dans sa1Succession : ce n’est donc qu’ambition et cupidité
de leur part. Toutes ces cii’constances se réunissent pour
rendre de plus en plus favorables les fins de non-recevoir
d’ailleurs bien fondées conti’e la tierce-opposition.
.Api’èstcelâ il est inutile d’observer que si Françoise
Faugier et son mari pouvoient réussir dans leur tierccopposition du chef du fils de Claude Faugier, la sentence
de l’officialité et l’arrêt du pai’lement de Paris ne devoient
' pas moins avoir tout leur effet du chef d’A n dré Faugier,
constamment partie en son nom dans la sentence et dans
l’arrêt, suivant ce que dit Jousse sur l’article X du titre
X X V Ï 1 de l’ordonnance de 16 6 7, d’après la disposition
de l’article L I de l’ordonnance de Moulins , qui porte
en effet que « Si à un jugement portant condamnation
« de délaisser un héi’itage, il survient des oppositions
« formées par des tierces personnes, néanmoins celui qui
« a obtenu le jugement sera mis en possession en laquelle
�(
4 3 ')
« étoit le condamné, sans p r é j u d i c e aux droits desdits
« opposans. »
' . .• ,
O n pourroit ici rappeler avec avantage la savante dis
sertation du jurisconsulte M erlin , aujourd’hui commis
saire du gouvernement près le tribunal de cassation , qui
se trouve dans le Répertoire de jurisprudence à la suite
des questions qui y sont traitées sur les mots V œ ux
solennels, et où l’auteur, par les plus profondes recher
ches puisées.dans les saintes écritures et dans les pères de
l’église, établit toute la faveur que méritent les demandes
en réclamation et en nullité contre les vœux. Il suiïit de
renvoyer à cette dissertation, dont on se bornera à saisir
quelques traits. « A in si, dit-il, l’intérêt des familles (dans
« cette matière ) ne doit être d’aucune considération; il
« n’entre pour rien dans la profession religieuse : ce n’est
« ni pour elles ni avec elles que l’on contracte; elles n’ont
« donc rien à. voir dans le contrat, et ne peuvent em« pêcher sa résiliation. Un religieux qui rentre dans le
« siècle est, par rapport à ses parens, ce qu’est un absent
« dont on partage la succession, dans la fausse persuasion
« qu’il est m ort, et qui reparoît ensuite. . . . P u i s q u e les
« vœux monastiques sont devenus une affaire capitale,
« c’est bien la moindre chose que les conditions requises
« pour leur validité s’observent en rigueur, etc. etc. »
V oilà sans doute qui justifie ce qu’àvoit dit D om at, que
les formalités n’ont été inventées que pour rendre les
actes valides, et pour faire qu’ils aient leur efïet; d’où
suit nécessairement la conséquence que l’inobservation
des formalités doit rendre les actes non valides et sans
effet. '
•<
�( 44 )
Il n’y a plus qu’un mot à dire sur la tierce-opposition
qu’à son tour Dancette a formée à l’arrêt du parlement
de T o u l o u s e . Il n’a pas entendu former cette opposition
sur ce que cet arrêt a annullé le testament d’André Dan
cette , son p è re , mais bien sur ce que les Faugier ont
été envoyés en possession des biens de sa succession.
Et même, à cet égard, la tierce-opposition n’eût pas
été absolument nécessaire, parce que n’étant pas partie
dans cet arrêt, il lui devient tout à fait étranger, et qu’il
n’a pu lui porter aucun préjudice ; ce principe est incon-.
testable: res intcr alios judicata, aliis neque prejudic iu m , neque emolumentum qfferre potest, L . 2 God. quib.
jud. Ce n’est donc que par exhaberance de droits, qu’il
a été formé tiërce-opposition à cet arrêt ; et la tierceopposition est recevable, dès que l’arrêt qui n’a pas été
rendu avec l u i , tendroit à le dépouiller d’un bien qui
lui appartient, et sur lequel ceux qui ont été condamnés,
pas plus que ceux à qui il a été adjugé, n’avoient aucun
droit.
O n ne peut mieux terminer ce mémoire qu’en rap
pelant encore une,fois les fiveuXjdep parties adverses, que
l ’entrée en rpligîop (Je Dancptte nîaypit ¡été que l’efl’et de
la force et de la violence^,aveux .consignés dans les deux
mémoires iftiprimés,qu’ils avaient signifiés au parlement
de Toulou-se.
P a g e & du prem ier mémoire. L e sieur D a n c e tte
çjtoit d un caractère tim id e et foible , se laissant
�( 45 )
aisément conduire et subjuguer par ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lui; il fut marié
avec la demoiselle R o b in , femme d’un caractère
très - difficile , acariâtre , impérieuse, exigeante,
n’aimant rien qu’elle-même.
Il provint de cette union trois enfans, Claude
D a n c e tte , avocat , qui décéda en 1 7 6 7 , JeanJacques et Marguerite D ancette qui furent forcés
d’embrasser l’état monastique , ne pouvant plus
supporter l’humeur difficile, les tracasseries et les
mauvais traitemens de leur mère.
Après avoir forcé ses enfans à faire profession,
l’un dans l’ordre de C lu n y , l’autre au monastère
des ursulines de M o n istro l, il ne manqua à là
demoiselle Robin , pour être au comble de ses
vœux , que de se revêtir des dépouilles de ses
enfans ; il ne lui fut pas difficile d’obtenir du
caractère foible de son époux une disposition en
sa faveur, telle qu’il lui plut de l’exiger, etc.
Page 7 du second mémoire. On n ’a pas calomnié
la demoiselle R obin , quand on a dit q u elle avoit
forcé ses enfans à faire profession dans l’état mo
nastique. Com m ent les adversaires peuvent - ils
soutenir le contraire , eux qui ont été témoins ,
ainsi que tous les habitans de la ville de Beauzat
�(46 )
et des environs, des plaintes amères, des reproches
que le religieux D an cette a faits à la demoiselle
R o b in , d’avoir violenté ses goûts et son inclina
tion décidée pour le commerce. L e s tentatives
inutiles de ce religieux, sa conduite, sa fuite et
sa position actuelle, ne prouvent que trop l’aver
sion qu’il a toujours eue pour un état que sa mère
lui fit embrasser malgré lui,
Comment, après de tels aveu x, a -t-o n assez peu de
pudeur pour vouloir dépouiller un malheureux fils du
patrimoine de ses pères, à la faveur d’un titre que l’on
reconnoît soi-même n’avoir été produit que par la force
ou la violence ? Les parties adverses reprochoient à la
m ère de Dancette de s'être revêtue, par ces mauvaises
voies, des dépouilles de ses enfa n s ; et eux-mêmes, que
tentent-ils dans ce moment ?
L e citoyen M A R C H E I X , ju g e - rapporteu r
L e citoyen A N D R A U D , avocat,
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dancette, Jean-Jacques. 1803]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité et la réclamation contre les vœux en religion. Mémoire pour Jean-Jacques Dancette, prêtre, habitant de la commune de Beauzat, département de la Haute-Loire, défendeur en tierce-opposition, et aussi demandeur en tierce-opposition ; contre Françoise Faugier et Jacques Massadier son mari, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1803
1761-1803
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0726
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0725
BCU_Factums_G0223
BCU_Factums_G0545
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53921/BCU_Factums_M0726.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Beauzac (43025)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53722/BCU_Factums_M0223.pdf
77ead9065ef3c0a6988e2fcc13d24a5f
PDF Text
Text
MÉMOIRE
SUR
LA N U L L IT É ET LA R É C LA M A T IO N
C O N T R E DES V Œ U X EN RELIG IO N .
A
DE L* IM P R IM E R IE
IMPRIMEUR
DU
R IO M ,
PE
L A N D R I O T , SEU L
T R I B Ü H A L D APPEL.
i 8 o 3. =
x i i
.
,
�MEMOIRE
PO UR,
J
e a n
- J
a c q u e s
D A N C E T T E ,
prêtre,
habitant de la commune de B e a u z a t , départe
ment de la H a u t e - L o ir e , défendeur en tierce• opposition, et aussi demandeur en tierce-oppo
sition
CONTRE
F rançoise
F A U G IE R
et J a c q u e s
M A S S A D I E R son mari, de lui autorisée
,
demandeurs et défendeurs.
JEa n - J a c q u e s DANCETTE est défendeur à une tierceopposition form ée par Françoise Faugier et son mari ?
à une sentence do l ’officialité du diocèse de M à co n , qui a
A
�C2 )
déclaré nuls ses actes de vêture et de profession dans
l’ordre de Cluny, et l’a renvoyé au siècle, et h ùn arrêt du
parlement de P aris, qui a déclaré n’y avoir abus dans la
sentence de l’officialité. D ’un autre côté, Dancette a formé
opposition à un arrêt du parlement de Toulouse, où il
n’est point partie, et qui cependant attribue à Françoise
Faugier le patrimoine de Dancette.
Si Françoise Faugier et son mari doivent succomber
dans la tierce-opposition à la sentence de l’ofïicialité de
Mâcon et a l’arrêt du parlement de Paris, alors il ne peut
y avoir aucune difficulté dans la tierce-opposition de
Dancette à l’arrêt du parlement de Toulouse. C’est donc
principalement à la tierce-opposition à la sentence de
l’olïicialité de M âcon, et à l’arrêt du parlement~de Paris,
qu’il faut s’attacher.
r:
- Celte affaire tient tout à la fois à l’ordre public et à l’in
térêt privé. C’est du développement des faits que naîtront
les questions sur lesquelles le tribunal d’appel doit pro
noncer.
F A IT S .
»
D u mariage d’André Dancette et de Marie Robin
étoient nés trois enfans, Claude, Marguerite et Jean
Jacques Dancette.
.
Toute l’ailection des pere et merc s’étoit portée sur
Claude Dancette, leur fils aîne, qui ilsdestinoient toute
leur fortune, qui étoit considérable, en lui sacrifiant sou
frère et sa sœur. Dès les premières années de c e u x -c i,
ils les vouèrent au célibat dans l’état monastique. A lVige
de huit ans, la fille fut mise dans un couvent de religieuses
�•
C 3.)
ursulines, où, sans qu’elle en fût jamais sortie, dès qu’elle
eut atteint sa seizième année, on lu i■
fit faire.le sacrifice
qu’on exigeoit d’elle : les caresses et les menaces, et les
insinuations des'religieuses toujours portées 'à faire des
prosélytes, rien ne fut épargné.
'^ 1 v
On trouva plus'de résistance de la part du fils cadet.
•Aux caresses employées vainement succédèrent les mena
ces , qui étoient aussi sans succès. Bientôt les mauvais traitemens suivirent et s’accrurent chaque jour : on en vint
à le forcer de partager avec les domestiques les travaux
les plus pénibles de la campagne, que son âge et somiîtat
ne pouvoient com porter; il fut privé de la tableiderses
parens.
i
•.
• Peut-être le cœur du père se seroit-il ouvert aux prières
et aux gémissemens de son fils ; mais que ne peut sur un
mari foible l’ascendant et l’empire que prend sur lui une
femme audacieuse , que sa-prédilection pour u n 1de ses
'enfaris veut enrichir- aux dépens des autres, et q u i, pour
parvenir à son b u t, les livre à la persécution, en faisant
partager à son mari ses caprices, sa'haine et ses mauvais
traitemens!
• .
Il n’est pas surpi-enant après cela qu’un enfant si cruel
lement persécuté, pour échapper peu t-être à de plus
grands dangers, se jette en désespéré dans la captivité
d’un cloître. T elle futla malheureuse destinée qui entraîna
Jean-Jacques Dancette dans la maison de Cluny.
Cependant la providence permit que son entrée dans
le monastère ne fût pas accompagnée des formes prescrites
par les lois pour l’y retenir à jamais; elle lui ménagea des
ressources assurées' pour reprendre sa liberté ’ lorsqu’il
A a
�C4 )
.
n’auroit plus à craindre lés effets funestes dé la haine ,et
de la violence. .C'est cè qu’on établira dans la discussion
des moyens. Continuons le,récit des faits.)
'
Jean-Jacgues Dancette n’avoit céssé de protester contre
la violence qui l’avoit conduit dans la maison de Cluny;
il avoit fait des actes dé protestation par-^devant notaires
en 1761, en 1766, en 177.1., exi 1776, en 1781 et en 1785.
Claude Dancette, son frère aîné, étoit mort en 1767.
Cette circonstance paroissoit devoir le rendre à l'affection
de ses père et mère : il tenta auprès d’eux toutes les voies
pour les engager à venir à son secours; mai$ les sentiment
de haine conçus contre lui par sa mère avoiejit pris dan?
son cœur de trop profondes racines, et la perte de son fils
aîné ne lui fit que reporter ses affections sur ses parens
collatéraux; elle prit d ès-lors le dessein dé leur faire
passer non-seulement ses propres biens, mais ceux même
de son m ari, au préjudice de ses enfans', ses héritiers
naturels; en sorte qu’abusant toujours de l’empire qu’elle
s’étoit donné sur un maili foible, elle le rendit insensible
aux prières et aux larmes de son fils, et se fit faire par lui,
dans un testament, une institution d’héritière universelle,
autorisée par les lois du pays de droit écrit, qui régissoit
les parties et leurs biens. Le testament qui contenoit cette
institution'étoit do'r*7;68.
.
Une circonstance bien remarquable dans ce testament,
c’est qu’oa instituant sa femme son héritière universelle,,
et faisant à son fils, par le môme testament, Je legs d’une
pension.viagère, ily est d itqu’il mstitueson iils,son héritier
particulier dans celte pension ¡ pourquoi ce legs h titre
d’institution particulière ? CeLa n’étoit pas nécessaire si le
�.
c 5 )
fils étoit vraiment mort au monde par une profession en
religion, libre et régulière ; mais il falloit prévoir le cas où
le fils réelameroit contre sa profession, ou laferoit déclarer
nulle : et si cela arrivoit, et qu’il n’y eût pas d’institution
particulière en sa faveur, l’institution universelle faite à la
femme eût été nulle par la prétention du fils. Cette précau
tion annonce suffisamment que le père et la mère connoissoient les vices de la profession de leur fils.
L e père, qui'avoit fait son testament en 1768, mourut
en 1773. En vain encore alors Jean-Jacques Dancette agitil et fit-il agir auprès de sa m ère, pour la rappeler à la
tendresse maternelle : vains efforts, la haine étoit trop
t
i
invétérée.
- Cependant, dès après la mort de son p ère, il avoit aban
donné la maison de Cluny , et quitté l’habit monastique ,
continuant toujours de renouveler ses protestations. Les
religieux de Cluny n’eurent garde d’user des voies qui
auroient pu le contraindre à rentrer-clans le cloître; ils
savoient trop eux-mêmes que sa vocation avoit été forcée,
et ils connoissoient sans doute la nullité des actes qui l’y
avoient introduit. Sorti de la maison de Cluny dès la mort
de son p è re , ne trouvant point d’asile auprès de sa mère, il
n’avoit cessé d’errer çà et l à , chez des parens et des amis
compatissans et sensibles à ses malheurs.
Mais sa mère étant morte en 1782, il se mit dès-lors en
possession des biens de son père, et n’a cesse depuis ce temps
d’en jouir et d’en disposer pendant un grand nombre cl an
nées, sans éprouver de contradictions de qui que ce soit.
Sa mère avoit fait un testament par lequel elle avoit ins
titué son héritier Barthclemi Robin son neveu, et par un
�C 6 )
codicile elle avoit fait en faveur de Jean-Barthelemi R obin,
autre de ses neveux, le legs d’un domaine considérable qui
venoitdesonm ari; et, dans la vue sans doute d’engager son
fils à ne pas contrarier ses volontés par les voies qu’elle
sa voit bien lui être ouvertes contre la profession en religion, .
elle lui avoit donné la jouissance du domaine dont elle avoit
disposé par son codicile en faveur de Jean - Bartlielemi
Robin : mais, ce qu’il y a encore à remarquer dans le testa
ment de la mère, elle qualifie son fils de prêtre sécularisé ,
et elle a aussi la précaution de lui faire un legs d’usufruit,
à titre d’institution particulière.
Il n’est pas non plus inutile d’observer que depuis 1773,
époque de la mort du père, jusqu’en 1782 qu’arriva celle
de la m ère, les collatéraux du père n’imaginèrent pas d’at
taquer le testament d’André Dancette, et laissèrent toujours
sa femme, son héritière testamentaire, jouir de l’universa
lité de sa succession. Ils auroient pu cependant demander la
nullité du testament, comme ils l’ont fait dans la suite ; et
s’ils ne le firent pas alors, ce ne put être que par la connoissance qu’ils avoient de la nullité de la profession de Jean
Jacques Dancette, qui seul alors pouvoit avoir le droit
d’attaquer le testament de son père : mais, même après la
mort de la m ère, le fils n’éprouva aucun obstacle dans la
possession où il se mit aussitôt des biens de son pèue.
Cependant,peu de temps après, Claude Faugierqui vivoit
encore alors, qui étoit fils et héritier d’Anne Dancette, la
quelle étoit sœur d’André Dancette, et qui auroit eu droit
à la succession de son o n d e, si Jean-.Jacques Dancette son
cousin-germain eût pu être considéré comme mort civile
ment par une profession en religion régulière, Claude
�( 7 ) ^
Faugier imagina d’attaquer les héritiers de Marie Robin ,
et de demander contre eux la nullité du testament d’André
Dancette.
Il doit paroîlre étrange que Claude Faugier ne se fût
adressé qu’aux héritiers de Marie R o b in , qui n’étoient pas
en possession des biens, ou qu’il n’eût pas en même temps
dirigé son action contre Jean-Jacques Dancette, qui s’étoit
emparé de ces mêmes biens après la mort de sa mère.
L ’action de Claude Faugier fut portée en la sénéchaussée
du P uy, où elle fut reprise après sa mort par André Faugiei',
tant en son nom que comme tuteur de l’enfant mineur de
Claude Faugier son frère, et par Françoise Faugier sa sœur,
et Massadierson mari; et, après une assezlongue instruction,
le testament d’ André Dancette fut déclaré nul, e ties Faugier
envoyés en possession de ses biens. Les Robin interjetèrent
appel de la sentence de la sénéchaussée du Puy au parle
ment de Toulouse , où elle fut confirmée.
Mais l’envoi en possession prononcé contre les R o b in ,
ne pouvoit pas être effectué à l’égard de Jean-Jacques Dan
cette qui s’étoit mis en pleine jouissance après la mort de
sa mère. Cependant, craignant d’être troublé parles collaté
raux, à la faveur de la sentence de la sénéchaussée du P u y ,
et de l’arrêt coniirmatif, il se persuada qu’il étoit de plus
grande précaution de faire prononcer judiciairement la
nullité des actes de vêture et de profession qu’on pourroit
lui opposer.
Il se pourvut en conséquence en l’oflîcialite du diocese
de M/icon, où étoit situé le monastere de Cluny, et demanda
la nullité des actes de v ê t u r e et de profession. Il appela ,
pour faire prononcer la nullité, non-seulement les religieux
�C8 )
de C lun y, mais aussi ses parens paternels et maternels, qui
à son défaut auroient été en droit de succéder à ses père et
mère. Les parens paternels étoient André Faugiei;, prêtre,
tant en son nom qu’en qualité de tuteur de l’enfant de
Claude Faugier son frère, tous deux héritiers d’Anne Dancette leur mère, sœur d’André Dancetté. Les parens mater-*
nels étoient Barthelemi et Jean-Bartlielemi R obin, neveux
de Marie Robin sa mère.
Par une sentence contradictoire de l’officialité deM âcon,
et sur les conclusions du promoteur, les actes de vêture et
de profession de Jacques-André Dancette furent déclarés
nuls, et il fut renvoyé au siècle en état de prêtre séculier.
I/a sentence est du . . . . juillet 1790,
Les Robin, parens maternels, interjetèrent appel comme
d’abus de cette sentence, au parlement de Paris, où ils ap
pelèrent en même temps André Faugier, tant en son nom
qu’en qualité de tuteur de Fenfant mineur de Claude Fau
gier , pour voir déclarer commun avec lui l’arrêt qui interviendroit sur l’appel comme d’abus; ils appelèrent aussi
les religieux de Cluny. L ’affaire ayant été discutée au parle
ment par des écritures de part et d’autre , intervint arrêt
contradictoire le 6 octobre 1790, sur les plaidoieries de
quatre avocats, et sur les conclusions du ministère public,
par lequel il fut dit qu’il n’y avoit abus dans la sentence
de I’oilicialité de M âcon , et il fut ordonné qu’elle sei’oit
exécutée selon sa iorme et teneur; et cet arrêt fut bientôt
après signifié aux parties.
De ce moment Jean-Jacques Dancette continua do
jouir paisiblement de la succession de son père, et eu
disposa librement ; il fit même des ventes de quelques
héritages
�(9 )
héritages détachés, sans que ses acquéreurs éprouvassent
aucun trouble de la part de ses pareils.
' Mais bientôt après survinrent les décrets funestes contre
les prêtres insermentés, et Dancette étoit du nombre : il
fut obligé de se cacher, et il fut même mis sur une liste
d’émigrés. Lesagens nationaux le considérèrent tellement
comme vrai propriétaire des biens de son père, qu’ ils
s’empressèrent de faire mettre le séquestre sur ces mêmes
biens, meubles et immeubles, et comme lui appartenans,
en vertu d’un arrêté du district de M onistrol, du mois
de floréal an 2 ; et l’administration du district adjugea la
ferme de ses p r o p r ié té s s u r la réquisition du receveur
de l’enregistrement.
îv
'
Cependant les temps étant devenus moins orageux, et
les prêtres commençant à repai'oitre, Dancette obtint du
directoire du district de Monistrol un arrêté du mois de
thermidor an 3 , qui le rétablit dans ses propriétés. Le
juge de paix vint avec les officiers municipaux de la com
mune de Beauzat lever le séquestre, et le remettre en
possession des meubles qui se trouvoient n’avoir pas été
vendus, et-de ses domaines, à la charge toutefois de laisser
subsister l’adjudication qui en avoit été faite, pour le
temps de sa durée.
L a jouissance de Dancette fut encore paisible. L e 25 fri
maire an 4 il afferma son domaine de Confolent au citoyen
Porchier, pour neuf ans; et le 7 nivose suivant son do
maine de la D orlière, pour six ans', au citoyen Rey.
Jean-Jacques Dancette avoit pris en affection AndréM arie Faugier, son neveu à la mode-de Bretagne, et qui
étoit son héritier présomptif du côté-paternel ; il l’avoit
B
�C I0. )
retiré auprès de lui : mais il eut le malheur de le perdre
le 6 comp’ émentaire an 5. A vant de m ourir, ce jeune
homme , qui avoit été mécontent de l’administration
d’A ndré Faugier, son oncle et son tuteur, lui avoit fait
signifier qu’ayant atteint l’âge de puberté il n’avoit plus
besoin de tuteur, et qu’il choisissoit Jean-Jacqucs Dancette pour son curateur. On conçoit aisément que cette
démarche dut déplaire à l’abbé Faugier, surtout en ce
que Dancette lui étoit préféré pour la curatelle. Cepen
dant tant que le jeune Faugier vécut on n’imagina pas
de troubler Dancette dans sa possession-, ce ne fut qu’après
sa mort que l’abbé Faugier et la femme de Massadier,
sa sœur, prétendirent se prévaloir de la sentence de la
sénéchaussée du Puy et de l’arrêt coniirmatif du parle
ment de Toulouse, qui les a voient envoyés en possession
de la succession d’André Dancette, et qu’ils se persua
dèrent qu’ils pourroient, par une tierce-opposition, faire
cesser l’effet de la sentence de l’officialité de Mâcon et de
l ’arrêt du parlement de P aris, qui avoient annuité la
profession de Dancette et l’avoient renvoyé au siècle.
Il seroit assez inutile de rendre compte de toutes les
procédures tenues dans les tribunaux du Puy et d’Issengeaux; il suffit de remarquer que Massadier et sa femme,
qui ont acquis les droits d André Faugier, ayant formé
tierce-opposition a l’arrêt du parlement de P aris, et
Dancette à celui du parlement de Toulouse, ces oppo
sitions ont enfin été renvoyons au tribunal d’appel, seul
compétent pour juger des tierces-oppositions à des jugemens rendus par des tribunaux souverains. M ais, comme
011 l’a déjà observé en commençant, c’est seulement à la
�( 11 )
tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris qu’il
faut s’attacher, parce que si cette tierce-opposition n’est
ni recevable ni fondée, l’arrêt du parlement de Toulouse,'
absolument étranger à Jean-Jacques Dencette, n’a jamais
pu produire aucun effet contre lui.
Si la tierce-opposition à l’arrêt du parlement de Paris
est non recevable, on pôürroit se dispenser d’établir
qu’elle est mal fondée. L a fin . de non recevoir est le
moyen principal; le mal fondé n’est qu’une proposition
subsidiaire. Cependant c’est par l’examen de celle-ci que
l’on va commencer : la fin de non recevoir, qui sera la
seconde proposition, n’en sera que plus favorable.
>
M O Y E N S ,
'
Prem ière -proposition.
Dans cette proposition il faut mettre à l’écart l’arrêt
du parlement de P a ris, qui avoit déclaré n’y avoir abus
dans la sentence de l’oificialité, qui avoit annullé les actes
de vêture et de profession, et qui avoijj ordonné l’exé
cution de cette sentence : il faut supposer que la sentence
n’eût pas été attaquée.
Elle n’auroit pu l’être que par un appel simple à l’ofiicialité métropolitaine, ou par un appel comme d’abus au
parlement de Paris. Mais l’appel simple n’auroit pas été
recevable après que, sur l’appel comme d abus, il auroit
été dit qu’il n’y avoit pas d’abus, et que 1 execution de
la sentence auroit été ordonnée. Mettons-nous donc dans
la position où il n’auroit pas été prononcé sur l’appel
.
B 2
�( 12 )
comme d’abus , et que ce fût aujourd’hui le tribunal
d’appel qui dût y faire droit. En un m ot, y a u ro it-il
des moyens d’abus contre la sentence de l’officialité ?
Il n’y en a pas certainement, si cette sentence, en pro
nonçant la nullité des actes de vêture et de profession de
Dancette, s’est conformée à la disposition des oi’donnances,
en jugeant que ces actes n’étoient pas revêtus des forma
lités qu’elles prescrivent.
,
C ’est sans doute une mauvaise objection que ce qu’on
a dit que l’official n’avoit pas énoncé les motifs de son juge
ment : ce n’est que dans ces derniers temps que les juges
ont été assujétis à cette énonciation ; et la sentence de
l’officialité est antérieure à la loi qui a prescrit dans les
jugemens cette nouvelle forme jusqu’alors inconnue dans
les tribunaux. C ’est dans la lo i, la justice et la raison
qu’on cherchoit seulement le m otif du jugem ent, sans
qu’ il fût exprimé dans le jugement même : aujourd’hui
même il n’est pas sans exemple de voir de bons jugemens
rendus sur de mauvais m otifs, et qui sont confii’inés
par d’autres motifs que ceux qui paroissoient avoir déter
miné les premiers juges.
Il y a deux moyens pour attaquer les vœux monastiques :
la nullité des actes par lesquels on veut les établir, pour
n’avoir pas observé dans ces actes les formalités prescrites
par les lois pour les rendre valides; et la nullité des vœux
dans leur substance, parce qu’ils n’ont été produits que
par la crainte ou la violence; et cette seconde nullité a
tout son eifel, lors même que, dans les actes, les forma
lités ont été gardées. Commençons par examiner la pre
mière de ces deux, nullités.
�/
( 13 )
■
Prem ière nullité,
./
•
■
•
'
L ’ordonnance de Moulins et celle de 1667 avoient
réglé les formalités des actes qui devoient assurer l’état
des religieux. Ces formalités ont été non-seulement con
firmées, mais exprimées et prescrites avec plus d’étendue
dans la déclaration du 9 avril 1736, dont il est néces
saire de rappeler les dispositions.
A rticle X X V . « Dans les maisons religieuses, il y
« aura deux registres en papier com mun, pour inscrire
« les actes de v ê tu re, noviciat et profession , lesquels
« registres seront cotés par premier et dernier, et para
« pliés sur chaque feuillet par le supérieur ou la supé« rieure -, à quoi faii’e ils seront autorisés par un acte
« capitulaire qui sera inséré au commencement du
« registre. »
A rt. X X V I. « Tous les actes de vèture, noviciat et
« profession , seront inscrits en français sur chacun desd.
« deux registres, de suite et sans aucun blanc; et lesd.
« actes seront signés sur lesd. deux registres par ceux
« qui les doivent signer, le tout en même temps qu’ils
« seront faits; et en aucun cas lesdits actes ne pourront
« être inscrits sur des feuilles volantes. »
Art. X X V I I . « Dans chacun desd. actes il sera fuit
« mention du nom et surnom et de l’âge de celui ou
« de celle qui prendra l’habit ou fera profession ; des
« nom s, qualités et domicile de ses père et m ère; du
« lieu de son origine, et du jour de l’acte, lequel
« sera signé sur lesdits registres, tant par le supérieur
�( i4 )
«
«
«
«
«
ou la supérieure, que par celui ou celle qui prendra
l’habit ou fera profession ; ensemble par l’évêque ou
autre personne ecclésiastique qui aura fait la cérém onie, et par deux des plus proches parens ou amis
qui y auront assisté. »
A rt. X X V I I I . « Lesdits registres serviront pendant
« cinq années consécutives, et l’apport au greffe s’en
« fera , savoir : pour les registres qui seront faits en
« exécution de la présente déclaration, à la fin de
« l’année 174 1, et ensuite de cinq ans en cinq ans, » etc.
C est d après ces dispositions de la déclaration de 1736,
que la sentence de l’officialité de Maçon a dû juger
de la validité ou de l’invalidité des actes de vêture et
de profession de Jean-Jacques Dancette. Voyons si dans
ces actes on s’est conformé aux dispositions de la lo i,
et si l’on y a observé les formes qu’elle prescrit.
Commençons par l’acte de vêture, qui est celui qui doit
constater l’introduction dans le noviciat.
Cet acte de vêture, comme celui de profession, devoit
être inscrit sur deux registres, et autorisé par un acte
capitulaire inséré au commencement du registre, suivant
l'article X X V de la déclara tion de 1736. On n’a pris pu
savoir s'il y «voit eu deux registres, et il y a lieu de croire
qu’il n’en avoit ele tenu qu un seul, puisque dans le procès
jugé par la sentence de 1 oilicialité, ni les religieux de
C lm iy, ni les parons de Dancette, qui étoient parties
dans ce ‘p rocès, n’ont pu représenter le regislrequi auroit
dû rosier dans les archives du monastère, et que leur oppo
sant des nullités dans le registre déposé au greffe, 011
n’auroil pas majiqué de tenter de les faire cesser par la
�( 15 )
représentation du registre qui devoit demeurer dans le
monastère, si dans le lait ces mêmes nullités n’eussent pas
existé dans ce second registre. Ce seroit déjà une première
contravention à. la disposition de la loi.
En second lie u , dans le registre déposé au greffe du
bailliage de M âcon, il n’y a point eu d’acte capitulaire
qui ait autorisé le supérieur à recevoir les actes de vêture
et de profession , formalité encore prescrite par le même
article. Et cette formalité n’est pas sans raison, puisque
la réception au noviciat et à la profession ne peut se faire
qu’après avoir recueilli les suffrages des religieux qui ont
droit de les donner, et qu’il n’y a qu’un acte capitulaire
qui puisse constater la pluralité des suffrages, sans laquelle
l’entrée au noviciat ne peut pas être accoi'dée. Les actes
de vêture et de profession sont des contrats synallagmatiques, qui doivent engager le novice ou le profès envers
la communauté, et la communauté envers le novice ou
le profès.
.
Eu troisième lie u , l’acte de vêture n’a pas été signé
par Dancette; et cette signature est exigée par l’art. X X V II.
E t comment ne l’auroit-elle pas été ? Un pareil acte est.
un acte authentique dont le supérieur du monastère est
le ministre établi parla lo i; et en général tous les actes
volontaires n’acquièrent l’authenticité qu’au tant qu’ils sont
signés par les parties, et le défaut de signature ou de la
mention que les parties ne savent pas signer, les rend par
cela seul radicalement nuls.
En quatrième lieu, l’acte de veture, comme celui de
la profession, doit être fait, suivant le môme article X X V II,
en présence et signé par deux des plus proches païens ou
�( r f)
amis. O r, clans celui dont il s’agit, il n’y a ni présence ni
signature de parens ni d’amis : et si l’on disoit qu’il n’y
avoit sur les lieux ni parens ni amis , au moins auroit-il
fallu les remplacer par deux tém oins, la présence des
témoins pouvant seule constater l’authenticité des actes,
et les ordonnances prononçant la nullité des actes publics
qui sont faits sans témoins.
En cinquième lieu, suivant l’article X X V I I I , le dépôt
de l’un des deux registres doit se faire, dans les cinq ans,
au greffe cta la justice royale. O r, ce n’est que huit ans
après l’acte de vêture dont il s’a g it, qu’il a été déposé
un registre au greffe du bailliage de M açon; en sorte que
pendant les trois ans qui ont suivi le délai prescrit par
la loi on a eu la facilité de faire ou refaire le registre à
volonté, pour y faire tous les changemens possibles.
En sixième lieu , suivant l’article X X V I I , il doit être
fait mention, dans les actes de vêture et de profession,
non-seulement des noms des père et mère de celui qui
est admis au noviciat ou à la profession, mais même de
leurs qualités ; et dans l’acte de vêture dont il s’« g it,
nulle mention des qualités des père et mère de Dancettc,
Ce u’est donc pas en un seul point qu’on s’est écarté
de la disposition de la loi ; elles ont toutes été violées dans
l’acte de vêture, ou l’on n’a observe aucune des formalités
essentielles qu’elle prescrit. D e là doit s’ensuivre néces
sairement la nullité de l’acte de vêture.
Mais la plupart des formalités négligées dans l’acte de
vêture, l’ont été également dans celui de la profession.
i°. Point d’acte capitulaire qui ait autorisé à recevoir la
profession. 2°. Point de double registre. Ni en l’ofïicialité
de
�( i7 )
dé M âcon, ni au parlement de Paris, les religieux de
C lu n y , ni les parens de Dancette n’ont pas pu justifier
de celui des deux registres qui devoit demeurer déposé
dans les archives du monastère. Il est possible que ce
registre n’ait jamais existé, ou que l’acte de profession
qui devoit s’y trouver manquât des formalités nécessaires;
sans quoi on n’auroit pas négligé de le représenter, soit
en l’officialité, soit au parlement. 30. Dans le registre
déposé au greffe, l’acte de profession n’énonce pas les
qualités des père et mère ; formalité exigée par l’ar
ticle X X V I I de la déclaration de 1736. 40. Une autre
formalité essentielle dans l’acte de profession, également
exigée par l’art. X X V I , c’est que cet acte soit entièrement
écrit en français ; au lieu que le plus essentiel de l’acte de
profession , le serment qui devoit attacher le religieux
au monastère, se trouve écrit en latin.
L e défaut d’observation d’un si grand nombre de for
malités , soit dans l’acte de v ê tu re , soit dans celui de
profession, doit donc nécessairement rendre ces deux
actes invalides, et les faire considérer comme n’ayant
jamais existé.
Et qu’on ne dise pas que les lois, en prescrivant ces
form alités, n’ont pas prononcé la nullité des actes où
elles n’auroient pas été gardées. Ecoutons sur cela ce
que nous dit notre célèbre Domat.
« Les formalités ont été inventées pour rendre les
« actes valables, c’est-à-dire, pour faire qu’ils aient leur
« effet, par la preuve qu’elles font de leur vérité. Que
« s’il est nécessaire qu’ils aient quelque forme qui en
« prouve la v é r ité , il y a autant ou plus de nécessité
n
*.4
�( 18 )
«
«
«
«
«
«
«
qu’un acte sérieux et important soit accompagné des
preuves de la vo lo n té, qui non - seulement excluent
tout soupçon d’autre volonté que de la sienne, mais
qui donnent à ses dispositions le caractère d’une volonté bien concertée, et dont la fermeté et l’autorité
doivent établir le repos des familles que ces dispositions peuvent regarder. »
Il est vrai que l’observation de Dom at, que l’on vient
de rapporter, est placée dans son ouvrage sous le titre
des formalités des testamens : mais le principe qu’il établit
est général ; il parle de toutes sortes d’actes, et ce n’est
que l’application du principe qu’il en fait aux testamens.
L a preuve en est dans ce qu’il dit que les form alités des
actes n ont été inventées que pour les rendre valides,
c e s t - à - d i r e , pour fa ir e q u ils aient leur effet. D ’un
autre côté, lorsqu’il ajoute, à l’égard des testamens, qu’il
y a nécessité qu’un acte sérieux et important soit accom
pagné des preuves de la volonté, qu’il fait résulter de
l’observation des formalités, quel acte plus sérieux et
plus important que celui qui exclut un individu de la
société, et qui attribue à des tiers les droits qu’il a déjà
Ct qu’il pourroit avoir à l’avenir; qui enfin intervertit
l’ordre des successions dans les familles? quel acte par
conséquent où il soit plus indispensable de garder lesf o r
mai: lé s , qui n'ont été inventées que pour rendre les actes
valides, c'est-à-dire, pour fa ir e q u ils aient leur effet.
Si donc l’acte de vêturc et celui de profession sont in
valides, s’ ils sont nuls, ou, c:e qui est la même chose,
s’ils sont censés n’avoir jamais existé, comme nos lois
exigent impérieusement une profession écrite où l’on ait
�( ï 9 ’)<
obsérve les formalités qu’elles prescrivent, on ne peut pas
argumenter d’une profession tacite par la résidence sous
l’habit monacal qu’eût pu faire -Dancette dans le monas
tère , quelque longue qu’eût pu être cette résidence.
X/ordonnance de-M oulins, celle de 1687, et la décla
ration de 1736, n’admettent d’autre profession que celle
qui est faite dans un acte par écrit, revêtu de toutes les
formalités; erl un m ot, c’est une maxime générale en
France qu’on n’y reconnoissoit point de profession tacite.
C’est ainsi que s’en expliquent tous nos canonistes : T/i
Galliâ minime prorsùs admittitur ulla tacita professio j
dit le père Cabassut; et après lui tous nos autres canonistes , et entr’autres d’Héricourt et Rousseau-Lacom be,
s’en expliquent de même ; et c’est ce qui a été cons
tamment jugé par les arrêts.
Ces arrêts l’ont ainsi jugé; bien que celui qui opposoit
la nullité ou qui réclamoit contre ses vœux eût demeuré
d ix , vin gt, trente ans et même plus dans le monastère
et sous l’habit religieux. D e là l’axiome du droit canon :
L ’habit ne fait pas le m oine, H abitas n o n fa c it monac h i n n ce que les canonistes expriment encore en d’autres
termes : L e capuchon ne fait pas le m oine, mais la pro
fession, Cuculla n o n fa c it monachwn , sed professio.
On trouve les arrêts qui l’ont ainsi jugé dans presque tous
les arrêtistes : on peut citer en particulier celui du 28 mai
1603, rapporté par M . Bouquier,'dans l’espèce duquel
il y avoit vingt-huit ans de résidence dans le cloître, sous
l’habit monacal; mais surtout on doit remarquer l’arrêt
du Journal des audiences, du 16 juillet 1657, rendu en
faveur de Christine de Haro contre son frère. Elle avoit
C 3
�( 2° )
résidé pendant trente ans dans le monastère de la Saalle,
dépendant de l’ordre de Cluny, toujours sous l’habit de
religieuse; i l y avoit de plus contr’elle cette circonstance
que dans plusieurs actes capitulaires où elle avoit assisté
elle y a v o i t pris la qualité de professe : son frère offroit
môme la preuve du vœu et de la profession, et il avoit
déjà obtenu monitoire à cet effet. Cependant elle fut
admise au partage des successions de ses père et mère.
L ’arrêt fut rendu en grande connoissance de cause, après
l’instruction qxii suivit un appointements
Parmi beaucoup d’autres arrêts semblables qu’on pourroit citer, et dont quelques-uns sont même rappelés dans
les Mémoires du clergé, il y en a surtout un bien remar
quable, en ce qu’il a été rendu pour cette province, et
pour une profession qui avoit été faite dans le couvent
des cordeliers de cette ville. En voici l’espèce.
Pierre de Pannevert de la Rocliette avoit pris l’habit
religieux dans le couvent des cordeliers de Riom . Son
acte de vôture étoit du 3 août 1690, et il avoit fait pro
fession le 6 août 169 1, après un an et quelques jours de
noviciat. Quelques années après il avoit déserté le monas
tère; il fut lieutenant au régiment d’Orléans; il fut ensuite
interprète dans les ordres du M ont-C arm el et de SaintLazare, écuycr du duc de la Force; et, dans tous les actes
qu’il avoit faits, il avoit toujours pris le nom de Pierre de
Pannevert, écnyer ou chevalier, seigneur de la Rochette.
Il se maria en 1729 avec la demoiselle M ansion, et ne prit
d’au Ire qualité que celle d’écuyer, sieur de la Rochette.
Il mourut sans enfans en 1743*
Un au après sa m o rt, sa veuve fit assigner au chûtelet
�)
le sieur de Pannevert, frère du défunt, pour voir ordonner
l’exécution d’une donation réciproque de tous les biens
du prédécédé en faveur du survivant, portée par leur
contrat de mariage.
'
On lui opposa que le mariage n’avoit pu produire
aucun effet c iv il, parce que Pierre de Pannevert étoit
engagé par des vœux en religion dès l’année 1692.
11 y eut appel comme d’abus du mariage, interjeté par
M . le procureur général; et le frère du défunt adhéra
ù cet appel.
Sur cet appel la veuve opposa la nullité des actes de
vêtui’e et de profession de Pierre de Pannevert, sqp mari.
Elle dit que l’acte de vêture n’avoit pas été signé par
Pierre de Pannevert; que l’acte de profession n’étoit signé
qu’imparfaitement Pierre de la R ocliette, sans exprimer •
le nom de famille Pannevert; qu’il y avoit plusieurs fa
milles dans la province du nom de la Rochette, et qu’une
signature imparfaite ne valoit pas plus qu’ un défaut absolu
de signature. Elle opposa que dans l’acte de vêture ni
dans l’acte de profession il n’y avoit aucune signature de
parens ni d’amis. Elle disoit que tant de vices rassemblés
dans ces actes formoient autant de moyens d’abus, parce
que toutes contraventions aux lo is , commises par les
ecclésiastiques séculiers ou réguliers dans les actes de leur
juridiction volontaire ou contenticuse, etoient des abus;
qu’il n’étoit pas nécessaire que la peine de nullité lût
prononcée par la loi pour caractériser l’abus, qu’il suffisoit que ce qu’elles ont ordonné, de quelque manière que
ce soit, n’eut pas été suivi et exécuté de la part dis ecclé
siastiques. On ajoutait que les formalités prescrites par
.
(
�C
)
les ordonnances, pour la solennité des mariages, n’étoient
point ordonnées à peine de nullité, et que cependant les
mariages qui pèchent dans l’une ou dans plusieurs de ces
formalités étoient abusifs, et jugés tels journellement par
les arrêts.
Tels furent les moyens sur lesquels fut rendu l’arrêt
du 16 mai 1746, par lequel il fut dit qu’il n’y avoit point
d’abus dans le m ariage, et qu’il y avoit abus dans la pro
fession de Pierre de Pannevert. On a î-ecueilli cet arrêt,
l’espèce et les moyens sur lesquels il fut rendu, dans le
traité de la mort civ ile, de Riçher ; et il est encore rappelé
dans le Répertoire de jurisprudence,
Il y a sur cet arrêt une observation qui n’échappera pas
au tribunal, c’est quependant cinquante-un ans qui s’étoient
écoulés depuis la profession de Pierre de Pannevert en
1692, jusqu’à sa mort en 1743, il n’y avoit jamais eu de
sa part aucune réclamation conti’e ses vœ ux; et par con
séquent ce ne fut que sur la nullité des actes de vêture et de
profession, que l’arrêt prononça qu’il y avoit abus, quoique
la nullité opposée ne fût pas prononcée par les lois, mais
parce qu’on jugea l’inyalibilité des vœux par l'inobserva
tion des formalités.
Il y a donc entre l’espèce présente et celle de l’arrêt de
1746, des rapports sensibles et même encore plus frappans.
Point de signature dans l’acte de vêture, point d’acte capi1Hlai rc qui ait autorisé ni l’entrée au noviciat, ni la profes
sion ; point de présence ni de signature de parons ou amis,
ni même d’aucun témoin, et la présence et la signature des
témoins est une formalité indispensable pour donner aux
actes qui doivent ê tre publics rauLhenLici té, et dont le défaut
/
�C *3 )
est même une nullité prononcée paf les ordonnances. Point
d’expression des qualités des père et mère. Il y a même une
autre nullité qu’on n’opposait pas dans l’affaire de Pannev e rt, c’est celle qui résulte de ce que l’acte de profession
se trouve écrit en latin : il est vrai que celui de Pannevert
étoit également en latin ; mais la nécessité de l’écrire en
français n’avoit pas été établie par l’ordonnance de 1667,
au lieu qu’elle fut prescrite par la déclaration de 173 6 ,
postérieure à la profession de Pannevert, mais antérieure
ù celle de Dancette*
Les actes de vêture et de profession de Dancette abondent
donc de nullités parle défaut d’observation des formalités*
mais on va présenter une autre nullité qui tient directement
à la substance des vœux.
Seconde nullité.
.
L e droit canonique, comme le droit civil, déclare nuls
tous les actes qui sont l’effet de la crainte ou de la violence ;
mais surtout la profession en religion exige la plus parfaite
liberté dans les personnes qui l’embrassent : de là la récla
mation autorisée par le concile de Trente et par l’ordon-*nance de Blois, contre les vœux de religion forcés par la
crainte ou la violence.
■
Il est vrai cependant qu’en g én éra l, et le concile et
l’ordonnance exigent que la réclamation soit faite dans les
cinq ans; mais, suivant tous les canonistes et la jurisprudence
constante des arrêts, et comme le disent les Mémoires du
clergé , tome 4 , pages 208 et 289 , « les cinq ans donnés
« à ceux qui sont entrés par force dans les monastères ,
« pour réclamer contre leurs v œ u x , ne doivent point être
�( 24 )
«
«
«
«
«
«
expliqués précisément de cinq ans après la profession y
sans avoir égard aux circonstances et empecliemens qui
n’auront pas laissé la liberté de réclamer; mais on doit
les entendre de cinq années utiles, qui sont comptées du
jour que la violence a cessé, et que celui qui a été forcé
à faire profession a pu agir pour se faire restituer. »
D ’un autre côté, il n’est même pas nécessaire que l’action
en réclamation ait été exercée dans les cinq ans utiles après,
que la violence a cessé; il suffit qu’il y ait eu des protesta
tions de la part de celui qui veut réclamer : c’est encore le
principe enseigné par tous les auteurs. Il suffit de citer
d’H éricourt, titre de la réclamation contre les vœux ,
article XIII. « Quoique le religieux, dit cet auteur, qui
« veut réclamer contre ses vœ ux, soit obligé de proposer
« ses moyens au supérieur, et à l’ordinaire dans les cinq
« ans de sa profession, il n’est pas nécessaire qu’il fasse des
« poursuites dans le même temps pour être relevé, ses pro
« testations conservant le droit qu’il a de demander à ren
« trer dans le siècle, pourvu qu’il n’ait pas laissé écouler
cc depuis un assez grand nombre d’années, pour qu’il soit
« ccnse avoir i-atifié tacitement sa profession. »
Pour appliquer ces principes , nous avons à établir ,
i° . que les vœux de Dancette ont été l’effet de la crainte et
de la violence; 2°. qu’il a protesté dans un temps utile ,
pendant et après que la violence et la crainte ont cessé;
3°. qu’il a exercé son action en réclamation et nullité des
vœux , dans un temps prochain de ses dernières protesta
tions. Trois articles qui doivent justifier pleinement la
Bcntence de l’ollicialité, qui a déclaré nuls les actes de veturo
et de profession , et qui l’a renvo3Té au siècle.
A r t ic l e
�X <25 )
•'«
A .B.-T I 'c L* E''>jP R ‘È rÏVÎ ?t E R. ’
U 5- . M.
M r" ■
*t,î: '■
!' ±
#
• En l’officialité-, Dancettç a,voit m isen fait la violence et
la crainte qui avoient-forcé son entrée dans le monastère
de Cluny : il en avoit offert la preuve par témoins; mais
il en avoit.dejplus rapporté, des -.preuves écrites, et ces
preuves écrites-furent jugées suffisantes;, sans être obligé
de recourir à la prejive par témoins ; et ce motif joint
d’ailleurs aux nullités des actes, de vêture et de profession,
déterminèrent la sentence de l’ofKcialité à prononcer la
nullité et le renvoi au siècle. Çes mêmes preuves écrites
furent présentées au parlement; sur l ’appel comme d’abus;
et elles sont dfautant plus éyi^e^tep quelles actes qui lea
renferment procèdpnt du fait; même ¡des personnes qui sont
aujourd’hui nos seules parties dans la tierce-opposition à
l ’arrêt du parlement de Paris.
’
'
'
Il faut ici se rappeler le procès jijgé en la sénéchaussée
du Puy et au parlement de Toulouse , entre les parens
collatéraux de Dancette , paternels et maternels : procès
dans lequel les-parens paternels liront déclarer nul le tes-,
tament d’André Dancette qui avoit donné tous ses biens
a Marie Robin sa femme , et se firent envoyer en'posses-»
sion d es- biens d’André Dajjcctt.ç , père de Jean-Jacques
Dancette.
,• •
Quels étoient les' parens paternels parties dans le procès?
C ’étoit André Faugier , Françoise Faugier sa sœur , et,
Massadier «on mari. Quellcî?sont aujourd'hui nos parties
adverses? C’est la même Françoise Faygierj et Massadier
son m ari, qui agissent n o n - seulement en leurs'nom s,
mais encore comme ayant les droits d’Aline Faugier, ' ,
D
�( 26)
Dans le procès en la sénéchaussée du Puy> et au par
lement de Toulouse, Annet F au gier, sa sœur, et Massadier son mai’i, étoient entrés dans les plus grands détails
sur la conduite de Marie R o b in , mère de Dancette, pour
faire passer à ses propres héritiers tous les biens de son
m ari, au préjudice des héritiers de celui-ci; et ils s’étoient expliqués on ne peut pas plus clairement sur les
violences exercées contre Jean-Jacques Dancette et sa
sœ ur, pour les forcer à prendre l’état religieu x, dans
deux mémoires imprimés et signifiés au parlement de
Toulouse : mémoires qui ont été heureusement conservés.
Dans le premier de ces mémoires, signifié le 7 avril 1789,
après avoir dit que du mariage d’André Dancette et de
Marie Robin éloient issus trois enfans, du nombre des
quels étoient Jean-Jacques et Marguerite Dancette, voici
comment ils s’expliquoient sur les mo}Tens employés par
M arie R o b in , pour obliger ces deux derniers enfans à
prendre l’état religieux :
« L e sieur A ndré Dancette étoit d’un caractère timide
« et foible, se laissant aisément conduire et subjuguer par
« ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lu i; il fut
« marie avec la demoiselle Marie R o b in , femme d’un
« caractère difficile, acariâtre, im périeux, exigeante,
« n’aimant rien qu’elle-même.
.
«
«
«
«
«
« Il provint de cette union trois enfans, Claude Dan
cette, avocat, qui deceda en 1767, Jean-Jacques et
Marguerite Dancette , qui furent forcés d’embrasser
l’état monastique, ne pouvant plus supporter l’humeur
difficile, les tracasseries et les mauvais traitemens de
leur mère.
�( 27 )
. Après avoir forcé,ses enfans à faire profession, l’un
« dans l’ordre de' Cluny , l’autre dans le couvent des
« ,ursulines,.il ne manquoit à la demoiselle R obin , pour
« être au comble de ses v œ u x , que de se revêtir des
« dépouilles de ses enfans, etc. »
•
Dans un autre mémoire imprimé, en réponse à celui-ci,
que firent signifier les héritiers de la demoiselle R o b in ,
qui soutenoierit la validité du testament par lequel elle
avoit été instituée héritière d’A ndré Dancette son mari,
ils se récrièrent contre les imputations qu’on faisoit à la
mère contre ses enfans, et traitèrent de fable et de calom
nie le reproche qu’on lui faisoit d’avoir par ses mauvais
traitemens forcé deux de ses enfans à embx-asser l’état
religieux.
Mais comment A ndré Faugier, sa sœur, et Massadier
çon mari répondirent - ils à ces dénégations , dans un
second mémoire signifié le 3 juin 1789, Il faut encore
rappeler les termes de ce second mémoire,
« On n’a pas calomnié la demoiselle R o b in , quand
« on a dit qu’elle avoit forcé ses enfans à faire profes« sion dans l’état monastique, Comment les adversaires
« peuven t-ils soutenir le contraire? eux qui ont été
« témoins, ainsi que tous les habitans.de la ville de
« Beauzat et des environs, des reproches que le religieux
« Dancette a faits à lçi demoiselle R obin, d’avoir contrarié
« ses goûts et son inclination décidés pour le commerce,
« Les tentatives inutiles de ce religieux, sa conduite, sa
« ,fu ite, ne prouvent que trop l’aversipn qu’il a toujours
« eue pour un état que sa mèx’e lui fit embrasser malgré
« \m, ?
D 3
�M >
.
.
.
Qui est-ce donc qui a terni ce langage?'C'é sont ceuxlà même qui âùjourd’liui1attaquent lés jügenïe:ns qui ont
annullé des vœux formés'pàr la crainte, par la violence
et par les mauvais traitem ens,qui, de leur propre aveu,
ayoient forcé l’entrée en religion de Jean - Jacques
Dancette.
.
:
::
V oilà donc la preuve par écrit, et la preuve la plus
irrécusable, puisqu’elle est sortie de la bouche des adver
saires de D ancette, et qu’ils l’ont rendue d’autant plus
éclatante dans des mémoa-es imprimés , que les vœux
de Dancette n’ont pas été libres', qu’ils n’ont été que
l’effet de la crainte et de la violence.
Après des aveux si formels dans des mémoires imprimée
et signifiés, et qui furent produits au parlement de Paris,
sur l’appel comme d’abus, comment le parlement auroit-il
pu ne pas dire qu’il n’y avoit pas d’abus dans la sentence
de l’oflicialité qui avoit déclaré nuls les vœux de Dancette,
e t l ’avoit renvoyé au siècle? et comment, encore aujour
d’hui, s’il pouvoit être question de prononcer de nouveau
sur l’appel comme d’abus , nos adversaires pourroient-ils
sans impudeur rejeter la preuve qu’eux-mêmes nous ont
fournie dans leurs mémoires imprimés et signifiés , qui
tiennent une place intéressante dans les productions de
Dancette.
.
A
r t i c l e
II.
On a vu ci-dévant qu’il est de principe que les cinq
ans accordés pour réclamer contre des vœux qui sont
l’elïèl de la crainte et de la violence, ne commencent à
courir que du jour où la crainte ou la violence ont cessé.
�i
-
‘
( 29 )
_
Mais la crainte et la violence n’ont jamais cessé. D ’abord
ces motifs ont toujours subsisté jusqu’à la mort du fils
aîné Dancette : c’étoit l’envie d’enrichir ce iils aîné aux
dépens des autres enfans, qui avoit excité les mauvais
traitemens de la mère et du père , qui forcèrent leurs
enfans à prendre l’état religieux.
A près la mort de ce fils aîné, la m ère, qui voulut se
rendre maîtresse des biens de son m ari, auroit eu de justes
sujets de craindre de ne pas réussir dans son p ro jet, si
elle n’eut pas entretenu son mari dans les sentimens de
haine qu’elle lui avoit inspirés et fait partager avec elle,
contre ce fils malheureux qu’on avoit entraîné dans la
captivité d’un cloître, la réclamation n’eût fait encore
que confirmer et envenimer la haine. I-e iils sortant du
cloître sc seroit trouvé sans ressource, et sans asile dans la
maison paternelle : ainsi la mère eut toutes les facilités
que son ascendant et son empire sur son mari pouvoient
lui donner pour se faire instituer héritière universelle
dans son testament ; et aussitôt après la mort de son mari
elle se mit en possession de sa succession.
Cependant, long-temps avant la mort du père, dès
176 1, le fils avoit fait des protestations pardevant notaires,
qu’il avoit renouvelées en 1769.01 en 1771- M ais, son
pere m ort, il espéra trouver grâce auprès de sa mère. Il
n’hesita pas dès ce moment à déserter le monastere et à
•quitter l’habit monacal. Tous ses efforts, toutes ses solli
citations auprès de sa mère furent inutiles, et il lut oblige
d'errer cà et là chez des parens ou des amis compatissans
cl sensibles à ses malheurs, toujours pourtant renouvelant
ses protestations en 1776, en 1781 et en 1785.
�( 3° )
.
Mais sa m ère, depuis la mort de son fils aîn é, avoit
tourné toutes ses affections du côté de ses parens et de
deux de ses neveux, l’un desquels par son testament elle
fit son héritier universel, laissant à l’autre un legs consi
dérable par un codicile. Touchée sans doute de quelque
rem ords, elle ne fit le legs d’un domaine venu du patri
moine du p è re , à un de ses n eveu x, qu’à la charge d’en
laisser la jouissance à son fils ; e t , ce qui est surtout à
remarquer, c’est que dans ce dernier actç la mère étoit si
pénétrée de la nullité des vœux de son fils, qu’elle ne le
qualifie pas de religieux, mais bien de prêtre sécularisé.
Elle eut encore la précaution qu’elle avoit déjà fait pren
dre dans le testament du p è r e , de faire faire une insti
tution particulière en faveur du fils, de faire elle-m êm e
une pareille institution dans la jouissance du domaine
dont la propriété fut donnée à son neveu par son codicile j
institution particulière, qui ne put être faite que dans
la prévoyance que le fils pourrait un jour faire déclarer
la nullité de ses vœ ux, et pour, dans ce cas, ne pas vicier
ses dernières dispositions par la prétérition.
A lo rs, qui est-ce qui ne comprendra pas que jusqu’à
la mort de la mère la volonté et la liberté du fils ont tou
jours été enchaînées, que les motifs de crainte et de vio
lence n’ont cessé de subsister tant que le fils a pit craindre
que sa m ère, par des voies extraordinaires qui n’échap
pent pas à la haine, le privât de toute ressource et de tout
secours pour réclamer les biens de son père, qu’elles’étoit
fait donner par un testament, testament que le fils ne
çonnoissoit que par la vo:e publique, sans qu’il en eût
jamais eu une counoissance particulière qui pût i’iijslruire
�( 3i )
des moyens par lesquels il pouvoit attaquer ce testament.
M ais, même encore après la mort de sa mèi’e, il renou
vela ses protestations en 1785. Il fit plus encore; il se
mit en possession de tous les biens de son père , sans
éprouver aucune opposition de la part de ses parens ni
paternels ni maternels, et sans même qu’il se crût obligé
de réclamer contre ses vœ ux, qu’il de voit regarder comme
absolument nuls,'non pas seulement parce qu’ils étoient
l’effet de la crainte et de la violence, mais parce que
tous les actes qui auroient pu les rendre valables étoient
frappés de nullité par l’inobservation des formalités né
cessaires pour les rendre valides.
•
Cependant ayant dans la suite été informé des contes
tations qui s’étoient élevées en la sénéchaussée du P u y ,
et au parlement de Toulouse , entre les Robin et les
Faugier, les premiers demandant la validité du testament
d’André Dancette, et les Faugier demandant la nullité
de ce testament, qui avoit été en effet ordonnée par la
sentence de la sénéchaussée dù P u y , et par l’arrêt confirmatif du parlement de Toulouse, Jean-Jacques Dan
cette , pour se mettrè à l’abri des contestations qu’à la
faveur de ces jugemens on pourroit lui élever pour le
dépouiller des successions de ses père et m ère, il prit
le parti de se pourvoir à l’oflicialité du diocèse de M âcon,
pour faire prononcer la nullité de ses vœux.
Ainsi on croit avoir établi la seconde proposition,
que Dancette avoit protesté dans un temps u tile, puis
que ses protestations avoient non - seulement précédé ,
iriais même suivi immédiatement le temps où la crainte
et la violence avoient pu cesser.
�C 32 )
A
r t
. III.
Enfin , il avoit exercé l’action en réclamation et en
nullité dans un temps prochain de ses dernières pro
testations.
Ou a vu ci-devant, dans les Mémoires du clergé, que
les cinq ans dans lesquels doit se faire la réclamation,
ne courent que du jour où la crainte ou la violence
ont cessé.
•
On a vu également dans d’H éricourt, qu’il n’est pas
nécessaire d’exercer l’action en r é c la m a tio n dans les cinq
ans, pourvu que dans ce temps il ait été fait des pro
testations, et que ces protestations conservent l’action,
si depuis les protestations on n’a pas laissé passer un
assez grand nombre d’années, pour qu’on ne soit pas
censé avoir ratifié tacitement la profession,
D ’après ces principes, quand même la nullité des
vœux n’eût été fondée que sur la crainte ou la violence,
abstraction faite de l’invalidité des actes de vêture et de
profession par l’inobservation des formalités, l’action
de Dancette seroit venue à temps, puisqu’elle lui avoit
été conservée par scs actes de protestation , dont le
dernier n’étoit pas antérieur de cinq ans à l’action
en nullité. La dernière protestation étoit du i 5 avril
1785 , et l’action en nullité fut exercée au mois do
mars i'tqo. D ’ailleurs, cette dernière protestation avoit
été précédée de plusieurs autres, dans l’intervalle des
quelles il ne s’étoit jamais écoulé cinq ans. Enfin , u’étoit-ce pas une protestation continuelle de la part de
Dancette,
�C 33 )
Dancette, d’avoir, d’abord après la mort de son père,
abandonné le monastère, et quitté l’habit m onacal, et
de s’ètre, après la mort de sa m ère, mis en possession
des successions paternelle et maternelle ?
On se persuade donc d’avoir établi invinciblement
les trois articles annoncés pour prouver l a secondé
nullité. i°. On a établi que la profession en religion de
Dancette a été l’effet de la crainte et de la violence ;
et toutes les lois civiles et canoniques déclarent nuls les
actes qui ne sont pas faits dans une parfaite liberté. z°. O n
a prouvé que Dancette avoit protesté dans un temps
U t i l e , avant et après les cinq ans où la crainte et la
violence avoient ce9sé. 30. On a encore prouvé que
l’action avoit été exercée dans les cinq ans de sa der
nière protestation, précédée de plusieurs autres qui
toutes avoient continué de conserver son action.
Mais on avoit encore, auparavant établi une première
nullité par l’inobservation des formalités dans les actes
de vêture et de profession. .
Tout concourt donc à justifier la disposition de la
sentence de l’oilicialité qui avoit déclaré nuls les actes
de vêture et de profession de Dancette, et l ’avoit renvoyé
au siècle. Tout démontre qu’ il n’y avoit pas d’abus dans
cette sentence, et que déjà n’eût-il pas été fait droit
au parlement sur l’appel comme d’abus, et put-il être
question de le juger de nouveau, les appelans ne pour
voient pas attendre du tribunal d’appel un jugement dif
férent de celui qui fut prononcé par l’arrêt du parle
ment. Mais alors quel avantage ne peut-011 pas se pro
met Ire de la lin de non-recevoir contre la tierce-oppopilion?
Ji)
�( 34 )
Seconde proposition.
Quels sont les tiers-opposans ? C’est Françoise Faugier,
et Massadier son mari. A quel titre se présentent-ils
pour former la tiei’ce opposition? C’est d’abord au nom
d’A ndré Faugier dont ils disent avoir les droits. Mais
A ndré Faugier étoit partie dans la sentence de l’ofïicialité et dans l’arrêt du parlement.
Sous ce premier rapport , et comme cessionnaires
d’A ndre F au gier, Françoise Faugier et son mari sont
constamment non-recevables dans la tierce-opposition.
L ’article II du titre X X X V de l’ordonnance de 1667 ne
permet la tierce-opposition contre les arrêts et jugemens
en dernier ressort, qu’à ceux qui n’y ont pas été parties:
or, A ndré Faugier avoit été partie non-seulement dans
la sentence de l’officialité, mais encoi’e dans l’arrêt du
parlement. Ainsi la tierce-opposition qu’il auroit formée
lui-même seroit évidemment non-recevable ; et elle l’est
également contre Françoise Faugier et son mari, q u i, à
cet égard, n’ont pas plus de droits que leur cédant.
Eussent-ils même obtenu la cession d’A ndré Faugier
avant l’arrêt auquel ils forment la tierce-opposition, ils
y seroient également non-recevables, étant do principe
que les successeurs et ayant-cause de ceux qui ont été
parties dans les jugemens en dernier ressort ne peuvent
pas plus qu’eux y former tierce-opposition. C ’est ce que
tous les auteurs et les praticiens nous cnseigncnl, et ce
qui a été jugé par une infinité d’arrefs : on eu trouve
jusqu’à onze dans Denizart et dans le Répertoire de juris
�prudence, qui ont été recueillis dans les arrêtistes. C’est
la faute de l’acquéreur ou du cessionnaire de celui contre
lequel a été rendu le jugement contradictoire en dernier
ressort, de n’avoir pas fait connoître sa vente ou sa cession,
et de n’être pas intervenu.
S’il en est ainsi lorsque la vente ou la cession est anté
rieure au jugement, à plus forte raison doit-il en être de
même lorsqu’elle est postérieure.
La fin de non-recevoir du chef d’A n dré Faugier doit
même paroître d’autant plus accablante, que l’arrêt du
parlement fut rendu de son consentement : c’est ce que
l’on voit dans le contexte même de l’arrêt.
Ce n’étoit d’abord que les R obin, parens maternels de
D ancette, qui avoieht interjeté l’appel comme d’abus de
la sentence de l’officialité ; mais sur cet appel ils avoient,
en vertu d’une commission, assigné A ndré Faugier au
parlement, pour se joindre à eux dans leur appel, et à fin
d’arrêt commun. O r, nous voyons dans l’arrêt qu’André
Faugier avoit donné une requête par laquelle il avoit
conclu à ce que les R obin fussen t déchirés noji-receçcibles dans leur demande en déclaration d'arrêt com
mun par eux form ée contre M e. A n d ré Faugier, ou
en tout cas et subsidiairement seulement qu'ils en f u s
sent déboutés. On ne pouvoit pas un consentement plus
formel de la part d’André Faugier à la sentence de l’officialité , et un aveu plus précis qu’il n y avoit pas
d’abus dans cette sentence : aussi l’arrêt qui intervint et
qui jugea qu’ il n’y avoit pas d’abus, ne condamna pas
seulement les Robin aux dépens envers Dancette, il les
y condamna également envers André Faugier.
E 2
�( 3^ )
Il seroit donc impossible de se refuser à l’évidence des
fins de n on -recevoir contre la tierce-opposition que
Françoise
Faugier
et Massadier son mari ont formée du
j
ii
chef d’André F au gier, et comme cessionnaires de ses
droits.
’
Mais cette tiei’ce-opposition a encore été formée du
chef de Françoise Faugier, en son nom propre et per
sonnel, sous le prétexte qu’étant elle-m êm e héritière
d’A ndré Dancette par la profession en religion de son fils,
elle auroit dû être appelée soit en l’officialité , soit au
parlement sur l’appel comme d’abus de la sentence de
l’oiiicialité.
Il y a trois réponses ù cette objection.
i°. Il n’est pas exact de dire qu’il faille que celui qui
demande la nullité, ou qui réclame contre ses vœ ux, soit
obligé d’assigner sur sa demande ceux de ses pareils qui
sont directement intéressés à ce que sa profession subsiste.
Il n’y a absolument aucune lo i, ni canonique, ni civile,
qui exige cette nécessité. Onproposoit néanmoins la même
objection lors d’un arrêt du mois d’avril i 665 , rapporté
par M . de Catelan ; et voici ce qu’on y répondoit : « Une
« religieuse, par sa profession et scs vœ ux, n’est engagée
« qu'à D ie u , dont les intérêts et les droits résident dans
« la communauté qui l’a reçue, et à laquelle 011 laisse le
« soin de les menager et de les défendre. Ainsi on n’u
« point dû y appeler son frerc, qui n’y a qu’un intérêt
« bien moins considérable en comparaison, et à regarv der la vraie importance des cl 1oses; un intérêt d’ailleurs
« accessoire, et qu’on nomme un intérêt per couse« quentias- tout comme, selon nos arrêts, les seigneurs
�( 37 )
« ne sont point appelés à l’entérinement des lettres de
« grâce-, quoique intéressés aux condamnations-, et tout
« comme les substitués ne sont point appelés dans des
« procès où il s’agit de la validité ou invalidité des ma
lt riages, et dont l’événement peut servir d’obstacle ou
« d’ouverture à la substitution. Aussi la chose'fut-elle
« décidée de même dans le cas pareil d’un frère non
« appelé à la fulmination du rescrit obtenu par la sœur
« qui réclamoit contre ses vœ ux, par l’arrêt du 30 mars
« 16 61, qui déclara n’y avoir point d’abus dans la sen
« tence de l’officialité de M ontauban, qui avoit fulminé
« le rescrit sans appeler le frère. »
Ce que l’on vient de rappeler de Catelan est répété par
les auteurs du Répertoire de jurisprudence, au mot P r o
fe s sio n , où ils disent que n’y ayant aucune loi canonique
ni civile qui exige la nécessité d’appeler les pareils, il est
à croire que l’inobservation de cette formalité ne seroil;
pas regardée comme abusive.
2°. Si 011 étoit obligé cl’appeler les parens, au moins
ne seroit-ce que ceux qui seraient alors directement inté
ressés a ce que la prolession- subsistât. Mais Françoise
F au gier, ù l’époque de la demande en nullité et de lu
réclamation de Dancette, n’avoit pas droit à la succession
(Tu père de Dancette. A la vérité elle étoit sa nièce; mais
elle ne pouvoit venir à la succession que par représenta
tion d’Anne Dancette, sa m ère, sœur d’André, Dancette,
et. laquelle elle-m êm e 11’étoit mor[o qu’après soiijlrère.
Ainsi c’eût élé la mère de,Françoise Faugier qui auroit
succédé à André Dancette, si, les vœux du lils n’eussent
pas été nids.
_ • \ •
�( 38 )
Mais Françoise Faugier, par son contrat de mariage
avec Massadier, du 28 avril 17 18 , avoit renoncé à la
succession de son père et à celle de sa m ère, moyennant
une dot qui lui fut constituée tant pour biens paternels
que maternels, et dans laquelle il fut distingué ce qui
lui étoit donné pour chaque espèce de biens. Par con
séquent sa mere auroit eu recueilli la succession d’André
Dancette son frère, si les vœux du fils eussent été vala
bles ; et cette succession auroit fait partie de celle d’Anne
Dancette, mere de Fi’ançois Faugier, à laquelle elle avoit
renonce. Donc alors , et au temps où Jean-Jacques
Dancette avoit demandé la nullité et réclamé contre ses
vœ ux, Françoise Faugier n’avoit aucun intérêt à ce que
la profession de Dancette subsistât. Il n’eût donc pas été
nécessaire, pour former la demande en nullité et en récla
mation , d’y appeler Françoise Faugier.
30. On croit avoir prouvé que quand les choses seroient
entières, et qu’il s’agiroit de prononcer de nouveau sur
l’appel comme d’abus, étant d’ailleurs démontré qu’il
n’y a point d’abus, la nullité des actes de vêture et de
profession se trouvant évidente par l’inobservation des
formalités prescrites par les lois, et d’ailleurs n ’a ya n t été
que l'effet de la crainte et de la violence, la tierce-oppo
sition seroit sans objet, puisqu’il fa adroit toujours déclarer
la nullité des vœux. A quoi donc pourroit servir la tierceopposition?
'
Il doit donc paroître démontré que Françoise Faugier
et Massadier son mari sontI non-recevables
dans leur tierce-*
*
opposition du chef de Françoise la u g ie r, soit parce qu’cu
général aucune loi civile ni canonique n’exige d’assignej’
�( 39 )
les parens sur les demandes en nullité des vœux, soit parce
que si cela étoit nécessaire, ce ne pourroit être que pour
les parens qui au moment de la demande en nullité
auroient un intérêt présent à ce que les vœux subsistassent,
et qu’à cette époque Françoise Faugier ne pouvoit pas
avoir cet intérêt, parce qu’elle avoit renoncé à la succession
de sa m ère, et par conséquent ne pouvoit pas la repré
senter dans celle d’A ndré Dancette-, soit parce qu’enfin
on ne pourroit jamais empêcher que les vœ ux de Dancelte ne fussent déclarés nuls.
f
Mais Françoise Faugier n’a voit renoncé qu’à la succes
sion de sa m ère, et non aux successions collatérales de
l’estoc ni paternel ni maternel. Sa renonciation aux suc
cessions directes avoit profité ù Claude et André Faugier
ses frères : or, Claude ayant laissé un fils qui est ensuite
décédé sans postérité, Françoise Faugier la tante a dû lui
succéder conjointement avec A ndré Faugier son autre
frère ; c’est une succession collatérale dans laquelle elle a
dû trouver la moitié de la portion que Claude Faugier
et son fils après lui auroient eue dans la succession d’A ndré
Dancette; et si le fils de Claude Faugier avoit dû être
appelé dans la demande en nullité et réclamation contre
les vœ ux, la tierce-opposition du chef du fils de Claude
Faugier, que Françoise Faugier représente, devroit être
accueillie.
D ’abord cette objection se réfuterait par ce qu’on a
déjà v u , qu’il n’y a aucune loi, ni canonique, ni civile,
qui exige d’appeler les parens dans les demandes en nullité
ou en réclamation contre les vœux; mais d’ailleurs le fils
de Claude Faugier s’est trouvé partie dans l’arrêt du par-
�( 4° )
.
lemcnl de Paris, dans la personne d’André Faugier, son
oncle et son tuteur.
'
Il est vrai qu’on a répondu à cela qu’André Faugier,
lors de l’arrêt, ne pouvoit pas figurer pour son neveu,
parce que la tutelle avoit cessé au moment de la puberté
que le mineur avoit acquise à cette époque, ayant accom
pli sa quatorzième année au mois de mars 1790, c’est-àdire, quelques mois avant l’arrêt du mois d’octobre de
la même année.
Mais comment Jean-Jacques D ancette, qui avoit été
si long-tem ps éloigné de sa fam ille, au ro it-il pu être
informé de l’âge du fils de Claude Faugier, tandis surtout
qu’A ndré Faugier procédoit lu i-m ê m e en qualité de
tuteur ? et s’il n’avoit plus cette qualité, ne devoit-il pas
cesser de la prendre, et en instruire Dancette ? Si lui—
même aujourd’hui proposoit cette objection, pourroit-il
y être recevable, lui qui auroit induit Dancette en erreur?
est-elle donc plus proposable dans la bouche de Françoise
Faugier et de Massadier son m a ri, qui se présentent
comme ccssionnaires d’André Faugier? ne pourroit-on
p-is même ajouter qu’André Faugier n’avoit cessé dêfre
tuteur jusqu’au moment de l’acte par lequel son neveu
lui signifia qu’il avoit atteint sa puberté, et qu’il s’étoit
choisi un curateur?
11 (¡1111enfin toujours en revenir y cotte vérité, qu’aucune
loi canonique ou civile n’exige la nécessité d’appeler les
parens; et il ne faut pas non plus perdre de vue que la
liei'ce-opposilion seroit sans ol^jcl, puisqu’ il faudroit tou
jours prononcer la nullité des vieu x, soit à cause qu’ils
n’étoient que l’eilet de lu violence, soit parce que les
actes
�( 41 )
actes de vêture et de profession n’avoient pas été revêtus
des formalités prescrites par les ordonnances, soit enfin
parce que les protestations avoient conservé l’action en
réclamation qui fut exercée dans les cinq ans de la ces
sation de la crainte et de la violence.
Une autre fin de non-recevoir se tire de l ’approbation
de la sentence et de l’arrêt, par l’exécution qu’en ont
soufferte tant André Faugier que Françoise Faugier et son
mari.
Déjà avant la sentence et l’arrêt, et dès l’instant de la
mort de sa m ère, Dancette s’étoit mis en possession tant
des biens de sa mère que de ceux de son père*, et après
la sentence et l’arrêt il s’étoit conservé dans cette posses
sion sans obstacle de la part de ses parens, et notamment
de Françoise Faugier. Si Dancette , par la rigueur des
décrets rendus contre les prêtres insermentés, dans les
temps désastreux de notre révolution , est mis sur une
liste d’émigrés et obligé de fuir et de se cacher, qui est-ce
qui met la main sur les biens de son père qu’il possédoit?
ce ne sont pas ses parens, ce n’est point A ndré ni Fran
çoise Faugier; c’est la régie nationale qui s’empare de ces
biens,comme appartenans à un prêtre déporté ou émigré;
rc’est la régie qui les met en séquestre et qui les afferme :
et dès l’instant que le'm alheureux Dancclle peut reparo ître, c’est lui seul qui demande la main-levce du sé
questré, c’est à lui seul qu’elle est accordee; et ses parens
continuent et ne cessent de le laisser jouir.
Françoise Faugier et son mari ont prétendu, dans leur
mém oire, que tant que le fils'de Claude Faugier avoit
vécu c’étoit lui qui attennoit les biens; mais c’est de leur
F
�C 42 )
part une fausse assertion, et qui est démontrée par les
baux de ferme consentis par Dancette lui-même avant la
mort du fils de Claude Faugier. Un de ces baux, du do
maine de la D orlière, est du 4 nivôse an 4 ; un autre,
du domaine de Confolent, est du 5 fructidor de la même
année : et la mort du fils de Claude Faugier est posté
rieure à ces baux; elle n’est arrivée que le 5 complémen
taire an 5.
Quel est le moment où Françoise
Faugier
et son mari
3
O
imaginèrent de troubler Dancette dans une possession où
ils l’avoient laissé si paisiblement pendant plusieurs an
nées? c’est seulement lorsqu’il a fait quelques dispositions
. de ces mêmes biens qu’ils espéroient de recueillir un jour
dans sa succession : ce n’est donc qu’ambition et cupidité
de leur part. Toutes ces circonstances se réunissent pour
rendre de plus en plus favorables les fins de non-recevoir
d’ailleurs bien fondées contre la tierce-opposition.
Après cela il est inutile d’observer que si Françoise
Faugier et son mari pouvoient réussir dans leur tierceopposition du chef du fils de Claude Faugier, la sentence
de l’ofiicialité et l’arrêt du parlement de Paris ne devoient
pas moins avoir tout leur eifet du chef d’A ndré Faugier,
constamment partie en son nom dans la sentence et dans
l ’arrêt«, suivant ce que dit Jousse sur l’article X du titre
X X V II de l’ordonnance de 166 7, d’après la disposition
de l’article L I de l’ordonnance de M ou lin s, qui porte
en eifet que « Si un jugement portant condamnation
« de délaisser un héritage, il survient des oppositions
« formées par des tierces personnes, néanmoins celui qui
« a obtenu le jugement sera inis en possession en laquelle
�( 43 )
« étoit le condamné, sans préjudice-aux droits desdits
« opposans. »
,
O n pourroit ici rappeler avec avantage la savante dis
sertation du jurisconsulte M erlin , aujourd’hui commis
saire du gouvernement près le tribunal de cassation, qui
se trouve dans le Répertoire de jurisprudence à la suite
des questions qui y sont traitées sur les mots V œ u x
solennels, et où l’auteur, par les plus profondes recher
ches puisées dans les saintes.écritures et dans les pères de
l’église, établit toute la faveur que méritent les demandes
en réclamation et en nullité contre les vœux. Il suffit de
renvoyer à cette dissertation, dont on se bornera à saisir
quelques traits. « A in si, dit-il, l’intérêt des familles ( dans
.« cette matière ) ne doit être d’aucune considération ; il
« n’entre pour rien dans ]a profession religieuse : ce n’est
« ni pour elles ni avec elles que l’on contracte; elles n’ont
« donc rien à voir dans le contrat, et ne peuvent em
it pêcher sa résiliation. Up religieux qui rentre dans le
« siècle est, par rapport à ses parens, ce qu’est un absent
« dont on partage la succession, dans la fausse persuasion
« qu’il est m ort, et qui reparoît ensuite........Puisque les
« vœux monastiques sont devenus une affaire capitale,
« c’est bien la moindre chose que les conditions requises
« pour leur validité s’observent en rigueur, etc. etc. »
Voilà sans doute qui justifie ce qu’avoit dit D om at, que
les formalités n’ont été inventées que pour rendre les
actes valides, et pour faire qu’ils aient leur eflet; d’ou
suit nécessairement la conséquence que l’inobservation
des formalités doit rendre les actes non valides et sans
elfe t.
�( 44 )
Il n’y a plus qu’un mot à dire sur la tierce-opposition
qu’à son tour Dancette a formée à l’arrêt du parlement
de Toulouse. Il n’a pas entendu former cette opposition
sur ce que cet arrêt a annullé le testament d’A ndré Dan»
cette , son p è re , mais bien sur ce que les Faugier ont
été envoyés en possession des biens de sa succession.
E t m ôm e, à cet égard, la tierce-opposition n’eût pas
été absolument nécessaire, parce que n’étant pas partie
dans cet arrêt, il lui devient tout à fait étranger, et qu’il
n’a pu lui porter aucun préjudice ; ce principe est incon-i
testable: Tes inter alios judicata, aliis neque prejudicium ,neque emolumentum afferrepotest. L . 2 God. quib.
jud. Ce n’est donc que par exhaberance de droits, qu’il
a été formé tierce-opposition à cet arrêt ; et la tierceopposition est recevable, dès que l’arrêt qui n’a pas été
rendu avec l u i , tendroit à le dépouiller d’un bien qui
lui appartient, et sur lequel ceux qui ont été condamnés,
pas plus que ceux à qui il a été adjugé, n’avoient aucuti.
droit.
O n ne peut mieux terminer ce mémoire qu’en rap
pelant encore une foui les aveux des parties adverses, que
l ’entrée en religion do Dancette n’avoit été que l-elfet de
la iorce et de la violénce; aveux consignés dans les deux
mémoires imprimés qu’ils avoiènt signifiés au parlement
de Toulouse.
'
.
v
Page 2 du premier mémoire. L e sieur D ancette
otoit d’uii caractère timide et foible
3 se
laissant
�( 45 )
.
aisément conduire et subjuguer par ceux qui vouloient prendre de l’ascendant sur lui ; il fut marié
avec la demoiselle R o b i n , femme d’un caractère
très - difficile , acariâtre , impérieuse, exigeante,
n’aimant rien qu’elle-même.
11 provint
de cette union trois enfans, Claude
D a n c e t t e , a v o c a t , qui décéda en 1 7 6 7 , Jean
Jacques et Marguerite D ancette qui furent forcés
d’embrasser l’état monastique , ne pouvant plus
supporter l ’humeur difficile, les tracasseries et les
mauvais traitemens de leur mère.
‘ Après avoir forcé ses e n f a n s ' à faire p r o f e s s i o n ,
l’un dans l’ordre de C l u n y , l’autre au monastère
des ursulines de M o n istro l, il ne manqua à la
demoiselle Robin , pour être au comble de ses
vœux , que de se revêtir des dépouilles de ses
enfans ; il ne lui fut pas difficile d’obtenir du
caractère foible de son époux une disposition en
sa faveur, telle qu’il lui plut de l’exiger,
etc.
P a g e 7 du second mémoire. On n ’a pas calomnié
la demoiselle R o bin , quand on a dit qu elle avoit
forcé ses enfans à faire profession dans 1 état mo
nastique. Com m ent les adversaires peuvent - ils
soutenir le contraire , eux qui ont été témoins ,
ainsi que tous les habitans de la ville de Beauzat
�( 46 )
et des environs, des plaintes amères, des reproches
que le religieux D ancette a faits à la demoiselle
R o b i n , d’avoir violenté ses goûts et son inclina
tion décidée pour le commerce. L e s tentatives
inutiles de ce religieux, sa conduite, sa fuite et
sa position actuelle, ne prouvent que trop l’aver
sion qu’il a toujours eue pour un état q ue sa mère
lui fit embrasser malgré lui.
Com m ent, après de tels aveu x, a -t-o n assez peu de
pudeur pour vouloir dépouiller un malheureux fils du
patrimoine de ses pères, à la faveur d’un titre que l’on
reconnoît soi-même n’avoir été produit que par la force
ou la violence ? Les parties adverses reprochoient à la
mère de Dancette de s 'etre ,revétue , par ces mauvaises
voies, des dépouilles de ses enfa n s j et eux-mêmes7 que
tentent-ils dans ce moment ?
L e citoyen M A R C H E IX , juge-rapporteur
Le citoyen A N D R A U D , avocat,
L e citoyen V A Z E I L L E ,
avoué,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Dancette, Jean-Jacques. 1803]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Marcheix
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
successions
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Description
An account of the resource
Mémoire sur la nullité et la réclamation contre des vœux en religion. Mémoire pour Jean-Jacques Dancette, prêtre, habitant de la commune de Beauzat, département de la Haute-Loire, défendeur en tierce-opposition, et aussi demandeur en tierce-opposition ; contre Françoise Faugier et Jacques Massadier son mari, de lui autorisée, demandeurs et défendeurs.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1803
1761-1803
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
46 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0223
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0725
BCU_Factums_M0726
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53722/BCU_Factums_M0223.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Beauzac (43025)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes de vêture
droit canonique
droit civil
mort civile
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53662/BCU_Factums_M0121.pdf
2ea9f32e1496380b93c76a625d3515a2
PDF Text
Text
M É MOI RE
P our
COUZON
M aurice
et J
e a n n e
P A T I F O L L E T , sa femme, Défendeurs;
C
o n t r e
M
a r i e
G O LF I E R
P E R S I G N A T , son mari, mineurs, F
J A U Z I N et A
n n et
et J
e a n
ra n ço is
C R O H E T , se disant
leurs curateurs . Demandeurs.
MAurice Couzon et Jeanne Patifollet, sa femme, ont
acheté de Jacques Golfier, par acte du 3 germinal an trois,
une maison située au quartier de Jaude , rue de la Cadenne,
moyennant la somme de 11,ooo liv. assignats qui ont été
payés 5,ooo liv. comptant, et le surplus peu de jours
après.
La majeure partie de cette somme a été payée à Antoînette Golfier, sœur du vendeur, et a été employée à le
libérer envers elle de ses droits dans la succession du père
commun qui étoient pour lui une dette pécuniaire.
Maurice Couzon et sa femme ont fait à cette maison
toutes les réparations dont elle avoit besoin ; ils y ont
ajouté de nouvelles constructions, et en ont considérablement
augmenté la valeur.
Il paroît que cette maison provenoit de la succession
de Marie Bonnet, veuve de Blaise Richen, mère de Marie
Richen , première femme de Jacques Golfier.
A
�2
Jacques Golfier avoit eu deux enfans de son premier
mariage avec Marie R iclien, Marie et Benoîte Golfier.
Benoîte Golfier est décédée après sa mère.
Jacques G olfier, son père , a hérité de la moitié de ses
biens ou du quart dans le tout, parce que tous les biens
de Marie Bonnet et de Marie Riclien étaient régis par le
droit écrit ; que suivant le droit é crit, les pères héritent
de leurs enfans par égale portion avec les frères et sœurs
survivans , et qu’il ne restait à Jacques Golfier que Marie
Golfier , son autre fille.
Jacques Golfier est décédé en l’an huit ; Marie Golfier
sa fille, femme Persignat, n’a accepté sa succession que
sous bénéfice d’inventaire.
Abusant de cette qualité , elle a actionné Maurice
Couzon et Jeanne Patifollet, sa femme, en désistement
de la maison acquise par eux de son père au mois ger
minal an trois.
Cette demande n’est pas régulière en la forme, en ce
qu’il n’y avoit qu’nn seul curateur , quoique le mari et la
femme fussent mineurs l’un et l’autre.
E t c’est en vain qu’ils croient l’avoir rectifiée en faisant
intervenir un second curateur ; ce qui est une fois nul ne
peut cesser de l’etrc ; les défendeurs y insistent, et le com
missaire du gouvernement ne manquera pas de faire valoir
ce moyen , ne fut-ce que pour l’honneur des règles.
Au fond, quand Jacques Golfier leur a vendu la maisoa
dont il s’agit, il en étoit propriétaire en partie, et peutêtre pour le tout.
On dit, en partie, parce qu’il a hérité par moitié de
�,
3
Benoîte Goliier, sa fille, qui étoit propriétaire en partie
de cette maison.
On dit qu’il en étoit peut-être propriétaire pourletoi.it,
parce que cela dépend du plus ou du moins, de valeur de
la succession de Benoîte Golficr , dont il a hérité par
moitié.
En effet, si cette maison qu’il a aliéné aux défendeurs
n’excédoit pas en valeur la moitié de la succession de
Benoîte G oliier, il est incontestable qu’il n’auroit aliéné
que sa propriété et non celle de Marie G oliier, femme
Pcrsignat son autre fille.
Marie Goliier trouverait de quoi se dédommager
dans le surplus des biens de lav succession commune;
les défendeurs représenteraient au partage Jacques Goliier,
on ne pourrait se dispenser de faire tomber à son lot les
objets qu’il'aurait aliéné, et les défendeurs seraient, par
ce moyen , à l’abri de toutes recherches.
A la vérité , Marie Goliier conteste cette propriété h
son père, elle prétend qu’il l’a perdue par son convoi»
qu’il n’a conservé que l’usufruit de la portion qu’il avoit
recueilli dans la succession de Benoîte Goliier sa fille, et
on ne peut se dissimuler que cette question a été dans
tous les temps tres-controversée dans les pays régis par
le droit écrit.
Mais dans cette question, comme dans beaucoup d’autres
l’incertitude n’est née que parce qu’on s’est écarté du texte
de la loi pour se perdre' en gloses arbitraires.
Les deux lois le plus généralement citées sur cette
matière, sont les lois fœ m in œ et generaliter au code de
secundis nuptiis.
A 2
�4
_
La première de ces lois prive les mères qui passent à
de secondes noces de la propriété de tous les avantages
qui leur ont été faits par leur premier mari.
Elle les prive également de leur portion virile dans la
succession de leurs enfans du premier lit dont elle leur
laisse seulement l’usufruit.
'
Quod mater ex filii prions matrimonii successione
lucratur ejus proprietatem cæteris defuncti fratribus
tenetur servare.
*
.
La loi generaliter va plus lo in , elle assimile les maris
aux femmes pour les peines des secondes noces , quant
aux biens qui leur sont provenus directement de leurs
femmes.
'•
P a ter lucra d o ta lia com m unibus liberis servare tenetur.
Mais cette loi est muette sur les biens qu’ils recueillent
par le décès de leurs enfans du premier lit.
Fachinée qui a amplement traité cette question dans
son traité de controversiis , livre I I I , chapitre L X I V ,
s’élève avec force contre les docteurs q u i, substituant leur
opinion au texte de la lo i, ont élevé des doutes sur ce
point.
Il soutient que la loi fæ m in æ , qui veut que les femmes
qui ont passé à de secondes noces conservent les biens
qui leur sont provenus par le décès de leurs enfans du
premier l i t , à leurs frères et sœurs germains , cæteris
defuncti fratribu s, ne peut être appliquée aux pères,
ad virum secundo nubentem nequaquam pertinere.
Il rappelle le texte des lois , et notamment ces
expressions du chapitre III de la novelle I I ; sicut enim
�5
patres, si ad secundas nuptias veniant, non fraudam us
filiorum suorum successione. Nec aliqua est le x aîiquid
taie dicens.
■
.
Il insiste sur-tout sur ces dernières expressions. Nec
aliqua est lex aliquid taie dicens , il n’y a point de loi
qui prononce cette peine contre les pères.
Ce qui a paru décider les differens auteurs qui se sont
écarté du texte des lois pour comprendre les pères dans
cette peine de privation de la succession de leurs enfans
comme les mères , c’est qu’ils ont cru voir parité de
raison entre les pères et mères qui ont passé à de secondes
noces, mais c’est en cela qu'ils se trompent, et pour s’en
convaincre il suffit de rappeler ce que dit h ce sujet
Bicard dans son traité des donations entre vifs, partie I I I ,
chapitre I X , glose 5 , n.° 1 358.
“ Il faut prendre garde , dit cet auteur , qu’il y a une
>> différence à faire en cette occasion entre le père et la
» mère ; car quoique la loi j'œminœ qui avoit d’abord été
>> faite contre les femmes seulement, ait été étendue contre
» les maris par la loi generaliter du même titre , code , de
!> secitndis nuptiis, ce n’a été que pour les gains nup>> tiaux , et non point pour les successions des enfans dont
>> nous parlons, lesquelles, parle droit romain appartenant
>) aux pères en vertu d’un titre beaucoup plus éminent
>j que n’étoit celui des mères, et en conséquence de la
t> puissance paternelle qui étoit d'une grande étendue, et
accompagnée et toute pleine de prérogatives, il ne faut
>» pas s’étonner si la. privation de la propriété de la suc
>> .cession des enians prononcée contre les mères en cas
A 3
�6
» de seconds mariages , n’a pas été prorogée contre Ie3
» pères, quoiqu’ils aient été égalés pour les biens qui
>> leur provenoient des libéralités de leurs femmes. >>
Il donne dans le n.° suivant un plus grand déve
loppement à cette opinion , et il termine par dire que
par la dernière jurisprudence, non plus que par l'ancienne ,
les pères n’ont jam ais été assujettis à cette peine.
Il rappelle un arrêt du parlement de Toulouse du
26 janvier i5 6 8 , cité par Cambolas , qui paroît avoir
jugé le contraire, et il s’explique ainsi à l’occasion de cet
arrêt :
<< Je ne puis pas abandonner le texte d’une loi pour
>> me rendre à l’autorité d’une chose ju gée, souvent sur
>y les circonstances particulières du fait, et quelquefois sur
>> une contestation mal instruite et mal défendue par les
>> parties.
Dom at, dans ses lois civiles, liv. III, tit. I V , sect. IIs’explique encore ainsi à la suite du n.° V I :
« On a restreint la règle expliquée dans cet article à la
» mère seule, sans y comprendre le père, parce que cette
>> novelle de Justinien ( 2 2 ) d’où la règle a été tirée, est
» bornée à la mère. >>
Il ajoute a la vérité qu’il semble que leur condition
devroit etre égalé ; mais cette réllexion ne change rien
au fait qu il atteste, qu’on a restreint la règle à la mère
seu le, sans y comprendre le père.
Lebrun dit aussi, liv. III, cliap. I X , n.° X V I I , que
n l’on doute que la même peine ait lieu à l’égard du
» père qui se remarie, parce que les lois du code ne font
�.
7
>) mention que de la mère >>; et après avoir rapporté les
textes pour et contre sur lesquels ces doutes peuvent être
fondés, il ajoute » qu’au reste nous tenons pour maxime
>> que toutes les peines des secondes noces qui ne sont
>> point exprimées dans l’édit de i5 6 o , n’ont point lieu
» en pays coutumier; ainsi parmi nous, d it-il, les pères
» et mères succèdent à leurs fils en pleine propriété, quoi
>> qu’ils se soient remariés, et ces seconds vœux ne dimit> nuent rien de leurs droits à cet égard. >>
» Il résulte de tout ce que nous venons de dire, premiè
rem ent, que tous les auteurs conviennent qu’il n’y a point
de loi qui prive les pères remariés de la successioq de
leurs enfans, ce qui seroit décisif en leur faveur, parce
que les lois pénales ne peuvent se suppléer, non debemus
esse asperiores legibus .
Secondement, que quelques auteurs n’ont paru se déci
der à appliquer aux pères les lois rendues contre les mères
pour la privation de la succession de leurs enfans, ou qu’ils
n’y ont trouvé de doute que parce qu’ils ont cru y voir
parité de raisons, et qu’en cela ils sont tombés dans une
erreur manifeste , attendu, comme le dit Ricard , que par
le droit romain la succession des enfans appartenoit aux
pères en vertu d’un titre beaucoup plus éminent que riétoit
celui des m ères, et en conséquence de la puissance pater
nelle qui étoit d'une grande étendue, et accom pagnée et
toute pleine de grandes prérogatives.
Troisièmement, que leur décision en cela est d’autant
plus erronée qu’elle est contraire à là maxime générale
du droit , suivant laquelle dans la désignation du sexe
A 4
�.
' 8
fém inin, le sexe masculin n’est pas compris, fœ m in œ i sexus
appellatione masculinum non intelligiw r, et que c’est sur
tout dans cette circonstance qu’on peut appliquer avec
exactitude*cet adage de droit, inclusio unius est exclusio
alterius.
. Quatrièmement, que si celle question a été controversée
_dans les pays régis par le droit écrit rigoureux , comme les
parlemens de Toulouse et de Bordeaux , elle n’a jamais
dû l’être dans les pays du droit écrit' du parlement de
.Paris, et sur-tout dans ceux où , comme l’Auvergne , le
droit commun est le droit coutumier, dans lequel toutes
les peines des secondes noces, autres que celles portées
par l’édit de i56o , sont inconnues.
Au surplus , cette' question doit bien moins être
controversée aujourd’hui que les secondes noces ne sont
vues que d’un œil favorable, et que la nouvelle législation
tend à les encourager ; quand donc cette question auroit
pu , dans d’autre temps, donner lieu à quelqu’incertitude,
elle cesseroit d’en présenter dans ce moment, ou loin
d’ajouter aux lois pénales des secondes noces , tout concourt
à les abroger.
.
Ce premier point doit donc être regardé comme cons
tant que Jacques <jolfier a succédé en toute propriété à la
moitié des biens de sa fille, d’où il faut conclure, premiè
rement , qu’il a vendu sa propre cliosc au moins en partie.
Secondement, qu’avant de savoir si on peut actionner
Maurice Couzon et sa femme en éviction de tout ou
partie de la maison dont il s’agit, il faut qu’il soit fait un
partage, en leur présence, de la succession entière de Benoîte
�•
§
9
Golfier, pour savoir si Jacques Golfier a excédé ses droits
en vendant la maison dont il s’ag it, et jusqu’à quel point
il les a excédé.
■ '
Mais quand on voudrait oublier pour un instant le droit
de propriété qu’avoit Jacques Golfier dans cette maison,
Marie G olfier, sa fille , ne serait pas recevable dans
L’action en éviction qu’elle a formé contre les défendeurs,
parce qu’elle est héritière de son père.
Personne n’a jamais.douté qu’un fils héritier de son
père ne peut être admis à évincer l’acquéreur de ses biens,
parce que tout héritier est tenu d’entretenir les faits du défunt,
et quêtant lui-même garant de toute éviction étrangère ■
>
il est à plus forte raison garant de sa propre action, et
par conséquent non recevable à la former.
On ne contestera sûrement pas ce principe , mais
on ne manquera pas de dire que ce qui est vrai pour un
héritier pur et simple-, ne l’est pas également pour un
héritier sous bénéfice d’inventaire qui, ne confondant pas
ses droits personnels avec la succession du défunt, peut
tout-à-la-fois évincer l'acquéreur de ses propres biens, et
conserver la qualité d’héritier sous bénéfice d’inventaire du
vendeur.
Il faut distinguer, avec le ■savant d’Argentré, ce qu’il
y a de vrai dans cette proposition, et ce qu’elle contient
d’erroné.
Après avoir dit qu’on ne trouve pas un seul juriscon-*sulte ancien ou nouveau qui ait osé mettre en question s;
■un hls .héritier pouvoit être admis à évincer l’acquéreur
4e ses biens aliénés par son père, il ajoute au n.° 23
•
A 5
�10
que cela doit avoir lieu , même pour le fils héritier sous
bénéfice d’inventaire.
Quæ vera sunt, etiam si fdius non nisi e x inventario
hœres sit.
Mais il modifie à l’instant cette décision , en disant que
l’héritier sous bénéfice d’inventaire ne peut néanmoins être
repoussé de l’éviction que jusqu’à concurrence de ce qui
se trouve dans la succession.
Q uandiu quidem in hœreditate e s t , unde compensetur
tantum quantum hæredi périt rei suæ alienatione.
Si en effet la succession ne suffit pas pour le remplir
de ce qu’il perd, il est juste qu’il retrouve ce qui lui
manque dans les mains de l’acquéreur.
Sic tamen n ejiliu s, hœres etvindicans , ab am plioripartis
vendicatione repelli possit quam pro qua hœres est.
Cet auteur en donne aussitôt la raison en ces termes *
nam in cætero extraneus est. Il est étranger dans tout le
reste , c’est-à-dire dans tout ce qui excède les forces de
la succession.
C’est-là l’avantage du bénéfice d’inventaire, l’héritier
au moyen de cette précaution n’est pas tenu des charges
au-delà des forces de la succession, mais il en est tenu
in quantum rei substantiœ ad eum devolutœ valeant.
Cette décision est conforme à celle de tous les auteurs
qui ont prévu la question , et notamment de Dupcrier
qui pose la question en ces termes, tome 3 , livre II
question 4 :
<( Si l’héritier par bénéfice d’inventaire peut aussi peu
v impugner le fait du défunt que l’héritier pur et simple.»
�11
Il commence par établir en principe que tout héritier
est obligé d'observer le fait du défunt quoique préju
diciable à son propre droit.
“ Le bénéfice d’inventaire , ajoute-t-il , ne déroge
y point à cette maxime, si ce n’est qu’elle réduit l’obliy gation que l’héritier a d’accomplir les faits et promesses
y du défunt à la valeur des biens qu’il en reçoit, qui est
j le seul eiiet du bénéfice d’inventaire, qui n’a été intro
y duit que pour empêcher que l’héritier ne soit tenu
> par-dessus la valeur de l’hérédité, et par conséquent il
y 7 1 a pas plus de droit que l’héritier pur et simple jusqu’à
y la valeur des biens de l’inventaire, suivant le sens vériy table de la constitution de Justinien bien entendue, et
> la résolution de tous les bons interprètes , tels que
y Faber, Périgrinus, Paul - de - Castres , Balde , Jazon,
y Boërius , Grassus , Cancerius, Barry et plusieurs autres
y qui tiennent to u s, d it-il, que l’héritier avec inventaire
y ne peut point vendiquer son propre bien aliéné par le
y défunt jusqu’il la valeur des
biens de linventaire, à
y concurrence
de laquelle il représente absolument sa
y personne, y y
. A la vérité L ebrun, après avoir présenté la question
comme très-importante et avoir rapporté quelques auto
rités pour et contre, termine par décider que l’héritier
bénéficiaire peut revendiquer l’héritage en son en tier,
sans qu’on lui puisse objecter la confusion ni du tout,
suppose qu’il soit seul héritier, ni d’une partie supposé
qu’il ait des cohéritiers.
.
Mais premièrement cet auteur ne dit rien de son chef
�12
y
,
'
jKjur justifier son opinion sur cette question qu’il convient
lui-même être très-incertaine.
Secondement, on voit qu’il ne connoissoit pas l’opinion
de d’Argentré, de Duperier et de tous les docteurs qu’ils
citent.
Il y a tout lieu de croire que s’il les avoit connu, iî
n’auroit pas hésité à' se décider en faveur de l’acquéreur
qui a pour lui le pincipe général que l’héritier est garant
des faits de celui qu’il représente, et que le bénéfice d’inven
taire n’a été inroduit par les lois que pour mettre ses droits
à couvert en cas d'insuffisance de la succession:, d’où il
résulte quêtant héritier jusqu’à concurrence des forces de
la succession, il est garant de son action jusqu’à' concur
rence de cette suffisance , et par conséquent non rccevable
à la former.
On peut rappeler à cette occasion ce que- dit Lebrun
lui-même à Ja suite de cette discussion , << qu’il ne faut
» pas s’imaginer que le bénéfice d’inventaire soit une herbe
n qui guérisse de tous maux. Nàm beneficium invert"
i> tarii non est herba b'etonîca quœ prosit ad omnia. »
Ainsi donc, en partant de ce principe que l’héritier
bénéficiaire est tenu d’entretenir les faits du défunt jusqu’à
concurrence de la valeur de la succession, les défendeurs
n’nuroient absolument rien à craindre de l’action qu’on leur
intente parce qu’il'reste, entre autres biens dans la succes
sion de Jacques Golfier, une maison située à la place du
Terrail qui vaut bien des fois celle qu’il a aliénée, que sa
snceession ne laisse aucun risque à courir, et que Marie
Golfier n’a eu recours à la qualité d’héritière sous beyé-
�*3
ficc d’inventaire que parce quelle a cru pouvoir abuser
impunément, soit de sa minorité , soit de cette qualité
pour vexer les acquéreurs de son père et tâcher de les
rançonner.
Au surplus, si elle prétend que les biens de la succes
sion de son père sont insufïisans pour faire face aux répé
titions quelle peut avoir, elle doit commencer par rendre
son compte de bénéfice d’inventaire pour établir la valeur
des biens et des charges, et éclairer les défendeurs sur le
vrai état de la succession ; jusqu’à cette reddition de
compte, et tant qu’il ne sera pas démontré que la succes
sion est insuffisante pour faire face à ses créances contre
cette succession, et spécialement à la valeur de scs biens
aliénés, elle n’est pas recevable à inquiéter les acquéreurs
de ces mêmes biens, et son action doit être rejcttée.
Ajoutons qu’en supposant que Marie Golfier put être
reçue à évincer les défendeurs , elle ne seroit pas dans
une position plus heureuse.
II faudroit alors faire estimer la valeur réelle et actuelle
de la maison dont il s’agit , les frais et loyaux coûts de
la vente et les dommages - intérêts que souffrent les
défendeurs par cette éviction, et ils resteroient en posses
sion de leur maison jusqu’à ce qu’ils seraient entièrement
remboursés de tout ce qu’ils seraient en droit d’exiger.
Non seulement la raison le dit ainsi, mais Lebrun qui
est si favorable aux demandeurs et qui pense que l’héritier
bénéficiaire n’est pas exclus de la revendication, le décide
de la manière la plus formelle.
•
» Mais, dit cet auteur à l’endroit cité , c o m m e , d\m
�>> cô té, l’héritier bénéficiaire est en possession des biens,
>7 et que, de l’autre, le tiers détenteur, aussitôt qu’il est
)) poursuivi pour le désistement, devient créancier de la
)j succession pour sa garantie, et a droit de faire rendre
>> compte i\ l’héritier bénéficiaire , ce tiers détenteur ne
>y doit pas être dépossédé pendant l'instance de com pte,
» et l'héritier ne doit point avoir une double provision. >>
Il est au surplus de jurisprudence constante au palais
que toutes les fois qu’un jugement prononce le désistement
d’un immeuble , à la charge par le demandeur en désis
tement de faire un remboursement quelconque au déten
teur évincé, on ne manque jamais d'ordonner le désiste
ment , à la charge de rembourser préalablement les sommes
dues au détenteur, parce qu’il n'est pas juste, comme le
dit Lebrun , que le demandeur ait dans ses mains double
provision , la chose et le prix.
JL / E S O U S S I G N É qu ia vu et examiné le mémoire
de Maurice Couzon et Jeanne Patifollel, su femme,
E s t i m e , sur la première question, qu’on doit la consi
dérer comme décidée en faveur des pères par ces seules
expressions de la novelle II : Nec aliqua est lex aliquid
taie dicens.
Il n’y a point de loi qui prive les pères remariés de la
succession de leurs enfans, les lois pénales ne s'étendent
pas d’un cas à un autre, et notre législation actuelle, favo
rable aux secondes noces, permet, moins que jamais,
d’ajouter h la rigueur des anciennes lois sur celle matière.
D ’où il résulte que Marie Goliicr ne peut etre admise
�i5
ù évincer les acquéreurs de ses biens aliénés par son père
qu’après qu’il aura été procédé au partage des biens de
Marie Richen , sa mere , pour fixer les droits qu’a recueilli
Jacques Golfier dans cette succession, du chef de Benoîte
Golfier , sa fille , et dont il a pu valablement disposer
comme propriétaire.
Sur la seconde question, le soussigné pense qu’il est
incontestable en principe, comme le tiennent tous les
auteurs cités dans la consultation, que l'héritier avec inven
taire ne peut point vendiquer son propre bien aliéné par
le d éfu n t, jusqu’à la valeur des biens de Vinventaire}
à concurrence de laquelle il représente absolument sa
personne.
_
D où il résulte qu’il doit être ordonné avant faire droit
sur l’action en désistement intentée par Marie Golfier,
contre Maurice Couzon et sa femme, qu’elle rendra son
compte du bénéfice d’inventaire, afin de connoître l’état
exact de la succession de Jacques Golfier , et s’assurer si
elle est insuffisante , ou non, pour faire face à la valeur
de ses biens aliénés, et des autres créances qu’elle peut
être en droit de répéter contre cette succession.
.
Délibéré et Clermont-Ferrand le i 5 germinal an g.
B O I R O T.
�1$
.
e C o n s e i l soussigné qui a vu le présent mémoire
et la consultation du jurisconsulte Boirot qui est à sa
■
> suite,
■
E s t entièrement du même avis et par les mêmes raisons.
Il ajoutera seulement sur la seconde question qu’il ne
croirait pas nécessaire de conclure à ce q u e , avant faire
droit sur la demande en désistement, il fut ordonné que.
Marie Golfier rendit son compte de bénéfice d’inventaire,
et il pense qu’on doit conclure à ce qu’elle soit quant à.
présent déclarée non recevable dans sa demande.
C’est en effet ce qui se trouve jugé dans l’espèce par
un arrêt du 6 mars 1 7 2 6 rapporté dans le recueil des
écrits de l’Epine de Grainville.
•
Arrêt fondé sur ce que l’héritier bénéficiaire n’est pas
recevable à revenir contre le fait de son auteur, lorsqu’il
retient les biens de la succession et qu’il n’a ni renoncé
ni rendu com pte, parce que fhéritier bénéficiaire ne repré-'
sente pas moins son auteur que l’héritier pur et simple;
que le premier a tous les droits du second, mais n’a pas
plus de privilège, tant qu’il reste h éritier; et qu’ils ne
different ensemble qu’en ce que l’héritier bénéficiaire a
l’avantage sur l’autre de ne pas confondre ses droits, mais
qu’ils demeurent en suspens et qu’il ne peut les exercer
qu’il ne renonce et rende compte.
On voit dans les motifs de l’arrêt que le sentiment de
Lebrun qui paroissoit contraire n’avoit pas été soutenu
par d'autres, et qu’il étoit contraire aux principes du
�1 7
.
,
bénéfice d’inventaire. A ce sentiment de Lebrun on
opposoit la doctrine de Ricard des substitutions liv. I I I ,
chap. X I I I , part. I I , pag.
, où cet auteur dit que
l’héritier bénéficiaire ne peut pas se plaindre des aliéna
tions faites par son auteur qu autant quil renonce ù la
succession.
E t c’est en effet ce qui fut jugé par l’arrêt du 6 mars
1726 ' qui déclara l’héritier bénéficiaire non recevable quant
à présent.
.
Délibéré à Riom le 20 germinal an 9.
’
'
A N D R A U D.
soussigné e s t du même avis et par les
( mêmes motifs; il ajoute sur la première question qu’ayant
été chargé en 1770 de faire une consultation sur ce point
de droit avec un des plus célèbres jurisconsultes de Paris,
Boucher d’Argis p ère, celui-ci avoit d’abord été d’avis
que le père perdoit par le convoi la propriété des biens
auxquels il avoit succédé par le décès de quelques-uns
de ses enfans , mais sur le rapport que lui fit le soussigné des
différentes autorités qui combattoient son opinion, il s’y
ren d it , et dit au soussigné qu’il réparerait l’erreur dans
laquelle il étoit tombé dans la nouvelle édition qu’il donnerait
L
e
C onseil
de ses œuvres. Il fut donc décidé que le père conservoit malgré
son convoi la succession qu’il avoit eu de quelques-uns
de ses enfans. Le soussigné eut occasion de consulter sur
cette même question un des plus savans jurisconsultes du.
1
■
�18
parlement, Duponchel qui étoit le conseil de ses confrères,
et il n’en fit pas difficulté.
Sur la seconde question, on ne peut rien ajouter aux
précédentes consultations, si ce n’est que Ricard à l’endroit
cité parle citoyen Andraud ne dit pas tout-à-fait ce qu’il lui fait
dire , mais seulement qu’il semble que l'héritier bénéficiaire
en renonçant puisse vendiquer même les biens substitués
en sa faveur, ce qui n’est pas la même chose que des
biens aliénés, mais le principe n’en doit pas moins être
regardé comme certain. Il n’y a en effet d’autre différence
entre l’héritier pur et simple et le bénéficiaire , que
celui-ci ne confond pas son bien avec celui de la succes
sion ; qu’il peut gagner, mais qu’il ne peut pas perdre.
A cela près, il est tenu des mêmes engagemens que le
premier.
.
Délibéré à Clermont-Ferrand le 20 germinal an 9.
DARTIS - MARCILLAT.
A
C L E R M O N T -FE R R A N D ,
DE L’IM PR IMERIE DE LA V EU V E DELCROS E T FILS,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couzon, Maurice. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Boirot
Andraud
Dartis-Marcillat
Subject
The topic of the resource
successions
acquisitions
droit écrit
droit coutumier
Description
An account of the resource
Mémoire pour Maurice Couzon et Jeanne Patifollet, sa femme, Défendeurs ; contre Marie Golfier et Jean Persignat, son mari, mineurs, François Jauzin et Annet Crohet, se disant leurs curateurs, Demandeurs.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie de la veuve Delcros et fils (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1795-An 9
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
18 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0121
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53662/BCU_Factums_M0121.jpg
acquisitions
Droit coutumier
droit écrit
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53708/BCU_Factums_M0209.pdf
99ed547116787ff604723f4f49662302
PDF Text
Text
M É M O I R E
P O U R
P ierre
COTANSON
et
/
M arguerite
'
C H E C L I N ,. sa
;- ,_-/»>• ■
. femme,
' .■
. ' intimes
x■
<
" «‘ r ‘ . ' ’ '
C
O
J a c q u e s
L
N T RE
•
/
C H E C L I N , a p p e la n t.
E Q U E L des articles C X X X I ou C X X X I V de l’o r
donnance de 1 5 3 9 , doit-on appliquer à la renonciation
faite par la fem me C outanson, en m in o r ité , p ar ordre
de sa mère qui étoit sinon sa tutrice légale, tout au moins
son adm inistratrice?
Si on préfère l’article C X X X I V , y a-t-il eu réclam a
tion dans les dix ans ?
Jacques C héclin est-il recenable sur son a p p e l, à sou
tenir les intimés non-recevables
qu’ils ont été in
A
�...................( 2 )
dûment forcés cle reproduire devant les mêmes juges
de première instance, u n e demande €n nullité de cette
renonciation implicitement comprise dans la demande en
p a rtag e, dont ils n’ont été déboutés qu’avec la faculté
d’exercer par action principale cette demande en n u llité ?
f
a
i t s
.
L e s frère et sœurs Chcclin et cinq autres enfans, sont
nés du mariage d ’A n d r é Chéclin avec M arie Coutanson.
L e père est décédé en mars i 7 7 o. Par son testam en t,
d u 16 du m êm e mois, il a légitimé chacun de ses enfans
a une somme de 800 fr. avec un ameublement. Il a ins
titué p o u r son héritière fiduciaire sa v e u v e , à la charge
p ar elle de rendre l’hérédité à celui ou à celle de leurs
enfans q u e lle jugeroit à propos : dans le cas où elle vien
drait ¿\ décéder sans avo ir fait ce c h o ix , le testateur nomm a
Jacques-Chcclin , appelant, p o u r recueillir l ’entière h é
rédité. L a m ère fut nom m ée tutrice de leurs enfans ,
avec décharge de toute.reddition „de com pte et revenu.
Cette ve u ve le fut encore aux sept enfans, sans excep
t io n , par avis de parens et ordonnance de justice du
26 avril 1770 , à la réquisition du ministère public
,ct elle déclara que q u o iq u 'elle put se dispenser tFaccepter
.cette charge , n éa n m oin s elle veut bien se charger de
la tu te lle , et p ro m it de bien et fid è le m e n t vaquer au
devoir de sa charge.
P a r le contrat de mariage des in tim es, du 9 février
1773-, leur mère et belle-mère constitua à sa fille 1,000 fr.
nu lieu de 800 qui lui avoient été légués par le père,,
�( 3 )
.
•et d'autres objets , le tout payable ¡\ longs termes de 60
francs par a n , p o u r tenir l ie u , est-il d it, a la future ,
de sa portion dans la succession de son père , qui étoit
é c h u e , de tout augm ent et supplément * et au m o y en
de c e , la fille mineure r e n o n ç a , sans dire au profit de
q u i , à tous ses droits paternels; mais immédiatement
après cette clause, elle se constitua en t o u s s e s biens, etdonna
plein et entier p o u v o ir à son futur de les rechercher.
L ’appelant contracta m a r ia g e , le 27 mai 1 7 8 7 ; les in
timés ne furent point appelés à cet acte : la m cre rem it
au fils l’ hérédité dont
elle
étoit c h a rg é e ,
et
quelque temps après.
P a r exploit du 13 prairial an 2 , les intimés
quèrent un tribunal de famille p o u r obtenir le
des biens d’A n d r é Chéclin et M arie G outanson,
communs.
'
'
I jG 2 nivôse an 7 , le tribunal du P u y rendit
décéda
'
provo
partage
auteurs :
' :
un ¡ju
gement contradictoire , par lequel « considérant que la
» demande en n u llité, form ée à cette audience par les
» demandeurs, tend à anéantir cet acte, et devient par
» là principale; que d’après les nouvelles lois, les tribu
» n a u x n e pouvoient en co n n o ître sans au préalable avoir
» épuisé la voie de la conciliation; c’est le cas de la re
» jeter..............
relaxe ledit Jacques Chéclin , de la de
» m ande en partage.........à la charge........... de p a y e r . . . . .
» en a rg e n t'o u c n 'iô n d et iV leur ch o ix.........s a û f a u x '
» m ariés Coutanson et Chéclin à se'pbihvoîr-, s ils y ' >
» sont.j'ondés , contre la renonciation ............... '»
Ci; jugem ent fut e x p é d ié , mais nullement signifié. lia
discussion s'étànt de rccUef engagée devant -le tribunal
A 2
�,
.
.
(
4
)
d’Yssingeaux, substitut* à celui du P u y , d’après la cédule
du 28 germ inal an 7 , les parties ne regardèrent ce ju ge
ment que com m e étant d’instruction; elles le reconnurent
expressément dans la rédaction du jugement du 5 ther
m idor, dont est appel. Elles discutèrent au fond. L a nullité
de la renonciation fut prononcée en conséquencedel’article
C X X X I de l'ordonnance de i 5 3 9 ) et le partage o rd o n n é .
L a cause appelée à to u r de rôle , en ce t r i b u n a l , & l'au
dience du a p ra iria l d e r n ie r , a été plaid ée; m a is , surlesC 0nclusions du citoyen s u b stitu t, il a sursis d-un m o ;S; p e n d an t
lequel temps l'expédition du jugement du 2 nivôse an 7
seroit rapportée.
Cette expédition est jointe : la transcription qui vient
d’en être faite par extrait, p ro u ve qu’en effet les expres
sions sont un débouté de la demande en partage , sauf la
faculté de demander la nullité de la renonciation ; mais
celui dont est appel établit aussi que les p a r tie s , en cause
principale, s’arrêtant plusau sens q u ’aux mots de cette rédac
tion, n’o ntregardéce jugem ent indivisible et contradictoire,
q u e com me simple instruction, puisqu’elles ont discuté sur
le fond.
M O Y E
N S.
II ne peut être question, dit l’ap pelan t, de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1639 >parce que M arie Coutanson n’a jamais été tutrice ni protutrice de sa fille, puis
que celle-ci étoit âgée de 17 ans, conséquemnient pubère ,
à l’époque du décès d’A n d r é Chéclin , et parce que celle
m è re , d’un c ô t é , ne devoit aucun com pte d’administration
à l’époque du contrat de mariage de sa £Ile y d’autant
�( 5 )
qu ’ elle en étoit expressément dispensée p ar le testament j
d’ un autre , elle n’a reçu aucune, disposition, p o u r elle
ni p ou r son f i l s , de la part de sa fille : qu au surplus les
parties étant domiciliées dans le ci - devant F o rez , il
convient d’écarter la jurisprudence du c i r devant parle
m ent de T o u lo u s e , mais b ien de s’aider, de la juris
prudence de celui de Paris qui n’adm ettoit(q u e jle .lapsde
dix a n s , conform ém en t à l ’article C X X X I V de cette loi ;
que sous ce r a p p o r t , les dix ans utiles ont été révolus., soit
qu ’ on les fasse courir de l’ époque d é j à m a jo r it é , soit
qu’ on, admette la suspension du délai jusqu’ au; 27 - mai.
178 7 , que la m ère a fait l ’ élection d’ hérîtier<en faveur de
son f ils , parce que dans ce c a s , au lieu de regarder l'action.",
du 13 prairial an 2 , com m e demande en nullité , il faut
seulement la. considérer com m e dem ande en partage', et.
ne rapporter cette demande en nullité-qu’au 28 germ inal,
an 7 , d’autant.plus que cette de mande est l’exécution d u
jugem ent du 2 nivôse an 7 , qu i conséquem m ent a a c q u is ,
p ar l’exécution , la force de chose j u g é e , et établit une fin
de non recevoir ' contre une dem ande qui est irrévo ca -.
blement prescrite.
•
R É P O N S E .
Cette discussion se divise en deux parties.
" i ° . C ’est l’article C X X X I et non l’article C X X X I V de
l ’ordonnance de 1639 , les ordonnances'de 1^49 et de 1667,
qui doivent être la base de la décision.
20. Si on se délerm inoit par 1 article C X X X I V , la
réclamation a été faite dans les dix ans.
Les autres questions ne sont que les accessoires des
deux principales.
�•
'
.
C6 )
P R E M I È R E
P A R T I E .
i y \
- s !N"ous déclarons tontes dispositions d5entre~vifs ou tes*
» tainen(aires, cjui seront ci-apres faites par les donateurs
» ou.testateuis, au p io fit de leurs tuteurs , curateurs, gar
» dicns,l aillisties et a u t r e s l e u r s a d m i n i s t r a t e u r s ,
» 'ê t r e nulles; de nul effet et valeur.» A rt, C X X X I de
rôtfdannance! de 1 6 3 9 .
•
'1;«. Et'.quant au six-vingt-unzièm e art;t.]C) faisant m en.
» n o n des donations, nous voulons et o rd o n n o n s, en in„ .terprétant ledit article , que toutes donations entre-vifs
» et testamentaires, qui seront faites p a r les don ateurs
* o u testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs,
» gardiens ybaillistres et
AUTRES
a d m in istra teu rs,
» soient nulles, et de nu L effet et v a le u r ; et telles les
¡0 avons declareeset déclarons par ces présentes ; ensemble
» celles qui frauduleusement seront faites d u r a n t le temps
» de ladite administration , à personnes interposées v e
» nant directement ou indirectement au profit desdits
» tu te u rs , curateurs , - gardiens , bdllistres et
»
ADMINISTRATEURS. »
Ordonnance de
AUTRES
1Ô49
Ces ordonnances ont été confirmées par celle de 16 6 7 ,
tît., X X l X , art. I ; elle oblige non-seulement les tuteurs*
pro tuteurs, curateurs, fermiers judiciaires, séquestres
g a rd ien s, mais encore t o u s a u t r e s q u i a u r o n t a d m i
n istr é
LES
biens
d ’a u t r u i
,
« à rendre com pte aussitôt
» que leur gestion sera fin ie , et les réputé com ptables,
5» encore que le compte soit clos et a r r ê t é , jusqu’à ce
�.
'
.(
7
)
„
-
»• 'qu’ils a ie n f p a y é le reliqu at, s’il en est d û , e t remis
» toutes les pièces justificatives. »
'
,
T e l étoit encore le droit romain. L e tuteur ¿toit censé
toujours tuteur jusqu’à ce qu ’il eût rendu com pte ; non est
•functus' o jjicio n is i ration es red d id en t,' Jusq ue-là il ne
'P ou voit être déchargé par quelqu’acte que ce f û t , suivant
la l o i , s i q u id e s t , idt. de auct. et cons. tutor. j et la glose
¡entend par ces mots , s i q u id , toutes sortes de conventions
entre le m in eur et le ,t u t e u r r ■mCme^les'transaçtÎG.ms j ut
.a ccep tilla tio , pactu m \ de n o n pet en do ^ tra n sa c tio ^ v el
delegatio. Il' en étoit de m êm e de to.ute .jespècerjd'admirnistrateur. L o i si q u is , ff. de n egot.' gesL \
:
D ans le m êm e droit ¡, l’action tutélaire ne prescrit que
par trente ans._ Il n’est pas^ possible ¡ de ?borner , -p a r l e s
conventions p articu lières, le .cours de cettér:prescription
légale ; c est c e- qui arriveroit', si on admettoit'la nécessité
de se po ur v oi r ,, dans- les d i x ans , contre des actes qu i
em porteroient la décharger de la tutelle..'
•
„
,
M o rn ac ad leg., X X I X y cod. l iv .'I I , tit, I V ? s’exp rim e
.ainsi : Docemus enim quotidianis .rerurn experùnentis
m hil prodesse tut a n quod transigerit in genere de tutelce suce administratione : nno nec si auditâ parte ra
tionuni suarurn minor fo e tu s major r libérationem ge•neralem de cœteris\omnibus ad tutelam spectantibus
dederit.. Oportet quippè rationes r e d d id is c u ti dis
pungi et claudi tandem autore judice. ¿Llitis et nisi ità
hœ cjîa n t nihil agit, citm usque ad annos t r i g i n t a
possit minor petere rationem , sub prétexta specicrmn
.post repertarum quçecumque generalis intercesserit
transactio : se/ya/nusque in eo .vulgard. heg„ cum ser.
,
,
,
�.
.
- '
.
( 8 5
,
.
de cohd. e t dem onstr. Q uce v u lt r.îan q u i s il ra tion ibu s
reddendis obnoxius reddére oportere rat lotie s ut dis
cutiatur sigdlaùm qiadquid egerit çel non egerit, citm
■aD
fct a dèbuisset.
,
-
Mïi-is rien nést plus 'énergique que ce q u ’enseigne
M . D üvaÎ dans sôn excellent traité de rebus d u b iis , en in
t e r p r é t a n t • les deux articles C X X X I et C X X X I V : « E t
» parce que s o m e n t y a difficulté sur lesordonnancesfaites
par L ou is X l l i e t Frahçois I , touchant la prescription
»•de dix ahs»contre la rescision des contrats faits p a rles
„ majeurs'termineurs ; ite m , si ladite prescription a lie u ,
» les dispositions faites par iceux m in eurs, au profit de
» leurs tuteurs ou a d m i n i s t r a t e u r s ; . . . . item p o u r le
» regard du tuteur ou a u t r e a d m i n i s t r a t e u r qu i
» auroit j o u i , par ¡l’espace de dix an s, des choses à
» lui délaissées par son m ineur ap rès'sa m a jo rité , ou
» avant la reddition de com pte ; le doute est grand
» à s a v o ir , si ladite prescription de dix ans a lieu en ce
” cas........* - M o v et d ubiu m q u o d le x est g en era lis e t in
» d istin ctè loq u en s............ Sed co n tra riu m est v en im
» Car il y a autre ordonnance touchant les dispositions
» faites par les-mineurs, au profit de leurs tuteurs
•» quelles elle ddclare nulles, de nul effet et
les-
valeur
» V o le n s em'm occurrere h u ju s m o d i d isp o sitio n ib u l
» etco n tra ctib u s q u a s h a b etp ro ùifectis. Pourtant l’autro
» ordonnance doit recevoir restriction et déclaration de
» celle-ci ; c’est-à-dire, qu ’elle n’a licu p our le regard des
» dispositions faites au profit des tuteurs et administra
» teurs, soit par contrat ou donation quelconque entre
» v i f s , ou à cause de m o r t 3 n’y fait riCu ci e
{j Ue i’o r_
donnanco
�( 9 )
», donnance touchant la prescription-'de dix ans subsé-
» q u en te, l’autre annullant les dispositions faites avec les
» tuteurs........ Car toutes les deux sont au m em e caliier
» et publiées en m êm e tem p s, l’an i ^39 3 p ou rq u oi la
» présomption de droit est que l’une se corrige par 1 autre,
» joint qu ’elle est con fo rm e au droit com m u n qui an nulle
» les contrats faits avec les tu teu rs, soit p o u r le regard
» de la disposition, ou d e l à tradition et possession.»
C ’est aussi la doctrine d e P a p o n jurisconsulte du F ores ,
pays des parties.j liv. V , tit. V I , nomb. 9 , de ses a rrêts,
et 3 *1*15, n otaire, liv. I X : « L e m in eur dans les 30 a n s ,
» contre la quittance peut v e n i r ................ à causé de dol
» dudit tuteur................ L es dix ans de l’ordonnance ne
» sont- pr.opres en ce cas ; ainsi devra le m in eur être
» reçu dans les 30 ans après son âge parfait. »
•
C ’est aussi l’avis de R o d i e r , comment at eur de l’ordon
nance de 1 6 6 7 , à l’article cité.
La
ju r i s p r u d e n c e d u
parlement:
de
T o u l o u z c a été
constamment conform e à ces auto rités, suivant le térnoinage uniform e de M eyn ard , de D,olive , de
de Catelan.
Serres ,
Il y a eu des variations au parlement de P a r is : dabord
un arrêt de 1 5 6 s avoit adopté l’art. G X X X I .
O n en
tro uve d’autres conformes dans Brodeau , le ttre -T :; dans
B a r d e t , tom. I I , liv. V , sous la date du 7 juillet 1636 , qui
p r o n o n ç a la n u l l i t é d’ une r e n o n c i a t i o n faite par une fille
de son p è r e , au profit de sa mère t u t r i c e , qui
n’ avoit point fait d ’ i n v e n t a i r e , et ne lui avoit rendu aucun
héritière
compte. D ivers autres
rapportés
p a r-C h e n u ,
Brodeau,
Bardet et M o n lh o lo u , ont adopté l’article C X X X I V ,
B
�,
.
10 ^ • .
.
m êm e sur de simples quittances données par des mineurs
à des tuleurs, sans com pte préalablement rendu. Il en est
cependant plusieu rs, notamment celui du 29 mars iô y ô ,
qui sont étrangers à notre e sp è c e } mais l’ordonnance
de 1667 a ramené à la pureté des principes ; et depuis
cette époque , le parlem ent de Paris 'a> rejeté la fin de
non-i’ccevoir des dix ans , p our n’adopter que la pres
cription de trente ans. L e s aiiets sont des 18 février 170 3,
i 7 décem bre 1706 et 26 mars- 17 0 7 . Celui de 1706
rapporté, au journal des audiences, tom. Y
liv. V I
chap. X L V , édition de 1 7 3 6 , ’ a annullé une transac
tion q u i avoit été • faite avec un hom m e chargé de
•
•
•
«|
Q
O ’
p ro cu ra tio n , et qui avoit administré p QUr des mineurs.
M . l’avocat g é n é r a l, J o ly - de - F le u r y , o b serv a , i Q. que
l ’on ne pouvoit appliquer à l’espèce l’art. C X X X I V ; q u ’il
n y a nulle prescription p o u r un administrateur qui n’a
rendu compte* qu'il est toujours débiteur. 2 0. Q ue tout
administrateur de biens de mineurs est protu teu r , et est
toujours présum é frauduleux.
Il est inutile à la cause de rem arquer la contrariété des
arrêts uniformes du parlement de T o u lo u z e avec la
jurisprudence vacillante de celui de Paris : d’une part
il n ’y a plus eu de variation depuis l’ordonnance de 1667:
d ’un autre côté , la com m une de Bas en Busset étoit
un dém em brem ent du L a n g u e d o c ; pendant le temps où
il a e x isté , le parlement de Paris a consacré p ar trois
a r r ê t s , le prem ier du 30 août 1 7 0 7 , rapporté par H enrys,
les deux autres des 21 juillet 1768 et 12 juillet 1 7 7 0 , la
maxim e rappelée par C hop in : tribunalium
jiu lla m p a r it le gui n m u ta tion cin .
v a ria tio
�( II
)
r
R a v io t, arrê tiste de D ijo n , distíngueles transactions, des
décharges. Il soutient que la jurisprudence qui accorde
trente années a u m in e u r , e s t préférable pour 1 utilité p u b li
a
/"
*
r
que. Il a transcrit un arrêt du 12 août 1 7 1 6 , qui a consacre
l’usage de cette c o u r , p our les trente ans. Enfin L a co m b e ^
au mot restitu tion y sect. Ire. n°. 4 , rapportant u n arrêt
du 26 janvier 1 7 4 5 , rappelle les mêmes principes que
fit valoir M . l’avocat général G ilbert.
’
Les jurisconsultes ont assimilé l’ obligation de rendre
compte à celle de rendre un d é p ô t , et les décharges pures
.et simples qui en sont données à des donations nulles de
•nullité absolue. Ils en .concluent que l’action dure 30 an s,
soit p our faire ¡rendre le d é p ô t , soit p o u r reven d iq u er
contre une disposition surprise par le dol à l’erreur , et à
une facilité*irréfléchie, n . , *
f ■r '
:.i
Personne ne m éconnoît l’autorité des arrêtés d.e M . de
Jjamoignon, rédigés, d’aprèsla lettre du célèbre A u z a n n e t ,
par le concours des jurisconsultes et des magistrats les plus
.renom m és et en expérience et en p r o b it é , dans le temps
où Louis X I V ayant donné , c o m m e , de nos j o u r s , B on a
p a rte, la paix à,l’E u ro p e , prit com m e ce hpros dont on
connoît les sollicitudes p o u r la rédaction des différens
codes , toutes les précautions p our retrancher la chicane.
.
Les arrêtés 127 et 1 2 9 , portent les mêmes dispositions
que l’article Ç X X X I de l’ordonnance de i 5 3 9 >
le s.o r
donnances de 1^49 et 1667.
Bien loin que la législation nouvelle ait p orté aucun,
c h a n g e m e n t, le régulateur suprême des tribunaux a con
sacré les mêmes principes par trois jugeinens des 13 prai
rial,, 3 messidor an 4 et s5 frimaire an xo,
*
B 3
/
�( Ï2 )
_
/ L e prem ier a admis la n u ll it é d'une cession faite par
‘’P ierre D uran d , en faveur de son frère, C lau d e, quoique
celui-ci ne fût pas majeur lors du décès du dernier de ses
asccndans, et q u ’ il y eut eu un autre tuteur. Il a été regardé
, com m e étant administrateur comptable.
L e deuxièm e a- cassé .comme contraire à l’article
• C X X X I de l’ordonnance de 1539 ? et à l’article 1er. titre
29 de 1 ordonnance de i 6 6 y , et com m e contenant une
fausse application de l’article C X X X I V de la mêm e ordon
nance de i 539 , un jugement du tribunal d’appel d’E v a u x ,
q u i avoit déclaré non-recevable, pour n’avoir pas été for
m ée dans les dix ans de la m ajorité, Ia demande en nullité
d ’ une renonciation faite par une fille m ineure, au profit
de son beau-frère , moyennant une constitution qui lui
fut faite par sa m è r e , tu trice, qui-ne lui avoit pas rendu
com pte.
' "
L e troisième a jugé dans le sens de l ’article C X X X I V
de 1 ordonnance de 1639 , en cassant un jugement du tri
bunal d appel de P a n s , qui avoit écarté la fin de non-recev o i r , en qualifiant donation dos nclcs qui 11’cn «voient pas
le caractère. Ce jugem ent, loin d’être contraire aux deux
autres, les corrobore en faisant ressortir la différence que
les jurisconsultes et les avocats généraux , ]0rs des arrêts
précités, ont faite, des deux articles C X X X I et C X X X I V .
L a femme intimée est dans un cas bien plus favorable
que Gabitelle L apo ito . C e llo -c i avoit renoncé au profit
de son b e a u - f r è r e , au lieu que Marguerite Chéclin n’a
dirigé sa renonciation q u ’en faveur delà masse de l’hérédité.
Si dans la rigueur du d io it on ne considéroit pas sa mère
com m e étant sa tutrice, ou ne peut au moins contester et
�'( *3
le fait d’administration en lui-m êm e et les titres qui la lui
ont c o n féré e, le testament du p e r e , 1 acceptation spon
tanée qu’elle a faite de la justice de la qualité de tu tr ic e , et
sa promesse judiciaire de rendre compte. Ce seul fait d ad
ministration assujétissoit cette m ère à rendre compte. Les
lois s’expliquent gén ériquem en t p ou r tous les adminis
tra te u rs , que l’arrêt de 1706 a appliquées à un simple
mandataire. Mais les expressions de l’ordonnance de 1667 ,
ne peuvent laisser aucun prétexte d’équivoque. D ’apres le
procès verbal de cette o rdo n n an ce, on avoit inséré dans
la prem ière rédaction ces expressions & économ e ¡ com m issa ir e etm c u id a la ire , et le législateur préféra celle (^admi
n istrateu r, em p loyée dans les ordonnances de 1639 et 1549.
H é ! qu’im porte que le père c o m m u n ait dispensé , par
son testament, sa v e u v e , qu ’il n o m m o it tu tr ic e , de faire
inventaire et de rendre com pte? D ’abord, M arie Coutanson
s’est obligée judiciairement de J id è le m e n t v a q u e r au de
voir de sa charge. Sans d o ut e , le premier d evo ir d’une
tu tr ic e , d’une usufruitière , d ’une administratrice , est de
faire in ven taire, de constater ce qu’elle prend et d ’en ren-j
dre compte. '
’
'
•
. .
.
Mais d’ailleu rs, cette obligation ne souffre point de
•dispense j elle e s t , de droit public , établir, par la loi V ,
ita autem , JJ'. liv. 2 6 , tit. 7 , n °. 7 , J u lia n u s . Q u id a m
decedeiis filiis su is d éd ir a i tu to r e s , et a d jecera t, eos
aneclogistos esse r o lo , et a it J u lia n u s tutores n is i bonani
■Jidem in a d m in istra iio n e prœ st/terin t, d a n m a r id e b e r e ,
quannñs testam ento com p réhen sio n sit ut a n eclog isti
essent : n e c e o n om in e e x causa fid e i-c o m m is s i q u ic q u a m co n seq u i d e b e b u n t, ut a it J u lia n u s : ac est veva>
�( i4 )
ista s entent l a , nem o en im j u s
'
-t e r e
potest
pu b l ic u m
r e m it
-
hujus m o d i cautio nib us nec rn u ta r e j'o r-
niam a n tiq u itù s constituta m .
M arie Coutanson n’a point usé de bonne foi en ne
faisant point inventaire , .et en exigeant une renonciation
- e u b lo c , d e là part sa fille, sans lui présenter seulement
d’ instruction.
:
.
Cette renonciation nest qu’une simple décharge en
faveur d un comptable , gratuite , puisque la m ère n’a
rien ■
fourni de sa substance^ elle s’est opérée p a r l e dol
■
et la fra u d e , en privant sa fille de la plus légère con-noissance de la succession. O n peut appliquer la dispo
s itio n de,.la loi I X q u i cùm tut. g, §. 2. ff. de tutorib.
•q u i ,ignoi ans universa quee m v ero era n t in stru in en tu n i
' tra n sa ctio n is 1sin e aqitilta n a stipitlcittone
non tant' ‘d ecip itu r qricim p a c is c itu r .
in terposu it
■
. Cette mère , 'cette tutrice ou administratrice com p table,
a encore usé de dol , en laissant entrevoir à sa fille l’espoir
d’une élection d’ h é r itie r, qui l’eût fait profiter de l’effet
de sa renonciation.
,
.‘
•
Q ue les n ovateurs, entraînés par l’exem ple du tribunal
-d’É v a u x , ne disent donc plus que les a ffa ires doivent
a v o ir une f in , q u 'il f a u t proscrire les vieilles recherches.
Ce seroit substituer l’arbitraire aux lois. Ces lo is, en
classant chaque prescription dans les termes q u e lle a éta
b li? , n ont introduit d^autre âge que celui q u ’elles ont
conibiné avec tontes les circonstances qui rendent plus
ou moins favorable la lenteur de ceux quelles ont îe •connu être dans l’impossibilité d’agir , par ce principe
contra non valen tem agere non cu rrit prcvscriplio. Ainsi
�( 15 } .
.
une affaire de deux siècles est toujours jeune, tant qu ’elle '
n’est point trop vieillie par le laps de temps utile qu il
faut pour l’éteindre.
D E U X I È M E
_
P A R T I E .
Il y a discordance sur l’ époque où l’action a dû être
e x e rc é e ,e t sur l’époque où elle l’a été réellement.
L ’appelant prétend que l'intimée a d û agir dès l’ins
tant de sa majorité , qui a eu lieu le 23 février 1 7 7 7 ,
et qu’elle n’a form é sa demande que le 28 germ inal an 7.
. Celle-ci soutient au contraire qu’ il y a eu'slispension
de prescription , tant qu ’elle n’a p u a g ir, et q u e lle I V
fait u tile m e n t, le 13 prairial an 2.
' ■ v'
L ’in tim é e , en m êm e temps q u ’il lui fut fait u n e;d o t, 1
se constitua en outre en tous ses' biens :présens et
à v e n ir, p ou r ;la recherche desquels elle donna sa p r o
curation à son mari. Or,- en quels autres biens présens
p o u vo ien t consister cette constitution p a rticu lière, si ce
n ’est dans la demande en partage auquel la m ère venôit
de la faire renoncer ,’ ;dans lés biens de son p ère ! M ais
la fem me a manifesté , par ce m êm e acte, son intention
de réclamer contre la renonciation qu ’il renferme , et
elle n’a pu le faire sous la puissance maritale , soit parce
que l’autorisation du mari étoit indispensable, soit parce
qu’il en avoit été expressément chargé par le contrat demariage. Sous ce prem ier r a p p o r t , i l y a eu suspension de
prescription. Il est reconnu constant dans le ressort du
ci-devant parlement de T o u l o u z c , conform ém ent ¿\ la loi
1 6 , ff. d e fu n d o d o ia li, que la prescription du fond dotal
�( 16 )
ne court pas contre la fem m e pendant le m a ria g e, sinon
qu'elle eût com m encé auparavant ; Serres , liv. II ,
tit. V I I I , page 192 j Catelan et V edel , liv. I V , chap.
X L V ; Despeysses liv. Ier. , tit. X V , sect. I I I , n°. 29.
C ’est
aussi ce qu’enseignent D o m a t , l i v . I I I , tit. V I I ,
sect. V , n°. V I I j L a com b e , verbo p r œ scrip t.,
n°. 1 ; H e n rys , liv. I V , Q. i y 5 .
sect.
V II,
M a is.la prescription a été suspendue de diverses autres
manières.
O n 'p o ü r r o i t e m p lo y e r, p our prem ier m oyen , reflet
d e là puissance maternelle méconnue dans le droit romain ,
et qui semble ctre' adoptée par plusieurs de nos auteurs
m od ern es, d après les rédacteurs du répertoire de jurispru
dence, verbo pu issa n ce p a ter n elle, sect. I I yet le projet d u :
codé c i v i l , surtout d’après l’arrêté 128 de M .le P. Lara oi
gnon ’ aù sujet précisément de la prescription dont il s’agit
au procès • « ladite prescription de trente ans, dit ce m a
» g is tra t, ne court au profit du père et D E L A M È R E , de
» l’aïeul ou DE ï/ A ï e u l e de leur vivan t , nonobstant que
35 la tutelle soit Unie. »
(
Cependant la veuve Chéclin avoit d’autant plus d’a u to
rité sur sa fille q u e lle lui avoit été transmise par le père
dans son testam ent, et confirmée par la justice, en sa
qualité de tutrice , qualité synonymifiée avec celle de
maître
suivant la loi ad ea 1 5 y.
de res. ju r. où.
celui qui dispose en faveur d’une personne à iaquellc il
est soum is, est réputé disposer contre sa v o lo n té ; Telle
non cred itu r q u io b s e q u itu r im perio dom ini. L a volonté
est fa m é de toute disposition , et l’on ne regarde point
com m e volonté
celle qui est forcée. C o a cla vo lu n ia s
n on
�•
C 17 >) ,
,
non h a b etu r pro volu htate Cujas ad tlt. eôd. s i q m s
cthquem tu to ri prohibùer. vel coeger. -Décision fondée
sur ce qu’il n’est rien qui soit si .contraire au consente
ment que la force ou la crainte qui l’extorque : N ih il
co n seiisu i tam contrciriim i est q u itn i vis atque m etus.
L o i 1 1 6 , if. de reg. ju r .
• • •;
•
S i , com m e il n’en faut pas d o u t e r , la m ère a usé de sa
puissance sur sa f ille , en la faisant ren o n c er, il est bien é\ v*
dent que la m êm e cause a forcé cette fille au sile n c e , pen
dant tout le temps que sa m ère a vécu ; et le gendre a telle
m ent partagé la condescendance et la crainte de sa fem m e ,
que non seulement il n’a pas usé de la procuration p o u r
rechercher le-bien d o ta l, mais encore il s’ est abstenu de
rien recevoir. N e résulte-t-il pas m êm e de ce silence une
pi’olestation continuelle contre la m odicité de la constitu
tion c o n v en tio n elle, et une intention bien manifeste de
réclamer contré?
t
• ... .
.
Mais un second m oyen de suspension de la prescription,
est la qualité d’usufruitière cleila mère p a ille testament du 1
père. lia fille n’avoit pas intérêt) cl’qgii* pendant'la durée de
cet usufruit. L a jurisprudence sur ce point est trop cer
taine p our s’ étendre d a v a n t a g e .'•'< .
U n troisième m oyen est la confusion des droits actifs e t
passifs, dans les mariés Cou tan-son et C.héclin. O n n’a pas
perdu de v u e ,q u e la renonciation dont il s’a g i t , n’a été
dirigée cil faveur de personne ni acceptée par personne.
L appelant p ou r écarter l’idée q u ’elle eût été faite en fa
veur de personne p r o h ib é e , a soutenu qu’elle tournoit au
profit de la masse de l’ hérédité du père ; mais cette masse
étoit eu. dépôt. L a remise pou vo it cil avo ir lieu en faveur
G
�r *8 ) '
_
de l’intimée , parce que M a rie Coutanson a eu la lib e lle
pendant toute sa vie d’ élire l’intimée pour la recueillir:
ainsi celle-ci auroit agi doublement contre ses in térêts,
de faire u n procès à sa mère. E n se l'aliénant, elle eût
écarté des dispositions bénévoles pour la transmission de
l ’ hérédité de son p è r e , et elle se fût attiré'son anim adver
sion , à raison de la succession maternelle ; elle a donc
agi sagement par le silence ,72e m a ter peju s fa c e r e t .
M ais, rep o n d 1 adversaire, tous vos motifs de crain te,
d esperance , ont cessé par les dispositions universelles
faites par la m ere , tant p ou r sa substance que p o u r celle
d A n d r é Checlin , par son testament du 3 janvier 1 7 8 5 , et
p ar m on contrat de mariage du 27 mai 1787. •
L a répliqué est absolue. J e n’ai connu ni l’im ni Tautre
de ces actes. L e premier p ou voit être rév o q u é à chaque
instant. Q uant au second, la m ère n’y a appelé ni sa fille ni
son gendre. O n peut conclure que c’est là le dernier p é
riode du d o l , et que c’est afin d’ éviter la réclamation contre
la renonciation , qu’elle a eu l’astuce de laisser ign o rer la
disposition irrévocable portée par le contrat de mariage de'
Jacques Chéclin*
E n un m o t , la renonciation n’ étant dirigée q u ’au p rofit
de la masse , elle n’a pu être que conditionnelle ou casuelle.
E lle eû t profité à la renonçante , si elle eût été élue à re
cueillir cette m êm e masse d ’ hérédité, et il falloit nécessai
rem ent attendre le sort de cette incertitude ^ de cette espé
rance.
Il doit donc dem eurer p our bien constant, que les inti
més n’ont pu , n’ont dû agir qu’après le décès de la mèrea n ’iv é depuis le ¿ 7 mai 17871.
�-
t x?^ .
,
.
Il reste à p ro u ve r que l’action utile a été intentée le 13
prairial an 2 , conséqucmraent avant les 10 ans.
O li! sur ce p o i n t , l’adversaire s’est créé une logique tout
ii fait com m ode } mais tout à la fois contradictoire et ridi
cule.
L e prem ier jugem ent du 2 nivôse an 7 , a débouté les
intimés de leur demande en partage, sauf à eu x à se p o u r
vo ir contre la renonciation.
L ’adversaire veut-il écarter, à la faveur du n on bis in
idem , cette demande en nullité d elà renonciation, sous le
p rétexte qu ’elle a été rejetée par ce jugem ent ? Il a soutenu
dans le procès verbal de n on-con ciliatio n du 14 floréal
an 7 ,' et il l’a répété jusqu’ à satiété, dans ses causes et
m oyens d’ a p p e l, sans en avoir dit m ot lors de la p lai
doirie sur laquelle est interven u le jugem ent du 5 ther
m id or an. 9 , que cette demande' a été comprise dans la
demande en p a r t a g e , du 1 3 prairial an 2.
L u i rétorque-t-on ce langage , p o u r établir d’après lu im e m e que 1 action en nullité a été introduite dans les 10
a n s ? Il sé retouvne| et v e u t to u t'à laMfois blanc et n o ir!
tantôt', que cette demande ait é té 'fo rm ée , le 13 prairial
an 2 r, et qu’en prêtant au ju gem en t du 2! nivôse an 7 , la
chose jugée et 1 exécution , elle soit éteinte 5 tantôt, q u e
cette demande n’ ait été fo r m é e , p ou r la prem ière fois,
r r 1
Q
•"
'
1
r ■
tjue le 20 germimü an 7 , et q u ’étant postérieure au terme
de 10 a n s , elle soit anéantie par cette espèce de prescrip
tion , de dix ans.
Séparons les élémens de cette big a rru re, de ce sophisme.
’ k o jugem ent du 2 nivôse an 7 a débouté., sauf l’action
en nullité 3 c’est absolument la m êm e 'chose'que s’ il avoifc
C 2
�( 20 )
p ro n o n c é, quant à p rése n t, non recevabJe,,ou un sursis^,
afin d ’observer la form e de la conciliation,' dès que l’exccption pérem ptoire de la nullité absolue, était consi*dérée com m e devant être une action principale , sujette
à ce préalable.
A u f o n d , chacune de ces trois dispositions renferme
deux parties indivisibles. I jg débouté, la fin. de non rece
v o i r , le sursis, ont également en vue le sort de la de
mande en nullité , qui doit être la base du rejet défi
n it if, ou de 1 accueil, de la demande principale ; en sorte
q u e , quelle que soit 1 expression, çe n’est dans le vrai q u ’ un
jugem ent d’instruction , et l’appelant l’a si bien rec o n n u ,
en cause p rincipale, q u ’au lieu de s’attacher à cette p ré
tendue fin de non rec e vo ir, il a discuté le fond de la ques
tion , et par l à , il est devenu lui-m êm e non-recevableà l’opposer sur l’appel.
,
!
C e s t en vérité abuser étrangement des m o ts , que depreter à la demande du 28 germinal an 7 , une telle accep
tion d e xecu tio n du jugem ent du 2 nivôse an y , qu’on
en infère une approbation du débouté , bien p lu s , une
persuasion d’un débouté p u r et sim p le, et définitif-•*mais
si l’appelant l’eut pensé a in si, en cause principale’ ,que
ne s’en tenoit-il à cette prétention ? D e ce q u ’il a dé
fendu au fo n d , ne peut-on pas lui ré to rq u e r, dans son
système de divisibilité d ’exécution du ju g e m e n t, du 2.
a lui-m êm e '-ai.culo
exérniv« la
1-, seconde partie
.•
.nivôse an 7! ,’ qu’il
-»
de ce jugement purem ent et simplement ; car si les inti
més ont été bien éloignés de demander le payem ent
du prix de la ren o n cia tio n , l ’appelant a bien senti qu’il.
W eût clé inutile tic foili'ir.
'
V- 1 '
Il !
�( te ) '
^
'
) îiMaintendnt 'ayons p p ü r certainf que 1 adversaire , en
a vouan t, soit dans le p r o c è s verbal de non-conciliation ,
soit clans les causes et moyens cl a p p e l, signifiées le 28 ven
tôse dernier, aveu indélébile en s o i , com m e conform e au
principe, au surplus formellement accepte pai la îeponse
signifiée le 24 floréal, que Ja demande en nullité delà renon
ciation a été;comprise dans ladem andeen p a rtag e,d u 1 3 ^ “
inaire an 2 , d’âprès m a xim eg en era h s p etitio in clu d it ea
om nia qu œ .in eii p etition e 'possunt in clu d i. Cet axiom e
est-encore appuyé; par un autre-: P e t i t 10 h 011 or uni poS)
sessiou is h œ red itn lis à iW tio n e m prçcsuppoiiit. L a de
mande en .partage r-excliit l’iidiée de préférence du p r ix
d ’une renonciation. In ç lu s io u n i us est e x c la sio a lte n u s .
• Semblable discussion sur ce p o in t, et sur l’application des
art. Q X X X I et
été jugée en ce
çitoÿcn iVerny
. l ie 2,5 février
C X -X X I Y , de 'l’ordonnance de 1 6 3 9 , a
t r i b u n a l, m êm e section présidée par le
à Vaudionce du 18 germinal dernier.
i y 5 6 , Jeanne B a rth élém y , par son contrat
de m ariage avec Jean P a g es, renonça, m oyennant 330 f r .r
aux successions de-son père échue,. et à celle iY échoir
de sa m è r e , non présente au Contrat, en faveur de Jean.
Barthélém y son frère. L e;m ari’ en donna quittance; L e 10
février 1 7 8 6 , Jeanne B arth élém y lit assigner lesenfans
héritiers de Jean Barthélém y p o u r-v e n ir à division et
partage. J u gem en t du tribunal du P u y , du 11 fructidor
nrii7 ? q u i déclare 9 q u a n t'à p r é s e n t, nonr-recevable, sur
ce q u e lle auroit dû se p o u r v o i r , avant to u t, contre la
renonciation de scs droits héréditaires. L e 11 bru m aire
®n 8 , nouvelle demande en partage , avec conclusion en
feviltité de la renonciation. Les,défendeurs opposèrent deux,
;
�t 22 )
^
Ens de n o n -re c e v o ir,' f u n e résultante''de ¡la quittance
donnée par le m a r i , l’autre de ce qu’il s’étoit écoulé près
de Irente ans depuis le décès, et plus de quarante ans depuis
la renonciation. Jugeirientdu tribunaIdeBrioude,du 3 ger
minal au 9, q u i , sans s arrêter aux deux üns de non-rece*
-voir, ordonne lé partage. Appel. A l ’appui on a in voqu é
l ’article C X X X I V de l ’ordonnance de 1 ¿39 ; on a désavoué
la qualité de tuteur dans le frère. L ’intimé s’est prévalu de
1 article C X X X I , de la qualité d’administrateur com p table,
et des deux premiers des trois jugemens du tribunal de cassa
tio n , dont il a été fait mention. A l ’audience, il prit fantaisie
a 1 appelant d im aginerlam êm e fin den on -recevo ir, qu’op
pose Jacques C h e c lin , sous le prétexte d’avoir exécuté le
jugem ent du Pu y qui déclaroit, quant à p ré se n t, non-recevable. C est ce qui donna lieu a la quatrième question insé~
rée-dans ce jugement: « Si une demande eh partage, ne côn» ton d u t-p o in t *de conclusions sur l'action en rescision:
» contre la renonciation , est suffisante p o u r admettre la
» prescription ? » L e jugem ent de B rioude fut confirm é,
plaidant le citoyen Pagès-Meyrr\ac , ’p o u r l’intimée. I;e
m o t i f 'q u i se rapporte à la quatrième question est ¡ainsi
conçu : « Considérant, qu ’à l'époqu eii laquelle a dû cesser
» la prescription de ce droit est celle du 4 février 1 7 8 6 ,
» jour 011 l’intimé a form é contre les appelans la de
» mande en p a rta g e , laquelle a été continuée par. l’exploit
» du 11 brum aire an 8, qui contient l’action en’ rescision
» conire la renonciation d o n t i l s’agiu
”■
; ■1.■• 1 . '
Il ne paroît pas q u ’on ^puisse rien opposer ît ce p ré
jugé si conform e au principe ; il y . a absolument parité
de raisons pour fixer l ’cpocjuc de la demande au 13 prairial
�( 23 )
_
an 2 , continuée" par la cédule du 28 germinal an 7, qui
contient- la .demande en nullité de la renonciation dont
'
il s’agit : d’autant plus que la prem ière de ses demandes a
eu expressément p o u r .objet d e . SE
R É GL ER.
SUR
les
successifs.
’
C ’est en v a i n , que l’appelant's’est flatté d’exclure par des
droits
chicanes, les intim és, d’une succession de va leu r de plus de
30,000 francs ; sans doute l’injustice d’une pareille ten
tative est assez démontrée.
•
'
Q u e l’on pèse la' va leu r dé cette renonciation par
e lle -m ê m e , par la nïère qui l’a obtenue par la fille qu i
l a f a it e ,p a r la concordance de la loi et de la jurispru
dence dans le lieu de la succession , p ar la faculté de
réclam er clans les trente ans ; m êm e par l’action intentée
réellement dans les d ix ans ; il doit rester évidem m ent
dém oïitrc que cette renonciation est caduque , com m e
étant faite au profit de la renonçante , si l’élection fidu
ciaire à laquelle elle p ou voit prétendre , eût été faite en
sa faveur ; que la m è r e , ne fût-elle considérée que com m e
curatrice ou simple administratrice ? a joint à sa puissance,
à son ascendant, le d o l , soit,en privant sa fille m ineure
et qui étoit sous sa dépendance , d’ un c o m p te , m êm e
d mstLuction , soit en lui laissant 1 espoir
de l’élection
d’héritier ; qu’en obéissant aveuglém ent , la fille a réclam é
contre cette renonciation au m om ent m êm e qu ’elle l ’a
faite , en se constituant ses droits présens qui ne p o u v o ie n t
etre autres que ceux auxquels l’aulorité maternelle venoit
de la faire re n o n c e r, et en donnant sa procuration à son
m ari pour en faire la recherche ; que 7 bien -lo in d ’a vo ir
ap prouvé cette renonciation faite à; v il p r ix et à termes-
�........
CC )
H
éloignés, il n’a été reçu aucun acompte '; que ce silence
m êm e est une m tci 1 uption , qu il n a pu courir de près*
c rip tio n , d a b o r d , en puissance m aritale,puis, parla nature
de la renonciation , tant que l’usufruit a d u r é , tant que
la crainte révérentielle ou tout au moins l’espoir d etre
■élue ont subsisté ; q u ’enfin il n > a point à hésiter d ’a p p li
qu er l’art. C X X X I de l’ordonnance de i 539 , et q u e ,
•quand la cause seroit décidée par l’art. C X X X I V l ’action
en nullité est implicitement renfermée dans la cédule du
13 p ia m a an 2 , dans 1 intervalle des d ix a n s ; que conséquem m ent le jugement dont est appel doit être con
firm é avec amende et dépens.
P u r conseil, C O U I J E R T - D Ü V E R N E T , anc. ju r isc .
C R O I Z I E R 3 avoué.
,
■Le
c o n s e i l
s o u s s i g n é , qui « v „ te pr#Sent
m é m o ir e , e s t i m e qu’il a été bien-jugé par le jugem ent
du tribunal d’ Yssingcaux.
L a m ère avoit été nom m ée tutrice de sa fille par le
testament du p è r e , antérieur seulement à sa m ort de peu
de jours. P e u im porte qu’elle fût alors pubère! le père
avoit jugé q u e lle avoit besoin d ê tre mise en' Wtelle ; les
parons en jugeront d e m e m e , lors de la confirmation de
la tu telle, qu i lut faite pai le juge des lieux. L a mère ellcm enic accepta la tutelle de sa fi 116 p u b è re, com m e celle
des autres cnians : de p lus, Iîi niere avoit l’usufruit clcs
biens
�.
- . ( 25)
.
biens du p ère par son testament; mais cet usufruit ne
p ouvoit frapper sur la légitim e de la .fille; par consé
quent devoit non seulement un com pte d’ instruction ,
mais m êm e un com pte d’administration pour la jouis
sance de la légitime. D ès qu ’elle devoit un c o m p t e ,
tant qu’elle ne l’avoit pas rendu , elle ne p ou vo it pas slipuler de sa fil/e, dans son contrat de m a ria g e, u n eirenon• •
«
r ' ciation qu i em portoit la décharge du com pte. D ’ un autre
côté , cette renonciation qui u’ étoit dirigée en faveur de
perso n n e, ni acceptée par p erso n n e, contrastoit singu
lièrem ent avec la clause subséquente du contrat de m a
n a g e , par laquelle la fille se constituoit tous ses biens et
donnoit p o u vo ir à son fu tu r m ari d’en faire la recherche.
X«a dernière clause détruisoit la prem ière. !La nullité de
la renonciation doit donc paroître évidente.
A -t-o n dû se p o u r v o ir , p o u r faire déclarer cette nullité ,
dans les dix ans, term e fatal des actions rescisoires, ou
l ’action s’est: elle p rorogée jusqu’à trente an s? L ’article
C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , celle "de 1649 et l’art,
p rem ier de celle de 1667 , mettent hors de doute la durée
de l’action pendant trente a n s , et l’ article C X X X I V de
1 ordonnance clé 15 3 9 , n ’a. nulle application aux actes
passés entre lés m in e u rs, m êm e devenus m ajeurs, et les
tuteurs qUi'n’ont pas rendu compte. C ’est ainsi qu’on le
jugea dans les temps les plus rapprochés de l’ordonnance
de 1 6 3 9 , dont l’intelligence devoit être aloi'S plus c o n n u e ,
com m e 011 peut le v o ir dans le passage du traité tic rébus
d u b iis , de M . D u v a l , qu ’on a transcrit dans le m ém oire.
S i dans la suite on s’é lo ig n a , contre tout p rin c ip e , de cette
jurisprudence on fut obligé d’y r e v e n ir , lorsque parut
'
D
,
�.
£ z6 )
,
.
l’ordonnance de 1 6 6 7 , et à dater de cette é p o q u e , les
arrêts rejetèrent constamment la fin de non-recevoir des
10 ans; aussi jurisprudence de la sénéchaussée d’A u v e rg n e
s’y é to i t-elle toujours conform ée. O n peut en citer trois
parmi un grand nom bre d’autres ; l’une au rap
p o r t du conseiller N e v r e z é , du 22 juillet 1749-, la seconde
l a
s e n
t e
n
c e
s ,
rendue à l’audience , lors de la prem ière cause de l’avocat
Beaulaton,
à ' présent juge
du tribun al, du 24 juillet
de la m êm e an née, et l a - troisième du 4 juin 1761 * au
r a p po r t du conseiller Brujas.
Ce ne fut que dans les premiers temps de la rév o lu tio n ,
qu ’ on parut vo u lo ir renouveler les questions, sans néan
moins q u ’aucune, des milliers de lois q u elle a enfantés ?
ait dérogé aux vrais princip.es’de la matière et.aux^ordonnârices qui les avoiént( consacrés ; mais le ■
tribunal , de
cassation les a maintenus. O n connoît surtout celui de ce
tr ib u n a l, du 3 messidor an 4 , qui a cassé le jugem ent du
tribunal d 'É v a u x , du 19 floréal an 3 ; et rien de plus^tranchant que les motifs et le dispositif de ce ju g e m e n t du
tribunal decassation.fcremier m otif : «Que l’article C X X X I
33 de l’ordonnance de 1 5 3 9 , déclare nulles toutes disposi
» tions faites en faveur des tuteurs et autres administra
» tours, directement ou indirectem ent, avant le com pte
» ren d u , et qu’ une ‘renonciation faite pm* un mineur en
» faveur d’une personne qu i administroit ses biens et
» a°*issoit p our les héritiers d’ un com p table, présentoit un
« avantage indirect en faveur de ses h éritiers:» Second
m otif : « Q u ’en pareil cas, l’action subsiste pendant trente
» a n s , parce que selon 1 article Ie** du titje
X X I X i de
» l’ordonnance de 1 6 6 7 , le comptable ne cessant d c l ’cLre
�que par la reddition de son com pte c 'est le com pte
» seul qui peut éclairer le m in eur sur ses i n terets.
Troisièm e m o tif : Q ue l’article C X X X I V de l'ordonnance
de 1 5 3 9 , qui restreint le délai a dix ans, n e' st relatif
qu'aux actions rescisoires qui n' o n t rien de com m un avec
celles en n u llité , qui durent trente ans, et p o u r lesquelles
' il n’est pas besoin de lettres. E nfin le dispositif, qui casse
le ju gemens du distr ict d'Évaux c o m m e contraire aux
du titre X X I X de l' ordonnance de 1 5 3 9 e t p r e m i e r
d u t i t r e X X I V d e l ' ocornte
dnaontn
unenfauassenapcplica
e tio
dnd
eel'a1rt6CX6XX7IVdeEl'o
t rdcononan
m
cedm
e153e9
v
L e s autres questions qu ’ on a vo u lu élever dans cette
a f f a i r e s o n t t r o p b i e n d i s c u t é e s d a n s l e m é m o i r e ,. p o u r
qu’ on pense qu’ il soit nécessaire de rien ajouter aux moyens
.
qui y o nt été e m p lo y é s} et-qu’on adopte p leineniènt.
'
A N D R A U D
t,
x.
V
A R
io m
, d e l ’imprime rie de L
a n d riot
»
', seul imprimeur
du tribu n al d ' app el an 10 1802,
�S U rú ..
ÿ u s'fa sft'U eJ x, 2 / . fáw M A f^ û Jc j û ,
•
»
Cy
2 * /e¿4—
*
//
•• /
K os J k m
û M ù a s fyu. ^
(l fá ttf-Í.M 'k
& ** ^
^ * * * * * fi* r tì* A tj/ sT
AÀ/vW Cvvs?&i4rt- ÇfijTK*/*
W U i^Jtvh
'tv v l fa cH j^ \tu én â <
i*¿ p u tD & v t y * * ^ ' f ä * A ^
b ß jir * ^
jí& ¿ u U ¿ ¿ s
liiA i) it á ^lUACtM U/’ — (A 'IitiM * tA M A ** CKA4L
t) * / ' ,
’ w l
^
/ k À ^ u 4^
,
iW
leufjüU M
f a A S v C t m â K ü j ^ tfawfií üU'
C ^ U y C tía A ^ ex ^ ^
D y h 'à n tf S u
eu U Á *M ¿&
/ ¡U w
¿^ C à n ^
w E Q r f& & ,
a ß fo J u ^
U u ÿ A p f C M zÇ jr lj
íh & lr ''4 ¿ w t/ KS$ ¿C ¿t~-hL> WWC/AMoùL p jS m ¡S % - ÍUM M éUpt^
k t fä d ii* tu^ M s ^ f f ^ . . A . . . . niy ^ ri 1(M
¿U tA SjS^ ¿ & 'fa ifa ' ou ¿ ¿ W '-tS 'v A ^ W '" ^
^ M ffau Q eSeM . r tv tfú ñ y J p u fr jù u it' J/*- jM U A jsh -^ * •
$ um/ 'p s y /
^
/^ 7
A u v *6 -tr /
i b
•
t* * * U ¿ ) / h v & h K .
y
•
/¿ U tA 'i jjh/ib^Ùf>^Jf\
r ! .r
j
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Coutanson et Marguerite Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1770-1802
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0209
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0210
BCU_Factums_M0703
BCU_Factums_G1418
BCU_Factums_G1419
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53708/BCU_Factums_M0209.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
Successions
tribunal de familles
tutelle
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53232/BCU_Factums_G1418.pdf
26fbf7c39dadcb30b807d08c71f0ebb6
PDF Text
Text
'm
MEMOIRE
P O U R
C O U T A N S O N et M a r g u e r i t e
C H E C L I N , sa femme, intimés
P ie rre
C O N T R E
J a c q u e s
L
,
C H E C L I N appelant.
EQ U E L des articles C X X X I ou C X X X I V de l’o r
donnance de 153 9, doit-on appliquer à la renonciation
faite par la femme Coutanson, en m in orité, par ordre
de sa mère qui étoit sinon sa tutrice légale, tout au moins
son administratrice ?
Si on préfère l’article C X X X I V , y a-t-il eu réclama
tion dans les dix ans ?
Jacques Chéclin est-il recevablc sur son app el, à sou
tenir les intimés non-recevables de ce qu’ils ont été inA
�dûment forcés de reproduire devant les mêmes juges
de première instance, une demande cii nullité de cette
renonciation implicitement, comprise dans la demande en
partage, dont ils n’ont été déboutés qu’avec la faculté
d’exercer par action principale cette' demande en nullité ?!
f a
i t s
..
L es frère et sœurs Cliéclin et cinq autres enfans, sont
nés du mariage d’A n d ré Chéclin avec Marie Coutanson.
L e père est décédé en mars 1770. Par son testament,
du 16 du même mois, il a légitimé chacun de ses enfansa une somme de 800 fr. avec un ameublement.. Il a ins
titué pour son héritière fiduciaire sa v e u v e , à là charge
par elle de rendre l'hérédité ¿1 celui ou à celle de leurs
enfans qu'elle jugeroit à propos : dans le cas où elle viendroit à décéder sans avoir fait ce c h o ix , le testateur nomma
Jacques C héclin, appelant, pour recueillir l’entière hé
rédité. L a mère fut nommée tutrice de leurs enfans,
avec décharge de toute reddition de compte et revenu.
Cette veuve le fut encore aux sept enfans, sans excep
tio n , par avis de parens et ordonnance de justice du
2.6 avril 1770 , à la réquisition du ministère public ,
et elle déclara que quoiqu'elle pût se dispenser (Vaccepter
cette ch a r g e, néanm oins elle veut bien se charger de
la tu telle, et p rom it de bien et Jidèlem ent vaquer au
deçoir de sa charge.
P ar le contrat de mariage des intim és, du 9. février1 7 73 , leur mère et belle-mère constitua à sa fille 1,000 fr.
au lieu de 800 qui lui a voient été légués par le père?>
�.3
(
Sot
* 4^
)
e't d’autres objets, le tout payable à longs termes de 6c
francs par an , pour tenir lie u , est-il dit, à la future ,
de sa portion dans la succession, de son p è r e , qui étoifc
é c h u e , de tout augment et supplément; et au m oyen
de ce , la fille mineure ren on ça, sans dire au profit de
q u i, t\ tous ses droits paternels; mais immédiatement
après cette clause, elle se constitua eu tous ses biens, et donna
plein et entier pouvoir à son futur de les i*echercher.
L ’appelant contracta m ariage, le 27 mai 17 8 7 ; les in
timés ne furent point appelés ù cet acte : la mère remit
au fils l’hérédité dont elle étoit ch argée, et décéda
quelque
temps après.
P ar exploit du 13 prairial an 2 , les intimés p r o v o
quèrent un tribunal de famille pour obtenir le partage
des biens d’A n d ré Chéclm et Mario Goutanson, auteurs
commüns.
L e 2 nivôse an 7 , le tribunal du P u y rendit un ju
gement contradictoire, par lequel « considérant que la
» demande en nullité, formée à cette audience par les
» demandeurs, tend à anéantir cet acte, et devient par
» là principale; que d’après les nouvelles lois, les tribu» nauxne pouvoient en connoître sans au préalable avoir
»
»
»
»
»
a
épuisé la voie de la conciliation; c’est le cas de la rej e t e r . . . . . . . relaxe ledit Jacques Chéclin , de la demande en partage.........à la charge........... de payer...........
en argent ou en fond et à leur choix.. . . . s a itf a u x
m ariés Coutanson et C héclin à se p o u rv o ir, s’ ils y
sont fo n d é s , contre la renonciation...........»
Ce jugement fut exp éd ié, mais nullement signifié. L a
discussion s'étant de rechef engagée devant le tribunal
A 3
�(
4
}
d’Yssingeaux, substitué à celui du P u y , d’après la cédule
du 28 germinal an 7 , les parties ne regardèrent ce juge
ment que comme étant d’instruction", elles le reconnurent
expressément dans la rédaction du jugement du 5 ther
midor, dont est appel. Elles discutèrent au fond. L a nullité
de la renonciation fut prononcée en conséquence de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1 5 3 9 , et lo partage ordonné.
L a cause appelée à tour de rôle , en ce trib u n a l, à l’au
dience du 2 prairial d ern ier,aétéplaid ée;m ais,su rlesconclusions du citoyen substitut, il a sursis d’un mois, pendant
lequel temps l’expédition du jugement du 2 nivôse an 7
seroit rapportée.
Cette expédition est jointe : la transcription qui vient
d’en être faite par extrait, prouve qu’en effet les expres
sions sont un débouté de la demande en partage , sauf la
faculté de demander la nullité de la renonciation ; mais
celui dont est appel établit aussi que les parties , en cause
principale, s’arrêtant plusausensqu’aux mots de cette rédac
tion, n’ont regardé ce jugement indivisible et contradictoire,
que com m e simple instruction p u is q u ’elles ont discuté sur
le fond.
M O Y E N S.
Il ne peut être question, dit l’appelant, de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1639 , parce que Marie Coutanson n’a jamais été tutrice ni protutrice de sa fille, puis
que celle-ci étoit Agée de 17 ans, conséquemment p u b è re ,
à l’époque du décès d’A n d ré Chéclin , et parce que cette
m ère, d’un côté, ne devoit aucun compte d’administration
à l’époque du contrat de mariage de su fille , d’autant
�( 5 )
s<>$
# 9
qu’elle en étoit expressément dispensée par le testament ;
d’ un autre , elle n’a reçu aucune disposition pour elle
ni pour son fils, de la part de sa fille : qu’au surplus les
parties étant domiciliées dans le ci - devant F o r e z , il
convient d’écarter la jurisprudence du c i-d e v a n t parle
ment de T o u lo u se, mais bien de s’aider de la juris
prudence de celui de Paris qui n’admettoit que le laps de
dix an s, conformément à l’article C X X X I V de cette loi ;
que sous ce ra p p o rt, les dix ans utiles ont été révo lu s, soit
qu’on les fasse courir de l’époque de la m ajorité, soit
qu’on admette la suspension du délai jusqu’au 27 mai
1787 , que la mère a fait l’ élection d’héritier en faveur dé
son fils, parce que dans ce cas, au lieu de regarder l’action
du 13 prairial an 2 , comme demande en nullité, il faut
seulement la considorei* com m e d em an d e en p a r ta g e , et
ne rapporter cette demande en nullité qu’au 28 germinal
an 7 , d’autant plus que cette demande est l’exécution du
jugement du 2 nivôse an 7 , qui conséquemmcnt a acquis,
par l’exécution , la force de chose ju g é e , et établit une fin
de non recevoir contre une demande qui est irrévoca
blement prescrite.
R É P O N S E .
Cette discussion se divise en deux parties.
i ° . C ’est l’article C X X X I et non l’article C X X X I V de
l’ordonnance de 1639, les ordonnances de 1649 et de 1667,
qui doivent être la base de la décision.
2°. Si on se déterminoit par l’article C X X X I V , la
réclamation a été faite dans les dix ans.
Les autres questions ne sont que les accessoires des
deux principales.
�P R E M I È R E
PARTIE.
« Nous déclarons toutes dispositions d’entre-vifs ou tes» tamentaires, qui seront ci-après faites par les donateurs
» ou testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs, gar» diens,haillistreset A U T R E S LEURS A D M I N I S T R A T E U R S ,
» être nulles, de nul effet et valeur.» A rt. C X X X I de
l’ordonnance de 1539.
« E t quant au six-vingt-unzième article, faisant men» tion des donations, nous voulons et ordonnons, en in?> terprétant ledit article , que toutes donations entre-vifs
» et testamentaires, qui seront faites par les donateurs
»
»
»
»
»
»
»
»
»
ou testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs,
gardiens, haillistres et a u t r e s a d m i n i s t r a t e u r s ,
soient nulles, et de nul effet et v a le u r ; et telles les
avons déclarées et déclarons par ces présentes ; ensemble
celles qui frauduleusement seront faites durant le temps
de ladite administration , à personnes interposées, venant directement ou indirectement au profit desdits
tuteurs , curateurs , gardiens , haillistres et A U T R E S
a d m i n i s t r a t e u r s . » Ordonnance de 1Î949.
Ces ordonnances ont été confirmées par celle de 1667,
l i t X X I X , art. I ; elle oblige non-seulement les tuteurs,
protuteurs 3 curateurs, fermiers judiciaires, séquestres,
gardiens, mais encore t o u s a u t r e s q u i a u r o n t a d m i
n i s t r é LES BIENS d ’ a u t r u i , « i\ rendre compte aussitôt
» que leur gestion sera fin ie, et les répute comptables,
» encore que le compte soit clos et a r r ê té , jusqu’à ce
�*S\\
•( 7 )
w qu’ ils aient payé le reliquat, s’il en est d û , e t remis
» toutes les pièces justificatives.»
T e l étoit encore le droit romain. L e tuteur étoit censé
toujours tuteur jusqu’à ce qu’il eut rendu compte ; non est
J'un ctus qfficio iiisi rationes reddiderit. Jusque-là il ne
pouvoit être déchargé par quelqu’acte que ce fiit, suivant
la l o i , si qitid e s t , ult. de auct. et cons. tutor. ; et la glose
entend par ces mots , s i q u id 3toutes sortes de conventions
entre le mineur et le tuteur, m êm e les transactions; ut
a ccep tilla iio , pactum de non petendo 3 transactio %'el
delegatio. Il en étoit de m ême de toute espèce d’admi
nistrateur. L/n si qui s , if. de negot. gest.
Dans le même d r o it, l’action tutélaire ne prescrit que
par trente ans. Il n’est pas possible de b o r n e r , par des
conventions particulières le cours de cette prescription1
lé g a le ;c ’est ce qui arrivero it, si onadmettoit la nécessité
de se p o u rv o ir, clans les d ix ans, contre des actes qui
emporteroient la décharge de la tutelle.
M ornac ad leg. X X I X , cod. liv. II, tit. I V , s’exprim e
ainsi : D o cem u s enim quotidian is rerum exp erim en tis,
n ih il prodesse tu ta ri quod transigen t in genere de tutelœ suœ adm inistratione : im o nec s i auditâ parte rationum suarw n , m inor'J'actus m a jo r , libérationem gé
néraient de cœ leris om nibus ad tutelam spectantibus
dederit. Oportet quippè rationes r e d d i d i s c u t i , dispungi et claudi tandem autore ju d ice. ¿ ilià s et n is iità
JiŒ cJiant, ni/ul agit, ciun us que a d 'a n n o s t k i g i n t a '
possit m in or petere rationem , sub pretextu specierum
post repertarum quœ cum que generalis intercesserit
transactio : servam usque in co vulgam. L eg. cum sers
�(
8)
de coud. et demonstr. Q uœ vult r.inn q u i sit rcitionïbus
reddendis obnoxius rcdderc oportere ration e s , ut dis-.
cu tia tu r s i pillât un quidquid.egerit v eln o n e g e n t , ciim
agere debuisset.
_
Mais rien n’est plus énergique que ce qu’enseigne
M. Duval dans son excellent traité de rebus dubiis , en in
terprétant les deux articles G X X X I et C X X X I V : « E t
» parce que souvent y a difficulté sur lesordonnancesfaites
» par Louis X II et François I, touchant la prescription
» de dix ans contre la rescision des contrats faits par les
»
»
»
»
majeurs et mineurs; item , si ladite prescription a lieu,
les dispositions faites par iceux m ineurs, au profit de
leurs tuteurs ou a d m i n i s t r a t e u r s ........ item pour le
regard du tuteur ou A U T R E a d m i n i s t r a t e u r qui
» auroit j o u i , par l’espace de dix an s, des choses à
» lui délaissées par son mineur après sa m ajorité, ou
»
»
»
»
»
»
»
»
avant la reddition de compte-, le doute est .grand
à savoir , si ladite prescription de ,dix ans a lieu en ce
cas........... M ovet dubium quod lex est generalis et indistinctè loquens............ Sed contrarium est verum .
Car il y a autre ordonnance touchant les dispositions
faites par les m ineurs, au profit de leurs tuteurs, lesquelles elle déclare nulles, de nul effet et valeur.
V o len s enirn occurrere hujus rnodi dispositionibits
» etcon tractibus qua s habetpro infectis. Pourtan t l’autro
»
»
»
»
ordonnance doit recevoir restriction et déclaration de
celle-ci ; c’est-à-dire, qu’elle n’a lieu pour le regard des
dispositions faites au profit des tuteurs et adrninistrateurs, soit par contrat ou donation quelconque entre-
» v i f s , ou i\ cause de m ort; n’y fait rien de dire que l’or•
donnanco
�a
9
(
5
» donnance touchant la prescription de dix ans subsé» quente, l’autre annullant les dispositions faites avec les
» tuteurs........ Car toutes les deux sont au même cahier
» et publiées en même temps, l’an 16395 pourquoi la '
» présomption de droit est que l’une se corrige par l’autre,
» joint qu’elle est conforme au droit commun qui annulle
» les contrats faits avec les tuteurs, soit pour le regard
» de la disposition, ou d e là tradition et possession.»
C ’est aussi la doctrine de Papon jurisconsulte du F o r é s ,
pays des parties ; liv. V , tit. V I , nomb. 9 , de ses arrêts,
et 3me. notaire, liv. I X : « L e mineur dans les 30 a n s ,
» contre la quittance peut v e n ir ................à cause de dol
» dudit tuteur................Les dix ans de l’ordonnance ne
» sont propres en
» r e ç u dans les 30
C ’est aussi l’avis
nance de .1667 , à
ce cas ; ainsi devra le mineur être
ans après son âge parfait. »
de R o d ier, commentateur de l’ordon
l’article cité.
L a jurisprudence du parlement de Toulouze a été
constamment conforme à ces autorités, suivant le témoinage uniforme de Meynard , de D olive , de Serres ,
de Catelan.
Il y a eu des variations au parlement de P a r is : dabord
un arrêt de i562 avoit adopté l’art. C X X X I . O n en
trouve d’autres conformes dans Brodeau , lettre T 5 dans
B a rd e t, tom. I I , liv. V , sous la date du 7 juillet,16 3 6 , qui
prononça la nullité d’une renonciation faite par une iille
héritière de son p è re , au profit de sa mère tutrice, qui
n’avoit point fait d’inventaire, et ne lui avoit rendu aucun
compte. Divers autres rapportés par C h e n u , Brodeau,
Bardet et Montholon ,3 ont adopté l’article C X X X I Y >
B
�.('ÏO )
m êm e sur-de simples quittances données par des mineurs
à des tuteurs, sans compte préalablement rendu. 11 en est
cependant plusieurs , notamment celui du 29 mars i ü j ô ,
qui sont étrangers à notre espèce ; mais l’ordonnance
de 1667 a ramené à la pureté des principes-, et depuis
cOl'te é p o q u e , le parlement de Paris a rejeté la fin de
non-recevoir des dix ans, pour n’adopter que la pres
cription de trente ans* Les arrêts sont des 18 février 1703,
17 décembre 1706 et 26 mars 1707. Celui de 1706
rapporté au journal des audiences, tom. V , liv. V I ,
cliap. ' X L V , édition de 1 7 3 6 , a annullé une transac
tion q u i-avo it été faite avec un homme chargé de
procuration, et qui avoit a d m i n i s t r é p o u r des mi neui ' S.
M . l’avocat gé n éra l, Jo ly - de -F le u ry , observa , i ° . que
l ’on ne pouvoit appliquer à l’espèce l’art. C X X X I Y ; qu’il
11’y a nulle prescription pour un administrateur qui 11’a
rendu compte ; qu'il est toujours débiteur. 20. Que tout
administrateur de biens de mineurs est protuteur , et est
toujours présumé frauduleux.
cIl est inutile à la cause de remarquer la contrariété des
arrêts uniformes du parlement de Toulouze avec la
jurisprudence vacillante de celui de Paris : d u n e p a r t,
il n’y a plus eu de variation depuis l’ordonnance de 1667:
d ’un autre côté , la commune de Bas en Busset étoit
nn démembrement du Languedoc ; pendant le temps où
il a existé, le parlement de Paris a consacré par trois
arrêts , le premier du 30 août 170 7, rapporté par Ilcnrys,
les deux autres des 21 juillet 1768 et 12 juillet 1 7 7 0 , la
maxime rappelée par Chopin : tribunalium veiriatio
nullam p a rti legum n n d a iio m n u
�R aviot, arrêtiste de D ijon , distíngueles transactions, des
décharges. Il soutient que la jurisprudence qui accorde
trente années au m ineur, est préférable pour l’utilité publi
que. Il a transcrit un arrêt du 12 août 1716 , qui a consacré
l’usage de cette co u r, pour les trente ans. Enfin Lacombe
au mot restitution , sect. Ire. n°. 4 , rapportant un arrêt
du 26 janvier 1 7 4 5 , rappelle les mêmes principes que
fit valoir M. l’avocat général Gilbert.
Les jurisconsultes ont assimilé l’obligation de rendre
compte à celle de rendre un d é p ô t, et les décharges pures
et simples qui en sont données à des donations nulles de
nullité absolue. Ils en concluent que l’action dure 30 ans,
soit pour faire rendre le d é p ô t, soit pour revendiquer
contre une disposition surprise par le dol h l’e rr e u r , et à
line facilité irréfléchie.
Personne ne méconnoît l’autorité des arrêtés de M . de
L a m o ig n o n , rédigés, d ’après la lettre du célèbre Auzannet,
par le concours des jurisconsultes et des magistrats les plus
renommés et en expérience et en probité, dans le temps
où Louis X I V ayant donné , com m e, de nos jo u rs, Bona
parte, la paix à l’Europe , prit comme ce héros dont on
connoît les sollicitudes pour la rédaction des difTérens
co d e s, toutes les précautions pour retrancher la chicane.
Les arrêtés 127 et 1 2 9 , portent les mêmes dispositions
que l’article C X X X I de l’ordonnance de 10 39, et les or
donnances de 1549 et 1667.
Bien loin que la législation nouvelle ail porté aucun
changem ent, le régulateur suprême des tribunaux a con
sacré les mêmes principes par trois jugemens des 13 prai
rial , 3 messidor an 4 et a 5 frimaire an 10.
B
3
�s
•'
' ( 12 )
lie premier a admis la nullité (Tune cession faite par
P ierre Durand , en faveur de son frère, Claude, quoique
celui-ci ne fût pas majeur lors du décès du dernier de ses
ascendans, et qu'il y eût eu un autre tuteur. Il a été regardé
comme étant administrateur comptable.
L e deuxième a cassé comme contraire
l’articlo
C X X X I de l’ordonnance de 1639 , et à l’arlicle Ier. , titre
29 de l’ordonnance de 16 6 7 , et comme contenant une
fausse application de l’article C X X X I V de la môme ordon
nance de 1539, un jugement du tribunal d’appel d’E vau x,
qui avoit déclaré non-recevable, pour n’avoir pas été for
mée dans les dix ans de la m ajorité, la demande en nullité
d’ une renonciation faite par une fille m ineure, au profit
de son beau-frère , moyennant une constitution qui lui
fut faite par sa m è re , tutrice} qui ne lui avoit pas rendu
compte.
L e troisième a jugé dans le sens de l’article C X X X I V
de l’ordonnance de 16 3 9 , en cassant un jugement du tri
bunal d’appel de P a ris, qui avoit écarté la fin de non-recev o ir , en qualifiant donation des actes qui n’en avoient pas
le caractère. Ce jugem ent, l o i n d’être contraire aux deux
autres, les corrobore en faisant ressortir la différence que
les jurisconsultes et les avocats généraux , lors des arrêts
précités, ont faite, des deux articles C X X X I et C X X X I V .
L a femme intimée est dans un cas bien plus favorable
que Gabrielle Laporte. C e lle -ci avoit renoncé au profit
de son b e a u - fr è r e , au lieu que Marguerite Cliéclin n’a
dirigésa renonciation qu’enfaveur delà masse de l’hérédité.
Si dans la rigueur du droit on ne considéroit pas sa mère
comme étant sa tutrice, on 11c peut au moins contester et
/
�( . 3 ).
.
J
"
ïe fait d administration en lui-mêm e et les titres qui ]a lui
ont conférée, le testament du p è r e , l’acceptation spon
tanée qu’elle a faite de la justice de la qualité de tutrice, et
sa promesse judiciaire de rendre compte. Ce seul fait d’ad
ministration assujétissoit cette mère ;\ rendre compte. Les
lois s’expliquent génériquement pour tous les adminis
trateurs, que l'arrêt de 1706 a appliquées à un simple
mandataire. Mais lçs expressions de l’ordonnance de 1667 >
ne peuvent laisser aucun prétexte d’équivoque. D ’après le
procès "Verbal de cette ordonnance, on avoit inséré dans
la première rédaction ces expressions Cl’économ e t com m iss aire et m andataire, et le législateur préféra celle Ü adm i
nistrateur, employée dans les ordonnances de 1639 et 1649.
H é ! qu’importe que le père com m un ait dispensé , par
son. testament, sa v e u v e , q u ’il n o m m a it tu trice, de faire
inventaire et de rendre compte? D ’abord, Marie Coutanson
s’est obligée judiciairement de fid èlem en t vaquer au de
voir de sa charge. Sans doute, le premier devoir d’une
tutrice, d’une usufruitière , d’une administratrice , est de
faire inventaire, de constater ce qu'elle prend et d’en ren^
dre compte.
Mais d’ailleurs, cette obligation ne souffre point de
dispense j elle e s t, de droit public , établie, par la loi Y ,
ita autein , /f. li[>. 26, tit. 7 , n °. 7 , J id ia n u s. Q uidam
decedens j i l i i s suis dederat tu to res, et adjecerat, eos
aneclogistos esse roio, et a itJ u lia n u s tutores n isih o n a m
Jideni in adm m istralione prœ stiterint, d a m n a rid ebere,
quamv'is testamento com yrehensinn sit ut aneclogisti
essent ' nec eo nom m e e x causa Jidei-connnissi q u icquam consequi d eb eb im t, ut a it J u lia n u s : ac est vera
�•
t
( 14 )
ista se n te n tia , nemo eni/n j u s p u b l i c u m r e m i t t e r e p o t e s t liujus inod'i cautionibus nec m utare J o r mam antiquitiis constitutam .
Marie Coutanson n'a point usé de bonne fol en ne
faisant point inventaire , et en exigeant une l'enonciation
en bloc, delà part sa fille, sans lui présenter seulement
d’instruction.
Cette renonciation n’est qu’une simple décharge en
faveur d’un comptable , gratuite, puisque la mère n’a
rien fourni de sa substance; elle s’est opérée p a r le dol
et la fra u d e, en privant sa fille de la plus légère connoissance de la succession. O n peut appliquer la dispo
sition de la loi I X q u i ciim tut. 9. §. 2. ffi de tutorib.
q u i ignorans universa quœ in vero era n t instrum entum
transactionis sine a qu ilia n a stipulatione
non tarn decipitur quant p a ciscitu r.
interposuit
- Cette mère , cette tutrice ou administratrice com ptable,
a encore usé de dol , en laissant entrevoir A sa fille l’espoir
d’une élection d’ héritier, qui l’eût fait profiter de l’effet
de sa renonciation.
Que les novateurs , entraînés p a r l’exemple du tribunal
d’É vau x ,'ne disent donc plus que les affaires doivent
a voir u n c j ï n ,q u i lj ( i u t proscrire les vieilles recherches.
Ce seroit substituer l’arbitraire aux lois. Ces lois, en
classant chaque prescription dans les termes qu’elle a éta
b lis, n’ont introduit d’autre âge que celui qu’elles ont
combiné avec toutes les circonstances qui rendent plus
ou moins favorable la lenteur de ceux qu’elles ont re
connu être dans l’impossibilité d’a g ir , par ce principe
contra non valentcm agerc non cu rrit prœscriptto. Ainsi
�,
( t "• ) .
Vune affaire de deux siècles est toujours jeune, tant qu’elle
n’est point trop vieillie par le laps de temps utile qu’il
faut pour l’éteindre.
>
.
D E U X I È M E
P A R T I E .
Il y a discordance sur l’époque où
exercée,et sur l’époque où elle l’a été
L ’appelant prétend que l’intimée a
tant de sa majorité , qui a eu lieu le
et qu’elle n’a formé sa demande que le
l’action a dû être
réellement.
dû agir dès l’ins
23 février 1 7 7 7 ,
28 germinal an 7.
Celle-ci soutient au contraire qu’il y a eu suspension
de prescription, tant qu’elle n’a pu agir, et qu’elle l’a
fait utilem en t, le 13 prairial an 2.
L ’in t im é e , en m êm e temps q u ’il l ui f u t fait une dot,
se constitua en outre en louSj ses biens présens et
à ven ir, pour la recherche desquels elle donna sa pro
curation à son mari. O r , en quels autres biens présens
pouvoient consister cette constitution particulière, si ce
n’est dans la demande en partage auquel la mère venoit
de la faire renoncer , dans les biens de son père ! Mais
la femme a manifesté , par ce même acte, son intention
de réclamer contre la renonciation qu’il renferme , et
elle n’a pu le faire sous la puissance maritale , soit parce
que l’autorisation du mari étoit indispensable, soit parce
qu il en nvoit été expressément chargé par le contrat de
mariage. Sous ce premier rap p o rt, il y a eu suspension de
prescription. Il est reconnu constant, dans le ressort du
ci-devant parlement de T o u lo u se , conformément à la loi
1 6 , lf. d efu n d o dotali, que la prescription du fond dotal
�•
V
( 16 )
ne court pas contre la femme pendant le m ariage, sinon
qu’elle eût commencé auparavant ; Serres , liv. I I ,
lit. V I I I , page 192 ; Catelan et Vedel , liv. I V , ehap.
X L V • Despeysses liv. Ier. , tit. X V , sect. I I Ï , n°. 29.
C ’est aussi ce qu’enseignent D o m a t, liv. I I I , tit. V I I ,
sect. V , n°. V I I 5 Lacombe , verbo prœ script. , sect. V I I ,
n°. 1 ; Henrys , liv. I V , Q. 175.
Mais la prescription a été suspendue de diverses autres
manières.
O n pourroit em p lo yer, pour premier moyen , l'effet
delà puissance maternelle méconnue dans le droit romain ,
et qui semble etre adoptée par plusieurs de nos auteurs
modernes, d’après les rédacteurs du répertoire de jurispru
dence, verbo puissance p a tern elle, sect. II, et le projet du
code c i v i l , surtout d’après 1arrêté 128 de M .le P. Lamoignon , au sujet précisément de la prescription dont il s’agit
au procès ; « ladite prescription de trente ans, dit ce ma» gistrat, ne court au profit du père et DE L A m è r e , de
» l’aïeul ou DE t/ a ï e u l e de leur v i v a n t , nonobstant que
» la tutelle soit finie. »
Cependant la veuve Chéclin avoit d’autant plus d’auto
rité sur sa fille qu’elle lui avoit été transmise par le père
dans son testament, et confirmée par la justice , en sa
qualité de tutrice , qualité synonymifiée avec celle de
m a ître , suivant la loi ad ea 167. jj\ de rcg. ju r. où
celui qui dispose en faveur d’une personne à laquelle il
est soumis, est réputé disposer contre sa volonté; vellc
non créditur q u i obsequitur irnperio dorni/ii. La volonté
est l’âme de toute disposition , et l’on ne regarde point
comme volonté
celle qui est forcée. Coacta voluntas
non
�,
,
C 17 )
J t\
4
á t
mon ' habetur pro volúntate Cujas ad tí t. cod. s i quis
(iliquem tutori prohibuer. vel coeger. Décision fondée
sur ce qu’il n’est rien qui soit si contraire au consente
ment que la force ou la crainte qui l'extorque : N ih il
'consensui tain contrariinn est quàm vis atque metus.
•Loi 116 , ff. de reg. jur.
S i, comme il n’en faut pas douter, la mère a usé de sa
puissance sur sa fille, en la faisant renoncer, il est Lien évi
dent que la même cause a forcé cette fille au silence , pen
dant tout le temps que sa mère a vécu ; et le gendre a telle
ment partagé la condescendance et la crainte de sa femme ,
que non seulement il n’a pas usé de la procuration pour
rechercher le bien dotal , mais encore il s’est abstenu de
rien recevoir. N e résulte-t-il pas môme de ce silence une
protestation continuelle contre la m od icité de la constitu
tion convcntionelle ,.ct une intention bien manifeste de
z’éclam cr contre?
Mais un second moyen de suspension de la prescription,
est la qualité d’usufruitière de la mère par le testament du
père. L a fille n’avoit pas intérêt d’agir pendant la durée de
cet usufruit. La jurisprudence sur ce point est trop cer
taine pour s’ étendre davantage.
Un troisième moyen est la confusion clés droits actifs et
passifs, dans les mariés Coutanson et Chéclin. On n’a pas
perdu de vue que la renonciation dont il s’agit, n’a été
dirigée en faveur de personne ni acceptée par personne.
L ’appelant pour écarter l’idée qu’elle eut été faite en fa
veur de personne prohibée, a soutenu quelle tournoit au
profit de la masse de l’hérédité du père ; mais celte masse
-étoit en dépôt. L a remise pouvoit en avoir lieu en faveur
C
�5» « W
*
i l
(i8)
de l’intimée , parce que M arie Coutanson a eu la liberté
pendant toute sa vie d’élire l’intimée pour la recueillir:
ainsi celle-ci auroit agi doublement contre ses intérêts,
de faire un procès à sa mère. En se ¡aliénant, elle eût
écarté des dispositions bénévoles pour la transmission de
l ’hérédité de son p è re, et elle se fût attiré son animadver
sion , à raison de la succession maternelle ; elle a donc
agi sagement par le silence, ne m ater pejus Ja ceret.
Mais, répond l’adversaire, tous vos motifs de crainte,
d ’espérance , ont cessé par les dispositions universelles
faites par la mère , tant pour sa substance que pour celle
d’A n d ré Chéclin , par son testament du 3 janvier 178 6 , efe
par mon contrat de mariage du 27 m a i 1787.
L a répliqué est absolue. J e n’ai connu ni l’un ni l’autre
de ces actes. L e premier pouvoit être révoqué à chaque
instant. Quant au second, la mère n’y a appelé ni sa iîlle ni
son gendre. O n peut conclure que c’est là le dernier p é
riode du d o l , et que c’est afin d’éviter la réclamation contre^
la renonciation, qu’elle a eu l’astuce de laisser ignorer la
disposition irrévocable portée par le contrat de mariage do
Jacques Chéclin.
En un m o t , la renonciation n’étant dirigée qu au profit
de la masse , elle n’a pu être que conditionnelle ou casuelle.
Elle eût profité à la renonçante , si elle eût été élue à re
cueillir cette même masse d’hérédité, et il falloit nécessai
rement attendre le sort de cette incertitude, de cette espé
rance.
Il doit donc demeurer pour bien constant, que les inti
més n’ont pu , n’ont dû agir qu’après le décès de la mère
arrivé depuis le 27 mai 1787-.
�{ i9 )
- ^z a
Il reste à prouver que l’action utile a été intentée le 13
prairial an 2 , conséqueminent avant les 10 ans.
O h ! sur ce p o in t, l’adversaire s’est créé une logique tout
à fait commode ; mais tout à la fois contradictoire et ridi
cule.
L e premier jugement du 2 nivôse an 7 , a débouté les
intimés de leur demande en partage, sauf à eux à se pour
voir contre la renonciation.
L ’adversaire veut-il écarter, à la faveur du non bis in
idem , cette demande en nullité delà renonciation, sous le
prétexte qu’elle a été rejetée parce jugement ? Il a soutenu
dans le procès verbal de non-conciliation du 14 floréal
an 7 , et il l’a répété jusqu’à satiété, dans ses causes et
moyens d’appel, sans en avoir dit mot lors de la plai
doirie sur laquelle est intervenu le jugem ent du 5 ther
m idor an g , que cette demande a été comprise dans la
demande en p a rta g e, du 13 prairial an 2.
L u i rétorque-t-on ce langage, pour établir d’après luimeine que l’action en nullité a été introduite dans les 10
nnâ!? Il se retourne et veu t tout, à la fois blanc et noir!
tantôt , que cette demande ait été formée le 13 prairial
an 2 , et qu’en prêtant au jugement du 2 nivôse an 7 , la
chose jugée et l’exécution , elle soit éteinte ; tantôt, que
celte demande n’ait été fo rm ée, pour la première fois,
que le 28 germinal an 7 , et qu’étant postérieure au terme
de 10 ans, elle soit anéantie par cette espèce de prescrip
tion , de dix ans.
Séparons les élérnens de cette bigarrure, de ce sophisme.
L e jugement du 2 nivôse an 7 a débouté, sauf l’action
en nullité ; c’est absolument la même chose que s’ il avoifc
G 2
�4ÀA jlix
'
¡1
i
;
•:
( âo )
prononcé, quant 5 présent, non recevable, on un sursis*,
afin d’observer la forme de la conciliation, dès que l’exception péremptoire de la nullité absolue, étoit consi~
dérée comme devant être une action principale, sujette
à ce préalable.
A u fon d , chacune de ces trois dispositions renferme
deux parties indivisibles. L e débouté, la fin de non rece
voir , le sursis, ont également en vue le sort de la demande en nullité , qui doit être la base du rejet défi
n itif, ou de l’accueil de la demande principale; eu sorte
que, quelle que soit l’expression, ce n’est dans le vrai q u’un
jugement d’instruction , et l’appelant l’a si bien reconnu,
en cause principale, qi,i’au lieu de s’attacher à cette prétendue fin de non recevoir, il a discuté le fond de la quest i o n , et par là , il est devenu lui-même non-recevable*
à l’opposer sur l’appel.
C'est en vérité abuser étrangement des m ois, que deprêter à la demande du 28 germinal an 7 , une telle accep
tion d’exécution du jugement du 2 nivôse an 7 , qu’on
en infère une approbation du d é b o u té , bien p lu s, une
persuasion d’un débouté pur et simple, et définitif; mais
si l’appelant l’eût pensé ainsi, en cause principale, que
ne s’en tenoit-il à cette prétention ? D e ce qu’il a dé
fendu au fo n d , ne peut-on pas lui rétorq u er, dans son
système de divisibilité d’exécution du jugem ent, du 2
nivôse an 7 , qu’il a lui-même exécuté la seconde partie
de ce jugement purement et simplement ; car si les inti
més .ont été bien éloignés de demander le payement
du prix de la renonciation, l’appelant a bien senti qu’il
lui eût été inutile tic l'offrir,
I
�,l
JiS
z r )\
^
Maintenant ayons .pour;certain que l’adversaire, en
avouant, soit dans le procès verbal de non-conciliation,
soit dans les causes et moyens d’àppel, signifiées le 28 ven
tôse dernier, aveu indélébile en soi, comme conforme au
principe, au surplus formellement accepté parla réponse
signifiée le-24 floréal, que la demande en nullité delà renon
ciation a été comprise dans lademandeen partage,du 13 fri-maire an 2, d’après la maxime generalis petitio includit ea
om nia q u œ in eâ petitione possunt in cludi..Cet axiome
est encore appuyé par un autre: P e titio b on orim iy os ;
scssio n ïs* hœ reditatis addïtio7ieju prcvsùpponit. L a de-:
mande en partage-exclut l’idée de préférence du prix;
d’une renonciation. In cîu sio unius est exclusio aîterius.
Semblable discussion sur ce point, et sur l’application des:
art. G X X X I et- G X X X I V de l’ordonnance de 1 5 3 9 , a*
été jugée en ce t r i b u n a l m ê m e section présidée par le:
citoyen V e r n y , il l’audience du 18 germinal dernier. ;
L e 25 février i y 56 , Jeanne Barthélém y, par son contrat
de mariage avec Jean Pagès, renonça,.moyennant 330 i'r.,
aux successions de son père échue, et à celle
échoir
de sa m ère, non présente au contrat, en faveur de Jean
Barthélémy son frère. L e mari en donna quittance. L e i o j
février 1 7 8 6 , Jeanne Barthélémy lit assigner les en fans
héritiers de Jean Barthélémy pour venir à division et
partage. Jugement du tribunal du P u y , du 11 fructidor'
an 7 , q u i d écla re, quant ¿1 présent, non-rcccçahle,■sur
ce qu’elle auroit dû se p o u rv o ir , avant tout, contre larenonciation de ses droits héréditaires. L e i r brumaire
*n 8 , nouvelle demande en partage , avec conclusion en '
nullité de la renonciation. Les défendeurs opposèrent deux-.
�* * *
'
c
>
fins de n o n -re c e v o ir,r l’une:-résultante-de''la quittance
donnée par le m a r i, l’autre de ce qu’il s’étoit écoulé près
de trente ans depuis le décès, et plus de quarante ans depuis
]a renonciation. Jugementdu tribunaldeBrioude,du 3 ger
minal an 9, q u i1, sans s’arrêter aux deux fins de non-rcce*
v o i r , ' O r do n n e le partage. Appel. A l’appui on a invoqué
l’article C X X X 1V de l’ordonnance de 16395 on a désavoué
la qualité de tuteur dans le frère. L ’intimé s’est prévalu de
l’article G X X X l , de la qualité d’administrateur comptable,
et des deux premiers des trois jugemens du tribunal decassation^ d on tilaété fait mention. A l ’audience, il prit fantaisie
à l’appelant d’imaginerlainéme fin denon-recevoir, qu’op
pose Jacques Chéclin , sous le prétexte d’avoir exécuté le
jugement du P u y qui déclaroit, quant à présent, non-receval^le. C ’est ce qui donna lieu à la quatrième question insé
rée dans ce jugement: * Si une demande eri partage, ne con» .tenant point de conclusions sur l’action en rescision
» contre la renonciation , est suffisante pour admettre la
» prescription ? » L e jugement de Brioude fut confirmé,
plaidant le citoyen P agès-M eym ac, pour l’intimée. L e
m otif qui se rapporte à la q u a t r i è m e question est ainsi
conçu : .« Considérant,'qu’à l’époque, à-laquelle a du cesser
» la p r e s c r i p t i o n de ce droit est celle du 4 février 178^),
» jour où l’intimé a formé contre les appelans la de» iiiànde ,eii partage, laquelle a été continuée par l’exploit
» du. i l brumaire an 8, qurcontient l’action en rescision
» ;contre la renonciation dont il s’agit.
Il
ne paroît pas qu’on puisse rien opposer à ce pré
jugé si conforme au principe ; il y a absolument parité
de raisons pour fixer l ’époque de la demande au 13 prairial
�•
( -
î
3
)
->'27
an 2 , continuéeTpar la cédule dti ¿ 8 germinal an 7, qui
contient la demande en nullité de la renonciation dont
il s’agit: d’autant plus que la première de ses demandes a
eu expressément pour objet de SE r é g l e r s u r l e s
successifs.
’
C ’est en vain que l’appelant s’ést flatté d’exclure par des
chicanes, les intimés, d’une succession de valeur de plus de
30,000 francs ; sans doute l’injustice d’une pareille ten
tative est assez démontrée.-■ Que l’on pèse la valeur de cette renonciation par
elle-m êm e, par la mère qui l’a obtenue, par la fille q u i
l’a fa ite ,p a r la concordance de la loi et de la jurispru
droits
dence dans le lieu de la succession , par la faculté de
réclamer dans les trente ans , même par l’action intentée
réellement dans les dix ans ; il doit rester évidemment
démontré que cette renonciation est cad u q u e, comme
étant faite au profit de la renonçante , si l’élection fidu
ciaire à laquelle elle pouvoit prétendre , eût été faite en
sa faveur ; que la m è r e , ne fût-elle considérée que comme
curatrice ou simple administratrice , a joint à sa puissance,
à son ascendant, le d o l , soit en privant sa fille mineure
et qui étoit sous sa dépendance, d’ un com pte, m ême
d’instruction , soit en lui laissant l’espoir de l’élection
d’héritier ; qu’en obéissant aveu glém en t, la fille a réclamé
contre cette renonciation au moment même qu’elle l ’a
faite , en se constituant ses droits présens qui n epouvoient
être autres que ceux auxquels l’autorité maternelle venoit
de la faire renoncer, et en donnant sa procuration à son
mari pour en faire la recherche j que , bien-loin d’avo ir
approuvé cette renonciation faite à vil prix et à.ternies.
fit 0
#
»
�^
U < -,
: ( .H)
'é lo ig n é s, il n’a. été xcçù aucun a com p te; que ce silence
inéme est une interruption ; q u ’il n’a pu courir de pres
cription , d’abord, en puissance maritale, puis, parla nature
d e là renonciation, tant que l’usufruit a d u r é , tant que
la crainte révérentielle ou tout au moins l’espoir d’étre
élue ont subsisté ; qu'enfin il n y a point à hésiter d’appli
quer l’art. C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , et q u e ,
quand la cause seroit décidée par l’art. C X X X I V , Faction
en nullité est implicitement renfermée dans la cédule du
’ 13 prairial an 2 , dans l’intervalle des dix ans ; que con:séquemment le jugement dont est appel doit être con
firmé avec amende et dépens,
t
P a r conseil, C O U I I E R T - D U V E R N E T , anc. jurisc.
C R O I Z I E R , avoué.
L
e c o n s e il
m ém oire, E S T I M E
s o u s s ig n é
, qui a vu le présent
q u ’il a é t é bi en j u g é p a r le j u g e m e n t
du triburud d’Yssingeaux.
L a mère avoit été nom m ée tutrice de sa fille par le
testament du p è r e , antérieur seulement t\ sa mort de peu
de jours. Peu importe qu’elle fût alors pubère! le père
avoit jugé qu’elle avoit besoin d’être mise en tutelle-, les
parens en jugèrent de m êm e , lors de la confirmation de
la tutelle, qui fut faite par le juge des lieux. La mère ellemême accepta la tutelle de sa fille pubère, comme celle
.des autres enfans : de plus, la mcrc avoit l’usuiruit des
biens
�( 25 )
biens du père par son testament; mais cet usufruit ne
pouvoit frapper sur la légitime de la fille; par consé
quent devoit non seulement un compte d’instruction ,
mais même un compté d’administration pour la jouis
sance de la légitime. Dès qu’elle devoit un co m p te,
tant qu’elle ne l’avoit pas r e n d u , elle ne pouvoit pas sti
puler de sa fille, dans son contrat de mariage, une renon
ciation qui emportoit la décharge du compte. D ’un autre
côté , cette renonciation qui n’étoit dirigée en faveur de
personne, ni acceptée par personne, contrastoit singu
lièrement avec la clause subséquente du contrat de ma
riage , par laquelle la fille se constituoit tous ses biens et
donnoit pouvoir à son futur mari d’en faire la rechei’che.
L a dernière clause détruisoit la première. L a nullité de
la renonciation doit donc paroître évidente.
A -t-o n dû se pourvoir, pour faire déclarer cette n u llité ,
dans les dix ans, terme fatal des actions rescisoires, ou
Vaction s’est-elle prorogée jusqu’à trente ans? L ’article
C X X X I de l’ordonnance de 153 9 , celle de 1649 et l’art,
prem ier de celle de 1 6 6 7 , mettent hors de doute la durée
de l’action pendant trente a n s , et l’article C X X X I V de
l’ordonnance de 1639, n’a nulle application aux actes
passés entre les mineurs, même devenus majeurs, et les
tuteurs qui n’ont pas l’endu compte. C ’est ainsi qu’on le
jugea dans les temps les plus rapprochés de l’ordonnance
de 15 3 9 , dont l’intelligence devoit être alors plus connue 7
comme on peut le voir dans le passage du traité de rebus
dubiis , de M . D u v a l , qu’on a transcrit dans le mémoire.
Si dans la suite on s’éloig n a , contre tout principe, de cette
jurisprudence o a fut obligé d’y revenir, lorsque parut
D
�C
*6 )
l’orclonnancc de 16 6 7 , et à dater de cette époque, les
arrêts rejetèrent constamment la fin de non-recevoir des
ioans; aussi la jurisprudence de la sénéchaussée d’A u vergn e
s’y étoit-elle toujours conformée. O11 peut en citer trois
sentences, parmi un grand nombre d’autres ; l’une au rap
port du conseiller N evrezé, du 22 juillet 1749; la seconde
rendue à l’audience, lors de la première cause de l’avocat
Beaulaton, à présent juge du tribunal, du 24 juillet
de la même année, et la troisième du 4 juin 1 7 6 1 , au
rapport du conseiller Brujas.
Ce ne fut que dans les pi’emiers temps de la révolution,
qu on parut vouloir renouveler les questions, sans néan
moins qu aucune des milliers de lois qu’elle a enfantés,
ait dérogé aux vrais princip.es de la matière et aux ordon
nances qui les av.oient consacrés; mais le tribunal de
cassation les a maintenus. O n connoît surtout celui de ce
trib un al, du 3 messidor an 4 , qui a cassé le jugement du
tribunal d’E v a u x , du 19 floréal an 3; ct'rien de plus tran
chant que les motifs et le dispositif de ce jugement du
tribunal de cassa tion.Pi'eniier m otif: «Que l’article C X X X I
» de l’ordonnance de 1639, déclare nulles toutes disposi» tions faites en faveur des tuteurs et autres administra» tetirs, directement ou indirectement, avant le compte
» re n d u , et qu’une renonciation faite par un mineur en
» faveur d’une personne qui adininistroit ses biens et
» agissoit pour les héritiers d’un com ptable, présentoit un
» avantage indirect en faveur de ses héritiers:» Second
m otif : « Q u ’en pareil cas, l’action subsiste pendant trente
33 ans, parce que selon l’articleIer- du titre X X I X de
a l’ordonnance de 1667, h comptable ne cessant de l’être
�jfS f
( 27 )
que par la reddition de son com pte; c’est le compte
» seul qui peut éclairer le mineur sur ses intérêts. »
Troisième m otif : «Que l’article C X X X I V de l’ordonnance
» de 1 5 39 , qui restreint le délai à dix ans, n’est relatif
» qu'aux actions rescisoires qui n’ont rien de commun avec
» celles en n ullité, qui durent trente ans, et pour lesquelles
» il n’est pas besoin de lettres. » Enfin le dispositif, qui casse
» le jugement du district d 'E v a u x , comme contraire aux
> articles C X X X I de l’ordonnance de 1 539, et premier
» du titre X X I X de l’ordonnance de 1 6 6 7 , et com m e
» contenant une fa u s s e application de l'a rt. C X X X I V
» de l'ordonnance de 1 539. »
Les autres questions q u ’on a voulu élever dans cette
affaire, sont trop bien discutées dans le m ém oire, pour
qu’o n pense q u ’il soit nécessaire de rien ajouter aux moyens
qui y ont été em ployés, et qu’on adopte pleinement.
D é l i b é r é à R iom , le 11 messidor an 10.
ANDRAUD.
i»
__
Oi
a j
.
( A A c / v i A ^
A
Riom,
•
de l'imprimerie de L a n d r i o t ,
du
tribunal d ’appel»
seul imprimeur
A n 1 0 — 18 o2 »
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle de la mère
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Coutanson et Marguerite Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant. Annotations manuscrites.
Table Godemel : Renonciation : 7. est-ce dans le délai de dix ou trente ans qu’une fille, qui, en état de minorité et sans l’autorisation de sa mère tutrice et héritière fidéicommissaire de son mari, a, par son contrat de mariage, renoncé purement et simplement à ses droits paternels, en se contentant de la destination faite par sa mère, doit de pourvoir en nullité ou restitution ? de quelle époque commence à courir le délai, lorsque la mère, chargée d’élire l’héritier, n’a fait l’élection qu’après la renonciation ? lorsque l’action en nullité est dotale, la prescription court-elle pendant le mariage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1770-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1418
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0210
BCU_Factums_M0703
BCU_Factums_M0209
BCU_Factums_G1419
BCU_Factums_G1420
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53232/BCU_Factums_G1418.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
Successions
tribunal de familles
tutelle de la mère
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53903/BCU_Factums_M0708.pdf
0da52d34874d59fd769b71a67bbd6661
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
SUR
LA N U L L I T É
d ’ UN
DIVORCE.
�CONSULTATIONS
SUR M É M O I R E I M P R I M É ,
P O U R
M a r g u e r it e
C O U G U E T -F L O R A T , veuve du sieur
de Reyrolles ? intimée
CO N TRE
C a t h e r i n e M A I G N E , appelante de jugem ent du
tribunal de première instance séant au P u y , rendu
le 24 flo réa l a n 13.
I
»
L E C O N S E I L S O U S S I G N É n’hésite pas à penser, avec
l’estimable auteur du mémoire imprimé pour la dame Couguet-,
A
�C2 )
Florat i que le jugement du tribunal du P u y , q u i, sans s’arrêter
fantôme de divorce opposé a cette veuve , a décidé que le
aieur de Reyrolles est mort son époux, rend un hommage trop
pur aux mœurs , à la justice et aux lo is, pour que l’appel porté
devant la sage cour de Riom doive lui inspirer des craintes.
La demoiselle Ma:gne se pare de la qualité de seconde femme
et de veuve du divorcé de Reyrolles; mais elle sait bien que ce
sont là des titres usurpés; que son mariage essentiellement nul,
pour avoir été précipité, quand il auroit été précédé d’un divorce
r é e l, ne 1 arracha point à la honte du concubinage, et ne couvrit
m êm e pas ses désordres de l’excuse et du manteau de la bonne
foi ; car elle ne pouvoit pas.ignorer, lorsqu’elle engagea sa foi
au sieur de R eyrolles, divorcé depuis dix mois seulem ent, elle
ne pouvoit pas »ignorer , disons-nous , la loi qui interdisoit à
l'époux divorcé de contracter un nouveau mariage dans l’année
du divorce (1) : ce mariage en outre présente d’autres vices
inutiles, quant à présent, à rapporter.
D ’un autre c ô t é , jamais elle n’a , pendant ce prétendu ma
riage , goûté les douceurs de la maternité.
Ce n’est donc ni pour couvrir son hon neur, ni pour conser
ver un état à ses enfans, qu’elle s’acharne à dégrader cette
épouse infortunée; c’est uniquement pour retenir, sans retran
chement et sans partage , la riche dépouille du d éfu n t, devenue
sa proie par un testament surpris à la crainte et à la foiblesse ;
uniquement pour nager dans un superflu plus abondant, et le
réserver à des collatéraux avides.
Ah ! si la balance de la loi pouvoit être un instant flottante ou
incertaine dans cette lutte affligeante pour les mœurs , l ’im
pulsion du sentiment et l’humanité la feroient pencher bien vite
en faveur de l’épouse légitime , à qui la cupidité ose disputer les
(i) A r t. a , §.
5 de la loi du ao septembre 1792.
�(3.)
avantagesi matrimoniaux que le plus solennel et le plus 'saint
des contrats lui avoit assurés, et qu’ une courtisanne voudront
réduire au plus extrême dénûment.
»
Mais la dame Florat de Reyrolles n’a pas besoin d émouvoir
le sentim ent, pour réunir les suffrages à la cour d’appel comme
elle les a réunis en première instance : il lui suffit de faire pailer
la loi.
n
L e sieur de Reyrolles lui engagea sa foi aux pieds des au tels,
le 8 novembre 1774 , avec toutes les formalités légales que la
loi du temps exigeoit pour former un mariage indissoluble. Ce
m ariage, légalement contracté, ne devoit être dissous que par
la mort de l’un des époux. Une loi postérieure en disposa autre
ment , et voulut que ce lien sacré pût être rompu , entre les
deux époux , par le divorce , dans les formes qu’elle déter
mina. Le sieur de Reyrolles , dans le délire de la passion qui'
l’égaroit, voulut tenter de rompre par cette nouvelle voie les’
sermens qui l’unissoient A son épouse ; mais conduisit-il l’en
treprise au terme marqué par la loi? il s’en faut bien. Un acte
de divorce précipité , arbitraire , et monstrueux dans sa contexture , la fit avorter au tiers de la route ; car le divorce provoqué
par lui seul le »4 mai 1ygS, sur la simple allégation de l’incom
patibilité d’humeur et de caractère , devoit être précédé de trois
assemblées de parens dans un intervalle de six mois de délai au
moins , afin de préparer par de sages conseils , et de mûrir par
la réflexion, un rapprochement entre les époux , q u i est le pre
mier et le principal vœu de la loi (1). lîlt bien ! il fut prononcé
le 28 juillet même année, à la suite d’une seule assemblée de
parens ou d’amis conciliateurs , par une complaisance de l’offi
cier de l’état civil , qui eût été coupable , si sa prévarication
n’étoit pas excusée par l’ineptie dont il a consigné la preuve
dans l’exercice de cet acte de l’autorité publique, en pronon
çant non la dissolution du mariage civil et religieux tout à la fois,
(1) A rticles 8 , 9 , 10 et s u iy a n s , §. 2 de la loi du 20 septembre 1792.
A 2
�(4)
que les époux avoient contracté devant le njinis.tre du c u lte , sui
vant les lois du. temps, le 8 novembre *774, mais seulement la
dissolution des conventions civiles du m ariage, contractées la
veille devant Couguet jeune et H éraud, notaires.
Une prononciation si prém aturée, quand on veut y trouver
la dissolution du mariage par divorce fondé sur l'incompatibi
lité d’humeur qui n’y est pas , et si bizarre , quand on se borne
à y voir la dissolution des conventions matrimoniales qui y est
seu le, peut-elle être présentée de bonne foiaux tribunaux comme
un acte de divorce sérieux? Le bon sens , la raison et la loi y
verront-ils jamais autre chose qu’une monstruosité , ou un jeu
du délire et de l’esprit de vertige ?
Vainem ent on multipliera les efforts pour y trouver un acte
de divorce légalement prononcé par le consentement mutuel des
époux : jamais on ne parviendra à faire illusion.
, i°. Le consentement mutuel des époux n’avoitété mis par l.a
loi au rang des causes légitimes de divorce , qu’avec des condipropres à en assurer la spontanéité , la réflexion et la per
sévérance. Ces conditions n’étoient pas livrées à l’arbitraire des
époux ; elles avoient été tracées avec soin par le législateur, et im
périeusement commandées. Ce genre de divorce de voit être provo
qué par le mari et par la femme réunis, et agissant conjointement,
par un acte de convocation de six au moins de leurs plus proches
parens, signifié par un huissier, non de la part de la femme au
m ari, ou de la part du mari à la femme , mais par un acte de
convocation signifié aux parens de la part du mari et de la femme
conjointement (1) ( celle-ci autorisée expressément à cet effet
par le mari ) (2) ; l’assemblée des parens de voit se former par u n
(1) A rtic le s 1 et 2 J e la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , §. 2.
(i) L'autorisation <le la fenune par le mari n ’est pas littéralement exigée
p.*r la loi du ao septem bre 179 a , mais elle est prescrite par les lois générale»
po ur tous les actes q u i concern ent la personne de la fem m e en puissance d u
n n r i.
�concert unanime deâ éponx ; en un m o t, ci jour f i x é , et au heu
convenu avec les parens ou amis. Un officier municipal devoit
être requis de s’y rendre , à l’effet de dresser un acte contenant
simplement que les parens ou amis avaient entendu les époux
en assemblée dûment convoquée , et qu’ ils n ’avoient pu les
concilier (1).
Un mois au moins après la date de cet acte , les époux persé
vérant dans leur dessein , avoient la faculté de se p r é s e n t e r , tou
jours conjointement et de concert, devant l’officier public charge
de recevoir les actes de m ariage; e t , sur leur demande , cét
officier public ¿toit tenu de prononcer leur divorce sans con
naissance de cause (i).
Est-cé avec un pareil concert que les époux de Reyrolles pro
cédèrent pour faire prononcer l a dissolution de leur m a r i a g é ?
non. Les vit-on se réunir pour convoquer c o n jo i n t e m e n t et db
concert l’assemblée de leurs parens et amis à un jour convenu
entr’eux? non. Point d’acte fait de concert par les époux réunis ,
mais seulement des actes isolés et hostiles de chaque côté ; point
de convocation notifiée conjointement aux parens , mais seule
ment des réquisitions réciproques et successives du mari à la
fem m e, et de la femme au mari : partout la marche et les ca
ractères du divorce par incompatibilité d’humeur ; nulle part la
marche et les caractères du divorce par consentement mutuel
et spontané.
20. Les époux se présentent le 27 ju in devant les parens :
sera-ce pour le ur exposer qu’il leur est impossible de supporter
plus long-temps le t o u r m e n t de le u r union , et qu’ils demandent
c o n jo in te m e n t le divorce? nullement. Le mari rappelle l’acte
signifié de sa part à son épouse, le 24 m ai, à l'effet de pro
voquer le divorce par incompatibilité d ’humeur; la fem m e, de
son cô té, rend compte de l’acte de représailles que l’amour-
(1) A r tic le 4.
(a) Articlu
5 de la même loi , même §. 2.
�(
6
)
propre irrité lui avoit fait notifier à son m ari, le 27 du même mois
pour lui déclarer qu’il n’avoit fait que prévenir ses 'intèntions,
qui étoient les mômes que celles de son mari; cë qui veut dire
qu’elle désiroit comme lui un divorce pour incompatibilité tl’hu
meur , si les tentatives trois fois réitérées de conciliation voulues
par la lo i , étoient infructueuses. Les arbitres firent aux deux
époux les représentations qu’ils jugèrent propres à les rappro
cher. La daménile Rôyrolles, loin de se refuser .Vune concilia
tion qu’elle désiroit , leur répondit qu’elle ¿toit disposée ¿1
suivre en tous points la volonté de son m a ri; et par consé
quent de se îéunir à l u i , s’il vouloit se désister de son projet
de divorce. Le m ari, au contraire, déclara qu’il persistoit au
divorce ; mais il est clair qu’il persista seul , et que tout se
d éd uisit, de la part de la fem m e, à une résignation passive à
la volonté de son époux.
Que voit-on dans tout cela qui ressemble au concert unanime ,
au consentement réciproque, persévérant et également spon
tané des deux cô té s , que la loi demande pour autoriser le di
vorce par consentement mutuel? rien assurément. On n’y voit
donc pas les préliminaires impérieusement exigés pour ce genre
de divorce.
3°. Enfin on ne trouve pas non p lu s , dans l ’acte de divorce
du 28 ju ille t, la preuve de l’accomplissement de cette impor
tante condition exigée par l’article 5 de la lo i, que le divorce
fut prononcé par l’officier public, sur la demande des épou x;
car il ne fut demandé ni par le' m a ri, ni par la femme. Le
récitatif de l’acte prouve en effet qirils se bornèrent à requérir
cet officier de prononcer la dissolution de leur contrat de m çriage passé devant Couguet jeu n e et H éraud, notaires : ce
n’étoit pas là l’objet du divorce, ni de la mission que l’officier
public avoit reçue de la loi. Le divorce ne détruit pas les con
ventions matrimoniales , il ne détruit que le mariage lui-méme,
par rapport à la personne des époux ; c’est-à-dire, l'engagement
de rester unis jusqu’à la m o rt, et soumis aux devoirs qu’en-
�(
'7
)
traîne la société conjugale contractée devant les ministres de
la loi. Cp fut bien là le prononcé de l'officier p u b lic, puisqu il
déclara que leur mariage, ¿toit dissous , et qu’ils etoient librck
de leurs, personnes ; mais ce n’étoit pas ce que les époux lui
avoient dçmandé.<-Encore une fo is , ce n’étoit pas du mariage
contracté entr’eux le 8 novembre 1774 5 devant le ministre de
la loi et du cu lte, qu’ils avaient requis l’oFiicier public de pro
noncer la dissolution , mais uniquement du contrat de mariage
passé la veille devant Couguet jeune et Héraud , notaires. Leur
réquisition éloit dérisoire , elle étoit un je u ; l’officier public
eut l’ineptie de ne pas s’en ap ercevo ir, et de prononcer gra
vement un divorce qu’on ne luj demandoit pas. Que conclure
de là? que cette prononciation arbitraire et i£ o ffice, d u n d i
vorce qui n'étoit pa.s demandé, n’est qu’ une monstruosité, une
illusion, un vain formulaire de paroles vides de sens , que le
poids de la loi fit rentrer dans le néant au même instant où
elles sortirent de la bouche de la sottise affublée du costume
de l ’autorité publique. Sunt verba et voces, prœtereà que nihil.
Les époux restèrent donc époux après avoir joué cette e s p è c e
de comédie ridicule.
,
Aussi l ’épouse a trouvé protection et accueil dans les organes
de la lo i, en première instance : pourroit-elle craindre d’étre
repoussée dans une cour, appui de l’infortune et gardienne de
l’ordre public?
Oui » vous serez repoussée, nous dira avec une insultante
arrogance l’qpulente demoisel}e M a i g n e , parce que vous avez
élevé contre v o u s de s fins de non-recevoir insurmontables, soit
par la constante adhésion que vous avez donnée au divorce pen
dant onze années, consécutives , vous, dame Florat-Reyrolles,
qui venez aujourd’hui faire entendre pour la première fois des
plaintes; soit par votre silence jusqu’après la mort du sieur de
I\eyrolles.
Des fins de non-recevoir contre l’ordre public et dans des
questions d’état! La demoiselle Maigne se fla tte -t-e lle donc
�ta)
que la cour d'appel oubliera cette maxime aussi ancienne que
la société , et qui vient d’étre renouvelée par 1’articlè 6 du
Code civil : ct
ne Pcut déroger par des conventions par
ie ticulières au x lois qui intéressent l'ordre public et les
u bonnes mœurs ? » Il faudroit cependant l’o u b lie r, et ad
mettre en principe qu’il est permis de déroger par des con
ventions privées, aux lois qui intéressent l’ordre public et les
m œ urs, pour valider par une adhésion, soit expresse, soit
tacite, un divorce dans Içquel les formes légales ont toutes été
méprisées , et pour donner de la consistance à ce fantôme.
Loin de nous un si étrange abus , qui frapperoit d’impuissance
les lois régulatrices de l’ordre so cia l, et ne laisseroit que le
caprice pour directeur de l’ordre public et des mœurs ! Sans
doute il est permis de transiger sur les intérêts civils qu’un di
vorce valablement prononcé laisse h régler entre les époux ; ce
ne sont là que des points secondaires et de droit purement
privé : mais transiger sur la -validité du divorce en lui-m êm e,
et rendre valide, par une approbation formelle ou tacite, celui
qui seroit nul par la violation des formes légales, c ’est là un
objet qui intéresse l’ordre public ct les bonnes mœurs , un
objet par conséquent qui ne sauroit être du domaine de la
volonté aibitraire des parties.
L ’arrét de la cour de cassation , du 24 pluviôse an i 3 , que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , n’a rien de contraire
à ces règles. On l’a démontré dans le mémoire, pag. 2G et 27 ; et
la seule lecture des motifs de l’arrèt de la cour d’appel de T rê v e s ,
qui étoit attaqué , et qui fut maintenu , suffit pour cette démons
tration. L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs
contrats la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cepen
dant tenté de le faire annuller par justice. Son épouse repoussoit
les nullités, et d’ailleurs elle se prévaloit de ce que son mari avoit
reconnu la validité du divorce. L ’arrét avoit déclaré le mari
non recevable dans sa demande en nullité ; mais pourquoi? non
parce que le mari avoit reconnu la validité du divorce , mais parce
�G
9
)
que cette validité étoit réelle. A tten du que les moyens de n u l
lité sont sansfo n d em en t, étoit-il dit dans l’arrét : ce m otif tranche
tout.
«v^mcr
>
Enfin répétons ce qu’on a dit dans le mémoire , qu’il n y a pas
eu un seul acte d’approbation d irecte, expresse et form elle de la
validité du d iv o rce , en ce qu’il avoit dissous ce m ariage, et
déclaré les époux libres de leurs personnes ; pas un seul acte d’exé
cution du divorce , sous ce point de vue , de là part de la dame
Florat de Reyrolles.
Pourquoi donc n’avez-vous pas formé opposition au second ma
riage de votre époux, si vous ne regardiez pas le premier comme
dissous, lui dira-t-on encore? Elle répondra : Pourquoi mon époux
a t-il trompé ma vigilance, en anticipant de deux mois le terme
d’une année, pendant lequel il lui étoit interdit de former de
nouveaux liens, dans le cas même où son premier mariage eût été
légalement dissous (1)?
9i
Mais encore , pourquoi différer jusqu’après la mort du sieur de
Reyrolles pour réclamer le titre d ’épouse, si vous n’en étiez pas'
déchue? continuera-t-on. Pourquoi? parce qu’il auroit fallu se
mettre aux prises avec l’implacable Maigne, qui auroit fait réparer,'
par un second d ivorce, les vices du premier. Mais , après tout,
la lin de non-recevoir qu’on voudroit induire du silence gardé pen
dant toute la vie du sieur de Reyrolles , n’auroit eu de poids ,
même sous le régime des lois romaines , que dans le cas où l’acte
de divorce n’auroit été attaqué que plus de cinq an s ap rès le décès
du sieur de Reyrolles. Ici la nullité a été demandée, non-seule
ment dans les c i n q ans , m ais même dans les six mois du décès. La
fin de non-recevoir dont il s’agit n’est donc qu’une illusion. C ’est
ce que la cour de cassation a formellement décidé par arrêt rendu
en l’an 10 , entre la demoiselle Preaudeau et l ’héritier de Davign on , son mari divorcé (2).
(1) A r t i c le 2 ,
3 de la loi du 20 septembre 1792 , précitée.
(2) Cet arrêt est rapporté dans le recueil de Sirey , an 10 , page
65 .
�(
10
)
Il ne nous r e s t e pins qu’à parler d’une dernière fin de non-recevoir que l’on prétend puiser dans la loi transitoire du 26 germinal
an 1 1 , d’après laquelle on raisonne ain si, comme dans l’affaire
M a c - M a h o n . « Le texte de l’article i er. de la loi est ainsi conçu :
« Toiis divorces prononcés par des officiers de l’état c iv il, ou au« torisés par jugement , avant la publication du titre du Code
« civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
« lois qui existoiçnt avant cette publication.
cc Le terme générique tous , embrasse indistinctement la génécc ralité des actes qualifiés divorces , afin qu’ils aient leur effet,
cc Le législateur 11e demande qu’une chose ; c ’est qu’ils soient
cc prononcés par un officier de l’état c iv il, quelle que puisse être
cc l’irrégularité de leurs formes. 33
Notre réponse est prompte , et nous la tirons de l’arrét même
qui intervint dans cette affaire célèbre , dont le détail se trouve
dans tous les recueils , et où on remarque que la loi transitoire
du 2G germinal fut spécialement discutée. L ’émigré rentré MacMahon ne fut pas déclaré par la cour de cassation, non recevable à demander la nullité du divorce prononcé contre lui
pour la cause d’absence, par le m otif-que la loi transitoire
du 06 germinal an 11 , interdisoit toute réclamation contre les
divorces prononcés avant la publication du Code c iv il, quel
ques nullités de forme qu’on pùt leur reprocher : la cour de
cassation repoussa, au contraire, absolument ce m oyen, nous
dit l’arrétiste (1). Le sieur Mac-Mahon fut seulement déclaré
non recevable , à cause de sa qualité d’émigré rentré ; et
cc attendu qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 sepcc tembre 1792, expliquées par l’avis du conseil d’état, du 11
« prairial an 12, approuvé par l’empereur le 18 du même mois,
cc que les al/sens de France rentrés ne peuvent point attaquer
cc les actes de divorce faits pour cause d absence , dans ce sens
( t ) R e ç ç u i l de S i r ey , an i 3
,pope
�(
11 \
« qu’ils puissent remettre en question 1 affaire, et d iscu terla
« cause de divorce. »
Tous les cloutes sont dissipés , ce semble.
La nullité absolue de l’acte de divorce prononcé entreles époux
de Rf;yrolles , le 28 juillet 1793 , ne peut pas être mise en pro-,
blèma ; elle u’est co u verte, et elle ne pouvoit l’étre , par aucune
fin <le non-recevoir. Le jugement du tribunal du P uy , q u i, en
l'accueillant , a déclaré le mariage des époux Couguet-Florat et
Claude de Rey rolles subsistant jusqu’au décès de ce dernier , et
q ui a m aintenu, en conséquence, la dame de Florat dans les
titres et les droits de veuve du sieur de Reyrolles , ne pourra donc
trouver que des approbateurs parmi tous les amis de l’ordre et
des mœurs.
;
A
D é l i b é r é à Clerm ont-Ferrand, le 8 janvier 1806.
'l
11
BERGIER, BEIL LE-BERGIER.
IMWI
LE CONSEIL
b
ui
r/i
S O U S S I G N E , qui a vu la présente con
sultation , est entièrement du même avis et par les mêmes
raisons. Le divorce étant n u l, dans une matière d’ordre p u b lic,
les fins de non-recevoir ne peuvent pas couvrir la nullité. On
ne croit pas pouvoir rien ajouter , ni aux moyens établis dans
la consultation pour prouver la nullité du d ivo rce, ni aux ré
ponses qui y sont faites aux fins de non - recevoir proposées.
On n a rien trouvé dan s le m é m o i r e de la demoiselle M aigne,
qui a paru après cette consultation , qui n’ait été prévu ; et il
ne reste dans ce mémoire que l’apologie du divorce.
D élibér é
à Riom , le 19 janvier 1806.
ANDRAUD,
GASCHON,
BORYE.
�C« )
L e CO N SE IL SO U SSIG N É , qui a vu le mémoire en réponsede la demoiselle M aigne, la consultation de,M M . Andraud ,
Caschon et Borye , du 19 janvier 1806 , et revu sa consulta
tion première du 8 janvier, qui, quoiqu’antérieure au mémoire
de la demoiselle Maigne, en a prévenu les m oyens, et y a
répondu d’avance,
, avec un nouveau degré de confiance , à penser
que le divorce prononcé entre le sieur de Reyrolles et la dame
C ou gu et-F lorat, le 28 juillet iy g 3 , est nul de toute nullité,
et que les fins de non-recevoir par lesquelles on prétend en.
écarter l’examen , ne sont que de pures illusions.
Si la demoiselle Maigne a c r u , dans son mémoire , ou plutôt
dans son libelle, prouver que la modération n’est pas son carac
tère , et que son ton n’est pas celui de la d écen ce, elle a par
faitement réussi : si elle a prétendu persuader que le tribunal
du Puy a mal jugé, en décidant que le sieur Reyrolles est mort
l ’époux légitime de la dame Couguet-Florat, elle a manqué son
but.
Rien de nouveau dans ce m ém oire, qui n’ait sa réponse dans
celui de la dame Couguet Florat et dans les consultations im
primées qui l’accompagnent. Un seul fait mérite d’être relevé :
en veut parler de l’exploit d’assignation donnée, d it-on, à la
requête de la dame Couguet F lorat, au sieur de Reyrolles, à
comparoitre et se trouver le 28 juillet, par-devant l’officier
p u b lic, pour voir prononcer le divorce d’entre les parties, lui
déclarant que comparant ou n o n , i l y sera procédé tant en
absence qu'en présence (1). La demoiselle Maigne a-t-elle pesé
cette dernière phrase , lorsqu’elle a produit l’exploit dans leP ersiste
(0
V oir
le* pages
38 et
5g du mémoire de la demoiselle Maigne,
l
�( i3 )
quel on la trouve, comme une pièce tranchante et décisive,^
pour caractériser le divorce par consentement m utuel? Si elle*
l’a pesée, comment n’a t-elle pas aperçu que cette pièce esti
au contraire une démonstration que le divorce provoqué n étoit
qu’un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère ?
En e ffe t , le divorce pour incompatibilité d’humeur et de
caractère, est le seul qui puisse être prononcé sur l’assignation
donnée par un seul des époux à l’autre, et en l'absence comme
en présence de l’époux appelé , d’après les articles 5 et 6 , sec
tion 5 de la loi du 20 septembre 1792, relative aux actes do
1 état civil. Quant au divorce par consentement m u tu el, ce
11’est pas sur l’assignation donnée par l’un des époux s e u l, au
jour qu’il lui plaît de fixer, que la loi veut qu’il soit prononcé,
c ’est sur la demande qu’en font conjointem ent les deux époux,
qui se présentent spontanément et d’un commun a cco rd , à cet
e ffe t, devant l’ofiicier p u b lic, en la maison com m une, aux
jo u r et heure qu’il aura indiqués. ( Art. 3 de la loi citée. ),p.
Ici la pièce produite par la demoiselle Maigne prouve irré-f:
sistiblement que les deux époux ne se présentèrent pas spojir
tanément et sans assignation devant l’officier public , aux jouf
et heure qu’il leur avoit indiqués, pour requérir conjointement
le divorce ; qu’ils ne comparurent l’un et l’au tre, au contraire,
que sur l’assignation donnée par un s e u l, et aux jour et heure
que le provocant avoit lui-méme indiqués : donc elle prouve
irrésistiblement qu’ils ne comparurent pas pour requérir un di
vorce par consentement m u tu el, mais uniquement pour requérir
un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère ; d’où
il suit que ce n’est qu’un divorce pour incompatibilité d'humeur
qui fut prononcé, et par conséquent un divorce dont il est
impossible de se dissimuler la nullité , puisqu’il fut prononcé
prématurément, et sans observer les délais et les trois épreuves
successives qu’exigeoit la loi pour ce genre de divorce. Ainsi
la pièce que la demoiselle Maigne a produite en triomphe sc
�( 14 )
retourne contre elle-même , et ne servira qu’à mieux assurer
sa défaite.
v
D é l i b é r é à Clermont-Ferrand, le 21 janvier 1806.
BERGIER.
*
A RIOM , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Gaschon
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
Description
An account of the resource
Consultations sur mémoire imprimé, pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, appelante de jugement du tribunal de première instance séant au Puy, rendu le 24 floréal an 13.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0708
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0706
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53903/BCU_Factums_M0708.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Brioude (43040)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
nullité du mariage
remariage hâtif
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53835/BCU_Factums_M0524.pdf
14f5510ea49293e5ece91401fd75bf0e
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
SUR M É M O I R E I MP R I MÉ ,
POUR
M a r g u e r ite C O U G U E T -F L O R A T , veuve du sieur
de Reyrolles, intimée ; .
C O N T R E
C
a t h e r i n e
M A I G N E } appelante de
ju g e m e n t
tribunal de première instance séant au Puy
le 24 floréal an 13.
du
rendu
T
T
L e C O N S E I L S O U S S I G N É n’hésite pas à penser, avec
'el stimable auteur du mémoire im prim é pour la dame CouguetA
�co
ï l o r a t , que le jugem ent du tribunal du P u y , q u i, sans s’arrêter
au fantôm e de divorce opposé à cette v e u v e , a décidé que le
sieur de R eyrolles est mort s o n , ép o u x , rend un hommage trop
pur aux mœurs , à la justice et au x lois , pour que l’appel porté
devant la sage cour de Riom doive lu i inspirer des craintes.
L a dem oiselle Maigne se pare de la qualité de seconde fem m e
et de veuve du divorcé de R e yro lles; mais elle sait bien que c e
sont là des titres usurpés; que son m ariage essentiellem ent n u l,
pour avoir été p récip ité, quand il auroit été précédé d’un divorce
r é e l, ne l’arracha point à la honte du co n cu bin age, et ne couvrit
m êm e pas' ses désordres de l’excu se et du manteau de la bonne
foi ; car elle ne pouvoit pas ign orer, lorsqu’elle engagea sa fo i
au sieur de R eyro lles, divorcé depuis dix mois seulem ent, elle
ne pouvoit pas ignorer , disons-nous , la loi qui interdisoit à
l'époux divorcé de contracter un nouveau m ariage dans l’année
du divorce (1) : ce m ariage en outre présente d’autres vices
in u tiles, quant à présent, à rapporter.
D un autre c ô t é , jamais elle n’a , pendant ce prétendu m a
riage , goûté les douceurs de la maternité.
C e n’est donc ni pour couvrir son h o n n eu r, ni pour conser
ver un état à ses e n fa n s, qu’elle s’acharne à dégrader cette
épouse infortunée; c ’est uniquem ent pour reten ir, sans retran
ch em en t.et sans partage , la riche dépouille du d é fu n t, devenue
sa proie par un testament surpris à la crainte et à la foiblesse ;
uniquem ent pour nager dans un superflu plus abon d an t, et le
réserver à des collatéraux avides.
A h ! si la balance de la loi pouvoit être un instant flottante ou
incertaine dans cette lutte affligeante pour les mœurs , l ’im
pulsion du sentim ent et 1 humanité la feroient pencher bien vite
ch faveur de l’épouse légitim e , à qui la cupidité ose disputer les
«— pjv-H—
oq ■
»>
. « î*
---- ----- 1-------- — — —
....................... i——----- -—
' fif Art. 2, §/s delà loi du ao septembre 1792,
�C 3)
avantages m atrim oniaux que le plus solennel et le plus saint
des contrats lu i avoit assu rés, et qu une courtisanne voudroit
réduire au plus extrêm e dénûment.
Mais la dame Florat de Reyrolles n’a pas besoin d ém ouvoir
le sen tim en t, pour réunir les suffrages à la cour d’appel com m e
elle les a réunis en prem ière instance : il lui suffit de faire pat 1er
la loi.
'
,
L e sieur de Reyrolles lu i engagea sa foi aux pieds des a u te ls ,
le 8 novem bre i 774 , avec toutes les formalités légales que la
loi du temps exigeoit pour form er un mariage in isso u e
m a ria g e , légalem ent co n tracté, ne devoit ê tie c issous que p^
la mort de l’un des époux. U ne loi postérieure en
ispo.a c
n ie n t, et voulut que c e lien sacré put etre ro m p u , entr^
d eux époux , par le divorce , dans les formes qu e le < ter
mina. L e sieur de R eyrolles , dans le délire de la passion qui
l ’é g a ro it, voulut tenter de rom pre par cette nouvelle voie les
sermens qui l’ unissoient h son épouse ; mais conduisit-il 1 en
treprise au term e marqué par la loi? il s’en faut bien. U n acte
de divorce précipité , arbitraire , et m onstrueux dans sa contexture , la fit avorter au tiers de la route ; car le divorce provoqué
par lui seul le 24 mai 179 5, sur la sim ple allégation de l ’in com
patibilité d’hum eur et de caractère , devoit être précédé de trois
assemblées de parens dans un intervalle de six mois de délai au
moins , afin de préparer par de sages conseils , et de mûrir pai
la réfle xio n , un rapprochem ent entre les époux , qui est le pre^
m ier et le principal vœu de la loi (1). Eli bien ! il f " 1
^
le 2 8 juillet m êm e an n ée, à la suite d’une s e u l e a s s c m j ^e ^
parens ou d’amis conciliateurs , par une com plaisance
cier de l’état c i v i l , qui eût été coupable , si sa pievar
n étoit pas excu sée par l’ineptie dont il a cons’pn a I
dans l’exercice de cet acte de l ’a u t o r i t é publique, en pronon
çant non la dissolution du mariage civil et r e l i g i e u x tout a a o is ,
(1) A rticles 8 , 9 , 10 et s u iv a n s , §. a de la loi du 20 septembre I 7 9 2.
A
2
�( 4)
que les époux avoîent contracté devant le ministre du c u lt e , sui
vant les lois du tem ps, le 8 novem bre 1774, mais seulem ent la
dissolution des conventions civiles du m ariage, contractées la
veille devant Couguet jeune et H é ra u d , notaires.
U ne prononciation si p r é m a t u r é e , quand on veut y trouver
la dissolution du m ariage par divorce fondé sur l’incom patibi
lité d’hum eur qui n’y est p a s, et si b iz a r r e , quand on se borne
à y voir la dissolution des conventions matrimoniales qui y est
se u le , peut-elle être présentée de bonne fo iau x tribunaux com m e
un acte de divorce sérieux? L e bon sens , la raison et la loi y
verront-ils jamais autre chose qu une monstruosité , ou un jeu
du délire et de l ’ e s p r i t de vertige ?
V ain em en t on m ultipliera les efforts pour y trouver un acte
de divorce légalem ent prononcé par le consentem ent m utuel des
époux : jam ais on ne parviendra à faire illusion.
x°. L e consentem ent m utuel des époux n’avoit été mis par la
loi au rang des causes légitim es de d iv o rc e , qu’avec des cond i
tions propres à en assurer la spontanéité , la réflexion et la per
sévérance. Ces conditions n ’étoient pas livrées à l’arbitraire des
époux ; elles avoient été tracées avec soin par le lég islateu r, et im
périeusem ent commandées. Ce genre de divorce devoit être provo
qué par le mari et par la fem m e réunis, et agissant conjointem ent,
par un acte de convocation de six au moins de leurs p lus proches
p a re n s, signifié par un huissier, non de la part de la fem m e au
m a ri, ou de la part du mari à la fem m e , mais par un acte de
convocation signifié aux parens de la part du mari et de la fem m e
conjointem ent (1) ( celle-ci autorisée expressém ent ii ce t effet
par le mari ) (2) ; L’assemblée des parens devoit se form er par un
(t) A r tic le s 1 et 2 île la loi (lu 20 septembre 1 7 9 2 , §. 2.
(2)
L'autorisation de la fem m e par le mari n'est pas littéralement exigée
p .r la loi du 20 septembre 1792 > iaais elle est prescrite par les lois générales
pour tous les actes q u i c o n c e r n e n t la personne de la feinuie en puissance d u
n u ti.
�( 5)
concert unanime des époux ; en un m o t, à j o u r f i x e , e t a u l i e u
c o n v e n u a v e c le s parais o u a m is . U n o liicier m unicipal d evoit
être requis de s'y rendre , à l’effet de dresser u n a c e c o n t e n a n t
s i m p le m e n t n u e le s p a r e n s o u a m is a v a i e n t e n t e n d u le s c-pouoo
en
a s s e m b lé e
d û m en t con voq u ée ,
e t q u 'i l s n a v a ie n t p u
es
concilier (1).
‘
,
n .
U n mois au moins après la date de cet. acte , les époux persé
vérant dans leur dessein , avoient la faculté de se présenter tou
jours conjointem ent et de c o n c e rt, devant 1 officier public charge
de recevoir les actes de m ariage; e t , sur eur c „m an
,
-
officier public ¿ to it tenu de prononcer leur ( H orce
naissance de cause (2).
,,
E st-ce avec un pareil co n cert que les époux de R eyro es p
cédèrent pour faire prononcer la dissolution de leur m anag ^
non. Les vit-on se réunir pour convoquer conjointement et
co n cert l’assemblée de leurs parens et amis à un jour convenu
entr’eux? non. Point d’acte fait de concert par les époux réunis ,
mais seulem ent des actes isolés et hostiles de chaque cûté ; point
de convocation notifiée conjointem ent aux parens , mais seule
ment des réquisitions réciproques et successives du mari à la
fe m m e , et de la fem m e au mari : partout la m arche et les ca
ractères du divorce par incom patibilité d’hum eur ; nulle part la
m arche et les caractères du divorce par consentem ent mutuel
et spontané.
a0. Les époux se présentent le 27 juin devant les parens
sera-ce pour leur exposer qu’il leur est i m p o s s i b l e de s u p p o r
1 1
1
i l
r m ’ ils d e m a n d e n t
plus long-temps le tourm ent de leur union , et 4 11
^ pacte
conjointem ent le divorce? nullem ent. L e m au
^
signifié de sa part à son épouse , le 2.4 n ia i, à l et f c t ( P
voquer le divorce p ar incom patibilité d'hum ew , a e
»
son c û té , rend com pte de l’acte de r e p r e s a i l l e s que am our
(l) Article 4 ,
(a) A r tic le
5 Je la même loi , m êm e
§. a.
�(
6
)
propre irrité lui avoit fait notifier à son m a ri, le 27 du même m o is,
pour lui déclarer qu’il n ’avoit fait que prévenir scs intentions,
qui étoient les mêm es que celles de son mari; ce qui veut dire
qu’elle désiroit com m e lui un divorce pour incom patibilité d 'h u
m eur , Si les tentatives trois fois réitérées cle conciliation voulues
par la l o i , étoient infructueuses. Les arbitres firent aux deux
époux les représentations qu’ils jugèrent propres à les rappro
cher. L a dame de R e y ro lles, loin de se refuser à une con cilia
tion qu’elle désiroit , leur répondit qu clic ¿to it disposée ci
suivre en tous points la 'v o lo n t é de son mari ; et par consé
quent de se réunir à lu i , s il v o u l o i t se desister de son projet
de divorce. L e m a r i, au contraire , déclara qu’il persistoit au
divorce j mais il est c la ir qu il persista seul , et que tout se
r é d u is it, de la part de la fe m m e , à une résignation passive à
la volonté de son époux.
Q ue voit-on dans tout cela qui ressemble au concert unanime ,
au consentem ent ré cip ro q u e , persévérant et égalem ent spon
tané des deux c ô té s , que la loi demande pour autoriser le di
vorce par consentem ent m utuel? rien assurément. O n n’ y voit
donc pas les préliminaires im périeusem ent exigés pour ce genre
de divorce.
5°. Enfin on ne trouve pas non plus , dans l’acte de divorce
du 28 ju ille t, la preuve de l’accom plissem ent de cette im por
tante condition exigée par l’article 5 de la l o i , que le divorce
fût prononcé par 1 officier p u b lic, sur la dem ande des ép ou x ;
car il ne fu t demandé ni par le m a r i, ni par la fem m e. L e
récita tif de l’acte prouve en effet qu’ils se bornèrent à r e q u é r ir
cet officier de prononcer la dissolution de leur contrat de m a
riage passé devant Couguet je u n e et I ié r a u d , notaires : ce
n ’étoit pas là l’objet du d ivorce, ni de la mission que l’officier
public avoit reçue de la loi. L e divorce 11e détruit pas les co n
ventions matrimoniales , il ne détruit que le m ariage lui-m éine,
par rapport à la personne des époux ; c ’est-à-dire , l’engagement
de rester unis jusqu’à la m o r t, et soumis aux devoirs qu’en
�( 7)
traîne la société conjugale contractée devant les ministres de
la loi. Ce fut bien là le prononcé de l’officier public , puisqu’il
déclara cjue leu r m cinoge étoit dissous , c l (ju ils cto ieu t libres
jtle leurs personnes ; mais ce n étoit pas ce que les époux lui
avoient demandé. Encore une f o is , ce n’étoit pas du mariage
contracté entr’eux le 8 novem bre a 7 7 4 , devant le ministre de
la loi et du c u lte , qu’ils avoient requis l’officier public de pro
noncer la dissolution , mais uniquem ent du contrat de m aiiage
passé la veille devant Couguet jeune et H éraud , notaires. L eu r
réquisition étoit dérisoire , elle étoit un jau ; 1 officier public
eut l’ineptie de ne pas s en apercevoir , et de piononcer giavem ent un divorce qu’on ne lui demandoit pas. Q ue conclure
de là ? que cette prononciation arbitraire et d o f f i c e , d un di
vorce qui n’étoit pas dem andé, n’est qu’ une m onstruosité, une
illusion , un vain form ulaire de paroles vides de sens , que le
poids de la loi fit rentrer dans le néant au m êm e instant ou
elles sortirent de la bouche de la sottise affublée du costum e
de 1 autorité publique. S u n t v e rb a , cl -v o ce s, p r œ t e r e à q u e n i h i l.
Les époux restèrent donc époux après avoir joué cette espèce
de com édie ridicule.
Aussi l ’épouse a trouvé protection et a ccu e il dans les organes
de la l o i , en prem ière instance : p o u rro it-elle craindre d’étre
repoussée dans une c o u r, appui de l’infortune et gardienne de
l’ordre public?
O u i, vous serez repou ssée, nous dira avec une insultante
arrogance l’opulente dem oiselle M aigne , parce que vous avez
élevé contre vous des fins de non-recevoir insurm ontables, soit
par la constante adhésion que vous avez donnée au divorce pen
dant onze années co n sé cu tiv es, vous, dame F lo ra t-R ejro lle s,
qui venez aujourd’hui faire entendre pour la prem ière fois es
plaintes; soit par votre silence jusqu’après la mort du sieur de
I\eyrolles.
D es fins de non - recevoir contre l’ordre public et dans des
questions d’état! La dem oiselle Maigne se fla tte - t- e lle donc
�« ( 8)
que la cour d'appel oubliera cette m axim e aussi ancienne que
la société , et, qui vient d’étre renouvelée par l’article 6 du
Code civil : ce O n ne p e u t déroger p a r des conventions par
ti ticuli'eres a u x lois q u i intéressent l ordre p u blic e t les
« bonnes mœurs ? » II faudroit cependant l’oublier , et ad
m ettre en principe qu’il est perm is de déroger par des con
ventions p rivé es, aux lois qui intéressent 1 ordre public et les
m œ u rs, pour valider par une a d h é sio n , soit e x p re sse , soit
ta c ite , un divorce dans lequel les form es légales ont toutes été
méprisées , et pour donner de la consistance à ce fantùme.
L oin de nous un si étrange abus , qui frapperoit d’impuissance
les lois régulatrices de 1 ordre s o c ia l, et ne laisseroit que le
caprice pour d irecteur de 1 ordre public et des mœurs ! Sans
doute il est perm is de transiger sur les intérêts civils qu’un di
vorce valablem ent prononcé laisse à régler entre les époux ; ce
ne sont là que des points secondaires et de droit purem ent
privé : mais transiger sur la v a lid ité du divorce en lu i-m êm e,
et rendre valid e, par une approbation form elle ou ta c ite , celu i
qui seroit nul par la violation des formes lég a les, c ’est là un
objet qui intéresse l’ordre public et les bonnes tnocurs , un
objet par conséquent qui ne sauroit être du domaine de la
volonté arbitraire des parties.
L a ir é t de la cour de cassation , du p.j pluviùse an i 5 , que la
dem oiselle IMaigne appelle à son se c o u rs, n’a rien de contraire
à CCS règles. O n 1 a dém ontré dans le m ém oire, pag. aG et 27 ; et
la seule lecture des motifs de l’arrêt de la cour d’appel de T r ê v e s ,
qui étoitattaqué , et qui fut m aintenu , sulfit pour cette dém ons
tration. L e sieur Jîoebler, après avoir reconnu dans plusieurs
contrats la validité du divorce obtenu par sa fe m m e , avoit cep en
dant tenté de le faire annuller par justice. Son é pouse repoussoit
les n u llité s, et d ’ailleurs elle se prévaloit de ce que son mari avoit
reconnu la validité du divorce. L arrêt avoit déclaré le mari
11011 recevable dans sa dem ande en nullité ; mais pourquoi P non
parce que le mari avoit reconnu la validité du divorce , mais parce
�( 9)
que cette validité étoit réelle. A tte n d u que les moyens de n u l
lité sont sa n sjo n d em en t, étoit-il dit dansl’arrét : ce m o tif tranche
tout.
Enfin répétons ce qu’on a dit dans le m ém oire , qu’il n’y a pas
eu un seul acte d’approbation d ir e c te , expresse et fo r m e lle de la
validité du divorce , en ce qu’il avoit dissous ce m a ria g e , et
déclaré les époux libres de leurs personnes; pas un seul acte d’exé
cution du divorce , sous ce point de vue , de la part de la dam e
Florat de R eyrolles.
Pourquoi donc n’avez-vous pas formé opposition au second ma
riage de votre époux, si vous ne regardiez pas le prem ier com m e
dissous, lu i dira-t-on encore? E lle répondra : Pourquoi mon époux
a t-il trompé ma vig ila n ce , en anticipant de deux mois le terme
d’ une a n n é e , pendant lequel il lui étoit interdit de form er de
n ouveaux liens, dans le cas m êm e où son prem ier m ariage eût été
légalem ent dissous (i)?
Mais encore , pourquoi différer jusqu’après la m ort du sieur de
R eyrolles pour réclam er le titre d ’ép ou se, si vous n’en étiez pas
déchue? continuera-t-on. Pourquoi? parce qu’il auroit fallu se
m ettre aux prises avec l’im placable Maigne, qui auroit fait réparer,
par un second d ivorce , les vices du prem ier. Mais , après to u t,
la fin de non-recevoir qu’on voudroit induire du silence gardé pen
dant toute la vie du sieur de R eyrolles , n ’nuroit eu de poids ,
m êm e sous le régim e des lois romaines , que dans le cas où l’acte
de divorce n ’auroit été attaqué que plus de cinq ans après le décès
du sieur de R eyrolles. Ici la nullité a été dem andée, non-seule
m ent dans les cinq ans , mais m êm e dans les six mois du décès. La
fin de non-recevoir dont il s’agit n’est donc qu’une illusion. C est
c e que la cour de cassation a form ellem ent décidé par arrêt rendu
en 1an 10 , entre la dem oiselle Preaudeaù et 1 héritier de D avignon , son m ari divorcé (2).
(ij Article 2 , §. 3 de la loi ilu
20
septembre 179 2 » Precitep.
(2) C et arrêt e n rap porté dans le r e c u e il de S ire y , an 10 , page
G5.
�( 10 )
Il ne nous reste plus qu’à parler d ’une dernière Fin de non-recevoir que l’on prétend puiser dans la loi transitoire du 26 germ inal
an 1 1 , d’après laquelle on raisonne a in s i, com m e dans l’affaire
M ac-M alion. « L e texte de l’article i cr. de la loi est ainsi conçu :
« T ous divorces prononcés par des officiers de l’état c i v i l , ou au« torisés par jugem ent , avant la publication du titre du Code
« c iv il re la tif au d ivo rce, auront leurs effets confoim ém ent au x
cc lois qui existaient avant cette publication.
« L e term e générique tous , embrasse indistinctem ent la génécc ralité des actes qualifiés d iv o r c e s , afin (pi ils aient leur effet.
« L e législateur ne demande q u ’une chose ; c ’est q u ’ils soient
« prononcés par un officier de l’état c i v i l , quelle que puisse être
cc l ’ i r r é g u l a r i t é de leurs formes. 35
N otre réponse est prompte , et nous la tirons de l’arrét m êm e
qui intervint dans cette affaire c é lè b r e , dont le détail se trouve
dans tous les recueils , et où on rem arque que la loi transitoire
du 26 germ inal fut spécialem ent discutée. L ’ém igré rentré M acliialion ne fut pas déclaré par la cour de cassation, non recevable à dem ander la nullité du divorce prononcé contre lui
pour la cause d’absence , par le m o tif que la loi transitoire
du c.G germinal an 11 , interdisoit toute réclam ation contre les
divo rces prononcés avant la publication du C ode civ il , quel
ques nullités de form e qu’on pût leur reprocher : la cour de
cassation repoussa , au co n tra ire, absolum ent ce m o y en , nous
dit l’arrétiste (i)> L e sieur Mac ÎMahon fut se\ilement déclaré
non r e c e v a b l e , à cause de sa qualité d’ém igré rentré ; et
cc
attendu qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 sep-
cc
teinbre 179 2 ,
e x p liq u é e s
par l’avis du conseil d ’é ta t, du 11
cc prairial an 12 , approuvé par 1 em pereur le 18 du m êm e m ois,
cc
(pie les absens de F ia n ce rentrés ne peuvent point attaquer
cc
les actes de d ivorce faits pour cause d’absence , dans ce sens
(1) IU-çeuil Je Sirey, an i 5 , page 2I^
�C Tr )
« qu’ils puissent rem ettre en question l’a ffa ir e , et discuter la
« cause de divorce. »
• T o u s les cloutes sont dissipés , ce semble.
L a nullité absolue de l’acte de d ivorce prononcé entre les époux
de Royrolles , le 28 juillet i 7 g3 , ne peut pas être mise en pro
blèm e ; elle n’est c o u v e rte , et elle ne pouvoit 1 être , par aucune
fin de non-recevoir. L e jugem ent du tribunal du P u y , q u i , en
l ’a c c u e illa n t, a déclaré le m ariage des époux Couguet-Florat et
Claude de R eyrolles subsistant jusqu’au décès de ce dernier , et
q u i a m a in ten u , en con séquen ce, la dame de F lorat dans les
titres et les droits de veuve du sieur de R eyrolles , ne pourra donc
trouver que des approbateurs parmi tous les amis de 1 ordre et
des mœurs.
D
îlibéré
à C lerm o n t-F erran d , le 8 janvier 1806.
BERGIER,
L
BEIL LE-BERGIER.
E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a v u la présente co n
sultation , est entièrem ent du m êm e avis et par les m êmes
raisons. L e divorce étant n u l, dans une m atière d’ordre p u b lic ,
les fins de non-recevoir ne peuvent pas couvrir la nullité. On
ne cro it pas pouvoir rien a jo u te r , ni a u x m oyens établis dans
la consultation pour prouver la nullité du d iv o rce , ni au x ré
ponses qui y sont faites a u x fins de n o n - r e c e v o i r proposées.
On n’a rien trouvé dans le m ém oire de la demoiselle M a ig n e ,
qui a paru après cette consultation , qui n'ait été p ié v u , et
11e reste dans c e m ém oire que l’apologie du tlh orce.
Dinnim*
Hiom , le 19 janvier 180G.
ANDllAUD,
g a s c h o n
,
b o r y e
.
�-1—iE C O N S E IL S O U S S IG N É , q u ia vu le m ém oire en réponse
de la dem oiselle M a ig n e , la consultation de MM. Andraud ,
C asch on et Borye , du 19 janvier 1806, et revu sa consulta
tion prem ière du 8 janvier, q u i, quoiqu'antérieure au m ém oire
de la dem oiselle M a ig n e , en a prévenu les m o y e n s, e t y a
répondu d ’a van ce,
P e rs is te , avec un nouveau degré de confiance , à penser
que le divorce prononcé entre le sieur de Pieyrolles et la dam e
C o u g u e t- F lo r a t, le 28 ju illet 1 7 9 3 , est nul de toute n u llité ,
et que les fins de n o n - recevoir par lesquelles on prétend en
écarter l’exainen , ne sont que de pures i l l u s i o n s ,
Si la dem oiselle M aigne a c r u , dans son m ém oire , ou plutôt
dans son lib elle, prouver que la modération n ’est pas son carac
tère , et que son ton n est pas celu i de la d é c e n c e , elle a par
faitem ent réussi : si elle a prétendu persuader que le tribunal
du P u y a mal ju g é , en décidant que le sieur R eyrolles est m ort
1 époux légitim e de la dame Couguet-F lorat, elle a manqué son
but.
Rien de nouveau dans c e m ém oire, qui n’ait sa réponse dans
celu i de la dame Couguet Florat et dans les consultations im
prim ées qui 1 accom pagnent. Un seul fait m érite d’être relevé:
bn veut pailer de 1 exploit d’assignation d on n ée, d it-o n , à la
requête de la dame Couguet F lo r a t, au sieur de R eyro lles, \
com paroltre et se trouver le 28 ju ille t, p a r-d ev a n t l'officier
public , pour voir prononcer le divorce d’entre les parties, lui
cU'rlarant que com parant on n o n , i l y sera procède ta n t en
absence qu’en presence (1). L a dem oiselle Maigne a-t-elle pesé
cette dernière phrase , lorsqu’elle a produit l’exploit dans le-
(1 ) V o i r les pages
3S et
uiém oire de la d em oiselle M a ign e,
�( i3 )
quel on la tro u ve, com m e une p ièce tranchante et d écisive,
pour caractériser le divorce p a r consentem ent m u tu e l? Si elle
l ’a pesée , com m ent n’a-t elle pas aperçu que cette p ièce est
au contraire une démonstration que le divorce provoqué n’étoit
qu’un divorce p our incom patibilité d ’hum eur e t de caractère?
En e f f e t , le divorce pour incom patibilité d’hum eur et de
ca ra ctè re, est le seul qui puisse être prononcé sur l’assignation
donnée par un seul des époux à l’au tre, et en l’absence com m e
en présence de l’époux appelé , d après les articles 5 et 6 , se c
tion 5 de la loi du 2.0 septem bre 17 9 2 , relative a u x actes de
l’état civil. Q uant au divorce par consentem ent m u tu e l, c e
n ’est pas sur l’assignation donnée par l’un des époux s e u l, au
jour qu’il lui plaît de fix e r, que la loi veut qu’il soit p ro n o n cé,
c ’est sur la dem ande qu’en font con jo in tem en t\es deux ép o u x,
q u i se présentent spontaném ent et d ’un com m un a c c o r d , à cet
e f f e t , devant l’officier public , en la m aison co m m u n e , a u x
fo u r e t heure q u ’ i l aura indiqués. ( Art. 5 de la loi citée. )
Ic i la p ièce produite par la dem oiselle M aigne prouve irré
sistiblem ent que les d eux époux ne se présentèrent pas sponta n em ent et sans assignation devant l’officier p u b lic , au x jour
et heure qu’il leur avoit in d iq u é s, pour requérir conjointem ent
le d iv o rce ; qu’ils ne com parurent l’ un et l’a u tre , au co n tra ire,
que sur Yassignation donnée par un s e u l, et au x jour et heure
que le provocant avoit lui-m ém e indiqués : donc elle prouve
irrésistiblem ent qu’ils ne com parurent pas pour r e q u é r i r un d i
vorce p a r consentem ent m u tu e l, mais uniquem ent pour requéiir
nn divorce pour incom p a tibilité d 'h u m eu r e t de caractère, d où
il suit que c e n’est qu’ un divorce pour in com p ^ 1!” ^ d hum eur
qui fut p ro n o n cé, et par conséquent un d h o rc e dont il est
impossible do se dissim uler la n u llité , puisqu’il fut prononcé
prém aturém ent, et sans observer les délais et les trois tpreuves
successives qu’exigeoit la loi pour ce genre de divorce. Ainsi
la p iece que la dem oiselle M aigne a produite en triomphe se
�( 14 )
retourne contre e lle -m ê m e , et ne servira qu’à m ieux assurer
sa défaite.
D
é l i b é r é
à C lerm ont-F erran d, le 21 janvier 1806.
B E R GIER,
»
A R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de la
C our d'appel. — Janvier 1806
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Gaschon
Borye
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité
Description
An account of the resource
Consultations sur mémoire imprimé, pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, appelante de jugement du tribunal de première instance séant au Puy, rendu le 24 floréal an 13.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0524
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0615
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53835/BCU_Factums_M0524.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Brioude (43040)
Le Puy-en-Velay (43157)
Limoges (87085)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
nullité
remariage hâtif
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53249/BCU_Factums_G1509.pdf
5b7017f3eaf2cc3056fda117a19f5248
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
SU R
LA N U L L I T É d ’ UN DI VORC E.
�CONSULTATIONS
SUR M É M O I R E I M P R I M E ,
P O U R
M a r g u e r i t e C O U G U E T -F L O R A T , veuve du sieur
de Reyrolles, intimée;
C O N T R E
C a th e r in e
M A I G N E , appelante de jugement du
tribunal de première instance séant au P u y , rendu
le 24 floréal an 13.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É n’hésite pas à penser, avec
l'estimable auteur du mémoire imprimé pour la dame CouguetA
�(O , F lo ra t, que le jugement du tribunal du P u y , q u i, sans s’arrêter
au fantùme de divorce opposé à cette v e u v e , a décidé que le
sieur de Reyrolles est mort son é p o u x , rend un hommage trop
pur aux mœurs , à la justice et aux lois , pour que l’appel porté
devant la sage cour de Riom doive lui inspirer des craintes.
La demoiselle Maigne se pare de la qualité de seconde femme
et de veuve du divorcé de Reyrolles ; mais elle sait bien que ce
sont là des titres usurpés; que son mariage essentiellement nul,
pour avoir été précipité, quand il auroit été précédé d’un divorce
r é e l, ne l’arracha point à la honte du concubinage, et ne couvrit
m êm e pas ses désordres de l’excuse et du manteau de la bonne
foi ; car elle ne pouvoit pas ign orer, lorsqu’elle engagea sa foi
au sieur de Reyrolles, divorcé depuis dix mois seulem ent, elle
ne pouvoit pas ig n o rer, disons-nous , la loi qui interdisoit à
l'époux divorcé de contracter un nouveau mariage dans l’année
du divorce (1) : ce mariage en outre présente d’autres vices
inutiles, quant à présent, à rapporter.
D ’un autre côté , jamais elle n’a , pendant ce prétendu ma
riage , goûté les douceurs de la maternité.
C e n’est donc ni pour couvrir son honneur, ni pour conser
ver un état à ses enfans, qu’elle s’acharne à dégrader cette
épouse infortunée; c’est uniquement pour retenir, sans retran
chement et sans partage, la riche dépouille du d éfu n t, devenue
sa proie par un testament surpris à la crainte et à la foiblesse ;
uniquement pour nager dans un superflu plus abondant, et le
réserver à des collatéraux avides.
A h ! si la balance de la loi pouvoit être un instant flottante ou
incertaine dans cette lutte affligeante pour les mœurs , l’im
pulsion du sentiment et l'humanité la feroient pencher bien vite
en faveur de l’épouse légitim e, à qui la cupidité ose disputer les
(«) A rt. a , $• 5 de la loi du 20 septembre 1792.
�y
'( 3 )
;
avantages matrimoniaux que le plus solennel et le plus saint
des contrats lui avoit assurés, et qu’ une courtisanne voudioit
réduire au plus extrêm e dénûment.
Mais la dame Florat de Reyrolles n’a pas besoin d’émouvoir
le sentim ent, pour réunir les suffrages à la cour d’appel comme
elle les a réunis en première instance : il lui sufiit de faire pailer
la loi.
L e sieur de Reyrolles lui engagea sa foi aux pieds des a u tels,
le 8 novembre 1774 1 avec toutes les formalités légales que la
loi du temps exigeoit pour former un mariage indissoluble.. Ce
m ariage, légalement contracté, ne devoit être dissous que par
la mort de l’un des époux. Une loi postérieure en disposa autre
m en t, et voulut que ce lien sacré pût être rompu , entre les
deux é p o u x , par le divorce , dans les formes qu'elle déter
mina. Le sieur de Reyrolles , dans le délire de la passion qui
l ’égaroit, vo u lu t tenter de rompre par cette nouvelle voie les
sermens qui l’unissolent à son épouse ; mais conduisit-il l’en
treprise au terme marqué par la loi? il s’en faut bien. Un acte
de divorce précipité , arbitraire, et monstrueux dans sa contexture , la fit avorter au tiers de la route ; car le divorce, provoqué
par lui seul le 24 m£d 179^> sur la simple allégation de l ’incom
patibilité d’humeur et de caractère , devoit être précédé de trois
assemblées de parens dans un intervalle de six mois de délai au
moins , afin de préparer par de sages conseils , et de mûrir par
la réflexion, un rapprochement entre les époux , qui est le pre
mier et le principal vœu de la loi (i). Eh bien ! il fut prononcé
le 28 juillet même année, à la suite d’une seule assemblée de
parens ou d’amis conciliateurs , par une complaisance de l’offi
cier de l’état c iv il, qui eût été co u p ab le, si sa prévarication
n étoit pas excusée par l’ineptie dont il a consigné la preuve
dans 1 exercice de cet acte de l’autorité pu bliqu e, en pronon
çant non la dissolution du mariage civil et religieux tout à la fo is,
(1 ) A r t i c l e s 8 , 9 , l o et s u i v a n s
,
§. 2 ils la lo i d u 20 s e p t e m b r e 1 7 9 a .
A
2
�(4)
que les ¿poux avoient contracté devant le ministre du c u lte , sui
vant les lois du temps, le 8 novembre 1774» mais seulement la
dissolution des conventions civiles du m ariage, contractées la
veille devant Couguet jeune et H éraud , notaires.
Une prononciation si prém aturée, quand on veut y trouver
la dissolution du mariage par divorce fondé sur l'incompatibi
lité d’humeur qui n’y est p a s, et si bizarre , quand on se borne
à y voir la dissolution des conventions matrimoniales qui y est
seule, peut-elle être présentée de bonne foiaux tribunaux comme
un acte de divorce sérieux? Le bon sens , la raison et la loi y
verront-ils jamais autre chose qu’une monstruosité , ou un jeu
du délire et de l ’esprit de vertige?
Vainem ent on multipliera les efforts pour y trouver un acte
de divorce légalement prononcé par le consentement mutuel des
époux : jamais on ne parviendra à faire illusion.
i°. Le consentement mutuel des époux n’avoit été mis par la
loi au rang des causes légitimes de divorce , qu’avec des condi
tions propres à en assurer la spontanéité , la réflexion et la per
sévérance. Ces conditions n’étoient pas livrées à l’arbitraire des
époux ; elles avoient été tracées avec soin par le législateur, et im
périeusement commandées. Ce genre de divorce devoit être provo
qué par le mari et par la femme réunis, et agissant conjointem ent,
par un acte de convocation de six au moins de leurs plus proches
parens, signifié par un huissier, non de la part de la femme au
m ari, ou de la part du mari à la femme , mais par un acte de
convocation signifié aux parens de la part du mari et de la femme
conjointement (1) ( celle-ci autorisée expressément à cet effet
par le mari ) (2) ; l’assemblée des parens devoit se former par un
( i j A r tic le s 1 et 2 de la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , §. 2.
(2) L'autorisation de la feim ne par le mari n ’est pas littéralement exigée
p.ir la loi du 20 septembre 1 7 9 2 , mais elle est prescrite p a r les lois générales
p o u r tous les actcs (jui concern cn t la personne de Ici fem uje en puissance Uu
m ari.
�5 )
concert unanime des époux ; en un m o t, à jou r f i x e , et au lieu
convenu avec les parens ou amis. Un olficier municipal devoit
être requis de s’y rendre , à l’effet de dresser un acte contenant
simplement que les parens ou amis avaient entendu les époux
en assemblée dûment convoquée , et qu’ils navoient pu les
concilier (1).
Un mois au moins après la date de cet acte , les époux persé
vérant dans leur dessein, avoient la l'acuité de se présenter , tou
jours conjointement et de concert, devant l’officier public chargé
de recevoir les actes de mariage ; e t , sur leur demande , cet
officier public ètoit tenu de prononcer leur divorce sans con
naissance de cause (2).
Est-ce avec un pareil concert que les 'époux de Reyrolles pro
cédèrent pour faire prononcer la dissolution de leur mariage ?
non. Les vit-on se réunir pour convoquer conjointement et de
concert l’assemblée de leurs parens et amis à un jour convenu
entr’eux? non. Point d’acte fait de concert par les époux réunis,
mais seulement des actes isolés et hostiles de chaque coté ; point
de convocation notifiée conjointement aux parens , mais seule
ment des réquisitions réciproques et successives du mari à la
iem in e, et de la femme au mari : partout la marche et les ca
ractères du divorce par incompatibilité d’humeur ; nulle part la
marche et les caractères du divorce par consentement mutuel
et spontané.
20. Les époux se présentent le 27 juin devant les parens :
sera-ce pour leur exposer qu’il leur est impossible de supporter
plus long-temps le tourment de leur union , et qu’ils demandent
conjointement le divorce? nullement. Le mari rappelle l’acte
signifié de sa part à son épouse, le 24 mai* à 1effet de pro
voquer le divorce par incom patibilité d ’humeur; la fem m e, de
son co té, rend compte de l’acte de représailles que l’amour-
Article /,.
1, 2) Article 5 de la même loi mèinu §. a.
,
A3
�w (¿ç**
. . .
.< 6 )
propre irrité lui avoit fait notifier à son m ari, le 27 du même m ois,
pour lui déclarer qu’il n’avoit fait que prévenir ses intentions,
qui étoient les mêmes que celles de son mari; ce qui veut dire
qu’elle désiroit comme lui un divorce pour incom patibilité d ’hu
meur , si les tentatives trois fois réitérées de conciliation voulues
par la l o i , étoient infructueuses. Les arbitres firent aux deux
époux les représentations qu’ils jugèrent propres à les rappro
cher. La dame de R eyrolles, loin de se refuser à une concilia
tion qu’elle désiroit , leur répondit q u ’elle éloit disposée ¿1
suivre en tous points la volonté de son mari ; et par consé
quent de se réunir à l u i , s’il vouloit se désister de son projet
de divorce. Le m ari, au contraire, déclara qu’il persistoit au
divorce ; mais il est clair qu’il persista s e u l, et que tout se
réduisit, de la part de la fem m e, à une résignation passive à
la volonté de son époux.
Que voit-on dans tout cela qui ressemble au concert unanim e,
au consentement réciproque, persévérant et également spon
tané des deux cù té s , que la loi demande pour autoriser le di
vorce par consentement m utuel? rien assurément. On n’y voit
donc pas les préliminaires impérieusement exigés pour ce genre
de divorce.
5". Enfin on ne trouve pas non p lu s , dans l ’acte de divorce
du 28 ju illet, la preuve de l’accomplissement de cette impor
tante condition exigée par l’article 5 de la lo i, que le divorce
fût prononcé par l’officier public, sur la demande des époux;
car il ne fut demandé ni par le m ari, ni par la femme. Le
récitatif de l’acte prouve en effet qu’ils se bornèrent à requérir
cet officier de prononcer la dissolution de leur contrat de ma
riage passé devant Couguet jeu n e et Ilé r a u d , notaires : ce
n’étoit pas là l’objet du divorce, ni de la mission que l’officier
public avoit reçue de la loi. Le divorce ne détruit pas les con
ventions matrimoniales , il ne détruit que le mariage lui-m ém e,
par rapport à la personne des époux ; c est-à-dire, rengagement,
de rester unis jusqu’à la m o rt, et soumis aux devoirs qu’en-
�(7 )
2
ü
\
traîne la société conjugale contractée devant les ministres de
la loi. Ce fut bien là le prononcé de l’officier p u b lic, puisquil
déclara que leur meninge ¿toit dissous , et qu’ils etoient libres
de leurs personnes ; mais ce n’étoit pas ce que les époux lui
avoient demandé. Encore une fois, ce n’étoit pas du mariage
contracté entr’eux le 8 novembre 17745 devant le ministre de
la loi et du c u lte , qu’ils avoient requis l'officier public de pro
noncer la dissolution , mais uniquement du contrat de mariage
passé la veille devant Couguet jeune et Héraud , notaires. Leur
réquisition étoit dérisoire , elle étoit un fau ; l’officier public
eut l’ineptie de ne pas s’en apercevoir , et de prononcer gra
vement un divorce qu’on ne lui demandoit pas. Que conclure
de là ? que cette prononciation arbitraire et d 'o ffice, d un di
vorce qui n'étoit pas dem andé, n’est qu’ une monstruosité, une
illusion , un vain formulaire de paroles vides de sens , que le
poids de la loi fit rentrer dans le néant au même instant où
elles sortirent de la bouche do la sottise affublée du costume
de l’autorité publique. Sunt verba et voces, prœtercti que nih.il.
Les époux restèrent donc époux après avoir joué cette espèce
de comédie ridicule.
Aussi l ’épouse a trouvé protection et accueil dans les organes
de la l o i , en première instance : pourroit-elle craindre d’être
repoussée dans une cour, appui de l’infortune et gardienne de
l’ordre public?
O u i, vous serez repoussée, nous dira avec une insultants
arrogance l’opulente demoiselle Maigne , parce que vous avez
élevé contre vous des fins de non-recevoir i n s u r m o n t a b l e s , soit
par la constante adhésion que vous avez donnée au divorce pen
dant onze années consécutives , vou s, dame Florat-Reyrolles,
qui venez aujourd’hui faire entendre pour la première fois des
plaintes ; soit par YOtre silence jusqu’après la mort du sieur de
Reyrolles.
Des fins de non -recevoir contre l’ordre public et dans des
questions d’état! La demoiselle Maigne se ila tte -t-e lle donc
�% •!
M
(8)
que la cour d'appel oubliera cette maxime aussi ancienne que
la société , et qui vient d’étre renouvelée par l’article 6 du
Code civil : cc On ne p eu t déroger par des conventions par
ti ticulières a u x lois q u i intéressent l'ordre public et les
« bonnes mœurs ? w II faudroit cependant l’oublier , et ad
mettre en principe qu’il est permis de déroger par des con
ventions p rivées, aux lois qui intéressent l’ordre public et les
m œ urs, pour valider par une adhésion , soit expresse, soit
incite, un divorce dans lequel les formes légales ont toutes été
m éprisées, et pour donner de la consistance à ce fantôme.
Loin de nous un si étrange abus , qui frapperoit d’impuissance
les lois régulatrices de l’ordre s o c ia l, et 11e laisseront que le
caprice pour directeur de l’ordre public et des mœurs ! Sans
doute il est permis de transiger sur les intérêts civils qu’un di
vorce valablement prononcé laisse à régler entre les époux; ce
11e sont là que des points secondaires et de droit purement
privé : mais transiger sur la validité du divorce en lui-m êm e,
et rendre valide, par une approbation formelle ou tacite, celui
qui seroit nul par la violation des formes légales, c ’est là un
objet qui intéresse l’ordre public et les bonnes mœurs , un
objet par conséquent qui ne sauroit être du domaine de la
volonté arbitraire des parties.
L ’arrét de la cour de cassation, du 24 pluviôse an i 3 , que la
demoiselle Maigne appelle à son secours , n’a rien de contraire
à ces régies. On l’a démontré dans le mémoire, pag. aG et 37 ; et
la seule lecture des motifs de l’arrét de la cour d’appel de Trêves ,
qui étoit attaqué , et qui fut maintenu , suifit pour cette démons
tration. L e sieur Boehler, après avoir reconnu dans plusieurs
contrats la validité du divorce obtenu par sa fem m e, avoit cepen
dant tenté de le faire annuller par justice. Son épouse repoussoit
les nullités, et d’ailleurs elle se prévaloit de ce que son mari avoit
reconnu la validité du divorce. L ’arrét avoit déclaré le mari
non recevable dans sa demande eu nullité ; mais pourquoi ? non
parce que le inari avoit reconnu la validité du divorce , mais paroc
�)
( 9
que Cette validité étoit réelle. A tten d u que les moyens de n u l
lité sont sansjoiulem ent, étoit-il dit dans l’arrë t : c e m otif tranche
tout.
Enfin répétons ce qu’on a dit dans le mémoire , qu’il n’y a pas
eu un seul acte d’approbation d irecte, expresse et form elle de la
validité du d ivo rce, en ce qu’il avoit dissous ce m ariage, et
déclaré les époux libres de leurs personnes ; pas un seul acte d’exé
cution du divorce , sous ce point de vue , de la part de la dame
Florat de Reyrolles.
Pourquoi donc n’avez-vous pas formé opposition au second ma
riage de votre époux, si vous ne regardiez pas le premier comme
dissous, lui dira-t-on encore? Elle répondra : Pourquoi mon époux
a t-il trompé ma vigilance, en anticipant de deux mois le terme
d’une a n n ée, pendant lequel il lui étoit interdit de former de
nouveaux liens, dans le cas même où son premier mariage eût été
légalement dissous (i)?
Mais encore , pourquoi différer jusqu’après la mort du sieur de
Reyrolles pour réclam er le titre d ’épouse, si vous n’en étiez pas
déchue? continuera-t-on. Pourquoi? parce qu’il auroit fallu se
mettre aux prises avec l’implacable Maigne, qui auroit fait réparer,
par un second divorce , les vices du premier. Mais , après to u t,
la fin de non-recevoir qu’on voudroit induire du silence gardé pen
dant toute la vie du sieur de Reyrolles , n’aurolt eu de poids ,
m êm e sous le régime des lois romaines , que dans le cas où l’acte
de divorce n’auroit été attaqué que plus de cinq ans après le décès
du sieur de Reyrolles. Ici la nullité a été dem andée, non-seule
ment dans les cinq ans , mais même dans les six mois du décès. La
fin de non-recevoir dont il s’agit n’est donc qu’une illusion. C ’est
ce que la cour de cassation a formellement décidé par arrêt rendu
en l’an 10 , entre la demoiselle Preaudeau et l ’héritier de Davignon , son mari divorcé (2).
(1) A r tic le 2 , §. 3 de la loi du 20 septem bre 1792 , précitée.
(2)C et
arrêt est rap porté dans le r e c u e il de S ir e y , «n 10 , page G5.
�< 5 * 0
S .
C i° )
Il ne nous reste plus qu’à parler d’une dernière fin de non-recevoir que l’on prétend puiser dans la loi transitoire du 26 germinal
an 1 1 , d’après laquelle on raisonne ain si, comme dans l’affaire
Mac-Mahon. « Le texte de l’article i fir. de la loi est ainsi conçu :
« Tous divorces prononcés par des officiers de l’état c iv il, ou au« torisés par jugement , avant la publication du titre du Code
« civil relatif au divorce, auront leurs effets conformément aux
« lois qui existoient avant cette publication.
cc Le terme générique tous , embrasse indistinctement la géné« ralité des actes qualifiés divorces , afin qu’ils aient leur effet.
« Le législateur ne demande qu’une chose ; c ’est qu’ils soient
cc prononcés par un officier de l ’état c iv il, quelle que puisse être
cc l’irrégularité de leurs formes. »
K otre réponse est prompte , et nous la tirons de l’arrêt même
qui intervint dans cette affaire cé lèb re , dont le détail se trouve
dans tous les recueils , et où on remarque que la loi transitoire
du 26 germinal fut spécialement discutée. L ’émigré rentré MacMahon ne fut pas déclaré par la cour de cassation, non recevable à demander la nullité du divorce prononcé contre lui
pour la cause d’absence , par le m otif que la loi transitoire
du c.6 germinal an 11 , interdisoit toute réclamation contre les
divorces prononcés avant la publication du Code civil , quel
ques nullités de forme qu’on pût leur reprocher : la cour de
cassation repoussa y au contraire, absolument ce m oyen, nous
dit l ’arrétiste (1). Le sieur Mac-Mahon fut seulement déclaré
non recevable , à cause de sa qualité d’émigré rentré ; et
te attendu qu’il résulte des dispositions de la loi du 20 sepcc tembre 1792, expliquées par l’avis du conseil d’é ta t, du 11
« prairial an 12 , approuvé par l’empereur le 18 du même mois,
cc que les absens de France rentrés ne peuvent point attaquer
cc les actes de divorce faits pour cause d’absence , dans ce sens
( i ) R ç c e u i l J e S i r e y , an 1 3 ,
page 216 .
�2oJ
( n )*
« qu’ils puissent reînettre en question l’a ffa ire , et discuter la,
te cause de divorce. «
Tous les cloutes sont dissipés , ce semble.
La nullité absolue de l’acte de divorce prononcé entre les époux
de Reyrolles , le 28 juillet 1793 , ne peut pas être mise en pro
blème* ; elle n’est couverte , et elle ne pouvoit l’étre , par aucune
fin de non-recevoir. Le jugement du tribunal du P u y , q u i , en
l ’a ccu e illan t, a déclaré le mariage des époux Couguet-Florat et
Claude de Reyrolles subsistant jusqu’au décès de ce dernier , et
qui a maintenu , en conséquence, la dame de Florat^ dans les
titres et les droits de veuve du sieur de Reyrolles , ne pourra donc
trouver que des approbateurs parmi tous les amis de l’ordre et
des mœurs.
D
élib é r é
à
Clevmont-Ferrand , le 8 janvier 1806.
BE R G 1E R , B E I L L E - B E R G I E R .
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu la présente con
sultation , est entièrement du même avis et par les mêmes
raisons. Le divorce étant n u j, dans une matière d’ordre p u b lic,
les fins de non-recevoir ne peuvent pas couvrir la nullité. On*
ne croit pas pouvoir rien a jo u ter, ni aux moyens établis dan»’
la consultation pour prouver la nullité du d ivo rce, ni aux ré
ponses qui y sont faites aux fins de n o n -recev o ir proposées.
On n’a rien trouvé dans le mémoire de la demoiselle M aigne,
qui a paru après cette consultation , qui n’ait été prévu ; et il
ne reste dans ce mémoire que l’apologie du divorce.
D é l i d é i v é à Riom , le 19 janvier 1806.
a n d r a u d
, g a s c i i o n , b o r y e .
oo.
�X j E CO N SE IL SO U SSIG N É , q u ia vu le mémoire en réponse
de la demoiselle M aigne, la consultation de MM. Andraud ,
Gaschon et Borye , du ig janvier 1806, et revu sa consulta
tion première du 8 janvier, qui, quoiqu’antérieure au mémoire
de la demoiselle M aigne, en a prévenu les m oyens, et y a
répondu d’avance,
P e r s is t e , avec un nouveau degré de confiance , à penser
que le divorce prononcé entre le sieur de Reyrolles et la dame
C o u g u et-F lo ra t, le 28 juillet 179 3, est nul de toute nullité,
et que les fins de non-recevoir par lesquelles on prétend en
écarter l’examen , ne sont que de pures illusions.
Si la demoiselle Maigne a c r u , dans son mémoire , ou plutôt
dans son libelle, prouver que la modération n’est pas son caracr
tère, et que son ton n’est pas celui de la d écen ce, elle a par
faitement réussi : si elle a prétendu persuader que le tribunal
du Puy a mal jugé, en décidant que le sieur Reyrolles est mort
l’époux légitime de la dame Couguet F lorat, elle a manqué son
but.
Rien de nouveau dans ce m ém oire, qui n’ait sa réponse dans
celui de la dame Couguet Florat et dans les consultations im
primées qui l’accompagnent. Un seul fait mérite d’étre relevé:
en veut parler de l’exploit d’assignation donnée, dit-on, à la
requête de la dame Couguet F lo ra t, au sieur de R eyrolles, à
comparoitre et se trouver le 28 ju illet, par-devant l’officier
pu b lic, pour voir prononcer le divorce d’entre les parties, lui
déclarant que comparant on non , il y sera procéda tant en
absence qu'en présence {1). La demoiselle Maigne a-t-elle pesé
cette dernière phrase , lorsqu’elle a produit l’exploit dans le-
(1) V o i r le* pngej 38 et
3g
du m ém o ire de la dem oiselle M a ig n e ,
�20/
( i3 ) M
."
quel on la trouve, comme une pièce tranchante et décisive,
pour caractériser le divorce par consentement m utuel? Si elle
l’a pesée , comment n’a-t-elle pas aperçu que cette pièce est
au contraire une démonstration que le divorce provoqué n étoit
qu’un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère?
En e f f e t , le divorce pour incompatibilité d’humeur et de
caractère, est le seul qui puisse être prononcé sur l’assignation
donnée par un seul des époux à l’autre, et en Xabsence comme
en présence de l’époux appelé , d’après les articles 5 et 6 , sec
tion 5 de la loi du 20 septembre 1792, relative aux actes de
l’état civil. Quant au divorce par consentement m u tu e!, ce
n’est pas sur l’assignation donnée par l’un des époux s e u l, au
jour qu’il lui plait de fixer, que la loi veut qu’il soit prononcé,
c ’est sur la demande qu’en font conjointem ent les deux époux ,
qui se présentent spontanément et d’un commun accord , à cet
e ffe t , devant l’officier public , en la maison com m une, a u x
jo u r et heure qu’ il aura indiqués. ( Art. 5 de la loi citée. )
Ici la pièce produite par la demoiselle Maigne prouve irré
sistiblement que les deux époux ne se présentèrent pas spon
taném ent et sans assignation devant l’officier p u b lic, aux jour
et heure qu’il leur avoit indiqués, pour requérir conjointement
le divorce ; qu’ils ne comparurent l’ un et l’au tre, au con traire,
que sur Yassignation donnée par un s e u l, et aux jour et heure
que le provocant avoit lui-méme indiqués : donc elle prouve
irrésistiblement qu’ils ne comparurent pas pour requérir un di
vorce par consentement m u tu el, mais uniquement pour requérir
un divorce pour incompatibilité d ’humeur et de caractère ; d’où
il suit que ce n’est qu’un divorce pour incompatibilité d’hum eur
qui fut pronon cé, et par conséquent un divorce dont il est
impossible de se dissimuler la n u llité , puisqu’il fut prononcé
prématurément, et sans observer les délais et les trois épreuves
successives qu’exigeoit la loi pour ce genre de divorce. Ainsi
ta pièce que la demoiselle Maigne a produite en triomphe se
�( 1 4 .)
retourne contre elle-m ém e, et ne servira qu’à m ieux assurer
sa défaite.
D e l i b é r é à Clerm ont-Ferrand, le 21 janvier 1806.
B E R G I E R.,
}
A RIOM , de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d’appel. — Janvier 1806.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Couguet-Florat, Marguerite. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Gaschon
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
divorces
remariage hâtif
nullité du mariage
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations sur mémoire imprimé, pour Marguerite Couguet-Florat, veuve du sieur de Reyrolles, intimée ; contre Catherine Maigne, appelante de jugement du tribunal de première instance séant au Puy, rendu le 24 floréal an 13.
Table Godemel : Divorce : la loi transitoire du 26 germinal an onze rend-elle inattaquables les divorces faits en éxécution de la loi du 20 septembre 1792, fussent-ils irréguliers et contraires aux formes voulues par cette loi ? La nullité du divorce a-t-elle été couverte par la qualité de femme divorcée prise par la femme dans différens actes, par cette possession d’état, et par le décès du mari divorcé ? en cas de nullité du divorce le traité fait entre les époux divorcés, relativement à leurs intérêts privés, seraient-ils infecté du même vice ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1774-1806
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1509
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0706
BCU_Factums_M0708
BCU_Factums_M0309
BCU_Factums_M0615
BCU_Factums_M0524
BCU_Factums_G1510
BCU_Factums_M0707
BCU_Factums_G1511
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53249/BCU_Factums_G1509.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
divorces
nullité du mariage
remariage hâtif
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53006/BCU_Factums_G0528.pdf
92bd98f6f1c018f39993c620f5041dff
PDF Text
Text
/ / /
I
CONSULTATION
S U R L E D R O I T D E T R IA G E .
E S fouffignés qui ont vu le Mémoire & la Confultation de M es. ßeaulaton & Andraud le je un e , du 8
mars 1768 & celle de Me, R ed on , du 14 du même mois,
E S T l M E N T , que le Seigneur eft bien fonde à demander le
triage des Commu naux , & que les Habitans n’ont: aucun
moyen folide à oppofer contre cette demande.
L ’O r don na nc e de 1669 , au tit. 25 , contient des difpofitions fi claires & fi précifes fur cette matiere , q u ’il e ft
é tonnant q u ’on veuille faire naître des doutes. II eft dit e n
l ’article I V , que fi les bois font de la conceffion gratuite des
Seigneurs , fans charge à aucuns cens , redevances , pref t ations,
eu f ervitudes , le tiers en pourra être dift ra it & feparé à leur
profit , en cas qu'ils le dem andent................. f i non le partage
n 'aura lieu
mais les Seigneurs & les Habitans jouiront en
commun , comme auparavant : ce qui fera pareillem ent obfervé
pour les Prés , M a ra is, & c . ou les Seigneurs n'auront autre droit
que d ’ufage , & d ’envoyer leurs beft ia u x en p â tu re, comme pre
miers Habitans , fan s part n i triage , s'ils ne font de leur conceffion , & fa n s pref t ations , redevances ou f ervitudes.
Cette premiere difpofition laiffoit fubfifter une difficulté
e ffentille. L e Seigneur pouvoit à la vérité demander le tria
g e , fi les fonds étoient de fa conceffion , & q u e la conc effion fût g r a tu i te mais fur qui devoit retomber la preuve
de ces deux faits ? il femble d’abord qu’elle étoit à la charge
d u Seigneur, parce que tout demandeur doit établir fa d e
mande ; mais le Seigneur pouvoit oppofer qu’il avoit le droit
c o m m u n en fa f a v e u r , & que
cette préfomption de
droit
�rejettoit la néceilite de la preuve fur les Habitans qui avoiensr
intérêt de détruire la préfomption » & de la faire cefïer.
C ’efl: pour prévenir cette difficulté que le Légiflateur d é
clare dans l’article fuivant que la conceffion ne pourra être
reputée gratuite de la part des Seigneurs,, fi les Habitans
juftifîent du contraire ; d’où il refultc , par une coniëquencc
néceilaire , que toutes les fois que les Habitans ne juiUfîenc
pas du contraire , la conceffion eft reputée gratuite de la
part du Seigneur , & il effc fondé à demander le triage»
L ’Ordonnance de i6 6 y n'a pas introduit à cet égard un
droit nouveau
elle a feulement confirmé les principes &:
donné force de Loix à une Jurifprudence déjà établie j en.
e f f e t , on trouve dans les recueils une foule d ’Arrêts qui ont
fucceiTivement ordonné le partage des Com m u na ux , fii en
ont adjugé une portion au Seigneur. Il feroit inutile d ’en
trer dans le détail de ces Arrêts, Si de ce que les Auteurs»
ont écrit antérieurement à l’Ordonnance de 1 66$ j cela formeroic une diATertation plus curieufe qu’utile.. Il y a une
L o i ,, c ’efl: le point décifif duquel il faut partir,
s ^ l l auroit été difficile de prévoir qu’on pût révoquer en<
doute la qualité des Seigneurs à qui [’Ordonnance accordele tri-ige.
C'efl une m axim e reçue en France , dit M» Salvaing, que
celui qui a la haute Jujlice d'une Terre , a fcul droit de s'en
qualifier (implement Seigneur par une prérogative qu'il a fu r
ceu x qui n'ont que la moyenne ou la baffe , ou qui n’ont que des
F iefs particuliers, ou des Cenfives , lefquels font obligés de f fê c ifier la qualité de leur Seigneurie. L a raifon efl que la h aute
J tflic e emporte fuperioritd y commandement & puijjance publiqueselle efl e'minemment, & par excellence domination & Seigneu
rie ; c'efl elle qui a proprement territoire , fu iv a n t L'ètimologieque lu i donne la L oi * T ou s les Auteurs parlent le mêm e
langage , Si il n’y a qu’à ouvrir les différentes Coutumes d u
Ro ya u m e pour voir que toutes les fois qu’il efl dit fimplem e n t , le Seigneur , cela ne s’entend & ne peut s'entendre que?
du Seigneur H m c - Jyfticier,
�3
Si une vérité auflî certaine & auili inconteftable avoir beibin de preuve, les termes mêmes de l’Or do nna nce , qu’on
vient de c'rer , en fourniroient une déciiive. 1! y eft dit que
il la concefilon n’eft pas gratuite , les Seigneurs n’auront d’au
tre droit que d ’ufage , & d’envoyer leurs beftiaux en pâtu
re , comme premiers Habitans. O r oieroit on propoier ferieuiement que le Seigneur Haut-Jufticier n’eft pas le premier
Habitant , dans l’etendue de la Juftice, & qu’on peut le d é
pouiller de cette qualité , pour l’attribuer 3 un autre ? Mais
je Seigneur à qui l’Ordonnance conlerve le droit de premier
Habitant , iorfque la conceilion a été faite , à titre onéreux ,
cil: le même à qui l’Ordonnance attribue le droit de triage,
lorique la conceilion eft gratuite , par conféquent il eft dé
montré que dans l’un & l’autre cas , l’Ordonpance parle uni
quement du Seigneur Ha u t Jufticiec.
L ’article 168. de la C o u tu m e de Troyes , Coutume
allodiale , porte ,H abitans , Communauté y ni mitres gens p a rti
culiers
ne peuvent prétendre ni azioir droit d ufage n i de p â
turage en Seigneurie & H tu te jn flic e d’autrui fa n s titre en en
j>*yer redevance au Seigneur., Sur quoi Me# Charles Dumoulin di ,
ergo le Seigneur efl fondé en la propriété dans fa Hante-Juflice.
On peut d’autant moins, en A u v e r g n e , attribuer la qua
lité de Seigneur , au propriétaire de la Seigneurie direcie ,
que communément la Cenfive , quand elle n’eft pas attachée
à la Haute Juftice , n’y eft d’aucune dignité , & eft purement
foturiere ; en effet la premiers rente impoiée fur un hérita
g e franc , forme un cens^ en dire&e , & dès lors il eft év i
dent que le Cens eft de même nature tjue l’héritage fur
iequel il eft impofé 5 &Ç c ’eft par, cette railon q u ’il eft trèsordinaire de voir en A uvergn e une multitude de Seigneurs
directs 4 dans l’étendue çle la rpêmeme Juftice.
Mais indépendamment de tous ces m o y e n s , il eft démon
tré que la difpofition de l’Ordonnance ne peut point s'ap
pliquer au Srigneur direct. En e f f e t , l’Ordonnance n’attribuç
le droit detriage.au Seigneur., que dan,s le cas où la concef-
j,
,
fion cil purenibné'gratûKC : ôr il ne peut jam:tis'y avoir de
A
�4
conceffion purement gratuite , de la part du Seigneur dire#.
La Seigneurie direéte ne fe forme que par un Bail e m phithéotique qui fuppofe néceflairement une preftation , une
redevance de quelque efpece & de quelque nature qu’elle
f o i t , & au moyen de laquelle la propriété fe divife en D o
maine utile & Seigneurie d ire de ) ainiî la conceflion faite
pat le Seigneur d i r e f t , étant toujours moyennant un prix ,
ne pou rroit, dans aucun cas , donner lieu au triage ; pat
conféqucnt la djfpofition de l’O rd o n n a n ce 'd e 1669 , feroic
non - feulement vaine & illufoire, mais impliqueroit contra
diction , Ci on vouloir l’appliquer au Seigneur dired.
M . B o ug u ie r, lettre P. N ° . 2. rapporte un Arrêt de 1603*
qui a j u g é , pour cette Province , que les Habitans n’étoient
pas recevables à demander entr’eux le partage des C o m m u
naux. C e M a g iftrat ajoute , les ieuls Seigneurs (ont en cela
favotifes par les Arrefs , ut Jib i competentem portionem babeant y
& in parte d iv ifa p afcua , & ne peuvent provoquer à par
tage leurs Manas , pour leur voir aifigner une part féparée
des pâturages , qui eft ordinairement le tiers. C e mot »
M a n a n s , fuflït pour mettre en évidence que M . Bouguier n’a
'parlé , 8c entendu parler, que du Seigneur H a u t - Jufticier.
L es mots Manans & Habitans n’ont jamais été employés re
lativement au Seigneur direcîv
O n c o n v i e n t , avec les Auteurs de la C o n fu lta tio n v que
M. Bouguier fuppofe une propriété c om mu ne & i'ndiviie,
entre le Seigneur & les Habitans i mais tous les Auteurs ont
æaifonné dans la même hypothèfe*
L e Grand , dont le témoignage ne doit pas être fufpcifc
aux Habitans , dit fur l’article 168. de la C o u tu m e de
Troy es , la Cour a donné d'autres Réglemens touchant les 17fages & PÂtùrâges , qui appartiennent en propriété à la Commu
nauté des Habitans , dont le Seigneur du lieu f a i t partie commeétant le. premier ; ayant été adjugé, par plufteurs A r r ê t s , a u x
Seigneurs des lieu x , le tiers de/dits U/ages. & Pâturages, &
Us deux autres tiers a ux Habitans,
Sans e x a m i n a s’i l eii exactement vrai q ue la qualité
�Jg<
\•
d e prmier & principal H a b ita nt , donnée au Seigneur H a u t .
Jufticier , le laiile dans la même clalîe que tous les autres
H abitans, lorique les Com munaux ne font point de fa conceflion gratuite j il eft au moins très-certain que l’obiedion
propofée ic retorque , avec avant ag e, contre les Seigneurs
direéts, parce que le Seigneur Haut Jurticier a toujours une
habitation de droit , & en A uvergn e les Seigneurs directs ne
font communément habitans, ni de fait ni de d r o i t , dans
Jcs juftices où il y a des héritages fujets à leurs cens.
L'Arrêt de 1 6 13 , rapporté par Filfeau , a ordonné le
triage , & a refervé en même temps au Seigneur la haute
juftice , la Seigneurie dire&e & fo n c iè r e , & les r e d e v a n c e s ,
fi aucunes (ont dues.
'
Il ne réfulte autre chofe de cet Arrêt , fi ce n’eft qu’ayant l’Ordonnance de 1 669 ) le droit du Seigneur étoit plus
e t e n d u , puiique le payement de la redevance ne formoit
point un obitacle au partage des Communaux.
11 eft vrai que la D a m e de la Rochefoucauld , au profit
de laquelle cet Arrêt eft rendu ^avoit non-feulement la haute
ju ft ic e , mais encore la Seigneurie dire de * ainfi il y auroit
au moins de l’incertitude pour fçavoir quel eft le titre qui
a déterminé la déciiion. Mais Filleau ne laifTe point dans le
doute } car à la fuite de cet A r r ê t , il examine l’origine du
droit des S ei g ne u rs , les motifs qui le f o n d e n t , les décifion3
rendues à ce iujet » & tout fe référé à la haute juftice.
LArrêt du 24 Mai 1659 ne peut être tiré à conféquence , parce qu’il ne j u g e v i e n de relatif à la queftion donç
il s’agit.
L ’ Arrêt rendu contre le fieur de LuiTan , & rapporté par
Dénifard dans fa Collection de Jurifprudence , ne donne au
cune atteinte aux maximes généralement réçues par rapport
aux droits du Seigneur Haut-Jufticier , fur les Pâturaçea
communs , parce que dans la Coutume de l’ Iiïe , pour la
quelle cet Arrêt a eré rendu , le Seigneur Vifcontier eft tou
jours aflîmilé au Seigneur H a u t - Juftih'cier , & mis avec luï
dans la m êm e cUiIe > & auffi. les é p a v e s , les deshérancest *
�£ ^ tj
c
les fucceiîions des bâtards, les c h e m i n s , les places publiques
font attribuées cumulativement aux Seigneurs Hauts-Juftkiera
&. aux Seigneurs Viicontiers j ainfi iuivant les dilpoluions de
cette Coutume , il paroît impoflible de faire , par rapport à
la Jurifdidion , aucune diitribution entre le Seigneur H i u t -J u iticier & le Seigneur Viicontier 5 dc*iorte que fi à une JuriidicHon
égale le Seigneur Viicontier joint la Seigneurie foncière & im
médiate fur tout le territoire, il n’efl: pa& étonnant q u ’il aie
obtenu la préférence.
Mais cet Arrêt ne peut recevoir aucune application dans
l ’A u v e r g n e , où la Seigneurie direcle , en d ’autres mains
que celles du Seigneur Haut .■Ju f ti ci er , n’emporte avec foi
ni Fie f ni J u r i d i c t i o n , &c où la Ceniive cil communément
un bien purement roturier.
Denifard rapporte un autre A r r ê t , du 20 Janvier 1 7 6 1 ,
qui a également admis le Seigneur Viicontier à demander
ie triage des Communaux. Mais le m ot if de la déciiion n’eii
pas douteux , parce que cet Arrêt a été rendu dans la C o u
tume d ’Artois, qui attribue tous les droits réels au Seigneur
Vifcontier 5 c’eil lans doute par cette raiion que ce fécond
Arrêt n’eft point cité dans la Conlultation.
11 faut donc s’en tenir à la maxime généralement re çu e,
écrite dans le texte d ’un grand nombre de C o u tu m e s , 8c
enfeignée par les Auteurs , que le droit (ur les Pâturages
c o m m u n s , eft une dépendante de la haute jnftice. C'efi: par
cette raifon q u ’il paroît inutile d ’examiner fi dans l’eipece
propoiée la C e n i w e du Seigneur a été augmentée par des
acquifitions particulières, ou fi au contraire elle a iouffert
des diminutions Ce des démembremens. Il paroîtroit égale
ment inutile d ’examiner fi le Seigneur Haut-Jufticier n’eft
pas encore aujourd’hui Seigneur dire# de la plus grande
partie du terreïn , & fi les C om m un aux ne font pas encla
vés dans fa Ceniive. Ces circonilances, qui exigeroient né.
cefiairement une longue difcnilion , ne (ont point aiTez déeifives pour qu’on doive s’y artêter >. il faut s’en tenir à I4
ibule qualité de Seigneur H a u t - Juûiçicr. M . le D u ç
�7
Bouillon, Seigneur Ha u t - Jufticier de G e r z a t , fit ordonnée
en 1 66$ , le triage des C o m m u n a u x , quoique certainement
il n’ait pas la Seigneurie directe fur tout le territoire j car il
ci l de notoriété que dans la feule juftice de Gerzat il y a
plus de trente Seigneurs dire&s.
|
La décifion rendue pour M. le D u c de Bouillon , relati
vement à une Juilice fituée en A u v e r g n e , cil beaucoup plus
analogue à nos moeurs & à nos ufages , que des Arrêts ren
dus pour des Seigneurs Vifcontiers de Flandre & d’Artois.
Mais ce feroit très-inutilement qu’on établiroit que dans les
Pâturages communs , dont les Habitans font propriétaires
le Seigneur H a u t-J u ft ic ie r, comme premier & principal H a
bitant , a une propriété commune & indivife , & p e u t , â
ce titre, demander le partage. C e t t e maxime , dit on , ne
feroit en Auvergne d’aucune utilité au Seigneur Haut-juftic i e r , i î , comme le prétendent les Auteurs de la Coniulration , 1 allodialite d e 3 fonds forme un obftacle à l'exercice
du droit.
L'Ordonnance de 1 6 6 9 , dans les difpofitions déjà citées y
ne diftingue point les pays de Franc-aleu , de ceux où on re
çoit la m a x i m e , m ile Terre fans Seigneur. La Loi eft conçue
en termes généraux , par conféquent elle concerne tous les
p a ys , iâns exception , qui font fournis à l’empire du Légiilareur 5 & c’eft un axiome tr iv ia l, que lorfque la Loi ne dis
tingue point , il n’eit pas permis d ’admettre des diftinctions.
Cette regîe eft d’autant plus certaine dans l’efpece pré
fente , qu’il ne s’agit point d ’un cas particulier 8c imprévu ,
, fur lequel le Légiilateur n’ait pas porté la vue , & qui ait
: pu échapper à fon attention > il eit queflion de fçavoir
une Loi générale doit demeurer fans exécution , dans la plus
grande partie du Royaume. En effet, iî le triage n’a point lieu
dans les pays de Franc-aleu, les diipolîtions de l’O r d o n n a o
ee de 1669 font étrangères au L a ng ue do c, à la Pr o v e n c e \
au Dauphiné , & à toutes les provinces de droit écrit ; if
faudra égalem ent retrancher la Bo u rg o g n e , laFranche-Coriné,
&
’
�i
s
la Champagne , le Berry , le N i v e r n o î s , !e Bourb onn oî s, la
Marche 6c l’Auvergne parce que les Coutumes de ces dif
férentes Provinces admerrent le Franc-aleu. Ainfi une Loi
générale deviendroit un Règlement particulier pour quelques
Provinces feulement.
O n pourroit s’en tenir à ce premier moyen qui eil décif i f , parce que la Loi étant générale, &. étant faite pouj
tous les pays iujets à la dornin.itioi) du Législateur , il ne
peut y en 2voir aucun qui foit excepté , Sc qui ne (oit point
aiÎujetti à la Loi.
L ’Ordonnance ne refufe le triage au Sei gne ur , que dans
le cas oq. les Habirans rapportent la preuve que les C o m
munaux n'ont point été concédés par le Seigneur , ou qu’ils
ont été concédés à titre onéreux > cette preuve a paru indifpeniable pour détruire la prefomption de d r o i t , qui fubilile en faveur du Seigneur Haut-Jullicier.
Les Auteurs de la Conlultation difenc que l’Ordonnancç
iuppoie que les Com mu na ux n’ont pu parvenir aux Hahitans , que par la conceilïon du Seigneur, Cette fuppofi.
tion , difènt-ils , très-admiiîîble dans les Coutumes qui ont
adopte la m a x i m e , nulle Terre fans Seigneur , refifls ouverte
ment à la maxime contraire , nul Seigneur fans Terre,
S’il s’agiiloit decombattre une déciiion particulière , le
fentiment d’un A u t e u r , on pourroit djicuter quels ont été les
motifs qui ont iervi de fondement à la Loi , & fi ces mo
tifs font fondés en raifon ou appuyés fur des autorités iufîîfantes. Mais ici c ’eil une Loi claire & préciie , q u ’on atta
que de front , Si qu*on. veut rendre inutile , fous pretexte
que le Legiiîateur s’efl: déterminé fur une faulfe iuppofition ,
q u ’ii n’a pas exactement conny. les principes du dioit couîumier. 11 n’y a pis lieu de craindre que les Joges ipécias
lement deftinés à faire exécuter la Loi , adoptent de pareilraiionnemens.
Au refie , il feroit facile de prouver q u e , meme relative,
ment aux pays de Franc-aleu , les difpofirions de l’Ordonm n c c de 1669 font conformes aux principes & à l’ufage.
L ’originq
�9
L ’origine des Communaux & des droits d’ufâgc fe rap
porte ordinairement à la libéralité des S e i g n e u r s q u i ont vou
lu peupler leurs T e r r e s , 2c y attirer des Habitans : tel cil
le langage des Auteurs.
O n convient qu’il eft poiïible que des Habitans ayenr
acheté un Pâturage , ou qu’ils ayent délaillé une portion de
leurs propriétés pour en former des pâturages communs}
mais il faut convenir en même temps que ces poilibilités fonc
prefque de pures ipéculations. On ne trouveroic peut-être
pas en A uvergn e un feul Communal acquis par les H a b i
tans, ou formé aux dépens de leurs propriétés 5 il y a même
à cet égard une impoilïbilité évidente pour lesjuftices d ’une
étendue coniîdérable , & qui renferment des Villages éloignés
les uns dés autres , telle que celle dont il s’agit. 11 feroic
abfurde d’imaginer que les Habitans d’un Village ont c o n
tribué pour acquérir un pâturage éloigné , dont ils ne peu
vent faire aucun ufage , & qui eft uniquement à la bien
séance des Habitans d ’ùn autre Village > cependant tous les
H a b i t a n t d'une même Juftice ont un droit égal dans les
C o m m u n a u x '} il n’y a^ucune différence dans leur condition.
, Mais (ans entrer, a cet é g a r d , d.an3 un plus grand d é t a i ,
& e n admettant ce qui eft purement poiîible , il fera toujours
•vrai que ce font des cas extrêmement rares , qui ne ionc
q u e des exceptions à h règle g én éra le , 5c auflî voyons-nous
-en Auvergne qu’on n’ y connoît d’âutrêti conceifions de C om iiiurlaux'que celles qui ont été faites par les Seigneurs.
O n hc contefte point aux Habitan:} la co-propriété des
,C o m m u n a u x , mais cette propriété q u ’ils tiennent du Seigneur
demeure commune & i indi^iie avec lui , & c ’eft en conié<quence qu*il éft'aütbrifé à demander le triage. C e droit du
Seigneür ri’a- rien d ’incompatible avec le Franc-aleu , parce
que l’ailodialité du fond le laille toujours fournis à la Jurifdi&ion , &. à tous les droits de la H a u te Juftice , & c ’eft
auili par cette' rarion que dans les pays mêmes de Franc-aleu
le droit du- Seigneur H^ut-Juilicier fur les C om m un aux a
toujours été reconnu» •.
B
�10
C ’eil fur la Cou tume de Troyes , qui eit une C ou tum e
allodiale, que Dumoulin a die que le Seigneur eft fondé en
la propriété dans fa Haute Juftice >& il tire cette conféquen^
ce fur l’article de la C o u t u m e , qui veut que les Habitans
ne puilFent prétendre droit de Pâturage , fans titres ou payer
ment de redevance au Seigneur.
©•
Cette déciiîon fe concilie parfaitement avec l’allodialité ,
parce qu'or? ne peut en inférer autre c h o f e , (I ce n’eft que
dans i’origne le Seigneur Haut.Jufticicr étoit propriétaire du.
tond , Sc q u ’il l’a concédé de la même maniéré qu’il le poiled o i t , c ’eft-à-dire , franc de toute charge.
C ’eft fur ce fondement q u ’antérieurement à l’Ordont*
nance de 1 66p , le triage a été ordonné dans cette même Cou,tume de T r o y e s , par plufieurs Arrêts. Il y en a un entr’autres, du 13 Septembre 1 5 5 2 , rapporté par Pithou & Filleau,
qui a adjugé au Seigneur ijn tiers des Comm un aux . L ’Arrêt
du 2, Avril 1613 , eft rendu ¡contre les Habitans de D u q ïe-R.oi, dans la Cou tume de Berry j àiniî l’allodialité n‘a ja
mais été un obftacle au triage, L e Grand , quoique partifan
zélé de l’allodialité, artefte l’uiàge fur ce point, de la m a
niéré U plus précife & I3 plus diferte : Pour ce qui regarde ,
dit. il , les upiges & pâturages efans les prairias , nous obfervons
communément , (ans dijlinclion, de bailler le tiers ait Seigneur.
Salliny, fur la Cou tume de Vitri , également allodiale ,
attefte ijuiii l’ufage ; il n’y a , . d i t - i l , que Jes Seigneurs qui
puident competehtem -portionsm (îbi 'vindicnre , laquelle monte
au tjers avec le droit de Juftice & de Chafte fur le tout ,
comme il fut ju g é par la T a b le de Marbre , le z Juin i 6 op ,
entre le Marquis de Trerçelps & les Habitans de N u ll y .
L e dernier Commentateur de la Coutijme de Chaurnont ,
article i o i , s’explique fort clairement: Il y a y dit cet A u r
teur , des liçux <?h les Habitans font propriétaires des Comprimes
& Pâcages , par indivis avec lç Seigneur , & d'autres oit h
Seigneur fèu l a la propriété , dr les Jrfabitans le drqit d’ufagQ
feulement. Lorfquc le Seigneur cjl propriétaire , par indivis avçç
'les Habitans , il petit demander qife partage en fait■
�J&7
rî
qu'il lu i en fo i: laififé tine portion lib r e , & dont i l puiffe difpoj'er à fa ‘volonté ; alors les Artêts fix e n t cette portion ait tiers
& laiffent le [urplus aux Habitans. C e fuffrage effc d ’autant
plus important, que l’Auteur a écrit réc em me nt, 5c que la
Coutu me de Chaumont eft allodiale.
Duno d , dans ion traité des preferiptions , part. r. chap,
12. attefle l’ufage de la Franche-Comté , qui efi: pays de
Franc-aleu : Quoiqu'on refufe dam le Royaume le partage des
f â t is communs aux Communautés & a u x Habitans , l ’on y à
admis depuis long-temps les Seigneurs h demander une part des
PÀtnrages & Communes, lorfqu'ils font tenus d ’eux a titre gra
tuit : laquelle part a été reglée au tiers. Cette Jnrifprttdencè
ne s'étoit pas introduite en Franche-Comté avant que l'Qrdonnance
de 1669 y fat publiée. C e font les termes de [’Auteur. Ori
n’a pas penfé en Franche - Comt é que les diipofùions de
J'Ordonnance de 1 66 y , fuflènt étrangères au pays d©
Franc-aleu.
O n ne croit point que l’autorité des JurifconfuÎtes puifle
être balancée par le ienriment folidaite d'un CommiiTaire à
Terrier , cité dans l.i Confultation j & à l’éçard de D e .
nifard q u i , comme le difent les Auteurs de" la Confultation , a entrevu la queftion , c ’ed plutôt un doute qu’ une
décifîon qu’il propofe.
Mais fi dans la thefe générale les Comm un aux , même
dans les pays de Franc-aleu , font préfumés de la concefîîoh
du Seigneur , cette vérité paroît encore plus certaine en
A uvergn e , où , comme Panefte Mazuer , notre ancien C o u tutnier , omnia qttx Junt in territorio feu dijîricin alicujus Dom ini cenfentur effe de Jno feudo & Dominio & etiam de ftia
Jurifdiffienc.
'
Les Auteurs d e la Confultation , pour éc3itcr , s’il éroic
poilible, une autorité auili preflante & aufli decifive , dffeilt
que ce paflage doit être entendu d'iftributivement 5 c ’eft àdire qqe tout ce qui efl renfermé dans la circonfcription de
la juctice du Seigneur eft fous fa Juriidiélion , & que t0ljC
&e Q,ui cft ren ferm é dans le territoire circonfcrit du F ie f ou
& *
�de la D i r e c t e , eil de fa mouvance ou de fa ccniîve.
C ette idee reiifte évidemment à l’eiprit tk. à la lettre ,
loin q u ’on trouve aucune disjon&ive dans le paffàge cité , to u t ,
au coutraire , eft lié par les copuiatives ejr ctiam tout fait ég a
lement partie 5c du Fief &: de la Juftice.
La diftinclion imaginée fur les mots territorio & diJlriBa
n’eft point exaéicj car loin que le mot territorittm puille i n
diquer le Fief, il eft au contraire confacré pour exprimer la
Juriidiclion. Territorittm ab eo d ifftm quod Magijlratns jus ibi
terrêndi hnbeat.
Dans l’origine la JurifdiéHon a été annexée au Fief. Les
Juftices, dit Lauriere fur Loifel , furent tellement inhérent
tes aux Fiefs qu’il n’y en avoir point fans J u f t i c e , ni de Juitice fans Fiefs. La Juftice étoit à la charge de ceux auxquels
la Terre le trou voit appartenir, dit l’Editeu.r du nouveau Traité
du Domaine dans la Préface. Loifeau dans ion Traité des
Seigneuries, développe ce point avec plus d’étendue j & le
lancraçe
O O des Jurifconfuites & des Hiftoriens eft conforme. Ainiï
l ’étendue de la Juitice a été la même que celle du F i e f , & les
changemens fucceififsqui peuvent être arrivés fur ce point font
abfolument étrangers , parce qu’il s’agit de l’état primitif. O r ,
la Seigneurie du F i e f emportoit néceiTàirement la Seigneurie
la propriété primitive du terrein qui compofoit le Fief. Le
Souverain a donné à íes premiers Vaifaux une certaine étendue
de terrein qui a formé le Fief. ¡Ce Vailil eniliite s’efi: donné
des Vailiiux en fous inféodant une partie de ce terrein ; il en
a concédé une autre portion moyennant des redevances5 une
autre portion a été concédée gratuitement ou pour récom«
penie de fervice , ou par pure libéralité , ou enfin pour ie pro
curer des habitans dont le Seigneur a cru pouvoir tirer avan-r
tage. Mais il n’eit pas moins vrai que la propriété primitive
{j réiîdé en ia perfonne.
Cela Ce vérifie dans i'efpece propofée. Non feulement le Seig
neur a coniêrvé la Seigneurie directe fur une partie confidérable de fa Ter re , mais preique tous cçux qui y perçoivent
s des cens .les tiennent dç lui en.t'iiîf» ôc s’il y a quelques par
.
�celles d ’héritages dont le cens ne Toit pas tenu en F ie f, c’efl
parce que ces héritages avoient etc concédés fans ch ar g e , Ôc
que la premiere rente que le propriétaire a impofee forme
un cens en directe en vertu de la difpofition de la Co utu m e.
Si l’autorité de Mazuer avoit befoin d’être confirmée , on y
joindroit le fentiment de Bafmaifon , q u i , fur l’article
du
titre 17 j d i t , que les terres, hermeî & vacants défrichés font
députés appartenir au Seigneur du territoire & non aux habi
tant.
C ’eft inutilement qu’on oppofe que Bafmaifon dit fur le
titre 28 , que les C om m u na ux font la petite portion de terre
délaiiTée d ’antiquité par commun confentement des Habitans
pour nourriture du bétail 5 cela ne détruit point la préemption
de propriété en faveur du Seigneur luut-Jufticier , & il n’en
réfultera autre choie , finon que Bafmaifon n’a peut-être pas
a irez approfondi la nature des C o m m u n a u x ; car rous les titres
de la Province apprenent que les Commu naux ont été concé
dés par les Seigneurs.
L ’ufage de la Province autorife le T riage. O n connoîc
rArrêt pour le Com te de Chabane contre íes Habitans. L;i
Sentence des Requêtes de l’Hôrel pour M . le D u c de Bouil
lon contre les Habitans de Gerzat du j Janvier 166$. La Sen
tence de la Maîtrife de Il io m , en faveur du même , contre les
Habitans du Château1 d’Ennezat, du 1 6 Juillet 17 j 6 . Les H a
bitans Defvaux-ès-Limagnes ne firent exiler la demande en
T r ia g e contre eux qu’en reconnoiilant un cens fur les C o m
munaux. Les Habitans de la Juftice de Perigere ne firenc
échouer la demande du Seigneur qu’en établiilant que la conceilion n’étoit point g ra tu ite , & que les Communaux étoient
tenus en Fief,
Dans l’efpece propofee le Seigneur joint à la Loi générale
des titres particuliers ; il rapporte une multitude d ’Acles qui
conftatent, non feulement que les Seigneurs ont difpofé des
biens vaçans
les ont donné à cens, mais qu’ils ont permis de
■ftirc-dçs raies & 4 <?s foíTés dans les C o m m u n a u x , d’y prendre
l'eau , cc qui l'upp?fe,non.f«ulcment une- lupériorhé & uns
�ict °
\i,c
*4
Jurifdiction maïs auffi une propriété C a r le Seigneur, à raif o n de la haute-Juftice, ne pourroit permettre aucun ouvrag e,
aucune entreprife dans les héritages des Propriétaires particu
liers. Il eft également conftaté que le Seigneur a concédé des
droits de marchage & pâturage dans l’étendue de fa Juftice
En cet état tout fe réunit pour aff urer le droit de T r ia g e on
peut même obferver que les H a b it a n s , f u i v a n t leur propre ti
t r e , ne pourroient réclamer que I’ufage d’un feul Communal ,
car en 1 5 87 ils ont déclaré qu’ils n’a voient l’ufage que d’un
feul Communal qu’ils ont dénommé.
O n ne connoît point l’efpece du Jugement rendu contre le.
fieur Depoiian , & on fait que les moindres circonftances peu
vent former une différence eff entielle pour la décifion. Si on;
s’en rapportoit à la citation , ce feroit un jugement contraire à;
ce qui avoit été jug é par plufieurs Arrêts dans la mêm e C ou tu
me de T r o y e s , & à l’ufage attefte par Legrand.
Délibéré a Riom ce 2 1 Mars 1 7 68, Signés , G R A N G I E R . ,
P R A D lE R ,T O U T T E E , PARADE, ANDRAUD
C H O S S I E R , & B R U G IE R E DE BARAN TE.
Délibéré à Clermont Ferrand , fuivant l'a v is & les moyens em
ployés dans la Confultation ci défu s le 25 Mars 1768
Signes
T O U R N A D R E
&: A R T A U D ,
De l'Imprimerie de L. P. B O U T A U D O N , Imprimeur du Roi
& du Confeil Supérieur, 1 7 7 3
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Consultation sur le droit de triage. 1773]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grangier
Pradier
Touttée
Parade
Andraud
Chossier
Brugière de Barante
Tournadre
Artaud
Subject
The topic of the resource
communaux
triages
seigneur haut-justicier
droits féodaux
doctrine
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation sur le droit de triage.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de L. P. Boutaudon (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1773
Circa 1768-1773
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0528
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Auvergne
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53006/BCU_Factums_G0528.jpg
communaux
coutume d'Auvergne
doctrine
droits féodaux
seigneur haut-justicier
triages
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53646/BCU_Factums_M0105.pdf
c7d6039e451b9ba974ff1d0c170d6ca3
PDF Text
Text
CONSULTATION
P O U R
L e cito yen J e a n - J o s e p h C H O U S S Y - D U P I N , h o m m e
, de lo i, habitant de la ville d u P u y , I n t im é , et défen
deur en opposition;
'c
o n t r e
D am e C a t h e r i n e - M a r i e - F r a n c o i s e F A U C H E R
,
et B a r t h é l é m y V A C H E R , son m a ri, de Lui auto
risée, propriétaires , habitans de La ville d 'A r la n t ,
A p p e lla n s , et dem andeurs en opposition.
L
es
S O U S S IG N É S , qui ont v u et exam in é les pièces
et procédures de la contestation pendante entre JeanJoseph C h o u s s y - D u p in , d ’ une p a r t, C a th e rin e-M a rie
F au ch er et B a rth é lé m y V a c h e r , son mari , d ’autre part,
sur la dem ande fo rm ée par ledit C h o us s y , en main
le v é e et radiation d ’une inscription de la som m e de
32 ,ooo fra n cs, fo rm ée contre lu i, au bureau des h y p o
thèques , par ladite F a u ch e r et son m a r i;
E
stim en t
que la dem an de fo rm ée par le cito yen
A
�(
2
)
C h o u ssy , est à l’abri de toute contradiction raison
nable.
L e ciloj^en Choussy et la D a m e F a u ch er ont é l é
unis par le m ariage, en 176 6 , séparés de fait depuis
1780 , et par le d iv o rce , depuis 1793.
Après des contestations sans nom bre , sur lesquelles
nous aurons occasion de revenir dans-la su ite, les par
ties p a s s è r e n t un co m p ro m is, le i 5 nivôse an 3 , pour
régler leurs d ifïéren s,, et spécialemenl pour prononcer
sur l’appel d’un ju g em e nt d’ un tribunal de fa m ille ,
rendu à Craponne , par défaut ,
contre
la D a m e
F au ch er, le 4 octobre 179 3 , lequel appel était alors
pendant au tribunal de Brioude.
L ’objet de ce procès étail la liquidation des reprises
et créances respectives que le cito yen Choussy et la
D a m e F a u ch er avaient à exercer l ’un contre l’autre
par suite de leur divorce, provoqué par la D a m e Faucher.
L e s parties ont nom m é pour leurs arbitres, le cito ye n
B ergier et le soussigné : elles ont voulu q u ’ils rendissent
leur jugem ent sans appel et en dernier ressort.
C e jugem ent a été rendu les 2 7 , 2 8 , 29 et 3 o prai
rial an 3 .
P arm i les nombreuses dispositions de ce jugem ent
qui a 1 1 9 rôles d ’exp éd itio n , celle qui donne lieu à
la contestation a ctu elle, est con çue en ces termes:
« Déclarons Choussy d éb iteu r, toute compensation
« fa ite , de la som m e de 17,220 liv. 7 so u s8 den. pour
« e x c é d e n t , et des intérêts depuis le 10 octobre der
« n ie r , époqu e où ont été arrêtés les calculs d ’intérêts
« par le ju gem en t dont est appel.
�> ( 3 )
-
# Pouf opérer le paiem ent de ladite créance, et par
« les ruutiis exprim és au jugem ent dont est ap p el, di
« sons q u’il a été bien jugé par ledit ju gem e nt , en ce
«• qu'il déclare la citoyenn e F a u ch e r propriétaire j u s
« q u à concurrence de son d u des sommes con sig n ées,
« en conséquence des' saisies et oppositions par elle fa ite s ,
« à la recette des consignations du district d’A m b e r t ,
«•- tant par D u m a r e t , acq uéreur d’ une maison et d o
« m aine vendus par C h o u ssy, que par P o m ie r , débi« teur dudit Choussy , en conséquence q u elle retirera
« des consignations sur lesdites sommes consignées , la
« susdite somme de 17,220 l. 7 s. 8 d . , m ontant de sa
« créance, a in si q u elle avisera ; au moyen de ce , dé«■clare Choussy quitte dès à présent envers lad. Faucher.
■U n e disposition postérieure fait m ain -le vée pure et
simple audit C h o u s s y , de toutes saisies et oppositions
sur lui faites de la part de ladite F a u c h e r , soit au sceau
des lettres de ratification prises sur les aliénations par
lui faites, soit entre les mains de ses débiteurs , ou de
toutes autres saisies ou oppositions faites ou à faire.
Enfin une dernière disposition de ce jugem ent p orte:
q u ’il sera exécu té en dernier ressort et sans appel, con
form ém ent ci la Loi.
C e ju gem en t arbitral a été h o m o lo gu é par le tribu
nal de B r io u d e , le 2 messidor suivant ; il a ensuite été
signifié par le cito ye n Choussy à la D a m e F a u c h e r
et a son m a r i, le i 5 du m ê m e mois.
P a r ce lte signification, le cito yen Clioussy a sommé
la D a m e F auch er et le cito ye n V a c h e r , son m a r i , de
se con form er à ce ju g e m e n t , et de retirer les papiers,
A 2
�c 4 }
.
.
dont il avait été condam né à la i faire la re m is e , des
mains de L e m e rle , n otaire, ch ez qui il avait été obligé
d ’en faire le d é p ô t, sur leur refus de les re c e v o ir, et
il ajoute de r e c h e f, les som m ant a u ssi de se conform er
et satisfaire en tout à La teneur d u d it jugem ent.
L e citû)^en Choussy a cru devoir ensuite faire des
réserves et p r o t e s t a t i o n s en ces term es;
« A u x q u e l s ledit instant déclare ne pas acquiescer
« ni icelui approuver quant a u x articles qui auront
« été ju g é s à son p réjudice et contraires aux lois , c ’est« à - d i r e , qant a u x chefs q u 'il se trouvera lésé , et
« donl les dispositions seront contraires à la loi , pro
« testant ët se réservant de se pourvoir en cassation,
« s’il y a lieu , etc. »
I l est assez évident par s o i- m ê m e , i.° que ces pro
testations étaient insignifiantes, et ne pouvaient porter
atteinte à ce jugem ent ni en em p êch er l’e x é c u tio n ;
2.0
Q u ’elles n ’avaient rien de re la tif à la som m e
de 17,220 livres 17
sous
F au ch er devait retirer
6 d e n ie rs, que la D a m e
du b u re au des consignations
d ’A m b e r t , puisque ces protestations ne frappaient que
su r les articles qui auraient été j u g é s à son p r é ju d ic e ,
c e s t-à -d ir e , a u x chefs qu il se trouverait lésé.
Q u o iq u ’il en s o i t , la D am e F au ch er et son m ari
a y a n t vou lu attaquer ce jugem ent arbitral au tribunal
de Brioude , sous prétex te q u ’elle avait ré v o q u é le
com p ro nis, elle a été déclarée n o n -recevab le dans sa
dem an de par ju g em e n t du 27 thermidor suivant , et
il a été ordonné que le ju g e m e n t arbitral serait e xécu té
scion sa fo rm e et teneur.
�( 5)
L ’un et l’autre de ces jug em ens ont été depuis for
m ellem en t exécutés par toutes les parties.
L a D a m o F a u ch e r et son m ari ont retiré les papiers
q u e le cito y e n Choussy avait été obligé de déposer
ch e z L e m e r l e , notaire , en exécution du ju g e m e n t
arbilral.
j
• I l a été obligé de les poursuivre depuis pour le paie
m en t de la m oitié des frais du ju g em en t arbitral et de
c e u x du ju g em e nt du 27 th erm idor ; il a fallu un n ou
vea u ju g em en t p o u r les y contraindre ; ils o n t exécuté
tous ces diffèrens jugem ens et en ont p a y é tous les frais.
T o u s ces faits sont consignés et avoués par le cito ye n
V a c h e r et sa fe m m e ; dans un dernier ju g e m e n t du
tribunal d ’A m b e r t , du 16 th erm idor an 8.
C ’est dans cet état de choses que le cito y e n Choussy
ayan t appris
que
la
Dam e
Faucher
et son m arî
avaient fait une inscription sur ses biens de 32 ,000 liv.
sous prétexte de cette prétend u e créan ce de 17,2 20 liv.
'7 sous 8 deniers et des intérêts 3 s’est po u rvu contre
eu x pour obtenir la radiation de cette inscription.
✓
O11 a dit en co m m e n ça n t que cette dem ande du
citoyen Choussy était à l ’abri de toute contradiction
raisonnable.
E t en effet on voit dans les défenses fournies par la
D a m e F a u ch e r et son m a r i , le 19 nivôse d e r n ie r ,
q u ’ils opposent deu x m o yen s au citoyen Choussy.
I-C' p rem ier , q u ’à raison des proteslations contenues
dans sa signification du ju g em en t a r b itr a l/ d u mois de
piairial an 3 , ils n ’ont pas dû se présenter ch ez le
receveu r des consignations pou r retirer ce lle sommes
de 17,220 liv. 7 sous 8 deniers.
�( 6 )
L e s e c o n d q u e ce lle som m e de 17,220 liv. 7 sous
.
8 deniers provenant de ses biens dotaux , il n ’est ni juste
ni h on n ête que le citoyen Clioussy s’en libèr.e en assi
gnats qui étaient déjà dans le plus grand discrédit ;i
l ’époqne du jugem ent dont il s agit ; que ce paiem en t
en assignats est d ’ailleurs contraire a la loi d u 25 m es
sidor an 3 , qui a s u s p e n d u le rem boursem ent des dots
des femmes.
Quant au
prem ier m o yen , on a déjà v u com bien
il était frivole.
L e cito yen Clioussy a observé dans ses réponses a u x
défenses qui lui ont été signifiées par ses ad versaires,
q u ’il n ’a fait ces protestations que parce q u’il avait
ép ro u vé jusques là des chicanes inouies , q u’ il était
m en a cé d ’en ép ro u ver de n ou velles, et de tout genre.,
et q u ’il a voulu par là se m ettre en mesure contre
toutes les tracasseries q u ’on pourrait lui susciter.
M ais quoiqu’il en soit de ces m otifs , il n ’y a rien
dans ces protestations dont la D a m e F a u ch er et son.
m ari puissent tirer le plus léger avan tage contre le
cito yen Choussy.
.
I l est bien essentiel de rem a rq u e r, i.° q u ’ils ne sont
pas recevables à critiquer le ju g em en t dont il s’a g i t ,
en ce que ce jugem ent a confirmé le prem ier jug em en t
du tribunal de famille , qui portait que les sommes
consignées seraient a u x risques de la D a m e F a u ch er
jusqu’ à concurrence du m ontant de ses créances contre
son m ari.
^
C e tte fin de n o n -re c e v o ir résu lte, soit de ce que ce
jugement; est en dernier ressort, soit de ce q u’il a ét6
pleinem ent ex écu té par eux.
�v
^7 ^
2.° Q u ’ils n e préten dent m êm e pas que les arbitres
aient: mal jugé en laissant celte consignation aux risques
de la D a m e Faucher.
D e sorte que toute la contestation se réduit sur ce
point à savoir si les protestât ions consignées dans la signi
fication du i 5 messidor an 3 , ont dû arrêter l'exécu tio n
de ce j u g e m e n t , et em p êch er la D a m e F a u ch e r de
retirer les deniers consignés.
O r , il est difficile de tro u ver q uelq u’obstacle au r e
tirem ent de ces deniers dans c e lle signification , lors
q u ’ on y lit ces mots : ¿es som m ant a u ssi de se conformer
et sa tisfa ire en tout à La teneur d u d it j ugement.
.
O n v e u t abuser des protestations qui s u iv e n t , mais'
« c est une m ax im e certaine ? dit D en iza rt , au m ot
« protestations, N.° 3 , que quand l ’action est con lraire
« à la protestalion , elle la détruit. »
D ’ailleurs n o n -seu lem en t cette protestation n’ a rien
de c o n l r a i r e à lu som m ation qui la précède de retirer
les denieis co n sign es 3 mais elle la confirm e au contraire
form ellem en t en ce q u ’elle ne porte que su r les articles
q u i auraient été ju g é s à son p r é ju d ic e , c'est-à -d ire ,
quant a u x chefs qu il se trouvera Lésé. D ’où il résulte que
cette protestation n ’avait rien de com m un au x deniers
consignés que la D a m e F a u ch er devait r e t ir e r , puisque
cet article n’avait pas été jugé au préjudice du cito y e n
C houssy , et q u ’il ne s’y trouvait pas lésé.
I l était d onc difficile de tro u ver u n p rétexte plus
frivole à l’inscription que la D a m e F a u c h e r et son
m ari ont fait faire sur le c ito y e n Choussy.
I l ne reste q u’à exa m in er si le prétexte du paiem en t
en assignats est plus imposant.
�(
8
)
#
^
O u ce m o y e n est opposé com m e une sim ple consi
dération ou com m e m oyen de droit.
Si c ’est com m e m oyen de considération, ilse retourn e
contre la D a m e F a u c h e r : c'esl elle qui a nécessité
la consignation des den iers; n on-seulem ent elle a fait
mal-à-propos des oppositionsaubureau des h yp o th èq u es
et des saisies entre les mains de tous ses d éb ite u rs,
q u o i q u ’ e l l e le supposât m illion n aire, co m m e elle le d i t
dans ses défenses du 19 nivôse dernier } mais elle n ’a
pas m êm e eu égard aux cautions les plus satisfaisantes
q u e le citoyen Choussy a présentées , et q u ’il a fait
r e c e v o ir , de sorte que cette consignation et le d é p é
rissement des assignats est uniqu em ent de son fa it, et
n ’est arrivé que par sa faute.
A u surplus, ce n ’est pas seulem ent ces 17,2 20 liv.
q u ’elle a fait ainsi dépérir par les chicanes q u’elle a
m ultipliées à l'infini pour nécessiter cette co n sign a tio n ,
elle a encore fait perdre au cito yen Choussy plus de
24)000 hv. qui form èrent le restant des assignats con
signés qui sont restés pour son co m p te; on sent d’après
cela que si les motifs de considération pouvaient être
de quelque poids aux y e u x de la justice , le cito yen
Choussy serait seul en droit deles invoquer en sa faveur.
Q uant au m o y e n de droit résultant de la loi du 2 5
messidor an 3 , il se retourne encore contre la D a m e
F a u ch e r et son mari.
L e jugem ent arbitral rendu en dernier ressort était
du mois de p ra irial, il était rendu contradictoirem ent
a vec la D a m e F a u ch e r et en présence de son fondé
de pouvoir c[ui avait assisté à toutes les séances.
�,
,
c 9 )
C ’est dès-lors du m o m e n t que le ju g e m e n t a été
rendu que le paiem ent est censé e ffectu é, puisque ce
ju g e m e n t porte que le ju g em en t du tribunal de famille
est co n firm é, en ce
q u ’il déclare la D a m e F a u ch er
propriétaire j u s q u 'à concurrence de son d u des sommes
consignées.
V o u d r a i t - o n co m p ter ce paiem ent du jour de la
signification du j u g e m e n t , cette signification est du i 5
m essidor, p ar conséquent bien antérieure à la loi.
E n f in , la loi de suspension q u ’ on oppose au citoyen
C h o u s s y , porte u n e exceptio n en sa fa veu r pour le cas
particulier dans leq u el il se trouve.
-
L ’art. I I I est ainsi co n c u : « Son t compris dans cette
« suspension p ro viso ire , les rem boursem ens des ca p i« ta u x q u i, en cas de dissolution du m ariage, doivent
« être restitués par le m ari ou ses héritiers, à la fe m m e
« ou aux héritiers de la fem m e. » .
'
A rt. I V . « L a suspension p ron o n cée par l ’article pré« cedent n aura lieu que dans le cas de dissolution du
« m aria g e, par la m ort d ’ un des ép ou x ou par r e f le t
« du divorce pron on cé sur la dem ande du m a r i, sans
« cause déterminée.-»
"
A i n s i , toutes les fois que le divorce a é lé dem and é
pour cause d ’incom patibilité d ’h u m e u r et de caractère
p a r une f e m m e , après a v o ir quitté son m ari depuis
15 ans , co m m e dans l ’espèce, il n ’y avait plus lieu à la
suspension p ronon cée par ce lte lo i , et le mari pouvait
se libérer après co m m e avant la loi du 2 5 m e s s i d o r .
C e qui ne laisse pas m ê m e le plus léger prétexte a
la D a m e F a u ch er , d ’exciper de ce lte loi qui con.-
�( ï° )
t
.
^
dam nerait form ellem ent sa p ré te n tio n , si elle ne lui
élait pas étrangère par la circonstance que tout était
term in é entre les parties pour cet o b jet, depuis le 3 o
prairial
précéd en t, époque du jugem ent.
D élib é ré à C l e r m o n t - F e r r a n d , le 10 germinal an 9.
D
ar tis-
M
arcillat
, B o ir ot, P ag ès- M
eim at.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu la présente
C on sultation ,
est entièrem ent du m êm e avis et par les
m ôm es raisons. Outre q u ’on a prouvé dans cette co n
sultation jusqu’à la démonstration que les protestations
du citoyen Choussy ne pouvaient apporter aucun obs
tacle à ce que la D a m e F a u ch er retirât les effets con
signés , com m e d ’ailleurs ces protestations ne frap
paient pas sur l ’objet des sommes consignées, mais sur
les chefs qui pou vaien t être sujets à cassation, dès que
la dem ande en cassation ne fut pas fo rm ée, et que le
délai de la form er fut passé, la D a m e F a u ch e r aurait
dû dès-lors renier les effets consignés; mais de plus,
un jugem ent en dernier ressort mettait la consigna
tion à ses risques.
D é lib é ré à R i o m , le 12 germinal an 9.
G
aschon
, P
L.
ages
, A
ndraud
,
F. D E L A rC HI E ll .
L E C O N S E I L S O U S S I G N E , q u i a v u les Consulta
tions ci-dessus,
estim e
,q u ’indépen d am m en t de la dé-
�( II )
faveur com plette qui accom pagne la personne ét la
prétention de la D a m e F a u ch er , contre le cito ye n
C h o u ss y , il est évident que son,inscription ne peut se
so u te n ir, p arceq u ’à supposer que les protestations du
c ito ye n Choussy contre le jugem ent arbitral, rendu en
dernier ressort par les citoyens Bergier et B o ir o t, eussent
le degré d ’intensité que la D a m e F au ch er leur d o n n e ,
elles ne seraient toujours pas plus considérables q u ’un
appel en cassation; o r , il est certain que l ’appel en tri
bunal de cassation ne pouvait arrêter l ’exécütion du
ju g em e n t arbitral, ni pour le p rin cip a l, ni pour les in
t é r ê t s , ni pour les d ép en s, et q u ’ainsi les protestations
du
citoyen
Choussy n ’ em pêchaient point la D a m e
F a u ch e r de retirer les effets consignés. E n les retirant
de
la consignation , la D a m e F au ch er ne se c o m
prom ettait en r ie n , au lieu q u ’en les laissant à la co n
signation, il y avait beau co u p de danger. E lle a donc
bien vo u lu courir la chance de l ’é v é n e m e n t , et dèslors elle ne peut en im p u ter la faute q u’à elle-m ême. '
A u surplus, les consultations détruisent si parfaitem ent
les objections de la D a m e F a u c h e r , q u ’on ne conçoit
pas com m en t elle pouvait persister à faire valoir son
in scription , qui est absolum ent sans fondem ent.
'
D é lib é ré à R i o m , ce i 3 germ inal an g.
C. L . R o u s s e a u .
L E S S O U S S IG N E S , qui ont pris lecture des avis déli
bérés a R i o m , les 9 , 1 2 et 1 3 du mois c o u ra u l, qui sont
sus-lranscrits,
.
�( I2
'
E
stim en t
)
que si les faits et les jugem ens rappelés et
datés dans le prem ier des susdits a v i s , sont exacts , la
justice ou ses ministres ne sauraient trop-tôt s’empresser
de rejeter ou d ’ordonner la radiation d ’une inscription
aussi injustement hasardée , en faisant supportera ce u x
qui se la sont p e rm ise , les frais et les dépens qu’ils au
ront ainsi tém érairem en t occasionnés, sans prétexte
com m e sans raison.
P o u r a vis, au P u y , le 2 5 germinal an 9.
L
obeyrac
,
Gallet.
Je suis du m êm e avis.
M
A
ouredon.
R I O M , de l ’i m p r i m e r i e du P a l a i s , chez J . - C . S a l l e s .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy-Dupin, Jean-Joseph. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dartis-Marcillat
Boirot
Pagès-Meimat
Gaschon
Pagès
Andraud
Delapchier
Rousseau
Lobeyrac
Gallet
Mouredon
Subject
The topic of the resource
hypothèques
divorces
tribunal de familles
créances
jugement arbitral
biens dotaux
assignats
dot
Description
An account of the resource
Consultation pour le citoyen Jean-Joseph Chousy-Dupin, homme de loi, habitant de la ville du Puy, Intimé, et défendeur en opposition; contre Dame Catherine-Marie-Françoise Faucher, et Barthélemy Vacher, son mari, de lui autorisée, propriétaires, habitans de la ville d'Arlant, Appelans, et demandeurs en opposition.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1765-An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0105
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1126
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53646/BCU_Factums_M0105.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Brioude (43040)
Arlanc (63010)
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens dotaux
Créances
divorces
dot
hypothèques
jugement arbitral
tribunal de familles
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53154/BCU_Factums_G1126.pdf
5b0ced36d73bfb4598d189fc27623d13
PDF Text
Text
CONSULTATION
POUR
L e citoyen J e a n - J o s e p h C H O U S S Y -D U P I N , homme
de loi, habitant de la ville d u P u y , In tim é, et défen
deur en opposition;
CONTRE
Dame C a t h e r i n e -M a r i e - F r a n ç o i s e F A U C H E R
,
,
et B a r t h é l é m y V A C H E R , son m a ri de lui auto
,
risée propriétaires
,
,
habitans de la ville d ’A r l a n t ,
A pp ella n s et demandeurs en opposition.
L e s SOUSSIGNES, qui ont vu et examiné les pièces
et procédures de la contestation pendante entre JeanJoseph C h oussy-D upin, d’ une part, C a therine-Marie
Faucher et Barthélém y V a ch e r, son mari, d’autre part,
sur la demande formée par ledit Choussy, en main
levée et radiation d’une inscription de la somme de
32,000 francs, formée contre lui, au bureau des h yp o
thèques , par ladite Faucher et son mari ;
E s t i m e n t que la dem ande fo rm ée par le citoyen
A
�( 2)
C h o u ssy, est à l ’abri de toute contradiction raison
nable.
L e citoyen Choussy et la D am e Faucher ont été.
unis .-par le mariage, en i y 6 5 , séparés de fait depuis
1780, et par le divorce, depuis 1793.
Après des contestations sans n o m b re , sur lesquelles
nous aurons occasion de revenir dans la suite, les par
ties passèrent un com prom is, le i
5
nivôse an
3,
pour
régler leurs difiérens, et spécialement pour prononcer
sur l’appel d’un jugement d’un tribunal de fam ille,
rendu à Craponne , par défaut , contre la D am e
Faucher, le 4 octobre 1793 , lequel appel était alors
pendant au tribunal de Brioude.
L ’objet de ce procès était la liquidation des reprises
et créances respectives que le citoyen Choussy et la
' D am e Faucher avaient à exercer l’un contre l’autre
' parsuite de leur divorce, provoqué par la D am e Faucher.
^ Les parties ont nommé pour leurs arbitres, le citoyen
’ Bergier et le soussigné : elles ont voulu qu’ils rendissent
leur j u g e m e n t sans appel et en dernier ressort.
Ce jugement a été rendu les 2 7 , 28', 29 et
3o
prai
rial an 3. .
Parmi les nombreuses dispositions de ce jugement
qui a 119 rôles d’expédition, celle qui donne lieu à
la contestation actuelle, est concue en ces termes:
■r.iii 1’
« Déclarons Choussy débiteur, toute compensation
« faite,, de la sommé de 1 7 ,2 2 0 liv. 7 sous 8 den. pour
« excé d en t, et des intérêts depuis le 10 octobre der« î^ier , époque où .ont été arrêtés les calculs d’intérêts
«'par le jugement dont est appel.
�c 3 }
«
«
«
te
«•
•
« Pour opérer le paiement doludito créance, et par
les motifs oxprimés au jugement dont est appel, disons qu’il a été bien jugé par ledit ju g e m e n t, en ce
qu’il déclare la citoyenne Faucher propriétaire j u s
qu’ à concurrence de son du des sommes consignées,
en conséquence des saisies et oppositions par elle faites,
a à la recette des consignations du district d’A m b e r t ,
« tant, par D u m a r e t, acquéreur d’ une maison et do
te maine vendus par Choussy, que par P o m ier, débi« teur dudit Choussy ; en conséquence quelle retirera
« des consignations sur Lesdites sommes consignées , La,
« susdite somme de 17,220 L 7 s. 8 d . , montant de sa
« créancej ainsi quelle avisera; au moyen de ce, déce clare Choussy quitte dès à présent envers Lad. Faucher.
Une disposition postérieure fait main-levée pure et
simple audit C h ou ssy, de toutes saisies et oppositions
sur lui faites de la part de ladite Fau cher, soit au sceau
des lettres de ratification prises sur les aliénations par
lui faites, soit entre les mains de ses débiteurs, ou de
toutes autres saisies ou oppositions fuites ou à faire.
Enfin une dernière disposition de ce jugement porte:
qu’il sera exécuté en dernier ressort et sans appel, con
formément à la loi.
Ce jugement arbitral a été homologué par le tribu
nal de Brioude, le 2 messidor suivant ; il a ensuite été
signifié par le citoyen Choussy à la D am e Faucher
el à son m ari, le i 5 du même mois.
l ’ ar cette signification, le citoyen Choussy a sommé
la D am e Faucher et le citoyen V a c h e r , son m a r i, de
se conformer à ce ju gem en t, et de retirer les papiers,
A 2
�(4 )
.• .
dont il avait été condamné h lui faire la rem ise, des
mains de Lem erle , notaire, chez qui il avait été obligé
d ’en faire le d ép ôt, sur leur refus de les recevoir, et
il ajoute de rech ef, les sommant au ssi de se conformer
et satisfaire en tout à La teneur dudit jugem ent.
L e citoyen Choussy a cru devoir ensuite faire des
réserves et protestations en ces termes :
« Auxquels ledit instant déclare ne pas acquiescer
« ni icelui approuver quant a u x articles qui auront
« été ju g é s à son préjudice et contraires aux lois , c ’est« à-dire , qant a u x chefs qu’il se trouvera lésé , et
« dont les dispositions seront contraires à la l o i , pro« testant et se réservant de se pourvoir en cassation,
« s’il y a lieu , etc. »
Il est assez évident par soi-m êm e, i.° que ces pro
testations étaient insignifiantes, et ne pouvaient porter
atteinte à ce jugement ni en empêcher l’exécution ;
2.0
Q u’elles n’avaient rien de relatif à la somme
de 17,220 livres 17 sous 6 deniers, que la D am e
Faucher devait retirer du bureau des consignations
d’A m b e r t, puisque ces protestations ne frappaient que
sur les articles qui auraient été ju g é s à son p réju d ice,
ccst-à -d ire , a u x chefs q u 'il se trouverait lésé.
Q uoiqu’il en s o it , la Dame Faucher et son mari
ayant voulu attaquer ce jugement arbitral au tribunal
do Brioude , sous prétexte qu’elle avait révoqué le
compro uis, elle a été déclarée non-recevable dans sa
demande par jugement du 27 thermidor suivant , et
il a été ordonné que le jugement arbitral serait exécuté
selon sa forme et teneur.
�I
L ’un et l’autre de ces jugemens ont été depuis for
mellement exécutés par toutes les parties.
L a D am e Faucher et son mari ont retiré les papiers
que le citoyen Choussy avait été obligé de déposer
chez L e m e r le , notaire , en exécutioii du jugem ent
arbitral.
Il a été obligé de les poursuivre depuis pour le paie
ment de la moitié des frais du jugement arbitral et de
ceux du jugement du 27 thermidor ; il a fallu un nou
veau jugement pour les y contraindre ; ils ont exécuté
tous ces difîérens jugemens et en ont payé tous les frais.
Tous ces faits sont consignés et avoués p a rle citoyen
V acher et sa fe m m e , dans un dernier jugem ent du
tribunal d’A m b e rt, du 16 thermidor an 8.
C ’est dans cet état de choses que le citoyen Choussy
ayant appris que la D am e Faucher et son mari
avaient fait une inscription sur ses biens de
32,000
liv.
sous prétexte de cette prétendue créance de 17,220 liv.
7 sous 8 deniers et des intérêts , s’est pourvu contre
eux pour obtenir la radiation de cette inscription.
On a dit en commençant que celte demande du
citoyen Choussy était à l ’abri de toute contradiction
raisonnable.
Et en efTet on voit dans les défenses fournies par la
D am e Faucher et son m a r i, le 19 nivôse d ern ier,
qu’ils opposent deux moyens au citoyen Choussy.
L e p r e m ie r , q u ’;i raison des protestations contenues
dans sa signification du jugem ent arbitral, du mois de
prairial an
3,
ils n ’ont pas dû se présenter ch e z le
receveu r des consignations po u r retirer celte sommet
de 17,220 liv. 7 sous 8 deniers.
�L e second., que cette somme de 17,220 liv. 7 sous
8 deniers provenant de ses biens dotaux , il n’est ni juste
ni honnête que le citoyen Choussy s’en libère en assi
gnats qui étaient déjà dans le plus grand discrédit à
l ’époque du jugement dont il s’agit; que ce paiement
en assignats est d’ailleurs contraire à la loi du 2 5 mes
sidor an 3 , qui a suspendu le remboursement des dots
des femmes.
Quant au premier m oyen , on a déjà vu combien
il était frivole.
L e citoyen Clioussy a observé dans ses réponses aux
défenses qui lui ont été signifiées par ses adversaires,
qu ’il n’a fait ces protestations que parce qu’il avait
éprouvé jusques là des chicanes inouies , qu’il était
menacé d ’en éprouver de nouvelles, et de tout genre^
et qu’il a voulu par là se mettre en mesure contre
toutes les tracasseries qu’on pourrait lui susciter.
Mais quoiqu’il en soit de ces motifs , il n’y a rien
dans ces protestations dont la D am e Faucher et son
mari puissent tirer lo plus léger avantage contre le
citoyen Choussy.
11 est bien essentiel de rem arquer, i.° qu’ils ne sont
pas recevables à critiquer le jugement dont il s’a g it,
en ce que ce jugement a'confirmé le premier jugement
du tribunal de famille , qui portait que les sommes
consignées seraient aux risques de la D am e Faucher
jusqu’à concurrence du montant do sos créances contro
son mari.
C e t t e lin de non-recevoir résulte, soit de ce que ce
j u g e m e n t est e n dernier ressort, soit de ce qu’il a été
pleinement exécuté par eux.
�(
7
)
a.0 Qu’ils ne prétendent même pas que les arbitres
aient mal jugé en laissant cette consignation aux risques
de la D am e Fauclier.
D e soi'te que toute la contestation se réduit sur ce
point à savoir silesprotestationsconsignées dans la signi
fication du i
5 messidor an 3 ,
ont dû arrêter l’exécutiou
de ce ju g e m e n t, et empêcher la D am e Faucher de
retirer les deniers consignés.
Or , il est difficile de trouver quelqu’obstacle au retirement de ces deniers dans cette signification , lors
qu’on y lit ces mots : Les sommant aussi de se conf ormer
et satisfaire en tout à La teneur dudit Jugement.
' On veut abuser des protestations qui suivent, mais
« c’est une maxime certaine , dit Denizart , au mot
« protestations, N.° 3 , que quand l’action est contraire
« à la protestation, elle la détruit. »
D ’ailleurs non-seulement cette protestation n’a rien
de contraire à la sommation qui la précède de retirer
les deniers consignés, mais elle la confirme au contraire
formellement en ce qu’elle ne porte que sur Les articles
qui auraient cté jugés, à son p réju d ice, c’est-à-dire ,
quant a u x chefs qu’il se trouvera Lésé. D ’où il résulte que
cette protestation n’avait rien de commun aux deniers
consignés que la D am e Faucher devait retirer, puisque
cet article n’avait pas été jugé au préjudice du citoyen
Choussy , et qu’il ne s’y trouvait pas lésé.
11 était donc difficile de trouver un prétexte plus
frivole ù l ’inscription que la Dam e Faucher et son
mari ont fait faire sur le citoyen Choussy.
I l ne reste q u ’à exam iner si le prétexte du paiem ent
en assignats est plus imposant.
�( S )
0 u ce moyen est opposé com m e une simple consi
dération 011 comme moyen de droit.
Si c ’est comme moyen de considération, il se retourne
contre la Dam e Faucher: c’est elle qui a nécessité
la consignation des deniers; non-seulement elle a fait
mal-à-propos des opposilionsau bureaudes hypothèques
et des saisies entre les mains de tous ses débiteurs,
quoiqu’elle le supposât millionnaire, comme elle le dit
dans ses défenses du 19 nivôse d ern ier, mais elle n ’a
pas môme eu égard aux cautions les plus satisfaisantes
que le citoyen Choussy a présentées , et q u ’il a fait
recevoir, de sorte que celte consignatiçn et le dépé
rissement des assignats est uniquement de son fait, et
n ’est arrivé que par sa faute.
A u surplus, ce n’est pas seulement ces 17,220 liv.
q u ’elle a fait ainsi dépérir par les chicanes qu’elle a
multipliées à l’infini pour nécessiter cette consignation,
elle a encore fait perdre au citoyen Choussy plus de
24,000 liv. qui formèrent le restant des assignats con
signés qui sont restés pour son com pte; on sent d ’après
cela que si les motifs de considération pouvaient être
de quelque poids aux yeu x de la justice , le citoyen
Choussy serait seul en droit de les invoquer en sa faveur. ‘
Quant au moyen de droit résultant de la loi du 2 5
messidor an
3,
il se retourne encore contre la D am e
Faucher cl son mari.
L e jugement arbitral rendu en dernier ressort était
du mois de prairial, il était rendu contradictoirement
avec la D am e Faucher cl en présence de sôn fondé
de pouvoir qui avait assisté à toutes les séances.
�( 9 )
^
C ’est dès-lors du moment que le Jugement a élé
rendu que le paiement est censé effectué, puisque ce
jugement porte que le jugement du tribunal de lamille
est confirmé, en ce qu’il déclare la Dam e Faucher
propriétaire j u s q u à concurrence de son dit des sommes
consignées.
Voudrait - on compter ce paiement d u . j o u r d e l a
signification du ju gem en t, cette signification est du i 5
messidor, par conséquent bien antérieure à la loi.
E n fin , la loi de suspension qu’on oppose au citoyen
C h o u ssy , porte une exception en sa faveur pour le cas
particulier dans lequel il se trouve.
L ’art. I I I est ainsi conçu: «Sont compris dans cette
« suspension provisoire, les remboursemens deâ capi«■taux q u i, en cas de dissolution du mariage, doivent
« être restitués par le mari ou ses héritiers, à la femine
«■ou aux héritiers de la femme. »
Art. I V « L a suspension prononcée par l’article pré« cèdent n’aura lieu que dans le cas de dissolution du
« mariage, par la mort d’ un des époux ou par l’effet
«■du divorce prononcé sur la demande du m ari, sans
« cause déterminée."
A in s i, toutes les fois que le divorce a élé demandé
pour cause d ’incompatibilité d’humeur et de caractère
par une fe m m e , après avoir quitté son mari depuis
1 5 ans , comme dans l’espèce, il n’y avait plus lieu à la
suspension prononcée par cette loi, et le mari pouvait
se libérer après comme avant la loi du 2 5 messidor.
Ce qui ne laisse pas mêm e le plus léger prétexte h
la D am e Faucher , d’exciper de cette loi qui con-
'Vjf-
'
�( to )
damnerait formellement sa prétention, si elle ne lui
élait pas étrangère par la circonstance que tout était
terminé entre les parties pour cet objet, depuis le 3 o
prairial précédent, époque du jugement.
D élibéré à Clerm ont-Ferrand, le 10 germinal an 9.
D a r t i s - M a r c i l l a t , B o ir o t, P a g è s- M e ijia t.
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a vu la présente
Consultation, est entièrement du mêm e avis et par les
mêmes raisons. Outre qu’on a prouvé dans cette con
sultation jusqu’à la démonstration que les protestations
du citoyen Clioussy ne pouvaient apporter aucun obs
tacle à ce que la D am e Faucher retirât les effets con
signés , comme d ’ailleurs ces protestations ne frap
paient pas sur l’objet des sommes consignées, mais sur
les chefs qui pouvaient être sujets à cassation, dès que
la demande en cassation ne fut pas form ée, et que le
délai de la former fut passé, la D am e Faucher aurait
dû dès-lors renier les effets consignés; mais de plus,
1111 jugement en dernier ressort mettait la consigna
tion à ses risques.
D élibéré à H io m , le 12 germinal an 9.
G a s c iio n , P a g e s , A n d r a u d ,
L. F. DELArciiiEii.
L E C O N SE IL SO U SSIG N E , q u i a vu les Consulta
tions ci-dessus, e s t i m e , qu’indépendamment de la dé-
�667
( i i )
faveur complette qui accompagne la personne et la
pr ét en ti on de la D am e Faucher , contre le citoyen
C h o u s s y , il est évident que son inscription S'e peut se
soutenir, parce.qu’à supposer que les protestations du
citoyen Clioussy contre le jugement arbitral, rendu en
j
j
t
dernier ressort par les cil oyensBergier et Boirot, eussent
le degré d’intensité que la D am e Faucher leur donne,
elles 11e seraient toujours pas plus considérables qu’un
appel en cassation; o r, il est certain que l’appel en tri
bunal de cassation ne pouvait arrêter l ’exécution du
jugement arbitral, ni pour le principal, ni pour les in
térêts , ni pour les dépens, et qu’ainsi les protestations
du citoyen Choussy n ’empêchaient point la D am e
Faucher de retirer les effets consignés. En les retirant
de la consignation , la D am e Faucher ne se com
promettait en rien , au lieu qu’en les laissant à la con
signation, il y avait beaucoup de danger. Elle a donc
bien voulu courir la chance de l’é v é n e m e n t, et dèslors elle ne peut en imputer la faute qu’à elle-même.
A u surplus, les consultations détruisent si parfaitement
les objections de la D am e F aucher, qu’on ne conçoit
pas comment elle pouvait persister à faire valoir son
inscription, qui est absolument sans fo n de m en t.
Délibéré à R io n i, ce i 3 germinal an 9.
C. L . R o u s s e a u .
L E S SOUSSIGNES, qui ont pris lecture des avis déli
bérés à R iom , les 9 , 12 et i
• sus-transcrits,
L
3 du mois courant,
qui sont
)
�( 12)
E s t i m e n t que si les faits et les jugemens rappelés et
datés dans le prem ier des susdits a v i s , sont exacts , la
justice ou ses ministres ne sauraient trop-tôt s’ empresser
de rejeter ou d ’ordonner la radiation d ’ une inscription
aussi injustem ent hasardée., e n faisant su p p o rter à ce u x
qui se la sont p e rm is e , les frais et les dépens qu’ils au
ront ainsi tém érairem ent occasionn és, sans prétexte
co m m e sans raison.
Pour avis, au P u y , le 2 5 germinal an 9.
L
obeyrac,
Gallet.
J e suis du m ê m e avis.
< a*X/ou}
U
cl*-s (o/
_
*
M ouredon .
.
t»
/ o O t
CaM
A
(V V a ^ - % “
^
/
»
/Ao»ru; rû.
Q)<a
A
Jr* ~ o - mii" /lopxj**Xîxrv^'*y'*y '
R I O M , de l’I m prim erie du P a la is , chez
J.-C. S a l l e s .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Choussy-Dupin, Jean-Joseph. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Dartis-Marcillat
Boirot
Pagès-Meimat
Gaschon
Pagès
Andraud
Delapchier
Rousseau
Lobeyrac
Gallet
Mouredon
Subject
The topic of the resource
hypothèques
divorces
tribunal de familles
créances
jugement arbitral
biens dotaux
assignats
dot
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour le citoyen Jean-Joseph Chousy-Dupin, homme de loi, habitant de la ville du Puy, Intimé, et défendeur en opposition; contre Dame Catherine-Marie-Françoise Faucher, et Barthélemy Vacher, son mari, de lui autorisée, propriétaires, habitans de la ville d'Arlant, Appelans, et demandeurs en opposition.
Annotations manuscrites.
Table Godemel : Protestation : voir Réserve : des protestations générales contre les dispositions qui pourraient lui faire grief, dans une sommation faite par l’une des parties de se conformer et satisfaire en tout à la teneur d’un jugement, ne sont pas un obstacle à ce que la partie qui a reçu la sommation retire une somme consignée.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie du Palais, chez J.-C Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1765-Circa An 9
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1126
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0105
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53154/BCU_Factums_G1126.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ambert (63003)
Brioude (43040)
Arlanc (63010)
Le Puy-en-Velay (43157)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
assignats
biens dotaux
Créances
divorces
dot
hypothèques
jugement arbitral
tribunal de familles
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53745/BCU_Factums_M0246.pdf
25bc946bc217202ffb203795c226a0cf
PDF Text
Text
m{u<¿us
,
M
~
É
J a c q u e s
M
O
’
I
R
E
-
P O U R
C H E M E L ,
in tim é
• CONTRE
•
P h i l i p p e S A I N T - B U T , appelant.
L
’ a p p e l est d’un jugem ent du tribunal d'arrondisse
ment de M o u lin s , du 7 germinal an 11 , par lequel
l’appelant a été déclaré purement et simplement non
t
r
recevable dans la demande qu il avoit
form ée contre
l’intimé en payement d’une rente de 24 boisseaux de blé
seigle, et l’intimé quitte et absous, avec condamnation
des dépens contre l ’appelant.
L 'u niqu e question est de savoir si la rente réclamée
par l’appelant est du nom bre de celles qui sont com
prises dans l’abolition générale des droits fé o d a u x , p ro
A
�noncée par les lois de
1792 et
17 9 3 ; et c’est cette
question qui a été décidée pour l’affirmative par le juge
ment dont est appel.
L ’article X V I I du décret du z 5 août 1792 porte que
dans l’abolition des droits féodaux ne sont pas com
pris les ren tes , champarts et autres redevances qui
ne tiennent point à la féo d a lité , et qu i sont dûs p ar
des particuliers à des particuliers non seigneurs ou
possesseurs de Jiefs.
• 'v
D e là la conséquence nécessaire que les rentes, cliàmparts et
autres r ede vanc es
qui
t iennent
à la féodalité >
et qui sont dûs à des seigneurs ou possesseurs de fiefs,,
sont compris dans l’abolition.
Si la redevance de vingt-quatre boisseaux de seigle,
réclamée par l’âppelant, tenait à la féodalité, et si elle
étoit due à un seigneur de fief, il a donc été bien jugé
par le tribunal de M oulins, et l’appel est inai fondé.
O r , il suffit de rappeler les titres qui ont été pro
duits en cause principale, pour porter jusqu’à la démons
tration la preuve que la redevance dont il s’agit tenoit
à la féodalité, et qu’elle étoit due à un seigneur de fief.
On pourvoit même l’établir par la seule disposition
de la coutume de Bourbonnais, dans l’étendue de laquelle
se trouvoit situé l’héritage sur lequel étoit assise la rente
dont il s’agit.
L ’article C C G X C II de cette coutume dit que la pre
mière rente constituée sur aucun héritage allodial >
�(3 )
■s'appelle rente fo n cière, et emporte droit de directe
seigneurie et de lods et ventes. L a directe seigneurie
attachée à une rente, et les droits de lods qui en sont
une suite, n'impriment-ils donc pas à une pareille rente
le caractère de féodalité?
Mais c’est surtout dans les titres produits au p r o c è s ,
qu’on trou vera, A ne pouvoir s y m épren d re, que la
rente tenoit A la féodalité, et qu’elle étoit due A un sei
gneur de fief, A cause de son fief ; et ce n’est qu’en,
omettant la plupart de ces titres, ou en mettant de côté
leurs principales expressions, qu’on a tenté vainement
de dénaturer la rente dont il s’agit.
L.e fief
et
domaine
de
Pouzeux,
d’où dépend
cette
rente, fut adjugé sur une saisie réelle en la sénéchaussée
de M oulins, par une sentence du
25
juin 1697 : l’ad
judication qui fut faite A la demoiselle Françoise A ubert
comprend le domaine de P o u z e u x , cens et droits en
dépendants.
Il y eut trois ans après une reconnoissance de la
rente , du 20 mai 1700, par Pierre Jam in , alors proprié
taire de fhéritage sujet A cette ren te, en faveur de la
demoiselle
Aubert ,
maîtresse de la seigneurie
de
P o u zeu x. Cette reconnoissance n’est pas un titre nou.
.
*
.
veau : il y est dit qu’elle est faite conformément au
titre primordial que la demoiselle A u bert en a ’ et il
•y est dit encore que la rente sera portée et payée èa
■
ladite seigneurie de Pouzeux.
A 2
�4
(
)
II y a lieu de croire que le titre prim ordial, s’il étoiü
rapporté, donneroit encore plus ¿ ’éclaircissement sur lar
nature de la rente ; et l’on verra bientôt que ce titre
primordial doit être au pouvoir de l’appelant.
L e 23 août 1720, la demoiselle A u bert vendit le fief
de Pouzeux à la demoiselle T ix ie r de la Nogerette. Il
est dit que la vente est faite du domaine de P o u z e u x ,
bâtimens, terres, etc. avec ‘le fo n d s des cens et devoirs
q u i sont dûs et dépendans de ladite maison de P o u zeux. Il y est encore dit que parmi les titres délivrés à
1 acquereur est une expédition en papier portantperéque-
ment des devoirs vendus entre les codétenteurs, passée
pardevant Duclier en 1660; ce qu’on appelle en A u
vergne également de cens est connu en Bourbonnais et
ailleurs sous le nom de peréquement. Enfin il est ajouté
que la venderesse se réserve les arrérages des devoirs
qui sont échus dudit terrier.
L e même jour d e là vente il y eu t, de la part de la
demoiselle T i x i e r , un acte de prise de possession du
domaine de P o u zeu x , otVil fut dit qu’elle prenoit posses
sion dudit domaine avec lejbn ds des cens et devoirs qu i
en dépendaient.
L e 11 octobre 1 7 6 1 , nouvelle vente du fief de P ou zeux , par un procureur constitué de Jean - Baptiste
T ix ie r de la N ogerette, à Pierre D u ran d, où il est dit
que dans la présente vente sont aussi compris quelques
articles
de
devoirs qu i étoient dus au vendeur a
cause
�C 5
)
du terrier acquis avec ledit domaine. II est aussi dit, dans
cette vente, que le vendeur a remis à l’acquéreur quel
ques titres qui sont désignés, et qu’il s’est obligé à lui
remettre tous les autres titres, papiers et enseignemens
et terrier concernant la chose vendue.
' -
L e fief de Pouzeux étoit mouvant du duché de B ou r
bonnais ; aussi voit-on , à la suite de là vente du 11 octobre
5
i y i , l’acte d’investiture qui en fut donné àTacquéreur
par les officiers de la chambre du domaine de ce duché,
le 24 février 1762.
r
L e 26 juin 1 7 7 6 , Jean Dubost et Jacques Chemel
firent l’acquisition du domaine des C h o p in s, dans la
paroisse de Treb an , d’où dépendoit la terre des M o n taix,
assujétie à la rente dont il s’a g it, à la charge de servir
i\ l’avenir les cens et devoirs qui se trouvoient sur les
objets vendus.
Soit pour faire courir le délai du retrait lignager,
soit pour empêcher le retrait censuel sur les fonds qui
dépendoient d’ une censive , et q u i étoient tenus en
directe seigneurie, il étoit nécessaire, suivant la coutume
de Bourbonnais, de prendre l'investiture des seigneurs
directs : c’est à
quoi les acquéreurs du domaine se
conformèrent ; et on trouve aux marges du contrat du
26 juin 1776 les actes d’investiture des différentes sei
gneuries qui avoient des censives sur des héritages dépendans de ce domaine.
•
Dans le nom bre de ces investitures est celle donnée
A3
�.
(6)
par le sieur de Saint-But, appelant, et qui contient en
m êm e temps quittance des droits de lods. Il n’est pas
inutile de transcrire cet acte : « Investi le présent contrat
» pour ce q u i relève de notre terrier de P o u z e u x ,
» après que l’acquéreur nous a payé les simples et doubles
» lod s, pour raison de ladite acquisition, sans préju» dice aux droits d’a u tru i, et à l’année de cens qui
» écherra à la saint Michel prochaine, l’année échue à
» la saint M ichel dernière ayant été payée, et à tous
5> autres droits et devoirs seigneuriaux , à
» les acquéreurs de
».
zaine. Fait
» Sa
in t
-B u
à
t
reconnoitre
de
la
charge par
n o u v e a u dans q u i n
V e r n e u il , le 28 novembre 1778. Signé
. »
de
'
V o ilà un acte d’investiture qui n ’eût pas été néces
saire pour la vente d’héritages qui n’auroient été sujets
qu’à de simples rentes ; au lieu qu’il étoit indispensable,
pour des héritages sujets à des rentes en directe sei
gneurie : mais ce même acte renferme de plus la quit
tance des droits de lods, qui ne pouvoient être dûs qu’à
raison d’un héritage asservi à une rente seigneuriale.
Il qualifie de cens la redevance dont il s’agit.
Sans doute on 11e prétendra pas que l'investiture et
les quittances des droits de lods se rapportoient à tout
autre héritage du domaine qu’à celui des M on taix, qui
étoit sujet à la rente dont il sagit. Il faudroit pour cela
qu’on fît voir qu’ il y avoit dans ce domaine d’autres
héritages qui relevoient du terrier de P o u z e u x , ce qui
�(7 )
seroit impossible à l’appelant: et m ê m e , dans son mé
m oire, n’applique-t-iJ pas l’acte d’investiture, et le paye
ment de lods et ventes, à d’autres héritages qu’a celui
des M ontaix; mais d’ailleurs on va démontrer qu’il ne
r el ev oi t
du terrier de Pouzeux que l’héritage des M on-
• taix sujet à la rente dont il s’agit, et cela par un' acte
de fait même de l’appelant.
'
L e 9 mars 178 4 , il fut présenté une requête au senéclial de Bourbonnais, par Philippe de Saint-But, écuyer, ’ •
sieur de P o u z e u x , et la dame D urand sa femme de
lui- autorisée, où ils disent que comme propriétaires du
f e f de P o u ze u x , il leur est dû une rente annuelle et
foncière de vingt-quatre boisseaux de seigle, su r une
terre appelée des M o n ta ix , dépendante du domaine des
Cliopins, dans la paroisse de Treban j ils répètent, dans
plusieurs endroits de cette requête, que le devoir de
vingt-quatre boisseaux de seigle f a i t une dépendance
du f i e f de P o u z e u x , et que devenant propriétaires du
f e f de P o u z e u x , ils le sont devenus du même, devoir f
puisqu’ ils ont acheté et le f e f et ses dépendances. C ’est
après cet exposé que Saint-But et sa femme demandent
permission d’assigner Chem el, qui étoit propriétaire du
,
domaine des Chopins, situé dans la paroisse de T r e b a n ,
comm e
propriétaire détenteur et jouissant de la terre
des M o n ta ix , pour être condamné à payer la rente
de vingt-quatre boisseaux de seigle , et leur en passer
nouvelle reconnaissance , et leur justifier du titre en
a
4
�C8 )
vertu duquel il jouit de ladite terre, pour être pris par
eux telles conclusions qu’ils aviseront, même en paye
ment des lods et ventes , s’il y échoit.
Cette requête fut répondue d’une ordonnance de per
mis d’assigner, et suivie d’une assignation donnée à Ghemel le
5 avril
1784.
Il étoit bien étonnant que Saint-But et sa femme de
mandassent, en 178 4 , à G hem el, la représentation du
titre en vertu duquel il possédoit la terre des M o n ta ix ,
tandis que Saint-But l u i- m ê m e , six ans auparavant, le
28 novembre 1 7 7 8 , avoit donné
l ’i n ve st it u re en
marge
de la vente de 1 7 7 6 , faite à Ghemel du domaine d’où
dépendoit la terre des Montaix. L a réserve de conclure
au payement des droits de lods, dans la requête de 1784 ,
étoit encore bien étonnante, puisque l’investiture donnée
par Saint-But en 1778 contenoit expressément la quittance
des simples et doubles droits de lods.
D u concours de tous les actes et titres qu’on vient de
rappeler avec la plus grande exactitude, de leur parfait
accord, des aveux même les plus positifs qu’on y trouve
de la part de 1 appelant, sort évidemment la démonstra
tion entière que la rente de v in g t-q u a tre boisseaux de
seigle, qui étoit due sur la terre des M o n ta ix ,
là féodalité, et q u’elle étoit due
à
des
t en o it
p art icul iers,
à
sei
gneurs et possesseurs de fiefs.
Q u ’est-il compris dans l’adjudication du fief de Pouzeux
en 1697? le fonds des cens et devoirs en dépendent s. Ces
�C9 )
mots cens et devoirs ne peuvent pas sans doute s’appliquer
à de simples rentes qui n’auroient pas emporté la directe
seigneurie ; et si on avoit voulu y comprendre la rente
dont il s’agit comme une simple rente non censuelle et en
directe, il auroit fallu l’y exprimer nommément.
Quand on consent en 1700 une nouvelle reconnoissance,
au profit de la demoiselle A u b ert, de la rente dont il s’agit,
dont il est dit qu'elle en a le titre p rim itif, la demoiselle
Aubert prend dans cette nouvelle reconnoissance le titre
de maîtresse de la seigneurie de P o u zeu x . C ’est à ce
titre qu’elle se fait faire la nouvelle reconnoissance ; et il
est ajouté que la rente sera payée et portée en la seigneurie
de P o u ze u x .
Quand en 1720 la demoiselle A ubert vend le fief de
P o u ze u x , elle comprend dans la vente le fonds des cens
et devoirs qui sont dûs et dépendans de la maison de
Pouzeux. Nulle mention de simples rentes ; et on ne peut
entendre sous les mots de cens et devoirs que des rentes
en directe seigneurie. Elle délivre une expédition d’un
peréquement des devoirs vendus entre les codétenteurs;
et par cette expression de peréquement on en ten d, en
Bourbonnais, ce qu’on appelle en A u vergn e également
de cen s' c’est-à-dire, l’acte par lequel les codétenleurs
font entr’eux la division des cens, pour la portion que
chacun d’eux doit en payer. L a demoiselle A u bert se
réserve dans le même acte les arrérages des devoirs qui
sont éclius dudit terrier: et qu’est-ce qu’on entend géné-
�( ÏO )'
raleraent par un terrier , sinon le recueil des reconnoissances des cens et de la directe seigneurie.
Quand la demoiselle T i x i e r , qui venoit d’acquérir de
la demoiselle Aubert le fief de P o u ze u x , en prend pos
session , il'est dit dans Tàcte qu’elle prend aussi possession
du fo n d s des cens et devoirs qu i en dépendent.
5
Quand en i y i le fief de Pouzeux est vendu à Pierre
' D u ra n d , c’est aussi avec les articles de devoirs q u iéio ien t
dus au vendeur à cause du terrier acquis avec ledit do•
»
inaine.
L e domaine de Pouzeux ¿toit
un
fief du duché de
Bourbonnais; et c’est aussi pour cela que la vente en est
présentée aux officiers du domaine de ce du ch é, qui en
donnent l’investiture.
Quand ensuite, en 1 7 7 6 , Chemel acquiert le domaine
d’où dépendoit la terre des M o n ta ix , qui étoit sujette à
la rente dont il s’agit, pourquoi s’en fait-il donner l’inves
titure par l’appelant lui-m êm e, alors propriétaire du fief
de P o u z e u x , investiture qui ne pouvoit avoir lieu que
pour des fonds sujets à des rentes censuelles et en directe
seigneurie, et non pour de simples rentes? Mais surtout
pourquoi l’appelant se fait-il payer des simples et doubles
droits de lods, à raison de la terre des M o n ta ix , si la renie
due sur cette terre n'étoit pas une rente en directe seigneu
rie? et pourquoi même Saint-But porte-t-il la rigueur
jusqu’à se faire payer un double droit de lods, parce que
la payement du simple droit n’avoit pas été payé dans les
�quarante jours de délai prescrits par l'article 394 de la
coutume de Bourbonnais ? Pouvoit-il y avoir une rcconnoissance plus formelle que la rente assise sur la terre
des Montaix étoit une rente en directe seigneurie, qui
par conséquent tenoit à la fé o d a lité , et qu’elle étoit due
à un seigneur ou possesseur de fief? R ien n’est plus plaisant
que la réponse sur ce dernier article, dans le mémoire de
l’appelant. Ghemel a , dit-on, demandé l’investiture sans
nécessité ; il l’a demandée sans doute pour éviter des droits
de francs fiefs, qui auroient été considérables. Mais où
a-t-on pris qu’il fût dû des droits de francs fiefs sur la vente
d’un héritage sujet à une rente foncière ? et p u is , les
droits de francs fiefs eussent même été fort au-dessous
d’un simple droit delod s, et bien plus encore d’un double
droit de lods.
Il est encore plus pitoyable de dire que S a in t-B u t a
fait un fau x em ploi du m ot cen s , q u ’il a fait une per
ception illégitime qu’ on auroit pu lui contester en p ro u
vant que la rente n’étoit pas féodale. T o u s les actes p rou
vent au contraire la féodalité de la rente,* et l’investiture
et la réception des droits de lods n’en sont que la con
firmation de la part de celui qui avoit alors intérêt q.u’elle
fût féod ale, et qui ne change aujourd’hui de système
que parce qu’il auroit un intérêt contraire.
,
Il n’ est pas inutile de parler d’ une transaction du 1
septembre 1790, passée entre les parties, dont l’appelant
dans son m ém oire paroît vouloir tirei^avantage : mais
�( 12 )
on croît pouvoir établir quelle prouve au contraire
de plus en plus la qualité féodale de la rente dont il
s’agit.
Voyon s ce qui avoit donné lieu à cette transaction,
et quel en fut le résultat.
L a transaction nous apprend que G herael, proprié
taire de la terre des M on taix, qui faisoit l’assiette de la
rente dont il s’agit, prétendoit que toute cette terre des
M ontaix étoit entièrement couverte par des cens qui
étoient dûs, soit au domaine du roi, soit au seigneur de
Iiamotte-Juliet ; d ou il
prétendoit
qu’il
ne
pouvoit pas
devoir la rente dont il s’a g it , qui ne pouvoit pas avoir
son assiette sur la terre des Montaix.
Cette prétention ei\t été bien ridicule, si de part et
d ’autre les parties n’avoient pas reconnu que la rente dont
il s’agit étoit due en directe seigneurie; car il n’est pas
douteux qu’on peut donner à titre de rente foncière sans
directe des fonds déjà assujettis à des censives,
Néanmoins sur cette prétention les parties nommèrent
des experts qui vérifièrent que de l’objet qui avoit fait
l’assiette de la rente, il y en avoit une partie dans la
censive du ro i, et une autre dans celle de la seigneurie
de Iiamotte-Juliet; mais en même temps il fut reconnu
qu’il en resloit une autre partie sur laquelle no porloient
pas les censives du roi et de Lajnotle-Jullct; et le résultat
de la transaction fut que Chemcl ne pouvoit point se
dispenser de payer la rente; en conséquence il paya les
�*3
(
)
arrérages, et s’obligea de continuer la rente ;\ l ’avenir.
Voilà donc par cette transaction la rente dont il s’agit
bien assise sur un terrain qui n’étoit sujet ni'à la censive du roi ni à celle de Lamotte-Juliet, qui par con
séquent avoit été allodiale dans le principe, dans la main
du seigneur de fief de Pouzeux, qui ayant donné à rente
ce terrain allodial , cette rente par la disposition de
l’article G C C X C II de la coutume de Bourbonnais empor*
toit droit de directe seigneurie et lods et ventes ; ,et
une rente dépendante du f i e f de P o u z e u x y comme l’é
noncent tous les titres qu’on a rappelés, et qui étoit due
au seigneur de lief de Pouzeux. L a transaction de 1790
feroit donc , s’il en étoit besoin, une nouvelle preuve que
la rente dont il s’agit tenoit nécessairement ¿1 laféodalité.
Après tout cela , après des preuves si multipliées et
¿les aveux si positifs, le tribunal dont est appel auroit-il
pu laisser subsister la redevance dont il s’a g it , sans con
trevenir
formellement à la disposition de la l o i ?
Q ue
l’on s’écrie tant que l’ on v o u d r a , Q u ’elle est d u r e , cette
loi! ceux qu’elle affranchit des droits féodaux ne la trou
vent pas telle; et c’est sans doute le plus grand et le trèsgrand nom bre des F ra n ça is, p e u t - ê t r e plus des n eu f
dixièmes : mais d’ailleurs elle est écrite, ,cctte lo i , et les
•
•
m
f
juges ne pouvoient pas s en écarter.
Il
est maintenant facile de pressentir les motifs qui ont
dû dicter la disposition du jugement dont est a p p e l, et
�14
(
)
on va les répéter pour en rendre le b ie n -ju g é d’autant
plus sensible.
P rem ier motif. — Q u ’à l’époque de la transaction de
1 7 9 0 , Saint-But étoit, comme il est aujourd’ fîui, à cause
de son épouse, propriétaire du ci-devant fief et seigneurie
de Pouzeux.
Deuxièm e m otif.'■
— Que la reconnoissance de la rente
dont il s’agit ne fut consentie en 1700, à la demoiselle
A u b e r t , qu’en sa qualité de maîtresse de la terre et
seigneurie dudit P o u z e u x ; que cette rente y fut stipulée
payable et portable en ladite seigneurie, et que Jamin
èt sa femme ne reconnurent la rente que comme d’un
terrain appelé des Montaix.
Troisièm e motif. — Que des contrats de vente de 1720
et de 1751 il résulte qu’il dépendoit du fief de Pouzeux
un fonds de cens et devoirs consignés dans un terrier.
Quatrième motif. — Que lors de l’acquisition faite en
1 7 7 6 , par Chem el, du domaine des C h o p in s, dont dé
pend la terre des M on taix, Saint - But étoit tellement
persuadé que la rente à lui due étoit la première rente
constituée, conséquemment cens, qu’il investit le même
contrat, perçut les lods et doubles lods du prix de la
vente de la terre des M o n ta ix , qualifia cette rente de
cens dans sa réserve de l’année à éch o ir, et se fit de
plus réserve de tous autres droits et devoirs seigneuriaux.
Cinquième motif. — Que dans la demande formée en
�C
15
)
1784 ( à la requête de Saint-But et de sa f e m m e ) , on y
annonce que ce n’étoit qu’en qualité de fief, et en vertu
de la reconnoissance précitée (d e 1700 ) , qu’onréclam oit
ladite rente.
Sixième motif. — Que la transaction de 1790 n’ayant
eu lieu que parce que les censives du roi et de Lamotte
ne couvroient pas tout le terrain des M o n t a ix , et qu’il
en restoit d ix - h u it boisselées pour l’assiette de la rente
en question, ( cette transaction ) peut d’autant moins être
considérée comme le titre constitutif, que la reconnois
sance de 1700 y est rappelée comme le véritable titre ,
d’après un autre titre primordial que la demoiselle A u b e rt
y
convient
avoir pardevers elle.
Septième motif. — Que la constitution de la rente doit
être considérée comme la première q u i , aux termes de
l’article C C G X C II de la coutume, étoit qualifiée cens em
portant. droit de directe seigneurie et lods et ventes.
Huitième motif. — Q u’il est prouvé que la rente a
toujours été regardée, par ceux à qui elle étoit d u e , et
par ceux qui la devoient, comme seigneuriale.
Neuvième motif. — Que suivant les lois de 1792 et
1793 , toutes redevances seigneuriales et droits féodaux
ont été supprimés sans indemnité; et les arrérages, m êm e
ceux dûs en vertu du jugement ou de convention , ne
sont pas exigibles.
Dixièm e motif. — Q u’enfin nrayant été excepté que
les rentes qui ne tenoient pas à la féodalité, et qui étoient
�•
( 16 )
•
'
d ues par des particuliers à des particuliers non seigneurs
ni possesseurs des fiefs de P o u z e u x , il s’ensuit que SaintBut est non recevable à l’exiger.
■
Tels sont tous les motifs d’après lesquels le jugement
déclare en effet l’appelant non recevable dans sa demande,
en renvoie l’intimé quitte et absous, et condamne SaintB u t aux dépens. L e dispositif est justifié par les motifs;
et les motifs ne sont que l’application des conséquences
qui dérivent des titres et actes qui sont produits. L a féo
dalité de la
rente
dont il s’a g it, et dans la main d’un
seigneur ou possesseur de fief, est si
é vi d e nt e
par elle-
m êm e, que ce seroit perdre du temps que de répondre
aux objections du mémoire de l’appelant, qui ne sont
que des efforts d’imagination ; et ce seroit par trop se
défier des lumières du tribunal d’appel.
L e citoyen A N D R A U D , avocat.
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
R
I O M , d e l' impr im erie de L
a n d r i o t
, seul imprimeur du
T r i b u n a l D’appel. — A n 1 1 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chemel, Jacques. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vazeille
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
reliquat féodalité
contentieux post-révolutionnaires
franc-alleu
fiefs
Description
An account of the resource
Mémoire pour Jacques Chemel, intimé ; contre Philippe Saint-But, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1697-Circa An 11
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0246
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0245
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53745/BCU_Factums_M0246.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Chopins (domaine des)
Montaix (terre des)
Treban (03287)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contentieux post-révolutionnaires
fiefs
franc-alleu
reliquat féodalité
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53085/BCU_Factums_G0924.pdf
c0b50f0c9f4b7993ea9e8e990e865472
PDF Text
Text
MEMOIRE
/iaUiXi
eut /& •
POUR
J a c q u e s C H E M E L , intimé ;
C O N T R E
Philippe
L’ a p p e l
SAINT-BUT,
appelant.
est d’un jugement du tribunal d’arrondisse
ment d e M oulins, du 7 germinal an 1 1 , par lequel
l’appelant a été déclaré purement et simplement non
recevable dans la demande qu’il avoit formée contre
l’intimé en payement d’une rente de 24 boisseaux de blé
seigle, et l’intimé quitte et absous, avec condamnation
des dépens contre l’appelant.
L unique question est de savoir si la rente réclamée
par l'appelant est du nombre de celles qui sont com
prises dans l’abolition générale des droits féodaux, proA
�?. » i-
( a J
noncée par les lois de 179 2 et 17 9 3
; et
c’est cette
question qui a été décidée pour l’affirmative par le juge
ment dont est appel.
L ’article X V I I du décret du
a o û t '1792 porte que
dans l’abolition des droits féodaux ne sont pas com
pris les rentes , champarts et autres redevances qui
ne tiennent point à la féo d a lité , et qu i sont dûs p a r
des particuliers à des particuliers non seigneurs ou
•
*'"
‘
'
possesseurs de jie fs .
D e là la conséquence nécessaire que les rentes, champarts et autres redevances qui tiennent à la féodalité r
. ;.v. --
et qui sont dûs à des seigneurs ou possesseurs de fiefs,
sont compris dans l’abolition.
Si la redevance de vingt-quatre boisseaux de seigle,,
réclamé? par l'appelant, tenoit à la féodalité, et si elle
étoit due à un seigneur de fief, il a donc été bien jugé
par le tribunal de Moulins, et l’appel est mal fondé.
O r, il suffit de rappeler les titres qui ont été pro
duits en cause principale, pour porter jusqu’à la démons
tration la preuve que la redevance dont il s’agit tenoit
à la féodalité, et qu’elle étoit due à un seigneur de fief.
On pourroit même l’établir par la seule disposition
de la coutume de Bourbonnais, dans l’étendue de laquelle
se trouvoit situé l’héritage sur lequel étoit assise la rente
dont il s’agit.
L ’article GCCXGII de cette coutume dit que la pre
m ière rente constituée sur aucun héritage a llo d ia l ,
�C3 )
s'appelle rente fo n c iè re , et emporte droit de directe
seigneurie et de lods et ventes. L a directe seigneurie
attachée à une rente, et les droits de lods qui en sont
une suite, nimpriment-ils donc pas à une pareille rente
le caractère de féodalité?
Mais c’est surtout dans les titres produits au procès ,
qu’on trouvera , A ne pouvoir s’y m éprendre, que la
rente tenoit à la féodalité, et qu’elle étoit due à un sei
gneur de fief, à cause de son fief *, et cc n’est qu’en
omettant la plupart de ces titres, ou en mettant de côté
leurs principales expressions, qu’on a tenté vainement
de dénaturer la rente dont il s’agit.
L e fief et domaine de P o u zeu x, d’où dépend celte
rente, fut adjugé sur une saisie réelle en la sénéchaussée
de Moulins, par une sentence du 25 juin 1697 : l’ad
judication qui fut faite à la demoiselle Françoise Aubert
comprend le domaine de P o u z e u x , cens et droits en
dépendans.
Il y eut trois ans après une reconnoissance de la
rente , du 20 mai 17 0 0 , par Pierre J a m i n , alors proprié
taire de l’héritage sujet à cette rente, en faveur de la
demoiselle
Aubert , maîtresse de la seigneurie
de
P ou zeu x . Cette reconnoissance n’est pas un titre nou
veau : il y est dit qu’elle est faite conformément au
titre prim ordial que la demoiselle uiubert en a ; et il
y est dit encore que la rente sera portée et payée en
ladite seigneurie de Pouzeux.
A 2
s
�C4)
Il y a lieu de croire que le titre primordial, s’il étoit
rapporté, donneroit encore plus d’éclaircissement sur la
nature de la rente ; et l’on verra bientôt que ce titre
primordial doit être au pouvoir de l’appelant.
L e 23 août 17 2 0 , la demoiselle Àubcrt vendit le fief
de Pouzeux à la demoiselle T ixier de la Nogerette. Il
est dit que la vente est faite du domaine de Pouzeux,
bâtimens, terres, etc. avec le fo n d s des cens et devoirs
q u i sont dûs et dépendans de ladite maison de P o u
zeux. Il y est encore dit que parmi les titres délivrés à
l’acquéreur est une expédition en -papier -portantperéque-
ment des devoirs vendus entre les codétenteurs, passée
pardevant Duclier en 16 6 0 ; ce qu’on appelle en A u
vergne également de cens est connu en Bourbonnais et
ailleurs sous le. nom de peréquement. Enfin il est ajouté
que la venderesse se réserve les arrérages des devoirs
q u i sont échus dudit terrier.
L e même jour de la vente il y e u t, de la part de la
demoiselle T ix ie r , un acte de prise de possession du
domaine de Pouzeux, où il fut dit qu’elle prenoit posses
sion dudit domaine avec lefo n d s des cens et devoirs qu i
en dépendaient.
L e 1 1 octobre 17 6 1 , nouvelle vente du fief-de P ou
zeux , par un procureur constitué de Jean - Baptiste
T ixier de la Nogerette, à Pierre Durand, où il est dit
que dans la présente vente sont aussi compris quelques
articles tle devoirs q u i étoient dûs au 2>endeur à cause
�/(Ô2>
C5 )
du terrier acquis avec ledit domaine. Il est aussi dit, dans
cette vente, que le vendeur a remis à l’acquéreur quel
ques titres qui sont désignés, et qu’il s’est obligé à lui
remettre tous les autres titres, papiers et enseignemens
et terrier concernant la chose vendue.
L e fief de Pouzeux étoit mouvant du duché de Bour
bonnais; aussi v o it-o n , à la suite de la vente du n octobre
1 7 5 1 , .l’acte d’investiture qui en fut donné à l’acquéreur
par les officiers de la chambre du domaine de ce duché,
le 24 février 17 52 .
L e 26 juin 1 7 7 6 , Jean Dubost et Jacques Chemel
firent l’acquisition du domaine des Chopins, dans la
paroisse de Treban, d’où dépendoit la terre des M ontaix,
assujétie à la rente dont il s’agit, à la charge de servir
â l’avenir les cens et devoirs qui se trouvoient sur les
objets vendus.
Soit pour faire courir le délai du retrait lignager,
soit pour empêcher le retrait censuel sur les fonds qui
dépendoient d’une censive, et qui étoient tenus eu
directe seigneurie, il étoit nécessaire, suivant la coutume
de Bourbonnais, de prendre l’investiture des seigneurs
directs : c’est à
quoi les acquéreurs du domaine se
conformèrent ; et on trouve aux marges du contrat du
26 juin 1776 les actes d’investiture des différentes sei
gneuries qui avoient des censives sur des héritages dépen
dons de ce domaine.
Dans le nombre de ces investitures est celle donnée
A 3
�c 6 )
par le sieur de Saint-But, appelant, et qui contient en
même temps quittance des droits de lods. Il n’est pas
inutile de transcrire cet acte : « Investi le présent contrat
» p o u r ce q u i relève de notre terrier de P o u z e u x ,
» après que l’acquéreur nous a payé les simples et doubles
» lods, pour raison de ladite acquisition, sans préju» dice aux droits d’au tru i, et à l’année de cens qui
écherra à la saint Michel prochaine, l’année échue à
» la saint Michel dernière ayant été payée, et à tous
s> autres droits et devoirs seigneuriaux , à la charge par
» les acquéreurs de reconnoitre de nouveau dans quin» zaine. Fait à Y e rn e u il, le ¿8 novembre 1778. Signé
de
» S a i n t -B u t . »
• V oilà un acte d’investiture qui n’eût pas été néces
saire pour la vente d’héritages qui n’auroient été sujets
qu’à de simples rentes ; au lieu qu’il étoit indispensable,
pour des héritages sujets à des rentes en directe sei
gneurie : mais ce même acte renferme de plus la quit
tance des droits de lods, qui 11e pouvoient êlre dûs qu’à
raison d’un héritage asservi à une rente seigneuriale.
Il qualifie de cens la redevance dont il s’agit.
Sans doute on ne prétendra pas que l'investiture et
les quittances des droits de lods se rappo rto icnt à tout
autre héritage du domaine qu’à celui des M ontaix, qui
étoit sujet à la rente dont il sagit. Il faudroit p o u r cela
qu’on fît voir qu’il y avoit dans ce domaine d’autres
héritages-qui relevoient du terrier de Pouzeux, ce qui
�C 7 )
seroît impossible à l’appelant: et m ôm e, dans son mé
m oire, n’applique-t-il pas l’acte d’investiture, et le p aye
ment de lods et ventes, à d’autres héritages qu’à celui
des M ontaix; niais d’ailleurs on va démontrer qu’il ne
relevoit du terrier de Pouzeux que l’héritage des Montaix sujet à la rente dont il s’a g it,.e t cela par un acte
de fait même de l’appelant.
L e 9 mars 1 7 8 4 , il fut présenté une requête au séné
chal de Bourbonnais, par Philippe de Saint-But, écuyer,
sieur de P o u z e u x , et la dame Durand sa femme de
lui autorisée, où ils disent que comme -propriétaires du
j î e f de P o u zeu x , il leur est du une rente annuelle et
foncière de vingt-quatre boisseaux de seigle, su r une
terre appelée des M o n ta ix , dépendante du domaine des
Chopins, dans la paroisse de T reb an j ils répètent, dans
plusieurs endroits de cette requête, que le devoir de
vingt-quatre boisseaux de seigle ju it une dépendance
du J î e f de P ou zeu x , et que devenant propriétaires du
J î e f de P o u z e u x , ils le sont devenus du même d evo ir ,
puisqu’ ils ont acheté et le J ie f et ses dépendances. C’est
après cet exposé que Saint-But et sa femme demandent
permission d’assigner Chemel, qui étoit propriétaire du
domaine des Chopins, situé dans la paroisse de Treban ,
comme propriétaire détenteur, et jouissant de la terre
des M o n ta ix , pour être condamné ci payer la rente
de vingt-quatre boisseaux de seigle , et leur en passer
nouvelle reconnaissance , et leur justifier du titre en
A 4
�C8)
vertu duquel il jouit de ladite terre, pour être pris par
eux telles conclusions qu’ils aviseront, mêrne en paye
ment des Jods et ventes, s’il y échoit.
Cette requête fut répondue d’une ordonnance de per
mis d’assigner, et suivie d’une assignation donnée à Chemel le 5 avril 1784.
Il étoit bien étonnant que Saint-But et sa femme de
mandassent, en 1 7 8 4 , à Chemel, la représentation du
titre en vei'tu duquel il possédoit la terre des M o n ta ix,
tandis que Saint-But lu i-m ê m e , six ans auparavant, le
28 novembre 177 8 ? avoit donné l’investiture en marge
de la vente de 1 7 7 6 , faite à Chemel du domaine d’où
dépendoit la terre des Montaix. L a réserve de conclure
au payement des droits de lods, dans la requête de 1784 ,
étoit encore bien étonnante, puisque l’investiture donnée
par Saint-But en 1778 contenoit expressément la quittance
des simples et doubles droits de lods.
D u concours de tous les actes et titres qu'on vient de
rappeler avec la plus grande exactitude, de leur parfait
accord, des aveux même les plus positifs qu’on y trouve
de la part de l’appelant, Sort évidemment la démonstra
tion entière que la rente de vingt-quatre boisseaux de
seigle, qui étoit due sur la terre des M o n t a i x , tenoit à
la féodalité, et qu’elle étoit due à des particuliers, sei
gneurs et possesseurs de fu'fs.
Qu’est-il compris dans l’adjudication du fief de Pouzcux
en 1697? le fonds des cens et devoirs en dépendons. Ces
�4
M
C 9 )
mots cens et devoirs ne peuvent pas sans doute s’appliquer
à de simples rentes qui n’auroient pas emporte la directe
seigneurie ; et si on avoit voulu y comprendre la rente
dont il s’agit comme une simple rente non censuelle et en
directe, il auroit fallu l’y exprimer nommément.
Quand on consent en 1700 une nouvelle reconnoissance,
au profit de la demoiselle Aubert, de la x*ente dont il s’agit,
dont il est dit qu’elle en a le titre p rim itif , la demoiselle
Aubert prend dans cette nouvelle reconnoissance le titre
de maîtresse de la seigneurie de P ouzeux. C’est à ce
titre qu’elle se fait faire la nouvelle reconnoissance ; et il
est ajouté que la rente sera payée etportée en la seigneurie
de Pouzeux.
Quand en 1720 la demoiselle Aubert vend le fief de
Pouzeux, elle comprend dans la vente le fonds des cens
et devoirs qui sont dûs et dépendans de la maison de
Pouzeux. Nulle mention de simples rentes; et on ne peut
entendre sous les mots de cens et devoirs que des rentes
en directe seigneurie. Elle délivre une expédition d’un
peréquement des devoirs vendus entre les eodétenteurs 5
et par cette expression dq peréquement on entend, en
Bourbonnais, ce qu’on appelle en Auvergne également
de cens; c’est-à-dire, l’acte par lequel les eodétenteurs
font entr’eux la division des cens, pour la portion que
chacun d’eux doit en payer. L a demoiselle Aubert se
reserve dans le même acte les arrérages des devoirs qui
sont échus dudit terrier : et qu’est-ce qu’on entend géné-
�V -V ( 10 )
raieraient par un terrier , sinon le recueil des reconnoissances des cens et de la directe seigneurie.
Quand la demoiselle T ix ie r , qui venoit d’acquérir de
la demoiselle Aubert le fief de P o u zeu x, en prend pos
session , il est dit dans l’acte qu’elle prend aussi possession
à u jv n d s des cens et devoirs qu i en dépendent.
Quand en 17 6 1 le fief de Pouzeux est vendu à Pierre
Durand, c’est aussi avec les articles de devoirs qui étoieTit
dûs au vendeur « cause du terrier acquis avec ledit do
maine.
L e domaine de Pouzeux étoit un_fief du duché de
Bourbonnais ; et c’est aussi pour cela que la vente en est
présentée aux officiers du domaine de ce duché , qui en
donnent l’investiture.
Quand ensuite, en 1 7 7 6 , Chemel acquiert le domaine
d’où dépendoit la terre des M o n taix, qui étoit sujette à
la rente dont il s’agit, pourquoi s’en fait-il donner l’inves
titure par l’appelant lui-même, alors propriétaire du fief
de Pouzeux, investiture qui ne pouvoit avoir lieu que
pour des fonds sujets à des rentes censuelles et en directe
seigneurie, et non pour desimpies rentes? Mais surtout
pourquoi l’appelant se fait-il payer des simples et doubles
droits de lods, h raison de la terre des M ontaix, si la rente
due sur cette terre n'étoit pas une rente en directe seigneu
rie ? et pourquoi même Saint-But porte-t-il la rigueur
jusqu’à se faire payer un double droit de lods, parce que
le payement du simple droit n’avoit pas élé payé dans les
�( 11 )
quarante jours de délai prescrits par l’article 394 de la
coutume de Bourbonnais? Pouvoit-il y avoir une reconnoissance plus formelle que la rente assise sur la terre
des Montaix étoit une rente en directe seigneurie, qui
par conséquent tenoit ci lajéodalité, et qu’elle étoit due
à un seigneur ou possesseur de fief? Rien n’est plus plaisant
que la réponse sur ce dernier article, dans le mémoire de
l’appelant. Chemel a , dit-on, demandé l’investiture sans
nécessité ; il l’a demandée sans doute pour éviter des droits
de francs fiefs, qui auroient été considérables. Mais où
a-t-on pris qu’il fût dû des droits de francs fiefs sur la vente
d’un héritage sujet à une rente foncière ? et p u is, les
droits de francs fiefs eussent même été fort au-dessous
d’un simple droit delods, et bien plus encore d’un double
droit de lods.
Il est encore plus pitoyable de dire que Saint-But a
fait un faux emploi du mot cens, qu’il a fait une per
ception illégitime qu’on auroit pu lui contester en prou
vant que la rente n’étoit pas féodale. Tous les actes prou
vent au contraire la féodalité de la rente; et rinvestiture
et la réception des droits de lods n’en sont que la con
firmation de la part de celui qui avoit alors intérêt qu’elle
fût féodale, et qui ne change aujourd’hui de système
que parce qu'il auroit un intérêt contraire.
Il n’est pas inutile de parler d’une transaction du 16
septembre 1790, passée entre les parties, dont l’appelant
dans son mémoire paroît vouloir tirer avantage : mais
�(
12
)
on croit pouvoir établir qu’elle prouve au contraire
de plus en plus la qualité féodale de la rente dont il
s’agit.
Voyons ce qui avoit donné lieu à cette transaction ,
et quel en fut le résultat.
L a transaction nous apprend que Chem el, proprié
taire1 de la terre des M ontaix, qui faisoit l’assiette de la
rente dont il s’agit, prétendoit que toute cette terre des
Montaix étoit entièrement couverte par des cens qui
étoiént dûs, soit au domaine du roi, soit au seigneur de
Lam otte-Juliet; d’où il prétendoit qu’il ne pouvoit pas
devoir la rente dont il s’agit, qui ne pouvoit pas avoir
son assiette sur la terre des Montaix.
Cette prétention eût été bien ridicule, si de part et
d’autre les parties n’avoient pas reconnu que la rente dont
il s’agit étoit due en directe seigneurie ; car il n’est pas
douteux qu’on peut donner à titre de rente foncière sans
directe des fonds déjà assujettis à des censives.
Néanmoins sur celte prétention les parties nommèrent
des experts qui vérifièrent que de l’objet qui avoit fait
l ’assiette de la rente, il y en avoit une partie dans la
censive du ro i, et une autre dans celle de la seigneurie
de Lam otte-Juliet; mais en même temps il fut reconnu
qu’il en restoit une autre partie sur laquelle ne portoient
pas les censives du roi et de Lam otte-Julict; et le résultat
de la transaction fut que Cliemel ne pouvoit point se
dispenser de payer la rente ; en conséquence il paya les
■
�( *3 )
arrérages, et s’obligea de continuer la rente à l’avenir.
Voilà donc par celte transaction la rente dont il s’agit
bien assise sur un terrain qui n’étoit sujet ni à la censive du roi ni à celle de Lamotte-Juliet, qui par con
séquent avoit été allodiale dans le principe, dans la main
du seigneur de fief de Pouzeux, qui ayant donné à rente
ce terrain allodial , cette rente par la disposition de
l’article CCG X CII de la coutume de Bourbonnais empor-
toit droit de directe seigneurie et lods et ventes 5* et
une rente dépendante du f i e f de P o u z e u x , comme l’é
noncent tous les titres qu’on a rappelés, et qui étoit due
au seigneur de fief de Pouzeux. L a transaction de 1790
feroit donc, s’il en étoit besoin, une nouvelle preuve que
la rente dont il s’agit tenoit nécessairement ¿1 la féodalité.
Après tout cela, après des preuves si multipliées et
des aveux si positifs, le tribunal dont est appel auroit-il
pu laisser subsister la redevance dont il s’agit, sans con
trevenir formellement à la disposition de la lo i? Que
Ion s ecrie tant que l’on voudra, Qu’elle est dure, cette
loi! ceux qu'elle affranchit des droits féodaux ne la trou
vent pas telle; et c’est sans doute le plus grand et le trèsgrand nombre des Français, p e u t-ê tre plus des neuf
dixièmes : mais d’ailleurs elle est écrite, cette lo i, et les
juges ne pou voient pas s’en écarter.
Il est maintenant facile de pressentir les motifs qui ont
du dicter la disposition du jugement dont est appel, et
�( i4 )
on va les répéter pour en rendre le b ien -ju gé d’autant
plus sensible.
Premier motif. — Qu’à l’époque de la transaction de
1 7 9 0 , S a in t-B u t étoit, comme il est aujourd’ hui, à cause
de son épouse, propriétaire du ci-devant fief et seigneurie
de Pouzeux.
Deuxième motif. — Que la reconnoissance de la rente
dont il s’agit ne fut consentie en 17 0 0 , à la demoiselle
A u b e r t, qu’en sa qualité de maîtresse de la terre et
seigneurie dudit P ou zeu x ; que cette rente y fut stipulée
payable et portable en ladite seigneurie , et que Jam in
et sa femme ne reconnurent la rente que comme d’un
terrain appelé des Montaix.
Troisième motif. — Que des contrats de vente de 1720
et de 1 7 5 1 il résulte qu’il dépendoit du fief de Pouzeux
un fonds de cens et devoirs consignés dans un terrier.
Quatrième motif. — Que lors de l’acquisition faite en
1 7 7 6 , par Chemel, du domaine des Chopins, dont dé
pend la terre des M ontaix, S a in t-B u t étoit tellement
persuadé que la rente à lui due étoit la première rente
constituée, conséqueinment cens , qu’il investit le même
contrat, perçut les lods et doubles lods du prix de la
vente de la terre des Montaix , qualifia cette rente de
cens dans sa réserve de l’année à échoir, et se fit de
plus réserve de tous autres droits et devoirs seigneuriaux.
Cinquième motif. -— Que dans la demande formée en
�C ï5 )
1784 ( àla requête de Saint-But et de sa fem m e ), on y
annonce que ce n’ctoit qu’en qualité de fief, et en vertu
de la reconnoissance précitée (de 1700 ), qu’on réclamoit
ladite rente.
Sixième motif. — Que la transaction de 1790 n’ayant
eu lieu que parce que les censives du roi et de Lamotte
ne couvroient pas tout le terrain des Montaix , et qu’il
en restoit d ix-h u it boisselées pour l’assiette de la rente
en question, ( cette transaction ) peut d'autant moins être
considérée comme le titre constitutif, que la reconnois
sance de 1700 y est rappelée comme le véritable titre,
d’après un autre titre primordial que la demoiselle Aubert
y convient avoir pardevers elle.
Septième motif. — Que la constitution de la rente doit
être considérée comme la première q u i , aux termes de
l’article CCGXCII de la coutume, étoit qualifiée cens em
portant droit de directe seigneurie et lods et ventes.
Huitième motif. — Qu’il est prouvé que la rente a
toujours été regardée, par ceux à qui elle étoit due, et
par ceux qui la devoient, comme seigneuriale.
Neuvjiyrîie*mot-if* — Q ug^uivar^ les lois de 1792 et
1 7 9 3 , toute$yedev^ncgs; sej^neuxiales et droits féodaux
.
f
f
1
>
•
r
*
' 1
ont etc supprimés sans indemnité; et les arréragés, même
ceux dûs en vertu du jugement ou de convention, ne
sont pas exigibles.
Dixième motif. — Qu’enfin n’ayant été excepté que
les rentes qui ne tenoient pas à la féodalité, et qui étoient
�( 16 )
dues par des particuliers à des particuliers non seigneurs
ni possesseurs des fiefs de Pouzeux, il s’ensuit que SaintBut est non recevable à l’exiger.
Tels sont tous les motifs d’après lesquels le jugement
déclare en effet l’appelant non recevable dans sa demande,
en renvoie l’intimé quitte et absous, et condamne SaintBu t aux dépens. L e dispositif est justifié par les motifs;
et les motifs ne sont que l'application des conséquences
qui dérivent des titres et actes qui sont produits. L a féo
dalité de la rente dont il s’a g it, et dans la main d’un
seigneur ou possesseur de fief, est si évidente par elle1
même, que ce seroit perdre du temps que de répondre
aux objections du mémoire de l’appelant, qui ne sont
que des efforts d’imagination ; et ce seroit par trop se
défier des lumières du tribunal d’appel.
L e citoyen A N D R A U D , avocat .
L e citoyen V A Z E I L L E , avoué.
A R I O M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel.— A n 1 1 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chemel, Jacques. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vazeille, avoué
Subject
The topic of the resource
rentes foncières
coutume du Bourbonnais
fond roturier
fiefs
droit de propriété
franc-alleu
doctrine
droits féodaux
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Jacques Chemel, intimé ; Contre Philippe Saint-But, appelant.
Annotations manuscrites: « jugement confirmatif 30 frimaire an 12, Journal de Riom, an 12, page 50 » .
Table Godemel : Rente : une rente, qualifiée dans les titres rente foncière, est-elle, par les clauses et expressions qui l’accompagnent, du nombre de celles comprises dans l’abolition générale des droits féodaux, prononcée par les lois de 1792 et 1793 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1792-Circa 1803
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0924
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0923
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53085/BCU_Factums_G0924.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Les Ancizes-Comps (63004)
Comps (03092)
Treban (03287)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
coutume du Bourbonnais
doctrine
droit de propriété
droits féodaux
fiefs
fond roturier
franc-alleu
rentes foncières
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53649/BCU_Factums_M0108.pdf
ef7209a765ea8c54fbae67306fbe6a72
PDF Text
Text
PRECIS
ET C O N S U L T A T I O N ,
P
G u illa u m e
et
O
U
F ran ço is
R
'
C H A U T A R D , appelans;
C O N T R E
Jean n e
T IP H A L IE R , veuve de
A n to in e ,
F ran ço is ,
autre F r a n ç o i s
enf a n s , intimés.
et
Jean
J e a n n e
P ie r r e
:
CHAUTARD,
A n n e - M a r ie
7
C H A U T A R D , leurs
-
Q U E S T I O N .
Un enfant légitimaire qu i, après le décès de son p è re ,
a approuvé le partage-que ce père avoit f a i t dans sa
fa m ille ; qu i a reçu de sesfr è r e s héritiers institués ,s a
légitime conventionnelle, qui étant devenu m ajeur a ,
par une transaction su rp rocès, traité de tous ses d ro its,
peut-il être admis ensuite à demander le partage des successions qu’il a cédées, et dont il a reçu le prix ?
D U mariage de François Chautard avec L ouiseP rulh ière
toient issus, entre autres enfans ? François et Antoine
é
�,
( 2 }
.
Chautard, pères des appelons; et Jean Chautard, mari
et père des intimés.
_
E n 1 7 4 7 , François Chautard, fils aîné, ayant épousé
Marie Bravard, François Chautard, son p è r e , l’institua
son héritier universel, à la charge d’associer à l’institution,
Antoine et.Annet C hautard, ses deux frères puînés. L a
légitime de Jean Chautard lut alors lixée à un ameuble
ment et à la somme dé 400 liv. tant pour biens paternels
que maternels. L a mère étoit décédée, et sa dot consistait
cri une modique somme en argent.
Avitoineet Annet Chautard ayant aussi contracté mariage
en 1700 , leur père renouvela l’institution qu’il avôit déjà
faite en leur fa^eurypar le contrat de mariage de son fils
aîné, et augmenta «de la somme' de 5o liv. la légitime de
Jean Chautard.
Annet Chautard, 1 un de ces trois héritiers, décéda sans
postérité peu._de temps après., et. avant son père,-de sorte
‘ V-- ! t '! que tout l’eiTet de l’institution se réunit sur les têtes de
François et d’Antôine Chautard, co-institués, re et verbis.
'
\ < Le
juilÎet 17^ 9, François Chautard, premier du
■nôiti-j déjà très-avancé en âge, fit un dernier règlement
•
dans sa iamille, afin d’éviter, après son décès , toute espèce
'
. de contestation entre scs enfans. Ayant fait nommer un
v
curateur a Jean Chautard, François Chautard, premier
du n o m , partagea par égalité , tous ses biens entre scs deux
; liéritiers^institués, se réduisit à une pension, et porta à la
somme de 600 liv. la légitime de 4Ôo liv. qu’il avoit d’abord
faite à Jean Çhautard: ce dernier, autorisé de son curateur,
' \ promit de sè contenter de cette légitime.
\s
\
�( 3 )
,
Après le décès de François C liautard, pi-emier du nom %
arrivé le 12 avril 1764, Jean Ghautard ayant contracté
mariage, reçut de ses frères une: somme de 350 liv. sur sa
légitime conventionnelle : Jeap. Cliautard étoit. alors m i
neur •, mais, parvenu à sa majorité, et par transaction du 4
novembre 17 6 9 , il traita avec ses frèi-és de'tous les droits
généralement quelconques qu’il pouvoit prétendre dans les
successions, directes et collatérales, et même pour les droits
d accroissement de sgs sœurs forcloses. Cette, cession de
droits fut faite moyennant la somme de 35o liv. en sus de
la légitime conventionnelle. L e prix de cette cession fut
dans la suite payé sans aucune protestation ni réserve de
la part de Jean Cliautard.
*;
, fI o u t paroissoit être terminé irrévocablement ; néan
moins environ dix ans a p rès, Jean Cliautard prit des
lettres dé rescision contre la transaction du 4 novembre
1769,- il donna, pour seul prétexte que, par ce traité, il
éprouvoit une lésion de plus d’outre moitié : dans la
suite, il im a g in a de prétendre que ses frères, cédataires ,
avoient été ses protuteurs ,* d où il conclut qu il n’avoit pu
valablement traiter avec eux sans un compte préalable. L a
demande en entérinement de ces lettres ayant été portée
en la ci-devant sénéchaussée d’A u vergn e ; y fut accueillie ;
par sentence du 10 mars 1786 *, les lettres furent entérinées
et le partage fut ordonné-, mais, sur l’appel porté en la cidevant cour du parlement de Paris, cette sentence fut infir
mée sur les productions respectives des parties,par arrêt
rendu en la seconde chambre des enquêtes, le 28 mai
1789 : Jean Cliautard fut déclaré non recevable dans toutes
ses demandes, et condamné aux dépens.
A 2
�( 4 )
. . . .
Ch au tard étant décédé, les intimés obtinrent au
tribunal de cassation, le 2,8 frimaire de l’an 2 , un jugement
par défaut,, qui cassa l’arrêt du parlem ent , e t renvoya le
fond de la-contestation, de-vant les juges qui en dévoient
Jean
connoître.
Les motifs de ce jugement sont remarquables : « attendu,
y est-il dit, « que Dicte du 4 novembre 1769, est le pre<c mier acte passé entre -les Cliautard -, héritiers institués,
« et leur frère légitimaire, et qu'il ne s’est pas é c o u l é dix
« années, à compter de eet'atte, jüsqu’à l’obtention et la
« signification des lettres de rescision , le tribunal casse et
« annullel’arrêtdüio'i'-deMantparlement de Paris, du 28 mai
« 1789, parce qu’il a déclaré Jean Cliautard non recevable
« dans 9a demande ^ e n té rin e m e n t de lettres de rescision ;
«en quoi il est contrevenu à l’article 46 de l’ordonnance
« dè Louis X l t , du mois de juin i 5 io , qui porte : Voulons
¿ e t ordonnons que toute rescision de contrat et d’autres
«actes quelconques, fondée sur dol, fraude, circonven« tion, crainte , violence ou déception dyoutre m oitié d u ■
v juste p r ix , se prescrivent dorénavant, tant en nos pays
« coutumiers que de droit écrit, par le laps de dix ans con« tinuels, a compter du jour que lesdits contrats et autres
ç actes auront été faits. »
*
, On demande au conspil si les héritiers de Jean Chautard
sont recevables à demander le partage des successions dont
il avoit reçu le prix.
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a pris lecture
du mémoire et des pièces y énoncées,
�E s t i m e que la réclamation des héritiers de Jean
Chautàrd n’est pas fondée : plusieurs moyens, aussi puis^
sans que décisifs , concourent et se réunissent pour la faire
proscrire et pour faire infirmer, par conséquent* la sentence
de la ci-devant sénéchaussée d’A u v e rg n e , du 10 mars 1786.
i°. François Chautard, premier du nom , avoit iaitun.
partage dans sa fam ille, et Jean Chautard y avoit
acquiescé. Personne n’ignore que- de tels partages et
àrrangemens de famille, faits par le père entre sesenfans ,
ont toujours formé entr’eux des jugemens domestiques,
que la nature , la raison et la loi les obligent de respecter.
Optim um enirn con silium paternel pietas stm per pra
liber is cap ¿t.
■
Les coutumes décident et les auteurs disent que les
partages faits par les pères et mères entre leurs enfans,
prévenant l’office des arbitres ou experts , 'sont favora
blement reçus par les lois romaines ; les auteurs en citent
plusieurs à l’appui de leur opinion : ils ajoutent q u e ,
par ces partages, les pères et mères peuvent donner
aux uns leurs portions en argent seulement, et aux
autres , en héritages ; ils ont la liberté de faire ces par
tages conjointement ou séparément, s im u l, dit D u
moulin , vel seoj'sim ’ hoc est etiam de ju re comrnuni.
Cette maxime est si favorable que nos usages l’ont étendue
même aux coutumes muettes (1),* on trouve à ce sujet,
(1)
Bourbonn. coutum e, art. 216. Nivern. art. 17, cliap. 34.
Duc lié de Bourgog. art. 6 et 7, chap. 7. Amiens, art. 49. Lor
raine, art. 4. Auroux Desponiniiers sur Bourbonn. art. 216, nos.
1 • 6 et i 5 . Lacombe, verbo partage, sect. 6, n. 3. d’Espeissés,
A 3
�,
( 6 )
.
.
-
une très-belle décision dans les capitulaires de Charîemagne ( i ) . Ce législateur, après avoir observé qu’il
n’est pas permis de disposer de la fortune des personnes
vivantes, ajoute : Sed prœcipiente pâtre divisionem ab
eo Juctam durare , si modo nsque ad extremuni ejus
vivendi spatiian, volimias eadem perseçerasse doceatur.
On ne sauroit douter que François Chautard, premier
du n o m , n’eût laissé à Jean Chautard, son fils, tout ce
qui lui pouvoit revenir pour sa légitime de droit, puisqu'il
eut l’attention de l’augmenter, soit à proportion que
sa fortune prit quelque accroissement, soit à proportion
que le nombre de ses en fans diminua. Ce partage fait par
un père, premier législateur de scs enfans, doit opérer
une première fin de non recevoir contre la prétention des
héritiers de Jean Chautard.
2 Il est aussi de principe fondé sur le texte même de
la loi municipale du département du P u y - d e - D ô m e ,
laquelle régit les parties, que celui qui a "approuvé les dis
positions faites par un défunt, n’est plus recevable à
les contredire (2).
Cette décision est en tout conforme aux dispositions
des lois romaines : Q u i agnovit judicunn defuncti, accu
sare ut inojjiciosam volunlatem patris quant probavÎt,
I er. pag. i49.BrocIeausur Louet, lett. p, s o m . 24. Lebrun,
traité des suce. liv. 4 , cliap. i cc. nos. 10 et 11.
tom.
( 1 ) Liv. 7, cbap. 248.
(2) Cout. d’Auverg. tit. 12, art. 5o.
�.
( 7 )
.
lion p o te s t, dit' l’une de ces lois ( i) . Godefroy s’exprime
de la môme manière. L a moindi'e approbation suffit, porte
une autre lo i, agnovissevidetur, q u i quale quale ju d iciurn defuncti comprobavit. Basmaison et P r h o e t ( 2 )
disent que si le ljgnager venant ab-intestat agrée tant soit
peu le testament, recevant ou baillant, de fait ou de
p aro le, il ne pourra plus contrevenir à la volonté du
d éfu n t ( 3 ).
Jean Cliautard accepta, du vivant de son p è re , la
légitime conventionnelle qui lui étoit destinée : après le
décès de son p è r e , il reçut une partie de cette légitime :
des payemens lui ont été faits, lors même qu’il étoit
en m ajorité,• on doit donc d ire , avec assurance, qu’il
avoit approuvé les dispositions de son p è re , agnoveraù
ju d iciu m d e fu n c ti, et qu’il n’étoit plus rècevable dans
sa demande en partage,
■
. 3 . Une troisième fin de non recevoir aussi décisive
résulte de la transaction du 4 novembre
, Une transaction se reconnoît à deux marques princi
pales : la prem ière, quand elle est faite pour assoupir ,
soit un procès qui étoit déjà n é , soit un procès qui
étoit sur le point de naître : T r a n sa d lo est rem issio
litis pressentis vel in u n in en tis, dit C u ja s, et après lu i,
Pothier. La seconde marque est quand les parties, sc
relachant respectivement de leurs droits, retiennent ou
(1) Paragr. i cr. 1. 8. cod. de i/wffic. testam.
(2) Sur le même art. 5o de la cout. d’Auverg.
(3) Cout. de Bourbon, ait. 32J.
�-reçoivent
( 8>
d’un côté, tandis qu’elles abandonnent de
l’autre , aliquo d a to , aliquo retenta. Ces deux caractères
distinctifs se trouvent dans l’acte de 1769. Par ce traite,
Jean Cliautard a renoncé à une légitime en corps héré
ditaire, à un supplément de légitime, et à tous les droits
qu’il pouvoit avoir dans les successions de ses père et
mère et dans celles de ses frères et sœurs : cette renon
ciation est expresse,* et, pour prix d’icelle, ses frères lui
donnèrent une somme de 360 liv. en sus de sa légitime
conventionnelle. Cet acte doit donc être regardé comme
une véritable transaction sur procès. Cela étant, il paroit
évident que Jean Chautard ne pouvoit être écouté dans
sa demande. E n effet, tout le monde sait qu’on ne peut
revenir contre une transaction passée entre majeurs sans
dol ni contrainte : telle est -la disposition de plusieurs
lois romaines et celle de l’ordonnance de Charles I X ( 1
laquelle porte : « Confirmons et autorisons toutes tran
« sactions q u i, sans dol et fo rce, auront été passées
«entre nos sujets majeurs............. Voulons que contre
« icelles nul ne soit reçu à se pourvoir sous prétexte de
</ lésion quelconque, même de celle appelée, à cause de
.r son énormité, dohis re ipsâ , mais que les juges, dès
« l’entrée du ju g em e nt, s’il n'y a autre chose alléguée
«contre lesdites transactions, déboutent les impétrantes
« lettres de l’effet et entérinement d’icclles ».
(1) L. ï o , au cod. de transact, 1. 16, cod, tit. 1. 20, cod. tit.
ordonu. de i 56o.
'
Mornac
�C9 )
.
Mornac ( i ) dit que les tribunaux ont toujours jugé
que l'ordonnance de i 56 o , sur le fait des transactions,
devoit être observée tant pour le passé que pour l'avenir,
cùm sit declaratoria ju r is antiqui.
Jean Chautard n’avoit pas prétendu que la transaction
de 1769 fût l’effet de la force, du d o l, de la violence
et de la surprise ; il avoit uniquement exposé qu’il avoit
été lésé par ce traité ; ainsi, comme il est démontré que
la lésion n’est point considérée en transaction, et qu’il
est avoué que Jean Chautard étoit alors m a je u r, il
devoit encore, par ce m o tif, être.déclaré non recevable
dans sa demande.
40. Si l’on envisage la transaction de 17 6 9 , non comme
une transaction sur procès , mais comme une simple
vente de droits successifs, il est également sensible que
la demande de Jean Chautard nepouvoiL être accueillie,
quand même il auroit éprouvé une lésion de plus d’outre
moitié : en effet, il est constant parmi nous, et telle est
la jurisprudence de tous les tribunaux, que la cession
de droits successifs n’est pas susceptible de rescision pour
cause de lésion d’outre moitié : Loysel (,2) en a fait une
règle du droit français. L ’incertitude, à laquelle s V p >sc
un acquéreur , est une considération puissante qui
exclut toujours et absolument le moyen de lésion,
qui pourroit donner lieu à la restitution contre lui.
S il se trouve du b én éfice, il n’est pas juste de lui
(1) Sur la loi 16 qui vient d’êlrc cilée.
Liv. 3 , lit. 4 , n°. xi .
B
�.
(
10
envier ce profit , parce que , s’il y a de la p e rte , elle
retombe sur lu i, sans ressource : le vendeur reçoit une
somme certaine qui ne peut lui être enlevée ; son gain
est assuré et à couvert de tout événement : l’acquéreur,
au contraire, ne tr o u v e , pour le prix de son a rg e n t,
qu’une espérance traversée de périls et d’ inquiétudes.
L ’on ne peut connoîtreles dettes d’ une succession qu après
- les trente ans dans lesquels les actions personnelles se
peuvent prescrire : jusqu’à ce terme fatal de prescription ,
un acquéreur flotte toujours entre la crainte et l’espé
rance , entre la perte et le gain : il ne faut qu’ une
promesse, qu’une garantie du défunt, pour renverser la
fortune la mieux établie.
C ’est d’après ces raisons naturelles que nos lois et nos
jurisconsultes ont toujours décidé q u e , dans une vente
de droits successifs, il n y avoit point de restitution, à
cause de l’incertitude de l’événement. On trouve, à ce
sujet, une foule d’arrets dansM aynard, Papon, Ferrières,
Beroyer sur Bardet, L e b ru n , D enisart, etc............... L e
dernier commentateur de la coutume du département
du Puy-de-Dôme ( i ) en cite un , du 26 août 1782, coniirniatif d’une sentence de la ci-d eva n t sénéchaussée
d’Auvergne. Cette fin de non recevoir seroit seule
suffisante pour faire rejeter la réclamation des héritiers
de Jean Chautard.
■
'
5*. Les intimés sont mal fondés à prétendre qu’il étoit
( 1) Chap. 1 2 , art. 5 o , quest. 2e.
�( 11 )
dû nn compte u «Jean Cliautard, p^r l f,s auteurs dos
appelans, attendu qu’ils n’avoicnt été ni ses tuteurs, ni
ses proluleurs : ils n’avoient point été ses tuteurs, le
■fait est constant, puisque les tutelles sont dalives en
France, et qu’on ne rapporte point d’acte de tutelle ;
ils n avoientpas été non plus ses protuteurs., ni n’avoient
pu lètre : en effet, on nomme protuteur celui q u i ,
sans aucune mission, sans aucun titre , s’ingère, à délaut
de tuteur, dans l’administration des Liens d’un mineur ;
mais ce n o m , cette qualité et ces conséquences cessent
toutes les lois que celui qui s'immisce, le fait et le peut
Jaire a tout autre titre que celui de protuteur, notam
ment quand il est héritier universel, comme clans l’espèce.
L en ru n , L o u e t , L aco m b e, F errières, etc........... par
lant des actes qui sont sensés donner la qualité d’héritier,
se reunissent pour dire qu'il suiiit de pouvoir faire une
chose en une autre qualité ,■pour être réputé ne l’avoir
pas laite comme héritier. C e l u i , par conséquent, qui
seroit présumé protuteur, à défaut de titre qui lui donnât
droit de jouir des biens d’une succession indivise entre
l u i, -ses frères et sœurs m ineurs, cesse d etre présumé
protuteur, quand ce titre se rencontre danssapersor.no:
si Ion considère un moment le droit que donne l'ins
titution d h é ritie r, cette proposition devient évidente.
I **
• *
■
. •
.
<institution d h éritie r, ,disent tous les auteurs, est
lui titre Universel., qui assure à celui qui en est revêtu,
le droit de jouir de la succession entière de l’institution',
dy. succeder ni witvcrsitni ju s defanclL Tou te l’hérédité
«ippartient u l’héritier institué, comme s'il éloit setd.
'
B a
�'( 12 )
, ..
héritier ab -in testa t. Lorsqu’il se présente des légitimaires , ils so n t, en quelque sorte, considérés comme de
simples créanciers donnés par le ministère de la loi a la
succession du défunt, et qui demandent à l'héritier institué
le payement de leurs créances.
C ’est d’après ces principes que, par arrêt du ci-devant
parlement de Bourdeaux , du 29 avril 1699 ( 1 ) , il
fut jugé qu’un frère institué héritier, qui clevoit une
légitime pécuniaire à son frère , n’étoit point présumé
a v o ir été son protuteur , et conséquemment qu’il n’étoit
p o in t tenu de lui rendre compte. C’est ce qui fut aussi
jugé en la ci - devant sénéchaussée d’A u v e rg n e , le 23
novembre 1 7 8 4 , et ce .qui avoit été jugé peu de temps
auparavant dans la famille des Altaroclie, de la commune
de Massiac. Telle est enfin la jurisprudence constante du
tribunal civil du département du Puy-de-Dôme. Il y e n
a un jugement très-récen t; il a été rendu en dernier
ressort, le 8 du présent m ois, après-une très-a m p le
discussion, et sur les conclusions du commissaire du
directoire exécutif.
François et Antoine Chautard , pères des appelans,
avoient été institués héritiers universels par François
C hautard/ premier du nom : Jean Chautard avoit été
réduit à une légitime conventionnelle ; les auteurs des
appelans avoient donc un titre qui les autorisoit à jouir
(1)
Rapporté par Brillon , verbo interêt, cl par ‘ Lapcyrère ,
édition de 1706, lot. I. n°. 82.
�.
( 13 )
des biens de l’institution ; c’cst en vertu de ce titre
qu ils ont j o u i , et non comme protuteurs de Jean
Chautard, leur frère ; d’où il résulte qu’ils ne lui devoient
point de compte.
6°. E n fin , le motif qui a servi de base au jugement
du tribunal de cassation, n’est étayé que sur une erreur
de droit.
D ’abord, en supposant que le traité de 1769 eût été
sujet ¿1 rescision, pour cause de lésion d’outre moitié, le
tiibunal n auroit pu de piano casser l’arrêt du ci-devant
parlement de Paris : il axiroit dû s’assurer auparavant
s i l y avo it, ou n o n , lésion.
2. . On a prétendu mal i\ propos , que le traité de
1769 étoit dans le cas d’être rescindé, pour cause de
lésion d o utre m oitié, sur le fondement que c’étoit le
premier acte passé entre les Chautai’d.
Il
est vrai q u e , si cet acte étoit un simple partage,
et que Jean Chautard y eût éprouvé une lésion, m ême
du tiersau quart, il auroit été en droit de le faire rescinder
dans les dix ans; mais cet acte n’est pas un partage,
c’est une vraie transaction sur procès, contenant .vente
de droits successifs : cela vient d’être démontré.
Quelques auteurs avoient distingué, à la v é rité , la
cession laite à un cohéritier, de celle laite à un étranger:
ils avoient pensé que dans le premier cas la lésion du
tiers au quart sullisoit pour eh o p é r e r la rescision ,
- suivant la maxime que le premier acte entre cohéritiers
est réputé partage, dont l’égalité doit être l’aine et la
base ; mais le sentiment contraire a p r é v a lu , et tous les
�.
.
f 14 >
,
autours qui ont écrit après Brodeàü ont pensé qu’une
cession de droits entre cohéritiers, 11e mérite pas plus
de laveur que si elle étoit faite aux étrangers, par la
raison que l’incertitude de l’événement est la même
dans les deux cas.
Un acte ne peut être considéré comme un partage ,
que sous deux conditions : la p rem ière, que les parties
soient cohéritières *, la seconde , quelles aient l’inten
tion de diviser, les biens entr"elles , et non de vendre et
d'acheter la portion l’une de l’autre. Ce principe est
enseigné par Dumoulin ( 1 ) qui dit que, si ceux qui ont
quelque chose de commun , traitent ensemble, que
l’acte no commence pas par un partage, on ne peut le
Considérer .comme formant un partage, quia rem citnt
non intendant diviilere, non est divisio.
d’Aguesseau (2 ) étoit si convaincu de cette vérité q u il
cLisoit à ce sujet : Il est inutile d'emprunter le -secours
cles.jlçîig et l’autorité des docteurs , pour prouver une,
maxime qui est également constante dans les principes
çle 1 équité naturelle, dans les maximes ¿de droit et dans
la jurisprudence. Parmi les arrêts qui ont jugé cette
question, il y en a un très^célèbre du <û-devant parlem ent
de Paris , rendu sur les conclusions de Seguier, le 10
mai 1760 • cela avoit été ainsi jugé par autre arrêt du 7
juin 1728.
( î ) Sur l’art. 33 de la commue de Paris, n°, 71*
(2) Dans ses .plaidoyers»
�'
(
1 5 }
.
.
.
.
O n observera enfin, que le tribunal de cassation a fait
une très-mauvaise application tle l’article 46 de l’ordon
nance de 1.510, attendu que cet article ne s'a p p liq u e
qu’aux ventes ordinaires de biens - immeubles, dans
lesquelles le vendeur se trouve lésé et 1 ordonnance de
i 56 o défend d’admettre la rescision pour cause de lésion,
même d’outre moitié, qui pourroit se trouver dans une
transaction. A i n s i, sous quelque point de vue qu on
envisage la demande en partage qu’avoit formee Jean
Chautard, il est, sans difficulté, quelle ne pouvoit être
accueillie, et que la sentence de la ci-devant sénéchaussee
d’A u vergn e doit être infirmée.
D é lib é r é à R io m , le 10 ventôse, an 4 de la r é p u b liq u e
française.
G A S C H O N.
T O U T T É E , père, A N D R A U D , T O U T T É E ,
jeu n e, G R E N I E R , B O R Y E ,
PAGES.
A R I O M , DE L’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T .
�"
¿Ú lZÚ ^) .
I
�MÉMOIRE
' -i
£
. V i.
V o A
ET C O N S U L T A T I O N .
M
»»** A
*
'
(9" *
^
*
. I
•
'
...
•
•
t
■
•
_
* •’
¿I
�QUESTIONS.
1ere. Fille renonçant a succession fu tu re , en pays
de droit é c rit, au profit de l héritier qui seroit institué,
sa renonciation profite aux mâles : si le père meurt
sant f a ir e d ’autres dispositions.
.
IIME E n pays de droit éc rit, où l'institution est né
cessaire pour la validité des testamens , L'institution du
posthume, dont la fem m e est enceinte, comprend elletous
les posthumes qui naissent après le testament. 1
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chautard, Guillaume. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Gaschon
Touttée
Andraud
Touttée jeune
Grenier
Borye
Pagès
Subject
The topic of the resource
successions
minorité
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Précis et consultation pour Guillaume et François Chautard, appelans; contre Jeanne Tiphalier, veuve de Jean Chautard, Antoine, François, Jeanne, Anne-Marie, autre François et Pierre Chautard, leurs enfans, intimés. Question. Un enfant légitimaire qui, après le décès de son père, a approuvé le partage que ce père avait fait dans sa famille ; qui a reçu de ses frères héritiers institués, sa légitime conventionnelle, qui étant devenu majeur a, par une transaction sur procès, traité de tous ses droits, peut-il être admis ensuite à demander le partage des successions qu'il a cédées, et dont il a reçu le prix ?
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1747-Circa An 4
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0108
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Auzelles (63023)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53649/BCU_Factums_M0108.jpg
coutume d'Auvergne
minorité
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53837/BCU_Factums_M0526.pdf
a214146ab064173cfddb6ed1ef63d99c
PDF Text
Text
CONSULTATIONS
P O U R
G ilb e r te
C H A R L E S , veuve A
u d ifr ed
, h a b ita n t à.
C le rm o n t., a p p e la n te d u ju g e m e n t d u 7 fr u c tid o r an 7 ;
fà/U ' / y
,
C O N T R E
,
C H A R L E S et F r a n ç o i s MICHEL O N son m a r i , propriétaires, habitans de la même
ville, intimés.
M a g d elein e
C
el ui
*
qui a pris cession d ’une créance non contestée, pendant
la dépréciation du papier-monnoie, a-t-il moins de droits que son
cédant? L e débiteur peut-il le forcer à recevoir son remboursement
au pied de l’échelle de dépréciation du temps de la cession, et à
s’en contenter? En un m o t, le débiteur d o it-il moins qu’il ne
devoit, parce qu’il a changé de créancier? T e lle est la question .à
t
juger. L a raison, et le texte précis de la loi du 1 1 frim aire an 6 ,
article 1 1 , la décident en faveur du créancier subrogé. Cependant
le tribunal dont est appel l’a décidée en faveur du débiteur, qu’il
a admis à se libérer avec 398 francs en num éraire, d'un capital
de 6000 fran cs, dû pour prix d’une vente d’immeubles faite par
contrat du 11 mai 1 7 9 1 , et des intérêts de quatre ans un m ois,
ainsi que des frais d’inscription ( qui montent à 9 francs ), m oyen
nant 82 fran cs, sans l ’obliger même à rembourser les coûts de
l'acte de subrogation. U n jugement si directem ent opposé à la
justice et au texte précis de la l o i , t r o u v e r a - t - il grâce devant la
^
cour d appel ? Ce seroit l’outrager que de le craindre
F A I T S .
Il résulte d ’un acte du 9 .prairial an 3 , que G ilberte C h arles,
J * /
il
W
•;><, £ __
-
^
V ' vt uJ^U' f
'
/ , U - I'1 ' / '
*
f
■£*kU~" f a i f c f r '1*!'
-,
....—
_
:_______
Æ./un «
i / i *„4
�veuve A u d ifred , appelante, paya à M . César Ch ampflour la somme
de 6000 fra n cs, pour remboursement du capital à lui dû par M agdeleine C harles, "veuve D o n s, remariée à François M ichelon, pour
prix d’une partie de maison sise ¿1 Clermont, sur le boulevart desA ugustins, à elle vendue par contrat du 11 mai 1791. M . Champflour, en recevant ce capital, en donna quittance, et subrogea la
veuve Audifred à son lieu et place, pour exercer contre les pro
priétaires de la maison vendue tous ses droits à cet égard; et
comme entièrement p a y é , il fît remise à la subrogée de son expé
dition de vente, pour s’en servir ainsi qu’elle aviseroit,
Magdeleine C h arles, et M ichelon, son second m ari, intervinreni
dans l’acte pour déclarer que d’après les arrangemens pris entre le
citoyen Champflour et la citoyenne A u d ifred , ils se tenaient l’ acte
pour sig n ifié , et consentir à payer annuellement à ladite Audifred
]e revenu de la somme de 6000 livres à son échéance r jusqu’au
remboursement dudit capital.
Il fu t ajou té, par convention expresse, que « la somme d e
»
»
'»
»
»
»
»
6000 livres dont il s’agit seroit remboursable à la volonté du débifpnr, iooo livras par 1000 liv ., et que l’intérêt y relatif seroit
payé à la veuve A u d ifred , avec les retenues légales, jusqu’à
1 entier payement ; les parties dérogeant, quant à c e , à la teneur
du contrat de vente, d’apres lequel le capital dû étoit rembour—
sable dans 1 intervalle de dix ans à compter de sa d ate, et le
revenu stipulé payable sans retenue. »
L e s sieur et dame Michelon ne profitèrent point des facilités
qui leur avoient été accordées pour se libérer, pendant que le
papier-monnoie avoit cours r après le retirem ent, le législateur
s’occupa de déterminer la réduction en num éraire, des obligations
qui avoient été contractées pendant le cours du papier-m onnoie j
elles furent divisées en plusieurs classes, et chacune reçut ses lois
particulières, suivant sa nature et son origine.
L a loi du i 5 fructidor an
5 avoit réglé le sort des obligations
antérieures à la dépréciation du papier-m onnoie; celle du 11 fri«vaire an 6 fixa le mode de remboursement des obligations con~
�(3)
tractées pendant cette dépréciation; et celles du 16 nivôse suivant
réglèrent spécialement le mode de payement des obligations con
tractées pour prix d’aliénations de biens immeubles faites depuis le
i ' r. janvier 17 9 1, jusqu’à la publication de la loi du 29 messidor
an 4.
Cette dernière loi s’applique évidemment à la liquidation du prix
de vente du 11 mai 1791» ccdée par M . Champflour à la femme
M ichelon, puisqu’elle est postérieure au i*\ janvier 1791 ; conséquem m ent si M . Champflour n’y avoit pas subrogé la veuve A u r
difred avant le retirement du papier-m onn oie, il auroit été en
droit d ’en exiger le payem ent d’après les bases de liquidation éta
blies par les lois citées, du 16 nivôse an G.
Il y a deux lois de cette date, dont l’une est le complément de
l ’autre; et le résultat des deux est que l’acquéreur est obligé de
payer les immeubles acquis pendant la dépréciation du papierm onnoie, au prix d ’estimation en numéraire, d’après la valeur
ordinaire des immeubles de même nature dans la contrée, à l’é
poque de la vente, à moins que le vendeur ne préférât de subir la
réduction au pied de l’échelle de dépréciation à la même époque (*)•
II suit de là , que la veuve AuJUVed, ayant été subrogée au lieu
et place de M . C ham pflour, par l’acte du 9 prairial an 5 , pour
exercer tous 6es droits, les sieur c l dame M ichelon ne pouvoient
se libérer valablement envers elle, après le retirement du papiermonnoie , qu’en lui payant la valeur de l’immeuble vendu par
M . Cham pflour, au mois de mai 179 1, sur le pied de l'estimation
en num éraire, à l’époque de la v e n te , ou au cours des assignats
à la même époque, si la veuve Audifred avoit préféré ce dernierxnode de liquidation. Sur ce pied , le remboursement auroit du
être de 558o francs numéraire, pour 6000 francs, vu que 1 assignat
ne perdoit que 7 francs par 100 contre numéraire, au mois de m ai
I 79 I > suivant l’échelle de dépréciation du temps.
(*) C est la la comtciuence des articles x«r. et 3 de
de la seconde.
prem ière loi, et ^
2
�(4 )
A u lieu de ce capital de 558o fr. numéraire, les sieur et danvr
M ichelon crurent qu’ils pouvoient se libérer avec 3g 8 fran cs, et
ils firent des offres réelles de cette dernière som m e, par acte da
8 messidor an 7 , ainsi que de 82 francs pour intérêts, et frais
d ’inscription. L a veuve A udifred refusa ces offres. L a contestation
¿’engagea au tribunal civil du départem ent, sur leur suffisance ou
insuffisance, et elles furent déclarées suffisantes par jugement da
7 fructidor an 7. Appel le i 5 brumaire air 8 r de la part de la
veuve A udifred. P a r le choix des tribunaux, qui avoit alors lieuy
la connoissance de cet appel fu t dévolue au tribunal civil d’A llie r j
m ais rétablissem ent de la cour d appel en la meme année, l’en a
saisie, et il s’agit m aintenant d y faire droit.
L a veuve A u d ifre d soutient son appel avec confiance; et c ’e st
avec ra is o n , car ses m oyens semblent victorieux : les voici.M O Y E N S
D ’APPEL.
L e jugement dont est appel paroit fondé sur l'article 10 de la
loi du 11 frim aire an 1 1 , ainsi conçu : « Quand le débiteur aura
» emprunté une somme en papier-monnoie, pour se libérer envers
-
v un ancien créancier, le capital «;u<» pr£t<£ aura soumis à l’échelle
/et-
» de réduction du jour de la nouvelle obligation, sans que le nou« veau créancier, qui en a fourni le m ontant, puisse se prévaloir,.
y> qliant à ce, de la subrogation aux droits, ainsi qu’à l’hypothèque:
» ou au privilège de 1 ancien créancier, qui a été remboursé de ses
» deniers. » M ais l’analise que nous venons de faire de l’acte do
cession du 19 prairial an- 3 démontre à l ’évidence que l’articlo
cité n »y a aucunc application. C et article en effet ne parle que du
uAjx'
.
•
/ *
/
lt'
cas où un débiteur emprunte pour payer une dette ancienne, et
contracte une obligation principale nouvelle envers le second pré*
t itl/ tus
teur. Or-, les sieur et dame Michelon n ’empruntèrent rien de lar
veuve A udifred; ils ne contracteront aucune obligation principal?
et nouvelle cn’vers e lle , par l ’acte du 9 prairial an
v*t J
x
/ A oJT'n
3. S ’ils inter-
vinrent dans cet acte, ce fut uniquement pour reconnoitrc la veuve
Audifred pour leur créancière; à la place de M . Cham pflour,,ac-r
-—-£ //(
�(5 )
ccpter le transp ort, et le tenir pour signifié. C e n ’est pas ainsi
que l'on s’exprime quand on crée une nouvelle dette par un em
prunt avec lequel on éteint la première. Il n’y a point alors de
signification de transport à fa ire , parce qu’il ne s’en opère aucun
relativement au capital de la créance. Concluons que les débiteurs
M ichelon, en tenant l’acte du g prairial an n pour signifie, ont
reconnu que cet acte étoit un 'véritable transport de Vancienne
dette au profit de la veuve A u d ifred , et qu’il n’étoit que cela.
O r , écoulons maintenant l’article u de la m êm e loi du n fri
maire an 6 f il nous apprendra que « la réduction à l’échelle du
» jour du nouvel acte, n’est pas applicable, i°. aux simples ces» sions et transports de dettes , 2% aux endossemens d’effets né» gociables, 38. aux délégations et indications de payemens, meme
» aux délégations acceptées.
» D ans tous ces cas, ajoute l’article, les cessionnaires ou délé» gataires pourront faire valoir en entier les droits des cédans ou
» délégans, contre les débiteurs cédés ou délégués. »
11
ne s’ agit ici que d ’une cession, d ’un transport, d’une délé
gation de créance acceptée; donc il ne s’agit point d ’une créance
à laquelle la réduction à l’échelle du joui*
*»o«vol n^to, purement
récognitif de la dette ancienne, soit applicable; mais d ’une créance
pour laquelle la veuve A u d ifred , cessionnaire ou délégataire, peut
faire 'valoir en entier les droits du sieur C ham pflour, cédant ou
délégan t, contre les sieur et dame M ichelon. D o n c , cneore une
fo is , les premiers juges ont fait uno fausse application de la réduc
tion prescrite par l’article 10 d e la loi citée, tandis qu’ils devoient
appliquer l’article n ^ qu’au lieu de déclarer valables les offres
faites par les intim és, de 398 francs en capital, pour éteindre une
dette de Gooo francs, créée ù la date du 11 mai 179 1 »
dévoient
déclarer les intimés débiteur de 558o livres, et rejeter leurs offies
insuffisantes, et de plus de n e u f fois trop foibles.
P
r e m i è r e
o b j e c t i o n
.
L a créance prim itive fut modifiée par l’acte de subrogation du
�g prairial an
(6 )
3 ; il y eut novation convenue entre la veuve A udi-
fred et les débiteurs, puisque les termes de payement furent chan
gés, et que l'intérêt stipulé par le premier acte fu t réduU, en le
soumettant aux retenues légales dont il avoit été affranchi dans
l ’acte de vente de 1791 ; o r , s’il y a eu convention nouvelle entre
le créancier subrogé et le débiteur, il y a lieu d’appliquer à ce con
trat nouveau l’article xo de la loi du 11 frim aire, qui soumettoit
la créance à la réduction sur le pied de l’echelle de dépréciation
de la date de ce nouveau co n tra t, et non à l ’application de l’article
i i ; qui la maintenoit telle qu’elle étoit originairement»
R É P O N S E ,
Q uelle m isérable subtilité ! Sans doute il fut apporté par l’acte
du 9 prairial an
3 , de la part de la veuve A u d ifred , un adoucis
sement volontaire et généreux à la créance que M . Champflour
lui cédoit; mais cet adoucissement n ’en changea ni la nature, ni
l ’origine ; il ne porte point sur le capital, mais seulement sur les
intérêts et sur les termes de payemens. C e me fu t point un nouveau
capital en u jjig n u w
i„
TVTiVli»lon et son mari reçurent
à titre d’emprunt des mains de la veuve A u d ifred , pour se libérer
envers leur ancien créancier d’un prix de vente d’immeubles : la
■veuve Audifred ne leur fournit rien, absolument rien, à litre de
p rê t, ni num éraire, ni papier-m onnoie, pour se libérei; envers le
sieur Champflour ; elle paya directement ce créancier , qui la su
brogea à sa place et lui céda scs droits, pour les exercer comme il
l ’auroit pu faire lui-m êm e. 11 y eut donc encore une fois transla
tion de la créance ancienne du sieur Champflour sur la tête de la
veuve A u d ifred , et adoucissement de cette créance ancienne; mais
point de création d ’une nouvelle. D onc il 11’y avoit pas lieu d ’ap
pliquer l’article 10 de la loi, qui présuppose non-seulement un con
trat nouveau, mais une creance nouvelle, par l ’emprunt d’une
somme en papier-monnoie • il n ’y a lieu qu’à l’applicalion de
l ’article j 1 , relatif aux pessions, délégations et transports des délies
�(7
)
anciennes, acceptées ou non par les débiteurs, telles que la su
brogation qui s’opéra par l’acte du 9 prairial an
D e u x i è m e
3.
o b j e c t i o n
.
S ’il en est ain si, la -veuve A udifred aura donc fait un Bénéfice
énorme sur la créance du sieur C ham pflour, puisqu’elle aura
acquis un capital de
valeur de
558o francs num éraire, pour une modique
3g 8 francs.
R
é p o n s e
.
H é ! quelque Lonne que soit devenue, par l ’événem ent, la né
gociation que la veuve Audifred fit avec le sieur Champflour ;
quelqu’heureux qu’ait été l’emploi qu’elle fit d ’une somme d ’assi
gnats provenue de marchandises vendues au maximum, qui re
présentait du numéraire en ses m ains, de quel droit les débiteur«
M iclielon lui en enlèveroient-ils le bénéfice? C ’est leur faute s’ils
ne l’ont pas remboursée en papier-monnoie dans le temps ; s’ils
n ont pas mis à profit la facilité de rembourser 1000 francs par
1000 fran cs, dans un temps où il en coûloiL s! pmi pour c» pro
curer de si médiocres «ommes. M ais ils doivent savoir que le Code
civil n ’a pas établi une règle nouvelle, qu’il n ’a fait que perpétuer
une règle de tous les tem ps, lorsqu’il a dit ( article n G 5 ), » Les
» conventions n ’ont d’effet qu’entre les parties contractantes; elles
» ne nuisent point au tiers, et elles ne lui profitent pas. » Rcs
inter alios acta , tertio nec nocet, nec prodest.
L a cession faite par M . Champflour de sa créance à la veuve
A u d ifred , sur la femme Miclielon et son époux, n ’a pas pu nuire
à ces débiteurs ; mais elle ne doit pa9 leur profiter. Débiteurs de
558o francs numéraire envers M . Cham pflour, pour Pr*x
ven^e
d une maison qui vaut aujourd'hui 3oooo francs, quoiqu ils n en
aient pas dépensé plus de cinq ou six mille à la réparer, ils ne
doivent ni regretter de payer cette dette sur son taux p rim itif,
à la veuve Audifred , cessionnaire de M . Cham pflour, ni s’en
dispenser ; leur sort n ’a pas été empiré par le changement de
�( 8 )
créancier : c’est tout ce qu’ils doivent considérer, et imposer silence
à l ’envie.
D e si puissans moyens ne permettront pas à la cour d’hésiter à
infirmer le jugement dont est appel, et à rejeter les offres déri
soires qu’ont faites les intimés de 398 fra n cs, pour se libérer d ’un
capital de 558o francs; et il seroit bien superflu de relever l ’insuffisance de ces o ffres, dans leur propre système, en faisant re
m arquer,
1°. Que quand il seroit possible d'admettre la réduction du capital de la créance à 398 fra n cs, il ne le seroit pas de ne porter
qu’à 82 fr. quatre ans un mois d ’intérêts de ce capital, et 9 fr.
de frais d’inscription;
2". Que si le bénéfice de l’acte de cession , du 5 prairial an 3 ,
devoit tourner au profit des débiteurs M ichelon, la justice publie
que ce ne pourroit jamais être qu’à la charge par eux d'en sup
porter les frais et loyaux coûts, qu’ils n ’ont cependant point of
fe rts , et qui resteroient en pure perte pour la veuve A u d ifred , si
le jugement dont est appel étoit confirmé.
Mais cette confirmation sur la question principale est impos
sible ; c est donc perdre u n t e m p s d e s’arrêter aux moyens
secondaires.
D
élibér é
à Clerm ont-Ferrand, le 11 juillet 1806.
BER G I ER. B E IL L E -B E R G IE R .
Le
co n seil so u ssig n é ,
qui a vu la présente consultation, est
entièrement du meme avis, et par les mêmes raisons. Les résolu
tions de cette consultation ne sont que le résultat et la juste ap
plication des lois rendues sur la matière.
D
é lisér é
à R io m , le 14 ju illet 1806.
A N D R AU D .
A RIOM, de l'imprimerje de LANDRIOT, seul imprimeur de la Cour d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Charles, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bergier
Beille-Bergier
Andraud
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Consultation pour Gilberte Charles, Veuve Audifred, habitant à Clermont, appelante du jugement du 7 fructidor an 7 ; contre Magdelaine Charles, et François Michelon, son mari, propriétaires, habitans de la même ville, intimés.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1795-1806
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
8 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0526
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53837/BCU_Factums_M0526.jpg
assignats
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53720/BCU_Factums_M0221.pdf
65b545069d60f9da5d0c0616666d7d9e
PDF Text
Text
CONSULTATION
P O U R
L a dame C H A P A V E Y R E , habitante de la
ville de M u r at, département du C a n t a l , appe
lante d’un jugement rendu au tribunal civil de
l'arrondissement de R i o m , le 9 thermidor an 10;
C O N T R E
I e citoyen A n t o i n e T E I L H ARD
D U C H A M B O N , propriétaire, habitant de
ladite ville de Ricm, intimé.
LE C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire
à consulter de la dame C hapaveyre, ensemble copie d’un
jugement rendu au tribunal civil du R io m , le 9 thermidor an 10 ,
�( 2 )
^
E s t i m e que ce jugement renferme une évidente
erreur, en ce qu’il déclare valable une donation mutuelle
faite par contrat de mariage entre futurs conjoints, quoi
que cette donation n’ait pas été revêtue de l’insinuation,
dans les quatre mois du décès de l’un des donateurs; q u e ,
par conséquent, l’appel interjeté par la dame Chapaveyre
est parfaitement bien fondé , et que le succès le plus com
plet doit couronner sa juste réclamation.
Il résulte du mémoire à consulter, et de l’exposé des
faits insérés au jugement dont il s’agit, que, par le contrat
cle mariage de Marie-Jeanne Chapaveyre du Saillant avec
Antoine Teilhard-du-Chambon , la future s’est constitué
en trousseau, meubles, effets, linge et liardes à son usage,
même ses meubles meublans, etc. jusqu’à concurrence
de 2,000 fr. à quoi ces divers effets ont été amiablement
- estimés entré les parties.
%
D e plu s, et en d o t , elle s’est constitué, i ° . les biens
meubles et immeubles à elle éclius par le décès de son
père ; 20. la somme de 60,000 fr. faisant partie des biens
par elle recueillis de la succession testamentaire de Jacques
Philippe du Saillant, son oncle.
Par le même contrat, le futur est spécialement autorisé
à poursuivre la rentrée et le remboursement de tout ce
qui peut être dû à la future, à demander partage, aliéner
les immeubles réels et fictifs , toucher le remboursement,
comme les interets ou revenus échus ou à écl\oir, à la
charge néanm oins de f a i r e emploi des fo n d s à f u r et
mesure q u i l en touchera le m o n ta n t, soit en acquisi
tions d’ immeubles réels ou fictifs, soit en acquittement
de dettes hypothécaires de l’un ou de l’autre des futurs.
�C
3
)
Il est d’ailleurs stipulé, que tous .les autres biens, de
quelque nature qu’ils soient, non compris dans les cons
titutions précédentes, sont réservés à la future, comme
extradotaux et parapliernaux.
Enfin, et à la suite de quelques autres clauses particu
l e res , dont il est inutile de rendre co m p te, parce qu’elles
n’ont aucun rapport à la question ci-dessus proposée ,
il est dit : « Que pour se témoigner leur amitié récipro« que, les futurs se sont mutuellement donné et donnent
« l’usufruit de tous et chacun les meubles et droits qui
« seront délaissés par le premier mouraut ; laquelle dona
« tion , est-il ajouté, qui est mutuellement acceptée, aura
« lieu , y ait enfans ou non du mariage. »
Quelques années après ce mariage, la dame Teilhardtlu-Gharnbon n’ayant point d'enfans institua pour son
héritière universelle Marguerite Chapaveyre, sa sœur.
L'institution fut faite par le contrat de mariage de celle-ci
avec le citoyen Pardoux - Fayolle, sous la réserve par
l’ instituante de pouvoir disposer d’une somme de 18,000 f.
q u i, en cas de non disposition de sa part, devoit fairj
partie de l’institution : l’instituée ne fut d’ailleurs soumise
ù aucune autre condition que celle de ne pouvoir attaquer
les ventes partielles qui avoieut été faites par TeilhardChambou , mari de l’instituante, de quelques portions
détachées du domaine de Saint-Bonnet-Laehamp.
La dame Teilhard-du-Chambon étant morte dans le
mois d’août 179 0 , Marguerite C hapaveyre, sa sœur et
son héritière instituée, forma contre le mari survivant une
demande tendante à ce q u e , faute par lui d avoir fait
emploi des sommes reçues de son épouse, pour avoir ,
A 2
�.
.
( .4:)
,
.
au contraire, aliéné, depuis le décès de celle-ci, la tota
lité de son domaine de Saint-Bonnet-Lachamp, et faute
d’avoir fait inventaire, au décès de sa fem m e, des biens
par elle délaissés, qu’elle s’étoit réservés en paraphernal,
il fût déclaré déchu de l’usufruit stipulé en son contrat
de m ariage, condamné à restituer les biens dotaux , et
la somme de o,ooo fr. pour les biens paraphernaux,
si mieux il n’aimoit suivant leur valeu r, à donner par
renseignement, ou à constater par voie de commune re
nommée.
5
Cette première demande a été suivie d’une a u tre,
formée dans le cours de l’an 10 par la dame Chapaveyre,
qui a conclu par celle-ci, à ce que le don m utu el, porté
au contrat de mariage de sa sœur avec le cit. Teilbarddu-Chambon , fût déclaré nul et de nul effet , f a u te
d'avoir été insinué dans les quatre m ois du décès de
la dame son épouse ,• en conséquence, que le citoyen
Teilhard-Cham bon fût condamné à restituer, avec inté
rêts, à compter du jour du décès, savoir, les biens dotaux,
ainsi quV.s étoient énoncés et fixés au contrat de mariage,
et les biens paraphernaux , suivant leur consistance ,
d après la preuve par commune renommée, ou la somme
de 5o,ooo fr. etc. etc.
Ces deux demandes ayant été jointes; par un jugement
du i l prairial an 1 0 , le tribunal ordonna, avant faire
droit , que le citoyen reilhard-du-Chambon scroit tenu
de justifie]’ d’ une manière legale, q u e , soit en quittances
de dettes pour le compte de Marie - Jeanne Chapaveyre ,
sa femme, soit en acquisitions d'immeubles réels ou fictifs,
il avoit suffisamment satisfait ù 1 emploi des deniers dotaux
dont ¡1 éloit expressément chargé.
�5
(
)
( _
A in si la contestation présentoit deux questions à jm-ei\
L ’ une de savoir, si, faute d’insinuation dans les quatre
mois du décès de la dam eTeilhard-du-Cham bon, la dona
tion mutuelle, portée en son contrat de mariage, devoit
être déclarée nulle.
L ’autre, si, en tous cas, le citoyen Teilhard-du-Ghambon
ne devoit pas être déclaré déchu de son usufruit, faute
par *lui d’avoir satisfait aux obligations que la l o i, son
. contrat de mariage et le jugement interlocutoire du n
prairial lui imposoient. Car il est bon d’observer qu’il
n ’a aucunement justifié des payemens par lui articulés
des dettes de sa fem me; et qu’au lieu d’être propriétaire,
comme il l’avançoit, d’un domaine de 1 12,000 fr.j il étoit
de notoriété publique , qu’à peine il en possédoit la moitié,
Mais , quoique les principes du droit civil et les cir
constances du fait se réunissent en faveur de la dame
Cbapaveyre pour assurer le succès de Tune ou de l’autre
de ses demandes , les deux questions ont été décidées
contrelle par le jugement du 9 thermidor an 1 0 , q u i,
sans s arrêter à sa demande en nullité, dont il l’a déboutée,
a repoussé pareillement sa demande subsidiaire en priva
tion d’usufruit, de même que celle en provision d’une
somme de 6,000 f r . , qu’elle avoit incidemment formée.
L e tribunal civil de Riom a donc ju g é, en principe,
que les donations mutuelles, faites par contrat de mariage,
n’avoient pas besoin, pour être valables, dêtre revetues
d e là formalité de l’insinuation , et que la loi qui les y
assujétissoit ne présentoit, à cet égard, qu une disposition
purement bursale, d o n t l’infraction n’entraînoit point la
A 3
�. ,
.
{ 6 )
.
nullité de l’acte , mais seulement une peine pécuniaire.
L e soussigné estime, au contraire, que le défaut d’in
sinuation dans les quatre mois du décès de l’un des dona
teurs , emporte la nullité radicale de ]a donation faite
par contrat de mariage ; que la distinction qui sert de
base au jugement du 9 thermidor an 10, contredit éga
lement la lettre et l’esprit de la loi.
P o u r se bien convaincre de cette v é r ité , il n’e s t ‘pas
besoin de rappeler ici nos anciennes ordonnances , notam
ment celle de M ou lin s, qui soumettent indistinctement
et la formalité de 1 insinuation toutes les donations entre—
v i f s , de quelque nature qu’elles puissent être. On se
bornera simplement à rapporter les dispositions de l’or
donnance de 1 7 3 1 , et celles des lettres patentes de 1769,
qui ont modifié le principe g é n é r a l, relativement aux
donations de survie d’entre mari et femme.
L ’article X I X de l’ordonnance de 1731 porte « que
« les donations faites dans les contrats de mariage en ligne
« directe ne seront pas sujettes à la formalité de l’insi« nnation. *
E t l’article X X » que toutes les autres donations ,
« même les donations rénumératoires ou m u tu elles,
« quand même elles seraient entièrem ent égales, ou celles
« qui seroient faites à la charge de services ou de l'onda« tions , seront insinuées conformément aux anciennes
« ordonnances, à peina de nullité. »
Ainsi , à l’exception des donations en ligne directe,
faites par contrat de mariage, toutes les autres donations,
indistinctement, sont assujéties à l’observation rigoureuse
�C 7 )
de cette fo rm alité ; et comme la nature des donations
mutuelles, qui ne sout, au fait, que des contrats c*ornm 11ta tifs, intéressés de part et d’autre, pouvoit laisser
quelque doute sur la nécessité de les comprendre dans
la classe des actes de pure libéralité, le législateur, pour
dissiper toute espèce d’incertitude à cet égard , les y a
spécifiquement comprises, même dans le cas où elles sel’oient parfaitement égales.
' A u x termes de l’ordonnance de 1731, il n’est donc pas
douteux que les donations mutuelles d’entre mari et
fem m e, étoient, comme toutes les autres, assujéties à la
formalité de l’insinuation dans les quatre mois de leur
date; les articles X I X et X X sont si formels, si clairs et
si précis, qu’il faudroit volontairement fermer les yeu x
à l’évidence pour méconnoître la règle qu’ils établissent.
' Cependant le caractère particulier de ces espèces de
donations pouvoit et devoit même les placer dans une
classe particulière, non pour les dispenser de l’insinuation,
mais du moins pour reporter au décès de l’un des dona
taires 1 obligation de remplir cette formalité.
Dans la donation mutuelle , effectivement, ni l’un ni
l’autre des donataires ne se dépouille de la propriété des
choses qu’il donne 5 il en conserve, pendant toute sa vie,
la libre disposition ; et s'il ne peut plus les aliéner à titre
purement gratuit, nu préjudice de son codonataire , du
moins.peut-il les v e n d r e , les échanger, ou les hypothé
quer au payement de ses dettes.
- O r , comme l’insinuation, qui n’est que le moyen de
donner la plus grande publicité possible aux actes de libéra
lité, n’a pour unique but que de prévenir ou d’empêcher la
a
4
�,
(8 )
..
fraude qu'un donateur déjà dessaisi de la propriété de
choses par lui données , pourroit commettre envers des
tiers qui ne connoîtroient pas la donation, il est clair que
ce motif cesse nécessairement pour les donations mutuelles,
q u i, ne dépouillant pas les donateurs de la p ropriété,
leur laissent conséquemrnent la disponibilité en tière et par
faite de tous les objets qui composent leur donation.
D ’un autre c ô t é , si cette forme extrinsèque devenoit
complètement inutile pour ces sortes de conventions, il
pouvoit etre dangereux de les y assujétir, en ce qu’elle
gênoit la libre disposition que conservoientles deux époux,
par les inquiétudes qu’elle donnoit aux tiers avec lesquels
ils avoient à contracter.
P o u r concilier ces différentes vues, il falloit donc néces
sairement faire deux choses.
I/ u n e , reculer le terme de l’insinuation jusqu’après le
décès de l’un des deux donateurs.
•
1/autre, obliger le donataire survivant à faire insinuer
dans les quatre mois de la mort du prédécédé, afin de
prévenir, par ce m oyen, les dispositions frauduleuses que
l’héritier pourroit faire des choses données; car la dona
tion mutuelle saisit le survivant à l’instant même du décès
de son codonuteur. Elle dépouille, conséquemrnent,l’héri
tier de celui-ci ; et, si elle n’étoit pas rendue publique par
rinsinualion, le même inconvénient qui résulte du défaut
de publicité des donations ordinaires, se rencontreroit dans
celle-ci, puisque l’héritier, ainsi investi de tous les biens
de la succession, par la règle le rnort saisit le vif\ pour
roit également tromper des tiers qui ne connoîtroient
pas la donation.
�,
C9)
Ce double but a été rempli par les lettres patentes cln 3
juillet 176 9 , qui ont ordonné « que tous les dons de
« survie faits dans les contrats de m ariage, par un mari à
<r sa fem m e, ou par la femme à son m a r i, tous les dons
« mutuels, réciproques, rénumératoires, faits par l’un et
« l ’autre, dans lesdits contrats, seroient exempts, ju s
« qu'au, jo u r du décès du d on a teur, de la fo r ni alité e
« üin sin ua tion , soit au domicile des contraetans, soit aux
« bureaux des lieux de la situation des biens donnés \ à la
« ch a rg e, n éa n m o in s, que lesdites donations seroient
« insinuées au dom icile du d o n a teu r, dans les quatre
« m o is , à com pter du jo u r de so?i décès. »
Remarquons, avant d’aller plus lo in , que l’exception
faite par cette loi en faveur des donations mutuelles, ou
de survie, par contrat de mariage, n’a lieu que pour le
temps de l’insinuation : sont dispensées ju sq u 'a u jo u r du
décès du dona teur,* q u e , par conséquent, la règle reprend
tout son em piré, lorsque le terme de cette suspension est
arrivé. E t, par une conséquence ultérieure, que l’obli
gation de faire insinuer, dans les quatre mois du décès,
est H»pTJsée à peine de nullité , puisque l’ordonnance
de 1 7 3 1 , à laquelle il n’ est dérogé que pour le tem ps,
punit de la môme peine l’ inobservation de cette formalité.
Il y auroit donc une absurdité com plète, à ne v o ir ,
dans les lettres patentes du 3 juillet 176 9 , qu’une dispo
sition purement bursale, puisque les mêmes motifs, qui
fondent la nécessité de l’insinuation des donations ordi
naires , dans les quatre mois de leur d ate, provoquent
également celle des donations réciproques, dans les quatre
mois du décès de l’un des donateursj et q u e, d’un autre
A
5
�(
IO )
^
côté, ces mêmes lettres patentes n’ont dérogé a l’ordon
nance de 1 7 3 1 , que pour le temps ou la formalité devroit
être rem plie, sans anéantir la peine de nullité, qui en
punit l’inobservation.
Ces principes posés, rien de plus facile que d’ écarter
les prétendus motifs qui servent de base au jugement du 9
thermidor an 10.
L e pi’emier consiste à dire : « que, d’après l’ordonnance
« de 1 7 3 1 j les lois antérieures et celles qui ont su iv i, l’in •
a sinuation n’est ordonnée à peine de nullité, que pour les
« donations entre-viis, pour les seules libéralités présentes
« et absolues. »
Nous venons de v o i r , au contraire, que les donations
mutuelles, même celles qui seroient parfaitement égales,
et généralement toutes les espèces de donations, sans autre
exception que celles en ligne directe, sont soumises parles
articles X I X et X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , à la for
malité de l’insinuation, sous peine de nullité : que celles
d’entre mari et femme en ont été dispensées, il est v ra i,
pour le temps de la vie des donateurs ; mais qu’en
laissant à la disposition de l’ordonnance de 1731 tout
son empire et son effet, relativement à l'obligation
d’insinuer dans les quatre mois du décès, les lettres pa
tentes de 1769 n’ont établi qu’une exception temporaire,
sans déroger au surplus des autres dispositions de l’ordon
nance.
L e second m otif du jugement est fondé, « sur ce qu’une
« donation mutuelle de biens qui se trouveront après le
« décès, ne peut être réputée ni une libéralité purement
« gratuite, ni une donation présente et absolue, puisqu’il
�( ri )
r n’y a de véritables donations entre-vifs, que celles qui
« dépouillent, dès le m oment, le donateur au profit du
« donataire; et q u ’ainsi la donation dontils’agit n’est qu’une
■
■véritable donation à cause de mort, a
Ce second m otif renferme autant d’erreurs que de mots.
D ’abord il est faux qu’il n’y ait de véritables donations
entre-vifs, que celles qui dépouillent le donateur dès l’ins
tant même de la donation ; car les institutions contrac
tuelles sont, par exem ple, de vraies donations entre-vifs ,
et réputées comme titres irrévocables de leur n a tu re ,
quoiqu’elles laissent à l’instituant la faculté de disposer à
titre onéreux de tous ses biens, et ne le dépouillent d’au-»
cun de ceux qui composent l’institution ( i ).
Les donations faites par contrat de m ariage, à la
charge de payer les dettes q u e laissera le donateur, et
qui sont formellement autorisées par l’article X V I I I de
l’ordonnance de 1 7 3 1 , sont encore des donations entre
vifs , et parfaitement irrévocables, quoique le donateur
conserve la faculté d’aliéner ses biens en les hypothé
quant à ses créanciers.
Les donations de survie , autorisées également par
la même l o i , sont encore des donations entre-vifs ; et
jamais personne n’a imaginé jusqu’il présent qu’on pût
les ranger dans la classe des donations à cause de m o rt,
( 1 ) Voyez L e b r u n , des successions, livre 3 , chap, z , numéro 7,
Pothier , introduction au titre des successions de la coutume d Orléans f
numéros 17 et 18.
L o i du 18 pluviôse an 5 , article premier.
�.
.
. ( 12}
qui en diffèrent essentiellement p a rle caractère de révo
cabilité qui leur est propre.
.
L a donation à cause de mort est essentiellement révo
cable jusqu’à la mort du donateur, non-seulement par
le fait, c’est-à-dire, par l’aliénation qu’il peut faire à
titre onéreux , mais par le d ro it, en ce qu’il n’a besoin
que d’ un simple acte de sa volon té, pour les anéantir,
les rév o q u er, les m odifier, ou disposer en faveur de
tout autre que le donataire.
^ Les donations de survie , au contraire, les donations
mutuelles et réciproques, celles à la charge de p-yer les
dettes du donateur, les institutions contractuelles, les
promesses de conserver, et autres de même nature, sont
bien révocables en ce sens, que le donateur ou l’insti
tuant conservent la liberté d’aliéner à titre o n é re u x ,
même la totalité des objets donnés.
Mais elles sont irrévocables en cet autre sens, que le do
nateur ou l’instituant ne peuvent disposer à titre gratuit en
faveur d’un autre que le donataire, et qu'il n’est plus en
son pouvoir de les anéantir ou de les modifier de quel
que manière que ce soit. L ’ordonnance des substitutions,
article X I I , le décide formellement pour les institutions
contractuelles d’héritier, et sa disposition s’applique à
J'ortio ri aux autres conventions de même nature , c’està-dire , à celles qui ne dépouillent pas le donateur de la
propriété des choses données, quoiqu’elles lui ôtent la
liberté de disposer à titre gratuit.
D e cela seul que les donations mutuelles , et en général
les donations de survie, sont irrévocables de leur nature,
il s'ensuit donc nécessairement qu’elles ne sont point
�13
(
)
donations à cause dè mort ; e t , par une conséquence ulté
rieure , qu’on doit les ranger dans la classe des donations
entre-vifs ; ce qu’il falloit démontrer.
A u surplus, si les donations mutuelles n’étoient pas de
véritables donations entre-vifs, soumises comme telles à
l’insinuation , on demanderoit pourquoi l’article X X de
l’ordonnance les a rangées dans la même classe pour les y
assujétir, et pourquoi les lettres patentes de 1769 ne les
ont exceptées de cette disposition générale que pour reculer
le terme de l’insinuation, en le plaçant au décès de l’un
des donateurs, sans anéantir d’ailleurs la peine de nullité
que l’inobservation de cette forme doit nécessairement
leur faire encourir.
.
L e troisième m otif du jugement est fondé sur ce que
« la déclaration d e ’ 1729 n ’a soumis à l’insinuation les
« dispositions testamentaires et autres à cause de m o rt,
.« que pour les assujétir à un droit bursal, et les a expres« sèment exceptées de la peine de n ullité, en cas de
« non insinuation. »
Si les donations mutuelles, par contrat de m ariage,
pouvoient être regardées comme dispositions
taires ou h cause de m o rt, rien ne seroit plus
ce raisonnement qui ne laisseroit aucun lieu à la
.mais on vient de faire vo ir qu’elles étoient
testamen
juste que.
répliqué :
essentiel
lement donations entre-vifs; qu’elles en avoient le prin
cipal caractère, celui de la parfaite ir r é v o c a b ilit é ; et la
conséquence directe qui résulte de li , c’est qu on ne peut
leur appliquer les lois relatives aux testamens.
Les jugés du tribunal de Hiom donnent pour quatrième
•motif, que les lettres patentes de 1769 n ont p o in t dérogé
\
�4
( i )
a u x lois a ntérieu res, relativem ent à la-peine de nullité
f a u t e d 'in sin ua tion , et il semble que l'on pourroit tirer
pour conséquence dii’ecte de cette assertion incontesta
b le, que si l’exception qu’elles introduisent n’est que pour
le terme de l’insinuation, la peine de nullité subsiste faute
d’ insinuation dans celui qu'elles établissent, c’est-à-dire,
dans les quatre mois du décès du donateur.
O n ajoute, dans le jugem ent, « que cette loi ( les lettres
« patentes de 1769 ) a seulement pour objet, en déterc< minant le temps et l’époque de l’insinuation, de fixer
« le temps précis auquel les peines du double et triple
« droit seroient encourues. »
Mais les lettres patentes de 1769 ne parlent ni du
double ni du triple droit ; elles disent seulement que les
donations de survie, comme les donations mutuelles, sont
dispensées pendant la vie du donateur de la formalité
de l’insinuation . . . . pour y dem eurer assujéties seulem ent dans les 4 m ois du jo u i' de son décès.
E t comme les raisons de l’exception sont puisées dans
Ja nature même des donations de survie, q ui, laissant au
donateur la iaculté de disposer à titre onéreux , n’exposent
point à être trompés les tiers qui conlracteroient avec lui j
C o m m e, d’ un autre côté, la nécessité de l’insinuation
doit commencer au moment où cette faculté s’anéantit,
c’est-a-dire, au moment ou 1 héritier du donateur est
pleinement dépouillé, entièrement dessaisi de la propriété
et de la libre disposition des choses données, c’est-à-dire,
au moment du décès de lu n des donateurs;
Comme cette nécessité se trouve fondée alors sur les
ïpêmes motifs que celle qui rend indispensable l’insinua-
�5
( ï )
^
tïon des donations présentes et absolues, c est-a-dire, sur
la crainte que des tiers de bonne foi ne contractent avec
un propriétaire dessaisi par la donation;
Comme enfin les lettres patentes de 1769 n’ont point
dérogé aux lois antérieures, quant à la peine de nullité;
Il s’ensuit, par la plus directe et la plus évidente de
toutes les conséquences, que le défaut d’insinuation dans
les quatre mois du décès , emporte la nullité radicale de
la donation.
•
Si d’ailleurs les lettres patentes de 1769 ne prononcent
pas cette peine de n u llité, c’est qu'il étoit parfaitement
inutile de la rappeler dans une lo i, q u i, n’ayant pour
objet que d’établir une dispense de temps, laissoit d’ail
leurs subsister toutes les dispositions de l’ordonnance
de 1731 , auxquelles le législateur n’entendoit aucune
ment déroger.
E t s i , en parlant des donations entre-vifs et absolues
de la femme au mari ou du mari à la fem m e, la même
loi veut qu’elles continuent d’être assujéties à l’insinuation,
sous peine de nullité, c’est uniquement pour mieux indi
quer la différence des unes et des autres, en ce que les
unes doivent être insinuées dans les quatre mois de leur
date, sous la peine voulue par l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
tandis que les autres sont dispensées de cette peine
pendant toute la vie du donateur.
C ’est donc une grande e rre u r que celle des premiers
juges, q u i ont cru voir une différence réelle entre ces
deux dispositions des lettres patentes de 1 7 6 9 , et qui en
ont conclu qu’elles a b r o g e o ie n t, au moins tacitement, la
peine de nullité pour le défaut d’insinuation des dona-
�.
.
( ,i 6 )
.
tîons mutuelles, tandis qu’elles la prononçoient textuel
lement par rapport aux donations présentes et absolues
du mari à la femme ou de la femme au mari. En matière
de formes extrinsèques , on ne connoît point d’abrogation
tacite : elle doit être formelle ou elle n’existe pas. O r ,
non - seulement les lettres patentes n’ont point abrogé
tacitement la peine de nullité prononcée contre les dona
tions mutuelles non insinuées; mais il est de toute évi
dence que le législateur ne pouvoit pas même en avoir
l’intention, sans tomber dans la plus absurde contradiction
avec l u i- m ê m e , puisqu’encore une fois les motifs qui
rendent l’insinuation nécessaire, dans les quatre mois du
décès, sont identiquement les mêmes que ceux qui l’ont
fait introduire pour les donations présentes et absolues.
Quant au dernier motif du jugem ent, qui est encore
fondé sur ce faux principe, que les donations mutuelles
sont de véritables donations à cause de mort , on se
croit dispensé d’y répondre, parce que ce seroit tomber
dans des redites aussi fastidieuses qu’ inutiles ; seulement
on observera que les premiers juges ont perpétuelle
ment confondu les donations entre-vifs qui n’ont d'effet
qu’après la mort du donateur , avec les donations à
cause de m o r t , lorsqu’ils devoient s’attacher au c.iractère essentiel qui les distingue, savoir, l’irrévocabilité
parfaite des premières , et la laeulté conservée par le
donateur jusquVi son dernier soupir, de rév o q u er, anéan
ti r , ou modifier les autres. A v e c cette distinction , ils
auroient évité l’erreur dans laquelle ils sont tom bés, ef
ne seroient pas contrevenu« , comme ils l’ont fa it, aux
dispositions textuelles de l ’ordonnance de 1731.
�' ( *7 )
.
L é soussigné ne doute donc pas un seul instant que
l'appel de madame Chapaveyre ne soit couronné du
succès le plus com plet, et que le tribunal devant lequel
se trouve portée sa réclamation ne rende aux vrais prin
cipes l’hommage que le premier leur a refusé.
D élibéré par le soussigné, ancien jurisconsulte, à P a ris,
ce
5 frimaire
an n .
'
^
PO IR IER .
L E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu la présente
consultation, est également d’avis de la nullité de la
donation mutuelle dont il s’a g i t , par le défaut d’insi
nuation dans les quatre mois du décès de la donatrice.
L ’auteur de la consultation a très-bien développé les
principes de la m atière, et parfaitement accordé la dispo
sition de l’article X X de l’ordonnance de 1731 , et celle
des lettres patentes du 3 juillet 1769, en ce qui concerne
les dons mutuels faits entre mari et femme. L ’ordon
nance de 1731 prononce textuellement la nullité de ces
sortes de donations, faute d’insinuation; celles-ci, comme
tontes les autres, devoient être insinuées dans les 4 mois
de leur date , on , tout au moins pendant la vie du dona
teur : c’étoit ainsi que l’avoit prescrit l’article L X V I I de
ordonnance de M ou lin s; et celle de 1 7 3 1 > dans l’ar
ticle X X V I , s’est référée aux délais de l’insinuation por
tés par les anciennes ordonnances.
Les lettres patentes du 3 juillet 1769 n ont rien changé
y la nécessité de l'insinuation des dons mutuels, ni à la
1
1
�.................................
(
18 ) ..............................
nullité qui devoit résulter du défaut d'insinuation ; elles
n’ont opéré d’autre changement que sur le temps où
cette insinuation devoit se faire, et elles ont déterminé
ce temps, dans les quatre mois du décès du donateur;
mais elles n’ont pas moins laissé subsister la nécessité
de l’insinuation du don mutuel , et sa nullité lorsque
l’insinuation n’a pas été faite dans le délai.
L ’auteur de la consultation donne d’ailleurs des raisons
sensibles de la nécessité de l’insinuation, même dans ce
cas; il est inutile de les répéter.
On ne peut donc qu’applaudir aux principes de la
consultation , et adhérer aux résolutions qui en sont la
conséquence. O n ajoutera seulement , pour démontrer
de plus en plus que les lettres patentes de 1769 ont laissé
subsister la nullité des dons mutuels, faute d’insinuation,
la décision de l’article X X I de l’ordonnance de 1731 , à
l’égard des dons mobiles, augment, contre^augment, etc.
On avoit douté long-temps si les donations faites par
forme de dons mobiles, augm ent, etc. étoient sujettes à
l’ insinuation , lorsqu’ une déclaration du 20 mars 1708
les y assujétit positivement; ce qui paroissoit aussi les y
soumeltre, peine de nullité. iVlais cetle rigueur fut tem
pérée , à leur égard , par une seconde déclaration de 1729 ,
qui les affranchit de la peine de nullilé, et n’ imposa à
l’inobservation de l’insinuation de ces sortes de donations
que les autres peines port ces par les edits et déclarations,
c’est-à-dire , des peines purement bursales.
S ’il eut été dans l’ intention du législateur d'en user de
même à l’égard des dons mutuels, dont le défaut d'in
sinuation, dans le délai prescrit, empurtoit, dans les termes
�( 19 )
précis de l’ordonnance de 1 7 3 1 , la peine de nullité; si,
dit - o n , le législateur eût voulu retrancher cette peine
dans les lettres patentes de 1769 , il n’auroit pas manqué
de le d ir e , comme il l’avoit fait pour les dons m obiles,
augm ent, etc. dans la déclaration du 30 mars 1729.
Ce seroit donc aller contre le texte précis de la l o i ,
et c’en seroit une violation, que de valider le don mutuel
dont il s’agit.
D élibéré à R i o m , le 19 pluviôse an 1 1
;
A N D R A U D .
A. RI O M , de l’imprimerie de L
an drio t
,
Tribunal d ’appel, — An 1 1
seul imprimeur du
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. An 2?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poirier
Andraud
Subject
The topic of the resource
insinuation
enregistrement
donations entre époux
donations
doctrine
Description
An account of the resource
Consultation pour la dame Chapaveyre, habitante de la ville de Murat, département du Cantal, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Riom, le 9 thermidor an 10 ; contre le citoyen Antoine Teilhard-Duchambon, propriétaire, habitant de ladite ville de Riom, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 2
1790-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0221
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53720/BCU_Factums_M0221.jpg
doctrine
donations
donations entre époux
enregistrement
insinuation
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53087/BCU_Factums_G0926.pdf
fe71fafb43bb0b1f9679e14c4641e9dc
PDF Text
Text
MÉMOIRE
POUR
La dame C H A P A V E Y R E - , appelante;
CONTRE
Le cit. TEILHARD DU CHAMBON , intimé.
Q u o i q u e la contestation qui divise les parties soit
d’un grand intérêt pour l’une et pour l’autre, elle
n’exige pourtant pas un long détail de faits : les questions
qu’elle présente demandent une plus longue discussion.
La question principale est de savoir s i, dans une
donation mutuelle d’usufruit, faite dans un contrat de
m ariage, des biens dont l’époux prédécédé mourra
saisi et vêtu , en faveur du survivant, le,défaut d’insiA 2
�(4 )
nuation , clans les quatre mois de la mort du prédécédé,
emporte la nullité de la donation.
La seconde question ue peut être que subsidiaire, et
seroit inutile à juger, si la première étoit décidée pour
la nullité : c’est de savoir si le donataire de l’usufruit
n’a pas été obligé de faire inventaire, et de donner
caution, e t , ne l’ayant pas fa it, quelle peine il doit
encourir ?
L e jugement dont est appel a débouté de lu demande
en nu llité, ainsi que de celle qui avoit pour objet
l’inventaire et la caution ; et c’est sur l’un et l’autre
chef de ce jugement qu’il s’agit d’établir les griefs de
l’appelante.
M arie-Jeanne Chapaveyre, sœur de l’appelante, con
tracta mariage le 21 octobre 1782 avec le cit. Teilhard
du Chambon, intimé.
Elle se constitua un trousseau de nippes et liardes à
son usage ; de p lu s, des meubles meublans, ustensiles
de maison, et argenterie; le tout évalué ù. 2,000 francs,
dont le contrat de mariage porte quittance.
Ensuite elle se constitua en dot les biens qui lui étaient
échus par le décès de son père, et la somme de 60,000 fr.
faisant partie des biens à elle échus comme héritière
testamentah’e de Jacques-Philippe du Saillant, son oncle,
consistans en différentes obligations, promesses ou effets à
elle dûs, provenans de ladite succession ; lesquels , est-il
dit, seront présumés reçus par la célébration du mariage.
L e citoyen Teilhard du Chambon fut chargé de faire
la recherche de tous ces effets actifs, à la charge néan
moins de faire emploi desdits biens, à fur et A mesure
�4& t
C
qu’il en t'ouclieroit le montant ; lequel emploi pourroit
être valablement fait en acquisitions d’immeubles fictifs
ou réels, ou en acquittement de dettes hypothécaires de
l’un et de l’autre des futurs époux , même en payement
du supplément de finance de la charge dont le futur
époux étoit revêtu, s’il y avoit lieu. p‘
La future épouse se réserva ses autres biens comme
paraphernaux, et spécialement une maison à Clerm ont,
place des Cercles.
Il fut stipulé un gain de survie réciproque de 6,000 f.
et les époux se donnèrent mutucllèment au dernier vivant
la jouissance de tous leurs biens.
Dans le cours du m ariage, la maison de Clermont
fut vendue 38,720 fr. principal ou. épingles. Il en fut
payé 20,000 francs à l’appelante, sœur dp l’épouse, pour
.-le legs à elle fait par le testament de Jacques-Philippe
du Saillant, son oncle. Les'autres 18,720 francs, qui
‘ étoient paraphernaux ù la fdmme ,1 furent ; touchés par
le mari.
.i,
,i,
L a sœur de l’appelante, en la m ariant, J ’avûit instituée
son héritière.; elle l’auroitu&té tigajQmpiat, quarte! -ü'nty
auroit pas eu d e s titu tio n , dès, que sa'sœur' est morte
en 1790 sans postérité.
f
;
. •
rr
i.* A près sa m o rt, le;(çitoyen TeilliArd du Cliam bon,
comme usufruitier, é(;oit certainement, tenu de .fnir.c
.inventaire et de "donner, c a u t i o n ¡ i l r*négligeaul ’un et
• l’autre.
'
.
C’est ce qui -avoit déterminé une première action
.exercée contre lui ppr l’appelante,,liériljère de sa sœur,
cc qu’il fût lenu de rapporter l’ÿivçnüûrç qu’il (qygit
A 3
�( 6 )
tlu faire après la mort de sa fem m e, et à justifier de
l’emploi qu’il avoit fait de ses biens dotaux et paraphernaux ; faute de ce faire, qu’il fût déclaré privé de
l’usufruit, condamné à la restitution des biens et des
jouissances.
Lorsque cette demande fut form ée, l’appelante n’avoit
garde de croire que l’intimé avoit négligé les formalités
nécessaires pour rendra valable la donation d’usufruit ;
elle ne se fût pas bornée à cette demande, si elle eût pu
penser que la donation n’avoit pas été insinuée dans le
délai prescrit par les lois. Mais ayant eu depuis recours
au registre des insinuations, et n’y ayant pas trouvé la
donation dont il s’a g it, c’est alors qu’elle s’est crue fondée
à exercer une nouvelle action, et à demander la nullité
de la donation.
C’est sur ces deux demandes portées au tribunal d’ar
rondissement de cette v ille , et après qu’elles ont été
jointes , qu’est intervenu le jugement dont est appel, qui
a débouté l’appelante également de l’une et de l’autre.
On parlera, dans la suite, des motifs que le premier
tribunal a énoncés dans son jugem ent, et q u i, de la
manière dont ils sont exprimés , auroient dû peut-être
produire une décision absolument contraire. Mais on va
commencer par présenter les moyens qui établissent la
demande en nullité : il y aura peu de chose à dire sur
la première derfiande en privation d’usufruit, qui n’est
devenue que subsidiaire. On se croira d ’autant plus dis
pensé d’une longue discussion sur cette demande en pri
vation d’usufruit, qu’on a plus de confiance dans l<i
demande en nullité«
�(7 )
Il s’agit d’abord d’établir la nature de la donation mu
tuelle d’usufruit, faite au profit du survivant par le contrat
de mariage de 1782. Est-ce une donation entre-vifs, ou
à cause de mort ?
- Quel est le principal caractère d’une donation entre
vifs ? c’est d’être irrévocable. A u contraire, la donation
à cause de mort est toujours révocable par le donateur.
Un autre caractère de la donation faite en contrat de
mariage , est de saisir le contractant en faveur de qui
elle est faite ; au lieu que la donation à cause de mort ne
saisit p as, mais qu’elle est sujette à la demande en déli
vrance.
S’il y a eu quelque controverse , entre les auteurs, sur
la nature des donations mutuelles , ce n’a pu être que pour
celles qui étoient faites entre mari et femme pendant le
m ariage, dans celles des coutumes qui autorisent les dona
tions mutuelles, et non pour les donations mutuelles qui
étoient faites par le contrat de mariage même. Mais encore
pour celles-ci, s’il y avoit eu quelque doute, il auroit dispai'u au moment de l’ordonnance des donations de 1731 ;
car, comme l’observe le jurisconsulte Bcrgier, dans la nou
velle édition qu’il nous a donnée des œuvres de Ricard,
dans sa note à la fin de la page 12 du deuxième tom e,
il n est plus possible de soutenir Vopinion de R ic a r d ,
depuis les nouvelles ordonnances, qui ont mis les dona-i
tions mutuelles au rang des véritables donations entreVvfs , et les ont assujéties aux mêmes règles que les
donations simples. Mais voyons ce que porte, à cet égard,
l’ordonnance de 1731.
‘ L ’article X IX dispense de l’insinuation les. donations en
A 4
�to®
( J JI'
C« )
contrat de mariage, lorsqu’elles sont faites en ligné directe.
M ais, tout de suite , l’article X X veut que toutes les
autres donations faites en contrat de mariage , même les
remunératoires ou mutuelles, quand elles seroient entiè
rement égales,' soient insinuées conformément aux an
ciennes ordonnances, à peine de nullité.
Plaçons-nous à l’époque la plus prochaine après l’or
donnance de 1731 ; il n’est pas douteux que la donation
dont il s’agit eut été absolument nulle par le défaut d’in
sinuation.
:
E t même alors il auroit fallu que l’insinuation eût été
faite dans les quatre mois de la donation, pour avoir son
effet du jour meme de sa date, ou bien qu’elle eût été insi
nuée avant la mort de la donatrice, auquel cas elle n’auroit
eu effet que du jour de la date de l’insinuation : mais
toujours le défaut d’insinuation en eût opéré la nullité.
C’est en effet ce qui étoit prescrit par l’ordonnance
de Moulins , à laquelle se réfère l’oi*donnance de 173!»
en disant que les donations dont elle parle seront in
sinuées conformément aux anciennes ordonnances, à
peine de nullité.
, Il faut avou er, cependant, qu’à l’égard de la femme
qui avoit survécu au m a ri, les héritiers du mari ne
pouvoiént pas lui opposer le défaut d’insinuation, parce
que cette insinuation étoit à la charge du m ari, et qu’il
en étoit garant envers sa femme..Il en-,étoit autrement
h l’égard du m ari, quand c’étoit lui q u i avoit survécu,
parce qu’il avoit tout, pouvoir et toute liberté de faire
insinuer la donation mutuelle ; et, ne l’ayant pas fait dans
les délais prescrits par les ordonnances ; c’e s t-à -d ire , dans
�4
m
(9 )
les quatre mois de la donation , ou pendant la vie de
sa fem m e, la peine de nullité étoit encourue contre luimême, en faveur des héritiers de sa femme.
Mais la disposition de l’ordonnance de 1731 a souffert
quelque changement par l’apport aux donations mutuelles
faites en contrat de mariage; non pas cependant, ni,
sur la nécessité de l’insinuation en elle-m êm e, ni sur la
nullité par le défaut d’observation de cette formalité;
mais seulement sur le temps et le délai de l’insinuation
de ces sortes de donations.
Cechangement s’opéra par les lettres patentes du 3 juillet
176 9 , qui intervinrent pour faire cesser la diversité de
jurisprudence qui s’étoit introduite , non-seulement dans
différentes cours de parlem ent, mais même entre les
diverses chambres du parlement de P aris, où l’on jugeoit
tantôt que les donations mutuelles faites en contrat de
mariage devoient être insinuées , non-seulement dans le
bureau du domicile des époux, mais encore dans celui
de la situation des biens; tantôt qu’il suffisoit de l’insi
nuation dans le bureau du domicile : où l’on jugeoit aussi,
tantôt que l’insinuation étoit nécessaire, à peine de nul
lité ; et tantôt qu’elle étoit inutile pour la validité d’une
donation mutuelle en contrat de m ariage, parce q u e , dans
cette espèce de donation, il n’y avoit ni tradition, ni
transmission de propriété au préjudice des créanciers du
donateur, ni des héritiers, qui devoient connoître l’état
de la succession , avant de se porter héritiers. C’est pour
■faire cesser cette diversité de jurisprudence, dans ces deux
cas, que le législateur veut qu’à l’avenir l’insinuation
tie soit nécessaire qu’au domicile du donateur , et n’en
A 5
*
�prescrit néanmoins la nécessité que clans les quatre mois
du décès du donateur, dérogeant à tous édits et déclara
tions à ce conti'aires. La dérogation ne porte donc évidem
ment que sur les deux cas prévus par les lettres patentes ,
c’est-à-dire , sur le lieu où doit être faite l’insinuation ,
et sur le délai dans lequel elle doit être faite; mais ne
frappe nullement sur la nécessité de l’insinuation en
elle-même, ni sur la nullité faute d’une insinuation
quelconque.
Il est vrai qu’à la suite de ces dispositions il est ajouté ,
qu’à l’égard des autres donations absolues du mari à la
fem m e, et de la femme au m ari, il n’est point dérogé
à l’ordonnance de 1 7 3 1 , et qu’elles continueront d’être
assujéties à la formalité de l’insinuation , suivant la dis
position des ordonnances, à peine de nullité ; mais cette
dernière disposition des letti’es patentes n’a pour objet
que d ’ i n d iq u e r la différence des donations mutuelles et
de celles qui sont absolues, par i*apport au temps où les
unes et les autres doivent être insinuées : et si les dona
tions absolues doivent continuer d’être assujéties à l’insi
nuation , à peine de n u llité, les donations mutuelles ne
sont pas affranchies de cette peine; il auroit fallu pour
cela qu’elles en eussent été nommément dispensées par
la pi’emière disposition des lettres patentes qui s’appli
quent uniquement à cette espèce de donation, surtout
dès que l’ordonnance de 1731 , et toutes les anciennes
ordonnances imposoient la peine de nullité , au défaut
d’insinuation , aux donations mutuelles en contrat de
nu ri age.
Mais dira-t-on, p e u t- ê tr e , cu i bono la nécessité de
�4 ^
( 11 )
l’insinuation, puisque la donation de l’usufruit des biens
qui se trouveront à la mort du prédécédé , ne l’empêche
pas, jusqu’à sa mort, d’aliéner et d’hypothéquer?M ais au
moins l'empêchc-t-elle de disposer à titre gratuit.
E t , d’abord , peut-on faire cette objection, lorsque la
loi prononce formellement une peine de nullité? peut-on
sonder le motif de la loi? ne suffit-il pas qu’elle soit écrite :
Jex scripta ? que nous disent sur cela tous nos anciens
auteurs , et après eux les habiles jurisconsultes auxquels
le gouvernement a confié la rédaction du nouveau projet
de code civil ? C’est dans l’article V du titre de l’appli
cation des lois et de leur interprétation , qu’ils s’expliquent
ainsi : Quand une loi est cla ire, il ne fa u t point en
éluder la lettre, sous prétexte d'en pénétrer Vesprit. ^
M ais, d’ailleurs, le cui bono de l’insinuation s’aper
çoit aisément, soit à l’égard des tiers, soit même à l’égard
des héiùtiers du donateur.
D ’abord pour les tiers, qui ne peuvent connoître la
donation que par l’insinuation , s’ils contractent avec
l’héritier du donateur, dans la confiance d’une hypothè
que sur les biens compris dans une donation qu’ils igno
rent ; si même ils achètent quelques-uns de ces biens, de
l’héritier du donateur, qui ensuite leur seront évincés
par le donataire, qui n’aura pas fait insinuer; alors ils
auront été trompés dans la juste confiance que devoit leur
inspirer l’ignorance d’une donation qui n’avoit pas été
rendue publique par l’insinuation.
En second lie u , à l’égard même de l’héritier du do
nateur, il aura également ignoré la donation ; il aura été
vérifier le registre des insinuations; il ne l’y aura pas
�trouvée, et il se croira fondé à vendre ; il l’aura fait
de bonne foi , et néanmoins, son acquéreur étant évincé
malgré le défaut dinsinuation, il se trouvera exposé à des
dommages-intérêts envers son acquéreur.
V oilà donc bien évidemment le cu i bono de l’insi
nuation , et de la nullité dont elle a frappé le défaut de
l ’insinuation; mais, on le répété, le cuibono est une ques
tion indiscrète ; lorsque le législateur a parlé et que la loi
est claire, il n’est pas permis d’en pénétrer les motifs ,
il faut s’en tenir à la lettre.
Veut-on, sur la question, une autorité qui nous soit fami
lière? c’es t celle du dernier commentateur de notre coutume,
sur l’art .X L I du titre X I V , tom. 2, p. 439, où, après avoir
dit que les donations absolues, faites par le mari à la
fem m e, doivent être insinuées dans les délais ordinaires,
mais que le mari est garant envers sa femme du défaut
d’insinuation, il ajoute, qu’il en est autrement de celles
mentionnées dans les lettres patentes de 1769 , c’est-àdire , des dons mutuels en contrat de m ariage, parce
qu’alox*s la femme qui survit, aya nt quatre mois après la mort
du mari, pour faire insinuer le don mutuel, la succession
de son mari n’est pas garante, puisque le temps de l’in
sinuation n’a commencé à courir qu’à son décès: si donc,
ajoute-t-il encore, la veuve n’a pas fait insinuer, en
laissant accomplir le délai dans un temps lib re , et où
elle n’étoit plus dans les liens du mariage ; c’est elle qui
a été vraiment négligente.
Il d o it, d’ailleurs, paroître bien évident que le com
mentateur a pensé que la donation, en ce cas, étoitnulle
par le défaut d’insinuation ; car il ne pouvoit pas en-
�4*/
0' 13 J)
tendre parler de la garantie du mari pour les peines
bursales, parce que les droits bursaux sont à la charge
de la f e m m e donataire, et que si le mari les eût payés
avant sa m o rt, ses héritiers les auroient répétés contre
la femme.
S’il en est ain si, dans le cas où la femme a survécü
au m ari, à plus forte raison doit-il en être de même à
l’égard du m ari, lorsque la femme est morte avant lui.
Pour démontrer de plus en plus que les lettres patentes
de 1769 ont laissé subsister la nullité des donations mu
tuelles en contrat de mariage , faute d’insinuation, on
peut rappeler l’art. X X I de l’ordonnance de 1731 ; cet
article répète et confirme la disposition d’une déclara
tion de 1729 : et en voici l’explication.
On avoit douté long-temps si les donations faites en
forme de dons mobiles , augmens, contre-augmens, etc.
étoient sujettes à l’insinuation , lorsqu’une déclaration
du 20 mars 1708 les y assujétit positivement ; ce qui
paroissoit aussi les y soumettre, à peine de nullité. Mais
une autre déclaration de 1729 les affranchit de la peine
de n u llité, et n’imposa ù l’inobservation de l’insinuation
de ces sortes de donations que les autres peines portées
par les édits et déclarations, c’est-à -d ire , les peines
purement bursales.
S’il eût été dans l’intention du législateur d’en user
de même i\ l’égard des dons mutuels faits en contrat de
mariage, dont le défaut d’insinuation emportoit la peine
de nullité dans les termes de l’art. X X I de l’ordonnance
de 1731 ; si j dit-on, le législateur eût voulu retrancher
cette peine dans les lettres patentes de 17 6 9 , il n’auroit
�4t(?
Cm ) t
pas manqué de le dire , comme il l’avoit fait pour les
dons m obiles, augmens, etc. dans la déclaration du 30
mars 1729, et comme il l’avoit répété dans l’art. X X I
de l’ordonnance de 1731.
E n fin , s’il pouvoit encore rester le moindre doute
sur la question , il seroit bien entièrement levé par
nos nouvelles lois, qui ne laissent pas la plus légère obscu
rité sur la nullité des donations dont il s’agit, faute
d’insinuation.
Une loi du 24 germinal an 3 , ayant sans doute égard
aux obstacles qu’avoient pu apporter à l’insinuation des
donations les temps de la terreur, permit à toutes les
parties intéressées dans des actes d’une date certaine, con
tenant des dispositions à titre gratuit, telles que dona
tions entre-vifs, dons mutuels sujets à la formalité de
l ’insinuation, et ayans-cause desdites parties qui auroient
omis de remplir cette form alité, à dater du 1er. avril
1 7 9 3 , leur pei’met de satisfaii’e k cette formalité dans
les trois mois de la publication de cette l o i , sans être
tenus de payer de plus forts droits, et sans q iio n puisse
leur opposer le défaut di insinuation, pour la validité
desdits actes et dispositions.
Cette loi a donc décidé deux choses : la p rem ière, que
la prorogation de délai q u i est accordé p o u r l ’insinua
t io n , n’aura lieu que p o u r les actes q u ’on auroit négligé
de faire in sinuer, à dater du i cr. avril 1 7 9 3 ; P nr con
séq u en t, elle n’embrasse pas les d o n atio n s qu i auroient
dû etre insinuées avant le i er. a vril 1 7 9 3 ; et la dona
tion dont il s’agit
auroit d û être insinuée avant le i cr.
avril 1793 j puisque la m ort de la donatrice remonte
à
1790.
�4»
( i 5 _)
La loi a décidé, en second lieu, en permettant de faire
insinuer dans les trois mois de la publication, que lus
actes qui ne l’auroient pas été auparavant, non-seule
ment ne seroient pas sujets à de plus forts droits, niais
même qu’on ne pourroit pas leur opposer le défaut d’in
sinuation pour leur validité.
La loi pouvoit-elle dire plus clairement, que les dons
mutuels dont elle parle, qui devoient être insinués avant
le I er. avril 1793, ainsi que ceux qui ne devoient l’être
qu’après cette époque, et qui 11e le seroient pas dans le
délai qu’elle venoit de leur accorder, seroient sujets nonseulement aux plus forts droits, mais qu’encore le défaut
d’insinuation pourroit leur être opposé pour leur validité?
A près les principes qu’on vient d’établir, après les
preuves qu’on vient d’en donner , on ose dire que ce
seroit s’aveugler volontairement et résister à l’évidence,
que de combattre la nullité de la donation qui n’a pas
été insinuée dans les délais prescrits. Ce ne sont pas
seulement les forts droits bursaux qui peuvent être exigés
pour l’inobservation de cette formalité, ou peut encore
opposer le défaut d’insinuation pour la validité desdits
actes et dispositions, comme le. dit la loi du 4 germi
nal an 3.
On trouvera encore d’autres moyens et d’autres raisonnemens autant ou plus décisifs en laveur de l’appe
lante, que ceux qui ont été employés par ce mémoire,
dans la consultation donnée sur la question sur cette
affaire, par un jurisconsulte de Paris, d’une imputation
connue : on ne croit pas devoir les répéter , parce que
la consultation est imprimée , et qu’elle sera distribuée
avec le mémoire-
�(
l 6
)
On croit également devoir se référer à la consultation,
sur la réfutation des motifs du jugement dont est appel,
sur le premier chef de sa disposition. Cette réfutation
est par e lle -m ê m e si pleine et si énergique, qu’on craindroit
de l ’affoiblir en y changeant ou y ajoutant. Ce ne seroit
qu’une répétition inutile.
Mais on n’a pas soumis à l’auteur de la considtation
le second chef du jugem ent, sans doute parce qu’on l’a
cru assez inutile , par la confiance que l’on avoit de la
nullité de la donation. Néanmoins , et par surabondance,
011 ne veut pas négliger la réfutation des motifs de ce
second ch ef, par lequel l’appelante a été déboutée de
sa première demande , relative au défaut d’inventaire et
de bail de caution; ne fût-ce que pour faire voir le peu
d’attention qu’on a mis dans toutes les dispositions du
* jugement.
C’est à mesure de l’exposition de' ces m otifs, qu’on
rappellera les faits et les principes par lesquels ils se ré
futent.
P rem ier motif. — Attendu que le citoyen Teilhard
du Chambon a justifié légalement d’un emploi en acqui
sition d’immeubles, en valeur de sommes excédantes celles
portées en son contrat de mariage; que les immeubles
consistent en une maison dans cette ville, en un domaine,
"moulin et bâtimens situés dans le canton le plus pro
d u c t if , plus q u e: sufïisans pour le r e c o u v r e m e n t de la
dot et 'autres biens parnphernaux de sa femme.
'Réponse. ■
— Les lois exigent impéricuseriicnt un bail
de caution de la1part de l’usufruitier. On peut voir sur
cela le titre du digeite de usufruçtu et quemadmodhm ;
.
..
t
�('*7 )
et l’art. C C L X X X V clé la coutume'de Paris veut que
le donataire mutuel ne gagne les fruits que du jour qu’il
a présenté caution. Les lois ni les auteurs ne distinguent
point si l’usufruitier a par lui-même de quoi répondre.
La caution est une double sûreté pour le propriétaire.
Second rnotif. — A ttendu, en outre, qu’il a été.arti
culé et mis en fait que le .citoyen Teilhard avoit payé,
du chef de sa femme, des dettes considérables, et que
ces payemens étoient connus de sa partie; ce qui n’a
pas été contesté.
Réponse. — L ’appelante n’étoit point présente à l’au
dience où les faits ont été proposés par l’intimé ; elle
ignore absolument s’il a payé des dettes de sa femme :
son défenseur ne pouvoit les avouer ni les désavouer en
l’absence de sa cliente, qui étoit à vingt lieues de là. Mais,
ces payemens, s’ils existent, devroient être justifiés par
des titres, et ces titres auroient dû être rappelés dans
l’inventaire auquel l’intimé étoit obligé.
Troisième motif. — Attendu que l’inventaire n’a pour
objet que de constater l’existence, la nature ou la valeur
des objets sujets à l’usufruit, et que, dans l’espèce, tous
les biens dotaux et paraphernaux connus ont été déter
minés et évalués à une somme fixe par le contrat de
mariage ; que rien n’établit q u e , par événement posté
rie u r, il soit échu ou advenu à la femme d’autres biens
que ceux qu’elle avoit lors de son mariage ; et q u ’ainsi
l’inventaire des choses sujettes à l’usufruit d e v e n ô it saiis
objet et sans nécessité.
Réponse. — L ’usufruitier n’est pas seulement obligé à
donner caution, il est encore tenu de faire inventaire,
�( I8 )
surtout quand les choses sujettes à l’usufruit consistent en
mobilier. C’est ce que nous enseigne Domat dans le titre
des obligations de l’usufruitier, d’après la disposition de
la loi première , íf. usufructuarais quo modo caveat.
Mais il n’est pas v ra i, d’ailleurs , que le contrat de
mariage établit l’existence, la nature et la valeur de toutes
les choses sujettes à l’usufruit.
O n voit en effet, dans le contrat de mariage, d’abord,
que l’épouse se constitue son trousseau, liardes et nippes à
son usage ; e t , de plu s, des meubles meublans, ustensiles
de maison , et de l’argenterie.
A la v é r ité , le mari devoit avoir le gain coutumier
du trousseau ; mais il ne gagnoit pas les meubles meu
blans , les ustensiles de m aison, et l’argenterie : il falloit
donc faire inventaire de ces objets.
D ’un auti’e côté , par le contrat de mariage, la femme
s’étoit constitué une dot de 60,000 liv. à prendre sur les
effets , obligations et promesses qu’elle avoit recueillis
dans la succession de son oncle : mais elle s’étoit réservé,
comme bien paraphernal, tout ce qu’il y auroit, dans ces
effets , au delà de la somme de 60,000 liv. ; et tous les
effets généralement avoient été remis au pouvoir du m ari,
qui en avoit donné décharge. La réserve en bien parapher
nal, de ce qu’il y auroit dans les effets au delà de la d ot,
montre la nécessité qu’il y avoit de faire un inventaire.
Enfin , il y avoit encore de réservé, comme bien para
phernal , la maison de C lerm on t, q u i lut vendue après
le mariage, moyennant 38,720 liv. dont le mari avoit dû
Loucher 18,720 livres : l’objet étoit assez conséquent pour
le comprendre dans un inventaire.
�( 19 )
A in s i, dès qu'il y avoit, d’un côté , obligation légale
de faire inventaire, et de l’autre, dans le fa it, nécessité
de le faire, pour constater ce qui devoit être rendu par
l’usufruitier,à la cessation de l’usufruit; ce qui composoit,
outre la dot les. paraphernaux de la femme, tels que les
meubles meublans , ustensiles de m aison, argenterie,
excédant des effets de la succession de Saillant au delà de
la dot; et enfin , ce que le mari avoit reçu du prix de
la vente de la maison de Clermont ; comment a-t-on pu
donner, pour m otif du jugem ent, que l’inventaire étoit
sans objet et sans nécessité ?
A insi paroissent s’écarter invinciblement les motifs du
jugem ent, pour dispenser l’intimé du bail de caution et
de la confection d’inventaire ; deux obligations que lui
imposoient les lois, et qu’on doit regarder -comme des
conditions de l’usufruit qui lui avoit été donné ; condi
tions dont, le défaut d’accomplissement d o it,l’en. faire
priver.
.M ais il y a lieu de croire que le tribunal d’appel n’aura
point à prononcer sur le second chef du jugem ent, qui
ne frappe que sur une demande subsidiaire , laquelle
deviendra sans objet si le premier chef est infirmé , e t
si la donation d’usufruit est déclarée nulle par. le défaut
d’inventaire.
' A N D R A U D , avocat,
D E M A Y , avoué.
A. R I O M , de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul im prim eur,du
T r ib u n a l d ’appel. — A n 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Demay
Subject
The topic of the resource
donations entre époux
donations mutuelles d'usufruit
contrats de mariage
nullité
insinuation
sécurité des tiers
douaire
usufruit
enregistrement
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour la dame Chapaveyre, appelante ; Contre le citoyen Teilhard du Chambon, intimé.
Table Godemel : Insinuation : le mari donataire de l’usufruit des biens, par contrat de mariage, a-t-il dû, sous peine de nullité, faire insinuer la donation dans les 4 mois du décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1782-Circa 1803
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0926
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0925
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53087/BCU_Factums_G0926.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Saint-Bonnet-près-Riom (63327)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations entre époux
donations mutuelles d'usufruit
douaire
enregistrement
insinuation
nullité
sécurité des tiers
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53086/BCU_Factums_G0925.pdf
60170fc090e538dd2833f549ec218dd8
PDF Text
Text
CONSULTATION
P O U R
L a dame C H A P A V E Y R E , habitante de la
v il le
de M urât, departement du C a n t a l , ap pe-
lante d’un jugement rendu au tribunal civil de
l’arrondissement de R i o m , le 9 thermidor an 10;
C O N T R E
Le citoyen A n t o i n e T E I L H A R D D U C H A M B O N propriétaire, habitant de
ladite ville de Riom } intimé.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a vu le mémoire
à consulter de la dame C hapaveyre, ensemble copie d’un
ju gem ent rendu au tribunal civil de R io m , le 9 ther
midor an 1 0 ,
�( 2 }
que ce jugement renferme une évidente
erreur, en ce qu’il déclare valable une donation mutuelle
faite par contrat de mariage entre futurs conjoints, quoi
que cette donation n’ait pas été revêtue de l’insinuation ,
dans les quatre mois du décès de l’un des donateurs; q u e ,
par conséquent, l’appel interjeté par la dame Chapaveyre
est parfaitement bien fondé , et que le succès le plus com
plet doit couronner sa juste réclamation.
Il résulte du mémoire à consulter, et de l’exposé des
faits insérés au jugement dont il s’agit, que-; par le'contrat
de mariage de Marie-Jeanne Chapaveyre du Saillant avec
Antoine Teilhard-du-Chambon , la future s’est constitué
E
s t i m e
en trousseau, meubles, effets, linge et hardes à son usagç,fi>
même ses meubles m eublans, etc. jusqu’à cotfeufrence
de 2,000 fr. à quoi ces divers effets ont été amiablement
estimés entre les parties.
D e plus, et en d o t , elle s’est constitué, i ° . les biens
meubles et immeubles à elle éclius par le décès de son
père ; 2°. la somme de 60,000 fr. faisant partie des biens
par elle recueillis de la succession testamentaire de Jacques
.
Phi lippe du Saillant, son oncle.
Par le même contrat, le futur est spécialement autorisé
à poursuivre la rentrée et le remboursement de tout ce
qui peut être du à la future, h demander partage, aliéner
les immeubles réels et fictifs , toucher le remboursement,
comme les intérêts ou revenus échus ou à éch oir, à la
charge néanm oins de f a ir e emploi des fon d s ¿i f u r et
mesure q u 'il en touchera le m o n ta n t, soit en acquisitions d’immeubles réels ou fictifs, soit en acquittement
de dettes hypothécaires de 1 uu ou de l’autre des futurs.
/
�( 35
Il est d’ailleurs stipulé, que tous les autres biens, de
quelque nature qu’ ils soient, non compris dans les cons
titutions précédentes, sont réservés à la future, comme
extradotaüx et paraphernaux.
Enfin, et A la suite de quelques autres clauses particu
lières , dont il est inutile de rendre co m p te, parce qu’elles
n’ont aucun rapport A la question ci-dessus proposée ,
il est dit : « Que pour se témoigner leur amitié récipro« q u e , les futurs se sont mutuellement donné et donnent
« l’usufruit de tous et chacun les meubles et droits qui
« seront délaissés par le premier mourant ; laquelle dona« tio n , est-il ajouté, qui est mutuellement acceptée, aura
« lieu , y ait enfans ou non du mariage. »
Quelques années après ce m ariage, la dame Teilharddu-Chambon n’ayant point d'enfans institua pour son
héritière universelle Marguerite Chapaveyre, sa sœur.
L ’institution fut faite par le contrat de mariage de celle-ci
avec le citoyen Pardoux - Fayolle, sous la réserve par
l'instituante de pouvoir disposer d’une somme de 18,000 f.
q u i, en cas de non disposition de sa part, devoit f’a irj
partie de l'institution : l’instituée ne fut d’ailleurs soumise
à aucune autre condition que celle de ne pouvoir attaquer
les ventes partielles qui a voient été faites par TeilhardCliambon , mari de l’instituante, de quelques portions
détachées du domaine de Saint-Bonnet-Lachamp.
La dame Teilliard-du-Chambon étant morte dans le
mois d’août 1790 , Marguerite Chapaveyre, sa sœur et
son héritière instituée, forma contre le mari survirant une
demande tendante A ce q u e , faute par lui d’avoir fait
emploi des sommes reçues de son épouse, pour avoir ,
A a
�C 4 )
au contraire, alién é, depuis le décès de celle-ci, la tota
lité de son domaine de Saint-Bonnet-Lachamp, et faute
d’avoir fait inventaire, au décès de sa femme, des biens
par elle délaissés, qu’elle s’étoit réservés en paraphernal,
il fat déclaré déchu de l’ usufruit stipulé en son contrat
de m ariage, condamné à restituer les biens dotaux , et
la somme de 5o,ooo fr. pour les biens para plier naux,
si mieux il n’aimoit suivant leur valeur,
donner par
renseignement, ou à constater par voie de commune re
nommée.
Cette première demande a été suivie d’une a u tre,
formée dans le cours de l’an 10 parla dame Chapaveyre,
qui a conclu par celle-ci, à ce que le don m utuel, porté
au contrat de mariage de sa sœur avec le cit. Teilbarddu-Cliambon , fût déclaré nul et de nul effet , fa u te
(Vavoir, été insinué dans les quatre m ois du décès de
la .dame son épouse ,* en conséquence, que le citoyen
Tcilhard-Cham bon fût condamné à restituer, avec inté
rêts, à compter du jour du décès, savoir, les biens dotaux,
ainsi qu’i’.s étoient énoncés et fixés au contrat de mariage,
et les bieus parapliernaux , suivant leur consistance ,
d’après la preuve par commune renommée, ou la somme
de 5o,ooo fr. etc. etc.
Ces deux demandes ayant été jointes; par un jugement
du i i prairial an 1 0 , le tribunal ordonna, avant faire
d r o it, que le citoyen Teilhard-du-Chainbon seroit tenu
de justifier d’ une manière légale, que , soit en quittances
de ilettcs pour le compte de Marie - Jeanne Chapaveyre ,
sa femme, soiten acquisitions d’immeubles réels ou fictifs,
il avoitsullisammcnt satisfait l’emploi des deniers dotaux
dont ii éloit expressément chargé.
�( 5)
Ainsi la contestation présentoit deux quest:nns à jurer.
L ’ une de savoir, si, faute d’insinuation dons les cju.iire
mois du décès de la dameTeilhard-du-Chainbon , ht dona
tion mutuelle, portée en son contrat de mariage, devoit
être déclarée nulle.
L ’autre, si, en tous cas, le citoyen Teilhard-du-Chambon
ne devoit pas être déclaré déchu de son usufruit, faute
par lui d’avoir satisfait aux obligations que la lo i, sou
contrat de mariage et le jugement interlocutoire du n .
prairial lui imposoient. Car il est bon d’observer qu’ il
n’a aucunement justifié des payemens par lui articulés
des dettes de sa femme; et qu’au lieu d’être propriétaire,
comme il Favançoit, d’un domaine de 112,000 f r . , il étoit
de notoriété publique, qu’à peine il en possédoit la moitié.
Mais , quoique les principes du droit civil et les cir
constances du fait se réunissent en faveur de la dame
Cbapaveyre pour assurer le succès de l’ une ou de l’autre
de ses demandes , les deux questions ont été décidées
contr’elle par le jugement du 9 thermidor an 1 0 , q u i,
sans s’arrêtera sa demande en nullité, dont il Fa déboutée,
a repoussé pareillement sa demande subsidiaire en priva
tion d’usufruit, de même que celle en provision d’une
somme de 6,000 fr ., qu’elle avoit incidemment formée.
L e tribunal civil de Riorn a donc ju g é, en principe,
que les donations mutuelles, faites par contrat de mariage,
n’avoient pas besoin, pour être valables, d’être revêtues
d e là formalité de l’insinuation , et que la loi qui les y
assujétissoit ne présentoit, à cet égard, qu’une disposition
purement bui’sale, dont l’infraction n’entraînoit point la
A 3
�( » 4
C6 )
i U ’ ité de l’acte , mais seulement une peine pécuniaire.
L e soussigné estime, au contraire, que le défaut d’in
sinuation dans les quatre mois du décès de l’un des dona
teurs , emporte la nullité radicale de la donation faite
par contx*at de mariage ; que la distinction qui sert de
base au jugement du 9 thermidor an 10, contredit éga
lement la lettre et l’esprit de la loi.
P o u r se bien convaincre de cette v é r ité , il n’est pas
besoin de rappeler ici nos anciennes ordonnances, notam
ment celle de M oulins, qui soumettent indistinctement
à la formalité de l’insinuation toutes les donations entre
v ifs , de quelque nature qu’elles puissent être. On se
bornera simplement à rapporter les dispositions de l’or
donnance de 1 7 3 1 , et celles des lettres patentes de 1769,
qui ont modifié le principe g é n é r a l, relativement aux
donations de survie d’entre mari et femme.
L ’article X I X de l’ordonnance de 1731 porte « que
« les donations faites dans les contrats de mariage en ligne
« directe ne seront pas sujettes à la formalité de l’insi« nuation. »
E t l’article X X » que toutes les autres donations,
« même les donations rénumératoires ou m u tu elles,
ce quand même elles seroient entièrem ent égales, ou celles
« qui seroient faites à la cliarge de services ou de fonda« tions , seront insinuées conformément aux anciennes
« ordonnances, à peine de nullité. »
Ainsi , à l’exception des donations en ligne directe,
faites par contrat de mariage, toutes les autres donations,
indistinctement, sont assujéties à l’observation rigoureuse
�C 7 )
de cette formalité ; et comme la nature des donations
mutuelles, qui ne sont, au fait, que des contrats eornmutatifs, intéressés de part et d’autre, pouvoit laisser
quelque doute sur la nécessité de les comprendre dans
]a classe des.actes de pure libéralité, le législateur,'pour
dissiper toute espèce d’incertitude à cet ég a rd , les y a
spécifiquement comprises, même dans le cas ou elles seroient parfaitement égales.
1
A u x termes de l’ordonnance de 1731, il n’est donc pas
douteux que les donations mutuelles d’entre mari- et
fem m e, étoientj’eomme toutes les autres, aisujétics à la
formalité de l’insinuation dans les cjuatre mois de-leur
date; les articles X I X et X X sont si formels, si clairs et
si précis, qu’i l •faudroit'volontairement fermer les y e u x
à l’évidence pour méconnoître la règle qu’ils établissent.
Cependant l ë ’ caractère particulier de ces espèces de
donations pouvoit et deVoit même les placer dans une
classe particulière, non pour les dispenser de l’insinuation,
mais du moins pour1reporter au décès de l’un des dona
taires l'obligation de remplir cette'formalité.
Dans la donation mutuelle , effectivement, ni l’un ni
Vautre-des donataires ne se dépouille de la propriété des
choses qu’ il donne; il en conserve, pendant toute sa vie,
la libre disposition ; et s’il ne peut plus les aliéner à titre
purement gratuit, au préjudice de son codonataire , du
moins peut-il les vendre , les échanger, ou les hypothé
quer au payement de ses dettes.
O r , c o m m e l’insinuation, qui n’est que le moyen de
donner la plus grande publicité possible aux actes de libéra
lité, nu pour unique but que de prévenir oti d’empôchûr la :
A 4
/
�f-S)
fraude qu’ un donateur déjà dessaisi de la propriété de
choses par lui données , pourroit commettre envers des
tiers qui ne connoîtroient pas la donation, il est clair que
ce m otif cesse nécessairement pour les donations mutuelles,
q u i, ne dépouillant pas les donateurs de la propriété,
leur laissent conséquemment la disponibilité entière et par
faite de tous les objets qui composent leur donation.
D ’un autre c ô t é , si cette forme extrinsèque devenoit
complètement inutile pour ces sortes de conventions, il
pouvoit être dangereux de les y assujétir, en ce qu’elle
gênoit la libre disposition que conservoientles deux époux,
par les inquiétudes qu’elle donnoit aux tiers avec lesquels
ils avoient à contracter. . . ,
P q u r concilier ces différentes vues, il falloit donc néces
sairement faire deux choses.
j
. c ; . • >i ■
'
L ’u n e, reculer le terme de l’iqsinuationijusqu’après le
décès de l’un des deux donateurs;
l/ a u tr e , obliger le donataire survivant à faire insinuer
dans les quatre mois de la mort du prédécédé, afin de
prévenir, par ce moyen, les dispositions frauduleuses que
riiéj’ilier pourroit faire des choses données; car la dona
tion mutuelle saisit le survivant à l’instant même du décès
de son codonateur. Elle dépouille, conséquemment,l’héri
tier de celui-ci; et, si elle n’étoit pas rendue publique par
l ’ insinuation, le même inconvénient qui résulte du défaut
de publicité des donations ordinaires, se rencontreroit dans
«elle-ci, puisque l’héritier, ainsi investi de tous les biens
de la succession, par la règle le m ort sa isit le vij\ pour
rait également tromper des tiers qui ne connoîtroient
pas la donation.
�c 9 )
Ce double but a été rempli par les lettres patentes du 3
juillet 176 9 , qui ont ordonné « q u e tous les dons de
« survie faits dans les contrats de mariage, par un mari à
te sa fem me, ou par la femme à son m ari, tous les dons
« mutuels, réciproques, rénumératoires, faits par l’un et
« l’a u tre, dans lesdits contrats , seroient exempts, ju s
te qu au jo u r du décès du donateur, de la form a lité e
« /’in sinu ation , soit au domicile des contraelans, soit aux
« bureaux des lieux de la situation des biens donnés ; à lu
« charge, n éa n m oin s, que lesdites donations seroient
« insinuées au dom icile du d o n a teu r, dans les quatre
« m o is , à compter du jo u r de son décès. »
Remarquons, avant d’aller plus lo in , que l’exception
faite par cette loi en faveur des donations mutuelles, ou
de survie, par contrat de mariage, n ’a lieu que pour le
temps de l'insinuation : sont dispensées ju s q u a u jo u r du
décès du donateur ; que, par conséquent, la règle reprend
tout sou em pire, lorsque le terme de cette suspension est
arrivé. E t, par une conséquence ultérieure, que l’obli
gation de faire insinuer, dans les quatre mois du décès,
est imposée à peine de nullité , puisque l’ordonnance
de 173 1, à laquelle il n’est dérogé que pour Je tem ps,
punit de la même peine l’inobservation de cette formalité.
Il y auroit donc une absurdité com plète, à ne v o ir,
dans les lettres patentes du 3 juillet 1769 , qu’une dispo
sition purement bursale, puisque les mêmes motifs, qui
fondent la nécessité de l’insinuation des donations ord i
naires, dans les quatre mois de leur date, provoquent
également celle des donations réciproques, dans les quatre
niois du décès de l’uu des donateurs} et que, d’un autre
A S
�454
( 10 )
côté, ces mêmes lettres patentes n’ont dérogé l’ordon
nance dé 1 7 3 1 , que pour le temps où la formalitéidevroit
être remplie, sans anéantir la peine de nullité, qui en
punit l’inobservation.
Ces principes posés, rien de plus facile que d’écarter
les prétendus motifs qui servent de base au jugement du 9
thermidor an 10.
L e premier consiste à dire : « que, d’après l’ordonnance
« de 1 7 3 1 , les lois antérieures et celles qui ont suivi, Tin 1
« sinuation n’est ordonnée à peine de nullité, que pour les
« donations entre-vifs, pour les seules libéralités présentes
« et absolues. »
, ,
Nous venons de v o ir , au contraire, que les donations
mutuelles, même celles qui seroient parfaitement égales,
et généralement toutes les espèces de donations, sans autre
exception que celles en ligne directe, sont soumises parles
articles X I X et X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , à la for
malité de l’in sin u a tio n , sous peine de nullité : que celles
d ’entre mari et femme en ont été dispensées, il est vra i,
pour le temps de la vie des donateurs ; mais qu’en
laissant à la disposition de l’ordonnance de 1731 tout
son empire et son eiFet, relativement à. l’obligation
d’insinuer dans les quatre mois du décès, les lettres pa
tentes de 1769 n’ont établi qu’une exception temporaire,
sans déroger au surplus des autres dispositions de l’ordon
nance.
.
,
L e second motif du jugement est fondé, « sur ce qu’une
«c donation mutuelle de biens qui s e trouveront après le
« décès, ne peut être réputée ni une libéralité purement
« gratuite, ni une donation présente et absolue, puisqu’il
\
�4.V f
( 11 )
* n’y a de véritables donations entre-vifs, que celles qui
« dépouillent, dès le moment, le donateur an profit du
« donataire; et qu’ainsi la donation dontil s’agit n’est qu’une
« véritable donation à cause de mort. »
Ce second motif renferme autant d’erreurs que de mots.
D ’abord il est faux qu’il n’y ait de véritables donations
entre-vifs, que celles qui dépouillent le donateur dès l’ins
tant même de la donation ; car les institutions contrac
tuelles sont, par exemple, de vraies donations entre-vifs ,
et réputées comme titres irrévocables de leur nature ,
quoiqu’elles laissent à l’instituant la faculté de disposer à
titre onéreux de tous ses biens, et ne le dépouillent d’au
cun de ceux qui composent l’institution ( i ).
Les donations faites par contrat de m ariage, h la
charge de payer les dettes que laissera le donateur, et
qui sont formellement autorisées par l’article X V I I I de
l’ordonnance de 1 7 3 1 , sont encore des donations entrevifs , et parfaitement irrévocables, quoique le donateur
conserve la faculté d’aliéner ses biens en les hypothé
quant à ses créanciers.
Les donations de survie , autorisées également par
la même lo i, sont encore des donations entre-vifs; et
jamais personne n’a imaginé jusqu’à présent qu’on pût
les ranger dans la classe des donations à cause de m o rt,
( i j Voyez L eb ru n , des successions, livre 3 , chap, a , numéro 7.
Potlùer , introduction au titre des successions de la coutume d ’Oxléanj,
numéros 17 et 18.
L oi du x8 pluviôse an 5 , article premier.
* *
�f 12 )
qui en diffèrent essentiellement p a rle caractère de révo
cabilité qui leur est propre.
La donation à cause de mort est essentiellement révo
cable jusqu’à la mort du donateur, non-seulement par
le fait, c’est-à-dire, par l’aliénation qu’il peut faire à
litre onéreux , mais par le d roit; en ce qu’il n’a besoin
que d’un simple acte de sa volon té, pour les anéantir,
les révo q u er, les m odifier, ou disposer en faveur de
tout autre que le donataire.
L es donations de su rv ie , au contraire, les donations
mutuelles et réciproques, celles à la charge de payer les
dettes du donateur, les institutions contractuelles, les
promesses de conserver, et autres de même nature , sont
bien révocables en ce sens, que le donateur ou l’insti
tuant conservent la liberté d’aliéner à titre onéreux ?
même la totalité des objets donnés.
Mais elles sont irrévocables en cet autre sens, que le do
nateur ou l’instituant ne peuvent disposer à titre gratuit en
faveur d’un autre que le donataire, et qu’il n’est plus en
son pouvoir de les anéantir ou de les modifier de quel
que manière que ce soit. L ’ordonnance des substitutions,
article X I [ , le décide formellement pour les institutions
contractuelles d’héritier, et sa disposition s’applique à
f o r t io r i aux autres conventions de même nature , c’està-dire , à celles qui ne dépouillent pas le donateur de la
propriété des choses données, quoiqu’elles lui ôtent la
liberté de disposer à titre gratuit.
D e cela seul que les donations mutuelles , et en général
1rs donations de survie, sont irrévocables de leur nature,
il s'ensuit donc nécessairement qu’elles ne sont point
�4&
( *3 )
donations à cause de mort ; e t , par une consequence ulté
rieure, qu’on doit le;s ranger dans la classe des donations
entre-vifs; ce qu’il 'falloit démontrer.
A u surplus, si les donations mutuelles n’étoient pas de
véritables donations entre-vifs, soumises comme telles à
Tinsinuation , on demanderoit pourquoi l’article X X de
l ’ordonnance les a rangées dans la môme classe pour les y
assujétir, et pourquoi les lettres patentes de 1769 ne les
ont exceptées de cette disposition générale que pour reculer
le terme de l’insinuation, en le plaçant au décès de l’un
des donateurs, sans anéantir d’ailleurs la peine de nullité
que l’inobservation de cette foi’me doit nécessairement
leur faire encourir.
L e troisième m otif du jugement est fondé sur ce que
« la déclaration de 1729 n’a soumis à l’insinuation les
« dispositions testamentaires et autres à cause de m o rt,
« que pour les assujétir à un droit bursal, et les a expres« sèment exceptées de la peine de n u llité, en cas de
« non insinuation. » ■
Si les donations mutuelles, par contrat de mariage,
pouvoient être regardées comme dispositions testamen
taires ou à cause de m o rt, rien ne seroit plus juste que
ce raisonnement qui ne laisseroit aucun lieu à la répliqué :
mais on vient de faire voir qu'elles étoient essentiel
lement donations entre-vifs; qu’elles en avoient le prin
cipal caractère, celui de la parfaite irrévocabilité; et la
conséquence directe qui résulte de là , c’est qu’on ne peut
leur appliquer les lois relatives aux testainens.
Les juges du tribunal de Riom donnent pour quatrième
motif, que les lettres patentes de 1769 n ont point déroge
�( 14 )
a u x lois antérieures, relativement à la. -peine de nullité
j'a u te dûinsinuation, et il semble que l’on pourroit tirer
pour conséquence directe de cette' assertion incontesta
ble, que si l’exception qu’elles introduisent n’est que pour
le terme de l'insinuation, la peine de nullité subsiste faute
d’insinuation dans celui qu'elles établissent, c’est-à-dire,
dans les quatre mois du décès du donateur.
O n ajoute, dans le jugement, a que cette loi (les lettres
* patentes de 1769 ) a seulement pour objet, en déter« minant le temps et l’époque de l’insinuation, de.fixer
« le temps précis auquel les peines du double et triple
« droit seroient encourues. a
Mais les lettres patentes de 1769 ne parlent ni du
double ni du triple d roit; elles disent seulement que les
donations de survie, comme les donations mutuelles, sont
dispensées pendant la vie du donateur de la formalité
de l’insinuation . . . . pour y demeurer assujéties seule
m ent dans les 4 m ois du jo u r de s o j i décès.
E t comme les raisons de l’exception sont puisées dans
la nature môme des donations de survie, qui, laissant au
donateur la faculté de disposer à titre onéreux , n’exposent
point à être trompés les tiers qui coiitracteroient avec lui;
C om m e, d’un autre coté, la nécessité de l’insinuation
doit commencer au moment où cette faculté s’anéantit,
c’est-à-dire, au moment où l’héritier du-donateur est
pleinement dépouillé, entièrement dessaisi de la propriété
et de la libre disposition des choses données, c’est-à-dire,
ou moment du décès de l’un des donateurs;
Comme cette nécessité se trouve fondée alors sur les
mêmes motifs que celle qui rend indispensable finsinuar
�( *5 )
tîon des donations présentes et absolues, c’est-à-dire, sur
la crainte que des tiers de bonne foi ne contractent avec
un propriétaire dessaisi par la donation;
Comme enfin les lettres patentes de 1769 n’ont point
dérogé aux lois antérieures, quant à la peine de nullité;
Il s’ensuit, par la plus directe et la plus évidente de
toutes les conséquences, que le défaut d’insinuation dans
les quatre mois du décès , emporte la nullité radicale de
la donation.
Si d’ailleurs les lettres patentes de 1769 ne prononcent
pas cette peine de n ullité, c’est qu’il étoit parfaitement
inutile de la rappeler dans une lo i, q u i, n’ayant pour
objet que d’établir une dispense de temps, laissoit d’ail
leurs subsister toutes les dispositions de l’ordonnance
de 1731 , auxquelles le législateur n’entendoit aucune
ment déroger.
E t s i , en parlant des donations entre-vifs et absolues
de la femme au mari ou du mari à la fem m e , la même
loi veut qu’elles continuent d’être assujéties à l’insinuation,
sous peine de nullité, c’est uniquement pour mieux indi
quer la différence des unes et des autres, en ce que les
unes doivent être insinuées dans les quatre mois de leur
date, sous la peine voulue par l’ordonnance de 1 7 3 1 ,
tandis que les autres sont dispensées de cette peine
pendant toute la vie du donateur.
C’est donc une grande erreur que celle des premiers
juges, qui ont cru voir une différence réelle entre ces
deux dispositions des lettres patentes de 176 9 , et qui en
ont conclu qu’elles abrogeoient, au moins tacitement, la
peine de nullité pour le défaut d’insinuation des dona-
�c ,i 6 )
tions mutuelles, tandis qu’elles la prononçoient textuel
lement par rapport aux donations présentes et absolues
du mari à la femme ou de la femme au mari. En matière
de formes extrinsèques , on ne eonnoît point d’abrogation
tacite : elle doit être formelle ou elle n’existe pas. O r ,
non - seulement les lettres patentes n’ont point abrogé
tacitement la peine de nullité prononcée contre les dona
tions mutuelles nom insinuées; mais il est de toute évi
dence que le législateur ne pouvoit pas mêtne en avoir
l’intention , sans tomber dans la plus absurde contradiction
avec lu i- m ê m e , puisqu’encore une fois les motifs qui
rendent l’insinuation nécessaire, dans les quatre mois du
décès, sont identiquement les ■mômes que ceux qui l’ont
fait introduire pour les donations présentes et absolues.
*• Quant au dernier, motif du jugem ent,, qui est .encore
fondé sur ce faux principe, que les donations mutuelles
sont de véritables donations à cause de mort , 011 se
croit dispensé d’y répondre, parce que ce seroit tomber
clans des redites aussi fastidieuses qu’inutiles ; seulement
on observera que les premiers juges ont perpétuelle
ment confondu les donations entre-vifs qui n’ont d’effet
qu’après la mort du donateur , avec les donations à
cause de m o r t , lorsqu’ils devoient s’attacher au carac
tère essentiel qui les distingue, savoir, l’irrévocabilité
parfaite des premières , et la faculté conservée par le
donateur jusqu’à son dernier soupir, de ré v o q u e r, anéan
tir , ou modifier les autres. A vec cette distinction, ils
auroient évité l’erreur dans laquelle ils sont tombés, et
11e süroient pas contrevenu« , comme ils l’ont fait, aux
dispositions textuelles de l ’ordonnance de 1731.
�4 à%
( 17 )
L e soussigné ne doute donc pas un seul instant que
l’appel de madame Chapaveyre ne soit couronné du
succès le plus com plet, et que le tribunal devant lequel
se trouve portée sa réclamation ne rende aux vrais prin
cipes l’hommage que le premier leur a refusé.
Délibéré par le soussigné, ancien jurisconsulte, à P a ris,
ce 5 frimaire an 11.
POIRIER.
L E C O N S E IL S O U S S I G N É , qui a vu la présente
consultation, est également d’avis de la nullité de la
donation mutuelle dont il s’a g i t , par le défaut d’insi
nuation dans les quatre mois du décès de la donatrice.
L ’auteur de la consultation a très-bien développé les
principes de la m atière, et parfaitement accordé la dispo
sition de l’article X X de l’ordonnance de 1 7 3 1 , et celle
des lettres patentes du 3 juillet 1769, en ce qui concerne
les dons mutuels faits entre mari et femme. L ’ordon
nance de 1731 prononce textuellement la nullité de ces
sortes de donations, faute d’insinuation; celles-ci, comme
toutes les autres, devoient être insinuées dans les 4 mois
de leur dale , o u , tout au moins pendant la vie du dona
teur : c’étoit ainsi que l’avoit prescrit l’article L X V I I I de
l'ordonnance de ÏVloulins ; et celle de 1 7 3 1 , dans l’ar
ticle X X V I , s’est référée aux délais de l'insinuation por
tés par les anciennes ordonnances.
Les lettres patentes du 3 juillet 1769 n’ont rien changé
ù la nécessité de l’insinuation des dons mutuels, ni à la
i 'j ,
�( 18 )
nullité qui devoit résulter du défaut d’insinuation ; elles
n’ont opéré d’autre changement que sur le temps où
cette insinuation devoit se faire, et elles ont déterminé
-ce temps, dans les quatre mois du décès du donateur;
mais elles n’ont pas moins laissé subsister la nécessité
, de l’insinuation du don mutuel , et sa nullité lorsque
l ’insinuation n’a pas été faite dans le délai.
L ’auteur de la consultation donne d’ailleui’S des raisons
sensibles de la nécessité de l’insinuation, même dans ce
cas; il est inutile de les répéter.
On ne peut donc qu’applaudir aux principes de la
consultation, et adhérer aux résolutions qui en sont la
conséquence. O n ajoutera seulement, pour démontrer
de plus en plus que les lettres patentes de 1769 ont laissé
subsister la nullité des dons m utuels, faute d’insinuation,
la décision de l’article X X J de l’ordonnance de 1731 3 à
l’égard des dons mobiles, augment, contre-augmënt, etc.
O n avoit douté long-temps si les donations faites par
forme de dons mobiles, augm ent, etc. étoient sujettes à
l'insinuation , lorsqu’une déclai’ation du 20 mars 1708
les y assujétit positivement; ce qui paroissoit aussi les y
soumettre, à peine de nullité. Mais cette rigueur fut tem
pérée , à leur éga rd , par une seconde décluration de 172 9,
qui les affranchit de la peine de n u llité, et n’imposa à
l’inobservation de l’insinuation de ces sortes de donations
que les autres peines portées par les édits et déclarations,
c’est-à-dire , des peines purement bursales.
S’il eût été dans l’intention du législateur d en user de
même à l’égard des dons mutuels, dont le défaut d'in
sinuation, dans le délai prescrit, emportoit, dans les termes
i
�f; "
( 19 )
précis de l’ordonnance de 1731 la peine de nullité; si,
dit - on , le législateur eût voulu retrancher cette peine
dans les lettres patentes de 1769 , il n’auroit pas manqué
de le dire , comme il l’avoit fait pour les dons m obiles,
augm ent, etc. dans la déclaration du 30 mars 1729.
Ce seroit donc aller contre le texte précis de la l o i ,
et c’en seroit une violation, que de valider le don mutuel
dont il s’agit.
Délibéré à R i o m , le 19 pluviôse an 11.
A N D R A U D .
A R I O M , de l ’im prim erie de
L a n d r i o t , seul im prim eur du
T rib u n a l d ’appel. — A n 1 1.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Chapaveyre. 1803?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Poirier
Andraud
Subject
The topic of the resource
donations entre époux
contrats de mariage
donations
nullité
enregistrement
sécurité des tiers
douaire
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultation pour la dame Chapaveyre, habitante de la ville de Murat, département du Cantal, appelante d'un jugement rendu au tribunal civil de l'arrondissement de Riom, le 9 thermidor an 10 ; Contre le citoyen Antoine Teilhard-Duchambon, propriétaire, habitant de ladite ville de Riom, intimé.
Annotations manuscrites: « voir l'arrêt confirmatif de la Cour 1ére section du 20 ventôse an 11, au recueil manuscrit page 674 » .
Table Godemel : Insinuation : le mari donataire de l’usufruit des biens, par contrat de mariage, a-t-il dû, sous peine de nullité, faire insinuer la donation dans les 4 mois du décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1803
1782-Circa 1803
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0925
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0926
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53086/BCU_Factums_G0925.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Murat (15138)
Riom (63300)
Saint-Bonnet-près-Riom (63327)
Clermont-Ferrand (63113)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
contrats de mariage
donations
donations entre époux
douaire
droit intermédiaire
enregistrement
nullité
sécurité des tiers
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53650/BCU_Factums_M0109.pdf
ab8b7219d2f8d50b8a0337836934f988
PDF Text
Text
T R IB U N A L
M
É
M
O
I
R
E
ET C O N S U L T A T I O N ,
P O U R JEAN C A R T I E R , propriétaire, habitant
de la commune de Saint - Germain - l’Herm ,
appelant ;
C O N T R E L o u i s e C A R T I E R et m a r c B A R R I E R E ,
s o n m a r i, officier de s a n té , habitans de la même
co m m u n e, intim és ;
E t encore C O N T R E m a g d e l e i n e C H R I S T O P H L E ,
veuve _de_F r a n çJo i s C A R T I E R : p r a n c*o i s et m a r i e
C A R T I E R , tous citoyens de la même com m une
intimés.
'
F r a n c o i s C a r t i e r et M agdeleine Christophle ont
e u plusieurs enfans ? dont quatre seulement : deux gar
çons, Jean et François Cartier ; deux filles, Louise et
C
I V
I L .
�f • )
. '
” ■> . - V
.« V
j
'*.•(
t. ).\
-'*•
.
^ ;' - r
: '5
!
M arie Cartier ont survécu à leur père , m ort le 16
mai 1791.
,
.. . ,
Il liabitoit la commune de St. Germ ain - TH erm ,
pays de droit écrit ; la principale partie de sa fortune se
régit par la m ême loi : une très-petite portion est située
cil pays de coutume.
,
\ . , - A u m ois-d ’août 1769 , François Cartier fut atteint
d’une maladie dangereuse , qui lui laissoit peu d'espoir
de retour à la vie. : il avoit alors un garçon ( Jean Cartier )
et trois fdlès : Magdeleine C hristophle, sa femme , étoit
grosse.
O
^
|
•
.
.
,<
r■ •• •
- .
■
■
L e 13 août 17 6 9 , il fit un testament nuncupatif, par
lequel, entr’autres dispositions, il légua à sa fem m e, pen
dant sa v id u ité , la jouissance universelle de ses b ien s, à
la charge par elle d’accepter la tutelle de' ses enfans, sans
être tenue de leur rendre compte.
Il institua Jean C artier, son fils, héritier universel de
tous les biens dont il m ourroit vêtu et saisi, mais qu’il
ne pourroit recueillir qu’après la cessation de l’usufruit
légué à sa mère.
,
•* ’ ]r. 1 . ’ ’ V ‘ ’
’ . ’
*.
„
Cette institution fut encore faite à la charge par lui
de payer à L o u ise , M arie, autre Marie , scs sœ urs, et au
posthum e dont la fe m m e étoit enceinte , la somme de
deux mille liv r e s , et un am eublem ent, chacun suivant
leu r état et condition , pour laquelle somme de deux
mille livres et un ameublement, il institue lesdites L ouise, .
M arie , autre M a r ie , et le posthume , ses héritiers par
ticuliers.
Si le posthum e est un. maie ? le testateur lui donne mille
�C3 )
livres de plus : si l’héritier universel vient à décéder avant
que de se m arier, il sera libre à M agdeleine Cliristoplile
de choisir pour l’héritier celui de ses en fans qu'elle vou
dra préférer ; m ais, si le posthume est un nulle , il sera
dans le cas prévu son héritier de droit : seulement dans
ce cas le posthume donnera à chacune de ses sœurs millo
livres de plus.
_
Telles sont les principales dispositions , et les seules
utiles à rappeler du testament du père commun. Il se réta
blit de la maladie grave dont il étoit attaqu é, et a sur
vécu vin g t-d eu x ans à ce testament.
L enfant dont la m ère étoit grosse alors n’a pas vécu;
il est m ort long-temps avant le père : mais depuis, M ag
deleine C liristophle a eu un autre enfant*, c’est François
Cartier, toujours vivant : l’une des filles, appelée M arie,
a également prédécédé son père.
L e 26 février 1 78 6, François Cartier a marié L o u ise ,
sa fille a în ée, avec M arc Barrière : ses père et m ère lui
constituèrent un ameublement détaillé au contrat de ma
ria g e, et une somme de trois mille livrés en d o t; savoir :
•deux mille neuf cents pour biens paternels-, et cent pour
bieng maternels ; au m oyen de q u o i, Louise Cartier a
frenoncé a u x successions à venir 'Seulement de 'ses père
et m e re , en faveur et au profit de- l’héritier que les père
et m ère jugeront à propos d’instituer.
A près le décès du père com m un , a rriv é , comme on
l a d it, le 16 mars 1 7 9 1 , Jean Cartier voulut profiter du
bénéfice de l’institution faite en sa faveur par le téstament ; mais cet acte -fut attaqué par ctille des enfans
�(4 )
.
.
qui y ayoit le moins d’intérêt : Lou:î:c Cartier ,' femme
Barrière , avoit renoncé expres-ément a la succession,
de son père ; une p a r e i l l e ' renonciation, laite par contrat
de mariage , à une succession à échoir , est .valable
faveur des mâles.
.
Elle prétendit que le décret du 8 avril 1791 , qui
supprime les forclusions coutum ières, abolit également
,les renonciations üiites en droit écrit. Feignant d’ignorer
que s o n père étoit m o rt ayant la promulgation; de celte
lo i, puisque François Carder est décédé le 16 mai 1791»
et que la loi n’a été envoyée que le 24 du même m ois,
elle vouloit absolument s’en appliquer les dispositions,
sur le fondement qu’elle n’avoit renoncé qu’en faveur
de l ’héritier qui seroit institué , et qu’il n’y avoit pas
d’institution valable.
:
.
'■
E n effet, suivant elle le testament étoit nul pour toutes
les dispositions cju’il contient 5 il y avoit.prétérition dans
son système, parce que le posthum e, qui étoit conçu lors
du-testam ent, est décédé depuis, et qu’il y avoit eu un
■autre enfant dont le testament ne faisoit pas m en tion , ce
qui entraînoit la nullité de l’institution, d’après l'ordon
n an ce de 1735.
.
.
Elle attaquoit encore le legs d’ usufruit fait ¿1 sa m ère,
parce q u e , disoit-elle, ce legs n’a été fait qu’à la charge
d’accepter la tutelle de scs enfans, et lors du décès du
testateur , tous les enfans étoient’ majeurs ou hors de
tutelle. Elle accnsoit encore sa mère d’avoir fait un in
ventaire frauduleux. _
D ’un autre côté, elle soutenoit que ce legs, étarife
�,
c 5 }
■
u n iversel, etoit également annuité par la prétérition ;
en conséquence elle demanda le partage et une portion
• égale dans les biens de son père.
Jean Cartier combattit avec avantage les singulières
prétentions de sa sœur ; suivant tous 'les principes, la
renonciation d’une lille à une succession à éch o ir, faite
en droit écrit par contrat de m ariage, étoit valable en
faveur des mâles \ il im portoit peu qu’elle fût dirigée
au profit de tel ou tel autre ; tant qu’il existoit des mâles
ou descendans d’e u x , la renonciation avoit tout son effet.
. Dès qu’il n’y a pas de forclusion légale en pays de
droit écrit, on ne pouvoit pas appliquer une loi qui ne
supprim e que les forclusions coutumières.
D ’ailleurs , la loi du 8 avril 1791 n’a pas d’effet
rétroactif ; elle ne regarde que les successions qui s’ouvriro n ta com pter de sa publication; et, suivant le certificat
donné par le département , la loi n'a été prom ulguée
que le 24 mai 1791 ; le père étoit décédé huit jours
auparavant; Louise Cartier n’avoit donc aucune action.
Eût-elle qualité pour demander le'partage, l’institution
testamentaire faite au profit de Jean Cartier devoit avoir
tout son e ffe t, dès que le posthum e, conçu lors dü testa
ment , avoit été institué : cette institution a compris tous les
posthumes qui pouvoient naître dans la suite, par l’égalité
d affection qu’on présum e dans le testateur pour tous les
posthumes, qui lui sont également inconnus: telle est la
disposition des lois auxquelles l’ordonnance de 1735 n’a
non changé.
P ou r ce qui regarde le legs d’usufruit fait à la m ère,
3
�(6 )
.
.
le système de Louise Cartier étoit absurde; Ta charge
d'accepter la tutelle disparoît, dès qu’ il n’y a plus de
m ineurs, mais la libéralité reste ; ce n’est d’ailleurs qu’un
legs particulier, puisqu’il ne consiste qu’en jouissance ,
et la prétention d’unlégititnaire n’annulleroit t o u t au plus
que l'institution universelle.
: T e l étoit l’état des choses, qui devoit faire espérer un
plein succès à Jean Cartier ; mais la; loi du 17 nivtbe
vint mettre tout le monde d’accord ; il fallut partager par
égalité.
Cette loi révolutionnaire ayant été rapportée dans ses
effets .rétroactifs , Louise : Cartier a renouvelé scs pré
tentions devant un tribunal de fam ille, qui a porté une
décision aussi injuste qu’inattendue ; il est indispensable
d'en faire connoître les motifs et les dispositions.
Les arbitres de famille ont d’abord posé quatre ques
tions.
.
*
te
«
«
«
« i ° . L a forclusion de Louise Cartier est-elle valable ?
« 2°. Dans le cas oii la forclusion ne seroit valable
q u en partie, quelle portion de sa dot devroit-on con
fondre avec la partie des biens dans lesquels elle seroit
admise à ren trer?
«c 30. L e testament de François Cartier est-il nul. par
vice de prétérition ?
« 40. En cas de n u llité, d o it-e lle entraîner celle de
legs d’usufruit fait à la mère ?
« A tte n d u , sur la première question , est-il d it , qu’il
g faut distinguer, dans la succession de François Cartier,
* les biens de coutume et ceux du droit écrit; q u i
�.
C 7 )
•
•
.
cî. l-'égard des prem iers, la renonciation , quoique vagur« ment d irigée, a un ciïct légal qui la dirige au profit
« de tous les maies in distin ctem entparce que la coutum e,
cc d’^ i v ÿ ^ u e eut opéré la iorclus'on léga le, quand .il
« 'ny auroit pas eu de rononciation précise * qu’on ne
« peut pas opposer, en faveur de Louise C artier, la loi
« du 8 avril 1 7 9 1 , qui abolit les forclusions coutum ières,
« parce que cette loi n’a point d’effet, rétroactif, et n a étc
« publiée dans le district d’A m b ert que postérieurement
« au décès de François
Cartier.
a
« Que pour ce qui concerne les biens de droit é c rit,
« ci l’égard desquels il faut une renonciation expresse et
« d irecte, on ne peut pas dire que ces deux caractères
« se rencontrent dans la renonciation de Louise C a rtier,
« en ce q u elle n’a renoncé qu’au profit de l’héritier
« que scs père et m ère jugeront à propos d’instituer, et..
* que dans le fa it, après ce-m ariage, ils n’en ont p o in tt
« institué \ d’après quoi une renonciation convention
« nelle ne pouvant s’étendre, d’après les principes,, d une
cc personne à une a u tre, ni d’un cas: à vul autre , il en.
« résulte qu’aucun des enfans de François Cartier ne-peut ,
« s’adjuger cette renonciation , ni l’opposer à Lo,uise 4
ce C a rtie r, qui dès lors ne peut être dite* avoir valable-,
« m ent, renoncé aux biens de droit éfirit;, Q iiciiiln si.,
« on pouvoit étendre cette renonciation; à. un héritier ^
cc déjà institué, m algré les expressions.du contrat-de^mji-.,
« riage, et l’irrégularité d’une’ pareille extension, la; fpj,'-^
c« clusion ne se seroit pas pour cela opérée , en ce qu’il ne,.
« se trouve p a rle fait aucun héritier valablement; institué
* par les motifs qui seront déduits ci-après.
4
�.
.
. . .
.
.
'« A ttendu, 2°. que la forclusion étant valable, pour les
a biens de coutum e, et ne l’étant pas pour les biens de
« droit é c rit, la règle la plus sû re , et la plus juste 'et'sin« cère pour l’imputation de la ''d o t, est une î/ewti/rtiion
« des biens de l’une et de l’autre espèces, p o u r dé-ter-'
c<‘ m iner, a proportion de chacun, quelle somme dcV-ia« rapporter Louise C artier, quand ii en sera*temps.-" "
~ « A tten d u , 3°.' que si avant ¡l'ordonnance d e-1736»
« les auteurs étbierit'divisés 'sur l?aj>plicàtiôîV
a tion d'héritier au proiife du posthume ;-et s i, c irg é n é cc ralisant une novclle de Jüstuiien , ’ôn parbissoit fixé à „
a rappliquer à tous les posthumes conçus ou n o n , lors"
« du testament j cette variabilité, rie peut pas avoir'lieu '
a depuis l'ordonnance des::teslamens', qui rie laisse plus'
a-d’équivoque sur cette question *, d’après les articles' ^ 5
« et ’5o , qui veu len t que 'l’institution- so if assez claire« ment expliquée pour désigner les en fans nés et à naître
d’après q u o i, si ou peut dire que François'Cartier a 3
«eassez 'clairement désigné le' post-humë ;üôntis'a'Tënimc'
a ":étoit «enceinte ^ on ne peut pas dire qu’il ait désigné'
« du.tout'!celui dont elle né pouvoit l’être alors, et qui11’est né que quelques années après le testam ent; de
« sorte que , inclus¿0 unius , est exclusio alterius y et
c’est précisém ënt parce qu’il a ; très-clairement institué
"le - posthüinë alors co n çu , qu il y ¡a prétérition pour
' celui qui ne l’étoit pas alors, le pere-he pouvant élre
#“ excusable dans cette prétérition , parce qu’il a vécu
»'-plusieurs années après la naissance de ce fils'prétérit.
-« Attendu ; 4 0, que 1 article 70 de l'ordonnance - qui
�..
.
^ 9 ^ , „
.
, . *
compmrd'j'Ylans ÏÏt nullité, opérée par la prétériiîoïi ï
« les dispositions' universelles1, : ne semble pas devoir.
« s’étendre à un legs d’usufruit, q u i, Iquoiqu univeri.el,
« ne peut être considéré que'com m e un simple legs,.d o
« manière qu’il est maintenu par l’article 03 de 1 ordon
ne nance, q u i, m algré la nullité de l ’institution, conservé
« les legs portés par le testament ,■q u e . 1 articie 70 110
« paroît devoir s'appliquer, par exem ple, q u a u cas ou
« un père, croyant n'avoir pas d’enfant, fait un legs unia versel à un étranger , ou bien dans 1er c a s ‘d’une substi« tu tio n , tout quoi est entraîné dans 'la nullité comme
« disposition générale. Què >les moyens d inventaire
a frauduleux, allégués par les demandeurs , ne peuvent
« donner contre la m ère qu’une action en spoliation ae
« la succession, quand il en sera temps ,• mais qu autre« ment on n’a pas d’action c ont r e li e , dès que son usufruit
«■est valable, et qu’elle-ne peut êlre contrainte de tout
«* laisser, lorsqu’on ne sait pas e n c o re , ni q u o n ne doit
« pas savoir en quoi consiste une succession dans laquelle
«• on n’a que des droits: a ven ir. 'Qu'e tout au plus a-t-on
a le droit de surveiller les dilapidations et 'les détério« rations de l’usufruitier, pour eii tirer te ll'p a rti que
«• de droit. Q u ’e n fin , à l’égard de la maintenue en
«■jouissance, elle n’a plus d’o b jet, d’après la suppression
'«•^décrétée et publiée de l’effet rétroactif donné à la loi
■
« du 17 n ivô se, et que d’ailleurs c’étoit une action'pos« sessoire, d e. la compétence du juge de paix.;
.
«Attendu enfin que les demandeurs n’ont pas" d’action
« actuelle, en p artage, dès que la citoyenne Cliristoplde
5
�. , .
10 5
. ,
«î a l’usufruit universel, et que leur droit n’aura scm.ciTeC
« qu’à la cessation légale de.’ cet usufruit; îc
:
, « L e tribunal ,de fam ille, sans s’arrêter au contrat de
« mariage de. Louise Cartier ? quant à la r e n o u e . utiou
« 'par.-.elle faite à:là;succession de son. p è r e ,■
à. l’égard:des
« biens situés en pays de'-droit é c rity déclare ladite rc->
a nonciation /nulle .et ‘de nul. effet yiefc , en . tant que de
a besoin, déclare ladite Cartier restituée; et néanmoins,
« ayant égard au testament de François C artier, en date
« dû 3 août .176 9 , en ce qui concerne',le,l'.'gs cf usufruit
e fait A M arguerite C hrîstôphle, sa veu ve, l e q u e l tes ta
« m e n t, en cette partie, .Sortira' son plein et entier.effet,
« déclare les demandeur^ non reeev'ables’èn l e u r demande
« en privation d’usufruit; cl,;sur la demande en partage
«, par/eux formée, y tks déclare quant à présent tl oa-rece™
« vàbles en icelle.; sau f'a 'eux. ¡vse pourvoir a i n s i ' quüils
« .avisero n t, -Înr-Sockiia cessation dudit usuhüit ,-dédite« rant , en tant que de b eso in , le testament du 13 août
« 1769 nul efc de nul effet, quant aux institutions d’hé* r-itiçrs jjpQur-.vice dfe p réten tion .d e François-C artier,
a posth um e, non ¡compris, auxdites mstitutiorisi Sur le
« surplus dés *demandes, met quant, à présent-les parties
* liors dç cause ; compense les dépens , etc. »
;
Cette décision, aussi obscure dans ses motifs qu’injuste
dans, ses;d isp o sitio n s,; blessé évidem ment les intérêts de
Jean Cartier et eeux de la; fam ille, en j?e.quelle:rappelle,
contre les principes les-plus évidiùis, une fille ¿renonçant©.
Jean Cartier s’est pourvu par appel au tribunal civil du
départem ent : et,.com m e su ni ère -et scs autres frère et
�.
.
. / 11 \
.
sœurs étoient en cause, il les a également intimés. Il de
mande au conseil de vouloir bien l'éelairer sur ses moyens
de défense. Cette cause présente un assez grand intérêt
dans sa discussion, comme dans son o b je t, et demande
une certaine publicité, pour q u elle soit m ieux connue
dans ses détails.
J U E C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a pris lectu re, i ° .
du testament de François ‘C a rtie r, du 13 août 1769 ;
20. du contrat de m ariage de Louise Cartier avec M arc
B arrière, du 2 6 'fé v rie r 1786 ; 30. de la décision du
tribunal de fam ille, dont est a p p e l, en dato du 8 ven
démiaire dernier,- 40. de l ’ e x t r a i t m ortuaire de François
C artier, du 16 niai 1791 ,• ensemble du m émoire à con
sulter,
:i. J • . ' • ' ’
'
E S T IM E que la décision du tribunal de famille est
injuste et contraire aux principes, dans toutes les dispo-1
skions q u i concernent Jean C artier *, ce sont aussi les seules
qu’on doit Exam iner, attendu qu’il lié s’elèvè pas de diiliculté entre le fils aîné et la m ère, et les autres frère et
sœurs non mariés •, d'ailleurs Louise Cartier , lemme
Bar x’iè re , ne se plaint pas de la disposition qui a con
firmé le legs de M agdeleine C ristop lile, mère commune.
P o u r mettre plus de clarté dans cette discussion , oii
suivra le m êm e ordre qui ri été adopté par les arbitres
de -fauivllè ; il est im partant a exam iner d'abord quel
�.
' 12 ^
.
-Uct doit avoir la renonciation de Louise C a rtier, femme
B arrière, parce que dans le cas où cette renonciation
oroit valable , Louise Cartier est sans in térêt, comme
ans qualité, pour attaquer le testament de son père.
. Or-, la validité de la. renonciation ne peut faire la
matière d’un doute dans notre droit français. La renon
ciation des fdles à succession future étoit regardée comme
une disposition judicieuse , plutôt que comme l’effet d’une
injuste prédilection. .Le p è re , prem ier législateur de ses
e n f a n s , . est toujours.censé prendre le meilleur parti pour
eux ; aussi ju g e o it-o n qu’une renonciation faite par une
fille , m oyennant un certain p r ix , étoit plus solide que
l’espérance; de grands biens à, venir , qui peuvent se
perdre par une .infinité d’accidens que la prudence
humaine ne peut, éviter. . ._ - .
r
Ces sortes de renonciations, d’a ille u r s n ’avoient été
admises qu’en faveur des m âles,' et il est m alheureux
sans doute que dans de certaines circonstances les pères
aient abusé de leur "p o u vo ir, en obtenant de leurs filles
des renonciations ¡pour des prix m odiques, et peu pro
portionnés à leur fortune j car les. renonciations ou for
clusions étoient une «des grandes et belles opérations de
notre droit*, c’étoit.le seul moyen d’éteindre les procès
dans les familles.
_ A u s s i toutes ; les fois qu’il y : avoit des m âles, les re
nonciations faites «pav les-filles, en pays de droit', écrit ,
étoient ¡valables,, pou rvu qu’elles fussent faites par contrat
çle mariage. L>est ce que nous enseignent tous les auteurs
qui ont traité la m atière, comme L e b ru n , dans son
�—.,
r
^
( 13 )
.
#
traité des successions’*'tit. ■
des renonciations, liv. 3;
cliap. 8. d’Espcisse, tom. 2 , p. 3 6 3 , et Lacom be , an
mot ren o n cia tio n , section première.
Les arbitres de famille n’ont pas attaqué ee p rin c ip é
en thèse générale; ils ont dit seulement qu’il l'alloit',
en pays de droit é crit, que la renonciation fût expresse
et directe , et qu-î ces deux caractères ne se rencontroient
pas dans celle de Louise Cartier ; elle n’a renoncé , disentils , qu'au*.profit de l’ héritier que scs père et m ère ju-=
geroient à propos d’ins'tituer; les père et m ère n’oat?
pas fait d’institution après ce mariage ; 011 en a c o n c l u
qu une renonciation'conventionnelle ne pouvant s’étendre
dune personne à une au tre, ni d’un cas à un au tre,
aucun des enfaris de François Cartier ne pouvoit s’ad
juger cette renonciation, ni l’opposer à Louise Cartier,
q u i, selon e u x , n’a pas renoncé valablement aux biens
de droit écrit.
^
'
.
Ce système est une erreur en point de droit. Il est de
principe que toutes les fois que la fille a ren o n cé, en
faveur de ceux qui seront institués , la renonciation p ro
fite aux m aies, quoique le pere n’ait pas iait de testament.
C’est ce que décide le savant D um oulin , conseil 55 ,
tome 2 , page 968 , nom bre 6 , o ù , après avoir dit que
la renonciation de la iiîle étoit valable, lorsqu’il y avoit
des milles , ajoute : E t tain 7?wscuïos tune institutos ,
quàm instituendos , quoniam institutus propriè is est,
qui témpora m ortis instituentis talis in ç c n itu r , ciun
d voluntas sit am bulatoria , ifno illud p a e t uni non
restringí tur ad liberos rnasculos institutos j et sic n o n
�,
( i4 )
.
(
obstat quod pater decessit ab in testa to, sed satis qubd
non videtur mutasse vohintatem.
'
L ebrun , à l'endroit déjà ciLé, nombre 4 , dit : « Q u’au
« cas qu’une fille eût renoncé en faveur de ses f r è r e s q u i
« seraient institués par le testament de son père , la
« renonciation 11'en est pas moins valable , quoique dans
« la suite le père n’eût point fait de testament*, car com m e
« on peut croire que la clause n’a été a p p o s é e que contre les
« exlié.rédés, et à l’effet de les exclure du profit de la rc« nonciation, elle doit etre présumée apposée en faveur
« de ceux qni ne seront point déshérités, et qu’ainsi,
c< le père n’ayant point fait de testament, elle profite
« aux frères. ■
*>
R ousseau-Lacombe , au mot renonciation , section i erc,
nom bre 6 , tient le même langage; il d it, que quand la
fille a renoncé en faveur, des frères qui seront institués , sa
renonciation profite au frè re , quoique le père n’ait pas
fait de testament.
C ’est pour la prem ière fois d’ailleurs qu’on a entendu
dire qu’une renonciation, pour être valable, doit être
directe, parce que les renonciations n’ayant été introduites
qu’en faveur des mâles , ainsi que l’enseigne L o u e t, toutes
les fois qu’au temps de la renonciation il y a des mâles ,
la renonciation pure et simple est présumée au profit des
fils seuls. L article 3°9
coutume de Bourbonnois
en a une disposition précise, et A u rou x-D esp om m iers
enseigne encore celle .vérité : Que la renonciation soit
expresse ou tacite , d i t - i l , elle est valable en faveur des
m âles, et sorxt telles renonciations approuvées par la
�( i 5 ’) •
.
c ont urne générale de F ra n ce , tant en pays coutum ier,
que de droit écrit. L e b r u n , à l’endroit cité, nom bre 14,
dit que s i, au temps de la renonciation, il y a des fds et des
filles, la renonciation pure et simple est présumée laite au
profit des fils, qui en doivent profiter seuls, dans la pureté
des maximes. Il cite A ufrérius et Paul D ccastres, cons.
311. L e prem ier s’exprim e en termes très-précis : jid d e ,
quod s i sunt duce sorores J'ratrem ha ben tes, q u a n m i
ima renunticLvit hœ raditati -patsrnœ , in j'avoram J r a t n s , et non s o ro ris, videtur renunticisse. E n f i n , ce? t
une maxime certaine en d ro it, qui n est aujourd liui
ignorée de personne, et qui n'a pas besoin d un plus
grand développement.
Lors de la renonciation de Louise C artier, il y avoit
deux fils - que la renonciation soit expresse ou ta cite,
qu’il y ait eu un héritier institué ou n o n , sa renonciation
n en profiteroit pas moins aux mâles ’ et tant qu’il en
existe, elle n’a aucune action à exercer.
Cette décision termine sans doute le procès, et établit
le mal jugé de la décision arbitrale. Louise Cartier ne
peut pas exciper de la loi du 8 avril 1791 , p u isq u e, lors
du décès du p è re , cette loi n’étoit pas prom ulguée, et que
les arbitres en conviennent. D ’ailleurs, cette loi ne semble
s appliquer qu’aux forclusions coutum ières, et il s’agit
ici d’une renonciation en pays de droit é c r it , qui n’adniettoit pas les forclusions. O n pourroit donc s’arrêter à
ce point, qui juge toute la cause, parce que Louise Cartier,
étrangère à la succession, n’a plus de qualité pour attaquer
le testament de son père.
�( i6 )
'
^ ^
, Mais il est important de prouver que la renonciation
de Louise Cartier profite à J ea n , son frère, seul ; q u il
a été valablement institué , et que le testament de son père
est revêtu de toutes les formes requises.
.
Par ce testament, François Cartier institue Jean , son
fils,son héritier universel de tous les biens dont il mourroit
vêtu et saisi, à la charge de payer à L o u ise , M a rie , autre
M arie , ses sœurs , et au posthume dont sa fe m m e était
e n c e in te , la somme de 2,000 liv. et un am eublem ent,
chacun suivant leur état: pour laquelle somme et ameu
blem ent, il institue ses trois enfatis, et le p o sth u m e, ses
héritiers particuliers : si le posthume est un m ille, le
testateur lui donne mille livres de plus.
L e père a survécu long-temps à ce testament. L e pos
thume , dont la femme étoit enceinte , est m ort peu de
temps après avoir vu le jour. D epuis, il est né un autre
enfant, toujours pendant la vie du testateur, et cet enfant
est François Cartier \ le testateur est décédé.sans avoir
rien changé à ses dispositions ; on prétend que François
C a rtie r, second fils, a été p rétérit, et que le testament
est nul pour vice de prétention. Cette prétention est
choquante et contrarie ouvertement la disposition des lois.
L a question qu’on va agiter n’est pas. nouvelle • elle a
été traitée, exprofesso , par plusieurs savans jurisconsultes,
et décidée uniformém ent par différens arrêts. L ’insti tutioj 1
du posthume com prend tous les posthumes qui naissent
après le testament, lle n ry s, liv. 5 , quest. 1 1 6 , décide
que l’ institution d’un posthume , dans un seul cas , s’étend
ù tous les autres. V o ici comment il s'exprim e, nomb. 8 ,
�C 17 )
#
’
après avoir rappelé les anciennes et nouvelles lois, et
concilié toutes celles qui pou voient pavot tre contraires :
c< Il nous a donc été proposé qu’ un père auroit institué
« son héritier universel le posthume ou la postuume
« dont sa femme se trouveront enceinte après son décès ,
a et où elle feroit un fils ou une 1111c, auront lait le fi is
« héritier et légué à la iille une somme à titre d in-.titu« tion , comme encore où elle fero’ t deux; fils, il m st
« tue l’aîné et où elle feroit deux filles posthum es, les
« auroit laites héritières par égale, portion , et qa après
« ce testament, et le testateur v iv a n t, lai serait né une
« fille de laquelle sa femme pou v o it , lors d uait t,%sta« m en t, être enceinte, et depuis seroit encore né un fi ¡.s
« pendant la vie dudit testateur ? Nous avons hardim ent
« répondu, qu’encore que ce fils fût né du vivant du p è re ,
« il ne laissoit pas d’ètre com pris dans l’instilution f.u
« posthume dont la femme se trouverolt enceinte lors
« du décès, et d’autant plus favorablement que c’est pour
« faire- subsister le testament,* et lit pot l u s actus v a len t,
« qrunn u t pereat • et c’est en effet le fondement que
« Justinien prend en la loi dernière , C. de posthwn.
« hœredib. instituend. ad adjuvandam testatoruui vo« luntaiem . »
V oici comment s’exprim e cette loi : N obis i ta que eoruvt
sententiarn deciden tibus, cüm fr e q u e n liss im a s leges pus m in u s, testato runi vo /un ta tes adjuvantes : e x n a îtra
hujusm odl verborum com positione , ruptum fic r i iestainentuni vidctur ,* s e d , sivè vivo testa tore, sivè pont
morte/n e ju s , intra dcce/u m enses ti m o i ta t e s t a taris
�( i8 )
_
ntirnerandos, filiu s vel filice f u e r in t p ro g en iti, m aneot
testât or îs voluntas im m utilata , ncc pccnarn patia tur
prœ teritionis, q u i s nos filio s _n o n .prœ tcnit.
Hernys cite à l’appui de son opinion , celle du docte
Cujas , sur la loi conim odissim e , f f . de lib. etposthum .
et encore sur la dernière du C. qu’on vient de rappeler.
Ce savant auteur adopte la môme résolution, et llen rys
dit q u ’ i l faut s’en tenir à l’avis de ce grand jurisconsulte.
B r e t o n n i e r , sur île n r y s , d it, noml). 18 : Si le testateur
a institué le posthum e, dont sa femme pourroit être en
c e i n t e *, si plusieurs posthumes naissent, soit de la mémo
g r o s s e s s e , ou en diliérens tem ps, tous seront également
héritiers; il ajoute, nomb. suivant, q u e, si le testateur
a légué seulement une certaine somme au posthume qui
n a îtra , et qu’il en naisse plusieurs , la même somme
sera due à chacun. T e l est encoi'e le sentiment de P a p o n ,
dans ses arrêts, liv. 20 , noml). 13. I l rapporte un arrêt
du parlement de B ord eaux, qui a jugé que l’institution
faite en faveur d’un posthum e, par un testateur qui
m ourroit sans autre testament, s’étendoit tant au posthume
cle cette fois, qu’aux autres nés depuis le testament.
Catelan, dans ses arrêts, tom. 2 , chap. 62, dit qu’une
institution faite en ces termes: L a posthum e, dont m a
J'ém ule est en cein te, com prend tous les posthumes qui
n a î t r o n t de cette fem m e,, par légalité d’affection qui
est à présumer dans’ le testateur pour tous les posthu
mes qui lul s011t également inconnus -, il î-apporle
plusieurs arrêts qui l’ont jugé de cette m anière; l'un ,
du 1 mars 1668 ; un second du 4 avril i 6 5 6 ; un troi-
�t
\
t
'•
\
' --------- 1 9 )
sième du 6 mars 16 3 8 ; un autre du 9 mai 1642. L a
nomination de la fem m e, d it - il, fait présum er que le
testateur a eu en vue tous les posthumes qui naîtraient
d’elle 5 il ajoute m êm e q u e les jurisconsultes sont" allés ‘
plus avant ,* car ils ont décidé q u e , sous cette institu- '
tion-du posthum e, dont la fem me est enceinte, sont
compris tous les posthumes qui naîtroient d’une autre
femme. * •
• .*■).*.
.......
' "
O n voit que les auteurs sont uniformes sur cette
question.'Les arbitres de famille ont prétendu, au con-• traire, qu’ils étoient d ivisés/m ais que j depuis l’ord. de
1 7 3 5 , il ne p o u v o ity avoir de doute que l'institution
d’héritier ne s’appliquoit pas aux posthumes non conçus,
lors du testam ent, parce que les art. 49 et 5 o de l’ord.
de 1735 , vouloient que l’institution fût assez clairement
expliquée, pour désigner les enfaris nés et à naître. Mais
d abord il semble que les arbitres ont fait une fausse
application de l’art. 4 9 , parce que cet art. ne parle que
des institutions universelles , et non de l’institution par
ticulière pour ceux qui n’ont qu’un droit de .légitime. O n .
conçoit le m otif d e'cet art. Il est essentiel à ‘ la qualité
d’ héritier institué , que cet héritier prenne la place du
défunt après sa m o r t, et que l’ hérédité ne courre point
risque de demeurer vacante. Ce scroit une institution
idéale et chimérique ; voilà pourquoi cet art. dit que
1 institution d’ héritier ne pourra valoir , si celui ou c e u x ,
au profit de qui elle aura été faite, n’ étoient ni,nés ni
connus -lors-du décès du testateur. L ’art. 5 o est le pre
mier qui parle* de ceux qui ont droit de légitim e. A
�( 20 )
_
,
la vérité il veut qu’ils soient instituas héritiers au moins
en ce que le testateur leur donnera , et les institutions
faites en les appelant par leurs noms , ou en les dési
gnant de telle manière que chacun d’eux y soit com
pris; ce qui aura lie u , même à l’égard des enians qui
ne seroient pas nés au temps du testam ent, et qui
seroient nés au temps de la m ort du testateur. Mais ,
loin de v o ir dans cet article un m otif d’annuller le
testament pour vice de prétérition, on n’y v o it, au con
tra ire, que la confirmation des principes de droit écrit,
suivant lequel le posthume doit être institué. Il est
évident que l’ord. n’a point d érogé, ni entendu révo
quer la loi dernière du code qu’on a cité plus h a u t, non
plus que l'explication, qu’elle a reçue de la jurisprudence
et des interprètes du droit. R ien ne le prouve ni ne le
fait présum er, et comment même p o u rro it-o n appe
ler par son nom un posthume qui n’en a pas encore ?
XI n y >a nen d assez précis dans la rt. de l’ord. pour en
induire qu elle ait entendu déroger aux principes qu’on
vient d établir.
En m i m o t, comme le rem arquent les jurisconsultes ,
il vaudroit m ieux dans le doute adopter un parti qui
tend ii conscivei le testament, plutôt que celui qui.tend
à le détruire. O n ne peut pas dire d’ailleurs qu’il y ait
p ré ten tio n , des que la femme est nom m ée, et que le
posthume qui naitia delle est institue ; on doit néces
sairement appliquer 1 institution à tous les posthumes à
qui elle donne le jour.
E n résum ant, .Jean Cartier a été valablement ins-
�( 21 )
titué ; il n'y a point de prétérition dans le testament
de son père. L a renonciation de Louise Cartier doit
profiter à son frère , dès qu’elle est dirigée au profit de
l'héritier qui seroit institué. Quoique cette disposition
soit au fu tu r , et que Jean Cartier fût dès lors institué,
néanmoins la clause ne peut concerner que lui ; il
étoit institué par un testam ent, qui est un acte ambu
latoire et révocable à volonté ; son institution ne devoit
prendre effet qu’à com pter du décès de son père , et
dès que le testateur a persisté dans sa v o lo n té , en ne
changeant rien à ses dispositions, la renonciation ne
s’applique qu’à lui seul.
Il
est inutile d’exam iner la disposition du jugement
qui a confirmé le legs d’usufruit ; aucune des parties
ne s'en plain t, et Jean Cartier lu i- m ê m e , loin de la
contester, en a toujours soutenu la validité; la décision,
des arbitres de famille doit donc être confirmée en
cette partie.
'
D élibéré à R io m , le 19 n ivôse, l’an 4 de la répu
blique française } une et indivisible. P A G E S .
T O U T T É E , A N D R A U D , GRANCHIER,
T O U T T É E , je u n e ; G R E N I E R , D E V A L .
A
RIOM
DE
L’ I M P R I M E R I E
DE
LANDRIOT.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Cartier, Jean. An 4?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Touttée
Andraud
Granchier
Touttée jeune
Grenier
Deval
Subject
The topic of the resource
successions
posthume
droit écrit
tribunal de familles
conflit de lois
Description
An account of the resource
Mémoire et consultation pour Jean Cartier, propriétaire, habitant de la commune de Saint-Germain-l'Herm, appelant ; contre Louise Cartier et Marc Barrière, son mari, officier de santé, habitans de la même commune, intimés ; et encore contre Magdeleine Christophle, veuve de François Cartier ; François et Marie Cartier, tous citoyens de la même commune, intimés.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 4
1769-Circa An 4
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0109
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Germain-l'Herm (63353)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53650/BCU_Factums_M0109.jpg
conflit de lois
droit écrit
Posthume
Successions
tribunal de familles
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52951/BCU_Factums_G0408.pdf
06fcad84cc237c3f3e6b3aab12fe9b51
PDF Text
Text
POUR RÉPONSE
Aux O bjections des Sieurs D E
G U I L L E M de Verrieres.
M
R
C o lo n g e avo it pu prefcrire' & avoit
prefcrit la propriété de l a m o n ta gne
d e Chabaniol par une jo u iffan te d é 3 2 a n s ,
depuis fon contrat d e m ariage de 1 7 0 9 j ufqu'a
la v e n te fa ite; à Mr. D auphin de M o n t r o d e s e n
1 7 4 1 par conf équént M adam e d e V i l l e m o n t
héritiere de M r de M o n tro d es , fon p e r e , fa ifa nt
valo ir la poff effion de M r. C o lo n g e s , eft à' couvert de l'éviction.
‘
L a "donation^ en1 avancem ent d’h o irie e ft: un
t i t r e
f i n
g
u
l i e
r
^
O
•
r
r
r*
Car bien ‘que cette donation foit fujette à
A
�r á p p o r t , comme: toutes -celles-qui font- faiteYern
ligne dire&e , en cas que le Donataire veuille*
fe porter héritier*
v v
; • j:-.'
Néanmô’i W , : même-. en c e n c a s . / i í ' ñ V í í 'o b ligé I
' .1- V-'
^
,
1
:
a rapporter en-nature qu autant que- la îchoie^f
eft encore en ^ . v ’pofleffion : même , Iorfqu'elle
y ¿ e í t , J l : a l’option d e ,la rapporter en e ie n c e
ou de^moins prendre. Conferre a u t. minus tanto.
■ f—
»._ _ — : . -—* • ■*?acili ^ r
: • ! ' ■ . :• \
, hI
■ )
S ’il. né. la^poiTëd e - p l u s , s’il In ve n d u e-, fans^
doute il n’eft obligé, q u ’au rapport, de la valeur.
Jamais s¡,íqoh éjiriet¿ jn ç jjpeuvirât contraindre le tiers acquéreur à rapporter, la chofe. I l n e '
pei*\(yV en; \ a ^ o i ’r, da,utsre V.raifbh', i î c e h ’e s
parce que le. donataire qui tfajVendüe * la poÎïe- doit alors à'titrefirigulier.
P ar le^miple du'^ i
coRé.riu.çr^qui,[ a g rjès¿. J ’ouy; ç r.tu r e de, là fuccé/îion,
ve n à ieul un'fonds de cette fùpceffion , .qui étoit<>)
indivis- avec. íes autres, cohéritiers./.Ceux-ci p e u - -
{ent.forcit,^ç.quéreuç^UujappÀM ,i p.ar.ce¿qu’il r.I
ne . i
°
,
ÍW,?D¡»!l‘ ^ r f e l : . &^ P 3 riÍ.nd¿vÍs:jr-t
tanj.,pc?ur Jui.jqug0po«r[Æs,;ç aW ritjetîii _ _ û r,i-:
Lé. ^àonajj aire,^çn;].avancement , d’hoirie . 'p eu r .
donc venclre'dès le moment de 1an d;on:aùon•,[, & .^ •
avw j 9 ttsœwrc> 489i!S9HKb
ris
fuccemon elt o u ve rte , la vente ne^pieu^n^tre,*;*
r é v g ( J 4 ^ , y p ^ o l l e ^ o S f t ^ ‘ t“ )KoqH.1!J[fleti'P6uvje Jit
�a
’ W
forcer l’acquéreur à rapporter la chofe m ê m e ,
au partage de la fucceflion.
Il n’a donc pas vendu la chofe d ’autrui , il a
vendu Ta chofe propre. •
Mais cette chofe, il la poiTédoit donc à titre
fingulier. D o n c encore il pouvoit prefcrire , dès
qu’il poiTédoit de bonne f o i , & q u ’il ignoroit le'
vice de la pofleflion de fon auteur.
Ainfi Mr. Colonges à pu prefcrire par une
pofleflion de 31- ans, depuis fon contrat de ma
riage jufqu’à la vente q u ’il a faite à Mr. Dauphin
de Montrodés,-- t
■
’ . ■■
Et notez q u ’à* l ’époque de cette venre, l ’ou
verture de la fucceflion du fieur Garnaud de la
F a b rie , n’étoit pas encore arrivée. L e fleur G a r
naud de la Fabrie n ’eft mort que plufieurs années'
après.
r.
?•
.
Si les héritiers- du fleur de Coteuge euflent'
formé'leur a & io n ’contre M r. Dauphin de Mont-*
rodés aufli-tôt'- après fon acquifition, & ' a vant’
l’ouverture de la fucceflion du-, fieur Garnaud d e
la Fabrie, on le leur a déjà dem andé, on le leur
demande encore , quel fort auroit eu leur a & i o n ? ’Eh- quoi ! pourrôit-elle être plus favorable pour'
avoir encore attendu 29- ans- de plus à l’exercer ? z°v Le fieur’ Garnaud de la-Fabrie ayant cefie
d’être détèntèur de la montagne de Chabaniol len
jour. dii; mariage de Mr. C o lo n g e s en 1 7 0 9 1 , les**
3
�' r
^
héritiers de Jacques de Coteuge n’ont plus eu
contre l ui , ou les héritiers, qu’une a&ion perlonnelle qui a pu iè prefcrire, 6c qui eil prefcrite.
On l’a établi dans le Mémoire à confulter , par
l ’autorité de C ’ujas & par celle de Dumoulin.
C ’eft en vain qu’on fait effort de la part des
Sieurs de Guillem pour écarter . l’application de
la do&rine de ces deux grands Jurifconfultes :
il fuffit de r en vo yer à la le âu re des paffages qui
ont été indiqués dans le Mémoire ; & pour rom
pre abfolument tous ces efforts, voici une nou
velle autorité dont, fans .doute , on n’entrepren
dra pas de combattre lapplicatÎon.'
o
P o t i e r , dans Ton Traité du prêt à ufage n.
4 7 , après avoir dit » que l’emprunteur & Tes
» héritiers ne peuvent oppofer aucune prefcrip» tion pour fe difpenfer de rendre la choie pré» tée ¡lorfquelle f e trouve en leur pojjejjion : car
» la poffeflion en laquelle quelqu’un eft d’une
» chofe , eft toujours cenfée continuer au même
» titre auquel elle a c o m m en c é , & c . Il ajoute.
M a is f i La chofe prêtée ri était plus par devers
iem prunteur ou fe s héritiers , l'aclion du prêteur
fe r oit fu je tte à la prefcriptLon ordinaire de trente
ans a laquelle fo n t fu jettes les autres actions.
Le même Auteur , dans le Traité du D é p ô t
n. 6.7, après avoir établi le même principe gé
néral à l’égard du dépoiîtaire & de Tes héritiers
�5
qui ne peuvent prefcrire par quelque temps que
ce foit , tant que la chofe donnée en dépôt eft pardevers eux , ajoute également:
» Comme c’eft la qualité de détenteur à titre
i> de dépôt qui réfifte à la prefcription contre
» la demande en reftitution du d é p ô t ; lorfque
» le dévofitaire n'ef t pas détenteur des chofes qui
» lui ont été données en dépôt , rien ne l 'empêche
» d'oppofer contre cette demande la prefcription
» trentenaire qui a lieu contre toutes les actions
» p e rf o nnelles.
Enfin, mêmes principes enfeignés par le même
Auteur dans fon Traité du contrat de nantiff ement.
5>
5>
»
»
» M a is lorfque le créancier ne poffede plus là
chofe qui lu i a été donnée en nantiffem e n t
quand m êm e cefero it par f a fa u te q u 'i l auroit
ceffé de pofféder , l' action f e prefcrit par l a
prefcription ordinaire¿
M . P R O H E T , Rapporteur.
M e. A N D R A U D , Avocat.
F A U C O N , Procureur.
— ...
A
-........................ ..
R I O M.
Chez M. D É G O U T T E , Imprimeur-Libraire , Place des
Taulles 1774.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Carraud d'Urbize, Louis-Jean. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Prohet
Andraud
Faucon
Subject
The topic of the resource
ventes
alpages
domaines agricoles
antichrèse
prescription
coutume d'Auvergne
avancement d'hoirie
successions
possession
généalogie
Description
An account of the resource
Titre complet : Observations pour réponse aux objections des Sieurs de Guillem de Verrières.
Table Godemel : Antichrèse : si celui qui possède à titre précaire ou pignoratif ne peut jamais prescrire, en est-il de même à l’égard de l’enfant donataire qui a reçu à titre d’avancement d’hoirie, l’immeuble antichrésé ; a-t-il possédé civilement animus domini et a-t-il pû prescrire la propriété s’il s’est écoulé trente ans depuis le jour de la donation ? si le don en avancement d’hoirie n’est qu’une disposition conditionnelle qui est censée n’avoir jamais existé, lorsque le donateur se déclare héritier et que les biens rentrent dans la possession du donateur, le tiers-détenteur qui a acquis l’immeuble du donataire, autorisé à vendre, peut-il opposer lui-même la prescription trentenaire ? dans tous les cas si la possession n’avait pas atteint cette durés, cet acquéreur de bonne foi pourrait-il être tenu de la restitution des fruits antérieurs à la demande ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1661-1774
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
5 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0408
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0406
BCU_Factums_G0407
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52951/BCU_Factums_G0408.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Diéry (63335)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
alpages
Antichrèse
avancement d'hoirie
coutume d'Auvergne
domaines agricoles
généalogie
possession
prescription
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/52949/BCU_Factums_G0406.pdf
7123946c78d5296185539f452ee00462
PDF Text
Text
M É M O IR E
'
A
. 'V *
0
•
C O N S U L T E R
ET CONSULTATION.P O U R M r. L o u i s - J e a n C A R R A U D D ’U R B IZ E ,
Chevalier de Saint Louis , ancien Lieutenant-Colonel
d’infanterie , Défendeur.
1C O N T R E les Sieurs de G U IL L E M
dt Vorrierès , Demandeurs.
Chevaliers¡Seigneurs
12 Mars 1661 , M e. Jacques de S erre, Avocat , vend
à Jacques de Montal , Seigneur de C oteuge, la montagne
de ,Chabaniol pour la fomme de 25oo liv. , payable aux
termes ftipulés, & cependant l’intérêt, avec pact e de rachat
'que le vendeur pourra faire quand bon lui femblera.
■ Même jour, 1 2 Mars 16 6 1 , fécond acte entre les mêmes
Partie,par lequel Jacques de Serre vend à Jacques d e Coteu_ge la faculté, de rachat qu’il s’étoit réfervée par la vente de
’
•
' '
A ,•
�, ■
%
®
__ _
• <•
♦-
L*«*'
‘ la montàgnè de Chabaniol, faite le même Jour, moyennant
la fom m edé 1760 l i v . , également payable- aux termes ac
cordas. ~
i
/
Âinfi Jacques d eSerre étoit créancier de,,, . 4200. liv.
JaCqûes+de./Co£enge lui paya . .
liv.
, X * y. “
^ ■
•* / V
‘
— rr-r-:
' IJ demeura',débi't;eiy: deft . .
. . .. . . .
(
14 À'vril1'id 7 o ., Pierre .de Serre ,, fils de Jacques.yî'cejie
à "Jean Garnaud de la Fabrié jJbh'beaïi^frej’éj' en paiement
d e l à dot de fa-fœur , la fonmie de 23 2ü -livî à, lui reftéè
due de la vente de 1661.
_
8 ïj'évfrier i
7 vSenterice aü^prcifif ’rie >.Teatr.Qârnaud ,
qui condamne Jacques de Liôtengeyà^payer dajiis-iix m ois,
le capital de 2320 liv. , 6c 34.8 liv. à quoi montoient les
intérêts ,,6* fautc^de ce faire } ledit temps pajje déclare
le contrat réfolu /comme non - avenii , fuivant les claufes
’ de le~ troubler \ ùc.
28 Mars 1683, a£le inftrumentaire par lé miniftere d’un
N otaire, par lequel Jean Garnaud déclare à Jacques de Côteuge , qu’en vertu de la Sentence de 16 S 1, il va fe met
tre en poiTeflion de la montagne de Chabaniol..
Jacques de Coteuges répond , qu’il ne veut empêcher
que le Sieur Garnaud ne jouifle des fruits de ladite monta
gne pour l’intérêt qu’il lui doit de la fomme de 25 20 liv .,
& qu’il continue ladite jouiflance jufqu’à ce qu’il pourra
lui payer ladite fomme de 232a liv. , & fans préjudice des
arrérages.
,fiJean Garnaud répliqué , q u il accepte, ladite déclàration
& confentement dùdit. Sieur de C oteuge, & fuivant icélui,
lui déclare qu’il jouira dorénavant dé ladite montagne ,
pour ladite fomme de 2320, liv. à hu due en principal], & ju fqtià ce qu il en fera.pàyé^ fans préjudice dçs. arrérages qüi
reviennent à la fomme dé jBo liv-; comme àuifiyfans préjudice'des frais & dépens.. D e tout quoi, le Notaire donne
•a£te aux Parties qui lignent cet a£le.
�26 Octobre i<?p4,M r. Garnaud delà Fabrie donne quit
tance à M r. de Coteuge de 580 liv. , montant des arréra
ges fixés par l’ade de 1683, & des frais.
Depuis l’a£te de 1683 , M r. Garnaud de la Fabrie jouit
paifiblement de la montagne de Chabaniol jufques au ....
1
j Janvier 1705), que M r. Garnaud mariant fa fille avec
M r. Colonges, après l ’avoir inftituée fon héritiere} conjoin
tement avec Madame Carraud , fon autre fille , lui fit un
avancement d’hoirie , dont la montagne de Chabaniol fait
partie. Il y a claufe dans le contrat de mariage, par la
quelle M r. Colonges eft autorifé à vendre les biens donnés
a fa femme en avancement d’hoirie, à la charge de l’em
ploi.
M r. Colonges jouit aufli paifiblement de la montagne de
Chabaniol depuis le 17 Janvier 1705» jufques en 174.1 ,
c’eft-à-dire pendant plus de 30 ans.
6 Mars 1741 , vente de la montagne de Chabaniol par
M r. Colonges à M r. Dauphin de M ontrodés, moyennant la
fomme de 2200 liv.
M r. de M ontrodés, & après lui Madame la Marquife de
V illem on t, faü lle , ont poifédé tranquillement jufqu’au 2
Novembre 1769 } que Madame de Villem ont a été affignée
en défiftement de cette même m ontagne, à la requête de
M M . de Guillem , héritiers de Jacques de Coteuges , qui
ont aufli demandé la reftitution des fruits depuis 1683 >
époque de la mife en pofleflion de M r. Garnaud de la Fa
brie , fous offres de déduire fur les jouiiTances, le princi
pal de créance de 2320 liv. & les intérêts.
Madame de Villem ont a dénoncé aux héritiers de M r.
Colonges, qui le font aufli de M r. Garnaud de la F a b rie,
leur grand-pere maternel.
Les héritiers de Jacques de Jüoteuges difent qu’aux
termes de l’a&e de 1683 , le Sieur Garnaud de la Fabrie
n’a joui de la montagne de Chabaniol qu’à titre précaire &
pignoratif, d’où ils concluent qu’ils font bien fondés à deÀ z
11
j
�4*
...
mander le défilement & reftitiirion des jouiiTances, à dire
d'Experts , dbpui? l’ade de 1683 , en déduifant le capital
de 2320 liy, & les,intérêts- que ce capital a produit, en faifdnt un:compté par' écHelette', année par année, aux impu
tations de droit.
Ils foutiennent, qu’en tout cas il devroit'au moins léur
être fait, raifon de ce que la montagne vaut a&uellement
au-deflus'des 2320 liv. par eyx reftées dues , ôc qu’il devroit
suffi leur être" fait ‘ raifon depuis 1683 des intérêts de la
fômme de 1.8.80 liv. , que Jacques de Cotenge avoit payé
fur le prix dé la v e n te, en faifant pareillement un compte
par échelette, année par année.
Pour fonder leur prétention, ils difentqueM r. Gp^naud
de la Fabrié n’a pas puftipuler en ir<^83 une antichrefe auffi' ruineufe pour le débiteur 3 puifqu’aux termes de cette
antichrefe, il auroit été en perte de l ’intérêt des 1880 liv.
qu’il avoit payées fur le prix de la vente.
D e fon côté , Madame de Villem ont répond i°. Q u ’à
fon égard il ne pourroit y avoir lieu à une reftitution de jouif^
iances, M r. Dauphin de Montrodés, fon pere, étant acqué
reur de bonne foi par le contrat de 1741 , n’ayant point
connu le vice de la poifeilion de fon vendeur. Mais elle
va plus loin , & dit 20. Q ue même par rapport à la deman
de en défiftement , elle en eft à couvert par la prefcription
non pas à la vérité par la prefcription de 10 & 20 ans, qui
n’eft point admife en; Coutume d’Auvergne ; mais par celle
dé 30 ans.
Il
eft vrai, qu’il n’y a pas 30 ans de la vente de 1741 à
l'exploit de demande de 1769 ; mais elle prétend que la
pôiTeflion de fon auteur doit être ajoutée à la fienne, & que
cette, poifeflio.n de M r. C olonges, vendeur, a été utile pour
la^
Garnaud de la Fabrie n’a eu ■
qu’une poiTeiTiori précaire ôc pignorative , infuffifante à
preferire depuis l ’a&ede 1683 , jufques au i f Mars 170^ 3
�s
époque du contrat de mariage de M r. Colonges ; elle dit
que de cette époque, M r. Garnaud de la Fabrie ayant
donné la montagne de Chabaniol en avancement d’hoirie à Madame Colongeô,' aveci pouvoir à 'M r. Colonges* de ven-'^
dre, M ç. Colonges qui ignoroit le vice de la poifeilion de
M r. Garnaud de la Fabrie, fori beau-pere, a eu dès-lors une
pofleiTion de bonne fo i, utile pour acquérir par la voie de
la prefcription : que même 1&; préfeription s’étoit accomplie
fur la tête de M C o l o n g e s lors de la vente' de 1741
y
ayant alors plus de
ans du contrât de mariage dè 170P 1
Les héritiers de M r."& de Madame Colonges , qui le font
àuiïï de M r. Garnaud de la Fabrie,difent de leur part,que M r.
Garnaud de la Fabrie ayant obtenu Sentence en 1687 , qui
déclarôit la vente de 1661 révolue , faute de paiement du
capital refté dû de 2320 liv. Il était rentré dans la monta
gne de Chabaniol pour en jouir déformais à titre de pro»riétaire. Q ue Tafte de 1583 ne déroge point au droit qui
ui étoit acquis par la Sentence de 16 8 7, qu’il n’avoit pas
déclaré dans cet a£te qu’il entendoit jouir delà montagne
pour les intérêts de fa créan ce, mais bien pour la fornrne ‘
de 2320 liv. à lui due en principal & que s’il avoit ajouté,
& jufquà ce q u il en fera paye , c’étoit de fa part une fimple faculté de rachat très-volontaire qu’il avoit accordée à :
Jacques de Cotenge; mais que celui-ci n’en ayant point fait
ufage dans 30 ans, la faculté de rachat avoit été prefcrite.
Ils ajoutent, que même à confidérer l’a£te de 168 3 comme
une antichrefe , on ne pourroit point le regarder comme
une afte ufuraire fit ruineux pour Jacques de Coteuge ,
ce qu’ils établiifent par lé rapport des baux faits par M r.
Garnaud de la Fabrie: baux, qui n’ont jamais monté à 120
liv. par année , & qui par conféquent n’ont point excédé
le légitime iatérêt du capital de 2320 liv., refté dû. Ils l’établiifent encore’ par le contrat de mariage de 170.9,, où cette
montagnô n’eft donnée en avancement d’hoirie , que fur T
le pied du produit de 120 liv. Ils letabliiTent enfin, parla
{
�\\v ’
5
vente que M r. Colonges en fit à M r. Dauphin de Mont^rodés en 1741 pour 2200 liv. ; quoiqu’il foit vrai que
l ’augmentation exeefïïve que les fonds ont acquis depuis
ce temps, en rendent aujoud’hui la valeur bien plus confidérable. Si d’ailleurs il paroît que le prix de cette monta
gne fût porté à 4200 liv. par la double vente de 1661 ,
la fingularité de deux actes dans le même jour : l ’un , où
l’on vend la montagne avec faculté de rachat, l ’autre, où
l’on vend cette même faculté de rachat , fait naître de ju£
tes foupçons fur lafincérité du prix , fur-tout lorfque l’on
voit par une longue fuite de baux , que cette même monta
gne n’a jamais été affermée au plus que 120 liv. , & que
80 ang après elle n’a été revendue que 2200 liv.
.Leshéritiers d eM r. Garnaudde la Fabrie difent encore,
qu’en confidérant l'acte comme une antichrefe qui pût donner
encore ouverture aujourd’hui aux héritiers de Jacques de
Coteuges pour reprendre la poiTeiTion de cette montagne ,
au moins ne pourroient-ils pas demander la reftitution des
jouiifances, qui même n’ont pu excéder le légitime intérêt,
que depuis 1741 , parce qu il faut bien distinguer l’antichroefe qui eit faite pour tenir lieu de l’intérêt d’une fomme
dpjnt il n’en eft point dû légitimement, de celle qui fe fait
pour une créance qui porre intérêt de fa nature , telle
qu’eft le prix de la vente d’un immeuble : dans ce dernier
cas , l’antichrefe ne contient rien d’illicite , quand même les
fruits du fonds qui eft abandonné en jouiifance excéderoient
1In térêt, parce qu’il y a double incertitude , l’unedesfruits
eue le fonds peut produire chaque année , l’autre procé
dant de la variété du prix des fruits qui peuvent s’y receuillir.
C ’eft la doctrine de Cujas, obferv. 1. 3 , chap. 35.
M ais, les héritiers Garnaudvont encore plus lo in , ôcils
difent , que quand même on jugeroit que fa poiTeffion de
M r. Garnaud de 1683 & 1705) n’a été que précaire ou pigno
rative ; cependant ils auroient prefcrit l’a&ion des héritiers
Coteuçïe.
�*
7
r
.
.
Ils conviennent bien , que celui qui poifede à titre pré
caire ou pignoratif, ne peut jamais prefcrire, etiam per
mille annos, commedit Dumoulin. Mais ils foutiennent que
ce principe n’a lieu } qu’autant que dure la détention du
"polieiTeur précaire , parce, que c’eft cette détention à titre
précaire ou pignoratif1qurréfifte à la pre’fcription ; au lieu
que lorfque la détention aceffé , rien n'empêché1cet an
cien poffeiTeur précaire d’oppofer la prefcription qui a lieu
contre toutes les a£tions perfonnelles.
T elle eft la do&rine des deux plus célébrés Jurifconfultes
:Cujas.& Dumoulin. L e premier dans fon cortimentairé du
code , 1. 7 , tit. *35>', fur la 1. cum, nbtijjimi, après avoir éta
bli la m axim e, que le détenteur précaire ne peut prefcrire
par quelque efpàce.de temps que ce fo it, réfoud cependant
qu’il eft un cas où il peut intervertir ; c’eft lorfqu’il'transféré
la détention .à un .tiers i &. c’ëft une exception qu’il admet
au principb‘ qü’il àyoTt établi \ E t intervertit unor'cafu
Domini pojfejjionem ; 'fiVrem qua'm poffidebïit^aüi ëxtr-atieo
tradidèri.t \ hoc môdo f.acit'l' utlDominus dejînat pojjidère ;
& re traditâ alii & vèrîditâtune fané intervertitur pàjféjjio.
É t à r égard de Dum oulin, c’.eft au Traité de ufur. queft.
6 i , ri. 409, in fine , qu’ji^réfoüd les deïïx quéftions : l une,
que1le tiers a'equéreur petit'p'rcfcrîré par dix ôc virigtJans,
quoique foii vendeur , ne pnt point prefcrire par aucun
tem ps, à caufe dèi'la .cjtlalité';de •fafpofleffiort'y fii •toutefois
le tiers acquéreur n’a pas connu la nature de la pofiefiion
de fon vendeur : ôc la f r o n d e , que le vendeur qui a fait
la ven te, quoique de mauvaife fo i, & fans déclarer le ^ice
ou la qualité de •la poiTeiTiori qu’il a v o ît, n’efl: tenu des
dommages-intérêts envers' le Vrai propriétairé3 que jufqu’à
30 ans : À 3 .ione cx'prïwi^coiiiraaiü r s ' ’■"
" r •
Ënfijjx lcff h^ricicis CiMttVigefc h. 'Gsrnaud terminent par
invoquer ,. ‘!4-Ta veut dés1 'qircqnftanccs. Originairement
'pr^opriétiirès
GftttbamM 3 en fu ite- créan
ciers du prix de la vent? cle cette montagne, vente réfolue
�r*
.par le rdçfaut -de .paiement'du .prijç^ mtfe.en poiTeiBon &
baux-à-ferme, qui n’ont point excédé ;le légïtime^intërêt
,de leur créance privilégiée, tant qu’ils ont confervé la
pofleffionjde cette montagne.; & lorfqu’eniïn elle a été
revendue, le prix de la vente,de 1741 Xe trouve encore
audeifous de ce qui leur étoit d û , puifque je prix de cette
_vente neft que de 2200 livres., & leur créance étoit 4e
23 20 livres.
Les héritiers Coteuge répliquent que l’a£te de 1683
.-contient évidemment une dérogation au droit acquis à Jean
vGarriaud par la Sentencet)de 1681 ; que dans cet^a&e,,
_Jacques de Coteuge dit qu’il confent que Jean Garnaud
JouifTe dej fruits & revenus pour l ’intérêt; ; et que Jean
Garnaud répond qu’il accepte la déclaration & confalte
rnent , & fuivant icelui, &c. qu’ainfi la jouiiTance a été
çonfprme, & par conféquent.pignoratif.
. À Tégard de1 la prefcriptîon oppofée, ils répondent
tqu-eu--admettant même les principes & autorités.invoqyés,
• foit'par; Madame de Villèm ont,, 'jToit par les H éritiers
Colonies & Garnaud, il n’y 'auroit,.pas de'prefcrÎption du
chef de M. Colonges.
C e n’étoit point à M . C o lo n ges, mais à Madame
Colonges que la montagne ,de Chabaniol avoit été donnée
■par le contrat de mariage dé 1705) ; ,& le don en avance
ment d’hoirie, qui lui en avoit été fait par M r. Garnaud,
fon pere, étoit accompagné d’une inftitution contractuelle.
Il eft bien vrai que Madame Colonges n’a recueilli la fuoceilion de fon pere, que plus de 30 ans après le contrat de
^mariage de 170^, & pluiieurs annéésraprès la vente, faite
-.j i:r:Mr. Colonges en 1741 ;,mais elle, a été héritiere de
Ion pere, & la montagne de Chabaniol ne lui avoit été
niée qu’en avancement d’hoirie. O r , l’acceptation de
.1 fucceflion de fon pere, par un effet rétroa&if, opere
-cette conféquence, qu’elle n a jamais joui à titre particu.. lier
�\ t \
ûp
lier , mais bien à y titreo uni ver f d de. la montagne de
Cha|ianiM ;Qii, <>l<ny ¿ ^ u e le'-lJceefTefiÿ a^itfe particulier
qui foit cenfé ignorer le vice de la pofleifion de fonAuteur;
au l^eujq^ie^i^e^fé^. unixeçfel e%:e$fé l&conrspîorQk: cet
te connoiiîance doit l’empêcher de prefcrire. DoncM onfieur
ôe Madame0;Colqnges' n’avouent pu -prefcrire pendant; le
temps qu’a duré leur poifeflion ; & à l’égard de celle de
Madame de V illem ont, o u .d eM :r.Dauphin de Montrodés,
fon pere , elle rvavoit pas duré .30.iins,.lors de la demande
qui a été form ée en 17ÎP.',
Vxon ■
; -i< r,r y .
. A •cette derniere ^objectiop, Madame de ‘V illem ont, '&c
les héritiers Garnaud répondent, e n c o r e q u e la raifon ne
comprend pas que l’acceptation , d’une fucceiTion)puiiTê
produire cet effet de rendre de mauvaife foi une pofTeiTioiv
antérieure , qui eût été de bonne fo i, ii l’on eût renoncé
a. cette; même fu cceflio n , r&; que Madame ‘Colongess’en fût tenue à fon don. •
.
; - Jtr
Madame de Villem ont fur-tout fait ce raifonnement, & .
dit: jrai acheté en 1741 de M r. de Colonges, qui avoit
pouvoir de vendre le bien de fa femme par une.claufe
e_xpreife du contrat de mariage.de 170p. J’ai, dès le mo
ment de la verit.e de . 1 741 , pu oppofer la prefcription du
chef de la poifeiTion de mon vendeur, puifqu’alors même
cette poiTeflion avoit duré plus de 30 ans. O r , je fuppofe
qu’auiîi-tôt mon acquifition, les héritiers Cotenge m euffent affignée en défiftement, ils auroient infailliblement
fuccombé , puifque M r. Garnaud étôit. encore vi vant, 6c
que Madame Colonges, fa fille, ne pouvait pas encore être
fon héritiere. Ma* condition a-t-elle pu changer, parce
qu’enfuite M ri Gàrnaùd eft décédé, & que Madame Colon~
ges a accepté fa fucceflion ?
*
Quid juris ?
M e.
.
t
.
.
A N rD R A U D ,
"‘
)L> 1
*
Avocat.
B
�10
ÈÉ
CONSEIL
SOUSSIGNÉ;
1 '■
1 E S T D ’A V IS * ï° . Que quand la demande de M ” . cfe
Guillem ferait fondée pour le principal, elle ne le feroit
pas pólli* les fruité, finon à compter du jour de la conteftâtionen caufe ; parce que , M r. de Montrodés à été
conftamment acquéreur & poifefleur de bonne foi , & que
celui <jui a joui de bonne foi, né doit la reftitution-des fruits
<|u-à compter dù jour de la ôonteftatioh en caufe.
a°. On ne croit pas leur demande recevabfe , même par’
rapport aiù défiftéfrient de là propriété de la Montagne , dont
la préfcHptioh’ pdroît être' aéquifé
Mad. de Villem ont
par la poflefllort paifibler d’e lle , dë fon pere Ôc de fes ven-,
deurs pendant plus de 30. années , qui eft le temps re
quis-pâr le ch'àpitre 17. de la coutume d’Auvergne pour toute
fòrte dé prefcription. L ’article i er. de ce chapitre d it, qu’il
n’y a en Aüvergne qu’une feule prefcription , qui. eft de
30. ans, à laquelle toutes-autres prefcriptions font réduites;
niais aufli.fuivant 1 article 2. d e ’c e ‘ même chapitre, tous
droits & aéHdhs, .cens j
> fërvitudés ôt autres droits
quelconques/ prescriptibles, foit corporels oü incorporels ,
fe preferì vent, a c q u i è r e n t p e r d f e n t par le laps & efpace
de 30- années coritittuéls & accomplis : l ’àrticle 3. n*affran-.
chit de la pi-eferi^tion, que ceux qui n’ont pas le pouvoir 6c
fâcuké7dë■
pburfuifrë leurs droits .& avions en jugement
cëhtrïidi£tôiï^\& Tàrtrclé 4, ajoute, qu’en cette coutume
la‘;pïéfctiptiôH!;dfe 3bv ans’tient lieu -dé titre
.droit coniti-1
tué & a vigueur de temps immémorial; d’où il fuit -, 'qü,0 n i
ne doit pas même diftinguer dans cette Province ii le poffefleur a été de bonne ou mauvaife foi ’, dè rnêrïie qu’on ne
le diftingue pas dans la poiTeifion ^immémoriale qui a la
force d’utt titre.
�•
**
*T.
Il
eft vrai que la pofleflion civile animo Domini eft requife : car celui qui ne poflede que naturellement , ne peut
acquérir la prefcription par aucun laps de temps, coriime
l ’ont établi tous les auteurs qui ont traité des prefcriptions.
;
Il
èft certain par cette raifon , que le fieur Garnaud n’auroit jamais pu preferire la propriété de la Montagne deChabaniol : car quoi qu’il eût obtenu le 8. Février 16$ i, une Sen
te n c e , qui faute par Jacques de Coteuges , de payer dans
fix mois le Capital ,de 2320 liv. & les 348 .liv. a intérêts
qui étoient alors dûs du prix de la vente du 12 Mars,i<ï<it,
avoit déclaré le contrat réfo'lu , comme non-avenu’, &Tavoit
permis à Jean Garnaud .de fe mettre en poifeifion ôc jouifÎiihce de la Montagne ., & quoique le 28 Mars 1683 >
fieur Garnaud eût fait nofifièr au fieur de Coteuge que
faute de paiement il alloit fe mettre en pofieilion de J;la
M ontagne , tout cela ne devoit être -conlipéré que comme
étant comminatoire,
c’eft l’eipece de tranfaûion réfultante des déclarations réciproques, que fçTpnt fait fignifier
les parties quia dû faire leur loi commune. O r , tout ce
que Jacques de Cotenge a r.confenti par fa déclaration ,,
que le fieur Garnaud a acceptée , a été qu’il ne voyloit em
pêcher que le fieur Garnaud ne jouit des fruits & revenus
de la Montagne pour l ’intérêt qu’il lui devoit de la fomme
de 2320 liv. & qu’il ne continuât la même jouiifance jufqu’à ce que lui fieur de Coteuge fut en état de lui payer
la fomme de 2320 l i v , ce n’eft pas là un délaiiTemejit de
propriété , mais feulement .de ,la jouiflance des fruits pour
tenir lieu des intérêts annuels ; ce n’eftconféquemment
qu’un contrat pignoratif, reprquvé en France , comme ufuraire, ou du mojns. réduit à l’effet d’une fimple délégation
de fruits pour le paiement des intérêts; contrat, <jui, non
feulement ne 'donne rauçun droit au Créancier joui (Tant
des fruits^ d’acquérir par prefcription le fonds & propriété
dûntil n’èft pas poflefleur civil ; mais qui n e m ic h e pas
�I2
I,
.même le débiteur de demander.en-tout temps; au créancier
'Jlé compte'des fruits qu’il; aura ,percu -i 'en- offrant de lui te■nir compte fur la valeur" des fruits -de.chaque année
vl?;ntéict'
■
capitalété
'"procKjdif'des iii‘térêfs,‘& iéiH^Fédüîfanf au taux permis, par
les Ordonnances^ que le créancier ne peut excédér fans
'ûfu.re''; c ë ’qiii fait’ gîtie; 'coüi/ire ï ’üfùre .né Te préfcrit pas'", la
'demande dé ce conhp,te elVimp^eicriptible.. '
• •
ï l eft Vrai que,'comiiné çlansTefpeçej la créancë proçér
' d.ôi,t H’iine véiïte de fçrïçjs^uqùe^tëcoriitrat':dp^ vente'favoLt
’ été-'rcifiIié^pâV Üné SénteVé.'qùi_ auttf rifoitiefcréàricier -ré'pfàèri’éàh’t dd vé'hdeiiV *à^ref ttrïïàtVs^l â*iét' é:du fonds ,
3(on/p.èütJ fôiirefilr''‘^üiéfla^^hVén’r îia "â ‘ lSt8 ,yâlàb'lc par trai\Ta£Hon^ de fu^ftituër^pour éviter le&" comptes & les dif‘cutions , les fruits de l?héritage aux intérêts, de ce qui refi j b i t y u M ü ÿ n x d ’ài.i^ant'pl'oC^*•qü'c la. valoir de l’un & dé
l fautiexétrOTt!a;neu'/prâs'cMlBi Mais ^ en exécutant même la
c$vfëriti$? .tfelle’q^eüe 1JayQit ''été faite , il eft certain que le
f i^ r 1CJarriàüd n’etôït' pas poffeifeiit: civil dé ' ïa propriété de
la Montagne ; qu’il n avoit droit que .de l ’adminiflrer pour
autrui ,' ôc ^d’en percevoir les fruits a fon profit -, jûfqu à ce
qu’onj îè rétîVbourkât .de' fdfii capital.. Il, ne dévpit donc ,pàs
AfVi=*
n *
'fa/'W
W
/Z AA ~ n i ’ l i o f ! ‘ * r i i i î
aft-
qu(ÿigcrênt?ôc^ôüHlraÂtpyufraù(?i:iiÎ^üaUtës 4 ui lé‘.réndpieht
incapable, dé preferirá la, propriété. " f
‘ - Mais' 1^ 0 U& Gar;iaúdJ' .a,qui fon pere'a donne ce bien
étï dëtl^cdrrirri^ èrt éíkíit ípíÍ^<ftáit^*j[o?fqm1ií'' i a Hnfina ^ni
iyop / :áuffltT
r.¿ Ôolpntgès ; a c i ^ t î i à i c é ^ p ^ t e l f é r é iy ljje m e iit?
âiittHa'^ôt^iP^k 1tdnipief du jofede fa donation : ëlle-ôi:
f ë f i ; .'(fótíH^ü.preferiré la1.pfojjriété} à1compter7du
f't Janviet n'yop ? 'On/exp'ofe'tfù’élie n’avoit.pa's encore re-
£ rl
�\
‘k*J
>
.1741 , à M r. ’de Montrôdés; L acaufe de fa pofleiTion ■
ira.vçit donçtpas encore,changé, 6c tout le temps qu’elle avoit
.duré ayok^été utile pour la prefcription : car, perfonne ne
(r;évQque^.en3cloutq,, ;que,: /ii donation d’un bien .particulier/t
quoique faite en ^avancement,d’hoirie par un pere à fa f ilh
quil marie >forme un titre fingulïer ,qiii conjütue unepoffejjion civile capable d’opérer^ la perfeription.
' T L ’acquéreur fuccede aux droits de fon vendeur, tels qu’iis
jétpient lorfqu’.il lcs. lui. /a.vendu ; ôc ainfi , -cpmme Ja Daniç: .de .Golonges étjoit 1devenue propriétaire par une 'pref
cription' <3e plus de1 32 ails lorfqu’elle a vendu x elle a bien
& légitimement tranfmis à fon acquéreur une propriété qui
lui appartenoit ^-quand elle n’auroit pas elle-même pofïédé
un temps aiTez longponr preferire ,1a prefcription fe feroit
achevée depuis 1741 , en la perfonne de fon acquéreur :
car , fuivant les Loix & le paragraphe 8 , aux inftituts de
ufucapionibus, l’acquéreur peut , fi cela lui eft utile , join
dre le temps de la poiTefTion de fon vendeur à celui pendant
lequel il a poffédé lui-même.
L ’acceptation que la Dame Colonges a fait depuis de la
fucceffion de fon pere , n’a pas pu préjudicier aux droits
précédemment dévolus à fon acquéreur : cette acceptation
n’a pas même pu effacer une propriété déjà preferite ; il
n’en auroit réfulté , qu’une a£tion perfonnelle contre l’héritiere , afin de l ’exécution de la convention faite en \683 ,
entre fon aïeul & Jacques de Coteuge ; action qui étoit
alors plus de deux fois preferite. Mais quant à l'action réelle,
l’acceptation de la fucceffion n’a pu la faire naître contre
auroit ;été
iy )èt~àrcvEirtîrcatioin jlfcrqu i~q U3rrtfe 11ert*5irroir en cor q po£fédé, en auroit antérieurement preferit la propriété à un
autre titre que celui d’héritiere. Il éft vrai, que fi elle l’eût
encore poffédé , ôc fi l’a&ion .perfonnelle contre le Sieur
Garnaud1ôefes héritiérs n’eût pas été preferite, fa qualité
d’héritiere l’aurok: obligée-de le livrer ; mais ne l’ayant
�14
plus, il ne pouvoit plus y avoir d’actio n réelle, ni contr’elle , parce qu’elle ne poffédoit pas, ni contre fon acqué
reur , parce que , tant de fon chef , que du chef de favendereffe , la prefcriptionde la propriété lui étoit acquife , la
Dame Colonges ayant pu valablement la prefcrire du vivant
de fon pere.
On croit donc , que les Sieurs de Guillem doivent être
déclarés non-recevables dans la demande qu’ils ont formé
contre la Dame de Villem ont, avec dépens, & à l’acquit
ter & indemnifer des frais & dépens par elle faits contre
fes garants.
Délibéré à Paris
ce
13
Novembre 1770.
M . P R O H E T , Rapporteur
D elam bon .
~
F A U C O N , Procureur»
A
Chez
M
artin
R I O M.
D É G O U T T E , Imprimeur - Libraire
Place des Taulles 1774.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Carraud d'Urbize, Louis-Jean. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Prohet
Faucon
Subject
The topic of the resource
ventes
alpages
domaines agricoles
antichrèse
prescription
coutume d'Auvergne
avancement d'hoirie
successions
généalogie
possession
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter et consultation. Pour Mr. Louis-Jean Carraud d'Urbize, Chevalier de Saint-Louis, ancien Lieutenant-Colonel d'Infanterie, Défendeur. Contre les Sieurs de Guillem, Chevaliers, Seigneurs de Vorrières, Demandeurs.
Table Godemel : Antichrèse : si celui qui possède à titre précaire ou pignoratif ne peut jamais prescrire, en est-il de même à l’égard de l’enfant donataire qui a reçu à titre d’avancement d’hoirie, l’immeuble antichrésé ; a-t-il possédé civilement animus domini et a-t-il pû prescrire la propriété s’il s’est écoulé trente ans depuis le jour de la donation ? si le don en avancement d’hoirie n’est qu’une disposition conditionnelle qui est censée n’avoir jamais existé, lorsque le donateur se déclare héritier et que les biens rentrent dans la possession du donateur, le tiers-détenteur qui a acquis l’immeuble du donataire, autorisé à vendre, peut-il opposer lui-même la prescription trentenaire ? dans tous les cas si la possession n’avait pas atteint cette durés, cet acquéreur de bonne foi pourrait-il être tenu de la restitution des fruits antérieurs à la demande ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1661-1774
1661-1715 : Règne de Louis XIV
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
14 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0406
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G0407
BCU_Factums_G0408
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/52949/BCU_Factums_G0406.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Diéry (63335)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
alpages
Antichrèse
avancement d'hoirie
coutume d'Auvergne
domaines agricoles
généalogie
possession
prescription
Successions
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53715/BCU_Factums_M0216.pdf
47a0bf12ee766875e43fbe9cdb44d392
PDF Text
Text
ni
/fr V c£t 'ù
MÉMOIRE
E N
R E P O N S E ,
SU R
LA
PR O PR IÉTÉ
/f/
yUj.< L , £
DES
ET
LE
PARTAGE
EAUX.
IfrhÀÛâ/'ï
’
y*/ ja.
y,^AJU)/vJg "’
A
de
l ’im p r i m e r i e
IMPRIMEUR
du
R IO M ,
de
L
ANDRIOT,
t r i b u n a l
1804. =
XII.
s e u l
d ’a p p e l.
��MEMOIRE
POUR
J e a n - A n d r è C A B A N E S , n otaire, habitant du
lieu d’A utrières, commune de Saint-C ham ant,
appelant de la sentence des requêtes du palais,
du 2-0 mai 1789 j
CONTRE'
P ie r r e
"
’
C O U D E R T , négociant, habitant de
la ville d’Aurillac intimé;
,
EN RÉPONSE AU MÉMOIRE DE L ’INTIMÉ.
“ ‘
t
T
•
•
.
.
cit. Cabanes a-t-il d r o it, à titre de servitude i pou r
l’arrosement de ses prés de l’Espinasse et du C lo u x , aux
eaux qui naissent dans le P ré du Chûteau, appartenant
au cit. Coudert ? C ’est la matière du procès soumis au
jugement du tribunal d’appel.
■
- A v an t de poser les questions auxquelles la contestation
A
�C a )
peut donner lie u , il est essentiel de rappeler les faits et
de présenter l ’état du lo c a l, qui sera d’ailleurs rendu
sensible par le plan géom étrique qui en sera mis sous les
y e u x du tribunal.
Il d é p e n d o i t de la terre de Saint-Cham ant, dont le cit.
Coudert est devenu acquéreur, un pré d’une étendue assez
c o n s id é r a b le , appelé le P ré du Château. Ce pré jo ign o it,
entre le nord et le couchant, à un petit pré appelé del
P ra d e l, qui étoit à la tête du pré de l’Espinasse, appartenant
à un nom m é M alp rad e, q u i , par une acquisition , avoit
réuni le petit pré del Pradel à celui de l ’Espinasse ; d’un
autre côté, et entre nord et m id i, le P ré du Château joi
gnoit en partie au pré du C lo u x , appartenant également
à M alprad e; mais au m ême aspect il y avoit un petit in
tervalle dans lequel le P ré du Château confinoit à des
terres appartenantes à différens particuliers, et c’étoitcet
intervalle qui em pêchoit la jonction des prés de l’Espinasse
et du C lou x , l ’un et l’autre appartenans à M alprade.
O n vient de pai’ler du petit pré del Pradel que M alprade
avoit acquis pour le joindre à celui de l’Espinasse. U ne
partie de ce pré del Pradel faisoit avancement dans le
P ré du Château, e t , pour rendre celui-ci plus ré g u lie r,
le seigneur de Saint-Cham ant désiroit que M alprade lui
cédât l’avancement que faisoit le pré del Pradel dans
celui du Château.
D ’un autre c ô té , on a remarqué qu’entre le pré de
l ’Espinasse et celui du C lo u x, tous deux appartenans à
M alp rad e, il y avoit un intervalle du P ré du C hâteau,
qui cm pechoit la jonction des deux prés de l’Espinasse et
du C lo u x , et M alprade désiroit que le seigneur de Saint-
�(3 )
Chamant lui cédât la très-petite partie du pré du Château _
qui séparoit le pré de l ’Espinasse de celui du C loux.
Ces avantages réciproques que désiroient le seigneur de
Sain t-C h am ant et M alprade , déterm inèrent l’acte d’é
change qui se fit entr’e u x , le 30 juin 1713 ? Par l ecIuel
M alprade céda au seigneur de Saint - Chamant la partie
du pré del Pradel qui faisoit avancement dans le P ré du
C hâleau, et le seigneur de Saint - Chamant lui céda en
échange l’espace du P ré du Château nécessaire pour join
dre le pré de l’Espinasse à celui du C loux.
Il est encore essentiel de rem arquer qu’il existoit aur
dessus du pré del P ra d e l, joint à celui de l’Espinasse, une
petite fontaine, appelée du Coudert de M any , dont les
eaux se partageoient pour l’arrosement du pré del Pradel
et de celui du Château-, e t , dans l ’acte d’échange de 1713 ,
M alprade consentit que les eaux de cette petite fontaine
du Coudert de M any appartinssent tout entières, à
l ’a v e n ir, au P ré du Château.
.
Il fut convenu , dans le même acte , que le seigneur de
Saint-Chamant feroit, à ses fra is, un m ur de séparation
entre l’avancement de ce pré del Pradel qui lui étoit cédé
et le reste de ce même pré.
'
.
Il fut également convenu que M alprade feroit à’ ses
frais un m ur de séparation entre l’espace du P ré du
Château qui lui étoit c é d é , et le reste de ce même pré ;
et il fut dit que l’espaco cédé du P ré du Chateau é to it« à prendre d e là dernière rase du P ré du Château, qui
« sort du P ré de l’Espinasse, et qui entre dans le P ré
« du C lo u x , laissant la rase dans le P ré du C hâleau,
« p o u r, par M alprade, joindre ladite portion d’environ
A 2
�r( 4 ')
« soixante-trois toises aux prés de l’Espinasse et du C lou x
« dudit M alp rad e, lequel sera tenu de faire la m uraille
« ’ pour la séparation desdits prés, au-dessus de ladite rase
te et b i a l l u r e , à ses frais et dépens. »
Cette dernière rase est une de celles qui recevoient les
eaux des sources qui naissoient dans le P ré du Château,
pour les traduire dans le P ré de l’Espinasse, d’où elles
rentroient encore dans le P ré du Château, pour se rendre
dans le P ré du C loux par une ouverture ou aqueduc
pratiqué dans le m ur de séparation ; aqueduc suffisam
m ent désigné dans le langage du pays par le terme de
biallure.
O utre cette dernière rase, il y en avoit une autre qui
traduisoit encore les mêmes eaux dans le pré du C lo u x ,
après avoir traversé une petite partie du P ré de l ’Espinasse, en sortant du P ré du C hâteau, dans lequel elles
rentroient encore , et n’en ressortoient que pour arriver
dans le P ré du Cloux.
M a i s ce qui est su r to u t x-em arquable, c’est que le P ré du
Château, dans les parties qui jo ig n o ie n t les p r é s de l’Espinasse et du C lo u x , étoit environné de murs anciens à
travers lesquels étoient pratiqués des ouvertures ou aque
ducs pour donner l’issue des eaux naissantes dans le P ré
du C h âteau, soit dans le P ré de l’Espinasse, soit dans
celui du C lou x ; ouvertures et aqueducs pratiqués dans
ces murs lors m ême de leur première construction, et
qu’il est encore aisé de reconnoître et de vérifier dans
ces mêmes murs toujours existans.
Indépendamment des eaux naissantes dans le P ré du
Château, le pré de l ’Espinasse jouissoit encore, pour son
�C 5 5
arrosement dans sa partie su p érieu re, des eaux de la
grande fontaine de M a n y , différente de la petite fon
taine du Coudert de M a n y , dont on avoit abandonné les
eaux pour le P ré du Château, dans l ’acte d’échange de
1713. Les eaux de cette grande fontaine de M a n y , qui
existent au delà du P ré du Château où elles entrent par une
grande rase qui le traverse, se versent de suite à la te te
du P ré de l’Espinasse par une ouverture ou aqueduc pra
tiqué dans l’ancien m ur de séparation du P ré du Châ
teau de celui de l ’Espinasse, dans cette partie ; ouverture
pu aqueduc q u i, comme les autres dont on a p a r lé , avoit
été pratiqué dans le temps même de la construction
de l ’ancien m ur , ce qui est encore aujourd’hui facile a
reconnoitre et à vérifier.
.
. U n e o b se rv a tio n q u ’ o n ne doit pas non plus n é g l i g e r ,
c’est q u e les p r é s d e l ’Espinasse et d u C l o u x n e p e u v e n t
être arrosés, le P ré de l’Espinasse dans sa plus grande
partie, et le P ré du C lou x dans sa totalité, que par les
eaux naissantes dans le P ré du Château-, et il n’est pas
possible de croire que l ’on eût fait des prés du terrein
qu’ils o ccu p en t, prés qui existent de toute ancienneté,
si l’on n’eut pas eu le droit de les arroser par les seules
eaux qui pouvoient y parvenir.
- U ne dernière observation non moins intéressante, c’est
que si l’on retenoit les eaux qui naissent dans le P ré du
Château , comme les sources d’où elles découlent sont
situées dans les bas fonds de ce même p r é , elles y seroient
stagnantes, et en inonderoient toute la partie intérieure.
Ce 11’est alors que par ém ulation , et sans aucun objet
�(
6 )
d’utilité ni d’agrém en t, que le propriétaire du P ré du
Château voudroit p river de ces eaux les prés inférieurs;
ce qu’il ne peut faire qu’en rejetant ces mômes eaux dans
la voie publique qui est au levant du P ré du Château,
d’où elles vont se jeter dans la rivière, sans aucun avan
tage ni pour le propriétaire du P ré du C hâteau, ni pour
aucune autre propriété, mais tout au détrim ent des prés
de l’Espinasse et du Cloux.
T e l étoit l’état des choses lorsque la terre de SaintCham ant, d’ou dépendoit le P ré du Château, fut mise
en vente judiciaire par les directeurs des créanciers du
duc de Caylus, seigneur de St.-Chaînant.
D é jà , et avant la vente, le cit. Cabanes avoit acquis de
M alprade les prés de TEspinasse et du C lo u x , et il avoit
conservé la possession q u ’avoit eue M alprade de la ser
vitude des eaux naissantes dans le P ré du Château. Ce
f u t alors que les gens d’affaires du duc de C aylus, et les
directeurs des créan ciers, voulurent s’assurer si dans la
vérité le cit. Cabanes avoit un droit de servitude sur les
eaux d u P r é d u C h âte au . P lu s ie u r s lettres fu re n t écrites au
cit. Cabanes, soit par l’intendant du duc de Caylus, soit par
le chargé d’affaires de la direction des créanciers; lettres
qui sont jointes au procès et qui annoncent que ce fut
pou r les satisfaire que le cit. Cabanes demanda un acte
de notoriété des plus anciens habitans cl voisins des prés
dont il s’a git, dans lequel ils attestèrent la possession im
mémoriale de M a lp rad e, vendeur du cit. Cabanes, de
prendre les eaux des sources du P ré du Château pour
l’irrigation des prés de l’Espiiiasse et du Ç lou x; et parmi
�C7 )
.f f
les particuliers qui donnèrent cet acte de n o to riété, le
16 avril 1781 , étoient plusieurs anciens fermiers ou
métayers de la terre de St.-Chamant.
Ce fut quelque temps après que le cit. Coudert devint
adjudicataire de la terre de St.-Cham ant, et qu’il entreprit,
après trois ans de silence, de contester au cit. Cabanes le
droit de servitude dont lui et M alprade s o n vendeur avoient
joui de tous temps sur les eaux du P ré du Château pour
l ’arrosement des prés de l ’Espinasse et du C loux.
L e cit. Coudert avoit trop à.crain dre des tribunaux
ordinaires, dans une coutume où les servitudes peuvent
s’acquérir sans titre, par la seule prescription; il profita
du com m ittim us que lu i donnoit une charge de secrétaire
du roi qu’il avoit acquise, pour porter aux requêtes du
palais la contestation qu’il vou lo it élever c o n t r e le cit.
Cabanes, p r é v o y a n t que sa prétention seroit m ieux ac
cueillie par des juges imbus de la m axim e de la coutum e
de P a ris} qui ne reconnoît point de servitude sans titre.
Il est nécessaire de rappeler les conclusions qui furent
prises par le cit. C o u d ert, dans la demande qu’il form a
contre le cit. Cabanes aux requêtes du palais. D ’ab ord , à
l’égard des eaux des deux fontaines, celle du C oudert
de M any et celle de M a n y, quoique le cit. Coudert p ré
tendît y avoir seul d ro it, cependant à cause de l’usage
qu’il fut obligé d’avouer qui en avoit été fait pour l ’ar
rosement des prés de l’Espinasse et du C lo u x , il en con
sentit le partage, et demanda qu’il fût fait par exp erts,
dans la proportion de l’étendue de son pré du Château
et de celle des prés de l’Espinasse et du C lo u x , se réser
vant toutefois de révoquer son consentement au partage,
�(S )
.
s’il venoit à découvrir des titres qui lui attribuassent le
droit exclusif des eaux de ces deux fontaines.
.
M ais à l ’égard des eaux des sources existantes dans le
P ré du Château, il demanda à y être maintenu exclusi
vem ent , soutenant que la possession que pou voit en avoir
le cit. C a b a n e s n’étoit qu’une possession p réca ire, qu’il
s’étoit attribuée dans le temps que lui-même étoit' ferm ier
de la seigneurie de Saint-Chamant et du pré du Château
qui en dépend, ayant profité de cette circonstance p o u r,
pendant la durée de sa fe rm e , user des eaux du P ré du
Château pour en arroser les prés voisins dont il étoit
propriétaire.
Sans rappeler les moyens par lesquels le cit. Cabanes
combattit les demandes du citoyen Coudert aux requêtes
du palais, parce que ces moyens seront employés dans
la suite de ce m ém oire en plus grand nombre et avec
plus d’étendue, il est néanmoins essentiel de rem arquer
ce que d isoit le cit. Coudert dans une requête signifiée
le 22 f é v r i e r 178 7, a u x pages 33 et suivantes de la grosse
de cette r e q u ê te. O n va le transcrire m o t p o u r mot.
cc II a été fait anciennem ent, entre le seigneur de Saint
« C ham ant, propriétaire du pré du Château, et le procc priétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x , un tra ité
« par lequel ce dernier a renoncé à se servir jamais des
« eaux de la fontaine du Coudert de M any. D e p lu s ,
« le suppliant prétend des droits de p ro p riété, en sa
« qualité de seigneur de Saint-Chamant, sur le com m un,
« et par conséquent sur les deux fontaines dont l’eau
« lui appartiendrait entièrement. Il est donc important
« pour le suppliant, dans la ca s où dans la suite il
youdroit
�( 9 )
t/
<* voudrait f a i r e usage de Vacte passe entre le proprié
té taire des prés de Y Espinasse et du C lo u x , et le pro
« priétaire du pré du C h â tea u , et au cas où il voudroit
« exercer son droit de propriété sur ledit commun en
« question, qu’on ne puisse lui opposer le partage des
« eaux desdites fontaines, qu’il a lui-m êm e p ro v o q u é ,
« et le soutenir non-recevable de prétendre à la totalité
« desdites eaux. V o ilà quel a été le m otif de la réserve,
« faite par le suppliant. »
.
•
O n voit par ce -passage de la requête signifiée par le
cit. Coudert le 22 février 17 8 7 , qu’il avouoit form el
lement l’existence d’un ancien traité fait entre le seigneur
de Saint-Chamant et le propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x ; traité q u ’il c o n v e n o i t a v o i r en son
p o u v o ir, p u i s q u ’i l se r é s e r v o it d’en faire usage. O r , ce
traité est celui dont on a p a rlé, du 30 juin 1 7 1 3 , puisque
la copie produite par le cit. Cabanes lui fut remise par
le cit. C o u d ert, et que le cit. Cabanes offre de prouver
au besoin l’aveu de cette rem ise, de la part de l’abbé
Y e y rin è s, beau-frère du cit. Coudert.
D ’après l’allégation de ce tra ité , faite par le citoyen
C oudert, il im portait au cit. Cabanes d’en avoir une
parfaite connoissance; c’est pourquoi il fit au cit. Coudert
deux sommations successives, le 9 et le 24 mars 17 8 7 ,
de lui donner copie du traité, sous protestation, en cas
de refu s, de le rendre garant de tout événem ent : mais
sans doute le cit. Coudert ou son conseil avoit réfléchi
sur l’avantage que le cit. Cabanes pourroit lui-m êm e tirer
de ce. traité, pou r'p rouver son droit aux eaux naissantes
‘
'
B
�( IO )
dans le pré du Château aussi refusa-t-on obstinément
d’en donner connoissahce au cit. Cabanes 3 et de lui en
fourn ir copie.
C ’est en cet état qu’intervint la sentence des requêtes
du p a la is , du 20 mai 1789, qui ordonna le partage des
eaux de la fontaine du Coudert de M any et de celle de
JVIany, mais qui maintint le cit. Coudert dans le droit
exclusif des eaux naissantes dans le pré du Château ; en
quoi ne fut pas trompée la prévoyance qui a voit engagé
le cit. Coudert à porter cette affaire devant des juges
imbus de la maxime de la coutume de Paris, qui n’admet
point de servitude sans titre. M ais, dans ce système m êm e,
il est inconcevable que les premiers juges n’eussent pas
forcé le cit. Coudert à justifier du traité de 1 7 1 3 , dont
il a voit excip é, et qui auroit lui-m êm e été un titre à la
servitude.
L e cit. Cabanes interjeta appel de la sentence des re
quêtes du palais , au parlem ent, où la cause fut appointée
au conseil, et où il avoit déjà été signifié p lu sieu rs é c ri
tures de part et d’autre, causes ou moyens d’app el, ré
ponses , salvations, etc. lorsque survint la suppression
des parlemens ; en sorte que la décision est aujourd’hui
soumise a ce tribunal d a p p e l’, et c est au mémoire im
prim é que vient de repandre le cit. Coudert qu’il s’agit
de répondre.
M ais auparavant il y a encore quelques faits à exposer.
A v a n t d’introduire l’alfaire dans ce tribunal, les parties
avoient successivement passé deux compromis pour la
faire décider par un jugement arbitral. Les premiers
�■
( II )
arbitres s’étoient transportés sur les lieux pour les exami
ner. Cependant ces premiers arbitres, on ne sait par quels
motifs, pressés par le cit. Cabanes de rendre leur juge
m ent, et même long-tem ps après que le délai du com
promis étoit e x p iré , d ilajan t toujours de prononcer sur
la contestation, le cit. Cabanes se v it forcé de révoquer
le com prom is, toujours cependant dans l’intention de se
faire juger par des arbitres, mais autres que ceux qui refusoient de juger. Aussi se prêta-t-il à passer un nouveau
compromis par lequel les parties nomm èrent pour arbitres
les cit. D u cla u x , D o liv ier et G ro s; le prem ier président,
les autres deux juges du tribunal d’arrondissement de
M auriac.
•
Ces trois nouveaux arbitres se transportèrent aussi sur
les l i e u x p o u r vérifier l’état des fontaines de M any et du
c o m m u n de M a n y , les sources existantes dans le P ré
du Château, les rases et fossés, les ouvertures et aqueducs
•placés dans les murs de clôture du- P ré du Château , par
lesquels les eaux couloient ordinairement dans les prés
de l’Espinasse et du Cloux. Ils entendirent les observations
des parties; et ce fut même devant ces arbitres que l’abbé
V e y rin è s , beau-frère de C ou d ert, et qui assistait pour
lui à la visite des arbitres, convint que la copie du traité
de iy ig a v o it été remise au cit. Cabanes p arle cit. Coudert:
les arbitres pourroient même le témoigner. Les arbitres
étaient encore dans le délai du com prom is, et ils alloicnt
rendre leur jugem ent, lorsque l’abbé V e y rin è s, frère de
la femme de C ou d ert, et son conseil, p révo ya n t, par
l’attention que portaient les arbitres à exam iner scrupu
leusement l’état des lie u x , que leur jugement ne seroit pas
B 2
�( 12 )
favorable, pria les arbitres de le suspendre de quelques
jours, pour lui donner le temps d’aller chercher à A u rilla c , au dom icile du cit. Coudert, un acte de partage
des eaux , qu’il dit exister, et qui pourroit apporter quel
que c h a n g e m e n t dans la décision. Les arbitres ne crurent
pas d evoir refuser un si court d é la i, et le cit. Cabanes
lui-m êm e ne s’y opposa point. Mais le m otif pour lequel
il avoit été demandé n’étoit qu’un vain prétexte pour
laisser passer le temps du compromis ; et aussi, presque
aussitôt, il fut fa it, à la requête du cit. C o u d e rt, une
révocation du com prom is, qui fut signifiée tant au cit.
Cabanes qu aux trois arbitres; et c’est à la suite de cette
révocation que l’afFaire a été portée en ce tribunal pour
juger l’appel de la sentence des requêtes du palais.
Il n’y a plus qu’ une remarque à faire sur ce qui a été
dit dans une requête signifiée de la part du cit. Coudert,
le 9 fructidor an 11.
Dans cette req u ête, le cit. C o u d ert, après avoir nié
l’existence de l’acte de 1 7 1 3 , après avoir soutenu que la
copie qu’en représentoit le cit. C a b a n es étoit in form e,
qu’elle ne pouvoit faire aucune foi en justice, il a ajouté
« qu’il avoit sommé formellement le cit. Cabanes de
« s’exp liq u er, s’il entendoit exécuter cet acte ou n o n ,
« parce qu’il l ’exécuteroit de son côté dans tout son
« co n ten u ; » et il lui dit avec justice et vérité : « V ous
« ne p o u rrie z, cet acte fût-il en form e, vous dispenser de
« l’exécuter dans toutes ses clauses, parce que les clauses
et d’un acte sont de leur natureindivisibles. 33 O r, le cit. Ca
banes déclare dès<\ présent qu’il accepte cet aveu et ce con
sentement du cit. Coudert ; et que de son côté il consent
�( *3 )
•
formellement à l’exécution de l ’acte de I 7 I 3 * A insi il
pourra en tirer toutes les conséquences qui en peuvent
.
résulter.
A lors il est vrai qu’il pourroit être prive des eaux de
la petite fontaine du Coudert de M any , parce que dans
le fait, par l’échange de 1 7 1 3 , M alprade son auteur avoit
consenti que les eaux de cette fontaine appartinssent en
entier au seigneur de Saint - d ia m a n t , propriétaire du
P ré du Château-, mais le cit. Coudert s’est abusé en croyant
trouver dans le même acte un abandon des eaux de la
fontaine de M a n y, toute différente de celle du Coudert
de M any ; ces deux fontaines se trouvent à une grande
distance l’une de l’autre.
Il est vrai q u e , m a l g r é l’abandon des eaux de la petite
fon tain e d u C o u d e r t de M a n y , M a l p r a d e , et après lui
le cit. C a b a n e s , les a v o ie n t to u jo u r s partag é e s a v e c le sei
gneur de Saint - C h aîn an t, et que le cit. C oudert, dans
l’instance pendante aux requêtes du palais, avoit lui-mêm e
provoqué et fait ordonner un nouveau partage de ces
eaux. Mais le cit. Cabanes renonce quant à celles de
la petite fontaine du Coudert de M any , dès que , de sa
part, le cit. Coudert consent à l’entière exécution de l’acte
de 1713 ; consentement que le cit. Cabanes vient d’accep
ter. Mais il 11’en est pas de même des eaux de la fontaine
de M a n y , à l’usage desquelles il n’a été fait aucune re
nonciation par le traité de 1713- E n sorte que le citoyen
Coudert, consentant à l’exécution de tout le contenu de
ce traité , il ne peut pas y comprendre l’abandon des
eaux de la fontaine de M a n y, qui ne fut point fait dans
le traité, mais seulement celui des eaux de la petite fon-,
�{ T-4 ) r
taine du Coudert de M a n y, différente de celle de M any.
M aintenant il ne s’agit plus que de répondre au m é
m oire imprimé du cit. C oudert, de présenter les questions
qui peuvent s’élever dans cette affaire, d’établir les prin
cipes de la m atière , et d’en faire l’application aux faits
dont on vient de rendre compte.
m
o
y e
n
s
.
L e m em oire auquel on répond a pour objet principal
d’établir le principe général que celui dans le fonds du
quel naît une source d’eau a le droit d’en disposer à son
g r é , q u o iq u e, même d’un temps im m ém orial, les eaux
de cette source, à la sortie de l’héritage où elle naît, aient
servi ù l’irrigation des fonds inférieurs. O n s’est épuisé en
citations de lois, d’auteurs et d’arrêts, pour établir ce prin
cipe; mais c'est peine inutile, pour prouver ce que per
sonne n’entreprendra de contester, aux exceptions près
dont il est susceptible.
lia v ra ie , la principale q u estio n d e cette affaire, est de
savoir si le propriétaire de l’héritage inférieur à celui où
naît la source peut acquérir la prescription des eaux de
cette source , pour l’irrigation de son h érita g e, par des
travaux de main d’homm e pratiqués dans l’héritage supé
rie u r, et par une possession continuée pendant l’espace
de 30 ans. M ais on n’a pas osé aborder franchement celle
question; on s’en est presque tenu ù la négative, au lieu
que l’allirmative est fondée sur la disposition des lois , la
doctrine des auteurs , même de quelques-uns de ceux cités
dans le m émoire auquel on répond, et sur la jurispru
dence, même sur celle du tribunal d’appel.
�C ^ )
Il y aura une question secondaire à examiner : celle de
savoir si le propriétaire du fonds in férieur, qui est devenu
fermier du fonds supérieur , mais qui avant d’etre fer
m ier étoit déjà, par lui ou par son vendeur, en possession
de la servitude,' en continuant d’en jouir pendant le temps
de sa ferm e, a fait interversion de la possession anté
rieure , de manière que la prescription n’ait pas pu con
tinuer de courir en sa fa v e u r, comme elle auroit fait pour
son vendeur, s’il n’eut pas cessé de jouir de l’héritage et
de la servitude.
'
< Commençons par développer les principes relatifs à ces
deux questions ; il ne sera pas difficile d’en faire l’appli
cation ; elle se présentera comme d’elle-m ême , d’après
les faits exposes/
■
P rin cip es sur la première question.
'
L a loi Prœ ses, I V , God. D e servitutibus et a q u â , que
l’on cite communément dans cette m atière, mais dont on
abuse sou ven t, comme on l’a fait dans le m émoire du cit.
Coudert ; cette loi p o rte , il est v r a i , que celui dans le
fonds duquel naît une source d’eau, peut en disposer ;\ son
g r é , et la retenir dans son h érita g e, ou la faire couler dans
d’autres héritages qui peuvent lui appartenir. Eu cela cette
loi n’est que l’application de la règle générale par laquelle
chacun est maître de disposer de sa chose comme hon lui
semble.
• Il est vrai encore que cette même loi veut qu’ il en soit
usé ainsi, bien que , de tout tem ps, les eaux de la source
aient servi à l’irrigation des héritages inférieurs, contra
�( i6 )
statulam consuctudinis Jo rm a m , carere te non per
m itid .
■ Mais la disposition de la loi Prœ ses souffre deux excep
tions.
Xi’une, q u a n d celui dans le fonds duquel naissent les
eaux ne veut les retenir ou les détourner que par émula
tion , sans aucune utilité pour l u i , et uniquement pour
nuire à ses voisins : la raison et l ’équité suffiroient pour
dicter cette exception. Mais toutes les lois qui défendent
de faire quelque chose par ém ulation, s’entendent quand
ce que 1 on fait est seulement dans l’intention de’ nuire ,
sans aucune utilité pour soi—m em e, cltivtïio nocdzdi non
utilitatis causa ; en un m o t, quand te que l’on fait ne
profite point à soi-m em e, mais nuit à autrui, quando non
prodest f a c ie n t i, et alteri nocet. O n peut vo ir sur cela les
lois citées par H enrys, tom. 2 , liv. 4 , quest. rj5 .
O r ici ce n’est vraiment que par émulation que le cit.
Coudert voudroit reteñirles eaux qui naissent dans le P ré
du C hateau, pour en priver les prés in férieurs du cit.
Cabanes, puisque ces eau x, qui suffisent à l’irrigation du
P ré du Château, et qui arrosent ensuite les prés inférieurs,
si elles étoient retenues dans le Pré du Château, deviendroient stagnantes dans les bas fonds de ce p r é , où sont
situées les sources, et par lâ non-seulemeut ne luiseroient
d’aucune utilité, mais même lui scroient nuisibles; et si
pour les faire sortir de son pré le cit. Couder t ne peut en.
procurer le versement q u e dans la rue publique, d’où elles
iroient se jeter dans la riv ière, d’un côté la rue publique
en seroit dégradée, et deviendroit moins praticable-, et
d’un autre côté ces eaux ne pourroient plus être utiles
personne,
�.
(. 17 ^ .
.
. .
personne, et'les prés in férieu rs,q u i en ont toujours jo u i,
souffriroient un préjudice notable de leur privation.
Si donc les faits qu’on vient de rappeler etoient vérifiés
par un rapport d’experts s’il étoit constant que ce n’est que
par pure ém ulation,sans utilité pour son propre héritage,
et au contraire au préjudice de ce même h éritage, que le
cit. Coudert veut priver le cit. Cabanes du bénéfice de
.ces mêmes eau x, à la sortie du P ré du Château , et que
d’ailleurs il ne pourroit les en faire sortir que par la voie
publique , sans utilité pour qui que ce s o it, il devroit
■paraître évident que son opposition à la possession du
cit. Cabanes ne seroit form ée que par pure ém ulation,
anim o n o c e n d i, non utilitatis causâ ; et sans doute le
cit. Cabanes n’eût-il que ce seul moyen à. faire valo ir, la
justice du tribunal le déterm ineroit à. ordonner une v é
rification p a r experts.
M ais la loi P rœ scs souffre encore une autre exception
dans laquelle se trouve le cit. Cabanes. Cette loi ne s’entend
que dans le cas où les eaux de la source qui naît dans l’hé
ritage supérieur, p a rle u r pente naturelle ont coulé dans
les héritages intérieurs, qui en ont profité pour leur irri
gation, et non lorsque les propriétaires des héritages in
férieurs ont été eux-mêmes prendre les eaux dans le fonds
supérieur, et y ont pratiqué des o u vrages, des fossés, des
rigoles , des aqueducs, pour faire parvenir ces eaux dans
leurs héritages ,• et qu’ ils en ont conservé la possession
pendant trente ans. V o ilà la doctrine constante de tous
nos bons auteurs.
Celui qui m érite d’être cité le p rem ier, D u m o u lin ,
cet oracle de notre jurisprudence française , et qui n’étoit
C
�( i 8
)
.
pas moins versé dans la jui’isprudence rom aine, s’en exp li
que avec énergie dans sa note sur le conseil 69 d’Alexandre.
Il p a r o ît, d’après ce que dit D u m oulin , que dans ce
conseil A lexan dre avoit été d’avis généralem ent que le
propriétaire de l’héritage inférieur, queD u m ou lin appelle
J o a n n e s , pouvoit empêcher le propriétaire de l’héritage
supérieur de retenir la source des eaux qui y naissoient,
au moyen de l’usage qu’il avoit eu de ces eaux pour l’arrosement de l’héritage inférieur ; sur qUQj[ D um oulin dit
qu’A lexan dre auroit mal con su lté, s’il n’y avoit pas eu
d’autres circonstances dans le fait qui lui avoit été exposé :
¿id çerte , si 71071 esset aliud quarn in prœdïcto ihem ate ,
A le x a n d e r pessim è consuhiisset. E t la raison qu’ il en
d o n n e ; c’est q u e , quoique d’un temps im m ém orial l ’eau
eut coulé naturellement dans le m oulin du fonds infé
rieu r, elle n’étoit pas censée y avoir coulé par droit de
servitude , mais par droit de pure faculté : Q u ia e tia m si,
per ternp us im m ém oriale, aqua sic p e r se flu x isset ad
m olciidinum dom ini J'un di inferioris , non censetur labi
ju r e servitutis , sed merœ fa cu lta tis. E t il faut bien
prendre garde à ces mots per se , qui veulent dire que l’eau
a coulé par sa pente naturelle; et c’est ce que fait bien
entendre D um oulin en ajoutant: Si le propriétaire de l’hé
ritage inférieur n’a rien lait dans le fonds supérieur pour
en faire parvenir les eaux dans le sien : Si dom inus i/if c r i o r nihH f o c i t in fu n d o superiori ut aqua sic flu a t.
E t ain si, pour justifier le conseil d’A le x a n d r e , D um oulin
dit qu’ il faut supposer que dans l’espèce qui lui étoit p ro
posée le propriétaire de l ’héritage inférieur avoit fait quel
que ouvrage dans l’héritage su p érieu r, pour en faire
�( 19 )
parvenir les eaux dans le sien : Ideo prœsupponendurn quod iste Joan n es in fu n d o superiori , domino
scie?ite et patiente, et ju re serv itu tis,jecit et du xit n vu m .
Seulement D um oulin ajoute qu’en ce cas la possession
de la servitude de la conduite des eaux ne commence que
du jour qu’à titre de servitude a été pratiqué dans l’ hé
ritage supérieur l’ouvrage nécessaire pour faire arriver
les eaux dans l’héritage inférieur : T a m en q u a si posses
sio servitutis aquœductûs non incipit antequànide fa c to ■
,
ju re servitutis , f a t rwus per quem aqua ducatur.
Nous avons un traité de Cæpola , D e servitutibus ,
où dans le chapitre I V , au titre D e servitute aquœ duc
tûs , il examine notre question •, et cet auteur se trouve
cité au nombre 5 i , dans le m ém oire du cit. Coudert.
C æ p o l a , dans ce n o m b r e 5 i , d ’après la loi P r œ s e s ,
établit la r è g l e g é n é r a le q u e le p r o p r ié t a ir e d u fon d s dans
lequel naît une source d’eau peut la retenir et en disposer
à son gré , malgré l’usage qu’en ont fait de tous temps les
propriétaires des héritages inférieurs., à la sortie de L’hé
ritage supérieur. M ais il fall'oit aller plus lo in , jusqu’au
nombre 5 6 , où cet auteur excepte de la règle générale le
cas où les propriétaires des héritages inférieurs ont euxmêmes été prendre l’eau dans l’héritage su p érieu r, et y,
ont pratiqué des aqueducs, des fossés, des rig o les, pour
la faire arriver dans leurs héritages inférieurs.
Cæpola distingue les eaux qui naissent dans un fonds
qui appartient au p u b lic, ou dans un fonds qui appar
tient à un particulier. Dans le prem ier cas, il exige une
possession im m émoriale; mais dans le second, il se con
tente de la prescription ordinaire , q u i, même chez les
C 2
�( 20 )
R om ain s, en matière de servitudes, n’étoit que de dix ans
entre p résen s, et de v i n g t ans entre absens.
■
Puis venant à la m anière dont il fau t, pour déroger à
la règle gén érale, que les eaux aient été prises dans le
fonds supérieur par les propriétaires des héritages infé
rieurs , afin d’acquérir la prescription ju re servitutis ,
il veut qu’on en juge par la nature des actes qui ont été
exercés , comme si celui qui prétend avoir prescrit la
servitude a coupé la haie du fonds supérieur, s’il y a fait
ou fait faire des fossés, s’il les a nettoyés pour y introduire
les eaux et les faire arriver dans le fonds inférieur; autant
d ’actes qu’il ne pouvoit exercer qu’à titre de servitude :
E x quo quis f u e r i t usus ju re serv itu tis, com prehendi
potest e x actibus quos J e c it , per quos q u i per se ipsum
non posset J u cere ni fu n d o v icin i citra ju s et nomen
serv itu tisy ut prœcedere sepem , mundcire vel m undari
fa cere Jv ssa tu ra m in f u n d o v ic in i, vel ducere aqitcim
per fim d im i v ic in i, q u œ jie r i non possunt regulariter,
n isi ju re servitutis.
Quand on lit un a u t e u r , il ne faut pas s’arrêter à l’en
droit où il établit la règle générale, il faut poursuivre la
suite de son discours où il établit les exceptions que doit
souffrir la règle. G est ce qui arrive souvent à ceux qui
prennent dans D um oulin 1 objection pour la solution,
pour ne pas s’etre donne la peine d’aller jusqu’au bout.
On trouve la m ê m e doctrine, la règle générale et l’excep
tio n , dans le traité des Prescriptions de D u n o d , o ù , à la
page 8 8 , i l dit que le maître de l’héritage où naît une
source d’eau , peut la retenir ou la conduire ailleurs pour
son u tilité, q u o i q u ’e lle ait coulé d’uu temps im m éino-
�(
21 )
rial dans ceux de ses vo isin s, et qu’ils s’en soient servis,
à m o in s, a j o u t e - t - i l , qu’elle n’ait coule par un droit de
servitude prouvé par actes , ou parce que les voisins
auroientfait un canal dans le fonds duquel la source sort,
pour en conduire l’eau dans les leurs.
A u cun des auteurs qu’on nous oppose, ni H c n ry s, ni
Bardet, ni B erro yer, ne disent rien de contraire à cette
doctrine. L a dissertation d’H enrys, l’arrêt qu’il rapporte,
et celui-qui est dans B ard et, ne sont que dans l’espèce de .
la règle générale. Les propriétaires des héritages infé
rieurs n’avoient d’autre possession que de r e c e v o i r les eaux
par leur pente naturelle, à la sortie de l’héritage supérieur.
A l’égard de la citation de B e r r o y e r , on en est étonne;
car l ’ o b s e r v a tio n q u ’ o n lu i fait faire n’existe point
dans l ’ é d itio n q u ’ il n o us a d o n n é e de B a r d e t , il n ’y en a
a u c u n e sur l ’ arrêt de B a r d e t dont on a p a r lé . I l est v r a i
qu’il y a une nouvelle édition de Bardet , qui a paru
en . . . . et où on a ajouté des notes de Delalaure. O n n’a
pas sous les yeux celte nouvelle éd itio n , et il pourroit
bien se faire qu’on eût confondu une observation de D e lalau re,avec une note de Berroyer. Cependant on auroit
peine h croire que Delalaure eût p u , dans une de ses notes,
combattre la doctrine générale q u e l’onvient d’établir, puis
que ce même D elalaure, dans le traité qu’ il nous a donné
sur les servitudes réelles, c o n firm e lu i-m ê m e cette d oc
trine, comme on peut le voir à la page 1 7 ° ? ou cet au
teur , traitant de la p r e s c r i p t i o n des servitudes dans les
provinces du Lyonnais , Fore/, et Beaujolais, pays de droit
é c rit, où les servitudes s’ a c q u iè r e n t sans titr e , par la
seule force de la prescription, comme eu coutum ed’A u -
�( 22 )
ve rg n e , il dit qu’on admet une exception par rapport aux
servitudes d’aqueducs et d’égoûts incorporés , et qu’elles
peuvent s’acquérir sans titre , par une prescription de dix
ans; et entre les motifs qu’il en donne est celui que ces sortes
de servitudes exigent nécessairement que l’on fasse des
constructions sur le fonds d’autrui, n’étant pas possible
de penser que ces constructions aient pu être faites sans
le consentement du propriétaire sujet à la servitude.
On pourroit m ultiplier ù l’infini les autorités ; mais il
suffit de terminer par celle du dernier commentateur de
la Coutum e d’A u v e rg n e , aux pages 7 17 et suivantes du
second tom e, où, après avoir rappelé le principe gén éral,
que le maître de l’héritage où il naît une source d’eau
peut l’y retenir ou la faire couler dans d’autres héritages
lui appartenans, sans que le propriétaire des héritages
inférieurs qui avoient joui de cette eau à sa sortie de l’hé
ritage supérieur, d’un temps im m ém orial , puissent s’en
p la in d re, et après avoir rappelé les arrêts qui ont con
sacré ce p rin cip e, M . C habrol ajoute : « M ais si ceux
« contre qui ces arrêts ont été rendus avoient eu une véri« table possession de prendre l’eau des sources dont il
« s’agissoit; s’ils avoient pratiqué, depuis plus de trente
« ans, un aqueduc dans l’héritage où elle nnissoit, pour
« la conduire dans les leurs; ces ouvrages extérieurs et
« appareils, soulierls p a r le propriétaire, auroient tenu
« lieu de titre; il en seroit résulté une vraie possession
« q u i, ayant continué pendant trente ans, auroit opéré
« la prescription dans une coutume où les servitudes sont
« prescriptibles. » L e commentateur prouve la distinction
p r les passages de D um ouliu et de Cæpola que nous
�avons cite s, et il y
excellent traité D e
tuent une servitude
d eles écui’er et de
( 23 )
ajoute ce que dit M . D uval dans son
rebus d u b a s , que les actes qui consti
en pareil cas , sont de faire des rases,
les rétab lir, n vu m f a cere, 'purgare}
reficere.
E n fin , comment pourroit-on désormais élever la ques
tion , après que le titre des servitudes, dans notre nouveau
code c iv il, a de plus en plus .confirmé les pyincipes que
nous venons d’é ta b lir, par l ’article 63 5 , qu’on, ne doit
pas regarder comme une loi nouvelle , mais comme
le développem ent des anciens principes sur cette m atière?
A près q u e, dans l ’article 634, il est dit que celui qui a
une source dans son fonds peut en user ù sa volon té ,
sauf le droit que le propriétaire inférieur pourroit avoir
acquis par titre ou par prescription , l’article 635 ajoute
que 'la prescription , dans ce cas , ne pevit s’acquérir
que par une jouissance non interrompue pendant l’espacé
de trente années, à compter du m oment où le propriétaire
du.fonds inférieur a fait et terminé des ouvrages appurens
destinés ù facilitei* la chute et le cours des eaux dans sa pro
priété : ce qui n’est proprem ent que la traduction de ce
qu’on a rapporté,de D um oulin dpns ses notes sur les con
seils d’Alexandre.
^
.
A des principes quiidpi.y.ent ppr pitre si incontestables,
on nous oppose deux arrêts’, fu n d e 178 6 , l’autre de 1788,
que l’on dit avoir été rendus , le prem ier en faveur des
tfordelicrs d’A u rilla c,.e t le second au profit d’ un nommé
Pradier. D ’un côté, c e s deux arrêts ne nous sont connus par
oucun ouvragti p u b lic; de l’autre , ce n’esL rien , comme
dit un de nos anciens praticiens ( R u u ilh ard ) , d’avoir le
�( 24 )
corps des arrêts, si l’on n’a pas l’âme des hypothèses. L a va
riété des espèces est infinie-, il est rare qu’on puisse raison
ner juste de l’une à l’autre; et il n’y a guère que les arrêts
de règlemens , ceux qui étoient autrefois publiés aux au
diences solennelles en robes rouges, sur lesquels on puisse
établir "quelque fondement. E nfin, tegibus , non exemp'Us
■jùdïcahdum • et l’on terminera par rem arquer que déjà
la jurisprudence du triblrnal d’appel s’est fixée sur la
question.
'
’
■
O n doit sentir à présent la juste application des prin
cipes établis aux faits et aux actes dont il a été rendu
com pte.
'
;
■
>
U ne s’agit pas ici d’une simple possession de recevoir les
eaux par leur pente naturelle. Il existe des rases'et des
rigoles pratiquées de tout temps dans le P ré du Château,
par le propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lou x;
des rases et rigoles', que le propriétaire a toujours net-r
toyées et entretenues pour faire arriver' dans ses p ro
priétés les e a u x naissantes dans le P ré du C h â te a u . Il
existe des o u v e r tu r e s et des aq u e d u cs dans les m urs de
clôture du P ré d u C hâteau,pour traduire les eaux; ouver
tures et aqueducs que Foh reeonnoît -aussi anciens que
les murs de clôture eux-memes , que l’on voit être de la
môme c o n s tr u c t io n et du même terri])};, qui existent peutêtre depuis des siècles. Ces rasés, ces'rigoles, ces aqueducs
tracés . dans le plan géom étrique
de l’état des lieux.
|
Ce plan est connu du cit. C ouderl;'il n’a p'aS énlreprisde le
so n t
contester, non plus que l’ancienneté des rases, des rigoles
et des aqueducs; et surtout' l’ancienneté des aquediics-so
manifeste à l’inspection des mura dans lesquels ils sont
pratiqués,
�( 25 )
'
pratiqués. T^e cit. Coudert n’a pas meme ose contester
formellement la très-ancienne possession de la servitude ;
et cette possession se trouve même proüvee par 1 ancien
neté des aqueducs, qui ne peut être m éconnue, et q u i,
quand il n’en resteroit que des traces, et qu’on n’en auroit pas fait u sage, auroient toujours conservé la posses
sion de ceux qui les avoient construits.
C ’est en effet un principe certain q u e, quoiqu’on n’ait
pas fait usage de la servitude, on n’en a pas moins con
servé la possession , tant, qu’il se trouve des vestiges des
ouvrages qui ont été faits,pou r l’exercer ; c’est ainsi que
s’en explique d’A rgen tré, sur l’article C C L X V I de la cou
tume de Bretagne , pag. 1092 : Signa ternporis succes
sion et perm anentis, signatura retinent i/i possessione
ju r is j et il dit encore au meme endroit : V estigia pos
sessionem retinent. L ’on trouve la m ême doctrine en
seignée par M ornac ,sur la loi 6 , ff. D e rerum diçisione.
E t quand même le cit. Coudert entreprendroit de con
tester la possession du cit. Cabanes et de M alprade son
-vendeur , le cit. Cabanes seroit en état, et offre même
d’en faire la preuve par tém oins; ce qu’il 11e croit pour
ta n t pas nécessaire, la preuve de la possession pouvant
se faire par la vériiication des experts, qui reconnoîtront
la haute antiquité des rases, fossés et aqueducs qui sont
désignés dans le plan géom étrique.
P rin c ip e s s u r la deuxièm e question.
Celte question est, comme ou l’a dit en com m ençant, de
savoir si le propriétaire du fonds in férieu r, qui est devenu
D
j
�( 26 )
^
ferm ier du fonds supérieur où naît la source des eaux,
mais q u i, avant'd’être ferm ier, éto it, ù la suite de son ven
d eu r, en possession de la servitude, en continuant cette
possession pendant la dui'ée delà ferm e, a fait interversion
de la possession qu’il avoit déjà , de manière que la près*
c r i p t io n n’ait pas pu continuer en sa fa v e u r, comme elle
a u r o i t f a i t p o u r son vendeur, s’il avoit continué de jouir
d e l’héritage inférieur et de la servitude sur l ’héritage
su p é rie u r.
Il n’y a sur cette question qu’un seul principe à in vo
q uer; c’est celui que rappelle ' notre célèbre D o m a t, au
titre de la possession, sect. I I , n. 27 : que « celui qui entre
cf en possession d’une chose qu’il a cq u iert, succède aux
ce mêmes droits, et ne possède ni plus ni moins que son
« auteur avoit possédé. » Ce n’est là que la traduction
m ême de la loi X X , if. D e acquir. rerum dom inio,
Q uoties dom iniuin tran sfe r tur ad eum q u i a ccip it, taie
transfiîitur q u a le fu it apud eum q u i tradidif.
D e là vien t, comme le dit D u nod dans son T raité des
p r e s c r i p t i o n s , pag. 2.0 , que « quand le titre vient de l’ail« teur qui avoit la possession, on peut joindre sa possession
« à la sienne. » C ’est ce que l ’on appelle en droit, accèssio.
L ’accession de la possession est pleinement accordée à
ceux qui succèdent aux droits d’a u t r u i P la n é tribuitur
h is q u i in loco aliorum succedunt, sive ex con tracta,
sive ex voluntate. L . I ,
diçersis te/nponb.
prœscrip. et accessionibus. Grodefroy, dans sa note 65 sur
cette lo i, dit que les accessions des temps sont des conjonc
tions des temps par lesquelles deux ou plusieurs personnes
ont joui successivement de la xneme chose, adccessiones
�C 27 ■
)
tem porum , sunt conjunctiones tem porum , quibus duo
a utp lu res separatïm eamdem rem possident. E t lem em e
G odefroy, dans la note
dit encore que l’accession du
vendeur est accordée à son acquéreur: V en d it or is accessio
tribuitur ejus emptori.
Il est donc certain que l ’acquéreur succède à tous les
droits qu’avoit le ven d e u r, à raison de la chose qu’il lui
a vendue, soit quant à la propriété , soit quant à la posses
sion ; c’est ce qui s’induit aisément des termes de la loi
T a le quale.
A i n s i , par ex e m p le , on ne pourroit pas douter que la
complainte possessoire ne pût bien être exercée par l’ac
quéreur du fonds dont son vendeur avoit la possession
d’an et jo u r; et la possession annale, donnant l’action en
com plainte possessoire, si elle est continuée pendant trente
an s, doit, par la même raison, opérer la prescription.
Il est bien v r a i , en g é n é r a l, que le ferm ier et tous
autres qui ont reçu la chose à titre de p récaire, ne prescri
vent contre le maître de la ch ose, pas plus que leurs h éri
tiers ou successeurs; mais quelle en est la raison? c’est
qu’on remonte à l’origine et à la cause de leur possession ,
et qu’ils n’ont pas pu en changer la cause par le prin
cipe : N em o sib i causant possessionis m ut are potest.
M a is, si l’origine de la possession remonte à un temps an
térieur à la fe rm e , si la possession du ferm ier se trouve
avoir tout autre cause que celle de la ferm e, si cette pos
session n’est que la continuation de celle qu’avoit son ven
d eu r, lequel étoit étranger à la ferm e, ce n’est plus alors
le cas où on puisse lui opposer qu’il a changé la cause de
sa possession. Ce n’est plus alors comme ferm ier qu’il
B z
�( ^8 )
a possédé ; il n’a fait que continuer la possession de son
vendeur, qui a conservé dans sa personne la même qua
lité , la même nature qu’elle avoit dans la personne du
vendeur : en un m o t , sa possession esl la même que celle
du vendeur, taie q u a lc , et doit produire le même effet à
son égard qu’elle auroit eu pour le vendeur lu i-m ê m e .
A in s i, de même que le vendeur, s’ il n’eût pas ven d u , et
qu’ il eut continué de jouir pendant (rente ans de la ser
vitude sur le fonds supérieur, l ’auroit acquise par la pres
cription ; l’acheteur, quoique ferm ier du fonds supérieur,
doit avoir le même avantage, puisque sa possession esl de
la jnême nature, et qu’ il succèdeau même droit, ta/e qualc.
C ’est une bien foible objection que de dire que le fer
m ier auroit dû avertir le propriétaire des entreprises qui
se faisoienl sur son fonds par le propriétaire de l’hérilage
inférieur. D ’ab ord , où est la loi qui l’y obligeoil ? D 'un
au Ire c û lé , le ferm ier q u i, entrant dans la ferm e, avoit
trouvé le propriétaire du fonds inférieur en possession
de la servitude dans le fonds supérieur, avoit dû croire
que celle possession nvml u n titre légitime. K m l i n , le
marquis de l.ig n era c, rl après lui le duc de C aylus,
seigneurs de Sainl-C ham ant, avoieul loujours ru sur les
lieux un intendant ou agent d'affaires, chargé de veiller
¡) la conservation de leurs biens, soit à l'égard des étran
gers , soit à l’égard des fermiers eux-mêmes.
M ais il y a plus : In possession de la servitude par
M alprade étoit bien antérieure a la vente qu'il fit au cil.
Cabanes, des prés de l'Iv-pi nasse et du (,lo u \ ; et le cit.
Coudert, prétendant que le cit. Cabanes , riant ferm ier,
auroit dû avertir le propriétaire du pré du Chateau de
�C 29 )
-
l'entreprise que faisoit M alpradc sur les eaux du pré du
Château, c’est bien co n v en ir, de sa p a rt, (pie M alpradc
avoit d ès-lo rs la possession de prendre ces eaux. Cette
possession étoit même im m ém oriale, suivant l’acte de
notoriété qui en fut donné au cit. Cabanes par les plus
anciens habitans de la terre de Saint-C ham ant, dans le
nombre desquels étoient même plusieurs des anciens fer
miers ou métayers de ccLte même terre de Saint-Chamant.
Cet acte de notoriété est du 16 avril 1781.
En vain a-t-011 dit que cet acte de notoriété avoit été
m endié par le cit. Cabanes; il 11e fut au contraire qu’une
suite des doutes qu’011 avoit voulu inspirer au duc de
Caylus sur le d r o i t de servitude dont il s’agit. Il existe
deux lettres qui élablisseut la nécessité où se trouva le
c i l . (.,¡1 b a n c s de d e m a n d e r e e l a e l e d e n o l o r i é l é . 1 <a pre
mière d e e e s l e t t r e s , d u 3 a v r i l 1 7 8 1, e s t c e l l e q u i lut
écrite au cit. Cabanes par un sieur Bussy, intendant du
duc (h' C aylu s, a Paris, par laquelle, après l avoir entre
tenu d’autres objets qui concernoient la ferme de SaintChamant , il ajoute : J l / égard de Veau que vous avez
pour votre pre , je ne p eu x prendre de p a rti que cette
affaire n a î t etc éclaircie : envoyez - m o i un petit M é
m oire bien e x a c t , et je vous fe r a i rendre ju stice. Ce fut
aussitôt après avoir reçu cette lettre, que le cit. Cabanes
se fit donner l\.cte de notoriété dont il s'agit ; et il an
nonça , d o n s le mémoire qu'il en vo ya, l'acte de notoriété
qu'il s'etoit fait d on n er, pour répondre à la plus grande
pv elitu-le qui lui étoit dem indée.
Presque
da ns
le m ê m e
t e mp s
les bi ens d u
d u c de
C ' v l u s f u i e n t nü> e n d i r e c t i o n ; et le cit. C i I k i u o m u t .
�( 30 )
.
.
une seconde lettre d’un sieur J o ly , agent de la direction, ^
datée du 4 septembre 1 7 8 1 , par laquelle il lui rappelle
la promesse q u ’il a ço it f a it e cCun acte de notoriété pu
bliq u e, su r le droit p a r lu i prétendu de prendre, trois
fois p a r se m a in e, Veau de la fo n ta in e de S a in t- d i a
m ant , et autres sources v iv es, pour Varrosem ent de
son pré.
L ’acte de notoriété dont il s’agit n’est donc pas, comme
le cit. Coudert veut bien le d ire, un acte m endié, une
enquête à fu tu r; c’est un acte de notoriété p u b liq u e,
nécessité par les circonstances où se trouvoit alors le cit.
Cabanes, provoqué par le duc de C aylus, o u , ce qui
est la même chose, par son intendant, et redemandé par
ses créanciers lorsque ses biens furent mis en direction.
O r , comme on l ’a d it, cet acte de notoriété atteste une
possession immémoriale de la servitude par .M alprade,
ancien propriétaire des prés de l ’Espinasse et du C lo u x ,
et continuée par le cit. Cabanes, son acquéreur.
E n fin , une preuve de plus en plus décisive de la posses
sion de M alprade, est celle q u i résulte de l’acte d’échange
de 1713 ? antérieur de près de cinquante ans à la vente
faite par M alprade au cit. Cabanes, des prés de l ’Espinasse et du C lo u x , auxquels est duc la servitude des
eaux naissantes dans le pré du Château.
P o u r s’assurer de la preuve qui se tire de l’acte de 1713,
il faut se mettre sous les yeu x le plan géom étrique de
l ’état des lieu x (1). O n y vo it d’abord toutes les sources
( 1) C e plan géo m étriq u e, q u ’a fait faire depuis lo n g-tem p s le
cit, C a b a n e s, sera joint au procès. 11 existe un autre plan <jue le
�C 31 )
qui naissent dans la partie basse du P ré du Château : les
eaux de ces sources, très-rapprochées les unes des autres,
vont se répandre et se distribuer dans deux rases, l ’une
supérieure, qui est la prem ière, et l’autre in férieu re,
qui est la seconde; l ’une et l’autre, après avoir parcouru
quelque espace dans le pré du C hâteau, viennent ré
pandre leurs eaux dans le pré de l’Espinasse, par deux
ouvertures ou aqueducs pratiqués dans le m ur de clôture
du pré du Château ; alors les rases continuent dans le
pré de l’Espinasse , et rentrent ensuite dans le pré du
Château par deux autres ouvertures ou aqueducs égale
ment pratiqués dans le m ur ; ces rases se prolongent
encore quelque temps dans le pré du Château, d’où elles
sortent encore par deux autres ouvertures toujours pra
tiquées clans le m ur de c lô tu r e du pré du C hâteau, pour
introduire leurs eaux dans le pré du C loux. T e l éto it,
à l ’époque de l’échange de 1 7 1 3 , et tel est encore l’état
des lieux parfaitement désigné dans le plan géom étrique.
V oyon s maintenant ce que dit l’acte de 1713 . Il s’y fait
un échange entre le seigneur de Saint-Cham ant, à qui
appartenoit le pré du C h âteau , et le sieur M alp rad e,
alors propriétaire des deux prés de l ’Espinasse et du Cloux.
M alprade cède au seigneur de Saint-Cham ant une por
tion du pré del P rad el, qu’il avoit nouvellem ent réunie
à son pré de l’Espinasse, pour par le seigneur de Saintcit. C oudert a fa it faire lui-m êm e. M a is ces deux plans son t con
fo rm e s, ù bien peu de chose p rè s; et le tribunal trou v era, dans
l’un et dans l’a u tre , les ra se s, fossés et aqueducs dont on a rendu
com pte.
�( 32 ) #
Chamant réunir cette môme portion à son pré du Chan
teau ; e t, de sa part, le seigneur de Saint-Chamant donne
en échange à M alprade la portion de son pré du Château
qui séparoit les deux prés de l’Espinasse et du C loux ,
appartenans à M alprad e; et il est dit que cette portion
du pré du C h âteau, cédée à M alprade dans la longueur
de soixante-dix toises, est à prendre de la dernière rase
dudit pré q u i sort du p ré de l’JEspinasse, laissant la
rase dans le pré du Château. M ais cette dernière rase
est la seconde marquée sur le plan géom étrique : cette
seconde rase, sortant du pré de l’Espinasse, n’étoit ellem ême q u’une suite de celle qui existoit dans le pré du
Château, pour traduire les eaux dans le pré de l’Espinasse,
d’où elles rentroient dans celui du Château pour parvenir
dans le pré du C loux. A in si il doit paraître évident que
la dernière rase dont il est parlé dans l ’échange de 1 7 1 3 ,
que l’on y dit être dans le pré du C h âteau , mais sortant
du pré de l ’Espinasse; que cette dernière rase ne pouvant
recevoir d’autres eaux que celles des soui’ces qui étoient
dans le pré du Château, et qui y rentroient après être
sorties du pré de l’Espinasse, le seigneur de S a in t-d ia
mant avoit recon n u , dans l ’échange de 1 7 1 3 , le droit
du pré de l’Espinasse aux eaux des sources du pré du
Château,
‘
Ce que l ’on vient de dire de la dernière rase, doit se
dire également de la prem ière, prenant aussi les eaux des
mêmes sources, les transmettant d ab ord dans le P ré de
l ’Espinasse, d’où elles rentrent, comme celles de la der
nière rase, dans le P ré du Château, pour se verser ensuite
dans le Pré du C lo u x; ce qui a nécessité toutes les ouver,
tures
�( 33 )
tures et aqueducs, au nom bre de s ix , existons de tout temps
dans le m ur de clôture du P ré du Château, pour en faire
sortir les eaux dans le P ré de l’Espinasse, les faire rentrer
ensuite dans le P ré du Château, et enfin les en faire res
sortir pour les verser dans le P ré du C loux.
A in si la possession de la servitude dont il s’agit, est au
moins prouvée depuis la date de l ’échange de 17135 dans
la personne de M alp rad e, alors propriétaire des prés de
l ’Espinasse et du C lo u x , et par l ’aveu du seigneur de St.Chamant lui-m êm e, qui résulte des termes de cet échange,
qui pourroit même être regardé comme un titre dans les
coutumes qui n’admettoient pas de servitude sans titre.
E t la possession 5 au moins constante depuis 17135 avoit
continué dans la personne de M alprade pendant près de
soixante ans ju s q u ’en 1 7 7 2 , qu’il vendit au cit. Cabanes
les prés de l’Espinasse et du C lou x ; possession continuée
depuis 1772 jusqu’à présent, par le cit. Cabanes, dans la
même qualité et la même nature que M alprade l’avoit
eue jusque-là.
M ais, nous d it-o n d e là part du cit. Coudert : V ou s
ne présentez qu’une copie inform e de ce prétendu échange
I 7 13 5
qui n’a aucun caractère d’authenticité ; c’est
un chiffon qui ne peut faire foi en justice. Cette objec
tion est pleine de mauvaise foi.
Lorsque les parties plaidoient aux requêtes du palais,
le cit. Cabanes n’établissoit sa défense que sur la posses
sion de trente ans ; il ignoroit absolument l’échange de
1 7 1 3 ; ce fut le cit. Coudert lui-m êm e qui le lui app rit,
comme on l’a v u dans le récit des faits, par une requête
signifiée le 22 février 1787. Rappelons encore les termes
E
�t
( 3 4 ')
de cette requête du cit. Coudert. « Il a été fait ancien«
« nement ( on ne dit pas en 17 13 , mais on dit ancienne« m e n t), e n t r e le seigneur de St. - Ghamant et le pro
«
«
«
«
«
priétaire des prés de l’Espinasse et du C lo u x, un tra ité
p»£ l e q u e l ce dernier a renoncé à se servir jamais des
eaux de la fontaine du Coudert de M any. D e plus,
le suppliant prétend des droits de propriété , en sa
qualité de seigneur de Saint - C h am ant, sur le com
'« m un , et par conséquent sur les deux fontaines, dont
« -les eaux lui appartiendraient entièrement. Il est donc
« im portant pour le suppliant, dans le cas où dans la
« suite il voud rait faire usage de l’acte passé entre le
ce propriétaire des prés de l’Espinasse et du C lou x, et le
« propriétaire du P ré du Château, et au cas où il vou « droit exercer son droit de propriété sur ledit commun
«
«
«
«
«
en question, qu’on ne puisse lu i opposer le partage des
eaux desdites fontaines, qu’il a lui-même p ro v o q u é ,
et le soutenir non-recevable de prétendre à la totalité
des eaux. V o ilà quel a été le m otif de la réserve faite
par le suppliant. »
D e l’aveu m ême du citoyen Coudert, il y a donc eu
a n c ie n n e m e n t un traité entre le propriétaire des prés de
l’Espinasse et du C lo u x , et celui du P ré du Château; de
son aveu c’est par ce traité que le propriétaire des prés
¿e l’Espinasse et du C loux abandonna au propriétaire
du P ré du Château la totalité des eaux de la fontaine du
Coudert de M any. J u s q u e -lâ il y a un véritable rapport
entre ce traité fait a n c i e n n e m e n t , et la copie que l’on
rapporte de l’acte de 1713 >011 ^on trouve en effet l’aban
don des eaux de la fontaine du Coudert de M any \ mais
�.
C 3*5 )
ce traité pouvoit contenir d’autres clauses, et expliquer
les causes de l’abandon de ces eaux du Coudert de M a n y ,
et les conditions sous lesquelles il étoit fait. Pourquoi
donc Coudert se refusa-t-il obstinément de satisfaire aux
sommations qui lui furent faites aux requêtes du palais,
les 9 et 24 mars 17 8 7 , de justifier de ce traité lait an
ciennem ent, dont il avoit argumenté dans sa requête du
22 février précédent, et qui par là 'é to it devenu un titre
commun au cit. Cabanes.
' M ais, dans la suite, ce fut le cit. Coudert lui-mêm e qui
remit au cit. Cabanes la copie du traité de 1 7 1 3 , que
celui-ci présente aujourd’h u i, et qui ne peut être autre
que celui fait a ncienn em en t, dont le cit. Coudert avoit
argumenté dans sa x-equête du 22 février 178 7, puisqu’on
y trouve l’abandon de la totalité des eaux de la fontaine
du Coudert de M any. Ou bien si le cit. Coudert prétend
que ce n’est pas celui dont il a entendu parler sous le titre
d’un traité fait ancienn em en t, qu’il rapporte donc cet
ancien traité dont il a lui-m êm e argum enté, et que par
là il a reconnu être en son pouvoir-, sans quoi il faut
qu’il avoue l’exactitude de la copie du traité de 1713
qui lui est opposé, et alors doivent subsister dans toute
leur lorce les inductions que l’on a tirées de ce traité
de 1713.
M a is il y a même plus, et ceci devroit trancher toutes
les difficultés du procès : c’est le consentement form el
donné par le cit Coudert à l’exécution, dans tout son
contenu, de l’acte de 1 7 1 3 , tel qu’il est conçu dans la
copie qui en est produite par le cit. Cabanes, s i celu i - c i
voulait de sa part V exécuterj consentement que le cit.
�.
(
3
6
3
.
.
Cabanes a ci - devant accepté. Comment le cit. Coudert
auroit-il pu avouer plus form ellement l’existence du traité
et l ’exactitude de la copie qui en est p ro d u ite , surtout
tant qu’il n ’en représentera pas l ’o rigin al, qui est certaine
ment en son p o u v o ir, puisqu’il en avoitargum enté dans
la r e q u ê t e qu’il avoit signifiée aux requêtes du palais,
le 22 février 1787 ? A lors il faut donc prendre dans tout
leur ensemble toutes les clauses et tous les termes du traité,
et par conséquent souffrir toutes les preuves et les induc
tions qui en résultent. O r , il a été établi que ce même
traite atteste la possession de la servitude des prés de l’Espinasse et du C lou x sur les eaux naissantes dans le P ré du
C h âteau, par l’existence , au temps même du traité de
1 7 1 3 , des rases qui commencent dans le P ré du C h â t e a u ;
qui conduisent les eaux dans lès prés de l’Espinasse, où elles
se prolongent, rentrent ensuite dans le P ré du Château
pour se verser dans le pré du C lo u x , et par l’existence des
six aqueducs pratiqués dans les murs du P ré du C h âteau,
et q u i, à la seule inspection , paroissent avoir été prati
q u é s dans le même temps q u e la c o n s tr u c tio n des murs
de clôture.
D e là donc que la copie du traité de 1713 est avouée
par le consentement du cit. Coudert de l’exécuter, si le
cit. Cabanes veut aussi l’exécuter de sa part, ce qui a été
accepté par le cit. Cabanes, il ne peut plus y avoir de
difficulté à réform er la sentence des requêtes du palais,
et à maintenir la servitude dont le cit. Cabanes est en
possession, par lui ou par M alprade son vendeur, depuis
plus de quatre-vingt-dix ans. L a seule chose qui en pourra
résu lter, est qu’il n’y aura point lieu au partage des eaux
�.
.
• c 37 ) .
f
de la petite fontaine de M an y, qui avoit etc ordonné par
la sentence des requêtes du p alais, qui n’avoit pas été
demandé par le citoyen Cabanes , mais qui avoit été
provoqué par le cit. Coudert lui-m êm e; et, en cela, le
cit. Cabanes ne fait que consentir l’exécution du traité de
1 7 I 3 5 Pav lequel M alp rad e, son atfreur, avoit fait au
propriétaire du Pi'é du Château abandon de la totalité
des eaux de cette fontaine.
U ne dernière réflexion n’échappera pas au tribunal :
comment concevoir qu’on eût pu mettre en pré des terreins qui ne pouvoient recevoir d’arrosemens que par les
eaux naissantes dans le pré supérieur , si on ne se fût pas
assuré auparavant du droit à la servitude de ces eaux.
O n croit donc avoir déjà suffisamment établi dans ce
m ém oire la possession même im m ém oriale de la servitude
dont il s’agit, par les ouvi’ages dem ain d’hom m e, existans
de tout temps dans le P ré du C hâteau, pour en faire par
venir les eaux qui y naissent dans les prés de l’Espinasse
et du C lo u x ; et l’on se persuade q u e , dès à présent, le
tribunal d’appel pourrait prononcer définitivem ent sur
la contestation des parties. M ais y trouvât - il encore
quelque d ifficu lté, une vérification par experts leveroit
jusqu’au m oindre d o u te, en constatant l ’antiquité des rases
et fosses et des aqueducs pratiqués dans le m ur de clô
ture du P ré du Château, et que ces aqueducs pratiqués
dans le mur de clôture sont de la même construction que
le m ur lui-même. L e cit. Cabanes est même encore en
état de prouver par témoins que M alprade son vendeur
éto it,lo n g - temps avant la vente, dans celte possession
im m ém oriale, qu’il a transmise au cit. Cabanes son acqué-
�.
(
38
}
.
re ur , telle qu’il pouvoit l ’avoir lui-m êm e, tale quale. E t
ce m ém oire r e n fe r m e les motifs les plus puissans qui
fondent les conclusions qui ont été prises par le citoyen
Cabanes.
.
L e cit. ARM AN D , ju g e, rapporteur.
L e cit. A N D R A U D , avocat,
L e cit. D E V È Z E , avoué,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Cabanes, Jean-André. 1789?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Armand
Andraud
Devèze
Subject
The topic of the resource
jouissance des eaux
successions
prescription acquisitive
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse sur la propriété et le partage des eaux. Mémoire pour Jean-André Cabanes, notaire, habitant du lieu d'Autrières, commune de Saint-Chamant, appelant de la sentence des requêtes du palais du 20 mai 1789 ; contre Pierre Coudert, négociant, habitant de la ville d'Aurillac, intimé. En réponse au mémoire de l'intimé.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1789
1783-1804
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0216
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0215
BCU_Factums_G1407
BCU_Factums_G1408
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53715/BCU_Factums_M0216.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Aurillac (15014)
Saint-Chamant (15176)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Jouissance des eaux
prescription acquisitive
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53166/BCU_Factums_G1208.pdf
64159c4f61555932aff78fb01ec06c17
PDF Text
Text
MEMOIRE
ET C O N S U L T A T I O N S
POUR
L e Citoyen A
n to in e
B O N N E T , Aubergiste et
Propriétaire, Habitant de la Commune de Riom.
CONTRE
La Citoyenne M a r i e - T h é r è s e - C é c i l e
B O N N E T veuve de Pierre-Amable Gué
rignon , Notaire et la Citoyenne M a r i e
B O N N E T et le C it. H u g u e s F E U I L L A D E ,
son M ari.
I L s’agit entre les parties du partage définitif de la
succession de Robert B on net, leur père. Il y avoit eu
un partage provisionnel pendant la minorité des parties;
la mère commune étoit entrée dans ce partage pour
l 'usufruit du quart qui lui avoit été légué par le tes
tament de Robert Bonnet, du 27 février 17 7 1 ; le surplus
des biens fut partagé en trois portions égales. Depuis
ce partage, la m ère, par le contrat de mariage d’A ntoine Bonnet, son fils, lui a cédé l’usufruit qu’elle avoit
du quart des biens du père.
A
�114,
Mi
(
2
)
L e partage définitif doit être ordonne sans difficulté;
on ne croit pas qu’il soit question de rapport de jouis
sances , qui en général n’a point lie u , lorsqu’il y a eu
un partage provisionnel. Cependant, comme il y avoit
m inorité, de la part de tous les entons, lors du partage
provisionnel, si quelqu’un d’eux se croit lésé, Antoine
Bonnet leur donne le choix de rapporter ou de ne pas
rapporter.
Mais il paroît qu’on élève deux difficultés dans Ta flaire.
L ’ une est de savoir si Antoine Bonnet doit prélever
dans la succession le quart entier, en vertu du testament
du père com m un, par leq u el, après avoir légué à sa
femme la jouissance du quart de ses biens, il donne la
propriété dudit quart à A ntoine et Fran çois B om iet,
ses deux fils j et en cas de décès de l’un d'eu x, la pro
priété dudit quart appartiendra au suivivant d eu x.
L a question naît de ce que François Bonnet est décédé
peu de temps après, son père. Mais le cas est prévu par
le testament.
L a seconde difficulté, est de savoir si la veuve Guérignon doit rapporler en nature un moulin sur lequel
étoit établie une rente foncière qui avoit été mise en
f
son lot par le partage provisionnel; rente dont la réso
lution a éLé prononcee et suivie de la mise en possession
du moulin par la veuve G uérignon; ou si elle peul être
admise à ne rapporter que la nouvelle rente sous laquelle
il avoit plu à son mari de donner ce même moulin.
Voici les consultations qui oui été données a Antoine
Bonnet sur ces deux questions.
�a i
(
3)
C O N S U L T A T I O N
S u r la prem ière question.
T i l 7. C o n s e i l
s o u s s i g n é , qui a vu le testament
de Robert Bonnet, du 27 février 1 7 7 1 ,
E st d ’ a v i s que le legs du quart fait par ce testament,
'doit valoir pour le quart en tier, en faveur de celui des
deux fils de Robert B onnet, qui a survécu à son frère.
L e testateur donne et lègue à A ntoine et Fran ço is
S o n n e t, ses deux J i l s , le quart de ses biens ’ et en cas
de décès de Y un d’e u x , il dit que la propriété du quart
appartiendra au. survivant d ’eux.
L e cas prévu p ar'le testateur est a rriv é ; un de ses fils
est mort peu de temps après lui : ainsi, d’après la disposi
tion du testament et l’intention bien marquée du testateur,
la propriété du quart entier a dû appartenir à celui des
deux fils qui a survécu <\ l’autre.
On ne-pourroit prétendre le contraire qu’en supposant
qu il y a une substitution directe et fidéicommissaire dans
la clause du testament, parce que suivant la disposition
de 1 article 63 du titre 12 de la coutume d’A u vergn e,
les substitutions testamentaires sont anéanties.
Mais prem ièrem ent, si on pouvoit regarder la disposi
tion du testament comme une substitution, on ne pourroit
placer cette substitution que dans la classe des substitutions
vulgaires, et non dans celles des substitutions directes ou
À 2
Cil
�vu
......................................( 4 )
fïdéicommissaires ; et l’article 53 du titre 12 do la cou
tume d’A u verg n e, ne peut s’appliquer qu’à ces dernières
substitutions, et non aux substitutions vulgaires, suivant
la doctrine de D um ou lin , dans sa note sur cet art. 53.
Intellige de fid 6icormn iss a riâ seu obliquâ, quia vulgaris
sub institutione continetur. Cette doctrine est aussi celle
du dernier commentateur de la coutume.
E n second lie ü , ce n’est pas même ici une substitution
vulgaire; ce n’est qu’un legs conditionnel : le legs du quart
n ’est fait qu’à celui des deux enfans qui survivra à 1 autre.
L a survie est la condition, et c’est l’événement de la con
dition qui assure le legs i\ l’enfant survivant, qui détermine
celui en faveur duquel le legs se trouve'fait en propriété.
Ju sq u ’à l'événement de la condition ce 11’est qu'une simple
jouissance qui est commune aux deux enfans : A u cas de
décès de F un d 'e u x , dit le testateur, la propriété dudit
quart appartiendra au survivant d'eux.
O r, on 11e peut douter, dit le dernier commentateur de
Ja coutum e, tome 2 , page 12 6 , que les dispositions con
ditionnelles 11e soient valables, quoiqu il y ait quelques
rapports entre les substitutions et les conditions; la cou
tume ne défendant pas de léguer sans condition , et ce qui
est contraire au droit commun ne devant pas être étendu.
Ce même commentateur rapporte au même endroit
des sentences (]ui ont jugé en conformité de ce principe
dans des espèces analogues, et qui ont fixé lo dernier état
¿le la jurisprudence.
Il se trouve aussi de semblables espèces rappelées par
Auroux:, dans son commentaire de la coutume de ïiourbonnois , dont l’article 324 est conforme à celle d’A u vcr-
�gn e, sur les mbsti lu lions testamentaires. Il cite entr’autres
deux sentences qui confirment des legs du quart faits par
des femmes à leurs m aris, dans le cas où les enfans vîen droient à mourir. C’est aux additions sur l'article 324 que
se trouvent ces sentences, avec une consultation de quatre
célèbres avocats du parlement de P aris, du nombre des
quels étoit Brodeau. Un de ces avocats disoit que la femme
n’avoit fait mention des enfans que pour désigner le temps
auquel le legs seroit d û , et que le mari étoit seulement
obligé par cette clause d’attendre1 extrinsecùs positœ
conditionis eventum ; qu’enfin la clause n’étoit qu’une
condition quœ rem fu tu ra m ostendebat.
D e même dans l’espèce du testament dont il s’ag it, le
père n’avoit donné la totalité du quart en propriété à
l’un des deux enfans, que pour la recueillir après l'évé
nement de la condition qui étoit le prédécès de l’autre;
la clause n’indiquoit qu’un événement futui*, rem Juturam
ostendebat.
D élibéré à R io m ^ le 28 mars 179 7 ( v. s. )
»
AN D RAU D .
T O U T T É E ,
PAGES.
,
L e C o n s e i l s o u s s i g n é est du même avis et par les
mêmes motifs. Il ajoute qu’en matière de testament la pre
mière chose ;\ considérer, c’est la volonté du testateur : la
faveur de l’héritier 11c vient qu'après. I n conditionibus
testcinientorum voluntatem pot lus quàtn rerba cunsiA
I
3
�v "
,(6)
d era ri oportct , dit îa loi P a te r Seçerin a m , ff. i o r , de
conditiofiibus et demonstr. C’est aussi ce qu’enseigne
Ricard , part. 2 , cliap. 4 , n°. 1 26.
Dans l’espèce, l'intention du père est manifeste ; il l’a
exprlnjée. dans dçs. ternies non équivoques : il lègue le
quart, i\(s,es deux fils; et dans le cas où l’un viendroit à
décéder, iljègu o le quart entier à l’autre survivant. Il y a
ici et la volonté et l’expression pour transmettre tout le
legs au survivant, et le conseil ne pense pas qu’on puisse
le lui.contester. Ce ij’çst po in t, comme 011 l’a très-biçji
développé dan^ la ; consultation, une substitution fidéicommissaire , la seule dont la coutume ait entendu parlerj
,ear une substitution de cette nature est celle par laquelle
■on charge, son héritier ou son donataire de rendre- la
^succession à un autre? après son décès, ou la libéralité
qu’il lui a faite. L e testament ne contient rien de sem
blable. Il lègue à deux frères le quart de ses biens; et en
cas de décès de l’un, le survivant profitera de tout. Ce
seroit tout au plus une substitution vu lgaire; et encore
ce terme pe convient pas ¿\ la disposition ; car le père n’a
pas légué à l’un de ses enfans le quart de son b ien , et n’a
pas dit que dans le cas où ce légataire ne voudroit ou ne
pourroit en profiter, il le transmet à un autre; c’est pure
ment une disposition conditionnelle permise par la loi.
L ’on ne peut pas dire que le p è re, en assurant au sur
vivant la totalité du legs, n'a eutendu parler que du cas
oùle^rém ourantdécéderoitavant lui testateur; il n’auroit
■pas eu besoin de le dire ; c’étoit une suite de la disposition
première ct‘de la loi qui accorde , en disposition à cause
r db rübtf, 16 droit d'accroissement au colocataire survivant;
�"V
,
( ? ) ••
.
,
.
et comme un acte n*est censé
contenir
r'çn d'inutile, ili
. .
■1 .
- ’ ' >> ■ J :
s’ensuit que le père a entendu exprimer, tout autre chose,
cl qu’il a entendu quç le. survivant des deux légataires
recueillît seul le legs fait aux deux , quand il décéderoit
après le testateur, sans en fa n s, bien entendu ; car ceuxci représentent le pere.
,
(
L e conseil estime donc qu’Ântoine Bonnet doit profi
ter seul du quart en préciput légué par le père.
1
f
*
•
)
j
.
f
♦
. , i ' w y
- D élibéré à Clermorit-Ferrand, ce 10 prairial an
PA RTIS
MARC ILLAC.
5.
. ,
'
•r
L e soussigné ne voyant rien à ajouter aux Éolicfès1
raisons contenues dans ces consultations, bien convaincu
de la force et de la netteté de l’expression de la volonté
du testateur, adopte la même solution , et estime q u e 'le 1
quart doit appartenir au fils. 6 e ï e r prairial an 5 d e là
républiquef'i’i’afiç'aise une et indivisible. '
TIO LIER .
....
'C
.0
N S t y, L T À T I O N
S u r la seconde question.
‘
I - i E C o n s e i l SOUSSIGNÉ , qui a vu le mémoire du ci
toyen Antoine B o n n et; contenant les faits qui seront
l’appelés dans la présenté consultation , E s t i m e que lai
question présentée mérite l’examen le« plus attentif, soit
darts le point de d ro it, soit dans les circonstances par
ticulières du fait.
A 4
�(S )
P ar un partage provisionnel, convenu et effectué entre
les héritiers de Robert B on n et, il fut rais au lot de Ma
rie Thérèse-C écile B o n n et, femme Guérignon , une
rente foncièi’e de 1 3 0 ^ , due sur un moulin par Fran
çois Gourcy.
Cette rente étoit originairement due par les nommés
D é at, qui avoient pris ce moulin des héritiers de Serre
par qui elle avoit été vendue à Robert Bonnet.
Celui-ci avoit obtenu en la justice de Tournoile une
sentence contre les D é a t, qui prononçoit la résolution
du bail à rente , faute de payement des arrérages , et pour
cause de dégradations, et il s’étoit mis en possession du
moulin.
Feu de temps après il avoit donné ce même moulin
à François G ou rcy, moyennant la rente foncière de 130 ^5.
et ce fut cette même rente qui, lors du partage provision
nel , fait entre les enfans de Robert B on net , fut mise au
lot de M aric-Thérèsc-Cécile Bonnet femme Guérignon.
G ourcy nouveau preneur à rente étant tombé en ar
rérages , fut aussi déposédé par Guérignon et sa femme,
qui firent prononcer la résolution du bail à rente. V ra i
semblablement l’action fut dirigée au nom de tous les
héritiers de Robert Bonnet et la résolution prononcée
en faveur de tous.
Mais Guérignon ne garda pas le moulin ; et bientôt
après seul, sans le concours de sa fem m e, ni de ses co
héritiers, il donna le même moulin au nommé Lauronçon , non plus sous la rente de 13 0
mais sous
une nouvelle rente de n setiers , moitié iroment et
moitié §e'gle , quatre journées de voitu re, deux paires
�u»
'
(9 )
de chapons et deux paires de poulets. Ainsi cette rente
équivalent, et peut-être plus, à la rente de 13 0 tt', que
la femme Guérignon avoit reçue par le partage provi
sionnel.
Les choses étoient en cet état, lorsque les Dca t , pre
miers preneurs à rente, firent assigner les héritiers de
Robert Bonnet en désistement du moulin.
On leur opposa la sentence de resolution ; mais ils en
interjetèrent appel, sur le fondement que la résolution
avoit été ordonnée, faute de payeinens de deux années
d’arrérages, au lieu qu’il en auroit fallu trois pour don-,
ner lieu à la résolution. Les Déat firent en même temps,
assigner Laurençon.en assistance de cause, et pour voir
également oi’donner le désistement en leur faveur.
C ’est alors que les héritiers Bonnet passèrent un traité
avec les U éat, le 13 août 17 9 0 , dans l’exposition duquel
il fut lait mention du bail à rente que Guérignon avoit
fait à Laurençon , mais sans indiquer n i.la date de ce
bail à rente, ni le notaire qui l’avoit x'eçu, ni la quotité
de cette rente.
P ar le résultat du traité, les héritiers Déat sc dépar-,
tent de leurs demandes et de leur appel \ ils co n sen tan t
a 1 exécution de la sentence qui avoit prononcé la réso
lution , et en conséquence que les Héritiers Bonnet et
L a u ren ço n , c h a c u n en ce q u i les c o n c e r n e demeu
rent en possession du moulin. Cus départenions et consentemens sont accordés moyennantunesomme de 1824^*.,
qui'leur est payée comptant par les héritiers Bonnet. On
observe que Laurençon n’est point partie dans ce traité.,
Il fe’agit aujourd’hui entre les héritiers Bonnet de faire
,
L
�( ÏO )
un partage défin itif, où chacun doit rapporter ce qu’il
avoit reçu par le partage provisionnel. Il y a trois hé
ritiers, Antoine B o n n et, M arie Bonnet, femme Feuillade,
et M arie- L hérèse-Cécile Bonnet, veuve Guérignon.
- Antoine Bonnet prétend , et vraisemblablement il en
sera de même de la femme Feu illade, que la veuve Gué
rignon ayant fait prononçer la résolution du bail h rente
de 130
qui ctoit due par François Gourcy , et s’étant
mise en possessiôn du moulin sujet à la rente, doit rap
porter au partage définitif le moulin en nature , et non
la nouvelle rente sous laquelle Guérignon, son mari, avoit
donné ce moulin à Laurençon. Il observe que le moulin
tfst d’une plustgrande v a le u r, et il le prouve parce que
L a u re n C o n a p rè s avoir reçu le moulin de G uérignon,
l’a lui-même donné à une nouvelle rente plus forte de
six setiers , que celle pour laquelle Guérignon le lui avoit
donné. '
;. . _
:■
' liii prétention dös;co-héritiers de la veuve Guérignon1*
jtaroîtr.oit appuyée sur le principe quo la rente foncière
de 13 0 ,f~ lu i ayant été donnée p a r le partage provi
sionnel, avec{toutes ses qualités , et avec une disposé
iion prochaine pour être éteinte en cas 'de déguerpis
sement ou de résolution, et être converti en l'héritage
déguerpi ou abandonné ; c’est alors Yhéritage lui-même
qui doit être rapporté en n a tu re , p a r celui à q u i la
rente avoit été donnée. Ce principe qui dérive des lois
romaines, est enseigné par tous les auteurs: Lebruntraité des successions, livre 3 , chapitre 6, section 3, n°. 39 ;
Ferriè'res sur l’article 3öS 'de 1b coutume de P a ris;
Legrand sur la coutume de T ro ÿès; tomi: 2 , page 206;
�1
.... . —
------- ----------------------- ------------ — ------------
1Â'->
( ..i l )
Rousseau de Lncouibc , au mot rapport , scct. 4 , no. ^ etc.
Ne peut-oa pas répondre pour la veuve G u érignon ,
qu’en admettant même le principe, ses cohéritiers seroient
non recevables à opposer le moyen qu’ils veulent en tire r,
parce qu’ils ont approuvé le bail à rente, fait par Guérignon et Laurençon. Cette approbation ne résulte-t-elle
pas en effet de ce que dans le traité iait avec les D é a t,
le 13 août 17 9 0 , le bail à rente de Laurençon est rappelé,
sans que les cohéritiers aient réclamé contre ce b a il,
qu’au contraire ils ont souffert la clause de ce traité par
laquelle les D éa t consentent que les héritiers Bonnet
et L a u re n ç o n , chacun en ce q u i les concerne, demeu
rent en possession du m oulin ? E t cela ne veut-il pas
dire que les héritiers Bonnet demeureront en possession
de la rente due par Laurençon, et que celui-ci demeurera
en possession du moulin sujet à la rente?
L a veuve Guérignon , ne peut-elle pas ajouter que
d’ailleurs si la nouvelle rente établie par Laurençon’j
excède de six setiers celle dont il étoit tenu Iut-rmême, c’est
parce qu’il avoit fait des réparations dans le m oulin,
et particulièrement qu’au lieu d’une seule roue que ce
moulin avoit originairement, il avoit établi une seconde
roue qui doubloit le travail et par conséquent le béné
fice du moulin ? et le fait de l’établissement d’une se
conde loue se trouve énonce dans le traité de 179®*
Ne pourroit-on pas repliquer pour les cohéritiers de la
veuve G u érign o n , qu’;\ la vérité le traité de 17 9 0 ,
rappelle bien le bail à rente fait par Guérignon et Laürencou ; mais qu’il n’en donne ni la date, ni le nom du
notaire qui favoit reçu , ni la quotité du la rente, et
�^12?
que Guérignon n’en a donné aucune connoissance à ses
cohéritiers ; ce qui auroit été absolument nécessaire
pour leur faire consentir une approbation valable de
tout ce que Guérignon auroit pu faire avec Laurençon.
D e /lis controversiis quœ ex testam entoprojiciscuntur
neque tra n sig i , neque e x q u iri veritas aliter pot e s t ,
quàtn inspectis, cognistique verbis testamenti. C’est la
disposition de la loi 6 , iF. de transactlonibus . Ce prin
cipe n’est pas particulier à la matière des testamens ; il
est général pour toute sorte d’actes sur lesquels on peut
transiger, sans en avoir une connoissance exacte. N on
valet transactio, quando alterius partis instrumenta
cùlantur r e l suppressa sunt , 1. g, if. de doîo malo. Q ui
ignorans per f u R adian coherœ dis, univers a verba quœ
in vero cra n t , instrurnentum tra?isactionis interpo
sait , 7iü7i tam pasciscitur quàm decipitur. 1. g. if. do
iransactionibus. L a loi ne se contente pas d’une simple
énonciation de l’acte sur lequel on transige; elle veut
que celui qui traite en commisse toutes les dispositions,
toutes les expressions, univers a verba . Ainsi on ne peut
•approuver un acte sur sa simple énonciation , A moins
qu’il ne paroisse qu’on en- a connu textuellement toutes
-les dispositions*, inspectis, cognitisque verbis. Mais sur
tout lorsqu’il s’agit d’un traité sur un acte qui a été
fait par un cohéritier, et dont il a caché les dispositions
à ses cohéritiers, et lorsqu’il n’a pu le faire que dans
un esprit de fraude: c’est alors sur-tout que la loi veut
que l’acte ne soit point regardé comme une transaction;
îDais comme une véritable tromperie. O r , on verra
bientôt que le bail <\ ren te, fait par Guérignon i\ Lau-
�. .
C *3 )
rençon , étoit un acte vraiment frauduleux, et que s’il
ne l’a pas fait connoître aux cohéritiers, c’est par une
suite de la fraude qu’il avoit déjà pratiquée: on est donc
parfaitement dans ces termes de la lo i, q u i ignorcms
})cr fallacium cohœredis.
Les cohéritiers -de la veuve Guérignon ne peuvent-ils
pas ajouter que d’un autre côté ce qui est dit dans le dispo
sitif du traité de 17 9 0 , que les Déat consentent à ce que les
héritiers Bonnet et Laurençon , chc jim en ce qu i les coti~
cern e , demeurent en possession du mt u lin, outre que cc
ne sont que les Déat qui parlent dans cette clause, et qui
n’avoient aucun intérêt à distinguer les héritiers Bonnet de
Laurençon ; la clause ne pouvoit êtreconsidéréecommeune
approbation du bail à rente fai t à Laurençon par Guérignon,
par la raison que tant que le partage provisionnel subsiste
ront, 1rs héritiers Bonnet ne pouvoien t pas contrarier le bail
fait par Guérignon à Laurençon , qui, malgré e u x , devoit
conserver la possession du moulin, pendant tout le temps
'que Guérignon lui-m ém e avoit droit d’en jouir en qualité
“de mari ; et alors l’interprétation de la clause, chacun en
ce qui les concerne, serait toute naturelle, que Laurençon
jouiroit tant que le partage provisionnel subsisteroit, pen
dant la vie de Guérignon • mais qu’aussitôt après le partage
deiinitii, la possession appartiendrait a u x héritiers Bonnet.
Quant à ce que peut dire la veuve G u é r i g n o n , que si le
nouveau bail à rente, fait par Laurençon , excède de six.
setiers celui que lui avoit fait Guérignon , c’est parce que
Laurençon avoit fait des réparations et établi imo seconde
roue dans le moulin , on peut répondre pour Antoine
Bonnet, que rétablissement d’une sccoude roue dans le
/> « > !
�M
VU
( i 4 -)
,moulin ne pouvoit être qu’une réparation peu considé
rable ; dès que d'ailleurs il y avoit un assez grand volump
d’eau pqur .le travail de deux roues.
Enfin un moyen de plus en plus puissant, et qui vient ù
l’appui de tous les autres contre la veuve G u érign on , se
tire de la découverte que l’on vient,de faire delà fraude
.manifeste qui a régné dans.le bajlà rente fait par Guérignon
à Laurençon. E n effet il est prouvé que Guérignon avoit
.reçu lors de ce bail ù rente., un pot de vin considérable
.de Laurençon; ce qui avoit dû notablement diminuer la
rente.
Laurençon a confié à Antoine Bonnet,une quittance qui
.lui fut donnée par Guérignon le jour même du bail à rente,
d’une somme de 5 s 8 francs, causée expressément pour pot
de vin de ce bail à rente. Il a .de plus assuré à Antoine
Bonnet, que ce qu’il devoit donner pour pot de v i n , rnontoit à 1,200 francs , et que pour les 1,0 72 francs restans ,
outre sa quittance, il lui avoit fait plusieurs billets, qu’il
avoit retirés à mesure des payemens qu’il lui en avoit faits,
et qu’ il n’avoit pas conservés ; mais en même temps il a re
mis à Antoine Bonnet la signification qui lui avoit été faite
p a r Feuillade , d’un de ces billets qui étoit de 2 16 francs,
.et que Guérignon avoit cédé à Feuilladc ; et le billet dont
la copie est en têle de la signification , est aussi du même
temps que Je bail à rente; ce qui prouve qu’il faisoit aussi
partie du pot de vin. Voilà donc bien 744 francs de pot de
vin prouvés par écrit, et Laurençon nllirmeroit que les au
tres billets qu'il avoit faits pour même cause, remplis.soient la somme de 1,200 francs, à laquelle le pot de vin
avoit etc arrêté. Ainsi il doit paroi Ire évident que le pot
�C 15: )
de vin équivaloit au moins à ce que le moulin pouvoit
valoir de plus que la ren te, pour laquelle Guérignon le
donnoit à Laurençon. , • . i
t ,
Il
doit donc encore paroître démontré que la fraude
la plus manifeste a présidé au bail ù rente l'ait par G ué
rignon à Laurençon, et qu’il a voulu trom per, et les co-,
héritiers de sa fem m e, et sa femme elle-même, pour faire
sur eux un profit considérable, en donnant le moulin .peut
un p rix très-inférieur’ à sa valeur, afin de s’approprier
un pot de vin de 1,2 0 0 francs, que les cohéritiers out
ignoré , et qu'il leur a caché.
L a veuve Guérignon pourroit elle-même faire annuller
le bail à rente fait par son m ari, qui ne pouvoit pas
disposer d’un bien dotal; et si elle ne prend pas ce p arti,
c’est pour éviter la garantie qui retomberoit sur ses enfans , héritiers de son mari. Mais les cohéritiers de la veuve
Guérignon ne peuvent pas êlre victimes des méuagemens
qu’elle peut avoir pour ses enfans.
- Enfin il est d’autiint plus juste que tous les cohéritiers
profitent de la plus-value du moulin , qu’ils avoient bien
acheté cette plus-value pour les 1,824 ira 11 es, qu’ils avoient
été obligés de payer aux D éat, pour faire cesser leur de
mande en désistement de ce même m oulin; dans laquelle
somme de 1,8 2 4 fi'ancs, la veuve Guérignon, ou son mari,
n avoient contribué que pour un quart ; tandis que G ué
rignon s’est fait ensuite donner ur^pot devin de 1,2 0 0 fr.
à l’inscu
> de ses cohéritiers.
On adopte donc pleinement les moyens proposés par
Antoine JBonnct, qui écartent absolument ceux qu’on a
supposé que pourroit employer la veuve Guérignon. Le
�1
6
conseil est pénétré de la preuve des fraudes commises par
Guérignon dans le bail à rente qu’il a fait à L aurençon ,
en se faisant donner à l'insçu de scs cohéritiers un pot
d e vin considérable, et que c’est par une suite de cette
même frau de, et pour couvrir la tromperie qu’il leur
avoit faite , que dans le traité de 179 0 , il s’est contenté
de faire énoncer le bail à ren te, sans en donner ni la date,
ni le nom du notaire qui l'avoit reçu , ni exprim er la quo
tité de la rente; en sorte qu’on ne peut jamais faire ré
sulter une approbation de la part des cohéritiers dans le
traité de 1790 , d’une simple énonciation d’un bail à rente,
qu’ils n’avoient jamais connu , qui ne leur avoit jamais
été com m uniqué, et qui leur a été tenu caché p e r fa lla cium cohœredis.
O n ESTIME donc que la veuve Guérignon doit rap
porter en nature au partage définitif le moulin dont il
s’a g it, ou le prendre à son lot suivant sa valeur actuelle,
sauf à ses cohéritiers dans le 1 er. cas , à rembourser les ré
parations faites par Laurençon , qui auroient pu rendre le
moulin de plus grande valeu r, ou dans le second cas à
n’estimer le moulin qui demeureroit au lot de la veuve
G uérignon, que suivant sa valeur actuelle, déduction faite
du montant des réparations qui ont augmenté cette valeur.
Telle est en effet la règle observée dans les rapports.
D élibéré à R io m , le 29 floréal, an 7.
ANDRAUD.
À R I O M , D E L ’I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T .
�^
f t M
^
^
jl
Î u
i u
^
a js
^
/a
<j|uoA>- /((jui aiíu/^'A *(/**"*/
t/ciuAt^u fin/tAAVM^Jp t/tjÜVAAAAU (AA ClA ^ÏÀAJkVlA* ; ^^ÜVWAJ /«I ^AAíjOVu/*
^'
Cv.
l " " “ "
û
uw
O uA uUi U
W vUi
<“ ^MUî w^AUJ Ui U
W
a
0
(J IfcAV ^ A
A ^ l O« w
I/ V
r fO
A jJ
Ar  ^/ tU
M s yy
. JL
/*../ \ ..... -i^r
^ OXAAAA tx>\*j ltv>4CA-nnjLkaJJ - €,>k.^
t j ^ r ^ ^aaaO
<*a*xA A a
tV ^
//
/X
X x ^ \{Ô Iu < J < X r ^
¿
4A A i M * i ,
^
(K A* /uut\i» JtUA\0 CX^)Uaa\01
<A
/ / ^ t U 4 " ( |f
ff /UAAiÙüIi^X
^
^ . ^ A t y u U i i t ^ ^VU^vV" ^ V S t ^
0 ^ |U f o f v í u M ^ V ^
Iaa^ ^
*f o
Wo.«ovLx-^W/' '
5 / V«^*. AxA^jol ci»ù
(/«wi* A
V
✓ // /
^
o / — frt^ùu üu> ^ (W— - ô*. /r~~T*>'~r f~ ~ -
/W W <W ^
lA A hM A ^
O J^W akI
^ vUXj t j
/* ------ \L/^ f
/a^Lo^uulitf
Y » ' Cu a MI i l C M ^ A JL A J«
^l
C vjU\ âk>*
Ot|UUUA«i«jjr €*■
CTJJ1A»^JL^.
• ^ua~i«MwU /t AaaAj^4 /O /
/ttAAJKj^
^
0 MuTiu ¿LyojCck^XXJLj ÿ\J*xr fa1*»mÂKA^ U á^fíjttMüU Cv»AuÂX citiâXjl
^ tAAhk
Cua
^ M ^
4 JUA
C A r ^ lM u ^ ij
y^ÉlMfc tu«^b«uy
O lÌr«AA AAA W
4.
C4>**Z>1
CJfc- tAAUJVV^VjÒ«AUÄjj'y^tAAkA
t
C A JU
^
° A* ^
Ííy m
V « a T ^ a i^ ì<
4 \w a.
j U a /u L ì)
V\M JL U js I a ì x A v À jm
(W M A '
/ l f o À ^ u J j r ‘^ » * ^ * A v Ó k L
C a j^ m u
w^T>
1
I ^ y ^ w l ìm a ia x I
s i0 i/ '
^
a if - fiiH.TVn., j —Oa** /n<a^ /a /4\Mmmom t/uw«f
¿ a/cL/cmjj ì*
">
V
/
'
Il
_
<
/
'
*•
v
'
•
'
^
/ /V \ J
O C v M A ju r Ok.
/to.^AAJL>^a\A-M *^OA A ^
OO U U
aa
/ t o i f <X ^ û v w u jL ï.
Uw>v\% ^ Ì Ì w m a A a ^ j l
«M% C V >
^ l/U jb o ju i
a a a AJ ^
m
(aÄ*v^>-*
^ «a u u
tubMUM. vuJL t*- ¿wn«iiru)b*>Av u- <>^/JL <v*u’
a i * .
^
Ò
C
^
,
/*
V x * ìl> ^ O L -
A
____ _
< x ¿ ~ x i
C Y iV ^ v ^
;
\L A ~ O v u ~ ~ u . ~ à *
/ _ / , ^ a ^ ju f / w , ^ cwvCwA ^ — " ~
ou^ioifc^r “-i wtuuAiuwi^jr /'t>-¿r¿yc^Aïàj« o V i a CJaj^x! (• ~*>° ^ KT*
bMy«>Mu'ui<uJ f ' <W«uU~ ¿ t«i»<u^üü 'bl ««*» A il,
yü&. *>—
^
— ix.
z^.
^ ^
/*. cLiW,,-- X
cx,v^ü-- ^
^
^ ^
^
(a u ^ J Iv J J it
**•
^^»A . CjU«a X u a a JT
« A r C uu>|^s à <
¿AAJUL
Í ^ A O ^ rííftfc -^ ij
&IUAV1 u a a A . ~0c\A kA J
^ r « /M l>
blwAvtnJt f'fc(OAJOJ ^tuojkxy/4**^ fauu\
O ^M AA
6
4
CLw\Vj <A A
(»W ^ v O k
<Am Ü>
t*-
<AW^ ^«CA' t&i.
O A JtA A A K *-»,
UA y o
^
€>w
*» m .^ O ^ J o O » £
u
k.
¿ .’f c t / .« - L ï »
iA A ik /^ -
<a '
jyu* ^ ¿ItnijLjh^ 1* jiJu M rk ,fcJi«»»wü^ M •’** yA " ff*** /
fiA. *(/**,
-Ay4w\ fcvS-wJ^ ^1K pAxiuxtj\
/i iaw'Ixa (iy«i«uKM
«X*0«A».Jr ¿
^ooxO f
¿ A f t/u o i ^ A»
u m , u i& V
u
, , , , ^
u /o w u
T i« / « y l M l|U U J L t l
WW«
^ Aa»^, L^ ò t ^ . (Ky^Ai^jLX *y€-- ^ A,~a
W ìy ^ « . , ì i i u i i i w ^
tw s ^ u A w W lu » ^ ~
CAA-i ------- --- } U r
»-
ov y^^ULi
�6 (¡7->{cAt~S>'
^ to»*^vlvôv\ ^vuùvum.
1*
a A
,
•
^
{ tt-K J CAA C v a * v a A ^
ÂaîSKaJ U J
p ' V f c —»OJVA.
O» A
^
4
C ï* > \* ^ jjc ~ ^
ClkAJU*. .> À t A A A ,& * » i> t
ijl^AUAV 0\ /uùjT«|^V)
ÍX**^<*ru /a ^ «A*A
A
ftlUvtVvwA Q buA/|»*A^\U)« Ùf"iu»«fl—
ÿ\UjJ[(Ktj « CwjGv» &■» U/^ tn*JuM/y
U (^\AA /üUX^I ¿ IvAJUv^V^
c^/*. ^-o». ^
t f r ù i * - « /*}
«wÆuv^l ^
c* covaaj^a &
«v UakJT £/Va*~ ¿
ftl^'xfrA
Culòr ¿ u*A g UmsJ ï
aft ^
fu^iy>f*^tai ^ u l /n/^vü^^uma
(/c\wua\XAai ^aa o JjT '
O^A\aJ\XJL AívO'^Or C*a1*
& ^>jJt «uwJCmU /^CwvaaaA t^V,^ 'h^
K^a,)!
ff\ U^vti ^AUyU
(A wUaXJIJIM) ^OxA c£\Jt^«-jjL / c^OOvAl» «aaä
o. <^x
ft
( r c d ti ~ h < ^-H ^
c u u w T
*
/<«y,<l**"“ ‘ Ä« / / O O ^ , Auya à büiAJLy
e \ -
u x ^ t w
f< x
^ u
V1
y
i u
^
u
i M
CLÄ.
¿i2>¿C ùitSti. fJr {tx u j k w j ^ c x Ou-Jt"
*/x‘—-*Js»l£ «.
è« A».
t» ^)(/\4Ái(JLt IA^'ULVUm}
(j'''~JLr ^
t*~
y<*«« bMvur l ’cuJl ^\A¿>uiujua/ /tt. U . \ ô k u A i i v l i <><
cJi . uÎimumiwjl. ^vJk t ÂûiJi <4* f}(f If f^winjUo^i A *~>»
ÍAAX1IV> ^OuMy Î a*
w uo ^ , . /î<o~A~
A(^fc^<AA-.
X-L M*rU «a*Ö. jr'*+*^y/
A* Aa^JU ù-^> /^Û^û-O-â^y**AÿA OM
()tài I^UaJT t*
,
i
U^<\u\^ijjtr
¿Í ¿ X ___ » (lUÌliWAi ft ^i>xíi»y»j - - - • Ua*
Ac^.jat>lV
-oJtwyT
à« /a
^v«^yo
—
/twiu»UM
^*.«—>*•■«—^ry 1 - ^ H £»~Jïww^ c^i>.
>^„... 6
*^'
/“
u’ &<* Y'
j ^ U «~»^v
/•***
^ W'IS*'/ ~
rj ,
.
t-' .t. {u
cl*j/('
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnet, Antoine. An 7?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Toutée
Pagès
Dartis-Marcillac
Tiolier
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
legs conditionnels
usufruit
coutume d'Auvergne
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire et consultations pour le Citoyen Antoine Bonnet, aubergiste et propriétaire, habitant de la commune de Riom. Contre la citoyenne Marie-Thérèse-Cécile Bonnet, veuve de Pierre-Amable Guérignon, notaire, et la citoyenne Marie Bonnet et le citoyen Hugues Feuillade, son mari.
Annotations manuscrites avec les attendus de l'arrêt, sur deux pages.
Table Godemel : Legs : par testament du 27 février 1771, robert Bonnet a donné et légué à ses deux fils le quart de ses biens, et, en cas de décès de l’un d’eux, il dit que la propriété du quart appartiendra au survivant d’eux. l’un de ses fils est mort peu de temps après lui, le survivant doit-il recueillir le quart entier ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 7
1771-Circa An 7
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1208
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53166/BCU_Factums_G1208.jpg
coutume d'Auvergne
legs conditionnels
Successions
usufruit
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53643/BCU_Factums_M0102.pdf
6caed9a8964235341eee5f210726bbef
PDF Text
Text
P R E C I S
P O U R
F
r an ço is
B O N N A M O U R , propriétaire, demeu-
reant à St.-G ilbert, commune de St.-Didier ;
C O N T R E
F r a n ç o is M
O R A N D , propriétaire, demeurant
en la commune de Jenzat.
L E citoyen François M orand est débiteur de Bonnam our d une somme de 19,500 francs; elle r eprésente la
Valeur de plusieurs immeubles. L e créancier en réclame
le payement. Il in v o q u e , pour y parvenir, la loi du 16
�■
(
o
-
nivôse an 6 , sur la vente des immeubles pendant la
dépréciation du papier-monnoie. François Morand ne
conteste pas la validité de cette dem ande-, il déclare, au
contraire, q u elle est juste; mais il prétend qu’Annet
M o r a n d , son f r è r e , s’est ch a rg é , par un arrangement
particulier entr’e u x , d’acquitter ses obligations. Annet
M orand lutte vainement contre la garantie q u il a pro
mise , et contre la force de la l o i , avec une foiblesse
que son texte seul combat. L ’on pourroit se dispenser
de répondre à cet adversaire mal conseillé; c’est afin de
ne rien n é glig er, que l’on réfutera ses principales objec
tions: le temps et la raison ne permettent pas cle s’arrêter
à celles qui ne sont que frivoles et captieuses.
' F A I T S .
François Bonnamour se rendit adjudicataire, les I er et
2 prairial an 2, de plusiers héritages nationaux, m oyen
nant’ 23,160 francs.
L e premier messidor an 3 , il subrogea à son adjudica
tion François MorantJ, à la charge de lui rembourser
*
*^
^
les sommes données, et d un bénéfice de 23,800 francs.
L ’acte annonce que François Morand s’étoit libéré en
assignats et en effets commerciaux. P o u r réaliser le
r montant de cette dernière stipulation, il souscrivit plu
sieurs promesses -, il y en avoit quatre de 5,000 francs
chacune. Un payement de oo francs, endossé sur ces
5
effets, réduit' la créance de Bonnarnour à la somme de
1 9 , 5 0 0 ' francs en principal.
�( 3)
Par acte du sixième jour complémentaire de la même
année, François M orand vendit à Annet M o ra n d , sans
garantie, la majeure partie ,des immeubles cédés .par
Bonnamour. L a condition la plus importante de l’acte,
fut celle de payer tous les effets dûs au premier cédant,
et de les rapporter soldés à François Morand.
Acquéreur d’un bien qui produit annuellem ent, au
moins 1,200 francs, A n n et M orand voulut que les
quatre billets fussent soumis au tableau de dépréciation
du papier-monnoie. Il cita Bonnamour en conciliation
sur la m anière d’acquitter ce qu’il devoit. François
Morand fut appelé comme essentiellement intéressé à la
discussion. L a conciliation échoua : Bonnamour dit sim
plement qu’il étoit disposé à recevoir.
v L a loi du 16 nivôse an 6, a été promulguée depuis
cette dém arch e; B o n n a m o u r, en l’in voq u an t, a cité
François M orand au bureau de paix 'de son canton ,
pour se concilier sur le payement de 10,000 francs pour
les termes échus de deux promesses. François M orand
a ré p o n d u , que d ’après ses arrangemens avec Annet
M o ra n d , il demandoit un délai, pour exercer contre
lui une action en garantie.
Annet M o ra n d , cité par son frère, s’est présenté,
le 26 du même m ois, devant le juge de paix. E n con
venant qu’il s’est chargé d’acquitter les quatre billets ,
il a soutenu qu’il a voit déclaré , par acte du 19 p lu
viôse, q u’il entendoit se conformer aux articles
et 7
■de la loi du 11 frimaire précédent, et payer tout ce
5
qu il devoit , dans le cours de l’année, après une réduc
tion faite sur les bases de la dépréciation du papier
monnoie.
A 3
’
�( 4 )
.
_
Il a offert de rem plir ses obligations , suivant cette
intention ainsi manifestée.
Les aveux de François M orand sont précieux. Il a
dit qu’ Annet Morand étoit son garant, parce qu’il l’avoit prom is;
Que les quatre billets devoient être acquittés sans
réduction , parce qu’ils formoient une partie du prix des
immeubles que Bonnamour lui avoit cédés; qu’Annet
Morand ne sauroit éluder cet engagement, et les suites
de la garantie.
François M orand enfin a été assigné, pour se vo ir
condamner à payer les 10,000 francs échus, ou 6,ooo
francs par forme de provision.
Annet M orand a été mis en cause. Il s’agit de
montrer que Bonnamour est réellement créancier
la somme de 19,600 francs en num éraire, avec
intérêts.
dé
de
les
-
�CS )
PIÈCES
JUSTIFICATIVES.
<E C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a pris lecture du
contrat portant subrogation, consenti par François Bon
nam our, au profit de- François M o ra n d , le premier
messidor an 35 de la notification faite par Annet Morand
à François B onnam our, le 19 pluviôse an 6 , et sur ce
^ u i a été exposé;
E s t i m e .que les sommes, restées dues à François
B on n am our, pour le prix- de la subrogation par lui
consentie, doivent être payées conformément au mode
décrété par la loi du 16, nivôse dernier, et non par la loi
du 11 frim aire, ainsi que. vou,droit le prétendre A n n et
M o ran d , auquel François M orand paroît avoir rétro
cédé les objets auxquels il ayoit été. subrogé par Bonnaimonr.
, ■, •
.
François Bonnamour s’étoit rendu adjudicataire par
différens procès verbaux du directoire du ci-devant
.district de Garinat, d,e plusieurs; immeubles nationaux.
r P a r acte d,u premier messidor an 3 , il a s u b ro g e
purement et simplement à-ces adjudications, François
Morand. Cette subrogation a été faite aux mêmes p r ix ,
�( 6 )
.
.
.
charges et conditions portées par les adjudications, et en
outre, moyennant la somme de 23,800, tant pour bé
néfice que pour épingles-, il est dit par le contrat, que
cette somme a été payée co m ptan t, tant en papier
monnoie ayant cours, q u en effets comroerçables.
Maintenant les effets donnés en payement n’ ont point
été acquittés, ou du moins ne l’ont été qu’en partie.
François M orand a lui-même rétrocédé les objets acquits
à Annet M oran d, son frère, à la charge par ce dernier ,
de payer en son acquit, le montant des effets énoncés
en la subrogation , et Annet M orand a cru pouvoir s’ac
quitter envers Bonnamour , en lui notifiant qu’il entend
renoncer aux termes portés par les effets, et en payant
suivant l’échelle de dépréciation.
1
Mais Annet M orand est bien loin de son compte , et
ce n’est pas ainsi qu’il devoit s y prendre pour s’ac
quitter envers Bonnamour. L es effets qui restent dus,
représentent le prix d’un immeuble vendu , et d’aprës
cela , ils sont payables conformément au mode décrété
par les articles 2 , 3 , 4 et
du titre I er. de la loi du 16
nivôse ; c’est-à-dire, qu’il faut faire estimer les immeu
bles vendus , suivant la valeur réelle qu’ils avoient en
numéraire métallique au temps du co n tra t, et en l’état
où ils étoient alors, et d’après cette estimation , qui est
aux frais du débiteur, il doit payer la quotité propor
tionnelle qu’il reste encore devoir sur le prix de la vente;
c’est-à-dire, que s’il est valablement acquitté d’une por
tion , en valeur nom inale, il est quitte de cette portion,
5
et doit payer 1 autre proportionnellement au prix réduit.
Ainsi, par exem ple, on suppose qu’un particulier aik
�............... (V) .
.
_ ...
acquis un immeuble pendant l é j cours du papier-monn oie, moyennant la somme de 30,000 ^ ; qu’il en ait payé
i ,’o oo-, lors du contrat, conformément aux lois alors
existantes; il sera quitte de la moitié du p r ix , et si l’hé
ritage n’est estimé valeur réelle qu’à la somme de i ,ooo ,
5
5
l’acquéreur alors, pour être libéré, devra celle de 7,500 n\
Ceci s’applique à toutes les portions que l’acquéreur
pourroit avoir acquittées ; comme s’il a payé les trois
quarts o uïes quatre cinquièmes, il ne devroit plus que
le q u a rt, ou le cinquième du p rix ainsi réduit à la valeur
réelle. ■
•
Il ne peut s’élever de difficulté sérieuse sur ce mode
de payement. En vain voudroit-on opposer , par exemple,
que la créance a été dénaturée; qu’ il n’existe plus que
des billets qui ne doivent être considérés que comme de
simples prêts; ce ne seroit là qu’une e rr e u r, i° .'p a r c e
qu’il est prouvé par le contrat, que les billets repvésen- 1
tent le prix de la vente; 20. parce qu’il est de principe
que les actes faits le même jour entre les mêmes parties,
ne sont censés faire qu’un seul et même acte, ainsi que
l’enseignent M o r n a c , Henrys et D u p e rrie r; de sorte que
les billets commerçables , étant évidemment le prix d’un,
im m eub le, ne peuvent et ne doivent être payés que de
la même m an ière, que toutes les sommes qui resteroient
dues pour une vente de m êm e nature.
1
Délibéré à Riom , le 11 ventôse an 6.
-
GRENIER,
P A G E S ,
A N D R A U D ,
T O U T T É E , YERNY.
'
�(
8
)
L e SOUSSIGNÉ est du même avis. R O L L A N D .
L e c o n s e i l SOUSSIGNÉ, qui a lu la subrogation dont
il s’agit, est du même a v is , et par les mêmes motifs. A
Clermont-Ferrand, ce 12 ventôse, an 6 de la république
française. D A R T I S - M A R S I L L A C .
L e s o u s s i g n é est du même avis, et par les mêmes
motifs. A M ou lin s, le 2 brumaire an 7 , S A U R E T .
L e s o u s s i g n é est du même avis et par les mêmes
motifs. A Moulins le 16 ventôse, an 6 de la république
française. D U R IN .
L e so u ssig n é
est entièrement de l’avis des délibé-
rans. M I Z O N .
L e s o u s s i g n é est du m ême avis. P I N O T .
Le
c o n s e il so u ssig n é ,
qui a vu la consultation
ci-contre et la subrogation qui y est énoncée, est du m ême
avis, et par les mêmes raisons. l i a notification du 19
pluviôse, est irrégulière et nulle. X^a loi du 11 frimaire
ne reçoit aucune application ; il faut, se référer à celle
du 16 nivôse, relative à la vente des immeubles; et le
délai fixé par cette lo i, ou l’option que doivent faire
les acquéreurs^ qui ?ont encore redevables du prix des
ventes, étant écoulé, Morand est obligé d’acquitter en
ç 'numéraire le montant du prix, de la vente, sans réduc
tion, et sans cju il soit nécessaire de recourir aux exper-
�.
'
(9 °
,
lises ; il faut simplement conclure au payement en numé
raire de ce qui reste dû. D élibéré à R i o m , ce i messid.
an 6. B O R Y E .
5
L eS O U S S IG N É , qui a pris lectured’un précis imprimé
pour François Bonnamour , contre François M oiand et
Anne t Morand, frères, ainsi que de différen tes consultations
qui sont à la suite , délibérées à R iom , à Clermont et à
Moulins, les n , 12 et 16 ventôse an 6 , et i messidor
même année, 26 vendémiaire et 2 brumaire an 7 ,
Se réunit à l’opinion unanime des jurisconsultes qui ont
signé les consultations précitées , et pense avec e u x , que
^a somme de 1 g,ôoo francs restée due ¿François Bonnamour,
en vertu de quatre effets ou billets de François M o ra n d ,
pour prix d’une revente de domaines nationaux qu'il fit
h ce citoyen, le I er. messidor an 3 , doit lui être payée
par cet acquéi'eur, suivant le mode décrété par la loi du
16 nivôse an 6 , pour l’acquittement des prix de ventes
d’immeubles faites pendant le cours du papier rnonnoie.
E t d’ab ord, remarquons que Bonnam our nereconnoît
et ne doit reconnoître que François M o ra n d , pour débi
teur direct et immédiat ; que c’est avec lui seul qu’il a
contracté; à lui seul qu’il a re v e n d u , en l’an 3 , le domaine
national qu’il avoit acquis en l’an 2; qu’il n’est point partie
clans
la rétrocession
faite par
François
M orand à A n n e t./
-1
_
t
A
>
le 6mc, jour complémentaire an 3 ; que par conséquent
5
les clauses et conditions de cet acte ne peuvent pas lui
�être opposées ; res inter alios a cta , tertio nec nocet ,n e c
•prodest.
Po u r savoir ce qu’il peut exiger de ce d ébiteur, et
quelles règles de réductions sont applicables à sa créance,
il suffit donc qu’ils soient d'accord ensemble sur son
origine.
O r , il est reconnu et constant entr’e u x , que la créance
de 19,500 francs, dont Bonnamour réclame le payem ent,
qu oi qu ’ elle ne soit établie que par des billets causés pour
prêts , n’en est pas moins vin reste à payer du prix de la
revente des biens-immeubles qu'il fit à François M orand,
le 1 e1'. messidor an 3.
Les obligations causées pour simple p r ê t, pendant la
dépréciation du papier-m onnoie, rie sont censées con
senties valeur nominale du papier-monnoie, et sujettes,
par cette raison, à la réduction au pied de l’échelle d e .
dépréciation, du jour de leur d ate, d’après l’article 2 de
la loi du 11 frimaire an 6 , « que lorsque le contraire n’est
« pas prouvé par le titre m êm e; et à son défaut, par des
« écrits émanés des débiteurs, ou par leur interrogatoire
« sur laits et articles ».
Dans l’espèce , les billets qui sont le titre , au lieu d'ex
primer la véritable origine de la dette, font déguisée;
mais elle est prouvée d’ailleurs par un autre écrit émané
du débiteur ; savoir, par le contrat de revente, du I er.
messidor an 3»
il est expressément déclaré que François
M orand se libéra du p r ix , en assignats et en effets com
m erciaux ; quatre promesses de même date que le con
trat qu’il souscrivit en le signant, réalisèrent ce payement
annoncé fait en effets commerciaux.
�( u ■
)
Voilà donc l'origine de la créance irrésistiblement
prouvée par l’une des voies que la loi a indiquées ; savoir ,
par un écrit émané du débiteur.
Elle l’est.aussi sur l’aveu qu’il en fit loyalement au
bureau de conciliation, lorsqu’il fut interrogé sur le
fait : le procès verbal de non-conciliation du mois de
pluviôse an 6 , en fait foi ; or , c’est là encore un autre
genre de preuves admis par la loi précitée du n fr i
maire an 6.
Ajoutons que cette dernière preuve répond à l’induc
tion qu’on a voulu tirer contre Videntité des billets repré
sentés, avec ceux dont parle le contrat du 1er. messidor
an 3 , de la circonstance, que les billets rapportés sont
des billets ordinaires , tandis que l ’acte de subrogation
énonçoit des ejjets com m erciaux . L ’identité de date et
l’absence de tout indice de négociations multiples entre
François M orand et B o n n a m o u r , dans le même temps ,
sufïiroient seules pour le v e r‘ l’ équivoque ,• car il est de
principe que tous les actes passés le m êm e jo u r , entre
les même6 parties, sont présumées se rapporter au même
objet; mais l’aveu précis de François M o ra n d , que les
billets représentés sont précisément et identiquement les
mêmes qu’il souscrivit pour solder le 'prix de la’ subroga
tion du ier, messidor an 3, ne laisse aucune place au doute
sur ce point de fait.
‘
Cependant, s’il est constant que les 19,500 francs restés
dûs à Bonnamour sont dûs pour solde du prix d’une
revente d’im m eubles, la conséquence que le payement'
doit en être fait suivant le mode établi pour la liquida-
�C
)
tion des prix de vente d’ im m eubles, par la loi du 16
nivôse an 6 , devient irrésistible et forcée.
Délibéré à Clerm ont-Ferrand, le 5 frimaire a n 8
BERG1ER.
C e t t e affaire a été portée en première instance devant
le tribunal civil du département de l’Allier.
L a question étoit simple: la loi du 1 6 nivôse an 6 la
décidoit en faveur de Bonnamour. L ' attente générale étoit
qu’il alloit gagner son procès ; il l’a perdu contre tous les
principes; et malgré le vœu impératif de la l o i , i l a été
débouté de sa demande.
Ce jugement foible et irrégulier dans ses motifs est
attaqué par la voie de l’appel.
Bonnamour a pour moyens la l o i , les principes constans
du tribunal d appel, pour le maintien de son exécution
littérale, et enfin les avis d’une très - grande partie des
jurisconsultes les plus célèbres des départemens de l’Allier
et du Puy-de-Dôm e.
A
r i o m
,
d e
l ’i m p r i m e r i e
d e
l a n d r i o t
Imprimeur du Tribunal d’appel.
,
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnamour, François. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Pagès
Andraud
Touttée
Verny
Rolland
Dartis-Marcillac
Sauret
Durin
Mizon
Pinot
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
Description
An account of the resource
Précis pour François Bonnamour, propriétaire, demeurant à St.-Gilbert, commune de St.-Didier; contre François Morand, propriétaire, demeurant en la commune de Jenzat.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1794-An 8
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0102
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Didier-la-Forêt (03227)
Jenzat (03133)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53643/BCU_Factums_M0102.jpg
assignats
Créances
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53131/BCU_Factums_G1103.pdf
dec7efdb90345419376081f70bdb851a
PDF Text
Text
PRECIS
•
i
POUR
F
r a n ço is
B O N N A M O U R , propriétaire, demeu-
reant à S t.-G ilb e rt, commune de S t.-D id ier
’
CONTRE
-F r a n ç o i s
O R A N D , propriétaire, demeurant
en la commune de Jenzat.
M
L E citoyen François Morand est. débiteur de Bonnam our d’une somme de 19 ,500 francs; elle représente la
valeur de plusieurs immeubles. L e créancier en réclame
le payement. Il invoque, pour y parvenir, la loi du 16
I
�nivôse an 6 , sur la vente des immeubles pendant la.
dépréciation du papier-monnoie. François Morand no
conteste pas la validité de cette demande ; il déclare, au
contraire, qu’elle est juste; mais il prétend qu’Aunet
M orand, son frère, s’est chargé, par un arrangement
particulier entr’e u x, d’acquitter ses obligations. Annet
Morand lutte vainement contre la garantie qu’il a pro
mise , et contre la force de la lo i, avec une foiblesse '
que son texte seul combat. L ’on pourroit se dispenser
de répondre à cet adversaire mal conseillé; c’est afin de
ne rien négliger, que l’on réfutera ses principales objec
tions: le temps et la raison ne permettent pas de s’arrêter
à celles qui ne sont que frivoles et captieuses.
F A I T S t•
,
............... .
Ç . -
t
â
.
*.
François Bonnamour se rendit adjudicataire, Ies I er et
2 prairial an 2 , de plusiers héiñtages nationaux, moyen
nant 23,160 francs.
L e premier messidor an 3 , il subrogea à son adjudica
tion François M orand, à la charge de lui rembourser
les sommes données, et d’un bénéfice de 23,800 francs»
L ’acte annonce que François Morand s’étoit libéré en
assignats et en effets commerciaux. Pour réaliser le
montant de cette dernière stipulation, il souscrivit plu
sieurs promesses; il y en avoit quatre de 5,000 francs
chacune. Un payement; de 5oo francs, endossé sur ces
effets, réduit h créance de Bonnamour à la somme de
19,500 francs en principal.
�C'3 ) '
Par acte du sixième jour complémentaire de la même
année, François Morand vendit à Annet M orand, sans
garantie , la majeure partie des immeubles cédés par
Bonnamour. La condition la plus importante de l’acte,
fut celle de payer tous les effets dûs au premier cédant,
et de les rapporter soldés à François Morand.
Acquéreur d’un bien qui produit annuellement, au
moins 1,200 francs, Annet Morand voulut que les
quatre billets fussent soumis au tableau de dépréciation
du papier-monnoie. Il cita Bonnamour en conciliation
sur la manière d’acquitter ce qu’il devoit. François
Morand fut appelé comme essentiellement intéressé à la
discussion. La conciliation échoua : Bonnamour dit sim
plement qu’il étoit disposé à recevoir.
L a loi du 1 6 nivôse an 6, a été promulguée depuis
cette dém arche; Bonnam our, en l’in v o q u a n t, a cité
François M o ra n d au bureau de paix de son canton ,
pour se concilier sur le payement de 10,000 francs pour
les termes échus de deux promesses. François Morand
a répondu, que d’après ses arrangemens avec Annet
M orand, il demandoit un. délai, pour exercer contre
lui une action en garantie.
Annet M orand, cité par son frère, s’est présenté,
le 26 du même mois, devant le juge de paix. En con
venant qu’il s’est chargé d’acquitter les quatre billets,
il a soutenu qu’il avoit déclaré , par acte du 19 plu
viôse j qu il entendoit se conformer aux articles 5 et 7
de la loi du 1 1 frimaire précédent, et payer tout ce
qu’il devoit, dans le cours de l’année, après une réduc
tion faite sur les bases de la dépréciation du papiermonnoie.
A 3
�Il a offert de remplir scs 'obligations , suivant cette
intention ainsi manifestée.
Les aveux de François’ Morand sont précieux. Il a'
dit qu’ Annet Morand étoit son garant, parce qu’il l’ayoit promis 3
.1
Que les- quatre billets devoient etre acquittés sans
réduction , parce qu’ils formoient une partie du prix des
immeubles que Bonnamour lui avoit cédés; qu’Annet
M orand'ne sauroit éluder cet engagement, et les suites
de la garantie.
François Morand enfin a été assigné, pour se voir^
condamner à payer les i o ;ooo francs échus, ou 6,000
francs par forme de provision.
Annet Morand a été mis en cause. II s’agit de dé
montrer que Bonnamour est réellement créancier de
la somme de ig,boo francs en numéraire , avec les1
intérêts.
"
..
'
i
’ 1
�P I È C E S
J U S T I F I C A T I V E S .
L e C O N SE IL SO U S SIG N É , qui a pris lecture du
contrat portant subrogation, consenti par François Bonnamour, au profit de François M orand, le premier
messidor an 3 ; de la notification faite par Annet Morand
à François Bonnamour, le 19 pluviôse an 6,|et sur ce
qui a été exposé;
E s t i m e que les sommes restées dues à François
Bonnam our, pour le prix de la subrogation par lui
consentie, doivent être payées conformément au mode
décrété par la loi du 16 nivôse dernier, et non par la loi
du 1 1 frimaire, ainsi que voudroit le prétendre Annet
M orand, auquel François Morand paroît avoir rétro
cédé les objets auxquels il avoit été subrogé par Bonnaniour.
François Bonnamour s’étoit rendu adjudicataire par
différens procès verbaux du directoire du ci-devant
district de Gannat, de plusieurs immeubles nationaux.
Par acte du premier messidor an 3 , ü a subrogé
purement et simplement à ces adjudications, François
Morand. Cette subrogation a été, faite aux mêmes p rix ,
�/t>t>
( .'A
(6 )
charges et conditions portées par les adjudications, et en
outre, moyennant la somme de 23,800, tant pour bé
néfice que pour épingles; il est dit par le contrat, que
. cette somme a été payée comptant, tant en papiermonnoie ayant cours, qu’en effets commerçables.
Maintenant les effets donnés en payement n’ont point
été acquittés, ou du moins ne l’ont été qu’en partie.
François Morand a lui-même rétrocédé les objets acquits
à Annet Morand, son frère, à la charge par ce dernier,
de payer en son acquit, le montant des effets énoncés
en la subrogation , et Annet Morand a cru pouvoir s’ac
quitter envers Bonnamour , en lui notifiant qu’il entend
renoncer aux termes portés par les effets, et en payant
suivant l’échelle de dépréciation.
Mais Annet Morand est bien loin de son compte , et
ce n’est pas ainsi qu’il devoit s’y prendre pour s’ac
quitter envers Bonnamour. Les effets qui restent dûs,
représentent le prix d’un immeuble vendu , et d’après
cela , ils sont payables conformément au mode décrété
par les articles 2 , 3 , 4 et 5 du titre I er. de la loi du 16
nivôse; c’est-à-dire, qu’il faut faire estimer les immeu
bles vendus, suivant la valeur réelle qu’ils avoient en
numéraire métallique au temps du contrat, et en l’état
où ils étoient alors, et d’après cette estimation , qui est
aux frais du débiteur, il doit payer la quotité propor
tionnelle qu’il reste encore devoir sur le prix de la vente;
c’est-à-dire, que s’il est valablement acquitté d’une por
tion, en valeur nominale, il est quitte de cette portion,
et doit payer l’autre proportionnellement au prix réduit.
Ainsi, par exem ple, on suppose qu’un particulier ait
�C7 )
acquis- un immeuble pendant le cours du papier-monn oie, moyennant la somme de 30,000 ^ ; qu’il en ait payé
1 5,ooo , lors du contrat, conformément aux lois alors
existantes; il sera quitte de la moitié du p rix, et si l’hé
ritage n’est estimé valeur réelle qu’à la somme de 1 5,000
l’acquéreur alors, pour être libéré, devra celle de 7 , 5oo
Ceci s’applique à toutes les portions que l’acquéreur
pourroit avoir acquittées ; comme s’ il a payé les trois
quarts ou les quatre cinquièmes, il ne devroit plus que
le quart, ou le cinquième du prix ainsi réduit à la valeur
réelle.
Il ne peut s’élever de difficulté sérieuse sur ce mode
de payement. En vain voudroit-on opposer , par exemple,
que la créance a été dénaturée; qu’il n’existe plus que
•des billets qui ne doivent être considérés que comme de
simples prêts; ce ne seroit là qu’une erreur, i ° . parce
qu’il est prouvé par le contrat, que les billets représen
tent le prix de la vente ; 20. parce qu’il est de principe
que les actes faits le même jour entre les mêmes parties,
ne sont censés faire qu’un seul et même acte, ainsi que
l’enseignent Mornac , Ilenrys et D uperrier; de sorte que
les billets commerçables , étant évidemment le prix d’un
immeuble, ne peuvent et ne doivent être payés que de
la même manière, que toutes les sommes qui resteroient
dues pour une vente de même nature.
Délibéré à Riom , le n ventôse an 6.
GRENIER, P A G E S, A N D RA U D ,
TO U TTÉE,
VERNY.
�l l <3
<>t
( 8 )
L e s o u s s i g n é est du même avis. R O L L A N D .
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a lu la subrogation dont
il s’agit, est du même a vis, et par les mêmes motifs. A
Clerm ont-Ferrand, ce 1 2 ventôse, an 6 de la république
- française. D A R T IS -M A R S IL L A C .
est du même avis, et par les mêmes
motifs. A M oulins, le 2 brumaire an 7 , S A U R E T .
Le
so u ssig n é
est du même avis et par les mêmes
motifs. A Moulins le 16 ventôse, an 6 de la république
française. D U R IN .
L
e
so u ssig n é
Le
so u ssig n é
est entièrem ent de l’avis des délibé-
M IZO N.
rans.
Le
so u ssig n é
est du même avis. P IN O T .
qui a vu la consultation
ci-contre et la subrogation qui y est énoncée, est du même
avis, et par les mêmes raisons. L a notification dii 19
pluviôse, est irrégulière ot nulle. T^a loi du 1 1 frimaire
11e reçoit aucune application ; il faut se référer à celle
du 16 nivôse, relative à la vente des immeubles’, et le
délai fixé par cette lo i, ou l’option que doivent faire
les acquéreurs t qui sont encore redevables du prix des
ventes, étant écoulé, Morand est obligé d’acquitter en
• numéraire le montant du prix de la vente, sans réduc
tion, et sans qu’il soitnécessaire de recourir aux experL
e
c o n se il
so u ssig n é ,
�( 9 )
,
tises ; il faut simplement conclure au payement en numé
raire de ce qui reste dû. Délibéré à R io m , ce i 5 messid. .
an 6. B O R Y E .
L e SO U SSIG N É , qui a pris lecture d’un précis imprimé
pour François Bonnamour , contre François Moiand et
Annet Morand, frères, ainsi que de différentes consultations
qui sont à la suite , délibérées à Riom , à. Clerrnont et à
Moulins, les n , 12 et 16 ventôse an 6 , et i 5 messidor
même année, 26 vendémiaire et 2 brumaire an 7 ,
Se réunit à l'opinion unanime des jurisconsultes qui ont
signé les consultations précitées , et pense avec eu x, que
la somme de 19,500 francs restée due àFrançoisBonnainour,
en vertu de quatre effets ou billets de François M orand,
pour prix d’une revente de domaines nationaux qu’il fit
c\ ce citoyen, le I er. messidor an 3 , doit lui être payée
par cet acquéreur, suivant le mode décrété par la loi du
16 nivôse an 6 , pour l’acquittement des prix de ventes
d’immeubles faites pendant le cours du papier monnoie.
E t d’abord, remarquons que Bonnamour ne reconnoît
et ne doit rcconnoître que François M orand, pour débi
teur direct et immédiat ; que c’est avec lui seul qu’il a.
contracté; a lui seul qu’il a revendu, en l’an 3 , le domaine
national qu il avoit acquis en l’an 2; qu’il n’est point partie
dans la rétrocession faite par François Morand à Annet,
le 6me. jour complémentaire an 3 ; que par conséquent
les clauses et conditions de cet acte ne p e u v e n t pas lui
�'-»l1
( 10 )
être opposées ; res inter àlios acta , tertio nec nocet, nec
prodest.
Pour savoir ce qu’il peut exiger de ce débiteur, et
quelles règles de réductions sont applicables à sa créance,
il suffit donc qu’ils soient d'accord ensemble sur sou
origine.
O r, il est reconnu et constant entr’e u x , que la créance
de 19,500 francs, dont Bonnamour réclame le payement,
quoiqu’elle 11e soit établie que par des billets causés pour
prêts , n’en est pas moins un. reste à payer du prix de la
revente des biens-immeubles qu’il fit à François Morand,
le i er. messidor an 3.
Les obligations causées pour simple prêt, pendant la
dépréciation du papier-monnoie, ne sont censées con
senties valeur nominale du papier-monnoie, et sujettes,
par cette raison, à la réduction au pied de l’échelle de
dépréciation, du jour de leur date, d’après l’article 2 de
la loi du 1 1 frimaire an 6 , « que lorsque le contraire n’est
« pas prouvé par le titre même ; et à son défaut, par des
« écrits émanés des débiteurs, ou par leur interrogatoire
« sur faits et articles ».
Dans l’espèce, les billets qui sont le titre, au lieu d'ex
primer la véritable origine de la dette, l’ont déguisée;
mais elle est prouvée d’ailleurs par un autre écrit émané
du débiteur ; savoir, par le contrat de revente, du I er.
messidor an 3 , ou il est expressément déclaré que François
Morand se libéra du p r ix , en assignats et en effets comynerciaux \ quatre promesses de même date que le con
trat qu’il souscrivit en le signant, réalisèrent ce payement
annoncé fait en ejjets commerciaux .
�Ilà
C” )
Voilà Jonc l’origine de la créance irrésistiblement
prouvée par l’une des voies que la loi a indiquées ; savoir,
par un écrit émané du débiteur.
Elle l’est aussi sur l’aveu qu’il en fit loyalement au
bureau de conciliation, lorsqu’il fut interrogé sur le
fait : le procès verbal de non-conciliation du mois de
pluviôse an 6 , en fait foi ; or , c’est là encore un autre
genre de preuves admis par la loi précitée du 1 1 fri
maire an 6.
Ajoutons que cette dernière preuve répond à l’induc
tion qu’on a voulu tirer contre Videntité des billets repré
sentés, avec ceux dont parle le contrat du I er. messidor
an 3 , de la circonstance, que les billets rapportés sont
des billets ordinaires , tandis que l’acte de subrogation
énonçoit des effets commerciaux. I/idcntitc de date et
l’absence de tout indice de négociations multiples entre
François Morand et Bormamour , dans le même temps,
suffiraient seules pour lever l’équivoque ; car il est de
principe que tous les actes passés le môme jo u r, entre
les mêmes parties, sont présumées se rapporter au même
objet; mais l’aveu précis de François M orand, que les
billets représentés sont précisément et identiquement les
mêmes qu’il souscrivit pour solder le prix de la subroga
tion du i er. messidor an 3 , ne laisse aucune place au doute
sur ce point de fait.
Cependant, s’il est constant que les ig , 5oo francs restés
dûs à Bonnamour sont dus pour solde du prix d’une
revente d’immeubles, la conséquence que le payement
doit en être fait suivant le mode établi pour la liquida-
Ai
�( 1 2)
tion des prix de vente d’immeubles , par la loi du 16 —
nivôse an 6 , devient irrésistible et forcée.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 5 frimaire an 8.
BERGI ER.
'
;
C ETTE affaire a été portée en première instance devant
le tribunal civil du département de l'Allier.
La question étoit simple: la loi du 16 nivôse an 6. la
décidoit en faveur de Bonnamour. L 'attente générale étoit
qu’il alloit gagner son procès ; il l’a perdu contre tous les
principes; et malgré le vœu impératif de -la lo i , il a été
débouté de sa demande.
Ce jugement foible et irrégulier dans ses motifs est
attaqué par la voie de l’appel.
Bonnamour a pour moyens la loi, les principes constans
du tribunal d’appel, pour le maintien de son exécution
littérale, et enfin les avis d’une très grande partie des
jurisconsultes les plus célèbres des départemens de l’Allier
et du Puy-de-Dôrnc.
A
R I O M , D E , L’I M P R I M E R I E
DE
LANDRIOT,
Imprimeur du Tribunal d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Bonnamour, François. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Pagès
Andraud
Toutée
Verny
Rolland
Dartis-Marsillac
Sauret
Durin
Mizon
Pinot
Borye
Bergier
Subject
The topic of the resource
créances
assignats
ventes
immeubles
biens nationaux
abbayes
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour François Bonnamour, propriétaire, demeurant à Saint-Gilbert, commune de Saint-Didier ; Contre François Morand, propriétaire, demaurant en la commune de Jenzat.
Table Godemel : Assignats - bail en assignats : 1. des effets souscrits pendant le cours des assignats, représentant le prix d’un immeuble vendu, ne peuvent être soumis à l’échelle de dépréciation du papier monnaie, mais sont payables, en conformité de la loi du 16 nivôse an 6, d’après l’estimation des immeubles au temps du contrat.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1793-Circa An 8
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
12 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1103
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Saint-Didier-la-Forêt (03227)
Jenzat (03133)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53131/BCU_Factums_G1103.jpg
abbayes
assignats
biens nationaux
Créances
immeubles
ventes
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53182/BCU_Factums_G1224.pdf
fc9169fd0c73ffaecabcebb927c606b2
PDF Text
Text
0
P R E CI S
POUR
!
M arie
BO ISSO N ,
veuve
d'A n t o i n e
C H A R L E S ; A n n e B O I S S O N et J e a n B a p t i s t e R O B E R T , son m ari, de lui au
torisée ; autre M a r i e et autre A n n e B O IS S O N ,
_ filles m ajeures, lesdites B O I S S O N , héritières,
par bénéfice d’inventaire, de J a c q u e s B O IS
S O N , leur p ère, dem anderesses
CONT RE
Louis BOISSON a în é , et Louis - B l a i s e
BOISSO N cadet, leurs fr è r e s , défendeurs.
C O N C LU SIO N S,
A
c e qu’il plaise au tribunal, ayant égard à ce qui ré
sulte des informations converties en enquêtes, et des n ou A
tOi~
�x velles enquêtes, ainsi que des interrogatoires subis par
lesdits frères Boisson, condam ner ledit Boisson a în é , à
payer aux demanderesses la somme de trente mille livres ,
à concurrence de laquelle le serment in litem leur sera
déféré pour la valeur de f o r , argent et effets par lui sous
traits et recélés dans la succession de Jacques Boisson,
père com m un ,,,et déclarer.ledit Boisson a în é , privé de
la portion qu’il auroit pu.prétendre comme, cohéritier dans
les objets par lui soustraits, ou dans la valeur d 'iceu x, au
payem ent de laquelle il sera con d am n é, et les intérêts de
ladite somme de trente mille livres, à com pter du jour de
l’ouverture de la succession ; comme aussi le déclarer d é
chu de .toutes créances qu’il auroit pu prétendre au partage
de. ladite succession: condam ner.ledit Boisson cadet, à
rapporter les papiers qu il a reconnu avoir en son p o u vo ir,
dëpendans de la succession du j}ère com m un; e t, h raison
de sa connivence avec ledit Boisson-aîné, le déclarer éga
lem en t’ p riv é de la portioniqu’il auroit amendée dans les
objets ou la v a l e u r des-objets soustraits papj ledit-Boisson
aîné ; e t , faute par lui de rapporter les papiers , qu’il a
reconnu être en son pûirftoü' ÿ'etxl’fcvoir fait la déclaration
de leur nature et qualité, le condam ner, envers les deman
deresses, en ¿rois m ille livres' de dommages - intérêts, et
aux jntérCte'd^p^i%')’(i^^yturQ ÿe^^a .spccàssionj.éi co n
damner lesdits'Boisson, tant l’aîné que le cadet, en tous
les dépens.
-------------------------------------•p
G *j— 1 . * • -- i.i u./ •
* -----
O n se propose,, dans ce précis, de ne rendre compte.au
tribunkVque 'de te qui est absolument nécessaire pour d é- i/m vj,! i'j (.üoJyj.’itTr) is;
a u‘)
�C3 )
term iner son jugem ent sür lô seul fait des soustractions
imputées au citoyen Boisson aîrié, dans lesquelles le citoyen
Boisson ca d e t, a connivé avec ;soiv fr è r e , sans entrer dans.un détail inutile des procédures qui ont eu lieu pour lo.
partnge’dela succession dû père com m un', et qui est différé
depuis huit ans par les incidens et les chicanes de tout genre;
que.Boisson aîrié a jusqu’à présent fait essuyer à ses sœurso
t. Jacques Boisson>, père oom m unides parties, mourut''
le 2 juin 179 0 , après une m aladie'd'environ six semaines;*.
Il faut observer que depuis quelque temps aucun de ses
enfans n’ habitoit avec lui. L a maladie étant; devenue sé- ■
rieu se, les filles Boisson proposèrent^ leur frère aîné ( 1er
cadeti n’habitoit point alors la com m une de R iom ) , de s£[
rendre ensemble chez: leur père. L e frère a în é , qui avoit'
ses v u e s, les engagea, sous différens prétextes; à ne s’y
rendre que le lendem ain, sous la promesse qu’il leur fit der
ne s’y rendre qu’avec elles; mais il les p révin t; e t , le m êm e 1
jour de l’invitation , c’est-à-dire la veille du jour convenu
à l’entrée de la n u it, il fut alors auprès de son père trèsmalade dans ce m o m en t, et qui ne pouvoit sortir du lit.
Ce n’ étoit pas sans raison que Boisson a în é, vouloit
éloigner ses sœ urs, et les p réven ir dans la maison du père ;
et ce n’est que quelque temps après qu’elles n’ont pu ignorer >
quels étoient ses projets, et par quels moyens il les avoit
réalisés.
A près la m ort du p è re , il fut fait un inventaire dans.f
sa m aison; e t , pour qui connoît le caractère de Boisson-)
aîné , on ne sera pas surpris que :cet inventaire ne pût être
fait‘ à l’amiable , et qu’il fallut!y em ployer l’autorité de: là ,
justice. L o rs dé cet inventaire;, il ne se trouva dans le cabWj
A 2
�* ,
( 4 )
net, où le père m eltoit ses effets les plus précieux, ni or ni
a rg e n t, ni les titres les plus importans de sa succession ; on
y trouva seulement de vieux actes et papiers ^ la plupart
inutiles.
Sur les difficultés élevées entre les parties, après l’inven
ta ire, le citoyen M ayet, n otaire, entre les mains duquel
ont resté tous les papiers compris dans cet inventaire, fu t
établi séquestre des biens de la succession r et le séquestre
subsiste encore aujourd’hui.
■
;r
B ientôt après, les filles Boisson ne pouvant douter des
soustractions commises avant au après la m ort de leur père,
rendirent plainte, et firent faire des informations pour*
parvenir à la découverte des auteurs de ces soustractions.
L a plainte et les informations furent d’abord renvoyées,
par un jugem ent du tribunal du district, au tribunal de la
police correctionnelle, o ù , après avoir fait subir des inter
rogatoires aux deux frères B oisson, contre lesquels frap poient les dépositions entendues dans les informations T
attendu qu’il s’agissoit de soustractions imputées à des .
cohéritiers, les inform ations furent converties en enquêtes,,
perm is aux parties d’enquêter plus am plem ent, et ren
voyées n fins civiles, par-devan t les juges qui en devoient
connoîtrc. Ce dernier jugem ent est du 14 nivôse, an 2.
Cette procédure pour les soustractions avoit demeurélong-tem ps iinpoursuivie *, et ce n’est môme que dans le
mois de prairial dern ier, que les sœurs Boisson ont fait
expédier les informations converties en enquêtes.
-C ependant elles avoient form é d’autres demandes au
c i v il , relativem ent au partage de la succession du père
commun 3 et ces demandes avoient d’abord été portées
�C 5
devant des arbitres qui s’étoient plusieurs fois assemblés ,
autant dans la vue de concilier les parties, que de les ju ger
rigoureusem ent. L e caractère de Boisson a în é , est trop
connu pour qu’on ne trouve pas très-vraisemblable l’asser
tion de ses sœurs, qu’il a em ployé tous les subterfuges
pour em pêcher la conciliation ou le jugement des arbitres5
et ila v o it si fort m ultiplié les incidens, qu'il avoit gagné
le temps où les arbitrages forcés furent supprimés. Il fallut
donc alors le traduire au trib u n al, 'devant les juges ordi
naires.
E n fin , après quatre ans, il est intervenu en ce tribunal
un jugem ent, le 14 therm idor an 5 , qui a ordonné le
partage des successions des père et m ère communs. Sans
entrer dans le détail des dispositions de ce jugem ent, il
suffit d’observer qu’il ne prononce point en détail sur les
rapports et prélèvem ens à faire au partage; il se borne en
général i\ ordonner que chacune-des parties rapportera ce
quelle peut avoir reçu , et prélèvera ce qui lui est légiti
mement dû. Mais il y a de plus une disposition particulière
de ce jugem ent, qui réserve aux-parties toutes contesta^
tions q u i pourraient encore être pendantes.
Cette réserve de toutes contestations encore pendantes,
s’applique évidem m ent au procès crim in el, converti en
procès civil, auquel jamais les sœurs Boisson n’ont renoncé;
et au contraire dans tous les actes, de procédure, elles ont
fait les réserves les plus générales.
C ’est d’après cela et d’après le jugem ent rendu au tri
bunal de la police correctionnelle, qui a converti les infor
mations en enquêtes, et permis d’enquêter plus ample
m e n t, jugement dont il n’y a pas eu d’ap p el, et dont il
�e n
ne peut pas y en avoir, puisqu’il ne s’agit que d’instruction;
c'est, dit-on , d’après ce jugem ent, que les sœurs Boissonen ont obtenu un autre du trib u n a l, très-contradictoire1
avec Boisson a în é , qui a fait tous ses efforts pour l’em pê
cher, et qui a ordonné que les sœurs Boisson assigneraient*
les témoins qu’elles voudroient faire entendre, en enquê
tant plus am plem ent, sauf aux frères Boisson ù en faire>
entendre de leur part*
..
.
11 ne s’agit donc à p résen t, pour l'objet de la cause
actuelle, que de chercher d’abord dans les informations e t’dans les enquêtes des sœurs Boisson (car on ne présume
- pas que les f r è r e s Boisson entreprennent de leur part def
faire des enquêtes contraires) .s’il y a vraim ent des preuves!
de soustractions commises par Boisson a în é , et s’il y a eu»
connivence de la part de Boisson cadet, si'm êm e il n’y a'
pas eu quelques soustractions particulières de la part de;
c e lu i- c i. O n examinera ensuite si les dépositions des;
témoins ne d on n en t pas quelque lum ière pour connoître’
l’importance des soustractions ; et c’est après avoir recueilli
ou résumé les preuves sur ces deux parties, qu’on posera)
les principes qui dans la circonstance des faits prouvés»
doivent déterm iner la décision du tribunal sur les conclu
sions qui ont été prises; par les sœurs Boisson contre leurs:
frères.
1
U n précis ne com porte pas le détail de chacune des»
dépositions qui sont en -grand nom bre dans les enquêtes
des sœurs Boisson *, il faudroit copier ces dépositions , ce
qui seroit d’autant plus in u tile, qu’il sc‘ra fait lecture i\i
l’audience de celles des témoins qui ont été!entendus dans7
les informations .converties, en enquête > et que les autres!
�i
7 )
•témoins de la nouvelle enquête', seront ‘entendusrpubli
quem ent: il suffit donc de résum er l’historique et le résultat
-de toutes ces dépositions , avec précision et exactitude.
.r V o ilà donc ce qui se recueille en substance des déposi
tions des I er. 2 e. 4e. 5e. 6e. et 8e. témoins de l’infor
mation, en observant que le i er.itémoin est la garde-malade
q u i avoit servi B oisson, père , pendant sa m aladie; le
4 e. témoin , une fille q u i, dans le m ême temps, étoit au
service de Boisson, fils aîné ; et le 6e. tém o in , la fille
d e service de Boisson, père.
Boisson, aîn é, s’étant rendu tout seul’, pendant la n u it,
auprès de son p è r e , qui gardoit le lit depuis long - temps ,
¡fit tous ses efforts pour éloigner la fille de service et la
garde-m alade qui le servoient et veilloient nuit et jo u r ,
disant q u ’elles devoient être fatiguées, et qu’il les rem plaÇeroit et seroit auprès de son père toute la nuit ; cependant
il ne put renvoyer chez elle la garde-m alade, quelques
instances qu’il p û tlu i faire , et seulement elle se déterm ina
à prendre quelques heures de repos, sur un lit qui n’étoit
pas éloigné de celui du malade.
Il resta donc seul avec la fille de service, qui le redoutoit
in fin im en t, paxxe qu’il l’avoit souvent menacée et malr
traitée. Il se mit au chevet du lit de son p è r e , où il essaya
de prendre dans sa cu lo tte, qui étoit sous le c h e v e t, la
ciel du cabinet où étoient renferm és l’or et l’argent et les
papiers de son p ère; mais comme la présence de cette fille
qui étoit auprès de l u i , le gènoit dans son p ro je t, il lui
ordonna de passer au pied du lit pour ferm er le rideau , et
profita de, ce m om ent pour enlever la clef du cabinet.
i: A p rès quelques .instans, il feignit de) vou lo ir sc cou-
�( 8 )
'c h e r dans une pièce voisine de la cham bre de son p è r e , et
il y fit faire le lit par sa propre servante, qui étoit venue le
joindre dans la maison de son père. Boisson aîné fit alors sem
blant de s’aller coucher ; mais il avoit bien un autre dessein.
-M uni de la clef du cabinet, il s y introduisit, y demeura
près de trois h eures, et em ploya le temps où il vouloit
qu’on le crût au lit, pour s’em parer de l’o r , de l’argent, et
des effets et papiers les plus précieux. O n ne peut pas douter
‘de son invasion dans le cabin et, par la preuve de deux
circonstances; i ° . celle de la réverbération de la lum ière
qü’il avoit du porter dans le cabinet, sur le m ur qui est en
face de la fenêtre du cabinet ; 2°. par. celle qu’il ne fut pas
se coucher, comme il l’avoit annoncé, dans le lit qu’il
avoit fait faire , parce qu’il est p rou vé que lé matin le lit
ne s’étoit point trouvé d érangé, mais qu’il étoit dans le
m êm e état où il avoit été mis par sa propre servante, à qui
il l’avoit fait faire.
: Boisson aîné trouva sans doute aisément le m o y en , avec
la finesse qu’on lui eonnoit, de rétablir la clef du cabinet,
dont il s’ étoit saisi. Mais Boisson p è re , ayant eu un léger
intervalle dans sa m aladie, soupçonnant ce qui pouvoit
être a rriv é , quoique extrêm em ent foible, il se fit conduire
dans son cabinet, soutenu par sa servante et une autre
femme de ses voisines , et se rendit certain par lui-m êm e
de l’enlèvem ent de son or et de son argent; ce qui le frappa
tellem ent, qu’il fut hors d’état de continuer sa rech erche,
n l’égard de scs effets et de ses papiers ; mais il ne douta pas
qu’ils ne lui eussent également été enlevés, et il ne douta
pas non plus que son fils aîné ne fût l’auteur de l'enlève
m en t, et il s’en expliqua devant plusieurs témoins qui en
ont déposé.
A p rès
�A p rès cette v is ite , Boisson père reçut une Somme de
i5 o tf" d’un particulier qui la lui devoit ; et si • cette
somme ne fut pas trouvée lors de l’inventaire , c’est parce
que Boisson aîné s’introduisit encore dans le cabinet dont
il se fit rem ettre la clef par la servante effrayée à la vue
d’un sabre qu’il venoit de faire porter dans la maison de
son père.
Indépendam ment des enlèvemens faits dans le cab in et,
il y en eut encore'dans les autres appartemens de la m aison,
de plusieurs m eubles, et notamment des couverts d’argent :
plusieurs témoins ayant déposé des allées et venues de la
maison du père dans celle du fils , par les domestiques du
fils , ou autres personnes par lui préposées pour porter les
meubles enlevés.
T o u s les faits qu’on vien t de rappeler sont prouvés
par les témoins que l’on a ci-dessus indiqués ; mais il y
a d’autres preuves qui ajoutent encore à celles-là, et qui
se tirent des aveux m êm e de Boisson, qui sont prouvés
par deux autres dépositions des inform ations; c’est celle
de Françoise M assy, 1 5 e. tém oin , et le I er. d’une conti
nuation d’in form ation; et célle de M arguerite D e v a l,
16e. tém oin , et le 2e. de la m êm e continuation. A quel
que précision qu’on ait voulu réduire les dépositions
des inform ations, ces deux dernières sont trop intéres
santes pour qu’on ne se croie pas obligé de les rendre
avec plus de détail,
Françoise Massy dépose d’une conversation tenuç
entre les deux frères B oisson, aîné et cadet,' dans 1#
maison de ce dernier, en la ville de C lerm ont, et dans
«ne ch am b re, où ils s’étoient renferm és, croyant n y
B
�■pouvoir pas être entendus. Mais Françoise Massy
servante de la m aison, fut envoyée par sa m aîtresse,
fem m e du cadet, pour .¿coûtera la porte de la chambre
la conversation des deux frères.
. Ce témoin dépose donc avoir entendu qu’ il s’agissoit,
dqns cette conversation, d’une déclaration cjue Bojsson
aîné vouloit faire faire à la servante de son père, tendante
à le disculper des soustractions qu’il avoit com m ises;
et qu’à l’occasion de cette déclaration, le cadet dit à son
frè re , qu’avant de faire faire cette déclaration, il fallolt
que Boisson aîné lui déclarat sur le champ les différons
vols et soustractions q u ’il avoit faits chez son père ; à
quoi Boisson aîné répondit qu’il lui rendroit com pte
de ce qui lui reven o it; mais que le cadet ayant insisté
à ce qu’il s y engageât par écrit, l’aîné le lui refusa, en
disant que ces sortes de choses ne se m ettoient pas par
écrit, attendu qu’elles pourroient donner lieu à un procès
crim inel. L e m êm e tém oin dépose encore que le cadet
demandoit à l’aîné de lui rem ettre différentes lettres de
change que lui Boisson cadet avoit consenties à son frè re ,
qu’ il avoit fait payer et retirer par le p è re, et que
Boisson aîné avoit enlevées dans le cabinet; à quoi Boisson
aîné répondit : sois tranquille, m on frè re , je te les
remettrai aussitôt que nous serons à R iom .
O n ne peut sans doute rien de plus précis que celte
déposition; mais elle se trouve appuyée et soutenue par
celle de, l’autre témoin dont on a p a rlé , et qui dépose
égalem ent de l’ayeu fait par Boisson aîné de ses sous
tractions.
' , . :.
■
/ M arguerite D eval dépose avo ir entendu Boisson cadet
�S ï$
(
)
dire à son frère a în é , marchant ensemble dans la 'ru e
des Taules : T u m ’as avoué avoir pris dans le cabinet de
m on père tout son argent et tous ses papiers, parm i
lesquels étoient des lettres de change que j’avois déjà
acquittées ; j’espère que si tu ne veu x pas me donnqr
ma portion d’argen t, tu me remettras du moins mas
lettres de change; à quoi Boisson aîné répondit : N e
b a v a rd e pas ta n t, sois tra n q u ille, je tiendrai ma,
parole.
A in si, voilà deux témoins bien positifs des aveux de
l’aîné B oisson, des soustractions par lui commises dans
le cabinet de son père, de tout son argent, et de ses papiers
les plus précieux.
O n ne croit donc pas qu’il puisse y avoir rien de plus
à désirer sur la preuve des soustractions les plus com
plètes, et de l’indignité des moyens par lesquels Boisson
aîné y est parvenu. Mais on doit croire que le tribunal
trouvera aussi dans les dépositions qu’on vient d’analyser
une preuve de connivence entre les deux frères, Boisson ca
det ne demandant jamais à son frère que sa portion desobjets
soustraits, sans parler des portions de ses sœurs, et insistanttoujours à ravoir seslettresdechange,quiappartenoient
au p ère, puisque c’éto itlu i qui les avoit payées et retirées
de son fils aîné, et qui par conséquent devoient se trouver
dans "sa succession , pour par les sœurs prendre leur
part de ces lettres de ch an ge, comme de tout le reste.
O n trouve aussi dans les informations la preuve que
Boisson cadet avoit pardevers lui des effets et papiers
de son p è re ; il en est môme convenu dans son inter
rogatoire au tribunal de la police correctionnelle : il est
B 4
**t
�C I* )
'v ra i qu’il a dit en m ôm e temps tju'il les tenoit de son
'p è re lu i-m ê m e ; mais outre qu’il seroit difficile de le
p résu m er, c’est que jusqu’à présent il n’avoit jamais
vouludire quels sont ces papiers et effets, et quelle en est
•la nature ; en sorte que: la -remise qu’il a offerte, et
qu^il a dû effectuer entre les mains de M aye t, notaire
séquestre, laisse toujours dans le doute s’il a fait une
remise entière. Q uoi qu’il en soit, le tribunal jugera
de la qualité et de l’effet que doivent produire contre
Boisson" cadet les dépositions des informations et des
enquêtes; et quoique les demanderesses aient pris des
conclusions directes contre lu i, elles s*en rapportent aux
lum ières et à la prudence du tribunal sur ces conclusions.»
O n croit donc a v o ir rem pli le prem ier objet qu’on s’étoit
-proposé dans ce précis^'c’e s t - à - d ir e , la preuve que c’est
•Boisson a în é, qui est l’auteur des soustractions commises
[pendant la dernière maladie du père com m u n , que ces
•soustractions embrassent tout l’or et l’argent et tous les effets
-les plus précieux que le père avoit dans son cabinet, et
•qu’enfin il a été fait d’autres soustractions de meubles qui
-étoient dans les autres appartemens de la m aison, et parti
culièrem ent de la vaisselle d’argent.
; Il s’agit maintenant de prouver en point de d ro it, q u e,
pour,fixer la valeur deces soustractions, le serment in litem
•doit être déféré aux dernanderesses. Les principes de cette
m atière serviront aussi à indiquer les bases qu’il faut re
ch erch er pour déterm iner le q u a n tu m , jusques auquel le
serm ent in litem doit être déféré.
Ces principes sont tous dans le droit rom ain. Nos ordon
nances n’en ont point parlé ; e t , de toutes nos coutum es,
�S « o
-celle de Bretagne est peut-êtrç^4&seiilë qui gît prSvu le cas
'des sousti*actions et recèles, pour accorder le serm ent sur
la quantité contre celui qui en est l’auteur. Nos lois nou
velles n’ont pas encore atteint cette matière.,, et l’on ne
•trouve m ême rien qui y ait rapport dans les projets de
:code civil qui ont paru jusqu’à présent; mais la ;jurispru<dence avoit reconnu dans cette partie la sagesse des lois
romaines , dont elle avoit adopté les décisions.
•Ce seroit un vain étalage de rapporter toutes les lois qui
.ont rapport, au serment in litem ; le nom bre en est infini
•'dans plus de vingt titres, du digeste ou du code-; mais coipm e
.e lle s sont-tou tes uniform es, il suffit d’en citer une seule, la
iloi 9, au titre du code undè v i : cette loi porte que les sous
tractions étantiprouvées en général, si celui qui les a éprou
vées ne peut pas établir chaque objet de soustraction «n
.particulier, le juge d o itlu i déférer le serment-sur la va*
Jeur et ^estimation ; la loi ne met d’autre restriction, si ce
•n’est que le juge déterminera lui-m êm e la somme jusquesà
laquelle le serment .sera d é fé ré .<. Siquando v is in ju d ic io
jfueritpatefacta^deindè sub rebus abreplis et in vasis quœsr
tio p ra p o n etu r, si n o n p o tu e r it, q u i vim s u s tin u it, quœ
perdidit singula com probare, ta xa tion e à ju d ic e fa c tâ
pro personarm n atque negoiii qua litate , sacram cnto
œ stim atiom s rerum quas perdidit, m anifestet : ncc licea t
eiM itra taxationem à ju d ic e jh c ta m ju r a r e .
*’ ■
N otre jurisprudence s’est entièrement conform ée sur ce
point à la disposition des lois rom aines, et nos livres sont
pleins d’arrêts qui ont accordé le serment in lit e m , soit
contre les veuves qui ont commis des soustractions dans
les successions, de leurs jnaris ? soit, contre les “héritiers qui
�,
,
( H i '
; ont fait des rècék's darts les successions qui leur sont com
munes avec d’autres héritiers. Sur quoi on peut voir le
■
P rêtre , centurie prem ière , chap. 65 ; le journal des au:diencesj sur l’arrêt du i 5 mai i 656 ; le journal du palais
sur l’arrêt du 18 septembre 1690, et généralem ent tous lés
arrêtistes. La.:jurisprudence de tous les parlemens a été
„toujours uniform e sur cette matière, et le serment in litem ,
constamment déféré contre les auteurs de v o ls, de recèles
IV L
et de soustractions , lorsque la preuve s’en est trouvée faite
,en g én éral, quoiqu’on n’ait pas pu prouver chaque objet
en particulier. Seulement les juges, dans ce cas-là, ont fixé
une somme jusqu'à laquelle ou au dessous on pourroit
ju r e r, et qu’ils ; ont déterminée , comme dit la lo i, pro
personarum atque negotii q u a lita te , prenant en consi
dération la qualité du d éfu n t, s’il .paésoit pour r ic h e ,.e t
avoit de l ’argen t, et autres circonstances qui pouvoient
résulter des preuves générales des soustractions et recèles.
Les principes établis, voyons à quelles sommes on pour
roit en porter la valeu r, et jusques à laquelle le serment
p ourroit être déféré. '
.. . . . ' ,
O n trouve déjà quelques objets indiqués dans les infor
mations. Boisson père déclare à plusieurs témoins qu’on lui
a enlevé vingt-deux pièces d’or de 48 ^ chacune, et sept
de 24
; il parle ensuite de deux sacs d’a rg e n t, sans en
spécifier le montant -, il est question encore dans les infor
mations d’une somme de i 5o
, que le père avoit remise
depuis la prem ière invasion dans son cabinet, et qui fut
sansdouteencoreenlevée,lorsque Boissonl’aîn éy retourna,
sous le prétexte d’arranger les papiers de son p è r e , et après
s on être fait délivrer la clef par la servante effrayée à la
vue d’uu sabre*
�(r ^ X
/
Mais il y .a encore dans'les informations la preuve de
l'enlèvem ent des papiers et effets les plus précieux du
défunt; les aveux qu’en a faits Boisson aîné, sont également
prouvés. O r , parmi les effets, il y a lieu de croire "q u ’ il
d e v o ity en avoir pour des sorrçmes- bien excédantes celles
qui étoient en num éraire dans le cabinet ; on espère qu’il
sera prouvé par les témoins qui seront entendus dans la
nouvelle en q u ête, que Boisson p è re , peu de temps avant
la maladie dont il est m ort, avoit voulu placer 6,000 ^ d’un'
côté , et 3,000
de l’autre en rente v ia g è re , et que sur les
représentations qui lui furent faites, que p arce placementen
v ia g e r,e t à son â g e ,ilfe r o it tort à ses enfans, il répondoit
qu’ilavoitbienencore assez d’argent; mais ces placemensen
viager n’ayanl pas été faits vraisemblablement d’après les
représentations qui furent faites à Boisson p è re , du tort
qui en résulteroit pour ses enfans, il y a tout lieu de croire’
que Boisson père n’auroit pas voulu garder de si grandes
sommes d’argent m o rt, et qu’il les avoit placées en billets
ou lettres de ch an ge, d’autant m ieux que toute ’sa v i e , il
avoit exercé le commerce, et ces billets ou lettres de change
se trouvant dans le cabinet dans lequel Boisson, fils a în é ,
avoit fait l’enlèvem ent des effets les plus précieux , seroient
nécessairement passés en son pouvoir. O r, la vraisemblance
de ces conjectures doit sans douté entrer en considération
dans la fixation de la somme jusqu’à laquelle ce serment in
ïitam sera déféré.
*
Les informations parlent aussi de deux quittances que
Boisson aîné avoit données à son père, et qu’il avoit enle
vées avec les autres p ap iers, sans spécifier le montant de
ces quittances, et sur quels objets elles avoient été données/
�in
v v ,
- i (*6 )
.
Elles parlent également de deux obligations faites au père
Boisson; l’une par le' citoyen V ia le tte, l’autre par le citoyen
M o ra n d , sans dire les sommes auxquelles pouvoient re
m onter ces obligations.
O utre les enlèvemens faits dans le cabinet, les informa
tions parlent encore d’autres meubles enlevés par Boisson
lîls, dans les autres appartem ensde la maison de son père ,
çt particulièrem ent de sa vaisselle d’argent.
O n . espère q u ’i l sera encore prouvé par les témoins qui
seront entendus dans la nouvelle en q u ête, que trois mois
avant sa m o rt, Boisson père montra a ses fermiers de V ille
n e u v e , une bourse c o n s id é r a b le rem plie de louis, et une
caisse où étoit son argent blanc ; que ces mêmes fermiers
placèrent cette c a isse s u r la voitu re, l o r s q u ’ils vinrenteherch e rle père Boisson pour aller de R iom à V ille -N e u v e , et
qu’ils la replacèrent encore, lorsqu’ils le ram enèrent de
y ille -N e u v e à R iom .
, Enfin ? on ne doit pas perdre de vue la preuve qui résulte
des informations que , parm i les effets enlevés par Boisson
a în é , se trouvoient les lettres de change qiie lui avoit
consenties Boisson cadet, et qui avoient été acquittées et
retirées par le père.
. Dans le concours de toutes ces circonstàncçs, et d’après
les preuves certaines de l'enlèvem ent fait par Boisson a în é,
de tout l'argent et de tous les effets qui étoient dans le cabi
net de son p è r e , il sembleroit qu’il n’y a pas trop d’exagé
ration. dans la réclamation d’une somme de 30,000 ^ jus
qu’à laquelle lés filles Boisson demandent d’être admises
au serment in titam \ mais lé tribunal pèsera‘toutes ces
circonstances pour déterm iner cette somme dans to\ite sa
sagesse.
Pour
�C *7 >
î*our terminer ce précis, il ne reste plus qu’à établir
quelles sont les peines que doit subir Boisson aîné, à raison
des soustractions et recélésqu’ilacommii,etàcetégard,ce.
sont encore les principes du droit romain, quii ont fixé
liotre jurisprudence française.
Les lois romaines sont encore uniformes sur la peine des
recélés , et dans le grand nombre qu’on en pourroit citer,
il n y en a pas de plus précise que lai, 48, if* ad senatusconsuîtum trebelianutn. Dans cette lo i, le jurisconsulte Paul
répond que si un des héritiers a soustrait des effets de la
succession, il doit être privé de la part qu’il y auroit eue.
Paulus respondit : S i certa poriio hœrcditatis ciïicui
rclicta proponitur, et is res hœreditatis quasdam fu ra tus sit: liis rebus quas subtraxit} déhegari ci petitioncjn
çportel, rectè respondetur.
A l’égard de notre jurisprudence française, elle a exac
tement suivi les principes du droit romain, et c’est suivant
tes principes que les arrêts ont constamment jugé, et à l’égard
des veuves communes, et à l’égard des héritiers qui avoient
Commis de9 soustractions ; qu’ils étoient par là privés des
portions qu’ils auroient dû avoir dans les choses soustraites :
on trouve ces arrêts dans Louet etBrodeau, lett. R. som. 1
etsom. 48, et généralement dans les arrêtistes de tous les
parlemens ; et tous nos auteurs français, depuis Dumoulin,
ont également enseigné la même doctrine. Dumoulin alloit
même jusqu’à priver la veuve ou l’héritier qui avoient
recélé, n o n seulement de leurs portions, dans les choses
recéldes, mais même dans toute la communauté ou la
iuccessiom
,. :
.
Mais indépendamment de la privation qui doit être
�( >8 )
prononcée Contre Boisson aîné , de sa portion dans' la
valeur des objets qii’ il a soustraits et recélés, il doit encore
être déelaréxléchu de toutes créances et prèle vemens, qu’il,
pourroit prétendresur ]à succession de.sçn père. P ès qu’il,
est prouvé par les informatiQnsV que dans le nombre des.
effets qu’il a enlevés.dans le cabinet de son père,, étoiüht
deux quittances qu’il lui avoit données, la présomption,
de droit en ce cas est que ces quittances se>rapportoieiit
à tout ce que son père pouvoit lui devpir; sans quoi il
n’auroit eu garde, de les soustraire , puisque si elles
n’eussent été données qu’à com pte, ou pour des objets;
particuliers, son intérêt eût été de ne pas les soustraire,
s’il avoit effectivement des créances plus considérables que
le montant de ces quittances. Ont doit croire qu’il n’a enlevé
ces quittances, que pour faire revivre des créances éteintes
par le payement établi par ces quittances. Plusieurs auteurs,
et entre autres, Denizart,,au m ot B.ECÉLÉS, sont d’avis
que quand une femme commune ou un cohéritier sont
créanciers de la succession dans laquelle ils ont commis des
r e c é l é s , il se fait une confusion de plein droit en leurs
personnes, de leurs créances, et qu’on les présume payés
par leurs mains ; il en, doit être de même à plus forte rajsoqt
dans le cas particulier, comfne celui-ci, où il est prouvé quç
,parmi les effets recélés il y avoit des. quittances.çlpnnées ail
défunt par le cohéritier,.qui est l’auteur des recélés. ■ .
' *»- ’ I
•
• >î *«
i
' .
,
‘
.
>
'
* ■ » * ' ;
.
*
*
1 Vf o t A1.' Les demanderesses ne doivent 'p as négliger de faire'
toutes réserves contre un traité sous seing privé, que Buisson: aîné
prétend avoir passé avec son père, tout écrit de main du clerc
�H \
( 19 )
q u e Boisson aîné avoit a lo rs, et qu’il prétend aussi être signé par
l e père. C e prétendu traité se tro u va lors de l’inventaire dans un
endroit du cabinet qui fu t indiqué par le fils. M ais il ne p o u vo it
y Être que par une insertiqn fu rtive de la part de B oisson aîn é,
lors des invasions qu’il avoit faites dans le cabinet. A u re ste , on
se borne ici à en faire l’ observation , p o u r m otiver les réserves
que se font les demanderesses et p o u r m ettre au grand jo u r ,
lorsqu’il en sera nécessaire, l’iniquité de cette m anœ uvre, si jam ais
on osoit faire usage du prétendu traité.
A in si semble devoir être défendue la cause des deman
deresses.
D élib é ré à R io m , le 11 m essidor, an 6. A N D R A U D .
A R I O M , D E L’ I M P R I M E R I E D E L A N D R I O T .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Boisson, Marie. An 6?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
inventaires
séquestre
serment in-litem
témoins
abus de faiblesse
vols
domestiques
recel
fraudes
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis pour Marie Boisson, veuve d'Antoine Charles ; Anne Boisson et Jean-Baptiste Robert, son mari, de lui autorisée ; autre Marie et autre Anne Boisson, filles majeures, lesdites Boisson, héritières, par bénéfice d'inventaire, de Jacques Boisson, leur père, demanderesse ; Contre Louis Boisson aîné, et Louis Blaise Boisson cadet, leurs frères, défendeurs.
Table Godemel : Serment : 2. Lorsqu’une instance est engagée entre cohéritiers, sur des soustractions commises dans la succession, à qui, du demandeur ou défendeur, doit- être déféré le serment in litem, pour déterminer le quantum des objets enlevés ? quelle peine encourt le spoliateur ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 6
1790-Circa An 6
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1224
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ville-Neuve (63458)
Riom (63300)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53182/BCU_Factums_G1224.jpg
abus de faiblesse
domestiques
fraudes
inventaires
recel
séquestre
serment in-litem
Successions
témoins
vols
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53695/BCU_Factums_M0154.pdf
6b3210cd5053ecae160659b29107629b
PDF Text
Text
M EM OIRE
ET C O N S U L T A T I O N ,
POUR
AYMET , notaire public ,
S u z a n n e T A P H A N E L , son é p o u s e ; J e a n
S I A U D , et R e n é e TAPHANEL, son é p o u s e ,
Ja cq u es-B én ig n e
appelans ;
CONTRE
N
icolas
T A P H A N E L , intimé.
P iE R R E Taphanel, père commun, contracta un pre
mier mariage, le 4 mai 1 7 3 9 , avec Marie-Anne L uzuy.
Noël Taphanel et Marie-Anne A ndraud, ses père et
m ère, l’instituèrent pour leur héritier universel de tous
leurs biens, en quoi qu’ils consistassent, pour leur suc
céder après leur décès seulement.
A
�( 2 )
m
D e ce mariage issurent Nicolas Taphanel, intimé, et
Marie-Anne Taphanel, mariée avec le citoyen Laurent,
représentée par Nicolas Tap han el, qui a acquis ses droits.
M arie -A n n e Luzuy étant décédée, Pierre Taphanel
contracta un second mariage avec Gilberte A n drau d, le
3 mai 1748. N o ë l Taphanel, son père, vivoit encore; mais
Marie-Anne Andraud, sa mère, étoit décédée. Il est im
portant de se pénétrer des clauses de ce second contrat de
mariage, relatives h la contestation; on va les transcrire.
« En faveur duquel mariage, et pour aider â en sup« porter les charges, ledit Taphanel père a ratifié fins-*
« titution qu’il a ci-devant faite au profit dudit Taphanel,
«< son fils, par-son premier contrat de mariage avec
<r défunte Marie L u z u y , le 4 mai 1 7 3 9 , dûment con« trôlé.... avec clause expresse que lesdits Taphanel, père
« et fils, ne pourront avantager les enfans du premier
k et second lit, les uns plus que les autres; pourront
« néanmoins faire des héritiers; et en ce cas seront tenius
« de choisir des enfans tant' du premier que du second
« lit, en nombre égal, lesquels seront institués héritiers
« par portion égale, et tous les autres enfans tant de l’un
« que de l’autre lit, constitués par égales portions •».
Suzanne Taphanel, épouse Aymet, et Renée Taphanel,
épouse Sia u d , sont issues de ce second mariage.
Nicolas Taphanel contracta mariage, le 22 novembre
17 7 9 ; Pierre Taphanel, père commun, dont le père étoit
alors décédé, 1 institua pour son héritier, à la charge
d’une légitime envers ses autres enfans.
Pierre Taphanel décéda le 4 nivôse an 3.
L e i 5 frimaire suivant, Suzanne et Renée Taphanel
�.
.
( 3 )
.
obtinrent contre leur frère un jugement par défaut, au
tribunal civil du département du Puy-de-Dôme , par
lequel il fut condamné à venir à partage des biens com
posant la succession de Pierre T ap b an el, pour leur en
être délaissé leur portion afférente , qui étoit un quart
pour chacune. Cette condamnation étoit fondée sur les
dispositions portées au second contrat de mariage de Pierre
Taphanel.
Nicolas Taphanel forma opposition à ce jugem ent, et
sur cette opposition, il en est intervenu un second con
tradictoirement rendu le 5 floréal an 5 , par lequel
Nicolas Taphanel a été reçu opposant au premier ; et
faisant droit au fond, sans s’arrêter ni avoir égard aux
clauses portées par le contrat de mariage du 3 mai 1748 ,
qui sont déclarées nulles et de nul eilet, il est ordonné
que les parties viendront à division et partage des biens
meubles et immeubles de Ici succession de Pierre Taphanel,
père commun , pour en être délaissé à chacune des deman
deresses un douzième ,• auquel partage Nicolas Taphanel
rapportera le mobilier , suivant l’inventaire qui en a été
ou dû être fait; sinon, suivant la commune renommée,
avec les intérêts depuis l'ouverture de ladite succession.
Il est pareillement ordonné, que chacune des parties rap
portera ce qu elle se trouvera avoir touché, notamment
]S¡colas Taphanel, les jouissances des immeubles,à compter
de l’ouverture de ladite succession > avec les intérêts, du
jour de la demande.
Suzanne et Renée Taphanel prétendent que ce juge
ment est mal rendu, en ce qu’il les réduit à une légitime
de droit ; que c’est sans fondement que les dispositions
A 2
r
�(4)
du contrat de mariage du 3 mai 1748 , ont été annullées ,
et qu’elles doivent avoir dans les biens de leur père , la
portion que ce contrat de mariage leur assure, et dont
leur père n’a pu les priver par l'institution universelle,
postérieurement faite en faveur de Nicolas Taplianel ;
elles demandent au conseil, si elles sont fondées ou n on ,
à interjeter appel du jugement du
floréal an 5 , et
dans le cas de l’affirmative, quelle est la portion qui doit
leur reven ir, d’après les clauses du contrat de mariage
du 3 mai 1748.
L E C O N S E IL S O U SS IG N É , qui a vu le mémoire
ci-dessus et tous les titres et pièces relatifs à la contestation ,
, que Suzanne et Renée Taplianel sont bien
fondées à interjeter appel du jugement du 25 floréal an 5 .
Ses dispositions sont contraires aux principes ,* mais on
ne doit pas en être étonné, parce qu’il paroît que la
cause n’a pas été présentée sous son véritable point de
vue. Il y a tout lieu de présum er, que si les moyens qui
se présentent pour Suzanne et Renée Taplianel eussent
été développés, il auroit été rendu un jugement différent.
Pierre Taplianel devoit, à la vérité, recueillir les biens
de son p ère , en vertu de l’institution contractuelle faite
en sa faveur, dans son premier contrat de mariage ,* mais
il n’en est pas moins vrai qu’il n’a pu en disposer en 1779?
au profit de Nicolas Taphanel, son fils, à titre d’institu
tion universelle, et réduire ses autres en fans à la légitime
de droit. En s’unissant avec Gilberte Andraud , il a con.E s t d ’ a v i s
�,
( 5 >
tracté l’engagement dé ne pouvoir choisir un héritier parmi
les seute, enfans de son premier mariage. C ’est sous la foi
de cet engagement que ce mariage a été contracté, et que
les enfans en sont nés.
On ne sauroit v o ir, sous aucun rapport, pourquoi
cette convention seroit nulle, et pour le démontrer, on
va établir deux propositions.
L a première , que la disposition contenue au contrat
de mariage de Pierre Taphanel
du 3 mai 17 4 8 , est
l’ouvrage de ce dernier; qu’ayant été saisi de l’institution
contractuelle à lui laite par son père, dès qu’il lui a sur
vécu, cette disposition, très-valable en elle-même, a eu
l’effet de le lier et de transmettre à ses enfans du premier
et du second mariage, tous ses biens, môme ceux provenans de cette institution contractuelle, sous le mode établi
par ce contrat de mariage.
L a seconde, que l’on ne peut vo ir, dans ce contrat de
m a r i a g e , aucune dérogation ni modification à l’institution
c o n t r a c t u e l l e faite par Noël T a p h a n e l à Pierre Taphanel ;
que Noël Taphanel n’avoit aucuu intérêt personnel à cette
dérogation ou modification.
P
r e m i e r e
P
r o p o s i t i o n
.
Il est incontestable qu’une institution contractuelle porte
sur tous les biens présens et à venir de celui qui la fait;
e n sorte que si, au moment de cette institution, l’ instituant
est lui-même institué d’une personne vivante; s’il lui survit
et que l’institution ait dès lors son effet, les biens, recueillis
par suite de cette institution, entrent dans la disposition
et doivent être réglés par cette disposition même.
A 3
�.
S 6)
.
II n’est pas moins certain que les promesses d instituer,
les promesses d'égalité ou les conditions que l’on s’impose
dans le cas où l'on voudroit disposer de ses biens, sont va
lables comme une institution, étant faites par contrat de
mariage en faveur des ép o u x, ou par ceux qui contractent
mariage en faveur de leurs enfans à naître. Ces sortes
d’engagemens doivent être réglés , quant à leurs effets,
comme les institutions.
O r , Pierre Taphanel a été saisi de Finstitution contrac
tuelle à lui faite par Noël Taphanel, son père, puisqu’il lui
a survécu. Les dispositions qu’il a faites de ses biens par
son contrat de mariage du 3 mai 17 4 8 , o u , ce qui revient
au même, les conditions qu’il s’est imposées , relativement
aux dispositions qu'ilpourroit faire dans la suite, ont donc
eu tout leur effet, même par rapport aux biens p ro
venus de l’institution contractuelle faite parNoe‘1 Taphanel.
Ainsi le contrat de mariage de Pierre Taphanel * du 3
mai 17 4 8 , portant la clause q u e : « Lesdits T a p h an el,
tr père et fils , ne pourront avantager les enfans du prc« m ier et du second lit , les uns plus que les autres ;
« q u ils pourront , néanm oins, fa ir e des h éritiers , et
« qu'en ce cas , ils seront tenus de choisir des enfans
« tant du prem ier que du second l i t , en nombre é g a l ,
« lesquels seront institués p a r portions égales, et tous
cc les autres en fa n s , tant de Tun que de l'autre l i t , consv t ’tués p a r égales portions ».
Cette clause a du être pleinement exécutée, et l’on ne
pourroit justifier, en aucune manière, la contravention
qui y a été faite par Pierre Taphanel. Il auroit pu insti
tuer, pour ses seuls héritiers, les enfans à naître de son
�.
( 7 )
second mariage, ou l’un d’eu x, et l’on ne voudroit pas
qu’il eût pu s’engager, s’il vouloit faire des héritiers, de
les prendre, en nombre égal, parmi lesenfans des deux
mariages , et de légitimer, à la môme somme, les en fans
de ces deux mariages, qui ne seroient pas héritiers ! Il ne
faut pas un grand effort de raison pour sentir combien
cette idée seroit révoltante. A u ssi, des clauses de la nature
de celles dont il s’agit, sont-elles fréquemment insérées
dans de seconds contrats de mariage, et journellement
l’exécution en est ordonnée.
On v o it, dans le jugement du 5 floréal an 5 , que le
premier tribunal s’est décidé sur ce que « l’institution
« d’ héritier faite par Noël Taphanel en faveur de Pierre
« Tap han el, son fils, par son premier contrat de mariage
« du 4 mai 1 7 3 9 , a été pure et simple.
« Que cette institution étoit irrévocable ; qu’elle ne
« pouvoit être, d’après les principes, grevée d’aucune
« condition, ni modifiée, et qu’ainsi la condition imposée
« par Noël Taphanel, instituant, à la seconde institution
« par lui faite en faveur de Pierre Taphanel, son fils,
« par son second contrat de mariage du 3 mai 1748 ,
« est évidemment nulle, et doit être considérée comme
« non écrite.
.
« Que le consentement donné par finslitué, dans son
« s e c o n d contrat , ne doit être d’aucune considération ,
« étant présumé extorqué, et que finslitué étoit d’ailleurs
« mineur lors de cette dernière institution.
• « Que Pierre Taphanel ayant recueilli l’effet de la pre« rnicre institution, et 11’étant pas grevé par la seconde
» institution, a pu instituer valablement Nicolas Tapluinel
A4
�..
( 8 )
.
« son héritier contractuel, et réduire ses autres enfans
« à. leur légitime. »
Il n’y a pas un de ces motifs qui puisse soutenir le choc
de la discussion.
On convient bien que l’institution contractuelle faite
par Noël Taphancl à P ie rre , son fils , par le premier
contrat de mariage de ce dernier, étoit pure et simple;
mais il ne sauroit en résulter aucune conséquence pour
annuller les dispositions faites par Pierre Taphanel luimême , par son contrat de mariage.
L e premier tribunal semble avoir jugé dans le sens que
ces dispositions ne devoient pas être considérées comme
étant du fait de Pierre T ap h an el, qu’elles étoient l’ouvrage
de son père, q u i , en abusant de son autorité, avoit dicté
ces dispositions à son fils , et avoit grevé de cette condition
l’institution qu’il lui avoit précédemment faite’ que le con
sentement que le fils avoit donné à cette condition, étoit
absolument n u l, d’après ce que dit Dumoulin dans un cas
tout autre que celui-ci : hic consensus non valet , ccnsetur
extortus à pâtre.
Mais toutes ces idées sont autant d’erreurs manifestes.
Dans quel cas Dumoulin s’est-il ainsi expliqué ? c’est
lorsque le fils institué, ou un institué quelconque, s’est
départi, du vivant de l’instituant et par son impulsion,
de l’effet de l’institution: o r, ce n’e&t pas ce dont il s’agit
dans l’espèce. E u effet, Pierre Taphanel ne s’est pas départi
du bénéfice de l’institution; au contraire, son père l’a
ratifiée, et cette ratification éto’ t absolument inutile, puis
qu’elle n’auroit pas moins existé sans cela.
Il est bien d it, à la vérité, dans la suite, avec clause ex
�( 9 )
presse que « lesdïts T ap h an el, père et fils, ne pourront
cc avantager les enfans du premier et second lit , les uns
a plus que les autres ; qu’ils pourront néanmoins faire des
« héritiers, et qu’en ce cas ils seront tenus de choisir des
« enfans tant du premier que du second lit, en nombre
« égal, etc.
M ais, en premier lie u , cette clause tie doit pas être
considérée comme unecondition expresse de la ratification
de l’institution contractuelle déjà-faite par le père. On ne
sauroit donner à une condition l’effet d’avoir grevé une
ratification, lorsque cette ratification est évidemment
vaine, lorsque la disposition ratifiée devoit subsister par
elle-même, sans le secours d’aucune ratification.
• En second lieu , non seulement il n’y a pas de nécessité
de considérer ces expressions, avec clause expresse, et
celles qui suivent, comme une condition apposée à la
ratification de l’institution, mais, au contraire, c’est une
seconde clause absolument distincte et séparée de la
première, avec laquelle même elle est incompatible.
Il est évident qu’après cette première clause, on en a
commencé une nouvelle qui avoit pour but d'assurer une
égalité d’avantages entre les enfans du premier et du second
lit. O r , qu'importe que dans cette clause le père et le fils
aient stipulé conjointement ; le fils avoit la liberté de la
stipuler seul, et la présence du père ne sauroit vicier son
engagement. Il n est pas rare de voir dans un contrat de
mariage, un pere et son fils , son héritier contractuel,
marier le fils de ce dernier, et de voir le père et le fils,
instituant et institué , instituer conjointement le fils de
l'institué; cependant il est hors de doute que si le fils ins
A 5
�.
( 10 "} .
.
titué survit à son père , l’institution faite par ce iîls a tout
son effet au profit de son institué , tant pour ses biens
personnels que pour ceux provenant de la première insti
tution.
Quelle différence pourroit-on faire de ce cas à celui
dont il s’agit? Pierre Taplianel devoit, sans douta, être
occupé du sort de sa propre postérité ; la famille Andraud,
i'i laquelle il s’allioit, avoit le plus grand intérêt de veiller
à ce que les enfans de ce second mariage ne fussent pas
.s a c r ifié s à l’avantage de ceux du premier lit.
Pierre T ap lian el, mû par tous ces motifs, contracte
l’engagement de traiter avec une égale affection , et de
mettre dans la même balance, les enfans de son second
mariage et ceux du premier. Cette convention est-elle pro
duite par un mouvement qui ne soit dans le vœu de la
nature? cet engagement est sans contredit plus digne de
la protection des lois, que celui qui auroit consacré une
inégalité entre ses enfans; et cependant , une telle dis
position auroit dû avoir son effet.
.
D'ailleurs, il pouvoit y avoir une raison pour faire
entrer [Noël Taplianel dans cette clause, i reflet de le
lier personnellement--1; abstraction faite de l’engagement
contracté par Pierre Taplianel.
En effet , il ne faut pas perdre de vue que l’institu
tion contractuelle faite par Noël T ap lian el, à P ie rre ,
Ta été sans réserve ; cela étant, Noël Taphanel pou
voit avoir le droit, dans les principes de la coutume de
la ci-devant province d’Auvergne , de disposer jusques
et à concurrence du quart de ses biens, autrement que
par forme de quote. Il ponvoit faire celte disposition
�^
( II )
en faveur de tel de ses petits-enfans , ou de-telle autre
personne qu’il lui auroit plu de choisir. On sait que cette
question est encore un sujet de controverse , que plu
sieurs jurisconsultes se sont décidés pour cette faculté
de disposer de la part de l’instituant, lorsqu’encore une
fois, l’institution a été faite sans réserve; ( car s’il y a
des réserves, il peut disposer de ces réserves ) ; telle étoit
la jurisprudence de plusieurs tribunaux. C'est donc pour
que Noël Taphanel ne pût faire une semblable dispo
sition, qu’il est entré dans la clause. Mais l’engagement
contracté par, Pierre T ap h an e l, ne subsiste pas moins ,
et il est ridicule de prétendre qu’il est nul , par la cir'constance que Noël Taphanel étoit présent. S’il avoit
pu valablement, malgré cette circonstance, stipuler une
convention qui eut accumule tous les avantages sur la
■tète d’un seul de ses enfans, au préjudice des antres, à
plus forte raison, a - t - i l pu en faire une qui a tous les
caractères de la sagesse et de la justice.
L e moyen resultant de ce que , lors de son second
contrat de mariage du 3 mai 17 4 8 , Pierre T a p h a n e l
étoit mineur, ne seroit encore d’aucune considération
puisque , suivant la jurisprudence généralement observée
dans tous les tribunaux de la ci-devant province d’A u vergue, les mineurs de vingt-cinq ans pouvoient vala
blement faire, en se mariant, une institution contrac
tuelle en faveur de leurs enfans à naître.
Cest ce quenseigne Chabrol, dans son commentaire,
sur 1 article
du titre 1 4 , tome 2 , page 329 : no
tamment a la page 16g du mémo volume, on trouve une
foule de jugemens qui ont confirmé des substitutions,
�.
.
..
C I 2 )
'
.
qui sont des dispositions moins favorables que les insti
tutions, quoique du même genre , faites par mineurs,
et dans les mêmes circonstances qui se présentent, c’està-dire, en présence du père qui s’étoit déjà lié par des
dispositions précédentes, envers son fils. Mais dans l’es
pèce présente, cette allégation de minorité, n’a été qu’un
prétexte pour inspirer plus de faveur sur l’intimé ; l’ex
trait de sa naissance qui la fixoit au 1 2 mai 1 7 2 3 , est
aujourd’hui reconnu inexact, et l’on en rapporte un plus
fidèle qui la détermine au 12 mars précédent; d’ovi il
résulte que Pierre Taphanel étoit majeur à l’époque de
son second contrat de mariage , du 3 mai 1748Ainsi , la circonstance de cette majorité, anéantit un
des motifs du jugement dont est appel; elle démontre
victorieusement que les dispositions portées dans ce se
cond contrat de mariage, sont incontestablement l’ou
vrage de Pierre Taphanel ; il étoit en effet le magistrat
de sa famille ; il a pu , même du vivant de son père et
eu sa présence, faire un règlement sur les biens qu’il
auvoit ou mourant; et l’effet de l’institution, à lui faite
par Noël T ap h an el, se trouvant dans sa succession , il
est impossible de concevoir comment les biens provenans
de Noël, ne seroient pas , ainsi que les siens propres,
soumis à ce règlement.
S
e c o n d e
P
r
o
p
o
s i t i o
n
.
On a déjà établi que la disposition dont il s’agit, con
tenue au second contrat de mariage de Pierre T a p h a n e l ,
éloit valable , parce qu’elle étoit son propre ouvrage,
�,
.
,
^ 13 ^
et qu’elle avoit frappé tous ses biens présens et à v e n ir ,
et par conséquent, les biens qu’il devoit recueillir un
jo u r, en vertu de l’institution contractuelle à lui faite
et qui a été ouverte à son profit, postérieurement à ce
contrat de mariage.
Mais, est-il dit dans un des motifs du jugement, « l’insti« tution contractuelle faite par Noël Taphanel à Pierre,
« étoit irrévocable; elle ne pouvoit être d’après les prin« cipes, grevée d’aucune condition, ni modifiée: ainsi,
« la condition imposée par Noël Taphanel, instituant, à
« la seconde institution , par lui faite en faveur de Pierre
« Taphanel son fils, par son second contrat de mariage
«■ du 3 mai 1 7 4 8 y est évidemment nulle, et doit être
« considérée comme non écrite ».
Si on se pénètre bien des clauses de ce contrat de ma
riage , il est certain qu’il n y a ni dérogation à l’institution
contractuelle faite par Noël Taphanel à Pierre son fi]s ,
ni modification de cette institution.
On a déjà dit que Noël Taphanel n’y a pas d é ro g é ,
puisqu’il l a au contraire ratifiée. Il est m êm e im p ossib le
q u ’il ait entendu y déro ger, parce que personne ne pou
voit pousser l’ignorance au point de croire cette déroga
tion possible.
Y a-t-il une modification ? non ; car il est hors de doute
que Pieire Taphanel etoit assure de recueillir intégrale
ment l’effet de son institution après le décès de son père.
Il est vrai qu’il résulte d’une clause particulière, que les
enfans du prem ier et du second lit devoient recueillir éga
lement le bénéfice de 1 institution , ou que si l’on eût fait
des h éritiers, ils devoient être choisis avec une certaine
�.
( 14 } .
,
égalité parmi tous les enfans. Mais cette clause, on le ré
pète, a principalement concerné Pierre Taphanel; il a pu
régler en présence de son père, comme seu l, le sort de ses
O'nfans. Noël Taphanel n y a eu aucun intérêt; s’il y en
avoit un, ce n’a pu être que relativement au quart de ses
biens dont il auroit pu disposer, malgré l'institution , dès
qu’elle étoit sans réserve. Il faut donc prendre cette clause
distributivement ; elle a dû avoir un elFet pour chacun
d ’e u x , en ce qui les concernoit, et chacun d’eux a pu la
Stipuler. Un fils saisi d’un espoir de succéder de la part de
son père, peut, même en présence de celui-ci, disposer
sur cet espoir de succéder; s’il vient à se réaliser, cela
est incontestable.
Il ne reste qu’une objection , qu’il est utile de prévoir
pour ne rien négliger. On pourroit dire que Pierre T a
phanel pouvoit décéder avant Noël ; que, dans ce cas, les
' enfans du premier mariage auroient du seuls recueillir
reflet de l’institution, exclusivement à ceux du second
mariage; que cependant, d’après la clause dont il s’agit,
les enfans du seconà lit auroient concouru avec ceux du
premier.
Mais, i ° . ce cas n est pas arrivé } et les dispositions de
la part de Pierre Taphanel auroient toujours dû avoir
leur effet, dès que, lorsqu il les a faites, il étoit saisi d’une
espérance; et que par l'événement cette espérance est de
venue pour lui une certitude, par cela seul qu’il a survécu ,
ù son père. lies dispositions qu’il a faites, même du vivant
de ce dernier, doivent subsister.
20. Il s’en faut bien qu’il soit vrai que les enfans issus
d’un mariage, en faveur duquel une institution conlrac-
�,
f l 5 )
.
tuellea été faite,'.aient seuls le droit de la recueillir exclu
sivement à ceux de mariages postérieurs, lorsque l'institué
prédécède l’instituant.
La coutume, art. 17 du tit. 1 4 , s’explique ainsi : « E t
« saisissent lesdites donations et dispositions apposées èsdits
« deux contrats, et chacun d’iceux au profit des contrac
ta tans ledit mariage et association, et descendans d’eux
« tant seulement. »
Ce sont ces dernières expressions qui ont fait naître la
question de savoir, si y ayant des enfans d’un mariage
postérieur, ils n’éloient pas exclus par ceux du premier
mariage.
Mais quand on veut se pénétrer de l’esprit de cet article
et des articles 20 et 2 6 , qui sont rédigés à peu près de
même, on est convaincu que la loi, en apposant cette par
ticule limitative tant seulement > n’a eu en vue que d’ex
clure les collatéraux , et cela étoit nécessaire dans une cou
tume qui exclut les aseen dans de toutes successions de leurs
enfans, même des biens par eux donn.es, s’il n y a pas3e
stipulation de réversion.
E n disant, et descendans d'eux tant seulement , c’est
comprendre tous les descendans des mariés qui pourroient
être tous deux institués, ou de celui qui le seroit, s’il n y
en avoit qu’un ; et il est impossible de trouver, dans cette
vocation générale , la distinction entre les enfans de ce
■mariage et ceux de mariages postérieurs.
Telle est aussi la doctrine du célèbre Dumoulin dans sa,
note sur cet article : E x quocumque matrimonio. L •
placet.ff. de Ub. et post/ium. quia non fit hic restrictio ad
descendentes ejusdem m alrïm oniincc in frà ,
2 5. et z6 ,
�(i6)
'
nec i n f §. i , tit. i 5. C’est aussi ce qui a été jugé eii thèse
par Je fameux arrêt du 9 juillet 1 6 3 7 , rendu dans la fa
mille Chabanes, sur la plaidoirie de Lemaître.
Il est vrai que cette opinion a été attaquée par le dernier
commentateur de la coutume, sur cet art. 17 • il a embrasse
l’opinion qui tend à exclure les enfans du second mariage,
lorsqu’il en l'este du premier.
Mais quelque déférence que l’on puisse avoir pour l’avis
de ce commentateur, il est impossible de l’adopter sans
heurter les idées de raison et de justice. Il est aussi réduit
à combattre la décision de Dumoulin, qui est précise, et
d’une multitude d’auteurs qui l’ont soutenue; il combat
l ’application à l’espèce de l’arrèt de la famille Chabanes.
Mais quand on a Iules éloquens plaidoyers de Lem aître,
qu’on trouve à la fin de ses œuvres avec l'arrêt, on est
vraiment étonné du doute élevé à cet égard.
D'ailleurs une réflexion seule prouve combien il seroit
injuste et ridicule de déférer l'institution contractuelle aux
seuls enfans du premier lit , à l’exclusion de ceux d’un
second. Il faudroit, dans celte hypothèse , considérer tous
les enfans du premier lit, dont le père auroit prédécédé
leur aïeul, comme étant les héritiers directs de cet aïeul,
et réduire tous les enfans du second lit à partager entr’eux
la légitime quidevoitreveniraupère, proportionnellement
à ce qu’ils amenderoient dans sa succession : c’est aussi ce
quia'été observé par le dernier commentateur de la cou
tume, comme étant une suite de son opinion. « Dans ce cas,
« dit-il, page 2 9 7, où une institution d’héritier pareille est
« faite par un ascendant, les enfans du second lit y auroient
« néanmoins une légitime, à concurrence de la portion
�«
«
k
r
C *7 )
pour laquelle ils représentent leur père ; mais si Tins
titution d’héritier étoit faite par un collatéral ou par
un étranger, ils n’auroient absolument rien à y prétendre. »
Il résulterait donc de là , qu’un fils institué, mourant
avant son père, laissant un enfant du premier mariage,
et six du second, l’enfant du premier lit auroit dans la
succession de son aïeul, d'abord cinq sixièmes de son
chef, ju re su o , ensuite le septième du sixième revenant
au père pour la légitime de droit, et que chacun des
autres six enfans auroit un septième du même sixième;
c’est-à-dire, un quarante - deuxième. A uro it-o n jamais
le courage d’introduire une jurisprudence aussi bar
bare ?
Ainsi, en se résumant, Pierre Taplianel a fait une dis
position valable ; il n’a fait que disposer de l'effet de
l’institution déjà faite à son profit; il a pu le faire, et
cette institution s’étant ouverte sur l u i , sa disposition
subsiste.
Cette disposition n’est point l’ouvrage de Noël Taphanel : celui-ci n’a porté aucune atteinte à l’institution qu’il
avoit déjà faite ; il n’y a apposé aucune condition. Il n y
avoit aucun intérêt. L a vocation des enfans tant du second
que du premier m ariage, est l’ouvrage de Pierre Taphanel. La présence du père ne vicie point cette vocation.
Il a pu d’ailleurs n’entrer dans cette vocation, que pour
s’engager à ne pas faire passer aux enfans du premier
�. ....................... ......
( >B )
,
,
mariage, préférablement à ceux du second, le quart qui
étoit disponible en sa personne.
1
En fin , si tout ce qu’on vient de dire auroit dû avoir
lieu, même sous l’ancien régim e, comment élèveroit-on
du doute,-d’après les nouvelles lois q u i, en suivant le
vœu de la nature, ont ramené l’égalité entre les enfans.
S’il y eût eu du doute autrefois, ce doute devroit aujour
d’hui disparoîtrç.
‘
Il ne reste qu’à dire un. mot relativement à ïa por
tion qui revient aux citoyennes Suzanne et Renée T a
phanel.
Il faut, à cet ‘égard, ne point perdre de vue les termes
dticontrat de mariage du 3 mai Ï748.— «Et en ce cas seront
« tenus de choisir des enians tant du premierque du second
a lit, en nombre égal, lesquels seront institués héritiers
« par portions égales , et tous les autres enfans tarit de l’un
« que de l’autre lit, constitués par égales [sortions ■».
, Il résulte de cette c l a u s e , qu’il n’étoit pas interdit à
Pierre Taphanel d’instituer Nicolas Taphanel pour son
héritier, c o m m e il l’a fait, mais qu’il ne pouvoit l’instituer
que pour moitié; qu’il devoit réserver l’autre moitié à un
enfant du second lit : et dès qu’ il n’a pas choisi un héritier
pour cette m oitié, parmi les enfans du second lit, tous
doivent toncourir à recueillir cette moitié.
Gela étant, Nicolas Taphanel doit avoir la •moitié de
la succession , en faisant face h la légitime de Marie-Anne
Taphanel,«asœur germaine; et Suzanncet Renée Taphanel
doivent avoir entr’elles l’autre moitié: ce qui fait, pour
�19
chacune, un quart, ainsi qu’elles y ont conclu par leur
exploit du 23 pluviôse an 5.
à R io m , le 8 prairial, an 6 de la r é p u
blique française, une et indivisible.
D
élibér é
GREN IER.
L a présente consultation souscrite et approuvée par les
citoyens A N D R A U D , T O U T T É E , B E R G I E R
et B O I R O T , jurisconsultes.
A RlOM, de rimprimerie de L a n d r i o T , seul imprimeur
r
du Tribunal d’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Aymet, Jacques Bénigne. An 6?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Andraud
Touttée
Bergier
Boirot
Subject
The topic of the resource
estimation
successions
experts
Description
An account of the resource
Mémoire et consultation, pour Jacques-Bénigne Aymet, notaire public, Suzanne Taphanel, son épouse ; Jean Siaud, et Renée Taphanel, son épouse, appelans ; contre Nicolas Taphanel, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 6
1739-Circa An 6
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
19 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0154
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Ardes (63009)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53695/BCU_Factums_M0154.jpg
estimation
experts
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53926/BCU_Factums_M0731.pdf
3f6724d8dfd3525f6b9b75295ec520c7
PDF Text
Text
CONSULTATIONS.
�CONSULTATIONS.
L
e
c o n se il s o u s s ig n é
, qui a pris lecture
du mémoire consulter pour le citoyen Pierre A u d ig ie r,
notaire public, habitant de la commune de R ochefort,
Contre Etienne Prugnard , et Marie Demurat ? sa
fe m m e ,
E s t i m e que le citoyen Audigier doit seulement res
tituer les deniers dont Granet est débiteur envers les héri
tiers de sa femme, conformément à son contrat de vente;
et que la propriété des immeubles adjugés par sentence
du 3 1 août 178 0 , appartient incontestablement au citoyen
Audigier , subrogé aux droits de Granet.
Quel seroit donc le prétexte d’Étienne Prugnard, et
de Marie Demurat, sa femme, pour faire rapporter ces
héritages à la succession de Laurent Gendraud ? Seroit-ce
parce qu’ils voudraient prétendre que l’adjudication a été
A 2
�( 4)
faite avec les deniers dotaux de Marie Gendi’aud ? Mais
on sait que l’acquisition, faite par le mari avec les deniers
dotaux de la femme, n’est pas dotale à la femme, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers.
Seroit-ce parce que la créance qui a conduit à l’adju
dication étoit une créance commune aux héritiers de
Je a n Gendraud, père de Marie , femme Granet ? Mais
l’adjudication a été faite à Jean-Baptiste Granet, en son
nom et pour lui. L e mari n’achète uxorio nom ine , qu’au
tant qu'il acquiert une portion indivise dans les biens
de sa fem m e, ou par la voie de la licitation, ou à titre
de cession. I c i, il n’y a d’indivis que des deniers ; le m ari,
qui a acheté avec ces deniers, ne doit autre chose que
la restitution des deniers. E n fin , le mari a vendu ces
memes immeubles qui lui avoient été adjugés; et, quand
il auroit acquis uxorio nom ine , il auroit toujours eu la
faculté d’aliéner.
L a prétention d’Etienne Prugnard et de Marie Demurat est donc une véritable chimère. On va le démon
trer , en rappelant quelques principes de la matière, et
en analisant succinctement les faits qui donnent lieu à la
question.
Il paroît que Laurent Gendraud avoit trois filles : Marie
Gendraud, mariée à Jean-Baptiste Granet, représentée
aujourd’ hui par le citoyen A u d igier; Jacqueline Gen
drau d, femme D em u rat, d’où est issue Marie Dem urat,
épouse d’ Etienne P ru g n ard \ et Catherine Gendraud, ma
riée à Michel Labonne.
La succession de Laurent Gendraud étoit créancière
d'Antoine Mercier. Ce dernier mourut sans avoir payé
�. ( 5 ?
les sommes dont il étoit débiteur ; et sa succession fut
répudiée. Jcan-Baptiste Granet fit liquider et adjuger la
créance due à la succession de Laurent Gendraud, contre
le curateur à la succession répudiée d’Antoine M ercier;
il en poursuivit le recouvrement , et fut obligé de passer
la saisie et vente des biens de la succession débitrice.
L e 3 1 août 17 8 0 , sentence de la ci-devant sénéchaussée
d A u v erg n e, qui fait étrousse et adjudication des immeu
bles saisis, à M. A ch on , procureur, pour lui ou son m ieux,
moyennant la somme de 1.200 francs. L e même jour de
la sentence d’adjudication, Achon fait sa déclaration de
m ieux, au profit de Jean-Baptiste G ra n e t, en son nom.
Granet notifia la sentence d’adjudication , toujours eji
son nom ; la déposa au bureau des hypothèques, et obtint
personnellement des lettres de ratification.
L e i 5 septembre 17 8 0 , Marie Gendraud, et Granet,
son mari , formèrent contre Marie De mura t , fille de
Jacqueline Gendraud, la demande en partage des biens
de Laurent Gendraud, père et aïeul commun ; et ceux-ci
imaginèrent de demander le rapport au partage, des biens
vendus sur le curateur à l’hoirie M ercier, et adjugés à
Granet.
Granet soutint qu’il n’étoit pas tenu à ce rapport; qu’il
ne devoit autre chose à ses cohéritiers que le prix de son
adjudication. Il y eut même erreur en ce poin t, parce
que la créance due à la succession de Gendraud étoit infé
rieure au prix de l’adjudication ; et il ne devoit que le
rapport du montant de la créance.
Les choses ont resté en cet état : m ais, le 25 prairial
an 2 Granet a vendu au citoyen Audigier les héritages
A
3
�( 63
qui lui avoient été adjugés, provenans de l’hoirie M er
cier. Cette vente a été faite moyennant la somme de 1,700 f.
et, en outre , « A la cliai’ge par l’acquéreur, de payer en
« l’acquit du vendeur, à Etienne Prugnard et à Marie
« D e m u r a t , sa femme, ce qui restoit dû du tiers seule« m ent de la créance dont Granet est débiteur envers
« les ci-dessus dénommés , et qui a donné lieu à la vente
« judiciaire des biens. Et attendu, est-il d it, qu’il y a
« contestation pour x’aison de cette créance et autres pré« tentions, Granet subroge Audigier , tant à l’effet du
« procès, qu’à tous les droits en résultant pour lui. Audi« gier est chargé d’en reprendre les poursuites, et de faire
« prononcer sur le tout. »
C ’est Marie Demurat et Prugnard qui ont repris les
poursuites. Audigier est intervenu , et a offert,ainsi que
l’avoit fait G ran et, de rapporter 1,200 francs, prix de
l’adjudication des biens Mercier. Mais Prugnard et sa
femme ont refusé ces offres; et, comme Marie Gendraud,
femme Granet, et Françoise Granet, sa fille, sont décé
dées; que Marie D e m u ra t leur a succédé; elle insiste sur
le désistement des immeubles adjugés à Granet.
Il s’agit de prouver que cette prétention est sans fon
dement.
On établira, i°. Que l’acquisition, faite p a rle mari
avec des deniers dotaux, n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers ; 20. que l’ad
judication étant faite en justice appartient au mari seul ;
3 0. que le mari, dans l’espèce, ne peut avoir acquis uxorio
nominc.
�( 7 ')
PREMIÈRE
PROPOSITION.
Il est de principe généralement reconnu , que celui qui
achète des deniers d’autrui, acquiert pour son compte, et
non pour le maître des deniers. F a b e v , sur le code ,
livre I V , titre S i quis alteri vel sib i, def. X , dit même
que quoique la chose achetée ait été livrée à celui qui a
fourni les deniers , il n’en est pas moins tenu de rendre
tous les fruits qu’il a perçus, à l’acquéreur. Mazuer, au
titre D e vendit, nomb. 23 et 3 8 , enseigne également que
la chose achetée appartient ù celui au nom duquel l’acqui
sition a été faite, et non à celui qui a fourni les deniers de
la vente. Telle est la disposition de la loi S i ea pecunia , V I,
au code D e rei vendit.
P ar une suite de ce principe, lorsque le mari achète
avec les deniers dotaux de sa femme, il acquiert pour lui,
et non pour sa femme, à qui il n’est jamais dû que la resti
tution des deniers. C’est ce qu’enseigne Bacquet, traité des
droits de justice, tome I er. chap. 2 1 , n°. 302 et suivans,
et M. d’Aguesseau dans ses plaidoyers, tome 2 , page 643,
Despeisses, tome
page 5oo,nom b. 1 1 , s’exprime ainsi :
a Lorsque la dot a été constituée en deniers, bien que
« desdits deniers le mari en ait acheté un fonds, néan« moins elle doit etre rendue en deniers. Il n’est pas au
« pouvoir de la femme de contraindre son mari ou ses
« héritiers de lui rendre le fonds acheté de ses deniers,
« puisqu’il n’est pas dotal. Pareillement, continue De>« peisses, il n'est pas au pouvoir du mari de bailler
« ledit fonds, contre la volonté de sa femme même.
�«
«
«
a
«
«
«
«
«
«
«
«
«
( 8 )
Bien que par le même contrat de mariage, par lequel
la constitution de dota été faite en deniers, il soit dit
qu’en payement des deniers constitués, le mari a pris du
père de sa femme certains fonds évalués à la somme
constituée; néanmoins le mari ou ses héritiers, après la
dissolution du mariage, ne sont pas recevables à vouloir
contraindre la femme à reprendre ledit fonds : mais ils
sont tenus de lui bailler lesdits deniers, ainsi que cela a
été jugé par un arrêt du 30 mars 1635. Toujours la
même raison demeure, que les deniers ont été constitués
en dot, et non pas un fonds : et si le mari a voulu prendre
en payement un fonds, il doit imputer cela à sa facilité,
qui ne doit pas être préjudiciable à sa femme. »
D ’après ces différentes autorités, qui sont encore dans
la raison, Marie Demurat et son mari ne peuvent réclamer
les immeubles adjugés à G ran et, quand bien même ils
auroient été acquis avec les deniers dotaux de la femme
Granet, puisque Granet a aclieté pour lui et en son nom ;
qu’il ne pourroit contraindre sa femme ou scs héritiers à
prendre ce fonds en payem en t. Il est donc juste alors qu'il
soit autorisé à conserver celte propriété.
On ne peut pas même dire, dans l'espèce particulière,
que Granet a employé exclusivement les deniers dotaux
de sa femme à cette acquisition. L a créance duc à l’hoirie
Mercier appartenoit à la succession Gendraud; la femme
Granet n’en amendoit qu’une portion; le prix de 1 adjudi
cation excède le montant de la créance : dès lors Granet a
employé à l’acquisition partie des deniers dotaux, partie
des deniers d’autrui, et partie des siens propres; ce qui est
une raison de plus pour que les immeubles adjugés lui
�(
9)
appartiennent, et qu’il ne soit pas tenu de les rapporter
au partage, ou de les restituer aux héritiers de sa femme. Il
ne doit autre chose que les deniers; sous ce point de v u e ,
la prétention de Marie Demurat et de son mari est donc
inadmissible.
SECONDE
PROPOSITION.
L ’adjudication des immeubles, ayant été faite en justice,
ne peut appartenir qu’à l’adjudicataire.
S’il n’a jamais été interdit au mari d’acheter pour lui avec
les deniers dotaux de sa femme, on doit, à plus forte
raison, regarder une adjudication judiciaire comme propre
au mari. On sait qu’il est interdit aux tuteurs et curateurs
d acquérir les biens de ceux dont ils ont l’administration.
Telle est la disposition de la loi In emptiojie, IV , §. Tutor
itli. au ff. D e contrahenda empt. S’il en étoit autrement, il
y auroit à craindre que bientôt les pupilles seroient op
primés par leurs tuteurs, qui s’empareroient, à vil p r i x ,
de tons les biens de leurs mineurs. Cependant si les biens
des mineurs se vendent en justice et aux enchères, alors le
tuteur peut s’en rendre adjudicataire, parce que, dans ce
cas, tout soupçon de fraude cesse, et qu’il est utile aux
pupilles qu’il y ait plusieurs enchérisseurs. C ’est ce qui
a élé jugé par un arrêt du 12 janvier 16 2 0 , rapporté par
T r o n ç3o n ,y sur Paris,* titre X V I , des criées, article C G G L IX .
O r, si le tuteur peut se rendre adjudicataire, en justice,
des biens de scs mineurs , à plus forte raison le mari, dont
l ’administration n’est pas aussi rigoureuse. Et ici le mari
ne s’est pas même rendu adjudicataire d’un bien apparie-
�( IO )
nant à sa fem m e, mais seulement de quelques immeubles
affectés et hypothéqués à une créance indivise entre sa
femme et ses cohéritiers. Il est donc personnellement adju
dicataire et propriétaire incoinmutable des immeubles
adjugés, sans autre charge que d’être tenu de rendre
compte de la créance, soit à sa femme, soit à scs cohéritiers.
TROISIÈME
PROPOSITION.
L e mari n’a pas acquis uxorio nom ine .
On dit communément au palais , et 011 tient comme
vérité certaine, que le mari qui achète une portion de biens
indivise avec sa femme, acquiert uxorio nom m e , cest-àd ir e , pour le compte de sa femme , et qu’il ne peut
réclamer autre chose que les deniers qu’il a fournis, pour
l’acquisition. Quoique personne ne semble douter de ce
principe, lorsqu’on veut remonter à la source, on trouve
un très-pelit nombre d’autorités pour l’appuyer. On p eu t,
à la vérité, l’induire de la disposition de la loi unique, au
code Tie rei uxoriœ actione , qui, expliquant tous les cas
de restitution de dot, semble dire qu'un fonds commua
entre la femme et un autre, ayant été licité et adjugé au
m a r i, celui-ci est obligé de le restituer tout entier à sa
femme. Dumoulin, tome I er. titre I ur. des fiefs, page 3 0 3 ,
glose ï ere. nombre 48, examine si le retrait féodal, exercé
par le mari à cause de sa femme, est un conquèt de commu
nauté, ou s’il doit appartenir i\ la femme. Il décide qu’il
appartient exclusivement à la femme.
nota , quod
j'eu d w n ^ u re et ¡ío test a te fc od a l i à viro retentuw, 7ion cenaîtitr inter conqueslus vel acquestus , ncc ejjficitur com-
�( 11 )
mune inter conjuges , sed proprium solius uxoris à
cujus propriis dependet. Quoniam v i retractus feodalis
unitur et incorporatur m en sœ fiu d i dominantis , nec in
eo habel maritus n isi usumfructam et adm inistrationem, sicut in rehquis propriis uxoris. Tamen soluto
mcitrimonio media p a rsp retii est legalium impensarum
solutarwn à marito , debent ipsi vel cjus hceredibus
restitui.
Il résulte de cette autorité, que lorsque la femme est
propriétaire du fief dominant, et que le mari exerce le
retrait féodal, ce qu’il a acquis par la voie de ce retrait
appartient à la femme et non à lui, et que le mari ou ses
héritiers ne peuvent réclamer que la moitié du prix dans
le pays de communauté.
C’est en raisonnant par analogie, et d’après cette opinion,
qu’on a introduit dans notre droit la maxime que le m ari,
qui achetoit une portion indivise dans les biens de sa
femme , acquéroit pour la femme et non pour lui. C’est
ainsi que l’a expliqué M r. l’avocat général Bignon, lors
d’un arrêt du 22 décembre 16 3 9 , rapporté dans Bardet,
tome 2. Dans l’espèce de cet arrêt, une femme étoit pro
priétaire du quart d’ une maison située à Paris. L e mari
avoit acquis les autres trois quarts à titre de licitation et de
cession. Après la mort de la mère, le fils exerça le retrait
des trois quarts acquis par son père. L e père soutenoit avoir
agi pour lui, et prétendoit d’ailleurs que le fils étoit non
recevable à exercer le retrait, parce que le délai en étoit
expiré. Mais, sans examiner ce point, M r. l’avocat général
établit qu’un fonds commun entre la femme et un autre,
ayant été licité et vendu au m ari, il étoit obligé de le resti-
�( 12 )
lucr tout entier à sa femme. Cette maxime, ajoute-t-il, fit
dii-e autrefois à un empereur quel’on sollicitoit de répudier
sa femme dont il tenoit l’empire : S i diniittamus u xorem ,
reddamus et imperium. En conséquence la maison fut
adjugée en entier au fils.
M ais, en partant de ce principe, on voit cjue le mari
n’achète pour sa fem m e, qu’autant qu’il acquiert une por
tion indivise avec les cohéritiers, parla voie de la licitation
ou autrement. Ici les immeubles adjugés ne proviennent
pas de la femme ni d’une succession indivise; ce sont des
immeubles étrangers à la succession. Granet n’a fait autre
chose que poui’suivre le recouvrement d’une créance com
mune, Pour y parvenir , il s’est vu obligé de faire saisir et
vendre les biens du débiteur ; il s’en est rendu adjudicataire
personnellement ; il a fait, en cela, le bien de la succession ,
en faisant rentrer la créance; il a rempli son objet; mais il
n’est pas tenu de rendre l’immeuble qu’il a acquis. Il n’est
ici qu'un acquéreur étranger; il n’a fait que ce que tout
autre enchérisseur auroit pu faire : et comme on ne pourroi t pas demander à un enchérisseur étranger la restitution
des immeubles adjugés, de même 011 ne peut les demander
au mari q u i, en ce point, est étranger à la succession de sa
femme.
On ne peut pas étendre une maxime rigoureuse. Pour
que le mari acquière uxorio nom ine , il faut lui en sup
poser l’ intention ou la nécessité. Celte intention ou cette
nécessité ne peut se présumer que lo rsq u ’il s’agit d’un
bien indivis entre sa femme ou ses cohéritiers. Aucune
de ces circonstances ne se rencontre dans l'espèce particu
lière: point d’indivision d’immeubles, inlenlion bien ma-
�( 1 3 )
nifestée par le mari d’acquérir pour lu i, adjudication en
son nom personnel ; signification, dépôt, obtention de
lettres de ratification, toujours en son nom personnel :
donc il n’a acquis que pour lu i, et non pour sa femme.
Il a donc pu transmettre cette propriété à un tiers, puis
qu’il n’a achete que pour lui. Eût - il acquis uxorio nomine , il eût môme été le maître de vendre. D ès-lors,
le citoyen Audigier, subrogé aux droits de Granet, n’a
rien à redouter de la demande de Marie Demurat et son
mari : leur prétention est exagérée, et contraire à tous
les principes du droit.
Délibéré par les anciens jurisconsultes soussignés, à
Riom, le 25 ventôse an n .
PAGES.
ANDRAUD.
L E S O U S S IG N É , qui a vu la consultation ci-dessus,
et des autres parts, EST ABSOLUMENT DU MÊME A v i s ,
et par les mêmes raisons.
L a demande formée par la femme P rugnard, est d’au
tant plus déplacée, qu’en supposant qu’il eût acheté les
immeubles dont il s’ag it, uxorio n o m in e , ce qui n’est
Pas, il n’y a pas de sens de prétendre qu’il a acheté pour
sa belle-sœur.
D élib éré à Clermont-Ferrand , le I er. germ inal an n .
B
0
IR
0
T.
�C *4 )
L E J U R I S C O N S U L T E A N C IE N , S O U S S I G N É ,
e s t d u MÊME A v i s , et par les mêmes raisons.
L a i ere. section du tribunal civil de Riom , présidée
par le citoyen Bonarm e, a poussé plus loin la rigueur des
principes en cette matière ; car elle a jugé en principe,
en messidor au 4 , ainsi que l’a rapporté le défenseur
officieux de l’une des parties, que le mari qui achetait
des biens indivis avec sa fem m e, n’acquéfoit pas uxorio
nom ine, à moins que l’acte ne le portât expressément,
mais bien pour son compte personnel. On auroit de la
peine à adopter cette ju risp ru d en ce qui est contraire aux
principes; m a i s , dans l’espèce des parties, il ne peut y
avoir de doute que l’adjudication dont il s’agit ne doive
profiter à l’adjudicataire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le I er. germinal an 1 1 .
D A R TIS-M A R CILLAT.
L E J U R I S C O N S U L T E S O U S S IG N É e s t d u m ê m e
A V IS , par les mêmes raisons ; et il ne voit pas com
ment il seroit possible de dire rien de raisonnable pour
l’opinion contraire.
Délibéré a Clermont-Ferrand, le 4 germinal an n BERG IER.
�( i5 )
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , en adoptant les principes
ci-dessus développés, n’y ajoutera qu’une réilexion. A u
moment de la mort de Laurent Gendraud, père commun
de la mère de la femme Prugnard et de la femme Granet,
il n’existoit dans sa succession, outre ses biens immeubiesj qu’une créance de 1,200 fr. due par Mercier.
En se mariant, les filles de Gendraud se sont consti
tué cette créance. Il n’y a donc jamais eu que cette somme
qui fût dotale. Les poursuites, et l’adjudication pronon
cée au profit de Granet, n’ont pu avoir la force d’im
primer le caractère de dotalité i\ des immeubles acquis
par G ranet, en son nom personnel ; pour opérer la dotaü t é , il auroit fallu, ou que les immeubles eussent fait
Partie de la succession du père commun , ou qu’ils eussent
été acquis en remplacement d’un fonds dotal aliéné.
O r , dans l'espèce, les immeubles ne proviennent ni
de la succession de Laurent Gendraud, ni ne servent au
remplacement d’un fonds dotal aliéné.
Que doit Granet, adjudicataire? le rajiport du prix de
l’héritage affecté à cette créance. En supposant qu’il se fût
trouvé plusieurs créanciers hypothécaires, et que quel
ques-uns eussent primé les héritières de Laurent Gendraud,
dira-t-on que l’adjudicataire auroit dû le rapport du prix
aux créanciers premiers en hypothéqué; et qu a 1 égard
des filles Gendraud, il étoit tenu au rapport de la chose.
Son sort ne sauroit s’aggraver par la qualité de mari; e t,
�( 16 )
dans tous les cas, il ne doit, comme tout autre adju
dicataire , que le prix devenu le gage de cette créance.
Délibéré à Clerm ont-Ferrand, le
5
germinal an 1 1 .
MAUGUE,
A. R I O M ; de ¡’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d’appel. — A n 1 1 .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Audigier, Pierre. An 11]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Pagès
Boirot
Dartis-Marcillat
Bergier
Maugue
Subject
The topic of the resource
successions
créances
immeubles acquis uxorio nomine
Description
An account of the resource
Consultations. [Citoyen Pierre Audigier, notaire public, habitant de la commune de Rochefort, contre Étienne Prugnard, et Marie Demurat, sa femme]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
1780-An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0731
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0732
BCU_Factums_M0238
BCU_Factums_M0239
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53926/BCU_Factums_M0731.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
immeubles acquis uxorio nomine
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/5/53737/BCU_Factums_M0238.pdf
abd7d20643b359877cf6ec4e81a233f6
PDF Text
Text
C O N S U L T A T IO N S .
�CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture
du m ém oire à consulter pour le citoyen Pierre Audigier ,
notaire p u b lic , habitant de la commune de R o ch e fo rt,
Contre Étienne Prugnard , et Marie D em u rat, sa
fe m m e ,
'
que le citoyen A u digier doit seulement res
tituer les deniers dont Granet est débiteur envers les héri
tiers de sa fem m e, conformément à son contrat de vente ;
et que la propriété des immeubles adjugés par sentence
du 31 août 1780, appartient incontestablement au citoyen
E stim e
Audigier , subrogé aux droits de Granet.
Quel seroit donc le prétexte d’Étienne Prugnard, et
de Marie Dem urat, sa fem m e, pour faire rapporter ces
héritages à la succession de Laurent Gendraud ? Seroit-ce
parce qu’ils voudroient prétendre que l'adjudication a été
A 2
�..
.
(4 )
.
.
faite avec les deniers dotaux de Marie Gendraud ? Mais
on sait que l’acquisition, faite par le mari avec les deniers
dotaux de la fem m e, n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers.
Seroit-ce parce que la créance qui a conduit à l’adju
dication étoit une créance commune aux héritiers de
Jean G endraud, père de Marie , femme Granet ? Mais
l’adjudication a été faite à Jean-Baptiste Granet, en son
nom et pour lui. L e mari n’achète uxorio nom ine , qu’au
tant qu’il acquiert une portion indivise dans les biens
de sa fem m e, ou par la voie de la licitation, ou à titre
de cession. I c i, il n’y a d’indivis que des deniers ; le m ari,
- qui a acheté avec ces deniers, ne doit autre chose que
la restitution des deniers. E n fin , le mari a vendu ces
„mêmes immeubles qui lui avoient été adjugés; et, quand
il auroit acquis uxorio nom ine , il auroit toujours eu la
faculté d’aliéner.
La prétention d’Etienne Prugnard
murat est donc une véritable chimère.
trer , en rappelant quelques principes
en analisant succinctement les faits qui
question.
et de Marie D eOn va le démon
de la matière, et
donnent lieu à la
Il paroît que Laurent Gendraud avoit trois filles: Marie
G en draud, mçiriee Jean-Baptiste Granet, représentée
aujourd’hui par le citoyen A u d ig ie rj Jacqueline Gen
draud , femme D e m u r a t, d’où est issue Marie D em urat,
épouse d’ Etienne Prugnard • et Catherine Gendraud, ma
riée à Michel Labonne.
La succession de Laurent Gendraud étoit créancière
d’Antoine Mercier. Ce dernier mourut sans avoir payé
�(
5 )
les sommes dont il étoit débiteur ; et sa succession fut
répudiée. Jcan-Baptiste Granet fit liquider et adjuger la
créance due à la succession de Laurent G en draud, contre
le curateur à la succession répudiée d’Antoine M ercier;
il en poursuivit le recouvrem ent, et fut obligé de passer
à la saisie et vente des biens de la succession débitrice.
L e 31 août 1780, sentence de la ci-devant sénéchaussée
d’A u v e r g n e , qui fait étrousse et adjudication des immeu
bles saisis, à M .A c h o u , procureur, pour lui ou son m ieux,
moyennant la somme de 1.200 francs. L e m ême jour de
la sentence d’adjudication, Aclion fait sa déclaration de
m ieu x , au profit de Jean-Baptiste G r a n e t, en son nom.
Granet notifia la sentence d’adjudication , toujours en
son nom ; la déposa au bureau des hypothèques, et obtint
personnellement des lettres de ratification.
L e i 5 septembre 1780, Marie Gendraud, et G ranet,
son m a r i , formèrent contre Marie Dem urat , fille de
Jacqueline G en draud, la demande en partage des biens
de Laurent Gendraud, père et aïeul commun ; et ceux-ci
imaginèrent de demander le rapport au partage, des biens
vendus sur le curateur à l’hoirie M ercie r, et adjugés à
Granet.
Granet soutint qu’il n’étoit pas tenu à ce rapport; qu’il
ne devoit autre chose ù ses cohéritiers que le prix de son
adjudication. Il y eut même erreur en ce p o in t, parce
que la créance due à la succession de Gendraud étoit infé
rieure au prix de l’adjudication ; et il ne devoit que le
rapport du montant de la créance.
Les choses ont resté en cet état : mais , le a 5 prairial
an 2 Granet a vendu au citoyen Audigier les héritages
A 3
�.
.
.
.
( 6 )
..
qui lui avoient été adjugés, provenans de l’hoirie M er
cier. Cette vente a été faite moyennant la somme de 1,700 f.
e t, en outre , « A la charge par l’acquéreur, de payer en
« l’acquit du vendeur, à Etienne Prugnard et à Marie
« D em urat, sa fem m e, ce qui restoit dû du tiers seule« ment de la créance dont Granet est débiteur envers
« les ci-dessus dénommés , et qui a donné lieu à la vente
« judiciaire des biens. Et attendu, est-il d it , qu’il y a
« contestation pour raison de cette créance et autres pré• tentions, Granet subroge Audigier , tant à Feffet du
« procès , qu’i'i tous les droits en résultant pour lui. Audi« gier est chargé d’en reprendre les poursuites, et de faire
« prononcer sur le tout. »
C ’est Marie Demurat et Prugnard qui ont repris les
poursuites. Audigier est intervenu, et a offert,ainsi que
l’avoit fait G ran et, de rapporter 1,200 francs, prix de
l’adjudication des biens Mercier. Mais Prugnard et sa
femme ont refusé ces offres; et, comme Marie G endraud,
femme G ran et, et Françoise G ran et, sa fille, sont décé
dées; que Marie Demurat leur a succédé; elle insiste sur
le désistement des immeubles adjugés à Granet.
II s’agit de prouver que cette prétention est sans fon
dement.
1
On établira, i ». Q ue l’acquisition, faite p a r le mari
avec des deniers d o ta u x , n’est pas dotale à la fem m e, et
qu’elle ne peut réclamer que les deniers ; 20. que l’ad
judication étant faite en justice appartient au mari seul ;
30. que le mari, dans l’espèce, ne peut avoir acquis uxorio
nomme.
�( 7)
PREMIÈRE
PROPOSITION.
Il est de principe généralement reconnu, que celui qui
achète des deniers d’autrui, acquiert pour son com pte, et
non pour le maître des deniers. F a b e r , sur le code ,
livre I V , titre S i quis alteri vel s ib i , def. X , dit même
que quoique la chose achetée ait été livrée à celui qui a
fourni les deniers , il n’en est pas moins tenu de rendre
tous les fruits qu’il a perçus, à l’acquéreur. M azuer, au
titre D e vendit, nomb. 23 et 38, enseigne également que
la chose achetée appartient à celui au nom duquel l’acqui
sition a été faite, et non à'celui qui a fourni les deniers de
la vente. Telle est la disposition de la loi S i eapecunia , V I,
au code D e rei vendit.
Par une suite de ce principe, lorsque le mari achète
avec les deniers dotaux de sa fem me, il acquiert pour lui,
et non pour sa femme, à qui il n’est jamais dû que la resti
tution des deniers. C ’est ce qu’enseigne Bacquet, traité des
droits de justice, tome I er. chap. 2 1, n°. 302 et suivans,
et M. d’Aguesseau dans ses plaidoyers, tome 2, page 643.
Despeisses, tome 1 e1'. page 5o o ,n o m b . 1 1 , s’exprime ainsi :
« Lorsque la dot a été constituée en deniers, bien que
« desdits deniers le mari en ait acheté un fonds, ncan« moins elle doit être rendue en deniers. Il n’est pas au
« pouvoir de la femme de contraindre son mari ou ses
« héritiers de lui rendre le fonds acheté de ses deniers,
« puisqu’il n’est pas dotal. P a r e i l l e m e n t , continue D e « peisses, il n’est pas au p o u v o i r du mari de bailler
t. ledit fonds, contre la volonté de sa femme même.
A 4
�•
A
( 8 )
•
« Bien que par le m ême contrat de mariage, par lequel
« la constitution de dot a été faite en deniers, il soit dit
« qu’en payement des deniers constitués, le mari a pris du
cf père de sa femme certains fonds évalués à la somme
« constituée; néanmoins le mari ou ses héritiei’S, après la
« dissolution du m ariage, ne sont pas recevables à vouloir
« contraindre la femme à reprendre ledit fonds : mais ils
« sont tenus de lui bailler lesdits deniers, ainsi que cela a
« été jugé par un arrêt du 30 mars 1635. Toujours la
« même raison demeure, que les deniers ont été constitués
«r en d o t, et non pas un fonds : et si le mari a voulu prendre
« en payement un fonds, il doit imputer cela à sa facilité,
« qui ne doit pas être préjudiciable à sa femme. »
D ’après ces différentes autorités, qui sont encore dans
la raison, Marie D e m u ratetso n mari ne peuvent réclamer
les immeubles adjugés à G r a n e t, quand bien même ils
auroient été acquis avec les deniers dotaux de la femme
Granet, puisque Granet a acheté pour lui et en son nom ;
qu’il ne pourroit contraindre sa femme ou ses héritiers à
prendre ce fonds en payement. Il est donc juste alors qu’il
soit autorisé à conserver cette propriété.
On ne peut pas même dire, dans l'espèce particulière,
que Granet a employé exclusivement les deniers dotaux
de sa femme à cette acquisition. La créance due à l'hoirie
Mercier appartenoit à la succession Gondraud; la femme
Granet n’en amendoit qu’une portion; le prix de l’adjudi
cation excède le montant de la créance : dès lors Granet a
employé à l’acquisition partie des deniers dotaux, partie
des deniers d’autrui, et partie des siens propres; ce qui est
une raison de plus pour que les immeubles adjugés lui
�( 9)
appartiennent, et qu’il ne soit pas tenu de les rapporter
au partage, ou de les restituer aux héritiers de sa femme. Il
ne doit autre chose que les deniers ; sous ce point de v u e ,
la prétention de Marie Demurat et de son mari est donc
inadmissible.
'
SECONDE
PROPOSITION.
L ’adjudication des immeubles, ayant été faite en justice j
ne peut appartenir qu’à l’adjudicataire.
S’il n’a jamais été interdit au mari d’acheter pour lui avec
les deniers dotaux de sa fe m m e , on d o it , à plus forte
raison, regarder une adjudication judiciaire comme propre
au mari. O n sait qu’il est interdit aux tuteurs et curateurs
d’acquérir les biens de ceux dont ils ont l’administration.
Telle est la disposition de la loi In emptLone, I V , §. Tutor
nït. au ff. D e contrahenda empt. S’il en étoit autrement, il
y auroit à craindre que bientôt les pupilles seroient op
primés par leurs tuteurs, qui s’empareroient, à vil prix ,
de tous les biens de leurs mineurs. Cependant si les biens
des mineurs se vendent en justice et aux enchères, alors le
tuteur peut s’en rendre adjudicataire, parce q u e , dans ce
cas, tout soupçon de fraude cesse, et qu’il est utile aux
pupilles qu’il y ait plusieurs enchérisseurs. C ’est ce qui
a été jugé par un arrêt du 12 janvier 1620, rapporté par
T ro n ç o n , sur Paris, titre X V I , des criées, article C C C L IX .
O r , si le tuteur peut se rendre adjudicataire, en justice,
des biens de ses m in eu rs, à plus forte iviison le mari, dont
l'administration n’est pas aussi rigoureuse. E l ici le mari
île s’est pas même rendu adjudicataire d u n bien apparte-
�.
( 10 )
.
nant à sa fem m e, mais seulement de quelques immeubles
affectés et hypothéqués à une créance indivise entre sa
femrne et ses cohéritiers. Il est donc personnellement adju
dicataire et propriétaire incommutable des immeubles
adjugés, sans autre charge que d’être tenu de rendre
compte de la créance, soit à sa femme, soit à ses cohéritiers.
TROISIÈME
PROPOSITION.
L e mari n’a pas acquis uxorio nom me .
O n dit communément au palais , et on tient comme
vérité certaine, que le mari qui achète une portion de biens
indivise avec sa fem m e, acquiert uxorio nom m e , c’est-àdire , pour le compte de sa femme , et qu’il ne peut
réclamer autre chose que les deniers qu’il a fournis pour
l ’acquisition. Quoique personne ne semble douter de ce
principe, lorsqu’on veut remonter à la source, on trouve
un très-petit nombre d’autorités pour l’appuyer. On p e u t,
à la vérité, l’induire de la disposition de la loi unique, au
code D e rei uxoriœ actione , q u i, expliquant tous les cas
de restitution de dot, semble dire qu’un fonds commun
entre la femme et un autre, ayant été licite et adjugé au
m a r i, celui-ci est obligé de le restituer tout entier à sa
femme. Dumoulin, tome Ier. titre Ier. des fiefs, page 303,
glose i ere. nombre 48, examine si le retrait féodal, exercé
par le mari à cause de sa fem me, est un conquit de commu
nauté, ou s’il doit appartenir à la femme. Il décide qu’il
appartient exclusivement à la femme. E t n ota , quod
j'cudwnyjure etpotestatefeodah à viro rétention,77on cen~
x'Uur inter conquestus vel acquestus, nec ejjicitur corn-’
�C ” )
mune inter conjuges ? sed propnw n sohus a x o n s à
cujus propriis dependet. Quomam vi retractus fco d a lis
unitur et incorporatur jnensŒfoudi dommcintis, nec in
eo habet maritus nisi iisumfructum et administrationem , sicut in reliquis propriis uxoris. Tarnen soluto
matrimonio media parspretii est legalium impensarum
solutarum à marito , debeht ¿psi vel ejus hœredibus
restitui.
Il résulte de cette autorité, que lorsque la femme est
propriétaire du fief dom inant, et que le mari exerce le
retrait féo d a l, ce qu’il a acquis par la voie de ce retrait
appartient â la femme et non à lui, et que le mari ou ses
héritiers ne peuvent réclamer que la moitié du prix dans
le pays de communauté.
C ’est en raisonnant par analogie, et d’après cette opinion,
qu’on a introduit dans notre droit la maxime que le m ari,
qui achetoit une portion indivise dans les biens de sa
fe m m e , acquéroit pour la femme et non pour lui. C ’est
ainsi que l’a expliqué M r. l’avocat général B ignon, lors
d’un arrêt du 22 décembre 1639, rapporté dans Bardet,
tome 2. Dans l’espèce de cet arrêt, une femme étoit pro-'
priétaire du quart d’une maison située à Paris. L e mari
avoit acquis les autres trois quarts à titre de licitation et de
cession. Après la mort de la m ère, le fils exerça le retrait
des trois quarts acquis par son père. L e père soutenoit avoir
agi pour lu i, et prétendoit d’ailleurs que le fils étoit non
recevable à exercer le retrait, parce que le délai en étoit
expiré. Mais, sans examinerce point, M r. l’avocat général
établit qu’un fonds commun entre la femme et un autre,
ayant été licité et vendu au m a ri, il étoit obligé de le resti-
�.
( 12 )
.
tuer tout entier à sa femme. Cette m axim e, ajoute-t-il, fit
dire autrefois à un empereur que l’on sollicitoit de répudier
sa femme dont il tenoit l’empire : S i dimittamus uxorem ,
reddamus et imperium. En conséquence la maison fut
adjugée en entier au fils.
M ais, en partant de ce principe, on voit que le mari
n ’achète pour sa fe m m e , qu’autant qu’il acquiert une por
tion indivise avec les cohéritiers, par la voie de la licitation
ou autrement. Ici les immeubles adjugés ne proviennent
pas de la femme ni d’une succession indivise; ce sont des
immeubles étrangers à la succession. Granet n’a fait autre
chose que poursuivre le recouvrement d’une créance com
mune. Pour y parvenir , il s’est vu obligé de faire saisir et
vendre les biens du débiteur ; il s’en est rendu adjudicataire
personnellement ; il a fait, en cela, le bien de la succession ,
en faisant rentrer la créance ; il a rempli son objet; mais il
n’est pas tenu de rendre l’immeuble qu’il a acquis. Il n’est
ici qu’un acquéreur étranger; il n’a fait que ce que tout
autre enchérisseur auroit pu faire : et comme on ne p ourroit pas demander à un enchérisseur étranger la restitution
des immeubles adjugés, de même 011 ne peut les demander
au mari q u i, en ce point, est étranger à la succession de sa
femme.
O11 ne peut pas étendre une maxime rigoui’euse. P ou r
que le mari acquière uxorio nom ine , il faut lui en sup
poser l’intention ou la nécessité. Celte intention ou cette
nécessité ne peut se présumer que lorsqu’il s’agit d’un
bien indivis entre sa femme ou ses cohéritiers. Aucune
de ces circonstances ne se rencontre dans l’cspèce particu
lière: point d’indivision d immeubles, intention bien ma-
�( i3 )
^
#
nifestée par le mari d’acquérir pour lu i, adjudication en
son nom personnel ; signification , d ép ô t, obtention de
lettres de ratification , toujours en son nom personnel :
donc il n’a acquis que pour lui, et non pour sa femme.
Il a donc pu transmettre cette propriété à un tiers, puis
qu’il n’a acheté que pour lui. Eût - il acquis uxorio no
mine , il eût même été le maître de vendre. Dès-lors ,
le citoyen A u d ig ie r, subrogé aux droits de G ran et, n’a
rien à redouter de la demande de Marie Demurat et son
mari : leur prétention est exagérée, et contraire à tous
les principes du droit.
Délibéré par les anciens jurisconsultes soussignés," à
R io m , le 25 ventôse an n .
PAGES.
ANDRAUD.
L E S O U S S I G N É , qui a vu la consultation ci-dessus,
et des autres parts, e s t AB S OL UME NT DU MÊME A V I S ,
et par les mêmes raisons.
L a demande formée par la femme P ru gn ard , est d’au
tant plus déplacée, qu’en supposant qu’il eût acheté les
immeubles dont il s’a g it, uxorio n om in e , ce qui n’est
pas, il n’y a pas de sens de prétendre qu’il a acheté pour
sa belle-sœur.
D élibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an n .
BOIROT.
�(
14
)
L E J U R I S C O N S U L T E A N C I E N , S O U S S IG N É ,
EST
DU
MÊME A V I S , et par les m ê m e s raisons.
L a i ere. section du tribunal civil de Riom , présidée
par le citoyen B on arm e, a poussé plus loin la rigueur des
principes en cette matière ; car elle a jugé en principe,
en messidor an 4 , ainsi que l’a rapporté le défenseur
officieux de l’une des parties, que le mari qui achetoit
des biens indivis avec sa femme , n’acqucroit pas uxorio
nom ine , à moins que l’acte ne le portât expressément,
mais bien pour son compte personnel. On auroit de la
peine à adopter cette jurisprudence qui est contraire aux
principes; m ais, dans l’espèce des parties, il ne peut y
avoir de doute que l’adjudication dont il s’agit ne doive
profiter à l’adjudicataire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le
I er.
germinal an 11.
DARTIS-M ARCILLAT.
L E J U R I S C O N S U L T E S O U S S IG N É e s t d u MÊME
A V I S , par les mêmes raisons ; et il ne voit pas com
ment il seroit possible de dire rien de raisonnable pour
l’opinion contraire.
Délibéré à Clermont-Ferrand, le 4 germinal an n .
B E R G I E R.
�C
)
L E C O N S E IL S O U S S IG N É , en adoptant les principes
ci-dessus d éveloppés, n’y ajoutera qu’une réflexion. A u
moment de la mort de Laurent Gendraud, père commun
de la mère de la femme Prugnard et de la femme G ran et,
il n’existoit dans sa succession, outre ses biens immeu
bles , qu’une créance de 1,200 fr. due par Mercier.
En se m ariant, les filles de Gendraud se sont consti
tué cette créance. Il n’y a donc jamais eu que cette somme
qui fût dotale. Les poursuites, et l’adjudication pronon
cée au profit de G ranet, n’ont pu avoir la force d’im
primer le caractère de dotalité à des immeubles acquis
par G ra n e t, en son nom personnel ; pour opérer la dota
l i t é , il auroit fallu , ou que les immeubles eussent fait
partie de la succession du père commun , ou qu’ils eussent
été acquis en remplacement d’un fonds dotal aliéné.
O r , dans l’espèce , les immeubles ne proviennent ni
de la succession de Laurent Gendraud, ni ne servent au
remplacement d’un fonds dotal aliéné.
Que doit Granet, adjudicataire? le rapport du prix de
l’héritage affecté à cette créance. En supposant qu’ il se fût
trouvé plusieurs créanciers hypothécaires, et que quel
ques-uns eussent primé les héritièresde Laurent Gendraud,
dira-t-on que l’adjudicataire auroit dû le rapport du prix
aux créanciers premiers en hypothèque ; et qu’à l’égard
des Glles Gendraud, il étoit tenu au rapport de la chose.
Son sort ne’ sauroit: s’aggraver par la qualité de mari; e t,
�16
dans tous les cas, il ne d o it, comme tout autre adju
dicataire , que le prix devenu le gage de cette créance.
D élibéré à C lerm ont-Ferrand, le 5 germinal an 11.
"
M A U G U E.
A- R IO M , de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur du
Tribunal d'appel. — An 11.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_M0101_0017.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Audigier, Pierre. An 11?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Andraud
Boirot
Dartis-Marcillat
Bergier
Maugue
Subject
The topic of the resource
successions
biens dotaux
immeubles
partage
moulins
Description
An account of the resource
Consultations [Citoyen Pierre Audigier, notaire public, habitant de la commune de Rochefort, contre Étienne Prugnard, et Marie Demurat, sa femme].
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 11
1780-Circa An 11
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0238
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0239
BCU_Factums_M0731
BCU_Factums_G1405
BCU_Factums_G1406
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53737/BCU_Factums_M0238.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rochefort-Montagne (63305)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
biens dotaux
immeubles
moulins
partage
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/18/53951/BCU_Factums_B0112.pdf
077e6c56813c642cdcdb021d7834cbf0
PDF Text
Text
I'Z
CONSULTATIONS
<1
P O U R Meff ire A n t o i n e - P i e r r e - X a v i e r - B e r n a r d
A R R A G O N E T D E L A V A L , Ecuyer,
Défendeur,
C O N T R E
T E I L H
D am e
Je
a n n e
- G
A R D , f o n E p o u fe
e n e v i è v e
D e m a n d e re ffe s
en fe p a r a t io n d e B i e n s .
L E C O N S E IL fouff igné qui a vu le mémoire du fieur D ....
E S T I M E que fi le fieur D . . . . paroît n’avoir rien à
redouter de la demande en réparation de biens, dont il eft
t menacé de la part de la dame fon époufe, il eft néanmoins
de fa prudence & de fa délicateff e d'employer to u s les moyens
poffibles d’en éviter l'éclat. ,
-
La féparation de bien, quoique moins fâcheufe & moins
A
�p
*y~->
.
‘
cjjtxz:
^rsA^' r».—
y -
£
~
r. j q
y
^
rîgoureufe que celle d'habitation > nJeft pourtant pas favo-*
rable en ce q u elle eil toujours contraire à Thonjnêteté
publique, & qu’elle tend à détruire ou affaiblir l'effet des
conventions d’un contrat de mariage & des conditions fous
lefquelles les parties fe font unies j aufli faut-ii des caufes
graves pour y donner lieu.
L a règle invariable que l'on doit tenir en cette m atière,
eft que la femme ne peut demander la réparation de biens,
qu’autant que fa dot fe trouve en péril., & qu'il peut y avoir
lieu de craindre par les diflipations du m ari, ou que la femme
foit expofée à perdre fa d o t, ou une p artie, ou bien qu’il
ne refte pas un revenu fuffifant pour la dépenfe raifonnable
(de la femme ôt de fes enfans. Suivant le droit romain qui
fait notre loi dans cette m atière, la femme ne peut demander
la réparation dé biens, qu’autant qu’elle fait voir que fon
mari eft tombé dans un tel état de pauvreté, que fon bien
n'eft pas fuffifant pour répondre de la reftitution de la dot :
c'eft ainfi que l ’on doit entendre la loi 24., ff. foluto- matri~
monio. Si confiante matrimonio j dit le jurifconfulte dans
cette lo i, propter inopiam m ariti 3 mulier agere velitj-confiât
exitidè dotis exaâionem accipere ; ex qua evidentiffimè app&'
ruerit mariti facultates ad exaâionem non fufficere. Ces dernierstetmes
de la loi prouvent
qu'il
ne fuflit
»
*•
*
*pas d'une
'
’fimple
11
diifipation de la part du m ari; qu’il faut qu’elle foit teüc
u ’on puifle en concevoir un jufte fujet de craindre la
perte de tout ou de partie de la d o t; e x qua evid en tijfi^
apparuerit, ces premières paroles font bien remarquable8 >
‘ m a r in facilitâtes ad exaâionem i dotis ) non fufficere.
C e principe du droit romain ac été ad o p té^ àr ceux de noS
auteurs qüi ont eu occafion de traiter ides-féparations &
�b ien s,
il â1 fait la règle générale 4e notre jurifprudéncè
dans cette matière. Mornaç fur la loi 2 , ff- de divortus >
n-admet d’autrecaufe de réparation de biens entre conjoints,
^qu’une jufte crainte de la perte de la dot; eo ju re utimur ut
quacumque ex caufa uxor ju re 6* merità doti fuœ tïmeat\ exaudienda fit femper à judicibus s ut res fuas fib i kabeat. Mais
il faut que cette crainte ait un jufte fondement, ju r t & merità
timeat. '
M. Cochin dans un plaidoyer que l’on trouve au cinquième
volume de fes oeuvres, & dont les moyens furent adoptés
par un arrêt du 27 janvier 17 4 0 , donnoit comme un prin
cipe certain j que quand la dot de la femme eft en pleine
fureté j & par exemple , difoit-il, fi elle confifte en fonds dé
te rre , & qu’elle foit en nature, comme la fem m e, fans
laquelle on ne peut l’aliéner, n’a alors rien à craindre de
la conduite de fon m ari, fa demande en féparation ne peut
pas être écoutée, tant que fon mari fournit convenablement
à fa dépenfe.
’
O n vient de dire que l’arrêt de 174 0 jugea conformément
à.ces principes; mais ils étoient déjà confacrés par une ju ris
prudence plus ancienne.
Dans l’efpèce d’ un arrêt du dernier février 1
que Ton
trouve dans le recueil de So efve, la femme du nommé V ern o y,
marchand de L y o n , demandoit la féparation de biens, fur
le fondement du mauvais état des affaires de fon m ari, qui
tvétoit pas contefté; mais le mari offroit de dépofer entre
les mains d’un notable bourgeois la fomme de 17000 liv.t
* quoi montoit la dot de fa femme ; en conféquence, il
«u ten oit que l a fem m e.n’ayant.rien-àcraindre pour fadot-*-
A a
�( 4 )
il n’ÿ avoit pas lieu à là féparatiôn.' L ’arrêt mit-les parties
hors de cour, fur la demandé en réparation;
L es annotateurs de Dupleifis, traité de la communauté,
liv. 2 , ch. ,2 , rapportent une fent€|nce du châtelet, du
août 17 0 0 , qui déboute une femme de la demande en féparation de biens, encore qu'il parût que le mari avoit reçu
des rembourfemens de fes biens dotaux pour 160000 livres,
fans qu’il en eût fait aucun em ploi, mais parce que le mari
faifoit voir qu’il lui reftoit encoreaftez de biens-pour rem
placer la dot de fa.fem m e; quoiqu’il’ fut d’ailleurs confiant
que la dot remplacée, il n’y en auroit pas affez pour acquitter
le douaire & le préciput de la femme; mais les juges ne s'arrê
tèrent point à cette dernière circonftance, parce qu’ils regar
dèrent le douaire & le préciput comme des gains éventuels
& incertains.
Si l’on fait l’applicaeion de ces principes confacrés par 1*
jurifprudence aux faits expofés par le mémoire, il fera facile
de fe convaincre que la demande en iéparation dont eft me
nacé led. fieur D . . . . ne pourra point réuifir, fi elle'vient à
être formée.
. .“
*
E n e ffe t, quoique le Heur D ." .. . convienne qu’il y à eu
de fa part quelques diffipations de fes biens, & quJil en ait
réfulté pour 12 ou ijo ô o liv. de dettes, cependant il n’en
fera pas moins évident que la dot de fa femme eft fans péril*
C ette dot confifte en fonds 'qui compofent un corps' àe
domaine j & le domaine eft fitué en pays! coutumier’ d’ Auyergoe f o r y fuivant la difpofition detla coutum e, le i(niarl
ne peut ni vendre ni Hypothéquer‘les biens dotaux’ de
femme; il ne le pourroit pas même avec fon confentemen^j
& quant-elle voudroic concourir à ile s vendre avec lui. k *
�<(s)
fureté de la dot eft donc dans la lob mêm e; il tnç pçut Pas T
en avoir de plus folide.
, ,
^ < .1 y '-,
... Audi cette dot eft-elle entière ; & elle i*eft, d’autant plus
que-la valeur du domaine, qui la com poie, excédant dej.plus
?de 8000 liv. ce que le père vouloit donner à fa fîlle en avan
cement d’hoirie;, le m a ri a rempli fon beau-père de.cet excé•d an t, en lui abandonnant des rentes qui lui étoiem propres-,
& d’une valeur équivalente. Les rentes exifterit, ôt elles font
.entre les mains du père'de la femme.
Mais le mari a de plus amélioré les biens dotaux, & aug^
menté par là la fureté de fa fem me.; il a ’fait réparer des bâcir
itimfens utiles ; il;les a*meublés convenablement ; il a.fait des
plantations & autres réparations dans les fonds’; il dit avoir
employé à tous, ces objets 18 à 20000 liv. enforte que les biens
de la femme , -depuis fon mariage , ont acquis uft. produit infi,niment;plus confidérable., que Je feul bénéfice dü temps ne
leur aurait pas procuré , fans les dépenfes.faites par le. mari ,
pour réparer & améliorer.
,
"•
r!'
D ’un autre c ô té , la femme ne peut pas fe plaindre que fon
-marim'ait pas fourni convenablement à faidépenfe. L e fieür
; D . ' . . expbfe /dans fon mémoire, qu’ayant voulu: fe]fixer à
la campagne pour être à la porté d’y mieux faire valoir fes bieris
& ceux de fa fem me, il avoit voulu l’engager à venir avec lui
& leurs enfansy faire fon fejour ;. mais qu’il avoit inutilement
employé les prières & les follicitations,-auxquelles-fa femme
âvoitcônftamment-réfifté ; ce qui avoit produit uneiforte de
féparation. , Jla femme.ïeftant à la.ville , & leim arif'à'la'cam pà'gne; que cependant, le fie.ùr D ; . . i donnoit à la dame fon
• époufe une penfioh de .2000 liv. par an , douze fetiers-de blé',
k bois, le.fruit & le jardinage néceÎTairps à la confommatioxi
�C C 6 )
* -
•
w
y
\
'de Ta maifôh : périfion fiipérieure au revenu*de fa dot', q u f,
aux termes du contrat de m ariage, n'étoit que°de 17.92 litf.
par. an. Mais auifi, la femme confervoit-elle auprès d'elle fes
enfans qui étoient dîun âge trop tendre pour n’avoir pais
befoin des foins d une mère j & le fieur D . . . expofe encore!,
qu’indépendamment de cette penfion, la dame fon époufe
70uiflbit, en paraphernal, d'un revenu de $00 liv. enfin , il
ajoute qu’il a toujours été fort exaft à acquitter cette penfion.
I l réfulce donc de tous les fa its, que le mari a fourni conve
nablement à la dépenfe de fa femme ’, & qu'elle n’a point eu
de fujet de fe plaindre à cet égardl ^
;
Mais alo rs, fur quels m otifsipourroit porter la demande en
féparation de biens ? il ne pourroit y en avoir que deux ;
•ou un danger réel pour la d o t, ou le défaut de fournir à la
-femme ce qui lui eft néceiTaire mais jufqu’à p réfen t, o n ne
'voit rien de fem blàble, & il eft prouvé , tout au contraire'»
que la dot ne-court & ne peut courir aucun rifque ; q u 'e lle *
été même am éliorée, & fon produit augm enté, par les foins
iôcles dépenfes du mari ; 6c qu'enfin, la femme n’a m a n q u é
de rien , fon mari ayant fourni' très-abondamment-à Une dé
penfe plus confidérable dans une v ille , q u elle ne l’eut é té 1*
la campagne.
-p
Mais il y a plus ; c’eft que les faits annoncés parle m ém oire
& dont on a touché quelque chofe ci-devant, prouveraient
que la femme elle-m ê m e eft en plus grande partie caute
idea diflîpations, dont elle voudrôitiiie faire un; prétexte ^
réparation» Son mari avoit défiré de fe retirer à ’ia, campafj0® ''
ice défir étoit raifonnable^iln'avbit point de m aifonà la vilte»
fil n’avoit pas de biens aux environs , qui y exigeaflent fott
iféjQuniaU avoic de.plus l'^xeipplode fo u p èra^ réfi^ a n t
�< Î 7 ')
cam pagne, fit-cJétoit-dans le même lieu qu'habitoit fon p ère,
dans le même lieu où .écojent-fittyés^feç biens Ôc^cei^xide ifa»
femme ; tcJétoit là rqu’il lui propofoit de fe retirer avec, leu r
famille ; le féjour n’ avoit d’ailleurs rien de défagréable; il fe
trouve placé dans un des meilleurs & des plus beaux cantons;
de la province. S i [l’on ajoute que la fortune du mari & de
là femme n’écoit pas bien confidérable , eu égard à lçur con^
dition & au nombre de leurs enfans , qui ¡çroiffpit chaque
jo u r , on trouvera fans doute > que la prppofition que faifoiç
le fieur D . . . à la dame fon époufe ^étQit çlans l’ordre d’ unet
conduite fage & prûdente. Indépendamment de ces m o tifs,
la religion j l’honnêteté publiquer, tout faifoit à la femfne'un',
devoir de fe.conformer aux volontés de.fon mari>de lie fuivrfe
à la cam pagne, d’y habiter avec lui.
- ■
;
- S i elle s’ y eft refufée , s’il a fallu tenir deux m énages, l’un$
à la ville , l’autre à' la cam pagne, qui ont occâfiônné plus,
de dépenfes ; ;fi ^’éloignement volontaire de la femme a donné
lieu à d’autres inconvéniens qui ont jeté un m ari, jeune en
co re, dans quelques écarts préjudiciables à fa fortune ; fi
tout cela , il en réfulte pour 12 à jy o o o liv. de dettes, les
torts^retomberont-ils^out entiers fur l e m a ri, & xxe les fera-t
t-on pas partagera fa-femme j pour.nJavoir point fait ce que
fon mari exigeoit;d’e lle , qu i^ toit raifonn,able > & qui étoic
ion-devoir? ? !l(
^
.
- Mais dans quelles cirçonftances encore la,demande en fépa*
ration fçroit^elle formée;?, c’ eft lorfque le m ari, revenu de fes
^cartSii.quç la fem m e.Revoit.aji moins;,
par;tjp,rfe repro*
cher à elle-même j c’ eft iorfque ce mari s’ eft réuni ^ ;elle^
& M llu ira ren^u.^ut&ife;^e^ d reire;Jl faut;av$uer q u e l e m o
feroi^am ichpiû^-,,
«««<«'«
^
n ^
«»inv.-b r:.
;
�,
e
n
Ainfi , tout concourt à perfuader que le fieur D . . . n’atH
roit rien* à craindre d’une demande en réparation, qui feroit*
fans m otif & fans fondem ent, ne pouvant y en avdifcque 1&
danger de la dot., ou le refus du m ari, de fournir au x ‘dépenfes
raifonnables de la fem m e; motifs qui fenfiblement ne peuvëht exifter \ comme on l’a ci-devant démontré ; ôc puis., la
femme feroit'mal vue datis'lë'côncburs des circonftances'quife'réu n iifen t, finon pour exetifer le= mari de quelques diflipà-’
tions qu’on petit lui reprocher, du moins pour en faire par
tager le reproche à la femme.
- -Au refte^ lé mari a dans fes biens a&uels, de quoi fatisfaire
à fes d e t t e s ' i l Iui teftefoit ’encore; fes reprifesfur les biens
de/fa fémme ^ S t fqùi'confiftent, comme Ori l’^ci-deifus obJ
fervé, dans une fomme de plus de 8000 liv. qu’il a remife de
fes'propres effets à fon beau-père , pour l’exccdant de l’avancerrtetîc d’hoirie de fa'fêtt)tt\e >-&-dans les conftruâtions & répa
rations1 faites'dans-des biens' de fa femme
qui vo n t de 18 à
20 0 0 0 " 1ÎV, t i1r : '• n
-' -•‘4 • O ’ 'P
r>
Vil« -ilU i ü . j i
f: -
•v Enfin j il nè faut pasfimplement confidérer l’état a£uel ds
la fortune des parties ; le mari & la femme n’ont à p r é fe t
que chacun un aVancéVnent d’h o irie; mâis‘ J’uri!& l’autre -font
héritiers de leurspërér& m'èrei, dont les fucceifions accroîtro^
infiniment leuriortüne y ëul!ég2(rd à ce qu’elle feil actuellement
Encore une fo is, il n’eft pas permis dans le c o n c o u r s^
tant*de circonftances y-de laifler entrevoir au fieur D.****
la moindre incertitude' fur le fort qu'auroit la demande e,1*
iéparation';dont! on -le rnénàde, fi o n a v ô it'la témérité
la former.
" ' h ‘/ r\ '
'■ ’! '' ¿ - ‘
Mais le fieur D . ; •Jexpofe- encore' darls1fo n : mémdî1^
«que fi en dernier lieu il s’eft réuni avec la dame foh ¿poufejj
�( i> )
s’il ëft venu habiter avec elle à la v ille , il n’en a pas moins
confervé le'd éfir de Te fixer à la campagne avec fai famille"»
qu'il a efpéré qüe ce retour’ auprès'de fa femme la rendtoic
à fa tendreffe pour lui,- 6c qu’alors elle pourroit être plus
fenfible à fes représentations, pour l’engager à entrer dans
fes premières vues, ¿t qu’elle pôurroit;elle-même comprendre
que ce parti de la ; retraite à'la1 campagne devenoit d’aùtarit
plus néceifaire pour faire des économies capables de rétablir
l ’ordre dans leurs affaires; en conféquence, le fieur D . . . i
demande quels peuvent être fes droits, sJil ne pouvoit
rien obtenir par fes prières & l’honnêteté de fes procédés, r
: A cet égard y il ne peut pas y avoir deux,.avis dans le
point de droit. Q ue la femme doive fuivreiforç mari'-par
tout où il veut fixer fon fé jo u r, & qu’elle ne doive point
l ’abandonner ; cJeft une propofition qui n’a pas befoin de
preuve; c’-eit une conféquence des engagemens que la femme
contra&e dans Tordre c iv il, ôc que la religion du facrement
ne fait que refferrer & rendrè plus étroits; aufli les loix
font-elles un crime à. la femme d’abandonner fon mari ;
uxori virum relinquere nefas ejlo. D e là vient que les loix
qui ordonnent au mari de fournir à la femme les chofes qui
lui font néceffaires, y attachent la condition qu’elle demeu
rera avec lu i, & qu’elles le déchargent même des alim ens,
lôrfque fan$ une caufe’ jufte & raifon'nable la femme l’aban
donne. Ce n’eft pas feulement la demeure commune à laquelle
les loix'foum ettent Ja fem m e; elle doit, m êm e, fi le jn a ri
!■exiggij Raccompagner dansi les voyages qu’il veut entre/ prendre , & les jurifconfultes n’en exceptent que les^ça^
les voyages feroient .dangèreux , <ouv quils pourraient
expofer la femme à des chofes qui .bleiferoient 1 honnêteté
& lJla pudeur,.
1.: -n. . u,.
; ® .,
»
�o ° >
r “M ais* qu«la que.’ibient jles droit? du, m ari*
quçiqi^JI
ïtài't point à: redouter ^ dem and e: ,çq /épar^non , [don^ilf.pÇ
m e n a c é y il eft-toujours.de fa:,prudence & de Ton'honnêteté,
éc on ne doute pas qu'il rje foic dans fon cœur d'employer tou|
les moyens poifibles d'éviter des éclats toujours défagréables*
tant pour le mari que pour la fem m e? dans de telles affaires,
Ainfi il ne doit rien négliger .ni du-côté des égards & des
emprèflemens pour faire oublier à fa femme les torts qu’ij
peut avoir eus avec e lle , ni du côté des repréfentations amir
cales fur l ’intérêt commun & celui de leurs enfans; il trouy
vera, fans doute, encore des reflburces dans les paren sd e
fà fem m e, qui, une fois convaincus qu’il eft revenu ¡de fes
écarts, ne pourront qu applaudir à de$ vues d'ordre & d’ar^*
rangem ent, ôc, concourir par la fageffe de leurs confeils, à
faire entrer la femme dans celles du Mari.
D élibéré
:
*
: r
à R iom le 18 décembre 17 8 3 .
AN D R AUD.
. ;
l},
•
Nota. Les circonjlances furvenues depuis la date de,cette confultation,
tnt donné lieu à celle qui Juit,
•
!. ^
■ ip
- L E S S O U S S IG N É S qui ont vu la confultation de l’un
â ’eu x, du 18 décembre 178 3 , une précédente de M* J 3oirot
èc de M ClB ergier, du 18 janvier u 7 7 9 , lia requête en Répara
tion deJ biens de la dame de L a v a l, ôc de nonveajujc^mén
¿noires,^1
’’ ’ '
lu (
. ci!
: S O N T D ’ A V ‘I S »que- fi c e tte . demande en -réparation,
¿toit accueillie dans les tribunaux, les ma r i s n e ; ferment
(déformais que des régiifeurs momentanées des b ie n id ç teuï»
�femmes : elles poürroient au gré de leur caprice, les priver
igtiominieufement de l’adminiftration que la loi leur donne
à titre d'honneur.
■ï
~ Dans quel cas la femme peut-elle demander d’être féparée
’d e biens ? C ’eiV lorfqu’elle démontre qu’elle eft fur .le. poinjt
d’être'viaim e déplorable des diffipations de fon m ari; lorfr
qu’elle a jufte fujet de craindre la perte de fa dot, & que les pourfuites des créanciers du mari ne le mettent dans l’impoiïibilité de lui procurer la fubfiftance, ainfi qu’à fes enfans.
E n un m ot, fuivant nos principes fur cette m atière, qui ne
font ignorés de perfonne, la féparation de biens eft ou une
punition des défordres exceififs d’un mari., ou un remède
à fon incapacité.
.«
O r , d'après l’état des affaires du fieur de L aval , i l
fcft impoifible à la dame fon époufe de juftifier fa prétenr
tention ; elle aura, fans doute, le fort des démarches de
plufieurs autres femmes qu’on a vu fatiguer inutilement les
tribunaux, pour tâcher de donner un libre effort à leur
humeur, 6c fe fouftraire à l’autorité légitim e, ôc quelquefois
importune de leurs maris.
D ’abord, la dot de la dame de Laval eft en fureté, puis
qu'elle confifte en immeubles inaliénables; elle a la loi pour
garante de leur confervation : ce moyen eft du plus grand
poids dans cette caufe.
A la v é rité , malgré cette circonftance, la demande de la
dame de Laval auroit quelqu’apparence de fondement, fi elle
prouvoit que fon mari a diiïipé entièrement les 40000 liv.
qui lui ont été données en avancement d'hoirie par M. de
J-aval , l fon p è re , en contrats de rente ou en fonds.yôc que
revenus de la dot J ’ deftinés aux charges du m ariage, vonfi
devenir la-proie des créanciers du fieur de L aval.
^
*
B 2
�( 12 )
*: Mais celui-ci eft en état de prouvef que de cês ,40000Ïiÿ.
¡1 en exifte en nature environ 20000 ,!y compris les 8000 liv;
qui font en dépôt, entre les mains de M . de Beauvezeix. ' „■
‘ Relativem ent aux autres rentes dont il a touché le s;.capi
taux , il n’en eft point réfulté un déficit dans fa fortune : il les
a employés en améliorations confidérables dans le domaine de
la dame de L aval; il a réparé & meublé des appartenons pour
fe loger ; fait conftruire des granges , des écuries; acheté des
beftiaux, de la futaille, & des uftenfiles d'agriculture:, -dont
ce bien étôit entièrement dépourvu : il a fait arracher & re
planter des vignes, converti des terres en prés-vergers; enforte
que la valeur du bien a été augmentée d’un tiers. Ces emplois
indiquent-ils un caractère prodigue & diflipateur ? & après une
telle adminiftration, le fieur de Laval auroit-il du s’attendre à
une demande en féparation ? eh ! que pourroit-on faire de
plu s, s’il avoit employé les capitaux qu’il a touchés., ou les
fommes qu’il a été obligé d’emprunter , à décorer un de ces
jardin s, à conftruire un de ces temples, deftinés à y jouir des
charmes de la volupté , ou à s’y livrer aux horreurs de la dé
bauche ?
• On fera encore plus convaincu de l’ économie, difonsm êm e,
de la parfimonie qui a régné dans radminiftration du fieur de
Laval. S i l’on fait attention que depuis plufieurs années, en
condefcendant aux goûts de la dame fon époufe, il a eu la
foiblefife de tenir deux ménages ; l’u n , à la v ille , l’autre, à la
campagne. Pendant tout ce tem ps, il a donné chaqu’annéeà
la dame de Laval 2000 liv. en argent, & environ 500 liv. en
b l é , vin & bois. Il n’eft refté au fieur de Laval qu'environ
1000 liv. fur quoi, il lui a fallu payer les charges : feroit-il
étonnant qu'il eût contrarié quelques dettes , pour furvenir
à fes befoins, & la dame de Laval les ayant elle-mêmQ
jiéceifitées, pourroit-elle en punir fon mari?,
�,< 1 6 } )
«„«.•lyiaViiitqut ’annonce qüe; la dame.de L a v a |,: € a .rrorn)a^t 1a
, demande■en féparationj a- biç^ mflins^cécjé. à
fur la fortune de fpn m ari, qu'elÎe ne s’ eft.prêtée aux Àiourvemens de haine 6c d’animofité que M . Teilhard de Beau■j.vezeix, fon père., à malheureufement conçues depuis long
tem p s contre fon gendre.
,
'
.
. , ,11 paroît que M . de Beauvezeix qui eft attaché à des prin
c ip e s auftères, fe prévient aifément contre ceux qui n’ont pas
xle courage de les choifir pour en faire la règle de leur con
d u ite . Que les goûts, que les temp^ramens, 'qye, les âges ,
que les circonftances diffèrent, n’importe, M .d e Beauvezeix
. n admet pas pour cela-de tempérament ; H condamne avec
. févérité tout ce qui s’éloigne, ,du plan uniforme qu’il s'eft
. tracé : le fieur de Laval eft devenu pour lui un objet de
haine, parce quJil n’eft pas. un de ces fujets inimitables, pour
lefquels tous les tem ps, tous les âges ont été les mêmes.
Ces idées, dont M. de Beauvezeix a paru toujours trop rem pli,
fe font malheureufement gliifées dans l’efprit de la dame de
Laval. C ’eft ainfi que peut-être fans le vouloir, il eft devenu
l'auteur d’une divifion qu’il eût été plus digne d’un p è re ,
d’un magiftrat, d’étouffer dès fa naiflance.
M. de Beauvezeix a d’abord tenté la voie de l’interdic
tion contre fon gendre; il a repréfenté aux parens même
du fieur de L av a l, avec cette fainte véhém ence, cette onc
tion doucereufe & perfuafive qu’un zèle pieux fait fi bien
mettre en ufage, que cette.demande devoit être accueillie,
comme le feul remède aux prétendus défordres du fieur âe
L?val : il en a engagé certains à entrer dans fes vues. Pour
vaincre le s . obftacles j on a efiayé de perfuader au fieur de
* Laval lui-même qu’il devoit fe foumettre docilement au jou g
on youloit lui impofer.
V;
r
�(( * 4 )
¿1 3Lseniiéiirr!t!e ;ta v :ai aÿant' irëjet^l,^com m e;fl t!ë\feît>:cette
2pfoj>ôfitidki ^uine^tenddit^ qüJà le déshonorer ^ratùitëmént,
‘ ori s’èti f"e ft: départi. Alors M .1 de 1Béaüvezei'x/à demandé !Jia
'nomination rd’un confeil. 'Les réponfes que-le fieur de L avâ l
a faites atfx intèrrogacôirB' tl^ ^ '^ i'ubis^ ’ont fait iléfefpérér
du fu ccès; il a expofé avec exa&ituHe l’état de fes aifFalreâ :
’ iVn a v u 'que fa fortune nTétoit pas d élab rée; qu?on fte pou‘ voit pas plus l’attaquer pour caufe de prodigalité , que de
‘ démence; que s’il avoit fait quelques dépenfes, il y avoit été
4obligé pour Fournir principalement aux befoins de fa femirie
" & de fes enfatis.1
D
C ’eft en cet état-qu'on à im aginé'la demande’en féparaV ion de biens. Lés circonftànces ne prouvent-elles pas qu'elle
eft une fuite des vexations-qu’on a fait efluyer jufqu'à pré
se n t au fieur de Laval? A qui perfuadera-t-on que la dame
‘ fon époufe y a eu recours, comme à l'unique rem ède, pour
'tirer fon mari de l'abym e dans lequel «Ifcprétend qu’il va
tomber? Ces idées de prétendue bienfaifance peuvent-elles
fe concilier avec les démarches que fait M. de Beaüvezeîx
auprès de quelques créanciers de fon gendre, pour les exciter
à fe livrer contre lui aux pourfuitës les plus.vives ?
M ais, de ce que la dame de L a v a l, ou pour mieux dire*
"M . de Beauvezeix a abandonné la voie de l’interdi£lion>
ou de la nomination d’un co n feil, il en- réfulté une fin de
non recevoir invincible contre la demande en réparation de
biêns.
~ Ç ’hitérdi&ion, ou là nomination d’un confeil, devoit avoir
"'plus efficacement l’effet de la fépa'ration ; il etf devoir réfultef
* la priv;aiiôn: de toute admiriiftration Quelconque ; niais 'tou # 9
ces- procédures avoient, fans doute, la m êm e'caufe î c’èft-àdire, la prétendue diifipacion du*fieur de Ziavial'Sii-lfe HëraH*’
�gejnwfc4e.\fe^ffairqs., <Q»U ri\Ài
-fôln
v&9X\Ç&sÂm* ■ ca.p r^ n t^i^;^B^jèTfi^Xi9« fc'P ^ ^ Ç C ^ 5y fe
mieux ^ réyflir-erv prenant la f^cpnde ?,-Le^eui;- de; levait»
ppytrlU: ne ’ point, êpre. regardé comme ' diiïïpateur, lprfqu il
s’agijttd’interdiÇtion, ôc avoir tout-à-coup,cô«e, qualité, ip.arçej
qu’on ,forme contre lui, une. demande en f^ aratiq n .j^ Ç om ;!
ment la dame de Laval entreprendra-t-elle de juftUjer to u tes
ces, inçonféquences;?tIn i! ■•»■
, •
.
-,iEnfin, la dame de^L^val demande une provifion de la,
fpmme de 2000 liv., pourrfournir à fç^ befoins y
aux ff afSj
de 1inftance.
•/ir .V ¡r;> ■
i. ^nn iir 3:r. " eviob
•Qn peut dire que cette demande eft çîcjicule : le ; fieur,dçJ
Laval a toujours fourni aux befoins de la dame fon'époufe ,
même plus abondamment que fa fortune n e -.le''lui perniettoit. Il veut enfin ,î recouvrer les droits que ¿lui donne %
qualité jdei matiij, il demandé qu’elle vienne habiter » ¡fa com
pagnie v les fecoursi qu’il.’lui a^toujpurs donnas, doivent 1^.
garantir: qu’elle n’ÿ; ¿proUverailjartiais de befoms.'nCqmment
dans cètte pofition, la dame de. Laval .a.-t-eUe pu conclure à
une provifion ? Eft-ce pour foulager le fieur de Laval:fqu!on;
forme*içontre lui des demandes au.fll ruineufes qu’a’bfurxies ? r
, iLa;:provifion 1ne peut tout /au/plus -j^rs dernandée quç .par
lal femme, quii forme lfc ;dem?n,de; çn ff4 p ^ tio n ¿ ç rcorps;.«no
pouvant vivre à la compagnie de fon m ari, il doit proviifoire^
ment: lui-’ fo\irnirKd^s alipiens. M aisjil n e n çû pas dç, même
de la femme qui n£ Içlçipande que la^ p ara tio n de;biepsj 5 ;puifcj
^eUeliiieipèuti.forcer-.fonj niaTi à ilu i foutnit d£:il4?Uy4tf£®:
lors:dfi:Xn wajfQn,, *1 no«mIuIs-.-I au ; i l u o r c v ’ ciiimuil illue
C eft ainfi que .^’en £tfj}ligueiit-U^,auteur^ qui pauSjirç^uientde la jurisprudence des^tribunaupc. p $m fa ç t, au m o tproJ^£2^.î_n, t a * nous dit qu’on accorde aü ffid ts provi/îons aux
f entl!& W hdc
�s
K\
,( 1 6 )
mais qu’on n 'en accorde pas ordinairement à celles qui dem a n
dentf eulement la féparation de biens parce que dans-ce dernier '
cas la f e mme ne doit point c ef er de vivre avec le maril
i Cette réflexion feule fuffit pour écarter cette demande e n
provifion : o n pourroit fe difpenfer d'ajouter que la dame de
L a v a l jo u it encore de quelques biens paraphernau x du pro^
d u it d e 50 0 liv an n u ellem en t
A in fi, quand on pourroit reprocher au fieur de Laval quel
ques démarches hafardées, quelques traits de légéreté, le repen
tir feu l ne doit-il pas en opér e r punition? s’enfuit-il qu’on1
doive accueillir une demande en féparation également c o n
traire aux loix & a l'ordre public? elle ne peut avoir aucun pré
te x te , dès que la dot; de la dame de Laval eft entière, que les:
fruits n'en font point faifis, & qu’il refte d’ailleurs au mari
Beaucoup plus de biens qu’il n’en faut -pour payer fes dettes.
- Que la dame de Laval & M . de Beauvezeix faff ent attenti o n qu'ils ont donné lieu aux défordres dont ils fe plai
gnen t Àprès avoir rebuté le fieur de Laval par de s procédés;
offenfans ils l’ont ifo lé, livré à lui-m êm e' dans l’âge le plus
tyrannifé par les paffions. On ne peut donc qu’ être étonné que'
M . de B e auvezeix au lieu de porter; fa fille à rem plir le
plus doux & le plus facré de fes devoirs l'éloign e d e fo n m ari,(
& la faffe paroitre en armes co n tre lui dans le fanctuaire de la
juftice ? f
L es moyens qu’on vient d’expofer, & qui feront fans doute
étendus & ¡développés avec force par le défenfeu r éclairé dufieur de L aval doivent le garantir d’une condamnation qui feroit
auffi humiliante pour lui que les fuites en feroient fâcheufes
D é lib é r é à R io m le 2 5 ju ille t 17 8 4
A N D RA U D .
G R E N IE R
A R io m c h e z M a rtin D E G O U T T E 17 8 4
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Baron Grenier
Relation
A related resource
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/vignettes/BCU_Factums_B0103_0021.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Arragonet de Laval, Antoine-Pierre-Xavier-Bernard. 1784]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Grenier
Subject
The topic of the resource
séparation de biens
droit écrit
dot
doctrine
droit coutumier
avancement d'hoirie
devoirs de la femme envers son mari
divorces
Description
An account of the resource
Consultations pour messire Antoine-Pierre-Xavier-Bernard Arragonet De Laval, écuyer, défendeur, Contre dame Jeanne-Geneviève Teilhard, son épouse, demanderesse, en séparation de Biens.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Chez Martin Dégoutte (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1784
1783-1784
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
16 p.
BCU_Factums_B0112
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Baron-Grenier
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0135
BCU_Factums_M0136
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/18/53951/BCU_Factums_B0112.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
avancement d'hoirie
devoirs de la femme envers son mari
divorces
doctrine
dot
Droit coutumier
droit écrit
séparation de biens
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53258/BCU_Factums_G1518.pdf
6139e91a98c26870515655726bd5ebf6
PDF Text
Text
P O U R
Le sieur A L L E Y R A T ;
C O N T R E
La dame D O U H E T , sa soeur ; et le sieur
D O U H E T , son mari,
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a vu un testa
ment du 27 janvier 17 7 0 , portant donation d’un quart,
de tous ses biens par H enri-François A lle y r a t, au profit,
de Pierre A l l e y r a t , son fils ; une cession de droits con
sentie par M arie-G ilberte A lle y r a t , au profit du même
Pierre A lle y r a t, son frè re , le 20 février 1792 ; la de
mande formée par M arie-G ilberte A lleyrat contre son
fr è r e , le 9 nivôse an 1 2 ; et la procédure tenue au tri
bunal d arrondissement de R io m ;
demande de M a rie-G ilb er te Alleyrat
est une chimère qui ne sauroit éblouir la justice, et qui
A
E
stime
que
la
�( 2 )
sera infailliblement repoussée. Il est facile de démontrer
que Faction qh’elle dirige est mal fondée dans, tous les
points; mais pour rendre sensibles les résolutions que
l ’on va prendre) il est nécessaire de rendre compte suc
cinctement des faits , et de la généalogie de la famille
Alleyrat.
^
Pierre Alleyrat et Gilberte M aignol avoient eu trois
enfans , G ilb e r t, Henri-François , et Amable.
A m able fut mai'iée père et mère vivans , et forclose de
leurs successions, qui durent se diviser par égalité entre
les deux enfans mâles.
Henri-François épousa Gilberte M o m e t , dont il eut
aussi trois enfans ; M a rie -G ilb e rte , qui a épousé le sieur
D ou liet; P ierre, qui est le consultant, et une fille appelée
Am able.
Henri-François A lleyrat décéda le 29 janvier 1 7 7 0 ,
laissant ses trois enfans en bas âge; Pierre n’étoit né que
le 7 du même mois; A m able n’étoit âgée que d’un 1m ;
M arie-G ilberte étoit née en 1765 .
A m ab le décéda elle-meme sans postérité le 6 sep
tembre 1786, à peine âgée de dix-sept ans; le partage
dii'sa succession dut se faire par égalité entre Pierre et
Marife-Gilberte 'A lleyrat, son frère et sa sœur.
‘ Mais cette succession avoit resté confondue dans celle
du père com m un1, qui étoit encore indivise; en sorte
que lés deux enians survivans durent se considérer comme
ayant toujours été les seuls héritiers, et ne porter leurs
vues que sur la succession du p è re, sans en distraire fic
tivement celle de la sœur décédée pour la partager en
suite ; ce qui produisent absolument le môme résultat.
�(3 )
En effet, Pierre A lleyrat am endoit, dans la succession
du p è r e , un quart en qualité de légataire ; ce qui réduisoit la succession ab intestat aux trois quarts de's'bienâ.
O r , Pierre amendoit un quart comme légataire , et les
deux filles chacune un autre quart; maïs le quart d’Â m ab le
étant divisible par moitié entre les deu x autres, il devenoit indifférent pour eux de partager les: trois quarts’ en
deux portions égales, comme s’ils eussent !tout obtenu
de leur chef par le ¡décès du père. - rrn
- Pierre A lleyrat'se maria en 1791', à vin gt-un 'an s ;
G ilb e rt, son. on cle, à quOavoit du appartenir la moitié
des* biens des -auteurs çominuns par égalité;W e c Ilen riFrançois’ , son frère , parut au contrat de mariage , et
institua son rieveu son héritier , à la charge de payer
1200
à M arie-G iiberte, sa sœur, et sous la réserve de
quelques héritages qu’il avoit acquis. -jJJ fut stipulé que ,
faute de disposition de .cette'résservo',’ elle^ feroit' partie
de» l’institution, ¿y':). ‘ '* < , i • : ■¡0 <0 .1
i: Gilbert Alléyrat est lui-m êm e: décédé le 22 octobre
179 2 , avant l’émission des lois nouvelles, sans avoir dis
posé de sa réserve; en sorte que cette véserve* s’est-irréVoca’blem'eflt réuniè“ à rjîistitution.
. r!p ,'»!>1 ' Cependaht Mafic-Gilliei!te, A lle y ra t, l’aînée des enfans
de1«F ra n ço is, fut re c h e rc h é e 'é n ‘^riarioge p a t ” le sieur
Douhet : elle ne dédaigna pas»la proposition. Mais comme
il étoit question d’allee habiter- une ¡cohimune éloignée,
éllei proposa îi -6on ;früi?c de* lu i céder ses droitsfttidyennan t une somme- fixe ; :et 'Pierre A lleyrat ) qui cbtifioissoit
moins qu’elle les forces/de la succession', coïiÿeiitit à fcet
arrangement'. •'> ‘ ;
: ? : 1 r:! .• j- ■
' ••• >m•.
»
A 2
�(4 )
E u conséquence, les parties convinrent que M arieGilberte Alleyrat céderoit à son frère tous ses droits du
chef paternel, poyen n an t une somme de
oo tf~; qu’il
se chargeroit en outre de toutes les dettes de la succession,
et lui délivreroit divers objets mobiliers.
65
Les parties laissèrent mutuellement dans l’oubli Am able
A ile y ra t, leur sœur. L a succession é toit encore indivise:
celle de la fille décédée* s’étoit fictivement confondue dans
celle du père co m m u n , dont ell#. n’a voit jamais été réel
lement distraite; ensorte qu’en pensant,à partager la suc
cession paternelle , P ie rr e et Gilburte Aileyrat n’imagir
noient pas do faire une double opé ratio n , mais:bien.de
prendre'chacun la moitié des biens ; et c’étoit cette moitié
de; tous les biens qii’ils appeloient leur portion de lai suc
cession patei’nelle.
r
. GV-’st.en conséquence de: cette idée qu’il n e fut point
questjon, dans l’açte de cession, d’AcaaJjla ALleyivit ,mii
de sa succession. Quoi qu’il en s o it ,c ’est de cet:acte qub
sort la-.difficulté F:"if est dono-important d’en rapporter
lei^..propres iexp.r^ssions;
.• ,
i : ••• • .¿ v n t
*■&£ 'SQihgvé; et.’bonne, volonfét,' a ;yeudu^
« c é d é , quitté, remit».
com m e piü- ces
? ! p v é s e n t e & < ? U e i Y < ? n d : , r e m e t et, tr a n s p o s e ,
« sans-,iuituwjie-garantie de sa part que descvs faits et fn-ob
« messes * à
.-.îo,ua.^»{droits j -n o m s, raisons , p«f-f
«•,et ;pp^ion littwdi»tak« rojcindjaus et resci&m’pî jfestin
a iH>Ht)ii^[li»uissajK’és>, A t'llé éelHCs rpar ile(;décès ^ludifc
5
<f- f,u a r ,I f c i j A H e y n l t p è a o * «n. quw iquu
« »•le.'
y
vïvca^lion, nh
« réserve , et ou que le tout soit situé, et jponunémenfc
" i.
�(5)
« dans le canton de G ia t, iceux indivis avec ledit sieiir
« acceptant.
« L a présente cession ainsi faite , à la charge par ledit
«' sieur acceptant d’acquitter /¿\y dettes de la su ccessio n ,
« si aucunes y a , même de î-estituer à ladite Gilberte
« M o m e t ,' leur m è r e , ce que le père commun pourroit
« avoir reçu de la légitime de leur dite .mère, sans dim i« 'nution du prix ci-après stip u lé, et autres, et ce moyen« nant le prix et somme de six mille cinq cents livres, etc. »
Cet acte, consenti le 20 février 1 7 9 2 , a été mutuelle
ment exécuté par les parties. Pierre A lleyrat a payé le
p rix conv;enii.,.et en a reçu les quittances de sa sœur, sans
qu’elle ait pensé à se faire la moindre réserve. Cependant,
en vertu de. cet a cte , P ierre "Alleyrat a joui de l’ univer
salité des Liens ; il en a joui paisiblement et sans trouble
jusqu’au 9 nivôse an* i2 ,: c’est-à-dire, pendant plus de
douze ans;
. 1 .
•'
Concevroit-on que la dame Douhet eût souffert si long
temps cette jouissance , si elle n’avoit eu cédé tous ses
droits; qu’elle n’eût pas pensé à se réserver la portion de
droits qu’elle prétend n’avoir pas vendue , en donnant
quittanrc e rdu prii-stipulé dans l’acte de cession, et pen
dant la jouissance que son frère en faisoit librement sous
ses yeux ? 11 est difficile de le penser.
Gèpeàdant c’est après un silence de,douze ans que la dame
fie D o u liet, excitée sans doute par quelque génie inquiet,
p lormé contre son' frère une demande dont il est essen
tiel de.rendre compte.
Elle a pour objet", i° . le partage de la succession de
Gilbert A lleyrat, oncle commun; à l’effet de quoi, et pour
�.
( 6 )
déterminer celte succession à laquelle elle prétend m o itié,
elle conclut au partage de celles de Pierre A lle y r a t ,
et Gilberte M a ig n o l, aïeuls communs.
2°. Elle tend au partage de la succession d’Am able
A lle y r a t , sœur com m une, laquelle, dit-on, doit se com
poser d’ une portion égale dans les biens délaissés par
H en ri-F ra n ço is, c’est-à-dire, d’ un tiers.
- Ce second chef contient deux parties; d’abord la de
mande en e l l e - m ê m e , ensuite la quotité de la succes
sion, q u i, dans tous les cas, ne seroit que d’un quart
de celle du père, puisque son testament du 27 janvier
1-770 contient disposition du quart en prjécLput au profit
de Pierre Alleyrat.
E n cet état, il s’agit d’examiner le mérite de cette
réclamation;
Il seroit difficile d’opposer des moyens plus solides que
ceux qui se présentent contre la demande en partage du
ch ef de Gilbert A l l e y r a t , oncle commun : on n’a pas
sous les y e u x le contrat de mariage du consultant, qui
contient à son profit une institution universelle de la part
de son oncle; mais on trouve la certitude de cette dis
position dans une écriture signifiée de la part de la dame
D o u h e t; e t , dans tous les cas, il suflira de justifier du
contrat de mariage; ce que l’on va faire incessamment.
Dans l’écriture signifiée le 8 floréal an 12, la dame
D ouhet dit avoir pris connoissance de l’institution ; et^
sans se départir expressement de sa demande, en ce chef^
elle se rabat sur la réserve apposée à cette institution;
elle soutient que Gilbert A lleyrat 11’est décédé qu’après
La loi du brumaire au 2; conséqueminent, dit-elle , il
5
�C7 )
en résulte , d’après J ’article 2 de la loi du 18 pluviôse an
, que cette ré s e rv e , bien loin d’être réunie à l’institu
tion , a dû appartenir en son entier à la succession ab
intestat.
Mais ce raisonnement porte à faux dans toutes ses
parties.
D ’a b o rd , il pèclie dans sa base , parce que l’extrait
mortuaire de Gilbert A lleyrat, 'qu’on a sous les y e u x , et
qui remonte au 22 octobre 1 7 9 2 , établit qu’il est décédé
plus d’ un an avant la loi du brumaire an 2 ; que conséquemm ent, lors de l’émission de cette l o i , la i-éserve
étoit irrévocablement réunie à l’institution, et q u e d ’après
l’article icr. de la loi du 18 pluviôse an , cette disposi-"
tion est inattaquable.
En second lieu, puisque la dame Douliet reconnoît la
validité de l’institution faite par Gilbert A lleyrat en
5
5
5
faveur de son n eveu , c’est à tort qu’elle persiste dans
l ’action en partage qu’elle a exercée relativement à sa
succession ; tout au plus pourroit-elle demander la dé-^
livrance des objets qui font partie de la réserve : mais,
encore une fois, l’époque du décès de G ilbert Alleyrat
est une fin de non-recevoir irrésistible contre cette action.
Dailleurs , Gilberte Alleyrat a reçu bien sciemment la
somme de 1200 ^ , qui étoit la condition de cette insti
tution -, elle en a donné quittance sans réserve ; elle a
connu et dû connoître l’époque du décès de son oncle \
elle a donné copie de son extrait m ortuaire, par acte du
21 ventôse an 12, et ses répliques ne sont que du 8 floréal
suivant. Comment a-t-elle osé persister dans une demande
aussi indiscrètement form ée?
�c 8 }.
Il seroit inutile de s’appesantir davantage sur ce pre
mier ch ef; c'est, de la part de la dame D o u h e t, une de
mande inconsidérée, qu’elle s’empressera sans doute de
rétracter : on va s’occuper du second ch ef, relatif à la
succession d’A m able A lle y r a t, sœur commune, et q u i,
à l’examiner de bien p r è s , ne semble pas présenter de
difficultés sérieuses.
A v a n t d’examiner si la demande est fondée en ellemême , il n'est pas inutile d’observer que la dame Douhet
a mal ù propos prétendu que la succession d’Am able
A lleyrat a dû se composer du tiers des biens délaissés
par le père commun. Pierre A lleyrat a droit incontes
tablement de prélever, par forme de préciput, le quart
de ces biens ; le testament qui lui lègue ce quart est
rapporté : la succession d’A m able A lleyrat n’a donc pu
Qlre formée que du quart de celle de son père.
JVlais celte première considération devient inutile, si
la dame Douhet n’a aucun droit à la succession de sa
sœ ur, si déjà elle en a disposé, et l’a comprise dans la
cession de droits du 20 février 1792.
O r , si l’on veut ne pas s’arrêter aux termes de cette
cession , aux expressions qu’a employées le notaire pour
exprim er la v o l o n t é des parties; si l’on considère la po
sition de G ilbcrle A lle y r a t , et les circonstances qui ont
déterminé cet acte, il demeure pour constant que la dame
D ou het a code non-seulement ses droits personnels dans
ln succession de son p ère, mais bien tout ce qu’elle a voit
à espérer du chef paternel.
O n a deju pu pressentir ces considérations; elles res
sortent de la cession elle-même.
En
�* H
9
. Î .5
.
En général , ibest dans l’intention de celui qui cède
ses droits , d’éviter des partages, des 'liquidations , des
difficultés sans nombre ; de ne pas s’exposer à l’incerti
tude de l’événement, de se débarasser enfin de toutes
craintes et de tous embarras par une liquidation amiable,
par une fixation certaine de la valeur de ses d roits, dont
il rejette toute l’incertitude -sur le cédataire. Celui qui
cède doit donc naturellement céder tout ce qui lui est
é c h u ; il fait un acte dénégatif de tout partage; il aban
donne des droits inconnus pour une somme déterminée-,
qui le met à l’abri de tout événement.
Comment concevoir alors qu’en ¡codant ses droits dans
la succession principale , il conserve ceux qu’il peut
avoir dans une subdivision de cette succession ? qu’il
veuille s’éviter un partage facile et de l’exécution la plus
simple, et qu’ il s’expose à des partages en so u s-o rd r e ,
à une subdivision longue et difficile ? Comment ima
giner qu’ il a vendu le principal et réservé l’accessoire,
si on ne trouve dans la cession une réserve expresse et
formelle ? Croira-t-on que pour une succession considé
rable il ait répugné à un p artage, et que pour un
d ix ièm e, un douzième, un trentième de cette succes
sion , il ait pris plaisir à un partage dix fo is , trente fois
plus long et plus pénible ? Rien de tout cela ne peut
entrer dans l’ idée.
Mais si l’on examine la cession dont il s’agit , on sera
convaincu, indépendamment de ces considérations géné
rales , que l’intention de M aric-Gilberte A lleyrat a été
de vendre l’ une et l’autre succession.
B
A f»
�ItfX
|V
C IO )
M arie-G ilberte Alleyrat. s’é l o i g n o i t e l l e étoit sur le
point de: s’établir lo in .de la maison paternelle, elle ne
vouloit et ne pouvoit s’occuper des discussions inévita
bles d’un partage; elle n’a cédé) que .par ces motifs.
Mais elle a bien évidemment démontré cette inten
tion en chargeant Pierre Alleyrat du payement de toutes
les dettes de la succession.- Gomment Pierre Alleyrat se
seroit-il chargé de. l’universalité des dettes, s’il n’eût
acquis l’universalité de la succession ? Gomment concevoir
l’étrange contradiction de la daine D o u h e t, de vouloir
que la vente des droits ne porte que sur ce qui lui étoit
persopnel, et que lç payement des dettes . porte sur ia
totalité?i .car elle persiste encore dans cette contradiction.
C ’est une charge comme;toute autre, dit-elle dans son
écriture ; c’est, une partie du prix. ■ u
’r
p C ’est une charge , il est!>vrai; mais une, charge <qüi
explique suffisamment l’étendue de la vente: Celuirqiji
ne veut s’exposer à aucune charge, ni de iscin ch ef^ ïû
du chef de, ses .frères et sœurs , ne peut conserver, et
ne pense à conserver ni ses droits personnels, ni .ceux
qu’il tient de ses frères et sœurs. .
.!
. • Enfin, une dernière circonstance explique eneore,plus
clairemqnt., s’il étoit possible, l ’étendue de ,1a jcessiott.
On a vu que les biens, étoient; encore indivis entre les
trois cohéritiers, lors du décès d’Ainable A lleyrat; qu’ils
îivoient toujours rsesté indivis .depuis, celle ép o q u e;.q u e
des-lors Pierre et Gilberte Alleyrat se sont, regardés
cpmme seuls .héritiers du père c o m m u n q u ’ils n ’ont
eu d’autre idée que ,d’y confondre la portion d’Am.able,
�4 " »
( ” )
et de partager par m o itié , comme si elle n’avoit jamais
existé ; conséquemment les parties n’ont pas dû s’expli
quer autrement, et n’ont dû parler que dé la succession
du père , qui remplissoit siiflisammeut., dans leur idée,
tous les biens qu’il avoit délaissés.
Il pourroit y avoir en effet quelque doute sur l ’éten
due de la cession, si les droits,: tant de l’un que de l’autre
chef, n’avoicnt pas été réunis et confondus dans la même
succession ; mais cette confusion , et la circonstance qu’ils
émanoicnt tous du père commun, suffisent pour déter
miner l’étendue de la vente.
A in si, peu importe que les termes de la cession ne paroissent comprendre que les droits du chef du p e r e , dès
qu’il est démontré que ces expressions ( ou au moins le
sens qu’on veut leur d o n n e r), seroient directement contraires à l’intention, à la volonté des parties -, c’est à l’in
tention des parties, et non aux '¡termes de l’acte, qu’il
f a ut s’arrêter ; I d de quo cogitatum f a i t ; surtout si l’on
considère que les expressions ne sont pas du fait des
parties, et que le notaire peut avoir mal rendu leurs
volontés.
G’est un principe enseigné par les lois et par tous les
auteurs, que l’intention des parties doit toujours ôtre la
règle du juge, et que dans le doute elle doit toujours
fixer sa décision. I n ambignis orationibus , m a xim è
sententia spectanda est ejus qui eas protulisset. L . 96,
ff. D e reg. j Ur.
Mais fauto.de pouvoir contester ce principe, on en a
eonteste l application. Rien n’esL moins am bigu, a dit la
dame D ou het, que les termes dont on s’est servi; il est
B 2
�évident, d’après ces: expressions,Jque la cession ne porte
que sur les droits du chef du père.
A cet égard , on peut répondre avec succès,' que lors
même que les termes* ne paroissent pas am bigus, il suffit
qu’ils soient en opposition avec l’intention des parties,
pour qu’on ne s’y arrête pas; ils deviennent obscurs et
am bigus, dès qu’ils ne concourent pas avec ¿’intention;
à plus forte raison s’ils la contrarient. C ’est donc alors
l ’intention seule qu’il faut considérer. P o tiü s voluntci
tent quam verbci spectari.
C’est aussi ce que nous dit Dantoine , dans son excellent
traité sur le titre iï. D e reg. ju r . L . 96. « IL faut moins
« s’attacher aux termes qu’à l ’intention, q u i est Vessen« tieî du contrat, »
Mais l’intention est évidente, et si.elle l’étoit m oins,
on expliqueroit la clause par l’exécution qu’y ont donné
les parties. O r , lorsqu’à la suite d?un acte comme celui
de 179 2 , on voit jouir le cédataire pendant douze ans.;
au su du cédant , et sansiréclamation de sa part, des objets
dont il demande aujourd’hui le partage, il néjdoit plus
rester le moindre doute.
D ’ailletivs, la^damé Douhet est bien éloignée de> se
présenter favorablement; elle a iorme un chef de demanfde
d’une évidente mauvaise foi, relativement au partage de
la succession de G ilb ert, son oncle ; elle eonnoissoit l’ins
titution iaite en faveur de son frerc, et elle en avôit reçu
le p rix , c’est-à-dire, les 1200
que son vfrère avoit été
chiirgér de lui payer., comme condition de son institu
tion. Mais fei'On doit Considérer comme fdrmé de'm au
vaise lo i, ce chef de demande, il faut en dire autant do
�w
c 13 )
celui qui est relatif au partage des biens de sa sœ ur, et
proscrire sa demande comme elle mérite de l’être*
D
élibéré
à R io m , le 17 nivôse an 13.
ANDRAUD,
VISSAC.
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , qui a v u une consulta
tion délibérée à R i o m , le 17 nivôse dern ier, relative
ment h une. demande en partage des successions de
G ilbert e iA m a b le A lleyrat, oncle et soeur du consultant,
dans laquelle se trouvent expliqués les faits et les points
de difficulté qu’il s’agit de résoud re,
que l’institution d’héritier, faite en 1 7 9 1 ,
de la part de Gilbert Alleyrat , au profit de Pierre
A lleyrat, son neveu , et la cession de droits successifs,
faite en 1792, par Marie - Gilberte A lle y r a t , femme
D o u h e t , en faveur dudit Pierre A lleyra t, son frère,
résistent aux demandes en partage formées récemment
par la dame Douhet : l’une et l’autre de ces demandes
sont destituées de toute espèce de fondement.
E
st d ’a v i s
L ’époque du décès de Gilbert Alleyrat étant aujourd’hui irrévocablement fixée au 22 octobre 1792, d’après
le rapport de son acte mortuaire , il est inutile de dis
cuter le chef de la demande en partage qui a trait à la
succession de cet oncle commun des parties.
L ’institution qu’il fit en faveur du consultant étant
'
�4
( i
)
universelle , assure'tout évidemment à ¡’héritier institué.
Les objets réservés sont tombés dans le bénéfice de l’insti
tution , faute par l’instituant d’avoir usé de la faculté
qu’il avoit d’en disposer et d’en priver son héritier.
L a clause du contrat de mariage étoit précise pour
attribuer à l’héritier institué , à défaut de disposition
contraire , les objets réservés ; et cette clause môme étoit
surrérogatoire, car les lois qui régissoieut alors la France
n’assuroient pas moins , et sans le secours de cette stipu
lation , les objets réservés à l’héritier par contrat de
mariage , qui avoit pour lui le titre universel. Ge ne
fut que par des lois postérieures au décès de Gilbert
A l l e y r a t , que les réserves furent déclarées appartenir à
la succession ab in testa t, et ne pouvoir plus faire partie
de l’institution contractuelle.
L a dame Douliet n’avoit à prétendre qu’une somme
de 1200
, dont l’héritier institué fut grevé envers elle.
Cette somme lui a été payée ; tout est donc consommé
sans retour , du chef de Gilbert A l l e y r a t , oncle com
mun ; et la déraison seule auroit pu enfanter , sur ce
point , une demande en partage , s’il étoit vrai qu’on
n’eût pas oublié , avant de la former , l’époque de la
mort de l’instituant.
S’il n’y a pas plus de solidité au fond dans la demande
en partage de la succession d Ainable Alleyrat , sœur
commune , décédée en 1786 , cette branche du procès
exige du moins plus de développement que la prem ière,
pour justifier la resolution prise en commençant.
O n 11e doit voir dans l’acte de cession qu’ une rédac
tion peu soignée qui a donné lieu à. l’ une de ces misé<
�■
,
(
1 5
}
râbles équivoques dont s’empare trop souvent la mau
vaise foi des plaideurs dès qu’elle s’en aperçoit. ^
A u lieu de rappeler dans l’acte le véritable état de la
famille , qui auroit conduit naturellement à faire men
tion spéciale de la succession de la sœur des parties, q u i,
morte en minorité , avoit survécu cependant au père
commun, et avoit par conséquent, et strictement parlant,
servi de canal intermédiaire , pour transmettre sur la tête
de son frère et celle de sa sœur une partie des biens de cet
auteur commun , les conlractans ne furent remplis que
de l’idée ou plutôt de l ’habitude où ils étoient de se vo ir,
depuis un certain nombre d’années, deux enfans seule
ment , vivans et capables de recueillir la totalité des
biens sujets à partage, et délaissés par leur père commun.
G’est à celte circonstance probablement , et à l’inatten
tion des contractans , qu’est due l’équivoque qui a fourni
matière au procès , si elle n’est pas due à une mauvaise
rédaction de notaire. Mais voulût-on admettre que ce
fût par réilexion et volontairement que Ton f î t , dans l’acte
de cession, abstraction d’une sœur qui n’éloit plus, d’ une
•^œur dont l ’oubli comme la mention formelle ne changeoient rien et ne pouvoient rien changer au quantum
■
de l’amendement de chacun, cette abstraction, loin qu’elle
lût propre à faire supposer qu’ il entrât dans l’ intention
.des parties de distinguer ce qui leur revenoit du chef de
cette sœur décédée , d’avec ce qui leur revenoit de leur
çhef personnel, prouveroit tout le contraire absolument.
]îille prouveroit qu’une seule masse , celle où tout se
trou voit r e u n i, a suiïi à leurs yeux pour se régler sur
, leurs; intérêts respectifs, et que la cession de droits, qui
�if l*
<<i
'• t
'
,
i l 6 )
iorinc ce règlement , frappe sur toute la masse pater
nelle, et enveloppe tout ce que la cédante avoit droit d’y
prendre.
On ne persuadera jamais que les parties aient entendu
terminer et composer sur ce qu’elles amendoient person
nellement seulement, et qu’elles aient voulu laisser à l’écart
ce qu’elles devoient prendre dans la masse paternelle par
représentation de leur sœur, et qu’elles aient v o u lu , en
un m o t, faire cesser l’indivision sous un ra p p o rt, et y
rester sous le rapport le moins conséquent pour elles.
Les circonstances où étoient les parties , les clauses de
la cession , et la manière dont cet acte a été exécuté pen
dant douze ans, tout concourt pour repousser la demande
tardive d’un partage des biens du père commun , du
chef de sa fille A m a b le , qui lui survécut quelques années.
Dans le f a it , il appartenoit au consultant, comme
héritier universel de G ilbert, son o n cle, la moitié des
biens des aïeuls communs ( Pierre A l l e y r a t et Gilberte
M aignol ) ; il lui appartenoit, dans l’autre moitié qui
devoit composer la succession de son p è re , un quart en
préciput comme légataire; plus, un quart et demi pour
sa portion héréditaire; ce qui donnoit au total, dans les
biens de la fam ille, très-anciennement restés indivis, treize
seizièmes au consultant, contre trois qui revenoient à sa
sœur. Il lai loi t , d’apres cette ancienne indivision, re
m onter aux aieux pour composer la succession du père,
puisque l’oncle G ilb ert, qui avoit tout donné au consul
tant , n’avoit point retiré ses droits. Les acquêts même
de G ilbert devoient être recherchés et distingués ; et de
tout cela résultoit des opérations infinies , et peuI-être
;
longues
�*7
(
) ,
longues et coûteuses, qu’ il étoit sage de prévenir. O n
tenoit d’ailleurs,dans les familles ep g é n é r a l, au non
morcellement des biens; on aimoit à y vo ir un,chef pos
sesseur de l ’ancien patrimoine des pères, et conservateur
de la maison; on voyoit, au contraire, à reg ret, porter
par les filles, dans des maisons étrangères, une portion
de ce patrimoine ancien. L ’intérêt des filles, et ie désir
des familles où elles entroient en se m aria n t, leur faisoit
souvent préférer des deniers comptant ou assurés h une
portion héréditaire en nature. Cela convenoit particu
lièrement aux filles q u i , comme la sœur du consultant,
quittoient le sol natal pour s’établir à quelque distance ;
et telle fille que la loi de la forclusion n ’atteignoit pas
par le décès anticipé de son pèi'e, prenoit le parti que
prit Marie-Gilberte A t le y r a t, et faisoit une cession de
ses droits moyennant un prix cprtain. C ’est à toutes ccs
considérations, et à l’ usagq ordinaire des filles en A u
vergn e, de porter des dots en a rge n t, en se m arian t,
qu’il faut attribuer la cession de droits dont il s’agit.
Les cessions de droit$ successifs ont pour objet toujours
de faire.çessçr un état.d’indivision , et d’éviter cependant
un partage : cela est incontestable ; et en appliquant ici
une règle constante en d ro it, que lorsqu’il y a du doute
sur le sens et l’étendue d’un acte, il faut prendre et en
tendre l’acte dans le sens qui convient le plus au but et
à la matière du contrat, on sera, convaincu aisément,
sous ce point de v u e , que la cession dont il s’agit em
brasse tout, et que la portion de biens paternels appar
tenant h la dame D o u h e t , du chef de sa sœur A m a b le ,
a e t e , conformément à l’intention commune des parties,
C
�M®
(* A t ( 1 8 1
enveloppée et comprise dans l’arrangement de famille.
Il répiigneroit trop^de syncoper un pareil arrangement;
et ce sei‘oit manquer son but évidem m ent, et admettre
deux choses5contradictoires, que de supposer l’abdication
et la conservation tout à la fois du droit de partage dans
la personne de la dame Douhet.
- ■
">
1
1 D e quoi s’es't-on occupé d’ailleurs dans Pacte qui 'fait
le sujet du procès ? A -t-o n réservé li^portron qui compétoit à la succession de la sœ ur, ou bien l’universalité
de la succession du père a-t-elle occupé les contrüctans ?
I j’acte lui-même fart foi q u ’on a agi et stipulé sous le
rapport d’universalité , puisqu’on chargeant nommément
le eédataire du payement des dettes, et de la restitution
de dot maternelle que pouvoit devoir la succession du
père , on l’a chargé de Vuniversalité dès dettes, do T ü n iVers a li lé de la restitution d e dot1',' tandis qu’il n’attroit dû
qu’une q u o tité, st'dans l’inteiltion des parties la portion
héréditaire üü-Amàble,' leur sœur communie , ' av'oit. du
êtr£ distraite
leur arrangement.
: !
Sans une cession de d r o i t s universelle, 011 concevroit
difficilementTuniversalité des- dettefe àpph’cjuée^ucéd;-’^
taire. Sans a ut ré explication ,’ et sans dire 'd'ans l’iitte 'la
raison de différence', et pourquoi on y trouve l ’obl/ga^
tion de toutes les dettes, et la non réunion cependiint'dc
toute la succession sur la môme tête, on ne p'eut se 1per
suader que l’intention dés parties ait été rAjlleinentid’éta
blir cette d ifférence, qui n’est point ordinaire, et qui
choque. On n’eût pas manqué de dire dans lWcte , si on
avoit entendu resCrver à lu cédante ce qui' pouvoit. 'lui
revenir du'ChCÎ dû1#» Sœur daiis la succession paternelle;
�r9
(
)
que nonobstant cette réserve , et par forme de supplé
ment de prix à la cession , l’acquéreur prenoit sur lui
toutes les dettes , et s’obligeoit à faire tenir quitte'et
franche la portion héréditaire réservée à la dame Douhet,
comme représentant sa sœur. Il étoit si naturel qu’on
s’expliquât ainsi , ou de toute autre manière équivalante,
si la dame Douhet 11’avoit pas tout cédé , que jamais elle
n’accréditera , dans l’état où se trouve l’acte de cession ,
la demande en partage qu’elle.a formée.
Non-seulement on ne trouve rien dans c e t . acte qui
réserve à la cédante quelque chose du chef de sa sœur ,
on y lit au contraire que sa cession est faite sans aucune
exception n i réserve. .On y- qualifie les biens et droits
cédés, de biens et droits indivis ; mais avec qui réputoiton indivis , ces mêmes biens cédés ? L ’acte le dit for
mellement : Indivis entre le cédataire et la cédante; et
cependant s’ il ne s’étoit agi dans la cession que des biens
paternels recueillis personnellement et de son chef par la
cédante , il y auroit eu indivision à. déclarer entre trois:
cela est évident , puisque A m a b le , sœur des parties ,
a voit succédé à son père , et que la maxime heredilas,
personam sustinet devoit la faire compter pour quelque
chose dans l’hoirie paternelle. En désignant sous le nom
de biens et droits compris dans la cession , les biens et
droits paternels indivis entre la cédante et le cédataire
seulement , c’est apprendre assez que la cédante faisoit
abstraction d'A m a b le , et qu’en définitif toute indivision
quelconque , et par conséquent tout droit de partage,
s ev.inouissoit pour jamais avec la cédante, sous quelque
prétexte que ce fût.
G 2
�^
O o )
T o u t vendeur au surplus est tenu de s’expliquer clai
rement. T o u t pacte obscur s?explique ets’interprèle contre
l u i , qui legem apertius dicere debuit ; telle est la dis
position précise de l’art. 1602 du Code civil. Cette règ le ,
dont la sagesse est garantie par cela même qu’elle a trouvé
place dans le code des Français, fut observée dans tous
les temps. Elle obligeoit autrefois comme elle oblige
aujourd’h u i , et l’eposoit sur le texte précis des lois 21
et 33 if. D e contrahend. ernpt. 39 D e p a c tis , et 172
D e regul. fur. Ainsi la dame D ouhet devrait s’imputer
de n’avoir pas fait préciser dans l’acte qu’il résidoit sur
sa tête deux sortes de droits , sa part personnelle dans
la succession du père , et une autre part distincte dans
cette même succession , du chef de sa sœur , et qu’elle
ne vendoit et n’entendoit vendre que ses droits per
sonnels , et se réservoit ceux qui lui revenoient du chef
de sa sœur. Ce défaut d’explication , l’absence d’une ré
serve des droits héréditaires à elle appartenans comme
représentant en partie sa sœur décédée après le père ,
surtout dès qu’elle chargeoit son frère de l’universalité
des dettes de celte même succession paternelle, doivent
nécessairement faire tourner contre elle le doute, s’il est
vrai qu’il puisse sérieusement y en avoir dans l’acte dont
il s’agit.
Ce doute , lors même qu’il eut pu exister le lendemain
de f a d e et avant que les parties eussent fourni , par la
manière de l’executer , la preuve de leurs véritables
intentions , ce doute n’a plus rien qui doive arrêter
aujourd’ h u i , ou plutôt il n’existe plus de doute, dès que
le consultant a joui seul et paisiblement de l’universalité
�(2 1)
des biens du père com m un , depuis la cession de 1 7 9 2 ,
sans contradiction ni réclamation de la part de sa sœur.
Cette manière d’entendre les actes par le fait de l’exé
cution , indépendamment de ce qu’elle seroit enseignée
par la seule raison , à défaut de lo is , l’est encore de la
manière la plus positive par la loi 1 ff. D e reb. d u b iis,
dont les termes sont précieux. Quœ dam s unt , dit cette
l o i , in quibus res dubia e s t , sed e x postfacto retrod u c itu r , et apparet q uid actum est.
Godefroy sur cette loi s’explique laconiquement, mais
très-énergiquement aussi. V o ilà ses termes : E x it u s acta
5
probat.
•
J
A in s i, soit q u ’o n considère les circonstances, les termes
de l’acte, la manière dont les parties l’ont exécuté , et
les règles enfin qui servent à expliquer les conventions
qui offrent quelque doute , la demande en partage de
la dame D ouhet , relative aux droits qu’elle prétend
exercer du chef de sa sœur, ne sauroit se soutenir.
D É L I B É R É à Paris , le 14 pluviôse an 13.
DE V A L ,
G R E N I E R ,
du Puy-de-Dôme.
ffu &
•Jjf
A R I O M , de l ’imprimerie de L AN DRIOT , seul imprimeur de la
C o u r d ’appel.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Alleyrat. An 13]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Andraud
Vissac
Deval
Grenier
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
ventes de part d'héritage
créances
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations pour le sieur Alleyrat ; contre la dame Douhet, sa sœur ; et le sieur Douhet, son mari.
Annotation manuscrite: « mai 1807, jugement confirmatif de celui du 31 juillet 1806 par lequel il avait été décidé que la cession comprenait aussi les droits à la succession du frère décédé. »
Table Godemel : Cession : 5. une cession de tous ses droits dans la succession du père commun, consentie le 20 février 1792, par une sœur, non mariée, comprend-elle ceux relatifs à la succession d’un frère prédécédé qui étaient confondus dans la succession paternelle ? Réserve : 3. la réserve faite par l’instituant dans un contrat de 1791 par lequel il avait institué le futur, son neveu, son héritier universel, avec stipulation qu’à défaut de disposition elle ferait partie de l’institution, appartient-elle à l’institué, si l’instituant est mort avant la loi du 18 pluviose an 5 ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 13
1770-An 13
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
21 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1518
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Giat (63165)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53258/BCU_Factums_G1518.jpg
Créances
Successions
testaments
ventes de part d'héritage