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O U V E R T U R E S
DE
CASSATION,
1*
POUR
F rançois
C H A LU S
et
. C l a u d in e
M A ZU EL
Prétendu homicide par fam ine.
A p r è s avoir langui long-tem s, la femme de Chalus
à perdu la vie : il fallait accuser la maladie et la n a
ture, et l’on a accusé le mari et la personne à qui il
avait confié le gouvernement de sa maison.
O n a inventé que des alimens avaient été refusés à
a malheureuse dont l’heure fatale venait de sonner
et la faim a été le couteau dont on a armé ses assassins.
Quelle a été la source de ces reproches si graves en
eux-mêmes , et si légèrement faits?
U n avide héritier n’avait pas ratifié la donation d'usu
fruit qui avait été faite à Chalus par s a f e m m e il a
voulu l’annuller.
-
Q uelques domestiques n 'av aien t pas pardonné à ClauA ,
�< o
dine M a z u e l, regardée par eux comme leur égale , l’au- torité qu’elle avait exercée sur eux; la jalousie a tenu
des propos, et les propos ont enfanté une accusation.
Des passions étaient en m ouvem ent; un texte avait
été fourni à leurs commentaires, lorsque , Clialus vou
lant assurer une récompense à Claudine M a z u e l, l ’inep
tie d’un notaire avait laissé ridiculement prendre à
l ’acte rénumératoire ,
mariage.
la
forme
d’un
contrat
de
On a expliqué la mort d’ une femme débile , à la
quelle on devait s’attendre , par un crime tellement
nouveau dans son atrocité , qu’ il avait échappé à la
prévoyance de la lo ij par un forfait répandu,pour ainsi
dire, sur on ne sait quel nombre ou de mois ou de jours ,
commis et renouvelle à tous les instans et se multipliant
parles heures et par les minutes.
Ce qu’avaient controuvé de petites passions, on a fini
par le répéter et par le croire : une prévention s’est
établie , qui a tenu lieu de conviction , qui a résisté à
toutes les preuves, d’autant plus inflexible qu’elle était
plus extraordinaire et plus contraire à toute vraisem
blance.
Enfin Chalus a été condamné à vingt ans de fers
et Claudine Mazuel â la m ort, résultat é t r a n g e d'une
accusation fantastique o ù , en supposant le crim e, ce
�(3 )
que la qualité d’époux y a jo u ta it, est oublié et la peine
est attenuée sur la tete la plus coupable.
Il faudra dérouler les feuilles de la procédure, pour
en manifester les vices j éplucher la déclaration des
jurés, pour en décéler l ’incertitude et l ’insuffisance}
•cçinparer le jugement à la lo i, pour en reconnaître
la déplorable inconsistance ; mais il importe de etter
d’abord sur l’accusation mêmejun’eoup-d’œil explorateur.
Telle est la nature de l ’aftaire, que la demande en
cassation ne peut être séparée des élémens qui en com
posent le fond , sans perdre beaucoup de son évidence
et de son energie.
Jeanne-Marie Authier femme Chai us , avait abusé
de la v i e , commis des excès et altéré son tempérainment.
Quand elle fit, le 3 ventôse an 6 , en faveur de son
m a r i, la disposition qui assurait à. ce dernier la jouis
sance de tous ses biens , déjà elle voyait le terme fatal
s’approcher pour elle.
Dès-lors elle sentait les atteintes de la maladie qui
devait la conduire au tombeau : bientôt à la perte des
forces du corps,s’ajouta celle des facultés intellectuelles,
et on la vit décheoir dans une effrayante progression.
On tint ce discours d’elle , à Martin-Gilbert Gomot
A 2
L e fo n d de
l'a ffa ir e .
�(4 )
l ’un des témoins dont les déclarations ont été écrites ,
que « c ’était une femme perdue, au physique comme
»-au m oral, et au moral comme au physique ».
Chalus appeîla en l ’an 8 , auprès de lu i, Claudine
Mazuel dont la famille n ’était pas étrangère à la sienne:
il la chargea, dans son m énage, des soins dont la maî
tresse de la maison n ’était plus capable. Les domestiques
s’etaient accoutumés à l’indépendance et au désordre
ils supportèrent impatiemment la supériorité de la nou
velle ven u e, et plus impatiemment la réforme.
Ils furent ses détracteurs quand elle régla la dépense
et mit fin au dégât ; e t , quand il fallut venir à les
congédier, ils devinrent ses ennemis déclarés.
Cependant l ’état de la malade allait empirant, avec ,
une affligeante rapidité.
»Son appétit dépravé repoussa les alimens auxquels
elle avait été a c c o u t u m é e . Elle ne prit que du pain ,
des racines, du la it , du fromage j elle mangea de la
terre et du plâtre j elle soutint opiniâtrément de
longues abstinences.
Son estomac cessa de faire ses fonctions. Les alimens
ne firent que passer dans un corps où tout ressort était
détendu , et p a r-to u t elle porta avec elle l ’ordure et
l ’infection.
Elle fut sujette à des défaillances dont les paroxisrnes
se rapprochèrent, et durant lesquelles sa bouche rendit
une sale écume.
�Plus rapidement encore elle perdit la mémoire et
1 in
telligence.
N e reconnaissant personne , elle allait disant piteuse
ment , j e n ’ a i rien , j e n ’ a i rien , à tous ceux qui se
présentaient à elle., et savait à peine proférer d’autres
mots.
Errant dans la cuisine, elle jettait des immondices
dans les vases où la nourriture de la maison était pré
parée.
U ne manie s’ empara d’elle, plus dangereuse pour ellemême et pour les autres 5 elle joua avec le feu^ empoi
gna ds-s tisons ardens, les porta sur ses habillemens et
dans ses poclies, et fit craindre l ’embràsement de la
maison.
'
Par respect pour son infortune, on supporta long-tems
le§ inconvéniens de sa situation et le spectacle rebutant
de sa maladie.
Il fallut bien se résoudre à la traiter d’ une autre ma
nière : on choisit une chambre vaste, bien placée , où
l ’air se renouvellait facilement , et on l’y déposa.
E lle cessa d’être libre et non d’être soignée. U ne jeune
servante fut chargée de ppurvoir à sa nourriture , et C lau
dine M azuel, de veiller à ce qu’elle fût tenue aussi pro
prement qu’il était possible.
Insen sible à
cette espèce de captivité , parce qu’elle
n’avait plus la faculté ni de sentir ni de comparer , elle
11e fit entendre aucune p l a i n t e .
/
�(6 )
On lui porta du p a in , du vin ? du lait et du fromage :
elle mangea comme auparavant, ne digéra pas mieux f
ne fut pas moins prompte à répandre l ’ordure sur elle et
autour d’elle»
Si l’on alluma du feu pour la réchauffer quand il fai
sait froid, on fut obligé de ne pas la quitter; car en se
brûlant elle-m êm e, elle aurait incendié la maison.
Elle était entrée dans cette chambre avec une lueur de
vie qui s’éteignit un mois après.
On peut dire q u e , long-tems imprudente et puis victiine,inalade de l’esprit e( du corps,privée d ’intelligence
' et de force, nulle pour elle*mêine et pénible pour les autres^et perdant , chaque jour , un lambeau de ce qui lui
restait d’existence j elle acheva enfin de mourir le 27
prairial an 9.
E l l e f ut sai si e p a r s a d e r n i è r e d é f a i l l a n c e ; e l l e v o m i t
sa dernière éc u m e.
Il
est reconnu, il a été déclaré par tous les témoins
qui ont é.é entendus, que Chalus n’avait cessé de s’oc
cuper affectueusement du sort de sa fem me, de lui
donner personnellement des soins et de la recomman
der à ceux de ses domestiques.
On voit .»ussi qu’ une jeune servante était chargée de
portera la captive ses alimens, et l ’on ne dit pas qu’elle
ail manqué à ce devoir.
\
�‘
7 ^
Aucun soin ne peut prévenir un assassinat ou
empoisonnement ; un instant y suffit : la fairn , au
contraire, est un moyen lent dont le moindre secours
interrompt l’action et prévient l’effet et, s*il est vrai ,
comme les témoins l ’ont dit f que Chalus ait souvent
porté à sa femme le pain , le fromage et le vin de son
déjeûner ^ oxi peut hardiment nier que la faim ait été
la cause de sa mort.
E t il est Lien plus certain que la mort a eu une
autre cfiuse que la faim } si la jeune servante a , même
avec n égligence, accompli son service.
Pourquoi donc Chalus et Claudine Mazuel avaientils donné à l ’acté passé entre eux , le 8 g erm in al, la
forme d’ un contrat de mariage? Ce fait extrêmement
singulier ne peut être expliqué que par la simplicité
d';s deux parties et l ’ignorance grossière du notaire.
Si un projet de mariage avait été lié à celui d ’ un
meurtre , il est évident que celui-là aurait été différé.
Outre qu’ il n’y aurait eu aucnn intérêt de commencer
par la , quelque stupide que l ’on fût , il ¿toit impossi
ble de ne pas voir que, dans cette inutile précipitation >
on fournirait une preuve du crime concerté.
Ce ridicule contrat de mariage est presque un moven
justificatif j il est incompatible
l ’homicide.
avec le complot de
Claudine Mazuel avait passé un an dans la maison
�(
8
)
de Clialus et parmi les peines et les dégoûts : elle n ’v
était pas salariée , et pourtant il était naturel qu’ une
récompense lui fût assurée.
U n e donation que Chalus avait faite à' son frère le
gênait 5 ce fut sa pensée que la forme du contrat de
mariage levait cet obstacle et l ’on prit cette forme.
C ’est ainsi que les parties ont uniformément rendu raison
de ce qu’elles avaient fait.
C ’était une bévue sans doute ; mais elle pouvdit fort
bien entrer dans la tête d ’un ci-devant gentilhomme de
campague et d’une paysanne de vingt-cinq ans.
Il n ’est pas clair qu’elle ne soit pas entrée dans celle
du Notaire qui fit l'acte j et, après tout, elle n ’était pas
plus grossière que celle de constater le dessein d’ un se
cond m ariage,lorsqu’on aurait complotté la dissolution
du premier par un meurtre.
Quand le Notaire a été interrogé
l ’ébruitement de
l ’affaire et ce qu’il en avait entendu dire l ’avaient aver
ti de sa lourde sottise , et il a dit q u’il avait cru les
parties également libres j mais avouant que Chalus était
connu de l u i , comment ne savait-il pas qu’il avait une
femme ? Mais avouant qu’ il ne connaissait pas Claudine
Mazuel , comment prêtait-il son ministère à un acte de
cette importance,, sans prendre aucune information
Il y a une bon-homrnic qui est presque la caution
dç la vérité , dans ce qu’en a déclaré Chalus à son pre
mier
�mier interrogatoire , » qu’il avait dit à cette dernière
» (Claudine M azu el) qu’il voulait lui reconnaître quel» que chose pour la, dédommager de ses peines ; m us
» qu’il ne savait comment s’y prendre , ayant donné a
» son frere tous les biens dont il mourrait vôtu et saisi j
» qu’ alors ladite Mazuel lui dit qu’il pourrait lui recon» naître quelque chose par contrat de mariage...... Qu’ il
» observa.au Notaire que son épouse n’ était pas morte j
» mais qu’elle était dans line si déplorable situation y
» qu’ elle pouvait être considérée comme telle ; qu’à
» cette observation le Notaire rêva un in s ta n t } et puis
» dit au répondant que cela n’ y faisait rien. «
'V o ilà l’incident tout entier de ce contrat de maringe.
I l fut écrit le 8 germinal, et ce fut le 28 floréal que
Clialus fit conduire sa femme dans la chambre où l’on
fut enfin forcé de la retenir et où elle vécut encore un
mois.
Il est cruel d’avoir à faire des calculs de cette nature j
il faut pourtant le remarquer ; dans le plan d’ un crim e,
une telle convention de mariage aurait été trop p r é c o c e ,
ou bien la catastrophe t r op differée.
On avait t e n u d e s d i s c o u r s d ’ a p r è s les domestiques
mécontentés et congédias ; quand,Chalus laissant sa fem
me
errante
dans sa mai on , elle vivait de pommes de
terre , de pain et de fromage 5 quand, retenue dans une
chambre , elle n’y avait p a s d ’auties alimens; quand on
B
�( 10 )
l ’avait entendu répéter , presque pour toute conversa
tion , ces mots qui entraient dans sa manie , j e n ’ a i r ie n ,
j e n ’ a i rien ; ces discours se renouvellerent quand la ma
lade eut fermé les yeux : ce fut un torrent que rien ne con
tint et qui entraîna la crédulité publique , toujours d’au
tant plus facile que les choses le sont moins.
. Tout le monde savait que cette femme infortunée avait
été accablée de symptômes graves et croissans journel
lement en fréquence et en intensité j il était naturel de
voir , dans ce déclin gradu el, la cause de son trépas j la
multitude aima mieux , l'expliquant par un crime f ima
giner ce qui était affreux, mais extraordinaire , que de
rechercher ce qui était v r a i , mais simple.
U n e lettre du maire de Pontaumur informa le juge de
paix de cette mort et de la rumeur dont elle était le sujet,
et le juge de paix assisté de son greffier qui joua depuis
dans cette affaire un autre rôle et de ses assesseurs qui
n'en devaient jouer aucun , alla reconnaître le cadavre
le 28 prairial lendemain de la mort.
Deux chirurgiens procèdent à Couverture et à la véri
fication et ne décident rien. Réunis le 29 avec trois au- 1
très , ils remarquent clans l'œSophage f l’estomac et le
duodœnum, quelques signes d'inflammation ; dans l'es
tomac en particulier l’absence de la tunique veloutée;
dans l e s intestins sept à huit corps de matière argilleusc
�C 1* )
et pierreuse j à cela près v a cu ité totale (c'est leur ex
pression) et , d’ailleurs , tout dans son état naturel.
C
rs
corps argilleuxet pierreux
trouvés
dans les intes
tins , prouvaient cette inanie qu’elle avait eue , de man
ger de la terre et du plâtre.
Cette va cu ité totale pouvait être lV ffet du relâche
ment extrême dont sa continuelle malpropreté avait été
l'indice. Les chirurgiens déposeront depuis avoir apperçu quelques restes de fromage et de beurre, et l'un
d'eux avoir vu dans le rectum, un morceau entier de fro
mage et la v a cu ité totale était un symptôme d'autant
plus équivoque.
*
Cette inflammation des viscères , effet commun de
plusieurs causes , ne dénotait rien par elle-même.
Enfin cette absence de la tunique veloutée, imputée
par eux à la matière argilleuse et pierreuse trouvée dans
les intestins, ainsi expliquée , prouvait seulement que
la défunte avait avalé cette même matière, dont la pré
sence le prouvait encore mieux.
Dans tout cela, la v a cu ité exceptée, qui n’était pas
totale , puisque l’on avait reconnu quelques restes de
fromage et de beurre, i! n’ y avait rien qui dût faire
soupçonner l’action de la faim.
A u moins les chirurgiens n'expliquèrent pas comment
les auties signes par eux énumérés,, concouraient à en
produire le soupçon.
B a
�( 12 )
Et pourtant ils ôtaient appelés , non pas pour d o n n e r
une décision dogmatique sur les causes de la mort ; mais
pour déduire les raisoiis de croire à certaine cause plu
tôt qu’à certaine autre.
En lisant la description imparfaite qui constitue tout
leur rapport, on n’apprend rien. Ils n’allèguent ni prin
cipes ni expérience , la rumeur est leur guide ; ils o n t
entendu crier dans le pays , que l ’on a fait mourir de
faim la femme de Chalus, et ils déclarent que la femme
de Chalus est morte de faim.
Pourquoi n ’ont-ils pris aucune information ? Ils au
raient appris qu’ une longue maladie avait tourmenté la
malheureuse femme dont ils visitaient les restes j qu’elle
avait perdu la santé dans l ’inconduite et dans l ’intempé- *
rance j qu’elle avait été, d ’esprit et de corps, la proie
d ’ une décrépitude prématurée j et tout cela les eût éclai"
rés sur les phénomènes observés par eux.
I ls
auraient
syncopes , elle
appris q u e , sujelte depuis long-tems à des
vomissait dans leurs accès, de l ’écume,
et que sa mort s’était confondue avec un accident du
même genre, signalé par les mêmes symptômes} et peutêtre eussent-ils été amenés à confesser un appauvrisse
ment su ccessf, annonçant ses progrès par cres pâmoi
sons subites et a yan t, dans la dernière, son période
extrême.
G’est ainsi qu’ un rapport de chirurgien
aurait été
�( i3 ")
utile à la manifestation de la vérité ; mais quand ceux
qui ont été appelés, font une opération purement ma
nuelle , ne discutent rien et prononcent d’après un
bruit populaire, il n’y a point de rapport, il n’y a que
le vain et insignifiant récit d’ une inutile décTiiqueture.
On fit comparaître des témoins, tant alors que
depuis, devant le juge de paix, devant le directeur du
jury et devant le tribunal criminel : leurs déclarations
peuvent être rangées dans trois classes.
Il y a d’abord celles des domestiques et habitués de
la maison que le gouvernement de Claudine Mazuel avait mécontentés et qui furent expulsés par elle ou
d’après ses conseils ; ils la chargent de tout leur pou
vo ir, et pourtant tout se réduit aux reproches d’avoir
manqué aux égards et au respect qu’ elle devait à la
défunte, d’avoir engagé Chalus à l ’exclure de sa table
et ensuite à la renfermer dans une chambre , d’avoir
repoussé les personnes qui voulaient la visiter; e t , sur
le refus des alimens , rien que ce discours habituel de la
malade, j e n?ai rien , j e n’ a i rien , et la vague alléga
tion de la mort causée par la faim.
Ensuite il y a les déclarations des personnes qui avaient
donné plus ou moins de confiance à la censure p o p u
laire dont Claudine M azuel avait été l’objet soit a v an t,
soit après la mort de la femme C halus. Celles-ci prouvent
l ’existence d’ une rum eur dont la source était probable-
�( i4 )
menl dans les détractions des domestiques expulsés j
c’est la rumeur elle-même ) mais seulement la rumeur
juridiquement constatée.
On distingue enfin la déclaration des témoins qui, ne
cédant à aucune passion et connoissant le bruit popu
laire sans être entraînés , ont articulé des faits précis, et
affirmé ce qu’ils avaient vu.
C ’est dans cette dernière espèce de déclarations q u e ,
remontant à quelques années et descendant jusqu’au
jour du trépas de la femme Chalus , on trouve le tableau
de sa vie et les causes qui en précipitèrent la fin.
On y apprend comment cette femme éprouva et détrui
sit son tempérament, devint insensée et malade et, de
chute en chûte^ arriva au point extrême de la démence et
do la caducité et aux symptômes déplorables de ce der
nier mois durant lequel, il fut nécessaire de la confiner
dans une chambre.
encore l ’histoire des soins dont elle fut l ’ob
jet. On la voit recommandée par son m ari, mangeant
L à est
à sa table tant que l ’infeçtion qu’elle porte après elle
est supportable,
patiemment épiée lorsqu’elle a la
double manie de couvrir d’immondices la nourriture
des autres, et elle-même de feu , conduite dans une
chambre quand sa liberté est devenue trop rebutante
et t r o p dangereuse, pourvue^ quant aux aliniens, par
une domestique, et, quant à l’habillement, par une autre,
�( iS )
et enfin mourant parce qu’elle n’ était pas immortelle,
non surprenante en ce qu’elle expire alors , mais en ce
qu’elle a traîné si long-tems une si misérable existence.
Ces détails sont l ’extrait fidèle de tous les témoi
gnages qui ont été écrits.
Quand on a tout lu avec attention et avec c a lm e , on
se demande si, destinée à mourir de faim , la femme
Clialus aurait été placée dans une cliambre à deux fe
n êtres, d’où ses plaintes pouvaient se faire entendre audeliors et qui auraient ouvert une issue à. son dé
sespoir.
On se demande si Claudine M a z u e l, ayant résolu cet
homicide barbare , aurait permis qu’ une autre qu’ elle
fût chargée de porter à la prisonnière le pain f le vin et le
fromage dont elle était nourrie.
On se demande si Clialus , complice d’ un affreux com
plot, n’aurait pas pris d’autres mesures pour se dérober à
tous les regards ou s i , attentif à prescrire les soins né
cessaires a sa femme, il n’aurait pas été informé de
1 inexécution de ses ordres.
On se demande si les alimens apportés à la malade
par son mari et par la jeune fille qui en avait l’e m p lo i,
pouvaient lui être enlevés assez promptement par d’au
tres mains et si la pins mince quantité
suffi pour l’empêcher'de mourir de faim.
n’aurait pas
�( 16 )
On se demande s’il se peut que la mort de la femme
Clialus ait été tramée, préparée et causée par ce pro
cédé lent de la faim , sans que non-seulement Chalus
et Claudine Mazuel aient été d ’accord j niais encore
que les deux autres filles qui étaient au service du pre
mier j mais encore que le domestique, ou les domestiques
mâles j mais encore que toutes les personnes qui fré
quentaient la maison aient été complices du crime sans
cesse présent, sans cesse commis , qui n ’aurait pas excité les cris de leur indignation.
O n se demande enfin si le terme naturel d’ une lan
gueur prolongée n’est pas la mort,' et s’il est permis
d ’attribuer à une cause extraordinaire , ce qui a dans
soi-même, son explication.
Toutes ces considérations ont été omises dans la
poursuite dirigée contre Chalus et contre Claudine M a
zuel , et dans le jugement qui les a condamnés : c’est
justement à ce qui était extraordinaire, difficile,impos
sible à co n c e v o ir, qu’ une inconcevable persuasion s’est
aheurtée.
L’accusation.
On form a, le 7 thermidor, la liste d’ un juré spé
cial d’accusation , et Bois , greffier de la justice de paix
de Pontaumur , compris dans cette liste , ne s’excusa
pas : on ne vit pas qu’après avoir pris part , comme
officier,, aux premiers actes de l’instruction , il ne pou
vait
_
�(
17
)
^
-
vait intervenir comme juré dan s l ’exament de 1 ac
cusation.
En lisant l ’acte d’ accusation , on voit la mort préten
due violente de la femme Cholus,en être le m otif uni
que et, depuis, quand la loi le défendait , on ajouta un
prétendu fait de bigamie et une prétendue atteinte a
l ’honnêteté publique.
Bientôt on prépare le jugement défin itif: un premier
tableau de jurés est annullé ; m ais, dans le tableau
nouveau, se trouvent les noms de deux hommes qui
n ’avaient été compris ni dans, la liste des jurés spé
ciaux, ni même dans la liste commune des jurés.
On remplace deux jurés actifs par deux hommes sans
caractère , et l’on remplace un juré adjoint par un
li'Mniue inscrit sur la liste des jurés spéciaux; comme
si la primauté n’avait pas été due au tableau des jurés
actifs.
Ensuite a une première liste de témoins , une se
conde est substituée: des témoins sont retranchés ; un
témoin est ajouté.
Arrive le moment critique où le jury doit s’expli
quer ; il est interrogé sur deux chefs , et il n 'y avait
qu’ un chef d’accusation.
v
U n e tentative de bigamie est niée, ce qui a rapport La .léchn«™
à cet acte réaiunurutoire que Chalus avait fujt Sm
(î" J,lr«
«le-jugement,
c
�( i8 )
la forme d’ un contrat demariage • mais les<jurés affir- .
ment qu’il y a eu action déslionnête et attentat publi
quement fait aux bonnes mœurs.
C ’est ensuite sur un plan et dans des termes singuliers
qu’est établie la déclaration du ju r y , relative à la mort
de la femme Clialus.
Il est constant
9 fait-on dire aux jurés , que cette
femme fut quelquefois maltraitée j
Qu’elle fut enfermée dans une chambre j
Que cette mesure ne fut pas commandée par la né
cessité j
Que Chalus et Marguerite Mazuel ont pris part à
cette mesure j
Que la femme ,Chalus est décédée peu de tems après
dans cette chambre j
«
Q u’ elle n’ est pas décédée de mort naturelle j
Que cette mort est due à une privation d ’ alim ens j
Que cette privation ne fut pas volontaire j
Q u ’elle fut l ’ effe t de manoeuvres étrangères à la
fe m m e Chalus ;
Que François Chalus est convaincu d'avoir concouru
à cette p rivation d 'a lim en s ;
Qu’il y a concouru sciem m ent ;
�0 9 )
Qu'il n 'y a pas concouru avec préméditation j
Que Claudine Mazuel est convaincue d 'avoir concouiu
à cette privation (Valimens ;
Qu’elle y a concouru sciem m ent ;
Qu'elle y a concouru avec prém éditation.
Enfin le tribunal prononce : Clialus est condamné à
la peine de vingt années de fers pour avoir concouru,
sciem m ent et sans prém éditation à la privation d’alimens à laquelle est due la inort de sa fem m e, en vertu
de l’art. 8. sect. 1. tit. 2. part. 2. du code p é n a l, suivant
lequel » l'homicide commis sans préméditation est puni
» ainsi. «
Et Claudine Mazuel est condamnée à la peine de mort
pour avoir concouru à cette privation d'alimens scient*
nient et avec prém éditation , en vertu de l'art. 1 1 por
tant que » l’ homicide commis avec préméditation sera
» qualifie d’assassinat et puni de mort «
Quelle obscurité et quelle indétermination là où la
loi desire tant de précision et tant de clarté !
U ne femme q u e l q u e f o i s maltraitée , enfermée dans
une chambre, par une mesure sans nécessité, à laquelle
on a pris p a r t , décédée dans cette chambre d’ une mort
non naturelle due h une privation d ’alimens non vo
lontaire , effet de manœuvres ; des accusés qui ont co n
couru à cette privation d’alimens , qui y ont concouru
sciemment l'un avec, l'autre sans préméditation !
C 2
I
�( 20 )
Il n 'y a pas un m o t dans cet entortillement qui ne soit
la matière d'un doute et d'un commentaire. Q u ’ e s t - c e
que prendre p a r t à une mesure ? Comment la m o r t
est-elle due à une privation d'aliinens ? Q u ’ e n t e n d - o n
par ces manœuvres dont la privation d’alimens a e t e
l ’effet? Que signifie le mot cojicourir , appliqué à une
privation d’alimens? D e quelle manière Chai us et C lau
dine Mazuel y ont-ils concouru , etc. etc. etc. ?
Et c’est ensuite de cette déclaration vague , quand il
reste tant de sujets de d o u te, et d’après des i n c u l p a
tions qui ne sont pas définies , qu’ un Tribunal r é s o u t
une condamnation à vingt ans de fers et une condam
nation à la mort !
Après avoir tracé ce tableau des faits , de l'instruc
tion , de la p r o c é d u r e , de l ’examen et du j n g e m e n t ,
on est p r e s q u e tenté de s’arrêter là e t, sans discussion ?
de livrer cet incohérent assemblage à la justice et à la
raison des Magistrats qui doivent juger la demande en
cassation.
Pour faire annuller et cette procédure et ce
ju gem en t,
fout-il autre chose que les exposer à nud dans
le u r
pro
pre défectuosité ?
L e s 011 vet lurps
(Je cassation.
C ’est en les renfermant dans le cercle d’ une démons-
�( 21 )
tration abrégée, que l ’ on va indiquer les ouvertures qui
doivent assurer le succès de la demande en cassation.
et
Il faut distinguer la procédure >la déclaration du Jury
le j u g e m e n t e t les vices qui leur s o n t r e s p e c t i v e m e n t
propres.
D e nombreux reproches pourraient être adressés à la La procédure,
procédure ; on ne dira pas tout.
Il y a sur les procès-verbaux du 28 et du 29 prairial
qui en sont la pièce fondamentale , cette premiere re
marque à faire , que des officiers sans compétence y ont
concouru. L e juge-de-paix à qui la loi donnait isolément
le titre d’officier de police ( loi de brumaire an 4 , art.
21 et s u iv .— loi du 7 pluviôse an 9 , art. 4 . ) , le juge-depaix s’ y fit assister de ses assesseurs, adjoints nécessaires
de ses fonctions civiles, étrangers à ses fonctions de po
lice ; et leur présence hétérogène priva ces actes de tout
caractère légal.
a dit q u e ces p r o c è s - v e r b a u x f u r e n t la p i è c e fon
damentale de la p r o c é d u r e . La l o i ne v e u t - e l l e p a s en
effet que » lorsqu’il a été commis un délit dont l’existence
» peut être constatée par un procès-verbal } le juge-deOn
» paix se transporte sur les lieux pour y décrire en détail
» le corps du délit ? «
Telle était la nature du fait , qu’il exigeait le trans\
. •
�'.( aa )
'
port et le procès-verbal ; et si l’acte est n u l, il ne reste
rien de la poursuite dont il fut le principe.
Si les procès-verbaux sont le fondement de la procé
dure, la déclaration affirmative du jury d ’accusation
est la base de toute poursuite déterminée devant le tri
bunal criminel.
Celle que l’on fit donner contre Clialus et contre C lau
dine M azu el, fut rendue défectueuse par la participa
tio n , en qualité de ju r é , du greffier de la justice de
paix de Pontaumur.
Il avait écrit et dû écrire les procès-verbaux du 28 et
du 29 prairial : le premier de ces actes faisait mention de
sa présence et de sa signature j il était terminé par ceg
mots , « et avons signé avec notre secrétaire-greffier. »
O n trouve établie, dans la loi, une incompatibilité pré
cise entre le titre de juge et les fonctions de juré ( loi de
brumaire, art. 484)5 et elle garde le silence à l ’égard du
titre de greffier.
Il s’ensuit qu’absolum ent, un greffier n ’est pas inca
pable j mais il est contre la nature des choses que dans la
même affaire il soit juré, étant ou ayant été greffier. Les
fonctions publiques ont été départies séparément et
une telle confusion n’y peut être reçue.
�(
*3 )
On voit que les accusés furent présentes deux fois au
débat» U ne liste de témoins leur avait été signifiée le
18 fructidor. On leur en signifia une nouvelle le 9 ven
démiaire , où les mêmes témoins ne furent pas tous com
pris , et ensuite on produit au débat un témoin dont le
nom n’ y avait pas été. Contravention à. laloidebrum airej
art. 346.
,
Quand il s’agit de former le tableau du jury de ju
gement, on y inscrit en remplacement de deux jurés qui
t
manquent, deux hommes qui n’ étaient n i sur la liste
spéciale , ni sur la liste com m une, et l’on remplace un
juré adjoint par un homme appartenant à la liste. Con
travention à l’art. 5 i 8 d e là loi de brumaire an 4 , e$ à
la loi du 6 germinal an 8, art. 4 et 5.
V oilà ce qui regarde la procédure.
Il faut passer maintenant à la déclaration du juré
de jugement.
On remarque d’ abord que l’acte d’accusation avait
eu pour objet un seul d élit, celui que l’on supposait
avoir eu pour eifet la mort de la femme Clialus , et il
fallait s’arrêter là; car, selon la lo i, les jurés ne peu
vent prononcer sur d’autres délits que ceux qui sont
portés dans l’acte d’accusation. ( L o i de brumaire
046.)
\
art
Déclaration
du J u ry .
�( H )
On se fait une autre règle : les jurés sont interro
gés, et s’expliquent en premier lieu sur le fuit de ce
ridicule contrat que le notaire Chevalier avait écrit
entre elles.
Dirait-on que la loi ne prononce pas la nullité de la
déclaration où les bornes de l’acte d’accusation sont
ainsi franchies? La nullité est de droit quand on a fait ce
qui était interdit expressément.
Dirait-on que cette partie de la déclaration n’a donné
lieu à l’application d’aucune peine, et qu’il n’y a point
d ’intérêt de s’en plaindre? Il y a toujours un intérêt de
demander que des actes non conformes à la loi ne soient
pas entretenus, et puis n ’y a-t-il pas lieu de soupçonner
que si l’attention des jurés n ’avait pas été partagée, ils
auraient mieux examiné le ch e f d’accusation qui devait
véritablement les occuper ?
,
Relativement à ce ch e f d’accusation, toutes les règles
ont été blessées dans la déclaration des jurés : tout ce
q u ’ il
y fallait essentiellement faire entrer y a été om is,
tout ce qu’il importait d ’éviter y a été employé.
Où est,dans l’ordre tracé pour cette déclaration par le
tribunal, la première question tendant essentielIement
« à savoir si le fait qui forme l’objet de l’accusation
» est constant? (L o i de brumaire , art. 374 ) ”
Pour qu’il y eût un d élit, il fallait, selon le thème de
l ’accusation *
�( 25 )
l’accusation, que la mort cle la femme Chalus fût arri
vée par l ’effet de la faim , des alimens lui étant refu.
ses , et des obstacles étant rnis à ce qu’ elle en reçût.
G’ est à cette définition du délit qee la premiere ques
tion devait répondre.
Que la femme Clialus eÆt été quelquefois maltraitéej
qu’elle eût été enfermée dans une chambre ; qu’ elle fût
morte dans cette chambre ; que sa mort eût été l’effet
d’ une privation d ’ a lin ien s; tout cela pouvait ê tr e ,
sans qu’il y eût un délit, et n ’était par conséquent pas
le fait formant l’oî jet de l ’accusation.
Il est fiit mention ensuite de manœuvres étrangè
res à la Ja n in e ( halus , dont cette privation d }alim ens
fut l’effet ; et c’est dans ces manœuvres que le délit a
dû consister , et que doit être le f a i t qui J'orine l ’ objet
de Vaccusation ; mais quelle idée les jurés ont-ils atta
chée à ces expressions?
Proprement le mot manœuvre signifie l ’attirail d’ un
vaisseau ou l’ action de son équipage et encore le m ou
vement d’ une armée : on l’emploie, au figuré, pour
exprimer des procédés et des moyens appliqués à de
certains desseins ou la conduite qui a été tenue pour
arriver à un certain but j et alors il est vague et par
conséquent équivoque P abstrait
et
par conséquent
obscur.
D
�( *6 )
Il ne convient à des jurés ni de parler au figuré ni de
faire des déclarations abstruses ou énigmatiques. Les
questions qui leur sont faites doivent, comme leurs ré
ponses , se réduire aux termes les plus simples , les plus
facilement intelligibles. Si leur pensée a besoin de tra
vail pour comprendre ce qu’ils ont à vérifier, s’il faut
ensuite que l’on étudie ce qu’ils ont déclaré, ce ne sont
plus des hommes d’entre le peuple appelés pour recevoir
une impression et la manifester $ ce sont des juges char
gés de discuter et les arguties prennent la place de la
conviction«
Quelle est la grande attention de la loi lorsqu’elle règle
la marche de l ’examen par jurés? N ’est-ce pas de faire
en sorte que les résultats soient exempts de toute combi
naison ? Pourquoi distingue-t-elle les questions sur le
f a i t , sur ses auteurs , sur sa m oralité , sur la gravité du
d é lit, sur ses circonstances, sur l’intention qui y fut
apportée, sur les excuses des accusés ( d it art. 3 7 4 ) , si
ce n'est afin que les jurés , à chaque fois qu’on les inter
roge , n ’aient à percevoir qu'un point sim p le, facile à
saisir, et sur lequel il y ait dans l ’affirmation ou la ne
gation , une explication suffisante et pleine ?
!N’est-ce pas encore dans le même objet , que la loi
défend
( art.
les questions
et les déclarations
complexes
3 77 ) ?
Faire consister un délit ou le fait qui fo r m e Vobjet
�( 27 )
d ’ une accusation dans des ‘manœuvres ^c’estne pas fane
aboutir l’examen à ce résultat simple et exempt de corn
lunaison que la loi désire, et contrevenir à ^institution
. des jurés dans son essence. Sur une telle interrogation ,
affirmer ou nier né suffit p a s pour qu’il y ait une expli
cation pleine.
Il reste à Savoir quelles ont été ces manœuvres , quel
rapport elles ont eu avec l ’effet qui a été produit , et
comment elles ontcontracté la nature du délit.
On voit b ie n , pour terminer la discussion de ce pre
mier p o in t, qu’ en énonçant ces manœuvres , dont la
privatiàn d'alim ens fut l’ effet pour là femme Chalus ,
le tribunal a eu la volonté de provoquer, et les jurés
celle de donner une déclaration sur un f a i t f o r m a n t
l’ objet de Vaccusation j mais on eàt forcé en même tems
de reconnaître que cette volonté n’ a pas été accomplie.
Et il- s’ ensuit qu’ il y a eu contravention à. la loi qui
prescrivait une première question, tendant essentiellement a savoir si le fait qui formait l’objet de l ’ accusatioilj était constant ou non.
Selon la méthode de la l o i , la seconde question et la
seconde déclaration devaient avoir lieu sur la conviction
des accusés : avaient-ils commis le délit ou y avaient-ils
coopéré ? voilà ce qu’il y avait à éclaircir. Et l’on a
�\
( *8 ) •
■
continué d’être hérissé d’ambiguité et enveloppé de
ténèbres.
'
Après dénonciation de cette espèce de fait principal
que la femme Chalus fut enfermée dans une c h a m b r e ,
l ’ un» et l’autre accusé est déclaré convaincu d’avoir
p r is p a r t à cette mesure.
Après l ’énonciation de l'autre fait principal des
manœuvres étrangères à la fem m e Chalus d o n t l ’ e f f e t
fut la privation cValimens , l ’ un et l ’autre accusé est
encore déclare convaincu d ’ avoir concouru à cette p r ivation d ’ a lim e n s.
P ren d re p a r t ou
co n co u rir ,
c ’est ,
à
quelques
nuances p r è s, la même chose j mais ces mots , em
ployés ab solum en t, expriment encore des abstractions
qui ont besoin d'être déterminées. Il n ’y a rien de pré
cis jusqu’à ce qu’il soit dit comment il a été p ris p a rt
et comment il a été concouru.
I l se peut que,, sans être coupable } l ’on ait p r is p a r t
ou concouru au fait qui constitue le plus grand crim e,
par des procédés éloignés qui viennent accidentelle
ment s’y rattacher.
Celui qui a retenu violemment un v o y a g e u r, afin
que l ’assassin l’atteignît et le frappât ; a p ris p a r t ,
a concouru au fait du d é l i t , et il est coupable : c e l u i
qui a arrêté le voyageur par quelque acte fortuit sc
�( a9 ) .
trouve fatalement avoir pi'is p a r t , avoir concouru au
fait j et il est innocent.
Il y a cela de remarquable que la privation d ’a limens dans laquelle on place la cause de la mort , est
attribuée à des m anœ uvres, et que ce n ’ est pas à ces
manœuvres que les accusés sont déclarés convaincus
d’avoir concouru ; et l’on sait que l’ action la plus in
nocente peut se trouver en concours avec la plus cri
minelle.
A i n s i , la seconde question prescrite par la loi,m an
que comme la première. On ne v o i t , aucun fait cons
tant dont les accusés aient pu être reconnus les auteurs j
mais sur-tout les accusés ne sont déclarés convaincus
d’avoir commis aucune action déterminée , ni d’avoir
coopéré à aucun fait précis , par aucun procédé défini.
I l y a donc encore contravention à la loi d’après la
quelle une seconde question devait être posée , ten
dante a savoir si les accusés étaient convaincus d’avoir
commis le délit ou d’ y avoir coopéré.
V oilà la déclaration du juré d e j u g e m e n t destituée de
ses deux élémens essentiels ; la, loi n’a pas été mieux
accomplie dans les détails.
Il a été reconnu que la femme C h alu s fut enfermée
dans une chambre , et les jurés ont dit ensuite que
�( 3° )
cette mesure ne fut pas commandée par une indispen
s a b l e nécessité. L a défense des accusés avait consi&té à
objecter l’état d’infection et d’imbécillité de la malade
et son habitude dangereuse de jouer avec le feu. Pour
quoi ces représentations n ’ont-elles été la matière d ’au
cunes questions ? L rs jurés n’auraient pu nier ni l’in
fection , ni l ’im bécillité, ni la risquable habitude; e t ,
d ’après ces circonstances reconnues , qui auraient dû
être considérées en premier lieu comme plus favórables
aux accusés ( dit art. 3 7 4 ) , les jurés auraient été
moins positifs sur la nécessité de la mesure.
Ceci appartenait à la moralité du fait et se trouvait
dans la cause et l ’omission fut une contravention à la
loi qui voulait qu’après les questions principales , on
f î t aux jurés celles « qui , sur la moralité du f a i t , ré» sultaient de l’acte d’accusation , de la défense des
» accusés et du débat , en commençant par les plus
» favorables aux accusés, ( d it art. 374. )
D e même sous le rapport du fait prétendu de la p r i
v a tio n d ’a lim e n s, il avait été allégué, pour la défense
des accusés , que la femme Chalus était parvenue à un
tel point d ’appauvrissement, que son estomac recevait
et renvoyait la nourriture sans la digérer ; que souvent,
par caprice ou par dégoût, elle s’était abstenue de man
ger; qu’elle avait cessé de vouloir d’autres alimens que
du p a i n , du l a i t , du fromage et du v i n ; que tout
�(
3i )
cela lui était porté journellement en plus ou moins
grande quantité; que les recommandations de son mari
étaient à cet égard aussi fréquentes qu’affectueuses ;
qu'une domestique avait été particulièrement chargée
de ce soin , et que le mari le remplissait souvent luimême.
Si l’on avait mis les jurés à portée de s’expliquer su®
ces particularités , après les avoir vérifiées dans les élémens du débat, il eût été difficile qu’ils attribuassent
la mort de cette femme à cette privation d’alimens , à
laquelle leur déclaration s’arrêta si absolument.
D e même encore,, les accusés avaient invité les juges
et les jurés à considérer les syncopes dont la femme:
Chalus avait été travaillée à différens intervalles , longtems avant l’époque où elle fut enfermée dans une
chambre i dans lesquelles , parmi d’autres symptômçs
semblables , elle avait vomi de l’écume comme dans la
pâmoison , qui s’était confondue avec sa mort ; et si
les jurés avaient été avertis par une question positive
de l’attention que méritait cette conformité d’attaques
xnultipliees , ils auraient été moins légers A caractériser
cette mort et ses causes.
C ’est parce qu’il n’y a point de délit là où il n’ y a
point d’intention de mal faire , que la loi a exigé
l’examen et la définition de ce qu’elje appelle la mo*
�( 32 )
r a lité du fait. Les jurés doivent être interrogés sur
l ’intention dans laquelle les accusés ont agi : la néces
sité de cette question fut dans l ’esprit de la loi de bru
maire ( dit art. 374 ) ; elle avait été littéralement
établie dans la loi du 14 vendémiaire an 3 .
On ne trouve dans la déclaration donnée contre Cha
lus et contre Claudine Mazuel f aucune explication sur
l ’intention qu’ils apportèrent dans leur conduite à l ’égard
de la femme Chalus.
A la vérité , les jurés ont dit que les accusés avaient
concouru sciem m ent à la privation d’alimens imposée
à cette femme , et même que Claudine Mazuel y avait
concouru avec prém éditation y mais pour avoir su ce
que l ’on faisait et pour l ’avoir prémédité , on n ’a pas
nécessairement eu la pensée qu’on commettait un
crime.
Si jamais une déclaration relative à l ’intention des
accusés dût être désirée, ce fut dans l ’affaire de Chalus
et de Claudine Mazuel. Aucun fait n ’y était articulé
dont la nature ne fût équivoque.
Même en reconnaissant.qu’il n’avait pas été indispensablement nécessaire de renfermer la femme Chalus
dans une chambre , on pouvait découvrir que les accu
sés , croyant à cette nécessité f s’étaient mépris et
n ’avaient été guidés par aucune pensée criminelle.
M êm e en reconnaissant que la privation d ’ alim cns
avait
�( 33 ) }' “
avait causé la m ort, on pouvait saisir, dans les circons
tances , des raisons de cro ire , si les accusés y avaient
concouru, qu’ ils ne s’étaient pas attendu au résultat
d’une privation qu’ on n’affirmait pas avoir été totale.
En un m o t , la loi voulait que l’on posât la question
relative à l’intention, et que les jurés fussent tenus
« d’y prononcer par une déclaration formelle et dis» tincte, et ce à peine de nullité ; » et la contravention
qui ne saurait être plus évidente , ne doit pas être
impunie.
On a vu que les déclarations principales données
par les jurés contre Chalus et contre Claudine Mazuel
ne remplissaient pas l’objet de la l o i , faute d’avoir leur
sens simple et déterminé ; il suit de là qu’ un autre
principe y a été blessé ; celui qui interdit les déclara
tions complexes , et le même reproche doit être fait
aux jurés à l’égard des articles accessoires.
Sont-ce des questions simples que celles-ci, si la me
sure d’ enfermer la femme Chalus fut commandée par
une indispensable nécessité , et si les accusés sont con
vaincus d’avoir pris part à cette mesure? Les jurés ne
sont-ils pas obligés de combiner, relativement à la pre
mière , la position dans laquelle était la malade et ce
qu’il y avait de raisonnable à faire ; et relativem ent à la
seconde , ce que firent les accusés pt ce que leurs proE
�(34)
cédés eurent de rapport avec la résolution d’enfermer
la femme C h alu s, et avec l’accomplissement de.cette
résolution ?
E t les questions si la femme Chalus est décédée de
iliort naturelle, si cette mort est due à une privation
d ’ a lim e n s , si cette privation fut l ’effet de manœuvres
étrangères à la femme Chalus , si les accusés concou
rurent à cette privation cPalimens , n ’offrent-elles pas
chacune en elle-même , plusieurs points à considérer ?
N e faut-il pas , pour répondre à la première , après
avoir conçu l’idée de ce qu’on appelle une mort natu
re lle , se représenter l ’idée contraire et
faire
com
paraison ?
N ’est-on pas obligé , à l ’égard de la seconde, de v é
rifier d’abord s’il y a eu privation d ’ a lim e n s, ensuite
de se rendre raison de la durée qui put rendre cette
privation mortelle , et enfin de voir si tel fut le cas
et si l ’événement ne peut être rapporté à aucune autre
cause ?
Quand on passe à la troisièm e, n ’a-t-on pas besoin
ds définir les m anœ uvres, d ’en rechercher l’existence
dans les faits , et d’établir le point par lequel ces m a
nœuvres se rattachent àf la privation d*alimens dont
il s’agit ?
Enfin , n ’entre-t-il pas dans la nature de la qua
trième, que, pour la résoudre, on ait à se rendre raison
�(3 5 )
en général de ce qui peut constituer le concours de
quelqu’ un à quelque évén e m en t, ensuite d’ un fait qui
ait constitué ce concours et en dernier terme du rap
port qui lie le fait à l’événement?
C ’est dans l’article 377 de la loi de brumaire qu’ est
cette disposition formelle , qu’ il ne peut être posé aucune
question com plexe, et il est bien clair qu’on ne s’y est
pas conformé dans la déclaration prise et xdonnée
contre Contre Chalus et contre Claudine Mozuel.
On avait annoncé que cette déclaration était contraire
aux règles dont L’observation y était ordonnée j mainte
nant ce reproche est démontré.
Reste le jugement.
Le jugement.
Qu’est-ce qu’ un jugement en matière criminelle? C ’est
l’acte par lequel le tribunal, après avoir comparé au fait
qui a été déclaré, les dispositions de la lo i, applique le
précepte qui y co n vien t, et en ordonne l ’exécution.
C est pour préparer la comparaison et sa conséquence,
que les jurés ont dû déclarer le fait qui a été rendu cons
tant, la conviction q u ia été,acquise contre les accusés
et les circonstances qui déterminent la nature du délit j
ensuite le juge n’ est que l’instrument de la lo i, dont il
prononce les paroles sur l'affaire et sur les accusés.
Et l’application du précepte de la loi qui convient au
E 2
�(3
6
)
cas ainsi défini, est si bien l ’objet unique du jugement
et la seule chose que les juges aient à faire, q u e , si le pré
cepte a été mal choisi dans la loi et ne se trouve pas ré
pondre au délit f il y a ouverture de cassation.
Il y a ouverture de cassation \ dit la loi'de brum aire,
i° . lorsqu’il y a eu fausse application des lois pénales
(art. 456 ).
,
Pour apprécier le jugement rendu contre Chalus et
contre Claudine Mazuel , il faut faire la comparaison
dont il dût être le résultat.
—
Ce n ’est ni de la chambre dans laquelle la femme
Chalus fut enferm ée, ni de cette mesure de l ’enfermer,
ni de la part que les accusés y avaient prise , que la
raison de punir a été tirée.
D u reste, quel est le fait constaté et quelle est la con
viction définie? La femme Chalus est décédée non de
m ort naturelle , mais d’une mort due à une privation
d ’ alim ent qui ne f u t p a s volontaire de la p a rt de la
fe m m e C h a lu s , qui f u t au contraire V effet de m a
nœ uvres étrangères à e lle , et les accusés ont été con
v a i n c u s d ’ a v o ir concouru à cette p riv a tio n d ’ a lim en sy
sciem m en t, et l ’un des deux a v e c prém éditation.
Quelles ont été les dispositions pénales que le tribunal
a regardées comme répondant à ce fait ? Voici celles
qu’il a .transcrites et appliquées.
�( 37 )
Il est dit dans la loi que « l’homicide commis vo» lontairement avec quelques armes , instrumens et
» par quelques moyens que ce soit , sera qualifié et
» puni selon le caractère e t les circonstances du crime. »
(Code pénal,, part. 2 , tit. 2, sect. 1 , art. 7 . )
Que « commis sans préméditation il sera qualifié
» meurtre, et puni de la peine de vingt années de fers,
» (art. 8 .) »
Que « commis avec préméditation il
sera qualifié
» assassinat, et puni de mort, (art. 1 1 .) »
Trouvait-on dans la déclaration des jurés le fait
d’ un hom icide commis volontairem ent avec quelque-S
armes , instrumens et p a r quelque moyen que ce f û t ,
sans prém éditation par l’ un des accusés, et avec p ré
m éditation par l’autre? Alors le tribunal criminel a bien
comparé et bien ju g é , puisqu’il a condamné l’ un des
accusés à vingt ans de fers, (art. 8 , ) et l’autre à la
mort, (art. 11 ) j mais dans le cas contraire il a mal
comparé et mal jugé.
Il y a hom icide lorsqu'une personne a été tuée par une
ou plusieurs autres en employant des a r m e s , des ins
trumens ou d’autres moyens , et cela suppose une ac
tion sans laquelle par conséquent le fait de l ’homicide
ne peut être affirmé.
U n e privation d*alim ens avait été la cause du tré
pas de la femme Chalus, Il n’ y a là point d’action , et par
�(
38 )
dans le sens de la lo i, point d’hom icide.
Les jurisconsultes disent, en matière civile, pour rendre
odieuse la personne qui refuse les alimens qu’elle doit
à une autre, que celle-là semble tuer celle-ci, necare
'videtur; niais en matière criminelle ce n’est pas d’après
ce qu’ un accusé est censé avoir f a i t , c’est sur ce qu’il
a fait réellement qu’on le condamne.
conséquent,
Il s’ensuit de l’adage des jurisconsultes que la per
sonne à qui des alimens sont d u s , a une action relative j
que cette action est urgente, provisoire et favorable;
mais la personne qui la doit est condamnée à la déli—
v ia n c e , et non pas aux fers ou à la mort.
Cette action civile en délivrance d’alimens ne peut
être intentée ni par le pu p ile, ni par l ’insensé incapable
de vouloir j elle appartient, pour eux , à leurs familles.
Pourquoi le frère de la femme C h a lu s, si ardent depuis à
poursuivre son beau-frère, ne s’occupa-t-il point du sort
de sa sœur vivante ?
N e voit-on pas qu’au moyen de ces actions données
pour les alimens , la loi n’ admet pas la possibilité de
l ’homicide par famine? C ’est ainsi que la définition d ’ un
tel homicide ne se trouve pas dans ses dispositions
Dirait-on que la disposition générale embrasse toutj
que la famine est l’un de ces quelques moyens que ce
�( 39 )
io iid o n t il y est fait mention? Cette disposition générale
n’est rien par elle-même ; elle réserve la qualification et
la déclaration de la peine qui en dépend pour les dis
positions suivantes , et c’ est là qu’est véritablement ex
primée la volonté de la loi.
Si la disposition générale avait par elle - même quel
que consistance, tout aurait été expliqué par la distinc
tion de la non préméditation et de la préméditation,
(art. 8 et 1 1 ) } et après avoir dit que l ’homicide com
mis avec préméditation serait qualifié d’assassinat et puni
de m ort, (art. 1 1 ) , on n’aurait pas eu besoin d’ajou
ter que « l’homicide commis volontairement par poison
,J serait qualifié de crime d’empoisonnement et puni de
» mort, (art. 1 2 ) . On n’ajouta pas une qualification
pour l’homicide commis par famine , parce qu’ un crime
ainsi qualifié n ’était pas dans l ’ordre des choses
possible^,.
Quand il y a accusation prouvée d'assassinat, les
juges appliquent l’art. 11 j quand il y accusation prou
vée d empoisonnement , i l s a p p l i q u e n t l ’art. 12 ; ce
n est jamais sur l’art. 7 , dans lequel il n ’ y a a u c u n
précepte pénal, que la c o n d a m n a t i o n est fondée. Quand
il y a accusation d’homicide par famine , alors mêmequ’elle pourrait être prouvée,
les juges ne trouvent
dans la loi aucun texte à appliquer.
Contre Chalus et contre Claudine M a zu e l, on a appli-
�( 4°)
que l’art. 8 et l’art. 11 ; mais il n’y avait déclaration d’au
cun faitauquel l ’ un ni l’autre se rapportât. On reprochait
aux accusés, non d’avoir commis , mais d’avoir omis;
non d’avoir tué 7 mais de n’avoir pas nourri ; et la nature
du fait n’admettait aucune comparaison avec des textes
de lo i, où l’action est toujours supposée.
I l ne peut être nié cependant que l ’homicide } de quel
que inaniere qu’il soit com m is, est un crim e , et que l’a
nalogie des cas prévus et des cas non prévus dans la l o i ,'
donne matiere à argumenter des uns aux autres. C ’est ce
que l’on aurait fait dans l’ancienne jurisprudence , lors
que l’on condamnait pour les cas résultans du procès;
mais la jurisprudence nouvelle ne permet aucune argu
mentation , aucune application de peine par analogie.
Sans doute , il importe que le crim e, de quelque li
vrée qu’il s’enveloppe , soit puni; mais il importe encore
plus que la loi seule punisse et que les juges soient
vmuets quand elle n’a pas parlé.
Dans le fait principal déclaré constant par la
d é c la
ration des ju r é s, de la mort de la femme C h a lu s,
par suite d 'u n e p r iv a tio n da U m ens , il est donc clair
qu’il n ’y avait rien qui pût autoriser la comparaison
avec les textes dans lesquels la loi définit et qualifie
l ’ h o m i c i d e ; c’est ce qui n’est pas moins manifeste lors
qu’on descend aux détails dans lesquels ce fait devient
p e r s o n n e l à Chalus et à Claudine Mazuel.
C ’est
�(4 0
C ’est l’ accusé qui a commis , sans préméditation , ce
que la loi définit un homicide que l’on doit condamner
à vingt ans de fers; c’est à l’accusé, qui a commis avec
préméditation le même homicide , que doit être appli
quée la peine de mort j quand on a lu la déclaration
de jurés donnée contre Chalus et contre Claudine Mazuel , il reste que ni l ’ un ni l’autre n’a rien commis
et que la prétendue mort par p r iv a tio n d ’ alim ens leur
est étrangère.
Des m anœ uvres ont été la cause de cette p riv a tio n
d ’ alim ens. Les jurés ont-ils reconnu que les accusés
aient été les auteurs de ces m anœ uvres ? Nullem ent.
Ont-ils reconnu que,de quelque manière, les accusés y
soient intervenus, y aient pris part? Nullement encore.
Comment entend-on, dans la déclaration, qu’il y a ,
des accusés , au fait dont il s’agit quelque rapport ?
C ’e s t, disent les ju rés, qu'ils ont co n cou ru , non pas
aux manœuvres qui sont le véritable délit ; mais à la
p riv a tio n d ’a lim en s, qui est l ’effet de ces manœuvres*
En sorte que toute cette déclaration, en mettant de
l ’ordre dans les idées qu’elle exp rim e, se réduit à ce ci,
que la femme Chalus est morte pour avoir été privée
d’alimens par l’effet de certaines m an œ uvres, et que
les accusés, sans que ces m anœuvres aient aucunement
été les le u r s, se trouvent cependant avoir concouru
d’ailleurs,on ne sait par quelle co-incidence , avec ces
m anœ uvres 7 un fait de la privation d’alimens.
F
�(40
Vous avez fermé une porte , par laquelle l ’homme
qui a été assassiné uu quart-d’heure après dans la rue,
a u r a i t pu se réfugier chez vous ; vous avez laissé sur
line table le couteau dont l’assassin s’est saisi ; vous
avez concouru à la mort; mais vous n^avez pas con
couru au crime. D e même , la femme Chalus a péri
par l ’effet de certaines m a n œ u v res, e t , sans avoir
été acteurs dans ces manœuvres , Chalus et Claudine
Mazuel ont co n co u ru t la mort qui en a été le produit«
V oilà tout ce qu’il y a à dire d’après la déclaration des
jurés , ce qui diffère grandement de la conviction d’être
auteurs ou complices du fait et d ’avoir commis le crime
d ’homicide avec ou sans préméditation.
Ain si la déclaration , considérée dans son point prin
cipal ou dans ses détails^articuliers , ne peut être mise
à côté des dispositions de la loi ( art. 7 , 8 et 11 ) que
l ’on ne reconnaisse la dissemblance des cas ; et il y a
ouverture de cassation ( loi de brumaire , art. ^56 ) ;
puisque des dispositions pénales ont été tirées hors de
leur cas précis et que c ’est ce déplacement qui consti
tue la fausse application.
Il
est tems de terminer ce développement des raisons
d’annuller et le procès et le jugement dont Chalus et
Claudine Mazuel ont si justement à se ptaindre. Les
ouvertures de cassation qu’ils proposent ne sont pas in-
�( 43 )
certaines j des préventions n ’auront pas atteint le T r i
bunal devant lequel ils sont enfin parvenus \ et c est
avec confiance qu’ils déposent devant lui leur demande
et leur légitime espérance.
' Des préventions ! il est trop vrai que jusqu’à ce jour
elles ont tout fait dans cette malheureuse affaire.
Claudine Mazuel a fait jalouser l’autorité que Clialus
lui avait donnée dans sa maison , et des domestiques
mécontens ont répandu une diffamation vague et té
nébreuse.
•
U n héritier a été intéressé à laisser subsister un pré
jugé qui pouvait un jour lui fournir des armes contre
la donation d’usufruit qu’ il se proposait d’irnpugner.
Dans le public on aime à s’entretenir des faits qui
sortent de l ’ordre commun et même à y croire.
A force de répéter que l ’on faisait mourir de faim la
femme Chalus , on a fini par faire de ces vains discours
une opiuion enracinée.
Ces bruits répandus tireront de la consistance de cette
imprudente bêtise d’ un contrat de mariage passé lors
qu’ un mariage n’était pas permis.
U n .murmure universel établi sur des rapports vagues
qu’on ne vérifia point, précéda et suivit l’événement du
trépas de la femme Chalus. On n’examina rien j on se
l
�(
44 )
plut à croire e t , comme une contagion , cette persua
sion sans cause se communiqua aux Jurés et aux Juges.
O ù était cependant la raison d’expliquer par une cause
si extraordinaire un événement si naturel ?
A près des années de maladie , lorsque , de progrès
en progrès , tous les principes de la vie avaient disparu ,
ne fallait-il pas que la femme Chalus arrivât au terme
fatal ?
Elle mourut parce qu’étant m ala d e,la crise fatale la
surprit : elle aurait pû. expirer plutôt sans que l ’on dût
en être étonné.
Dans sa situation il n’y avait point d’instant qui ne
fût l’ instant possible de la mort.
C H A B R O U D , Défenseur.
D e l ’ im p r im e r ie d e R e n a u d ie r e , r u e d e s P ro m v a ircs t n , 5 6 4
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Chalus, François. An 8?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Chabroud
Subject
The topic of the resource
homicide par famine
démence
autopsies
médecine légale
jury d'accusation
condamnation à mort d'une femme
homicides
rumeurs
Description
An account of the resource
Ouverture de cassation, pour François Chalus et Claudine Mazuel ; Prétendu homicide par famine.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Renaudière (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 8
1798-Circa An 8
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
44 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0711
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Coverage
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Pontaumur (63283)
Rights
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Domaine public
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autopsies
condamnation à mort d'une femme
démence
homicide par famine
homicides
jury d'accusation
médecine légale
rumeurs
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CON SU LTA TI ON S.
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a pris lecture, 1°. du.
contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
avec Marie-Léonarde Cornudet, du 14 mai 1778 2° du
contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte
Ducourthial, du 2 avril 178 3 30. d’un mémoire à con
sulter
E st d ’ a v i s q u e , d'après les anciennes et les nouvelles
lo is, le prem ier enfant mâle , issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec Marie-Léonarde Cornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son p è re , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
n oces, il avoit épousé Marie - Gabrielle de Villette. D e
ce premier mariage issut Gilberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen Maignol.
A
�CM
E n 1 7 7 8 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
n o c e s , M arie-Léonarde Cornudet.
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert D ucourthial, futur époux, instituehéritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un
des enfans qui naîtra du présent m ariage, et ce par préciput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que les futurs choisiront conjointement,,
par quelques actes que ce soit, ou qui sera choisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit;
et en cas que le choix rien ait pas été ¿fait, ladite ins
titution sera au projit de Vaine des m âles, s'il y a des
m â les, et s'il riy a point de m âles, au profit de îa în ée
des Jilies.
D e ce mariage sont issus trois enfans maies. Gilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793.
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant \ ni l’un ni l’autre n’ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, lie fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés,
par le contrat dé mariage de ses père et mère.
L ’édit des secondes noces, de i 56o, qui ne permet pas
à ceux qui sé remarient, et qui ont des enfans d’un premier
lit, de se donner réciproquement au delà de la portion de
l’enfant le moins prenant, avoit lait naître des doutes à cet
égard: on craignoit sur-tout en droit écrit, qu’en faisant
de pareilles institutions, ce ne fût un moyen de frauder la
loi ; mais la dernière jurisprudence, fixée par difl'érens ar
rêts, dontl’un du 29 avril 1719 , et l’autre du 11 août 1 7 4 ^
�(
3
)
.............................................................
rapportes par Lacombe, est que de pareilles dispositions
sont valables. C’étoit aussi la jurisprudence de la ci-devant
sénéchaussée d’Auvergne. L e dernier commentateur de la
coutume, tome II, titre X I V , art. X X V I , page 3^4 >raP" *
porte une sentence du mois de juin 1773 , qui confirme uni?
institution d’héritier, en faveur des eufans à naître d’un
second mariage. A in si, en ne consultant que l’ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput, le tiers des biens qui lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est de principe qu’un don fait de cette riianière,
n’est pas sujet à rapport, même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à la récla«
snation des exposans: on peut même dire qu’elles décident
la question en sa faveur.
,
Il est vrai que d’après les dispositions des art. X X III et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 ventôse de l’an 2, l’élection
laissée au choix de l’un des époux étoit nulle, si elle n’avoit
été faite que le 14 juillet 1789 et depuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité ù la succession
de ci/jus.
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du 5 b ru m a ire précédent, puisqu’elles ont été
annullées, quant à leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4 , soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourthial, à l’effet de savoir si h cette époque, il existoit
quelque loi qui put empêcher l’effet de la disposition faite
en faveuj* de l’exposant, par le contrat de m ¡r age de scs
père et mère : or, il n y avoit pas alors de loi qui eût prosA 2
�(
4
)
erit de semblables dispositions, et annuité des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d'avoir exercé
la facu lté d'élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
n’y en a pas depuis, attendu l’abolition de FeiFet rétroactif
L a loi du 7 mars 1793, antérieure au décès de Gilbert
Ducourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n’est relative qu’aux dispositions futures, n’a
néantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, etn ’o bligeoit point les père et mère à les révoquer : o r , ce n’est
point en vertu d’une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793, que l’exposant réclame le tiers des
biens dé son père, comme un don qui lui a été fait en préciput; il le réclame en vertu d’une disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu drune disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
E n e ffe t, l’article p re m ie r de la lo i du 18 p lu viô se d e r
n ie r , p o r te : « L e s a va n ta g e s, p ré lè v e m e n s , p ré c ip u ts, d o -
* nations entre-vifs, institutions contractuelles, et autres:
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
* stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du
« 7 mars 1793 ? et en ligne collatérale ou entre individus
« non parenS', antérieurement à la publication de la loi du
* 5 brumaire a'n 2, auront leur plein et entier effet, con
ic formément aux anciennes lo is, tant sur les successions
* ouvertes jusqruà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans un contrat de mariage, passé antérieurement à la loi
�du 7 mars 1793 ; à défaut d’élection de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroitdu mariage : il n’y a pas eu d’élection*, les père et
mère sont décédés avant les lois des 5 brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle; il doit par
conséquent en profiter.
Le père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature, ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée, si Ton fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l’avenir ; qu’elle n’anéantit pas
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. ( A rt. X X V I de la loi du 22 ventôse ).
O r,l’avantage dont il s’agit, est assuré à l’exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation de la loi du
7 mars 1793; mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni parla lo i, doit donc
avoir son effet, puisqu’elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mère avant la promulgation des lois des
5 brumaire et 17 nivôse de l’an 2.
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté , qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la m êm e loi du 18 pluviôse dernier.
Cetarticle est ainsi conçu :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
�(
6
)
« fonds perdu, qui ont été annullées par les art. XXlI et
« X X V d e la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet 1789,
« sont rétablies dans leur effet p rim itif, si elles ont été
« faites par acte ayant date certaine avant la publication de
« ladite loi du £7 nivôse ».
Des termes de cette lo i, il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à celle du 7 mars 17 9 3 , doivent être
maintenues: ainsi, l’exposant étant saisi de l'effet de l’insti
tution par le décès de son p è re , arrivé avant la publication
de la loi du 17 nivôse, on ne sauroit lui contester légitime
ment l’avantage qu’il réclame.
D é l i b é r é à R iom le 14 germinal an
française une et indivisible.
5 de la république
T O U T T É E , T O U T T É E , GASCHON.
f
LE SOUSSIGNE qui a yu la consultation ci-dessus et
des autres parts ;
, que s’il n’est pas impossible de tirer des lois nou
velles , quelques inductions favorables aux enfans du pre
m ier lit de G ilbert D ucourthial, les raisons déduites dans la
E stim e
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup à faire incliner en faveur de l’exposant. On pput même
ajouter aux raisonnemens delà consultation. En effet, en
supposant que par 1<; défaut d’élection, fait antérieurement
�(
7
)
à la loi du 7 mars 1793, la disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable; c’est que le
contrat de 1778 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit. Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’e u x , emporteroient dans sa succession un
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C est sous la foi de cette promesse irrévocable
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; par
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
enfans du même p è re , en se référant à celle du 7 mars
1793 j Que ce dont le- père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n'ont pas même entendu faire ,
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de même que
Ducourtliial père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second l it , de même les
lois nouvelles ne sauraient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
D é l i b é r é ùR îom , le 14 germ inal an
française, une et indivisible.
5 de la république-
DE VAL.
�m ém o ir e a c o n su l t e r
ET C O N S U L T A T I O N .
J_ E citoyen Titus s'est marié deux fois ; il a eu de son
premier m ariage, avec dame Marie Laurette , une fille
nommée G ilberte, et de son second, avec Suzanne D ailly,
trois en fan s, Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de mariage , Titus a institué pour son
héritier du tiers de tous ses biens présens et à v e n ir, l’un
des enfans qui naîtroit dudit mariage , et ce, en préciput
et avantage ; laquelle institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce lu t, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fû t; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fait, ladite
institution profiterait à Tainê des mâles ; et s’il n y a pas
de maies , à l’aînée des filles. Telle est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur à la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de 1 5,000 liv- 3payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
ons , sans intérêts qu’à défaut de payement terme par
terme î
�( 9 -V
.
^epne i;-et moyennant cette ¿constitution, il fut stipulé
q u ’elle demeureraitforclose dè.;lôütes succcssionsidirectes
et collatérales de l’estoc paternel, sous la réserve quil fit
de la rappeler <auxdites successions par quelquacte que ce
fû t : cet acte est de 1.783................. , a
.
;p
t - T itu s, père com m ua, est mort le 27. juillet 17 9 3 , l*
mère e$t morte avant, sans avoir fait de cliqix de l’un, des
eniàns, Il s’agit maintenant de'savoir , i° . :si -cette'Jinsti*
tuti( -, contractuelle.est valable en faveur des enfansldii
second lit,
ir î,> t *1_
• î\ j
-, •.juuiü .j.. i.j
a 0.' Si yen le supposant,n’y ayant paseu d’élection delà
part des père et m ère, 1c’est 1l’aîné mâle qui doit en pro
fiter; .
.. i •
• •;
. ... l'j'-- c . . [
30. Quels sont les droits delà fille du premier lit dans
la succession du père commun ? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle avoir son effet ?
... Enfin , y ayant des enfanfc mineurs, quelle doit être la
forme du partage ? -.¿j
•;
• • > Jnu ù
.
.
CO N SULTATION.
L e C O N S E I L S OU S SI G NÉ',’qui a lu les deux
contrats de mariage dont il s’a g it,
E
stim e
1
, sur les questions proposées,
1°. Que l’inst;itution contractuelle, faite par un père dans
son second contrat de mariage au profit des enians à naître
d’icelui, est valable et doit avoir sou exécution.
B
�( IO }
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs,
>et il paro ît qu’elle a été diversement jugée par les tribu
naux. ' '
r
"
*
v C e u x qui ont soutenu qu’elle étoit nulle, se sont fondés
sur ce que les enfans du second ,lit,, n’étaut encore Sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
jiî de haine’, les dispositions que l’un des conjoints fait
«n leur)faveur., ne sont censées faites qu’en contemplation
de l’autrejcorijoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d’une portion d’enfant, l’on a voulu
éluderda loi par une disposition'indirecte, èt que d'après
l ’/*dit'Adüscáecorides, inoces ,'Ujon me p ou voit donner aux
pères, mères et enfans du second mari ou autres personnes
•parod0l etj fraude .'intérpaiés. :J‘ •»
i„„» •’
Une femme, dit Chabrol, qui ne peut pas profiter de
ces libéralités pour elle-même, n’a pas moins d’empressexnentûài’les procurer, à ¿es; enfans à naître; s’ils lui survi
ven t, ils ont ce que leur mère n’auroit désiré avoir que
p o u r e u x j et s’ils lui pr<5décèdent, elle peut retrouver
souvent', dans leur succession, les biens qu’elle leur a
-r
-- s
r ««
» f - **
procure?.^
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i 588 ,
rapporté par Mo^tluolon., ,,
*
L e sècoàd qu’on trouve dans Soefve, du 18 juillet 1.645.
Un troisième recueilli par Brodeau sur L o u e t, L. Nsomm. 3 , du .3 août 1647.
.
1
quatrième ,!;qu’on ¡trouve au journal 'du .Balais ,
du 7 spptombre a 673.
1
Enfin ,1 cèlui connu saus :1e nom de Laparra, du 18
�mai 1736.,j rapporta .par l’Epine de GrainV[ille. Tous ,•
dit- on , ont an nulle des dispositions faites^en faveui- des
enfans à naître d’un second mariage.>
Mais si l’on se donne la peine d’entrer ten connaissance,
de cause de ces jugemens:, on s’aperçoit bientôt qu’iisi
sont rendus sur des circonstances particulières, et n’ont
aucune application à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de Montholon , d’après. Rousseau de
la C om be, n’a pas jugé la' question. « Il s’est trouve ,>
« dit-il, verbo Noces, qu’il,s’agissoit d?une donation faite.
« non à des enfans? d?un. second l i t , mais à des colla-?
ce .téraux. »
Celui de 1645 paroît avoir jugé qu’une mère remariée,
n’avoitpu donner aux enfans du second mariage ses meubles
et acquêts, et le quint de ses propres, au préjudice des enfans
du premier lit, dont la légitime n’avoji; cependant pasiété
blessée; mais indépendamment de l’injustice évidente qui,
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume diffé
rente de celle-ci, où les pères et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs enfans.
Celui de 1647 se trouve dans-tous les recueils^ il fut rendu
consulhs classibus ,• il annulla une donation contractuelle,
faite au profit d’enfans à naître , par une femme qui se
remarioit \ m a is B ro d e a u , qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation étoit tout-à-fait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite à l’exclusion perpétuelle des enfans
du premier lit , au point qu’à défaut denians du second
lit, les collatéraux étoient appelés.
Il n’est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
«mnuUée ; i° . elle, étoit faite ab irato> et 20. comme l’obB 2
�serve Chabrol > il est évident que le lllari aVoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
c o n tra ctu e lle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it, suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
d e son gendre, « et au cas qu’il riy ait pas d’enfans y lesdits
* biens appartiendront audit sieur de Saint-M artin seul r
* qui étoit le futur époux , et au x sien s, sans que les enfans
« du premier m ariage, n i les héritiers de ladite fu tu r e y
a puissent rien prétendre n i demander, sinon que ladite
« G uilbou, si elle survit, auquel cas elle jouira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour« neront aux héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrêt de 1673, a bien aussi annulléune donation faite
aux enfans à naître d'un second mariage; mais elle avoit
pour principal objet la fèmme ; c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit: « au f a i t particulier y
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
« du palais , il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère ; c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la passion extrême qu’avoit
te pour elle le sieur de Tersam , a été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
* qu’il ne pouvoit encore aimer. »
Cela est si vrai que Rousseau de la Com be, qui rapporte
aussi cet arrêt, verbo Noces, s’en fait un moyen pour prou
ver que les enfans communs, nés ou à naître, ne sont point
compris dans la prohibition, pourvu qii ils n aient servi
de prétexte pour donner au second conjoint.
E nfin, l’arrêt do 1738 de Laparra, a été rendu en pays
�..........................
( *3 )
cle droit écrit, où la mère succède à son enfant*, en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition ¿toit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; les
pai'ties et leurs biens étoient régis par une coutume qui
exclut les ascendans de la succession des descendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle.rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
declarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second mariage, entre le pays de
droit é crit, et celui de coutume.
Dans le prem ier, la seconde femme peut être l’objet de
la lib éralité d’un mari ; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eu x, à moins qu’il n’y
ait aucun parent de la ligne ; et dès lors la p ro h ib itio n ne
peut plus exister , puisqu’il n’y 'a plus d’intéressd.
M ais ce n’est pas seulem ent avec des raisonn em en s tranchans qu’ on v e u t écarter les p ré ju g és que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement form ée, soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in termini's, soit
par les nouveaux; et la presqu’universalité des auteurs,
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bien pro
noncée.
�c h .y
L e premier-arrêt qui ait admis l’institution d’héritier en
faveur des.en-fans a naître d un second mariage, est rapporté,
par C h opin , liv. 3., ehap. i ei‘. lit. 1er. sur ja coutume d'An
jou , en date du 7 septembre 1675.
L e second, du 19 juillet i 65g.} rapporté par Ricard
T r a it é des Donations, partie.3 , n°. 1243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite,
à des enfans à naître, par un troisième contrat de mariage:
c’est l’arrêt des Lagrange. On demandoit la réduction da
la donation, conformément à l'édit des secondes noces. La.
disposision fut confirmée pour le tout.
L e troisième,j ..se trouve au Journal des audiences,y sous
la date du 29 avril 1719 ; il fut imprimé-dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en fa
veur des enfans à naître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
L e quatrième est intervenu le 11 août 1740, au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Com be,
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrèt, Jacques de Gagnou
de. Vilène , lieutenant général des armées , âgé de soixantequinze ans , qui avoit un fils du premier litco n v o la n t en
secondes noces avec daine Claude-Antoinette Dassé, avoit
donné aux enfans de ce futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui pennettoit de donner à ses enfans- puînés. L a
donation a été confirmée eu faveur des enfans du second
mariage , quoique la dame Dassé eût la gajxle-/toble de
jîes cîïfans.
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui sq remarie, peut donner à ses en fans du second lit;
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans communs,
�( * 5' )
nés ou à naître, ne sont p a s compris dans la prohibition
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
sè remarie en pays de droit écrit ,1a donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
laveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas ù un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
■une exception au droit commun. T o u t le monde eonnoît
•les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C’étoit une dame d’Âlègre , qui avoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire la condition d’un enfarft
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par dès
considérations d'honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du J o u r n a l dù palais,
daus la cause jugée par l’arrêt de 1673, «que les législa'« teurs q u i se sont p a rticu lièrem en t attachés à former des
« obstacles au x secondes noces , n’eussent point parlé des
•«enfans, s’ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition ; mais ils n’avoient garde de penser à eux ; il
« y en a deux raisons sans répliqué. »
«La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autorisant les secondes noces,
« elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
.
�( i6 )
« en naissent, clans la possession du droit commun ; c'est-àa d ire , q u e comme ces enfans né sont pas encore au monde,
« et n éanm oin s-y doivent venir par une voie légitime > la
« loi ne peut pas avoir pour eux de l’indignation, qu’elle ne
r fonde jamais que sur un démérite naturel ou moral.
« La seconde raison est, que l’ordonnance ne peut com
te prendre les enfans communs dans la .prohibition, que par
ce les mêmes motifs quiy ont donné lieu, savoir, en faveur
« de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
et mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
a innocente des enfans, et sur-tout dans des enfans à naître,
* qui n’ont que le suffrage de la nature qui parle pour eux.
« Il ajoute que presque tous les docteurs avoient décidé,
« que la loi hcic ed icta ti , et l’édit des secondes noces, ne
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
« excité la libéralité des pères et mères, par leur mérite, par
* leur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
« que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
ce que leurs pères et mères pensent ¿\ eux avant leur nais« sance , et qu’ils se les représentent, comme s’ils étoient
« effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
ce contrats de m ariage, les enfans ù naître ont ordinaire"
et ment la meilleure part, »
Brodcau sur L ouet, lettre N , somm. 3 , n°. 12 , a traité
également cette question: et Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l’édit des
« seconds noces a lieu , non seulement ù l’égard des con« joints, mari ou femme , mais encore des enfans du
« prem ier ou du second m ariage........Mais néanmoins il
« est
�« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu a Tegard
¡k des enfa n s du prem ier lit de l’un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et m ê m e personne avec
« leurs père et mère , el qui est dans la prohibition de l'edit
« et non des enfans communs issus de leur m ariage, qui
« sont capables de recevoir toutes sortes à!avantages,
« s a lifia légitime aux enfans An premier l i t , si la coû
te tnme ne dispose du contraire; la présomption naturelle
« étant que la m ère faisant la donation , est plutôt portée
« par l’affection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
« le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. de secundis
jiuptiis, q u e B ro d e a u r a p p o r te , d écid e cette q u estion dans
les term es les plus form els : «
■potest vidua dare, non p?'o« vigno sedfdio cornmujii, nato ex secundis nuptiis : licet
« sit eadem ratio , non tamen idem ju s , q u ia jilio com« muni ut donet mater naturalis affectio f a c i t provigno
« ut donet noverca, maritalis ajfectus f a c i t , non certè
« novercalis,* provignum non semper accipiam pro percc sona supposita, sed excogitatamfraudent edicto inspi« cabor in provigno , non in f li o communi. »
B ro d e au cite les d eu x arrêts de i 5ç)5 et de 1 6 2 6 , q u i
o n t co n firm é de pareilles donations.
L e b r u n , traité des successions , liv. 2 , ch ap . 6 , sect.
distinction 2, est du même avis: « L e second conjoint, dit« i l , est la première personne prohibée , et nulle autre ne
« fest qu’à cause de lu i......... O n demande si les enfans du
« second mariage sont compris dans cette prohibition et il
« semble qu’ils n’y sont pas compris: car, si d'un côté on les
« considère comme les enfans du second con join t, de l’au»
G
�C 18 )
« tre, on les peut regarder comme leS enfans de celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
« de ses libéralités ».
« Si les enfans decelui à quiil est défendu de donner, sont
« dans la prohibition ; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner h ses propres enfans......... Il faut prendre en
« toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation;
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
cc que ces donations se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions.. . . Aussi nos
cf docteurs, entr’autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
« cod.deseciind. nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n'étoit pas compris dans l’édit ; ce que j’estime
« devoir avoir lieu, pourvu que les enfans n’aient pas
« servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color non jfuerit quœ situs, comme dit la loi item s i y r
uff. de sénat. Mace.d. et particulièrement pour l’espèce
• la loi suspitius 4 9 , j f . de donat. item s i color v eî
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœsitus , n ih il
« valebit traditio ,* id e s t, si hoc exigit uxor, ut aliquid
« ex ea re intérim commodisentiret m antus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu’en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari, à cause de la puissance pater
nelle; mais que hors ce cas particulier, les donations
fa ite s aux enfans com m uns, ne sont pas réputées com
prises dans fédit.
E nfin, le dernier commentateur de la coutume d’A u ver
gn e, traite aussi cette question dans le plus grand détail,,
�( 19 )
et après avoir rapporté les arrêts pour et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière jurisprudence -parait
décisive pour la validité de ces dispositions.
« Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740 j on*:
jUl^s*
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruitpas,
» puisqu’il est dû à la circonstance particulière du choix
« laissé à la seconde femme ; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
« pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
« venu des successions et donations en ligne directe, et
« oùles dispositions en faveur d’enfans à naître sont assez
« fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en« fanspersonnes prohibées, ne s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints , avec qui le mariage se contracte , et il
« suffit que la disposition puisse s'appliquer à d’autres causes
« que riinpression du conjoint, pour qu’elle doive avoir
« tout son effet. On doit plutôt rapporter la disposition à
« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
« combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, com« ment un second mari pouvant profiter directement au
«moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
«a naître seroient dans une plus grande prohibition que
« lui. Il nous semble donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition , saiif les exceptions légitimes
« dans des cas où il est visible que le donateur n’a eu d’autre
« motif que l'impression et la suggestion du nouveau con
te joint ou la volonté de l’avantager lui-même.»
Ainsi donc , il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune, faite par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
C 2
�(20)
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement delà disposition, puisqu’en cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoîent succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien, puisque la femme n’avoit pas d’autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice. Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps 5
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas, ni l’un ni
l ’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d’une disposition universelle; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au profit des mâles , à l’exclusion des
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
mariées par père et mère»
T o u t concourt d o n c , on le répète, à rendre cette dispo
sition inattaquable. Le droit d’é lire, accordé au survivant,
dans le cas où il n'auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne changcrien a cette décision, parce qu’il n’en résultoit au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première, ce qui est réellement
arrivé , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mari.
I» y a même plus, c’est que , sans les nouvelles lois, le
consultant n’eri auroit pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle éloit forclose, moyennant la dot à elle
�( M \
constituée, et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de
son père sans y être rappelée \ et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
ment qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis a l’aîné mâle du second l it , une
Buccession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
S e c o n d e
Q u e s t i o n .
N y ayant pas eu d!élection, tous les enfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition f
ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question peut avoir été controversée dans les temps
voisins de la loi du 17 nivôse an 2 , dont l’effet rétroactif
avoit tourné les têtes ; mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , (f avant ou depuis le 14 juillet 1 7 8 9 , auroit conféré
»au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« h éritiers dans ses b ie n s , l’ é le c tio n , si elle n’a eu lieu que
« le 14 ju ille t 178 9 o u d e p u is , d em eu re n u lle et de nul
« effet; et tous les h éritiers p ré so m p tifs, au préjudice dés
ir quels elle auroit été faite,sont, nonobstant toute exclu« sion, appelés à partager la succession de la même manière
* et par les mêmes règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. » .
L ’article suivant,porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier, néanmoins subordonnéaau cas
�« où un tiers ne disposeroit pas autrement des biens com
te pris en la même institution , sont nuls et de nul e iïe t, à
«dater du 14 jui^ct *789, si à cette époque le droit dé
« l'institué n étoit pas devenu irrevocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée avec lui. »
Mais, i° . cette loi ne peut avoir d’effet rétroactif; les
lois des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an 5 , ont confirmé toutes les dispositions irrévocables
de leur nature, faites avant la publication de la loi du 7 mars
*793>^u^a défendu toute espèce d’avantage en ligne directe,
ainsi que les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse an 2.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse an 5 , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
« an 2 , à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
« date certaine avant la publication de ladite loi du
« 17 nivôse, »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dernière loi.
Dans l’espèce particulière, la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est morte avant la r é v o lu tio n ,
.et le père, le 27 juillet 1793 * la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession ; il
faut juger l’institution dont il s’agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L ’on n’a pas oublié qu’à défaut d’élection , c’étoit lui
qui étoit appelé à la recueillir; et la mort du père, sans
l’avoir faite, équivaut ù un acte qui la coiitiendroit.
�( 23 )
• Ces principes anciens n’ont point été altères par les
nouvelles lois, parce que la succession s est ouverte avant
et dans un temps utile ; et on peut d’autant moins les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs,
et sur-tout par Ricard, traité des donations , partie i re*>
chap. 3 , section 12, n°. 672 et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers,comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’électiorr.
c< qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu u n , mais seulement le ch o ix de la personne
« entre un certain nom bre, ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui rogatus e s t, positum est om n ino, an velit
« restituere , sed qui potiùs restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé à l’au
dience de la grand’chambre , par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’a u tru i , quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterminé y
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au marnent où il écrivoit, particulièrement dans le-
�( h )
pays de droit écrit, où les maris et femmes ont coutunie de se déférer entreux cet honneur, de laisser
au survwant la liberté} de choisir un héritier universel entre leurs enfans j ce qu'ils pratiquent par le
principe d'une sage p olitiqu e, cl afin de transmettre
toute la puissance entre les mains de celui q u i survit,
tt lu i conserver, par ce m oyen, le respect de ses
enfans. »
L on volt donc que les principes anciens valident l’instilution dont il s’agit.
Les mêmes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas où le tiers, chargé d’élire,
ne feroit pas de ch o ix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement un des éligibles pour recueillir sa dis
position , i\ défaut d'autre ch o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par l’ex
tinction du droit d'élire, ou par la mort du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite. .
>
E nfin, les nouvelles lo is, au lieu de contrarier les1
anciennes sur ce point , ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l’on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an 5 , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la publication de la loi du T7 nivôse : ainsi l’élection
auroit pu valablement être faite ju sq u e -là , et par la
même raison, l’aîné maie avant été désigné pour la
recueillir, à défaut d'élection d’un autre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
Nous trouvons encore cette question décidée dans un
rapport
«
«
«
«
ce
«
»
»
�f 25 5 . .
- ,
■
■'nppott fait au nom d'une commission, pat* le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
•résolution par lui présenté, porte.que si-l’auteur de la
•disposition avoit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en avoit chargé, et s’il avoit nommé un
héritier ou légataire pour recueillir à défaut d'autre choix,
sa nomination , conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’élire ,
et l’ héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p ré v u , a recueilli seul h bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection le lui auroit
enlevé, ce qui n'est pas même proposable, elle n’en seroit
pas plus avancée, parce quelle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second l i t , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe.
ST r o i s i è m e
III.
Q u e s t i o n .
Quels sont les droits de la jille du premier lit ?
Cette fille a été forclose par son contrat de mariage*
mais la loi l’a relevée de cette forclusion. Le père n'est
mort qu'en juillet 1793; à cette époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793, avoient frappé,
«t elle est appelée à recueillir, en rapportant ce qu’elle
D
�à reçu , sa portion des deux tiers de la succession ah
‘in testa t, qui seront divisés entre tous les enfans par
égale portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau ; mais ce qu’elle
prendra dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira' sera dotal j si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra m oins, et lès autres héritiers feront
les prélèvemens de d ro it, de manière que l’aîné maie ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l'autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera, au prorata de son1émolument , lés autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de -230,000
y compris le rapport des i 5,ooo
la portion de l’aîné maie sera de 1 1 5,000
parce que
le tiers de 230,000 & est de 76,666 ^ 13 ^ 4
et que
le quart, dans le surplus, est de 38,333 ^*6^8
en sortô
que la fille du premier lit, conservant les i 5 ,ooo
argent,
n’aura plu s, en b ien s-fon d s, que 22,333
8
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineurs,,
le partage doit être fait en justice, et provoqué par un
majeur ; il ne pourrait avoir lieu sans cela.
DÉLIBÉRÉ à Clermont-Ferrand , le 19 nivôse an 9.
;
B O Y R O T , D A R T I S - M A R C IL L A T ■Je suis du même avis, et-par les mêmes raisonsP I C O T -L A C O M R K
�( v j.y L e soussigné, qui a lu la consultation cl "dessus, est
du même avis *, les motifs qui lui servent de fondement
sont trop anvpleroent discutés dans oetteconsultation, pour
qu’il soit nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
en faveur du consultant, c’est que sa mère avoit prédécéde
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793>
et qu’ainsi son droit à l’ institution étoit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2,(
D é l i b é r é à R io m , le 12 pluviôse, an 9 de la ré -i
publique.
TO U TTÉE.
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
D é l i b é r é à R io m , ,1e 2 ventôse, an 9 de la répu
blique.
PAGÈS.
L e soussigné est du même avis, par les mêmes m otifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de l’ancienne législation , encore ca
vigueur à l’époque de l’ouverture de la succession.
L e zz ventôse an 9 .
M A U GUE.
�Q U E S T I O N S PROPOSÉES.
G i l b e r t D U C O U R T H IA L , veufde Marie de Vîllette,.
contracta un second mariage le 14 mai 1778; il avoit'
une fille unique d’un premier mariage.
T ro is enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthial est décédé le 27 juillet 1793 ; sa
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
Il s'agit de régler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père commun.
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial de Lassuchette, fils
aîné du second l i t , croit avoir droit de prendre, dans
cette succession, un fiers en préciput et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, son
p è re , du 14 mai 17 78 , dont la teneur suit :
<r Ledit............futur ép o u x , en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à ven ir, Tun des enj'ans qui naîtra
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage *
« laquelle institution est faite en faveur de celui ou celle
k que les futurs époux choisiront conjointement, par
�2
9
)
« quelques actes que ce so it, ou qui sera choisi par ie
« survivant des deux futurs, auquel le droit en appar«• tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
k que ce soit ; et en cas que le choix rüen ait pas étéf a i t ,
« ladite institution sera au profit de Vainé des m âles,
« s’il y a des mâles , et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. »
Gilbert D ucourthial et sa seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre, sans avoir fait d’autre choix entre leurs
enfans com m uns, pour recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de Vainé des m âles, en cas qu’il
n’en fut pas fait d'autres.
En cet état, le citoyen Lassuchette, fils aîn é, e st-il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son p è re , a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vini des enfans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
2°. Que Xindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
la disposition ?
3°. Qu’elle n’ëtoit pas viciée non plus par la circonstance
que la seconde fem m e devoit concourir au choix de cet
héritier, dans le cas où il seroit fait du vivant des deus
époux, et même de l’élire seule, si elle avoit survécu ?
40. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans le cas, qui est arrivé, où il n y auroit
pas d’autre choix , étoit également une disposition valable
�( 3° )
dans le p r in c ip e , ci; quelle aoit produire son plein et
entier effet, nonobstant la révocation des dispositions de
ce g e n r e , prononcée par les articles X X III et X X I V
de la loi du 17 nivose an 2 , postérieure de cinq mois
au décès de Gilbert Ducourthial ?
5°. E n fin , que le décret du 7 mars 1793 , qui avoit
interdit tous avantages en ligne directe, quelques mois
avant le décès de Gilbert Ducourthial, n’est pas un obs
tacle non plus à ce que le citoyen Ducourthial fils aîné
profite d une disposition en préciput, qui a sa source dan9
un contrat de mariage antérieur de plus de quatorze ans
à ce décret.
Opi?iions du Conseil sur les questions proposées.
L a première observation à fa ir e , pour résoudre les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d'une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2 ; mais d’une
succession ouverte près de six mois avant cette loi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut rapportée par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
celte époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisième observation. Le sort de l'élection faile par
�( 3 0 #
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourr
thial - Lassuchette, fils aîn é, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas ou
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
m ère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé ayant la loi du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ,* car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils avoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
De ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées ; mais
■uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i ° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
valid ité, sous le régim e ancien, des donations de biens
présens et à v e n ir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de m ariage, en fa v e u r des erfans à naître du mariage y
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 1 7 31 , art. X V I I et X V I I I , et de 174 7, art. X II.
On ne sauroit non plus m é c o n n o ître la cap acité des
enfans d’ un second m a r ia g e , p o u r r e c e v o ir de pûreillcs
dispositions et en p r o fit e r , en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut permettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de ses
enfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
Auvei’gne, où étoient situés les biens de G ilb e rt Ducourth ial,)et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage,, sur ceux du second.
�. ( 3a' ) .
La seconde fem m e, il est v r a i, n’auroit pu être vala
blem ent instituée par son m ari, que pour succéder à une
' p a r t (Tarifant \ mais son incapacité,relative et limitée ne se
communiquoit point à ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en gén éral, ne fut jamais mise eu
question; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naîtroient du m ariage, étolent
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits h la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
1719 et i l août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage eu secondes noces,
aux enfans à naître du mariage, que çe qui y est véri
tablement; je veux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, qui, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir le sort
des enfans à naître du mariage, s’occupent de l'assurer A
l’avance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contracleut,
pt sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrêts notables do
la C o m b e .
donc
�donc pas surpris si tous les suffrages ?e sont reunis, depuis
soixante an s, pour en proclamer la validité.
D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec laquelle Gilbert Ducour thial use de la
faculté d'avantager l’un de ses enfans à naître du second
lit ; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; c’est-à-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gratifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauraient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes généraux, pour ne laisser voir
dans l’institution faite par Gilbert Ducourlhial en faveur
d un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
motif pour les tribunaux d'en ordonner l’exécution sans
hésiter.
a°. Mais on semble prétendre que l’institution dont il
s agit étoit vicieuse dans sa forme , en ce que rinstitué
etoit indéterminé , et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourrait être de quelque considération, s’il
s’agissoit d’une disposition postérieure à la loi du 17 nivôse
an 2, qui a aboli pour l’ avenir les dispositions dont l’ap
plication seroit laissée au choix d’un tiers.— Mais il s’agit
ici d’une disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que, loin que les donations et institutions électives fussent
E
�( 34 )
•prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X I I , L X III, I jX IV , L X V e tL X V I de l’or
donnance de 1735, sur les testamens, et par celle du mois
d’aout 1747 sur les substitutions, art. XII.
Enfin, les articles X X IIIe t X X I V de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 5 , lèvent tous les doutes; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r, l’institution dont le citoyen D ucourthial-Lassuchette réclame l'exécution, est dans ce casr
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur fils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’e u x , et
choisir un autre de leurs enfans pour recueillir à sa placer
ctoient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,,
dont le citoyen Ducourtliial-Lassuchette veut tirer avan
tage, n’étoit pas vicieuse dans son essence ; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conféré à sa
seconde épouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueille! oit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit d’élire lui offroit une perspective éventuelle, qui
pouvoit lui ouvrir des chances pour faire tourner le-don
à son p ro fit, quoique personne prohibée; et Ton cite en
faveur de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
�(35)
■
r-
r
fut jugé par l’ arrêt rendu entre la veuve et les enlans
Laparra, le 18 mai 173^*
La réponse est facile et tranchante. L ’arret de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L ’institution élective q u iï
annulla , étoit universelle , et réduisoit les enfans du pre
mier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mòre succédoit à Ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœurs consanguins.
Cette mère qui avoit survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession, consistant principalement
en mobilier; et elle avoit d’ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant de son mari, pour réduire à peu
près à rien les légitimes des enfans du premier lit. L ’in
dignation plaidoit la cause de ces victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence appeler l’arrêt qui an n u lla
1 institution contractuelle faite à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
O r , qu’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont il s’agit ici?
L institution de L a p a r ra é to it u n iverselle ; cellc-ci n'est
q u e d u tiers.
La seconde femme de Laparfa avoit survécu à son m a ri,
ets’étoit emparée de toute la succession , pour en détourner
la meilleure part à son profit. Ici la seconde femme de
Gilbert Ducourthial est mortelong-temps avant son mari,
et n’a profité, ni pu profiter de rien dans sa succession.
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
scs enfans, et elle pouvoit abuser du droit d’élire qui lui
avoit été confié, soit pour jou ir, eu retardant son ch o ix ,
E a
�( 36)
soit pour y mettre un prix et des conditions à son avantage.
La secon d e femme de Gilbert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à son
mari ; la coutume qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, l’auroit exclue de l’espoir d’y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’en
fant , dont il lui étoit permis de la gratifier ostensible
ment *, la médiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée, y auroit mis un obstacle invincibleIl n y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. Tout étoit fraude dans l’affaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci j la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
Voilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial a în é , qui s’évanouit.
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement, pour recueillir à défaut d’autre ch o ix , et
l'héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice delà disposition, toutes les fois qu’il
n’en étoit pas déchu, par un choix contraire.
L ’article X X I V de la loi du 17 nivôse, abrogea ces
règles pour Tavenir ; mais il en consacra les effets pour
le passé y en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
seroit devenu irrévocable par le décès de la personne
ayant droit de révoquer. ,
�C 37 )
.
.
, . ..
L ’article vouloit que le décès qui avoit rendu la dis
position irrévocable, fût antérieur au 14 juillet 1789mais cette rétroactivité est rapportée. Il suffit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
révoquer , soit antérieur à la publication de la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourthial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est conifirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
5°. Il reste la principale difficulté à éclaircir; elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en principe, que « la faculté de disposer de ses
« biens, soit à cause de m ort, soit entre-vifs, soit par do« nation contractuelle, en ligne directe, était abolie, et
« qu en conséquence, tous les descendans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
, Appuyés sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette , lui diront sans doute, « si vous
«échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
« parce que le décès de n o tre père est antérieur, au
«moins n’échapperez - vous pas au décret du 7 mars1
«17935 car notre P^re n’est m ort qu’après ce décret1,
« et conséquemment dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de sa succes« sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. » *.
L a réponse est dans les articles I et V II de la loi du
�( 38 )
18 pluviôse an 5 , qui détei-minent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
L793 , en ces termes:
t
çt Les avantages , prélèvemens , précïputs , donations
«entre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi« tions irrévocables de leur nature, légitimement stipuo lées en ligne directe avant la publication du décret du
« 7 mars 1793 ,,auront leur plein et entier effet, confor« mément aux anciennes lois , tant sur les successions
« ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur celles qui s’ouvriront
« à l’avenir. » ( Article I.er )
« Les élections d’héritiers ou de légataires.... qui ont
« été annullées par les articles........ de la loi du 17 nivôse,
«à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant, date
«certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. *
( Article V il. )
L e contrat de mariage du 1 4 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-di$tincles ; sa vo ir , une disposition princi-»
pale, qui étoit une institution du tiers des biens de Gilbert
Ducourthial en faveur de l’un des enfans à naître de son
second mariage, par préciput et avantage, et une disposi
tion secondaire, qui étoit la désignation particulière de
l’aîné des mâles pour recueillit’ ce tiers de.biens , dans lc>
cas où il ne seroit pas fait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition principale étoit pure , sans c o n d i t i o n ,
et irrévocable de, sa nature ,• eUe a,uro.it profité à tous les:
enfans du second l i t collectivem ent, à défaut de- choixvalable d’un seul d’entre eux,, pour recueillir exclusive-
�Trient ; la disposition secondaire , qui appliquent l a vantage du tiers à l’aîné des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et pou voit être ré v o q u ée , par 1 élection. d’un autre enfant.
' Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an 5 , qui viennent
d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
p ale; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
coivformément aux anciennes lois , puisqu'elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
, Quant à la disposition secondaire , elle est maintenue
par l’article Y I I ; car cet article rétablit dans leur effet
prim itif, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 1793, mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la loi du ijn iç ô s e
o-n 2. ; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse, seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée parle décret du 7 mars 179 3 , n’enïportoit pas la prohibition de choisir un d’entre plusieurs
éligiblds, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle , irrévocable de sa nature , qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans Tèspèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîn é, étoit
�. C 4° ) . A
antérieure, soit À la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 1793 ? puisqu’elle étoit contenue dans le contrat
même de 17 7 8 . Mais elle étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant l^;loi du ly nivôse , par le
décès de celui qui seul auroit pu la révoquer par un choix
contraire.
Ainsi la validité, sous tous les rapports, se trouve proüoiiçée sans équiyoque, par les deux textes précités.
O
b
j
e
c
t
i
o
n
.
L a validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
pu problème, à la bonne heure; mais la validité de l’élection.
conditionnelle deil’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
k l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine. Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur;, qui pouvoit jüsqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîn é, par le
choix d'un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
jl est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès, doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eut été
faite le 27 juillet 1793 seulement , jour du décès de Gilbert
Pucourthial père, il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée alors depuis plusieurs mois, en
ligne
�ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
*
•
non avenue.
’
R é p o n s e .
Ce raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i°. C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 , jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778, sous le
prétexte que le décret du 7 mars 17935 lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II d elà loi du 18 pluviôse an 5 ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l'intervalle de la loi du 7 mars 1793, à celle du 17
nivôse an 2 ; il maintient l’effet primitif de toutes celles
qui avoient précédé la publication de la loi du 17 nivôse,
indéfiniment sans exception, sans distinction entre celles
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793, et celles
qui etoient antérieures. Cette décision positive de la lo i,
au surplus , n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les tem p s; car dans tous les te m p s , on a v o it pensé
que celui qui clvoisissoit tin de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition p r é e x ista n te , ne faisoit point une
disposition nouvelle ; et conséquemment qu’il ne contrevenoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
Après cela , qu’importeroit donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîn é, en 1778 , dût
n’être considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne seroit
F
�( 4 0
pas moins vrai de dire qu’elle est‘textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, qui
e n co re une fois maintient indistinctem ent , toutes les
élections antérieures a la loi du 17 nivôse..
20. Les citoyens Ducourthial p u în é s n e se font pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à l’appui de leurs
prétentions le principe d’égalité des partages établi par
les lois de 1793 ^ et de l’an 2. Us ne veulent pas voir
que ces lois n’ont pas été faites pour régler les intérêts des
donataires entre eux, mais seulement pour régler les in—térêts des héritiers légitimes, mis en opposition avecceux des donataires. G’est cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien énergiquement exprimé dans l’articleL V II de la loi même du 17 nivôse, qui porte :
tr Le droit de réclamer le bénéfice de la lo i, quant aux
a dispositions qu’elle anmille, n’appartient qu’aux héritiers.
« naturels..»
Il est reconnu que la disposition, du tiers des biens de
G ilbert D u co u rth ial, qui est l’objet du litige , loin d’êtreannullée,. est au contraire maintenue par rapport aux
héritiers de G ilbert D u cou rth ial, en général; que le con
trat de 1778 , qui la contient , doit avoir sa pleine et en
tière exécu tio n , en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput , au préjudice de la
fille du prem ier lit, qui n’a pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens D u cour
thial p u în és, de plus grands droits qu’à leur sœur ; consé»
quennnent, dès qu’il n’attribue aucune part à cette fille
unique du premier lit, il n’en attribue aucune non plu$
à, ses frère s, sur le tiers des biens en litige.
�C 43 3
Cela posé, ce ne peut ôtre qu’en se présentant comme
^donataires concurremment avec leur frère aîné, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le tiers des biens , et en demander partage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D u«courthial en 1778, h celui des enfans à naître de son
« second mariage qu’il choisiroit, est bon en so i, et doit
* profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait en faveur d’aucun des trois.
« O r , il n y a point eu de choix valable, puisque le seul
«■qui ait été fait, celui qui étoit contenu dans le contrat
« merae de mariage , du 14 mai 1778 , a été annullé par
« le décret du 7 mars 1793. »
Hé bien! ce raisonnement, quand il ne seroit pas ren
versé par l’art. V II delà loi du 18 pluviôse, s'écarterait
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle généiale, que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
pi ohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héiitiers naturels en leur qualité d’héritiers seulem ent , et
non Par des donataires contre d’autres donataires. En
un m o t, les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu’en faveur des héritiers ; aucune n’a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen D ucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père com m un l’a avan-
'
r 2
�C4 4 )
tagé par l'acte le plus favorable de la société , par un contrat
de mariage : d’un préciput qu’il pouvoit lui ôter, mais
qu’il a voulu lui conserver. En vain ils feront des efforts,
pour se l’évolter contre la volonté paternelle , ils n’en;
feront que d’impuissans.
Paris par le jurisconsulte ancien sous-signé, le 8 germinal an g..
B E R G 1E R ,
D
é l i b é r é
à
L e C O N SE IL SOU SSIGN É qui a vu le mémoire à.
consulter et les diverses consultations au bas rapportées,
pour le fils aîné du second lit. de feu Gilbert Ducourthial.
de Lassucliette
des résolutions contenues d&ns ces consul-' tâtions. Trois questions y ont été traitées..
i° . Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens
faite en faveur des enfans du second lit, est valable?
2°. Si cette institution profite à tous les enfans} ou*
¡»u fils aîné exclusivement?
3°. Quels sont lés droits de la fille du premier lit?
L a première et la troisième question ne présentent
point de difficulté sérieuse..
Lors du contrat de m ariage, l’inégalité dé succession,
entre les enfans n’étoit pas prohibée; ils pouvoient être
" avantagés les uns sur les auti’es : on avoit éclairci et con
damné le doute , si des enfans du second lit pouvoient
être mieux traités que ceux du premier. Le contrat du,
E s t d ’a v is
�second mariage assura donc irrévocablement aux enfans*
du second lit ua avantage alors licite.
20. Par les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant, de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa ,
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avi'il 1791 rendit
ee rappel inutile; elle le fit clle-mcme en> prononçant
l'abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permet
taient d’exclure les filles. La fille du premier lit est donc
héritière comme >les autres enfans , sauf le rapport.de ce
qu’elle a reçu;
3 • Mais à qui appartiendra le tiers réservé dans' le1
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat a celui d’eux qui seroit choisi ,
et à. défaut, à lam é?, G est la seule question véritable-'
ment litigieuse..
Bans l’ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute. Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîné, que le contrat du
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit j le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna ii aucun des enfans à en. naître la.certitude de re
cueillir ce tiers. Uni seul y. étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant. Il est vrai
qu’à défaut de ch oix, l’aîné étoit appelé : il est vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an 5 , a confirmé , art. 1er. ]es
institutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de la loi du 7 mars 1793 , et que par l’ar
ticle V II, elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17
nivôse an 2 , les élections d’héritier, qui auroient été fa i-
�( 4M
tes par acte ayant diue certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse.Mais, dira-t-on, l’article V II n’est pas
a p p lic a b le , puisquil n y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et 1 article Iei*. n’est pas applicable
non plus , parce qu il n y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
■
7 mars 1793 , lui avoit ôté la faculté du ch oix, en dé
clarant que tous les descendans auraient un droit égal
sur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont e u , par la loi du
7 mars, un droit égal à ce préeiput qu’il avoit destiné
en se mariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus
été permis depuis le 7 mars 1793-, de disposer en faveur
de l’un, au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à ses parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués, et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
Mais le choix fut placé-dans l’institution même ; l’ins
tituant en se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut donc, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir,'si son père ne disposoit pas au-
�C 47 7
trement. H avoit donc sur ses frères qui n’étoient qu e ligibles, l’avantage d’être élu conditionnellement', c està-d:re, si le père ne térrioignoit pas une autre volonté.
La condition qui Tauroit dépouillé n’étant pas arri
vée , son droit remonte au titre qui lui fut donne par
le contrat, titre irrévocable de sa n a t u r e ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé a laissé subsister
^institution en faveur de l’aîné dans toute sa force-.
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com
mun des testateurs, l’aîné étoit l’objet dés choix et des
préférences; et si l’on se réservoit de p o u v o i r appeler
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans
le devoir que pour lui donner- des co-partageans. C’est
dans la même intention qu’afin que la réserve derchoisir
ne lui nuisît pas,, on déclaroit qu’à défaut d’élection il
seroit héritier.
L e défaut d’élection n’est donc que la ratification de
*|V •
linstitution de l’aîné, si un autre n’est appelé : o r, la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con-,
trat à. la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,
et nullement par la loi du 7 mars 1793^
Il
n’est pas même vi'ai que - cette loi eût ôté au père
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un
de ses enfans qu’à l’avenir , elle ne détruisoit pas
l’avantage déjà fait à celui des enfans qu’il éliroit, encore
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , en
cas de non élection.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir,
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre
.
�( 43)
irrévocable, elle ne pouvoil embrasser l’hypotlièse dont
il s’agit; car, ou elle empechoit le père d'élire, ou elle
lui en laissoil la faculté. Si elle lui en laissoit la faculté, il
pouvoil donc dans cette espece particulière avantager un
de ses enians : si elle empêchoit l’élection, elle auroit donc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde; elle auroit eu eiTet ré
troactif. Le père avoit donné. (U n e institution contrac
tuelle est une donation ). Le père avoit donné à un seul
parmi les enfans qu’il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il 11 y
avoit pas d’élection-, il y en avoit une bien expresse dans
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en
substituer une autre, elle doit avoir son effet.
Trois lois sont à considérer : celle du 7 mars qui abolit
pour l’avenir la faculté de disposer en ligne directe ; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures .et irrévocables.
La loi du 17 nivôse fut plus hardie', elle annulla ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
]e f4 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l'effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2, fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi jdu 9 fructidor an 3. Le donateur ou instituant,
décédé le 27 juillet 1793 , est donc mort sous l’empire
de la loi du 7 mars précédent, qui ne touchoit pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an 5 maintient expressé
ment , par l’article I.cr. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avaut la publication do
la
�( 49)
la loi du 7 mars 1793 ; et par l'article V I I , elle maintient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi du 17 nivôse.
O r , la disposition de 1778 est antérieure au 7 mars
* 793Elle est irrévocable de sa nature ; car elle est comprise
dans un co n trat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvoit être révoquée au préjudice
de l’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du choix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’institution en soi ne soit irrévocable: elle donne droit, et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne l’est pas : tous les
appelés ont l’espérance d’être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
L article V II de la loi du 18 pluviôse est décisif j il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses •
1 °, que l’élection antérieure au 17 niyôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 20. qye la loi du
7 mars 1793 n’avoit pas prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d’actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations, ou devenus tels par les événemcns, tels
G
�( 5o ')'
que les testamens après le décès de leurs auteurs ; que les
élections ne furent supprimées que par la loi du 17 nivô>e,
et que les corrections faites ù.cette loi les out rétablie^ pour
le passé.
> 7^1
. '
-’ .
O r , il s’agit ici d’une donation faite un entre plusieurs:
donation irrévocable et permise en 1778.
Il
s’agit de l’élection de ce donataire , faite dans la dona
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
Avant son décès arrivé en juillet 1793 , ou il eût pu en
appeler un autre , ou il ne l'auroit pas pu. A u premier cas,
il 11e l'a pas voulu ; sa volonté , que rien, ne génoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, l’élec
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit pas, doit être exé
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit : elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le contrat de mariage. Le dépouil
ler , ce seroit rétroagir ; ce seroit tomber dans cette absur
dité de le dépouiller , parce que la condition sous laquelle
le testateur l’avoit appelé ( le défaut d’autre ch o ix ), est
arrivée.
D É L IB É R É i\
Paris, le
2
germinal an 9.
SIM É O N . P O R T A L IS . M U R A I R E , président
au tribunal de cassation. F A V A R D .
L E C O N SE IL SO U SSIGN É , qui a lu une consultation
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données ¿1 Riom et à Clermont-Ferrand \
E s t n u m ê m e AVIS sur les trois questions traitées dans
çcs co n su lta tio n s, d o n t les résolutions sont uniformes,
�( Si )
Sur ïa première question, il est sans difficulté qu en 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde femme, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
autrement, un de ses enfans plus que l’autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
La jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui contractoit un nouveau mariage, ayant des enfans du premier,
de faire des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union, après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du it août 1740 , qui
est rapporté en forme avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
79. On trouve au même en droit, à la suite de l’arrêt du 11
août 1740 , un autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L institution d’héritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , étoit donc valable dans son principe.
Sur la d eu x ièm e q u e s tio n , cette lib é ra lité du père subsistoit dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est décédé, et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales:
G 2
�.
c
S
z
5
mais cette loi ne régloit que l’avenir, et non le passé.
L ’effet rétroactif attribué depuis aux lois des 5 b ru
maire et 17 nivose an 2 , en rétrogradant jusqu’au 14
juillet 1789, a été aboli, et par conséquent l’institution
d’héritier, qui avoit été détruite, est redevenue en pleine
Vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second lit , les autres
enfans ne peuvent le lui contester.
L e contrat de mariage de X778 ,. contient deux disposi
tions :1a première est une institution d’héritier pour untiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
ou le survivant d’eux voudront choisir ; la seconde est
une vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils aîn é, au défaut de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N ’y ayant point eu de choix ni par les père et mère,
conjointement, ni par le citoyen Ducourthial qui a sur
vécu , le fils aîné s'est donc trouve seul donataire, non,
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que le contrat de mariage renferme.
La loi du 7 mars 1793 n’a point défendu les élections
d’héritier ou de donataire à faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d’héritier ou de donataire n’est
point une donation proprement dite. Ce n’est que l'exé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions
sont de. droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1793 doit donc être restreinte dans le cas des.donations
postérieures à sa publication.
* I>’aillcurs; le fils aîné n’avoit pas besoin detre élu. Il
�(
6
3
)
•
•
.
tStoit institué éventuellement par le contrat de mariage
m êm e, dans lc'Càs où üri'aüttû que lui ne seroit pas
nommé.
i
v
r k afn i Vàrticle V II de ta loi du ià pluviôse an 5 , donnée
en explication du rapport de l'cfîet rétroactif, porte : « T^S
« élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
«perdu q u io n t été annullées par les articles X X III et
« X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
« 1789 , sont rétablies dans leur effet prim itif, s i elles ont
« étéfa ites par acte ayant date certaine avant la publi« cation de ladite loi du 17 nivôse. »
D e pareilles élections pouvoient donc s’effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l’espèce proposée, le citoyen
Ducourthial étant décédé le 17 juillet 1793, quand on
considéreroit le défaut de choix de sa part comme une élec
tion du fils aîné du second l it , cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les pèi*e et m ère, ou le survivant d'eux, n’éliroient pas:
ce qui met son droit hors de tout doute.
Il est m êm e o b se rv e r, q u e l’article V I I de la loi du 18
pluviôse ne parle point du cas où le donateur prévoyant
le défaut d'élection, a désigné éventuellement, comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fut recueillie.
Sur la troisième question, la fille du premier lit étant
exclue par la coutume, sa renonciation à la succession
future de son père n*a pas plus d’effet que lu forclusion
�( 54 )
légale. A in s i, elle a le droit de succéder avec ses frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793.
D é lib é r é
à Paris i par le citoyen F e r e y ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
F E R E Y,
** I
A R io m , de l'imprimerie de L a n d r io t , imprimeur du tribunal
d ’app
e l
An 9
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Touttée
Touttée jeune
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Pagès
Maugue
Bergier
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
partage
successions
secondes noces
conflit de lois
droit d'aînesse
Description
An account of the resource
Consultations [contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette avec Marie-Léonarde Cornudet et contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte Ducourthial, du 2 avril 1783]
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1778-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0710
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0527
BCU_Factums_M0127
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
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droit d'aînesse
partage
secondes noces
Successions
-
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p a w ta n iiiw gi
3
MEMOIRE
EN R É P O N S E ,
P o u r dame G i l b e r t e D U C O U R T I A L , v eu ve
de Joseph M a i g n o l , tutrice de leurs enfans
mineurs; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
v e u v e de M ichel d e P a n n e v e r t ; dame M a r i e
M A I G N O L , et sieur A n t o i n e B O U Y O N ,
son mari ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
et le sieur P i e r r e L E G A Y , son é p o u x, et sieur
A n t o i n e M A I G N O L , tous intimés ;
C o n tre
sieur
G u illa u m e
G u illa u m e
M A I G N O L y autre
M A I G N O L , son f i l s , appelans
d’un jugement rendu au tribunal d'arrondisse
ment de Riom , le 18 floréal an 1 ;
3
E t
encore en présence
d' A
n to in e
G U IL
L A U M E , maréchal, habitant de la commune
de Pontaumur, aussi intimé.
l
E sieur G uillau m e M a ignol
fils demande le désisteD
m eut d ’ un p ré vendu p ar P ierre M a ig n o l, d e L a n d o g n e ,
A
�'( 2 )
ii Antoine G uillaum e: il a osé revenir contre des engagemens contractés par Guillaume M a ig n o l, son père ; il
veut etre tout à la ibis créancier et débiteur de lui-même ;
et c’est après vingt-cinq ans d’exécution, après que Pierre
M a ign o l, et son fils, héritier institué, sont décédés , que
Guillaume M aignol fils a cru trouver les circonstances
favorables, pour arracher à la famille M a ig n o l, de L an d o g n e ,u n héritage dont leur père avoitpaye le prix.
Cette tentative qui blesse l a délicatesse et les conve
nances, a été rejetée par le tribunal d’arrondissement; et
la cour s ’ e m p r e s s e r a de confiimci un jugement conforme
en tous points aux lois et a. 1 équité,
F A I T S .
L e 16 mai 1 7 6 5 , un sieur M ichel Lenoble , habitant
du lieu de V a u r y , concéda aux dames Gliefdeville, à titre
de rente foncière et non l’achetable , un pré appelé
P ré-G rand , d elà contenue d’entour sept journaux, situé
dans les appartenances de Vaury.
Cette concession fut faite moyennant la rente annuelle
de 90 francs.
P a r une transaction du même jour, le sieur Lenoble
se r e c o n n u t débiteur d’une somme d e 1800 francs envers
le sieur Guillaume IMaignol, du Cheval - B lan c, père
d’autre Guillaume M aign ol, qui est aujourd’hui la partie
principale.
P o u r le payement de cette somme de 1800 francs,
Lenoble délégua à M aignol, du Cheval-Blanc, la rente
qui avoit été créée le nierne jour par les dames Chefdeville.
«
�( 3 )
Maignol, du Cheval-Blanc, a joui de cette rente jusqu’au
6 juin 1777 , qu’il se lit subroger par Annet Chefdeville,
héritier des preneuses, en 176 , à la propriété du pré
co n céd é, à la charge par lui d’acquitter la rente de 90 fr.
A u moyen de cet arrangement, M aignol, du ChevalBlanc , devenoit tout à la fois créancier et débiteur de
la rente de 90 fr. ; de manière que cette rente s’éleignit
par la confusion.
O n sait que l’eiFet de la confusion est d’anéantir les
deux qualités incompatibles qui se trouvent réunies dans
une môme personne; ce qui est fondé sur ce qu’il est
impossible d’être à la fois créancier et débiteur de soiîneme.
L e pré dont il s’agit n’étoit point à la convenance du
sieur M aign ol, du Clieval-Blanc; il étoit peut-être plus
rapproché du sieur M aign o l, de Landogne; mais point
assez à sa portée, pour qu’il désirât de l’acquérir.
M a ig n o l, du Cheval - B la n c , avoit d’autres vu es; il
5
convoitoit depuis long-temps un domaine qui joignoit
ses propriétés , et qui avoit été vendu par un sieur
de Larfeuil au nommé Jean Gastier.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, savoit que M aign o l, de
L an d ogn e, étoit créancier du sieur de L a r f e u i l , d’une
l’ente foncière au principal de 1400 francs, de plusieurs
années d’arrérages, et qu’il avoit fait d é c l a r e r le domaine
vendu à Gastier, affecté et hypothéqué au payement de
sa créance.
M aign o l, du Cheval-Blanc, n’ignoroit pas que le paye
ment de cette créance étoit au-dessus des forces du ven
deur comme de l’acquéreur; et il lui sembloit facile de
A 2
�(4)
devenir propriétaire du domaine, s’il étoit acquéreur de
la créance.
Il va solliciter Pierre M aign ol, de Landogne, de lui
céder l ’effet de cette créance, offrant de lui donner en
échange ce P ré -G ra n d , dont le sieur M aignol, de L an
dogne , n’avoit nullement besoin, qu’il n’a pas même
conservé.
M a ig n o l, de L a n d o g n e , par obligeance pour son
parent, accepta la proposition; mais il ne vouloit pas
payer de droits de lods : il falloit prendre une tournure
pour ]çg éviter ; et en conséquence, le meme jour 2 oc
tobre 1779? il fut Pass^ ^eux actes entre les parties, l’un
par-devant n o ta ire, et l’autre sous seing privé. Comme
ces deux actes font la matière du procès, il est impor
tant de les analiser.
P a r le premier acte notarié, Pierre M aign o l, de L a n
dogne , cède et transporte à Guillaume M a ig n o l, du
Cheval-Blanc, un contrat de rente de la somme de 28 fr.
par an , au principal de 1400 francs, faisant moitié de
2800 francs, consentie par dame Marie L aco u r, veuve
de Henri de Larfeuil, au profit de dame Gaum et, grandtante du cédant, le 23 octobre 1720,
Il cède pareillement les arrérages de cette rente de
puis l’année 1 7 ^ ? jusques et compris 1779*
Il cède encore l’effet de la sentence qu’il avoit ob
tenue en la sénéchaussée d A u v e rg n e , le 14 août 1 7
,
56
contre Jean Gastier, acquéreur de L arfeuil, d’un do
maine situé au Cheval-Blanc, et sur lequel il avoit exercé
une action eu matière hypotliecaire.
M aign o l, du Cheval-JBlanc, est subrogé à l’exécution
�( 5 )
de cette sentence, et aux procès verbaux de nomina
tion d’experts, sans néanmoins aucune garantie, ni res
titution de deniers pour cet objet.
L e prix de cette cession est fixé à la somme de 2000 f r . ,
pour payement de partie de laquelle M a ig n o l, du ChevalB la n c, cède et transporte, avec toute promesse de ga
rantir , un contrat de rente de la somme de 90 f r . , au
principal de 1800 f r . , à lui due par les héritiers de Pierre
Lenoble , suivant le traité du 16 mai i y
; laquelle
ren te, est-il d it, est -payable p a r les jou is s ans du pré
appelé P r é ” G r a n d , su r lequel elle est spécialement
ajfectée.
55
A u moyen de cette cession , M a ig n o l, du ChevalBlan c, demeure quitte de la somme de 1800 francs, en
déduction de celle de 2000 francs , prix du transport
consenti par M a ig n o l, de* Landogne.
A l’égard de la somme de 200 francs restante, Pierre
M aign o l, de Landogne, reconnoît l’avoir reçue de G u il
laume M aign o l, du Cheval-Blanc, en délivrance de pro
messe de pareille som m e, dont quittance.
A la suite de cet acte, M a ign o l, du C h e v a l - Blanc,
donne la déclaration suivanle, écrite en entier de sa main :
« Je soussigné, subroge M e. Pierre M aignol, bailli de
« Landogne, ci Peffet de la vente du bail emphytéotique
« du p ré appelé P r é - G r a n d , que sieur A n n et C hef« deçille m’ a consentie devant M a ig n o l, n o t a ir e , le 6
« ju in 1777 > pour par lui jouir dudit pré ainsi qu’il
« avisera bon être, moyennant la somme de 280 livres,
« dont 200 livres demeurent compensées avec pareille
« somme de 200 l i v . , comprise en la cession que ledit
�«
«
«
te
( 6 }
sieur Maignol m’a faite devant A lle y r a t, cejourd’liui,
d’un contrat de rente sur les sieurs de Larfeuil, et les
80 livres restantes me seront déduites sur les arrê
rages réservés par l’acte ci-dessus daté. Fait ce 2 oc-
« tobre 1779- »
P ou r entendre cette dernière clause, relativement à la
somme de 80 francs, il est bon d’observer que par l’acte
notarié, et par une c l a u s e finale, Pierre M a ig n o l, de
L a n d o g n e , s’étoit réservé les arréragés dus antérieure
ment à 1 7 5 8 , dont il devoit être fait compte entre le
cédataire et le c é d a n t , sans que M aignol, de Landogne,
pût e x e r c e r aucune action contre Larfeuil de Lacour;
« attendu, est-il d i t , que Guillaume M aign ol, du Clieval« Blanc, s’est obligé de rapporter quittance au sieur de
« Larfeuil de ces mêmes arrérages de rente. »
Cette dernière énonciation démontre assez que M a i
gn o l, du Cheval-Blanc, a voit déjà pris des arrangemens
avec le sieur de Larfeuil, et que tout étoit d’accord pour
que Guillaume M aignol devînt propriétaire du domaine
vendu à Gastier.
Q u o i q u ’ o n ait voulu à dessein répandre de l’obscurité
dans ces conventions, l’intention des parties n’en est pas
moins clairement manifestée. Il est évident que M aignol,
31
du Cheval-J ‘u:iC ? . îl voulu transmettre la propriété du
pré dont il s’agit à M aignol, de Landogne. Il ne pouvoit
pas vendre une rente qui n’existoit plus, qui s’étoit éteinte
par lfi confusion : il vouloit vendre le pré ; et l’acte sons
seing p r iv é , qui a suivi l’acte public, 11’étoit autre chose
que la p r o fe sse de 200 francs enoncee dans la cession
du même jour; promesse qui développoit les intentions
�(7 )
des parties, mais qui n’avoit pas besoin d’être faite double,
puisqu’elle ne contenoit point d’engagemens synallagm.-itiques, qu’ il n’y avoit d’obligation que de la part de
M a ign o l, du C h e va l-B lan c, attendu que le prix de la
vente étoit payé jusqu’à concurrence de 200 irancs, au
moyen de la cession consentie le meme jour. '
»
Aussi n’y a-t-il pas eu de difficulté entre les parties
pendant tout le temps qu’a vécu Pierre M a ig n o l, ainsi
que Joseph M aiguol, son fils et son héritier. Tous deux
ont joui du pré vendu en 1779 : mais l’exploitation étoit
pénible pour eux^ et Pierre M a ig u o l, de Landogne, sc
détermina à le v en d re , par contrat du 29 ventôse au 6 ,
à Antoine Guillaum e, maréchal, du lieu de Pontaumur.
Les M a ig n o l, du Cheval-Blanc, ont souffert, sans se
plaindre, et les jouissances de M a ig n o l, et la vente qu’il
a consentie.
Ce n’est que six ans après, et le 29 vendémairc an 1 2 ,
que Guillaume M aignol iils , se disant donataire de son
p e r e , a fait assigner Antoine G uillaum e, acquéreur, de
M a i g n o l, de L a n d o g n e , en désistement du pré dont il
s’agit, avec restitution de jouissances.
A ntoine Guillaum e, à son to u r, a fait dénoncer cette
demande aux héritiers de son vendeur, et a pris contre
eux des conclusions en garantie et dommagcs-intérêls.
Un premier jugement du tribunal de Riom , en date
du 6 thermidor an 1 2 , a ordonné la mise en cause de
Guillaume Maignol père , à la requête des intimés; ceuxci ont pris contre M aignol père des conclusions en contre
recours, à ce qu’il fût tenu de faire valoir la vente par
lui consentie h Pierre M a ig n o l, de Landogne.
\
�C 8 )
Un second jugement, du 23 venlose an 1 3 , a ordonné
la comparution des parties en personne ; elles ont satisfait
à ce jugement, et ont été interrogées le 6 floréal an 13.
Les interrogatoires respectifs sont transcrits dans le
mémoire de l’appelant, pages 10 et suivantes, aux notes.
Il résulte de l'interrogatoire de Maignol père , d u
C h eval-B lan c, i°. que le même jo u r de ta cte n ota rié,
du 2 octobre 1 7 7 9 , ^
a etl un acfe sous seing privé
entre les mômes parties ; 20. que cet acte sou§ seing privé
a été écrit en entier de la matn de M aignol père , du
C heval-B lan c ; 3°* cIuG M aign ol, de Landogne, a dicté
les conditions; °* q u’il n y a Pas ^ll d’autre double sous
seing privé que celui qui lui est représenté; °. que cet
acte a eu pour but de céder à Pierre Maignol la jouis
4
5
sance du pré dont est question , jusqu’à de nouveaux
arrangemens entr’eu x ; 6°. que l ’acte notarié ne lui délaissoit pas cette jouissance, qu’elle ne lui est délaissée que
par l’actesousseing privé; 7 0. que le m otif d’éviter les droits
de lods n’est pas entré dans sa pensée; 8°, qu’il n’a pas
été question de la propriété du p r é ; que ce n’étoit ni
son intention, ni celle de M a ig n o l, de Landogne. Si
l’acte ne fait aucune mention de la jouissance , il a écrit
sous la dictée de Pierre Maignol.
L e fils M a ig n o l, du Cheval-Blanc, n’étoit pas présent
à cet acte. Il en a eu connoissance bientôt après, et a osé
en témoigner son mécontentement a son père : le fils
avoit alors seize ans.
M aignol père convient que M a ig n o l, de Landogne ,
a bien pu avoir l ’intention de se soustraire aux droits de
lods, de devenir propriétaire du p r é ; mais il n’a pas été
question de la propriété entr’eux.
�( 9 )
A u surplus M a îg n o l, du Cheval-Blanc , ne jouîssoit
pas de ce pré lorsqu’il a fait une donation à son lils ; il
ne lui a pas donné nominativement le pré , innis il lui a
donné en général tous ses biens. Il a eu connoissance do
la vente consentie par M a ig n o l, d eL an d o gn e, à Antoine
Guillaum e; il l’a sue quatre à cinq mois après, et ne s’en
est pas mis en peine : cependant il a voulu , après cette
vente , se procurer l’acte de vente de 1777 ; mais comme
la minute se trouvoit. cliez M a ig n o l, de Landogne, il n’a
pu se la procurer d’abord : enfin il désavoue que le sieur
Lc'gay ait écrit un autre double de l’aclc sous seing privé.
Il est important de s’arrêter sur ce premier interro
gatoire. Ou voit que quelque soin qu’ait mis Maignol
père , du Cheval - Blanc , à s’envelopper d’ une certaine
obscurité, et d’être très-réservé sur ses confidences, il n’en
est pas moins constant que l’acte sous seing privé est du
même jo u r que l’acte notarié ; qu’il est écrit en entier de
la main de M a ign o l, du Cheval-Blanc ; que son fils a eu
connoissance de cet acte dans le même temps, lorsqu’il
11’avoit que seize ans ; qu’ainsi la date de l’acte est cer
taine , et que Maignol fils en imposoit à la justice, lors
qu’il disoit qu’il n’avoit connu cet acte qu’après sa do
nation.
M aignol fils, dans son interrogatoire, prétend n’avoir
eu connoissance de cet acte que depuis qii’ü es^ (l
de la m aison. A v a n t , son père lui a voit parlé des arrangemens faits avec M aign o l, de Landogue , mais lui disoit
qu il esperoit rentrer dans le pré ; il a la maladresse de
dire que son père a voit consulté trois jurisconsultes qu’il
nom m e, sur l’acte sous seing p r iv é , et on lui avoit dit
�( 1° )
que cet acte ¿toit nul pour n’avoir pas ¿té fait double ;
mais s’il a consulté sur cet a c te , il l’avoit donc dans les
mains : il répond que n o n , mais il en savoit le contenu.
L e père, interpellé sur ce f a it, répond affirmativement
que sur ce qu’il avoit rapporté de cet acte, M e. Andraud
lui avoit assuré qu’il étoit nul.
M aign ol fils n’a vu dans aucun temps un écrit sous
seing privé entre les mains de son père; ce dernier lui
a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu de double ; son père
ne lui a pas donné nominativement le pre, mais lui disoit
toujours qu’il avoit le droit de s’en mettre en possession,
et lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre qui
établissoit la propriété de ce p r é , la minute de ce titre
étant entre les mains de Pierre Maignol.
Mais si son père prenoit un prétexte pour se dispenser
de lui donner ce p r é , M aignol fils ne peut donc pas s’en
dire donataire, et seroit sans qualité pour en demander
le désistement : lorsqu’on est de mauvaise f o i , on n’est
pas toujours conséquent.
Enfin Maignol fils a ouï dire que le sieur L e g a y ,
gendre de M a ig n o l, de L a n d o g n e, avoit été le scribe de
l ’acte n o ta rié, et non du sous-seing privé.
L e sieur Bouyon , l’un des gendres de Pierre M aignol,
de L a n d o g n e, a déclaré qu’il n’avoit eu connoissance, et
n’avoit entendu parler de cet acte ? que depuis l’affaire
dont il s’agit.
L e sienr L e g a y , autre gendre, se trouvoit à Landogne;
le sieur M aignol l’appela dans son cabinet, où il étoit
avec M aignol p è re , du Clieval-Blanc; il l’ invita à écrire
un double sous seing privé ? contenant subrogation de
�( 11 )
rente , et notamment contenant aussi cession d’ un pré de
la part de M a ig n o l, du Cheval - B lan c, au profit de
M a ig n o l, de Landogne ; il ne se rappelle pas sur quel
papier il écrivoit ; il croit, sans pouvoir le certifier , que.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, écrivoit avec l u i , et que
M a ig n o l, de L a n d o g n e, leur dictoit ; il n’a écrit qu’ un
acte, ne se rappelle pas qui signa ; M aignol père n’écrivit
p o in t , c’étoit lui qui dictoit.
Après ces interrogatoires, il a été rendu, le 18 floréal
an 1 3 , un jugement qui déclare Maiguol père et fils non
recevables dans la demande en désistement du pré dont
il s’a g it , met les parties hors de cause sur les demandes
en recours et contre reco urs, compense les dépens entre
A ntoine Guillaume et les M a ig n o l, de L an d o gn e; con
damne les M a ig n o l, du Cheval-Blanc , eu tous les dépens,
ineme en ceux compensés , et aux c o û t , expédition et
signification du jugement.
Les premiers juges remarquent avec sagacité que G u il
laume Maignol père ayant réuni dans sa main la rente,
et le pré qui y étoit asservi, cette confusion de la qualié
de débiteur et de créancier a opéré nécessairement l ’ex
tinction de la rente.
Dès-lors le contrat de 1779 n’a pu avoir pour objet
la cession d’une rente qui n’existoit plus , et ne peut se
référer qu’à la propriété du pré.
Les premiers juges ont aussi très-bien observé que
par l’acte sous seing privé , M a ig n o l, du Cheval-Blanc ,
subrogeoit Pierre M aignol à la vente qui lui a voit ete
consentie le 6 juin 1777 >
que cette subrogation ne
pou voit s’entendre que de la propriété , puisque l’acte
B 2
�( 12 )
do 1777 étoit exclusivement translatif de la propriété
du pré.
L e tribunal dont est appel , répondant à l’objection
résultante du défaut de mention que l’acte a été fait
double, décide que les M aign o l, du Cheval-Blanc, dans
les circonstances où se trouvent les parties, ne peuvent
exciper de celte omission ; car il résulte des interroga
toires de M aignol père et fils, qu’ils ont connu la pos
session publique de M aign ol, de Landogne, et après lui
d’A ntoine Guillaume, tiers détenteur. Ils ne se sont pas
mis en devoir de réclamer contie cette possession; ils
n’ont pas é g a l e m e n t réclamé contre l’acte sous seing
p r i v é du 2 octobre 1779, quoique cet acte f û t présent
à leur esprit, quoiqu’il soit du f a i t personnel de Maignol
p è r e , qui l’avoit écrit en entier.
L e tribunal en tire la juste conséquence que l’exécu
tion donnée î\ cet acte sous seing p r i v é , du 2 octobre
I 779? forme une fin de non-recevoir contre Guillaume
M a ig n o l, d’après l’article 1325 du Code c iv il; et c’est
sans contredit rendre bonne justice.
Guillaume Maignol père a été convaincu que ce ju
gement étoit le résultat d’une discussion éclairée; il a
gardé le silence, et ne s’est point rendu appelant. Son
iils a été plus courageux; il n’a pas même craint de rendre
sa défense publique, comme si sa prétention pouvoit
faire honneur ù sa délicatesse.
O n se flatte d’écarter péremptoirement toutes les ob
jections qu’il a proposées : on établira, i ° . que Guillaume
M aignol père 11’a voulu et pu vendre que la propriété
du p r é , attendu que la rente étoit éteinte par l’acqui
sition du 6 juin 17775
�03
)
2.°. Que l ’acte sous seing p r iv é , du 2 octobre 17795
11’avoit pas besoin d’être fait double;
3°* Que cette omission, dans tous les cas, seroit ré
parée par l’exécution de l’acte pendant vingt-cinq années.
§. 1« .
L a rente de 90 fra n cs était anéantie p a r l'acte de
vente du 6 ju in 1777.
L a confusion, disent les auteurs, est l’union et le m é
lange de plusieurs choses ou de plusieurs droits, qui en
opèrent le changement ou l’anéantissement. Cette con
fusion s’opère principalement par la réunion de la pro
priété directe et de la propriété utile.
L ’effet de cette confusion est d’anéantir les deux qua
lités incompatibles qui se trouvent réunies dans une
même personne; ce qui est fondé sur ce qu’il est im
possible d’être à la fois créancier et débiteur de soi-même.
Voici comment s’exprime à cet égard Boutaric, Des iiefs,
pag. 92.
« Je suis seigneur direct d’un fonds assujéti par le
« bail à une rente annuelle d’un setier de blé ; ce
« fonds revient en ma main par d é g u e r p i s s e m e n t , préK
«
«
«
«
«
lation, ou autrement; je l’aliène ensuite sans réserver la rente : ce défaut de réserve r e n d r a - t - i l l e fonds
allodial? O u i, sans doute; car, quoi qu’en dise B rodcau sur L o u e t, tel est l'effet de la confusion ou de
la reunion du domaine utile au domaine direct, d'éteindre absolument la rente, »
�C 14 )
Il cite la loi dernière, S i q u is , ff. D e serv. urb. P r œ àia œde.s quœ suis œdibtts servirent, cum e/msset, traditas sib i acceperity coirfusa sublata que servitus e s t ,
et s i rursiis vendere v u lt, imponenda servitus est alioquin libéré veneunt.
L e même auteur ajoute que les deux qualités de sei
gneur et d’empliytéote ne peuvent subsister sur la même
tête , qui ne peut servir à soi-m êm e, et être soi-même
son emphytéote et son seigneur; que cette réunion s’o
père incontinent et sans délai, quand bien même la vente
ne seroit faite qu’à faculté de rachat.
Brillon , dans ses arrêts, enseigne que l’obligation est
absolument éteinte, toutes les fois qu’il y a concours de
la dette et de la créance dans la même personne; il cite
la loi 7 5 , ff. D e solut.
Despeisses, tom. ie r .5 pag. 803, édit. in -40., dit que
toutes obligations prennent fin par confusion ; qu ia nem opotest apudeundem pro ipso obligatus esse. L . Heures,
21 j §■ Q uod s i , 3 , fi'. F ide jussoribus.
On ne voudra pas sans doute établir une différence
entre le seigneur et le bailleur à titre de rente foncière.
Personne n’ignore que la rente foncière étoit considérée
comme un immeuble réel : le propriétaire de la rente
conserve la propriété directe; il a l’espérance de rentrer
dans le fonds, faute de payement, et la rente représente
le fonds.
D ’après ces principes fondés sur les assertions les plus
positives des docteurs du d ro it, comment seroit-il pos
sible de penser que Guillaume M aign o l, par l’acte no»
tarié du 2 septembre 1779 > a voulu ou pu vendre sirn-r
�C
15)
plement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , la rente de 90 fr.
dont il étoit acquéreur en i j 5 5 ?
Cette rente n’existoit plus ; elle étoit éteinte par la
réunion du domaine u tile , lorsque Guillaume M aignol
eut acquis le pré asservi. Il ne pouvoit donc pas vendre
une cliim è re , une cliose anéantie : il a donc entendu
vendre la propriété du pré. Cela est d’autant plus évi
d en t, qu’il énonce dans cet acte notarié que la rente
dont il s’agit éloit due par les jou isso n s du pré. O r ,
c’étoit lui qui jouissoit du p r é , qui l’avoit acquis ; il ne
pouvoit pas vendre une rente sur lu i-m em e, puisqu’il
ne pouvoit être débiteur et créancier, puisqu’enfin la
rente étoit éteinte absolument dès le moment de la réu
n io n , et sans pouvoir revivre.
Il est donc démontré que la convention arrêtée entre
les parties étoit de vendre la propriété du p r é ; que la
rédaction de l’acte notarié n’a eu d’autre objet que d’éviter
des droits de lods ; et quoiqu’on dise que ces lods eussent
été peu considérables ; que M a ig n o l, acquéreur, étant
b a illi, auroit obtenu des remises, etc. etc.
Il ne s’agit pas d’examiner ou de savoir à quoi se portoient ces lods ; on sait qu'en général ce droit paroissoit
odieux autant qu’onéreux aux acquéreurs : il y avoit un
certain amour-propre à les éluder. Combien n’y a-t-il pas
d’exemples que des droits de lods très-modiques ont empeclié des ventes, soit parce qu’on ne vouloit pas solli
citer des grâces, ni payer rigoureusement le droit ! Enfin
les lods étoient en pure perte pour l’acquereur ; ils
l’étoient d’autant mieux dans l ’espèce, que l’objet cédé
�( i6 )
u Maignol , du C h e v a l-B la n c, n’en devoit p r s , tandis
que M a ig n o l, de L an dogn e, auroit dû le tiers denier
en ascendant sur le prix du pré dont il s’agit; et dans
ce cas la chance n’étoit pas égale.
Si l’acte notarié a q u e l q u ’ y b s c u r i t é dans sa rédaction,
toute équivoque est levée par la déclaration sous seing
privée du même jour : il n’y a plus de doute sur la pro
p rié té , puisque M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c, subroge
M a ig u o l, de L an do gn e, à l’acte du 6 juin 1777.
Si” t
que ce dernier acte_est celui qui transféré la propi’iété
du pré à Guillaume Maignol.
Dans tous les cas, toute clause obscure s’interpréteroit
contre M a ig n o l, vendeur, qui pouvoit dicter la loi, et
qui le pouvoit d’autant m ieux, qu’il 11e cesse de. répéter
que M a ig n o l, de Landogn e, convoitoit, désiroit le pré
dont il s’agit. S’il avoit un désir si violent de cet objet,
il se seroit rendu moins difficile sur les conditions, et
auroit subi la loi de son vendeur.
Ainsi le pré en question est nécessairement vendu par
l ’acte notarié, du 2 octobre 1779 : M aign o l, du ChevalBlanc, ne pouvoit vendre autre chose-, et, sous ce rapport,
son fils seroit non recevable dans sa prétention.
§• 1 1 .
L 'a cte sous senig p r iVe > du 2 octobre 1 7 7 9 , r i o i t pas
besoin d'étre fa it double.
Guillaume M aignol fils, qui sent toute la force de cet
acte,
�17
(
)
a cte , réunit tous ses moyens pour l ’écarter : en conve
nant qu’ il contient la vente du p r é , il soutient qu’il est
n u l, faute d’avoir été fait double, ou du moins faute
d ’en contenir la mention.
Pour apprécier le xxiérite de cette objection principale,
il est bon d’examiner la nature de cet acte.
Eu matière d’actes sous seing p r iv é , on distingue les
contrats bilatéraux ou synallagmatiques, d’avec les con
trats unilatéraux-, les premiers sont ceux dans lesquels
chacun des contraetans s’oblige envers l’autre; les seconds
sont ceux où il n’y a qu’une seule partie obligée.
On convient que les premiers doivent être faits doubles,
sauf l’exception dont il sera bientôt parlé, parce qu’il faut
bien que chaque partie ait son acte dans les mains pour
forcer l’autre à l’exécuter.
A 1 égard des seconds, on n’a jamais prétendu qu’ un
contrat unilatéral, comme une déclaration, une promesse
ou un b illet, dussent être faits doubles.
L e sieur M a ign o l, appelant, à moins de s’aveugler,
ne peut placer l’acte sous seing p riv é, du 2 octobre 1779,
parmi les contrats bilatéraux: la contexture de l’acte s’ÿ
oppose absolument. Guillaume Maignol père y parle tout
seul : J e soussigné 7 déclare , etc.,' lui seul c o n tra c te des
engagemens ; il a reçu le prix de la vente par le contrat
notarié. C ’est au contraire lui qui s e t r o u v e débiteur
d une somme do 200 francs ; il en c o n se n t une promesse
au profit du sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e : -cette promesse
est même énoncée, son existence est e x p r i m é e , par l’acte
devant notaire, du même jour; lui seul s’oblige. M a igu o l,
c
�( i8 )
de Landogne, 11e contracte aucuns engagemens envers
son parent; il ne dit mot : c’est toujours Guillaume Maignol qui parle exclusivement, qui se reconnoît débiteur.
Il n’y a rien de réciproque, tout est du fait de M aignol,
du Cheval-Blanc. Ce n’est donc là qu’un contrat unila
téra l, une simple déclaration, une simple promesse; et
comment pourroit-il y avoir n é c e s s i t é , dans ce cas, de
faire un acte double ?
M ais, d i t - o n , cet acte est une veDte, et toute vente
doit être faite double.
D ’abord, c ’ e s t mettre en fait ce qui est en question:
la vente s e trouve dans acte notai ie. Il finit bien donner
im sens quelconque à ce premier acte; et on a vu q u ’ i l
seroit absurde que M aignol, du Cheval-Blanc, n’eût voulu
vendre qu’ une rente anéantie.
1
Mais est-il bien vrai, dans tous les cas, qu’une vente
doit être faite double? On le conçoit, lorsque l’acqué
reur ne paye pas le prix , parce qu’ il faut bien qu’il s’oblige
à le payer , et que le vendeur ait des moyens pour l’y
contraindre ; mais lorsque l’acquéreur paye entièrement
le prix , qu’il ne contracte aucune obligation , comment
seroit-il essentiel que l’acte fût double? il devient alors
unilatéral ; il ne reste que Fobligation du vendeur de faire
jouir de la chose vendue, de garantir de l’éviction, etc.;
et dans ce cas, certes, il snflit que l’acquéreur soit nanti
de l’acte qui lui transmet la propriété. C ’est la distinc
tion qu’on a toujours faite en jurisprudence; et la cour
l ’a consacrée par plusieurs arrêts, notamment par un
rendu sur la plaidoirie de M e. P ag ès, dans la cause de
�T9
(
)
M e. Bertier, avocat à Brioude. La co u r, par cet arrêt,
ordonna l'exécution d’une vente sous seing privé non
faite double, par cela seul que l’acquéreur avoit payé
rentier p rix , que l’acte en portoit quittance, et que l’i.cquéreur n’avoit contracté aucun engagement.
O p p o s e r a -t-o n que l’acte sous seing p r i v é n’est pas
unilatéral, parce que M a ig n o l, du Cheval-Blanc, devoit
déduire une somme de 80 francs sur les arrérages
réservés ?
. Ce seroit une erreur ; le contrat ne change point de
nature par cette circonstance. 11 en est de cette mention,
comme si un débiteur, en souscrivant la promesse d’une
somme, y mettoit pour condition de déduire tous acquits
bons et valables qu’il pourroil avoir faits antérieurement:
la promesse pourcela 11’iiuroit pasbesoin d’être faite double,
parce que le créancier ne pourroit se f;iire payer sans re
présenter la promesse, et sans souscrire à la condition.
D e même ic i, M a ig n o l, de Landogne, n’auroit pu
exiger de M a ig n o l, du Cheval-Blanc, la somme de 280 fr.
sans représenter la promesse ; et alors il auroit bien
fallu déduire sur les arrérages la somme de 80 francs,
avec d’autant plus de raison, que l’acte n o t a r i é u’énonçoit qu’une promesse de 200 francs.
, Ainsi diparoît le moyen principal de Guillaume Mai
gnol. L ’acle sous seing privé est unilatéral; il ne con
tient pas d’engagemens réciproques; dès-lors il est fort
indiüérent qu’il ait été ou non fait double.
C2
�C 20 )
§. I I I .
D a n s tous les c a s , cette om ission serait réparée par
ïe x é cu tio n de l'acte.
Il est constaté par l ’interrogatoire des deux M aign ol,
du Cheval-Blanc, que cet acte sous seing privé est du
même jour que l’acte notarié-, il est écrit par le père;
il a été connu par g fils des le moment meine , et lors
qu’il n’avoit que seize ans : le père comme le fils ont
connu et souffert la possession publique de l’acquéreur;
ils n’ont réclam é, ni conlre M aignol, de Landogne ,
ni contre Antoine Guillaum e, tiers détenteur, quoiqu’ils
1
aient été instruits de la vente consentie par Maignol à
Guillaume.
«
«
cc
«
L ’article 1325 du Code civil porte : « Les actes sous
seing p riv é, q u i contiennent des conventions synallagmatiques , ne sont valables qu’autant qu’ils ont été
laits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant
un intérêt distinct.
« Il suffit d’ un original pour toutes les personnes ayant
« le même intérêt.
« Chaque original doit contenir la mention du nombre
« des originaux qui en ont etc faits.
« N é a n m o in s, Ie défaut de mention que les origi« 7iaux ont été f a i t s doubles, triples , etc. , ne peut être
« opposé par celu i qui a exécuté de sa part la co n
te çention portée dans Vacte. »
�( 21 )
M . Malleville , sur cet article, s’exprime ainsi : « S i
« l’une des parties avoit déjà exécuté l’acte , elle ne
« doit pas être reçue à opposer qu’il n’a pas été fait
« double; mais il y aura souvent de l’embarras à prouver
« cette exécution.» ( Il n’y en a pas dans l'espèce parti
culière, puisque les deux M aiguols, père et iils, en con
viennent dans leur interrogatoire. ) « Ün admettoit une
« autre exception à la règle posée dans l’article, c’est
« lorsque l’ une des parties n’a voit pas d’intérêt à avoir
« un double : par e x e m p le , je f a i s une vente sous
« seing p rivé, et j'e n reçois le p rix ; on jugeoit que/«
« vente étoit vala ble, quoiqu'elle ne f û t pas fa ite dou« ble ,• mais on l’auroit jugée nulle s’il étoit resté quelque
« partie du prix à payer. «
Cette doctrine d’un magistrat éclairé, l’un des rédac
teurs du Code c i v i l , confirme ce que l’on a déjà dit dans
le §. précéden t, et prouve que l’exception admise par
l ’article cité , n’est pas nouvelle, comme a voulu le pré
tendre l’appelant. E n effet, la rigueur du droit, le sum
m um ju s , ne peut être invoqué avec succès qu’autant
q u’il paroîtroit qu’on a pu ignorer l’existence de l ’acte
qui vous est opposé ; mais lorsque tout annonce que cet
acte a été connu, qu’on en a souffert l ’e x é c u tio n sans se
plaindre, aujourd’hui surtout que la justice se rappro
che de l’équité, qu’on a senti la nécessité d’ccarter toutes
les subtilités du d ro it, Guillaume Maignol ne peut espé
rer aucun succès.
Il aura beau se battre les flancs, reproduire une ob
jection mille fois détruite, que le Code civil n’a pas
�( 22 )
d’effet rétroactif, qu’ il ne peut régler une convention
antérieure à sa publication.
Foible et petite ressource! L e Code civil est aujour
d’hui la loi de l'empire , et doit régler tout ce qui est
encore indécis.
D e même qu’on juge que la subrogation d’action peut
être admise pour une cession de droits successifs anté
rieure à la publication du Code , lorsqu’il y a encore
indécision, de même on doit décider que l’omission que
l ’acte a été fait double n’est d aucune conséquence, lors
que cet acte a été long-temps et pleinement executé,
avec d’autant plus de raison q u e , d’après l’opinion de
M . Malle v ille , cette exception n’est pas nouvelle, et a été
admise dans l’ancien droit.
E t s’il en étoit autrement, si le Code civil pouvoit êlre
mis de côté pour tous les actes antérieurs sur lesquels il
n’a pas été prononcé, il vaudroit autant décider que ce
Code si long-temps attendu, que cette loi uniforme pour
tout l’em pire, si souvent désirée, que l’ immortel D«iguesseau trouvoit si nécessaire, ne pourroitôtre exécutée
que dans trente ans, ou n’auroit été promulguée que
pour la génération future -, ce qui est une absurdité.
X^e Code des Français est aujourd’hui leur unique loi.
S i , comme tout ce qui sort de la main des hommes, il a
quelque im perfection, on est au moins obligé de convenir
qu’on y retrouve toute la purete du droit romain , tout
ce que l’expérience et la raison avoient remarqué de plus
sage dans le droit coutumier; qu’il n’a nullement besoin
de commentaire pour le jurisconsulte; que les pandectes
r
�23
(
)
• ne servent qu’à l'obscurcir; qu’enfin il a paru sous l’in
fluence d’un héros législateur, et qu’il suilit. d’un rayon
de sa gloire pour que ce Code devienne bientôt la loi
de l’Europe entière.
Guillaume Maignol fils ne se tirera jamais de J’ar
ticle 1325; l’exécution de l’acte est pour lui la pierre
d’achoppement : sa mauvaise foi est à découvert; la loi
et l’équité repoussent une prétention ambitieuse et tardive,
qui 11’uuroit pas vu le jour si Pierre Maignol existoit
encore.
Il ne s’agit plus que de parcourir rapidement quel
ques misérables objections proposées en désespoir de
cause.
L ’appelant reproche aux premiers juges de s’être
occupé de l’acte sous seing p r iv é , comme si cet acte
étoit souscrit par lui-même. On a confondu , dit-il , les
moyens du iils avec ceux du père ; cependant un iils
donataire 11e pouvoit être tenu de l’effet d’un acte sous
seing privé, n’ayant de date certaine qu’après sa donation.
Ce paquet ne peut aller à aucune adresse, et ne séduiroit pas même le praticien le plus formaliste.
11 est constant, d’après le père et le fils, que l’acte sous
seing privé est du même jour que l’acte n o t a r i é . 11 est
constant que l’acte a été connu du fils et du père, et que
ce fils rebelle s’avisoit à seize ans d’en témoigner son
v
m êcontentement au père.
Ce fils précoce n’a rien ignoré ; il a rneme voulu se
faire donner ce pré ; mais le père a pris pour prétexte
qu’il n’a voit pas l’acte de 1 7 7 9 , et que la minute avoit
resté entre les mains de M a ig n o l, de Landogne.
�24
(
)
D ’après ces a v e u x , il est assez maladroit d’équivoquer
sur les dates. Il est vrai qu'en général les actes sous seing
privé n’ont de date certaine qu’avec la formalité de l'en
registrement , ou par le décès de l’un des signataires ; mais
pourquoi ? c’est qu’il seroit facile de dater un acte sous
seing privé du temps que l’on v o u d ra it, et que par ce
moyen on anéantirait des conventions postérieures.
Mais lorsque la date est. avouée et reconnue ; lorsque
ce iils , qui parle si souvent de sa donation , a connu
auparavant un acte qui transmettoit a un tiers la pro
priété d’un immeuble particulier ; lorsque surtout cet
immeuble n’est pas nominativement compris dans la dis
position q u ’ i l in vo q u e , il n’a pas dû y compter; il n’a
pas dû calculer la valeur de cet objet dans la donation
qui lui a été faite; il aurait même trompé la famille avec
laquelle il contractait, s’il leur «voit fait entendre que
cet héritage faisoit partie de sa donation : dans tous les
cas, il n’auroit pu nuire au tiers détenteur.
On ne voit pas quelle analogie il peut y avoir entre
cet acte et une contre-lettre à 1111 contrat de mariage.
lies lois ne proscrivent les contre-lettres aux contrats
de mariage qu’autant qu’elles seraient isolées, qu’elles
é m a n e r a i e n t d e l’époux sans les avoir communiquées à
la famille avec laquelle il contracte.
Mais si les contre-lettres étoient signées par toutes les
parties qui ont assiste au contrat, elles seraient très-vala
bles, et auraient tout leur effet. Il n’y a d’ailleurs aucune
comparaison à faire entre cet acte et une contre-lettre :
M a i g n o l , de L a n d o g n e , serait propriétaire en vertu de
l ’acte notarié. L ’acte subséquent n’est qu’un acte iso lé ,
explicatif,
�*5
(
)
explicatif, interprétatif, si l’on v e u t, du précédent, mais
qui n’ajoute rien au droit des parties.
Q u ’on ne dise pas que cet acte sous seing privé est
obscur et équivoque ; l’appelant doit se rappeler qiûd
subroge M aign o l, de Landogne, a u x effets de Pacte du
6 ju in 1 7 7 7 , et que ce contrat transmet la propriété du
pré i\ M a ig n o l, du Cheval-Blanc.
M aignol iils tourne toujours autour de ce cercle vicieux;
il en revient à dire qu’un acte sous seing privé, qui con
tient des engagemens synallagmatiques,doit être fait double;
il a recueilli quelques arrêts rapportés dans la dernière
collection de jurisprudence, en faveur de l’archevêque
de R e im s, contre le prince de Conti ; entre le sieur Forget
et le duc de G ram m on t, etc. On ne lui conteste pas le
principe : on n’est divisé que sur l’application.
Il prétend prouver la nécessité que cet acte fût fait
doub le, dans le cas où le sieur Maignol auroit été évincé
de son p r é , ou qu’il l’eut perdu par force majeure.
Mais si M a ig n o l, de L an dogn e,eût été évincé , il avoit
son acte pour demander une garantie ; il n’auroit pas pu
le supprimer pour s’en tenir ù l’acte notarié, et demander
la rente, parce qu’on lui auroit répondu que la rente éfoit
anéantie, et qu’il n’avoit acheté que le pré dont il jouissoit publiquement; il n’auroit jamais été assez malavisé
pour se contenter d’une rente, lorsqu’il pou voit obtenir
une indemnité suivant la valeur actuelle du pré.
E t s’il l’avoit perdu par une force majeure, si la riViere le lui eut en levé} comme ou l’a dit plaisamment
en première instance, le pré.auroit été perdu pour lui :
res périt domino.
D
�(26)
Mais pour cela il faut supposer des accidens bien graves;
une révolution clans le globe, le contact d’une comète, etc.
C ’est prévoir les choses de loin : la pauvre humanité ne
va pas jusque-là.
»
Antoine Guillaume attendra d’ailleurs l ’événement; et
il est à croire que sa postérité la plus reculée jouira •pai
siblement du pré dont est question, malgré Maignol fils,
et malgré la rivière de Sioulet qui le fertilise et ne peut
lui nuire.
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
M e. M A N D E T , avoué licencié.
A R I O M , de l'im prim erie de L
andriot,
seul im prim eur de la
C o u r d ’appel. — Juillet 1806.
�
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Factums Marie
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Description
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
créances
cautions
compétence de juridiction
tribunal de commerce
cylindre à indiennes
teinturier
serrurier machiniste
moulins
fabriques
textile
Description
An account of the resource
Mémoire en réponse, pour dame Gilberte Ducourtial, veuve de Joseph Maignol, tutrice de leurs enfans mineurs ; dame Marie-Gilberte Maignol, veuve de Michel de Pannevert ; dame Marie Maignol, et sieur Antoine Bouyon, son mari ; dame Marie-Gilberte Maignol, et le sieur Pierre Legay, son époux, et sieur Antoine Maignol, tous intimés ; contre sieur Guillaume Maignol, autre Guillaume Maignol, son fils, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Riom, le 18 floréal an 13 ; et encore en présence d'Antoine Guillaume, maréchal, habitant de la commune de Pontaumur, aussi intimé.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0527
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0127
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_G1606
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
cautions
compétence de juridiction
Créances
cylindre à indiennes
fabriques
moulins
serrurier machiniste
teinturier
textile
tribunal de commerce
-
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503ec65ba2e4e5e60d20bcf4f5be230a
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Text
|
M
E
M
O
I
R
E
POUR
ftys
-
G
uillau m e
M A IG N O/ L f ils, habitant à Bon-
lieu, canton d’E v au x, appelant ;
c o n t r e
,
A n t o i n e G U I L L A U M E maréchal a P on
taumur, intimé ;
ET
C O N T R E
,
G ilb e r te M A IG N O L , P ie r r e L E G A Y
mari
A n to in e
-
M A IG N O L
, son
G ilb e r te
veuve Paneveyre, et autres, héri
Pierre M a i g n o l , d e Landogne, intimés;
M A IG N O L ,
tiers
EN P R É S E N C E
,
D e G u i l l a u m e M A I G N O L père habitant au
lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, ap
pelé en assistance de cause.
U
n
acte sous seing p r i v é , synallagm atique, est-il nul
s’ il n’a pas été fait double ? Peut-il être opposé à un dona
taire contractuel s’il n ’a de date certaine que postérieure
ment à sa donation ? E n fin quels caractères d ’exécution
A
’
,
�faut-il à cet acte p o u r q u ’il soit obligatoire m algré les
nullités qui le vicient ?
Telles sont les questions que présente cette cause, en
supposant qu ’ un acte sous seing p r i v é , produit par les h é
ritiers M a ig n o l, soit une vente. C a r , en p oin t de fait,
l’appelant démontrera que cet acte n’est qu’un ti^re de
possession,
*
F A I T S . '
. v
'
•
*•
P a r acte du 16 mai 1^ 5 5 , M ic h e l L en o b le donna ¿1 bail *
em pylitéotique à des nomm és C liefd eville, un p ré situé
près de L a n d o g n e , m oyennant 90 francs de rente annuelle.
C ’est ce p ré qui fait
1’objet
de la contestation.
L e m êm e j o u r , L en o b le vendit ladite rente de 90 fr.
îi G uillaum e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , p o u r le payer
de 1800 francs qu ’il lui devoit.
L e 16 juin 1 7 7 7 , C h efd eville subrogea ledit G uillaum e
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , audit bail em p yhtéo liq ue ;
de sorte q u ’il lui céda la p ro p riété du pré.
Ce pré étant situé près de L a n d o g n e , étoit désiré beau
coup par le s ie u rP ie rre M a ig n o l, notaire audit lie u ; et il
paroît q u ’il chercha les m oyens d’en devenir propriétaire.
Il étoit créancier dessieui’s L a rfe u il d’une rente de 56 f. ?
au principal de
2800 francs, créée en 1 7 2 0 , due p o u r
m oitié par les héritiers de Jean-Franeois L arfeuil.
L e s L a rfe u il ayant vendu en rente un petit domaine à
Jean Gastier, P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit obtenu
contre lui une sentence hypothécaire en 1 7 6 6 , portant
permission de se mettre en possession ou faire vendre.
D e son c ô té , G uillau m e M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c
,
�( .3 )
seigneur féodal dudit d o m a in e , et ayant acheté de l’ un des
L arfeu il la m oitié de la rente due par Jean G a s tie r , lA
poursuivoit p our être payé des cens , lods et arréragés de
rente, et se tro u vo it empôclié par ladite sentence de 1 7 6 6 ,
en ce que son vendeur l’avoit chargé de payer à P ie rre
M a ig n o l la p ortion de la rente de 1720.
Cette procédure fournit à ce dernier l ’occasion de faire
des
propositions à G uillau m e
M a i g n o l , du
C h e va l-
Blanc , et de profiter de son ascendant, en lui faisant
entendre que rien n’étoit plus aisé p o u r lui que de de
ve n ir p ropriétaire de ce petit domaine ven du à G a stier,
lequel étoit parfaitement à sa bienséance, puisqu’il jo i—
gnoit ses propriétés du Clieval-Blanc.
Il paroît que P ierre M aign o l proposa à G uillau m e de
faire par ce m oyen un échange de ses droits à ce d o
maine , avec le p ré venu de L e n o b le , assurant sans doute
q u ’il n’y avoit plus qu’à se mettre en possession dudit d o
maine , au m oyen de sa sentence de 1766.
Cependant le sieur M a ig n o l, du C h e v a l - B l a n c , ne
donna pas pleinement dans le piège. Il fut passé un acte
entre les parties, le 2 octobre 1779* M ais cet acte ne
contient pas de v e n t e ; sa contexture m êm e p ro u v e que
le sieur M a ig n o l, du Cheval - B la n c , entendoit stipuler
toute autre chose q u ’ une vente , et ne vo u lo it que
laisser le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , jouir du p ré
L e n o b l e , jusqu’à ce q u ’il y eût quelque chose de certain
p o u r lui-mêrne au sujet du domaine Gastier. l
E n e f f e t , on lit dans cet acte, du 2 octobre 177 9 ■
>que
P ierre M a i g n o l , de L a n d o g n e , cède à G uillau m e M a i
g n o l la rente de 28 fran cs, au principal de 1400 francs
A
2
�( 4 )
faisant moitié de celle de 1 7 2 0 , due par les héritiers de
Jean - François
L a r f e u i l ,' ensemble les arrérages
éclms
J
O
depuis 1 7 5 8 ; p l u s , il cède audit G uillaum e M a ig n o l ,
du C h e v a l- B la n c , l ’efiet de la sentence de 1 7 6 6 , p ar lui
obtenue contre Gastier.
Le
p r ix dudit transport est fixé
entre
les parties
à 2000 fran cs, p o u r l’acquit de laquelle somme M a ig n o l,
du C h e v a l- B la n c ( propriétaire cependant du p ré L e n o b l e ) , cède seulement à M a ig n o l, de L a n d o g n e , le c o n
trat de renie de 90 francs à lui dû par les héritiers de
P ierre L e n o b le , suivant l ’acte du 16 m ai 1 7 5 5 ; la quelle
rente est -payable, est-il d i t , p a r les jo u is s o n s du p ré
appelé P r é ■■Grand y s u r le q u e l elle e st sp écia lem en t
affectée.
E n co n sé q u e n c e , au m oyen de la rem ise que fera
G uillaum e M a ig n o l des titres co n stitu tifs de ladite rente
de 90 francs, ensemble des titres de créances y énoncés ,
il demeurera quitte de la somm e de 1800 francs: et quant
h la somme de 200 fra n c s, P ie rre M a ig n o l reconnoît
l ’avoir reçue en d élivran ce de promesse de ladite somme.
D e sa p a r t , P ie rre M a ig n o l remet à G uillaum e la sen-*tence de 1 7 6 6 , obtenue contre G astier; et néanmoins il
se réserve le contrat de rente de 1 7 2 0 , p ou r p ou rsu ivre
le payement de la m oitié qui lui re s te , et m ê m e , d it -il,
les arrérages de la m oitié v e n d u e , antérieurs à 17^ 8 ;
enfin les parties se cèdent respectivement les droits rescindans et rescisoires qui peu ven t résulter des contrats cidessus énoncés.
Il paroît aujourd’hui un acte sous seing p riv é , de la
m êm e date que le transport ci - dessus, assez diilicilc à
�( 5 )
accorder avec les clauses dont on vient de rendre com pte,
du moins dans le sens que les adversaires lui d o n n e n t ,
mais qui p rou veroit assez, s’ il étoit réellem ent de cette
date, que le sieur M a ig n o l, de L an d o gn e, n ’avoit cherch é
à extorquer un écrit quelconque du sieur M a i g n o l , du
C h e v a l-B la n c , que p o u r tirer parti un jour de son obscu
rité. Il est néanmoins évident q u ’il ne s’agissoit alors que
de lui laisser les jouissances du pré L e n o b le p o u r 90 fr.
par a n , afin de le payer de l ’intérêt des 1800 francs cidessus stipulés, jusqu’à ce que l’occupation réelle du do
maine Gastier perm ît de faire un échange définitif.
Q u o i q u ’il en soit, et en attendant que cet écrit jus
q u ’à présent inconnu soit mis sous les y e u x d e là c o u r , et
discuté, il s’agit de continuer l ’ordre des faits. L e sieur
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , eut bientôt à s’ap plaudir de
n ’avoir pas entièrement cédé aux assurances du sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e ; car huit jours après l’acte du 2
octobre 1779 , ayant pris possession notariée du domaine
G astier, en vertu d e l à sentence de 1 7 6 6 , qui venoit de
lui être c é d é e , ledit Gastier loin de se rendre à une
expropriation v o lo n ta ire , c o m m e l’avoit prom is le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , alla au contraire traiter avec l’ un
des L a r f e u i l , ses v e n d e u rs, qui offrit de payer le sieur
M a i g n o l , et conclut à ce qu ’il fût déchu de ses demandes.
En e f fe t , par une sentence de la sénéchaussée d ’A u
v e r g n e , au rapport de M . F a y d it , G uillaum e M a ig n o l
fut d é b o u té , à la charge d ’être payé des cens à lui dûs per
so n nellem ent, et seulement de la moitié des arrérages
de rente par lui acquise de L aurent L arfeuil.
Cette sentence ne dit rien de la m oitié de rente cédée
par P ierre M a ig n o l à G uillaum e , q u o iq u ’elle fût de
�(6 )
m a n d ée , et que la sentence de 17 66 en portât condam
nation; de sorte que par le fa it, G uillaum e M a ig n o l, du
C heval-B lanc, n’a pas t o u c h é ,à ce qu ’ il p a ro ît, un denier
de ce qui lui a été vendu par M a ig n o l , de L a n d o g n e ,
le 2 octobre 1779
tandis q u ’on élève la prétention de
s’a p p r o p r ie r , sans bourse d é lier, un p ré q u ’ il n’a pas
vendu.
Cependant P ierre M a ig n o l, de L a n d o g n e , s’étoit mis en
possession dudit p r é , et les fruits devoient lui en rester
p o u r la rente de go francs , suivant la clause du traité, tant
que le sieur M a i g n o l , du C h e v a l - B l a n c , ne préféreroil pas
jo uir lui-m êm e en payant ladite rente.
O n pense bien que le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e ,
s’arrangea p ou r faire'durer cet état de choses encore lo n g
temps , et q u ’il ne manqua pas de rév eille r de loin en
loin l ’espoir de son cousin de devenir p ropriétaire du
petit dom aine G a s tie r , qui étoit si fort à. sa bienséance.
L e sieur M a ig n o l, du C h eval - B l a n c , éloigné du p ré
L e n o b le , ne mettoit pas un grand pi’ix à en jouir lu im êm e , et peut-être lui en exagéroit-on les inconvéniens ;
peut-être aussi le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , sayoit-il
tirer parti d’ une espèce de dépendance dans laquelle il
avoit su tenir son parent.
L es choses restèrent en cet état jusqu’en l ’an 7 , que
le sieur M a i g n o l , fils de G u illa u m e , donataire universel
de son père par son contrat de m ariage, se mit en pos
session de ses biens en cette q u a lité , et demanda à son
père des renseignemens sur le résultat de l’acle de 1 7 7 9 ,
et d e là prise de possession du dom aine G a stier, que son
père lui rernettoit avec d’autres titres. C ’est alors que le
sieur M a ig n o l père expliqua à sou fils que si, à la v é r it é }
�(7 )
il ne jouissoit pas du domaine G a s t ie r , il restoit maître
du p ré L e n o b le , q u ’il reprendrait quand il v o u d r a it , et
que lu i, M a i g n o l p è r e , n’avoit pas encore ré c la m é , parce
q u ’on l ’avoit toujours bercé d’un vain espoir , et parce
q u ’il devoit au sieur M aignol, de L a n d o g n e ,p o u r un procès
de fam ille; ce qui l ’avoit em pêché de le contrarier.
M a ig n o l fils vo u lu t avoir une explication avec le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , qui lui refusa toute com m unica
tion sur ce poin t, et ne lui répondit qu ’en pressant le paye
m ent d ’une créance étrangère au procès actuel. M a ig n o l
fils paya le 2
5 nivôse an 9 ,
et se crut dès-lors autorisé à
reco u vrer ses droits.
I/acte de 1779 qui lu i avoit été remis n’énonçoit que
l ’acte de i r/ 5 5 ) lequel ne donnoit la p rop riété du p ré q u ’à
Ch efd eville : il s’agissoit donc de rechercher la vente que
C hefd eville avoit dû faire au sieur M a ig n o l, du C h evalBlanc. Mais l ’acte en avoit été reçu par le sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , et il étoit difficile de se le p rocurer ; il l’avoit
refusé plusieurs fois. Enfin M a ig n o l fils, étant p arvenu
à trouver la date de l’enregistrem ent, étoit p rêt à p o u r
suivre le sieur M a ig n o l, de J/andogne, lorsqu’il décéda.
A lo r s il demanda une expédition au n o t a ir e , son suc
cesse u r, q u i , en cherchant avec l u i , ne trouva pas la
m inute de l’acte dans la liasse de 1777? n * au répertoire.
A l o r s , p o u r éviter toutes difficultés, M a ig n o l fils p rit le
parti d’acheter du m êm e C h efd eville, le 14 fructidor an 1 1 ,
une ratification de la vente q u ’ il avoit consentie en 1 7 7 7 .
M u n i de cette p ièce , M a ig n o l fils informé que le pos
sesseur du pré L en o h le étoit A n to in e G u illa u m e , de P o n t à u m u r , le fit citer ch désistement, par cédule du 3 ven
démiaire an 12.
�C8)
G uillau m e ne vo u lu t pas plus donner d ’explica lions que
le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , et ne com parut au bureau
de p aix que p o u r o b éir à la loi. Ensuile il se défendit
par des réquisitoires de qualités et de titres ;'et après cela,
il demanda la nullité de l ’e x p lo it , sous p rétexte que les
confins du p ré n’y étoient pas én o n cés, q u o iq u ’ils le fussent dans la cédule.
Il succomba justement sur cette ch ican e, par jugem ent
du 4 pluviôse an 12 , lequel néanmoins réserva les dépens
p o u r y'étre fait d r o it , en statuant au fond.
Enfin il plut à G u i l l a u m e de r é v é l e r q u ’ il étoit acqué
reur du sieur M aig n o l , de I,an dogn e, par acte du 29 ven
tôse an 6 , et il assigna son vendeur en garantie.
L e sieur M a ig n o l, d e L a n d o g n e , étoit décédé dans l ’in
tervalle; ses enfans in t e r v in r e n t , et en rendant com pte
des faits, ils se contentoient d ’abord de dire que leur père
étoit propriétaire en vertu d ’un acte , sans l’indiquer. Ce
pendant il falloit ne pas s’en tenir à des mots ; et les h éri
tiers M a ig n o l produisirent enfin un acte sous seing p r i v é ,
sous la date du 2 octobre 1 7 7 9 , enregistré seulement depuis
le p r o c è s , et ainsi conçu :
« J e soussign é, subroge M e. P ierre M a i g n o l , bailli
« de L a n d o g n e , ù l’effet de la vente du bail em phytéo« tique , appelé P r é - G r a n d , que M e. A n n c t C h efd eville
« m ’a consentie devant M a ig n o l, n o ta ire, le six juin m il
« sept cent so ixa n te-d ix-sep t, p o u r p a r lu i j o u ir dudit
« pré ainsi q u ’ il avisera bon ê tre , m oyennant la somme
« de deux cent quatre-vingts liv r e s , dont deux cents livres
a demeurent compensées avec pareille somme de d e u x
« centslivrescom prise en la cession que ledit sieur M a i g n o l
« m ’a faite d e v a n t A lle y r a t cejourd’h u i , d ’ un cont rat de
« rente
�(
a
cc
a
«
9)
rente sur les sieurs de L a r fe u il, et les quatre-vingts livres
restantes me seront déduites sur les arrérages réservés
par l’acte ci-dessus daté. Fait ce deux octobre m il sept
cent soixante-dix-neuf; et s 'g n é M aignoJ.
« Enregistré à R i o m , le 24 nivôse an 13 : reçu
fr.
5
c e n t ., etc. »
Les héritiers M a ig n o l com prirent bien qu ’ils ne p o u voient pas opposer cet acte à M aign o l fils , com m e ayant
cc 6 0
une date certaine antérieure au procès. E n conséquence,
pou r a vo ir plus de droits vis-à-vis M a ign o l p è r e , ils de
mandèrent sa mise en cause , qui fut ordonnée par juge
ment du 6 therm idor an 12.
XiC sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , ainsi assigné en
garantie par les adversaires, dit en défenses q u ’il reconnoissoit sa signature, mais que l’écrit q u ’on lui représentoit ne contenoit de sa part aucune convention synallagniatique qui l’eût p riv é de la prop riété de son pré.
L a cause en cet état portée à l’audience du tribunal
d ’arrondissement de R i o m , le 23-ventôse an 1 3 , les h éri
tiers M a ign o l s’efforcèrent de jeter de la défaveu r sur
G uillaum e M a ig n o l p è r e ; et le sieur L e g a y , l ’ un d ’e u x ,
qui avoit écrit com m e scribe la m inute de l’acte du 2 oc
tobre 1779 , alla jusqu’à dire, en désespoir de cause, q u ’il
avoit écrit aussi un double du sous-seing p riv é p o u r être
remis au sieur M a i g n o l , du Cheval-Blanc.
Q uelque défiance que dût inspirer au tribunal une mise
en fait de cette im p o rta n c e, venant d’une partie intéressée
à la fin d’ une seconde p la id o ir ie , elle ré u s s it, et le t r i
bunal ordonna la comparoissance-des parties en personne
ppur être questionnées sur ce fait.
B
�( IO )
A l ’audicncc du 6 floréal an 1 3 , tout le m onde com
parut ; le tribunal fit plusieurs questions h M aign ol père
et à M a ig n o l fils. L e sieur L egny lui-m em e fut admis à
rép o n dre sur le fait par lui allégué , et le tout fut consigné
dans le jugement en form e d’interrogatoires.
M . le p rocu reu r im périal fut pleinem ent d ’avis que
l ’acte sous seing p riv é 11’avoit pas eu p ou r objet une vente
qu ’il n’ énonçoit pas, et q u ’il étoit d ’ailleurs nul com m e
n ’étant pas double. Cependant le tribunal y vit une ven te,
et qui plus est, une vente va la b le; en con séq u en ce, il
déboula M a ig n o l iils de ses demandes (1).
(x)
J u g e m e n t
d o n t
e s t
a p p e l
.
Entre Guillaume Maignol fils.......... Antoine Guillaume.............
Marie-Gilberte M aignol, et sieur Pierre L e g a y , son m ari; A n
toine M aignol, Gilberte M a ig n o l, yeuve P a n e v e y re , et autres.. . .
et Guillaume Maignol père.........
Interrogatoire de G uillaum e M a ig n o l pùre.
A lui demandé si à l’époque de l’acte n otarié, du 2 octobre
1 7 7 9 , il a été fait le mémo jo u r, entre les mêmes parties , un
acte sous signature privée. — Répond qu’il y a eu en effet un acte
sous seing privé. — D cm . Par qui les doubles ont été écrits, et
s’il reconnoit le double sous seing privé qui lui est représcnlé
et rapporté par les parties de M c. Mayet. — Rép. que ledit acte
avoit été écrit de sa main. — D em . Qui est-ce qui a dicté les co n
ventions. — Rép. que c ’é lo itle sieur Pierre Maignol. — Dr/n. Si
ledit sieur Pierre Maignol avoit écrit quelque chose. — Rép. que
non , et qu’il est très-mémoralif qu ’il n’y a pas eu d’autre double
écrit du sous-seing privé, que celui qui lui est représenté
D cm . Quel a été le but de cet acte sous seing privé? — Rép.
�L e sieur M a ig n o l fils a interjeté appel de ce jugem en t,
et ses m o y en s, p ou r le faire accueillir , sont fondés sur
les principes les plus constans et sur la plus exacte justice.
que c ’étoit pour céder au sieur Pierre Maignol la jo u issa n ce du
pré dont est question , ju s q u ’il de nouveaux arrangemens entre
eu x. — D em . L e sieur Pierre Maignol ne devoit donc pas avoir
cette jouissance par l’acte notarié ? — Hép. que non ; qu’il n’y
a que l’acte sous seing privé qui la lui délaisse. — A lui demandé
s’il ne fut pas question entr’ eux de chercher à éviter les droits
de lods. — Rép. qu’il ne sait pas ce que le sieur Pierre Maignol
pensoit ; que pour lui ce m otif n’est entré pour rien dans cet
acte. — D em . S ’il a été question de la propriété du pré. — Rép.
que non , que ce n ’étoit pas son intention , et que ce ne pouvoit
être non plus celle du sieur Maignol. — D em . Pourquoi, n ’ayant
été question que de la jouissance, l’acte sous seing privé ne fait
aucune m ention de cette jouissance. — Rép. qu’il a écrit sous
la dictée de M. Maignol. — D em . Si son fils étoit présent à c e t
acte. — Rép. que non ; mais qu’en ayant eu connoissance peu
de temps après , il lui en avoit témoigné son mécontentement.
— D em . Q uel ¿Ige avoit alors votre fils? — Rép. environ seize
ans. — A lui demandé si le sieur Maignol, ayant intention de
se soustraire aux droits de lods , n avoit pas aussi l’intention de
devenir propriétaire au lieu de simple jouissant du pré. — A
répondu que M. Maignol a bien pu avoir cette intention ; mais
qu’il n’a pas été question de la propriété entre les parties. —
D em . Lorsque vous avez fait donation de tous vos biens à votre
fils , aviez-vous alors la jouissance du pré? — Rép. que M. M ai
gnol en jouissoit alors. — D em . Avez-vous donné le pré dont il
s’agit? — Rép. qu’il a donné en général tous les biens qu’il avoit.
_D em . Avez-vous eu connoissance de la vente du p r é , faite
le 29 ventôse an 6 par M. Maignol à Guillaume ? — Rép. que
cet. objet pouvant se re n d ro , il ne s’est pas mis en peine dü
B 2
�( 1* )
M O Y E N S .
L es premiers juges se sont occupés de l’acte sous seing
s’ informer de ce que le sieur Maignol feroit relativement à cette
affaire. — D em . S ’il a^su la vente. — Rep. q u ’il en a eu connoissance quelque temps après ; et ensuite a ajouté affirmati
vem ent qu'il l’avoit sue quatre à cinq mois après. — D em . S ’il
avoit d’autres éclaircissemens à donner. — Rép. qu’ayant appris
la vente du pré par P ierre M aign ol à Antoine G u i lla u m e , il a
voulu se procurer l’acte de vente de 1 7 7 7 , dont la minute étoit
chez ledit sieur Pierre Maignol ; il 11’avoit pu se le procurer
d abord. — D em . Si le sieur L c g a y , notaire, a écrit un autre
double de l’acte sous seing privé. — Rép. que non.
Interrogatoire du sieur M a ig n o l fils .
D em . S ’il avoit eu connoissance des affaires faites par son père
avec le sieur Pierre Maignol, en 1779. — Rép. qu’il n’en a eu co n
noissance que depuis qu’il a été à la tète de la maison ; qu’a
vant , son père lui avoit parlé des arrangemens faits avec le sieur
Pierre M a ig n o l, en lui disant qu’il espéroit rentrer dans le pré.
•— D em . Rappelez-vous ce que vous a dit M. votre père à l’égard
de l’acte notarié et du sous-seing privé. — Rép. qu’il lui a dit
avoir consulté MM . P a g è s , Andraud et Grenier sur l’acte sous
seing p rivé, et qu’on lui avoit dit qu’il étoit n u l , pour n ’avoir
pas été fait double. — D em . M. votre père avoit donc cet acte
alors? — Rép. qu’il ne l’avoit pas, mais qu’il se rappeloit de son
contenu ; que son père lui a toujours dit qu’il n ’ y avoit pas eu
de double de c e t acte. — M. Maignol père i n t e r p e l é s’il est
vrai q u ’ il a consulté les trois jurisconsultes s u s - n o m m é s . — Rép.
qu’o u i, qu’il n ’avoit pas l’a c te ; mais que sur c e qu il en avoit
rapporté, M. Andraud l u i ayoit assuré que la c t é étoit nul. —
�3
( i )
p riv é dont les adversaires font leur titre , com m e si cet
acte étoit souscrit par le demandeur lui-m ém e ; ils ont
D em . à M. Maignol fils, s’il a vu entre les mains de son père
un écrit sous seing privé. — Ré p. n’en avoir pas vu , et que
son père lui a toujours assuré qu’il n’avoit pas été fait de double.
— D em . Si lors de la donation à lui faite par son p ère, celuici lui avoit aussi donné le pré. — Rép. que son père disoit tou
jours qu’il avoit droit de se remettre en possession dudit pré,
mais qu’il lui donrioit pour prétexte q u ’il n’avoit pas le titre
qui établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre étant
entre les mains de Pierre Maignol. — D em . Avez-vous eu connoissance que M. L e g a y , notaire, eût fait un des doubles du
sous-seing privé de 1779? — Rép. qu’il a ouï dire par son père
que le sieur L egay avoit été le scribe de l’acte notarié, et non
du sous seing privé.
Interrogatoire de M e. A n to in e Bouyon.
D em . A v e z -v o u s eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. n’avoir eui,connoissance et
n’avoir entendu parler de cet acte que depuis l’affaire dont
s’agit.
Interrogatoire de M e. P ierre L eg a y.
D em . Avez - vous eu connoissance qu’il eût été fait un acte
double sous seing privé? — Rép. que se trouvant a Landogne,
M. Maignol , de L a n d o g n e , qui étoit dans son cabinet avec
M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , l’appela , et l’invita à écrire un
double sous seing privé , contenant subrogation de rente , et
n o t a m m e n t contenant aussi cession d'un pré de la part du sieur
M aignol, du Cheval-Blanc , .au profit du sieur Pierre M aignol,
de Landogne. — D em . Etes-vous mémoratif si l ’acte que vous
écrivîtes étoit sur papier. timbré ou sur papier libre?,«*- Ilép.
�( I 4 )
confondu les moyens de M a ig n o l fils avec ceux de M a 'g n o l
p è r e , sans donner de motifs de cette résolution princi-
qu’il ne se rappelle pas sur quel papier il écrivit. — D em . Q u e l
qu’un écrivoit il ave c v o u s ? — Rép. qu’il ne s’en rappelle pas
très - positivement ; que néanmoins, sans pouvoir bien le c e r
tifier , il croit que M. M a ig n o l, du Cheval-Blanc , écrivoit avec
l u i , et que M. M a ig n o l, de L a n d o g n e , leur dictoit. — D n n . Lors
que vous eûtes fini d’écrire , qui est ce qui signa? — Rép. qu’il
ne s’en rappelle pas. — D em . S’il n’écrivit qu’un acte , et s’il
n’en écrivit pas deux. — Ilép. qu’il est mémoratif d’en avoir
écrit un seulement. — D em . M. M aignol, de L an d o g n e , écri
vit il en même temps que vous? Rép. que non; que c ’est lui
qui dictoit.
Après ces différens interrogatoires, M. le procureur impérial
a porté la parole ; et après un résumé de l’affaire , il a été d’avis
de déclarer nul l’acte sous seing p r i v é , du 2 octobre 1779»
parce qu’il n’avoit pas £té fait double ; a conclu à ce qu ’Antoine Guillaume fut condamné à se désister du pré dont il s’a g i t ,
en faveur du sieur Guillaume Maignol père , ou quoi que ce soit
Guillaume M aignol, son fils et donataire, avec restitution de
jouissances, et aux dépens. Il a pareillement conclu à ce que
les parties de M ayet fussent tenues de garantir ledit Antoine
Guillaume des condamnations contre lui prononcées.
Les débats terminés , le tribunal a ordonné que les pièces
seroient mises sur le bu reau , pour en être délibéré en la chambre
du conseil.
1 L a cause de nouveau appelée en cette a u d ie n c e , il en est
résulté les questions suivantes à résoudre.
Q
uestions
.
Quels effets doivent avoir les actes des iG mai xjS'j , 6 juin
1)777, l’acte notarié, du ¿1 octobre *779 , et l’acte sous seing
�5
( i )
pnlc ; et cependant ce iféto it pas une m édiocre difficulté
que celle de savoir jusqu’à quel point un fils, donataire
p riv é , du même jour deux octobre 1779} intervenus dans la
famille des Maignol?
L ’acte sous seing privé, du 2 octobre 17 7 9 , n’énonçant pas
qu’il a été fait double , cette irrégularité doit-elle le faire dé
clarer n u l, lorsque cet acte a r e ç u , du consentement de celui
qui veut l’attaquer, une exécution complète pendant plus de
vingt cinq ans?
*:
’
E n ce q u i touche la demande en désistement, formée contre
le nommé Antoine Guillaume', du pré dont il s’a g it;
Attendu que cette demande est subordonnée à l'effet que
doivent avoir différens actes qui ont été consentis entre les
Maignol , relativement au pré en question.
En ce qui touche la validité de ces actes ;
Attendu qu’il est établi que par le contrat du 16 mai 17 5 5 ,
Guillaume Maignol père a acquis la propriété de la rente fon
cière de go francs , assise sur le pré dont il s’a git;
Attendu que par contrat du 6 juin 1777, le même Guillaume
Maignol père étant devenu propriétaire de ce pré , a réuni par con
séquent dans sa main la rente , et le pré qui étoit asservi à cette
rente; que dès-lors il y a eu en sa personne confusion des qua
lités de créancier et de débiteur, ce q u i a opéré nécessairement
l ’extinction de ladite rente ;
Attendu que le contrat du 2 octobre 1779? consenti par G u il
laume Maignol père à Pierre M a ig n o l, so n p arè n t, n’a pu avoir
réellement pour objet la cession de la rente qui n’existoit p l u s ,
et 11e peut se référer qu’à la cession de la propriété du pré;>
Attendu que l ’acte sous seing privé du même jour 2 octobre
jy y g , intervenu entre les mêmes Guillaume Maignol p è r e 1,
et Pierre Maignol, a subrogé ledit Pierre Maignol à la cession
consentie à Guillaume Maignol p a r l e contiat du 6 'juin 17^7;
�(i 6)
par acte authentique , p o u v o it être tenu de l ’effet d’ un
acte sous seing p r i v é , n’ayant de date certaine qu’après sa
donation.
que cette subrogation générale des effets de l’acte de 1777 ,
ne peut s’entendre que de la propriété du pré dont il s’a g i t ,
puisque cet acte de 1777 étoit uniquement translatif de la pro
priété du m êm e pré ;
Attendu que quoique cet acte sous seing privé , du 2 octobre
1779, ne fasse aucune mention qu’il a été fait double entre les
p a r t ie s , G u illa u m e M aignol p è r e , ni G u illa u m e Maignol fils,
ne p euvent, dans,les circonstances où se trouvent les parties,
e xciper de cette omission , parce qu’il résulte des réponses
faites par lesdits Maignol pére et fils, lors de leur comparution
h l ’audience, qu’ils ont connu la possession publique de Pierre
Maignol, et après lu i, du mommé Antoine G u illa u m e, tiers dé
tenteur ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir de réclam er contre
cette possession ; qu’ils ne se sont pas mis en devoir non plus
de réclamer contre l’acte du 2 octobre 1779, quoique cet acte
fût présent à leu r esprit , et du fait personnel de Guillaume
JMaignol père ; .
Attendu que cette exécution donnée à cet acte sous seing
p rivé, du 2 octobre 1779» forme une fin de non-recevoir contre
G uillaum e M a ig n o l, d ’après l’article iSaü du Code civil ;
Par ces m o tifs ,
L a tr ib u n a l, p a r ju g em en t en prem ier resso rt, ayant a u
cunem ent égard à ce qui résulte des réponses faites par les
dits Maignol père et fils, lors d e leur comparution à l'audience
dudit jour 6 du présent mois de floréal, déclare G u i l l a u m e et
autre Guillnume Maignol , père et fils , non r e c e v a b l e s dans
l e u r demande en désistement du pré dont il s ’a g i t . Sur le sur
p l u s d e toutes les demandes en recours et contre recours, e t
iiutres demandes, met les parties hors de cause ; compense les
Une
�C *7 )
U ne donation contractuelle ne peut subir aucune dim i
nution ; car c’est sous la foi de cette promesse que deux
familles se sont unies. Q uand la donation contient tous les
biens p résen s, elle doit se composer de toutes les actions
qui résultent des titres remis par le donateur au dona
taire; caries actions sont aussi des meubles ou des im m eu
bles, suivant l ’objet qu ’elles tendent à recouvrer.
Gomment donc admettre que les droits assurés à des
futurs et ù leurs descendans, par leur contrat de m ariage,
puissent être diminués sous aucun prétexte par des sousseing privés , d’ une date à la v é rité a n té rie u re , mais non
constatée par l’enregistrem ent? Il en résulteroit souvent
que deux fam illes, après a vo ir com pté sur une fortune
conséquente et prop o rtio n n ée, sur le vu de plusieurs titres,
n’auroient cependant fait q u ’un calcul in u tile , et que l’ un
des ép o ux se tro u ve ro it, après ses noces, n’avo ir que la
moitié de la fo rtu n e 'q u ’il avoit établie et justifiée en se
mariant.
C ’est p our p réven ir de tels mécomptes que les lois pros
crivent les contre-lettres aux contrats de m a ria g e, et q u e ,
dépens entre ledit Antoine G u illa u m e , ledit Antoine Maignol
et consorts ; et condamne lesdits Guillaume et autre Guillaume
M a ig n o l, père et fils , en tous les dépens faits tant à l’égard
dudit Antoine Maignol et consorts és-dits noms , qu’en c e u x
qui ont été compensés entre lesdits Antoine G u illa u m e , A n
toine Maignol et consorts ; et aux c o û t, expédition et significa
tion du présent jugement.
Fait et prononcé publiquem ent, à l’audience du tribunal civil
de première instance , séant à Iliom , par M M . P a r a d e s , p rési
dent ; D a n i e l , A s t i e h et M a n d o s s e , ju g es , le 18 floréal an i 3.
C
�( 18 )
dans les donations de biens présens et à v e n i r , il est permis
aux ép o ux de s’en tenir aux biens présens, p ou r que leur
contrat ne souffre aucune dim inution dans la fortune alors
p rom ise, et qu ’ils demeurent entièrement hors de la dé
pendance du donateur.
Certes le sieur M a ig n o l fils n’entend en cette cause élever
aucune sorte de soupçon contre la sincérité de l’écrit de
son p è r e ; mais il n ’est ici que le c h e f de sa fam ille, et
il plaide p o u r le maintien d’ une donation qui a saisi aussi
ses descendans. Son contrat de m ariage a été com pté p our
r ie n , et c’étoit l ’acte qui devoit l ’em porter sur toutes les
autres considérations. D e vagues recherches sur l ’ inten
tion des parties, et sur la connoissance que M aign o l fils
avoit pu avo ir à seize ans de l ’existence d’ un sous-seing
p r i v é , ne pou vo ien t conduire les premiers juges que des
hypothèses à l’abstraction , et de l ’abstraction à l’erreur.
A quoi p ou voient tendre en effet les questions faites au
sieur M a ig n o l fils, s’il avoit eu connoissance de l’écrit sous
seing p riv é en 1779 , ù un âge où on n’a que faire de s’oc
cuper des petits détails d’une fortune dont on ne jouit pas ?
L e sieur M a ign o l père avoit dit a son fils qu il avoit signe
un acte nul et non d o u b le , p o u r ceder au sieur M a ig n o l,
de L a n d o g n e , les jo u issa n ce s d’un pré. U ne consultation
d’avocats en porta le mêm e jugem ent; et dès-lors on pense
bien que cette décision qui sans doute tranquillisa le p è re ,
11’ occupa bientôt plus le fils. Il a fallu ensuite l’im por
tance et les débats d’un procès p ou r lui rappeler un fait
presque effacé de son souvenir.
Toutes les précautions q u ’ont prises les prem iers juges
�C r9 )
p ou r chercher la pensée des sienrs M a ig n o l père et fils dans
leurs réponses , et les mettre en défaut par des questions
inattendues, ne p ouvoient donc changer l ’état de la cause.
Il y avoit un point de vue certa in , qui conduisoit à une
simple question de d ro it, et dispensoit de se perdre dans
le vague des conjectures.
Po u v o it-o n opposer à M üignol fils, donataire contrac
tuel en l ’an 7, demandeur en désistement en l’an 11, un acte
sous seing p r iv é , enregistré en l ’an 1 3 ? C e sous-seing p riv é
étoit-il une vente et une vente valable du p ré conten
tieu x? La jouissance dudit p r é , q u ’avoit eue le sieur M a i
g n o l , de L a n d o g u e , supposoit - elle nécessairement une
vente , com m e l ’ont décidé les premiers juges ?
Q uand m êm e il auroit été possible de dim inuer par
une vente sous seing p riv é l ’e0et d ’une donation c o n
tractuelle , au moins au roit-il fallu que cette vente fût
p a rfa ite , et que l’acte duquel on ve u t la faire résulter en
eût tous les caractères et toutes les formes.
A u contraire, on ne vo it dans le sous-seing p r iv é , du 2
octobre 1 7 7 9 , et en le supposant a cette d a te , q u ’ un
acte obscur et é q u iv o q u e , dont l’intention n’a pas m êm e
pu être bien exp liqu ée par ceux qui s’en font un titre.
Si l’on se reporte aux circonstances qui ont p récédé et
accompagné cet a c t e , on est bientôt convaincu que le
sieur M aign o l, du Cheval-Blanc, n’entendoit céder son p ré
L en o b le , que dans l’expectative du domaine Gastier ; et
q u e , jusqu’à ce qu’ il pût être propriétaire lui-m êm e ,
il n’entendoit pas vendre.
Sans cela , com m ent exp liquer cet amalgame d’actes
C 2
�( 2° )
in u tile s, et en quelque sol’te inintelligibles et incompa
tibles ?
M a ig n o l père étoit propriéta ire du pré L e n o b l e , di
sent les adversaires , puisqu’il avoit acquis la rente en
l y S ô , et l ’effet du bail em phytéotique en 1 7 7 7 , par acte
passé devant M a ig n o l, de L a n d o g n e , lui-même.
Cela est certain ; et c’est précisément parce que M aignol,
de L a n d o g n e , étoit le rédacteur de l’acte de 177 7 , q u ’il
ne p ou voit pas ignorer que le sieur M a i g n o l , du ChevalBlanc , propriétaire du domaine utile et direct du pré
I,enoble , n ’avoit qu ’ un mot à dire p our le vendre , sans
u ser d’autant de détours e t de circonlocutions.
Si son intention eût été de v e n d r e V pourcfuoi donc
a uroit-il'ven du une rente de 1755 , qui n’existoit p lu s ,
et q u ’ il créoit sur lui-m êm e en d’autres te rm e s, en don-^
nant une plus ancienne hyp oth èqu e ?
P o u rq u o i auroit-il fait deu x actes au lieu d’ un seul ?
p o u rq u o i a u r o it-il pris des précautions p o u r valider un
acte absolument inutile, et n’en auroit-il pris aucune p ou r
la rédaction du seul acte qui eût un sens et un résultat ?
A qui persuadera-t-on que le sieur M a ig n o l, de L a n
dogne , bailli de sa justice, et notaire intelligent, se fût
contenté de tels actes, s’ il eût voulu devenir réellement
et solidement p rop riétaire? ou p lutôt, qui ne sera pas p er
suadé , à la lecture de ces deux actes du mêm e jour ,
que le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , a vo ulu enlacer le
sieur M a ig n o l, du C h e va l-B la n c, par des clauses e nt or
tillées et peu intelligibles , qui présentassent au besoin
un sens favorable à l’intention de ce d e rn ie r, lequel dût
en effet s'y laisser prendre.
�C ar ne percions pas de v u e que le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e, a d icté ( on l’avoue ) l’acte sous seing p riv é ,
du 2 octobre 1779. ^ étoit donc bien le maître de d icter
une vente, si telle étoit l ’intention de M aignol père. D èslors s’il n ’en a pas dicté une claire et non é q u iv o q u e , il
est clair que l ’acte doit être interprété contra eum in
cu ju s potes ta te era t legern apertiùs dicere.
O r , le sieur M a ig n o l , de L a n d o g n e, s’est fait subroger
à l’effet d’une vente de bail em phytéotique d’ un p r é , p o u r
p a r lu i jo u ir d udit p ré ainsi qu ’ il avisera bon ê t r e ,
moyennant 280 francs ; et cela ne ressemble nullem ent
à la vente franche et simple dudit pré.
11 est bien plus clair q u ’il ne s’agissoit que de jouis
sances, et l’acte notarié le p r o u v e ; car la rente de 90 fr.
créée ou renouvelée par M a ig n o l, du C h eval - Blanc ,
étoit payable par les jo u is s a n s du pré. O r , peut-on à
présent se m éprendre à l’intention des parties ? L ’acte
notarié étoit un prem ier pas vers une convention plus
importante. L es parties .prévoyoient que M a ig n o l , du
C h e v a l-B la n c , auroit le domaine Gasticr , et alors tout
auroit été consommé. Jusque-là il devoit une rente ; et
cependant il stipuloil q u ’elle seroit payée par ceux qui
jouiroient du pré.
S’il eût jo u i, il devoit payer lu i-m ê m e ; mais le sieur
M a ig n o l, de L a n d o g n e , devoit j o u i r , et alors il se payoit
par ses mains, d’après la clause, comme jo u is s a n t ; il lui
falloit donc un nouveau titre p o u r jo u ir du p ré : voilà
donc le m otif exact et visible du sous-seing p riv é.
Cette interprétation si facile n’a point échappé aux
�héritiers M a ig n o l, à qui il auroit peut-être été nécessaire
de demander aussi à quoi avoit pu être utile de faire deux
actes p ou r un. Il est vrai qu ’ ils a voient p ré v u l ’objec
tio n , et y avoient répondu d’avan ce; c’é to it, dirent-ils
d 'a b o r d , p o u r éviter les droits d’enregistrement.
M ais , d ’après le tarit'de 1722 , qui étoit suivi en 1 7 7 7 ,
une vente d’ immeubles payoit un droit de 1 fr. p our
les premiers roo f r . , et 10 sous p ou r choque 100 francs
suivans. A in s i , c’étoit 36 sous p ou r 280 francs ; et à
supposer , com m e l’entendent les adversaires , que le p rix
eût été de 2000 fran cs, c’eût été 10 liv. 10 sous; tandis
que Pacte notarié , du 2 octobre 1 7 7 9 , a Pay é un droit
de contrôle de 14 liv. 12 sous; ce qui encore ne dispensoit pas du contrôle du sous-seing p r iv é , quand il y au
roit lieu de le produire.
A u ssi n’est-ce plus là la cause q u ’ont donnée depuis
les adversaires; c’é to it, ont-ils d i t , p ou r éviter le paye
ment des droits de lods.
Sin gulière raison p o u r le bailli de la justice, qui ne
pou voit p is être traité bien rigoureusement en iiscaliLc.
A u reste, le droit le pins ordinaire étoit de 2 sous 6 de
niers p our livre. Ce q u ’il appelle son contrat de vente
portoit un p rix de 280 fr. ; c’étoit donc 35 fr.
q u ’ il
s’ agissoit d’éviter.
Dira-t-on encore que cette somme n’étoit pas le p r ix
réel ? Mais , si le sieur M a i g n o l , de L a n d o g n e , 11e faisoit
un sous-seing p riv é que p o u r ne pas payer des lods , ce
n’étoit donc pas la crainte de ce droit qui lui faisoit dis
simuler le p rix : convenons plutôt que si au lieu du p rix
imaginaire q u ’ il a lait écrire dans ce sous-seing p riv é , il
�( *3 )
avoit inséi'é un p rix ap pro xim atif de la valeur de l ’im
m eu b le, il auroit excité la défiance du sieur M a ig n o l, du
Cheval-B lanc ; et c’est ce q u ’il vo u lo it éviter. R e m a r
quons encore q u ’avec cette version, les adversaires sont
forcés de donner p our prétexte de l’illégalité d’ un acte ,
une fraude que leur père vouloit co m m ettre , et dont
cependant ils veulent s’adjuger le profit.
Com m ent donc v o ir une vente de prop riété dans ce
sous-seing p r i v é ? Com m ent concevoir q u ’il ait une exis
tence com patible avec l’acte notarié du mêm e jo u r ? A u
contraire , en ne vo ya n t dans le sous-seing p riv é qu ’un
p o u v o ir de jo u ir du p ré p ou r la rente de 90 fra n cs, et le
lé g e r supplém ent convenu , on entend alors parfaitement
l ’existence simultanée des deux actes ; et 011 conçoit com
m ent le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , créancier d ’ une
rente payable par les jo u is s a n s du pré , eut besoin d ’un
second litre qui le rendît jo u is s a n t lu i-m ê m e ?
D e cette m a n ière, il n’ étoit plus nécessaire que l ’acte
sous seing p riv é fut double ; car si le sieur M a ig n o l, du
C heval-B lan c , avoit v o u lu demander les jouissances du
p r é , le sieur M a ig n o l, de L an dogne, lui auroit ex h ib é son
é c r it, portant qu ’il avoit eu le droit d’en jouir. Si h son
to u r ce dernier avoit demandé les arrérages de rente ,
l ’autre auroit répondu q u e , comme jo u is s a n t du p r é , il
se les de voit à lui-m êm e.
L a cause est donc claire dans ce sens; mais si on veut
v o ir une vente dans ce sous-seing p r i v é , alors non-seu
lement tout est in e xp lica b le, com m e on vien t de l’o b
s e r v e r, mais encore les_principes s’opposent absolument
à ce que cet acte puisse contenir une v en te va la b le.
�C 24 )
L es actes translatifs de p rop riété sont des actes trop im-
portans à la société, p ou r q u ’on puisse les dispenser avec
trop de légèreté de la rigueur des formes légales. Ce que
la loi a v o u lu , a dû être la règle com m une ; et si quelques
exceptions tolèrent par fois l’arbitraire, dont il faut tou
jours se tenir en défiance, ce ne peut être que p o u r venir
au secours de l ’ignorance qui a traité avec bonne fo i, et
qui ne doit pas en demeurer victime.
M ais un notaire éclairé com m e le sieur M a i g n o l , de
L a n d o g n e , pou vo it-il ig n ç rer que tous les actes synallagmatiques doivent porter m in u te, s’ ils sont notariés, et
doivent être faits do u b les, s’ ils sont faits sous seing p r iv é ?
L a raison le d i r o i t , si les premiers élémens du di’oit ne
l ’enseignoient com m e un principe.
C ’est mêm e la plus usuelle des maximes ; car tous les
jours 011 fait de pareils actes, et les moins expérim entés
n ’oublient pas de v o u lo ir en retenir une copie. Cela arrive
p o u r les actes les plus simples ; et com m ent un notaire
qui eût dicté une vente l’auroit-il oublié p o u r lui-m êm e ?
L a nécessité do rédiger en double écrit les actes synallngma tiques d érive évidem m ent de la nature mêm e de
ces actes ; car si p o u r la validité d ’ un acte de ce genre
il est requis que chacune des parties soit obligée envers
l’autre; si p ou r la validité d ’ une vente il est nécessaire que
l’un consente à ve n d re, et que l’autre consente à acheter,
il faut dès-lors, par une conséquence fo rcé e, que chacun
puisse avoir dans ses mains la p reu ve que l’autre a co n
s e n t i; sans cela , il seroit au p o u v o ir de l’une des parties
de détruire l’acte, ou de contester son existence.
T o u s les auteurs enseignent ces p rincipes, et prou ven t
par
�( 25 3 ,
par une foule d’arrêts, qu ’ils ont été consacrés p a rla juris
prudence la plus constante.
U n arrêt du 6 août 1740 déclara nul un acte par lequel
l ’archevêque de Reim s s’ étoit soumis à acheter l’ hôtel de
Conti m oyennant 450000 fr. L ’acte n ’étoit pas fait double ;
mais les héritiers du prince de Conti opposoient que l’acte
n’avoit pas dû être d o u b le , parce q u ’il n ’étoit obligatoire
que pour l’archevêque qui l ’avoit signé. L a m êm e chose
fut ju gée par arrêt du 29 n o vem bre 1781 , entre le sieur
F o rg et et le duc de G ram m o n t : il y avoit m êm e eu m en
tion de l’acte et réparations commencées ; néanmoins le
sieur F o rg et obtint que les lie u x seroient remis en leur
prem ier é ta t, ou des dom m ages-inlérêts en cas qu'ils ne
pussent se l’établir.
U n autre arrêt du 23 juin 1 7 67 a jugé la rigueur du
principe dans des termes plus lorts encore. D e u x co h é ri
tiers a voient fait un partage sous seing p r iv é , et l’ un d ’eu x
devoit payer p o u r retour de lot à l’autre 240 fr. L ’acte
fut déposé chez le curé du lie u ; chacun jouit de son l o t ;
et dans un contrat de mariage postérieur, un des copartageans se constitua, en présence des autres, le lot à lui échu.
L ’un des coh éritiers, après plusieurs ann ées, demanda
un p a rta g e , et soutint que l’acte q u ’on lui présentoit éloit
nul p ou r n’a vo ir pas été fait double. O n lui opposoit le
dépôt en main tierce , sa prop re exécution pendant six
a n s, et des coupes d ’arbres dans son l o t , sa présence m êm e
au contrat de mariage ci-dessus, et l’adhésion de tous les
autres héritiers,
Ces moyens avoient réussi en prem ière instance en 1764rnais sur l’appel à A m ien s , la force des principes p réD
�( *6 )
valut. U n e sentence de 1766 prononça la nullité de l ’acte,
et ordonna un nouveau partage. Sur appel au parle
m ent, cette sentence fut c o n firm é e, après une plaidoirie
très-d éb a ttu e, dit l’arrêtiste, et l’appel fut mis au néant.
Enfin 011 conuolt l ’arrêt cité par L é p in e de G rainville.
U ne vente avoit été faite en deux doubles; mais il n ’étoit
pas fait mention dans les deux écrits q u ’ils eussent été faits
doubles : ils étoient représentés tous d e u x , et cependant
l’acte fut déclaré nul.
C e u x qui ne veulen t v o ir dans les procès que des cir
constances to u jo u r s variables, et ces apparences fugitives
de bon ou mauvais d r o it, qui s'évanouiroient souvent le
le n d e m a in , si 011 les exam inoit sous un autre point de
v u e , c e u x -là , d iso n s-n o u s , p ou rroien t s’étonner d ’ une
telle jurisprudence, sans songer que si le sum rnum ju s a
par fois ses inconvéniens, l’arbitraire en a m ille fois davan
tage. Ils peu ven t lire dans L é p in e de G ra in ville les motifs
qui engagèrent le parlement à se décider p o u r la nullité
dans l’espèce ci-dessus, et peut-être cesseront-ils de penser
que le juge doit rester le maître de son o p in io n ,q u a n d il
en vo it le d a n g e r , et quand il peut se gu ider par les
principes.
L ’article 1325 du Code civil les rappelle , et devoit
em pêcher les premiers juges de faire autant d'efforts p ou r
rechercher s’ il avoit été fait un double du sous-seing p rivé
du 2 octobre 1779? (l lli ? par son style et son c o n t e x t e ,
p ro u vo it cependant assez par lui-m êm e q u ’il n’avoit pas
dû être fait double.
« L es actes sous seing p r i v é , dit le C o d e ,q u i contien« lient des conventions syuallagmatiques, ne son t valables
�C 27 )
« q u ’autant q u ’ils ont été faits en autant d’originaux qu’il
« y a de parties ayant un intérêt distinct.
« C h a q u e originalàa\\. contenir la m en tion du nom bre
a des originaux qui en ont été faits.
« Néanm oins le défaut de m ention que les o rig in au x
« ont été faits doubles, ne peut être opposé par celui qui
« a exécuté de sa part la convention portée en l ’acte. »
A i n s i , quand il eut été vi*ai que le sieur I-egay eû t
écrit un double sous la dictée du sieur M a i g n o l , de L a n
dogne -, quand il seroit aisé de con cevoir que celui-ci eut
de sa part signé un écrit par lequel il auvoit dit ; J e s o u s
s ig n é
, subroge M e. P ie r r e M a ig n o l ( c’est-à-dire, lui-
même ) , à F e ffe t, ctc. ; quand celte rédaction insensée
sei’oit vraisem blable, un tel acte n’en vaudroit pas m ie u x ,
parce que ch a q u e orig in a l ne contiendroit pas la m en
tion q u ’ il a été fait double.
M a is , s’écrient les héritiers M a ig n o l , au moins êtesvousdans l’exception du Gode que vous citez vous-m êm e;
car vous avez la issé jo u ir le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e :
donc vous avez e x é c u té la vente.
O n pou rro it d ’abord répondre que le Code civil peut
être in v o q u é p ou r le passé , quand il est conform e aux
anciens p rin c ip e s , si Jiempè déclarét jus avtiquum nova
constitutio , mais q u ’il ne faut pns le suivre lorsqu’il s’en
écarte ; que d ’après cela il y avoit lieu de le citer p o u r
le déiaut de mention du m ot fa it double , parce que les
arrêts y étoient conformes ; mais que les arrêts n’atlachoient. aucune im portance à l ’exécution d’ un acte nu]
dans son p rin cip e , com m e on le vo it notamment par l’arrêt
D
21
�(
2
8
)
de 176 7 ; car ce seroit donner un effet rétroactif à la l o i ,
ce qui n’est pas dans l ’intention du Code.
M ais passons encore légèrem ent sur ce moyen, et voyons
s’il y a réellem ent une e xécu tio n de l’acte sous seing p riv é
dans le sens de l’art. 1 3 2 5 , c’est-à-dire, si le sieur M a ig n o l,
du C heval-B lan c , en la issa n t jo u ir le sieur M a ig n o l, de
L a n d o g n e , a nécessairement entendu ex é cu te r un acte
de vente.
Sans doute , si j’achète un p ré et que je paye le p r ix
c o n v e n u , j’exécute la convention ; de m ê m e , si je vends
un p ré dont j’étois en possession h ier , et qu ’après en
avo ir touché le p rix je le liv re dem ain, sans autre cause
de tradition , et sans é q u i v o q u e , j’exécute encore le
m arché. V o ilà bien ce q u ’a vo u lu dire le Code : pas de
difficulté sur ce point.
M a i s , si l’acheteur s’empare de l’objet vendu , ou s’ il
a un autre titre de possession que la v e n t e , alors l’équ i
v o q u e du m ode de possession p roduit l ’éq u iv o q u e du titre,
et le vice du titre renaît dès l’instant q u ’il n’est plus pos
sible d’être convaincu que l'occupation de la chose vendue
soit l’effet n écessa ire de l’acte de v e n te , com m e la preuve
certaine de son exécution.
O r , revenons à la position des parties en 1779. Sans
d o u t e , s’ il n’existoit d’autre acte que le sous-seing p r i v é ,
et si le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , n’étoit en posses
sion qu'en vertu de cet a c t e , il seroit difficile de p ré
tendre q u ’il n’a eu aucune exécution.
M a is , i° . q u ’on supprime tout à fa ille sous-seing p r iv é ,
et on concevra encore d ’après l’acte notarié du 2 octobre
1779 ,q u e le sieur M a ig n o l; de L a n d o g n e , a eu qualité
p o u r jouir.
�( z9 )
E n e ffe t , com m e le disent les adversaires , il fit créer
en sa faveur une rente qui n ’existoit plus. L e sieur M a ig n o l , du Cheval-Blanc , ne stipuloit pas q u ’il la payeroit,
mais il disoit qu’elle seroit payée p a r les jo u is s a n s du
pré. D o n c le sieur M a ig n o l, de L a n d o g n e , ch erchoit un
titre de jouissance, p o u r em pêcher de transporter cette
jouissance à d’autres : donc s’il a joui ensuite, c’est d’après
sa prop re convention p o u r le pa yem en t de sa rente. Sa
jouissance n’est donc pas la p reu ve certaine de V exécu tion
d’ un contrat de vente.
2°. Cette prétendue vente est encore si obscure, que ce
n’est en vérité pas la peine de vio le r une loi p o u r elle.
U n notaire qui veut acheter p o u r être p r o p r ié ta ire , ne
se fait pas subroger à un bail em phytéotique p o u r jo u ir .
U n notaire qui dicte une vente p o u r lui-m êm e, la dicte
com m e celles q u ’il rédige p o u r les a u tre s , et ne fait pas
écrire un b arbo u illage, ou astucieux, ou vide de sens.
M ais enfin les adversaires qui ne veulent v o ir que l ’e x
ception du Code c i v i l , parce qu ’elle leur est fav o ra b le,
et que rien n’a plus de latitude au gré des plaideurs que
les exceptions des lo is ; les adversaires, disons-nous, ne
rem arquent pas qu’ il faut cependant entendre la loi dans
un sens raisonnable ; car c’est bien là au moins l ’inten
tion du législateur.
L a nullité ne peut pas êlre opposée par celui q u i u
e x é c u té de sa p a rt la convention : voilà l’exception du
Code.
P o u r appliquer cette e xce p tio n , fa u t -il une exécution
a c t iv e ? faut-il une exécution en tière ?
J e vends aujourd’hui un im m euble par acte non don-
�( 33 )
Lie , et je le livre. Si au terme on ne me paye p a s , je
ne puis me servir de ma vente , cnr je n’en ai pas. J'aurai
bien une action en désistement qui forcera l ’acheteur à
s’exp liq u e r : mais si la vente lui est onéreuse , il se
désistera ; s’ il la trouve avantageuse, il la produira ; et
je ne pourrai l’em pêcher d’être maître de sa c a u s e , parce
que j’aurai e x é c u té de m a p a ît la convention. A in s i
une convention syn a lla g m a tiq u e m'aura obligé s e u l:
voilà l’abus des interprétations forcées d’ une loi qui n’a
rien voulu de pareil.
L es di fie rentes parties de l’article 1 3 2 6 , doivent s’e x
p liq u er l ’une par l’autre , de manière ù être entendues
e n se m b le , et sans s’entredétruire. L e Code a vo ulu que
V exécu tion fût un m oyen contre le d éfa u t de m en tion
que l ’acte ait été fait double : mais si chacune des parties
est obligée envers l ’a u tr e , il est bien toujours néces
saire que celle qui a encore un in térêt distinct à l'e x é
cu tio n de l’a c te , ait pardevers elle le double qui force
l ’autre à T exécuter de sa part.
Sans d o u te , quand le Code civil ôte toute action à
celui qui a e x é c u té de sa p a r t , c’est lorsque par cette
pleine exécution il n ’a plus un intérêt à l’exécution qui
reste à faire de la part des autres : voilà sans contredit
l ’ unique sens que la loi puisse présenter, en l’expliquant
par scs propres expressions.
A c c i a les adversaires répondent que le sieur M a i g n o l ,
du C h e va l- B la n c , étoit payé , et 11’avoit plus d ’intérêt à
a voir un double.
D ’abord c’esL une erreur de fait. L e sous-seing privtî
�C 31 )
p ro u ve lu i-m êm e le contraire; car si le p r ix supposé à la
vente est de 280 francs , il en resterait dû plus du tiers, dès
que 80 francs dem euraient à im puter sur des arrérages de
rente , dont le prétendu vendeur ne p o u vo it pas de
m ander la compensation sans un double.
20. Les adversaires supposent que le vrai p r ix de la
cession étoit les 2000 francs cédés par la rente des L arfeuil ; mais le sieur A îaignol père , qui a remis les titres
de cette rente à son donataire , lui a attesté n’en a vo ir
jamais touché un denier ; celui-ci n’eu a rien reçu non
plus : il falloit donc un double p o u r réclam er en rem
placem ent un p r ix de v e n t e , ou p our en demander la
résolution.
3 0. Une circonstance non moins sensible p ro u v e encore
la nécessité d’avo ir un double de vente, si c’en étoit une.
L e sieur M a i g n o l , de L a n d o g n c , p ou vo it être é v i n c é , ou
perdre son pré par force m ajeure; alors en supprimant
son double il retrou voit l’acte notarié du m êm e jo u r , et
demandoit au sieur M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , le paye
ment d’ une rente de 90 francs.
V o ilà quelle étoit la position du prétendu v e n d eu r;
et voilà précisément les motifs de cette jurisprudence sé
v è re q u i , en sacrifiant quelques intérêts particuliers , faisoit la leçon aux citoyens, et les préservoit de l’abus de
ces actes p rivés q u i , à l’économ ie p r è s , sont le plus sou
vent une occasion de surprises et une source de procès.
L a cou r doit juger ici la valeur d’un acte équ ivoqu e et
suspect. Si donc la rigueur de la loi fut jamais ap pli
cable , c’est sans doute dans une circonstance où il s’agit
�( 32 )
d’une prétendue v e n te , q u i , qu oique dictée par un no
taire, ne contient aucune des clauses d ’usage, aucune des
formes extrinsèques les plus c o m m u n e s, et à l’égard de
laquelle on ne donne aucune de ces excuses que la bonne
foi fait adm ettre, ou que l’ ignorance fait tolérer.
M e. D E L A P C H I E R ,
avocat.
M e. V E R N I È R E , avoué,
A R I O M , de l’imprimerie de L a n d rio t , seul imprimeur de la
Cour d ’appel. — Juin 1806.
�
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Title
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Factums Marie
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Description
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A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Maignol, Guillaume. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Delapchier
Vernières
Subject
The topic of the resource
rentes
ventes
bail emphytéotique
interrogatoires
donations contractuelles
conflit de lois
donations
bail
Description
An account of the resource
Mémoire pour Guillaume Maignol fils, habitant à Bonlieu, canton d'Évaux, appelant ; contre Antoine Guillaume, maréchal à Pontaumur, intimé ; et contre Gilberte Maignol, Pierre Legay, son mari, Antoine Maignol, Gilberte Maignol, veuve Paneveyre, et autres héritiers de Pierre Maignol, de Landogne, intimés ; en présence de Guillaume Maignol père, habitant au lieu du Cheval-Blanc, commune de Condat, appelé, en assistance de cause.
Annotations manuscrites.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774 : Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
32 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0328
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
A language of the resource
fre
Relation
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BCU_Factums_G1605
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Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Condat (15054)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
bail
Bail emphytéotique
conflit de lois
donations
donations contractuelles
interrogatoires
rentes
ventes
-
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Text
CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture, i°. du
contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
avec Marie-Léonarde Cornudet, du 14 mai 1778 ; 2°. du
contrat de mariage de Marie-JosephMaignoI avec Gilberte
Ducourthial, du 2, avril 1783; 30. d 'un mémoire à con
sulter ;
E s t D AVIS q u e , d'après les anciennes et les nouvelles
lois, le premier enfant m âle, issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec M arie-Léonarde Cornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son p e re , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
noces, il avoit épousé Marie-Gabrielle de Villette. D e
ce premier mariage issut Gilberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen Maignol.
A
�C* )
En 17 7 8 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
noces, Marie-Léonarde Cornudet.
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert Ducourthial r futur époux, institue
héritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un,
des enfans qui naîtra du présent mariage , et ce par préçiput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que les futurs choisiront conjointement,
par quelques actes que ce soit, ou qui sera Ghoisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit ;
et en cas que le choix ríen ait pas été fia it, ladite ins
titution sera au profit de Taîné des m âles, s’ il y a des
m â les, et s'il 71y a, point de mâles, au profit de Taînée
des filles.
D e ce mariage sont issus trois enfans mâles; G ilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793*
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant ; ni l’un ni l’autre n'ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, le fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés,
par le contrat de mariage de ses.père et mère.
L ’édit des secondes noces, de ï o, qui ne permet pas
à ceux qui se remarient, et qui ont des enfans d’un premier
lit, de se donner réciproquement au delà de la portion de
l’enfant le moins prenant, avoit fait,naître des doutes à cet.
égard: on craignoit sur-tout en droit écrit, qu’en faisant:
de p a r e i l l e s institutions, ce ne fût un moyen de frauder laloi ; mais la dernière jurisprudence, fixée par diiïérens ar
rêts , dont l’un du 29 avril 1719 , et l’autre du 11. août 1.740,,
56
�3
(
)
rapportes par Lacombe, est que de pareilles dispositions
Sont valables. C etoit aussi la jurisprudence de la ci-devant
sénéchaussée d’Auvergne. Le dernier commentateur de la
coutume, tome II, titre X I V , art. X X V I , page 354, rap«
p o r t e une sentence du mois de juin 1773, qui confirme une
institution d’héritier, en faveur des enfans à naître d’un
second mariage. A in si, en ne consultant que l'ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput,le tiers des biens qui'lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est de principe qu’un don fait de cette manière,
n’est pas sujet à rapport, même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à. la récla*
mation des exposans: on peut même dire'qu’elles décident
la question en sa faveur.
Il est vrai que d’après les dispositions des art. X X III et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 v e n t ô s e de l’an 2 élection
laissée au choix de l’un des ¿poux éLoit nulle, si elle n avoit
été faite que le 14 juillet 1789 etdepuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité à la succession
de cujus.
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du brumaire précédent, puisqu’elles ont été
armuUées, quant a leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4, soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourthial, à l’effet de savoir si à cette époque, il existoit
quelque loi qui pût empêcher l’effet delà disposition faite
en faveur de l’exposant, par le contrat de mariage de ses
père et mère : or, il n y avoit pas alors de loi qui eût pros
A 2
,1
5
�4
C )
crît de semblables dispositions, et annuité des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d’avoir exercé
la faculté d’élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
11 y en a pas depuis, attendu l’abolition de l’effet rétroactif.
La loi du 7 mars 179$ > antérieure au décès de Gilbert
Ducourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n'est relative qu’aux dispositions futures, n’a~
néantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, et nroblîgeoit point les père et mère à les révoquer : or , ce n’est
point en vertu d une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793 , que Fexposant réclame le tiers des
biens de son père, comme un d'on qui lui a été fait en pré
ciput; il le réclame en vertu d’une disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu d’une disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
En effet, l’article premier de la loi du 18 pluviôse der
nier, porte: « Les avantages, prélèvemens, préciputs, dô« nations entre-vifs, institutions contractuelles, et autre»
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
* stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du*
« 7 mars 1793, et en ligne collatérale ou entre individus
« non parens, antérieurement à la publication dé la loi du
k
brumaire an 2, auront leur plein et entier effet, con« formément aux anciennes lois , tant sur les successions
k ouvertes jusq’uà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir ».
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans nn contrat de mariage, passé antérieurement à la.loi
5
�1793
\
,
c ,5 ) .
du 7 mars
5a
d election de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroitdu mariage : il n’y a pas eu d’élection; les père et
mère sont décédés avant les lois des brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle ; il doit par
conséquent en profiter.
L e père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette-loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature 7 ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée f si l’on fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l’avenir \ qu’elle n’anéantit pas.
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. (A rt. X X V I de la loi du 22 Ventôse).
O r ,l’avantage dont il s’agit, est assuré à exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation delà loi du
rj mars 1793; mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni par la loi, doit donc
avoir son effet, puisqu elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mere avant la promulgation des lois des
brumaire et 17 nivôse'de l’an 2C :
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté , qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la même loi du 18 pluviôse dernier:
Celarticle est ainsi eoncu
9 :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
5
1
5
•
|
•
�.
C;6 .) ,
« fonds perdu, qui ont été annullées par les art. X X lI et
« X X V d e la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet 1789,.
«sont rétablies dans leur effet prim itif, si elles ont été,
« faites par acte ayant date certaine avant la publication d e|
« ladite loi du 17 nivôse ».
•
• Des termes de cette loii? il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à celle du 7 mars 1793, doivent être
maintenues: ainsi, 1 exposait étant, saisi de 'l'effet de l’insti
tution par le décès de son père, arrivé avant la publication
de la loi du 17 nivôse, on ne sauroit lui contester légitime
ment l’avantage qu’il réclame.
D é l i b é r é à R iom le -14 germinal an
5 de la république
française une et indivisible.
•
.
TOUTTÉE, TOÜTTÉE, GASCHON.
/
L E SOUSSIGNÉ qui a vu la consultation ci-dessus et
des autres parts j '
ques’il n’est pas impossible de tirer des lois nou
velles , quelques inductions favorables aux enfans du pre
mier lit de Gilbert Ducourthial, les
déduites dans la
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup à faire incliner en faveur de l ' e x p o s a n t . On peut rnême
a j o u t e r a u x r a i s o n n e m e n s d e l a c o n s u l t a t i o n . E u effet, en
supposant que par le d.éjjaut d’élection, fait antérieurement
E stim e,
r a i s o n s
�7
'
(
)
'
à la loi du 7 mars 1793, la disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable; c’est que le
contrat de 1778 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’eux ,emporteroient dans sa succession uu
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C’est sous la foi de cette promesse irrévocable,
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; p ar
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d’examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
enfans du. même p è re , en se référant à celle du 7 mars
793
I
><Iue ce dont le père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n’ont pas même entendu faire,
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de meme que
Ducourthïal père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second lit , de même les
lois nouvelles ne sauroient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
D é l i b é r é à Riom , le 14 germinal an
.française, une et indivisible.
5 de la république'
•
D E VAL..
V
�MÉMOIRE A CONSULTER
\
,
ET C O N S U L T A T I O N .
i_ iE citoyen Titus s est marié deux fois 5 il a eu de son
premier mariage, avec dame Marie L a u r e tte , u:ie fille
nommée Gilberte , et de son second, avec Suzanne Dailly
trois erifaiis , Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de mariage , Titus a institué pour son
hé ritier du tiers de tous ses biens présens et à ven ir, l’ un
des enfans qui naîtroit dudit mariage , et ce, en préciput
et avantage; laquelle .institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce fût, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fût ; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fait, ladite
institution-profiterait à ta în ê dès mâles ; et s’il n y a pas
de mâles , à l’aînée des filles. Telle .est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur ù la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de i ,oooliv., payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
pus f sans intérêts qu’a défaut de payement terme pac
terme j
5
�9
Ç ')
terme ; .et,,moyennant.ce.tte, çonstïtutîqn., ii^ fut stipulé
qu’qllp denp£ureroit forclose.de j t au tes;suçcesçjons directes
et collatérales de 1 estoc paternel, sous la réserve qu’il .-fit,
de la rappeler auxdifes,successions,par quelquacte que ce
fû t; ce,t,acte e s t d e ,i ^\ tl . ‘
T itus, père com m un,,est mort le 27 juillet 17.93;.la
mère est morte ,avant, sang avoir fait de choix de. l’uri des
enfans. Il s’agit m^intçnant de.savoir., ï ° . -si,cette, insti-,
tutiov h•-‘Atractuelle es t. valable en faveur des enfans ch*
second lit;
•
jm >
>«i . . *
2°. Si, en le supposant, n’y ayant pas eu d’élection de la
part des père et, mère ?1c’est' l’aîné mâle qui. doit .en pro
fiter j
j
(
j'.jr
3°. Quels sont les droits delà fille du premier,lit dans
la succession du père commun ? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle avoir son effet ?
. ''
• Enfin j y. ayant ,des enfi^ns.mineurs, quelle doit etre la
forme du partage? , * j
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S ü L T A T I O N;
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)
L e co n se il s o u s sig
contrats de mariage dônt'il s’agit,
E s t i m e , sur
:
n é
; qui a lu lès deux
* ■
les questions proposées,
_
■. <■
.
jp. Que^’institutionjcontractueile^faite par un.père dans
son second contrat de mariage au profit des pnfansjà naître
çl’icelui, est valable et ¿Qit avoir son exécution.
B
~
�.
.
( '1 0 l
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs¿
et il paroît qu’elle a été diversement jugée par' les tribunaui'.:, j
:
>
Ceux qui ont soutenu qu’elle étoit nulle, se sont fondée
sur ce que les enfans du second lit, n’étant encore sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
ni de haine, les dispositionsjqiië l’un dès conjoints fait
en leur faveur /ne-sont censées faites qu’en contemplation
de l’autre conjoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d une portion d’enfant, l’on a voulu
éluder la loi par une disposition indirecte -, et que d’après
l ’édit des secondes noces, lô n ne poüvóít donner aux
pères, meres et enfans du second mari ou autres personnes
par'dôï et fraude interposés.’
■
Une femme, dit Chabrol, qui iïe peut pas profiter de
ces libéralités pour elle-même, ha pas moins d’empresse
ment à les procurer à ses enfans à naître; s’ils lui survi
v e n t, ils ont ce que leur mère n’auroiï désiré avoir que
pour eux ; et s’ils lui prédécèdent, elle peut retrouver
souvent, dans leur succession, les biens qu’elle leur a.
procurés.^ v ‘
.
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i
,
rapporte par Montholon.
i
588
L é second qu’on írouve;dansiSoe{Ke >''du
juillet 1645.
Un troisième recueilli par ïirodeau sur L o u e t, L . N.
somm. 3 , du gsa'oíit
1
• ~Le'quotrièmü , 1qu’ôii t^bliVé au rjourilal dû Palais ,
dn.7'iséptembre 1673.
1
■
E n fin / ’celu i‘cirtinü soüs le hcUn ’ de LiâpaV'rà j du 18
�( H >
mai 1736, rapppr^ paritr % m e de^GraifiyilIe. T o u s,
dit-on, pot an nulle des çh^positioiis fîûte^ en faveur des
enfaus à naître ¿ ’un secpnd ¡mariage,
.
,, IV^is si l'on se donne la peine d’entrçr en connoissancç
de cause de ces jugpmerçs, on s’aperçoij: bientôt qu’il^
sont rendus sur des circonstances particulières, et n’ont;
aucune application, à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de Montholon , d’après ■
Rousseau dç
la C om be, n’a p^s jugp Iq. question. ? Il s’est trouvé ,
« dit-il, ¡y.erio'j^ocps, qu’ils’agissoit d’une donation faitç
« non à des enfqns d’un second lit , mais ià des colla,
c téraijx. »
'
■
Celui de 1645 paroît ¡avoir jugé qu’une mère remariée
n’avoitpu donner auxenfans du second mariage se^ meubles
et acquêts1, et le quint de ses propres, au préjudice des en fans
du premier lit, dont la légitime n’avoit cependant pas été
blessée; mais indépendamment de l’injustice évidente qui
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume diffé
rente de celle-ci, où les père6 et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs finfans.
'
Celui de 1647 se trouve dans tous les recueils ; il fut rendu
çonsultis çlasçibus • ilanjiull,a une donation,contractuelle,
faite au profit d.enfans à,n aître, par une femme qui se
remarioit; maisBrodeau, qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation était .tout-àrfait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite h l’exclusion perpétuelle des enfanf
du premier lit, au point qu’à défaut d’eniàns du secontf
Üt, les collatéraux étoient appelés.
.
Il n est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
annullée; i° . elle étoit faite ab iratoy et 20. comme l’obB 2
�.
.
,
.
(
«
)
.
.
.
.
.
.
serve Chabrol, il estévidènt que le mari avoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
contractuelle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it, suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
de son gendre, « et aü cas qu’il n y ait pas d’enfans , lesdits
« biens appartiendront audit sieur de Saint-M àriin seul \
tequi etoit le'futur époux, et aux sien s, sans que les eni’ans
« du premier m ariage, n i les héritiers de laditefu tu r e y
« -puissent rien prétendre n i demander, sinon que ladite
« Guilbou, s i elle survit ,•duquel cas elle jouira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour
« lieront au x héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrêt de 1673, a bien aussi annulléune donation faite
aux enfans à naître d'un second mariage; mais elle avoit
pour principal objet la femme 5 c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit: « au fa itp a rticu lier,
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
* du palais, il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère 5 c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la pa'ssion extrême qu’avoit
« pour elle le sieur de Têrsam , a1été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
»qu'il ne pouvoit encore aimer. »
’
Cela est si vrai que Rousseau de la Com beyqui rapporte
aussi cet arrêt!/verbo Noces, s’en fait' un moyen pour prou
ver que les enfans communs, nés oü à. naître,'ne' sont point
compris dans la prohibition,, pourvu qu’ ils n aient servi
de prétexte pour donner aü second conjoint,
'
E nfin, l’arrêt de 1738 de Làpàrta, a été rendu en pays
�X3
. . .
.
•., •.
(
) .. •
He droit écrit, ou la mere succède à son enfant: ; en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition étoit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; le3
parties et leurs biens étoient régis par une coutumç qui
exclut les ascendans de la succession desdescendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
déclarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second mariage, entre le pays de
droit écrit, et celui de coutume.
1
Dans le prem ier, la seconde femme peut etre I objet de
la libéralité d’un mari ; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eux, à moins qu’il n’y
ait aucun parent de la ligne ; et dèslors la prohibition ne
peut plus exister, puisqu’il n’y a plus d’intéressé.
Mais ce n’est pas seulement avec des raisonnemens tran-clians qu’on veut écarter les préjugés que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement form ée, soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in term inis‘y sort
par lés nouveaux; et la presqu’universalité des auteurs,,
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bieù pro»'
nonéée.
-
�.
.
. f *4 )
L e premier arrêt qui ait admis l’institution d’héritier en
faveur des enfans à naître d’un second mariage, est rapporté
par Chopin, liv. 3 , chap. ie r. lit. 1e1'. sur la coutume d'An
jou , en date du 7 septembre i y .
.
•
Le second, du 19 juillet 1659 , rapporté par R icard ,
Traité des Donations,, partie 3 , n°. 1243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite
à des enfans à naître, par un troisième contrat de mariage:
c’est l’arrêt des Lagrange, On demandoit la réduction de
la donation ? conformément à led it des secondes noces. La
disposision fut confirmée pour le tout.
L e troisième se trouve au Journal des audiences , soug
la date du 29 avril *
? ^ fut imprimé dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en fayeurdesenfansü naître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
L e quatrième est intervenu le 1 1 août 174° >au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Combe >
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrêt, Jacques de Gagnou
de V ilèn e, lieutenant général des armées, figé de soixantequinze ans, qui avoit un fils du premier lit , convolant eu
secondes noces avec dame Claude-Antoinette Passé, avoit
donne auxenfansde ce futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui permettoit de donner à ses enfans puînés. L3.
donation a été confirmée en faveur'des enfans du second
.mariage, quoique la dame Dassé eût la garde’-iioble de
¿es enfans»
■
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui se remarie, peut donner ¿ses enfans du secprid lit *
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans comipuns,
55
7*9
�. .
a
...
c 15 )
nés ou à naître, ne sont pas compris dans la prohibition,
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
se remarie en pays de droit écrit, la donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
faveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas à un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
une exception au droit commun. Tout le monde connoît
les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C ’étoit une dame d’-Alègre, quiavoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire ]a condition d’un enfant
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par des
considérations d'honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du Journal du palais,
dans la cause jugée par 1 arrêt de 1673? «que les législa% teurs qui se sont particulièrement attachés à former des
« obstacles aux secondes noces, n’eussent point parlé des
«enfans, s ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition; mais ils n avoient garde de penser ¿i eux ; il
« y en a deux raisons sans répliqué. »
«La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autoi’isant les secondes noces,
« elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
�.
i . 1? )
« en naissent, clans ïapossession du droit commun ; c’est-âe dire., que comme ces enfans ne' sont pas encore au monde,
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venir pa'rune. voie
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) ... . .¿i) y -i>• •>*?. •, • - i ' •
« loi ne peut pas avoir pour eux de 1indignation, qu elle ne
‘» fonde jamais que sur un démérite naturel ou.moral. .
«L a seconde raison^est, que l’ordonnance ne,peut com
te prendre les enfans communs dans la prohibition, que par
« les mêmes motifs qui y ont donné lieu, savoir , en faveur
a de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
« mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
çc innocente des enfans, et sur-tout dans des
enfans à naître,
1
qui n’ont que suffrage de la nature qui parle pour eux.
« Il ajoute que presque tous les docteurs avaient décidé,
« que la loi hâc echctati, et led it des secondes noces, rje
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
p excité 1a libéralité des pères et mères, par leur mérite, par
<r leur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
p que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
« que leurs pères et mères pensent à eux avant leur naisr
«sançe , et qu’ijs se les représentent, comme s’ils étoient
«effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
« contrats de m ariage, les enfans à naître ont ordinaire?« ment la meilleure part, » ,
Brodeau sur I^ouet, lettre N , somm. 3 , n°. 12 , a traité
également cette question: « Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l'édit des
« seconds noces a lieu , non seulement A l’égard des con
j o i n t s , mari ou fem m e, mais encore des enfans d\i
« premier ou du second mariage....... Mais néanmoins il
. « est
’
J
.
* î .
i
.
�*7
(
)
« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu'à Tégarâ
« des enfans du premier lit de 1 un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et même personne avec
c leurs père et m ère, et qui est dans la prohibition de l’édit
« et non des enfans communs issus de leur mariage, qui
c sont capables de recevoir toutes sortes d avantages,
c s a u f la légitime au x eirfans du -premier h t , si la cou« tume ne dispose du contraire; la présomption naturelle
k étant que la mère faisant la donation, est plutôt portée
k par l’afFection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
c le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. de secundis
nuptiis, queBrodeaU rapporte, décide cette question dans
les termes les plus formels : «■potest vidua dare, non pro« vigno sedjilio communia nato ex secundis nuptiis :licet
« sit eadem ratio , non tamen idem j u s , q u ia jilio com« m uni ut donet mater naturatis a ffectio fa cit provigno
« ut donet noverca, maritalis ajfcctus J 'a c it, noji certè
« nover'calis; provignum non semper accipiam pro per~
« s a supposita, sed excogitatamfraudem edicto inspi*
« cabor in provigno , non in jilio com muni. »
Brodeau cite les deux arrêts de iôgô et de 162.6, qui
ont confirmé de pareilles donations.
072
L ebrun , traité des successions, liv. 2 , chap. 6 , spet. ire>j
distinction 2, est du même avis: « L e second conjoint, dit—
« i l , est la premiere personne prohibée, et nulle autre ne
«r l'est qu*à cause de lu i.........Q n demande si les enfans du
tf second mariage sont compris dans cette prohibition, et il
« semble qu’ils n’y sont pas compris: car, si d*un côté on les
,c considère comme les euians du second conjoint, de l’auG
�( i8 )
« tre, on les peut regarder comme les enfans de celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
* de ses libéralités ».
« Si les enfans de celui à qui il est défendu de donner, sont
t< dans la prohibition; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner «\ ses propres enfans......... I l faut prendre en
« toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
« que ces donations se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions.. . . Aussi nos
« docteurs, entr autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
te cod. de secund, nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n’étoit pas compris dans l’édit; ce que j’estime
« devoir avoir lieu, pourvu que les enfans n’aient pas
a servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color non fu e r it quœ situs, comme dit la loi item s i 7,
«jf. de sénat. Maced. et particulièrement pour l’espèce
« la loi suspitius 4 9 , j f . de donat. item si color vel
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœ situs, n ih il
« valebit traditio ; id est, si hoc exigit u xo r, ut aliquid
« ex ea re intérim commodi sentiret m antus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu?en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari,-à cause de la puissance pater
n e l l e ; mais que hors ce cas particulier, les donations
J'aites au x enfans comm uns, ne sont pas réputées com
prises dans ledit.
'Enfin, le derniercommentateur.dela coutum ed’Auver
gne, traite aussi cette question dans le plus grand détail,
�*9
(
)
et après avoir tfappôiHé les- arre(s>pnur et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière Jurisprudence paraît
décisive pour la validité de ces dispositions.
« Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740, ont fixé la juris
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruit pas,
g puisqu’il est dû à la cii’constance particulière du choix
« laissé à la seconde fem m e; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
c pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
«venu des successions et donations en ligne directe, >et
c où les dispositions en-faveur d’enfans à naître sont assez
a fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en
« î&mpersonnes prohibées, 11e s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints, avec qui le mariage se contracte, et il
« suffit que la disposition puisse s'appliquer à d’autres causes
« que l'impression du conjoint, pour qu’eHe doive a'voii
« tout son effet. On'doit plutôt rapporter la disposition â
'« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
ce combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, corn
et ment un second mari pouvant profiter directement au
«moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
« à naître seroient dans une plus grande prohibition que
« lui. Il nous sembla donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition, sauf les exceptions légitimes
« dans des cas ou il est visible que le donateur n’a eu d’autre
« motif que 1 impression et la suggestion du nouveau con« joint ou la volonté de l’avantager lui-même. »
Ainsi d on c, il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune, faile par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
C a
�.
,
(
2 0
5
.
-
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement de la disposition, puisquen cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoient succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien j puisque la femme navoit pas d autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice. Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps 5
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas yni l’un ni
l’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d’une disposition universelle ; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d ’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au projit des m â les, à l’exclusion des.
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
.mariées par père et mère^
‘ Tout concourt donc, bn le répète, à rendre cette dispo~
silion inattaquable. Le droit d’é lire , accoi’dé au survivant}
dans le cas où il n’auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne change rien à cette décision, parce qu’il n’en résul
tait au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première,, ce qui est réellement
-arrive , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mariII y a même plus, c’est q u e , sans les nouvelles lois, le
consultant n’en auroit pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle étoit forclose * moyennant la dot à elle
�constituée? et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de;
son père sans y être rappelée ; et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
m ent qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis h l’aîné mâle du second lit, une
succession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
Seconde
Q uestion.
jV y ayant pas eu à*élection, tous les enfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition,
- ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question
peut avoir été controversée dans les temps
Voisins de la loi du 17 nivôse an 2., dont 1effet rétroactif
avoit tourné les têtes j mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L ’art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , «• avant ou depuis le 14 juillet 1789, auroit conféré
<r au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« héritiers dans ses biens, l’élection, si elle n’a eu lieu que
«le 14 juillet 1789 ou depuis, demeure nulle et de nul
« effet; et tous les héritiers présomptifs, au préjudice des
ri quels elle auroit été faite, sont, nonobstant toute exclu« sion, appelés à partager la succession de la même manière
* et par les mêmes règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. »
L ’article suivant porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier ? néanmoins subordonnée au cas.
�■
.
-
,
,
.
« où un tiers ne (ïïsposcroit fpâs autrement des biens comcc pris en la même institution , sont nuls et de nul effet, k
te dater du 14 juillet 1789, si à cette'époque le droit "de
« l'institué n’étoit pas devenu iri-évocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée aveclui. »
Mais* i° . cette loi ne peut avoir d’effet rétroactif ; les
lois des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an , ont c o n f i r m é toutes les dispositions irrévocables
de leur nature-, faites avant la publication de la loi du 7 mars
179 3,qui a défendu toute espèce d'avantage enlignedirecte,
ainsi que les élections faites avant la publication de là loi du
i 7 nivôse an 2.
I/article V i l de la loi du 18 pluviôse an , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
a an 2 , à compter du 14 juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
«c date certaine avant la publication de ladite loi du
« 17 nivôse. »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dernière loi.'
Dans l’espèce particulière , la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est morte avant la révolution,
et le père, le 27 juillet 1793 '• la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession 3 il
faut juger linstitution dont il s’agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L ’on n’a pas oublié qu’à défaut d’élection , c’étoît lui
qui étoit appelé à la recueillir; et la mort du père, sans
l’avoir faite, équivaut à un acte qui la contiendrait,
5
5
�\
23
.
f
)
Ces principes anciens n’ont point été altérés par les
nouvelles lois, parce que la succession sest ouverte avant
et dans un temps u tile; et on peut d’autant moins'les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs
et sur-tout par Ricard, traité des donations , partie ire
chap. 3> section 12, n°. 572 et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un,
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers, comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’élection
« qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu’u n , mais seulement le choix de la persomie
« entre un certain nom bre, ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui rogatus e s t, positum est om ninb, an velit
*c restituere , sed q u i potiùs restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé h l’au
dience de la grand’eham bre, par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’autrui, quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterm iné,
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
' personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au moment ou il écriyoit ? particulièrement dans lé
�. , .
? 24 ) . •
ce pays de droit écrit, où les maris et femmes ont coua lume de se déférer entr’eux cet honneur, de laisser
te au survivant la liberté de choisir un héritier unicf versel entre leurs enfans ; ce qu’ils -pratiquent par le
r principe d'une sage politique , et afin de transmettre
ce toute la puissance entre les mams de celui qu i survit,
» ‘it lui conserver, Par ce m oyen, le respect de ses
» enfans. »
L 'on voit donc que les principes anciens valident l’ins
titution dont il s’agit.
Les memes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas ou le tiers, chargé d’élire,
ne feroît pas de ch o ix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement un des éligibles pour recueillir sa dis
position , à défaut d'autre ch o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par le x tinction du droit d’élire, ou par la mort du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite.
•
E n fin , les nouvelles lois , au lieu de contrarier les
anciennes sur ce p o in t, ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l'on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la publication de la loi du T7 nivôse : ainsi l'élection,
auroit pu valablement être faite jusque - là , t’t par la
même raison , l’aîné mâle avant été d é s i g n é pour la
recueillir, à défaut d’élection d'un autre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
Nous trouvons encore cette question décidée dans un
rapport
5
�5
t> )
iTapp'O’rt fait
nom d une commission, par le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
-résolution par lui présenté, porte que si: l’auteur de la
^disposition a voit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en a voit chargé', ët s’il avoit nommé un
-héritier ou légataire pour recueillir à défaut d autre choix*
sa nomination , conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’élire,
çt l’héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p ré v u , a recueilli seul le bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection, le lui auroit
en levé, ce qui n’est pas même proposable, elle n’en seroit
pas plus avancée, parce qu’elle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second lit , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe,
§.
T r o i s i è m e
111.
Q u e s t i o n .
Quels sont les droits de la fille du premier lit?
Cette fille a été foi close par son contrat de mariage;
mais la loi 1 a relevee de cette forclusion. Le père n’est
mort qu en juillet 1793? « celte époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793, avoient frappé,
et elle est appelée à recueillir, en rapportant ce qu’elle
D
�.
.
a re ç u , sa portion des deux tiers de la succession àb
intestat, qui seront divisés entre tous les enfans par
égaie portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau; mais ce qu’elle
prendra,dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de. son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira sei’a dotal; si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra moins, et les autres héritiers feront
les prélèveraens de d roit, de manière que l’aîné maie ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l’autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera , au prorata de son émolument, les autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de 230,000
y compris le rapport des i ,ooo
la portion de l’aîné mâle sera de 1 1 ,000
parce que
le tiers de 230,000
est de 76,666 ^ 13 J 4^v, et que
le quart, dans le surplus , est de 38,333 #"6*^ 8
en sorteque la fille du premier lit, conservant les * ,000
argent,
n’aura plus , en biens - fonds , que 22,333
6^ 8
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineursT
le partage doit être fait en justice, et provoqué par un
majeur; il ne pourroit avoir lieu sans cela.
5
5
5
D é l ib é r é à Clermont-Ferrand, le 19 nivôse an 9.
•
B O Y R O T , D A R T IS - M A R C I L L A T .
Je suis, du même avis, et par les mêmes raisons*
P IC O T -L A C O M B E L
�7
4
( z ')
'L e soussigné , qui a lu la consultation ci-dessus, est
du même avis; les motifs qui lui servent de fondement
sont trop amplement discutés dans cette consultation, pour
qu’il soit nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
en faveur du consultant, c’est que sa mcre avoît prédécédé
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793,
et qu’ainsi son droit à l’institution étoit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2.
D é l i b é r é à R io m , le 12 pluviôse r an 9 de la ré
publique.
'
TOUTTÉE.
'
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
.
+
D é l i b é r é à R io m , le 2 ventôse, an 9 dé là répu
blique.
PAGÈS:
L e soussigné est du même avis, par les mêmes motifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de 1 ancienne législation , encore en,
vigueur à l’époque de l’ouverture de-la succession.
L e 22 ventôse an 9,
MAÜGUE.
D 2
.
-
�Q U E S T I O N S PROPOSÉES*
C t i l b e r t D U C O U R T H IA L , veuf de Marie de Villette,.
contracta un second mariage le 14 mai 1778; il avoit
une fille unique d’un premier mariage*
Trois enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthiai est décédé le 27 juillet 1793 ; sa
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
il s’agit de régler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père commun..
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthiai de Lassuchette, fils
aîné du second lit, croit avoir droit de prendre, dan&
cette succession, un tiers en précipuf et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
• contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, sort
p ère, du 14 mai 17.78., dont la teneur suit :
* Ledit........... futur ép o u x, en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à venir , Vun des e?ifans qui naîtrai
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage *
k laquelle institution est faite en faveur de celui ou celle
* que les futurs époux choisiront conjointement,, pas-
�.
29
(
)
« quelques actes que ce soit , ou q u i sera choisi par le
c?' survivant des deux futurs , auquel le droit en appar-'
<r tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
« que ce soit ; et en cas que le choix rien ait pas été f a i t ,
« ladite institution sera au profit de Taîné des mâles ,
« s’il y a des mâles , et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. >3
Gilbert D ucourthial et sa seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre, sans avoir fait d’autre choix entre leurs
enfans communs , pour recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que’ le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de Vaîné des m âles, en cas qu’il
n’en fût pas fait d’autres.
En cet état, le citoyen Lassnchefte , fils a în é , est - il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son père, a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vun des enfans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
20. Que Yindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
la disposition ?
.
3«. Qu elle n etoît pas viciée non plus par Ta circonstance’'
que la seconde fem m e devoit concourir au choix de cet
héritier, dans le cas ou il seroit fait du vivant des deux
époux, etmeme de 1 élire seule, si elle avoit survécu ?
40. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte“
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans le cas, qui est arrivé, où il n’y auroit
pas d’autre ch oix, étoit également une disposition valable
�3
. .
( ° >
^
#
dans le principe , et qu’elle doit produire, son plein et
entier effet, nonobstant la révocation des dispositions de
ce genre, prononcée par les articles X X III et X X I V
de la loi du 17 nivôse an 2 , postérieure de cinq mois
au décès de Gilbert D u c o u rth ia l ?
°. E n fin , que le décret du 7 mars 1793 , qui avoît
interdit tous avantages en ligne directe, quelques mois
avant le.décès de Gilbert Ducourthial, n’est pas un obs
tacle non plus à ce que le citoyen Ducourthial fils aîné
profite d’une disposition en préciput, qui a sa source dans
un contrat de mariage antérieur de plus de quatorze ans
à ce décret.
5
Opinions du Conseil sur les questions proposées.
L a première observation à fa ir e , pour résoudre les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d’une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2 ; mais d’une
succession ouverte près de six mois avant cette loi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut rapportée par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
cette époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisièm e observation. Le sort de l’élection faite par
�#
C 31 )
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourthial -Lassuchette, fils aîné, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas où
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
mère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé avant la lo i du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ’ car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils avoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
De ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées 3 mais
uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
validité, sous le régime ancien, des donations de biens
présens et à venir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de mariage, en fa v e u r des enfans à naître du mariage T
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 1731 ? art. X V II et X V I I I, et de 1747, art. XII.
On ne sauroit non plus méconnoître la^ capacité des
enfans d’un second mariage, pour recevoir de pareilles
dispositions et en profiter, en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut permettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de ses
enfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
A uvergne, où étoient situés les biens de Gilbert D ucourtliial,) et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage, sur ceux du second.
�.
(
3
S
.
.
Xa seconde femme, il est vrai, n’auroit pu être vala*^
folement instituée par son m ari, que pour succéder à une
part dteiifant; mais son incapacité relative et limitée ne se
communiquoit point à ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en général, ne fut jamais mise eu.
question ; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naitroient du m ariage, étoient
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits A la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
*719 et 11 août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage en secondes noces,
aux enfans à naître du mariage, que ce qui y est véri
tablement ; je veux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, qui, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir le sort
dçs enfans à naître du mariage, s’occupent de l’assurer à
avance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contractent,
et sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
1
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrôts notables de
la Combe.
donc
�.
f 33 )
.
donc pas surpris si tous les suffrages se sont réunis, depuis
soixante ans, pour en proclamer la validité.
<- D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec laquelle Gilbert Ducourthial use de la
faculté d’avantager l’un de ses enfans à naître du second
lit; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; c’est-à-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gi'atifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauroient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes généraux, pour ne laisser voir
<ians l’institution faite par Gilbert D u courthial en faveur
d ’un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
m otif pour les tribunaux d’en ordonner l’exécution sans
hésiter.
'
2°. Mais on semble prétendre que l'institution dont il
s’agit itoit vicieuse dans sa form e, en ce que (in stitué
était indéterminé, et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourrait être de quelque considération, s’il
s’agissoit dune disposition postérieure à la loi du 17 nivôse
an 2, qui a aboli pour Lavenir les dispositions dont l’ap
plication serait laissée au choix d’un tiers. — Mais il s’agit
ici dune disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que; loin que les donations et institutions électives fussent
E
�34
'
C
')
.prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X II, L X III, L X I V , L X V e tL X V I de l’or
donnance de 1735, sur les testamens, et par celle du mois
d’août 1747 sur les substitutions, art. XII.
Enfin, les articles X X III et X X IV de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 5 , lèvent tous les doutes; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r , institution dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette réclame l’exécution, est dans ce cas,
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur fils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’eu x, et
choisir un autre de leurs enfans pour recueillir à sa place,
étoient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,
dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette veut tirer avan
tage , n’éloit pas vicieuse dans son essence; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conléré ¿1 sa
seconde epouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueilleioit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit delire lui olfroit une perspective éventuelle, qui
pouvoit lui ouvrir des chances pour faire tourner le don
à son p ro fit, quoique personne prohibée ; et l’on cite en
faveur de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
1
�.
. . . .
fut jugé par l’arrêt rendu entre la veuve et les enlans'
Laparra, le 18 mai 1736,
La réponse est''facile et tranchante. L ’arrêt de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L'institution élective qu’il
annulla , éfoit universelle ,'et réduis'oît les enlans du pre-’
iiiier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mère suc’cédoit à ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœùrs consanguins.
’
Cette mère qui aVoit'survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession . consistant principalement
en mobilier; et elle avoit d?ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant - de son mari, pour réduire à peu
près h rien les légitimes desènfans du premier -lit. L ’in
dignation plaidoit la cause de ces'victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence 'appeler l’arrêt qui annulla
l’institution contractuelle faite-à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
:
'
O r, qii’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont il s’agit ici?
' ‘
•
|
•
_
■
.
1
.
L ’institution de Laparra étoit universelle ; celle-ci n’est
que du tiers.
'
:
'
La seconde femmede Laparra avoit survécu à son m ari,
ets’étoit emparée débouté la succession , pour en détourner
la meilleure part <Y son profit. Ici ’la seconde femme de
Gilbert Ducourthialtîst morte long-temps avant son mari,
et n’a profité, rii'pu'profiter de rien dans sa succession. '
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
ses enfans,¿et‘elle' pouvoit abuser du droit d’élire qui lui:
avoit été confié, soit pour jo u ir, en retardant son ch oix,
E
2
�3*5
.
(
..
.
soit pour y mettre lin prix et des conditions à Son avantagé.
La seconde femme de Gilbert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à sont
mari ; la coutume qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, l’auroit exclue de l’espoir d y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’en
fant, dont il lui étoit permis^de la gratifier ostensible
ment ; la m édiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée ; y auroit mis un obstacle invincible..
Il n’y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. Tout étoit fraude dans l’afFaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci ; la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
Voilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial a în é , qui s’évanouit.
•
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement , pour recueillir à défaut d’autre choix , et
l’héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice de la disposition, toutes les fois, qu’il
n en ctoit pas déchu, par un choix contraire.
L article X X IV de la loi du 17 nivôse, abrogea ces.
règles pour Tavenir • mais il en consacra les effets pour
le p assé, en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
seroit devenu irrévocable par le décès de la . personne
ayant droit de révoquer..
• ...
'
•
�t
C37 )
L ’article vouloit que le décès qui avoit rendu la dis
position irrévocable, fut anteneur au ¡4 juillet 1789 !
mais cette rétroactivité est rapportée. Il suflit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
révoquer , soit antérieur à la publication de la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourthial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est confirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
•
°. Il reste la principale difficulté à éclaircir; elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en principe, que « la faculté de disposer de ses
cc biens, soit à cause de m ort, s o i t entre-vifs, soit par. do
te nation contractuelle, en ligne directe, étoit abolie, et
« qu’en co nséqu ence, tous les descéndans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
A p p u y é s sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette, lui diront sans doute, « si vous
«échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
«parce que le décès de notre père est antérieur, au
«moins n’échapperez-vous pas au décret du 7 mars
* 1793 > car no^re pere n est mort qu’après ce décret ,
« et conséquemment dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de sa succes« sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. »
5
La réponse est dans les articles I et V II de la loi du
�5
.
- / 38. }
.
t8 pluviôse an , qui déterminent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
1793 , ren ces termes :
«Les avantages i prélèvem ens, préciputs., donations;
«entre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi
t io n s irrévocables de leur nature , légitimement stipua lées en ligne directe avant la publication du décret du
« 7 mars 1793 > auront leur plein et entier effet, confor« moment aux anciennes lo is, tant sur les successions
« o u v e r t e s jusqu’à'ce jour, que sur celles qui s’ouvriront
« à l’avenir. » ( Article I.ei )
■
« Les élections d’ héritiers ou de légataires. . . . qui ont
a été anrrullées par les articles........ de la loi du 17 nivôse,
a à compter du 14 juillet 1789 , sont rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant date
« certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. »
( Article VIT. )
L e contrat'de mariage du 14 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-distinctes ; savoir , une disposition princi
pale , qui étoit une institution du.tiers des biens de Gilbert
Ducourtliial -en faveur de l’un deis enfans à naître de son
second mariage, par préciput et avantage , et .une disposi
tion secondaire, qui étoit la désignation particulière de
l’aîné des mâles pour recueillir ce tiers de biens, dans le
cas ou il ne seroit pas fait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition .principale étoit pure , sans condition,
et irrévocable de sa-.nature ,* elle auroit profité à tous les
enfans du second lit collectivement, à défaut de choix
valable d’un seul d’entre e u x , pour recueillir exclusive-
�.
. .
c 39 \
.
ïiient ; la disposition secondaire, qui appliquoit l’a
vantage du tiers à laine des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et pouvoit être révoquée, par l'é
lection d’un autre enfant.
Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an
, qui viennent
.d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
pale ; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
conformément aux anciennes lois , puisqu’elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
Quant à la disposition secondaire , elle est maintenue
par l’article V II ; car cet article rétablit dans leur effet
p rim itif, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 17935 mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la loi du 17 nivôse
an 2 ; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse,'seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée par le décret du 7 mars 1793, n’emportoit pas la prohibition de choisir un d’entre plusieurs
éligibles, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle, irrévocable de sa nature , qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans l’espèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîné, étoit
5
�,
.
.
.
(
4
0
]
.
,
antérieure, soit à la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 1793, puisqu’elle étoit contenue dans le contrat
rue me de 1778. Mais elle étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant la loi du 17 nivôse, par le
décès de celui qui sèul auroit pu la révoquer par un choix
contraire.
'
Ainsi la validité, sous tous les rapports, se trouve pn>
noucée sans équivoque, par les deux textes précités.
.
•
•
O
b j e c t i o n
.
!La validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
en problème, à la bonne heure; mais la validité de l’élection
conditionnelle de l’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
à l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine-Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur, qui pouvoit jusqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîné, p arle
choix d’un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
il est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès , doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eût été
faite le 27 juillet 1793 seulement, jour du décès de Gilbert
Ducourthial père, il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée alors depuis plusieurs mois, en
li^tlQ
�4
t
( 1 )
ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
non avenue.
?
•
.
R É PO
n
s E.
Ce raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i». C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 > jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778? sous le
prétexte que le décret du 7 mars 1793? lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II de la loi du 18 pluviôse an ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l’intervalle de la loi du 7 mars 1793, à celle du 17 .
nivôse an 2 5 il maintient l’effet primitif de toutes celles
qui avoient précédé la publication de la loi du 17 nivôse,
indéfiniment sans exception, sans distinction entre celles
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793?
celles
qui étoient antérieures. Cette décision positive de la lo i,
au su rp lu s , n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les temps; car dans tous les temps, on avoit pensé
que celui qui choisissoit un de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition préexistante, ne faisoit point une
disposition nouvelle ; et conséquemment qu’il ne contrevenoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
'• ’
Après cela , qu’importeront donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîné, en 1778, dût
n’être considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne seroit
F
5
�4
;
.
( 2o
pas moins vrai de dire qu’elle est textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, quiencore une fois maintient indistinctem ent, toutes les
élections antérieures à la loi du 17 nivôse.,
2°. Lés citoyens Ducourthial puîriés, ne’ se font' pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à l’appui de leurs
prétentions le principe d égalité des partages' établi par
les lois de 17935 et de la u 2,. Ils ne veulent pas voiique ces lois n’ont pas été faites pour régler les intérêts des
donataires entre eux, mais seulement pour régler les in
térêts des héritiers légitimes, mis en- opposition avec
ceux des donataires, Cest cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien énergiquement exprimé dans l’articleL V II de la loi même du 17 nivôse , qui porte :
«• Le droit de réclamer le bénéfice de la l o i, quant aux.
« dispositions quelle annulle,.n’appartient,qu’aux héritiers,
« naturels. »Il est reconnu que la disposition du tiers des biens de
Gilbert Ducourthial, qui est l’objet du litige, loin d’êtreannullée, est au contraire maintenue par rapport aux;
héritiers de Gilbert D ucourthial, en général ; que le con
trat de 1778, qui la contient, doit avoir sa pleine et en
tière exécution , en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput, au préjudice de la
fille du premier lit, qui n’à pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens Ducour-thial pûmes > de plus grands droits qu’à leur sœur \ conséquem m ent, dès qu’il n’attrihue aucune part u cette filleunique du premier lit, il n’en-attribue aucune non plus;
à ses. frères, sur le tiers des-biens en litige,.
.
�43
(
)
Cela posé, ce ne peut être qu«n se présentant comme
■donataires concurremment avec leur frère aîné, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le tiers des biens , et en demander par
tage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
.
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D utc courthial en 1778, à celui des enfans à naître de son
k second mariage qu’il choisiroit, est bon en soi, et doit
« profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait en faveur d’aucun des trois.
« O r , il n’y a point eu de choix valable, puisque le seul
r qui ait été fa it, celui qui étoit contenu dans le contrat
« même de m ariage, du 14 mai 1778, a été annullé par
« le décret du 7 mars 1793. »
H é bien ! ce raisonnement, quand il ne seroit pas ren
versé par l'art. V II de la loi du 18 pluviôse, s’écarteroit
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle gé*nérale, que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
prohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héritiers naturels en leur qualité d’héritiers seulement, et
non par des donataires contre d’autres donataires. En
un m o t,. les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu en faveur des héritiers ; aucune n’a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen DucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père commun l’a avan¥2
�44
C
)
t
tagé par l'acte le plus favorable de la société, par un contrat
de mariage: d’un préciput qu’il pouvoit lui ôter, mais
qu’il a voulu lui conserver. Eu vain ils feront des efforts
pour se révolter contre la volonté paternelle, ils n e a
feront que d’impuissans.
' D é l i b é r é à Paris par le jurisconsulte ancien sous
signé , le 8 germinal an p..
b
BERGIER.
Le
C O N SE IL SOUSSIGNÉ qui a vu le mémoire à
consulter et les diverses consultations au bas rapportéespour le fils aîné du second lit de feu Gilbert Ducourthial:
de Lassuchette
E st
d ’avis des résolutions contenues dans ces consul
tations. Trois questions y ont été traitées..
i°. Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens,,
faite en faveur dès enfans du second lit , est valable ?
2°. Si cette institution profite^ à. tous les enfans, ou:
au fils aîné exclusivement ?
3°. Quels sont les droits de là fille du premier lit? ’
L a première et la troisième question ne présentent
point de difficulté sérieuse*.
Lors du contrat de mariage, l’inégalité de succession;
entre les enfans n’étoit pas prohibée ; ils pouvoient être
avantagés les uns sur les autres :on avoit éclàirci et con
damné le doute , si des enfans du second lit pouvoient
jâtrc mieux traités que ceux du premier. Le contrat dii
�.
' c 45}
second mariage assura donc irrévocablement aux enfans
du second lit un avantage alors licite.
2o. Par les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avril 1791 rendit
ce rappel inutile; elle le fit elle-même en prononçant
l’abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permeftoient d’exclure les filles. La fille du premier lit est donc
héritière comme les autres enfans , sauf le rapport de ce
qu’elle a reçu■
30. Mais à qui appartiendra ïe tiers reservé dans le'
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat à celui d’eux qui seroit choisi ,
et à défaut, à l’aîné? C ’est la seule question véritable
ment litigieuse,,
__
Dans l’ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute; Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîné, que le contrat du’
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit , le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna à aucun des enfans à en naître la certitude de re
cueillir ce tiers. Un seul y étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant. Il est vrai
qu a défaut de ch oix, 1 aîné étoit appelé : il est vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an , a'confirm é, art. I e1-. les>
institutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de la loi du. 7 mars 1793 , et que par l’ar
ticle V II, elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17’
nivôse an z les élections d’h éritier, qui auroient été fai-
5
�4
( ^)
tes par acte ayant date certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse.Mais, dira-t-on, l’article V II n’est pas
applicable, puisqu’il n’y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et l’article Ier. n’est pas applicable
non plus , parce qu’il 11y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
7 mars 1 7 9 3 ? bii avoit ôté la faculté du choix, en dé-,
clarant que tous les descendans auroient un droit égal
sur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont e u , par 3a loi du
7 m ars, un droit égal à ce préciput qu’il avoit destiné
en se mariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus,
été permis depuis le 7 mars 1793, de disposer-en faveur
de l’un, au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à ses parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués , et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
•
Mais le choix lut placé dans l’institution même ; l’ins
tituant en se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut donc, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir, si son père ne disposoit pas au-
�#
C47
)
trement. H avoit donc sur sès frères qui n’étoient qu’cligililes, 1 avantage detre élu conditionnellement; c’està-dire, si le père ne lémoignoit pas une antre volonté.
La condition qui fautoit dépouillé n’étant pas arri
vée , son droit remonte au titre qui lui fut donné par
le contrat, titre irrévocable de sa nature ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé-a laissé subsister
l’institution en faveur de Taîné dans toute sa forcev
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com-mun des te s ta te u r s l’aîné étoit l’objet des choix et des-''
préférences; et si l’on se réservoit de' pouvoir appeler'
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans;
le devoir que pour lui donner des co-partageans. C’est
dans la même intention qu’afin que la réserve de choisir
ne lui nuisît pas, on déclaroit qu’à défaut d’élection il
seroit héritier.
L e défaut d’élection n’est donc que là ratification de
l’institution de l’aîné, si un autre n’est appele : o r , la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con
trat à la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,,
et nullement par la loi du 7 mars 1793:
Il n est pas meine vrai que' cette loi eût ôté au1 père*
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un*
de ses enfans qu à 1 avenir , elle ne détruisoit pas
l’avantage deja fait ¿t. celui des enfans qu’il éliroit, encore'
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , ew
cas de non électiou.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir'
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre
�43
(
)
irrévocable, elle ne pouvoit embrasser l’hypotlièse dont
il s’agit; car, ou elle empêchoit le père d’élire, ou elle
lui en laissoit la faculté. Si elle lui eu laissoit la faculté, il
pouvoit donc dans cette espèce particulière avantager un
de sesenfans : si elle empêchoit l’élection, elle auroitdonc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde ; elle auroit eu effet ré
troactif. Le père a v o it donné. (U ne institution contrac
t u e l l e est une donation ). Le père avoit donné à un seul
parmi les enfans qu il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il n’y
avoit pas d’élection-, il y en avoit une bien expresse dans
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en
substituer une autre, elle doit avoir son effet.
Trois lois sont à considérer : celle du 7 mars qui abolit
pour lïavenir la faculté de disposer en ligne directe; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures et irrévocables,
• La loi du 17 nivôse fut plus hardie; elle annulJa ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
le 14 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l’effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2 , fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi du 9 fructidor an-3- L e donateur ou instituant,
décédé le 2 7 juillet 1793 , est donc mort sous l’e m p ir e
de la loi du 7 mars précédent, qui ne to u c h o it pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an maintient expressé
ment , par l’article I.er. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avant la publication de
5
�4
C P )
-larïoi du 7 mars 1793 *, et par l’article V II* elle mairitient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi du 17 nivôse. ' ;
O r , la disposition de 1,778 est antérieure ’au. 7 mars
793-
X
’ #
'
•
•
Elle est irrévocable de sa nature; car elle est comprise
dans’ un contrat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvdit être;révoquée au préjudice
de 1’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du choix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’institution en soi ne soit irrévocable: elle donne droit et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne 1 est pas : tous les
appelés ont l’espérance d*être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
.
L ’article V II de la loi du 18 pluyiôse est décisif; il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
1 7 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses ;
1 °, que 1 élection antérieure au 17 nivôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 2 °. que la loi du
7 mars 1 7 9 8 n’avoit P a s prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations ; ou devenus tels par les événemens, tels
G
�5
I o )
que les testattierts après ïe décès de leur? auteurs ; qüe lei
élections ne furent supprimées que parla loi du' 17 nivôse,
et que les corrections faites à-cette loi les ont rétablies pour
le passé. ; ...••• ••-••• a - ■
'>
■
:J 1 *
4-.. ^
O r, il s’agit ici d’une donation faite à un entre plusieurs:
donation irrévocable-et permise en'1778. ' ; : '
Il
s’agit de l’élection de ce donataire , faite dans la’dona*
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
.
Avant son décès arrivé en juillet 1793 , ou il eût pu en
appeler un autre, ou il ne l’auroit pas pu. A u premier cas,
il ne Ta pas voulu ; sa volonté , que rien ne genoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, l’élecr
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit .pas, doit être exé-^
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit : elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le contrat de mariage. Le dépouil-p
1er, ce seroit rétroagir 5 ce seroit tomber dans cette absur--dité de le dépouiller, parce que la condition sous laquelle
le testateur l’ayoit appelé ( le défaut d’autre c h o ix ), esj;
arrivée.
D é l ib é r é à P a ris, le 2 germinal an 9.
SIM É O N , P O R T A L IS . M U R A I R E , président
au tribunal de cassation. F A V A R D .
L E C O N SE IL SO U SSIG N É , qui a lu une consultation
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données ù Riom et a Clermont-Ferrand ;
*
E st du même a v is sur les trois questions traitées dans
çes consultations dont les résolutions sont uniformes.
,
�51
C
)
Sur la première question, il est sans difficulté qu’eri 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Coraudet, sa seconde fem m e, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
au trem en t , un de ses enfans plus que l’autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
*
' La jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui con
tractait un nouveau mariage, ayant des enfans du prem ier,
de faire des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union , après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du i ï août 1 7 4 ° »
est rapporté en forme avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
' 79- On trouve au même endroit, à la suite de 1 ai'ret du 11
août 1740 , un autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L institution d hcritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , étoit donc valable dans son principe.
Sur la deuxième question, cette libéralité du père subsistoit dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est decédc ; et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales:
G 2
�.
*
:• • •■ S * ? ' ) •
fiîais cette1 loi ne^régloît1 que l’avenir, et non le passé.
L ’effet'rétroactif attribué depuis aux lois dés 5 bru
maire e t-17 nivôse 'an' 2 ,” en rétrogradant jiisqu’aV
juillet 1789, a été aboli, et par'conséquent rinstitutîorii
d'héritier, qui avoit été détruiteâ est redevenue en pleine
vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second lit., les autres
enfans ne peuvent le lui contesle.LV . ....
L e contrat de mariage de 1 7 7 8 contient deux disposi
tions; la première est uneinstitution d’héritier pour un tiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
pu le survivant deux* voudront ch oisir;,la seconde est
uu,e vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils a în é , au défaut, de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N ÿ ayant point eu de. choix ni par les père et mère
conjointement, ni par le citoyen Ducoui,thial qui a sur
vécu , le fils aîné s’est donc, trouvé seul donataire, non,
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que> le contrat de mariage renferme*
- .
La loi du 7, mars 1793 n’a point défendu Tes élections
d'héritier ou de donataire à< faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d'héritier oü de donataire n’est’
point une donation proprement dite* Ce n’est que l’e xé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions4
sont de droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1 7 9 3 doit donc être restreinte dans le.cas dus donations
postérieures à sa publication.
.
D ’ailleurs, le fils aîné n’avoit pas besoin d’être élu. I f
�t
"■
¿trnú IttstîWc* JétfCníUelíemenl páf* le Contrat de' mariage
mê me , d an síe Cas ôiYüii'ôütrê que lui fie seroit pas
nonmu*.
, r
■ , , . . , r f, ■ . ;
Enfin l’article V ï ï de Ta toi'dû.iÔ pluviôse an , donnée
•
*'
’,
*.£»v
'
y*
en explication du rapport de 1 effet rétroactif, porte : a JLes
c<élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
c<perdu qui ont été annullées par les articles X X III et
a X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
a 1789 , sont rétablies dans leur effet primitif, s i elles ont
a été fa ites par acte ayant date certaine avant la publi« cation de ladite loi du 17 nivôse. »
1
1
5
D e pareilles élections pouvoient donc s’effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l’espèce proposée, le citoyen
Ducourthial étant décédé le 17 juillet 1793» quand on
considéreroit le défaut de choix de sa part conime une clection du fils aîné du second lit, cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les père et m ère, ou le survivant d’eu x, n’éliroient pas :
ce qui met son droit hors de tout doute.
.
Il est même à observer, que l’article V II de la loi du 18
pluviôse ne pailc point du cas ou le donateur prévoyant
le délaut délection, a designe éventuellement, comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fût recueillie.
Sur la troisième question , la fille du premier lit étant
exclue par la coutume, sa r e n o n c i a t i o n l a succession
future de son père n A pas plus d’effet que la forclusion
�( 54 }
légale. A insi, elle a le droit de succéder avec ses frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793
Délibéré
à P a r i s , rpar le citoyen F e re y , ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
'
A
F E R E Y .
Riom, de l'imprimerie de Landriot, l'imprimeur du tribunal
d’ appel. — An 9.
�
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The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
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Factums Marie
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[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9]
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Touttée
Touttée jeune
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Pagès
Maugue
Bergier
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
successions
partage
conflit de lois
droit d'aînesse
secondes noces
Description
An account of the resource
Consultations [contrat de mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette avec Marie-Léonarde Cornudet et contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte Ducourthial, du 2 avril 1783.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
An 9
1783-An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
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54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_M0127
Source
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Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Marie
Language
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BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
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Landogne (63186)
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droit d'aînesse
partage
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Text
Ba^aam asm sumjassaamammmmmam b —
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MEMOIRE
E
N
R
É
P
O
N
S
E
,
P o u r dame G i l b e r t e D U C O U R T I A L , v eu ve
de Joseph M a i g n o l , tutrice de leurs enfans
mineurs ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
veu ve de Michel d e P a n n e v e r t ; dame M a r i e
M A I G N O L , et sieur A n t o i n e B O U Y O N ,
son mari ; dame M a r i e - G i l b e r t e M A I G N O L ,
et le sieur P i e r r e L E G A Y , son é p o u x ,e t sieur
A n t o i n e M A I G N O L , tous intimés ;
C
ontre
G
sieur G
u illau m e
u illau m e
M A I G N O L , autre
M A I G N O L , son f i l s , appelans
d ’un jugement rendu au tribunal d 'arrondisse
ment de R i o m , le 18 flo réal an 1 3 ;
E
t encore en présence
L A U M E , maréchal
d ’A n t o i n e G U I L
habitant de la commune
de P o n t a um u r , aussi intimé.
L E sieur Guillaume M aignol fils demande le désiste
ment d’ un pré vendu par Pierre M a ig n o l de Landogne
A
�S 2),
à Antoine Guillaume : il a osé revenir contre des engagemens contractés par Guillaume M a ig n o l, son père ; il
veut être tout à la fois créancier et débiteur de lui-même •,
et c’est après vingt-cinq ans d’exécution, après que Pierre
M a ig n o l, et son fils, héritier institué, sont décédés , que
Guillaume M aign ol fils a cru trouver les circonstances
favorables, pour arracher à la famille M a ig n o l, de L a n d o g n e ,u n héritage dont leur père avoitpayé le prix.
Cette tentative qui blesse la délicatesse et les conve
nances, a été rejetée par le tribunal d’arrondissement; et
la cour s’empressera de confirmer un jugement conforme
en tous points aux lois et à l ’équité.
F A I T S .
L e i6 m a i i y
55 ,
un sieur M ichel L e n o b le , habitant
du lieu de V a u r y , concéda aux dames C hefdeville, à titre
de rente foncière et non rachetable, un pré appelé
P ré -G ra n d , de la contenue d’entour sept journaux, situé
dans les appartenances de Vaury.
Cette concession fut faite moyennant la rente annuelle
de 90 francs.
P a r une transaction du même jo u r, le sieur Lenoble
se reconnut débiteur d’une somme de 1800 francs envers
le sieur G u i l l a u m e M a i g n o l , du Cheval - B la n c, père
d’au Ire Guillaum e M a ig n o l, qui est aujourd’hui la partie
principale.
P o u r le payement de cette somme de 1800 francs,
L enoble délégua à M aign ol, du Cheval-Blanc, la rente
qui avoit été créée le même jour par les dames Chefdeville.
�lit
(3 )
M aign ol,d u Cheval-Blanc, a joui de cette rente jusqu’au
6 juin 1777 , qu’il se fit subroger par A n n et Chefdeville,
héritier des preneuses, en i j ô ô , à la propriété du pré
concédé , à la charge par lui d’acquitter la rente de 90 fr.
A u moyen de cet arrangement, M aign o l, du ChevalBlanc , dcvenoit tout à la fois créancier et débiteur de
la rente de 90 fr. ; de manière que cette x’ente s’éteignit
par la confusion.
O n sait que 1’efTet de la confusion est d’anéantir les
deux qualités incompatibles qui se trouvent réunies dans
une même personne -, ce qui est fondé sur ce qu’il est
impossible d’être à la fois créancier et débiteur de soimême.
L e pré dont il s’agit n’étoit point à la convenance du
sieur M aign ol, du Cheval-Blanc; il étoit peut-être plus
rapproché du sieur M a ig n o l, de Landogne; mais point
assez ù sa portée, pour qu’il désirât de l’acquérir.
M a ig n o l, du Cheval - B la n c , avoit d’autres vu es; il
convoitoit depuis long-temps un domaine qui joignoit
ses p ro p rié té s, et qui avoit été vendu par lin sieur
de Larfeuil au nommé Jean Gastier.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, savoit que M a ig n o l, de
L an do gn e, etoit créancier du sieur de L a rfe u il, d’ une
rente foncière au principal de 1400 francs, de plusieurs
années d’arrérages, et qu’ il avoit fait déclarer le domaine
vendu à Gastier, affecté et hypothéqué au payement de
sa créance.
M aign o l, du Cheval-Blanc, n’ignoroit pas que le paye
ment de cette créance étoit au-dessus des forces du ven
deur comme de l’acquéreur; et il lui sembloit facile de
A 2
tji
�•¿ïüt
( 4 )
devenir propriétaire du domaine, s’il étoit acquéreur de
la créance.
Il va solliciter Pierre M aign ol, de L a n d o gn e, de lui
céder l’effet de celte créance, offrant de lui donner en
échange ce P ré -G ra n d , dont le sieur M aign ol, de L an
dogne , n’avoit nullement besoin, qu’il n’a pas même
conservé.
M a i g n o l, de L a n d o g n e , par obligeance pour son
parent, accepta la proposition; mais il ne vouloit pas
payer de droits de lods : il falloit prendre une tournure
pour les éviter; et en conséquence, le même jour 2 oc
tobre 177 9 , il fut passé deux actes entre les parties, l’ un
par-devant n o ta ire , et l’autre sous seing privé. Comme
ces deux actes font la matière du procès, il est im por
tant de les analiser.
P a r le premier acte notarié, Pierre M a ig n o l, de L a n
dogne , cède et transporte à Guillaume M a ig n o l, du
C h eval-B lan c, un contrat de rente de la somme de 28 fr.
par a n , au principal de 1400 francs, faisant moitié de
2800 francs, consentie par dame Marie L a c o u r , veuve
de Henri de I^arfeuil, au profit de dame G aum et, grandtante du cédant, le 23 octobre 1720.
Il cède pareillement les arrérages de cette rente de
puis l’année 176 8, jusques et compris 1779.
Il cède encore l’eilct de la sentence qu’il avoit ob
tenue en la sénéchaussée d’A u v e rg n e , le 14 août 1 7 ,
56
contre Jean Gastier, acquéreur de L arfeuil, d’un do
maine situé au Cheval-Blanc, et sur lequel il avoit exercé
une action en matière hypothécaire.
M a ig n o l, du Cheval-Blanc, est subrogé à l’exécution
�l(y$
(5 )
de cette sentence, et aux procès verbaux de nomina
tion d’experts, sans néanmoins aucune garantie, ni res
titution de deniers pour cet objet.
L e jjrix de cette cession est fixé ù la somme de 2000 f r . ,
pour payement de partie de laquelle M a ign o l, du ChevalB la n c, cède et transporte, avec toute promesse de ga
ra n tir, un contrat de rente de la somme de 90 f r . , au
principal de 1800 f r . , à lui due par les héritiers de Pierre
Lenoble , suivant le traité du 16 mai i j 55 ; laquelle
r e n te , est-il d it, est -payable p a r les jou issa n s du pré
appelé P r é - G r a n d , su r lequel elle est spécialem ent
qjfectée.
A u moyen de cette cession , M a i g n o l , du ChevalB lanc, demeure quitte de la somme de 1800 francs, en
déduction de celle de 2000 francs , prix' du transport
consenti par M a ig n o l, de Landogne.
A l’égard de la somme de 200 francs restante, Pierre
M a ign o l, de Landogne, reconnoît l’avoir reçue de G u il
laume M a ig n o l, du Cheval-Blanc, en délivrance de pro
messe de pareille so m m e, dont quittance.
A la suite de cet acte, M a ig n o l, du Cheval - B la n c ,
donne la déclaration suivante, écrite en entier de sa main:
« J e soussigné, subroge M e. Pierre M aign o l, bailli de
« Landogne, à Veffet de la vente du b a il em phytéotique
« du pré appelé P r é - G r a n d , que sieu r A n n e t C h ef«
«
«
«
«
devüh m ’ a consentie devant M a ig n o l, n o ta ir e , le 6
ju in 1777 , pour par lui jouir dudit pré ainsi qu’il
avisera bon être, moyennant la somme de 280 livres,
dont 200 livres demeurent compensées avec pareille
somme de 200 l i v . , comprise en la cessiou que ledit
iê )
�V*n
( 6 }
« sieur M aignol m ’a faite devant A lle y ra t, cejourd’h u i,
« d’un contrat de rente sur les sieurs de L a rfe u il, et les
« 80 livres restantes me seront déduites sur les arrê
te rages réservés par l’acte ci-dessus daté. Fait ce 2 oc« tobre 1779- »
P o u r entendre cette dernière clause, relativement à la
somme de 80 francs, il est bon d’observer que par l’acte
n o ta rié , et par une clause finale, Pierre M a i g n o l , de
L a n d o g n e, s’étoit réservé les arrérages dûs antérieure
ment à 1758 , dont il devoit être fait compte entre le
cédataire et le cédant, sans que M a ig n o l, de L an d ogn e,
pût exercer aucune action contre Larfeuil de Lncour;
« attendu, est-il d i t , que Guillaume M aign o l, du Clieval« B lan c, s’est obligé de rapporter quittance au sieur de
« Larfeuil de ces mômes arrérages de rente. »
Cette dernière énonciation démontre assez que M a i
g n o l, du C h eval-B lan c, avoit déjà pris des arrangemens
avec le sieur de L arfeu il, et que tout étoit d’accord pour
que Guillaum e M aignol devînt propriétaire du domaine
vendu à Gastier.
Q uoiqu’on ait voulu à dessein répandre de l’obscurité
dans ces conventions, l’intention des parties n’en est pas
moins clairement manifestée. Il est évident que M aign ol,
du C h eval-B lan c, a voulu transmettre la propriété du
pré dont il s’agît il M a ign o l, de Tjnndognc. Il ne pouvoit
pas vendre une rente qui n’existoit plus, qui s’étoit éteinte
par la confusion : il vouloit vendre le pré ; et l’acte sous
seing p r iv é , qui a suivi l’acte public, 11’étoit autre cliose
que la promesse de 200 francs énoncée dans la cession
du méinc jour; promesse qui développoit les intentions
�(7 )
des parties, mais qui n’a voit pas besoin d’être faite double,
puisqu’elle ne contenoit point d’engagemens synallagmatiques, qu’il n’y avoit d’obligation que de la part de
M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c, attendu que le prix de la
vente étoit payé jusqu’à concurrence de 200 francs, au
m o yen de la cession consentie le même jour.
Aussi n’y a-t-il pas eu de difficulté entre les parties
pendant tout le temps q u ’a vécu Pierre M a i g n o l, ainsi
que Joseph M a i g n o l , son fils et son héritier. Tous deux
ont joui du pré vendu en 1779 : mais l’exploitation étoit
pénible p o u r e u x ; et Pierre M a ig n o l, de L an dogn e, se
détermina
à le v e n d re , par contrat du 29 ventôse an 6 ,
à A n toine Guillaum e, m aréchal, du lieu de Pontauniur,
L es M a ig n o l, du C h eva l-B la n c, ont souffert, sans se
plaindre, et les jouissances de M a i g n o l , et la vente qu’il
a consentie.
Ce n’est que six ans après, et le 29 vendémaire an 1 2 ,
que Guillaume M aignol iils , se disant donataire de son
p è r e , a fait assigner A ntoine G u illau m e, acquéreur de
M a i g n o l , de L a n d o g n e , en désistement du pré dont il
s’a git, avec restitution de jouissances.
A n toin e G uillaum e, ¿\ son to u r , a fait dénoncer cette
demande aux héritiers de son ven d eu r, et a pris contre
eux des conclusions en garantie et dommages-intérêts.
U n premier jugement du tribunal de R iom , en date
du 6 thermidor an 1 2 , a ordonné la mise en cause de
Guillaume M aignol père , à la requête des intimés; ceuxci ont pris contre M aignol père des conclusions en contre
recours, h ce qu’ il fût tenu de faire valoir la vente par
lui consentie i\ Pierre M aignol ; de Landogne.
�(8 )
U n second jugement, du 23 ventôse an 1 3 , a ordonne
la comparution des parties eu personne ; elles ont satisfait
à ce jugement, et .ont été interrogées le 6 floréal an 13.
L es interrogatoires respectifs sont transcrits clans le
m émoire de l’appelant, pages 10 et suivantes, aux notes.
Il résulte de l’interrogatoire de Maignnl père , du
C h eva l-B la n c, i°. que le même jo u r de Cavte n o ta rié,
du 2 octobre 1779 , il y a eu un acte sous seing privé
entre les mômes parties ; 2°. que cet acte sous seing privé
a été écrit en entier de la m ain de M a ig n ol p è r e , du
C h eva l-B la n c ; 30. que M aig n o l, de L andogne, a dicté
les conditions ; 40. qu’il n’y a pas eu d’autre double sous
5
seing privé que celui qui lui est représenté; °. que cet
acte a eu pour but de céder à Pierre M a i g n o l la jouis
sance du pré dont est question , jusqu’à de nouveaux
arrangernens entr’e u x ; 6°. que l’acte notarié ne lui délaissoit pas cette jouissance, q u’elle ne lui est délaissée que
par l'acte sous seing privé; 7 °. que le m otif d’éviter les droits
de lods n’est pas entré dans sa pensée ; 8°. qu’il n’a pas
été question de la propriété du p r é ; que ce 11’étoit ni
son intention, ni celle de M a ig n o l, de Landogne. Si
l ’acte ne fait aucune mention de la jouissance, il a écrit
sous la dictée de Pierre Maignol.
L e fils M a ig n o l, du Cheval-Blanc, n’étoit pas présent
à cet acte. Il en a eu connoissance bientôt après, et a osé
en témoigner son mécontentement ù son père : le fils
avoit alors seize ans.
M aignol père convient que M a ig n o l, de L a n d o g n e,
a bien pu avoir l’intention de se soustraire aux droits de
lods, de devenir propriétaire du p r é ; mais il n’a pas été
question de la propriété entr’eux,
�f<6
(9)
A u surplus M a ig n o l, du Clieval-Blanc , ne jouissoit
p i s de ce pré -lorsqu’il a fait une donation à son üls ; il
ne lui a pas donné nominativement le pré , mais il lui a
donné en général tous ses biens. Il a eu connoissance de
la vente consentie par M a ig n o l, d e L a n d o g n e , à An toin e
G uillaum e; il l’a sue quatre à cinq mois après, et ne s’en
est pas mis en peine : cependant il a voulu , après ceLte
vente , se procurer l’acle de vente de 1777 » ma,s comme
la minute se t r o u v o i t chez M a i g n o l , de L and ogne, il n’a
pu se la procurer d’abord : enlin il désavoue que le sieur
Z.egay ait écrit un autre double de l’acte sous seing privé.
Il est important de s’arrêter sur ce premier interro
gatoire. O n voit que quelque soin qu’ait mis M aignol
p è r e , du Cheval - Blanc , à s’envelopper d’une certaine
obscurité, et d’être très-réservé sur ses confidences, il n’en
est pas moins constant que l’acte sous seing privé est du
même jo u r que l’acte notarié ; qu’il est écrit en entier de
la main de M a ig n o l, du Cheval-Blanc ; que son iils a eu
connoissance de cet acte dans le même temps, lorsqu’il
n’avoit que seize ans; qu’ainsi la date de l’acte est cer
taine , et que Maignol lils en imposoit à la justice, lors
qu’il disoit qu’il n’avoit connu cet acte qu’après sa do
nation.
M aignol fils, dans son interrogatoire, prétend n’avoir
eu connoissance de cet acte que depuis q u ’il est à la tête
de la m aison. A v a n t , son père lui a voit parlé des arrangemens faits avec M a ig n o l, de Landogne , mais lui disoit
qu’il espéroit rentrer dans le pré ; il a la maladresse de
dire que son père avoit consulté trois jurisconsultes qu’il
nom m e, sur l’acte sous seing p r i v é , et on lui avoit dit
B
�( 1° )
que cet acte étoit nul pour n’avoir pas été fait double ;
mais s’ il a consulté sur cet a cte , il l ’avoit donc dans les
mains : il répond que n o n , mais il en savoit le contenu.
L e père, interpellé sur ce f a it, répond affirmativement
que sur ce qu’il avoit rapporté de cet acte, M e. A ndrau d
lui avoit assuré qu’il étoit nul.
M aign ol fils n’a vu dans aucun temps un écrit sous
seing privé entre les mains de son père; ce dernier lui
a toujours dit qu’il n’y avoit pas eu de double ; son père
ne lui a pas donné nominativement le p r é , mais lui disoit
toujours qu’il avoit le droit de s’en mettre en possession,
et lui donnoit pour prétexte qu’il n’avoit pas le titre qui
établissoit la propriété de ce pré , la minute de ce titre
étant entre les mains de Pierre M aignol.
Mais si son père prenoit un prétexte pour se dispenser
de lui donner ce p r é , M aignol fils ne.peut donc pas s’en
dire donataire, et seroit sans qualité pour en demander
le désistement : lorsqu’on est de mauvaise f o i , on n’est
pas toujoui’s conséquent.
Enfin M aignol fils a ouï dire que le sieur L e g n y ,
gendre de M a ig n o l, de L a n d o g n e , avoit été le scribe de
l ’acte notarié , et non du sous-seing privé.
L e sieur B o u y o n , l’un des gendres de Pierre M aign ol,
de Landogne , a déclaré qu’il n’avoit eu connoissance, et
n’avoit entendu parler de cet a c t e , que depuis l’afïaire
dont il s’agit.
L e sieur L e g a y , autre gendre, se trouvoit à Landogne;
le sieur M aignol l’appela dans son cabinet, où il étoit
avec M aignol p è r e , d u Cheval-Blanc; il l’invita à écrire
un double sous seing p r i v é , contenant subrogation do
�t 6 c]
( 11 )
— s
rente , et notamment contenant aussi cession d’ un pré de.
la part de M a ig n o l, du Cheval - B la n c , au profit de
M a ig n o l, de Landogne ; il ne se rappelle pas sur quel
papier il écrivoit ; il croit, sans pouvoir le certifier , que
M a ig n o l, du C h eval-B la n c, écrivoit avec l u i , et que
M a i g n o l , de L a n d o g n e , leur dictoit ; il n’a écrit qu’un
acte, ne se rappelle pas qui signa ; M aignol père n’écrivit *
p o i n t , c’étoit lui qui dictoit.
Après ces interi’o g a t o i r e s , il a été rendu, le 18 floréal,
an 1 3 , un j ugement qui déclare M aignol père et fils non
recevables dans la demande en désistement du pré dont
il s’a g i t , met les parties hors de cause sur les demandes
en recours et contre reco u rs, compense les dépens entre
A n toin e Guillaume et les M a ig n o l, de Landogne ; conr
damne les M a ig n o l, du Cheval-Blanc , en tous les dépen s,
même en ceux com pensés, et aux coût , expédition et
signification du jugement.
Les premiers juges remarquent avec sagacité que G u il
laume M aignol père ayant réuni dans sa main la rente,
et le pré qui y étoit asservi, cette confusion de la qualié
de débiteur et de créancier a opéré nécessairement l ’ex
tinction de la rente.
n,£1 11
Dcs-lors le contrat de 1779
P avoir pour objet
la cession d’une rente qui n’existoit plus , et ne peut se
référer qu’à la propriété du pré.
Les premiers juges ont aussi très-bien observé que
par l’acte sous seing privé , M a i g n o l, du Cheval-Blanc ,
subrogeoit Pierre M aignol à la vente qui lui avoit été
consentie le
juin 1777 , et que celte subrogation ne
pouvoit s’entendre que de la p r o p rié té , puisque l’acte
B 2
6
�( 12 )
de 1777 étoit exclusivement translatif de la propriété
du pré.
L e tribunal dont est appel , répondant à l’objection
résultante du défaut de mention que l’acte a été fait
double, décide que les M aign o l, du Cheval-Blanc, dans
les circonstances où se trouvent les parties, ne peuvent
exciper de cette omission ; car il résulte des interroga
toires de M aignol père et fils, qu’ils ont connu la pos
session publique de M aign o l, de Landogne, et après lui
d’Antoine Guillaum e, tiers détenteur. Ils ne se sont pas
mis en devoir de réclamer contre cette possession ; ils
n’ont pas également réclamé contre l’acte sous seing,
p rivé du 2 octobre 1779, quoique cet acte f û t présent
à leur esp rit, quoiqu’il soit du f a it personnel de Maignol
p è re , qui l’avoit écrit en entier.
L e tribunal en tire la juste conséquence que l’exécu
tion donnée à cet acte sous seing p r i v é , du 2 octobre
17 7 9 , forme une fin de non-recevoir contre Guillaume
M a ig n o l, d’après l’article 1325 du Code c iv il; et c’est
sans contredit rendre bonne justice.
Guillaume M aignol père a été convaincu que ce ju
gement étoit le résultat d’une discussion éclairée; il a
gardé le silence, et ne s’est point rendu appelant. Son
fils a été plus courageux; il n’a pas même craint de rendre
sa défense p u b liq u e, comme si sa prétention pouvoit
faire honneur à sa délicatesse.
O n se flatte d’écartcr péremptoirement toutes les ob
jections qu’il a proposées : ou établira, i ° . que Guillaume
M aignol père n’a voulu et pu vendre que la propriété
du p ré , attendu que la rente étoit éteinte par l ’acqui
sition du 6 ju ia 1777
5
�I V
!3
(
)
2°. Que l ’acte sous seing p r iv é , du 2 octobre 1 7 7 9 ,
n’a voit pas besoin d’être fait double;
30. Que cette omission, dans tous les c a s , seroit ré
parée par l’exécution de l’acte pendant vingt-cinq années.
§. 1er.
L a rente de 90 fr a n cs était anéantie p a r Tacte de
vente du 6 ju in 1777*
L a conf usi on, disent les auteurs, est'l’union et le m é
lange de plusieurs choses ou de plusieurs droits, qui en
opèrent le changement ou l’anéantissement. Cette con
fusion s’opère principalement par la réunion de la pro
priété directe et de la propriété utile.
L ’effet de cette confusion est d’anéantir les deux qua
lités incompatibles qui se trouvent réunies dans une
même personne ; ce qui est fondé sur ce qu’il est im
possible d’être à la fois créancier et débiteur de soi-même.
Voici comment s’exprime à cet égard Boutaric, Des fiefs,
pag. 92.
« Je suis seigneur direct d’un fonds assujéti par le
« bail à une rente annuelle d’un setier de blé ; ce
« fonds revient en ma main par déguerpissement, prê
te lation, ou autrement ; je l’aliène ensuite sans réser« ver la rente : ce défaut de réserve rendra-t-il le fonds
«
«
«
«
allodial? O u i, sans doute; car, quoi qu’en dise Brodeau sur L o u e t, tel est l’effet de la confusion ou de
la réunion du domaine utile au domaine direct, d'é"
teindre absolument la rente. »
�C 14 )
Il cite la loi dernière, S i g u is, ff. D e serv. in b . P rœ àia œdes quœ suis œdibus servirent, cum ennsset, traditas sib i a ccep erit, corifusa sublataque servit as e s t ,
et s i rursùs vendere v u lt, imponenda servitus est alioquin libère veneunt.
L e même auteur ajoute que les deux qualités de sei- gneur et d’emphytéote ne peuvent subsister sur la même
t ê t e , qui ne peut servir à soi-m êm e, et être soi-même
son emphytéote et son seigneur; que cette réunion s’o
père incontinent et sans délai, quand bien même la vente
ne seroit faite qu’à faculté de rachat.
B r illo n , dans ses arrêts, enseigne que l’obligation est
absolument éteinte, toutes les fois qu’il y a concours de
la dette et de la créance dans la même personne; il cite
la loi y , if. D e solut.
Despeisses, tom. I er. , pag. 803, édit. in -4°., dit que
5
toutes obligations prennent fin par confusion; qu ia nem opotest apudeitndem pro ipso obligatusesse. L . Hœres,
2 1 , §. Q uod s i , 3 , ff. F id e jussoribu s.
O n ne voudra pas sans doute établir une différence
entre le seigneur et le bailleur à titre de rente foncière.
Personne n’ignore que la rente foncière étoit considérée
comme un immeuble réel : le propriétaire de la rente
conserve la propriété directe; il a l’espérance de rentrer
dans le fonds, faute de payem ent, et la rente représenté
le fonds.
D ’après ces principes fondés sur les assertions les plus
positives des docteurs du d ro it, comment seroit-il pos
sible de penser que Guillaume M a ign o l, par l’acte no
tarié du 2 septembre 1 7 7 9 , a voulu ou pu vendre sim-
�tr &
5
C i )
plement à M a ig n o l, de L a n d o gn e , la rente de 90 f r . ,
dont il étoit acquéreur en i y 55 ?
Cette rente n’existoit plus ; elle étoit éteinte par la
réunion du domaine u t ile , lorsque Guillaume M aignol
eut acquis le pré asservi. Il ne pouvoit donc pas vendre
une c h im è r e , une chose anéantie : il a donc entendu
vendre la propriété du pré. Cela est d’autant plus évi
den t, qu’il énonce dans cet acte notarié que la rente
dont il s’agit étoit due p a r les jo u isso n s du pré. O r ,
c’ étoit lui qui jouissoit du p r é , qui l’avoit acquis ; il ne
pouvoit pas vendre une rente sur lu i- m ê m e , puisqu’il
ne pouvoit être débiteur et créan cier, puisqu’enfin la
rente étoit éteinte absolument dès le moment de la réu
nion , et sans pouvoir revivre.
Il est donc démontré que la convention arrêtée entre
les parties étoit de vendre la propriété du p r é ; que la
rédaction de l’acte notarié n’a eu d’autre objet que d’éviter
des droits de lods ; et quoiqu’on dise que ces lods eussent
été peu considérables ; que M a i g n o l, acquéreur , étant
b a illi, auroit obtenu des remises, etc. etc.
Il ne s’agit pas d’examiner ou de savoir à quoi se portoient ces lod s; on sait qu’en général ce droit paroissoit
odieux autant qu’onéreux aux acquéreurs : il y avoit un
certain amour-propre à les éluder. Combien n’y a-t-il pas
d’exemples que des droits de lods très-modiques ont em
p ê ch é des ventes, soit parce qu’on ne vouloit pas solli
citer des grâces, ni payer rigoureusement le droit ! Enfin
les lods étoient en pure perte pour l ’acquéreur ; ils
l’étoient d’autant m ieux dans l’espèce, que l’objet cédé
*
�( i 6 )
à M a ig n o l, du C h e v a l-B la n c , n’en devoit pas, tandis
que M a ig n o l, de L an d ogn e, auroit dû le tiers denier
en ascendant sur le prix du pré dont il s’agit; et dans
ce cas la chance n’étoit pas égale.
Si l’acte notarié a quelqu’obscurité dans sa rédaction,
toute équivoque est levée par la déclaration sous seing
p rivée du même jour : il n’y a plus de doute sur la pro
p r ié té , puisque M a ig n o l, du Cheval - Blanc , subroge
M a ig n o l, de L an d o gn e, à l’acte du 6 juin 1777. On sait
que ce dernier acte est celui qui trausière la propriété
du pré à Guillaume M aignol.
Dans tous les cas, toute clause obscure s’interpréteroit
contre M a ig n o l, ven d eu r, qui pouvoit dicter la lo i, et
qui le pouvoit d’autant m ieu x , qu’il ne cesse de répéter1
que M a ig n o l, de L a n d o g n e , c o n v o i t o i t , désiroit le pré
dont il s’agit. S’il avoit un désir si violent de cet objet,
il se seroit rendu moins difficile sur les conditions, et
auroit subi la loi de son vendeur.
A insi le pré en question est nécessairement vendu par
l ’acte notarié, du 2 octobre 1779 : M a ig n o l, du ChevalBlanc, ne pouvoit vendre autre chose; et, sous ce rapport,
son fils seroit non recevable dans sa prétention.
S- IIL 'a c te sous seing-privé, du 2 octobre 1 7 7 9 , iia v o it pas
besoin cCétre fa it double.
Guillaum e M aign ol fils, qui sent toute la force de cet
acte,
�17
C
)
a c te , réunit tous ses moyens pour l ’écarter : en conve
nant qu’ il contient la vente du p r é , il soutient qu’il est
n u l , faute d’avoir été fait double, ou du moins faute
d ’en contenir la mention.
Po u r apprécier le mérite de cette objection principale,
il est bon d’examiner la nature de cet acte.
E n matière d’actes sous seing p r iv é , on distingue les
contrats bilatéraux ou synal lagmat iques , d’avec lps con
trats unilatéraux ; les premiei's sont ceux dans lesquels
chacun des contractans s’oblige envers l’autre; les seconds
sont ceux où il n’y a qu’une seule partie obligée.
On convient que les premiers doivent être faits doubles,
sauf l’exception dont il sera bientôt parlé, parce qu’il faut
bien que chaque partie ait son acte dans les mains pour
forcer l’autre à l’exécuter.
>
A l’égard des seconds, on n’a jamais prétendu qu’un
contrat unilatéral, comme une déclaration, une promesse
ou un b il l e t , dussent être faits doubles.
L e sieur M a ig n o l, appelant, à moins de s’a veu gler,
ne peut placer l’acte sous seing p riv é, du 2 octobre 1779,
parmi les contrats bilatéraux: la contexture de l’acte s’y
oppose absolument. G uillaume M aignol père y parle tout
seul : -/a. soussigné, d éclare, e t c lui seul contracte des
engagemens ; il a reçu le prix de la vente par le contrat
notarié. C ’est au contraire lui qui se trouve débiteur
d’ une somme de 200 francs ; il eu consent une promesse
au profit du sieur M a ig n o l, de Landogne : cette promesse
est même énoncée, son existence est exp rim ée, par l’acte
devant notaire, du même jour; lui seul s’oblige. M aignol,
C
�( 18 )
de L a n d o g n e, ne contracte aucuns engagemens envers
son parent; il ne dit mot : c’est toujours Guillaume Maignol qui parle exclusivement , qui se reconnoît débiteur.
Il n’y a rien de réciproque, tout est du fait de M aign o l,
du Cheval-Blanc. Ce n’est donc li\ qu’ un contrat unila
t é r a l, une simple déclaration, une simple promesse; et
comment pourroit-il y avoir nécessité, dans ce cas, de
faire un acte double ?
M a is, d i t - o n , cet acte est une vente, et toute vente
doit être faite double.
D ’abord, c’est mettre en fait ce qui est en question:
la vente se trouve dans l’acte notarié. Il faut bien donner
un sens quelconque à ce premier acte ; et on a vu qu’il
seroit absurde que M aign ol, du Cheval-Blanc, n’eût voulu
vendre qu’ une rente anéantie.
Mais est-il bien vrai, dans tous les cas, qu’ une vente
doit être faite d o ub le? On le conçoit, lorsque l’acqué
reur ne paye pas le p r i x , parce qu’il faut bien qu’il s’oblige
à le payer , et que le vendeur ait des moyens pour l’y
contraindre ; mais lorsque l’acquéreur paye entièrement
le prix , qu’il ne contracte aucune obligation , comment
seroit - i 1 essentiel que l’acte fût double? il devient alors
unilatéral ; il ne reste que l’obligation du vendeur de faire
jouir de la chose vendue, de garantir de l’éviction , etc. ;
•et dans ce cas, certes , il su (lit que l’acquéreur soit nanti
de l’acte qui lui transmet la propriété. C ’est la distinc
tion qu’on a toujours faite en jurisprudence; et la cour
l ’a consacrée par plusieurs arrêts , notamment par un
rendit sur la plaidoirie de M e. P a g è s, dans la cause de
\
�/ ï>
'
*9
(
)
M e. Bertier, avocat à Brioudc. L a c o u r , par cet arrêtr
ordonna l'exécution d’une vente sous seing privé non
faite double, par cela seul que l’acquéreur avoit payé
l’entier p r ix , que l ’acte en portoit quittance, et que l’ac
quéreur n’avoit contracté aucun engagement.
O p p o s e r a - t- o n que l’acte sous seing prive n’est pas
unilatéral, parce que M a ig n o l, du Cheval-Blanc, devoit
déduire une somme de 80 francs sur les arrérages
réservés ?
Ce seroit une erreur; le contrat ne change point de
nature par cette circonstance. Il en est de cette m ention,
comme si un débiteur, en souscrivant la promesse d’une
som m e, y mettoit pour condition de déduire tous acquits
bons et valables qu’il pourroit avoir faits antérieurement :
la promesse pour cela n’auroit pas besoin d’être faite double,
pa rce que le créancier ne pourroit se faire payer sans re
présenter la promesse, et sans souscrire à la condition.
D e même ic i, M a ig n o l, de Lan dogn e, n ’auroit pu
exiger de M aign o l, du Cheval-Blanc, la somme de 280fr.
sans représenter la promesse ; et alors il auroit bien
fallu déduire sur les arrérages la somme de 80 francs,
avec d’autant plus de raison, que l’acte notarié n’énonçoit qu’une promesse de 200 francs.
Ainsi diparoît le moyen principal de Guillaume M ai
gnol. L ’acte sous seing privé est unilatéral; il ne con
tient pas d’engagemens réciproques; dès-lors il est fort
indifférent qu’il ait été ou non fait double.
C 2
�/
* ■
*
C 20 )
§. I I I .
D ü 72S tous les c a s , cette om ission serait réparée p a r
l'exécution de l'acte.
’
Il est constaté par l ’interrogatoire des deux M a ig n o l,
du C h eval-Blanc, que cet acte sous s e in g ‘privé est du
même jour que l’acte notarié; il est écrit par le père;
il a été connu par le fils dès le moment môme , et lors
qu’il n’a voit qtie seize ans : le père comme le fils ont
connu et souffert la possession publique de l’acquéreur;
ils n’ont réclam é, ni contre M aign o l, de Landogne 3
ni contre Antoine Guillaume , tiers détenteur , quoiqu’ils
aient été instruits de la vente consentie par Maignol à
Guillaume.
L ’article 1325 du Code civil porte : « Les actes sous
«
«
a
cc
seing p r iv é , q u i contiennent des conventions synallagm atiques y ne sont valables qu’autant qu’ils ontété
faits en autant d’originaux qu’il y a de parties ayant
un intérêt distinct.
ce II suffit d’un original pour toutes les personnes ayant
« le même intérêt.
« Chaque original doit contenir la mention du nombre
« des originaux qui en ont été faits.
« N é a n m o in s, le défaut de m ention que les origi« n a u x ont été J'aits doubles, triples , etc. , ne peut être
a opposé p a r celu i q u i a exécuté de sa part la c o u « çention portée dans Pacte, »
�( 21 )
M . M a lle v ille , sur cet article, s’exprime ainsi : « S i
« l’une des parties avoit déjà exécuté l’acte , elle ne
« doit pas être reçue à opposer qu’il n’a pas été fait
« double; mais il y aura souvent de l’embarras à prouver
« cette exécution.» ( Il n’y en a pas dans l’espèce parti
cu lière, puisque les deux M aignols, père et fils, en con
viennent dans leur interrogatoire.)« On admettoit une.
« autre exception à la règle posée dans l’article, c’est
« lorsque l’une des parties n ’a voit pas d intérêt a avoir
« un douille : par e x e m p le , je f a i s une venta sous
« seing p rivé, et f e n reçois le p rix ; on jugeoit que la
« vente étoit v a la ble, quoiqu'elle ne f û t pas f a i t e dou« ble ; mais on l’auroit jugée nulle s’il étoit resté quelque
« partie du prix à payer. »
Cette doctrine d’ un magistrat écla iré, l ’un des rédac
teurs du Code c i v i l , confirme ce que l’on a déjà dit dans
le §. précédent, et prouve que l’exception admise par
l’article c ité , n’est pas nouvelle, comme a voulu le pré
tendre l’appelant. En effet, la rigueur du d ro it, le sum
mum ju s , ne peut etre invoqué avec succès qu’autant
qu’ il pai-oîtroit qu’on a pu ignorer l’existence de l’acte
qui vous est opposé ; mais lorsque tout annonce que cet
acte a été con n u , qu’on en a souffert l’exécution sans se
plaindre, aujourd’hui surtout que la justice se rappro
che de l’équité, qu’on a senti la nécessité d’écarter toutes
les subtilités du d ro it, Guillaum e M aignol ne peut espé
rer aucun succès.
Il aura beau se battre les flancs, reproduire une ob
jection mille fois détruite, que le Code civil n ’a pas
�(22)
d’effet rétroactif, q u’il ne peut régler une convention
antérieure à sa publication.
Foible et petite ressource! L e Code civil est aujour
d’hui la loi de l ’e m p ir e , et doit régler tout ce qui est
encore indécis.
D e même qu’on juge que la subrogation d’action peut
être admise pour une cession de droits successifs anté
rieure à la publication du Code , lorsqu’il y a eucore
indécision , de même on doit décider que l’omissiou que
l ’acte a été fait double n’est d’aucune conséquence, lors-,
que cet acte a été long-temps et pleinement exécuté,
avec d’autant plus de raison q u e , d’après l’opinion de
M . M alleville, cette exception n’est pas nouvelle, eta été
admise dans l’ancien droit.
E t s’il en étoit autrement, si le Code civil pouvoit être
mis de côté pour tous les actes antérieurs sur lesquels il
n ’a pas été p ro n o n cé , il vaudroit autant décider que ce
Code si long-temps attendu, que cette loi uniforme pour
tout l’empire , si souvent désirée, que l’immortel Daguesseau trouvoit si nécessaire, ne pourroit être exécutée
que dans trente ans, ou n’auroit été promulguée que
pour la génération future ; ce qui est une absurdité.
L e Code des Français est aujourd’hui leur unique loi.
S i , comme tout ce qui sort de la main des hommes, il a
quelque im perfection, on est au moins obligé de convenir
qu’on y retrouve toute la pureté du droit romain , tout
ce que l’expérience et la raison avoient remarqué de plus
îv'igc dans le droit coutumier; qu’ il n’a nullement besoin
de commentaire pour le jurisconsulte; que les pandectes
�*3
.(
)
ne servent qu’à l’obscurcir ; qu’enfin il a paru sous l’inilucnce d’un héros législateur, et qu’il suflit d’un rayon
de sa gloire pour que ce Code devienne bientôt la loi
de l’Europe entière.
Guillaume M aignol fils ne se tirera jamais de l’ar
ticle 1325; l’exécution de l’acte est pour lui la pierre
d’achoppement : sa mauvaise foi est à découvert; la loi
et l’équité repoussent une prétention ambitieuse et tardive,
qui n’auroit pas vu le jour si Pierre M aignol existoit
-encore.
Il ne s’agit plus que de parcourir rapidement quel
ques misérables objections proposées en désespoir de
cause.
L ’appelant reproche
aux premiers juges de s’ètre
occupé de l’acte sous seing privé , comme si cet acte
étoit souscrit par lui-même. On a confondu , d it - il, les
moyens du fils avec ceux du père ; cependant un fils
donataire ne pouvoit être tenu de l'effet d’un acte sous
seing privé, n’ayant de date certaine qu’après sa donation.
Ce paquet^ne peut aller à aucune adresse, et ne séduiroit. pas môme le praticien le plus formaliste.
Il est constant, d’après le père et le iils, que l’acte sous
seing prive est du même jour que l’acte notarié. Il est
constant que l’acte a été connu du iils et du p è re , et que
ce fils rebelle s’avisoit à seize ans d’en témoigner son
mécontentement au père.
Ce
faire
qu’il
resté
fils précoce n’a rien ignoré ; il a n)ême voulu se
donner ce pré ; mais le père a pris pour prétexte
11’avoit pas l’acte de 1 7 7 9 , et (lue
minute avoit
entre les mains de M a ig n o l, de Landogne.
�24
(
)
'D ’après ces a v e u x , il est assez maladroit d’équivoquer
sur les dûtes. Il est vrai qu’en général les actes sous seing
privé n’ont de date certaine q u’avec la formalité de l'en
registrem ent, ou par le décès de l’un des signataires ; mais
pourquoi ? c’est qu’il seroit facile de dater un acte sous
seing privé du temps que l’on v o u d r o it, et que par ce
moyen on anéantiroit des conventions postérieures.
Mais lorsque la date est avouée et reconnue ; lorsque
ce fils , qui parle si souvent de sa donation , a connu
auparavant un acte qui transmeltoit à un tiers la pro
priété d’un immeuble particulier ; lorsque surtout cet
immeuble n’est pas nominativement compris dans la dis
position qu’il in v o q u e , il n’a pas dû y com pter; il n’a
pas dû calculer la valeur de cet objet dans la donation
qui lui a été faite; il auroit même trompé la famille avec
laquelle il contractait, s’ il leur avoit fait entendre que
cet héritage faisoit partie de sa donation : dans tous les
cas, il n’auroit pu nuire au tiers détenteur.
On ne voit pas quelle analogie il peut y avoir entre
cet acte et une contre-lettre à un contrat de mariage.
Les lois ne proscrivent les contre-lettres aux contrats
de mariage qu’autant qu’elles seroient isolées, qu’elles
émaneroient de l’époux sans les avoir communiquées à
la famille avec laquelle il contracte.
■Mais si les contre-lettres otoient signées par toutes les
parties qui ont assisté au contrat, elles seroient très-vala
bles*, et auroiqnt tout leur eiïet. Il n’y a d’ailleurs aucune
comparaison à faire entre cet acte et une contre-lettre :
jYlaignol , de Landogrie , seroit propriétaire en verdi de
l ’acte notarié. L ’acte subséquent n’est qu’un acte iso lé ,
explicatif,
�( 25 )
explicatif, interprétatif, si l’on veu t, du précédent, mais
qui n’ajoute rien au droit des parties.
Q u ’on ne dise pas que cet acte sous seing privé est
obscur et équivoque ; l’appelant doit se rappeler q u 'il
subroge M a ign o l, de L a n d o g n e, a u x effets de Pacte du
6 ju in 1 7 7 7 , et que ce contrat transmet la propriété du
pré à M a ig n o l, du Cheval-Blanc.
M aignol fils tourne toujours autour de ce cercle vicieux;
il en revient ù dire qu’un acte sous seing p riv é , qui con^
lient des engagement synallagmatiques,doit être fait double;
il a recueilli quelques arrêts rapportés dans la dernière
collection de jurisprudence, en faveur de l’archevêque
de Reims , contre le prince de Conti ; entre le sieur Forget
et le duc de G ra m m o n t, etc. ,Qn»ne Uy^coptestQi pas le
principe's orF 11’est dirigé, que. sm-.J’appl ¡cation*
Il prétçnd prouver la nécessité que £<<£j;clje. fvtt^Jfait
double j dans le bai où'1b tfixiur Maignol «m-oi* été évincé
dq^son pré , ou qu’il l’eût perdu par .force -majeure*
Mais^si M a ig n o l, de L an d o gn e,eû t éte'évincu«^ il avoit
^sqiijtcte ]oou^ demander une gài'flntie ; il n’-uifroi-t pas pu
, e supprimer pour Yen feiiii' à' Pacte" notarié , et demander
la rente, parce qu’on lui ¡fiuVoitr répnfidu que-la renie et oit
^anéantie, et qu’il
voit acheté que'le pré\lont il jouissoit |niÎ)liqûerï^e'il'f; I f n ’aùroit jamais été' assez malavisé
1
pour ie c,onfenter d’une raîle,M orsqu’ i f po^ vôte obfbriîr
»'A».■,-1.
..C
,
*1. , *'
une indemnité gmvant la valeur actuelle du pré. •
E t s’il l’a voit perd vi par une force m ajeure, 'si ta ri
vière le lu i eut en lev é, comme 011 l’a dit plaisamment
en première instance, le pré auroit été perdu pour lui :
�( 26 )
Mais pour cela il faut supposer des accidens bien graves;
une révolution dans le globe, le contact d’une comète, etc.
C ’est prévoir les choses de loin : la pauvre humanité ne
va pas jusque-là.
A ntoine Guillaume attendra d’ailleurs l ’événement; et
il est à croire que sa postérité la plus reculée jouira pai
siblement du pré dont est question, malgré M aignol fils,
et malgré la rivière de Sioulet qui le fertilise et ne peut
lui nuire.
_
*
M e. P A G E S ( d e R i o m ) , ancien avocat.
M e. M A N D E T , avoué licencié.
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Dublin Core
The Dublin Core metadata element set is common to all Omeka records, including items, files, and collections. For more information see, http://dublincore.org/documents/dces/.
Title
A name given to the resource
Factums Godemel
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/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. 1806]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Pagès
Mandet
Subject
The topic of the resource
actes sous seing privé
bail emphytéotique
créances
cens
rentes foncières
interrogatoires
longues procédures
bail
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire en réponse, pour dame Gilberte Ducourtial, veuve de Joseph Maignol, tutrice de leurs enfans mineurs ; dame Marie-Gilberte Maignol, veuve de Michel de Pannevert ; dame Marie Maignol, et sieur Antoine Bouyon, son mari ; dame Marie-Gilberte Maignol, et le sieur Pierre Legay, son époux, et sieur Antoine Maignol, tous intimés ; contre sieur Guillaume Maignol, autre Guillaume Maignol, son fils, appelans d'un jugement rendu au tribunal d'arrondissement de Riom, le 18 floréal an 13 ; et encore en présence d'Antoine Guillaume, maréchal, habitant de la commune de Pontaumur, aussi intimé.
Annotations manuscrites : extrait de l'arrêt de la Cour d'appel, 1er août 1806, 1ére chambre. Met hors de cause Guillaume Maignol qui n'a aucun intérêt à la concertation.
Table Godemel : Acte sous seing privé : 1. un acte sous seing privé synallagmatique, contenant vente et subrogation, est-il nul s’il n’a pas été fait double ? peut-il être opposé à un donataire contractuel, s’il n’a de date certaine que postérieurement à sa donation ? enfin quels caractères d’exécution faut-il à cet acte pour qu’il soit obligatoire, malgré les nullités qui le vicient ?
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
1806
1755-1806
1716-1774: Règne de Louis XV
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
1804-1814 : 1er Empire
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
26 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1606
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_M0127
BCU_Factums_G1605
BCU_Factums_M0710
BCU_Factums_M0527
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53280/BCU_Factums_G1606.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
actes sous seing privé
bail
Bail emphytéotique
cens
Créances
interrogatoires
longues procédures
rentes foncières
-
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5f679000c0f8cc6c0bda8cba0701972f
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Text
M É M O IR E
À
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S
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A
R
T
,
I
O
N
,
D U C O U R T H I A L et
M a r i e - J o s e p h M A I G N O L son m ari, et les
citoyens D U C O U R T H I A L - L A S U C H E T T E
enfans
G i lb e r t e
puînés de Gilbert Ducourthial;
C O N T R E J e a n - B aptiste - G ilbert
D U C O U R T H I A L ainé.
G ilbert
D U C O U R T H I A L , ayant eu un enfant d’un
premier mariage avec Marie - Gabrielle Devilletto , savoir
• Gilberte Ducourthial f épouse du citoyen Maignol contracta*
.un second mariage avec Léonarde Cornudet , le 14 mai 1778.
Il y avait entre eux une grande disproportion d’âge : Léonarde
Cornudet n’avait que 2 3
ans, et Gilbert Ducourt h i al en avait plus de 45.
‘
,
'
�•1
Par ce second contrat cle m ariage, Gilbert Ducourthial ins
titua pour son héritier du tiers de tous ses biens présens et à
venir , l’un des enfans qui naîtrait .dudit m ariage, et c e , en
préciput et avantage ;• laquelle institution était faite en faveur
de celui ou de celle que les futurs choisiraient conjointement,
par quelque acte que ce f û t , ou qui le serait par le survivant
des deux futurs ép o u x, auquel le droit en appartiendrait , par
clause expresse. Et dans le cas où le choix n’en eût pas été
fait, ladite institution profiterait à l ’aîné des m âles, et s'il n’y
avoit pas de mâles, à l’aînée des filles.
La fille du premier lit fut mariée le 8 avril iy .
Léonarde Cornudet mourut à-peu-près dans le même temps.
Gilberj^Ducourthial est mort le 27 juillet 179^, sans avoir fait
aucune disposition.
On demande l’avis du conseil sur les droits respectifs de l’enfant
du premier m ariage, et de ceux du second*
83
C
O
N
S
U
L
T
A
T
I
O
N
.
-
L E C O N S E I L s o u s s i g n é , consulté sur les droits res
pectifs des enfans du premier et du second mariage de Gilbert
Ducourthial , et après avoir vu plusieurs consultations produites
par l’aîné du second lit, recueillies en
pages d’impression ,
format in-4°. ;
54
qu’il se présente une question préalable : elle
consiste à savoir si la-faculté d’opter ou d’élire, accordée par
Gilbert Ducourthial à Léonarde Cornudet, sa seconde épouse ,
par leur contrat de mariage du 14 mai 1778 , ne donne pas lieu ’
à la nullité de la disposition contenue dans ce même contrat. *
E s t i m e
Si cetie nullité devait a^oir lieu , i l .n ’y aurait plus
diffi
cultés : la succession de Gilbert Ducourthial serait alors dévolue
�3
à tous les enfans du premier et du second mariage , sans dis
tinction , et par égalité.
Mais à supposer que l’on ne se décidât pas pour cette nullité ,
il s’agiroit de savoir s i , d’après la nature de cette disposition , et
d’après l ’effet de la loi du 7 mars 1793, le fils aîné pourroit
prétendre qu’il a été saisi du tiers des biens, en préciput.
Et enfin , a négative de cette proposition devant être adoptée,
il s’élèvera une nouvelle question. 11 faudra examiner s i , quoique
la fille du premier lit ne fût pas fondée à soutenir q u e, dans
le principe , la disposition contenue au second contrat de ma
riage de son p è re , n’a pu être validée, néanmoins la manière
dont cette disposition s’est évanouie, ne l ’appelle pas à recueillir
le tiers, par égalité avec les autres enfans , en sa seule qualité
d’enfant , et abstraction faite de celle d’enfant du premier
mariage.
C’est sous ces trois rapports, qu’il est forcé de considérer les
contestations qui s’élèvent. Cet examen demande une grande
attention , parce que les circonstances ne sont pas ordinaires,
et qu’elles appellent l ’application de l ’ancienne et de la nouvelle
1
législation sur les dispositions des biens.
PREMIERE
La
QUESTION.
circonstance, de La fa cu lté d ’opter ou d ’élire, ac
cordée par Gilbert Ducourthialà Léonarde Cornudet,
sa seconde épouse, par leur contrat de mariage du 1 4
mai 1 7 7 B , ne donne-t-elle pas lieu à la nullité de la
disposition contenue dans ce même contrat?
Ne considérons point en ce moment la nature de la dispo‘ sition faite par Gilbeft D ucourtliial, relativement aux enfans à
naître de son second mariage , n’y voyons qu’une disposition
A
2
�* v*
4
quelconque ; supposons-la pure et simple , même irrévocable ,
et néanmoins , sous ce point de v u e , cette disposition a été frappée
de nullité.
La question de savoir si un pére qui se remarie , ayant des
enfans d’un premier mariage , peut valablement avantager les
enfans à naître du second m ariage, a été dans les tribunaux ,
le sujet d’une véritable difficulté. Le dernier commentateur de
la coutume de la ci-devant province d’Auvergne, qui régit les
parties et leurs biens , a traité la question avec étendue , sur
l ’article 26 du titre 14, section 6. Les consultations annoncent
que c’est même dans cet ouvrage que l’on a puisé les autorités
qu’on employe ; ainsi , en suivant la marche de la discussion
lumineùse de cet auteur , on invoque une autorité qui ne peut
être suspecte à Jean-Baptisté-Gilbert Ducourthial, puisque luimême s’en fait un appui.
O r, la lecture de cette dissertation apprend que cette ques
tion a fait difficulté , non-seulement sous le rapport de la pro
hibition de l’édit des secondes noces , mais encore parce qu’une
disposition de cette nature paroissait destituée de motifs raison
nables ; des enfans à naître n ’étant encore susceptibles , de la
part de leurs père et mère , ni d’am our, ni de liaine , les dispo
sitions qu'un conjoint se hâte ainsi de préparer en leur faveur, 11e
sont censées faites (ju en contemplation de l'autre des conjoints •
elles sont plutôt l ’ouvrage de la suggestion que d’une volonté
libre.
On convient cependant qu’il résulte du rapprochement de tous
les arrêts, que dans la règle générale, un pére en se remariant ,
peut instituer pour héritiers, un ou plusieurs enfans à naître du
second m ariage, ou même tous, quoiqu’il y ait des enfans de
piécédens mariages. On avoue encore que telle est la jurispru
dence , quoiqu’on ne doive l ’attribuer qu’à un relâchement des
vrais principes.
�Jt)
5
Mais en même temps, on soutient, même d’après les arrêts,
qu’il se fait exception à cette règle générale , lorsqu’il y a des
circonstances qui indiquent que le père a agi par l ’effet d’une
impression étrangère uniquement dirigée, contre les enfans du
premier mariage , et l’une de ces circonstances se rencontre
dans l’espèce; c’est le droit accordé à la seconde épouse d’opter
entre l ’un ou l ’autre des enfans, pour lui faire recueillir la dis
position.
C’est ce qui a été jugé en thèse et en grande connaissance de
cause par l'arrêt du ci-devant parlement de Paris, du 18 mai
4
17 5 5 , rapporté par Lépine de G rain ville, page 21 - Les faits et
les motifs du jugement sont rapportés au long par l’arrêtiste ; et
l ’on voit que l’arrêt a été ren d u , non pas en contrariété des
préeédens arrêts q u i, ainsi qu’on en convenait alors , avaient
établi la règle générale , qu'une disposition pouvait être faite en
faveur d’enfans à naître, mais attendu la circonstance particu
lière q u i, comme dans le cas de qnelques-uns des arrrêts précédens ; devait former une exception à cette réglé. Cet arrêt
mérite d’autant plus de considération, qu’il a été rendu pour des
parties de la même province que celles qui sont en contes
tation.
En voici l ’espèce :
Jean Lapparra avait eu des enfants d’un premier mariage.
Eu 1697, il épousa en secondes noces Marie-Gabrielle Lavergne ;
et son contrat de mariage contenait cette clause :
« Et par même faveur dudit m ariage, ledit Lapparra a promis
» d’instituer, comme dès-à-présent il institue tel des enfans mâles
» qui naîtront du présent mariage , héritier de tous et un chacun
« les biens dont il se trouvera saisi lors de son décès , ou tel
» qui sera jugé capable par lui , nu à son défaut par ladite
» future c/jouse , préalablement déduit la légitime de ses autres
» enians , et autres charges s’il y en a.
�^
» Jean Lapparia mourut le
6
5 août
3
i y r, et laissa trois enfans
>< mâles de son second mariage. Gomme , pendapt sa vie, il n’avait
>1 point choisi , entre les trois enfans du second lit, un d’entr’eux
» pour être son héritier universel, Marie-Gabrielle Lavergne , sa
» v e u v e , se servit de la faculté qui lui était accordée par le
« contrat de mariage; et par acte du 21 décembre 17 3 5 , elle
» nomma Antoine Lapparra, un des trois enfans mâles du second
» l i t , héritier universel de Jean Lapparra pére.
» Les enfans du premier lit, peu de temps après la mort de leur
» père , formèrent contre Antoine Lapparra une demande en
» partage, et prétendirent que l'institution contractuelle était
» nulle.
» La demande portée au bailliage d’A u rilla c, il y était inter» venu sentence le g juillet 1734, q u i, en déclarant nulle Cins» titution contractuelle, avait ordonné le partage égal entre tous
» les enfans, tant du premier que du second lit.
» Sur l ’appel de la part d’Antoine Lapparra , la sentence fut
« confirmée au rapport de M. A n g ran , en la quatrième chambre
» des enquêtes. »
L ’auteur rapporte les moyens déduits de part et d’autre ; on
y voit figurer tous les arrêts dont il est parlé dans les consulta
tions -, et après avoir exposé les principes développés par celui
en faveur duquel l’option avait été faite de la part de la m ère,
il ajoute : « Ces principes ont paru être approuvés dans les opi>i nions ; et si l option n eut j/uint été laissée à la m are, on
>ï aurait orilotinc l cjcecution île l institution, j\lais cette option
» do n n ée h la mère , a paru être un moyen sûr de se procurer
« un avantage indirect : elle lui donnait une autorité sur ses
»
«
»
»
enfans , dont elle pouvait abuser : elle pouvait choisir celui
qui se soumettait plus volontiers des conditions avantageuses
pour e lle , et exiger de l’un de ses enfans l’avantage que son
mari n’avait pu lui faire directement. Il est vrai qu’un acte qui
�» aurait contenu ces conditions, aurait p u , dans la suite , être
» déclaré nul ; mais elle pouvait s’assurer ces conditions par des
» moyens secrets, et par des actes déguisés. Il suffit qu’une seconde
» femme puisse retirer un avantage indirect d’une disposition
» pour qu’elle soit nulle. »
Cet arrêt a invariablement fixé la jurisprudence des tribunaux,
et sur-tout de ceux de la ci-devant province d’Auvergne. Les
dispositions en faveur des enfans du second lit , subordonnées
à l’option conférée à la seconde femme , y ont toujours été dé
clarées nulles , soit dans les tribunaux, soit par l’application de
cet arrêt , faite dans des consultations qui prévenaient les
procès.
La question n’est donc pas de savoir s i, en général, des insti
tutions d'héritier, faites à des enfans à naître d’un second ma
riage , sont valables en elles-mêmes : elle consiste à examiner sv
elles ne sont pas viciées par la circonstance de la faculté d’opter
ou d’élire entr’eux , accordée à la seconde femme.
O r, c’est ce qui a été précisément jugé par cet arrêt : il est
conforme à la saine raison. Le bon ordie ne permet pas de
consacrer toute libéralité qu’on ne peut rapporter à une volonté
libre , mais seulement à des insinuations venant d’une seconde
femme, ou de sa famille. Gilbert Ducourthial était beaucoup
plus âgé que sa seconde femme qui n’avait que
à
4
V > . di*r üij*- ans. Il oublia qu’il avait une fille de son premier ma
riage , et il n’était pas principalement animé du désir d'investir
un enfant mâle d’une grande partie de sa fortune, comme on
le dit dans les consultations, puisqu’il est dit dans le c o n t r a t ,
que le choix pourrait être fait entre tous les enfans à n a î t r e , et
qu’à défaut de ch o ix, le tiers était destiné à l ’a î n é des mâles , et
s’il n’y avait pas de m âle, à l’uincc des filles.
On ne peut qu’être étonné que les auteurs d’une des con su l'
tatiuns
, juives
18
et
u ), invoquent l’opinion du dernier co n v
�s
m cntateur de lu c o u tu m e , à l'appui de la validité de la dispo
sition dont il s’agit.
C et a u t e u r , après avoir rapporté les arrè:s , dont le dernier
est du i i août. 1 7 4 0 , desquels il résulte qu’en général une insti
tution con tractuelle, faite par un second contrat de mariage, en
faveur des enfans à naître, est valable, s’explique tout de suite ainsi :
« Cependant un autre arrêt du 18 mai 17 3 6 , rendu pour cette pro» v in c e , au rapport de M . A n g r a n , entre les nommés Lapparra,
» d’A u r i l l a c , a déclaré nulle une institution d’héritier, faite par
» u n second contrat de m a r ia g e , en faveur des enfans à naître. J ’ai
* » lu l ’expédition de cet arrêt, et il est rapporté par M . Lépine
» de G rainville, au x arrêts de la quatrième chambre des enquêtes.
» M ais il y avait une circonstance <jui tirait la décision des
»
règles générales. L e père avait institué celui de ses enfans
» inâles à n a îtr e , qui serait choisi par lui , et à son défaut par
» sa future épouse. Il y avait quatre enfans du premier l i t , trois
» mâles et une
fille.
L e c h o is laissé à la fe m m e , qui pou-
» <vait lui donner des moyens de profiter de la disposition
» indirectem ent, détermina le jugement. M . de Grainville
» assure que , sans cette circonstan ce, l ’institution eût été dé» clarée v a l a b l e , et il en était bien in s tr u it, puisqu’il était 1111
» des jugys;.»
•
A in s i l'auteur distingue la thèse générale du cas d ’exception ,
et il adopte l ’arrêt pour le cas d ’exception. Il ne faut doirtf pas
référer son opinion entière â la thèse générale.
D a n s toute sîl dissertation , il a marqué cette
nous
semble d o n c , en se ré su m a n t, page
exception : il
355 , «
» générale est pour la validité de la disposition ,
que la règle
sa u f les exccp-
» dons légitimes dans des cas où il est visible que le donateur
» n ’a eu d ’autre m o tif que l'impression et la suggestion du n o u » veau c o n j o i n t , ou
la volonté de l ’avantager l u i- m ê m e . Ces
>» MOTII'S SE KENCONTHAIENT DANS 1,’ a IIKÈT DE LAPPAnRA ,
et
» l ’espèce
^
�"9
» l’espèce tle celui de 167? , ( qui avait aussi annullé une
x pareille institution contractuelle ) était bien peu favorable :
»> un mari de qualité disposait, de la totalité de ses meubles et
» acquêts au préjudice d’un 111s du premier lit , en faveur, des
» enfans à naître d’un second, mâles et Jilles indistinctement. »
On voit donc toujours deux choses : la règle générale et les
cas d’exceptions ; et l ’auteur marque continuellement la cir
constance de l ’arrêt de Lapparra , comme un cas tVexception.
Il réunit son suffrage au poids de l ’arrêt.
Aussi l ’auteur de la consultation , en rapportant le dernier
passage du commentateur, s’arrête-t-il à ces mots , nu la volonté
de Vavantager lui-même. Mais le reste explique toute l’opinion
du commentateur , et en le supprimant, ce serait ne pas rendre
le sens dans lequel il s’est exprimé sur le cas d’exception dont
il s’agit ici.
M ais, d it-on , pages 12 et i , l’arrêt de Lapparra, a été
rendu en pays de droit écrit , où la mère succède à son en fan t.
en sorte que l’on pouvait dire que la disposition était faite en
3
faveur de la femme , puisqu’elle pouvait en profiter : au lieu
que dans l ’espèce , les parties et leurs biens étaient régis par
une coutume qui exclut les ascendans de la succession des
descendans.
Il est impossible , sous tous les rapports , d’être touché de
ces observations.
En pays de droit écrit, la mère ne succédait à l’enfant qui
pour une portion v irile , lorsqu’il y avait d’autres enfans.
En pays de.coutume , à la vérité , la mère ne lui aurait pas
succédé quant aux propres ; mais elle lui a u r a i t s u c c é d é seule
et exclusivement aux autres enfans , quant à la totalité des
meubles et acquêts, suivant l ’article 3 du titre 12 de cette cou
tume ; et les fruits et revenus même des propres , tombaient
dans les meubles et acquêts. D e plus, l a mère pouvait, en pays
li
�10
de coutum e, recevoir de la part d’un de ses enfans, une dona
tion de tous les biens même propres, ou la disposition d’un
quart par testament. Et enfin, les propres pouvaient être déna
turés et vendus. Le prix en serait devenu acquêt , et la mère y
aurait succédé, d’après la maxime qu / fa u t prendre les succes
sions en L'état oïù elles se trouvent.
7
Aus«i , qu’on lise les moyens respectifs allégués lors de l’arrêt
56
de i y
, et rapportés par Lépine de Grainville ; qu’on fasse
attention aux moiifs de l ’arrêt, et on sera convaincu que l’obser
vation de l'auteur de la consultation n’a influé en aucune ma
nière : le moyen ne fut pas même présenté. Personne ne con
naissait encore mieux que le dernier commentateur de La
coutume , et les Hits invoqués par l’auteur de la consultation ,
et les circonstances de l’arrêt avec ses m otifs, et cependant il
n’a pas imaginé que ces faits dussent introduire une différence
dans la manière de décider. Il invoque l ’arrêt comme une déci
sion générale, qui devait s’appliquer tant aux pays de coutume
qu’à ceux de droit écrit. Son opinion, comme celle qui a donné
lien à l’a rrêt, est que la seule circonstance de la faculté d'opter
ou d’élire, donnée à la seconde fem m e, suffit pour annuller la
disposition , et cette circonstance ne se trouvait dans aucun des
autres arrêts.
35
L ’auteur d’une des autres consultations , page
, après avoir
employé les moyens qu’on vient de réfuter, en ajoute un autreIl dit que d:m§ l’aifaire Lapparra , « cette mère qui avait, sur» vécu à soa m ari, avait spolié scandaleusement la succession,
» consistant principalement en mobilier , et elle avait: d’ailleurs
>> pratiqué toutes sortes de fraudes du vivant de son m ari, pour
» réduire à-pcu-pi è.i à rien les légitimés des en fans du premier
» lit. L'indignation plaidait la catr.e de ces victimes délaissées,
» et l’on peut , en conséquence , appeler l'arrêt qui anmtU.i
�&
ir
» 1’institution contractuelle faite à leur préjudice , un
» ab irato. »
arrêt
Mais où a-t-on puisé tous ces fuits? Lépine de Grainville a
rapporté , selon sa coutume , avec la plus grande exactitude ,
les faits et les moyens respectifs. C’est aussi ce qui a donné un
si grand poids à cet a rrêt, dont la sagesse a généralement sub
jugué la raison , et il n’en dit pas un mot. Cet arrêt a été cons
tamment suivi en jurisprudence , même au ci-devant présidial
d’Aurillac , où les faits devaient être bien connus ; on l’a vu
journellement citer dans les qonsultations, et jamais il n’a été
rien dit de ce qu’on avance. Le dernier commentateur, qui sans
doute connaissait les faits et l’espèce de l ’a rrêt, puisqu’il s’ex
plique ainsi : j'a i lu l’ expédition de cet a rrêt, garde aussi , à
cet égard , le plus profond silence. D'après cela, on laisse à juger
de quel poids peut être une telle assertion. On serait autorisé à
croire que l’auteur de la consultation n ’avait point sous les yeux
le recueil de Lépine de Grainville.
Mais , dit - on , dans l ’espèce de Lapparra , l ’institution était
universelle; ici elle n ’est que d’un tiers. La veuve avait survécu ;
ici c’est le mari.
Il est aisé de sentir que ces circonstances sont absolument in
différentes pour la décision.
Pourquoi la disposition a-t-elle été déclarée nulle ? C’est uni
quement parce qu’elle renfermait un vice , qui devait la laire
rejeter. On ne pouvait y voir une volonté libre et éclairee. O r,
ce vice frappe la disposition , quelle qu’en soit la quotité. On ne
peut pas plus adjuger un tiers qu’une moitié , sans une dispo
sition valable , et dans l’espèce , il n’y a pas eu de disposition
valable.
On doit porter .encore plus de sévérité sur les dispositions en
coutume d’Auvergne qu’en droit écrit ; elle ne leur a pas donné
B 2
�autant de latitude que les lois romaines , puisqu’elle n’a point
admis l ’institution testamentaire, et qu’elle n’a permis que le legs
du quart par testament.
Q u’importe ensuite que dans l ’espèce de l’arrêt la femme eût
survécu , et.qm ci ce soit le mari? Cette circonstance n’a pu inJluer sur la décision. Il a toujours fallu remonter à la source ,
initia inspecte*, pour juger la disposition. Il faut faire de même
ici , puisque , quoique le mari ait survécu , l’espèce n’a pa*
changé; il n’y a .eu de sa part aucun acte, après le décès de sa
seconde femme , par lequel il ait entendu approuver la dispo
sition ; et on prétend que Jean-Baptisle Gilbert D ucouiihial a
été saisi du tiers , en vertu de cette même et seule disposition
sur laquelle Gilbert Ducourtliial n’a pu s’expliquer, par l’effet
de la loi du 7 mars 1793.
Dans l’espèce qui se présente , l ’opinion consacrée par la juris
prudence est encore bien plus applicable que dans celle de l’arrêt
de Lapparra , puisque dans l’espèce de cet arrêt, le père avait ins
titué tel des enfans à naître, qui sera jugé capable par l u i , o u ,
à son défaut. , pur ladite future épouse. Au lieu que dans l’espèce
actuelle , l’institution était faite en faveur de celui ou de celle
que les futurs choisiraient conjointem ent, ou qui le serait par
le survivant des deux futurs époux.
Dans l’espèce de l’a rrêt, le père demeurait encore maître
jusqu’à un certain point de sa disposition. Il pouvait la diriger
seul et à son gré , au profit de l’un des enfans à naître , qui
serait par lui ju gé capable. Il pouvait le faire sans le concours
de sa seconde femme. Celle-ci 11 avait un libre exercice de vo
lonté, à cet égard , qu’après le décès de son mari , ou à son
d é fa u t, par ladite fu ture épouse.
JMais , dans l’espèce qui se présente , le père avait aliéné sa
volonlé. Il ne pouvait rien faire seu l, lant que vivrait sa femme,
�6Ÿ
13
qui était infiniment plus jeune que lui. Leur concours était né
cessaire pour une disposition, en faveur de celui ou celle que
les futurs choisiraient conjointement.
IL est donc impossible de v o ir, dans tout c e la , d’autre volonté
que celle de la seconde femme. C ’est elle qui dispose et non le
mari, qui ne peut résister à la séduction , et qui se livre au joug
qu’on lui impose.
Par tous ces motifs , on est convaincu que la disposition portée
au contrat de mariage du 14 mai 1778, quelle qu’en soit la na
ture, doit être déclarée nulle. Il résulte de là que tous les enfans
doivent avoir un droit égal aux biens de leur père. Cela étan t,
toutes autres difficultés disparaissent.
Cependant quand on supposerait, pour un m om ent, que la
nullité que l’on vient de proposer ne fut pas admise , les enfans,
autres que le iils aîné , auraient, encore des droits sous un autre
point de v u e , et c ’est par cette raison (pion est fo rcé , quoique
subsidiairement , d’examiner les autres questions que Ion a déjà
annoncées.
S E C O N D E
Q U E S T I O N .
E n supposant que la disposition portée par le contrat
de mariage du 1 4 mai 1 7 7 b , ne f u t pas nulle par le
défaut d ’une volonté lib ic, J e a n -B a p tiste Gilbert
JDucourthial pout rait-il prétendre qu il a été saisi du
tters au préjudice des autres enjans ?
Il faut partir
législation, lant
cation de la loi
thial , fils aîné
d’un point constant , qui est que , suivant la
ancienne que n o u velle,» l’époque de la publi
du 7 mais 1 7 9 ', .ban- liaptiste-Gilbert Ducourdu second lit , n’avait aur.un droit acquis en
ro
�■14
vertu dos seules dispositions contenues da îs ljseco n d contrat de
mariage de Gilbert D u co u rth ial, son père.
Il devait recueillir l ’effet de la disposition, si le père ne faisait
pas un aulre choix. Ce droit était donc subordonné à la volonté
du père, et celui-ci pouvait manifester cette volonté jusqu’à son
décès; ensorte que les avantages que pouvait avoir Jean-Bap tisteGilbert Ducourthial dépendolent entièrement de l’état des choses
lors du décès de son p ère, et jusques-là il n’était saisi d’aucun
droit.
Cette vérité est si constante, elle est tellement fondée sur les
simples lumières de la raison , qu’on peut se dispenser de l’étayer
sur des autorités. On se contentera de rappeler l’article 16 de la
loi du 22 ventôse an 2. Cet article , qui a toute la force légis
lative , et qui consacre seulement un p rin cip e, doit irrévoca
blement fixer les idées sur la nature de la disposition dont il
s’asrit.
O
On y voit que l’on desirait l ’explication du législateur sur
ce point : « à ce que toutes dispositions faites avec la réserve de
» les révoquer , et toutes donations subordonnées au changement
» de la volonté du donateur n’a ie n t, à quelque titre qu’elles
» aient été faites, d’autres règles ni d’autres effets que ceux
» propres aux dispositions à cause de mort. »
Le législateur f.iit la réponse suivante , consacrée en loi :
« qu’il résulte bien assez évidemment, et d»> l'ensemble de la
» l o i , et des seuls termes de la raison , que les dispositions
» révocables au seul gré du donateur, ne so n t, dans quelques
*> actes qu elles aient été inscrites, que des dispositions à cause
» de m ort, puisque jusques-là le donateur a pu les changer. »
A in s i, c’est nu moment où Jean-IJaptiste-Gilbert Ducourthial
n’avait aucun droit acquis sur la succession luture de son père ,
qu’a é té ‘émise la loi du 7 mars 17f)3, qui est ainsi conçue :
« La Convention nationale décrète que la fa cu lté de disposer
�15
» de ses b ien s, soit à cause de m ort, soit en tre- vifs , soit par
» donation contractuelle, en ligne directe, est abolie ; en con» séquence, que tous les descendans auront un droit égal sur
« le partage des biens de leurs ascendans. «
11 est incontestable que dès la publication de cette lo i, les
enfans Ducourthial ont eu un droit égal à la succession de leur
père. Il n’y avilit point de disposition en faveur de l ’un d’eux
exclusivement aux autres, ou , ce qui revient absolument au
même, il n’y avait point de disposition irrévocable ; le sort des
enfans dépendait de la volonté du père , de sa fa cu lté de dis
poser , et c’est cette fa cu lté de disposer qui a été abolie par la
loi. Ce père, comme tous les autres, qui n’avaient pas fait alors
de dispositions fixes et irrévocables, n’a pu avoir d’antre volonté
«pie celle de la loi ; il a dû laisser ses biens à ses enfans , de la
manière dont la loi le voulait, c’est-à-dire , par égalité.
Pour le décider ain si, il n’a fallu que le principe consacré
par la loi du y mars 1793. Les dispositions des articles
et
24 de la loi du 17 nivose an 2 ; celles de plusieurs articles des
lois des 22 ventôse et 9 fructidor suivans, qui ont appliqué l’effet
23
de la loi du 7 mars 1793 , à certains cas particuliers , ne sont
point des dispositions nouvelles; elles 11e sont que la déclara
tion des conséquences du principe consigné dans la loi du 7
mars i7<p.
11 est vrai que ces lois donnaient à celle du 7 mars 179^
effet rétroactif, en en faisant remonter l’effet jusqu’au 14 juillet
*7^9’> 01 e’est: avec raison que cette rétioaction a été r a p p o r t é e
par les lois des 9 huctidor an 5 , 3 vendémiaire an 4 , eL
plu
viôse an .
Mais aussi faut - il garder de se m é p r e n d r e sur l’effet et la
durée de celle rétroaction, et ii cet: égard, les consultations
produites par Jean lkptiste-Gilbert. D u c o u r t h i a l , ne présentent
pas des idées nettes.
5
�Il y avait rétroaction, en ce que la loi du 17 nivose voulait
qu’on réglât j par l ’effet de la loi du 7 mars 1793, les disposi
tions même irrévocables qui avaient été faites avant l’émission
de cette loi, en remontant jusqu’au 14 juillet 1789. Mais il n’y
avait pas de rétroaction dans la loi du 17 nivose, en ce qu’elle
prescrivait relativement aux dispositions qui n’étaient pas irré
vocables lors de la promulgation de la loi du 7 mars 17¡) .
Dans ces cas, la loi du 7 mais 179Ô était le vrai régulateur;
et l ’on peut dire que les articles
et 24 de la loi du 17 nivose,
5
23
et un grand nombre d’autres articles , soit de cette lo i, soit de
celles des 22 ventôse et g fructidor an 2 , n’auraient point existé ,
qu’ils auraient été jugés inutiles, si on n’eût pas eu l ’intention
d’établir une rétroaction du 7 mars 1793 au 14 juillet 1789, contre
laquelle il était dans l ’ordre qu’on s’élevât.
A in s i, quoique le conseil soussigné n’ait pas plus approuvé
que les auteurs des consultations produites par Jean - lîaptisteG ilbcrt Dueourlhial , la rétroaction de la loi du 17 nivose , il
est toujours d’avis, qu’à moins de renverser tous les principes de
la législation, dont la loi du 7 mars 1793 fait la base, et qui
n été maintenue par toutes les lois postérieures , il faut assigner
les limites de cette rétroaction dans l ’intervalle du i/j juillet 1789,
à la publication de la loi du 7 mars 1793, en ce qui concerne la
ligne directe.
En supposant donc que Gilbert Ducourtliial eut disposé du
tiers des biens en faveur de son fils aîné, dans l'intervalle du i/v
juillet 1789, a la publication de la loi du j mars 1793, par un
acte irrévocable , tel qu un contrat de mariage 011 une transac
tion , 011 q u e , dans le meme intervalle, il fût décédé sans avoir
fait de disposition, il est hors de doute que son fds ainé serait
laisi du tiers.
A u premier ca s, il aurait été saisi par une disposition irrévo
cable, qui , ayant même été faite en faveur de tout autre en fan t,
uuralt
�Yt
17
aurait également son effet. A u second ca s, le défaut de dispo
sition de la part de Gilbert D ucourthial, aurait opéré la confir
mation de celle du contrat de mariage du 14 mai 1778 , parce
qu’a y à n t, avant le 7 mars 179^, une volonté , une liberté de
disposer, son silence serait considéré comme une confirmation
de la destination faite dans le contrat du 14 mai 1778 j eri
faveur du fils aîné, en cas qu’il n’y eût pas de disposition
contraire.
Dans ces deux cas, la loi du 7 mars 1795 serait sans application,
parce qu’elle n’a jamais dû dépouiller d’un droit acquis avant son
émission.
Mais n’y ayant eu aucune disposition irrévocable en faveur
d’aucun des enfans, avant la publication de cette lo i, et Gilbert
D ucourthial n’étant décédé qu’après, par conséquent aucun des
enfans n’ayant été saisi avant cette époque, on ne conçoit pas
comment ils n’ont pas dû être appelés par égalité.
A ussi, tout ce qu’on vient de dii’e est-il parfaitement confiimu
par l’article premier de la loi du 18 pluviôse an .
« Les avantages, y est-il d it, prélévem ens, préciputs, dona-
5
» tions entre - v ifs , institutions contractuelles et. autres disposi» tions, irrévocables de leur n ature, légitimement stipulées en
» ligne directe avant la publication de la loi du 7 mars 179^,
» et en ligne collatérale ou entre individus non parons, anté» rieurement à la publication de la loi du
brumaire an 2 ,
» auront leur plein et entier e ffe t, conformément aux anciennes
5
» lo is, tant sur les successions ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur
» celles qui s’ouvriraient à l’avenir. »
Cet article iixe d’une manière précise tout l’effet de la loi du 7
mars 1793.
La loi du 17 nivose an 2 détruisait toutes dispositions, même
celles qui étaient irrévocables, faites à partir du 14 juillet 1789.
Il y avait là une rétroaction. La loi du 18 pluviôse, en consé-iC
�qiioncn de celles des 9 fructidor an 0 et 5 vendémiaire an 4 ,
veut supprimer cette rétroaction, et dès-lors elle conserve les
dispositions faites du père aux enfans , entre le 14 juillet 1789
et la publication de la loi du 7 mars 1793, qui les a abolies, et
elle laisse subsister celles faites en ligne collatérale , jusqu’à la
publication de la loi du
brumaire an a , qui était la première
qui eut défendu ces sortes de dispositions ; mais en même temps
5
elle explique quelles sont les dispositions qui doivent subsister ,
ce ne sont que les dispositions irrévocables de leur nature.
O11 sent aisément l ’énergie de ces expressions. La loi ne peut
rappeler les dispositions irrévocables de leur nature que par
opposition aux. dispositions révocables, ou, ce qui est de même,
qui n’assuraient aucun droit; et ayant donné aux premières seules
le privilège de la stabilité, il est sans doute forcé de conclure que
les dernières n’ont dû avoir aucun effet.
Il 11’est pas inutile de remarquer la marche du législateur
'Après avoir
rappelé les avantages, prélévemens , préciputs ,
donations entre-vifs et les institutions contractuelles, il prévoit
bien qu’il y a d’autres espèces de dispositions; et quelles qu’elles
soient, il a le soin de les comprendre sous ces mots : et autres
dispositions irrévocables de leur nature. 11 serait difficile de
concevoir comment il serait possible de ne pas comprendre , dans
les termes de cet article, les dispositions de la nature de celles que
peut présenter le contrat de mariage du 14 mai 1778.Elles p0UVaient
être irrévocables ou incertaines , selon ce qui se serait passé mais
toujours avant, la publication de la loi du 7 mars 1795. V oilà
l ’époque
laquelle il faut se référer pour juger du caractère de*
stabilité ou d’instabilité do toutes dispositions quelconques.
En un m ot, le principe de l ’égalité, consacré par la loi du 7
mars 1795 , n’a pu porter sur les libéralités qui étaient irrévo
cables avant la publication de cette lo i, parce que c’eût été lui
donner un effet rétroactif en dépouillant des citoyens d'un droit
�x9
acquis. Mais tout ce q u i, à cette époque , n’était pas irrévo
cable , tout ce qui était versatile, ou , ce qui est de m êm e, tout
ce qui dépendait entièrement de la volonté de l'hom m e, a été
nécessairement soumis à ce principe d’égalité. A lo r s , aucun
citoyen n ’a été dépouillé; la loi n’a eu ni pu avoir égard a des
intentions d’un p ère, qu’il était d’ailleurs impossible de connaître,
puisqu’elles pouvaient varier jusqu’au décès.
Examinons actuellement les raisonneinens déduits dans les
consultations produites par Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial.
Les auteurs de ces consultations , se sentant gênés par l’effet
qu’a dû avoir la loi du 7 mars 179$, de rendre inutile toute
disposition qui n’aurait pas eu un caractère dirrévocabilité,
avant la publication de cette l o i , se sont efforcés de faire con
sidérer le droit de Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial comme
n’ayant jamais dû être soumis à l’empire des nouvelles lois ,
comme émanant d’un titre qui leur est bien antérieur : ils le
fondent sur le contrat de mariage de son père , du 14
mai 1778.
» L ’avantage dont il s’a g it , est-il dit page
5
et à plusieurs
» autres , est assuré à l ’exposant, non par une dispositiou pos» térieure à la promulgation de la loi du 7 mars 1793, mais par
« une disposition bien antérieure , puisqu’elle remonte au 14
mai 1778. >»
Selon e u x , le droit de recueillir le tiers , de la part du fds
aîné , lui aurait été acquis dés cetinslant : «Dans tous les temps
» on avait pensé que celui qui choisissait un , de plusieurs éligibles,
» pour recueillir une disposition préexistante, ne faisait point
» une disposition nouvelle , et conséquemment qu’il ne contrc» venait point aux lois prohibitives des nouvelles dispositions ».
Page 41. Les mêmes idées se reproduisent encore ailleurs.
ous ces raisonneinens ne sont propres qu’à jetter du louche
C 2
�STir ce qui no l ’est certainement pas. Ils disparoissent en réta
blissant les idées simples et vraies. D e quelque manière qu’on
décompose les clauses du contrat de mariage du 14 mai 1778 ,
on ne prouvera jamais qu’elles présentent en faveur du fds aîn é,
une disposition irrévocable , lors de la publication de la loi du 7
mars 179?) ; et c’est à ce point unique que se réduit la difficultéLe contrat de mariage ne contient aucune disposition effective.
Il n’y a tout au plus qu’une disposition éventuelle , qui pouvait
produire un effet ou s’évanouir au gré des père et mére , ou du
survivant de l ’un d’eux
E lle est subtantiellement et littéralement une destination du
tiers à l ’un des enfans qui Serait choisi, et à défaut de choix ,
à l ’ainé des mâles : il existait donc en la personne du père , à
l ’instant de la publication de la loi du 7 mars 1795, la faculté
de faire passer le tiers et même le surplus, à celui de ses enfans
que bon lui aurait sem b lé, sauf la légitime des autres, et de
rendre sans effet la simple destination déjà faite dans le contrat
de mariage du 14 mai 1778 , au hazard et en faveur d’un in
dividu inconnu et qui n’existait même pas.
A u surplus , on pourrait, comme a fait le législateur, dans
dans l ’article 6 de la loi du 22 ventôse an a , et dans l ’art. i er.
de la loi du 18 pluviôse an , ne point s’occuper des dénomi
nations qu’on doit rigoureusement attacher aux dispositions. Ce
dernier article, auquel on ne peut faire le reproche de rétroac
tio n , et dont le but a été au contraire de la faire cesser, ne
5
conserve que les dispositions irrévocables de leur nature, anté
rieures à la publication de la loi du 7 mars 1793 , et par con
s é q u e n t il a n nulle celles qui ne l’étaient pas à cette époque.
Il résulte de ces termes , que le législateur y a employés , et
autres dispositions irrevocables de leur nature, que la 'lo i 11e
distingue les dispositions quelles qu’elles puissent être, que par
�i 1
yj
tir
cette seule marque caractéristique , tVirrévocables ou non-irré
vocables.
Mais à quoi bon s’efforcer-de prouver qu’à l ’époque de la loi
du 7 mars 1793 , il n’y avait aucune disposition, irrévocable ¡en
faveur du fds aîné? Cette proposition est tellement vraie q uelle
n’a pu être mieux prouvée que par ce qui à été dit par les auteurs
des consultations.
Non-seulement ils conviennent qu’avant cette époque Gilbert
D ucourthial pouvait disposer de ses biens en faveur de celui
de ses enfans que bon lui aurait semblé ; mais ils soutiennent
encore qu’il a p u , même après la publication de la loi du 7
mars 179^ , faire passer le tiers en préciput à l’un des enfans
mâles autres que l’a în é , en exerçant le droit delire porté au
contrat de mariage du 14 niai 1778.
Cela ne résulte-t-il pas de ces expressions de la page 47 du
volume des consultations ? « 11 n’est même pas vrai que cette loi
» ( d u 7 mars 1793 ) eût ôté au père, le droit de choisir ; car
» ne lui inhibant d’avantager un da ses enfans, qu’à l’avenir,
» elle ne détruisait pas l’avantage déjà fait à celui des enfans
» qu’ il élirait. »
Ne trouve-t-on pas la même proposition dans ces expressions
de la page 48. « Car ou la loi du 7 mars 179^ empèchoit le
» père d’élire , ou elle lui en laissait la /acuité. Si elle lui en
» hiissait la faculté , il pouvait donc , dans cette espèce parti» cu lière, avantager un de ses enjans : si elle empêchait l ’é» lectio n , elle aurait donc détruit une disjwsition c o n tr a c tu e lle
» et par conséquent irrevocable. »
La încme proposition se reproduit encore dans ces expres
sions de la J>nge <)- « La disposition de 1778 cst irrevocable
» de sa naluro ; car elle est comprise dans un contrat de
» mariage.
4
» O.uund on dit qu’e lle pouvait être révoquée au préjudice
'
�n (Je l'aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été exercée,
» et q u i, quoique son exercice eût appelle un autre, héritier,
» ne changeait pas la-nature de la disposition , n’empèchait pas
» q u ’ u n s e u l parmi plusieurs, ne fut irrévocablement favorisé. »
On retrouve encore la même idée à la pagè o. !
On est bien éloigné d admettre , qu’après la publication de la
loi du 7 mars 1796, Gilbert Ducourthial aurait pu disposer du
tiers en question , comme bon lui aurait semblé , même en
faveur jd e . tout autre enfant que l’aîné , et les auteurs des consul
5
tations n’ont été obligés de hazarder une opinion aussi surpre
nante, que par la nécessité où ils se sont vus d’invoquer à l’appui
de leur système , la lettre de l ’art. 7 de la loi du 18 pluviôse j
dont on parlera bientôt.
Mais au moins conviendra-t-on que dès qu’ils attribuaient
cette faculté à Gilbert Ducourthial , même après la publication
de la loi du 7 mars 1793, ils devaient renoncer , à moins de
tomber dans une contradiction sensible, à l ’idée de la prétendue
irrévocabilité de la disposition du tiers dont ils disent que le fils
aîné était saisi par le seul effet des clauses du contrat de ma
riage du 14 mai 1778. Une disposition qui peut disparaître au
seul gré du disposant ; qui peut être portée sur toute autre tête,
peut-elle raisonnablement être transformée en une disposition,
irrévocable de sa nature ? Comment donc a-t-on pu dire , dans
un langage assez intelligible quoiqu’un peu enveloppé , contenu
dans un très-petit nombre de lignes trés-rapproehées, que la
disposition dont il s’agit était irrévocable ; qu’elle avait saisi ,
avant le 7 mars 17 9 3 ,0 1 que cependant elle n’assurait r ie n ,
puisque , même après , elle pouvait être détruite, et que tout
autre enfant pouvait en devenir l ’objet ?
Venons aux inductions que l’on lire de l’article 7 de la loi
du 18pluvio.se.
On est obligé de convenir qu’avant la loi du 7 mars 1795,
�Jean-Baptiste-Gilbert Ducourtliial n’était point saisi du tiers ;
que son père avait la fa cu lté -d'en disposer ; que cette faculté
a été abolie par cette loi; il est constant que celle du 18 plu
viôse, article i er. , n’a voulu laisser subsister que les dispositions
irrévocables antérieures à la publication d e là loi du 7 mars 17ÇP;
n importe tout cela , il résulte , dit-on , des expressions de l'ar
ticle 7 de la loi du 18 pluviôse, que Jean - Baptiste-Gilbert
D ucourthial doit avoir le tiers, en préciput. •
Cet article , est-il toujours dit dans les consultations, a voulu
que l ’on considérât comme existante , même après la publica
tion de la loi du 7 mars 1795 , la destination du tiers faite en
faveur de Jean-Baptiste-Gilbert D ucourtliial, par le contrat du
14 niai 1778 , jusqu’à une élection contraire que Gilbert
D ucourtliial avait eu la liberté de faire ; et comme il est dé
cédé avant le 17 nivose, sans faire une élection contraire , le
décès a opéré la confirmation de celle qui existait déjà dans le
contrat du 14 mai r778. En un m ot, on propose de donner à ce
qui s’est passé entre la publication de la loi du 7 mars 17g3
et la publication de celle du 17 nivose, le même effet qu’au
raient produit les mêmes circonstances dans l ’intervalle du 14
juillet 1789, à la publication de la loi du 7 mars 1793.
Telles sont les propositions que présentent les consultations.
. O n est forcé de dire que si jamais on pouvait les adopter ■
>
il 11’y aurait ni raison, ni principe dans l ’article 7 de la loi du
18 pluviôse ; il serait en opposition manifeste avec l’article i er.>
et l’esprit 11e se familiariserait jamais avec les conséquences absunies qui en résulteraient.
il faudrait admettre que, même après la p u b l i c a t i o n de la loi
du 7 mars 179^, Gilbert Ducourtliial aurait pu f«irp passer le
tiers de ses biens en préciput l’un de ses en fans mâles, autres
que l’aiué. Aussi les auteurs des consultations, comme on vient
de le voir, ont-ils été obligés d’aller jusques-li.
�7»
Vi
H
Mais à qui pcrsuadcra-t-on que Gilbert Ducourthial ait eu
cette faculté, et qui ne verra pas dans celte proposition, une
aberration de principes?
C o m m e n t l ’exercice d’une pareille faculté aurait-il pu se sou
tenir?. E t Jean-Baptiste Gilbert Ducourthial lui-m êm e, ne se
se ra it-il pas élevé avec force contre cette disposition ? Il n’au
rait pas fallu un grand effort de logique pour proposer ce dilême à son père.
Ou je suis saisi du tiers par les dispositions de votre contrat
de mariage , ou je n’en suis pas saisi. ( On trouve l ’un et l’autre
dans les consultations : il faut cependant convenir que çe 110
doit être que l’un ou l ’autre. )
A u premier c a s , vous ne pouvez plus disposer de ce tiers à
pion préjudice. J’invoque la disposition première.
A u second cas, vous ne pouvez pas plus disposer de ce tiers
en faveur de l ’un de mes frères. J’invoque pour y avoir ma
portion, la loi du 7 mars *793.- Vous voudriez faire usage d’une
faculté de disposer d’une partie de vos biens , et vous ne le
pouvez pas , puisque cette loi a aboli toute fa cu lté de disposer
de tout ou de partie de ses b iens, en faveur d’un enfant au pré
judice des autres. E lle exige l ’égalité entre eux.
O n serait curieux de savoir comment il eût été possible do
répondre à ce dilême.
(Je raisonnement n’eût rien perdu de sa force, quand il serait
38
vrai , comme on l ’a dit à la page
des consultations, que l ’on
eût dû voir dans le contrat de mariage , du 14 mai 1778 , une
institution contractuelle du tiers en faveur des enfans du se
cond l i t , q u i, à défaut de ch oix, les eût saisi cumulativement
par exclusion à la Aile du premier lit; ( ce qu’on examinera,
dans la discussion de la troisième question ) dans ce cas m êm e,
la loi du 7 mars 179^ aurait eu pour le tiers entre les trois enfans
du second lit , le même effet qu’elle aurait eu pour le surplus
des
�3
z5
-fies biens entre eux et la fille du premier mariage. Le tiers
serait alors devenu un patrimoine particulier aux enfans du se
cond l i t , pour lequel chacun d’eux avait droit de réclamer l’é
galité. prescrite par la loi , tant qu’aucun d’eux n était saisi
d’nuoune partie; et de même que les deux enfans puînés du
second lit étaient bien en droit en vertu de la loi du 7 mars
1793 , de réclamer leur portion du tiers, leur frère aîné ne
pouvant invoquer une disposition irrévocable de ce tiers en sa
faveur , de même aussi Jean-Baptistp-Gilbert Ducourthial , tou
jours dans l’hypothèse , aurait réclamé sa portion du tiers , en
vertu de cette même loi.
Gilbert Ducourthial n’a pu croire raisonnablement, après la
loi du 7 mars 1793 , qu’il eût le pouvoir dont on le gratifie au
jourd’hui, pour soutenir un système contre lequel la raison et
les lois s’élèvent. Il a dû forcément considérer comme éteinte ?
même pour le tiers, toute faculté de disposer q u ’i l avait avant la
. loi du 7 mars i-7y3. l i a senti, comme tous les autres pères qui
n ’avaient pas fait de disposition irrévocable, qu’il n’avait plus de
v o lo n té, qu’il ne devait avoir que celle de la loi qui prescrivait
l ’égalité.
Mais la fa c u lté de disposer qu’il avait ayant disparu , on ne
peut pas plus lui supposer l ’inlention de laisser le tiers au fils
aîné, que celle de le donner aux deùx autres enfans ou à l ’un
d’eux. Il a pu avoir la dernière intention comme la première.
Chacun des enfans peut également s’emparer du silence du
pere. Jcan-Baptisie-Gdbert Ducourthial dirait-il qu’il l ’a garde ,
parce qn il a voulu lui laisser le tiers dont il n’y avuit en sa faveur
qu’une simple destination. Mais , les autres e n tans diraient aussi :
' le père voulait nous gratifier du tiers, ou au moins nous y rap
peler ; sa volonté première et non moins prononcée, était que
chacun de ses enfans pût être son héritier du tiers, selon qu’il
�l’aurait avisé ; mais il a gardé le silence , par la seule raison
qu’après la loi du 7 mars 1793 , il n’a plus eu de volonté, cette
loi disposait de ses biens pour lui. T elle a été, en effet, l ’idée de
tous les pères qui se sont trouvés dans le cas où était Gilbert
D ucourthial ; et dans plusieurs endroits , ils n’auraient pas trouvé
de notaires qui eussent voulu rédiger une disposition contrariée
par la loi qui réclamait impérieusement l ’égalité.
Que résulterait-il donc du système des auteurs des consulta
tions? C’est qu’on adjugerait au fils aîné le tiers , en préciput ,
d’une fortune considérable, sans qu’il y eût h proprement parler
de disposition de la part du père. On ferait taire le vœu de la
nature; on renverserait la loi q u i, de concert avec elle réclamait
l ’égalité, sous le prétexte d’une intention supposée, en vertu d’un
silence qui n’a pu être que l ’effet de. l ’absence de toute volonté
de la part du p ère, la loi faisant sans lui la distribution de ses
biens.
A in s i, en donnant un véritable effet rétroactif à l'article 7 de
la loi du 18 pluviôse , une législation établie par la loi du 7
mars 1793 , uniquement en faveur des enfans puînés, maintenue
par toutes les lois postérieures , et sur-tout par l ’article i £r. de
cette même loi du 18 pluviôse , cette législation , dit-on, tour
nerait tout à coup contre les mêmes enfans qu’elle a voulu
favoriser ! On assurerait à l’aîné ce qu’il est incertain que le père
eût voulu lui laisser, ce dont il est possible qu’il eût voulu le
p r i v e r , pour eu gratifier les enfans puînés!
Mais est-il bien vrai que des conséquences aussi contraires à
la raison et û la justice, qui sont l’amc des lois, résultent de la
lettre de cet article 7 11 est ainsi conçu :
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à fonds
» perdu , qui ont élé annulléts par les articles
et
de la
,1 loi du 17 nivôse , à compter du 14 juillet 1789 , sont rétablies
» dans leur effet p rim itif,si elles ont été faites par acte ayant
7
23
�Si.
2-7
» date certaine avant la publication de ladite loi du 17 nisose».
Il est d’abord à propos d’examiner si les dispositions de cet
article , de quelque manière qu’on veuille les entendre , peuvent
se rapporter à l ’espèce dont il s’agit.
O n sera bien fondé à écarter sans ressource toutes les induc
tions qu’on ne cesse d’en tire r, si les articles a et 26 de la loi
du i7n ivo se auxquels il se réfère , sont étrangers au cas qui se
3
présente.
O r , il paraît démontré qu’aucun de ces articles ne peut sc
rapporter à l’espèce.
L ’article 26 a trait aux donations à charge de rentes viagères
ou ventes 11 fon ds perdu, en ligne directe ou collatérale , à l ’un
des héritiers présomptif ou à ses ascendans ; elles y sont annullées
depuis et compris le 14 juillet 1789.
C ’est ce dont il n’est point ici question.
23
L ’article
porte que « Dans le cas on un époux décédé ,
» avant ou depuis lo 14 juillet 1789, aurait confère au conjoint
» survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs héritiers danssesbiens,
» l ’élection , si elle n’a eu lieu que le 14 juillet 1789 , ou depuis,
» demeure nulle et de nul e ffe t, etc. »
Ce n’est pas là non plus le cas dont il s’agit.
La différence d’un cas à l ’autre est en effet sensible. L ’arliclc
2.0 de la loi du 17 nivose suppose que l ’auteur de la disposition
était décédé avant le 7 mars 1793 , et que le sort de cette dis
position dépendait à cette époque de l ’élection d'un tiers dépo
sitaire de la confiance et des intentions de l’auteur de la dis
position. On ne peut raisonnablement faire une différence entre
l’un des époux chargé d’élire, et toute autre personne. Telle
est d’ailleurs la disposition de l’article 3 de la loi du 9 fruc
tidor an 2. Il y est d it: « L ’article 2 de la loi du 17 nivose
» demeure déclaré commun au cas même où la faculté d’élire a
3
D 2
f
�Il
28
» été conférée à tous'autres qu’à des ép o u x , si l'élection n’a eu
» son effet que le 14 juillet 17S9 ou depuis ».
O r , dans l ’espèce, l ’auteur même de la disposition vivait à
l ’époque de la publication de la loi du 7 mars 1795. C’est à
lui seul qu’ap^arténait l ’élection et non à tout autre ; c’est en
son pouvoir qu’était la fàculté de laisser le tiers au fils aîné,
ou de'le lui retirer. Il pouvait même en gratifier tout autre en
fant; il pouvait faire plus encore, il pouvait instituer un seul
héritier universel. Aucun individu n’était dans son secret, il n’y
avait personne qui fût chargé de l ’exécution de ses (intentions.
Lui seul les connaissait, lui seul pouvait les diriger à son gré
jusqu’au dernier moment de sa vie.
L ’article 7 de la loi du 18 pluviôse ne doit pas être détaché
de l ’article a de la loi du 17 nivôse. Il ne parle que des mêmes
élections , de celles qui ont été annullées par cet article
. Il
3
23
se réfère donc nécessairement à une élection qu’aurait pu faire
un tie r s , en conséquence de la disposition d’un défunt.
Mais , dans l ’espèce , ce n’était pas l ’état des choses à l ’époque
du 7 mars 1793. Cet état eut été tel si Léonarde Cornudet eût
survécu à son mari. Mais cet état n’existait pas dés q u elle était
décédée depuis longtemps , et que Gilbert D ucourlhial vivait.
Ce serait en vain qu’on aurait recours à des analogies, à dos
parités , pour faire rentrer le cas où se trouvent les parties dans
celui énoncé dans l ’article a de la loi du 17 nivose.
3
Quoique dans une matière aussi abstraite, susceptible de tant
de combinaisons , il soit difficile d’entrer dans la pensée du lé
gislateur, on peut cependant dire qu’il serait possible qu’au 18
5
pluviôse an , 011 eut ainsi raisonné : « La loi du 7 mars 1793
» a aboli la fa cu lté de disposer de ses biens. Elle 11’a pas eu en
» vue une disposition déjà faite p’ir un d éfu n t, subordonnée
>, néanmoins ù une faculté d’élire conférée à uu tiers que les
�29
»
»
»
»
éligibles auraient pu actionner en justice pour qu’il eut à faire
un choix entre eux. Cette faculté d’élire a été seulement abolie
par l ’article 25 de la loi du 17 nivose ; donc elle a pu être
exercée jusqu’à la publication de cette loi. »
O r, il n’est pas là question, comme ici, d’une faculté qu’avait
un individu relativement ci scs propres biens. Ce dernier cas
tombe évidemment sous la dispositions de la loi du 7 mars 179^1
qui porte : « La faculté de disposer de ses b ien s, soit à cause de
» m ort, soit entre-vifs, soit par donation contractuelle , en ligne
» directe , est abolie. »
Ce n ’est pas qu’en revenant à des principes qu’on croît surs
et qui sont une conséquence de la loi du 7 mars 179^ > on ne
pense bien q u e , même dans le cas de la faculté d’élire qui
devait être exercée par un tiers, l ’élection était éteinte, par le
seul effet de cette l o i , comme dans le cas d’une faculté relative
aux propres biens d’un individu ; mais il est toujours vrai que
ce sont deux cas différens, et il suffit que lors des modifications
apportées par la loi du 18 pluviôse, ils aient pu n’être pas
considérés sous le même point de vue , pour que la disposition
législative qui se rapporte à l ’un d’eu x, ne doive pas être ap
pliquée par extension à l ’autre.
O u cette différence , dans l ’idée du législateur, a élé fondee
en raison , ou elle a été l’effet de l’erreur. Dans un cas comme
d ms 1 au tre, on irait contre son intention, en appliquant sa
disposition à tout autie cas que celui qui a été prévu; cette
extension seiait encore plus dangereuse , si l ’on apercevait de
erreur dans sa décision pour le cas prévu. Il aurait lui-meme
a .ce réjouir cl en voir d i m i n u e r les progrès. Le domaine ut. er
1
1
reur doit être aussi restreint que lY'inpire de la raison doit être
étendu.
Ce qui achève de prouver jusqu’à quel point , dans une pa
reille matière , les moindres nuances peuvent avoir porté de
�hk
« îf
30
changement quant aux décisions; c’est la circonstance que dans
l’article 7 de la loi du 18 pluviôse an 5 , le législateur n’a pas
voulu rappeler l ’article 24 de la loi du 17 n ivose, qui est ainsi
conçu : « Tous actes portant institution nominative d’un héritier ,
» néanmoins subordonnée au cas où un tiers ne disposerait pas
» autrement des biens compris en la même institution sont nuls
» et de nul effet, à dater du 14 juillet 1789, si à cette époque
» le droit de l’institué n’était pas devenu irrévocable , soit par
» le décès du tiers , soit par transaction authentique passée avec
» lui. »
L ’espèce dans laquelle se trouvent les parties n’est pas exac
tement la même que celle prévue dans cet article. Le contrat
de mariage du 14 mai 1778 , contenait une disposition du tiers
en faveur du fils aîné , subordonnée néanmoins au cas où le
père n’en disposerait pas autrement. Il y a toujours la diffé
rence que dans l’espèce de l’article , la faculté de disposer au
trement appartient à lin tiers, et l’auteur de la disposition était
réputé décédé avant le 7 mars 1793 ; au lieu que dans l ’espèce
actuelle la faculté de disposer autrement était au pouvoir du
père même , auteur de la désignation , et qu’il existait au 7
mars 1793.
Cependant si on devait faire un rapprochement de l ’espèce
actuelle à l’un ou l’autre des deux articles
et 24 , ce serait
plutôt au dernier.
E h bien : le législateur , dans l’article 7 de la loi du 18 p lu
23
viôse, a eu des raisons de marquer une différence entre l’espèce
de l ’article 24 et celle de l’article
, puisqu’il ne parle pas de
23
l’article 24 ;
ne fait Pas porter sur cet article les modifica
tions qu’on prétend qu’il a voulu apporter à l’article
, dont il
25
parle seulement.
On ne dira p as, sans doute, que c’est par une omission sans
conséquence que le législateur n’a pas rappelé l ’article 24 dîyis
�JP
5'
l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse, et qu’il a entendu confondre
ses dispositions avec celles de l ’article 2.0.
Cette manière de raisonner, dans une matière telle que celle
*
dont il s’agit, serait une source de graves erreurs.
Le législateur avait sous les yeux quatre articles , qui se sui
vent , les articles 20 , 24 , 26, 26. 11 ne porte son attention , et
n ’applique par conséquent ses nouvelles dispositions quJà deux
de ces articles , qui sont les articles 2.0 et 26 ; il omet les deux
articles intermédiaires , et l ’on voudrait persuader qu’il faut
suppléer d’oflice l ’insertion de l ’un ou l’autre de ces deux
articles !
D ’ailleurs le législateur a le soin de caractériser de manière
à ne pouvoir s’y méprendre , les articles auxquels s’appliquait la
nouvelle disposition législative. Il ne parle pas vaguement des
articles
et 26. Il rappelle le sujet de chacun d’eux. L es élecLions il’héritier ou de légataire , voilà ce dont il était question
seulement dans l ’article a . L ’article
n’était point relatif aux
élection s, ce mot môme 11’y est pas prononcé. Il est dit ensuite,
23
3
24
et les ventes ¿t fo n d s perdu. C’est - là un des sujets de l ’ar
ticle 26.
A in si, le législateur rappelle tout à la fois les articles
et
26, avec les cas auxquels ils avaient trait. Comment voudraiton hazarder d’appliquer sa disposition à d’autres articles qui
23
sont relatifs à d’autres objets?
Le législateur a donc voulu laisser subsister , quant au fond }
l ’article 24 , ainsi que 1’articly 2Î> , qui est relatif à une espèce
particulière de libéralité. « Les d i s p o s i t i o n s alternatives, y est-il
» d it, comme celles par l e s q u e l l e s le donateur a v a i t promis de
» nourrir et d’entretenir le donataire , ou de lui donner une
» somme déterminée en cas que l e u r h u m e u r cessai de sympa>> thiser , sont maintenues comme donations entre-vifs, si elles
» sont antérieures au 14 ju illet.1789. »
■
�51
Il y a v a it, à la vérité , clans les dispositions de ces deux ar
ticles , la retroaction, en. remontant de la loi du 7 mars 179^ ,
au 14 juillet 1789. Mais le législateur ne s’en est pas occupé ,
parce que cette rétroaction était détruite par l ’article premier de
de la même loi du 18 pluviôse, et par les précédentes, dont on
a déjà parlé. A insi, il a soumis les dispositions de ces deux articles
à la loi du 7 mars 1795, et à l’article premier de la même loi
du 18 pluviôse.
Q u’on ne perde pas de vue que le législateur, dans cette ma
tière comme, dans plusieurs autres, a souvent statué autant par
omission que par énonciation,v.n laissant subsister une législation
ancienne pour les cas om is, et. en faisant des dispositions nou
velles seulement pour les cas énoncés. On en trouve un exem ple,
.même dans l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse , dont il
s’agit ici.
Il y est d it, les élections d ’héritier ou de légataire , et les
ventes i l fo n d s perdu , qui ont été annullées par les articles
3
n et 2G cle la loi du 17 nivose. L ’article 26 était relatif aux.
ventes à fon d s perdu. Mais ce n’était pas le seul objet dont il y
fut fait mention. Cet article porte : toutes donations ¿1 charge
de rentes viagères, ou ventes à fon ds p erd u , en ligne directe
ou collatérale , etc. Cependant l ’article 7 de la loi du 18 plu
viôse ne parle pas des donations à charge de rentes viagères.
O r , pourrait-on dire qu’il L ille les y suppléer, et les confondre
avec les ventes à fon ds perdu ?
L a difficulté qui se trouve dans l ’article 7 de la loi du 18
pluviôse an
5,
dérive de ce qu on a rassemblé dans ce seul ar
ticle deux objets absolument disparates , savoir : les élections
d'héritier ou de légataire, et les ventes ¿1 fon ds perdu.
11 se pouvait qu’on 11e dût pas appliquer aux ventes <ï fonds
perdu la même disposition législative qu’aux élections d ’héritier
ou de légataire. Les vendes à fonds perdu n’étaient pas dans la
classe
�5/
33
cîaise des dispositions ordinaires , on pouvait ne pas les consi
dérer comme ayant été frappées par la loi du 7 mars 179^ , et
dès-lors ayant été seulement annullées par la loi du 17 nivose, il
pouvait paraître juste de laisser subsister toutes celles qui avaient
été faites jusqu’à la publication de cette loi.
Mais les élections d’héritier ou légataire eiaient évidemment
des dispositions gratuites, soumises comme toutes les autres, a
la loi du 7 mars 1793. L ’article a de la loi du 17 nivose ne
contenait pas , à ce su jet, une disposition nouvelle. Il n’était
3
qu’une déclaration de la conséquence du principe consigné dans
la loi du 7 mars 1793, et son unique but était de reporter l ’effet
de cette dernière lo i, jusqu’au 14 juillet 1789. Il ne s’agissait
donc, lors de loi du 18 pluviôse, que de détruire cette rétroac
tion , en conservant les élections faites jusqu’à la publication de
la loi du 7 mars 1793.
Ainsi, en entrant dans le sens et dans l ’esprit de l ’ensemble d elà
loi du 18 p l u v i ô s e , il faudrait entendre distributivement les termes
d e l’art. 7 si elles ont été faites par acte ayant date certaine avantï
la publication de ladite loi du 17 nivose. Ces termes devraient
être appliqués seulement aux ventes à fo n d s perdu. Mais leur
application ne peut se faire aux élections d’héritier ou de lé
gataire , parce que dans l’article premier il y a nécessairement
un régulateur pour ces sortes d’actes. Ils rentrent incontesta
blement dans les dispositions de biens, abolies par la loi du 7
mars 17 9 3 , et l’article premier de la loi du 18 pluviôse n’a
voulu conserver que les dispositions de biens qui s e r a i e n t irré
vocables à 1 époque de la publication de la loi du 7 mars 179^ ,
sous quelque dénomination que fussent ces dispositions.
On pourrait encore observer que s’il était vrai que le légis
lateur eût voulu donner effet aux élections jusqu’à la publication
de la loi du 17 nivose , il aurait entendu que pour assurer le
-Port d’une élection postérieure au 7 mars 1793, il faudrait an
E
�moins qu'elle eût été faite expressement par un acte ayant
une date certaine avant la publication de la loi du 17 nivose,
c’est-à-dire, que dans l ’intervalle de la publication de la loi du
7 mars 1797) , à celle de la loi du 17 nivose , il devrait y avoir
une confirmation de la destination du tiers, portée par le contrat
de mariage du 14 niai 1778, afin qu’on fût assuré de la persé
vérance d’une volonté depuis le premier mars 1793 , sans qu’on
pût y suppléer par le décès ; car la loi ne parlant point du cas
du décès , ne fait pas marcher cette circonstance d’un pas égal
avec l’élection constatée par un acte.
M ais, quoi qu’il en soit de cette dernière interprétation , qui
ne serait certainement pas déraisonnable , toujours est-il certain
que de quelque manière qu on entende l ’article 7 , il est im
possible d’en appliquer les dispositions à l’espèce dont il s’agit.
On est fondé à faire ce dilême. Ou le cas en question ne peut
être rangé sous aucun des articles de la loi du 17 nivose, ou
s’il peut être compris dans un de ces articles, c ’est seulement
dans. l’article 24 ;
dans un cas comme dans l’autre , on ne peut
lui appliquer l ’article 7 dé la loi du 18 pluviôse an 5.
Aussi lit-on dans une des consultations, page
: « il est
» même à observer que l ’article 7 de la loi du 18 pluviôse , ne
55
» parle point du cas où le donateur prévoyant le défaut d’élec» tio n , a désigné éventuellem ent, comme i c i , celui des éligibles
n par lequel il entendait que la donation fût reueillie. »
Dans quelque sens que cet aveu ait été fa it,, il en résulte
toujours que l'article 7 de la loi du 18 pluviôse ne parle point
du cas dont il s'agit, et d’après tout ce qu’on a dit, la seule
conséquence qu on puisse en tirer , est que sa décision est sou
mise à la loi du 7 mars 1793 , et à l ’article premier de la loi du
5
18 pluviôse an .
Tout se réduit donc à ce point. Lors de la publication de la
loi du 7 mars 1793 , Gilbert Ducourlhial avait la Jacuité de dis
�poser-\dv scs 'biens , ou , ce qui est de m ê m e , i l n’y en avait
pas eu de sa pari mie disposition .qûii'-fût-irrévocable ; -donc 5
■soit vn ver lu de celte lo i , soit en vertu 'de l ’article .premier de
la loi du 18 pluviôse , sesenfaus o n td iï avoir -un droit égal sur
la partage de ses biens.
'Enfin, l'auteur d’une deis -consultations, pages 42;e£-45 , a pvé-
lendu qu’il s’élevait de l ’article -Ciy ‘de lkiloi du iy-nivose an 2 ,
une ‘fin de noii‘-recevoir contre les citoyens Ducourtliial' puînés :
« ils ne veulent pas'voir , d it-il, -que ‘les lois de 1793 et^de Uan 2,
'» n’ont pas été faites pour régler les intérêts des donataires>entre
» eux , mais seulement pour régler les intérêts des héritiers lé» 'gitimés , m is ‘en opposition SaVfcc1 c6ux des donataires. C ’est
» cependant ce qui est bien textuellem ent et bien énergiquement
» exprim é dans F article
de la loi du 17 nivose. »
'
Personne iiè Verra de qiieTautfelir’thì la consultation veut; qu’on
v o ie , et l ’ohjection paraîtra toujours étonnante quelque soin
qu’il ait pris pour la faire entendre.
L ’article 57 est ainsi con çu : « L e droit de réclamer le bénéfice
>1 de la l o i , quant aux dispositions q u ’elle an nulle, n ’appartient
»> qu’a u x liêritiérs 'riatttfels ,‘ fet à dater sfeiileihèüt
»
du jo u r où leur
droit'est oiïvért, seins qüe , jiièqu’à t e t t e épòque , il y ait lieu à
» aucune institution de fruit. »
Cet article n’a voulu dire autre chose, si ce n’est que le droit
de réclamer la n u llité , ou la rédüction-dë la disposition ^appar
tenait pas à l'auteur même de la disposition. Q u ’il pouvait seu
lement etre exercé par ses héritiers ,•<?£ à dater s e u l e m e n t du jo u r
ou leur droit est ouvett-^ c’est-à-dire, après son décès.
. V o ilà h qüoi se borne le sens de cet a rticle , et on peut dire
quei cela est bien téxtuellcm etit et bièn érïergiqucm'enl exprim é
par le législateur -lui - m êm e, dans l’article 44 de la loi dut 2a
Ventose an 2.
i Question.' « A ce qu’il's o it1in terdit, d’une manière précise à
E 2
�» col ni qui a fait depuis le 14 juillet 178 g , ou qui fera à l’avenir
» une donation entre - vifs , soit en faveur de mariage , soit en
» avancement d’hoirie ou autrem ent, de réclamer personnel» lement contre l’effet de sa propre libéralité, et sauf aux héri» tiers , à son d écès, à faire valoir leurs droits.»
Réponse consacrée en l o i , « qu’elle est véritablement résolue
» par l’article 67 de la loi du 17 nivose. Q u’en effet l ’attribution
» faite par cet article aux seuls héritiers, et à dater seulement d«
» jour où leur droit est ouvert, décide bien nettement que nul
» droit à cet égard ne réside dans la personne du donateur
» máme. »
Il serait inutile de faire de nouvelles observations pour réfuter
|ine semblable objection. •
.
v ■
T R O Í S I E ME
QUESTION.
Jean-Baptiste-Gilbert DucoartfiiciL n’ayant pas été saisi
du tiers , ce tiers doit-il appartenir a u x seuls en/ans
du second lit à titre d ’éligibles dans Le principe , à
L'exclusion de Gilberte D u co u rth ia l, fille du premier
Lit ?
Cette question que l ’on va discuter , en faisant toujours abs
traction du moyen de n u llité , qui a été l’objet de la première
est une des plus délicates qui puissent se rencontrer. Sa discus
sion exige la plus grande attention. O11 11’a pas m êm e, k propre
ment parler, à combattre, a cet égard , les consultations pro
duites par Jean-Itoptiste-Gilbert D ucourthial, puisque les diffi
cultés qu’elle présente n’y sont pas prévues. O11 s’est contenté de
dire que si le droit d’avantager du tiers l’un des en fans du second
lit eut été éteint par l ’cflct de lu loi du 7 mars 1796 , au moins
�*
y
ce tiers serait réversible sur eux collectivem ent, sans que Gilberte
’Ducourthial pût y rien prétendre.
Mais en y réfléchissant, on sera convaincu que cette opinion
n ’est point fondée, et que la caducité de la faculté d’élire fait
rentrer le tiers dans la succession, qui doit être partagée par éga
lité entre tous les enfans.
Il est bien important de saisir le genre et le but des disposi
tions contenues au contrat de mariage du 14 mai 1778.
« Gilbert Ducourthial, en faveur du présent m ariage, institue
» héritier du tiers de tous ses biens , présens et à ven ir, l'un des
» enfans qui naîtra du présent m ariage, et ce par préciput et
» avantage ; laquelle institution est faite en faveur de celui ou
» celle que les futurs époux choisiront conjointement, par quel» qu’acte que ce soit. »
Il est impossible de voir là une institution contractuelle du
tiers , en faveur de toute la postérité qui devait provenir du
second mariage. Il n’y a d’appelé que celui ou celle que les fu
turs choisiraient, ce qui est bien différent.
Voici le véritable sens d’une pareille disposition : « Si quelqu’un
» de mes enfans dôit avoir, en vertu de la présente disposition,
» le tiers de mes biens en p récip u t, ce sera celui des enfans du
» présent mariage , qui sera choisi. >»
Mais ce n’est pas dire que , « si aucun ne peut être choisi , tous
» les enfans du second mariage auront le tiers en préciput. »
Ce serait supposer une seconde disposition, qu’il est impossible
de trouver dans le contrat , et il est de principe qu’on 11e doit
point donner d’extension aux dispositions , sur-tout au préjudice
des héritiers du sang , tels que des enfans. Le d r o i t que leur
donnent la nature et la lo i, ne peut être m o d i f i é que par une
disposition précise , et toujours réduite à sa v é r i t a b l e valeur.
Il faut ne pas détacher la disposition du m o d e qui la dirige. Ce
Xie sont pas tous les enfans qui sont appelés. Celui - là seul est
�ap p elé, qui sera élu. C’est donc un seul pris isolément qui est
appelé, et celle vocation est subordonnée à son élection ; mais
tous les enfans du second mariage ne sont nulle part appelés co l
lectivem ent, et si on se permettait une pareille interprétation, ce
serait entièrement dénaturer les clauses du contrat, et supposer
dans la volonté du disposant ce qui n’y est pas.
L ’idée de vouloir que si le tiers était prélevé en préciput, ce
ne fut que par l’un des enfans du second lit qui serait ch o isi,
peut subsister seule et séparément de l ’idée que si cette élection
devenait impossible, tous les enfans du second lit auraient le tiers,
exclusivement à l ’enfant du premier.
Ce sont deux idées, et par conséquent deux volontés différentes.
La première est textuellement écrite dans le contrat ; la seconde
ne s’y trouve pas.
Il n’y a rien d’extraordinaire à vouloir qu’un seul des enfans
du second lit fût gratifié du tiers; mais que si la condition sous
laquelle il devait lc tr e , qui était Yélection , devenait impossible,
ce tiers demeurerait confondu dans la succession. Le tiers répartj.
sur toiis les fenfans du second lit, pouvait ne pas paraître au dis
posant un avantage assez considérable pour opérer une gratifica
tion conforme à ses vues : il a pu vouloir , dans ce cas, y appeler
tous ses enfans indistinctement.
Q u ’on suppose, tant qu’on voudra, qu’il ne prévoyait pas la
distribution forcée du tiers entre tous ses enfans indistinctem ent,
parce qu’il ne soupçonnait pas l’impossibilité de l’élection. Dés
que ce cas est arrivé, il suffirait qu’on ne pût savoir ce qu’il
eût fait, s’il 1 eut prévu, pour q u o n s en tienne à la disposition
telle qu’elle est écrite. On peut interpréter une volonté obscu
rément énoncée ; mais une volonté claire et précise ne peut être
dénaturée en y en ajoutant une autre.
En un m o t, la disposition dont il s’agit présente une vocation
bien déterminée et subordonnée à une condition.
�Cÿb
39'
V
Elle est dirigée au profit (l'un seul (les eufani du second l i t ,
et cet enfant devait être celui qui serait élu. La condition
n’ayant pu avoir lieu , il est impossible de voir de vocation , et dèslors tout rentre dans la règle générait; qui appelle tous les enfaus.
T elle est sans doute la règle générale : la disposition exclu
sive contre plusieurs ou l ’un d’e u x , n’en est qu’une exception,
et il est incontestable que les exceptions ne doivent point rece
voir d'extension.
T ou t ce qu’on vient de dire ne reçoit aucun changement par
la clause qui suit : « Et en cas que le choix n’en ait pas été fait,
» ladite institution sera au profit de l’aîné des m âles, s’il y a
» des mâles, et s’il n’y a point de m âle, au profit de l’aînée des
>» filles. »
Cette clause,au contraire, ne fait que prouver que jamais, dans
l’esprit du disposant, il n’y a eu l ’idée du concours de tous les
enfans du second lit pour recueillir le tiers des biens.
11 appelle l ’un d’eux ; c’est celui qui sera élu : il suppose ensuite
qu’il n’y ait pas de ch o ix; mais alors il n’appelle pas tous les
enfans du second lit; il persévère toujours dans son idée, il dé
signe seulement un de ces enfans. Toujours ce n’est qu’un des
enfans qui doit recueillir le tiers en préciput, et il n’y a jamais
de vocation pour les enfans du second lit collectivement.
Gilbert D ueourthial, en disant : et en cas (/ue le ch o ix rien
ait pas été f a i t , suppose toujours qu’il aura ou son épouse, si
elle eût survécu, la possibilité de faire un choix. Il croit tou
jours que si son fils aîné a le tiers , ce sera parce que la désigna
tion sera confirmée , ou par un nouvel acte , ou au moins par
la perseverance dune volonté libre, jusqu’au décès du survivant.
La disposition n’était une vraie disposition , elle n’a dû com
mencer à prendre effet qu’au décès ; c’était s e u l e m e n t â cette époque
qu’il devenait certain (jue l’enfant désigné
un choix contraire.
n ’a v a i t
point à craindre
�/
4°
.
A insi, sous tous les rapports possibles, la disposition reste dans
les formes d’une vocation de Yun des »nfans, subordonnée à la
condition qu’il sera élu. La possibilité de l'extinction de la faculté
d’élire n’a point été prévue.
Il n’y avait cependant rien de plus vrai que la possibilité de
cette extinction , puisqu’elle est avouée par l ’auteur de l ’une des
consultations, page
. « La disposition principale ( l’institution
» contractuelle du tiers) dit - i l , était pure, sans condition et
>1 irrévocable de sa nature. Elle aurait profité à tous les enfans
» collectivem ent, ci défaut de ch o ix valable d’un seul d'entre
» eux pour recueillir exclusivement. »
Si un choix non valable eut donné lieu à l ’extinction de la
faculté d’élire , à plus forte raison est-elle résultée de l ’impossi
bilité où s’est trouvé Gilbert Ducourthial d’exercer ce droit, par
l ’effet de la loi du 7 mars 1795.
38
Il est vrai que , dans le cas de cette extinction , l ’auteur de
la consultation dit que l ’institution du tiers aurait profité à tous
les enfans du second lit , sous le prétexte que c’était une dispo
sition principale sans condition et irrévocable ; mais c’est ce qu’il
s'agissait de prouver, et on a déjà démontré le contraire.
L a question qui se présente a exercé les auteurs, et tout ce qu’on
vient de dire est conforme au résultat de leur doctrine.
Ce qui était propre à induire en erreur, c’est ce qu’avait d it
R icard, dans son T raité des substitutions, traité e. , partie 2e. ,
chapitre 1 i e. , n°.
. « Mais bien que la faculté donnée ¿1 l ’hé» ritier de choisir un fidéi-commissaire entre plusieurs, fasse une
» c o n d itio n à 1 égard de celui qui doit être choisi, il est pour» tant pur et simple a l’égard de tous en général; ensorte q u ’il
» ne peut leur être ôté que sous cette condition , laquelle , si
65
3
*> elly m anque, et que l’héritier meure sans faire son élection }
« Ici fïdéi-commis doit être partagé également entre tous. »
Mais R i c a r d , com m e l ’observe son dernier annotateur, n ’avait
point
,
�y
. r
.
.point mis 1a dernière main à ce chapitre ; qui n’ est qu'une
.ébauche. Tous les auteurs q u i, depuis, ont approfondi la question,
,ont rétabli les principes en restreignant l'opinion de Ricard, au
¿seul .cas auquel elle devait être appliquée d'après le §. liogo de
,1a loi.6 7 , ff. de legatis a0, sur lequel il se fonde.
Ile n ry s, liv. 6 , quest. a , explique ce §. Piogo ; il démontre
.qu’il ,est seulement dans le cas d’un testament contenant une
.institution d’h éritier, à la charge par cet héritier de rendre , à
-titre de lidéi-com m is, l’hérédité à celui des affranchis du défunt
.que Ijqii semblerait à l ’héritier. Rogo fundum cum morieris ,
5
restituas uni e x libertis cui voles. O r , dans ce cas, si- l’héritier
iidéi->commissaire ne veut point é lire , ou néglige de le faire, il
est forcé,de donner le bénéfice de l’institution à tous les éligibles^
à moins que le testateur en eût désigné un auquel la restitution
.dût^e faire e n (cas de non élection.
Mais pourquoi cela ? « C’e st, comme dit J’a u te u r, parce que ,
.» dans l ’espèce proposée , il est bien au pouvoir de 1 héritier
-*> fidéi-çommissaire .^l’en élire un ou de n’en élire aucun; rnais
-»<en négligeant d’é lire, il n’est pas juste qu’il s’exempte pour
,>' cela du lidéi-commis, et qu'il le ¡retienne. U serait absurde que
.» sa négljgence ¡pu ,sa;mauyai$e foi lui fut profitable, et que le
.» ¡profit qu’il en tirerait l ’obligent à ne,ppint élire................ ,11 ne
.» -reste -partait qu’à l ’obliger à lais$çr à ,tous ,ce , qu’il n’a voulu
.h bailler à fin s e u lyct qu’il ne peut pas,garder. ,»
•
, U ilie^ ’agit pas ici d e ,c e la ,ie t ;hors ce xCas,,1’auteur s’ep.
tient à la règle, que Ce qui n’est d on n é, çomnie dans,l’espèce »
.qii^i ¡un t^.C^^., n’<ist pojnt: donné à tçus les éligibles. 11 dit que
.cette règle résulte. même <du §. Rpgo ,,cité par ,J\icard , puisque
•le législateur ,y dit q u e, daris .ee o.as particulier, il arrivera ce
tqui est çofitrp le vflroitcoin}nyn. que pe q u i n’est donné qu’à un
6eul pourra être demandé par tous. Itaque eveniet ut quod uni
.tfatiwi .estt, .yivis pl^ribus ¿im tj pçtcre fiçn p o tsit, seil omne$
'
'
«
�*
42.
pctrnt quod non omnibus datum e s t, et « toujours pour empê» cher que le testateur ne soit trompé par l’héritier ( fuléi» commissaire ) et parce que la loi présum e, que si bien il n’a
» entendu laisser l ’héritage quVi un s e u l, il a pourtant voulu
» qu’il demeure plutôt à tous ceux qu’on pouvait élire qu’à son
« héritier ( fidéi-cominissaire ) et qu’ieelui ne se prévalût de sa
négligence ou de sa perfidie. » Il fallait, dans ce cas, que les
éligibles eussent collectivement l ’hérédité, ou qu’elle restât à
l ’héritier institué chargé de la ren dre, et ce dernier parti eût été
absurde. L ’institution testamentaire , suivant la jurisprudence
rom aine, devant avoir son e ffet, il était forcé de le lui donner
conformément au §. R o g o , et d’exclure les héritiers de droit.
La question a été traitée encore avec plus d’étendue par Sudrc,
auteur d’observations , trés-estimées sur le Traité des élections
d ’h éritier, contractuelles et testamentaires de J^ulson^ conseiller
au parlement de G renoble, pag. 64 et suiv. édit. de 1753.
Sudre s’est attaché à prévenir l’abus qu’on pouvait faire de la
manière dont s’est expliqué Ricard. Il dit que « les lois qui ont
>, établi la maxime du concours (d e tous les éligibles à défaut
» d’élection ) sont toutes dans le cas que la faculté d’élire a
» été commise à Yhéritier ou au légataire qui était grevé de
>. rendre. » Il traite la question pour le cas où la faculté d’élire
serait séparée de l’institution, et serait donnée à un tiers comme
nn simple ministère. L ’on sent qu’il ne peut y avoir aucune
différence de ce cas à celui où l ’élection aurait appartenu à l ’auteur
même de hi disposition, comme dans l ’espèce.
O r , dans le cas proposé, l’auteur, en analysant l ’opinion de
Ricard , en rend ainsi le résultat : Q u’encore qu'il semble que
la donation soit fa ite à un s e u l, toutefois la vérité est que la
disposant donne à tous, sinon q u il aime m ieux fa ir e un ch o ix
cn lrcu x.
C ’est sur cette idée que l ’on se fonde pour soutenir que si le
�43
fils aîné n’était pas saisi du tiers , il appartiendrait k tous les
enfans du second lit exclusivement à Gilberte Ducourthial.
Eh bien ! c’est contre cette même idée que Su rire s’élève avec
force. ’
Il
dit que cette opinion est « formellement condamnée par
» les maximes de d ro it, et par la disposition de la loi. « Il établit
que les dispositions dont il s’agit sont en effet conditionnelles
dans leur substance, puisque c’est l'événement incertain, d’une
élection qui doit déterminer cette personne unique à laquelle
les biens sont destinés. Il n’est jamais permis, d it-il, de suppléer
des dispositions que le testateur a omises, et qui n’ont point de
fondement dans la lettre du testament. Peut-on d o n c , ajoute-t-il,
dans un fidéi-com rnis qui n’appelle qu'un des enfa n s, suppléer
d office une première disposition par laquelle tous les enfans
soient censés appelés.
E n fin, dit toujours l’auteur, nul des enfans n’ayant été appelé
qu autant qu’il serait é l u , nul aussi ne semble avoir de qua
lité pour être admis toutes les fo is qu’il n ’y a point d’élection ;
qu’a in si, par le défaut d’élection , tous sont d’échus de la con
dition du fidéi - commis , ncm inc elepto
dcjiciunt.
omjics conditione
Cet auteur se fonde sur H enrys, sur le président F a b e r, de
erroribus praginaticorurn d e c is , 5 5 , cap. 5 et G, qui s’explique
ainsi : F it non solurn prœter v e ib a , sed etiam prœter voluntatern ^
si quis dicat fidei-com m issum omnibus datum esse. Il i n v o q u e
opinion de Bornier sur Ranchin, inverbo fid éi-co m m is, art. i8 ,
et de M aynard, liv. 6 , chap. g.
tu rg o le parle encore de la question, traité des testamens ?
chap. y , sect. 0 , n . £>. « Mais on dem ande, d it-il, si une dis—
» position faite en faveur de l’une d’entre plusieurs personnes
» qui sera é lu e , est conditionnelle ou pure ? » T elle est sans
1
5
doute la question , puisque les auteurs des consultations préF ?
�44
tendent que la disposition était conditioûnelle seulement à l'égard
de celui qui serait élu, mais pure par rapport à tous les éligibles,
n’ayant pu y avc.ir d’élection.
L ’auteur établit que les lois sur lesquelles Ricard se fo n d e,
sont inutiles pour la question. 11 puise la décision du doute dans
la loi 24 , ff. clé legatis a0. « 11 faut d ire , selon lui , que la fa» culte d’élire forme une condiiion qui suspend le droit de ceu*
qui sont appellés en général, de même que le droit de celui
» qui doit être élu. » Et après avoir traité des cas autres que celui
dont il s’agit, il en revient à cette conclusion : « A in s i, il est
» certain en g én éral, et sans distinction, que la faculté d’éliré
rf renferme une condition qui suspend le droit de tous les éligibles
>1 jusqu’au temps que l ’élection doit être faite. »
Enfin, c’est ainsi que la question a été jugée en grande con
naissance de cause , par un jugement rendu par le tribunal civil
du département du Puy-de-D ôm e, seconde sectio n , le
nivose
5
an 6 , conformément aux conclusions du commissaire, entre des
nommés Souchaire.
Dans l ’espéee de ce jugem ent, un père qui avait deux enfans
du premier m ariage, s’était remarié avant la révolution. Il
institua , par le second contrat de m ariage, celui des enfans à
naître qu’il lui plairait choisir. Il n’avait fait aucune élection
lors de la promulgation de la loi du 17 nivose,' et il mourut
quelque temps après.
A ucun des enfans du second lit n’ayant été saisi ; Ce qui doit
également avoir eu lieu dans l ’espèce , quoique Gilbert D u couftliial soit décédé avant la publication de la loi du 17 nivosi; ,
ainsi qu’on l ’a établi en discutant la seconde partie, il ne s'éleva
qu’une seule question qui étitit relative aux intérêts respectifs des
enfans des deux inariagrs.
Ceux du prèmier lit réclamaient le partage de la succession pa»
portions égales avec ceux du second lit.
�4 5
Ceux-ci prétendaient être seuls en droit de recueillir l ’effet
de l’insdturion, sauf la légitime de droit des enfans du premier
lit. Ils se fondaient sur ce qu’ils étaient seuls éligibles ; et qu’à
défaut d’élection , les éligibles devaient tous concourir. En un
m ot, disaient-ils, il y a une institution contractuelle en faveur de
la descendance du second lit.
Les enfans du premier mariage répondaient qu’il n’y avait pas
d’institution , qu’il n’avoit dû y en avoir qu'au moment de 1 élec
tion ; que le père avait seulement entendu, ou qu’un des enfans
du second lit serait son héritier, ou qu’il n’en aurait aucun,, et
que dès-lors les enfans des deux lits seraient égaux ; que le droit
des éligibles avait été suspendu jusqu’à l ’élection , et qu’ils
n’avaient jamais été saisis.
•*<'
(
'
Le jugem ent, après une forte discussion, d’après les autorités >
et quoiqu’on eût principalement insisté sur l ’opinion de R icard,
rejeta la prétention des enfans du second m arîage, et ordonna le
partage par égalité entr’eux et ceux du premier.
Tant d’autorités et un jugement rendu en thèse sur la ques
tio n ', devraient sans doute, fixer les incertitudes, s’il pouvait y
en avoir.
Il
' i
'
n’y a point de préjugé à tirer de la forclusion contumière qui
semblait menacer Gilberte Ducourthial.
E lle n’élait pas forclose lors de la disposition dont il s’a g it ,
puisqu’elle n’était pas mariée alors; et les nouvelles lois, d’accord
avec la nature, ont effacé toute différence entr’e lle , et tout autr<2
enfant mâle ou fille non mariée.
D ’ailleurs , en coutume d’A u vergn e, le père pouvait donner
à sa fille même forclose, tous ses biens , et réduire les autres
enfans, même les mâles , à leur légitime. T el esc le résultat de'
l ’article 5o 'du titre 12 de cette coutume , et Cet!« jurisprudence
est attestée par tous les commentateurs. L e , père pouvait donc
disposer, en faveur de sa fille , des deux tiers de ses biens, sauf
�4 i
la légitime cle droit des enfans , autres que celui qui aurait été
appelé pour recueillir le tiers , si cette disposition ne fut pas
devenue caduque.
Enfïn, on ne contrarie pas ici une volonté de Gilbert Ducourtliial , qui eût eu pour fondement Ja puissance paternelle.
L'exercice de cette puissance ne peut être basée que sur un
discerneiuenl du père , d’après les qualités respectives de ses
enfans; et ici il s’était lié pour des individus qu’il ne connaissait
p a s, puisqu’ils 'n ’étaient point nés, et entre lesquels leur bas
âge, même à lépoque de son décès, l’aurait empêché de décider,
en connaissance de cause , quand il aurait pu disposer. La dispo
sition contenue au contrat de mariage du 14 mai 1778 , est
donc respectivement, à Gilberte D ucourthial, aussi défavorable
qu’il soit possible,
•
rti . .
R
É
S
U
M
É
.
La disposition contenue au second contrat de mariage de
Gilbert D ucourthial, est nulle en elle-m êm e respectivement à
Gilberte D u courthial, à raison de la faculté d élire , accordée
à-la seconde femme. Dès-lors, le partage doit avoir lieu par égalité
entre tous les enfans , tant du premier mariage que du second, et
les autres questions deviennent inutiles.
Mais à supposer que cette nullité, quoique bien fon dée, ne
fut pas adoptée, le tiers ne reviendrait pas pour cela à JeanJiaptiste-Gilbert Ducourthial. O n a démontré qu’il n’en a jamais
été saisi.
E t ne l ’ayant pas été individuellem ent, les enfans du second
lit ne l ’ont point ete collectivement,parce qu’il n’y avait de dispo
sition que pour celui qui serait é lu , et non de disposition pour
tous les éligihles, en cas de non-élection. La faculté d’élire étant
devenue caduque, la condition à laquelle la disposition du tiers
�47
était subordonnée, a m anqué, et dés-lors tous les enfans indis
tinctement sont appelés à recueillir la succession comme héritiers
de droit: Quos æqualis ju n x it natura, æqualis jungat gratia.
1
1
D élibéré à Paris par les jurisconsultes anciens soussignés 3
%
le 29 prairial an 9 de la République fran ça ise.
Signé G R E N I E R , ( d u P uy-de-D ôm e.)
DESEZE.
%
BIGOT-PRÉAM ENEU.
•
<
» «
A
P aris
, de l ’imprimerie du D épôt des lo is , place du Carousel;
�
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Title
A name given to the resource
Factums Godemel
Relation
A related resource
/files/factum-remarquables/BCU_Factums_G0301_0007.jpg
Description
An account of the resource
<a href="/exhibits/show/factums/thesaurus">En savoir plus sur les factums</a>
Text
A resource consisting primarily of words for reading. Examples include books, letters, dissertations, poems, newspapers, articles, archives of mailing lists. Note that facsimiles or images of texts are still of the genre Text.
Dublin Core
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilberte. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Grenier
Desèze
Bigot-Préameneu
Subject
The topic of the resource
successions
contrats de mariage
testaments
droit d’aînesse
secondes noces
loi du 17 nivôse An 2
égalité des héritiers
rétroactivité de la loi
doctrine
application des lois dans le temps
coutume d'Auvergne
forclusion
Description
An account of the resource
Titre complet : Mémoire à consulter, et consultation, pour Gilberte Ducourthial et Marie-Joseph Maignol son mari, et les citoyens Ducourthial-Lasuchette enfans puînés de Gilbert Ducourthial ; Contre Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial aîné.
Table Godemel : Election : l’institution sera au profit de l’ainé des mâles, et s’il n’y en a point au profit de l’ainé des filles. de ce mariage sont issus trois enfans mâles. Le père est décédé en juillet 1793, longtemps après sa femme, et sans faire d’élection. que devient l’institution ? deux systêmes : pour le fils ainé, 1° l’institution au profit des enfans du second mariage est valable, et doit avoir son exécution ; 2° n’y ayant pas eu d’élection, l’ainé des mâles désigné pour recueillir l’institution, doit en profiter seul pour le tiers qui en fait l’objet ; 3° la fille née du premier mariage, relevée de sa forclusion, prendra sa portion, c'est-à-dire le quart dans les deux tiers formant la succession ab intestat. pour les autres enfans, 1° la faculté d’opter ou d’élire accordée par Gilbert Ducourthial à sa seconde épouse, par leur contrat de mariage, donne lieu à la nullité de la disposition contenue dans ce contrat ; 2° en supposant que cette disposition ne fut pas nulle par le défaut d’une volonté libre, le fils ainé ne pourrait prétendre qu’il a été saisi du tiers, au préjudice des autres enfans ; 3° le fils ainé n’ayant pas été saisi individuellement, les enfans du second lit ne l’ont point été collectivement ; la condition attachée à la disposition ayant manquée, tous les enfans sont appelés à recueillir la succession, par égalité, comme héritiers de droit.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
de l'imprimerie du Dépôt des lois (Paris)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1778-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
47 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1102
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1101
vignette : https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/thumbnails/6/53130/BCU_Factums_G1102.jpg
Coverage
The spatial or temporal topic of the resource, the spatial applicability of the resource, or the jurisdiction under which the resource is relevant
Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
Rights
Information about rights held in and over the resource
Domaine public
application des lois dans le temps
contrats de mariage
coutume d'Auvergne
doctrine
droit d’aînesse
égalité des héritiers
forclusion
loi du 17 nivôse An 2
rétroactivité de la loi
secondes noces
Successions
testaments
-
https://bibliotheque-virtuelle.bu.uca.fr/files/original/6/53129/BCU_Factums_G1101.pdf
9cb91ddb519ef7845373117e5a0aabbf
PDF Text
Text
CONSULTATIONS.
L e c o n s e i l s o u s s i g n é , qui a pris lecture, 1 du
contrat de mariage de G ilb ert D ucourthial de Lassuchette
avèc Marie-Léonarde Cornudct, du 14 mai 1778 ; 2°. du
contrat de mariage de Marie-Joseph Maignol avec Gilberte
D ucourthial, du 2 avril 1:783; 30. d’un mémoire à con
sulter ;
que , d’après les anciennes et les nouvelles
lois, le premier enfant m âle, issu du second mariage de
Gilbert Ducourthial avec M arie Léonarde C ornudet, doit
avoir, en préciput, le tiers des biens de la succession de
son pèr e , et un quart dans les deux tiers restans.
Gilbert Ducourthial fut marié deux fois. En premières
noces, il avoit épousé Marie - Gabrielle. de. V illette. D e
ce premier mariage issut Giiberte D ucourthial, actuelle
ment épouse du citoyen M aign ol
E
st d’ a v is
A' '
�c o
En 1778 , Gilbert Ducourthial épousa, en secondes
noces, Marie-Léonarde Cornudet,
Par une clause expresse de ce contrat de mariage , il
est dit que Gilbert DuCoürthial y futur époux, institua
héritier du tiers de tous ses biens présens et à venir, l’un
- des enfans qui naîtra du présent mariage ,, et ce par préciput et avantage ; laquelle institution est faite en faveur
de celui ou celle que le& futurs choisiront conjointement,
•par quelques actes que ce soit; ou qui sera phoisi par le
survivant des deux futurs, auquel le droit en appartiendra
par clause expresse, aussi par quelques actes que ce soit ;
et en cas que 7è ch o ix rten ait pas été fia it, ladite ins
titution sera au profit de Taîné des m âles, s’ il y a des
mâles , et, s'il n j a p o in t de mâles., au profit de ïaînée
des filles. , . : • •
D e ce mariage sont issus trois enfans milles. Gilbert
Ducourthial est décédé depuis le mois de juillet 1793.
Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, étoit dé
cédée plusieurs années auparavant; ni l’un ni l’autre n’ont
fait d’élection. Dans cette circonstance, le fils aîné demande
s’il doit profiter des avantages qui lui paroissent assurés
par le contrat ’de mariage de ses père et mère.
. JL?édit óeVsecòndès noces, d e 'i o, qui ne permet pas
à ceux qui se remarient, et qui ont des enfans d’un premier
■' i
'
•
’1* * ) I ■
î
^‘
lit, de se donner réciproquement aù delà de la portion de
l’enfant le moins.prenant., a!voit fait naîtreJdes doutes à cet
’ s u ¿ i i - ' d r 011 éctit, qu’en faisant
dépareilles iins\ittitiops,V ce rie i&t un moyen de frauder la,
loi; mais la derniére^xjrispruçlchce, fixée par différens ar
rêts, don/: l’un du 29 avril 17 19, et Vautre'du 1.1 août 1740*
56
�3
r , ,>.
rapportés par Laeo-mbe, esfc c|ué de, pareilles dispositions
sont valables.
C’étoit aussiJ la
jurisprudence de la ci-devant
, . ! >») '
Zg.' Ul ' * §
1~ •
sénéchaussée d’Auyergjie. L e dernier commentateur de la
coutume>Jome Ü t it r e
yçage £$4* rap- t
porte.urçe,sentence du mois:<iÎe.ju,in j 773 *qui confirme unô 1
institution d’héritier,-en, faveur des-enfans à naître d’un.second mariage. A in si, en ne consultant que l’ancienne
jurisprudence, il est sans difficulté que l’exposant doit avoir
en préciput, le tiers des biens qui lui a été donné par le
contrat de mariage de ses père et mère : on dit en préciput,
parce qu’il est .de principe qu’ùn don faitde cette nlaniére,
n’est pas sujet à rapport^ même en ligne directe.
Les lois nouvelles ne font pas non plus obstacle à la récla
mation des exposans: on peut même dire qu’elles décident
la question en sa faveur.
. i)
i l est vrai que cTftprôs les dispositions des art» X X t li et
X V II des lois du 17 nivôse et 22 ventôse de l’an 2 , l’élection
laissée au choix de l’un des époux étoit nulle, si elle n’avoit
été faite que le 14 juillet 1789 et depuis, et que tous les héri
tiers présomptifs venoient alors par égalité à la succession
de ci/jus. •
Mais il ne peut plus être question de ces lois, non plus
que de celle du brumaire précédent, puisqu’elles ont été
annuljées, quant à leur effet rétroactif, soit par la loi du
3 vendémiaire de l’an 4 , soit par la nouvelle constitution.
Il faut donc se référer au moment du décès de Gilbert
Ducourtliial, à l’effet de savoir si î\ cette époque, il existoit
quelque loi qui pût empêcher l’effet de la disposition faite
en faveur de. l’exposant-, par le contrat de mariage de ses
père et mère : o r, i l n y avoit pas alors de loi qui eût prosA 2
5
�crit de semblables dispositions, etannuïlé des conventions
contractuelles, faute par l’un des conjoints d’avoir exercé
la faculté d’élire, stipulée dans un contrat de mariage ; et il
n’y en a pas depuis, attendu l’abolition de Teffet rétroactif.
L a loi du 7 mars 1793, antérieure au décès de Gilbert
D ucourthial, abolit, à la vérité, la faculté de disposer de
ses biens, soit à cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par
donation contractuelle en ligne directe; mais cette loi, dont
la défense n’est relative qu’aux dispositions futures, n anéantit pas les dispositions qui étoient déjà faites, et n’oblîgeoît point les père et mère à les révoquer : o r , ce n’est
point en vertu d’une disposition faite postérieurement à la
loi du 7 mars 1793., que l’exposant réclame le tiers des
biens de son père, comme un don qui lui a été fait en préciput; il le réclame en vertu d’une' disposition bien anté
rieure à la loi, en vertu d’une disposition respectée et con
firmée même par les lois postérieures.
En effet, l’article premier de la loi du 18 pluviôse der
n ier, porte: « Les avantages, prélèvemens, préciputs, do
t a t i o n s entïe-vifs, institutions contractuelles, et autres:
«dispositions irrévocables de leur nature, légitimement
» stipulées en ligne directe avant la publication de la loi du
« 7 mars 1793? et en ligne collatérale ou entre individus
« non parens, antérieurement à la publication de la loi du
« brumaire an 2, auront leur plein et entier effet, con« formémcnt aux anciennes lo is , tant sur les successions
•t ouvertes jusq’uà ce jour que sur celles qui s’ouvriroient à
« l’avenir ».
L ’avantage ou le préciput dont il s’agit, a été stipulé
dans un contrat de mariage, passé antérieurement à la loi
5
�5
.
(
)
du 7 mars 1793; à défaut d’élection de la part des père et
m ère, ces avantages étoient destinés au premier enfant qui
naîtroit du mariage : il n’y a pas eu d’élection-, les père et
mère sont décédés avant les lois des brumaire et 17 nivôse
de l’an 2 ; par leur décès, l’avantage s’est fixé et est devenu
irrévocable sur la tête du premier enfant mâle; il doit par
conséquent en profiter.
L e père ne pouvoit, dira-t-on, faire un choix postérieu
rement à la loi du 7 mars 1793, puisque cette loi prescrivoit l’égalité entre tous les enfans, dans l’ordre de succéder
à leurs ascendans, et on pourroit en conclure que la dis
position n’étant pas irrévocable de sa nature, ne peut sub
sister : mais cette objection n’est pas fondée, si l’on fait
attention que la loi de 1793 n’interdit que les dispositions
qui pourroient être faites à l ’a v e n i r j qu elle n anéantit pas^
celles qui existoient alors ; qu’elle valide, au contraire, ce
qu’elle n’annulle pas. (A rt. X X V I de la loi du 22 ventôse).
O r, l’avantage dont il s’agit, est assuré à l’exposant, non par
une disposition postérieure à la promulgation de la loi du
7 mars 17933 mais par une disposition bien antérieure, puis
qu’elle remonte au 14 mai 1778 : cette disposition n’ayant
été annullée ni par les père et mère, ni parla lo i, doit donc
avoir son effet, puisqu’elle est devenue irrévocable par les
décès des père et mère avant la promulgation des lois des
brumaire et 17 nivôse de l’an 2.
Cette résolution doit éprouver d’autant moins de diffi
culté, qu’elle a pour principe et pour fondement la dispo
sition de l’article 7 de la même loi du 18 pluviôse dernier.
Cetarticle est ainsi conçu:
« Les élections d’héritier ou de légataire, et les ventes à
5
5
�( 6 -y m
« fonds perdu, qui ont été antiullces par1les art. XXH et?,
« X X V de la loi du 1 7 nivôse, à compter du 14 juillet 178 9 ,
« s o n t ' rétablies dans leur effet pïim itif, si elles ont é té r
» faites par acte ayant date, ¡certaine avant la publication d a r
celadite loi du 17 nivôse ».- :
‘
' V
,
Des termes de cette loi , il résulte évidemment que les
élections d’héritier qui ont été faites antérieurement à la loi
du 17 nivôse, et non à cell&du17 mars 1793, doivent etre
maintenues : ainsi, l’exposant étant saisi de l’effet de l’insti
tution par îe décèsde son père, arrivé avant la publicationde la loi du 17 nivôse , on ne sauroit lui contester légitime-'
ment l’avantage qu’il réclame.
D É L IB É R É à Riôrïi le *4 germinal au
française une et indivisible.
i;!
5
de la r é p u b liq u e
’■
>’
TO U T T ÉE, TO U TTÉE, GASGHOJNT.
. LI£ S O U S S lé N Ê qui a yu la consultation ci-dessus.et"
•i 11 11, I •
'
j •
des autres parts ;
E s t i m e , que
s’il n'est pas impossible de tirer des lois nou
velles, quelques inductions favorables aux enfans du pre
mier lit de Gilbert Ducourthial, les raisons déduites dans la
consultation ci-devant transcrite, doivent contribuer beau
coup ù faire inclinet^n faveur de l'exposant. On peut meme
ajouter aux raisonnerons de la consultation. En effet, en
supposant que par le défaut d’élection, fait antérieurement
�7
C )
à la loi du 7 mars 1793 » disposition ne se fût pas déterminément fixée sur la tête de l’aîné des mâles du second
lit, il est au moins une chose incontestable ; c’est que le
contrat de 1 7 7 8 lia irrévocablement les mains de l’insti
tuant respectivement aux enfans du premier lit. Par ce
contrat, il prescrit irrévocablement que les enfans du se
cond lit ou l’un d’e u x , emporteraient dans sa succession uu
tiers des biens, par préciput et avantage sur les enfans du
premier lit. C’est sous la foi de cette promesse irrévocable
de sa nature, que le second mariage fut accompli ; par
conséquent les enfans du premier lit, n’ont point le droit
d’examiner et de critiquer la prétention de l’exposant.
L a loi du 18 pluviôse dernier, n’a attribué à tous les
'enfans du même père T en se référant à celle du 7 mars
1 7 9 3 , que ce dont le père n’étoit pas dessaisi déjà. Les lois
nouvelles n’ont pas p u , n'ont pas même entendu fairer
plus que ne le pouvoit le père ; or ic i, de même que
Ducourthial père ne pouvoit pas remettre l’égalité entre
tous ses enfans du premier et du second lit , de même les
lois nouvelles ne sauroient la rem ettre, sans avoir un effet
rétroactif.
5
D é l i b é r é à Riom , le 14 germinal an de la républiquefrançaise , une et indivisible.
D E V A I> .
�. MÉMOIRE A CONSULTEE ;
ET C O N S U L T A T I O N .
L , e citoyen T itus s’est marié deux fois ; il a eu de son
premier m ariage, avec dame Marie L a u r e tte , une fille
nommée G ilberte, et de son second, avec Suzanne D ailly,
trois en fan s, Pierre , Jean et Jacques.
Par ce contrat de m ariage, Titus a institué pour son
héritier du tiers de tous ses biens présens et à v en ir, l’ un
des enfans qui naîtroit dudit m ariage, et ce, en préciput
et avantage \ laquelle institution étoit faite en faveur de
celui ou de celle que les futurs choisiroient conjointement,
par quelques actes que ce fût, ou qui le seroit par le sur
vivant des deux futurs époux, auquel le droit en appartiendroit par clause expresse , aussi par quelqu’acte que ce
fût ; et dans le cas où le choix n’en ait pas été fa it, ladite,
institution projiteroit à rainé des mâles ; et s’il n y a pas
de inâles , à l’aînée des filles. Telle est la clause portée par
ledit contrat qui est du 14 mai 1778.
L e père commun a marié sa fille unique du premier lit,
et par son contrat de mariage antérieur à la révolution,
il lui a constitué en dot une somme de 1 ,000 liv., payable
en cinq termes de 3,000 liv. chacun, de deux en deux
ans , sans intérêts qu’à défaut de payement terme par
ternie i
5
�( g ) ' '
terme ; et moyennant' cette i constitution , il fut stipulé
qu’elle demeui'eroit forclose idei toutes successions directes
et collatérales de l’estoc paternel, sous la réserve qu’il fit
de la rappeler auxditessuccessions par quelqu’acte que ce
fût : cet acte est de 1783. r
T itu s, père com mun, est mort le 27 juillet 1793; la
mère est morte avant,.sans avoir fait de choix de l’un des
enfans. Il s’agit maintenant de savoir, i ° . : si cette insti
tution contractuelle est valable en faveur des enfans du
second lit;
"
1 ■ :i \>
i °. Si, en le supposant, n’y ayant pas eu d’élection de la
part des père et m ère, c’est l’aîné mâle qui doit en pro
.....:
'
fiter;
3°. Quels sont les droits de la fille du premier lit dans
la succession du père com m un? la forclusion prononcée
contre elle doit-elle av o ir son elfet ?
Enfin , y ayant des enfans mineurs, quelle doit être la
forme du partage?
C O N S Ü LT ATION.
:
l'i
. 1
;
'
;
1,
I
* . .
■
-i i
>
•
T
L e C O N S E I L S O U S S I G N É , q u ia lu les deux
contrats de mariage dont il s’agit,
E s t i m e , sur les questions p ro posées,
i°. Que l’institution contractuelle, faite par un père dans
son second contrat de mariage au profit des enfans à naître
d’icelui, est valable et doit avoir son exécution.
B
�C *0 ÎJ
Dans le principe, cette question a partagé les auteurs,
et il paroît qu’elle a été diversement jugée par les tribu
naux.
Ceux qui ont soutenu qu’elle étoit n u lle, se sont fondés
sur ce que les enfans du second lit,, n’étant encore sus
ceptibles de la part de leur père et m ère, ni d’am our,
ni de haine, les dispositions que l’un des conjoints fait"
en leur faveu r, ne sont censées faites qu’en contemplation
de l’autre conjoint; on présume que, ne pouvant lui donner
directement au delà d’une portion d’enfant, l’on a voulu
éluder la loi par une disposition indirecte, et que d'après
l’édit des secondes noces, Von ne pouvoit donner aux
jîères, mères et enfans du second mari ou autres personnes
par dol et fraude interposés.
Une fem m e, dit Chabrol, qui ne peut pas profiter de
ces libéralités p o u r elle-même, n’a pas moins d’empresse
ment à les procurer u ses enfans íi naître •, s’ils lui survi
vent , ils ont ce que leur mère n’auroit désiré avoir que
pour eux ; et s’ils lui prédécèdent, elle peut retrouver
souvent, dans leur succession, les biens qu’elle leur a
procu rés.
Les partisans de cette opinion citent à son appui plu
sieurs arrêts: le prem ier, du mois de novembre i
,
rapporté par Montholon.
L e second qu’on trouve dans Soefve, du 18 juillet 1645.
Un troisième recueilli par Brodeau sur L o u e t, L . N.
somm. 3 , du 3 août 1647.
L e quatrièm e, qu’on trouve au journal du Palais ,
du 7 septembre 1673.
Enfin, celui connu SOus le nom de Laparra, du i&
588
�( ” )
tnai
rapporté pav l’Epine- d e . Graînvilie. T o u s,
dit-on, ont annullé des dispositions faites en faveur des
€nfans à naître d’un second mariage.
Mais si l'on se donne la peine d’entrer en connoissance
de cause de ces jugemens, on s’aperçoit bientôt qu'ils
sont rendus sur des circonstances particulières,, et n’ont
aucune application à l’espèce qui se présente ici.
D ’abord celui de M on tholon , d’après Rousseau de
la C om be, n’a pas jugé la question. « Il s’est tro u v e ,
« dit-il, verbo Noces, qu’il s’agissoit d’une donation faite
« non à des enfans d’un second l i t , mais à des colla« ter aux. »
’
Celui de t6^S paroît avoir jugé qu’une mère remariée
n’avoit pu donner aux enfans du second niariageses meubles
et acquêts , et le quint de ses propres, au préjudice des enfans
du premier lit, d o n t la légitime n'avoit cependant pas été
blessée; mais indépendamment de ¡’injustice évidente qui
paroît en résulter, il est rendu pour une coutume dillerente de celle-ci, où les pères et mères ne peuvent succéder
aux propres de leurs enfans.
,
Celui de 1647 se trouve dans tous les recueils; il fut rendu
consultis classibus ,• il annulla une donation contractuelle,
faite au profit d’en fans à. n aître, par une femme qui se
remarioit; maisBrodeau, qui le premier l’a recueilli, dit
que cette donation étoit tout-à-fait extraordinaire, injuste
et barbare, étant faite à l’exclusion perpétuelle des enfans
du premier lit, au point qu’à défaut deniansdu second
lit, les collatéraux étoient appelés.
Il n’est pas étonnant qu’une pareille disposition ait été
annullée ; l °. elle étoit faitaaô irato, et 20. comme l’ob-*
J3 3.
�( 12 )
serve Chabrol, il est évident que le mari avoit été le seul
objet de cette libéralité ; et cela est si v r a i, que la donation
contractuelle en contenoit une clause particulière, puis
qu’il y étoit d it , suivant Brodeau, qui le rapporte et qui
le connoissoit bien, puisque l’arrêt fut rendu sur le rapport
de son gendre, « et au cas qu’il n y ait pas d’enfans , lesdits
« biens appartiendront audit sieur de Saint-M artin seul,
» qui étoit le futur ép ou x, et au x sien s, sans que les enfans
« du premier m ariage, n i les héritiers de ladite fu tu r e y
« puissent rien -prétendre n i demander, sinon que ladite
« G uilbou,' s i elle s u iv it, auquel cas elle jou ira desdites
« acquisitions sa vie durant seulem ent, et après retour« lieront au x héritiers dudit sieur de Saint-M artin. »
L ’arrèt de 16 73 , a bien aussi annullé une donation faite
aux enfans à naître d*un second mariage,- mais elle avoit
pour principal objet la femme ; c’est ce que soutenoit les
défenseurs des enfans du premier lit : « a u jiiitp a rticu lier,
« disoient-ils, ainsi qu’on le lit dans les auteurs du Journal
« du palais, il est certain que la donation dont il s’agit, est
« moins faite aux enfans qu’à leur mère ; c’est le fruit de ses
« charmes et de ses caresses : la passion extrême qu’avoit
cr'pour ellelesieurde Tersam , a été colorée d’une affection
« apparente pour une postérité qu’il ne connoissoit pas, et
«■
qu’il ne pouvoit encore aimer, »
Gela est si vrai que Rousseau de la Com be, qui rapporte
auSsi cet arrêt, tyerboNoces, s*en fait un moyen pour prou
ver que les enfans communs,¡nés’ou à naître, ne sont point
compris dans la proliibition, pourvu qu ils n aient servi
de prétexte pour donner au secoiid conjoint.
Enfin j l’arrêt de 1738 de-Laparra, a été rendu en paya
�( 13 ^
de droit écrit, où la mère succède à son enfant ; en sorte
que l'on pouvoit dire que la disposition étoit faite en fa
veur de la femme, puisqu’elle pouvoit en profiter.
Mais l’espèce qui nous divise est bien différente ; les
parties et leurs biens étoient régis par une coutume qui
exclut les ascendans de la succession desdescendans, et qui
donne la préférence aux collatéraux du centième degré
sur eux; ils ne peuvent succéder que quand il n’y a aucun
parent de la ligne. Cette coutume est même si contraire
aux ascendans sur le droit de successibilité ; qu’elle rend
propre, pour l’empêcher, ce que toutes les autres coutumes
déclarent acquêts, et ce que celle-ci rend acquêt pour tout
autre parent que les ascendans; ainsi il faut faire une grande
'différence en matière d’institution contractuelle, en faveur
des enfans à naître d’un second m ariage, entre le pays de
droit <?crit, et celui de coutume.
Dans le prem ier, la seconde femme peut être Fobjet de
la libéralité d’un m ari; mais jamais elle ne peut le deve
nir dans le second, puisqu’elle ne peut succéder aux enfans
dudit mariage, ni aux descendans d’eux, à moins qu’il nry
ait aucun parent de la ligne ; et dès lors la prohibition ne
peut plus exister, puisqu’il n’y a plus d’intéressé.
Mais ce n’est pas seulement avec des raisonnernens tranclians qu’on veut écarter les préjugés que l’on vient de
discuter; la jurisprudence, en faveur de la validité de pa
reilles institutions, est irrévocablement formée , soit par
les anciens arrêts qui ont jugé la question in terrninis, soit
par les nouveaux; et la presqu’universalité des auteursf
n’hésitent pas de la consacrer par leur opinion bien pro*noncée.
�>4
, (
) .
L e premier arrêt qui ait admis l’insti liât ¡ou d’héritier en
faveur des enfans à naître d’ un second mariage, est rapporté
par Chopin, liv. 3 »chap. i er-tit. ie r. Sur la coutume d'An
jou , e n date du 7 septembre 1575.
L e second, du 19 juillet i 65 g , rapporté par R icard ,
T r a i t é des Donations, partie 3 , n°. *243, et par l’au
teur du Journal du Palais, a confirmé une donation faite
à des enfansànaître, par un troisième contrat de mariage :
c’est l’arrêt des Lagrange. On demandoit la réduction de
la donation, conformément à l’édit des secondes noces. La
disposisiori fut confirmée pour le tout. ■
L e troisième se trouve au Journal des audiences, sous
la date du 29 avril 17 19 ; il fut imprimé dans le temps. Il
a déclaré valable une institution contractuelle, faite en faveurdesenfansà n aître, par un second contrat de mariage,
par Jean Chaussard de Felletin, en Marche.
• Le quatrième est intervenu le 11 août 1740, au rapport
de M. Bochard de Sarron. Il est rapporté par la Com be,
verbo Noces. Dans l’espèce de cet arrêt, Jacques de Gagnou
de V ilè n e , lieutenant général des armées, âgé de soixantequinze ans , qui avoit un fils du premier lit , convolant eu
secondes noces avec dame Claude-Antoinette Dassé, avoit
donné auxenfansdece futur mariage tout ce que la coutume
du Maine lui permettoit de donner à ses enfans puînés. La
donation a été confirmée en faveur des enfans du second
mariage , quoique la dame Dassé eût la garde~?iuble de
ses enfans.
Rousseau de la Combe annonce en thèse générale, que
celui qui se remarie, peut donner ¿\ses enfans du second lit;
et qu’il faut tenir pour constant que les enfans communs,
�15
c
)
nés ou à naître, ne sont pas compris dans la prohibition,
pourvu qu’ils n’aient pas servi de prétexte pour donner
au second conjoint; mais que quand c’est la femme qui
se remarie en pays de droit écrit, la donation est suspecte,
à cause de la puissance paternelle.
En effet, les lois romaines, ni l’édit des secondes noces,
n’ont pas défendu les donations des pères et mères, en
faveur de leurs enfans communs ; et comme c’est une loi
pénale, on ne peut pas l’étendre d’un cas à un autre ; il
faut au contraire la restreindre, sur-tout quand elle est
une exception au droit commun. T o u t le monde connoît
les motifs qui donnèrent lieu dans le temps à rendre l’édit
des secondes noces. C ’étoit une dame d\Alègre, quiavoit
sept enfans de son premier m ariage, et q u i, en se rema
riant , avoit donné presque tous ses biens à son second
mari. Cette loi prohibitive est donc une exception au droit
commun qui permet de faire la condition d’un enfant
meilleure que celle de l’autre ; elle a été introduite par des
considérations d honnêteté publique, qui ne peuventavoir
pour objet les enfans communs des deux époux.
« Il seroit étrange, » disoit l’auteur du Journal du palais,
dans la cause jugée par l’arrêt de 1673, «que les législa« teurs qui se sont particulièrement attachés à former des
« obstacles aux secondes noces, n’eussent point parlé des
« enfans, s’ils eussent prétendu les comprendre dans la
« prohibition ; mais ils n’avoient garde de penser à eux ; il
« y en a deux raisons sans réplique. *
« La première est, que ce sont des sujets innocens que la
«loi doit protéger, puisque, autorisant les secondes noces,
«elle laisse par une conséquence nécessaire, les enfans qui
�Cl6)
« en naissent, dans la possession du droit commun ; c’est-à-.
« d ire , que comme ces enfans ne sont pas encore au monde,
« et néanmoins y doivent venir par une voie légitime , la
« loi ne peut pas avoir pour eux de l’indignation, qu’elle ne
r fonde jamais que sur un démérite naturel ou moral.
« La seconde raison est, que l’ordonnance ne peut com« prendre les enfans communs dans la prohibition, que par
cç les mêmes motifs q u iy ont donné lieu, savoir, en faveur
k de l’honnêteté publique, et par la crainte de la suggestion ;
« mais il ne se rencontre rien de tout cela dans la qualité
et innocente des enfans, et sur-tout dans des enfans à naître,
<rqui n’ont que le suffrage de la nature qui parle pour eux,
« Il ajoute que presque tous les docteurs avoient décidé,
« que la loi fiâc ed icta ti, et l’édit des secondes noces , ne
« concernent point les enfans communs.
« Car d’opposer que les enfans à naître ne peuvent avoir
cç excité la libéralité des pères et mûres, par leur mérite, par
trieur sexe, ou par quelques autres qualités; c’est ignorer
c que les enfans étant la fin du mariage, il est assez naturel
« que leurs pères et mères pensent à eux avant leur nais-»
« sance, et qu’ils se les représentent , comme s’ils étaient
«effectivement nés; de là vient que dans les clauses des
cf contrats de m ariage, les enfans à naître ont ordinaire« ment la meilleure part. »
Brodeau sur L ou et, lettreN , somm. 3 , n°. 12, a traité
également cette question: « Aucuns de nos docteurs fran
ç a i s , dit-il, tiennent que la prohibition de l’édit des
« seconds noces a lieu , non seulement à l’égard des con« joints , mari ou femme , mais encore clés enfans du
« premier ou du second mariage....... Mais néanmoins il
« est
�*7
(
)
« est indubitable , que cela ne doit avoir lieu qu'à Tégarà
« des enfans du premier lit de l’un des conjoints, qui
«sont censés et réputés une seule et même personne avec
ce leurs père et mère , el qui est dans la prohibition de l’édit
«et non des enfans communs issus de leur mariage, qui
« sont capables de recevoir toutes sortes d’avantages,
« s a iif la légitime au x enfans du premier l i t , si la cou« tume ne dispose du contraire; la présomption naturelle
« étant que la mère faisant la donation, est plutôt portée
« par l’affection de ses enfans que de son mari ; ou si elle
« le considère, c’est comme père, et non comme mari.
Cujas sur la loi hâc edictati, inprincipio cod. desecundis
nuptiis, que Brodeau rapporte, décide cette question dans
les termes les plus formels : «■potest vidua dare, non pro« vrgno sedjîlio comjnuni, nato cx> secundîs nuptiis : licet
« sit eadem ratio , non tamen ulem jus , (juia jilio com« m uni ut donct mater naturalis affectio fa c it provigno
« ut do net noverca, maritalis ajfectus J 'a c it, non certè
« novercalis ; provignurn non semper accipiarn pro per« sona supposita, sed excogitalam fraudem edicto inspi« cahor in provigno , non in filio communi. »
Brodeau cite les deux arrêts de i5c)5 et de 1626, qui
ont confirmé de pareilles donations.
Lebrun , traité des successions, liv. 2 , chap. 6 , srct. i ro. f
distinction 2, est du même avis: ce L e second conjoint, dit« il, est la première personne prohibée, et nulle autre ne
«• l’est qu’à cause de lu i.........On demande si les enfans du
« second mariage sont compris clans cette prohibition, et il
« semble qu’ils n y sont pas compris: car, si d'un côté on les
« considère comme les euians du second conjoint, de l’au»
G
�( i8 )
« tre, on les peut regarder comme les enfansde celui qui a
« passé en secondes noces, et comme des objets légitimes
« de ses libéralités ».
« Si les enfans de celui à qui il est défendu de donner, sont
« dans la prohibition; aussi rien n’est plus légitime que de
« donner à ses propres enfans......... Il faut prendre en
t<toutes choses, autant qu’il est possible, l’interprétation
« la plus favorable; o r , il est bien plus favorable de dire
« que ces donations‘se font par la charité du sang, que
« de dire que c’est par l’effet des suggestions-----Aussi nos
« docteurs, entr’autres M . Cujas, sur la loi hâc edictati,
« cod.de secund. nupt. ayant agité la question, ont été d’avis
« que ce cas n’étoit pas compris dans l’édit; ce que j’estime
« devoir avoir lieu , pourvu que les enfans n’aient pas
« servi de prétexte pour donner au second conjoint. S i
« color nonjfuerit quœsitus , comme dit la loi item si y y
«ff. de sénat. Maced. et particulièrement p o u r l’espèce
» la loi suspitius 49 ’ .lf' (^e d°nat' item si color Del
« titulus, ut sic dixerim , sic donationi quœ situs, n ih il
« valehit traditio ; id e s t, s i hoc exigit u xo r} ut ahquul
a ex ea re intérim commodi sentiret maritus ».
Lebrun dit ensuite que la donation faite par une femme
qui se remarie en pays de droit écrit est suspecte, parce
qu’en donnant aux enfans de son second mariage, elle
donne à son second mari, h cause de la puissance pater
nelle; mais que hors ce cas particulier, les donations
fa ite s aux enfans com m uns} ne sont pas réputées com
prises dans Cédit.
Enfin, le dernier commentateur delà coutume d’A uver
gne, traite aussi cette question dans le plus grand détail,
�C t9 )
et après avoir rapporté les arrêts pour et contre que nous
avons cités, il dit que la dernière jurisprudence -paraît
décisive pour la validité de ces dispositions.
1 « Les arrêts, dit-il, de 1719 et de 1740, ont fixé la juris
te prudence, et celui des Laparra de 1736 ne la détruit pas,
« puisqu’il est dû à la circonstance particulière du choix
« laissé à la seconde fem m e; elle est sur-tout favorable
« dans cette coutume où les père et mère ne peuvent
« pas succéder à leurs en fa n s, même dans le mobilier
«venu des successions et donations en ligne directe, et
« où les dispositions en faveur d’en fans à naître sont assez
« fréquentes ; l’édit des secondes noces, en déclarant les en« fans personnes prohibées, ne s’entend que des enfans déjà
« nés des conjoints , avec qui le mariage se contracte , et il
« suifit que la disposition puisse s’appliquer Ad autres causes
« que l’impression du c o n jo in t, pour q u ’elle doive avoir
« tout son effet. On doit plutôt rapporter la disposition à
« des motifs purs qu’à des causes illégitimes, quand ils se
« combattent. Il est difficile d’ailleurs de concevoir, com« ment un second mari pouvant profiter directement au
« moins d’une portion d’enfant, selon l’édit, ses enfans
« à naître scroient dans une plus grande prohibition que
Cc lui. Il nous semble donc que la règle générale est pour
« la validité de la disposition, sauf les exceptions légitimes
« dans des cas où il est visible que le donateur n’a eu d autre
« motif que l’impression et la suggestion du nouveau con« joint ou la volonté de l’avantager lui-même.»
Ainsi donc , il faut tenir pour constant que la disposition
du tiers de leur fortune , faite par les père et mère du
consultant dans le second contrat de mariage du premier
G 2
�C 20 )
en faveur de l’aîné des mâles à défaut de choix, est inat
taquable. Ce n’est pas la mère qui se remarioit, c’est le
père. La mère ne pouvoit profiter directement ni indirec
tement de la disposition, puisqu'on cette coutume, ni l’un
ni l’autre ne pouvoient succéder à leurs enfans au préjudice
de la ligne collatérale : la puissance paternelle n’étoit ici
pour rien, puisque la femme n’avoit pas d’autres enfans,
et que par conséquent elle ne disposoit pas à leur préju
dice, Enfin il ne se rencontre dans l’espèce aucun prétexte
pour annuller une disposition permise dans tous les temps ÿ
les enfans du second lit n’ont pas servi de canal pour avan
tager l’un des conjoints, puisque dans aucun cas, ni l’un ni
l’autre ne pouvoit leur succéder. Il ne s’agit pas ici d’ailleurs
d ’une disposition universelle ; mais seulement du tiers de
la succession au profit du mâle et au préjudice seulement
d’une fille du premier lit, avantage habituel que toutes
les familles faisoient au profit des nulles , à l’exclusion des
filles que la loi déclaroit forcloses, quand elles étoient
mariées par père et mère»
T o u t concourt donc, on le répète, à rendre cette dispo
sition inattaquable. Le droit d’é lire , accordé au survivant,
dans le cas où il n’auroit pas été exercé du vivant du prédé
cédé, ne change rien à cet te décision, parce qu’il n’en résultoit au profit de la femme aucun avantage, puisque d’ailleurs
elle pouvoit mourir la première, ce qui est réellement
arrivé , et que sa survie ne l’auroit pas rendue plus parti
cipante de la disposition du mari.
11 y a même plus, c’est q u e, sans les nouvelles lois, le
consultant n’en am-0it pas moins exclu sa sœur du premier
lit, parce qu’elle étoit forclose, moyennant la dot à elle
�f « J .
constituée, et qu’elle ne pouvoit venir à la succession de
son père sans y être rappelée \ et si les nouvelles lois ont
produit cet effet, l’on ne peut rien conclure de cet événe
ment qui ne peut être rétroactif, contre la disposition anté
cédente qui a transmis à l’aîné maie du second lit , une
succession qu’il auroit eue dans les anciens principes, sans
le secours de la disposition.
S e c o n d e
Q u e s t i o n .
N ÿ ayant pas eu d'élection, tous les eirfans du premier
et du second l i t , doivent-ils profiter de la disposition>
ou appartient-elle à Taîné mâle ?
Cette question peut avo ir été controversée dans les temps
voisins de la loi du 17 nivôse an 2 , dont l’effet rétroactif
avoit tourné les têtes \ mais elle ne peut pas en faire une
aujourd’hui.
L ’art. X X III dit bien que dans le cas où un époux dé
cédé , «r avant ou depuis le 14 juillet 1789, auroit conféré
« au conjoint survivant, la faculté d’élire un ou plusieurs
« héritiers dans ses biens, l’élection, si elle n’a eu lieu que
«le 14 juillet 1789 ou depuis, demeure nulle et de nul
« effet; et tous les héritiers présomptifs, au préjudice dés
ir quels elle auroit été faite, sont, nonobstant touteexclu« sion, appelés à partager la succession de la meine manière
r et par les menies règles que celles ouvertes depuis et
« compris le 14 juillet 1789. >3
L ’article suivant porte : « Tous actes portant institution
« nominative d’un héritier, néanmoins subordonnée au cas
�; c 20
& où un tiers ne disposeroit j>as autrement des biens com« pris en la même institution , sont nuls et de nul effet, à
«daterdu 14 juillet 1789, si ù cette époque le droit de
« l'institué n’étoit pas devenu irrévocable, soit par le décès
« du tiers, soit par transaction authentique passée aveclui. o
; jVlais, i° . cette loi né petit avoir d’effet rétroactif; les
lo is des 9 fructidor an 3 , 3 vendémiaire an 4 , et 18 plu
viôse an , ont confirmé toutes les dispositions irrévocables
de leur nature, faites avant la publication de la loi du 7 mars
ï 793, qui a défendu toute espèce d’avantage en ligne directe,
•ainsi que les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse an 2.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse an , porte :
« Les élections d’héritier ou de légataire, qui ont été
« annullées par l’article X X III de la loi du 17 nivôse
ce an 2 , à compter du 14. juillet 1789, sont rétablies dans
« leur effet prim itif, si elles ont été faites par actes ayant
« date certaine avant la publication de ladite loi du
5
5
17 nivôse. »
Ainsi a disparu l’effet rétroactif et désastreux de cette
dôrnière loi.
>
Dans l’espèce particulière, la succession s’est ouverte
avant cette loi. La mère est m orte avant la révolution ,
et le père, le 27 juillet 1793 : la loi du 17 nivôse n’a
donc pu avoir aucune influence sur cette succession; il
faut juger l’institution dont il s'agit, par les anciennes
lois qui la donnent à l’aîné mâle.
L'on n’a pas oublié qu’à défaut cVélection , rétoit lui
qui étoit appelé à la r e c u e i l l i r ; et la mort du père, sans
l’avoir faile, équivaut à. uu acte qui la contieudroit,
k
�(
)
Ces principes anciens n’ont point été altérés par les
nouvelles lois, parce que la succession s’est ouverte avant
et dans un temps utile ; et on peut d’autant moins les
révoquer en doute, qu’ils sont attestés par tous les auteurs,
et sur-tout par R icard, traité des donations , partie i re. f
chap. 3 , section 12, n°. 5yz et suivans. Cet auteur traite
la question de savoir si les legs laissés à la volonté d’un:
tiers, sont valables, et il distingue entre ceux qui dé
pendent absolument de la volonté de ce tiers pour les
faire subsister ou les annuller, et ceux dont le choix du
légataire dépend seulement de ce tiers, comme dans l’espèce.
« Le premier exem ple, d it - il, est au cas que l’élection
« qui est laissée à un tiers par le testateur, ne regarde
« pas la substance du legs qui est certain et fait au profit
« de quelqu’u n , mais seu lem en t le c h o ix de la personne
a entre u n certa in n o m b r e , ou de la chose léguée entre
« plusieurs choses qui sont désignées, ou du temps ; et
« pour lors le legs est valable. N ec enim in arbitrio
« ejus qui 7'ogatus e s t, positum est onuiino, an velit
« restituere , sed qu i potius restituât. »
En conformité de cette opinion, il a été jugé ù l’au
dience de la grand’eham bre, par arrêt du 18 mai 1687,
que ce n’est pas laisser à l’arbitrage d’autrui,' quand le
testateur, après avoir fait un legs constant et déterm iné,
laisse à la volonté de son héritier de choisir entre les
personnes désignées : cet arrêt est rapporté dans le journal
des audiences.
« Ricard ajoute que l’expérience a fait connoître que
« ces sortes d’institutions étoient d’un usage fort fréquent
« au moment où il écriyoit, particulièrement dans le
�( 24 )
et pays de droit écrit, où les maris et femmes ont cou« (unie de se déférer entr eux cet honneur, de laisser
« au survivant la liberté de choisir un h éritier uni
té versel entre leurs enfans ; ce q iiils pratiquent par le.
ce p rin cip e une sage politique , et afin de transmettre
ce toute la puissance entre les mains de celui qu i survit,
» <it lu i conserver, par ce m oyen , le respect de «scs
>5 enfans. »
L ’on voit donc que les principes anciens valident l’ins
titution dont il s’agit.Les mêmes principes veulent que si l’auteur de la dis
position avoit prévu le cas où le tiers, chargé d’élire,
ne feroit pas de choix , et s’il avoit nommé lui - même
éventuellement mi des éligibles pour recueillir sa dis
position , & défaut d’autre c h o ix , sa nomination condi
tionnelle et éventuelle devenoit pure et simple par l’ex
tinction du droit d'élire, ou par la m o r t du chargé de
cette élection, sans l’avoir faite.
E nfin, les nouvelles lois , au lieu de contrarier les
anciennes sur ce p o in t, ne font que les confirmer ; la loi
du 17 nivôse avoit bien annullé toutes les dispositions de
ce genre, antérieures au 14 juillet 1789; mais l’on a vu
que l’article V II de celle du 18 pluviôse an , avoit
rétabli toutes celles faites par actes ayant une date certaine
avant la p u b l ’Cation de la loi du 17 nivôse : ainsi l'élection,
auroit pu valablement être faite jusque - là , et par la
même raison , l’aîné mâle avant été désigné pour la
recueillir, à défaut d’élection d’un antre , doit en profiter,
comme s i, avant sa m ort, le père l’eût choisi de nouveau.
JNous trouvons encore cette question décidée dans im
rapport
5
�5
f»
)
rapport fait ail nom d'une commission, par le citoyen
•Bergier, le 13 ventôse an 7 ; un article du projet de
Résolution par lui présenté, porte que si l’auteur de la
disposition avoit prévu le cas de non-élection de la part
du tiers qu’il en avoit chargé, et s’il avoit nomme un
héritier ou légataire pour recueillir à défaut d autre choix,
sa nomination, conditionnelle dans le principe , est de
venue pure et simple par l’extinction du droit d’é lire ,
et l’héritier ou légataire spécialement nommé pour le cas
p r é v u , a recueilli seul le bénéfice de la disposition.
En dernière analise, on ne voit pas pourquoi la fille
du premier lit viendroit contester au consultant ce foible
avantage; car quand le défaut d’élection le lui âuroit
en levé, ce qui n’est pas même pr o p o s a b le , elle n ’en seroit
pas plus avancée, parce q u ’elle n’en profiteroit pas, mais
bien les enfans du second l i t , parce qu’étant seuls ins
titués et seuls éligibles, le défaut d’élection ne profiteroit
qu’à e u x , et non à la fille du premier lit qui n’étoit pas
dans cette classe,
§.
T
r o i s i è m e
III.
Q
u e s t i o n
.
Quels sont les droits de la jïlle du premier h t ?
Cette fille a été forclose par son contrat de mariage;
mais la loi l’a relevée de cette forclusion. L e père n’est
mort qu'en juillet 1793; à cette époque, la loi du
8 avril 1791 et celle du 4 janvier 1793» avoient frappé,
et elle est appelée à recueillir, ea rapportant ce qu’elle
D
�(26)
a reçu , sa portion des deux tiers de la succession ah
in testa t, qui seront divisés entre tous les- enfans par
¿gale portion : cela ne peut pas faire de difficulté. Elle
rapportera aussi la moitié de son trousseau; mais ce qu’elle
prendra dans la succession sera dotal, parce qu’une clause
qu’on trouve à la fin de son contrat, porte que tout ce
qui lui échoira sera dotal; si elle ne peut pas les rap
porter , elle prendra moins, et les auti’es héritiers feront
les prélèvemens de d ro it, de manière que l’aîné mâle ait
la moitié de toute la succession paternelle, et les trois
autres, par égalité, l'autre moitié : chaque lit prélèvera
aussi, avant partage, la dot de la m ère, et chacun sup
portera , au prorata de son émolument, les autres dettes
de la succession. Exemple : supposons la succession du
père de 230,000 ir , y compris le rapport des 1 ,000
la portion de l’aîné mule sera de 1 1
parce que
le tiers de 230,000
est de 76,666 *t~
J 4 ^ , et que
le quart, dans le surplus, est de 38,333 ^ 6^ 8 ^ ; en sorte
que la fille du premier lit, conservant les i ,ooo
argent,
n’aura p lu s, en b ien s-fo n d s, que 22,333 ^ 6 ^ 8 ^ ..
Comme les deux enfans puînés du second lit sont mineurs^
le partage doit etre fait en justice, et provoqué par un
majeur; il ne pourroit avoir lieu sans cela.
5,000
5
5
D é l ib é r é à Clerm ont-Ferrand, le 19 nivôse an 9^
B O Y R O T , D A R T IS -M A R C IL L A T .
Je suis du môme avis, et par les mêmes raisons.
P IC O T - LA C G M BE ..
�27
(
)
L e soussigné, qui a lu la consultation ci-dessus, est
du même avis; les motifs qui lui servent de fondement
sopì trop auipk\n>entdiscutés cUns-cette^onsultation, pour
qü’il-sok nécessaire d’y rien ajouter. Ce qui est décisif
eu faveur du consultant, c’est que sa mòre avoit prédécédé
son père, et que celui-ci est décédé le 28 juillet 1793»
et qu’ainsi son droit à l’ institution, ¿toit acquis avant la
loi du 17 nivôse an 2.
D é l i b é r é à R io m , Je jE2 pluviôse, an 9 de la r é
publique.
r
tquttée.
L e soussigné est du même avis sur tous les points, et
par les mêmes motifs.
D é l i b é r é à R io m , ,1e a ye^itôse, an 9 de la répu
blique.
PAGÈS.
*
L e soussigné est du même avis, par les mêmes motifs,
en ajoutant que cette question ne peut être décidée que
par les principes de l’ancienne législation, encore en
vigueur à l’époque dç l’puverture de la succession.
L e 22 ventôse an 9.
MAU G US*
�(i8)
Q U E S T I O N S PROPOSÉES.
CjX il e e r t D U C O U R T H IA L , veuf de Marie de Villette,
contracta un second mariage le 14 mai 1778} il avoit
une fille unique d’un premier mariage.
Trois enfans sont issus du second.
Gilbert Ducourthial est décédé le 27 juillet 1793 5 s&
seconde femme étoit morte avant lui.
Les quatre enfans des deux lits ont survécu et vivent
encore.
Il s’agît de irégler leurs droits respectifs sur la succes
sion de leur père c o m m u n .
Jean-Baptiste-Gilbert Ducourthial de Lassuchette, fils
aîné du second lit , croit, avoir droit de prendre, dans
cette succession,, un tiers en préciput et avantage sur ses
co-héritiers, et de partager avec eux les autres deux tiers
par égalité ; ce qui lui attribueroit la moitié de la suc
cession entière ; il fonde sa prétention sur la clause du
contrat de mariage en secondes noces, de G ilbert, son
p è re , du 14 mai 1778 , dont la teneur suit :
*
Ledit. . . . . . futur ép o u x , en faveur du présent
« m ariage, a institué et institue héritier du tiers de tous
« ses biens présens et à ven ir, Vun des erifans qui naîtra
« du présent mariage , et ce par préciput et avantage f
« laquelle institution est faite en faveur de celui ou.celle« que les futurs époux choisiront conjointement, par-
�*9
.(
)
a quelques acïes que ce soit, ou qui sera choisi par le
« survivant des deux fu tu rs, auquel le droit en appar» tiendra, par clause expresse, aussi par quelques actes
* que ce soit et en cas que le"ch o ix nyeh ait pas été f a i t ,
« ladite institution sera au profit de Taîné des mâles
« s’il y a des m âles, et s’il n’y a point de m âle, au profit
« de l’aînée des filles. »
Gilbert D ucourthia l et sà seconde épouse sont décédés
l’un et l’autre i sans avoir, fait d’autre choix entre leurs
enfans communs pour, recueillir l’effet de l’institution
portée par cette clause, que le choix conditionnel qui
y est contenu enfaveur de l’aîné des m âles, en cas qu’il
n’en fût pas fait d'autres.
En cet état, le citoyen Lassuchette, fils aîn é, e s t-il
fondé à soutenir,
i° . Que Gilbert D ucourthial, son p ère, a pu vala
blement avantager, par son contrat de mariage en secondes
noces, Vun des eiifans à naître de son second mariage,
du tiers de ses biens en préciput?
’
2°. Que Yindétermination de l’institué, à élire entre
tous les enfans à naître du second mariage, ne vicioit pas
îa disposition ?
3°. Qu’elle n’étoit pas viciée non plus par la circonstance
que la seconde Jèmrne devoit concourir au choix- de cet
h éritier, dans le cas où il seroit fait du vivant des deux
époux, et même de l’élire seule, si elle- avoit survécu ?
4°. Que l’élection de l’aîné des mâles, faite dans l’acte
même qui contient l’institution , pour recueillir éven
tuellement, et dans Je cas, qui est arrivé, où il n’y auroit
pas d’autre ch oix, étoit également une disposition valable
�(3
■«)-.'
dan,sle ¡principe ,
, soUxPlein >et
èqtiex’ leè’ej:, ;uor^o.bsta*at5la rc^^^iqrjjd^s^^spfîÿitions e
«jgeij^^rpjçpnonçép paç
& , 2P£lV:
dç^a 'ioi*,du â- , pip^sg. flftA* ^ ^ w v u r e j d ç ^ ^ q n ^ ia
au cK’Ç&s de Gilbert P«c^r^ lw ftl?•-> nol u!ï1-uii * ''l.ii »
!. £?,,Enfin.r^qpeje^djicrgt dir^m .ars ,1793., ,qui avoit,
interdit tous avantages en ligne (directe, quelques mois
4
7
9
avant le dc^s,(^^Gilbei^)Dugourthi^V)\^^t:.¥l.a&. uri ^s“
tacle non ¡plus(à çe que/Jp jç^oypn iDiicpurtliif^iil^aj^é
profit^ d’une disposition ejti .pi^cipUft, ,qui a sa soj^rfe ;$atis
un contrat de mariage^ntéiieuf de ph ^ d e quatorze tans
à ce décret.
• O pinions du Conseil,sur les questions proposées.
•>
L a première observation à f a i r e , pour résoudre ¡les
questions proposées avec justesse et précision, est qu’il
ne s’agit point de régler le partage d’une succession
ouverte depuis la loi du 17 nivôse an 2; mais d’une,
succession ouverte près de six mois avant cette lpi, dès
le 27 juillet 1793.
Seconde observation. L a rétroactivité de la loi du
17 nivôse, qui remontoit en arrière pour régler des
successions et des dispositions ouvertes depuis le 14 juillet
1789, fut ra p p o rté par les lois des 9 fructidor an 3 ,
trois vendémiaire an 4, 18 pluviôse an 5 ; elle ne doit
plus en conséquence avoir d’application qu’aux successions
ouvertes depuis sa publication. Les droits acquis avant
cette époque, sont maintenus, consacrés, inviolables.
Troisième observation. Le sort de l’élection faite par
�(3 0
le contrat de mariage du 14 mai 1778 , du cit. Ducourthial-Lassuchette, fils aîn é, pour recueillir le tiers de
la succession de son père en préciput, dans le cas où
aucun autre des éligibles ne seroit choisi par ses père et
'mère, ou par le survivant des deux, avoit été invaria
blement fixé avant' la lo i du 17 nivôse, par la mort de
ses père et mère ; car le décès du survivant avoit éteint
sans retour la faculté qu’ils aVoient pendant leur v ie , de
le déchoir da cet avantage.
D e ces trois observations préliminaires, résulte la con
séquence , que Ce n’est point par la loi du 17 nivôse,
que doivent se décider les questions proposées ; mais
Uniquement par les lois antérieures.
Raisonnons maintenant d’après ce point de départ:
i° . L ’aveuglement seul pourroit révoquer en doute la
validité, sous le régime ancien, des donations de biens
présens et h ven ir, des institutions contractuelles, et de
toutes autres dispositions éventuelles faites par contrat
de mariage, en fa v e u r des erifans à naître du mariage T
tant elle étoit disertement prononcée par les ordonnances
de 17 3 1, art. X V II et X V I I I , et de 1747, art. XII.
On ne sauroit non plus méconnoître la capacité des
enfans d’un second mariage, pour recevoir de pareilles
dispositions et eu p rofiter, en avantage sur les enfans du
premier lit, dans les pays où le statut perinettoit en général
au père de famille d’avantager un ou plusieurs de sesenfans, sur les autres, sans distinguer les lits ( comme en
Auvergne, où étoient situés les biens de Gilbert D ucourthial, ) et sans accorder de privilège aux enfans du premier
mariage, sur ceux du second.
�32
/(
) .
La seconde femm e, il est v r a i , n’auroit.pu être vala
blement instituée pai\son mari,, que pour succéder à une
partd!eiifant\ mais son incapacité relative et limitée ne se
co m m uniquo it point à.ses enfans à naître ; et leur aptitude
personnelle à recevoir de leur père tous les avantages
permis entre enfans en gén éral,,n e fut jamais mise eu
question ; on avoit seulement prétendu autrefois que les
avantages faits dans un contrat de mariage en secondes
noces , aux enfans qui naîtroient du m ariage, étoient
prohibés, lorsqu'ils étoient excessifs, comme ceux qui
seroient faits à la seconde femme elle-même , parce qu’ils
étoient inspirés par la même séduction.
Mais ce système ombrageux a perdu tous ses partisans,
depuis que les arrêts du parlement de Paris, des 19 avril
1719 et 11 août 1740 (1 ), ont ramené à la raison et aux
principes sur cette question. On ne voit plus, dans les
avantages faits par contrat de mariage en secondes noces,
pux enfans à naître du m ariage, que ce qui y est véri
tablement ; je yeux dire un acte de prévoyance trèsnaturel, très-favorable et très-sage des familles, q u i, ne
voulant pas abandonner aux hasards de l'avenir Je sort
des enfans’ à naître du mariage, s’occupent de l’assurer à
l’ayance, et en font une des conditions du mariage. La
société est intéressée au maintien de stipulations si rai
sonnables, sous la foi desquelles les mariages se contractent,
et sans lesquelles ils ne se seroient pas contractés. Ne soyons
(1) Ils sont rapportés dans le recueil des arrêts notables de
Combe»
donc
�33
(
)
donc pas surpris si tous les suffrages se sont réunis, depuis
soixante ans, pour en proclamer la validité.
D ’un autre cô té, il ne faut pas perdre de vue la mo
dération avec--laquelle • Gilbert Ducourtliial use de la
faculté d’avantager l’un de ses enfans à’ naître du second
lit ; il ne lui destina que le tiers de sa succession en préciput; e’est-c\-dire, deux quinzièmes seulement de plus que
la part d’enfant dont la seconde femme auroit pu être
gratifiée elle-même par l’événement.
Cette modération est la preuve de la sagesse qui inspira
le don. La passion est prodigue sans mesure,, parce qu’elle
est un délire. Des dispositions modérées ne sauroient donc
en être le fruit.
Concluons que les considérations particulières se joi
gnent ici aux principes g é n é r a u x , pour ne laisser voir
dans l’institution faite par Gilbert Ducourtliial en faveur
d un des enfans à naître de son second mariage, qu’une
disposition dont le principe fût légitime et pur. Nouveau
m otif pour les tribunaux d’en ordonner l’exécution sans
hésiter.
2°. Mais on semble prétendre que l’institution dont il
s agit étoit vicieuse dans sa form e, en ce que Tinstitué
étoit indéterm iné, et que sa désignation avoit été subor
donnée à un choix futur.
Ce moyen pourroit être de quelque considération, s’il
s agissoit d une disposition postérieure à la loi du i 7 nivôse
an 2, qui a aboli pour l’avenir les dispositions dont l’ap
plication seroit laissée au choix d’un tiers.-— Mais il s'agit
ici dune disposition faite en 1778. O r , à cette épo
que, loin que les donations et institutions électives fussent
E
�( 24 )
prohibées, la validité en étoit expressément consacrée par
les articles L X I I, L X III, L X I V , L X V e tL X V I de l’or
donnance de i7 3 5 >sur les testamens, et par celle du mois
d’août 1747 sur les substitutions, art. X IL
Enfin, les articles X X IIIe t X X I V de la loi du 17 nivôse
an 2 , rapprochés de l’art. V II de celle du 18 pluviôse
an 3 lèvent tous les doutes ; car le résultat du rappro
chement est la confirmation des institutions subordonnées;
à une élection, lorsque le droit de l’institué élu étoit
devenu irrévocable par le décès de la personne qui avoit
droit d’en élire une autre, avant la publication de la loi
du 17 nivôse an 2 : o r , l’institution dont le citoyen Ducourthial-Lassucliette réclame l’exécution, est dans ce cas,,
puisque son père et sa m ère, qui auroient pu révoquer
le choix qu’ils avoient fait de leur iils aîné pour recueillir
le tiers des biens de Gilbert D ucourthial, l’un d’eu x, et
choisir un autre de leurs enfanspour.recueillir à sa place,
(koient décédés l’un et l’autre bien avant la loi du 17
nivôse an 2.
30. Mais on insiste et l’on dit : A la bonne heure l’insti
tution conditionnelle et subordonnée à un choix éventuel,,
dont le citoyen Ducourthial-Lassuchette veut tirer avan
tage , n’étoit pas vicieuse dans son essence ; mais elle l’étoit
par la circonstance que le disposant avoit conféré à sa
seconde épouse le droit de choisir entre ses enfans, celui
qui recueille; oit le tiers assuré en avantageau second lit. Ce
droit d’élire lui oJFroit une perspective éventuelle, qui
pouvoil lui ouvrir des chances pour faire tourner le don.
à son p ro fit, quoique personne prohibée ; et Ton cite en.
l a v e u r de cette subtilité systématique, l’exemple de ce qui
5
�035)
fut jugé par l’arrêt rendu entre la veuve et les enfans
Laparra, le 18 mai 1736«
- La réponse est facile et tranchante. L ’arrêt de Laparra
fut un arrêt de circonstances. L ’institution élective qu’il
minulla, étoit universelle , et réduisoit les enfans du pre-»
xnier lit à leurs simples légitimes de rigueur.
La succession Laparra étoit ouverte en pays de droit
écrit, où la mère succédoit à ses enfans, au préjudice de
leurs frères et sœurs consanguins.
Cette mère qui avoit survécu à son mari, avoit spolié
scandaleusement la succession . consistant principalement
en m obilier; et elle avoit d’ailleurs pratiqué toutes sortes
de fraudes du vivant de son mari, pour réduire à peu
près à rien les légitimes des enfans du premier lit. L in
dignation plaidoit la cause de ces victimes délaissées, et
l’on peut en conséquence appeler l’arrêt qui annulla
l’institution contractuelle faite à leur préjudice, un arrêt
ab irato.
O r , qu’a de commun cet étrange préjugé avec l’insti
tution dont ii s’agit ici?
L ’institution de Laparra étoit universelle ; celle-ci n’est
que du tiers.
La seconde femme de Laparra avoit survécu à son m ari,
ets’étoit emparée de toute la succession , pour en détourne!'
la meillcuve part à son profit. Ici la seconde femme de
Gilbert Ducourthial est morte long-temps avant son mari,
et n’a profité, ni pu profiter de rien dans sa succession.
La femme Laparra avoit la perspective de succéder à
scs enfans, et elle pouvoit abuser du droit d’élire qui lui
avoit été confié, soit pour jouir, ea retardant son choix ,
E a
�(3 0
soit pour y mettre un prix et des conditions à son avantage.
La seconde femme de Gilb ert Ducourthial n’avoit pas
la même perspective, quand elle auroit survécu à son
m ari; la coutum e qui régissoit les biens destinés à ses
enfans, fauroit exclue de l’espoir d y succéder: elle n’auroit pas mieux réussi à s’approprier par des voies détour
nées, une portion conséquente du patrimoine de son
m ari, sur-tout une portion équivalente à la part d’enian t, dont il lui étoit permis de la gratifier ostensible-,
ment ; la médiocrité de la disposition dont l’application
lui avoit été confiée, y auroit mis un obstacle invincible.
Il n y a donc aucun parallèle à faire entre deux espèces
si différentes. T out étoit fraude dans l’afFaire deLaparra,
tout est loyauté dans celle-ci ; la fraude et la loyauté au
ront-elles jamais le même sort ?
V oilà encore la troisième objection des adversaires
du citoyen Ducourthial aîné , qui s’évanouit.
4°. La quatrième question ne peut pas faire la ma
tière d’un doute. La même législation autorisoit en effet,
les élections conditionnelles et révocables, faites par con
trat de m ariage, en faveur d’un enfant à naître indivi
duellement , pour recueillir à défaut d’autre ch o ix , et
l’ héritier ainsi désigné éventuellement, recueilloit sans
difficulté le bénéfice delà disposition, toutes les fois qu’il
n’en étoit pas déchu , par un choix contraire.
L ’article X X I V de la loi du 17 nivôse, abrogea ces
règles pour f avenir ÿ mais il en consacra les effets pour
le p a ssé, en faveur des héritiers éventuels, dont le droit
scroit devenu irrévocable par le décès de la personne
ayant droit de révoquer»
�:
.
^ 37, 5
L ’article vouloit que le décès qui avoît rendu là dis
position irrévocable y fût antérieur au 14 juillet 1789:
mais cette rétroactivité est rapportée. Il suffit en con
séquence , que le décès de la personne ayant pouvoir de
ré v o q u e r, soit antérieur à la publication dé la loi du
17 nivôse an 2. Dans le fait particulier, le décès de
Gilbert Ducourtliial est antérieur, et de beauconp, à la
publication de la loi du 17 nivôse an 2: concluons donc,'
que la disposition conditionnelle qu’il avoit faite en fa
veur de son fils aîné du second lit, est confirmée par
la loi même dont ses frères et sœurs voudroient se pré
valoir pour l'attaquer.
°. Il reste la principale difficulté à éclaircir ; 'elle est
tirée de la loi du 7 mars 1793, par laquelle il fut dé
crété en p r i n c i p e , que « la faculté de disposer de ses
« bien s, soit c\ cause de m o rt, soit entre-vifs, soit par do« nation contractuelle, en ligne directe, étoit abolie, et
« qu’en conséquence, tous les descendans auroient un
« droit égal sur le partage des biens de leurs ascendans.
Appuyés sur ce texte, les adversaires du citoyen
Ducourthial-Lassuchette, lui diront sans doute, « si vous
« échappez à l’article X X I V de la loi du 17 nivôse,
« parce que le décès de notre père est antérieur, au
«moins n’échapperez - vous pas au' décret du 7 mars
*I
> car notre père n’est mort qu’après ce décret ,
« et conséquemmenl dans un temps où la loi assuroit à
« tous ses enfans un droit égal au partage de 8a succesn sion , et prohiboit l’avantage du tiers en préciput que
« vous revendiquez. »
I
L a réponse est dans les articles I et V II de la loi du
5
793
�(38
(
;)
*8 pluviôse an , qui déterminent sans équivoque le sens
dans lequel il faut entendre et appliquer le décret du 7 mars
5
*-793 ? enjces termes :
,q^
! j. :
* y Les avantages , prélèvçm ens, préciputs , donations
« eiitre-vifs, institutions contractuelles, et autres disposi-;
« tions irrévocables de leur nature, légitimement stipuo lées en ligne directe avant la publication du décret du
a 7 mars 1793 , auront leur plein et entier effet, confor«.mément aux anciennes lois , tant sur les successions.
« ouvertes jusqu’à ce jo u r, que sur celles qui s’ouvriront
a à l’avenir. » ( Article I.er )
« Les élections d’héritiers ou de légataires. . . . qui ont
c été annullées par les articles.. : . . de la loi du 17 nivôse,
«.à compter du( 14 juillet 1789 , sont-rétablies dans leur
« effet prim itif, si elles ont été faites par acte ayant date
«certaine avant la publication de la loi du 17 nivôse. »
( Article V II. )
L e contrat de mariage du 14 mai 1778 , contenoit deux
dispositions très-distinctes ; savoir, une disposition princi
pale , qui étoit une institution du tiers des biens de Gilbert
Ducoürthial en faveur de'l'un des enfans à naître de son
second m arine') par préciput et avan tagen t une disposi
tion s e c o n d a i r e qui, étoit la [désignation particulière de
l’aîné des inâles poiir recueillir ce tiers de biens t dans le
cas où il ne seroit pasfait choix d’un autre enfant du second
lit, pour en profiter préférablement à lui.
L a disposition principale étoit pure , sans condition,
et irrévocable de sa nature ; elle aurait profité à tous les
enfans du second lit collectivem ent, à défaut dei choix:
valable d’un seul d’entre e u x , pour recueillir exclusive-
�( 3 9 ) .
m ent ; la disposition secondaire, qui appliquent da
vantage du tiers à l’aîné des mâles particulièrement ,
étoit conditionnelle , et< pouvoit être révoquée, par l’é
lection, d’un autre enfant.'
Toutes deux sont également confirmées par les deux
articles de la loi du 18 pluviôse an
, qui viennent
d’être rapportés.
L ’article Ier. confirme en effet la disposition princi
pale ; car elle se range incontestablement dans la classe
des dispositions contractuelles, irrévocables de leur na
ture , et antérieures à la publication du décret du 7 mars
.1793, que cet article a maintenues pour être exécutées
conformément aux anciennes lois , puisqu’elle est con
tenue dans un contrat de mariage de 1778.
Quant à la disposition s e c o n d a ir e , elle est maintenue
par l’article V I I ; car cet article rétablit dans leur effet
p r im itf, non pas seulement les élections d’héritiers ou
de légataires faites en ligne directe par acte ayant date
certaine avant la loi du 7 mars 1793, mais indéfiniment
les élections faites avant la publication de la lo i du 17 nivôse
an 2; de sorte qu’une élection qui auroit été faite an
térieurement à la publication de la loi du 17 nivôse, seroit
confirmée par cet article : ce qui décide bien nettement
ce point de droit, que la prohibition de disposer en ligne
directe, prononcée par le décret du 7 mars 1793? n’ernportoit pas la prohibition de choisir un d entre plusieurs
éligibles, pour recueillir l’effet d’une disposition contrac
tuelle , irrévocable de sa nature, qui auroit été faite anté
rieurement au décret de 1793. Dans l’espèce, non seule
ment l’élection du citoyen D ucourthial, fils aîné, étoit
5
�(
4
0
^
an térieure, soit à la loi du 17 nivôse an 2 , soit au décret
du 7 mars 17 9 3 , puisqu’elle éloit contenue dans le contrat
m ême de 1778. Mais^ elle, étoit d’ailleurs devenue irré
vocable plusieurs mois avant la loi du 17 nivôse, par le
décès de celui qui seul auroit pii la'révoquer par un choix
contraire.
Ainsi la va lid ité , sous tous les rap ports, se trouve pro
noncée sans équivoque, par les deux textes précités.
O
b j e c t i o n
.
L a validité de la disposition principale, au profit des
enfans du second lit collectivement, ne peut pas être mise
en problème, à la bonne heure ; mais la validité de l’élection
conditionnelle de l’aîné de ces enfans, pour recueillir seul,
à l’exclusion des autres, est loin d’être aussi certaine. Cette
élection étoit révocable par le changement de volonté de
son auteur, qui pouvoit jusqu’à son dernier soupir, en
enlever le bénéfice au citoyen Ducourthial aîn é, par le
choix d’un de ses frères, pour recueillir à sa place: or,
jl est de principe que de pareilles dispositions, qui restent
mobiles pendant toute la vie du disposant, et ne devien
nent immuables que par son décès , doivent être consi
dérées comme si elles n’avoient été faites que le jour de sa
mort. Mais si l’on considère l’élection dont le citoyen D u
courthial aîné prétend se prévaloir, comme si elle eût été
faite le 27 juillet 1793 seulement, jour du décès de Gilbert
Ducourthial père , il en résultera qu’elle sera réputée faite
dans un temps où elle n’étoit plus permise , puisque toute
disposition étoit prohibée a l o r s depuis plusieurs mois, en
ligne
�C'4i )
ligne directe ; donc il faudra la regarder comme nulle et
non avenue. ■
<* ■
R
é p o n s e
^
C e raisonnement repose sur des bases évidemment
erronnées.
i°. C’est une première erreur de prétendre que Gilbert
Ducourthial n’auroit pas pu faire le 27 juillet 1793 , jour
de son décès, l’élection qu’il avoit faite en 1778, sous le
prétexte que le décret du 7 mars 1793) lui en avoit inter
dit la faculté. L ’art. V II d elà loi du 18 pluviôse an ,
déjà rapporté plus haut, décide bien positivement le con
traire ; car il déclare valables les élections d’héritiers, faites
dans l’intervalle de la loi du 7 mars 1793 5 à celle du 1 7
nivôse an 2 ; il maintient l’eilet p rim itif de toutes celles
qui avo ient procédé la publication de la loi du 17 nivôse,
nuiéjiniment sans exception, sans distinction entre celles >
qui étoient postérieures à la loi du 7 mars 1793, et celles
qui étoient antérieures. Cette décision positive de la loi,
au surplus, n’est que l’application d’un principe reconnu
de tous les temps; car dans tous les temps, on avoit pensé
que celui qui choisissoit un de plusieurs éligibles pour
recueillir une disposition préexistante, ne faisoit point une
disposition nouvelle • et conséquemment q u ’il ne contreveuoit point aux lois prohibitives des nouvelles dispo
sitions.
- Après cela , qu’importeroit donc que l’élection faite
en faveur du citoyen Ducourthial aîn é, en 1778, dût
n’ôtre considérée que comme faite le jour du décès de
son père? elle n’en seroit pas moins valable. Il ne scroit
F
5
�C 4* . r
pas moins vrai de dire qu’elle est textuellement main
tenue par l’article V II de la loi du 18 pluviôse, quiencore une fois maintient indistinctem ent, toutes les
élections nntérieurés à la loi du 17 nivôse..
20. Les citoyens Ducourthial puînés, ne’ se font pas
moins illusion, lorsqu’ils invoquent à. l’appui de leursprétentions le principe d’égalité des partages établi par
les lois de 1.793.,. et-de l’an 2. Ils ne veulent pas voir
que ces lois n’ont pas été faites, pour régler les intérêts des <
donataires entre eux, mais, seulement pour régler les in
térêts des héritiers légitimes, mis en opposition avec
ceux des donataires. C’est cependant ce qui est bien tex
tuellement et bien, énergiquement exprimé dans l’articleL V II.d e la loi même du 17 nivôse , qui porte:
<r Le droit de réclamer le bénéfice de la lq i, quant aux;
« dispositions qu’elle annulle, n’appartient qu’aux héritiers,
« naturels. »
-.
Il est reconnu que la disposition du tiers des biens de^
Gilbert Ducourthial, qui est l’objet du litige, loin d’être*
annullée,. est au contraire maintenue par rapport aux
héritiers de Gilbert D ucourthial, en général.; que le con
trat de 1778 j qui la contient, doit avoir sa pleine et en
tière exécution, en faveur des enfans du second lit, consi
dérés comme donataires en préciput, au préjudice de lafille du premier lit, qui n’a pour elle que le seul titre
d’héritier. Ce titre seul ne donne pas aux citoyens Ducour-tliial puînés, de plus grands droits qu’à leur sœur ; consé-quemment, dès qu’il n'attribue aucune part à cette filleunique du premier lit, il n’en attribue aucune non plus,
à scs frères, sur le tiers des biens en litige..
�' { 43 ^ ,
Cela posé, ce ne peut être qu’en se présentant cornure
donataires concurremment avec leur frère aîn é, en vertu
du contrat de mariage de 1778, qu’ils peuvent élever des
prétentions sur le £[ers des biens , et en demander par
tage ; ce ne peut être qu’en faisant le raisonnement que
voici :
« L ’avantage du tiers en préciput fait par Gilbert D u« courthial en 1778, à celui des enfans à naître de son
« second mariage qu’il choisiroit, est bon en s o i, et doit
. « profiter aux trois enfans éligibles par égalité, s’il n’y a
« eu de choix valablement fait eu faveur d’aucun des trois.
« O r , il n’y a point eu de choix valable, puisque le seul
<r qui ait été fait, celui qui étoit contenu dans le contrat
« même de m ariage, du 14 mai 1778 , a été annuité par
« le décret du 7 mars 1793- a
I l e bien! ce raisonnem ent, quand il ne seroit pas ren
versé par l’art. V II delà loi du 18 pluviôse, s’écarteroit
victorieusement par l’article L V II de la loi du 17 nivôse,
qui vient d’être rappelé. Il établit en effet, pour règle gé
nérale , que le bénéfice des nouvelles lois relatives à la
prohibition de disposer, ne peut être réclamé que par les
héritiers naturels en leur qualité d’héritiers se u lem en t , et
non par des donataires contre d’autres donataires. E11
un m o t, les nouvelles lois prohibitives des dispositions ,
ne sont qu’en faveur des héritiers ; aucune n a prononcé
de nullités qui aient pour objet de faire passer les choses
données d’un donataire à l’autre.
Concluons que les frères puînés du citoyen DucourthialLassuchette sont sans action et sans droit, pour disputer à
leur frère aîné un préciput dont le père commun l’a avauY 2
�tagé' par l’acte le plus favorable delà société, par un contrat
de mariage : d’un précipu t q u il pouvoit lui oter, mais
qu’il a voulu lui consei'ver. En vain ils feront des efforts
pour se révolter contre la volonté paternelle, ils n’en;
feront que d’impuissans.
D
élibéré
<\ Paris par le jurisconsulte ancien sous-EERGIER.
J U E C O N SE IL SOU SSIGN É qui a vu le mémoire à.
consulter et les diverses consultations au bas. rapportées
pour le fils aîné du secondait de feu Gilbert Ducourthial
de Lassuchette ^
E s t d ’AYIS des résolutions contenues dans ces. consul-tâtions. Trois questions y ont été traitées..
i°. Si l’institution contractuelle d’un tiers des biens,,
faite en faveur des enfans du second lit, est valable ?
2°. Si cette institution profite à tous les enfans, ou;
au fils aîné exclusivement ?'
3°. Quels sont les droits de la fille du premier lit ? '
L a première et la troisième question ne présentent:
point de diiliculte sérieuse.
Lors du contrat de m ariage, l’inégalité de succession
entre les enfans n’étoit-pas1prohibée ; ils pouvoiènt être
avantagés les uns sur les autres : on avoit éclairci et condamné le doute , si des enfans du second lit pouvoiènt
être mieux traités que ceux du premier. Le contrat du;
�C 45 3
second mariage assura donc irrévocablement aux enfans;
du second lit un avantage alors licite.
20. P ar les lois existantes, lorsque le père maria sa
fille du premier l i t , il avoit le droit en la dotant, de
la forclore de toute succession de son estoc ; il en usa ,
sauf de la rappeler. Mais la loi du 8 avril 1791 rendit
ee rappel inutile ; elle le fit elle-même eu prononçant
l’abrogation des coutumes qui excluoient ou qui permet-- toient d’exclure les filles. La lille du premier lit est donc
héritière comme les autres enfans , sauf le rapport de ce
qu’elle a reçu;
30. Mais à qui appartiendra le tiers reservé dans' le
contrat de mariage aux enfans à naître du second lit
et donné par ce contrat à celui d’eux qui seroit choisi ,
♦et à défaut, à. l’aîné ? C’est la seule question véritable
m en t litigieuse.
Dans 1 ancien d ro it, elle ne souffriroit aucun doute. Les
lois nouvelles y ont-elles apporté quelque changement ?
On peut dire contre le fils aîn é, que le contrat du
second mariage assura sans doute irrévocablement au se
cond lit , le tiers des biens , mais en même temps il ne
donna à aucun des enfans à en naître la. certitude de re-Gueillir ce tiers. Un seul y étoit appelé, d’après le choix
que se réservoit le donateur ou instituant.U est vrai
qu’à défaut de choix , l’aîné étoit appelé : il est. vrai encore
que la loi du 18 pluviôse an , a confirmé", art. I er. lesinstitutions contractuelles stipulées en ligne directe avant
la publication de*la loi du 7 mars X'793 5 et tjue par l'ar
ticle V II , elle a rétabli dans leur effet aboli par la loi du 17
nivôse an 2., les élections.d’héritier, qui auroient été fai—
5
�C .tf)
-tes par acte ayant date certaine avant la publication de
la loi du 17 nivôse. Mais, dira-t-on, l’article V I I n’est pas
applicable, puisqu’il n’y avoit pas d’acte d’élection, lors
que le père est mort : et l’article Ier. n’est pas applicable
non plus , parce qu’il n’y avoit point en faveur de l’aîné ,
de disposition irrévocable. L ’irrévocabilité n’est résultée
que de la mort du père, qui perdit avec la v ie , la puis
sance physique de choisir. Mais de son vivant, la loi du
7 mars 1793 , lui avoit ôté la faculté du ch oix, en dé
clarant que tous les descendans auroient un droit égal
6ur le partage des biens de leurs ascendans; d’où il suit
que tous les enfans du second lit ont eu , par la loi du
7 mars, un droit égal à ce préciput qu’il avoit destiné
en se m ariant, à l’un d’e u x , mais dont il ne lui a plus
été permis depuis le 7 mars 1793, de disposer en faveur
de l’u n , au préjudice des autres.
Voilà les objections dans toute leur force. Les réponses
à donner nous paroissent satisfaisantes.
Il doit être convenu d’abord que l'institution étoit
irrévocable, puisqu’elle étoit faite par contrat de ma
riage; elle étoit une des conditions promises à la future
épouse et à scs parens.
Il n’y avoit d’incertain que le choix entre les insti
tués, et si ce choix n’avoit pas été fait, l’institution auroit appartenu à tous.
Mais le choix fut placé dans l’institution mêm e; l’ins
tituant eu se le réservant déclara que s’il n’usoit pas de
-cette réserve, elle s’appliquoit dès lors à son premier
né. L ’aîné eut'donc-, par une des clauses de l’institution,
le droit de la recueillir, si son père ne disposoit pas au-
�c 47 y
trement. Il avoit donc sur ses frères qui n’étoient qu’éligibles, l’avantage d’etre élu conditionnellement; c’està-dire, si le père ne témoignoit pas une autre volonté.
La condition qui l’auroit dépouillé n’étant pas arri
v é e , son droit remonte au titre qui lui lut donne par
le contrat, titre irrévocable de sa nature ; conditionnel
par une réserve dont l’exercice négligé a laissé subsister
Institution en faveur de l ’aîné dans toute sa force.
Cela est d'autant plus vrai que dans l’intention du com
mun des testateurs, l’aîné étoit l’objet des choix et des
préférences; et si l’on se réservoit de pouvoir appeler
un de ses frères, c’étoit bien plus pour le contenir dans
le devoir que pour lui donner des co-partageans. C ’est
dans la même intention quafin que la réserve de choisir
ne lui nuisît pas, on déclaroit qu'à.- défaut d élection il
seroit héritierLe défaut d’élection n’est donc que la ratification de
l’institution de l’aîné, si un autre n’est appelé : o r, la ra
tification se porte à l’acte. C’est donc du contrat de ma
riage de son père que l’aîné tire son droit, et ce con-*
trat à la date 1778 , est régi par les lois de ce temps,
et nullement par la loi du 7 mars 1793;
Il n’est pas même vrai que cette loi eût ôté au’ pore
le droit de choisir; car ne lui inhibant d’avantager un
de scs enfans qu’à l'avenir , elle ne détruisoit pas*
Tavantage déjà fait à celui des enfans qu’il éliroit, encore
moins annulloit-elle l’avantage déjà fait à l’aîné , cm
cas de non élection.
Le but de la loi du 7 mars fut d’abolir pour l’avenir
toutes dispositions qui n’avoient pas encore donné un titre-
�48
(
)
irrévocable, elle ne pouvoit embrasser l’hypothèse dont
il s’agit; car, ou elle empeehoit le père d’élire, ou elle
lui en laissoit la faculté. Si elle lui en laissoit la faculté, il
pouvoit donc dans cette espèce particulière avantager un
de scs enfans : si elle empêchoit l’élection, elle auroit donc
détruit une disposition contractuelle et par conséquent
irrévocable, ce qui est absurde; elle auroit eu effet ré
troactif. Le père avoit donné. ( Une institution contrac
tuelle est une donation ). Le père avoit donné à un seul'
parmi les enfans qu’il avoit d’un second lit, et l’on prétendroit qu’il a donné à tous!
On a tort de dire que quand le père est m ort, il n’y
avoit pas d’élection; il y en avoit une bien expresse dans^
le contrat : le père ne l’ayant pas révoquée, pour lui en<
substituer une autre, elle doit avoir son efTet.
Trois lois sont i\ considérer: celle du 7 mars qui abolitpour l’avenir la faculté de disposer en ligne directe; elle
ne touche pas aux dispositions antérieures et irrévocables.
La loi du 17 nivôse fut plus hardie; elle annulla ré
troactivement tous les avantagas faits aux enfans depuis
le 14 juillet 1789; elle ne détruisit pas les droits du con
sultant, qui remontent à 1778 : l'effet rétroactif de la loi
du 17 nivôse an 2, fut lui-même d’ailleurs rapporté par
la loi du 9 fructidor an 3. Le donateur ou instituant,
décédé le 27 juillet 1793 , est donc mort sous l’empire
de la loi du 7 mars précédent, qui ne touchoit pas aux
dispositions irrévocables qu’il avoit faites.
Enfin la loi du 18 pluviôse an maintient expressé
ment , par l’article I.cr. les dispositions irrévocables de leur
nature, stipulées en ligne directe avant la publication de
la
5
�4
C S>)
la loi du 7 mars 1793 ; et par l’article V I I , elle maintient
les élections ayant date certaine et antérieure à la publi
cation de la loi(du 17 nivôse.
O r , la disposition de 1778 est antérieure au 7 mars
*
793-
Elle est irrévocable de sa nature ; car elle est comprise
dans un contrat de mariage.
Quand on dit qu’elle pouvoit être révoquée au préjudice
de l’aîn é, on argumente d’une faculté qui n’a pas été
exercée, et q u i, quoique son exercice eût appelé un autre
héritier, ne changeoit pas la nature de la disposition, n’empêchoit pas qu’un seul parmi plusieurs ne fût irrévocable
ment favorisé. L a réserve du clioix dans une institution
contractuelle n’en altère pas l’essence, et ne fait pas que
l’ institution en soi ne soit irrévocable : elle donne droit et
titre irrévocable à celui qui sera appelé. L ’appel seul est
contingent et facultatif ; la donation ne l’est pas : tous les
appelés ont l’espérance d’être donataires.
Celui en faveur de qui l’espérance se réalise, prend son
droit de la donation qui lui est appliquée.
L ’article V II de la loi du 18 pluviôse est décisif ; il main
tient les élections faites avant la publication de la loi du
17 nivôse. O r il y a ici une élection de l’aîné dans le contrat
même de mariage en 1778.
L article V II de la loi du 18 pluviôse juge deux choses j
1 °, que 1 élection antérieure au 17 nivôse est bonne, et à
plus forte raison celle qui date de 1778 ; 2,0. que la loi du
7 mars 1793 n’avoit pas prohibé les élections qui n’étoient
que l’exécution d’actes irrévocables de leur nature, tels
que les donations, ou devenus tels par les événemens, tels
G
�5
( o )
que les testamens après le décès de leurs auïeurâ ; que les
élections ne furent supprimées que par la loi du 17 nivôse,
et que les corrections faites à cette loi les ont rétablies pour
le passé.
;
Q r , il s’agit ici d’une donation faite ù un entre plusieurs:
donation irrévocable et permise en 1778.
Il
s'agit de l’élection de ce donataire, faite dans la dona
tion même, si le donateur n’eu appeloit pas un autre.
Avant son décès arrivé en juillet 1793, ou il eût pu en
appeler un autre, ou il ne l'auroit pas pu. A u premier cas,
il ne l’a pas voulu \ sa volonté , que rien ne genoit alors,
est encore exécutoire aujourd’hui. A u second cas, Télccr
tion qu’il avoit faite, s’il ne disposoit pas, doit être exér
cutée. Les lois nouvelles ont éteint les élections à faire, ou
qui n’avoient pas donné un droit: elles respectent les autres.
O r , l’aîné a droit par le .contrat dje mariage. Le dépouil-r
1er, ce seroit rétroagir; ce geroit tom b er dans cetle absur-r
dité de le dépouiller, parce que la condition sous laquelle
Je testateur l’AVoit appelé ( le défaut d’autre ch o ix }, est
Arrivée,
f
D é l i b é r é à Paris, le 2 germinal an 9.
SIM É O N . P O R T A L IS . M U R A IR E , président
au tribunal de cassation. F A Y A R D .
LF, C O N SE IL S O U S S IG N É , qui a lu une consultation,
délibérée à Paris, le 2 germinal an 9 , et plusieurs autres,
données i\ Rioru et à Clermonl-Ferrand j
E s t d u m k m e a v i s sur les trois questions traitées dans
pes co n su lta tio n s, dont les résolutions sont uniform es,
�( Si )
Sur la p re m iè r e question, il est sans difficulté q u ’en 1778,
époque du mariage de Gilbert Ducourthial de Lassuchette
et de Marie-Léonarde Cornudet, sa seconde fem m e, le
père pouvoit avantager, par son contrat de mariage ou
autrement, un de ses enfans plus que l'autre; que de plus,
un conjoint qui se rem arioit, ayant un enfant du premier
l i t , pouvoit donner à ses enfans à naître du second lit, et
qu’en conséquence, ceux-ci n’étoient point compris dans
la prohibition de l’édit des secondes noces.
L a jurisprudence sur la faculté du conjoint, qui con
tractait un nouveau mariage, ayant des enfans du prem ier,
de faii’e des avantages aux enfans à naître de sa nouvelle
union , après avoir v a rié , avoit été irrévocablement fixée
par l’arrêt du parlement de Paris, du xt août 1740 , qui
est rapporté en form e avec les moyens des parties dans le
recueil des arrêts notables de Rousseau de la Com be, chap.
79. On trouve au même endroit, à la suite de l’arrêt du 11
août 1740," u n autre arrêt semblable, du 29 avril 1719 ,
qui fut levé au greffe, et dont l’espèce est également rap
portée par la Combe.
L ’institution d’héritier, contenue au contrat de mariage
de 1778 , etoit donc valable dans son principe.
Sur la deuxième question , cette libéralité du père sub
sistait dans toute sa force, au 27 juillet 1793, jour qu’il
est décédé, et le fils aîné du second mariage est le seul
qui en doive profiter.
La loi du 17 mars 1793 défendit aux pères et mères
d’avantager, par quelque acte que ce fû t, un enfant plus
que l’autre, et voulut que les successions en ligne directe
fussent partagées entre les enfans, par portions égales :
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)
jîiais cette Ioï ne régloit que l’avenir, et non le passé.
? L ’effet rétroactif attribué depuis aux lois des 5 b ru
maire et 17 nivôse an 2 , en rétrogradant jusqu’au 14
juillet 1 7 8 9 , a été aboli, et par conséquent l’institution
d'héritier, qui avoit été détruite, est redevenue en pleine
Vigueur.
Quant au droit du fils aîné du second l i t , les autres
enfans ne peuvent le lui contester.
L e contrat de mariage de 17 7 8 , contient deux disposi
tions :1a première est uneinstitution d’héritier pour un tiers,
au profit de celui des enfans à naître que les père et mère
ou le survivant d’eux voudront choisir; la seconde est
une vocation éventuelle exprimée dès-lors formellement
au profit du fils a în é , au défaut de nomination de l’un
des enfans par les père et mère ou par le survivant.
N y ayant point eu de choix ni par les père et mère
conjointement, ni par le citoyen Ducourthial qui a sur
vécu , le fils aîné s’est donc trouvé seul donataire, non
pas par une disposition nouvelle, mais par la disposition
que le contrat de mariage renferme.
La loi du 7 mars 1793 n’a point défendu les élections
d’héritier ou de donataire à faire en vertu d’anciennes
dispositions. Une élection d’héritier ou de donataire n’est
point une donation proprem ent dite. Ce 11 est que l’exé
cution d’une disposition déjà existante. Les prohibitions
Eont de droit étroit. Celle contenue dans la loi du 7 mars
1793 doit donc être restreinte dans le cas des donations
postérieures à sa publication.
D ’ailleurs, le fils aîné n’avoit pas besoin d’être élu. Il
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étoit institué éventuellement par le contrat de mariage
m êm e, dans.le cas où un autre que lui ne seroit pas
nommé.
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Enfin l’article V II de la loi du 18 pluviôse an , donnée
en explication du rapport de l'effet rétroactif, porte : « Les
et élections d’héritier ou de légataire , et les ventes à fonds
ce perdu qui ont été annullées par les articles X X III et
« X X V I de la loi du 17 nivôse, à compter du 14 juillet
« 1789 , sont rétablies dans leur effet prim itif, s i elles ont
« été fa ites par acte ayant date certaine avant la publi
c a tio n de ladite loi du 17 nivôse. »
D e pareilles élections pouvoient donc s'effectuer jusqu’à
la publication de la loi du 17 nivôse an 2 , nonobstant la
loi du 7 mars 1793. O r , dans l ’espèce proposée, le citoyen
D u courthial étant décédé le 17 juillet 1793, quand on
considérerait le défaut de choix de sa part comme une élec
tion du fils aîné du second lit , cette élection seroit valable.
Mais ce dernier a de plus en sa faveur une nomination
écrite dans le contrat de mariage de 1778 , pour le cas où
les père et m ère, ou le survivant d’e u x , n’éliroient pas :
ce qui met son droit hors de tout doute.
Il
est même à observer, que l’article V I I de la loi du 18
pluviôse ne parle point du cas où le donateur prévoyant
le déiaut délection, a désigné éventuellement , comme
ic i, celui des éligibles, par lequel il entendoit que la dona
tion fut recueillie.
Sur la troisième question , la fille du premier lit élant
exclue par la coutume, sa renonciation à la succession
future de son père n'a pas plus d’effet que la forclusion
�(
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)
légale. A in si, elle a le droit de succéder avec scs frères, en
vertu des lois des 8 avril 1791 et 4 janvier 1793.
D é l i b é r é à P aris, par le citoyen F erey, ancien
jurisconsulte, le 8 germinal an 9.
FEREY.
À R i o m , de l'Im prim erie de L a n d r i o t , im p r im e u r du trib u n a l
d ’ appel. —
An 9
�
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Factums Godemel
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Title
A name given to the resource
[Factum. Ducourthial, Gilbert. An 9?]
Creator
An entity primarily responsible for making the resource
Toutée
Toutée
Gaschon
Deval
Boyrot
Dartis-Marcillat
Picot-Lacombe
Maugue
Siméon
Portalis
Muraire
Favard
Ferey
Subject
The topic of the resource
successions
contrats de mariage
testaments
droit d’aînesse
secondes noces
loi du 17 nivôse An 2
égalité des héritiers
rétroactivité de la loi
doctrine
application des lois dans le temps
coutume d'Auvergne
forclusion
Description
An account of the resource
Titre complet : Consultations.
Table Godemel : Election : l’institution sera au profit de l’ainé des mâles, et s’il n’y en a point au profit de l’ainé des filles. de ce mariage sont issus trois enfans mâles. Le père est décédé en juillet 1793, longtemps après sa femme, et sans faire d’élection. que devient l’institution ? deux systêmes : pour le fils ainé, 1° l’institution au profit des enfans du second mariage est valable, et doit avoir son exécution ; 2° n’y ayant pas eu d’élection, l’ainé des mâles désigné pour recueillir l’institution, doit en profiter seul pour le tiers qui en fait l’objet ; 3° la fille née du premier mariage, relevée de sa forclusion, prendra sa portion, c'est-à-dire le quart dans les deux tiers formant la succession ab intestat. pour les autres enfans, 1° la faculté d’opter ou d’élire accordée par Gilbert Ducourthial à sa seconde épouse, par leur contrat de mariage, donne lieu à la nullité de la disposition contenue dans ce contrat ; 2° en supposant que cette disposition ne fut pas nulle par le défaut d’une volonté libre, le fils ainé ne pourrait prétendre qu’il a été saisi du tiers, au préjudice des autres enfans ; 3° le fils ainé n’ayant pas été saisi individuellement, les enfans du second lit ne l’ont point été collectivement ; la condition attachée à la disposition ayant manquée, tous les enfans sont appelés à recueillir la succession, par égalité, comme héritiers de droit.
Publisher
An entity responsible for making the resource available
De l'Imprimerie de Landriot (Riom)
Date
A point or period of time associated with an event in the lifecycle of the resource
Circa An 9
1778-Circa An 9
1774-1789 : Règne de Louis XVI -Fin de l’Ancien Régime
1789-1799 : Révolution
1799-1804 : Consulat
Type
The nature or genre of the resource
text
Format
The file format, physical medium, or dimensions of the resource
application/pdf
54 p.
Identifier
An unambiguous reference to the resource within a given context
BCU_Factums_G1101
Source
A related resource from which the described resource is derived
Bibliothèque Université Clermont Auvergne
Cour d'Appel de Riom, Collection Godemel
Language
A language of the resource
fre
Relation
A related resource
BCU_Factums_G1102
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Coverage
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Pontaumur (63283)
Landogne (63186)
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