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MÉMOIRE
P O U R M e.
P ierre-A lexis
-Louis B R U , Avocat et
premier Suppléant de Juge à S t, F lour, départe
ment du Cantal ;
C O N T R E les sieurs Jean M E Y R E , Greffier au tribunal
de commerce de St.
F l o u r , et F r a n ç o i s
D A U B U SSO N ,
de Clermont,
J e suis forcé de réclamer auprès des tribunaux une
justice vainement tentée auprès de mes adversaires ;
ma patience et les voies amiables n’ont produit aucun
effet. Accoutumés à faire des profits énormes par l’usure
et par l’agiotage les plus effrénés, ils ont ri de la bonne
foi de mes démarches , tant la corruption devient une
seconde nature par l’habitude de s’y livrer.
Depuis environ cinq ans ma fortune est menacée
Par cette espèce d’hommes inconnus jusqu’à nos jours,
et des sommes empruntées à diverses époques, dont
le total ne s’élève pas à vingt mille francs, réellement
�c o
reçus, sur lesquelles j’en ai déjà donné plus de vïngt-un
mille , laisseroient aux sieurs M eyre et Daubusson, un
produit en interets , et inteicts d interets de.plus de
25000 fr. dans moins de cinq ans, si les lois n’étoient
là pour réprimer leur cupidité , et si je n’avois en mon
pouvoir les preuves écrites de leur usure infâme.
Je le rép ète, c’est à regret que j’entreprends une
affaire qui auroit pu être assoupie , et dont le ré
sultat ne peut qu’être funeste à mes adversaires ; mais
ma réputation de solvabilité et de probité attaquée
a u d a c i e u s e m e n t de Jeurpart, des poursuites'vexatoires
commencées, une masse d’intérêts qu’ils réclam ent,
après avoir reçu plus que le capital ; le soin naturel de
défendre pour ma fam ille, contre des voleurs publics t
une fortune honnêtement acquise ; enfin un jugement
rendu pour et par des gens qui ont à démêler des af
faires majeures avec m o i, tout cela me force à parler
haut le langage de la justice. Je suis bien favorable , si
j’avois besoin de faveur , car je dois au sort de mes enfans les efforts que je vais faire. Je serai vrai dans l’ex
posé des faits ^ et les principes immuables du tien et
du m ien, trouveront leur application à mes intérêts
méconnus impunément jusques à ce jour.
FAITS.
Je possède au Village de Pierrefite, près de St. Flom y
département du C an tal, un domaine au milieu du
quel sont enclavés des héritages que Guillaume Amat
laissoit dans sa succession, et auxquels étoient dues des
servitudes de passage, prise d e a u , etc. etc.
�( 3 )
Moins par ambition que par nécessité je me vois
forcé de les acquérir. Je devois à cette époque en petits
capitaux exigibles environ 8000 fr. Lorsqu’au commen
cement de l’an dix je iis cette acquisition , j’ignorois
que les capitalistes coniioient leurs capitaux à des gens
la plupart sans a v e u , sans garantie, sans bonne fo i,
sans loi ; pouvois-je présumer qu’ils seroient aussi cu
pides , aussi imprudents qu’ils l’ont été. Car enfin ,
quelle garantie présentent des agioteurs en général.
L ’impérieuse nécessité de solder pour huit ou neuf
mille fr. de capitaux que je devois alors , ainsi que le
prix de mon acquisition, me fait découvrir Jean M eyre,
qui me procure, d’accord avec le sieur Daubusson,
les sommes dont j’ai besoin; le taux de 24 pour ojo est
le taux absolu exigé de leur part et accordé. L a re
construction d’une façade à ce d om ain e , la réparation
des grange et écurie , nécessitent encore un emprunt
dans les années onze, douze et treize, d’environ cinq
ou six mille livres , et il faut toujours recourir aux ad
versaires , tant les capitalistes semblent resserrer leur
argent, pour........
Les sommes que j’ai empruntées à ces diverses épo
ques ne s’élèvent pas à vingt-un mille l iv ., et s’il pouvoit y avoir de l’erreur nous la rectifierons par les
registres des adversaires , dont infailliblement le rap
port sera ordonné. Je désire ne pas en imposer.
^L e sieur M eyre ne manquoit pas d’empirer ma situa
tio n ; il faisoit ses comptes à discrétion; tantôt il fixoifc
pour six mois , tantôt pour trois m ois, 1 intérêt q u i,
quoique de 24 pour o¡o par an , se portoit à 28 ou à 5o
�(4)
pour o/o, selon les époques plus ou moins rapprochées
du renouvellement. Je vivois dans une inquiétude dont
personne que moi ne pourra se faire une idée. Les ex
trémités les plus malheureuses m’auroient paru quelque
fois' un bien infini. Je me rends inutilement chez le
sieur Daubusson , duquel je reçois pour toute réponse »
le c a p it a l ou Yagiot ; j’insiste, et il me réplique : arran
gez-vous avec M eyre , tandis que Meyre m’a dit : arran
gez-vous avec Daubusson.
Deux ou trois personnes qu’il ne convient pas de
nommer ici m’avoient bien promis de me prêter une
somme de 20000 liv. ( cette espérance cause en partie
mes malheurs ) •, ces fonds manquent, et cependant
la crainte des poursuites inouies que les agioteurs
étoient dans l’usage d’exercer, des ménagements pour
mon père et pour ma famille, la considération que j’ai
tant souhaité de me conserver, et que ces misérables
ont tenté de mo faire perdre, me forcent de renouveller de six en six , et de trois en trois mois ; mon
épouse qui partage mes sentiments , mon épouse qui
se flatte d’une espérance aussi vaine que m oi, m’engage
aussi à ce fatal et continuel renouvellement ; elle et moi
passons sous silence les chagrins que nous avons dé
vorés à ce sujet. Puissent les âmes honnêtes être saisies
d’horreur à l’aspect de pareils hommes, et de leurs as
sociés bien connus*
C e p e n d a n t j’avois déjà payé au sieur Meyre environ
six mille liv. à la fin de l’an dix; postérieurement je lui
ai donné quelques à compte , en le conjurant toujours
'de réduire cet intérêt qui alloit infailliblement dévorer
�ma fortune. Je l’ai pressé plusieurs fois de me laisser
connoitre par ses registres l’état des effets qu’il régloit
à son g ré, et il ne m’a donné qu’une fois cette satisfac
tion ; c’étoit en l’an onze, j’avoue même que je n’ai
pas été satisfait. On va voir qu’il ne falloit pas s’en
rapporter uniquement à lui.
En l’an treize , il me dit qu’il faut des fonds, il me
promet astucieusement une réduction considérable à
condition que je lui payerai une forte somme, j’y sous
cris , mais comment ferai-je ? je ne peux vendre sans
diminuer hors de toute proportion les revenus d’une
propriété considérable que je possède à Pierrefort, et
dont onconnoît aujourd’hui la valeur par l’afiiche que
j’en ai fait. L e sieuv Meyre est de mon a vis, il m’en
gage à faire une vente de 4oo septiers de bled , délivrablc en quatre ans , à quatorze francs le septier, me
sure de IVlurat, il retient les cinq mille six cents liv. que
produit cette ven te, il garde l’acte de vente entre ses
mains , et au lieu de diminuer le taux de l’usure , il me
répond que je n’ai pas fait un remboursement suffisant.
Je dévore ce trait inoui de perfidie, et je me tais.
Ce dernier procédé m’assure qu’il faut par la suite
retirer moi-même les lambeaux des lettres de change
lacérées, si je ne veux laisser périr totalement ma for
tune par la dévorante activité à renouveller, qu’em
ploient les sieurs Meyre et Daubusson.
J avois déjà tenté plusieurs fois de vendre tout ou
partie des biens dont je viens de parler ; mais comme
les agioteurs accaparent plus que jamais les fonds des
capitalistes, je ne peux vendi'e^ je tente de me faire
�d’autres ressources pour payer au moins partie aux
adversaires ; je suis forcé de contracter d’autres enga
gements qui, quoique onéreux, ne seront pas contestés
de ma p a rt, tant ils sont éloignés du taux énorme que
les sieurs M cyre et Daubusson ont adopté. Je rem
bourse donc plus de vingt-un mille liv., ce qui excède
de beaucoup le capital ; ensorte que ce qui est dû au
jourd’hui ne présente que des intérêts, cl intérêts des
intérêts.
Je tente in u tile m e n t à plusieurs reprises d’obtenir
une diminution auprès .du sieur Daubusson. Je me dé
te r m in e à revenir à Clerm ont, en foire de mai 1806 ;
tout ce que je peux obtenir est une diminution qui
porte à 18 pour ojo l’intérêt, en payant cet intérêt
dans deux m ois, et le capital en novembre suivant.
Il ne sortira jamais de ma mémoire que le 9 mai 1806,
jour où en présence du sieur Meyre je renouvellai les
effets éch u s, chez ledit D aubusson, un commis à fi
gure basse épioit mes moindres mouvements \ que les
sieurs M eyre et Daubusson n’avoient pas meilleure
m in e} que lorsque je pris et déchirai les effets précé
dents , un sourire pénible, mais dur, dérida un moment
leurs traits qu’avoit sans doute altérés une conscience
coupable, et que sortant de ce gouffre, je me dis tris
tement , le& yeux presque gros de larmes, où suis-je ?
que deviendrai-je ?
Q u o iq u ’ il en so it, à l’échéance des effets, même
embarras de ma p a rt, même rigueur , même dureté de
la le u r, menaces d’emprisonnement, de saisie, d’ex
propriation \ ei>iin, renouvellement forcé de mes effets
�( 7 )
le i 5 mai dernier, toujours à 18 pour o/o, sans éclater
contre les propos menaçants du sieur Meyre.
L ’échéance de ces derniers effets n’étoit pas encore
arrivée, lorsqu’il s’est fait une levée de boucliers parmi
les agioteurs, et qu’au lieu de céder aux sollicitations
portées par deux lettres au sieur Daubusson, mais qu’il
a laissées sans réponse, ils ont eu l’impudeur pour
20000 liv. d’intérêts usuraires et accumulés, d’àffecter
et de répandre une crainte d’insolvabilité, de grossir
des inscriptions, et d’allarmer des créanciers heureu
sement peu nom breux, tandis qu’ils n’ignoroient pas
que je possédois une fortune de plus de 200000 l i v .,
suivant l’évaluation ordinaire de notre département.
Ils font plus, me voyant afficher la majeure partie de
ines biens, ils ont répandu qu’à mon tour je voulois
imiter leur agiotage : les misérables !
Disposé a faire dés sacrifices qu’une faute produite
par la nécessité avoit rendus inévitables, en méprisant
leurs calomnies, j’ai cru ne pas devoir franchir les
bornes de la modération et de la loyauté ; je leur ai
dit que je payerois, mais qu’il falloit un peu de temps j
que ces intérêts étoient trop forts, que quelques re
mises seroient justes , etc. etc.
Ma patience a doublé leur ardeur, et soit qu’ils
1 attribuassent à la crainte , soit que par des procédés
violents et des menaces affreuses, ils aient cm m’emnieuer à détruire jusqu’aux traces de leur infâme agiotae>e > ils ont montré la même audace. L e sieur M eyre,
en présence de personnes dignes de f o i, a osé me
pioposer d attendre trois mois seulement, sous la condi-
�c, 8 ? . ,
tion de lui payer encore l’intérêt à 18 pour o/o, de lui
donner une caution, de lui remettre les effets qui font
ma preuve , ou de lui déclarer qu’il n’a voit perçu que
le taux légal. J’ai contenu mon indignation en repous
sant sa proposition; il a osé me proposer un jugement
auquel j’acquiescerois , ou dans lequel je déclarerois
que la créance:est bien et légitimement due au sieur
Daubusson ; même refus de ma part. Enfin , il a osé
me dire et répandre en public qu il ne m’avoit prêté
qu’à i5 pour o/o, tandis que la notoriété publique
l’écrase, tandis'que ses propres écrits à la m ain, et ses
lettres de change endossées par lui ou par le sieur
Daubusson, établissent d’une manière invincible qu’ils
ont porté le taux de l’usure jusques à 33 pour o/o, et
qu’ils ont accumulé intérêts sur intérêts.
Cependant ils viennent d’obtenir le 24 août dernier,
sous le nom du «sieur Daubusson, un jugement par dé
faut , qui me condamne au payement de vingt mille
deux cents liv ., montant de cinq lettres de change ; et
ce jugement est rendu dans la propre cause du greffier
M eyre , par le sieur Béraud, son cousin germain allié,
par le président, qui doit savoir que des affaires ma
jeures sont à démêler entre lui et moi. Le sieur M eyre
fait plus, il répand que nous sommes convenus d’un
jugement auquel j’acquiescerai, tandis qu’il l’a fait
rendre parce que je n’ai pas voulu y acquiescer de la
manière proposée, et que je lui ai laissé la faculté de
prendre scs avantages ; tandis que de suite il me l’a fait
signifier, et qu’il s’est inscrit, le tout contre une parole
donnée, comme ces sortes de gens la donnent.
�C9>
Si j’écrivois pour le tribunal de commerce de St.
F lo u r, je lui dirois que ce jugement est nul, parce qu’il
est rendu pour des personnes qui ont contre moi des
engagements de la nature de ceux que j’attaque, et par
des personnes qui ont aussi à régler des intérêts ma
jeurs avec moi.
Je leur dirois que le sieur Meyre est souvent partie
dans les affaires de commerce de ce tribunal ; que lui
greffier écrâse en frais une foule de propriétaires, qu’en
un mot il est du nombre de ceux qui agiotent au sein
même du tribunal.
Sans doute, Son Excellence le G ran d- Juge, informé
des abus qui se sont glissés dans les tribunaux, et de
ceux qui se commettent journellement au tribunal de
commerce de St. F lo u r, y mettra un ordre salutaire.
Les bons esprits n’cn doutent pas.
Je leur prouvcrois encore que cette espèce de tri
bunal est incompétente.
Mais comme j’écris pour le p u b lic, comme j’écris
principalement pour les juges qui connoîtront de l’u
sure et de l’agiotage dont je me plains, je vais rappeler
tes principes immuables qui doivent faire annuller les
actes de prêt à usure, en forme de lettres de change,
qui m ont rendu débiteur des sieurs M eyre et Daubuss° n , et qui doivent me faire restituer les produits
énormes de leur usure.
Il est de principe chez toutes les nations, et princi
palement en France que l’usure est un délit puni par
les lois, et que l’usurier est tenu à la restitution des
sommes qu’il aperçues de trop, qu’il est même soumis
2
�C 10 )
à des peines capitales. Je ne leur rappellerai pas les
principes du droit divin, ni môme la religion naturelle-*
la charité, Ici fraternelle charité ; leur cœur pourri est
fermé pour jamais à ce sentiment, et avertit la société
d’ètre en garde contr’eux ; je leur rappellerai les lois
qui les atteignent, en attendant que la Providence en
fasse justice.
Un capitulaire de Charlemagne, de 789, dressé à
A ix-la-C h ap elle, un de Louis le débonnaire, son fils r
de 8 1 3 , l’ordonnance de Louis I X , de 1254, celles de
Philippe le h ard i, de 12 74 , de Philippe I V , de i 3 i i*
de Philippe de V alo is, de i 34<), de Louis X I I , de
i 5 i o , de François Ier. , de i 535 , de Charles I X , de
i 56o , l’art. 147 de celle d’Orléans, de Henri III,
de 1576, celle de B lo is, de *1579 >art- 202, celles de
fleu ri IV , de i 594 > de Louis X III, de 1629, art. i 5 r,
celle de Louis X IV , de i 6j 5 , tit. 6 , portant défenses
aux marchands et à tous autres d’englober les intérêts
dans les lettres de change , et de prendre intérêts sur
intérêts, Toutes ces lois punissent de l’amende hono
rable ,, du bannissement et même de galère , au cas de
jé c id iv e , tous les usuriers connus aujourd’hui, tant sous
ce n o m , que sous celui d’escrocs et d’agioteurs.
' Divers arrêts rendus en 1699, en 1736, en 1745»
en 1752, ont,Consacré ces principes.
- Il n’est qu’à voir si ces principes s’appliquent à mon
espèce ; l’affirmative ne sauroit laisser de doute.
En effe t, les sieurs Meyre et Daubusson ont entre
tenu pendant cinq ans avec moi une relation de prêi
à usure, à 3 o , à 2 8 , à 24, à 18 , sous les couleurs de
�C rO
lettres de cl lange, portant la contrainte par corps.
Mais ces lettres de change sont des titres faits eh
fraude du code c iv il, qui défend à tout T rançais qui
n’est pas commerçant, ou qui n’est pas dans les cas
prévus aux art. 2o 5c) et suivants, de consentir à la con
trainte par corps. O r, je n’ai jamais fait de commerce
avec qui que ce soit ; les adversaires n’en ont fait ni
avec moi ni à mon occasion ; mes effets n’ont jamais
passé dans le com merce, ils se les sont réciproquement
endossés , et les ont gardés daris leur cabinet ; ce n’est
donc qu’à l’aide d’une fausse terreur de la prison, et
d’une exécution prompte et violente , qu’ils ont voulu
se procurer des lettres simulées , en fraude de la lo i,
tandis qu’ils dévoient se contenter d’une simple obli
gation de prêt; ils ont donc doublement violé la loi à
mon égard, i°. en ce qu’ils ont abusé de ma position
pour dénaturer un simple prêt ; 2 °. en ce qu’en le dé
naturant , ils ont exigé un intérêt usuraire et prohibé.
Ils diroient vainement que la simple lettre de change
me rend justiciable du tribunal de commerce ; je letir
réponds que des lettres qui sont nulles, qui contiennent
cumulativement capital et intérêts usuraires , et qui
sont un simple prêt déguisé, ne sauraient être de 1 at
tribution de ce tribunal.
, Il ne faut pas sans doute des preuves plus évidentes
que celles rapportées de ma p art, pour établir que ces
lettres n’ont pour objet qu’un prêt usuraire déguisé.
Les lettres que je tiens dans mes m ains, les comptes
et notes écrits par le sieur M eyre lui-même, ses propres
registres qu’il tient cachés, et ceux du sieur Daubusson ,
�c 12 y
la notoriété publique qui les flétrit, tout dépose hau
tement que les sieurs Daubusson et lui ont prêté à une
usure énorme , quoi qu’ils n’aient fait aucun, commerce'
avec moi.
Diront-ils que j’étois- majeur et homme d’affairesr
que dès lors je savois ce que je faisois? diront-ils qu’ilsne sont pas venu&me chercher pour, prêter ces fonds ?
Qu’un pareil raisonnement est puéril et de mauvaise
foi ! Et q u o i, l’homme d’affaire et le majeur ont-ils pu.
se mettre à l’abri de la nécessite ? Est-il une puissance
qui puisse les y soustraire ? Non. Eh bien, vous, M eyre,
vo u s, Daubusson et vos pareils, vous avez introduit
cette affreuse nécessité , vous êtes alléf accaparer tous
les fonds que vous avez pu découvrir, il n’est pas jus
qu’au salaire des gens à gages que vous n’ayez pris pour
en retirer l’usure, au moyen de laquelle vous avez mis
et vous réduisez une foule de familles à la misère ; et
vous avez le front de dire que vous n’allez pas cher
cher les emprunteurs, et vous leur dites que les ma
jeurs et les hommes éclairés doivent savoir, ce qu’ils
fo n t, vous osez, le d ire, et la société ne vous vomit pas
hors de son sein !
Dites-le m oi, quel droit avez-vous eu d’élever l’ar
gent que vous prêtez, à un taux au-dessus de celui fixé
par la lo i, à un taux inoui? aucun, si ce n’est celui du
voleur qui enlève la bourse‘ du passant, aucun., si ce .
n’est celui de la dure nécessité où vous avez mis ceux
que vous deviez regarder comme vos frères et vos amis»
et qui ne devoient bientôt devenir que des esclaves que
vous jeteriez dans des cachots.
�( . 3 )
Vous direz peut-être que l’argent est une marchan
dise ; autre misérable absurdité ! D ’abord il n entre
point dans une tête bien organisée , que 1argent inonnoyé, qui est le signe représentatif des marchandises,
de tous les autres objets quelconques , puisse etie une
marchandise lui-même ; d’autre part, cette marchan
dise ayant un taux de produit fixé par la lo i, celui
qui l’a prêté n’a pu lui donner, sans se révolter contre
la lo i, ùn taux usuraire de 25 et 3 3 pour o j o .■
On,dira peut-être encore qu’on ne connoît pas d usure en France.
Mais nous n’avons besoin
pour
répondre a cette autre
ineptie , que d’ouvrir le code civil.
„ L ’in térêt, est-il dit art. 1907> est légal ou conven„ tionel. L ’intérêt légal est fixé par la lo i, l’intérêt con„ ventionnel peut excéder le taux fi;xé par la loi toutes
„ les fois que la loi ne le prohibe} as ; le taux de l’inté„ rêt conventionnel doit être fixé par écrit. „
L ’article 1 3 y 8 ordonne la restitution des sommes et
intérêts perçus de mauvaise foL
Je conclus de là que le taux excessif est prohibé par
la lo i, et qu’il est usure comme dans l’espèce ; je con
clus encore que l’intérêt exigé de moi par les sieurs
Meyre et Daubusson , est usure, parce qu’ils ont évite
1 I j
•
de le stipuler par écrit, c’est-à-dire par convention cer
taine et dénommée. Je conclus donc que le Législateur
reconnoît qu’il peut y avoir usure, et qu’il entend la
punir.
Cela est d’autant plus vrai que j’ai en mes ma^ns
une lettre certifiée, en bonne forme, de son Excellence
«
�C *4 )
Monseigneur le Grand Juge, datée du 7 prairial an xiii,
qui porte que l ’on doit agir en restitution devant les
tribunaux civils contre les usuriers ; et que le journal
des débats du 3 floréal an x i , en rapporte une pareille
de s o n Excellence au Procureur impérial de Montreuilsur-mer ; cela est d’autant plus vrai encore , c’est que
les diverses Cours et Tribunaux ont condamné cer
tains usuriers à cinq ans d'emprisonnement, à vingt,,
à trente , à deux cents mille liv. d’amende, et que dans
l ’universalité des départements le taux de l’argent a
été remis à cinq pour cent ’, par suite de ces divers ju
gements , et des principes que les agioteurs avoient
cherché à dénaturer.
Il
est donc bien vrai que j’ai été victime d’une usure
immodérée ; il est vrai que les lettres de change simu
lées dont on a obtenu la condamnation, ne sont que
des prêts déguisés faits en fraude de la lo i, pour avoir
la contrainte par corps , qu’elles ont été exigées de
moi pour me contenir par une crainte chimérique, que
cet intérêt usuraire est le fruit d’une escroquerie pra
tiquée sous ces titres colorés ; que ces titres sont nuls
dès qu’ils supposent un négoce qui n’a jamais existé y
qu’il doit m’être rendu compte des intérêts usuraires
perçus au de-la du taux légal.
Je termine une lliscussion dont l’objet m’a causé et
me cause bien des chagrins. Je pourrais appeller plus
particulièrement l’attention du public sur ces hommes,
q u i, non contents d’usurper ma fortune , ont osé atta
quer mon crédit et mon honneur, qui me déchirent
sourdement encore ; mais me bornant à mon affaire,
�( 15)
j’aurai le courage de les combattre avec .l’opinion des
personnes estim ables, desquelles seules je désire le
suffrage ; une famille honnête et nombreuse inspirera
sans douté quelqu’intérêt à la justice, et quoique les
mœurs soient perdues , il est aussi quelques âmes rares
qui auront résisté à la corruption, et qui sentiront vi
v ement ma position ; qu’elles reçoivent ici mes remercîments sur cette sensibilité qui est le partage des bons
cœurs, et qui m’a souvent soutenu. J’avoue que j’ai
résisté long-temps á former une action qui me répugnoit; mais j’en suivrai la chance avec une constance
que rien n’ébranlera.
J’ai informé leurs Excellences Messeigneurs le Grand
Juge et Ministres de l’intérieur et de la police générale
des exactions de mes adversaires; je ne sais si mes ré
clamations leur sont parvenues ; je les réitérerai, et si
quelques-unes des entraves que j’ai vu plus d’une fois
mettre à mes démarches se renouvellent, les auteurs
seront connus, et je les suivrai par-tout. L a France ne
doit pousser qu’un cri pour signaler une espèce
d hommes dont les annales des peuples ne fournissent
pas d’exemple-
�
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Factums Marie
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[Factum. Bru, Pierre-Alexis-Louis. 1808?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bru
Subject
The topic of the resource
usure
agiotage
créances
abus
tribunal de commerce
libelle
Description
An account of the resource
Mémoire pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, avocat et premier suppléant de Juge à Saint-Flour, département du Cantal ; contre les sieurs Jean Meyre, greffier au tribunal de commerce de Saint Flour, et François Daubusson, de Clermont.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1808
Circa 1806-Circa 1808
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
15 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0505
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0506
BCU_Factums_M0509
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Talizat (15231)
Pierrefite-sur-Loire (03207)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus
agiotage
Créances
libelle
tribunal de commerce
Usure
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e18b9a6f4eb144599b8d091f5701f222
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Text
PREMIER MEMOIRE,
DU
7 SEPTEMBRE
1807,
ET SUPPLEMENT EN CAUSE D’APPEL,
DU
26 N O V E M B R E
1808,
P o u rM .e P i e r r e - A l e x i s - L o u i s B R U , Avocat, et premier
Suppléant de Juge à St.-Flour, département du Cantal;
Contre les sieurs J e a n M E Y R E , Greffier du Tribunal
de commerce de St.-Flour, et F r a n ç o i s D A U B U SSO N f
de C 1ermont.
E
J suis force de réclam er auprès des tribunaux une justice v a i
nement tentée auprès de mes adversaires; ma patience et les voies
amiables n’ont produit aucun effet. Accoutum és à faire des profits
énormes par l ’usure et par l ’agiotage les plus effrénés , ils ont ri
ed la bonne foi de mes démarches, tant la corruption devient une
seconde nature par l’habitude de s’y livrer.
Depuis environ cinq ans ma fortune est menacée par cette espèce
d hommes inconnus ju s q u ’à nos jo u rs; et des sommes empruntées
a diverses e po qu es, dont le total ne s’élève pas à vingt mille f r . ,
r éellement reçus, sur lesquelles j’en ai déjà donné plus de vingt-un
mille , laisseraient aux sieurs M eyre et Daubusson , un produit en
interets, et interets d’intérêts, de plus de 25,000 fr. dans moins de
cinq ans , si les lois n ’étaient là pour réprim er leur c u p i d i t é , et
si je n avais en mon pouvoir les preuves écrites de leur usure infâme.
e le répéte , c’est à regret que j ’entreprends une affaire qui
J
aurait pu être assoupie , et dont le résultat ne peut qu’être funeste à
mes adversaires ; mais ma réputation de solvabilité et de probité ,
a ta
q uee audacieusement de leur part , des poursuites vexatoires
commencées , une masse d ’intérêts qu’ils ré cla m e n t, après avoir
recu plus que le capital; le soin naturel de défendre , pour m a
famille , contre des voleurs publics, une fortune honnêtement acq u i s e jugement rendu pour et par des gens qui ont à
déméler des
affaires majeures avec moi , tout cela me fo r ce a parler
haut le langage de la justice. J e suis bien favorable, si j avais besoin
defaveur , car je dois au sort de mes enfans ( au nom bre de
o n z e , les efforts que je vais faire. Je serai vrai dans l’exposé des
faits et les principes immuables du tien et du m ie n , trouveront
�(a )
leur application à mes intérêts, méconnus impunément jusques à
J e possède au v illa g e de Pierrefite , pre» de St.-FIour, dépar
tement du C antal, un domaine au milieu duquel sont enclavés des
h é r i t a i s que Guillaum e A m a t laissait dans sa succession, et auxquels
¿taien? dues des servitudes de p a ss a g e, prise d eau , etc., etc.
Moins par ambition que par nécessité, je me vois forcé de les ac
quérir. J e devais à cette époque en petits capitaux exigibles environ
8 co o fr. Lorsqu’au commencement de l’an dix; je fis cette acquisition ,
j ’ignorais que les capitalistes confiaient leurs capitaux à des gens la
plu part sans aveu , sans garantie, sans bonne foi, sans loi; pouvais-je
présumer qu’ils seraient aussi cupides, aussi îrnprudens qù ils l’ont été !
C a r enfin, quelle garantie présentent des agioteurs en général ?
L ’impérieuse nécessité de solder pour huit ou neuf mille francs de
capitaux que je devais alors, ainsi que le prix de mon acquisition , me
fait découvrir Jean M e y r e , qui m e procure, d’accord avec le sieur
D a u b u sso n , les sommes dont j’ai besoin; le taux de 24 pour cent est
le taux absolu exigé de leur part et accordé. L a reconstruction d ’une
façade à ce dom aine, la réparation des grange et écurie, nécessitent
encore un emprunt dans les années onze , douze et treize, d’environ
cin q ou six mille fr., et il faut toujours recourir aux adversaires, tant
les capitalistes semblent resserrer leur argent, pour........
L e s sommes que j'ai empruntées à ces diverses époques ne s’élèvent
pas à vingt-un mille f r . , et s’il pouvait y avoir de l’e rre u r, nous la
rectifierons par les registres des adversaires , dont infailliblement le
rapport sera ordonné. J e désire de ne pas en imposer.
L e sieur M eyre ne manquait pas d’empirer ma situation; il faisait
ses comptes à discrétion; tantôt il fixait pour six m ois, tantôt pour trois
m o is, l’intérêt q u i, quoique de 24 pour cent par an , se portait à 28
ou à 3o pour cent, selon les époques plus ou moins rapprochées du
r e n o u v e l l e m e n t . J e vivais dans une inquiétude dont personne que
m oi ne pourra se faire une idée. L es extrémités les plus malheureuses
m ’auraient paru quelquefois un bien infini. J e me rends inutilement
chez le sieur Daubusson , duquel je reçois pour toute réponse, le ca
p it a l ou l'a g io ; j’insiste, et il me réplique : arrangez-vous avec M eyre,
tandis que M eyre m ’a dit : arrangez-vous avec Daubusson.
D eu x 011 trois personnes , qu’il ne convient pas de nom m er ici ,
m ’avaient bien promis de me prêter une somme de 20,000 fr. (cette
espérance cause en partie mes m a lh eu rs); ces fonds manquent , et
cependant la crainte des poursuites inouies que les agioteurs étaient
dans l’usage d’exercer, des ménagemens pour mon père et pour ma
fam ille, la considération que j ’ai tant souhaité de me conserver, et
que ces misérables ont tenté de me faire p e rd re , me forcent de renou
veler de six en six, de trois en trois mois. M on épouse qui partage
�mes sentimens, mon épouse qui se flatte d ’une espérance aussi vaine
que m o i, m ’engage aussi à ce fatal et continuel renouvellement; elle
et moi passons sous silence les chagrins que nous avons dévorés à ce
sujet. Puissent les âmes honnêtes être saisies d’horreur à l’aspect de
pareils hommes , et de leurs associés bien connus !
Cependant j ’avais déjà payé au sieur M eyre environ six mille fr.
à la fin de l’an dix ; postérieurement je lui ai donné quelques à-comptes,
en le conjurant toujours de réduire cet intérêt qui allait infailliblement
dévorer ma fortune. J e l’ai pressé plusieurs Ibis de me laisser connaître
par ses registres l’état des effets q u ’il réglait à son g r é , et il ne m’a
donné qu’une fois cette satisfaction ; c’était en l’an onze , j ’avoue même
que je n’ai pas été satisfait. On va voir q u ’il ne fallait pas s’en rap
porter uniquement à lui.
, E n l’an treize, il me dit qu’il faut des fonds; il me promet astu
cieusement une réduction considérable a condition que je lui payerai
une forte somme; j’y souscris; mais comment lera i-je? Je ne peux
vendre sans diminuer hors de toute proportion les revenus d’une pro
priété considérable que je possède à Pierrefort, et dont on connaît a u
jo urd ’hui la valeur par l'affiche que j ’en ai faite. L e sieur M eyre est
de mon avis; il m ’engage à faire une vente de quatre cents setiers de
b l é , délivrables en quatre an s, à 14 fr. le setier, mesure de M urât;
il retient les cinq mille six cents fr. que produit cette vente, il garde
1 acte de vente entre ses mains, et au lieu de diminuer le taux de l’ usure,
il me repond que je n’ai pas fait un remboursement suffisant. J e dévore
ce trait inoui de perfidie, et je me tais.
Ce dernier procédé m ’assure q u ’il faut par la suite retirer moimeme les lambeaux des lettres de change lacérées, si je ne veux laisser
périr totalement ma fortune par la dévorante activité à re n o u ve le r,
q u ’emploient les sieurs M e y re et Daubusson.
J avais deja tenté plusieurs fois de vendre tout ou partie des biens
dont je viens de parler; mais comme les agioteurs accaparent plus que
jamais les fonds des capitalistes, je ne p e u x vendre ; je tente de me faire
d autres ressources pour payer au moins partie aux adversaires; je suis
iorce de contracter d ’autres engagemens q u i , quoique o n é re u x , ne
seront pas contestés de ma p a r t , tant ils sont éloignés du taux énorme
que les sieurs Meyre et D aubusson ont adopté. Je rembourse donc
plus de vingt-un mille f r . , ce qui excède de beaucoup le capital ; en
sorte que ce qui est dû aujourd’hui ne présente que des intérêts, et
inteiets cles intérêts.
J e tente inutilement à plusieurs reprises d ’obtenir une diminution
auprès du sieur Daubusson. J e m e détermine à revenir à C le rm o n t,
en . °ire de mai 1806; tout ce que je peux obtenir est une diminution
q iu porte a 18 pour 100 l’intérêt, en payant cet intérêt dans deux
mois , et le capital en novem bre suivant.
ne sortira jamais de ma mémoire que le g mai 1806 , jour où ,
en presence du sieur M e y r e , je renouvelai les effets é c h u s , chez
2
�( 4 )
ledit Daubusson , un commis à figure b a ss e , épiait mes moindres
mouvemens; queles sieurs M e y re e t Daubusson n’avaientpasm eilleure
mine ; que lorsque je pris et déchirai les effets précéd ens, un sou
rire p énible, mais d u r , dérida lin moment leur traits qu’avait sans
doule altérés une conscience coupable ; et que sortant de ce gouffre,
je me dis tristement , les j e u x presque gros de larmes : où suis-je?
que deviendrai-je ?
Q u o iq u ’il en so it, à l’échéance des effets , même embarras de ma
p a r t , même rigu e u r, m êm e dureté de la leur, menaces d ’ em prison
n e m e n t, de saisie, d ’expropriation; enfin renouvellement forcé de
mes effets , le i 5 mai dernier , toujours à 18 pour 100, sans éclater
contre les propos menaçans du sieur Meyre.
L ’échéance de ces derniers effets n ’était pas encore arrivée , lors
q u ’ il s’est fait une levée de boucliers parmi les agioteurs, et q u ’au
lieu de céder aux sollicitations portées par deux lettres au sieur D a u
busson, mais q u ’il a laissées sans reponse, ils ont eu l’impudeur, pour
20,000 fr. d ’ intérêts usuraires et a c c u m u lé s , d’affecter et de répandre
une crainte d’insolvabilité , de grossir des inscriptions , et d ’allarmec
des créanciers heureusement peu nom breux, tandis qu’ils n ’ ignoraient
pas que j ’avais une fortune de plus de 200,000 f r ., suivant l’évaluation
ordinairs de notre département. Ils font plus , me voyant aflicher la
m ajeure partie de mes b ie n s , ils ont répandu q u ’à mon tour je voulais
imiter leur agiotage : les misérables !
Disposé à faire des sacrifices qu’ une faute, produite par la nécessité,,
avait rendus inévitables , en méprisant leurs calom nies, j ’ai cru ne
jas devoir franchir les bornes de la modération et de la loyauté ; je
eur ai dit que je payerais, mais qu’il fallait un peu de tems; que ces
intérêts étaient trop forts, que quelques remises seraient justes, etc. etc.
M a patience a doublé leur ardeur , et soit q u ’ils l’attribuassent à
la crainte, soit que par des procédés violens et des menaces affreuses,
ils aient cru m’emmener à détruire jusqu’aux traces de leur infâm e
a g io ta g e, ils ont montré la m ême audace. L e sieur M e y r e , en p ré
sence de personnes dignes de f o i , a osé me proposer d’attendre trois
mois seulement, sous la condition de lui payer encore l ’intérêt à 18
p o u r 100, de lui donner une caution, de lui remettre les effets qui
font ma p r e u v e , ou de lui déclarer qu’il n ’avait perçu que le taux
légal. J ’ai contenu mon indignation en^repoussant sa proposition; il
a osé me proposer un jugement auquel j’acquiescerais , ou dans lequel
je déclarerais que la créance est bien et légitimement due au sieur
D aub usson ; même relus de ma part. E nfin , il a osé me dire et ré
pandre en public q u ’il ne m ’avait prêté qu’à i pour 100, tandis que
la notoriété p u b liq i,e l’écrase , tandis que ses propres écrits à la main ,
et ses lettres de ch a n g e, endossées par lui ou par le sieur Daubusson ,
établissent d’une manière invincible qu’ils ont porté le taux de l’usure
jusqu’ù 33 pour 100 , et qu ils ont accum ule interets sur interels.
Cependant ils viennent d’obtenir, le 24 août dernier, sous le nom.
f
5
�du sieur D aubusson, un jugem ent par d é f a u t , qui me condamne au
paiement de 20,200 fr ., montant de cinq lettres de change; et ce j u
gement est rendu dans la propre cause du greilier M e y r e , p a r l e
sieur B éraud, son cousin germain allié, par le présid en t, qui doit
savoir que des affaires majeures sont à démêler entre lui et moi. L e
sieur M eyre fait plu s, il répand que nous sommes convenus d ’un j u
ment auquel j ’acquiescerai , tandis qu’il l ’a fait rendre parce qne je
n ’ai pas voulu y acquiescer de la manière p ro p o s é e , et que je lui ai
laissé la faculté de prendre ses avantages ; tandis que de suite il m e
l ’a fait signifier, et qu ’il s’est inscrit, le tout contre une parole donnée,
com m e ces sortes de gens la donnent.
Si j ’écrivais pour le tribunal de com m erce de S a in t-F lo u r, je lui
dirais que ce jugement est n u l, parce qu ’il est rendu pour des per
sonnes qui ont contre moi des engagemens de la nature de ceux que
j ’attaque, et par des personnes qui ont aussi à régler des intérêts
majeurs avec moi.
J e leur dirais que le sieur M e y re est souvent partie dans les
affaires de commerce de ce tribunal ; que lui greffier écrase en
frais une foule de propriétaires; qu’ en un m o t , il est du nombre
de ceux qui agiotent au sein même du tribunal.
Sans d o u te. Son E xcellence le G r a n d - J uge , informé des abus
qui se sont glissés dans les tribunaux, et de ceux qui se commettent
journellement au tribunal de com m erce de S t .- F lo u r , y mettra un
ordre salutaire. L e s bons esprits n 'en dou tent p as.
Je leur prouverais que cette espèce de tribunal est incom pétente.
Mais comme j écris pour le p u b lic , com m e j’écris principalement
pour les juges qui connaîtront de l’usure et de l’agiotage dont je
me plains , je vais rappeler les principes immuables qui doivent
iaire annuller les actes de prêts à usure , en forme de lettres de
change, qui m ’ont rendu débiteur des sieurs M eyre et Daubusson ,
et qui doivent me iaire restituer les produits énormes de leur usure.
Il est de principe chez toutes les nations , et principalement en
i r a n c e , que l’usure est un délit puni par les lo is, et que l’usurier
est tenu à la restitution des sommes qu ’il a perçues de trop, qu’il
est même soumis à des peines capitales. J e 11e leur rappellerai pas
es principes du droit divin, ni m êm e la religion naturelle, la c h a r ité }
a J ra tern elle ch a rité ; leur cœur est fermé pour jamais à ce
sentlment , et avertit la société d’être en garde contr’eux; je leur
rappellerai les lois qui les atteignent , en attendant que la provi
dence eu fasse justice.
de
PI ... —* »
*<5^4 ; ceues cie rnuippe-ie-ixaj u* , uc » 2 74: de.
(le.
,
PPe Ï V , de i 3 i I ; de Philippe de V a l o i s , de 1849; de L o u is X I [
üe i io ; de Francois I.” , de i 5 3 5 ; de Charles I X , de i o art. 14-7 d e ceu e O rléans; de H enri I I I , de 1 5 7 6 ; celle de jBlois*
5
56
�( 6 )
de 15 79, art. 202; celles de H en ri I V , de 1694; de L o u i s I I I , de 1629,
art. i 5 i ; celle de L o u is X I V , de 1 6 7 3 , tit. 6 , portant défenses,
a ux marchands et à tous autres d ’englober les intérêts dans les
lettres de c h a n g e , et de prendre intérêts sur intérêts. Toutes ces
lois punissent de l’amende h o n o rable, du bannissement et même de
c a ière, au cas de récidive , tous les usuriers connus aujourd’ hui , tant
sous ce nom , que sous celui d’escrocs et d agioteurs.
D ivers arrêts rendus en 1699, en 1756 , en 1745 , en i 7 z ; ont
consacré ces principes.
_
Il n ’est qu’à voir si ces principes s appliquent a mon espece ; a f
firmative 11e saurait laisser de doute.
E n e f f e t , les sieurs M e y re et Danbusson ont entretenu pendant
cinq ans avec moi une relation de prêt à usure, a o , à 28, à 24, à
1 8 , sous les couleurs de lettres de c h a n g e , portant la contrainte par
5
1
3
^ ï & a ’is ces lettres de change sont des titres faits en fraude du code
c iv il, qui défend à tout Français qui n’est pas com m erçant , ou qui
n’ est'pas dans les cas prévus aux art. 2059 et suivans, de consentir à
la contrainte par corps. O r , je n’ai jamais fait de commerce avec qui
aue ie soit; les adversaires n’en on fait ni avec moi ni à mon occasion;
mes effets n’ont jamais passé dans le commerce , ils se les sont réci•nroquement endossés, et les ont gardés dans leur cabinet; ce n’est donc
ciu’à l’aide d’une fausse terreur de la prison , et d ’une exécution
prompte et violente , qu ’ils ont voulu se procurer des lettres sim ulées,
en fraude de la lo i, tandis qu’ils devaient se contenter d ’une simple
obligation de prêt ; ils ont donc doublement violé la loi à mon é g a r d ,
j.o en ce qu’ils ont abusé de ma position pour dénaturer un simple
prêt; 2.0 en ce qu’en le dénaturant, ils ont exigé un intérêt usuraire
et prohibé.
Ils diraient vainement que la simple lettre de change me rend jus
ticiable du tribunal de com m erce; je leur réponds que des lettres qui
it n u l l e s , q ui contiennent cumulativement capital et intérêts usur m i sont un simple prêt déguisé, ne sauraient être de l’atraires, et qui
i
1
°
tribution de ce tribunal.
,
, .,
.
Il ne faut pas sans doute des preuves plus évidentes que celles rap
portées de ma p a r t , pour établir que ces lettres n’ont pour objet q u ’ un
prêt usuraire déguisé. L e s lettres que je tiens dans mes m a in s, les
com ptes et notes écrits par le sieur M eyre l u i - m ê m e , ses propres
registres qu ’il tient cachés, et ceux du sieur D a u b u sso n , la notoriété
üubliciue qui Ies flé tr it, tout dépose hautement que les sieurs D a u
busson et lui ont prêté à une usure énorm e, quoiqu’ils n’aient fait
aucun commerce av«c moi.
„
.
,, ,
Diront-ils que j’étais majeur et homme d’afïaires, que dès-lors je
savais ce que je faisais ? diront-ils qu’ ils ne sont pas venus me cher
cher pour prêter ces fonds? Q u’un pareil raisonnement est puenl et
de mauvaise foi! E h q u o i , l’homme d ’aflaire et le m ajeur ont-ils pu
�se mettre à l’abri de la nécessité? Est-il une puissance qui puisse les
y soustraire? non. E h b ie n , vous, M e y r e , v o u s, D aubusson et vos
p areils, vous avez introduit cette affreuse nécessite; vous etes aile
accaparer tous les fonds que vous avez pu découvrir , il 11 est pas jus
qu’au salaire des gens à gages q ue vous n ay’ez pris pour en retirer
l’usure, au moyen de laquelle vous avez mis et vous reduisez une
foule de familles à la misère; et vous avez le front de dire que vous
n’allez pas chercher les em p ru n te u rs, et vous leur dites que les m a
jeurs et les hommes éclairés doivent savoir ce qu ils foiit ; vous osez le
d ire, et la société ne vous vomit pas hors de son sein.
Dites-le m o i, quel droit avez-vous eu d’ enlever l’argent que vous
prêtez, à un taux au-dessus de celui fixé par la l o i , à un taux inouï,
au cu n , si ce 11’est celui du voleur qui enlève la bourse du passant;
aucun , si ce n’est celui de la dure nécessité où vous avez mis ceux que
vous deviez regarder comme vos frères et vos am is, et qui 11e devaient
bientôt deveuir que des esclaves que vous jetterez dans des cac ots.^
V o u s direz peut-être que l’argent est u n e marchandise; autie misé
rable absurdité! D ’abord il n’entre point dans une tête bien organis e,
que l’argent m onnoyé, qui est le signe représentatif des marchandises
et de tous les autres objets quelconques, puisse être une marchandise
lui-m ê m e; d ’autre p a r t , cette marchandise ayant un taux de produit
fixé par la lo i, celui qui l’a prêté, n’a pu lui donner, sans se révolter
contre la loi, un taux usuraire de
et
pour 100.
O n dira peut-être encore qu’on ne connaît pas cl’usure en France.
M ais nous n ’avons besoin pour répondre à celte autre ineptie,
que d’ouvrir le Gode c iv il:
« L ’intérêt, est-il dit , article 19 0 7, est légal ou conventionnel.
« L ’intérêt légal est fixé par la l o i , l’ intérét conventionnel peut
« excéder le taux fixé par la loi toutes les fois que la loi ne le prohibe
« pas ; le taux de l’intérêt conventionnel doit être fixé par écrit».
L ’article i y ordonne la restitution des sommes et intérêts perçus
25 33
38
de mauvaise fo i.
Je conclus de là que le taux excessif est prohibé par la l o i , et qu il
est usure comme dans l’espèce; je conclus encore que l’intérêt exige
de moi par les sieurs M eyre et D aubusson , est usure, parce qu ils
°nt évité de le stipuler par écrit, c’est-à-dire, par convention certaine
et dénommée. J e conclus donc que le l é g i s l a t e u r reconnaît qu il peut
y avoir usure , et qu’il entend la punir.
Cela est d ’autant plus v r a i , que j ’ai en mes mains une lettre cer
tifiée, en bonne form e, de Son E x . Monseigneur le G r a n d - J u g e ,
atée du 7 prairial an i 3 , qui porte que l’on doit agir en îestitntion
,^vant les tribunaux civils contre les usuriers; et que le Journal des
ebats, du
floréal an 11 , en rapporte une pareille de oOn E x . au
ocureur impérial de M ontreuil-sur-M er ; cela est d autant plus
vrai encore, c’est que les diverses cours et tribunaux ont condamne
certains usuriers à 5 ans d ’emprisonnement, a 20, à o, à 200,000 f.
3
3
�( 8 )
d’am ende, et que dans l’ universalité des départemens, le taux de l ’a r
gent a été remis à cinq pour 100, par suite de ces divers jugem ens,
et des principes que les agioteurs avaient cherché à dénaturer.
Il est donc bien vrai que j ’ai été victime d’une usure immodérée;
il est vrai que les lettres de change sim ulées, dont on a obtenu la
condam nation, ne sont que des prêts déguisés, faits en fraude de la
lo i, pour avoir la contrainte par corps; q u ’elles ont été exigées de
moi pour m e contenir par une crainte chim érique, que cet intérêt
usuraire est le fruit d ’une escroquerie pratiquée sous ces titres colorés;
que ces titres sont nuls dès qu’ils supposent un négoce qui n ’a jamais
existé ; qu’il doit in’être rendu compte des intérêts usuraires perçus
au-delà du taux légal.
Je termine une discussion dont l ’objet m ’a causé et me cause bien
des chagrins. Je pourrais appeler plus particulièrement l’attention
du public sur ces hommes qui , non contens d’usurper m a fortune,
ont osé attaquer mon crédit et inon honneur, et qui me déchirent
sourdement encore; mais me bornant à mon affaire, j’aurai le courage
de les combattre avec l’opinion des personnes estimables , desquelles
seules je désire le suffrage. U ne famille honnête et nombreuse inspi
rera sans doute quelqu’intérêt à la justice; et quoique les mœurs
soient perdues, il est aussi quelques âmes rares qui auront résisté à
la corruption , et qui sentiront vivement ma position ; qu’elles-reçoi
vent ici nies remercîmens sur cette sensibilité qui est le partage'des
b o n s cœ urs, et qui m ’a souvent soutenu. J ’avoue que j ’ai résisté longtems à former une action qui me répugnait; mais j ’en suivrai la chance
avec une constance que rien n’ébranlera.
J ’ai informé leurs Excellences Messeigneurs le G r a n d - J u g e et
JVlinistres de l’intérieur et de la police générale des exactions de mes
adversaires; je ne sais si mes réclamations leur sont parvenues; je
les ré ité re ra i, et si quelques-unes des entraves que j ’ai vu plus d’ une
fois mettre à mes démarches, se renouvellent, les auteurs seront con
n u s, je les suivrai par-tout. L a France ne doit pousser qu’ un cri pour
signaler une espèce d’hommes dont les annales des peuples ne four
nissent pas d’exemple.
1
BRU.
« y , m
J .1'1 — w m a - . .
S u p p l é m e n t
tfl
. a iu h u m i
cle Mémoire sur appel.
J E vais continuer le récit des faits de cette cause, justifier des motifs
qui ont fait infirmer le jugement du tribunal de commerce , qui rejeta
mon opposition, de ceux qui ont dicté celui rendu le g août dernier
eu ma faveur, et exposer rapidement mes moyens d’a p p e l, quant aux
chefs
�'(
9
)
chefs cjui me font préjudice. L a conduite de mes adversaires paraîtra
ju sq u ’a la fin sous le jour odieux qui l’a caractérisée depuis le com
mencement.
C O N T IN U A T IO N
DES
F A IT S .
Lorsque le jugem ent du 24 août m ’eut été signifie, toujours déter
miné à épuiser les voies amiables', je fis proposer au sieur M eyre de
traiter, puisque cela se pouvait encore, et que j ’attendrais 1 expira
tion de la huitaine sans former mon opposition ; sa reponse fut que
je ferais bien de ne pas la laisser écouler. E n conséquence , j e 2 sep
tembre 1 8 0 7 , je m ’occupai de la rédaction du mémoire qu’on vient
de lire.
On ne saurait se faire une idée de la célérité q u ’on mit alors à me
poursuivre. M e y re , qui venait de faire incarcérer avec tout appareil
de là force p u b liq u e , un nom m é Louis R o u d i l, propriétaire, qu il a.
ruiné dans trois an s, répandit que je subirais le même soj-t. O n anti
cipa les délais portés par mon opposition; pour en obtenir le débouté,
on me cita à l’audience du y , et à cette audience, dont je supprimerai
les débats scandaleux, m algré mon déclinatoire : « A tten d u , est-il dit,
« que j ’ai signé des lettres de change, avec remise de place eu place ,
K qu au fond il n ’est pas constant que M eyre ait un intérêt dans la
« cause; » je fus débouté de mon opposition, mon mémoire fut dçlionce à M . le Procureur-général de la C o u r criminelle , avec priere
de l’adresser à Monseigneur le G r a n d -J u g e , q u ia fait de cette dénon
ciation le cas q u e lle méxûtait: on demanda des dommages-intérêtS au
pront de l’hosp ic e , a cause des prétendues calomnies que le mémoire
renferm ait, tandis que je l ’avais consacré à la vérité.
Cependant, qu on ju g e par la position où j’étais , des diverses inquié
tudes que je devais eprouver. On m e citait les 7 et 8 pour contester
tiois cautions q u ’offrait le sieur Daubusson. M on épouse était accouc iee le 2 septembre ; le moindre acte de violence exercé sur moi ou
ans ma maison, pouvait priver mes enfans et m o i , eux d’une mère,
et moi d une épouse à laquelle nous tenons par des liens bien chers.
appelai le sieur B eau fils, officier de santé, q u i, le même j o u r ,
a esta que la dame B r u , accouchée depuis le 2 , avait le genre
nerveux extrêmement d élicat, au point de s’affecter aisément. L e
raetne Jour j e notifiai son certificat au s.r Daubusson, avec protestation
^ue je le rendais responsable de tout événem en t, et j’allai réclamer
u pi es de la cour d’a p p e l, une justice que je ne pouvais plus espérer
de trouver dans mes foyers.
Si e. Ptlr*a*s dans les plus vives allarmes. Violera-t-on mon asile.?
s i rn U est. » cl ue deviendra mon épouse; et si à mon retour j ’apprends
011 , je demande à ceux nui sont époux et pères , dans quel état
je me trouverai ?
J e demandai des défenses à la cour; je pouvais en obtenir, parce
que d après les dispositions des articles a o
et 2070 du code c iv il,
1
63
3
�( 1° )
il est défendu de stipuler la contrainte par co rp s, hors les cas prévus
audit code: on l’avait exigé de moi pour sim ple prêt usuraire. M ais
Daubusson lit plaider qu’on n’avait pas les pièces, quoique je les aie
vues entre les mains de son avoué , qui ne le dénia pas à la cour.
L a cause Fut renvoyée à la première audience d’après les vacations,
toutes choses demeurant en état.
L e projet de mes adversaires était, en demandant le renvoi, de pou
voir mettre le jugement du 7 septembre a executiun sur moi ; ils pré
tendaient le pouvoir m algré l’arrêt : ils s’en flattaient ; un conseil per
fide les entretenait dans cette erreur.
L e sieur Daubusson lit plaider le bien juge de la condamnation
prononcée au tribunal de com m erce de S t.-F lo u r; mais pressé par
les moyens puissans qui établissaient la négociation pour simple prêt
déguisé sous les couleurs de lettres de change , avec usure énorme et
anatocism e, depuis plus de cinq a n s , il finit par déclarer q u ’il ne
m ’avait jamais vu , qu’il était étranger à 1 affaire , et qu’ il ne me con
naissait pas , moi qui soutenais avec vérité être allé chez lui à trois
diverses fois. Rien ne fut plus surprenant que cette assertion démentie
de ma p a rt, en sorte que par arrêt du 20 novembre , la cour d’a p p e l,
séant à R io m « attendu que la sérielles lettres de change fournies par
« n i o i à M e y r e , et endossées au profit de Daubusson, lesquelles lettres
« n ’étaient même pas protestées aux échéances; attendu qu’il y a sup« position de lieu , et nulle remise de place en p la c e , que Meyre et
« Daubusson sont communs , que cette négociation n ’a eu pour objet
« que de simples prêts , déclare cju’il avait été nullement et incompé« temment jugé , et pour être fait droit aux parties , elle renvoie la
« cause au tribunal civil de S t.-F lo u r, et condam ne Daubusson aux
« dépens. »
J ’avais formé contre M eyre et Daubusson ma demande au tribunal
de St-.Flour, a fin de nullité des lettres de change souscrites et exigées
contre les dispositions de l’art. o
et su iva n s, et colorant des prêts
, nsuraires depuis plus de cinq a n s , avec intérêt de 24 à 33 pour 100,
anatocism e et renouvellement de trois en trois , ou six mois ; j ’avais
dem andé la restitution jusques à due concurrence de la somme de
douze mille fr. sur celle de 2 0 ,2 4 0 ^ ., a la quelle je voulais bien me
restreindre, si mieux mes adversaires n ’aimaient un compte , sur le
rapport de mes lettres cjui portaient leurs noms respectifs , et de leurs
registres depuis l’an dix. J ’avais aussi demandé la décharge de la
contrainte par corps.
_
T o u t - à - c o u p les adversaires réalisent le projet de se séparer, qui
avait pris naissance en cour d’a p p e l , au sujet de l’incompétence.
M e y re me fait citer au tribunal civil où nous étions en instance sur
m a demande en restitution de 12,000 fr., pour voir dire , q u ’attendu
q u ’à diverses époques il m ’a prêté ladite somme de 20,240 f r . , je sois
condamné à lui en payer le montant ; il poursuit en son nom la recon
naissance des cinq, lettres de changes 7 fait inscrire le jugem ent q u i
2 63
�( 11 )
les tient pour reconnues pour la somme de 22,364 f i . , tan
Daubusson avait pris une inscription cle 22,620 rancs pou
objet. L es deux inscriptions existent encore. ( Que jeu u cre
la solvabilité des débiteurs ! )
,
Indigné de ce système soutenu d’arbitraire et c e rauc ,
y
r)aubiens frappés d’inscriptions exagérées , niiustemen îai ^ J ‘
;’aj
busson , qu ’on prétendait ne pas avoir d intere
a
pourcru devoir à mes intérêts , à mon honneur et a
m-onortionnée
suivre une demande en dom mages-interets, qui u P P ^
^
aux torts qu ’ils m ’ont fait éprouver. Je me suis on
1 ^ ¿ es
Daubusson m ’a poursuivi avec un acharnement sans^
n iniurié*
audiences extraordinaires du tribunal de com m eice , ou 1
tu c r è s
qu’il a , par ses vexations, jeté l ’allarme dans ma
de mes autres créanciers ; qu’ il m a attaqu t ans
[ortune.
d ’honneur et de probité, qui me sont bien p us
q h isse ra i
L a cause a été plaidée au tribunal civil de S t
l° u i - Je
D es
sur les outrages dont on a cherché impunément a m
pssaver d e
hommes qui n’ont pas de famille ni ¿ h o n n e u r , on
J
porter le trouble dans la mienne. C ’était vraiment une
S me
demander justice contre des usuriers est une crise). M ais sur
mme
suis soulevé d’ indignation, lorsqu’on a prétendu me présen er
ossjr
un mauvais administrateur , et que pour le prouver ou pour 8 .
les capitaux , on a osé déclarer que M e y re m ’avait fo u rn i, dans
sucre
de deux ans , pour 3,800 fr. de vins étran gers, d’eau-de-vie, u
nu rln pnfp • i’/ivnis dans ma main sa nronre note et mon billet
blll qui
4
.-1
j y o o , les lois romaines ne permettaient pas de repeler - - „jjgj.
payés ; que prenant des fonds à 18 pour 100 , il pouvait bien S'1».
quatre ou c in q ; enfin, il a mis ainsi le vol et l’exaction en P11’ r
L e tribunal a ordonné le
m a rs, avant faire droit , (^-iep an IO
et Daubusson rapporteraient leurs registres respectifs t epuis
jusques en mai 1806, si non qu’ il serait fait droit.
.nrlnirf»
Daubusson a refusé de produire les siens ; M e y re n a vou u P1
que ceux tenus par lui depuis l’an 12 , quoique j’en aie vu en
de bien fournis en lettres de change.
.
. •
;n Rm
------------- .•
0
__„
î ncrri pti ons m uni-
23
r ----»
icî) iiunieuJJies
qiu; 1
^
a
vable , j ’ai demandé un d é la i, fondé snr les cuconstances ou les
usuriers ont placé leurs débiteurs ; je me suis fonde sur le décret des
4
�( 12}
J u ifs , plus applicable peut-être à M eyre et à Daubusson q u ’à tous
aUEnS'cet é t a t , le tribunal a examiné mes lettres de change et les
notes écrites de la main de M eyre, qui établissent les renouvellemens
rapprochés , l’anatocisme et le taux énorme de 1 intérêt ; la m auvaise
foi de mes adversaires l ’a frappé. E n conséquence, il a rendu le 9 août
d e rn ie r, le jugem ent dont les principales dispositions portent en
substance
devait être s t i p u l é ; qu'il n 'y a ci autre
.u. u c 1789 c .
en l’art. IQ 0 7 , s i ce n’ est q u e d ’après cette d ernière l o i , l e t a u x g u i aurait e x c é d é
l ’intérêt l é g a l , devait non seu lem ent être stipulé par é c r i t , mais ind iq u er le taux ;
tandis que d’après celle de 1789 et d e 179 0, il suffisait de s obliger par é c r i t , a v e c ou
sans re ten u e : q u e sans c ela la loi d e 1789 >dunt 1 obJet éta.t sans doute de restreindre
la ru u id ité d u p rê te u r, d ev en ait inutile , q u e tout intérêt excessif ou non , qui 11 est
nas stioulé est par cela m ê m e illégitim e , qu e x c ip er des négociations publiques oîj
l’ intérêt s e r a i t a u - d e l à de c i n q , c’ est présenter c o m m e loi la cou traveution à la loi
iviême q u e l’ anatocism e fut toujours sé v è r e m e n t r é p r i m é , q u ’ il n’ est pas autorisé
jgs’ ait. i i 54 et i i 5 5 , q u i ne pe u ve n t s’ appliquer à des intérêts illé g itim e m e n t
nerçus et confondus ; q ue l’ art. 1906 ne peut a vo ir trait q u ’ à des intérêts lé g itim e s;
O u ’alteudu en f a i t , q u e les effets dont il s’a g it, ne sont q u ’ une suite de négociations
c o m m u n e s auxdits M e y r e et D aubusson a v e c le sieur B ru , ainsi que cela est tenu
u o u r c o n s t a n t par l’arrêt d e la cour du 20 n o ve in b ré d e r n i e r ; ce qui laisse d’autant
m o in s de d o u t e , si l’on considère le refus d e D aubusson de présenter ses r egistre s,
et l’affectation de M e y r e de ne produire que ceu x tenus depuis l’an 12 ; et q u e dire
de la part de M e y r e n’a voir été q u e l’agent de D a u b u s s o n , ne se con cilie pas a v e c
les poursuites de c e l u i - c i , sans a v o ir a p p e lé M e y r e en garantie ; que M e y r e n a pas
d é n i é a vo ir rem is à B ru les notes écrites d e sa m a i n , qui établissent et l’ intérêt à
, p 0Ur 100 , et les r e n o u v e lle m e n s ; que la noie 3 én on ce de n ou ve au les 3 lettres
d e ch a n g e d e S o o o , 3o o o e t l 3o o f r . , q u e la note 4.® et 5.« c o ntienn en t le m êm e
Câîclll » ClC» y CtC*
i
O u e dès lors M e y r e et D au bu sso n d o ive n t faire raison audit B ru de 12,000 francs,
m es nui paraît être bien au - dessous de la restitution à laquelle il s’ est restreint ;
S° I,n
ste s’ ils veulent y r e m é d i e r , il l e u r a été laissé la faculté de v e n ir h com pte.
qu a u , e
>D a u b Uss0n sont con d a m n é s à faire raison audit B ru de la so m m e de
^ f6 pour restitution des intérêts excessifs et usuraires par eux perçus, si m ie u x
ïhiïument ve n ir au com pte p r o p o s é , sur la représentation de leurs regislres de l’an
nui seront abutés a v e c les pièces dudit B r u , à la déduction en leur faveur do
l ’intérêt d e c haq ue c a p i t a l , q u e ledit B ru a offert d’ allouer. C e jugem ent c o n d a m n e
B ru du consentem ent dudit D au busson, à p a y e r audit M e y r e la so m m e de 8,240 f . ,
ou t e l l e autre so m m e qu i résultera du c o m p t e , a v e c intérêts depuis le 3o j a n v i e r ,
énonue de la d em a n d e de M e y r e , ordonne la.rad iation de l’ inscription de D a u
busson la réduction d e c e l l e d e M ^ y r e a la som m e de 8,000 f.,et attendu que q u oique
B ru soit d é b i t e u r , et q u ’ il n ’ait pas fait des o ffr e s, il a soutenu une conteslalion
l é g it i m e , c o n d a m n e M e y r e et D aubusson en vers l u i , pour tout d o m m a ges et
in té r ê ts, a u x d é p e n s , hors le cout du ] u g e m e n t , ordonne q u e c e ju gem ent sera
ex é c u té par p r o v isio n , et sur les autres dem a n d e s des p a r ties,les met hors d instance.
C e jngement vient de m ’être notifié par M e y r e , sans nullement
l’approuver de sa part, et sous reserves au contraires de appel. J en
1
�—
I,
1.1
J-------------------- -----------------------
suis moi-même a ppelant, en ce q u ’il ne m ’accorde ni d élai, ni dom
mages et intérêts, et en ce q u ’il ordonne l’exécution provisoire.
Je vais parcourir rapidement les moyens qui doivent faire con
firmer le jugement en ce qui concerne la réduction ordonnée à la
somme de 8,000 f r . , si M eyre l’attaque form ellem ent, ainsi q u ’il
paraît se le proposer. J ’espèreaussi, en peu de mots , faire ressortir ceux
qui établissent Ja nécessité d ’en faire infirmer certaines dispositions.
i.° L e jugem ent du 9 août a bien jugé en réduisant à 8240 fr. les
20,240 fr. demandés par mes adversaires. _
2 -° Il a m al jugé en me refusant le délai demandé.
..° Il a aussi mal jugé en me refusant des dommages et in térê ts,
ou en les réduisant aux dépens.
4.0 L a disposition qui en ordonne l’exécution provisoire , autorise
une action irréparable en définitif.
D ’a b o r d , les motifs du jugement justifient assez la réduction
prononcée ; je ne m ’étendrai même pas beaucoup sur les moyens qui
doivent le faire accueillir, ce serait surabondant, d’après mes premiers
moyens.
J e m e contenterai de dire à son a p p u i, q u ’à commencer de l’ori
gine des sociétés ju sq u ’à nos jours , l’usure.a été un fléau que tous les
législateurs ont cherché à extirper, par des lois fréquentes et sévères.
Un lit dans le D euléronom e, dans le L é v itiq u e et dans une foule
dautres passages, rapportés par M . D o m n t , pag. 72 et suivantes,
les defenses les plus expresses de se livrer à l ’usure.
L e s lois d’A th èn es, la loi des douze tables à R o m e , l ’ont mise au.
nom bre des d é lits, puisqu’à R o m e , l ’usurier était puni du quadruple
de la somme prêtée, tandis que le voleur ne fut puni que du double.
L a raison en était qu’on est plus porté à se livrer à l’usure et q u ’il
est moins aisé de la découvrir que le vol.
E lle était tellement en horreur à R o m e , que quelqu’un faisant à
Caton cette question-ci : Q u ’est-ce q u ’un usurier? Il répondit froide
ment par cette autre : Q u ’est-ce q u ’un a ssa ssin ? Oflic. de Cic. J e
me tairai sur les désastres qui affligèrent R o m e , lorsque l’usure y fut
a son comble.
1
^ ^ . raPPort® p lus haut les lois connues depuis l’origine de la mo
narchie irançaise.
L es nouvelles lois , depuis celle du
octobre 1789 , n’ont jamais
a nus d’autre taux que celui de 5 pour 100 , fixé par édit de 1 7 7 ° e *
autres lois précédentes.
L art. 1907 du Code civil porte les mêmes dispositions : en déclaant que le taux conventionnel peut excéder le taux lé g a l, il ajoute
j outes les fois que Ja loi ne le prohibe pas). O r , des lois prohibies existaient, principalement la loi du
prairial an , qui remet
en vigueur toutes les lois prohibitives du commerce de la m onnaie
m étallique; d’autre p artj ]iavis Ju conseil d’état, qui est l’esprit de
ta loi, t u t , lors de sa rédaction, qu'à défaut de stipuler l ’intérêt p a r
écrit, il serait réduit au taux de cinq.
3
3
3
3
�--
r
Q ue les adversaires cessent donc d ’associer le législateur et le go u
à leurs crimes , quand il est prouvé que leur pensée a été
de réprimer et de contenir l’usure.
Q u ’ils n’invoquent sur l’anatocisme et sur l ’intérêt volontairement
p a v é , ni l’art. i i 5 4 , ni l’art. **
, ni l’art, 1906, q u ’on ne peut
sans rougir appliquer à d ’autres interets q u ’aux intérêts légitimes.
E n fin , deux arrêts des Cours d ’appel de D ijon et de Besançon,
de l’an 11, rapportésau journal du palais; deux de laCour de Bourges,
deux de la Cour de T u rin de 1807 et 1808 ( c e dernier rapporté par
Sirey ); un de la Cour de L i m o g e s , du 12 mars; arrêt de la Cour de
R i o m , du 20 n o vem bre, qui préjuge dans mon affaire qu’il n’y a eu
que négociations de prêts usuraiies. Ces arrêts, dont nous appli->
querions les principes sages qui les ont dictés, si l’appel de M e y re
était connu , attestent que l’ usure a été prohibée de tout teins.
A i n s i , de tous les coins de l’e m p ire, des magistrats probes et éclairés,
dont le choix honorera à jamais fa F ra n c e , ont consacré les principes.
A in s i, plus de cent vingt opinions des plus respectables, attestent la
nécessité urgente de punir et de réprimei 1 usure.
P o u r 'établir qu ’en fait le tribunal a bien jugé en appliquant ces
principes à m a ca u se , je me contenterai de renvoyer à la lecture du
jugem ent du g août.
J e vais donc m ’occuper de prouver que le tribunal a dû m ’accorder
le délai que je demandais.
L e jugem ent du 9 août porte que la somme réclamée par moi est
au-dessous de celle que j ’aurais pu demander. L es adversaires sont
donc à peu près désintéressés; et pour payer le restant d ’une créance
provenue d ’intérêts illégitimement stipulés, il était juste que le délai
nie fût accordé.
J e devais encore d’autant plus l ’obtenir, que les doubles inscrip
tions de 45,000 f. que se sont permises les adversaires, ont éloigné
les acquéreurs , auxquels des affiches avaient fait connaître mon
d e s s e i n de vendre; et que les inscriptions, quoiqu’injustes, ne peuvent
être rayées que sur un jugement en dernier ressort, s’ ils ne les rayent
eux-mêmes.
.
O ui ce délai devait d’autant plus m être accorde, que l’esprit du
décret relatif aux Juifs , du 17 mars 1808 , devait déterminer les
ju^es en ma faveur ; car si ce décret a eu pour objet de soustraire à
la'cupidité des usuriers les departemens malheureux compris dans le
sursis porté par décret du o mai 1806, Sa Majesté a bien entendu
sans doute protéger ses sujets de l'intérieur de la F rance, contre des
usuriers non moins furieux que les Juifs. O r , l’art. porte, que toute
créance portant cumulation d’intérêts, à plus de
pour 100, sera
réduite par les tribunaux , et que si cet intérêt réuni au c a p it a l,
excède 10 pour 100, lü crcanco sera annulleej enfin, l’art. 6 porte,
q u e , pour les créances légitimes et non usuraires, les tribunaux sont
autorisés à accorder aux débiteurs des délais conformes à l ’équité.
vernem ent
55
1
3
5
5
�( i5 )
D ans l ’espèce où je me trouve, je dois le restant d'une créance énor
mément usuraire réduite; je devais donc à plus forte raison avoir le
délai demandé.
Je devais aussi l ’obtenir suivant nos anciennes lois, puisque les
édits de Henri I V , du 17 février i 6 o 5 , et 14 mars 1606 , que les parlemens enregistrèrent seulement en faveur des veuves et mineurs des
usuriers, portent que les intérêts usuraires seront convertis en c o n
trats de r e n te , ce qui suppose un délai indéfini. V o y e z Pothicr sur
l ’ usure. E n f in , ce délai était d’autant plus nécessaire, que les ad
versaires ont répandu qu’ ils me mèneraient de telle manière que je
ne trouverais pas à ven d re , et cependant il faudrait les payer de suite.
D o n c ce délai était de la plus rigoureuse équité.
Il
a été mal iu e é quant aux dommages et intérêts. E n ettet , les
dépens ont-ils pu suffire, dans une affaire où ma réputation et mon
crédit ont été a lté rés, ainsi que ma tranquillité et celle de ma fa m ille ,
puisque nous ne vivons plus que dans les amertumes et les c î a g u n s ,
qui ne devraient être le supplice que du méchant?
Non , ils n ’ont pu me suffire , dès qu ’on a dit publiquement a J au
dience, q u ’avec mes propriétés je ne trouverais pas un sou , tandis
que M e y re , sans billet et sans im m eubles, trouverait 3oo,ooo f r . , lui
qui n’a qu’ une maison , et....... mais je m ’arrête.
Ont-ils pu me suffire, lorsque j’ai été représenté comme un mau
vais administrateur , qui ai pris pour 3,800 fr. d ’objets de consom
mation superflus, tandis que , l’écrit à la main , je lui ai prouvé 11 en
avoir pas pris pour plus de oo fr. dans trois ans?
A i- je été un mauvais administrateur, moi qui établis avoir p a yé ,
suivant un état signé en famille , le
germ inal an 9 , un'passif'de
,ooo f r . , en légitimes ou dettes de mon p è r e , que je remercie de
ses bienfaits et d’une administration bien plus heureuse que la mienne»
mais qui rend hommage à la vérité; moi qui ai acquis ou répare a
Pieriefite plusieurs domaines pour 47,000 fr. numéraire , ou d’après
l ’échelle de dépréciation; .qui ai acquis ou réparé à Saint-F lour une
maison pour 10,000 fr. ; moi qui ai éprouvé en trois ans le m axim um
®t des réquisitions sans n o m b re ; q u i , emprisonné en I79^ i su.r un®
liste de suspects, dont l ’auteur est trop célèbre dans notre cité, ai payé
une taxe révolutionnaire de valeur alors de 8,000 fr. num éraire, et
ensuite 4,000 fr. d’un emprunt forcé de 120,000 f r . , le tout réduit sur
l ’echelle de dépréciation ; 4,000 fr. de réparations dans mes biens de
Pierrefort ; enfin 5,3oo fr. pour la famille Fontes. T o t a l . . . • 101,0001.
Moi qui n’ai eu pour payer ces objets en total que 8 2 ,0 0 0 . sa v o ir ,
4^,000 fr. à des termes reculés, de la dot de mon épouse, dont cerm’ont été payés en assignats ; 14,000 fr. du remboursement d ’ on
office; 13,000 fr. de retour sur les biens cédés à mes lreres et sœursj
et 12,000 fr. prix d ’un petit domaine.
M o i enfin qui n’ai causé l'infortune d’aucun de mes créanciers, que
j ’ai payés en num éraire, sauf très - peu de chose en assignats qui avaient
presque leur valeur.
5
83
25
�(
)
J e défie ici qui que ce soit de contester ce que j’avance.
C epend ant, sur soixante-quinze mille francs qui pourraient rester,
je n ’en dois pas
,ooo fr. exigibles.^
Que ces détails sont fastidieux, mais la calomnie de mes adversaires
les rend indispensables; si tant y a , c[ue celui qu’on a si audacieuse
ment e x p o lié ,a it besoin de justification. J e 11 ai donc pas mal a d m i
nistré; j ’ai donc été calom nié; j ’ai donc droit à desdommages-intérêts
plus considérables , pour avoir été blesse dans mon honneur et dans
la profession honorable que j ’exerce. ^
■
Enfin, je prouve que l’exécution provisoiren a pas dû être ordonnée,
du moins sans caution, parce que M e y re n’a qu une maison et peu d’hé
ritages, hypothéqués à la dot de son épouse, et que quoiqu’ il ait vendu
le p e u q u ’ilavait pour se livrer à l’usure, il doit la plus grande quantité
des fonds qu’il a accaparés ; et que les victimes de son usure deman
dent de vant les tri bunaux la restitution des sommes qu’il leur a expoliées.
A p rè s avoir établi les moyens qui repousseraient l’appel de M e y r e ,
et ceux qui fondent le m ie n , qu’il me soit permis quelques réflexions
bien tristes, mais bien nécessaires, ce semble , dans les circonstances
critiques où les usuriers ont mis, en F r a n c e , les propriétaires et les
familles.
Ils répandent que les propriétés vont incessamment changer de main;
les mêmes continuent leur trafic. Il y a mieux , depuis la loi du sep
tem bre, il s’ est établi encore des compagnies d’argen t, qui courent à
la découverte des effets de tous les particuliers, qui inventorient et
font le bilan des diverses fortunes; ces compagnies ont leurs livres ;
l’éducation m ême semble s’être tournée vers ces spéculations désas
treuses. P a r leur monopole, le produit des biens du C a n ta l, qui n’est
que deux et demi pour cent, est à l’argent comme un est à cinq.
Us ont profité et ils profitent des ravages de la guerre pour assouvir
leur cupidité insatiable. E n un m o t , la loi du septembre n ’est pour
eux q u ’un avertissement d’être plus circonspects ( i ) .
Si donc toutes les lois ne sont remises en v ig u e u r , si incessamment
le décret relatif aux Juifs, n'est appliqué en entier aux usuriers connus,
sur-tout les articles , 6 et 16 ; si les créances qu’ils se forment ne sont
annullées ; si ce trafic ne leur est prohibé sous les peines les plus sé
vères, notamment celles du bannissement et des grosses am endes, ou
si un délai, au moins de deux ans, n’est accordé à leurs débiteurs, pour
les créances réduites; a moins que les usuriers ne préfèrent d’être payés
en biens fonds, sur estimation; si on ne les force à acquérir; si les
magistrats ne sont point assez courageux pour les poursuivre , nous ne
voyons devant nous que la misère, le désespoir et la m ort; et que
d’exemples il en existe !
36
3
3
5
( i ) L ’ iin p u n ilé les en hard it. L e s registres du greffe que lient M e y r e , sont c o u
verts de ses d é b i t e u r s , et les tribunaux correctionnels du Cantal ont beau s é v i r ,
leurs j u g e m e n s , q u ’a basés la c o n v i c t i o n , n ée d es d é b a t s , sont réform és par un
m o in d re u om b re d e juges et sur les sim ples notes du greffe.
�( 17 )
ï ï semble indispensable que S a M a j e s t é daigne Fortifier l’ouvrage
sorti de son cœur paternel le 3 septembre 1807; qu’elle songe à ces
peres de familles qui sont la ressource la plus sure de ses états.
O ui, Sire, songez que les propriétaires et les pères de famille sont
vos plus fidèles sujets , qu’ils tiennent essentiellement au sol et à la
patrie, plus que ces vampires, ces égoïstes, qui rapportent tout à eux
comme à un centre unique. F e rm e z , fermez ces gouffres où vont
s engloutir toutes les fortunes particulières.........
Puissent ces malheureux pères de famille, répandre des larmes de
reconnaissance autant qu’ils sont pénétrés de sentimens d’admiration
et d amour ! L a fin de leurs malheurs intéresse votre gloire. Sire, votre
cœur magnanime nous préservera de tous les genres d’a n a rch ie , et
cette gloire s’élévera au plus haut période.
S ig n é , B R U .
DEMANDE,
D U 12 J A N V I E R 1809,
en
SUPPRESSION D'UN LIBELLE,
Pour M.e P i e r r e - A l e x is - L o u i s B R U , A vo cat, et Sup
p lé a n t à S t . - F l o u r ;
Contre M E Y R E , habitant de Ladite Ville (1).
U n libelle commençant par ces mots : B r u a f a i t im prim er, etc . ,
® nnissant par ceux-ci : D e s n ég o cia tio n s dont j ' a i é té chargé par
ru ; libelle qu’a conçu une imagination d éréglée, mais féconde en
3 \ocl,é s , est l’unique moyen opposé à ceux que contiennent mes
ftiemoires des 7 septembre 1807 et 26 septembre 1808.
n style grossier, ignoble et c y n iq u e , caractérise l’âme et le cœur
e .ceux ^I11* ont travaillé à la rédaction de cet écrit diffamatoire. ^On.
voit que non contens d ’avoir corrompu les m œ u r s , ils voudraient
encore corrompre la langue ; aussi me serais-je borné à le jeter dans
es egouts, si mon honneur et ma réputation , attaqués si audacieuseent, ne m imposaient le devoir d ’en obtenir justice , de le faire supjrntner, et de poursuivre les réparations auxquelles les preuves que
ej r e m a fournies par écrit, me donnent droit.
Darce n?ionîe m p ' ° !e P as cians m on supplém en t ni dans cet é c r i t , le mot d e sieur,
avait comm
r S pr,.is“ C,Pes
e* l ’ asocial.
s a & ref“ sent ce titre à CeIui auclueI 0« a prouvé
yquu uil avait
un délit
5
�t I» )
Quant aux m o y e n s, M eyre prétend n ’avoir été que mon manda
ta ire, m a caution, mon ami; et pour tout cela n’avoir pris que demi
pour io o par mois. ( L a singulière et gratuite amitié que celle d’un
usurier! )
M a réponse est fort simple ; je ne lui ai jamais donné de pouvoir
c o m in ea mon mandataire; je lui ai demandé de l’argent, Daubusson
et lui m ’en ont fourni ; tout établit qu’ils sont unis d’intérêt, l’arrêt
de la C o u r, du 20 novem bre, ne laisse aucun doute à ce sujet, et le
jugement dont est appel constate ces faits pour ceux qui ont le c o u
rage de déposer tout esprit de passion ou d interet.
J e passe donc aux faits calomnieux et injurieux qui paraissent avoir
été le seul objet du libelle de Meyre.
D ’abord, aux pag. 2 et 2 1 , Meyre est sans expérience, et se dit
rédacteur de son libelle.
Réponse. A va n t l’an 1 0 , au moyen d ’un emprunt forcé, valeur
m étallique, sur son père, il se mit à même d’agioter sur les mandats.
D ep u is, 011 sait avec quelle rapidité il a m arché, et en combien de
manières.
A la pag. 14 , lig- et en marge , on lit que j ’ai rédigé un mé
moire infâm e, etc.
R ép . Il n’a jamais existé un pareil mémoire fait par moi, je défie
d ’e n
trouver un indice.
J ’ajoute, que lorsqu’après le p thermidor je fus appelé à l’adminis
tration de département, pour aider à réparer les ravages de l’anarchie
révolutionnaire, je fus chargé par mes collègues d’appeler auprès d ’elle
les prêtres détenus à l’abbaye du B uis, et que je rendis peut-être moi
s e u l,. à ces respectables citoyens, le témoignage des espérances qu’elle
fondait sur l’exercice de leur ministère.
J ’ajoute encore à cela une maxime vraie, qu’il est impossible q u ’un
homme de bien soit sans religion. J ’aurais autre c liose à dire ; mais il
n e faut pas être long.
A la même page ligne 9. - O n ne rapporte qu’ un arrêt de la Cour
de L im o g e s, tandis q u e , dans mon m é m o ire , pag. 2 4 , j ’en ai rap
porté huit de diverses Cours d ’appel.
A lam énte p a g ', li£- 2°- - 0 n es.1 soulevé d’indignation parce que
j ’ose demander un délai, après avoir obtenu une réduction des deux
tiers.
.
.
,
Rép- J ’ai obtenu justice et non une grâce. J ai offert plus que le
taux légal.
_
J ’ajoute que , libéré envers le sieur B asset, je ne dois pas 20,000 f.;
q u ’il me reste plus de 160,000 f. de propriétés, à dires d’experts; que
je n ’ai pas de bilan à déposer, et que je dois compter plus q u e M e y re ,
sur le silence de M . ls Magistrat de surete.
Même pag., lig. 27 et suivantes. — Je renvoie à mon supplément
de m ém oire, pag. 2 4 , liget suivantes.
J ’ajoute toujours que si les articles , 6 et 16 du décret du 3o mai
5
,
5
�c 19 ;
désignent seulement les J u ifs , c’est qu’on a supposé qu’ il n’existait
f ias en France d'autres maltotiers , usuriers , escros et agioteurs, que
es Juifs.
Pag- i , lig. 11 et suivantes du lib elle. -- J e réponds que j ’ai en
mes mains un état de M . R iv e t , du 17 décembre dernier, qui cons
tate la double inscription; je n’ai connu ni la procuration de M urât,
ni la radiation qui devaient m ’êlre notifiée par Daubusson. Gela
s’expliquera devant la Cour.
M êm e p a g ., lig. 17 et suivantes. — C ’est ici qne M eyre commence
à développer tout l’affreux du complot de diffamation, de ses consorts
et de lui.
D ’abord , il est notoire que lors de l’établissement du tribunal’civil
à St. F lo ur , un ê t r e , malheureusement trop in ih ia n t, au lieu de dé
terminer le choix pour l ’alternat de l’administration départementale,
que son incurie avait f;fit perdre à la ville en 1791 , fut pousse' par le
désir de faire sa fortune et celle d’un collaborateur du lib e lle , qu’il
ecarta, sous divers prétextes plus ridicules les uns que les autres, des
avocats qui lui reprochaient une honnête banqueroute de 10,000 f r .,
en prairial an trois, à la famille B a d u e l, et que par cette influence,
il fallut s’ad ressërà son cousin , qui recevait et répétait assez bien ses
conseils à l’audience; q u ’ ainsi des jeunes g e n s , (c o m m e on d it, a
peine sortis des bancs) firent promptement une fortune scandaleuse.
Mais arrêtons-nous là pour un moment.
P o g . 16, lig. 1.re et suivantes. — P our les raisons ci-dessus don
nées , il fallut crue les beaux-frères s’adressassent à la véritable source
pour faire plaider leurs causes avec succès.
M êm e p a g ., li g , 10. ~ J e viens de donner plus haut les raisons qui
expliquent les causes inexplicables.
M êm e p a g . , lig. i . — L e fait est faux; je défie qu’on administre
un adminicule de preuve.
On sait que M . Spy-Desternes ne cachait pas une opinion qui 11’était
alors un crim e, que parce que ce n’était pas celle de l’intrigant en
c h e f, a cette époque; lequel intrigant doit se rappeler l ’avoir échappé
belle à cause de ses intrigues, dit-on. A u reste, on connaît l ’auteur
de la mise hors de la loi de cet honnête citoyen; cet auteur est un
digne compagnon d’un des collaborateurs du libelle.
M êm e pag. h g . i{j. — J e n’ai scandalisé personne en exerçant les
lonciions d’a v o c a t , pour un accusé.
,1 a * demandé toute la latitude de le défendre; elle m ’a été refusée.
honneur et l ’indépendance de mon état me faisaient une loi de de
mander'respectueusement cette latitude. Les avocats doivent respect
aux tribunaux ; a leur to u r , ceux-ci leur doivent la considération
<lu us n’ont pas droit de leur enlever. O11 sait à quel degré d’honneur
tu t portée cette profession chez tous les peuples; et il faut esp érer
mess,eurs ^es avocats se pénétrant bien du droit q u ’ils on t de le
réclam er , cet honneur reviendra.
5
5
�\
20
)
A u reste, exerçant cette fonction pénible mais honorable, je n’ai
point exigé douze cents francs, ni d e u x , ni trois, ni quatre mille
francs pour une seule c a u s e , dans un département où les fortunes
sont très-bornées , et où les véritables talens ne le sont pas moins.
M êm e pag. ligne. 24 avec une note. — Cette note est ma justifica
tion. On sait que ce qui n’est pas établi paraphernal est dotal ; le pé
cule et les droits successifs m o b ilie rs , échus pendant son mariage à
la fem m e B e r l h u , ne pouvaient sans injustice passer à des parens
qui n’étaient pas les siens.
P a g .'i ’j ,I ig i re et suivantes avec note en marge. L e sieur Basset
est payé : il m e tint un propos que M eyre et ses consorts peuvent
seuls entendre de sang lroid ; pour m o i , je ne conseille à âme qui
viv e de m ’en tenir de pareils. L e sieur Basset ne fut vigoureusement
repoussé du poingt qu’une fois. M . Loussert , mon a m i, qui m ’estime
depuis
ans autant qu ’il est lui-même estimable, me fit vivement
retirer ; il n’a pas depuis cessé de me donner des preuves de son at
tachement. V o ilà le fait.
M ême pag. lig. 4 et suivantes avec la note. — L e fait est puéril ;
fût-il v r a i , est-ce notre faute si nous recevons de faux renseignemens?
M ême pag. lig • 9 d note. — L a circonstance à laquelle on a donné
une tournure maligne est controuvée. Je n’elais pas et je n’aurais-pas
été le juge de Roussille pour une somme quelconque.
J ’a jo u te , que je suis destiné à être honnête homme toute ma vie;
q u e d ’autres sont décidés à être fripons toute la leur. J ’espère que la
cour fera justice de la noirceur de cette imputation.
M ême pag. lig. 1 r. — Jam ais ma société n ’a été fort étendue. Celle
que je hante est estimable ; des j u g e s , des beaux-frères estimés , un«
maison vo isin e , un ami intime ; jamais cela ne m ’a abandonné : je
verrais encore une autre maison , si d ’une part la m é ch a n ce té , de
l ’autre, la présence de ces êtres corrompus n’étaient venues la souiller.
Quand a l’homme dont on a parlé , il n’a reçu de moi d ’autre ac
cueil que consolation dans son malheur.
M ême pag. lig • 18 et suivantes. -- L es faits dont il s’agissait étaient
vrais. M- le Sous-Préfet n ’ignore pas, et je sais comme.lui de quelle
manière cela s’est terminé. J ’ai copie de la lettre de M . le Ministre
de l’intérieur , du 19 fruct. an 10 , qui se borne à dire que les faits ne
lu i paraissent pas prouvés. Si j eusse calomnié!..... Mais alors je me
tus pour un bten cle p a i x , comme je me tais aujourd’hui j et c ’est à
regret que je réponds.
P a g . 18 , i re ligne. — L e fait est faux ; a l’exception du s.r DnudeCissac , tous les autres ont plaidé ; quels motifs ont-ils eu pour le con
traire? je serais lâché de leur en avoir donné de fondés.
M êm e pag. lig • 9 . ^ suivantes. — J ’ai dit que M . Devillas était
incapable de tronquer des dépositions ; mais que son greffier, am i
de C h anso n, p o u va it, par un penchant naturel à excuser son ami ,
avoir affaibli fa rédaction. Misérables calomniateurs l
,
23
,
�( 2ï )
M êm e p a g .lig . i — L e cadastre parcellaire de la commune de
Paulhenc avait été fait avec une imperfection sensible. Plusieurs
liabitans, M . le Maire et moi présentâmes notre pétition à M . le
Préfet : elle porte, que si cet ouvrage n’ est pas le fruit de la partialité ,
I n e x p é r ie n c e , puisqu’on n’a pas sondé les terreins; de la
précipitation puisque dans v in g t- n e u f jo u r s , le cadastre d’une
commune qui a deux lieues de rayon a été opéré; et de l’ erreu r,
parce qu’on a ajouté des héritages qui n’existaient pas. Sur celte
pétition , M. le Préfet écrit, d il-on, au Maire dans le sens rapporté ;
il envoie les experts, l’opération est réformée. O ù est le forfait ?
M êm e p ag. lig . zB et su iva n tes. — U n des rédacteurs du libelle
sait que les siens déchirent les billets avec les dents. Quant à moi, je
vais expliquer mon fait. L e sieur Beaufils - Mentieres , qui a fait des
progrès en alliance , était mon créancier par billet à ordre, de créances
que je n’ai pas voulu lui rembourser en assignats ; ces effets avaient
porté depuis des intérêts qui ne sont connus que de nous deux ; il me
cita au tribunal de co m m erce, il prit d éfaut; ma servante porta les
fonds chez M. G a u ta r d , je les com ptai, je pris d’après cela mon
b ille t, que je déchirai ; je refusai de payer le montant des frais et le
ard pour fra n c, non stipulé; je lui évitai les frais d’une opposition,
pour cause d’incompétence. V o ilà le fait. A h , M . Mentieres ! mais il
sera encore question de vous par la suite; malheureusement trop pour
cette affaire.
pag. lig. o et suivantes. — Il ne peut exister d’autre
o servation de ma p a rt, à nies héritiers, que celle de se défendre
une action injuste que pourraient intenter des créanciers avec
lesquels j ’avais traité en nu m é ra ire , sur l’échelle de dépréciation
existant alors, pour des assignats qu’ils m ’avaient prêtés. Ceci concerne
probablement le sieur Mentieres.
. ^ l*8 - T > 1*8 . " E t malheureusement ceci le regarde : eu 1 7 9 2 ,
(je m en rapporte à lui sur l’année) le sieur Mentieres me prêta, an mois
de m a rs, 6,000 fr. en assignats, remboursables dans 6 ans , avec oo f.
«intérêts. ( I l ne tenait pas tant aux intérêts alors. ) J e lui en avais
payé deux années; je ne l’aflligeai pas d ’assignats en l’an
et 4. L es
mandats circulaient ; M . Mentieres répandait qu’il aurait de l’argent ;
je prends 1 échelle imprimée de la trésorerie, par Bailleul > laquelle
) ai encore, je lui dis : le louis, en mars 1 7 9 2 , valait’43 fr. ; il est juste
que vous ayez l’équivalent de vos assignats , ou bien des mandats;
j étais bien éloigné de les lui donner. Nous traitons pour 4,000 fr.;
’ flue vous avez été im p ru d en t, M . Mentieres !
M êm e p a g e , ligne 7. — A n n et R odier n’a jamais été mon b o u ici ; je ne lui dois que 180 f r . , à ce que je crois. Celui qui a fourni
s m atériaux, ainsi que ceux du sieur Roussille pour ce libelle, donne
Une opinion que je n ’aggraverai pas.
M êm e p ag ,
j — Et c’est Je N e c p lu s utlrà de la turpitude.
Comment 1 M e y re m ’a fourni dans un a n , à moi s e a ï, autant de
5
3
9
3
3
3
�(
22
)
vins étrangers et d’eau-de-vie, que peut en consommer la moitié des
trente meilleures maisons de S t .- F lo u r , qui font à peu près la con
sommation. ( O n sait que quelques-unes de ces maisons, présentant
bien moins d’hypothèques, sablent plus que moi de ces sortes de vjns ).
Mais en leur passant vingt bouteilles à chacune annuellement, plus ou
moins, nous aurons oo bouteilles qui, à o sous, donneront 450 fr.
C e p e n d a n t, en 1801 j’a i , en tâtonnant commencé par 5j z francs de
consommation; mais en l’an 1 2 , j’ai dépensé en toute livraison, plus
de i , i 3 o fr. ; a h , cette année, j ’ai surpassé les trente maisons. E n
l ’an i 3 , je me suis arrêté à 806 fr.; je n’avais pu sans doute digérer
celui de l ’année précédente. En 1806, j ’en ai aussi consommé pour
8 i 5 fr. ; je me suis aussi infailliblement ressenti de l’indigestion de
l ’an 12. E nfin , en 1807, j ’ en ai consommé seulement pour 484 f r . ,
j ’imagine qu’ il a été fatigué de fournir; sa cave seserait épuisée. Faut-il
encore que je lui observe q u ’il y a erreur de 100 fr. à son préjudice?
Mais M e y r e , que fîtes-vo u s, lorsqu’au tribunal je vous déclarai
fripon, lorsque je fixai sur vous les regards du tribunal , et que vous
n ’osâtes pas même lever, cette tête qui n’a plus rien de la dignité de
l ’homme. J ’ai vos notes, mes écrits, l’état de livraison de ceux qui
m ’ont fourni après fructidor an 12 ; la cour appréciera tout.
Pages 20 et 21.
J e renvoie,u mon mémoire, page 2 7 , dans
lequel j’explique les faits que M eyre paraît ne pas avoir lus.
Quant à l’ironie relative à l’emprunt de 120,000 f r . , il n’y a que des
têtes semblables à celle d’un des rédacteurs du libelle qui aient pu
l ’imaginer. Dans certaines familles il y a des lubies; je sais que les
cousins se sont forgé celle-là ; mais quelle apparence que je veuille
devenir pauvre par orgueil : les tems ne sont point assez bons pour cela.
M êm e p a g e , lig . 14. — J e n’entends rien à cela. On cpnnaît les
démarches que je faisais pour mon malheureux père, infirme et sexa
génaire, lorsqu’un des rédacteurs du libelle et son cousin s’amusaient
à le traduire dans la maison de réclusion, on sait avec quelle énergie
je me présentai devant un représentant.
Page 22, ligne 11. — L ’im punité, je le répète, a doublé l’audace
de cet usurier; je le ferai sentir plus clairement à la page suivante.
rage
, lig n e 7. — Q u o i , M e y re , on délibère sur une innocence
aussi prouvée que la votre! U n entortillement pour caractériser l’es
pèce tle d o l , tandis qu’il était plus clair que le jour cjue vous en étiez
incapable! et aussi de l ’avis de M. le Suppléant qui faisait les fonc
tions de M . le Pro cureur-gén éral, et à l’unanimité après le délibéré!
la prononciation paraît insolite! T o u t cela me passe, en vérité.
3
3
23
.................................... ... . . . C et esprit m e c o n fo n d ;
J e ne p e u x co n c ev o ir com m eutc.es M essieurs font.
M
étromanie.
A u reste, vous avez un bon arrêt qui vous blanchira s’il se peut.
A propos d’unanim ité, la délicatesse et la sévérité des principes de
�\
J
M M . les juges du tribunal de première instance q u i, selon M e y r e ,
page i du libelle, n’ont pas été unanimes, sont trop certaines, pour
q u ’on doute de l’unanimité de leur opinion ; ils ont la réputation d'hon
nêtes gens, et ne l ’a pas qui veut.
Page
, lig. a . —- M eyre ose parler de Roudil. M alheureux,
taisez-vous; s’il mourait de chagrin , comme bien d ’autres, son spectre
vous serait épouvantable.
P a g e 26 , ligne 4. — O u i, ce registre est couvert de vos victimes ;
qu’ on le compulse. E t ajoutons-y que vous étiez greffier et partie , et
que vous ruiniez vos victimes en irais.
Quant à m o i , M . Douet m’a appris qu’il ne voulait que sûreté , et
qu’il n’avait pas voulu céder 111a créance pour m ’éviter vos poursuites.
M êm e page, lig. xi et suivantes. M o i, dem andera Son Excellence
là place de greffier au tribunal de commerce de St.-Flour ! et après
Meyre ! ! ! ............
Ë t'm o n b e a u -frè re , avocat estim é, écrire contre le sieur F a h y ?
Cette lettre existe sans doute comme celle que me prêta M . le SousPréfet , en l’an 10 , et qu’il ne put trouver dans sa poche.
M êm e p a g e, lig n e 17. — Faits fa u x, que je délie de prouver.
L ig n e 20. Fait faux. Jamais je n’ai paru à Murât les jours où votre
affaire a été discutée; j ’y suis allé au sujet du blé dont la vente vous
est connue, j’y ai pris sur votre compte des renseignemens dont je
ferai usage.
M êm e p a g e , ligne 23. — Si j ’ai dit à un magistrat que notre
3
25
3
escroc était condam né, je d éclare, pour sou honneur, qu’il ne in’a
pas fait Ja réponse que vous m ellez clans sa bouche.
1
J ai fini. J e crois avoir mis a nu usure au désespoir; mais cela
ne me suffit pas. Ma réputation, mon état et mon honneur ont reçu
1 outrage le plus sanglant qui puisse leur être porté.
S il existait une société dans laquelle une poignée d ’hommes eût
le droit de nous expolier, de nous enlever ensuite notre honneur, la
seu e îessource de 1 homme dans le malheur ; si des pervers pou
vaient le faire im puném ent, si la justice était impuissante pour nous
en ve n g e r, 011 n’aurait d ’autre parti à prendre que de défendre à main
armée sa fortune, sa famille et cet honneur. Q u o i, Meyre et D a ubus
son seraient aujourd’h u i , dans l’espace de sept ans , mes créanciers
de plus de cent mille francs, pour environ vingt mille fr. de fournis,
si je ne m ’étais épuisé en tout sens pour des remboursemens fréquens.
■keschevçux se dvéssem !
1
,n.’ j eJ a* dit, la société de ces vampires doit être anéantie avec
.atraPj, ®
* eclair , si l’on ne veut voir périr les ressources de I’é>si on ne vmit voir se briser la pierre fondamentale de ces ressources.
cultn*-’
S° nt c^evenues nos manufactures, le com m erce, l ’agriu ture, depuis que ces misérables font accumuler les banqueroutes,
epuis que la plupart d’entr’eux ont quitté même leur commerce pour
se livrer a l’usure.
F
�( 2
4
)
Ils sont furieux d’être découverts. Cependant, je n ’avais pas dit que
dans l’arrondissement de M u r â t , le boiteux Dauzolle , était mort de
chagrin , de voir en trois ans ooo fr. s’é le ve r, par l’usure, à 1 1 ooo f. ;
que Sarraille a éprouvé pendant deux ans les rigueurs de l'emprison
n em ent, pour des créances non dues, et que pour paralyser l’action
publique , on l’a dédom m agé; je n ’avais pas dit qu’aux prisons de
St.-Flour, deux détenus , victimes de l’usure, sont morts de chagrin;
que Gueffier d’A lo z ie r, et celui de R u in e s, forts propriétaires , sont
en fu ite , etc. etc. etc. et qui en est la cause ?
Je n’avais pas dit que les cam pagnes, à l ’exemple des villes, étaient
infestées du poison de l’usure; quel remède y apportera-t-on ? quelle
est la peine qui vengera la société de cet état de corruption, que
M eyre et consorts y ont introduit.
Que le crim e v e ille , qu ’il soit même im p u n i, je ne m ’en défendrai
pas moins contre lui, j’a ttends justice et réparation, et j ’espère fer
m em ent que je l’obtiendrai.
S ig n é B R U .
3
�
Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Marie
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Description
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Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Bru, Pierre-Alexis-Louis. 1809?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Bru
Subject
The topic of the resource
usure
agiotage
créances
abus
tribunal de commerce
libelle
Description
An account of the resource
Premier mémoire du 7 septembre 1807, et supplément en cause d'appel, du 26 novembre 1808, pour maître Pierre-Alexis-Louis Bru, Avocat et premier suppléant du Juge à Saint-Flour, département du Cantal ; contre les sieurs Jean Meyre, greffier du Tribunal de commerce de Saint-Flour, et François Daubusson, de Clermont [suivi de] Demande du 12 janvier 1809, en suppression d'un libelle, pour Maître Pierre-Alexis-Louis Bru, Avocat et Suppléant à Saint-Flour ; contre Meyre, habitant de ladite Ville.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
s.n.
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa 1809
Circa 1806-Circa 1809
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
24 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0506
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0505
BCU_Factums_M0509
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/5/53817/BCU_Factums_M0506.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Clermont-Ferrand (63113)
Talizat (15231)
Pierrefite-sur-Loire (03207)
Saint-Flour (15187)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
abus
agiotage
Créances
libelle
tribunal de commerce
Usure
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f0757809a78ab6e72458283aab4cbd09
PDF Text
Text
P O U R
V I N G T
H A B I T A N T S
du village d e Taleizat,oppofants à l'enrégiftrement
des Lettres Patentes obtenues a l’effet de leur
ôter le droit de fecondes herbes dans les prés.
C O N T R E les fleurs C A R R I E R E &
B A R T H O M E U F , fe difants Syndics
du village de Taleizat réellement parties en la
caufe, & demandeurs en enrégift rement def dites
Lettres Patentes.
E T V I N G T - T R O I S autres H A B I T A N T S
, Vagabonds , à qui Ja f uppref f ion du
droit de fecondes herbes eft indifférente , ou qui ,
débiteurs de Carrière & Barthomeuf nofe nt pas
f e def endre,& font obligés d' en paff e rpar leur avis.
' f urp r is
T
Out ce que l’injuftice a inventé de plus étonnant fe trouve en cette caufe. Les fécondes
herbes des prés du village de Taleizat ont, de tout
tem ps, appartenu aux Habitants , qui font fans com
munaux. B arthomeuf, C arriere, la dame de M ontlo u b y , les Héritiers d’un feu fieur P rivat , feuls
A
�w,
a
propriétaires des p rés, ie font apperçus que cet
ufage leur laiibit un tort notable , ils ont voulu le
fupprimer, & à force de furprifes & d’aftuces, ils
en font prefque venus à bout.
Achever de ruiner un village au profit de quatre à
cinq particuliers , détruire un ufage auiîi ancien que
Taleizat, juger contre la coutume, ne pas avoir
égard aux furprifes vifiblement faites a ceux qui
paroiiïent conientir à la fuppreffion des fécondes
herbes, voilà ce que l’on propofe de faire au C o n feil Supérieur, après avoir furpris le R o i , par des
menées auiTi fourdes que criminelles.
F A I T .
Taleizat eit fitué dans la haute A uvergne, a deux
lieues de S. Flour : il n’a que 4. à feterées de com
munaux ; il s’y trouve néanmoins beaucoup de prés,;
mais tous appartiennent aux héritiers P rivât, la
dame de M ontlouby , Carriere & Barthomeuf.
Com m e de tous les temps les chofes ont été
dans cet é ta t, de tous les temps les Habitants, qui
n’avoient pas de quoi elliver leurs beftiaux , ont eu
le droit de fécondés herbes dans ces prés, qui iitués en pleine coutume d’Auvergne , <Sc n’ayant
jamais porté revivres , font régis par l’article 4 du
titre 28 , qui permet de faire pafturer le beftail eç
héritages portants fruits , /oit prés ou terres, iccux
levés.............. f i 11 ejl e% prés où ¿'ancienneté Von
a accoutumé faire revivre.
�3
Le fieur P riv â t, Procureur du R oi a S. P lour,
homme puiiTant'a T aleizat, fut le premier qui con
çut le projet de fupprimer ce droit de fecondeskerbes: il éveilla tous les antres propriétaires au
nombre de quatre , 6c après des prieres, des me
naces , d e 'l’argent prêté , de petits fervices rendusà quelques malheureux de la paroiiîe, il fit cons
truire clie^ lui certain délibératoire du 2 j Juin 1 7 6 5,dans lequel il paroît que vingt-cinq perfonnes qui
font dites tous faifant la communauté ¿'Habitants'
dudit lieu de Taleizat, ont (a) reconnu-qu’ancien
nement les- prés de Taleizat portoient foin 6c re
gain, que depuis quelques années, il s’étoit introduit’
parmi eux unufage iingulier de ne faucher qu’une
fois leurs prés, ce qui étoit contre l’uiàge de tous;
les villages 6c de la Province d’Auvergne ; que les
iecondes herbes dont ufoient les gens de Taleizat
empêchoient la confommation des herbes des pâturaux pendant l’été, attendu que les Habitants-nfcpouvoient eiYiverdebeitiaux qu’autant qu’ils en pouvoient hiverner. Ils dirent que ce droit étoit a char
ge a la communauté , qui par la n’avoit aucun;
iumier pour améliorer les terres , & que la fuppreffion de ce droit, en facilitant le paiement des im
pôts, dont ils étoient furchargés, empêcheroit leur
expatriation.
Le fieur Privât 6c Barthomeuf crurent qu’ils
pouvoient agir en vertu de ce feul délibératoire.
(a) C et extrait eit fidele.
�D ès le lendemain leurs près furent fermes ; mais
les habitants, même ceux qui font en nom en
l’a& e, ignorants ce qui s’étoit pailé , réfiilerent.
Barthomeuf prit desbeiliaux, le village s echauflà,
Barthomeuf craignit, &c s’applaudit de les avoir
rendus , fentant bien que , quoique l’on puniilè le
défefpoir des gens , il n’y si qu’un téméraire qui,
l’excite.
_ '
:
Le fieur Privât m ourut, & en mourant il re
nonça a fes projets odieux , recommandant a fes
domeftiques de mener fes beftiaux aux fécondés
herbes, 6c de le faire avec toute la publicité
Alors Barthomeuf, qui ne travailloit qu’en ious
ordre , devint chef d’un parti, que lui & la dame
de M on tlou by, dont il eil fermier & homme
d’affaires, avoient trop intérêt de ne pas laiilèr étein
dre. O n croit d’abord qu’il agit en vertu du,dé
libératoire : point du tout. O n ne voit ni fes ac
tions, ni fes mouvements; il paroît s’endormir en
176^ , pour ne s’éveiller qu’en 177 3 .
Le délibératoire eftd e 1765 ; au bout de
ans de fom m eil, il obtient 1111 Arrêt du Confeil
d’Etat du R o i, le 21 Août 1770 , qui rend les
prés défenfables juiqu’à la Saint M a rtin ,
il
garde cet Arrêt avec le délibératoire. Trois ans fe
pailènt encore dans le filence le plus profond, ÔC
il obtient des Lettres Patentes, le 12. M ai 17 7 9 ,
qui ordonnent la même chofe, & font adreiTées
à la Cour pour y être cnrégiftrées.
\
�Barthomeuf ne dit rien de touàcela àTalciza*,;
dont les Habitants jouiiïoient toujours des fécon
dés herbes. Arrêt de la C our du
Juillet 1773 ,
q u i, fur la requête de Barthomeuf, ordonne une
enquête de commodo & incommodo. L e 18 cette
enquête fe fait chez la dame de Montlouby par
le Lieutenant Général de Saint-Flour, qui couche
chez Barthomeuf ; dans cette enquête on n’entendque des parents & des amis de la dame de M ont
louby , que l ’on a eu la précaution de ne pas
mettre en caufe , que des. gens étrangers, que des
débiteurs de Barthomeuf. A rrêt du 31 Juillet,
q u i, fur requête, enregiftre les Lettres Patentes.
Com m e l’on v o it, la Procédure a été prompte :
en huit jours de temps tout eft confommé. Le but
étoit de dérober aux Habitants la connoiiTance de
la matiere que l’on traitoit; aufil lorfqu’ils virent
le Juge de Sain t-Flour a Taleizat, fut-on obligé
de répandre le bruit qu’il venoit informer contre
le C uré du lieu.
Barthom euf, muni de fon A r r ê t, voulut le
mettre a exécution ; il faifit les beftiaux de trois
Particuliers , un d’eux fe laiila condamner par
défaut, les deux autres confentirent condamna
tion ,
Barthomeuf, leur rendant leurs beitiaux ,
les tint quittes.
Mais le 0.4. Aouc tout le village, tant ceux qui
paroiiîènt aii délibératoire de 176^ , que ceux
qui n’y font pas, ignorants 6c les Lettres Paten
tes 6c les Arrêts de la C our , abattirent les mu
�6
railles que Barthomeuf 6c Carriere avoient fait
élever autour de leurs prés ; procès verbal en
fut d reiîé, Arrêt intervint le 30 , qui , par
provifion , ordonna l’exécution des Lettres Paten
tes , & permit de faifir les beitiaux qui fe trouveroient dans les prés.
■A lo r s , (■& voici le premier a£te public que
Barthomeuf ait fait ) alors il fit afficher & publier
à la porte de l’Eglife cet A rrê t, q u i remplit de
refpeft 6c d’étonnement tous les Habitants.
Ils efpérerent enfin d’avoir juftice , ceiTerent les
voies de fait dont ils étoient en droit d’ufer , 6c
s’ ailèmblerent pour prendre la voie de l^oppofxtion.
Quelques-uns n’oferent réfifter à Barthomeuf,
&c ne voulurent rien accorder ni contefter* à cet
homme la ; mais trente-un autres prirent leur parti,
£>C délibérèrent de défavouer tout ce qui avoit été
f a it , démandé &: par lui obtenu pour l’autre par
tie du village.
C om m e le PrédéceiTeur de M . l’intendant
avoit homologué le délibératoire de 1 7 6 ^ , celui
de 1773 , qui étoit abfolument contradi&oire , ne
le put être ; mais loin que cet incident rebutât les
O ppofants, ils réfolurent de plaider chacun en
leur n om , puifqu’ils ne pouvoient pas le faire en
nom collectif.
Q u ’a fait Barthomeuf? il a taché d’attirer dans
ion parti plufieurs des oppofants. Il les a fait boi
re , m anger, leur a fourni du tabac 6c prêté de
�■V7
«■
7
l’argent ; huit des oppofants ont défavoué tout cô
que l’on avoit fait pour eux. M ais Barthômeuf, à
qui ils ioutiendront, quand il vou d ra, qu’ils ont
déiavoué tout ce qui s’étoit fait, fans lavoir ni
pourquoi ni comm ent, Barthômeuf oleum perdidit.
Nous rapportons aujourd’hui le défaveu de ces
prétendus déiaveux , un a&e par lequel 2,4. H a
bitants renouvellent leur premiere oppofitio.11, ce
font eux tous qui plaident en préfence de 14 au-*
très qui ne veulent prendre aucun p arti, crainte
de fuccomber ; Barthômeuf n’a donc pas feule
ment quatre mutins a réduire en dépouillant le
village de T aleizat, c’efl: donc plus de la moitié
du village qui s’oppofe a Tes injuftices, 6c voici
fur quoi elle fonde ion oppofition.
M
1
O Y
E N -S .
Les Lettres Patentes iont obreptices êc iiibreptices ; la procédure faite en conséquence, 6c les'
Arrêts intervenus fur icelle font nuls.
. -n rr
P ' R E M
I E R E - P
A R T
i
I E.
7
O b r e p t i o n .
L ’obreptiôn confifte à fuppofer un f a it , pour obtenir quelque ‘grâce qiie l?on neût pas obtenue,
fi ce fait n’avoit été fuppofé.
Pour obtenir la fuppreifion des fécondés her- J obr^ o^ '
�8
bes , Barthomeuf a été obligé de iuppofer dans le
délibératoire que les 27 Habitants y dénommés
faiioient la communauté entiere de T aleizat, il a
été obligé de l’expofer. ainfi dans fa requête au
R o i , qui, n’eut accorde ni A r r ê t, ni Lettres Pa
tentes , fi l’expofé n’avoit été tel.
L e délibératoire porte : Tous ( les dénom
més ci—deiTüs ,) faifant la communauté d'Habitants
dudit lieu de T aleizat, lefquels de leur bon gré ,
L ’À rrêt du Confeil du R oi porte : V u la requete préfentée au R o i ? en fo n Ç o n fe il, par les
Habitants & Laboureurs xde la paroijje de T alei^at.
!
r
• •
11 fuit bien de ces termes que l’on a expofé au
R o i que tous les Habitants de Taleizat demandoient la fuppreifion des fécondés herbes : que
le R oi n’a prononcé' la. iiippreiïion des fécondés
herbes, que parce que tous les Habitants la de
mandaient ; delà deux objets à prouver : l’un ,
qu’il s’en faut plus de la moitié que tous les H a
bitants aient demandé cette fuppreifion : l’autre ,
q u e , pour que cette fuppreifion ait lieu , il faut
que tous les Habitants , ufque cid unum , l’ayent
demandée.
. „
§. I.
L es z y ’ uîénqpinif s au (h’libératoire de ¿765 ne
J ç n t-p o in t la .communauté.
.
;
,
¡,
Il y a 27
perfonnes de nommées dans le
délibératoirc
�délibératoire de 17 65 , qui fait la bafe de la de
mande de Barthomeuf. N ous rapportons le rôle
des Tailles de 1765 , cette piece eft irrécufable ,
ôc nous y trouvons qu’il y a 94. cotes ; de ces
94. cotes il en faut ôter 33 , qui , quoique de
laparoiiîè de T aleizat, ne font pas du village ;
ainfi relient 6 1 fe u x , 61 chefs de famille à T a
leizat. Si donc il ne fe trouve que 27 vocaux dans
le délibératoire de 176$ , il s’enfuit que la moitié
de la paroiiTe n’a pas été appellée
il s’enfuit in
vinciblement que l’on a fait un faux expofé au
R o i , lorfque l’on lui a dit que ces 1 7 vocaux
faifoient tous la communauté cCHabitants de Ta~
lei^at. Il y a obreption, la preuve en eft on ne
peut pas plus claire.
En effet fi on n’eut pas expofé au R o i que ces
27 vocaux faifoient le village entier de T aleizat,
il on lui eut expofé au contraire q u e, pendant qu’il
y avoit 27 demandeurs , il y avoit 34. perfonnes
qui n’avoient point été confultées, ou qui refufoient
de confentir a la ilippreftion des fécondés herbes,
le R oi n’eût accordé ni Arrêt ni Lettres Patentes,
voici pourquoi.
§.
I I.
I I faut que tous les Habitants, ufque ad unum ?
confentent à la JuppreJJion desfécondés herbes. Taleizat n’a point de comm unaux, les fécondés
B
�^
IO
herbes lui en tiennent lieu. L ’on doit Juger des fé
condes herbes comme des com m unaux, & ceuxci étant inaliénables & imprefcfijriibles, celles-là
doivent jouir des mêmes privilèges. Ce n’eft qu’avec
l’autorité.du R oi que l’on peut porter atteinte aux
communaux, les Parties adveries ont eu recours
au R oi pour fupprimer les fécondés herbes. Elles
¡ont donc reconnu que les fécondés herbes devoient
;fe juger comme les communaux ; or in pari caufâ
idem judicîum.
Dix Habitants
Suivant la coutume <le-Nivernois, chap. i %art.
font communauté
t r
I
rr i l r o
.
pour délibérer fatJJ . dlX fOîlt peUlUC OU Cl etÎlbléc'' 'Qt tOUS les A u chofe de pure pofin
\
r ce •
n
lice & non per- teurs dilent que ce nombre lumt pour compofer
«natieme.
.une aifemblée faite pour choie1qui concerne l’adminiflration d’une communauté , charger Procu
reur , nommer Synd ic, parce que ces choies ne
font pas permanentes; tous dilent que les autres
Hjbitants ne peuveht s’en plaindre , parce que c’eiî
à eux à s’imputer la faute de ne s’y pas être trouvés,
il faut les deux Mais tous les Auteurs difent en même-temps que
n'autépôurobliger dix Habitants ne fuffifent- pas, lorfqu’il s’agit d’un
Ja communauté. çmprunt xonfidérable , de paffer tranfa&ion ; qu’il
faut alors au moins les deux tiers des Habitants, &c
c’eil là en particulier le fentiment de Baquet en
foti traité des droits de juilice, chap. 2 9 , n°. 22
& 23 ; de Tronçon fur l’article <51 de la coutume
dç ¡Paris ; de Legrand fur Part. 64 de la coutumede Trbyes , n°. 34. '
11faut latotalité E nfin, ajoutent les mêmes Auteurs avec un
,des Habitants ufi
r •n
vi /'
1
i
„¿«n«*«,pour nombre innnid autres, qu il-leroit trop long de ci-
�11
ter, s il s 'a g i t e d’aliéner partie des communaux,
bois, pâturages, ou même de traiter avec le Sei- pâturages, &c.
gn eu r, s’afiiijcttir à un droit de bannalité , fo u r, *
moulin , corvées & autres fervitudes : il' faut que
tous les Habitants foient afiemblés, fans exception, '
parce que l’exécution s’en fait ab omnibus ut a
jin g u lis, chacun y eft intérefle pour foi, ôt paye de r
fa perfonne ou de fon argent. Etant de principe
que routes les fois qu’il s’agit d ’une chofe’ qui ap
partient a tout un corps, non comme corps, mais
comme appartenante a chacun des membres en
particulier, qui perd quelque chofe, ou eft aiTujet- jti perfonnellement, il faut le confentement de tous.- ^
L a Poix de Fréminville n’elt pas le feul qui pehfe.
ainfi, avant lui Godcfroi fur la loi 1 9 , ff. ad nui- nicip. avoit dit : in his quee jiu nt à plunbns ut^ ab
omnibus, majoris-partis confenfus fujficit ; in his ~
autem quœ Jiunt à pluribus ut à jingulis , non fuffic it majons partis confenfus. Ferriere fur l’art. ?
7 1 de Paris ; DupleiTis, liv. 8 , chap. 2 des fiefs;
Brcdeau fur 71 de Paris, & une infinité d’autres
font la même diilin&ion.
*;
Si donc , pour l’aliénaiion des biens d’une com
munauté , il faut le confentement de tous les Ha- ;
hitants ujque ad unum , comment permettroit-on
cette aliénation , lorfque fur 6 1 Habitants il n’en
paroît que 2 7 , qui encore ont été furpris ou n’o
ient s’en expliquer , lorfqu’encore ces 27 ont é,é •
■dits, fauiîèment au R o i, faire le total de la com
munauté } tandis qu’ils n’en font pas la moitié ,
B 2
1
�IX
ioriqu’enfin il eil clair que le R o i , qui ( comme
on l’a plaidé ) fait to u t, Tachant qu’on ne peut
dépouiller, une communauté, fans que tous ies
membres n’y conientent, n’eut pas accordé iès Let
tres Patentes, s’il n’eut cru que les chofes étoient
dans l’état où on les lui expofoit. Il y a donc obreption dans les Lettres Patentes, & le total des
Habitants n’ayant jamais demandé la fuppreilion
des fécondés herbes , il eil: donc impoiîible de l’or»
donner par l’enrégiflrement de ces Lettres.
Contre ce premier moyen, on a bien ofé plaider
que le délibératoire de 176 5 étoit compofé de 36
perfonnes ; mais quand cela feroit ( ce qui n’eft
pas ) ce nombre ne ieroit pas fuiiifanr. O n a
bien dit que ce nombre faifoit com m unauté, que
les oppofanrs n’éroient qu’au nombre de quatre ;
c’eit à cela que Barthomeuf a réduit tous fes
moyens Mais', comme l’on v o it, cela ne répond
>as au rôle des taillesde 1765 , qui prouve que
’on n’a point appellé tout le village au délibé
ratoire portant aliénation des fécondés herbes ;
cela ne prouve pas que s’il y a 17 demandeurs en
enrégiftrement de lettres , il y a réellement 10
oppofants pour lefquels ce Précis cil: fait, & qu’il
y a i^. perfonnes , qui ne voulant fe mêler de
rien , relient dans l’ina6lion, & p ourrjn t après
le jugement former oppofition a l’ Arrêt. Quand
Barthom euf réuniroit aujourd’hui tout le village,
tout ce qu’il a fait n’en feroit pas moins nul.
H é, pourquoi! c’ eft que le délibératoire de 1765>
Ï
�cp'b
13
portant que les 2 7 vocaux font la communauté
entiere de T a le iz a t, il contient un faux , fur lequel
font intervenus un A rr ê t du C o n fe il d’Etat, des
Letcres Patentes & des A rrêts du C o n fe il Su
périeur ; que tout cela ayant pour bafe un faux
fu ppofé, tout cela eft nul de toute nullité.
L e délibératoire ds 176^ & la R equête pré- Ile. Moyen
fentée au R o i portent qu anciennement tous les D° BRE*T10*'*
prés des Habitants du village de Taleizat por
taient fo in & regain ; que depuis quelques années
il sétoit introduit parmi eux & dans leur village
un ujage fingulier , de ne faucher quune f o is
leurs prés.
C ’ eft encore la un faux expofé. Si en effet les
prés de Taleizat avoient jadis porté foin & re
gain , eft-il pofiible de croire que les propriétaires
de ces prés en euilènt abandonné la fécondé her
be au public? N ’eft-il pas plus naturel de croire,
en voyant Taleizat réduit a 4 a 5 feterées de
communaux , que dans l’origine les fécondés
herbes ont eu lieu, & que quelqu’ eiTai que l’on
ait tait en différents temps pour faire porter revivres
aux prés de T aleizat, on n’a jamais pu y parvenir.
L ’ état des choies eft d’abord une preuve pour les
Oppofants ; cette preuve eft foutenue par l’art. 4
du tit. 2,8 de la C o u t u m e , qui permet de mener
paître les beftiaux dans tous les prés 6c terres où
l’on n’ a pas accoutumé faire revivre.
A cet article de C o u tu m e , à des chofes exiitantes, au défaut de’ pâturaux, a une néceflité de
••
�fécondés herbes attachée au fol d eT a leiza t, qui
n’a point changé, on oppofe un ancien ufage;
& où eft donc la preuve de cet ancien ufage ?
Elle c ft, nous dit-on dernièrement à l’ A u
dience, confignée dans l’enquête de commodo &
incommodo ; mais outre que cette enquête eft
nulle pour avoir été faite en vertu d’A rrèt obrep*
tice,fans parties appellées ; outre qu’elle eft nulle,
parce que tous les témoins en font reprochablcs ,
pour être parents des véritables Parties adveriès ,
)our être leurs débiteurs & ne pas connoître le
o ca l, c ’eft qu’aucun des témoins ne dépofc de
cet ancien ufage. Ils difent bien qu’ils ne favent
pas quand les fécondés herbes ont commencé à
avoir lieu en faveur des Habitants , mais ils ne
difent pas qu’ il y eût auparavant un ufage con
traire : ils ne fixent point les époques de la ceflàtion de l ’un & du commencement de l’autre. Il
n’y a donc pas de preuve, comme le prétendBarthom euf, de cet ancien prétendu ufage.
O n plaida enfuite que ce fait étoit indifférent.
N ’étoit-ce pas plaider qu’il étoit indifférent de
faire un expofé v r a i, eu un expofé faux au R o i,
de lui furprendre .des Lettres Patentes, quelque
moyen que l ’on employât pour les obtenir, pourvu
que l’on les obtint?
O n en vint jufqu’h dire que peu im portoitque
la Coutume fût contraire à la prétention de Barthom euf ; mais eft*cc là répondre à un moyen
d ’obreption "? N ’eft-cc pas là pouiïer l’abfurdité
j u f q u a l'on comble?
Î
�s> *
M
En effet, Barthomeut dit dans fa requête au
R oi que l’ancien ufage privoit les Habitants des
fécondés herbes ; on dit a Barthomeuf qu’il en
a im pofé, que jamais les prés n’ont fait revivre :
on lui ajoute que la coutume autorife en ce cas
les Habitants a prendre les fécondés herbes, qu’il
n’eft pas préiumable que l’ufage des fécondés her
bes fe foit introduit fans raiion en faveur des H a
bitants , qu’il faut que ce droit ait exifté de tous
les temps, que l’article de la coutume n’a pas été
mis fins iujet, qu’il a été fait pour les Paroiiîès
mal fituées 6c fans communaux, 6c il nous répond:
cela eft égal, cela eft indifférent. C ’eft a la C o u r
à juger du mérite de l’obje&ion 6c du mérite de
la réponfe; mais toujours eft-il vrai qu’il s’en faut
bien que la réponfe vaille l’obje&ion.
Barthomeuf a expofé dans fon délibératoire de nie. Moyen
D O B R E P T IO N .
i 7 6j 6c fa requête au R oi que les regains 6c les
revivres étoient d ’ufage dans toute la Pro\ince
d’Auvergne 6c dans tous les autres villages de
Taleizar. .
C ’elV encore là un faux expofé. Toute la Pro-*
vince d’Auvergne n’a pas pour maxime de faire
porter revivre a fes prés. Tous les villages ne {ont
pas privés des fécondés herbes : pour s’en convain
cre , il n’y a qu’à fe rappeller l’article 4 du tit.
de la coutume d’ Auvergne, & l’on y voit que*
naturellement les prés portent revivre ; que ceux
qui ne portent pas revivre font exceptés de la loi ' .
générale, à caufe de la poiîeifion ancienne 6c im.
�16
mémoriaîe où ils font d’être clos & bouchés ; mais
cette poiîèiîion ancienne eft un privilege pour les
propriétaires ôc une privation pour ceux qui ont
droit aux fécondés herbes. D ’où il fuit que Bàrthom euf a non feulement vifiblement trompé le
Prince en lui expofant que les fécondés herbes
n’étoient pas d’ufage dans toute la Province d 'A u
vergne y mais encore qu’il a pouffé les choies au
point qu’il a engagé les Habitants de Taleizat a
fe priver d’un droit qu’ils avoient, pour lui donner
un privilege qu’il n’avoit pas.
a°. C e t ufage de tous les villages circonvoifins
n’eft pas vrai ( b ) ; mais quand il le feroit, que
s’enfulvroit-il ? les villages voifins ne font pas fitués
comme T aleizat, ils ont des communaux , ce ne
font pas 4 a ■
>particuliers qui y pofledent tous le>
prés. Enfin fi dans les villages voifins tous les prés
ont été clos d’ancienneté par les propriétaires au
préjudice des Habitants, c’eft la faute de ces H a
bitants de s’êtrelaifTés priver d’un droit qu’ils avoient,
&: laifîe acquérir fur eux un privilege. L a faute de
ces Habitants ne doit pas faire la condamnation
des Habitants de Taleizat, & quoiqu’en dife Barthomeuf, le droit de la coutume d’Auvergne eft
toujours d’abandonner les fécondés herbes des prés
aux Habitants, puifque fi la coutume ôte ces fè(b) A lla n c h e s & M u râ t , q u o iq u ’a y a n t b eaucoup d e c o m
m u n au x , jouifi'ent du d r o i t d e fécondes herbes : à S. i ’io u r le
p iê.ne d ro it a lieu.
condes
�condes herbes, ce n’ eft que dans le cas où les près
aurcient fait revivre d’ancienneté, que par conféquent c’elf la une exception a lo i, &:!que dans la
faine raifon, pourfaire exception à une; loi ' il faut
qu’il en exille une générale, qui fait le droit com
mun 6c univerfel du pays. C ’eft auffi dans ce fens,
que Barthomeuf a toujours parfaitement bien en
tendu que nous^ propofons notre troifiéme: moyen
d’obrepticn, fondé fur ce que l ’on a trompé le j l o i
fur le droit & l’ufage de la coutume d’Auvergne.
Barthomeuf a expofé au R oi que pendant l’été d*obrepÎ ioh.K
les Habitants de Taleizat ne pouvôieht pas confommer leurs pâturages, n’ayant pas la ‘liberte de ‘
tenir plus de beiliaux qu’ils n’en pouvoient hiver
ner.
• C e f t encore la un faux expofé; Les Habitants r -•
de Taleizat n’ont point dé communaux, ce qu’ils
en ont, ne peut nourrir lé'gros bétail’ 6c ne iùfft-'
roit pas a cent brebis ; tout eft rocher , tout eft
fec , tout cil aride , tout eft ftérile a Taleizat- :
n’eft-ce pas la un fait notoire ¿^comment Bartho
meuf peut-il entreprendre de perfuader le con
traire ?
Que répond-t-il a ce fait que les Oppofants ar
ticulent ? il n’ofe pas le nier ouvertement 6c en
public, du moins ne l’a-t-il pas fait a l’Audience :
il répond que quand les Habitants de Taleizat
n’auroient pas de communaux , il n’y auroit pas
faux expofé : mais quelle abfurdité ! Si Taleizat
n’a pas de communaux, il n’a pas d’herbes * s’il
c
�i8
n’a pas d’herbes’ , comment eft-il vrai qu’il s’en
perd par la trop grande abondance ? comment eftil vrai que les fécondés herbes lui font inutiles ?
comment peut-il lui être avantageux d’en être
privé ? cela étant iènfible, 6c le faux expoie étant
dém ontre, pafïons à la fùbreption.
S E C O N D E
P A R T I E .
S U B R E P T I O N .
.1 . '
1
L a fùbreption confifte à taire des choies q u i,
fi elles eufîènt été feues , eufïènt empêché le Sou
verain d’accorder la grâce que l’on lui demandoit.
: Barthomeuf a tu au R o i, que fi le droit de fé
condés herbes avoit lieu à Taleizat, ce village tenoit ce droit de la Coutume.
Il eft vrai que Barthomeuf a répondu, a l’au
dience , que le R oi favoit to u t, qu’il favoit par
conféquent que l’ancien ufage de Taleizat étoit
contraire à l’ufage aduel.
Mais fi le R oi fait to u t, que deviendra donc
la fùbreption ? il faut donc la rayer du nombre
des moyens que le R oi veut que 1on emploie
contre les grâces qu’il fait , 6c qu’il n’accorde
jamais que fous la condition que. toutes choies lui
ont été expofées dans leur véritable point de vue ?
fi le Roi fait tour, a quoi bon l’adreile qu’il fait
aux Cours de fes Lettres , n’eft-ce pas pour les
�19
^
vérifier ? à quoi iert cette information , de coirtmodo &’ incommodo , n’eft-ce pas pour découvrir
la vérité toujours iuipeétée en pareil cas ? le R oi
ne fait donc pas to u t, puifqu’il veut que l’on vé
rifie les faits ? en difant que le R oi fait tout ,
Barthomeuf convient qu’il ne fait rien lui-m êm e,
qu’il ne voit rien qui puiilè répondre à notre ob
jection.
Barthomeuf a tu au R o i que , fi les villages
voifins n’avoient pas droit de fécondés herbes ,
c’eft qu’ils avoient des communaux , c’eft qu’il y
avoit titre ou poiïeiïion contr’eux de la part des
propriétaires.
Et qu’a-t-il répondu: a cette obje&ion ? la même
chofe que ci-deilus : Le R o i Jait to u t, il favoit
cela, il n’e'toit pas befoin de le lui dire. 'JSJlême
réponfe par conféquent.1 '
Barthomeuf a tu ;au R o i'q u e 'le s‘''pires de T a - n ie . M oyen d*
•1 •
■>
■
^
T i\ " ■ /
„
SUBREPTION.
leizat n appartenoient qu a 4011/$ iroprietaires.,
que le relie n’avoit aucun communal , aucun
fo n d s, ou fi peu. que cela nevaloit nas.la peii>e
d’ en parler.
' ; - •_; ■-1 /
™
f
E t Barthom eiif à plaidé1qu’il n ^ voirpas dit
cela au R o i , parce que cé fait étoit faux: “
Les Oppofants perfiftent néanmoins1' dans ce
qu’ils ont dit , & foutiennent; que la' clame de
M ontlotiby B arth om eu f, Càm erpfy Fontanier
& les Héritiers Privât enleVent à; eux *feul’s .tous
les foirts de Taleizat , qu’il n’en appartient pas 100
chars au refte des Habitants.
C *
»
y-«
-I
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-l.M
«*
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�20
T R O I S I E M E
P A R T I E .
t
. N u llité de toute la procédurefaite parBarthomeuf.
!•
■-rt h■
Les Lettres Patences font viciées d’obreption &
fubreption. Barthom euf s’eft préfenté a la Cour
pour les faire entériner. Il a parlé au nom de tout
je village de T aleizat, tandis qu’il n’étoit charge
que par 27 Habitants. Il a induit la C o u r en er
reu r, comme il y avoit induit le R oi. Le premier
A rrê t, rendu par la C o u r eft donc. ,nul comme
obreptice & fubrepticc.
1
C et A rrê t eft d’autanr plus n u lp que s’il eut été
expofé au Confeil Supérieur qu’il n’y avoit que 27
Habitants qui demandoient la fuppreiîion des fé
condes herbes , que fi on eut expofé que tous n’avoient pas donné leur avis, .que fi la Cour eut
iii qu’il y eût eu,un feul Oppofànt, au lieu d ’or
donner fu rie champ une information de commoi/o & ijîçp.mmodQjr elle auroit prdonné,, fuivanc
Tordre de là procédure, que les* 0 [Vpofants ftiilènc
appelles.,pgur. favoir,; leur .radions;?rrleur auroit
permis, cj’articuler,, des ..faits., contraires au de libé
ratoire d e . . a u r o i t 'f a i t , f a i 'r e . l ! i n f o r m a t i o n
^ntradiâD irem cnt.ay.ec.eux. y
-j ,
sJi.> p ' . ' y ^ '•v'1' r Î- \ 1' :
J^
'1 Vd ^
; L înrorm^tiopfh ite a ^ rçquet^ d e ,M ,.lc P r o
cureur Général' eft eiicore,,n.ulle ^..patjce’ qucj M .
le Procureur Général e^bien le jprortîâeur ne des
communautés ; mais- lçs Oppofants aux délibéra-
�toircs doivent être en caufe aufïi-bien cjne lu i,
pour détendre leurs droits, perionne ne les en
tendant mieux que le perionnellement intérefle.
Il a été ordonné que l’information feroit faite à la
requête de M . le Procureur G én éral, parce que
tout Taleizat étant dit confentir & requérir l’enrégiftrement, il n’y avoit que lui que l’on put met
tre en caufe.
Si l’enquête eft nulle , l’A rrêt auquel les vingt
Habitants ont formé oppofition étant toujours
vicié d’obreption 6c fubreption, eft également nul,
rien de tout ce qui s’eft fait ne peut fubfifter.
V oyon s quelles font les raiions avec lefquelles
Barthom euf a prétendu fejuftifier de ces nullités
radicales.
Il pôle pour principe ce qui eft en queftion.
L ’ A rrê t, dit-il, le premier A rrêt de la C o u r ne
porte pas que je vous mettrai en caule. N ous la
vons parfaitement cela. Ce n’étoit pas là le but de
Barthom euf, il s’en faut bien. Mais pourquoi cet
A rrêt ne le porte-t-il pas? c’eft que vous avez
furpris la C o u r, en lui difant que tout le village
de Taleizat étoit d’accord-, que tout le village
.de .Taleizat demandoit U iiippreifion des fécondés
herbes : ce fait étoit faux ; obreption par conléquent.
^ L ’information, dit Barthom euf, n’eft pas nulle,
quoique faite"chei, la dame de M on tlon by, parce
.que, qu oiq u ’elle ait beaucoup de prés à T a leiza t,
Çc que Î’on ait entendu quelques-uns de les parents,
gens qualifiés , cette dame n ’eft point partie en
la caule.
�(ûX
11
M ais v o u s, fieur Barthom euf, vous êtes bien
partie au procès, puifque, fans vous, il n’exiileroit
pas, puifque iî vous n’exiiliez p as, il n’auroit ja
mais exiilé. H é bien! les Juges de S. Flour , qui
ont procédé à cette information , ont couché, bu
& mangé che^ vous & avec vous ; eft-ce là une
nullité?
Dans cette information que vous n’ofez fignifier,
toute avantageufe qu’elle vous eft, pour éviter les
reproches qui pleuvroient fur les témoins qui la
com pofent, l’articulation du contraire des faits qui
y font dépofés, &: bientôt la preuve que ce n’eft
qu’un tiifu de menfonges , dans cette information ,
n’avez - vous pas fait entendre les parents de la
dame de M ontlouby, vos débiteurs, des gens qui
dépendent de vous, des gens qui n’ont peut-être
jamais vu les ccmmunaux de Taleizat, qui n ’en
ont jamais examiné la nature du fol ? ne font-ce
pas là des nullités, qu’avez-vous à dire à cela ?
Réponfes à dautres objections faites par B a ithomeuf
l°. Il oppoÎè une fin de non-recevoir en la for
me , réfultant du filence des Oppofants, jufqu’à la
lignification de l’A rrêt fur requête, qui ordonne
l’enrégiilxcnicnc des lettres.
Pitoyable fin de non-recevoir, vous ères l’ou
vrage d’un défefpéré! rappelions les faits, Bartho*
m euf n’appelle que 1 7 Habitants, lui compris au
�lo2f
délibératoire de 1 7 6 ^ ; il met en poche ce déli
bératoire , ce n’eft que cinq ans après, ce n’eft
qu’en 1 7 7 0 qu’il le préfente au R o i , ôc obtient
un A rrêt du Confeil.
Il met cet A rrêt du Confeil avec le délibéra
toire; ce n’ell: qu’en 177 3 qu’il leur fait voir le
jour
obtient des Lettres Patentes. Pendant ces
huit années perionne ne trouble les Habitants dans
leur pofTeiTion des fécondés herbes, ils ignoraient
les fourdes menées de Barthomeuf, qui n’en parloit
pas même à ces cofyndics, tant il avoit peur de
manquer ion coup.
Il vient a la C o u r, y furprend un A rrêt qui
ordonne une information. Il fait venir des témoins
éloignés qu i, fous prétexte de vifite, vont chez la
dame de Montlouby figner leurs dépofitioris. Le
nombre. des vijîtants excite la curiofité des Habi
tants, ils veulent favoir ce que font les Juges de
Saint-Flour chez la dame de M ontlouby , ils veulent
favoir le fujet des vifites que l’on lui rend ; Bar
thomeuf dit a chacun en particulier & d ’un air
m yftérieux, que l’on informe contre le Curé de
Taleizat , a qui l’on va faire le procès. A u lieu
d’appaiièr les mouvements de curiofité , Bartho
m euf, avec ce menfonge , les excite davantage ,
& r on découvre la vérité.
Auifi-tôt les Habitants prennent le parti de
s’oppoièr à la fuppreflion des fécondés herbes ; ils
vont garder leurs beftiaux : l’Arrèt d’enrégiitre-
¿üi
�M
Ku,
a4
ment fur requête eft du 31 Juillet, le 8 A oût il
eft publié , & le 10 trente-deux Habitants s’a f
femblent pour s’y oppofer.
/
Avant cette publication, cette affiche de l ’A r
rêt , peut-on dire que ces Habitants euilent connoiiîàncé des' démarches de Barthomeuf, puifqu’ils
ne connoiiîoient pas le délibératoire de 1765 ; que
même , quand ils l’auroient connu, il n’étoit pas
préfumable que Barthomeuf , qui l’avoit depuis
8 ans, en eût fait aucun ufage , puifqu’il n’avoic
fait faire aucune ailèmbl e , ni demandé aucun
fonds/A infi point de fin de non-recevoir dans la
forme , puiique la procédure eft non feulement
obreptice , mais encore frauduleufe , tortueuie ,
& 011 ne peut pas plus dangereufe ; car enfin quel
étoit le but de Barthom euf, en cachant ainfi fes
démarches? il favoit parfaitement que 1 7 Habitants
ne pouvoient dépouiller le village ; en habile hom
m e, repréfentant ces 27 Habitants, comme faifànt
la communauté entière, ion projet, fut de faire
clandeftinement toute fa procédure , afin de par
venir a un Arrêt d’enrégiftrement , au nom de
toute la communauté, de fupprimer enfuite le délibératoire , de ne montrer que les pièces qui
parlent purement 6c fimplement de toute la com
munauté, 6c de dire enfuite : l’Arrêt d’enrégiftre
ment fuppofe le délibératoirc, fi cet A rrêt porte
que tout le village a demandé la fuppreifion des
fécondés herbes , perfonne ne peut aujourd’hui
s’y
�s'y oppofer. C ’étoit là le but de Barthomeuf, &
l’on défie d’expliquer autrement fon filence de 8
années fur l’objet dont il s’agit.
a°. Barthomeuf oppofe une fin de non-recevoir , particulière a Antoine. Chaftinel ; il la fait
réfulter de ce qu’apr'es que l’Arrêt d’enrégiftrement a été rendu , ce Particulier oppoiant continua
de mener fes beltiaux , qui furent pris aux fécon
dés herbes , & fut condamné par une Sentence
rendue par le Juge des lieux.
M ais cette fin de non-recevoir eft im aginaire,
parce que Chaftinel n’a été condamné que par
défaut , qu’il a appellé de la Sentence , dont il
pourfuivra l’infirmation quand bon lui femblera.
30. Salus populi fuprema lex ejlo , s’écrie Bar- thom euf ! &: dans quelle bouche fe trouve cette
loi fainte , qui doit faire le premier m otif du ju
gement que le Confeil Supérieur va rendre ici ?
Barthomeuf dit qu’il fe fait un commerce confidérable de Mules a Taleizat ; que fi on n’ôte point
les fécondés herbes aux Habitants c’eft ruiner ce
Com m erce , qui foutient le peuple.
Mais Barthomeuf en im poiè, on ne peut pas
plus lourdement : jamais il n’y a eu de commerce
de Mules a Taleizat. Il eft vrai qu’il a acheté 4.
Mules au mois de M ars dernier, que Fontanier
&: Juilhe, fes adhérents, "en ont acheté chacun
deux , mais on ne voit de Mules que chez’eux. E it-ce
donc là un fonds de commerce? eft-ce là ce corn*
D
�16
mercc tant van te, qui devroit procurer la iubfiftance des gens de Thaleizat ? B arthom euf,
Fontanier & Garriere font-ils le peuple ? pour s’é
crier S alu s popuh ?
Suprema lex ejlo , hé bien, qu’il le ioit donc ;
examinons les inconvénients qu’entraînera la fuppreiïlon des fécondés herbes.
Barthomeuf n’uie plus des raifons employées
dans le délibératoire , il en a fenti la vanité ; peut»
être y reviendra-t-il clandeftinement, fuivons ce
délibératoire pied à pied.
O n y dit que les fécondés herbes étant fupprimées , l’on confommera les pailles par le moyen
de la mêlée qui s’en fera avec le regain , pour
nourrir une quantité fufHiante de belûaux , pour
produire & fournir du fumier qui engraiflera les
terres labourables &C produira l’abondance.
Mais B arth om eu f& fes adhérents raifonnent là,
on ne peut pas plus mal. Ils ne confultent sûre
ment que leurs intérêts, fans prendre garde que
tout le monde n ’eft pas des Barthomeuf.
L ’abondance vient bien des terres labourables
& labourées ; ces terres produifent bien , parce
qu’elles font fumées ; on fait bien du fumier avec
du regain ôc de la paille ; mais pour en venir là,
que Barthomeuf & fes adhérents donnent donc
du regain &c de la paille à 57 maifons qui n?ont
rien en prôpriété, qui n’ont point de communaux,
qui n’ont que les fécondés herbes pour toute reír
?
�4o7
,
X?
.
iou rce, qui, déjà prefque hors d’étàt d’hiverner les
beitiaux qui font leur ioutien & leur v ie , ne pour
ront jamais les eftiver, puifqu’elles n’ont point de
regain , & qu’elles ne pourront acheter de la
paille.
Tant que Barthom euf, qui a du regain <Sc de
la paille autant 6c plus qu’il n’en peut deiirer, dira
qu’il faut l’un & l’autre pour faire du fum ier; tant
qu’il dira de labourer la terre , & que loin
d’en faciliter le labour, il ôtera la nourriture
des befliaux , il eft confiant qu’il conflituera l’Habitant dans l’inipoifibilité d’exécuter ce projet,
d’autant mieux que, convenant que cet Habitant
eft déjà furchargé par les. im p ôts, il ne pourra
acheter ni regain, ni p aille, ni faire du fumier,
ni labourer, ni procurer l’abondance.
Renfermé dans la fphere, Barthom euf raifonne
comme un homme qui a tout ce qu’il lui faut
pour exécuter ce p rojet, qui eft bienfait pour des
propriétaires, mais non pour des malheureux qui
deviendraient les efclaves forcés de ceux à qui les
terres appartiennent. Q ue l’on applique a préfent
cette fameufe loi que Barthomeut nous cite avec
tant d’emphafe. S al u s populi Jùprema lex ejlo ?
Le délibératoire ajoute que les Habitants fe
font apperçus que l’ufage oii ils font d’abandon
ner les p rés, après qu’ils lont fauchés , leur eft
à charge, qu’il tend à leur ruine 6c deflru& ion,
en ce que , pendant l’été , ils ne peuvent confom-
ot
�mer leurs pâturages, n’ayant pas la liberté d’efc
tiver plus de beftiaux qu’ils n ’en peuvent hiverner.
M ais d’abord où lont ces pâturages ? Si Bar
thom euf vouloit les indiquer, s’il pou voit en don
ner d’à peu-pres fuififants , on lui abandonncroic
ici le champ de bataille.
E nfuite, fi l’on fait bien que l’on ne peut eftiver plus que l’on ne peut hiverner, comment peut-il
s’enîuivre que les fécondés herbes ruineront le
village de Taleizat? Les prés appartiennent touc
au plus à cinq particuliers, & comme expedit
imum hominem mori pro populo, on ne voit pas
que Barthom euf entre bien dans l’efprit de la loi
qu’il cite : Salus populi fuprema lex ejio.
Enfin , fi ce droit eft fi à charge, pourquoi
avoir recours à des remedes violents, à des déli
bératoires , des Arrêts du Confeil d ’E ta t, des
Lettres Patentes, des Arrêts de la C o u r, des in
formations ? Si ce droit eft à charge aux Habi
tants de T aleizat, il n’y a qu’à s’en rapporter à
eux, le remede eft tout fimplc , ils n’ont qu’à
n’en plus ufer. La Coutum e le leur confervera
pendant qu’ils uferont du projet œconomique ,
6c un homme qui veut faire le bien des gen s,
leur propofera plutôt de fufpendre l’exercice de
leur droit que d’y renoncer. En effet , fi le pro
jet ne réuilit pas , les Habitants de Taleizat ic
trouveront fans regain, fans paille & fans fécondés
herbes; Barthomeuf & les adhérents, les {culs qui
�2 9
en puiiTent fournir, puilqu’ils ont tous les prés,
y mettront tel prix que bon leur femblera , ÔC
au lieu d’avoir fait le bien du village , on en aura
occafionné la perte , & que deviendra la loi Salus populi fuprema lex efto ?
Le delibératoire continue & porte que fi l’on
rend les prés détenfables, les Habitants auront
l’avantage d’avoir en hiver plus de beftiaux, que
leurs fourages augmenteront, 6i qu’en été ils au
ront lieu d’avoir les beftiaux néceiïaires pour confommer les petites herbes vaines qui fans cela iè
perdent, que l’on payera facilement les impôts
dont on eft furchargé, ôc que l’on ceiTera d’être
vagabond.
Là les mauvaifes raifons manquent, & làauiïi
finiiïènt le délibératoire & la Requête préfentée
au Roi.
L ’attentif Barthom euf a tout compté. Il fem
óle qu’il fait jufqu’au nombre des brins d’herbes
qui peuvent par-ci, par-là, border les chemins de
Taleizat ; mais à quoi fert tout fon calcul, lorfque
1 im posibilité de Ion iyftême eft démontrée par
ion iyftême même.
D ’aprcs lui on eft furchargé d’impôts, on ne
peut les payer, on eft obligé de s’expatrier, 6c
Ion fait tout cela dans le temps où l’on jouit des
fécondes herbes; que fera-ce d o n c , lorfque l’on
ne jouira plus de ce d ro it} Couper un bras à un
homme , eft-ce lui donner le moyen d’être plus
�w>
3°
adroit ? Si avec un fecours, tel que les fécondés
herbes, on peut à peine fuffire à to u t, ne fera-ton pas absolument hors d’état de faire la même
ch o ie, fi l’on diminue les forces, ii l’on ôte ce iecou rs ?
Barthom euf prétend qu’en hiver on aura plus
de beftiaux, mais il n’offre pas d’en payer l’acquiiitio n , & de nourrir ces mêmes beftiaux, qui,
faute des fécondés herbes pendant l’été , auront
ruiné leur maître qui pendant l’hiver ne pourra
fubvenir à leur fubiiftance.
• Il prétend qu’en été ces beftiaux confommeront
les petites herbes vaines qui fe perdent, ôc il ne
fait pas attention qu’il reconnoît la qu’il n’y a pas
de communaux. Pourquoi en effet cite-t-il plutôt
ces petites herbes vaines que ces grands & gras
pâturages communs dont il a coutume de parler
& qui ne giflent que dans fon imagination ?
D ’après cela ne voit-on pas que fi jamais la loi
• Jalus popuh fuprema lex ejlo , a été faite pour être
appliquée a la cauie préfente , ça été pour foudroyer
Barthomeuf & non pour l’en voir abufer comme
il a ofé le foire.
Le refte des obje&ions ne tirant a aucune confequence, trouvant d’ailleurs fa réponfe dans tout
ce qui cil ci-deffus, il ne reile plus aux Oppofants
que de fe réfumer.
Obreption , fubreption dans les Lettres &c les
Arrêts rendus en conféquence ; injuilice , fauifeté ,
furprife, indignité , oppreiïion, vexation de la part
�pg?-------------
■
Hk
3 l1
de Barthomeuf contre les O ppofants, qui ne cefferont d’invoquer la loi fa lu s populi f uprema lex
ef t o , voila à quoi fe réduit la caufe.
Perfuadés qu’inftruite de leur m ifere, la C ou r
les traitera moins comme des mutins puniffables
que comme des pauvres défefpérés qui, manquants
prefque déjà de to u t, fe voient encore dépouillés
par Barthomeuf ; les oppofants demandent juftice
& s’affurent qu’ils l’obtiendront, malgré la brigue
& les démarches fouterraines de cet homme dan
gereux pour tout le village.
M o n f ieur C A I L L O T
A vocat Général.
D E
B E G O N ,
M e. G U Y O T D E STE. H É L É N E , Avocat.
, I m b e r t , Procureur.
A
De
C L E R M O N T - F E R R A N D ,
de P i e r r e V I A L L A N E S , Imprimeur des Domaines
du R o i , Rue S. G enès, près l’ancien Marché au Bled. 1774,
l'im p r im e r ie
W.
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Carriere. 1774]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Caillot de Bégon
Guyot de Sainte Hélène
Imbert
Subject
The topic of the resource
communaux
pacage
coutume d'Auvergne
droit de secondes herbes
enquête de commodo & incommodo
troubles publics
subornation de témoins
obreption
faux témoignages
communautés villageoises
consentement
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire pour vingt habitants du village de Taleizat, opposants à l'enregistrement des lettres patentes obtenues à l'effet de leur ôter le droit de secondes herbes dans le prés. Contre les sieurs Carriere et Barthomeuf, se disant syndics du village de Taleizat, réellement partie en la cause, et demandeurs en enregistrement desdites lettres patentes. Et vingt-trois autres habitants surpris, vagabonds, à qui la suppression du droit de secondes herbes eft indifférente ou qui, débiteurs de Carriere et Barthomeuf, nosent pas fe défendre, et font obligés d'en passer par leur avis.
Table Godemel : Secondes herbes. d’injustice et de violation de la règle salus populi suprema lex esto.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Pierre Viallanes (Clermont-Ferrand)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1774
1765-1774
1716-1774 : Règne de Louis XV
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
31 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G0603
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Talizat (15231)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
Relation
A related resource
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53012/BCU_Factums_G0603.jpg
communautés villageoises
communaux
consentement
coutume d'Auvergne
droit de secondes herbes
enquête de commodo & incommodo
faux témoignages
obreption
pacage
subornation de témoins
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