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Dame J u l i e - A n g é l i q u e M O N T E R E Y M A R D , et le
sieur J a c q u e s M A T H O N , son m ari, propriétaires, habitans d u lieu de Bourg-Argental,appelans d’un jugement
rendu au tribunal d’Yssingeaux le 1 floréal an d ix;
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C O N T R E
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S A I G N A R D -C H O M O U R O U X ,pro- =
priétaires, habitans de la ville d 'Y ssingeaux, intimés ;
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rançoise
ET
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ENCORE
C O N T R E
L A R O C H E -N E G L Y ,
propriétaire habitant du lieu de Cham blas, commune
de Saint-Etienne-Lardeyrol , intimé.
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F
rançois-
A
lexis
Q U E S T IO N
P R IN C IP A L E .
Une donation fa it e au nom d'un tiers , par contrat
de mariage, et sans procuration de sa p a rt, est-elle
obligatoire pour celui au nom de qu i elle est faite ?
C a t h e r in e et Marthe T r eveis étoient sœurs. La pre
mière épousa Georges Bonnafoux, et eut trois enfans,
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%. . Catherine, Francoise-Hyacintlie, et Cathei'ine-Francoise.
seconde épousa Bénigne Plantier; elle est morte sans
enfans. Catherine Bonnafoux, première fille de Catherine
xi+* Treveis, s’est mariée avec Gaspard M ontereymard, et a
eu de son union M ichel M ontereym ard, d’où est issue
dame Julie-A ngélique, épouse de sieur Jacques Mathon.
Ce sont les appelans.
Françoise-Hyacinthe Bonnafoux a contracté mariage
avec un sieur Louis de Laval-d’Arlem pde , et a eu un fils
qui a figuré dans la cause principale, mais n’est pas
partie sur l’appel.
Catherine-Françoise, mariée à Pierre Saignard-Chom ouroux, a eu douze enfans ; il n’en existe plus que
trois et les enfans d’un autre. Les trois existans, parties
au procès comme intimés, sont Joseph Raymond, LouiseFrancoise,
et Alexis-Francoise.
»
M arie-M arthe , quatrième enfant , épousa FrançoisAm able Laroche-Negly ; il en est provenu quatre enfans:
Georges-François, l’un d’eux,est seul en cause sur l’appel.
L e 13 février 1746, par le contrat de mariage de MarieMarthe Saignard-Cliom oroux , avec François - Am able
L aroche-N egly, ses père et mère lui constituèrent une
somme de 18000 ft~; savoir, celle de 9000 pour droits pa
ternels, 2000 1i~ du chef maternel, 1000 ^ que le père
a ordre de constituer à la demoiselle fu tu re épouse,
du c h e f de dame Catherine Treveis, aïeule maternelle
de cette dernière, 3000 *** du c h e f de dame M arie-M arthe
T reveis, veuve de M . P la n tie r , aussi de son ordre,
1000
du c h e f de M . J e a n -A y m é de Saignard-deC hom ouroux, aussi de son ordre, en tant moins des
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( 3 )
droits légitimaires qui peuvent lui être dûs du chef
de ses père et m ère, et finalement la somme de 2000 ***
que demoiselle Marie - A lexis de Saignard, présente,
donne et constitue de son chef.
« Laquelle entière constitution, est-il ajouté, ledit sieur
« de Chom ouroux, tant de son chef que de celui des
« dames Treveis aïeule et tante, etc. a promis et prom et,
a en son propre et privé n om , et solidairem ent, payer. »
L e père p a y e, en effe t, jusqu’à concurrence de
12000 t t . Cette dernière somme est stipulée remboursa
ble en payemens égaux et annuels de la somme de 3000 ^
chacun, à commencer en un an lors prochain, et succes
sivement d’année en année, sans intérêts qu’à défaut de
payement.
I/’aïeule ni la tante ne sont présentes à ce contrat.
L e 30 avril de la même année 1746, Catherine Treveis,
aïeule de la dame Laroche-Negly, fit son testament, et con
firma la donation de 1000 ^ portée par le contrat de
mariage de sa petite-fille.
L e 30 août 1757, Marie-Marthe T reveis, veuve Plant ie r , fit aussi son testament. Il contient quelques legs
p ie u x , et une institution universelle, au profit de Ca
therine Bonnafoux , veuve Montereymard , mère des
appelans, et garde le silence le plus absolu sur la dona
tion de 3000 ^ que L o u is-P ierre S a ig n a rd -d e -C h o
mouroux disoit avoir faite par s o j i ordre à la dame
Laroclie-N egly, sa fille, lors de son contrat de mariage.
La succession de M arie-M arthe Treveis étoit fort obé
rée : la dame Bonnafoux ne voulut l’accepter que par
bénéfice d’inventaire, lorsqu’elle connut le testament. Elle
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fit procéder à l’inventaire, après en avoir obtenu la per
mission, avec assignation aux parties intéressées. La darne
Laval seule s’y lit représenter pour réclamer une somme
de 2000
qui lui avoit éLé constituée par la défunte,
lors de son contrat de mariage de 172 7; mais la dame
Saignard ne s’y présenta point.
Suivant les titres qui ont été trouvés dans les papiers
de la dameBonnafoux, et qui sont écrits de sa main, l’actif
de la succession de la dame veuve Plantier, dans laquelle
on comprenoit une maison sise en la ville du P u y , se
portoit à 26900
et le passif à 29300
encore ne
comprenoit-on pas dans le passif ni la créance de 2000
de la dame L a v a l, ni la prétendue créance de 3000
répétée par la dame Laroche-Negly.
A in s i, la dame veuve Plantier ne laissoit pas suf
fisamment pour acquitter ses dettes, et il est établi par des
quittances, dont on est en état de justifier, que la dame
Bonnafoux a payé au delà de l’actif, comme aussi qu’elle
a remboursé à la dame Laval les 2000
qu’elle avoit
droit de répéter.
La succession de Marie-Mnvthe Treveis, veuve Plan
tier, ne s’est ouverte qu’en 17^9, deux ans après qu’elle
eut fait son testament. La dame Laroclie-N egly, sa petitenièce, lui a survécu plus de quinze ans, et le mari de
celte dernière a vécu plus de vingt-quatre ans après la
grand’tante de sa femme. Les deux époux , le mari
surtout, maître de la dol mobilière , n’a jamais réclamé ,
ni contre la grand’tante , ni contre scs héritiers, le
montant de la donation portée en son contrat de mariage.
Cependant le sieur Saignard Cliom ouroux, son beau-
�( 5 )
p è re , avoit contracté l’obligation personnelle d’acquitter
le montant de la dot constituée de son chef ou de l’ordre
prétendu de la veuve Plan lier ; il en avoit payé une partie
et avoit pris pour le surplus des termes rapprochés qui
depuis bien long-temps étoient échus.'
, .
Eu général, et surtout en pays de droit écrit, ¡la- dot
est censée payée après dix ans, à compter du dernier
terme échu ; le mari en devient seul responsable : c’est
ainsi qu’on le jugeoit constamment au parlement de T o u - A
lousc , dans le ressort duquel les parties sont domiciliées.
-C e n’est qu’en l’an 7 , et par acte des 18 floréal et,;
7 prairial de la même année, c’est-à-dire, cinquante-trois j
ans après le contrat de mariage de la dame Laroclie-N egly,
que les héritiers Saignard - Chomouroux imaginèrent
une forme de procédure toute nouvelle, et qui a dû paroître extraordinaire, même à Yssingeaux.
A vant aucune demande formée par les héritiers de la
dame L aroclie-N egly, les héritiers Saignard firent faire
des saisies-arrêts, connues dans le pays sous le nom de
bannim ens, entre les mains d’un sieur Bonneville, comme
des biens du sieur Matliori et de son épouse, pour sûreté
du payement de la sommede 4000 lf~, constituée, par ordre
et pouvoir écrit donné par Catherine et Marie Treveis, <1
la dame de Laroclie-N egly, et que ses héritiers, est-il
d it , étaient sur le point de demander en justice.
Il est bon de remarquer que ces héritiers Saignard , si
prévoyans, commençoient leurs poursuites avant aucune
action des Laroclie-N egly, et sans avoir aucun titre contj e
les appelans. Cependant personne n’ignore qu’on ne peut
faire de saisies-arrêts qu’en vertu d’un titre authentique,
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(
6)
;
ou qu’au moins pour suppléer au titre il faut une per
mission de la justice.
Cette saisie étoit donc irrégulière et nulle ; mais encore
elle est faite à la requête du sieur Saïgnard et de ses deux
sœurs, c’est-à-dire, sans énoncer le prénom de celui qui
est nom m é, et sans qualifier autrement les demoiselles
Saignard, que de cette manière , ses deux sœ urs, qu’il
ne nomme pas. T elle est la manière de procéder dans
le pays.
Les appelans n’ayant pas voulu s’expliquer sur cette
saisie, on fit alors paroître les Laroche-Negly , qui in
tentèrent leur demande en payement de la dot de
leur mère , ainsi que des droits successifs qui devoient
leur revenir dans les successions de leur oncle et tante :
c’est ainsi qu’ils s’expliquent. L ’action est intentée par
Gcorges-François Laroclie-N egly, fa isa n t tant pour lui
que pour ses fr èr e et sœurs ; il cite le sieur Saignard
et ses deux sœ urs, dans les mômes termes, et sans au
cune énonciation, ni du prénom du frère, ni du nom
des deux sœurs.
L e 27 prairial an 7 les appelans reçoivent une dénon
ciation de la cédule des Laroche-N egly en ces termes:
A la requête du cit. Saignard et de ses deux sœurs.
Saignard demande à etre concilié sur l’action en garan
tie de la demande du sieur de L aroclie-N egly, pour
raison de la somme de 4000 ^ constituée à leur mère ,
pour le compte et par l’ordre de Catherine et M arieMarthc Trcveis.
Saignard notifia, par la même copie, un écrit sous
seing privé } portant pou voir, delà part de Catherine et
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• ' •
(
)
M arie-M arthe T reveis, de constituer à M arie-M
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Françoise Saignard la somme de 4000 ^ , et sous leur
obligation de rembourser la somme à Pierre-Louis Sai
gnard, attendu qu’il s’obligera de les payer. Cet acte pro
duit au procès par les intim és, sous la cote prem ière,
est signé du seul nom de Plantier, sans énoncer le nom
p r o p r e de M arie-M artlieTreveis, ni la qualité de veuve;
il est sous la date du 9 février 1746 , il n’a été enregistré
que le 10 décembre 1753.
L e 11 thermidor an 7, les appelans, ainsi que le sieur
L a v a l, qui n’est pas partie sur l’appel, furent assignés,
toujours à la requête de Saignard et de ses deux sœurs,
comme dans la cédule : on ne donne pas plus de quali
tés aux assignés ; l ’huissier ne dit pas même qu’il s’est
transporté à leur dom icile, mais seulement avoir donné
une copie à la dame Ma thon , trouvée à M ontfaucon,
sans apprendre comment elle se tx-ouvoit là.
Saignard, pour lui et ses sœurs, assigne pour voir
joindre la demande en garantie à la demande prin
cipale; e t, sans libeller autrement sa demande, ni pren
dre de conclusions précises, il demande seulement qu’on
lui adjuge toutes celles prises dans sa céd u le, et toutes
les autres qu’il trouvera bon de prendre dans le cours do
l’instance.
L e 11 fructidor an 7 , jugement qui joint les demandes
principales et récursoires, et adjuge au sieur LaroclieNegly une provision de la somme de 3000 ^ contre
Saignard et ses sœurs.
Les appelans contestent cette demande en recours par
tous les moyens qui militent en leur faveur, et qui se-
�( 8 )
'ront développés dans la suite; ils désavouent également
les signatures apposées au bas de l’écrit qualifié de pro
curation du 9 février 1746.
L e 6 germinal an 8 , il est rendu un second jugement
où tous les cohéritiers Laroche-Negly et tous les Saignard se trouvent en qualité, sans l’avoir été dans les
'exploits introductifs, et sans être intervenus; qui, considé
rant que sur les demandes en partage les parties sont
convenues d’arbitres ( les Laroclie-Negty et les Saignard),
ordonne que dans une décade les ai’bitres procéderont au
partage ; e t , avant faire droit sur la demande en payement
des 4000 tl~, ordonne la vérification des écritures et signa'tui-es Treveis, apposées en la procuration rapportée par
Saignai'd, sur pièces de comparaison.
On assigne les appelans, en vertu de ce jugement, pour
nommer des experts ; ce n’est plus au lieu de BourgArgental, qui est leur domicile, mais en la ville du Puy.
Les experts sont nommés : après de grandes circonlocu
tions, et à travers une foule d’incertitudes, ils inclinent
à penser-que la signature est sincère.
ï^és appelans contestent. Ils ne sont pas héritiers purs
et "simples de Mnrie-Marthe Treveis. Catherine Bonnafoux n’avoit accepté la succession de sa tante que par
bénéfice d’inventaire. La donation de M arie-M arth e
Treveis étoit nulle. L e tiers n’avoit pas de pouvoir. L ’écrit
enregistré en 1763 étoit insuffisant. On ne peut faire de
donation au profit d’un tiers, sans procuration de sa part,
et annexée à l’acte portant donation. L ’action dirigée
contr’eux étoit ’ d’ailleurs ' éteinte par la prescription; ce
'uVst pus après cinquante-trois ans de silence qu’on pouvoit former une semblable demande.
�C 9)
Les parties sont appointées sur toutes ces discussions;
et enfin, le i floréal an 10, a été rendu, à Yssingeuux,
un jugement définitif, par forclusion , contre le sieur
Laval. En voici la teneur :
« Le ti'ibunal disant droit aux conclusions principales
« prises par les frères, sœurs et belle-sœ ur Laroclie« N egly, sans avoir égard à celles des frères et sœurs
« Chom ouroux, non plus qu’à celles des mariés Ma thon
.< et Montereymard ; vidant l’interlocutoire porté par
« le jugement du 6 germinal an 8 ; homologue la re« lation rendue par les experts Champanhac-Villeneuve
« et P ouzol, les 7 et 8 pluviôse an 9 ; en conséquence,
« déclare la procuration privée, passée le 9 février 1746
« par Catherine et Marie - Marthe Treveis sœurs, eu
« faveur de Pierre-Louis Saignard-Chomouroux, avouée,
« et reconnue de conformité à l’édit de 1684; et, sans
a avoir égard aux fins de non-recevoir opposées par les
« mariés Mathon et Montereymard, desquelles elles de« meurent démises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Chomouroux à faire payement aux frères, sœurs
« et b^lle-sœur Laroche-Negly, de la somme de 3666 ^
« 13^ 4 ^ , pour reste de la dot constituée à Marthe Sai« gnard-Chomouroux leur m ère, lors de son contrat de
« mariage avec Arnable Laroche-N egly, du 13 février
ce 1746, et ce avec les intérêts encourus, savoir, de la
« somme de 666 ^ 13^ 4 ^ , depuis le 14 février 1749;
« de la somme de 1000 ^ depuis le 14 février 1747;
« d’autre somme de 1000 , depuis le 14 février 1748;
« et enfin, de la somme de 1000
depuis le 14 février
ce 1749; sous toutes les déductions et distractions de
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f 10 )
droit; condamne lés frères et sœurs Cliomouroux aux
entiers dépens envers les Laroclie-Negly. Comme aussi
disant droit aux conclusions prises par les frères et
sœurs Cliom ouroux, demeurant les instances jointes,
sans avoir égard à la demande en main-levée provisoire et définitive des bannimens mis au préjudice des
mariés Mathon et M ontereym ard, entre les mains du
sieur Bonneville, a condamné et condamne le sieur
d’Arlem pde, et les mariés Mathon et M ontereymard,
en leur qualité de cohéritiers de Catherine Treveis
leur bisaïeule, à relever et garantir conjointement les
Cliom ouroux, pour la somme de 666 ^ 13^ 4 ^ , dont
la condamnation se trouve prononcée contr’e u x , en faveur des Larochc-N egly, et ce avec les intérêts depuis
le 14 février 1749, sous toutes déductions et distractions de droit; et, sans avoir égard aux conclusions
subsidiaires et principales prises par les mariés Mathon
et M ontereymard, dont les a dém is, les a condamnés
et condamne, en leur qualité de successeurs à Catherine Bonnafoux, héritière de M arie-M arthe Treveis,
h relever et garantir les Cliomouroux de la condam
nation contr’eux prononcée de la somme de 3000
et ce avec les intérêts depuis les époques fixées et
adjugeés aux L a ro c lic -N e g ly , et sous les mêmes
déductions et distractions ; a condamné conjointement les mariés Mathon et Montereymard, et d’A r lempde, à un tiers des dépens, tant de la demande
priucipalc que de celle en garantie, non compris les
frais de la vérification des signatures des sœurs T re veis , ensemble le rapport des experts ; lesquels dé-
�/ 4*
( 11 )
pcns demeurent à la charge des mariés M atlion, ensemble les autres deux tiers des dépens, ainsi que les
deux tiers du coût du jugem ent, l’autre tiers devant
être supporté conjointement par les Mathon et d’A rlempde. »
1
Ce jugement est fondé sur une-foule de motifs qu’il
e s t important de connoître pour les apprécier.
Les premiers juges posent d’abord les questions sui
vantes :
« Les réclamations de la famille Laroche-Negly, contre
« les frères et sœurs Saignard, sont-elles prescrites?
« La prescription a-t-elle pu courir étant sous la puis« sance paternelle ? Préjugeant la prescription inter« rompue, faut-il porter la môme décision à l’égard de
« la demande en garantie formée par les frères et sœurs
« Chom ouroux, contre les mariés Mathon et M onte« reym ard, et le sieur Laval-d’Arlempde ?
« Faut-il considérer les mariés Mathon comme héri« tiers purs et simples, ou comme héritiers sous béné« fice d’inventaire de Marie-Marthe T reveis?
' « La main-levée, définitive ou provisoire, réclamée
« par les mariés M athon, peut-elle leur être accordée?
« Considérant que toute prescription n’a pu courir
« contre les enfans Laroche-Negly, pendant le vivant de
« leur père; que tous les auteurs du parlement de Tou« louse enseignent unanimement que le fils de famille
« privé par la loi de l’usufruit de ses biens est censé'’
« ignorer ses droits; qu’ayant les mains liées pendant
« le vivant de son père, et n’ayant pas l’exercice de ses
« droits et de ses actions, toute'prescription, soit d’un
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«
«
«
«
«
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«. héritage, ou d’une action , doit dormir et demeurer
suspendue , contra nonvcilentem , etc. L e Journal du
Palais , de .Toulouse rapporte deux arrêts , du mois
d’août. 1695 et 1702, conformes à cette doctrine ; il y
est dit : Quoique le père soit le maître des actions à
[ l’égard de son fils ,, cependant, nous jugeons que la
prescription ne court contre le fils de famille que
depuis ,qu’il est sorti de la puissancee paternelle.
« Considérant que les enfans Laroche-Negly ne peu
vent être assimilés à des mineurs qui doivent se faire
restituer dans les dix ans de leur majorité; qu’il existe
même une différence bien prononcée par la lo i, entre
le mineur, et le fils de fam ille; que le mineur a le,
libre exercice de ses,actions; il est nanti de ses titres,
et présumé avoir la jouissance de ses droits assisté d’un
curateur; il peut ester,en jugement : le fils de famille,
au contraire, est privé de l’usufruit de ses biens ; la
loi ne lui accorde, aucune action pour agir ; il ne peut
ester en jugem ent,,et la prescription ne,reprend son
cours que dès l’instant qu’il se trouve affranchi de la
puissance paternelle. .
.
« Considérant,que la dame Chom ouroux, femme La
roche - N e g ly , ajTant contracté mariage le 13 février
1746, et étant décédée le 4 ju in ;i
, il ne court sur
sa tète que.dix ans trois mois de prescription utile;
qu’ayant été interrompue pendant le vivant du père
des.frères et sœurs Laroche-Negly, n’ayant repris son.
; cours qu’à l’époque de son décès, arrivé le 4 décembre
1783, il ne s’est écoulé, jusqu’au jour de l’introduc
tion de l’instance, qu’ un intervalle de quinze ans, ce
756
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c
1
3
)
« qui forme un total de près de vingt-six ans; qu’il fai
te loit trente années utiles pour opérer la prescription
« de l’action des frères et sœurs Iiaroche-Negly.
« Considérant que les experts ayant déclaré les signa« tures de Catherine et de M arie-M arthe Treveis sin« cères et véritables, on ne peut se méprendre sur l’in« tention de ces deux sœurs, manifestée dans la procu« ration du 9 février 1746 ; que la constitution de
« 4000
faite à la mère des enfans Laroche-Negly, par
« Louis Chomouroux son père, n’est que l’exécution de
te la volonté des sœurs Treveis; que Louis Chom ouroux
« ne peut être considéré que comme le mandataire des« dites sœurs, ou tout au plus comme leur caution ;
« que, dans ces deux cas, la prescription n’ayant pas
« couru, ou ayant été interrompue sur la tête des suc« cesseurs de Louis Chom ouroux, elle doit subir le même
« sort vis-à-vis les représentais des sœurs T reveis, étant
« de principe certain qu’il n’y a que l’extinction de l’obli« gation principale qui entraîne celle de l’obligation
« accessoire, et que ce n’a été que du jour que les frères
« et sœurs Laroche-Negly ont formé leur demande ju« diciaire contre les successeurs de Louis Chom ouroux,
« que ceux-ci ont pu former leur demande contre les
« mariés M athon, pour l’objet des 4000 ^ donnés par
« les sœurs Treveis.
« Considérant que Catherine Bonnafoux , aïeule des
« mariés M athon, et héritière de Marie-Marthe Treveis^
« ayant requis, par sa requête du 13 février 1759, la
« faction de l’inventaire et l’appréciation du mobilier
« délaissé par la dame M arie-M arthe T re veis, pour en
�c 1 4 }
« connoître la consistance avant de se déterminer à ac
te cepter ou abandonner ladite hérédité; qu’ayant fait sa
« déclaration au bureau de l’enregistrement, où elle ne
« prit point la qualité d’héritière sous bénéfice d’inven« taire ; qu’ayant constamment joui les biens de M arie« Marthe T reveis, en ayant disposé comme de sa chose
« propre, et sans avoir jamais pxùs la qualité d’héritière
« sous bénéfice d’inventaire; qu’ayant encore sollicité,
« par lettres, des délais pour payer, on ne peut se dis« penser de la regarder comme héritière pure et simple,
« et s’étant déterminée, après la faction de l’inventaire,
« à accepter purement et simplement.
« Considérant que M ichel Montereymard, fils de Ca« tlicrinc Bonnafoux, et père et beau-père de Marie
« M athon, a réclam é, par lettres, des termes, et offert
« des biens fonds en payement; qu’il a accepté purement
te et simplement la succession de Catherine Bonnafoux
« sa mère ; qu’il a vendu le champ porto dans la décla« ration faite au bureau de l’enregistrement, sans pren« dre la qualité d’héritier bénéficiaire de sa mère et de
cc la dame T reveis; que la femme Mathon a pareille-'
« ment accepté la succession de M ichel Montereymard
« son père , sans réclamer la division de la succession
« de M arie-M arthe T reveis; qu’il s’est en conséquence
« opéré une confusion dans ces diverses successions.
cc Considérant que le délai pour délibérer présupcc pose que l’héritier a la liberté d’accepter ou d’abancc donner; que s’il laisse passer plus de quarante jours
« après l’inventaire fait de son consentement, sans expli« quer scs intentions, il est tenu de se départir de la
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5
( i )
r faculté que la loi lui accorde, d’accepter sous béné« fice d’inventaire; qu’alors la loi le répute héritier pur
« et simple, et le prive de la faculté de répudier.
«
«
«
«
«
«
«
« Considérant que ne s’étant •élevé aucune eontestation à raison du don de iooo ^ , fait par Catherine
Treveis à la mère des enfans Laroclie-N egly ; qu’il
résulte du testament de cette dernière, que les mariés
Matlion et d’Arlempde sont cohéritiers, pour un tiers,
de la dame Catherine Treveis ; l’on ne peut se dis—
penser d ’en prononcer la condamnation en faveur des
enfans Laroche-Negly.
« Considérant enfin qu’ un débiteur ne peut obtenir
« la main-levée définitive ou provisoire, qu’autant qu’il
« justifie de sa libération, etc. etc. »
Tels sont les nombreux motifs du jugement : il étoit
impossible de les analiser ; on ne peut les faire com
prendre qu’en les rapportant dans leur intégrité.
La dame Montereymard et son mari en ont interjeté
appeL Ils ont attaqué ce jugement par des vices de form e,
et des moyens au fond. Ils ont remarqué que les exploits
introductifs, tous les actes de la procédure, ainsi que les
jugemens rendus, ne contenoient pas les prénoms du
frère Saignard, les noms de ses sœurs, ni les qualités
des parties, qu’aucun des exploits de demande n’étoit
libellé.
<
Us ont invoqué l’article I er. du titre 2 des A jou rnemens, de l’ordonnance de 1667, qui porte « que les
« ajournemens et citations, en toute matière, et en toutes
« juridictions, seront libellés, contiendront les conclu-
ou?
�( 16 )
t< sîons, et sommairement les moyens de la demande, i
« peine de nullité des exploits ; »
L ’article 2 du môme titre, qui dit que les huissiers
exprimeront le domicile et la qualité des parties, ausr
à peine de nullité.
Les appelans ont encore observé que Saignard, comme
Laroche-N egly, ont toujours procédé comme procureurs
fondés. Les citations et les assignations, tant de Saignard
que de Laroche-N egly, sont données à leur requête, tant
pour eux que pour leui’s frères et sœurs.
Quant aux saisies-arrêts, les appelans en ont égale
ment demandé la nullité. Il est de règle constante qu’on
ne peut faire saisir et arrêter qu’en vertu d’un titre au
thentique , ou au moins en vertu d’une permission de
la justice. Ici les Saignard, ou du moins le frère, tant
pour lui que pour ses sœurs , avant aucune demande
formée par les L aroche-N egly, avant que la prétendue
procuration sous seing privé fût vérifiée en justice,
enfin, avant d’avoir un titre quelconque, s’est permis
de faire saisir et arrêter, de son autorité, les revenus des
appelans, entre les mains du sieur Bonneville.
Cette manière de procéder est inouïe et choque toutes
les règles connues. Les appelans insistent sur ces vices
de forme, que la cour appréciera dans sa sagesse. La loi
prononce; il n’est pas possible de s’écarter de sa dispo
sition : les formes sont conservatrices de la propriété,
et il est très-important , surtout pour le pays d’ Yssingeaux, que la cour apprenne enfin, par un grand exem
ple, qu’on doit procéder d’une manière conforme à la loi.
Les appelans ne s’étendront pas davantage sur cette
matière
�7
( i )
matière qui pourra donner lieu à des observations plus
amples lors du rapport : ils se hâtent d’examiner le fond
de la contestation.
On peut la réduire il trois propositions :
i° . La donation portée au contrat de mariage de 1746,
est-elle obligatoire contre M arie-M arthe Treveis ou les
appelans qui la représentent ? A - t - o n pu former une
action contre eux pour cet objet?
. 20. Cette action, si elle a existé , ne seroit-elle pas
prescrite ?
30. Pourroit-on, dans tous les cas, faire considérer les
appelans comme héritiers purs et simples de MarieM arthe Treveis? ou au contraire devroit-on se borner à
leur demander le compte bénéficiaire de la succession
de la veuve Plantier?
§ Iert
La donation portée par le contrat de mariage de
Ma rie-Marthe Saignard-Chomouroux , du 13 février
'17 4 6 , a été faite par Pierre Saignard-Chomouroux, son
p è r e , en ces termes : M ille livres que le père a ordre
de constituer à la demoiselle fu tu r e épouse , du c h e f
de daine Catherine Treveis , aïeule maternelle de cette
dernière. Tois mille livres du c h e f de dame M arieM arthe Treveis , veuve de M . P lan tier , aussi par
son ordre , etc.
11 n’y a point de procuration rapportée de la part de
celles dont on dit avoir l’ordre ; il n’en existe pas d’annexée au contrat : aussi voit-on que le père s’o b lige, en
C
�(' 18 )
son propre et privé nom , au payement des sommes
constituées.
Il falloit bien que le constituant le prît pour son compte,
lies clauses d’un contrat de mariage ne doivent pas être
douteuses ; son exécution ne doit pas dépendre de causes
étrangères. Cependant sans l’obligation du père il n’y
auroit eu rien de certain ; le contrat n’eût plus été un
acte constant et indépendant, quoique l’engagement eût
été formé dans l’espérance d’avoir la somme promise.
Aussi est-il certain, en point de droit, qu’une donation
ne peut être faite au nom d’un tiers sans procuration de
sa part ; une promesse faite au nom d’un tiers ne l’engage pas ; elle peut devenir inutile par le refus de la
ratifier; toutes les promesses faites par contrat de mariage
sont irrévocables de leur nature. On ne peut donc point
autoriser , surtout dans un contrat de mariage, des dis
positions q u i, pouvant être révoquées ou ne produire
aucun effet , laissent les parties contractantes dans un
état d’incertitude qui répugne à la nature du contrat.
M . l’Epine de Grainville rapporte un arrêt du 28
février 1726 , qui a jugé conformément à ces principes.
Dans l’espèce de cet arrêt , un particulier appelé Jean
Gaugery avoit fait à Antoine son frè re , et par le contrat
de mariage de ce dernier , une donation de tous les
biens présens et à venir que lui et Marie sa sœur , avec
laquelle il vivoit en commun , auroient au jour de leur
décès. Celte donation étoit faite comme se portant fort
pour, M arie, et sans procuration : la donation étoit du
27 juillet 1690, et Marie l’avoit ratifiée le i novem
bre : Marie mourut et laissa pour héritiers tous ses
5
�*9
(
)
n eveu x, et entr’autres les enfans d’un quatrième frère
nommé M arcou.
Ces derniers demandèrent la nullité de la donation
faite au nom de M a rie , sans procuration de sa p a rt, et
soutinrent que la ratification postérieure de leur tante
n’avoit pu valider un acte nul dans son principe. L ’arrêt
déclara la donation nulle, sans aucun égard aux moyens
que faisoient valoir les enfans du donataire, qui prétendoient que la ratification devoit avoir un effet ré
troactif, puisqu’elle ne laissoit aucun doute sur le pou
voir que Jean avoit eu de Marie pour faire la donation.
Il est vrai qu’il s’agissoit dans l’espèce d’une donation
de biens à venir, qui ne peut avoir lieu que par contrat
de mariage ; mais cette circonstance ne change rien aux
principes qui s’opposent à ce qu’on ne puisse stipuler au
nom d’un tiers sans son aveu. Une ratification posté
rieure est presque toujours l’effet de la séduction ou
de la complaisance. O n peut arracher le consentement
par importunité , et pour ne pas compromettre celui
qui a pris sur son compte de contracter sans pouvoir.
Ce seroit en quelque manière forcer la volonté , et
engager un tiers malgré lui-même ; ce qui pourroit en
traîner les plus grandes conséquences.
Eu vain les intimés voudroient-ils opposer l’acte sous
seing privé , qu’ils datent du 9 février 1746 , et par
lequel l’aïeule et la grand’tante sembleroient avoir donné
ordre à Pierre Saignard de faire cette constitution pour
leur compte. D ’abord , cette prétendue procuration
n’a été enregistrée que le 10 décembre 1763-, c’est-àd ire , sept années après le mariage : elle n’a donc de
C 2
�*
(
20
)
date qu’à cette époque ; et encore n’e s t-c e pas une
ratification de la libéralité , mais seulement une autori
sation de donner, qu’on voudroit faire remonter avant le
contrat de mariage, et dans un temps où elle n’existoit
pas ? Ce retard dans l’enregistrement prouve que Pierre
Saignard avoit été assez imprudent pour vouloir en
gager Catherine Treveis et sa sœur , à leur insu ; et
comme il s’étoit obligé personnellement au payem ent,
il a voulu avoir un titre, qu’il a sollicité et obtenu de
la complaisance ou de la foiblesse de deux femmes qui
n’ont osé lui refuser. La preuve que cette prétendue
procuration est postérieure au contrat de m ariage, résulte des termes dans lesquels elle est conçue ; il fait
obliger les constituantes à lui rembourser les sommes,
attendu q u il s'obligera de les payer.
O r , comment concevoir qu’on a prévu que Saignard
s’obligeroit à payer ces sommes. Si véritablement il y
avoit eu un pouvoir valable , rien de plus inutile que
l ’obligation personnelle du père; il étoit si simple de
prendre une procuration, de l’annexer au contrat, et
de faire faire la donation par celui qui auroit rempli
la procuration. Il est inusité , il est inouï , de faire
obliger quel ju’un pour celui qui donne; c’est déjà faire
douter de la solvabilité du donateur ; c’est au moins lui
faire injure ; et ce n’est pas ainsi qu’on honore un contrat
de mariage.
Il est bien démontré que le pouvoir n’existoit pas
lors du contrat de mariage. Dans la suite , la procu
ration qu’on a rapportée sous seing privé , ne pouvoit
avoir aucun effet. Cet acte sous seing privé contient une
�//<
\
( 21 )
véritable donation entre-vifs ; e t , d’après l’ordonnance
de 1731 , une donation n’est valable qu’autant qu’elle
est fuite devant notaire. « Tous actes portant donation
« entre-vifs seront passés devant notaires, et il en res
te tera minute, à peine de nullité. » ( Article I er. de l’or
donnance. )
.
:
On sent aisément le motif de la loi , lorsqu’elle a
oi'donné impérieusement cette formalité. Une des qua
lités essentielles de la donation entre-vifs est l’irrévocabilité. Un acte sous seing privé n’a aucune date cer
taine; tous actes emportant hypothèque, faits postérieu
rement, lui seroient préférés; ce serait donc, commel’avoit
dit Ricard antérieurement à l’ordonnance , traité des
Donations, partie i ]e. y chap. 4 , n. 881 , tomber dans
l’inconvénient de la règle donner et retenir, si les dona
tions demeuraient sous seing privé jusqu’au-décès du
donateur , parce qu’il aurait toujours conservé par ce
moyen la liberté de faire qu’elles ne subsistassent plus;
enfin rien ne serait plus facile que de supposer de fausses
donations.
En un mot , il n’existoit aucune obligation des. deux
femmes Treveis lors du contrat de mariage de 1746.
Pierre Saignard a .tout pris sur son compte. Un acte
sous seing privé ne peut produire aucun effet k côté
d’un contrat de mariage ; ce serait une véritable contrelettre au contrat , et toute contre-leltre au contrat de
mariage est absolument n u lle , à moins qu’elle ne soit
signée de tous ceux qui étoient présens au mariage.
On ne saurait donc se tenir trop en garde contre un
acte produit cinquante-trois ans après le mariage. Indé-
*
�( )
22
pendnniment des motifs de suspicion qui naissent aisé
ment contre une production tardive , la procuration est
irrégulière et nulle : Pierre Saignard n’a pas reçu une
autorisation suffisante ; les femmes Treveis pouvoient
révoquer ce pouvoir sous seing p riv é ; elles n’ont pas
valablement donné : d ès-lors il est impossible que ce
prétendu pouvoir puisse faire naître une action contre
les appelans.
§ II.
""
. s
¡
.
• Cette action, dans tous leseas, étoit prescrite à l’époque
où elle a été exercée. L a dame Laroche-Negly , mariée
en 17 4 6 , et qui fut l’objet de la prétendue donation,
a survécu plus de quinze ans à M arie-M arthe T reveis,
sa grand’tante ; son mari a vécu plus de vingt-quatre
ans après : jamais on a osé faire paroître la procuration,
du vivant de l’aïeule ni de la tante. La femme ni le
mari n’ont jamais réclamé de leur vivant. Toutes les
sommes promises par le contrat de mariage devoient être
payées quatre ans après ; comment concevoir que les
sieur et dame Laroche-Negly eussent constamment gardé
le silence , s’ils n’avoient pas reçu le montant de la consti
tution portée au contrat de mariage.
En pays de droit é c rit, et notamment d’après la juris
prudence du parlement de Toulouse, où les parties sont
dom iciliées, le mari devient responsable de la d o t ,
quand-même il ne l’auroit pas reçue, s’il ne s’est fait
payer,par le constituant, au temps et au terme porté par
le contrat de mariage. Catelan , tome 2 , liv. 4 , dit que
le mari çst responsable de la dot constituée par le père
�23
(
)
de la femm e, lorsqu’il a demeuré dix ans après la célé
bration ou le terme du payem ent, sans en faire demande
à son beau-père.
A la vérité , continue Catelan, on ne lui impute pas
s’il n’a pas pressé son beau-père pendant les dix pre
mières années; mais s’il a laissé passer dix ans sans enfaire demande , cette patience trop longue tourne eu
négligence, et le charge de cette d o t , comme s’il l’avoit
reçue. Ce n’est pas alors le cas de la l o i, où la femme ne
peut imputer au m a ri, cur non urserit ,* et il y a un
grand milieu entre presser et laisser passer dix ans sans
faire de poursuites. D ix ans sont d’ailleurs ün temps que
les lois mettent souvent en usage , et qu’elles emploient
pour termes et pour bornes en bien des rencontres. Catelan
rapporte.cinq arrêts £i l’appui de son opinion : l’un, de
1664 ; un second, du mois d’avril de la même année;
un troisième , du mois de mai i
; un autre, du mois
de septembre 1696; et le dernier, du 9 février 1699.
Ce long espace de dix ans , à compter des termes, sans
aucunes poursuites , doit faire présumer le payement;
et cette présomption ne devient-elle pas une certitude ,
lorsqu’on voit que non-seulement le mari ni la femme
n’ont rien réclamé pendant leur vie , mais que ce n’est
qu’en l’an 7 , cinquante-trois ans après , que les héritiers
Saignard forment cette demande contre les appelans ?
Ceux-ci sont donc encore dans l’exception de la pres*cription trentenaire : il n’y a eu dans la famille Chomouroux aucune minorité qui ait pu suspendre ou
arrêter le cours de cette prescription ; elle a commencé
le 13 février 1749? échéance des termes de payement *
elle a donc été accomplie le 13 février 1779.
665
�( H )
• Les frères Saignard - Cliomouroux sont obligés de
convenir qu’il n’y a point eu dans leur famille de mino
rité interruptive de la prescription ; mais ils voudroient
éluder l’exception, sous un prétexte frivole. Ils préten
dent que leur action contre les appelans n’est autre chose
qu’une demande en garantie, qui ne pourroit prescrire
qu’autant que la demande principale des Laroche-Negly
seroit elle-même prescrite : ils s’efforcent ensuite d’éta
blir que l’action principale des Laroche-Negly est tou
jours entière.
Pour répondre à cette objection, il faut d’abord exa
miner la nature de l’action que les Chomouroux vou
droient exercer contre la dame Matlion. Il est facile de
prouver que c’est une action principale, distincte et in
dépendante de celle des frères et sœurs Laroche-Negly.
E n effet, la constitution portée au contrat de mai'iage
de T746 , a été faite par le père Chomouroux à sa fille.
Il annonce bien à la vérité qu’il avoit ordre de la faire
du chef de l’aïeule et de la tante ; mais il prom et, en son
nom personnel, de faire le payement de la totalité des
sommes constituées.
O r , dès que le père s’est obligé en son n om , qu’il
n’a point agi en qualité de mandataire , sa fille ou ses
enfans n’avoient aucune action contre l’aïeule ou la tante;
ils ne pouvoient s’adresser qu’à leur p è re , qui seul étoit
débiteur.
. X a procuration du 9 février 1746 ne donne pas au
père. Chomouroux le droit de se pourvoir contre les
constituantes , en garantie de l’action que les frères et
sœurs Laroche-Negly exerccroient contre lui en payement
des
�S i)
(25)
des sommes constituées. L ’aïeule et la tante promettent
seulement à leur neveu de lui rembourser ou faire rem
bourser ces sommes, attendu q u i l s'obligera de les
payer. Ce ne seroit donc jamais qu’une action en rem
boursement que le père Cliomouroux auroit pu former
contre les constituantes ; action absolument distincte et
indépendante de celle des enfans Laroche-Negly. Si donc
l’action des Chomouroux est principale et indépendante,
ils ont dû l’exercer dans un temps u tile, c’est-à-dire, avant
trente ans, à compter de l’échéance des termes; ils ont
dû m êm e, avant cet intervalle, faire reconnoître le titre
d’où ils prétendent faire dériver leur action.
Il seroit donc fort inutile de vérifier maintenant si
l’action des L aro ch e-N egly contre les Chomouroux est
toujours entière; cette question est sans intérêt pour les
appelans : mais il seroit encore facile de prouver que
même la demande des Laroclie-Negly étoit éteinte par la
prescription, au moment où ils l’ont exercée.
Il ne s’agit point ici d’un immeuble dotal, qui ne peut se
prescrire pendant le mariage, ou pendant l’usufruit du
p ère, mais bien d’une somme m obilière, dotale à la vé
rité, mais dont le mari ou le père étoit le maître, et qu’il
avoit seul le droit de recouvrer.
Catelan, tom. 2, liv. 4, chap. 45 , enseigne que la pres
cription d’une somme due à la femme court en faveur de
son débiteur, quoique la femme ait constitué à son
mari tous et chacun ses biens, et que la prescription n’eût
pas commencé avant le mariage. Il y a cette différence
entre le fonds dotal et une somme m obilière, que le
premier ne peut prescrire pendant le mariage. La raison
D
«".<
�vO
f î6)
de cette différence est prise de ce que la loi JuVa défen
dant toute aliénation d’un fonds dotal, en défend p ir
conséquent la prescription ; mais la loi J u lia ne défen
dant pas l’aliénation d’une dette, rien n’empêche que la
prescription ne courre en faveur du débiteur. On ne peut
opposer, ajoute Catelan, la règle qui dit que la prescrip
tion ne court pas contre celui qui ne peut a g ir, et que
la femme ne pouvant pas agir pendant le mariage contre
son débiteur, il semble qu’il ne peut pas lui opposer de pres
cription; d’autant qu’à l’égard du débiteur il suffit qu’il y ait
une personne qui puisse agir, à qui la somme appartient pen
dant le mariage, tel qu’est le m ari, qui d’ailleurs, pouvant
retirer payement de la dette, et libérer le débiteur, doit
nécessairement donner lieu au cours de la prescription.
Prœ scribens soh’enti sim ilis est. Le laps de trente ans fait
présumer que le payement a été fait au mari.
Serres, dans ses Instituts, liv. 2 , tit. 8 , est du meine sen
tim ent; la loi J itlia , d it-il, ne s’applique qu’au fonds
dotal, mais non à la prescription d’une dette.
Cette doctrine , bien constante dans le ressort du parle
ment de Toulouse, s’applique parfaitement à l’espèce. La
prescription a commencé à courir depuis 1749. L e père
Laroche - Negly n’est décédé que le 4 décembre 1783,
trente-quatre ans après l’échéance des termes. L ’action de
ses ■
héritiers est donc également prescrite.
En vain les enfans Laroche-Negly voudroient-iïs étabJ’r une différence entre la femme et les enfans mineurs
sous la puissance paternelle; en vain voudroient-ils pré
tendre que la prescription ne court pas contre ces derniers
pendant la durée de l’usufruit : ce seroit une erreur en
�( 27 )
point de droit, quia ubi eadem ratio, ibidem jus. L e
père 11’a-t-il pas le d roit, comme le mari , de faire le
recouvrement des sommes mobilières qui reviennent à ses
mineurs? n’a-t-il pas-la faculté d’a g ir ? n’est-il-pas de
principe que les créances personnelle^ d’un mineur, pourvii
d’un tuteur, peuvent prescrire pour le débiteur, sauf
le recours des pupilles contre le tuteur? Mais, dans tous les
cas, les enfans Laroche - Negly n’en seroient pss plus
avancés en point de fait. M arie-M artlie Saignard, leur
itière, a vécu jusqu’en 1774 ; il s’étoit déjà écoulé vingtcinq ans utiles pour la prescription; ce 11’fest qüe quinze
ans après la mort de leur pèrë que lès enfans Laroche-Negly se sont pourvus : leur action, sous tous les rapports,
étoit également prescrite.
Les intimés ne peuvent se refuser à l’évidence; ils voudroient user de leur dernière ressource, et produisent
trois lettres qu’ils attribuent l’une à ra ïeu le , les deux’
autres au père de la dame Mathon : ces lettres, nonreconnues ni vérifiées, et sur lesquelles il s’élève des
doutes, ne peuvent influer sur le sort du procès.
La prem ière, prétendue écrite par la veuve Monte-'
reymard, est sous la date du 13 mars 1760 : il en résu Ite qu'à
cette époque, et plus d’un an après la mort de MarieMartlie Treveis , Catherine Bonnafoux n’avoit aucune
connoissance de ce prétendu titre dé 1746 ; depuis ce
moment jusqu’à la demande, il s’est écoulé trente-neuf
ans.
Celles‘que l’on dit écrites par M ichel Montereymai-d ,
rt’ont aucun rapport avec lap rocu ration .il ne peut s’oc
cuper d’affaires avec Chom ouroux, et prie d’attendre qu’il
D a
�c 28 )
en ait terminé d’autres. Il se plaint ensuite de ce qu’on lui
demande quelque chose sur la succession de M arie-M arthe,
et linit par dire qu’il renoncera à la succession si on exige
le payement de ce qui pourroit être dû. Mais nulle part
on ne voit aucune explication précise de l’objet particulier;
tout annonceroit, au contraire , qu’il n’en avoit aucune
connoissance. E nfin, l’une de ces lettres, sans date, est
adressée au sieur L aval, et ne peut se trouver dans les
mains des Chomouroux que par un abus de confiance : et
Laval n’avoit pas craint lui-même de faire assigner la dame
M athon pour unè somme de 2000^ qu’il prétendoitlui
être due; mais on rapporta la quittance donnée par son
père à l’aïeule de la dame Mathon. Il paroît plus que vrai
semblable que toutes les affaires de famille étoient termi
nées depuis long-temps. On voudroit abuser du peu de
connoissance qu’a la dame M athon de ce qui s’est passé
dans la fam ille; mais un silence de cinquante-ti’ois ans,
sans aucunes poursuites, est un obstacle insurmontable.
L a demande actuelle a toute la défaveur d’une vieille
recherche : en point de droit elle n’est pas fondée, en
point de fait elle est prescrite.
§. I I I .
Les appelans, dans tous les cas, ne sont pas héritiers
purs et simples de Marie-Marthe T reveis; Catherine
Bonnafoux leur aïeule n’a accepté la succession que par
bénéfice d’inventaire.
Ce n’est que très-subsidiairement, et pour ne rien né
gliger en cour souveraine, que les appelans réclament
�( 29 )
contre le chef du jugement qui les a condamnés comme
héritiers purs et simples. Ils croient avoir démonti-é, 1°.
qu’il n’existe aucune obligation des deux femmes Treveis;
20. que les intimés n’ont aucune action contre eux; 30. que
cette action, dans tous les cas, est éteinte parla prescription.
Mais on se rappelle que lors du décès de M arie-M arthe
Treveis, du 16 janvier 1769, les scellés furent apposés
sur ses meubles et effets, à la diligence de dame Catherine
Bonnafoux, aïeule de la dame Mathon. Sa requête, du 13
février de la même année l ’j ôg, présentée au sénéchal
du P u y , tend à la vérification et levée des scellés apposés
par le même juge. Cette requête est suivie d’une ordon
nance de transport pour la vérification des scellés qui
avoient été apposés le 16 janvier précédent, même jour
du dé_cès. Vient ensuite l’inventaire fait par le même juge
en présence du procureur du r o i, après assignation à toutes
les parties intéressées, mais hors la présence des père et
mère des appelans, quoiqu’ils y eussent été appelés. Depuis,
Catherine Bonnafoux n’a pris d’autre qualité que celle
d’héritière bénéficiaire ; c’est en cette qualité que , le 8
novembre 1759, elle fait commandement à plusieurs dé
biteurs de la succession ; c’est en la même qualité que, le
31 mai 1759, elle acquitte une dette de la succession au
profit de M aximilien Gautier-la-Boulaye, créancier de
cette succession.
L ’inventaire n’a jamais été attaqué de fraude ou d’o
mission ; il contient l’énumération de tout ce qui compose
la succession, omnia jura successioms.
Les poursuites actives
passives
et
n’ont été faites qu’en
cette qualité d’héritière bénéficiaire j les appelans pro-
�3
(' ° )
duisent ces actes anciens qui doivent faire foi pleine et en
tière, d’après la maxime h t antiquis enunciativa pro
bant. Ces actes remontent à plus de quarante-cinq ans. En
pays de droit écrit, il n’étoit pas nécessaire d’obtenir des
lettres do bénéfice d’inventaire; la déclaration de l’héri
tier et l’inventaire sufïisoient pour attribuer la qualité.
Comment donc les premiers juges se sont-ils déterminés
à condamner les appelans comme héritiers purs et sim
ples , parce qu’ils auroient accepté purement et simple
ment la succession de leur père et aïeule? cette circonstance
peut-elle influer sur la succession de M arie-M arthe T reveis ? l’une n’a rien de commun avec les autres, et c’est une
injustice de plus, contre laquelle les appelans sont bien
fondés de réclamer.
Ils ne sont parvenusu réunir quelques pièces de famille
qu’avec des soins infinis et des recherches multipliées dans
les dépôts publics. La dame Mathon-, orpheline, fut mise
en tutelle dès le plus bas age; son tuteur est décédé sans
lui avoir rendu compte de sa gestion, et elle s’est vaine
ment pourvue pour obtenir au moins la remise de'ses
pièces; elle se voit accablée tout à coup par des pour
suites rigoureuses des Chom ouroux, q u i, abusant de son
étit d’ignorance, ont voulu surprendre sa foiblesse; ils
sont allés jusqu’à provoquer la demande des enfans Laroche-Negly avec lesquels ils sont d’accord; ils ont attendu,
pour frapper des coups plus certains, que l’aïeule, le père,
et le tuteur de la dame Mathon fussent décédés; c’est alors
qu’ils ont cherché.à faire sortir du tombeau de la pres
c r i p t i o n cíes titres surannés et nuls ; ils ont osé repro
duire une vieille recherche que leurs auteurs a voient con-
�>¿1
31
(
)
damnée à l’oubli : mais leurs intentions perfides ne peu
vent être couronnées d’aucun succès; ils ont négligé ou
méconnu les premières règles de la procédure; le titre
qu’ils invoquent, et qu’ils ont sorti d e la poussière, est
irrégulier et nul. T out prouve que depuis long-temps
les affaires de famille étoient terminées. Enfin, la pres
cription , ce remède légal, vient au secours des appelans;
et certes il ne fut jamais mieux appliqué.
M. C A T H O L ,
rapporteur
.
M e. P A G E S ( de Riom ),
M e. V A Z E IL L E ,
.
ancien avocat.
avoué.
i
A RIOM, de l'imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de
la Cour d’appel.
�
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montereymard, Julie-Angélique. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Julie-Angélique Montereymard, et le sieur Jacques Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'Yssingeaux le 15 floréal an dix ; contre les sieurs Joseph-Raymond, Bénigne, Alexis-Françoise Saignard-Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; et encore contre George-François-Alexis Laroche-Negly, propriétaire, habitant du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Lardeyrol, intimé. Question principale : Une donation faite au nom d'un tiers, par contrat de mariage, et sans procuration de sa part, est-elle obligatoire pour celui au nom de qui elle est faite ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1746-Circa An 10
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1223
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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Yssingeaux (43268)
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Text
V r
G
MEMOI RE
TRIBUNAL
d ’a p p e l
séant à R io m .
P O U R le citoyen
Je
a n
- P
ier re
B E SQ U E U IL
second, propriétaire, habitant de la ville du P u y,
appelant d’un jugement rendu au tribunal d 'arrondissement de la même v ille , le 2 germinal
an 1 0
C O N T R E l e cit. L o u i s - J o s e p h D E S C O U R S ,
commissionnaire, habitant de la même ville du
P u y , intimé.
U
N commissionnaire qui sc charge de transporter de
l'argent d’un lieu à un autre, et moyennant un salaire,
devient-il responsable des sommes qui lui ont été comptées,
et pour lesquelles il a donné son char geme nt ?
Telle est l'unique question que cette cause présente à
juger.
L e tribunal dont est appel a déchargé ce commission
A
�( 2 )
naire négligent de toute responsabilité , sur le fondement
que le préposé du commissionnaire avoit été arrêté et
volé à main armée.
Il s’agit d’établir, i° . que le vol n’est pas constant ;
2°. que dans le cas même du v o l , le commissionnaire
seroit toujours responsable , parce qu’il n’a pris aucune
précaution pour se garantir des accidens de ce genre ; que
sa négligence est impardonnable; qu’ainsi il ne peut éviter
le remboursement des sommes qui lui ont été confiées.
F A I T S .
L e citoyen Besqueuil de voit faire passer à Lyon une
somme de 6,000 francs ; il s’adressa au citoyen Descours,
commissionnaire, pour faire transporter cette somme de
la ville du Puy jusqu’à celle de Saint-Etienne, où elle
devoit être remise au citoyen Lallier, directeur de la mes
sagerie.
Il fut convenu que le citoyen Besqueuil pnyeroit une
somme de 18 fr. pour le prix de ce transport : c’étoit à
raison de 3 fr. par 1,000, et le prix ordinaire, lorsqu’il
s’agissoit d’une somme un peu considérable.
L e citoyen Descours donna son chargement en ces
termes : « Je déclare avoir reçu le sac ci-dessus énoncé,
» déclaré contenir 6,000 fr. pour faire passer à Saint» Etienne au citoyen Lallier, directeur de la messagerie
» de Saint-Etienne, de conformité i\ la lettre de voiture
•» (Mi date de ce jour. A u P u y , le 20 fructidor an 8.
» Signé Descours. »
Trois jours après la remise de cette somme à Descours,
f
�0
i )
(3)
le citoyen Besqueuil reçut du directeur de la messagerie de
Saint-Etienne une lettre ainsi conçue: « Citoyen, pour
» votre règle , je vous préviens que les 6,000 fr. men» tionnés en votre lettre du 20 du courant , et portés au
» bordereau du citoyen Descours, du 21, ne me sont pas
» parvenus. Je vous salue. Signé Lallier. »
On peut juger de l’inquiétude du citoyen Besqucuil à la
réception de cette lettre : il courut clicz le cit. Descours
pour réclamer son argent; mais il n’en reçut que de vaines
excuses, et se vit obligé de le citer au tribunal d’arron
dissement du P u y , après avoir épuisé les voies conciliatoires, pour être condamné au remboursement de cette
somme.
L a réponse du citoyen Descours, au bureau de paix,
ne fut pas très - satisfaisante , et n’apprenoit rien au
citoyen Besqucuil ; il àc contenta de dire, sans autre expli
cation, que la demande contre lui formée étoit non recevab le, mal fondée et ridicule , ainsi qu’il l’établiroit lors
qu’il en seroit temps.
Devant le tribunal, le citoyen Descours développa sa
défense; il convint que le 20 fructidor an 8 , sur le soir
et a 1 entree de la n u it, après que tous les paquets et effets
destinés a partir le lendemain dans sa voiture, pour SaintElienne, eurent été préparés et enregistrés, le citoyen Bes
quenil lui apporta un sac qu’il déclara contenir la somme de
6,000 fr. tournois en argent; il le pria de lui faire partir
le lendemain cette somme pour Saint-Etienne, et de lit
remettre au citoyen Lallier, à qui elle étoit adressée.
Il reçut le sac tel que celui-ci le déclara, sans l’ouvrir
et sans vérifier ni nombrer les espèces : il en coucha la
A 2
�( 4 )
mention clans son registre, et sur la feuille de voiture.
II ajoute qu’il en donna un récépissé au cit. Besqueuil ;
qu’il renferma le sac, ainsi qu’un autre petit où il y avoit
36 francs, dans un porte-manteau en cu ir, très-solide et
très-bien fermé. Il mit le porte-manteau, le lendemain
matin,dans la caisse de sa voiture : cette caisse très-solide
par elle-même, fut encore fermée î\ clef, et la clef remise
par lui à son domestique chargé de conduire à SaintEtienne la voiture qui étoit chargée de ballots et de mar
chandises.
Ce domestique, dont Descours fait l’éloge , étoit connu,
dit-il, depuis long-temps, et en usage de conduire la même
voiture j très-souvent il l’a conduite chargée de sommes
considérables : sa probité et sa fidélité généralement recon
nues sont à toute épreuve.
Descours rend compte ensuite que sur la route du Puy
à Yssengeaux, entre Saint-ilostieux et le Pertuis, le con
ducteur de la voiture fut arrêté par deux hommes armés
de fusils d o u b l e s , qui avoient la figure masquée; ils cou
chèrent en joue le voiturier, le menaçant de le tuer s’il
faisoit le moindre mouvement, ou s’il poussoit le moindre
cri 5 et tandis que l’un des assassins tenoit le voiturier
c ou ch é en joue, le second monta sur la voiture, vérifia
tout ce qui y étoit, ne trouva rien qui lui convînt, ouvrit
de force la caisse, en sortit le porte-manteau contenant
les deux sacs déclarés, l’un pour 6,ooo fr. l’autre pour
36 francs, jeta le porte-manteau de la voiture en bas, le
chargea sur ses épaules, tenant toujours son fusil d’une
main , rentra avec son camarade dans les bois qui étoient
à une demi-lieue de là, emportant le porte-manteau.
�( 5 )
Cet enlèvement fait devant témoins fut à peine exé
cuté , que les témoins qui n’a voient pas osé avancer, parce
qu’ils n’étoient point armés , et dans la crainte qu’il n’y
en eût encore d’autres dans les bois , coururent vite au
village voisin , après que le vol eut été effectué , pour
demander des secours. La commune de Saint-Hostieux se
mit sous les armes, la garde nationale de ce village de
Saint-Hostieux fit des perquisitions ; les autorités admi
nistratives et militaires du P u y , sur la nouvelle qui leur
fut donnée de cet enlèvement, firent partir en grande
diligence des gendarmes et des militaires de ligne.
L e citoyen Descours lui-même partit pour se rendre à
la poursuite des voleurs : on fit des battues dans les cam
pagnes , dans ¡es k 0js . majs t0U{;es ces recherches ne pro
duisirent autre chose que l’arrestation de deux militaires
déserteurs. La troupe qui les prenoit pour des brigands
Vouloit les fusiller; mais ils furent ensuite reconnus innocens , et renvoyés à leurs corps sous l’escorte de la gen
darmerie. Le citoyen Descours, qui n’avoit rien trouvé,
revint au Puy pendant la nuit, dénonça le vol au com
missaire du gouvernement près le tribunal criminel de la
Haute-Loire. Ce commissaire intima des ordres au juge
de paix de Saint-Julien-Chapteuil, dans le territoire duquel
le vol avoit été commis. Ce juge de paix fit informer ;
1information fut produite par le citoyen Descours.
Tel lut le roman imaginé par le citoyen Descours ,
pour se mettre A l’abri de la demande de l’appelant. Il
soutint que nul ne pouvoit être garant des événemcns
qu’il étoit impossible de; prévoir ou' d’éviter. Il argu
menta encore d’un procès verbal dressé par les officiers
�\q %
( 6 )
municipaux de St. Hostieux, que l'on aura bientôt occa
sion d’analyser.
L e citoyen Besqueuil répondit que rien ne prouvoit
le prétendu vol ; qu’en point de d ro it, le commission
naire étoit responsable de tous les dépôts dont il étoit
chargé ; qu’il étoit tenu de la faute légère, et que le
citoyen Descours avoit à s’imputer la négligence la plus
grossière.
La cause, en cet état, portée à l’audience du tribunal
du P u y , le 14 messidor an 9 , il fut rendu un premier
jugement interlocutoire qui ordonna , avant faire d ro it,
que le citoyen Descours feroit preuve tant par actes que
par témoins, que le vol dont il s’agit avoit été commis
par force et violence, le 21 fructidor an 8, sur la grande
route du P u y à Yssengeaux, entre St. Hostieux et le
Pertuis, sauf au citoyen Besqueuil la preuve contraire.
En exécution de ce jugement, le cit. Descours a faitentendre plusieurs témoins.Il n’avoit pas oublié Christophe
Maclaux, son domestique, qui prétend avoir été volé;
mais le tribunal dont est appel a rejeté sa déposition.
Avant de rendre compte des déclarations des témoins,
il est nécessaire de faire connoître le procès verbal qui
fut dressé par les officiers municipaux de St. Hostieux.
L e procès verbal, en date du 21 fructidor an 8, fait
mention « que les maire et adjoint ont été appelés par
<r le citoyen Bonnet , capitaine de la garde nationale,
« qui a déclaré qu’on avoit assassiné un voiturier sur la
« grande route , entre St. Hostieux et le Pertuis. Ce
« voiturier nommé Christophe Maclaux, a déclaré qu’011
« lui avoit enlevé la somme de 6,036 IV. renfermée dans
�\ob
( 7 )
* deux sacs, l’un contenant 6,000 fr. et l’autre 36 fr. que
« le tout étoit dans un porte - manteau déposé dans la
« caisse de la voitui’e qu'on a enfoncée; qu’on a enlevé
« une partie de la serrure du coffre. Les officiers muni« cip a u x, pour s’assurer du fait, se sont fait représenter
« la voiture, en présence de plusieurs témoins, parmi
« lesquels se trouve Laurent M ontcoudiol, fils à Pierre,
« qui a dit être présent audit vo l; que les voleurs étoient
« au nombre de d e u x , munis chacun d’un fusil à deux
«■coups; qu’ils étoient barbouillés l’un de noir et l’autre
« de rouge : habillement, veste bleue, chapeau retapé ;
« et l’autre, la veste café, chapeau rond. Les officiers
« municipaux interpellent Jacques Champagnac, habitant
« de Vallogères , qui déclare avoir vu deux hommes,
« avec des iusils, qui chassoient, qui portoient des liabille« mens étrangers; 1 un veste bleue, chapeau retapé, et
« l’autre veste café, chapeau l'ond ; les ayant vus un quart
« d’heure environ avant le vol quia été fait cejourd’hui,
« entre dix et onze heures du matin.
«
«
«
«
*
«
«
«
«
« On demande k Christophe Maclaux, s’il connoissoit
les voleurs, et de quelle façon ils étoient habillés : il
répond qu’il ne les connoissoit pas; qu’ils étoient marques 1 un ro u ge, l’autre noir: habillement, l’un veste
bleue, chapeau retapé : et l’autre noir ; habillement,
veste calé, chapeau rond. Tous deux paroissoient étrangers ; ils étoient armés d’un fusil à deux coups chacun.'
« E n fin , il est dit que le citoyen Bonnet, capitaine
de la garde nationale , ayant élé instruit du v o l , a
invité plusieurs de la garde pour aller à la poursuite
des voleurs, sans avoir pu les atteindre ».
�(8 )
On voit que ce procès verbal , dont on s’est entretenu
jusqu’à la satiété devant Jes premiers juges, ne contient
que des déclarations, et ne constate aucun fait, ne fait
pas même la description de l’état de la voiture, et ne dit
autre chose, sinon qu’on a voulu aller h la poursuite des
prétendus voleurs , et qu’on n’a pu les atteindre.
L e lendemain 22 fructidor, le citoyen Descours fit sa
dénonciation au commissaire près le tribunal criminel ; il
indique pour témoins Laurent Montcoudiol fils, Jacques
Champagnac, le cit. Charreyre et M aclaux, son domes
tique. Le commissaire arrête qu’il en sera informé pardevant le juge de paix du canton de St. Julien-Chapteuil. Il a été en effet procédé à cette information, dont
le citoyen Descours a fait donner copie dans le cours de
l’instance.
Comme les témoins de l’information sont les mêmes
que ceux qui ont déposé en l’enquête, on rendra compte
de leurs premières déclarations, pour les comparer avec
celles de l’enquête.
Jacques Champagnac dépose que le 21 fructidor an 8,
étant à garder une c h è v re , il entendit crier sur la route
le nommé Christophe Maclaux qui se plaignoit3ctnesavoit
où passer; que s’étant approché de lu i, il lui dit que deux
hommes masqués, armés d’un fusil double chacun , lui
avoient volé plus de 6,000 fr. L e déclarant vit que la
voiture avoit été déchargée , qu’il y avoit des paquets
par terre; que la serrure du coffre avoit été forcée et
la planche de dessus enlevéo; que les doux qui la tenoient
avoient sauté de force; il déclare aussi qu’environ demiheure avant, il vit deux hommes qu’il crut des chasseurs,
dans
�\oS
dans une terre tout proche de la route où ledit Maclaux
fut arrêté; qu’ils étoient armés chacun d’un fusil double ;
l’un d’eux étant habillé en bleu, chapeau retapé, et l’autre,
chapeau rond abattu, habillé couleur de café : mais il ne
les connut pas, soit qu’ils fussent étrangers, ou à cause de
l’éloignement d’environ quatre portées de fusil.
Ce même Jacques Champagnac, lors de l’enquête,
dépose que le jour désigné dans le jugement, il vit deux
personnes paroissant chasser vers les dix, heures du matin,
auprès de la grande route, près d’un- moulin appartenant
au citoyen G in o u x , armés chacun d’un fusil double , et
habillés • l’un en,veste courte , couleur verte , chapeau,
retapé et à l’ordinaire, et. l’autre ,un peu plus grande
aussi en .veste courte, couleur canelle , chapeau rond ou
abattu ; qu il vit dans le même, temps la voiture du çitl
Descours , conduite par son domestique ; que cíes prétendus
chasseurs rodèrent un moment, lorsqu’il rles .perdit de
v u e , ainsi que l a :voiture du citoyen.Descours qui continuoit sa route, à:,cause d’un tertre qui lui cachoit la
grande route ; lorsqu’un moment après, envirjon un quart
d!heure, il entendit crier le. vo itu rier, en disant : Que
deviendrai-je ? que lui déposant, courut à son secours,
et fut bien surpris, lorsqu’il vit qu’il y avoit trois ballots
par terre, près de la voiture ; que les barres ainsi que la
serrure de la caisse étoient cassées.
v
>
■
■
Il demanda au voiturier qui avoit occasionné tous ces
desordres : celui-ci répondit qu’il venoit d’être volé par
deux personnes armées de fusils doubles, qui avoient jeté
les ballots par ten;e, fracturóla caisse, et avoient enlevé
6,000 fr. Le témoin ayant représenté au voiturier, pour-
�Vil
( 10 )
quoi il n’avoit pas crié de suite au secours ; c’est parce
q u e ,lu i dit-il, il avoit toujours été tenu couché en joue
par l’un d'eux, tandis que l’autre fouilloit et renversoit
les ballots. Le témoin ayant encore demandé, pourquoi
il n’avoit pas crié lorsqu’on l’eût quitté à plus d’une portée
de fusil , le voiturier répondit qu’on l’avoit menacé de
le tuer à son retour, s’il crioit avant qu’ils l’eussent quitté.
L a différence* entre les deux dépositions du môme
témoin est remarquable. L e 8 vendémiaire an 9 , dans
un temps très-rapproché du prétendu v o l, c’est-à-dire ,
moins d’un mois après, Champagnac est fort bref dans
sa déclaration. Les deux hommes qu’il a vus le 8 vendé
miaire , étoient habillés l’un couleur bleue, et l’autre
douleur café. Dans la déclaration de l’enquête, ils étoient
habillés l'un couleur verte, et l’autre canelle. Dans la
première., il avoit vu les chasseurs, une d em i-h eure
avant le vol ; dans la seconde , il les aperçoit, et le vol
est fait en moins d’un quart d'heure ; c’est-à-dire , que
ces deux hommes qu’il avoit vus de loin et à quatre por
tées de fusil, joignent la voilure qui passoit près de lui:
tin tertre lui dérobe la vue de la voiture et des hommes;
et dans moins d’un quart d’heure, une voiture est dé
c h a r g é e , fracturée, volée, lés voleurs ont emporté l’ar
gent dans les bois qui sont éloignés de là; et le voiturier
se trouve tout seul, déplorant son sort, ot racontant sou
malheur.
Quelque expéditifs que soient les voleurs, il est impos
sible qu’un seul homme ait fait tant de choses en si peu
de temps, puisqu'ils n’étoient que deux j et que l’un ne
faisoit autre chose que de Coucher en joue lû voiturier y
�•{o7
'( ' « )
îe jeune Montcoudiol et une a u t r e personne, ainsi qu’on
va le voir bientôt dans la suite de l’enquête. A "moins
que d’imaginer que le voiturier a Iui-mênie:àidéle voleur,
on ne fera jamais croire q u e ‘cela ait pu être fait si vite.
Jacques Charreyre, second témoin, prend la qualité
de voiturier dans l’information, celle de marchand quin
caillier dans l’enquête; et il déclare, lors de l’informa
tion , que le 21 fructidor an 8 , sur les neuf à dix
heures du matin, il alloit dans la route du côté d’Yssengeaux ; lorsqu’il fut au-dessus du lieu de Saint-Hostieux,
il vit à son devant deux hommes qui avoient arrêté la
voiture du citoyen Descours ; ils étoietit’ arflvës* d’un fusil
double chacun, il ne lit pas''attention à ifeiir ItabiÏÏeriaehh
L ayant aperçu ve n ir, l’un ‘d& ces" 'iricôrtnus lè coucha
en jo u e , lui disant: A r r ê t e , sinon je te'tire un coup de
fusil, et si tu bouges tu es mort. L ’aüfre tenoit aussi en
joue la voiturier, en lui demandant la clef et:ïui disant
qu’il sa voit qu’il portoit de l’argent k
, ‘qu’il rie vit pas s’ils
prirent de 1 argent ou non, mais sitôt^qu’ils eurent dis
paru , il continua sa route.
Lors de 1 enquête , il dépose que le môme jour 21 fruc
tidor, allant à. Lyon pour fait de son commerce, étant
dans la commune de Saint-IIostieux et sur la grande
route, entre un moulin et une petite maison qui se
trouvent au bas de la côte de Pertuis, il vit, environ trente
pas au-devant de l u i , une voiture arrêtée, au-devant de
laquelle il aperçut un homme armé d'un fusil double,
ayant un chapeau abattu sur la ligu re, qui coiichoit en
joue le voiturier, et un autre homme dans la voiture
qui jetoit des ballots par terre; que ne s’imaginant pas
B a
�V
( 12 )
que ce iïït d e s voleurs, il avança encore un peu, lorsqu’on le
covic^a en joue lui-même, en lui criant : Arrête ou je te tue;
qii’en çffetil s'arrêta et entendit qu’on demandoit la clef au
voiturier qui répondoit qu’il n’en avoitpoint; que d’ailleurs
ce n’étoit pas la recette, que c’étoit des objets de mar
chands; qu’il disoit qu’on lui faisoit un grand tort: qu’alors,
Jui déposant tâcha de rétrograder chemin, ce qu’il ût
au moment où ils ne s’en aperçurent pas; qu’il courut
au galop au village de Saint-Hostieux, où il ne trouva
que quelques femmes à qui il fit part de ce qu’il venoit
de voir; qu’elles lui répondirent que cela ne pouvoit pas
p tre, que c’étoit peut-être des jeunes gens qui clierchoient
de la poudre pour aller s’amuser à Rosières 011 étoit ce
jour la fête baladoire ; qu’il n’y avoit d’ailleurs point
d’hommes dans ce moment pour donner des secours:
qu’il resta environ trois quarts d’heure; lorsqu’il repartit,
surtout en voyant qu’il n y avoit plus de danger , parce
q u ’ il vit q u ’ il venoit d’ autres étrangers qui lui dirent
avoir rencontré le voiturier seul avec un jeune homme
qui se plaignoit d’avoir été volé; que lorsqu’il repassa,
il rencontra encore le voiturier avec sa voiture et deux
ballots par terre ; que le voiturier pleuroit et se plaignoit
de ce qu’on lui avoit enlevé quatre-vingts livres pesant
e n vi ro n d ’a r g en t ; que lui déposant, n’ayant pas le temps
de s'arrêter, donna au voiturier une adresse de lettre
pour le rappeler de son nom , au cas qu’il eut besoin de
le faire témoigner.
(Jette seconde déclaration ajoute infiniment à la pre
mière. Jacques Charreyre, très-bref dans son premier
récit, voit deux inconnus dont fa n le couchoit en joue
�u
C X3 5
et l’autre tenoit aussi en joue le voiturier, en lui deman
dant la clef; il étoit à portée et de voir et d’entendre :
comment se fait-il que dans la seconde déclaration il n’y
ait qu’un des voleurs pour coucher en joue e lle voiturier
et le m archand, et que l’autre soit dans la voiture à jeter
des ballots? Charreyre n:a rien dit devant le juge de paix
de sa conversation avec le voiturier, ni de son voyage à
Saint-Hostieux. Comment se fait-il encore qu’il ne trouve
que des femmes dans tout un village, et qu’on ne veuille
pas croire à son récit? Des voleurs qui choisissent pour
le lieu de la scène un endroit près d’une maison à côté
d’un village; deux hommes qui en imposent à tant d’autres,
qui arrêtent un voiturier qui avoit avec lui une autre
personne, qUi avoit vu un homme tout à côté, qui voient
encore arriver un marchand, et cela en plein jour, à
dix heures du matin : tous ces faits passent la vraisem
blance. Ce qu’il y a de plus remarquable encore, c’est que
ce voiturier avoit avec lui un jeune homme , et ni
Champagnac, ni Charreyre ne font mention de cette cir
constance qui devoit les frapper.
Ce jeune homme est Laurent Montcoudiol. Il a été
entendu devant le juge de paix et dans l’enquête. Il est né
le 9 octobre 1788; c’est-à-dire, qu’il n’avoit pas encore
dix ans lorsqu il a déposé ; il s’en donne quatorze à quinze
lors de 1information. Il déclare que le jour cotté, étant
parti du Puy ou il restoit à l’école, il voyageoit dans la
voiture du citoyen Descours , conduite par Christophe
Maclaux , son domestique. Etant tous les deux dans la
voiture et arrivés au-dessus du moulin de St. Hostieux ,
survinrent tout à coup deux hommes armés d’un fusil
�( 1 4 ')
double chacun, l’un desquels pouvoit être de la taille de
4 pieds 6 pouces, l’autre plus grand; tous les deux âgés
d’environ 2 5 ans; le petit vêtu d’une veste couleur café,
chapeau rond ; le grand habillé d’une veste couleur bleue,
cliapeau retapé. L e petit leur dit, en les couchant en joue:
Arrête là, coquin, ou tu es mort: tu portes l’argent de la
recette. Maclaux leur ayant répondu qu’il ne portoit pas la
recette, il continua de le tenir en joue, et l’autre jeta les
paquets et ballots qui étoient dans la voiture. Sur les
plaintes que faisoit Maclaux qu’on lui faisoit tort, il lui
répondoit : Si tu parles tu es mort. Qu’ayant forcé la serrure,
parce qu’il n’avoit pas pu ouvrir avec la clef que l’un
d’eux avoit prise dans les poches de la voiture, il ouvrit le
coffre, prit le porte-manteau qui y étoit, et l’emporta jus
qu’à environ cent pas, et ensuite il appela l’autre qui tenoit
toujours le voiturier en joue en reculant ; que les deux
inconnus ayant passé du côté du bois du Pertuis, ce témoin
courut v i l e du côte de St. Ilosticux pour appeler du
secours ; il ne trouva que deux bergers qu’il ne cormoît pas.
Lors de l’enquête, ce même Montcoudiol se dit âgé de
quinze ans; il partit de la ville du Puy ce jour cotté pour
aller chez ses parens , et prit place dans la voiture du
citoyen Descours. Cette voiture fut arrêtée entre SaintIlostieux et le Pertuis, vis-à-vis un moulin, par deux
hommes qui lui parurent être des chasseurs. L ’un avoit un
chapeau abattu ou rond, et l’autre un chapeau relevé. Ils
avoieut l’un et l’autre la figure noircie avec des mûres sau
vages, (circonstance nouvelle dont aucun témoin n’avoit
parlé jusqu’ici ). Ils invitèrent le charrelier à s’arrêter, et
lui déposant, à descendre; ils demandèrent l’argent de la
�tir
( i 5 )
recette au v o i t u ri er , en le tenant en joue, et ordonnèrent à
lui déposant, de se retourner de l'autre côté en le tenant
aussi en joue; il fit tout ce qu’on lui dit de faire. Le voi
turier avoit beau dire à ces gens-là qu’il n’apportoit point
l’argent de'la recette, ils voulurent toujours voir ce qui
étoit dans le caisson, et demandèrent la clef ; le voituricr là
refusa toujours. Ces gens-là fouillant, trouvèrent la clef
clans une des poches de la voiture ; mais n’ayant pas su
o u v rir, celui qui fouilloit ainsi leva avec ses deux mains
le caisson et brisa la serrure. Ils trouvèrent un porte-man
teau où il y avoit de l’argent et des lettres; ils rendirent les ’
lettres d’après l’observation du voiturier, qui leur dit que
c étoient des lettres de marchands : car les voleurs obser
vèrent que s’ils croyoient que ce fussent des lettres contre
les requisitionnaïres, iis ne les rendroient pas; ensuite celui
qui avoit pris le porte-manteau s’en fut, laissant toujours
son camarade tenant en joue le voiturier et lui déposant ;
mais l’autre voleur s’étant aperçu que son camarade plioit
sous le poids du porte-manteau, il alla le joindre, portèrent
ensemble le porte-manteau, et passèrent du côté à la droite
du Pertuis. Pendant toute cette scène il vint un homme à
cheval qui s’approcha presque de la voiture; il a su depuis
que-c’étoit le marchand du JVlônastier, ( Cliarreyve), qui
a deja déposé, lequrl lutoussi mis en joue par celui qui les
tenoit de mêm e, et qui hii cria: Arrête ou je te tue ; que cet
étranger rebroussa chemin un moment après, et s’enfuit au
galop. Il ajoute encore qu’environ à soixante pas de l’en
droit ou fut arretee la voiture, et lorsque le voiturier fut
libre de pouvoir crier> il parut un homme qui vint lui
proposer du secours, et lui faire des reproches de ce qu’il
n’avoit pas crié plutôt-
�)\ X
C 16 )
Il passa, un moment après, deux voyageurs qu’ils priè
rent d’aller avertir Bonnet, du Pertuis, de vouloir bien
descendre tout de suite. Lui-même se rendit à St. Hostieux
pourchercher du secours;mais ilne trouva personne,parce
que tous les gens étoient à la messe. Aussitôt que Bonnet,
du Pertuis, fut descendu, ils montèrent ensemble la côte ;
on envoya chercher les maire et adjoint de la commune,
on dressa procès verbal de ce qui s’étoit passé, et il signa
ce procès verbal.
Ces trois témoins seulement ont été entendus lors de
l’information et de l’enquête. Leurs déclarations n’ont
entr’elles aucune ressemblance j aucun des trois, pas même
Montcoudiol, n’avoit dit devant le juge.de paix que ces
voleurs avoient la figure barbouillée avec des m vires,*
Montcoudiol ne se rappelle cette circonstance q u e lors
de l’enquête: elle auroit dû cependant frapper davantage
un enfant, et lui inspirer plus d’effroi.
Lors de l'information , il t ro uve deux bergers à SaintHostieuxj lors de l’enquête il ne trouve personne; tout le
m onde, dit-il, étoit à la messe ; et cependant, bien vérifié,
le 21 fructidor de l’an 8 étoit un lundi. Lors de l’infor
mation, Montcoudiol ne fait aucune mention de la ren
contre de Charreyre; il s’en rappelle lors de l’enquête. Lo
même voleur tenoit trois personnes en joue ; et suivant
Charreyre, l’un des voleurs couchoit en joue le voiturier,
et l’autre faisoit à lui la même menace. Comment se fait-il
que Charreyre n’ait pas vu cet enfant et n’en ait pas parlé?
Pourquoi un des voleurs, lors de l’information, emportoitil l’argent avec agilité, et comment se fait-il que, lors
de l’enquête, il succombât sous le poids?
L ’enquête
�( 17 )
L ’enquête a été enrichie de plusieurs autres déclarations
qui ne se trouvent point dans l’information. Bonnet ,
aubergiste, l’un d’eux, déclare que le jour que la voiture
de Descours fut volée au bas de la côte du Pertuis, il
apprit cette nouvelle par un étranger qui passoit, qui lui
dit qu’on venoit de piller la voiture appartenante à Des
cours; qu’il monta aussitôt à cheval; qu’il trouva encore
levoiturier sur le chemin, qui se lamentoit; qu’il y avoit
même encoi'e des ballots par terre ; qu’il se décida de
suite à faire conduire la voiture et les effets jusque chez
l u i , et il fit appeler le maire et autres personnes. On dressa
procès verbal; lui et d’autres allèrent de suite battre les
bois voisins pour chercher les voleurs, mais leur recherche
fut infructueuse.
Ce témoin, comme l’on vo it, ne parle que d’après la
déclaration qui lui a ¿té faite par le domestique de Dcscours , et n’a rien vu par lui-même.
Un autre témoin, Etienne D elorm e, n’a su le vol que
vers midi; Bonnet, aubergiste, vint le lui annoncer en
lui disant qu’il falloit battre les bois, ce qu’ils firent toute
la journée infructueusement. Il apprit seulement par le
domestique de Descours chez Bonnet, que deux hommes
noircis avec des mûres de buisson l’avoient volé et menacé
de le tuer.
Claude Montchamp , autre témoin , fut requis par
Bonnet, en sa qualité décommandant de la garde natio
nale , pour faire la recherche des voleurs dans les bois ; ce
qu’il fit pendant tout le jour sans fruit. Il vit ù l’auberge de
Bonnet la caisse de la voiture cassée, et le domestique
de Descours qui se lamentoit et pleuroit comme un enfant.
C
�C 18 )
Sébastien P radin e, autre témoin, aperçut le jour où
le vol fut commis, et sur les dix heures du matin, deux
h o m m e s armés, marchant très-vite et prenant le chemin
de Chazeaux, en passant par le bois appelé la Bromadoire. Une heure après, B onnet, commandant de la garde
nationale, vint le requérir pour battre les bois et attraper
les voleurs ; il fit une recherche inutile ; il vit chez Bonnet
le caisson de la voiture fracturé, et le domestique pleurer
et se lamenter.
François Gavier, autre témoin, sait seulement que le
jour du vo l, Bonnet, commandant, vint le requérir ; il
obéit ; il sut par le domestique de Descours qui conduisoit la voiture, qu’il avoit crié, mais qu’on l’avoit me
nacé d’être tu é , s’il crioit davantage ; il vit aussi la voiture
et le caisson fracturé.
Jean G in ou x, autre témoin, raconte que Bonnet, sur
les onze heures du matin , le jour cotté, lui annonça
qu’on venoit de détrousser la voiture de Descours, pas
bien loin de chez lui ; il se rendit aussitôt avec Bonnet
auprès de la voiture dont il vit qu’on avoit enlevé
de force le couvert du caisson , et qu’on avoit jeté des
ballots par terre; il aida à relever les ballots, et accom
pagna la voiture jusque chez Bonnet; on fit appeler les
inaire et adjoint qui dressèrent procès verbal en sa pré
sence ; on décida de faire une battue dans les bois, surtout
du côté du bois de Fauchet, où le voiturier disoit que
les voleurs avoient passé. Il remarqua que le voiturier
étoit Tort chagrin de l’événement qui venoit de se passer.
Etienne Cliapuis, maire de Saint-llostieux , autre téijioin, déclare que le 21 fructidor an 8 , il étoit pour
�( 19 )
affaire d’administration à la commune de St. Julien-Chapteuil; que vers les deux ou trois heures de relevée, il reçut
une invitation, de Bonnet de se rendi’e de suite au Pertuis
pour dresser procès verbal du vol qui s’étoit commis
vers les dix heures du mptin, entre le Pertuis et SaintH ostieux, sur une voiture appartenante au citoyen
Descours, commissionnaire du P u y ; qu’en effet il partit
de suite, et étant arrivé au Pertuis il y trouva le domes
tique du citoyen Descours qui lui raconta que deux hommes
armés de fusils l’a voient volé entre Saint-Hostieux et le
Pertuis ; qu’il avoit été tenu en joue pendant tout le temps ;
qu’un des voleurs voloit le caisson dont il avoit enlevé
le couvercle, n’ayant pas voulu donner la clef qu’on lui
avoit demandée en le couchant en joue ; qu’il avoit em-»
porté un porte-manteau où il y avoit 6,036 francs d’ar
gent; de ce dont le témoin, dressa procès verbal avec son
adjoint et plusieurs autres.
L ’autre témoin est le citoyen Peyrin , adjoint; sa dé
claration est conforme à celle du précédent, avec cette
diftérence qu’il demanda au domestique de quel pays les
voleurs paroissoient être; qu’il avoit répondu qu’ils ne
paroissoient pas être du pays.
On voit dans cette enquête, que si on excepte Charreyre
et Montcoudiol, les autres témoins ne parlent que d’après
la déclaration de Maclaux, domestique; les deux témoins
qui parlent de visu , ont déposé d’une manière contra
dictoire , et n’ont pas d it, lors de l’enquête, ce qu’ils
avoient déclaré lors de l’information.
Quelle confiance, surtout, pouvoit mériter la décla
ration de M ontcoudiol, d’uu enfant qui 11’étoit pas âgé
C a
�.y|*!
C 20 )
cíe dix ans, lorsqu’on l’a fait entendre, puisqu’il n’est né
que le 9 octobre 1788? Est-il vraisemblable que des vo
leurs eussent choisi un lieu aussi près du village de SaintIiostieux ? Le domestique, après le v o l , ne pouvoit-il pas
courir après les voleurs , appeler du secours dans les
villages qu’ils avoient à traverser, dVprès la direction
qu’il leur fait prendre pour gagner les bois du Pertuis;
le jeune Montcoudiol, lui-même ne pouvoit-il pas aller
demander du secours à Saint-Iiostieux?
Le citoyen Besqueuil fit signifier ses reproches contre
plusieurs témoins de l’enquête ; mal à propos le domes
tique avoit été entendu en déposition; il déposoit dans
sa propre cause ; il étoit le domestique du défendeur :
dès-lors sa déclaration devoit être rejetée.
Montcoudiol n’avoit pas l’age requis, il étoit impubère;
et d’après la loi 3 , §. lege, auiF. de test, il étoit hors detat
de faire sa déclaration.
A u fond, le citoyen Besqueuil soutint, d’après la dis
position des lois et la jurisprudence des arrêts , que le
commissionnaire en général est responsable de tous les
dépôts dont il est chargé ; que l’exception de la force
majeure n’étant pas absolue, elle dépend des circonstances:
la plus légère faute, la plus petite négligence fait disparoître l’exception ; le commissionnaire est tenu de la faute
même légère, surtout lorsqu’il reçoit un salaire.
Dans l’espèce, le prétendu vol étoit invraisemblable; il
n'éloit pas prouvé : dans tous les cas, c’eût été au citoyen
Descours h se reprocher de n’avoir pas pris de plus grandes
précautions pour l’éviter. Gomment deux hommes, i\ dix
heures du matin, très-près d’un village considérable j
�Il*
r( 2T )
auroient-ils eu l’audacc de l’entreprendre ? Comment
auroient-ils pu l'effectuer ? ils avoient un long trajet à
faire pour gagner les bois, un poids considérable i\ porter,
sous lequel l’un d’eux succomboit. I æ voiturier pouvoit
se défendre , et avoir du secours avec la plus grande faci
lité : un seul homme qui l’auroit accompagné auroit rendu
le vol impossible.
En vain le citoyen Descours vouloit-il rappeler^pour
donner plus de vraisemblance au vol, que le cit. Besqueuil
lui-môineavoit été arrêté i\ son retour de Lyon par quatre
hommes armés.
Celte arrestation du citoyen Besqueuil, loin de justifier
le citoyen Descours, ne faisoit que prouver la nécessité
d une plus grande précaution de sa p a rt, et établissoit la
faute grossiere qui le rend responsable.
Aussi le citoyen Descourg , qui sentoit toute la force
du reproche, prétendoit-il que le salaire n’étoit pas assez
considérable.
L e citoyen Besqueuil répondit que 3 fr. par 1,000 étoit
le taux le plus considérable; il établit que lui-même Bes
queuil, en l’an 7 , dans des circonstances plus difficiles, à
lepoque ou les brigands enlevoient à main armée les
caisses publiques, et infestoient la route du Puy Monistr o l, ou ils enlevèrent la recette du Puy, malgré le convoi
de troupes qui lescortoit, il se chargea de porter à ses
risques et fortune, du P u y à Grenoble, une somme de
40,000 fr. moyennant une provision de deux pour cent;
eest-à-dire, de la porter à une distance de plus de qua
rante lieues dans des routes difficiles, tandis que le citoyen
Descours n’avoit qu’une traversée de moins de deux jours
pour arriver à sa destination-
�‘
.I
( 22)
La provision de 3 fr. par 1,000 étoit donc un salaire
suilisant , puisque pour un tiers pour cent de provision ,
les banquiers prennent sur la place tout le papier dont
on a besoin, et i\ trois mois d’écliéance , avec garantie
du papier. •
Pourquoi d’ailleurs le citoyen Descours avoit-il déposé
cet ai’gent dans un porte-manteau , et dans une caisse aussi
frêle que celle de sa voiture ? L ’usage de tous ceux qui
voiturent de l’argent, est de le renfermer dans une malle
bien ferrée, attachée avec des écrous à la voiture; et
certes si le citoyen Descoursavoit eu une malle semblable,
le vol eût été impossible.
L e citoyen Besqueuil reproclioit encore au domes
tique voiturier d’avoir répandu sur toute la route qu’il
portoit de l’argent, d’avoir rencontré des hommes qui
avoient eu une querelle à la barrière du Puy , et qui portoient des marques ensanglantées, et de les avoir invités
à répandre qu ’ ils avoient été arrêtés par des voleurs entre
le Pertuis et Saint-LIosticux.
Malgré ces circonstances et les moyens de droit qui
furent développés , le tribunal dont est appel, par son
jugement du 2 germinal an 10, statuant sur les reproches
proposés contre les témoins par le citoyen Besqueuil, sc
contenta de rejeter la déposition de Maclaux , voiturier,
et laissa subsister celle de Montcoudiol, impubère , et
prononçant sur le fonds;
Considérant qu’il est clairement prouvé tant par l’en
quête que par le procès verbal et l’information des 21
fructidor nu 8 , et 8 vendémiaire an 9 , que le domesti
que de Descours conduisant sa voilure , a été arrêté,
�( s3 )
couché eu jo u e , et menacé d’être tué par deux hommes
masqués, armés chacun d’un fusil double ; que ces hommes
ont jeté les ballots de la voiture en bas ; qu’ils ont forcé
les fermetures et serrure de la caisse de la voiture; qu’ils
ont pris et emporté le porte - manteau qui contenoit
l’argent ;
Considérant qu’en général, en point de droit, nul n’est
garant des événemens arrivés par force majeure, et que
le principe est encore confirmé par l’art. X X I V de la
proclamation du 10 avril 179 1, et par la loi du 9 nivôse
an 3 , relative à l’agence des fermes et messageries ;
Débouta le citoyen Besqueuil de sa demande , et le
condamna aux dépens.»L e citoyen Besqueuil a interjeté appel de ce jugement.
On sent combien cette cause est importante dans son objet,
mais elle n est pas dillîcîle dans sa solution.
Tout commissionnaii-e , conduct eur de messageries ,
hôteliers, aubergistes, sont responsables des vols qui se
commettent dans leur auberge ou dans leur voiture. La
loi connue sous le titre nautœ caupones, au iF. Üv. I V ,
tit. I X , est celle qu’on cite avec avantage dans cette ma
tière. A itp r e to r , nautœ caupones stabularii quod eu ju s
que salvum f o r e receperinl n isi restituent, in eo sju d icium daho. Il est ajouté §. I: M axim a utilitas est fiujus
ed ieti, quia necesse est plerunique eorum fideni sequi
et res custodiœ eorum comrnittere. N e quisquam putet
graviter hoc adversùs eos constitution j nam est in
ipsorum arbitrio ne queni recipiant : et n isi hoc esset
statuturn m atena daretur cuni ju r ib u s adversùs eos
quos recipiunt coeundi- cum ne nunc quidam abstineant
hujus jnodi Jraudibus,
�( *4 )
Telle est la sagesse du législateur, qu'il semble prévoir
ce qui n’arrive que trop ordinairement, que les messa
gers s’entendent avec les voleurs. Personne, dit-il, n’a
droit de se plaindre de la rigueur de cette loi : les mes
sagers ne sont-ils pas les maîtres d’accepter ou de refuser.
Mais s’ils acceptent, ils deviennent responsables, puisqu’on
est obligé de suivre leur foi ; que le dépôt devient néces
saire, autrement ce seroit leur donner l’occasion de s’en
tendre avec les voleurs.
C ’est donc précisément dans le cas d e 'v o l que la loi
établit la responsabilité du dépositaire.
On trouve encore au ff. liv. X I I I , lit. V , commodati
vel con trit, la loi V , § . I I , qui décide que le dépositaire
qui reçoit un salaire est tenu de tous les périls. E t qu idem in contractibus interdùm dolum solu m , inierdùm
et culpa?n pnvstam us : dolum in deposito ,* nam quia
nulla utïlitas cjus versatur apud quem depomtur rnerito dolus prœstatur soîus , m si fo r te et merces accessit.
Tune enini ut est et constitutinn etiam cuïpa exhibetur.
Cette disposition est juste : celui qui reçoit un dépôt
volontaire et gratuit ne peut être garant des événemens;
ce seroit trop rigoureux*, la loi ne le rend responsable
que du dol :mais pour celui chez qui le dépôt est néces
saire , qui reçoit une provision, un salaire pour cet objet,
il est tenu de tous les périls, même de sa faute.
Les tribunaux ont toujours maintenu avec la plus grande
sévérité fexécution de ces lois: ce seroit autrement com
promettre la vie et la fortune des citoyens. Les recueils
d’arrêts sont pleins de décisions semblables. Maynard ,
liv. V III, clinp. L X X X I I et L X X X I I I , rapporte plusieurs
arrêts
�(25 }
ortêts qui ont toujours rendu l’hôtelier responsable des
vols qui se commettoient dans son hôtellerie. Un entr’autres condamna l’hôtelier , quoique le vol eût été
commis par des voleurs étrangers venus du dehors pen
dant la nuit, et qui avoient emporté les objets volés par
un trou qu’ils pratiquèrent à la muraille. Charondas en
ses réponses, liv. X , chap. V I I I , a recueilli un arrêt du
parlement de Paris qui a jugé de la même manière.
La jurisprudence de la ci-devant sénéchaussée d’A u
vergne étoit également très-rigoureuse. Un jugement
solennel du 21 août 1784 , rendu sur la plaidoirie des
citoyens V ern y et Pagès, décida qu’un ouvrier étoit res
ponsable des vols qui se commettoient chez lu i, quoiqu il y eût effraction extérieure. Les parties étoient le
citoyen Cornudet, officier déganté de cette ville de R iom ,
et le nommé Jasse , tisserand. On avoit volé chez ce der
nier trois pièces de t oil e, et pour s’ introduire dans sa
boutique qui étoit un souterrain, les voleurs avoient fait
sauter un gond incrusté dans le m u r , et avoient coupé
une corde qui servoit de fermeture au volet. Cette effrac
tion étoit constatée par un procès verbal du juge de
police ; cependant le tisserand fut condamné à payer la
toile volée. On jugea q u ’il y avoit au moins de la négli
gence de sa part, pour n’avoir fermé son volet qu’avec
une corde , quoique l’enlèvement du gond eût vendu
tout autre précaution inutile. Il 11’y avoit ici que la
faute légère, et cependant l’ouvrier fut responsable. Le
jugement lut approuvé dans le temps par tous les juris
consultes; on pensa qu’il étoit conforme aux principes;
qu’il importoit à la sûreté publique d’etre infiniment
D
�a26)
rigoureux dans ces matières, afin d’obvier aux fraudes
qui p o u v o i e n t se commettre.
L e citoyen Descours a donc le principe contre l u i ,
les premiers juges en conviennent ; il est commissionnaire ;
il se charge habituellement du transport d’argent, moyen
nant une rétribution; il est donc responsable des pertes
qu'il éprouve.
• • •
Peut-il se placer dans l’exception qu’il invoque ? y a-t-il
ici force majeure qu’il ne pouvoit éviter ni prévoir ?
peut-il invoquer l’art, X X I V de la proclamation du 10
avril 1791 ? Cette proclamation a pour objet le service des
‘ messageries nationales, coches et voitures deau. L ’art, cité
porte: « Ne seront tenus lesdits fermiers de répondre des
« événemens occasionnés parforce majeure ou causes
« impossibles ¿1 prévoir, ainsi que par défaut d’embal« lage ou de précautions quelconques qui dépendent des
cc particuliers intéressés , et dont mention devra être faite
« en leur présence dans l’enregistrement ». La même dis
position est répétée dans la loi du 29 nivôse an trois, égale
ment invoquée par l’intimé.
I/exception se réduit donc aux événemens occasion
nés par fo rce majeure et causes impossibles à prévoir.
O r , dans l’espèce particulière, il n’est pas prouvé qu’il
y ait force majeure; 20. y eût-il vol à force armée, on
pouvoit prévoir l’événement, et prendre des précautions
pour l’éviter.
�U2
( *11
P R E M I È R E
P R O P O S I T I O N .
T ''1 ' '
' ; •. ¡; Le,.vol n’est pas constant.
La première pièce dont on justifie pour établir le vol,
est le procès verbal de la municipalité de St. Hostieux.
D ’après la déclaration de Descours et de son domes
tiq u e , le prétendu vol a eu lieu à dix heures dii matin ;
ce n’est qu’à trois heures de relevée que les officiers mu
nicipaux ont été requis ; ils n’avoient aucun caractère
pour constater ce vol ; ce n’est pas un fait de police
administrative; c’étoit un fait de 'police judiciaire, et le
juge de paix étoit seul compétent. Ce procès verbal ne
contient autre chose que la déclaration du voiturier; il
ne fait pas meme la description de la voiture, et ne
constate pas l’élat dans lequel elle a été trouvée.
L ’officieux Bonnet qui a requis le transport des muni
cipaux, est l’aubergiste chez qui logent habituellement
Descours et son domestique. Il s’empresse de faire dresser
procès verbal, plutôt que de courir après les voleurs;
ce n’est qu’après que cette formalité est remplie; c’està-dire , plus de sept heures après le v o l , qu’il imagine de
faire battre les bois ; et on conçoit que les prétendus
voleurs n’ont pas dû rester aussi long-temps pour les
attendre; il est assez naturel que les recherches aient été
infructueuses.
< L ’information faite devant le juge de paix, ne donne
pas plus de lumières. Jacques Champagnac gardant paisi
blement sa chèvre, entend crier Maclaux et x-aconte ce
D 2
�( 2 8 }
qu’il lui a clit. Une demi-heure avant, il avoit vu deux
h o m m e s q u ’ il avoit pris pour des chasseurs.
Cliarreyre ne prouve autre chose, sinon qu’il n’est
pas fort courageux. Il avance dans cette route ; il voit
deux hommes qui avoient arrêté la voiture ; l’un le
couche en jo u e , l’autre tenoit aussi en joue le voiturier,
et quand on a peur on n y voit pas si bien; il ne voit pas
même si les voleurs prennent l’argent. Il semble qu’il
lui eût été facile d’empêcher le vol; les voleurs n’étoient
qu’au nembre de d e u x, ils se trouvoient alors trois per
sonnes, le voiturier , Charreyre et Montcoudiol. Il étoit
sans’ contredit possible, sans excès de courage, sinon de
désarmer, du moins d’effrayer les voleurs.
Ce jeune Montcoudiol, que personne n’a v u , dont ni
Champagnac ni Charreyre n’ont parlé dans leur déclara
tion , est un enfant de dix ans; il a vu le voleur forcer
la serrure, parce qu'il n’avoit pas pu ouvrir avec la clef,
prendre le porte-manteau et l’emporter à environ cent
pas, et q u ’ensuite il appela l’autre. Ce jeune homme dé
barrassé des voleurs, courut vite du côté de St. Hostieux
pour appeler du secours ; mais il ne vit que deux bergers.
C’est là tout ce qu’apprend l'information ; l’enquête
n’en dit pas davantage ; car il n’y a jamais que Charreyre et
Montcoudiol qui aient été témoins du vol : tous les autres
ne parlent que sur la déclaration du domestique, et n’ont
appris les détails qu’après que le vol a été effectué.
Il est vrai que ceux-ci ajoutent différentes circonstances
lors de l’enquête. Champagnac lui - même qui , lors de
l’information, avoit vu les voleurs fu n habillé de bleu,
t autre couleur ca fé , les a vus lors de l’enquête Vim habillé
�i
(29)
en vert et Tautre en canelle ; il voit dans moins d’un
quart d’heure les voleurs, le voiturier, les perd de vue
à cause d’un tertre, et le vol est fait dans ce court intervalle.
Pour Charreyre, lors de l’enquête, ce n’est plus les
deux voleurs qu i étaient occupés à coucher en jo u e ,
ïu n le voiturier et t autre Charreyre , comme il l’avoit
dit lors de l’information, c’est le même voleur qui les
couchoit en joue tous deux , tandis que l’autre étoit dans
la voiture occupé à décharger les ballots; de sorte q u e ,
comme Montcoudiol dit aussi avoir été couché en jo u e ,
c’est un seul homme qui, tout à la fois, couchoit en joue,
Charreyre, Montcoudiol et le voiturier ; ce qui paroît
peu difficile.
D ailleurs? comme Montcoudiol est impubère et que,
par cette raison, il n’est pas en état de déposer, il ne
reste plus qu un seul témoin qui ait été présent au pré- .
tendu vol ; dès-lors il n’existe aucune preuve. Descours
n’a pas satisfait au jugement interlocutoire.
*
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
On déçoit craindre et prévoir Tévénement.
A l’époque où ce prétendu vol a été commis, il n’étoit
malheureusement question que de bi’igandages de ce genre;
on neparloitque d’ehlèvemens de caisses publiqnes, de vols
particuliers. Tous ceux qui avoient à voiturer de l’argent,
prenoient des précautions extraordinaires. La loi, et notam
ment la proclamation de 1791 , qu’invoque Descours,
autorisoit les messagers, les commissionnaires à. se faire
�( 3° )
escorter de la gendarmerie et.de la force armée. Le gou
vernement prcnoit des arrêtés pour faire escorter les caisses
publiques ; les voyageurs étoient inquiets; les voituriers
menacés. Le citoyen Besqueuil n’avoit-il pas été arrêté
lui-même? le citoyen Descours en étoit informé, puis
qu’il s’en fait un moyen.
C ’est dans ces circonstances difficiles qui commandoient
des précautions extraordinaires , que Descours prend sur
son compte de faire voiturer des effets précieux, de trans
porter des sommes considérables, et de confier sa voiture
à un seul homme. Ce voiturier a l'indiscrétion de répan
dre qu’il porte de l’argent ; il le dit à ceux qu’il rencontre.
Ce même homme n’avoit-il pas répandu sur la route,
lors de l’arrestation du citoyen Besqueuil, qu’il l’avoit
rencontré et que le citoyen Besqueuil portoit de l’argent.
C ’est ce même voiturier dont Descours s’avise de faire
l?éloge pour justifier sa conduite imprudente; c’est à ce
même homme et à ce seul homme qu’il confie une voi
ture où il dépose des sommes aussi considérables.
Pas la plus légère précaution pour mettre l’argent en
sûreté; il le dépose dans un simple porte-manteau de
cuir qui facilite l’enlèvement ; plusieurs sacs auroient em
barrassé les voleurs.
Il se contente de déposer ce porte-manteau dans la caisse
frêle d’une voiture ; tandis q u e, selon l’usage , tout messa
ger qui transporte de l’argent doit avoir une malle ferrée,
fermant î\ plusieurs serrures qui puissent résister aux
efforts; et si on veut croire au prétendu vol, les ballots
ont été déchargés, la caisse fracturée, le porte-manteau
enlevé dans moins d’un quart d’heure, par uuseul homme
�( 31 )
dépourvu de toute espèce d’instrumens, qui devoitmême
être embarrassé de ses armes.
Il y a donc négligence et faute grossière de la part de
Descours. C e n’est point ici une cause ù?ipossible à pré
v o ir, comme l’exige lu proclamation qu’il invoque: et
certes si, avec une aussi légère exception, Descours pouvoit être à l’abri de toute responsabilité, la prévoyance
du législateur seroit vaine, les exemples inutiles; tout
hôtelier, tout messager pourroit impunément s’entendre
avec les voleurs.
Et que le citoyen Descours ne parle pas de la modi
cité du salaire qu’il recevoit. L e citoyen Besqueuil est
porteur d’un certificat du préfet du département de la
Ilaute-Loîre, qui atteste que dépouillement fait des re
gistres déposés a u x archives de la préfecture , lui Besqueuil
S est charge du transport de la somme de 39,000 francs ,
du Puy à Grenoble, pour le compte du g o u v e r n e m e n t , le
7 thermidor an 6 , se rendant responsable des frais et ris
ques, moyennant la provisiorî'Üe deux pour ceiit pour
droit d’assurance et de trahsport.
2.9 Que le 12 floréal an 10, l’appelant a également fait
transporter du Puy à L y o n , à ses risques et périls , la
somme de 83,000 fr. espèces d’argent, bronze et cuivre,
sous la provision de trois quarts pour cent pour tous frais
d’assurance et de transport.
Comment, pour des voyages d'aussi long cours, le trans
port n’a été payé, avec toute assurance, que deux pour
cent et trois quarts pour cen t, tandis que pour un voyage
d’un jour et dem i, il a été compté au citoyen Descours
une somme de 3 fr. par 1,000 ? Dans tout autre temps
�( 32 )
la provision eût été exhorbitante ; et qu’importe d’ailleurs
la modicité de la somme ! n’est-ce pas ici un dépôt néces
saire ? le citoyen Besqueuil ne s’est-il pas confié à la foi
de Descours , commissionnaire? Descours n’a - t - i l pas
c o n n u lui-même toute la force de ses engagemens ? n’en
a-t-il pas voulu courir les risques?
Il
se trouve donc dans l’espèce prévue par la loi nautœ
ca upones, par celle commodati vel contrà.
Il est donc responsable de la somme dont il s’est chargé.
L ’intérêt public, la sûreté des personnes, les circonstances
particulières imposent aux juges le devoir rigoureux de
lui appliquer la disposition des lois que les juges d appel
ont violées et méconnues.
Par conseil, P A G E S , ancien jurisconsulte.
D E V E Z E , avoué.
^1
U âStfütO e u *
Hf
.
/pi** ù»
A RIOM, de l’imprimerie de L a n d ri o t , seul imprimeur d u
Tribunal d’appel.— An 11.
�
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A name given to the resource
[Factum. Besqueuil, Jean-Pierre. An 11]
Creator
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Pagès
Devèze
Subject
The topic of the resource
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Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour le citoyen Jean-Pierre Besqueuil second, propriétaire, habitant de la ville du Puy, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de la même ville, le 2 germinal an 10 ; contre le cit. Louis-Joseph Descours, commissaire, habitant de la même ville du Puy, intimé.
Annotations manuscrites: « 21 nivôse an 11, 2éme section confirme pour les motis exprimés » .
Table Godemel : Commissionnaire : qui se charge de transporter de l’argent d’un lieu à un autre, moyennant un salaire, devient-il responsable des sommes qui lui ont été comptées et pour lesquelles il a donné son chargement, même lorsque son préposé a été arrêté et volé à main armée ?
Un commissionnaire a été payé pour livrer 6000 francs à un créancier à Lyon. Mais son domestique a été attaqué et volé en chemin. Le commissionnaire refuse la responsabilité de la disparition.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 11
Circa An 8-An 11
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1303
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0203
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Le Puy-en-Velay (43157)
Yssingeaux (43268)
Saint-Hostien (43194)
Le Pertuis (43150)
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Domaine public
vols
-
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26fbf7c39dadcb30b807d08c71f0ebb6
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Text
'm
MEMOIRE
P O U R
C O U T A N S O N et M a r g u e r i t e
C H E C L I N , sa femme, intimés
P ie rre
C O N T R E
J a c q u e s
L
,
C H E C L I N appelant.
EQ U E L des articles C X X X I ou C X X X I V de l’o r
donnance de 153 9, doit-on appliquer à la renonciation
faite par la femme Coutanson, en m in orité, par ordre
de sa mère qui étoit sinon sa tutrice légale, tout au moins
son administratrice ?
Si on préfère l’article C X X X I V , y a-t-il eu réclama
tion dans les dix ans ?
Jacques Chéclin est-il recevablc sur son app el, à sou
tenir les intimés non-recevables de ce qu’ils ont été inA
�dûment forcés de reproduire devant les mêmes juges
de première instance, une demande cii nullité de cette
renonciation implicitement, comprise dans la demande en
partage, dont ils n’ont été déboutés qu’avec la faculté
d’exercer par action principale cette' demande en nullité ?!
f a
i t s
..
L es frère et sœurs Cliéclin et cinq autres enfans, sont
nés du mariage d’A n d ré Chéclin avec Marie Coutanson.
L e père est décédé en mars 1770. Par son testament,
du 16 du même mois, il a légitimé chacun de ses enfansa une somme de 800 fr. avec un ameublement.. Il a ins
titué pour son héritière fiduciaire sa v e u v e , à là charge
par elle de rendre l'hérédité ¿1 celui ou à celle de leurs
enfans qu'elle jugeroit à propos : dans le cas où elle viendroit à décéder sans avoir fait ce c h o ix , le testateur nomma
Jacques C héclin, appelant, pour recueillir l’entière hé
rédité. L a mère fut nommée tutrice de leurs enfans,
avec décharge de toute reddition de compte et revenu.
Cette veuve le fut encore aux sept enfans, sans excep
tio n , par avis de parens et ordonnance de justice du
2.6 avril 1770 , à la réquisition du ministère public ,
et elle déclara que quoiqu'elle pût se dispenser (Vaccepter
cette ch a r g e, néanm oins elle veut bien se charger de
la tu telle, et p rom it de bien et Jidèlem ent vaquer au
deçoir de sa charge.
P ar le contrat de mariage des intim és, du 9. février1 7 73 , leur mère et belle-mère constitua à sa fille 1,000 fr.
au lieu de 800 qui lui a voient été légués par le père?>
�.3
(
Sot
* 4^
)
e't d’autres objets, le tout payable à longs termes de 6c
francs par an , pour tenir lie u , est-il dit, à la future ,
de sa portion dans la succession, de son p è r e , qui étoifc
é c h u e , de tout augment et supplément; et au m oyen
de ce , la fille mineure ren on ça, sans dire au profit de
q u i, t\ tous ses droits paternels; mais immédiatement
après cette clause, elle se constitua eu tous ses biens, et donna
plein et entier pouvoir à son futur de les i*echercher.
L ’appelant contracta m ariage, le 27 mai 17 8 7 ; les in
timés ne furent point appelés ù cet acte : la mère remit
au fils l’hérédité dont elle étoit ch argée, et décéda
quelque
temps après.
P ar exploit du 13 prairial an 2 , les intimés p r o v o
quèrent un tribunal de famille pour obtenir le partage
des biens d’A n d ré Chéclm et Mario Goutanson, auteurs
commüns.
L e 2 nivôse an 7 , le tribunal du P u y rendit un ju
gement contradictoire, par lequel « considérant que la
» demande en nullité, formée à cette audience par les
» demandeurs, tend à anéantir cet acte, et devient par
» là principale; que d’après les nouvelles lois, les tribu» nauxne pouvoient en connoître sans au préalable avoir
»
»
»
»
»
a
épuisé la voie de la conciliation; c’est le cas de la rej e t e r . . . . . . . relaxe ledit Jacques Chéclin , de la demande en partage.........à la charge........... de payer...........
en argent ou en fond et à leur choix.. . . . s a itf a u x
m ariés Coutanson et C héclin à se p o u rv o ir, s’ ils y
sont fo n d é s , contre la renonciation...........»
Ce jugement fut exp éd ié, mais nullement signifié. L a
discussion s'étant de rechef engagée devant le tribunal
A 3
�(
4
}
d’Yssingeaux, substitué à celui du P u y , d’après la cédule
du 28 germinal an 7 , les parties ne regardèrent ce juge
ment que comme étant d’instruction", elles le reconnurent
expressément dans la rédaction du jugement du 5 ther
midor, dont est appel. Elles discutèrent au fond. L a nullité
de la renonciation fut prononcée en conséquence de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1 5 3 9 , et lo partage ordonné.
L a cause appelée à tour de rôle , en ce trib u n a l, à l’au
dience du 2 prairial d ern ier,aétéplaid ée;m ais,su rlesconclusions du citoyen substitut, il a sursis d’un mois, pendant
lequel temps l’expédition du jugement du 2 nivôse an 7
seroit rapportée.
Cette expédition est jointe : la transcription qui vient
d’en être faite par extrait, prouve qu’en effet les expres
sions sont un débouté de la demande en partage , sauf la
faculté de demander la nullité de la renonciation ; mais
celui dont est appel établit aussi que les parties , en cause
principale, s’arrêtant plusausensqu’aux mots de cette rédac
tion, n’ont regardé ce jugement indivisible et contradictoire,
que com m e simple instruction p u is q u ’elles ont discuté sur
le fond.
M O Y E N S.
Il ne peut être question, dit l’appelant, de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1639 , parce que Marie Coutanson n’a jamais été tutrice ni protutrice de sa fille, puis
que celle-ci étoit Agée de 17 ans, conséquemment p u b è re ,
à l’époque du décès d’A n d ré Chéclin , et parce que cette
m ère, d’un côté, ne devoit aucun compte d’administration
à l’époque du contrat de mariage de su fille , d’autant
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# 9
qu’elle en étoit expressément dispensée par le testament ;
d’ un autre , elle n’a reçu aucune disposition pour elle
ni pour son fils, de la part de sa fille : qu’au surplus les
parties étant domiciliées dans le ci - devant F o r e z , il
convient d’écarter la jurisprudence du c i-d e v a n t parle
ment de T o u lo u se, mais bien de s’aider de la juris
prudence de celui de Paris qui n’admettoit que le laps de
dix an s, conformément à l’article C X X X I V de cette loi ;
que sous ce ra p p o rt, les dix ans utiles ont été révo lu s, soit
qu’on les fasse courir de l’époque de la m ajorité, soit
qu’on admette la suspension du délai jusqu’au 27 mai
1787 , que la mère a fait l’ élection d’héritier en faveur dé
son fils, parce que dans ce cas, au lieu de regarder l’action
du 13 prairial an 2 , comme demande en nullité, il faut
seulement la considorei* com m e d em an d e en p a r ta g e , et
ne rapporter cette demande en nullité qu’au 28 germinal
an 7 , d’autant plus que cette demande est l’exécution du
jugement du 2 nivôse an 7 , qui conséquemmcnt a acquis,
par l’exécution , la force de chose ju g é e , et établit une fin
de non recevoir contre une demande qui est irrévoca
blement prescrite.
R É P O N S E .
Cette discussion se divise en deux parties.
i ° . C ’est l’article C X X X I et non l’article C X X X I V de
l’ordonnance de 1639, les ordonnances de 1649 et de 1667,
qui doivent être la base de la décision.
2°. Si on se déterminoit par l’article C X X X I V , la
réclamation a été faite dans les dix ans.
Les autres questions ne sont que les accessoires des
deux principales.
�P R E M I È R E
PARTIE.
« Nous déclarons toutes dispositions d’entre-vifs ou tes» tamentaires, qui seront ci-après faites par les donateurs
» ou testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs, gar» diens,haillistreset A U T R E S LEURS A D M I N I S T R A T E U R S ,
» être nulles, de nul effet et valeur.» A rt. C X X X I de
l’ordonnance de 1539.
« E t quant au six-vingt-unzième article, faisant men» tion des donations, nous voulons et ordonnons, en in?> terprétant ledit article , que toutes donations entre-vifs
» et testamentaires, qui seront faites par les donateurs
»
»
»
»
»
»
»
»
»
ou testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs,
gardiens, haillistres et a u t r e s a d m i n i s t r a t e u r s ,
soient nulles, et de nul effet et v a le u r ; et telles les
avons déclarées et déclarons par ces présentes ; ensemble
celles qui frauduleusement seront faites durant le temps
de ladite administration , à personnes interposées, venant directement ou indirectement au profit desdits
tuteurs , curateurs , gardiens , haillistres et A U T R E S
a d m i n i s t r a t e u r s . » Ordonnance de 1Î949.
Ces ordonnances ont été confirmées par celle de 1667,
l i t X X I X , art. I ; elle oblige non-seulement les tuteurs,
protuteurs 3 curateurs, fermiers judiciaires, séquestres,
gardiens, mais encore t o u s a u t r e s q u i a u r o n t a d m i
n i s t r é LES BIENS d ’ a u t r u i , « i\ rendre compte aussitôt
» que leur gestion sera fin ie, et les répute comptables,
» encore que le compte soit clos et a r r ê té , jusqu’à ce
�*S\\
•( 7 )
w qu’ ils aient payé le reliquat, s’il en est d û , e t remis
» toutes les pièces justificatives.»
T e l étoit encore le droit romain. L e tuteur étoit censé
toujours tuteur jusqu’à ce qu’il eut rendu compte ; non est
J'un ctus qfficio iiisi rationes reddiderit. Jusque-là il ne
pouvoit être déchargé par quelqu’acte que ce fiit, suivant
la l o i , si qitid e s t , ult. de auct. et cons. tutor. ; et la glose
entend par ces mots , s i q u id 3toutes sortes de conventions
entre le mineur et le tuteur, m êm e les transactions; ut
a ccep tilla iio , pactum de non petendo 3 transactio %'el
delegatio. Il en étoit de m ême de toute espèce d’admi
nistrateur. L/n si qui s , if. de negot. gest.
Dans le même d r o it, l’action tutélaire ne prescrit que
par trente ans. Il n’est pas possible de b o r n e r , par des
conventions particulières le cours de cette prescription1
lé g a le ;c ’est ce qui arrivero it, si onadmettoit la nécessité
de se p o u rv o ir, clans les d ix ans, contre des actes qui
emporteroient la décharge de la tutelle.
M ornac ad leg. X X I X , cod. liv. II, tit. I V , s’exprim e
ainsi : D o cem u s enim quotidian is rerum exp erim en tis,
n ih il prodesse tu ta ri quod transigen t in genere de tutelœ suœ adm inistratione : im o nec s i auditâ parte rationum suarw n , m inor'J'actus m a jo r , libérationem gé
néraient de cœ leris om nibus ad tutelam spectantibus
dederit. Oportet quippè rationes r e d d i d i s c u t i , dispungi et claudi tandem autore ju d ice. ¿ ilià s et n is iità
JiŒ cJiant, ni/ul agit, ciun us que a d 'a n n o s t k i g i n t a '
possit m in or petere rationem , sub pretextu specierum
post repertarum quœ cum que generalis intercesserit
transactio : servam usque in co vulgam. L eg. cum sers
�(
8)
de coud. et demonstr. Q uœ vult r.inn q u i sit rcitionïbus
reddendis obnoxius rcdderc oportere ration e s , ut dis-.
cu tia tu r s i pillât un quidquid.egerit v eln o n e g e n t , ciim
agere debuisset.
_
Mais rien n’est plus énergique que ce qu’enseigne
M. Duval dans son excellent traité de rebus dubiis , en in
terprétant les deux articles G X X X I et C X X X I V : « E t
» parce que souvent y a difficulté sur lesordonnancesfaites
» par Louis X II et François I, touchant la prescription
» de dix ans contre la rescision des contrats faits par les
»
»
»
»
majeurs et mineurs; item , si ladite prescription a lieu,
les dispositions faites par iceux m ineurs, au profit de
leurs tuteurs ou a d m i n i s t r a t e u r s ........ item pour le
regard du tuteur ou A U T R E a d m i n i s t r a t e u r qui
» auroit j o u i , par l’espace de dix an s, des choses à
» lui délaissées par son mineur après sa m ajorité, ou
»
»
»
»
»
»
»
»
avant la reddition de compte-, le doute est .grand
à savoir , si ladite prescription de ,dix ans a lieu en ce
cas........... M ovet dubium quod lex est generalis et indistinctè loquens............ Sed contrarium est verum .
Car il y a autre ordonnance touchant les dispositions
faites par les m ineurs, au profit de leurs tuteurs, lesquelles elle déclare nulles, de nul effet et valeur.
V o len s enirn occurrere hujus rnodi dispositionibits
» etcon tractibus qua s habetpro infectis. Pourtan t l’autro
»
»
»
»
ordonnance doit recevoir restriction et déclaration de
celle-ci ; c’est-à-dire, qu’elle n’a lieu pour le regard des
dispositions faites au profit des tuteurs et adrninistrateurs, soit par contrat ou donation quelconque entre-
» v i f s , ou i\ cause de m ort; n’y fait rien de dire que l’or•
donnanco
�a
9
(
5
» donnance touchant la prescription de dix ans subsé» quente, l’autre annullant les dispositions faites avec les
» tuteurs........ Car toutes les deux sont au même cahier
» et publiées en même temps, l’an 16395 pourquoi la '
» présomption de droit est que l’une se corrige par l’autre,
» joint qu’elle est conforme au droit commun qui annulle
» les contrats faits avec les tuteurs, soit pour le regard
» de la disposition, ou d e là tradition et possession.»
C ’est aussi la doctrine de Papon jurisconsulte du F o r é s ,
pays des parties ; liv. V , tit. V I , nomb. 9 , de ses arrêts,
et 3me. notaire, liv. I X : « L e mineur dans les 30 a n s ,
» contre la quittance peut v e n ir ................à cause de dol
» dudit tuteur................Les dix ans de l’ordonnance ne
» sont propres en
» r e ç u dans les 30
C ’est aussi l’avis
nance de .1667 , à
ce cas ; ainsi devra le mineur être
ans après son âge parfait. »
de R o d ier, commentateur de l’ordon
l’article cité.
L a jurisprudence du parlement de Toulouze a été
constamment conforme à ces autorités, suivant le témoinage uniforme de Meynard , de D olive , de Serres ,
de Catelan.
Il y a eu des variations au parlement de P a r is : dabord
un arrêt de i562 avoit adopté l’art. C X X X I . O n en
trouve d’autres conformes dans Brodeau , lettre T 5 dans
B a rd e t, tom. I I , liv. V , sous la date du 7 juillet,16 3 6 , qui
prononça la nullité d’une renonciation faite par une iille
héritière de son p è re , au profit de sa mère tutrice, qui
n’avoit point fait d’inventaire, et ne lui avoit rendu aucun
compte. Divers autres rapportés par C h e n u , Brodeau,
Bardet et Montholon ,3 ont adopté l’article C X X X I Y >
B
�.('ÏO )
m êm e sur-de simples quittances données par des mineurs
à des tuteurs, sans compte préalablement rendu. 11 en est
cependant plusieurs , notamment celui du 29 mars i ü j ô ,
qui sont étrangers à notre espèce ; mais l’ordonnance
de 1667 a ramené à la pureté des principes-, et depuis
cOl'te é p o q u e , le parlement de Paris a rejeté la fin de
non-recevoir des dix ans, pour n’adopter que la pres
cription de trente ans* Les arrêts sont des 18 février 1703,
17 décembre 1706 et 26 mars 1707. Celui de 1706
rapporté au journal des audiences, tom. V , liv. V I ,
cliap. ' X L V , édition de 1 7 3 6 , a annullé une transac
tion q u i-avo it été faite avec un homme chargé de
procuration, et qui avoit a d m i n i s t r é p o u r des mi neui ' S.
M . l’avocat gé n éra l, Jo ly - de -F le u ry , observa , i ° . que
l ’on ne pouvoit appliquer à l’espèce l’art. C X X X I Y ; qu’il
11’y a nulle prescription pour un administrateur qui 11’a
rendu compte ; qu'il est toujours débiteur. 20. Que tout
administrateur de biens de mineurs est protuteur , et est
toujours présumé frauduleux.
cIl est inutile à la cause de remarquer la contrariété des
arrêts uniformes du parlement de Toulouze avec la
jurisprudence vacillante de celui de Paris : d u n e p a r t,
il n’y a plus eu de variation depuis l’ordonnance de 1667:
d ’un autre côté , la commune de Bas en Busset étoit
nn démembrement du Languedoc ; pendant le temps où
il a existé, le parlement de Paris a consacré par trois
arrêts , le premier du 30 août 170 7, rapporté par Ilcnrys,
les deux autres des 21 juillet 1768 et 12 juillet 1 7 7 0 , la
maxime rappelée par Chopin : tribunalium veiriatio
nullam p a rti legum n n d a iio m n u
�R aviot, arrêtiste de D ijon , distíngueles transactions, des
décharges. Il soutient que la jurisprudence qui accorde
trente années au m ineur, est préférable pour l’utilité publi
que. Il a transcrit un arrêt du 12 août 1716 , qui a consacré
l’usage de cette co u r, pour les trente ans. Enfin Lacombe
au mot restitution , sect. Ire. n°. 4 , rapportant un arrêt
du 26 janvier 1 7 4 5 , rappelle les mêmes principes que
fit valoir M. l’avocat général Gilbert.
Les jurisconsultes ont assimilé l’obligation de rendre
compte à celle de rendre un d é p ô t, et les décharges pures
et simples qui en sont données à des donations nulles de
nullité absolue. Ils en concluent que l’action dure 30 ans,
soit pour faire rendre le d é p ô t, soit pour revendiquer
contre une disposition surprise par le dol h l’e rr e u r , et à
line facilité irréfléchie.
Personne ne méconnoît l’autorité des arrêtés de M . de
L a m o ig n o n , rédigés, d ’après la lettre du célèbre Auzannet,
par le concours des jurisconsultes et des magistrats les plus
renommés et en expérience et en probité, dans le temps
où Louis X I V ayant donné , com m e, de nos jo u rs, Bona
parte, la paix à l’Europe , prit comme ce héros dont on
connoît les sollicitudes pour la rédaction des difTérens
co d e s, toutes les précautions pour retrancher la chicane.
Les arrêtés 127 et 1 2 9 , portent les mêmes dispositions
que l’article C X X X I de l’ordonnance de 10 39, et les or
donnances de 1549 et 1667.
Bien loin que la législation nouvelle ail porté aucun
changem ent, le régulateur suprême des tribunaux a con
sacré les mêmes principes par trois jugemens des 13 prai
rial , 3 messidor an 4 et a 5 frimaire an 10.
B
3
�s
•'
' ( 12 )
lie premier a admis la nullité (Tune cession faite par
P ierre Durand , en faveur de son frère, Claude, quoique
celui-ci ne fût pas majeur lors du décès du dernier de ses
ascendans, et qu'il y eût eu un autre tuteur. Il a été regardé
comme étant administrateur comptable.
L e deuxième a cassé comme contraire
l’articlo
C X X X I de l’ordonnance de 1639 , et à l’arlicle Ier. , titre
29 de l’ordonnance de 16 6 7 , et comme contenant une
fausse application de l’article C X X X I V de la môme ordon
nance de 1539, un jugement du tribunal d’appel d’E vau x,
qui avoit déclaré non-recevable, pour n’avoir pas été for
mée dans les dix ans de la m ajorité, la demande en nullité
d’ une renonciation faite par une fille m ineure, au profit
de son beau-frère , moyennant une constitution qui lui
fut faite par sa m è re , tutrice} qui ne lui avoit pas rendu
compte.
L e troisième a jugé dans le sens de l’article C X X X I V
de l’ordonnance de 16 3 9 , en cassant un jugement du tri
bunal d’appel de P a ris, qui avoit écarté la fin de non-recev o ir , en qualifiant donation des actes qui n’en avoient pas
le caractère. Ce jugem ent, l o i n d’être contraire aux deux
autres, les corrobore en faisant ressortir la différence que
les jurisconsultes et les avocats généraux , lors des arrêts
précités, ont faite, des deux articles C X X X I et C X X X I V .
L a femme intimée est dans un cas bien plus favorable
que Gabrielle Laporte. C e lle -ci avoit renoncé au profit
de son b e a u - fr è r e , au lieu que Marguerite Cliéclin n’a
dirigésa renonciation qu’enfaveur delà masse de l’hérédité.
Si dans la rigueur du droit on ne considéroit pas sa mère
comme étant sa tutrice, on 11c peut au moins contester et
/
�( . 3 ).
.
J
"
ïe fait d administration en lui-mêm e et les titres qui ]a lui
ont conférée, le testament du p è r e , l’acceptation spon
tanée qu’elle a faite de la justice de la qualité de tutrice, et
sa promesse judiciaire de rendre compte. Ce seul fait d’ad
ministration assujétissoit cette mère ;\ rendre compte. Les
lois s’expliquent génériquement pour tous les adminis
trateurs, que l'arrêt de 1706 a appliquées à un simple
mandataire. Mais lçs expressions de l’ordonnance de 1667 >
ne peuvent laisser aucun prétexte d’équivoque. D ’après le
procès "Verbal de cette ordonnance, on avoit inséré dans
la première rédaction ces expressions Cl’économ e t com m iss aire et m andataire, et le législateur préféra celle Ü adm i
nistrateur, employée dans les ordonnances de 1639 et 1649.
H é ! qu’importe que le père com m un ait dispensé , par
son. testament, sa v e u v e , q u ’il n o m m a it tu trice, de faire
inventaire et de rendre compte? D ’abord, Marie Coutanson
s’est obligée judiciairement de fid èlem en t vaquer au de
voir de sa charge. Sans doute, le premier devoir d’une
tutrice, d’une usufruitière , d’une administratrice , est de
faire inventaire, de constater ce qu'elle prend et d’en ren^
dre compte.
Mais d’ailleurs, cette obligation ne souffre point de
dispense j elle e s t, de droit public , établie, par la loi Y ,
ita autein , /f. li[>. 26, tit. 7 , n °. 7 , J id ia n u s. Q uidam
decedens j i l i i s suis dederat tu to res, et adjecerat, eos
aneclogistos esse roio, et a itJ u lia n u s tutores n isih o n a m
Jideni in adm m istralione prœ stiterint, d a m n a rid ebere,
quamv'is testamento com yrehensinn sit ut aneclogisti
essent ' nec eo nom m e e x causa Jidei-connnissi q u icquam consequi d eb eb im t, ut a it J u lia n u s : ac est vera
�•
t
( 14 )
ista se n te n tia , nemo eni/n j u s p u b l i c u m r e m i t t e r e p o t e s t liujus inod'i cautionibus nec m utare J o r mam antiquitiis constitutam .
Marie Coutanson n'a point usé de bonne fol en ne
faisant point inventaire , et en exigeant une l'enonciation
en bloc, delà part sa fille, sans lui présenter seulement
d’instruction.
Cette renonciation n’est qu’une simple décharge en
faveur d’un comptable , gratuite, puisque la mère n’a
rien fourni de sa substance; elle s’est opérée p a r le dol
et la fra u d e, en privant sa fille de la plus légère connoissance de la succession. O n peut appliquer la dispo
sition de la loi I X q u i ciim tut. 9. §. 2. ffi de tutorib.
q u i ignorans universa quœ in vero era n t instrum entum
transactionis sine a qu ilia n a stipulatione
non tarn decipitur quant p a ciscitu r.
interposuit
- Cette mère , cette tutrice ou administratrice com ptable,
a encore usé de dol , en laissant entrevoir A sa fille l’espoir
d’une élection d’ héritier, qui l’eût fait profiter de l’effet
de sa renonciation.
Que les novateurs , entraînés p a r l’exemple du tribunal
d’É vau x ,'ne disent donc plus que les affaires doivent
a voir u n c j ï n ,q u i lj ( i u t proscrire les vieilles recherches.
Ce seroit substituer l’arbitraire aux lois. Ces lois, en
classant chaque prescription dans les termes qu’elle a éta
b lis, n’ont introduit d’autre âge que celui qu’elles ont
combiné avec toutes les circonstances qui rendent plus
ou moins favorable la lenteur de ceux qu’elles ont re
connu être dans l’impossibilité d’a g ir , par ce principe
contra non valentcm agerc non cu rrit prœscriptto. Ainsi
�,
( t "• ) .
Vune affaire de deux siècles est toujours jeune, tant qu’elle
n’est point trop vieillie par le laps de temps utile qu’il
faut pour l’éteindre.
>
.
D E U X I È M E
P A R T I E .
Il y a discordance sur l’époque où
exercée,et sur l’époque où elle l’a été
L ’appelant prétend que l’intimée a
tant de sa majorité , qui a eu lieu le
et qu’elle n’a formé sa demande que le
l’action a dû être
réellement.
dû agir dès l’ins
23 février 1 7 7 7 ,
28 germinal an 7.
Celle-ci soutient au contraire qu’il y a eu suspension
de prescription, tant qu’elle n’a pu agir, et qu’elle l’a
fait utilem en t, le 13 prairial an 2.
L ’in t im é e , en m êm e temps q u ’il l ui f u t fait une dot,
se constitua en outre en louSj ses biens présens et
à ven ir, pour la recherche desquels elle donna sa pro
curation à son mari. O r , en quels autres biens présens
pouvoient consister cette constitution particulière, si ce
n’est dans la demande en partage auquel la mère venoit
de la faire renoncer , dans les biens de son père ! Mais
la femme a manifesté , par ce même acte, son intention
de réclamer contre la renonciation qu’il renferme , et
elle n’a pu le faire sous la puissance maritale , soit parce
que l’autorisation du mari étoit indispensable, soit parce
qu il en nvoit été expressément chargé par le contrat de
mariage. Sous ce premier rap p o rt, il y a eu suspension de
prescription. Il est reconnu constant, dans le ressort du
ci-devant parlement de T o u lo u se , conformément à la loi
1 6 , lf. d efu n d o dotali, que la prescription du fond dotal
�•
V
( 16 )
ne court pas contre la femme pendant le m ariage, sinon
qu’elle eût commencé auparavant ; Serres , liv. I I ,
lit. V I I I , page 192 ; Catelan et Vedel , liv. I V , ehap.
X L V • Despeysses liv. Ier. , tit. X V , sect. I I Ï , n°. 29.
C ’est aussi ce qu’enseignent D o m a t, liv. I I I , tit. V I I ,
sect. V , n°. V I I 5 Lacombe , verbo prœ script. , sect. V I I ,
n°. 1 ; Henrys , liv. I V , Q. 175.
Mais la prescription a été suspendue de diverses autres
manières.
O n pourroit em p lo yer, pour premier moyen , l'effet
delà puissance maternelle méconnue dans le droit romain ,
et qui semble etre adoptée par plusieurs de nos auteurs
modernes, d’après les rédacteurs du répertoire de jurispru
dence, verbo puissance p a tern elle, sect. II, et le projet du
code c i v i l , surtout d’après 1arrêté 128 de M .le P. Lamoignon , au sujet précisément de la prescription dont il s’agit
au procès ; « ladite prescription de trente ans, dit ce ma» gistrat, ne court au profit du père et DE L A m è r e , de
» l’aïeul ou DE t/ a ï e u l e de leur v i v a n t , nonobstant que
» la tutelle soit finie. »
Cependant la veuve Chéclin avoit d’autant plus d’auto
rité sur sa fille qu’elle lui avoit été transmise par le père
dans son testament, et confirmée par la justice , en sa
qualité de tutrice , qualité synonymifiée avec celle de
m a ître , suivant la loi ad ea 167. jj\ de rcg. ju r. où
celui qui dispose en faveur d’une personne à laquelle il
est soumis, est réputé disposer contre sa volonté; vellc
non créditur q u i obsequitur irnperio dorni/ii. La volonté
est l’âme de toute disposition , et l’on ne regarde point
comme volonté
celle qui est forcée. Coacta voluntas
non
�,
,
C 17 )
J t\
4
á t
mon ' habetur pro volúntate Cujas ad tí t. cod. s i quis
(iliquem tutori prohibuer. vel coeger. Décision fondée
sur ce qu’il n’est rien qui soit si contraire au consente
ment que la force ou la crainte qui l'extorque : N ih il
'consensui tain contrariinn est quàm vis atque metus.
•Loi 116 , ff. de reg. jur.
S i, comme il n’en faut pas douter, la mère a usé de sa
puissance sur sa fille, en la faisant renoncer, il est Lien évi
dent que la même cause a forcé cette fille au silence , pen
dant tout le temps que sa mère a vécu ; et le gendre a telle
ment partagé la condescendance et la crainte de sa femme ,
que non seulement il n’a pas usé de la procuration pour
rechercher le bien dotal , mais encore il s’est abstenu de
rien recevoir. N e résulte-t-il pas môme de ce silence une
protestation continuelle contre la m od icité de la constitu
tion convcntionelle ,.ct une intention bien manifeste de
z’éclam cr contre?
Mais un second moyen de suspension de la prescription,
est la qualité d’usufruitière de la mère par le testament du
père. L a fille n’avoit pas intérêt d’agir pendant la durée de
cet usufruit. La jurisprudence sur ce point est trop cer
taine pour s’ étendre davantage.
Un troisième moyen est la confusion clés droits actifs et
passifs, dans les mariés Coutanson et Chéclin. On n’a pas
perdu de vue que la renonciation dont il s’agit, n’a été
dirigée en faveur de personne ni acceptée par personne.
L ’appelant pour écarter l’idée qu’elle eut été faite en fa
veur de personne prohibée, a soutenu quelle tournoit au
profit de la masse de l’hérédité du père ; mais celte masse
-étoit en dépôt. L a remise pouvoit en avoir lieu en faveur
C
�5» « W
*
i l
(i8)
de l’intimée , parce que M arie Coutanson a eu la liberté
pendant toute sa vie d’élire l’intimée pour la recueillir:
ainsi celle-ci auroit agi doublement contre ses intérêts,
de faire un procès à sa mère. En se ¡aliénant, elle eût
écarté des dispositions bénévoles pour la transmission de
l ’hérédité de son p è re, et elle se fût attiré son animadver
sion , à raison de la succession maternelle ; elle a donc
agi sagement par le silence, ne m ater pejus Ja ceret.
Mais, répond l’adversaire, tous vos motifs de crainte,
d ’espérance , ont cessé par les dispositions universelles
faites par la mère , tant pour sa substance que pour celle
d’A n d ré Chéclin , par son testament du 3 janvier 178 6 , efe
par mon contrat de mariage du 27 m a i 1787.
L a répliqué est absolue. J e n’ai connu ni l’un ni l’autre
de ces actes. L e premier pouvoit être révoqué à chaque
instant. Quant au second, la mère n’y a appelé ni sa iîlle ni
son gendre. O n peut conclure que c’est là le dernier p é
riode du d o l , et que c’est afin d’éviter la réclamation contre^
la renonciation, qu’elle a eu l’astuce de laisser ignorer la
disposition irrévocable portée par le contrat de mariage do
Jacques Chéclin.
En un m o t , la renonciation n’étant dirigée qu au profit
de la masse , elle n’a pu être que conditionnelle ou casuelle.
Elle eût profité à la renonçante , si elle eût été élue à re
cueillir cette même masse d’hérédité, et il falloit nécessai
rement attendre le sort de cette incertitude, de cette espé
rance.
Il doit donc demeurer pour bien constant, que les inti
més n’ont pu , n’ont dû agir qu’après le décès de la mère
arrivé depuis le 27 mai 1787-.
�{ i9 )
- ^z a
Il reste à prouver que l’action utile a été intentée le 13
prairial an 2 , conséqueminent avant les 10 ans.
O h ! sur ce p o in t, l’adversaire s’est créé une logique tout
à fait commode ; mais tout à la fois contradictoire et ridi
cule.
L e premier jugement du 2 nivôse an 7 , a débouté les
intimés de leur demande en partage, sauf à eux à se pour
voir contre la renonciation.
L ’adversaire veut-il écarter, à la faveur du non bis in
idem , cette demande en nullité delà renonciation, sous le
prétexte qu’elle a été rejetée parce jugement ? Il a soutenu
dans le procès verbal de non-conciliation du 14 floréal
an 7 , et il l’a répété jusqu’à satiété, dans ses causes et
moyens d’appel, sans en avoir dit mot lors de la plai
doirie sur laquelle est intervenu le jugem ent du 5 ther
m idor an g , que cette demande a été comprise dans la
demande en p a rta g e, du 13 prairial an 2.
L u i rétorque-t-on ce langage, pour établir d’après luimeine que l’action en nullité a été introduite dans les 10
nnâ!? Il se retourne et veu t tout, à la fois blanc et noir!
tantôt , que cette demande ait été formée le 13 prairial
an 2 , et qu’en prêtant au jugement du 2 nivôse an 7 , la
chose jugée et l’exécution , elle soit éteinte ; tantôt, que
celte demande n’ait été fo rm ée, pour la première fois,
que le 28 germinal an 7 , et qu’étant postérieure au terme
de 10 ans, elle soit anéantie par cette espèce de prescrip
tion , de dix ans.
Séparons les élérnens de cette bigarrure, de ce sophisme.
L e jugement du 2 nivôse an 7 a débouté, sauf l’action
en nullité ; c’est absolument la même chose que s’ il avoifc
G 2
�4ÀA jlix
'
¡1
i
;
•:
( âo )
prononcé, quant 5 présent, non recevable, on un sursis*,
afin d’observer la forme de la conciliation, dès que l’exception péremptoire de la nullité absolue, étoit consi~
dérée comme devant être une action principale, sujette
à ce préalable.
A u fon d , chacune de ces trois dispositions renferme
deux parties indivisibles. L e débouté, la fin de non rece
voir , le sursis, ont également en vue le sort de la demande en nullité , qui doit être la base du rejet défi
n itif, ou de l’accueil de la demande principale; eu sorte
que, quelle que soit l’expression, ce n’est dans le vrai q u’un
jugement d’instruction , et l’appelant l’a si bien reconnu,
en cause principale, qi,i’au lieu de s’attacher à cette prétendue fin de non recevoir, il a discuté le fond de la quest i o n , et par là , il est devenu lui-même non-recevable*
à l’opposer sur l’appel.
C'est en vérité abuser étrangement des m ois, que deprêter à la demande du 28 germinal an 7 , une telle accep
tion d’exécution du jugement du 2 nivôse an 7 , qu’on
en infère une approbation du d é b o u té , bien p lu s, une
persuasion d’un débouté pur et simple, et définitif; mais
si l’appelant l’eût pensé ainsi, en cause principale, que
ne s’en tenoit-il à cette prétention ? D e ce qu’il a dé
fendu au fo n d , ne peut-on pas lui rétorq u er, dans son
système de divisibilité d’exécution du jugem ent, du 2
nivôse an 7 , qu’il a lui-même exécuté la seconde partie
de ce jugement purement et simplement ; car si les inti
més .ont été bien éloignés de demander le payement
du prix de la renonciation, l’appelant a bien senti qu’il
lui eût été inutile tic l'offrir,
I
�,l
JiS
z r )\
^
Maintenant ayons .pour;certain que l’adversaire, en
avouant, soit dans le procès verbal de non-conciliation,
soit dans les causes et moyens d’àppel, signifiées le 28 ven
tôse dernier, aveu indélébile en soi, comme conforme au
principe, au surplus formellement accepté parla réponse
signifiée le-24 floréal, que la demande en nullité delà renon
ciation a été comprise dans lademandeen partage,du 13 fri-maire an 2, d’après la maxime generalis petitio includit ea
om nia q u œ in eâ petitione possunt in cludi..Cet axiome
est encore appuyé par un autre: P e titio b on orim iy os ;
scssio n ïs* hœ reditatis addïtio7ieju prcvsùpponit. L a de-:
mande en partage-exclut l’idée de préférence du prix;
d’une renonciation. In cîu sio unius est exclusio aîterius.
Semblable discussion sur ce point, et sur l’application des:
art. G X X X I et- G X X X I V de l’ordonnance de 1 5 3 9 , a*
été jugée en ce t r i b u n a l m ê m e section présidée par le:
citoyen V e r n y , il l’audience du 18 germinal dernier. ;
L e 25 février i y 56 , Jeanne Barthélém y, par son contrat
de mariage avec Jean Pagès, renonça,.moyennant 330 i'r.,
aux successions de son père échue, et à celle
échoir
de sa m ère, non présente au contrat, en faveur de Jean
Barthélémy son frère. L e mari en donna quittance. L e i o j
février 1 7 8 6 , Jeanne Barthélémy lit assigner les en fans
héritiers de Jean Barthélémy pour venir à division et
partage. Jugement du tribunal du P u y , du 11 fructidor'
an 7 , q u i d écla re, quant ¿1 présent, non-rcccçahle,■sur
ce qu’elle auroit dû se p o u rv o ir , avant tout, contre larenonciation de ses droits héréditaires. L e i r brumaire
*n 8 , nouvelle demande en partage , avec conclusion en '
nullité de la renonciation. Les défendeurs opposèrent deux-.
�* * *
'
c
>
fins de n o n -re c e v o ir,r l’une:-résultante-de''la quittance
donnée par le m a r i, l’autre de ce qu’il s’étoit écoulé près
de trente ans depuis le décès, et plus de quarante ans depuis
]a renonciation. Jugementdu tribunaldeBrioude,du 3 ger
minal an 9, q u i1, sans s’arrêter aux deux fins de non-rcce*
v o i r , ' O r do n n e le partage. Appel. A l’appui on a invoqué
l’article C X X X 1V de l’ordonnance de 16395 on a désavoué
la qualité de tuteur dans le frère. L ’intimé s’est prévalu de
l’article G X X X l , de la qualité d’administrateur comptable,
et des deux premiers des trois jugemens du tribunal decassation^ d on tilaété fait mention. A l ’audience, il prit fantaisie
à l’appelant d’imaginerlainéme fin denon-recevoir, qu’op
pose Jacques Chéclin , sous le prétexte d’avoir exécuté le
jugement du P u y qui déclaroit, quant à présent, non-receval^le. C ’est ce qui donna lieu à la quatrième question insé
rée dans ce jugement: * Si une demande eri partage, ne con» .tenant point de conclusions sur l’action en rescision
» contre la renonciation , est suffisante pour admettre la
» prescription ? » L e jugement de Brioude fut confirmé,
plaidant le citoyen P agès-M eym ac, pour l’intimée. L e
m otif qui se rapporte à la q u a t r i è m e question est ainsi
conçu : .« Considérant,'qu’à l’époque, à-laquelle a du cesser
» la p r e s c r i p t i o n de ce droit est celle du 4 février 178^),
» jour où l’intimé a formé contre les appelans la de» iiiànde ,eii partage, laquelle a été continuée par l’exploit
» du. i l brumaire an 8, qurcontient l’action en rescision
» ;contre la renonciation dont il s’agit.
Il
ne paroît pas qu’on puisse rien opposer à ce pré
jugé si conforme au principe ; il y a absolument parité
de raisons pour fixer l ’époque de la demande au 13 prairial
�•
( -
î
3
)
->'27
an 2 , continuéeTpar la cédule dti ¿ 8 germinal an 7, qui
contient la demande en nullité de la renonciation dont
il s’agit: d’autant plus que la première de ses demandes a
eu expressément pour objet de SE r é g l e r s u r l e s
successifs.
’
C ’est en vain que l’appelant s’ést flatté d’exclure par des
chicanes, les intimés, d’une succession de valeur de plus de
30,000 francs ; sans doute l’injustice d’une pareille ten
tative est assez démontrée.-■ Que l’on pèse la valeur de cette renonciation par
elle-m êm e, par la mère qui l’a obtenue, par la fille q u i
l’a fa ite ,p a r la concordance de la loi et de la jurispru
droits
dence dans le lieu de la succession , par la faculté de
réclamer dans les trente ans , même par l’action intentée
réellement dans les dix ans ; il doit rester évidemment
démontré que cette renonciation est cad u q u e, comme
étant faite au profit de la renonçante , si l’élection fidu
ciaire à laquelle elle pouvoit prétendre , eût été faite en
sa faveur ; que la m è r e , ne fût-elle considérée que comme
curatrice ou simple administratrice , a joint à sa puissance,
à son ascendant, le d o l , soit en privant sa fille mineure
et qui étoit sous sa dépendance, d’ un com pte, m ême
d’instruction , soit en lui laissant l’espoir de l’élection
d’héritier ; qu’en obéissant aveu glém en t, la fille a réclamé
contre cette renonciation au moment même qu’elle l ’a
faite , en se constituant ses droits présens qui n epouvoient
être autres que ceux auxquels l’autorité maternelle venoit
de la faire renoncer, et en donnant sa procuration à son
mari pour en faire la recherche j que , bien-loin d’avo ir
approuvé cette renonciation faite à vil prix et à.ternies.
fit 0
#
»
�^
U < -,
: ( .H)
'é lo ig n é s, il n’a. été xcçù aucun a com p te; que ce silence
inéme est une interruption ; q u ’il n’a pu courir de pres
cription , d’abord, en puissance maritale, puis, parla nature
d e là renonciation, tant que l’usufruit a d u r é , tant que
la crainte révérentielle ou tout au moins l’espoir d’étre
élue ont subsisté ; qu'enfin il n y a point à hésiter d’appli
quer l’art. C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , et q u e ,
quand la cause seroit décidée par l’art. C X X X I V , Faction
en nullité est implicitement renfermée dans la cédule du
’ 13 prairial an 2 , dans l’intervalle des dix ans ; que con:séquemment le jugement dont est appel doit être con
firmé avec amende et dépens,
t
P a r conseil, C O U I I E R T - D U V E R N E T , anc. jurisc.
C R O I Z I E R , avoué.
L
e c o n s e il
m ém oire, E S T I M E
s o u s s ig n é
, qui a vu le présent
q u ’il a é t é bi en j u g é p a r le j u g e m e n t
du triburud d’Yssingeaux.
L a mère avoit été nom m ée tutrice de sa fille par le
testament du p è r e , antérieur seulement t\ sa mort de peu
de jours. Peu importe qu’elle fût alors pubère! le père
avoit jugé qu’elle avoit besoin d’être mise en tutelle-, les
parens en jugèrent de m êm e , lors de la confirmation de
la tutelle, qui fut faite par le juge des lieux. La mère ellemême accepta la tutelle de sa fille pubère, comme celle
.des autres enfans : de plus, la mcrc avoit l’usuiruit des
biens
�( 25 )
biens du père par son testament; mais cet usufruit ne
pouvoit frapper sur la légitime de la fille; par consé
quent devoit non seulement un compte d’instruction ,
mais même un compté d’administration pour la jouis
sance de la légitime. Dès qu’elle devoit un co m p te,
tant qu’elle ne l’avoit pas r e n d u , elle ne pouvoit pas sti
puler de sa fille, dans son contrat de mariage, une renon
ciation qui emportoit la décharge du compte. D ’un autre
côté , cette renonciation qui n’étoit dirigée en faveur de
personne, ni acceptée par personne, contrastoit singu
lièrement avec la clause subséquente du contrat de ma
riage , par laquelle la fille se constituoit tous ses biens et
donnoit pouvoir à son futur mari d’en faire la rechei’che.
L a dernière clause détruisoit la première. L a nullité de
la renonciation doit donc paroître évidente.
A -t-o n dû se pourvoir, pour faire déclarer cette n u llité ,
dans les dix ans, terme fatal des actions rescisoires, ou
Vaction s’est-elle prorogée jusqu’à trente ans? L ’article
C X X X I de l’ordonnance de 153 9 , celle de 1649 et l’art,
prem ier de celle de 1 6 6 7 , mettent hors de doute la durée
de l’action pendant trente a n s , et l’article C X X X I V de
l’ordonnance de 1639, n’a nulle application aux actes
passés entre les mineurs, même devenus majeurs, et les
tuteurs qui n’ont pas l’endu compte. C ’est ainsi qu’on le
jugea dans les temps les plus rapprochés de l’ordonnance
de 15 3 9 , dont l’intelligence devoit être alors plus connue 7
comme on peut le voir dans le passage du traité de rebus
dubiis , de M . D u v a l , qu’on a transcrit dans le mémoire.
Si dans la suite on s’éloig n a , contre tout principe, de cette
jurisprudence o a fut obligé d’y revenir, lorsque parut
D
�C
*6 )
l’orclonnancc de 16 6 7 , et à dater de cette époque, les
arrêts rejetèrent constamment la fin de non-recevoir des
ioans; aussi la jurisprudence de la sénéchaussée d’A u vergn e
s’y étoit-elle toujours conformée. O11 peut en citer trois
sentences, parmi un grand nombre d’autres ; l’une au rap
port du conseiller N evrezé, du 22 juillet 1749; la seconde
rendue à l’audience, lors de la première cause de l’avocat
Beaulaton, à présent juge du tribunal, du 24 juillet
de la même année, et la troisième du 4 juin 1 7 6 1 , au
rapport du conseiller Brujas.
Ce ne fut que dans les pi’emiers temps de la révolution,
qu on parut vouloir renouveler les questions, sans néan
moins qu aucune des milliers de lois qu’elle a enfantés,
ait dérogé aux vrais princip.es de la matière et aux ordon
nances qui les av.oient consacrés; mais le tribunal de
cassation les a maintenus. O n connoît surtout celui de ce
trib un al, du 3 messidor an 4 , qui a cassé le jugement du
tribunal d’E v a u x , du 19 floréal an 3; ct'rien de plus tran
chant que les motifs et le dispositif de ce jugement du
tribunal de cassa tion.Pi'eniier m otif: «Que l’article C X X X I
» de l’ordonnance de 1639, déclare nulles toutes disposi» tions faites en faveur des tuteurs et autres administra» tetirs, directement ou indirectement, avant le compte
» re n d u , et qu’une renonciation faite par un mineur en
» faveur d’une personne qui adininistroit ses biens et
» agissoit pour les héritiers d’un com ptable, présentoit un
» avantage indirect en faveur de ses héritiers:» Second
m otif : « Q u ’en pareil cas, l’action subsiste pendant trente
33 ans, parce que selon l’articleIer- du titre X X I X de
a l’ordonnance de 1667, h comptable ne cessant de l’être
�jfS f
( 27 )
que par la reddition de son com pte; c’est le compte
» seul qui peut éclairer le mineur sur ses intérêts. »
Troisième m otif : «Que l’article C X X X I V de l’ordonnance
» de 1 5 39 , qui restreint le délai à dix ans, n’est relatif
» qu'aux actions rescisoires qui n’ont rien de commun avec
» celles en n ullité, qui durent trente ans, et pour lesquelles
» il n’est pas besoin de lettres. » Enfin le dispositif, qui casse
» le jugement du district d 'E v a u x , comme contraire aux
> articles C X X X I de l’ordonnance de 1 539, et premier
» du titre X X I X de l’ordonnance de 1 6 6 7 , et com m e
» contenant une fa u s s e application de l'a rt. C X X X I V
» de l'ordonnance de 1 539. »
Les autres questions q u ’on a voulu élever dans cette
affaire, sont trop bien discutées dans le m ém oire, pour
qu’o n pense q u ’il soit nécessaire de rien ajouter aux moyens
qui y ont été em ployés, et qu’on adopte pleinement.
D é l i b é r é à R iom , le 11 messidor an 10.
ANDRAUD.
i»
__
Oi
a j
.
( A A c / v i A ^
A
Riom,
•
de l'imprimerie de L a n d r i o t ,
du
tribunal d ’appel»
seul imprimeur
A n 1 0 — 18 o2 »
�
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle de la mère
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Pierre Coutanson et Marguerite Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant. Annotations manuscrites.
Table Godemel : Renonciation : 7. est-ce dans le délai de dix ou trente ans qu’une fille, qui, en état de minorité et sans l’autorisation de sa mère tutrice et héritière fidéicommissaire de son mari, a, par son contrat de mariage, renoncé purement et simplement à ses droits paternels, en se contentant de la destination faite par sa mère, doit de pourvoir en nullité ou restitution ? de quelle époque commence à courir le délai, lorsque la mère, chargée d’élire l’héritier, n’a fait l’élection qu’après la renonciation ? lorsque l’action en nullité est dotale, la prescription court-elle pendant le mariage ?
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De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1770-1802
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1418
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Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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Yssingeaux (43268)
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doctrine
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
Successions
tribunal de familles
tutelle de la mère
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bdc9b957b4c3294d969af66afafd0dea
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Text
u-
T R IB U N A L
MEMOIRE
d ’a p p e l
EN RÉPONSE,
P O U R
C H É V E L I N , p r o p r ié t a ir e , habitant du
lieu de B a sset, commune de Bas , appelant
d 'un jugement rendu au tribunal d’Issingeaux,
J acques
le 5 thermidor an 9;
C O N T R E
C O U T A N S O N et C a t h e r i n e
C H É V E L I N sa femme, habitants du lieu de
la M ure, commune de Bas intimés.
P ierre
,
L ES intimés en publiant leurs défenses, n’ont pas
cherché à éclaircir la cause ; et si leur but a été de traiter
des questions étrangères souvent débattues et que tout
le monde connoît, ils ont parfaitement rempli leur objet.
A
»
séant à R iom .
�( 2 )
5
Catherine Cliévelin née le 23 février 17 a , majeure
le 23 février 17 7 7 , a-t-elle pu revenir en l’an 7 contre
une renonciation par elle faite ù la succession écliue de
son père, par son contrat de mariage du 3 février 1773?
P eu t-elle attaquer une renonciation qui, n’étant di
rigée en faveur de personne, a profité à ses cohéritiers?
Peut-elle en droit écrit faire considérer sa mère comme
sa tutrice, quoiqu’elle fût âgée de plus de dix-liuit ans
lors du décès de son père ?
Peut-elle enfin revenir contre la chose ju g é e , après
avoir été déboutée de sa demande en partage par un
jugement contradictoire qu’elle n’a point attaqué?
T elle est aujourd’hui la prétention singulière de Ca
therine Cliévelin; et ce qu’il y a de plus extraordinaire,
c’est qu'elle ait été adoptée par le jugement dont est
appel.
F A I T S .
D u mariage d’André Cliévelin avec Marie Coutanson,
sont issus sept enfans ; deux mâles et cinq filles. Il n’est
question au procès que de Catherine, l’une des intimés;
les autres enfans n’ont point réclamé.
L e 16 mars 1770 , A ndré C liévelin , père com m un,
fit un testament nuncupatif par lequel il légua à chacun
de ses enfans, à titre d’institution particulière, la somme
de 800 francs, et quelques meubles et denrées; il lègue
de plus à sa femme une pension viagère , et l’institue
pour son héritière fiduciaire, à la charge par elle de
remettre son entière succession à celui ou celle de ses
.enfans que bon lui semblera, lorsqu’ils auront atteint leur
vingt-cinquièm e année,
�3
> C
)
Si l’héritière fiduciaire vient à décéder sans faire cette
remise , le testateur nomme pour son héritier universel
Jacques C liévelin , son fils , appelant.
Il nomme également
sa femme tutrice de ses enfans:7
O
il fixe la valeur de ses meubles à. 400 francs. Dans le cas
où ils seroient de plus grande valeur , il lègue la plusvalue ci sa femme , et la dispense des charges et de toute
reddition de compte.
O n sent qu’au moyen des dispositions universelles du
testateur, la tutelle devenoit insignifiante. Marie Coutanson, sa veuve, avoit le droit de jouir de tous les biens
comme héritière fiduciaire , jusqu’à la majorité de ses
enfans. D ’ailleurs cette tutelle pouvoit tout au plus con
cerner les enfans im p u b è r e s ; elle étoit é tr a n g è r e à Cathe
rine Cliévelin qui, née le 23 février 1752 , avoit dix-huit
ans au moment du décès de son père.
L e 9 février 1773 , Catherine Cliévelin contracta ma
riage avec Pierre Coutanson ; sa mère lui donna en
faveur de ce mariage la somme de 1,000 francs, un
trousseau et vingt mesures de blé seigle. L a somme de
1,000 francs est stipulée payable en différens termes, et
il est dit « qu’au moyen de cette d o t, la future épouse
» autorisée par son futur é p o u x , et ce dernier de son
» p è re, a renoncé et renonce h tous ses droits paternels,
5) part et portion d’augm ent, supplément de dot, si le cas
» y éch et, sous la réserve de ses droits maternels. »
Telle est la clause littérale du contrat : il 11’y est pas dit au
profit de qui elle renonce ; mais il est bien évident que la
mère ne peut en profiter dans aucun cas, et que cette re
nonciation ne peut tourner qu’au bénéfice des cohéritiers.
Aa
�C 4 )
L e 3 janvier 1785, M arie Coutanson, mère commune,
fit son testament, par lequel elle légua à chacun de ses
enfans, à titre d’institution particulière , une somme de
200 francs pour droits maternels , et institua Jacques
Chévelin , son iils , son héritier universel.
Mais le 27 mai 178 7, Jacques Chévelin contracta
mariage avec Marguerite Varennes ; et Marguerite Coutanson, qui étoit encore vivante, remit à. son fils l’en
tière hérédité de son m a r i, et lui lit donation entre
vifs de la moitié de ses biens.
L a mère commune est décédée bientôt après ce ma
riage. Les règlerrïens de famille qu’on vient d’analyser
ont eu leur exécution jusqu’au 13 prairial an 2 , que
Catherine Chévelin et son mari provoquèrent une de
mande en partage devant un tribunal de famille. Les
arbitres de famille ayant été supprimés, Catherine Ché
velin renouvela sa demande en partage par cédule du
7 prairial an , qui fut suivie d’une assignation au cidevant tribunal du P uy , du 7 messidor suivant. Mais
comme elle désavouoit avoir reçu le montant de sa dot,
l ’appelant demanda qu’elle lût interrogée sur faits et
articles ; ce qui eut lieu sans que son frère eu fût plus
avan cé, parce qu’elle persista dans son désaveu.
Enfin la cause portée à l’audience du tribunal civil de
la H aute-Loire, le 2 nivôse an 7 , il fut rendu un juge
ment contradictoire qui sans s’arrêter ni avoir égard à la
demande en partage formée par Catherine Chévelin et
son mari , non plus qu’aux conclusions en nullité prises
contre la renonciation , renvoya Jacques Chévelin de la
demande contre lui form ée, à la charge par lu i, suivant
5
�4
^
i
( 5 )
ses offres, de payer à sa sœur le montant de la cons
titution de dot portée par le contrat de mariage de
Catherine C h évelin , en argent ou en fonds , à la valeur
actuelle, au choix de Catherine Chévelin, d’après les nou
velles lois, et il est ajouté : « sauf aux mariés Coutanson et
» Chévelin à se p o u vo ir, s’ils y sont fondés contre la re» nonciation porté een leur contrat de mariage, ainsi qu’ils
» verront bon être et de conformité à la lo i, tous les droits
» et moyens des parties leur demeurant jusqu’à ce res» pectivement conservés. »
Ce jugement est motivé sur ce que Catherine Ché
velin avoit reçu une somme excédant celle fixée par le
testament de son père, qu’au moyen de ce, elle avoit re
noncé à tous ses droits dans cette succession, et par exprès
au droit de supplém ent, ce qui excluoit toute idée de
partage. On observe encore que la demande en nullité
formée à l’audience contre la renonciation tendante à
anéantir un acte, devient par là principale, que dès-lors
il faut épuiser préalablement la voie de la conciliation.
Catherine Chévelin et son m ari, après ce jugem ent,
crurent pouvoir revenir par nouvelle action; le 28 ger
minal an 7 , ils firent citer leurs frère et beau-frère pour
se concilier sur la demande en nullité qu’ils cntendoient
former : cette nouvelle contestation fut portée au tribunal
¿ ’arrondissement d’Yssingeaux, où il intervint le
ther
m idor an 9 , un jugement contradictoire qui déclara nulle
et de nul effet la renonciation insérée dans le contrat de
mariage de Catherine Chévelin, et a condamné Jacques
Chévelin à payer aux intimés un quatorzième des biens
des père et mère communs, avec intérêts et restitution
5
A 3
t
�( 6 )
de fruits depuis leur décès pour les immeubles, suivant
la division, fixation et estimation qui en seroit faite par
experts, et pour le m obilier, suivant l’inventaire qui en
a été ou dû être fait.
Une foule de motifs précède ce jugement : on se contentei'a de rappeler les principaux. Il résulte, dit-on, du
testament d’André Cliévelin , et de la délibération des
parens, que Marie Coutanson fut nommée tutrice de ses
enfans. Il est établi que Catherine Chévelin étoit mineure
lors de son mariage ; la renonciation insérée dans ce
contrat est consentie par une mineure au profit de sa
mère tutrice.
Si la tutrice est déchargée de toute reddition de compte,
ce ne devoit être que jusqu’à la rémission de l’hérédité
que la mère étoit tenue de faire à l’un de ses enfans, à
l’âge de vingt-cinq ans : elle a administré les biens posté
rieurement, elle devoit donc un compte.
On pose en principe que le mineur a trente ans pour
revenir contre une pareille renonciation, suivant la juris
prudence du parlement de Toulouse. On prétend encore
que le prix d’ une r e n o n c ia tio n à une succession échue,
étant payable i\ longs termes en faveur d’une personne
qui ne donne rien de son ch ef, est nulle suivant la
jurisprudence de Roussilie.
Un mineur ne peut rien donner h son tuteur , d’après
les ordonnances de 1539 et 1540 : il est inutile de se
pourvoir en restitution pour des nullités absolues.
Tels sont les argumensqui ont détérminé les premiers
juges. Que d’erreurs cumulées dans ces motifs ! Jacques
Chévelin s’est empressé d’interjeter appel de ce jugement:
�(7)
""
la cause a même déjà été plaidée une première fois au
tribunal d’appel ; mais on ne rapportoit pas le jugement
du 2 nivôse an y ; le tribunal crut devoir surseoir jusqu’au
rapport de ce jugement, et dans cet intervalle les intimés
ont publié leui’s défenses.
O n va répondre succinctement aux moyens qu’ils pro
posent , et on croit pouvoir écarter avec succès leur
prétention ; mais il importe avant tout de fixer le véri
table état de la question.
O n voudroit faire considérer la mère commune comme
tutrice de Catherine Chévelin ; on établira qu’elle ne
l’étoit, ni ne pouvoit l’être.
O n prétend que la cession est faite à son profit ; on
prouvera qu’elle n’a jamais pu en tirer aucun bénéfice.
O n soutient que les tuteurs sont incapables de l’ecevoir
aucune libéralité de leurs pupilles ; on établira que les
ascendans sont exceptés de cette prohibition.
Enfin subsidiairement, on démontrera que toute action
en restitution ou en nullité se prescrit par dix années de
majorité ; que Catherine Chévelin ne s’est pas pourvue
dans un temps utile. Mais cette question ne sera que
subsidiaire , parce qu’elle n’est point dans la cause.
P
r e m i è r e
p r o p o s i t i o n
.
M arie Coutcinson n’a pu être tutrice de Catherine
jChévelin.
Les parties sont domiciliées en pays de droit écrit : on
sait que, dans le droit rom ain, on ne donnoitdes tuteurs
A 4
�Y \
( 8 )
qu’aux impubères et non aux adultes ; la tutelle finissoit
même par la puberté , ainsi que nous l’atteste Coquille
dans ses institutes au droit français, chapitre de l’état des
personnes.
Il n’est pas de matière dont les lois romaines se soient
plus occupées que de celle des tutelles. Les titres X X V I et
X X V I I du digeste; le titre X X V I I I , livre , du code;
et les institutes, livre prem ier, depuis le litre X III jus
qu’à la fin , ne parlent que des tutelles et de ceux à qui
il peut être nommé des tuteurs.
A u ff. la loi 9 , titre V , ne donne de tuteurs qu’aux
impubères. L a loi 13 , §. I I , fait cesser la tutelle au mo
ment de la puberté : Scd si puelhi duodecini a/m os i/n•
pleverit, tutor des in it esse. lia loi 3, au code de légitima
tutela , dit encore qu’on he peut donner de tuteur qu’aux
impubères : S i pttpiliare/n cetateni ex cesser i t , tutela
ta//¿en vestra ad eum non pert met.
L e §. I I I , inst. de tu telis, dit encore qu’on ne donne
des tuteurs qu’aux impubères : enfin , c’est un principe
qu’on trouve écrit dans tous les auteurs du di*oit écrit;
et Domat nous le donne en maxime au titre des tuteurs,
titre prem ier, section pi'emièrc; il ne pouvoit être ques
tion que de curateur dès qu’on avoit atteint l’âge de pu
berté , inst. de curatoribus.
5
O r Catherine Chévelin , femme Coutanson, à l’époque
du décès de son p è r e , étoit parvenue à sa dix-huitième
année; elle avoit atteint l’âge de puberté, par conséquent
sa mère n’a pu être sa tutrice ; elle 11e l’a pas été dans le
d ro it, elle n’a pu l’être dans le fait*, elle étoit héritière
fiduciaire de son m a ri, elle avoit droit de jouir de run iversalité
�Jk\
9
(
) a
versalité de ses biens'; elle étoit même déchargée de toute
espèce de reddition de compte; et quoiqu’en thèse géné
rale une décharge de rendre compte ne soit point va
lable , elle l’étoit dans l’espèce particulière, puisque le
mari pouvoit tout donner à sa fem m e, et que qui peut
le plus peut le moins.
Si M arie Coutanson n’a pas été tutrice de Catherine sa
fille , déjà l’objection principale des intimés tombe d’elle*
même : il n’y auroit eu aucune incapacité dans la personne
de la mère pour traiter avec sa fille*
S
e c o n d e
p r o p o s i t i o n
.
L a renonciation de la Jîïïe n'est p asJuite au profit de
la mère.
On se rappelle que le testament du p ère, du 16 mars
1770 , avoit fixé la légitime de chacun des enfans à une
somme de 800 fr. un mobilier et quelques denrées.
Par le contrat de mariage de Catherine C h évelin , la
mère lui constitue une somme de 1 ,ooo fr. par consé
quent au-dessus de celle fixée par le testament ; elle lui
donne également le trousseau et le mobilier tel qu’il étoit
déterminé par le père ; et au moyen de c e , elle renonce
à la succession paternelle échue, à tout augment, comme
à tout dx-oit de supplément : ce n’est point au profit de
la mère qu’elle dirige sa renonciation ; elle est générale
et indéterminée ; dès-lors cette renonciation ne pouvoit
accroître qu’à ses cohéritiers : il en est d’une renonciation
conventionnelle à une succession éch u e, comme d’une
A
5
^
�répudiation pure et simple. Les auteurs ne distinguent
pas dans leurs effets la renonciation faite moyennant un
prix d’avec la répudiation ; et quel en est le résultat ?
c’est que celui qui renonce ou purement et simplement,
ou moyennant un p rix , fait place aux autres cohéritiers;
il devient étranger à la succession , -et n’est plus compté
dans le partage.
S’il renonce moyennant un p r ix , il préfère une somme
certaine aux embarras d’un partage; s’il répudie purement
etslmplement, c’est qu’il croit la succession onéreuse: dans
l’un et l’autre cas, la portion accroît aux autres cohéri
tiers , à moins qu’il ne r e n o n c e ou ne c è d e ses d r o i t s . a u
proiit de l’un d’eux ou d’un tiers.' M a is, dans l’espèce
particulière, Catherine Chévelin n’a point renoncé- au
profit de sa mère ; elle n’a pas renoncé au profit d’un de
ses cohéritiers en particulier ; la mère n’en tire aucun bé
néfice ; Jacques, son fils , n’ en profite pas exclusivement;
c’est au profit de tous les cohéritiers en général qu’accroît
la portion de la renonçante.
Comment la mère p o u r r o i t - e l l e en profiter ? ce n’ est
point elle qui a paye , ou s’est engagée de son chef à payer
le prix de la r e n o n c ia tio n : cette somme n’a pu se prendre
que sur la succession du père; ce n’est que comme héri
tière fiduciaire du mari que la veuve a fixé le droit de sa
fille : celle-ci ri’a donc point dirigé sa renonciation au
profit d’une mère tutrice ; elle ne peut donc pas exciper
du prétendu moyen de nullité qui résulte d’un traité fuit
.avec le tu te l u 1 avant une reddition de compte.
�( 11
T
r o i s i è m e
)
p r o p o s i t i o n
.
Lies ascendans, quoique tuteurs, so?it exceptés. de la
■¡prohibition de Vordonnance de 1639, et d eîéd it d'am
pliation de 1549.
O n ne sait trop pourquoi on a dit dans les motifs du
jugement dont est a p p el, et les intimés ont répété dans
leur mémoire que les tuteurs étoient incapables de recevoir
aucune libéralité de leurs pupilles.
On croit avoir prouvé que la renonciation de Catherine
Chévelin ne pouvoit profiter à sa mère , qu’elle n’étoit
pas d i r ig é e en sa faveui-, ni par son a u to r ité ; que Cathe
rine Chévelin ne faisoit qu’exécuter la volonté de son père.
D ’un autre côté , ce n’étoit point une disposition
gratuite, puisque Catherine Chévelin recevoit le prix de
jeette même renonciation. Mais voudroit-on la faire con
sidérer comme une libéralité au profit de sa mère ?
l’ordonnance de 1639 et l’édit d’ampliation de 1549 ne
parlent que des tuteurs étrangers , et non des père et
mère tuteurs de leurs enfans : tel est l’avis de M . le
procureur général Bourdin qui a commenté cette or
donnance. Les auteurs, les plus célèbres, et môme
contemporains, qui ont écrit sur cetle ordonnance, at
testent tous que les père et mère n’y sont pas compris :
.tel est l’avis de Dumoulin dans ses notes sur l’ar
ticle C X X X I de cette ordonnance; elle ne s’applique,
.suivant lui , qu’aux tuteurs étrangers q u i, abusant de
l ’empire que la loi leur donne sur leurs pupilles} pour-
�( ** )
roîent en extorquer par violence ou par artifice des do
nations , à leur profit i C onspice, d it-il, hanc constitutionem quœ loquitur contra captantes ; mais il ajoute
que les père et mère tuteurs , même le frère, ne sont
pas compris dans cette prohibition, quia prestotio naturalis excludit si/ggestionem, et potiùs causa naturalis , quàm patris tutoris attenditur.
L ’article C C L X X V I de la coutume de Paris , qui
contient la même disposition que l’ordonnance de 1639,,
a ajouté l’exception en faveur des père et mère et autres
ascendans, qui avoit déjà été marquée par les docteurs
et par l’autorité de la cliose jugée. O n trouve au Journal
( (({[ des audiences un arrêt du 31 mai 1647, qui a confirmé
pour le pays du droit écrit, une disposition faite par le
' fils au profit du père tuteur. Un second, du 27 jan)\
vier 1684, a jugé conformément ; et enfin on trouve au
Journal du palais deux arrêts du 6 septembre 1673, qui
ont confirmé de semblables dispositions : ce second est
même remarquable en ce qu’il juge l’exception en faveur
d’une mère quoique remariée. « Il seroit certainement
» injuste , s’écrioit celui qui defendoit la m e re , lors de
» ce dernier arrêt, que par le mélange et le concours
» d’une qualité étrangère, les droits du sang perdissent
» leur force, et qu’un titre superficiel qui n’a son fon» dément que dans l’institution des hommes, qui s’efface
» par le cours de quelques années, anéantît, pour ainsi
» d ire , ce beau nom de père qui vient immédiatement
» de la nature, et qui avoit ses droits fixes et assurés
» avant qu’il y eût des lois dans le monde : c’est pour» quoi lu lo i, toujours sage dans ses dispositions, et qui
�13
(
)
» sait que le premier droit de la succession vient du
» sang, n’a jamais permis que la qualité de tuteur l’em» portât sur celle de père; au contraii’e , le titre de père
» joint à celui de tuteur , corrige la sévérité de la loi :
» et même dans le doute on présume toujours que ces
» sortes de libéralités des enfans envers ceux qiii leur
35 ont donné le jour , sont plutôt un tribut qu’ils payent
» à la qualité de père , qu’une récompense de la tutelle ;
» d'où vient ce beau mot que les docteurs ont coutume
» d’employer en ces rencontres , et qu’ ils ont emprunté
» de Papinien dans la loi 28 au fî‘. de excus. tut. non
» tanquam tuior , sed tanquam pater , judicïum dea J'itncti yn ornerait. »
Q
u a t r i è m e
p r o p o s i t i o n
.
Tout traité j'a it entre Je tuteur et le m ineur devient
inattaquable après dix ans de majorité.
Il est aisé de se convaincre , après la discussion qui a
-eu lieu , que cette question devient oiseuse ; c’est cepen
dant la seule qu’ont traitée les intimés : ils ont cherché
à établir que le mineur avoit trente ans à compter de
«a majox-ité , pour revenir contre une renonciation ou
un traité fait avec le tuteur, sans reddition de compte;
ils ont ensuite essayé d’écarter cette fin de non-recevoir,
en soutenant qu’ils s’étoient pourvus, dans les dix ans
utiles, contre la renonciation dont il s’agît.
M ais, si la mère n’a pas été tutrice, si la renonciation
n’a pas été dirigée à son p ro iit, à quoi bon examiner si
�V i . Vj
. C ^ }
on a pu revenir après dix ans, ou si la fin de non-recevoir
a été mise à couvert? cependant c’est-là le grand cliamp
de bataille des intimés ; ils ont répété tout ce qu’on a dit
pour et contre depuis trois siècles , quoique les idées
soient aujourd’hui fixées d’une manière invariable sur cette
controverse.
Ceux qui soutiennent qu’il n’y a que dix années, ont
pour eux la disposition précise d’une loi à laquelle il n’a
point été dérogé ; c’e s t - à - d ir e , l’article C X X X I Y de
l’ordonnance de 1539. Cet article ne fait aucune excep
tion , n’admet point cette distinction subtile des nullités
absolues ou relatives , il embrasse tous les cas •, et voici
comment il s’explique :
« N ou s, voulant ôter aucunes difficultés et diversités
j) d’opinions qui se sont trouvées par ci-devant, sur le
» temps que se peuvent faire casser les contrats faits par
» les m ineurs, ordonnons qu’après l’âge de trente-cinq
» ans parfaits et accom plis, ne se pourra pour le regard
» du privilège ou faveur de m inorité, plus déduire ne
,» poursuivre la cassation desdits contrats en demandant
» ou en défendant, par lettres de relièvement ou resti» tution ou autrement, soit par voie de nullité pour alié» nation de biens immeubles, faite sans décrets ne auto» ri té de justice, lésion , déception ou circonvcntion ,
» si lion ainsi qu’en semblables contrats scroit permis aux
» majeurs de faire poursuivre par relièvement ou autre
» voie permise de droit. »
Cette loi est claire et précise. Point d’exception pour
les tuteurs. Les mots déception ou circonvcntion qu’elle
em ploie, ne peuvent s’appliquer qu’au traités faits avec
�J4V
I
dft-VrL
(i5 )
les tuteurs et cependant elle n’accorde que d ix ans pour
revenir contre des actes de cette uatui'e.
Comment seroit-il possible d’étendre l’action jusqu’à
trente ans? dix ans de majorité ne suffisent-ils pas pour
rechercher ses droits ? N ’importe-t-il pas à l’ordre public
qu ’il y ait quelque chose de certain parmi les hommes ?
L e repos des familles doit-il être continuellement troublé ?
c’est cependant ce qui résulterait du système des intimés;
des dissensions continuelles et ruineuses, toujours injustes,
parce qu’il faut avoir égard au temps où les transactions
ont été passées: les sommes pi’omisesalors étoient toujours
en équilibre avec la valeur des droits. Les recherches inquiètes après un laps de temps considérable ne sont jamais
que les eiï'ets de la cupidité ou de l’iimbition , excitées par
la progression des denrées ou l’augmentation des valeurs:
presque toujours l’ambitieux qui réclame a placé uti
lement les sommes reçues, et fait ainsi un double bénéfice.
Aussi la loi citée a-t-elle paru si sage , que la jurisprudence du temps s’y est conformée en tout point ; et les
anciens arrêts ont proscrit ces réclamations tardives. Si
depuis quelques arrêts plus modernes se sont écartés de
cette disposition, ce n’est jamais que clans des circonstances
particulières; et une habitude de jurisprudence qui dérogeroit à une l o i, seroit vicieuse , il faudroit la réformer.
D’ailleurs, on cite à tout propos l’arrêt du 17 décem
bre 1706, qui n’a point jugé la question. Cet arrêt a
seulement décidé qu’ une transaction faileavec un homme
chargé de procuration, qui a administré pour dos mineurs
sans compte préalable, est détruite par des lettres de
¡rescision.
;
;
i
j
i
i
!
�t
( 16 )
Il est vrai que M . Joly de F le u ri, avocat général,
qui portoit la parole lors de cet arrêt, voulut établir la
distinction des nullités absolues d’avec les nullités rela
tives *, mais tout ce qui est système ne peut être considéré
comme une doctrine, encore moins déroger à une loi que
les juges doivent littéralement exécuter. A u s si, malgré
que ces arrêts aient été rappelés jusqu’à satiété, la nou
velle jurisprudence s’étoit établie d’une manière constante;
et s’il n’y a point encore de préjugé du tribunal d’appel,
on connoît assez la sagesse de ses décisions, pour croire
qu’il se conformera-'à la disposition de la loi.
E n v a in , opposeroit-on l’article I er. du titre X IX de
l’ordonnance de 1667, qui accorde trente ans aux mineurs
pour intenter l’action en reddition de compte contre un
tuteur : cet article n’a fait que se conformer à la règle gé
nérale , à la durée des actions ordinaires qui ne s’éteignent
que par le laps de trente ans ; mais il n’a pas statué sur
le cas particulier d’une transaction faite avec un tu teu r,
ni sur les cas de restitution qui étoient limités par les lois
antérieures, à dix ans de majorité.
Les prétendus jugemens du tribunal de cassation ne
sont point légalement connus : le dernier que l’on cite n’a
pas trait à la question ; et personne n’ignore qu’il a été
rendu en cette matière des jugemens pour et contre ,
suivant les circonstances particulières.
Mais on ne craint pas de s’égarer lorsqu’on invoque
la l o i, lorsqu’on voit que cette loi a embrassé tous les cas
de restitution, de n u llité , déception, circorivention; et
il faut décider avec elle, qu’après dix ans de majorité il
n’est plus possible d’obtenir la restitution.
�x7
(
)
Il s’agit d’examiner maintenant s’il est vrai que Ca
therine Chévelin se soit pourvue dans les dix ans utiles ;
1 ce n’est ici qu’une affaire de cacul : elle est née le 23 fé
vrier 1752 ; elle est donc devenue majeure le 23 fé
vrier 1777 ; elle ne s’est pourvue contre la renonciation
portée en son contrat de mariage du 3 février 1773?
que le 28 germinal an 7 , correspondant au 18 avril 1799;
c ’est-à-dire, plus de vingt-deux ans après sa majorité ; elle
est donc non-recevable..
En vain .cherche-t-elle à couvrir cette fin de nonrecevoir par différentes exceptions? L a première est de
dire que lors de son mariage elle se constitua tous ses
tiens comme dotaux; qu’en droit écrit les biens dotaux
sont im p r e s c r ip tib le s p e n d a n t le max-iage ; que dès-lors
il n’a pas couru un moment utile pour la prescription.
Cette objection est de la plus grande foiblesse. Dans
la pureté du d ro it, il n’y a de dotal que ce qui est
constitué par le contrat de mariage. On ne doit con
sidérer comme dotales que les sommes qui ont été
promises à Catherine Chévelin pour la succession pater
n e lle , plus les droits maternels qu’elle s’est réservés:
dès-lors son action en partage, ou sa demande en nullité,
étoit une action extradotale qu’elle a pu exercer, nonobs
tant la puissance maritale, et la prescription a pu courir.
faut môme aller plus loin. En admettant même que
par une clause générale et indéterminée, elle se fût cons
titué tous ses droits présens et futurs, la demande en restituîion ou en nullité n’en seroit pas moins extradotale,
parce que ces sortes d’actions sont inhérentes à la per
sonne, dépendent de la volonté de celui qu’elles inté
ressent ; que souvent il répugne de revenir contre son
11
�c
1 8
)
propre fait; qu’on peut être arrêté dans l’exercice de
cette action par des motifs de déférence ou d’affection ;
e t, pour qu’une action de cette nature fût réputée dotale,
il faudrait de toute nécessité que la femme se la cons
tituât nominativement et limitativement : tels sont les
véritables principes. On sait que celui qui est fondé
d’une procuration générale pour exercer toute espèce
d’actions, 11e peut valablement intenter une action res
cindante et rescisoire , qu’autant que la faculté lui
est expressément accoi’dée par la procuration. Ces
sortes de demandes ne sont pas rangées dans la classe
des actions ordinaires ; et dès que Catherine Chévelin
ne se l’est pas nominativement constitué par son con
trat de mariage, l’action a été pour elle extradotale.
Il
faut donc écarter sans retour cette première ex
ception , et les intimés ne seront pas plus heureux dans
celle qu’ils ont voulu proposer secondairement.
Catherine Chevelin ne pou voit pas, disent-ils, former
cette demande pendant la vie de la m ère; la déférence
ou la crainte arrêtoit sa vo lo n té, et de suite ils s’étu
dient à prouver contre toutes les idées reçues que cette
fille mariée étoit sous la puissance de sa m ère, et qu’il
existe une puissance maternelle aussi forte que celle du
père.
C ’est pour la première fois qu’on a là une disserta
tion de ce genre : jamais dans le droit romain comme
dans le droit français, la mère n’eut ses en fans sous sa
puissance ; et on ne s’arrêtera pas à répondre a de sem
blables absurdités.
Ce n’est encore que par une inversion de maximes du
droit qu’on fait arriver le ne p ejàsJucerel, en mettant
�JSi
4y i
( 19 .)
m ater au lieu de pater. Mais que pouvoit donc faire
de pis cette m ère, dont on redoute si fort la puissance?’
elle ne pouvoit que réduire sa fille à sa légitime ,
c’e s t-à -d ir e , au quatorzième des biens ; et elle n’en
réclame pas davantage aujourd’hui.
A uroi t-elle espéré que sa mère la choisirait pour reeueillir l’hérédité paternelle ; mais cet espoir a été déçu
par le testament de 1785, et encore mieux par le contrat
de mariage de son frère , du 3 janvier 1787. Cependant
elle n’a pas réclamé dans les dix ans, ni du testament,
ni du contrat de mariage; il est vrai qu’elle répond à cela
d’ une manière satisfaisante-, elle ne veut avoir connu ni
le testament de la mère , ni le contrat de mariage de
son frè r e ; m ais le c o n tr a t de m a r ia g e est l ’acte le plus
solennel, et celui qui acquiert le plus de publicité; mais
une sœur ne peut pas ignorer le mariage de son frère.
Ces allégations ne sont donc que des puérilités; aussi
dit-elle qu’elle est revenue dans les dix ans, à compter
du mariage de son frè re , puisqu’elle a formé en l ’an 2
une demande en partage devant un tribunal de famille.
O r, disent les intim és, une demande générale suffit
pour interrompre la prescription.
Mais ils ne veulent pas s’apercevoir qu’avec ce sys
tè m e , ils reviennent contre la chose jugée. Il est jugé
contradictoirement par le jugement de nivôse an 7 , que
Catherine Chévelin ne s’est pas pourvue contre sa renon
ciation ; elle a été déboutée de sa demande en partage,
précisément parce que sa renonciation n’étoit pas attaquée
et subsistoit dans toute sa force. Elle a été renvoyée à
se p ou rvoir, s'il y avoit lieu , contre celte renonciation;
«lie a acquiescé à ce jugement j elle a intenté une non-
�i
( 20 )
velle action ; elle reconnoît donc elle-même que sa pre
mière demande n’avoit pas interrompu la prescription y
et c’est en quoi l’appelant a opposé aux intimés l’auto
rité de la chose jugée. Cet argument n’est pas si incon
séquent que voudroient bien le dire les intimés ; ils auroient agi plus prudemment dans leur système, s’ils avoient
interjeté appel du jugement du 2 nivôse an 7 ; et dès
qu’ils y ont acquiescé , ce jugement est un obstacle invin
cible à leur prétention, en supposant toujours que la
renonciation pouvoit être attaquée comme faite au profit
d’une mère tutrice.
Mais c’est t r o p s’ o c c u p e r de cette q u es tio n s u b s id ia ir e ,
étrangère à l’espèce qui divise les parties. On a prouvé
que la mère n’a jamais été ni pu être tutrice de Cathe
rine C h évelin ; que la renonciation de 1773 ne pouvoit
profiter à la mère ; que cette renonciation n’étoit pas nulle
de plein d ro it, et ne pouvoit être attaquée que pour
cause de m inorité; dès-lors, le mal jugé du jugement
dont est appel est évident. Catherine Chévelin d o i t être
déclarée non-recevablc dans sa d e m a n d e : son système de
d éfe n se est u n tissu d ’a b s u r d ité s ; scs moyens ne sont pas
c o r r o b o r é s par la c o n s u lta tio n qui est à la suite du mé
moire ; ce n’est là qu’une consolation éphém ère, qu’une
dissertation sans objet, qui comme tant d’autres déjà
connues, ne fera pas changer la jurisprudence.
Par conseil, P A G E S ( de Riom ) , anc. jurisconsulte.
V E R N I E R E ,
A
R iom ,
de
avoué.
l'im prim erie de L a n d r i o t , seul imprimeur
tribunal d’appel. — A n 10.
du
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chévelin, Jacques. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle de la mère
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour Jacques Chévelin, propriétaire, habitant du lieu de Basset, commune de Bas, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'Issingeaux, le 5 thermidor an 9 ; Contre Pierre Coutanson et Catherine Chévelin, sa femme, habitans du lieu de la Mure, commune de Bas, intimés.
Table Godemel : Renonciation : 7. est-ce dans le délai de dix ou trente ans qu’une fille, qui, en état de minorité et sans l’autorisation de sa mère tutrice et héritière fidéicommissaire de son mari, a, par son contrat de mariage, renoncé purement et simplement à ses droits paternels, en se contentant de la destination faite par sa mère, doit de pourvoir en nullité ou restitution ? de quelle époque commence à courir le délai, lorsque la mère, chargée d’élire l’héritier, n’a fait l’élection qu’après la renonciation ? lorsque l’action en nullité est dotale, la prescription court-elle pendant le mariage ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1770-1802
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
20 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1419
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1418
BCU_Factums_M0210
BCU_Factums_G1420
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
Successions
tribunal de familles
tutelle de la mère
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53234/BCU_Factums_G1420.pdf
ea439d3bf24cc8ab33c32b084e203ab8
PDF Text
Text
PRECIS
EN
RÉPLIQUE,
POUR
P
ierre
C O U T A N S O N et C
.
;
I;
a t h e r in e
C H E C L I N , sa femme, intimés \
!
'
i-
CONTRE
!
J
acques
C H E C L I N , appelant.
L ' A P P E L A N T veu t exclure de la cause, et nomme
absurdité tout ce qui le contrarie dans son projet d ’ex
clure une légitim aire d’ un droit qu’elle ne tient que de
la l o i , et que les auteurs de ses jours n’ont pas plus pu
lu i ra v ir, que les subtilités, le ton d’assurance dans la
A
j
�#.'• «
I H,
( ^ )
discussion, et les efforts téméraires pour intercepter la
clarté, l’évidence des moyens, dans le vrai point de la
difficulté.
Jusqu’ici la symétrie des moyens a été entraînée autant
par la rédaction du jugement dont est appel, que par le
plan de défense qu’a présenté l’appelant dans ses causes et
m oyens, lors de la plaidoirie, dans sa réponse imprimée.
Rétablissons dans l’ordre naturel et ordinaire de ques
tions principales, celles que l’appelant nomme subsi
diaires.
D ’abord,
l’appelant
est-il recevable
et fondé à prétendre
l’intimé non-recevable dans sa demande? la négative
a reçu un tel degré d’évidence, pages 2o , 2 1 , 22 et 23
de l’imprimé de l’intim ée, que l’appelant n’y a pas fait
la plus légère réponse.......D ira-t-il, en plaidant, qu’il
ne l’en a pas jugé digne? —
Les intimés a voient pris des conclusions verbales et sub
sidiaires à l’audience du 2 prairial dernier, pour appeler
du jugement du 2 nivôse an 7; mais cet appel et ce juge
ment sont également inutiles, surtout d’après l’abandon
spontané de la part de l’appelant en cause principale,
et sur l’appel, de cette puérilité de prétendre que ce
jugement étoit sans retour.
La fin de non-recevoir, ressource ordinaire des plai
deurs en désespoir de cause, étant une fois écartée, l’action
�en nullité a-t-elle été comprise dans l’exploit du 13 prai
rial an 2 , dans les dix ans à partir du décès de la m ère,
postérieur au 27 mai 1787? Depuis la majorité de l’in
timée jusqu’à cette époque, y a - t - i l eu suspension de
prescription? l’ailirmative a été démontrée pages i 5 ,
1 6 , 17 et 18 du mémoire.
L ’apjDelant
regarde comme absurde tout ce que les
intimés ont fait valoir, d’après les autorités les plus res
pectables , sur la suspension opérée par la puissance ma
ritale et par la puissance maternelle.
Quant au premier point, il tente vainement de prêter
au contrat de mariage qui renferme la stipulation génél’ale de la constitution en dot, de la part de l’intim ée,
de tous ses droits, une réserve en aventif qui n’existe
p as, de l’action en nullité de sa renonciation.
A l’égard du second, il affecte d’ignorer que les in
timés, page 16, ont rappelé que le droit romain 11e reconnoissoit pas de puissance maternelle*, et il englobe incon
sid é ré m e n t,
dans son apostrophe familière d’absurde, ce
qu’il y a de plus prépondérant dans le droit français,
divers jurisconsultes recommandubles , des dispositions
de coutumes, M . le président do Lam oignon, les coopératours du projet du code civil.
Les intimés ont opposé d’autres moyens de suspension
de la prescription : l’appelant n’y a pas répondu.
A z
�( 4 )
Ce n’est donc que très-subsidiairement que les intimes
reviennent à la question jusqu’ici principale.
N ’est-ce pas l’appelant qui tente de détourner l’at
tention sur le vrai point de la cause, en présentant
d’abord comme certitude
que l’intimée n’a réclamé
qu’en l’an 7 , contre sa renonciation, tandis qu’il est au
moins en thèse, si cette réclamation n’a pas eu lieu le
13 prairial an 2, et en hasardant de détruire une qua
lité de comptable que la veuve Chéclin avoit elle-meme
contractée judiciairement?
M a r ie G o u tan so n , d it l ’a p p e la n t ,
n’é to it, ni ne pou-
voit être tutrice de sa fille ; l’appelant, en compulsant les
autorités du digéste, du cod e, des institutes, de D om at,
eût sans doute écla tfci la cause, en écartant tout ce qui
a rapport à la tutelle légitim e, et qui est évidemment
étranger à la contestation. Ne pouvant douter que M arie
Coutanson a été nommée tutrice par le testament du
père; qu’elle a été confirmée par un avis de parens et
par la justice, de son
expresse de sa
part
consentem ent,
et avec obligation,
de gérer, 11’étoit-il pas naturel de
s’attacher h ce qui est enseigné sur la tutelle testamen
taire ? le droit ne la place-t-il pas avant la légitim e?
ne lui donne-t-il pas la préférence sur celle-ci ? lia
faculté permise au père de donner un tuteur à scs enfans , émane de sa puissance. Il suiiisoit que l ’enfant
�( s >
fût sous cette puissance pour recevoir un tuteur de la
volonté du père ; et il étoit indifférent qu’il fût pubère
ou impubère. Paterne, pietas pro liberis consilium
capit.
L e père avoit même ce pouvoir pour l’enfant éman
cipé ou exhérédé : celui-ci pouvoit-il être impubère? Bien
plus ; on distinguoit les trois sortes de tutelles pour les
femmes pubères comme pour les pupilles. Tutores constituuntur, dit Ulpien [ dont le témoignage est rappelé
par M . Potliier dans son appendice sur les seizième et
dix-septièm e livres du digeste, toine I I , page 168.
Ferninis autem iàm irnpuberibus quiim puberibus, et
propter scxûs infirmitatem et propter forensii/m rerinn
ignorantiam. Il y avoit même une telle différence entre
les deux sexes, que le tuteur, nommé aux fils par le
père, étoit censé nommé aux iilles; mais le tuteur donné
aux lilles n’étoit pas censé donné aux iils, d’après les dif
férentes lois rapportées par F e m è re s, dans son traité
des tutelles, page
5,
qui termine ainsi : Excm plo enim
pessi/num est Joiiiuiino
vocabulo
ctiaîn
rnasculos
continari.
Mais n’est-ce pas assez que Marie Coutanson ait con
tracté en justice l’obligation de gérer comme tutrice ?
et le fait seul de la gestion ne l’a -t-il pas rendue
comptable aux yeux de la loi?
�( 6 )
M arie Coutanson étoit tutrice dans le droit; elle l’étoit
encore dans le fa it, parce que , quelqu’avantage qu’eût
pu lui faire son mari , il ne pourroit atténuer la légi
time de rigu eu r, due par la loi à ses enfans ; ce n’est
donc pas le cas d’invoquer l’adüge trivial : Qui peut le
p lu s , -peut le moins.
O n ne conçoit pas pourquoi l’appelant n’a pas luimême jugé étrangères à la contestation les deux propo
sitions , que la renonciation de la Jllle 11est pas f a it e
au profit de la mère , et que les ascendans, quoique „
tu teu rs
,
sont exceptés de la prohibition
de l’ordon
nance de 1539, et de l’édit d’ampliation de 1649.
Ces discussions sont aussi oiseuses qu’incohérentes.
Il suffit que la mère comptable ait trompé sa fille eu ne
lui donnant pas même un compte d’instruction, et qu’elle
ait blessé l’égalité au-delà de la faculté que lui en a voit
donnée le p ère,p o u r avoir donné lieu à la nullité , et
non à la restitution, selon les expressions de Dumoulin.
N ’cst-il pas du dernier ridicule de faire parade de
progression de denrées, d’augmentation de valeurs, de
reproches de cupidité , d’am bition, là où le légitim aire,
depuis l'ouverture des successions en 1770 et 1787 ,
n’a reçu
j la moindre chose?
C’est plutôt une législation nouvelle que propose l’appe
lant, pour détourner Tai-ticle CX XX J.de l’ordonnance
�( 7 )
de
i 539 ,
^
qu’une discussion profonde sur les autorites
qui lui ont été opposées.
Selon l u i , ce sont des questions étrangères , souvent
débattues , que tout le monde connaît , un tissu d’ab
surdités ; une dissertation sans objet, q u i , comme tant
d'autres , ne fe r a pas changer la jurisprudence.
Mais c’est précisément la jurisprudence qui a été invo
quée ! Plaisanter, se moquer, se croire le plus habile,
c’est sans doute beaucoup pour celui qui se complaît en
lui-même ; mais ce n’est ni modeste pour un jeune h omme,
ni circonspect envers le jurisconsulte célèbre qui a donné
la consultation im prim ée, que l’appelant se divertit à
nommer consolation éphémère : quoique ce juriscon
sulte ait vieilli avec succès dans l’étude et l’application
du droit et de la jurisprudence, c’est encore moins satis
faisant pour la justice, pour la vérité.
Par conseil, COH E R T-D U V ER N ET , ancien jurisc.
CROISIE R , avoué.
A
R iom , de
l'im p rim erie de L
a n d r io t
tribunal d ’appel. —
, seul im prim eur
A n 10.
du
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle de la mère
doctrine
ordonnance de 1539
fideicommis
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réplique pour Pierre Coutanson et Catherine Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1798-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1420
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0209
BCU_Factums_M0703
BCU_Factums_M0210
BCU_Factums_G1418
BCU_Factums_G1419
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
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Domaine public
doctrine
fideicommis
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
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tribunal de familles
tutelle de la mère
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cbb9dc38f64aa2c6cd8d9b4abe9c2bc1
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■îi
GÉNÉALOGIE DES PARTIES.
N.............
Treveis.
C ath erin e,
à
Georges Bonnafoux.
2
Françoise-Hyacinthe,
à
Louis Laval
d’Arlempde.
Catherine,
à
Gaspard
Montereymard.
I
Laval-d’Arlem pde,
Marie M a rth e ,
morte sans p o sté rité ,
A
a
Bénigne Plantier.
5
CalherineFrançoise,
a«
Pierre
SaignardCliom ouroux.
IVIicliel.
JulieAngélique,
M arieM a rlh e,
à
FrançoisAm able
LarocheNegly.
à
Jacques
M athon,
appelans.
2
GeorgesFrançois,
JosephBênigne,
intim é.
intimé.
5
Joseph
R aym on d ,
A lexisFrançoise,
intim ée.
intim é.
intim ée.
4
JeanneM drieM artlie,
intim ée.
*¡
4
2
LouiseFrançoise,
�M
É
M
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P O U
I
R
E
R
Dame J u l i e - A n g é l iq u e M O N T E R E Y M A R D , et le
sieur J a c q u e s M A T H O N , son m ari propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental,appelans d’un jugement
rendu au tribunal d’Yssingeaux le 1 5 floréal an dix ;
C O N T R E
'! .
COUR
D’APPEL
’
SÉANTE
Les sieurs J o s e p h - R a y m o n d , B é n i g n e , A l e x i s - AR I O M .
F r a n ç o i s e S A I G N A R D - C H O M O U R O U X ,p r o
priétaires, habitans de la ville d 'Yssingeaux, intimés ;
et encore C O N T R E
••
n
G eo rg e- F r a n ç o is - A l e x i s L A R O C H E - N E G L Y ,
propriétaire, habitant du lieu de Ch am blas commune
de Saint-Etienne-Lardey r o l, intim é.
Q U E S T IO N P R IN C IP A L E .
Une donation faite au nom d’un t iers par contrat
de mariage, et sans procuration de sa p a r t, est-elle
obligatoire pour celui au nom de q u i elle est f a i t e ?
Ct
a h e r i n e et Marthe T re v eis étoient sœurs. Là pre
mière épousa Georges Bonnafou x et eut trois enfans,
■A
�C2 )
Catherine, Françoise-Hyacinthe, et Catherine-Frnnçoise.
La seconde épousa Bénigne Plantier; elle est morte sans
enfans. Catherine Bonriafoux, première fille de Catherine
T reveis, s’est mariée avec Gaspard Montereymard, et a
eu de son union M ichel M ontereym ard, d’où est issue
dame Julie-1A n géliqu e, épouse de sieùr Jacques Mathon.
Ce,sont les appçlan's. ;î ; a,/ > •'
!
•- r
Françoise-Hyacinthe JBonnafoux a contracté mariage
avec un sieur Loüi$, delLaval-d’Arlerripde , et a eu un lils
qui a figuré dans la cause principale, mais n’est pas
partie sur l’appel.
^
^
Catherine-Françoise, mariée à Pierre Saignard-Chom ouroux, a eu douze e n f a n s il n’en existe plus que
trois et les enfans d’un auti'e. Les trois existans, parties
au procès comme intimés, sont Joseph Raymond, LouiseFrancoise, et Alçxi$7Françpise.
»
7
.. ■ ;
'
:I T >
M arie-M artlie , quatrième enfant , épousa FrançoisAm able Laroche-Négly ;'il en est provenu quatre enfans:
Georges-François, l’un d’eux,'est seul en cause sur l’appel.
L e 13 février 1746, par le contrat de mariage de M arieMarthe Saignard- C hom oroux, avec François - Am able
L aroch c-N egly, se? père et mère lui constituèrent une
somme de 1800b
savoir /celle de 9000 ^ pour droits pa
ternels , 2000 /tVdii clief m a t e r n e l , 1000 ^ que le père
a ordre de constituer à la demoiselle future épouse,
du c h e f de darne Catherine Ti'eveis, aïeule maternelle
de cette dernière, 3 0 0 0 du chef-de darne M arie-M arthe
T reveis, veuve de M . P la n tier, aussi de son ordre,
1000 tt du c h e f de)
:J ea n - A y m é de Saignard-deChoinouroux j aussi.de> son^ordre y en tant moins des
�( 3 ) '
droits légitimaifes qui -peuvent lui être dûs du chef
desespère et m ère, et finalement la somme de 2000 ir
que demoiselle ; M arie - Alexis de Saignard, présente,
donne et c'onstituoi de son fchef.
; ; ¡;
•>: « Laquelle entière constitution, e$t-il ajouté >ledi l.sieur;
« de Chom ouroux, tant. de son chef que' de celui des
« dames Treveis aïeule et tante, etc. a promis et prom et,
« en son propre et privé n o m , et solidairem ent, payer. »
' L e père p aye, en effet, jusqu’à concurrence.! de
12000 tr. Cette dernière som m e est-stipulée remboursa
ble en payemens égaux et annuels d elà somme de 3000
chacun, à commencer en un an lors prochain, et succes
sivement d’année en année, sans iiité,rêts qu’à défaut de
payement.
.
•
r
L ’aïeule ni là tante ne sont présentes à ce contrat.
L e 30 avril de la même année 1746, Catherine Treveis,
aïeule de la dame Laroclie-Negly, fit son testament , et con*
firma la donation de 1000 1t'. portée par le contrat de
mariage de sa petile-fillé.
)(
L e 30 août iy ô y , Marie-Marthe Treveis ^veuve Plan?
lie r , fit aussi son ■
tëstament. Il contient quelques legs
p ieu x , et une institution universelle, au profit de Ca-ttherine Bonnafoux , veuve Montci’eymard , mère de?
appelans , ! et garde le (silence le plusrabsolu sur la dona
tion de 3000 1f~ que! Louis +■
Pierre Saignard-de-C ho-r
m ouroux, disoit avoir faite par so 7i ordre à la dame
L aroclie-N egly, sa fille, lors de son contrat de mariage.
La succession de M arie-M arthe Treveis étoit fort obér
ree : la dame Bonnafoux ne voulut, l’accepter que par
bénéfice d’inventaire, lorsqu’elle connut le testament. Elle
A 2.
�( 4 - ) - .....................................................
fit procéder à l’inventaire, après en avoir obtenu la per
mission , avec assignation aux parties intéressées. La dame
Laval seule s’y fit représenter pour réclamer une somme
de 2000
qui lui avoit été constituée par la défunte,
lors de son contrat de mariage de 17 2 7; mais la dame
Saignard ne s’y présenta point.
Suivant les titres qui ont été trouvés dans les papiers
de la dame Bonnafoux, et qui sont écrits de sa main, l’actif
de la succession de la dame veuve Plantier, dans laquelle
on comprenoit une maison sise en la ville du P u y , se
portoit à 26900
et le passif à 29300
encore ne
comprenoit-on pas dans le passif ni la créance de 2000
de la dame L a v a l, ni la prétendue créance de 3000
répétée par la dame Laroche-Negly.
A in s i, la dame veuve Plantier ne laissoit pas suf
fisamment pour acquitter ses dettes, et il est établi par des
quittances, dont on est en état de justifier, que la dame
Bonnafoux a payé au delà de l’actif, comme aussi qu’elle
a remboursé à la dame Laval les 2000 ^ qu’elle avoit
droit de répéter.
La succession de M arie-Martlie T reveis, veuve Plan
tier, ne s’est ouverte qu’en 17^9, deux ans après qu’elle
eut fait son testament. La dameiLaroche-Negly, sa petitenièce, lui a survécu pilus de iquinzé ans, et le mari de
celte dernière a vécu plus de: vingt-quatre ans après la
grand’tante de sa femme; 'L es deux , époux , le mari
surtout , maître de la dot mobilière , n’a jamais réclam é,
n i contre la grand’tante , ni) contre ses héritiers , le
montant de la donation portée en son contrat de mariage.
Cependant le sieur Saignard Cliom ouroux; son beau-
�( 5 y
p è re , avoit contracté l’obligation personnelle d’acquitter
le montant de la dot constituée de son chef ou de l’ordre
prétendu de la veuve Plantier; il en avoit payé une partie
et avoit pris pour le surplus des termes rapprochés qui
depuis bien long-temps étoient échus.
En général, et surtout en pays de droit écrit, la dot
est censée payée après dix ans, à compler du dernier
terme échu ; le mari en devient seul resp on sable : c’est
ainsi qu’on le jugeoit constamment au parlement de T o u
louse , dans le resso rt d u q u el les parties sont domiciliées.
Ce n’est qu’en l ’an y , et par acte des 18 floréal et
7 prairial de la même année, c’est-à-dire, cinquante-trois
ans après le contrat de mariage de la dame Laroche-N egly,
que les héritiers Saignard-Chom ouroux imaginèrent
une forme de procédure toute nouvelle, et qui a dû paroître extraordinaire, même à Yssingeaux,
A van t aucune demande formée par les héritiers de la
dame Laroche-N egly, les héritiers Saignard firent faire
des saisies-arrêts, connues dans le pays sous le nom de
bannimens ) entre les mains d’un sieur Bonne ville, comme
des biens du sieur Matlron et de son épouse, pour sûreté
du payement de la sommede 4000
constituée, par ordre
et pouvoir écrit donné par Catherine et Marie T reveis, à
la dame de Laroclie-Negly , et que ses héritiers, est-il
d it , étaient sur le point de demander en justice.
Il est bon de remarquer que ces héritiers Saignard, si
prevoyans, commençoient leurs poursuites avant aucune
action des Laroche-Negly, et sans avoir aucun titre confie
les appelans. Cependant personne n’ignore qu’on ne peut
faire de saisies-arrêts qu’en vertu d’un titre authentique,
�c 6 3
ou qu’au moins pour suppléer au titre il faut une per
mission de la justice.
Cette saisie étoit donc irrégulière et nulle ; mais encore
elle est faite à la requête du sieur Saignard et de ses deux
sœurs, c’est-à-dire, sans énoncer le prénom de celui qui
est nom m é, et sans qualifier autrement les demoiselles
Saignard, que de cette m anière, ses deux sœ urs, qu’il
ne nomme pas. T elle est la manière de procéder dans
le pays.
lies appelans n’ayant pas voulu s’expliquer sur cette
saisie, on fit alors paroître les Laroche-Negly , qui in
tentèrent leur demande en payements de la dot de
leur m ère, ainsi que des droits successifs qui dévoient
leur révenir dans les successions de leur oncle et tante :»
c’est ainsi qu’ils s’expliquent. L ’action est intentée par
Georges-François Laroclie-N egly, fa isa n t tant pour lu i
que pour ses frère et sœurs ÿ il cite le sieur Saignard
et ses deux sœ urs, dans les mêmes termes, et sans au
cune énonciation, ni du prénom du frère, ni du nom
des deux sœurs.
'
;
L e 27 prairial an 7 les appelans reçoivent une dénon~
dation de la cédule des Laroclie-N egly en ces termes :
A la requête du cit. Saignard et de ses deux sœurs.
Saignard demande à être concilié sur faction en garan
tie de la demande du sieur de L aro clie-N egly, pour
raison de la somme de 4000 rh constituée à leur mère ,
pour le compte et par l’ordre de Catherine et Marie-*
Marthe Treveis.
Saignard notifia, par la même copie, un écrit sous
seing privé , portant pou voir, delà part de Catherine et
�(7 )
M arie-M arthe T reveis, de constituer à M arie-M artheFrançoise Saignard la somme de 4000 ^ , et sous leur
obligation
de rembourser la somme à Pierre-Louis Sai©
gnard, attendu qu’il s’obligera de les payer. Cet acte pro
duit au procès par les intim és, sous la cote prem ière,
est signé du seul nom de Plantier, sans énoncer le nom
propre de M arie-M artheTreveis, ni la qualité de veuve;
il est sous la date du 9 février 1746 , il n’a été enregistré
que le 10 décembre 1753.
L e 11 thermidor an 7, les appelans, ainsi que le sieur
I ia v a l, qui n’est pas partie sur l’appel, furent assignés,
toujours à la requête de Saignard et de ses deux sœurs,
comme dans la cédule : on ne donne pas plus de quali
tés aux assignés ; l’huissier ne dit pas môme qu’il s’est
transporté à leur dom icile, mais seulement avoir donné
une copie à la dame M ath on , trouvée à M ontfaucou,
sans apprendre comment elle se trouvoit là.
S;)ignard , pour lui et ses sœurs, assigne pour voir
joindre la demande en garantie à la demande prin
cipale; e t, sans libeller autrement sa demande, ni pren
dre de conclusions précises, il demande seulement qu’on
lui adjugé toutes celles prises dans sa cédule, et toutes
les autres qu’il trouvera bon de prendre dans le cours de
l ’instance.
L e 11 fructidor a n 7 , jugement qui joint les demandes
principales et récursoires, et adjuge au sieur LaroclieNegly une provision de la somme de 3000
contre
Sut gnard et ses sœurs.
Les appelans contestent cette demande en recours par
tous les moyens qui militent en leur faveur, et qui se
�( 8 )
ront développés dans la suite; ils désavouent également
les signatures apposées au bas de l’écrit qualifié de pro
curation du 9 février 1746.
>
L e 6 germinal an 8 , il est rendu un second jugement
où tous les cohéritiers Laroche-Negly et tous les Saignard se trouvent en qualité, sans l’avoir été dans les
exploits introductifs, et sans être intervenus; qui, considé
rant que sur les demandes en partage les parties sont
convenues d’arbitres ( les Laroche-Negly et lesSaignai’d ),
ordonne que dans une décade les arbitres procéderont au
partage ; e t, avant faire droit sur la demande en payement
des 4000 tf", ordonne la vérification des écritures et signa-,
tures Treveis, apposées en la procuration rapportée par
Saignai'd, sur pièces de comparaison.
On assigne les appelans, en vertu de ce jugement, pour
nommer des experts ; ce n’est plus au lieu de Bourg-*
A rgentai, qui est leur domicile, mais en la ville du Puy.
Les experts sont nommés : après de grandes circonlocu
tions, et à travers une foule d’incertitudes, ils inclinent
à penser que la signature est sincère.
Les appelans contestent. Ils ne sont pas héritiers purs
et simples do M arie-M artlic Treveis. Catherine Bonna-*
foux n’avoit accepté la succession de sa tante que par
bénéfice d’inventaire. L a donation de M arie ^M arthe
Treveis étoit nulle. L e tiers n’avoit pas de pouvoir. L ’écrit
enregistré en 1753 étoit insuffisant. On ne peut faire de
donation au profit d’un tiers, sans procuration de sa part,
et annexée à l’acte portant donation. L ’action dirigée
contr’eux étoit d’ailleurs éteinte par la prescription; ce
n’est pas après cinquante-trois ans de silence qu’on pou*
voit former une semblable demande.
�(9 )
Les parties sont appointées sur toutes ces discussions ;
et enfin, le i 5 floréal an 10, a été rendu, à Yssingeaux,
uu jugement définitif, par forclusion , contre le sieur
Laval. En voici la teneur :
« Le ti-iLunal disant droit aux conclusions principales
* prises par les frères, sœurs et belle-sœ ur Laroclietç N egly, sans avoir égard à celles des frères et sœurs
« Chom ouroux, non plus qu’à celles des mariés M atlion
c? et Montereymard ; vidant l’interlocutoire porté par
« le jugement du 6 g e rm in a l an 8 ; homologue la re« lation rendue par les experts Champanliac-Villeneuvc
« et P ouzol, les 7 et 8 pluviôse an 9 * en conséquence,
« déclare la procuration privée, passée le 9 février 1746
« par Catherine et M arie - M arthe Treveis sœurs, en
« faveur de Pierre-Louis Saignard-Chomouroux, avouée,
« et reconnue de conformité à l’édit de 1684; et, sans
a avoir égard aux fins de non-recevoir opposées par les
« mariés Mathon et Montereymard, desquelles elles dc« meurent démises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Chomouroux à faire payement aux frères, sœtlrs.
« et bslle-sœur Laroclie-Negly, de la somme de 3666 ***
« 13^ 4$n, j pour reste de la dot constituée à Marthe Sai« gnard-Chomouroux leur m ère, lors de son contrat de
« mariage avec Am ablc Laroche-N egly, du 13 février
« 1746, et ce avec les intérêts encourus, savoir, de la
K somme de 666
13«/ 4^v > depuis le 14 février 1749;
« de la somme de 100 0^ , depuis le 14 février 17 4 7 ;
« d’autre somme de 1000
depuis le 14 février 1748;
« et enfin, de la somme de 1000
depuis le 14 février
“ 1749 » sous toutes les déductions et distractions de
B
�( ÏO }
« droit ; condamne les frères et sœurs Chomouroux aux
« entiers dépens envers les Laroclie-Negly. Comme aussi
« disant droit aux conclusions prises par les frères et
« sœurs Chom ouroux, demeurant les instances jointes,
« sans avoir égard à la demande en main-levée provi« soire et définitive des bannimens mis au préjudice des
« mariés Mathon et M ontereym ard, entre les mains du
« sieur B onneville, a condamné et condamne le sieur
« d’A rlem pde, et les mariés M athon et M ontereymard,
« en leur qualité de cohéritiers de Catherine Treveis
« leur bisaïeule, à relever et garantir conjointement les
« Chomouroux., pour la somme de 666
13^ 4-^, dont
a la condamnation se trouve prononcée eontr’e u x , en fa« veur des Laroclie-N egly, et ce avec les intérêts depuis
« le 14 février 1749, sous toutes déductions et distrac« tions de droit; et, sans avoir égard aux conclusions
« subsidiaires et principales prises par les mariés Mathon
« et M ontereym ard, dont les a dém is, les a condamnés
« et condamne, en leur qualité de successeurs à Cathe« rine Bonnafoux, héritière de Mai*ie-Marthe Treveis,
« à relever et garantir les Chomouroux de la condam« nation contr’eux prononcée de la somme de 3000
« et ce avec les intérêts depuis les époques fixées et
« adjugeés aux L a ro c lie -N e g ly , et sous les mêmes
« déductions et distractions ; a condamné conjointe« ment les mariés Mathon et Montereymard, et d’A r « lempde, â un tiers des dépens, tant de la demande
« principale que de celle en garantie, non compris les
« frais de la vérification des signatures des sœurs T re « -yeis, ensemble le rapport fies experts , lesquels dé-
�( 11 )
pens demeurent à la charge des mariés Ma th on , ensemble les autres deux tiers des dépens, ainsi que les
deux tiers du coût du jugem ent, l’autre tiers devant
être supporté conjointement par les Mathon et d’Ai>
lempde. »
Ce jugement est fondé sur une foule de motifs qu’il
est important de connoître pour les apprécier.
Les premiers juges posent d’abord les questions sui
vantes :
« Les réclamations de la famille Laroche-N egly, contre
« les frères et sœ urs Saignard, sont-elles prescrites?
« La prescription a-t-elle pu courir étant sous la puis« sance paternelle ? Préjugeant la prescription inter« rompue, faut-il porter la même décision à l’égard de
« la demande en garantie formée par les frères et sœurs
« Chom ouroux, contre les mariés M athon et M onle« reym ard, et le sieur Laval-d’Arlem pde ?
« Faut-il considérer les mariés Mathon comme liéri« tiers purs et simples, ou comme héritiers sous béné« fïce d’inventaire de M arie-Marthe T reveis?
« La main-levée, définitive ou provisoire, réclamée
« par les mariés M athon, peut-elle leur être accordée?
a Considérant que toute prescription n’a pu courir
« contre les enfans Laroche-N egly, pendant le vivant de
« leur père ; que tous les auteurs du parlement de Tou« louse enseignent unanimement que le fils de famille
« privé par la loi de l’usufruit de ses biens est censé
K ignorer ses droits ; qu’ayant les mains liées pendant
« le vivant de son p è re , et n’ayant pas l’exercice de ses
« droits et de ses actions, toute prescription, soit d’un
B a
'«f
«
«
«
«
�t iO
héritage ou d’une action , doit dormir et demeurer
suspendue , contra non valentem , etc. L e Journal du
Palais de Toulouse rapporte deux arrêts, du mois
d’août i 6 ç 5 et 1702, conformes à cette doctrine; il y
est dit : Quoique le père soit le maître des actions à
l’égard de son fils , cependant nous jugeons que la
prescription ne court contre le fils de famille que
depuis qu’il est sorti de la puissancee paternelle.
« Considérant que les enfans Laroche-Negly ne peu-*
vent être assimilés à des mineurs qui doivent se faire
restituer dans les dix ans de leur majorité; qu’il existe
même une différence bien prononcée par la lo i, entre
le mineur et le fils de famille ; que le mineur a le
libre exercice de ses actions.; il est nanti de ses titres,
et présumé avoir la jouissance de ses droits assisté d’un
curateur; il peut ester en jugement : le fils de famille,
au contraire, est privé de l’usufruit de ses biens; la
loi ne lui accorde aucune action pour agir ; il ne peut
ester en jugem ent, et la prescription ne reprend son
cours que dès l’instant qu’il se trouve affranchi de la
puissance paternelle.
« Considérant que la dame Cliom ouroux, femme Laro clie -N e g ly , ayant contracté mariage le 13 février
1746, et étant décédée le 4 juin 1766, il ne court sur
sa tête que dix ans trois mois de prescription utile ;
qu’ayant été interrompue pendant le vivant du père
des frères et sœurs Laroche-Negly, n’ayant repris son
cours qu’A l’époque de son décès, arrivé le 4 décembre
1783, il ne s’est écoulé , jusqu’au jour de l’introduc
tion de l’instance, qu'un intervalle de quinze ans, ce
�( 13 )
« qùi forme ün total de près de vingt-six ans-, qu’il fai« loit trente- années utiles pour opérer la prescription
« de l’action des frères et sœurs Laroche-Ncgly.
r
« Considérant que les experts ayant décluré les signa
it tures de Catherine et de M a r i e -M arthe Treveis sin« cères et véritables, on ne peut se méprendre sur l’in« tention de ces deux sœurs, manifestée dans la procu« ration du 9 février 1746 ; que la constitution de
« 4000 if faite à la mère des enfans Lnroche-Ncgly, p;,r
« “Louis Chomouroux son p ère, n’est que l’exécution (le
« la volonté des sœurs Treveis; que Louis Chomoui:ou;x
k ne peut être considéré que comme le mandataire de$« dites sœurs, ou tout au plus comme leur cautiçn ;
« que, dans ces deux cas, la prescription n’ayant pqs
« couru, ou ayant été interrompue sur la tête des suc« cesseurs de Louis Chom ouroux, elle doit subir le même
« sort vis-à-vis les représentais des sœurs T reveis, étai^t
« de principe certain qu’il n’y a que l’extinction de l’obl;•« gation principale qui entraîne celle de l’obligation
« accessoire, et que ce n’a été que du jour que les frères
« et sœurs Laroche-Ne^ly ont formé leur demande ju« diciaire contre les successeurs de Louis C hom ouroux,
« que ceux-ci ont pu former leur demande contre les
« mariés M athon, pour l’objet des 4000 ^ donnés par
« les sœurs T i’eveis.
« Considérant que Catherine Bonnafoux , aïeule.,des
« mariés M athon, et héritière deM arie-M arthe Treveis,
« ayant requis, par sa requête du 13 février 1759, la
« faction de l’ inventaire et l’appréciation du mobilier
« délaissé par la dame M arie-M arthe T rev eis, pour en
�( 14 )
« connoître la consistance avant de se déterminer à ac« eepter ou abandonner ladite hérédité ; qu’ayant fait sa
« déclaration au bureau de l’enregistrement, où elle ne
« prit point la qualité d’héritière sous bénéfice d’inven
te taire ; qu’ayant constamment joui les biens de M arie« M arthe T reveis, en ayant disposé comme de sa chose
« propre, et sans avoir jamais pris la qualité d’héritière
cc sous bénéfice d’inventaire; qu’ayant encore sollicité,
« par lettres, des délais pour payer, on ne peut se dkk penser de la regarder comme héritière pure et simple,.
« et s’étant déterminée, après la faction de l’inventaire,
« à accepter purement et simplement.
« Considérant que M ichel M ontereymard, fils de Ca« tlierine Bonnafoux, et père et beau-père de Marie
« M athon, a réclam é, par lettres, des termes, et offert
« des biens fonds en payement; qu’il a accepté purement
« et simplement la succession de Catherine Bonnafoux
« sa mère ; qu’il a vendu le champ porté dans la décla« ration faite au bureau de l’enregistrement, sans pren« dre la qualité d'héritier bénéficiaire de sa mère et de
« la dame Treveis ; que la femme M athon a pareille« ment accepté la succession de M ichel Montereymard
« son p è r e , sans réclamer la division do la succession
« de M arie-M arthe Treveis ; qu’il s’est en conséquence
« opéré une confusion dans ces' diverses successions.
« C o n sid é ra n t que le délai pour délibérer présup« pose que l’héritier a la liberté d’accepter ou d’aban« donner; que s'il laisse passer plus de quarante jours
« après l’inventaire fait de son consentement, sans expli« quev ses intentions, il est tenu de se départir de la
�t 15 )
« faculté que la loi lui accorde, d’accepter sous be-ne■
« iice d’inventaire ; qu’alors la loi le répute héritier pur
« et sim ple, et le prive de la faculté de répudier.
«
«
«
«
« Considérant que ne s’étant élevé aucune contestation à raison du don de i o o o ^ , fait par Catherine
Treveis à la mère des enfans Laroche - Negly ; qu’ il
résulte du testament de cette dernière, que les mariés
Matlion et d’Arlem pde sont cohéritiers, pour un tiers,
« <le la <lanse Catherine T r e v e is ; l’on ne peut se dis-
« penser d ’en
pro n o n ce r la jccmcLamnation en fa v e u r des
« -enfans L a r o c h e -N e g ly .
« Considérant enfin qu’ un débiteur ne peut obtenir
« ‘la main-levée définitive ou provisoire, qu’autant qu’il
« justifie de sa libération , etc. etc. »
T e ls sont les nombreux motifs du jugement : il étoit
impossible de les analiser ; on ne peut les faire com
prendre qn’en les rapportant dans leur intégrité.
La dame Montereymard et son mari en ont interjeté
appel. Ils ont attaqué ce jugement par des vices de form e,
«t des moyens au fond. Ils ont remarqué que les exploits
Introductifs, tous les actes de la procédure, ainsi que les
:jugemens rendus, ne contenoient pas les prénoms d u '
frère Saignard, les noms de ses sœurs , ni les qualités
des parties, qu’aucun des exploits de demande n’étoil
libellé.
Ils ont invoqué l’article i ev. du titre -2 des A jo u rnemens, de l’ordonnance de 1667, qui porte « que les
« ajournemens et citations, en toute matière, et en toutes
* juridictions, seront libellés , contiendront les co n c lu -
�( i6 )
or sions, et sommairement les moyens de la demande, L
« peine de nullité des exploits ; »
I/article 2 du même titre, qui dit que les huissiers
exprimeront le domicile et la qualité des parties, ausJ
à peine de nullité.
Les appelans ont encore observé que Saignard, comme
Laroclie-N egly, ont toujours procédé comme procureurs
fondés. Les citations et les assignations, tant de Saignard
que de Laroche-N egly, sont données à leur requête, tant
pour eux que pour leurs frères et sœurs.
Quant aux saisies-arrêts, les appelans en ont égale
ment demandé la nullité. Il est de règle constante qu’on
ne peut faire saisir et arrêter qu’en vertu d’un titre au -y
thentique, ou au moins en vertu d’une permission dej
la justice. Ici les Saignai*d, ou du moins le frèi’e , tant
pour lui que pour ses sœurs , avant aucune demande
formée par les Laroch e-N egly, avant que la prétendue
procuration sous seing privé fût vérifiée en justice,
enfin, avant d’avoir un titre quelconque, s’est permis
de faire saisir et arrêter, de son autorité, les revenus des
appelans, entre les mains du sieur Bonneville.
Cette manière de procéder est inouïe et choque toutes
les règles connues. Les appelans insistent sur ces vices
de forme, que la cour appréciera dans sa sagesse. La loi
prononce; il n’est pas possible de s’écarter de sa dispo
sition : les formes sont conservatrices de la propriété,
et il est très-im portant, surtout pour le pays d’ Yssingeaux, que la cour apprenne enfin, par un grand exem
ple, qu’on doit procéder d’une manière conforme ù la loi.
' Les appelans ne s’étendront pas davantage sur cette
matière
�i7 y
matière qui pourra donner lieu à des observations plus
amples lors du rapport : ils se hâtent d’examiner le fond
de lu contestation.
On peut la réduire h trois propositions :
i° . La donation portée au contrat de mariage de 174^* > '
est-elle obligatoire contre M arie-M arthe Treveis ou les *
appelans qui la représentent ? A - t - o n pu former une
action contre eux pour cet objet?
20. Cette action, si elle a existé , ne seroit-elle pas
prescrite ?
dans tous les cas, faire considérer les
appelans comme héritiers purs et simples de M arieMarthe T reveis? ou au contraire devroit-on se borner à
leur demander le compte bénéficiaire de la succession
de la veuve Plantier?
30. Pourroit-on,
§
Ier-
La donation portée par le contrat de mai'iage de
M arie-M arthe Saignard-Chomouroux , du 13 février
1746 , a été faite par Pierre Saignard-Chomouroux, son
p è re , en ces termes : M ille livres que le père a ordre
de constituer à la demoiselle future épouse , du c h e f
de dame Catherine Treveis , aïeule maternelle de cette,
dernière. T ois mille livres du c h e f de dame M arieM arthe Treveis , veuve de M . P la n tier , aussi par
i on ordre , etc.
Il n’y a point de procuration rapportée de la part de
celles dont on dit avoir l’ordre ; il n’en existe pas d’annexée au contrat : aussi voit-on que le père ■
s’ob lige, en
C
�( i s y
son propre et privé nom , au payement des sommes
constituées.
Il falloit bien que le constituant le prît pour son compte.
Les clauses cl*un contrat de mariage ne doivent pas être
douteuses ; son exécution ne doit pas dépendre de causes
étrangères. Cependant sans l’obligation du père il n’y
auroit eu rien cle certain ; le contrat n’eût plus été un
acte constant et indépendant, quoique l’engagement eût
été formé dans l’espérance d’avoir la somme promise.
Aussi est-il certain, en point de droit, qu’une donation
ne peut être faite au nom d’un tiers sans procuration de
sa part ; une promesse faite au nom d’un tiers ne l’en
gage pas ; elle peut devenir inutile par le refus de la
ratifier; toutes les promesses faites par contrat de mariage
sont irrévocables de leur nature. On ne /peut donc point
autoriser , surtout dans un contrat de mariage, des dis
positions q u i, pouvant être révoquées ou ne produire
aucun eiTet, laissent les parties contractantes dans un
état d’incertitude qui répugne à la nature du contrat.
M . l’Epine de Grainville rapporte un arrêt du 28
février 1726 , qui a jugé conformément à ces principes.
Dans l’espèce de cet arrêt , un particulier appelé Jean
Gaugery avoit fait à Antoine son frè re , et par le contrat
de mariage de ce dernier , une donation de tous les
biens présens et à venir que lui et Marie sa sœur , avec
laquelle il vivoit en commun , auraient au jour de leur
décès. Cette donation étoit faite comme se portant fort
pour M arie, et sans procuration : la donation étoit du
27 juillet 1690, et Marie l’avoit ratifiée le i 5 novem
bre : Marie mQiirut et laissa pour héritiers tous scs
�( x9 )
n eveu x, et entr’autres les enfans d’un quatrième frère
nommé M arcou.
Ces derniers demandèrent la nullité de la donation
faite au nom de M arie, sans procuration de sa p art,.et
soutini’ent que la ratification postérieure de leur tante
•n’avoit pu valider un acte nul dans son principe. L ’arret
déclara la donation nulle, sans aucun égard aux moyens
que faisoient valoir les enfans du donataire, qui prétendoient que la ratification devoit avoir un effet ré
troactif, puisqu’elle ne laissoit aucun doute sur le pou
vo ir que Jean avoit eu de M arie pour faire la donation.
Il est vrai qu’il s’agissoit dans l’espèce d’une donation
de biens à venir, qui ne peut avoir lieu que par contrat
de mariage ; mais cette circonstance ne change rien aux
principes qui s’opposent à ce qu’on ne puisse stipuler au
nom d’un tiers sans son aveu. Une ratification posté
rieure est presque toujours l’effet de la séduction ou
de la complaisance. O n peut arracher le consentement
par importunité , et pour ne pas compromettre celui
qui a pris sur son compte de contracter sans pouvoir.
Ce seroit en quelque manière forcer la volonté , et
engager un tiers malgré lui-même ; ce qui pourroit en
traîner les plus grandes conséquences.
En vain les intimés voudroient-ils opposer l’acte sous
seing privé , qu’ils datent du 9 février 1746 , et pap
lequel l’aïeule et la grand’tante sembleroient avoir donné
ordre à Pierre Saignard de faire cette constitution pour
leur compte. D ’abord , cette prétendue procuration
n’a été enregistrée que le 10 décembre 1763 j c’est-àd ire , sept années après le mariage : elle n’a donc de
C 2
�C( 20')
date qu’à cette époque ; et encore n’est - ce pas une
ratification de la libéralité , mais seulement une autori
sation de donner, qu’on voudroit faire remonter avant le
contrat de m ariage, et dans un temps où elle n’existoit
pas ? Ce retard dans l’enregistrement prouve que Pierre
Saignard avoit été assez imprudent pour vouloir en
gager Catherine >Treveis et sa sœur , à leur insu ; et
comme il s’étoit obligé personnellement au payem ent,
il a voulu avoir un titre, qu’il a sollicité et obtenu de
la complaisance ou de la foiblesse de deux iemmes qui
n ’ont osé lui refuser. La preuve que cette prétendue
procuration est postérieure au contrat de m ariage, ré
sulte des termes dans lesquels elle est conçue ; il fait
obliger les constituantes à lui rembourser les sommes,
attendu q iiil s'obligera de les payer.
O r , comment concevoir qu’on a prévu que Saignard
s’obligeroit à payer ces sommes. Si véritablement il y
avoit eu un pouvoir valable , rien de plus inutile que
l’obligation personnelle du père; il étoit si simple de
prendre une procuration , de l’annexer au contrat, et
de faire faire la donation par celui qui auroit rempli
la procuration. Il est inusité , il est inouï , de faire
obliger quelqu’un.pour celui qui donne; c’est déjà faire
douter de la solvabilité du donateur ; c’est au moins lui
faire injure ; et ce n’est pas ainsi qu’on honore un contrat
de mariage.
Il est bien démontré que le pouvoir n’existoit pas
lors du contrat de mariage. Dans la suite > la procu
ration qu’on a rapportée sous seing privé , ne pouvoit
avoir aucun effet. Cet acte sous seing privé contient une
�f 2ï )
véritable donation entrc-vif's ; e t , d’après l’ortlonnan-ce
de 1731 , une donation n’est valable qu’autant qu’elle
est faite devant notaire. « Tous actes portant donation
« entre-vifs seront passés devant notaires, et il en rcs« tera minute, à peine de nullité. » ( A rticle i er. de l’or
donnance. )
On sent aisément le motif de la loi , lorsqu’elle a
ordonné impérieusement cette formalité. Une des qua
lités essentielles de la donation e n tre -v ifs est l’irrévocabilité. Un acte sous seing privé n’a aucune date cer■tüine; tous actes emportant hypothèque, faits postérieu
rement, lui seroient préférés; ce seroit donc, com m el’avoit
dit Ricard antérieurement à l’ordonnance , traité des
D onations, partie i re. , chap. 4 , n. 881 , tomber dans
l’inconvénient de la règle donner et retenir, si les dona
tions demeuroient sous seing privé jusqu’au décès du
donateur , parce qu’ il auroit toujours conservé par ce
moyen la liberté de faire qu’elles ne subsistassent plus;
■enfin rien ne seroit plus facile que de supposer de fausses
donations.
En un m o t, il n’ existoit aucune obligation des deux
femmes Treveis lors du contrat de mariage de 1746.
Pierre Saignard a. tout pris sur son compte- Un acte
•sous seing privé ne peut produire aucun effet h côté
¿ ’un contrat de mariage ; ce seroit une véritable contrcïettre au co n trat, et toute contre-lettre au contrat de
mariage est absolument n u lle , ù moins qu’elle ne soit
signée de tous ceux qui étoient présens au mariage.
On ne sauroit donc se tenir trop en garde contre un
acte produit cinquante-trois ans après le mariage. Inde-
�( 22 )
pendamment des motifs de suspicion qui naissent aiséïnent contre une production tardive , la procuration est
irrégulière et nulle : Pierre Saignard n’a pas reçu une
autorisation suffisante ; les femmes Treveis pou voient
révoquer ce pouvoir sous seing privé ; elles n’ont pas
valablement, donné : d ès-lors il est impossible que ce
prétendu pouvoir puisse faire naître une action contre
les appelans.
§ IICette action, dans tous les cas, étoit prescrite à l’époque
où elle a été exercée. La dame Laroclie-Negly , mariée
en 1746 , et qui fut l’objet de la prétendue donation,
a survécu plus de quinze ans h M arie-M arthe T reveis,
sa grand’tante ; son mari a vécu plus de vingt-quatre
ans après : jamais on a osé faire paroître la procuration,
du vivant de l’aïeule ni de la tante. L a femme ni le
mari n’ont jamais réclamé de leur vivant. Toutes lés
sommes promises par le contrat de mariage devoient être
payées quatre ans après ; comment concevoir que les
sieur et dame Laroche-Negly eussent constamment gardé
•le silence, s’ils n’avoient pas reçu le montant de la consti
tution portée au contrat de mariage.
En pays de droit é c rit, et notamment d’après la juris
prudence du parlement de Toulouse, où les parties sont
domiciliées , le mari devient responsable de la d o t ,
quand même il ne l’auroit pas reçue , s’il ne s’est fait
payer par le constituant, au temps et au terme porté par
le contrat de mariage. Catelan , tome 2 , liv. 4 , dit que
le mari est responsable de la dot constituée par le père t
�(i 23 )
de la fem m e, lorsqu’il a demeuré dix ans après la célé
bration ou le terme du payem ent, sans en faire demande
à son beau-père.
A la vérité , continue Catelan, on ne lui impute pas
s’il n’a pas pressé son beau-père pendant les dix pre
mières années; mais s’il a laissé passer dix ans sans en
faire demande , cette patience trop longue tourne en
négligence, et le charge de cette d o t , comme s’il l’avoit
reçue. Ce n’est pas alors le cas de la l o i, où la femme ne
peut imputer au m a ri, cur non u rserit, et il y a un
grand milieu entre presser et laisser passer dix ans sans
foire de poursuites. D ix ans sont d’ailleurs un temps que
les lois mettent souvent en usage , et qu’elles emploient
pour termes et pour bornes en bien des rencontres. Catelan
rapporte cinq arrêts à l’appui de son opinion : l’u n , de
1664; un second, du mois d’avril de la même année;
un troisième , du mois de mai i 665 ; un autre, du mois
de septembre 1696; et le dernier, du 9 février 1699.
Ce long espace de dix ans , à compter des term es, sans
aucunes poursuites , doit faire présumer le payement ;
et cette' présomption ne devient-elle pas une certitude ,
lorsqu’on voit que non-seulement le mari ni la femme
n’ont rien réclamé pendant leur v i e , mais que ce n’est
qu’en l’an 7 , cinquante-trois ans après , que les héritiers
Saignard forment cette demande contre les appelans?
Ceux-ci sont donc encore dans l’exception de la pres
cription trentenaire : il n’y a eu dans la famille CI10^mouroux aucune, minorité qui ait pu suspendre ou
Jarrêter le cours de cette prescription ; elle a commencé
13 tévi-icr 1749, échéance des termes de payement ;
elle a donc été accomplie le 13 février 1779.
�( 24 )
Les frères Saignard - Chomouroux sont obligés de
convenir qu’il n’y a point eu dans leur famille de mino
rité interruptive de la prescription ; mais ils voudroient
éluder l’exception, sous un prétexte frivole. Ils préten
dent que leur action contre les appelans n’est autre chose1
qu’une demande en garantie, qui ne pourrait prescrire
qu’autant que la demande pi’incipale des Laroclie-Negly
serait elle-même prescrite : ils s’efforcent ensuite d’éta
blir que l’action principale des Laroclie-Negly est tou
jours entière.
Pour répondre à cette objection, il faut d’abord exa
miner la nature de l’action que les Chomouroux vou
droient exercer contre la dame Mathon. Il est facile de
prouver que c’est une action principale, distincte et in
dépendante de celle des frères et sœurs Laroclie-Negly.
En effet, la constitution portée au contrat de mariage
de 17 4 6 , a été faite par le père Chomouroux à sa fille.
Il annonce bien à la vérité qu’il avoit ordre de la faire
du chef de l’aïeule et de la tante ; mais il prom et. en son
nom personnel, de faire le payement de lu totalité des
sommes constituées.
O r , dès que le père s’est obligé en son nam , qu’il
n’a point agi en qualité de mandataire , sa fille ou ses
enfans n’avoient aucune action contre l’aïeule ou la tante;
ils ne pou voient s’adresser qu’à leur p è re , qui seul étoit
débiteur.
La procuration du 9 février 1746 ne donne pas au
père Chomouroux le droit de se pourvoir contre les
constituantes , eu garantie de l’action que les frères et
sueurs Larocho-Ncgly exerceraient contre lui en payement
des
�( *5 )
des sommes constituées. L ’aïeule et la tante promettent
seulement à leur neveu de lui rembourser ou faire rem
bourser ces sommes, attendu qu 'il s'obligera de les
payer. Ce ne seroit donc jamais qu’une action en rem
boursement que le père Chomouroux auroit pu former
contre les constituantes ; action absolument distincte et
indépendante de celle des enfans Laroche-Negly. Si donc
l’action des Chomouroux est principale et indépendante ,
ils ont dû l’exercer dans un temps u tile, c’est-à-dire, avant
trente ans, à compter de l’échéance des termes*, ils ont
dû m êm e, avant cet intervalle, faire reconnoître le titre
d’où ils prétendent faire dériver leur action.
Il seroit donc fort inutile de vérifier maintenant si
l’action des L aro ch e-N egly contre les Chomouroux est
toujours entière ; cette question est sans intérêt pour les
appelans : mais il seroit encore facile de prouver que
même la demande des Laroche-Negly étoit éteinte par la
pi'escription, au moment où ils l’ont exercée.
Il ne s’agit point ici d’un immeuble dotal, qui ne peut se
prescrire pendant le mariage, ou pendant l’usufruit du
p è re , mais bien d’une somme m obilièi'e, dotale à la vé
rité, mais dont le mari ou le père étoit le maître, et qu’il
avoit seul le droit de recouvrer.
Catelan, tom. 2, liv. 4, chap. 45 , enseigne que la pres
cription d’une somme due à la femme court en faveur de
son débiteur, quoique la femme ait constitué à son
mari tous et chacun ses biens, et que la prescription n’eût
pas commencé avant le mariage. Il y a cette différence
entre le fonds dotal et une somme m obilière, que le
premier ne peut prescrire pendant le mariage. La raison
D
�(26)
de cette différence est prise de ce que la loi J u l'a défen^dant toute aliénation d’un fonds dotal, en défend par
conséquent la prescription; mais la loi J u lia ne défen
dant pas l’aliénation d’une dette, rien n’empêche que la
prescription ne courre en faveur du débiteur. On ne peut
opposer, ajoute Gatelan, la règle qui dit que la prescrip
tion ne court pas contre celui qui ne peut a g ir , et que
la femme ne pouvant pas agir pendant le mariage contre
son débiteur, il semble qu’il ne peut pas lui opposer de près- ,
cription; d’autant qu’à l’égard du débiteur il suffit qu’il y ait
une personnequi puisse agir, à qui la somme appartient pen
dant le mariage, tel qu’est le m ari, qui d’ailleurs, pouvant
retirer payement de la dette, et libérer le débiteur, doit
nécessairement donner lieu au cours de la prescription.
Prœ scrihens solventi sim ilis est. L e laps de trente ans fait
présumer que le payement a été fait au mari.
Serres, dans ses Instituts, liv. 2 , tit. 8 , est du même sen
tim ent; la loi J u lia , d it-il, ne s’applique qu’au fonds
dotal, mais non à la prescription d’ une dette.
Cette doctrine , bien constante dans le ressort du parle
ment de Toulouse, s’applique parfaitement à l’espèce. La
prescription a commencé à courir depuis 1749* L e père
Laroche - Negly n’est décédé que le 4 décembre 1783,
trente-quatre ans après l’échéance des termes. L ’action de
ses héritiers est donc également prescrite.
En vain les enfans Laroche-Negly voudroient-ils éta
blir une différence entre la femme et les enfans mineurs
&ous la puissance paternelle; en vain voudroient-ils pré
tendre que la prescription ne court pas contre ces derniers
pendant la durée de l’usufruit : ce seroit une erreur en
�C ¿7 )
point de d roit, quia abi eadem ra tio , ibidem jus. L e
père n’a-t-il pas le d roit, comme le mari , de faire le
recouvrement des sommes mobilières qui reviennent à ses
mineurs? n’a-t-il pas la faculté d’agir ? n’est-il-pns de
principe que les créances personnelles d’un mineur, pourvu
d’un tuteur, peuvent prescrire pour le débiteur, sauf
le recours des pupilles contre le tuteur? Mais, dans tous les
cas, les enfans Laroche - Negly n’en seroient pas plus
avancés en point de fait. M arie-M arthe Saignard, leur
m ère, a vécu jusqu’en 1774» il s’étoit déjà écoulé vingtcinq ans utiles pour la prescription ; ce n’est que quinze
ans après la mort de leur père que les enfans LaroclieNegly se sont pourvus : leur action, sous tous les rapports,
étoit également prescrite.
Les intimés ne peuvent se refuser à l’évidence ; ils voudroient user de leur dernière ressource, et produisent
trois lettres qu’ils attribuent l’une à l’aïeu le, les deux
autres au père de la dame M atlion : ces lettres, nonreconnues ni vérifiées, et sur lesquelles il s’élève des
doutes, ne peuvent influer sur le sort du procès.
1
La prem ière, prétendue écrite par la veuve Montereyrnard, est sous la date du 13 mars 1760: il en résulte qu'à
cette époque, et plus d’un an après la mort de MarieMarthe Treveis , Catherine Bonnafoux n’avoit aucune
connoissance de ce prétendu titre de 1746 ; depuis ce
moment jusqu’à la demande, il s’est écoulé trente-neuf
ans.
Celles que l’on dit écrites par M ichel Montereymard ,
n ont aucun rapport avec la procuration. Il ne peut s’oc
cuper d’affaires avec Clioinouroux, et prie d’attendre qu’il
D 2
�( 28 \
en ait terminé d’autres. Il se plaint ensuite de ce qu’on lui
demande quelque chose sur la succession de M arie-M arthe,
et finit par dire qu’il renoncera à la succession si on exige
le payement de ce qui pourroit être dû. Mais nulle part
on ne voit aucune explication précise de l’objet particulier ;
tout annonceroit, au contraire, qu’il n’en avoit aucune
connoissance. E nfin, l’une de ces lettres, sans date, est
adressée au sieur L a v a l, et ne peut se trouver dans les
mains des Chom ouroux que par un abus de confiance : et
L aval n’avoit pas craint lui-même de faire assigner la dame
Mathon pour une somme de 2000^ qu’il prétendoitlui
être due; mais on rapporta la quittance donnée par son
père ù. l’aïeule de la dame Mathon. Il paroît plus que vrai
semblable que toutes les affaires de famille étoient termi
nées depuis long-temps. On voudroit abuser du peu de
connoissance qu’a la dame M athon de ce qui s’est passé
dans la fam ille; mais un silence de cinquante-trois ans,
sans aucunes poursuites, est un obstacle insurmontable.
L a demande actuelle a toute la défaveur d’une vieille
recherche : en point de droit elle n’est pas fondée, en
point de fait elle est prescrite.
§. I I I .
Xæs appelans, dans tous les cas, ne sont pas héritiers
purs et simples de M arie-M arthe T reveis; Catherine
Bonnafoux leur aïeule n’a accepté la succession que par
bénéfice d’inventaire.
Ce n’est que très-subsidiairement, et pour ne rien né
gliger co cour souveraine, que les appelans réclament
�( 29 )
contre le chef du jugement qui les a condamnés comme
héritiers purs et simples. Ils croient avoir dém ontré, i° .
qu’il n’existe aucune obligation des deux femmes Treveis;
2°. que les intimés n’ont aucune action contre eux; 30. que
cette action, dans tous les cas, est éteinte parla prescription.
Mais on se rappelle que lors du décès de M arie-M arthe
Treveis, du 16 janvier 1769, les scellés furent apposés
sur ses meubles et effets, à la diligence de dame Catherine
Bonnafoux, aïeule de la dame Mathon. Sa requete, du 13
février de la même année 1759, présentée au sénéchal
du P u y , tend à la vérification et levée des scellés apposés
par le même juge. Cette requête est suivie d’une ordon
nance de transport pour la vérification des scellés qui
avoient été apposés le 16 janvier précédent, même jour
du décès. Vient ensuite l’inventaire fait par le même juge
en présence du procureur du r o i, après assignation à toutes
les parties intéressées, mais hors la présence des père et
mère des appelans, quoiqu’ils y eussent été appelés. Depuis,
Catherine Bonnafoux n’a pris d’autre qualité que celle
d’héritière bénéficiaire ; c’est en cette qualité que , le 8
novembre 1769, elle fait commandement à plusieurs dé
biteurs de la succession ; c’est en la même qualité que, le
31 mai 1759, elle acquitte une dette de la succession au
profit de Maximilien Gautier-la-Boulaye, créancier de
cette succession.
L ’inventaire n’a jamais été attaqué de fraude ou d’o
mission; il contient rémunération de tout ce qui compose
la succession, ornnia jura successionis.
Les poursuites actives et passives n’ont été faites qu’en
cette qualité d’héritière bénéficiaire; les appelans pro
�duisent ces actes anciens qui doivent faire foi pleine et en
t iè r e , d’après la maxime ln antiquis enunciativa pro
bant. Ces actes remontent à plus de quarante-cinq ans. En
pays de. droit écrit, il n’étoit pas nécessaire d’obtenir des
lettres de bénéfice d’inventaire; la déclaration de l’héri
tier et l’inventaire suffisoient pour attribuer la qualité.
Gomment donc les premiers juges se sont-ils déterminés
à condamner les appelans comme héritiers purs .et sim
ples , parce qu’ils nuroient accepté purement et simple
ment la succession de leur père et aïeule? cette circonstance
peut-elle influer sur la succession de M arie-M arthe T reveis ? l’une n’a rien de;commun avec les autres, et c’est une
injustice de plus, contre laquelle les appelans sont bien
fondés de réclamer.
Ils ne sont parvenus à réunir quelques pièces de famille
qu’avec des soins infinis et des recherches multipliées dans
les dépôts publics. Lai dame Ma thon-, orpheline, fut mise
en tutelle dès le plus bas âge ; son tuteur est décédé sans
lui avoir rendu compte de sa gestion, et elle s’est vaine
ment pourvue pour obtenir au moins la remise de ses
pièces; elle se voit accablée tout à coup par des pour
suites rigoureuses des Chom ouroux, q u i, abusant de son
ét.'.t d’ignorance, ont voulu surprendre sa foiblesse; ils
sont allés jusqu’à.provoquer la demande des enfans Larochc-Negly avec lesquels ils sont d’accord; ils ont attendu,
pour frapper des coups plus certains, que l’aïeule, le père,
el le tuteur de la dame Ma thon fussent décédés; c’est alors
qu’ils ont cherché- ù faire sortir du tombeau de la pres
cription, des titres surannés et nuls ; ils ont osé repro
duire une vieille recherche que lcux’s auteurs avoienteon-
�( 31 )
damnée à l’ oubli : mais leurs intentions perfides ne p e u
ven t être couronnées d’aucun succès; ils ont n é g lig é o u
m éconn u les premières règles de la pro céd u re ; le titre
q u ’ ils in v o q u e n t, et q u ’ils ont sorti de la poussière, est
irrégulier et nul. T o u t p r o u v e qu e depuis lo n g -te m p s
les affaires de famille étoient terminées. E n f in , la pres
cription , ce remède l é g a l , vient au secours des appelans;
et certes il ne fut jamais m ie u x appliqué.
M.
C A T H O L ,
M e. P A G E S
r a p p o r te u r .
( d e R iom ) , a n c ie n a v o c a t.
M e. V A Z E I L L E ,
avoué.
ARIO M ; de l' imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur de
la Cour d’appel.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Montereymard, Julie-Angélique. An 10?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Cathol
Pagès
Vazeille
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Dame Julie-Angélique Montereymard, et le sieur Jacques Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu de Bourg-Argental, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'Yssingeaux le 15 floréal an dix ; contre les sieurs Joseph-Raymond, Bénigne, Alexis-Françoise Saignard-Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; et encore contre George-François-Alexis Laroche-Negly, propriétaire, habitant du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Lardeyrol, intimé. Question principale : Une donation faite au nom d'un tiers, par contrat de mariage, et sans procuration de sa part, est-elle obligatoire pour celui au nom de qui elle est faite ?
Arbre généalogique.
Table Godemel : Dontation : 9. une donation faite au nom d’un tiers, par contrat de mariage, en 1746, et sans procuration annexée, est-elle obligatoire pour celui au nom duquel elle a été faite ? Si celui qui s’est porté fort a rempli la donation, a-t-il une action en garantie contre le tiers dont il avait reçu procuration par acte sous signature privée ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 10
1746-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1601
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1223
BCU_Factums_G1602
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53275/BCU_Factums_G1601.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
donations
droit écrit
expertises graphologiques
experts
inventaires
signatures
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53276/BCU_Factums_G1602.pdf
7ac09658f8a50b982276f4b998986aba
PDF Text
Text
M
E
M
O
I
R
E
POUR
J oseph
- R aymond - B énigne
,
F rançoise
et A l e x i s D E S A I G N A R D D E C H O U M O U R O U X , propriétaires, h abitans de la ville
d ’Ys s i ngeaux , i ntimés j
COUR
D ’A PP EL
C O N T R E
J
séant
,
M O N T E Y R E M A R D et
J a c q u e s- L o u is M ATH ON
son mari pro
priétaires , habitans du lieu du Bourg-Argental ,
appelans ;
u l ie
-A
n g é l i q u e
EN
,
,
P R É S E N C E
D u sieur G e o r g e s - F r a n ç o i s -A l e x i s D E L A -
,
R O C H E - N E G L Y D E C H A M B L A S pro
priétaire habitant du lieu de Chamblas, com
,
,
mune de Saint-Etienne-Larderol intimé.
P a r un acte sons seing p rivé , du 9 février 174 6 , enre
gistré le 10 octobre 1 7 53 , Catherine T r eveis et M arieM arthe T r e v eis sœurs, aïeule et tante de demoiselle M arieA
A RIOM.
�( Z )
.
.
* r'
M arthe-Françoise de Saign ard, demoiselle de Choum ouroux, donnèrent ordre à Pierre-Louis de Saignard de ^ o i^ -,
m ouroux de , pour et en leur n o m , donner et consti
tuer à demoiselle M arie-M artlie-Françoise 'de Saign ard,
sa fille , petite-fille et petite-nièce desdites daines T re v e is ,
dans le contrat de mariage qu’elle devoit contracter avec
FrançoispAm able de L a ro clie -N e g ly , seigneur de Cham b las, sa v o ir, de la part de Catherine T reveis , la somme
de io o o fr. pour être payée dans trois ans , à com pter
du jour dudit m ariage; et de la part de M arie-M artlie,
la somme de 3000 f r . , pour etre payée en trois payemens é g a u x , dont le prem ier devoit commencer un an
après la date dudit m ariage; et pour lesdites sommes de
1000 fr. et 3000 f r . , lesdites T reveis , chacune en ce
qui la concernoit , prom irent audit de Choum ouroux
de lui,Rembourser ou faire rem bourser icelles aux mêmes
te rm e s, attendu, l i t - o n dans l’acte, qu'U s'obligera de
les payer.
Quatre jours après , et le 13 du môme mois , M arieM artlie-Françoise Saignard de Choum ouroux contracta
m ariage avec François-A m able de L aroclie-N egly , sei
gneur de Chamblas. O n vo it dans le contrat que le sieur
de C houm ouroux et la dame B o n n a fo u x , son épouse ,
donnèrent et constituèrent à la future épouse , leur fille ,
une somme de 18000 fr. ; sa v oir, celle de 9000 fr. pour
droits paternels ; 2000 ir. du ch ef de la dame Bonna
foux ; 1000 fr. que le sieur C houm ouroux avoit ordre
de constituer à la future , du chef de Catherine T r e
veis, son aïeule m aternelle; 3000 fr. du chef de dame
M arthe T r e v e is , veuve P la n tie r, aussi de son ordre.
*1
\
.. *>l
�H'V
( 3)
C’est le payement de ces deux dernières sommes qui
a donné lieu à la contestation sur laquelle la cour a à
prononcer ; et il est inutile de rappeler ici d’oii provenoient ou devoient proven ir les autres 3000 fr. qui dé
voient parfaire la constitution totale de 18000 fr.
L e sieur de C h oum ouroux, tant de son chef que de celui
des dames T re v e is , prom it en son nom propre et p r iv é ,
et solidairem ent, de payer ladite constitution -, et à
compte d’icelle il fut par lui payé au sieur de C ham blas,
futur époux , au vu du notaire recevan t, lu somme de
4000 fr. O u t r e 2000fr. qui avoientétéconstitués àla future
ép o u se, dans le môme contrat de m ariage , par dem oi
selle M arie-A lexis Saignard de Cliazeaux, il restoit encore
à p a y e r, pour parfaire la constitution de 18000 fr. , une
somme de 12000 fr. qui fut stipulée payable en quatre
payemens égaux et annuels de 3000 fr. Suit ensuite
cette clause essentielle pour déterm iner l’origine des dif
férentes sommes formant la constitution totale: M o y en
nant laquelle susdite som m e de i i o o o f r . constituée à
ladite demoiselle ¿future épouse p a r ledit seigneur
de C houm ouroux et dame de B o n n a fo u x , ses père
et mère , elle a renoncé à tous ses droits paternels et
maternels , s a u f droit de succession , substitution , et
loyale échoite le cas arrivant.
L a môme année, et le 30 août 17 4 6 , Catherine T r e v e is ,
veuve de Georges Bonnafoux , au nom de laquelle le
sieur de Choum ouroux avoit constitué ù sa fille une
somme de 1000 fr. , fit son testam ent; entr’autres dispo
sitions , on y lit la confirmation du don qu’elle avoit fait
a sa p etite-fille. Cette confirmation est conçue en ces
A 2
�(4)
termes : P l u s , je confirme la donation que f a i j u i t e
à m adame M a rthe de S a i gnard de C h o u m o u ro u x ,
Jille ainée de M . de C houm ouroux et de dame C a th erine-Francoise B o n n a fo u x , m a jïlle , épouse de M . de
C h a m b la s, de la som m e de t o o o J'r.
Cette môme Catherine T reveis , veu ve B o n n afo u x,
avoit laissé de son mariage avec ledit Bonnafoux trois
filles; Catherine, qui contracta m ariage avec Jean-Gaspard
M onteyrem ard , représentée par J u lie-A n géliq u e M o n tcyrem ard et le sieur M a tlio n , appelans *, Françoise-H yacin th e, qui contracta mariage avec Louis de L a v a l , dont
les descendans ne figurent pas en cause d’appel -, et Cathe
rin e - F ran ço ise, qui épousa P ierre-L ou is Saignard de
C houm ouroux. D e ce mariage sont issus treize en fans,
n euf décédés sans p o stérité, et il n’en est pas question
dans la cause. M arth e, fille aînée, provenue dudit m ariage,
est aussi décédée le 4 juin 1756 : c’est celle q u i, dans son
contrat de m ariage avec le sieur de C ham blas, avoit été
gratifiée par les sœurs T reveis d’une somme de 1000 fr.
et de celle de 3000 fr. ; elle est représentée en la cause
par G eorges-François-A lexis L aroch e-N egly qui y figure
comme intim é. Les autres trois enfans existans s o n t,
Joseph-R aym ond-B énigne, Françoise et Alexis-Francoise
Saignard-Choum ouroux -, ils figurent en cause d’a p p e l,
comme intimés , contre L ouis M athon et son épouse ,
sur la demande en garantie qu’ ils ont exercée contr’eux.
L es trois filles de Catherine T r e v e is , veuve Bonnafoux ,
C ath erin e, F ran ço ise-H yacin th e et Catherinc-Françoise
Bonnafoux , furent instituées héritières par égale p or
tio n , par le testament de leur m ère ; et en exécution de
�( 5)
cc meme testament le partage fut effectué en trois lots
égaux , en 1763 , avec promesse de la part de chacune
d’elles de contribuer, pour un tiei’s au- payement des
dettes et legs dont la succession étoit grevée.
Il n’y avoit encore aucune disposition de la part de
M arthe T reveis , veu ve Plantier , tante commune y le
4 juin i y 56 , époque du décès de M arie-M arthe Saignard
de Chomnoui’o u x , épouse du sieur Ghamblas ■
, en sorte
qu’outre les 3000 fr. que
grand’tante lui avoit donnés
dans son contrat de m ariage, elle avoit à recueillir du
chef de Catherine-Françoise Bonnafoux , sa m è r e , con
curremment avec ses frères et sœurs-, le tiers dans sa suc-'
cession alors ab intestat: mais bientôt après, et le 31
adût 1 7 5 7 , ladite M arthe T reveis fit un testament par
lequel elle nomma et institua pour son héritière uni
verselle dame Catherine B o n n afo u x, sa n iè ce , veuve de
Gaspard M onteyrem ard, à la charge par elle de payer ses
dettes et legs. E lle décéda dans ces dispositions, le 17
janvier 1769 , laissant conséquemment à son héritière
instituée la charge d’acquitter les 3000 fr. promis par son
ordre à M arie-M arth e B o n n afo u x, dans son contrat de
mariage du 13 février 1746.
Peu de jours après sa m ort, e tle 6 février de l ’année 1769,
Catherine B o n n a fo u x , veuve M onteyrem ard , lit con
trôler le testament susdaté ; et comparaissant au bureau
du receveur du centième denier en qualité d’héritière
de dame M arthe T reveis , veuve Plantier , suivant son
testament du 31 août 1767 , elle fit sa déclaration sur
la consistance des immeubles dépendans de ladite suc
cession , qu’elle déclara consister seulement en un champ
sis à E x p a ly , de valeur de 800 fr.
�*0%
( 6 )
Cette qualité prise par la veuve M onteyrem ard, jointe à
une foule d’autres circonstances également déterm inantes,
servira à apprécier les moyens employés par les appelans,
pour se faire considérer .seulement comme héritiers béné
ficiaires de la veuve Planticr.
L ’époque fixée par le contrat de mariage de 1746 ,
pour le payement de la somme de 14000 fr. restée due
pour le payement de la dot de l ’épouse du sieur L aroch eNegly-Cham blns, étoit déjà passée; mais des circonstances
particulières déterm inèrent le sieur de Chamblas et son
épouse à ne pas en exiger le payement.
T o u s les enfans de Clioum ouroux étoient célibataires;
et l’espoir de réunir un jour l’entière succession C h oum ouroux fit suspendre jusqu’en l ’an 5 l ’action des enfans
L aroclie-N egly.
M ais les mêmes considérations qui suspendoient l’exer
cice de l’action de la fam ille C ham blas, n’em pèclièrent
p'as la dame C lioum ouroux et son mari de rappeler
Catherine Bonnafoux , veuve M onteyrem ard , à l ’exé
cution de ce à quoi s’étoit obligée M arthe B on n afou x,
sa tante , et qui l’avoit instituée son héritière. L a veu ve
P la n tie r, comme on l’a déjà v u , avoit chargé le sieur
de Clioumouroux; de constituer pour elle à sa fille , lors
de son mariage avec le sieur Chamblas , une somme
de 3000 IV. qu’elle de voit lui rembourser dans trois ans.
E lle 11’avoit pas com pté celle somme de son v iv a n t; et
quoique ledit Clioum ouroux n’eût pas payé cette somme
à sa fille qui ne l’avoit pas encore dem andée, il n’eu
rappela pns moins à la dame veuve M onteyrem ard l’obli
gation où elle é to it, com m e héritière de sa tante, d’ac-
�( 7 ) .....................................
quitter les 3000 fr. qu’ il a voit constitués à sa fille en
vertu des ordres qu’il en avoit reçus : de là les lettres
en réponses qui form ent la cote 6 de la production prin
cipale des sieur et dames C lioum ouroux.
Dans une prem ière , Catherine Bonnafoux , veuve
M on teyrem ard , offre à madame de Clioum ouroux , sa
sœur , d’en passer par l’arbitrage de celui qu’elle choisira
pour leurs intérêts *, et ces intérêts n’avoient d’autre objet
que le payement des 3000 fr.
Dans une seconde, qui suppose la demande en paye
ment de cette somme m otivée sur l’acte sous seing p rivé
dont on a rapporté les dispositions, elle demande à sa
sœur une copie des billets souscrits par la veu ve P la n tie r,
sa tanle , et un état de tout ce qui pou voit être dû à la
maison C lioum ouroux par ladite Plantier. Cette lettre
est du 13 mars 1760.
D ix ans a p rès, manifestation des mêmes intentions de
la part de C laude-M ichel M on teyrem ard, fils et h éritier
de ladite Catherine Bonnafoux.
P ar une troisième le ttre , qui est présum ée une réponse
à une réitération de demande de la part de la maison
G houm ouroux , il olfre à sa tante C lio u m o u ro u x, par la
m édiation d’ un parent et ami co m m u n , le délaissement
d’ une vigne pour entier payement de ce qu’il peut devoir
à la maison C lioum ouroux , du ch ef de la veuve P lan
tier , en parlant toutefois, pour faire accepter ses offres,
d’un projet de répudiation ; répudiation qu’il 11’étoit plus
à temps de faire.
P ar une quatrième lettre écrite à la dame Clioum ou
ro u x , sa tante , le 17 septembre 17 6 9 , il prétexte des
�c 8 ')
embarras de fa m ille, afin d’obtenir d’elle encore quelque
temps pour parler de leurs affaires.
Enfin , par une dernière lettre qui est datée de 17 7 0 ,
il cherche à intéresser la commisération de sa tante; il
prétend qu’il ne retirera pas ou n’a pas retiré de la suc
cession Plantier la somme de 3000 fr. qu’on lui dem ande;
il dit que sa succession 11’a été acceptée par sa m ère que
sous bénéfice d’inventaire ; qu’ il y auroit trop à perdre
de prendre la qualité d’héritier pur et simple , qualité
cependant que sa m ère et lui avoient prise ; et il l’invite
à avoir pitié de lui et de sa misérable situation.
T elles é to ie n t, dans ces temps plus reculés , les inten
tions des auteurs des appelans. lia dette fut toujours
par eux reconnue ; et la production des lettres qu’ils
écrivirentalors va bientôt contraster avecle plandedéfense
des mariés M onteyrem ard et M athon , d’une manière qui
ne fait honneur ni à leur lionne foi ni à leur délicatesse.
L e mariage de J o se p h -R a y m o n d -B én ig n e Saignard
de Choiim ouroux avec la dame de C o lo n n e , dont elle
a eu un enfant encore existan t, ayant absolument fait
évanouir l’espoir que les enfans Laroche-N egly avoient
eu de recueillir l’entière succession C lio u m o u ro u x , ces
derniers manifestèrent aux frères et sœurs Choum ourou x l ' i n t e n t i o n où ils étoient de les actionner en paye
m ent de la somme de 3300 fr. d’une p a r t , et de celle
de io o o francs d’autre part, que leur père s’étoit obligé de
donner à leur m ère pour et au nom de Catherine T rev e is , veuve Bonnafoux , et de M arthe sa sœ ur, veuve
Plantier.
Les frères et soeurs C lio u m o u ro u x , menacés de pour
suites
�suites judiciaires , voyant que les invitations verbales et
par écrit qu’ils avoient faites aux M onteyrem ard n’avoient
produit d’autre eiFet que de conserver leur action au
b e so in , se décidèrent enfin à em ployer d’autres voies
pour forcer Ju lie-A n g éliq u e M onteyremard , et Louis
M atlion son m a ri, à leur payer cette somme de 4000 fr. ;
et par l’exploit des 6 et 18 prairial an 7 , ils firent
saisir et arrêter entre les mains d’un nom m e B on n eville,
débiteur des appclans, tout ce qu’il pouvoit leur devoir:
mais les appclans avoient eu la précaution de se faire
sousem-e par ledit Bonneville un billet payable au p o r
teur ; ils en ont été payés ; et ces deux saisies-arrets n’ont
conséquemment produit aucun effet.
Les menaces des enfans L aroch e-N egly ne tardèrent
pas à s’effectuer; et le 2 5 prairial an 7 , F ran çois-A lexis,
faisant tant pour lu i que pour ses frères et sœurs et
b e lle s -s œ u r , cita en conciliation le sieur C houm ouro u x et ses deux sœm*s en payement de la somme de
18000 f r . , montant de la constitution de dot de sa mère.
D e u x jours ap rès, et le 27 p r a ir ia l, le sieur de C lioum ouroux et ses deux sœurs citèrent aussi en conciliation
les mariés M atlion et M onteyrem ard , et le sieur L ou is
de L a va l-d ’A rle m p d e , h éritier pour un tiers par repré
sentation de Françoise-H yacinthe B on n afoux, sa grandm ère, de Catherine T r e v e is , femme B onnafoux, bisaïeule
des parties , à l’eifct de les indemniser ou rem bourser
chacun en droit soi de la somme do 4000 fr. qui étoit
à leur c h a rg e , aux offres de payer le surplus de la
dot demandée par les enfans Laroche-N egly.
Les parties com parurent au bureau de paix le 27
B
�(-1°)
messidor an 7 ; et ce ne fut pas sans étonnement que
les frères et sœurs Choum ouroux virent com paraître un
nomm é Biaise B o rt, fondé de pou voir des mariés M allion
et M o n teyrem ard , à qui ils curent l'im pudeur de faire
déclarer pour eux que l’action des frères et sœurs Glioum ouroux étoit n o n -receva b le, parce qu’elle étoit pres
crite et m al fondée , parce que leur créance n’étoit pas
établie , et parce qu’ils n’en avoient jamais entendu
p a rle r: q u a n ta u sieur de L a v a l, il ne com parut pas.
L e procès verbal de non-conciliation fut suivi d’une
assignation au tribunal civil de la Ilau te-L o ire, à la requête
du sieur Choum ouroux et de ses sœurs , donnée tant
aux mariés M atlion qu’au sieur de L a v a l, le 11 ther
m idor suivant.
U n prem ier jugement joignit la demande en garantie
à la demande principale qui avoit été form ée par les
enfans L aroch e-N egly , et accorda à ces derniers 1111e
provision de 3000 fr. contre les frères et sœurs C h ou
m ouroux : cette provision a été payée.
L a demande principale des enfans L a r o c h e -N e g ty ,
outre la demande en payement de 18000 fr. pour la cons
titution de dot faite à leur m ère , avoit encore pour
objet le partage de la succession C h o u m o u ro u x, pour
leur en être délaissée, du ch ef de leur m ère, la portion
qu’elle y amendoit du ch ef de ses irères et sœurs décédés,
oncles et tantes des demandeurs. Sur celle dem ande, des
arbitres avoient été nommés en l’an
5 entre toutes les
parties intéressées ; mais les arbitres 11’avoient pas encore
prononcé.
L es parties en étant venues à l’au d ien ce, au tribunal
�( ii )
de la H autc-I.oire , sur la demande en partage , sur la
demande en payement de la d o t, et sur la demande en
garantie , il y in te rv in t, le 6 germ inal au 8 , un juge
ment q u i, sur la demande en partage , ordonna que
les arbitres respectivement nommés procéderoient ,
dans le délai d’ une décade , au partage des successions
dont il étoit question ; et avant faire droit sur la
demande en payement de la somme de 4000 fr. cons
tituée à la dame Laroche-Negly , du ch ef de Catherine
et M arthe Trevcis , ordonna , sur la demande des mariés
M atlion et M onteyrem ard, qui avoient eu la mauvaise
foi de désavouer la signature desdites T reveis apposée
au sous seing p rivé du 9 janvier 17 4 6 , que par des
experts-écrivains dont les parties conviendroient dans
le délai d’une décade , il seroit procédé à l ’aveu et reconnoissance, par comparaison d’écritu re, de leurs signa
tures.
Les parties n’ayant pas exécuté la prem ière disposi
tion de ce jugem ent, et les arbitres n’ayant pas. prononcé ,
le môme trib u n al, par un second jugement du 24 prai
rial an 8 , ordonna le partage des successions des frères
et sœurs Chouniouroux , décédés, pour en être attribuée
aux en fans Laroche-N egly la portion qu’ ils y am endoient;
il condamna de plus les frères et sœurs C h oum ou roux
ù .payer aux L a r o c h e -N e g ly la somme de 14000 fr.
restée due sur la constitution faite à leur m è re , sauf à
eux ù exercer leur garantie contre les débiteurs princi
paux de partie de cette même dette. L e jugem ent a été
e x é cu té , le partage a été fait; sur les 14000 fr. pour
final payement de la d o t , ic o o o fr. ont été payés par les
B 2
�-M
C 12 )
frères et sœurs C h o u m o u ro u x, en sorte que toute la
contestation, par suite de l’exécution de ce ju g em en t,
se borne à savoir qui doit payer les 4000 fr. du ch ef des
sœurs T reveis : aussi n’est-ce que pour la seconde dis
position de ce jugem ent que les parties ont contesté dans
la suite.
E n exécution de cette dernière disposition du juge
ment , des experts furent en effet nommés par-devant
le tribunal civ il d’Yssingeaux , q u i , après la nouvelle
organisation ju d icia ire, remplaça le tribunal civil du
département. Chainpanhac et P o u z o l, experts nomm és,
convinrent unanimement dans leur rapport du 30 pluvise an 9 , que les signatures apposées à l’acte sous seing
p rivé étoient vraim ent celles des sœurs Catherine et
M arthe Treveis.
L e 8 therm idor an 9 , les appelans firent signifier un
m ém oire dans le q u e l, sans contester les qualités des par
ties , et sans exciper d’aucun m oyen de nullité contre la
procédure , ils se bornèrent à soutenir que l’action des
frères et sœurs C houm ouroux étoit prescrite; dans tous
les c a s , qu’ils ne pouvoient être condamnés qu’en qua
lité d’héritiers bénéficaires ; et ils insistèrent ensuite sur
la nullité de la saisie faite à leur p ré ju d ice , saisie q u i ,
comme on l’a observé , n’em pécha pas la par lie saisie de
payer : ce qui rend ce dernier ch ef de conclusion sans
objet.
E n cetétat, et après plusieurs autres actes respectivement
signifiés , les parties en vinrent à l’audience du 14 fruc
tidor an 9 , jour auquel il intervint au même tribunal un
jugement qui a appointé les parties en d ro it, écrire et
produire.
�( i3 )
Ce fut donc sur productions respectives de la part
des appelans , des sieurs Choum ouroux et des enfans
Laroche-N egly , qu’il fut rendu sur rapport au tribunal
d’ Yssingeaux, le i5 floréal an 10 , contradictoirem ent
entre toutes les parties qui sont en cause sur a p p e l, et
par défaut contre le sieur de L aval qui a acquiescé aux
condamnations prononcées contre lui , le jugem ent sur
le m érite duquel la cour a à prononcer. Ce jugem ent
est également sage dans ses motifs et dans son dispo
sitif. Les motifs ont déjà été transcrits tout ail lon g dans
le m ém oire im prim é des appelans ; on se bornera à en
rappeler le dispositif ; il est ainsi conçu :
« L e tribunal, disant droit aux conclusions principales
«
«
«
«
«
prises par les frères, sœurs et b e lle -sœ u r L aroch eN e g ly , sans avoir égard à celles des frères et sœurs
C houm ouroux, non plus qu’à celles des mariés M atlion
et M onteyrem ard -, vidant l’interlocutoire porté par
le jugement du 6 germ inal an 8 , hom ologue la re-
«
«
«
k
«
lation rendue par les experts C ham panliac-V illeneuve
et P o u z o l, les 7 et 8 pluviôse an 9 ; en conséquence,
déclare la procuration p riv ée , passée le 9 février 1746
par Catherine et M arie-M artlie T reveis sœurs, en faveur de Pierre-Louis Saignard-Choum ouroux , avouée
« et reconnue de conform ité à l’édit de 1684-, e t, saus
« avoir égard aux üns de non-recevoir opposées par les
« mariés M athon et M onteyrem ard , desquelles elles de« meurent dém ises, a condamné et condamne les frères et
« sœurs Choum ouroux à faire payement aux frères, sœurs
« et belle -sœur L a ro ch e-N egly, de la somme do 3666 liv.
« 13 sous 4 deniers, pour reste de la dot constituée à
�«
«
«
«
«
«
«
«
( 14 )
M arthe Saign ard -C h ou m ou rou x leur m è re , lors de
son contrat de mariage avec A m able L aroch e-N egly,
du 13 février 17 4 6 , et ce avec les intérêts encourus,
savoir, de la somme de 666 livres 13 sous 4 deniers,
depuis le 14 février 1749; de la somme de 1000 francs,
depuis le 14 février 174 7 ; d’autre somme de 1000 fr .,
depuis le 14 février 1 7 4 8 ; et enfin , de la somme
de 1000 francs, depuis le 14 février 1749; sous toutes
« les déductions et distractions de droit ; condamne les
« frères et sœurs Choum ouroux aux entiers dépens envers
cc les L aroch e-N egly. Comm e aussi disant droit aux con« clusions prises par les frères et sœurs C h o u m o u ro u x,
« demeurant les instances jointes, sans avoir égard à la
« demande en m ain-levée provisoire et définitive des ban« nim ens mis au préjudice des mariés M athon et M on« teyrcm ard , entre les mains du sieur B onneville , a con
te
«
«
«
damné et condamne le sieur d’A r le m p d e , et les mariés
M athon et M onteyrem ard , en leur qualité de cohéritiers de Catherine T reveis leur bisaïeule, à relever et
garantir conjointement les C h oum ouroux , pour lu
« somme de 666 livres 13 sous 4 deniers, dont la con« damnation se trouve prononcée contr’e u x , en faveur des
« L a ro ch e -N e g ly , et ce avec les intérêts depuis le 14 fé« vrier 17 4 9 , sous toutes déductions et distractions de
« d ro it; et , sans avoir égard aux conclusions subsidiai« res et principales prises p-ir les mariés M athon et M011« tevrem ard, dont les a dém is, les a condamnés et con« dam ne, en leur qualité de successeurs à Catherine B011« n afouv. héritière de M arie-M arlh e T r e v e is , à relever
« et garantir les C houm ouroux de lu condamnation con-
�( i5 )
tr’eux prononcée de la somme de 3000 fran cs, et ce
« avec les intérêts depuis les époques fixées et adjugées
« aux L a ro ch e-N eg ly , et sous les mêmes déductions et
« distractions ; a condamné conjointem ent les mariés M a
te thon et M onteyrem ard, et d’A rlem p d o , ù un tiers des
« dépens, tant de la demande principale que de celle en
« garantie, non compris les frais de la vérification des
« signatures des sœurs T re v e is , ensemble le rapport des
« exp erts, lesquels dépens demeurent à la charge des
« mariés M ath on , ensemble les autres deux tiers des d é-
k
« p e n s, ainsi que les deux tiei’s du coût du ju g em e n t,
« l’autre tiers devant être supporté conjointem ent par les
>« M athon et d’A rlem pde. »
C ’est de ce jugement dont la dame M allion et son
mari ont interjeté appel. E11 prem ière instance 011 ne
s’etoit occupé que du fond de l ’affaire , et les appelans
ne s’étoient pas imaginés p ou voir arguer de nullité toute la
procédure tenue par les frères et sœurs Choum ourpux à
Yssingeaux. M a is, plus pénétrans en cause d’appel , ils
ont produit contre toute la pi-océdure une foule de nul
lité s , q u i, si elles eussent réellem ent existé , nuroient
-cté couvertes .par la défense an fond devant les p re•mieis juges. Les exploits introductifs d e -l’instance , et
tous les actes de la. p ro cé d u re , ont été par eux argués
de nullité , parce qu’ils ne contiennent pas les prénom s
et les qualités des parties , parce qu’ils 11e sont pas
libellés , et parce que le sieur C houm ouroux et le sieuv
Chamblas ont form é leur demande , et poursuivi l’ ins
tance comme procureurs fondés de leurs frères et
sœurs.
�( i6 )
Les frci’es et sœurs C houm ouroux ont suffisamment
répondu à ces moyens de nullité dans leur écritu re;
et les appelans., dans leur m ém oire im p rim é , semblent
eux-m èm esfaire justice de semblables m oyens, en ne les
rappelant que par form e dénonciation et sans y insister.
V enons donc avec eux à la discussion du fond ; e t ,
pour les suivre dans leur plan de défense , examinons
successivement les trois propositions qu’ils ont fait dériver
de l ’exposé des faits et de la procédure.
P r e m iè r e proposition d isc u té e p a r les a p p e l a i s .
L a donation portée au con trat de mariage de 1746
est-elle obligatoire p o u r M a rie-M a rth e T reçeis ou
les appelans q u i la représentent ? A -t-o n pu f o r m e r
une action c o n tr e u x p o u r cet o b je ts
Cette prem ière proposition ne contient pas à beaucoup
près la question à ju g e r; elle n’a jamais été proposée ni
discutée dans le cours de l ’instance , soit en cause prin
cipale , soit dans les écritures faites en a p p e l, jusqu’à la
signification du m ém oire qui la contient. E lle supposeroit que, d’après le contrat de m ariage du 13 février 17 4 6 ,
les eafin s Laroche - N egly auroient form é une action
directe contre les appelans ; et son examen ne tendroit
qu’à discuter la question de savoir si , en vertu de la
clause insérée au contrat de m ariage de M arthe C hou
m ouroux avec le sieur de L a r o c h e - N e g ly , ceux-ci ou
leurs héritiers auroient à exercer une action directe contre
les mariés M atlion et M onteyreinard. C ’est en elï'et sous
ce
�. ( 17 )
ce point de vue qu’elle est discutée dans le m ém oire
signifié •, et cette discussion, sur laquelle on s’est com plai
samment appesanti , sort absolument de la question à
juger. Il n’y a p a s, dans l’espèce , d’action directe de la
part des L aroclie-N egly contre les appelans : ce n est
pas aux appelans que les L a ro clie -N e g ly ont demandé
les 4000 fr. ; il n’y avoit rien de douteux entr’eux et
le sieur de C lio u m o u ro u x , père de la dame LaroclieN egly. L e sieur Clioumouroux lu i constitue une dot ,
tant de son chef que par l’ordre des dames T re v e is, veuves
Plantier et Bonnafoux ; il p r o m e t, tant de son ch ef que
de celui des dames T re v e is, en vertu de la procuration
desquelles il a g it , de payer le montant de la constitution
qu’ il fait à sa fille : rien d’incertain dans cette clause;
l ’exécution de cette obligation ne dépend pas de causes
étrangères : peu im porte que la procuration soit ou non
annexée au contrat de m ariage, pour donner aux futurs
l ’assurance que cette constitution totale leur sera payée.
Cette clause , dans tous les c a s, doit produire tout son
eiîet respectivement à eux ; elle ne peut pas devenir inu
tile par le refus que fèroient les dames T rev eis de
ratifier les ordres ou procuration par elles donnés. Q ue
l’ordre fût révoqué ou non , que l’action résultante de
cet ordre fût ratifiée ou non ; dans ces deux cas point
d’ incertitude de la part des contractons, leurs droits n’en
sont pas moins assurés : l’obligation personnellem ent
con tractée, et solidairement en l’une et l’autre q u a lité ,
en son nom p erso n n el, et com m e ayant ordre de la
part de ses tantes , par le sieur Clioum ouroux , leur
assuroit toujours l’exécution des conventions m alriinoC
�( 18 )
niales. E t en effet, les enfans L a ro ch e-N eg ly , sans s’oc
cuper des dames T reveis , n’ont vu que le sieur C h o u m ouroux com m e seul obligé respectivement à eux ; ils
n’ont dirigé leur action que contre ses héritiers , et ils
ont obtenu contr’eux tout ce qu’ils auroient pu obtenir
contre lui-m êm e , le payement de l’entière constitution ,
sauf à eux à faire discuter la question de garantie avec
les appelans.
C ’est cette seule question de garantie qui a été, devant
les prem iers ju g e s , et qui est encore aujourd’hui l’objet
de la contestation qui divise les parties ; et sans s’occuper
de l’arrêt rapporté par M . L ép in e de G r a in v ille , arrêt
qu’il est inutile de v é r ifie r , p u isq u e, dans aucun cas,
il ne sauroit s’appliquer à l’espèce sur laquelle la cour
a à p ro n o n c e r, au lieu de la question proposée , nous
en poserons une autre qui dérive plus naturellement de
l’exposé de toute la procédure.
P r e m i è r e
Le
q u e s t i o n
a
j u g e r
sous seing -privé souscrit p a r les
.
deux sœ urs
Treveis , le 9 f é v r ie r 1 7 4 6 , étoit-il obligatoire p o u r
elles ?
P ar ce sous seing p r iv é , les deux sœurs Catherine et
M arie - M arthe T reveis chargent le sieur Choum ouro u x
de constituer à sa fille , dans son contint de
m ariage arrêté avec le sieur de Laroche-N egly , l’une une
somme de 1000 fr. , et 1’autre une somme de 3000 fr. ;
les 3000 fr. payables en trois termes annuels et égau x,
�S\
Jté
( 19 )
dont le prem ier devoit échoir un an après le m ariage:
elles s’obligent à lui rem bourser ou faire rem bourser lesdites sommes aùx mêmes term es, attendu q i ï i l s obligera
de les payer.
Cette procuration est aujourd’h u i reconnue et v eriflée,
elle doit donc obliger les dames T reveis ou leurs héritiers,
si réellem ent le sieur de Choum ouroux a constitué à.
sa fille cette somme •, or , il est incontestable qu’en effet,
lors du contrat de mariage de sa fille, il lu i a constitué
pour ses deux tantes cette somme. Il n’a pas, il est v ra i,
relaté dans l’acte la procuration sous seing p rivé’ en vertu
de laquelle il agissoit, parce qu’alors elle n’étoit pas sou
mise à la form alité de l’enregistrement ; mais il a textuel
lement déclaré que c’étoit par l’ordre des damés T reveis
qu’il constituoit ¿t sa fille cette somme de 4000 fr. faisant
partie d’une constitution plus considérable. A u surplus,
nanti de la procuration qui lu i assuroit le rem bourse
ment de ce qu’il auroit avan cé, il en a fait son affaire
personnelle relativem ent aux deux contractans, à qui il
devoit être indifférent alors qu’il y eût procuration, quant
à ce , de la part des sœurs Treveis.
L e sieur Choum ouroux ayant rem pli les intentions de
ses tantes , et s’étant engagé personnellem ent ;\ payer
pour elles la somme de 4000 f r ., maintenant que ses
enfans sont condamnés à payer cette somme com m e ses
h é ritie rs, leur garantie contre les héritiers des dames
T reveis est incontestable ; la promesse de rem bourser
subsiste dans sa force , et elle est obligatoire pour eux.
L e seul moyen apparent de p ou voir la contester seroit
de dire que cette somme de 4000 f r . , comme le surplus
C 2
�1L
C 2° )
de la constitution , a été faite par le père de son ch ef:
mais la lettre de l’acte écarte cette supposition ; il y dit
que c’est par l’ordre des dames T reveis. Il y a plus ,
c’étoit une chose reconnue par toutes les. parties p ré
sentes au contrat de m ariage , et notamment par les
contractans ; car on lit dans le m êm e acte que la future
ép o u se, m oyennant îa susdite somme de n o o o fr. à
elle constituée par ses père et m è r e , renonce à tout
droit paternel et m aternel ; elle reconnoit donc qu’il
n’y avoit de constitution du ch ef de ses pèi’e et m ère
que p o u r une somme de i io o o fr. ; le surplus , pour par
faire celle de 18000 f r . , n’étoit donc p a s, d’après la science
certaine de la fu tu re , constitué par le père et la m ère de
leu r chef j les 4000 fr. n’étoient donc pas donnés et consti
tués par le père de son c h e f, parce qu’alors la constitution
par lui faite, au lieu d ’être de 11000 f r . , auroit été de
18000 fr ., ou tout au moins de iô o o o fr.
L e système des adversaires, qui tend à soutenir que
la procuration est postérieure au contrat de m a ria g e,
est d’abord im aginé sans aucun intérêt *, car enfin , dans
cette hypothèse , l’autorisation , la procuration , ou , si
l’on v e u t, la ratification de ce qui auroit été fait par le
sieur C lioum ouroux , quoique d’une date« postérieure
au contrat de m ariage, n’en seroit pas moins obliga
toire pour les deux sœurs T reveis. M ais il y a p lu s,
ce système ne peut se soutenir; la procuration n’a pas été
relatée , parce qu’elle n’étoit pas encore contrôlée : toutes
les présom ptions tendent à détruire ce système ridicule.
Quand on n’a pas un o rd re, et un ordre par écrit, pour
constituer une somme aussi considérable, on 11’énonce pas
�f a
O O
r
.
,
dans un acte si solennel, et en présence de deux familles
réu n ies, que c’est par ordre de tierces personnes que
l’on constitue telle ou telle -autre- somme en dot:. Il y a
p lu s , les intimés ne sont pas réduits à invoquer de
simples présomptions ; ils trouvent dans deux actes la
preuve par écrit de l’antériorité de la procuration au
contrat de mariage. Catherine T réveis , veu ve Bonnafoux , dans son testament du 30 août 1746 , confirm e
la donation par elle faite ¿1 la dame L aroch e - N egly
d’une somme de 1000 fr. ; il n’y :a pas d’autre donation
-
que la constitution énoncée au contrat de mariage. A ù
contrat de m ariage, ce n’est pas Catherine T reveis qui
donne et co n stitu e, c’est le sieur C h oum ouroux qui
donne et constitue pour elle ; il faut donc une manifes
tation de sa volon té avant le contrat de m ariage : cette
manifestation se trouve dans la procuration. L ’acte sous
seing p rivé est donc antérieur au contrat de m ariage :
et il en est de la procuration de M arthe T reveis , veu ve
P la n tier, comme de celle de Catherine sa sœur-, le m êm e
acte sous seing privé contient les deux procurations.
E n second lieu , on trouve encore la preuve de cette
antériorité dans le contexte même de la procuration. L es
deux sœurs s’obligent à rem bourser à leur neveu les
deux som m es, celle de 1000 fr. et celle de 3000 f r . ,
attendu qu il s obligera de les payer. L e sieur C h ou
m ouroux , lors de la p ro cu ratio n , ne s’étoit donc pas
encore obligé *, il ne s’est obligé que par le contrat de
mariage-, donc le contrat de m ariage est postérieur à
la procuration. Celte conséquence , n’en déplaise aux
appeluns , est un peu plus juste que celle qu’ ils ont tirée
�( 2 2 )
de la même clause dans leur m ém oire im p rim é, page 20.
L a preuve , disent-ils , que cette prétendue procuration
est postérieure au contrat de mariage , résulte des
term es dans lesquels elle est conçue ; il J u i t obliger
les constituantes à lu i rem bourser les som m es , attendu
q u 'il s'obligera de les payer. Les appelans et les intimés
partent du même principe; ils en tirent une conséquence
opposée : la cour pèsera dans sa sagesse quelle est celle
qui est la plus juste,
<
M ais pourquoi les appelans s’épuisent-ils en de vains
efforts pour contester une garantie qu’ils ont eux-m êm es
form ellem ent reconnue? T e l est en général l’em pire de
la vérité sur ceux q u i , mentant à leur conscience j cherclient à s’aveugler sur son existence ; elle përee souvent
au m ilieu même des désaveux de ses détracteurs ; et c’est
ce dont les appelans nous ont fourni la preuve dans
leur écriture et leur m ém oire en cause d’appel. T o u t
en contestant d’abord l’existen ce, et ensuite la validité
de l’obligation contractée par la procuration sous seing
p rivé du 9 février 17 4 6 , ils ne peuvent soutenir jusqu’à
la fin un désaveu et une résistence aussi déloyale ; ils
reconnoissent l’un et l’autre, et il leur échappe des aveux
qui seuls suliiroient pour détruire le plan de défense
qu’ ils ont adopté. A u dernier rôle de leurs griefs signi
fiés le 18 therm idor an j i , ils reconnoissent que la
demande principale des enfans Laroche^Ncgly a pour
objet la condamnation d’une somme de 18000 fr. à lu
charge des héritiers Choum ouroux., ot que la demande
eu garantie de çes derniers a pour •objet.le rem bourse
ment de 4009 fr. , dont 3333 f r . sont ¿1 leur charge.
�( 23 )
N ’est-ce pas convenir de'la m anière la plus form elle qüe
la procuration sous seing p riv é est vraim ent obligatoire
pour eux ? i N ’est-ce pas d étru ire1tout ce qu’ ils avoient
déjà dit et écrit pour contester la garantie ? N ’est-ce pas
reconnoitre qu’ilsson t vrahnent débiteurs de cette somme
envers les héritiers C houm ouroux ? ........
Dans leur m ém oire signifié en iorm e de salvation, on
vo it encoreile même aveu , sinon d’une m aniéré bien ex
presse, au moins d’une manière im plicite. Dans les questions
par eux p o s é e s e t dans la suite de la discussion de ces
mêmes questions, ils s’occupent'uniquem ent de l’obliga
tion que pouvoit avoir contractée M arie-M arth e T r e veis ; ils ne parlent plus de celle contractée par sa sœur*
Catherine ; ils passent en conséquence condam nation ën f
ce qui concerne cette dernière : aucune réclam ation ,
quant à ce ; tous leurs griefs portent uniquem ent sur les
3000 fr. promis par la veu ve Plantier. M ais en ne par
lant plus de l’obligation contractée par Catherine pour
une somme de 1000 f r . , n’est-ce pas reconnoitre la
légitim ité de celle de 3000 fr. souscrite par M arieM arthe sa sœur ? L ’une et l’autre ont la m êm e causé","
la même o rig in e , la même date ; elles sont l’ une et
l ’autre souscrite dans le m ême acte : cet acte n’est pas
susceptible d’être scindé , il faut qu’il vaille pou r l’une
et pour l’autre , ou qu’il ne vaille pour aucune. Si l’obli
gation de 1000 fr. est obligatoire pour C ath erin e, il
faut que celle de 3000 fr. soit aussi obligatoire pour
M arie - M arthe : reconnoitre qu’on est débiteur de la
p rem ière, c’est reconnoitre que l’on doit payer la seconde;
no pas opposer la prescription contre la prem ière créance,
�\\
(H )
c’cst s’interdire la proposition du m oyen de prescrip
tion contre la seconde. O r , en ne demandant pas dans
leur m ém oire la réform ation du jugement dont est appel j
quant à cette prem ière créan ce, les appelans l’ont for
mellement approuvé en cette partie ; cette approba
tion entraîne , par une suite nécessaire, l’approbation de
la seconde. O utre les moyens déjà proposés , il résulte
donc des écrits et m émoires signifiés en cause d’appel
par les mariés M atlion et M onteyrem ard, il résulte même
du contexte durjugcm ent dont est appel q u i, dans un
de ses m o tifs, ¿ a v a n t d ern ier, nous apprend qu’ils n’ont
élevé aucune contestation sur la demande en payem ent
de la somme,de io o o fr. du chef de Catherine T re v e is;
il résulte d o n c, disons - nous, une fin de non - recevoir
contre tous les moyens qui tcndroient à atténuer l’ob li
gation contractée, par M arie -.M arthe T reveis de rem -,
bourser au sieur Clioum ouroux la somme de 3000 f r .’
qu’il devoit payer pour elle.
L es appelans pou rsu ivans, sur leur prem ière p ro p o -i
sition , prétendent inférer la nullité de la procuration
de ce qu’elle n’a pas été rédigée par-devant notaire. Ils ne
von t pas jusqu’à soutenir qu’ une procuration d o it, pour
être valable , être faite par-devant notaire ; mais appli
quant aux procurations les dispositions de l'ordonnance
do 1731 qui n'a trait qu’aux donations, ils veulent faire
dépendre la validité de la procuration des mêmes prin
cipes qui règlent et qui fixent le sort des donations. M ais,
pou r toute réponse à cette objection , il suffira de dire
que l'acte de
1746 11e fut jamais une
donation , et
qu’il ne doit pas être jugé d’après les formes et les prin
cipes
�St
( *5 )
cipes qui ne s’appliquent qu’aux donations entre-vifc.
Présenter aussi, comme le font les appelans , cet acte
comme une contre-lettre au contrat de m ariage, c’est
abuser des expressions , et vo u lo ir absolument faire
prendre le change sur la définition des choses : par
contre-lettre , en fait de contrats de m ariage , on en ten d,
d’après la définition de tous les auteurs , une convention
qui attaque les termes ou la substance d’un contrat de
mariage , qui en détruit les clauses , qui les altère , les
dim inue ou y déroge. M ais a ces caracteres , pou rrat-on jamais reconnoitre l ’acte sous seing p rivé de 1746 ?
Les clauses du contrat de m ariage du 13 février 1746
ne sont-elles pas, quant à leur exécu tio n , absolument in dé
pendantes de ce même sous seing p rivé ? Relativem ent aux
futurs constitués, et au père constituant, sont-elles donc
susceptibles de la m oindre altération , de la m oindre
modification ? Ne restera-t-il pas tou jou rs, indépendam
ment de la procuration , une constitution en totalité , et
telle qu’elle a été promise ? L a fam ille L aroch e-N egly
n’a-t-elle pas toujours la certitude du payement de c«tte
constitution , d’après l’obligation q u ’en a contractée le
sieur Choum ouroux , sauf à lui ou à ses héritiers à
exercer leur recours contre les dames T reveis ou leurs
héritiers. Cette idée de contre-lettres apposées à un con-'
trat de mariage sort donc absolument de l’espèce à jun-er
et l’application n’en est ni juste ni raisonnable.
Passant de cette prem ière proposition u une seconde,
les appelans soumettent à l’examen de la; cour la question
de savoir si l’action des héritiers Choum ouroux n’est pas
prescrite : de là la seconde question.
D
ÍV
�( *6 )
S e c o n d e
>
p r o p o s i t i o n
.
>
TJ action dirigée contre les appelons est - elle ou non
prescrite ?
P o u r établir que cette action est p rescrite, les appelan s, il faut en co n ven ir, auroient bien dû être au moins
un peu plus exacts dans la relation des dates d’où ils
sont partis pour faire com m encer la prescription de l’ac
tion ; on n’auroit pas alors à leur reprocher presqu’autant d’erreurs que de mots dans plusieurs pages du
second paragraphe de leur m ém oire. Us supposent d’abord
que la dame Laroche-N egly a survécu plus de quinze
ans à M arie-M arth e T reveis sa grand’tante ; son acte de
décès est produit au procès, cote 4 de la production Choum o u ro u x ; elle est décédée le 4 juin 1 7 56. M arie-M arthe
T reveis, sa grand’tante, est décédée le 17 janvier 1759-, au
lieu d’avo ir survécu à la veu ve P lantier elle l’a donc
précédée. Ils mettent aussi en fait que l’on n’a pas osé
faire paroître la procuration du vivant de l’aïeule ou de
la tante \ mais la procuration a été contrôlée en dé
cembre 1 7 5 3 , cinq ans avant le décès de M arie-M arthe
T reveis arrivé en janvier 1769. Partant de ces points
de faits dont la fausseté est d ém o n trée, les appelans en
tirent des conséquences qui doivent nécessairement
crouler avec les principes dont ils les font dériver.
M ais leu r'b u t est d’établir une prétendue prescription
qui n’exista jamais que dans leur imagination ; le but des
héritiers C houinouroux est de p rou ver qu’ il n’en existe
�3
C 27 )
pas. Rétablissons les dates, et démontrons que l’action
n’est pas prescrite : nous intervertirons l ’ordre adopté,
par les appelans, et nous établirons d’abord que l’action
principale n’est pas p rescrite, et ensuite qu’il en est ,de
même de l’action en garantie. - ,
c, ■- '
. M arie-M artlie C houm ouroux a contracté m ariage avec
le sieur de L aro ch e-N egly, le 13 février 1746-, l’échéance
des termes de pnyemens pour la somme de 3000 francs
contestée, puisqu’il ne s’agit que de cette som m e, d’après
le mémoire des appelans, et d’après le consentement par
eux donné devant les premiers juges, relativem ent au
payement de leur quote part de la somme de 1000 fr.
du chef de Catherine T r e v e is , est fix é e , par le contrat
de m ariage, au 13 février 1749 : c’est de cette dernière
époque seulement, ainsi que les appelans en sont convenus
dans leur m ém o ire, que doit com m encer à cou rir la
prescription.
Si la prescription eût pu courir contre la dame Cham blas constant son m ariage, il se seroit écou lé, jusqu’à son
décès, sept ans trois mois vingt-un jours utiles à la pres
crip tio n , et non pas plus de d ix ans, comme le sou
tiennent les appelans aux pages 22, 23 , 25 et 26 dq leur
m ém oire: ce qui écarte absolument la discussion à laquelle
ils se sont livré s, et qui devient dès-lors inutile et oiseuse.
L e père Chamblas est aussi décédé le 4 décem bre 1783:
en supposant, ce qui n’est pas, que la prescription, eût
pu courir contre ses enfans pendant sa su rvie, il y auroit
eu encore de prétendue prescription jusqu’à ladite époque
un laps de temps de vingt-six ans trois m ois; du 4 dé
cembre 1783 jusqu’à lu demande du 25 prairial an
cor-
�(28}
responclant au 14 juin 17 9 8 , il se seroit écoulé un laps
de temps de quatorze ans neuf mois dix jours de vrai-1
m ent utiles à la prescription; en sorte qu’en calculanttout le temps interm édiaire depuis le 13 fév rier 1749
jusqu’au 2.5 prairial an 7 , sauf ensuite la distraction du
temps pendant lequel la prescription a été interrom pue,
il se seroit écoulé un laps de temps de quarante-huit ans
quatre mois. M ais du nom bre de ces années il faut dis
traire d’abord les vingt-six ans trois mois qui se sont
écoulés depuis le 4 juin 176 6 , époque du décès de M arieM arth e G houm ouroux, épouse du sieur Cham blas, jus
qu’au 4 décem bre 17 8 3 , époque du décès de ce d ern ier7
ce qui laisseroit seulement vin g t - deux ans et un mois
d’utiles à la prescription. Si l’on doit en effet distraire
ces vingt-six ans trois m o is, dès q u e, par cette distrac
tio n , il ne reste plus que vin gt-deu x ans un m o is, il est
inutile de s’occuper de la question qui tendroit à savoir
si la prescription a pu courir contre la m ère constant le
m ariage, puisqu’en supposant môme l’affirm ative de cette
p ro p o sitio n , il n’y auroit jamais que vingt-deux ans et
un mois drutiles à la p rescrip tion , et non plus de trente
a n s, comme le supposent les adversaires.
M ais la prescription a - t - e l l e été suspendue pendant
les vingt-six ans trois mois qui se sont écoulés depuis le
déct& de M a r ie - M a r th e Choum ouroux jusqu’au décès
du sieur Cham blas, son m a ri? V o ilà la question de la
solution de laquelle d ép en d , en grande partie, le sort
de la demande principale dans, le système des adver
saires, parce q u e , d’après e u x , le moyen de prescription
n’aurait été couvert ni par les lettres ni par les autres
�( i9 )
moyens que les intimés ne font valoir que surabondam
ment pour écarter un m oyen aussi odieux*
S o u te n ir, comme le font les app elans, que la pres
cription court contre le fils de fam ille constant l’ usufruit
de son p ère, c’est heurter de front tous les principes reçusen cette m atière, c’est vo u lo ir m éconnoître l’opinion de
tous les auteurs> la jurisprudence des arrêts, et m&ftie
celle de la cou r d’appel q u i, par divers arrêts, a consacré
le principe contraire. Ce système erroné vient se briée#
contre une foule d’autorités égalem ent respectables : l*atiteur des M axim es journalières du ci-devànt parlem ent dé
P ro v en ce, L o u et et B rodeau, P o th ier, D u n o t, des arrêts
rendus au parlem ent de T ou lou se en 1695 et eri 17 0 2 ,
C atelan, que les adversaires osent in v oq u er, tom e 2 ,
liv . 7 , chap. i 5 , pag. 484, From ental, Serres en ses Ins
tituts, liv . 2 , tit. 8 , pag. 19 3 , ne permettent plus aujour
d’hui de controverser une semblable question. L ’opinion
de ces divers auteurs, les lois romaines sur lesquelles ils
l?ont basée, et les arrêts1 qu’ ils in vo q u en t, sont littéra
lem ent transcrits dans le m ém oire signifié par les frères
Choum ouroux , en prem ière instan ce, le 17 messidor
an 9 , cote 23 de la procédure principale-, et l’on se b or
nera à y renvoyer les appelans, pour éviter des rép éti
tions inutiles, et d’autant plus inutiles que la jurisprudence
de la cour d’appel est, quant à c e , irrévocablem ent fixée.
L a demande principale des en fans L aroch c-N egly n’étoit donc pas prescrite à l’époque de la demande par eux'
formée.
Mais la demande des frères et sœurs Choum ouroux
n’étoit-elle pas elle-même prescrite au m oment où ils l’ont
�IU
C 30 )
exercée contre les mariés M athon et M onteyrem ard? Ces
derniers soutiennent l ’affirmative de cette proposition. Il
n ’y a e u , disent-ils, aucune m inorité dans la fam ille Choum ouroux qui ait pu suspendre ou arrêter le cours de
cette prescription; elle a commencé le 13 février 17 4 9 ,
elle a donc été accomplie le 13 février 1779. M ais, pré
sumant bien que tous les moyens em ployés pour écarter
la prescription de l ’action j)rincipale concourent égale
ment à conserver en son entier l’action en garan tie, ils
veulent que l’action C houm ouroux contr’eux soit une
action prin cipale, distincte et indépendante de celle des
frères et sœurs L aro clie-N cgly : mais comment l’établir ?
I.e père C h o u m o u ro u x, disent-ils, a promis en son nom
personnel de faire le payement de la totalité des sommes
constituées, et de là ils en concluent qu’il n’a pas agi
en qualité de m andataire, et que sa fille et ses enfans
n’ont aucune action contre l’aïeule ou la tante, 11 n’a pas
agi en qualité de mandataire! le fait est fa u x ; il a expres
sément déclaré qu’il ne constituoit la somme de 4000 fr.
que par l’ordre do ses tantes. Il s’est obligé personnelle
ment ! le fait est vrai ; mais il s’est aussi obligé solidai
rem ent comme constituant de son ch ef, et comme ayant
ordre de constituer du ch ef de ses tantes. Les futurs ou
leurs enfans ne dévoient s’adresser qu’à lui pour être
payés de cette somme de 4000 fr. ! cela peut être; mais
l ’action qu’ils dirigeroient dans la suite contre l u i , par
une conséquence forcée, devoit seulement être le prin
cipe et la cause de l’action que le sieur C houm ouroux
au ro it, dans ce cas, à exercer lui-même contre la suc
cession de scs tantys, 011 vertu de l ’ordre qu'il eu avoit
N-
�( 31 )
reçu : jusque-là, n’ayant rien payé pour elles, il n’avoit
rien à leur dem ander, et l’obligation contractée par elles
dans le sous seing p rivé du 9 février 17 4 6 , se rattachoit
à l’exécution du contrat de m ariage; elle ne devoit leur
être rappelée que lorsqu’il auroit payé ou lorsqu’il auroit
été actionné pour payer : de là le caractère distinctif de
sa dem an de, qui ne peut être absolument considérée
comme une demande prin cipale, mais bien comme une
action en garan tie, nécessairement liée avec l’action prin
cipale dont elle n’est qu’une suite et une conséquence.
E n un m ot, le sieur Choum ouroux ou ses héritiers n’ont
eu intérêt d’agir contre la succession des dames T reveis
que lorsque les enfans L aroch e -N e g ly ont exercé leur
demande directe contr’eux : cette demande a été exercée
contr’eux en l’an 7 ; en l ’an 7 ils ont form é leu r demande
en recours; les mariés M athon et M onteyrem ard n’ont
donc pas m êm e à leur opposer un instant de prescription.
Ce n’est donc pas pour user de leur dernière ressource,
que les frères et sœurs C houm ouroux ont em ployé dans
leur production les lettres dont nous avons déjà p arlé ;
ce n’est que par surabondance de m oyens, et pour dém on
trer à la cour que tout l’odieux de cette fin de nonrecevoir doit uniquement retom ber sur le sieur M athon
et son ép ouse, et non sur leurs auteurs, qui n’eurent
jamais l’indélicatesse et la mauvaise foi de désavouer une
dette aussi légitim e. D ire que ces lettres ne contiennent
pas une explication précise de l’objet particu lier, c’est
tout au moins prouver que l’on n’a pas voulu se donner
la peine de les lire. L a seconde lettre parle des billets
souscrits par la veu ve Plantier ; la troisièm e parle du
�M
( 32 )
délaissement d’une v ig n e , en payement de ce que l’on
doit à la maison C h oum ou roux, du clief de la veu ve
P lan tier; et la dernière, qui est de 17 7 0 , parle textuel
lement d’ une.somme de 3000 francs demandée. L a p ro
duction de ces lettres, et surtout de la dernière, sufiiroit
Lien sans doute pour faire absolument évanouir et dis—
paroître le moyen de presci’iption indélicateinent im aginé
par les adversaires. D e 1770 à 17 9 8 , époque de la de
m ande, il n’y auroit pas les trente ans utiles ù la presr
cription.
M aintenant que nous avons suffisamment établi que
la procuration du .9 février 1746 étoit obligatoire pour
la veu ve Plantier ou pou r ses h éritiers, qu’il y a eu ap
probation de cette dette dans les écrits des adversaires,
qu’au surplus ni l’action principale, ni l’action en garan
tie, ne sont éteintes par la prescrip tion , venons à l’exa,.men de la. dernière, proposition qui form e le §. I l l du
m ém oire im prim é.
T R O I S I È M E
PROPOSITION.
P e u t-o n f o i r e considérer les appelons com m e héritiers
purs et simples de M a r ie - M a r t h e Treveis?- ou au
contraire doit-on se borner à leur dem ander le compte
b é n é f i c i a i r e de la succession de la veuve P la n tie r ?
C ’est ici le deruier retranchement des adversaires. Celte
question , qu'ils «voient à peine lait naître dans leurs
griefs, est présentée avec un développem ent plus étendu
dans leur m ém oire : mais ils ne seront pus plus heureux
dans
�6
( 33)
.
'
dans ce dernier moyen que dans les précédens. L es appelans sont héritiers purs et simples de M a rie -M a rth e
T re v e is , et ils doivent être condam nés, en cette q ualité,
à rembourser aux. frère et sœurs C h oum ouroux la somme
de 3000 f r . , ensemble les intérêts.
Rapellons succinctement les principes sur cette ques
tion ; rapprochons ces mêmes principes de la conduite
des appelans ou de leurs auteurs, et de ce rapprochem ent
résultera la conséquence forcée qu’ils ont dû être con
dam nés, non en qualité d’héritiers bénéficiaires, mais en
qualité d’héritiers purs et simples.
L ’héritier bénéficiaire , d’après la définition de tous
les auteurs, est celui qui en appréhendant une succession
en a fait constater le montant par un inventaire fait dans
le temps et dans les formes déterminées par la l o i , et q u i,
par cette précaution , s’est mis dans le cas de ne répondre
des dettes et des faits du défunt que jusqu’à concurrence
de la valeur des biens dont la succession est composée.
O r , à ces caractères reconnoîtra-t-on la qualité d’h é
ritier bénéficiaire de M arie-M artlie T re v e is, d’abord dans
Catherine B on n afoux, ensuite dans C laude-M ichel M o n tê yiem a rd , son fils, et ensuite dans l’épouse du sieur
M athon ?
O n convient d’a b o r d , avec les app elans, qu’en pays
de droit écrit il n’est pas d’ une indispensable nécessité
d’obtenir du prince des lettres de bénéfice d’in ven taire,
pour être admis à prendre la qualité d’héritier bénéfi
ciaire •, mais au moins il est indispensablcment nécessaire
de prendre cette qualité. O r , voyons d’abord si Catherine
Bonnafoux a pris cette qualité.
E
�(
34
)
L a requête du 13 février 1769 ne prouve et n’établit
d’abord rien de semblable : c’est une simple mesure de
précaution qu’elle croit devoir prendre avant de se dé
term iner, d it-elle, à l’acceptation ou à l ’abandon de la
succession de M arie-M arth e T i’eveis. Cette succession ne
pou voit lui être o n éreu se, elle en connoissoit alors la
consistance, elle connoissoit toutes les affaires de sa tante,
elle étoit intéressée dans son commerce. D ’ailleurs, en
1 7 5 4 , et le 12 a v r il, la veu ve Plantier avoit fait ellem ême son in ven taire, il avoit été écrit de sa main ; alors ,
elle n’avoit pas fait son testam ent, qui est sous lu date
du 31 août 1 7 5 7 ; il avoit été com m uniqué à tous les
prétendant droit à sa succession; à Catherine B onnafoux,
qui conséquemment en avoit une connoissance suffisante;
à la branche C houm ouroux : aussi trouve-t-on dans les
papiers relatifs à cette aifaire une copie de ce même in
ven taire, écrite par feu Pierre-Joseph Saignard de C lioum o u ro u x, décédé en maison de réclusion, et avant que
l ’action ait été introduite : à la branche L a va l ; et la preuve
de ce fait résulte d’ une copie du même inventaire, écrite
par la dame L a v a l, qui est décédée depuis plus de vin gtcinq ans (1). O r , cet inventaire fait par la veuve Plan
tier quelques années avant sa m o rt, portoit son actif à
7Ô5oo f r . , son passif à 38100 fr. ; il restoit conséqueininent de net une somme de 36400 f r . , et dès-lors l’incer
titude dont parloit Catherine Boim afoux n’étoit donc
(1) Ces deux copies fo n t partie du résidu : on a cru inutile (l’on
faire une production n o u velle, la qualité d ’héritier pur et simple
étant suffisam ment établie par les pièces produites.
�( s 5 )
vraim ent que de style, et elle n’eut môme pas alors l’intenlion de répudier la succession de sa tante.
A u surplus, eût-elle été vraim ent incertaine sur ce
qu’elle avoit à faire , elle n’avoit pas rem pli alors les
form alités requises pour eti’e admise dans la suite au
bénéfice d’inventaire; l ’inventaire qui fut fait à sa re
quête auroit d û, pour être rég u lier, être précédé d’ une
assignation à toutes les parties qui pouvoient y avoir in
térêt ; elle auroit dû notamment y appeler les créanciers
connus et certains de M arie-M artlie T reveis : la dame
Laroche-N egly ou ses héritiers étoient bien ses créanciers
connus et certains, d’après le contrat de m ariage de 174 6 ,
ou au moins P ie rre -L o u is Saignard de C houm ouroux
qui avoit constitué par son ordre ; et cependant ni les
L aro ch e-N egly, ni le sieur de C houm ouroux ne furent
appelés. E lle n’auroit donc pas rem pli à leur égard, les
formalités requises pour être admise au bénéfice (l’in
ventaire : c’est ce que nous enseigne Serres en ses Insti
tu ts , liv. 3 , tit. 1 9 , pag. 3 1 5 , et une foule d’autres
auteurs qui ont écrit pour le pays de droit écrit.
Mais Catherine Bonnafoux e û t-e lle fait faire un in
ventaire ré g u lie r, elle n’en seroit pas moins héritière
pure et simple de M arie-M artlie T re v e is , et cette qualité
auroit passé sur la tête de l’appelante, sa p e tite -fille .
Il est de principe que la qualité d’h éritier est indélé
b ile , et que celui qui a pris une fois cette q u alité, en
faisant acte d’héritier pur et sim ple, ne peut ni l’abdiq u er, ni la m odifier: Q u i sem cl h care s , semper h ocres.
L e 6 février 1759 , sept jours après l’ouverture du
testament de M arthe T re v e is , Catherine Bonnafoux comE 2
�t
c.36)
paroît au bureau du centième denier a u P u y ; et là , en
qualité d’héritière de la veuve P la n tier, suivant son tes
tament du 31 août 1 7 5 7 , elle fait la déclaration des im
meubles à elle échus dans cette succession. V o ilà la qua
lité qu’elle ne peut plus abdiquer : pro hœrede gerere
non tam Jxicti quam a n im i est. L o i 20 , au ff. de a cq u irejida vel am ittendà hœ reditate. G erit pro hœrede q u i
anim e agnoscit saccessionem licet n ih il attingat hœ reditarium . Ib id . liv . 88. C ’en étoit donc fait; d’après cet
acte elle n’étoit plus recevable à se porter héritière
b én éficiaire, et tous les actes postérieurs où elle auroit
ensuite pris cette dernière qualité ne pourroient effacer
la prem ière, pou r laquelle elle avoit déjà fait son option.
Cette qualité d’h éritière pure et simple fut encox-e
reconnue en elle par le sieur M onteyrem ard son iils;
l ’on vo it en effet que le 7 septembre 17 6 9 , il donna à
M . Chazeaux de C h ou m o u rou x, son cousin, une procu
ration pour toucher d’une denjoiselle M agdeleine D u m as,
veu ve R o c h e , une somme de i 5o fr. qu’elle devoit à la
succession de la veuve P la n tie r, dont sa iiière étoit héri
tière. Cette p ièce, surabondamment produite sur ap p el, ne
fait que confirm er, soit en point de fa it, soit en point de
d ro it, que Catherine Bonnafoux étoit héritière pure et
simple de sa ta n te , et que cette qualité a m êm e été re
connue par son fils.
Cette qualité , qui auroit passé de droit à son fils ClaudeM chel M o n teyrem ard , lui fut encore irrévocablem ent
acquise par son propre fait. O11 ne contestera sans doute
p:is le principe qui nous est enseigné par Serres au lieu
déjà c ité , page 3 1 7 , que l’on fait aclc d’héritier exprès-
�(
37
)
3
sèment par le seul fa it3 lorsque l ’héritier légitim e ou
institué fait quelque acte qu’ il ne pourroit faire qu’en
qualité d’h é ritie r, comme s’il dispose en maître des biens
de la succession par vente ou autrement. T e lle e s t, en
effet, la disposition de la loi 20 déjà citée, pro hccrcde
gerit q u i a liqu id gerit tanqucim hœres.
O r , c’est précisém ent ce qu’a fait Claude-Michel M o n teyrem ard, fils à Catherine Bonnafoux : par acte notarié
du g décem bre 1761 , il a v e n d u , avec promesse de faire
v a lo ir , fo u rn ir et garan tir, un champ dit d’ E xp aly , à
M e. Claude G e n a y , procureur. Ce cham p dépendoit de
la succession de M arthe T re v e is ; et la déclaration de
Catherine B o n n a fo u x, dont nous avons parlé plus h a u t,
ne laisse aucun doute à cet égard. L e principe ci-dessus
invoqué trouve donc ici son application.
A in s i, sans qu’il soit besoin d’avoir recours à une
foule d’au torités, sans qu’il soit nécessaire de rapporter
l ’espèce d’un arrêt rendu au parlem ent de T o u lo u se , le
31 août 1 7 7 2 , arrêt qui a jugé la question in ten n in is ,
et qui est rapporté par Boutaric en ses Instituts, p. 3 18 ,
et de plusieurs autres, et notamment d’un arrêt du par
lement de Paris , du 18 février 1784 , rapporté au R é
pertoire de jurisprudence au m ot h é r itie r , page 3 6 3 ; il
demeure pour constant que C la u d e -M ic h e l M o n t e y r e mard , soit comme h éritier de sa m ère , soit par son
propre fa it, étoit h éritier pu r et simple de M arie-M arth e
Treveis. L ’appelante, sa fille et son h é r itiè r e , ne peut
aujourd’hui se dépouiller d’une qualité qui a irrévoca
blement passé sur sa tête avec la succession de son père.
Son mari et elle ne sont donc plus rccevables ù. se porter
�aujourd’hui héritiers bénéficiaires de la veu ve Plantier;
ils ne sont plus recevables à répudier une succession que
leur père et leur aïeule ont si form ellem ent acceptée : ils
ont donc dû être condamnés comme héritiers purs et sim
ples, et non comme héritiers sous bénéfice d’inventaire.
L es moyens surabonderoient pour mettre à découvert
toute la mauvaise foi des appelans, et pour justifier dans
toutes ses dispositions le jugem ent dont est appel. M ais
à quoi bon entrer dans une plus longue discussion ? L e
droit des intimés est suffisamment établi par les motifs
qui lui ont servi de base; motifs que les appelans ont
eu soin de transcrire en entier dans leur m ém oire. Les
rapporter littéralem ent et ne pas les r é fu te r , c’est en
quelque sorte reconnoître la légitim ité des condamna
tions prononcées contr’eux. L e but des intimés ne fut
jamais d'accabler tout à c o u p , p a r des poursuites rigou
reu ses, la dame M a th o n , cette orpheline si intéressante,
cette orpheline qui semblerait vou loir évoquer les mânes
de son aïeu le, de son père et de son tu teu r, pour leur
demander des renseignemens, des titres et des com ptes(i).
( i ) L a dam e M a t li o n , qui prétend q u ’on a voulu abuser de son
état d ’ignorance, et n ’avoir aucune pièce en son pouvoir, a cepen
dant produit au procès l’inventaire fait les 16 janvier 175«) et jours
suivans, après le décès do la veuve l ’inntier, clos meubles et e ile ls
composant sa succession; elle a cependant produit la requête pré
sentée par son aïeule pour faire apposer les scellés sur les effets de
la m êm e succession, et celle présentée pour parvenir à l ’ouverture
du testament; elle a cependant un arrêté «le compte entre la darne
B o n n a fo u x , sa gran d’m ère, et la veuve Plantier, duquel il r< suite
q u ’il y avoil société de com m erce c n tr ’cllcs; elle a cependant tous
�f t
\
Ils n’ont pas colludé avec le sieur L a r o c h e -N e g ly ( 1 ) .
il sont d'autre intention que d'éxiger de la dame
M athon l’ex écution des obligations contractées par M a rieMarthe , treveisveuve P la n tier d o n t elle est h éritière
par représentation d e s e s auteurs. Si elle n’eut pas eu
l’indélicatesse ,d'opposer une p r e s c r ip tio n c h im é r iq u e ,
les frères et sœurs C h oum ouroux n 'a v o ie n t p a s b e s o i n ,
p our écarter un m oyen si o d ieu x,d
ir
efa
contraster
sa co n d u ite et so n lan g ag e avec la co n d u ite et les écrits
de son père e t d e so n a ie u le . L a fa m ille C h o u m o u ro u x
tient à honneur de ne pas chercher à écarter une demande
légitim e, celle du sieur L a r oche-N egly , par une prescrip
tion odieuse. P ou rqu oi ces sentimens ne sont-ils pas com muns aux appelans .e t a u x in t im é s , q u i d e s
uns les
autres, sortent de la même souch e?
M . C A T H O L , rapporteur.
M e. T A R D I F ,
avoué.
les papiers de la fa m ille , sans en excepter ceux qui serviroient à
établir la légitimité de la demande des intimés : mais ces papiers,
com m e on le présume b ien, sont ceux dont elle a le m oins besoin
dans la cause, et qu’elle a eu grand soin de ne pas produire.
( 1) il y a si peu collusion entre les frères et sœurs C h ou m ou ro u x
et le sieur L a ro che - N e g l y , que ce d e rn ie r, en vertu du jugem ent
du P uy qui lui accordoit une provision de 3ooo f r . , avoit f ait
saisir et arrêter le prix entier des fermages dûs à la maison C houmouroux par divers particuliers. C e lt e saisie fut faite par R e d o n d ,
huissier, le 11 vendémiaire an h uit.
A R l O M , de l ’imprimerie de L a n d RI o
C o u r d ’appel.
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,
seul imprimeur de la
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
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An account of the resource
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. De Saignard de Chomouroux, Joseph-Raymond-Bénigne. An 13?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Subject
The topic of the resource
donations
successions
droit écrit
créances
expertises graphologiques
experts
signatures
inventaires
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Joseph-Raymond-Bénigne, Françoise et Alexis de Saignard de Chomouroux, propriétaires, habitans de la ville d'Yssingeaux, intimés ; contre Julie-Angélique Monteyremard, et Jacques-Louis Mathon, son mari, propriétaires, habitans du lieu du Bourg-Argental, appelans ; en présence du sieur Georges-François-Alexis de Laroche-Negly de Chamblas, propriétaire, habitan du lieu de Chamblas, commune de Saint-Etienne-Larderol, intimé.
Table Godemel : Donation : 9. une donation faite au nom d’un tiers, par contrat de mariage, en 1746, et sans procuration annexée, est-elle obligatoire pour celui au nom duquel elle a été faite ? Si celui qui s’est porté fort a rempli la donation, a-t-il une action en garantie contre le tiers dont il avait reçu procuration par acte sous signature privée ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 13
1746-Circa An 10
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1602
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1601
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53276/BCU_Factums_G1602.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Créances
donations
droit écrit
expertises graphologiques
experts
inventaires
signatures
Successions
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53497/BCU_Factums_G2511.pdf
eb70863809433f79bc5a3ebc0dcedc7a
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Text
MEMOIRE
POUR
COUR ROYALE
_
C
laude
et
M
a t th ie u
.
DE RI OM .
M IJO L A S
frères, ap p e-
lans de jugem ent rendu par le tribunal civil
d’Issengeaux, le 20 avril 18 19 ;
(
CO N TR E
Dame M a r i e - F r a n ç o i s e - M é l a n i e d e
B A I L L E et sieur H y p p o l i t e d e L A G R E V O L , procureur du Roi à Issengeaux,
son mari, intimés
E t contre J e a n et J e a n - P
ierre
CHAM-
B O U V E T } et J e a n R O M E Y E R , en qua
lité de tuteur de ses enf ans mineurs d'avec
Jeanne
CH A M B O UVE T , aussi intimés.
U
N E question q u ’on
a vo it cru sim ple a ce p en d an t
présenté des difficultés assez sérieuses pour partager le
*
—
Chambre
2
�sentiment des magistrats auxquels elle étoit soumise.
La partie doit donc y apporter plus d’attention et le
défenseur ne doit plus s’abandonner à sa propre con
fiance en des moyens qui lui avoient parus décisifs.
Dès qu’un point de droit fait des doutes, il faut le dis
cuter sérieusement, partir des principes, en développer
l’application et en démontrer les conséquences.
Un acte qualifié donation à cause de m ort, où on
semble avoir évité à dessein le mot testam ent, réduit
à de simples leg s, revêtu , d’ailleurs, de toutes les for
malités nécessaires à un codicille, en pays de droit écrit,
est attaqué de nullité. On y lit ces mots placés indifférem
ment : A. titre d'institution. Ils y étoient sans objet; ils
y sont sans effet; et cependant ils servent de prétexte
à une demande en nullité, parce q u e , d it-o n , ils dé
montrent que le défunt vouloit faire un testament et
non un simple codicille, et que l’acte n’est pas fait en
présence d’un nombre de témoins suffisant pour valider
un testament.
N ous avons donc à examiner quel effet peuvent pro
duire contro un acte ces mots à titre d'institution , qui
n’eussent servi à rien pour le faire valoir. Nous le verrons
avec les principes du droit et la doctrine des auteurs saine-*
ment entendue. Nous verrons encore si on peut tirer
parti des subtilités du droit Romain ; si des termes qui
pouvoient y être en quelque sorte sacramentels, sont de
quelque conséquence depuis la loi du 17 nivôse, dans un
temps où les testamens, comme les codicilles, étoient
absolument indépondans de toute institution. «Héritier*
G’est toute la difficulté de cette cause,
�c 3 ;
F A IT S .
Antoine-M arin de Baille , célibataire, avoit pour hé
ritiers présomptifs des neveux qui sont les intimés. Les
M ijolas, appelons, étoient ses neveux à la mode de B re
tagn e, enfans de Catherine F a u , sa cousine germaine.
L ’un d’eux, Claude, avoit demeuré plusieurs années dans
la maison du sieur de Baille ; il en avoit reçu quelques
services; il lui avoit rendu avec beaucoup de reconnoissance tous ceux qui étoient en son pouvoir; il l’avoit
soigné dans plusieurs maladies avec beaucoup d’affection,
et lui avoit été fréquemment utile dans la gestion de
ses affaires.
Après la mort de Jean-Antoine de Baille, son frère,
Antoine-M arin n’avoit pas vécu en bonne intelligence
avec sa belle-sœur ; celle-ci n’avoit pas effacé, bien au
contraire, les sentimens d’affection qu’il avoit pour les
Mijolas; maître de sa fortune, pouvant disposer de
la moitié de ses biensr ayan t, d’ailleurs, par devers lui
d’autres motifs personnels de faire du bien aux M ijolas,
il fit, le 17 frimaire an 1 1 , un acte où. on lit la dispo
sition suivante:
« D e son gré et volonté, a donné et donne par do« nation à cause de m ort, à titre d’institution, en œuvres
« pies, savoir, auxpauvres de D ieu , la somme de cinq cents
« francs à eux payable et distribuable après son décès j
a p lu s, la somme de soixante francs en acquits de messes
» par les citoyens prôtres qui desservent l’église de
«: Notre*Dame du P u y ; plus, le quart de ses entiers biens
«. présens et à venir aux citoyens Ghambouvet de M o1 *
�C4 )
«
«
«
«
«
«
«
«
nistrol, à se partager entr’e u x , au nombre de trois
petits-neveux ou nièces; plus, autre quart aux citoyens Claude M ijolas, Matthieu Mijolas, son frère,
et Catherine F au , leur m ère, à se partager ensemble
par égales portions, du lieu de L o lie r, commune de
Saint-Hostien, et ledit M atthieu, du lieu de la T o u reille, commune de G lavenon, ce qui a été fait et récité, etc. »
Il est inutile de rapporter la form ule, puisqu’elle n’est
pas critiquée ; seulement observons que cet acte est reçu
par M e. Rocher qui étoit le notaire ordinaire du sieur
de B aille, et qu’on n’y trouve que cinq témoins au lieu
de six qui eussent été nécessaires pour un testament
solennel.
Comme on le vo it, le sieur de Baille disposoit seule
ment de la moitié de ses biens ; le surplus demeuroit
dans la succession, ab intestat, pour appartenir à ses
héritiers de droit. La loi qui leur en faisoit réserve et
qui ne permettoit d’instituer personne à leur préjudice,
les instituoit héritiers par cela seul ; nulle part le sieur
de Baille ne dit qu’il veut faire un testament plutôt qu’un
simple codicille; il déclare même ne vouloir faire qu’ une
donation à cause de ??iort, qui s’entendoit ordinairement
du codicille, et qui étoit valable en cette forme ; enfin,
il ne cherche pas à remplir les formalités des testamens,
parce qu’il ne fait que de simples legs.
' L e sieur de Baille survéquit assez long-temps à cet
acte. Le Code civil fut promulgué et lui rendit la fa
culté de disposer de la totalité de scs biens; il paroît
qu’il en proiita. Un acte dont les appelans ne peuvent
�(5)
pas user en ce moment, faute de l’avoir connu assez tôt,
et qu’ils n’ont pas môme encore en forme probante,
en seroit une preuve sans réplique. Revêtu de toute sa.
capacité, le sieur de Baille ne voulut plus disposer d’une
partie, mais de tout; il ne voulut plus faire un codicille,
mais un testament ; le Code réduisoit, d’ailleurs , à cette
forme unique tous les actes à cause de m o rt, et celuici fut fait seulement le 18 nivôse an 1 2 ; aussi le no
taire ne manqua-t-il pas de déclarer en commençant
que le sieur de Baille « l’a requis en vertu des précé« dentes lois, et notamment de celle du 13 floréal dernier,
« de recevoir son testament nuncupatif é c r it, et dis« position de dernière volonté.
« Il lègue 5oo francs aux pauvres, puis à cliacun de
« ses parens et prétendans droit la somme de ¿5 cen t.,
« et pour ses héritiers -particuliers et universels, en
« tous et chacun, ses biens meubles et immeubles. . .
« ..............Il nomme et institue de sa propre bouche y
« savoir, pour un tiers, Françoise-Mélanie de B aille, sa
« nièce ; pour un autre tiers , Claude M ijolas, son pa« rent, fils à Joseph; et pour un autre tiers les trois
« enfans Chambouvet, enfans de feue M arie-Anne A u « lanier, ses petits-neveux et nièces................... auxquels
« susnommés veut les susdits biens appartenir à raison
« d’un tiers comme dessus à chaque branche susnom« m êe, à la charge par eux de payer et satisfaire les
« susdits légats ’ » il casse et annule tous autres testamens ou donation ¿1 cause de mort qu’il pourroit
avoir faits ci-devant; ensuite, il déclare que si le présent
ne pouvoit valoir comme testament, il veut qu’il vaille
�(6)
par donation à cause de m ort; et enfin, par toute autre
meilleure forme que de droit il pourra valoir. L e no
taire Pouzol qui recevoit l’acte, le termine par cette
formule du droit écrit : P r ia n t les témoins ici présens
d'être mémoratifs de sa présente disposition.
. O n voit que par cet acte le sieur de Baille conserve
les mêmes affections ; qu’il dirige ses dispositions en
faveur des mômes personnes. ; que seulement il les
agrandit, parce qu’il peut disposer de tout ; qu’il reconnoît Mijolas pour so7i parent, et l’appelle à sa succession
au même rang que ses neveux et petits-neveux, quoi
que plus éloigné; que voulant faire un testament, il le
dit expressément ; qu’il en emploie toutes les formes ;
qu’il institue des héritiers universels, les charge de cer
tains legs et ajoute la clause codicillaire ; qu’enfin, le no*
taire s’assujétit à toutes les formules du droit rom ain, si
vaines et si inutiles sous le C o d e, mais q u i, autrefois,
étoient caractéristiques du testament et le distinguoient
du simple codicille; et il est fort remarquable que 1&
notaire établit lui-même une différence essentielle entre,
le testament et la simple donation à cause de m ort ;
en effet, on considérait habituellement cette dernière es
pèce de disposition comme différente du testament ,
comme un simple codicille, et les notaires ne manquoient
jamais à qualifier un testament du nom qui lui étoit
propre, et à l’entourer de toutes ces formules qu’ils
apprenoient avant tout et qu’ils regardoient comme sa
cramentelles;
Le 18 décembre 18 12 , les Mijolas ont réclamé le
quart de la succession, en. vertu du- premier acte ; comme
�(7 )
le legs fait en leur faveur étoit un legs de quote ; que
conséquemment ils ne pouvoient l’obtenir qu’en deman
dant un partage et en se soumettant, à toutes les charges,
comme les héritiers ; ils ont pris cette qualité d’héritiers
pour un quart, et ils ont demandé le partage en vertu
du testament du sieur de B aille, du 17 frimaire an 1 1 ,
ne mettant aucune importance à la qualification de l’acte,
dès qu’il n’y en avoit aucune dans les résultats, et dès
que la qualité de légataire ou d’héritier devenoit indif
férente, par cela seul que la succession étoit ouverte
sous le Code civil.
Les intimés demandèrent la nullité de ce testament.
E t cette nullité a été prononcée par les premiers juges,
par trois motifs.
* L ’un qu’on ne trouve pas dans la -prétendue donation
dont il s’agit, que M arin de S a ille ait prononcé ses
dernières volontés au testateur.
L e second, qu’en prenant cet acte dans les termes où
i l est co n çu , on ne peut douter que Vintention du sieur
de Baille a été de faire un testament-nuncuyatif, puis
qu’il donne à titre d'in stitution, à ceux qui sont ap
pelés à son hérédité, la part qui se trouve à sa dispo
sition; que cette intention a été partagée par les deman
deurs qui agissent dans la demande introductive d’ins
tance, en qualité d’héritiers ; qu’enfin, cette disposition
est contraire à l’article 5 de l’ordonnance de 17 3 5 , qui
veut que le testament soit dicté par le testateur, en pré
sence de sept témoins , y compris le notaire, tandis que
dans cet acte on n’en trouve que six.
1
L e troisième m otif porte, qu’en considérant Vacte
�(8'
comme codicille , il seroit encore nui pour ne pas
contenir l’expression non équivoque de la dictée, et n’étrc
pas revêtu de la clause codicillaire.
Sur l’appel de ce jugement est intervenu un arrêt
de partage,
*1
M O YEN S.
. A ne considérer que les motifs du jugement dont est
appel dans les termes où ils sont conçus, on s’étonnerait
d’en voir résulter une question sérieuse.
• Les premiers juges auraient pu d’abord nous faire
grâce du dernier,.qui est absolument inintelligible; en
considérant Vacte comme un co d icille, il seroit n u l,
dit - o n , pour ne pas contenir la clause codicillaire ;
comme si on ne sayoit pas que la clause codicillaire n’étoit
qu’une formule pour faire valoir comme un simple co
dicille l’acte qui n’étoit pas valable comme testament; et
qu’insérer cette clause dans un codicille, c’eût été une
évidente absurdité.
. . . .
. Quant aux autres, nous examinerons avant tout, la pré
tendue nullité tirée du défaut de mention de la dictée, pour
n’avoir à entremêler d’aucune autre la difficulté principale,
celle relative à la qualité de l’acte.
L ’article 5 de l’ordonnance de 17 3 5 , prescrit les for
malités nécessaires pour faire valoir un testament nuncupatif ; il porte que le testament sera prononcé par le
testateur, en présence de sept témoins, y compris le
notaire; que le notaire écrira les dispositions à mesure
qu’elles seront prononcées par le testateur ; après quoi
�C9 )
il sera fa it lecture du testament entier audit testateur,
DE l a q u e l l e LECTURE il sei'a f a i t mention par le
notaire, etc.
Rien de plus clair que cette disposition de l’ordon
nance; elle indique certaines formalités comme essen
tielles: le testateur dictera , le notaire écrira, le notaire
fera la lecture. Parmi ces trois formalités nécessaires,
l’ordonnance en distingue une qui lui paroît, sans doute,
plus essentielle encore que les autres, et croit devoir
l ’assujétir elle-même à une formalité pour constater son
observation ; elle oublie les deux premières q u il lui a
suffi de prescrire, mais elle veut que la troisième soit établie
d’une manière plus solennelle ; de laquelle lecture il
sera f a it mention.
Ici, deux mots suffisent pour détruire l’argument des
premiers juges.
D ’une p art, il étoit vrai alors, comme aujourd’hui
sous l’ordonnance comme sous les Codes, que les juges
ne peuvent prononcer de nullités ni exiger de formalités
que celles qui sont prescrites par la loi ; il suffit donc
que l’article ait gardé le silence sur la mention de la dic
tée, et q u e, ne la prescrivant p a s, il ne prononce pas
de nullité lorsqu’elle est om ise, pour que le juge ne
puisse ni la créer ni la prononcer de sa propre autorité.
E n second lieu, la séparation que fait l’ordonnance
entre les diverses formalités qu’elle e x ig e, suffit pour
démontrer qu’elle n’a pas voulu la mention de la dictée;
1 article en est exclusif, bien loin de la commander.
A ussi, seroit-on en peine de citer un seul arrêt qui
�C IO )
ait annule un testament ou un codicille pour cette cause,
un seul auteur qui ait adopté cette nullité comme point
de doctrine. E lle n’a paru quelque chose aux premiers
juges que par l’idée que peut en avoir donné le Code
civil qui , en effet , exige la mention de la dictée et
prononce la nullité de l’acte où elle est omise ; mais
le Code a créé cette nullité comme celle résultante du
défaut de mention que le notaire a écrit le testament,
et jusqu’à présent personne n’avoit pensé à attaquer un
testament antérieur au C o d e , pour ne pas contenir la
mention qu’il fût écrit de la main du notaire.
Cette pensée n’est donc que l’effet d’une distraction.
C e m oyen écarté, il nous reste à examiner la dispo
sition sous son point de vue principal. L ’acte est-il un
testament ou un codicille? pouvoit-il et devoit-il, sous les
lois nouvelles , être autre chose que ce qu’il est ? les
deux mots, à titre d’ in stitution , qu’on y lit au milieu
d’une phrase où ils ne sont même pas bien placés, gram
maticalement parlant , y eussent été de quelqu’eftet
si le sieur de Baille eût fait un acte valable en la forme,
comme testament? peuvent-ils le vicier si l’acte n’est
pas fait devant un nombre suffisant de témoins pour un
testament solennel? Voilà les questions auxquelles nous
sommes réduits, et qu’il suffit d’examiner pour la
décision de cette cause.
Pour discuter avec clarté, nous commencerons par
l’examen de la difficulté dans le sens où l'ont présen
tée les intimés, et telle qu’elle a été examinée par les
premiers juges, c’est-à-dire, en considérant l’acte comme
�C 11 )
s’il out été fait pendant que les anciennes lois étoient
intégralement en vigueur, lorsque des institutions étoient
non-seulement admises, mais encore essentielles dans un
testament; nous aurons à voir ensuite comment cette
partie de l’ancienne législation pourroit se concilier avec
nos lois nouvelles, et s’il est possible de supposer que
depuis les lois des 7 mars 17935 5 brumaire et 17 nivôse
an 2, une institution d’héritier défendue ou inutile, a pu
produire quelqu’effet dans un testament; mais, avant tout,
posons quelques principes ; ils nous seront nécessaires
pour bien distinguer sous quel rapport et par quelle
cause , en pays de droit écrit, l’institution d’héritier étoit
nécessaire.
L e droit naturel appelle les parens les plus proches
à succéder aux défunts. lie droit romain déféroit la suc
cession aux agnats; en pei’mettant d’y déroger, les légis
lateurs du monde entourèrent l’exercice de cette faculté
de certaines formalités tendantes à prouver authentique
ment que le testateur avoit agi avec liberté et circons
pection , et que sa v o lo n té, devenue certaine autant
qu’elle étoit absolue, avoit été ratifiée publiquem ent; et
comme dans les temps de la république romaine la loi étoit
1 expression de la volonté générale , on voulut que per
sonne ne pût disposer de ses biens qu’en faisant sanc
tionner ses dispositions par l’universalité des citoyens.
Voilà pourquoi le testateur prononçoit ses dispositions
devant le peuple assemblé, et le suffrage des citoyens
produisoit une loi qui étoit alors substituée à la loi
fondamentale.
Celle des douze tables changea cet ordre de choses
�( » )
et ne soumit plus le testament qu’à être l’effet de la
seule volonté du testateur. Sans nous arrêter ici à des
recherches plus curieuses qu’utiles sur les diverses espèces
de testamens successivement admises, et sur les nuances
diverses de la législation rom aine, il nous suffit d’indi
quer immédiatement de quelle manière y furent admis
les testamens nuncupatifs qui furent usités dans notre
droit jusqu’il la publication du Code.
Ce testament ne devoit pas d’abord être écrit, mais
le testateur devoit en prononcer les dispositions en pré
sence de sept témoins qui alloient en faire la déclara
tion chez le juge, après le décès du testateur; on sent
combien un semblable m o d e , si susceptible d’inconvéniens , devoit êti’e entouré de précautions , puisqu’il
s’agissoit de faire passer l’hérédité du défunt à d’autres
personnes qu'à celles appelées par la loi générale pour
laquelle on avoit un si grand respect. Aussi, on vouloit que les témoins ne se trouvassent pas là fortuite
m ent, et qu’ils fussent priés par le testateur d’entendre
ses dispositions et d’en porter témoignage. Peu à peu on
dut prendre l’habitude d'écrire ce testament; car si la
loi ne l’ordonnoit pas, elle le défendoit encore m oins,
et toutes les formules dont on usoit jusqu’alors furent
employées par le testament écrit; il falloit qu’il fût conçu
en termes im pératifs, parce qu ’on le considéroit comme
une loi particulière, T itius hœres es to; c’est ce qu’on
appela par la suite une institution en termes directs,
bien différente dans ses effets avec celle qui n etoit con
çue qu’en termes obliques, Titium hœredem esse volo.
Mais il laut bien se fixer sur cette vérité principale,
�M
( *3 )
que le testament ne fut admis que pour transmettre
Vhérédité; aussi, Vinstitution d’héritier y étoit essen
tielle; elle en étoit le'fondement. Il faut observer aussi
que l’institution devoit être universelle, et que le testa
ment ne pouvoit valoir que pour toute l’hérédité: en telle
sorte, qu’il attribuoit la totalité de la succession, quoique
le testateur n’eût donné qu’une partie ; car ne pouvant pas
mourir partira testa tus , partira intestatus, la seule cir
constance, qu’il avoit institué un héritier, quoique pour
une partie , suiKsoit pour attribuer la succession en
tière à cet héritier. Cette remarque est fort essentielle,
car nous aurons à voir si, en supposant l’acte de l’an 11
valable comme testament, les mots à titre d'institution
qui s’y trouvent, auroient eu la force d’attribuer toute la
succession aux Mijolas. Mais continuons l’examen de la
législation.
X<a loi appelant de droit les enfans à la succession de leur
auteur, ne vouloit pas qu’ils fussent privés de la succession
entière, et, hors le cas d’exhérédation , elle réservoit leur
légitime. E n ce cas, elle vouloit, à peine de nullité ,
que les testateurs les appelassent par le testament, et que
ce qui leur étoit réservé leur fût donné à titre d’institu
tion ; tant étoit grand le respect qu’on portait aux prin
cipes sur la transmission de l’hérédité.
Dans les premiers temps, on ne connoissoit pas lusage
des simples legs ; il falloit tester et instituer des héri
tiers ; celui qui vouloit imposer quelque charge à son
héritier le faisoit par de simples lettres ou par des
moyens semblables, toujours imparfaits, puisqu'ils n’étoient pas obligatoires.
ï
�( r4 )
Bientôt, on reconnut les inconvéniens qu’il y avoit
à exiger pour tous les cas possibles l’exécution de toutes
ces formalités ; on sentit combien cela étoit désavan
tageux pour ceux qui voudroient modifier leurs dis
positions par des legs ou des conditions, et aussi pour
ceux q u i, se trouvant en voyage ou dans des circons
tances particulières , ne pouvoient pas s’assujétir à toutes
les formes du testament solennel.
Alors s’introduisit l’usage des codicilles, pour lesquels
il ne falloit que cinq témoins ; où le style impératif
n’étoit plus nécessaire, et q u i, en un m ot, n’exigeoit
pas des formalités aussi minutieuses, ü n permit d’em
ployer cette forme beaucoup plus sim p le, pour ajou^ter à un testament ou pour le modifier ; on le permit
également pour ceux qui n’avoient pas encore testé ;
mais de même qu’un testament ne pouvoit valoir que
par une institution d’héritier, de même on voulut que
l’institution d’héritier ne pût valoir que par testament;
et il ne fut permis, par le codicille, ni d’instituer un
héritier , ni prononcer une exhérédation ; il ne valoit
que pour de simples legs qui étoient, en ce cas, transmis
au légataix’e par voie de fidéicommis dont on chargeoit
l’héritier institué.
Nous ne devons pas omettre de parler ici d’une troi
sième espèce d’acte qui fut admis dans le droit Rom ain;
nous voulons parler do la donation à cause de m o r t,
qui fut introduite pour donner à chacun la faculté de
disposer directement d’un objet particulier, sans em
ployer la voie du fidéicommis, ni se dépouiller de son
vivant. Dans le principe, elle avoit i\ peu près la même
�C
)
forme que la donation entre-vifs , puisqu’elle avoit pour
objet d’investir le donataire, pour le cas où le donateur
succomberoit à un événement p révu, et qu’elle exigeoit
l’acceptation du donataire ; mais étant faite in contem platione m ortis, elle pouvoit. être révoquée, et le do
nateur , échappé au danger qu’il avoit craint, pouvoit
reprendre ou réclamer l’objet de la donation qui demeuroit alors sans effet.
Dans la suite, elle devint d’un usage plus général ;
elle fut employée pour faire un don cogitatione mortis,
sans la prévoyance d’aucun danger ou d’aucun cas par
ticulier; aussi Justinien la compare-t-il aux dispositions
de dernière vo lo n té, et l’auteur du dernier traité des
donations nous dit, page 67 : « On pouvoit la comparer
« au codicille ,• dans l'un et Vautre c a s , il ne J a llo it
« pas d’institution d’h éritier, qui ne pouvoit être faite
« que par testament ; aussi , c o m m e pour le codicille,
a il n e fa lla it que cinq tém oins, nombre qui ne sufüsoit
a pas pour le testament. »
Ces principes sont incontestables ; on les puise dans
les sources les plus pures du droit : ils furent admis dans
la législation française, et furent généralement observés
dans tous les pays qui avoient adopté le droit écrit, jusqu'à
la publication des ordonnances de 1731 et 1735. Les
notaires étoient familiarisés avec les formules du droit
romain, ils les employoient avec ce rigorisme attaché ;\
1 habitude, et il étoit facile ¿\ leurs expressions, à la simple
pliisionomie de l’acte, au préambule seul, de distinguer
du premier coup d’œil si on avoit voulu faire un testa
ment ou un codicille ou une donation à cause de m ort;
�C 16 )
il n’y avoit jamais de louche qu’entre ces deux dernières
espèces d’actes, parce qu’ils «voient entr.eux des res
semblances telles, qu’il pouvoit être quelquefois diilicile de les distinguer l’un de l’autre.
Il
n’ en fut pas de même dans les pays coutumiers ;
chacun adopta des règles particulières ; quelques-uns,
comme l’A uvergn e , ne permirent par testament que
des dispositions particulières, et n’y autorisèrent pas
l’institution; aussi d isoit-on que dans ses coutumes, il
n’étoit pas permis de tester, et que les actes qualifiés
testament n’étoient, par le fait, que de véritables codi
cilles. Ces distinctions, toutes de principe , nous dé
montrent qu’on ne considéra comme testament que
ceux qui contenoient institution cohéritier et transmis
sion de l’hérédité, et comme simple codicille, tout acte
à cause de mort qui ne faisoit que des legs.
L ’ordonnance de 1731 apporta un changement à cet
état de choses ; elle supprima par son article 3 , la form e
des donations à cause de m o rt, ne les autorisant plus
qu’en contrat de mariage ; elle ne permit que deux
formes de disposer , celle des donations entre-vifs, et
celle des testamens ou codicilles. Dans les pays de droit
écrit on continua de faire par codicille des donations à
cause de m o rt, q u i, en effet, furent valables sous cette
forme.
L ’ordonnance de 1735 vint compléter la législation;
elle adopta, pour les pays de droit écrit, les principes du
droit rom ain, les testamens nuncupatifs écrits et le co
dicille ; elle en régla toutes les formes extérieures ; elle
exigea
�exigea pour le premier sept témoins y compris le notaire,
et pour le second cinq seulement; et quant à 'la forme
ou la nature des dispositions, elle se borna à ne point
déroger aux lois et usages préexistans; c’ést ce qu’on
voit dans l’article 5o , où elle dit que « dans les pays
« ou Pinstitution (f héritier est nécessaire pour la vali« dité du testam ent, ceux qui ont droit de légitime
« seront institués héritiei’S, au moins en ce que le testa
it teur leur donnera, etc. »
A près cette ordonnance, les notaires des pays de droit
écrit Continuèrent à employer les formules auxquelles
ils s’attachoient toujours minutieusement. Jam ais, dans
un testament, ils ne manquoient à dire qu’ils faisoient
un testament n u n cu p a tif‘ à insérer une institution, parce
q u e , disoient-ils , elle est le fondem ent de tout testament
valable ; à y donner cinq sous à titre cCinstitution à
tous les prétendant d ro it, pour eviter la prétérition ; ils
en avoient tellement l’habitude qu’on les voyoit souvent
insérer toutes ces clauses q u i, alo rs, n’étoient plus que
de vaines form ules, dans les dispositions d’individus qui
ne devoient de légitime à personne ; souvent ils ajou
taient là clause c’odicillâire , et quoique la forme des
donations à cause do mort fût abrogée, ils ne disoient
pas moins que si l’acte ne valoit pas comme testament,
le testateur vouloit qu’il valût comme codicille, comme
donation à cauie de m ort, ou sous toute autre fo rm e
sous laquelle U pourroit être valable. T o u t cela dé
montre combien les notaires mettaient do soin à entourer
le testament de toutes les formules usitées; et combien
3
�( i8 )
il filloit se garder de reconnoître l’intention de faire un
testament nuncupatif, à une expression isolée, détachée
de toutes ces formules, produite par la routine, et em
ployée à contx-e sens par un notaire peu instruit, dans un
acte où elle étoit inutile et déplacée.
Les lois nouvelles apportèrent d’autres modifications à
cet état de choses, sans rien changer à la forme exté
rieure des actes de dernière volonté. L ’ordonnance de
1735 continua de la régler dans les pays de droit écrit,
mais le fond des dispositions cessa de pouvoir être le
même , puisqu’une loi qui exigeoit' dans le testament
la transmission de ïh é ré d ité, et du titre d'héritier, fut
remplacée par une autre dont le principal objet fut de la
défendre.
La loi du 7 mars 1793 avoit interdit toutes disposi
tions en ligne directe. Celle du 17 nivôse an 2 alla ’
plus loin ; et sans parler ici de son effet rétroactif, il
nous suffit de remarquer que la nullité prononcée
de toutes dispositions gratuites, continua de subsister
pour le temps à venir , sous la seule inculte laissée
par l'article 16 de disposer du dixième de son bien
en ligne directe et du sixième en ligne collatérale ,
au profit d’autres que des héritiers ; nous devons dire
aussi qu’après avoir, par son article 6 1 , renversé tout le
système de la transmission des biens par succession uu
donation, en abrogeant toutes lois, coutumes ou statuts,
elle régla, par ses articles 62 et suivans, le partage des
successions à ven ir, y appela elle-même ceux qui dé
voient les receuillir dans chaque cas ; ensorte qu’elle
opéra une saisine directe et immédiate en faveur des hé-
�C l9 )
ri tiers du sang. Il falloït bien, en effet, que b saigne légale
succédât immédiatement à cella qui résultait auparavant
de Vinstitution d'héritier.
La loi du 4 germinal an 8 ne changea rien à ces prin
cipes; seulement elle apporta plus de latitude à la faculté
de disposer : « Toutes libéralités, dit-elle, qui seront faites
« soit par actes entre-vifs, soit par actçs de dernière vo « lonté, dans les formes légales, seront valables lors« qu'elles n'excéderont pas le quart des biens du dis—
« posant, s’il laisse à son décès moins de quatre enfans.
/
« La moitié, s’il laisse. . . . soit des frères ou sœurs, soit
« des enfans ou petits-enfans des frères ou des sœurs. »
E n se fixant sur ces lois, sous l’empire desquelles a
été faite la disposition dont il s’agit, on ne peut se dissi
muler que non-seulement la transmission de Vhérédité,
du titre universel d’héritier n’étoit plus nécessaire, mais
qu’il n’étoit plus autorisé par la loi ; la saisine des hé
ritiers naturels résultait de la réserve faite à leur profit;
et quoiqu’il ait été reconnu en jurisprudence que les
dispositions universelles pouvoient être valables , sauf
réduction, il n’en est pas moins vrai qu’elles n’étaient
ni essentielles ni nécessaires à la validité d’un acte quel
conque; elles ne pouvoient l’être dans le testament,
surtout lorsqu’il existait des héritiers à réserve, puisqu’alors il eut été permis de dire qu’elles n’étaient point
valables, ce qui résultait assez des expressions de la loi:
seront valables lorsqu’elles n’excéderont p a s,* et qu’au
moins il est certain qu’elles n’étoient pas valables pour
la quotité réservée dont l’héritier du sang était saisi
3 *
�( 2° )
par la lo i, comme celui qui, de droit, héritoit du défunt.
A vec ces explications, nous éviterons les subtilités, les
arguties, et nous saisirons bien mieux quel doit êlre le
sens, reflet des deux mots ¿1 titre t£institution, ajoutés,
dans l’acte dont il s’a g it, à une disposition de quote
qui x-econnoissoit et i*espectoit le droit des héritiers
naturels.
Examinons-le dans toute la rigueur des principes du
droit écrit, comme si la disposition eût été faite sous
l’empii’e des anciennes lois ; nous verrons ensuite ce que
devient cette difficulté coordonnée avec les lois nouvelles.
On a très-mal interprété l’opinion de Fux’gole sur la
manièx'e dont on doit reconnoitre un testament d’avec
un codicille ; on a donné de cet avis une explication aussi
fausse respectivement aux principes que contraix-e à co
qu’a dit et voulu dire Furgole lui-m êm e. Pour s’en
convaincre, il suffit de se fixer sur le chapitre 20 des
instituts de codicillis, la loi 13 ff de jure codicillorian,
la glose sur ces deux lo is, les docteurs du droit et
F u rgo le lui-même. l'.à, nous verrons que tout ce qu’a
dit Furgole tient à la qualité des mots qui établissoient
dans le droit romain des différences essentielles pour
l’interprétation des actes.
Dans le d ro it, l’institution ne pouvoitêtre valable que
par testament, et n’étoit pas bonne dans le codicille.
Mais comme alors, par des fictions ou par l’emploi
d’une simple form ule, on faisoit valoir par une voit; une
disposition qui n’auroit pas pû valoir sous une autre
mode, les législateurs romains distinguèrent deux cas;
d’abord, celui où l’institution scroitfaite en termes directs}
�( 21 )
et accompagnée de caractères qui lui seroient propres,
et qui ne pourroient être appropriés à une autre espèce
d’acte; par exemple, lorsque le testateur auroit institué
un héritier en ces termes: Titius heres esto, et l’auroit
chargé de legs ou d’une substitution vulgaire ; en ce
cas, il fut reconnu que l’institution étant directe avec
charge de fidéicommis envers des tiers, elle ne pouvoit
être valable que dans un testament, et qu’alors, faute
d’avoir les solennités exigées pour un .testam ent, l’acte
étoit nécessairement nul.
Mais le deuxième cas admis par les romains étoit
bien différent ; imbus de cette pensée digne des légis
lateurs du m onde, qu’un acte doit toujours être validé
dans la forme où il peut valoir lorsque les dispo
sitions qu’il renferme ne sont pas absolument incon
ciliables avec cette forme , ils déclarèrent que lorsqu'un
acte qui pouvoit valoir comme codicille, renfermeroit
seulement une institution en termes ordinaires, verbis
com m unibus, et q u elle ne seroit accompagnée ni dé
substitution ni de legs ù la charge de l’institué, l’ins
titution pourroit valoir comme fidéicommis, et qu’alors
l’acte vaudroit comme codicille, et nonobstant le mot
institution qui seroit considéré comme inutile.
Voila cette distinction solide et non subtile que faisoient avec raison les législateurs romains; elle nous est
absolument nécessaire pour rassurer le cœur et reposer
1 esprit; car, sans cela , il nous seroit difficile de compi t.ndre comment un acte, d’ailleurs Valable et régulier
sous une form e, peut être déclaré nul pour un seul
�C 22 )
mot qui ne change rien à ses caractères ni au fond des
dispositions, tandis qu’il est bien plus juste, bien plus
naturel, si ce mot peut être considéré comme inutile,
et si la disposition est valable pour la chose qu’elle con
tient, de maintenir l’acte sous la forme où il peut être
b o n , sans s’arrêter au sens étroit de l’expression, par
suite de cette maxime utile per inutile non vitiatur.
Voyons donc la loi et les docteurs.
D ’abord la loi 13 if. de jure codicillorum ; elle s’ex
plique sans équivoque..
L e législateur se demande ce que l’on doit penser de
celui q u i, n’ayant pas fait de testament, a écrit dans son
codicille, je veux que Titius soit mon h éritier 5 et,
nonobstant cette expression ti'ès - positive, il dit qu’il
faut rechercher s’il a néanmoins eu pour objet de faire
passer la succession à T itius par voie de fidéicommis,
qui est bonne dans un codicille, ou s’il a eu la volonté
formelle de faire un testament; car, en ce dernier cas,
l’héritier ne pourra rien demander.
« Tractciri solet de eo , qui cùm tabulas testarnenti
« nonfecisset ,co d icillis scrip sit, Titiuni hœredem esse
« volo ,• sed mulliun interest, utnnnjideicom inissariam
a hœreditalcm à legitimo per hanc scripturam quant
« codicillorum instar habere v o lu it, reliquerit- an vero
a testamentumfacere se existim averit ; n am , hoc casu,
« n il à legitimo p eti poterit. ( in hoc proxim o casu. )
dit Bnrthole pour qu’il n’y ait pas d’incertitude.
A in si, quoique le testateur ait institué un héritier eu
termes exprès, il faut encore rechercher si la disposition
�( *3 )
peut valoir comme fidéicommis dont on charge l’héritier
ab intestat ; car il faut bien observer que cette loi est
dans le cas où il n’existe pas de testament, mais seule
ment un acte isolé, dont on recherche le caractère
pour savoir s’il est un simple codicille ou un véritable
testament ; et on n’a pas perdu de vue que ce cas est
précisément le nôtre.
Après avoir posé cette règ le, le législateur indique
à quels signes on reconnoîtra que l’acte est un testament
ou un simple codicille. Vous le reconnoîtrez, d it-il, par
l’ensemble de l’acte : si Titius a été chargé de quelques
legs , si on lui . a donné par l’acte un substitué dans
le cas où il ne pourroit pas être héritier, il n’est pas
douteux qu’on a voulu faire un testament et non un
codicille.
« V oluntatis autern quœstio ex ( eo ) scripto plerum« que,declarabitur; nam si fo rte ¿1 Titio legata reh q u it,
« substitutum adscripsit, liœres s i non extitisset, sine
«• dubio non cod icillo s, sed testam entum facere voluisse
« intelligetur. »
Godefroi expliquant, d’après Barthole, ces termes
qui sont d’ailleurs assez clairs, nous dit qu’on doit re
chercher par l’ensemble de l’acte si le testateur a voulu
faire une institution directe ou n o n , car il met comme
le législateur lui-même beaucoup de prix à savoir si
1 institution est faite en termes directs ou en termes
ordinaires; et c’est, suivant lui comme suivant eu x , de
cela seul que dépend la décision. E x presumptione colhgitur utrum testator voluerit instituera directo vel
non.
�( 24 )
La loi nous dit assez, d’ailleurs, par ses propres e x ])ressions ce qu’elle entend par l’institution en termes
directs qui ne peut être faite que par testament, et
celles en termes ordinaires qui ne peut valoir dans le
codicille.
A van t de faire ressortir l’application que cette loi reçoit
à notre espèce, voyons le chapitre 20 aux instituts de
co d icillis, il est plus formel encore, s’il est possible.
Après avoir dit qu’on peut faire un codicille sans faire
de testament, l’empereur ajoute qu’on ne peut ni donner
ni ôter directement l’hérédité par un codicille, car l'h éiédité donnée par cette voie se transmet par voie d e jid e icommis et voilà pourquoi on ne peut pas par le codi
cille imposer des conditions à Vhéritier qu’ on institue, n i
lu i substituer un autre directement. Term es précieux
qui ne nous laissent pas même à conclure, mais qui
nous disent ouvertement que l’institution faite-par co-*dicille n’est pas valable directement, mais qu’elle vaut
obliquement comme lideicommis, et que seulement elle
est nulle entièrement, lorsque les conditions qui y sont
ajoutées lui donnent irrévocablement le caractère d’ins
titution directe , et ne permettent plus de le faire Valoir
obliquement et comme fidéicommis.
« C odicillis autem hccreditas iieqite dari, h é que
a adim i potest f lie confundatur ju s testamentorum et
« codicillotum : et ideb nec exhœredatio scribi. D irecto
« autem hcereditas codicillis iiequè d a ri, lieqüe àdim i
« potest: nam, perfidéicommiSsum, hccréditas codicillis
« jure relinquitur. N ec conditiùntm hcèredi instituto
« codicillis
�(
25
)
« codicillis adjicere, neque substituere directo ( quis )
k potest. »
Cela est-il clair ? Il n’y a pas de doute, ce semble.
A u reste, la glose répète la loi presque mot à mot et avee
des explications plus étendues ; elle ne laisse pas plus que
la loi la moindre obscurité sur le sens qu’on doit donner
à ces expressions d’ailleurs si claires, si form elles, si
impérieuses ; quoique l’institution ne vaille pas directe
ment dans le codicille, dit-elle,' elle vaut néanmoins par
droit de fidéicommis ; sed lie et in codicillis hœreditas
directo dari non possit, in illis tamen Jldeicom m issis
ju re relinqui potest.
Il
ne faut donc plus dire que lorsqu’on aura institué un
héritier dansun acte qualifié codicille, ou môme non quali
fié , il faudra y reconnoître un testament, et déclarer l’acte
et les dispositions nulles, si l’acte n’est pas revetu des for
malités du testament. Il faut d ire, au contraire, il faut
avouer que la disposition qui ne pourra pas valoir
comme institution dans un acte qui n’a reçu que la
forme du codicille, vaudra néanmoins par droit de iidéicommis, ù moins que le testateur n’ait ajouté h l’ins
titution des dispositions qui obligent à la prendre di
rectement et s’opposent à ce qu’on puisse la recevoir
par voie de fidéicommis; et cela est conforme à cette
maxime générale de tous les temps, que toutes les fois
qu un acte peut valoir tel qu’il est, sous une forme quel
conqu e, on doit plutôt le faire valoir que l'anéantir,
et que (com m e dit le Code civ il, art. n 5y ), on doit
plutôt lui donner le sens dans lequel il peut produire
•effet, que celui dans lequel il n’en produiront aucun,
4
�il6)
A v e c cette connoissance précise et exacte de la lo i,
on ne se méprendra pas sur l’avis de Furgole. Ne sé
parons pas ce qu’il a dit au chapitre 2 et au chapitre 12.
A u chapitre 2, il établit quatre règles; partout il pose
en principe que si l’acte porte institution d'héritier, il doit
être considéré comme testament ; mais il apporte à ce
principe des explications précieuses.
D ’abord, en disant, n°. 6, que dans le doute il f a u t
entendre et expliquer l'acte dans le sens capable de
le f a ir e valoir.
E n second lieu , en ajoutant que l’institution dont il
parle est celle qui ne peut être apposée qu’au testa
m ent, c’est-à-dire, cette institution directe et universelle
sans laquelle un testament ne peut pas valoir, et qui
elle-même ne peut pas valoir ailleurs: aussi ne séparet-il jamais ces expressions institution et exhérédation,
qui conviennent si bien au sens de la loi ; hœreditas neque
dari neque adim i potest, et qui signifient seulement en
ce cas une disposition qui nomme un héritier direct ou
qui le deshérite directement. A u ssi, après avoir dit sur
chaque cas comment l’acte pourroit être considéré comme
codicille, il ajoute : « Mais s’il y a voit des institutions,
« des substitutions directes, ou une exhérédation , il
« faudroit le considérer comme un testam ent, parce
« que tout cela ne peut exister au codicille. »
Furgole est donc fort clair; il ne s’arrête pas au mot
institution, mais à la chose m êm e, aux caractères do
l’institution, et si on en doute, qu’on le lise au nombre
10 , chap. 2 , section 7.
Il pose le cas où, par des tonnes qui paroissent presqtio
�( 27 )
directs, le testateur aura dit : J e veux que T itius soit
mon héritier (ce sont ceux de la loi m êm e); et il dit
que s’ il n’y a pas à’autre circonstance qu i puisse déterminer au contraire, il faudra regarder la disposition
comme un codicille, et la fa ir e valoir jure fid eicom m issi j il ajoute qu’en ce cas l’institution se trouvant
faite verbis com m unibus, peut être tournée dans le sens
d’un fidéicommis ; il cite ensuite les circonstances qui
peuvent déterminer au contraire, et indique l’institution
en termes directs, la nomination d’un substitué vulgaire,
la charge de legs qui ne peuvent subsister qu’au testa
ment ; il ne fait que traduire la loi : il y ajoute cependant,
car il suppose pour cela que l’acte est qualifié codicille,
ce que la loi ne dit pas ; mais ici nous verrons que l’acte
annonce suffisamment l’intention de faire un simple codi
cille ou donation à cause de m ort, et non un véritable
testament.
T o u t ce qu’a dit Furgole au chapitre 2 , est encore
plus clairement établi au chapitre 12 où il dit positive
m en t, n°. 35 , qu’en parlant d’institution, il n’a entendu
parler que de ces institutions universelles et des exhéré
dations qui ne peuvent pas convenir au codicille, et où
il f i n i t par dire au n°. 37, il est remarquable qu’ il fa u t
toujours, autaut que les circonstances le com portent,
déterminer la n atuie de l’acte dans le sens q u i peut le
faire valoir sans donner atteinte au x règles. O r , il
peut valoir sans porter atteinte aux règles, lorsque
1 institution n’étant faite qu’en termes ordinaires, p eu t,
suivant son expression, être tournée en fid éico m m is,
cest-à-dire, lorsquellc n’a pas les caractères d’institution
4 *
�( 28 )
•
universelle, avec substitution vulgaire, charge de legs, etc.
C ’est pnr suite decesprincipes certains, que M . Grenier,
tom. Ier. , page 6 1 , nous dit que si on employoit dans un
testament fait en payscoutum ier,lc mot d’institution d’hé
ritier , cette institution n étoit considérée que comme
un legs, ........... parce que ces testamens n’étoient que
de véritables codicilles.
A ppliquant ces principes à l’acte, nous voyon s, i°. que
le sieur de Baille a déclaré ne vouloir faire qu’une simple
donation à cause de m ort; 2°. qu’il n’a pas fait d’institution
directe ni universelle et n’a pas nommé d’héritier ; 30. qu’il
n’a pas employé les formalités nécessaires au testament;
trois circonstances qui démontrent une volonté contraire
à celle de faire un testament, et que Furgole a suffisam
ment déclarées etre suffisantes pour établir l’existence
d’un codicille et non d’un testament. E t certes, si l’ins
titution d’héritier, même universelle, étoit valable au co*
dicille lorsqu'elle étoit faite verbis com m im ibus, à plus
forte raison un simple legs de quote, qui réserve le droit
de l’héritier , et qui n’est lui-même qu’une charge im
posée à l’héritier, ne p eu t-il donner à un codicille le
caractère du testament.
E n vain diroit-on que les mots donation à cause de
mort sont insignifians ; le notaire Rocher n’est pas le
seul q u i, depuis l’ordonnance de 173 5 , ait confondu la
donation à cause de mort et le codicille; presque tous
le faisoient ainsi : on le voit dans la cause m êm e, puis
que le notaire P o u zo l, recevant en 1811 le testament
du sieur de B aille, ajouloit que s’il ne vnloit pas comme
les*ninent, il vaudroit comme codicille ou donation à
�( *9 )
cause de m o r t, et en i8 r2 , M . Grenier a d it, au
même endi-oit: « L e véritable caractère du testament,
« étoit l’institution d’héritier , q u i, de sa nature, étoit
k universelle , et par codicille comme par donation
« à cause de m ort, on entendoit tous actes de dernière
« volonté, par lesquels il n’y avoit pas d’héritiers do
« nommés, mais seulement des legs lim ités a u x objets
« dont on disposoit. »
A u reste, remarquons bien que la loi et lés auteurs,
en examinant si l'institution est directe ou oblique, ne
s’occuppent que du seul cas où il y a eu un héritier
nommé ; qu'ils ne reconnoissent de testament que là où
on a donné fus et nomen hœ redis, et q ue, dons aucun
cas, cette distinction ne peut être nécessaire dans une
disposition qui ne contient que de simples legs, et où
le testateur n’a transmis ni voulu transmettre l’hérédité.
V e u t-o n se faire une idée nette sur l’acte de l’an 11 ?
Q u’on se place dans la position o ù , tel qu’il est, et sans
le changement d’un seul m ot, il eût été fait en présence
de sept témoins, et où la succession se fût ouverte sous
l'empire des anciennes lois. E n suivant le système des in
timés , les légataires de moitié eussent pu demander la
totalité de la succession, par cela seul qu’ils avoient reçu
un legs de m oitié, à titre dyinstitution ; alors ils eussent
dit, à bien plus forte raison qu’on ne fait aujourd’hui : ces
deux mots dénotent un testament et non un simple codi
cille ; cela seul suffit pour que le testateur n’ait pas pu
mourir partlrn intestatus ,* le titre d’héritier nous est donc
dévolu, et nous attribue la succession entière. Qu’auroit-on
dit d’une semblable prétention ? auroit-on, pour la favo-
�C 30 )
riser , forcé violemment le sens d’une expression d’ail
leurs fort indifférente ? auroit-on cherché une institu
tion d’héritier là où il n’y avoit qu’un simple legs ?
enfin, auroit-on mis son esprit à la torture pour arra
cher aux héritiers naturels une moitié de la succession
coutre le vœu et l’intention du donateur ? ou b ien , dé
daignant une expression qui n’a pas de sens et qui ne
pouvoit pas avoir d’objet dans l’acte où elle se trouve,
auroit-on jugé de l’acte par son caractère ? de l’étendue
de la disposition par l’expression de la volonté? et au
roit-on restreint le légataire à l’objet de son legs ? N ’en
doutons pas ; de quelque hardiesse d’esprit qu’on pût
être doué, le magistrat toujours sage se fût gardé de prêter
l'oreille à une argutie , pour attribuer aux Mijolas toute
une succession qui ne leur étoit ni dévolue ni transmise.
Les expressions de l’acte, l’ensemble des dispositions, tout
l’eût convaincu que les volontés du testateur ne devoient
pas être étendues ; il eût décidé que l’acte devoit être ren
fermé dans son objet ; que rien n’obligeant à le considérer
comme testament, il ialloit y voir un simple codicille,
un legs de quotité qui pouvoit exister sans un testa
ment solennel ; aucun doute ne se fût élevé dans son
esprit pour repousser une prétention arbitraire, injuste ;
et en ordonnant la délivrance du legs, il eût déféré
aux héritiers du sang le titre d’héritier et le Bénéfice
de l’hérédité.
Mais si tout cela eût été inévitable, comme on ne
peut en douter, comment cet acte au ro it-il d’autres
caractères, les termes inutiles une plus grande force,
h disposition moins d’eilicacité, la volonté moins d’évi-
�(30
dence? pourquoi, enfin, verroit-on l’actc avec d’autres
yeux , parce qu’il s’agit de donner aux légataires ce
qui leur est légué, d’exécuter littéralement et dans leur
vrai sens les volontés du donateur, du testateur si l’on
veu t? pourquoi une expression inutile, ridicule, ne
craignons pas de le d ire, et qui n’auroit servi à rien
pour faire considérer l’acte comme testament quand il
devoit être valable, prendroit-elle un sens et feroit-elle
un testament d’un codicille lorsqu’il faudroit l’annuler?
Cependant la circonstance qu’il manque un témoin pour
en faire un testament est une preuve de plus que le
sieur de Baille n’a voulu faire qu’un simple codicille,
et d’ailleurs, lorsqu’un acte, nul sous une form e, peut
valoir sous un autre, on doit l’exécuter dans le sens où
il est valable ; c’est alors que le magistrat toujours digne
de la justice, voit un acte dans son ensemble, le con
sidère dans son objet, respecte l’intention de celui qui
l’a consenti, et que bien loin de détruire l’intention, la
volonté exprimée, par des termes inutiles et qui contrarient
le surplus de l’acte, il les regarde d’un œil de mépris et leur
applique noblement cette maxime du d r o it, tirée des
premiers principes: V itia n tu r et non vitiant.
" A in s i, et quand bien même nous aurions à. appli
quer le droit romain dans toute sa pureté, il n’y
auroit de doute ni sur la nature de l’acte, ni sur l’in
tention de son auteur, ni sur la nécessité d’exécuter sa
•volonté telle qu’elle est écrite.
Mais est-ce là la position où se trouvent les appelans?
s a g it-il bien ici de rechercher quel sens et quel effet
pouvoient avoir , sous le droit romain, des formules qui
�Sv
f so
tenoient aux principes d’alors ? N on, certes. L ’institution
d’héritier fût-elle positive dans l’acte de l’an i l , elle ne
pourroit ni le faire valoir ni l’annuler; à plus forte rai
son , un seul m ot, sans aucune signification réelle, ne peut
y être d’aucun effet.
Si l’ordonnance de 1735 a dû continuer d’être exé
cutée depuis les lois nouvelles pour les formalités exté
rieures des testamens, il ne faut pas confondre ces formes
avec l’institution qui tenoii moins à la forme qu'a la
substance de l’acte.
Lorsque le testament étoit considéré comme une loi ;
que cette loi devoit embrasser toute la succession, qu’en
fin la loi de l’état faisoit de l’institution (Vhéritier une
partie substantielle du testam ent, on conçoit qu’il pouvoit s’élever des difficultés sur la validité des actes, sui
vant qu’o n pou voit les considérer comme des testamens
ou des codicilles.
Mais lorsque la loi défendit les institutions, que la
faculté de disposer fut réduite à de simples le g s , con
çoit-on la possibilité de tirer le moindre a v a n ta g e , pour
ou contre , du m ot in stitu tio n , ou même d’une ins
titution réelle placée dans un acte de dernière volonté?
lies magistrats n’eurent plus alors qu’une chose à con
sidérer, savoir, si la* personne étoit prohibée, ou si la
disposition excéüoit les bornes. Sous la loi du 17 ni
vôse elle-m êm e, et avant celle du 4 germinal an 8 ,
un acte qualifié testament et entouré de toutes les for
malités du testament solennel, n’en eût pas été moins
valable s’il n’eut contenu qu’un simple legs du dixième
pu du sixièm e, .au profit d’un autre que l'héritier du
sang ;
�( 33 )
sang ; et l’institution d’un dixième ou du sixième eût été
très-b on n e par un simple codicille fait devant cinq
témoins, quoique les dispositions universelles fussent dé
fendues ; le mot ne fut plus rien dès que la nouvelle
loi eut abrogé toutes lois ou coutumes relatives a la
transmission des biens, qu’elle eut prononce la saisine
des héritiers du sang, et réduit à de simples legs la fa
culté de disposer.
Il
en fut de même sous la loi de germinal an 8 ; elle
conserve encore la saisine des héritiers, et dit que les
libéralités vaudront, lorsqu'elles riexcéderont pas la
quotité qui leur est réservée; certes, en réservant ainsi
aux successibles une quotité déterminée de la succession ,
elle leur donne aussi le titre d’héritiers; les dispositions
permises étoient en ce cas de simples legs des choses
dont on disposoit.
A la vérité, et on n’entend pas le dissimuler ici, la loi
jDermettant en certains cas d’épuiser la totalité des biens ,
il a été reconnu par la jurisprudence, que les dispo
sitions universelles furent valables depuis sa publication,
et qu’elles étoient seulement sujettes à réduction, jusqu’à
concurrence de la portion réservée; mais quest-ce que
cela peut avoir de commun avec l’institution d’héritier
qu’exigeoient les anciennes lois pour la validité du tes
tament? Si la loi du 4 germinal permettoit d’instituer,
elle n’y obligeoit pas; l’institution ne vicioit pas la dis
position , mais la disposition valoit sans l’institution ; ce
n etoit donc plus qu’un vain m ot, qu’une expression
inutile, qui ne pouvoit ni soutenir ni vicier le testament;
Ue n’y produisoit pas plus d’eifet qu’autrefois dans les
5
�> ( 3 4 ),
pays de coutum es, et il est vrai de dire q u e , par l’effet
de ces lo is, les testamens ne furent plus que de véri
tables codicilles.
E t si nous plaçons sous les lois nouvelles l’argument
que nous avons fait plus haut ; si nous supposons que
l’acte eût été fait en présence de sept témoins, et qu’il
eût contenu une institution directe de m oitié, et qu’il
n’y eût pas eu d’héritier à réserve, concevrons-nous
que les légataires eussent eu le ridicule de vouloir tirer
des mots à titre d'institution un droit à l’autre moitié,
et établir , pour y arriver , une différence entre les
effets du testament et du codicille ? on eût ri de pitié,
comme du soin cju’auroit pris un notaire de dire, après
les nouvelles lois, et même depuis le Code , qu’une insti
tution est le fondem ent de tout véritable testament, de
léguer cinq sous à tous prétendant d ro it, d'y ajouter
la clause codicillaire et autres choses semblables, et c’est,
en effet, ce qui est arrivé souvent par la force de lliabitude, et à quoi n’a pas manqué le notaire P ouzol,
dans le testament du sieur de B aille, fait seulement de
puis le Code ; acte dans lequel il se croyoit sans doute,
au temps où on faisoit les testamens par simples pax-oles,
puisqu’il prie les témoins d'en être mémoratifs j acte
cependant qui ne seroit pas moins valable, malgré ce
ridicule échaffaudage de formules inutiles; car-ce sont
ces formules et non pas l’acte qui demeurent nulles et
sans effet.
Il
en est de même dans notre espèce. Si le mot ins
titution ne peut pas donner une plus grande valeur à
l'acte testamentaire depuis l’abrogation des dispositions
�( 35 )
.
universelles, pourquoi su présence les vicicroit-elle ?
une semblable proposition, présentée d’une manière géné
rale , seroit-elle autre chose qu’une absurdité ? oseroit-on
la mettre au jour sous le Code ? « ü n a cru , dit en« core l’auteur du 2e. traité des donations, tome i er,
« page 397, devoir toujours permettre la disposition sous
« le nom d’institution d’héritier, par égard pour les an« ciennes habitudes ; mais il est indifférent qu’on qualifie
« celui à qui on fait des dispositions, d’héritier ou de léga« taire. É n matière de testament, les mots donner, insti« tuer h éritier, léguer, deviennent par eux-mêmes sans
« conséquence ; l’objet essentiel est que la disposition
« soit claire et précise ; tel est le résultat de l’art. 967, etc. »
O r , si cela est vrai sous le Code qui a fort étendu la
faculté de disposer, et qui avoit rendu au sieur de Baille
la sienne toute entière; la vérité n’étoit-elle pas plus
certaine encore sous l’empire des lois précédentes qui ne
donnoient qu’une faculté extrêmement lim itée, et ne
reconnoîssoient d’autres héritiers que ceux qu’elles mêmes prenoient soin d’appeler ?
N e recherchons donc pas si le sieur de Baille a voulu
faire autre chose que ce qu’il a fait ; voyons sa disposi»
tion telle qu’elle est, et demeurons convaincus que res
pectant la saisine des héritiers du sang, c’est avec inten
tion qu’il 11e s’est occupé ni d’eux ni de la moitié de ses
biens qui leur étoit réservée ; que sachant bien qu’il ne
pouvoit disposer que de moitié, c’est avec réflexion qu’il
s est borné t\ léguer un quart aux Chambouvet et un
quart aux Mijolas ; qu’il a voulu le faire par simple
donation ¿1 cause de mort ; que le notaire a banni de
�(3
«)
son acte les termes de testament et de testateur que
tous les notaires du droit écrit eussent plutôt répété dix
fois que de les oublier une seule quand ils faisoient un
testament; et disons enfin qup réduite ainsi à de simples
legs de quotité, lorsque la qualité d’héritier étoit attri
buée par la loi à des tiers, lorsque l’institution çouvoit
valoir sans testament et que le testament valoit sans
institution, la disposition a pu valoir sous la forme du
codicille, et qu’elle doit être maintenue puisqu’elle est
revêtue de cette forme.
Il
ne nous reste qu’à repousser une objection des
intimés et du jugement dont est appel : elle n’est pas
redoutable.
Les demandeurs, dit le jugem ent, ont eu x-m êm es
considéré l’acte comme un testam ent, puisqu'ils agissent en qualité cïhéritiers • et pour que l’argument soit
plus v if , les intimés ajoutent que les Mijolas l’ont
fait ainsi par une spéculation d’intérêt, car la qualité
d’hériticr les saisissoit de plein droit, tandis que celle
de légataire les eût assujéti. à demander la délivrance
et leur eût fait perdi*c les fruits de plusieurs années,
pendant lesquelles'ils avoient suspendu leur action. Cette
objection qui tend à favoriser le système gén éral, qu’il
y a une différence entre les effets de l’institution et celle de
simple leg s, n’a pas même le mérite de l’exactitude.
Les premiers juges, non plus que les intimés, n’ont
•pas fait attention que la succession étoit ouverte sous le
Code ; q u e , par conséquent, la qualité d’héritier ou de
légataire étoit absolument indifférente, comme le démon
trent les'articles 967 et 1002; que le testament étoit
�( 37 )
fait sous les lois du 17 nivôse an 2 et 4 germinal an 8 ;
qu’ainsi la disposition seule étoit à considérer, les termes
ou la qualification n’y étant d’aucune conséquence ; que
par suite de cela, il étoit fort indifférent qu’on eût donné
par le testament où qu’on eût pris par la demande la
qualité d’héritier. O11 n’a pas vu que par les résultats de
l’article 1011 , les M ijolas, légataires où héritiers, peu
importe , étoient obligés de demander la délivrance
aux héritiers du sang, puisque le legs n’étoit pas uni
versel, et qu’ainsi ils n’avoient pas le moindre intérêt
à prendre la qualité d'héritiers, puisqu’il n’en résultoit
pour eux aucun bénéfice.
D ’ailleurs, et quelqu’intérêt qu’on pût supposer aux
appélans à prendre une qualité plutôt qu’une au tre,
cela changeoit - il les caractères et la nature de l’acte ?
eussent-ils trouvé dans cette qualité le m oyen de le
rendi’e valable comme testament, s’il ne l’étoit pas;
d’obtenir toute la succession quand on ne leur léguoit
que moitié ? e t , par la même raison, peut-on y puiser
contr’eux un m oyen d’annuler l’acte , s’il est valable
sous une forme quelconque ? O n a droit de s’étonner
lorsqu’on voit détruire des actes avec de semblables
argumens.
.
Voilà cependant tout ce qu’on a pu imaginer pour
échapper aux dispositions du sieur de Baille. O n concevroit plus facilement cette résistance, si des héritiers
directs, investis de la succession de leur auteur, se trouvoient en lutte avec des étrangers, et défendoient contre
eux une portion de leur patrimoine ; mais le sieur de
Baille au momenl de son décès, 11e devoit rien A ses
�collatéraux, cependant il leur a réservé les trois quarts
ou au moins les deux tiers de sa succession ; c’est sans
doute par reconnoissance qu’on fait la guerre à ses vo
lontés, à la réalité desquelles, cependant, l’esprit et le
cœur sont obligés de croire; aussi, a-t-on essayé de ré
pandre mystérieusement quelques soupçons, et refusé
de reconnoître les Mijolas pour parens du sieur de Baille,
quoique leur parenté soit assez proche pour que les
intimés ne pussent pas l’ignorer. Les appelans ne s'oc
cuperont pas de Semblables moyens ; indépendamment
de ce que toutes les circonstances les repoussent, ils savent
combien peu ils doivent en redouter l’eifet devant des'
magistrats qui commandent le l'espect par leur sagesse
profonde autant que par la dignité dont ils sont l'evêtus.
• C ’est sans doute avoir beaucoup trop disserté sur une
question, qu’on persiste à trouver simple et dégagée de
difficultés; mais, encore une fois, on a dû compte de ses
moyens, dès qu’un arrêt de partage a démontré l’existence
du doute. Il faut, en de semblables cas plus encore qu’en
tout autre, se défier de ses propres lum ières, appuyer
les propositions sur les moyens de la loi, ne pas crain
dre de multiplier les preuves et les soumettre avec con
fiance à la sagesse des ministres de la justice ; c’est ce
qu’ont dû faire les appelans; ils ont rempli cette tache.
Plein de respect pour les magistrats auxquels la décision
de leurs intérêts est confiée, ils livrent tous les moyens de
la cause à leur méditation ; ils ne feront aucune imputation
ni publique ni secrète à leurs adversaires, mais ils ose
ront dire qu’ils ne méritent ni ne craignent aucun re
proche ; que sous leur vêtement com m un, ils portent
�A * '*
C 39 )
une âme honnête et une conscience droite ; ils sau
ront garder ce qu’ils doivent à la justice et aux con
venances, et attendre, avec autant de respect que de
confiance, la décision de la Cour.
M e. d e V I S S A C , avocat.
M e. B R E S C H A R D , avoué-licencié.
THIBAUD , Imprimeur du Roi, de la Cour royale et libraire, à Riom.
�
Dublin Core
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
[Factum. Mijolas, Claude. 1820?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Vissac
Breschard
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour Claude et Matthieu Mijolas frères, appelans de jugement rendu par le tribunal civil d'Issengeaux, le 20 avril 1819 ; contre dame Marie-Françoise-Mélanie de Baille et sieur Hyppolite de Lagrevol, procureur du Roi à Issengeaux, son mari, intimés ; et contre Jean et Jean-Pierre Chambouvet, et Jean Romeyer, en qualité de tuteur de ses enfans mineurs d'avec Jeanne Chambouvet, aussi intimés.
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Thibaud (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1820
An 11-1820
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
39 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2511
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2512
BCU_Factums_G2513
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53497/BCU_Factums_G2511.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Saint-Hostien (43194)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53498/BCU_Factums_G2512.pdf
c8a7e80ddd543ee154d9908c01d523f0
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Text
CONSULTATIONS.
L
C O N S E IL S O U S S IG N É , qui a pris lecture,
1 ° Du mémoire à consulter ci-joint;
2° De la consultation délibérée par l ’ un des consultans, le 16 mars 1 8 1 9 ;
E n adoptant entièrement ‘ les principes contenus
dans la consultation, et l ’avis qui en est la conséquence
nécessaire, se contentera, par suite, de répondre à
e
l ’objection contenue dans le mémoire.
Les adversaires, forcés de se rendre aux principes
contenus dans la consultation , ont prétendu que ,
v rais d’après la législation existant au moment de la
révolution, ils avaient éprouvé des changemens consi
dérables par l'effet des lois des 17 nivôse an 2 , et
4 germinal an 8 , q u i, suivant eux, ont défendu la
transmission de l ’ hérédité et du titre d ’héritier; d’où
il suivrait qu e, depuis la promulgation de ces lois,
non-seulement l ’institution d ’ héritier ne fut plus né
cessaire pour la validité du testament, mais encore
q u 'elle n’y eut plus aucun effet, puisque ces lois dé
truisaient la saisine que la loi romaine attribuait à
l ' héritier institué , et décidèrent que cette saisine
appartiendrait, dans tous les cas, aux héritiers,du
sang; donc, ajoutent-ils, depuis cette époque, il n’y
eut plus de différence entre les pays de droit écrit et
les pays coutumiers; et, dans les uns comme dans les
autres, les testamens ne furent plus que de véritables
codicilles; donc l 'institution d’ héritier, eut-elle été
�■
(
2
)
formellement exprimée dans l ’acte de dernière volonté
du sieur Baille, n’y aurait produit aucun çfïet, et eût
été, dès-lors, insuffisante pour assurer à cet acte le
caractère de testament à plus forte raison ne doit-on
y avoir aucun égard, lorsqu’on ne veut s’ en servir que
comme d’un codicille,
A cette objection, qui n’est q u e . spécieuse, on peut
répondre que dès qu’il est avoué, et ce point est
d ’ailleurs incontestable, que les lois intermédiaires
n ’ont rien changé à la forme extérieure des actes de
dernière volonté, ces actes., jusqu’à la promulgation
du G ode, n’ont pu valoir que s u i v a n t la forme pres
crite , pour chacun d’eux , par les anciennes ordon
nances, et que par conséquent toutes les fois qu’ un
testateur a annoncé l ’intention de faire un testatement,
il a dù suivre les formes prescrites pour les testamene
comme il a dù suffire que les règles des codicilles
eussent été suivies , s’il avait annoncé l ’intention de
fa ir e s i m p l e m e n t un codicille. Dans l'espèce, la ques-;
tion est donc uniquement une question d ’inlcntion ;
e t , dès-lors, reviennent tous les argumens qui se
trouvent dans la consultation énoncée plus haut , et
notamment celui qui est tiré de ces mots : A titre
d'institution. C a r , comme il était de principe, en
droit romain, que l ’institution directe d ’héritier ne
pouvait avoir lieu par codicille, on conclut avec raison
que, par cela seul que le testateur s’est servi du mot
institution, il a entendu luire un testament, et non
un simple codicille,
13 uii autre côté, lu ita turc même de ces dispositions}
�(
3
■ '■ Â V
)
ainsi qu’ il a etc dit clans la même consultation, prouve
évidemment que le testateur a entendu faire une véri
table institution d’ héritier, puisqu’il a donné a titre
universel tout ce dont la loi lui permettait de disposer
à cette époque. Peu importe que cette institution n’ait
pu comprendre la totalité des biens , puisqu’il est
certain que dans l ’ancien droit l ’institution n’était pas
moins regardée comme telle, lors même qu’elle avait
lieu en faveur d ’autres personnes que les enfans du
testateur, quoique, dans ce cas, l ’institution ne put
certainement comprendre la totalité de la succession ,
dont une partie était réservée aux enfans, à titre de
légitime.
i
Quant à la loi i 3 , Dig- D e ju i'e coclicill. , opjiosée
par les advex-saires , elle rentre absolument dans le
système qui vient d’être présenté, puisqu’elle décide
formellement que la question dont il s’a g it est une
pure question d!inteution, et que cette intention doit
se juger par les termes du testament. On y voit préci
sément que, si le testateur exprime la volonté que les
legs fussent acquittés par l ’institué, s’il en a fait une
. charge de l ’institution, il y a testament et non pas
codicille. Or, c’est précisément ce qui a lieu dans l ’acte
qui fuit l’objet de la contestation actuelle, puisque,
ta portion indisponible ne pouvant jamais être en
tamée, il cn résultait, pour conséquence nécessaire,
que les legs particuliers étaient une charge de l ’insti
tution.
Délibéré à Paris, ce 3 o avril 1 82 1 .
D E L V IN C O U R T .
�(4 )
L E CO N SEIL SO U SSIG N É, qui a pris lecture de
la consultation ci-dessus et de celle qui a précédé, par
tage entièrement l’avis de son confrère et collègue, et
par les mêmes motifs.
Il
croit devoir ajouter seulement qu ’indépendam
ment de ce que la volonté de faire une institution ,
caractère essentiel des testamens, est exprimée littérament, et de ce que l’intention résulte de ce que les
legs particuliers doivent être acquittés par l ’institué,
comme charge de son institution, l ’argument tiré des
lois des 17 nivôse an 2 et 4 g e r m i n a l an 8 , par les
quelles on prétend que la différence entre les testamens
et les codicilles aurait été abolie, est contraire à la
législation positive, suivant la doctrine de M. Merlin,
R éperto ire, v° Codicille, § 3 , doctrine avouée par
tous les auteurs. C ’est l ’article 7 de la loi du 3 o ¡ven
tôse an 1 2 , qui a la prem ière et seule aboli les dis
positions des lois romaines, à l ’aide desquelles on
pouvait distinguer les codicilles des testamens, et les
différences essentielles de ces deux sortes d’actes.
Ainsi le fait et le droit se réunissent pour déclarer
n u l comme testament, l’acte dont il s’agit, et em
pêcher de le faire valoir comme codicille.
,
Paris le 3 o avril 18 2 1.
PA RD ESSU S.
R I O M , I M P R I M E R I E DE SALLES, PRES LE P ALAIS D E J U S T I C E .
�
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Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
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<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mijolas, Claude. 1821]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delvincourt
Pardessus
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations.
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1821
An 11-1821
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
4 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2512
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
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A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2511
BCU_Factums_G2513
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
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Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53499/BCU_Factums_G2513.pdf
19ce6dad3781c767a5c19631a5f29bd2
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PRECIS
EN RÉPONSE,
P O U R M a r ie - F r a n ç o is e - M é la n ie de B A I L L E ,
et Hippolyte de L A G R E V O L , Procureur du Roi
à Yssingeaux, son m ari, intimés/
COUR R O Y A LE
DE RIOM.
2 8 CHAMBRE.
ûjyù\'huAtyff
aKtaTu qn\i
^ ^XuuuLh
C O N T R E C l a u d e et M a t h i e u M I J O L L A S , fr è r e s, / - f “ * *
appelans ;
/
7
p-W A.
EN PRÉSENCE
D eJ
,
n
ea
J e a n - P i e r r e C H A M B O U V E T , et J e a n
R O M E Y E R , tuteur de ses en fans mineurs} d'avec
Jeanne Cham bouvet, aussi intimés.
Les lois romaines avaient prévu le cas où l ’on serait
embarrassé de décider si une disposition de dernière
volonté devait être considérée comme testament ou
comme codicille.
Cette distinction était de la plus
�( > )
grande importance; car il était de principe que lorsque
le testateur avait annoncé l ’intention de faire un tes
t a m e n t , l ’acte devait être parfait comme testament,
et q u e , quoiqu’il eût des solennités suffisantes pour
valoir comme codicille, il demeurait néanmoins sans
effet, s’il n ’était accompagné de toutes celles requises
au testament, à moins q u ’il ne contint la clause codicillaire (i). S'il arrivait, d ’ailleurs, q u ’une personne
laissât à sa mort deux dispositions, il était bien im
portant de décider si c’étaient deux testamens j car alors
le premi er était révoqué de plein droit, même sans
clause révocatoire c o n t e n u e dans le second; si, au
g.
contraire, ces dispositions étaient des codicilles, ou s’il
-'X'
*c
y avait un testament et un codicille, le dernier acte
ne révoquait pas le premier.
On trouve dans ces lois non-seulement des règles
générales pour discerner ces sortes d ’actes, mais elles
f ournissent encore des solutions p our des espèces par
ticulières. Ce sera à l’aide de ces principes, que nous
chercherons à déterminer la nature et les caractères
de l’acte qui sert de titre aux appclans. Nous verrons
ensuite quelles sont les modifications q u ’y ont ap
portées les lois qui ont précédé le Code civil 5 enfin
nous examinerons si cet acte pourrait cire validé ?
même en le considérant comme codicille. Telle est la
lâche que nous avons à remplir.
(1) L. 29, nu I)., f/ih' tcsl.fac. poss. ; \ \ , de vuljj, et ¡ni/iit• subit. /
L. i T* , de jure codicil.; et 8, au C. de codidllii.
�( 3 )
FAIT S.
Antoine-Mar in Je Baille avait passé une grande
partie de sa vie dans la compagnie de Jean-Anloine
de Baillej sieur des Crozes, son frère : ils avaient vécu
dans la meilleure union. Le dernier, héritier, par
testament, d ’Antoine de Baille, seigneur de Malmont,
son oncle, avait laissé jouir Antoine-Marin de celte
succession.
Il mourut en l ’an 8 , laissant une fille
Unique, à peine âgée de deux mois. Cette mort fut
pour Antoine - Marin le commencement de grands
malheurs. Arrivé à l àge de soixante-seize ans , des
personnes trop avides captivèrent sa c on f ia nc e , a u x dé
pens de sa nièce q u ’il chérissait, mais qui était trop
faible pour pouvoir rien opposer aux pièges qui lui
étaient dressés. Il fut victime de cette facilité déplo
rable; il périt, en i 8 o 5 , d ’une manière tragique, âgé
de près de quatre-vingt-deux ans.
L a providence veillait aux intérêts de Mélanie de
Baille, alors âgée de cinq ans. Les dispositions que
font valoir aujourd hui les appelans leur parurent sans
doute irrégulières, puisqu’ils ne se présentèrent point
au partage judiciaire de la succession, qui eut lieu
entre Mélanie de Baille et les frères et sœur Cliaml)ouvel. On doit croire que c’est par erreur q u ’ils
disentavoir ignoré les dispositions dusieur d c B a il le ( i ) .
(*) Pages 4 et 5 du Mémoire <lcs appelans.
�On leur prouverait que l ’un d ’eux, Claude Mijollas,
était présent a la confection du testament, reçu Pouzol,
notaire.
Ils gardèrent le silence pendant plusieurs années.
Ce ne fut que le 18 décembre 1 8 1 2 , plus de sept
ans après le dèces, q u ’ils firent connaître, pour la
première fois, leur droit à la succession, en décla
ra n t, par leur exploit de demande, q u ’ils étaient co
héritiers de f e u Antoine de Iia ille -M a n n , suivant son
testament, reçu Rocher, notaire p u b l i c l e 17 frim aire
an 11 , et en demandant, en cette qualité, le partage
de ses biens.
L ’acte du 17 frimaire est ainsi conçu. Il importe de
le faire connaître en entier.
L ’an onze de la république française, et le dix-sept frimaire avant
m id i, par-devant nou s, notaire public p a ten té, et présens les témoins
soussignés, fut présent citoyen Antoine de Baille-Marin , du lieu de
C hevalier, commune tl’Araiiles , liubitnut h présent nu clief-liou dudit
A ra u le s , maison de feu son frère des Crozes , de son gré et vo lo n té, a
donné et d o n n e , par donation ¿1 cause de m ort, à titre d ’institution et
icuvrcs pies , savoir : aux pauvres de Dieu la somme de cinq cents francs,
a eux payable et distribuable après son décès;
p lu s , la somme de
soixante francs, en acquittement de messes par les citoyens piètres qui
desservent l’église de IN’otrc-Damc du P u y ; plus, le quart de ses entiers
biens présens et à v e n ir , aux citoyens Cliambouvet de M onistrol, à sc
partager entr’e u x , au nombre de trois petits-neveux et nièces; plus,
autre quart aux citoyens Claude M ijollas, du lieu de l ’O l l i e r , c o m m u n e
de Saint-Hostien ; Mathieu M ijollas, son frère, et Catherine T a u , leur
mère ; ledit Mathieu du lieu de Tou rcille , commune de Glavenas , à
partager ensemble par égales porjjbtns. Ce qui a été fait et r é c i t é a u d i t
lieu d ’Arnules, maison dudit feu des Crozes, à lui lu en entier a u - d e v a n t
d u lit OÙ il c»t couché , en présence Ucs citoyens Jacques J o u b c it, Louis
�Chevalier, L ouis R e c h à tin , cultivateurs dudit l i e u ,
signés,
de ce
enquis; Joseph Joubert-Cougnac et Claude Descours , aussi cultivateurs
dudit lieu d’A rau le s, qui ont déclaré ne savoir sign e r, de ce enquis. L e
disposant de Baille a déclaré ne pouvoir sign er, à cause de son indispo
sition , de ce enquis.
L a qualification que les appelans eux-mêmes ont
donnée à cet acte dément l ’assurance avec laquelle ils
soutiennent aujourd’hui q u ’il porte la physionomie
d ’un codicille ; q u ’on a évité h dessein le mot testa
m ent; que les mots à titre d ’institution y sont indiff’érens. Ils ont répété trop souvent cette qualification
de testament dans leur procédure, pour q u ’on puisse
croire que c’est légèrement et par inattention, q u ’ils
ont ainsi considéré l ’acte.
Les héritiers du sang en ont demandé la nullité ,
c o m m e contenant une double contravention à Fart. 5
de l ’ordonnance de 1 7 3 5 , par le défaut d ’ un nombre
suffisant de témoins, et par le défaut de prononciation
des dispositions par le testateur; ce q u i , aux termes
de l ’article 47 de la même ordonnance , devait en
entraîner la nullité. Les premiers juges l ’ont prononcée
par les motifs suivans :
Attendu quo les donations , à cause de m o r t , ne pouvaient avoir
aucun effet, môme dans les pays où elles étaient expressément autorisées
avant le C o d e c iv il, que quand elles avaient été faites dans les mômes
foirnes que les testainens et les codicilles; q u ’en fixant ces formalités, le
législateur en a ordonné l ’exécution , à peine de n u l l i t é j
A ttendu qu’en appliquant ces principes à la prétendue donation dont
il s’a g i t , on n'y trouve pas qu ’elle ait été dictée ou prononcée, ou enfin
d autres termes équipollcns , d’où l’on puisse induire que M a r i n de U a i l l o
ait
prononcé
ses
volontés au notaire
rcccvant ; q u ’on en peut conclure
�'I
* «* ►
»
'
(G )
au contraire q u e c ’ est le notaire q u i p a r l e , et n o n le d o n a te u r ; q u ’ ainsi
elle se trouve en co ntravention à l ’ord o nnan ce de 1^35 ;
A t te n d u q u ’ en appréciant cet acte d ’après les termes dans lesquels il
est conçu , on ne peu t d ou ter q u e l ’ in te n tio n d u sieur M arin de B aille a
clé de faire un testament n u n c u p a t i f , puisqu’ il d o n n e , à litre d ’ in stitu
tion , à ceu x qui sont appelés à son h é r é d i t é , la part qu i se trouve à sa
disposition ; que cette intention a été ég alem en t partagée par les d em an
deurs qui agissent dans la dem an de in trod u ctiv e d ’ in s ta n c e, en qu a lité
d ’héritiers d u sieur M arin de B aille ; qu e , dans ce cas , cette disposition
se trouve en opposition avec l ’article 5 de l’ordonnan ce de 1 7 3 5 , q u i
v e u t im périeusem ent q u ’elle soit dictée par le te s t a te u r , en présence de
sept témoins , y compris le n o t a i r e , tandis q u e , dans cet a c t e , il ne s’en
trouve qu e six ;
A t te n d u qu e , si on considérait cet acte com m e co d icille , il serait
ég alem en t contraire à l ’article c i t é , p o u r ne pas y rencontrer l ’ expres
sion non é q u iv o q u e de la dictée de ses volontés au n o t a i r e , et n être pas
r evêtu de la clause codicillaire., q u i ne peu t être su ppléée, co n form ém en t
à la loi 1 1 , au C o d e D e Testam entariâ manumissionc.
D ’ après
ces m o t i f s ,
le trib u n al ju g ea n t en prem ie r ressort, e t c . ,
déclare l ’acte d o n t il s’agit n u l et de n u l e f f e t , et r e n v o i e , etc.
L e d e r n i e r m o t i f , c o m m e o n le v o i t , r e n t r e cla n s le s
deux premiers, c’est-à-dire que, quand même on con
sidérerait l’acte comme codicille, il serait nul, pour 11e
pas contenir l’expression non équivoque de la dictée
des
volontés au notaire ; mais que, d ’ailleurs, il 11e peut
valoir comme codicille, puisqu’il ne contient pas la
clause codicillaire, q u ’011 ne peut suppléer. Voilà évi
demment ce q u ’ont voulu dire les premiers juges, et
ce q u ’ont bien compris les appelans, quoiqu’ils le
déclarent inintelligible.
Quant aux deux autres motifs, nous examinerons,
en premier lieu, celui tiré du défaut de prononciation,
�(
7
)
parce q u ’il s’applique aussi bien à l ’acte considéré comme
codicille que comme testament.
On ne contestera pas, sans doute, que la pronon
ciation ne soit une formalité commune aux testamens
et aux codicilles. C ’est, comme dit Furgole, Vunique
voie certaine p o u r connaître sûrement la volon té' de
c e lu i qui dispose , et obvier a u x captations et sugges
tions. Voyez chapitre 1 2 , nos 11 , 12 et i 5 .
L a définition que les lois romaines avaient donnée
du testament prouve évidemment q u ’on regardait cet
acte comme une loi qui ne devait pas être moins so
lennelle que celles qui concernaient l ’intérêt public.
Testamentum
est v o lu n t a t i s
n o str æ j u s t a
senlentia
Loi i re,
au D . , q u i test. f a c . p o ss. (i)- I l fallait donc que
c el ui qui la dictait s’exprimât de la même manière que
d e eo q u o d q u is p o s t m o rtem su a m J i e r i v u l t .
le législateur qui proposait une loi à tout le peuple
romain.
L ’ordonnance de
1735 établit la nécessité de la
prononciation de la manière la plus formelle;
à la
vérité, et c est le grand argument des appelans , elle
n exigea pas q u ’il fût fait mention de cette formalité;
mais la nécessité de rencontrer dans un testament la
preuve que le défunt avait manifesté sa volonté par
es expressions dispositives sorties de sa bouche, tenait
trop a la substance même du testament, pour avoir
( t ) Godcfroi ajoute sur celte loi : Q ualcnùs d id tu r scntcntia testa m entum , haberc vim le gis dici p o tc sty
�besoin d ’être prescrite par la loi. Ricard avait dcjà
démontré cette nécessité au chapitre 5 , partie i re,
section 3 : « Je passe encore p lu s avant et crois que
3
« quand la coutume ne requerrait pas précisément
« q u ’il fût fait mention, par le testament, des so
it lennités q u ’elle désire être gardées, comme il a été
« dicté, nommé, lu et relu, e t c . , que les légataires
« seraient non recevables à les vouloir vérifier par
«
«
«
«
témoins, et q u ’il y aurait toujours nécessite' que
la preuve s’en rencontrât dans le testament même ,
parce que la coutume désirant, pour la validité d ’un.
testament, que ces solennités y interviennent , il
« n ’est point parfait, à moins q u ’i l ne se reconnaisse,
« p ar l ’acte même , q u ’i l est revêtu des form es près« crites par la lo i qui lu i donne son effet. »
Il s’exprime de même au même chapitre, sèct. 6 :
« Comme il est de principe et de doctrine indubi« t a b l e q u e c ’est à c e lu i q u i veut tirer avantage d ’un
« acte, de faire apparoir q u ’il est revêtu de tout ce
« qui est nécessaire pour le faire subsister, ceux qui
« prétendent se prévaloir d ’un testament, dont une
« formalité essentielle n ’est pas constatée par l’acte
« même, ne pouvant établir, par des moyens extrin« sèques, l’existence de cette formalité, il s’ensuit que
« le testament doit demeurer sans eifet. »
L ’ordonnance
de
1735
n’était
pas entièrement
muette îi cet égard. D ’abord l ’article a 3 déclare que
les mots dic té, nommé, etc. , ne sout point sacra
mentels, mais il suppose évidemment que l ’on doit
�M
(
9
)
trouver dans l ’acte la preuve que cette formalité a été
remplie. L ’article 48 prononce la peine de mort contre
les notaires et témoins qui auraient signé les testamens,
codicilles, ou autres actes do dernière volonté, sans
avoir vu le testateur, et sans V avoir entendu prononcer
ses dispositions. Pour appliquer cette peine, il fallait
lnen s’inscrire en faux contre le notaire et les témoins;
e t , pour q u ’il y eût lieu à l ’inscription de fa ux, il
fallait bien que l’acte énonçât, d ’une manière qu el
conqu e, une fausseté; sans cela, aurait-on osé appli
quer la peine de mort? L e notaire et les témoins
ne se seraient-ils pas excusés sur leur bonne foi, en
prétendant q u ’ils avaient connu , d ’une manière cer
taine, la volonté du défunt, quoique non manifestée
de sa propre bouche? Les dispositions de la loi auraient
donc été violées impunément ? et q u ’on ne s’imagine
pas que ce danger ne fut que chimérique. Il a existé
des notaires assez ignorans ou d’assez mauvaise foi,
pour rédiger des actes de dernière volonté, dont les
dispositions n’avaient été exprimées, par les mourans,
que par signes ou par monosyllabes.
Il
n y a donc pas de formalité plus essentielle dans
le testament nuncupatif, que la dictée ou la pronon
ciation; sans elle, il n ’y a point de testament; et si
elle ne résulte pas des termes de l ’a c t e , il n’y a point
de preuve légale de l'accomplissement de cette for
malité, et par conséquent de la volonté du testateur.
Aussi Fuigole, chap. 2 , sect. i 11^ no 4 , dit <• qu'il
* f aut f/n d paraisse que le testateur en a d icté le
’ H
�«< contenu, ou du moins il est nécessaire q u ’il n’y ait
« point de preuve ni de circonstance qui puisse faire
« présumer que le testatenr n’a pas dicté sa volonté à
« l ’écrivain ; car ce serait alors, non la volonté du
« testateur, de laquelle dépend la force et l'efficace
« du testament, mais celle de l ’écrivain j et ce serait
« en quelque façon tester par procureur, ce que les
« lois ne permettent pas, puisqu’elles n’ont aucun
« égard aux dispositions de la volonté d ’autrui ». Voir
le même chap. 2 , sect. 3 , n° 8.
L ’annotateur de R i c a r d ne s’e xpr ime pas d une
manière moins positive, sur le cliap. 5 , addition 3 ,
noie i re. Il dit « q u 'il a v u attaquer avec succès un
« testam ent, par lequ el le notaire avait dit q ue ,
« s’étant transporté auprès d ’un testateur, et ayant
« été par lui requis de recevoir son testament.,
il
« l ’avait rédigé ainsi q u ’il suit : Il ve u t, etc. ». Ces
expressions, nous l ’avons rédigé, il v eu t, dans la
Louche du notaire, parurent prouver que les disposi
tions n ’avaient pas été prononcées par le testateur et
sous sa dictée, mais que la rédaction était l ’ouvrage
du notaire.
Aussi le tribunal d ’appel de Montpellier, par juge
ment du f) fructidor an 9 , rapporté dans les A nnales
du D roit fr a n ç a is,
de G u y o t , de l ’an
1 1 , a-t-il
annullé une donation à cause de mort, parce q u ’elle
n ’avait pas été dictée ou prononcée^ e t , plus récem
ment, la Cour royale de Riom, par arrêt rendu, le
10 juillet 1820, à la première chambre, a annullé la
�C 11 )
donation, à cause de mort, d ’Antciae V a n n i e r , par
acte reçu Joucerand, notaire, le 10 nivôse an 10,
faite dans la forme de testament, en adoptant les
motifs des premiers juges. Cette donation à cause de
mort commençait ainsi : « Est comparu Antoine
« Varinier............... .. lequel, étant malade, a donné
« et donne, à titre de donation à cause de mort, à
« Marie-Thérèse Barrol, sa femme, etc. »
L ’acte se terminait ainsi : « C ’est la dernière do« nation à cause de mort et disposition de dernière
« volonté dudit Antoine Varinier, et, comme telle,
« veut que vaille ou par testament, codicille, ou par
«
«
«
«
toute autre meilleure forme que de droit pourra
valoir, cassant et révoquant, ledit Varinier, toutes
autres donations et dispositions q u ’il pouvait avoir
ci-devant faites, voulant au contraire que la pré-
« sente, dont.............. sorte à effet et soit seule exé« icutée, suivant sa forme et teneur,' en faveur de
« ladite Marie-Thérèse B a rro l, sa fe m m e, et de la■
< dite Marie Varinier, sa sœur, les instituant..'.......
« pour ses héritiers particuliers. E t ainsi vo ulu.........
« E t de nouveau lecture lui a été faite en entier, par
11 nous, dit notaire, de sa présente donation, à la“ fP lclle il a persisté en présence de, etc. »
Les moiils des premiers juges, qui ont été adoptés
pai l.i Cour pour la nullité de cet acte, sont : « Ou il
« résulte de la donation à cause de m ort, du io
« mvose an n i ,
que le donateur n ’en a p c i i t pro-
« nonce les dispositions , puisqu’au commoi.cjinent
�« dudit acte, c’cst le notaüe seul qui déclare que
« Vannier,
de gré et volontairement, a donné et
« donne, à titre de donation, à cause de mort,
et
« q u ’en se contentant d ’employer ces expressions, qui
« étaient usitées chez les notaires pour toutes les
« autres espèces de donations, Joucerand, notaire ,
« ministre de l ’acte, n’a point rempli le vœu de la
« loi j q u ’en vain on remarque dans le corps de l ’acte
« ces mots : C ’est la dernière, etc. 5 bien loin d ’y
« reconnaître la volonté dictée par le donateur, on
« n ’y découvre que le langage du notaire........; que
« les autres clauses de cette d o n a t i o n à cause de mort
« annoncent clairement que le donateur n’a rien dicté
« ni prononcé, et
que ses intentions ont pu être
« connues du notaire par toute autre voie que celle
« exprimée par sa bouche, etc. »
Examinant l’acte du 17 frimaire an 11 , d ’après les
dispositions de lu l o i , la do ct ri ne des ail leurs et la
j u r i s p r u d e n c e , on ne voit rien qui justifie que le
notaire ait écrit les volontés du testateur sous sa
dictée; on v o it , au contraire, que c’est
le
notaire
seul qui parle, en disant que Marin de B a ille a
donné et donne ; il n’y a pas un seul mot qui annonce
qu ’ il ait déclaré lui-méme sa volonté, pas un seul
mot qui apprenne de quelle manière il a (ait connaître
q u ’il voulait disposer de scs biens. Lorsqu’on arrive
ensuite à la menlion de la lecture, il semble que le
testateur a été étranger aux dispositions q u ’on lui
attribuej il ue déclare point q u ’il y persiste, ni rien
�( .3 )
qui annonce une approbation de sa part. On ne voit
la preuve de sa volonté ni dans sa signature, ni dans
aucune déclaration sortie de sa bouche.
Les mots f a it et récité désignent des opérations du
notaire, et non du disposant. On ne récite que ce que
l ’on a étudié et appris de mémoire, ou ce que l ’on
lit sans l ’avoir étudié ; on ne peut pas dire q u ’un
disposant récite ses dispositions : il les prononce à
mesure q u ’elles se forment dans son entendement.
L ’opération de la prononciation, telle q u ’elle est dé
crite par la loi (ordonnance de 1 7 3 5 , article 5) , et
qui consiste, de la part
du disposant, à exprim er
intelligiblem ent ses dispositions en présence cles té
moins et du notaire, fjai les écrit à mesure que le
disposant les e x p r i m e ne saurait être décrite par les
mots f a it et récité, d ’autant plus que, dans leur style
ordinaire, les notaires les employaient jadis (ainsi
qu on peut le prouver) pour tous les actes, même pour
les simples contrats
prononciation.
où la
loi
n’exigeait
aucune
Ainsi les premiers juges n’ont pas créé une nullité
arbitraire, en déclarant l ’acte nul parce q u ’il ne pa
rait point être l’ouvrage du disposant; ils o n t , au
contraire, fait une juste application des articles
5 ,
23 et 47
l'ordonnance. Us n’ont pas exigé une
mention que la loi ne prescrit pas; mais ils ont re
connu, avec raison, que la contexture de l’acte
faisait
présumer q u ’une formalité, aussi essentielle que la
dictée ou la prononciation, n ’avait pas été
remplie;
et
�(
«4
)
certes, ce n ’est pas là l ’eiTet d ’une distraction;
ce
n ’est pas le Code civil qui leur a donné l’idée de cette
nullité ( i ) , pas plus q u ’en l ’an 9 il en avait donné
l ’idée à la Cour de Montpellier.
Ce moyen nous parait victorieux.
Mais allons plus l o in , et prouvons aux appelans que
ce n’est pas nous qui faisons la guerre aux volontés
du sieur de Baille (2), mais q u ’eux-mêmes, en vou
lant faire passer pour codicille un acte q u ’il a entendu
faire comme testament, contrarient ses intentions;
car s’il est vrai q u ’il ait voulu faire un testament, il
est plus prudent de rendre sa disposition sans effe t,
que de lui en faire produire une qui ne serait pas
dans sa volonté. E st magis tolerabile} reddi inutdem
lestaloris dispositionem ,
quam aliq u id adnutti ut
v a lea i contrà ejus voluntatem .
Mantica, lib.
2 ,
lit. 3 , de conject. ult. volunt.
rap
porter tous les textes des lois romaines qui établissent
Nous
serions i n é p u i s a b l e s ,
si
nous v o ul i o n s
q u ’un testament imparfait ne peut pas, sans le se
cours delà clause codicillaire, être converti en codicille,
bien q u ’il contienne toutes les formalités prescrites
pour le codicille; q u ’il nous suffise d ’observer que dans
la loi 1 1 , au C . de tcslamcntarid manumissionc} il
est dit que le legs même de la liberté à un esclave
( , ) Voyez le Mémoire dos nppelans, page 10.
(a) Voyez page 38 du Mémoire des appelans.
�( . 5 )
demeurerait n u l , si la nullité du testament n ’était
réparée par la clause codicillaire; et cependant on sait
combien, chez les Romains, les lois favorisaient la
liberté des esclaves. S i ju r e non subsistit testamentum,
in hoc nec liberlales (chm non fu isse ad jectu m } ut
3
pro co d icillis scriptum valeret , proponas)
rectè
datas constabit. L a raison q u ’en donnent les inter
prètes, c’est que lorsqu’on a négligé les formes de
l ’acte q u ’on a en v u e , on est censé n ’avoir voulu faire
aucune disposition. L a loi présume alors q u ’on a ré
digé à dessein un acte défectueux, pour se dérober
à des suggestions importunes, en paraissant y céder.
Testator, qui omittit débitas sole militâtes ^ prœsumitur
suce 'voluntatis pœ nituisse, et elusorium aclum conJicere voluisse. M antica, loc. cit.
Voyons donc si l ’acte du 17 frimaire an 11 peut
être considéré autrement que comme un testament.
Nous ne suivrons pas les appelans dans leur savante
dissertation sur l ’origine et les progrès des différentes
dispositions de dernière volonté, qui furent admises
en pays de droit écrit. Il nous suffit de savoir, pour
la cause qui nous occupe, q u e , depuis l ’ordonnance
de 17.31 , les donations à cause de mort 11e furent plus
que des tesiamens ou des codicilles; elles cessèrent
d être une manière particulière de disposer de scs
biens, excepté pour les fils de famille, q u i, comme ou
sait, en pays de droit écrit, ne pouvaient pas faire de
testamens ni de co d ic ille s, mais qui pouvaient faire
des donations à causa de m ort, du consentement de
�/
( i <5 )
leur père. Ce f u t donc p our leur laisser cette ressource,
dit M. Grenier, T ra ité des D onations} discours his
6
torique, page g , que la lo i n établit que l ’identité
des form es de la donation à cause de m ort, avec
celles du testament ou du c o d ic ille ,
mais q u e lle
n a lla pas ju s q u ’il Vabolir.
Aussi, depuis cette ordonnance, ou qualifia indis
tinctement de donations à cause de m ort, des actes
qui ne renfermaient que des legs, d ’autres qui contetcnaient des institutions d ’héritier, des substitutions,
et, en général, les actes dont les dispositions ne de
vaient avoir leur effet q u ’au décès du disposant. Il
arrivait même que les notaires ne qualifiaient pas la
disposition., et se bornaient à dire que le défunt avait
déclaré disposer de telle et telle manière,
etc. II
fallait alors recourir à la nature de la disposition ,
pour savoir quelle était la forme q u ’on avait du em
ployer. Il est évident que si l’acte n’avait point de
dénomination, ou s’il était qualifié de donation à
cause de mort, et q u ’il ne contint que des legs ou
des dispositions particulières sans institution, il pou
vait valoir dans la forme du codicille; mais que si,
au contraire, on trouvait dans cet acte une institution
d ’hérilier, une substitution, une exhérédation, ou,
en général, ce qui ne pouvait convenir q u ’au testa
ment, l’acte, de quelque manière q u ’il fut qualifié,
ou n ’eùt-il pas même de dénomination, devait être
considéré comme testament, et devait en avoir les
formes.
�(
x7
)
Ceci nous conduit à examiner quels étaient, d ’après
les lois romaines et d ’après l’ordonnance de
iy3 5 ,
les caractères du testament, et si ces caractères peuvent
et doivent convenir à l ’acte qui fait l ’objet du procès.
Il était de principe q u ’on ne pouvait faire d ’iustilution
d ’héritier que par un testament : cette institution était
la base et le fondement du testament; son véritable
caractère était Vinstitution fo rm elle ( V h é r it ie r q u i,
de sa nature, était universelley et, par co d icille
comme par donation à cause de m ort, on entendait
tous actes de dernière v o lo n té, par lesquels il n ’y
avait pas d ’héritiers de nommés, mais seulement des
legs lim ités a u x objets dont on disposait. Traité des
Donations, lo c. c i t ., page 61.
L ’institution d ’héritier produisait deux effets bien
importans : le premier était de saisir l'institué
de
l ’hérédité, du moment du décès, d ’après la maxime
générale du royaume, le mort saisit le v i f , q u i, cil
pays de droit écrit, s’appliquait aux héritiers testa
mentaires,
de même q u ’en pays de cou tu m e, 011
1 appliquait aux héritiers du sang. En conséquence ,
les institues n’avaient besoin, après l’ouverture du
testament, ni de permission de justice, ni de demander
la délivrance des biens de l’ hérédité j ils étaient les
successeurs immédiats du d éfun t, et avaient droit
aux lruils des liions compris en l'institution, du jour
du décès du testateur.
Le second eflet que produisait l'institution se trouve
établi en lu loi i Te, J f. de heredibus instit. et suiI
l
�( >8 )
vantes. Il consistait en ce que s i , dans le testament,
il n’y avait q u ’un seul héritier institué pour une
partie d e l ’hérédité, les autres portions lui accroissaient
et lui appartenaient, à l ’exclusion des successeurs ab
intestat> d ’après la règle qui voulait q u ’on ne put
décéder partim testatus} partim inteslalus. C ’était
par suite de ce même principe, que lorsqu’on n ’avait
institué un héritier q u ’en une certaine chose, et q u ’on
ne lui avait pas donné d ’autre cohéritier, on lui ad
jugeait cependant l ’entière hérédité, et la succession
ne se partageait pas entre lui et les successeurs ab
intestat.
Voilà quels étaient les eiTets de l ’institution, et ces
effets ne pouvaient être produits que par le testament.
C ’était l ’institution d ’héritier qui distinguait essen
tiellement le testament du codicille. Le codicille, étant
assujetti à des formes bien moins rigoureuses, ne pou
vait être e m p l o y é ni pour faire un héritier., ni pour
déshériter, ni pour substituer. On permit cependant
de laisser l’ hérédité par codicille, en employant la
voie du fidéicommis, c’est-à-dire en priant sou héri
tier légitime de faire la restitution de son hérédité à
la personne q u ’on lui marquait, lorsqu 011 n’avait pas
fait de testament j et en adressant la même prière à
l ’ héritier testamentaire, lorsqu’on avait testé. C ’est
la seule interprétation q u ’on puisse donner de ce pas
sage des Jnstitutes, dont les appelans veulent tiier
parti : Nam ¡1er Jidciconim issiun hœreditas co d icd h s
rcctc rcliru/uilur.
�Il
suffit
d ’ouvrir tous les auteurs pour se convaincre
q u ’il fallait que l'institution fut conçue en termes
obliques, ou de prière; et ce qui confirme la règle
générale q u ’on ne pouvait instituer par codicille, c’est
q u ’on accordait au soldat, comme un privilège extraor
dinaire, la faculté de disposer de son hérédité par
codicille.
E n effet, si les lois eussent permis d’instituer par
un codicille de la même manière que par un testa
ment, il eut été dérisoire d ’avoir prescrit des forma
lités aussi rigoureuses pour les testamens, puisqu’on
aurait toujours été maître de s’en affranchir , en
donnant à l ’acte la dénomination de codicille, ce qui
aurait produit les mêmes effets. Mais la loi avait prévu
cet inconvénient, et y avait porté remède; elle n ’avait
pas voulu q u ’avec les formes du codicille on pût faire *
une véritable institution d ’héritier, un véritable tes
tament. C ’est ce q u ’on voit par la loi 7 , au C . de
co d icillis. S i idem c o d ic illi, cjuod testanienta possent,
cu r diversion his inslrumentis vocabulum mandaretur,
fjuoR v is ac potestas un a sociasset? Igitur specialiter
co d icillis inslituendi ac substituendi potestas ju r is
(luctoritatc data non est.
L a loi voulait aussi que, pour reconnaître l'acte et
déterminer les formalités q u ’on avait dù y employer,
011 s attachât plutôt à la substance, q u ’à la d é n o m i n a
tion qu on aurait ailecté de lui donner. Tel est le vœu
manifestement exprimé dans la loi i 3 ,
D e ju r e c o d ic iL ,
S i er. « On agite quelquefois la question de savoir ce
�«
(
2
0
)
« q u ’on devrait décider, dans le cas oîi un homme
« qui n’aurait pas fait de testament, déclarerait ainsi
« sa volonté dans un co d icille : Je v e u x que T iliu s
« soit mon héritier. »
On voit d ’abord q u e ,
dans l ’espèce, l ’acte est
qualifié de co d icille : C o d icillis ità sci'ipsit. ( C ’est
donc bien mal à propos que les appelans soutiennent
que Furgole, qui rapporte cette loi, y ajoute : « E n
« supposant que l ’acte est qua lifié de co d icille , ce
« que la lo i ne dit p a s, suivant eux) » (i). On voit en
outre que le disposant s’est servi de ternies obliques,
qui semblent annoncer l ’intention de faire un fidéicommis : Titium hœredem esse vo lo . 11 est évident
que les termes seuls annoncent l’ intenlion de iaire une
institution indirecte. On peut s’en convaincre par le
mémoire même des appelans, page 12 , où 011 lil : « Il
« fallait q u ’il (le testament) fût conçu en termes impé« raiifs, p a r c e q u ’ on le considérait comme une loi parli« culière : T iliu s heures esto. C ’est ce q u ’on appela par
« la suile une institution en termes directs, bien
« différente en ses effets avec celle qui 11'élait conçue
« q u ’en termes
obliques
:
Titium
hœredem esse
« v o lo . »
On vo it , d ’ailleurs, aux Tnslitules, liv. 1 , lit. [\ ,
De
si 11g . reh.
p er
J id eic.
rel. \ , quelles étaient les
expressions dont 011 avait coutume de se servir pour
jaire un fiilcicouimis : f erh a autem J id e ic o m m isso ru n i
(1) Voyez page 27 du Mémoire des appelans.
�(
1
31 )
hœc m axim e in usu habentur, p e to , rogo
3 v o lo }
mando , jid e i tuœ commitlo.
Il
y aurait donc dans l ’cspècc double motif de
considérer l ’acte comme codicille ; d ’abord la dénomi
nation qui lui a été donnée, et la formule de l ’insti
tution , qui dénote un fidéicommis. Cependant le
législateur se demande ce q u ’on doit penser de cet acte;
puis il ajoute : « ïl faut bien distinguer s’il a entendu
« faire un codicille, et charger son héritier légitime
« de rendre la succession à T i t i u s , par forme de fidéi« commis, ou s’il a cru faire un testament; car dans
« ce de rnier cas, Titius ne pourrait rien demander à
« l ’héritier légitime.
✓
« On pourra trouver, continue le législateur, dans
« l’écrit même, les moyens de juger quelle a été la
« volonté de celui qui a fait celle disposition. E n
« effet, s’il a chargé ce Titius de payer quelques legs;
« s’il lui a nommé un su btii ué, dans le cas où il ne
« recueillerait
pas la succession , on verra q u ’il a
« entendu faire un testament, et non un codicille. »
Les conséquences de cette loi sont faciles à tirer. On
voit d ’abord que si l’ inslilulion était conçue en termes
directs, le législateur n’ hésiterait pas à regarder l’acle
comme testament, quoique qualifié de codicille, et à
en prononcer lu nullité : J / o c ca sn n ih il à légitim a
( C a r on voit évidemment q u ’ il suppose
que l acte n est pas revelu de loules les formalités du
peti p a ten t.
testament; dans le cas conliaiie, la distinction serait
�y
(
Lien superflue, puisque
2
2
)
l ’acte pourrait valoir,
de
quelque manière q u ’on l’envisageât).
On voit q u e , quoique la disposition soit faite en
termes de jid é ic o m m is, qui sont propres au codicille,
le législateur déclare q u ’il faut néanmoins rechercher
quelle a été l’intention du disposant. A-t-il réellement
voulu transmettre à Titius sa succession par voie de
fidéicommis? a - t - i l , au contraire, fait des dispositions
qui ne peuvent convenir q u ’au testament? Peu importe
la qualification donnée à l’acte, la tournure des expres
sions; il faut s’attacher à la réalité. Si l’acte contient
des legs à la charge de l ’ héritier; si on lui a nommé
un substitué, dans le cas où il ne recueillerait pas la
succession , alors l ’acte ne peut être considéré que
comme testament.
Tel est le véritable sens de la loi i 3 , D e ju r e cod iciL
Pour échapper à son application , les appelans ont
imaginé une distinction qui n ’e^t pas dans la loi. Ils
ont prétendu (i) q u ’il fallait examiner si l’institution
était faite en termes directs ou en termes ordinaires
3
tandis quelles lois ne reconnaissent que les ternies
directs et les termes indirects. Ils ont supposé que
dans la loi 1 3 , l ’institution était faite en termes ordi
naires, tandis q u e , d ’après le passage des Institutes,
que nous avons cité, il est évident que cette institu
tion est
faite en termes indirects.
Ainsi tombe la
( i ) Voyez page a 3 du Mémoire «les appelai!» , in Jiiia.
�(
2
3
)
conséquence que les appelans se sont efforcés de tirer
/de cette loi, que l ’institution, contenue dans un codi
cille , valait par droit de iidéicommis. Cette loi con
firme, au contraire, ce que nous avons dit plus h a u t ,
q u ’on n'e pouvait laisser son hérédité par codicille
q u ’en termes de prière, c’est-à-dire, en chargeant son
héritier d’en faire la remise à celui qui était désigné
dans le codicille.
Cette loi nous offre des points de ressemblance avec
l ’acte du 17 frimaire*, mais avant de les faire ressortir,
ajoutons aux idées générales que nous avons données
sur l ’institution d ’héritier, quelques observations sur
la manière dont on devait s' ex pr imer p o u r a nno nc e r
q u ’on v o u l a i t faire u n héritier.
L a loi 1 , au D. , § 5 , D e Jiceredibus insl. , nous
apprend q u ’on n ’était point rigoureux sur les termes
q u ’on avait employés; q u ’on suppléait facilement à
l'omission de quelque mot en l ’institution , pourvu
q u ’il apparût de la volonté du testateur : Credim us
p lu s nuncupatum
3
minus scriptum . C ’est ainsi que
1 institution paraissait constante et suffisamment ex
primée par ces mots : L u ciu s heures, et même par
ceux-ci : L u ciu s esto} ilia u x o r mca esto j etc., etc.
Les pays de droit écrit n’étaient pas plus rigoureux;
et Ion tenait pour maxime constante q u e , de quelque
manière q u ’il fût évident que le testateur avait v o u l u
faite une institution d héritier, 011 devoit suiv re sa
volonté; l e n e u r ou 1 insuffisance dans les termes 11c
pouvait en détruire l ’cftct.
�(
»4
)
Faisons maintenant l ’application des principes des
à lois romaines, et des ordonnances de 1731 et 1735,*^l ’acte du 17 frimaire. Nous voyons ([ne si cet acte est
qualifié de donation à cause de mort 011 y trouve en
même teins la formule à titre d'institution : c’est donc
3
une donation à cause de mort, contenant une insti
tution d ’héritier; et, de même que, si elle n’eùt con
tenu que des legs ou des dispositions particulières sans
institution , elle eut pu valoir dans la forme du co
dicille, de même aussi, par cela q u ’elle contient une
institution , elle a dû. être faite dans la forme du tes
tament. Il suffit, pour s’en convaincre, de lire la loi 7,
au C . de testamentis. N on co d icillu m , sed testament
tiim aviani vestra/n fa ce r e v o lu isse, institutio et ex~
heredatio probant evidenter.
Quels eussent été les effets, en pays de droit écrit,
de cette formule, à titre d ’institution? Les appelans
affectent de les méconnaître. Cependant 011 n ’en em
ployait pas d’autres pour faire un héritier dans un
testament. E n donnant tous ses biens, ou une partie,
à titre d'institution, on 11e s’était jamais avisé de
contester le titre d ’héritiers a ceux au proiil desquels
011 disposait ainsi. Cette formule fut même consacrée
par l’ordonnance de 1 7 35 , pour exprimer q u ’on fai
sait des héritiers, comme on peut le voir par les ar
ticles 5 ?., ■}(», etc. Il suffisait même de donner cinq
sous à ses légitimaires, à titre d ’institution, pour q u ’ils
dussent se considérer comme ayant été institués hcriliers, cl 11e pussent opposer le vice de la préiérition
�(
25
)
et l ’on v o m i r a i t qu ’en donnant, au même titre , la
moitié de ses biens, la seule portion dont la loi permit
au sieur de Baille de disposer, il n’ait pas eu l ’inten
tion de se choisir des héritiers! N ’en doutons pas; si
la succession se fût ouverte avant le Code civil, et que
l ’acte eût été régulier, comme testament, les appelans
auraient mis autant de zèle à réclamer l ’honneur et le
profit de cette institution, q u ’ils font aujourd’hui
d ’efforts pour faire perdre à l’acte son caractère essentiel,
et pour faire méconnaître les intentions du sieur de
Baille : ils l ’ont trop bien prouvé par leur demande
et leurs autres écrits signifiés. Si même, lorsque la
succession s’est ouverte sous le Code civil, ils o nt re
connu que l ’acte leur a t t r i b u a i t la q u a l i t é d ’ héritiers,
que n ’auraient- il s pas fait sous une législation qui ne
les eût pas obligés à demander la délivrance?
On ne peut croire que ce soit sérieusement que les
appelans ont avancé que les mots à titre d ’institution
n ’avaient aucune signification réelle (i) . Ils en avaient
une bien réelle, puisqu’ils étaient synonymes des mots
à titre d ’héritiers; puisque cette formule les appelait
directement a la succession du défunt, les saisissait
de son hérédité, et leur donn ait droit aux fruits depuis
le moment du décès.
Mais il est certain auàsi q u ’ ils ne pouvaient obtenir
ce titre honorable; d’ héritiers, que par un testament.
S i idem c o d ic illi, r/uod testamenta passent, etc. ,
h. i
i
( i ) V o ir pages 3o , 3 i et 3 a d u Mémoire des appelai».
4
�loi 7 , au C . de c o d ic illis ; donc il est évident que le
sieur de Baille a voulu faire un testament.
«Mais, disent les appelans, et c’est pour eux un
« rempart q u ’ils croient inexpugnable, « les lois ro« maines sont sans application dans l ’espèce présente,
« pai'ce q u ’à l ’époque où l ’acte a été f a i t , on ne pou« vait point faire d ’institution d ’héritiers : la loi elle« même appelait les .parens à l ’hérédité; celles des
« 17 nivôse an 2 et 4 germinal an 8 ne permirent
« plus la transmission de l ’hérédité; les libéralités
« qui furent autorisées ne furent plus que de simples
« legs, qui é t a i e n t u n e charge imposée à l ’ héritier du
« sang. Ces lois opérèrent en sa faveur une saisine
« directe et immédiate; dès-lors l'institution cessa
« d ’ètre une marque distinctive du testament : ce ne
« fut plus q u ’ un vain mot, une expression inutile ;
« on ne put pas tirer avantage de celle qui était con« tenue
« d ’effet,
un acte : elle n ’y p r o du i sa i t pas plus
q u ’autrefois, dans les pays de coutume, où
dans
« les testamens n’étaient que de véritables codicilles. »
Telle est l’objection des appelans.
Pour y répondre^ examinons rapidement le système
de la législation qui a précédé le Code civil, et voyons
si les conséquences q u ’on en tire sont fondées. D ’abord
la loi du 7 mars 179^ nc peut pas être invoquée,
puisqu’elle se borna à abolir la faculté de disposer eu
ligne directe.
Celles des 5 brumaire et 17 nivôse an 2
e ur e nt
pour objet d ’empccher de dépouiller les héritiers du
�sang par des dispositions trop considérables en faveur
d ’étrangers ; d ’établir entre les successibles la plus
parfaite égalité dans les partages; elles laissèrent aux
époux la liberté de se faire réciproquement des dispo
sitions illimitées, lorsqu’ils n’avaient point d ’en fans,
et sauf réduction à un usufruit, lorsqu’ils en avaient.
Résulta-t-il de ces lois l’abolition générale de tous
les effets de l ’institution d ’héritier? Non : l ’ensemble
de la loi du 17 nivôse démontre le contraire; d ’abord
l ’institution d’ héritier, entre époux sans enfans, pro
duisait les mêmes effets q u ’anciennement; ainsi cette
institution saisissait de plein droit l ’époux institué ,
lui donnait droit aux fruits, du j o u r du décès; et, en
cas q u ’il n ’eut été i n s t i t u é q u ’en u n e p a r t i e , il a u r a i t
eu la t o t a l i t é , en vertu de l ’ i n s t i t u t i o n . L ’article 1 4
de la loi du 17 nivôse ne laisse aucun doute à cet
égard.
De même, celui qui n’avait pas de parens était maître
de disposer de la totalité de sa fortune, et de la même
manière q u ’anciennement, par institution d ’héritier
ou autrement.
Les limites apposées par ces lois à la faculté de dis
poser n ’ayant eu pour objet que l’intérêt des succes
sibles, dont elles déterminèrent la réserve, les insti
tutions d héritiers ne furent abolies q u ’autant q u ’elles
pouvaient porter atteinte à cette réserve. Mais il fut
toujours loisible, en pays de droit écrit, de donner
la portion disponible, soit ¿1 titre d ’institution , soit
à titre de legs.
�Les héritiers du sang n ’étaient àaisis légalement que
de leur réserve, et la saisine de la portion disponible
continua d ’appartenir à ceux q u ’on avait honorés du
titre à'héritiers. On ne trouve dans ces lois aucune
dérogation, ni expresse, ni tacite, au droit ancien
en cette matière; il n’était, comme nous l’avons ob
servé, dans l ’esprit de ces lois que d ’établir l ’égalité
entre les héritiers, et de leur assurer d’une manière
certaine la portion indisponible. Ainsi, pourvu que
les limites q u ’elles avaient tracées fussent respectées ,
elles ne s’occupèrent point de la manière dont on dis
poserait de ce qui n ’était point compris dans sa prohi
bition; et il y eut toujours cette différence entre les
dispositions à titre (Vinstitution et celles faites à titre
de legs, que, par les premières, on était saisi de l ’objet
de l'institution de la même manière que l'héritier
appelé par la loi, au lieu que, par les secondes, on
était obligé (le demander, la tli:l ivianre.
La loi du 17 nivôse avait embrassé, dans sa solli
citude, les païens à 1111 degré quelconque; elle avait
établi en leur faveur une réserve, toutefois plus ou
moins considérable, selon que les parons étaient des
descendans ou des collatéraux., Celle du [\ germinal
an 8 n’établit des réserves q u ’au profit des parons qui
n ’étaient
pas à un degré plus éloigné que celui de
cousin issu de germain : tous ceux dont les païens
étaient au-delà de ce degré rentrèrent dans la pléni
tude de leurs droits; leurs libéralités purent avoir la
même éleudue et les mêmes caractères que celles îles
�f
époux sans enfans, au profit l ’un de l ’autre, sous la
loi du 17 nivôse, et que celles d’ un homme q u i , sous
cette même loi, n ’avait point deparens. Ainsi ils purent
instituer, ou en la totalité de leurs biens, ou en une
partie; et lorsqu’ils n ’avaient fait qu/une institution
particulière, elle devenait universelle, parce que, dans
ce cas, il ne pouvait y avoir des héritiers ab intestat
et des héritiers testamentaires. De même, ceux qui
avaient des héritiers à réserve purent instituer par
testament, pour la portion disponible; et si, par l ’évé
nement du décès du testateur, il n’existait pas d’hé
ritiers auxquels la loi l ’obligeât de laisser une partie
de sa succession, l ’héritier de quote, q u ’il avait fait, la
recueill ait t o u te entière.
Ceux qui o n t prétendu que la loi du 17 nivôse
an 2 avait assimilé les pays de droit écrit aux pavs
couturniers; que les testamens n ’y furent plus que de
véritables codicilles; que l'institution d ’héritier n 'y
produisait que l’eilet d ’un legs, ont commis une grande
erreur.
Ils
auraient du nous donner les preuves de cette
innovation, qui nous paraît autant en opposition avec
1 esprit de la loi, que contraire à ses termes, et con
traire à la manière dont elle a été interprétée en pays
de droit écrit. O n ne citerait pas un seul notaire de
ces pays qui n’ait fait et n ’ait cru pouvoir faire, sous
1 empire des lois des 17 nivôse et !\ germinal, des
actes contenant institution d ’ héritier, de véritables
testamens; e t , sans doute, on 11c prétendra pas qu'en
luisant de pareilles dispositions, ils fussent persuadés
�c 3o )
qu ’elles n’avaient rien de réel; que les termes dont ils
se servaient étaient inutiles, déplacés, et même ri
dicules.
Comment cette loi
aurait-elle
pu a b o li r ,
par
l ’article Gi , tous les principes qui étaient suivis en.
pays de droit écrit, et notamment ceux qui étaient
relatifs à la saisine des institués, lorsque cette loi ne
régla rien sur cette m a tiè re , non plus q u ’en bien
d ’autres? Ne sait-on pas, au contraire, qu e, dans ces
pays, on appliquait le droit romain pour tout ce à
quoi il n’avait pas été dérogé par les lois nouvelles, et
que jamais on ne donnait une trop grande extension
aux dispositions contraires aux anciens principes.
Il
est évident que l ’abolition portée par l ’article 6 r ,
ne doit s’entendre que des lois, coutumes, e tc ., qui
concernaient
la fixation de la quotité disponible,
suivant l’état de la famille du disposant, sa capacité de
d o n ne r , la c apa ci t é de recevoir de la par t d u d o n a t a i r e ,
l ’ordre des païens qui étaient appelés à succéder, etc.
Mais la loi n ’ayant pas réglé de quelle manière on
pouvait donner la portion disponible, ni les effets que
pouvait produire le genre de disposition, il fallut s’en
référer aux anciens principes. Dès-lors on put donner
par testament ou par c o d ic ille , à titre d ’institution,
ou à titra de legs y et la différence qui existait entre
ces manières de disposer fut maintenue, ou plutôt no
fut pas abrogée. Ainsi l’institution ne put avoir l i e u ,
comme auparavant, que par testament; et il fut tou
jours vrai de dire que lorsqu’elle avait lieu dans un
�( 3> )
acte qui n’avait pas de dénomination, ou qui en avait
une douteuse , elle annonçait que l ’acte était un
testament.
S ’il pouvait rester le moindre doute à cet égard, il
suffit de lire le passage suivant de l ’instruction de
M. Bergier, sur la loi du 4 germinal an 8 , sect.
,
6
distinct, i , n° 196 :
« Ce titre d ’héritier peut être, ou déféré à un seul
« institué, ou attribué conjointement à plusieurs,
« pour en partager l ’utilité également ou inégalement;
« enfin, l ’institution peut être accompagnée de legs
« dont les héritiers testamentaires sont chargés; mais
«
«
«
«
elle ne peut pas être limitée à certaines parties de
la succession seulement, sans disposer du surplus ».
De sorte que personne ne peut laisser, en droit
écrit, deux classes d'héritiers de ses biens disponibles ,
« les uns testamentaires, les autres ah intestat; et que
« les héritiers testamentaires, quand ils ne seraient
« institués que pour une faible portion, ne prennent
« pas moins, par accroissement, tout ce qui est dispo« nible de l ’hérédité. »
Cet auteur établit jusqu’à l ’évidence q u ’on pouvait
instituer p our les biens disponibles, et que l ’accrois
sement avait lieu pour tout ce qui était disponible,
et n avait pas été compris dans l ’institution.
Au n° 198 de la même section, il établit que les
héritiers testamentaires, en droit écrit, sont saisis,
par la l o i , des biens disponibles de la succession 7
aussitôt q u ’elle s’oum *.
�( 3* )
Après avoir démontré que, sous les lois en vigueur
à l'époque où lu disposition d ’Antoine-Marin de Baille
a été laite, les effets de l'institution n’étaient pas
abolis, nous pouvons invoquer avec plus de confiance
les principes des lois romaines , et la doctrine des
auteu rs.
L ’application que reçoit à notre espèce la loi i 3 ,
au D. D e ju r e co d icillo ru m , dont nous avons rap
porté le texte, est remarquable. Il s’agit, dans l'acte
du 17 frimaire, comme dans celui de la loi romaine,
d en d é te r mi ne r la nature, par l'intention q u ’a eue le
d i s p o s a n t , et par les dispositions q u ’ il a f aites ...... Le
jurisconsulte romain décide q u e , si l ’acte contient une
substitution, des legs à la charge de Vhéritier institue',
c’est un testament q u ’on a entendu faire, et non un
codicille. Dans notre espèce, le sieur de Baille a fait
une institution , et des legs pies qui sont nécessairement
à la charge des héritiers ins ti t ué s , p u i s q u ’ il ne pou
vait pas porter atteinte à la réserve de la moitié de
ses biens, établie en faveur de ses successeurs ab
intestat. Il y a donc la même raison de décider que
c ’est un testament q u ’on a entendu faire; et notre
espèce est encore plus favorable, en ce que l ’acte n ’a
pas été qualifié de codicille, comme dans la loi ro
maine; il a été qualifié de donation à cause de mort,
qui pouvait être aussi bien un testament q u ’un co
dicille.
On a prétendu que nous avions très-mal
interprète
l ’opinion de i* urgole, sur la manière dont 011 doit,
�reconnaître un teslament d ’aVec un codicille. Pour
éviter un semblable reproche, nous nous abstiendrons
de toute interprétation; nous nous bornerons à rap
porter les passages suivans, quoique ses savantes disser
tations,' contenues auîï chap. 2 , sect. 7 , et chap. 12,
aient besoin d ’etre méditées dans leur ensemble.
Chapitre 2 , section 7 , n° 2. « Au contraire, il
« faudrait regarder la disposition comme un testament
« et non comme un codicille, si elle contenait une
« institution , des substitutions directes, ou une exhé« rédation
3 quand
même on n ’aurait appelé que cinq
•l témoins, par la raison que nous avons touchée, que
« le contenu en la disposition doit en déterminer la
« n a t u r e , plutôt que la formalité extérieure. Loi 14 ,
« au Code D e Testant. Dans ce cas, la disposition
« serait nulle, suivant la loi i 3 , D e ju r e co d icill.T ).
»...
I1'
Chapitre 1 1 , n° 3 5 . « Que si l ’acte n ’est qualifié
« ni de testament ni de codicille, il faut juger de sa
« nature par les dispositions q u ’il contient. Si,
par
« exemple, 1 acte contient des institutions universelles
« et des exhérédations qui ne peuvent pas convenir à
« lin codicille, il faut considérer la disposition comme
« un testament. Loi 1 4 ? au C . non co d ic illu m , sed
« testarnentu/n, etc. »
Même chapitre, n° 37. ft II faut néanmoins prendre
« garde q u e , quoique la disposition soit nommément
“ .qualifiée de codicille dans l a c t é même, néanmoins
M une telle qualification ne doit pas prévaloir sur 1q
�(34
)
k volonté qui paraît clairement par les dispositions
« qui y sont contenues, parce que la difficulté qui
« consiste à déterminer la nature d ’un acte, est une
« question de volonté qui peut être expliquée par la
« qualité des dispositions. Voilà pourquoi, si l ’acte
« contient une institution d ’héritier, une substitution
« directe, et des legs, dont le testateur a chargé son
« héritier dans l ’acte qualifié de codicille, il faudra
« le considérer, non comme un codicille, mais comme
« un testament, et déterminer par-là sa validité ou
« sa nullité, selon que les formalités requises au tes« tament ont été observées ou négligées. L . i 3 , de
« ju r e coclicill. »
Voilà donc à quoi se réduit cette affaire, que pav
tant d ’efforts^on à cherché à rendre douteuse, afin
d ’en tirer la conséquence que, dans le doute} il fa lla it
entendre et exp liqu er l ’acte dans le sens qui peut
le f a i r e 'v a lo ir . Il faud rait, pour q u ’il y eût du
doute, que l ’institution d ’héritier ne fut pas la plus
forte de toutes les preuves de l ’intention q u ’on a eue
de faire un testament, plus forte même que celle qui
se tire de la dénomination donnée à l ’acte, et de la
solennité q u ’on y a observée. Ce ne sont pas seulement
les lois romaines, dont nous avons rapporté le texte,
et Furgole qui
nous l ’apprennent , mais
tous lcs
auteurs qui ont écrit sur cette matière : N am a d h u C
ob illam hœ redis institutionem , testamentum conjîcere
voluisse prœsumitur. liu ju s traditionis ea est ratio >
quia actus non ju d iç a tu r à nudd dcnam inatione, sed
�( 35 )
ab effectu ............ Menochius, D e prœsumptionibiis
3
lib. 4j prœsumptio 3 .
Mantica répond ainsi à l ’objeclion tirée de la ma
nière dont on doit interpréter l ’acte en cas de doute :
N e c officit , quod in dubio sit capienda ilia co n jec
tu ra , quoi fa c it actum v a lere, quia rom anus respondet in D . § T ra cta ii in fin e : hoc verum esse
quando fa c it actum valere eo modo quo f u it actum ;
3
sed eæ hœredis institutione colligitur evidenter, quod
quis voluerit fa cere testamentum. Igitu r contrà voluntatem defuncti non debet id sustineri ju r e cod i-
3
cilloru m , est magis tolerabile reddi inutilem testatoris
dispositionem , quain aliq u id adm itti ut va lca t contrà.
eju s voluntatem . L ib . i , Ut. 3 .
On voit par là que la maxime, in d u b io , est vraie
ii l ’égard de toute disposition q u i , portant à l ’exté
rieur un caractère particulier, ne présente des doutes
que sur le fond des choses’ qui en sont l ’objet; mais
q u ’elle cesse d ’etre applicable, lorsque, la disposition
étant conçue dans des termes qui annoncent un genre
<le disposition, on voudrait, pour lui conserver sou
effet, la transformer en disposition d ’un autre genre :
Quando f i t digressio de una specie in alteram specie ni
divcrsam
, Aleuti
cum digreditur de testamento a d
c o d icillo s...... N am in ca su ..........substantia testamenti
ommnò répugnât substantiæ co d icillo ru m } cum in
c o d ic ilh s , directe quis hæres instim i non p o ssit, et
tamen polest in testamento...... Mcuoch. D e prwsump,
pnesuinpt. a , n° 30.
�fJC V
( X, )
Il
est à remarquer que les auteurs n ’hésitent pas à
regarder comme
testament l’acte qui
contient une
-institution, quand même il serait qualifié de codicille,
et quand même il ne siérait fait q u ’en présence de cinq
témoins. Ne doit-on pas, à plus forte raison , le décider
ainsi pour un acte qui a une qualification commune au
testament et au codicille, et qui est fait en présence de
six témoins, y compris le notaire, dans une-campagne
où le nombre des personnes capables d ’être témoins était
et lorsque, pour un codicille, il suffisait d ’y eu
employer c i n q ? ( O r d o n n a n c e de 1^3 5, art. i 4 )*
Que sert, après cela, de dire q u ’on semble avoir
rare,
évité à dessein le mot testament ( i ) ,
lorsqu’il est
certain q u ’on pouvait faire une donation à cause de
mort par testament, et q u ’en y faisant une institution
d ’ héritier, on faisait un véritable testament? F l i t - i l
v r a i , d ’ailleurs, q u ’on eut évité ce mot à dessein, la
loi n’y v errait pas un motif pour le faire valoir comme *
codicille. Elle y verrait plutôt un moyen détourné
pour faire un héritier, sans employer les formalités
rigoureuses prescrites pour les testamens.
Quelques explications que les appelans s'efforcent
de donner aujourd’ hui sur la qualité de cet acte du
17 frimaire an 1 1 , q u ’ils avaient si long-lcms euxmêmes qualifié de testamens dans tous leurs actes <1°
procédure, leurs propres'aveux prouveront toujours 1*
(1) Voyez page a «lu Mémoire des appelans.
�v'JV
( 37 )
certitude où ils étaient, que M. de Baille avait voulu
les gratifier par un testament, et il devra paraître ex
traordinaire q u ’ils aient cru pouvoir faire, à volonté,
de sa disposition, un testament ou un codicille.
Nous ne pouvons passer sous silence la défaveur
q u ’ils ont cherché à jeter sur la mère de Mélanie de
B a il l e , en supposant q u ’elle n’avait pas vécu en bonne
intelligence avec le testateur (i). Que ne peut-elle
faire entendre, elle-même sa voix, et apprendre à la
justice les manœuvres q u ’on mit peut-être en usage
pour chercher à les désunir ! Les papiers de la suc
cession nous apprennent, toutefois, q u ’Àntoine Marin
était détenteur de la succession cl’A u t o i n e de B a i l l e
de M a l m o n t } que c et te succession appartenait au père
de Mélanie -, que même ce dernier n ’avait touché
q u ’une faible partie de ses droits légitimaires : il ne
réclama rien de son vivant; et son désintéressement
fut imité par sa veuve. Sont-ce là de mauvais pro
cédés, des preuves de mésintelligence?
On ne sait non plus sur quel fondement les adver
saires ont parlé de soupçons mystérieusement répandus,
d ’imputations publiques ou secrettes. Forts de notre
conscience, nous leur faisons le défi de prouver que
nous ayons dit, soit en public, soit en particulier,
autre chose que ce que nous leur avons dit à euxmêmes. Nous nous sommes plaint avec laison de
ce qu ils n avaient produit leur titre que plus de
( i) Page 3 de leur Mémoire.
�sept ans après le décès du sieur de Baille, et de ce
q u ’ils ne s’étaient pas présentés pour concourir au
partage judiciaire.
Quant à leur parenté, nous ne l’avons jamais con
testée; mais nous n ’avons trouvé, dans la succession,
aucun acte qui
en établit le degré; au reste, cette
parenté ne saurait, aux yeux de la C o u r , donner effet
à un acte nul.
Ne serait-ce pas aussi pour inspirer quelque intérêt
de p l u s , que nos adversaires ont cru devoir parler d e
le u r v ê l e m e n t c o m m u n ? c o m m e s’ ils i g n o r a i e n t que si
la justice ne fit jamais acception des personnes, elle
ne se laissa aussi jamais surprendre par ces petits
moyens.
Quant à nous, investis de la succession de notre
oncle, par la voie de la nature et l ’autorité de la loi,
que produit-on pour nous dépouiller? un acte, q u i ,
sous q u e l q u ’a s p e c t q u ’o n l’envisage, ne peut soutenir
les regards de la justice, et sur la validité duquel les
appelans eux-mêmes ont peu compté. Nous devons
donc attendre avec autant de calme que de respect la
décision de la Cour.
D
e
LAGREVOL.
Me L A F O N T , A vo u é-licen cié.
RIOM, IMPRIMERIE DE SALLES, PRES LE PALAIS DE JUSTICE.
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Baille, Marie-Françoise-Mélanie de. 1821]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
De Lagrevol
Lafont
Subject
The topic of the resource
testaments
successions
pays de droit écrit
codicille
donations
vices de forme
doctrine
droit intermédiaire
Description
An account of the resource
Titre complet : Précis en réponse, pour Marie-Françoise-Mélanie de Baille, et Hippolyte de Lagrevol, Procureur du Roi à Yssingeaux, son mari, intimés ; contre Claude et Mathieu Mijollas, frères, appelans ; en présence de Jean, Jean-Pierre Chambouvet, et Jean Romeyer, tuteur de ses enfans mineurs, d'avec Jeanne Chambouvet, aussi intimés.
note manuscrite : « après deux partages, arrêt des chambres réunies, 1 er juin 1821, Journal des audiences, p. 354. »
Table Godemel : testament : 20. sous l’empire des ordonnances de 1731 et de 1735, comme sous le code, toute disposition de dernière volonté, soit testament, soit donation à cause de mort, ou codicille, devait contenir, au moins en termes équipollents, la mention qu’elle avait été dictée par le disposant, et écrite par le notaire, à mesure de sa prononciation. cette formalité étant de l’essence de l’acte, son omission en entraînait la nullité, encore qu’elle ne fut point formellement prononcée par la loi.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1821
An 11-1821
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
38 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2513
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2511
BCU_Factums_G2512
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53499/BCU_Factums_G2513.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
codicille
doctrine
donations
droit intermédiaire
pays de droit écrit
Successions
testaments
vices de forme
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53505/BCU_Factums_G2519.pdf
d745023ace7cb673eff5d2456984529d
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Text
MEMOIRE
COUR R OY AL E
DE RIOM.
POUR
Ire CHAMBRE.
L e Sieur Jean-M artin R O C H E R , Négociant, habitant
de la V ille de Tence, arrondissement d ’Issingeaux,
en qualité de subrogé-tuteur de J e a n - P i e r r e
P eyrachon, fils mineur, habitant de la même Ville,
A ppelant
CONTRE
D am e M a r i e - G e n e v i è v e P E Y R A C I I O N
et M onsieur J e a n - A n t o i n e
O L L I N , Juge
M
au Tribunal civil d 'Issingeaux , son m ari, de lu i
autorisée, habitansde la F ille d T s s in g e a u x , intimés;
E t C O N T R E Sieur J e a n - P i err e P E Y R A C H O N
Rentier, habitant en l a ville de T ence, aussi intimé.
,
D a n s tous les tems et chez presque tous les peuples
policés, les lois ont accordé aux pères la faculté de
disposer d’ une partie de leurs biens.
�Cette faculté,
trop étendue peut-être parmi les
Romains, et que des idées bizarres avaient réduite à
rien parmi nous, à une époque où les exagérations
dictaient les lo is , cette faculté précieuse a été sage
ment réglée par notre législation nouvelle.
Le Code civil présente, il semble, la combinaison
la plus juste du droit de disposer, qui est une éma
nation du droit de propriété, avec les devoirs que la
nature impose aux pères envers leurs enfans.
E n fixant
tiers, ou au
enfans, nos
passions, ou
la quotité disponible à la m o itié , au
quart des biens, selon le nombre des
législateurs ont prévenu les écarts des
les erreurs de la faiblesse, en même tems
q u ’ils ont laissé une carrière assez grande à la recon
naissance, aux affections et aux sentimens généreux.
Les tribunaux ne sauraient trop respecter ces règles
bienfaisantes q u ’ont préparées de profondes médita
tions; et s’ils doivent être attentifs à empêcher que
les réserves destinées aux enfans ne reçoivent quelque
atteinte, ils ne doivent pas être moins empressés à
consacrer les dispositions des pères qui ont employé
d abord une partie de l e u r p a t r i m o i n e à payer la dette
de la nature.
Ainsi l ’enfant qui a reçu de son père un don con
sidérable pour sa portion héréditaire, 11e saurait être
admis à critiquer des libéralités postérieures, ou doit
au moins imputer, sur la réserve q u ’il r é c l a m e , l'avan
cement d ’hoirie qui lui a été fait.
Cette vérité, élémentaire en droit, a cependant été
�. ( 3 )
méconnue par le tribunal d ’Issingeaux. Confondant
les principes des rapports avec ceux de l ’im putation,
et sous le prétexte que le rapport n Jétait pas dû au
légataire, ce tribunal a pensé que l ’héritier, donataire
d ’un avancement d’hoirie, avait le double droit et de
conserver le don, et de réclamer en outre la réserve
par la voie du retranchement , contre un légataire
universel.
Une telle erreur, qui tendrait à détruire la faculté
de disposer, est trop contraire à la doctrine ancienne,
à la doctrine nouvelle, à l’esprit, et même à la lettre
de la loi considérée dans son ensemble, pour soutenir
long-tems les regards éclairés des magistrats d ’une Cour
supérieure.
F A IT S.
L a contestation est née sur une demande en partage
de la succession du sieur Jean-Pierre Peyrachon.
L e sieur Peyrachon a laissé, à son décès, deux enfans, Marie-Geneviève Peyrachon, épouse d eM .M ollin ,
et Jean-Pierre Peyrachon, deuxième du nom.
L e contrat de mariage de Marie-Geneviève Peyrachon
et de M. Mollin est en date du 12 floréal an i 3 .
Pa i' ce contrat, passé sous l ’empire du Code civil,
le père de la future lui constitua une dot considérable,
q u i, d’après l ’intention des parties, devait lui tenir
lieu de scs droits dans la succession de sa mère, dans
celle d ’un frère nommé Augustin, et dans les biens
paternels.
�( 4 )
Voici les termes de la constitution :
« Ledit sieur Jean-Pierre Peyrachon donne et cons
titue à la demoiselle Marie-Geneviève Peyrachon ,
sa fille, en dot, la somme de cinquante mille francs,
dont deux mille francs du chef de ladite Rocher (la
mère, alors décédée); le surplus, du chef paternel,
dont v in g t-cin q
mille francs seront payables en
dettes ou obligations, à réquisition, et d ’après l ’état
à faire entre les parties; et les autres vingt-cinq
mille francs seront payables en fo n d s ou argent ,
p ar q u i cle d roit, après le décès dudit donateur ,
et sans intérêt, et même p a r a n t i c i p a t i o n , en tout
ou en partie. »
Plus bas est ajoutée la clause suivante :
« Déclarant ladite future q u e , dans ladite consti« tution maternelle, qui est mobilière, sont fixés et
« compris les droits qui peuvent lui revenir du chef
« d ’Augustin Peyrachon, son frère, qui se portent à
« 5oo fr. pour le tiers
et ( j uel le renonce à ses droits
« légitimaires paternels et maternels. »
Ces dernières expressions sont claires; Marie-Geneviève Peyrachon renonçait, moyennant la dot promise,
à scs droits le'gitimaires paternels. O r , depuis la
publication
du Code civil ,
les droits légitirnaires
n ’étaient autre chose que les droits à la réserve légale
établie par l’article c) 1 3 , réserve qui remplaçait la
légitime ancienne.
A insi, que la renonciation fût ou non valable, il est
évident q u e , renoncer à de tels d ro its, c’était rocou-
�(
5
)
naître que la dot avait été donnée et reçue à compte
seulement de la réserve, et à imputer sur la portion
qui reviendrait à l ’épouse dans cette réserve, si elle la
réclamait un jour.
Cependant Marie-Genevière Peyraehon a soutenu
dans la suite q u ’elle pouvait, et retenir sa d o t, et
réclamer, en outre, le tiers des biens que son père
avait laissés au moment de son décès ; et cette pré
tention j repoussée par la volonté du père comme par
les dispositions de la lo i, a cependant été accueillie
par le tribunal d’ïssingeaux.
Il parait que la dot entière avait été payée par le
père; que même il avait délaissé, pour 12,000 francs
seulement, un domaine appelé de Naute , dont la
valeur réelle est de 24?000 francs.
Convaincu d’avoir donné à sa fille plus même que
la loi ne lui attribuait dans son patrimoine, le sieur
Peyraehon père crut pouvoir exercer des libéralités
envers celui de ses petits-fils qui s’était montré le plus
digne de son aflection.
Il consigna ses volontés dans un testament olographe
du 3 o mars 1819.
x
Le testateur fait d ’abord quelques legs pieux;
Il lègue* ensuite à Jean-Pierre Peyraehon , son fils
aine, un domaine, un pré et un bois, p ou r lu i tenir
lieu , d it-il, du tiers de mes biens r/iic la lo i lu i accorde ;
Enfin il lait nu legs universel en faveur de JeanPierre-Auguslin Peyraehon, son petit-fils. Voici les
termes de la disposition :
�(
6
)
« E t au surplus de tous mes autres biens meubles
« et immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les donne en préciput et avantage, et hors part
« et portion, et sans rapport, à Jean-Pierre-Augustin
« Peyrachon, mon petit-fils, l’ainé de mondit fils et
« de la défunte demoiselle D e ig n a t, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes biens que je lui
« donne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu au
« présent testament, et de payer mes dettes. »
L e sieur Peyrachon déclare, dans son testam ent,
que son intention a été de prévenir les procès entre
ses enfans.
On verra combien peu ont été respectées les der
nières volontés d ’un père.
L e sieur Peyrachon décède. Bientôt après, M. Mollin
et son épouse forment contre leur frère une demande
en partage ; e t , comme le légataire était un mineur
non émancipé, et q u ’il avait des intérêts contraires à
ceux de son tuteur légal, ils l ’assignent dans la personne
de son subrogé-tuteur, en réduction du legs universel
qui lui avait été fuit.
Ils appellent aussi dans la cause le vicaire de Tence,
q u ’ils accusent de spoliation, et multiplient les procé
dures par de nombreuses saisies-arrêts, destinées, si
on les en croit, à faire connaître les vraies forces de la
succession du père.
Sans entier dans le détail de ces diverses procédures,
il suffira de dire que la cause fut jugée contradictoire
ment ti l ’audience du 7 juin 189.0.
�(
7
)
L à , M. Mollin et son épouse conclurent au partage
des biens dont le sieur Peyrachon père était en posses
sion au moment de son décès ; ils demandèrent que le
tiers de ces biens leur fût a ttrib u é , et q u ’en consé
quence le legs universel fut réduit. Ils soutinrent q u e ,
dans le tiers auquel ils avaient droit, ne devaient être
compris ni les 48,000 fr. de dot que le père leur avait
donnés, ni le domaine de N au te, qui leur avait été
délaissé h vil prix.
Le sieur Jean-Pierre Peyrachon fils conclut aussi au
partage 5 mais il réclama seulement le tiers du patri
moine de son p ère, patrimoine sur lequel il n’avait
rien reçu.
Le subrogé-tuteur du légataire soutint que la réduc
tion du legs universel ne pouvait être demandée par la
dame et le sieur M o llin , qu'autant que ce qui leur
avait été donné serait insuffisant pour leurs droits
dans la réserve légale, et q u e , pour vérifier ce fa it,
il fallait réunir fictivement aux biens existans au décès
du testateu r, ceux que ses héritiers avaient reçus
pendant sa vie.
Il fut pris de part et d ’autre divers autres chefs de
conclusions qui sont étrangers à la discussion actuelle.
L e tribunal adopta le système que lui présentait la
daine M o l l i n ? refusa, pour déterminer la réduction
du legs universel, de réunir fictivement les biens
donnés à la masse des biens existans au décès du tes
tateur, et ordonna que ce legs serait réduit au tiers
seulement des biens existans.
�f k
l
( g }
Cependant la dame Mollin fut soumise, envers son
frère, au rapport des 48>ooo francs qui lui avaient
été constitués ; mais on ne l ’obligea pas à rapporter
le domaine de Naute. L ’estimation de ce domaine fut
néanmoins ordonnée, mais dans le but unique de
diminuer encore le legs fait au petit-iils Peyrachon^
de toute la plus-value q u ’aurait le domaine au-dessus
de 12,000 francs ( i) .
( i ) Voici lo texte du jugement sur la question :
E n c e q u i t o u c h e la d e m a n d e e n p a r t a g e f o r m é e p a r les é p o u x M o l l i n ,
A ttend u que nul ne peut ôtre contraint de demeurer dans l ’indivi
sion ; que dès-lors un cohéritier a droit de forcer son cohéritier, ou
tout autre détenteur des biens de la succession , à quelque titre que ce
çoit, de venir à partage de ces mêmes Liens;
Attendu que Jean-Pierre Pcyrachon père n’a fait aucun acte duquel
011 puisse tirer la conséquence, qu ’ il a abandonne la succession pater
n e lle , pour s’en tenir an legs qui lui avait été fait par son père; qu ’ une
semblable option ne peut résulter que d’ un acte fôrmel fait au greffe
ilu tribunal ; qu ’on n’en produit aucun de cette’ espèce ;
A ttendu que les cohéritiers du sieur Jcan-Picrre P cyra ch on , voulant
procéder à la division des biens délaissés par c e lu i - c i , ont dû y appeler
Jean-Picrrc-Augustin Pcyrachon , son légataire; qu'il est impossible de
procéder au partage d ’ u n e B u c c e s s io n hors la p r é s e n c e d ’ une personno
intéressée à cc partage.
E n cc qui touche le rapport, à la masse de la somme des q u arantehuit mille francs donnés à la daine M o llin , réclame par le mineur
Pcyrachon ,
Attendu que des dispositipns du Code c i v i l , il îésnlle que le rapport
¡est nue obligation imposée par la loi à l’héritier, du remettre dans Ifi
succession les choses q u ’ il a reçues entre-vifs directement ou indirocjuent, de la part du défun t, pour ¿tic partagées entre tons les héritiers;
A t t e n d u q ue cette o b l i g a t i o n
,
fondée sur
1«
présomption q u e le don
�(
9
)
L e principal motif de la décision est puisé dans une
fausse application des règles sur les rapports, notam
ment de celle qui déclare que le rapport n’est dû q u ’au
n ’avait été fait à l ’héritier, qu’à titre d ’avance sur ce qu’ il devait re
cueillir dans la succession, a pour principal objet de rétablir entre tous
les héritiers l ’égalité qui est dans le vœu de la loi ;
Attendu que cette vérité résulte de l ’article
843 , qui déclare que
tout héritier, même bénéficiaire, venant à une succession, doit rap
porter à ses cohéritiers tout ce qu’ il a reçu du défunt par donation
en tre-v ifs, directement ou indirectem ent, à moins qu ’ il lia it été e x
pressément dispensé du rapport;
Attendu que de ce principe constant et bien reco nnu , il suit qu ’ il
n’y a que le cohéritier qui puisse demander à son cohéritier le rapport
du don entre-vifs qu ’ il avait reçu du d é fu n t, puisque lui s e u l a droit à
la faveur de la loi et au maintien de l ’égalité; que cette conclusion est
encore corroborée par les dispositions claires, précises et formelles de
l ’article
85^ du Code c iv il, ainsi conçu ; « L e rapport n’est dii que
ic par le cohéritier ci son cohéritier ; il n'est pas du ni a u x légataires
« ni a u x créanciers de la succession ». E t la Cour suprême a consacré
ce principe par son arrêt du
3o décembre 1 8 1 6 , dans la cause entre les
frères Davier et les sieurs Villeniorc et L e c l c r c , rapporté par S ire y ,
tome 17 , pages i 53 et suivantes.
Attendu , en f a i t , que le mineur Peyrachon n’est pas le cohéritier de
la dame Mollin ; qu ’il est étranger à la succession , dans laquelle il ne
recueille que ce qui lui a été transmis par la libéralité de son grandpère ; q u ’ il ne peut dès-lors invoquer le bienfait d ’ une loi qui n’a
d ’a u tre
objet que de rétablir l’égalité parmi les cohéritiers du sang.|
Q u a n t à la d e m a n d e e u r ap p o r t d e c e t t e s o m m e ,
f or mée p a r le sieur
P e y r a c h o n pè r o ,
A ttendu qu ’ il est le cohéritier de la dame M o llin , et qu ’en celle
qualité il peut exiger le rapport du don entre-vifs qui lui a été tait
par l’uutcur commun ; que tel est le vœu des articles 843 et
Code civil.
857 du
�(
10
)
*
cohéritier, et qu ’il n ’est pas (lu aux légataires ni aux
créanciers de la succession.
Le tribunal n’a pjis réfléchi q u ’il ne s’agissait pas
En ce qui touche la réclamation de Jean-Pierre P eyra ch o n , tendant
au rapport à la masse du domaine de la Naute,
Attendu q u e , lors du contrat de mariage de la dame Mollin , le père
de celle-ci ne lui constitua qu ’ une dot de la somme de cinquante mille
francs; qu ’à la vérité, il se réserva, ou à scs héritiers, la faculté de
payer la moitié de celte dot en fonds ou en argent ;
Attendu que de la réserve de cette faculté, 011 ne peut induire
que les biens qui seraient donnés en paiement seraient dotaux, parce
qu il résulterait de cette induction , que la nature de la dot de la daine
M ollin n’aurait pas été certaine, et qu'elle aurait pu varier au gré de
son père ou des héritiers de c e lu i- c i, ce qui répugne au caractère de la
dot , qui d )it être déterminée par le contrat de maiiage ;
Attendu que toute interprétation doit disparaître devant les termes
môme de l ’acle dans lequel on lit que ledit Jean-Pierre Peyrachon
donne et constitue en dot à sa fille la.som me de cinquante mille fra n cs ;
q u e , par ces expressions, la nature et le caractère île la dot sont fixés
d ’ une manière absolue; q u ’on ne peut y apercevoir qu’ une dot mobi
lière; que si h: constituant s’est réservé le droit (le payer une partie de
cette dot eu immeubles, c ’est une condition qu ’ il a imposée à son
g e n l t e , et a laquelle celui-ci a acquiescé; q u ’ il serait difficile de con
cevoir l’exécution de cette clause entre le sieur Peyrachon père et sa
fille, puisque, dès 1 instant où le inanpge était accom p li, elle nVtait
plus habile à recevoir do ses mains les fonds qu’il aurait voulu lui
donner en paiement ;
A t t e n d u q u ’on 11e p e u t v o i r d a n s c c l t o c la u s e q u e la f n cul l é d e p a y e r
a ve c des i m m e u b l e s u n e d ot m o b i l i è r e ; q u e si tel est le v é r i t a b l e p o i n t
d e v u e sous l eq u e l on d o i t la c o n s i d é r e r ,
il s ' ens u i t q u« l ’ i m m e u b l e q u i
a ét é d o n n é en p a i e m e n t d e la s o m m e d e d o u z e m i l l e francs n ’est pas
d o t a l , d ’après
1rs
di s posi t i ons d u p a r a g r a p h e 2 d e l ’a r t i c l e
1 553 d u
C o d e c i vi l ;
A tleu du que la vérité de cette proposition acquiert un nouveau degré
�de juger une question de rapport, mais une question
de réduction; que le légataire n ’était pas demandeur
en rapport, mais défendeur en réduction; et q u ’il
d'évidence, par le mode d ’exécution de cette clause, entre les paities
qui l ’avaient consentie. Il n’est pas contesté que le sieur Peyraclion
père ait remis et cédé à son gendre la propriété du domaine de la
N a ute, en paiement de la somme de 12,000 francs qu’ il lui devait pour
payer la totalité de la dot qu’ il avait constituée à sa fille ; le père
Peyraclion avait donc entendu que la dot de sa fille était constituée en
a rg en t, mais qu ’il avait la faculté d’en payer une partie en immeubles ;
le mari l ’avait entendu de m êm e; ils ont exécuté l’ un et l ’autre cette
c onvention, dans le sens qu’elle présente naturellem ent, et de la ma
nière qu ’ils l ’avaient composée l'un et l’autre; et peut-il y avoir une
règle plus contractante dans le inoilo de sou exécution?
A ttendu néanmoins qu ’il est soutenu que la valeur du domaine de la
Piaule s’élève à la somme de 24,000 fr. , tandis que cet immeuble a été
cédé à M. Molli» , pour acquitter une somme de 12,000 fr. ;
Attendu q u e , s’il était vrai que cet immeuble fût réellement de la
valeur de s j ' 000 fr. , ou de toute autre supérieure valeur de celle de
12,000 f r . , il s’en suivrait que le père Peyraclion aurait exercé envers
M . Mollin une libéralité qui excéderait le montant du paiement qu ’ il
a voulu faire, libéralité qui aurait réduit d’ autant la faculté que lui
accordait la loi de disposer d’ une partie de ses biens;
Attendu que , pour déterminer si le sieur Peyraclion , de la succession
duquel il s’agit, n ’a pas dépassé les limites que la loi lui avait assignées,
il est important de connaître la valeur du domaine de la Mutile........
I->e t r i b u n a l .............................. o r d o n n e q u e , jinrJVIiW. P a n e l i e r , d u l i e u
d e P a n e l i e r , c o m m u n e d e S a i n t - V o y ; M a t h i e u a î n é , d e la v i l l e d e l i a s ,
e t Jîreiias, île lu v i l l e d ' I> s i ng e a u x , e x p e r t s - gé o n i èl r e s ......... , il sera p r o
c é d é à la visite e t e s t i ma t i on des i m m e u b l e s délaissés p a r d é f u n t J e a n P i e r r e P e y r a c l i o n , en c e non c o m p r i s le d o m a i n e d e l a f t a u t e , céilé
p a r ce d e r n i e r à M. Mollin , en p a i e m e n t d e l a somme d e 12,000 f r an c s ,
pour savoir si lesdits immeubles , dont ils ser ont t e nu s d e r a p po r t e r
�( 13 ;
n ’exigeait pas un rapport réel pour prendre une partie
de la chose donnée, mais seulement une réunion fictiv e
pour juger si l’héritier à réserve avait déjà reçu tout
ce que la loi lui assurait.
L e subrogé-tuteur du légataire a interjeté appel
d ’un jugement par lequel les droits de son pupille
étaient sacrifiés.
L ’appel a été dirigé contre les deux héritiers à réserve.
L a Cour aura à examiner si ces héritiers, auxquels
il n’a pas été fait de don en précip ut, ont le droit
de faire réduire un legs, pour obtenir plus des deux
tiers du patrimoine de leur père, quoique cette quotité
seule leur soit attribuée par la loi.
l ’é t a t , consistance et v a l e u r , peuvent sc partager commodément en
portions égales, sinon avec soulte ; e t, dans le cas où la division puisse
avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux , pour en être a ttr ib u é , par
la voie du sort, et par-devant le juge-commissaire, un à chacun des
copartageans , M arie -G cn evièv e , Jean-Pierre et Jean-Pierre-Augustin
Peyrnclion , légataire. Lcsdits experts seront tenus de présenter les l>nses
de 1 estimation, et d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits
biens , depuis le décès du père Peyraolion ;
Déclaré n y avoir lieu d’accorder a n l é g a t a i r e le rapport à la masse de
la somme de .(8,000 fr. , payée par ledit défunt Peyrachon à la dame
Mollin , sa fille ; ordonne que cette somme sera rapportée à l’égard de
Jean-Pierre Peyraclion, cohéritier;
Déclare ce dernier non recevablc dans sa demande en rapport à la
masse du domaine de la K a u l c , cédé par le défunt à M. Mollin , pour
compléter la dot qu’ il avait constituée h sa fille ; ordonne nussi q u e , par
les mêmes experts, ¡1 sera procédé à l'estimation de lu valeur de ce do
maine, a dater du jour de la remise qui en a été faite à M. M ollin, p ou r,
sur leur rap p ort, élrc statué co qu ’ il appartiendra........
�( ,3 )
A consulter seulement les principes, la négative de
cette proposition ne paraîtra pas douteuse.
Si l ’on considère aussi les termes de la constitution
dotale faite à la dame M o llin , on sera de plus en plus
étonné de son succès en première instance.
Les principes anciens et nouveaux sont en harmonie
parfaite sur la question.
On sait que la réserve légale est aujourd’hui ce
q u ’était la légitime autrefois. L ’une et l ’autre ont les
mêmes caractères, sont fondées sur les mêmes m otifs,
ont reçu de la loi la même destination.
L a réserve légale, comme la légitime, est une portion
du patrimoine du père, que la loi attribue aux enfans,
et dont il ne lui est pas permis de les dépouiller.
La réserve légale, comme la légitime, est une dette
du père, destinée à fournir des alimens aux enfans.
L a réserve légale, comme la légitime, n’admot ni
mode, ni terme, ni conditions.
Elles ne diffèrent entr’elles que par le nom et par
la quotité.
Aussi vo it-o n , dans les discours des législateurs,
que la réserve légale a été établie à l ’image des légi
times fixées soit par le droit romain, soit par la
coutume de Paris; que les discussions ont roulé seule
ment sur sa q u o tité ; et que le Code civil a adopté,
sauf quelques modifications, la quote légilimaire réglée
par la coutume de Paris, qui avait mis une balance
�( 4 )
plus égale entre le droit de propriété et les devoirs de
famille (i).
Aussi remarque-t-on , dans les procès-verbaux du
conseil d ’E t a t , relatifs à la rédaction du Code civil.,
que la réserve légale est appelée légitime (2).
S ’il y a identité de cause et de nature entre la
légitime d ’autrefois et la réserve légale actuelle, ce qui
a été reconnu vrai dans la législation ancienne, relati
vement à la légitime, doit être appliqué, sous la
législation nouvelle,
C Jest en effet un
les cas semblables, il
In casibus omissis 3
à la réserve légale.
aphorisme de d ro it, q u e , dans
doit y avoir semblable décision.
deducenda est norma legis à
sim ilibus. (B a co n , aph. 115 D u p in , Principia ju r is
civilis prolegomena.')
O r , si nous examinrvis les principes anciens, on
reconnaîtra que l ’eufant légitimaire, quoique dispensé
du rapport envers 1111 étranger, était cependant tenu,
même à l’égard de celui-ci, d ’imputer sur sa légitime
ce q u ’il avait reçu précédemment de la libéralité de
son père.
La décision devait être différente dans les deux cas,
parce que les règles sur les rapports, et celles sur
( 1 ) V o y e z l’arliclo
do c c l l o coultunc.
(a) N ota. O u lit notam m ent, dans le procès-verbal do la séance du
rj pluviôse an 1 1 , ces oxpressions :
« JjO conseil d l'-tal adopte en p r in c ip e , cpie l(i Icgitimc ne pourra
(t être iïappéo ilo substitution. *
�l ’im putation, appartenaient à deux ordres distincts
d ’idées et de principes.
Les règles sur les rapports avaient leur fondement
sur l ’égalité naturelle des enfans dans la succession de
leurs ascendans (i).
Ut liberis tum m asculini quam fe m in i seæûs...........
cequd la n ce, p a n que modo prospici possit : hoc
etiam œquitatis studio, pressenti legi credidim us inserendum , ut in dividendis rebus ab
functoriun parentum ,
intestato de-
tcim dos r/ucim antè nuptias
donatio confcraiur. L . 1 7 , C . de C ollât.
Si le m otif d’équité qui avait dicté la règle ne se
rencontrait pas, le rapport n ’avait pas lieu.
Ainsi le rapport n’était dû q u ’entre enfans cohéri
tiers, et h ceux-là seulement qui avaient ces deux
qualités (?.).
Tous les auteurs anciens s’accordent à professer cette
doctrine, et à reconnaître que le rapport n’est dû ni
aux légataires ni aux créanciers de la succession.
Les règles sur l ’imputation n ’étaient pas les mêmes.
L ’imputation pouvait être exigée par un donataire
ou légataire étranger, toutes les fois q u ’un légitimaire,
qui avait déjà reçu du défunt une libéralité, deman
dait, pour obtenir sa légitime, le retranchement du
don ou du legs fait à l’étranger.
(1) Voyez D om at, Lois civiles , titre (lit rapport, scct. 1 " , art. i tr!.
(a) Voyez D o m a t , Lois civiles, i l i d } scct. 1 , ait, 1 , 3. -
�Cette règle était la conséquence d ’un autre principe
qui n’autorisait l ’enfant à quereller les dispositions
faites par son père, q u ’autant que la dette de la nature
ne lui avait pas été p a yé e, et q u ’il était privé de tout
ou de partie de sa légitime.
In quartam parlent a d excludendam inojficiosi
(juœrelanij tant dotem quàm antè nuptias donationem
prœfato modo volum us im putari, siexsub sta n tid ejus
p rofecta sit de cu ju s hœreditate agitur ( L . 29, C . de
inojf. testant.
Tous les auteurs s’accordent aussi à décider que
l ’enfant doit imputer sur sa légitime ce q u ’il a reçu
du père, à moins q u ’il n’en ait été expressément dis
pensé par celui-ci.
U n grand nombre, et des plus recommandables ,
examinent la question même qui a été jugée dans la
cause; et leur décision est absolument contraire à celle
du tribunal d ’Issingeaux.
Dumoulin la résout dans une courte note sur les
articles 10 et 11 du chapitre 27 de la Coutum e du
Nivernais.
L article 10 pose le principe du rapport des dons à
la succession.
L ’article 11 établit deux exceptions : l ’une quand
l’enfant donataire renonce à la succession ; l ’autre
quand le don lui est fait en préciput.
Sur cette dernière exception , Dumoulin fait observer
que, dans le cas prévu, l’enfant même, en se portant
héritier, n’est pas tenu de rapporter : i)uia tune
�(
'7 )
succedenclo non lenetur conferre. Mais il ajoute
aussitôt que l ’exception disparaît, c’est-k-dire, que le
rapport est d û , si la légitime des autres enfans est
atteinte, et si l ’enfant donataire réclame lui-méme sa
légitim e, par la voie du retranchement sur une dona
tion ou sur un legs. F a lh t , quatenhs ahorum liberorum légitima lœderctur. Item f a l h t , u t se m p e u
TENE 4TUR IMPÜTARE IN LEG1 TIMAM3 SI OPÜS SIT (i).
« Il est impossible, dit un auteur- m odern e, de
« mieux marquer la différence q u ’il'!*y a' entre le
« ' rapport simple à une succession à laquelle on vient
« comme héritier, et le cas d ’une attaque dirigée
« contre un don ou un legs, pour faire ordonner une
«’ déduction pour la légitime (2). »
Ricard, dans son Traité des D onations, après avoir
démontré que l ’incompatibilité des qualités de dona
taire et d ’ héritier, et l ’obligation du rapport ont lieu
seulement entre les enfans, et non pas à l ’égard des
étrangers (3) , examine si le légataire étranger peut
exiger que le don fait à l’enfant s’impute sur la légitime
q u ’il réclame (4).
i
Il indique les raisons contre cette imputation ,
raisons q u ’il puise dans les règles du rapport.
(1) Voir lcsn o tcstlc Dumotilin *ur Icsarticlescit<5s, dans le C oatum ier
tonic 3 , p o ^ o 1 x S s .
*
g e n t 1r a l ,
(•*) Truitc des Donations, par M. G re n ie r , edition iu- 4 ° , tome a ,
page 337.
,
;
,
( 3) l’ artle x1* , chap.
{\) Garlic
3
3 , sect. i 5.
3 ‘ chap. 8 , scct."i 1 , n « 1 1 54 et suivang.
!
�( 18 )
Mais il se décide eu faveur du légataire. Y o ic i eu
quels termes
« Mais encore que cette doctrine (de la dispense du
rapport à l ’égard d ’un étranger) pût être véritable
dans un raisonnement exact, et q u ’il semble q u ’il
. y ait d’autant plus de lieu de la réduire à cet effet,
que nous sommes dans une matière extrêmement
favorable, néanmoins il faut considérer d ’un autre
côté q u ’il s’agit d ’une grâce extraordinaire , que
la loi n ’a introduite que sous des conditions qui
sont entr’autres d ’imputer et de tenir compte par les
enfans des libéralités q u ’ils ont reçues de leur père;
et , en effet , si nous considérons quels ont été
l ’origine et le m otif de la querelle d ’inofficiosité,
nous trouverons q u ’elle n’a été inventée que pour
réprimer les libéralités immenses des pères, dans
les
rencontres
auxquelles ,
ayant
méprisé
leurs
iferifans,' ils s’étaient épuisés en laveur des étrangers;
si bien-que, lorsque cet oubli ne se rencontre pas,
et que le père a employé une partie de ses libéralités
envers scs enfans, il est bien raisonnable que l ’action
que la loi leur a mise en main diminue à proportion
q u ’ils ont été reconnus par leur père. E t si notre
première proposition avait lieu, il s’ensuivrait q u ’un
fils, comblé de bienfaits par son père, ne laisserait
pas de pouvoir contester les moindres et les plus
légères donations q u ’il aurait faites, et d ’en de
mander le retranchement; si bien que cette obliga
tion d ’imputer les avantages reçuç à la légitim e,
�(
r9
7^
)
« étant si fort de la substance à l ’égard de qui que
« 'ce so it, il n’y a pas d ’apparence de prétendre que
«r nous en ayons tiré l'usage du droit romain, sans
« cette circonstance qui lui est si essentielle : aussi la
« pratiquons-nous de la sorte sans contredit. » •
M. Lebrun traite aussi la question5 e t, après avoir
développé, comme Ricard, les motifs que les principes
sur les rapports peuvent fournir contre l ’imputation ,
il ajoute (1) :
« Il faut dire néanmoins que des héritiers étrangers
a ont droit, comme des enfans qui sont institués
a héritiers, de faire faire l ’imputation sur la légitim e,
«
«
«
«
parce que la querelle d’inofficiosité, et la demande
delà légitime sont un droit extraordinaire, qui 11e doit
avoir lieu que lorsque le père, ou n ’a point du tout,
ou n ’a pas assez considéré son san g, et quand il faut
« que la loi vienne au secours de la n a tu r e , et q u ’elle
« supplée au défaut de l ’affection paternelle : Q uia
« ju d ic iu m patris le x su pp let, dit Godefroy
« loi S i totas C) j
C . D e in of.
donat .
sur la
Ainsi cette
« action n ’a point lie u , quand le père a rempli les
« devoirs naturels; et il serait fort injuste q u ’un fils,
«
«
«
«
comblé des bienfaits de son père, vint accuser son
t e s ta ie n t , et donner atteinte à do légères libéralités,
dont le père aurait voulu reconnaître l ’amilié de
quelqu’un. »
(1) Voir L ebrun , îles Successions, tome i " , li Y. a , cliap.
n°‘ 4 et
5.
3 , sect. 9 ,
�(. 2 0 )
Espiai’d-D usaux, dans ses Observations sur L e b ru n ,
enseigne la même doctrine.
Argou, dans ses Institutions au droit français, après
avoir dit que le père peut disposer des deux tiers ou
de la moitié de ses bien s, selon le nombre de ses enfans,
soit en faveur de l ’un d ’eu x, soit en fa v e u r d ’ un
étranger, fa it, en parlant de la légitim e, la remarque
suivante :
i
j
.
« Sur quoi les enfans doivent, parmi nous, imputer
« tout ce q u ’ils ont reçu de la libéralité du père ou
« de la mère ( i) . »
Fçrrières, sur la coutume de Paris; Furgole, dans
son Traité des testamens; Pothier, dans son Traité
dfcs Donations entre-vifs, expriment la même opinion;
L apeyrère, pour le parlement de Bordeaux; Duperrier, pour celui de Provence; d ’O live, pour celui de
Toulouse, attestent l ’ usage admis dans ces parlemens, de
faire imputer sur la légitime ce que les enfans ont reçu
de leur père par donation entre-vifs, « soit q u ’il l ’ait
« ainsi expressément ordonné, ou q u ’il n ’en ait point
« parlé du t o u t , remarque d ’O live; car bien que la
« donation ne soit point conçue en termes qui puissent
« induire l’im putation, la Cour, toutefois, à l ’exemple
« de ce grand Papinien , estime que la pensée du
«< donateur est étendue plus avant que l’écriture :
« P lu s diettim minus scriptum . »
INI. M erlin ,
q u i,
dans son Répertoire, rappelle
(i)Iustitutions au droit français, liv. a , chap.
de la dixième ¿dition.
> tome i ' r , page
3/P
�plusieurs de ces opinions, et qui atteste la jurispru
dence uniforme des tribunaux français, sur ce poin t,
s’exprime ainsi :
« 11 faut considérer la chose donnée au légitimaire^
« comme existant dans la succession , et supposer
« ensuite q u ’il l ’en tire en vertu de la volonté du
« défunt; ce qui amène nécessairement cette consé« quence, que Vimputation ne peut en être éludée
« p ar quelque prétexte que ce soit ( i). »
Telle était, à l ’instant où le Code civil a p a r u , la
doctrine généralement adoptée par les auteurs et par
les trib un au x, doctrine qui distinguait le rapport de
l ’im putation; doctrine qui ne permettait pas au léga
taire de demander à l ’enfant donataire le rapport de
la chose donnée, pour en prendre une partie, mais
qui l ’autorisait à soutenir que la valeur du don fait
à l’enfant devait s’imputer sur sa légitim e, et q u ’il
fallait q u ’il y eût insuffisance pour que le legs fût
réduit.
Cette doctrine, aussi équitable que constante , at-elle été renversée par le Code civil?
Pour le supposer, il faudrait rencontrer dans la loi
nouvelle les dispositions les plus claires et les plus
fo rnielles.
O r, q u ’y trouve-t-on, et quels articles ont invoqués
les premiers juges?
On y trouve des règles sur les rapports; et les ar( i ) Voir au mot L ég itim e} section 8 , paragraphe 3 ,-art. a , u°
4*
�(
22
)
ticle s' 843 , 8^7 sont les seuls q ü ’on ait invoques k
l ’appui d ’un nouveau système,
;
!» n ¡ ' il
■'J'xr
Mais ces articles ne disent rien de plus que ce^tjue
disaient les lois anciennes. r
'
•
L ’un déclare que tout héritier, venant h. partage,
doit rapporter k la succession le don q u ’il a reçu, s’il
ne lui a été fait e n p ré cip u t.
L ’autre ajoute q u e le rapport n ’est pas dû au créan
cier ni au légataire.'
'•
’
aw.»
Tout cela était vrai autrefois comme aujourd’hui :
la loi nouvelle n ’est q u ’une copie fidèle du droit
antérieur.
Ces articles ne disent pas que l ’ héritier naturel peut
faire réduire le legs fait h ¿un étranger, sans imputer
sur la portion héréditaire q u ’il réclame, les donations
q u ’il a reçues.
La question même ne peut être résolue dans des
articles qui ne traitent que des rapports, parce q u ’elle
a moins trait à un rapport q u ’à une réduction.
- C ’est dans les articles qui fixent la quotité dispo
n ib le, qui établissent une légitime ou une réserve
légale, qui autorisent les cnfatis q u ’un père injuste a
dépouillés de cette réserve ii la réclamer; c’est dans
les articles qui accordent aux enfans l ’action en re
tranchement, et qui en règlent le mode et les condi
tions, que doit être cherchée la solution de la difficulté.
O r , si nous considérons cette partie de la loi, nous
verrons q u ’elle autorise la disposition de la moitié, du
tiers, ou du quart des biens du disposant, selon q u ’il
�laisse à son tîécès un seul enfant légitim e, cru deux,
ou un-plus grand nombre ( Y . Code civil, art. 9 13 .)
L a réserve est donc restreinte, suivant les cas, k la
moitié, aux deux tiers ou aux trois quarts des biens.
C ’est de cette réserve seulement q u ’il n ’est pas
permis de disposer au préjudice des enfans.
C ’est cette réserve q u ’ils ont le droit de réclamer
par la voie du retranchement, s’ils en sont privés par
des libéralités excessives.
Mais si les libéralités n’excèdent pas la quotité dis
ponible , si les portions que conservent ou que re
cueillent les enians suffisent à la réserve légale, l ’action
en retranchement ne saurait être admise.
E t quelle opération ordonne la' loi pour vérifier si
le père, par une aveugle générosité, a excédé les bornes
q u ’elle lui prescrivait? L ’article 922 nous l ’apprend.
« La réduction se détermine en formant une masse
« de tous les biens existant au décès du donateur ou
« testateur. On y réunit fictivement ceux dont il a
« été disposé par donations entre-vifs,
d ’après leur
« état à l’époque des donations, et leur valeur au
« tems du décès du donateur. On calcule sur tous
« ces biens, après en avoir déduit les dettes, quelle
« est, eu égard à la qualité des héritiers q u ’il laisse,
« la quotité dont il a pu disposer. >»
La règle est positive; elle veut que tous les biens
du d éfu n t, ceux même dont il a disposé à titre gratuit
pendant le cours de sa v ie , soient, sinon rapportés,
au moins réunis fictivement à ceux q u ’il laisse à son
�l
(= 4 )
décès', pour ne former q u ’une seule masse de patrie
moine, sur laquelle on calcule la quotité dont il a pu
disposer.
Alors s i , dans les libéralités entre-vifs ou testamen
taires, il y a eu excès de la quotité disponible, la
réduction est faite ; s’il n’y a pas eu excès, les libé
ralités sont maintenues.
Telle était l ’opération que devait ordonner le tri
bunal d ’Issingeaux; telle est celle q u ’on lui deman
dait; telle est celle q u ’il a refusée, quoique la loi la
prescrivit impérieusement. Il l ’a refusée sous le plus
vain prétexte. Les règles sur les rapports ne s’appli
quaient pas à la question. Il ne s’agissait pas d ’un
rapport réel, mais d ’une réunion fictive; et qu o iqu ’il
paraisse y avoir quelque analogie dans les deux cas,
on y reconnaît une différence sensible, pour peu q u ’on
réfléchisse. Lorsqu’il y a rapport réel, celui qui l ’a
exigé et qui l ’a o b te n u , prend part dans la chose
rapportée -, il en prive le donataire. Mais par une
réunion fictive, le donataire n’est-privé de rien; il
conserve la chose donnée; elle n’est réunie que par un
simple calcul, pour faire connaître le patrimoine entier
du donateur, en déterminer la valeu r, et vérifier ainsi
ce dont il a pu disposer au préjudice de ses en fans.
E t remarquons que celte réunion purement fictive
est ordonnée par la lo i, dans tous les cas possibles.
Quels que soient les donataires, étrangers ou successibles ? les libéralités q u ’ils ont reçues doivent servir à
�(
»5
)
former la masse destinée à calculer la quotité dis
ponible.
A in si, pour savoir si le sieur Peyrachon père avait
excédé cette quotité, l ’on devait former une masse
générale, soit des objets légués au sieur Peyrachon fils,
soit de ceux compris dans le legs universel, soit enfin
des biens donnés précédemment, et par conséquent de
la dot constituée à la dame Mollin.
La valeur de cette masse étant déterminée, on en
aurait distrait,
i° les sommes ou les valeurs données
à la dame Mollin ; 20 celles léguées au fils P eyrach o n ,
pour le tiers que la loi lui réservait.
On aurait examiné ensuite si le surplus du patri
moine excédait le tiers dont la loi permettait la dis
position .
E n cas d ’excès, le legs eût été réduit.
S ’il n ’y avait pas excès, le legs eût du être exécuté
sans modification.
Cette opération simple , la seule juste , la seule
légale, ne pouvait convenir à la dame M ollin, parce
q u ’il en serait résulté la preuve q u ’elle était en
possession du tiers du patrimoine du père, de ce tiers
que personne ne lui d isp u ta it, de ce tiers, seule
quotité que lui réservait la lo i, puisque le défunt n’a
laisse ([iic deux enlans.
L lle a voulu conserver la dot q u ’elle avait reçue,
et obtenir encore le tiers du surplus; elle a soutenu
et a eu le bonheur de faire penser aux premiers juges
que sa dot ne devait pas-s’imputer sur le tiers qui
4
�( 26 )
lui était réservé par le C od e; c’est-à-dire q u ’après
avoir reçu de son père sa portion de la réserve > elle
a prétendu q u ’elle lui était due une seconde fois en
vertu de la loi.
Cette prétention est contraire à notre législation, à
la doctrine de tous les auteurs nouveaux, aux clauses
même du contrat de mariage de la dame Peyrachon.
A ce que nous avons déjà dit sur les termes et le
sens de la loi, il suffira d ’ajouter quelques réilexions.
Si les législateurs ont établi une réserve légale, c’est,
comme nous l ’avons déjà remarqué, dans le but de
prévenir l ’erreur ou la passion d ’un père q u i , mécon
naissant ses devoirs envers ses enfans, les priverait de
son patrimoine entier, pour verser scs bienfaits sur un
héritier de son choix. Guidée par le vœu de la nature,
la loi a créé la légitime ou la réserve, comme une
créance des enfans sur les biens de leurs auteurs. Elle
a d ’ailleurs autorisé ceux-ci à disposer à leur gré du
surplus de leur fortune. O r , un père qui constitue
une dot à sa fille, doit être , ainsi que tout autre
débiteur, présumé avoir voulu acquitter la dette dont
il ne lui était pas permis de s'affranchir, plutôt que
faire une libéralité purement gratuite : Nem o liberalis
nisi liberatus. Cette présomption ne cesse que lors
q u ’une volonté contraire a été exprimée, c’est-à-dire,
lorsque le don a été fait en préciput.
Comment d ’ailleurs supposer q u ’un père, qui a
versé ses bienfaits sur l ’un de ses enfans, ait voulu
le dispenser de lui en* tenir com pte, lui permettre de
�(
27 )
l'accuser de ne pas avoir rempli ses devoirs, et lui
laisser le droit de faire réduire ses autres dispositions,
et de demander une légitime entière comme s’il n ’avait
rien reçu?
9
L ’action en réduction n ’est accordée à l ’enfant, que
comme un secours contre l ’injustice ou l ’aveuglement
du père, et comme un moyen de réparer les torts
de celui-ci. Si le père a été juste et éclairé, si l ’on ne
peut lui reprocher aucun tort, il n’y a pas de répara
tion à ordonner, et l ’action en réduction disparait.
Enfin le droit des enfans à la réserve est un droit
sacré, sans doute; mais celui des pères sur le surplus
de leurs biens est également respectable; et ne seraitce jias l ’anéantir, que d ’autoriser l ’enfant, déjà comblé
des bienfaits de son père^ à disputer encore à un tiers
une faible partie de la quotité disponible?
C ar quel serait l ’efFet d’un tel système?
L e père de deux enfans, après avoir leur donné
entre-vifs les neuf dixièmes d ’une grande fortune ,
ne pourrait cependant disposer à son gré du dixième
qui lui resterait. Il serait tenu d’en réserver les deux
tiers aux deux enfans déjà si riches de ses libéralités.
Une telle conséquence, résultat nécessaire de l ’opi
nion de M. Mollin , en rend l ’erreur palpable.
Aussi les auteurs nouveaux ont-ils reconnu le prin
cipe de l ’im putation, en l ’appliquant à la réserve
comme les auteurs anciens l’appliquaient à la légitime.
M. Malleville , dans sou Analise du Code civil >
�( ^8 )
enseigne celle doctrine, précisément sur cet art. 857,
q ui a fourni à M. Mollin son principal argument.
Voici comment s’exprime ce magistrat, q u i, comme
011 le sait, a concouru à la rédaction du Code :
« Si un enfant prétendait faire retrancher une do« nation ou un legs , comme ne trouvant pas sa légitime
« ou sa réserve dans les biens libres, sans doute les
« légataires ou donataires seraient en droit d ’obliger
« cet enfant à tenir compte de ce q u ’il a reçu; mais
« ce n’est pas Iti ce q u ’on entend par rapport. »
Les auteurs des Pandectes françaises énoncent la
même opinion sur le même article 8^7 :
« Il y a cependant un cas où il se fait une sorte de
« rapport par l’hérilier donataire à d ’autres qu a des
« cohéritiers : c’est celui où il demande le retranche« ment des legs ou des donations, pour compléter sa
« légitime. Comme il doit alors imputer sur sa légi« lime les choses q u ’il a reçues lui-même, et que les
« legs ou donations ne souillent de retranchement
« que pour ce qui manque sur sa légitime après cette
« imputation , l’enfant donataire fait une espèce de
« rapport de ce qui lui a été donné, aux légataires
« et donataires étrangers, quoiqu’ils ne soient passes
« cohéritiers. »
lie savant auteur du dernier Traité des Donations
et Testainens, distingue aussi les principes qui con
cernent l’action en réduction d ’un legs universel, pour
le parfournissement de la légitim e, de ceux qui ont
�( . » ,
r t f :
traitl simplement au rapport. On remarque clans sa
dissertation les expressions qui suivent :
« Dans le cas de la demande tendant à faire distraire
« d ’un legs universel la portion nécessaire pour com« poser la légitime, il n ’est pas un au teu r, au moins
« de ma co n n a issa n ceq u i n’ait enseigné, en s’expli« quant d ’après les principes mêmes dans lesquels le
« Code civil est con çu, que tout ce qui était donné
« par le défunt à celui qui réclame une légitime par
« voie de réduction , devait être imputé sur cette
« légitime, même quand la demande en réduction ou
«
«
«
«
«
retranchement pour la légitime (ce qui doit avoir
lieu aujourd’ hui pour la réserve) serait dirigée
contre un étranger qui serait légataire universel. Ce
q u i, dans ce cas particulier, exclut l'application .des
principes concernant les rapports, c’est la nécessité
« de concilier le droit de disposer, accordé par la lo i,
« avec le devoir q u ’elle impose de laisser une partie
« de ses biens à quelques-uns des héritiers. Si ce
« devoir est rempli en entier, la disposition ne doit ’
« être réduite que proportionnellement à ce qui peut
« manquer pour compléter la réserve (i). »
Cette uniformité d ’opinions démontre la vérité de
la règle de l’imputation; elle est en harmonie d ’ailleurs
avec les lois,’ les autorités et la jurisprudence, qui ,
( i ) Voir le Traite des Donations, par M . G re n ie r , édition i u - 4 ° >
tome 2 , page
334 -
�1 ^
( 3o )
dans l ’ancien droit, obligeaient le légitimaire a déduh'e
sur sa légitime les dons q u ’il avait reçus. O r, l ’on sait
que les lois anciennes et nouvelles se prêtent un mu.tuel secours pour la décision des cas non expressément
prévus par l ’une des législations. Leges priores ad
posteriores trahuntur et è contra. On se rappelle aussi
la maxime que nous avons déjà citée : In casibus
omissis deducenda est norma legis à sim ilibus.
Mais dans la cause, on pourrait se dispenser d ’avoir
recours aux règles générales, qui ne sont nécessaires
que dans le silence des actes de libéralité.
E n effet, la question est décidée par le contrat
même qui contient la constitution de dot.
On se rappelle les termes de cette constitution.
D ’un côté, le sieur Peyrachon père avait stipulé
q u ’une partie de la dot ne serait payable q u ’après
son décès, ce qui indiquait assez q u ’il ne la donnait
que pour tenir lieu à sa fille des droits q u ’elle aurait
un jour dans sa succession,
D ’un autre côté, il exigea d ’elle une renonciation «
tous scs droits le'gitiniaires paternels et maternels.
N ’était-ce pas interdire formellement à la daine Mollin
le droit de réclamer une portion de la réserve légale?
N ’était-ce pas lui annoncer clairement que son père
entendait disposer du surplus de ses biens, sans q u ’il
lui fut permis d ’attaquer les dispositions?
La dot fut le prix de la renonciation. Comment la
dame Mollin pourrait-elle conserver la dot, et rétracter
la renonciation? Si elle refuse d’exécuter la convention,
�n ’est-il pas juste q u ’elle en restitue le prix ; q u ’elle le
rende au patrimoine du père, dont il avait été tiré,
ou q u ’elle l ’impute au moins sur les droits légitimaires
q u ’elle avait promis de ne jamais réclamer?
Ainsi la loi du conti’at de mariage suffirait pour
décider la cause, et pour faire rejeter les prétentions
exagérées de la dame Mollin.
Combien ne doit-on pas être surpris de la double
erreur des premiers juges? Ils ont méconnu tout à-lafoiset les règles ordinaires de l’imputation, qui devaient
dicter leur jugem ent, et la convention écrite, qui ne
permettait pas a la dame Mollin de retenir sa dot en
réclamant ses droits légitimaires! Cette erreur est trop
grave pour ne pas être réparée par la Cour.
Les motifs que nous avons développés peuvent s’ap
pliquer à l ’imputation de la valeur réelle du domaine
de Naute, comme a celle de la partie de la dot qui a
été payée en argent.
S ’il est v r a i, comme on l ’assure, et comme cela
paraît avoir été reconnu par toutes les parties, que ce
domaine fut d ’un prix beaucoup au-dessus des 12,000 fr.
pour lesquels il a été délaissé, la plus-value doit aussi
être imputée sur les droits légitimaires de la dame
Mollin.
E n valu dirait-on que le domaine a été délaissé h
M. Mollin, non à son épouse, et q u ’il n ’appartient
pas à celle-ci.
Plusieurs réponses écarteraient l ’objection.
i° Elle n’est pas justifiée; car l ’acte de délaissement
�n ’est pas rapporté. Il ne paraît pas même q u ’il ait été
produit en première instance; et cependant il serait
important à connaître ;
20 L e délaissement f u t - il fait au m ari, s’il y a
vilité dans le p r ix , et si l ’on doit considérer la plusvalue comme une vraie libéralité, au moins doit-on
reconnaître aussi que c’est envers sa fille, et non en
vers M. M ollin, que le sieur Peyrachon aurait entendu
se montrer généreux; q u ’ainsi la libéralité devait être
attribuée à celle-ci, et par conséquent être imputée
sur les droits q u ’elle réclame ;
3 ° C e t t e i m p u t a t i o n s e r a i t d ’ a u t a n t p l u s équitable,
que si le père, par un délaissement d ’immeubles , a
réellement augmenté la dot promise, il n ’a fait à sa
fille et à son gendre cette seconde libéralité, que parce
q u ’il a pensé qu e, fidèles à remplir la condition à
laquelle ils s’étaient soumis, ils ne réclameraient pas
leurs droits légitimaires.
A ujourd’hui q u ’ils se jouent de cette condition ,
pourquoi conserveraient-ils l’avanlage de la plus-value
du domaine que leur a cédé le sieur Peyrachon père?
Ce domaine, comme la dot payée en a r g e n t , doit être
réuni à la masse du patrimoine pour déterminer la
quotité disponible, sauf, après la fixation de celte
q u o tité, à ]\I. Mollin et à son gendre, à retenir l’ar
gent cl le domaine, en les imputant sur le tiers qui leur
revient dans le patrimoine entier.
Mais n’ordonner l ’estimation du domaine de N aule,
comme le porte le jugement dont est appel, (pie pour
�diminuer le don fait au légataire, c ’est blesser à-lafois et les règles du juste, et l ’intention* évidente du
sieur Peyrachon père.
Quoique principalement dirigée contre la dame
M ollin, la discussion à laquelle nous nous sommes
livrés s’applique aussi au sieur Peyrachon son frère.
Si la dame Mollin doit imputer sa dot sur sa portion
dans la réserve légale, c’est-à-dire sur le tiers du pa
trimoine du père, son frère ne doit pas lui-m êm e
obtenir la moitié de cette dot et le tiers du surplus
des biens; car il aurait plus que la loi ne lui attribue,
et le légataire serait privé d ’une partie de la quotité
disjionible.
L e jugement doit donc aussi être réformé à l ’égard
du sieur Peyrachon fils.
Au reste, celui-ci avait approuvé le testament, et
l ’avait même exécuté , en 1 se mettant en possession
du legs qui lui avait été fait pour sa portion dans la
réserve légale. Cette circonstance présente un moyen
de plus contre la décision du tribunal d ’Issingeaux.
Il serait superflu de réfuter l ’application d ’un
arrêt de cassation, du 3 o décembre i8 i( î, cité dans
les motifs du jugement. L ’arrêt est étranger à la
cause. Il d é c i d e que le légataire d ’une quote déter
minée , c’est-à-dire du quart des biens de la suc- *
cession j
ne peut exiger le rapport des dots ou des
avancemens d’hoirie, pour prendre le quart, même
des objets rapportés.
5
�( 34 )
La difficulté n ’était pas celle qui nous occupe. Il
s’agissait d ’un rapport r é e l, qui tendait à priver les
donataires antérieurs d ’une partie de la chose donnée,
et non d ’une réunion fictive, destinée seulement à
faire connaître la quotité disponible. L e légataire
n ’était pas attaqué en réduction;
au contraire, il
voulait augmenter le legs, du quart de tous les dons
précédemment faits. Ce n’est donc que par confusion
de principes, que l'on a pu assimiler les deux questions.
Egarés par les règles sur les rapports , les premiers
juges n ’ont pas remarqué q u ’ils se jetaient dans une
fausse route, et q u ’ils avaient à juger seulement une
question de réduction.
Ils ont oublié q u ’un legs,
quelque considérable q u ’il f û t , ne devait pas être
r é d u it, s’il n’exçédait point la quotité disponible. Ils
se sont mis en opposition directe avec le texte même
du droit français, qui ordonne la réunion des biens
donnés aux biens existans lors du décès du testateur,
pour calculer la valeur de la quotité dont il lui était
permis de disposer. Ils ont ignoré aussi ce grand
principe d ’équité et de justice, qui ne permet pas aux
enfans d ’attaquer les dernières volontés d ’un père,
lorsque celui-ci n ’a pas négligé lui-même scs devoirs,
et lorsqu’il leur a payé la dette de la nature et de la
loi. E n fin , méconnaissant le vœu de la législation
n ou velle, qui
protège également , et le droit des
enfans à la réserve q u ’elle a é ta b lie , et la faculté
de disposer accordée aux pères, mais restreinte dans
de justes bornes, ils ont créé un système qui rendrait
�(3 5 )
■ ■w
cette faculté illusoire, et qui autoriserait les enfans,
quoique enrichis, par les bienfaits du père, de la plus
grande partie de son patrimoine, à faire réduire à
son décès les libéralités même les plus modiques,
dictées par l'affection ou commandées par la recon
naissance.
Me ALLEMAND, Avocat.
M* GAYTE-LARIGAUDIE, Licencié-Avoué.
R I O M , I M P R I M E R I E D E S A L L E S , P R È S L E P A L A I S DE J U S T I C E .
-
,
■r
�
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Titre complet : Mémoire pour le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, arrondissement d'Yssingeaux, en qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre Peyrachon, fils mineur, habitant de la même ville, appelant ; contre dame marie-Geneviève Peyrachon et monsieur Jean-Antoine Mollin, juge au tribunal civil d'Issingeaux, son mari, de lui autorisée, habitans de la Ville d'Issingeaux, intimés ; et contre sieur Jean-Pierre Peyrachon, rentier, habitant en la ville de Tence, aussi intimé.
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
35 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2519
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2520
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53505/BCU_Factums_G2519.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine de)
Rights
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Domaine public
experts
gain de survie
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
-
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f2bdb61e87702c60506dae495bb99ac7
PDF Text
Text
ff
■ÿr m
memoire
EN REPONSE,
P O U R M. J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat,
au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs l
habitant de la ville d ’Yssingeaux; intim é.
�MEMOIRE
COUR ROYALE
DE RIOM.
EN R E P O N S E ,
Ir
P O U R M . J e a n - A n t o i n e M O L L I N , ancien Magistrat, .
au nom et comme tuteu r de ses enfans mineurs ,
habitant de la ville d ’Y ssingeaux, in tim é
*r
{ 9 X%
CONTRE
L e S ieu r J e a n - M a r t i n
R O C H E R , N é g o c ia n t , ^ ~
habitant de la ville de T e n c e , en q u a lité de subrogétuteur de J e a n - P i e r r e - À u g u s t i n P e y r a c ho n , appelant;
EN PRÉSENCE
«
D u S ie u r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n Propriétaire t
habitant la v ille de T e n c e , aussi intimé.
S
i la loi a mis des bo rne s à
la
faculté
q u ’elle
a c c o r d e a u x pères de disposer de le ur s b i e n s , à titre
g r a t u i t , c ’ est p r i n c i p a l e m e n t d a n s l ’ i n t é r ê t des enfans.
/
�, r
( 2 )
C ’est, cl’un autre c ô t é , pour maintenir l ’égalité
V
entre les héritiers, et sur-tout entre les enfans, appelés
à la même succession, que la loi a ordonné le rapport
des dons q u i leur ont été faits , s’ ils n ’ont pas été
expressément dispensés de ce rapport.
Ma is , d ’après les principes même qui l ’ont fait in
troduire, le rapport ne peut être exigé par le donataire
ou légataire, étranger à la succession.
C e point n ’est pas contesté.
O n ne veut pas moins en éluder l ’application 5 et ,
pour y parven ir, on veut faire distinguer l ’action en
r a p p o r t , de l ’aclion en im p u t a t io n .
C e n ’est pas, d il -o n , le r a p p o r t de la dot par elle
reçue, et du domaine qui lui a été abandonné en
jjiienient d ’ une partie de cette d o t , q u ’on a demandé
ïîtcjp- madame Mo llin.
L a loi faisait en sa faveur une
l*. * réserve dont elle ne pouvait être privée par les dispo^
* ^
"
*\
sitions gratuites du sieur Peyrachon , son père. L e
legs fait en faveur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon
doit recevoir son exécution ju s q u ’à concurrence de
cette réserve et de celle du sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
autre enfant; mais, pour compjti/fcr la ré se rv e de ma
dame M o l l in , il faut d ’abortl im p u t e r le montant de
sa dot et l ’excédant de valeur du domaine qui a été
délaissé à son mari.
On arriverait ainsi, pour Jean-Pierre-Augustin P e y
rachon , légataire, au même résultat que s’il pouvait
obtenir le rapport do la dot constituée à jMm'! Mollin.
L e legs iait eu faveur de Jean-Pierre Peyrachon 11c
�(3 )
peut comprendre, aux termes mêmes du testament du
sieur Peyrachon p è r e , que le tiers des biens existans
dans les mains de celui-ci à l ’ époque de son décès.
Il
ne peut être question , dans aucun cas ,
de
Y im putation de cette dot; et madame Mollin ou ses
enfans doivent obtenir leur droit de réserve sur les
biens dont le sieur Peyrachon est mort saisi, tout en
conservant la dot que le sieur Peyrachon lui avait
constituée.
A u moins ,
madame Mollin et
ses enfans
de
vraient toujours retenir l ’excédant de la valeur du
domaine de la Nau te , si cet excédant ex i s te , et est
réputé lib é r a l i té , à valoir sur la quotité disponible des
biens du sieur P e y ra ch o n , le d é l a i s s e m e n t d e ce d o
m a i n e , en p a i e m e n t de la d o t , devant etre considéré,
q u a n t à l ’excédant, comme un don .en pr éc ip ut ; cequi restreindrait d ’autant le legs fait à Jean-PierreAugustin Peyrachon.
C ’est ce que nous espérons étab l ir , avec le secours
d ’ une législation qui a eu principalement en vue les
héritiers à réserve, saisis de plein droit de la succession,
quelles que soient les dispositions fai tes pour les en
écarter; avec le concours d ’ une jurisprudence qui tend,
avec raison , lorsque la loi n ’a pas de prohibition for
m e l l e , à préférer, à des l é g a t a i r e s étrangers, ceux pour
lesquels les l i e n s du sang et les droits de la nature
semblaient être une recommandation suffisante, dans
l ’exercice de la faculté donnée h l ’ homme de substituer
aux héritiers que la loi appelait, des héritiers de son
choix.
�(4)
\ »
B u reste,
l ’avantage q u ’on veut obtenir pour le
mineur Peyraehon tient à la décision d ’un point de
' . ,.
droit 5 et l ’on doit s’en rapporter aux lumières des
magistrats q ui doivent prononcer.
Mais le mineur Peyraehon a cherche en ou tre , ou
l ’on a cherché dans son in térêt, à détourner toute la
fortune mobilière du sieur Peyraehon.
C ’est l ’objet d ’un autre procès pendant én la C o u r ,
et dans lequel figure un sieur abbé Merle, qui aurait
participé aux soustractions et enlèvemens dont les
h é r i t i e r s légitimes se sont plaints.
N ’é t a i t - c e p o i n t a s s e z , p o u r le m i n e u r Peyraehon ,
de recueillir, au préjudice de son père et de sa tante,
»
le tiers des biens de la succession de son aye ul?
FAITS.
L e sieur Jean-Pi erre P e y r a e h o n , ancien juge de
paix du canton de T e n c e , a e u , de son mariage avec
Marguerite Rocher ,
trois
enfans , savoir : Marie-
Geneviève , Jean-Pierre et Augustin.
M a r g u e r i t e H o c h e r est d é c é d é e ' l a p r e m i è r e .
A u g u s t i n P e y r a e h o n est m o r t q u e l q u e t e m s a p r è s .
M a r ie -
Geneviève Peyraehon a contracté
mariage
avec M. Jean-Antoine M o l l i n , juge au tribunal civil
d ’Yssingeaux.
L ’acte réglant les conditions civiles de ce mariage
est en date du 12 iloréal an i 3 .
L e régime dotal est d ’abord stipulé.
�(5 )
L e sieur Jean-Pierre Peyra ch on, pére de la futu re,
lui donne et'constitue en dot la somme de 5 o,ooo f r . ,
dont 2000 fr. du chef de Marguerite R oc h er, alors
décédée, et le surplus du chef paternel.
L a somme de 25 ,ooo fr. doit être payée en dettes
ou obligations à réquisition, et d après 1 clat à faire
entre les parties. « Les autres 2^,000 f r . , est-il d i t ,
« seront payables en fonds ou a r g e n t , par qui de
« dro it, après le décès du donateur, et sans inté rêt,
« et même par anticipation, en tout ou en partie »
L a future se constitue de son ch ef, et du consente
ment de son père, la somme de 1000 francs pour son
trousseau.
Il est stipulé un gain de survie en faveur de la
future.
Suit immédiatement la clôture de l ’acte, avec la
mention des signatures des parties et des témoins.
« Déclarant ladite f u tu r e , est-il ajouté après cette
« clôtu re , que dans ladite constitution maternelle,
« qui est mobilière, sont fixés et compris les droits
« qui peuvent lui revenir du chef d ’Au gu stin Pe yra « chonson
frère, dont le tiers se porte à 5oo f r . ,
« et q u ’elle renonce à tous ses droits légitimantes
« paternels et maternels. »
C e c o n t r a t est passé sous le C o d e c i v i l .
L a déclarai ion qui le termine est insignifiante; elle
devrait d ’ailleurs, en la forme, être considérée comme
non écrite.
E n paiement du premier terme de la dot de son
�(0)
épouse, M. Mollin a reçu du sieur Peyraclion , son
b eau-p ère , le ro mai i 8 o 5 , des effets* et créances,
ainsi que quelques héritages, céd és et rem is pour la
somme de 5 ooo f r . , ju s t e v a le u r desdits fo n d s .
L e second terme a été anticipé. L e 20 juin
i
8i 3
,
le sieur Peyraclion a remis à M. Mollin des titres de
créances, pour la somme de i3 ,o o o fr. ; « et pour les
« 12,000 f r . , restant de ladite d o t , lit-on dans l ’acte,
« je,
Peyrachon , ai remis et cédé,
en propriété,
« l ’entier domaine de la N a u te audit sieur M ollin,
i< a cc epta nt, pour le m onta nt desdits 12,000 francs,
« d u q u e l domaine il n ’entrera en j o u i s s a n c e cju après
« le décès d u sieur P e y r a c l i o n , qui s’en réserve les
« fruits pendant sa v i e ; et, au moyen de tout ce que
« dessus, et sau f le paiement desdites créances, ledit
« Peyrachon sera libéré de rentière dot de sa fille. »
L e sieur Peyrachon avait un attachement particulier
pour madame Mollin , q u ’il honorait d ’une entière
confiance.
Il
est inutile , pour la
cause a c t u e l l e ,
d ’entrer dans des explications à cet égard. Il suffira de
dire q u e , par un premier testament olograph e, en
date du i3 juin i8i3 , le sieur Peyrachon av;rit légué,
sur la portion disponible de ses liions, à Jean-PierreCiiarles M o llin , son petit-fils et filleul, son domaine
du P e ic h e r , et avait donné le surplus de cette portion
disponible à Jean-Pierre-Martin-Alphonse P e y ra c h o n ,
un des enfans de Jean-Pierre Peyrachon , son fils.
Ce
n ’ont
pas
été les
dernières dispositions du
sieur Peyrachon : inutile encore de dire comment et
�( 7 )
par les suggestions de q u i elles ont ¿té changées. L e
sieur abbé Merle joue ici un
rôle peu h o n o rab le ,
comme dans toutes les circonstances q ui ont précédé,
accompagné et suivi la mort du sieur Peyraehon.
'
Qu oi q u ’il en soit, le sieur Peyraehon a fait u n
second testament olographe, sous la date du 3 o mars
1819.
i° L e testateur révoque et anmille toutes les dispo
sitions q u ’il pourrait avoir faites antérieurement ;
20 II fait quelques legs p i e u x , à. acquitter p a r c e lu i
q u i aura la partie disponible de ses bien s3 q u i d e
meure aussi chargé de ses honneurs fu n èb res ;
3°
Il donne à Jean-Pierre P ey ra eh o n , son fîls aîné,
le domaine de F o u r n e t, un pré et un bois, et c e y
p o u r lu i tenir lieu du tiers de ses biens que la lo i lu i
accor de y
4 ° « Je déclare reconnaître, porte le testament,
« pour mes p e ti t s-en fan s, M a r i e - G e r m a i n e , Jean« P ierre-A u g u stin et J e a n - P i e r r e - M a r t i n - A l p h o n s e
« Peyraehon ,
ces trois e n f a u s issus du mariage do
« mondit fils avec feue Maric-Germaine Deiguas ; e t ,
« au surplus de tous mes autres biens meubles et
« immeubles, noms, droits, voies, raisons et actions,
« je les d o n n e e n p r é c i p u l e t a v a n t a g e ,
hors p a r t e t
« p o r t i o n , e t sans r a p p o r t , à Jean-Pierre-Augustin
« P e y r a e h o n , m o n p e t i t - f i l s , l ’a î n é de mond it lils et
« de la défunte d e m o i s e l l e Deiguas, pour lui tenir
« lieu de la portion disponible de mes bie ns, que je
�(8 )
« lui don ne, à la charge par lui d ’exécuter le contenu
« au présent testament, et de payer mes dettes. »
L e testament se termine par la déclaration, de la
part du testateur, que ses meubles et effets ne sont
de v a le u r que de cent cinquante fr a n c s .
C ett e déclaration était-elle un moyen q u ’on cher
chait à se ménager, pour écarter tous reproches d ’enlèvemens et spoliations?
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon est décédé le 9 mai
1819.
U n a c t i f considérable en deniers et en c r é a n c e s avait
été dét ou rn é, d a n s l ’ i n t é r ê t , san s d o u t e , de JeanPierre-Augustin Peyrachon : on veut bien croire que
le sieur abbé Merle n ’y avait aucun intérêt personnel.
L e 18 mai 1819, M. e t M meMoIlin présentent requête
au tribunal d ’Yssingeaux, et ils obtiennent une ordon
nance portant permission de faire des saisies-arrêts,
jusques à concurrence de la somme de 3 o,ooo f r . , entre
les mains de diiférens débiteurs désignés, et de tous
autres qui
pourraient
être
découverts.
La
même
o r d o n n a n c e , a t t e n d u ‘que les intérêts de .Tcan-Pierre-
A u g u slin
Peyrachon ,
encore
m ineur ,
peuvent se
trouver en opposition avec ceux d u sieur Jean-Pierro
P e y r a c h o n , son père,
autorise M. et M me Mollin à
provoquer la nomination d ’un subrogé-tuteur.
Suivant procès-verbal du 4 j n ‘ n !8i9> le sieur JeanMartin llocher a été nommé subrogé-tuteur du mineur
P e y r a c h o n , par le conseil de fumillo.
�Des saisies-arrêts ont eu l i e u , et elles ont été suivies
de demande en validité.
Peu de jours après., et le 11 juin
1 8 1 9 , M. et
M me Mollin ont saisi le tribunal d ’Yssingeaux d ’ une
demande en p a r t a g e de la succession du sieur JeaiiPierre Peyraclion.
C ett e demande est formée contre le sieur JeanPierre Peyraclion fils, et contre le sieur R o c h e r , en
sa qualité de subrogé-tuteur de Jean-Pierre-Àugustin.
Peyraclion.
Il est annoncé que les biens de la succession, indé
pendamment des immeubles légués au sieur Peyraclion
pour son tiers, consistent dans plusieurs m aiso ns,
domaines, rentes, e l dans le s titr e s e t p a p ie r s que
Jea n -P ieire- A u g u s t i n Peyraclion remit en dépôt à
M e Cham pagnac j notaire à T e n c e , avec le testament
de son a y e u l, et dans les promesses et sommes ré
clam ées contre les siciu's a b b é M erle et R o c h e r , en
sa dite q u a lité > et que le m ineur P e y r a c lio n , d ’in
telligence avec le sieur M erle , pretre, ont transfoi'mées en b illets p a y a b les au p o rteu r, dont ils sont
restés saisis.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle sont égale
ment assignés pour rapporter à la masse tout ce q u i
a clé détourné avant la mort du sieur Peyraclion et
pendant sa maladie, même de son consentement} pour
rendre toutes les sommes remises en leurs mains, ainsi
que tous les billets et promesses souscrits, par suite
des changemciis opérés, au 110111 du sieur Merle ou de
�Jean-Pierre-Augustin P eyra ch on, ou stipulés 'payables
au porteur , desquels billets et promesses ils ont été
n a n tis , et qui étaient primitivement au nom du sieur
Peyrachon père.
M. et madame Mollin concluent enfin à ce que le
sieur Peyrachon , en qualité de tu teur légal de JeanPi erre-A ugustin, et le sieur Ro ch er, en qualité
de
subrogé-tuteur, ne puissent être envoyés en possession
des biens com pris en
l ’ institution f a it e p a r Jean-
P ierre P eyrachon j prem ier du n o m , en fa v e u r de
J e a n -P ierre-A u g u stin j son p etit f i l s , que de con for
m ité à la loi.
L ’affaire étant engagée devant le tribunal d ’Yssingeaux, des faits de soustractions et spoliations ont été
précisés d ’une manière plus particulière, par M. et
madame M ollin, et ils en ont offert la preuve. Préala
b l e m e n t , l ’abbé Merle et le subrogé-tuteur ont subi
interrogatoire sur faits et articles, en vertu de jugeincns des 12 juillet et 9 novembre 1819.
M. et madame Mollin ont soutenu que le legs fait
en f a v e u r d e J e a n - P i e r r e - A u g u s t i n
testament du
3o mars 1 8 1 9 , 11c
P e y r a c h o n , p a r le
p o u v a i t lui donner
droit q u ’au tiers des biens dont le sieur Peyrachon
père était mort en possession \ et que pour déterminer
la quotité disponible à l ’égard de ce légataire , qui
était étranger à la
succession, 011 ne devait point
comprendre dans la masse la somme de 48,000 francs,
montant de la constitution de dot laite à la dame
�( 11 )
'/
M o l l i n , dont le rapport ne pouvait être du q u ’au sieur
Jean-Pierre P e y r a c h o n , cohéritier.
L e subrogé-tuteur du mineur Peyrachon a demandé,
par application des articles 920 et 922 du Code civil,
que la f i x a t i o n de la quotité dont le sieur Peyrachon
père avait pu disposer, fut faite sur une masse c o m
posée to u t à-la-fois des biens existans à son décès, et
des immeubles et sommes d ’argent dont il avait dis
posé de son vi va n t; et , par suite , que Ton comprit
dans la masse, soit la somme de 48,000 f r . , montant
de la constitution de dot faite à la dame M o llin , soit,
q uan t à l’excédant de v a le u r , le domaine de la N au te ,
donné en paiement, sur le montant de la d o t , pour
la somme de 12,000 f r a n c s , et a y a n t u n e v a l e u r beau
coup plus considérable, d ’après le subrogé-tuteur et
le sieur Jean-Pierre Pey ra chon , q u i , de son c o t é ,
demandait le rapport du domaine même de la Naute.
L e sieur Jean-Pierre Peyrachon a adhéré, d ’ailleurs,
aux conclusions de M. et madame Mollin , et à celles
du subrogé-tuteur, en tant q u ’elles avaient pour objet
d ’augmenter la masse de la succession, h laquelle il
était appelé pour un tiers. L e subrogé-tuteur lui op
posait q u ’ il était censé avoir renoncé à cette succession,
en acceptant le legs à lui fait par le testament, eu
jouissant et prenant la possession des objets q u i lui
avaient été légués.
L e sieur abbé Merle s’est réuni au subrogé-tuteur
pour coutester les enlèvemens et spoliations articulés
�par M. et madame Mollin; il a particulièrement conclu
à la suppression des écrits signifiés par M. et madame
M o llin , comme lui étant injurieux.
E n cet état , le tribunal civil d ’Yssingeaux a rendu,
le 7 juin 1820, un jugement contradictoire dont voici
le dispositif (1) :
« L e tr ib unal, après avoir entendu M. le substitut
du
procureur du Roi,
et
en avoir délibéré en la
chambre du conseil ,
« Ordonne que par les sieursPannelier, Mathieu aîné,
et B renas, experts-géomètres, que le tribunal a nommés
d ’o f f i c e . . . . , il sera p r o c é d é à la v i s i t e e t e s t i m a t i o n des
immeubles délaissés par défunt Jean-Pierre Peyrachon,
en ce non compris le domaine de la N a u t e , cédé par
ce dernier à M. M o l l in , en paiement de la somme de
,12,000 francs, pour savoir si lesdits immeubles dont
ils seront tenus de rapporter l ’état , consistance et
v a l e u r , peuvent se partager commodément en portions
égales, sinon avec soultc; et, dans le cas où la division
puisse avoir lieu , ils en formeront trois lots égaux ,
pour en être att ri b ué, par la voie du sort, et
par-
devant le juge-commissaire, un à chacun des eo-partageailS, Marie-Gencvièvo, J e a n - P i e r r e et Jean-PierreAu gust in P e y r a c h o n , légataires; lesquels experts se
ront tenus de présenter les bases de re s t i m a l io n , et
( 1) I-cs motifs de ce jugeaient sont transcrits dans le M ém oire p u b lié
au nom du sieur Jean-M artiu R o c h e r , su brogé-tuteur , pages 8 c l
suivantes »
�( -3 )
d ’estimer encore les restitutions de fruits desdits biens,
depuis le décès du père Peyrachon ;
« Déclare n ’y avoir lieu d ’accorder au légataire le
rapport à la niasse de la somme de 48,000 f r . , payée
par ledit défunt Peyrachon à la dame M o l l i n , sa fille;
ordonne que cette somme sera rapportée à l ’égard de
Jean-Pierre Peyrachon , cohéritier ;
« Déclare ce dernier non-recevable dans sa demande
en rapport, à la masse, du domaine de la N a u t e , cédé
par le défnnt à M. Mollin , pour completter la dot
q u ’il avait constituée à sa fille; ordonne aussi que ,
par les mêmes experts, il sera procédé à l ’estimation
de la valeur de ce d o m a i n e , à dater du jour de la re
mise q ui eu a été faite à M. M o l l i n , p o u r , s u r leur
r a p p o r t , ê t r e statué ce q u ’il appartiendra ;
« E t , avant dire droit sur la demande en partage
des meubles dépendans de la même succession, le tri
b u n a l reçoit M. Mollin à prouver, tant par titres que
par témoins, dans le délai de h u i t a i n e , par-devant
M. Massard, jugeîi cet effet commis, les faits suivans :
« Qu e le défunt Peyrachon était reconnu dans le
public pour un grand capitaliste, ayant à sa disposi
ti on, et placée chez différons particuliers, une somme
de 5o,ooo francs, q u ’ il prêtait journellement avec on
sans b i l l e t s ;
« Q u ’il avait un livre-journal oii il énumérait scs
dettes actives, et indiquait sa position avec ses fermiers;
« Q u e , par aveux, et pendant sa maladie, et no
tamment depuis le carnaval dernier ( i B kj ) , le défunt
�avait reçu de ses fermiers, des cohéritiers Boy er, ou
du nommé P e y r o t , plus de 6000 francs en argent ;
« Q u ’ un grand nombre de promesses ou billets ,
souscrits en faveur du d é f u n t , et sous son nom, ont
été convertis en billets au porteur*, que les nouveaux
billets ont été écrits par Jean-Pierre-Augustin Peyrachon,
légataire, en présence de l ’abbé Merle; que
tantôt il était convenu q u ’ils seraient payés à JeanP i e r r e - A u g u s t i n , et tantôt à l'abbé Merle; que JeanPierre-Augustin s’est rendu plusieurs fois chez les dé
b i t e u r s pour leur recommander le secret, et les engager
à déclarer q u ’ ils n e d o i v e n t r i e n ,
et q u e ,
pour y
parvenir, il leur observait que l ’abbé Merle pensait
q u ’ils pouvaient dire avoir payé le d éfun t;
« Qu e depuis le dimanche gras, et pendant tout le.
tems qui a précédé de quinzaine la mort du père
P ey ra ch on , l ’abbé Merle était souvent pendant tout le
jo u r , et ju s q u ’à m i n u i t , dans le domicile du dé f u n t ;
« E t enfin q u e , pendant la maladie et après le décès
de Jean-Pierre P eyra ch on, Jean-Pierre-Augustin } son
petit-fils, a emporté de la maison du premier plusieurs
objets, tels que linge, bouteilles, argent, papiers et
autres effets;
« S a u f audit Jean-Pierre-Augustin Peyrachon et à
l ’abbé Merle leurs preuves contraires, dans le même
d él ai, et par-devant le même commissaire;
« Sursoit à prononcer sur la demande en suppression
de mémoire, déclaration d ’écrits calomnieu x, et eu
�( i5 )
dommages-intérêts, formée par l ’abbé Merle, jusqu a
ce q u ’il aura été procédé en exécution de l ’interlo
cutoire ci-dessus ordonné;
« C ondamne Jean-Pierre-Augustin P ey rach o n , dans
la personne de son subrogé-tuteur, en la moitié des
dépens faits j u s q u ’à ce j o u r , le surplus demeurant
réservé en définitif- »
L e 2 5 octobre 1820, le sieur Rocher, en sa qualité
de subrogé-tuteur, a interjeté appel de ce j u g e m e n t ,
tant contre le sieur Jean-Pierre Peyrachon , que contre
M. et M me Mollin ; mais avec déclaration que V appel
ne portait point sur la
disposition du ju g em en t j
relative à la preuve ordonnée p o u r de prétendues
sp oliation s.
Les parties ont dès-lors procédé en exécution de
cette disposition. Des enquêtes ont eu lieu; e t , par
de nouvelles conclusions, M. et M me Mollin ont de
mandé que le subrogé-tuteur et l ’ abbé Merle fussent
condamnés solidairement à payer et rapporter à la
succession de Je an -Pierre Peyrachon la somme de
5o,ooo fran cs ,. p o u r le numéraire q u ’avait le d é f u n t ,
et pour les sommes retirées par Jean-Pierre-Auguslin
P eyra ch on, ou mises en dépôt chez l ’abbé Merle, ou
enfin détournées par substi tut ion de promesses au
porte ur, h. laquelle somme le légataire serait privé de
prendre part , et ce , indépendamment des objets
énoncés aux t i t r e s confiés à M* C h am p a g n a c , à l ’égard
desquels il serait également déchu de tout droit.
L e subrogé-tuteur et l ’abbé Merle 11’ayant pas cru
�Î^î
( «6 )
.
devoir se présenter devant le tribunal d ’Y ss in geaux,
sur ces conclusions, un jugement par défaut, faute
de plaider, est intervenu le 25 mai 1 8 2 1 , par lequel
la condamnation au rapport de la somme de 5o,ooo fr.
a
été
prononcée solidairement
contre Jean-Pierre-
Àugustin Peyrachon et l ’abbé Merle. Il a été ordonné
que cette somme serait divisée par égale portion, entre
M. et M me Mollin et le sieur Jean-Pierre P e y r a c h o n ,
sans que le mineur Peyrachon pu t y prendre aucune
part. Il a été néanmoins déclaré par le jugement, que
cette privation ne s’étendrait point aux sommes prove
nant des l i t r e s déposés c h e z le n o t a i r e C h a m p a g n a c y
lesquelles seraient p a r t a g é e s e n trois portions, dont
l ’une serait attribuée au mineur.
L e subrogé-tuteur et le sieur abbé Merle se sont
pareillement pourvus en la C o u r contre ce jug ement ;
et il s’agira de savoir,
lorsqu’on s’occupera de cet
app el , s’il est recevable, et très-subsidiairement s’il
est fondé.
Q u a n t à pr és en t, nous n ’avons à. examiner que les
dispositions du jugement du 7 j u i n . 1820, dans les
chefs attaqués; et c ’est à justifier ces dispositions, que
nous allons nous attacher.
�MOYENS.
L
a
principale q ues ti on, la question même unique
qui se présente en ce moment à la décision de la
Cour,
consiste à déterminer sur quels biens Jean-
Pierre-Augustin Peyrachon peut prendre le legs q ui
lui a élé fait par Jean-Pierre P e y ra c h o n , dans le testa
ment du 3 o mars 1819.
C e legs doit-il être borné au tiers des biens existant
lors du décès de Jean-Pierre P e y r a c h o n , c ’est-à-dire,
des biens dont il est mort en possession ?
O u bien ce legs peut-il comprendre le tiers des mêmes
biens, en y réunissant fictivement le m onta nt de la
constitution de dot faite à la dame Mollin par son
contrat de mariage du 12 floréal an 1 3 , et le prétendu
excédant de valeur du domaine de la Naute ; de telle
sorte que Jean-Pierre-Angustin ait le tiers en valeur
des biens existans lors du décès, du montant de la
C o n s ti tu t io n de d o t ,
et de l ’excédant de valeur d u
domaine ?
I l f a u t d ’a b o r d se f i x e r s u r les t e r m e s m ê m e de l a
d i s p o s i t i o n f a i t e p a r J e a n - P i e r r e P e y r a c h o n pè r e .
Après d!flférCng legs, et notamment le legs d ’ un
domaine fait au sieur Jean-Pierre Peyrachon fils, pour'
lui tenir lieu du tiers des biens que la loi lui accorde,
le testateur ajoute : « E t au surplus de mes biens
3
�« meubles et immeubles , je les donne en préciput
« et avantage à Jean-Pierre-Augustin Peyraclio n, mon
« p e t i t - f i l s , p o u r lu i tenir lieu de la portion dispo« niblc de mes biens que j e lu i donne. »
Q u ’entend donner,
sieur Peyraclion
et que donne
réellement le
par cette disposition ? L a
quotité
disponible; et il ne pouvait pas donner davantage :
quotité disponible, déterminée par l ’article
q i
3 du
C od e c i v i l , d ’après lequel les libéralités, par acte
entre-vifs ou par testament, ne peuvent excéder le
t i e r s des biens du disposant, s’il laisse h son décès deux
enfans légitimes*, cas d a n s l e q u e l sc t r o u v a i t le sieur
Jean-Pierre Peyraclion.
L e sieur P e y ra c l io n , testateur, gratifiait donc JeanPierre-Àugustin Peyraclion du tiers do ses biens.
Mais était-ce seulement du tiers des biens dont il
mourrait saisi et v êtu ?
L ’affirmative est sans difficulté.
Il est certain que des objets donnés entre-vifs, des
objets constitués en d o t , sortis de la main du dona
teur ou constituant, ne lui appartiennent plus. Si
postérieurement il dispose de tout ou de partie de ses
b ie ns, sur-tout par un testament qui ne reçoit d ’eiïet
que par sa m o r t , celte disposition ne peut atteindre
les biens dont il s’est déjà dépouillé par des donations
entre-vifs ou des constitutions de d o t , qui ne sont
autre chose que des donations.
A la vérité, les dons entre-vifs peuvent ne pas être
irrévocables, en ce sens q u ’il est des cas oit ils rentrent
�( *9 )
<
dans la succession du don at eu r, pour être soumis au
partage, ainsi que les biens dont le donateur est resté
nanti ju s q u ’à sa mort.
Mais c’est là ce qui constitue le rapport à succession.
A i n s i, c’est par l ’effet du rapport à la succession du
do nateur, que les objets donnés ou constitués en dot
viennent faire partie de la succession, viennent grossir
la masse des biens laissés par le donateur ou consti
t u a n t , afin que ceux q ui ont droit à la succession
puissent avoir leur p a r t , non-seulement dans les biens
existans lors du décès, mais encore dans les biens dont
le défunt avait cessé d ’être propriétaire à titre gratuit.
O r , quel est l ’objet du rapport?
C ’est d ’établir l ' é g a l i t é e n t r e c e u x q u i s o û l appelés
h la s u c c e s s i o n ; et cet engagement des en fans et autres
desceiulans, dit D o m a t , L o is c iv ile s , liv. 2 , l i t . 4 ,
sect.
i rc,
n°
I er,
à remettre dans la masse de l ’ hérédité
de leur père, ou autre ascendant à qui ils veulent
succéder, les choses-à eux données par cet ascendant,
pour être partagées entr’eux et leurs cohéritiers, de
même que les autres biens de l ’ hérédité,
est d ’une
équité toute évidente, qui a son fondement sur l'éga
lité naturelle entre les enfans dans la succession de
ascendans , et sur ce q u ’on présume d ’un lel
don,
n ’a v a i t été fa it <jue p o u r avancer au do
leurs
nataire u n e partie d e ce q u ’il pouvait espérer de l'hé
rédité.//«- titu lu s manifestant habet œ quilalem : loi 1,
il’, de collatione honorum. C e sont les mêmes p r i n c i p e s
qui out die te 1 article 8^3 du, Code c iv il, qui soumet
�Ctf
( 20 )
tout héritier venant à une succession, à rapporter tout
ce q u ’il a reçu du d é f u n t , directement ou indirecte
ment , à moins que les dons et legs ne lui aient été
faits expressément par préciput et hors pa rt, ou avec
dispense du rapport.
Dès que le rapport n ’a d ’autre b u t que l ’égalité
entre cohéritiers, il s’ensuit q u ’il ne devait être or
donné q u ’en leur fave ur, et q u ’il ne pou vait l ’être au
profit de ceux qui n ’étaient point appelés à la succes
sion,
et particulièrement
au profit des légataires,
envers lesquels le cohéritier donataire ne peut être
aucunement obligé.
».Telle a toujours été la règle, que l ’article 8D7 d u
Code civil n ’a fait que consacrer : « L e rapport n ’est
« du. que par le cohéritier à son cohéritier j il n ’est
« pas clù a u x légataires ,
ni aux
créanciers de la
« succession. »
U n e des conséquences
forcées de cette
règle est
q u ’ un légataire, quel q u ’il soit, e t su r- to u t le légataire
de la quotité disponible, ne peut demander le rapport
à l ’enfant ou autre cohéritier donataire, pour prendre
son legs tant sur les objets donnés que sur les biens
de la succession.
C ’est ce q u ’expliquent très-bien , pour l ’ancienne
législation, P o t h ie r , T r a ité des S u ccessio n s, chap. /j,
article a , § (>*, et pour la n o u v e ll e , M. C h a b o t
de
l ’A l l ie r , dans son ouvrage sur les Successions.
« L e rapport étant introduit pour établir l ’égalité
entre les enfuns qui Viennent à la succession de leur
�père 011 mère, ou autres ascendans, dit P o t h ie r ,
il
suit que l ’enfant ne doit le rapport q u ’aux autres
en fans ses cohéritiers : c’est pourquoi nous avons vu
q u ’il ne pouvait être prétendu par les créanciers de la
succession acceptée sous bénéfice d ’inventaire.
« Par la même raison , continue le même a u t e u r , si
un père qui a deux en fans, à l ’un desquels il a fait
une donation entre-vifs, fait un tiers-étranger léga
taire du tiers de ses biens, ce légataire ne pourra pré
tendre aucune part dans le rapport des biens donnés
entre-vifs à l ’un des enfans,-et n’ aura que le iiej's des
biens q u i se sont trouvés lors du d écès. C e u x donnés
entre-vifs à l ’un des enfans, se partageront entre les
deux enfans; car le rapport n ’est ilù q u ’aux enfans
cohéritiers. »
« M. C h ab ot de l ’Allier s’exprime en ces termes, sur
l ’article 857 du C o d e , n° 3 :
« Il est évident que la l o i , en cherchant à établir
l ’égalité, par le moyen du rapport, n ’a eu en vue que
les héritiers du sang, à qui la nature donne en effet
des droits égaux. Il ne peut y avoir aucun m o t if pour
établir l ’égalité à l ’égard des héritiers institués, dés
légataires, des donataires, qui ne tiennent leurs droits
ni de la n a t u r e , ni de la l o i , mais un iquem ent de la
volonté de l'homme. »
. ,.
H . C h ab o t pose ensuile cet exemple :
«Uri père, ayant cinq enfans, a fait à l ’ un d ’eux uil
don en avancement d ’ hoirie, et postviiun cinen t i l ' a
institué un étranger son héritier, ou légataire du quart
�de ses biens. Si l ’enfant donataire vient à la succession,
il fera le rapport de ce q u ’il a reçu ; mais ce rapport
ne profitera q u ’à ses frères et sœurs. L ’ héritier institué,
ou le légataire, n’aura rien à prétendre dans la chose
rapportée, et ne prendra son quart que dans le reste
de la su ccessio n / en sorte que si la succession vaut
4ooo francs,; et que le don fait à l ’un des cnfans soit
de 600 francs, l ’ héritier in sti tué, ou le lé g a ta ire ,
n ’aura le quart que de 34oo francs : les trois autres
quarts et les 600 fr. rapportés par le donataire seront
partagés également entre les cinq cnfans.
C e s p r i n c i p e s s’ a p p l i c f u e n t d i r e c t e m e n t a n o t r e espeCG.
L e sieur Peyrachon
père a légué à Jean-Pierre-
A u g u slin P ey ra chon , son petit-fils, la portion dispo
nible de ses biens, c’est-à-dire le tiers, dès q u ’il avait
deux enfans. L a dame Mollin avait reçu 48,000 francs
en d o t; elle en doit le'rapport, sans difficulté, à JeanPierre P e y r a c h o n , son cohéritier; mais elle ne le doit
point, à Jean-Pierre-Augustin , légataire étranger. C e
légataire ne doit donc avoir que le tiers des biens q u i
se sont trouvés lors du d é c è s , suivant les expressions
de Pot hier.
On cherche, pour le mineur P e y r a c h o n , à écarter
la conséquence qui vient d ’être tirée de la règle que lo
rap/torl n ’est pas dit a u x légataires ,
tinciion.
c'ntro les principes
sur
par une dis-
le rapport et les
principes sur Y im p uta tion .
Sous les anciennes lois, diL-011, l ’imputation pouvait
�( =3 )
être exigée par nn donataire on légataire étranger,
toutes les fois q u ’un légitimaire, qui avait déjà reçu
du défunt une libéralité, d e m a n d a it , pour obtenir sa
légitim e, le retranchement du don fait à l'étranger.
Il y a identité de cause et de nature entre la légitim e
d ’autrefois et la réserve actuelle. Sous les lois n o u
velles, il n’est pas permis de disposer, au préjudice
des enfans , d ’une quotité
d é t e r m in é e ,
qui est la
réserve faite en leur faveur-, et si une libéralité excé
dant cette quotité est faite au profit d ’un étranger,
les enfans ont le droit de la faire réduire; mais cette
réduction doit avoir lieu d ’ après la base déterminée par
l ’art. 922 du C o d e , et les enfans sont tenus d ’imputer
sur la portion ré se rv é e les sommes .et objets q u ’ils ont
précédemment reçus.
On cite , entre autres a u t e u r s ,
D o n a tio n s, partie 3 , cliap.
Ricard (T ra it é des
8., sect.
11,
n° 1 1 5 ) ,
L eb ru n (Traité des Successions, liv. 2, cliap. 3 , sect. 9,
nos 4 et 5 ) , M. Merlin (Répertoire de Jurisprudence,
au mot lég itim e, sect. 8 , § 3 , articles 2 , n° 4 ) , et
M.
Grenier
(T ra it é des D on a tion s
et
T esta m en s,
4e p a r t ., cliap. 2 , sect. 4 , § 2 , n° 5 9 7 . ) — Suivant ces
aut eurs, tout ce qui avait été donné par le défunt à
celui qui réclamait une légitime par voie de réduction,
devait ê t r e impute sur c e t t e légitim e, même quand la
demande e n réduction ou retranchement pour la légi
time aurait, été dirigée contre un étranger, légataire
universel.
Voila sans co nliedil des a u tonlc s bieu imposantes ■
�Wt
( H )
Voyons ju sq u’à quel point elles peuvent
servir au
système dtï‘ subrogé-tuteur du m ineu r Peyrachon.
'■ i° Il ne s'agit pas précisément, dans l ’espèce, d'une
action en réduction ou retranchement.
donation
ou un legs universl avait été
é t r a n g e r , celui
q u i réclamait
une
L o r s q u ’une
fait à un
légitime devait
imputer ce q u ’il avait reçu du défunt : c ’est ce qui
parait résulter assez
positivement
de l ’opinion des
auteurs.
Mais Jean-Pierre-Àugustin Peyrachon n ’a pas reçu
de Jea n -P ier re Pe yra ch on , son grand’père, un legs
Universel d o n t la r é d u c t i o n soit n é c e s s a i r e pour former
ôti completter la réserve de la dame Mollin dans les
biens du testateur. L e mineur Peyrachon n ’a reçu
d ’autre legs que celui de la quotité disponible ; c’est
•
un legs à titre universel. O r , quelle était la quotité
disponible? le tiers des biens existans au décès; car ,
à l ’égard du légataire, le montant de la constitution
dotale de la dame Mollin était irrévocablement sorti des
înains du testateur. C ’est à ce tiers des biens existans
lors du décès, que le mineur Peyrachon a seulement
d r o i t , d ’ a p r è s la d i s p o s i t i o n elle-même, sans q u e la dame
Mollin ait besoin d ’agir e n r é d u c t i o n o u retranchement.
Nous sommes absolument dans l'hyp othèse d ’une suc
cession où il y a tout à-la-fois des héritiers donataires
et un légataire d ’une quotité fixe. On a v u , suivant
Pothier- et M. C h a b o t , q u ’ il y a , dans ce cas, deux
masses distinctes; l ’ une à partager entre le légataire
et les héritiers, et qui ne comprend que les biens esis-
�(» 5 )
M
tans à l ’époque du décès de l ’auteur com m un ; l ’autre
à laquelle ne prennent part que les héritiers, et com
posée des biens existans au décès, distraction faite du
legs ; plus , des objets rapportés
par
les héritiers
donataires.
20 L e legs en faveur de Jean-Pierre-Auguslin Peyrachon fùt-il r é p u t é legs u n iv e r s e l fait sous l ’empire du
Code civil, il ne po urra it, ce semble, jouir des mêmes
S^jntages q u ’il aurait pu avoir sous l ’ancienne^ légisr
lation.
Sans entrer dans un examen approfondi du carac
tère de la légitime ancienne; sans chercher a marquer
tous les points de différence qui existent entre cette
légitime et la ré se rv e l é g a l e a c t u e l l e , d is o n s que la
q u e r e l l e d ’i n o f f i c i o s i t é , inventée pour les cas où ayant,
m éprisé .leu rs e n fa n s, les pères s ’étaient épuisés en
fa v e u r des étrangers} était considérée, en général ,
comme une grâce extraordinaire (ce sont les termes
dont se sert Ricard, à l ’endroit ci té ), que la loi n ’avait
introduite que sous des conditions qui étaient, entre
autres, d ’imputer et de tenir compte, par les enfans,
des libéralités q u ’ils avaient reçues de leur père. L e
brun disait aussi que la querelle d ’ inofficiosité «t la
demande de la légitime étaient un droit extra ord i
naire q u i n c d e v a i t a v o i r li eu q u e l o r s q u e le père, ou.
n ’avait p o i n t du to ut, ou n ’avait pas assez considéré
son sang, et q u a n d il fallait que la loi vint au secours
de la nature, et suppléât au défaut de l ’affection pa
ternelle : Q uia ju d ic iu m p a tris l e x supplet.
4
�'( 26 )
L a réserve, cette portion sacrée, que le Code a établie
en faveur des enfans et ascendans, se rattache à des
idées différentes : les enfans et ascendans ne peuvent
en être privés par quelque disposition que ce soit. C e
sont eux q ui ont la saisine des biens, que le légitimaire n ’avait jamais autrefois. A u x termes de l ’ar
ticle i o i r du Code civil, les héritiers auxquels une
quotité de biens est réservée par la l o i , sont saisis de
lein (]roit de tous les biens de la succession ; et leJ|i|r
universel est tenu de leur demander la déli
vrance des biens compris dans le testament.
C ett e sa is in e est -e lle s o u m i s e à q u e l q u e condition?
L e Code civil, unique lo i qui doive régler la réserve,
oblige-t-il l ’héritier réclamant sa réserve
contre
un
étranger, à imputer ce q u ’ il a reçu de son auteu r?
Les auteurs conviennent, au contraire, que la querelle
d ’ inofficiosité n ’avait été introduite que sous la co n d i
tion de l'imp utation. U n e pareille condition peut-elle
être suppléée, lorsque toute la faveur est du coté de
l ’ héritier h réserve?
E t n ’est-ce pas un principe constant, écrit (Jans la
loi 20, au code, de co lla tio n ib u s, q u ’on ne doit im
puter dans la légitime que ce qui est expressément
soumis par la loi à cette im putation? C e l t e loi établit
d ’abord que tout ce qui est sujet à l ’imputation dans
la légitime, l ’est aussi au rapport dans la succession ;
m ais, suivant l ’explication ajout ée, il ne faut pas en
conclure que réciproquement tout ce qui se rapporte »H
la succession doive s’impu ier sur la légitime. l)ü toutes
�( 27 )
/<
les choses soumises au rap port, on ne doit assujettir à
l ’imputation que celles qui sont exprimées par les lois.
H œ c autem rég u la , ut omma quœ p o itio n i quartes,
com putantur, etiam cib inteslalo conferantur : m inim e
è contrario tenebit3 ut possit quis diccre etiam ilia
quœ con feru n tu r, omnimodb in quartam partem his
c o m p u t a r i q u i ad inojficiosi querelam v oca n tu r. E a
enini tantummodb ecù his quœ co n feru n tu r3 m ém ora tœ portioni com putabuntur, pro quibus specia liter
leg ib u s} ut hoc f ie r e t , expressum est.
3 ° M. Merlin, dans l ’endroit in d iqu é, ne s’occupe
que de la question de savoir si les donations ordinaires
s’imputent sur la légitime, q u ’elles aient été faites ou
non sous c e l t e c o n d i t i o n 5 et ce p o i n t est d i s c u t é en
thèse g é n é r a l e . M . M e r l i n rapporte l'opinion de difi’érens auteurs, et l ’espèce de plusieurs arrêts. C e n ’est
que dans l ’article 3 du même § , q u ’il examine si un.
étranger, institué héritier ou légataire universel, peut
obliger le légilimaire à l ’ imputation de ce q u ’ il a reçu.
L a raison de douter, dit -i l,
est très-plausible. Les
choses exemptes du rapport à la succession le sont
aussi, en général, de l'imputat ion dans la légitime.
Après cette réllexion, INI. Merlin se borne à transe, ire
le sentiment de L e b r u n . O n voit dès-lors q u ’il ne
s ' e x p l i q u e p o i n t sur la réserve actuelle.
#
4" Q u a n t à l'auteur du dernier Traité des D o n a
tions, c’est à l ’occasion d ’un arrêt rendu par la Cour
d ’appel d ’ Agen, le 28 décembre 1808, q u ’ il (ait u n e
dissertation savante sur cette matière. Il indique aussi
�un grand nombre d ’autorités, et s’appuie principale
ment de la distinction faite par D u m o u l i n , sur l ’ar
ticle
ii
du chapitre 27 d e l à C o u tu m e de Nivernais,
entre le rapport simple à une succession à laquelle on
vient comme héritier, çt le cas d ’ une attaque dirigée
contre un don ou un legs, à l ’effet de faire ordonner
une déduction pour la légitime.
Dans l ’espèce de l ’arrêt de la C o u r d ’A ge n, rapporté
dans le Journal de D en ev ers3 i er v o lu m e de 1809,
page 49 du sup p l. , le sieur de Montalambert a v a it ,
par te sta m en t, légué à sa mère la moitié de ses m e u b l e s ,
son a r g e n t e r i e , e t u n e p e n s i o n de 800 f r a n c s ; 1il avait
institué po u r son héritier universel Louis de Montal e m b e r t , son cousin.
L a mère du testateur a tout à-la-fois réclamé le
quart qui lui était réservé par l ’arlicle 91 5 du C o d e ,
et le legs à elle fait.
L ’ héritier institué a soutenu que la mère ne pouvait
cumuler la réserve et le legs, qui ne lui avait pas été
fait à titre de préciput et hors part.
‘
O u voit la similitude q u ’offre cette espèce avec celle
de la cause : la m è r e v o u l a i t ne point r a p p o r t e r a u
mineur le legs à el le f a i t ; la fille v e u t o b t e n i r l a réserve,
indépendamment de la somme à elle constituée en dot.
Eli tyen! la C o u r d ’appel d ’Agen a accueilli la ré
clamation de la mère : «Considérant que les art. 843
et 85 7 du Code n ’assujettissent les héritiers venant à.
succession, à rapporter les donations entre-vifs q u ’ils
ont reçues du d é f u n t , 1 et ne leur interdisent de ré
�.( 29 )
'
clamer les dons h cause de m o r t , ou les legs q u ’il leur
a faits, q u ’a l ’égard de leurs cohéritiers; d ’où il suit
que l'incompatibilité des qualités d ’héritier et de lé
gataire en la même personne n ’est point absolue, mais
seulement
relative à l ’intérêt des cohéritiers;
que
l ’expression cohéritiers, employée dans les articles pré
cités, ne signifie que les héritiers légitimes, et non
les héritiers institués........... ; que l ’objet des rapports
étant de maintenir l ’égalité entre cohéritiers, l ’héritier
in s ti tué, non successible, est non recevable, envers
l ’héritier de la loi , à demander soit le rapport des
donations, soit la compensation des dons et legs avec
la réserve, parce que son titre établit l ’inégaliié, et
q u ’il i m p l i q u e r a i t q u ’il p û t l ’a i d e r , pour m a i n t e n i r ou
pour a u g m e n t e r cette inégalité, des mesures que le
législateur n ’a admises que pour la faire cesser........ ;
que l ’héritier in s ti tué, non successible, tenant tout
son droit du testament, doit prendre ce titre tel q u ’il
est dans son entier; q u ’il peut d ’autant moins inquié
ter l ’ héritier au sujet des legs q u i lui ont été faits ,
q u ’ils dérivent du même titre que l ’in s tit u t io n , dont
ils sont, en quelque sorte, une condition (les dons
entre-vifs sont encore plus favorables), et que le tes
tateur eût pu transmettre à cet héritier sa succession
tout entière, sans blesser en aucune manière les droits
de celui qui se trouve institué; par oii il est évident
que l ’appelant n ’est pas fondé en droit à forcer l ’hé
ritier à opter entre la réserve et le legs. »
M. Grenier, après avoir dit que cette décision n ’est
�( 3o )
.pas, àj beaucoup près, sans difficultés,, discute les
motifs d e - l ’arrêt de la C o u r d ’'Agen, q u ’il trouve en
opposition avec les anciennes règles sur l ’im pu tation ,
anciennes règles non contrariées, d i t - i l , par les dispo
sitions du Code c i v il , et à l ’appui desquelles viennent
les articles 920 et 922.
« A u surplus, ajoute cet a u t e u r, jusqu'à, ce q u ’il
y ait à ce sujet une jurisprudence formée, q u ’il est
impossible de faire résulter du seul arrêt de la C o u r
d ’appel (l’A g e n , la discussion aura l ’avantage de faire
sentir combien il est p r uden t, lorsqu’ on,veut instituer
un l é g a t a i r e u n i v e r s e l , e t q u ’ il y a u n a s c e n d a n t ou
un autre héritier à réserve, auquel on fait un d o n ,
de, s’expliquer de manière q u ’ il résulte de la volonti*
même du disposant, si le don est fait à l ’ héritier qui a
droit de réserve, indépendamment de cette même ré
serve, o u , au contraire, à imputer sur cette réserve,
en tout ou en partie. »
M . Grenier est donc bien loin d ’émettre l'opinion,
q u e , d ’après les dispositions du Code civ il, le donataire
ou légataire, en même tems héritier, doive absolument
imputer le don o u le legs sur la portion que la loi d é
clare indisponible en sa l a v e u r . Il indique seulement
des précautions ju s q u ’à ce r ju il y a it, à ce su je t }
une ju risp ru d en ce fo r m é e .
C et te
jurisprudence existe aujourd’ hui ; et nous
mettrons en première ligne un arrêt de la C o u r de
cassation , considéré comme étant de la p lu s hauts
im portance par les arrêtistes qui l ’ont rapporté.
�(
3i
)
C e t arrê t, qui est en date du 3 o décembre 1 8 1 6 ,
et q u ’on trouve dans le Journal de D e n e v e r s v o l . de
1 8 1 7 , page a 5 , et dans celui de S irey } tome 1 7 ,
page 1 53 de la i re partie ,
a été rendu contre un
héritier à qui la portion disponible avait été léguée
par préciput sur la totalité des biens, et q ui voulait
prendre c e . préciput sur l ’universalité de la succession,
y compris les objets soumis au rapport.
Il s’agissait
du
partage de la succession de Jean
Decour, q u i , en mariant ses trois filles, dans le cours
des années 1791 , 1792 et 1 7 9 4 , leur avait constitué
des dots, sous l ’obligation de rapporter à la succession
du constituant le capital et même les intérêts des
sommes dotales à elles constituées, dans le cas où elles
voudraient venir à partage.
L e 9 juin
1807 , testament de Jean D ec ou r, par
lequel il lègue à ses enfans mâles, avec dispense de
r a p p o r t, le qua rt de tous les biens qui composeraient
sa succession, sans en rien excepter.
S ’étant agi du partage
de la succession du père
commun , les filles y ont prétendu une part égale >.
nonobstant la clause portée en leur contrat de mariage.
Les frères ont demandé q u ’on fit entrer dans là masse
les dots reçues, pour, sur le to u t, être prélevé le
quart à 1<mu- profi t, et les irois quarts resians être
partagés entre tous. Les filles ont répondu (pie le pré
ciput ne pouvait se prendre que sur les seuls biens
qui étaient dans les mains du père au jo ur de son
�(32 )
décès, et non sur les sommes données en d o t , et qui
ne faisaient plus partie des bieris du testateur.
Les frères Decour disaient à leurs sœurs q u ’elles ne
pouvaient toucher au legs fait en leur fa veur , q u ’au
tant q u ’elles ne trouveraient point dans les dots reçues
et dans les biens libres de la succession, leur réserve
légale; et ils leur opposaient, comme le fait le subrogétu teur du mineur Peyrachon , l ’article 922 du Gode
civil , d ’après lequel la réduction des dons et legs se
détermine en formant une masse de tous les biens
existans au décès du donateur ou testateur ,
en
y
réunissant fictivement ceux dont il a été dispose par
donations entre-vifs, et, e n c a l c u l a n t sur tous ces biens,
après en avoir réduit les dettes, quelle est, eu égard
à la qualité des héritiers lé giti m es, la quotité dont le
donateur ou testateur a pu disposer.
L e tribunal d ’A r g e n l an , et la C o u r royale de C a e n ,
par arrêt du 20 avril 1814? ont proscrit la prétention
des sieurs Decour frères; et la C o u r de cassation ,
section civile , a rejeté le pourvoi formé contre cet
arrêt.
Les motifs de l ’arrêt de la C o u r de cassation
\
sont « q u ’en décidant q u ’ un héritier qui est en même
tems légataire, par p r é c ip u t , d u q u a rt
des b i e n s d u
d é f u n t , peut réclamer sa portion v i r i l e , comme héri
tier, sur les sommes qui sont rapportées à la masse de
la succession par les cohéritiers donataires en avance
ment d ’ h o ir i e ; mais q u ’il 11c peut être adm is , cil
qualité de légataire, à prendre une part quelconque
$ur les sommes rapportées, et q u ’en conséquence il
�n ’a droit, en ladite qualité de légataire, q u ’au quart,
par préciput, des biens qui appartenaient au testateur
lors de son décès, l ’arrêt dénonce a fait une juste ap
plication de l ’art. 857 du Code c i v il , et que d ’ailleurs
il n ’a contrevenu à aucun des articles invoqués par les
demandeurs, et qui étaient tous sans application à
l ’espèce. »
U n arrêt de la C o u r de cassation, du 27 mars 1822,
rapporté
dans le n° 3 du B u lle tin des A rrêts de la
C ou r de cassation } p o u r 1 8 2 2 , a été rendu absolu
ment dans les mêmes pr incipe s, en cassant un arrêt
de la C o u r royale de Montpellier, du 8 avril 1818.
E n 1792 , 1.793, et en l ’an 7 , le sieur Balsan avait fait
des dons, en a v a n c e m e n t d ’hoirie, à ses deux filles et
à l ’ un de ses fils. L e i 3 mai 1802, il fit un testament,
par lequel il donna, par préciput et hors p a r t , à JeanBaptiste B alsan , son fils a i n é , le quart de tous les
biens q u i l laisserait à son d é c è s , de q u elq u e nature
q u ’ils fu sse n t.
ainé
L e quart légué par préciput au fils
d e v a i t - i l être
prélevé
sur tous les biens dé
laissés par le père c o m m u n , y
compris les rapports
des dons en avancement d ’ hoirie, ou seulement sur
les biens dont
le père
était saisi au
moment
de
mort ? L e tribunal de Lodè vc et la C o u r de
M o n t p e l l i e r avaient décid£ que le préciput du q u a rt
devait ê tre p ris sur tous les biens, en y comprenant
sa
les dons en avancemens d ’hoirie. L a C o u r
sation
nant
a ,
au
contraire ,
les demandeurs
à
jugé
« q u ’en
rapporter
de cas
condam
à la succession
�(34)
de leur p è r e , et au profit d ’un légataire du quart en
p r écip u t , les biens q u i leur avaient
été donnés en
avancement d ’ hoirie, la C o u r royale de Montpellier
avait violé l ’article 857 du Code c i v il ,
et fait une
fausse application de l ’article 922 du même Code. »
C o m m e n t un légataire, non successible, pourrait-il
avoir plus de droit q u ’un légataire par préciput, ve
nant au partage comme héritier?
L a C o u r de cassation, par son arrêt d u 3 odécembre
1816,
a , au surplus, regardé comme non avenue et
sans effet la renonciation qui aurait été faite par les
sœurs D e c o n r , clans leurs contrais de mariage; ce qui
nous conduit à faire remarquer que la renonciation
de la dame Mollin à tous ses droits légitimaires pa
ternels, moyennant la somme à elle constituée en d o t,
ne peut influer en rien sur le droit de réserve qui lui
était assuré par la l o i , sur-tout à l ’égard d ’ un légataire
4
q ui n ’avait en l u i - m ê m e aucune vocation pour être
admis au partage des biens.
C e t t e renonciation
ne
parait point avoir été exigée par le père : pourrait-elle
être opposée sous une législation qui prohibe d ’une
m a n i è r e si e x pr e ss e les s t i p u l a t i o n s sur les s u c c e s s io n s
non o u v e rte s ? ( Code c i v i l , a r t i c l e s 7 9 1 , i i 3 o , i38f),
1G00, 18 3 7.).
A u besoin, M. Mollin rappellera les dispositions des
articles il\> i 5 , 16 et G8 de la loi du
ventôse
an 1 1 , sur le notariat, qui veulent que la mention de
la signature des parties, des témoins et des notaires
soit laite il la fui de l ’aôte; que les renvois et apostilles
�C 35 )
soient écrits en marge ou à la fin (le l ’acte , avec signa
t u r e , paraphe, et même
approbation des parties ,
lorsque la longueur du renvoi a exige q u ’il fût mis à
la fin de l ’acte; et q u ’ il n ’y ait dans le corps de l ’acte
ni surcharge, ni interligne, ni addition.
Sans nous occuper davantage de cette clause de re
nonciation, disons donc , ainsi que l ’ont décidé les
arrêts de la C o u r de la cassation, des 3 o décembre
18 1 6 et 27 mars 1 8 2 2 , que les légataires, lors même
q u ’ils ont une portion virile a réclamer comme héri
tiers , ne peuvent faire porter la disposition testamen
taire sur les dons en avancement d ’ hoirie ou autres,
que leurs cohéritiers ont r e ç u s .
E n vain on d i t , j)our le mineur P e y r a c h o n , que
l ’arrêt du 3 o décembre 1 8 1 6 , le seul que l ’on con
naissait, est étranger à la cause, et ne peut s’appliquer
q u ’au légataire d' une
quote déterminée , q u i
veut
augmenter le legs du q u a r t , de tous les dons précé
demment faits.
Nous avons déjà observé que Jean-Pierre-Augustin
Peyrachon était simplement légataire de la
d is p o n ib le ,
q u o tité
q u i se trouvait déterm inée au tiers, à
raison du nombre des enfans du testateur.
I j ’arrêt de la C o u r royale d ’A ge n, clti 28 décembre
1808, n ’a-t-il pas, d ’ailleurs, été rendu contre un
légataire universel qui refusait à la mère d u testateur
le legs particulier à elle fait et la réserve légale cu
mulés, c’est-à-dire, q u i voulait que le legs fut imputé
sur la réserve légale.
�( 36 )
L a C o u r royale de Limoges a décidé la munie chose
par un arrêt du i 4 juillet 1818 (D enevers, volume de
1 8 1 9 , page 7 d u suppl. ; S i r e y , tome 1 9 , page 1 44
de la 2e partie.). D ’après cet arr ê t, l ’ héritier à réserve
à qui il a été fait un legs, peut cumuler le legs et la
réserve, lorsqu’il vient en concours avec un étranger,
ou même un successible, agissant en qualité de léga
taire universel. L a C o u r de Limoges se fonde sur les
dispositions conférées des articles 843 et 8 5 7 du C o d e ,
et
répond aux objections tirées des articles 920
et
suivans.
« A t t e n d u , est-il d i t d a n s les m o t i f s de l ’arrêt, q u e
du système des rapports, voulùt-on passer à l ’examen
de la section du C ode q u i traite de la réduction des
donations et legs , la décision attaquée n ’en serait pas
plus légale; q u ’en effet, q u o iq u ’au premier aperçu l ’on
puisse peut-être s’arrêter à l ’idée de quelques auteurs
modernes, q u i ont dit q u i l ne s ’agit point proprem ent
d e rapport, tant que les legs n ’ont point été reçus, et
que la question doit être ju g é e p a r la règle des ré
d u ctio n s ; néanmoins 011 v o i t , i° q u e , dans la 2e partie,
l ’a r t i c l e 8 /j3 p r é v o i t le cas de legs à r e t e n i r o u à rap
p o r te r , et les embrasse dans sa g é n é r a l i t é ; 2° que le
système des réductions s’appliquant uni quement à la
quotité indisponible, il en résulte que les héritiers à
réserve ont seuls droit à former cette action en réduc
tion, pour faire rendre intacte à la masse c e t t e quotité
indisponible, si elle a été ébréchée; et q u e , dans l ’es
pèce, Lo uis C h e y l a r d , frère du déf un t, ne sc trouvant
�,
( 37 )
point dans la catégorie des héritiers à réserve, serait
encore non recevable dans sa demande, soit q u ’on la
jugeât par les règles des rapport s, soit par celles de la
réduction. »
A i n s i, il résulte bien positivement de cet arrê t,
comme de celui de la C o u r royale d ’A g e n , que le
légataire, même universel, doit souffrir tout à-la-fois
l ’exercice du droit de réserve accordé aux en fans et
ascendans, et le prélèvement des legs faits à ces der
niers, quoique non dispensés du rapport. A plus forte
r a i s o n , l ’héritier à réserve doit-il conserver les dons
irrévocables par lu i reçus, et obtenir sa réserve sur les
biens existans lors du décès.
✓
On ne se borne pas, pour le mineur P e y ra c h o n , à
demander la réunion de la dot de la dame Mollin à
la masse du patrimoine, pour déterminer la quotité
disponible; on veut aussi que la dame Mollin impute
sur ses droits légitim aires la plus-value du domaine
de la N a u te , délaissé à M. Mollin pour une somme
de 12,000 fr.
Nous avons à présenter des observations particulières
relativement
à cette plus-value
du domaine de la
N a u t e , si tant est q u ’elle existe.
C e ne serait pas, sans d o u t e , un excédant de valeur
peu considérable (j Uî pourrait faire regarder coin 111d
un avantage fait à la dame M ollin, le délaissement du
domaine de la Naute. Il a toujours été reconnu, en
matière de rapport ou à a' ré d u ctio n s q u e , pour l ’en-
�( 38 )
>tière exécution tle la vente faite à un successible, il ne
/fallait pas q u e l l e eut é té f a it e exa ctem en t au p r ix
'V énal, lors de cette v e n te } d ’après une estimation
d ’e x p e r ts , q u i p eu t elle-m êm e n ’être p a s sans in cer
titude ( L e b r u n , des S u ccessio n s} livre 3 , cliap. 6 ,
section 3 , n° 7 J 'M . G r e n ie r , T ra ité ¡des D on a tion s et
T estam ens} 4 e partie, chapitre i EV s e c t . 2 , n° 5 i 8 .).
M . Grenier pense que. si la valeur réelle n ’excédait
pas d ’un qua rt le prix de la v e n t e , la différencetqui
existerait serait sans conséquence.
Mais supposons que le domaine de la INaute-, donné
en paiement po u r 12,000 f r . , valait réellement plus
de iG,ooo I r . , 24,000
5 si 1 on veut.
Lorsque le sieur Peyrachon père a ainsi abandonné
h JVI. Mollin le domaine de la N a u t e , il n ’avait point
iencore disposé de la quotité de ses biens dont ses
•enfans pouvaient être privés.
Dès-lors, si on voit une libéralité dans la plus-value
•du domaine délaissé, le sieur Peyrachon aurait entamé
l a quotité disponible, par cette libéralité, qui serait
p r é s u m é e avoir été faite à
personne de son m a r i , à
la dame M ollin , dans la
titre de p r é c i p u t et hors
part.
E11 effet, non seulement, d ’après une jurisprudence
aujo u rd ’ hui iixéc, toute donation déguisée est valable,
.'lorsque le donateur est capable de donner et le dona
taire de recevoir; mais encore une semblable donation
f a it e à un successible est dispensée du ra ppo rt , et le
donataire peut la roieuir ju s q u ’à concurrence de la
�( 39 )
portion disponible, et prendre également sa portion
virile dans le surplus. Par cela que le donateur a em
prunté la forme d ’une vente ou de tout autre contrat
o n éreu x, il est censé avoir donné à titre de préciput
et hors part ( V o y e z , entre autres arrêts, celui de
la C o u r d ’appel de C o l m a r , du 10 décembre i 8 i 3 ,
rapporté dans le Journal de D ene vers , v o l. de i 8 i 5 ,
page i 4 du suppl. ■) et celui de la C o u r de cassation,
du i3 août 1 8 1 7 , rapporté dans le même jo u r n a l,
v olu m e de 1 81 8, page 98.).
Ainsi , M. Mollin ou ses enfans ne peuvent devoir,
dans aucun cas, le rapport ou l ’imputation de la plusvalue du domaine de la N a u t e , pas même envers le
sieur J e a n -P ie rre P e y r a c l i o n , q ui était le cohéritier
de la dame M o l l in , parce que l ’héritier venant à u n e
su c c e ss io n n ’est soumis au rapport de ce q u i lui a été
donné ou légué, que lorsque les dons-et legs ne,lui ont?
pas été faits par préciput.
A u contraire,
le legs fait ail mineur Peyraclion
doit être diminué de l ’excédant de valeur du domaine
de la N a u te ; de telle sorte que la portion disponible
des biens q u i devront former la succession du sieur
Peyraclion, soit d ’abord attribuée aux enfans Mollin,
jusques à concurrence du montant de l'estimation do
ce domaine, eu sus de la somme de 12,000 francs, et
que le mineur Peyraclion 11c puisse prendre que le
surplus.
C ’est de cette manière que doivent être entendues les
dispositions du jugement rendu .par le tribunal d ’Yssiu-
�( 4o )
geaux; et l ’on se demande comment se trouveraient
blessées les intentions d u sieui' P e y r a c h o n , et les
règles du ju s te ?
Les intentions d u sieur Peyrachon ! ...........
. Pe u t- on supposer que le sieur P e y ra c h o n , qui avait
constitué une dot à la dame M ollin , et q ui ensuite a
délaissé à M. M o l l i n , en paiement d ’une partie de
cette d o t , un domaine q u i aurait été d ’ une valeur
plus considérable, ait voulu restreindre et diminuer
les droits de la dame Mollin sur les biens dont il avait
resté saisi, pou r augmenter d ’autant le legs q u ’il fai
sait à Jean-Pierre-Àugustin Pey ra ch on ?
Mais le sieur Peyrachon avait donné des preuves à la
dame Mollin de l'affection q u ’il lui p o r t a i t , par les
dispositions contenues dans son premier testam ent,
d u i 3 ju in i 8 i 3 .
L e testament du 3 o mars 18 1 9 contenait-il la véri
table expression de scs dernières volontés? O11 pourrait
en d o u t e r , d ’après toutes les ’c irconstances qui ont
précédé sa mort.
Q u o i q u ’ il e n s o i t , ce testament doit recevoir son
exécution, mais de m a n i è r e à n e pas porter atteinte
aux droits que la dame Mollin tenait de la loi , ou
que lui assuraient des dispositions irrévocables en cllesmêinos, sur-tout respectivement ?i un légataire qui
n ’avait rien à prétendre, et qui ne recevra une portion
des biens de son a y e u l , que pour en p r i v e r sa tante et
son père, auxquels la loi les destinait entièrement,
�( 4 0
Les règles du juste ! ...............Mais
_ J
les raisons les plus puissantes, l ’équité la
mieux entendue ne se réunissent-elles pas en faveur
des enfans, dans la transmission des biens du père de
famille ?
Il a fallu laisser aux pères les moyens d ’exercer des
libéralités
qui , dans certains cas ,
pouvaient
être
d ictées p a r l ' affection ou com m andées p a r la recon
naissance.
Les enfans n ’en ont pas moins du exciter toute la
sollicitude de la loi ; et alors la nature et la loi se
trouvent d ’accord.
S ’écarterait-on des Règles du juste , par une obser
vation rigoureuse de ce qui est commandé par la nature
et par la loi ?
B E R N E T - R O L L A N D E , A v o ca t.
A L L E Z A R D , A voué.
RIOM
I M P R IM E R IE DE S A L L E S , PRÈS LE P A L A I S DE JU STIC E .
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
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Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Mollin, Jean-Antoine. 1822?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bernet-Rollande
Allezard
Subject
The topic of the resource
legs
partage
successions
légitime
quotité disponible
réduction
experts
réserve héréditaire
gain de survie
jurisprudence
doctrine
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour M. Jean-Antoine Mollin, ancien magistrat, au nom et comme tuteur de ses enfans mineurs, habitant de la ville dYyssingeaux, intimé ; contre le sieur Jean-Martin Rocher, négociant, habitant de la ville de Tence, en qualité de subrogétuteur de Jean-Pierre-Augustin Peyrachon, appelant ; en présence du sieur Jean-Pierre Peyrachon, propriétaire, habitant la ville de Tence, aussi intimé.
note manuscrite : « 3 juillet 1822, arrêt confirmatif, Journal des audiences, p. 116. »
Table Godemel : Legs : 5. le légataire de la portion disponible peut-il, n’étant pas héritier à réserve, exiger que les héritiers qui ont reçu des dots en avancement d’hoirie, en fassent le rapport par voie d’imputation ? est-il réduit à prendre la portion disponible calculée sur ce qui reste dans les mains du donateur au moment de son décès ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
Imprimerie de Salles (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1822
An 13-1822
1804-1814 : 1er Empire
1814-1830 : Restauration
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
41 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G2520
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G2519
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53506/BCU_Factums_G2520.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Tence (43244)
Yssingeaux (43268)
Le Chambon-sur-Lignon (43051)
La Naute (domaine)
Pêché (domaine du)
Fournet (domaine du)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
experts
gain de survie
jurisprudence
légitime
legs
partage
quotité disponible
réduction
réserve héréditaire
Successions
-
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03ea131a5e6cf454ec9b6305d02a478e
PDF Text
Text
TRIBUNAL
M
É
M
O
I
R
d’apfei,
E
séant àRiom.
P O U R , le citoyen J e a n - P i e r r e B E S Q U E U I L
s e c o n d , p r o p r i é t a ir e , habitant de la ville du P u y ,
a p p e la n t d ’un j u g e m e n t r e n d u au tribunal d’ar
ro n d i s s e m e n t de la m ê m e v i l l e , le 2 germinal
an 1 0
C O N T R E le cit. L o u i s - J o s e p h D E S C O U R S 3
commissionnaire, habitant de la même ville du
P u y , intimé.
U
N commissionnaire qui se charge de transporter de
l’argent d’un lieu à un au tre, et moyennant un salaire,
devient-il responsable des sommes qui lui ont été comptées,
et pour lesquelles il a donné son chargem ent?
T elle est l'unique question que cette cause présente à.
juger.
L e tribunal dont est appel a déchargé ce commission
A
■
�( 2 )
^
naire négligent de toute responsabilité , sur le fondement
que le préposé du commissionnaire avoit été arrêté et
volé à main année.
■
Il s’agit d'établir, i ° . que le vol n’est pas constant;
2°. que dans le cas même du v o l , le commissionnaire
seroit toujours responsable , parce qu’il n’a pris aucune
‘
précaution pour se garantir des accidens de ce genre ; que
sa négligence est impardonnable; qu’ainsi il ne peut éviter
le remboursement des sommes qui lui ont été confiées.
F A I T S .
. L e citoyen Besqueuil devoit faire passer à L y o n une
somme de 6,000 francs ; il s'adressa au citoyen Descours,
commissionnaire, pour faire transporter cette somme de
la ville du P u y jusqu’à celle de S a in t-E tie n n e , où elle
devoit être remise au citoyen L a llier, directeur de la mes
sagerie.
Il fut convenu que le citoyen Besqueuil pnyeroit une
somme de 18 fr. pour le prix de ce transport : c etoit à
raison de 3 fr. par 1,000, et le prix ordinaire, lorsqu’il
s’agissoit d'une somme un peu considérable.
L e citoyen Descours donna son chargement en ces
termes : « Je déclare avoir reçu le sac ci-dessus énoncé,
» déclaré contenir 6,000 fr. pour faire passer à Saint
» Etienne au citoyen L a llie r, directeur de la messagerie
» de S ain t-E tien ne, de conformité à la lettre de voiture
* en date de ce jour. A u P u y , le 20 fructidor an 8.
» Signé Descours. »
Trois jours après la remise de cette somme
à Descours,
�.
( 3 >
.
le citoyen Besqueuil reçut du directeur de la messagerie de
Saint-Etienne une lettre ainsi conçue : « C ito y e n , pour
» votre r è g le , je vous préviens que les 6,000 fr. men
» tionnés en votre lettre du 20 du c o u ra n t, et portés au
» bordereau du citoyen D escou rs, du 2 1 , ne me sont pas
» parvenus. Je vous salue. Signé Lallier. »
O n peut juger de l’inquiétude du citoyen Besqueuil à la
réception de cette lettre : il courut chez le cit. Descours
pour réclamer son argent ; mais il n’en reçut que de vaines
excuses, et se vit obligé de le citer au tribunal d’arron
dissement du P u y , après avoir épuisé les voies conciliatoires, pour être condamné au remboursement de cette
somme.
L a réponse du citoyen D escou rs, au bureau de paix,
ne fut pas très - satisfaisante , et n’apprenoit rien au
citoyen Besqueuil ; il se contenta de dire, sans autre expli
cation , que la demande contre lui formée étoit non îvceva b le, mal fondée et ridicule , ainsi qu'il l’établiroit lors
qu’il en seroit temps.
Devant le tribunal, le citoyen Descours développa sa
de l’en se ; il convint que le 20 fructidor an 8 , sur le soir
et a 1 entrée de la n u it, après que tous les paquets et effets
destinés à parlir le lendemain dans sa v o itu re , pour SaintEtienne, eurent été préparés et enregistrés, le citoyen Besqueuil lui apporta un sac q u’il déclara contenir la somme de
6,000 fr. tournois en argent; il le pria de lui faire partir
le lendemain cette somme pour Saint-Etienne, et de la
remettre au citoyen L a llie r, à qui elle étoit adressée.
Il reçut le sac tel que celui-ci le déclara , sans l’ouvrir
et sans vérifier ni nonibrer les espèces : il en coucha la
À 2
�( 4 )
_
_
mention clans son registre, et sur la feuille de voiture.
Il ajoute qu’il en donna un récépissé au cit. Besqueuil ;
qu’il r e n f e r m a le sac, ainsi qu’un autre petit où il y avoit
36 francs, dans un porte-manteau en c u ir , très-solide et
très-bien fermé. Il mit le porte-manteau , le lendemain
m atin,dans ia caisse de sa voiture : cette caisse très-solide
par elle-m ém e, fut encore fermée à clef, et la clef remise
par lui à son domestique chargé de conduire à SaintEtienne la voiture qui étoit chargée de ballots et de mar
chandises.
Ce domestique, dont Descours fait l’éloge., étoit connu,
dit-il, depuis long-temps, et en usage de conduire la même
voiture; très-souvent il l’a conduite chargée de sommes
considérables rsa probité et sa fidélité généralement recon
nues sont à tonte épreuve.
Descours rend compte ensuite que sur la route du P u y
à Yssengeaux , entre Saint-Hostieux et le Perlu¡s , le con
ducteur de la voiture fut arrête* par deux h omme s armés
de fusils doubles, qui avoient la figure masquée; ils cou
chèrent en joue le voiturier, le menaçant de le tuer s’il
faisoit le moindre m o u ve m en t, ou s’il poussoit le moindre
c r i; et tandis que l’un des assassins lenoit le voiturier
c ou ch é
en jo u e , le second monta sur la vo ilu re , vérifia
tout ce qui y é lo il, ne trouva rien qui lui convînt, ouvrit
de force la caisse, en sortit le porle-manleau contenant
les deux sacs déclarés, l’ un pour 6,ooo fr. l’autre pour
36 francs, jeta le porte-manteau dé la voilure en bas, le
chargea sur ses épaules, tenant toujours son fusil d’une
m a in , rentra avec son camarade dans les bois qui éloient
i\ une detni-licuc de là , emportant le porle-numleau.
�c 5 )
.
.
Cet enlèvement fait devant témoins fut à peine exé
cuté , que les témoins qui n’avoient pas osé avancei , parce
qu’ils n’étoient point a rm és, et clans la crainte qu il n y
en eût encore d’autres dans les bois , coururent vite au
village voisin , après que le v o l eut ete effectue , pour
demander des secours. L a commune de Saint-Hostieux se
mit sous les armes, la garde nationale de ce village de
Saint-IIostieux fit des perquisitions ; les autorités admi
nistratives et militaires du P u y , sur la nouvelle qui leur
fut donnée de cet en lè v e m e n t, firent partir en grande
diligence des gendarmes et des militaires de ligne.
L e citoyen Descours lui-même partit pour se rendre à
la poursuite des voleurs : on fit des battues dans les cam
pagn es, dans les bois; mais toutes ces recherches ne pro
duisirent autre chose que l’arrestation de deux militaires
déserteurs. La troupe qui les prenoit pour des brigands
vouloit les fusiller ; mais ils furent ensuite reconnus innoce n s, et renvoyés à leurs corps sous l’escorte de la gen
darmerie. L e citoyen D cscours, qui n’avoit rien tro u v é ,
revint au P u y pendant la n u it, dénonça le vol au com
missaire du gouvernement près le tribunal criminel de la
Ilaute-Loire. Ce commissaire intima des ordres au juge
de paix de Saint-Julien-Chapteuil, dans le territoire duquel
le vol avoit été commis. Ce juge de paix fil informer ;
l’information fut produite par le citoyen Descours.
T e l fut le roman imaginé par le citoyen Descours ,
pour se mettre à l’abri de la demande de l’appelant. Il
soutint que nul ne pouvoit être garant des événemens
q u’ il étoit impossible de prévoir ou d’ éviler. Il argu
menta encore d’ un procès verbal dressé par les olliciers
�( 6 )
m unicipaux de St. Hostieux , que
.
1 on aura
bientôt occa
sion d’analyser.
L e c it oy e n Besqueuil répondit que rien ne prouvoit
Je p r ét e n d u vol ; qu’en point de d r o it , le commission
naire étoit responsable de tous les dépôts dont il étoit
c h a r g é ; qu’ il étoit tenu de la faute lé g è r e , et que le
citoyen Descours avoit à s’imputer la négligence la plus
grossière.
L a ca u se, en cet état, portée à l’audience du tribunal
du P u y , le 14 messidor an 9 , il fut rendu un premier
jugement interlocutoire qui o rd o n n a , avant faire d ro it,
que le citoyen Descours feroit preuve tant par actes que
par tém o in s, que le vol dont il s’ agit avoit été commis
par force et vio len ce, le 21 fructidor an 8, sur la grande
route du P u y à Yssengeaux , entre St. Hostieux et le
P ertuis, sauf au citoyen Besqueuil la preuve contraire.
E n exécution de ce jugem en t, le cit. Descours a fait
entendre plusieurs témoins. Il n’avoit pas oublié Christophe
M a cla u x , son dom estique, qui prétend avoir été v o lé ;
mais le tribunal dont est appel a rejeté sa déposition.
A v a n t de rendre compte des déclarations des témoins,
il est nécessaire de faire connoître le procès verbal qui
fut dressé par les officiers municipaux de St. Hostieux.
L e procès v e r b a l, en date du 21 fructidor an 8 , fait
mention « que les maire et adjoint ont été appelés par
* le citoyen Bonnet , capitaine de la garde nationale ,
« qui a déclaré qu’on avoit assassine un voilurier sur la
« grande route , entre
St. Hostieux et le Pertuis. Ce
« voiturier nommé Christophe M a c la u x , a déclaré qn’on
« lui avoit enlevé la somme de 6,036 fr, renfermée dans
�( 7 )
* deux sacs, l'un contenant 6,000 Fr. et 1 autre 36 fi. que
« le tout étoit dans un porte - manteau déposé dans la
« caisse de la voiture qu’ on a enfoncee; qu on a enleve
« une partie de la serrure du coffre. Les officiers muni
« c ip a u x , pour s’assurer du fait, se sont fait représenter
« la vo itu re , en présence de plusieurs témoins, parmi
« lesquels se trouve Laurent M o n tc o u d io l, fils a P ie rre ,
« qui a dit être présent audit v o l; que les voleurs étoient
« au nombre de d e u x , munis chacun d’un fusil à deux
* coups; qu’ils étoient barbouillés l’un de noir et l’autre
« de ro u g e : habillement, veste b leu e , chapeau re ta p é ;
« et l’a u tre , la veste c a f é , chapeau rond. L es officiers
« municipaux interpellent Jacques C ham pagnac, habitant
«
«
«
«
de Vallogères , qui déclare avoir vu deux h o m m es,
avec des tusils, qui chassoient, qui portoient des habille
mens étrangers ; l’un veste b l e u e , chapeau retapé , et
l'autre veste café, chapeau rond ; les aj^ant vus un quart
« d’ heure environ avant le vol q u ia été fait cejourd’h u i,
« entre dix et onze heures du matin.
« O n demande il Christophe M a cla u x , s’il connoissoit
« les voleu rs, et de quelle façon ils étoient habillés : il
« répond qu’il ne les connoissoit pas; qu'ils étoient mar
« qués l’ un r o u g e , l’autre noir : habillem ent, l’un veste
« bleue, chapeau retapé: et l’autre noir ; habillement ,
«• veste c a fé , chapeau rond. Tou s deux paroissoieut étran« gers ; ils étoienl armés d’ un lusil à deux coups chacun.
« E n fin , il est dit que le citoyen B o n n e t, capitaine
« de la garde nationale, ayant été instruit du v o l , a
« invité plusieurs de la garde pour aller à la poursuite
« des v o le u rs, sans avoir pu les atteindre».
�(
8
)
•
On voit que ce procès v e r b a l, dont on s’est entretenu
jusqu’à la satiété devant les premiers juges, ne contient
que des déclarations, et ne constate aucun fait, ne fait
pas m êm e la description de l’état de la voiture, et ne dit
autre chose , sinon qu’on a voulu aller à la poursuite des
prétendus vo leu rs, et qu’on n'a pu les atteindre.
L e lendemain 22 fructidor, le citoyen Descours fit sa
dénonciation au commissaire près le tribunal criminel ; il
indique pour témoins Laurent Montcoudiol fils, Jacques
C ham pagnae, le cit. Charreyre et M a c la u x , son domes
tique. L e commissaire arrête qu’il en sera informé par'"devant le juge de paix du canton de St. Julien-Chapteuil. Il a été en effet procédé à cette inform ation, dont
le citoyen Descours a fait donner copie dans le cours de
l’instance.
Com m e les témoins de l'information sont les mêmes
que ceux qui ont déposé en l’enquête, on rendra compte
de leurs premières déclarations, p o u r les c o mp ar er avec
celles de l’enquête.
Jacques Champagnac dépose que le 21 fructidor an 8,
étant à garder une c h è v r e , il entendit crier sur la route
le nomm é Christophe M aclaux qui se plaignoit,et nesavoit
où passer; que s’étant approché de lu i, il lui dit que deux
hommes masqués, armés d’un fusil double chacun, lui
avoient volé plus de 6,000 fr. L e déclarant vit que la
voiture avoit été d éch arg ée, q u’ il y avoit dus paquets
p a r terre; que la serrure du coi ire avoit été forcée et
la planche de dessus enlevée; que les d o u x (pii la lenoient
avoient sauté de fo rce; il déclare aussi qu’environ demiJicurc avant, il vit doux hommes q u ’il crut des chasseurs,
dans
�( 9 )
,
.
dans nne terre tout proche de la route où ledit Maclaux
iut arrêté; qu’ils étoient armés chacun d’un fusil double ;
l’un d’eux étant habillé en bleu, chapeau retapé, et 1 autre,
chapeau rond abattu, habillé couleur de ca fé : mais il ne
les connut p a s , soit qu’ils fussent étrangers, ou à cause de
1 éloignement d’environ quatre portées de fusil.
. Ce même Jacques C h am pagn ac, lors de l’e n q u ê te ,
dépose que le jour désigné dans le jugem ent, il vit deux
personnes paroissant chasser vers les dix heures du m atin ,
auprès de la grande rou te, près d’un moulin appartenant
au citoyen G in o u x , armés chacun d’un fusil d o u b le , et
habillés l’un en veste courte , couleur verte , chapeau
retapé et à l’ord in aire, et l’autre un peu' plus g r a n d ,
aussi en veste co u rte , couleur canelle , chapeau rond ou
abattu ; q u ’ il vit dans le même temps la voiture du cit.
Descours, conduite par son domestique; que ces prétendus
chasseurs rodèrent un m o m e n t , lorsqu’il les perdit de
v u e , ainsi que la voiture du citoyen Descours qui continuoit sa route, à cause d’un tertre qui lui cachoit la
grande route ; lorsqu’ un moment a p rès, environ un q u a rt
d heure, il entendit crier le voiturier , en disant : Que
deviendrai-je ? que lui d ép o san t, courut à son secours,
et fut bien surpris, lorsqu’ il vit qu’il y avoit trois ballots
par terre, près de la v o itu re ; que les barres ainsi que la
serrure de la caisse étoient cassées.
Il demanda au voiturier qui avoit occasionné tous ces
desordres : celui-ci répondit qu’il venoit d’être volé par
deux personnes armées de fusils doubles, qui avoient jeté
les ballots par terre, fracturé la caisse, et avoient enlevé
6,ooo ir. L e témoin ayant représenté au voiturier, pour
ri
�quoi il n’avoit pas crié de suite au secours ; c’est parce
q u e , lui dit-il, il avoit toujours été tenu couché en joue
par l’un d’e u x , tandis que 1 autre fouilloit et renversoit
les ballots. L e témoin ayant encore demandé, pourquoi
il n ’a voit pas crié lorsqu’on l’eût quitté à plus d’une portée
de fusil , le voiturier répondit qu’on l’avoit menacé de
le tuer à son retour, s’il erioit avant qu’ils l’eussent quitté.
L a différence entre les deux dépositions du m êm e
témoin est remarquable. L e 8 vendémiaire an 9 , dans
un temps très-rapproché du prétendu v o l , c’est-à-dire,
moins d’un mois a p rès, Champagnac est fort b ref dans
sa déclaration. Les deux hommes qu’il a vus le 8 vendé
m ia ir e , étoient habillés l’un couleur b leu e, et l’autre
cou leu r café. Dans la déclaration de l’enquête, ils étoient
habillés l’un cou leu r v erte, et l’autre canelle. Dans la
p r e m iè r e , il avoit vu les chasseurs, une d e m i- h e u r e
avant le vol ; dans la seconde , il les ap erço it, et le vol
est l'ait en moins d ’un quart d’heure ; -c’est-à-dire , que
ces deux hommes qu’il avoit vus de loin et à quaIre por
tées de fusil, joignent la voilure qui passoit près de lu i:
un tertre lui dérobe la vue de la voiture et des hommes;
et dans moins d’un quart d’h eure, une voiture est dé
ch a rg ée, fracturée, v o lé e , les voleurs ont emporté l’ar
gent dans les bois qui sont éloignés de là-, et le voiturier
je trouve tout se u l, déplorant son sort, et racontant son
711a 1heur.
Quelque expéditifs que soient les voleurs, ¡1 est impos
sible qu’un seul homme ait fait tant de choses en si peu
de temps, puisqu’ils n’étoient (jue d e u x , et que l\m ne
laisoit autre chose que de coucher en joue le voiturier ,
�( « )
. .
le jeune Montcoudioï et une autre personne, ainsi qu’on
va le voir bientôt dans la suite de l’enquête. A moins
que d’imaginer que le voiturier a lui-même aidé le v o le u r,
on ne fera jamais croire que cela ait pu être fait si vite.
Jacques C h a r r e y r e , second té m o in , prend la qualité
de voiturier dans l’inform ation, celle de marchand quin
caillier dans l’enquête ; et il déclare , lors de l’informa
t i o n , que le 21 fructidor an 8 , sur les neuf à dix
heures du m atin, il alloit dans la route du côté d’ Yssengeaux ; lorsqu’il fut au-dessus du lieu de Saint-Hostieux,
il vit à son devant deux hommes qui avoient arrêté la
voiture du citoyen Descours ; ils étoient armés d’un fusil
double chacun , il ne fit pas attention à leur habillement.
L ayant aperçu v e n i r , l’un de ces inconnus le coucha
en jo u e , lui disant : A r rê te , sinon je te tire un coup de
fusil 7 et si tu boug es tu es mort. L ' a u t r e tenait a ussi en
jo u e le v o itu r ie r , en lui demandant la clef et lui disant
qu il savoit qu’il portoit de l’argent ; qu’il ne vit pas s’ils
prirent de 1 argent ou n o n , mais sitôt qu’ ils eurent dis—
paru , il continua sa route.
Lors de 1enquête , il dépose que le m ême jour 21 fruc
tid o r, allant à L y o n pour fait de son co m m erce, étant
dans la commune de Saint-H ostieux et sur la grande
r o u t e , entre un
moulin et une petite maison qui se
trouvent au bas de la côte de Pertuis, il vit, environ trente
pas au-devant de l u i , une voiture arrêtée, au-devant de
laquelle il aperçut un homme armé d’un fusil double,
ayant un chapeau abattu sur la fig u r e , qui co u ch oit en
jo u e le v o itu r ie r , et un autre hom m e dans la voiture
qui jetoit des ballots par terre j que no s’ imaginant pas
B 2
�( 12 )
qüe CG'fût des v oleurs, il avança encorc un peu, lorsqu on le
coucha en joue lui-même, en lui criant : Arrête ou je te tue;
qu’en e f f e t il s’arrêta et entendit qu’on demandoit la clef au
voiturier qui répondoit qu’il n’en avoitpoint;que d’ailleurs
ce n’étoit pas la recette, que c’étoit des objets de mar
chands; qu’il disoit qu’on lui faisoitun grand tort: qu’alors,
lui déposant tâcha de rétrograder ch em in , ce qu’il fit
au moment où ils ne s’en aperçurent pas ; qu’il courut
au galop au village de Saint-Hostieux, où il ne trouva
que quelques femmes à qui il lit part de-ce qu’il venoit
de voir ; qu'elles lui répondirent que cela ne pouvoit pas
ê t r e , que c’étoit peut-être des jeunes gens qui cherchoient
de la poudre pour aljer s’amuser à Rosières où étoifc ce
jour la fête baladoire; qu’il n’y avoit d’ailleurs point
.d’hommes dans ce moment pour donner des secours:
qu’il resta environ trois quarts d’heure; lorsqu’il repartit,
surtout en voyant qu’il n’y avoit plus de danger , parce
qu’il v i t qu’ il veno it d’autres étrangers qui lui dirent
a v o i r rencontré le v oitur ier seul avec un j eune homme
qui se plaignoit d’avoir été v o lé ; que lorsqu’il repassa,
il rencontra encore le voiturier avec sa voiture et deux
ballots par terre; que le voiturier pleuroit et se plaignoit
de ce qu’on lui avoit enlevé quatre-vingts livres pesant
environ d’argent ; que lui déposant, n’ayant pas le temps
de s’arrêter, donna au voiturier une adresse de lettre
pour le rappeler de son n o m , au cas q u il eÛL besoin de
le faire témoigner.
(Jette seconde déclaration ajoute infiniment
la pre
mière. .Jacques C h arreyrc, Irès-brel dans sou premier
récit, voit deux incomius dont l'u n le couc/ioit eu jo u e
�et l’autre tenoit a u ssi en jo u e le voiturier
n lui deman
dant la clef; il étoit ¿\ portée et de voir et d’entendre :
comment se fait-il que dans la seconde déclaration il n y
ait qu’un des voleurs pour co u ch er en jo u e et Je voiturier
et le m a rch a n d , et que l’autre soit dans la voiture à jeter
des ballots? Charreyre n’a rien dit devant le juge de paix
de sa conversation avec le voiturier , ni de son voyage à
Saint-Hostieux. Comment se fait-il encore qu’il ne trouve
que des femmes dans tout un village, et qu’on ne veuille
pas croire à son récit? Des voleurs qui choisissent pour
le lieu de la scène un endroit près d’une maison à côte
d un village-, deux hommes qui en imposent à tant d’autres,
qui arrêtent un voiturier qui avoit avec lui une autre
personne, qui avoit vu un hom m e tout à c ô t é , qui voient
encore arriver un m archand, et cela en plein jo u r, à
dix heures du matin : tous ces faits passent la v raisem
blance. C e qu’il y a de plus remarquable encore, c’est que
ce voiturier
avoit avec lui un
jeune hom m e , et ni
Cliampagnac, ni Charreyre ne font mention de cette cir
constance qui devoit les frapper.
Ce jeune homme est L aurent Monlcoudiol. Il a été
entendu devant le juge de paix et dans l’enquête. Il est né
le 9 octobre 1788; c’est-à-dire, q u ’il n’avoit pas encore
dix ans lorsqu’il a déposé; il s’en donne quatorze à quinze
lors de 1 inlormation. ¡1 déclare que le jour cotté, étant
parti du P u y où il restoit à l’école, il voyageoil dans la
Voiture du citoyen Descou ri , conduite par Christophe
3V.Iaclau\- y son domestique. Etant tous les deux dans la
voiture et arrivés au-dessus du moulin de St. U o stie u v ,
survinrent tout à coup deux hommes armés d’un,¡fusil
�( *4 )
double chacun , l'un desquels pouvoit etre de la. taille de
4 pieds 6 p o u c e s , l’aulre plus grand; tous les deux âgés
d’environ 2,5 ans; le petit vêtu d’une veste couleur café,
chapeau rond ; le grand habillé d’une veste couleur b le u e ,
chap eau retapé. L e petit leur dit, en les couchant en joue:
A r rê te l à , coquin , ou lu es mort : tu portes l’argent de la
recette. Maclaux leur ayant répondu q u’il ne portoit pas l a ’
recette, il continua de le tenir en jo u e , et l’autre jeta les
paquets et ballots qui étoient dans la voiture. Sur les
plaintes que faisoit Maclaux qu’on lui faisoit t o r t , il lui
répondoit : Si tu parles tu es mort. Qu’ayant forcé la serrure,
parce qu’il n’avoit pas pu ouvrir avec la clef que l’un
d’eux avoit prise dans les poches de la voiture, il ouvrit le
coffre, prit le porte-manteau qui y étoit, et l’emporta jus
qu’à environ cent pas, et ensuite il appela l’autre qui tenoit
toujours le voiturier en joue en reculant; que les deux
inconnus ayant passé du côté du bois du Pertuis, ce témoin
c our ut v ite d u côté de St. Hosticmx p o u r appeler d u
secours
; il ne trouva que deux bergers qu’il ne connoît pas.
L o rs de l’enquête, ce même Montcoudiol se dit âgé de
quinze ans; il partit de la ville du P u y ce jour cotté pour
aller chez ses p a re n s, et prit place dans la voiture du
citoyen Descours. Cette voiture fut arrêtée entre SaintIlostieux et le Pertuis, v i s - à - v is un m o ulin , par deux
hommes qui lui parurent être des chasseurs. L ’ un avoit un
chapeau abattu ou rond, et 1 autre un chapeau relevé. Ils
avoient l’un et l’autre la figure noircie avec des mûres sau
vages, ( circonstance nouvelle dont aucun témoin n avoit
parlé jusqu’ ici ).TIs invitèrent le charretier a s’arrêter, et
lui déposant, à descendre; ils demandèrent l’argent de la
�( i 5 <j
.
^
recette au voiturier, en le tenant en jo u e ,et ordonnèrent c\
lui déposant, de se retourner de 1 autre cote en le tenant
aussi en joue; il fit tout ce qu on lui dit de faire. L e voiturier avoit beau dire à ces gens-là q u ’il n apportoit point
l’argent de la recette, ils voulurent toujours voir ce qui
étoit dans le caisson,et demandèrent la clef ; le voiturier la
refusa toujours. Ges g e n s - là fouillant, trouvèrent la clef
dans une des poches de la voiture ; mais n’ayant pas su
o u v r ir , celui qui fouilloit ainsi leva avec ses deux mains
le caisson et brisa la serrure. Ils trouvèrent un porte-man
teau où il y avoit de l’argent et des lettres; ils rendirent les
lettres d’après l’observation du voiturier, qui leur dit que
c’étoient des lettres de marchands: car les voleurs obser
vèrent que s’ils croyoient que ce fussent des lettres contre
les réquisitionnaires, ils ne les rendroient pas; ensuite celui
qui avoit pris le porte-manteau s’en fu t, laissant toujours
son camarade tenant en joue le vo it ur ier et lui déposant ;
mais l’autre voleur s’étant aperçu que son camarade plioit
sous le poids du porte-manteau, il alla le joindre, portèrent
ensemble le porte-manteau, et passèrent du côté à' la droite
du Pertuis. Pendant toute cette scène il vint un lvoinrne k
cheval qui s’approcha presque de la voiture ; il a su depuis
que c’ éto itle marchand du iVIonastier, ( (Jlinircyrc ) , qui
a déjà déposé, lequel fui aussi mis en joue par celui qui les
tenoit de m ê m e , et qui lui cria ¡Arrête ou je te tue ; que cet
étranger rebroussa chemin un moment après, et s’enfuit au
galop. Il ¿»joute encore qu’etivirbn à soixante pas de l’en
droit où fut arrêtée la voiture, et lorsque le voiturier fut
libre de pouvoir crie r, il parut un homme qui vint lui
proposer du secours, et lui faire des reproches de ce qu’il
u’avoit pas crié plutôt-
�C 16 )
II passa , îm moment après, deux voyageurs qu’ils priè
rent d’aller a v e r t i r Bonnet, d u Pertuis, de vouloir bien
.descendre t o u t déduite. Lui-même se rendit à St. Hostieux
p o u r c h e r c h e r du secours; mais il ne trouva personne, parce
que tous les gens étoient à la messe. Aussitôt que Bonnet,
du P e r t u i s , fut descendu, ils montèrent ensemble la côte ;
o n ^envoya chercher les maire et adjoint de la com m une,
on dressa procès verbal de ce qui s’étoit passé, et il signa
ce procès verbal.
Ces trois témoins seulement ont été entendus lors de
l’information et de l’enquête. Leurs déclarations n’ ont
entr’ellps aucune ressemblance ; aucun des trois, pas même
]Vlontcoudiol, n’avoit dit devant le juge çlç paix que ces
voleurs avoient la figure barbouillée avec' des mûres ;
M ontcoudiol ne se rappelle cette circonstance que lors
de l’enquête : elle auroit dû cependant frapper davantage
un enfant, jst'lui inspirer plps d’effroi.
I i O r s de l’information , il trouve doux bergers à SaintI l o s t i e u x ; lors de l’e nq u êt e il ne t rouve pers onne; tout le
monde. ,
dit-il,,, étoit à la messo ; et cependant, biefi vérifié,
le 21 fructidor de l’an 8 étoit un lundi. Lors de l’infor
mation ', Mo.i1□tcoudiol
ne
11
' fait aucune mention de la ren
contre de Clinrreyre; il s’en rappelle lors de l’enquête. L e
m êm e voleur tenoit trois personnes en jo u e; et suivant
C h a m y r e , l’un des voleurs couchoit en joue le voiturier,
et l’autre, fa ¡soit à lui la même menace. Comment se fait-il
qüe C h a rre y rq n ’ait pas vu cet eniant et n’eu ait pas parlé?
Pourquoi 1111 des voleurs, lors de 1 iniormation, emportoitil l’argent avec agilité, et comment se Jail-il q u e , lors
de l’en q u êle, il succombât, sous le poids ?
L ’enquête
�. S 17 ^ .
,
.
L ’enquete a été enrichie cle plusieurs antres déclarations
qui ne se trouvent point dans l’information. Bonnet ,
aubergiste , l’un d’e u x , déclare que le jour que la voiture
de Descours fut volée au bas de la côte du Pertuis, il
apprit cette nouvelle par un étranger qui passoit, qui lui
dit qu’011 venoit de piller la voiture appartenante à Des
cours; qu’il monta aussitôt à cheval; qu’il trouva encore
le voiturier sur le chemin , qui se lamentoit; qu’il y avoit
même encore des ballots par terre ; qu’il se décida de
suite à faire conduire la voiture et les effets jusque chez
l u i , et il fit appeler le maire et autres personnes. O n dressa
procès verbal; lui et d’autres allèrent de suite battre les
bois voisins pour chercher les voleurs , mais leur recherche
fut infructueuse.
Ce té m o in , comme l’on v o i t , ne parle que d’après la
déclaration qui lui a été faite par le domestique de Des
cours , e t n’ a rien, v u p a r l u i - m ê m e .
U n autre tém oin, Etienne D e lo rm e , n’a su le vol que
vers m idi; B on n et, aubergiste, vint le lui annoncer en
lui disant qu’il falloit battre les bois , ce qu’ils firent toute
la journée infructueusement. Il apprit seulement par le
domestique de Descours chez B o n n e t, que deux hommes
noircis avec des mûres de buisson l’avoicut volé et menacé
de le tuer.
Claude M ontcham p , autre témoin , fut requis par
Bonnet, en sa qualité décom m andant de la garde natio
nale , pour faire la recherche des voleurs dans les bois ,• ce
qu’ il fit pendant tout le jour sans fruil. Il vit ;\ l'auberge de
Bonnet la caisse de la voiture cassée , et le domestique
de Descours qui se lamentoit et pleuroit comme 1111 enfant.
C
,
�( 18 5
.
'
.
,
Sébastien P r a d in e , autre témoin, aperçut h jour où
le vol fut c o m m i s , et sur les dix heures du m atin,"deux
hommes ar mé s, marchant très-vite et prenant le chemin
d e C h a z e a u x , en passant par le bois appelé la Brom adoire. Une heure après, B o n n e t, commandant de la garde
n a t i o n a l e , vint le requérir pour battre les bois et attraper /
les voleurs ; il fit une recherche inutile ; il vit chez Bonnet
le caisson de la voilure fracturé, et le domestique pleurer
et se lamenter.
François G a vier, autre tém oin , sait seulement que le
jo u r'd u v o l , B o n n et, commandant, vint le requérir; il
obéit ; il sut par le domestique de Descours qui condui
sent la v o itu re , qu’ il avoit crié, mais qu’on l’avoit m e
nacé d’être tu é , s’il crioit davantage ; il vit aussi la voiture
et le caisson fracturé.
Jean G in o u x , autre tém oin, raconte que B onnet, sur
les onze heures du m a t in , le jour c o t té , lui annonça
q u ’on venoit de détrousser la voiture de D escours, pas
bien loin de chez lui ; il se rendit aussitôt avec Bonnet
auprès de la voiture dont il v it qu’on avoit enlevé
de force le couvert du caisson , et qu’on avoit jeté des
ballots par terre; il aida à relever les ballots, et accom
pagna la voiture jusque chez Bonnet; on fit appeler les
niaire et adjoint qui dressèrent procès verbal en sa pré
sence ; on décida de faire une battue dans les bois, surtout
du côté du bois de F a u c h c t , où le voiturier disoit que
les voleurs avoient passé. Il remarqua que le voiturier
étoit fort chagrin de l’cvénerncnl qui venoit de se passer.
Klienne Chapuis, maire de Saint-IIostieux , autre té
m o in , déclare que le 21 fructidor ail 8 , il étoit pour
�.
. .
.
( 19 5 •
.
affaire d’administration à la commune de St. Julien-Chapteui]-que vers les deux ou trois heures de relevée, il reçut
une invitation de Bonnet de se rendre de suite au Pertuis
pour dresser procès verbal du v o l qui s’étoit commis
vers les dix heures du m atin , entre le Pertuis et SaintH o s tie u x , sur une voiture appartenante au citoyen
D escours, commissionnaire du P u y ; qu’en effet il partit
de suite, et étant arrivé au Pertuis il y trouva le domes
tique du citoyen Descours qui lui raconta que deux hommes
armés de fusils l’a voient volé entre Saint-Hostieux et le
Pertuis ; qu’il avoit été tenu en joue pendant tout le temps ;
qu un des voleurs voloit le caisson dont il avoit enlevé
le couvercle, n’ayant pas voulu donner la clef q u ’on lui
avoit demandée en le couchant en joue ; qu’il avoit em*
porté un porte-manteau où il y avoit 6,036 francs d’ar
g en t; de ce dont le témoin dressa procès v er b al avec son
adjoint et p l u s i e u r s a u tres .
L ’autre témoin est le citoyen P eyrin , adjoint; sa d é
claration est conforme à celle du précéd ent, avec cette
difiérence qu’ il demanda au domestique de quel pays les
voleurs paroissoient ê tre ; qu’il avoit répondu qu’ils ne
paroissoient pas être du pays.
ü n voit dans cette enquête , que si on excepte Charreyrc
et M ontcoud iol, les autres témoins ne parlent que d ’après
la déclaration de M aclau x, domestique; les deux témoins
qui parlent de visu , ont déposé d’ une manière contra
dictoire , et n’ont pas d i t , lors de l’enquête , ce qu’ ils
avoient déclaré lors de l’ information.
Quelle confiance, surtout, pouvoit m ériter la décla
ration de M o n tco u d io l, d’un enfant qui n’étoit pas âgé
C 2
�( 20 )
^
de dix ans, lorsqu’on l’a fait entendre, puisqu’il n’est né
que le 9 octobre 178 8 ? Est-il vraisemblable que des v o
leurs eussent choisi un lieu aussi près du village de SaintH o s t i e u x ? L e domestique, après le v o l , ne pouvoit-il pas
courir après les voleurs , appeler du secours dans les
villages qu’ils avoient à traverser, d’après la direction
qu’ il leur fait prendre pour gagner les bois du Pertuis;
Je jeune M ontcoudiol, lui-même ne pouvoit-il pas aller
demander du secours h Saint-Hostieux?
L e citoyen Besqueuil fit signifier ses reproches contre
plusieurs témoins de l’enquête ; mal à propos le domes
tique avoit été entendu en déposition-, il déposoit dans
sa propre cause; il étoit le domestique du défendeur:
dès-lors sa déclaration devoit être rejetée.
Montcoudiol n’avoit pas 1 age requis,il étoit im pubère;
et d’après la loi 3 , § . /ege, auiF. de test, il étoit hors d’état
de faire sa déclaration.
■
A u fo n d , le citoyen Besqueuil soutint, d’après la dis
position des lois et la j urisprudence des arrêts , que le
commissionnaire en général est responsable de tous les
dépôts dont il est chargé ; que l’exception de la force
majeure n’étant pas absolue, elle dépend des circonstances:
la plus légère faute, la plus petite négligence fait disparoître l’exception ; le commissionnaire est tenu de la faute
même légère, surtout lorsqu’ il reçoit un salaire.
Dans l’espèce, le prétendu vol étoit invraisemblable; il
n’éloit pas prouvé : dans Ions les cas, c’eût été au citoyen
.Descours à se reprocher de n avoir pas pris de plus grandes
précautions pour l’éviter. Comment deux hommes, t\ dix
heures du m alin , tr è s - p r è s d’un village considérable j
�(2 0
'
auroient-ils eu l’audace de l’entreprendre ? Com m ent
auroient-ils pu l'effectuer ? ils avoient un long trajet à
faire pour gagner les b o is , un poids considérable à p o rter,
sous lequel l’un d’eux succomboit. I>e voiturier pouvoit
se défendre , et avoir du secours avec la plus grande faci
lité : un seul homme qui l’auroit accompagné auroit rendu
le vol impossible.
E n vain le citoyen Descours vouloit-il rappeler, pour
don ner plus de vraisemblance au v o l , que le cit. Besqueuil
lui-même a voit été arrêté à son retour de L y o n par quatre
hommes armés.
Cette arrestation du citoyen B e sq u eu il, loin de justifier
le citoyen Descours, ne faisoit que prouver la nécessité
d une plus grande précaution de sa p a r t , et établissoit la
faute grossiere qui le rend responsable.
Aussi le citoyen Descours , qui sentoit toute la force
du r e p r o c h e , prétendoit-il qu e le salaire n ’ étoit pas assez
considérable.
L e citoyen Besqueuil répondit que 3 fr. par 1,000 étoit
le taux le plus considérable ; il établit que lui-même Bes
queuil, en 1 an 7 , dans des circonstances plus difficiles, î\
1 cpoque ou les brigands cnlevoient à main armée les
caisses publiques, et infestoient la route du P u y à Monisrt r o l , où ils enlevèrent la recette du P u y , malgré le convoi
de troupes qui Pescortoit, il se chargea de porter i\ scs
risques et iortune, du P u y à G ren ob le, une somme de
40,000 Ir. moyennant une provision de deux; pour cent;
cest-à-dire, de la porter ¿\ une distance de plus de qua
rante lieues dans des routes difficiles , tandis que le citoyen
Descours n’avoit qu’une traversée de moins de deux jours
pour arriver à sa destination.
�(
22 )
^
^
Ti!\ provision de 3
ïj^oo étoit donc un salaire
suffisant, puisque p o u r un tiers pour cent de provision , (
les banquiers prennent sur la place tout le papier dont
on a b e s o i n , et à trois mois d’échéance , avec garantie
du papier.
P ou rqu oi d’ailleurs le citoyen Descours avoit-il déposé
cet argent dans un porte-manteau , et dans une caisse aussi
frêle que celle de sa voiture ? L ’usage de tous ceux qui
voiturent de l’argen t, est de le renfermer dans une malle
bien ferrée, attachée avec des écrous à la v o itu re ; et
certes si le citoyen Descours avoit eu une malle semblable,
le vol eût été impossible.
L e citoyen Besqueuil reprochoit encore au domes
tique voiturier d’avoir répandu sur toute la route qu’il
portoit de l’argent, d’avoir rencontré des hommes qui
avoient eu une querelle à la barrière du P u y , et qui portoient des marques ensanglantées, et de les avoir invités
à répandre qu’ils avoient été arrêtés par des voleurs entre
le Pertuis et Saint-llosticux.
M algré ces circonstances et les moyens de droit qui
furent développés , le tribunal dont est a p p e l, par son
jugement du 2 germinal an 10 , statuant sur les reproches
proposés contre les témoins par le citoyen Besqueuil , se
contenta de rejeter la déposition de Maclaux , vo itu rie r,
et laissa subsister celle de M o n lc o u d io l, impubère , et
prononçant sur le fonds;
Considérant qu’ il est clairement pro u vé tant par l’en
quête que par le procès verbal et linlorm ation des 21
fructidor an 8 , et 8 vendémiaire an 9 , que le domesti
que de Descours conduisant sa voiture , a été a r r ê t é ,
�( 23 )
couché eu joue , et menacé d’être tué par deux hommes
masqués, armés chacun d’un fusil double ; que ces hommes
ont jeté les ballots de la voiture en bas; qu ils ont forcé
les fermetures et serrure de la caisse de la v o itu ie ; qu ils
ont pris et emporté le porte - manteau qui contenoit
l’argent ;
Considérant qu ’en gén éra l, en point de d r o it , nul n est
garant des événemens arrivés par force majeure , et que
le principe est encore confirmé par l’art. X X I V de la
proclamation du 10 avril I 7 9 i , e t p a r la loi du 9 nivose
an 3 , relative à l’agence des fermes et messageries ;
Débouta le citoyen Besqueuil de sa demande , et le
condamna aux dépens.
L e citoyen Besqueuil a interjeté appel de ce jugement.
O n sent combien cette cause est importante dans son o b jet,
mais elle n’est pas diflicile dans sa solution.
Tout
com m issionnaire ,
conducteur
de messageries ,
hôteliers, aubergistes, sont responsables des vols qui se
commettent dans leur auberge ou dans leur voiture. L a
loi connue sous le titre nautœ ca u p o n es, au fT. liv. I V ,
tit. I X , est celle qu’ on cite avec avantage dans cette ma
tière. A i t p reto r, nautœ caupones sta b u la rii quod eu ju s
que sahntm fo r e receperint n is i restitu e n t, in e o s ju d icium dabo. Il est ajouté §. I : M a xim a utilitas est liujus
edictiy quia necesse est plerum que co n n u fu ie m se q u i
et res custodiœ eorum com m ittere. N e q u isqu am putet
graviter hoc adversùs eos con stitution ,• nam est in
ipsorinn arbitrio ne que/n rccipiant : et n is i hoc esset
statutuin m ateria daretur cum f ît r ib u s adversùs eos
quos rccipiunt co eim d ij cum ne nunc quidetn abstineant
hujus rnodi J'raudibus.
�( 24 )
^
T elle est la sagesse clu législateur, qu’il semble prévoir
ce qui n’arrive que trop ord in airem en t, que les messa
gers s’entendent avec les voleuis. Personne , dit-il, n a.
droit de se plaindre de la rigueu r de cette lo i: les mes
sagers ne sont-ils pas les maîtres d’accepter ou de refuser.
JVIais s’ ils acceptent, ils deviennent responsables, puisqu’on
est obligé de suivre leur foi ; que le} dépôt devient néces
saire, autrement ce seroit leur donner l’occasion de s’en
tendre avec les voleurs.
C ’est donc précisément dans le cas de v o l que la loi
établit la responsabilité du dépositaire.
O n trouve encore au ff. liv. X I I I , tit. V , conunodati
y elco n trà , la loi V , §. I I , qui décide que le dépositaire
qui reçoit un salaire est tenu de tous les périls. E i q u idéni in contractikus interdùm dolim i so h n n , interdùm
et culpam prœ stainus : dolim i in deposito ; nam q u ia
nulla u tilita s ejus versatur apud quern deponitur m e
ritò d o l u s prœ statur solus , n is ifo r t e et uierces accessit,
'Tane c u i ni ut est et co n sti lutim i etiarn cufpa ex h ib etu r.
Cette disposition est juste : celui qui reçoit un dépôt
volontaire et gratuit ne peut être garant des événemens;
ce seroit trop rigoureux ; la loi ne le rend responsable
que du (loi : mais pour celui chcz qui le dépôt est néces
saire, qui reçoit une provision , un salaire pour cet objet,
il est tenu de tous les périls, m ême de sa faute.
Les tribunaux ont toujours maintenu avec la plus grande
sévérité l’exécution do ces lois: ce seroit autrement com
promettre la vie et la fortune des citoyens. Les recueils
d’arrêts sont pleins de décisions semblables. JYlaynard ,
liv. V I I I , clinp. L X X X I I et L X X X I Ü , rapporte plusieurs
arrêts
�•
(
25
)
_
arrêts qui ont toujours rendu 1 hôtelier responsable des
vols qui se commettoient dans son hôtellerie. U n entr’autres condamna l’hôtelier , quoique le vol eut été
commis par des voleurs étrangers venus du dehois pen
dant la nuit, et qui avoient emporté les objets volés par
un trou qu’ ils pratiquèrent à la muraille. Charondas en
ses réponses, liv. X , chap. V I I I , a recueilli un arrêt du
parlement de Paris qui a jugé de la m êm e manière.
L a jurisprudence de la ci-devant sénéchaussée d’A u
vergne étoit également très-rigoureuse. U n jugement
solennel du 21 août 1784 , rendu sur la plaidoirie des
citoyens Y e r n y et P a g ès, décida qu’ un ouvrier étoit res
ponsable des vols qui se commettoient chez l u i , quoi
qu’ il y eût effraction extérieure. Les parties étoient le
citoyen C o r n u d e t , officier de santé de cette ville de R io m ,
et le nommé Jasse , tisserand. O n avoit volé chez ce der
nier trois pièces de t o i l e , et p o u r s’ introduire dans sa
boutique qui étoit un souterrain, les voleurs avoient fait
sauter un gond incrusté dans le m ur , et avoient coupé
une corde qui servoit de fermeture au volet. Cette efl'rac•tion étoit constatée par un procès verbul du juge de
police ; cependant le tisserand fut condamné à payer la
toile volée. O11 jugea qu’ il y avoit au moins de la négli
gence de sa p a r t , pour n’avoir iermé son volet qu’avec
une corde , quoique l'enlèvement du gond eût vendu
tout autre précaution inutile. Il n’y avoit ici que la
faute lé g è re , et cependant l’ouvrier fut responsable. L e
jugement fut approuvé dans le temps par tous les juris
consultes-, on pensa qu’ il étoit conforme aux principes;
qu’ il importoit à la sûreté publique d’être infiniment
D
�("26 )
f
rigoureux dans ccs m atières, afin d’obvier aux fraudes
qui pouvoient sc commettie.
L e citoyen Descours a donc le principe contre l u i ,
les premiers jngcs en conviennent ; il est commissionnaire ;
il se charge habituellement du transport d’argent, moyen
nant une rétribution; il est donc responsable des pertes
qu’ il éprouve.
Peut-il sc placer dans l’exception qu’il invoque ? y a-t-il
ici force majeure qu’il ne pouvoit éviter ni prévoir ?
peut-il invoquer l’art. X X I V de la proclamation du 10
avril 1791 ? Cette proclamation a pour objet le service des
messageries nationales, coches et voitures d'eau. L ’art, cité
porte: * Ne seront tenus lesdits fermiers de répondre des
« événemens occasionnés p a r f o r c e m ajeure ou causes
« im possibles à p rév o ir, ainsi que par défaut d’embal« lage ou de précautions quelconques qui dépendent des
k particuliers intéressés, et dont mention devra être faite
« en leur présence dans l’enregistrement ». L a m ême dis
position est répétée dans la loi du 29 nivosc üii II ois, égale
ment invoquée par l’intimé.
L ’exception sc réduit donc a u x événemens o cca sio n
nés p a r f o r c e m ajeure et causes im possibles à prévoir.
O r , dans l’espèce particulière, il n’est pas prouvé qu’il
y ait force majeure; z ° . y eut-il vol a force a rm ée, on
pouvoit prévoir l'événem ent, et prendre des précautions
pour l’éviter.
�(
P R E M I È R E
*7
)
P R O P O S I T I O N .
jLe vol n e s t pas constant.
L a première pièce dont on justifie pour établir le v o l,
est le procès verbal de la municipalité de St. Hostieux.
D ’après la déclaration de Descours et de son domes
tique , le prétendu vol a eu lieu à dix heures du matin ;
ce n’est qu’à trois heures de relevée que les officiers m u
* •
•
^
•
V
nicipaux ont été requis ; ils n avoient aucun caractère
p o u r constater ce vol ; ce n’est pas u n fait de police
administrative; c’ étoit un fait de police jud iciaire, et le
juge de paix étoit seul compétent. Ce procès verbal ne
contient autre chose que la déclaration du voiturier:, il
n e fait pas même la description de la v o i t u r e , et ne
constate pas l’élat dans lequel elle a été trouvée.
L ’officieux Bonnet qui a requis le transport des m uni
c i p a u x , est l’aubergiste chez, q u i ’ logent habituellement
Descours et son domestique. Il s’empresse de faire dresser
procès verbal, plutôt que de courir après les v o le u rs;
ce n’est qu'après que cette formalité est rem plie; c’està-dire , plus de sept heures après le v o l , qu’il imagine de
faire battre les bois; et 011 conçoit que les prétendus
voleurs n’ont pas dû rester aussi long-temps pour les
attendre; il est assez naturel que les recherches aient été
infructueuses.
‘
L ’information faite devant le juge de p a ix, ne donne
pas plus de lumières. .Jacques Champagnac gardant paisi
blement sa ch è v re , entend crier Maclaux et raconte ce
D 2
�c 23 )
#
^
qu’il lui a dit. U ne demi-heure avan t, il avoit v u deux
hommes qu’il avoit pris pour des chasseurs.
C h a r r e y r e ne prouve autre ch o se, sinon qu’il n’est
pas f o r t courageux. Il avance dans cette route ; il voit
deux hommes qui avoient arrêté la voiture ; l’un le'
couche en jo u e , l’autre tenoit aussi en joue le voitu rier,
e t quand on a peur on n y voit pas si bien 5 il ne voit pas
m êm e si les voleurs prennent l’argent. Il semble qu’il
l u i eût été facile d’empêcher le vol; les voleurs n’étoient
qu’au nombre de d e u x , ils se trouvoient alors trois per
sonnes , le voiturier , Charreyre et Montcoudiol. Il étoit
sans contredit possible, sans excès de courage, sinon do
désarm er, du moins d’effrayer les voleurs.
Ce jeune M o n tco u d io l, que personne n’a vu , dont ni
Champagnac ni Charreyre n’ont parlé dans leur déclara
tion , est un enfant de dix ans; il a v u le voleur forcer
la serrure, parce q u’il n’avoit pas pu ouvrir avec la clef,
prendre le porte-manteau et l’emporter à environ cent
p a s , et q u ’ensuite il appela l’autre. C e jeune homme dé
barrassé des voleurs, courut vite du côté de St. Ilostieux
pour appeler du secours; mais il ne vit que deux bergers.
C ’est là tout ce qu’apprend l'information ; l’enquête
n’en dit pas davantage ; car il n y a jamais que Charreyre et
M ontcoudiol qui aient été témoins du vol : tous les autres
ne parlent que sur la déclaration du domestique, et n'ont
Appris les détails qu’après que le vol a été eUbctué.
il est vrai que ceux-ci ajoutent différentes circonstances
lors de l’enquèle. Champagnac l u i- m ê m e qui , lors de
l'inform ation, avoit vu les voleurs l un habillé de b le u ,
l'autre couleur c a f é , les a vus lors de l enquête Cun ha billé
�C^9 )
^
^
en vert et Tautre en canelle ¿ il vo it dans moins d’ un
quart d’heure les voleurs, le voiturier, les perd de vu e
ù cause d'un tertre, et le vol est fait dans ce court intervalle.
P o u r C h a r re y r e , lors de l’e n q u ê te , ce n’est plus les
deux voleurs q u i étoient occupés à co u ch er en j o u e ,
Vun le voiturier et Vautre C harreyre , comme il la v o it
dit lors de l’information , c’est le m êm e voleur qui les
couch oit en jo u e tous deux , tandis que l’autre étoit dans
la voiture occupé à décharger les ballots; de sorte q u e ,
comme Montcoudiol dit aussi a voir été co u ch é en j o u e ,
1
w
c est un seul homm e q u i , tout à la fo is, couchoit en jo u e ,
Ç h a r re y r e , M ontcoudiol et le voilurier ; ce qui paroît
un peu difficile.
D ailleurs, comme Montcoudiol est impubère et q u e ,
par cette raison5 il n’est pas en état de déposer, il ne
reste plus qu’un seul témoin qui ait été présent au pré
tendu vol ; dès-lors il n’existe aucune preuve. Descours
n a pas satisfait au jugement interlocutoire.
t
S E C O N D E
P R O P O S I T I O N .
O n devait craindre et prévoir T événement,
A 1 époque où ce prétendu vo l a été Commis, il n’étoit
malheureusement question que de brigandages de ce genre;
on neparloitque d’enlèvemens de caisses publiques, de vols
particuliers. T o u s ceux qui avoient à voiturer de l’a r g e n t,
pvenoient des précautions extraordinaires. La loi, et notam
ment la proclamation dw 1 7 9 1 , qu'invoque Descours,
autonsoit les messagers, les commissionnaires à se faire
�( 3® )
escorter de la gendarmerie et de la force armée. L e gou
vernement prenoit des arrêtés pour faire escorter les caisses
publiques ; les voyageurs étoient inquiets ; les voituriers
Menacés. L e citoyen Besqueuil n’avoit-il pas été'arrêté
lu i-m ê m e ? le citoyen Descours en étoit inform é, puis
qu’il s’en fait un moyen. ‘
C ’est dans ces circonstances difficiles qui commandoient
des précautions extraordinaires, que Descours prend sur
sdn compte de faire voiturdr des effets précieux, de trans
porter des sommes considérables, et de confier sa voiture
à un seul homme. Ce voiturier a l'indiscrétion de répan
dre qu’il porte de l’argent ; il le dit à ceux qu’ il rencontre.
Ce même" hom m e n’avoit-il pas répandu sur la ro u te,
lors de l’arrestation du citoyen Besqueuil, qu’il l’nvoit
rencontré et qué le citoyen Besqueuil portoit de l’argent.
C ’est ce même voiturier dont Descours s’avise défaire
l ’éloge pour justifier sa conduite im prudente; c’est à ce
mêm e h o m m e et à ce seul h o m m e q u ’ il confie une voi
ture où il dépose des soin mes aussi considérables.
Pas la plus légère précaution pour mettre l’argent en
sûreté; il le dépose dans un simple porte-manteau de
cuir qui facilite l'enlèvement ; plusieurs sacs auroient em
barrassé les voleurs.
Il se contente de dé poser ce porte-mnntcau dans la caisse
frêle
d’une voilu re; tandis que;, selon l’iisage, tout messa
ger qui transporte de l’argent doit avoir une malle ferrée *
fermant
plusieurs serrures qui puissent résister aux
efforts;
et si ou veut croire au prétendu v o l, les ballots
ont été d é c h a r g é s ,‘la caisse fracturée^ io porte-manteau
t'iiluU dans moins d’un quart d’h e u r e , par uuseulhom m o
�f 31 )
.
.
%
dépourvu de tonte espèce d mstrumens , cjui devoitm em e
être embarrassé de ses armes.
II
y a donc négligence et faute grossière d e là part de
Descours. Ce n'est point ici une cause impossible a pré
v o ir , comme l'exige la proclamation q u il in v o q u e , et
certes s i , avec une aussi légère exceptio n , Descours pou
voit être à l’abri de toute responsabilité, la prévoyance
du législateur seroit vain e, les exemples inutiles; tout
hôtelier, tout messager pourroit impunément s’entendre
avec les voleurs.
■
E t que le citoyen Descours ne parle pas de la modi
cité du salaire qu’ il recevoit. L e citoyen Besqueuil’ est
porteur d’un certificat du préfet du département de la
H a u te -L o ir e , qui atteste que dépouillement fait des re
gistres déposés aux archives de la préfecture, lui Besqueuil
s’est chargé du transport de la somme de 39,000 francs 7
du P u y à G r e n o b l e , p o u r le c o m p t e du gouvernem ent, le
7 thermidor an 6 , se rendant responsable des frais et ris
ques, moyennant la provision de deux pour cent po u r
droit d’assurance et de transport.
2.q Que le 12 floréal an 1 0 , l’appelant a également fait
transporter du P u y à L yo n , à ses risques et périls , la
somme de 83,000 fr. espèces d’a r g e n t, bronze et cu ivre,
sous la provision de trois quarts pour cent pour tous frais
d’assurance et de transport.
C o m m e n t, pour des voyages dTaussi long cours, le trans
port n’a été p a y é , avec toute assurance, que deux pour
cent et trois quarts pour c e n t , tandis que pour un voyage
d un jour et d e m i, il a été compté au citoyen Descours
une somme de 3 fr. par i ;ooo ? Dans tout autre temps
�( 3
2
)
la provision eut été exhorbitante ; et qu’importe d’ailleurs
la modicité de la somme! n’est-ce pas ici un dépôt néces
saire ? le citoyen Besqueuil ne s est-il pas confié à la foi
-d e Descours , commissionnaire? Descours n’a - t - i l pas
c o n n u lui-même toute la force de ses engagemens? n’en
a-t-il pas voulu courir les risques?
i l se trouve donc dans l’espèce prévue par la loi nautoe
ca u p o n e s, par celle com m odati vel contrà.
Il
est donc responsable de la somme dont il s’est chargé.
L ’intérêt p u b lic, la sûreté des personnes, les circonstances
particulières imposent aux juges le devoir rigoureux de
lui appliquer la disposition des lois que les juges d’appel
ont violées et méconnues.
•
P a r conseil, P A G E S , ancien jurisconsulte.
D E V E Z E , avoué.
*
A R I O M D E l'im p r im er ie
L a n d r i o t , seul im pr im eu r du
T r i b u n a l d ’a p p e l . — A n 11.
�
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Mémoire pour le citoyen Jean-Pierre Besqueuil second, propriétaire, habitant de la ville du Puy, appelant d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de la même ville, le 2 germinal an 10 ; contre le cit. Louis-Joseph Descours, commissaire, habitant de la même ville du Puy, intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 2
Circa An 2
1789-1799 : Révolution
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0203
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1303
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53702/BCU_Factums_M0203.jpg
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The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Le Puy-en-Velay (43157)
Yssingeaux (43268)
Saint-Hostien (43194)
Le Pertuis (43150)
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Domaine public
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-
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99ed547116787ff604723f4f49662302
PDF Text
Text
M É M O I R E
P O U R
P ierre
COTANSON
et
/
M arguerite
'
C H E C L I N ,. sa
;- ,_-/»>• ■
. femme,
' .■
. ' intimes
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" «‘ r ‘ . ' ’ '
C
O
J a c q u e s
L
N T RE
•
/
C H E C L I N , a p p e la n t.
E Q U E L des articles C X X X I ou C X X X I V de l’o r
donnance de 1 5 3 9 , doit-on appliquer à la renonciation
faite par la fem me C outanson, en m in o r ité , p ar ordre
de sa mère qui étoit sinon sa tutrice légale, tout au moins
son adm inistratrice?
Si on préfère l’article C X X X I V , y a-t-il eu réclam a
tion dans les dix ans ?
Jacques C héclin est-il recenable sur son a p p e l, à sou
tenir les intimés non-recevables
qu’ils ont été in
A
�...................( 2 )
dûment forcés cle reproduire devant les mêmes juges
de première instance, u n e demande €n nullité de cette
renonciation implicitement comprise dans la demande en
p a rtag e, dont ils n’ont été déboutés qu’avec la faculté
d’exercer par action principale cette demande en n u llité ?
f
a
i t s
.
L e s frère et sœurs Chcclin et cinq autres enfans, sont
nés du mariage d ’A n d r é Chéclin avec M arie Coutanson.
L e père est décédé en mars i 7 7 o. Par son testam en t,
d u 16 du m êm e mois, il a légitimé chacun de ses enfans
a une somme de 800 fr. avec un ameublement. Il a ins
titué p o u r son héritière fiduciaire sa v e u v e , à la charge
p ar elle de rendre l’hérédité à celui ou à celle de leurs
enfans q u e lle jugeroit à propos : dans le cas où elle vien
drait ¿\ décéder sans avo ir fait ce c h o ix , le testateur nomm a
Jacques-Chcclin , appelant, p o u r recueillir l ’entière h é
rédité. L a m ère fut nom m ée tutrice de leurs enfans ,
avec décharge de toute.reddition „de com pte et revenu.
Cette ve u ve le fut encore aux sept enfans, sans excep
t io n , par avis de parens et ordonnance de justice du
26 avril 1770 , à la réquisition du ministère public
,ct elle déclara que q u o iq u 'elle put se dispenser tFaccepter
.cette charge , n éa n m oin s elle veut bien se charger de
la tu te lle , et p ro m it de bien et fid è le m e n t vaquer au
devoir de sa charge.
P a r le contrat de mariage des in tim es, du 9 février
1773-, leur mère et belle-mère constitua à sa fille 1,000 fr.
nu lieu de 800 qui lui avoient été légués par le père,,
�( 3 )
.
•et d'autres objets , le tout payable ¡\ longs termes de 60
francs par a n , p o u r tenir l ie u , est-il d it, a la future ,
de sa portion dans la succession de son père , qui étoit
é c h u e , de tout augm ent et supplément * et au m o y en
de c e , la fille mineure r e n o n ç a , sans dire au profit de
q u i , à tous ses droits paternels; mais immédiatement
après cette clause, elle se constitua en t o u s s e s biens, etdonna
plein et entier p o u v o ir à son futur de les rechercher.
L ’appelant contracta m a r ia g e , le 27 mai 1 7 8 7 ; les in
timés ne furent point appelés à cet acte : la m cre rem it
au fils l’ hérédité dont
elle
étoit c h a rg é e ,
et
quelque temps après.
P a r exploit du 13 prairial an 2 , les intimés
quèrent un tribunal de famille p o u r obtenir le
des biens d’A n d r é Chéclin et M arie G outanson,
communs.
'
'
I jG 2 nivôse an 7 , le tribunal du P u y rendit
décéda
'
provo
partage
auteurs :
' :
un ¡ju
gement contradictoire , par lequel « considérant que la
» demande en n u llité, form ée à cette audience par les
» demandeurs, tend à anéantir cet acte, et devient par
» là principale; que d’après les nouvelles lois, les tribu
» n a u x n e pouvoient en co n n o ître sans au préalable avoir
» épuisé la voie de la conciliation; c’est le cas de la re
» jeter..............
relaxe ledit Jacques Chéclin , de la de
» m ande en partage.........à la charge........... de p a y e r . . . . .
» en a rg e n t'o u c n 'iô n d et iV leur ch o ix.........s a û f a u x '
» m ariés Coutanson et Chéclin à se'pbihvoîr-, s ils y ' >
» sont.j'ondés , contre la renonciation ............... '»
Ci; jugem ent fut e x p é d ié , mais nullement signifié. lia
discussion s'étànt de rccUef engagée devant -le tribunal
A 2
�,
.
.
(
4
)
d’Yssingeaux, substitut* à celui du P u y , d’après la cédule
du 28 germ inal an 7 , les parties ne regardèrent ce ju ge
ment que com m e étant d’instruction; elles le reconnurent
expressément dans la rédaction du jugement du 5 ther
m idor, dont est appel. Elles discutèrent au fond. L a nullité
de la renonciation fut prononcée en conséquencedel’article
C X X X I de l'ordonnance de i 5 3 9 ) et le partage o rd o n n é .
L a cause appelée à to u r de rôle , en ce t r i b u n a l , & l'au
dience du a p ra iria l d e r n ie r , a été plaid ée; m a is , surlesC 0nclusions du citoyen s u b stitu t, il a sursis d-un m o ;S; p e n d an t
lequel temps l'expédition du jugement du 2 nivôse an 7
seroit rapportée.
Cette expédition est jointe : la transcription qui vient
d’en être faite par extrait, p ro u ve qu’en effet les expres
sions sont un débouté de la demande en partage , sauf la
faculté de demander la nullité de la renonciation ; mais
celui dont est appel établit aussi que les p a r tie s , en cause
principale, s’arrêtant plusau sens q u ’aux mots de cette rédac
tion, n’o ntregardéce jugem ent indivisible et contradictoire,
q u e com me simple instruction, puisqu’elles ont discuté sur
le fond.
M O Y E
N S.
II ne peut être question, dit l’ap pelan t, de l’article
C X X X I de l’ordonnance de 1639 >parce que M arie Coutanson n’a jamais été tutrice ni protutrice de sa fille, puis
que celle-ci étoit âgée de 17 ans, conséquemnient pubère ,
à l’époque du décès d’A n d r é Chéclin , et parce que celle
m è re , d’un c ô t é , ne devoit aucun com pte d’administration
à l’époque du contrat de mariage de sa £Ile y d’autant
�( 5 )
qu ’ elle en étoit expressément dispensée p ar le testament j
d’ un autre , elle n’a reçu aucune, disposition, p o u r elle
ni p ou r son f i l s , de la part de sa fille : qu au surplus les
parties étant domiciliées dans le ci - devant F o rez , il
convient d’écarter la jurisprudence du c i r devant parle
m ent de T o u lo u s e , mais b ien de s’aider, de la juris
prudence de celui de Paris qui n’adm ettoit(q u e jle .lapsde
dix a n s , conform ém en t à l ’article C X X X I V de cette loi ;
que sous ce r a p p o r t , les dix ans utiles ont été révolus., soit
qu ’ on les fasse courir de l’ époque d é j à m a jo r it é , soit
qu’ on, admette la suspension du délai jusqu’ au; 27 - mai.
178 7 , que la m ère a fait l ’ élection d’ hérîtier<en faveur de
son f ils , parce que dans ce c a s , au lieu de regarder l'action.",
du 13 prairial an 2 , com m e demande en nullité , il faut
seulement la. considérer com m e dem ande en partage', et.
ne rapporter cette demande en nullité-qu’au 28 germ inal,
an 7 , d’autant.plus que cette de mande est l’exécution d u
jugem ent du 2 nivôse an 7 , qu i conséquem m ent a a c q u is ,
p ar l’exécution , la force de chose j u g é e , et établit une fin
de non recevoir ' contre une dem ande qui est irrévo ca -.
blement prescrite.
•
R É P O N S E .
Cette discussion se divise en deux parties.
" i ° . C ’est l’article C X X X I et non l’article C X X X I V de
l ’ordonnance de 1639 , les ordonnances'de 1^49 et de 1667,
qui doivent être la base de la décision.
20. Si on se délerm inoit par 1 article C X X X I V , la
réclamation a été faite dans les dix ans.
Les autres questions ne sont que les accessoires des
deux principales.
�•
'
.
C6 )
P R E M I È R E
P A R T I E .
i y \
- s !N"ous déclarons tontes dispositions d5entre~vifs ou tes*
» tainen(aires, cjui seront ci-apres faites par les donateurs
» ou.testateuis, au p io fit de leurs tuteurs , curateurs, gar
» dicns,l aillisties et a u t r e s l e u r s a d m i n i s t r a t e u r s ,
» 'ê t r e nulles; de nul effet et valeur.» A rt, C X X X I de
rôtfdannance! de 1 6 3 9 .
•
'1;«. Et'.quant au six-vingt-unzièm e art;t.]C) faisant m en.
» n o n des donations, nous voulons et o rd o n n o n s, en in„ .terprétant ledit article , que toutes donations entre-vifs
» et testamentaires, qui seront faites p a r les don ateurs
* o u testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs,
» gardiens ybaillistres et
AUTRES
a d m in istra teu rs,
» soient nulles, et de nu L effet et v a le u r ; et telles les
¡0 avons declareeset déclarons par ces présentes ; ensemble
» celles qui frauduleusement seront faites d u r a n t le temps
» de ladite administration , à personnes interposées v e
» nant directement ou indirectement au profit desdits
» tu te u rs , curateurs , - gardiens , bdllistres et
»
ADMINISTRATEURS. »
Ordonnance de
AUTRES
1Ô49
Ces ordonnances ont été confirmées par celle de 16 6 7 ,
tît., X X l X , art. I ; elle oblige non-seulement les tuteurs*
pro tuteurs, curateurs, fermiers judiciaires, séquestres
g a rd ien s, mais encore t o u s a u t r e s q u i a u r o n t a d m i
n istr é
LES
biens
d ’a u t r u i
,
« à rendre com pte aussitôt
» que leur gestion sera fin ie , et les réputé com ptables,
5» encore que le compte soit clos et a r r ê t é , jusqu’à ce
�.
'
.(
7
)
„
-
»• 'qu’ils a ie n f p a y é le reliqu at, s’il en est d û , e t remis
» toutes les pièces justificatives. »
'
,
T e l étoit encore le droit romain. L e tuteur ¿toit censé
toujours tuteur jusqu’à ce qu ’il eût rendu com pte ; non est
•functus' o jjicio n is i ration es red d id en t,' Jusq ue-là il ne
'P ou voit être déchargé par quelqu’acte que ce f û t , suivant
la l o i , s i q u id e s t , idt. de auct. et cons. tutor. j et la glose
¡entend par ces mots , s i q u id , toutes sortes de conventions
entre le m in eur et le ,t u t e u r r ■mCme^les'transaçtÎG.ms j ut
.a ccep tilla tio , pactu m \ de n o n pet en do ^ tra n sa c tio ^ v el
delegatio. Il' en étoit de m êm e de to.ute .jespècerjd'admirnistrateur. L o i si q u is , ff. de n egot.' gesL \
:
D ans le m êm e droit ¡, l’action tutélaire ne prescrit que
par trente ans._ Il n’est pas^ possible ¡ de ?borner , -p a r l e s
conventions p articu lières, le .cours de cettér:prescription
légale ; c est c e- qui arriveroit', si on admettoit'la nécessité
de se po ur v oi r ,, dans- les d i x ans , contre des actes qu i
em porteroient la décharger de la tutelle..'
•
„
,
M o rn ac ad leg., X X I X y cod. l iv .'I I , tit, I V ? s’exp rim e
.ainsi : Docemus enim quotidianis .rerurn experùnentis
m hil prodesse tut a n quod transigerit in genere de tutelce suce administratione : nno nec si auditâ parte ra
tionuni suarurn minor fo e tu s major r libérationem ge•neralem de cœteris\omnibus ad tutelam spectantibus
dederit.. Oportet quippè rationes r e d d id is c u ti dis
pungi et claudi tandem autore judice. ¿Llitis et nisi ità
hœ cjîa n t nihil agit, citm usque ad annos t r i g i n t a
possit minor petere rationem , sub prétexta specicrmn
.post repertarum quçecumque generalis intercesserit
transactio : se/ya/nusque in eo .vulgard. heg„ cum ser.
,
,
,
�.
.
- '
.
( 8 5
,
.
de cohd. e t dem onstr. Q uce v u lt r.îan q u i s il ra tion ibu s
reddendis obnoxius reddére oportere rat lotie s ut dis
cutiatur sigdlaùm qiadquid egerit çel non egerit, citm
■aD
fct a dèbuisset.
,
-
Mïi-is rien nést plus 'énergique que ce q u ’enseigne
M . D üvaÎ dans sôn excellent traité de rebus d u b iis , en in
t e r p r é t a n t • les deux articles C X X X I et C X X X I V : « E t
» parce que s o m e n t y a difficulté sur lesordonnancesfaites
par L ou is X l l i e t Frahçois I , touchant la prescription
»•de dix ahs»contre la rescision des contrats faits p a rles
„ majeurs'termineurs ; ite m , si ladite prescription a lie u ,
» les dispositions faites par iceux m in eurs, au profit de
» leurs tuteurs ou a d m i n i s t r a t e u r s ; . . . . item p o u r le
» regard du tuteur ou a u t r e a d m i n i s t r a t e u r qu i
» auroit j o u i , par ¡l’espace de dix an s, des choses à
» lui délaissées par son m ineur ap rès'sa m a jo rité , ou
» avant la reddition de com pte ; le doute est grand
» à s a v o ir , si ladite prescription de dix ans a lieu en ce
” cas........* - M o v et d ubiu m q u o d le x est g en era lis e t in
» d istin ctè loq u en s............ Sed co n tra riu m est v en im
» Car il y a autre ordonnance touchant les dispositions
» faites par les-mineurs, au profit de leurs tuteurs
•» quelles elle ddclare nulles, de nul effet et
les-
valeur
» V o le n s em'm occurrere h u ju s m o d i d isp o sitio n ib u l
» etco n tra ctib u s q u a s h a b etp ro ùifectis. Pourtant l’autro
» ordonnance doit recevoir restriction et déclaration de
» celle-ci ; c’est-à-dire, qu ’elle n’a licu p our le regard des
» dispositions faites au profit des tuteurs et administra
» teurs, soit par contrat ou donation quelconque entre
» v i f s , ou à cause de m o r t 3 n’y fait riCu ci e
{j Ue i’o r_
donnanco
�( 9 )
», donnance touchant la prescription-'de dix ans subsé-
» q u en te, l’autre annullant les dispositions faites avec les
» tuteurs........ Car toutes les deux sont au m em e caliier
» et publiées en m êm e tem p s, l’an i ^39 3 p ou rq u oi la
» présomption de droit est que l’une se corrige par 1 autre,
» joint qu ’elle est con fo rm e au droit com m u n qui an nulle
» les contrats faits avec les tu teu rs, soit p o u r le regard
» de la disposition, ou d e l à tradition et possession.»
C ’est aussi la doctrine d e P a p o n jurisconsulte du F ores ,
pays des parties.j liv. V , tit. V I , nomb. 9 , de ses a rrêts,
et 3 *1*15, n otaire, liv. I X : « L e m in eur dans les 30 a n s ,
» contre la quittance peut v e n i r ................ à causé de dol
» dudit tuteur................ L es dix ans de l’ordonnance ne
» sont- pr.opres en ce cas ; ainsi devra le m in eur être
» reçu dans les 30 ans après son âge parfait. »
•
C ’est aussi l’avis de R o d i e r , comment at eur de l’ordon
nance de 1 6 6 7 , à l’article cité.
La
ju r i s p r u d e n c e d u
parlement:
de
T o u l o u z c a été
constamment conform e à ces auto rités, suivant le térnoinage uniform e de M eyn ard , de D,olive , de
de Catelan.
Serres ,
Il y a eu des variations au parlement de P a r is : dabord
un arrêt de 1 5 6 s avoit adopté l’art. G X X X I .
O n en
tro uve d’autres conformes dans Brodeau , le ttre -T :; dans
B a r d e t , tom. I I , liv. V , sous la date du 7 juillet 1636 , qui
p r o n o n ç a la n u l l i t é d’ une r e n o n c i a t i o n faite par une fille
de son p è r e , au profit de sa mère t u t r i c e , qui
n’ avoit point fait d ’ i n v e n t a i r e , et ne lui avoit rendu aucun
héritière
compte. D ivers autres
rapportés
p a r-C h e n u ,
Brodeau,
Bardet et M o n lh o lo u , ont adopté l’article C X X X I V ,
B
�,
.
10 ^ • .
.
m êm e sur de simples quittances données par des mineurs
à des tuleurs, sans com pte préalablement rendu. Il en est
cependant plusieu rs, notamment celui du 29 mars iô y ô ,
qui sont étrangers à notre e sp è c e } mais l’ordonnance
de 1667 a ramené à la pureté des principes ; et depuis
cette époque , le parlem ent de Paris 'a> rejeté la fin de
non-i’ccevoir des dix ans , p our n’adopter que la pres
cription de trente ans. L e s aiiets sont des 18 février 170 3,
i 7 décem bre 1706 et 26 mars- 17 0 7 . Celui de 1706
rapporté, au journal des audiences, tom. Y
liv. V I
chap. X L V , édition de 1 7 3 6 , ’ a annullé une transac
tion q u i avoit été • faite avec un hom m e chargé de
•
•
•
«|
Q
O ’
p ro cu ra tio n , et qui avoit administré p QUr des mineurs.
M . l’avocat g é n é r a l, J o ly - de - F le u r y , o b serv a , i Q. que
l ’on ne pouvoit appliquer à l’espèce l’art. C X X X I V ; q u ’il
n y a nulle prescription p o u r un administrateur qui n’a
rendu compte* qu'il est toujours débiteur. 2 0. Q ue tout
administrateur de biens de mineurs est protu teu r , et est
toujours présum é frauduleux.
Il est inutile à la cause de rem arquer la contrariété des
arrêts uniformes du parlement de T o u lo u z e avec la
jurisprudence vacillante de celui de Paris : d’une part
il n ’y a plus eu de variation depuis l’ordonnance de 1667:
d ’un autre côté , la com m une de Bas en Busset étoit
un dém em brem ent du L a n g u e d o c ; pendant le temps où
il a e x isté , le parlement de Paris a consacré p ar trois
a r r ê t s , le prem ier du 30 août 1 7 0 7 , rapporté par H enrys,
les deux autres des 21 juillet 1768 et 12 juillet 1 7 7 0 , la
maxim e rappelée par C hop in : tribunalium
jiu lla m p a r it le gui n m u ta tion cin .
v a ria tio
�( II
)
r
R a v io t, arrê tiste de D ijo n , distíngueles transactions, des
décharges. Il soutient que la jurisprudence qui accorde
trente années a u m in e u r , e s t préférable pour 1 utilité p u b li
a
/"
*
r
que. Il a transcrit un arrêt du 12 août 1 7 1 6 , qui a consacre
l’usage de cette c o u r , p our les trente ans. Enfin L a co m b e ^
au mot restitu tion y sect. Ire. n°. 4 , rapportant u n arrêt
du 26 janvier 1 7 4 5 , rappelle les mêmes principes que
fit valoir M . l’avocat général G ilbert.
’
Les jurisconsultes ont assimilé l’ obligation de rendre
compte à celle de rendre un d é p ô t , et les décharges pures
.et simples qui en sont données à des donations nulles de
•nullité absolue. Ils en .concluent que l’action dure 30 an s,
soit p our faire ¡rendre le d é p ô t , soit p o u r reven d iq u er
contre une disposition surprise par le dol à l’erreur , et à
une facilité*irréfléchie, n . , *
f ■r '
:.i
Personne ne m éconnoît l’autorité des arrêtés d.e M . de
Jjamoignon, rédigés, d’aprèsla lettre du célèbre A u z a n n e t ,
par le concours des jurisconsultes et des magistrats les plus
.renom m és et en expérience et en p r o b it é , dans le temps
où Louis X I V ayant donné , c o m m e , de nos j o u r s , B on a
p a rte, la paix à,l’E u ro p e , prit com m e ce hpros dont on
connoît les sollicitudes p o u r la rédaction des différens
codes , toutes les précautions p our retrancher la chicane.
.
Les arrêtés 127 et 1 2 9 , portent les mêmes dispositions
que l’article Ç X X X I de l’ordonnance de i 5 3 9 >
le s.o r
donnances de 1^49 et 1667.
Bien loin que la législation nouvelle ait p orté aucun,
c h a n g e m e n t, le régulateur suprême des tribunaux a con
sacré les mêmes principes par trois jugeinens des 13 prai
rial,, 3 messidor an 4 et s5 frimaire an xo,
*
B 3
/
�( Ï2 )
_
/ L e prem ier a admis la n u ll it é d'une cession faite par
‘’P ierre D uran d , en faveur de son frère, C lau d e, quoique
celui-ci ne fût pas majeur lors du décès du dernier de ses
asccndans, et q u ’ il y eut eu un autre tuteur. Il a été regardé
, com m e étant administrateur comptable.
L e deuxièm e a- cassé .comme contraire à l’article
• C X X X I de l’ordonnance de 1539 ? et à l’article 1er. titre
29 de 1 ordonnance de i 6 6 y , et com m e contenant une
fausse application de l’article C X X X I V de la mêm e ordon
nance de i 539 , un jugement du tribunal d’appel d’E v a u x ,
q u i avoit déclaré non-recevable, pour n’avoir pas été for
m ée dans les dix ans de la m ajorité, Ia demande en nullité
d ’ une renonciation faite par une fille m ineure, au profit
de son beau-frère , moyennant une constitution qui lui
fut faite par sa m è r e , tu trice, qui-ne lui avoit pas rendu
com pte.
' "
L e troisième a jugé dans le sens de l ’article C X X X I V
de 1 ordonnance de 1639 , en cassant un jugement du tri
bunal d appel de P a n s , qui avoit écarté la fin de non-recev o i r , en qualifiant donation dos nclcs qui 11’cn «voient pas
le caractère. Ce jugem ent, loin d’être contraire aux deux
autres, les corrobore en faisant ressortir la différence que
les jurisconsultes et les avocats généraux , ]0rs des arrêts
précités, ont faite, des deux articles C X X X I et C X X X I V .
L a femme intimée est dans un cas bien plus favorable
que Gabitelle L apo ito . C e llo -c i avoit renoncé au profit
de son b e a u - f r è r e , au lieu que Marguerite Chéclin n’a
dirigé sa renonciation q u ’en faveur delà masse de l’hérédité.
Si dans la rigueur du d io it on ne considéroit pas sa mère
com m e étant sa tutrice, ou ne peut au moins contester et
�'( *3
le fait d’administration en lui-m êm e et les titres qui la lui
ont c o n féré e, le testament du p e r e , 1 acceptation spon
tanée qu’elle a faite de la justice de la qualité de tu tr ic e , et
sa promesse judiciaire de rendre compte. Ce seul fait d ad
ministration assujétissoit cette m ère à rendre compte. Les
lois s’expliquent gén ériquem en t p ou r tous les adminis
tra te u rs , que l’arrêt de 1706 a appliquées à un simple
mandataire. Mais les expressions de l’ordonnance de 1667 ,
ne peuvent laisser aucun prétexte d’équivoque. D ’apres le
procès verbal de cette o rdo n n an ce, on avoit inséré dans
la prem ière rédaction ces expressions & économ e ¡ com m issa ir e etm c u id a la ire , et le législateur préféra celle (^admi
n istrateu r, em p loyée dans les ordonnances de 1639 et 1549.
H é ! qu’im porte que le père c o m m u n ait dispensé , par
son testament, sa v e u v e , qu ’il n o m m o it tu tr ic e , de faire
inventaire et de rendre com pte? D ’abord, M arie Coutanson
s’est obligée judiciairement de J id è le m e n t v a q u e r au de
voir de sa charge. Sans d o ut e , le premier d evo ir d’une
tu tr ic e , d’une usufruitière , d ’une administratrice , est de
faire in ven taire, de constater ce qu’elle prend et d ’en ren-j
dre compte. '
’
'
•
. .
.
Mais d’ailleu rs, cette obligation ne souffre point de
•dispense j elle e s t , de droit public , établir, par la loi V ,
ita autem , JJ'. liv. 2 6 , tit. 7 , n °. 7 , J u lia n u s . Q u id a m
decedeiis filiis su is d éd ir a i tu to r e s , et a d jecera t, eos
aneclogistos esse r o lo , et a it J u lia n u s tutores n is i bonani
■Jidem in a d m in istra iio n e prœ st/terin t, d a n m a r id e b e r e ,
quannñs testam ento com p réhen sio n sit ut a n eclog isti
essent : n e c e o n om in e e x causa fid e i-c o m m is s i q u ic q u a m co n seq u i d e b e b u n t, ut a it J u lia n u s : ac est veva>
�( i4 )
ista s entent l a , nem o en im j u s
'
-t e r e
potest
pu b l ic u m
r e m it
-
hujus m o d i cautio nib us nec rn u ta r e j'o r-
niam a n tiq u itù s constituta m .
M arie Coutanson n’a point usé de bonne foi en ne
faisant point inventaire , .et en exigeant une renonciation
- e u b lo c , d e là part sa fille, sans lui présenter seulement
d’ instruction.
:
.
Cette renonciation nest qu’une simple décharge en
faveur d un comptable , gratuite , puisque la m ère n’a
rien ■
fourni de sa substance^ elle s’est opérée p a r l e dol
■
et la fra u d e , en privant sa fille de la plus légère con-noissance de la succession. O n peut appliquer la dispo
s itio n de,.la loi I X q u i cùm tut. g, §. 2. ff. de tutorib.
•q u i ,ignoi ans universa quee m v ero era n t in stru in en tu n i
' tra n sa ctio n is 1sin e aqitilta n a stipitlcittone
non tant' ‘d ecip itu r qricim p a c is c itu r .
in terposu it
■
. Cette mère , 'cette tutrice ou administratrice com p table,
a encore usé de dol , en laissant entrevoir à sa fille l’espoir
d’une élection d’ h é r itie r, qui l’eût fait profiter de l’effet
de sa renonciation.
,
.‘
•
Q ue les n ovateurs, entraînés par l’exem ple du tribunal
-d’É v a u x , ne disent donc plus que les a ffa ires doivent
a v o ir une f in , q u 'il f a u t proscrire les vieilles recherches.
Ce seroit substituer l’arbitraire aux lois. Ces lo is, en
classant chaque prescription dans les termes q u e lle a éta
b li? , n ont introduit d^autre âge que celui q u ’elles ont
conibiné avec tontes les circonstances qui rendent plus
ou moins favorable la lenteur de ceux quelles ont îe •connu être dans l’impossibilité d’agir , par ce principe
contra non valen tem agere non cu rrit prcvscriplio. Ainsi
�( 15 } .
.
une affaire de deux siècles est toujours jeune, tant qu ’elle '
n’est point trop vieillie par le laps de temps utile qu il
faut pour l’éteindre.
D E U X I È M E
_
P A R T I E .
Il y a discordance sur l’ époque où l’action a dû être
e x e rc é e ,e t sur l’époque où elle l’a été réellement.
L ’appelant prétend que l'intimée a d û agir dès l’ins
tant de sa majorité , qui a eu lieu le 23 février 1 7 7 7 ,
et qu’elle n’a form é sa demande que le 28 germ inal an 7.
. Celle-ci soutient au contraire qu’ il y a eu'slispension
de prescription , tant qu ’elle n’a p u a g ir, et q u e lle I V
fait u tile m e n t, le 13 prairial an 2.
' ■ v'
L ’in tim é e , en m êm e temps q u ’il lui fut fait u n e;d o t, 1
se constitua en outre en tous ses' biens :présens et
à v e n ir, p ou r ;la recherche desquels elle donna sa p r o
curation à son mari. Or,- en quels autres biens présens
p o u vo ien t consister cette constitution p a rticu lière, si ce
n ’est dans la demande en partage auquel la m ère venôit
de la faire renoncer ,’ ;dans lés biens de son p ère ! M ais
la fem me a manifesté , par ce m êm e acte, son intention
de réclamer contre la renonciation qu ’il renferme , et
elle n’a pu le faire sous la puissance maritale , soit parce
que l’autorisation du mari étoit indispensable, soit parce
qu’il en avoit été expressément chargé par le contrat demariage. Sous ce prem ier r a p p o r t , i l y a eu suspension de
prescription. Il est reconnu constant dans le ressort du
ci-devant parlement de T o u l o u z c , conform ém ent ¿\ la loi
1 6 , ff. d e fu n d o d o ia li, que la prescription du fond dotal
�( 16 )
ne court pas contre la fem m e pendant le m a ria g e, sinon
qu'elle eût com m encé auparavant ; Serres , liv. II ,
tit. V I I I , page 192 j Catelan et V edel , liv. I V , chap.
X L V ; Despeysses liv. Ier. , tit. X V , sect. I I I , n°. 29.
C ’est
aussi ce qu’enseignent D o m a t , l i v . I I I , tit. V I I ,
sect. V , n°. V I I j L a com b e , verbo p r œ scrip t.,
n°. 1 ; H e n rys , liv. I V , Q. i y 5 .
sect.
V II,
M a is.la prescription a été suspendue de diverses autres
manières.
O n 'p o ü r r o i t e m p lo y e r, p our prem ier m oyen , reflet
d e là puissance maternelle méconnue dans le droit romain ,
et qui semble ctre' adoptée par plusieurs de nos auteurs
m od ern es, d après les rédacteurs du répertoire de jurispru
dence, verbo pu issa n ce p a ter n elle, sect. I I yet le projet d u :
codé c i v i l , surtout d’après l’arrêté 128 de M .le P. Lara oi
gnon ’ aù sujet précisément de la prescription dont il s’agit
au procès • « ladite prescription de trente ans, dit ce m a
» g is tra t, ne court au profit du père et D E L A M È R E , de
» l’aïeul ou DE ï/ A ï e u l e de leur vivan t , nonobstant que
35 la tutelle soit Unie. »
(
Cependant la veuve Chéclin avoit d’autant plus d’a u to
rité sur sa fille q u e lle lui avoit été transmise par le père
dans son testam ent, et confirmée par la justice, en sa
qualité de tutrice , qualité synonymifiée avec celle de
maître
suivant la loi ad ea 1 5 y.
de res. ju r. où.
celui qui dispose en faveur d’une personne à iaquellc il
est soum is, est réputé disposer contre sa v o lo n té ; Telle
non cred itu r q u io b s e q u itu r im perio dom ini. L a volonté
est fa m é de toute disposition , et l’on ne regarde point
com m e volonté
celle qui est forcée. C o a cla vo lu n ia s
n on
�•
C 17 >) ,
,
non h a b etu r pro volu htate Cujas ad tlt. eôd. s i q m s
cthquem tu to ri prohibùer. vel coeger. -Décision fondée
sur ce qu’il n’est rien qui soit si .contraire au consente
ment que la force ou la crainte qui l’extorque : N ih il
co n seiisu i tam contrciriim i est q u itn i vis atque m etus.
L o i 1 1 6 , if. de reg. ju r .
• • •;
•
S i , com m e il n’en faut pas d o u t e r , la m ère a usé de sa
puissance sur sa f ille , en la faisant ren o n c er, il est bien é\ v*
dent que la m êm e cause a forcé cette fille au sile n c e , pen
dant tout le temps que sa m ère a vécu ; et le gendre a telle
m ent partagé la condescendance et la crainte de sa fem m e ,
que non seulement il n’a pas usé de la procuration p o u r
rechercher le-bien d o ta l, mais encore il s’ est abstenu de
rien recevoir. N e résulte-t-il pas m êm e de ce silence une
pi’olestation continuelle contre la m odicité de la constitu
tion c o n v en tio n elle, et une intention bien manifeste de
réclamer contré?
t
• ... .
.
Mais un second m oyen de suspension de la prescription,
est la qualité d’usufruitière cleila mère p a ille testament du 1
père. lia fille n’avoit pas intérêt) cl’qgii* pendant'la durée de
cet usufruit. L a jurisprudence sur ce point est trop cer
taine p our s’ étendre d a v a n t a g e .'•'< .
U n troisième m oyen est la confusion des droits actifs e t
passifs, dans les mariés Cou tan-son et C.héclin. O n n’a pas
perdu de v u e ,q u e la renonciation dont il s’a g i t , n’a été
dirigée cil faveur de personne ni acceptée par personne.
L appelant p ou r écarter l’idée q u ’elle eût été faite en fa
veur de personne p r o h ib é e , a soutenu qu’elle tournoit au
profit de la masse de l’ hérédité du père ; mais cette masse
étoit eu. dépôt. L a remise pou vo it cil avo ir lieu en faveur
G
�r *8 ) '
_
de l’intimée , parce que M a rie Coutanson a eu la lib e lle
pendant toute sa vie d’ élire l’intimée pour la recueillir:
ainsi celle-ci auroit agi doublement contre ses in térêts,
de faire u n procès à sa mère. E n se l'aliénant, elle eût
écarté des dispositions bénévoles pour la transmission de
l ’ hérédité de son p è r e , et elle se fût attiré'son anim adver
sion , à raison de la succession maternelle ; elle a donc
agi sagement par le silence ,72e m a ter peju s fa c e r e t .
M ais, rep o n d 1 adversaire, tous vos motifs de crain te,
d esperance , ont cessé par les dispositions universelles
faites par la m ere , tant p ou r sa substance que p o u r celle
d A n d r é Checlin , par son testament du 3 janvier 1 7 8 5 , et
p ar m on contrat de mariage du 27 mai 1787. •
L a répliqué est absolue. J e n’ai connu ni l’im ni Tautre
de ces actes. L e premier p ou voit être rév o q u é à chaque
instant. Q uant au second, la m ère n’y a appelé ni sa fille ni
son gendre. O n peut conclure que c’est là le dernier p é
riode du d o l , et que c’est afin d’ éviter la réclamation contre
la renonciation , qu’elle a eu l’astuce de laisser ign o rer la
disposition irrévocable portée par le contrat de mariage de'
Jacques Chéclin*
E n un m o t , la renonciation n’ étant dirigée q u ’au p rofit
de la masse , elle n’a pu être que conditionnelle ou casuelle.
E lle eû t profité à la renonçante , si elle eût été élue à re
cueillir cette m êm e masse d ’ hérédité, et il falloit nécessai
rem ent attendre le sort de cette incertitude ^ de cette espé
rance.
Il doit donc dem eurer p our bien constant, que les inti
més n’ont pu , n’ont dû agir qu’après le décès de la mèrea n ’iv é depuis le ¿ 7 mai 17871.
�-
t x?^ .
,
.
Il reste à p ro u ve r que l’action utile a été intentée le 13
prairial an 2 , conséqucmraent avant les 10 ans.
O li! sur ce p o i n t , l’adversaire s’est créé une logique tout
ii fait com m ode } mais tout à la fois contradictoire et ridi
cule.
L e prem ier jugem ent du 2 nivôse an 7 , a débouté les
intimés de leur demande en partage, sauf à eu x à se p o u r
vo ir contre la renonciation.
L ’adversaire veut-il écarter, à la faveur du n on bis in
idem , cette demande en nullité d elà renonciation, sous le
p rétexte qu ’elle a été rejetée par ce jugem ent ? Il a soutenu
dans le procès verbal de n on-con ciliatio n du 14 floréal
an 7 ,' et il l’a répété jusqu’ à satiété, dans ses causes et
m oyens d’ a p p e l, sans en avoir dit m ot lors de la p lai
doirie sur laquelle est interven u le jugem ent du 5 ther
m id or an. 9 , que cette demande' a été comprise dans la
demande en p a r t a g e , du 1 3 prairial an 2.
L u i rétorque-t-on ce langage , p o u r établir d’après lu im e m e que 1 action en nullité a été introduite dans les 10
a n s ? Il sé retouvne| et v e u t to u t'à laMfois blanc et n o ir!
tantôt', que cette demande ait é té 'fo rm ée , le 13 prairial
an 2 r, et qu’en prêtant au ju gem en t du 2! nivôse an 7 , la
chose jugée et 1 exécution , elle soit éteinte 5 tantôt, q u e
cette demande n’ ait été fo r m é e , p ou r la prem ière fois,
r r 1
Q
•"
'
1
r ■
tjue le 20 germimü an 7 , et q u ’étant postérieure au terme
de 10 a n s , elle soit anéantie par cette espèce de prescrip
tion , de dix ans.
Séparons les élémens de cette big a rru re, de ce sophisme.
’ k o jugem ent du 2 nivôse an 7 a débouté., sauf l’action
en nullité 3 c’est absolument la m êm e 'chose'que s’ il avoifc
C 2
�( 20 )
p ro n o n c é, quant à p rése n t, non recevabJe,,ou un sursis^,
afin d ’observer la form e de la conciliation,' dès que l’exccption pérem ptoire de la nullité absolue, était consi*dérée com m e devant être une action principale , sujette
à ce préalable.
A u f o n d , chacune de ces trois dispositions renferme
deux parties indivisibles. I jg débouté, la fin. de non rece
v o i r , le sursis, ont également en vue le sort de la de
mande en nullité , qui doit être la base du rejet défi
n it if, ou de 1 accueil, de la demande principale ; en sorte
q u e , quelle que soit 1 expression, çe n’est dans le vrai q u ’ un
jugem ent d’instruction , et l’appelant l’a si bien rec o n n u ,
en cause p rincipale, q u ’au lieu de s’attacher à cette p ré
tendue fin de non rec e vo ir, il a discuté le fond de la ques
tion , et par l à , il est devenu lui-m êm e non-recevableà l’opposer sur l’appel.
,
!
C e s t en vérité abuser étrangement des m o ts , que depreter à la demande du 28 germinal an 7 , une telle accep
tion d e xecu tio n du jugem ent du 2 nivôse an y , qu’on
en infère une approbation du débouté , bien p lu s , une
persuasion d’un débouté p u r et sim p le, et définitif-•*mais
si l’appelant l’eut pensé a in si, en cause principale’ ,que
ne s’en tenoit-il à cette prétention ? D e ce q u ’il a dé
fendu au fo n d , ne peut-on pas lui ré to rq u e r, dans son
système de divisibilité d ’exécution du ju g e m e n t, du 2.
a lui-m êm e '-ai.culo
exérniv« la
1-, seconde partie
.•
.nivôse an 7! ,’ qu’il
-»
de ce jugement purem ent et simplement ; car si les inti
més ont été bien éloignés de demander le payem ent
du prix de la ren o n cia tio n , l ’appelant a bien senti qu’il.
W eût clé inutile tic foili'ir.
'
V- 1 '
Il !
�( te ) '
^
'
) îiMaintendnt 'ayons p p ü r certainf que 1 adversaire , en
a vouan t, soit dans le p r o c è s verbal de non-conciliation ,
soit clans les causes et moyens cl a p p e l, signifiées le 28 ven
tôse dernier, aveu indélébile en s o i , com m e conform e au
principe, au surplus formellement accepte pai la îeponse
signifiée le 24 floréal, que Ja demande en nullité delà renon
ciation a été;comprise dans ladem andeen p a rtag e,d u 1 3 ^ “
inaire an 2 , d’âprès m a xim eg en era h s p etitio in clu d it ea
om nia qu œ .in eii p etition e 'possunt in clu d i. Cet axiom e
est-encore appuyé; par un autre-: P e t i t 10 h 011 or uni poS)
sessiou is h œ red itn lis à iW tio n e m prçcsuppoiiit. L a de
mande en .partage r-excliit l’iidiée de préférence du p r ix
d ’une renonciation. In ç lu s io u n i us est e x c la sio a lte n u s .
• Semblable discussion sur ce p o in t, et sur l’application des
art. Q X X X I et
été jugée en ce
çitoÿcn iVerny
. l ie 2,5 février
C X -X X I Y , de 'l’ordonnance de 1 6 3 9 , a
t r i b u n a l, m êm e section présidée par le
à Vaudionce du 18 germinal dernier.
i y 5 6 , Jeanne B a rth élém y , par son contrat
de m ariage avec Jean P a g es, renonça, m oyennant 330 f r .r
aux successions de-son père échue,. et à celle iY échoir
de sa m è r e , non présente au Contrat, en faveur de Jean.
Barthélém y son frère. L e;m ari’ en donna quittance; L e 10
février 1 7 8 6 , Jeanne B arth élém y lit assigner lesenfans
héritiers de Jean Barthélém y p o u r-v e n ir à division et
partage. J u gem en t du tribunal du P u y , du 11 fructidor
nrii7 ? q u i déclare 9 q u a n t'à p r é s e n t, nonr-recevable, sur
ce q u e lle auroit dû se p o u r v o i r , avant to u t, contre la
renonciation de scs droits héréditaires. L e 11 bru m aire
®n 8 , nouvelle demande en partage , avec conclusion en
feviltité de la renonciation. Les,défendeurs opposèrent deux,
;
�t 22 )
^
Ens de n o n -re c e v o ir,' f u n e résultante''de ¡la quittance
donnée par le m a r i , l’autre de ce qu’il s’étoit écoulé près
de Irente ans depuis le décès, et plus de quarante ans depuis
la renonciation. Jugeirientdu tribunaIdeBrioude,du 3 ger
minal au 9, q u i , sans s arrêter aux deux üns de non-rece*
-voir, ordonne lé partage. Appel. A l ’appui on a in voqu é
l ’article C X X X I V de l ’ordonnance de 1 ¿39 ; on a désavoué
la qualité de tuteur dans le frère. L ’intimé s’est prévalu de
1 article C X X X I , de la qualité d’administrateur com p table,
et des deux premiers des trois jugemens du tribunal de cassa
tio n , dont il a été fait mention. A l ’audience, il prit fantaisie
a 1 appelant d im aginerlam êm e fin den on -recevo ir, qu’op
pose Jacques C h e c lin , sous le prétexte d’avoir exécuté le
jugem ent du Pu y qui déclaroit, quant à p ré se n t, non-recevable. C est ce qui donna lieu a la quatrième question insé~
rée-dans ce jugement: « Si une demande eh partage, ne côn» ton d u t-p o in t *de conclusions sur l'action en rescision:
» contre la renonciation , est suffisante p o u r admettre la
» prescription ? » L e jugem ent de B rioude fut confirm é,
plaidant le citoyen Pagès-Meyrr\ac , ’p o u r l’intimée. I;e
m o t i f 'q u i se rapporte à la quatrième question est ¡ainsi
conçu : « Considérant, qu ’à l'époqu eii laquelle a dû cesser
» la prescription de ce droit est celle du 4 février 1 7 8 6 ,
» jour 011 l’intimé a form é contre les appelans la de
» mande en p a rta g e , laquelle a été continuée par. l’exploit
» du 11 brum aire an 8, qui contient l’action en’ rescision
» conire la renonciation d o n t i l s’agiu
”■
; ■1.■• 1 . '
Il ne paroît pas q u ’on ^puisse rien opposer ît ce p ré
jugé si conform e au principe ; il y . a absolument parité
de raisons pour fixer l ’cpocjuc de la demande au 13 prairial
�( 23 )
_
an 2 , continuée" par la cédule du 28 germinal an 7, qui
contient- la .demande en nullité de la renonciation dont
'
il s’agit : d’autant plus que la prem ière de ses demandes a
eu expressément p o u r .objet d e . SE
R É GL ER.
SUR
les
successifs.
’
C ’est en v a i n , que l’appelant's’est flatté d’exclure par des
droits
chicanes, les intim és, d’une succession de va leu r de plus de
30,000 francs ; sans doute l’injustice d’une pareille ten
tative est assez démontrée.
•
'
Q u e l’on pèse la' va leu r dé cette renonciation par
e lle -m ê m e , par la nïère qui l’a obtenue par la fille qu i
l a f a it e ,p a r la concordance de la loi et de la jurispru
dence dans le lieu de la succession , p ar la faculté de
réclam er clans les trente ans ; m êm e par l’action intentée
réellement dans les d ix ans ; il doit rester évidem m ent
dém oïitrc que cette renonciation est caduque , com m e
étant faite au profit de la renonçante , si l’élection fidu
ciaire à laquelle elle p ou voit prétendre , eût été faite en
sa faveur ; que la m è r e , ne fût-elle considérée que com m e
curatrice ou simple administratrice ? a joint à sa puissance,
à son ascendant, le d o l , soit,en privant sa fille m ineure
et qui étoit sous sa dépendance , d’ un c o m p te , m êm e
d mstLuction , soit en lui laissant 1 espoir
de l’élection
d’héritier ; qu’en obéissant aveuglém ent , la fille a réclam é
contre cette renonciation au m om ent m êm e qu ’elle l ’a
faite , en se constituant ses droits présens qui ne p o u v o ie n t
etre autres que ceux auxquels l’aulorité maternelle venoit
de la faire re n o n c e r, et en donnant sa procuration à son
m ari pour en faire la recherche ; que 7 bien -lo in d ’a vo ir
ap prouvé cette renonciation faite à; v il p r ix et à termes-
�........
CC )
H
éloignés, il n’a été reçu aucun acompte '; que ce silence
m êm e est une m tci 1 uption , qu il n a pu courir de près*
c rip tio n , d a b o r d , en puissance m aritale,puis, parla nature
de la renonciation , tant que l’usufruit a d u r é , tant que
la crainte révérentielle ou tout au moins l’espoir d etre
■élue ont subsisté ; q u ’enfin il n > a point à hésiter d ’a p p li
qu er l’art. C X X X I de l’ordonnance de i 539 , et q u e ,
•quand la cause seroit décidée par l’art. C X X X I V l ’action
en nullité est implicitement renfermée dans la cédule du
13 p ia m a an 2 , dans 1 intervalle des d ix a n s ; que conséquem m ent le jugement dont est appel doit être con
firm é avec amende et dépens.
P u r conseil, C O U I J E R T - D Ü V E R N E T , anc. ju r isc .
C R O I Z I E R 3 avoué.
,
■Le
c o n s e i l
s o u s s i g n é , qui « v „ te pr#Sent
m é m o ir e , e s t i m e qu’il a été bien-jugé par le jugem ent
du tribunal d’ Yssingcaux.
L a m ère avoit été nom m ée tutrice de sa fille par le
testament du p è r e , antérieur seulement à sa m ort de peu
de jours. P e u im porte qu’elle fût alors pubère! le père
avoit jugé q u e lle avoit besoin d ê tre mise en' Wtelle ; les
parons en jugeront d e m e m e , lors de la confirmation de
la tu telle, qu i lut faite pai le juge des lieux. L a mère ellcm enic accepta la tutelle de sa fi 116 p u b è re, com m e celle
des autres cnians : de p lus, Iîi niere avoit l’usufruit clcs
biens
�.
- . ( 25)
.
biens du p ère par son testament; mais cet usufruit ne
p ouvoit frapper sur la légitim e de la .fille; par consé
quent devoit non seulement un com pte d’ instruction ,
mais m êm e un com pte d’administration pour la jouis
sance de la légitime. D ès qu ’elle devoit un c o m p t e ,
tant qu’elle ne l’avoit pas rendu , elle ne p ou vo it pas slipuler de sa fil/e, dans son contrat de m a ria g e, u n eirenon• •
«
r ' ciation qu i em portoit la décharge du com pte. D ’ un autre
côté , cette renonciation qui u’ étoit dirigée en faveur de
perso n n e, ni acceptée par p erso n n e, contrastoit singu
lièrem ent avec la clause subséquente du contrat de m a
n a g e , par laquelle la fille se constituoit tous ses biens et
donnoit p o u vo ir à son fu tu r m ari d’en faire la recherche.
X«a dernière clause détruisoit la prem ière. !La nullité de
la renonciation doit donc paroître évidente.
A -t-o n dû se p o u r v o ir , p o u r faire déclarer cette nullité ,
dans les dix ans, term e fatal des actions rescisoires, ou
l ’action s’est: elle p rorogée jusqu’à trente an s? L ’article
C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , celle "de 1649 et l’art,
p rem ier de celle de 1667 , mettent hors de doute la durée
de l’action pendant trente a n s , et l’ article C X X X I V de
1 ordonnance clé 15 3 9 , n ’a. nulle application aux actes
passés entre lés m in e u rs, m êm e devenus m ajeurs, et les
tuteurs qUi'n’ont pas rendu compte. C ’est ainsi qu’on le
jugea dans les temps les plus rapprochés de l’ordonnance
de 1 6 3 9 , dont l’intelligence devoit être aloi'S plus c o n n u e ,
com m e 011 peut le v o ir dans le passage du traité tic rébus
d u b iis , de M . D u v a l , qu ’on a transcrit dans le m ém oire.
S i dans la suite on s’é lo ig n a , contre tout p rin c ip e , de cette
jurisprudence on fut obligé d’y r e v e n ir , lorsque parut
'
D
,
�.
£ z6 )
,
.
l’ordonnance de 1 6 6 7 , et à dater de cette é p o q u e , les
arrêts rejetèrent constamment la fin de non-recevoir des
10 ans; aussi jurisprudence de la sénéchaussée d’A u v e rg n e
s’y é to i t-elle toujours conform ée. O n peut en citer trois
parmi un grand nom bre d’autres ; l’une au rap
p o r t du conseiller N e v r e z é , du 22 juillet 1749-, la seconde
l a
s e n
t e
n
c e
s ,
rendue à l’audience , lors de la prem ière cause de l’avocat
Beaulaton,
à ' présent juge
du tribun al, du 24 juillet
de la m êm e an née, et l a - troisième du 4 juin 1761 * au
r a p po r t du conseiller Brujas.
Ce ne fut que dans les premiers temps de la rév o lu tio n ,
qu ’ on parut vo u lo ir renouveler les questions, sans néan
moins q u ’aucune, des milliers de lois q u elle a enfantés ?
ait dérogé aux vrais princip.es’de la matière et.aux^ordonnârices qui les avoiént( consacrés ; mais le ■
tribunal , de
cassation les a maintenus. O n connoît surtout celui de ce
tr ib u n a l, du 3 messidor an 4 , qui a cassé le jugem ent du
tribunal d 'É v a u x , du 19 floréal an 3 ; et rien de plus^tranchant que les motifs et le dispositif de ce ju g e m e n t du
tribunal decassation.fcremier m otif : «Que l’article C X X X I
33 de l’ordonnance de 1 5 3 9 , déclare nulles toutes disposi
» tions faites en faveur des tuteurs et autres administra
» tours, directement ou indirectem ent, avant le com pte
» ren d u , et qu’ une ‘renonciation faite pm* un mineur en
» faveur d’une personne qu i administroit ses biens et
» a°*issoit p our les héritiers d’ un com p table, présentoit un
« avantage indirect en faveur de ses h éritiers:» Second
m otif : « Q u ’en pareil cas, l’action subsiste pendant trente
» a n s , parce que selon 1 article Ie** du titje
X X I X i de
» l’ordonnance de 1 6 6 7 , le comptable ne cessant d c l ’cLre
�que par la reddition de son com pte c 'est le com pte
» seul qui peut éclairer le m in eur sur ses i n terets.
Troisièm e m o tif : Q ue l’article C X X X I V de l'ordonnance
de 1 5 3 9 , qui restreint le délai a dix ans, n e' st relatif
qu'aux actions rescisoires qui n' o n t rien de com m un avec
celles en n u llité , qui durent trente ans, et p o u r lesquelles
' il n’est pas besoin de lettres. E nfin le dispositif, qui casse
le ju gemens du distr ict d'Évaux c o m m e contraire aux
du titre X X I X de l' ordonnance de 1 5 3 9 e t p r e m i e r
d u t i t r e X X I V d e l ' ocornte
dnaontn
unenfauassenapcplica
e tio
dnd
eel'a1rt6CX6XX7IVdeEl'o
t rdcononan
m
cedm
e153e9
v
L e s autres questions qu ’ on a vo u lu élever dans cette
a f f a i r e s o n t t r o p b i e n d i s c u t é e s d a n s l e m é m o i r e ,. p o u r
qu’ on pense qu’ il soit nécessaire de rien ajouter aux moyens
.
qui y o nt été e m p lo y é s} et-qu’on adopte p leineniènt.
'
A N D R A U D
t,
x.
V
A R
io m
, d e l ’imprime rie de L
a n d riot
»
', seul imprimeur
du tribu n al d ' app el an 10 1802,
�S U rú ..
ÿ u s'fa sft'U eJ x, 2 / . fáw M A f^ û Jc j û ,
•
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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A name given to the resource
Factums Marie
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Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Andraud
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Coutanson et Marguerite Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1770-1802
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0209
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0210
BCU_Factums_M0703
BCU_Factums_G1418
BCU_Factums_G1419
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Yssingeaux (43268)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
doctrine
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
Successions
tribunal de familles
tutelle
-
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6d334c0eb9064520546cbda8064f1530
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Text
P R E C I S
EN
R É P L I Q U E
P O U R
P
i e r r e
C O U TA N SO N
CH ECLIN ,
et
C
a t h e r i n e
sa femme, intimés
C O N T R E
J a c q u e s
L
C H E C L I N ,
appelant.
’ A P P E L A N T veut exclure de la cause, et nomm e
absurdité tout ce qui le contrarie dans son projet d’ex
clure une légitim aire d’ un droit qu’elle ne tient que de
la lo i, et que les auteurs de ses jours n’ont pas plus pu
lu i ra v ir, que les subtilités; le ton d’assurance dans la
A
�•
C2 )
discussion, et les efforts téméraires pour intercepter la
cla rté, l’évidence des m oyens, dans le vrai point de la
difficulté.
J u sq u ’ici
la symétrie des moyens a été entraînée autant
par la rédaction du jugement dont est appel, que par le
plan de défense qu’a présenté l’appelant dans ses causes et
m oyen s, loi's de la plaidoirie , dans sa réponse imprimée.
Rétablissons dans l’ordre naturel et ordinaire de ques
tions principales, celles que l’appelant nomme subsi
diaires.
D ’abord, l’appelant est-il recevable et fondé à prétendre
l ’intimé n on -recevab le dans sa dem ande? la négative
u reçu un tel degré d’évidence, pages 20, 2 1 , 22 et 23
de l’im prim é de l’in tim ée, que l’appelant n’y a pas fait
la plus légère réponse....... D ira -t-il, en plaidan t, qu’il
11e l ’en a pas jugé d i g n e ? -----
Les intimés avoient pris des conclusions verbales et sub
sidiaires à l’audience du 2 prairial dernier, pour appeler
du jugement du 2 nivôse an 7; mais cet appel et ce juge
ment sont également inutiles , surtout d’après l’abandon
spontané de la part de l’appelant en cause principale,
et sur l ’appel, de cette puérilité de prétendre que ce
jugement étoit sans retour.
L a Un de n o n -reccvo ir, ressource ordinaire des plai
deurs en désespoir de cause; étant une lois écartée, l’action
�C 3 )
en nullité a-t-elle été comprise dans l’exploit du 13 prai
rial an 2 , dans les d ix ans à partir du décès de la m ère,
postérieur au 27 mai 178 7? Depuis la m ajorité de l ’in
timée jusqu’à cette ép o q u e, y a - t - i l eu suspension de
prescrip tion ? l’affirmative a été dém ontrée pages i
5,
16 , 17 et 18 du mémoire.
L ’appelant regarde comme absurde tout ce que les
intimés ont fait valo ir, d’après les autorités les plus res
pectables, sur la suspension opérée par la puissance ma
ritale et par la puissance maternelle.
Quant au prem ier p o in t, il tente vainem ent de prêter
au contrat de mariage qui renferme la stipulation géné
rale de la constitution en do t , de la part de l ’in tim ée,
de tous ses d ro its, une rései've en a v e n tif qui n’existe
p a s, de l’action en nullité de sa renonciation.
A l’égard du second, il affecte d’ignorer que les in
tim és, page 16 , on trappelé que le droit romain ne rcconnoissoit pas de puissance m aternelle; et il englobe incon
sidérém ent, dans son apostrophe fam ilière à 'absurde, ce
qu’il y a de plus prépondérant dans le droit français,
divers jurisconsultes rccommandablcs , des disposilions
de coutum es, M . le président de I,am oignon, les coopérateurs du projet du code civil.
Les intimés ont opposé d’autres moyens de suspension
de la prescription ; l’appelant n’y a pas répondu.
A 2
�( 4 )
Ce n’est donc que très-subsidiairement que les intimés
reviennent à la question jusqu ici principale.
N ’est-ce pas l ’appelant qui tente de détourner l’at
tention
sur le vrai point de la cause, en présentant
cl’abord comme
certitude
que l’intimée n’a réclamé
qu’en l ’an 7 , contre sa renonciation, tandis qu’il est au
moins en thèse, si cette réclamation n’a pas eu lieu le
13 prairial an 2, et en hasardant de détruire une qua
lité de comptable que la veuve Cliéclin avoit elle-m ême
contractée judiciairement ?
M arie Coutanson, dit l ’appelant, n’é to it, ni ne pouvo it être tutrice de sa fille ; l ’appelant, en compulsant les
autorités du digeste, du co d e , des institutes, de D om at,
eût sans doute écla irci la ca use, en écartant tout ce qui
a rapport à la tutelle lé g itim e , et qui est évidem m ent
étranger à la contestation. N e p o u v a n t douter que M a r ie
Coutanson a été nommée tutrice par le testament du
père-, qu’elle a été confirmée par un avis de parens et
par la justice, de son consentement, et avec obligation
expresse de sa part de géi'er, n’étoit-il pas naturel de
s’attacher à ce qui est enseigné sur la tutelle testamen
taire ? le droit ne la place-t-il pas avant la légitim e?
ne lui donne-t-il pas la préférence sur celle-ci? L a
faculté permise au père de donner un tuteur ù ses enfans ; émane de sa puissance. Il sufiisoit que l ’enfant
�5
.
(
)
fût sous cette puissance pour recevoir un tuteur de la
volonté du père ; et il étoit indifférent qu’il fut pubère
ou
im pubère. P a tern a pietas pro hberis consilium
capit.
L e père avoit même ce p o u voir pour l ’enfant éman
cipé ou exhérédé : cclui-ci pouvoit-il être im pubère? Bien
plus ; on distinguoit les trois sortes de tutelles pour les
femmes pubères comme pour les pupilles. T u tores cojîstitu u n tiir, dit U lp ie n , dont le témoignage est rappelé
par M . Pothier dans son appendice sur les seizième et
d ix-sep tièm e livres du digeste, tome I I ,
page
168.
F e m i n i s a u te m tàm im pub erib us q u à m p iib e rib u s, et
p ropter se x û s in firm itatem et p r o p t e r f o r e n s i in n r e r u m
ignora/itiam. IL y avo it m êm e une telle différence entre
les deux sexes, que le tuteur, nommé aux fils par le
p è re, étoit censé nommé aux filles; mais le tuteur donné
aux filles n’étoit pas censé donné aux fils, d’après les dif
férentes lois rapportées par E errières, dans son traité
des tutelles, page
pessitnum
5,
qui termine ainsi : E xem p lo cnim
est J cm in in o
voccibuloj etiam
m asculos
continari.
M ais n’est-ce pas assez que M arie Coutanson ait con
tracté en justice l’obligation de gérer comme tutrice?
et le fait seul de la gestion
comptable aux yeux de la lo i?
ne l’a - t- il pas
rendue
'
�C 6 )
M arie Coutanson étolt tutrice dans le droit; elle Tétoit
encore dans le fa it, parce q u e , quelqu’avantage qu’eût
pu
lui faire son mari , il ne pourvoit atténuer la légi
tim e de rig u e u r, due par la loi à scs enfans ; ce n’est
clone pas le cas d’invoquer l’adage trivial : Q u£ peiit le
■plus , peut le moins.
O n ne conçoit pas pourquoi l’appelant n’a pas luim ême jugé étrangères à la contestation les deux propo
sitions , que la renonciation de la J llle u est pas f a i t e
au profit de la. mère , et que les ascendans, quoique
tu teu rs,
sont exceptés de la prohibition de l’ordon
nance de 1539, et
l ’édit d’ampliation de 1649.
Ces discussions sont aussi oiseuses qu’ incohérentes.
Il suffit que la mère comptable ait trompé sa fille en ne
lui donnant pas même un compte d’ instruction , et qu’elle
ait blessé l’égaliLé au-delà de la faculté que lui en a voit
donnée le p ère, pour avoir donné lieu à la nullité , et
non à la restitution, selon les expressions de Dum oulin.
N ’est-il pas du dernier ridicule de faire parade de
progression de denrées, d’augmentation de valeurs, de
reproches de cupidité , d’am bition, lu où le lég'tim aire
depuis l ’ouverture des successions en 1770 et 1787 ,
n’a reçu
j la moindre chose?
C ’est plutôt une législation nouvelle que propose l’appe
1
lant , pour détourner l’article C X X X de l’ordonnance
�(71
de 1 53 9 qu’une discussion profonde sur les autorités
qui lui ont été opposées.
Selon l u i , ce sont des questions étrangères , souvent
,
débattues , que tout la monde connaît , un tissu d'abssurdités ; une dissertation sans o b je t, q u i , comme tant
d'autres , ne f e r a pas changer la jurisprudence.
M ais c’est précisément la jurisprudence qui a été in vo
quée ! Plaisan ter, se m o q u er, se croire le plus habile ,
c’est sans doute beaucoup pour celui qui se com plaît en
lui-même ; mais ce n’est ni modeste pour un jeune h om m e,
ni circonspect envers le jurisconsulte célèbre qui a donne
la consultation im p rim ée, que l ’appelant se divertit a
nomm er consolation éphém ère : q u o iq u e ce juriscon
sulte ait v ie illi avec succès dans l ’étude et l’application
du droit et de la jurisprudence, c’est encore moins satis
faisant pour la justice, pour la vérité.
P ar conseil, C O H E R T - D U V E R N E T , ancien ju risc.
C R O I S I E R , avoué.
A. RIOM , de
l'im prim erie
de
L an driot
tribunal d ’appel. A n 10
, seul im prim eur
du
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. An 10]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croisier
Subject
The topic of the resource
successions
partage
jurisprudence
tribunal de familles
minorité
tutelle
doctrine
ordonnance de 1539
prescription
fideicommis
Description
An account of the resource
Précis en réplique pour Pierre Coutanson et Catherine Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 10
1798-An 10
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
7 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0210
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0209
BCU_Factums_M0703
BCU_Factums_G1420
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Yssingeaux (43268)
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doctrine
fideicommis
jurisprudence
minorité
ordonnance de 1539
partage
prescription
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tribunal de familles
tutelle
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1a09388423e84b52b0eef0233149b408
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M É M O I R E
pour
P
i e r re
COUTANSON et
‘
M
arguerite
C H E C L I N , sa femme, intimés
;
C O N T R E
r
Jacques
C H E C L I N , appelant.
L E QU E L des articles C X X X I ou C X X X I V Je l’o r
donnance de 1 5 3 9 , doit-on appliquer à la renonciation
faite par la femme C o u ta n so n , en m in o r ité , par ordre
de sa mère qui é toit sinon sa tutrice légale, tout au moins
son administratrice ?
Si on préfère l’article C X X X I V ,
a-t-il eu réclam a
tion dans les dix ans ?
Jacques Chéclin est-il recevable sur son a p p e l, à sou
tenir les intimés non-recevables de ce qu’ils ont été inA
�(. * )
dûm ent forcés de reproduire devant les mêm es juges
de première instance, une demande en nullité de celte
renonciation implicitement comprise dans la demande en
p ar t a g e , dont ils
n’ont été déboutés qu ’avec la faculté
d’exercer par action principale cette demande en n u llité ?
F A I T
S.
L e s frère et sœurs Chéclin et cinq autres enfans, sont
nés du mariage d ’A n d r é
l i e père est décédé en
du 16 du m êm e m ois, il
à une somme de 800 fr.
Chéclin avec M arie Coutanson.
mars 1770. P a r son testam en t,,
a légitim é chacun de. ses enfans
avec u n ameublement.. Il a ins
titué p o u r son héritière fiduciaire sa v e u v e , à la charge
p a r elle de rendre l’hérédité à celui ou à celle de leurs
enfans qu ’elle jugeroit à propos r dans le cas où elle v ie n droit à décéder sans avoir fait ce c h o i x , le testateur nom m a
Jacques C h é c lin , appelant, p o u r recueillir l’entière h é
rédité. L a m ère fut nom m ée tutrice de leurs en fa n s,
avec décharge de toute reddition de com pte et revenu.
Cette veu ve le fut encore aux sept enfans, sans excep
t io n , par avis de parens e t ordonnance de justice du
26 avril 1 7 7 ° > à la réquisition du ministère public ,
et elle déclara que q u o iq u e lle pût se dispenser d'accepter
cette c h a r g e , n éa n m oin s elle veu t bien se ch arg er de
la tu te lle , e t p r o m it de bien et fid è le m e n t v a q u er a u
devoir, de sa charge.
P a r le contrat de mariage des in tim és, du 9 février
1 7 7 3 , leur mère et belle-mère constitua il sa fille 1,000 fra u lieu de 800 qui lui a voient été légués par le p è re ,
�<3 )
et d’autres o b je ts, le tout payable à longs termes de 60
francs p a r 1a n , p o u r tenir l i e u , est-il d it, a la future ,
de sa portion dans la succession de son père , qu i étoit
é c h u e , de tout augm ent et supplément ; et au m o y en
de c e , la fille’ mineure r e n o n ç a , sans dire aù profit de
q u i, à tous ses droits paternels ; mais immédiatement
après cette clause,elle se constitua en t o u s ses b i e n s , et donna
plein et entier p o u v o ir à son futur de les rechercher.
L ’appelant contracta m a r ia g e , le 27 m ai 1787', les in
timés ne furent point appelés à cet acte : la m ère rem it
au fils l’hérédité dont
elle ’étoit c h a r g é e , ‘ et
décéda
quelque temps après.
P a r exploit du 13 p r a iria l'a n 2 , les intimés p r o v o
quèrent un tribunâïi:de famille p o u r obtenir le partage
des biens d’A n d r é lChééliri : et M a rié JC o u ta n so n , aùtéurs •
commiirts. 1’>
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n
i
- >!>I. vlfinn?
L e 2 nivôse ail 7'^ lè tribunal du P u y rendit u n j u - ’
gemeht con trad ictoire, par lequel « considérant que la
» demande en n u llité , form ée à cette audience par les
»' demandeurs, tend à anéantir cet a c t e ,, e t dévient par
» lt\ p rin cipale; que d’ après les nouvelles lois, les trib u a n a u x n e pouvoient en connoître sans au préalable a vo ir
» épuisé la voie de la conciliation; c’est le cas de la rejeter.. . . . . . relaxe ledit Jacques .Chéclin , de la de»• inandc en partage.. . . . à la charge.. . . .'‘ de payer.. . . .
»• en argent ou en- fond et à l e u r i c h o i x . . . . . s d i/ f a u x
» m ariés G outanson et C h éclin à se p o u r v o ir ," s Us y .
» so n t fo n d é s , contre la ren o n cia tio n . . . . . . »
C e jugement fut e x p é d ié , mais nullement signifié. L a
discussion s’ étant de reclief engagée devant le tribunal
A
a
�(4 )
d’Yssingeaux* substitué à celui du P u y , d’après la cédule
du 28 germinal an 7 , les parties ne regardèrent ce ju g e
ment que c o m m e étant d’ instruction; elles le reconnurent
expressément dans la rédaction du jugement du 5 ther
m id or, dont est appel. Elles discutèrent au fond- L a nullité .
de la renonciation fut prononcée en conséquencpde l’articleC X X X I d e r}’pi’donnance de 1 6 3 9 et.le partage ordonné.
L a cause appelée à tour de rôle , en ce t r ib u n a l, à l'au
dience du 2 prairial dernier, a été plaidéejm ai^, sur lesconclusions du citoyen substitut f il asursis d’un m ois, p endant 1
lequel temps l’expédition du ju gem ent ,du arnivôse an 7
seroit rapportée.
Cette expédition est jointe :/la transcription qui vient
d’en être faite par extrait, p ro u v e ;,qu:en effet les expres-j,
sions. sont u n débouté de la demande ren; partage * sauf lajj
faculté de demander la nullité de la renonciation ; mais
celui dont est appel établit aussi que les parties , ‘ en. cayse
principale, s’arrêtant plus au sens q u ’ aux m ots de cette rédac
tion,n’ont regardé ce j ugem en t indivisible et contradictoire,
qu e com m e simple instruction, puisqu’elles ont discuté sur
le fond.
,r
M O Y E N S .
Il ne peut être question , dit l’appelant j de l’article .
C X X X I de l’ordonnance de 1539 , parce ^ue M arie Cou-
tanson n’a jamais été tutrice ni protutrice de sa fille , puis
que celle-ci étoit âgée de 17 a n s, conséquem m ent p u b è r e ,
h l’époque du décès d’A n d r é C l i é c l i n , et parce que cette
m è r e , d?un c ô té , n ed evo it aucun com pte d’administration
à l’époque du contrat de m ariage de sa fille , d’autant
�(.5 ) .
q u e lle en ¿toit expressément dispensée p ar le testament ;
d’ un autre , elle n’a reçu aucune disposition p o u r elle
ni pour son üls , de la part de sa fille : qu au surplus les
parties étant domiciliées dans le c i - d e v a n t F o r e z ,
il
convient d’écarter la jurisprudence du ci - devant parle
m ent de T o u lo u s e , mais b ie n de s’aider d é la juris
prudence de celui de Paris qui n’admettoit que le laps de
dix a n s , conform ém ent à l ’article C X X X I V de cette l o i }
que sous ce î-app.ort j les dix ans utiles ont été r é v o lu s , soit
qu’ on les fasse courir de l’ époque de la m a jo r ité , soit
qu’on admette la suspension du délai jusqu’au 27 mai
178 7 , que la m ère a fait l’ élection d’héritier en faveur de
son fils , parce que dans ce c a s, au lieu de regarder faction,
du 1 3 prairial an 2 , com m e demande en n u llité , il faut
seulement la considérer com m e demande, en p a r t a g e , et
ne rapporter cette demande en nullité qu’au 28 germinalan 7 , d’autant plus que cette dem ande est l’exécution du
jugement du 2 nivôse an 7 , qu i conséquem m ent a a c q u is ,
par l’exécution , la force de chose j u g é e , et-établit une fin
de non recevoir contre une dem ande qu i est irrévo ca-.
blement prescrite.
'
;
R É P O N S E .
Cette discussion sc divise en deu x parties.
l0> C ’est l’ai-ticlc; G X X X I et non l ’article C X X X I V de
l ’ordonnance de 1 6 3 9 ? les oi'dormances de 1549 et de 166 7,
qui doivent être la base de la décision.
2 0. Si on se déterm inoit par l’article C X X X I V , la
réclamation a été faite dans les dix ans.
L es autres questions ne sont que les accessoires des
deux principales.
�P R E M I È R E
p
a
r
t
i
e
.
« N ous déclarons toutes dispositions d’entre-vifs ou tes» tamentairbs, qui seront ci-après faites par les donateurs
» ou testateurs, au proiit de leurs tu teu rs, curateurs, gar» diens, baillistres et a u t r e s l e u r s a d m i n i s t r a t e u r s ,
» être nulles, de nul effet et valeu r.» A r t . C X X X I de
l'ordonnance de 1639.
•
..
«• E t quant au six-vingt-unzièm e article, faisant m en» tion des donations, nous voulons et o rd o n n o n s, en in» terprétant ledit article , que toutes donations entre-vifs
» et testamentaires, qui seront faites par les donateurs
» ou testateurs, au profit de leurs tuteurs, curateurs,
». gardiens,.baillistres et A U T R E S A D M I N I S T R A T E U R S ^
» soient ¡nulles, et de nul effet et valeu r ; et telles les'
» avons déclarées et déclarons par ces présentes ; ensemble
» celles q u i:frauduleusement seront faites durant le tem p sL
» de ladite administration , ià personnes interposées, v e » nant directement ou indirectement au profit desdits
» tuteurs , curateurs , gardiens , baillistres et A U T R E S
» A D M I N I S T R A T E U R S . » O rdonnance de 1549.
Ces ordonnances ont été confirmées par celle de 1 6 6 7 ,
tit. X X I X , art. I ; elle oblige non-seulement les tuteurs,
protuteurs, curateurs, fermiers judiciaires, séquestres,
gardiens , mais encore TOUS A U T R E S QUI A U R O N T A D M I
N I S T R É l e s b i e n s d ’ a u t r u i , « à rendre com pte aussitôt
» que leur gestion sera fin ie , et les réputé com ptables,
» encore que le com pte soit clos et a r r ê t é , jusqu’à ce
�C7 )
» qu’ils aient pîvvé le reliq u at, s’il
en
est d û , e t remis
» toutes les pièces justificatives.»
T e l ctoit encore le droit romain. L e tuteur etoit censó
toujours tuteur jusqu’à ce qu’il eût rendu com pte \ non est
¿functus offîcio n is i ra tion es reddiderit. Ju sq u e-là il ne
p ou vo it être déchargé par quelqu’acte que ce f û t , suivant
la l o i , s i q u id e s t , ult. de auct. et cons. tutor. ,* et la glose
entend par ces mots ys i q u id 3toutes sortes de conventions
entre le m ineur et le tu te u r, m ê m e les transactions; u t
a ccep tilla tio , pactu m de n on p eten d o , tra n sa ctio vel
delegatio. Il en étoit de m êm e de toute espèce d ’adm i
nistrateur. L o i s i q u is , ÍF. de negot. gest.
D ans le m êm e d r o i t , l’action tutélaire ne prescrit que
par trente ans. Il n’est pas possible de b o r n e r , par des
conventions p articu lières, le cours de cette prescription
légale; c’est ce qui a rrivera it %si on ad m ettoit la nécessité
de se p o u r v o i r , dans les d ix a n s , contre des actes q u i
em porteroient la décharge de la tutelle.
.
M ornac cid leg. X X I X . , cod. liv. I I , tit. I V , .s’exp rim e
,
inhil prodesse tutari quod transigerit in genere de tuteîce suce administrai
e : ùtià nec si auditâ parte raiionum suarum ,minor Ja ctas m ajor , Jiberationern gé
néraient de cwleris omnibus ad tuleïam spectantibus
dcdcnt.
quippè rationes reddV, discuti , dispimgi et claudi tandem autore judice. ¿íliiis et n isiità
h œ cfia n t , nihil agit, cùm us que ad annos t r i c i n t a
ainsi : Docem us enun quotidianis rerum experùnentis
lo ti
O p ortet
possit mijior petere rationern , sub prelextu specicrum
post repertarurn
quœcumque generalis
intercesserit
transactio : serva/nusque in eo vulgari. Lèg. cum sei\
�(
8)
de cond. e t dem onstr. Q u œ v u ll r.iim q u i s it ra tio n ib u s
reddendis o b n o x iu s reddere oportere rat ione s , u t dis c u tia tu r sigittaùm q u id q u id egerit ç e l non e g c n t , cim i
a géra debuisset.
M ais rien n’est plus
énergique
que ce q u ’enseigne
]VL. D u v a l dans son excellent traité de rebus d u b iis , en in
terprétant les deux articles C X X X I et C X X X I V : « E t
» parce que souvent y a difficulté sur lesordorinanccsfaites
» par L ouis X I I et François I , touchant la prescription
» de dix ans contre la rescision des contrats faits par les
» majeurs et mineurs ; it e m , si ladite prescription a lie u ,
» les dispositions faites par iceux m in eu rs, au profit de
>3
leurs tuteurs ou A D M I N I S T R A T E U R S ........ item pou r le
» régard du tuteur ou A U T R E
ad m in istr ateu r
qui
» auroit j o u i , par l’espace de dix ans, des choses à
'» lui délaissées par son m ineur après sa m a jo r ité , ou
» avant la reddition de com pte ; le doute est grand
» à s a v o ir , si ladite prescription de dix ans a lieu en ce
» cas.. . . . . . M o v et d ubium qu òd le x est generalis et in » d istincte loqu en s............ Sed co n tra ria v i est -verum.
•» C ar il y a autre ordonnance touchant les dispositions
» faites par les m ineurs, au profit de leurs tuteurs, les» quelles elle déclare nulles, de nul effet et valeur.
» V o le n s en im occurrere h u ju s m o d i d isp osìtio n ib u s
3) et G ontractibus qu a s habet p rò ù ifectis. Pourtan t l’au tre
>3 ordonnance doit recevoir, restriction et déclaration de
» celle-ci \ c’est-à-dire, q u ’elle n ’a lieu p ou r le regard des
33 dispositions faites au profit des tuteurs et adm inistra>3 teurs, soit par contrat ou donation quelconque entre33 vifs , ou à cause de m o rt; n’y fait rien de dire que l’or
donnance
�C9 ) ' '
» donnance touchant la prescription de dix ans subse» q u en te, l’autre annullant les dispositions faites avecles
» tuteurs........ Car toutes les deux sont au m em e caliieu
» et publiées en m em e te m p s, l’an 1539 \ p ou rq u oi la
» présomption de droit est que l’une se corrige par \ autre,
» joint qu’elle est conform e au droit com m u n qui annulle
» les contrats faits avec les tu te u rs , soit p o u r le regard
» de la disp ositio n , ou de la tradition et possession. »
C ’est aussi la doctrine d e P a p o n jurisconsulte du F o r e s ,
pays des parties ; liv. V , tit. V I , nom b. 9 , de ses a rrê ts,
et 3me. n otaire, liv. I X : « L e m in eur dans les 30 a n s ,
» contre la quittance peut v e n i r ................ à cause de dol
» dudit tuteur................ Les d ix ans de l’ordonnance ne
» sont propres en
» reçu dans les 30
C ’est aussi l’avis
nance de 1667 , à
ce cas ; ainsi devra le m in eur être
ans après son âge parfait. »
de R o d i e r , com m entateur de l’ordon
l’article cité.
L a jurisprudence du
parlement de T o u lo u z e a été
constamment conform e à ces au to rités, suivant le lé m o inage uniform e de M eyn ard , de D o liv e , de
de Catelan.
Serres ,
Il y a eu des variations au parlement de P a r is : dabôrd
un arrêt de 1662 avoit adopté l’art. C X X X I . O n eu
trouve d’autres conformes dans Brodeau , lettre T ; dans
B a r d e t , tom. I I , liv. V , sous la date du 7 juillet 16 3 6 , qui
pi'ononca la nullité d’ une renonciation faite par une, fille
héritière de son p è r e , au profit de sa mère tu tric e , qui
n’avoit point fait d’inventaire, et ne lui avoit rendu aucun
com p te..D ive rs autres rapportés par C h e n u , B r o d e a u ,
Bardet et M o ntholo n , ont adopté l’article C X X X I V 3
B
�( 10 )
m êm e sur de simples quittances données par des mineurs
à des tuteurs, sans compLe préalablement rendu. 11 en est
cependant plusieurs , notamment celui du
iïiîiis i 5y 5 ,
qui sont étrangers à notre esp èce; mais l’ordonnance
de 1667 a ramené à la pureté des p rin cip es; et depuis
cette époque , le parlem ent de Paris a rejeté la fin de
ifon-recevoir des dix a n s , p o u r n’adopter que la pres
cription de trente ans. L es arrêts sont des 18 février 170 3 ,
17
décem bre
1706 et 26 mars
r a pp o rt é au journal
1707. Celui de 1706
des audiences, torn. V ,
liv. V I ,
cliap. X L V , édition de 1 7 3 6 , a annullé une transac
tion qui avoit été faite avec un h o m m e chargé de
p ro c u ra tio n , et qui avoit administré p ou r des mineurs.
M . l’avocat g é n é ra l, J o l y - de - F l e u r y , o b serv a , i Q. que
l ’on ne pouvoit appliquer à l’espèce l’art. C X X X I V ; q u ’il
n ’y a nulle prescription p ou r un administrateur qui n’a
rendu compte ; qu’il est toujours débiteur. 2°. Q u e tout
administrateur de biens de mineurs est p rotu teu r , et est
toujours présumé, frauduleux.
, Il est inutile, il la cause de rem arquer la contrariété des
arrêts uniformes du parlement de
T o u lo u z e avec
la
jurisprudence vacillante de celui de Paris : d’une p a r t ,
il n’y a plus eu de variation depuis l’ordonnance de 1667 :
d ’un autre côté r la com m une de Bas en Busset étoit
un dém em brem ent du L an guedoc ; pendant le temps où
il a e x is t é , le parlement de Paris a consacré par trois
a r r ê ts , le prem ier du 30 août 1 7 0 7 , rapporté par H cnrys,
les deux autres des 2.1 juillet 1768 et 12 juillet 1 7 7 0 , la
m axim e rappelée par C hopin : trib u n a liu m
n ullarn pcirii k g u m rnutationem .
v a ria tio
�X ” )
R a v io t, arrêtiste de D ijo n , distíngueles transactions, des
décharges. Il soutient que la jurisprudence qui accorde
trente années au m in e u r , est préférable p our l’ utilité p u b li
que. Il a transcrit un arrêt du 12 août 1 7 1 6 , qui a consacré
l’usage de cette c o u r , p o u r les trente ans. Enfin Lacom be f
au mot restitution , sect. Ire. n°. 4 , rapportant un arrêt
du 26 janvier 1 7 4 5 , rappelle les mêm es principes que
fit valoir M . l’avocat général Gilbert.
Les jurisconsultes ont assimilé l’obligation de rendre
com pte à celle de rendre un d é p ô t , et les décharges pures
et simples qui en sont données à des donations nulles’ de
nullité absolue. Ils en concluent qu¿ l’action dure 30 an s,
soit p ou r faire rendre le d é p ô t , soit p o u r reven diquer
contre une disposition surprise par le dol à l’ erreur , et à
une facilité irréfléchie.
■x
Personne ne m éconnoît l’autorité des arrêtés de M . de
L a m o ig n o n , rédigés, d ’api-ès la lettré du célèbre A u z a n n e t,
par le concours des jurisconsultes et des magistrats les plus
renom m és et en expérience et en p r o b it é , dans le temps
où L ou is X I V ayant donné , c o m m e , de nos jours ./Bona
p a rte , la paix à l’E u ro p e , prit com m e ce héros dont on
connoît les sollicitudes p o u r la rédaction des différens
c o d e s , toutes les précautions p o u r retrancher la chicane.
Les arrêtés 127 et 1 2 9 , portent les mêmes dispositions
que l’article G X X X I de l’ordonnance de 1 ^ 3 9 , et les o r
donnances <le 1549 et 1667.
Bien loin que la législation nouvelle ait p orté aucun
c h a n g e m e n t, le régulateur suprême des tribunaux a con
sacré les mêm es principes par trois jugemens des 13 prai
rial , 3 messidor au 4 et z 5 frimaire an iq ,
Ba
�rL e prem ier a admis la nullité d’ une cession faite par
P ie r r e D u ra n d , en faveur de son frère, C la u d e , quoique
celui-ci ne fût pas majeur lors du décès du dernier de ses
ascendans, et q u ’il y eût eu un autre tuteur. Il a été regardé
c o m m e étant administrateur comptable.
Le
deuxièm e
a cassé com m e contraire ¿\ l’article
C X X X Í de l ’ordonnance de 1639 , et à l’article 1er. , titre
29 de l’ordonnance de 1 6 6 7 , et com m e contenant une
fausse application de l’article C X X X I V de la m êm e ordon
nance de 1 5 3 9 , un jugement du tribunal d'appel d’E v a u x ,
q u i a voit déclaré non-recevable, p our n’avoir pas été for
m ée dans les d ix ans de la m a jorité, la demande en nullité
d ’ une renonciation faite par une fille m in e u re , au profit
de son beau-frère , m oyennant une constitution qui lui
fut faite par sa m è r e , tu trice, qui ne lui avoit pas rendu
compte.
L e troisième a jugé dans l e ’ sens de l ’article C X X X I V
de l’ordonnance de 1 5 3 9 , en cassant un jugem ent du tri
b u n a l d’appel de P a r is , qui àvoit écarté la fin de non-recev o i r , en qualifiant donation des actes qui n ’en avoient pas
le caractère. Ce jugem ent, loin d’être contraire aux deux
autres, les corrobore en faisant ressortir la différence que
les jurisconsultes et les avocats généraux , lors des arrêts
précités, ont faite, des deux articles C X X X I et C X X X I V .
L a fem m e intimée est dans un cas bien plus favorable
que Gabrielle Laporte. C e lle - c i avoit renoncé au profit
de son b e a u - f r è r e , au lieu que M arguerite Chéclin n’a
dirigé sa l’enonciation qu ’en faveur delà masse de l’hérédité.
Si dans la rigueur du droit on ne considéroit pas sa m ère
com m e étant sa tutrice, on ne peut au moins contester et
�( ?3 ) a
le fait d’administration en lui-m êm e et les -titres.qui la lui
ont c o n fé r é e , le testament du p è r e , l’acceptation sponr
tanée q u ’elle a faite de la justice de la qualité de tu trice, et
sa promesse judiciaire de rendre compte. Ce seul fait d’ad
ministration assujétissoit cette m ère à rendre compte. L es
lois s’expliquent gén ériquem en t p o u r tous les adminis
trateu rs, que l’arrêt de 1706 a appliquées à un simple
mandataire. Mais les expressions de l’ordonnance de 1667 ,
ne peuvent laisser aucun prétexte d’équivoque. D ’après le
procès verbal de cette o rdo n n an ce, on avoit inséré dans
la prem ière rédaction ces expressions ^ é c o n o m e , com m ise
s a ir e e i m a n d a ta ire, et le législateur préféra celle $ adm i
n istra teu r, em p loyée dansles ordonnances de 1639 et 1549.
H é ! qu ’im porte que le père co m m u n ait dispensé , par
son testament, sa-v e u v e , qu’il n o m m o it tu trice, de faire
inventaire et de rendre com pte? D ’abord, M arie Coutanson
s’est obligée judiciairement de fid è le m e n t v a q u e r aü de
v o ir de sa charge. Sans d o u t e , le prem ier d evo ir d’une
t u tr ic e , d’une usufruitière j d’ une administratx-ice , est de
faire inventaire, de constater ce qu ’elle prend et d’en ren^
dre compte.
M ais d’ailleu rs, cette obligation ne souffre point de
dispense ; elle e s t , de droit public , établie, par la loi V ,
ita autem , J f. liv. 2 6 , tit. 7 , n ° . 7 , J u lia n u s . Q u id a m
decedens f i l i i s su is dederat tut or e s , et a d jece ra t, eos
aneclogistos esse 2>olo, et a it J u lia n u s tutores n is i bonarn
fid e m in a d m in istra tion e p rœ stiterin t, d a m n a r id e b e r e ,
qu am vis testam ento com p rehen sian sit ut a n eclogisti
essent : n ec eo n om in e e x c a u s â jid e i-c o m m is s i q u ic q u a m co n seq u i d e b e b u n t, ut a it J u lia n u s : ac est ver a
�( M )
ista sen ien tla ,-i>nemo en im j u s p u b l i c u m r e m i t t e RE POT e s t ' lut ju s m o d i cd u tio n ib u s n ec m u t are f o r
mant a n tiq u itu s constituta/fi.
■
M a r i e C o u t a n s o n n ’a point usé de bonne foi en n e
faisan t point inventaire , et en exigeant une renonciation
b lo c , de la:part sa fille , sans lui p r é s e n te r seulement
d’ instruction.
;
e n
,
Cette renonciation n’est qu’une simple décharge en
faveu r d’un comptable , g ra tu ite , puisque la mère n’a
rien fourni de sasubstance ; elle s’est opérée p a r l e dol
et la fraude , en privant sa fille de la plus légère con noissance de la succession. O n peut appliquer la dispo
sition de la loi I X q u i ciim tu t. 9. §. 2. j f . de tu torib.
q u i ignorons univers a quœ in vero e r a n t in stru m en tu m
tra n sa ctio n is sin e a q u ilia n a stip u îa tio n e
7 ioii tam d ecip itu r qu iim paciscitur.
in terp osu it
- Cette m ère , cette tutrice ou administratrice co m p ta b le,
a encore usé de dol , en laissant entrevoir à sa fille l’espoir
d’une élection d’ h éritier, qui l’eut fait profiter de l’effet
de sa renonciation;
> -i
Q u e les novateurs, entraînés par l’exemple.du tribunal
d’É v a u x ,'n e disent donc plus qu e les a ffa irés doivent
a v o ir u n e fin , q u i l f a u t proscrire les vieilles rech erch es.
Ce seroit substituer l’arbitraire aux lois. Ces lo is , en
c l a s s a n t chaque prescription dans les termes qu’elle a éta
blis , n’o n t introduit d’autre âge que celui q u ’elles ont
com biné avec toutes les circonstances qui rendent plus
ou moins favorable la lenteur de ceux qu ’elles ont re
connu être dans l’impossibilité d’agir , par ce principe
con tra non valentem agere non c u r rit prœ scriptio. Ainsi
�( i 5 ) #
une affaire de deu!x siècles est toujours jeun e, tant qu’ellen’est point trop vieillie par le laps dei temps utile qu ’ il
iaut pour l’éteindre.
. D E U X I È M E
t
P A R iT I E , '
?
• 1• ' ' A A
Il y a discordance sur l'époque où l'action a dû etre
e x e rc é e ,e t sur l’époque où elle l’a été réellement.
L ’appelant prétend que l’intimée a dû agir dès l’ins
tant de sa niajoi'ité , qui a eu lieu le 23 février 17 7 7 ?
et qu’elle n’a form é sa demande que le 28 germ inal an 7.
Celle-ci soutient au contraire qu’il, y a eu suspension
de prescription , tant qu ’elle n’a p u a g ir, et q u ’elle l’a
fait u tile m e n t, le 13 prairial an 2.
L ’in tim é e , en m êm e temps q u ’i l l u i f u t fait une d o t ,
se constitua en outre en tous, ses biens présens et
à v e n ir , p our la recherche 1desquels elle donna sa p ro
curation à son mari. O r , en quels autres biens présens
p ou vo ien t consister cette constitution p a rticu lière, si ce
n’est dans la demande en partage auquel la m ère ^venoit
de la faire renoncer , dans les biens de son p ère! M ais
la fem m e a manifesté , par ce m êm e acte , son intention
de réclamer contre la renonciation qu’il renferme , et
elle n’a pu le faire sous la puissance maritale , soit parce
que l’autorisation du mari étoit indispensable, soit parce
qu il en avoit été expressément chargé par le contrat de
mariage. Souscc prem ier r a p p o r t , il y a eu suspension de
prescription. Il est reconnu constant dans le ressort du
ci-devant parlement de T o u l o u z c , conform ém ent à la loi
1 6 , if. de f u n d o d vlcili, que la prescription du fond dotal
�( 16 }
ne court pas contre la fem m e pendant le m a ria g e, sinon
qu ’elle eût com m encé auparavant ; Serres , liv. I I ,
tit. V I I I , page 192 ; Catelan et V e d e l , liv. I V , chap.
X L V ; Despeysses liv. Ier. , tit. X V , sect. I I I , n°. 29.
C ’est aussi ce qu’enseignent D o m a t , liv. I I I , tit. V i t ,
sect. V , n°. V I I ; L a c o m b e , verbo prccscn 'pt., sect. V I I ,
n°. 1 i H e n ry s , liv*. I V , Q . 175.
M ais la prescription a été suspendue de diverses autres
manières.
t O h p oürroit ërriployer, p ou r p rem ier m oyeu , l'effet
dé la puissance maternelle m éconnue dans le droit rom ain ,
ét qüi semble êtrô. adoptée par plusieurs de nos auteurs
m od ern es, d’après les rédacteurs du répertoire dejurisprudence, verbo p u issa n ce p a ter n e lle , sect. I I , et le projet du
code c i v i l , surtout d ’après l’arrêté 128 de M .l e P. L am o ignon , au sujet précisément dé la prescription dont il s’agit
au p ro c è s; « ladite prescription de trente ans, dit ce ma*
» g istra t, ne çourt au profit du père et d e L A MÈRE, de
» l’aïeul ou d e i / à ï e u l e de leu r v i v a n t , nonobstant que
» la tutôllé soit iiniél »
* *
«
Cependant la veuvë Chéclin avoit d’autant plus d auto
rité sur'sa fille qu’elle lui avoit été transmise par le père
dans son testam ent, et confirmée par la justice , en sa
qualité de tutrice , qualité synonymifiée avec celle de
m a ît r e , suivant la loi ad ea
f f . de reg. ju r . où
celui qui dispose en faveur d ’une personne à laquelle il
est soum is, est réputé disposer contre sa v o lo n té ; velle
non cred itu r q u i o h seq u itu r in ip e n o dornini. L a volonté
est l'âme de toute disposition , et l’on ne regarde point
com m e volonté
celle qui est forcée. C oa cta voluntas
n on
�n on
( *7 ) #
h abetur pro voluntate Cujas ad til. ,cod. s i qtas
aliqu cm tu to ri p roh ibu er. val côeger. Décision fondue
sur ce qu’il n'est vien qu i soit si contraire au consente
ment que la force ou la crainte qui l'extorque : N ih r f
con sen su i tam co n tra riu in est qiutm i’is a tq uc m etus.
L o i 1 1 6 , ff. d e ‘ reg. ju r .
î.. ;•1
S i , com m e il n’en faut pas d o u te r, la m ère a usé de. sa
puissance sur sa f ille , en la faisant r e n o n c e r , il est bien é v i
dent que la m êm e cause a forcé cette fille au silence , p en
dant tout le temps que sa m ère a vécu-j et le gendre a' telle
m ent partagé la condescendance et la crainte de sa fem m e ,
que non seulement il n’a pas usé de la procuration p o u r
rechercher le bien d o t a l, mais encore il s’est abstenu de
rien recevoir. N e résulte-t-il pas m êm e de ce silence une
protestation continuelle contre la m odicité de Ja constitu
tion co n v en tio n elle, et une intention bien manifeste de
réclam er contre?
M ais un second m o y en de suspension de la prescription,
est la qualité d’ usufruitière de la m ère par le testament du
père. L a fille n’avoit pas intérêt.d’agir pendant la durée de
cet usufruit. L a jurisprudence sur ce point est trop cer
taine p our s’ étendre davantage.'
U n troisième m oyen est la confusion des droits actifs et
passifs, dans les mariés Coutanson et Chdclin. O n n’a pas
perdu de vu e que. la l’enoncialion dont il s’a g i t , n ’a été
dirigée en faveur de personne ni acceptée par personne.
L ’appelant p ou r écarter l’idée q u ’elle eiit été faite en fa
veur de personne p ro h ib é e , a soutenu qu’elle lournoit au
profit de la masse de l’hérédité du père ; mais cette masse
-étoit en dépôt. L a remise p o u vo it en avoir lieu en faveur
G
�I 18 )
de l’intimée , parce que M a rie Coutanson a eu la Iiberto
pendant toute sa vie d’ élire l’intimée p ou r la recueillir :
ainsi c e lle -ci auroit agi doublement contre scs intérêts T
de faire un procès à sa mère. E n se l'aliénant, elle eût
é c a r té des dispositions bénévoles p ou r la transmission de
l ’ h é r é d i t é de son p è r e , et elle se lut attiré son anim adver
sion , à raison de la succession maternelle 5 elle a donc
agi sagement par le silence, 7ie m a ter pejus ja c e r e t .
M ais, rép o n d l’adversaire, tous vos motifs de crain te,
d’espérance ,, ont cessé par les dispositions universelles
faites par la mère , tant p o u r sa substance que p o u r celle
d’A n d r é Chéclin , par son testament du 3 janvier 1785 , et
par m on contrat de mariage du 27 mai 1787.
L a répliqué est absolue. J e n’ai connu ni l’un ni l’autrede ces actes. L e prem ier p ou voit être ré v o q u é à chaque
instant. Quant au second, la m ère n ’y ¿r appelé ni sa fille ni
son gendre. O n peut conclure que c’est là le dernier pé
riode du d o l , et que c’est afin d’ éviter la réclamation contre
la renonciation, qu’elle a eu l’astuce de laisser ign o rer la
disposition irrévocable portée par le contrat de mariage deJacques Chéclin.
E n un m o t , la renonciation n’ étant dirigée qu'au p rofit
de la masse , elle n’a pu être que conditionnelle ou casuelle.
E lle Cdt profité à la renonçante , si elle eût été élue à re
cueillir cette m êm e masse d’ h éréd ité, et il falloit nécessai
rem ent attendre le sort de cette incertitude, de cette espé
rance.
i l doit donc dem eurer p our bien con stan t, que les inti
més n’ont pu , n’ont dû agir qu ’après le décès de la n iè r e
arrivé depuis le 27 mai 1787.
�( *9 )
. -
I l l’es te à p rou ver que l’action utile a ¿te intentee le 13
prairial an 2 , conséquemment avant les 10 ans.
O h ! sur ce p o i n t , l’adversaire s’est créé une logique tout
à fait com m ode •, mais tout à la fois contradictoire et ridi
cule.
L e prem ier jugem ent du 2 nivôse an 7 , a débouté les
intimés de leur demande en p artage, sauf ¿1 eux à se pour
v o ir contre la renonciation.
L ’adversaire veut-il écarter,,à la faveur du n on bis in
idem , cette demande en nullité de la renonciation, sous le
prétexte qu’elle a été rejetée par ce jugem ent ? Il a soutenu
dans le procès verbal de n on -con ciliation du 14 floréal
an 7 , et il l’a répété jusqu’ à satiété, dans ses causes et
m oyens d’a p p e l, sans en a vo ir dit m ot lors de la p lai
doirie sur laquelle est intervenu le jugem ent du 5 ther
m id o r an 9 , que cette demande a été comprise dans la
demande en p a r ta g e , du 13 prairial an 2.
L u i rétorque-t-on ce la n g a g e , p o u r établir d’après lui"môme que l’action en nullité a été introduite dans les 10
a n s? lis e retourne et v e u t tout à la fois blanc et n oir!
‘t a n t ô t , que cette demande ait été form ée le 13 prairial
an 2 , et qu’en-prêtant au jugem ent du 2 nivôse an 7 , la
chose jugée et l’exécution , elle soit éteinte j tantôt, que
cette demande n ’ait été f o r m é e , p o u r la prem ière fois,
q u e le 28 germinal an 7 , et qu’ étant postérieure au terme
de 10 ans, elle soit anéantie par cette espèce de prescrip
t io n , de dix ans.
Séparons les élémens de cette b ig a rru re , de ce sophisme.
L e jugem ent du 2 nivôse an 7 a d ébou té, sauf l’action
en nullité ; c’est absolument la m êm e chose que s’ il avoit
G 2
�( 20 )
p ro n o n c é, quant à p r é s e n t, non recevable, ou un sursis,,
afin d’observer la form e de la conciliation, dès que l’ex
ception pérem ptoire de la nullité a b so lu e, eloit consi
dérée
comme
devant être une action p rin c ip a le , sujette
à cc préalable.
A u f o n d , chacune de ces trois dispositions renferme
J e u x parties indivisibles. L e d ébou té, la ü n de non rece
v o ir , le sursis,. ont également en vue le sort de la de
mande en-nullité , qui doit être la base du rejet défi
n it if, ou de l’accueil de la demande principale; en sorte
q u e , quelle que soit l’expression, ce n’est dans-le vrai q u ’un
jugem ent d’instruction, et l’appelant l’a si bien r e co nn u ,
en cause p rin c ip a le , q u ’au lieu de s’attacher à cette pré
tendue fin de non rec e v o ir, il a discuté le fond de la ques
tion , et par
il est devenu lui-m êm e non-recevablc'
u l’opposer sur l’appel.
C'est en vérité abuser étrangem ent des m ots, que doprêter à la demande du 28 germinal an 7-, une telle accep
tion d’exécution du jugem ent du 2 nivôse an 7 , qu’on
en infère une approbation du d é b o u t é , bien p lu s , une
persuasion d’un débouté p u r et sim p le, et définitif-, mais
si l’appelant l’eût pensé a in si, eu cause principale, que
ne s’en tenoit-il à cette prétention ? D e ce qu ’il a dé
fendu au f o n d , ne peut-on pas lui r é t o r q u e r , dans son
système de divisibilité d ’exécution du ju g e m e n t, du 3
nivôse an 7 , qu ’il a lui-m êm e exécuté la seconde partie
de cc jugem ent purem ent et simplement ; car si les inti
més ont été bien éloignés de demander le payem ent
du p rix de la renonciation, l’appelant a bien senti qu ’il
lui eû t été inutile de l’offrir^
�( ai ) ^
M aintenant ayons p o u r certain que l’adversaire, en
avouant, soit dans le procès verbal de non-conciliation ,
soit dans les causes et m oyens d’appel, signifiées le 28 ven
tôse dernier, aveu indélébile en s o i, com m e conform e au
principe, au surplus form ellement accepté p a rla réponse
signifiée le 24 floréal, que la demande en nullité de la renon
ciation a été comprise dans la demande eu partage, du 13 fri
maire an 2 , d’après la m a x im e g en era lis p etiiio in clu d it ea
om n ia qu œ in câ petitiona p o ssu n t in clu d i. Cet axiom e
est encore ap pu yé par un a u tre: P e ii t i o h o n o rn m p o s
sessiom s h œ red ità iis ad dition em prœ supponit. L a d e -v
mande en partage exclut l’idée de préférence du p rix
d une renonciation. I n c lu sio u n iu s est ex ch tsio a lteriu s.
Semblable discussion sur ce p o in t, et sur l’application des
art. G X X X I et G X X X I V de l’ordonnance de 1 6 3 9 , a
été jugée en ce t r ib u n a l, m êm e section présidée par le
citoyen V e r n y , . i\ l'audience du 18 germinal dernier.
L e 20 février i y û ô , Jeanne B a rth élém y , par son contrat
de mariage avec Jean P a g è s , r e n o n ç a m o y e n n a n t 330 fr.,
aux successions de son p ère é c h u e , et à celle à échoir
de sa m e r e , non présente au contrat, en faveur de Jean
Barthélém y son frère. L e m ari en donna quittance. L e 10
février 1786 , Jeanne B arth élém y fit assigner les en fans
héritiers de Jean B arthélém y p o u r venir à division et
partage. J ugem ent du tribunal du lJu y , du i t fructidor
an 7 , q u i déclara , q u a n t à p r ése n t, n o n -recev a b lc, sur
ce qu'elle auroit dû sc p o u r v o i r , avant to u t, contre la
renonciation de ses droits héréditaires. L e 11 bru m aire
an 8 , nouvelle demande en partage , avec conclusion en
nullité de la renonciation. Les défendeurs opposèrent doux.
�fins de n o n -rc c e v o ir, l’une résultante de la quittance
donnée par l e m a r i , l’autre de ce qu’il s’étoit-écoulé près
de (rente ans depuis le décès, et plus de quarante ans depuis
la r e n o n c i a t i o n . J ugem en t du tribunal de B riou de, du 3 ger
m in a l
■ voir,
an 9 , q u i , sans s’arrêter* aux deux fins de non-rece«
ordonne le partage. A p p el. A l’appui on a invoqué
•l'article C X X X I Y de l’ordonnance de 1639; on a désavoué
la qualité de tuteur dans le frère. L ’intimé s’est prévalu de
l ’article C X X X I , de la qualité d’administrateur com ptable,
et des deux premiers des trois jugemens du tribunal de cassa
tio n , dont il a été fait mention. A l ’audience, i l prit fantaisie
à l'appelant d’im agin erlam êm e fin de n on -rccevoir, qu’op
pose Jacques C h é c lin , sous le prétexte d’avoir exécuté le
jugem ent du P u y qu i déclaroit, quant à p rése n t, non-recevable. C ’est ce qui donna lieu à la quatrièm e question insé
rée dans ce jugement: « Si une demande en partage, ne con». tenant point de conclusions sur l'action en rescision
» contre la renonciation , est suffisante p ou r admettre la
» prescription ? » L e jugem ent de Brioude fut confirm é,
plaidant le citoyen Pagès-M eym ac , p o u r l’intimée. L e
m o tif qui se rapporte à la -quatrième question est ainsi
conçu : « Considérant, qu'à l’époque à laquelle a dû cesser
» la prescription de ce droit est celle du 4 février 1 7 8 ^ ,
» jo u r où l'intimé a form é contre les appelans la de» mande en p a rta g e , laquelle a été continuée par l’exploit
» du 11 brum aire an 8, qui contient faction en rescision
» contre la renonciation dont il s’agit.
Il
ne p a r o î t pas qu ’on puisse rien opposer à ce p ré
ju gé si conform e au principe ; il y a absolument parité
de raisons pour fixer l ’époque de la demande au 13 prairial
�( 23)
an 2 , continuée'’ par la cédule du 28 germinal an 7, qui
contient la demande en nullité de la renonciation dont
il s’agit : d’autant plus que la prem ière de ses demandes a
eu expressément p o u r objet de SE RÉGLER. SUR LES
successifs.
C ’est en vain que l’appelant s’est flatté d’exclure par des
d roits
chicanes, les intimés, d’une succession de valeu r de plus de
30,000 francs ; sans doute l’injustice d’une pareille ten
tative est assez démontrée*
Q u e l’on pèse la va leu r de celte renonciation par
elle -m ê m e , par la m ère qui l’a o b ten u e, par la fille qui
l ’a fa it e ,p a r la concordance de la loi et de la jurispru
dence dans le lieu de la succession , par la faculté de
réclamer dans les trente ans , m êm e par l’action intentée
réellement dans les dix. ans j il doit rester évidem m ent
dém on!ré que cette renonciation est caduque , com m e
étant faite au profit de la renonçante , si l’élection fidu
ciaire à laquelle elle p ou voit prétendre , eût été faite en
sa faveur ; que la m è r e , ne fût-elle considérée que com m e
curatrice ou simple administratrice , a joint à sa puissance,
à son ascendant, le d o l s o i t en privant sa fille m ineure
et qui étoit sous sa dépendance , d’un c o m p t e , m êm e
d’instruction , soit en lui laissant l’espoir de l’élection
d héritier ; qu’en obéissant aveuglém ent , la fille a réclamé
contre cette renonciation au m om ent m êm e qu ’elle l ’a
faite , e n se c o n s t i t u a n t ses d ro i t s p r é s e n s qui ne p o u vo ien t
être autres que ceux auxquels l’ a u t o r i t é maternelle venoit
de la faire re n o n c e r, et en donnant sa p rocu ration à son.
mari pour en faire la recherche ; q u e , bien-loin d’a vo ir
ap prouvé cette renonciation faite à vil p rix et à termes.
�( H )
élo ign é s, il n’a été reçu aucun «compte ; que ce silence
m êm e est une interruption ; qu ’il n’a pu courir de pres
cription , d’a b o r d , en puissance maritale, puis, parla nature
de la r e n o n c i a t i o n , tant que 1 usufruit a d u r é , tant que
la c ra in te révéreritielle ou tout au moins l’espoir d ’être
élue ont subsisté ; q u ’enfin il n’y a point à hésiter d ’a p p li
qu er l’art. C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , et q u e ,
quand la cause seroit décidée par fart. C X X X I V , l ’action
en nullité est implicitement renferm ée dans la cédule du
•13 prairial an 2 , dans l’intervalle des d ix ans ; q u e c o n séquem m ent le jugem ent dont est appel doit être con
firm é avec amende et dépens.
P a r conseil, C O U I I E R T - D U V E R N E T , anc. juj'îsc*
\
C R O I Z I E R , a vou é.
J L i E C O N S E I L S O U S S I G N E , qui a vu le présent
m é m o ir e , e s t i m e qu’il a été bien jugé par le jugem ent
du tribunal d ’ Yssingeaux.
L a m ere avoit été nom m ée tutrice de sa fille par le
testament du p è r e , antérieur seulement a sa m ort de peu
de jours. P eu im p orte qu’elle fût alors pubère! le père
avoit jugé qu ’elle avoit besoin d ’ôlre mise en tutelle; les
parens en jugèrent de m ê m e , lors de la confirmation de
la tutelle , qu i fut faite par le juge des lieux. L a mère ellem êm e accepta la tutelle de sa fille p u b è re, com m e celle
des autres enfans : de p lu s, la m ère avoit l’usufruit des
biens
�(* 5 )
biens du père p ar son testament; mais cet usufruit ne
pouvôit frapper sur. la légitim e de la fille ; par consé
quent devo it n on seulement u n com pte d’in stru ctio n ,
mais m êm e un com pte d’administration p our la jouis
sance de la légitime.
tant qu’elle ne l’avoit
puler de sa fille, dans
ciation qu i em portoit
D ès q u ’elle devoit u n c o m p t e ,
pas rendu , elle ne p o u vo it pas sti
son contrat de m a ria g e, une renon
la décharge du com pte. D ’un autre
côté , cette renonciation qui n’étoit dirigée en faveur de
p erso n n e, ni acceptée par jpersonne, contrastoit singu
lièrem ent avec la clause subséquente du contrat de m a
riage , par laquelle la fille se constituent tous ses biens et
donnoit p ou vo ir à son futur m ari d’en faire la recherche.
L a dernière clause détruisoit la prem ière. L a nullité de
la renonciation doit donc paroître évidente.
A -t-o n dû se p o u r v o ir , p o u r faire déclarer cette n u llit é ,
dans les dix ans, term e fatal des actions rescisoires, ou
l’action s’est-elle p rorogée jusqu’à trente ans? L ’article
C X X X I de l’ordonnance de 1 6 3 9 , celle de 1549 et l’art,
p rem ie r de celle de 1667 , mettent hors de doute la durée
de l’action pendant trente a n s , et l’article C X X X I V de
l’ordonnance de 16 3 9 , n,£l nulle application aux actes
passés entre les m in e u rs, m êm e devenus majeurs, et les
tuteurs qui n’ont pas rendu compte. C ’est ainsi qu’on le
jugea dans les temps les plus rapprochés de l’ordonnance
de i5 3 9 , dont l’intelligence devoit être alors plus c o n n u e ,
comme on peut le v o ir dans le passage du traité de rebus
à u bü s , de M . D u v a l , qu’on a transcrit dans le m ém oire.
Si dans la suite on s’é lo ig n a , contre tout p rin cip e , de cette
jurisprudence ou fut obligé d’y r e v e n ir , lorsque parut
D
�(
)
l ’ordonnance de x 6 6 7 , et à dater de cette é p o q u e , le»
arrêts rejetèrent constamment la fi.11 de non-vecevoiv de 9
lo a n s; aussi la jurisprudence de la sénéchaussée cTAuvergno
s’y étoit-elle toujours conform ée. O11 peut en citer trois
sentences, parmi un grand nom bre d’autres l’une au, rap
p o rt du conseiller N e v r e z é , du 22 juillet 1749 ; la seconde
rendue à l’audience , lors de la prem ière cause de l’avocat
B e a u la to n , à présent juge
du tribunal,, du 24 juijle.lj
de la m êm e an n ée, et la troisièmeudu 4 juin l 'j ô i j att
ra p p o rt du conseiller Brujas. .
,•
Ce ne fut que dans les p rem ierstem p s de la révolu tio n *
qu ’on parut vo u lo ir renouveler les questions, sans néanr
moins qu ’aucune des milliers de. lois qu ’çlle a enfantés,
ait dérogé aux vrais principes de la matière et a u x ordon
nances qui les avoient consacrés; mais le tribunal de
cassation les a maintenus. O n connoît surtout celui de ce
tr ib u n a l, du 3 messidor an 4 , qui a cassé le jugem ent du
tribunal d’E v a u x , du 1,9 floréal an 3; et rien de plus tran
chant que les motifs et le dispositif de ce jugem ent du
tribunal de cassation.Premier m otif: «Q ue l’article C X X X I
5) de l ’ordonnance de 16 3 9 , déclare nulles toutes disposi» tions faites en faveur des tuteurs et autres admiuistra» teurs, directement ou indirectem ent, avant le com pte
» re n d u , et q u ’ une renonciation faite par un m ineur en
» faveur d’une
personne qu i administrent ses biens et
» agissoit p ou r les héritiers d ’un c o m p ta b le , présentoit un.
» avantage indirect on faveur de ses héritiers, :» Second
m otif : « Q u ’en pareil cas1, l’action subsiste pendant trente
53 a ris, parce que selon l’article Ier- du titre
X X I rK d e
» fordonnance de 16 6 7 , lu comptable ne cessant d e l c t r e
l
�( 27 )
» que par la reddition de son c o m p te , c’est le com pte
» seul q u i p eu t éclairer le m in e u r sur ses intérêts. »
T roisièm e m o tif : a Q u e l'article C X X X I V de l'ordonnance
» de 1 5 3 9 , qui restreint le délai à d ix an s, n’ est relatif
» qu'aux actions rescisoires qui n’ont rien de com m un avec
» celles en nullité , qui durent trente ans, et p o u r lesquelles
» il n’est pas besoin de lettres. » E n fin le dispositif, qu i casse
» le jugem ent du district d 'É v a u x , com m e contraire aux
» articles C X X X I de l’ ordonnance de 1 5 39, et prem ier
» du titre X X I X de l ’ ordonnance de 1 6 6 7 , e t com m e
» con ten a n t une f a u s s e app lication de Tart. C X X X I V
» de l 'ordonnance de 1 539. »
L e s autres questions qu’on a vo u lu élever dans cette
a ffa ire, sont trop bien discutées dans le m é m o ir e , p o u r
qu’ on pense qu’ il soit nécessaire de rien ajouter aux moyens
qui y ont été e m p lo y é s , et qu ’on adopte pleinement.
D é l i b e r È à R i o m , le 11 messidor an 10.
ANDRAUD.
À R i o m, de l’imprimerie de L a n d r i o t , seul imprimeur
du tribunal d’appel, — An 10. — 1802»
�
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Coutanson, Pierre. 1802]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Couhert-Duvernet
Croizier
Andraud
Subject
The topic of the resource
tribunal de familles
minorité
tutelle de la mère
doctrine
ordonnance de 1539
Description
An account of the resource
Mémoire pour Pierre Coutanson et Marguerite Chéclin, sa femme, intimés ; contre Jacques Chéclin, appelant.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1802
1770-1802
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
27 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0703
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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Relation
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BCU_Factums_M0209
BCU_Factums_M0210
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minorité
ordonnance de 1539
tribunal de familles
tutelle de la mère